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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE Mme

NICOLE CATALA

1. Présomption d'innocence et droits des victimes. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 2915).

DISCUSSION

DES ARTICLES (suite) (p. 2915)

Article 19 (p. 2915)

M. Alain Tourret.

Amendement no 174 de M. Gerin : M. André Gerin, Mmes Christine Lazerges, rapporteur de la commission des lois ; Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. - Retrait.

Amendement no 109 de la commission des lois : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, M. Patrick Devedjian,

Mme Frédérique Bredin, M. Alain Tourret. - Adoption.

L'amendement no 32 de M. Devedjian n'a plus d'objet.

Amendement no 257 de Mme Bredin : Mmes Frédérique Bredin, le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 314 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

A mendements nos 110 de la commission et 246 de M. Tourret : M. Alain Tourret, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption de l'amendement no 110 ; l'amendement no 246 est satisfait.

Amendement no 33 corrigé de M. Devedjian : M. Patrick Devedjian, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. Rejet.

Adoption de l'article 19 modifié.

Après l'article 19 (p. 2919)

Amendement no 111 de la commission : Mmes le rapport eur, la garde des sceaux, M. Patrick Devedjian, Mme Frédérique Bredin, MM. Alain Tourret, Pierre Albertini, Jérôme Lambert. - Rejet.

Amendement no 112 de la commission : Mmes Frédérique Bredin, le rapporteur, la garde des sceaux, MM. Alain Tourret, Patrick Devedjian. - Adoption.

Avant l'article 20 (p. 2921)

Amendement no 113 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, M. Arnaud Montebourg. Retrait.

Article 20 (p. 2922)

M. Pierre Albertini.

Amendement no 114 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 115 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 116 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendements nos 117 et 118 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoptions.

Amendement no 119 de la commission, avec le sousamendement no 251 de M. Jean-Pierre Michel : Mme Frédérique Bredin, M. Patrick Devedjian, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, MM. Arnaud Montebourg, Louis Mermaz. - Retrait de l'amendement no 119 ; le sous-amendement n'a plus d'objet.

Amendement no 320 de Mme Lazerges : Mmes la garde des sceaux, Frédérique Bredin. - Adoption.

Adoption de l'article 20 modifié.

Article 21 (p. 2926)

Amendement no 120 rectifié de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, MM. Louis Mermaz, Arnaud Montebourg. - Rejet.

Adoption de l'article 21.

PRÉSIDENCE

DE

M.

ALAIN

COCHET Après l'article 21 (p. 2929)

Amendement no 247 de M. Tourret : M. Alain Tourret,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Retrait.

Amendement no 122 de la commission : M. Philippe Houillon, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. Adoption.

Amendement no 121 de la commission : Mmes Frédérique Bredin, le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 123 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 124 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption de l'amendement no 124 rectifié.

A mendement no 204 de M. Houillon : M. Philippe Houillon, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, Nicole Catala. - Rejet.

Amendement no 125 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Article 22 (p. 2933)

M. Léonce Deprez, Mme Frédérique Bredin, MM. Patrick Devedjian, Arnaud Montebourg, Mme la garde des sceaux.

Amendement no 126 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendements identiques nos 127 rectifié de la commission et 285 corrigé de Mme Catala : Mmes Nicole Catala, le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 208 de M. Albertini : M. Pierre Albertini, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, Frédérique Bredin, M. Patrick Devedjian. - Rejet.

Amendement no 128 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, M. Léonce Deprez. - Rejet.

Amendement no 286 de Mme Catala : Mmes Nicole Catala, le rapporteur, la garde des sceaux, Frédérique Bredin. Rejet.

Amendement no 259 de Mme Lignières-Cassou : Mme le rapporteur. - L'amendement n'est pas soutenu.

Amendement no 287 rectifié de Mme Catala : Mmes Nicole Catala, le rapporteur, la garde des sceaux. - Retrait.

Adoption de l'article 22 modifié.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Après l'article 22 (p. 2941)

Amendement no 129 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Article 23 (p. 2941)

Amendements de suppression nos 27 de M. Devedjian et 69 d e M. Albertini : MM. Patrick Devedjian, Léonce Deprez, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux.

Rappel au règlement (p. 2942)

MM. Pierre Albertini, Arnaud Montebourg.

Reprise de la discussion (p. 2942)

Mme Frédérique Bredin. - Rejet des amendements de suppression.

Amendement no 130 rectifié de la commission, avec le sousamendement no 260 de Mme Bredin : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, Frédérique Bredin. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié, qui devient l'article 23.

Article 24 (p. 2943)

M. Arnaud Montebourg.

A mendement no 28 de M. Devedjian : M. Patrick Devedjian, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, Frédérique Bredin. - Adoption.

Adoption de l'article 24 modifié.

Article 25 (p. 2944)

MM. Pierre Albertini, Philippe Houillon.

A mendement no 29 de M. Devedjian : M. Patrick Devedjian, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, Frédérique Bredin. - Rejet.

Amendement no 202 de M. Houillon : M. Philippe Houillon, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Rejet.

L'amendement no 203 est retiré.

Amendement no 49 de M. Albertini : M. Pierre Albertini,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 132 et 133 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, MM. Patrick Devedjian, Christophe Caresche. - Adoption.

Amendement no 133 de la commission. - Adoption.

Amendements identiques nos 30 de M. Devedjian et 193 de M. Houillon : M. Philippe Houillon, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 134 de la commission : Mmes Frédérique Bredin, le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 135 de la commission : M. Philippe Houillon, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. Adoption.

Amendement no 137 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendements identiques nos 31 de M. Devedjian et 194 de M. Houillon : M. Patrick Devedjian. - Ces amendements n'ont plus d'objet.

Amendement no 136 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 138 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendements identiques nos 139 de la commission et 206 de M. Albertini : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Adoption de l'article 25 modifié.

Article 26 (p. 2949)

Amendement no 207 de M. Albertini : M. Pierre Albertini,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Ce texte devient l'article 26.

Les amendements nos 44 de M. Devedjian, 313 de la commission, 261 de Mme Lignières-Cassou et 140 rectifié de la commission n'ont plus d'objet.

Article 27 (p. 2950)

Amendement no 142 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Les amendements nos 316 de la commission et 262 de Mme Lignières-Cassou n'ont plus d'objet.

Adoption de l'article 27 modifié.

Après l'article 27 (p. 2950)

A mendements nos 143 de la commission et 175 de M. Gerin : Mme le rapporteur, M. Alain Tourret, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 222 de M. Tourret : M. Alain Tourret,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 141 rectifié de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption de l'amendement no 141, deuxième rectification.

A mendement no 34 de M. Devedjian : M. Patrick Devedjian.

A mendement no 36 de M. Devedjian : M. Patrick Devedjian, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. Rejet des amendements nos 34 et 36.

Article 28. - Adoption (p. 2952)

Après l'article 28 (p. 2952)

Amendement no 144 de la commission : M. Pierre Albertini,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 145 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, Frédérique Bredin. - Adoption.

Amendement no 265 de Mme Picard : Mmes Catherine Picard, le rapporteur, la garde des sceaux, M. Pierre Albertini. - Adoption.

Avant l'article 29 (p. 2953)

Amendements nos 223 de M. Tourret, 146 de la commission et 176 de M. Gerin : M. Alain Tourret, Mme le rapporteur ; l'amendement no 176 n'est pas soutenu ; Mme la garde des sceaux. - Rejet de l'amendement no 223 ; adoption de l'amendement no 146.

Article 29. - Adoption (p. 2954)

Article 30 (p. 2954)

A mendements nos 147 de la commission et 224 de M. Tourret : M. Alain Tourret, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption de l'amendement no 147 ; l'amendement no 224 n'a plus d'objet.

Adoption de l'article 30 modifié.

Article 31. - Adoption (p. 2955)

Après l'article 31 (p. 2955)

Amendement no 310 de M. Gerin : M. Alain Tourret,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 151 de la commission : Mmes Frédérique Bredin, le rapporteur, la garde des sceaux, M. Arnaud Montebourg. - Rejet.

Amendement no 250 de M. Gouzes : M. Gérard Gouzes, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, M. Patrick Devedjian. - Adoption.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Amendement no 315 de M. Gerin : M. Alain Tourret,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendements identiques nos 153 de la commission et 226 de M. Tourret : M. Alain Tourret, Mmes le rapporteur, la garde des sceaux, M. Gérard Gouzes. - Rejet.

Amendement no 309 du Gouvernement : Mmes la garde des sceaux, le rapporteur, M. Alain Tourret. - Adoption.

Amendement no 148 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 149 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 317 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 150 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Avant l'article 32 (p. 2959)

Amendement no 177 de M. Gerin : M. Alain Tourret,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Rejet.

Article 32 (p. 2959)

Amendements nos 154 et 155 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoptions.

Adoption de l'article 32 modifié.

Article 33 (p. 2960)

Amendement no 156 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 157 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 178 de M. Gerin : M. Alain Tourret,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Rejet.

L'amendement no 158 de la commission n'a plus d'objet.

Amendement no 159 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 160 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 161 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 162 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Adoption de l'article 33 modifié.

Article 34 (p. 2962)

Amendement de suppression no 163 de la commission :

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

L'article 34 est supprimé.

Articles 35 à 39. - Adoption (p. 2962)

Article 40 (p. 2963)

Amendement no 164 de la commission : Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Adoption.

Adoption de l'article 40 modifié.

Titre (p. 2963)

Amendement no 45 de M. Albertini : M. Pierre Albertini,

Mmes le rapporteur, la garde des sceaux. - Rejet.

SECONDE DÉLIBÉRATION (p. 2963)

Article 15 (p. 2963)

Amendement no 1 du Gouvernement : Mmes la garde des sceaux, le rapporteur. - Adoption.

Adoption de l'article 15 modifié.

Article 25 (p. 2964)

Amendement no 2 du Gouvernement : Mmes la garde des sceaux, le rapporteur. - Adoption.

Adoption de l'article 25 modifié.

Article 26 (p. 2964)

Amendement no 3 du Gouvernement : Mmes la garde des sceaux, le rapporteur, M. Patrick Devedjian. - Adoption.

Ce texte devient l'article 26.

Renvoi des explications de vote et du vote à une prochaine séance.

2. Dépôt d'une proposition de loi (p. 2965).

3. Dépôt d'un rapport d'information (p. 2965).

4. Dépôt d'un rapport de l'Office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (p. 2965).

5. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 2966).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1 PRÉSOMPTION D'INNOCENCE ET DROITS DES VICTIMES Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes (nos 1079, 1468).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente.

Cet après-midi, l'Assemblée a p oursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'article 19.

Article 19

Mme la présidente.

Je donne lecture de l'article 19 : Section 3 Dispositions relatives à l'indemnisation des détentions provisoires

« Art. 19. - I. - L'article 149 du même code est ainsi modifié :

« 1o Après les mots : "un préjudice" sont rajoutés les mots : "matériel ou moral". »

« 2o L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la décision de non lieu, de relaxe ou d'acquittement lui est notifiée, la personne est avisée de son droit de demander une indemnisation, ainsi que des dispositions des articles 149-1 et 149-2. »

« II. L'article 149-2 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, les mots : "par une décision non motivée" sont remplacés par les mots : "par une décision motivée". »

« 2o La première phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée : "Les débats ont lieu en audience publique sauf opposition du requérant". »

La parole est à M. Alain Tourret, inscrit sur l'article.

M. Alain Tourret.

Je tiens à dire à quel point l'article 19 me satisfait, surtout avec les amendements proposés. L'indemnisation des victimes de détention provisoire, dont le nombre varie de 1 200 à 2 000 selon les années, est une nécessité absolue. En la prévoyant, le projet de loi fait faire un grand pas à notre démocratie.

Mme la présidente.

M. Gerin et les membres du g roupe communiste ont présenté un amendement, no 174, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 19 :

« Les articles 149, 149-1 et 149-2 du code de procédure pénale sont ainsi rédigés :

« Art.

149. - Sans préjudice de l'application des dispositions des articles 505 et suivants du code de procédure civile, une indemnité peut être accordée à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, lorsque cette détention lui a causé un préjudice.

« Art.

149-1. - L'indemnité prévue à l'article précédent est allouée par décision d'une commission auprès de la cour d'appel qui examine le dossier dans un délai de trois mois.

« La commission est composée de trois magistrats du siège à la cour d'appel.

« Ces magistrats sont désignés annuellement, en même temps que trois suppléants, par le bureau de la cour.

« Art.

149-2. - La commission saisie par voie de requête dans le délai de six mois de la décision devenue définitive, statue par une décision motivée qui est susceptible de recours auprès d'une commission composée dans les mêmes conditions auprès de la Cour de cassation.

« Le débat est oral et le requérant peut être entendu personnellement sur sa demande.

« La procédure devant la commission qui a le caractère d'une juridiction civile est fixée par un décret en Conseil d'Etat. »

La parole est à M. André Gerin.

M. André Gerin.

Cet amendement tend à mieux définir les conditions de l'indemnisation des détenus provisoires en cas de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenus définitifs. Sans aucun doute, la détention aura causé un préjudice moral et matériel certain.

Il nous semble opportun que l'indemnisation soit décidée collégialement par une commission auprès de la cour d'appel, qui devra motiver sa décision, et que cette décision soit susceptible de recours devant une commission composée dans les mêmes conditions auprès de la Cour de cassation. Tel est l'objet de notre amendement.

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour donner l'avis de la commission.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

La commission est défavorable à l'amendement de M. Gerin. L'amendement suivant va plus loin.

Mme la présidente.

La parole est à Mme le ministre de la justice, garde des sceaux, pour donner l'avis du Gouvernement.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

L'amendement de M. Gerin propose d'instituer des commissions d'indemnisation des détentions provisoires auprès de chaque cour d'appel, et de permettre un recours auprès d'une commission nationale.

Je ne suis pas favorable à cet amendement en l'état qui me semble prématuré. J'assure M. Gerin que le Gouvernement va poursuivre sa réflexion sur le sujet. La solution devra prendre en compte l'augmentation prévisible des d emandes d'indemnisation résultant de la réforme actuelle - l'augmentation est déjà très sensible depuis la réforme de 1996 -, ainsi que le renforcement des droits de la personne qui découle de l'existence d'un recours Une telle réforme doit faire l'objet d'une étude complémentaire. Le projet modifie déjà substantiellement le droit actuel, en prévoyant notamment l'indemnisation du préjudice moral et en exigeant la motivation des décisions. Il me paraît indispensable que la commission actuelle applique d'abord quelque temps ces nouvelles dispositions pour fixer le droit.

Si l'on modifiait en même temps le fond du droit et l'organisation judiciaire de la procédure d'indemnisation, nous nous exposerions pendant plusieurs années, je le crains, à des divergences de jurisprudences extrêmement regrettables, avant que la commission nationale puisse unifier les pratiques. Voilà pourquoi je pense que nous avons besoin d'un temps de réflexion même si, évidemment, la préoccupation exprimée ici est tout à fait louable.

Mme la présidente.

La parole est à M. André Gerin.

M. André Gerin.

Compte tenu des propos de Mme la ministre et de l'amendement suivant, je retire le mien.

Mme la présidente.

L'amendement no 174 est retiré.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 109, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le deuxième alinéa (1o ) du I de l'article 19 :

« 1o Après les mots : "une indemnité", la fin de cet article est ainsi rédigée : "est accordée, à sa demande, à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, afin de réparer le préjudice moral et matériel qu'elle a subi à c ette occasion. Toutefois, aucune indemnisation n'est due lorsque cette décision résulte de la reconnaissance de son irresponsabilité au sens de l'article 122-1 du code pénal, de la prescription ou de l'amnistie, ou lorsque la personne a fait l'objet d'une détention provisoire pour s'être librement et volontairement accusée ou laissée accuser à tort". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

C'est un amendement très important. Comme M. Gerin, M. Tourret et Mme la ministre de la justice, j'estime qu'il s'agit d'une avancée considérable, au point que je vais vous en donner lecture dans la version proposée par la commission des lois : « une indemnité est accordée à la demande de la victime à la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, afin de réparer le préjudice moral et matériel - Mme la garde des sceaux a insisté sur cette double réparation, - qu'elle a subi à cette occasion. Toutefois - car nous sommes obligés de prévoir certaines exceptions - aucune indemnisation n'est due lorsque cette décision résulte de la reconnaissance de son irresponsabilité au sens de l'article 122-1 du code pénal, de la prescription ou de l'amnistie, ou lorsque la personne a fait l'objet d'une détention provisoire pour s'être librement et volontairement accusée ou laissée accuser à tort. »

Nous ne saurions exiger, dans tous les cas, l'indemnisation systématique sans prévoir les quelques hypothèses où elle ne serait pas justifiée - après le mot : « toutefois » apparaissent trois exceptions.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Poser le principe de la réparation obligatoire d'une détention provisoire prononcée contre une personne qui bénéficie ensuite d'un non-lieu, d'une relaxe ou d'un acquittement, est évidemment légitime mais je souhaite qu'on l'assortisse de certaines exceptions.

Je m'interroge cependant sur l'énumération de celles qui sont prévues par l'amendement de la commission.

N'est-elle pas trop limitée ? Le cas de l'abrogation de la loi pénale, par exemple, n'est pas prévu. La question est, certes, théorique, mais si une personne est détenue provisoirement pour une infraction ensuite abrogée, on ne peut pas considérer qu'elle a été détenue à tort. C'est un premier problème.

N'est pas prévue non plus l'hypothèse de l'annulation de la procédure. Si une procédure est annulée pour vice de forme, ce qui entraîne un non-lieu pour la personne poursuivie, une indemnité est-elle justifiée...

M. Patrick Devedjian.

Mais oui !

Mme la garde des sceaux.

... alors même que de nouvelles poursuites, juridiquement respectueuses de la loi, peuvent aboutir à la condamnation de la personne.

Inversement, certaines des exceptions prévues par la commission pourraient être considérées comme trop étendues.

Que l'auteur d'un crime, bénéficiant d'un non-lieu ou d'un acquittement en raison d'un trouble mental, ne soit pas indemnisé peut apparaître justifié. Mais s'il apparaît que ce non-lieu est aussi motivé par l'absence de charges matérielles, et que l'aliéné n'est pas l'auteur de ce crime, il doit évidemment être indemnisé. En pareil cas, il appartiendra à la commission d'indemnisation d'interpréter ces dispositions avec discernement.

Compte tenu de ces observations, je me demande si le texte du Gouvernement n'est pas plus simple.

Reste qu'il est indispensable, si l'on pose le principe de la réparation automatique, de prévoir des exceptions, en particulier l'hypothèse de la personne qui se laisse librement accuser à tort pour couvrir le véritable coupable.

En l'état, je m'en remets donc à la sagesse nationale espérant que, ce soir, ou au cours de la navette, nous trouverons la meilleure rédaction possible.

Mme la présidente.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Je soutiens l'amendement de Mme Lazergues, qui satisfait celui que j'ai déposé.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Rappelons d'abord d'où nous venons. Nous avons une commission nationale d'indemnisation en matière de détention provisoire dont le président - je ne le nommerai pas, mais il le mériterait ! - déclarait en 1990 que la commission d'indemnisation n'indemnisait que "si le requérant ne pouvait pas manifestement être le coupable", ajoutant qu'il y avait deux conditions pour cela : que l'on ait trouvé le vrai coupable - sinon la suspicion demeurait - et qu'on soit assuré que le requérant n'ait jamais menti. Et ce président, chargé précisément de réparer l'atteinte à la présomption d'innocence, d'ajouter que les autres, qui ne répondaient pas à ces deux conditions, étaient des innocents - avec des guillemets ! Voilà d'où nous venons ! Le texte du Gouvernement prévoit que le détenu

« peut » être indemnisé, ce qui laise le champ largement ouvert au refus. L'intérêt de la rédaction de Mme Lazerges c'est qu'elle rend l'indemnisation obligatoire. Peut-on douter une seconde qu'une incarcération indue ne puisse causer un préjudice ? Le seul fait d'avoir été privé indûment de sa liberté cause un préjudice, à l'évidence, sans qu'il soit besoins de le montrer.

L'article 149 du code de procédure pénale précise

« lorsque cette détention lui a causé un préjudice » : c'est se moquer du monde ! Bien sûr, elle lui en a causé un ! Et la rédaction du Gouvernement ne change rien à cela ! L'amendement de Mme Lazerges est donc très heureux.

Et même si la procédure a été annulée, madame la garde des sceaux, la culpabilité de l'intéressé n'est pas démontrée. Il bénéficie pleinement de la présomption d'innocence. Celui qui sort de prison à la suite de l'annulation d'une procédure n'est pas un coupable, ni un d emi-innocent. Ou l'on est coupable ou l'on est innocent. « Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée », écrivait Musset ! L'amendement de Mme Lazerges me paraît tout à fait raisonnable et je le soutiens.

Mme la présidente.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Cet amendement de notre rapporteur est très important puisqu'il touche à l'indemnisation des détentions provisoires injustifiées ou trop longues, en tout cas, des détentions que n'exigeait pas l'enquête. C'est une avancée considérable que de passer d'une indemnisation possible à une indemnisation systématique. Je remercie Mme Lazerges, qui nous fait faire là un progrès décisif vers la réparation, dans la mesure du p ossible, des détentions injustifiées. J'ai encore en mémoire le cas de cette personne qui s'est exprimée, il y peu, dans les médias pour expliquer comment elle avait été emprisonnée injustement pendant six mois, faute d'un test ADN effectué dans les délais requis.

Il est vraiment fondamental, d'une part, que l'indemnisation soit systématique, d'autre part, que le simple fait d'être en prison de façon injustifiée constitue un préjudice à la fois moral et matériel - ce qui est l'évidence.

Cependant, je m'interroge - je prie Mme le rapporteur de bien vouloir m'en excuser, mais nous avons eu l'occasion d'en parler à plusieurs reprises - sur les exceptions, notamment sur la prescription et l'amnistie, dans la mesure où ces décisions peuvent être prises indépendamment de la personne concernée qui, malgré tout, peut être innocente.

M. Pierre Albertini.

Absolument !

Mme Frédérique Bredin.

Se pose là un vrai problème j uridique, que nous réglerons peut-être d'ici à la deuxième lecture.

En outre je n'aime guère que l'on évoque le cas de la personne ayant fait l'objet d'une détention provisoire pour s'être « librement et volontairement accusée » - notre fameuse culture de l'aveu - ou pire, « s'être laissée accuser à tort ». Ce qui signifie que si vous vous accusez vousmême alors que vous êtes innocent, c'est que vous vous êtes laissé accuser à tort et que vous êtes responsable de cette situation, alors que l'on vous aura extorqué des aveux qui ne correspondaient pas à la réalité.

Bref, de nombreuses interrogations demeurent quant aux exceptions. Cependant l'avancée est telle, madame le rapporteur, que nous vous soutiendrons avec force en sachant que votre sagesse nous permettra de réfléchir sur les exceptions d'ici la deuxième lecture.

Mme la présidente.

La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Autant le texte du Gouvernement me paraît parfait, autant l'amendement de Mme Lazerges, je le dis franchement, me paraît invraisemblable, compte tenu des exceptions qu'il introduit. Je n'y comprends plus rien ! La législation actuelle n'en prévoit aucune : il s'agit donc d'un texte restrictif. Je serai encore plus critique que Mme Bredin, qui s'est exprimée avec douceur, sur ce genre de littérature : « ... lorsque la personne a fait l'objet d'une détention provisoire pour s'être librement et volontairement accusée ou laissée accuser à tort ».

Nous avons adopté au mois d'avril dernier un principe, celui de l'indemnisation sans exception, pour réparer le préjudice moral et matériel subi. Les exceptions posent des problèmes invraisemblables. Comment faire dans le cadre de la prescription ? Quand la prescription est acquise, on ne va plus juger au fond.

M. Patrick Devedjian.

C'est cela la prescription !

M. Alain Tourret.

Eh oui, et on ne saura pas si la personne a été mise à tort en détention provisoire. De même pour l'amnistie, qui s'applique de plein droit. Le juge, quand il étudiera la question, regardera d'abord - c'est une obligation, in limine litis - non pas le fond, mais les effets de l'amnistie. Celle-ci s'appliquant de plein droit pour telle ou telle catégorie de délits, amnistié de plein droit, vous ressortez aussitôt. On ne cherchera pas à savoir, si vous avez été placé à tort ou à raison en déte ntion provisoire.

Votre amendement, madame le rapporteur, correspond donc à une inacceptable régression. J'en appelle à votre sagesse pour que vous le retiriez.

Mme la présidente.

Madame le rapporteur, vous avez le droit de répondre. (Sourires.)

M me Christine Lazerges, rapporteur.

Un verbe change...

M. Patrick Devedjian.

Oui le verbe « pouvoir » !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Dans notre texte, le verbe « être » est employé ; dans le projet, c'est le verbe

« pouvoir ». Toute la différence est là.

Mme Frédérique Bredin et M. Patrick Devedjian.

Eh oui.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

La différence est magistrale.

M. Patrick Devedjian.

Bien sûr.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Je reconnais bien volontiers la médiocrité de la rédaction relative aux except ion dont l'énumération mérite au surplus d'être repensée.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme Frédérique Bredin.

Merci, madame le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Afin de progresser, je suggère à l'Assemblée d'adopter l'amendement quitte à y revenir au cours des lectures ultérieures pour améliorer considérablement la seconde partie du texte.

M. André Gerin.

Très bien !

M. Patrick Devedjian.

C'est d'une humilité sympathique !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 109.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'amendement no 32 n'a plus d'objet.

Mme Bredin et les membres du groupe socialiste et apparentés ont présenté un amendement, no 257, ainsi libellé :

« Après le deuxième alinéa (1o ) du I de l'article 19, insérer l'alinéa suivant :

« 1o bis Cet article est complété par une phrase ainsi rédigée : "A la demande de l'intéressé, le préjudice est évalué par expertise contradictoire réalisée dans les conditions des articles 156 et suivants du code de procédure pénale". »

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

A la demande de l'intéressé, et dans les cas que nous avons cités auparavant, il doit y avoir possibilité d'une expertise contradictoire sur la nature et le montant du préjudice.

Actuellement, les indemnisations proposées par la commission sont extrêmement faibles : 63 000 francs en moyenne, pour six mois, un an ou deux ans de détention injustifiée, ce qui est totalement disproportionné par rapport au préjudice moral et financier subi.

Nous proposons que l'expertise n'ait lieu qu'à la demande de la personne interessée. En effet, si, pour une raison ou une autre, cette personne ne veut plus entendre parler de son cauchemar, si elle se contente du franc symbolique de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi, c'est son affaire, sa responsabilité. C'est sa liberté première et nous devons la respecter. Reste qu'il lui faut pouvoir demander une expertise juste établissant la nature du préjudice, dont je rappelle qu'il est à la fois moral et financier.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Favorable.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Pas favorable. Ce serait alourdir ou allonger de façon excessive la procédure devant la commission d'indemnisation à cause d'exceptions. Or on en connaît trop les lenteurs d'exécution.

Mieux vaut laisser à la commission le soin de décider d'ordonner ou non une expertise.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 257.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 314, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le dernier alinéa (2o ) du II de l'article 19 :

« 2o Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Les débats ont lieu en audience publique, sauf opposition du requérant. A sa demande, celui-ci est entendu personnellement ou par l'intermédiaire de son conseil. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

L'amendement tend à préciser que le requérant est entendu devant la commission d'indemnisation, soit personnellement soit par l'intermédiaire de son conseil. Nous pensons aux hypothèses où l'intéressé, souffrant, blessé ou pour une autre raison, ne peut pas être entendu personnellement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 314.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je suis saisie de deux amendements pouvant être soumis, malgré la place, à une discussion commune.

L'amendement no 110, présenté par Mme Lazerges, rapporteur, et M. Tourret, est ainsi libellé :

« Compléter le II de l'article 19 par deux alinéas suivants :

« 3o Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La décision de la commission d'indemnisation a llouant une indemnité est communiquée aux magistrats qui ont concouru à la mise ou au maintien en détention provisoire. »

L'amendement no 246, présenté par M. Tourret, est ainsi rédigé :

« Compléter le I de l'article 19 par l'alinéa suivant :

« La décision de la commission d'indemnisation a llouant une indemnité est communiquée aux magistrats qui ont concouru à la mise en détention provisoire ou au maintien en détention provisoire. »

Monsieur Tourret, c'est vous qui soutenez l'amendement no 110 ?

M. Alain Tourret.

Oui, monsieur le président, nous proposons que la décision de la commission d'indemnisation d'allouer une indemnité soit communiquée aux magistrats qui ont concouru à la mise ou au maintien en détention provisoire.

Après une longue discussion, nous sommes convenus que le mot magistrats était le mieux adapté. Il m'apparaît parfaitement normal d'informer les magistrats des suites des désisions qu'ils ont été conduits à prendre. Cela leur permettra éventuellement de réfléchir aux conséquences du dysfonctionnement grave qui a eu lieu.

Mme la présidente.

La commission a adopté cet amendement.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

En effet, monsieur le président.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 110.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'amendement no 246 est satisfait.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme la présidente.

M. Devedjian et M. Cazenave ont présenté un amendement, no 33 corrigé, ainsi libellé :

« Compléter le II de l'article 19 par l'alinéa suivant :

« 3o Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les magistrats qui ont concouru à la mise en détention provisoire reçoivent copie des décisions de non-lieu, de relaxe, d'acquittement et d'indemnisation accordées aux personnes innocentées. »

La parole est à M. Patrick Devedjian.

Mme Frédérique Bredin.

N'est-il pas satisfait, monsieur Devedjian ? (Sourires.)

M. Patrick Devedjian.

Eh bien non, pas tout à fait ! (Sourires.)

Mon amendement, dans l'esprit même de ce que nous venons de voter, va plus loin. Ce n'est pas seulement la décision de la commission d'indemnisation qui doit être adressée aux magistrats qui ont concuru à la mise en détention, ce sont aussi les décisions de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement accordées aux personnes innocentées.

Actuellement, et c'est un des paradoxes avec lesquels nous vivons, un juge de première instance n'est même pas destinataire de l'arrêt qui statue sur le jugement qu'il a rendu. Confirmation ou infirmation ? Il l'ignore totalement. On parle de la responsabilité des magistrats : elle commence par la connaissance du destin juridique des décisions qu'ils ont rendues.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement n'est-il pas satisfait par celui que l'Assemblée vient d'adopter ?

M. Patrick Devedjian.

Oh non, aucun doute à ce sujet.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Soit, avis défavorable.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis. L'amendement no 110, qui a été adopté, est préférable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 33 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 19, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 19, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 19

Mme la présidente.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 111, ainsi libellé :

« Après l'article 19, insérer les dispositions suivantes :

« Section 4

« Dispositions relatives à l'exécution de la détention provisoire

« Art. 19 bis. - Après l'article 714 du code de procédure pénale, il est inséré un article 714-1 ainsi rédigé :

« Art. 714-1. - Les personnes mises en examen placées en détention provisoire font l'objet d'une enquête sur leur situation matérielle, familiale ou sociale dans un délai de deux mois à compter de leur entrée dans la maison d'arrêt. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement tend à poser le principe d'une enquête sociale systématique pour toutes les personnes placées en détention provisoire, dans le cadre d'une information.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Recourir à une enquête sociale avant le placement éventuel d'une personne en détention est une bonne idée, précisément pour éviter ce placement. Néanmoins, le coût de la mesure proposée par votre commission - 6 millions de francs - n'est pas négligeable. Je me demande si nous ne pourrions pas promouvoir les enquêtes sociales dans les procédures de comparution immédiate, où elles me semblent particulièrement urgentes et justifiées. Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente.

La parole est à M. Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Six millions ? Cela ne me paraît pas cher. Compte tenu du nombre de détenus provisoires enregistré chaque année, je suis surpris que le coût ne soit p as supérieur. D'autre part, pour les récidivistes, recommencerez-vous l'enquête sociale chaque fois ? Je pense à des gens qui ont un casier judiciaire extrêmement fourni.

Mme la présidente.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Cet amendement nous paraît important. Les personnes placées en détention provisoire doivent au moins faire l'objet d'une enquête sur leur situation matérielle, familiale ou sociale. Car il s'agit d'une décision grave ! Il est normal qu'un minimum d'informations soient réunies sur les situations.

J'ai bien entendu ce qu'a dit Mme la garde des sceaux.

