page 05518page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

ARTHUR PAECHT

1. D éclaration de l'urgence d'une proposition de loi (p. 5521).

2. Pacte civil de solidarité. - Suite de la discussion, en nouvelle lecture, d'une proposition de loi (p. 5521).

QUESTION PRÉALABLE (p. 5521)

Question préalable de M. Jean-Louis Debré : MM. Patrick Delnatte, Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois ; Bernard Accoyer, Mme Christine Boutin,

M M. Jean-Pierre Blazy, Bernard Birsinger, Claude Goasguen. - Rejet.

Rappel au règlement (p. 5527)

MM. Jean-Claude Lenoir, le président, Mme Christine Boutin.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 5528)

Mme Monique Collange,

MM. Claude Goasguen, Yves Cochet, Henri Plagnol, Bernard Birsinger, Patrick Devedjian, Mme Véronique Neiertz,

M.

Jean-Pierre Blazy, Mmes Christine Boutin, Yvette Benayoun-Nakache.

Clôture de la discussion générale.

MOTION DE

RENVOI EN

COMMISSION (p. 5541)

Motion de renvoi en commission de M. José Rossi :

M. François Goulard.

PRÉSIDENCE

DE

M.

YVES

COCHET MM. François Goulard, le rapporteur, Mme Dominique Gillot, MM. Bernard Accoyer, Pierre-Christophe Baguet, Jean-Claude Lenoir. - Rejet de la motion de renvoi en commission.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 5550)

Articles 1er A, 1er B et 1er C (p. 5550)

Le Sénat a supprimé ces articles.

Avant l'article 1er (p. 5550)

Amendement no 118 de M. de Courson : MM. PierreC hristophe Baguet, le rapporteur, Mme Elisabeth G uigou, garde des sceaux, ministre de la justice ;

M. Thierry Mariani. - Rejet.

Amendement no 119 de M. de Courson : MM. Charles de Courson, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 117 de M. de Courson : MM. Charles de Courson, le rapporteur, Mme la garde des sceaux,

M. Bernard Accoyer. - Rejet.

Amendement no 116 de M. de Courson : MM. Charles de Courson, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 120 de M. de Courson, avec le sousamendement no 323 de M. Mariani : MM. Charles de Courson, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. Thierry Mariani. - Rejet du sous-amendement no 323 et de l'amendement no 120.

Article 1er (p. 5554)

M. Thierry Mariani, Mme Christine Boutin, MM. Bernard Accoyer, Claude Goasguen.

Amendements de suppression nos 6 de M. Goasguen, 41 de M. Mariani, 82 de M. Plagnol et 180 de M. Accoyer :

M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 237 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 42 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 80 de M. Plagnol : Mme Christine Boutin,

M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 115 de M. de Courson : MM. Charles de Courson, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendements nos 178 de M. Accoyer et 7 de M. Goasguen : MM. Bernard Accoyer, Claude Goasguen, le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Rejets.

A mendement no 177 de M. Accoyer : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 239 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 238 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

ARTICLE 515-1 DU

CODE

CIVIL (p. 5561)

Amendements identiques nos 8 de M. Goasguen, 83 de M. Plagnol et 179 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

A mendement no 9 de M. Goasguen : MM. Claude Goasguen, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 54 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. Charles de Courson. - Rejet.

Amendements nos 176 de M. Accoyer, 181 de M. Delnatte et 46 de M. Mariani : MM. Bernard Accoyer, Thierry

M ariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux,

M. Claude Goasguen. - Rejets.

Amendement no 48 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. Claude Goasguen. - Rejet.

Amendement no 51 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 55 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. Claude Goasguen. - Rejet.

Amendements identiques nos 11 de M. Goasguen et 241 de Mme Boutin, amendement no 47 de M. Mariani et amendements identiques nos 49 de M. Mariani, 175 de


page précédente page 05519page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Accoyer et 240 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, MM. Thierry Mariani, Bernard Accoyer, PierreChristophe Baguet, Mmes Catherine Tasca, présidente de la commission des lois ; la garde des sceaux, M. Claude Goasguen. - Rejet des amendements nos 11 et 241.

MM. Thierry Mariani, le président. - Rejet des amendements no 47, 49, 175 et 240.

Amendement no 52 de M. Mariani : M. Thierry Mariani.

Amendement no 53 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet des amendements nos 52 et 53.

Amendement no 242 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 10 de M. Goasguen : MM. Pierre-Christophe Baguet, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 50 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 12 de M. Goasguen : MM. Claude Goasguen, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 173 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mmes la garde des sceaux, Christine Boutin. - Rejet.

Amendement no 174 de M. Accoyer : MM. Bernard A ccoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux,

M. Claude Goasguen. - Rejet.

Amendement no 56 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 243 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 244 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 245 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

M. Bernard Accoyer.

Suspension et reprise de la séance (p. 5573)

ARTICLE 515-2 DU

CODE

CIVIL (p. 5573)

Amendement no 57 de M. Mariani et amendements identiques nos 13 de M. Goasguen et 84 de M. Plagnol : MM. Thierry Mariani, Claude Goasguen, Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejets.

Amendement no 247 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux,

M. Claude Goasguen. - Rejet.

Amendement no 58 de M. Mariani et amendements identiques nos 14 de M. Goasguen et 246 de Mme Boutin : MM. Thierry Mariani, Claude Goasguen, Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejets.

Amendement no 59 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mmes la garde des sceaux, Christine Boutin. - Rejet.

Amendement no 60 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 172 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 183 de M. Delnatte, 62, 63, 61 de M. Mariani et 171 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. Claude Goasguen. - Rejets.

Amendement no 64 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 65 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 170 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 248 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 169 de M. Accoyer : M. Bernard Accoyer.

Amendement no 182 de M. Delnatte : MM. Bernard A ccoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. Thierry Mariani. - Rejet des amendements nos 169 et 182.

Amendement no 249 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 250 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

ARTICLE 515-3 DU

CODE

CIVIL (p. 5582)

Amendements identiques nos 15 de M. Goasguen, 66 de M. Mariani, 85 de M. Plagnol et 168 de M. Accoyer : MM. Claude Goasguen, Thierry Mariani, Mme Christine Boutin, MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

A mendements nos 16 de M. Goasguen et 251 de Mme Boutin : M. Thierry Mariani, Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejets.

Amendements nos 1 de M. Birsinger et 69 de M. Mariani : MM. Bernard Birsinger, Thierry Mariani, le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Rejets.

Amendement no 167 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 73 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 76 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 166 de M. Accoyer : MM. Bernard A ccoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux,

M. Thierry Mariani. - Rejet.

Amendement no 17 de M. Goasguen : MM. Claude Goasguen, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 253 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin. - Retrait.

Amendement no 68 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 254 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 252 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

A mendement no 321 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

A mendement no 322 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 77, 78 de M. Mariani et 162 de M. Accoyer : MM. Thierry Mariani, Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejets.

Amendements nos 72 et 193 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejets.


page précédente page 05520page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Amendement no 75 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 70 et 71 de M. Mariani et 255 de Mme Boutin : M. Thierry Mariani, Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejets.

Amendement no 256 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 257 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

A mendement no 194 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 165 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 185 de M. Delnatte : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements identiques nos 67 de M. Mariani et 160 de M. Accoyer : MM. Thierry Mariani, Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 74 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 159 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 184 de M. Delnatte : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 258 et 279 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejets.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

3. P ublication du rapport d'une commission d'enquête (p. 5593).

4. Dépôt d'une proposition de résolution (p. 5593).

5. Dépôt d'un rapport (p. 5593).

6. Dépôt d'un rapport d'information (p. 5593).

7. Ordre du jour des prochaines séances (p. 5593).


page précédente page 05521page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. ARTHUR PAECHT,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures quarantecinq.) 1 DÉCLARATION DE L'URGENCE D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président.

J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant que le Gouvernement déclare l'urgence de la proposition de loi portant diverses mesures relatives à l'organisation d'activités physiques et sportives (no 1612).

Acte est donné de cette communication.

2 PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ Suite de la discussion, en nouvelle lecture, d'une proposition de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en nouvelle lecture, de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (nos 1587, 1639).

Question préalable

M. le président.

J'ai reçu de M. Jean-Louis Debré et des membres du groupe du Rassemblement pour la République une question préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à M. Patrick Delnatte.

M. Patrick Delnatte.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, après quatre-vingtcinq heures de débat, notre assemblée examine en nouvelle lecture la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité.

On pourrait croire que tout a été dit. Pourtant, les péripéties qui ont marqué le cheminement de ce texte, les transformations qu'il a subies au cours des discussions tant dans notre assemblée qu'au Sénat, les mécontentements et les interpellations des différentes composantes de la société qui se sentent exclues du débat, les questions fondamentales restées sans réponse sont autant d'éléments qui nous obligent à prendre du recul, voire de la hauteur.

M. Jean-Pierre Blazy.

Ça va être difficile !

M. Patrick Delnatte.

Comment pourrait-il en être autrement ? Ce texte du PACS n'a rien de banal, il touche à l'essence même de la nature humaine, aux fondements de notre société : c'est la vie des personnes unies en couple qui est concernée, c'est la place du couple par rapport à la famille dans la société qui est en jeu, c'est l'assimilation d'une tendance sexuelle à un modèle social qui est créée.

Croyez-vous, chers collègues, que tout cela, ramené à l'expression réductrice d'un problème de société, puisse trouver son expression et sa solution dans la seule limite du débat parlementaire ? On peut comprendre l'impatience d'une majorité parlementaire, par essence temporaire dans une démocratie, pressée d'afficher l'euphorie de sa victoire en imposant ses idées et ses promesses électorales à toute la société, quell es qu'en soient les conséquences pour l'avenir de cette société.

M. Daniel Marcovitch.

Elle aura su tenir ses promesses !

M. Patrick Delnatte.

On peut comprendre la lassitude d'élus soumis aux contraintes de l'obéissance aux règles majoritaires, qui souhaitent rapidement tourner la page du PACS pour se retrouver mieux en phase avec leurs électeurs.

Le Gouvernement et la majorité composite de cette assemblée ont choisi la seule voie parlementaire pour, audelà de la simple définition de droits et obligations organisant une vie en commun, toucher aux fondements de notre société. Pour nous, élus de l'opposition, il s'agit là d'une erreur, je dirai même une faute.

En raison de la méthode que vous avez choisie, nous n'avons nous, l'opposition, comme seule possibilité que d'utiliser tous les droits que nous accorde la procédure parlementaire pour exprimer notre détermination à nous opposer pied à pied à vos erreurs et traduire ici même les inquiétudes des Français en quête de repères leur permettant de mieux vivre et d'assurer leur avenir.

Mme Christine Boutin.

Très bien !

M. Patrick Delnatte.

Dans une démocratie participative comme la nôtre, il eût été bien préférable d'adopter la méthode utilisée en 1987 par le gouvernement de Jacques Chirac sur un sujet tout aussi fondamental pour notre société : la nationalité. Comment être français aujourd'hui et demain ? La commission Marceau Long a permis, par des auditions publiques, l'expression de toutes les composantes de la société française, qu'elles soient intellectuelles, philosophiques, sociales, religieuses, culturelles, associatives...

Cette commission a pu dégager les points de convergence et de désaccord, exprimer des propositions en toute indépendance.


page précédente page 05522page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Alors seulement les élus peuvent légiférer, sous leur propre responsabilité, si possible dans le consensus et en évitant les polémiques inutiles, les simplifications outrancières et les amalgames absurdes. L'opinion, quant à elle, a tous les éléments pour comprendre et juger.

Cette méthode ne correspondait peut-être pas, madame la garde des sceaux, mesdames, messieurs les députés de la majorité, à votre urgence, mais l'urgence du parti socialiste n'est pas l'urgence de la France.

(Exclamations sur divers bancs.)

Loin de moi l'idée qu'il n'y a pas de problèmes à régler, y compris de façon urgente, pour la protection des personnes qui vivent en couple, pour répondre à la souffrance des personnes qui vivent une sexualité différente ou pour répondre à la discrimination à leur encontre autrement que dans l'altérité.

M. Bernard Grasset.

Que c'est bien dit !

M. Patrick Delnatte.

Mais vous n'avez pas voulu saisir la perche que vous ont tendue le Sénat et l'opposition parlementaire par une législation appropriée sur le concubinage et l'utilisation normale des lois fiscales et sociales.

Non, coûte que coûte, vous voulez imposer un nouveau modèle social, le PACS. Il faut reconnaître qu'en l'état actuel du débat parlementaire, ce PACS pose au moins encore quatre questions qui ne peuvent trouver ici toutes les réponses.

Première question : peut-on légiférer sur le statut des personnes non mariées vivant en couple sans toucher à la législation sur le mariage et au droit de la famille ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Votre réponse est claire, madame la garde des sceaux :

« le PACS concerne le couple, il ne concerne pas la famille ».

Plusieurs députés du groupe socialiste.

C'est vrai !

M. Patrick Delnatte.

Non seulement cette affirmation est fausse dans les faits, mais elle est encore dangereuse, car elle conduit à dévaloriser la famille.

(Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Mme Monique Collange.

Contresens !

M. Patrick Delnatte.

Ne serait-ce que par ricochet, la famille est bien concernée par l'instauration du PACS.

M. Gilbert Meyer.

Vous avez raison !

M. Patrick Delnatte.

Ne prenons qu'un exemple, celui des successions. Le partenaire pacsé profitera dorénavant d'un abattement fiscal supérieur à celui des enfants légitimes de même que le bénéficiaire du capital décès, en l'absence de conjoint issu d'un mariage, sera le partenaire pacsé et non les enfants légitimes.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

C'est scandaleux !

M. Daniel Marcovitch.

Il n'y a que l'argent qui vous intéresse !

M. Patrick Delnatte.

Mais plus grave que cette négation des faits, les propos de la garde des sceaux avalisent l'idée que le couple et la famille sont deux notions totalement étrangères l'une à l'autre.

M. Daniel Marcovitch.

Non, légèrement différentes !

M. Patrick Delnatte.

Le reconnaître, c'est nier que la famille et les enfants sont la justification même du couple.

(Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) L'enfant n'est pas l'accessoire du couple, il en est le but.

Je sais bien que les faits peuvent ne pas correspondre à cette affirmation, mais quel est le rôle de la loi ? A cette question, les réponses peuvent être différentes.

J'ai souvent entendu la majorité de cette assemblée dire que la législation devait se contenter de suivre l'évolution des faits et des moeurs.

M. Jean-Claude Beauchaud.

C'est ce qu'elle fait !

M. Patrick Delnatte.

Notre réponse à nous rejoint la p osition que vient d'exprimer le Président de la République lors de la remise de la médaille de la famille française.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et l'administration générale de la République.

Médaille pétainiste !

M. Patrick Delnatte.

Je le cite : « Respectueuse des choix de chacun, la loi ne peut pour autant se faire l'auxiliaire de tous les arrangements de la vie privée, ni les placer tous sur le même plan. Ce serait méconnaître la portée de sa mission. La loi n'est pas la servante du bonheur individuel. Elle est au service de l'intérêt général.

C'est lorsqu'il est mû par les intérêts supérieurs de notre société que le législateur est pleinement dans son rôle. »

Les Français demeurent attachés à la famille...,

M. Jean-Pierre Blazy.

Nous aussi !

M. Patrick Delnatte.

... premier lieu du partage, du réconfort et de l'entraide, comme l'atteste la hausse du nombre des mariages depuis plusieurs années.

Très sincèrement, je ne crois pas que nos concitoyens soient acquis à cette idéologie disjoignant couple et famille et qui est manifestement imprégnée d'individualisme voire d'égoïsme.

(« Très juste ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

L'honneur du Parlement n'est pas de concrétiser cette dérive, même si elle est habillée de modernité, car cette dérive n'est pas étrangère aux violences quotidiennes commises par des jeunes en déshérence, lesquels sont orphelins de repères familiaux ni, hélas, aux faits de maltraitance des parents sur leurs enfants.

(Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Besson.

Très juste !

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Vous mélangez tout !

M. Jean Besson.

Quand on ne sait pas, on écoute, madame !

M. Patrick Delnatte.

Sachons, chers collègues, répondre à l'appel que les enfants nous ont adressé à l'occasion du Parlement des enfants. Avec leurs mots et leur sincérité,...

Mme Raymonde Le Texier.

Vous dites n'importe quoi !

M. Jean-Claude Beauchaud.

Amalgame scandaleux !

M. Patrick Delnatte.

... c'est bien l'aspiration à la vie et à l'amour familial,...

M. Yves Durand.

C'est d'un jésuitisme à pleurer !

M. Patrick Delnatte.

... même dans les circonstances les plus difficiles, qu'ils ont exprimée.

M. Jean-Claude Beauchaud.

On dirait du Boutin !

M. Patrick Delnatte.

Entre le collectif à tout prix qui déshumanise la société et l'absolu de l'individu qui dénature la personne humaine, le groupe familial est une cellule sociale qui peut permettre à la fois l'épanouissement de l'être humain,...


page précédente page 05523page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Jean-Claude Beauchaud.

On en a marre des sermons !

M. Yves Durand.

En effet, c'est de la bouillie pour les chats !

M. Jean Besson.

C'est pour cela qu'il vous la sert !

M. Patrick Delnatte.

... la création du lien social et la pérennité de la société. Quel autre groupe peut faire mieux ? Dans ces conditions, n'est-ce pas répondre à l'intérêt général que de replacer la famille au premier rang des priorités de notre pays ? A la question sur les liens entre couple et famille, les réponses peuvent être apportées par l'actualisation de la législation sur le mariage et le droit de la famille.

Tout le monde s'accorde sur cette nécessité de réforme.

Vous-même, madame la garde des sceaux, avez installé un groupe de travail.

(Exclamations sur les bancs du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

M. Bernard Accoyer.

Encore un !

M. Patrick Delnatte.

... présidé par Mme le professeur Dekeuwer. La sagesse voudrait que l'on attende ses conclusions...

M. Bernard Accoyer.

Bien sûr !

M. Patrick Delnatte.

... pour avoir tous les éléments du débat, et qu'on utilise le droit positif pour régler les problèmes les plus urgents que le PACS est censé vouloir résoudre.

La deuxième question tient à la nature juridique du PACS. Mme Guigou a dit devant le Sénat : « Le PACS est un contrat, il n'est pas une institution. ». Le rappor-

teur de notre commission des lois écrit, quant à lui : « Il s'agit d'une convention solennelle. »

En fait, lorsqu'on tente d'y voir clair, on constate que le PACS n'est ni un contrat, ni une institution digne de ce nom, ni une convention solennelle. C'est un objet qui, juridiquement, est difficilement identifiable.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Parce que c'est nouveau !

M. Gilbert Meyer.

C'est un OVNI !

M. Patrick Delnatte.

Si le PACS avait été un vrai contrat, il aurait été intégré dans le livre III du code civil, réservé aux contrats, et non dans le livre Ier intitulé « Des personnes », et dans lequel le mariage se trouve codifié. Si le PACS était vraiment un contrat, point ne serait besoin qu'il déroge autant au droit commun des contrats, en particulier en ce qui concerne la capacité à contracter et en matière de dénonciation.

Mme Christine Boutin.

Très juste !

M. Patrick Delnatte.

En effet, les mineurs émancipés ne peuvent pas signer un pacte alors que le droit de contacter leur est reconnu ; les majeurs sous tutelle sont exclus de ce droit alors qu'ils ont le droit de se marier ;...

Mme Christine Boutin.

Eh oui !

M. Patrick Delnatte.

... certaines catégories, telles les frères et les soeurs, sont exclues du droit à signer un PACS. S'il s'agissait d'un vrai contrat, ces catégories se v erraient appliquer les règles générales de capacité contractuelle et non des règles spécifiques.

Mme Christine Boutin.

Excellent !

M. Patrick Delnatte.

La multiplication des réponses apportées à la question concernant la nature juridique du PACS témoigne de l'état de confusion dans lequel se déroule le débat. L'efficacité du droit n'est-il pas d'être énoncé clairement pour être compris de tous ? Et les choses se sont encore compliquées avec la navette parlementaire ! En effet, le Sénat avait proposé comme solution alternative au PACS l'introduction du concubinage dans le code civil. C'était aux problèmes posés par le PACS une réponse pragmatique qui ne bouleversait pas la hiérarchie des valeurs qui fondent notre société. La majorité de cette assemblée n'a rien trouvé de mieux que de cumuler les deux formules !

