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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET

1. Arts martiaux. Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'une proposition de loi (p. 2626).

M. Patrick Leroy, rapporteur de la commission des affaires culturelles.

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports.

DISCUSSION GE NE RALE (p. 2628)

MM. Daniel Feurtet, Patrick Ollier, Michel Dasseux, Denis Jacquat, Léonce Deprez.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles.

Mme la ministre.

Clôture de la discussion générale.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 2632)

Adoption de l'ensemble de la proposition de loi.

2. Chèques-vacances. - Discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat (p. 2633).

Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme.

M. Gérard Terrier, rapporteur de la commission des affaires culturelles.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 2636)

MM. Léonce Deprez, Denis Jacquat, Jean-Pierre Dufau, Jean-Michel Couve, Patrick Malavieille, Jacques Blanc, André Capet, Michel Bouvard, Marc Dumoulin, Mme Nicole Bricq.

Mme la secrétaire d'Etat.

Clôture de la discussion générale.

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 2651)

Article 1er (p. 2651)

M. Maxime Gremetz.

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT

Amendement no 19 du Gouvernement, avec les sousamendements nos 43 de M. Gremetz et 36 de M. Terrier : Mme la secrétaire d'Etat, MM. le rapporteur, Maxime Gremetz, Léonce Deprez, Jean-Pierre Dufau, Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles. - Rejet, par scrutin, du sous-amendement no 43 ; adoption du sous-amendement no 36 et de l'amendement no 19 modifié.

Amendement no 2 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, MM. Michel Bouvard, Jean-Pierre Dufau, Maxime Gremetz, Léonce Deprez. - Adoption.

Amendements nos 29 de M. Couve et 25 de M. Deprez : MM. Jean-Michel Couve, Léonce Deprez, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, M. le président de la commission. - Rejets.

Amendements nos 30 de M. Couve et 27 de M. Deprez : MM. Jean-Michel Couve, Léonce Deprez, le rapporteur,

Mme la secrétaire d'Etat. - Rejets.

Amendements nos 31 de M. Couve et 39 de M. Deprez : MM. Jean-Michel Couve, Léonce Deprez, le rapporteur,

Mme la secrétaire d'Etat. - Rejets.

Amendements nos 32 de M. Couve et 38 de M. Deprez : MM. Jean-Michel Couve, Léonce Deprez, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, MM. Michel Bouvard, le président de la commission, Jean-Pierre Dufau. - Rejets.

Amendement no 33 de M. Couve : M. Jean-Michel Couve.

- Retrait.

Retrait des amendements nos 37, 41 et 26 de M. Deprez.

Retrait de l'amendement no 34 de M. Couve.

Amendement no 3 de la commission, avec les sousamendements nos 42 de M. Couve et 18 de M. Blanc : MM. le rapporteur, Jean-Michel Couve, Jacques Blanc, Mme la secrétaire d'Etat, M. Maxime Gremetz. - Retrait de l'amendement no 3 ; les sous-amendements n'ont plus d'objet.

MM. Léonce Deprez, Jacques Blanc, le président.

Adoption de l'article 1er modifié.

Après l'article 1er (p. 2660)

L'amendement no 16 de M. Malavieille a été retiré.

Article 2 (p. 2660)

Amendement no 4 de la commission, avec le sous-amendement no 21 du Gouvernement : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption du sous-amendement et l'amendement modifié, qui devient l'article 2.

Article 3 (p. 2661)

M. Maxime Gremetz.

Amendement no 5 de la commission, avec le sous-amendement no 22 du Gouvernement : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Retrait du sous-amendement ; adoption de l'amendement, qui devient l'article 3.

Article 4 (p. 2663)

Amendement no 6 de la commission : M. le rapporteur,

Mme La secrétaire d'Etat. - Adoption.

Ce texte devient l'article 4.

Article 4 bis (p. 2663)

Amendement no 7 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption.

Ce texte devient l'article 4 bis.

Article 4 ter (p. 2663)

Amendement du suppression no 8 de la commission : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption.

L'article 4 ter est supprimé.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Article 4 quater (p. 2664)

Amendement no 9 de la commission : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, M. Jean-Pierre Dufau. - Adoption.

Amendement no 10 de la commission : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, MM. Michel Bouvard, JeanPierre Dufau, Maxime Gremetz, Léonce Deprez. - Adoption.

Adoption de l'article 4 quater dans le texte de l'amendement no 9 complété par l'amendement no

10. Article 5 (p. 2665)

Amendement no 11 rectifié de la commission : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendements nos 12 de la commission et 20 rectifié du Gouvernement : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, MM. Jean-Pierre Dufau, Jean-Michel Couve. Adoption de l'amendement no 12 ; l'amendement no 20 rectifié n'a plus d'objet.

Adoption de l'article 5 modifié.

Article 6. - Adoption (p. 2666)

Article 7 (p. 2666)

Amendement de suppression no 13 de la commission : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption.

L'article 7 est supprimé.

Les amendements nos 35 corrigé et 40 de M. Deprez n'ont plus d'objet.

Après l'article 7 (p. 2667)

M. Léonce Deprez.

Amendements nos 14 rectifié de la commission et 17 de M. Malavieille : MM. le rapporteur, Maxime Gremetz, Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement no 14 rectifié ; l'amendement no 17 n'a plus d'objet.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 2667)

MM. Léonce Deprez, Jean-Pierre Dufau, Maxime Gremetz, Jean-Michel Couve.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 2668)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

3. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 2668).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1 ARTS MARTIAUX Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'une proposition de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Patrick Leroy et plusieurs de ses collègues relative à la délivrance des grades dans les disciplines relevant des arts martiaux (nos 1394, 1459.)

Je rappelle que ce texte fait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

La parole et à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Patrick Leroy, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Monsieur le président, madame la ministre de la jeunesse et des sports, mes chers collègues, on pourrait s'étonner que l'Assemblée délibère aussi rapidement de cette proposition déposée par le groupe communiste, relative à la délivrance des titres dans les arts martiaux, mais il ne faut pas méconnaître à la fois la popularité de ces disciplines sportives venues de l'Extrême-Orient et la nécessité de leur donner un encadrement juridique strict.

En France, le judo est, de tous les arts martiaux, de loin le plus populaire. La fédération française de judo compte plus de 500 000 licenciés répartis en 5 400 clubs.

O n compte 7 300 professeurs diplômés d'Etat et 40 000 dirigeants de clubs bénévoles. Les autres disciplines relevant des arts martiaux, notamment l'aïkido, le karaté ou le taekwondo, et des disciplines qui s'y apparentent, connaissent des pratiques moins fortes, mais cependant significatives.

Pourquoi cette proposition ? La délivrance des titres établis par la gradation des ceintures et des dans, qui s'appliquent aux ceintures les plus élevées, ne sanctionne pas exclusivement le résultat des compétitions individuelles, elle tient compte également d'épreuves techniques ou d'exercices collectifs accomplis dans les clubs.

Actuellement, l'article 17 de la loi du 16 juillet 1984, relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, exclut explicitement une telle possibilité. Il dispose, en effet, que les fédérations reçoivent délégation pour organiser les compétitions sportives et procéder aux sélections correspondantes et que c'est à l'issue de ces compétitions, et seulement dans ce cas, que sont délivrés les titres internationaux, nationaux, régionaux ou départementaux.

Or l'article 1er du décret du 2 août 1993 fixant les conditions de délivrance de certains titres dans les disciplines sportives relevant des arts martiaux prévoit que les titres fédéraux que constituent les grades "sanctionnent la valeur sportive des pratiquants au regard de l'éthique et de la technique" des disciplines en cause.

Il existe donc une distorsion entre le texte de la loi, lequel lie la délivrance du grade à la compétition, et celui du décret, qui ne prévoit pas l'obtention des titres seulement à cette occasion mais aussi en cas de succès à des épreuves techniques ou éthiques, très importantes s'agissant des disciplines en cause.

Saisi par un syndicat de professeurs, le Conseil d'Etat a annulé ce décret en considérant que les dans ne constituent pas des titres délivrés à l'issue de compétitions sportives au sens des dispositions de l'article 17 de la loi de 1984 mais sanctionnent pour partie les performances en compétition et pour partie des qualités sportives et les connaissances techniques de leurs attributaires.

Or, sur la base de ce décret, environ 60 000 grades ou dans ont été délivrés depuis 1993.

Il est donc indispensable que le législateur intervienne vite, d'une part, pour sortir de la situation créée par la décision du Conseil d'Etat et ses suites éventuelles, d'autre part, pour réaffirmer, comme pour les autres disciplines, la place des fédérations la délivrance de titres, même s'ils ne sanctionnent pas exclusivement une compétition. Tel est l'objet, de portée limitée mais indispensable, des deux articles de la présente proposition.

L'article 1er prévoit les conditions, dérogatoires au droit commun, de la délivrance des grades et des dans par les fédérations agréées dans les disciplines et arts martiaux.

Il prévoit également d'ajouter aux conditions de délivrance des grades ou dans la possibilité de sanctionner non pas les performances obtenues après compétition mais les qualités sportives et les connaissances techniques de la discipline concernée. S'agissant en particulier du judo, il constitue donc une mise en conformité du droit avec le fait en retenant l'existence d'une seule fédération délégataire par discipline ou, à défaut, une fédération agréée compétente pour délivrer les titres.

Dans toutes les disciplines sportives, la fédération agréée dispose d'un monopole. C'est le point essentiel de l'organisation du sport en France. La loi sur le dopage, non encore promulguée, retient le principe que seules ces fédérations disposent d'un pouvoir disciplinaire encadré par la loi. La collation des titres qui leur est conférée est parfaitement logique : la fédération dispose du pouvoir d'organiser les compétitions, d'en sanctionner les manquements et donc de délivrer les grades. Elle a un pouvoir général d'organisation, de contrôle et de discipline.

Les fédérations sont, en matière sportive, associées à la gestion du service public, et les lois les plus récentes, que ce soit sur les moniteurs de ski ou sur le dopage, tendent à mieux les y associer.


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Le monopole de délivrance des grades est logique. Cela évite de voir des personnes qui n'ont pas la qualification requise enseigner et délivrer des titres, des personnes ne recherchant que le profit encadrer des jeunes, et n'importe qui s'intituler moniteur, surtout dans des activités sportives présentant un aspect intellectuel, ce qui est le cas du judo. Cela permet de réglementer les activités lucratives des clubs. C'est donc indispensable.

Le quatrième alinéa de l'article 1er prévoit, en conséquence, que les commissions spécialisées, composées de représentants de la fédération délégataire, le cas éché ant agréée, de représentants des fédérations affinitaires et des organisations professionnelles - à ce titre, les syndicats seront représentés dans ces commissions dont la composition sera fixée par arrêté du ministre chargé des sports soumettent les conditions de délivrance des grades à l'autorité ministérielle compétente.

Le cinquième alinéa crée une commission consultative des arts martiaux. Ce dispositif ne paraît pas relever du domaine de la loi. En effet, cette commission ne touche, ni de près ni de loin, à l'une des matières que le constituant a énumérées dans l'article 34. Toutefois, cela apporte une précision utile au texte.

L'article 2 tend à valider les titres délivrés par les fédérations d'arts martiaux, qui sont dépourvus de fondement juridique depuis l'annulation, par le Conseil d'Etat, le 28 janvier 1998, du décret du 2 août 1993.

Toute validation porte, par principe, atteinte à la séparation des pouvoirs puisqu'elle revient sur les conséquences de décisions de justice. Aussi la jurisprudence du Conseil constitutionnel a-t-elle posé diverses exigences de constitutionnalité des validations.

En premier lieu, la validation doit poursuivre un but d'intérêt général, lequel est ici manifeste puisque, je le répète, plus de 60 000 grades ou dans ont été délivrés sans base juridique. On voit mal la totalité des clubs être obligés de recommencer la procédure visant à délivrer les titres en cause et d'organiser à nouveau examens et compétitions.

La validation doit explicitement respecter l'autorité de chose jugée, ce qui est le cas ici, et la non-rétroactivité des peines et des sanctions, qui ne sont pas ici en cause.

Son objet doit être défini avec une précision suffisante, ce qui résulte clairement du texte qui fixe la liste des disciplines concernées - judo, karaté, taekwondo et aïkido, la nature des titres en cause et la période pendant laquelle ils ont été acquis, qui va de la date du décret annulé jusqu'à la promulgation de la loi. Aussi, on peut conclure que cette validation, parfaitement nécessaire et logique, est conforme en tout point aux exigences constitutionnelles.

En conclusion, la commission des affaires culturelles a adopté ce texte sans amendement. Au-delà de son aspect technique, il pose la question du rôle des fédérations, qu'il convient de réaffirmer ici face à des intérêts mercantiles. C'est ce que la commission vous demande de faire en adoptant cette proposition. (Applaudissements.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement approuve sans réserve la proposition de loi qui vous est soumise.

Les arts martiaux connaissent un très grand développem ent depuis ces dernières années. L'enthousiasme, notamment des jeunes, a abouti à l'émergence de structures nouvelles et à une multiplication des disciplines.

Une enquête des services déconcentrés du ministère de la jeunesse et des sports fait apparaître l'existence de plus de 180 disciplines relevant des arts martiaux et des sports de combat. Cette évolution, loin d'être négative, bien au contraire, s'inscrit dans la diversification de la pratique sportive.

Mais l'organisation de nombreuses pratiques en dehors de tout cadre réglementaire pose des problèmes importants. Au-delà de certaines dérives commerciales, sécuritaires ou sectaires, heureusement peu nombreuses, mais qu'il faut prendre très au sérieux, sont en jeu plus largement le respect de la sécurité des pratiquants et le contrôle de l'observation des règlements régissant les activités physiques et sportives.

Un plan d'action en plusieurs étapes a été défini par mes services afin de parvenir à garantir à tout pratiquant de ces disciplines un encadrement qualifié, attentif au respect élémentaire de son intégrité physique et morale.

Cette proposition de loi s'inscrit dans le même cadre.

Ces disciplines sportives sont caractérisées par une très forte tradition dont le grade « dan » est une expression forte. Il constitue une reconnaissance d'un individu au sein d'une école et établit ainsi une hiérarchie entre les pratiquants de cette école. Depuis, cette notion a évolué pour se rapprocher davantage de l'appréciation du niveau technique du pratiquant. En France, il représente également un niveau de qualification technique nécessaire à l'inscription au brevet d'Etat d'arts martiaux.

Le dan sanctionne au total des valeurs morales, la technique et l'attitude corporelle. Sa délivrance est un enjeu trop important pour ne pas être confiée à des structures assurant une mission de service public sous la tutelle de l'Etat.

La proposition de loi répond à cet objectif.

Elle soutient l'action des fédérations sportives.

Elle crédibilise le titre en confiant sa délivrance à une structure unique par discipline, ce qui ne fait que préserver, en le légalisant, un mode d'attribution cohérent quie xiste depuis 1976. Vous prévoyez d'ailleurs dans l'article 2 de valider les 60 000 dans délivrés depuis 1993 par les commissions spécialisées des fédérations délégataires.

Elle permet également de mettre en place un système qui préserve l'égalité des chances de tous les pratiquants d'accéder à ce titre, autour d'un programme unique, de membres du jury spécialement formés à cet effet et d'un contenu technique harmonisé entre les fédérations sportives.

Elle permet, enfin, d'assurer le plus large partenariat entre les différentes structures organisant les arts martiaux ou représentant les enseignants professionnels.

Dans l'esprit de votre proposition de loi, l'Etat fixera la composition des commissions spécialisées mises en place dans les fédérations sportives délégataires ou agréées. L esdites fédérations, bien sûr, mais également les fédératio ns multisports et affinitaires, les organismes professionnels et les professeurs seront représentés dans ces commissions.

Enfin, la commission consultative que vous proposez de mettre en place garantira le dialogue permanent entre les différents partenaires.

Cette proposition de loi répond, mesdames, messieurs les députés, aux préoccupations et attentes des pratiquantes et pratiquants, des professeurs et dirigeants de ces disciplines.

(Applaudissements).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Daniel Feurtet.

M. Daniel Feurtet.

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, je voudrais tout d'abord remercier les membres de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales et son président, qui ont fait un excellent travail lors de l'étude de la proposition de loi déposée par le groupe communiste relative à la délivrance des grades dans les disciplines relevant des arts martiaux.

Vous savez, madame la ministre, que, dans votre circonscription et plus particulièrement au Blanc-Mesnil, ville dont je suis le maire, les arts martiaux sont très appréciés, notamment chez les jeunes.

Le judo est l'un des emblèmes de la ville à travers l'organisation d'un tournoi international de première importance. Vous connaissez bien le Blanc-Mesnil Sports Judo 93, qui a su associer le haut niveau à une dimension éducative remarquable à l'égard des jeunes. Ce club se situe dans l'élite nationale et compte en son sein des champions de grande renommée.

L'article 17 de la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives exclut toute possibilité de délivrer des grades et dans en dehors des compétitions.

Afin de remédier à cette situation, le précédent gouvernement, par un décret du 2 août 1993, prévoyait la délivrance de ces grades et dans par les fédérations délégataires et, en l'absence de délégataires, par la fédération agréée qui organise la discipline, à l'issue des compétitions et lors d'épreuves techniques ou d'exercices collectifs accomplis dans les clubs.

En l'absence de base légale, le Conseil d'Etat, par un arrêt en date du 28 janvier 1998, a annulé ce décret.

Cette annulation a abouti à remettre en vigueur le décret du 4 novembre 1976 relatif à l'enseignement de ces arts martiaux qui prévoit que seul le comité national des grades a le monopole de délivrance des grades et dans. Ce décret, d'une légalité douteuse, est lui aussi susceptible d'être annulé par le Conseil d'Etat.

Néanmoins, entre 1993 et 1998, ce sont près de 60 000 grades et dans, condition nécessaire pour l'inscript ion aux brevets d'Etat d'éducateur sportif et aux concours de professeur de sport dans les disciplines de judo, karaté, taekwondo et aïkido, qui ont été délivrés sans base juridique.

Le Conseil constitutionnel ayant rappelé, dans sa décision du 24 octobre 1969, que seule une loi à portée rétroactive pouvait valider la rétroactivité d'un acte administratif, il est indispensable que le législateur intervienne, d'une part, pour sécuriser les titres délivrés entre 1993 et 1998, d'autre part, pour préciser l'étendue des prérogatives accordées aux fédérations.

Le développement des pratiques sportives et la spécificité de certaines disciplines pouvant porter atteinte à la sécurité physique et morale des licenciés justifient l'existence d'une réglementation propre à ces disciplines pour éviter toute dérive dangereuse.

L'article 1er de la proposition de loi accorde ainsi le pouvoir de délivrance des grades et des dans aux fédérations sportives délégataires ou, à défaut, aux fédérations sportives agréées. L'Etat déterminera par arrêté la liste de ces fédérations.

Il approuvera également les conditions de délivrance des grades, mais sur proposition de commissions spécialisées dont la composition sera fixée par arrêté ministériel.

Pourraient siéger dans ces commissions, des représentants de la fédération délégataire, le cas échéant agré ée, des représentants des fédérations affinitaires, des organisations professionnelles ainsi que des représentants syndicaux.

M. Maxime Gremetz.

Très bien !

M. Daniel Feurtet.

Dans un souci d'harmonisation entre disciplines, il sera également créé une commission consultative des arts martiaux comprenant des représentants des fédérations sportives concernées et de l'Etat, dont la composition est arrêtée par le ministère chargé des sports.

Cette commission consultative aura une mission de conseil et d'expertise auprès de ce ministère, en particulier sur toutes les questions techniques, déontologiques, administratives et de sécurité se rapportant aux disciplines considérées et assimilées.

L'article 2 tend, quant à lui, à valider les titres délivrés par les fédérations d'arts martiaux, qui sont dépourvus de tout fondement juridique depuis l'annulation par le Conseil d'Etat du décret du 2 août 1993.

Cette validation, parfaitement nécessaire et logique, est en tout point conforme aux exigences constitutionnelles.

On ne peut obliger la totalité des clubs à recommencer la procédure de délivrance des titres en cause et à organiser de nouveau examens et compétitions.

Je vous invite donc, mes chers collègues, dans un souci de défense de l'intérêt général et compte tenu des risques contentieux encourus, à vous prononcer en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements.)

M. le président.

La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Patrick Ollier.

La décision du Conseil d'Etat du 28 janvier 1998 annulant le décret du 2 août 1993 relatif à l'attribution des grades et des dans a mis votre administration, madame la ministre, dans une situation inextricable.

D'un côté, un décret sans base légale et la loi de 1984, modifiée en 1992, de l'autre près de 60 000 gradés ceinture noire, 1er ou 2e dan, niveau nécessaire pour accéder à l'enseignement d'un art martial, par le biais du brevet d'Etat d'éducateur sportif du premier degré. Le paysage est bien campé.

Les grades, dans et brevets délivrés depuis cette date se retrouvent ainsi dépourvus de toute assise juridique. C'est ce qui motive que nous examinions aujourd'hui cette proposition de loi, pour tenter, dans l'immédiat et dans l'urgence, de pallier l'arrêt du Conseil d'Etat, qui conteste ainsi les modalités d'attribution des grades et dans, et pour contrecarrer un certain ostracisme à l'égard des organisations professionnelles et de certaines fédérations affinitaires agréées.

Bien que l'on retrouve dans la rédaction du texte, quand on le lit avec attention, la technicité de votre a dministration, nous sommes surpris, madame la ministre, que celui-ci soit présenté par le groupe dont vous êtes issue (« Oh ! » sur les bancs du groupe communiste), alors que l'arrêt a été cassé à l'initiative d'une fédé ration affinitaire agréée proche de la gauche dite « plurielle ». En somme, c'est presque une affaire de famille ! Ou plutôt un heureux hasard, j'en conviens, et je rends hommage au sens de l'opportunité et à cette nouvelle spécialisation du groupe communiste. (Sourires sur les bancs du groupe communiste.)

M. Daniel Feurtet.

Merci !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

M. Patrick Ollier.

Mais on nous présente aujourd'hui un embryon de texte élaboré dans l'urgence, cela a été dit tout à l'heure, alors que votre loi santé, véritable tapisserie de Pénélope, sans cesse remise sur l'ouvrage, aurait dû, dans une version rénovée et alors tout à fait complète, fruit de la concertation avec les différents partenaires, trouver toute sa place pour promouvoir le sport du troisième millénaire. Sur ce sujet, nous attendons que vous fassiez de réels efforts dans les mois à venir.

En vérité, notre groupe est face à une alternative : d'un côté, des situations et des emplois à conforter, à régulariser, et notre responsabilité nous incline donc à voter ces dispositions qui leur sont nécessaires ; de l'autre, un chèque en blanc, avec l'annonce de la création d'une commission consultative un peu floue, dont on ne sait pas si elle comprendra des représentants des syndicats de professeurs, ou même des représentants de ces fédérations affinitaires qui ont fait invalider votre décret. Cela mérite tout de même des précisions, que vous ne nous avez pas données à ce jour.

Loin de nous l'idée de ne pas reconnaître la prééminence des fédérations délégataires, dont les athlètes et les maîtres s'illustrent sur tous les dojos du monde. Mais le moment n'est-il pas venu de permettre aux fédérations agréées d'être mieux représentées ? Les syndicats professionnels ont leur mot à dire, eux qui forment les grands bataillons de licenciés. Ayant moimême pratiqué le judo en compétition pendant plus de vingt ans, je sais de quoi je parle ! Il y a là un besoin réel.

D'ailleurs, les lettres que nous avons tous reçues vont dans ce sens, vous le savez.

Si une ouverture est nécessaire, nous ne voulons pas pour autant pratiquer une brèche, et il est hors de question de reconnaître les groupes ou groupuscules où chaque maître gourou a ses dévots et où, hélas, les arts martiaux sont dévoyés à des fins plus proches des sectes que du sport !

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Tout à fait !

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

C'est hors de question !

M. Patrick Ollier.

Le groupe RPR vous alerte avec force sur cette dérive, peut-être limitée, mais bien réelle et inquiétante. De vos réponses sur ce point précis, madame la ministre, dépendra notre position.

Si le sport rassemble, encore faudrait-il que cela s'opérât dans la transparence et dans le progrès.

M. Georges Hage.

Très bel imparfait ! (Sourires.)

M. Patrick Ollier.

Je suis sensible à votre compliment, mon cher collègue.

M. Jean-Pierre Dufau.

C'est un imparfait de droite ! (Sourires.)

M. Patrick Ollier.

Mais nous n'en sommes pas encore à cette extrémité et le groupe RPR défend des valeurs auxquelles vous auriez pu donner corps dans les textes proposés ! Nous vous donnons rendez-vous pour discuter de votre loi santé.

Bien que la méthode employée pour en arriver à ce texte soit surprenante, nous privilégions l'intérêt des pratiquants des arts martiaux. Par conséquent, si vous nous rassurez sur votre volonté d'éviter la confusion entre sectes et pratique des arts martiaux,...

M. Alain Néri.

C'est essentiel !

M. Patrick Ollier.

... le groupe RPR votera en faveur de la proposition de loi.

(Applaudissements.)

M. le président.

La parole est à M. Michel Dasseux.

M. Michel Dasseux.

J'ai failli venir en kimono, monsieur le président, mais cela aurait posé des problèmes aux huissiers !

M. le président.

Avec une cravate, c'est autorisé ! (Sourires.)

M. Michel Dasseux.

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, le sport, en cette fin de XXe siècle, comme d'autres activités, connaît des évolutions profondes. Il est donc nécessaire que l'on se penche très sérieusement sur sa pratique.

Je rends particulièrement hommage à Mme la ministre Marie-George Buffet pour le travail remarquable qu'elle effectue, en vue de tenir compte de la psychologie du sportif, mais également de sa protection physique et morale, comme le montre la loi sur le dopage.

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Très bonne loi !

M. Michel Dasseux.

Justement, dans le cadre de la protection des sportifs, et surtout des plus jeunes, il est indispensable que les enseignants d'arts martiaux soient très sérieusement recrutés, puis très sérieusement suivis par les fédérations, qui ont des comptes à rendre à leur ministère de tutelle.

La délivrance des titres compétitifs doit aussi être l'apanage des fédérations agréées ou ayant délégation de pouvoir.

Entre 1976 et 1993, l'Etat a réglementé l'attribution des grades et des dans. La loi du 16 juillet 1984, relative à la promotion des activités physiques et sportives, a permis de prendre un décret, le 2 août 1993, prévoyant la délivrance des grades et des dans par les fédérations délégataires ou agréées. Un arrêt du Conseil d'Etat du 28 janvier 1998 a annulé ce décret au motif que les grades et les dans « ne constituent pas des titres délivrés à l'issue de compétitions sportives ».

Je m'arrêterai un instant sur la spécificité des arts martiaux, et plus particulièrement celle du judo, qui, je vous le rappelle est pratiqué par 550 000 licenciés.

En judo, les dans sont attribués en fonction de trois éléments : le shin, le ghi et le taï.

Le shin est la valeur morale du pratiquant, le ghi sa technique et le taï sa capacité physique, sa valeur de compétiteur.

M. Georges Hage.

Sa pugnacité !

M. Michel Dasseux.

Absolument. Mais de la pugnacité nous en avons tous, mon cher collègue.

(Sourires.)

Le dan a donc une signification très forte, d'autant que son obtention nécessite la possession d'un certain nombre de points attribués au cours de compétitions officielles d'un certain niveau.

D'aucuns s'inquiètent néanmoins de cette proposition de loi, à mon avis bien à tort. En effet, les fédérations délégataires détermineront les conditions de délivrance des grades par l'intermédiaire des commissions spécialisées. Quoi de plus normal puisque celles-ci comprendront des représentants de toutes les parties prenantes, y compris des professeurs et des représentants des fédérations affinitaires ? Mme la ministre a insisté sur ce point tout à l'heure. Ainsi, personne ne pourra se prévaloir d'un grade obtenu on ne sait comment.

Il convient de maintenir une unité dans la délivrance des grades et donc dans le contenu des formations, afin d'assurer une meilleure sécurité des pratiquants d'arts martiaux.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

N'oublions pas en effet qu'un grade minimum est nécessaire pour l'obtention d'un diplôme d'Etat de professeur d'arts martiaux. Si les grades ne sont accessibles qu'après plusieurs années de pratique, c'est pour assurer la maturation physique et intellectuelle du sportif. Il en est d'ailleurs ainsi au Japon, pays d'origine de la plupart des arts martiaux.

C'est l'Etat, bien sûr, qui fixe les conditions requises pour se présenter au brevet d'Etat. Et il peut tout à fait considérer que l'une de ces conditions est un niveau technique minimum déterminé par la fédération, qui a délégation de service public. Cela ne peut être considéré comme une atteinte à la liberté du travail. Sinon par extension, les diplômes délivrés par l'éducation nationale le seraient eux aussi. Rien n'empêche non plus un enseignant d'exercer sa profession de manière indépendante.

La commission spécialisée des grades et la commission consultative des arts martiaux seront bien entendu toutes deux composées de représentants des parties prenantes, fédérations et enseignants. C'est un gage de sécurité pour la ministre de la jeunesse et des sports, qui recevra ainsi un avis motivé sur toutes les questions techniques, déontologiques et administratives.

A ceux qui voudraient instiller le doute dans les esprits en affirmant que cette loi serait la mort des arts martiaux, je réponds que cette clarification, au contraire, évitera des débordements et les dérapages toujours possibles. En effet, et c'est un risque réel, la connotation orientale, la touche d'exotisme ou de mystère que revêtent parfois les arts martiaux pourrait être exploitée au profit de dérives très dommageables pour l'intégrité physique et morale des pratiquants.

M. Patrick Ollier.

Tout à fait !

M. Michel Dasseux.

Qui reprend la parole ? Lorsque l'on étudie de près le fonctionnement des fédérations agréées ou ayant délégation de pouvoir, on es t forcément conforté dans l'idée que la sécurité de l'enseignement et la pérennité des actions dépendent d'elles.

C'est pourquoi les missions de service public qui leur sont confiées doivent s'appuyer sur des directives claires, comme celles énoncées dans la loi que j'ai l'honneur, au nom du groupe socialiste, de vous demander de voter sans restriction.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Gérard Terrier.