Faut-il étendre cette mesure à la comparution immédiate ? C'est une vraie question sur laquelle nous aurons peut-être l'occasion de revenir. Ce n'est pas absurde du tout. Pour le moment, nous en sommes à un texte qui - malheureusement, diront certains - se limite à l'instruction. Il ne concerne pas la comparution immédiate. Pour la détention provisoire, qui fait l'objet de ce texte, essayons de nous mettre d'accord sur une enquête minimale pour avoir un point de vue vérifié sur la situation réelle des gens.

Mme la présidente.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Nous proposons que l'enquête pour les personnes placées en détention provisoire soit effectuée dans un délai de deux mois à compter de leur entrée dans la maison d'arrêt et qu'elle puisse servir à préparer la décision de prolongation de cette détention provisoire. C'est autre chose que l'enquête rapide qui devrait être systématiquement effectuée pour quelqu'un qui est poursuivi dans le cadre de la comparution immédiate. Là, c'est vrai, une enquête rapide s'impose toujours. Ici, nous sommes simplement dans le cadre de l'instruction préparatoire, et il s'agit de préparer la prolongation de la détention. Ce qui explique le faible coût, beaucoup moins de personnes étant concernées.

Mme la présidente.

La parole est à M. Tourret.

M. Alain Tourret.

Sachant que la durée moyenne de la détention provisoire en matière délictuelle est de 3,9 mois et de dix-sept mois en matière criminelle, combien de p ersonnes sont intéressées ? Je formule une simple d emande d'information. Combien de personnes qui


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

restent plus de deux mois en détention provisoire seront susceptibles de revendiquer la mesure que vous préconisez ?

Mme la présidente.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Votre question annonce l'amendement suivant. Nous n'avons pas de statistiques suffisantes en la matière. Combien de personnes, dans le cadre d'une instruction préparatoire, restent en prison plus de deux mois ? Le chiffre que vous avez cité est une moyenne obtenue en mélangeant les détentions provisoires dans le cadre d'une comparution immédiate et les détentions provisoires dans le cadre d'une instruction préparatoire ; annuellement, environ 13 000 personnes par an sont placées en détention provisoire dans le cadre d'une instruction préparatoire, tout le reste dans le cadre de la comparution immédiate. La mesure proposée a un intérêt pour la prolongation ou la non-prolongation, je le redis.

Mme la présidente.

Décidément, ce sujet inspire nos collègues ! (Sourires.)

La parole est à M. Pierre Albertini.

M. Pierre Albertini.

Evidemment, on ne connaît pas le nombre des personnes concernées, mais on peut essayer d'estimer le coût d'une enquête sociale. Pour quelques milliers de personnes, le coût sera de 1 500, 2 000 ou 2 500 francs par enquête sociale, et nous serons très audelà du chiffre qui a été cité et qui s'avère, lui, d'ores e t déjà tout à fait dérisoire.

M. Patrick Devedjian.

En effet.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert.

Nous sommes, assurément, devant une bonne idée. Pour répondre à certaines remarques qui viennent d'être avancées, je suggérerais que les personnes mises en examen placées en détention provisoire, puissent demander - à ce moment-là leurs demandes seraient suivies - une enquête sur leur situation matérielle.

A l'évidence certaines personnes, celles dont la situation matérielle ne pose pas de problème, par exemple, ne souhaitent pas forcément que leur situation soit évoquée d'une manière particulière. Je ne vois pas pourquoi cette enquête aurait lieu pour les multirécidivistes ! Reste que, dans de nombreux cas, sans doute, les personnes auraient intérêt à demander une enquête et la demanderaient effectivement.

M. Pierre Albertini.

A ce moment-là, il ne faut pas écrire que les personnes mises en examen « font l'objet » d'une enquête !

M. Jérôme Lambert.

Il faut écrire qu'elles peuvent la demander.

Mme la présidente.

Madame le rapporteur, souhaitezvous cette rectification ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Non, madame la présidente, je préfère laisser le texte en l'état.

M. Pierre Albertini.

Alors, nous sommes dans le vague le plus absolu. Comment être contre, ou pour ?

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 111.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Patrick Devedjian.

Un contre un. (Sourires.)

M me la présidente.

Mme Lazerges, rapporteur, Mme Bredin et M. Tourret ont présenté un amendement, no 112, ainsi rédigé :

« Après l'article 19, insérer l'article suivant :

« Une Commission de suivi de la détention provisoire est instituée. Elle est placée auprès du ministre de la justice.

« Elle est composée de deux représentants du Parlement, d'un magistrat de la Cour de cassation siégeant à la Commission d'indemnisation de la détention provisoire, d'un membre du Conseil d'Etat, d'un professeur de droit pénal, d'un avocat et d'un représentant d'un organisme de recherche judiciaire.

« Elle est chargée de réunir les données juridiques, statistiques et pénitentiaires concernant la détention provisoire, en France et à l'étranger. Elle se fait communiquer tout document utile à sa mission et peut procéder à des visites ou à des auditions.

« Elle établit et publie dans un rapport annuel les données statistiques locales nationales et internationales concernant l'évolution de la détention provisoire ainsi que la présentation des différentes politiques mises en oeuvre. Elle établit une synthèse des décisions de la Commission d'indemnisation de la détention provisoire.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Il s'agit d'éclairer nos débats futurs - car j'ai cru comprendre que nous n'en étions pas à la dernière réforme du code de procédure pénale ni à la dernière réflexion sur la détention provisoire !

M. Pierre Albertini.

Probablement pas.

M. Patrick Devedjian.

Vous avez bien raison, nous ferons la prochaine. (Sourires.)

Mme Frédérique Bredin.

Pour éclairer le Parlement et les citoyens sur ce qui se passe derrière les barreaux des prisons, il est proposé la création d'une commission de suivi de la détention provisoire placée auprès du ministre de la justice. Elle serait composée de deux représentants du Parlement - Assemblée nationale et Sénat, pour qu'on ne puisse rien nous reprocher -, d'un magistrat de la Cour de cassation, d'un membre du Conseil d'Etat, d'un professeur de droit pénal, d'un avocat, et d'autres.

Bref, il s'agirait d'une commission qui, composée de personnalités indépendantes et expertes, pourrait à la fois analyser les données juridiques, statistiques et pénitentiaires sur la détention provisoire, regarder la jurisprudence, si je puis dire, de la Commission d'indemnisation de la détention provisoire, et établir et publier un rapport annuel sur toutes ces données - importantes, puisque nous sommes sur un sujet qui touche de près les libertés fondamentales.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Favorable.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

La création de cette commission ne relève pas du domaine de la loi, semblet-il. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. Pierre Albertini.

En tout cas, la composition de la commission va un peu loin dans le détail, au-delà de ce que permet l'article 34 de la Constitution.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme la présidente.

La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Cette commission, dans son principe, est tout de même une très bonne chose. Car, véritablement, comment travailler et réfléchir - on en a eu un exemple avec la proposition de Mme Lazerges quand on ne dispose pas de certains renseignements ? Or les législateurs que nous sommes sont dans la quasiimpossibilité d'obtenir les renseignements dont ils ont besoin.

Ainsi, lorsque j'ai travaillé sur la proposition de loi adoptée en avril dernier, j'avais demandé à la chancellerie toute une série de renseignements. Je n'ai pas pu me les procurer : les données n'existaient pas. J'aurais voulu connaître le nombre de personnes mises en détention provisoire, la durée de leur détention, et ce par cour d'appel - pour savoir s'il pouvait exister des différences -, par catégories de délits et de crimes. Il m'a été impossible d'avoir ces chiffres. De sorte que nous avons dû préparer une proposition de loi à partir de quelques statistiques générales, et rien d'autre. Il a fallu que j'appelle un certain nombre de cabinets d'instruction - parce que les procureurs de la République ne voulaient pas me fournir les renseignements - pour obtenir des données précises.

C'est pourquoi j'appelle cette commission de mes voeux. Et je me réjouis de ce que l'ensemble de la commission des lois ait adopté le principe de sa création.

Mme la présidente.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Il est tout à fait vrai que les statistiques sont insuffisantes. Mais à la chancellerie, il y a un bon outil, qui demanderait à être développé : le CESDIP. Il fournit des données statistiques de très bonne qualité. Je me demande s'il ne faudrait pas renforcer ses moyens, quitte à lui donner les patronages que vous souhaitez, madame Lazerges. Mais il y a déjà là, à mon avis, l'embryon d'un véritable outil statistique.

Mme la présidente.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la garde des sceaux.

La question des statistiques du ministère de la justice est une vaste et douloureuse question pour la ministre de la justice que je suis, croyezmoi. (Sourires.) Alors que d'autres ministères, infiniment plus puissants, disposent de toutes les statistiques possibles et imaginables, nous, nous n'avons rien, ou pratiquement rien. Il est vrai que, chaque fois que nous voulons obtenir des données chiffrées, nous sommes obligés d'imposer un surcroît de travail aux parquets et aux tribunaux, et que nous n'avons pas les moyens financiers nécessaires pour nous procurer ces renseignements.

Voilà pourquoi je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. En effet, l'on pourra décider tout ce qu'on veut, finalement,...

M. Patrick Devedjian.

On ne le fera pas ! (Sourires.).

Mme la garde des sceaux.

...il se posera toujours un problème budgétaire. Je devrai choisir entre faire établir des statistiques ou donner des gommes, des crayons et des ordinateurs aux juridictions !

Mme Véronique Neiertz.

Voilà !

M. Pierre Albertini.

Il faut les deux !

M. Alain Tourret.

Sans les deux, on n'arrive à rien !

Mme la garde des sceaux.

Voilà les termes du problème, si l'on veut être parfaitement honnête.

Mme la présidente.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Effectivement, il faut des crayons, des gommes et des règles,...

M. Pierre Albertini.

Et des ordinateurs !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

... mais il faut aussi, pour proposer des textes judicieux, disposer d'un minimum d'éléments fournis par des chercheurs.

Le CESDIP, monsieur Devedjian, est non seulement un centre de recherche du ministère de la justice, mais aussi un laboratoire du CNRS, ce qui fait que les chercheurs font porter leurs recherches sur les sujets qui les intéressent. Il est également possible de leur passer des commandes.

M. Patrick Devedjian.

On peut développer cet organisme !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Certes, on peut le développer, mais il est peut-être plus raisonnable de développer le service satistique du ministère. Il ne faut pas se priver d'outils d'évaluation.

La création de la commission ne relève peut-être pas du domaine de la loi, mais, en tout cas, la commission elle-même est indispensable.

M. Alain Tourret.

Très bien !

M. Pierre Albertini.

Nous en sommes d'accord.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 112.

(L'amendement est adopté.)

Avant l'article 20

Mme la présidente.

Je donne lecture de l'intitulé du chapitre III :

« C HAPITRE

III

« Dispositions renforçant le droit à être jugé dans un délai raisonnable »

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 113, ainsi libellé :

« Avant l'article 20, insérer l'article suivant :

« Après l'article 75 du code de procédure pénale, il est inséré un article 75-1 ainsi rédigé :

« Art. 75-1. - Lorsque l'enquête préliminaire est m enée sur instruction du procureur de la République, celui-ci fixe le délai à l'issue duquel elle doit être achevée. Lorsqu'elle est déclenchée d'office, les officiers de police judiciaire doivent rendre compte de son état d'avancement tous les quatre mois à compter de la date à laquelle les faits ont été portés à la connaissance de la police. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet article additionnel fait partie d'une série d'articles additionnels dont est objet d'encadrer la durée des procédures. Dans le cas présent, il s'agit de la durée de l'enquête préliminaire.

Nous souhaitons que les officiers de police judiciaire rendent compte de l'état d'avancement de leur enquête tous les quatre mois à compter de la date à laquelle les faits ont été portés à la connaissance de la police.

Je précise qu'il est prévu d'introduire la même disposition dans un autre volet de la réforme de la justice, celui qui concerne les relations entre le parquet et la chancellerie. Il est donc possible d'envisager de réserver cet amendement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

M. Patrick Devedjian.

Oui !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

J'ai tenu à le présenter ce soir pour montrer que nous avions prévu de mieux encadrer la procédure pénale dès son début.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Cet amendement concerne l'importante question du contrôle de l'autorité judiciaire sur la police judiciaire. Pour moi, il relève du projet de loi relatif à l'action publique en matière pénale dont il reprend d'ailleurs, en la modifiant légèrement, une des dispositions.

Evidemment, je préfère qu'une telle disposition, qui permettra aux magistrats d'exercer un meilleur contrôle sur l'affectation des moyens de police judiciaire, soit examinée à l'occasion du projet de loi qui sera soumis à l'Assemblée en juin prochain. Je n'ai donc aucune objection à formuler sur le fond car il s'agit bien là d'une clé essentielle du rapport entre la justice et la police judiciaire.

Cela dit, je crois vraiment que cette disposition trouverait mieux sa place dans le texte relatif à l'action publique en matière pénale. C'est pourquoi je demande que l'on rejette l'amendement.

Mme la présidente.

La parole est à M. Arnaud Montebourg.

M. Arnaud Montebourg.

Le texte évoqué par Mme la ministre traduit un effort de cohérence quant à l'articulation entre les pouvoirs de la police judiciaire et le parquet et les juges d'instruction. Il serait génant que nous nous prononcions alors que nous allons, en juin prochain, débattre de ce sujet délicat et difficile. Je suis donc assez défavorable à l'adoption de l'amendement et j'apporte mon soutien à Mme la ministre.

Mme la présidente.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Je propose de retirer cet amendement, qui n'avait pour objet que de sensibiliser l'Assemblée au problème de l'encadrement de l'enquête.

M. Arnaud Montebourg.

Nous y sommes sensibles.

(Sourires.)

M. Alain Tourret.

C'est Austerlitz, Montebourg ! Attention, Waterloo n'est pas loin !

Mme la présidente.

L'amendement no 113 est retiré.

Article 20

Mme la présidente.

« Art. 20. - Il est inséré, après l'article 77-1 du même code, deux articles 77-2 et 77-3 ainsi rédigés. »

« Art. 77-2 . - Toute personne placée en garde à vue au cours d'une enquête préliminaire ou de flagrance, en raison d'indices faisant présumer qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et qui, à l'expiration d'un délai de huit mois à compter de la fin de la garde à vue, n'a pas fait l'objet de poursuites, peut interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s'est déroulée sur la suite donnée ou susceptible d'être donnée à la procédure. Cette demande est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

« Dans le mois suivant la réception de la demande, le procureur de la République compétent doit, soit engager des poursuites contre l'intéressé, soit lui notifier le classement sans suite de la procédure à son égard, soit, s'il estime que l'enquête doit se poursuivre, saisir le président du tribunal de grande instance. A défaut de saisine de ce magistrat, il ne peut être procédé contre l'intéressé, à peine de nullité, à aucun acte d'enquête postérieurement au délai d'un mois à compter de la réception de la demande.

« Lorsque le président du tribunal de grande instance est saisi en application des dispositions du précédent alinéa, il entend, au cours d'un débat contradictoire, les observations du procureur de la République et de la personne intéressée, assistée le cas échéant par son avocat.

A l'issue de ce débat, le président décide si l'enquête peut être poursuivie. En cas de réponse négative, le procureur de la République doit, soit engager des poursuites contre l'intéressé, soit lui notifier le classement sans suite de la procédure à son égard. Si le président autorise la continuation de l'enquête, il fixe un délai qui ne peut être supérieur à six mois, à l'issue duquel la personne intéressée peut, le cas échéant, faire à nouveau application des dispositions du présent article.

« Si la personne intéressée en fait la demande, le débat contradictoire prévu à l'alinéa précédent se déroule en audience publique, sauf si la publicité est de nature à nuire au bon déroulement de l'enquête, à l'ordre public, à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Le président du tribunal de grande instance statue sur cette demande par une décision qui n'est pas susceptible de recours.

« Art. 77-3 . - Lorsque l'enquête n'a pas été menée sous la direction du procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la garde à vue a été réalisée, celui ci adresse sans délai la demande mentionnée au premier alinéa de l'article 77-2 au procureur de la R épublique qui dirige l'enquête. Le délai fixé au deuxième alinéa du même article court à compter de lar éception de la demande par le procureur de la République du lieu de la garde à vue. »

La parole est à M. Pierre Albertini, inscrit sur l'article.

M. Pierre Albertini.

Quelques observations très brèves sur la notion de délai raisonnable. Evidemment, il n'est pas possible d'établir un délai prédéterminé, étant donné que celui-ci dépendra de la complexité des affaires et du comportement des parties. La maîtrise des délais d'instruction et de jugement est forcément une notion « circonstanciée ».

De plus, j'appelle l'attention sur le fait que le dispositif prévu à l'article 21 ne me paraît pas a priori efficace. Je rappelle, à cet égard, que la Cour européenne de Strasbourg a condamné la France en raison de la longueur excessive des procédures dans notre pays.

La notion de délai raisonnable ne peut naturellement s'apprécier qu'en tenant compte de chaque cas d'espèce.

Chez nous, elle est interprétée d'une manière particulièrement défavorable par rapport au droit de l'accusé de trouver son juge dans un délai assez rapide.

L'insertion d'une telle notion dans une déclaration de principe du type de celle contenue dans l'article 20 et le dispositif prévu à l'article 21 sont tout à fait insuffisants pour changer le poids des pratiques et des habitudes, et surtout pour lutter contre les causes mêmes des retards.

La maîtrise des délais d'instruction et de jugement est, je crois, un impératif fortement ressenti par nos concitoyens.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme la présidente.

Mme Lazergues, rapporteur, et Mme Bredin ont présenté un amendement no 114, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article 77-2 du code de procédure pénale, supprimer les mots : ", en raison d'indices faisant présumer qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Amendement de coordination.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 114.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 115, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article 77-2 du code de procéd ure pénale, substituer au nombre : "huit" le nombre : "six". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement a pour objet de réduire de huit à six mois le délai au-delà duquel une personne ayant fait l'objet d'une garde à vue qui n'a été suivie d'aucune procédure peut demander au procureur soit de procéder à un classement sans suite soit de poursuivre.

C'est une incitation pédagogique à une meilleure circulation des informations entre la police judiciaire et le parquet.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 115.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 116, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article 77-2 du code de procédure pénale, substituer aux mots : "demande d'avis" les mots : "accusé". »

La parole est à Mme le rapporteur.

M me Christine Lazerges, rapporteur.

Amendement rédactionnel.

M. Pierre Albertini.

Et même télégraphique ! (Sourires.)

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 116.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 117, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 77-2 du code de procédure pénale, après les mots : "contre l'intéressé", insérer les mots : "soit engager une mesure ou une procédure alternative aux poursuites". »

V oulez-vous, madame le rapporteur, présenter en même temps votre amendement no 118 ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Volontiers !

Mme la présidente.

Cet amendement est ainsi rédigé :

« Compléter l'avant-dernière phrase de l'avantdernier alinéa du texte proposé pour l'article 77-2 du code de procédure pénale par les mots : ", soit engager une mesure ou une procédure alternative aux poursuites". »

Vous avez la parole, madame le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Lorsque aucune poursuite n'est engagée après une garde à vue, nous pensons judicieux d'ajouter à la liste des possibilités que le texte offre au procureur de la République - une médiation pénale, un rappel à la loi - une procédure alternative aux poursuites. Tel est l'objet de l'amendement no 117.

C'est un clin d'oeil au texte de Louis Mermaz.

Quant à l'amendement no 118, il est de coordination.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable aux deux amendements.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 117.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 118.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Mme Lazerges, rapporteur, et Mme Bredin ont présenté un amendement, no 119, ainsi libellé :

« Après les mots : "audience publique", rédiger ainsi la fin du dernier alinéa du texte proposé pour l'article 77-2 du code de procédure pénale : "sauf si la publicité est de nature à nuire à l'ordre public, à la dignité ou aux intérêts d'un tiers. Le président du tribunal de grande instance statue sur cette demande par une décision motivée qui n'est pas susceptible de recours". »

Sur cet amendement, M. Jean-Pierre Michel a présenté un sous-amendement, no 251, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'amendement no 119, supprimer les mots : "à l'ordre public,". »

La parole est à Mme Frédérique Bredin, pour soutenir l'amendement.

Mme Frédérique Bredin.

Cet amendement permet d'aborder un problème de fond que nous reverrons au cours du débat. Nous avons tous, je crois, la volonté d'ouvrir à la publicité certaines phases importantes de la procédure pénale. Et nous aurons l'occasion de parler bientôt de la communication vis-à-vis de la presse, qui n'a de sens que si elle est équilibrée, mais aussi que si elle existe. Pour l'heure, il s'agit de la question des « fenêtres » proposées par le projet de loi.

M. Pierre Albertini.

Des hublots, plutôt !

Mme Frédérique Bredin.

Certes, il y a des fenêtres, mais aussi toute une série d'exceptions qui en rendent l'ouverture difficile.

L'amendement proposé tend donc à réduire le champ des exceptions à l'audience publique des débats devant le président du tribunal de grande instance. Je m'en explique.

Nous ne pouvons envisager, aujourd'hui, la levée totale du secret de l'instruction, comme le souhaitent certains de nos collègues. Ce choix n'a pas été retenu...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

M. Pierre Albertini.

Hélas !

Mme Frédérique Bredin.

... car une telle mesure ne semble pas opportune. Mais nous sommes très favorables à ce que des fenêtres soient ouvertes, et réellement ouvertes, à certaines étapes clefs de la procédure. Pour cela, il faut que les exceptions à la publicité des débats soient très rares, très limitées et le moins subjectives possibles.

En contrepartie de cette ouverture à la libre information, à la libre communication, nous demanderons un meilleur respect de la présomption d'innocence, dans la mesure où des informations équilibrées pourront être communiquées aux journalistes, à la presse écrite ou aux médias audiovisuels. Et nous allons rechercher cet équilibre tout au long de notre débat.

Nous sommes là à la première fenêtre, et il y en aura d'autres en matière de détention provisoire, en particulier.

Autant d'avancées importantes : il nous semblerait dommage de les réduire en prévoyant toute une série d'exceptions qui, laissées à l'appréciation subjective du juge, enlèvent le caractère automatique de l'ouverture de ces fenêtres. Nous croyons profondément qu'il faut ouvrir à la publicité un certain nombre de moments clés de la procédure.

Faut-il, par exemple, accepter l'exception prévue quand la publicité est de nature à nuire au bon déroulement de l'information ? Nous ne le pensons pas, et c'est pourquoi nous proposons de supprimer cette exception. Pourquoi ? Tout simplement, parce que l'appréciation du bon déroulement de l'information est, par nature, subjective,...

M. Patrick Devedjian.

Floue !

Mme Frédérique Bredin.

... floue, donc arbitraire. La publicité des débats est a priori plutôt gênante pour le magistrat ou, en tous les cas, elle peut l'être. Il est donc important d'arriver à l'automaticité de l'ouverture de ces fenêtres. Pour nous, c'est cela la liberté d'informer. Et si nous demandons en contrepartie un meilleur respect de la présomption d'innocence, c'est parce que nous ouvrons réellement ces fenêtres à la publicité des débats.

Mme la présidente.

Je rappelle que cet amendement a été accepté par la commission.

Le sous-amendement no 251 de M. Michel est-il défendu ?

M. Patrick Devedjian.

Oui, je le soutiens.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

La commission a émis un avis favorable à ce sous-amendement qui tend à supprimer la nuisance au bon déroulement de l'ordre public parmi les motifs permettant de refermer la fenêtre de publicité des débats précédemment ouverte.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement et le sous-amendement ?

Mme la garde des sceaux.

Il s'agit d'un sujet important. Comme je l'ai indiqué lors de la discussion générale, je suis opposée à cet amendement et à d'autres de même nature.

Le projet de loi instaure des fenêtres de publicité à différentes phases de la procédure pour permettre un débat public et contradictoire sur les charges. La première fenêtre est prévue par l'article 77-2 du code de procédure pénale, qui donne la possibilité au président du tribunal de grande instance de contrôler la durée d'une enquête p réliminaire à l'occasion d'un débat contradictoire demandé par une personne qui a été placée en garde à vue. Nous sommes dans la phase de l'enquête et non dans celle de l'instruction.

M. Patrick Devedjian.

Absolument !

Mme la garde des sceaux.

A la demande de l'intéressé, ce débat est normalement public - c'est la fenêtre de publicité instaurée -, sauf dans certaines hypothèses que reprennent les autres dispositions du projet instituant les fenêtres de publicité. Dans ces hypothèses, le président du tribunal ou, selon les cas, le juge de la détention ou la chambre d'accusation pourront refuser la publicité du débat.

La commission supprime la possibilité de refuser la publicité du débat si celle-ci est de nature à nuire au bon déroulement des investigations. Cette hypothèse d'exception à la publicité doit être maintenue, ou alors, il faut purement et simplement supprimer le secret de l'enquête, dont le premier objectif, je le rappelle, est de préserver la présomption d'innocence, mais aussi, bien sûr, de permettre le travail des enquêteurs.

Je prendrai un exemple. Soit un débat réalisé à la demande d'un usager de stupéfiants placé en garde à vue au début d'une enquête préliminaire durant depuis plusieurs mois. Peut-on imaginer que, au cours de ce débat, soient rendues publiques les investigations que la police a l'intention de faire pour confondre les trafiquants ? Autant cesser immédiatement toute investigation.

Je rappelle que nous sommes dans l'enquête, que notre procédure inquisitoire conduit à ce que ce soit une seule et même personne qui mène l'enquête et l'instruction, que, dans la procédure anglo-saxonne, toute l'enquête est soumise au secret le plus absolu, et qu'il faut au moins laisser au magistrat la possibilité, s'il estime que la nécessité de l'enquête l'impose, de refuser cette fenêtre de publicité.

Vous proposez d'aller encore plus loin que ce que l'on trouve dans la procédure anglo-saxonne, mais je vous mets en garde contre les inconvénients extrêmement sérieux auxquels risquerait d'aboutir l'adoption d'un tel amendement. Je ne dirais pas exactement la même chose sur les autres fenêtres de publicité, qui se situent à d'autres moments de la procédure, mais pour le moment, nous sommes dans l'enquête.

Je ne suis pas opposée, en revanche, à ce que la décision du président du tribunal refusant la demande de publicité fasse l'objet d'une ordonnance motivée, mais non susceptible de recours, et si l'amendement était rectifié en ce sens, je serais favorable à son adoption.

Mme la présidente.

La parole est à M. Arnaud Montebourg.

M. Arnaud Montebourg.

Le principe des fenêtres de publicité est intéressant car il permet une information équilibrée à destination du public, lorsqu'il y a un intérêt légitime pour que celui-ci obtienne ladite information.

Nous sommes là dans le cadre de l'enquête préliminaire, c'est-à-dire qu'il n'y a pas, à ce stade, de décision de poursuite ; les vérifications préliminaires permettront éventuellement la mise en évidence d'infractions.

Cette fenêtre de publicité, telle qu'elle est ouverte dans le cadre du débat contradictoire que provoque celui qui fait l'objet d'une garde à vue, est - ce n'est pas déraisonnable de le soutenir - placée à un endroit suffisamment précoce pour préserver les droits de l'intéressé. Mais permettre à tout tiers d'entrer dans le détail de l'enquête est


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une source de désorganisation des enquêtes préliminaires, je le dis au vu d'expériences qu'ont tous les praticiens de ces procédures. Cette fenêtre de publicité existe, mais permettons au magistrat de ne pas l'ouvrir au public lorsque l'enquête à venir doit être protégée.

Il est inexact de prétendre qu'il serait arbitraire de laisser le juge interpréter la notion de bon déroulement de l'enquête ; il y a en fait une incitation à élaborer une jurisprudence.

Heureusement que le législateur n'intervient pas dans les 70 000 dossiers que sécrète chaque année la justice pénale ! Le législateur ne se prononce pas en fonction des cas, mais de manière uniforme, pour que les magistrats appliquent la loi et l'interprètent dans les cas d'espèce.

Chaque juge se prononcera en fonction d'éléments concrets et d'une ligne fixée par le législateur. J'ajoute que c'est un magistrat civil qui donnera cette autorisation, ce qui n'est pas dénué d'importance.

Mme la présidente.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Je soutiens l'amendement no 119, de même que le sous-amendement. Ce débat est essentiel et il est un peu étonnant que nous nous battions à front renversé. Je me suis battue et je me battrai pour que la présomption d'innocence soit respectée avec une très grande rigueur, ce qui signifie que la presse doit présenter les faits et les commentaires de façon équilibrée.

Je suis, en revanche, tout à fait favorable à la plus grande transparence. Sans aller jusqu'au système, proposé par certains de nos collègues de l'opposition, consistant à lever complètement le secret de l'instruction, nous nous rendons bien compte que ce secret est aujourd'hui un secret de Polichinelle, quotidiennement bafoué, mais de façon extrêmement problématique car il est bafoué de manière parcellaire, et donc instrumentalisée.

Bafoué par qui ? Soit par les personnes qui mènent l'enquête et qui veulent continuer de la mener dans telle ou telle direction, soit par les parties, dont les avocats v eulent décharger leur client ou charger quelqu'un d'autre, ou faire les deux en même temps.

J'ai bien entendu le plaidoyer prononcé par Mme la ministre contre la fenêtre : mais alors, il ne fallait pas la proposer ! Je ne comprends pas qu'on puisse se battre pour la liberté d'information si l'on n'accepte pas ces moments de publicité équilibrée, qui permettent un vrai débat et la présentation des arguments pro et contra.

Le bon déroulement de l'information et l'ordre public sont des notions extrêmement subjectives. Pour aller au bout de mon raisonnement, je dirai que la publicité est toujours vécue comme un peu dérangeante, surtout quand on peut, comme aujourd'hui, la faire de manière discrète et éventuellement parcellaire.

Moi, je préfère au système hypocrite actuel un système équilibré, transparent, permettant une information à des moments clés de la procédure. Et c'est avec ce souci d'une vraie information des médias que nous demanderons un véritable respect de la présomption d'innoncence.

Mme la présidente.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Je voudrais apporter quelques éclaircissements de procédure comparée. Je fais référence à l'ouvrage du professeur Spencer, dont j'ai parlé hier. Dans la procédure anglo-saxonne,...

M. Patrick Devedjian.

Ce n'est qu'un Que sais-je ?

Mme la garde des sceaux.

Oui, mais l'ouvrage est rédigé par un professeur émérite. Je ne sais pas si vous voulez dénigrer les publications des Presses universitaires de France, mais je peux vous assurer que cet ouvrage fait autorité dans plusieurs universités françaises...

M. Patrick Devedjian.

Il n'est pas très étoffé, tout de même !

Mme la garde des sceaux.

... et je ne pense pas que l'on puisse mettre en doute cette affirmation.

M. Spencer précise, à propos de l'Angleterre : « La recherche des preuves est secrète et globalement plus secrète qu'elle ne l'est en France. A l'égard du grand public, la phase préliminaire est plus secrète grâce au contempt of court ; même si les médias pouvaient persuader la police ou le CPS de leur divulguer les preuves, ils n'oseraient pas les publier avant l'audience de jugement, de peur d'être pénalement poursuivis. »

M. Pierre Albertini.

Il y a donc du bon en GrandeBretagne !

Mme la garde des sceaux.

Je poursuis : « Aspect moins satisfaisant : la recherche des preuves est aussi plus secrète qu'elle ne l'est en France à l'égard du suspect et de l'accusé. »

M. Patrick Devedjian.

Ce n'est pas nous qui le disons !

Mme la garde des sceaux.

En France, le défenseur du mis en examen a le droit d'ouvrir une brèche dans le secret de l'instruction.

Nous devons être cohérents. Cette fenêtre de publicité vise à permettre une discussion et un contrôle sur la durée de l'enquête préliminaire, et je crois que c'est une bonne chose. Mais, à partir du moment où cette fenêtre risque de compromettre l'efficacité de l'enquête, je vous demande de rejeter cet amendement, à moins qu'il ne soit sous-amendé comme je l'ai proposé il y a un instant.

Mme la présidente.

La parole est à M. Louis Mermaz.

M. Louis Mermaz.

Je ferai remarquer à Mme la ministre que la procédure dont nous parlons se déroule après de longs mois d'enquête, et que toutes les précautions ont été prises pendant au moins six mois. Je suis tout à fait favorable, en ce qui me concerne, au sousamendement présenté par M. Jean-Pierre Michel, parce que je suis défavorable à la notion d'ordre public, qui est souvent une tarte à la crème. Je ne vois pas pourquoi il faudrait laisser aux magistrats la possibilité d'invoquer une notion aussi floue. M. Jean-Pierre Michel est luimême magistrat et il sait de quoi il parle.

Mme la présidente.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Madame la présidente, je propose d'ajouter après le mot : « demande », d ans la dernière phrase du texte proposé pour l'article 77-2 du code de procédure pénale, le mot :

« motivée » et de laisser de côté la phrase de l'amendement no 119 concernant les exceptions.