M. Daniel Marcovitch.

Comme ça, tout le monde est content !

M. Patrick Delnatte.

Ainsi, en l'état actuel des choses, la proposition de loi introduit dans le code civil une définition imparfaite du concubinage, union de fait caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple.

Comme l'a fait remarquer Patrick Gélard, rapporteur de la commission des lois du Sénat, cette définition permet de légaliser les « mariés concubins », c'est-à-dire des hommes mariés qui vivent en union libre avec d'autres personnes.

En outre, cette définition trop rigide du concubinage va engendrer une nouvelle catégorie de fait : celle des concubins non déclarés.

Actuellement, les concubins, lorsqu'ils souhaitent se voir reconnaître un certain nombre de droits, demandent généralement à la mairie un certificat de concubinage. Ne pourront, à l'avenir, être reconnus concubins que ceux qui peuvent justifier de deux éléments précis : la stabilité et la continuité de leur vie en couple.

En résumé, dans les faits, nous pourrons donc rencontrer des personnes vivants en union libre, des concubins non déclarés, des concubins déclarés, des concubins mariés, des concubins pacsés, des pacsés et des mariés !

M. Bernard Accoyer.

Excellente analyse !

M. Patrick Delnatte.

Ainsi, nous aurons sept régimes juridiques différents pour les couples. On peut parler d'union à la carte ou à géométrie variable.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Même ceux qui devraient se féliciter de la création du PACS ne sont pas véritablement satisfaits de cette grande complexité.

Faut-il que le droit, sous prétexte qu'il doit répondre à la complexité des situations, dévalorise la hiérarchie des valeurs ? Nous ne le pensons pas.

Certes, il faut respecter les choix de chacun, mais, je le répète, le législateur ne peut se faire l'auxiliaire de tous les arrangements de la vie privée, ni les placer tous sur le même plan.

Troisièmement, le PACS assure-t-il la protection des personnes comme l'affirment ses promoteurs ?

Mme Odette Grzegrzulka.

Oui !

M. Patrick Delnatte.

Le PACS risque fort d'être un leurre pour les femmes et les enfants.

Mme Monique Collange.

Cessez de vous occuper des femmes !


page précédente page 05524page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Patrick Delnatte.

Non seulement les femmes pacsées n'acquièrent aucun droit à pension de réversion, mais elles n'auront aucun droit sur leur conjoint en cas de rupture unilatérale du PACS par celui-ci.

Mme Véronique Neiertz.

On s'en fout, on les aime !

M. Gilbert Meyer.

Quelle honte, madame !

M. Patrick Delnatte.

Je ne sais pas, madame, si cette réflexion est digne des responsabilités que vous avez exercées et de la nature du débat.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Véronique Neiertz.

Vous croyez qu'on vous épouse pour la pension de réversion ?

Mme Odette Grzegrzulka.

Mme Neiertz parle avec son coeur, vous, monsieur Delnatte, vous ne parlez que de fric !

M. Patrick Delnatte.

Non seulement les femmes pacsées n'acquièrent aucun droit à pension de réversion...

Mme Véronique Neiertz.

Et la tendresse, bordel !

M. Patrick Delnatte.

... mais elles n'auront aucun droit sur leur conjoint en cas de rupture unilatérale du PACS par celui-ci.

Mme Véronique Neiertz.

Encore heureux !

M. Patrick Delnatte.

Le texte prévoit certes que le juge puisse exercer un contrôle sur la rupture et prononcer une réparation pour le dommage éventuellement subi.

Mais cela ne peut-être assimilé à l'indemnité compensatrice du divorce, plus protectrice pour la femme et dont les garanties qui entourent le dédommagement sont plus étendues et plus précises. Quand un couple pacsé a des enfants, la coexistence du droit de la famille et du droit du PACS crée une situation de concurrence que l'on ne peut pas ignorer et qui accentue l'ambiguïté sur la finalité du couple.

Mme Odette Grzegrzulka.

C'est de la haute philosophie !

M. Jean Besson.

Ce n'est pas de la philosophie, c'est la réalité ! Arrêtez de vous « shooter » tous les matins !

M. Patrick Delnatte.

En fait, le PACS est un piège pour les plus faibles.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Dans la mesure où il n'existe aucune obligation d'intervention d'un professionnel du droit dans la rédaction de ce pseudo-contrat, le plus avisé des deux signataires aura toute latitude pour élaborer un PACS répondant à ses propres intérêts.

M. Yves Durand.

Et Dieu dans tout ça ? (Sourires.)

M. Patrick Delnatte.

Enfin, quatrième et dernière question : quel est le coût du PACS ? (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Martine Lignières-Cassou.

Maintenant on va parler d'argent !

M. Daniel Marcovitch.

Et la tendresse, bordel !

M. le président.

Mes chers collègues, je crois que l'on peut considérer que la récréation est terminée. Vous avez suffisamment décompressé. Ecoutez l'orateur.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Daniel Marcovitch.

D'autant qu'il nous raconte une histoire drôle !

M. le président.

Poursuivez, monsieur Delnatte.

M. Patrick Delnatte.

Le Parlement ne dispose toujours d'aucune évaluation financière.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) La procédure de la proposition de loi choisie par la majorité parlementaire et le Gouvernement leur permet d'éviter l'étude d'impact rendue obligatoire pour les projets de loi.

M me Odette Grzegrzulka.

Et pourquoi pas une enquête d'utilité publique pendant que vous y êtes ?

M. Patrick Delnatte.

Le rapporteur de la commission du Sénat avait demandé la collaboration du service de la législation fiscale. Le 11 mars, il a confirmé sa demande, et, le 21 avril, le président de la commission des finances du Sénat a réitéré des questions précises.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Et en juin, on solde !

M. Patrick Delnatte.

Tout cela en vain. Les seules informations officieuses émanent d'indiscrétions sur une n ote ministérielle concernant la seule imposition commune des pacsés. Je cite : « Il s'agit d'une mesure coûteuse. Les chiffrages, nécessairement approximatifs, font apparaître un coût compris entre 4 et 6 milliards de francs. »

M. Claude Lanfranca.

C'est plus cher qu'avec de Courson !

Mme Odette Grzegrzulka.

L'amour n'a pas de prix !

M. Daniel Marcovitch.

Quand on aime, on ne compte pas !

M. Patrick Delnatte.

Par ailleurs, il apparaît clairement aux fiscalistes que le PACS sera anti-redistributif, car il favorise les ménages mono-actifs à grande disparité fiscale.

Mme Odette Grzegrzulka.

Amis de la poésie, bonsoir !

M. Patrick Delnatte.

Là encore, le Gouvernement et la majorité doivent clarifier leur position.

Parallèlement à cet effort financier important au bénéfice des couples pacsés, le Gouvernement remet en cause la situation fiscale des familles en orientant la politique familiale vers la seule solidarité, comme l'a clairement exprimé ici même Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Au moment où le Gouvernement accepte de consacrer plusieurs milliards de francs pour le PACS, il n'est peutêtre pas inutile de rappeler les mesures qu'il a prises.

Mme Odette Grzegrzulka.

Elles sont tellement bonnes, que vous ne pouvez que les rappeler !

M. Patrick Delnatte.

Après avoir mis pendant un an les allocations familiales sous condition de ressources, le Gouvernement a abaissé le quotient familial - ce qui a coûté 4 milliards aux familles -, diminué l'allocation de garde d'enfant à domicile (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste), réduit la déduction fiscale pour l'emploi d'une personne à domicile (« Très bien ! » sur les mêmes bancs), plafonné la demi-part accordée aux personnes ayant élevé seules un ou plusieurs enfants, et, enfin, refusé, en janvier dernier, de donner suite à la proposition de loi de l'opposition visant à revaloriser l'allocation veuvage.

Or, compte tenu du rôle social et démographique de la famille, l'Etat a un devoir de reconnaissance du fait familial, en soutenant la famille et en lui facilitant l'existence.


page précédente page 05525page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

La solidarité, dont tout le monde soutient le principe, est un complément pour les familles les plus en difficulté, mais elle ne doit pas se réaliser au détriment de la reconnaissance du fait familial lui-même.

M. Yves Durand.

Ça, c'est signé ! (Rires.)

M. le président.

Monsieur Durand, laissez poursuivre l'orateur.

M. Patrick Delnatte.

Ainsi donc, chers collègues, les différentes questions que je viens d'évoquer démontrent combien il est nécessaire, qu'il s'agisse de la méthode, des problèmes de fond...

Mme Odette Grzegrzulka.

Et la forme !

M. Patrick Delnatte.

... ou des aspects pratiques, de revoir votre façon de légiférer.

Il est dangereux de travailler sous l'influence de l'urgence programmatique (Rires sur les bancs du groupe socialiste),...

M. Bernard Outin.

Juppé en sait quelque chose !

M. Patrick Delnatte.

... des groupes de pression, des modes médiatiques et de leurs enjeux financiers.

Mme Odette Grzegrzulka.

Ce soir, nous avons droit aux Guignols de l'amour !

M. Patrick Delnatte.

C'est pourquoi le groupe du Rassemblement pour la République vous propose d'adopter la question préalable. Nous pourrons ainsi donner toutes ses chances à une évolution constructive de la société, approuvée par le plus grand nombre de nos concitoyens,...

M. Yves Durand.

Comme en 1997 !

M. Patrick Delnatte.

... reposant sur des bases solides et respectueuse de l'intérêt général.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yves Durand.

Amen !

M. le président.

Le Gouvernement souhaite-t-il intervenir ?...

Comme tel n'est pas le cas, la parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Je voudrais simplement dire, monsieur le président, que la commission des lois a repoussé la question préalable.

M. Delnatte vient, en termes modérés,...

M. Gilbert Meyer.

Merci pour la modération !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... d'exposer une position qui a déjà été présentée plusieurs fois. La différence entre l'histoire et la procédure parlementaire, c'est que le Parlement repasse souvent les mêmes plats.

M. Yves Durand.

Un peu réchauffé, comme plat !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Je vous demande donc, mes chers collègues, de repousser la question préalable.

M. le président.

Dans les explications de vote sur la question préalable, la parole est à M. Bernard Accoyer, pour le groupe du RPR.

Mme Odette Grzegrzulka.

Accoyer : docteur Folamour ! ( Rires.)

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voilà donc neuf mois...

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Eh oui !

M. Yves Durand.

Longue gestation !

M. Bernard Accoyer.

... que ce texte vient, revient, et il est toujours le même. Et la majorité le présente toujours avec outrance, en faisant preuve de mépris envers l'opposition (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...

M. Bernard Outin.

Il y en a qui ne méritent pas mieux !

M. Gilbert Meyer.

M. Accoyer a raison !

M. Bernard Accoyer.

... et en manifestant une expression scandaleusement moqueuse à l'égard de la famille et des valeurs qu'elle représente. (Rires sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Un député du groupe socialiste.

Tartuffe !

M. Bernard Accoyer.

Il suffira de lire le compte rendu des débats pour apprécier les propos tenus ce soir dans cet hémicycle et constater ce que représente la famille pour la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mais j'en viens à la questions préalable.

Neuf mois de travail. Neuf mois de débats. Neuf mois d'excès. Neuf mois de perdus !

M. Jean Vila.

Ça ne vous a pas suffi ?

Mme Odette Grzegrzulka.

C'est le temps d'une grossesse !

M. Bernard Accoyer.

Madame la ministre, n'y a-t-il rien de plus important, rien de plus urgent pour nos concitoyens, pour leur sécurité, pour notre pays, pour la justice, pour nos enfants ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous avez fait ce choix, qui est un choix emblématique. Car vous légiférez de manière idéologique, de manière symbolique. En fait, il n'y a pas de fond derrière la politique du Gouvernement. Et en suivant cette ligne, c'est toute notre société que vous allez mettre en pièces.

(Mêmes mouvements.)

Avec le PACS, vous jetez le discrédit sur l'institution du mariage et vous l'affaiblissez. Alors que notre société se cherche, alors que de toutes parts des menaces se font jour, que ce soit dans nos banlieues, dans nos universités ou dans nos écoles (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste),...

Mme Odette Grzegrzulka.

On va le savoir !

M. Yves Durand.

Ridicule !

M. Bernard Accoyer.

... alors qu'il serait nécessaire de renforcer la cellule familiale, alors qu'il faudrait aider les familles, aider ceux qui ont fait le choix de donner à la France des enfants pour assurer la solidarité entre les générations (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), vous avez décidé, au contraire, de dégager des moyens financiers pour ce projet idéologique qui n'apportera rien de bon à notre pays ! La question préalable est une motion particulièrement opportune dans le cas du texte qui nous occupe une nouvelle fois ce soir.

Parce qu'il méconnaît l'intérêt des familles, la défense des droits des plus faibles, des femmes, des enfants,...


page précédente page 05526page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Mme Monique Collange.

Arrêtez de nous traiter de faibles ! Ça commence à bien faire !

M. Bernard Accoyer.

... parce qu'il jette la confusion dans le pays, le groupe RPR votera la question préalable.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, la parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Bien sûr, le groupe UDF votera la question préalable, excellemment défendue par notre collègue Patrick Delnatte.

Que vous le vouliez ou non, chers collègues de la majorité, la famille est concernée par le PACS.

Quels que soient les arguments invoqués par l'opposition, vous avez toujours réagi de façon passionnelle ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Yves Durand.

Pas comme vous !

Mme Odette Grzegrzulka.

Tout le monde n'a pas votre sang-froid !

Mme Christine Boutin.

Les cris, les vociférations, les excès...

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration de la République.

Vos excès !

Mme Christine Boutin.

... n'empêchent pas la réalité d'exister : le PACS touche à la famille.

Nous n'avons pas pu discuter au fond de ce texte, ni en commission, ni dans l'hémicycle. Ce texte est purement symbolique et idéologique.

M. Francis Hammel.

Ah !

Mme Christine Boutin.

Que vous l'admettiez ou non, nous croyons, nous, que la famille est le fondement de la société, et que vous allez la mettre à mal. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe socialiste, la parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, troisième lecture, troisième question préalable. Pour la troisième fois consécutive, l'opposition pense qu'il n'y a pas lieu de débattre.

En première lecture, nous avons eu une première question préalable, défendue par M. Lenoir, qui s'est contenté de faire de l'obstruction.

M. Jean-Claude Lenoir.

Moi ? Voilà qui mérite un fait personnel !

M. Gilbert Meyer.

C'était tout à fait démocratique !

M. Jean-Pierre Blazy.

Il a fallu l'interrompre ! En deuxième lecture, M. Dord, qui a disparu depuis, a recherché les voies d'un consensus, mais pour conclure aussitôt qu'il ne fallait pas toucher au code civil.

Et, en troisième lecture, M. Delnatte nous dit qu'il y a déjà eu quatre-vingt-cinq heures de débat, mais qu'il ne faut pas poursuivre la discussion.

M. Bernard Accoyer.

C'est inutile !

M. Jean-Pierre Blazy.

M. Accoyer nous dit qu'il y a eu neuf mois de débat et qu'il ne faut pas poursuivre la discussion.

Reconnaissez plutôt que le texte a évolué entre la première et la deuxième lecture.

M. Daniel Marcovitch.

Mais eux, ils n'ont pas changé !

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est bien la preuve qu'il y a eu débat, écoute, dialogue. On a ainsi noté l'abandon des fratries et la reconnaissance du concubinage homosexuel, comme le souhaitait le Sénat. C'est bien la preuve qu'il y a eu un échange entre l'Assemblée et le Sénat, alors même que l'opposition y est majoritaire.

La majorité plurielle veut poursuivre le débat...

M. Bernard Accoyer.

Ça fait déjà neuf mois !

M. Jean-Pierre Blazy.

... et le conduire à son terme.

C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste votera contre la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Pour le groupe communiste, la parole est à M. Bernard Birsinger.

M. Bernard Birsinger.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je veux d'abord vous dire que j'aime la famille, que j'aime les enfants, et que donc j'aime le PACS ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Que d'efforts à droite pour chercher à faire aboutir une manoeuvre dilatoire et politicienne ! Que de salive dépensée depuis le premier débat sur ce texte, au cours duquel on a disserté de tout autre chose que du PACS.

Mme Christine Boutin.

Comment ça ?

M. Bernard Birsinger.

Votre démarche, mesdames, m essieurs de l'opposition, est claire ; nous l'avons comprise, l'opinion publique aussi.

M. Gilbert Meyer.

Tout à fait : l'opinion publique l'a parfaitement comprise !

M. Bernard Birsinger.

Personne n'est dupe. Vous refusez la reconnaissance officielle des couples homosexuels.

Vous refusez de leur accorder des droits leur permettant de vivre mieux, d'avoir toute leur place dans notre société, d'être des citoyens et des citoyennes à part entière.

Vous refusez de prendre en compte la réalité des nouveaux modes de vie, à savoir la vie à deux sans être mariés,...

Mme Christine Boutin.

Ça n'est pas vraiment nouveau !

M. Bernard Birsinger.

... en brandissant l'étendard des institutions fondamentales, de la famille, que vous estimez voir s'effondrer avec le PACS.

Quand on sait que deux Français sur trois et neuf jeunes sur dix sont favorables aux PACS, au nom de l'égalité des droits et de la reconnaissance des différences,...

M. Gilbert Meyer.

Ce sont des sondages belges !


page précédente page 05527page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Bernard Birsinger.

... force est de reconnaître que vos arguments s'essoufflent.

Pourtant, vous avez tout essayé, tant au Sénat qu'à l'Assemblée. Souvenons-nous : tirant les leçons des comportements et des propos outranciers et homophobes de la droite qui ont jalonné la première lecture à l'Assemblée, la majorité sénatoriale a tenté de brouiller quelque peu les données du débat en adoptant, dans un contreprojet, des dispositions légalisant le concubinage tout en refusant, bien entendu, de le définir clairement.

Cette audace dissimulait pourtant bien mal la réalité de vos objectifs. La preuve : lorsque le Gouvernement et les députés de la gauche plurielle ont pris à contre-pied cette prétendue solution alternative pour rétablir, en l'améliorant, le PACS, et pour définir clairement le concubinage comme le fait, pour deux personnes, sans distinction de sexe, de vivre ensemble, la droite s'est sentie prise au piège de ses propres contradictions.C'est ainsi que la majorité sénatoriale a, le 11 mai dernier, adopté une motion de procédure en arguant qu'une deuxième lecture du PACS serait une perte de temps.

Et que nous proposent aujourd'hui les députés de l'opposition, au mépris du débat parlementaire ? Tout simplement de ne pas débattre au fond d'un sujet de société d'importance et de prendre en compte la réalité des couples non mariés, hétérosexuels ou homosexuels ! Prenez vos responsabilités, ayez le courage de laisser transparaître votre côté réactionnaire et votre homophobie latente ! (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe socialiste. Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Christine Boutin.

Les réactionnaires, c'est vous !

M. Bernard Birsinger.

Les parlementaires communistes, eux, prendront leurs responsabilités, comme ils le font depuis le début. Ils contribueront à faire adopter ce texte ; car nous devons relever ce défi moderne sans frilosité.

Pour toutes ces raisons, nous nous opposerons fermement à cette motion de procédure de la droite. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Pour le groupe Démocratie libérale et des Indépendants, la parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Bien entendu, le groupe Démocratie libérale et Indépendants votera la question préalable.

M. Bernard Outin.

C'est un scoop !

M. Claude Goasguen.

Nous estimons que, quelle que soit l'issue de ce texte dans quelques jours - et on peut la prévoir - le PACS est déjà un échec. (« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.) C'est un échec parce que vous n'avez pas pu, ou que vous n'avez pas voulu chercher, sur cette question de société, le moindre accord entre les membres d'une nation qui ont le désir de vivre ensemble et de partager des valeurs communes.

Non seulement vous n'avez pas cherché à parvenir à un accord ; mais vous avez progressivement durci le texte.

D'ailleurs, l'intervention de M. Birsinger, sans doute talonné par des intérêts électoraux immédiats (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert),...

Mme Raymonde Le Texier.

C'est une obsession !

M. Yann Galut.

C'est chez vous que ça se passe mal, pas chez nous !