Allez la Meuse !

M. Denis Jacquat.

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la popularité des arts martiaux en France, et en particulier celle du judo, qui compte plus de 500 000 licenciés répartis en 5 400 clubs, ainsi que les excellents résultats obtenus par nos équipes nationales lors des compétitions, méritent que l'on se penche sur le problème de la délivrance des grades et des dans dans ces disciplines sportives.

En effet, cette délivrance doit aujourd'hui faire face à un inquiétant vide juridique, à la suite de l'annulation par le Conseil d'Etat, le 28 janvier 1998, du décret du 2 août 1993, lequel prévoyait que la délivrance des grades et des dans se ferait exclusivement par le fédération délégataire ou, à défaut, par la fédération agréée qui organi se la discipline.

Le Conseil d'Etat a annulé ce décret en se basant sur l'article 17 de la loi du 16 juillet 1984, selon lequel c'est à l'issue des compétitions, et seulement dans ce cas, que sont délivrés les titres. En ce sens, le décret de 1993, en précisant que la délivrance des grades et des dans se basait sur les résultats en compétition, mais aussi sur des épreuves techniques ou exercices collectifs en club, était bien contraire à la loi.

Le décret ne pouvant plus s'appliquer, on en revient à la loi du 16 juillet 1984, qui ne confie pas aux fédérations délégataires le monopole de délivrance des grades et dans.

Cette situation est dangereuse, car les grades et dans sont quelquefois malheureusement utilisés par des structures mercantiles, à des fins plus commerciales que pédagogiques.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Eh oui !

M. Patrick Leroy, rapporteur.

Très bien !

M. Maxime Gremetz.

Il a raison !

M. Denis Jacquat.

Il existe donc un risque d'arbitraire, d'autant moins acceptable que les grades et dans sont indispensables pour accéder aux diplômes d'enseignement.

Galvauder, brader les grades et dans nuirait à la crédibilité de leur valeur de référence et désorienterait le monde des arts martiaux.

Il est donc indispensable, afin de combler ce vide juridique, que le législateur intervienne et réaffirme le rôle exclusif des fédérations dans la délivrance de titres, même s'ils ne sanctionnent pas exclusivement une compétition.

C'est précisément l'objet de la proposition de loi, qui envisage, d'une part, de valider les grades et dans délivrés par les fédérations ayant reçu cette attribution par le décret du 2 août 1993 annulé et, d'autre part, de déroger à l'article 17 de la loi du 16 juillet 1984 sur les activités physiques et sportives, en raison de la spécificité des disciplines concernées.

Pour les arts martiaux, les grades et dans sanctionnent les qualités sportives, les connaissances techniques et, le cas échéant, les performances en compétition. Ils seront délivrés par la commission spécialisée des grades de la fédération délégataire ou, à défaut, par la fédérat ion agréée.

Ce monopole de la fédération relatif à la délivrance des grades et dans complète celui prévu dans le projet de loi sur le dopage pour le pouvoir disciplinaire. Le rôle des fédérations est ainsi réaffirmé : pouvoir d'organiser les compétitions, de sanctionner les manquements à l'éthique et, enfin, de délivrer les grades et dans.

Je conclurai sur une note optimiste. En effet, cette proposition de loi,...

M. Maxime Gremetz.

Du groupe communiste !

M. Denis Jacquat.

... tendant à éliminer tout risque d'arbitraire dans la délivrance des grades pour les disciplines relevant des arts martiaux, tout comme l'importance que revêt la lutte contre le dopage, témoignent que l'heure est désormais au respect de l'éthique dans le monde du sport.

Le groupe DL votera la proposition de loi.

(Applaudissements.)

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Le gardien de but du Touquet !

M. Léonce Deprez.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, face à l'évolution de notre société et au milieu de toutes les perturbations que connaît notre monde en mouvement, le sport doit


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

conserver ce qui fait son attrait et sa beauté. Il doit résister aux assauts des forces occultes qui le détournent de son but : l'épanouissement des être humains et la joie de vivre individuelle et collective des citoyens. Il doit donc répondre à des règles précises, connues et reconnues de tous, sans contestation possible.

La proposition de loi déposée par nos collègues communistes tend à définir clairement quelles autorités seront habilitées à définir les grades dans les diverses disciplines dites des « arts martiaux ».

C'est bien le rôle des fédérations de faire respecter les règles et les niveaux de compétition. La proposition mérite donc d'être soutenue, et le groupe UDF la votera.

En outre, en même temps qu'elle répond à un besoin de clarification des arts martiaux, la proposition a une valeur symbolique, tout spécialement dans le contexte actuel. En effet, à force de laisser s'installer des pratiques contestables, l'on apprend un jour que tel membre du CIO a accepté des présents de la part de villes candidates à l'organisation des JO ou que tel commissaire européen aurait pris des décisions contrevenant aux règles de l'administration.

Le sport impose le respect de règles du jeu, mais encore faut-il que celles-ci soient bien réfléchies et définies.

Hier, pour prendre un exemple, tous les élus de la région Nord Pas-de-Calais ont défendu la candidature de Lille à l'organisation des JO. Aujourd'hui, alors qu'ont été rendues publiques certaines irrégularités dans le mode de désignation des villes organisatrices, nous sommes en droit de nous interroger sur les chances réelles qu'avait la capitale des Flandres dans cette compétition.

A l'époque, j'étais d'ailleurs de ceux qui se demandaient si les cadeaux offerts n'allaient pas trop loin. Et même si nous avons perdu la chance d'organiser les jeux Olympiques, nous avons eu raison de rester modestes.

J'ai entendu ce matin à la télévision - vous aussi peutêtre, madame la ministre - notre collègue Guy Drut, ancien champion olympique, annoncer que le CIO allait créer un comité d'éthique. Cela m'a beaucoup choqué. Le CIO, qui est censé incarner l'olympisme, n'aurait-il pas dû être lui-même le comité suprême de l'éthique sportive ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la ministre de la jeunesse et des sports et

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Mais si !

M. Alain Néri.

Mieux vaut tard que jamais !

M. Léonce Deprez.

L'injustice que nous ressentons face au mode de désignation de la ville qui a l'honneur de recevoir la flamme olympique et de la nourrir avant de la transmettre, il est indispensable de faire en sorte qu'aucun sportif ne la ressente face à un concurrent.

Le sport doit être loyal. Les jeunes gens auxquels on tente d'inculquer des règles d'honnêteté et de discipline doivent être préservés de tout doute quant à leur propre niveau et quant à celui de leur condisciples. C'est pourquoi nous ne pouvons qu'apporter notre soutien à la proposition. Il convient en effet qu'une ceinture noire ait la même valeur, qu'elle soit obtenue à Lille, à Perpignan ou à Besançon.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. Léonce Deprez.

Il s'agit d'instaurer les règles de délivrance de ces diplômes et en même temps de faire en sorte qu'ils ne soient pas contestables. Nous ne pouvons donc qu'approuver une telle démarche.

Il est certes regrettable que cela n'ait pu se faire plus tôt...

M. Maxime Gremetz.

Mieux vaut tard que jamais !

M. Léonce Deprez.

... mais saluons de mérite de ceux qui ont pris l'initiative de clarifier enfin la situation.

Voilà pourquoi nous approuverons cette initiative, tout en nous réjouissant que le sport permette, une fois de plus, de dégager un consensus.

(Applaudissements.)

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Je tiens à souligner la qualité du travail de M. Patrick Leroy dont je rappelle qu'il a agi non par souci partisan, mais tout simplement parce qu'il a été sollicité par des fédérations. J'ai d'aill eurs en ma possession une lettre de M. Jean-Luc Rougé demandant que l'on règle ce problème en urgence car, depuis l'annulation du décret, 60 000 grades sont en suspens. M. Patrick Leroy a accompli un véritable travail de fond, et je me félicite de l'initiative prise par le groupe communiste.

Je tenais aussi, madame la ministre, à vous saluer pour la qualité du travail que nous faisons ensemble. La commission comme moi-même y éprouvons un grand plaisir. Et de notre commission, qui est celle des affaires culturelles, familiales et sociales, on pourrait dire aussi qu'elle est celle du sport.

Je vous indique, monsieur Ollier, que ce texte était vraiment nécessaire, car il correspond à une demande.

Quant au problème de la santé des sportifs, il fait l'objet d'une loi que nous venons de voter : la loi relative à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage. Elle a fait l'objet d'un débat de qualité qui nous a mobilisés durant des semaines et qui s'est terminé par un vote unanime. D'ailleurs, j'ai grand plaisir à vous annoncer que, la semaine prochaine, la commission publiera, comme elle le fait pour tous les grands textes, une petite brochure destinée à mieux faire connaître la loi en question à ceux qui sont concernés : associations, mouvements sportifs, etc. A cet égard, je tiens à rendre hommage à M. Alain Néri.

Pour en revenir au présent texte, il était très attendu non seulement au Blanc-Mesnil...

M. Daniel Feurtet.

En effet !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... mais aussi par la fédération du Nord Pas-de-Calais - et

M. Patrick Leroy le sait bien - ...

M. Maxime Gremetz.

Dans la Somme aussi !

M. Ernest Moutoussamy.

Chez nous aussi, en Guadeloupe !

M. Patrick Ollier.

Et dans les Hautes-Alpes !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

En Haute-Garonne également !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... qui nous a plusieurs fois sollicités pour que nous engagions une action de fond pour résoudre ce problème.

Il s'agit, une fois de plus - car c'est tout le sens de la politique menée par Mme la ministre - de replacer les fédérations au centre du dispositif et, en même temps, d'engager une action de moralisation, ou plutôt de restauration de l'éthique du mouvement sportif en ce qui concerne l'attribution des grades, puisque nous savons


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

bien que, dans certains cas, on s'en éloigne un peu. Ce texte vise donc ces deux objectifs. De surcroît, il y avait urgence, depuis l'annulation du décret.

Je crois savoir, monsieur Ollier, que Mme la ministre pourra vous fournir quelques explications sur la composition de la commission consultative et sur celle des commissions de distribution des grades et des dans. Vous verrez ainsi que ce texte est réfléchi et que la mise en place de ces commissions devrait s'effectuer sans difficultés.

Comme je le souhaite, rien ne devrait donc s'opposer à un vote unanime de ce ce texte qui est parfaitement utile.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Soyez assuré, monsieur Ollier, que je serai toujours aux côtés de ceux qui veulent préserver les valeurs dont le sport est porteur et luttent contre toutes les dérives qui le menacent. Nous avons d'ailleurs agi ensemble pour lutter contre le dopage, donc pour protéger la santé des sportifs et s'opposer à la tricherie dans le sport.

La présente proposition de loi permet, grâce à la création de la commission consultative, d'apporter des garanties quant au respect de la déontologie dans la pratique des arts martiaux. Car - et vous avez raison sur ce point - les enquêtes menées par nos services déconcentrés sur ces 180 disciplines qui commencent à se développer montrent que certaines d'entre elles sont touchées par des pratiques sectaires.

D'ailleurs, j'appelle souvent les élus locaux à faire preuve de beaucoup de vigilance à l'égard de certains clubs qui s'installent dans les quartiers. Ils ont le sentiment que l'installation de ces clubs est de nature à calmer les choses, mais en fait il s'agit parfois de l'installation de sectes ou de groupes intégristes.

Le plan d'action dont j'ai parlé tout à l'heure servira à surveiller de très près les pratiques en question. Du reste nous avons refusé d'accorder des agréments à de nouvelles pratiques pour lesquelles nous n'avions pas encore la g arantie qu'elles respectaient l'intégrité physique ou morale de leurs pratiquants et pratiquantes. Nous continurons dans cette voie.

La loi sur le sport, à laquelle nous allons travailler au cours du dernier trimestre, permettra de s'attaquer à d'autres dérives et de clarifier le rapport entre l'argent et le sport. Ce sera une nouvelle étape sur le chemin de la restauration de l'éthique du sport - et c'est un souci que nous partagerons tous.

En ce qui concerne les commissions spécialisées, nous avons intérêt à y associer tous les acteurs concernés par c es disciplines : fédérations délégataires, fédérations agréées pour certaines pratiques, fédérations affinitaires,s tructures multisports, représentants des professeurs, représentants des structures professionnelles. C'est dans ce partenariat que réside la solution du problème.

Il en ira de même pour la commission consultative à laquelle je souhaite associer des élus, des maires, car ils sont concernés au premier chef.

Pour conclure, je tiens à remercier une nouvelle fois M. le rapporteur et la commission pour le travail qu'ils ont accompli.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Le texte dont nous sommes saisis ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission.

Article 1er

M. le président.

Je donne lecture de l'article 1er :

« Art. 1er L'article 17 de la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Dans les disciplines sportives relevant des arts martiaux, nul ne peut se prévaloir d'un grade ou dan sanctionnant les qualités sportives et les connaissances techniques, et le cas échéant les performances en compétition, s'il n'a pas été délivré par la commission spécialisée des grades et dans de la fédération délégataire ou, à défaut, de la fédération agréée consacrée exclusivement aux arts martiaux.

« Un arrêté du ministre chargé des sports fixe la liste des fédérations mentionnées à l'alinéa précédent.

« Les commissions spécialisées des grades et dans, dont la composition est fixée par arrêté du ministre chargé des sports sur proposition des fédérations concernées, soumettent les conditions de délivrance des grades et dans, dans le respect des règlements internationaux, au ministre chargé des sports qui les approuve par arrêté.

« Il est créé une commission consultative des arts martiaux comprenant des représentants des fédérations sportives concernées et de l'Etat, dont la composition est arrêtée par le ministre chargé des sports. Cette commission est compétente pour donner son avis au ministre de la jeunesse et des sports sur toutes les questions techniques, déontologiques, administratives et de sécurité se rapportant aux disciplines considérées et assimilées. »

Article 2

M. le président.

Je donne lecture de l'article 2 :

« Art. 2. Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les grades et dans délivrés depuis le 2 août 1993 et jusqu'à la date de promulgation de la présente loi par la commission spécialisée des grades et dans du judo, jujitsu, kendo et disciplines associées de la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées, la Commission nationale spécialisée des grades et dans de karaté de la Fédération française de karaté et arts martiaux affinitaires, la Commission nationale spécialisée des grades et de taekwondo et disciplines associées de la Fédération française de taekwondo et disciplines associées et par la commission spécialisée des grades aïkido de l'Union des fédérations d'aïkido sont réputés acquis à leurs titulaires depuis leur date d'obtention. »

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

M. François Goulard.

Contre !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

M. Georges Hage.

C'est l'exception qui confirme la règle ! (Sourires.)

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

2 CHÈQUES-VACANCES Discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, modifiant l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances (nos 1414, 1460).

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, c'est avec un grand plaisir que j'ai l'honneur de présenter devant vous au nom du Gouvernement, le projet de loi tendant à élargir l'accès au chèque-vacances.

J'ai d'autant plus de plaisir à vous le présenter, que je dois vous dire, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les membres de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, que le travail que vous avez effectué a permis de rétablir le sens premier de ce projet de loi, qui avait été sensiblement modifié en première lecture au Sénat.

Avant de rentrer dans le détail du projet de loi, permettez-moi de resituer, en quelques mots, ce texte dans le cadre de la politique que je mène depuis mon arrivée au secrétariat d'Etat au tourisme.

Comme vous le savez, trois réalités essentielles guident mon action.

Première réalité : le tourisme est pour notre pays un important secteur économique, lequel est en croissance et créateur de richesses et d'emplois.

Deuxième réalité : nos concitoyens aspirent légitimement à accéder aux vacances et aux loisirs.

Troisième axe : le tourisme est une activité porteuse de valeurs d'amitié, de solidarité et d'échange des cultures.

Elle porte en elle des progrès pour la tolérance et la paix, autant de valeurs qui ont besoin d'être revivifiées dans notre société aujourd'hui.

C'est en partant de la cohérence entre ces trois réalités que s'inscrit depuis maintenant vingt mois la politique du Gouvernement pour le tourisme français. En un mot, je dirai qu'on ne saurait se réjouir des excellents indicateurs du tourisme français - 70 millions de touristes accueillis en 1998 et 70 milliards d'excédents pour la balance des paiements - sans en même temps agir pour qu'un plus grand nombre de nos concitoyens puisse accéder aux vacances.

Ainsi, 40 % des Français ne partent pas ou peu en vacances. Selon une enquête menée en 1997 par la direction du tourisme, 35 % des foyers disposant d'un revenu inférieur à 6 000 francs par mois ne partent jamais et, plus de la moitié de ceux qui ne partent pas appartiennent à un foyer dont les revenus mensuels ne dépassent pas 10 000 francs par mois.

C'est pourquoi, depuis mon arrivée au secrétariat d'Etat au tourisme, j'ai voulu relancer la politique sociale du tourisme par le biais de différentes actions : soutien de rénovation du patrimoine social par le doublement du budget affecté à ces opérations ; inscription du droit aux vacances pour tous dans la loi relative à la lutte contre lese xclusions et création d'une bourse « solidarité vacances » ; redéfinition des missions du tourisme social, notamment grâce à la tenue à Paris, au mois de mai prochain, des premiers états généraux du tourisme social et associatif.

Depuis 1982, date de sa création, un moyen moderne adapté aux attentes et besoins d'aujourd'hui a prouvé toute son efficacité pour favoriser le départ en vacances d'un grand nombre de salariés : le chèque-vacances.

Un million de salariés, quatre millions de personnes en bénéficient. Il repose à la fois sur l'épargne du salarié et sur une contribution de l'employeur. En 1998, il a été émis 3,7 milliards de francs en chèques-vacances.

Les bénéficiaires actuels des chèques-vacances sont les salariés des grandes entreprises, par le biais des comités d'entreprise, et ceux de la fonction publique. Il est intéressant de noter que 67 % des bénéficiaires disposent d'un revenu inférieur à 15 000 francs par mois et que le tiers d'entre eux ne prendraient pas de vacances sans ce dispositif.

Mais force est de constater que, jusqu'à présent, une importante catégorie de salariés n'en bénéficiait pas ou très peu. Et pourtant ils représentent 55 % des effectifs du secteur privé : il s'agit des salariés des petites et moyennes entreprises de moins de cinquante salariés.

C'est aussi dans ce secteur, vous le savez, que l'on trouve les salaires les plus modestes et que n'existe pratiquement aucune activité sociale au sein du lieu de travail.

Voilà pourquoi le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui entend rétablir un peu de justice sociale entre les salariés du pays en prenant en compte l'évolution du monde du travail. Il s'inscrit donc pleinement dans la continuité de l'ordonnance de 1982 portant création du chèque-vacances et dont le préambule rappelait que : « Le droit aux vacances, reconnu aux travailleurs en 1936, n'a pu s'inscrire dans les faits que parce qu'étaient mis en place certains moyens permettant de l'exercer. »

C'est l'un de ces moyens que je vous propose de développer en élargissant le dispositif du chèque-vacances à un plus grand nombre de bénéficiaires - en l'occurrence plus de 7,5 millions de salariés - et en levant les obstacles à sa diffusion dans les 1 400 000 entreprises concernées.

Aujourd'hui, 95 % des chèques-vacances sont diffusés par les comités d'entreprise sur leur budget d'activités sociales, en application de l'article 6 de l'ordonnance. De ce fait, ils ne sont pas soumis aux cotisations sociales.

Les petites et moyennes entreprises, elles, ne peuvent prétendre à cette possibilité puisque la loi ne les obligent pas à créer un comité d'entreprise. Elles ne peuvent donc accéder à un tel dispositif que par le biais de l'article 2 de l'ordonnance. Dans ce cas, la participation de l'employeur est assimilée à une rémunération et donc soumise à cotisations sociales.

Voilà pourquoi le projet de loi qui vous est soumis par le Gouvernement entend prioritairement lever ces obstacles grâce à quatre mesures nouvelles.

La première mesure consiste en une exonération des charges sociales sur la contribution employeur dans les entreprises de moins de 50 salariés. Cette exonération s'inscrit dans le cadre d'un dialogue social renforcé. Elle


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

est en effet assortie de obligation de conclure un accord d'entreprise, accord passé entre l'entreprise et les délégués syndicaux ou, en l'absence de représentation syndicale, un salarié mandaté, à l'instar de ce que prévoit la loi sur la réduction du temps de travail. Je vous rappelle que 42 % des accords signés en application de cette loi l'ont été par des mandatés.

La deuxième mesure est l'ouverture d'une autre voie de délivrance du chèque-vacances. Cette voie nouvelle, par sa nature collective, m'apparaît bien adaptée aux petites et moyennes entreprises. Elle nécessitera un accord collectif de branche ou territorial conclu entre partenaires sociaux.

Ainsi, comme vous pouvez le constater, ce projet de loi, sans bouleverser le dispositif actuellement en vigueur de l'ordonnance de 1982, donne la priorité au dialogue social. Car, j'en suis persuadée, c'est le renforcement des relations sociales qui permettra une meilleure prise en considération du chèque-vacances par les différents partenaires sociaux.

J'en viens à la troisième mesure pour plus de justice et d'efficacité sociale. Le projet de loi propose de remplacer la référence à l'impôt payé par celle du revenu fiscal de référence du foyer. Ce revenu, je vous le rappelle, a été fixé, pour 1999, à 87 680 francs pour une part, et majoré de 19 990 francs par demi-part supplémentaire.

Comme vous pouvez le constater, en proposant cette disposition, nous favorisons légèrement les familles par rapport au plafond précédent.

Enfin, quatrième mesure : parce qu'elles avaient été oubliées par l'ordonnance de 1982, je vous propose également d'étendre l'attribution du chèque-vacances à certaines professions, en l'occurrence les dockers et les marins-pêcheurs.

Avant de vous parler du texte adopté par le Sénat en première lecture, je tiens à vous rappeler que le dispositif d u chèque-vacances a une double vocation sociale.

L'Agence nationale pour le chèque-vacances est chargée de le gérer selon les principes de l'ordonnance de 1982.

Cette agence est un organisme sous tutelle de l'Etat, donc du secrétariat d'Etat au tourisme. Elle est dirigée par un conseil d'administration composé des partenaires sociaux et d'acteurs du tourisme, qui décide de l'attribution des excédents de gestion.

Ceux-ci servent essentiellement à permettre aux publics le plus en difficulté de partir en vacances. En cinq ans, 60 000 bourses-vacances ont été attribuées à des familles connaissant des difficultés sociales par l'intermédiaire des associations caritatives.

Les excédents de gestion vont aussi à l'aide à la rénovation du patrimoine social : en 1998, 100 projets de réhabilitation ont été subventionnés, pour un montant total de 26 millions de francs.

Dernier point : le chèque-vacances est un excellent vecteur de développement de l'économie touristique. Les 3,7 milliards de francs émis en chèques-vacances en 1998 ont généré 10 milliards de francs de consommation tou-r istique auprès des 130 000 prestataires agréés par l'Agence nationale du chèque-vacances.

Le chèque-vacances est aussi un excellent vecteur du développement local et de l'aménagement du territoire.

Le Sénat a modifié profondément le sens du texte, qui vise à confirmer le rôle social du chèque-vacances.

En effet, la Haute assemblée a apporté un certain nombre de modifications qui tendent à dénaturer l'objet social du chèque-vacances, notamment en élargissant les conditions fiscales d'accès ; en étendant massivement l'exonération à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, sans tenir compte du rôle des comités d'entreprise ; en portant atteinte à la volonté de développement du dialogue social qui sous-tend le projet du Gouvernement et en fragilisant le statut de l'Agence nationale pour le chèque-vacances.

Cette vision et celle du Gouvernement - dont j'ai eu le plaisir de voir qu'elle était partagée par votre commission - deux conceptions différentes de la finalité du chèque-vacances.

En ce sens, je dois vous féliciter, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, pour la qualité du travail de la commission. Vous avez rétabli le sens premier du projet de loi : favoriser l'accès aux vacances pour le plus grand nombre, en particulier les plus démunis. Les réflexions que vous avez menées sur l'accès au chèquevacances pour les salariés précaires et les emplois-jeunes relèvent d'un souci légitime.

Je partage votre volonté de donner toute sa place, à tous les niveaux, au dialogue social, qu'il s'agisse de la branche, du territoire ou de l'entreprise.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Très bien !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

C'est d'ailleurs le sens du projet de loi, qui ouvre deux voies : celle de l'accord de branche ou territorial pour la mise en place d'organismes paritaires, et celle de l'accord d'entreprise.

Le souhait du Gouvernement, partagé par les partenaires sociaux, est bien de développer le plus largement possible la négociation, au plus près des entreprises et de leurs salariés.

Comme la commission l'a justement relevé, l'institution du chèque-vacances, en 1982, était destinée à contribuer à « une réduction des inégalités devant le droit aux vacances pour tous ».

Cet objectif est plus que jamais d'actualité ! Le chèque-vacances a prouvé son efficacité sociale et économique à travers les chiffres que je rappelais tout à l'heure. Son développement spectaculaire, ces cinq dernières années, montre qu'il correspond à un besoin, en particulier pour les salariés à revenus modestes.

Mon ambition est de doubler le nombre des bénéficiaires. Ainsi, en six ans, un million de salariés supplémentaires pourraient avoir accès au chèque-vacances, soit un rythme de 150 000 nouveaux bénéficiaires par an : des salariés ayant une famille, et dont beaucoup aujourd'hui renoncent à partir ou hésitent, parce qu'ils n'en ont pas les moyens financiers.

Cet objectif m'apparaît réaliste pour plusieurs raisons.

Tout d'abord parce que le chèque-vacances répond à un besoin social, mais aussi à l'aspiration de tous à ser etrouver en famille, à découvrir d'autres cultures, d'autres paysages, à recréer du lien social. En un mot, la découverte des vacances, nous le savons tous, permet à ceux qui en ont été privés une ouverture d'esprit, une meilleure compréhension du monde, l'ouverture aux autres, l'accès à la culture et à la tolérance.

Ensuite, comme l'atteste le sondage commandé par l'Agence nationale du chèque-vacances, l'ANCV, dont la presse s'est fait l'écho ce matin, le chèque-vacances apporte une véritable réponse aux attentes des salariés des petites et moyennes entreprises, puisque 82 % d'entre eux utiliseraient le chèque-vacances s'ils le pouvaient et que les trois quarts estiment que cela les aiderait à partir en vacances plus souvent.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

C e sondage confirme par ailleurs l'adhésion des employeurs et des salariés au dispositif qui vous est présenté.

En effet, 71 % des salariés et 59 % des employeurs considèrent que le projet d'extension du chèque-vacances est une bonne chose, parce que tous les salariés doivent avoir droit aux mêmes avantages, quelle que soit la taille de leur entreprise.

Enfin, près de la moitié des employeurs de PME et PMI de moins de cinquante salariés seraient prêts à consacrer de 0,1 % à 0,5 % de leur masse salariale pour abonder le système au profit de leurs salariés ; cela correspond tout à fait à l'ambition du projet de loi. Ces employeurs se disent même incités en ce sens par l'exonération de charges.

C'est en partant de ce socle que, sur ma demande, l'ANCV conduira une stratégie de mobilisation de tous les acteurs, je pense en particulier aux organisations professionnelles et consulaires et aux partenaires sociaux.

Cette stratégie s'accompagnera d'une démarche visant à convaincre 1,4 million d'entreprise éligibles. Il s'agit pour moi de permettre l'accès le plus rapide possible du plus grand nombre de salariés des PME au chèque-vacances.

Mais, comme en témoignent les travaux de la commission, l'intérêt pour le chèque-vacances ne s'arrête pas aux frontières de l'Hexagone. En effet, un certain nombre de pays de l'Union européenne préparent la mise en place d'un tel dispositif sur leur territoire. C'est le cas, par exemple, de l'Italie, de l'Espagne et du Portugal.

Par ailleurs, le Bureau international du tourisme social, qui regroupe des associations, des gouvernements et des centrales syndicales réfléchit à l'extension du chèquevacances au niveau européen C'est un élément positif pour la construction d'une Europe sociale.

Dans notre pays, le droit aux vacances est intimement lié au mouvement pour le progrès social : de l'accès aux congés payés en 1936, sous l'impulsion du Front populaire et de Léo Lagrange, au développement, dès 1945, des activités sociales des comités d'entreprise, de l'allongement de la durée des vacances à la réduction du temps de travail, en passant par la création du chèque-vacances en 1982.

Le projet de loi que je vous présente au nom du Gouvernement relève de cette continuité, celle de la justice sociale, qui rappelle qu'en cette fin de siècle tous les Français ne sont pas encore égaux devant l'accès aux vacances.

Au moment où se met en oeuvre un mouvement de réduction du temps de travail qui va libérer un nouvel espace de temps libre propice aux vacances et aux loisirs, il nous appartient d'agir pour qu'une nouvelle avancée sociale ne se traduise pas par une accentuation des inégalités, mais s'accompagne au contraire de plus d'égalité et, pourquoi ne pas le dire, de liberté et de fraternité.

Car, plus de deux siècles après la Révolution française, le bonheur reste une idée neuve en Europe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Gérard Terrier, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Madame la secrétaire d'Etat, je voudrais vous faire part de plusieurs motifs de satisfaction à propos de ce texte.

Le premier est de constater que vos promesses sont tenues, puisque, il y a moins d'un an, vous vous étiez engagée devant l'Assemblée à nous présenter un projet de loi visant à étendre le champ d'application des chèquesvacances, et je sais que vous y tenez beaucoup.

Le second réside dans le fait que vous avez conservé à ce projet l'orientation sociale qu'avaient voulue ceux qui sont à l'origine de l'ordonnance, à la rédaction de laquelle le président de la commission des affaires sociales, Jean Le Garrec a grandement contribué.

Enfin, je me réjouis de l'excellent travail que j'ai pu accomplir tant avec vous-même qu'avec votre cabinet.

Créé par l'ordonnance du 26 mars 1982, le système des chèques-vacances a pour but de développer une aide à la personne pour permettre le départ en vacances des salariés les plus défavorisés, grâce à une contribution de l'employeur abondant leur participation, afin de réduire les inégalités devant le droit aux vacances.