M. Pierre Albertini.

Renvoyons cela à la seconde lecture !

Mme la présidente.

Cela signifie-t-il, madame le rapporteur, que la commission retire l'amendement no 119 et propose un nouvel amendement ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Oui, madame la présidente cela nous permettra de réfléchir au problème des exceptions entre les deux lectures.

M. Louis Mermaz.

Nous sommes véritablement dans des sables mouvants !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme la présidente.

Il n'est pas très facile de travailler dans ces conditions, mes chers collègues.

L'amendement no 119 est donc retiré, et le sousamendement no 251 devient sans objet.

Je viens d'être saisie par Mme Lazerges d'un amendement, qui portera le numéro 320, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du texte proposé pour l'article 77-2 du code de procédure pénale, après le mot : "décision", insérer le mot : "motivée". »

Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?

Mme la garde des sceaux.

Je ne vois pas d'objection à son adoption.

Mme la présidente.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Je suis assez surprise du retrait de l'amendement no 119, car il s'agissait d'un point essentiel sur lequel nous nous étions prononcés en commission.

M. Patrick Devedjian.

C'est un amendement de la commission ; peut-il être retiré ?

Mme Frédérique Bredin.

Je crois que oui, hélas ! Est-ce bien possible, madame la présidente ?

Mme la présidente.

Oui...

Mme Frédérique Bredin.

Dont acte ! Il n'y a donc plus de discussion possible.

M. Arnaud Montebourg.

Merci, madame le rapporteur, d'avoir retiré cet amendement !

Mme la présidente.

Vous pouvez néanmoins présenter votre point de vue, madame Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Nous reviendrons sur ce sujet en deuxième lecture. En tout cas, nous ne pouvons pas prévoir des fenêtres pour les refermer aussitôt ! On ne peut pas parler de fenêtres d'information de la société, de la presse et des médias dans ces conditions.

Je regrette beaucoup ce retrait mais nous aurons l'occasion de reparler du sujet dans d'autres débats.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 320.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 20, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 20, ainsi modifié, est adopté.)

Article 21

Mme la présidente.

« Art. 21. - I. - Le deuxième alinéa de l'article 89-1 du même code est remplacé par les alinéas suivants :

« S'il estime que le délai prévisible d'achèvement de l'information est inférieur à un an, le juge d'instruction donne connaissance de ce délai à la partie civile et l'avise qu'à l'expiration dudit délai, elle pourra demander la clôture de la procédure en application des dispositions de l'article 175-1. Si le juge ne peut fixer un délai prévisible d'achèvement inférieur à un an, il indique à la partie civile qu'elle pourra demander, en application de ce même article, la clôture de la procédure au bout d'une année.

« Les avis prévus au présent article peuvent également être faits par lettre recommandée. »

« II. Il est inséré, après le quatrième alinéa de l'article 116 du même code, un alinéa ainsi rédigé :

« S'il estime que le délai prévisible d'achèvement de l'information est inférieur à un an, le juge d'instruction donne connaissance de ce délai à la personne mise en examen et l'avise qu'à l'expiration dudit délai, elle pourra demander la clôture de la procédure en application de l'article 175-1. Si le juge ne peut fixer un délai prévisible d'achèvement inférieur à un an, il indique à la personne qu'elle pourra demander, en application de ce même article, la clôture de la procédure au bout d'une année. »

« III. L'article 175-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art. 175-1 . - La personne mise en examen ou la partie civile peut, à l'expiration du délai qui lui a été indiqué en application du cinquième alinéa de l'article 116 ou du deuxième alinéa de l'article 89-1, ou, si un tel délai n'a pas été notifié, après qu'une année s'est écoulée à compter, selon les cas, de la date de la mise en examen ou de la constitution de partie civile, demander au juge d'instruction, selon les modalités prévues au dixième alinéa de l'article 81, de prononcer le renvoi devant la juridiction de jugement ou de transmettre la procédure au procureur général, ou de déclarer qu'il n'y a pas lieu à suivre. Cette demande peut également être formée lorsqu'aucun acte d'instruction n'a été accompli pendant un délai de quatre mois.

« Dans le délai d'un mois à compter de la réception de cette demande, le juge d'instruction y fait droit ou déclare, par ordonnance motivée, qu'il y a lieu à poursuivre l'information. Dans le premier cas, il procède selon les modalités prévues à la présente section. Dans le second cas, ou à défaut pour le juge d'avoir statué dans le délai d'un mois, la personne peut saisir le président de la chambre d'accusation en application de l'article 207-1.

Cette saisine doit intervenir dans les cinq jours qui suivent la notification de la décision du juge ou l'expiration du délai d'un mois.

« Lorsque le juge d'instruction a déclaré qu'il poursuivait son instruction, une nouvelle demande peut être formée à l'expiration d'un délai de six mois.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables après l'envoi de l'avis prévu au premier alinéa de l'article 175. »

« IV. Au premier alinéa de l'article 186-1 du même code, les mots : "et le quatrième alinéa de l'article 167" sont remplacés par les mots : ", par le quatrième alinéa de l'article 167, par le deuxième alinéa de l'article 175-1 et par le deuxième alinéa de l'article 177-1". »

« V. - Il est inséré, après l'article 207 du même code, un article 207-1 ainsi rédigé :

« Art. 207-1 . - Le président de la chambre d'accusation, saisi en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 175-1, décide, dans les huit jours de la transmission du dossier, par une ordonnance qui n'est pas susceptible de recours, s'il y a lieu ou non de saisir la chambre d'accusation.

« Dans l'affirmative, il transmet le dossier au procureur général qui procède ainsi qu'il est dit aux articles 194 et suivants. Après qu'elle a été saisie, la chambre d'accusation peut, soit prononcer le renvoi devant la juridiction de jugement ou la mise en accusation devant la cour d'assises, soit déclarer qu'il n'y a pas lieu à suivre, soit évoq uer et procéder dans les conditions prévues aux articles 201, 202 et 204, soit renvoyer le dossier de la procédure au même juge d'instruction ou à tel autre, afin de poursuivre l'information.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

« Dans la négative, il ordonne, par décision motivée, que le dossier de l'information soit renvoyé au juge d'instruction. »

Je suis saisie de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 120 rectifié, présenté par Mme Lazerges, rapporteur, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 21 :

« Après l'article 175-1 du même code, il est inséré un article 175-2 ainsi rédigé :

« Art. 175-2. - Tout témoin assisté, toute personne mise en examen, ou la partie civile peut, si l'information n'est pas close à l'issue d'un délai de dix-huit mois en matière délictuelle ou vingt-quatre mois en matière criminelle à compter, selon le cas, de la date de la première audition, de la première comparution ou de celle du dépôt de la plainte avec constitution de partie civile, demander au juge d'instruction de transmettre immédiatement le dossier de la procédure au président de la chambre d'accusation. Le juge d'instruction effectue cette transmission par une ordonnance motivée justifiant la durée de l'information et les perspectives de son règlement.

« Dans les huit jours de la réception de ce dossier, le président peut autoriser le juge d'instruction, par une ordonnance non susceptible d'appel, à poursuivre l'information pour une durée qui ne peut excéder six mois.

« Dans le même délai, il peut également transmettre le dossier de la procédure au procureur général, qui le soumet à la chambre d'accusation dans les conditions prévues aux articles 194 et suivants.

Celle-ci peut ordonner soit le renvoi devant la juridiction de jugement ou la mise en accusation devant la cour d'assises, soit le non-lieu à suivre. Elle peut également soit renvoyer le dossier au même juge d'instruction ou à tel autre aux fins de poursuite de l'information, soit évoquer et procéder dans les conditions prévues aux articles 201, 202 et 204, auxquels cas elle fixe un délai qui ne peut excéder un an en matière délictuelle ou dix-huit mois en matière criminelle ; si l'information n'est toujours pas close à l'issue de ce nouveau délai, la chambre d'accusation peut, selon la même procédure et les mêmes conditions, le proroger. »

L'amendement no 298, présenté par M. Lang, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 21 :

« Après l'article 175-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 175-2 ainsi rédigé :

« Art. 175-2. - Si l'information n'est pas close à l'issue d'un délai de deux ans à compter de la date du réquisitoire introductif ou de celle du dépôt de la plainte avec constitution de partie civile, le juge d'instruction transmet immédiatement le dossier de la procédure au président de la chambre d'accusation, par une ordonnance motivée justifiant la durée de l'information et les perspectives de son règlement.

« Dans les huits jours de la réception de ce dossier, le président peut autoriser, par une ordonnance non susceptible d'appel, le juge d'instruction à poursuivre l'information pour une durée qui ne peut excéder six mois.

« Dans le même délai, il peut également transmettre le dossier de la procédure au procureur général, qui le soumet à la chambre d'accusation dans les conditions prévues aux articles 194 et suivants.

Celle-ci peut ordonner soit le renvoi devant la juridiction de jugement ou la mise en accusation devant la cour d'assises, soit le non-lieu à suivre. Elle peut également soit renvoyer le dossier au même juge d'instruction ou à tel autre aux fins de poursuite de l'information, soit évoquer et procéder dans les conditions prévues aux articles 201, 202 et 204, auxquels cas elle fixe un délai qui ne peut excéder un an ; si l'information n'est toujours pas close à l'issue de ce nouveau délai, la chambre d'accusation peut, selon la même procédure, le proroger une seule fois. »

La parole est à Mme le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 120 rectifié.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement tend à insérer, après l'article 175-1 du code de procédure pénale maintenu, un article 175-2 qui précise la durée de la procédure.

Il propose une nouvelle rédaction de l'article 21 du projet, qui instituait un « contrat de procédure » tout à fait intéressant mais compliqué.

M. Patrick Devedjian.

Eh oui !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Ce mécanisme était vraiment complexe et difficilement compréhensible pour des non spécialistes.

M. Patrick Devedjian.

Il n'y a pas de projet socialiste sans un article usine à gaz !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

De surcroît, le dispositif du projet était essentiellement incitatif, et d'ailleurs très pédagogique pour les magistrats, mais faute de déterminer un délai butoir, il laissait subsister des informations qui pouvaient être interminables.

Le procédé alternatif que nous proposons n'est pas non plus d'une extrême simplicité, mais il est un peu plus simple. A l'issue d'un délai d'un an en cas de délit, et d'un délai de dix-huit mois en cas de crime, les parties, le témoin assisté, le mis en examen ou la partie civile peuvent demander la clôture de l'information. Le juge d'instruction doit alors transmettre le dossier à la chambre d'accusation. Soit celle-ci accorde un délai supplémentaire de six mois, soit les parties saisissent la chambre d'accusation, qui, à son tour, soit clôture l'affaire, soit accorde un nouveau délai d'un an en matière délictuelle ou de dix-huit mois en matière criminelle.

M. Alain Tourret.

C'est à peine plus simple !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

C'est tout de même un peu plus simple.

A l'issue de ce délai supplémentaire la chambre d'accusation peut, le cas échéant, proposer encore un nouveau délai.

Le nouveau dispositif est un peu plus simple dans la mesure où un véritable contrôle de la chambre d'accusation est exercé sur le déroulement et la longueur des instructions. Il n'y a pas de différence radicale entre les deux systèmes, mais, selon le mécanisme proposé par la commission, le juge d'instruction peut, juqu'à un an, ne pas voir son dossier transmis à la chambre d'accusation.

En contrepartie, une fois que son dossier lui est transmis, la chambre d'accusation est maître des délais complémentaires qu'elle octroie.

Ce mécanisme, je le reconnais, est encore très technique, mais il a pour objet d'encadrer l'instruction sans créer de délai butoir.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme la présidente.

L'amendement no 298 n'est pas défendu.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 120 rectifié ?

Mme la garde des sceaux.

Je donnerai un avis circonstancié car je suis fermement opposée à cet amendement, ainsi qu'à celui de M. Lang.

L'amendement prévoit un mécanisme de contrôle de la durée des informations totalement différent, dans ses modalités et dans son esprit, du système proposé par le Gouvernement.

Les dispositions du projet de loi permettent un dialogue entre le juge et les parties, en confiant au juge d'instruction le soin de fixer, s'il l'estime possible, un calendrier prévisionnel de la procédure. A l'expiration des délais fixés par le juge, ou à défaut après un an d'instruction, les parties peuvent demander au juge de clôturer son information ; il y a donc bien une possibilité d'intervention des parties. Si le juge refuse, les parties peuvent saisir la chambre d'accusation, devant laquelle s'ouvre un nouveau dialogue.

L'amendement de votre commission procède d'une critique du projet qui est, me semble-t-il, a priori infondée : les juges ne voudront jamais, affirme-t-on, fixer de calendrier prévisionnel inférieur à un an. Il est vrai qu'il y a des procédures dans lesquelles ils ne pourront pas le faire, mais ils le feront lorsque ce sera possible, et le nouveau texte sera à cet égard incitatif.

Je répète que, même si la durée moyenne des instructions est de dix-huit mois et demi, 16 % des procédures ont une durée inférieure à six mois et 27% une durée comprise entre six mois et un an.

Pourquoi vouloir s'interdire cette possibilité et attendre systématiquement un délai d'un an, comme cela résulterait du texte de la commission - on écarterait ainsi 30 % des procédures pour lesquelles le délai est inférieur à un an -, avant de permettre un contrôle de la chambre d'accusation sur la durée de la procédure ? L'amendement de la commission, outre le fait qu'il prive de cette souplesse, institue par ailleurs un dispositif extrêmement rigide. Au bout d'un an de procédure, si la chambre d'accusation est saisie à l'initiative d'une partie, elle devra toujours fixer des délais impératifs même si elle estime que l'instruction doit se poursuivre. A l'issue de ces délais - le texte de l'amendement ne l'indique pas expressément, mais c'est la seule interprétation qui peut en être faite -, tous les actes accomplis par le juge d'instruction seront nuls, j'insiste là-dessus, sauf si celui-ci aura auparavant saisi la chambre d'accusation pour obtenir une prorogation des délais.

Même si la chambre d'accusation estime que le juge fait bien son trvail, même si elle considère qu'il n'est pas possible de prédire la date d'achèvement de la procédure, elle doit fixer des délais, avec les nullités qui peuvent en résulter.

Ce système est d'une lourdeur et d'une complexité qui manifestent une réelle méfiance envers le juge d'instruction, dont le travail s'effectuera sous la tutelle étroite et a priori de la chambre d'accusation. Je préfère le texte du Gouvernement, qui n'interdit pas à la chambre d'accusation de réagir si le juge ne fait pas bien son travail, puisqu'elle pourra évoquer l'affaire, et même décider, le cas échéant, d'instruire elle-même en délivrant des commissions rogatoires au juge d'instruction. Elle pourra aussi saisir un autre juge. Mais elle pourra également, si elle estime que le magistrat instructeur mérite sa confiance, maintenir un esprit de dialogue. Et c'est cela que nous devons essayer de promouvoir si nous voulons maintenir notre système, dont je crois qu'il est bien meilleur que le système accusatoire.

Nous devons marquer notre confiance dans le juge d'instruction. On ne peut pas se prononcer favorablement à notre système et accomplir sans arrêt des actes de défiance envers lui.

M. René André.

Très juste !

Mme la garde des sceaux.

En tout état de cause, à l'issue d'un nouveau délai de six mois, une partie peut à nouveau demander au juge de clôturer sa procédure et recommencer un dialogue qui peut à nouveau être élevé devant la chambre d'accusation. Voilà ce qui ressort du projet. Je crois que ce texte permet un contrôle de la durée de l'instruction, lequel est tout aussi efficace sans être cause de nullités. De plus, il ne repose pas sur une logique de défiance.

Je vous demande donc avec insistance, mesdames, messieurs les députés, de préférer, à ce stade, le texte du Gou vernement.

Je sais bien que vous avez le souci, non pas de bloquer le dispositif, mais d'instaurer des contrôles un peu plus effectifs. J'ai sous les yeux un amendement que je n'ai pas déposé parce qu'il était trop tard. Je suis prête, à l'occasion de la deuxième lecture, si vous rejetez l'amendement no 120 rectifié, à étudier un autre amendement dans lequel nous combinerions le mécanisme de contrôle de la durée de l'instruction qui est prévu dans le projet. Il permet un dialogue, qu'il faut effectivement promouvoir, entre le juge et les parties, avec le mécanisme envisagé par votre commission des lois.

Nous pourrons ainsi aboutir à une rédaction qui concilie nos objectifs. L'amendement de la commission serait source de complexités et, au final, de nullités.

Mme la présidente.

La parole est à M. Louis Mermaz.

M. Louis Mermaz.

Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras, comme on dit familièrement. Je souhaite que Mme Lazerges ne retire pas l'amendement de la commission. J'ajoute que les commissaires ne devraient pas être assis aussi près du Gouvernement. (Sourires.)

M. Pierre Albertini.

N'est-ce pas une marque de suspicion ?

M. Louis Mermaz.

Non, je dis cela dans un souci d'efficacité de notre travail ! Nous avons enregistré la proposition de Mme la garde des sceaux. Il sera toujours possible, en seconde lecture, de réfléchir sur le sujet avec elle. Mais je pense qu'il serait bien de voter ce soir le texte que propose Mme Lazerges, si elle veut bien le maintenir.

Mme la présidente.

La parole est à M. Arnaud Montebourg.

M. Arnaud Montebourg.

Il est louable que les parties puissent contrôler les délais du déroulement d'une information judiciaire.

En ce qui me concerne, madame le rapporteur, je m'opposerai, je vous le dis en toute amitié, à votre amendement.

Nous savons malheureusement que, dans le système judiciaire que nous lègue l'histoire, les magistrats instructeurs n'ont pas la maîtrise du travail d'investigation réalisé par les policiers sous commission rogatoire. Ce point est essentiel. Tout avocat - certains l'ont été ici - qui


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

connaît les galeries d'instruction du palais de justice de Paris pourrait vous décrire les conditions dans lesquelles les magistrats instructeurs s'arrachent les cheveux pour obtenir le retour - le fameux, l'hypothétique, l'impossible, le presque virtuel retour - de la commission rogatoire, maladie congénitale, si je puis dire, de notre système judiciaire. Quelle en est la raison ? Ce sont les policiers qui fixent les priorités dans les enquêtes judiciaires dans notre pays, et non les magistrats.

Imposer un système de contrôle, qui peut être louable, en tout cas dans son principe, par les parties des délais de l'information judiciaire provoquerait de considérables dégâts sur les enquêtes, non seulement en cours mais à venir. J'appelle donc l'attention de tous mes collègues sur les conséquences quelques peu dangereuses que l'adoption de l'amendement pourrait avoir.

Cet amendement pourrait, en effet, provoquer des dégâts. Je ne vous demande pas, madame le rapporteur, de le retirer, mais je prie chacun de mes collègues de ne pas le voter.

Mme la présidente.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Je rappelle, car on risque de l'oublier, que l'amendement no 120 rectifié a été adopté par la commission des lois.

M. Arnaud Montebourg.

Et alors ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Il est très difficile pour un juge d'instruction d'indiquer le temps que durera son instruction car cet élément lui échappe complètement.

M. Pierre Albertini et M. Léonce Deprez.

C'est vrai !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Au début de l'instruction, il ne sait pas encore très bien comment il orientera celle-ci, il ignore si la police judiciaire sera rapide ou lente et s'il aura besoin ou non d'une commission rogatoire internationale. Il est donc complètement illusoire d'imaginer qu'un juge d'instruction puisse indiquer aux parties que l'instruction durera six, douze ou dix-huit mois.

Le système que nous proposons peut paraître plus rigide que ce qui est prévu dans le projet, mais il est plus simple. En outre, je pense qu'il faut réhabiliter la chambre d'accusation.

M. Patrick Devedjian.

Vaste programme !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Je vous l'accorde, mais je suis persuadée si les chambres d'accusation comprenaient des magistrats plus jeunes et plus dynamiques, leurs contrôles et leurs missions seraient mieux effectués.

Cela dit, je maintiens l'amendement. Mais je suis prête, d'ici à la deuxième lecture, à reconsidérer les propositions de Mme la garde des sceaux, pour voir comment nous pourrions combiner, de façon intelligente et pragmatique, le système du ministère de la justice et celui de la commission des lois.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 120 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 21.

(L'article 21 est adopté.)

(M. Yves Cochet remplace Mme Nicole Catala au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

Après l'article 21

M. le président.

M. Tourret a présenté un amendement, no 247, ainsi libellé :

« Après l'article 21, insérer l'article suivant :

« Le premier alinéa de l'article 8 du même code est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« En matière de délit, la prescription de l'action publique est de trois années révolues à compter du jour ou le délit a été commis si dans cet intervalle il n'a été fait aucun acte d'instruction ou de poursuite.

« S'il en a été effectué dans cet intervalle, elle ne se prescrit qu'après une année révolue à compter du dernier acte. Il en est ainsi même à l'égard des personnes qui ne seraient pas impliquées dans cet acte d'instruction ou de poursuite.

« La prescription est toujours acquise, au terme de six années révolues à compter du jour ou les faits ont été commis. »

La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

La prescription doit-elle exister en tant que principe général du droit ? Assurément car elle est un élément de paix publique, exception faite des crimes contre l'humanité.

Les prescriptions en matière de contraventions, de délits et de crimes ont fait l'objet de différentes décisions de la chambre criminelle de la Cour de cassation. En matière délictuelle essentiellement, une juriprudence a dégagé le principe de délit continu pour ce qui est du recel, puis posé que la prescription intervenait à compter du jour où le délit a non pas été commis, mais révélé.

Certains ont dès lors pu parler, de manière impropre, d'imprescriptibilité d'un certain nombre de délits. L'abus de biens sociaux entre dans cette catégorie.

Il s'agit donc d'une création de la chambre criminelle de la Cour de cassation. Cette création peut être modifiée à tout moment. Elle l'a d'ailleurs été il y a moins de deux ans, avant que la chambre criminelle ne revienne sur sa jurisprudence.

Or il n'appartient pas à la chambre criminelle, il n'appartient pas à son président, il n'appartient pas à ses conseillers de faire la loi. Le mérite de faire la loi revient au Parlement et non aux magistrats.

Il n'est donc pas question d'appliquer une amnistie déguisée : il s'agit, au contraire, de se donner les moyens de réprimer la délinquance économique, qui ne porte pas que sur les abus de biens sociaux.

Pourquoi réserver, comme le fait la chambre criminelle, un sort favorable à la corruption ? Pourquoi réserver un sort favorable à la prise illicite d'intérêts ? Pourquoi réserver un sort favorable à l'escroquerie ? Refuser de réfléchir sur la prescrition concernant les délits odieux qui troublent gravement l'ordre social et économique est incompréhensible.

Il est donc nécessaire, face au laxisme législatif actuel, de prévoir une prescription aggravée pour tous les délits économiques et, plus largement, pour tous les délits complexes.

Je propose donc, premièrement, que cette prescription soit non pas de trois années, mais de six, à compter du moment où le délit est commis ; deuxièmement, que


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cette prescription de six années s'applique à tous les délits économiques et complexes et non pas simplement au délit d'abus de biens sociaux ; troisièmement, qu'elle ne s'applique à aucune des infractions commises avant le vote de la loi, que la loi ne soit donc pas d'application immédiate et qu'elle ne s'applique pas aux affaires en cours quatrièmement, que la loi puisse prévoir une responsabilité spéciale des commissaires aux comptes et de tous ceux qui auront contribué à permettre la réalisation des délits économiques.

C'est donc à une vaste réforme de la loi de 1966 sur les sociétés commerciales, et particulièrement au rôle joué par les commissaires aux comptes, que j'appelle le Gouvernement à réfléchir pour permettre une véritable répression de la délinquance économique, qui tienne compte des principes généraux du droit.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis également défavorable à l'amendement. J'ai dit nettement pourquoi dans mon discours introductif et je n'y reviendrai donc pas. La question de l'opportunité est décisive.

Je suis assez sensible aux arguments d'incohérence, en tout cas de non-égalité des délais de prescription entre des délits assez voisins. Mais si nous devons rétablir une cohérence, celle-ci se fera dans le sens de la plus grande sévérité.

Nous aurons sans doute à reparler du sujet dans le cadre de la révision de la loi de 1966. Il ne peut y avoir d'ambiguïté : je serai hostile à l'adoption de tout amendement de ce type.

M. le président.

La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Je n'espère pas régler le problème de la prescription de l'abus de biens sociaux par le biais de l'adoption d'un tel amendement, dont l'objet est d'ailleurs moins large que l'ensemble des questions que je viens d'évoquer. Ce que je souhaite - et j'ai bien entendu l'annonce de Mme la garde des sceaux -, c'est qu'une véritable réforme de la loi sur les sociétés commerciales intervienne et qu'à travers elle l'ensemble de la délinquance économique puisse être poursuivi, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Il suffit d'une modification de la composition de la chambre criminelle pour qu'il n'y ait plus aucune possibilité de poursuivre les délits en matière d'abus de biens sociaux. C'est une question de majorité ! Cette majorité existe dans un sens, et elle peut se constituer dans un autre.

Nous savons très bien que tant la chambre sociale que la chambre criminelle ont des jurisprudences évolutives, qui évoluent au gré du temps et des majorités qui les composent. Il est donc indispensable que le Parlement soit saisi d'une vaste réforme.

Compte tenu de ce qu'a dit Mme la garde des sceaux et du fait que nous reconnaissons l'un et l'autre la nécessité de poursuivre l'ensemble de la délinquance économique, et pas simplement l'abus de biens sociaux - la n otion d'« imprescriptibilité » étant ici à mon sens inconcevable par rapport aux principes généraux du droit -, je retire mon amendement.

M. Arnaud Montebourg.

Il ne s'agit pas d'« imprescriptibilité » !

M. le président.

L'amendement no 247 est retiré.

Mme Lazerges, rapporteur, et M. Houillon ont présenté un amendement, no 122, ainsi libellé :

« Après l'article 21, insérer l'article suivant :

« I. - La dernière phrase du dernier alinéa de l'article 151 du même code est remplacée par deux alinéas ainsi rédigés :

« L'officier de police judiciaire accuse réception de sa mission.

« Il indique en même temps au juge s'il lui est possible de respecter le délai imparti ou s'il souhaite bénéficier d'un délai supplémentaire pour les raisons qu'il indique. »

« II. - Le premier alinéa de l'article 161 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées : "les experts accusent réception de leur mission. Ils indiquent en même temps au juge s'il leur est possible de respecter le délai imparti ou s'ils souhaitent bénéficier d'un délai supplémentaire pour les raisons qu'ils indiquent". »

La parole est à Mme le rapporteur.

M me Christine Lazerges, rapporteur.

Je laisse à M. Houillon le soin de défendre cet amendement, monsieur le président.

M. le président.

Vous avez la parole, monsieur Houillon.

M. Philippe Houillon.

Cet amendement tend à organiser le travail des officiers de police judiciaire et des experts, dans un souci d'accélération de la procédure pénale. Ils doivent pouvoir dire si le délai imparti leur paraît pouvoir être tenu ou, à défaut, préciser le délai supplémentaire dont ils estiment avoir besoin.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement a été adopté par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Le Gouvernement s'en remet à la sagessse de l'Assemblée.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 122.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Mme Lazerges, rapporteur, et Mme Bredin ont présenté un amendement, no 121, ainsi libellé :

« Après l'article 21, insérer l'article suivant :

« Après l'article 175-1 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Le juge d'instruction informe tous les six mois la partie civile de l'avancement de l'instruction. »

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Cet amendement concerne l'information de la partie civile pendant l'instruction.

Aujourd'hui, nombre d'informations sont données aux différentes parties, mais on aborde peu ce qui intéresse la victime elle-même, son écoute, sa place. Il faut, c'est l'évidence, informer la partie civile tous les six mois de l'avancement de l'instruction. Elle aussi doit savoir ce qu'il advient de l'affaire.

M. le président.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement est très important.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 121.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 123, ainsi libellé :

« Après l'article 21, insérer l'article suivant :

« Les deux derniers alinéas de l'article 179 du même code sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le prévenu en détention est immédiatement remis en liberté si le tribunal correctionnel n'a pas commencé à examiner au fond à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date de l'ordonnance de renvoi.

« Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut se tenir avant l'expiration de ce délai, le tribunal peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée de deux mois. La comparution personnelle du prévenu est de droit si lui-même ou son avocat en font la demande. Cette décision peut-être renouvelée une fois dans les mêmes formes. Si le prévenu n'a toujours pas été jugé à l'issue de cette nouvelle prolongation, il est remis immédiatement en liberté.

« Lorsqu'elle est devenue définitive, l'ordonnance mentionnée au troisième alinéa couvre, s'il en existe, les vices de la procédure. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Il nous a semblé important de s'interroger aussi sur la zone d'ombre qui s'étend entre le moment où l'instruction préparatoire est terminée et le moment où la personne est renvoyée en jugement. L'amendement a donc pour objet d'instituer un délai d'audiencement en matière correctionnelle.

Actuellement, l'article 179 du code de procédure pénale dispose que la détention provisoire peut être prolongée pour une durée qui ne peut être supérieure à deux mois lorsque l'on est toujours en détention provisoire au terme de l'instruction. En pratique, cette mesure n'empêche pas les détentions plus longues, qui correspondent à des mises à disposition de la justice, le tribunal se réunissant une première fois dans le délai de deux mois puis renvoyant l'affaire au fond à une audience ultérieure. Ces pratiques sont graves : l'instruction est close, la personne renvoyée en jugement est toujours en détention provisoire et elle ne sait pas, finalement, quand elle finira par comparaître.

Nous proposons que le jugement au fond intervienne dans les deux mois, faute de quoi le prévenu est remis en l iberté. Toutefois, pour tenir compte de certaines contraintes pratiques, le tribunal pourrait prolonger cette mesure à deux reprises. Ainsi, en matière correctionnelle, le délai d'audiencement d'une personne en détention provisoire ne pourrait en aucun cas excéder six mois.

C'est un amendement de sagesse.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

C'est un bon amendement, auquel le Gouvernement est favorable, comme je l'avais dit dans mon discours introductif.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 123.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 124, ainsi libellé :

« Après l'article 21, insérer l'article suivant :

« Après l'article 215-1 du même code, il est inséré un article 215-2 ainsi rédigé :

« Art. 215-2 . - L'accusé détenu en raison des faits pour lesquels il est renvoyé devant la cour d'assises est immédiatement remis en liberté s'il n'a pas comparu devant celle-ci à l'expiration d'un délai de huit mois à compter de la date à laquelle l'arrêt de mise en accusation est devenu définitif.

« Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut débuter avant l'expiration de ce délai, la chambre d'accusation peut, à titre exceptionnel, par une décision rendue conformément à l'article 144 et mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obst acle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation des effets de l'ordonnance de prise de corps pour une nouvelle durée de huit mois. La comparution personnelle de l'accusé est de droit si lui-même ou son avocat en font la demande. Cette prolongation peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes. Si l'accusé n'a pas comparu devant la cour d'assises à l'issue de cette nouvelle prolongation, il est immédiatement remis en liberté. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement, parallèle à celui qui vient d'être adopté, concerne cette fois la procédure criminelle. Nous voulons essayer de faire en sorte - mais nous savons que cela est difficile dans certains ressorts - que l'audiencement devant les cours d'assises ne soit pas aussi long qu'il l'est aujourd'hui.

L'amendement a pour objet de limiter à huit mois le délai d'audiencement que l'on pourrait appeler « de droit commun ». Ce délai pourrait être porté à vingt-quatre mois, sous certaines conditions, que vous trouverez énoncées clairement à l'article 215-2 du code de procédure pénale. Ainsi, au bout de vingt-quatre mois, si la personne n'est toujours pas jugée et est toujours en détention provisoire, elle est remise en liberté.

Vingt-quatre mois pour audiencer une affaire d'assises constituent à mon avis, partout en France, un délai à peine raisonnable.

M. Patrice Martin-Lalande.

C'est un euphémisme !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Vous venez d'adopter un délai d'audiencement en matière correctionnelle, ce dont je me réjouis. Je suis également favorable au principe d'un délai d'audiencement en matière criminelle. Mais j'éprouve une légère hésitation sur les délais proposés i ci. Le délai global de deux ans me paraît opportun mais le premier délai de huit mois renouvelable deux fois peut paraître un peu trop court.

Dans plusieurs ressorts comme Paris, Bobigny ou Douai, où les cours d'assises sont encore surchargées, malgré l'amélioration des effectifs, les délais d'audiencement sont supérieurs à un an. Il est sûr que ce retard ne pourra pas être résorbé en un jour. On risque donc d'utiliser de façon systématique la première prolongation au bout de huit mois, ce qui portera, dans certains cas, le délai d'audiencement à seize mois au lieu d'un an.