M. Claude Goasguen.

Je n'ai fait que constater un état de fait et j'ai simplement voulu dire que mon prédécesseur à cette tribune avait employé des termes un peu forts pour qualifier l'attitude de l'opposition.

Notez que ma réponse est très mesurée : je suis simplement amusé de voir le changement de ton des députés c ommunistes depuis quelques jours. N'y voyez pas malice : simplement, j'ai lu les journaux ! Vous n'avez donc pas, disais-je, essayé de parvenir, sur ces questions de société, à un accord entre nous, alors qu'il n'était pas impossible.

Mme Monique Collange.

Si !

M. Claude Goasguen.

Toute l'évolution de notre droit montre que, sur les questions de société, quoi que vous puissiez dire, les choses ne sont pas aussi faciles. D'ailleurs, la législation sur de tels sujets a toujours fait l'objet de consensus inattendus.

Sur le fond, votre texte est mauvais.

Mme Christine Boutin.

Tout à fait !

M. Claude Goasguen.

De plus, il est inachevé.

M. Yann Galut.

Il faut donc continuer à débattre pour le rendre meilleur !

M. Claude Goasguen.

Nous avons regretté à plusieurs reprises que le Conseil d'Etat n'ait pas été consulté avant l'examen de ce texte par le Parlement.

Cela nous aurait sans doute évité de perdre beaucoup de temps dans des considérations techniques. Mais vous n'avez pas voulu le lui soumettre car vous avez recouru à la procédure, très contestable en pareille matière, de la proposition de loi.

Vous qui êtes si confiants, vous aurez cependant quelque difficulté à rédiger les décrets d'application, car le Conseil d'Etat sera obligatoirement consulté. Et vous verrez, alors, que votre texte est très imparfait sur le plan juridique.

Vous sentez tout comme nous qu'il a été rédigé un peu hâtivement et que ses conséquences juridiques ont mal été évaluées. Nous estimons qu'il y a encore lieu à délibérer et, pour des raisons de forme aussi bien que de fond, nous voterons la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.)

M. le président.

Je mets aux voix la question préalable.

(La question préalable n'est pas adoptée.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Rappel au règlement

M. Jean-Claude Lenoir.

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Claude Lenoir.

Monsieur le président, je voudrais appeler votre attention sur un petit incident qui s'est produit.

M. Daniel Marcovitch.

Quel article du règlement invoquez-vous ?


page précédente page 05528page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Jean-Claude Lenoir.

L'article 166.

Pendant que notre collègue Christine Boutin s'exprimait, un commissaire du Gouvernement, que je pense être un collaborateur de Mme la ministre, se tournant vers Mme Boutin, a eu une attitude parfaitement discourtoise. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Cette personne, je le précise, n'est plus au banc des commissaires du gouvernement après, semble-t-il, qu'un huissier lui a fait connaître le sentiment qu'avait suscité son attitude.

Monsieur le président, je voudrais simplement qu'on rappelle aux ministres que leurs collaborateurs doivent manifester la plus totale neutralité à l'égard des orateurs, ne serait-ce que par respect pour les membres de l'Assemblée.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme Christine Boutin.

Je vous remercie, monsieur Lenoir, et j'accepterai des excuses de ce commissaire du gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Daniel Marcovitch.

Le règlement ne comporte pas d'article 166 !

M. Jean-Claude Lenoir.

Tiens ?

M. le président.

Monsieur Lenoir, vous avez parfaitement saisi le sens du règlement et je ferai part de votre rappel au règlement à la prochaine Conférence des présidents.

Mme Christine Boutin.

Je vous en remercie, monsieur le président.

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Monique Collange.

M me Monique Collange.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici à la troisième lecture de cette proposition de loi sur le PACS.

Tout a été dit, ou presque.

Jusqu'à maintenant, je n'étais pas intervenue à la tribune sur ce sujet.

M. Jean Ueberschlag.

Oui, ça manquait !

Mme Monique Collange.

Mais, ce soir, j'ai envie de dire : stop, ça suffit ! Je suis révoltée d'entendre toutes les âneries qui se colportent sur ce texte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Odette Grzegrzulka.

Elle a raison !

Mme Monique Collange.

L'opposition a largement contribué à détourner le véritable objectif de cette proposition de loi en se focalisant avec acharnement sur les homosexuels ; elle a voulu faire peur à nos concitoyens.

M. Jean Besson.

A la niche !

Mme Monique Collange.

J'aimerais bien qu'on parle un peu plus de tous les jeunes, et des moins jeunes, qui sont intéressés par ce texte.

Qui n'a pas dans sa famille ou parmi ses amis proches une jeune fille ou un jeune homme qui vit avec son copain ou avec sa copine,...

M. Yann Galut.

Tout à fait !

Mme Monique Collange.

... sans autre souci que de vivre ensemble, de s'aimer, sans même se rendre compte des problèmes qui peuvent éventuellement survenir ?

M. Gilbert Meyer.

N'en rajoutez pas !

Mme Monique Collange.

Ils ont même des enfants. Et ils pensent qu'un jour, plus tard, quand ils auront un vrai boulot, ils se marieront.

Eh oui, le PACS n'est pas contre le mariage, il représente au contraire une solution provisoire, en attendant d'avoir la stabilité professionnelle et financière.

Quant aux moins jeunes, beaucoup ont déjà été mariés et, pour des raisons multiples, ils se retrouvent parfois sans leur conjoint.

M. Jean Ueberschlag.

Arrêtez de dire des âneries !

Mme Monique Collange.

Ils ne souhaitent pas pour autant se remarier, mais ils ne veulent pas non plus finir leur vie dans la solitude.

M. Gilbert Meyer.

Vous allez pacser avec votre fils ?

M. Jean Ueberschlag.

C'est qu'elle est moderne !

Mme Monique Collange.

Et, s'ils trouvent la personne qui les accompagnera dans leur dernière tranche de vie, le PACS est alors pour eux une sécurité, une protection, et il ne met pas en émoi leurs familles respectives.

M. Jean Ueberschlag.

Qu'est-ce qu'elle est moderne !

M me Monique Collange.

On peut parfaitement comprendre qu'à un certain âge on n'ait pas forcément envie de se remarier, et pouvoir bénéficier de certains avantages n'est pas critiquable.

M. Gilbert Meyer.

Vous ne comprenez rien !

Mme Monique Collange.

Je suis excédée de recevoir certains courriers et d'entendre M. de Courson prétendre que les gens qui contracteront un PACS auront trop d'avantages fiscaux.

Est-il scandaleux que deux personnes qui s'unissent dans l'amour puissent bénéficier d'une seule déclaration de revenus parce qu'elles additionnent deux petites retraites ?

M. Jean Ueberschlag.

Vous connaissez beaucoup de jeunes qui ont une retraite ?

Mme Monique Collange.

Est-il scandaleux que deux jeunes gens qui s'unissent dans l'amour puissent bénéficier d'une seule déclaration de revenus parce qu'ils additionnent deux SMIC ? Est-il scandaleux qu'une jeune fille qui vit avec l'homme de sa vie puisse bénéficier de sa couverture sociale alors qu'elle n'est pas mariée ?

M. Jean Ueberschlag.

Avec votre politique, les jeunes n'auront plus de retraite du tout !

Mme Monique Collange.

Pourquoi n'auraient-il pas les mêmes avantages que n'importe quel citoyen, pour la seule raison qu'ils ne sont pas passés devant le maire ?

M. Gilbert Meyer.

Hors sujet !

M. Daniel Marcovitch.

Ou le curé !

Mme Monique Collange.

J'en ai aussi assez de cette hypocrisie de la droite bien-pensante et moralisatrice (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du


page précédente page 05529page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) qui prétend que le mariage serait la sécurité de la femme et de l'enfant ! Combien d'hommes mariés, et bien mariés, devant M. le maire et devant M. le curé, ont abandonné femme et enfants pour aller conter fleurette ailleurs ? (Applaudissements sur les mêmes bancs.) Combien de femmes n'arrivent jamais à récupérer la pension alimentaire qui leur a été attribuée et font face, seules, aux problèmes quotidiens ? Où sont passés les devoirs du mariage ?

M. Jean Ueberschlag.

Allez-y ! Encore une couche !

Mme Monique Collange.

Eh bien moi, je préfère un PACS d'amour à un mariage d'intérêt ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Soyons clairs, mes chers amis ! Ce qui compte, c'est l'affection que deux êtres peuvent se porter mutuellement ; et c'est le comportement de chacun qui assure l'épanouissement de la cellule familiale. Le mariage, le concubinage ou le PACS ne sont que des accessoires juridiques...

M. Jean Ueberschlag.

L'accessoire, c'est vous !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Ne soyez pas grossier !

Mme Monique Collange.

... qui permettent aux uns et aux autres de faire leur choix de vie.

Le PACS n'est pas l'adversaire du mariage. Le groupe socialiste est déterminé et, que vous le vouliez ou non, cette proposition de loi sera adoptée.

(Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, nous arrivons aujourd'hui à la troisième et nouvelle lecture de la proposition de loi relative au PACS,...

M. Jean Vila.

Allez, un peu de tendresse !

M. Claude Goasguen.

... quasiment à l'achèvement d'une procédure marquée par l'absence de dialogue entre nous. La majorité a en effet refusé d'écouter les arguments...

M. Bernard Outin.

On ne les a pas repris, mais on les a écoutés !

M. Claude Goasguen.

... de ceux qui ne représentaient pas les inspirateurs du texte.

Par la suite, au mépris du règlement de notre assemblée, vous avez redéposé une proposition de loi rejetée régulièrement par la représentation nationale. Le Conseil constitutionnel appréciera. Vous avez délibérément choisi de passer en force...

Mme Nicole Bricq.

En force ? Avec trois lectures !

M. Claude Goasguen.

... refusant de discuter, d'écouter même, nos arguments.

Après l'échec de la CMP, peu surprenant à vrai dire, nous voici donc quasiment au point de départ de la discussion avec un texte que vous avez refusé d'améliorer, comme s'il s'agissait du totem de votre majorité. Ainsi, malgré sa longueur, nous n'avons eu droit qu'à une caricature de débat parlementaire. Nous continuerons pourtant, sans faire de la morale et en essayant de ne pas dire des âneries,...

M. Jean-Pierre Blazy.

Vous n'avez fait que ça !

M. Claude Goasguen.

... nous continuerons pourtant à nous opposer, sans illusion sur votre volonté de nous écouter, mais persuadés qu'une majorité de Français nous entendra.

En premier lieu, nous affirmons une nouvelle fois que le PACS est un texte dangereux pour notre société, et par la vision de notre société qu'il veut traduire et l'orientation qu'il lui donne. Notre société souffre aujourd'hui d'insécurité, de précarité, d'absence de références.

Mme Véronique Neiertz.

Il est frileux, il a peur !

M. Claude Goasguen.

L'échec scolaire, la délinquance juvénile, l'exclusion, tous ces maux sociaux ont aussi pour cause l'éclatement des familles, l'absence d'autorité parentale, la solitude dans les nombreux choix imposés par la vie. Or le PACS entretient de façon malheureuse cette évolution.

Contrat précaire par essence, il conforte l'insécurité et la précarité dans le droit des personnes. Rompu par la volonté unilatérale d'une des parties, il institue la loi du plus fort au sein du couple et n'entretient même plus l'illusion du devoir de solidarité. Les obligations qu'il crée sont floues et deviendront vite illusoires à l'heure de la séparation. Ces incohérences juridiques ouvriront la voie à de nombreux contentieux dans lesquels les parties les plus fragiles s'épuiseront en vain.

Le PACS ne prend en compte que la volonté individuelle des signataires sans jamais garantir les droits des tiers, notamment des enfants, délibérément ignorés.

Le PACS est également dangereux en ce qu'il entretient l'idée fausse qu'une même institution peut régir des situations totalement différentes. En définissant un statut unique pour des situations très hétérogènes, vous avez volontairement provoqué une confusion entre les notions de solidarité, de reconnaissance sociale du couple homosexuel et d'institutionnalisation de l'union libre.

Nous contestons la justification de votre entreprise.

Vous vous réfugiez derrière le principe de non-discrimination, que vous interprétez cependant à contresens.

L'idée positive de non-discrimination, l'égalité des droits, la liberté de la vie privée et notamment du choix de l'homosexualité, principe incontestable et incontesté par l'opposition, ne peuvent justifier l'aboutissement à une fusion artificielle, dans un statut commun de droit des personnes en situation totalement différente :...

Mme Véronique Neiertz.

Ce n'est pas artificiel ! C'est humain !

M. Claude Goasguen.

... couples hétérosexuels avec ou sans enfants, couples homosexuels, union de célibataires intéressés financièrement à l'affaire.

Enfin, ce texte est dangereux en ce qu'il sera bientôt la source de difficultés considérables, d'abus multiples et de contentieux divers. Tout au long du débat, nous n'avons cessé de dénoncer les nombreuses faiblesses et incohérences de cette proposition de loi, je n'y reviens donc pas. Mais que dire des quelques bombes à retardement que permettra ce texte, des abus caractérisés de la loi et des détournements de procédures ? J'y reviendrai. Comment accepter, notamment cette disposition inadmissible qui confère la carte de séjour aux étrangers, même en situation irrégulière, signataires d'un PACS,...


page précédente page 05530page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Jean-Claude Lemoine.

C'est vrai !

M. Claude Goasguen.

... ouvrant ainsi la possibilité maximale de régularisation et de naturalisation et ruinant toute tentative de régulation des flux migratoires ?

M. Jean-Claude Lemoine.

Scandaleux !

M. Claude Goasguen.

Il apparaît aussi nécessaire de vous redire en quoi le PACS, objet juridique contestable, fruit croisé de l'idéologie et du politiquement correct, va bouleverser le droit de la famille et de la filiation.

Madame la garde des sceaux, vous n'avez cessé d'affirmer que le PACS n'étant pas un mariage bis, qu'il n'aurait aucun effet sur le mariage et, plus généralement, sur la famille. Dans la construction du texte, les auteurs ont sans cesse cherché, tout en s'inspirant évidemment des articles du code civil relatifs au mariage, au « dématrimonialiser » les termes, les régimes et les constructions juridiques, ne faisant aucune référence ni aux enfants ni à la famille. Soit.

Cette tentative de séparer le PACS de la famille n'est pourtant, à notre avis, qu'une mystification. Il est en effet certain qu'à de nombreux égards le PACS aura une implication concrète sur le droit de la famille. Il n'est d'ailleurs pas anodin que les membres de la commission qui se réunit actuellement auraient, si j'en crois certaines indiscrétions, quelque peu protesté contre la création du PACS qui vient briser la cohérence des travaux à venir sur une réforme globale du droit de la famille.

Votre volonté de séparer absolument PACS et famille est totalement artificielle. D'ailleurs, n'avez-vous pas fait inscrire le PACS dans le chapitre du code civil relatif aux personnes, entre les dispositions sur le mariage et celles sur le divorce ? Dans quel chapitre pensez-vous que les futurs étudiants en droit étudieront le PACS, dans celui du droit des contrats ou dans celui du droit de la famille ? Vous connaissez très bien la réponse : c'est dans le droit des personnes et dans le droit de la famille. Car le PACS affectera indiscutablement, même si c'est d'une manière indirecte, l'évolution du mariage.

Le mariage est une institution hétérosexuelle, et vous n'avez pas cédé à la revendication d'un certain nombre de g roupes qui auraient souhaité la reconnaissance du mariage homosexuel. Pour contourner la difficulté, vous avez créé un statut global, extramatrimonial et patrimonial, pour tous ceux qui, pour vous citer, « ne peuvent ou ne veulent se marier ».

Le PACS reste donc conçu, pour les couples hétérosexuels qui ne veulent pas se marier, comme un avatar, et pour les couples homosexuels qui ne peuvent pas se marier, comme un succédané.

Le mariage a une finalité que ne peut avoir le couple homosexuel : mettre au monde des enfants pour la perpétuation de la société. C'est ce qui justifie que l'Etat se préoccupe d'en garantir la stabilité par le biais des avantages fiscaux et sociaux. La stabilité recherchée du mariage est jugée imposée par sa finalité.

Ainsi la confusion, à terme, des deux statuts semble à première vue impossible. Cependant, en reconnaissant aux homosexuels un statut, vous résisterez difficilement à la pression sociale et politique de ceux qui considèrent le PACS comme une étape. Vous avez mis le doigt dans l'engrenage, car vous avez quitté le domaine de la liberté du comportement privé pour vous engager dans la socialisation de l'homosexualité.

Mme Véronique Neiertz.

Et alors ? Où est le mal ? Ce n'est pas possible d'entendre des choses pareilles !

M. Claude Goasguen.

Mais il n'y a rien d'insultant à cela ! Restez calme, madame Neiertz...

M. Jean Ueberschlag.

Calmez-vous, madame Neiertz !

Mme Véronique Neiertz.

C'est de l'homophobie !

M. Claude Goasguen.

Pour les couples hétérosexuels, vous n'échapperez pas à la mise en concurrence des deux statuts.

Mme Véronique Neiertz.

On est en pleine homophobie !

M. Claude Goasguen.

Monsieur le président, cela d evient pénible. Pourriez-vous rappeler à l'ordre Mme Neiertz ?

M. Jean Ueberschlag.

Arrêtez les vociférations de Mme Neiertz, monsieur le président !

M. le président.

Mes chers collègues, encore une fois, je vous demanderai d'interrompre sur un mode plus bas et moins déclamatoire, afin que l'orateur puisse au moins continuer son discours. Je vous en serai reconnaissant.

Poursuivez, monsieur Goasguen !

M. Claude Goasguen.

En ce qui concerne les couples hétérosexuels, vous n'échapperez pas à la mise en concurrence des deux statuts. Or cette concurrence est à l'évidence déloyale. Face aux facilités qu'offre le PACS, le mariage confirmera son déclin et deviendra une institution minoritaire, un engagement fondé davantage sur une croyance que sur la reconnaissance civile. Quel paradoxe ! Vous qui n'avez que le mot « modernité » à la bouche, vous taillez ainsi sérieusement dans les acquis de la Révolution de 1789 (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), qui avait permis l'avènement d'un mariage civil, laïc et égalitaire. Dorénavant, seuls accepteront l'institution du mariage ceux qui en auront les moyens matériels, ou qui voudront accompagner la démarche religieuse de leur union.

Soyez réalistes : quel intérêt conservera le mariage ? Qui choisira le mariage, alors que le PACS durable offre d es avantages similaires, sans obligation et sans contrainte ? La création du PACS préfigure ainsi une nouvelle conception du mariage. Soit ce dernier restera une institution lourde, auquel cas il se marginalisera ; soit nous assisterons à une libéralisation des procédures du mariage, à un abandon de sa dimension institutionnelle, qui seule pourtant la préserverait face au PACS. Dès lors, paradoxalement, c'est au PACS que le mariage empruntera ses principales caractéristiques...

Mme Christine Boutin.

C'est vrai !

M. Claude Goasguen.

... en perdant sa dimension institutionnelle et symbolique. En réalité, avant même tout débat sur la famille, vous avez « pacsisé » le mariage.

Mme Véronique Neiertz.

C'est très bien !

M. Claude Goasguen.

Cette évolution est dangereuse pour la société, car elle enracine la précarité dans le droit des personnes. Les intérêts matériels du couple primeront sur les intérêts des enfants, dont le mariage assure la meilleure protection et que le PACS, décidément, ignore.

M. Bernard Accoyer.

Tout à fait !

M. Claude Goasguen.

C'est aussi le droit du divorce qui subira les effets du PACS. La proposition de loi organise la rupture du PACS. Or l'encadrement du divorce a


page précédente page 05531page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

pour objectif de préserver l'ensemble des intérêts en présence. Face aux facilités de sortie du PACS, le divorce pourra-t-il résister ? Est-il comparable ? Sera-t-il encore supportable de canaliser la sortie du mariage, alors qu'une simple déclaration suffit dans le PACS ? En réalité le PACS ouvre, dès maintenant et sans le dire, le débat que nous allons ouvrir sur la « déjudiciarisation » du divorce. La réforme du divorce mérite sans doute un débat, et nous y sommes favorables. Le problème, c'est qu'avec votre PACS, vous avez amorcé le changement et posé les termes du débat à votre convenance.