Ce système a connu un réel succès, comme l'atteste la constante progression du chiffre d'affaires de l'Agence nationale du chèque-vacances. En effet, le montant des chèques émis qui atteignait 4,6 millions en 1983, est passé à plus de 3,6 milliards en 1998.

Le chèque-vacances a pleinement rempli sa mission sociale puisque 67 % des porteurs de chéquiers ont un revenu inférieur à 15 000 francs, et que le tiers de ses bénéficiaires ne prendraient pas de vacances sans ce système.

Le chèque-vacances, qui bénéficie à un million de salariés aux revenus modestes et à leur famille, permet aussi de soutenir le développement d'équipements de tourisme à vocation sociale, y compris la petite hôtellerie familiale et les campings. Au total, 70 millions de francs ont été redistribués dans ce secteur de 1994 à 1998.

Le chèque-vacances constitue ainsi un vecteur de structuration du territoire : 80 000 professionnels du tourisme et des loisirs représentant 150 000 points d'accueil bénéficient de l'agrément pour le chèque-vacances.

De même, il contribue à l'organisation des vacances et des loisirs en faveur de populations défavorisées, en coopération avec des organismes sociaux ou des associations c aritatives : 42 millions reversés pour ce public depuis 1987, dont 7,9 en 1997.

Enfin, il contribue largement au développement économique, puisque les 3,6 ou 3,7 milliards représentant le montant des chèques émis en 1998 ont induit une consommation trois fois supérieure, soit plus de 10 milliards.

Cependant, il faut bien constater que 40 % des Français ne partent pas en vacances, dont près de la moitié pour des raisons financières.

Le rôle social du chèque-vacances doit donc être renforcé, notamment en élargissant son champ d'application.

En effet, l'absence de comité d'entreprise dans les entreprises de moins cinquante salariés conduit de fait - parce que la loi ne l'interdit pas - à exclure quelque 7,5 millions de salariés du bénéfice de cet instrument de promotion de vacances populaires. Il convenait de remédier à cette situation dénoncée par l'ensemble des organisations syndicales, patronales et de tourisme social.

Le présent projet de loi a donc pour objet d'étendre le bénéfice du chèque-vacances à tous les salariés des petites et moyennes entreprises, en préservant le caractère social et redistributif du dispositif et en favorisant l'intervention des partenaires sociaux.


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Par ailleurs, se pose la question de l'ouverture du chèque-vacances sur l'Europe, sous condition de réciprocité, qui n'est pas évoquée dans le projet de loi ; un amendement traitera de ce sujet.

Le Sénat, au cours de la première lecture, a amendé conséquemment le projet de loi, lui conférant ainsi une orientation vers l'économie de profit. La portée sociale voulue par ce projet s'en trouve diluée, notamment par l'élargissement de l'exonération des charges sociales à toutes les entreprises et par le relèvement important du p lafond de ressources donnant accès aux chèquesvacances.

Le Sénat a également tenu à limiter le dialogue entre les partenaires sociaux à une simple consultation, et non plus à un accord d'entreprise, et il a modifié les missions de l'agence nationale.

Il me paraît donc utile de revenir pour une grande part au texte initial, et de lui apporter des améliorations induites par les nombreuses auditions que j'ai organisées avec l'ensemble des représentations patronales des PMEPMI, qui accueillent très favorablement ce projet, et la plupart des syndicats salariaux, qui nous ont fait part de quelques observations.

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui s'articule autour de cinq articles et le texte voté par le Sénat comporte cinq articles nouveaux.

L'article 1er vise deux objectifs. Il met à jour des références obsolètes du code du travail et élargit l'accès des salariés au système des chèques-vacances ; les dockers et les marins pêcheurs seront concernés.

Aussi, à l'article 1er , je vous proposerai un amendement qui précisera les conditions d'ouverture des chèquesvacances aux emplois jeunes et aux titulaires d'un contrat d'emploi solidarité. Il sera suivi d'un article additionnel précisant l'accès au chèque-vacances pour les non-titulaires de la fonction publique, par le biais de l'article 6 de l'ordonnance de 1982, ainsi que d'un article additionnel permettant d'ouvrir les chèques-vacances à la zone euro.

Le deuxième article propose une rédaction nouvelle de l'intégralité de l'ordonnance qui précise les conditions auxquelles doivent répondre les salariés pour bénéficier du chèque-vacances et reprend le contenu du premier alinéa de l'article 3 de l'ordonnance.

Le 1 de cet article substitue un critère de revenu au critère d'imposition retenu par l'ordonnance, pour déterminer les personnes potentiellement bénéficiaires du chèque-vacances.

Cette nouvelle disposition engendre plus de justice sociale, car nous savons tous que, derrière un montant identique d'impôt à payer, nous trouvons des situations économiques bien différentes ne fût-ce que du fait des exonérations et crédits d'impôt divers.

L'article 3 constitue le coeur de ce projet puisqu'il introduit dans l'ordonnance un nouvel article qui prévoit une exonération de charges dans les entreprises de moins de cinquante salariés, pour les sommes consacrées par l'employeur à l'abondement de l'épargne des salariés.

L'article 5, également très novateur, ouvre une voie nouvelle d'attribution des chèques-vacances par le biais des organismes paritaires chargés de la gestion d'activités sociales. Ces organismes paritaires relèvent du même régime que les organismes sociaux visés à l'article 6 de l'ordonnance.

Or nous savons que 95,3 % des chèques émis le sont par le biais de cet article, dont 37,8 % par les comités d'entreprise, 33,3 % par la fonction publique d'Etat au travers de la MFP, 14,9 % par La Poste et France Télécom et 9,4 % par les fonctions publiques territoriale et hospitalière.

Outre les amendements de retour au texte initial, je vous proposerai un amendement abaissant l'épargne minimale de 4 % à 2 % et un amendement imposant au ministre du tourisme de présenter annuellement à la représentation nationale un compte rendu économique et social de ce dispositif.

Je vous propose donc d'examiner et de voter ce projet de loi tel qu'il a été amendé par la commission des affaires culturelles familiales et sociales, afin que les 7,5 millions de salariés des PME-PMI puissent, dans les meilleurs délais, bénéficier de ce merveilleux outil, et pour que le droit aux vacances, reconnu en 1936 aux travailleurs, s'inscrive dans les faits. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le chèque-vacances n'est encore qu'une goutte d'eau dans la mer montante du chiffre d'affaires de l'économie touristique. Ce chiffre d'affaires, tous secteurs confondus, approche les 650 milliards de francs dépassant ainsi de plus d'un tiers celui de l'agriculture.

Madame la secrétaire d'Etat, nous vous demandons de commencer par le faire comprendre à vos collègues membres du Gouvernement et au Premier ministre : vous pesez déjà 650 milliards de francs, mais vous pesez aussi près de 2 millions d'emplois, dont 800 000 dans le secteur de l'hôtellerie.

Je vous avais déjà rencontrée il y a plus d'un an, peu après votre prise de fonctions, pour vous proposer de faire comprendre qu'un tel gisement d'activités nouvelles et d'emplois nouveaux justifiait une actualisation des textes législatifs. Je vous avais aussi proposé d'actualiser certaines réglementations, dont certaines datent d'avant votre naissance et dont d'autres ne sont plus adaptés à l'évidence que je veux rappeler.

Avec une progression des effectifs salariés d'environ 3 %, contre 1,2 % pour l'ensemble de l'économie en F rance, l'économie touristique pourrait créer 100 000 emplois d'ici à 2001 ou 2002, date de la prochaine élection présidentielle, si le Gouvernement suivait l'esprit de la proposition de loi que j'ai déposé avec JeanMichel Couve et qui tend à faire de l'économie touristique, à partir des 1 500 à 2 000 pôles territoriaux déjà situés sur notre territoire, un thème majeur du développement de notre économie nationale.

L'effort doit partir d'une volonté de mise en valeur et en vie de notre territoire à partir de ces 1 500 à 2 000 pôles à vocation touristique, rayonnant dans nos vingt-deux régions et nos DOM-TOM.

L'effort doit naître aussi d'une volonté d'aménager le temps de vie des Français pour que le temps libre des uns génère le temps de travail des autres.

L'effort doit naître, enfin, d'une volonté de mieux ouvrir l'accès aux espaces à labelliser de l'économie touristique, en faveur d'une clientèle plus large, moins restreinte sur le plan international, mais surtout sur le plan social. Et nous en arrivons ainsi au sujet qui nous rassemble aujourd'hui, mais que nous ne devons pas aborder par le petit bout de la lorgnette.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Le taux de départ des Français en vacances approche 60 % pour ce que l'on appelle les vacances d'été, et il se situe entre 25 et 30 % pour ce que l'on appelle les vacances d'hiver.

Les statistiques de l'INSEE elles-mêmes, dans leur vocabulaire, à l'image de nos textes législatifs et réglementaires, sont en retard d'une époque, pour ne pas dire d'une guerre économique - je préfère dire : en retard d'une paix, et cette paix doit être de plus en plus une paix sociale. Ces statistiques oublient qu'entre l'hivr et l'été il y a la merveilleuse saison de printemps, où l'on se sent si heureux de respirer la vie à travers les parfums de la nature,...

M. Maxime Gremetz.

Que c'est bien dit ! C'est magnifique !

M. Léonce Deprez.

... et qu'entre l'été et l'hiver, il y a la saison d'automne, pleine de poésie, qui inspirait jadis, dans nos écoles primaires et dans les classes de sixième de nos collègues, les plus belles rédactions françaises. Rappelez-vous ces mots d'André Theuriet : « Les feuilles dorées jonchent le sol... », que nous avons tous appris.

M. Michel Bouvard.

Maintenant, ce sont les feuilles d'impôt. C'est moins romantique ! (Rires.)

M. Léonce Deprez.

A travers la proposition de loi d'il y a quelques mois de votre prédécesseur, Bernard Pons, et de votre projet de loi, notre objectif doit être triple.

Premièrement, il nous faut organiser une économie touristique pluri-saisonnière, que je propose depuis plusieurs années d'appeler le « tourisme des quatre saisons ».

Nous séduirons mieux l'étranger avec cette appellation.

Deuxièmement, nous devons organiser le développement des capacités d'accueil et d'animation de l'économie touristique à travers la France, à partir des 1 500 à 2 000 pôles à vocation touristique déjà répertoriés à tr avers le pays - stations thermales, stations de montagne, stations littorales, villes d'art et d'histoire, villes de congrès, pays d'attrait rural intercommunal. Il s'agit de les reconnaître et de les labelliser. Nous devons favoriser leur rayonnement et leur excellence à travers le paysage français.

Troisièmement, il importe d'ouvrir à de nouvelles couches sociales l'accès aux vacances et à l'évasion touristique, que permet désormais et que permettra de plus en plus demain un meilleur aménagement du temps de vie en fin de semaine et de trimestre, durant les quatre saisons de l'année.

Depuis les congés payés de 1936 jusqu'aux Trente Glorieuses et même après elles, en dépit des années de crise que notre pays a traversées, et surmontées, la progression du niveau de vie et de l'accès à des temps de vacances, de remise en forme, de réflexion en commun, de congrès, d'évasion ou de retrouvailles, pour se régénérer l'esprit ou s'oxygéner le corps, a été une réalité vé cue en France. Mais, en attendant 2010, où l'on peut espérer que de 90 % à 95 % de la population française accédera aux vacances, comme l'a laissé penser une étude récente du Commissariat du Plan, il nous faut organiser une meilleure solidarité nationale pour que la justice sociale s'exprime aussi en temps de vacances vécu, c'est-à-dire en tourisme pour tous.

Pour aboutir à cet élargissement social de l'accès à ces temps de vie touristique sur des espaces territoriaux à vocation touristique, il convient de donner une ampleur plus grande, plus ambitieuse, à la politique des chèquesvacances.

Réduit à 3,7 milliards de francs pour l'année 1998, sur les 650 milliards de francs de chiffre d'affaires global de l'économie touristique, le volume d'émission actuel des chèques-vacances révèle le champ d'action immense que nous avons à labourer. Ouvrir et labourer ce champ au profit des Français qui vivent mal est une ambition partagée dans l'ensemble des groupes qui constituent la représentation nationale. A cet égard, je me retrouve souvent en accord aussi bien avec tel ou tel député nordiste, président du groupe communiste de l'Assemblée - je pense à

M. Alain Bocquet -, ...

M. André Capet.

C'est un grand mariage ! (Sourires.)

M. Léonce Deprez.

... qu'avec mes collègues du groupe UDF, dont je suis le porte-parole, du groupe RPR ou du groupe DL, dont quelques représentants particulièrement qualifiés sur le plan du tourisme sont ici présents.

C'est une volonté commune de création d'activités nouvelles, génératrices de vie économique et de valeur ajoutée à la vie, ainsi qu'une volonté de création d'emplois nouveaux qui nous animent. Toutes nos régions ont tant besoin de ces emplois pour aborder les années 2000 ! Mais nous sommes également animés par une volonté de justice sociale. Nous le disons clairement : le temps des égoïsmes de milieux et des privilèges de classe est fini.

Il faut en effet que les citoyens à bas revenus, les familles aux moyens financiers les plus modestes ne se retrouvent pas exclus du temps des vacances, des espaces de liberté, de beauté, d'épanouissement que doivent être les pôles territoriaux d'économie touristique que la France a la chance de compter déjà à ce jour sur son territoire, depuis ses montagnes jusqu'à son littoral.

Géographiquement, ces pôles sont accessibles à tous puisqu'ils sont répartis à travers tout le territoire français, y compris dans la France profonde de nos régions intérieures. Le malheur, c'est que tous nos concitoyens n'ont pas les moyens d'accéder à ces pôles de vie touristique et aux espaces que ceux-ci vitalisent et valorisent ! Le malheur, c'est que l'on enferme cet accès dans un temps limité à une saison d'été ou à une saison d'hiver, de sorte que la rentabilité de la gestion des lieux et des équipements n'est pas possible, à moins de la rendre trop coûteuse, ce qui impose un coût insupportable pour le budget d'une grande partie des Français. Car une entreprise qui ne travaille que trois ou quatre mois par an ne peut qu'être condamnée un jour à déposer son bilan et, avant même qu'elle ne le fasse, à envoyer au chômage celles et ceux auxquels elle ne peut offrir que des emplois précaires, parés du titre démodé d'« emplois saisonniers ».

Je laisserai à Jean-Michel Couve le soin de développer l'argumentation qui avait incité la majorité précédente à développer les chèques-vacances et à présenter une proposition de loi signée de Bernard Pons, dont votre projet de loi s'est pour une bonne part inspiré, madame la secrétaire d'Etat. Il faut rendre à César ce qui est à César, et à Bernard ce qui est à Bernard.

(Sourires.)

M. Denis Jacquat.

Nous avons là un PACS touristique !

M. Léonce Deprez.

Je poserai plusieurs questions au gouvernement actuel au nom de mes collègues du groupe UDF, à l'occasion de ce rendez-vous de mars de l'Assemb lée nationale avec l'économie touristique. De vos réponses dépendra le vote de notre groupe.

Pourquoi les chèques-vacances ne pourraient-ils pas s'inspirer de la grande réussite des tickets-services des c hèques d'accompagnement professionnalisé, qui tra-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

duisent une politique comparable d'ouverture sociale et de partenariat efficace avec les entreprises de notre pays, grandes, moyennes ou petites ? Pourquoi ne pas permettre, à partir de l'Agence nationale pour les chèques-vacances, créée il y a presque dixhuit ans, ou avec son concours, dans le cadre possible, dans un premier temps, d'une sous-traitance très transparente, le développement de la commercialisation des chèques-vacances en France, à condition que la finalité sociale de ceux-ci soit rigoureusement respectée ? Pourquoi ne pas mettre à profit le formidable savoirfaire et le savoir-vendre exemplaire des entreprises spécialisées dans la prestation de services touristiques ? Pourquoi ne pas alléger, dans le strict respect du critère de revenus très modestes des bénéficiaires de ces chèquesvacances, les modalités de négociation avec les entreprises et ne pas donner à celles-ci, qu'elles soient grandes, moyennes ou petites, les mêmes possibilités, à partir d'accords entre les directions et les délégués de personnels, que celles données aux comités d'entreprise, aux caisses d'allocations familiales ou aux caisses de retraite ? Je ne citerai qu'un seul chiffre, madame la secrétaire d'Etat, pour vous faire réfléchir sur le sujet : les entreprises hôtelières spécialisées dans l'émission de titres res taurant à but social ont réalisé 16 milliards de francs de chiffre d'affaires en 1998.

Accor, Sodexho, la Banque populaire et d'autres sont prêts à coopérer avec l'Agence nationale pour les chèquesvacances et avec les entreprises françaises pour favoriser un tourisme pour tous, et cela durant toute l'année. Ces entreprises pourraient participer aux frais de développement et au soutien financier que l'ANCV apporte très heureusement aux équipements du tourisme social.

Le principe d'assurer une part des chiffres d'affaires au financement de la rénovation et du développement des équipements du tourisme social pourrait être un principe de base pour l'ouverture de la politique des chèquesvacances que nous proposons.

Un pourcentage pris sur le volume d'émission de tout titre de chèque-vacances pour les équipements de tourisme social devrait permettre d'accentuer les efforts que l'Etat veut faire, à juste titre, afin d'atteindre cet objectif des vacances pour tous.

D'un chiffre d'affaires de 3,3 milliards de francs en 1998, on passerait à un chiffre d'affaires évalué à 10 milliards de francs de volume d'émission de chèquesvacances par an, et l'Etat retrouverait en emplois créés à l'année et en recettes de TVA, ainsi qu'en cotisations sociales, l'effort qu'il consentirait pour l'allégement des charges sociales des entreprises participant au financement des vacances de leurs employés. On estime en général que 1 franc de chèque-vacances génère 3 francs de dépenses touristiques.

Le tourisme associatif et la petite hôtellerie familiale connaîtraient ainsi un essor considérable.

Madame la secrétaire d'Etat, j'attire votre attention sur le fait que, depuis quelques années, les bénéficiaires des chèques-vacances ne résistent plus à la tentation de les utiliser à d'autres fins que l'hébergement, la restauration et le transport dans le cadre des vacances. Ils les dépensent en effet pour payer leurs activités sportives, culturelles ou de loisir en général. Ne le regrettons pas ! Mais ces utilisations ne sont pas conformes aux objectifs initiaux et commencent à faire concurrence aux chèques d'accompagnement personnalisé comme à de nombreux titres de service à caractère social, tels que le titre

« culture », le titre « transport » ou le titre « loisir ».

On voit donc que les frontières du chèque-vacances s'ouvrent d'elles-mêmes. On paie même des chèquesvacances grâce à une habile substitution opérée par certaines agences de voyage pour des dépenses en France alors que ils servent à des séjours à l'étranger.

Il est donc nécessaire, madame la secrétaire d'Etat, d'aller plus loin que le Gouvernement ne le propose aujourd'hui et d'établir les nouvelles règles du jeu économiques et sociales d'un partenariat plus ambitieux entre l'Etat, l'ANCV et les entreprises, au profit de leurs employés, et les entreprises spécialisées, au profit de leurs c lients, pour que l'initiative heureuse des chèquesvacances obtienne un succès social et économique à l'échelle des ambitions d'une France qui veut donner l'exemple à l'Europe.

M. André Capet.

C'est une bonne idée !

M. Léonce Deprez.

A ce sujet, ne convient-il pas que le Gouvernement propose aux pays de l'Union européenne - c'est le moment de le faire - la réciprocité en matière de chèques-vacances ? Ne pourrait-on aboutir, à partir d'une double ambition clairement affichée, de justice sociale et de progrès de l'économie touristique, à une politique europénne des chèques-vacances ? C'est cela, l'Europe sociale que nous voulons en marche ! Madame la ministre, vous êtes, permettez-moi de le dire, un des ministres féminins les plus discrets de ce gouvernement.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Mais efficace !

M. Léonce Deprez.

Vous devriez être la plus entourée, la plus soutenue.

Vous savez porter, nous l'avons constaté, votre regard sur les autres et leur offrir votre sourire, même à ceux qui ne pensent pas comme vous, quel que soit le sujet.

Répondez, s'il vous plaît, à notre attente, et à celle des Français qui vivent très modestement au-dessous d'un seuil qui ne respecte pas la dignité de leur personne ni le droit pour leurs familles de vivre comme les autres.

Ecoutez nos propositions, et vous serez la femme de ce gouvernement la plus porteuse d'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie franç aise-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il est paradoxal que, dans le pays du tourisme par excellence, des millions de Français n'aient pas accès aux vacances, faute de moyens financiers. Cette carence est d'autant moins acceptable qu'il est reconnu que les vacances participent pleinement à l'épanouissement de la personne.

Permettre au plus grand nombre de partir en vacances, tel est précisément l'objectif dévolu au chèque-vacances.

Créé en 1982, le chèque-vacances est un titre de paiement nominatif, utilisable sur l'ensemble du territoire national par son titulaire et les personnes à sa charge, pour régler des dépenses de vacances. Seules les dépenses effectuées auprès des prestataires agréés peuvent être payées en chèque-vacances.

Force est de constater que la formule a connu un succès réel : actuellement, plus d'un million de salariés à revenus modestes bénéficient des chèques-vacances, ce qui porte le nombre total des bénéficiaires - porteurs, conjoints et enfants - à plus de quatre millions de personnes. Cette aide représente entre 15 % et 35 % du budget vacances des bénéficiaires.


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Le succès du chèque-vacances tient aussi à ce que la formule présente des avantages pour l'organisme prescripteur, par le biais d'une exonération de tout ou partie des charges sociales sur sa contribution aux chèques-vacances.

Partant de ce double constat - efficacité de la formule et absence de vacances pour 30 % de nos concitoyens -, il paraît souhaitable d'élargir l'attribution des chèquesvacances. En effet, le dispositif est surtout appliqué dans les grandes entreprises et les organismes publics.

Le projet de loi vise à ouvrir aux 7,5 millions de salariés des PME de moins de cinquante salariés la possibilité d'accéder aux chèques-vacances. Ceux-ci y échappent pour deux raisons : l'absence de comité d'entreprise et l'absence d'exonération de charges sociales pour les PME sur la contribution de l'employeur. Deux mesures sont proposées pour y remédier : l'ouverture d'une voie nouvelle de distribution des chèques-vacances à travers les organismes paritaires de gestion d'activité sociale et une exonération des charges sociales sur la contribution de l'employeur en faveur des PME.

Il semble par ailleurs souhaitable de maintenir l'une des modifications apportées par les sénateurs, visant à diminuer le montant minimal des versements mensuels des salariés de 4 % à 2 % pour permettre aux plus modestes de se constituer une « épargne vacances ».

Une telle réforme autorise à la fois plus de justices ociale, puisque l'Association nationale des chèquesvacances participe à des actions solidaires en direction des publics en difficulté, et une efficacité économique accrue : le chèque-vacances a en effet des retombées non négligeables sur l'ensemble du secteur touristique et, par là même, sur l'emploi.

Le chèque-vacances aurait ainsi induit pour 1997 une dépense touristique trois fois supérieure au volume des chèques émis, soit 10 milliards de francs. Il contribue également à l'équipement et à la rénovation du patrimoine touristique à vocation sociale.

Toutefois, je ne voudrais pas conclure avant d'avoir souligné les limites du dispositif : si les marins-pêcheurs et les ouvriers dockers occasionnels peuvent désormais accéder au chèque-vacances, et si la commission a voté un amendement dans ce sens au profit des retraités, ce n'est le cas ni des artisans, ni des commerçants, ni des demandeurs d'emploi. Par ailleurs, le problème du personnel non statutaire des fonctions publiques n'est toujours pas réglé.

Au total et malgré les insuffisances relevées, l'élargissement de l'attribution du chèque-vacances participera à la concrétisation du droit aux vacances pour tous.

L e chèque-vacances, c'est, enfin, l'illustration que l'économique et le social, au lieu de s'opposer, tendent à se rejoindre.

Madame la secrétaire d'Etat, le groupe DL, que j'ai l'honneur de représenter, vous a posé quelques questions précises. Nous serons très attentifs à vos réponses.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

C'est en pénétrant dans la cour d'honneur de l'Assemblée que j'ai retrouvé immortalisé dans le bronze l'ensemble des articles de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Moment d'émotion ! L'article Ier de ce texte fondateur de la République fixe à jamais le socle d'une société civilisée démocratique.

« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. » Tout est dit

! Reste à faire vivre au quotidien cet admirable principe repris en 1946 par la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Ayons toujours présente à l'esprit la pensée de Jaurès :

« Aller à l'idéal et comprendre le réel. » Comprendre le

réel, c'est faire progresser la société dans laquelle nous vivons. Malgré les difficultés économiques et le chômage, et aussi à cause de cette situation, le droit au travail pour tous reste l'objectif prioritaire qui doit mobiliser tous nos efforts, de même son corollaire : le droit aux vacances.

Cet ensemble permet à chaque individu de trouver sa dignité, son épanouissement, sa place dans la société.

Après un rapide rappel historique du droit aux vacances pour tous, j'analyserai le projet de loi Demessine modifiant l'ordonnance de 1982 et proposant l'extension du bénéfice du chèque-vacances. Ce texte constitue un incontestable progrès social aux retombées économiques importantes.

Faisons un rappel historique. Si l'histoire du travail est aussi vieille que celle de l'humanité, il n'en est pas de même du droit aux vacances pour tous. Sans remonter aux temps odieux de l'esclavage, dont nous venons de célébrer le 150e anniversaire de l'abolition, force est de constater que le droit au repos hebdomadaire, par exemple, est encore très récent. Quant aux congés payés, c'était hier ! Chacun sait qu'il aura fallu attendre le gouvernement du Front populaire de 1936 pour que les travailleurs bénéficient de deux semaines de congés payés.

Les luttes syndicales avaient enfin conquis, grâce à la volonté politique du gouvernement de l'époque, ce qui paraissait impossible au patronat. Et c'est encore avec l'appui des forces syndicales que les gouvernements de progrès successifs mettront en place les cinq semaines légales de congés payés aujourd'hui en vigueur.

Dans cet esprit, l'ordonnance de 1982 créant le chèque-vacances a constitué une avancée sociale supplémentaire indéniable. Il faut aller plus loin mais pas sur les bases de la proposition de loi Pons-Séguin, rejetée par notre assemblée. C'était le Canada Dry du chèquevacances, qui risquait d'en faire un complément de salaire exonéré de charges sociales pour l'employeur.

M. Bernard Pons et M. Michel Bouvard.

Vous l'avez déjà dit il y a un an !

M. Jean-Pierre Dufau.

Je n'ai pas changé d'avis ! De plus, sa distribution se serait effectuée en dehors du contrôle des salariés, selon des modalités décidées par l'employeur. Inacceptable ! Fort heureusement, comme elle s'y était engagée, Mme la secrétaire d'Etat propose une loi qui respecte l'esprit et la lettre de l'ordonnance de 1982 tout en élargissant le champ des bénéficiaires.

Analysons ce projet de loi. Adopté en conseil des ministres le 26 août 1998, c'est un bon projet de loi. Il vise l'élargissement de l'accès des salariés des PME de m oins de cinquante salariés au chèque-vacances et concerne donc quelque 7,5 millions de salariés. Il comporte deux mesures principales : Premièrement, une exonération de charges sociales sur la contribution de l'employeur pour les entreprises de m oins de cinquante salariés dépourvues de comité d'entreprise ou ne relevant pas d'un organisme paritaire.

Cette exonération est encadrée par l'obligation d'un accord d'entreprise, ce que ne prévoyait pas la proposi-


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tion Pons-Séguin. Elle incitera à favoriser les salariés dont les rémunérations sont les plus faibles et les chèquesvacances ne pourront se substituer à des rémunérations prévues ou en vigueur.

Deuxièmement, le projet de loi ouvre une voie nouvelle pour le bénéfice du chèque-vacances à travers les organismes paritaires susceptibles d'être créés par les partenaires sociaux par accords de branches ou territoriaux.

C'est donc un texte adapté aux PME de moins de cinquante salariés qui favorise l'accès au chèque-vacances pour les bas salaires et relance le dialogue social. Le Gouvernement va dans le bon sens. C'est bien ! Mais il importe que le Parlement joue son rôle. Je ne m'attarderai pas sur le vote du Sénat qui a dénaturé le projet de loi. En revanche, je voudrais saluer le mérite du rapporteur qui, après un important travail d'audition des partenaires sociaux, de l'Agence nationale pour les chèquesvacances et d'organismes autorisés, propose de nouvelles avancées.

La commission des affaires sociales et son président ont aussi pleinement contribué à valoriser la loi. A titre d'exemple, l'extension du chèque-vacances aux agents non titulaires de la fonction publique, aux emplois-jeunes, aux contrats emploi consolidés, aux préretraités et même aux retraités, par voie de conventionnement avec les caisses, reste conforme à l'esprit de l'ordonnance de 1982 et améliore sensiblement le texte du Gouvernement. L'abaissement du montant mensuel des cotisations salariales à 2 % du SMIC va dans l'intérêt des bas salaires. La hiérarchie des modalités de concertation des partenaires renforce la volonté de dialogue social. Quant à la possibilité d'utiliser le chèque-vacances dans les pays de l'euro, elle va dans le sens de l'histoire et amorce la réciprocité.

Enfin, au-delà du symbole, la décision de placer l'Agence nationale pour les chèques-vacances sous la tutelle du secrétariat d'Etat au tourisme témoigne de l'importance spécifique accordée par le Gouvernement à ce secteur d'activité et à ceux qui en ont la charge. Mieux qu'un symbole, c'est une reconnaissance. Car cette loi n'a pas seulement un impact social, elle est aussi un facteur d e développement économique, donc de création d'emplois. A ce jour, 80 000 professionnels du tourisme répartis sur 130 000 points d'accueil bénéficient de l'agrément chèque-vacances. On estime à 10 milliards de francs les retombées du chèque-vacances. Malgré une importante accélération ces dix dernières années, le nombre de bénéficiaires ne représente que 1 million de personnes. Le potentiel de développement reste donc considérable, d'où l'intérêt de le populariser davantage, de mieux faire connaître ce dispositif. Il reste encore du chemin à parcourir.