C'est pourquoi je préférerais que l'on prévoie un premier délai d'un an et deux délais supplémentaires de six mois. Ce serait plus compatible avec la réalité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Si l'amendement était modifié en ce sens, je m'y rallierais pleinement. De toute façon, c'est un bon amendement dans son principe. Je m'en remets donc à la sagesse de votre assemblée. Peut-être pourrons-nous trouver une rédaction plus adéquate au cours des navettes, sauf si vous en avez une à proposer immédiatement.

M. le président.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Nous pourrionsr ectifier sur-le-champ cet amendement en retenant comme premier délai un an puis deux prolongations de six mois.

M. Patrick Devedjian.

Très bien !

M. le président.

En d'autres termes, dans le premier alinéa, vous substituez aux mots : « huit mois » les mots :

« un an » et, dans le second alinéa, au mot : « huit » le mot : « six ».

L'amendement est ainsi rectifié.

Je mets aux voix l'amendement no 124, rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Houillon a présenté un amendement, no 204, ainsi libellé :

« Après l'article 21, insérer l'article suivant :

« Il est inséré dans le code de procédure pénale un nouvel article 469-2 ainsi rédigé :

« Art. 469-2. - A la demande des parties, le tribunal se prononce par motivation spécifique sur la sanction de l'absence de jugement du prévenu dans un délai raisonnable. Après avoir constaté que ce délai était dépassé, il peut en tenir compte dans le prononcé de la peine. »

La parole est à M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon.

Cet amendement concerne la n otion de délai raisonnable. Dans votre rapport, madame Lazerges, vous indiquez que celui-ci « constitue une innovation essentielle dans notre droit pénal ». Une telle affirmation mérite d'être nuancée. Cette notion figure à l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, laquelle est applicable dans notre droit positif. C'est une « innovation essentielle » relative.

Cela dit, je suis favorable à ce qu'elle soit inscrite expressément dans notre code pénal.

Une fois le principe du « délai raisonnable » affirmé, on s'aperçoit qu'il n'est pas assorti de sanctions. Aucun changement par rapport à la situation actuelle. J'entends bien que les choses ne sont pas très faciles. Mais pourquoi affirmer un tel principe si on n'en tire strictement aucune conséquence ? Le tribunal doit se prononcer sur le délai raisonnable et, le cas échéant, pouvoir tenir compte de son dépassement dans le prononcé de la peine. Ainsi, lorsque le jugement est rendu sept ans, voire plus, après les faits, le tribunal devrait pouvoir en tenir compte sans qu'il y ait pour lui obligation de le faire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Effectivement, l'article 6-1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme prévoit ce délai raisonnable. Nous n'avons rien inventé. Nous avons simplement essayé de décliner ce principe dans plusieurs articles du code de procédure pénale.

Je reste sceptique devant cet amendement, qui a été repoussé par la commission des lois. La preuve vient d'en être donnée avec les délais d'audiencement, nous avons déjà travaillé de façon concrète sur le délai raisonnable

Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la garde des sceaux. Même avis.

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Catala.

Mme Nicole Catala.

J'avais déposé un amendement dans le même sens à l'article 1er , malheureusement, il est tombé.

Je regrette comme M. Houillon qu'on n'ait pas prévu de sanction « nationale » pour dépassement des délais raisonnables. Seule, en effet, une procédure devant la Cour de Strasbourg peut aboutir à une véritable sanction des lenteurs de notre justice.

J'aurais volontiers proposé que le dépassement des délais permette à la chambre d'accusation de prononcer la nullité de l'instruction. Il est trop tard pour reprendre l'amendement que j'avais déposé à l'article 1er , mais peutêtre, en deuxième lecture, ferai-je à nouveau cette proposition.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 204.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 125, ainsi rédigé :

« Après l'article 21, insérer l'intitulé et l'article suivants :

« C HAPITRE

III bis

« Dispositions relatives aux audiences

« Art. 21 bis Après l'article L.

311-15 du code de l'organisation judiciaire, sont insérés l'intitulé et l'article suivants :

« Sous-section IV bis

« Composition des audiences pénales

« Art. L.

311-15-1. La composition prévisionnelle des audiences pénales est déterminée par une commission paritaire composée de magistrats du siège et du parquet. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement tend à créer une commission d'audiencement. Nous avons interrogé de très nombreux magistrats au sujet de l'audiencement. Les magistrats du parquet rejettent la responsabilité de ses lenteurs sur les magistrats du siège et ceux-ci nous répondent que l'audiencement est l'affaire du parquet. De façon peut-être simple, mais que nous espérons fructueuse, nous avons suggéré que magistrats du siège et magistrats du parquet organisent ensemble l'audiencement dans leur juridiction.

M. Patrick Devedjian.

La perspective des 35 heures s'éloigne de plus en plus pour eux ! (Sourires.)

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Certainement.

M. le président.

Ne soyez pas cavalier, monsieur Devedjian.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Sagesse.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 125.

(L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Article 22

M. le président.

Je donne lecture de l'article 22 : C HAPITRE IV Dispositions relatives à la communication

« Art. 22. - Les sections VII et VIII du chapitre VI du titre II du livre II du code pénal deviennent respectivement les sections IX et X et il est inséré, après l'article 226-30 de ce code, deux sections VII et VIII. La section VII est ainsi rédigée :

« Section

VII

« De l'atteinte à la réputation d'une personne mise en cause dans une procédure judiciaire

« Art. 226-30-1 . - Est puni d'une amende de 100 000 F le fait de diffuser, de quelque manière que ce soit et quel qu'en soit le support, l'image d'une personne identifiée ou identifiable, mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale et n'ayant pas encore fait l'objet d'un jugement de condamnation, faisant apparaître que cette personne porte des menottes ou entraves.

« Est puni de la même peine le fait de réaliser ou de diffuser un sondage d'opinion portant sur la culpabilité d'une personne mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale ou sur la peine susceptible d'être prononcée à son encontre.

« Lorsque les délits prévus au présent article sont commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les d ispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la prescription et la détermination des personnes responsables. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Avec l'article 22, nous abordons le chapitre IV consacré aux dispositions relatives à la communication. A ce propos, je tiens à souligner que j'ai été personnellement un peu choqué de l'expression

« fenêtre de publicité ». En tant que professionnel de la presse, je recommanderais, en deuxième lecture, madame la ministre, madame le rapporteur, d'utiliser plutôt

« fenêtre de communication » ou « fenêtre d'information ». Le terme « publicité » n'est vraiment pas adéquat.

Quoi qu'il en soit, nous avions craint que la liberté de la presse ne soit quelque peu restreinte en raison de telle et telle propositions. Mais nous avons pris note, madame la ministre, de votre volonté de défendre cette liberté de la presse, de la respecter et de faire en sorte que des textes législatifs ne viennent pas la limiter de manière regrettable.

La loi de 1881 est un texte de base, presque un monument historique. Il s'agit d'une très bonne loi. La preuve, c'est qu'elle a surmonté l'épreuve du temps. Il convient donc de ne pas rajouter, au fil des ans, de nouveaux textes qui alourdiraient les charges qui pèsent sur les entreprises de presse.

Nous avons entendu à l'Assemblée nationale, dans le groupe d'études de la presse écrite, les demandes des professionnels des entreprises de presse. Il s'agit d'aider la presse, mais surtout de ne pas alourdir encore les charges qui pèsent sur elle. Ne compliquons pas la gestion de cette presse, souvent harcelée par nombre de procédures et de procès.

Vous avez tenu à ajouter dans le code pénal deux infractions supplémentaires, madame la ministre. Sans doute avez-vous souhaité renforcer l'équilibre entre, d'une part, le respect de la personne et de son image, d'autre part, le droit de la société d'être informée. Mais intégrer ainsi des dispositions spécifiques déjà sanctionnées par le juge des référés et le droit civil, n'est-ce pas vouloir « légiférer dans le détail », pour reprendre l'expression d'un de nos collègues ? N'est-ce pas la voie ouverte à la multiplication des textes ? L'efficacité de la loi de 1881 a été démontrée. Son objectif était de fixer l'esprit et les lignes directrices de la liberté de la presse et du droit des personnes. Et la presse, reconnaissons-le, respecte le droit de réponse. Elle est même de plus en plus attentive à ses devoirs envers les personnes.

Ces deux interdictions, la photo de la personne menottée et la diffusion de sondages n'ont-elles pas été inspirées par de récentes affaires pénibles ? Je remarque que l'interdiction de sondages ne peut viser que des figures politiques et que les textes actuels permettent déjà de sanctionner et de réparer le préjudice causé, même si ce n'est pas intégré dans le code pénal.

De façon plus générale, il me paraît nécessaire de rappeler que le législateur ne doit pas légiférer au cas par cas ni faire du pointillisme. On comprend la bonne intention exprimée par les propositions contenues dans ce projet, mais il faut veiller à ce que le législateur s'attache d'abord à l'esprit des lois et n'entre pas trop dans le détail sous le coup d'émotions récentes, provoquées par telle ou telle dérive. La loi doit fixer de grandes orientations.

Quant au droit à l'image, c'est le droit qu'a toute personne d'empêcher la publication de son image.

Je pense que ces règles sont aujourd'hui respectées et si j'ai fait ces observations, c'est pour faire comprendre que la presse doit maintenant pouvoir jouer son rôle sans supporter de nouvelles contraintes. Il suffit de lui demander de respecter l'esprit de la loi de 1881, ce qu'elle a d'ailleurs fait jusqu'à ce jour.

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Je suis très flattée d'intervenir après M. Léonce Deprez, qui parle au nom d'une entreprise de presse - on ne sait pas laquelle...

M. Arnaud Montebourg.

Hersant !

Mme Frédérique Bredin.

Il était néanmoins important de connaître son point de vue.

Le projet a le mérite de ne pas simplement envisager la présomption d'innocence dans le cadre du procès pénal.

En effet, il traite d'un problème extrêmement grave aujourd'hui, celui de la présomption d'innocence face à l'opinion publique. Ainsi le volet consacré à la communication est-il désormais indissociablement lié à toutes les étapes de la procédure. Le rapport Truche, d'ailleurs, expliquait fort bien que la présomption d'innocence devait être assurée non seulement face à la justice, mais aussi face à l'opinion publique.

Dans notre pays, le débat est difficile, il vire facilement à la caricature et, pourtant, c'est un débat essentiel pour notre démocratie. Il mériterait d'être mené dans le calme, dans la sérénité et sans pressions, d'où qu'elles viennent.

Puisqu'il semble que le sujet porte rapidement à des faux débats ou à des confusions savamment entretenues, je voudrais faire trois remarques préalables pour enfoncer quelques portes qui sont, d'ailleurs, à mon avis, comme le disait notre collègue Louis Mermaz, déjà ouvertes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Il ne s'agit pas de tenir la presse écrite ou audiovisuelle à l'écart des affaires judiciaires, de la priver peu ou prou du droit d'en rendre compte. Ce serait non seulement impossible, mais inadmissible. Ce serait un combat d'arrière-garde et, qui plus est, un mauvais combat.

Mais, deuxième remarque, chaque fois que, dans notre droit un peu poussiéreux - finalement trop écrit - on veut affirmer ou fortifier un droit de l'homme, on invoque la liberté de la presse qui pourrait en souffrir. Or il ne faut pas parler de la presse comme d'une entité théorique, tellement théorique et abstraite qu'elle en devient intouchable. Car la réalité est infiniment plus complexe.

Il n'existe pas une presse, mais plusieurs presses. La presse audiovisuelle et la presse écrite répondent à des logiques tout à fait différentes. La presse nationale et la presse régionale ne sont pas les mêmes et on ne peut pas limiter nos débats aux trois journaux parisiens, que nous lisons tous, aussi estimables soient-ils. Il y a la presse d'information, la presse d'opinion, et une troisième catégorie, la presse à sensation, qui se nourrit, au sens figuré comme au sens propre, des faits divers. Il y a une presse - très rare - qui vit sans publicité, qui ne connaît pas la logique commerciale des annonceurs, et une autre qui vit de la publicité.

De même, nous ne laisserons pas dire, ce serait nous croire bien naïfs, que la presse se limite aux journalistes, qui, bien sûr, respectent leur charte déontologique. Car il n'y a pas que les journalistes, il y a d'autres acteurs. Ce sont les annonceurs, ce sont aussi les actionnaires, et ils poursuivent leur propre stratégie. Nous avons assistér écemment à de sérieuses restructurations dans le domaine de l'audiovisuel et de la presse écrite. Souvent, il s'agit de grands groupes qui sont en train de se constituer, des groupes extrêmement puissants, qui ont leurs propres intérêts économiques et financiers et qui savent se transformer en redoutables lobbies, on a pu le constater.

Dernièrement, dans un journal que je ne citerai pas, nous avons pu lire qu'un grand groupe avait comme idée de distraire les députés qui s'ennuyaient en organisant quelques séances distractives près de l'Assemblée nationale, à Paris : « C'est le point de rassemblement naturel pour nos députés et un lieu de disponibilité plus facile (sauf session de nuit, ils s'ennuient même le soir, loin de leur circonscription). »

M. Jean Launay.

Mais quel est ce groupe, madame Bredin ?

Mme Frédérique Bredin.

Ces quelques évidences étant rappelées, j'en reviens au débat sur la présomption d'innocence. Essayons de voir comment nous pourrions éviter les préjugements face à l'opinion publique. Que faire ? Nous inspirer peut-être des exemples étrangers. Nombre de pays européens ont, en la matière, des législations infiniment plus restrictives que la nôtre, sans d'ailleurs que la liberté de la presse y semble menacée. C'est le cas du Danemark, où est interdite, à peine de sanctions pénales, toute allusion à l'identité des personnes en cause, et je crois que le Danemark est un pays démocratique. C'est également, dans une moindre mesure, le cas des Pays-Bas, où seuls peuvent être publiés le prénom et l'initiale du nom, de la Belgique aussi, et encore de l'Allemagne.

Quant à nos voisins de Grande-Bretagne - puisque vous nous avez suggéré à juste titre, madame la ministre, de lire le livre de M. Spencer - même eux prennent très au sérieux, selon l'auteur, « le risque que l'accusé soit jugé par un tribunal ayant un préjugé contre lui, en raison de l'action des médias qui l'ont dénigré et qui ont créé, de quelque façon que ce soit, un climat d'opinion publique qui le considère comme incontestable coupable ».

M. le président.

Madame Bredin, je vois qu'il vous reste plusieurs feuillets à lire, mais votre temps est écoulé.

Je vous prierai donc de conclure.

Mme Frédérique Bredin.

Eh bien, je finis cette partie, monsieur le président, et je présenterai la seconde à l'article 23.

Le fameux contempt of court se justifie d'ailleurs, et c'est une caractéristique du droit anglais davantage par le refus d'ingérence dans la justice ou d'influence des médias sur les juges que par le respect de la présomption d'innocence. Il prévoit des amendes considérables et de lourdes peines de prison, comme on l'a vu avec la jurisprudence sur le Daily Mirror ou le Sun . Les Anglais sont donc sont extrêmement sévères, comme les Danois, les Hollandais et les Allemands.

Qu'allons-nous faire ? J'y reviendrai, monsieur le président, à l'article 23.

M. le président.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Madame la ministre, l'article 22 comprend deux dispositions.

La première interdit les sondages sur la culpabilité.

Cela ne pose pas de problème, à mon avis, et j'y suis favorable.

La seconde interdit la publication de photographies de personnes entravées ou menottées. Je comprends parfaitement l'intention et je me souviens d'ailleurs du discours de M. Crépeau à cet égard, mais deux interrogations m'interpellent.

D'une part, compte tenu de la mondialisation des médias, comment allez-vous empêcher la diffusion sur le territoire national d'images de personnes menottées transmises par la télévision ou publiées par la presse étrangère ? Sont-ce seulement les menottes françaises que vous voulez interdire de diffusion ? Ou sont-ce toutes les menottes du monde ? Faudra-t-il inscrire made in France en gros caractères sur nos menottes, pour qu'on sache qu'on ne peut pas les montrer ? D'autre part, toutes les menottes ne sont pas les mêmes : il y a celles de la démocratie et celles de la dictature. Lorsque des combattants de la liberté sont arrêtés et humiliés, je crois que la publication des images de la répression qu'ils subissent est une bonne manière de lutter contre la dictature. Si, par exemple, M. Pinochet se retrouve avec une paire de menottes d'ici à quelques jours - ce que beaucoup de gens espèrent - le public français sera-t-il le seul à être privé de ces images ? Et ces photos que je vous montre, celles de la Chine entravant, humiliant ses condamnés avant de les exécuter publiquement qui témoignent de l'horreur de ce régime, les Français ne pourront-ils plus les voir ? Le vrai problème, c'est que, dans 80 % des cas, les menottes françaises sont inutiles. Elles ne sont mises que par commodité. La tradition, d'ailleurs, est de ne pas menotter les femmes. C'est bien, et cela prouve que les menottes n'ont rien d'obligatoire. Il suffirait de donner des instructions pour que le port des menottes ne soit imposé qu'aux gens dangereux ou qui encourent des peines très longues.

Pour résumer, si vous ne voulez pas voir les menottes, le meilleur moyen c'est encore de ne pas les mettre.

M. Pierre Albertini.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Arnaud Montebourg.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

M. Arnaud Montebourg.

L'analyse de M. Devedjian et ses objections auxquelles nous souscrivons tous renvoient finalement à l'interprétation ou à l'usage que les parties privées pourront faire de ce point d'appui inséré dans le nouveau code pénal, une fois la loi promulguée. J'exprimerai cependant le regret que ce texte ne soit pas plutôt inséré dans la loi de 1881. Cette grande loi, appliquée depuis un siècle et précisée par une jurisprudence qui a procédé par couches sédimentaires, a toujours protégé, dans son esprit comme dans sa lettre, la liberté d'expression, organisant des règles de courte prescription, une interprétation restrictive de ses dispositions et des nullités de procédure qui pourraient trouver à s'appliquer en la matière.

Finalement, dans son esprit, qu'est-ce que la loi de 1881 ? Un texte qui pénalise certains abus de presse mais qui est, en vérité, un instrument de réparation civile devant des juridictions pénales. Dans cette réparation civile, le procureur est en quelque sorte le jouet des parties, un jouet complaisant, certes, car il aime participer à ces débats prestigieux et de surcroît passionnants, mais un personnage un peu en retrait. Ce n'est pas le parquet qui, dans la tradition de la loi de 1881, poursuit.

Je ne pense pas que ce point puisse faire l'objet d'un amendement et je me permets d'exprimer ce regret directement à Mme la garde des sceaux. Mais si nous décidions d'insérer ce texte dans le corpus même de la loi de 1881 et donc de l'appliquer dans l'esprit de cette loi, peut-être pourrions-nous atténuer ses effets éventuellement pervers.

Sur le fait et le contenu, nous sommes d'accord.

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

C'est une disposition importante sur laquelle je souhaite revenir un instant, compte tenu des observations qui ont été faites.

Je trouve très intéressantes les considérations planétaires de M. Devedjian. Simplement, les procureurs poursuivront s'ils sont saisis d'une plainte. Personnellement, je n'éprouve pas le besoin de voir M. Pinochet menotté. Il me suffit de savoir qu'il échappe à l'impunité. Quant à ce qui se passe en Chine, encore une fois, il faudrait porter plainte pour voir les images condamnées. Nous sommes donc bien ramenés à ce qui se passe très prosaïquement, très concrètement, lorsqu'une personne, chez nous, doit porter des menottes.

Vous me dites, monsieur Devedjian : si vous ne voulez pas voir des images de menottes, commencez par dire qu'on ne les mette pas. Telle a été évidemment ma première réaction lorsque je me suis penchée sur le sujet.

Mais j'ai relu l'article 803 du code de procédure pénale, qui est très précis : « Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s'il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite. » On ne

peut pas mieux dire ! Quant aux instructions données aux forces de l'ordre, je les ai vérifiées. J'avais été choquée par l'affaire du gu ide Forté, que l'on a vu à la télévision et en pleine page dans les journaux, non seulement menotté, mais tenu en laisse par des escorteurs hilares ! Je ne sais pas comment on peut être fier de tenir un homme en laisse, mais c'était comme ça ! Je me suis donc renseignée directement auprès du directeur de la gendarmerie et du directeur de l a police judiciaire pour savoir quelles étaient les consignes données aux escorteurs. Ils m'ont affirmé, preuves à l'appui, que toutes les consignes allaient dans le même sens, à savoir que le port des menottes doit être exceptionnel et ne se justifie que si la personne est dangereuse pour elle-même ou pour autrui, ou risque de s'échapper.

La vérité, c'est que les responsables ne sont pas les magistrats mais les escorteurs. Ils ont tendance, et on les comprend, à prendre des précautions parfois excessives.

J'en ai déduit qu'il ne fallait pas imputer à la seule presse la responsabilité des images de personnes menottées, et j'ai donc mis dans le texte de loi ce qui n'était jusqu'ici que de l'ordre de la circulaire. C'est une précaution supplémentaire.

Mais comme je sais que, malgré les règles qui s'imposent déjà aux auxiliaires de justice et celles que nous allons y ajouter dans le code de procédure pénale, on continuera quand même de mettre les menottes, je demande en outre que l'on fasse passer les personnes mises en cause par des portes dérobées pour les soustraire aux regards quand c'est possible.

M. Pierre Albertini.

Vous les cachez !

M. Patrick Devedjian.

Quelle hypocrisie !

Mme la garde des sceaux.

Quand ce n'est pas possible, quand, malgré tout, des images de personnes menottées sont prises - et on se demande pourquoi car les photographes ont suffisamment de talent pour éviter juste ce détail humiliant, tout en montrant ceux que l'on embarque ou qui sont encadrés par des policiers - alors, oui, à ce moment-là, les tribunaux sanctionnent, s'il y a plainte, la publication de ces images interdites.

Je crois que c'est une gradation, que c'est un partage de la responsabilité. Je crois que c'est une bonne mesure.

Je crois que la liberté de l'information ne gagne rien à se livrer à ces pratiques. Je crois que prévoir cette sanction contribue à protéger la dignité des personnes. Et si j'avais pu aller plus loin dans l'interdiction du port des menottes, soyez sûrs que je l'aurais fait, mais je constate que ce n'est pas possible.

Le seul fait que l'on parle dans le débat public de cette question a déjà abouti à beaucoup plus de sobriété dans les pratiques. Tout simplement parce que les gens réfléchissent. Je suis persuadée que ces escorteurs que l'on a vus mener un homme en laisse ne sont probablement pas fiers de ce qu'ils ont fait, mais c'était l'usage, personne ne le remettait en cause, alors pourquoi se priver ?

M. Patrick Devedjian.

C'est une affaire de gouvernement !

Mme la garde des sceaux.

C'est presque une question de civisme et de citoyenneté. Il y aura des débats dans les rédactions, dont beaucoup, d'ailleurs, approuvent cette mesure. Inutile de vous dire que j'ai, comme toujours, consulté tous les professionnels. Je pense cette mesure salutaire pour qu'ils prennent un minimum de distance par rapport à la publication des images. Et cela ne bride en rien, monsieur Devedjian, l'information que chacun doit avoir sur des événements importants, à plus forte raison quand ils sont collectifs, comme ceux que vous avez cités.

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 126, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le début du premier alinéa de l'article 22 :

« La section VII du chapitre VI du titre II du livre II du code pénal devient la section IX et il est inséré... (le reste sans changement). »

La parole est à Mme le rapporteur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement corrige une erreur matérielle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 126.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement no 127 rectifié est présenté par Mme Lazerges, rapporteur, et Mme Catala, l'amendement no 285 corrigé par Mme Catala.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le troisième alinéa de l'article 22, après les mots : "de l'atteinte", insérer les mots : "à la dignité ou". »

La parole est à Mme Nicole Catala, pour soutenir ces deux amendements dont elle est signataire.

Mme Nicole Catala.

L'amendement que j'avais déposé a été adopté par la commission. Il tend à prendre en compte le fait qu'une procédure pénale peut se dérouler dans des conditions portant atteinte non seulement à la réputation de la personne mais aussi à sa dignité. J'ai donc proposé d'élargir en ce sens l'intitulé de la section VII.

M. le président.

Je présume que l'avis de la commission est favorable.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Forcément, monsieur le président, mais ces amendements identiques ne sont plus utiles compte tenu de ceux qui viennent par la suite.

M. le président.

Nous verrons en deuxième lecture pour l'harmonisation syntaxique.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Le Gouvernement est favorable à ces amendements dès lors que le contenu même de l'incrimination n'est pas modifié.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 127 rectifié et 285 corrigé.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président.

M. Albertini a présenté un amendement, no 208, ainsi rédigé :

« I. - Supprimer le premier alinéa du texte proposé pour l'article 226-30-1 du code de procédure pénale.

« II. - En conséquence, dans le deuxième alinéa, substituer aux mots : "de la même peine" les mots : "d'une amende de 100 000 francs". »

La parole est à M. Pierre Albertini.

M. Pierre Albertini.

Cet amendement me donne l'occasion de revenir au débat sur les deux aspects de l'article 22. Autant nous approuvons l'interdiction des sondages d'opinion, qui sont le contraire même de la présomption d'innocence et du respect de la justice, autant, personnellement, je suis résolument hostile à la première partie de cet article, qui concerne la diffusion d'images de personnes menottées ou entravées. Et ce pour deux raisons.

La première, c'est qu'il y a bien des façons, plus cruelles encore, de porter atteinte à la dignité des personnes.

La deuxième tient de plus près à ce droit à l'image que doivent avoir nos concitoyens. Vous avez dit, madame la garde ses sceaux, que vous étiez assez impuissante devant l'usage un peu abusif des menottes. Nous en prenons acte, mais nous ne pouvons accepter comme une fatalité des pratiques contraires à la dignité de la personne. En même temps, vous estimez que ces pratiques tendent à reculer parce que le débat public s'en est emparé. Eh bien, je prétends que les images sans doute abusives que nous avons vues concourent à la prise de conscience par l'opinion qu'il ne convient pas de recourir aux menottes dans les circonstances qui ne le justifient pas. Et soyez sûre que, dans cette affaire, la puissance de l'image est au moins aussi grande que celle du verbe.

Je crois profondément à un droit à l'image, qui est à mon sens inhérent au droit à l'information. La liberté de la presse est essentielle et la déontologie des journalistes, la responsabilité des directeurs de publications sont des notions juridiques fortement ancrées dans notre pays.

Mais l'écrit et l'image ne doivent absolument pas être opposés, car l'un ne va pas sans l'autre.

Le premier alinéa de l'article 226-30-1 me semble extrêmement dangereux parce qu'il institue une sorte de c odification de l'image. Pourquoi interdire certaines d'entre elles et pas les autres, alors que le champ des images portant atteinte à la dignité des personnes est potentiellement illimité ? Pourquoi, sinon pour trouver un symbole qui cède, à mon sens, à la facilité et peut-être même, dans une certaine mesure, à la sensiblerie ? En outre, cet alinéa prévoit une pénalisation elle aussi dangereuse. Pour ma part, je suis partisan de la responsabilité civile dans cette matière. Considérer qu'une image est attentatoire à la dignité de la personne, à la vie privée, au sentiment d'affliction d'une famille, cela ne se définit pas de manière générale et absolue, cela s'apprécie au cas par cas.

J'ose même dire que, dans certaines circonstances, une image peut être considérée à un moment donné comme attentatoire à la dignité d'une personne et, un mois plus tard, comme ayant concouru à la prise de conscience par l'opinion de la gravité d'une situation.

Je prendrai pour exemple l'image qui a été montrée de l'assassinat du préfet Erignac en Corse. De par mon origine, j'y ai été particulièrement sensible et j'ai regardé attentivement comment les choses se sont présentées juridiquement. Lorsque cette image a été montrée, la famille a obtenu très rapidement du juge que sa dignité et ses sentiments d'affliction soient respectés et protégés. Mais, un mois, deux mois après, force était de constater que l'opinion avait été convaincue de l'atrocité des attentats grâce à cette image.

Madame la garde des sceaux, de grâce, faites confiance aux juges et, d'une manière générale, aux hommes de presse, aux hommes d'édition et aux hommes de médias.

Ne cherchez pas à voir des symboles là où les choses sont infiniment plus complexes, sans compter que notre pays n'est pas fermé sur lui-même, mais ouvert à des informations et à des images provenant du monde entier.

Ne soyons pas hexagonaux comme a pu l'être un arrêt de la cour d'appel, dénoncé à juste titre par notre président de séance, portant sur la responsabilité des hébergeurs sur Internet.

E ssayons d'avoir une vision moderne. Faisons confiance à la déontologie des juges civils pour réparer les atteintes à la dignité de la personne.

M. Daniel Marcovitch.

Aux paparazzi aussi ?

M. le président.

La parole est à Mme le rapporteur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Je répondrai à M. Albertini que l'article 22 du projet de loi qui interdit simplement la publication de photos de personnes portant des menottes ne fait pas doublon avec l'article 9-1 du code civil qui, lui, concerne les personnes présentées comme coupables. Ils n'ont pas trait aux même situations et on ne peut pas, sur la base de l'article 9-1, préserver l'image de personnes menottées, en tout cas pas systématiquement.

M. Pierre Albertini.

C'est l'article 9 qui le permet !

M. Patrick Devedjian.

Bien sûr, le droit à l'image !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Il le permet par le droit à l'image, en effet. C'est une sanction civile.

Dans le nouveau code pénal, plusieurs atteintes à la dignité ont été introduites. S'il nous apparaît important de dire que l'image d'une personne qui porte des menottes est une atteinte réelle à sa présomption d'innocence, c'est que, pour le commun des mortels, quelqu'un qui apparaît menottes aux poignets est forcément coupable.

Cette question ne relève pas du problème général du droit à l'image, mais de celui, spécifique, du renforcement de la présomption d'innocence.

L'introduction d'un texte dans le code pénal à ce sujet relève des les trois fonctions de la loi pénale : pédagogique, d'abord, expressive des valeurs essentielles de notre société, ensuite, répressive, enfin, si, d'aventure, il fallait aller jusqu'à la sanction.

Quant au principe de l'opportunité des poursuites, il existe et il permet au parquet, dans des cas qui ne paraissent pas nécessiter des poursuites pénales, de décider de classer sans suite.

Il me semble donc de bonne politique criminelle et conforme à notre objectif de renforcer la présomption d'innocence, d'essayer de faire en sorte qu'il n'y ait plus d'image de personnes menottées ou, en tout cas, qu'il y en ait moins.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je n'argumenterai pas davantage car je souscris entièrement aux propos de Mme Christine Lazerges. Je suis donc défavorable à l'amendement no 208.

M. le président.

Mes chers collègues, vous êtes nombreux à demander la parole, et il s'agit d'un point important, je vous l'accorde, mais si nous voulons achever l'examen de ce texte, il faudra essayer, par la suite, d'accélérer le débat.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Je suis en tout point d'accord avec ce que vient d'expliquer Mme Lazerges, et des exemples très récents nous montrent à quel point de telles dispositions, de telles avancées sont utiles. Ainsi, malgré les engagements et les déclarations des rédactions et des journaux, j'ai encore vu dans un journal la semaine dernière la photo de deux personnes avec menottes. C'est bien l'illustration que les déclarations de principe ne suffisent pas et qu'il y a vraiment un effort à faire pour éviter la publication des images les plus choquantes.

Je suis extrêmement surprise que nous soyons, en France, aussi frileux, aussi inquiets sur ce sujet important qu'est la préservation de la présomption d'innocence face à l'opinion publique. Il s'agit d'un vrai problème de liberté publique et d'atteinte à la dignité des gens.

Nous sommes devenus un modèle européen en matière de respect de la vie privée. Quand on voit de quelle façon il y est porté atteinte dans d'autres pays, on peut être fier de la législation française. Mais notre vieille culture inquisitoriale nous rend très frileux sur le respect de la pré-s omption d'innocence, comme si cette présomption n'avait cessé de nous déranger tout au long de notre histoire.

Permettez-moi un petit point d'histoire. Dans le décret rédigé par Couthon en 1794, qui supprimait les droits de la défense, il était écrit : « Les droits de la défense ne servent à rien. Les innocents n'en ont pas besoin, et les coupables n'y ont pas droit. » Dans notre pays, nous nous

sommes finalement toujours appliqués à honorer la présomption d'innocence, la considérant comme une sorte de principe vertueux, mais, en même temps, nous n'avons cessé de l'écarter.