Enfin, le PACS aura une troisième conséquence sur le droit de la famille, même indirecte - car les choses ne sont pas aussi hermétiques que vous semblez le concevoir ou le dire - et affectera le régime de la filiation, vous nous dites que rien ne concerne le droit de la filiation. Je persiste à affirmer qu'en refusant d'indiquer dans la loi que le PACS ne permet pas l'adoption par un couple h omosexuel, vous portez une lourde responsabilité.

Comme nous l'avons longuement expliqué, la jurisprudence n'est pas fixée en la matière et le juge prétextera de la reconnaissance que vous faites de l'égalité des liens personnels entre homo et hétérosexuels pour bientôt considérer comme nulle toute mesure discriminatoire en ce qui concerne l'adoption homosexuelle que la loi n'interdit pas.

Dès la promulgation de la loi, le pacsé homosexuel, considéré comme célibataire, pourra adopter en bénéficiant des dispositions du code civil.

M. Bernard Accoyer.

C'est vrai !

M. Claude Goasguen.

Vous n'échapperez pas à vos responsabilités en ce domaine. Votre refus de légiférer est un consentement à une évolution dont vous prétendez ne pas voir les prémices, ignorant délibérément et volontairement l'évolution déjà entamée chez nos voisins européens.

Il est illusoire de penser qu'un statut quasi matrimonial proposé à tous les couples puisse ne pas ouvrir, à terme, les mêmes droits pour tous. Pour l'adoption comme pour la PMA, pourtant protégée par la loi, pourra-t-on demain maintenir une discrimination entre des personnes quis ont reconnues et traitées identiquement, identifiées comme partenaires par le droit ? Le principe de nondiscrimination entre des personnes se trouvant dans des situations comparables imposera, pour les hétérosexuels comme pour les homosexuels, le droit à l'enfant.

Les propos du rapporteur de la proposition de loi, qui a ouvertement qualifié le PACS de « première étape vers l'adoption homosexuelle », nous ont inquiétés. Une fois de plus, mes chers collègues, se trouve confirmée une des évolutions les plus critiquables de notre droit et de notre société, où les volontés individuelles, celles des parents et des contractants, l'emportent de plus en plus sur la protection et l'intérêt de l'enfant. Avec le PACS, vous consacrez l'ère de « l'enfant-objet » et vous compromettez gravement l'évolution de notre société.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme Dominique Gillot.

N'importe quoi ! C'est de l'incantation sans aucune argumentation !

M. Claude Goasguen.

Prétendre le contraire relève de la pure propagande.

Mme Dominique Gillot.

Cela ne veut rien dire !

M. Claude Goasguen.

Je vous enverrai le texte pour que vous puissiez le lire ! Le PACS est un danger pour la famille, pour le présent mais aussi pour l'avenir. Le droit des personnes entraînant par nature des droits acquis, il nous sera extrêmement difficile - mais cela doit vous satisfaire, monsieur le rapporteur - de remettre en cause ce pacte. Parce que vous avez voulu passer en force sur un sujet de société, le PACS risque de perturber pendant très longtemps, beaucoup plus longtemps que notre mandature, l'ensemble de notre droit civil.

Mme Christine Boutin. Eh oui ! M. Claude Goasguen. Pour la première fois, une loi portant sur le droit des personnes aura été imposée d'une manière autoritaire, rompant avec la tradition républicaine de dialogue et de recherche du consensus - comme nous l'avions observé lors des débats sur l'adoption et sur la bioéthique.

Cependant, ne vous réjouissez pas trop tôt. Nous ne laisserons pas votre PACS étouffer les fondements juridiques de notre société.

M. François Goulard. Très bien ! M. Claude Goasguen. Nous aurons à coeur de rendre le mariage et la filiation plus attractifs par des mesures fiscales, sociales et patrimoniales.

Tout en prenant des dispositions pour assurer aux personnes homosexuelles qui le désirent un contrat privé de vie commune spécifique organisant leur liberté, sans confusion possible avec la famille, nous ferons tomber votre PACS en désuétude. Car nous entendons respecter les règles de notre droit.

Vous avez manqué de courage politique. Cédant à la pression d'associations minoritaires sans assumer le choix politique de légiférer exclusivement pour les couples homosexuels, vous avez créé une construction juridique hybride et étrange, multipliant les insatisfactions comme les confusions.

Vous pourrez bientôt vous enorgueillir d'avoir honoré - à moitié - vos engagements électoraux auprès des lobbies. Mais sachez que c'est au prix d'un bouleversement grave de l'avenir de l'institution familiale, que vous avez ainsi indirectement attaquée, sans avoir examiné au préalable les nécessaires et possibles évolutions à venir.

Il reste quelques jours aux députés de la majorité pour réfléchir aux conséquences de leurs choix idéologiques. Je ne les sens pas très fiers, malgré les cris d'une poignée d'entre eux. En tout état de cause, je vous le garantis, mes chers collègues de la majorité, nous ne tournerons pas la page. Et les Français vous demanderont des comptes sur votre PACS, lorsque viendront les échéances législatives ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme Véronique Neiertz.

Nous l'espérons bien !

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. François Goulard.

Le PACS vert !

M. Yves Cochet.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, plus de deux ans après le début de notre législature, le PACS sera définitivement adopté par notre assemblée. Ce texte était pourtant attendu par de nombreuses personnes depuis de longues années. Il est dommage que cette belle idée ait eu à pâtir des excès procéduriers de l'opposition, qui a tenté de détourner la volonté du suffrage universel exprimée lors des dernières élections législatives.


page précédente page 05532page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Je tiens par ailleurs à féliciter ceux qui, envers et contre tous,...

M. Bernard Accoyer.

Surtout envers ! (Sourires.)

M. Yves Cochet.

... ont cru en la possibilité de ce texte.

C'est grâce à leur ténacité, leur obstination et leur détermination que le PACS devient aujourd'hui réalité. C'est notamment le fruit du travail des deux rapporteurs, Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel. Mes collègues Verts et moi-même nous étions d'ailleurs associés à la proposition de loi de Jean-Pierre Michel, que celui-ci avait déposé dès le début de la législature. Que tous ces parlementaires, qui ont su relayer au sein de notre assemblée la volonté de nombreuses associations, en soient aujourd'hui remerciés.

Au-delà de ces remarques de forme, je voudrais réaffirmer ici le soutien des Verts à ce texte. Certains de nos collègues, des deux côtés de l'hémicycle d'ailleurs, aiment à évoquer et à invoquer la République quel que soit le sujet traité.

La République, c'est d'abord trois valeurs fondamentales : liberté, égalité, fraternité. Interrogeons-nous donc à propos du PACS. Cette proposition de loi renforce-t-elle la liberté, garantit-elle l'égalité et encourage-telle la fraternité entre les citoyens de ce pays ? Pour nous, la réponse à ces trois questions est claire : oui, le PACS renforce la liberté de chacun ; oui le PACS garantit l'égalité de tous ; enfin : oui, le PACS encourage la fraternité, la solidarité au sein de la République.

M. Jean-Claude Lemoine.

Quel lyrisme !

M. Yves Cochet.

Le PACS s'inscrit ainsi dans la longue lignée des avancées législatives progressistes.

Le mot liberté est inscrit en premier dans la devise républicaine. Je ne crois pas que ce soit un hasard. C'est pourquoi notre devoir de législateur est de toujours vérifier que nos projets accroissent la liberté des individus.

En intégrant le PACS à son code civil, la République reconnaît enfin le droit à chacun de choisir sa vie, ses amours, les types d'union qu'il, ou elle, souhaite contracter.

En consacrant si tardivement ce droit qui pourrait pourtant paraître élémentaire, le PACS est bien une législation qui offre plus de liberté à chacun.

Pour ce qui est de l'égalité des droits, le PACS est évidemment un grand pas dans le bon sens. Au nom de quoi, en effet, pourrait-on refuser à des individus la possibilité de sceller l'union de leur choix ? Ici ou là, j'ai entendu « au nom de la tradition ». Mais la tradition estelle la meilleure référence quand on veut construire un monde de citoyens libres et égaux, un monde de progrès ? Toute l'histoire de nos sociétés aurait plutôt tendance à démontrer le contraire.

Certains ont cru pouvoir dénoncer l'évolution vers un mariage homosexuel. M. Goasguen y faisait allusion précédemment. Eh bien, monsieur Goasguen, chers collègues et madame la ministre, honnêtement, je ne vois vraiment pas ce qu'il y aurait là de scandaleux. Je le dis clairement, les Verts n'auraient pas été défavorables à ce qu'on étende la possibilité du mariage aux couples homosexuels qui le souhaitent.

Pour autant, cela n'enlève rien à l'intérêt du PACS, qui permet aussi de répondre à d'autres aspirations. Le texte, en introduisant une définition du concubinage dans le code civil, contribue d'ailleurs à clarifier les choses. Le droit français proposera dorénavant trois types d'union : le mariage, le PACS et le concubinage, ce qui n'est pas de trop pour recouvrir les situations extrêmement différentes que nous connaissons aujourd'hui. Comme l'a indiqué le rapporteur en commission, ces unions entraîneront des effets juridiques proportionnels au degré d'engagement et de contrainte. Ces trois types de statut ont donc chacun leur utilité.

La fraternité est le troisième terme de cette fameuse devise républicaine. Un projet comme celui du PACS encourage, à n'en pas douter, la fraternité entre les citoyens de ce pays. D'abord, parce qu'il organise la solidarité entre deux personnes. Ensuite, parce qu'il a sûrement contribué à faire reculer l'homophobie dans notre pays. En inscrivant la proposition de loi sur le PACS à l'ordre du jour de notre assemblée, la majorité plurielle a incontestablement permis que s'ouvre un large débat dans la société.

Je crois même qu'on peut ajouter avec un peu de recul que ce fut un bon débat. En consacrant la reconnaissance de toutes les unions, je le répète, il a fait reculer l'homophobie, mot qui est d'ailleurs un euphémisme puisqu'on l'emploie parfois pour désigner toutes les discriminations et souvent les crimes dont ont été victimes les homosexuels. Je ne reviendrai pas sur la déportation et l'extermination des homosexuels pendant la Seconde guerre mondiale, mais je rappellerai que l'homosexualité a longtemps été considérée par l'Organisation mondiale de la santé comme une maladie mentale et que la loi Debré de 1960 parlait encore de « fléau social ».

Mme Christine Boutin.

Les communistes envoyaient les homosexuels au goulag !

M. Yves Cochet.

Après ces remarques générales, je tiens, en évoquant deux points plus particuliers de cette proposition de loi, à exprimer, au nom des Verts principalement, deux divergences avec le projet de PACS tel qu'il nous est présenté aujourd'hui.

La première porte sur le lieu de conclusion du PACS.

Nous ne comprenons toujours pas pourquoi la mairie n'a pas été retenue. Une fois de plus, la question de l'égalité des droits est sous-jacente. Mais notre attachement à la mairie est aussi de nature pratique. Souvenez-vous que mon collègue Guy Hascoët avait dit en deuxième lecture, dans la discussion générale, que la logique voudrait que ceux qui seront demain concernés par le PACS puissent trouver ce service là où la République est présente partout sur le territoire, c'est-à-dire dans les mairies. C'est tout simplement une question de bon sens.

M. François Goulard.

Il est logique, lui !

M. Yves Cochet.

Notre deuxième divergence porte sur les délais imposés pour bénéficier des droits accordés par le PACS.

Pourquoi donc ne pas avoir permis aux pacsés de bénéficier de leurs droits dès la signature du contrat ? Pourquoi maintenir cette sorte de période probatoire spécifique au PACS, qui n'est autre qu'une forme de discrimination larvée ? Quel serait donc le risque ? Soupçonne-t-on de la même manière tout mariage d'être un mariage arrangé en puissance ? Etonnante conception que celle qui veut que l'on puisse quasiment se marier du jour au lendemain et bénéficier des droits du mariage immédiatement, alors que même ses plus ardents défenseurs nous le présentent comme l'engagement le plus fort et le plus difficile à défaire, mais qui refuse que les mêmes conditions s'appliquent au PACS. Des droits plus importants sont accordés sans délai et des droits moindres ne le seraient qu'au terme d'un certain délai ? Il y a là une logique qui m'échappe.


page précédente page 05533page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Mme Christine Boutin.

Encore une incohérence !

M. Yves Cochet.

Alors même que nous avons récemment adopté un projet de loi sur le respect de la présomption d'innocence, il y a quelque chose de choquant à institutionnaliser une sorte de suspicion a priori qui pèse sur les pacsés.

On peut enfin regretter que le débat sur le PACS n'ait été, en ce qui concerne notre assemblée, que partiel. En effet, des questions restent sans réponse. La liberté de fonder une famille est un débat qu'il aurait sans doute fallu ouvrir. Les Verts regrettent qu'on le ferme par avance en se fondant sur des certitudes issues de traditions considérées comme immuables, alors même que l'expérience de nombreux hommes et de nombreuses femmes nous démontrent quotidiennement qu'il n'en est rien.

Pour conclure, il est bien clair que, comme en première et en deuxième lecture, les députés Verts voteront ce texte.

Nous ne le ferons pas pour satisfaire un quelconque lobby, comme on a pu l'entendre lors du débat en première lecture ; il s'agit simplement de la reconnaissance de droits fondamentaux de la personne humaine et de la solidarité contemporaine.

Nous ne le ferons pas non plus pour flatter qui que ce soit, ce que certains croient pouvoir appeler une communauté. Le PACS s'adresse à tous sans discrimination, et c'est justement là sa principale force.

Bref, nous voterons cette proposition de loi parce que le PACS est incontestablement une avancée républicaine et solidariste.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Il est trop facile, monsieur Cochet, de détourner notre belle devise républicaine : « Liberté, égalité, fraternité », en présentant le PACS comme un projet allant dans le sens de l'histoire et participant au progrès du droit. Nous pensons exactement le contraire.

Plus de liberté, nous dites-vous. S'il était agi uniquement de mettre fin aux discriminations subies par les homosexuels, de faire en sorte que chacun ait le droit de choisir sa vie privée, nous aurions voté avec vous des deux mains. Nous avons d'ailleurs fait des propositions concrètes en ce sens.

M. Jean-Pierre Blazy.

Quelle hypocrisie !

M. Henri Plagnol.

Mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit.

Avec le PACS, vous remettez en cause la frontière - expression d'une tradition républicaine constante entre la vie privée et la vie publique. Vous obligez à rendre publics des choix de vie privés.

M. Jean-Pierre Blazy.

Ah bon ?

M. Henri Plagnol.

Et vous le faites singulièrement pour la communauté homosexuelle. Le PACS ne représente donc pas un progrès de la liberté, mais un recul de la liberté, car il marque l'intrusion de l'Etat et du législateur dans des questions qui relèvent strictement du choix de vie de chacun.

M. Yann Galut.

Personne n'est obligé de conclure un PACS !

M. Henri Plagnol.

Plus d'égalité, nous dites-vous. Il est assez surprenant de voir la majorité se réjouir d'un texte qui érige en dogme la loi du marché s'agissant de la famille.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

On croit rêver !

M. Henri Plagnol.

Avec le PACS, en effet, c'est la loi du contrat qui s'impose, c'est-à-dire la loi du plus fort.

M. Bernard Outin.

Il reconnaît enfin que la loi du marché, c'est la loi du plus fort !

M. Henri Plagnol.

Comme il s'agit essentiellement d'un produit fiscal...

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Quelle honte de dire cela !

M. Henri Plagnol.

... le PACS privilégiera les plus favorisés. Et quand se posera le problème des contentieux judiciaires ou de la séparation - puisque, de l'aveu même de la majorité, ces couples ne sont pas aussi solides que les couples mariés - là encore, c'est la loi du plus fort qui s'imposera aux dépens du plus faible. Curieuse conception de l'égalité !

M. Bernard Outin.

C'est ça, le libéralisme !

M. Yves Durand.

Ce libéralisme si cher à vos amis !

M. Henri Plagnol.

Enfin, vous parlez de fraternité.

Mais, s'il s'agit de la fraternité républicaine, comment p ouvez-vous défendre une législation d'inspiration communautariste, aux antipodes de notre tradition...

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est faux !

M. Henri Plagnol.

... qui vous conduit à placer artificiellement sous le même statut des couples qui relèvent de situations concrètes totalement opposées ? Vous allez jusqu'à faire comme si les couples qui ont vocation à avoir des enfants pouvaient être soumis aux mêmes règles juridiques que ceux qui n'en auront pas, puisque vous prétendez que les couples homosexuels ne pourront pas adopter.

Ainsi, vous êtes conduits à détourner systématiquement de son sens notre devise républicaine...

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est faux !

M. Henri Plagnol.

... pour justifier une construction aux antipodes de notre tradition.

Mais le plus grave, c'est que vous prétendez légiférer sur le couple sans qu'il y ait la moindre conséquence pour les familles. Les grands oubliés de votre proposition, ce sont les enfants...

M. Bernard Accoyer.

Eh oui !

M. Henri Plagnol.

... puisqu'on peut penser que l'immense majorité des couples « pacsés » auront bel et bien des enfants. Or, de ces enfants, votre proposition ne dit pas un mot.

Nous sommes totalement opposés à un statut qui, pour des raisons purement idéologiques, prétend enfermer dans une même construction juridique des catégories de personnes qui relevaient de solutions concrètes totalement différentes.

Le PACS est le fruit d'une erreur de méthode doublée d'une grave erreur sur le fond. Un orateur précédent a parlé de PACS d'amour et de mariage d'intérêt. Nous, nous pensons qu'il y aura essentiellement des PACS d'intérêt et nous souhaitons qu'il puisse encore y avoir des mariages d'amour.

« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Bernard Birsinger.


page précédente page 05534page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Bernard Birsinger.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après huit mois de débats ici même et dans tout le pays, celui d'aujourd'hui va encore nous rapprocher du but. Bien sûr, l'opposition a montré sa capacité d'obstruction à un texte porteur de droits nouveaux pour les individus. Mais, d'ici à quelques semaines, une exigence majoritaire deviendra loi.

Je veux d'abord dire toute la satisfaction des députés communistes de contribuer utilement au pacte civil de solidarité. Le PACS fait avancer notre pays vers une époque nouvelle pour les droits et les libertés, pour la fin des discriminations.

Depuis le début de l'examen de cette proposition de loi, notre attitude n'a pas varié, elle est restée en permanence constructive pour ouvrir un maximum de droits nouveaux aux individus, pour aller le plus loin possible vers le respect de la personne humaine quels que soient ses choix de vie. Et cette attitude s'est avérée utile au regard des enjeux du pacte civil de solidarité.

Ces enjeux, c'est la réponse à apporter à notre société, qui évolue, à ses besoins, qui se modifient. Des aspirations nouvelles s'expriment, se transforment, grandissent.

La République n'a pas le droit de s'immiscer dans la vie privée de ses citoyens, encore moins de les juger. Elle a cependant la responsabilité d'accorder à tous sa protection, de permettre à chacun de bénéficier de nouveaux droits et libertés, à condition qu'ils n'entravent point ceux des autres. Et c'est bien ce qu'entend apporter le PACS au regard de l'évolution récente de notre collectivité nationale, et particulièrement de la famille.

Ces dernières décennies, les femmes ont pris une place nouvelle dans la société. Elles ont investi le monde du travail, et nous sommes de ceux qui s'en réjouissent pleinement. Il reste beaucoup à faire pour aller vers une réelle égalité des droits, mais ce rééquilibrage hommesfemmes a d'ores et déjà des répercussions sur la famille.

Aujourd'hui, 87 % des unions se forment hors mariage, 4,8 millions de personnes vivent en couple sans être mariées. Deux enfants sur cinq naissent hors mariage.

Deux millions d'enfants vivent avec leurs deux parents non mariés.

C'est à cette famille nouvelle que le pacte civil de solidarité entend donner une plus grande stabilité juridique.

Mme Christine Boutin.

Mais non !

M. Bernard Birsinger.

Pour s'épanouir pleinement, les citoyens, mais aussi et surtout les enfants, ont besoin d'un cadre familial solidaire et protecteur.

Mme Christine Boutin.

Vous ne croyez pas un mot de ce que vous dites !

M. Bernard Birsinger.

Lorsqu'on examine dans le détail les dispositions relatives au PACS, on constate combien ce texte permet de progresser vers la réalisation de cette exigence. Sans rien renier à ceux qui font le choix de se marier, le pacte civil de solidarité est un élément d'une politique familiale qui intègre mieux les contours contemporains de la famille.