Vous comprendrez, madame la secrétaire d'Etat, que le Parlement entende pleinement jouer son rôle de législateur. Le groupe socialiste attend donc du Gouvernement, que vous représentez, une attitude ouverte et positive eu égard aux amendements proposés. Ces amendements visent à améliorer le projet de loi tout en lui restant fidèles, comme ils restent fidèles à l'esprit de l'ordonnance de 1982.

Pour conclure, je voudrais rappeler que 37 % de nos concitoyens ne partent pas en vacances, essentiellement par manque de moyens. Espérons que cette loi améliorera la situation. Pour autant, j'attends du Gouvernement la définition et la mise en oeuvre d'une politique touristique ambitieuse, créatrice d'emplois et gage de cohésion sociale.

Nous devons penser aux exclus et, en liaison avec la loi Aubry sur l'exclusion, trouver les modalités pratiques adaptées d'accès aux loisirs et aux vacances des plus démunis. C'est aussi cela la solidarité au quotidien.

Enfin, il est maintenant acquis que le tourisme démocratique accessible à tous est un puissant démultiplicateur économique. Il est urgent de se pencher, comme vous le faites, sur le tourisme social en pleine mutation. Ne faut-il pas étudier sérieusement l'abaissement de la TVA pour la restauration...

M. Loïc Bouvard.

Ah !

M. Jean-Pierre Dufau.

... sous réserve de contreparties en matière de créations d'emplois, de prix à la consommation, de conventions collectives et de formation ? Il nous reste beaucoup de pistes à explorer.

M. Michel Bouvard.

Nous commençons enfin à être entendus !

M. Jean-Pierre Dufau.

Il faut organiser les assises du tourisme de l'an 2000 pour parfaire la dimension sociale et accroître la dimension économique de ce secteur d'activités.

Pour l'heure, madame la secrétaire d'Etat, persuadé de votre volonté de prendre en compte les propositions constructives de la représentation nationale, c'est avec conviction et enthousiasme que le groupe socialiste soutiendra votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Couve.

M. Jean-Michel Couve.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vouloir étendre le bénéfice des chèques-vacances aux marins-pêcheurs, aux dockers et aux salariés des PME-PMI est certainement une bonne idée.

Mme Nicole Bricq.

Tout à fait !

M. Jean-Michel Couve.

Mais je crains que le texte qui sera issu de cette lecture à l'Assemblée ne réponde pas à notre attente. Cette attente, vous la connaissez. Nous l'avions exprimée dans la proposition de loi déposée en mai 1998 par Bernard Pons et le groupe RPR, sur votre demande, madame la secrétaire d'Etat, votre majorité n'avait pas hésité pas à la rejeter sans permettre qu'un véritable débat s'instaure à son sujet.

Mme Nicole Bricq.

Il a lieu aujourd'hui !

M. Jean-Michel Couve.

Le projet que vous avez déposé, un an après, en première lecture au Sénat a été largement et justement remanié. Les propositions de nos collègues sénateurs ouvrent des perspectives de meilleure équité et de plus grande solidarité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste), mais votre majorité amendera certainement leur texte pour en revenir à vos orientations de départ,...

Mme Nicole Bricq.

Ça c'est sûr !

M. Jean-Michel Couve.

... ce qui conduira à une regrettable limitation de l'extension du chèque-vacances.

Il est vrai qu'à la lecture de l'ordonnance de 1982, à la lecture de votre projet de loi et des amendements proposés par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, on a bien du mal à s'y retrouver pour saisir quels seront, au bout du compte, les bénéficiaires effectifs du chèque-vacances. D'ailleurs, je ne trouve pas très loyal d'entretenir la confusion à ce sujet.


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Disons qu'il y aura d'abord tous ceux qui en seront exclus : en premier lieu les non-salariés. Vous vous fondez sur le principe selon lequel - je vous cite - « l'organisme abondeur ne peut se confondre avec le bénéficiaire ». Je rappelle que nombreux sont les artisans, commerçants, professionnels libéraux constitués en société et qu'on ne peut confondre juridiquement ces personnes physiques avec leurs sociétés personnes morales. Dans leur cas, l'abondeur ne serait pas le bénéficiaire. Et pourtant, vous ne les avez pas retenues.

M. Bernard Pons.

C'est tout à fait exact !

M. Michel Bouvard.

Très juste !

M. Jean-Michel Couve.

Au total, si l'on tient compte des agriculteurs, c'est deux millions de Français qui seront ainsi interdits de chèques-vacances. Pourtant, pour ne parler que d'eux, les artisans et les commerçants ont rarement un train de vie de grands patrons. Ils n'ont pas droit, eux, à cinq semaines de vacances. Et si leur renvenu moyen est estimé à 120 000 francs par an, beaucoup d'entre eux ne gagnent pas plus que le SMIC.

Seront exclus aussi, alors qu'ils en étaient bénéficiaires jusqu'à présent, les 40 à 50 000 salariés dont le revenu fiscal dépassera le plafond que vous voulez imposer.

Notre rapporteur a qualifié cette exclusion de « mesure de justice sociale ». Je laisse aux exclus en question le soin d'en juger !

M. Bernard Pons.

Très bien !

M. Jean-Michel Couve.

Parmi ceux auxquels le texte devrait accorder le bénéfice des chèques-vacances, il faudra bien différencier ceux qui en bénéficieront réellement parce qu'ils y seront aidés - les fonctionnaires et les salariés des grandes entreprises - mais ils le sont déjà, et ceux pour lesquels cette faculté sera plus problématique car il leur sera difficile d'y accéder du fait des conditions trop contraignantes que vous imposez. Je veux parler en particulier des salariés des PME-PMI auxquels vous prétendez ouvrir généreusement cette possibilité, alors que vous limitez de façon excessive le plafond de ressources et que vous imposez aux responsables de ces petites entreprises des contraintes telles qu'ils hésiteront ou ne pourront y souscrire. A ce sujet, vous annoncez à grand renfort médiatique que ces nouvelles mesures s'adresseront aux 7,5 millions de salariés de PME-PMI en même temps que vous reconnaissez qu'elles ne viseront que 150 000 salariés supplémentaires par an, ce qui ne représentera jamais que 2 % d'entre eux, madame la secrétaire d'Etat.

On est bien loin du compte et c'est d'autant plus dommageable qu'on connaît bien les retombées des chèquesvacances en termes d'aide aux équipements sociaux, de consommation et de création d'emplois.

Nous savons que le million d'attributaires actuel utilise pour 3,7 milliards de francs de coupons, ce qui équivaut à une dépense globale de plus de 10 milliards de francs.

Nous savons aussi qu'une étude réalisée en 1996 par l'OFCE démontre qu'un déplacement de 9 milliards de francs de la consommation des ménages vers les services est susceptible d'entraîner la création de 8 000 emplois nouveaux en deux ans. Cela signifie que si vous permettiez le doublement en deux ans du nombre d'attributaires à 2 millions, vous mettriez le secteur du tourisme en mesure de créer ces 8 000 emplois, chiffre que je ne peux m'empêcher de comparer aux 6 000 emplois-jeunes que vous voulez instaurer d'ici au 31 décembre 1999 moyennant une contribution de l'Etat de 562 millions de francs par an soit, chaque année, une fois et demie le budget total de votre ministère.

Je ne vois pas là beaucoup de cohérence dans votre politique, madame la secrétaire d'Etat !

M. Maxime Gremetz.

Votre cohérence est très libérale !

M. Jean-Michel Couve.

Pas du tout ! C'est du bon sens, tout simplement ! Contraints aussi, jusqu'à ne pas pouvoir en bénéficier, les retraités dont votre majorité réaffirme déjà qu'ils seront inscrits parmi les bénéficiaires, alors que de fait vous ne donnerez aucun moyen nouveau aux caisses de retraite pour pouvoir assumer cette charge. Et pourtant, voilà bien une population nombreuse, disponible, dont la grande majorité ne dispose que d'un faible pouvoir d'achat, et qui mériterait, pour le moins, de pouvoir, elle aussi, accéder aux vacances.

Sur tous ces points, il est clair qu'il y aura loin de votre effet d'annonce aux réalités du terrain que vivront ces salariés, ces non-salariés, ces retraités, ces responsables de PME qui ne manqueront pas d'être déçus, comme nous.

Concernant les conditions de ressources, vous avez fait le choix de remplacer la cotisation d'impôt par un revenu fiscal de référence. Pourquoi pas ? En revanche, vous limitez les revenus des foyers fiscaux à 86 840 francs pour la première part de quotient familial au motif que vous voulez circonscrire l'action de solidarité aux revenus les plus modestes. J'ai souvenir que, lors de la présentation du projet d'extension des chèques-vacances par Bernard P ons au conseil d'administration de l'ANCV du 19 novembre 1996, l'administrateur de la CGT avait déclaré qu'elle regretterait que le plafond d'imposition soit maintenu, qu'elle souhaitait un relèvement significatif, que s'il était conservé de nombreux fonctionnaires n'auraient plus accès aux chèques-vacances.

M. Michel Bouvard.

C'est dans le procès-verbal !

M. Jean-Michel Couve.

Elle estimait que le plafond fiscal constituait un véritable blocage, sentiment qui était alors partagé par l'ensemble des organisations syndicales.

Je rappelle aussi que c'est Pierre Bérégovoy lui-même, et non la droite, et non les libéraux, qui a augmenté le plafond de cotisation de 3 000 à 10 000 francs et que, de façon justifiée, les organisations syndicales demandent sans cesse son relèvement. Pour ne pas laisser des foyers à revenus, de fait modestes, au bord de la route, il aurait été indispensable et raisonnable de doubler le montant de ce plafond.

C oncernant le plafond de la contribution de l'employeur donnant droit à l'exonération fiscale, rien de neuf ! Il reste fixé à 1 610 francs par an et par salarié. Il aurait fallu tout à la fois le relever et le majorer significativement en fonction du nombre d'enfants à charge.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Jean-Michel Couve.

A propos des allégements de charges sociales au bénéfice de l'employeur, en sont exclues la CSG et la CRDS. L'exonération est limitée à 2 039 francs par salarié et par an. Comment prétendre qu'un allégement aussi minime puisse véritablement inciter les petites et très petites entreprises, handicapées par les lourdes charges qui pèsent sur elles ? La réalité est que votre projet ne concrétise pas l'ambition que vous voulez afficher. Il ne témoignera pas de l'avancée sociale que vous annoncez. En fait, il s'agit d'une modeste retouche à l'ordonnance de 1982...

M. Jacques Blanc.

Tout à fait !

M. Jean-Michel Couve.

... qui n'ouvre pas significativement sur plus de solidarité et d'équité contrairement au texte que nous avions déposé en mai 1998. Je dirai même


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que ce texte est discriminatoire en ce sens que vous imposez aux circuits de distribution « entreprises » des conditions d'attribution trop contraignantes et un régime fiscal et social bien peu incitatif alors que, pour le circuit des organismes sociaux, il n'existe aucune condition de ressources et que les charges sociales sont très largement exonérées, y compris la CSG et la CRDS.

M. Léonce Deprez.

Deux poids, deux mesures !

M. Jean-Michel Couve.

Véritable injustice, vous aggravez encore cette disparité en introduisant pour les PME un nouveau circuit de distribution qu'elles ne pourront pas emprunter parce que trop complexe, trop engageant et, pour tout dire, inadapté aux nécessités et aux moyens de l'entreprise.

Inéquitable aussi parce que vous ne prenez pas assez en compte les familles, alors que les charges de vacances augmentent avec le nombre d'enfants, on le sait bien. Et que dire de votre exclusion quasi dogmatique du dispositif des classes moyennes modestes ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Qu'est-ce que c'est ?

M.Jean-Michel Couve.

Demandez aux Français concernés ! Ils se reconnaîtront.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Que dire donc de votre exclusion du dispositif des classes moyennes modestes, sinon que la vraie raison, du moins la seule plausible, serait encore une fois que Bercy veillerait ? Je dirai enfin que votre projet est peu innovant. En effet, vous auriez pu profiter de cette opportunité pour redéfinir le fonctionnement de l'Agence nationale pour les chèques-vacances en lui ouvrant, par exemple, la possibilité de sous-traiter la distribution des chèques-vacances comme l'a dit Léonce Deprez. Ils auraient pu ainsi être beaucoup plus largement diffusés.

Au total, nous aurons donc perdu une année à attendre votre texte. Les amendements de votre majorité n'y changeront rien. Vous n'aurez pas profité de la croissance que connaît aujourd'hui notre pays pour renforcer la solidarité entre les Français. A ce titre, ce texte restera pour nous celui des occasions perdues. (Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Patrick Malavieille.

M. Patrick Malavieille.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il aura fallu des décennies de lutte pour que soit enfin reconnu aux salariés le droit aux vacances. Ce droit a pu s'inscrire dans les faits parce qu'étaient mis en place, grâce à la persévérance du monde du travail, des moyens économiques et sociaux permettant de l'exercer, comme les congés payés et la possibilité d'obtenir un billet de chemin de fer à tarif réduit.

Par la suite, la création des comités d'entreprise a permis d'initier une politique sociale dans l'entreprise impliquant les employeurs et les salariés. Les comités d'entreprise, les syndicats, les associations, ont pris alors à bras-le-corps la dimension sociale du droit aux vacances et, par leurs actions, ont contribué à faire vivre ce dernier.

Ces avancées, qui ont permis de pallier de trop faibles rémunérations, ont été décisives dans la conquête du temps libre. Elles ont marqué en profondeur les conditions de vie des Français et stimulé l'économie générale du pays. Aujourd'hui, l'industrie du tourisme emploie 7 % de la population active et représente 12 % de la consommation.

L'histoire du mouvement ouvrier nous a appris et souvent démontré que l'octroi de droits nouveaux était toujours source de progrès social et avait des retombées positives sur l'économie nationale. Le droit aux vacances en est une démonstration supplémentaire.

La France est la première destination touristique avec 70 millions de touristes. L'industrie du tourisme occupe une place importante dans l'économie nationale, puisque c'est le premier poste excédentaire, avec plus de 70 milliards de francs.

Pour autant, les inégalités face au droit aux vacances restent une préoccupation. Déjà, en 1982, un Français sur deux ne partait pas en vacances. Les plus défavorisés, ceux dont les conditions de travail ou de vie quotidienne étaient les plus difficiles, ne partaient pas ou partaient peu, et choisissaient le moins facilement le lieu et les conditions de leurs vacances. L'ordonnance de 1982 s'est attaquée à ce problème en créant les chèques-vacances.

Etait alors franchie une nouvelle étape de l'histoire du droit aux vacances.

Le chèque-vacances est, en effet, un atout. C'est un moyen supplémentaire et souple, une nouvelle façon de concevoir l'organisation des vacances dans le temps et dans l'espace. Sa souplesse permet des séjours de longue ou courte durée en hôtel, en camping, en gîte rural labellisé, des sorties au restaurant, voire le paiement des péages d'autoroute ou d'activités sportives. Il permet aussi de relancer et d'élargir le tourisme social et associatif, qui représente 75 000 emplois et 60 000 places d'hébergement.

En outre, autre aspect original, le chèque-vacances a une deuxième vie sociale, dans la mesure où on peut utiliser les chèques périmés pour préserver et valoriser le patrimoine touristique ou alimenter des fonds destinés à d'autres catégories de personnes défavorisées.

Grâce aux missions sociales de l'établissement public, l'ANCV, en partenariat avec le ministère, les excédents d'exercice ont été distribués sous forme de subventions aux équipements de tourisme et de loisirs à vocation sociale. En 1996, 22,8 millions de francs ont été attribués aux équipements et 1,2 million de francs aux actions de solidarité.

L'ordonnance de 1982 prévoit, dans le cadre de cette solidarité, que la contre-valeur des chèques-vacances périmés soit affectée à des catégories sociales défavorisées.

Ainsi, en 1997, une dotation de 7,9 millions de francs a été attribuée sous forme de bourses vacances permettant à 60 000 personnes supplémentaires de partir en vacances.

Le chèque-vacances constitue donc aujourd'hui un formidable outil de promotion du droit aux vacances ; il a permis à nombre d'exclus d'y avoir accès.

Il n'en demeure pas moins qu'à l'aube du troisième millénaire, alors que notre pays figure au rang des plus grandes puissances mondiales et que des richesses colossales sont produites tous les jours, un Français sur cinq ne dispose pas de moyens suffisants pour partir en vacances ! Il s'agit là d'un problème de société, qui dépasse de loin le cadre du texte dont nous avons à débattre aujourd'hui. Une telle situation est tout à fait inadmissible, d'autant plus que, voilà soixante ans, les salariés luttaient déjà pour un véritable droit aux vacances. En effet, dixsept ans après la signature de l'ordonnance de 1982,


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40 % des Français ne partent toujours pas en vacances, dont près de 20 % pour des raisons financières. Bien sûr, la dégradation de la situation de l'emploi ces dernières années pèse fortement sur ces chiffres.

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui a l'ambition de s'attaquer à ce problème. Il se veut être une conception du tourisme qui s'appuie sur la mise en valeur économique du patrimoine, sur la volonté de répondre à une aspiration des citoyens et sur le développement de l'industrie du tourisme. Un franc de chèque-vacances génère trois francs de consommation dans le secteur touristique.

M. Michel Bouvard.

Très juste !

M. Patrick Malavieille.

Rappelons que le dispositif actuel est applicable dans les grandes entreprises et les organismes publics. L'objectif du projet de loi est donc de permettre aux salariés des entreprises de moins de cinquante salariés d'accéder, eux aussi, aux chèques-vacances.

Cela concerne, dans les faits, 7,5 millions de salariés.

Pour privilégier les revenus modestes, il maintient le principe d'un plafond et prend en compte le revenu fiscal de référence et non l'impôt payé.

Il reste fidèle à l'esprit de l'ordonnance qui demande une épargne du salarié, accompagnée d'une contribution de l'employeur allant de 20 à 80 %. L'abondement de l'employeur doit obligatoirement être plus important pour les salaires les plus faibles.

Deux principales mesures forment la charpente du texte : l'ouverture d'une voie nouvelle de distribution des chèques-vacances à travers les organismes paritaires de gestion d'activité sociale et l'exonération des cotisations sociales salariales sur la contribution de l'employeur.

L'exonération proposée par le projet est portée à 30 % du SMIC, soit le double du montant actuel. Elle se veut une mesure incitative pour ce secteur particulier des petites et moyennes entreprises.

En aucun cas le chèque-vacances ne saurait être un complément de salaire, ce qui justifie le plafonnement de l'exonération. Le chèque-vacances est l'occasion d'une négociation entre les salariés et l'employeur. Et nous percevons tous combien le chèque-vacances peut favoriser le dialogue social dans ce secteur où la négociation salariale et sociale n'existe pas ou peu. D'où le rôle important des institutions représentatives du personnel, qui doit absolument être préservé.

M. Maxime Gremetz.

Très bien !

M. Patrick Malavieille.

Le projet propose également d'étendre le recours au mandatement tel qu'il a été défini dans la loi sur les trente-cinq heures.

Le texte que nous examinons à présent a déjà été discuté et amendé en première lecture au Sénat. Or la majorité sénatoriale a bouleversé l'économie générale du projet.

Le texte du Sénat ne réduit pas les inégalités devant les vacances ; au contraire, il fait du chèque-vacances un produit commercial ! C'est pourquoi les députés communistes ont travaillé en commission à restaurer le texte dans sa version originelle. En outre, ils ont cherché à l'enrichir sur quelques points tout en respectant son esprit.

Nous avons amendé le texte pour appeler l'attention du Gouvernement sur certaines catégories de salariés ou de salariés privés d'emploi. Ces catégories subissent les conséquences des plans sociaux, du développement de la précarité et se retrouvent exclus du bénéfice des chèquesvacances. Nous pensons notamment aux préretraités, aux bénéficiaires d'emplois-jeunes et de CEC. Mon ami, Maxime Gremetz, dans son intervention sur l'article 1er , reviendra sur cette question.

Un autre problème se pose, c'est celui de l'information des salariés.

Nous nous réjouissons que la commission ait adopté l'amendement du groupe communiste qui vise à ce que toutes les mesures nécessaires soient prises pour permettre une large diffusion, au sein des entreprises, des dispositions prévues par la présente loi. Nous suggérons d'obliger l'employeur à informer les salariés, initiative qui favoriserait l'ouverture de négociations pour la mise en place du chèque-vacances. Il en va, me semble-t-il, de son devenir et de sa promotion.

Enfin, la France a innové en matière de chèquevacances. Aujourd'hui, d'autres pays européens envisagent de mettre en place un système équivalant au nôtre.

Le chèque-vacances est donc bel et bien un outil social qui s'inscrit tout à fait dans la voie de la construction d'une Europe sociale. Une ouverture plus large à l'Europe mérite donc d'être encouragée. C'est tout le sens de l'amendement que le groupe communiste a déposé en commission et qui a été retenu.

En conclusion, madame la secrétaire d'Etat, je voudrais souligner que les députés communistes et partenaires partagent pleinement votre démarche. A l'aube de l'an 2000, les inégalités en matière de droit aux vacances doivent être fermement combattues.

Nous entrons de ce point de vue aussi dans une ère nouvelle, où il faut construire un temps maîtrisé par les salariés, où des droits nouveaux permettront une harmonie entre temps de travail, temps de formation et temps libre. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est un débat qui aurait pu être passionnant et autour duquel on aurait pu se rassembler.

M. Maxime Gremetz.

C'est un peu compliqué, avec vous !

M. Jacques Blanc.

Mais il paraît un peu « court » tant la disproportion est grande entre ce qu'on pouvait espérer et ce que, en fin de compte, on nous propose. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Tout le monde pouvait se rassembler autour d'un tel texte. Car nous avons tous, à un moment donné, proposé une réponse de ce type pour essayer de réduire les inégalités d'accès aux vacances.

A u mois de janvier 1977, le Président de la R épublique de l'époque, Valéry Giscard d'Estaing, m'avait confié la présidence d'une commission chargée de faire des propositions.

M. Léonce Deprez.

C'est exact !

M. Jacques Blanc.

Et le rapport que j'avais remis le 10 août 1977 au Président de la République proposait le

« titre-vacances ».

M. Maxime Gremetz.

Eh bien ! Il vous a fallu du temps !


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M. Jacques Blanc.

Je vous ferai grâce de la lecture du texte. On y retrouve un peu tout ce qu'on a entendu.

C'est devenu ensuite le chèque-vacances, mais le principe était le même.

L'essentiel était qu'il associait l'effort du bénéficiaire, à travers une épargne volontairement mise en oeuvre, à l'effort des employeurs ou des organismes sociaux caisses de retraite, comités d'entreprise - chargés en quelque sorte de bonifier cette épargne, et à l'effort des grandes caisses, voulu par l'Etat, à travers l'exonération de charges pesant sur l'apport des employeurs.

La grande idée de ma proposition était à la fois de favoriser le départ de ceux qui ne pouvaient pas partir et de créer un instrument de liberté. Je m'en explique, comme je m'en étais expliqué auprès de l'ensemble des grandes organisations touristiques : il s'agissait de passer d'un système un peu contraignant à un système permettant d'exercer saliberté.

Les systèmes précédents, dont personne ne conteste d'ailleurs la qualité, exigeaient que l'on choisisse, comme lieu de vacances, tel village de vacances de tel comité d'entreprise, VVF ou autre. Désormais, le bénéficiaire disposait d'un véritable choix.

Je souhaitais, pour ma part, que ces familles défavorisées puissent accéder à des gîtes ruraux ou à la petite hôtellerie de campagne, afin de favoriser le développement du tourisme en espace rural, là où il n'y avait pas d'installations d'accueil collectif.

Cet aspect était important. Je tenais à l'évoquer, car je n'ai rien entendu à ce propos. Et je regrette que, dans un texte comme celui-ci, on n'ait pas abordé au fond le problème du tourisme social. Le passage de l'aide à la pierre à l'aide à la personne se situe un peu dans ce mouvement, et cela ne condamne pas la pierre.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Non.

M. Jacques Blanc.

Je regrette aussi que l'on n'ait pas envisagé de moduler l'importance de l'aide en fonction de la période d'utilisation.

Je regrette enfin que l'on n'ait pas considéré que ce t exte pouvait être l'occasion de mieux apprécier l'ensemble du phénomène touristique en France ou en Europe.

Par ailleurs, je trouve injustes les critiques qui ont été apportées au travail du Sénat. Je veux, ici, rendre un hommage appuyé au rapporteur, M. Paul Blanc, sénateur des Pyrénées-Orientales, et à l'action qu'il a menée. Je ne comprends pas que notre rapporteur, M. Terrier, ait pu écrire que le texte de loi avait été dénaturé par le Séna t. Que le ministre, qui est contrôlé par Bercy, bloque un petit peu, on en a l'habitude. Tous les gouvernements l'ont vécu. Mais, les parlementaires, eux, disposent de plus de liberté ! Vous écrivez, monsieur le rapporteur, que le Sénat, en étendant l'exonération des charges sociales sur la contribution de l'employeur à l'ensemble des entreprises, dénature le texte. Or il ne le dénature pas, il étend son champ d'application et il permet d'avoir une vision plus simple.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Il enlève au chèquevacances son objet social !

M. Jacques Blanc.

Vous savez, en effet, que, dans les grandes entreprises, l'exonération passe par les cotisations au comité d'entreprise...

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Ce n'est pas la même philosophie !

M. Jacques Blanc.

Ce n'est pas une dénaturation que d'étendre à toutes les entreprises la possibilité d'exonérer de charges la contribution de l'employeur. Tous ceux qui m'écoutent, objectivement, me semblent devoir y souscrire.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Vous lui ôtez son caractère social !

M. Jacques Blanc.

Mais non. Au lieu de faire bénéficier de cette mesure telle entreprise ou telle autre, on l'étend à toutes les entreprises et à tous les salariés. Je ne vois pas là une dénaturation...

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Mais si !

M. Jacques Blanc.

... mais plutôt une extension.

Le doublement du niveau des plafonds des ressources nécessaires pour bénéficier des chèques-vacances constituerait-il lui aussi une dénaturation ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Bien sûr !

M. Jacques Blanc.

Notre collègue a souligné tout à l'heure le fait que, malheureusement, il y avait des couches « moyennes modestes ».

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Les couches « moyennement moyennes » !

M. Jacques Blanc.

Or l'idéologie vous empêche de reconnaître que ces couches moyennes modestes...

Mme Muguette Jacquaint.

Expliquez-nous ce que sont les couches « moyennes modestes » !

M. Jacques Blanc.

... doivent pouvoir, elles aussi, bénéf icier d'une chance supplémentaire de choisir leurs vacances ! Et c'est peut-être là que nos conceptions divergent. (« Tout à fait ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Maxime Gremetz.

Si c'était seulement là !

M. Jacques Blanc.

C'est à la fois un acte social fort et un acte de liberté. Je veux, quant à moi, que la liberté de choisir ses vacances et ses loisirs soit renforcée pour tout le monde. Vous trouvez que cela constitue une dénaturation. Pour moi, c'est vous qui proposez un recul par rapport au texte du Sénat ! Quant à l'ouverture des chèques-vacances aux nonsalariés, elle constituait une chance fabuleuse. Les organismes sociaux pouvaient se substituer à l'employeur.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Ils peuvent déjà le faire !

M. Jacques Blanc.

Alors, pourquoi ne pas conserver le texte du Sénat ? Il était bien fait.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

L'ordonnance le prévoit !

M. Jacques Blanc.

Enfin, la modification des procédures de concertation avec les institutions représentatives du personnel représentait aussi une simplification. Vous savez comme moi que le dialogue est favorisé par la simplification. Arrêtons de construire des usines à gaz qui ne fonctionnent jamais. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste.)

On laisse espérer beaucoup de choses. Et puis après, rien ne se fait !

M. Maxime Gremetz.

Une usine à gaz, vous savez ce que c'est ! Avec le Front national dans votre région...

M. Jacques Blanc.

Je suis ici, monsieur le député, un des seuls élus au premier tour. Et je ne dois mon élection à personne d'autre que mes électeurs ! (Exclamations sur


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Alors qu'on sait bien à qui la majorité doit la sienne ! Alors, je vous en prie, de ce côté, pas de leçon !

M. Patrick Malavieille.

Vous avez trompé vos électeurs !

M. Jacques Blanc.

Pour notre part, madame la secrétaire d'Etat, nous aurions préféré une approche plus générale. Nous espérions d'ailleurs que vous reprendriez le texte préparé par votre prédécesseur M. Pons - malheur à la dissolution ! -...

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Ce n'est pas notre faute !

M. Maxime Gremetz.

On n'y est pour rien !

M. Jacques Blanc.

... ou encore la proposition de loi qu'il avait ensuite déposée ici même. Vous aviez annoncé, c'est vrai, que vous referiez une proposition en ce sens.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

C'est le cas.

M. Jacques Blanc.

Dont acte. Mais je trouve quand même très dommage que vous nous soumettiez un autre texte.

En réalité, c'est le règne de l'hypocrisie.

M. Patrick Malavieille.

Vous êtes orfèvre !

M. Jacques Blanc.

Vous avez des moyens limités et nous le savons. Si vous aviez reconnu que telle était la raison pour laquelle vous ne pouviez pas suivre le Sénat sur tel ou tel point, on aurait pu comprendre. Mais vous nous dites que nous dénaturons le texte, ce qui n'est pas vrai.

J'espère néanmoins que le débat permettra d'apporter des réponses positives à nos préoccupations. Nous avons tous la même volonté d'action sociale et de réduction des inégalités : personne n'a le monopole du coeur.

M. Maxime Gremetz, Arrêtez ! Vous et les valeurs, ça fait deux !

M. Jacques Blanc.

Mais, pour notre part, nous avons en plus la volonté d'instaurer davantage de liberté, d'une part en faisant des chèques-vacances, comme c'est écrit dans le rapport, un instrument facilitant l'étalement des vacances dans le temps, au moyen d'une valorisation de l'aide en fonction de la période choisie ; d'autre part en ouvrant la négociation à l'ensemble des bénéficiaires, c'est-à-dire non seulement aux salariés, mais aussi aux structures d'accueil.