En 1993, un grand pas a été franchi pour le respect de ce droit fondamental : la présomption d'innocence a été inscrite dans le code civil - M. Albertini l'a rappelé -, parmi les premiers articles du titre Ier , où sont énoncés les principes civils fondateurs de notre droit. La présomption d'innocence est venue prendre place au premier rang de ces principes à la suite du respect de la vie privée proclamé en 1970.

Il y a quelques mois, se référant aux législations européennes, la commission Truche, chargée de réfléchir sur ces questions, a proposé d'aller plus loin et d'interdire la citation des noms des personnes susceptibles d'être mises en cause dans une affaire en cours, y compris ceux des personnes placées en garde à vue. Le projet n'a pas retenu cette proposition. Mais il prévoit des avancées concrètes sur les situations les plus choquantes : la publication de l'image d'une personne menottée - peut-être faudrait-il préciser, pour répondre à votre préoccupation qu'il ne s'agit que des procédures pénales françaises - et la réalisa tion d'un sondage sur la culpabilité d'une personne mise en cause.

Pourquoi, finalement, le principe d'opportunité obliget-il à une telle prudence ? Les propositions qui sont faites sont limitées à quelques situations particulièrement choquantes. La sanction proposée est pénale. Personnellement, j'aurais préféré - rejoignant en cela la position d'Arnaud Montebourg - que l'on ne choisisse pas le terrain pénal : celui-ci correspond évidemment à la tradition française,...

M. Léonce Deprez.

C'est vrai !

Mme Frédérique Bredin.

... mais il semble peu approprié quand il s'agit de liberté de la presse.

M. Pierre Albertini.

Eh oui !

Mme Frédérique Bredin.

Le terrain civil, qui ne vise pas à sanctionner une faute, mais à réparer un préjudice...

M. Léonce Deprez.

C'est ce qui se passe !

Mme Frédérique Bredin.

... me paraissait beaucoup plus intéressant pour le respect d'une garantie individuelle fondamentale.

M. Léonce Deprez.

Oui !

Mme Frédérique Bredin.

C'est ce que j'avais proposé dans mon amendement mais, ma proposition, même si elle se plaçait sur le terrain civil et non pas sur le terrain pénal, a été immédiatement caricaturée.

M. Pierre Albertini.

Pas par nous !

M me Frédérique Bredin.

Des caricatures ont été savamment propagées par tous ceux qui voulaient écarter toute avancée en ce domaine. Je rappelle cependant que,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

contrairement à ce qui a été dit ici où là, elle n'autorisai t pas la citation de noms ou les commentaires sur les affaires en cours, mais exigeait simplement une présentation équilibrée.

A d'autres moments de notre débat, nous avons demandé que l'instruction se déroule non seulement à charge, mais également à décharge. Il faut demander la même chose aux médias.

M. Pierre Albertini.

Oui.

Mme Frédérique Bredin.

Il faut qu'ils informent non seulement à charge mais également à décharge et ne présentent pas les personnes suspectées comme étant présumées coupables ou dans des conditions laissant penser qu'elles sont coupables.

M. Pierre Albertini.

Tout à fait !

Mme Frédérique Bredin.

La publication de photos de personnes avec des menottes laisse présumer, comme l'a dit notre rapporteur, la culpabilité.

C'est une question de prudence, d'équilibre dans la présentation. Au droit au procès équitable doit s'adjoindre le droit à l'information équitable.

Aujourd'hui, notre débat porte sur des points beaucoup plus précis. Mais le cadre de la procédure pénale ou du droit pénal ne correspond pas forcément à ce type de réflexion.

Ce qui compte pour le législateur, c'est de trouver les moyens d'adopter la protection des droits de la personne à l'exercice moderne de la liberté d'informer, ce qui veut dire qu'il faut afficher des règles du jeu claires qui permettent à chacun d'exercer la plénitude de ses droits. Il faut pour cela être conscient de la discordance qui existe entre le temps de la justice et le temps des médias.

M. le président.

Madame Bredin, je vous vois avec des feuilles à la main...

Mme Frédérique Bredin.

J'ai quasiment terminé, monsieur le président !

M. Pierre Albertini.

C'est le temps des députés, monsieur le président.

M. le président.

Vos propos sont tout à fait légitimes, madame Bredin. Cependant, nos débats sont régis par un règlement qui n'est pas le code de procédure pénale, mais qui limite le temps de parole de chaque orateur à cinq minutes !

Mme Frédérique Bredin.

Je réponds à ce qu'a dit

M. Albertini.

M. Pierre Albertini.

Je vous sers d'excuse absolutoire, si je comprends bien ! J'en suis heureux.

M. Patrick Devedjian.

Cela mérite un peu plus de temps !

M. le président.

Je vous prierai de conclure, madame Bredin !

Mme Frédérique Bredin.

Je terminerai en disant simplement que le législateur doit veiller à ce que les droits des uns ne s'établissent pas au détriment des droits des autres. Par les avancées extrêmement raisonnables et pragmatiques proposées par le projet, on est en train d'essayer de rechercher cet équilibre, en tout cas d'avancer dans cette voie.

M. le président.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Je serai bref.

(Sourires.) Madame le garde des sceaux, vous avez répondu tout à l'heure à mon objection que ce qui distinguait les « bonnes menottes » des « mauvaises menottes », c'est-à-dire celles que l'on pourrait voir de celles qu'il ne faudrait pas voir, c'est la plainte de la victime, c'est-à-dire de la personne menottée. Mais, dans votre texte, il n'y a rien de tel. La compétence du procureur de la République n'est pas liée à la plainte de la victime. Celui-ci peut poursuivre de sa propre autorité, sans qu'aucune plainte ait été déposée.

C'est là où il y a abus et atteinte à la liberté de la presse.

M. Arnaud Montebourg.

Vous croyez qu'ils n'ont que cela à faire ?

M. Patrick Devedjian.

Vous prétendez défendre la victime sans elle et peut-être même contre elle. N'oubliez pas qu'elle dispose, de par l'article 9 du code civil, comme l'a rappelé excellemment M. Albertini, du moyen d'obtenir réparation. Elle peut également obtenir une transaction. C'est son problème. Mais, même si elle estime que le préjudice qu'elle a subi est réparé, le procureur de la République pourra, dans votre dispositif, poursuivre de son propre chef. Et comme, madame, vous ne voulez pas lui donner d'instruction et qu'on ne sait pas ce que peut donner un parquet indépendant, cela fait peser une vraie menace sur la liberté de la presse : elle dépendra de ce que fera tel ou tel substitut, tel ou tel procureur.

M. Arnaud Montebourg.

Nous en reparlerons, monsieur Devedjian !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 208.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, et Mme Bredin ont présenté un amendement, no 128, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 226-30-1 du code pénal, substituer à las omme : "100 000 francs" la somme : "200 000 francs". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

La commission d es lois a souhaité porter de 100 000 francs à 200 000 francs le montant de l'amende prévue à l'article 226-30-1 du code pénal.

M. Pierre Albertini.

Eh voilà, ça continue !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Elle souhaite renforcer la pénalisation.

M. Pierre Albertini.

C'est une surpénalisation ! Pourquoi pas 500 000 francs ou même 1 million ?

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Le seul point sensible de la droite, c'est le portefeuille !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis opposée à ce que l'on augmente la peine d'amende prévue par le projet. Je trouve qu'elle est déjà élevée. Le taux minimum de l'amende correctionnelle est de 25 000 francs et une amende de 100 000 francs correspond en principe à un délit puni d'une peine d'un an d'emprisonnement.

Le but de l'incrimination créée par le projet est de prévenir, de réprimer de façon proportionnée les atteintes à la présomption d'innocence. Des amendes trop lourdes risqueraient de compromettre la viabilité des entreprises de presse dont je rappelle qu'elles sont, en matière de diffamation, déjà soumises à toutes sortes de plaintes et à une jurisprudence de plus en plus forte.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

J e ne souhaite pas que l'amende dépasse les 100 000 francs prévus.

M. Arnaud Montebourg.

Très juste !

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Je tiens à dire que les députés sont tous attachés à la liberté de la presse. L'article 9-1 du code civil permet réparation. Alors, de grâce, madame le rapporteur, si l'on pénalise et si l'on prévoit dans le droit pénal une amende, veillons à ne pas aller au-delà du raisonnable ! Comme l'ont dit M. Devedjian et M. Albertini, ce serait créer une nouvelle et inadmissible atteinte à la liberté de la presse.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 128.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je constate que personne n'a voté pour l'amendement.

Mme Catala a présenté un amendement no 286, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 226-30-1 du code pénal, substituer aux mots : "faisant apparaître que cette personne porte des menottes ou entraves" les mots : "dès lors que cette image la fait apparaître dans des conditions portant gravement atteinte à sa réputation ou à sa dignité comme le port de menottes ou d'entraves". »

La parole est à Mme Nicole Catala.

Mme Nicole Catala.

Je suis habitée par des préoccupations similaires à celles de Mme Bredin. Je suis, comme elle, désireuse que nous trouvions un équilibre nouveau entre la liberté de la presse, dont chacun sait qu'elle est le garant de la démocratie, et une meilleure protection des personnes.

Avec cet amendement, je voudrais amener l'Assemblée à déplacer un peu le curseur en faveur d'une meilleure protection de la présomption d'innocence et de la dignité des personnes qui se trouvent mises en cause dans le procès pénal.

De quoi s'agit-il en effet ? D'élargir de façon très mesurée le texte du Gouvernement de manière, je le répète, à mieux protéger la dignité des individus qui, parfois tout à fait par hasard, se trouvent impliqués dans le déroulement d'une procédure pénale. Il s'agit par hypothèse de personnes présumées innocentes, puisqu'elles n'ont pas été jugées. Il s'agit de citoyens qui ont droit, comme vous et moi, au respect de leur image. Nous nous plaçons dans cette situation.

Pour assurer le respect de la dignité de ces citoyens comme les autres, le texte du Gouvernement propose de sanctionner la publication de leur image seulement s'ils sont menottés ou entravés. Nous venons d'en débattre. Je trouve, pour ma part, que cette interdiction ne va pas assez loin, car il existe d'autres images qui sont tellement humiliantes qu'elles portent irrémédiablement atteinte à la réputation et à la dignité des individus. Vous pouvez imaginer l'émoi de ces personnes quand elles voient passer ces images sur une chaîne de télévision ou reproduites dans un journal.

Certes, il existe une procédure civile. Pour ceux qui, mis en examen ou placés en garde à vue, sont présentés publiquement comme coupables par un article de presse, l'insertion d'un communiqué prévue par l'article 9-1 du code civil pourra représenter un remède imparfait certes, mais un remède tout de même. Toutefois, jamais un communiqué n'effacera l'impression que laissera dans les esprits une image dégradante ou humiliante pour ceux qui se retrouveront ainsi photographiés : l'image d'un voisin ou d'un collègue de travail surpris en sortant, un soir, du cabinet du juge d'instruction alors qu'il n'est peut-être coupable d'aucune infraction et qu'il sera relaxé ; ou encore ces images si fréquentes de jeunes gens que l'on voit se couvrant la tête de leur blouson ou de leur veste pour ne pas être identifiés.

Je ne vois vraiment pas ce que de telles images apportent d'utile à l'information des citoyens. A mes yeux, elles relèvent purement et simplement d'un goût douteux pour les faits divers, pour ne pas dire du voyeurisme. Proposer l'interdiction d'images humiliantes, attentatoires à la dignité des personnes, au-delà des seules photographies de prévenus menottés ou entravés, ne me paraît pas de nature à mettre en cause la liberté de la presse. Elle n'empêchera pas celle-ci d'informer nos citoyens, ni davantage les juges et les policiers de faire leur travail. Voilà les raisons pour lesquelles je suggère d'élargir quelque peu le cadre de l'incrimination proposée.

Il m'a été objecté en commission que mon amendement n'était pas assez précis et ne respectait pas de ce fait le principe de la légalité des incriminations. Je ne crois pas que cette objection soit fondée. La disposition que je propose n'est pas plus floue que celle qui figure dans le texte à propos de l'atteinte à la dignité des victimes, pourtant rigoureusement parallèle. Elle n'est pas plus floue que la notion d'atteinte à la vie privée, non plus que le délit d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise, bien connu en droit du travail, bien que peu précisément défini.

Je crois sincèrement que cette objection ne résiste pas à l'examen et je souhaite vraiment que l'Assemblée, sensible à la recherche d'un nouvel équilibre, me suive en adoptant mon amendement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Madame Catala, je persiste à croire que votre incrimination est bel et bien trop floue. La preuve en est que vous êtes sentie obligée de donner un exemple, afin que le futur utilisateur du texte sache de quoi il s'agit.

Le Conseil constitutionnel, à juste titre, pour préserver le principe de la légalité, vérifie et sanctionne de temps en temps des textes insuffisamment précis comme c'est, je le crois, le cas de votre amendement. L'interdiction de l'image de personnes menottées est un appel à réfléchir sur d'autres images qui seront quant à elles sanctionnées civilement si elles relèvent des dispositions de l'article 9-1 du code civil.

La commission a donc repoussé votre amendement pour de bonnes raisons, tant sur le plan du droit que sur celui de la politique pénale que nous souhaitons.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je crois moi aussi que l'incrimination proposée est insuffisamment définie : la référence à la dignité, à la réputation de la personne reste une notion bien trop vague. Le problème ne se pose pas, à mes yeux, dans les mêmes termes que pour les victimes.

Dans le cas d'espèce, je crois que seule l'hypothèse claire, incontestable de la diffusion d'images de la personne portant des menottes doit relever du droit pénal. Cela ne signifie pas que d'autres images ne soient pas condamnables ; mais ce sont alors les règles du droit civil qui peuvent s'appliquer, non celles du droit pénal.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Voilà pourquoi je demande également à l'Assemblée de rejeter cet amendement.

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

On ne peut se permettre des concepts trop flous sur le terrain pénal : il s'agit de sanctions et elles doivent être précisées. Autant je comprends votre attachement, madame Catala, à préserver la dignité et l'image de la personne, autant il me paraît plus judicieux de nous placer sur le terrain civil ; comme en matière de protection de la vie privée, il appartiendra au juge de décider s'il y a eu ou non atteinte à la dignité du prévenu à la présomption d'innocence.

M. Léonce Deprez.

Mais c'est bien ainsi que les choses se passent !

Mme Frédérique Bredin.

Cela dit, j'irai un peu dans votre sens : même si je reconnais avec la garde des sceaux et le rapporteur l'insuffisante précision, sur le terrain pénal, de votre dispositif, je ne considère pas pour autant, que la liberté de la presse soit liberté absolue, souveraine, supérieure aux autres. Toute liberté démocratique, à commencer évidemment par celle de la presse, trouve ses limites dans le respect des droit de l'homme et des libertés individuelles. Les éventuelles sanctions doivent-elles figurer dans le cadre pénal ou plutôt dans la loi sur la presse, sur le terrain civil ? C'est un débat juridique que nous aurons dans les moments qui viennent.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 286.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Lignères-Cassou et les membres du groupe socialiste et apparentés ont présenté un amendement, no 259, ainsi rédigé :

« Compléter le premier alinéa du texte proposé pour l'article 226-30-1 du code pénal par la phrase suivante : "En cas de récidive, le montant de l'amende est porté à 400 000 F". »

Cet amendement est-il défendu ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Je suggère le retrait de cet amendement bien qu'il ait été accepté par la commission, puisque nous venons de ramener l'amende encourue de 200 000 francs à 100 000 francs. Je vois mal comment nous pourrions la porter à 400 000 francs en cas de récidive.

M. Léonce Deprez.

Le bon sens l'emporte !

M. le président.

C'est bien pourquoi je pose la question, madame le rapporteur : si personne ne le soutient, l'amendement ne sera pas discuté.

M. Pierre Albertini.

Il est accablé.

(Sourires.)

M. Patrick Devedjian.

Cet amendement a été présenté par l'ensemble des membres du groupe socialiste, monsieur le président.

M. le président.

Quoi qu'il en soit, l'amendement no 259 n'est pas défendu.

Mme Catala a présenté un amendement, no 287 rectifié, ainsi rédigé :

« Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 226-30-1 du code pénal, insérer les deux alinéas suivants :

« Est puni d'une amende de 100 000 francs le fait de publier ou diffuser, par quelque moyen de communication que ce soit, des actes, procèsverbaux ou documents couverts par le secret de l'enquête et de l'instruction, en dehors des diffusions prescrites par l'autorité judiciaire pour les besoins de l'enquête.

« Toutefois, aux seules fins de préparer sa défense, la personne mise en examen ou son avocat peut communiquer une ou plusieurs pièces couvertes par le secret à un tiers dont l'avis ou le concours lui paraîtrait souhaitable. Ce dernier est alors également tenu par le secret. En aucun cas cette communication à un tiers ne doit faire l'objet d'une publication ou d'une diffusion dans la presse. »

La parole est à Mme Catala.

Mme Nicole Catala.

Cet amendement, qui se situe dans la même ligne que le précédent, vise des objectifs quelque peu différents.

Je vous propose de sanctionner de façon pour ainsi dire autonome, et non plus seulement au titre du recel de violation du secret de l'instruction, la publication ou la diffusion dans des organes de presse de pièces ou documents couverts par le secret de l'enquête ou le secret de l'instruction.

Pour commencer, ces documents appartiennent à la justice. Ils n'ont donc pas lieu d'être communiqués à l'extérieur ni a fortiori d'être reproduits dans la presse quotidienne ou hebdomadaire, voire montrés à la télévision.

Là encore, je ne pense pas que nous portions atteinte à la liberté de la presse, du moins telle que la conçoit la Convention européenne des droits de l'homme dans son article 10, alinéa 2 : « L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécesaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la dé fense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles. » Il s'agit bien ici d'empêcher

la divulgation d'informations confidentielles.

Certes, plusieurs arrêts de la Cour européenne, dont celui du 24 février 1997, concernant la Belgique, ont reconnu à la presse le droit fondamental de communiquer des informations, mais en lui traçant des frontières à ne pas franchir en matière de protection de la réputation, des droits d'autrui et de la nécessité de ne pas divulguer les informations confidentielles dont nous parlons.

Plus récemment, l'arrêt rendu par la Cour européenne dans l'affaire Fraissoz et Roire, le 21 janvier 1999, énonce un motif qui ménage l'avenir dans le domaine dont nous traitons ce soir, puisque, tout en reconnaissant le rôle essentiel qui revient à la presse dans une société démocratique, la Cour souligne que « les journalistes ne sauraient en principe être déliés par la protection que leur offre l'article 10 de la convention de leur devoir de respecter les lois pénales de droit commun ». Or nous sommes bien en présence de lois pénales de droit commun, en l'occurrence celles qui sanctionnent la violation du secret de l'instruction. Je souhaite donc que la diffusion de pièces couvertes par le secret fasse l'objet d'une incrimination spécifique.

Au demeurant, nous parviendrons certainement, si nous empruntions cette voie, à limiter la tentation de certains acteur du procès pénal à faciliter la divulgation de ces pièces, contribuant de ce fait à mieux assurer le secret de l'instruction, facteur indispensable à mes yeux de la sauvegarde de la présomption d'innocence.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Nous cherchons dans ce texte un subtil équilibre entre la liberté de la presse, le secret de l'instruction et le respect de la pré-s omption d'innocence. Tous les articles du projet - Mme le garde des sceaux a beaucoup insisté sur ce point - tendent à concilier de la meilleure façon possible ces impératifs parfois contradictoires. Mais retenir l'amendement de Mme Catala porterait véritablement atteinte à la liberté de la presse ; surtout, il mettrait fin au journalisme d'investigation, ce qui ne me paraît pas judicieux.

Cet argument fondamental plaide pour le rejet de l'amendement.

M. Léonce Deprez.

Ce n'est pas le seul !

M. Patrick Devedjian.

Il y en a un autre !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Effectivement, le secret de l'instruction tel qu'il est défini aujourd'hui nes 'applique qu'à un certain nombre de personnes.

Mme Catala l'étend à beaucoup d'autres.

M. Patrick Devedjian.

Il y a un autre argument, et meilleur : cette interdiction existe déjà dans la loi du 29 juillet 1881, à l'article 38.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

C'est vrai.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

L'amendement est inutile, car ces faits sont déjà réprimés par l'article 38 de la loi de 1881 sur la presse.

M. Arnaud Montebourg.

Mme Catala aurait dû le savoir !

Mme la garde des sceaux.

De surcroît, il porterait l'amende de 25 000 à 100 000 F, ce que je trouve tout à fait inopportun.

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Catala.

Mme Nicole Catala.

Selon Mme le rapporteur mon amendement porterait atteinte à la liberté de la presse. Si, comme on me l'indique, le texte de la loi de 1881 est exactement le même, c'est toute notre législation qui porterait déjà atteinte à la liberté de la presse... Pour ma part, je ne le crois pas. La presse a le droit d'informer, y compris dans le cadre du journalisme d'investigation, sur les faits qu'elle découvre. Ce qui me heurte, et je m'étonne que mes collègues n'en soient pas également choqués, c'est de retrouver dans les journaux des procèsverbaux d'interrogatoires, des réquisitoires, des pièces en théorie couvertes par le secret de l'instruction. Ceux qui divulguent de telles pièces peuvent être poursuivies, tout c omme ceux qui les font connaître, en tant que complices ou receleurs du secret de l'instruction. Mais si nous parvenions à sanctionner de façon spécifique la publication ou la diffusion de ces pièces, nous taririons en amont l'envie de violer ainsi le secret de l'instruction ; c'est dans cet esprit que je proposais cette incrimination particulière.

Cela étant, sentant bien que je ne serait pas suivie, je vais retirer mon amendement dont je refuse de considérer qu'il porterait atteinte à la liberté de la presse, y compris au journalisme d'investigation. La question est de savoir s'il est normal que les journalistes reproduisent des documents couverts par le secret de l'enquête. Ma réponse personnelle est très clairement non.

M. Arnaud Montebourg.

Ce que vous proposez n'est pas conforme à la convention européenne.

M. le président.

L'amendement no 287 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 22, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 22, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 22

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 129, ainsi libellé :

« Après l'article 22, insérer l'article suivant :

« L'article 803 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans ces deux hypothèses, toutes mesures utiles doivent être prises, dans les conditions compatibles avec les exigences de sécurité, pour éviter qu'une personne menottée ou entravée soit photographiée ou fasse l'objet d'un enregistrement audiovisuel. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement de précision rappelle le caractère exceptionnel du port des menottes. Nous voudrions inciter les autorités de police à en éviter l'usage.

M. Patrick Devedjian.

C'est du domaine réglementaire !

M me Christine Lazerges, rapporteur.

Le meilleur moyen d'éviter qu'une personne menottée ou entravée soit photographiée, c'est encore de ne pas la menotter...

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 129.

(L'amendement est adopté.)

Article 23

M. le président.

« Art. 23. - I. - Il est ajouté à l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse un alinéa ainsi rédigé :

« Le droit de réponse prévu au présent article peut également être exercé par le ministère public, à la demande de la personne intéressée, lorsque celle ci a été nommée ou désignée à l'occasion d'une enquête ou d'une information dont elle fait l'objet. »

« II. L'article 6 de la loi no 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle est ainsi modifié :

« 1o Au cinquième alinéa, les mots : "ce délai" sont remplacés par les mots : "ce délai est porté à trois mois et il".

« 2o Il est ajouté, après le dernier alinéa, un alinéa ainsi rédigé : "Le droit de réponse prévu au présent article peut également être exercé par le ministère public, à la demande de la personne, lorsque celle ci a été présentée comme faisant l'objet de poursuites pénales". »

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement no 27 est présenté par M. Devedjian et M. Cazenave ; l'amendement no 69 par MM. Albertini, Blessig, Deprez et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 23. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

La parole est à M. Patrick Devedjian, pour soutenir l'amendement no

27.

M. Patrick Devedjian.

Il m'avait semblé que Mme Lazerges avait plus ou moins fait droit à cet amendement. L'article 23 vise à confier au procureur de la République le soin de faire usage d'un droit de réponse, y compris lorsque c'est l'accusé qui est en cause. Si celui-ci se sent victime d'une atteinte au secret de l'instruction ou d'une désinformation à propos des faits qui lui valent sa mise en examen, il lui appartient de s'adresser au procureur de la République pour obtenir réparation et communiqué. En d'autres termes, l'accusé se retrouve obligé de demander à son accusateur d'assurer sa défense ! C'est invraisemblable, insensé ! Par ailleurs, l'accusé bénéficie lui-même des dispositions de l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881 qui institue le droit de réponse. Mieux vaut qu'il exerce ce droit lui-même plutôt que de le confier à son accusateur.

Je voudrais à ce propos rafraîchir la mémoire de l'Assemblée quant à l'objectivité du procureur de la République.

Un procureur de la République assez médiatique a récemment fait l'objet d'une promotion, du reste méritée.

Je l'ai entendu dire, dans une affaire qui a quelque peu défrayé la chronique, qu'il faisait des communications p our « affoler la meute » ! Si le procureur de la République affole la meute pour faire avancer ses investigations et si c'est à lui qu'il faut s'en remettre pour assurer l'objectivité de l'information, pardonnez-moi, mais ce n'est pas réussi !

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez, pour soutenir l'amendement no

69.

M. Léonce Deprez.

La loi de 1881 a prouvé son efficacité : il ne convient pas de la retoucher. Elle est appliquée à longueur d'année : tous les journaux de France respectent le droit de réponse dans des conditions qui ne sont d'ailleurs pas, sauf exception, l'objet de conflits.

N'allons pas ajouter des textes à un texte qui a fait ses preuves et supporté l'épreuve du temps ! La pratique du droit de réponse est reconnue comme très valable, n'en rajoutons pas.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Je pense moi aussi qu'il faut supprimer partiellement l'article 23. Je suis tout à fait de l'avis de M. Devedjian : le procureur de la République n'a pas à faire usage du droit de réponse à la place de la personne qui doit l'exercer. Le droit de réponse est un droit personnel, personne ne l'a jamais nié. Au demeurant, surcharger les procureurs de la République en leur confiant cette mission annexe serait une erreur.

Je précise cependant que nous n'envisagions pas de faire disparaître le II alors que M. Devedjian propose la suppression de la totalité de l'article.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je partage le point de vue de Mme Lazerges et je considère avec elle que le droit de réponse est personnel et qu'il n'a pas à être nécessairement exercé par le procureur. Donc je suis d'accord avec la suppression du I de cet article, mais pas avec celle du II qui prévoit qu'on porte le délai du droit de réponse à trois mois.

L'amendement no 130 de Mme Lazerges proposera exactement cela. Je m'y rallierai volontiers. Je propose donc le rejet de ces amendements, de suppression pour aboutir au résultat - que vous-même, vous souhaitez, monsieur Devedjian.

Rappel au règlement

M. Pierre Albertini.

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président.

La parole est à M. Pierre Albertini, pour un rappel au règlement.

M. Pierre Albertini.

Pendant que M. Deprez parlait, j'ai entendu M. Montebourg scander : « Hersant ! Hersant ! ». Outre que c'est faux, puisque mon collègue appartient à un groupe de province indépendant, il est tout à fait inadmissible de s'attaquer ainsi à quelqu'un qui s'exprime selon sa conviction. Sinon, c'est la porte ouverte à tous les abus.

Monsieur Montebourg, je ne vous accuse pas de parler comme l'avocat que vous êtes !

M. Patrick Devedjian.

M. Montebourg est un petit terroriste !

M. Pierre Albertini.

Et j'espère que, lorsque je parle, vous ne me traitez pas d'universitaire ! Nous sommes tous ici des élus du peuple et je souhaite qu'on évite à l'avenir de tels incidents dans cette enceinte.

M. le président.

Je crois comprendre que vous demandez un droit de réponse, monsieur Montebourg ?

M. Arnaud Montebourg.

En effet, monsieur le président, c'est à l'ordre du jour.

M. Albertini, qui en avait au début de la discussion, m anque maintenant singulièrement d'humour. Si je devais moi-même faire un rappel au règlement à propos de tous les noms d'oiseaux dont en m'afflige dans cet hémicycle, comme dans la presse ! Dans le Nouvel Observateur I, on me traite de flic et de Fouquier-Tinville.

Voilà de la diffamation. Il n'a jamais été diffamatoire de dire que quelqu'un a été proche d'un groupe de presse connu pour son libéralisme.

M. Pierre Albertini.

Ce n'est pas le problème !

M. Arnaud Montebourg.

Sans doute M. Deprez, qui, d'ailleurs, ne se défend pas lui-même, et surtout M. Albertini, qui considère vexatoire d'être proche du groupe Hersant, ne souffrent-ils pas la taquinerie !

M. le président.

Mes chers collègues, restons calmes. Si nous devons nous échauffer, que ce soit pour accélérer le débat sur les amendements ! (Sourires.)

Reprise de la discussion

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Pour en revenir aux amendements, le droit de réponse exercé par le ministère public est, en effet, chose curieuse. Qu'on le veuille ou non, c'est un rôle accusatoire que détient le ministère public dans la procédure pénale. Faire exercer un droit personnel par l'accusation paraît un peu ubuesque.

Nous avions expliqué devant la commission des lois notre position : ou bien il faut supprimer ce droit de réponse, ou bien, il faut, à tout le moins, le rendre auto-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

matique et le ministère public n'aura pas à apprécier s'il faut ou non accepter la demande de droit de réponse de la personne mise en cause.

En tout cas, c'est bien volontiers que l'on supprimera purement et simplement le droit de réponse exercé, de manière assez étrange, par le ministère public.

M. le président.

Je mets aux voix, par un seul vote, les amendements nos 27 et 69.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, et M. Tourret ont présenté un amendement, no 130 rectifié, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 23 :

« Dans la dernière phrase du cinquième alinéa du I de l'article 6 de la loi no 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, après les mots : "ce délai", sont insérés les mots : "est porté à trois mois et il". »

Sur cet amendement, Mme Bredin et les membres du groupe socialiste et apparentés ont présenté un sousamendement, no 260, ainsi rédigé :

« Au début de l'amendement no 130 rectifié, insérer l'alinéa suivant :

« Dans la première phrase du cinquième alinéa du I de l'article 6 de la loi no 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, les mots : "dans les huit jours" sont remplacés par les mots : "dans le délai d'un mois". »

La parole est à Mme le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 130 rectifié.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Monsieur le président, je l'ai déjà présenté.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin, pour soutenir le sous-amendement no 260.

Mme Frédérique Bredin.

Le délai d'exercice du droit de réponse est différent pour la presse écrite et pour l'audiovisuel. Pour la première, il est très long puisqu'il a été fixé à un an par la loi de 1881, alors que, pour l'audiovisuel, il est au contraire très court.

Le projet de loi propose de l'allonger dans des cas précis liés à la procédure pénale. De manière plus généra le, nous proposons de le porter de huit jours à un mois, ne serait-ce que pour laisser aux gens le temps de réagir.

Je vous citerai l'exemple d'une personnalité morale, celui de la ville dont je suis l'élue. Fécamp avait été gravement mise en cause dans l'émission Perdu de vue sur TF 1, qui la présentait comme Chicago. Nous avons dû réunir les élus, prendre des conseils juridiques et une pétition a été lancée dans la ville avant que nous n'exercions un droit de réponse. Tout cela prend plus de huit jours ! Un mois paraît un délai raisonnable, tenant compte de l'immédiateté, caractéristique évidente des médias, mais donnant le temps aux uns et aux autres de réagir.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Avis favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Avis favorable, même si je crois que le projet propose de « caler » les délais de l'audiovisuel sur ceux de la presse écrite.

Avis favorable, dans le doute !

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 260.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 130 rectifié, modifié par le sous-amendement no 260.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 23 est ainsi rédigé.

Article 24

M. le président.

« Art. 24. - L'article 64 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est rétabli dans la rédaction ci-après :

« Art. 64 . - Lorsqu'ont été ordonnées en référé des mesures limitant par quelque moyen que ce soit la diffusion de l'information, le premier président statuant en référé peut, en cas d'appel, arrêter l'exécution provisoire de la décision si celle-ci risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. »

M. le président.

La parole est à M. Arnaud Montebourg.

M. Arnaud Montebourg.

J'approuve que, grâce à l'article 24, il soit possible, dérogeant aux règles de la procédure civile, d'interrompre les effets d'un référé en matière de presse.

Je me réjouis également que cette disposition soit introduite dans la loi du 29 juillet 1881, car c'est la première fois que le législateur valide l'introduction du référé en matière de presse.