Mme Christine Boutin.

Je croyais que le PACS n'avait rien à voir avec la famille !

M. Bernard Birsinger.

D'ailleurs, les députés communistes se réjouissent que la deuxième lecture ait permis de compléter les dispositions du PACS par l'introduction dans le code civil de la notion de concubinage sans distinction de sexe. Union libre, concubinage, pacte civil de solidarité, mariage... les couples auront désormais le choix du statut qui convient le mieux à la conception qu'ils se font de leur vie familiale.

Au-delà des droits nouveaux qu'il confère, le PACS constitue une reconnaissance sociale et juridique des couples non mariés, particulièrement les couples homosexuels. Il a une portée historique et symbolique. Avant nous, d'autres pays ont déjà reconnu juridiquement le couple homosexuel, et dans ces pays-là, on continue de vivre, de se marier et d'avoir des enfants. Il était temps que la France mette enfin le cap sur le droit à l'égalité et sur l'égalité des droits, comme l'y invitait d'ailleurs un rapport du Parlement européen adopté l'an dernier.

Sans doute parce qu'ils étaient les premières victimes des discriminations, les homosexuels et leurs associations ont eu l'immense mérite de faire grandir l'exigence de ce pacte civil de solidarité. Preuve qu'en relativement peu de temps une exigence exprimée par une minorité peut devenir une avancée significative pour l'ensemble de la société.

Pour travailler efficacement à la réalisation de cete njeu, les parlementaires communistes n'auront pas ménagé leurs efforts. Nous sommes du combat contre toute forme de discrimination, du combat pour l'égalité des droits, du combat pour l'acceptation des différences.

C'est cette conception que nous défendons avec le pacte civil de solidarité, après avoir déjà déposé une proposit ion de loi en ce sens lors de la précédente législature. C'est aussi cette conception qui nous a poussés à faire le choix d'un apport constructif pour améliorer le texte, pour ouvrir un maximum de droits nouveaux. C'est enfin cette conception qui nous a conduits à être, comme d'autres, le relais dans cet hémicycle de ceux qui se battent depuis des années sur les mêmes objectifs : je pense en particulier aux homosexuels et à leurs associations.

Associée à la détermination de la gauche plurielle et de son gouvernement, cette démarche s'est avérée efficace. Je tiens à dire combien les députés communistes se félicitent des progrès enregistrés par le texte entre sa première version, en septembre dernier, et celle qui nous est aujourd'hui soumise après deux lectures. Je citerai notamment l'amendement que nous avions déposé et qui a été adopté, visant à préciser que le PACS est ouvert à deux personnes « de sexe différent ou de même sexe » ; l'ouverture de la qualité d'ayant droit d'assuré social au partenaire lié par un PACS qui ne pourrait y prétendre à un autre titre ; la disparition des délais nécessaires avant que le survivant ne puisse bénéficier de la reprise du bail de son partenaire décédé ; la suppression des délais imposés avant de pouvoir bénéficier des abattements sur la succession du partenaire décédé ; la suppression de l'article ouvrant certaines dispositions du PACS aux fratries, celles-ci devant faire l'objet de mesures nouvelles dans le cadre d'une prochaine loi sur la famille ; l'extension de l'article 62 de la loi du 11 janvier 1984 sur la fonction publique aux personnes liées par un PACS, suite à un amendement des députés communistes ; la reconnaissance dans le code civil du concubinage sans distinction de sexe, le législateur mettant ainsi fin à la jurisprudence rétrograde de la Cour de cassation.

Oui, que de chemin parcouru depuis septembre dernier, que d'avancées obtenues vers l'égalité des droits ! Cependant le texte proposé mérite encore d'être amélioré pour répondre pleinement aux exigences de notre époque et de nos moeurs.

Ainsi, les députés communistes, comme ils l'ont fait en première lecture, proposeront que le pacte civil de solidarité soit signé à la mairie. C'est l'institution la plus proche des citoyens, la plus connue, la plus accessible. En faisant ce choix, nous ferions un grand pas supplémentaire vers la reconnaissance sociale des couples non


page précédente page 05535page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

mariés. De plus, à la mairie, la mise en oeuvre du PACS serait possible sans délais avec un personnel déjà qualifié pour les actes d'état civil.

De même, nous demanderons la suppression de tous les délais qui subsistent encore dans le texte, particulièrement ceux qui courent avant d'accéder à l'imposition commune. Les autres délais ont été supprimés ou vont l'être, pourquoi ne pas aller au bout de cette logique, pourquoi ne pas mettre résolument fin à cette forme de suspicion que de tels délais font planer sur ceux qui signent un PACS ? Permettez-moi d'évoquer tout particulièrement les couples dont la vie commune est établie depuis plusieurs années et ceux qui ont déjà des enfants.

Nous demeurons également persuadés que la loi doit ouvrir un droit au séjour plus ferme pour les étrangers liés par un PACS. Ces personnes dont les attaches effectives et familiales se situent en France doivent en effet pouvoir bénéficier de garanties de stabilité. Or le texte adopté en première lecture précise seulement que « la conclusion d'un pacte civil de solidarité constitue un élément d'appréciation des liens personnels en France ».

Nous ne pouvons nous satisfaire que la situation de ces personnes demeure assujettie au pouvoir d'appréciation des préfets. C'est la porte ouverte à des inégalités de traitement. Il faut que la conclusion d'un PACS ouvre le droit au séjour comme le mariage.

Nous regrettons aussi que l'article 40 de la Constitution ne permette pas à notre assemblée de débattre et d'adopter de justes dispositions complémentaires que les députés communistes n'ont pas manqué de déposer. Je pense particulièrement à l'abattement sur les successions, qu'il conviendrait d'aligner sur les dispositions en vigueur pour les personnes mariées, et à diverses mesures sociales comme la pension de réversion.

Il convient de veiller à ce que le PACS entre en vigueur dans les meilleurs délais. Des millions de personnes attendent l'ouverture de droits nouveaux. Dès l'adoption définitive de la loi, il conviendra que le Gouvernement prenne rapidement les décrets d'application du PACS.

Avec le pacte civil de solidarité notre société fait un pas important vers la fin des discriminations. Toutefois, dans la période qui vient, notre assemblée devra prendre d'autres dispositions pour avancer sur le chemin des droits et libertés. Je pense naturellement à la lutte contre l'homophobie. Dans le même esprit que la loi Gayssot a permis de compléter la lutte contre le racisme et la xénophobie, il serait en effet utile de doter le combat contre l'homophobie d'outils juridiques et répressifs. Il s'agit d'une exigence portée par de très nombreux démocrates et par le mouvement homosexuel.

Je suis persuadé que, comme pour le PACS, elle finira pas devenir réalité et les députés communistes y contribueront.

Enfin, les enjeux soulevés par le pacte civil de solidarité ne peuvent se limiter aux frontières de l'hexagone. Ils ont une dimension européenne. Je tiens ainsi à rappeler le rapport sur les droits de l'homme adopté le 17 février 1998 par le Parlement européen et dont mon amie Aline Pailler avait été la cheville ouvrière. Invitant tous les Etats membres à reconnaître l'égalité des droits des homosexuels, il a contribué à mettre cette question à l'ordre du jour dans notre pays.

Je ne peux que souscrire aux propos de Michela Frigiolini, jeune militante d'association homosexuelle qui juge nécessaire d'aller plus loin que le débat d'aujourd'hui et de porter le PACS au niveau européen en ces termes :

« L'harmonisation par le haut n'est plus un discours dans le vide, c'est une question qui se pose aujourd'hui concrètement. » Chers collègues, la discussion d'aujourd'hui permet de poursuivre plus avant un grand débat de société comme le furent, en leur temps, ceux sur l'IVG, la réforme du mariage ou l'abolition de la peine de mort. Depuis trente ans, notre société a eu la force de dégager de nouveaux droits et de nouvelles libertés. Le PACS est un nouveau et important moment de ce processus. Les députés c ommunistes sont de cette avancée de civilisation.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, bien des arguments présentés par l'opposition dans ce débat sur le PACS, lequel d'ailleurs - je m'adresse à M. Cochet malgré son absence - ne s'achèvera pas avec ce nouvel examen. D'autres événements suivront.

(Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

La majorité a balayé toutes les objections de l'opposition d'un revers de main, mais elle n'a cessé de modifier son projet pour tenter d'éviter les écueils juridiques que nous dénoncions.

Mme Christine Boutin.

Eh oui !

M. Patrick Devedjian.

Je pense au balai des fratries que l'on a vu entrer dans ce texte puis en sortir.

Mme Christine Boutin.

Absolument !

M. Patrick Devedjian.

Ainsi la proposition est devenue de plus en plus compliquée et les qualificatifs n'ont pas manqué pour tenter de définir juridiquement votre démarche. Je n'aurai pas la cruauté de rappeler vos variations et ces incertitudes. Je veux simplement réfléchir tout haut avec vous sur ce texte.

L'opposition a souvent déclaré que le PACS était un sous-mariage et vous avez, chaque fois, protesté vivement.

Pour nourrir cette discussion, il faudrait d'abord réfléchir à ce qu'est juridiquement le mariage. Vous parcourrez en vain tout le code civil : il n'en donne pas de définition. Il se contente d'en énoncer les caractères car le mariage est un fait social qu'il est difficile d'insérer dans une catégorie juridique.

M. Henri Plagnol.

Très juste !

M. Patrick Devedjian.

Certes, Portalis a dit que le mariage était la société de l'homme et de la femme qui s'unissent pour perpétuer leur espèce, pour s'aider par des secours mutuels à porter le poids de la vie et pour protéger leur commune destinée. Certes, le précis Dalloz nous indique que le mariage est un acte juridique solennel par lequel un homme et une femme établissent entre eux une union dont la loi civile réglemente impérativement les conditions, les effets et la dissolution.

Je reprends ces définitions car elles s'appliquent parfaitement au PACS. Cela démontre que ce dernier n'est qu'un sous-mariage ; je veux bien d'ailleurs admettre que l'emploi de la préposition « sous » est un peu polémique.

Il constitue en réalité une variété du mariage car il contient moins d'obligations. Néanmoins, il est juridiquement un autre mariage, un deuxième mariage.

M. François Goulard.

C'est vrai !

M. Patrick Devedjian.

Le concubinage, dès lors qu'il fait l'objet d'un statut juridiquement reconnu, est lui aussi un mariage. Il devient un troisième mariage.


page précédente page 05536page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Mme Christine Boutin.

Eh oui !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Soyez contents !

M. Patrick Devedjian.

Peu importe qu'on leur accole la

« sous » ou « sur », pour certains. Il s'agit à la fois d'institutions et de contrats. Le mariage, le PACS, le concubinage institutionnalisé ont des caractérisques comparables.

J'ai d'ailleurs entendu sur ces bancs l'expression de forts désirs de rapprocher davantage encore ces caractéristiques.

Vous êtes donc en train de créer trois mariages en France en autorisant leur fonctionnement par paire : on pourra être à la fois marié et concubin institutionnel, pacsé et concubin institutionnel. Vous instituez donc juridiquement la bigamie dans notre pays. Je ne peux pas appeler cela autrement. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. « Eh oui ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Sans doute le faites-vous sans même l'avoir compris !

M. Jean-Pierre Blazy.

Nous sommes tous des idiots ! Vous êtes le seul intelligent, monsieur M. Devedjian !

M. Patrick Devedjian.

Je veux bien admettre que cela n'est pas votre objectif, mais vous aboutissez à ce résultat car vous autorisez le cumul de deux états à caractère de mariage.

Le Sénat avait glissé dans son texte ce que l'on appelle, en jargon du business, une pilule empoisonnée. En effet sa proposition de substitution était incompatible avec la vôtre. Pourtant vous vous êtes crus habiles en la récupérant et en l'incorporant dans votre texte. Cette fausse bonne idée est en réalité une vraie maladresse...

M. Henri Plagnol.

Très juste !

M. Patrick Devedjian.

... car, à elle seule, elle rend votre texte inconstitutionnel, puisque la polygamie est inconstitutionnelle.

En effet, dans une décision du 12-13 août 1993, le Conseil constitutionnel a estimé que la polygamie ne constituait pas une vie familiale normale. Il a également considéré, dans une décision du 7 juin 1973, que la monogamie était un principe d'ordre public.

Mme Christine Boutin.

Très belle démonstration !

M me Véronique Neiertz.

L'endogamie aussi est inconstitutionnelle !

M. Jean Ueberschlag.

Allez, à la buvette !

Mme Véronique Neiertz.

C'est un lieu que vous connaissez mieux que moi !

M. Patrick Devedjian.

Je rappelle que, dans son article 433-20, le nouveau code pénal condamne la bigamie.

Votre entêtement nous conduit naturellement à placer l'essentiel de nos espoirs dans le Conseil constitutionnel, véritable défenseur de notre ordre fondamental. Je crois que vous nous avez donné un moyen royal.

Il est bien vrai que la dilution du statut de la famille contribue à son affaiblissement. Je ne conteste pas qu'en créant deux statuts nouveaux vous espérez permettre la recomposition d'autres familles.

Mme Véronique Neiertz.

Voilà !

M. Patrick Devedjian.

Mais l'enfer est pavé de bonnes intentions, madame Neiertz.

M. Jean Besson.

L'enfer, c'est elle, et ça se voit !

M. Patrick Devedjian.

Je suis évidemment convaincu que vous n'êtes pas contre la famille, madame, vous en avez une et vous l'aimez, ...

Mme Véronique Neiertz.

Merci !

M. Patrick Devedjian.

... même s'il arrive à certains d'entre vous d'écrire des bêtises, par exemple pour affirmer que la famille est un instrument de perpétuation des inégalités sociales.

Mme Véronique Neiertz.

Personne n'est parfait !

M. Patrick Devedjian.

Malgré ces petits dérapages, je crois que vous êtes attachés à vos familles. Cependant vous en prenez moins soin que nous. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Pierre Blazy.

Inadmissible !

Mme Véronique Neiertz.

Comment pouvez-vous dire cela ! Vous ne vous occupez même pas de vos enfants ! (Protestations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Patrick Devedjian.

Vous prenez moins soin de l'institution familiale que nous.

Mme Véronique Neiertz.

La double journée, vous ne savez pas ce que c'est, vous !

M. Patrick Devedjian.

Je ne parle pas de vos familles personnelles, mais de l'institution qu'est la famille, dont vous prenez moins soin que nous parce que vous la surchargez fiscalement.

Mme Véronique Neiertz.

Vous rentrez et vous mettez les pieds sous la table, quand les gosses ont fait leurs devoirs et sont couchés !

M. Patrick Devedjian.

Pourtant, il n'y a rien de plus moderne que la famille.

Mme Véronique Neiertz.

Vous voulez nous donner des leçons de famille ! C'est à peine croyable ! (Protestations sur les mêmes bancs.)

M. Jean Ueberschlag.

Eh, ça va, à la buvette, madame Neiertz !

M. Jean Besson.

Monsieur le président, il faut lui imposer un contrôle anti-dopage !

M. Patrick Devedjian.

Madame Neiertz, c'est un vrai bonheur que de vous entendre.

M me Véronique Neiertz.

Contente que vous le reconnaissiez !

M. le président.

Monsieur Devedjian, un instant, permettez-moi de demander à Mme Neiertz si elle souhaite vous interrompre. Si tel est le cas, et si vous êtes d'accord, elle se lève et prend la parole.

M. Patrick Devedjian.

Je suis d'accord, monsieur le président, ne serait-ce que pour m'éviter de l'entendre vociférer.

M. le président.

Souhaitez-vous interrompre l'orateur, madame Neiertz ?

Mme Véronique Neiertz.

Volontiers. Si M. Devedjian le permet !

M. le président.

Il nous a déjà fait part de son accord.

Au moins les choses se passeront-elles dans le silence.


page précédente page 05537page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Patrick Devedjian.

Cela vaudra mieux que de m'interrompre.

M. le président.

La parole est à Mme Véronique Neiertz avec l'autorisation de l'orateur.

Mme Véronique Neiertz.

Cela ne m'étonne pas car, avec M. Devedjian, nous avons toujours eu des relations (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) extrêmement courtoises.

M. Patrick Devedjian.

Bien sûr.

Mme Véronique Neiertz.

Qu'allez-vous chercher ? Quel mauvais esprit.

M. Patrick Devedjian.

Personne n'avait compris autre chose, madame Neiertz.

Mme Véronique Neiertz.

Merci, monsieur Devedjian.

Il nous est même arrivé d'être d'accord.

M. Patrick Devedjian.

Bien sûr.

Mme Véronique Neiertz.

Cela nous est même arrivé en commission.

M. Patrick Devedjian.

Bien entendu.

Mme Véronique Neiertz.

Tel a été le cas, par exemple, pour le texte reconnaissant le génocide arménien.

M. Patrick Devedjian.

Que cette logique n'a-t-elle été suivie par le Gouvernement jusqu'au Sénat...

Mme Véronique Neiertz.

Et ne soit pas reprise par le Sénat lui-même !

M. Patrick Devedjian.

Je le déplore.

M. le président.

Monsieur Devedjian, Mme Neiertz a demandé à vous interrompre, laissez-la parler. N'engagez pas un dialogue particulier.

M. Jean Besson.

On se croirait à Roland-Garros !

M. Jean Ueberschlag.

Pour le moment, elle n'a rien à dire !

Mme Véronique Neiertz.

J'ai toujours quelque chose à dire à M. Devedjian, il le sait bien.

M. le président.

Madame Neiertz, venez-en au fait, je vous en prie.

Mme Véronique Neiertz.

Mes chers collègues, vous avez bien de la chance d'entendre, ce soir, dans un débat aussi important et aussi sérieux, M. Devedjian nous donner une leçon sur la famille.

M. Jean Besson.

Une bonne leçon !

Mme Véronique Neiertz.

Il est assez inattendu, pour qui connaît la vie que mènent les femmes députées, de voir un député masculin nous expliquer comment on élève des enfants, comment on fait marcher la maison, comment on est aussi des épouses et des mères.

M. Jean Ueberschlag.

Vous dites vraiment n'importe quoi !

Mme Véronique Neiertz.

En la matière un peu de pudeur s'impose, mais je ne sais pas si cela est possible dans cette enceinte, surtout dans ce débat.

M. Jean Ueberschlag.

Et quand on pense que cela va paraître au Journal officiel !

Mme Véronique Neiertz.

Davantage de discrétion serait de mise (Sourires sur divers bancs.) dans un discours qui pourrait être relativement sérieux, surtout de votre part, monsieur Devedjian. ( Sourires.)

M. Jean Ueberschlag.

Arrrêtez-la, monsieur le rapporteur !

M. Jean Besson.

Soumettez-la au contrôle antidopage !

Mme Véronique Neiertz.

Il vaudrait mieux ne pas chercher la provocation et ne pas aborder des sujets que, peut-être, vous ne connaissez pas suffisamment.

M. Jean Ueberschlag.

Quel beau morceau d'anthologie !

M. le président.

Je vous remercie, madame Neiertz.

M. Devedjian, veuillez poursuivre votre intervention, et non pas une discussion particulière avec Mme Neiertz.

M. Patrick Devedjian.

Monsieur le président, j'espère simplement que, ayant ainsi assouvi son envie de m'interrompre, Mme Neiertz me laissera continuer.

M. le président.

Oui, poursuivez.

M. Patrick Devedjian.

Lorsque je parlais de la conception de la famille, je me gardais bien d'entrer dans la vie personnelle de chacun. J'opposais les conceptions qu'ont de la famille la gauche et la droite. Je le précise pour ceux qui n'auraient pas suivi.

Je répète donc que la gauche, qui a surchargé fiscalement la famille, prend certainement moins soin d'elle que la droite au plan du fonctionnement des institutions.

(« Très bien ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Même si la famille peut sembler une institution ringarde...

Mme Muguette Jacquaint.

Qui a dit ça ?

M. Patrick Devedjian.

... elle demeure une notion très moderne, parce qu'elle est encore la meilleure des solidarités. La famille est plus sûre que le RMI.