Cette démarche beaucoup plus forte, associant action sociale et liberté, devrait aussi permettre d'étendre l'utilisation de cet outil aux loisirs, qui sont partie intégrante des vacances. Moi, je vais même proposer la création d'un chèque-culture. Vous voyez que je reste dans la ligne que je suis depuis 1977.

Ce texte, au fond, est une occasion ratée. Vous auriez pu en profiter pour aller beaucoup plus loin. Tout n'est pas mauvais, madame la secrétaire d'Etat, dans votre projet de loi, mais le Sénat l'avait considérablement amélioré.

Je souhaiterais que l'Assemblée poursuive encore cette amélioration...

M. Maxime Gremetz.

Un enterrement de première classe, oui !

M. Jacques Blanc.

... dans le seul objectif de donner plus de chances à ceux qui en ont réellement besoin de prendre des vacances, d'accéder aux loisirs et aussi de s'ouvrir sur l'Europe, comme l'a dit notre collègue du Gard.

M. le président.

La parole est à M. André Capet.

M. André Capet.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Gouvernement a pris de nombreux engagements pour garantir l'accès du plus grand nombre aux vacances. Il a affirmé clairement que l'accès de tous aux vacances constitue un objectif national, auquel doivent contribuer l'Etat, le monde associatif, les collectivités territoriales et les entreprises.

C'est dans cette perspective, madame la secrétaire d'Etat, que vous avez déposé, dès octobre 1997, ce projet de loi visant à étendre le chèque-vacances aux salariés des petites et moyennes entreprises.

Ce projet s'inscrit dans une politique globale du Gouvernement, soutenu par sa majorité parlementaire, dont l'objet est d'assurer le droit aux vacances pour tous. Ainsi, dans le budget de 1999, plusieurs millions de francs supplémentaires sont déjà consacrés au tourisme associatif et contribuent largement à permettre aux personnes en situation d'exclusion de bénéficier de ce droit.

Dans le même esprit, vous avez développé les outils d'aide au départ, via la « bourse solidarité vacances » qui a pour but de mobiliser les moyens d'accueil et de transport en faveur du départ des plus défavorisés de nos concitoyens. Rappelons que la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, votée en juillet dernier, affirme elle aussi clairement que « l'accès de tous aux vacances est un objectif national auquel doivent contribuer tant l'Etat que le monde associatif, les collectivités territoriales et les entreprises ».

Le projet de loi modifiant l'ordonnance du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances se situe dans le sillage de la politique sociale de 1936, symbolisée en particulier par le droit aux congés payés.

Il s'agit désormais de consolider et d'élargir l'accès aux vacances pour tous. Ce texte va y contribuer. Et il ne pourra que susciter de nouvelles initiatives pour un tourisme social dont nous aurons l'occasion, madame la secrétaire d'Etat, de discuter largement au niveau national, à l'occasion des états généraux que vous allez bientôt organiser.

Les vacances, comme l'accès aux loisirs, constituent un facteur décisif et prioritaire de l'équilibre social, un besoin ressenti comme essentiel, surtout par ceux dont les conditions de vie sont aujourd'hui déstructurées. Elles sont un élément de rapprochement, de reconstruction de la vie sociale et familiale. L'accès aux vacances, à la culture et a ux loisirs est indéniablement, dans notre société moderne un facteur d'épanouissement, de repositionnement social, voire d'insertion. Mais surtout, rappelonsnous que les vacances doivent être un droit pour tous les travailleurs, comme pour chacun d'entre nous.

Aujourd'hui, vous venez de le souligner, plus de 40 % des Français ne partent pas en vacances et 17 % y renoncent uniquement pour des raisons financières. Dans ces conditions, le droit aux vacances, conquis en 1936, est bien loin d'être une réalité pour tous. Le débat que nous engageons nous permet d'aborder cette question de manière rationnelle.

C'est dans cet esprit et animée par une volonté identique que l'ANCV, créée en 1982 par le gouvernement de Pierre Mauroy, a donné à l'Etat un véritable outil de service public et de régulation sociale, dont la mission principale est de favoriser le départ des salariés aux revenus les plus modestes, ainsi que de leur famille et des personnes à leur charge. En 1998, plus d'un million de salariés ont été attributaires du chèque-vacances, plus de quatre millions de personnes en ont ainsi bénéficié.


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Permettez-moi, madame la secrétaire d'Etat, de rappeler ici la nécessité de donner la plus large application à la faculté ouverte en 1982 de favoriser le départ en vacances des plus démunis. L'agence étend sa mission à des familles précarisées et contribue souvent largement à financer le premier départ en vacances de familles et de jeunes en difficulté ou de personnes handicapées. Elle peut soutenir des actions sociales très ciblées car elle a réussi à constituer un fonds spécifique grâce à la contrevaleur des chèques-vacances périmés et non utilisés. Elle attribue des bourses-vacances à de nombreux organismes caritatifs : ATD Quart-Monde, le Secours populaire, le Secours catholique, Solidarité laïque et bien d'autres associations que je n'ai pas le temps de citer mais qui jouent un rôle éminent dans la réinsertion des populations en situation d'exclusion, voire de déstructuration.

L'extension du chèque-vacances à de nouveaux bénéficiaires va permettre d'accroître le développement d'équipements de tourisme à vocation sociale, y compris la petite hôtellerie familiale et rurale et les campings. Dans ces conditions, l'utilisation du chèque-vacances aura un impact économique encore plus fort et contribuera, par là même, à la création d'emplois.

Depuis leur création, les chèques-vacances ont permis un développement diversifié et durable du tourisme français en favorisant la consommation touristique, en permettant de mieux utiliser les équipements existants, en offrant tout un éventail de prestations afin que les bénéficiaires puissent avoir une liberté de choix. L'agence est un outil économique au service du social. Les trois milliards de francs de chèques-vacances utilisés en 1997 ont généré 10 milliards de francs de consommation touristique.

Le poids du chèque-vacances se mesure à l'aune de quelques autres chiffres : 3,7 milliards de francs de chèque-vacances émis en 1998, un réseau de près de 11 000 organismes prescripteurs et un réseau de plus de 35 000 prestataires agréés, soit 130 000 points d'accueil dans tous les secteurs d'activité liés au tourisme et aux loisirs.

Le projet de loi prévoit en outre l'ouverture d'une voie nouvelle de distribution des chèques-vacances, à travers les organismes paritaires de gestion d'activité sociale, et une exonération de charges sociales sur la contribution de l'employeur aux chèques-vacances en faveur des entreprises de moins de 50 salariés. Cette mesure va aussi dans le sens d'une accentuation de la concertation entre les salariés et les employeurs, et ses effets seront très positifs à bien des égards, ne serait-ce que pour introduire un dialogue social dans des lieux non structurés par le monde syndical. Susciter le dialogue dans les PME-PMI où le syndicalisme n'a pu pénétrer devrait permettre aux employeurs de prendre conscience de la réalité sociale de leur entreprise.

Mme Nicole Bricq.

Très bien !

M. Jean-Michel Couve.

Vive la lutte des classes !

M. André Capet.

Les échanges qui auront lieu à cette occasion seront extrêmement fructueux.

La France va être l'initiatrice, à l'échelon national, d'un progrès social qui pourra être transposé à l'échelle européenne dans le cadre de la construction de l'Europe sociale. L'ouverture du chèque-vacances à l'Europe est aujourd'hui indispensable, afin de constituer un tronc commun pour le développement du tourisme social, levier d'une intégration européenne qui ne peut se réaliser qu'au travers de l'harmonisation sociale. C'est pourquoi l'utilisation du chèque-vacances au sein de l'Union l'européenne et en particulier de la zone euro peut être un élément de cohésion sociale ; elle permettrait aux salariés à faibles revenus de voyager au sein de l'Union et favoriserait ainsi le rapprochement avec les salariés des autres pays et le développement du sentiment de citoyenneté européenne.

Les vacances pour tous sont un enjeu fondamental des années futures, sur le plan social et économique, mais aussi pour l'évolution de la société vers plus de cohésion, d'équilibre et d'équité. C'est bien la notion d'équilibre social qui est au coeur du projet de loi. Le Sénat, en première lecture, a profondément bouleversé l'économie générale du texte. Il convient de lui redonner sa dimension sociale.

Au-delà, quelques aménagements peuvent encore être apportés au dispositif du Gouvernement. Ainsi conviendrait-il d'étendre le bénéfice des chèques-vacances aux agents non titulaires de la fonction publique, ainsi qu'aux CES, CEC et emplois-jeunes. Notre camarade Gremetz abordera cette question à l'article 1er

Pour conclure, madame la secrétaire d'Etat, je vous ferai une suggestion. Pour l'extension du chèque-vacances à laquelle nous procédons, vous avez judicieusement prévu un plafond de ressources qui permet d'en réserver le bénéfice aux familles les plus défavorisées ou en déstructuration familiale, celles qui ont le plus besoin d'être aidées. Or la Caisse nationale d'allocations familiales a engagé une réflexion, car elle s'est rendu compte que l'aide à la pierre, à laquelle faisait allusion Jacques Blanc, ne correspondait plus au profil des familles dont elle a la responsabilité. Elle recherche donc une nouvelle orientation plus conforme à la justice sociale pour l'utilisation de ses bons-vacances.

Je vous suggère donc, madame la secrétaire d'Etat, de lancer très rapidement après le vote de cette loi une opération expérimentale au niveau d'une région ou d'un département. En tant que vice-président régional chargé du tourisme, je présente d'ailleurs la candidature du Pasde-Calais ou du Nord. Compte tenu de l'échec auquel sont actuellement confrontés les bons-vacances tels qu'ils ont été conçus à la suite de la loi de 1936, il s'agirait de les affecter à la constitution de l'épargne des familles défavorisées, bref de les orienter désormais vers l'épargne.

Puisque vous menez avec elle une politique commune en faveur de ces familles, la CNAF participerait certainement très volontiers à cette expérimentation. Cette nouvelle forme de contribution à l'épargne des familles les plus démunies viendrait compléter l'effort que vous avez entrepris pour développer le tourisme à caractère social.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'ensemble des professionnels du tourisme et l'ensemble des élus partagent depuis plusieurs années le souci, dans un marché aussi concurrentiel que celui du tourisme, d'élargir au-delà de la fréquentation étrangère la base de la clientèle par une meilleure mobilisation de la clientèle française, dont le taux de départ en vacances, même s'il est plus élevé que dans nombre de pays développés, reste cependant à améliorer. Un tiers environ des Français ne partent pas en vacances, dont la moitié pour des raisons économiques.

Le chèque-vacances, depuis sa création en 1982, a contribué au départ de nouveaux Français en vacances, mais force est de constater que, quinze ans après sa création, si l'on peut se féliciter de sa croissance et de son


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succès, il reste un produit relativement étranger à nombre de nos concitoyens, notamment les 7,5 millions de salariés des PME, les artisans, les commerçants et les agriculteurs.

C'est pour remédier à cette situation que toutes les organisations syndicales et patronales, de même que les organismes de tourisme social, ont réclamé l'exonération des charges sociales sur la contribution de l'employeur aux chèques-vacances, sur le modèle du ticket-restaurant.

Il y a un an, avec Bernard Pons qui avait pris l'initiative d'un premier projet de loi lorsqu'il était ministre chargé du tourisme, nous avons déposé une proposition de loi pour étendre l'utilisation du chèque-vacances. La majorité n'a pas souhaité alors en discuter, et un an aura donc été nécessaire, madame la secrétaire d'Etat, pour que soit inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le texte que vous aviez promis et que vous nous présentez aujourd'hui.

Peut-être eût-il mieux valu, il y a un an, passer outre aux prééminences de droit d'auteur et discuter du texte du RPR. Cela aurait été faire preuve de considération pour une opposition qui se veut constructive ; cela aurait été mettre les actes en conformité avec les discours sur la revalorisation du rôle du Parlement. On ne vous l'a pas permis et nous le regrettons.

Le texte qui nous est présenté aujourd'hui répond-il aux objectifs que nous nous fixions il y a un an : étendre le bénéfice du chèque-vacances au plus grand nombre de nos concitoyens dont les revenus sont modestes ou moyens, dynamiser l'économie touristique ? Il comporte tout d'abord des mesures de restriction.

L'article 2 du projet de loi, en substituant le revenu fiscal de référence au critère actuel de la cotisation d'impôt sur le revenu, est présenté comme un élément de justice. Dans la pratique, il privera cependant du bénéfice du chèque-vacances un grand nombre de familles. Le Gouvernement a-t-il procédé à une évaluation ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Oui !

M. Michel Bouvard.

Ainsi, telle famille qui emploie occasionnellement une personne à domicile pour garder les enfants ou aider la mère dans son activité, notamment dans les familles nombreuses, et qui, de ce fait, bénéficie d'une réduction d'impôt, se verra privée du bénéfice du chèque-vacances alors que son revenu disponible sera souvent inférieur à celui d'un couple sans enfant. Il en va de même pour les ménages qui supportent des remboursements d'emprunts importants pour l'accession à la propriété et bénéficient de ce fait de déductions fiscales.

En effet, les déductions fiscales ne sont pas toutes liées à des placements boursiers ou à des assurances vie. Il me semble qu'on l'oublie un peu rapidement.

Tout en comprenant le soin du Gouvernement de ne pas dénaturer l'objet du chèque-vacances, je veux attirer l'attention sur les effets pervers des mesures contenues dans cet article, qui me paraît ne pas avoir d'autre but que de financer une partie de l'extension du chèquev acances, sans bourse délier pour le ministère des finances, et qui ne prend pas en compte les effets bénéfiques que l'on peut attendre de cette mesure en termes de croissance d'activité et donc de recettes pour l'Etat.

Il est par ailleurs singulier que l'étude d'impact présentée à l'appui du texte ne fasse mention que des pertes de recettes pour la sécurité sociale ou l'Etat et nullement des recettes induites, notamment de TVA, par le départ d'un plus grand nombre de personnes en vacances. Il y a là un véritable problème que je ne manquerai pas de soulever devant la commission des finances. En effet, une étude d'impact ne peut pas se contenter de faire apparaître les conséquences négatives d'une mesure sans mettre en balance les aspects positifs que l'on peut en attendre au niveau des recettes fiscales dans d'autres domaines.

J'en viens aux mesures d'extension.

S'agissant de la fonction publique, le texte ne prend pas en compte les agents non titulaires, notamment les contractuels de droit privé dont le nombre est significatif.

Mais j'ai constaté avec plaisir que le rapporteur était favorable à un élargissement à cette catégorie.

L'extension reste cependant limitée pour les salariés du secteur privé. Il aurait été souhaitable, sans peut-être aller aussi loin que le Sénat, d'élargir quelque peu le dispositif en direction des classes moyennes dont une partie est aujourd'hui fragilisée par le problème d'intégration des jeunes à la vie professionnelle. Combien de familles ne sont-elles pas aujourd'hui obligées d'accueilir, au-delà de l'âge de la majorité, des jeunes en situation de difficulté, se privant par là-même d'une partie des ressources qui pourraient être utilisées pour leurs vacances ?

M. le président.

Monsieur Bouvard, je vous invite à vous acheminer vers votre conclusion.

M. Michel Bouvard.

Je conclus, monsieur le président ! En outre, et à la différence de la proposition de Bernard Pons, ce texte n'apporte pas de solution pour les commerçants et artisans les plus modestes pour lesquels le droit aux vacances est pourtant aussi essentiel que pour un salarié.

Permettez-moi enfin d'évoquer, comme élu montagnard, le souhait qu'une réflexion soit menée pour permettre d'étendre, à terme, le chèque-vacances aux pluriactifs.

Des améliorations peuvent donc être apportées. En effet, nous attendons aussi de ce texte qu'il contribue à une meilleure diffusion du tourisme sur l'ensemble du territoire. A cet égard, le chèque-vacances est un outil précieux puisque ses bénéficiaires l'utilisent largement dans des régions où la fréquentation touristique n'est pas la plus importante, participant ainsi à leur développement et à l'aménagement du territoire. Or, là aussi, l'objectif quantitatif limité quant aux nouveaux bénéficiaires, la disparition d'une partie des bénéficiaires actuels dont il n'est pas sûr qu'ils continueront de partir, le chèquevacances représentant 15 à 35 % d'un budget de séjour, réduisent l'effet bénéfique que l'on pouvait attendre de ces mesures pour dynamiser de nouveaux territoires et étendre leur potentiel touristique.

Je ne citerai qu'un seul chiffre pour illuster mon propos : à raison de 150 000 salariés supplémentaires par an, il faudra attendre cinquante ans pour que les 7,5 millions de salariés des PME et PMI bénéficient du chèquevacances.

En clair, madame la secrétaire d'Etat, ce texte procède d'une bonne intention. Il correspond à votre volonté d'élargir la fréquentation touristique dans notre pays, tout en répondant à un souci de justice sociale que nous partageons car, pour nous, la République ne doit laisser personne au bord du chemin. Mais force est de constater que l'impact attendu de ce projet sera limité pour notre économie touristique. Une fois de plus, nous constatons le décalage qui existe entre la volonté des acteurs du tourisme dont vous faites partie, et ce qui est finalement possible du fait des contraintes budgétaires de l'Etat.

Mais ce constat vaut aussi dans d'autres domaines.

Ainsi, nous observons la même dérive à propos du problème de la TVA sur la restauration. Depuis des années,


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nous nous heurtons, à des fins de non-recevoir, alors que, chacun le sait, certaines mesures permettraient d'accroître la fréquentation dans les restaurants et donc de développer l'emploi.

M. Daniel Feurtet.

Ce sera à la prochaine commission européenne d'étudier le problème !

M. Michel Bouvard.

Pour toutes ces raisons, je souhaite, madame la secrétaire d'Etat, que vous puissiez accepter les amendements qui améliorent ce texte : cela nous permettrait d'écrire tous ensemble une nouvelle page de l'histoire du chèque-vacances. (Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Marc Dumoulin.

M. Marc Dumoulin.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mesdames, messieurs, j'aimerais exprimer des regrets, des satisfactions, des observations et des propositions.

Je commencerai par les regrets. Comme l'a fait mon prédécesseur à cette tribune, je déplore que la discussion engagée sur la proposition de loi de Bernard Pons n'ait pu aller plus loin. Cette proposition permettait, en effet, une avancée sociale, avait une portée économique non négligeable, et était génératrice d'emplois.

Oui, c'est vrai, on est devant un exemple type de texte sur lequel il ne devrait pas y avoir de clivage gauchedroite.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Il n'y en a pas sauf pour les libéraux !

M. Marc Dumoulin.

Je vais en apporter la preuve en reprenant deux petites citations : « La première leçon à tirer est le gros succès du chèque-vacances. Aujourd'hui, 4 millions de Français partent en vacances grâce à lui et le nombre de chèque émis est en constante augmentation.

Cependant, malgré cette réussite, le chèque-vacances voit aujourd'hui sa généralisation freinée par différents obstacles juridiques. »

M. Gérard Terrier, rapporteur.

On est d'accord !

M. Marc Dumoulin.

N'est-ce pas, monsieur le rapporteur.

S econde citation : « L'exemple social original que constitue notre chèque-vacances a démontré depuis 1982 sa raison d'être et son efficacité. En 1998, 4 millions de personnes, soit 1 million de salariés et leurs familles, en ont bénéficié. Cependant, nous constatons que, dans la pratique, de très nombreux salariés n'ont pas accès aux chèques-vacances. »

Eh bien, l'un de ces propos est de Bernard Pons, et l'autre est extrait de l'intervention de Mme la secrétaire d'Etat au Sénat. Vous le voyez, nous sommes tout à fait d'accord sur les motiviations.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Non, sur les constats !

M. Marc Dumoulin.

Sur les constats et sur les motivations, c'est dans l'exposé du texte.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Non, sur les motivations nous divergeons !

M. Marc Dumoulin.

La satisfaction, c'est que la promesse faite par Mme la secrétaire d'Etat est aujourd'hui tenue ; il faut le reconnaître.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Vous partagez au moins un point d'accord avec le rapporteur.

(Sourires.)

M. Marc Dumoulin.

Oui, nous sommes en présence d'un texte qui constitue une avancée sociale incontestable et qui permettra aux plus défavorisés de partir en vacances.

J'en viens maintenant aux observations. La première, c'est que ce texte, qui s'adresse bien sûr aux plus défavorisés, devrait aussi viser l'accès aux vacances du plus grand nombre, sans pour cela modifier l'objet social du chèquevacances. Or les conditions de ressources définies dans le projet de loi sont, à mon sens, trop restrictives. Non seulement elles risquent d'exclure 5 % des bénéficiaires actuels, soit près de 50 000 personnes, mais elles limitent considérablement le développement du chèque-vacances.

Deuxième observation, pour que ces mesures soient véritablement efficaces, il faut qu'elles soient génératrices d'emplois en participant très largement à l'aménagement du territoire et en injectant des moyens financiers. Pour cela, il faut une augmentation considérable du volume des chèques-vacances émis. On pourrait ainsi étendre le chèque-vacances aux titulaires d'emplois-jeunes. Sur ce point aussi je suis d'accord avec vous, monsieur le rapporteur. Mais pourquoi ne pas l'étendre également aux artisans et aux agriculteurs les plus défavorisés ? Troisième observation, il est satisfaisant, certes, que la décision de l'employeur reste facultative. Mais il est nécessaire aussi de prévoir des mesures véritablement incitatives. Or, si l'exonération sur la taxe sur les salaires est une bonne chose, on aurait pu imaginer aussi une extension de l'exonération aux autres taxes.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Lesquelles ?

M. Marc Dumoulin.

Le RDS et la CSG.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Ce sont les seules !

M. Marc Dumoulin.

Certes. Mais on aurait pu le faire.

Toujours dans le cadre des mesures incitatives, on aurait pu simplifier l'accès aux chèques-vacances. On va probablement assister à des phénomènes de rejet de la part des chefs de petites entreprises en raison de la complexité actuelle.

Je terminerai par les propositions. Elles ne sont d'ailleurs pas forcément d'ordre législatif. D'abord, il me semble indispensable d'étendre les critères d'agrément des prestations aux chèques-vacances. Je pense par exemple à l'hébergement chez l'habitant ayant fait l'objet de la procédure de classement. Ensuite, on pourrait envisager d'exonérer l'Agence nationale pour les chèques-vacances de l'impôt sur les sociétés.

(Exclamations sur les bancs du groupe communiste.)

Les sommes dégagées pourraient être réintégrées dans le tourisme social et, pourquoi pas, dans le soutien à l'hôtellerie familiale.

(Exclamations sur les bancs du groupe communiste.)

Mme Muguette Jacquaint.

Cela ne sera pas réinjecté dans le tourisme social !

M. Marc Dumoulin.

Est-ce à dire que l'Agence nationale pour les chèques-vacances est mal contrôlée, madame Jacquaint ? Enfin, il faudrait que les bénéfices de l'agence soient réinvestis non seulement dans la réhabilitation de l'hébergement du tourisme social,...

M. Maxime Gremetz.

Il faut augmenter l'impôt sur les grandes fortunes !

M. Marc Dumoulin.

... mais également dans le soutien à l'hôtellerie familiale et indépendante.

Pour conclure, je dirai, madame la secrétaire d'Etat, que nous sommes bien en face d'un texte où les clivages politiques droite-gauche, n'ont pas lieu d'être. Si vous


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acceptiez un relèvement du plafond des conditions de ressources, une extension du chèque-vacances aux artisans et aux agriculteurs les plus défavorisés et une incitation plus forte pour les entreprises, nous devrions pouvoir aboutir à un consensus souhaitable sur un texte d'intérêt général et social incontestable.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Léonce Deprez.

Dommage que tout cela ne soit pas déjà dans le texte !

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq.

Avions-nous mesuré, en 1982, toute la portée de l'ordonnance qui a créé le chèquevacances ? Je ne le crois pas. Aujourd'hui, dix-sept ans après sa mise en place, nous pouvons en faire un bilan très positif et je me félicite que le Gouvernement ait choisi la voie législative pour que nous puissions en débattre ici.

En premier lieu, le chèque-vacances permet à des salariés aux revenus faibles de partir en vacances pour un coût relativement modeste. C'est, en quelque sorte, le prolongement des grandes avancées, sociales et familiales amorcées en 1936, avec les premiers congés payés, qui avaient comme finalité l'accession des plus pauvres aux loisirs et à la culture. En effet, c'est bien dans cette perspective d'incitation sociale que l'on se retrouve avec le chèque-vacances puisque 67 % des ménages qui en bénéficient ont un revenu inférieur à 15 000 francs et un tiers d'entre eux ne seraient pas partis en vacances sans ce dispositif.

L'effet second, mais non secondaire, du chèquevacances réside dans la part qu'il prend dans l'activité économique. Les activités liées au tourisme - l'hôtellerie, la restauration - sont fortement créatrices d'emplois.

Ainsi, favoriser la consommation des ménages les plus modestes par le biais du chèque-vacances participe au soutien à la croissance et à l'emploi. On estime qu'un franc de chèque-vacances génère plus de trois francs d'activité. Avec plus de 3 milliards de francs de chèquesvacances en 1997 et 1998, l'Agence nationale pour les chèques-vacances génère plus de 10 milliards de francs de consommation touristique intérieure. C'est donc directement de l'emploi et de l'activité, et donc des recettes fiscales supplémentaires, qui sont ainsi créées. C'est aussi un levier économique qui contribue au développement touristique en espace rural et donc à l'aménagement du territoire.

Dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances, nous avons eu, l'année dernière, un débat sur les baisses ciblées de TVA. Avec l'ouverture proposée par la Commission européenne de baisser éventuellement les taxes sur des produits et services qui utilisent une forte main-d'oeuvre, ce débat n'est pas clos.

M. Michel Bouvard.

Nous l'espérons bien !

Mme Nicole Bricq.

Nous le reprendrons sans doute dans le cadre du projet de loi de finances pour l'an 2000.

M. Léonce Deprez.

Sûrement !

Mme Nicole Bricq.

En outre, et c'est la troisième vertu du texte, le fait qu'un accord d'entreprise soit nécessaire pour fixer la part de l'employeur ne peut, à mon avis, que renforcer le dialogue social dans l'entreprise. C'est une des raisons essentielles pour ne pas laisser le texte issu du Sénat en l'état, la majorité sénatoriale ayant supprimé la nécessité de ce dialogue social.

L'efficacité du système des chèques-vacances est ainsi avérée et sa vocation sociale est incontestable. Par le texte que vous nous proposez, vous souhaitez, madame la secrétaire d'Etat, élargir le dispositif. Il est, en effet, fort souhaitable d'ouvrir les chèques-vacances aux PME et aux très petites entreprises car elles ne sont pas, comme les plus grandes, dotées de dispositifs d'aide aux loisirs.

La question se pose également d'élargir le bénéfice du chèque-vacances aux salariés de la fonction publique qui ne sont pas agents de l'Etat ou des collectivités territoriales. La commission propose des amendements en ce sens. Je pense qu'ils seront votés.

Le Sénat, en modifiant profondément l'esprit du projet de loi, dévoie le dispositif du chèque-vacances. L'orientation qu'a en effet défendue la majorité sénatoriale s'inspire de la proposition de loi Pons-Séguin, elle-même repoussée par notre assemblée le 15 mai 1998, et fait ainsi d'un projet de nature sociale et économique, un projet libéral. Il s'agit pour l'opposition de transformer les chèques-vacances en un complément de salaires exonéré de charges sociales. C'est en fait un moyen de rendre le travail salarié plus flexible et de diminuer les charges pour les entreprises.

M. Michel Bouvard.

Fantasme !

Mme Nicole Bricq.

Or tel n'était pas l'esprit du texte initial. Aujourd'hui, nous avons effectivement un choix à faire entre deux conceptions : l'une se situe dans la continuité de l'ordonnance de 1982, l'autre dans une approche libérale, voire paternaliste de l'accès aux loisirs. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Pour nous, socialistes, qui sommes les héritiers des grandes conquêtes populaires pour le droit aux loisirs et à la culture.

M. Michel Bouvard.

Les artisans et les agriculteurs ont également droit aux vacances !

Mme Nicole Bricq.

Eh oui ! Mes propos ne vous font peut-être pas plaisir, mais la réalité est là. Et nous allons revenir sur le travail du Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Michel Bouvard.

Oui, ça ne nous fait pas plaisir que les commerçants, les agriculteurs et artisans n'aient pas droit aux vacances !

Mme Nicole Bricq.

Le droit aux loisirs et à la culture, c'est, pour nous, le choix de la justice sociale et de l'efficacité économique...

M. Michel Bouvard.

La justice pour tous !

Mme Nicole Bricq.

... par une relance contrôlée de l'activité. C'est cette logique que nous approuvons en soutenant votre projet de loi, madame la secrétaire d'Etat.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Michel Bouvard.

L'agriculteur a aussi le droit de partir en vacances !

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, dans cette discussion générale, vous avez été nombreux à rappeler que les vacances, le droit aux vacances, étaient intimement liés au mouvement social et à son développement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Les rappels historiques de M. Capet et de M. Malavielle ont bien montré que cette évolution n'était pas écrite d'avance.

M. le rapporteur a mis en évidence la volonté de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de revenir aux valeurs sociales du projet de loi et a présenté votre travail de réflexion en vue d'apports nouveaux au texte initial. Je suis persuadée que la discussion des articles permettra encore de mieux affiner la réflexion qui nous anime.

Monsieur Dufau, vous avez fort justement relevé l'ambition de ce projet de loi : il s'agit bien d'aller vers plus de justice sociale. C'est pourquoi je comprends bien les orateurs qui, comme M. Malavielle, souhaitent que le plus grand nombre de salariés puissent intégrer le dispositif.

Sans anticiper sur le débat des articles, mais pour répondre à votre souci, je peux vous dire que le Gouvernement partage ces préoccupations. C'est pourquoi, avec mes collègues du Gouvernement, j'ai souhaité qu'en raison des interrogations que peut susciter la différence de statuts entre les emplois-jeunes de la police et les autres, la loi rappelle que les emplois-jeunes peuvent bénéficier du chèque-vacances.