Les juristes spécialisés en droit de la presse se sont divisés, pendant des années, sur la question de la légalité des référés décidés par des juridictions civiles en matière de presse, dans la mesure où ces référés reposaient sur un décret alors que la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ne permettait de porter atteinte à la liberté d'expression que si la loi le prévoyait explicitement. Or des dispositions réglementaires, ce n'est pas la loi ! L'apport de cette nouvelle rédaction de l'article 64 de la loi du 29 juillet 1881 est considérable car elle va offrir à tous les praticiens contestataires de la procédure du référé, c'est-à-dire les défenseurs de la liberté de la p resse, un nouvel appui juridique.

Je voudrais préciser, ici, dans le cadre des travaux préparatoires, qui seront certainement lus avec précision et de façon circonstanciée par tous les usagers de ce nouveau texte, que si le référé est aujourd'hui validé sous une forme législative et si nous l'introduisons explicitement dans ce texte pour usage à l'égard de la presse, avec les mécanismes d'atténuation en appel que la chancellerie nous propose, ce référé, en aucun cas, ne peut enjamber les dispositions d'ordre public de la loi de 1881, que la jurisprudence des chambres civiles de la Cour de cassation a imposées à tous les plaideurs et à tous les tribunaux.

Ainsi dans l'affaire célèbre qui a opposé il y a quelques années l'Evénement du Jeudi à M. Jean-Christophe Mitterrand, il a été dit que, dans le cadre d'un référé, il é tait nécessaire de respecter le délai impératif de dix jours, fixé par l'article 35 de la même loi de 1881, qui permet impérativement à l'organe de presse de produire ses preuves. Car s'il est impossible de diffamer lorsqu'on dit la vérité, encore faut-il avoir le temps d'en fournir la preuve !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Dès lors que le texte introduit la notion de référé, il faut rappeler que, devant le juge des référés, les dispositions d'ordre public consacrées par la jurisprudence des chambres civiles de la Cour de cassation doivent s'appliquer. Il en est ainsi, à mes yeux, de l'offre de preuve et du délai impératif de dix jours, de l'audition de témoins, aujourd'hui autorisée par les juridictions civiles devant les juridictions civiles, alors que l'audition de témoins n'était obligatoire que devant les juridictions correctionnelles, de manière que les journalistes et les organes de presse puissent, dans cette procédure exceptionnelle, qui mène parfois à des mesures gravissimes de saisie, se défendre et faire triompher la vérité.

M. le président.

M. Devedjian et M. Cazenave ont présenté un amendement, no 28, ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 64 de la loi du 29 juillet 1881, après les mots : "le premier président", insérer les mots : "de la cour d'appel". »

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Il s'agit d'un amendement de précision, accepté par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

C'est uniquement pour faire plaisir à M. Devedjian que la commission a adopté cet amendement, peut-être utile pour les étudiants ignorant que le premier président qui statue en référé est le premier président de la cour d'appel. Qu'ils n'aillent pas imaginer que c'est le premier président de la Cour de cassation ! (Sourires.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis favorable à cet amendement, et je remercie M. Montebourg d'avoir souligné à quel point cet article était important. En effet, en cas de référé, il évitera, en instituant des délais, que ce soit d'ordre public en première instance ou, d'après le texte, en appel, que les saisies n'aient des conséquences excessives, comme de compromettre la survie d'entreprises de presse.

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Je suis tout à fait d'accord avec Mme la garde des sceaux. En revanche, notre excellent collègue Montebourg me semble faire un usage un peu personnel des travaux préparatoires.

(Sourires.)

Il faut laisser au juge le soin d'interpréter les textes. De sa part, cette manifestation de méfiance est surprenante. La jurisprudence est ce qu'elle est, et c'est aux juges d'apprécier comment ils doivent la faire évoluer.

Par ailleurs, j'ai été surprise de cette allusion au référé car j'ai l'impression qu'il existe déjà. Il est au moins cité dans l'article 9-1 du code civil.

M. Arnaud Montebourg.

Mais pas en matière de diffamation !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

28. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 24, modifié par l'amendement no

28. (L'article 24, ainsi modifié, est adopté.)

Article 25

M. le président.

« Art. 25. - I. - L'article 11 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois le procureur de la République peut, d'office ou à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause. »

« II. Le quatrième alinéa de l'article 145 du même code est complété par la phrase suivante : "Si la personne majeure mise en examen ou son avocat en font la demande dès l'ouverture de l'audience, le débat contradictoire a lieu en audience publique, sauf si la publicité est de nature à nuire au bon déroulement de l'information, à l'ordre public, à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Le juge de la détention provisoire statue sur cette demande de publicité après avoir recueilli les observations du ministère public, de la personne mise en examen et de son avocat."

« III. L'article 177-1 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, après les mots : "sur la demande de la personne concernée", il est ajouté les mots : "ou, avec l'accord de cette personne, d'office ou à la demande du ministère public," ;

« 2o L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si le juge ne fait pas droit à la demande de la personne concernée, il doit rendre une ordonnance motivée, qui est susceptible d'appel devant la chambre d'accusation. »

« IV. L'article 199 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est complété par la phrase suivante : "Toutefois, si la personne majeure mise en examen le demande dès l'ouverture des débats, ceux ci se déroulent et l'arrêt est rendu en séance publique, sauf si la publicité est de nature à nuire au bon déroulement de l'information, à l'ordre public, à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. La chambre d'accusation statue sur cette demande, après avoir recueilli les observations du procureur général et, le cas échéant, des avocats des autres parties, par un arrêt rendu en chambre du conseil qui n'est susceptible de pourvoi en cassation qu'en même temps que l'arrêt portant sur la demande principale."

« 2o La dernière phrase du cinquième alinéa est supprimée.

« V. - Le deuxième alinéa de l'article 199-1 du même code est supprimé.

« VI. L'article 212-1 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, après les mots : "sur la demande de la personne concernée", il est ajouté les mots : "ou, avec l'accord de cette personne, d'office ou à la demande du ministère public,".

« 2o L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si la chambre d'accusation ne fait pas droit à la demande de la personne concernée, elle doit rendre une décision motivée. »

« VII. L'article 803 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutes mesures utiles doivent être prises, dans les conditions compatibles avec les exigences de sécurité, pour éviter qu'une personne menottée ou entravée soit photographiée ou fasse l'objet d'un enregistrement audiovisuel. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Pierre Albertini, premier orateur inscrit.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

M. Pierre Albertini.

La publicité du débat contradictoire me paraît une étape importante. Malheureusement, elle est trop verrouillée par des conditions qui permettront finalement au juge de la détention provisoire de s'y opposer. Ces conditions sont : l'atteinte au bon déroulement de l'information, le trouble à l'ordre public, deux notions assez floues, auxquelles on ajoute la dignité de la personne ou les intérêts d'un tiers. Je comprends que les intérêts d'un tiers doivent être sauvegardés par une personne impartiale, par un juge indépendant. Mais il me semble qu'il revient au prévenu de juger lui-même de ce qui porte atteinte à sa dignité, à son honneur ou à sa vie privée.

Il s'agit donc, selon moi, d'une fausse « fenêtre » d'information ou de communication. Il faudrait alléger ce dispositif pour lui donner une portée réelle, que les exceptions prévues risquent de lui enlever.

M. le président.

La parole est à M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon.

Ma brève intervention sur l'article, me dispensera de défendre mes amendements.

L'article 25 du projet concerne l'article 11 du code de procédure pénale, relatif au secret de l'instruction. C'est un des éléments importants de la présomption d'innocence. Lors du déroulement de l'instruction, certaines choses sont dites, des pièces circulent, et la présomption d'innocence est mise à mal.

J'ai cru, un temps, car c'est un sujet difficile sur lequel j'ai évolué, je le reconnais, que pour mieux préserver la présomption d'innocence, il fallait peut-être renforcer le secret de l'instruction. Mais en regardant les choses d'un peu plus près, on s'aperçoit que les faits, c'est-à-dire les infractions qui concernent l'instruction, sont publics, qu'un certain nombre d'actes sont publics : la mise en examen, l'arrestation, a fortiori la mise en détention provisoire. En outre, le secret ne peut pas être total puisqu'il ne peut pas être imposé à la défense dont les droits doivent pouvoir s'exercer.

On s'aperçoit auussi que, dans la pratique, le secret de l'instruction n'est pas respecté. On a beau dire, on a beau faire, il ne peut pas l'être et, d'ailleurs, ses violations ne sont pas poursuivies. Voilà le constat objectif auquel nous pouvons parvenir.

Dès lors, autant le dire clairement : supprimons le secret de l'instruction - c'est à quoi tendra un amendement. Ce n'est pas là le moyen de protéger la présomption d'innocence, qui réside plutôt dans la responsabilité, c'est-à-dire dans la réparation du préjudice, lorsque préjudice il y a. Il faut que cette réparation soit effective et, comme le disait Mme Bredin, il faut qu'à côté du droit d'informer s'impose petit à petit le droit à l'information en se plaçant du point de vue du consommateur d'information, le droit à une information objective et contradictoire. S'il n'est pas respecté et qu'il y a préjudice, des dispositions existent déjà dans le code civil, celles des articles 9 et 9-1 dont on a déjà beaucoup parlé, mais aussi, et plus généralement, celles de l'article 1382 du code civil, qui permettent de le réparer.

Adaptons le droit au fait. Ne conservons pas le secret de l'instruction comme un alibi. Peut-être ferons-nous ainsi en sorte que des sanctions et des réparations pécuniaires, quand elles seront nécessaires, soient appliquées avec plus de réalisme.

M. le président.

M. Devedjian et M. Cazenave ont présenté un amendement, no 29, ainsi rédigé :

« Supprimer le I de l'article 25. »

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

C'est un amendement de cohérence avec ce que nous avons voté tout à l'heure à l'article 23 concernant le droit de réponse par le procureur de la République. Je propose, de retirer à ce dernier le droit de communiquer, et surtout à la demande des parties.

Le procureur de la République est une des parties au procès, puisqu'il est l'accusateur. Il ne peut donc pas faire de communication objective, quoi qu'en dise le texte de loi. Nous restons dans le système, M. Houillon vient de l'expliquer, du « secret de l'instruction ». Ce n'est pas encore cette fois-ci qu'on le mettra à bas ! Le secret de l'instruction est un bunker dans lequel on ouvre de petites fenêtres, qui sont, en réalité, des meurtrières.

N'acceptons pas !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Les communiqués du parquet, nous en avons maintenant l'habitude. Ils ont même fait l'objet d'une circulaire. Le processus est devenu classique pour le législateur ; une circulaire, un décret, enfin la loi qui ratifie quand l'expérience paraît positive.

L'expérience des communiqués du parquet paraît maintenant devoir être ratifiée par le Parlement, organisée, encadrée, afin que les procureurs de la République sachent précisément ce qu'ils peuvent faire ou ne pas faire. Je suis donc hostile à l'amendement de M. Devedjian, qui a d'ailleurs été repoussé par la commission. Par ailleurs, un amendement de la commission encadre mieux les communiqués du parquet, nous y reviendrons.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis moi aussi défavorable à l'amendement. Il convient de consacrer la pratique des communiqués du parquet, qui sont utiles, surtout s'ils sont encadrés comme le propose l'amendement no 132 de la commission des lois.

M. le président.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Madame, si vous posez ce principe pour l'une des parties, le principe de l'égalité des armes que vous avez fait inscrire dans l'article préliminaire vous oblige à décider de même pour l'avocat. Lui aussi a droit à un communiqué, comme le procureur de la République. Et c'en est fini du secret de l'instruction !

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Pour ma part, je suis très sensible aux arguments développés par M. Devedjian, parce que le parquet est partie au procès. Il a la charge de l'accusation. Dans ces conditions, il est extrêmement difficile de l'envisager comme porte-parole, comme « attaché de presse » du procès, sauf à déséquilibrer la présentation des choses.

J'ai bien compris la position du Gouvernement qui souhaite que les communiqués soient limitées, enserrés.

Mais, madame la garde des sceaux, si vous avez cité l'amendement no 132, vous avez omis de citer l'amendement no 133 ! Soit on arrive à encadrer les communiqués de façon très précise non seulement dans leur raison d'être, mais aussi dans les mentions qu'ils peuvent comporter, notamment les mentions nominatives, soit on estime que ce type de communiqué ne doit pas être confié au parquet, quitte d'ailleurs - pourquoi pas ? - à le remettre à un autre magistrat. Personnellement, je ne serais pas choquée


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qu'il s'agisse éventuellement du juge de la détention ou du juge d'instruction. A la limite ça me paraîtrait plus légitime que le parquet.

Je vous livre une réflexion d'ensemble parce que tous les amendements sont un peu liés. Pour être acceptables, les communiqués du parquet doivent clairement être limités dans leur raison d'être et dans leur portée. Sinon, l'argumentation de M. Devedjian prend tout son sens.

On ne peut pas, en effet, confier la communication d'un procès à la partie strictement chargée de l'accusation.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

29. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Houillon a présenté un amendement, no 202, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le I de l'article 25 :

« I. - L'article 11 du code de procédure pénale est supprimé. »

La parole est à M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon.

J'ai déjà défendu cet amendement.

D'ores et déjà, je retire l'amendement no 203.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Défavorable.

Puisque nous traitons du secret de l'instruction, j'en profite pour rappeler à M. Devedjian qu'il a parfaitement le droit, en tant qu'avocat, de faire des communiqués pour les besoins de la défense. L'égalité des armes est donc respectée.

M. Patrick Devedjian.

Non, madame le professeur, je n'ai pas ce droit !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Nous n'allons pas nous battre à coups de code, mais je vous rappellerai que dans les notes de l'article 11 du code de procédure pénale un certain nombre d'arrêts sont cités...

M. Patrick Devedjian.

Ce droit est très strictement encadré et très limité. Il n'y a pas du tout égalité d'armes avec le procureur de la République !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Toujours est-il que vous pouvez largement vous exprimer pour les besoins de la défense.

M. Patrick Devedjian.

Et je n'y manque jamais ! (Sourires.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

J'aimerais souligner dans la controverse qui oppose M. Devedjian à Mme Lazerges que l'article 11 lui-même précise bien que le secret de la procédure doit être assuré « sans préjudice des droits de la défense ». Les droits de la défense sont donc tout à fait préservés.

M. Patrick Devedjian.

Oh non !

Mme la garde des sceaux.

Je suis défavorable évidemment, à la suppression de l'article 11 du code de procédure pénale qui maintient le secret de l'instruction. Je préfère le maintenir et ménager des phases de publicité dans les moments importants de la procédure juridictionnelle.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 202.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

L'amendement no 203 a été retiré.

MM. Albertini, Blessig, Deprez et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, ont présenté un amendement, no 49, ainsi rédigé :

« Avant le premier alinéa du I de l'article 25, insérer les trois alinéas suivants :

« L'article 11 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

« L'alinéa premier est supprimé.

« Dans le dernier alinéa, les mots : "à cette procédure" sont remplacés par les mots : "à une procédure d'enquête et d'instruction". »

La parole est à M. Pierre Albertini.

M. Pierre Albertini.

Nous venons de discuter du secret de l'instruction. C'est une étape importante dans la réflexion, et nous avons voulu y contribuer à notre manière, notamment en assurant le respect d'une information équitable dont il a été question sur tous les bancs.

De l'article 11 du code de procédure pénale l'opinion a une vision simplifiée qu'elle exprime en parlant du

« secret de l'instruction ». En réalité, l'alinéa 1er concerne le « secret de l'enquête et de l'instruction ». Il faudrait d'ailleurs s'entendre sur une délimitation plus stricte, sachant que tous les professionnels qui concourent ensuite à la procédure sont tenus par l'alinéa 2 au secret professionnel, les officiers de police judiciaire, les magistrats, les avocats, et d'autres.

Aujourd'hui, il s'agit de s'orienter vers un système différent. L'information a une limite : le respect des droits de la personne, de la dignité, de l'honneur, de la réputation des personnes. Cette limite, nous ne l'assurerons pas en maintenant un principe devenu fictif. Et c'est sur une fiction que vous organisez des fenêtres de publicité.

Quand mon collègue Patrick Devedjian les a qualifiées de meurtrières, il avait raison.

Reconnaissez là une forme de contradiction et en tout état de cause une défiance à l'égard de ceux qui - liberté de presse oblige et droit de l'information oblige - ont aussi pour mission de ne pas donner de notre société une image totalement anesthésiée.

La violation du secret de l'instruction, madame le garde des sceaux, n'est pas sanctionnée. On pourrait d'ailleurs s'interroger sur ceux qui le violent. Les juges d'instruction, dit-on quelquefois : à mon avis, souvent c'est la police qui est à l'origine de l'essentiel des informations transmises aux journalistes. En ce qui concerne les hommes et les femmes politiques que nous sommes, comment imaginer que nous puissions récuser le principe de transparence et d'information totale sur ce que nous faisons ? Il y aurait forcément rupture d'égalité. Personne ne sera capable d'assurer également le secret de l'instruction au sens très large.

Pour terminer, je citerai un passage du « manifeste pour l'écrit », publié par plusieurs journalistes, directeurs de publication et éditeurs. Il est assez révélateur et je le livre à votre réflexion : « Nous dénonçons le risque de développement d'une censure insidieuse. Le journaliste ou l'écrivain ont pour vocation d'être les témoins critiques de leur temps. Ils ne peuvent se borner, tels des miroirs, à renvoyer à la société ses stéréotypes, mais doivent, au contraire, exercer une fonction d'analyse, parfois même contestataire. » Voilà qui est très important. Cette fonc-

tion de contestation a, d'ailleurs, été reconnue par la Cour européenne de Strasbourg qui, dans un arrêt de 1994, attribue même aux journalistes une fonction de

« chiens de garde » de notre société.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Il faut donc vraiment ouvrir cette discussion. Vous n'y êtes peut-être pas complètement prêts aujourd'hui, mais nous avons voulu montrer publiquement les dérives et les impasses auxquelles conduisait un principe de secret purement fictif.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable aussi.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

49. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Lazergues, rapporteur, a présenté un amendement, no 132, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du I de l'article 25, après le mot : "Toutefois", insérer les mots : ", afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public," ».

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai conjointement les amendements nos 132 et 133.

M. le président.

Je vous en prie.

L'amendement no 133, présenté par Mme Lazerges, rapporteur, et Mme Bredin, est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du I de l'article 25, substituer aux mots : "objectifs tirés de la procédure ne comportant" les mots : "relatifs à la procédure ne comportant aucune mention nominative, sauf accord de l'intéressé, ni". »

Poursuivez, madame le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Il s'agit d'encadrer un peu plus précisément les communiqués du parquet, la commission des lois souhaitant que les communiqués du parquet ne soient pas l'occasion, pour quelques magistrats particulièrement médiatiques, de passer à la télévision.

Nous demandons donc que le texte portant sur les communiqués du parquet mentionne que ces communiqués ont lieu « afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, ». Nous demandons, par ailleurs, que les informations relatives à la procédure ne comportent aucune mention nominative, sauf accord de l'intéressé.

Ces deux petits compléments, je les crois utiles au texte.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable à l'amendement no 132. Mais défavorable au no 133 parce que l'interdiction faite au ministère public de divulguer des informations nominatives dans ses communiqués, sauf accord de l'intéressé, est injustifiée, d'abord, ensuite difficilement applicable.

En cas de violences urbaines qui ont choqué une population, il est normal que le parquet fasse état de l'arrestation des personnes, mais il n'a pas à citer les noms. Imaginez une affaire dans laquelle l'identité de la personne, une personne publique, serait déjà connue par la presse, on ne comprendrait pas que le parquet ne donne pas son nom. Si un communiqué nominatif ne peut intervenir de surcroît qu'avec l'accord de la personne - et on ne voit comment cet accord pourrait être recueilli -, il y a une grande chance pour qu'il ne soit pas donné.

La commission vient de supprimer le rôle du parquet en matière de droit de réponse, en estimant, et je me suis ralliée à cette position, que le parquet n'avait pas à être le porte-parole d'une personne poursuivie. Or l'amendement no 133, procède de la logique exactement inverse. Si un communiqué nominatif ne peut être publié qu'avec l'accord de l'intéressé, cela signifie que ce dernier ne donnera son accord que s'il estime que le procureur peut être son porte-parole.

M. Patrick Devedjian.

Vous avez raison.

M. Alain Tourret.

Non.

Mme la garde des sceaux.

Dernier argument, l'amendement de la commission rend également nécessaire l'accord de la victime, ce qui soulève à nouveau d'insurmontables problèmes pratiques.

Bref, je vous demande de ne pas adopter l'amendement no 133. L'amendement no 132 suffit à bien encadrer les communiqués du parquet.

M. le président.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Madame Lazerges, je ne résiste pas au bonheur de vous prendre en flagrant délit de contradiction. Il y a quelques minutes à peine, s'agissant d u droit de communication du procureur de la République, vous avez dit qu'il était équilibré par celui de l'avocat qui, selon vous, avait le droit de communiquer.

Or maintenant, dans l'exposé sommaire de l'amendement no 132, je lis : « La pratique des communiqués du parquet doit être strictement encadrée, afin d'éviter un déséquilibre avec les avocats de parties qui sont, eux, soumis au secret de l'instruction ». Vous l'avez écrit, ce n'est pas moi !

Mme Christien Lazerges, rapporteur.

Sauf les besoins de la défense !

M. Patrick Devedjian.

Avez-vous écrit ce que je viens de citer ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

C'est vrai, mais c'est un résumé...

(Sourires.)

M. Pierre Albertini.

Un raccourci plus qu'un résumé !

M. le président.

La parole est à M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche.

Sans vouloir faire de la peine à Mme Lazerges, je trouve que son amendement n'est pas justifié.

Le nom des personnes sera étalé dans toute la presse, et le seul à qui on demande de communiquer ne pourra pas parler. Il faut avouer que cela est en contradiction avec la volonté d'ouvrir un droit de communication et d'information, dont le but est de protéger, de rétablir la vérité sur un certain nombre de faits. Je suis donc très réservé sur cet amendement.

M. le président.

Madame Bredin, vous m'avez demandé la parole, mais je ne puis vous la donner. Il nous faut progresser.

Mme Frédérique Bredin.

Je voulais parler pour l'amendement.

M. le président.

Le règlement ne m'autorise pas à donner la parole à plus de trois orateurs. D'abord, un orateur contre l'amendement, dans ce cas, la parole est de droit.

C'est à ce titre que M. Caresche l'a eue. De plus, l'usage


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

autorise le président, selon son souhait, ou son « senti », ou l'importance du sujet, à donner la parole à deux opposants, l'un pour répondre à la commission, l'autre pour répondre au Gouvernement. Mais il n'est pas question d'organiser un débat général.

Je mets aux voix l'amendement no 132.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 133.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement no 30 est présenté par M. Devedjian et M. Cazenave, l'amendement no 193 par M. Houillon et

M. Goasguen.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Après les mots : "audience publique" supprimer la fin du dernier alinéa du II de l'article 25". »

Vous défendez les deux amendements monsieur Houillon ?

M. Philippe Houillon.

La publicité des audiences demandée par l'accusé, doit être de droit.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 30 et 193.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, et Mme Bredin ont présenté un amendement, no 134, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du dernier alinéa du II de l'article 25, supprimer les mots : "au bon déroulement de l'information,". »

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Nous en revenons à notre débat.

Autant je crois tout à fait important de veiller au respect de la présomption d'innocence - et cela doit se dérouler partout dans le cadre du procès pénal, comme dans les médias, de façon équilibrée, à charge et à décharge - autant il me paraît non seulement normal mais indispensable que les médias puissent avoir un accès réel et équilibré au déroulement de l'information. Je ne comprends pas pourquoi les « fenêtres de publicité », à très juste titre proposées comme une avancée significative, peuvent se refermer aussi vite et surtout de manière aussi subjective. Le bon déroulement de l'information est une donnée très difficile à objectiviser. Le juge pourra évidemment à tout moment estimer que la publicité est dérangeante pour son information. Il est donc indispensable de supprimer cette exception.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

La commission a adopté l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 134.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 253 de M. JeanPierre Michel n'est pas défendu.

Mme Lazerges, rapporteur, M. Houillon et M. Goasguen ont présenté un amendement, no 135, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article 25, après le mot : "statue", insérer les mots : "par ordonnance motivée". »

La parole est à M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon.

Nous nous livrons à une véritable guerre de tranchée pour avancer dans le domaine des libertés. S'agissant de la publicité, nous sommes toujours en retrait par rapport à la Convention européenne qui est dans notre droit positif. La publicité a été rejetée.

Permettons au moins que le juge explique sa décision quand il refuse la publicité, et il doit le faire par une ordonnance motivée. Cet amendement est devenu celui de la commission des lois.

M me Christine Lazerges, rapporteur.

En effet, la commission l'a retenu.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 135.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 137, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du IV de l'article 25, après les mots : "mise en examen", insérer les mots : "ou son avocat". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Amendement de précision.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 137.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement no 31 est présenté par M. Devedjian et M. Cazenave ; l'amendement no 194 par M. Houillon et

M. Goasguen.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Après les mots : "séance publique", supprimer la fin de l'avant-dernier alinéa du IV de l'article 25. »

La parole est à M. Patrick Devedjian, pour soutenir l'amendement no

31.

M. Patrick Devedjian.

Ce sont des amendements de cohérence avec un amendement qui a été rejeté.

M. le président.

Disons alors que les amendements nos 31 et 194 n'ont plus d'objet.

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, et Mme Bredin ont présenté un amendement, no 136, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du IV de l'article 25, supprimer les mots : "au bon déroulement de l'information,". »

La parole est à Mme le rapporteur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Amendement de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 136.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 138, ainsi rédigé :

« Supprimer le V de l'article 25. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement tend à rectifier un oubli. Les dispositions de l'article 199-1 du code de procédure pénale doivent être maintenues.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 138.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement no 139 est présenté par Mme Lazerges, rapporteur ; l'amendement no 206 par M. Albertini.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le VII de l'article 25. »

La parole est à Mme le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 139.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

L'amendement no 139 est de coordination.

M. Pierre Albertini.

L'amendement no 206 également !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 139 et 206.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 25, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 25, ainsi modifié, est adopté.)

Article 26

M. le président.

Je donne lecture de l'article 26 :

TITRE II

DISPOSITIONS RENFORÇANT LES DROITS

DES VICTIMES C HAPITRE Ier Dispositions réprimant l'atteinte à la dignité d'une victime d'une infraction pénale

« Art. 26. - I. - Il est inséré, après l'article 226-30-1 du code pénal, une section VIII ainsi rédigée :

« Section

VIII

« De l'atteinte à la dignité de la victime d'un crime ou d'un délit

« Art. 226-30-2 . - Le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, la reproduction des circonstances d'un crime ou d'un délit lorsque cette reproduction porte atteinte à la dignité d'une victime, est puni de 100 000 F d'amende.

« Lorsque le délit prévu au présent article est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la prescription et la détermination des personnes responsables. »

« II. Les troisième et quatrième alinéas de l'article 38 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse sont abrogés. »

M. Albertini a présenté un amendement, no 207, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 26 :

« I. Le premier alinéa de l'article 9 du code civil est complété par les mots : "et à la protection de sa dignité".

« II. Dans le dernier alinéa du même article, après les mots : "vie privée", sont insérés les mots : "ou à la dignité de la personne". »

La parole est à M. Albertini, pour soutenir l'amendement no 207, qui, s'il était adopté, ferait tomber tous les autres amendements à l'article 26.

M. Pierre Albertini.

Monsieur le président, vous allez attribuer une vertu supplémentaire à mon amendement : la rapidité. (Sourires.)

L'article 9 du code civil fait référence à la protection de la vie privée. La jurisprudence y a rattaché notamment le droit à l'image. Il me semble qu'il pourrait également être fait référence à la dignité de la personne, notion qui n'est peut-être pas tout à fait comparable à celle de vie privée.

Cette disposition s'inscrit dans le sens de ce que nous avons indiqué ici à plusieurs reprises : le juge civil est, d'une manière générale, le meilleur garant des droits de la personne.

Cet amendement va à l'opposé de la surpénalisation dont nous sommes souvent victimes, les uns et les autres.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Dans un souci de codification et de mise en ordre, une telle disposition devrait être « rapatriée » dans le code pénal, où figure déjà une autre disposition concernant l'atteinte à la dignité des personnes en matière d'image. Il serait plus cohérent que toutes ces dispositions figurent dans le code pénal.

M. Patrick Devedjian.

Ce n'est pas du tout la même répression ! Cela va du simple au quadruple !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable, parce que la disposition proposée est sans rapport avec le projet de loi.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 207.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

A la suite du vote intervenu, les amendements nos 44 de M. Devedjian, 313 de la commission des lois, 261 de Mme Lignières-Cassou et 140 rectifié de la commission des lois deviennent sans objet.

Vous voyez, monsieur Albertini, tout finit par arriver.

(Sourires.)

M. Pierre Albertini.

A une heure du matin !

M. le président.

Et en conséquence, l'article 26 est ainsi rédigé.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Article 27

M. le président.

« Art. 27. - Il est inséré, après l'article 227-24 du code pénal, un article 227-24-1 ainsi rédigé :

« Art. 227-24-1 . - Le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, des renseignements concernant l'identité d'un mineur victime d'une infraction est puni de 100 000 F d'amende.

« Lorsque le délit prévu au présent article est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la prescription et la détermination des personnes responsables.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque la diffusion est réalisée, pour les nécessités de l'enquête ou de l'information, à la demande du procureur de la République, du juge d'instruction ou du juge des enfants. »

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 142, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 227-24-1 du code pénal, après les mots : "victime d'une infraction", insérer les mots : "ou l'image de ce mineur lorsqu'elle est identifiable". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement de précision tend à modifier légèrement le texte proposé par l'article 227-24-1 du code pénal. Il s'agit de faire en sorte que la diffusion d'une image permettant d'identifier le mineur victime d'une infraction puisse être sanctionnée.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 142.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 316 de la commission des lois et l'amendement no 262 de Mme Lignières-Cassou deviennent sans objet.

Je mets aux voix l'article 27, modifié par l'amendement no 142.

(L'article 27, ainsi modifié est adopté.)

Après l'article 27

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 143, présenté par Mme Lazerges, rapporteur, et Mme Bredin, est ainsi libellé :

« Après l'article 27, insérer les dispositions suivantes :

« Chapitre Ier bis

« Dispositions concernant l'enquête de personnalité de victime

« Art. 27 bis. - Il est inséré, après le sixième alinéa de l'article 81 du code de procédure pénale, un alinéa ainsi rédigé :

« Le juge d'instruction peut ordonner à l'égard de la victime, si celle-ci donne son accord, toute mesure lui permettant d'être informée des conséquences de l'infraction subie sur sa santé, sa personnalité ainsi que sur sa situation matérielle, familiale ou sociale.

Il peut notamment prescrire à cette fin un examen médical, une expertise psychologique ou médicop sychologique ou une enquête de personnalité confiée à une personne habilitée. Une enquête sociale doit être ordonnée lorsque la victime est décédée. »

L'amendement no 175, présenté par MM. Gerin, Braouezec, Brunhes, Carvalho et les membres du groupe communiste, est ainsi libellé :

« Après l'article 27, insérer l'article suivant :

« Après le septième alinéa de l'article 81 du code de procédure pénale, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le juge d'instruction peut ordonner à l'égard de l a victime toute mesure lui permettant d'être informé des conséquences de l'infraction subie sur sa santé, sa personnalité ainsi que sur sa situation matérielle, familiale ou sociale. Il peut notamment prescrire à cette fin un examen médical, une expertise p sychologique ou médico-psychologique ou une enquête de personnalité confiée à une personne habilitée. Cette enquête est obligatoire lorsque la victime est décédée. »

La parole est à Mme le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 143.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement tend à prévoir l'extension à la victime du dispositif de l'enquête prévue par l'article 81 du code de procédure pénale.

M. le président.

La parole est à M. Alain Tourret, pour soutenir l'amendement no 176.

M. Alain Tourret.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 176 ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis favorable sur le principe, mais je préfère la rédaction de l'amendement no 222 de M. Tourret.

M. le président.

Nous allons y venir. Dois-je en déduire, madame la garde des sceaux, que vous souhaitez le rejet des amendements nos 143 et 175 ?

Mme la garde des sceaux.

Oui.

M. le président.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges.

rapporteur.

Il y a une différence entre les deux amendements : dans l'amendement no 143, l'accord de la victime est requis. Cette précision n'est peut-être pas inutile, mais enfin...