Elle constitue également le meilleur moyen de l'intégration. J'ai ainsi observé, dans les banlieues difficiles, que s'intégrent plus facilement ceux qui ont la chance d'avoir une famille pour s'occuper d'eux. La famille confère la plus précieuse des éducations. Vous le pensez d'ailleurs aussi, mais vous êtes aveuglés par une vision communautariste de la société. Là est le problème qui sépare profondément la gauche et la droite : vous concevez la société comme une juxtaposition de communautés. D'ailleurs, votre proposition de loi se réfère expressément, dès les premières lignes, à la notion de communautés.

D'une manière générale, votre politique sociale et sociétale traite la société par tranche, et vous légiférez chaque fois pour une catégorie de citoyens déterminée. L'intention électorale n'est d'ailleurs pas toujours absente de cette préoccupation, de cette démarche. Mais c'est surtout votre vision de la société qui est communautariste.

A droite, nous pensons que la République est universelle...

M. Jean-Pierre Blazy.

Nous aussi !

M. Patrick Devedjian....

et que ses institutions doivent s'adresser à tous.

Mme Odette Grzegrzulka.

Nous aussi ! Vous n'avez pas le monopole !

M. Patrick Devedjian.

Nous le pensons donc pour le mariage. En estimant que cette institution a vocation à demeurer unique. Or vous en créez trois. C'est la raison pour laquelle, d'une manière aussi déterminée que lors des précédentes lectures, nous voterons systématiquement


page précédente page 05538page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

contre votre texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'adoption du pacte civil de solidarité suscite, depuis des mois, de longs et vigoureux débats. Nous le constatons encore ce soir. L'Assemblée nationale a procédé, en deuxième lecture, à d'importantes modifications, mais, face au dogmatisme de la majorité sénatoriale qui a rejeté la proposition de loi, j'adhère pleinement à la décision de nos rapporteurs, Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel - dont je salue au passage le travail et la ténacité -, de conserver à l'identique le texte adopté par notre assemblée lors de son dernier examen. Ce texte a en effet le mérite d'être parvenu à un réel équilibre sans avoir rien perdu de son caractère novateur et audacieux.

La création du PACS trouve son point de départ dans la volonté de mettre en phase la législation avec la réalité sociale contemporaine. Elle s'appuie sur le constat indéniable que des couples, en nombre croissant, qui ont un projet de vie commune ne veulent pas ou ne peuvent pas se marier. La PACS est donc une forme nouvelle d'union civile.

Cela ne constitue en rien une attaque contre la famille, car ce qui fait la famille, c'est l'enfant. La famille demeure la cellule de base de la société, le lieu privilégié de socialisation de l'enfant, mais ses formes et sa configuration évoluent dans le temps.

S'en tenir obstinément aux schémas traditionnels de la famille et du couple revient à se voiler la face, à refuser de voir et de prendre en compte les évolutions du monde qui nous entoure. Ce comportement conduit, à terme, non seulement à exclure une partie croissante de la population de la reconnaissance juridique et sociale, mais à s'exclure soi-même, en tant que législateur dogmatique, de la réalité sociale.

Le PACS prend de plus en compte un état de fait : l'homosexualité, que vous, messieurs et mesdames de l'opposition, avez toujours niée et rejetée comme un comportement déviant, pervers. Réduits à la marginalité et au secret honteux du fait de l'intolérance d'une partie de la société, les homosexuels revendiquent aujourd'hui un statut légal leur permettant de vivre à deux et d'être reconnus en tant que citoyens et membres à part entière de notre société. Le PACS leur offre cette possibilité.

Nous avons refusé, monsieur Devedjian, contrairement à ce que vous venez d'affirmer, de créer une caste juridique spécifique à ce groupe car, au nom de l'universalisme des valeurs de la République que nous défendons, comme vous, nous n'acceptons pas la « ghettoïsation » juridique ou culturelle d'une partie de nos concitoyens.

M. Jean Ueberschlag.

Pour vous, l'homosexualité est une valeur universelle ?

M. Jean-Pierre Blazy.

Cette proposition de loi est assurément moderne. Elle garantit droits et protection à tous les couples qui ne peuvent ou ne veulent pas se marier.

Près de 5 millions de personnes seront ainsi concernées par le PACS.

M. Jean Ueberschlag.

Vous dites 5 millions. Avez-vous des fichiers pour citer ce chiffre ? La garde des sceaux a-telle des fichiers ?

M. Bernard Outin.

Cela suffit !

M. Jean Ueberschlag.

Mais enfin, sur quoi se base-t-il pour affirmer cela ? Ou bien il a des fichiers, ou bien il dit n'importe quoi !

M. Jean Besson.

Il dit n'importe quoi.

M. Jean-Pierre Blazy.

L'enjeu est celui du respect par l'Etat des choix amoureux de chacun, sans déterminer à la place des individus le sexe de leur partenaire. Face à une société où triomphent les valeurs de liberté, de changement, d'innovation, de construction individuelle et autonome de sa vie, le PACS représente un effort d'adaptation des structures juridiques aux tendances culturelles de fond.

Mais le fait de proposer au citoyen un choix réel quant à sa vie de couple ne doit pas s'apparenter, j'en suis bien conscient, au choix d'un pur consommateur testant à sa guise les différentes formules à sa disposition. Inscrit dans une démarche de liberté individuelle accrue et de responsabilité, le PACS se garde néanmoins de rentrer dans une logique consumériste et individualiste par l'établissement de droits et de devoirs.

Le PACS ne menace en rien l'institution du mariage...

Mme Monique Collange.

Tout à fait !

M. Jean-Pierre Blazy.

... contrairement à ce que l'opposition tente de faire croire. Ce n'est pas un sousmariage, monsieur Devedjian.

M. Bernard Accoyer.

Si !

M. Jean-Pierre Blazy.

Votre délire « intello-juridicoprovocateur » (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) vous conduit à nous accuser même d'instituer la bigamie, la polygamie.

M. Jean Besson.

C'est le cas !

M. Jean-Pierre Blazy.

Les liens du mariage conservent toute leur spécificité, tous leurs avantages et obligations propres. La famille demeure étroitement liée au mariage puisque le PACS est étranger au droit de la famille, neutre au regard du droit de filiation, de l'autorité parentale, de l'adoption et de la procréation médicalement assistée.

M. Jean Besson.

Votre intervention est très décevante !

M. Jean-Pierre Blazy.

L'instauration du PACS ne fait donc qu'ajouter un lien de solidarité supplémentaire. Le PACS est un contrat, un engagement responsable qui vise à tisser des liens étroits et durables entre les personnes.

Les adversaires invétérés du PACS sur les bancs de l'opposition négligent volontairement et systématiquement les devoirs impliqués par la signature d'un PACS.

Les partenaires se doivent aide mutuelle et matérielle. Ils sont solidaires à l'égard des dettes contractées par l'autre pour les besoins de la vie courante. Les biens acquis, sauf s'ils en conviennent différemment, sont indivis. Toutes ces obligations assurent un équilibre des droits et des devoirs qui défie tout dogmatisme.

Et pour tous ceux qui, parmi vous, mesdames, messieurs de l'opposition, tel M. de Courson, qualifient fallacieusement le PACS de porte ouverte à la fraude fiscale, je voudrais dire que si, pour vous, la vie commune se réduit à la recherche d'avantages fiscaux, vous nous donnez là une bien piètre image du mariage dont vous vous attribuez indûment le rôle de défenseur.

Mme Monique Collange.

Bravo !


page précédente page 05539page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Jean-Pierre Blazy.

Entre tolérance vis-à-vis des choix de vie personnels et encouragement à une solidarité renforcée entre citoyens, le PACS est une réponse adaptée aux exigences de notre époque.

En vous engageant dans une obstruction démesurée, mesdames et messieurs les membres de l'opposition, vous menez une fois de plus une bataille d'arrière-garde. Votre attitude rétrograde et réactionnaire...

M. Bernard Accoyer.

Encore ?

M. Jean-Pierre Blazy.

... ne fait que confirmer à ceux qui contestent la pertinence d'un clivage droite-gauche l'abîme qui existe toujours à la fin de notre siècle entre les partis de la réaction et ceux de la modernité.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Ueberschlag.

C'est un discours soixantehuitard.

M. Jean Besson.

C'est en 1968 que vous avez écrit votre discours, M. Blazy ?

M. Jean-Pierre Blazy.

Votre rejet du PACS est totalement stérile. Vous n'avez tenté à aucun moment - on le voit encore ce soir - de participer au débat de façon constructive. Vous vous êtes contentés d'agiter de vieux démons - mariage homosexuel, fin de la famille - pour attiser la peur et justifier votre repli dans le réduit idéologique dans lequel vous vous enfermez sur cette question comme sur d'autres.

M. Jean Besson.

Oh là là !

M. Jean-Pierre Blazy.

Le PACS, je voudrais le dire pour terminer (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas trop tôt !

M. Jean-Pierre Blazy.

... est, comme le mariage, (« Oh ! » sur les mêmes bancs) au service de l'amour et non de l'intérêt, monsieur Plagnol. Un amour affiché librement, un amour digne de respect, quelles que soient les préférences sexuelles, un amour vécu dans un cadre citoyen...

M. Lionnel Luca.

Ah, très important, le cadre citoyen !

M. Jean-Pierre Blazy.

... et pleinement reconnu par l'ensemble de la société.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin.

M. Daniel Marcovitch.

La seule femme à droite intéressée par le PACS. On la met à toutes les sauces.

Mme Christine Boutin.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, messieurs les rapporteur, mes chers collègues, avant toute chose, je voudrais donner lecture d'un extrait du compte rendu de la première commission du Congrès des notaires de France, réuni à Marseille entre les 9 et 12 mai derniers. La première commission, qui devait traiter de l'union libre, disait ceci : « Le défi paradoxal d'encadrer dans des textes législatifs les relations de ceux qui souhaitent avant tout n'avoir aucune contrainte n'est pas nouveau : si le code civil n'a pas encore été véritablement adapté pour prendre en compte cette évolution, ce n'est pas faute d'avoir vu se succéder de nombreuses propositions de loi. » Et les notaires de

poursuivre. « Il ne nous appartient pas de discuter des choix idéologiques, moraux, propres à chacun. Notre mission quotidienne est d'appliquer la loi et de fournir des solutions raisonnées, équitables et sécurisées aux problèmes qui nous sont posés. Il semble, à l'heure où nous écrivons, que le dernier texte sur le PACS ne constitue pas une réponse claire et adaptée. Ses lacunes techniques sont nombreuses et la volonté politique est tellement présente qu'elle s'exprime au détriment de l'efficacité technique »

M. Daniel Marcovitch.

Personne n'est obligé de signer un PACS !

Mme Christine Boutin.

Ce n'était donc pas mentir que de faire référence aux réticences des notaires sur ce texte comme nous le faisions tout à l'heure avec M. de Courson.

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Il faut dépoussiérer les notaires.

Mme Christine Boutin.

Et je regrette que les mots de M. Michel à notre encontre aient dépassé sa pensée, ce à quoi il ne nous avait pas habitués.

M. Jean Besson.

Tout à fait !

Mme Christine Boutin.

Nous nous retrouvons donc aujourd'hui pour parler du PACS.

Ne croyez-vous pas qu'à l'occasion de ces débats, nous aurions dû, ou pu, nous interroger tous ensemble et confronter nos projets de société respectifs.

Mme Dominique Gillot.

Nous n'avons pas les mêmes !

M. Jean Besson.

Evidemment si nous avions les mêmes il n'y aurait pas à les confronter !

Mme Christine Boutin.

... au lieu de nous limiter à l'étude des revendications des lobbies minoritaires des personnes homosexuelles ? L'opposition n'a cessé de poser des questions de fond auxquelles elle n'a pas eu de réponse. A toutes nos questions, il nous a été répondu par des faux-fuyants. Il est temps d'arrêter ces tours de passe-passe et d'en finir avec l'éternel paquetage...

M. Daniel Marcovitch.

Pacsage, pas paquetage !

Mme Christine Boutin.

... des procès d'intention et des invectives.

Contrairement à l'affirmation de nombreuses fois répétées en commission des lois et dans l'hémicycle, la notion de couple ne peut être radicalement séparée de celle de famille. Disons les choses clairement : nous n'avons pas la même conception de la famille...

Plusieurs députés du groupe socialiste et du groupe communiste.

C'est bien vrai !

Mme Christine Boutin.

... et le PACS en est le révélateur. Il semble que vous craigniez de le reconnaître. D'ailleurs, cela se comprend : le reconnaître serait manifester la formidable incohérence gouvernementale dans laquelle cohabitent le PACS et l'affirmation d'une volonté de renforcer la famille au sens commun du terme, comme vous ne cessez de le dire.

Derrière le mot famille, nous ne mettons pas la même réalité.

M. Yann Galut.

Ça, c'est vrai !

Mme Christine Boutin.

Pour les uns, la famille se définit par rapport à ce qui la constitue de façon universelle, par l'ensemble des facteurs et des propriétés qui la carac-


page précédente page 05540page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

térisent. Elle naît de l'union d'un homme et d'une femme qui décident ensemble et dans le cadre d'un projet commun d'avoir et d'élever un ou plusieurs enfants.

M. Jean Besson.

Bravo !

Mme Christine Boutin.

Cette définition prend acte de trois éléments constitutifs que la famille est seule à regrouper : la différence sexuelle, l'engagement et la filiation.

Pour les autres, il y a famille dès lors qu'il existe un seul de ces éléments constitutifs, et plus particulièrement la présence d'un enfant. Nous l'avons entendu plusieurs fois ce soir.

Mme Dominique Gillot.

Eh oui !

Mme Christine Boutin.

Peuvent constituer une famille toutes les situations de fait dans lesquelles se retrouvent un adulte au moins et un enfant au moins, reliés par un lien de filiation.

Mme Dominique Gillot.

Voilà, c'est la première expression de la famille !

Mme Christine Boutin.

Selon la conception à laquelle on se rallie, les conséquences à tirer en matière de politique familiale sont naturellement différentes. Et les orientations que chacun d'entre nous souhaite donner à la société le sont tout autant.

On nous dit que nulle part la famille n'est définie, ou encore que sa définition serait susceptible d'évolution.

Prétendre cela constitue un défi aux règles de la logique.

La réalité, c'est que l'existence du PACS provoquera un affaiblissement de l'attrait pour un homme et une femme de s'engager avec l'intention d'avoir un ou plusieurs enfants.

Mme Dominique Gillot.

Bien au contraire !

Mme Christine Boutin.

Vous niez que cette réalité-là puisse être seule désignée par le terme

« famille » ?

M. Daniel Marcovitch.

Vous avez tellement dénigré le PACS !

Mme Christine Boutin.

Vous refusez que des situations radicalement différentes de celle-là ne puissent être appelées du terme « famille » ?

Mme Dominique Gillot.

Pas du tout !

Mme Christine Boutin.

C'est votre droit. Mais c'est porter la confusion dans le débat que de vouloir désigner par les mêmes mots des réalités aussi radicalement différentes que deux personnes homosexuelles vivant avec un enfant d'un côté et, de l'autre, une femme et un homme vivant avec un enfant.

M. Yann Galut.

C'est la famille plurielle !

Mme Christine Boutin.

Et la réalité est bien plus importante que tous les concepts que vous essayez d'englober dans cette définition.

Tous les enjeux du PACS ont été dénoncés un à un, tous les arguments invoqués en sa faveur ont été démontés un à un.

Alors maintenant, il nous reste une seule question à nous poser, mes chers collègues : quelle famille et quelle société voulons-nous pour demain ?

Mme Dominique Gillot.

Une société de solidarité !

Mme Christine Boutin.

Une société composée d'une juxtaposition d'individus, chacun n'étant responsable que de sa propre personne, ou une société dont le socle premier est la famille ? Une société fondée sur l'individualisme ou une société fondée sur la solidarité ?

M. Yann Galut.

Le PACS, c'est le contraire de l'individualisme !

Mme Dominique Gillot.

C'est la solidarité réciproque !

Mme Christine Boutin.

Une société fondée sur l'irresponsabilité et l'illusion ou une société fondée sur le sens de l'engagement et de la réalité ? Une société craintive ou une société audacieuse ? Une société destructurée ou une société qui fournira des repères solides à nos enfants ? C'est bien là l'enjeu du PACS.

La position de chacun par rapport au PACS trahit sa profonde conception de la société et de la personne humaine. Vous voulez du PACS ? C'est votre droit. Mais acceptez au moins de reconnaître que cela n'est pas sans conséquence sur la famille, et qu'il modifiera profondément le visage de notre société.

M. Daniel Marcovitch.

Il faut conclure !

Mme Véronique Neiertz.

Les cinq minutes sont passées !

M. Bernard Outin.

C'est l'heure !

Mme Christine Boutin.

Reconnaissez que cela nie le principe de l'altérité homme-femme, qui est le principe fondateur de toute construction sociale et politique.

Je sais que nous n'avons pas tous les mêmes aspirations pour l'avenir, et c'est normal. C'est justement pour cette raison que nous ne pouvons ignorer que nous nous trouvons à une bifurcation. Nous devons choisir entre deux routes. Pour ou contre le PACS, le vote n'est pas neutre.

Et il faut que chacun d'entre nous puisse effectuer ce choix en toute liberté et en pleine conscience des enjeux.

M. Yann Galut.

C'est ce que nous faisons.

Mme Christine Boutin.

Puisque vous voulez le PACS, vous l'aurez peut-être. (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.) La majorité parlementaire est au garde-à-vous. J'aimerais pouvoir me rassurer en me disant que vous seuls en porterez la responsabilité.

Mme Odette Grzegrzulka.

Evidemment.

Mme Christine Boutin.

Mais l'ennui, c'est que tous les Français en supporteront les conséquences. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Monique Collange.

Ils ne sont pas obligés de signer un PACS.

M. le président.

La parole est à Mme Yvette Benayoun-Nakache, dernier orateur inscrit.

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs les députés, lourde tâche que celle de succéder à Mme Boutin à cette tribune et de clore la discussion générale. (Sourires.)

Mme Odette Grzegrzulka.

Votre intervention ne peut être que meilleure !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Ce texte important revient donc pour la troisième fois devant notre assemblée. Cela exige que l'on s'y arrête plus que de coutume.

MM. les sénateurs n'en peuvent certainement plus, car, en deuxième lecture, ils ont tout simplement proposé de supprimer le texte, et de réduire ce projet de société à une définition nouvelle du concubinage. C'est à se demander s'ils ont réellement examiné le texte.


page précédente page 05541page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Pour ma part, je n'ai qu'un regret : celui de voir la verve acide que le projet du PACS a suscitée, le conservatisme de certains élus et de certains de nos concitoyens et concitoyennes qu'il a mis au jour, et dont on a malheureusement retrouvé l'écho dans les débats sur la parité, ou, plus récemment encore, sur celui des gens du voyage ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Ueberschlag.

Oh là là !

M. Bernard Accoyer.

Vous mélangez tout !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

C'est là qu'on se rend compte à quel point il est difficile d'introduire des idées nouvelles, qui dérangent des schémas classiques, bien ancrés dans la mentalité de certaines couches de notre société.

En ce qui concerne le PACS, on aura tout entendu, ...

M. Jean Besson.

Et nous, nous aurons tout vu !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

... et vu la résurgence d'un ordre moral constitué autour du seul noyau familial traditionnel, faisant de l'homosexualité un danger...

M. Jean Ueberschlag.

Pas pour nous !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

... une menace face à ce qui est communément admis comme étant normal.

Les homosexuels se sont ainsi vu érigés en boucs émissaires d'un projet qui ne s'adresse pas qu'à eux, accusés de constituer un lobby exerçant des pressions visant à défaire l'ordre social et entraînant nos concitoyens dans un laisser-aller malsain, comme je l'ai lu dans la multitude de lettres que j'ai reçues à ce sujet.

Certains croient peut-être que l'avènement du troisième millénaire sera celui d'événements apocalyptiques et que l'homosexualité y sera pour quelque chose...

M. Jean Ueberschlag.

Sodome et Gomorrhe !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

... ce qui est pour le moins étonnant, vu que l'homosexualité est un des phénomènes sociaux les plus anciens, affirmé depuis la démocratie athénienne. Etouffée par le christianisme, elle est devenue un phénomène de transgression dans nos sociétés modernes. Il n'y a rien de vraiment nouveau qui laisse présager un tel renversement.