M. Jean-Pierre Dufau.

Très bien !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Je souhaite aussi que, sans attendre l'adoption du projet de loi, les caisses de retraite puissent plus largement ouvrir l'accès du chèque-vacances pour les retraités à l'image de ce qui se fait déjà, notamment avec la CNRACL.

La question est beaucoup plus complexe pour les préretraités considérés comme demandeurs d'emploi. D'une part, ils ne sont plus par voie de conséquence liés par un contrat de travail et, d'autre part, ils ne dépendent pas encore d'une caisse de retraite.

Quant aux contractuels de la fonction publique, ils ont accès aux chèques-vacances dans les mêmes conditions que les fonctionnaires.

Pour les contrats emploi-solidarité et les contrats emploi consolidé, l'accès aux chèques-vacances va faire l'objet de discussions entre les organisations syndicales de fonctionnaires et le ministère de la fonction publique. Ce problème sera traité dans le cadre du dialogue social.

Monsieur Dumoulin, avec d'autres parlementaires de l'opposition, vous vous êtes inquiété de la limite d'accès instaurée par le niveau du revenu de référence, notamment pour les classes moyennes modestes. J'observe au passage que nous découvrons ainsi une nouvelle catégorie sociale. Sachez que, d'après nos projections, les nouvelles dispositions couvrent 75 % des salariés ayant un emploi, soit près de 15 millions sur les 20 millions de personnes ayant un emploi dans notre pays. Ces chiffres, qui montrent que nous couvrons un terrain très large, devraient apaiser vos inquiétudes.

Monsieur Bouvard, si ce projet de loi ne vient en débat qu'aujourd'hui, ce n'est pas uniquement pour une question de droits d'auteur. C'est bien pour des raisons de fond que votre commission a, le 15 mai dernier, décidé de ne pas approuver la proposition de loi Pons.

De fait, nous n'avons pas tous la même vision sur les finalités du chèque-vacances.

Mon objectif va bien au-delà de sa seule dimension économique. Comme Mme Nicole Bricq, à l'instant, je ne néglige pas cet aspect. Mais notre projet de loi est avant tout un moyen de tendre vers l'égalité sociale devant le droit à profiter des vacances. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Le chèquevacances n'existe pas pour lui-même. Il est investi de missions sociales que l'on se doit de préserver.

Monsieur Jacquat, étendre le chèque-vacances aux artisans et commerçants n'est pas possible sans une modification profonde de sa nature. Je vous rappelle que la philosophie du dispositif repose essentiellement sur la relation de l'employeur et du salarié. Se poserait la question du financement de l'abondement. En clair, quel serait le partenaire qui abonderait dans ce cas ? Quant aux retraités, rien n'interdit à leur caisse de retraite de le mettre en place au titre de l'article 6.

Les chômeurs privés d'emploi, je le précise d'abord, n'ont pas vocation à rester chômeurs. C'est aussi pour prendre en compte leur situation que j'ai fait inscrire dans la loi sur l'exclusion le droit aux vacances pour tous.

Et mis en place la bourse solidarité vacances.

En outre, à ma demande, la délégation interministérielle à la famille va engager dans les jours qui viennent une large réflexion sur la place des vacances dans la politique familiale et les aides qui s'ensuivent. Cela devrait répondre à la proposition que vient de faire M. Capet.

M. Michel Bouvard.

On va encore supprimer quelque chose !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Je ne sousestime pas pour autant le chemin à parcourir mais ma volonté est bien de faire en sorte que le droit aux vacances pour tous devienne une réalité.

Plusieurs orateurs ont abordé la question de l'utilisation du chèque-vacances dans les pays de l'Union européenne. C'est un grand chantier dans lequel le Gouvernement s'engage, mais la discussion montre la complexité du dossier. Nous aurons certainement l'occasion d'y revenir lors de l'examen des amendements.

Monsieur Deprez, vos compliments évidemment, me touchent, même si nous ne partageons pas la même vision de la société.

Vous avez abordé tous les sujets liés au tourisme qui vous préoccupent. Pour au moins d'eux d'entre eux, un travail est en train de s'engager, notamment dans l'élaboration de la loi d'organisation du tourisme qui sera le prochain chantier du secrétariat d'Etat au tourisme.

S'agissant du tourisme des quatre saisons, je partage votre préoccupation. Nous travaillons dans le cadre de la procédure des contrats de plan pour aider les opérateurs à s'engager dans la voie d'une offre plus répartie sur l'ensemble de la saison.

Vous avez évoqué l'utilisation du chèque-vacances audelà du strict champ de l'hébergement et des transports.

Je vous rappelle que l'ordonnance prévoit bien dans son article 1er son utilisation pour la restauration touristique et les loisirs. J'ajoute que les chèques-vacances consacrés aux loisirs sportifs et culturels ne représentent que 8 % du total des chèques-vacances. S'il y a quelques dérives, que la procédure d'agrément permet d'ailleurs de sanctionner, il ne me semble pas que ce soit dans le domaine de la culture et du sport.

M. Couve, vos propos relèvent d'une telle surenchère que l'on peut se demander pourquoi, avec une telle conviction, votre projet n'a pas été mis en oeuvre lorsque l'ancienne majorité était au pouvoir.

Mme Nicole Bricq.

Très bien !

M. Jean-Michel Couve.

Elle n'a pas eu le temps, vous le savez !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

S'agissant du tourisme social et associatif, j'ai annoncé la tenue prochaine d'états généraux, qui permettront de débattre de toutes les questions qui ont été évoquées à cette tribune.

Ces états généraux devraient réunir plus de mille acteurs du tourisme social et associatif et j'ai bien l'intention que leurs travaux débouchent sur des propositions et sur une nouvelle définition de ce que doit être aujourd'hui le tourisme social et associatif.

Enfin, permettez-moi de remercier à nouveau M. Terrier, votre rapporteur, pour son investissement personnel et la qualité de son travail, ainsi que le président de la commission, M. Le Garrec, que ce débat, j'en suis sûre, a dû rajeunir puisqu'il a été l'un des instigateurs de l'ordonnance de 1982. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er

M. le président.

« Art. 1er . - Le premier alinéa de l'article 1er de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances est ainsi rédigé :

« Les salariés des entreprises, sociétés et organismes soumis aux dispositions de l'article L. 223-1, des 3o et 4o de l'article L. 351-12 et de l'article L. 351-13 du code du travail, leur conjoint ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, peuvent, avec la contribution de leure mployeur, acquérir des titres nominatifs appelés

« chèques-vacances ».

La parole est à M. Maxime Gremetz, inscrit sur l'article.

M. Maxime Gremetz.

L'article 1er est particulièrement important puisqu'il énumère les bénéficiaires du chèquevacances.

Un certain nombre de personnes ont été à mon avis anormalement exclues de cette liste.

M. Jean-Michel Couve.

C'est vrai !

M. Maxime Gremetz.

Il s'agit notamment des préretraités....

M. Léonce Deprez.

Tout à fait !

M. Maxime Gremetz.

... et des titulaires de contrats emploi-solidarité, ainsi que des bénéficiaires d'un emploijeunes.

Nous adhérons pleinement à l'objectif du texte, qui est d'élargir le champ d'application des chèques-vacances.

C'est pourquoi nous avons proposé des amendements visant à inclure ces catégories et nous nous félicitons qu'ils aient été adoptés en commission. Or, depuis, l'article 40 est passé par là et, surtout, notre rapporteur, qui était signataire avec nous d'un amendement concernant les CES, a cru bon de le retirer sans me demander mon avis.

La position du Gouvernement sur les CES est indéfendable.

On nous dit que les personnes concernées n'ont pas de contrat de travail, mais je fais observer qu'elles en ont un.

On nous a expliqué en commission que, depuis la loi de lutte contre les exclusions, les CES n'étaient plus renouvelables, qu'ils étaient conclus pour six mois seulement et que leurs titulaires n'auraient donc pas le temps de capitaliser. Or la loi relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998, dans ses articles 7 et suivants, fixe leur durée de six à vingt-quatre mois. Dans ces conditions, comment peut-on prétendre les exclure ? Nous avons donc déposé un sous-amendement, qui reprend les dispositions de l'amendement qui a été retiré en commission, pour remettre les titulaires des contrats emploi-solidarité dans la liste, conformément au code du travail. Si on ne le fait, ne parlons pas de social ! Il y a 600 000 CES chaque année. On ne peut pas exclure ces gens-là ! Concernant les préretraités, j'entends bien l'argument qui est avancé, mais comment se fait-il que les retraités puissent bénéficier du dispositif et pas les préretraités ? C'est bizarre ! En plus, ceux qui bénéficient de l'ARPE versent 2,4 mois de salaire à l'UNEDIC, et des gens en préretraite peuvent bénéficier des droits octroyés par les comités d'entreprise. Il reste bien là un lien avec l'entreprise ! Je ne comprends donc pas comment on prétend écarter les préretraités. J'ai vu, dans les amendements, qu'ils faisaient partie de la liste. J'espère que ce sera le cas.

(M. François d'Aubert remplace M. Yves Cochet au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT,

vice président

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 19, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par l'alinéa suivant :

« Les salariés soumis aux dispositions de l'article

L. 322-4-18 du code du travail, leur conjoint ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, peuvent acquérir, dans les conditions fixées à l'article 6, des titres nominatifs appelés chèquesvacances. »

Sur cet amendement, je suis saisi de deux sousamendements, nos 43 et 36.

Le sous-amendement no 43, présenté par M. Gremetz, est ainsi rédigé :

« Dans l'amendement no 19, après les mots : "aux d ispositions", insérer les mots : "de l'article

L. 3224-7 et" ».

Le sous-amendement no 36, présenté par M. Terrier, est ainsi rédigé :

« Dans l'amendement no 19, substituer aux mots : "de l'article L.

322-4-18", les mots : "des articles

L. 322-4-8-1 et L.

322-4-18 ».

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat, pour soutenir l'amendement no

19.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Cet amendement vise à permettre aux titulaires d'un emploi-jeunes de bénéficier de l'accès aux chèques-vacances.

La référence à l'article 6 de l'ordonnance renvoie, pour la mise en oeuvre, aux dispositions existant dans la fonction publique. Ce sont donc des conditions similaires à celles des fonctionnaires ou contractuels.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

En outre, il est rédigé de manière à tenir compte du fait que, s'agissant des conditions fixées à l'article 6, l'abondement n'est pas nécessairement apporté par l'employeur.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 19 ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

La commission n'est pas hostile à cet amendement mais il n'est pas complet. C'est pourquoi je propose un sous-amendement visant à inclure dans le dispositif les personnes titulaires d'un contrat emploi consolidé.

M. le président.

Vous avez donc défendu votre sousamendement no

36. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir le sous-amendement no

43.

M. Maxime Gremetz.

Il convient de viser dans le texte les titulaires d'un contrat emploi-solidarité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

La commission ne l'a pas examiné, mais, à titre personnel, j'y suis défavorable.

Nous touchons là un point sensible. Les contrats emploi-solidarité, au sens strict de la législation, sont bien un contrat de travail mais, pour ces publics en difficulté, qui n'ont de toute façon qu'un mi-temps, l'objectif que nous poursuivons tous, et on l'a poursuivi dans le cadre de la loi de lutte contre les exclusions, c'est qu'ils soient le moins longtemps possible en CES. Or le dispositif des chèques-vacances est fondé sur une épargne de quatre mois alors que ces contrats n'ont qu'une durée de six mois.

M. Maxime Gremetz.

Non, de six à vingt-quatre mois !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Cela peut être, c'est vrai, de six à vingt-quatre mois, mais pour des personnes superprioritaires, c'est-à-dire des gens qui bénéficient de conditions particulières.

M. Maxime Gremetz.

Et alors, vous voulez les exclure ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

La plupart des titulaires d'un CES ont un contrat de six mois et on ne peut pas ainsi pérenniser en quelque sorte ces contrats.

Mme Nicole Bricq.

Bien sûr !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Il faut être logique. Ils relèvent d'une autre logique d'accompagnement que celle des chèques-vacances.

Mme Nicole Bricq.

Exactement !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements nos 43 et 36 ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Je comprends tout à fait vos préoccupations en ce qui concerne les contrats emploi consolidé et les contrats emploi-solidarité.

Il est tout à fait exact que leurs bénéficiaires sont des salariés titulaires d'un contrat de travail. La durée de base des contrats emploi-solidarité est de six mois, qui peut être portée dans certains cas jusqu'à vingt-quatre mois.

Les salariés relèvent naturellement de l'ordonnance du 26 mars 1982. Il appartient donc aux partenaires sociaux, selon les cas, de conclure des accords prévoyant un abondement de l'employeur ou de définir ensemble les conditions d'intervention des organismes d'activités sociales dans le cadre de l'article 6. C'est bien ce qui se passe, par exemple, dans de nombreuses collectivités territoriales, qu'il s'agisse d'un abondement direct par la collectivité ou d'une prise en charge par le comité d'action sociale ou le comité des oeuvres sociales pour les contrats emploi consolidé et les contrats emploi-solidarité.

Les retraités ont, au titre de l'article 6 de l'ordonnance, la possibilité d'accéder aux chèques-vacances. Cela peut se faire à travers les caisses de retraite, et j'ai cité tout à l'heure l'exemple de la CNRACL. Elles ont d'ailleurs d éveloppé un système qui a permis à plus de 12 000 retraités de la fonction publique de bénéficier du chèque-vacances l'année dernière. Je souhaite que d'autres caisses s'engagent dans le dispositif. Cela relève de leur seule responsabilité.

Pour les préretraites, la question essentielle est celle de leur statut. Demandeurs d'emploi, bien que dispensés de rechercher du travail, ils sont dans une situation identique à celle des chômeurs. Non affiliés à une caisse de retraite, ils ne peuvent bénéficier des dispositifs de l'article 6 de l'ordonnance. Par ailleurs, se pose la question de la contribution de l'employeur : qui finance, l'Etat ou l'UNEDIC ? Vous conviendrez que cette question est extrêmement complexe et qu'on ne peut trouver de solution dans le seul cadre qui nous occupe aujourd'hui.

Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à ces deux sous-amendements.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Je crois qu'il faut tout de même apporter quelques précisions car j'ai été très choqué par certaines expressions que j'ai entendues.

Nous avons tous ici, en tout cas ceux qui se sont exprimés, une même volonté de justice sociale. Je le dis au nom de mon groupe, l'UDF, comme d'autres pourraient le dire au nom du leur. Nous divergeons seulement sur le chemin à prendre pour atteindre le but. Le but, c'est l'amélioration des conditions de vie de tous les Français qui vivent mal aujourd'hui.

Je le dis avec une certaine révolte, parce que je ne peux pas entendre constamment les mêmes formules toutes faites à notre égard alors que nous avons les mêmes buts, notamment à propos de ce projet de loi.

Mme Nicole Bricq.

Vous le voterez alors ?

M. Léonce Deprez.

Selon nous, vous n'allez pas assez loin...

M. Patrick Malavieille.

Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?

M. Léonce Deprez.

... et vous ne visez pas un assez grand nombre de Français. C'est pourquoi nous n'approuvons pas ce texte, car vos vues sont restrictives.

S'agissant des CES, nous soutenons la proposition de M. Gremetz...

M. André Capet.

Evidemment !

Mme Nicole Bricq.

Ce n'est pas politicien cela ?

M. Léonce Deprez.

... car c'est un exemple typique. On cherche un moyen d'éviter que les titulaires d'un CES bénéficient des chèques-vacances, alors que, de toute évidence, il s'agit d'un contrat de travail.

Il faut prendre en considération ce qu'apportent les CES à l'économie des collectivités locales, en solutions provisoires, mais dignes, valables. Les collectivités locales, et je parle en connaissance de cause, concluent souvent des CES non pas pour quelques mois mais pour un an et


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

parfois deux. En outre, leurs titulaires bénéficient d'un temps de formation dans le cadre de leur contrat de travail. Et ils n'ont pas accès aux vacances ! Ce n'est pas cohérent !

Mme Nicole Bricq.

Donnez-leur un vrai contrat de travail, c'est mieux !

M. Léonce Deprez.

C'est pourquoi nous demandons que la question soit revue, ainsi que pour les préretraités, qui ont droit aussi aux vacances.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Tout le monde est d'accord pour étendre aux emplois-jeunes et au contrats emploi consolidé le bénéfice des chèques-vacances. La discussion porte essentiellement sur les CES et les préretraités.

Après les explications du rapporteur et du Gouvernement, je reconnais qu'on ne peut pas étendre aux CES le dispositif des chèques-vacances, pour des raisons assez faciles à comprendre.

D'abord, le cas des CES, dont le nombre est considérablement réduit et qui concernent des publics très particuliers, est traité dans la loi sur l'exclusion comme l'a rappelé Mme la secrétaire d'Etat.

Certes, monsieur Deprez, ces contrats peuvent durer de six à vingt-quatre mois, mais j'espère que, si une collectivité locale considère au bout de six mois que quelqu'un fait bien son travail, elle transformera son contrat en CEC. Des CES qui vous donnent satisfaction peuvent donc bénéficier du dispositif des chèques-vacances.

M. André Capet.

Exactement !

M. Jean-Pierre Dufau.

Je comprends bien l'esprit de ce que propose M. Gremetz, mais le groupe socialiste ne votera pas l'extension aux CES du bénéfice des chèquesvacances.

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Je n'aime pas donner de leçons, mais je n'aime pas non plus qu'on m'en donne. Après tout, je suis de ceux qui ont mis en place les chèques-vacances, parfois sous les risées de l'opposition de l'époque. A part nous, personne n'y croyait.

Mme Nicole Bricq.

Exactement !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Comme l'ont dit de nombreux orateurs, les chèques-vacances ont démontré leur efficacité. Qu'on nous en donne acte, ce fut une grande avancée sociale.

De surcroît, je le fais remarquer à M. Deprez, que je connais bien, nous venons de voter la loi contre les exclusions. Et nous avons eu le souci d'introduire dans ce texte des dispositions concernant le sport, la culture et les vacances.

Comme j'ai chargé un membre de notre commission d'élaborer un rapport de suivi, nous aurons le loisir - et le devoir - de vérifier que les mesures prévues sont appliquées sur le terrain, et en particulier celles touchant les chômeurs. Si l'objectif que nous avons fixé n'est pas atteint, nous reprendrons ce chantier. Nous en prenons l'engagement.

Je respecte beaucoup M. Gremetz et je voudrais qu'on aborde le débat avec sérénité. Nous avons voulu sousamender l'amendement du Gouvernement, que nous trouvions trop restrictif. Les emplois-jeunes sont donc inclus, c'est important, mais le rapporteur propose que ce soit aussi le cas des CEC. Enfin, je partage l'avis de M. Dufau, qui vient d'expliquer pourquoi il n'est pas souhaitable d'inclure les CES.

Non pas qu'il y ait je ne sais quel désaccord entre vous et moi, monsieur Gremetz, sur le plan des préoccupations sociales - vous savez très bien que ce n'est pas cela qui nous oppose. Mais il y a tout simplement lieu de s'interroger sur la possibilité de prendre en compte les CES.

Il est indéniable, et je ne porte pas de jugement de valeur, que face aux événements, l'esprit des CES s'est peu à peu transformé. On en a beaucoup parlé lors du débat sur les exclusions, et nous étions d'accord sur ce point, monsieur Gremetz. Nous voulons donc revenir à l'esprit initial des CES, qui devaient être des contrats de courte durée - moins de vingt-quatre mois - et permettant l'accès au marché du travail, grâce à un volet insertion. Dans ces conditions, l'épargne serait très difficile à gérer, de même que le montant potentiel de la cotisation.

M. André Capet.

Moitié, moitié !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Nous pensons donc qu'il faut en rester là pour le moment.

Mais le texte reviendra en discussion. D'ici là, madame la secrétaire d'Etat, nous devrons d'ailleurs organiser une réunion de travail sur ce sujet avec votre collègue, le ministre de la fonction publique, qui est le premier concerné.

Je ne veux pas exclure l'extension aux CES, que l'article 6 de l'ordonnance permet, car c'est en quelque sorte un article balai. Nous devons y réfléchir plus à fond et, en tant que président de la commission, je m'engage à le faire avant le vote définitif du texte.

Je soutiens donc la position du rapporteur, sans nier l'importance de la question posée par M. Gremetz, mais je m'engage à examiner le problème avec le Gouvernement. En effet, nous n'avons aucune raison - ce n'est d'ailleurs ni dans l'esprit du rapporteur ni dans le vôtre, madame le secrétaire d'Etat - de l'expédier sans précaution.

M. Jean-Pierre Dufau.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Je ne puis m'incliner devant une telle proposition, pour une raison simple : je n'accepterai jamais qu'il y ait plusieurs catégories de salariés dans ce pays.

M. Jean-Michel Couve.

Il y a pourtant bien une différence entre les salariés des petites entreprises et ceux des grandes entreprises !

M. Maxime Gremetz.

Et je le dis et je le répète, il y a une contradiction à exclure les CES alors qu'on ouvre le droit aux chèques-vacances à ceux qui ont un contrat de travail ou qui sont employés par l'entreprise.

Je considère donc que cela n'est pas acceptable, y compris du point de vue du droit. C'est pourquoi non seulement je maintiens notre amendement, mais encore je demande un scrutin public.

M. le président.

Sur le sous-amendement no 43, je suis en effet saisi par le groupe communiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

....................................................................

M. le président.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant.

Je mets aux voix le sous-amendement no

43. Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

42 Nombre de suffrages exprimés .................

41 Majorité absolue .......................................

21 Pour l'adoption .........................

16 Contre .......................................

25 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je mets aux voix le sous-amendement no

36. (Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 19, modifié par le sous-amendement no

36. (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

M. Terrier, rapporteur, M. Gremetz et les commissaires membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 2, ainsi libellé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« III. - Il est inséré, après le premier alinéa de l'article 1er de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982, un alinéa ainsi rédigé :

« Les salariés soumis aux dispositions des 1o et 2o de l'article L. 351-12 ou aux dispositions de l'article L. 322-4 du code du travail, leur conjoint ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des i mpôts, peuvent, avec la contribution de leur employeur, acquérir dans les conditions fixées à l'article 6, des titres nominatifs appelés "chèquesvacances". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Cet amendement a pour but de préciser que les agents contractuels de la fonction publique ont bien accès au dispositif, en application de l'article 6 de l'ordonnance du 26 mars 1982, c'est-à-dire par le biais de l'organisme social habilité à attribuer des aides aux vacances, qui émane du comité interministériel à l'action sociale.

Cet amendement vise aussi à introduire les préretraités dans le dispositif des chèques-vacances, toujours sur la base de l'article 6 de l'ordonnance, à condition qu'ils conservent un lien juridique avec leur employeur.

Le projet de loi a vocation à étendre le champ d'application des chèques-vacances et on ne comprendrait pas que cette juste vocation soit altérée par une restriction, en particulier si elle concernait les préretraités.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Selon la jurisprudence du Conseil d'Etat sur le caractère de droit public des contrats, les contractuels de la fonction publique d'Etat relèvent manifestement des circulaires en vigueur sur l'attribution des chèques-vacances dans la fonction publique. Par conséquent, je ne suis pas favorable à l'amendement no

2.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Les élus de l'opposition voteront en faveur de cet amendement. Nous ne comprenons pas très bien la position de Mme la secrétaire d'Etat. Son raisonnement juridique n'est pas faux, mais je ne vois pas en quoi il serait gênant de préciser que certaines catégories ont droit aux chèques-vacances.

On peut certes considérer que c'est redondant eu égard à la jurisprudence, mais cela n'en semble pas moins utile, à la lumière d'un certain nombre de précédents.

D'une manière générale, conformément aux engagements que nous avons pris à cette tribune, nous voterons l'ensemble des amendements proposant d'étendre le dispositif des chèques-vacances, puisque telle est bien la logique dans laquelle nous nous sommes inscrits.

Je profiterai de cette intervention pour dire que nous devons faire un effort de cohérence dans la gestion des extensions. Tout à l'heure, madame la secrétaire d'Etat, vous nous avez indiqué que les commerçants et artisans retraités, via leurs caisses de retraite, pouvaient bénéficier du régime des chèques-vacances. Nous nous en réjouissons, mais il faut prendre conscience de l'existence d'artisans et de commerçants modestes. Il n'y a pas que Fauchon ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Couve.

Il y a aussi les fauchés !

M. Michel Bouvard.

Dans les campagnes, dans les zones de revitalisation rurale, certains artisans et commerçants gagnent moins que le SMIC. Pourquoi ne trouverait-on pas une solution pour qu'eux aussi aient le droit de partir en vacances avant de prendre leur retraite, c'està-dire lorsqu'ils en ressentent davantage le besoin ?

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Si cela va sans dire, je pense que cela va encore mieux en le disant : même si le Gouvernement y est défavorable, le groupe socialiste votera pour cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Signataire de cet amendement avec M. le rapporteur, le groupe communiste votera également pour cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Le groupe UDF aussi, pour les mêmes raisons.

M. Bouvard a très bien traduit notre volonté d'approuver les amendements qui permettent l'extension de la formule, dans un esprit de justice sociale à l'égard d'un grand nombre de Français et également dans le but de développer le chiffre d'affaires du tourisme. Cela créera des emplois et cela procurera des recettes de TVA à l'Etat, qui en a grand besoin. Les préretraités ne doivent pas être exclus.

M. le président.

Je vous rappelle que les amendements et les sous-amendements ne font pas l'objet d'explications de vote. On ne s'exprime que pour répondre au Gouvernement ou à la commission.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (L'amendement est adopté.)

M. Michel Bouvard.

L'amendement a été adopté à l'unanimité !

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 29 et 25, pouvant être soumis à une discussion commune.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

L'amendement no 29, présenté par M. Couve et les m embres du groupe du Rassemblement pour la République, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les bénéficiaires d'une prestation d'assurance vieillesse ont la possibilité d'acquérir des chèquesvacances par l'intermédiaire des caisses de retraite dont ils relèvent. Celles-ci peuvent passer une c onvention avec l'établissement public visé à l'article 5. »

L'amendement no 25, présenté par M. Deprez et Mme Alliot-Marie, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les bénéficiaires d'une prestation d'assurance vieillesse, dont le montant de l'impôt est inférieur au quintuple du plafond du quotient familial, ont la possibilité d'acquérir des chèques-vacances par l'intermédiaire des caisses de retraite dont ils relèvent.

Celles-ci peuvent passer une convention avec l'établissement public visé à l'article 5. »

La parole est à M. Jean-Michel Couve, pour soutenir l'amendement no

29.

M. Jean-Michel Couve.

L'objectif de cet amendement est d'ouvrir le bénéfice des chèques-vacances aux retraités, dont les revenus sont souvent bien modestes. Il serait plus sûr et plus concret d'inscrire ce droit directement et tout de suite dans l'article 1er du projet.

M. le rapporteur vient encore de nous déclarer que le droit aux vacances doit bénéficier à tous les Français. Ce doit être le cas y compris pour les retraités.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez, pour soutenir l'amendement no

25.

M. Léonce Deprez.

Même proposition, mêmes arguments et même conclusion.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

La commission n'a pas pu examiner ces amendements.

Je fais néanmoins remarquer à l'opposition, qui veut élargir, et c'est bien naturel, le champ des chèquesvacances, que son attitude me surprend.

Je viens de prendre connaissance de toute une série d'amendements déposés très tardivement et n'ayant de ce fait pas pu être analysés par la commission. Plus grave, lors de l'examen du projet de loi en commission, un seul député de l'opposition était présent.

M. Jean-Michel Couve.

Considération secondaire !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Pas du tout ! C'est fondamental ! En commission, un député ; et maintenant, plein d'amendements.

M. Michel Bouvard.

C'est un mauvais procès ! Tout le monde n'est pas membre de la commission des affaires sociales !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Si vous aviez été présents, vous sauriez que l'amendement que vous proposez est couvert par l'amendement no 12, lequel a été adopté par la commission. Vous présentez donc un amendement complètement inutile.

M. Jean-Pierre Dufau.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Même avis.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Je répondrai à M. le rapporteur.

Tous les députés ici présents ne sont pas membres de la commission des affaires sociales. Je dirai d'ailleurs à ce sujet que je suis très étonné que les questions relatives à l'économie touristique ne soient pas étudiées en commission de la production, présidée avec beaucoup de sérénité par M. Lajoinie.

En effet, même lorsqu'elles sont d'ordre social, les questions touristiques devraient obligatoirement être examinées par les deux commissions, car le tourisme contribue au développement de l'économie nationale.

M. Jean-Claude Lefort.

Ce n'est pas le problème du Gouvernement !

M. Léonce Deprez.

Si cela avait été le cas, un certain nombre d'entre nous auraient été en mesure de soutenir les amendements en question.

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Premièrement, monsieur Deprez, je vous ferai remarquer que je préside la commission des affaires sociales, avec beaucoup de sérénité moi aussi. (Sourires.)

M. Michel Bouvard.

Nous n'en doutons pas, monsieur le président !

M. Jean Le Garrec.

président de la commission.

Deuxièmement, les députés appartenant à d'autres commissions ont toujours la possibilité de s'y exprimer.

M. Michel Bouvard.

Sauf quand les commissions se réunissent au même moment !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Si M. Deprez était venu, nous l'aurions reçu avec plaisir et il aurait pu s'exprimer très librement.

Troisièmement, sur le fond, je suis heureux de constater qu'un certain nombre de députés volent au secours de la victoire, les chèques-vacances ayant fait la preuve de leur réussite.

Enfin, quatrièmement, le rapporteur ayant démontré que la proposition de vos collègues est satisfaite par l'amendement no 12, nous pouvons arrêter là le débat.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

29. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

25. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 30 et 27, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 30, présenté par M. Couve et les m embres du groupe du Rassemblement pour la République, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les agriculteurs, leurs conjoints ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, p euvent, avec la contribution de leurs caissess ociales, acquérir dans les conditions fixées à l'article 6 des chèques-vacances. Celles-ci peuvent passer une convention avec l'établissement public visé à l'article 5. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

L'amendement no 27, présenté par M. Deprez et Mme Alliot-Marie, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les exploitants agricoles, dont le montant de l'impôt est inférieur au quintuple du plafond du quotient familial, leur conjoint ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, p euvent, avec la contribution de leurs caissess ociales, acquérir dans les conditions fixées à l'article 6 des chèques-vacances. Celles-ci peuvent passer une convention avec l'établissement public visé à l'article 5. »

La parole est à M. Jean-Michel Couve, pour soutenir l'amendement no

30.