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 143.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 175.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Tourret a présenté un amendement, no 222, ainsi libellé :

« Après l'article 27, insérer l'article suivant :

« Il est inséré après l'article 81 du code de procédure pénale un article 81-1 ainsi rédigé :

« Art. 81-1. Le juge d'instruction peut, d'office, sur réquisition du parquet ou à la demande de la partie civile, procéder, conformément à la loi, à tout


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

acte lui permettant d'apprécier la nature et l'importance des préjudices subis par la victime ou de recueillir des renseignements sur la personnalité de celle-ci. »

M. Alain Tourret.

En autorisant le juge d'instruction à procéder à tous les actes qui lui permettront d'apprécier la nature et l'importance des préjudices subis par la victime ou de recueillir des renseignements sur la personnalité de celle-ci, cet amendement permet de protéger les droits de la victime.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 222.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 141 rectifié, ainsi libellé :

« Après l'article 27, insérer l'article suivant :

« I. Il est inséré, après l'article 227-24-1 du code pénal, un article 227-24-2 ainsi rédigé :

« Art. 227-24-2. Le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, d es renseignements concernant l'identité d'un mineur ayant quitté ses parents, son tuteur, la personne ou l'institution qui était chargée de sa garde ou à laquelle il était confié, d'un mineur exposé ou d élaissé dans les conditions mentionnées aux articles 227-1 et 227-2 du code pénal ou d'un mineur qui s'est suicidé est puni de 200 000 F d'amende.

« La même peine est applicable lorsqu'il s'agit d'une image permettant d'identifier le mineur.

« Lorsque les délits prévus au présent article sont commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la prescription et la détermination des personnes responsables.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque la diffusion est réalisée à la demande du procureur de la République, des personnes ayant la garde du mineur, du préfet du département, du juge d'instruction ou du juge des enfants.

« II. Les articles 39 bis et 39 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse sont abrogés. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Je signale que, par souci de coordination, il faut rétablir le montant de l'amende initialement prévu, soit 100 000 francs.

Cet amendement vise à transposer dans le code pénal les dispositions de la loi sur la presse interdisant de révéler l'identité des mineurs fugueurs ou qui se sont suicidés.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

L'amendement no 141 rectifié, devient donc l'amendement no 141 deuxième rectification, la somme de « 200 000 F » étant remplacée par celle de

« 100 000 F ».

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 34, présenté par MM. Devedjian et Cazeneuve, est ainsi libellé :

« Après l'article 27, insérer l'article suivant :

« L'article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :

« Art. 38 ter. Tout journaliste professionnel a le droit de filmer par une caméra fixe les séances publiques de toute juridiction. Les images peuvent être diffusées en direct ou en différé. Les conditions matérielles d'organisation de cette liberté sont déterminées par le président de la juridiction concernée.

Le coût de la dépense est à la charge exclusive du titulaire de ce droit. »

M. Patrick Devedjian.

Je suis sans illusion, mais je prends date.

M. Arnaud Montebourg.

C'est l'amendement Gilbert Collard !

M. Patrick Devedjian.

Cet amendement tend à permettre l'installation d'une caméra fixe lorsqu'il y a audience publique, et ce dans toute juridiction.

La justice est rendue au nom du peuple français qu'il n'y a aucune raison de tenir éloigné des audiences.

M. Gérard Gouzes.

Les audienences sont publiques !

M. Patrick Devedjian.

Autrefois, le peuple pouvait facilement assister aux audiences. Aujourd'hui, c'est évidemment beaucoup plus difficile, mais les moyens techniques permettent de pallier cette difficulté.

Madame Lazerges, vous disiez que la justice a une fonction pédagogique, et je le crois volontiers. Mais je constate que, aujourd'hui, cette fonction est remplie par les feuilletons américains sur la justice américaine dont le système accusatoire bénéficie, lui, de ce droit d'être filmé

Je souhaite donc la présence d'une caméra fixe lors des audiences publiques, parce que cela, qui a une valeur d'exemplarité, valeur pédagogique, influe sur le comportement du juge et sur celui des parties au procès - se sachant filmés, ils se tiendront mieux.

Cela dit, je suis sans illusion sur le sort qui sera réservé à cet amendement quand je vois la philosophie qui a prévalu ici quant à la publicité de l'audience. Pour autant, je prends date.

Je défends en même temps l'amendement no 36 qui, lui, ne prévoit que le droit de procéder à un enregistrement sonore des débats en audience publique. Pourquoi ce qui est permis à l'écrit devrait-il être interdit au son ?

M. le président.

L'amendement, no 36, présenté par M. Devedjian et M. Cazenave est ainsi libellé :

« Après l'article 27, insérer l'article suivant :

« Après l'article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. 38 quater. Tout journaliste professionnel a le droit, à sa charge, de réaliser un enregistrement sonore des paroles prononcées en audience publique de toute juridiction. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 34 et 36 ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Totalement défavorable.

Pensons aux torts que le film pourra porter aux personnes relaxées ou acquittées. Pensons également à la protection des victimes qui, la plupart du temps, n'ont aucune envie que l'audience soit filmée : la diffusion des images risquerait d'accroître leur traumatisme. Il est assez différent d'assister à une audience ou à la retransmission de celle-ci hors de son contexte.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis très opposée à ces amendements. J'ajouterai aux arguments avancés par Mme Lazerges que l'exemple américain est là pour nous montrer que la présence de la caméra a une influence directe sur le comportement des acteurs du procès et modifie le déroulement de celui-ci, voire son issue.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

34. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

36. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 28

M. le président.

Je donne lecture de l'article 28 : C HAPITRE II Dispositions relatives aux associations d'aide aux victimes et aux constitutions de partie civile

« Section 1

« Dispositions relatives aux associations d'aide aux victimes

« Art. 28. - L'article 41 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le procureur de la République peut également recourir à une association d'aide aux victimes ayant fait l'objet d'un conventionnement de la part des chefs de la cour d'appel, afin qu'il soit porté aide et assistance à la victime de l'infraction. »

Je mets aux voix l'article 28.

(L'article 28 est adopté.)

Après l'article 28

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur et M. Albertini ont présenté un amendement, no 144, ainsi rédigé :

« Après l'article 28, insérer l'article suivant :

« Le conventionnement est de droit pour les associations d'aide aux victimes, reconnues d'utilité publique. »

La parole est à M. Pierre Albertini.

M. Pierre Albertini.

Cet amendement est explicite. Il vise simplement à proposer que le conventionnement soit de droit pour les associations d'aide aux victimes, reconnues d'utilité publique. On sait que ces associations apportent un concours utile aux victimes.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 144.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 145, ainsi libellé :

« Après l'article 28, insérer l'article suivant :

« I. Il est inséré, après l'article 53 du même code, un article 53-1 ainsi rédigé :

« Art. 53-1 . - Les officiers et les agents de police judiciaire informent les victimes de leur droit d'obtenir réparation du préjudice subi et d'être aidées et assistées par un service ou une association d'aide aux victimes. »

« II. - L'article 75 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ils informent les victimes de leur droit d'obtenir réparation du préjudice subi et d'être aidées et assistées par un service ou une association d'aide aux victimes. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement important et je regrette d'ailleurs que nous ne commencions à parler des victimes qu'à une heure du matin.

Le texte du Gouvernement - cela a été fréquemment relevé dans la discussion générale - concerne à la fois les victimes et les personnes poursuivies.

Pour les victimes, l'information est le capital. C'est pourquoi nous proposons que les victimes soient informées à tous les stades de la procédure, et pas seulement par le procureur de la République. Les officiers et agents de police judiciaire informeront les victimes de leur droit d'obtenir réparation du préjudice subi et d'être aidées et assistées par un service ou une association d'aide aux victimes.

Il existe en France un excellent réseau d'associations d'aide aux victimes auquel malheureusement trop peu d'entre elles recourent.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis favorable à cet amendement qui permettra une information des victimes sur leurs droits dès le début de la procédure.

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Les amendements sur le droit des victimes, proposés par Mme Lazerges, sont tous extrêmement importants, autant que les propositions faites par la garde des sceaux dans le projet.

On l'a dit au début de notre débat, les victimes devaient avoir leur place dans ce texte, comme elles l'avaient eue, déjà, dans le texte sur les crimes sexuels contre les mineurs. Il faut donner droit de cité aux victimes dans la procédure pénale ; elles ne l'ont pas eu pendant trop longtemps. Nous aurons ainsi à préciser, dans les minutes qui viennent, quelle est leur place, l'écoute qu'elles doivent recevoir et l'information qu'on peut leur donner sur les possibilités de réparation des préjudices subis.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 145.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Picard a présenté un amendement, no 265, ainsi libellé :

« Après l'article 28, insérer l'article suivant :

« Après l'article 2-16 du code de procédure pénale, il est inséré un article 2-17 ainsi rédigé :

« Art. 2-17. Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et se proposant par ses statuts de défendre et d'assister l'individu ou de défendre les droits et libertés individuels et collectifs peut, à l'occasion d'actes commis par toute personne physique ou morale, dans le cadre d'un mouvement ou organisation ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter une dépendance psychologique ou physique, dès lors que ces actes portent atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues par les articles 222-1 à 222-6, 222-7 à 222-14, 222-15 à 222-18, 222-22 à 222-32, 223-5 à 223-6, 224-1 à 224-5, 225-5 à 225-12, 225-13 à 225-16, 227-15 à 227-17-2, et 227-22 à 227-27, 311-1, 311-3 à 311-11, 312-1 à 312-12 et 313-1 à 313-4, 314-1 à 314-2, 321-1 du code pénal lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée. »

La parole est à Mme Catherine Picard.

Mme Catherine Picard.

Cette législature, comme, du reste, la précédente, s'est particulièrement occupée de la très forte progression des mouvements dits sectaires. Nous avions jusqu'à présent travaillé sur la définition et le repé rage des sectes. Nous nous intéressons maintenant à la défense des victimes, qui sont très souvent démunies, à la fois psychologiquement et juridiquement, pour assurer leur défense lorsqu'elles veulent se porter auprès des tribunaux. Les associations représentatives, dont une est reconnue d'utilité publique, sont tout aussi démunies pour apporter leur soutien. Par conséquent, nous avons pensé qu'il était vraiment urgent de permettre aux victimes de se rapprocher des associations, ce qu'elles font, et à ces associations de pouvoir se porter partie civile, afin de défendre l'ensemble des personnes qui sont touchées dans leur vie, leur intégrité et leur dignité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Sur le fond, nous sommes bien sûr d'accord avec l'amendement. Mais une mission d'enquête étudiant en ce moment la question des sectes, il n'est peut-être pas judicieux d'interférer avec ses travaux. Sans doute vaut-il mieux attendre ses conclusions. C'est pourquoi la commission a repoussé l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis très favorable à cet amendement, qui va aider les victimes des sectes à faire valoir leurs droits devant la justice. Il est bien cadré sur le plan juridique pour éviter tout abus éventuel. Il permettra de renforcer les relations entre les parquets et les associations de lutte contre les phénomènes sectaires. Ce sont d'ailleurs des actions que j'avais souhaitées dans une circulaire diffusée le 1er décembre 1998. Le partenariat est une condition essentielle du succès de l'intervention judiciaire. Je ne vois aucune raison pour ne pas adopter cet amendement dès maintenant.

M. le président.

La parole est à M. Pierre Albertini.

M. Pierre Albertini.

Sur le principe, je suis absolument d'accord : il faut reconnaître aux associations qui luttent contre les phénomènes sectaires - ils ont, hélas ! tendance à se développer dans notre pays - la possibilité d'exercer les droits reconnus à la partie civile. Cette action est d'ailleurs considérée par le parquet comme tout à fait bénéfique.

Je note simplement que l'amendement tend à insérer un dix-septièmement à l'article 2 du code de procédure pénale et que j'ai recensé plus de trente types d'associations qui, soit dans le code de procédure pénale, soit dans le code de l'urbanisme, soit dans le code de la famille, soit dans le code de la santé publique, sont habilitées, dans des conditions extrêmement diverses et qui tiennent aux délais, à l'agrément ou à la nature des infractions, à exercer l'action civile.

Je crois donc qu'une certaine remise en ordre, qu'une réflexion sur ce sujet s'impose. J'espère qu'elle sera entreprise dans le cadre du rapport que je déposerai prochainement devant l'office parlementaire d'évaluation de la législation. Je crois d'ailleurs que ce sera le premier rapport de cet organisme. Je propose une clause de caractère général définissant de manière beaucoup plus simple, beaucoup plus lisible, la possibilité pour les associations, en particulier celles qui luttent contre les phénomènes sectaires, d'exercer l'action civile.

On peut regretter que ce chapitre consacré aux victimes soit abordé à une heure du matin, mais c'est un peu notre méthode de travail qui le veut. Afin d'atténuer les remords exprimés, je précise que ces dispositions ont fait l'objet d'un assez large accord, ce qui montre qu'il y a une forte convergence sur ce dernier volet du projet.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 265.

(L'amendement est adopté.)

Avant l'article 29

M. le président.

Je donne lecture de l'intitulé de la section 5 : Section 2 Dispositions relatives aux constitutions de partie civile Je suis saisi de trois amendements qui, en dépit de l'endroit où ils s'insèrent, peuvent être soumis à une discussion commune.

L'amendement, no 223, présenté par M. Tourret, est ainsi libellé :

« Après l'article 27, insérer l'intitulé et l'article suivants :

« Chapitre Ier bis Dispositions relatives à l'information donnée à la victime.

« Art. 27 bis I. L'article 81 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dès le début de l'information le juge d'instruction doit signifier à la victime d'une infraction portant atteinte à la personne l'existence de la procédure, de son droit de se constituer partie civile, les modalités d'exercice de ce droit. Si la victime est m ineure, l'avis est donné à ses représentants légaux. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

« II. L'article 706-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'une juridiction alloue des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l'une des infractions visées au présent article, elle avise la victime des possibilités de saisine de la commission d'indemnisation des victimes d'infraction. Le délai de saisine de cette commission ne court qu'à compter de l'avis donné par la juridiction. »

L'amendement no 146, présenté par Mme Lazerges, rapporteur, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 29, insérer l'article suivant :

« L'article 80-2 du même code est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. 80-2. - Dès le début de l'information, le juge d'instruction doit avertir la victime d'une infraction mentionnée au livre deuxième du code pénal de l'ouverture d'une procédure, de son droit de se constituer partie civile et des modalités d'exercice de ce droit. Si la victime est mineure, l'avis est donné à ses représentants légaux. »

L'amendement no 176, présenté par MM. Gerin, Braouezec, Brunhes, Carvalho et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« Après l'article 27, insérer l'article suivant :

« L'article 81 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dès le début de l'information, le juge d'instruction doit avertir la victime d'une infraction portant atteinte à la personne, de l'existence de la procédure, de son droit de se constituer partie civile et des modalités d'exercice de ce droit. Si la victime est m ineure, l'avis est donné à ses représentants légaux ».

La parole est à M. Alain Tourret, pour soutenir l'amendement no 223.

M. Alain Tourret.

Cet amendement a pour objet de renforcer les droits des victimes, d'abord en informant.

En particulier lorsqu'une juridiction accorde des dommages et intérêts, il m'apparaît indispensable qu'elle avise la victime des possibilités de saisine de la commission d'indemnisation et que le délai de saisine de celle-ci ne coure qu'à compter de l'avis donné par la juridiction.

L'expérience montre que d'innombrables victimes n'ont pas saisi cette commission, perdant ainsi toute chance d'obtenir une indemnisation.

M. Arnaud Montebourg.

Très juste !

M. le président.

La parole est à Mme le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 146.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Par l'amendement no 146, nous donnons satisfaction à la première partie de l'amendement no 223 de M. Tourret, et, dans un amendement ultérieur, nous donnerons satisfaction à sa seconde partie. Nous voulons, comme M. Tourret, une meilleure information des victimes, à tous les stades de la procédure, y compris au stade du jugement devant le tribunal correctionnel ou devant la cour d'assises. Je l'ai déjà dit dans mon propos introductif, il y a quantité de façon, aujourd'hui, d'être indemnisé, et trop de professionnels du droit s'y perdent.

Ces dispositions ont pour objet d'informer non seulement les victimes mais aussi les avocats.

M. le président.

L'amendement no 176 n'est pas défendu.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 223 et 146 ?

Mme la garde des sceaux.

Je les juge excellents. Mais, cette fois, je préfère la rédaction de la commission à celle de M. Tourret, et je demande à l'Assemblée d'adopter l'amendement no 146.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 223.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 146.

(L'amendement est adopté.)

Article 29

M. le président.

« Art. 29. - L'article 420-1 du même code est ainsi modifié :

« I. - Au premier alinéa :

« 1o Après les mots : "par lettre recommandée avec avis de réception", sont insérés les mots : "ou par télécopie" ;

« 2o Les mots : "dont le montant n'excède pas le plafond de la compétence de droit commun des tribunaux d'instance en matière civile" sont supprimés ;

« 3o Les mots : "elle joint à sa lettre toutes les pièces justificatives de son préjudice. Cette lettre et ces pièces sont jointes immédiatement au dossier" sont remplacés par les mots : "elle joint à sa demande toutes les pièces justificatives de son préjudice. Ces documents sont immédiatement joints au dossier".

« II. Le deuxième alinéa est remplacé par les deux alinéas suivants :

« Avec l'accord du procureur de la République, la demande de restitution ou de dommages intérêts peut également être formulée par la victime, au cours de l'enquête de police, auprès d'un officier ou d'un agent de police judiciaire, qui en dresse procès-verbal. Cette demande vaut constitution de partie civile si l'action publique est mise en mouvement.

« Dans les cas prévus aux deux alinéas précédents, la partie civile n'est pas tenue de comparaître. »

« III. Au dernier alinéa, les mots : "dans la lettre" sont remplacés par les mots : "dans la demande". »

Je mets aux voix l'article 29.

(L'article 29 est adopté.)

Article 30

M. le président.

« Art. 30. - Il est inséré, après le troisième alinéa de l'article 464 du même code, un alinéa ainsi rédigé :

« Après avoir statué sur l'action publique, le tribunal peut, d'office ou à la demande du procureur de la République ou des parties, renvoyer l'affaire à une date ultérieure pour statuer sur l'action civile, même s'il n'ordonne pas de mesure d'instruction, afin de permettre à la partie civile d'apporter les justificatifs de ses demandes.

Le tribunal doit alors fixer la date de l'audience à laquelle il sera statué sur l'action civile. »

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 147, présenté par Mme Lazerges, rapporteur, et M. Tourret, est ainsi rédigé :

« Après la première phrase du dernier alinéa de l'article 30, insérer la phrase suivante : "Ce renvoi est de droit lorsqu'il est demandé par les parties civiles". »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

L'amendement no 224, présenté par M. Tourret, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 30 par l'alinéa suivant : "Ce renvoi est de droit lorsqu'il est demandé par les parties civiles". »

La parole est à M. Alain Tourret, pour soutenir l'amendement no 147.

M. Alain Tourret.

Cet amendement prévoit la possibilité, pour la victime, d'obtenir de plein droit le renvoi de l'audience pour préparer sa défense.

M. Patrick Devedjian.

C'est l'égalité des armes !

M. Alain Tourret.

Exactement. Actuellement, ce renvoi est de plein droit pour la personne censée avoir commis l'infraction, mais pas pour la victime, qui peut le demander mais est soumise à l'autorisation de la juridiction.

M. Christophe Caresche.

Amendement pertinent !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Amendement très pertinent, en effet, et avis très favorable de la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Avis également très favorable, car cet amendement améliore considérablement le texte.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 147.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

En conséquence l'amendement no 224 tombe.

Je mets aux voix l'article 30, modifié par l'amendement no 147.

(L'article 30, ainsi modifié, est adopté.)

Article 31

M. le président.

« Art. 31. - Il est ajouté, après l'article 618 du même code, un article 618-1 ainsi rédigé :

« Art. 618-1 . - En cas de rejet du pourvoi formé par le condamné, les dispositions de l'article 475-1 sont applicables devant la Cour de cassation. »

Je mets aux voix l'article 31.

(L'article 31 est adopté.)

Après l'article 31

M. le président.

MM. Gerin, Braouezec, Brunhes, Carvalho et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 310, ainsi libellé :

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« Il est inséré, après l'article 15-1 du code de procédure pénale, un article 15-2 ainsi rédigé :

« Art. 15-2. - La police judiciaire est tenue de recevoir les plaintes déposées par les victimes d'infractions à la loi pénale et de les transmettre, le cas échéant, au service ou à l'unité de police judiciaire territorialement compétent. »

M. Alain Tourret.

L'amendement est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Très favorable, car cet amendement est très utile et je suis très contente que M. Gerin l'ait déposé. Il va éviter aux victimes de se heurter à des refus et de devoir multiplier les démarches.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 310.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur et Mme Bredin ont présenté un amendement, no 151, ainsi libellé.

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« La dernière phrase du premier alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : "L'avis de classement doit être motivé et notifié par écrit.". »

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Il s'agit de motiver et de notifier par écrit aux victimes l'avis de classement. C'est un point très important. Nous avons déjà retenu cette solution dans le cadre de la procédure concernant les infractions sexuelles commises sur mineurs et nous l'étendons là à tous les cas de classement.

Aujourd'hui, presque 80 % des affaires se terminent par un classement. Les pratiques sont variables d'un endroit à l'autre mais, souvent, les victimes ne sont pas informées. Elles voient dans ce silence de la justice une indifférence et elles sont meurtries parce qu'elles ont le sentiment que leur douleur n'est pas reconnue.

Il est extrêmement important qu'on leur explique pourquoi il y a eu classement. Cela peut être dû à la prescription, à l'absence de preuves suffisantes, au fait que l'auteur est inconnu, mais il est fondamental d'écouter les victimes et de les comprendre.

M. Patrick Devedjian.

L'auteur est inconnu dans 80 % des cas !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Favorable. Je précise cependant que cet article fait partie d'un autre volet de la réforme de la justice, c'est-à-dire du projet relatif à l'action publique. Je ne vois pas d'inconvénient à ce qu'on l'inclue dans le projet de loi qu'il concerne à titre principal bien que regrettant que cela retarde le moment où l'avis de classement devra être motivé pour les victimes d'infractions pénales.

M. Patrick Devedjian.

Inscrivons-le dans cette loi : c'est plus sûr ! On ne sait jamais...

M. Alain Tourret.

Si l'autre loi n'était pas adoptée...

M me Christine Lazerges, rapporteur.

Cet article concerne le droit des victimes, mais aussi le déclenchement des poursuites.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis évidemment favorable à la motivation des classements, mais je souhaite vraiment que l'on réserve cette question jusqu'au projet de loi relatif à l'action publique en matière pénale, qui va venir très bientôt en discussion devant l'Assemblée, parce


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

qu'il s'agit d'une question d'ensemble. Ce projet de loi prévoit la motivation des classements sans suite à auteur connu, avec un mécanisme de recours. Je préfère que nous définissions un mécanisme global.

M. le président.

La parole est à M. Arnaud Montebourg.

M. Arnaud Montebourg.

J'insisterai dans le même sens que Mme la garde des sceaux. Un texte extraordinairement cohérent nous attend dans deux mois et demi.

Il organise la reddition de comptes pour le parquet, qui est saisi sur plainte simple, et crée une juridiction des p oursuites, avec possibilité de recours devant une commission d'abord hiérarchique puis juridictionnelle, des délais étant prévus.

Je veux bien que nous votions, à l'occasion de tous les textes - cela a déjà été le cas pour le projet sur la rép ression des infractions sexuelles -, des dispositions relatives aux rapports du parquet avec l'extérieur, mais cela me paraît être un aimable désordre.

Pour des raisons de cohérence à la fois politique et intellectuelle, je crois sage de s'en remettre à l'analyse plus large que nous ferons ensemble dans quelques semaines sur le texte relatif à l'action publique en matière pénale.

M. Pierre Albertini.

Ce n'est pas sûr !

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Je suis bien entendu sensible à ce qu'a dit Mme la garde des sceaux mais je crois que cet amendement a toute sa place dans un texte qui traite du droit des victimes. Or nous sommes vraiment au coeur d'un droit fondamental pour les victimes : celles-ci ont elles, oui ou non, le droit d'être informées du classement sans suite de leur affaire ? Il est difficile de parler d'information des victimes et de ne pas leur donner une information, qui est fondamentale, sur le classement de leur affaire. Nous avons déjà adopté un autre amendement prévoyant d'informer les victimes de façon régulière au cours de l'instruction sur le déroulement de l'affaire. Nous sommes vraiment dans la même perspective d'information et d'écoute des victimes. C'est une chose à laquelle, je crois, les Français seront très sensibles. Nous voulons rendre une justice plus proche des citoyens et prenant mieux en compte le sort et la place des victimes.

Lors de l'examen du texte relatif aux infractions sexuelles commises sur des mineurs, j'avais déjà proposé la motivation et la notification par écrit de l'avis de classement. A l'époque, le Gouvernement n'avait également répondu qu'il fallait attendre l'examen d'un texte dans lequel s'insérerait cette disposition. Mais, aujourd'hui, je sais que, si les textes sont appliqués - ce que j'espère -, les victimes d'infractions sexuelles bénéficient déjà d'un avis de classement motivé. Nous avons par conséquent gagné du temps, et les victimes sont dès à présent mieux écoutées. Alors, gagnons une nouvelle fois un temps précieux.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 151.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Gouzes a présenté un amendement, no 250, ainsi rédigé :

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« Dans la dernière phrase du quatorzième alinéa (12o ) de l'article 138 du code de procédure pénale, les mots : "le juge d'instruction doit saisir le conseil de l'ordre qui statue" sont remplacés par les mots : ", seul le conseil de l'ordre, saisi par le juge d'instruction, peut prononcer cette mesure, sous le contrôle de la cour d'appel,". »

La parole est à M. Gérard Gouzes.

M. Gérard Gouzes.

Chacun sait que l'avocat représente la défense. A ce titre, il doit jouir de certaines protections, qui ont incontestablement été prises en compte par le législateur en 1993. Le 12o de l'article 138 du code de procédure pénale prévoit que, lorsqu'un juge d'instruction envisage, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, d'interdire à un avocat d'exercer son activité professionnelle, il doit saisir le conseil de l'ordre.

Mais il se trouve que certains magistrats - ce n'est pas la majorité, heureusement - estiment que le 12o de l'article 138 n'est pas suffisamment précis. Je propose par conséquent à l'Assemblée de bien préciser les choses.

Ainsi, la rédaction sera très claire et la loi de 1993 pourra s'appliquer. Un avocat devra passer devant le conseil de l'ordre avant de subir une formule de contrôle judiciaire qui l'empêcherait d'exercer sa profession.

M. Pierre Albertini.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement constitue une précision utile. Avis favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je crois que le droit positif actuel est clair. Un juge d'instruction a le droit de placer sous contrôle judiciaire un avocat mis en examen pour des faits commis dans l'exercice de ses fonctions en lui interdisant de continuer d'exercer son activité d'avocat. Il doit alors saisir le conseil de l'ordre, qui peut prendre les décisions qu'il estime nécessaires en matière disciplinaire.

La question est de savoir si cette règle est justifiée ou s'il faut donner au seul conseil de l'ordre la possibilité d'interdire à un avocat qui fait l'objet de poursuites judiciaires d'exercer son activité.

Je crois que le droit actuel est satisfaisant. Je ne vois pas pourquoi les avocats bénéficieraient, parmi toutes les professions réglementées, du privilège d'échapper dans ce domaine à la compétence de la juridiction d'instruction.

Je ne vois pas pourquoi on prévoirait un régime différent de celui des médecins, des notaires, des huissiers, des avoués ou des magistrats eux-mêmes, qui peuvent tous, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, être interdits de poursuivre leurs activités professionnelles. Je m'interroge d'ailleurs sur la constitutionnalité d'une telle différence.

Voilà pourquoi je ne peux pas être favorable à cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Le régime de l'avocat est particulier pour une raison très simple : il s'agit des droits de la défense, car l'avocat est confronté au juge d'instruction.

Et celui-ci peut le combattre en prononçant contre lui un empêchement temporaire d'exercice de la profession. Il n'est pas un arbitre impartial à son égard puisque c'est son contradicteur ; c'est la raison pour laquelle il faut s'en remettre à un tiers. Le texte ne le précise pas mais la décision du conseil de l'ordre est susceptible d'appel devant les magistrats de la cour d'appel.

M. Gérard Gouzes.

Tout à fait !

M. Patrick Devedjian.

En tout état de cause, je le répète, le contradicteur de l'avocat ne doit pas avoir le moyen d'empêcher l'exercice de la défense.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

M. Alain Tourret.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Gérard Gouzes.

M. Gérard Gouzes.

Les choses doivent être claires : en 1993, nous avons déjà eu ce débat, et l'Assemblée nationale s'est prononcée dans le sens que nous avons indiqué avec M. Devedjian.

Or, dans certains cas, des juges d'instruction n'ont pas respecté la loi et ont décidé d'eux-mêmes, sans consulter le conseil de l'ordre - je peux citer ces cas si vous le souhaitez -, de suspendre des avocats, dans des conditions à mon avis illégales.

Cela a donné lieu à toute une série d'interrogations, et certains ont dit que la loi n'était pas suffisamment précise. Mais nos débats font foi et le texte existe. L'amendement que je présente n'ajoute rien à ce que l'Assemblée nationale a voté en 1993, il se contente de préciser les choses, afin qu'il n'y ait aucune ambiguïté.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 250.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

MM. Gérin, Braouezec, Brunhes, Carvalho et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 315, ainsi libellé :

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« Il est inséré, après l'article 393 du code de procédure pénale, un article 393-1 ainsi rédigé :

« Art. 393-1 Dans les cas prévus à l'article 393, la victime doit être avisée par tout moyen de la date de l'audience. »

M. Alain Tourret.

L'amendement est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement. Il me paraît inutile car d'autres dispositions du code de procédure pénale prévoient une information des victimes quant à la date de l'audience.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis très favorable à cet amendement, car il est important pour le droit des victimes.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 315.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement no 153 est présenté par Mme Lazerges, rapporteur, et M. Tourret ; l'amendement no 226 par

M. Tourret.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« L'article 583 du code de procédure pénale est supprimé. »

Monsieur Tourret, vous soutenez ces deux amendements identiques ?

M. Alain Tourret.

Oui, car l'article 583 du code de procédure pénale est un mauvais article dont je propose la suppression.

L'obligation de se constituer prisonnier avant même que le pourvoi soit étudié par la chambre criminelle de la Cour de cassation est totalement moyenâgeuse et ne correspond plus à rien. Alors que l'affaire a été jugée plusieurs mois ou plusieurs années auparavant, il faut à nouv eau se constituer prisonnier. C'est vraiment une contrainte médiévale !

M. le président.

La commission a adopté l'amendement, madame le rapporteur ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

En effet, cet amendement a été adopté par la commission mais, à titre personnel, je suis assez réservée.

D'abord, cet article ne concerne pas les personnes condamnées à une peine privative de liberté supérieure à six mois. Ce seuil a été porté à un an par l'article 14 du projet relatif aux alternatives aux poursuites, et nous sommes là encore à la croisée de deux projets.

Les condamnés peuvent d'ores et déjà être dispensés de cette obligation en obtenant de la juridiction qui prononce la peine une dispense, avec ou sans caution, et 10% des condamnés obtiennent cette dispense. Enfin, beaucoup de condamnés qui font un pourvoi sont déjà incarcérés.

Cet amendement risque par conséquent de multiplier les pourvois abusifs et de surcharger la chambre criminelle, qui statuera peut-être dans des délais moins raisonnables qu'aujourd'hui.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis favorable aux amendements.

Au vu des divers cas et des différents chiffres, je pense que laisser les personnes concernées en liberté ne ferait pas peser une menace insupportable sur la sécurité.

M. Alain Tourret.

Très bien !

Mme la garde des sceaux.

J'indique cependant que la suppression de l'article 583 du code de procédure pénale ne remet nullement en cause la jurisprudence traditionnelle de la Cour de cassation, qui est fondée sur les principes généraux du droit et selon laquelle une personne en fuite lors de la procédure et faisant par exemple, l'objet d'un mandat d'arrêt, ne peut exercer les voies de recours.

M. le président.

La parole est à M. Gérard Gouzes.

M. Gérard Gouzes.

Je suis quant à moi un peu perplexe. A priori, on pourrait penser à une affaire célèbre : je crois savoir que, à l'occasion du procès Papon, il y a eu un cas de ce genre.

M. Tourret dit qu'il est inadmissible que le prévenu soit tenu de se constituer prisonnier pour faire examiner son pourvoi. Je lui rappellerai qu'il existe d'autres solutions : il est possible de demander une dérogation, qui est souvent accordée, notamment lorsque la personne concernée a un casier judiciaire vierge ou qu'elle a des problèmes de santé.