Au contraire, je suis bien heureuse d'appartenir à ceux et à celles qui, à travers la défense de ce projet, défendent non pas des formes de déviance sociale mais bien des idées qui contribuent au progrès et à l'affirmation des valeurs humanistes - eh, oui, messieurs de l'opposition ! que tout le monde aime s'accaparer, sans crainte de leur faire défaut au moment de les engager dans des projets de société.

M. Jean Ueberschlag.

A commencer par vous !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Ce texte est pour moi une des pièces maîtresses de notre action, à travers laquelle nous affirmons notre volonté de voir évoluer le lien social vers plus de tolérance et de connaissance de l'autre.

Avec le projet de loi sur les gens du voyage...

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas ce qui est à l'ordre du jour ce soir !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

... on écoute les gens du voyage et leurs besoins, et on tente de mettre en place un compromis qui permette une bonne coexistence dans le respect de nos différences.

M. Bernard Accoyer.

Vous vous êtes trompée de papiers !

M. François Goulard.

Apportez-lui les bonnes pages !

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Avec le PACS, on écoute les millions de personnes qui se reconnaissent dans une forme d'union qui n'est pas le traditionnel mariage.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Veuillez laisser parler Mme BenayounNakache.

M. Jean Besson.

Ce n'est pas le bon discours, monsieur le président. Autant l'arrêter.

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Monsieur le président, l'opposition ne m'empêchera pas de parler. Je vous remercie, en tout cas, de m'aider à garder la parole.

Il est compréhensible que les personnes et groupes de personnes ayant érigé ces formes traditionnelles de liens en modèle unique de société s'insurgent face à des projets qui les bousculent sans pour autant les remettre complètement en question. Ce sont bien eux qui, aujourd'hui, font figure de lobbies nous inondant de pressions et discours acerbes, se laissant parfois aller à des considérations qui font froid dans le dos. Ils ne nous donnent, à nous, et à toutes celles et ceux qui se sont mobilisés pour le PACS que plus de force pour défendre nos idéaux d'ouverture et de tolérance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Motion de renvoi en commission

M. le président.

J'ai reçu de M. José Rossi et des membres du groupe Démocratie libérale et Indépendants une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le malheureux feuilleton du pacte civil de solidarité restera dans les annales parlementaires, pourtant riches, comme l'exemple absolu de ce qu'il ne faut pas faire : préparation laborieuse d'un texte, choix hypocrite d'une initiative parlementaire, conduite inconséquente du débat et surtout, sur le fond, un texte mal pensé, malvenu, inopportun, inutile, injuste, dangereux et lourd de conséquences pour l'avenir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indép endants, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République.)

Mme Monique Collange.

Oh !

Mme Dominique Gillot.

C'est vous qui le dites !

M. Bernard Accoyer.

Oui, et très bien dit !

M. Yvette Benayoun-Nakache.

Les électeurs apprécieront ! (M. Yves Cochet remplace M. Arthur Paecht au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

Poursuivez, monsieur Goulard.

M. François Goulard.

Mais, dans cette affaire, s'il y a une constante, quelque chose qui n'a pas changé, du début à aujourd'hui et jusqu'à la fin...


page précédente page 05542page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Bernard Outin.

C'est la droite !

M. François Goulard.

... c'est le combat résolu, déterminé que nous, députés de l'opposition, avons conduit et voulons continuer à conduire contre ce mauvais projet.

M. Pierre-Christophe Baguet.

Très bien !

M. François Goulard.

Vous espériez peut-être, mes chers collègues de la majorité, voir la combativité de l'opposition s'émousser, sa résolution faiblir, son courage retomber. (« Mais non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Eh bien non !

M. Henri Nayrou.

C'est très bien comme ça !

M. François Goulard.

Vous pensiez sans doute, Gouvernement et majorité, en inscrivant ce débat de troisième lecture à quelques jours de l'élection européenne, nous voir absents de ce débat. Eh bien non !

M. Bernard Outin.

Vous nous auriez manqué !

Mme Odette Grzegrzulka.

Si vous n'existiez pas, il faudrait vous inventer !

M. François Goulard.

Comme d'autres, engagés dans la campagne européenne, j'ai pensé qu'il était de mon devoir, ce soir, de venir dire à nouveau, à cette tribune, mon opposition à ce projet (« Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

L'opposition, parce que c'est son rôle et parce que c'est sa conviction la plus profonde, s'opposera jusqu'au bout au projet de pacte civil de solidarité.

M. Francis Hammel.

Quel courage ! Quelle abnégation !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Ne changez surtout pas !

M. François Goulard.

Au demeurant, s'il venait à l'esprit de quelqu'un de contester notre droit de le faire à chaque lecture,...

Mme Raymonde Le Texier.

Surtout pas !

M. François Goulard.

... avec toute l'insistance que nous entendons y mettre, il se tromperait lourdement au regard des exigences de la démocratie et du respect fondamental des droits de l'opposition.

Mme Christine Boutin.

Eh oui !

M. François Goulard.

Si notre Constitution a organisé des navettes entre l'Assemblée nationale et le Sénat, si notre règlement a prévu des motions de procédure, telles que le renvoi en commission, c'est bien pour que l'examen des lois soit entouré de toutes les précautions nécessaires, donne lieu à tous les débats souhaitables et permette à toutes les convictions de s'exprimer.

M. Bernard Outin.

C'est du remplissage !

Mme Christine Boutin.

Non, c'est la démocratie !

M. François Goulard.

De la même façon, notre droit de déposer des amendements est absolu et ne doit pas souffrir de limites.

Dès les premiers moments de la préparation de ce texte, la méthode retenue n'a pas été la bonne. Sur des sujets aussi difficiles, qui touchent à la vie privée, aux sentiments personnels, et à supposer que l'on veuille apporter des réformes, il faut faire prévaloir la plus large concertation, entendre toutes les familles de pensée, toutes les associations concernées et laisser tout son temps à la réflexion. Manifestement, ce n'est pas ce que vous avez fait. Pressés par une toute petite minorité agissante, vous avez pensé que deux rapports préparatoires, au demeurant parfaitement contradictoires, pouvaient faire office de débat et préparer suffisamment les esprits. Vous auriez pourtant dû sentir, dans tout notre pays, dans tous l es milieux, dans toutes les catégories, de la part d'hommes et de femmes de toutes convictions religieuses ou philosophiques, une hostilité réelle à vos projets.

Vous avez également choisi d'avancer masqués : au lieu d'oser présenter un projet de loi qu'il aurait pleinement assumé, le Gouvernement a préféré jouer la fausse initiative parlementaire téléguidée.

Mme Christine Boutin.

Eh oui !

Mme Dominique Gillot.

C'est insultant !

M. François Goulard.

La presse nous donnait le détail des arbitrages rendus au sein du Gouvernement ; nous en suivions les détours. La chancellerie tenait la plume, mais vous vous abritiez derrière la fiction d'une proposition de loi, ce dont personne n'a été dupe. Ce manque de courage politique n'a pas été un facteur de clarification pour l'opinion ; bien au contraire, il a fait planer la suspicion sur l'ensemble de la manoeuvre.

Puis vint le PACS première formule dont vous escomptiez, en l'inscrivant à l'ordre du jour en fin de semaine, qu'il serait discrètement voté. L'adoption de l'exception d'irrecevabilité présentée par mon collègue Jean-François Mattei fut un coup de tonnerre, révélateur d'une puissante mobilisation de l'opposition, sans doute, mais surtout révélateur d'un malaise évident parmi les députés socialistes.

Nous nous souvenons tous de cette journée du 9 octobre 1998, des efforts désespérés du président du groupe socialiste pour rameuter ses troupes, des vaines tentatives d'une majorité soudain devenue minoritaire pour faire durer la discussion, des explications de vote... Hélas ! Les quelques heures gagnées ne suffirent pas à convaincre ceux d'entre vous qui avaient délibérément préféré leurs pantoufles et leur circonscription à l'affirmation d'une position que leurs électeurs réprouvaient et continuent de réprouver. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Daniel Marcovitch.

Combien sont-ils pour vous soutenir ce soir ?

Mme Christine Boutin.

L'enjeu n'est pas le même !

M. François Goulard.

Ce soir-là, les députés socialistes ont voté avec leurs pieds qu'ils eurent très lourds au point de ne pas venir vous soutenir.

M. Daniel Marcovitch Est-ce à dire que nous allons perdre toutes les élections ?

M. François Goulard.

Et je voudrais aussi rappeler, comme l'a fait mon collègue Jean-Claude Lenoir, lors de l a présentation d'une motion de procédure restée fameuse, qu'aucun d'entre vous, mesdames, messieurs, dans sa profession de foi lors des élections législatives de 1997, aucun d'entre vous, je le répète, dans ses projets, face à ses électeurs, n'avait parlé d'une proposition de loi créant le PACS. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Bernard Accoyer.

Il y a eu tromperie sur la marchandise !

Mme Dominique Gillot.

Vous n'avez pas le droit de dire cela !


page précédente page 05543page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Henri Bertholet.

Vous n'êtes que quatorze à vous opposer aujourd'hui !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Et la dissolution, vous l'aviez annoncée ?

M. François Goulard.

Devant un tel fiasco, vous auriez pu choisir la voie de la sagesse et de la réflexion. Au lieu de cela, violant allègrement l'esprit sinon la lettre de notre règlement, vous avez redéposé la même proposition de loi, mais en obtenant, avec une efficace persuasion la signature volens nolens de tous les députés socialistes.

M. Bernard Schreiner et M. Jean Ueberschlag.

Ce sont les malgré-nous au PACS !

M. François Goulard.

Depuis lors, au cours des deux lectures précédentes, tous les amendements que nous avons défendus qui auraient pu, sur tel ou tel point précis, rassurer l'opinion si vous aviez bien voulu les accepter, ont été systématiquement repoussés.

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

C'est faux !

M. François Goulard.

De la même façon, les tentatives du Sénat pour aboutir à une forme de consensus, qui n'ont d'ailleurs pas toujours été comprises par les adversaires les plus résolus du PACS, n'ont pas été - c'est peu de le dire - couronnées de succès.

En deuxième lecture, le Sénat a voté la question préalable et nous retrouvons donc le texte voté par notre assemblée.

Mme Odette Grzegrzulka.

Mettez le ton ! Vous n'y croyez pas !

M. François Goulard.

Pour justifier ce texte, vous avez avancé, au fil du temps, des arguments de nature diverse mais qui, en définitive, visent tous à entourer d'un voile pudique, du moins trompeur, la véritable intention de ses auteurs.

Il s'agirait, avez-vous dit, de créer un tiers statut, intermédiaire entre l'union libre et le mariage, auquel aspireraient nombre de couples qui ne se satisfont ni de l'une ni de l'autre.

Chacun sait pourtant que la jurisprudence autant que la loi ont progressivement bâti un cadre juridique pour les couples non mariés. Qu'il faille y apporter quelques modifications, je ne saurais l'exclure, mais tel n'est évidemment pas le propos de votre texte : si l'on avait voulu le faire, on aurait à l'évidence procédé autrement.

Il s'agirait aussi, à vous entendre, d'instaurer une forme de solidarité entre personnes, un engagement de solidarité qui appellerait de la part de la collectivité non seulement une reconnaissance mais aussi l'attribution d'avantages en contrepartie.

Mais si l'objectif était d'encourager la solidarité entre personnes, pourquoi cet acharnement manifesté avec constance lors de nos précédentes discussions à exclure les fratries, à exclure la conclusion d'un PACS entre ascendants, descendants et alliés ? Pourquoi limiter le PACS à deux personnes ?

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Faites attention à ce que vous dites !

M. François Goulard.

Il s'agirait aussi - et nous nous rapprochons du sujet - de donner aux couples homosexuels un certain nombre de protections d'ordre juridique, dont l'absence est à l'origine de situations dramatiques, notamment en cas de décès de l'un des membres du couple.

M. Yves Rome.

Il n'y croit pas !

Mme Odette Grzegrzulka.

Il n'y met pas le ton !

M. François Goulard.

S'il avait été question, par exemple, de modifier le droit de la location pour permettre, dans de telles situations, le maintien du survivant dans les lieux, la réforme aurait pu à coup sûr s'effectuer dans une plus grande discrétion.

En réalité - pourquoi ne pas oser le dire clairement ? vous avez voulu répondre à une demande précise, au demeurant parfaitement respectable, qui émanait de certains milieux homosexuels désireux d'obtenir un droit au mariage ou tout au moins un statut qui s'en approcherait autant que possible sur le plan du symbolique. Telles sont les véritables motivations des auteurs du texte ; telle est la clef de toute l'affaire. Le reste n'est qu'ajout, habillage ou raccroc.

Si tel n'était pas le cas, comment justifier votre insistance à inscrire le PACS dans le livre du code civil relatif aux personnes et non dans celui relatif aux contrats, comme le proposait d'ailleurs l'un des deux rapports auxquels je faisais allusion ? Si tel n'était pas le cas, pourquoi vouloir absolument écarter tout ce qui, de près ou de loin, empêcherait un parallélisme parfait avec le mariage ? Pourquoi interdire l'équivalent de la polygamie - le PACS à plus de deux - ou du mariage incestueux - le PACS entre collatéraux ou entre ascendant et descendant - sinon pour parfaire la ressemblance ? Pourquoi un enregistrement du PACS devant une autorité publique, alors que, pour tous les objectifs déclarés et affichés du texte, un contrat sous seing privé ou devant un notaire aurait constitué une réponse satisfaisante, si ce n'est pour conférer au PACS la solennité que revêt précisément la célébration d'un mariage ? Au bout du compte, et après beaucoup d'atermoiements, vous avez retenu le greffe du tribunal d'instance.

Ce choix à lui seul mérite un commentaire. Sur un plan pratique, le notaire aurait parfaitement convenu. Sur un plan symbolique, la mairie était l'idéal. Mais, à n'en pas douter, vous avez craint une réaction de rejet de nombreux maires.

M. Pierre-Christophe Baguet.

Y compris des leurs !

M. François Goulard.

Quoique officiers de l'état civil et tenus, à ce titre, d'enregistrer les actes, les maires sont également porteurs de la volonté de la population et, de ce point de vue, capables de refuser d'appliquer un texte très mal accepté par nombre de nos compatriotes.

F aut-il instaurer un quasi-mariage accessible aux couples homosexuels ? C'est là, je le répète, la vraie question qui renvoie chacun à sa conscience, à ses convictions les plus personnelles. Je me garderai bien, pour ma part, de jeter l'anathème sur ceux dont la réponse est différente de la mienne. Je pense, quant à moi, que si le mariage, tout à la fois contrat et institution, est reconnu par la société, entouré d'un cadre juridique déterminant les droits et les obligations de chaque époux, assorti d'avantages fiscaux, sociaux et juridiques, c'est essentiellement parce qu'il est fondateur de la famille.

Mme Dominique Gillot.

Ce n'est pas vrai !

M. François Goulard.

Ce qui justifie l'institution du mariage, ce n'est pas seulement le couple, ce sont aussi et avant tout les enfants.

Mme Dominique Gillot.

Il n'y a pas que le mariage qui fasse les enfants !

M. François Goulard.

En instituant le mariage, en lui accordant une protection, le législateur a entendu préserver la famille, c'est-à-dire le couple et ses enfants. En


page précédente page 05544page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

d'autres termes, le législateur a entendu favoriser une institution dans laquelle se détermine une part essentielle de l'avenir de toute société. C'est la raison pour laquelle, quelle que soit la liberté pleine et entière des individus de vivre comme ils l'entendent, d'adopter les modes de vie qu'ils souhaitent comme c'est leur liberté inaliénable et le droit imprescriptible de tout individu, l'Etat serait abolument infondé à le restreindre en quoi que ce soit, quel que soit le respect que je porte au choix individuel de vie privée, il ne me paraît pas possible de mettre sur un même plan au regard du statut matrimonial ou quasi matrimonial les couples homosexuels et les couples hétérosexuels. C'est donc un désaccord de principe fondamental que j'exprime avec ce qui est, à mon sens, au coeur de votre proposition de loi.

Le reste, pour n'être pas secondaire, découle très largement de ce constat.

Nous reprochons à votre texte de légiférer sur le couple, sans se préoccuper, à aucun moment et en aucune manière, des enfants. Nous reprochons à votre texte d'être soumis à notre examen alors qu'une réforme d'ensemble du droit de la famille est à l'étude à la chancellerie - mon collègue Goasguen y a fait allusion.

On comprend bien pourquoi ce texte n'est pas fait pour les enfants. Et pourtant, des enfants naîtront de couples ayant conclu un PACS. Par quel droit seront-ils protégés ? L'incertitude la plus complète règne sur ce point.

Mme Raymonde Le Texier.

Par le code de la famille !

M. François Goulard.

Sans doute faudra-t-il attendre que la jurisprudence vienne régler cette matière. Est-ce convenable ? Cette absence de souci du sort des enfants alors que l'on établit un statut pour les couples me choque et éclaire, s'il en était besoin, les intentions réelles des auteurs du texte.

M. Jean-Paul Bret.

Vous avez tort d'utiliser ainsi les enfants ! C'est scandaleux !

M. François Goulard.

Patrick Devedjian vous a reproché avec raison de créer trois types de mariage. Votre projet introduit une inutile complexité entre les différents statuts du couple en instaurant entre le concubinage et le mariage un nouvel état hybride qui abouti à gommer les différences, à estomper les contours et à brouiller les repères.

Nous reprochons à votre texte de compliquer l'état civil avec l'intervention surprenante des greffes des tribunaux d'instance, alors que l'unité de tenue de l'état civil dans les mairies est une commodité évidente et une source de sécurité juridique.

Enfin, si le mot de solidarité figure dans le titre de votre loi, il est en réalité très peu présent dans les obligations découlant du PACS.

Relevant de l'habillage, destiné à justifier et non voué à servir, l'obligation de solidarité entre signataires d'un PACS reste totalement entre leurs mains dès lors qu'il s'agit d'en définir tant la portée que l'étendue. De ce fait, les personnes concluant un PACS bénéficieront d'avantages sans que la collectivité ait la moindre assurance d'une contrepartie.

La faiblesse du lien instauré par le PACS ressort aussi des conditions dans lesquelles il peut y être mis fin.

Beaucoup sont choqués, et je partage leur sentiment, par la procédure retenue que l'on a pu, à juste titre, qualifier de répudiation.

Sur ce plan, le PACS se distingue sensiblement du mariage, mais ce n'est pas en bien. Il fait fi des situations de dépendance économique et des droits du plus faible.

Le PACS risque d'entretenir un sentiment de sécurité illusoire chez un certain nombre de gens. Il n'est pas respectueux de l'intérêt des personnes et, par conséquent, de ce point de vue, il est condamnable.

J'en viens maintenant aux avantages fiscaux que vous proposez d'accorder aux titulaires d'un PACS. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme Dominique Gillot.

Il y avait longtemps !

Mme Nicole Feidt.

Vous vous répétez !

M. François Goulard.

Oh, je serai moins long que mon collègue de Courson, qui est expert.

Nous en cherchons en vain la contrepartie. Le bénéfice de la déclaration fiscale unique se justifie dans le mariage parce qu'il y a de véritables obligations réciproques des époux ; il se justifie encore plus, bien sûr, lorsque ce couple a des enfants.

Ce bénéfice n'a pas de fondement dans le cas du PACS. Remarquons d'ailleurs que la déclaration fiscale unique ne joue vraiment en faveur des intéressés que s'ils ont des revenus assez élevés, et d'ailleurs très différents l'un de l'autre. Mais on ne voit vraiment pas au nom de quoi nous donnerions un avantage aux couples, n'ayant souscrit aucune obligation particulière, par rapport, par exemple, à des célibataires isolés dont les charges sont généralement, et par construction, plus élevées.

M. Bernard Outin.

Démago !

M. François Goulard.

Quant aux droits de succession, je pense pour ma part - et c'est la réforme qu'il aurait fallu conduire - qu'ils sont dans notre pays anormalement élevés, et parfaitement confiscatoires dans le cas de mutations entre personnes n'ayant pas de liens de parenté. Le taux de 60 % d'ailleurs ne résisterait pas à la jurisprudence de la cour de Karlsruhe.

Une baisse généralisée des droits de succession est infiniment souhaitable, car choisir à qui on lègue ses biens est une liberté que ne respecte pas la loi fiscale française, laquelle fait de l'Etat, ou peu s'en faut, le premier héritier obligé de chacun d'entre nous.