M. Jean-Michel Couve.

Il s'agit, par cet amendement, de permettre aux agriculteurs, à leurs conjoints ainsi qu'aux personnes à leur charge de bénéficier des chèquesvacances. Il s'agit toujours de faire en sorte qu'il n'y ait pas deux poids deux mesures, et que tous les Français dont les revenus sont à peu près identiques puissent bénéficier du même dispositif. Je pense, bien sûr, aux agriculteurs qui ont les revenus les plus modestes.

M. Michel Bouvard.

Les petits agriculteurs de montagne dont les moutons sont mangés par les loups !

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez, pour soutenir l'amendement no

27.

M. Léonce Deprez.

Il a été dit tout à l'heure qu'il ne fallait pas oublier le monde rural et les activités touristiques en milieu rural. C'est pourquoi cet amendement tend à étendre le bénéfice des chèques-vacances aux exploitants agricoles dont les revenus sont inférieurs au q uintuple du quotient familial, soit un revenu de 110 000 francs par an, ce qui est somme toute modeste.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Ces amendements n'ont pas été examinés par la commission. A titre personnel, j'y suis défavorable. D'ailleurs, les agriculteurs qui relèvent de la MSA peuvent toujours, par le biais de l'article 6 de l'ordonnance, contractualiser un accord pour bénéficier des chèques-vacances.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Mais oui !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Ce qui me gêne dans les arguments avancés, c'est qu'ils ne correspondent pas à la réalité. Comme je l'ai écrit dans mon rapport, 92 % des c hèques-vacances sont distribués par des organismes sociaux et des gens y ont droit de plein droit. N'ajoutons pas des complications supplémentaires et attachons-nous surtout à ce qui importe : inciter les PME-PMI à rejoindre le système.

Enfin, monsieur Deprez, n'avez-vous pas commis une erreur en écrivant dans votre amendement : « Au quintuple du plafond du quotient familial » ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Je crois que nous sommes là dans un faux débat.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Eh oui !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

En aucun cas, les agriculteurs ne sont exclus de l'accès aux chèquesvacances. Ils peuvent en bénéficier au titre de l'article 6 de l'ordonnance par l'intermédiaire des organismes paritaires. Quelle autre voie suggérez-vous donc ?

M. André Capet.

Ils n'ont rien à proposer. Il font de la démagogie !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Ce que vous proposez n'est absolument pas applicable.

Par quel biais les agriculteurs peuvent-ils rentrer dans le dispositif autrement que par celui de l'article 6 de l'ordonnance ? Certainement pas en application de l'article 2, puisque celui-ci prévoit un dispositif fondé sur une relation entre les employeurs et les salariés. Les agriculteurs, en tant que professions indépendantes, ne peuvent absolument pas rentrer dans un tel cadre. En tout cas, grâce à l'article 6 de l'ordonnance, ils ne sont pas exclus du système.

Mais pour bénéficier de l'article 6, la profession agricole devra effectuer des démarches auprès d'un organisme paritaire.

Au reste, la loi relative à l'agriculture a prévu un dispositif pour les salariés agricoles. Vous voyez bien que des dispositions existent !

M. Jean-Michel Couve.

Pour les salariés ! Mais qu'en est-il pour les non-salariés ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Les non-salariés peuvent monter un dispositif par le biais d'un organisme du monde agricole. Evidemment, cela implique d'engager des négociations et d'effectuer des démarches. Si vous le souhaitez, monsieur Couve, je peux très bien vous aider entreprendre ces démarches.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Couve.

M. Jean-Michel Couve.

Je vous remercie de votre proposition, madame la secrétaire d'Etat. Mais il faut savoir que les organismes en question ne participeront au dispositif que s'ils y sont aidés. Sans aide, sans soutien, sans participation de l'Etat, pourquoi voulez-vous que des organismes comme les caisses de retraite participent au dispositif ? Aujourd'hui, seule la CNRACL participe. Or nous savons la situation financière dans laquelle elle se trouve.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

30. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

27. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 31 et 39, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 31, présenté par M. Couve et les m embres du groupe du Rassemblement pour la République, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les artisans et commerçants, leurs conjoints ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, peuvent, avec la contribution de leurs caisses sociales, acquérir dans les conditions fixées à l'article 6 des chèques-vacances. Celles-ci peuvent passer une convention avec l'établissement public visé à l'article 5. »

L'amendement no 39, présenté par M. Deprez et Mme Alliot-Marie, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les artisans et commerçants, dont le montant de l'impôt est inférieur au quintuple du plafond du quotient familial, leur conjoint ainsi que les per-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

sonnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, p euvent, avec la contribution de leurs caisses sociales, acquérir dans les conditions fixés à l'article 6 des chèques-vacances. Celles-ci peuvent passer une c onvention avec l'établissement public visé à l'article 5. »

La parole est à M. Jean-Michel Couve, pour soutenir l'amendement no

31.

M. Jean-Michel Couve.

Il s'agit, par cet amendement, de permettre aux artisans et aux commerçants, ainsi qu'à leurs conjoints et aux personnes qui sont à leur charge de bénéficier du dispositif des chèques-vacances.

M. Patrick Malavieille.

Démagogie !

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez, pour soutenir l'amendement no

39.

M. Léonce Deprez.

Il est nécessaire de répéter que toutes les catégories de Français doivent avoir droit, si leurs revenus sont insuffisants, aux bénéfices des chèquesvacances. Telle est la conviction qui doit s'imposer pour créer un climat favorable à l'accès aux vacances pour tous, au tourisme pour tous.

Par ailleurs, j'indique à M. le président de la commission, que je respecte beaucoup et dont je connais les qualités pour le côtoyer dans la région Nord Pas-de-Calais, que je n'ai reçu le projet à mon bureau que mercredi à seize heures. Dans ces conditions, comment voulez-vous que je puisse participer le lendemain matin à la réunion d'une commission dont je ne fais pas partie ? Je vous dis cela pour témoigner de notre bonne foi. D'ailleurs vous savez, monsieur Le Garrec, que tous ceux qui sont ici sont ouverts à tout dialogue, et ils vous l'ont déjà démontré, en matière sociale ou économique.

M. Jean-Pierre Dufau.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Je reconnais, monsieur Deprez, que, si vous avez reçu le rapport mercredi, l'exercice n'était pas facile.

Il faut bien comprendre que le dispositif des chèquesvacances a deux entrées : l'article 1er et l'article 6 de l'ordonnance. Il faut éviter la confusion des genres.

Cet article 6 offre d'innombrables possibilités de réaliser ce que vous nous proposez : elles existent, il faut les mobiliser. Par exemple, les agriculteurs auraient pu envisager de mettre en place ce genre de dispositif et de conventions avec la MSA. Pourquoi ne l'ont-ils pas fait ? Ce que vous demandez n'est pas recevable à l'article 1er , qui ne concerne que les salariés et implique une relation entre salarié et employeur, puisqu'il y a contribution de ce dernier. L'article 1er ne pourrait donc absolument pas s'appliquer pour les non-salariés même si nous le désirions. Seul l'article 6 de l'ordonnance permettra à ces catégories d'accéder aux chèques-vacances. Ils n'en sont pas totalement exclus.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat au tourisme. Même avis que la commission : défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

31. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

39. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 32 et 38, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 32, présenté par M. Couve et les m embres du groupe du Rassemblement pour la République est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les professions libérales, leurs conjoints ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, peuvent, avec la contribution de leurs caissess ociales, acquérir dans les conditions fixées à l'article 6 des chèques-vacances. Celles-ci peuvent passer une convention avec l'établissement public visé à l'article 5. »

L'amendement no 38, présenté par M. Deprez et Mme Alliot-Marie, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les professions libérales, dont le montant de l'impôt est inférieur au quintuple du plafond du quotient familial, leur conjoint ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, p euvent, avec la contribution de leurs caissess ociales, acquérir dans les conditions fixées à l'article 6 des chèques-vacances. Celles-ci peuvent passer une convention avec l'établissement public visé à l'article 5. »

La parole est à M. Jean-Michel Couve, pour soutenir l'amendement no

32.

M. Jean-Michel Couve.

Je poursuis mon idée. Par cet amendement, je souhaite que l'extension du dispositif des chèques-vacances bénéficie aux professionnels libéraux, dans les mêmes conditions que pour d'autres Français dont les revenus peuvent être modestes.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez, pour soutenir l'amendement no

38.

M. Léonce Deprez.

On serait surpris si l'on connaissait le niveau de revenus de certains membres des professions libérales. A Paris même, bon nombre de jeunes juristes ont des revenus bien inférieurs au SMIC. Il faut penser aux professions libérales : elles aussi ont droit aux vacances pour tous. Nous ne demandons qu'une chose : qu'on élargisse le champ d'application du texte.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Je pourrais développer la même argumentation que précédemment, mais, là, il y a tout de même une petite particularité.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Une petite nuance ! (Sourires.)

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Cela vaut la peine qu'on la souligne. Pour ce type de public, l'organisme abondeur ne peut pas se confondre avec le bénéficiaire ; or, en l'occurrence, ce sont les deux mêmes ! M. Jean-Michel Couve. Il y a des professionnels libéraux en société !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Nous ne pouvons donc pas souscrire à ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat au tourisme. Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. J'aimerais que nous tentions de trouver une solution, car nous n'aurons pas tous les jours l'occasion de discuter ici du chèque-vacances. Il a fallu


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

quasiment un an pour réinscrire un texte, qui est pourtant d'origine gouvernementale, à l'ordre du jour, et nous savons, madame la secrétaire d'Etat, que cela n'a pas forcément été simple.

J'entends bien les arguments du rapporteur selon lesquels l'article 6 de l'ordonnance peut s'appliquer dans un certain nombre de cas. Mais si c'était déjà possible en théorie, il faut alors s'interroger sur la raison pour laquelle il n'y a pas plus de bénéficiaires du chèquesvacances dans ces catégories...

M. Jean Le Garrec, président de la commission. Voilà une bonne question ! M. Michel Bouvard. ... alors que la proportion de personnes à revenus modestes y est tout de même élevée.

Il nous faut trouver une solution. Si vous nous dites qu'elles ne résident pas dans nos amendements - pourquoi p as ? -, faites-nous une proposition. Acceptez, par exemple, qu'un groupe de travail réunissant les parlementaires qui s'intéressent à ces questions puissent examiner les raisons pour lesquelles cela ne fonctionne pas.

M. Jean Le Garrec, président de la commission. Je vais vous le proposer ! M. Michel Bouvard. Faites des propositions pour éviter qu'un certain nombre de nos concitoyens exerçant des professions indépendantes - artisans, commerçants, agriculteurs -, et qui n'ont pas les mêmes possibilités que les autres de partir en vacances, ne vivent pas cette situation comme étant injuste. Car c'est le sentiment d'injustice qui crée des fractures dans la société et entretient des rancoeurs qui ne sont pas souhaitables pour l'unité sociale du pays. Je voudrais que l'on puisse travailler ensemble sur ce problème. Et, le cas échéant, si nous nous apercevons que l'article 6 ne fonctionne pas ou ne peut fonctionner, il faudra en tirer les conclusions qui s'imposent et apporter les modifications nécessaires.

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

On avance un tout petit peu.

D'abord, je reconnais qu'il a fallu examiner ce texte dans des délais très brefs.

M. Léonce Deprez.

Merci de le reconnaître !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Certaines interventions montrent qu'il est nécessaire de connaître le contenu de l'ordonnance de 1982 et de son article 6. Le rapporteur a en effet raison, il y a une double entrée dans le dispositif : l'article 1er du projet et l'article 6 de l'ordonnance.

Pour ma part, je trouve tout à fait dommage, monsieur Deprez, que, dix-sept ans après, un certain nombre de professions n'aient toujours pas engagé de négociations.

Ainsi les agriculteurs auraient pu le faire avec la MSA.

Cela dit, comme nous n'en sommes qu'au stade de la première lecture, je vais demander au rapporteur, qui a réalisé un remarquable travail d'analyse de l'ordonnance et du texte du Gouvernement, de se mettre à votre disposition et d'organiser une réunion de travail avec les parlementaires concernés, afin de faire le point des problèmes, de voir où nous en sommes et de poser les conditions de la discussion avec le Gouvernement. Et nous reverrons tout cela en deuxième lecture si c'est nécessaire.

Je retiens donc votre proposition, monsieur Bouvard.

Réunissons un groupe de travail placé sous l'autorité du rapporteur - il a la compétence nécessaire - afin d'éviter un faux débat et qu'on se jette à la figure telle ou telle catégorie qui serait oubliée, car ce n'est pas de bonne méthode.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Couve.

M. Jean-Michel Couve.

Monsieur le président de la commission, je suis ravi que vous constatiez, vous aussi, qu'un vrai problème se pose.

A-t-il fallu que nous répétions inlassablement les mêmes choses à propos d'un certain nombre de catégories de Français pour que vous finissiez par découvrir qu'il y avait un problème ?

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

C'est un faux problème !

Mme Muguette Jacquaint.

La droite découvre aujourd'hui qu'il y a des Français qui ne partent pas en vacances !

M. Jean-Michel Couve.

Le problème tient au fait que la réforme proposée n'est pas suffisante. Vous n'avez fait, madame la secrétaire d'Etat, que toiletter l'ordonnance de 1 982, laquelle limite le dispositif aux salariés. En revanche, notre proposition de loi de mai 1998 et celle plus récente de nos collègues sénateurs prévoient une réforme plus large.

M. Patrick Malavieille.

Quelque 7,5 millions de salariés seront concernés ! Ce n'est pas une ouverture ?

M. Michel Bouvard.

Cinquante ans pour y arriver !

M. Jean-Michel Couve.

Selon le rapport du ministère, l'objectif est de 150 000 salariés supplémentaires par an.

En tout cas, la grande majorité des salariés des PME ne pourra pas accéder au dispositif.

Bref, si nous pouvons revoir le texte plus en détail, cela sera de nature à nous satisfaire.

Mme Muguette Jacquaint.

Vous découvrez seulement aujourd'hui que certains Français ne vont jamais en vacances !

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Monsieur le président de la commission, j'accepte votre proposition. Je suis heureux que vous vous soyez rendu compte qu'un problème se pose et qu'il mérite d'être étudié plus en profondeur, avec plus d'ambition sociale. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons déposé toute une série d'amendements.

Cela dit, nous sommes tout à fait prêts à répondre à votre invitation.

M. Maxime Gremetz.

Alors retirez vos amendements !

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Cessez, monsieur Couve, de nous donner des leçons ! L'ordonnance date de 1982. Cela fait donc dix-sept ans qu'elle est en application ! S'il y avait de tels problèmes pour les agriculteurs, rien n'empêchait les organisations syndicales agricoles d'engager une négociation avec leurs organismes sociaux.

Par ailleurs, monsieur Couve, l'ordonnance de 1982, que manifestement vous ne connaissez pas - ce qui est regrettable cas vous êtes le maire d'une ville essentiellement touristique - permet de répondre à certaines situations.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

M. Jean-Michel Couve.

Il est inacceptable de tenir de tels propos !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Cessez de dire que nous ne voyons pas pas les problèmes. Pour ma part, je considère que l'article 6 de l'ordonnance permet de les régler. Et s'il y a encore des difficultés, nous sommes prêts à les examiner.

Enfin, si vous êtes cohérent, retirez le reste de vos amendements.

M. Jean-Michel Couve.

Si vous vous engagez à une concertation !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Je rappelle que grâce à l'extension du dispositif du chèque-vacances, plus de 7,5 millions de salariés seront concernés. De plus, des amendements ont prévu l'accès d'autres catégories au dispositif.

En ce qui concerne la proposition de loi Pons-Séguin de 1998, on oublie de dire qu'elle ouvrait la voie à des compléments de salaire et qu'elle ne prévoyait pas le contrôle par les partenaires sociaux de l'attribution des chèques. A notre avis, il s'agissait d'un texte trop libéral.

Le président Le Garrec a fait une proposition fort intéressante, qui peut permettre d'affiner le projet de loi pour la deuxième lecture. Nous verrons bien, à cette occasion, ceux qui ont la volonté d'aboutir concrètement et ceux qui ont une approche plus politicienne.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Je suis prêt à accepter la proposition de M. le président de la commission dont je ne doute pas des bonnes intentions. Bien entendu, lors de cette réunion de concertation, il devra être tenu compte du fait que la société a beaucoup évolué depuis 1982 et q u'un grand nombre de catégories de citoyens connaissent maintenant un niveau de pauvreté regrettable.

Cela dit, je retire le reste de mes amendements sur l'article 1er

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

32. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

38. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Les amendements nos 37, 41 et 26 de M. Deprez sont retirés.

M. Couve et les membres du groupe du Rassemblement pour la République ont présenté un amendement, no 33, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Les artistes non salariés, leurs conjoints ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, peuvent, avec la contribution de leurs caissess ociales, acquérir dans les conditions fixées à l'article 6 des chèques-vacances. Celles-ci peuvent passer une convention avec l'établissement public visé à l'article 5. »

La parole est à M. Jean-Michel Couve.

M. Jean-Michel Couve.

Monsieur le président, je retire, moi aussi, le reste des amendements que j'ai déposés avec mon groupe sur l'article 1er , puisque M. Le Garrec s'est engagé à ce qu'un véritable débat s'instaure sur les raisons pour lesquelles les non-salariés ne peuvent réellement accéder à ce dispositif.

M. le président.

L'amendement no 33 est retiré, de même que l'amendement no 34 de M. Couve.

M. Terrier, rapporteur, M. Gremetz et les commissaires membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 3, ainsi libellé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« IV. Après le deuxième alinéa de l'article 1er de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les chèques-vacances peuvent également être remis en paiement des dépenses effectuées sur le territoire des Etats membres de l'Union européenne aux prestataires dont les conditions d'agrément sont fixées par décret. »

Sur cet amendement, je suis saisi de deux sousamendements, nos 42 et 18.

Le sous-amendement no 42, présenté par MM. Couve, Deprez et Mme Alliot-Marie, est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'amendement no 3, après les mots : "des Etats membres de l'Union européenne", insérer les mots ; "ainsi que la Confédération helvétique, sous réserve de réciprocité". »

Le sous-amendement no 18, présenté par M. Blanc, est ainsi rédigé :

« A la fin du dernier alinéa de l'amendement no 3, substituer aux mots : "dont les conditions d'agrément sont fixées par décret", les mots : "sous réserve de réciprocité, dans les conditions d'agrément et de conventionnement fixées par décret". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

3.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Cet amendement est important par son objet.

E n effet, actuellement, l'utilisation des chèquesvacances est limitée au seul territoire français. Il est clair que l'Europe et l'euro nous permettent d'espérer une extension au moins territoriale du dispositif.

La commission souhaite que l'utilisation du chèquevacances puisse être étendue par la voie réglementaire à la zone euro.

Il devrait y avoir des retombées économiques et touristiques, mais la difficulté réside dans la réciprocité entre les pays. Celle-ci ne peut être invoquée par un seul Etat membre. Aussi, j'attends avec intérêt la réponse du Gouvernement.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Couve, pour soutenir le sous-amendement no

42.

M. Jean-Michel Couve.

Je ne vois pas ce que la précision concernant la zone euro peut apporter. Il suffit de dire que l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne sont concernés. Il convient cependant de viser également la Confédération helvétique, sous réserve de réciprocité. En effet, c'est le seul autre pays à avoir mis en oeuvre le chèque-vacances, et bien avant nous. C'est donc le seul pays avec lequel nous pourrions commencer à travailler et à réfléchir à l'élaboration d'une convent ion de réciprocité.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Blanc, pour soutenir le sous-amendement no

18.

M. Jacques Blanc.

Tout le monde devrait pouvoir être d'accord sur la notion de réciprocité. Il serait souhaitable que, au-delà des conditions d'agrément, les conditions de conventionnement soient également fixées par décret.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 3 et sur les sous-amendements nos 42 et 18 ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

L'extension de l'utilisation du chèque-vacances aux pays membres de l'Union européenne est fondée et, comme je l'ai indiqué lors de mon audition par la commission, le Gouvernement travaille sur cette idée.

Il faut procéder à une expertise fine des conséquences de l'ouverture du chèque-vacances à d'autres pays européens et des modalités d'agrément des prestataires étrangers. En effet, la France est à ce jour le seul pays de l'Union européenne à disposer du chèque-vacances, la Suisse ne faisant pas partie de l'Union européenne. Si des initiatives sont en cours en Italie, en Espagne et au Portugal, tous ces pays n'en sont qu'au début de la mise en place.

Ma réflexion est guidée par un double souci.

L'ouverture vers l'Union européenne me paraît indispensable car les salariés à revenus modestes ne doivent pas être privés du droit de découvrir d'autres pays de l'Union européenne ; cela correspond à ma vision d'une Europe du progrès social et de la fraternité.

Mais il faut préserver les équilibres économiques dans le secteur du tourisme, et ne pas déséquilibrer l'industrie touristique nationale.

Le Gouvernement indiquera à l'Assemblée nationale, lors de la deuxième lecture du projet de loi, les dispositions qu'il entend prendre en ce domaine. Nous profiterons de ce délai, mes collègues et moi, pour travailler sur ce sujet.

Je demande donc le retrait de cet amendement, ainsi que du sous-amendement no 18 - dont je comprends tout à fait l'inspiration, ayant moi-même évoqué le problème de la réciprocité devant la commission, mais cet a mendement posant des questions juridiques qu'il convient d'analyser avec précision - et du sous-amendement no

42.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Madame la secrétaire d'Etat, nous comprenons votre demande. Effectivement, les sous-amendements de M. Blanc et de M. Deprez donnent matière à discussion, et nous devons encore travailler sur ce sujet.

Pourquoi avons-nous seulement retenu la zone euro ? Parce que les chèques-vacances seront rédigés dans une même monnaie, ce qui posera moins de difficultés.

Par ailleurs, effectivement, un pays ne peut pas imposer la réciprocité à un autre pays.

M. Jean-Claude Lefort.

Sauf les Etats-Unis !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Nous voulons cependant tous élargir le champ du chèque-vacances et nous attendons de connaître les orientations que le Gouvernement nous indiquera en deuxième lecture.

Je suis donc d'accord pour retirer l'amendement.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Cosignataires de l'amendement no 3, les députés communistes tiennent compte de ce qu'a dit Mme la ministre. Nous souhaitons étendre l'utilisation du chèque-vacances à la zone euro, mais il semble que toutes les implications de ce choix n'aient pas été évaluées. Nous sommes donc d'accord pour que l'amendement no 3 soit retiré, de même que l'amendement no

16.

M. le président.

L'amendement no 3 est retiré ; les sous-amendements nos 42 et 18 n'ont donc plus d'objet.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Nous demandons que le chèquevacances ne se limite pas à la zone euro ; nous devons en effet tenir compte de la clientèle de l'ensemble de l'Union européenne et, en particulier, de la clientèle britannique. Il appartient à l'agence de faire son métier en ce qui concerne les changes.

Nous proposons par ailleurs d'étendre le champ du chèque-vacances à la Confédération helvétique pour les raisons qu'a indiquées notre collègue Jean-Michel Couve, mais, eu égard à ce qu'a dit Mme la secrétaire d'Etat, nous espérons qu'il sera possible de trouver une solution en deuxième lecture.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc.

Monsieur le président, j'aurais voulu reprendre l'amendement no

3.

M. le président.

Trop tard ! Monsieur Blanc, quand on veut reprendre un amendement, il faut aller très vite.

M. Jacques Blanc.

J'avais levé la main !

M. le président.

Il faut aller plus vite encore. (Sourires.)

Je mets aux voix l'article 1er , modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er , ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 1er

M. le président.

L'amendement no 16 de M. Malavieille portant article additionnel après l'article 1er a été retiré.

Article 2

M. le président.

« Art. 2. - I. - Dans les premier et deuxième alinéas de l'article 2 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, le nombre : "9 000" est remplacé par le nombre : "20 000".

« II. - Dans le troisième alinéa du même article, le mot : "interprofessionnel" est supprimé.

« III. - L'avant-dernier alinéa du même article est ainsi rédigé :

« La contribution de l'employeur est exonérée des taxes prévues aux articles 224, 231, 235 bis et 235 ter C du code général des impôts. »

M. Terrier, rapporteur, M. Gremetz et les commissaires membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 4, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 2 :

« L'article 2 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 2. I. - Les salariés doivent justifier chaque année, auprès de leur employeur, que le montant des revenus de leur foyer fiscal de l'avant-dernière année, tels qu'ils sont définis au V de l'article 1417 du code général des impôts, n'excède pas la somme de 86 840 francs pour la première part de quotient familial, majorée de 19 770 francs par demi-part supplémentaire. Ces chiffres sont actualisés chaque année, dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.

« II. - L'avantage résultant de la contribution de l'employeur à l'acquisition des chèques-vacances par les salariés est exonéré de l'impôt sur le revenu, dans la limite du salaire minimum de croissance apprécié sur une base mensuelle.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

« Cette contribution de l'employeur est exonérée de la taxe sur les salaires prévue à l'article 231 du code général des impôts.

« Les chèques-vacances sont dispensés du timbre.

« III. - L'employeur, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ou de toute autre instance de concertation ayant compétence en matière d'oeuvres sociales, définit, sous réserve des dispositions du 2o du II de l'article 2 bis de la présente ordonnance, les modalités de l'attribution éventuelle de chèques-vacances à ses salariés qui répondent aux conditions fixées au présent article. »

Sur cet amendement, je suis saisi de deux sousamendements, nos 21 et 23.

Le sous-amendement no 21, présenté par le Gouvernement, est ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du I de l'amendement no 4, substituer respectivement aux sommes : "86 840 " et "19 770", les sommes : "87 680" et "19 990". »

Le sous-amendement no 23, présenté par M. Blanc, est ainsi rédigé :

« Au début du premier alinéa du II de l'amendement no 4, après le mot : "avantage", insérer les mots : "en nature". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

4.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

L'amendement no 4 vise à revenir au texte initial, car le Sénat a dénaturé le projet.

Le revenu fiscal de référence est une mesure de justice sociale, je l'ai déjà dit. On sait très bien que, pour un montant d'impôt égal, on a des situations économiques très différentes, et le revenu fiscal de référence est tout de même plus juste. Même si l'on peut souhaiter des critères sociaux, celui-ci a le mérite d'exister.

Le Sénat avait prévu de doubler le plafond des cotisations fiscales et de le faire passer à 20 000 francs.

Les orateurs se sont interrogés, dans la discussion générale, sur les conséquences de l'application du revenu fiscal de référence. Elles sont assez simples. De 2 % à 4 % des personnes peuvent bénéficier aujourd'hui, par le biais de l'article 1er de l'ordonnance de 1982, du chèque-vacances, et pourraient ne plus en bénéficier. Cela ne les empêchera au demeurant pas d'en bénéficier grâce à l'article 6. Vous avez raison de dire que l'effectif potentiel est composé des 7,5 millions de salariés des PME-PMI. Encore faut-il savoir combien d'entre eux pourraient, par le biais de l'article 1er , accéder au chèque-vacances. A l'heure actuelle, le pourcentage est de 75 %, ce qui est assez important.

Les 25 % restants pourront également accéder au c hèque-vacances, mais uniquement par le biais de l'article 6 de l'ordonnance...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Voilà !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

... dès l'instant où, de façon paritaire, les conditions d'accès auront été négocié es avec des organismes sociaux à créer.

Il y a donc là une large extension, tant en nombre qu'en qualité.

M. Jean-Michel Couve.

Mais les organismes restent à créer.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Absolument ! Ils sont à inventer.

Je suis bien entendu à votre disposition pour améliorer le texte et vous donner toutes les explications nécessaires, et j'espère que, désormais, le débat est plus clair.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat au tourisme, pour défendre le sous-amendement no 21 et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no

4.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Favorable à l'amendement no

4. Le sous-amendement no 21 a pour objet d'intégrer l'actualisation du plafond des revenus des bénéficiaires du chèque-vacances, qui tient compte du barème de l'impôt sur le revenu pour 1998.

M. le président.

Le sous-amendement no 23 n'est pas défendu.

Je mets aux voix le sous-amendement no

21. (Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 4, modifié par le sous-amendement no

21. (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.

Article 3

M. le président.

« Art. 3. I. Il est inséré, après l'article 2 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, un article 2 bis ainsi rédigé :

« Art. 2 bis L'avantage résultant de la contribution de l'employeur à l'acquisition des chèques-vacances par les salariés satisfaisant à la condition de ressources fixée à l'article 2 est exonéré de l'ensemble des cotisations et contributions prévues par la législation du travail et de la sécurité sociale, à l'exception de la contribution pour le remboursement de la dette sociale. Le montant de l'avantage donnant droit à exonération, qui ne peut excéder le plafond fixé au dernier alinéa de l'article 3, est limité, par salarié et par an, à 40 % du salaire minimum de croissance apprécié sur une base mensuelle ; ce taux est majoré de dix points par enfant à charge au sens des articles 6 et 196 du code général des impôts.

« L'exonération prévue à l'alinéa précédent n'est accordée que si :

« 1o La fraction de la valeur des chèques-vacances prise en charge par l'employeur est modulée en faveur des salariés dont les rémunérations sont les plus faibles et comporte une majoration pour enfant à charge ;

« 2o La contribution de l'employeur ne se substitue à aucun élément faisant partie de la rémunération versée au salarié dans l'entreprise, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, ou prévu pour l'avenir par des stipulations contractuelles individuelles ou collectives. »

« II. L'extension des exonérations de charges sociales aux entreprises de cinquante salariés et plus et l'exonération de contribution sociale généralisée pour l'ensemble des entreprises sont compensées, à due concurrence, par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Maxime Gremetz, inscrit sur l'article.