On peut aussi imaginer qu'un pourvoi soit formé mais que la personne choisisse de fuir. Que se passe-t-il donc ? Le pourvoi est rejeté sans être examiné.

C'est une manière de s'assurer de la présence de la personne que de lui demander de se présenter la veille de l'audience de la Cour de cassation.

Je pense qu'il faudrait travailler davantage sur le sujet a vant de supprimer d'un simple trait de plume l'article 583 du code de procédure pénale.

M. le président.

La parole est à Mme le rapporteur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Nous empiétons sur le projet de loi relatif aux alternatives aux poursuites, dont l'article 14 tend à remplacer, au premier alinéa de l'article 583 du code de procédure pénale, les mots « de plus de six mois » par les mots « de plus d'un an ».

Nous avons tout à l'heure fait le choix d'abandonner deux amendements importants dans la perspective de l'examen du texte sur l'action publique.

N'anticipons donc pas, en l'occurrence, sur un texte qui aurait dû être voté en première lecture mardi dernier mais qui, en raison de circonstances exceptionnelles, ne le sera que la semaine prochaine.

Evitons l'incohérence. Laissons au débat sur le texte relatif aux alternatives aux poursuites le soin de résoudre le problème, comme nous avons choisi, à regret pour ce qui concerne les victimes, d'abandonner une question à l'examen du texte relatif à l'action publique.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 153 et 226.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 309, ainsi libellé :

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« Il est inséré, après l'article 800-1 du code de procédure pénale, un article 800-2 ainsi rédigé :

« Art. 800-2. - A la demande de l'intéressé, toute juridiction prononçant un non-lieu, une relaxe ou un acquittement peut accorder à la personne poursuivie une indemnité qu'elle détermine au titre des frais non payés par l'Etat et exposés par celle-ci.

« Cette indemnité est à la charge de l'Etat. La juridiction peut toutefois ordonner qu'elle soit soumise à la charge de la partie civile, lorsque l'action publique a été mise en mouvement par cette dernière.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Cet amendement reprend une initiative de M. Tourret, dont j'avais dit qu'elle recevait le plein accord du Gouvernement mais qui avait été écartée par la commission des finances au titre de l'article 40 de la Constitution.

Il est équitable et juste de permettre l'indemnisation des frais irrépétibles des personnes relaxées ou acquittées.

Le présent amendement codifie cette disposition dans le code de procédure pénale. Il prévoit l'indemnisation en cas de non-lieu en utilisant la terminologie de « frais non payés par l'Etat et exposés par la personne », déjà employée dans les articles 375 et 475-1 du code de procédure pénale et préférable à celle de « frais irrépétibles ».

Il précise que l'indemnité doit être demandée par la personne. L'indemnité, qui est normalement à la charge de l'Etat, pourra toutefois être mise à la charge de la partie civile si celle-ci est à l'origine des poursuites. L'amendement renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser les conditions d'application de cet article.

Je remercie M. Tourret de nous avoir donné cette bonne idée.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Avis extrêmement favorable. Cet excellent amendement constituera une avancée considérable pour nombre de victimes.

M. Patrick Devedjian.

Que de fleurs pour M. Tourret !

M. le président.

La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Je tiens à remercier solennellement Mme la garde des sceaux pour avoir accepté de reprendre l'amendement : ce n'était pas évident car il fallait obtenir l'accord du ministère des finances.

Dans la vie de tous les jours et de toutes les juridictions, on parlera longtemps de cet amendement.

M. Gérard Gouzes.

Et de M. Tourret ! (Sourires.)

M. Patrick Devedjian.

On parlera de Portalis et de Tourret ! (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 309.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement no 148, ainsi rédigé :

« Après l'article 31, insérer les dispositions suivantes :

« C HAPITRE

III

« Dispositions relatives à l'indemnisation des victimes » La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Nous souhaitons que, dans le texte en discussion, dont l'une des deux parties porte sur le renforcement des droits des victimes, un chapitre soit consacré à l'indemnisation des victimes.

C'est un chapitre que nous ne remplirons que peu en p remière lecture, par respect pour le rapport que Mme Marie-Noëlle Lienemann doit remettre au Premier ministre dans quelques jours. Quand le rapport sera remis, nous introduirons, à l'occasion de la deuxième lecture - en tout cas, je l'espère - des réformes considérables concernant l'indemnisation des victimes d'infractions pénales.

M. Patrick Devedjian.

Nous construisons un temple à Mme Lienemann et nous attendons sa venue ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

C'est rigoureusement cela !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 148.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 149, ainsi libellé :

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« I. Il est inséré, après l'article 375-2 du code de procédure pénale, un article 375-3 ainsi rédigé :

« Art. 375-3. - Lorsque la cour condamne l'auteur d'une infraction mentionnée aux articles 706-3 et 706-14 à verser des dommagesintérêts à la partie civile, elle informe cette dernière de la possibilité de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

« II. L'article 464 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le tribunal condamne l'auteur d'une infraction mentionnée aux articles 703-3 et 706-14 à verser des dommages-intérêts à la partie civile, il informe cette dernière de la possibilité de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Depuis une petite demi-heure, nous portons notre attention sur l'information des victimes. Il s'agit ici de l'information des victimes au stade du jugement devant le tribunal correctionnel.

Nous proposons qu'une information soit donnée sur l'octroi possible de dommages et intérêts, ainsi que sur la saisine possible de la commission d'indemnisation des victimes d'infractions pénales.

Un autre amendement aura le même objet, s'agissant cette fois des cours d'assises.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 149.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 317, ainsi rédigé :

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« A la fin de la deuxième phrase de l'article 706-5 du même code, les mots : "après la décision de la juridiction qui a statué définitivement sur l'action publique ou sur l'action civile engagée devant la juridiction répressive", sont remplacés par les mots : "après l'avis donné par la juridiction en application des articles 375-2 et 464 du présent code". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement fixe le point de départ du délai d'un an dont dispose la victime pour saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions pénales, non plus au jugement, mais au moment où est donnée aux parties civiles par les juridictions l'information sur la possibilité de saisir ladite commission.

Les associations d'aides aux victimes pourraient nous dire que, souvent, les victimes apprennent subitement, et beaucoup plus d'un an après le jugement, l'existence même des CIVI.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 317.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 150, ainsi rédigé :

« Après l'article 31, insérer l'article suivant :

« I. - A la fin du premier alinéa de l'article 721-1 du même code, les mots : "ou en justifiant de progrès réels dans le cadre d'un enseignement ou d'une formation", sont remplacés par les mots : ", en justifiant de progrès réels dans le cadre d'un enseignement ou d'une formation ou en s'efforçant d'indemniser leurs victimes".

« II. - Le premier alinéa de l'article 729 du même code est complété par les mots : "notamment lorsqu'ils s'efforcent d'indemniser leurs victimes". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement s'inspire de l'excellente circulaire du mois de juillet dernier sur les victimes d'infractions pénales.

Les efforts faits par les personnes détenues pour indemniser leurs victimes doivent être pris en compte par le juge de l'application des peines pour l'octroi de réductions de peines, de libérations conditionnelles ou de permissions de sortir. Toutes les mesures d'individualisation de la compétence du juge de l'application des peines doivent être aussi fonction des efforts réalisés pour indemniser les victimes.

M. Patrick Devedjian.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 150.

(L'amendement est adopté.)

Avant l'article 32

M. le président.

Je donne lecture de l'intitulé du titre III :

«

TITRE

III

«

DISPOSITIONS DE COORDINATION » MM. Gerin, Braouzec, Brunhes, Carvalho et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement no 177, ainsi libellé :

« Avant l'article 32, insérer l'article suivant :

« L'article 622 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 5o Même en l'absence d'un fait nouveau, il apparaît que la demande en révision est ligitime. »

Cet amendement est-il défendu ?

M. Alain Tourret.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement a été rejeté par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Très défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 177.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 32

M. le président.

« Art. 32. - I. - L'article 104 du code de procédure pénale est abrogé.

« II. L'article 105 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

« 1o Il est inséré, au début du premier et du deuxième alinéas, après les mots : "Il en est de même", les mots : ", sous réserve des dispositions de l'article 113-1,".

« 2o Le troisième alinéa est abrogé.

« III. Au deuxième alinéa de l'article 152 du même code, les mots : "ou des personnes mentionnées au deuxième alinéa de l'article 105" sont supprimés, et les


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

mots : "ou de la personne bénéficiant des dispositions de l'article 104" sont remplacés par les mots : "ou du témoin assisté".

« IV. Au premier alinéa de l'article 183 du même code, les mots : "et de la personne bénéficiant des dispositions de l'article 104" sont remplacés par les mots : "et du témoin assisté". »

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 154, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le II de l'article 32 :

« II. Les deuxième et dernier alinéas de l'article 105 du code de procédure pénale sont supprimés ».

Pourriez-vous défendre en même temps l'amendement no 155, madame le rapporteur ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Volontiers, monsieur le président.

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 155, ainsi rédigé :

« Après le III de l'article 32, insérer le paragraphe suivant :

« III bis . - A la fin du dernier alinéa de l'article 175 du même code, les mots "à la personne bénéficiant des dispositions de l'article 104" sont remplacés par les mots "au témoin assisté". »

Vous avez la parole, madame le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

L'amendement no 154 tend à rédiger un peu différemment le II de l'article 32. Il est tout à fait inutile de laisser subsister le deuxième alinéa de l'article 105 du code de procédure pénale puisque ses dispositions relatives à l'audition des personnes nommément visées par un réquisitoire introductif sont reprises à l'article 113-1. Il s'agit en fait d'un amendement de précision.

Quant à l'amendement no 155, il est de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 154.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 155.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 32, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 32, ainsi modifié, est adopté.)

Article 33

M. le président.

« Art. 33. - I. - Au troisième alinéa de l'article 83 du code de procédure pénale, les mots : "Il a seul qualité pour statuer en matière de détention provisoire" sont remplacés par les mots : "Il a seul qualité pour saisir le juge de la détention provisoire, pour ordonner une mise en liberté d'office".

« II. L'article 116 du même code est ainsi modifié :

« 1o L'avant-dernier alinéa est complété par la phrase suivante : "Cette déclaration est faite devant le juge de la détention provisoire lorsque ce magistrat, saisi par le juge d'instruction, décide de ne pas placer la personne en détention." »

« 2o Le dernier alinéa est complété par la phrase suivante : "Ces avis sont donnés par le juge de la détention provisoire lorsque celui-ci décide de ne pas placer la personne en détention." »

« III. L'article 122 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Le juge d'instruction peut, selon les cas, décerner mandat de comparution, d'amener ou d'arrêt. Le juge de la détention provisoire peut décerner mandat de dépôt. »

« 2o La première phrase du quatrième alinéa est ainsi rédigée :

« Le mandat de dépôt est l'ordre donné par le juge de la détention provisoire au chef de l'établissement pénitentiaire de recevoir et de détenir la personne mise en examen à l'encontre de laquelle il a rendu une ordonnance aux fins de placement en détention provisoire. »

« IV. Le premier alinéa de l'article 135 du même code est abrogé.

« V. - Au premier alinéa de l'article 136 du même code, il est inséré, après les mots : "le juge d'instruction", les mots : "le juge de la détention provisoire".

« VI. Le second alinéa de l'article 137 du même code est abrogé.

« VII. Au premier alinéa de l'article 138 du même code, après les mots : "juge d'instruction", sont insérés les mots : "ou par le juge de la détention provisoire".

« VIII. Le premier alinéa de l'article 141-2 du même code est ainsi rédigé :

« Si la personne mise en examen se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire, le juge d'instruction peut décerner à son encontre mandat d'arrêt ou d'amener. Il peut également, dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article 137-1, saisir le juge de la détention provisoire aux fins de placement en détention provisoire. Quelle que soit la peine d'emprisonnement encourue, le juge de la détention provisoire peut décerner, à l'encontre de cette personne, un mandat de dépôt en vue de sa détention provisoire, sous réserve des dispositions de l'article 141-3. »

« IX. Au second alinéa de l'article 144-1 du même code, il est inséré après les mots : "le juge d'instruction", les mots : "ou, s'il est saisi, le juge de la détention provisoire".

« X. L'article 145 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, les mots : "de l'article 144" sont remplacés par les mots : "des articles 143-1, 143-2 et 144".

« 2o Au deuxième alinéa, les mots : "Le juge d'instruction qui envisage de placer en détention la personne mise en examen l'avise" sont remplacés par les mots : "Le juge d e la détention provisoire, saisi conformément à l'article 137-1, avise la personne".

« 3o Au quatrième alinéa, les mots : "le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "le juge de la détention provisoire". »

« 4o Au cinquième alinéa, les mots : "Toutefois, le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "Le juge de la détention provisoire". »

« XI. Aux premier et troisième alinéas de l'article 145-1 du même code, les mots : "le juge d'instruction", sont remplacés par les mots : "le juge de la détention provisoire".

« XII. Au premier alinéa de l'article 145-2 du même code, les mots : "le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "le juge de la détention provisoire".


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

« XIII. L'intitulé de la section XII du chapitre Ier du titre III du livre Ier du même code est complété par les mots "ou du juge de la détention provisoire".

« XIV. Aux premier et dernier alinéas de l'article 185 du même code, les mots : "du juge d'instruction" sont remplacés par les mots "du juge d'instruction ou du juge de la détention provisoire".

« XV. Aux troisième, cinquième et septième alinéas de l'article 187-1 du même code, les mots : "juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "juge de la détention provisoire".

« XVI. L'article 207 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, les mots : "une ordonnance du juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "une ordonnance du juge de la détention provisoire", les mots : "en application du deuxième alinéa de l'article 137" sontr emplacés par les mots : "en application de l'article 137-1", et les mots : "la décision du juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "la décision du juge de la détention provisoire".

« 2o Au troisième alinéa, les mots : "L'ordonnance du j uge d'instruction" sont remplacés par les mots : "L'ordonnance du juge d'instruction ou du juge de la détention provisoire".

« 3o Au dernier alinéa, les mots : "le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "le juge d'instruction ou le juge de la détention provisoire". »

Mme Lazerges, rapporteur, et M. Tourret ont présenté un amendement, no 156, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le troisième alinéa du III de l'article 33 :

« Le juge d'instruction peut, selon le cas, décerner mandat de comparution ou d'amener. Le juge de la détention provisoire et des libertés peut décerner mandat de dépôt ou mandat d'arrêt. »

La parole est à Mme le rapporteur.

M. Patrick Devedjian.

Je vois que Mme Lazerges a approfondi ses connaissances sur le mandat d'arrêt !

M me Christine Lazerges, rapporteur.

J'ai surtout constaté que, l'autre jour, vous vous étiez trompé, mon-s ieur Devedjian ! J'ai effectivement approfondi mes connaissances sur le mandat d'arrêt, mais j'avais raison et vous aviez tort.

M. Patrick Devedjian.

Vous m'expliquerez cela !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Le mandat d'arrêt vaut mandat de dépôt. C'est au juge de la détention provisoire et des libertés de le décerner. Vous souteniez quant à vous que le mandat d'amener valait lui aussi mandat de dépôt.

M. Patrick Devedjian.

Je n'ai pas dit cela !

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Le mandat d'amener permet la rétention pendant vingt-quatre heures, en attendant un mandat de dépôt qui doit suivre si l'on veut vraiment que la personne soit placée en détention provisoire.

L'article 133 du code de procédure pénale précise que la personne incarcérée en vertu d'un mandat d'arrêt doit être interrogée dans les vingt-quatre heures suivant son incarcération. Si l'on veut la maintenir en détention provisoire, il faut saisir le juge de la détention et obtenir un mandat de dépôt.

Le mandat d'arrêt permet seulement au juge d'instruction de retenir pendant vingt-quatre heures une personne en fuite ou résidant hors du territoire de la République.

Il convient donc de conserver au juge d'instruction cette compétence, indispensable pour qu'il puisse correctement conduire son instruction.

M. Patrick Devedjian.

Vous avez modifé votre amendement !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Si Mme Lazerges estimait qu'on ne retire plus au juge d'instruction la possibilité de décerner des mandats d'arrêt, je suis d'accord.

M. le président.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

L'amendement no 156, adopté par la commission, n'est pas utile, et j'y suis personnellement défavorable.

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Je suis également défavorable à l'amendement, no 156, qui résulte d'un malentendu puisqu'il retire au juge d'instruction la possibilité de décerner des mandats d'arrêt pour la confier au juge de la détention au motif que le mandat d'arrêt vaut mandat de dépôt. Or cela ne reflète pas la réalité.

Depuis la réforme de la détention préventive de 1970, une personne arrêtée en vertu d'un mandat d'arrêt peut tout à fait être détenue dans une maison d'arrêt, mais elle ne peut l'être plus de vingt-quatre heures en application de l'article 133 du code de procédure pénale. Dans ce très court délai, moins long qu'une garde à vue qui peut durer deux ou quatre jours, il doit avoir été statué sur son placement en détention provisoire.

Actuellement, c'est le juge d'instruction qui statue.

Avec la réforme, ce sera le juge de la détention. Si ce magistrat décide de placer la personne en détention, il doit délivrer un mandat de dépôt.

Le mandat d'arrêt ne remplace donc pas le mandat de dépôt et il n'induit nullement le placement en détention provisoire. Cela s'explique : le mandat d'arrêt est un acte d'enquête qui permet de rechercher les personnes soupçonnées qui sont en fuite. Seul le juge d'instruction peut décider d'en délivrer un, en tant qu'acte d'instruction dans son enquête.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 156.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 157, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le V de l'article 33 :

« V. Dans le premier alinéa de l'article 136 du même code, les mots : "ou à prise à partie contre le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "contre le juge d'instruction, le juge de la détention provisoire". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement tend à supprimer la référence à la procédure de prise à partie, qui n'existe plus pour les magistrats professionnels.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 157.

(L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

M. le président.

MM. Gerin, Braouezec, Brunhes, Carvalho et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 178, ainsi rédigé :

« Au début du VI de l'article 33, insérer l'alinéa suivant :

« Dans le premier alinéa de l'article 137 du même code, après les mots : "La personne mise en examen", sont insérés les mots : "présumée innocente". »

Cet amendement est-il défendu ?

M. Alain Tourret.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 178.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

L'amendement no 158 n'a plus d'objet.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 159, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa (1o ) du X de l'article 33, supprimer la référence : ", 143-2". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement tend à corriger une erreur matérielle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 159.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 160, ainsi rédigé :

« Supprimer le XI de l'article 33. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Amendement de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 160.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 161, ainsi rédigé :

« Après le XII de l'article 33, insérer le paragraphe suivant :

« XII bis. Dans la première phrase du troisième alinéa de l'article 179 du code de procédure pénale, les mots : "d'instruction peut" sont remplacés par les mots : "de la détention provisoire ou le juge d'instruction peuvent". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Encore un amendement de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable, ce qui est rare s'agissant d'un amendement de coordination. Cela veut dire que je suis défavorable à ce qui est « coordonné ».

Cet amendement me semble résulter d'un nouveau malentendu. C'est en effet tout à fait volontairement que le projet laisse au juge d'instruction le soin de maintenir en détention une personne qu'il décide de renvoyer devant le tribunal correctionnel et qu'il ne confie pas cette prérogative au juge de la détention, contrairement à ce que prévoit l'amendement.

M. Patrick Devedjian.

Quel aveu ! Cela prouve bien le caractère fallacieux de la réforme !

Mme la garde des sceaux.

Mais non ! M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 161.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 162, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa (1o ) du XVI de l'article 33, substituer à la référence : "article 137-1" la référence : "article 137-5". »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Correction d'une erreur matérielle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 162.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 33, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 33, ainsi modifié, est adopté.)

Article 34

M. le président.

« Art. 34. - Au premier alinéa de l'article 145 du même code, les mots : "de l'article 144" sont remplacés par les mots : "des articles 143-1, 143-2 et 144". »

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 163, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 34. »

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement tend également à corriger une erreur matérielle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 163.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 34 est supprimé.

Articles 35, 36, 37, 38 et 39

M. le président.

« Art. 35. - I. - A l'article 420-2 du même code, les mots : "présentée par lettre" sont remplacés par les mots : "présentée conformément aux dispositions de l'article 420-1".


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

« II. Au premier alinéa de l'article 460-1 du même code, les mots : "s'est constituée partie civile par lettre, le président donne lecture de cette lettre" sont remplacés par les mots : "s'est constituée partie civile selon les modalités prévues à l'article 420-1, le président donne lecture de sa demande". »

Je mets aux voix l'article 35.

(L'article 35 est adopté.)

« Art. 36. - Il est inséré, après la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article 154 du même code, la phrase suivante : "L'information prévue au troisième alinéa de l'article 63-4 précise que la garde à vue intervient dans le cadre d'une commission rogatoire". » -

(Adopté.)

« Art. 37. - Le premier alinéa de l'article 82 du même code est complété par la phrase suivante : "Il peut également demander à assister à l'accomplissement des actes qu'il requiert" ». - (Adopté.)

« Art. 38. - I. - Au paragraphe IV de l'article 4 de l'ordonnance no 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, les mots : "de seize ans" sont supprimés.

« II. Au premier alinéa de l'article 11 de la même ordonnance, les mots : "soit par le juge d'instruction, soit par le juge des enfants" sont remplacés par les mots : "par le juge de la détention provisoire saisi soit par le juge d'instruction, soit par le juge des enfants". » -

(Adopté.)

« Art. 39. - Les sections 1 et 2 du chapitre II du titre Ier de la présente loi entreront en vigueur le premier jour du quatrième mois suivant sa publication au Journal officiel de la République française. » -

(Adopté.)

Article 40

M. le président.

« Art. 40. - La présente loi est applicable dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte. »

Mme Lazerges, rapporteur, a présenté un amendement, no 164, ainsi rédigé :

« Dans l'article 40, après les mots : "territoires d'outre-mer", insérer les mots : ", en NouvelleCalédonie." » La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Cet amendement, de précision, tient compte du nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 164.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 40, modifié par l'amendement no 164.

(L'article 40, ainsi modifié, est adopté.)

Titre

M. le président.

Je donne lecture du titre du projet de loi :

« Projet de loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes. »

M. Albertini a présenté un amendement, no 45, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le titre du projet de loi :

« Projet de loi portant réforme de la procédure pénale et renforçant les droits des victimes. »

La parole est à M. Pierre Albertini.

M. Pierre Albertini.

L'amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

45. (L'amendement n'est pas adopté.)

Seconde délibération

M. le président.

En l'application de l'article 101 du règlement, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des articles 15, 25 et 26 du projet de loi.

La seconde délibération est de droit.

La commission interviendra dans les conditions prévues à l'alinéa 3 de l'article 101 du règlement.

Je rappelle que le rejet des amendements vaut confirmation de la décision prise en première délibération.

Article 15

M. le président.

L'Assemblée a adopté, en première délibération, l'article 15 suivant :

« Art. 15. L'article 144 du même code est remplacé par deux articles 143-1 et 144 ainsi rédigés :

« Art. 143-1 Sous réserve des dispositions de l'article 137, la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que dans l'un des cas ci-après énumérés :

« 1o La personne mise en examen encourt une peine criminelle ;

« 2o La personne mise en examen encourt une peine correctionnelle d'une durée égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement, compte tenu, le cas échéant, de l'aggravation de la peine encourue si elle est en état de récidive ;

« 3o La personne mise en examen encourt une peine correctionnelle de deux ans d'emprisonnement pour un délit prévu aux livres II ou IV du code pénal ;

« 4o La personne mise en examen encourt une peine correctionnelle de deux ans d'emprisonnement pour un délit prévu au livre III du code pénal et a déjà été condamnée, soit à une peine criminelle, soit à une peine d'emprisonnement sans sursis d'une durée supérieure à un an ;

« La détention provisoire peut également être ordonnée dans les conditions prévues à l'article 141-2 lorsque la personne mise en examen se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire.

« Art.

144 La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que si elle constitue l'unique moyen :

« 1o De conserver les preuves ou les indices matériels ou d'empêcher soit une pression sur les témoins ou les victimes, soit une concertation frauduleuse entre personnes mises en examen et complices ;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

« 2o De protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement. »

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 1, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 144 du code de procédure pénale par l'alinéa suivant :

« 3o De mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé. Toutefois, ce motif ne peut, à lui seul, justifier la prolongation de la détention provisoire sauf en matière criminelle. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Il s'agit de rétablir la possibilité pour un juge d'utiliser la notion de trouble à l'ordre public pour placer une personne mise en examen en détention provisoire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Avis favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 15, modifié par l'amendement no

1. (L'article 15, ainsi modifié, est adopté.)

Article 25

M. le président.

L'Assemblée a adopté, en première délibération, l'article 25 suivant :

« Art. 25. -

I. - L'article 11 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, le procureur de la République peut, d'office ou à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, rendre publics des éléments relatifs à la procédure ne comportant aucune mention nominative, sauf accord de l'intéressé, ni aucune appréciation sur le bienfondé des charges retenues contre les personnes mises en cause. »

« II. - Le quatrième alinéa de l'article 145 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Si la personne majeure mise en examen ou son avocat en font la demande dès l'ouverture de l'audience, le débat contradictoire a lieu en audience publique, sauf si la publicité est de nature à nuire à l'ordre public, à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Le juge de la détention provisoire statue par ordonnance motivée sur cette demande de publicité après avoir recueilli les observations du ministère public, de la personne mise en examen et de son avocat. »

« III. - L'article 177-1 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, après les mots : "sur la demande de la personne concernée", il est inséré les mots : "ou, avec l'accord de cette personne, d'office ou à la demande du ministère public" ;

« 2o Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Si le juge ne fait pas droit à la demande de la personne concernée, il doit rendre une ordonnance motivée, qui est susceptible d'appel devant la chambre d'accusation. »

« IV. L'article 199 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : "Toutefois, si la personne majeure mise en examen ou son avocat le demande dès l'ouverture des débats, ceux-ci se déroulent et l'arrêt est rendu en séance publique, sauf si la publicité est de nature à nuire à l'ordre public, à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. La chambre d'accusation statue sur cette demande, après avoir recueilli les observations du procureur général et, le cas échéant, des avocats des autres parties, par un arrêt rendu en chambre du conseil qui n'est susceptible de pourvoi en cassation qu'en même temps que l'arrêt portant sur la demande principale." ;

« 2o La dernière phrase du cinquième alinéa est supprimée.

« V. Supprimé.

« VI. L'article 212-1 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, après les mots : "sur la demande de la personne concernée", il est inséré les mots : " ou, avec l'accord de cette personne, d'office ou à la demande du ministère public," ;

« 2o L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si la chambre d'accusation ne fait pas droit à la demande de la personne concernée, elle doit rendre une décision motivée. »

« VII. Supprimé. »

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 2, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du I de l'article 25, substituer aux mots : "relatifs à la procédure ne comportant aucune mention nominative, sauf accord de l'intéressé ni", les mots : "objectifs tirés de la procédure ne comportant". »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Il s'agit de rétablir les communiqués du parquet, tels que les proposait le projet, avec l'amendement no 132 de la commission, accepté par le Gouvernement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

La commission s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 25, modifié par l'amendement no

2. (L'amendement 25, ainsi modifié, est adopté.)

Article 26

M. le président.

L'Assemblée a adopté, en première délibération, l'article 26 suivant :

« Art. 26. I. Le premier alinéa de l'article 9 du code civil est complété par les mots : "et à la protection de sa dignité".

« II. Dans le dernier alinéa du même article, après les mots : "vie privée", sont insérés les mots : "ou à la dignité de la personne" ».


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 3, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 26 :

« I. Il est inséré, après l'article 226-30-1 du code pénal, une section VIII ainsi rédigée :

« Section

VIII

« De l'atteinte à la dignité de la victime d'un crime ou d'un délit

« Art.

226-30-2 Le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, la reproduction des circonstances d'un crime ou d'un délit lorsque cette reproduction porte atteinte à la dignité d'une victime, est puni de 100 000 F d'amende.

« Lorsque le délit prévu au présent article est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la prescription et la détermination des personnes responsables. »

« Art.

226-30-3. Le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, des renseignements concernant l'identité d'une victime d'une agression ou d'une atteinte sexuelles ou l'image de cette victime lorsqu'elle est identifiable est puni de 100 000 F d'amende.

« Lorsque le délit prévu au présent article est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la prescription et la détermination des personnes responsables.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque la victime a donné son accord écrit. »

« II. Les troisième et quatrième alinéas de l'article 38 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse sont abrogés.

« III. L'article 39 quinquies de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est abrogé. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Il s'agit de rétablir le texte du Gouvernement et de la commission sur l'incrimination des images portant atteinte à la dignité des victimes.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Christine Lazerges, rapporteur.

Avis favorable.

M. le président.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Je suis opposé à cet amendement. M. Albertini a expliqué que la victime avait une protection civile et l'Assemblée avait adopté cette disposition. Or vous persistez à vouloir incriminer pénalement, et ce en l'absence éventuelle de plainte de la victime, des faits qui peuvent être protégés par le code civil.

Au sujet de cette infraction que vous aggravez - vous multipliez par quatre la pénalité de l'article 38 de la loi de 1881 - je reprendrai mes propos de tout à l'heure, que vous avez qualifiés de « considérations planétaires » : le monde entier publie des photos de victimes et d'événements considérables. Sera-ce interdit aux médias français ? Pourra-t-on continuer à voir l'assassinat de John Kennedy ? Et l'assassinat de Bob Kennedy ? Pourra-t-on continuer à montrer aux révisionnistes et aux négationnistes les empilements de cadavres d'Auschwitz sortis des chambres à gaz pour les convaincre que cela a bel et bien existé ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.).

Pourrai-je moi-même montrer à M. Védrine, qui est très intéressé par la vente des hélicoptères, les aligne ments de cadavres du génocide arménien pour lui prouver que cela a bien existé ?

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 26 est ainsi rédigé.

M. le président.

Nous en avons terminé avec la seconde délibération.

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé, en application de l'article 65-1 du règlement, que les explications de vote et le vote par srcutin public sur l'ensemble du projet auraient lieu de mardi 30 mars, après les questions au Gouvernement.

2 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI M. le président J'ai reçu, le 25 mars 1999, de M. Paul Quilès et plusieurs de ses collègues une proposition de loi tendant à la création d'une délégation parlementaire pour les affaires de renseignement.

Cette proposition de loi, no 1497, est renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées, en application de l'article 83 du règlement.

3 DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION M. le président J'ai reçu, le 25 mars 1999, de M. Alain Barrau un rapport d'information, no 1498, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur des propositions d'actes communautaires soumises par le Gouvernement à l'Assemblée nationale du 14 janvier 1999 au 16 mars 1999 (nos E 1207, E 1210 à E 1212, E 1214, E 1216 à E 1218, E 1221 à E 1223, E 1226 et E 1228) et sur les propositions d'actes communautaires nos E 1016, E 1102 et E 1197.

4 DÉPÔT D'UN RAPPORT DE L'OFFICE D'ÉVALUATION DES CHOIX

SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES

M. le président.

J'ai reçu, le 25 mars 1999, de M. JeanYves Le Déaut, vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, un rapport, no 1496, établi au nom de cet office, sur le


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 25 MARS 1999

contrôle de la sûreté et de la sécurité des installations nucléaires (Deuxième partie : Le bilan et les perspectives de la politique de sûreté des installations nucléaires).

5

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Aujourd'hui, à onze heures, séance publique : Déclaration du Gouvernement sur la situation au Kosovo et débat sur cette déclaration.

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 26 mars 1999 à une heure quarante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

CONVOCATION DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 30 mars 1999, à 10 heures, au 4e bureau.

ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE COMMISSION SUPÉRIEURE DES SITES,

PERSPECTIVES ET PAYSAGES (1 poste à pourvoir) La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a désigné M. Jean Rouger comme candidat.

La candidature est affichée et la nomination prend effet dès la présente publication.

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION Transmissions

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale les textes suivants : Communication du 24 mars 1999 No E 1233. - Proposition de règlement (CE) du Conseil relatif à la coopération au développement avec l'Afrique du Sud.

No E 1234. - Proposition de règlement (CE) du Conseil modifiant le règlement (CEE, EURATOM, CECA) no 259/68 fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (statut des interprètes freelance) (COM [99] 102 final).

No E 1235. - Proposition de règlement (CE) du Conseil relatif à l'application des mesures spécifiques à l'importation de jus et moûts de raisins originaires de Chypre (COM [99] 85 final).