M. Maxime Gremetz.

L'article 3 prévoit une exonération de charges, pour les entreprises de moins de cinquante salariés, sur les sommes consacrées à l'abondement par l'employeur. L'exonération est limitée à 30 % du SMIC sur une base mensuelle.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

L'article définit également les conditions auxquelles il doit être satisfait pour bénéficier de l'exonération et prévoit aussi qu'un accord d'entreprise doit être conclu pour valider la convention.

Le projet de loi prévoit l'exonération de cotisations sociales, hors CSG et RDS, pour les entreprises de moins de cinquante salariés et dépourvues de ce fait de comité d'entreprise.

Le Sénat et la droite à l'Assemblée ont proposé une exonération supplémentaire de la CSG. A mon avis, celle-ci ne tiendrait pas suffisamment compte de l'effort déjà consenti en ce qui concerne les cotisations sociales.

De plus, l'exonération de la CSG pour les comités d'entreprise se justifie aussi par le fait que ceux-ci ont desr esponsabilités qui vont bien au-delà des chèquesvacances, en raison de leur rôle dans la gestion des activités sociales et culturelles.

Cela pourrait inciter à encourager l'absence de comité d'entreprise, ce qui n'est pas souhaitable, on en conviendra.

Par ailleurs, le Sénat a proposé de porter à 40 %, au lieu de 30 %, du montant du SMIC le plafond ouvrant droit à exonération. Le montant de 30 % donne une marge suffisamment importante puisqu'il correspond au double du montant actuel. En faisant le calcul sur la base du SMIC actuel, le montant de l'exonération s'élève à 2 309 francs, ce qui n'est pas négligeable.

L'esprit qui a présidé à l'instauration du chèquevacances était de donner un avantage social aux salariés qui ont un revenu modeste. Gardons à l'esprit cet objectif, afin que le chèque-vacances ne soit pas détourné et ne devienne pas un avantage fiscal pour les employeurs.

En ce qui concerne la notion de salarié, le projet de loi fait explicitement référence à l'article L.

242-1 du code de la sécurité sociale. L'ajout du mot « salarié » est donc inutile et superflu.

La proposition visant à supprimer l'obligation d'un accord d'entreprise pour bénéficier des exonérations présente plusieurs inconvénients. D'abord, il faut distinguer les différentes prérogatives des organisations syndicales et des comités d'entreprise.

Les organisations syndicales ont vocation à négocier et à signer des accords. S'il n'existe pas d'organisation syndicale dans l'entreprise, le projet de loi reprend le dispositif de mandatement de la loi du 13 juin 1998 sur la réduction du temps de travail. Nous savons que ce dispositif est efficace puisque 43 % des accords portant sur la réduction du temps de travail ont été conclus par le biais du mandatement.

Les délégués du personnel, quant à eux, ont pour mission de défendre les intérêts individuels et collectifs des salariés. Les rôles ne doivent pas se confondre si l'on ne veut pas créer une confusion préjudiciable au dialogue social.

J'ajoute qu'un accord collectif obéit à des règles de négociation, de révision et de dénonciation très précises.

Si l'employeur mettait en place les chèques-vacances sans accord collectif, il s'agirait d'un accord unilatéral dont les g aranties juridiques sont très différentes, puisque l'employeur peut décider seul d'y mettre un terme, et les règles sont beaucoup moins contraignantes que celles imposées par un accord collectif. Pour garantir le dialogue social et assurer une garantie juridique supérieure, l'employeur qui veut bénéficier d'une exonération des cotisations sociales devra se prévaloir d'un accord collectif, et nous sommes d'accord sur ce point.

La mise en place des chèques-vacances permettrait concrètement le départ en vacances de salariés aux revenus modestes et le développement des activités de tourisme. Elle permettrait aussi une incitation au dialogue social. Négocier pour la mise en place de chèquesvacances permettra vraisemblablement, dans de nomb reuses petites et moyennes entreprises, l'ouverture d'autres négociations. Ne remettons pas cette possibilité en cause et prenons-la comme une chance permettant d'améliorer le dialogue social sous un prétexte bien sympathique, puisqu'ils s'agira de parler de vacances.

M. le président.

M. Terrier, rapporteur, a présenté un amendement, no 5, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 3 :

« Il est inséré après l'article 2 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, un article 2 bis ainsi rédigé : Art. 2 bis. I. Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, dépourvues de comité d'entreprise et qui ne relèvent pas d'un organisme paritaire mentionné au second alinéa de l'article 6 de la présente ordonnance, l'avantage résultant de la contribution de l'employeur à l'acquisition des chèques-vacances par les salariés satisfaisant à la condition de ressources fixée au I de l'article 2 est exonéré des cotisations et contributions prévues par la législation du travail et de la sécurité sociale, à l'exception de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale. Le montant de l'avantage donnant droit à exonération, qui ne peut excéder les plafonds fixés au dernier alinéa de l'article 3, est limité, par salarié et par an, à 30 % du salaire minimum de croissance apprécié sur une base mensuelle.

« II. L'exonération prévue au I ci-dessus est accordée si :

« 1o La fraction de la valeur des chèques-vacances prise en charge par l'employeur est plus élevée pour les salariés dont les rémunérations sont les plus faibles ;

« 2o Le montant de la contribution de l'employeur et les modalités de son attribution, notamment la modulation définie conformément au 1o ci-dessus, font l'objet soit d'un accord collectif de branche au niveau national, régional ou local prévoyant des modalités de mise en oeuvre dans les entreprises de moins de cinquante salariés, soit d'un accord conclu dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l'article L.

132-30 du code du travail, soit d'un accord d'entreprise conclu avec un ou plusieurs délégués du personnel désignés comme délégués syndicaux ou, en l'absence d'une telle représentation syndicale avec un ou plusieurs salariés mandatés dans les conditions prévues au III de l'article 3 de la loi no 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail.

« 3o La contribution de l'employeur ne se substitue à aucun élément faisant partie de la rémunérat ion versée dans l'entreprise, au sens de l'article L.

242-1 du code de la sécurité sociale, ou prévu pour l'avenir par des stipulations contractuelles individuelles ou collectives. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Sur cet amendement, le Gouvernement a présenté un sous-amendement, no 22, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'avant-dernier alinéa (2o ) de l'amendement no 5 :

« 2o Le montant de la contribution de l'employeur et les modalités de son attribution, notamment sa modulation définie conformément au 1o ci-dessus, font l'objet soit d'un accord d'entreprise conclu avec un ou plusieurs délégués syndicaux ou délégués du personnel désignés comme délégués syndicaux, ou, en l'absence d'une telle représentation syndicale, avec un ou plusieurs salariés mandatés dans les conditions prévues au III de l'article 3 de la loi no 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail, soit d'un accord conclu dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l'article L.

132-30 du code du travail. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

5.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

M. Gremetz a en fait développé les arguments à l'appui de cet amendement. Il s'agit de revenir au texte initial du projet et de préciser q ue le mandatement ne sera utilisé que lorsque l'ensemble des autres possibilités auront été explorées sans succès.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat, pour présenter le sous-amendement no 22 et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no

5.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

N'étant pas totalement convaincue par cet amendement, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée et je retire mon sousamendement.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. le président.

Le sous-amendement no 22 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 3 est ainsi rédigé.

Article 4

M. le président.

« Art. 4. - Le premier alinéa de l'article 3 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée est ainsi rédigé :

« Le montant de la contribution de l'employeur et les modalités de son attribution font l'objet soit d'une consultation du comité d'entreprise, soit d'un accord d'entreprise conclu avec un ou plusieurs délégués syndicaux ou délégués du personnel désignés comme délégués syndicaux, soit, en l'absence de tels délégués, d'un accord d'entreprise conclu en application d'un accord de branche mettant en oeuvre les dispositions de l'article 6 de la loi no 96-985 du 12 novembre 1996 relative à l'information et à la consultation des salariés dans les entreprises et les groupes d'entreprises de dimension communautaire, ainsi qu'au développement de la négociation collective, ou conclu avec un ou plusieurs salariés mandatés dans les conditions prévues au III de l'article 3 de la loi no 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative au temps de travail, soit d'un accord conclu dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l'article L. 132-30 du code du travail. A titre expérimental, dans l es entreprises de moins de cinquante salariés où n'existent pas de délégués syndicaux ou de délégués du personnel désignés comme délégués syndicaux ni de salariés mandatés dans les conditions prévues au III de l'article 6 de la loi no 96-985 du 12 novembre 1996 précitée ou au III de l'article 3 de la loi no 98-461 du 13 juin 1998 précitée, le montant de la contribution de l'employeur et les modalités de son attribution peuvent être fixés après consultation des délégués du personnel. »

M. Terrier, rapporteur, M. Gremetz et les commissaires membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 6, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 4 :

« Le premier alinéa de l'article 3 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée est supprimé. »

La parole est M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Retour au texte initial.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

6. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé.

Article 4 bis

M. le président.

« Art. 4 bis. - I. - Le deuxième alinéa de l'article 3 de l'ordonnance no 82-283 du 6 mars 1982 précitée est ainsi rédigé :

« Les salariés acquièrent les chèques-vacances dans le cadre d'un plan d'épargne par des versements mensuels obligatoirement répartis sur trois mois au moins et d'un montant compris entre 2 % et 20 % du salaire minimum de croissance apprécié sur une base mensuelle. »

« II. - La dernière phrase du dernier alinéa de l'article 3 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée est supprimée. »

M. Terrier, rapporteur, M. Gremetz et les commissaires membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 7, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 4 bis :

« Dans le deuxième alinéa de l'article 3 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, le pourcentage "4 %" est remplacé par le pourcentage "2 %". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Nous avons pensé que le pourcentage de 4 % du SMIC, qui représente 270 francs d'épargne, était un peu lourd. Nous proposons de ramener à 2 % du SMIC le montant minimal des versements m ensuels des salariés pour bénéficier des chèquesvacances.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 4 bis est ainsi rédigé.

Article 4 ter

M. le président.

« Art. 4 ter. - Au début du dernier alinéa de l'article 4 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, les mots : " Le salarié titulaire" sont remplacés par les mots : " Le titulaire". »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

M. Terrier, rapporteur, a présenté un amendement, no 8, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 4 ter. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Cet amendement tend à revenir au texte initial de l'ordonnance de 1982.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

8. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 4 ter est supprimé.

Article 4 quater

M. le président.

« Art. 4 quater. - Dans le deuxième alinéa de l'article 5 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, les mots : "ministre du temps libre" sont remplacés par les mots : "ministre chargé du tourisme". »

M. Gérard Terrier, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 9, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 4 quater :

« Dans le deuxième alinéa de l'article 5 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, les mots "de l'économie et des finances et du ministre du temps libre" sont remplacés par les mots "chargé du tourisme". »

M. Maxime Gremetz.

C'est un amendement important !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Nous proposons que la tutelle de l'Agence nationale pour les chèques-vacances soit exercée par le ministre chargé du tourisme.

M. Jean-Michel Couve.

Très bien !

M. Michel Bouvard.

Excellente proposition !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Monsieur le rapporteur, par cet amendement, vous souhaitez mettre fin à la tutelle du ministère de l'économie et des finances sur l'Agence nationale pour les chèques-vacances. Je prends acte de l'hommage que vous rendez par la même au secrétariat d'Etat au tourisme (Sourires.).

Je rappellerai toutefois que l'ANCV est un établissement public, industriel et commercial et qu'elle est en principe soumise à ce titre au contrôle financier de l'Etat.

En outre, l'Agence nationale pour les chèques-vacances est chargée d'émettre un titre de paiement. Cette mission fondamentale me paraît exiger que le ministère de l'économie et des finances exerce, pour ce qui le concerne, une cotutelle avec le secrétariat d'Etat au tourisme.

C'est pourquoi je vous propose de confirmer la tutelle du ministère de l'économie et des finances et d'actualiser l'ordonnance en remplaçant la référence au ministre « du temps libre » par celle du ministre « chargé du tourisme ».

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Dans mon intervention générale, j'ai bien précisé qu'il s'agissait, au-delà du symbole, d'une reconnaissance du ministère du tourisme. J'ai également bien marqué que le chèque-vacances est totalement lié au tourisme.

Pour ce qui est de l'aspect comptable et financier, le fait que le ministère de l'économie et des finances exerce t outes ses prérogatives administratives peut se comprendre. Mais, sur le plan politique, il me semble important que ce soit le ministère du tourisme qui exerce la tutelle de l'ANCV, car cela ressortit tout de même à sa mission.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

9. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Ce texte devient l'article 4 quater.

M. Terrier, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 10, ainsi libellé :

« Compléter l'article 4 quater par le paragraphe suivant :

« II. - Il est inséré après le dernier alinéa de l'article 5 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, un alinéa ainsi rédigé :

« Le ministre chargé du tourisme rend public chaque année un rapport établissant un bilan économique et social de l'utilisation du chèque-vacances. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Compte tenu des masses émises par l'Agence nationale pour les chèques-vacances, il me semble souhaitable que le ministre chargé du tourisme, qui vient d'être investi de la tutelle, ce dont je le félicite (Sourires), rende public chaque année un rapport établissant le bilan économique et, surtout, social de l'utilisation des chèques-vacances. Pour ce faire, il se procurera toutes les informations utiles auprès de l'agence.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Favorable.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Je partage le souci de mes collègues, mais je ferai observer que les documents élaborés chaque année par l'Agence nationale pour les chèquesvacances sont déjà de bonne qualité et l'on peut y trouver une bonne partie des informations voulues. Le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges et le rapporteur spécial du budget du tourisme de la commission des finances étudient d'ailleurs ces documents chaque année avec attention.

Sans être hostile à l'idée d'un rapport, je me demande si la disposition proposée ne serait pas redondante et si les missions de contrôle exercées par les différents rapporteurs ne permettent pas déjà d'obtenir les informations dont il s'agit.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Je soutiens l'amendement no 10 car nous pourrons procéder à une analyse plus fine. Nouss aurons, par exemple, pourquoi certains salariés ne partent pas en vacances malgré le dispositif mis en place.

M. Michel Bouvard.

Exact !

M. Jean-Pierre Dufau.

Cet amendement rejoint l'amendement no 14 rectifié, qui prévoit la publicité et l'information concernant les chèques-vacances.

Je pense donc que le rapport proposé est non seulement nécessaire, mais qu'il est aussi le point de départ d'une extension réelle du chèque-vacances.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Je soutiens également l'amendement car, alors qu'il peut y avoir des contestations de chiffres, il permettra de disposer de toutes les informations nécessaires...

M. Michel Bouvard.

J'ai été convaincu par le rapporteur !

M. Maxime Gremetz.

... et de corriger un certain nombre de choses, en particulier en ce qui concerne les CES.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Nous sommes favorables nous aussi au rapport car il permettra de révéler la nécessité d'ouvrir le dispositif.

Je suis persuadé que, dans quelques années, l'urgence de prendre de nouvelles mesures pour aller plus loin et ouvrir le champ d'action des chèques-vacances apparaîtra.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

10. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 4 quater dans le texte de l'amendement no 9 complété par l'amendement no

10. (L'article 4 quater, ainsi rédigé, est adopté.)

Article 5

M. le président.

« Art. 5. - L'article 6 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Peuvent également être versées sous forme de chèques-vacances les aides aux vacances accordées par tout organisme paritaire de gestion d'une ou plusieurs activités sociales, dont la création et les principes de fonctionnement sont prévus par un accord collectif de branche, ou territorial, conclu conformément aux articles L. 132-1 et suivants du code du travail. »

M. Terrier, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 11 rectifié, ainsi rédigé :

« Avant le premier alinéa de l'article 5, insérer le paragraphe suivant :

« I. - A l'article 6 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, les mots "bureaux d'aides ociale" sont remplacés par les mots "centres communaux d'action sociale". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement de précision, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 12 et 20 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 12, présenté par M. Terrier, rapporteur, Mme Génisson et les commissaires membres du groupe socialiste est ainsi libellé :

« Avant le premier alinéa de l'article 5, insérer le paragraphe suivant :

« I. - Après le premier alinéa de l'article 6 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les retraités, notamment ceux dont les pensions de retraite sont les plus faibles, peuvent acquérir des chèques-vacances par l'intermédiaire des caisses de retraite dont ils relèvent. Celle-ci ont la possibilité de passer une convention avec l'établissement chargé d'émettre les chèques-vacances visé à l'article 5. »

L'amendement, no 20 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi rédigé :

« Avant le premier alinéa de l'article 5, insérer le paragraphe suivant :

« I. - Le premier alinéa de l'article 6 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée est complété par les mots : "en particulier aux retraités". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

12.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Cet amendement est nécessaire pour des raisons sociales : il vise à permettre l'accès aux vacances à des personnes qui ont travaillé toute leur vie.

En outre, il favorisera l'économie car les retraités, et Mme la secrétaire d'Etat ne me démentira pas, constituent en matière de tourisme un public très important.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 12 et présenter l'amendement no 20 rectifié.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Par l'amendement no 12, vous souhaitez, monsieur le rapporteur, attirer l'attention sur la situation des retraités dont la pension est faible. Vous souhaitez que les caisses de retraite aident plus largement les retraités dont les pensions sont modestes. C'est également mon souci.

Toutefois, on ne peut imposer à des caisses de retraite relevant de l'article 6 de l'ordonnance des obligations que les autres organismes sociaux relevant du même article ne se verraient pas imposer.

En outre, prévoir pour ces caisses une convention que les autres organismes sociaux ne mettent pas en oeuvre, peut déséquilibrer cet article 6 et limiter singulièrement les possibilités de conventionnement, qui relèvent de la gestion de l'Agence.

J'ai souhaité engager un dialogue avec les caisses de retraite, dont j'espère que, à l'image de ce qui s'est passé avec la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, il permettra un accès plus large aux vacances pour les retraités dont les pensions sont modestes. Cela passe, de mon point de vue, non par la loi, mais par le dialogue avec les intéressés.

C'est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer l'amendement no

12. Le Gouvernement propose quant à lui un amendement visant à compléter le premier alinéa de l'article 6 de l'ordonnance par les mots : « en particulier aux retraités ».

Il me paraît bon que le législateur oriente la réflexion des acteurs sociaux et conforte le Gouvernement dans sa volonté de faire bénéficier les retraités comme les salariés


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

à revenus modestes du chèque-vacances. Voilà pourquoi je propose à l'Assemblée d'adopter ce dernier amendement.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

J'ai été à l'initiative de l'amendement no 12 mais, n'étant pas membre de la commission des affaires culturelles, je n'ai pu le déposer en mon nom propre. Je défendrai donc le point de vue de Mme Génisson.

Etant donné les explications du Gouvernement, nous sommes prêts, en ce qui nous concerne, à retirer l'amendement no 12 pour voter celui du Gouvernement, mais n ous demanderons des comptes sur ce dossier en deuxième lecture, à l'occasion de laquelle nous nous réservons la possibilité de présenter, le cas échéant, un amendement analogue.

M. Maxime Gremetz.

Nous sommes d'accord !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Il n'appartient pas à

M. Dufau de retirer un amendement de la commission.

M. Jean-Pierre Dufau.

J'ai bien précisé que je parlais au nom de Mme Génisson !

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Certes ! Mais, sur la forme, je suis un peu gêné, car il m'est assez difficile de retirer un amendement adopté par la commission et de me rallier à un amendement du Gouvernement que cette même commission a repoussé, même si j'en comprends les motivations.

Dans ces conditions et puisqu'il y aura une deuxième lecture, je propose à l'Assemblée d'adopter l'amendement no 12, étant précisé que nous reviendrons ultérieurement sur le problème législatif soulevé par le Gouvernement et que nous étudierons avec beaucoup d'attention les propositions qu'il pourra nous faire.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Couve.

M. Jean-Michel Couve.

Je ne suis pas certain que le texte de loi que nous examinons aujourd'hui soit véritablement finalisé. En effet, voilà que, par le biais de l'article 6 de l'ordonnance, ce qui n'a pas été fait à l'article 1er est en quelque sorte récupéré.

L'amendement de la commission tend à désigner les retraités comme des bénéficiaires potentiels du chèquevacances. Mais vous allez plus loin, madame la secrétaire d'Etat, puisque vous ne voulez pas imposer aux caisses de retraite des contraintes que d'autres organismes sociaux n'ont pas. Or il n'est pas question de cela : il est question d'étudier avec les caisses de retraite la manière dont elles pourraient être concernées afin que les retraités à revenus très modestes puissent réellement bénéficier des chèquesvacances.

La deuxième lecture sera décidément très importante.

(Sourires.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Je ferai observer à M. Couve que l'amendement de la commission comporte le mot :

« peuvent ».

M. Jean-Michel Couve.

Je l'avais bien noté !

M. Jean-Pierre Dufau.

A la suite des précisions que n ous a données le rapporteur, je me rallie à sa proposition.

De toute façon, nous reviendrons sur le sujet en deuxième lecture.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

12. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 20 rectifié n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Article 6

M. le président.

« Art. 6. - Dans le premier alinéa de l'article 5 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, avant les mots : "chargé notamment d'émettre les chèques-vacances", il est inséré le mot : "seul". »

Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

Article 7

M. le président.

« Art. 7. Après le premier alinéa de l'article 5 de l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 précitée, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Cet établissement public est chargé de promouvoir et diffuser le titre nominatif "chèques-vacances" en France et à l'étranger. A cette fin, il est autorisé à conclure des conventions de partenariat avec des entreprises ou organismes susceptibles d'en assurer la plus large diffusion.

« Il rend public chaque année un rapport établissant un bilan économique et social de l'utilisation du chèquevacances. »

M. Terrier, rapporteur, a présenté un amendement, no 13, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 7. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

Il s'agit de revenir au texte initial de l'ordonnance.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

13. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 7 est supprimé et les amendements nos 35 et 40 de M. Deprez n'ont plus d'objet.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

L'amendement no 35 corrigé visait à ouvrir l'horizon tout en conciliant la volonté de maintenir le monopole de l'agence et celle de favoriser la commercialisation. Avec Jean-Michel Couve, nous proposions que l'agence puisse concéder des délégations à des organismes ou à des groupements privés spécialisés, de manière à permettre, sous son contrôle, un développement de l'activité des chèques-vacances à son profit, mais surtout à celui des Français dont les revenus sont très modestes.

Il s'agit d'une piste nouvelle qui pourrait être explorée dans un esprit de partenariat et d'ouverture économique et sociale.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

M. le président.

Certes, mais comme je l'ai dit, cet amendement n'a plus d'objet.

Après l'article 7

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 14 rectifié et 17, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 14 rectifié, présenté par M. Terrier, rapporteur, M. Gremetz et les commissaires membres du groupe communiste est ainsi rédigé :

« Après l'article 7, insérer l'article suivant :

« Toutes les mesures nécessaires seront prises afin de permettre une large diffusion des dispositions de la présente loi au sein des entreprises, sociétés et organismes visés à l'article 1er de l'ordonnance no 82283 du 26 mars 1982 précitée. »

L'amendement no 17, présenté par MM. Malavieille, Gremetz, Vila et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« Après l'article 7, insérer l'article suivant :

« Il sera pris toutes les mesures nécessaires afin de permettre une large diffusion des dispositions de la présente loi au sein des entreprises, sociétés et organismes visés par l'article 1er de l'ordonnance no 82283 du 26 mars 1982 modifiée. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 14 rectifié.

M. Gérard Terrier, rapporteur.

On peut se demander si les articles que tendent à insérer les deux amendements ont leur place dans le dispositif législatif que nous examinons.

Ces amendements, dont le premier a été adopté par la commission, visent à promouvoir par voie publicitaire et d'annonces la diffusion des chèques-vacances. On ne peut être opposé à une telle disposition.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir l'amendement no

17.

M. Maxime Gremetz.

Je propose de mettre de côté l'amendement no 17 et j'invite l'Assemblée à adopter l'amendement que j'ai présenté avec M. Terrier et que la commission a adopté. Je suis donc pour l'amendement no 14 rectifié.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements ?

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 14 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 17 n'a plus d'objet.

Explications de vote

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Je m'en tiendrai à quelques points.

Tout d'abord, il faut reconnaître que notre débat a été positif. Nous avons pu dialoguer pour aboutir à une meilleure appréhension de la nécessité d'ouvrir le champ d'action des chèques-vacances pour des raisons tant sociales qu'économiques.

Je remercie le président Le Garrec d'avoir joué un rôle positif en favorisant l'ouverture de nos réflexions, au sein d'un groupe de travail qui lui est apparu, à lui comme à nous, nécessaire, sur une clientèle des chèques-vacances plus large, concernant des Français qui ont droit, eux aussi, à accéder aux vacances et qui sont originaires de milieux très divers.

Cependant, au stade où nous sommes, nous voterons contre le projet de loi car nous n'avons pas obtenu de réponse à nos questions.

M. Maxime Gremetz.

Quel esprit d'ouverture !

M. Léonce Deprez.

Nous ne pouvons pas avoir dit tout ce que nous avons dit et approuver le texte !

M. Maxime Gremetz.

Vous l'approuviez pourtant !

M. Léonce Deprez.

Tout se passera entre la première et la deuxième lecture. Nous espérons bien que, grâce au groupe de travail, où vous pourrez faire preuve de la même compréhension que celle que vous témoignez depuis plusieurs quarts d'heure à l'égard de nos propositions, nous aurons toutes les raisons de voter pour en deuxième lecture.

M. Jean-Claude Lefort.

C'est un « pour » camouflé ! (Sourires.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Je regrette que l'esprit de dialogue qui a prévalu et l'esprit d'ouverture qui été unanimement reconnu ne conduisent pas M. Deprez à des conclusions plus logiques. Il aura une chance de se rattraper en deuxième lecture.

Je voudrais remercier Mme la secrétaire d'Etat de nous avoir présenté un projet de loi qui constitue la base d'une avancée sociale indéniable.

Le président Le Garrec, en proposant de créer un groupe de travail, a montré la volonté de la majorité de cette assemblée de faire du chèque-vacances un véritable outil social, sans exclure a priori de son bénéfice ceux qui, pour l'instant, n'en bénéficient pas.

Je remercie aussi le rapporteur et la commission qui dans l'ombre, ont accompli un travail considérable.

Je suis persuadé que ce que nous allons voter aujourd'hui en première lecture sera un élément important du dispositif des vacances sociales, pour lequel il restera encore d'autres chantiers à ouvrir.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Je veux d'abord, au nom du groupe communiste, remercier Mme la secrétaire d'Etat pour son projet de loi. Nous l'avons dit : ce texte de loi va loin, sa portée est sociale autant qu'économique, et il s'inscrit dans la satisfaction des besoins nouveaux.

Nous avons toujours en tête les 40 % de Français qui ne peuvent pas prétendre partir en vacances.

Nous attachons une grande importance au problème des CES. C'est avec conviction, madame la secrétaire d'Etat, que nous vous avons interrogée à ce sujet, sur lequel nous vous demandons de réfléchir. On ne peut pas avoir deux catégories de salariés avec des droits différents, y compris dans une même entreprise. Cela n'est pas possible.

M. Léonce Deprez.

C'est vrai !

M. Maxime Gremetz.

Je vous demande, madame la secrétaire d'Etat, de réfléchir à ce qui est un vrai problème.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

Par ailleurs, je croyais franchement que vous voteriez ce texte, messieurs de l'opposition, puisque vous considérez que c'est un progrès même si, selon vous, il ne va pas assez loin. Moi quand j'estime qu'un texte est un formidable progrès...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Vous votez pour le progrès !

M. Maxime Gremetz.

... je vote pour, même si je souhaite qu'il aille plus loin. Si vous estimiez que ce projet de loi opère un recul, vous pourriez voter contre. Mais là, je ne vous comprends pas !

M. Jean-Michel Couve.

Les mêmes raisons qui font que nous ne sommes pas la majorité font que nous ne voterons pas ce texte !

M. Maxime Gremetz.

En tous les cas, pour ce qui nous concerne, nous considérons comme positives l'extension du bénéfice des chèques-vacances aux 7,5 millions de salariés des entreprises de moins de cinquante salariés et l'instauration d'un dialogue social dans ces entreprises qui en manquent beaucoup. D'ailleurs, selon un sondage récent, 80 % des dirigeants de PME et des salariés seraient favorables à ce projet de loi. Ils risquent donc de ne pas apprécier votre vote négatif. C'est bien dommage ! En tout cas nous, nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Couve.

M. Jean-Michel Couve.

Nous n'allons ni refaire le texte, ni reprendre le débat. Je répète que nous attendons la deuxième lecture, car des éclairages intéressants seront sans doute apportés sur certains points. Mais, monsieur Gremetz, il ne faut pas raconter d'histoires ! Ce n'est pas parce que les responsables de PME sont, sur le principe, d'accord avec l'extension du chèque-vacances à leurs salariés qu'ils connaissent le texte.

M. Maxime Gremetz.

Dites qu'ils ne comprennent rien !

M. Jean-Claude Lefort.

Vous les prenez pour des imbéciles ?

M. Jean-Michel Couve.

Et quand ils l'auront lu, vous verrez qu'ils le trouveront bien décevant ! Vote sur l'ensemble

M. le président.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

3

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures quinze, troisième séance publique : Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux polices municipales : M. Jacky Darne, rapporteur (rapport no 1470).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 18 MARS 1999

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 2e séance du jeudi 18 mars 1999 SCRUTIN (no 162) sur le sous-amendement no 43 de M. Gremetz à l'amendement no 19 du Gouvernement à l'article 1er du projet de loi modifiant l'ordonnance no 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances (extension de leur bénéfice aux titulaires des contrats emploi solidarité).

Nombre de votants .....................................

42 Nombre de suffrages exprimés ....................

41 Majorité absolue ..........................................

21 Pour l'adoption ...................

16 Contre ..................................

25 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (250) : Contre : 25 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Laurent Fabius (président de l'Assemblée nationale).

Groupe R.P.R. (138) : Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe U.D.F. (70) : Pour : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (43) : Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. François d' Aubert (président de séance).

Groupe communiste (35) : Pour : 9 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Abstention : 1. - M. Ernest Moutoussamy

Groupe Radical, Citoyen et Vert (35).

Non-inscrits (5).