Nous trouvons, bien sûr, absolument contestable d'introduire une fois de plus dans notre droit une disposition facilitant l'immigration.

(« Encore ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Le mariage blanc, couramment pratiqué mais assez complexe à organiser, ne sera plus nécessaire.

Le PACS blanc vaudra, ou à peu près, titre de séjour.

M. Jean-Claude Beauchaud.

Après le PACS vert, le PACS blanc !

M. François Goulard.

Comme aucune condition sérieuse n'est posée à la conclusion d'un PACS, la tâche sera aisée.

Mme Dominique Gillot.

Vous manquez complètement d'imagination !

M. François Goulard.

Voilà une bonne nouvelle pour ceux qui, à gauche comme à droite, veulent la régularisation de tous les sans-papiers.

(Exclamations sur divers bancs.)

Mme Nicole Feidt.

Et voilà, la boucle est bouclée !

M. Jean-Claude Beauchaud.

Pasqua va être content !

M. François Goulard.

Le ministre des relations avec le Parlement et le rapporteur, auteur du texte, ont affirmé que des millions de Français attendaient ce statut répondant enfin à leurs aspirations les plus profondes.


page précédente page 05545page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Curieusement, mes chers collègues, dans nos circoncriptions, nous n'en rencontrons pas beaucoup.

M. René Mangin.

Parce qu'elles sont très à droite !

M. François Goulard.

Oh, vous savez, les citoyens sont partout les mêmes ! Nos concitoyens nous parlent de toutes leurs difficultés, de quelque ordre qu'elles soient, de divorce, de situation douloureuse des enfants, de problèmes posés par les prestations compensatoires ou les pensions alimentaires non versées ; curieusement, ils ne nous demandent pas de hâter l'adoption du PACS.

En revanche, beaucoup de nos interlocuteurs s'inquiètent, par exemple, de l'adoption d'enfants ou du recours à la procréation médicalement assistée par des couples homosexuels.

Mme Dominique Gillot.

Oh là la !

M. François Goulard.

Bien sûr, le rapporteur le disait tout à l'heure, il existe aujourd'hui des enfants élevés par des couples homosexuels.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Et alors ?

M. François Goulard.

Est-ce une raison pour favoriser le développement de telles situations ?

Mme Christine Boutin.

Mme la ministre n'en veut pas !

M. François Goulard.

Nous pensons que non. Et nous ne pouvons que déplorer votre obstination à refuser...

Mme Béatrice Marre.

Vous voulez déchoir ces parents de leurs droits ?

M. François Goulard.

Mais nous avons le droit d'avoir des points de vue différents, madame, sur des sujets comme ceux-là ! Chacun juge en conscience !

M. Thierry Mariani.

Ils sont intolérants !

M. François Goulard.

Et nous ne pouvons que déplorer votre obstination à refuser tout amendement clarifiant les choses sur ce point. Nous savons d'ailleurs quelle est l'opinion du rapporteur à ce sujet.

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Vous n'en avez pas assez depuis six mois que vous répétez la même chose ?

M. François Goulard.

Je crois sincèrement, mes chers collègues, que ce n'est pas être décalé, comme vous le pensez, avec la réalité sociale...

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Non, mais c'est répétitif !

M. François Goulard.

... que de refuser résolument le PACS.

M. Yann Galut.

C'est votre droit !

M. François Goulard.

Je pense au contraire que notre opposition au PACS est très largement comprise et approuvée dans le pays.

M. Daniel Marcovitch.

On est à la veille des élections, donc c'est bon pour vous !

M. François Goulard.

Je pense que le mariage, et la famille qui lui est intimement associée, le mariage malgré le caractère désormais plus tardif de sa conclusion, malgré la cohabitation en union libre qui souvent le précède, malgré l'augmentation du nombre de divorces, reste aux yeux des Français une institution fondamentale pour notre société...

M. Yann Galut.

On est d'accord là-dessus !

M. François Goulard.

... un modèle qui n'est bien sûr pas imposé, mais qui reste très largement souhaité et choisi.

M. Jean-Claude Beauchaud.

C'est normal : on fait des mariages, ça marche !

M. Yann Galut.

Et c'est très bien !

M. François Goulard.

Il y a dans notre pays plus de douze millions de couples mariés, pour moins de deux millions et demi de couples non mariés, dont beaucoup choisissent tôt ou tard le mariage.

Nous croyons aussi que les Français se préoccupent beaucoup plus que vous ne le faites des enfants. Parce qu'ils savent que les enfants sont le bien le plus précieux, et que leur intérêt doit primer.

Nous croyons enfin, que dans notre pays, l'urgence n'est pas de répondre à une attente peu partagée, respectable mais irréaliste, de quelques personnes, comme vous voulez le faire avec le PACS, mais que l'urgence est de nous doter, enfin, de politiques plus favorables à la famille, à ceux qui ont des enfants et qui de ce fait préparent notre avenir collectif.

M. Jean-Paul Bret.

Ce n'est pas ce que vous avez fait !

M. François Goulard.

L'urgence est de comprendre que notre société est trop peu accueillante aujourd'hui...

M. Bernard Outin.

C'est une société libérale !

M. François Goulard.

... pour ceux qui ont des enfants, pour les familles, pour les femmes qui veulent concilier une activité professionnelle et leurs responsabilités familiales, qu'elle est trop peu généreuse pour celles et pour ceux qui font le choix de se consacrer à l'éducation de leurs enfants.

Voilà, mes chers collègues, la politique profondément différente que nous souhaitons...

M. Jean-Paul Bret.

Une politique réactionnaire !

M. François Goulard.

... au lieu de cette inopportune proposition de loi. C'est pourquoi nous demandons le renvoi de ce texte en commission par le vote de la présente motion.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission des lois a examiné ce texte abondamment. Je demande donc que cette motion soit rejetée afin que nous passions à l'examen des articles.

Mme Christine Boutin.

« Abondamment » est un peu excessif !

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à Mme Dominique Gillot, pour le groupe socialiste.

Mme Dominique Gillot.

Chers collègues de la droite, votre stratégie est transparente. Arc-boutés sur de vieux schémas démentis par les réalités sociales, y compris dans votre propre entourage, vous tentez de reprendre ce que vous pensez être votre fond de commerce et d'influence, celui de la tradition, de la morale et de l'ordre social.

Mme Christine Boutin.

Ce n'est pas si mal !

Mme Dominique Gillot.

Mais êtes-vous aussi rigides sur ces principes dépassés dans votre propre vie ? (Rires et exclamations sur les mêmes bancs.)


page précédente page 05546page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Jean-Claude Lenoir.

Non mais !

Mme Christine Boutin.

Qu'est-ce qui lui arrive ?

M. Bernard Accoyer.

C'est une brusque dégradation intellectuelle !

M. Jean Ueberschlag.

C'est la pleine lune !

Mme Dominique Gillot.

Votre équilibre social est-il uniquement fondé sur l'institution du mariage, comme vos incantations voudraient le faire croire ? (Rires et exclamations sur les mêmes bancs.) Dans ce texte que vous contestez pathétiquement, où est l'insulte à la nature ? Où est le mauvais coup porté à la famille ? Où est le crime contre la société ? L'aveuglement et l'obscurantisme sont pour certains d'entre vous les seuls remparts contre ce qui vous est étranger. (Protestations et huées sur les mêmes bancs.)

Mme Christine Boutin.

Madame Gillot, vous pouvez faire mieux !

Mme Dominique Gillot.

Le conservatisme et l'intolérance sont pour vous la seule réponse à des comportements qui sortent des modèles habituels et traditionnels.

Mme Christine Boutin.

Ce n'est pas vous, ça !

M. Bernard Accoyer.

Arrêtez-la !

Mme Dominique Gillot.

Peut-être même êtes-vous contraints à des faux-semblants et à des compromissions tels que les a évoqués avec coeur et réalisme Monique Collange tout à l'heure.

L'hostilité dogmatique et l'appel à l'ordre public, voire aux dérapages fiscaux sont exploités sans vergogne par ceux d'entre vous en mal de sens et de projet politique (Exclamations sur les mêmes bancs.)

qui dérivent sans honte vers l'exhortation d'un ordre moral incompatible avec votre libéralisme.

M. Jean Ueberschlag.

C'est une dissertation de philosophie !

Mme Christine Boutin.

Madame Gillot, allons ! Que vous arrive-t-il, aujourd'hui ?

Mme Dominique Gillot.

Pour ma part, madame Boutin, très attentive aux questions touchant les familles, j'ai eu l'honneur de remettre un rapport au Premier ministre pour une politique familiale rénovée qui tienne compte de l'évolution des comportements et des liens qui unissent aujourd'hui les hommes et les femmes avant et même après l'arrivée des enfants.

Aujourd'hui, le mariage est de moins en moins la seule réponse au souhait de construire un projet de vie commun. En tout cas, ce n'est plus l'acte fondateur de la famille. Il y a une vie avant le mariage. Il y a aussi une vie après le mariage.

Par ailleurs, j'ai engagé et j'entretiens un dialogue confiant avec le mouvement familial...

Mme Christine Boutin.

Vous êtes très décevante !

Mme Dominique Gillot.

... ne vous en déplaise, et tous les partenaires de la politique familiale, y compris ceux qu'on peut qualifier de conservateurs. Ce qui me permet de bien comprendre la problématique de la famille contemporaine, ses aspirations au regard des problèmes quotidiens qu'elle rencontre dans l'éducation de ses enfants et la construction de ses repères.

Mme Christine Boutin.

Le PACS n'a rien à voir avec la famille !

Mme Dominique Gillot.

Cessez de prendre la famille en otage, madame Boutin. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Mme Christine Boutin.

Mais c'est vous qui ne cessez d'en parler ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Dominique Gillot.

Marqué par son universalité, s'appuyant sur un engagement de solidarité réciproque dans la durée, offrant une alternative au mariage sans le concurrencer, le PACS permettra d'organiser la relation entre deux personnes adultes. Il ne remet pas en cause la famille. Je pense même, au contraire, qu'il peut la favoriser.

De nombreux couples se forment aujourd'hui hors du mariage et recomposent une famille après un mariage manqué. Il n'y a pas que la conjugalité qui crée de la filiation. Les formes d'organisation familiales sont marquées par la diversité...

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est bien le cas de la famille

RPR !

Mme Dominique Gillot.

... selon les périodes de la vie, les coutumes régionales...

Mme Christine Boutin.

Et la bigamie, c'est une coutume régionale ?

Mme Dominique Gillot.

... les aléas, l'allongement de la vie. Patriarcale ou nucléaire, aujourd'hui recomposée, monoparentale, la famille reste malgré tout le lieu de la solidarité et le maillon central de la cohésion sociale.

Mais gardons-nous d'idéaliser une forme de famille, ni le contrat qui préside à l'union d'un homme et d'une femme qui désirent en fonder une. Admettons qu'elle puisse prendre plusieurs formes sans que cela débouche sur une remise en cause de sa fonction fondamentale, notamment celle qui inscrit l'enfant dans l'altérité et dans la généalogie.

M. François Goulard.

Mme Gillot lit son rapport !

M me Christine Boutin.

On en voit le résultat aujourd'hui !

Mme Dominique Gillot.

Cessez de prendre l'enfant en otage, madame Boutin !

M. Jean Ueberschlag.

Arrêtez-la, monsieur le président !

M. Yann Galut.

Libérez les enfants de la droite !

Mme Dominique Gillot.

Aujourd'hui, si la famille n'est plus le lieu de transmission des valeurs patrimoniales et sociales que certains continuent d'ériger en modèle, elle est le lieu où se constituent les repères, où se structurent les individus, protégés par l'affection de leur entourage.

Mme Christine Boutin.

Elle vous aide bien, Mme Boutin ! Merci, madame Boutin !

Mme Dominique Gillot.

Elle est un lieu d'amour dont les seuls liens indissolubles sont les liens de filiation et de parentalité que nous devons conforter.

M. Jean Ueberschlag.

Mais qu'est-ce que ça veut dire

« parentalité » ? Ça n'existe pas !

Mme Dominique Gillot.

Elle n'est cependant pas le seul lieu de protection des femmes qui aspirent - et elles en ont les moyens aujourd'hui - à assumer leur propre détermination.

Le PACS qui ne traite pas de ces liens-là, puisque tel n'est pas son objet,...


page précédente page 05547page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Mme Christine Boutin.

Alors, pourquoi en parlezvous ?

Mme Dominique Gillot.

...développe une logique de contrat entre adultes. L'enfant ne peut, ne doit pas être un des objets de la convention.

M. Jean Ueberschlag.

Monsieur le président, ce n'est pas une explication de vote. C'est hors sujet !

Mme Dominique Gillot.

Par ailleurs, si le mariage crée incontestablement la filiation, d'autres situations inscrites dans le droit de la famille établissent aussi la filiation légitime, l'autorité parentale en dehors du mariage.

M. le président.

Veuillez conclure, madame Gillot.

Mme Dominique Gillot.

Le PACS ne constitue pas un bouleversement du fait familial. Il faudra d'ailleurs prochainement compléter l'évolution du droit au regard de celui des enfants par une précision des formes d'engagement des adultes vis-à-vis de ceux-ci. C'est le travail que Mme la garde des sceaux a confié à la commission Dekeuwer-Défossez.

Le PACS est totalement neutre quant aux droits des enfants et il faut arrêter de construire des images absurdement négatives pour effrayer les populations.

Mme Christine Boutin.

Les populations ont du bon sens, elles !

Mme Dominique Gillot.

Ni l'adoption, ni la procréation médicalement assistée pour les homosexuels ne sont contenues dans les objets de cette proposition de loi.

M. Bernard Accoyer.

Quelle hypocrisie !

M. Jean-Pierre Blazy.

Mais c'est vous les hypocrites !

Mme Dominique Gillot.

Par contre, permettre la solidification de liens informels, organiser la solidarité de deux adultes dans la durée et la responsabilité dûment réfléchie, voilà qui est de nature à introduire de la stabilité dans la construction du lien social.

Mme Christine Boutin.

Mme Gillot a le sens de l'humour !

M. Jean Ueberschlag.

Arrêtez-la, elle délire !

Mme Dominique Gillot.

Dans un environnement marqué par l'accroissement de la vulnérabilité, de la précarité , de l'individualisme anxiogène pour beaucoup de nos concitoyens, tout ce qui peut apporter douceur de mieux vivre, partage de sécurité matérielle,...

M. Bernard Accoyer.

C'est une véritable motion de procédure, monsieur le président !

Mme Dominique Gillot.

... visibilité d'un rapprochement dans la durée n'est-il pas à encourager ?

M. Jean Ueberschlag.

On reprend le débat,...

M. le président.

Madame Gillot, je vous prie de conclure !

M. Jean Ueberschlag.

... la discussion est ouverte !

Mme Dominique Gillot.

J'ai bientôt terminé, monsieur le président.

En dehors des bienfaits du mariage, ces personnes qui ne veulent pas ou ne peuvent pas passer devant le maire devraient-elles être punies, privées de cette possibilité de conclure un contrat pour un projet de vie commun ?

Mme Christine Boutin.

Elles peuvent le faire sans le PACS !

Mme Dominique Gillot.

Et si cette stabilité éprouvée dans un cadre moins contraignant que le mariage permettait à ces personnes de comprendre que le contrat peut être renouvelé, au point de durer plus longtemps que certains mariage ? Rappelons-nous qu'un mariage sur trois échoue, voire un sur deux dans certains secteurs.

Mme Christine Boutin.

Deux sur trois se maintiennent !

Mme Dominique Gillot.

Qui aurait à y perdre ? Certainement pas la société ! Encore moins les enfants qui pourraient naître naturellement de ce couple à stabilité reconduite dans le temps et qui auront statut d'enfants naturels.

M. Thierry Mariani.

Mme Gillot fait de l'obstruction !

M. le président.

Mme Gillot, je vous demande de conclure.

Mme Dominique Gillot.

C'est vrai, madame Boutin, rien n'empêchera ces adultes de choisir l'institution du mariage. Et je vois, moi, dans le PACS entre hétérosexuels non pas un sous-mariage mais un acte qui peut être un encouragement effectif pour les réticents à faire le grand pas du mariage, à passer de l'union libre à un statut impliquant plus de solidarité réciproque et, dans le même temps, un test efficace à la solidité de leur relation.

Mme Christine Boutin.

Un sas, en quelque sorte !

M. François Goulard.

Une période d'essai !

Mme Dominique Gillot.

Chercher l'affrontement sur cette question, déchaîner les passions en s'arc-boutant sur la défense d'un modèle unique et obligatoire de la famille, c'est refuser de voir que les familles évoluent et que le politique se doit d'adapter les réponses à cette évolution. C'est tenter d'utiliser le sujet pour conforter un clivage droite-gauche à votre avantage. La solidarité qui est au coeur de ce texte fondateur, qui guide l'action du Gouvernement et l'engagement de la majorité qui le soutient, mérite mieux que ces débordements récurrents.

M. le président.

Madame Gillot, il vous faut conclure vraiment.

Mme Dominique Gillot.

Attachée, donc, à la cohésion sociale,...

M. le président.

Madame Gillot, je vais vous interrompre !

Mme Dominique Gillot.

... défenseur d'une politique familiale résolument adaptée, je soutiens donc cette proposition de loi qui offrira la reconnaissance juridique et la protection de l'Etat à des couples hors mariage. J'invite donc mes collègues à rejeter la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Enfin ! enfin !

M. le président.

La parole est - brièvement, bien entendu ! - à M. Bernard Accoyer, dont nous connaissons la concision.

Mme Christine Boutin.

Vous avez droit à dix bonnes minutes, monsieur Accoyer !

M. Bernard Accoyer.

Evidemment, le groupe RPR votera la motion de renvoi en commission.

M. Alain Rodet.

C'est une surprise !


page précédente page 05548page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Bernard Accoyer.

Je dois dire, mes chers collègues, que le discours que nous venons d'entendre...

M. Claude Goasguen.

Très instructif !

M. Bernard Accoyer.

... de Mme Gillot, qui nous avait habitués à plus de mesure, nous a quelque peu surpris. Se serait-elle trompée de lecture ? En effet, elle m'a rappelé Mme la garde des sceaux quand, ce fameux 9 octobre, il a fallu que, ici même, elle lise deux fois son discours à la tribune, faute de majorité.

Mme Dominique Gillot.

Quel honneur !

Mme Christine Boutin.

A ce moment-là, j'avais dû sortir ma Bible !

M. Bernard Accoyer.

Neuf mois après, le long discours de Mme Gillot montre bien qu'elle avait besoin de remettre de l'ordre dans sa propre réflexion puisque, si j'ai bien entendu, elle est chargée, dans son parti politique, de responsabilités relatives à la famille.

M. Yann Galut.

Remettez donc de l'ordre dans votre famille politique !

M. Bernard Accoyer.

Si cette soirée a été pour vous, madame Gillot, l'occasion de faire le point, vous conviendrez qu'après neuf mois de travail le PACS ne s'inscrit pas comme un progrès dans le cadre de la politique familiale à laquelle, pourtant, nous aspirons tous, une politique familiale en faveur des enfants, et de la solidarité entre les générations.

M. Alain Rodet.

C'est un peu poussif !

M. Bernard Accoyer.

Nous voterons cette motion de renvoi en commission pour de nombreuses raisons, et d'abord, parce que, sur une question aussi importante, la recherche d'un consensus, un travail approfondi avec des consultations élargies, des commissions extraordinaires, auraient certainement permis de dégager les avancées nécessaires. Tel n'a pas été le choix du Gouvernement qui a décidé de passer en force par dogmatisme, mais également pour réunir sa majorité, la consolider autour d'un texte emblématique. La législation par voie emblématique, voilà votre méthode de gouvernement ! Ce texte est également empreint de confusions multiples et de nombreux dangers. Confusions multiples sur la nature même du PACS, ce contrat à géométrie variable.

Confusion désormais entre les différents types d'unions q ui pourront être contractées : concubinage, PACS, mariage. Il faudra ouvrir des cabinets de conseil.

M. Daniel Marcovitch.

Cela va créer des emplois ! (Sourires sur divers bancs.)

M. Bernard Accoyer.

D'ailleurs, ne doutons pas que les plus instruits, les plus cultivés, les plus forts, les plus riches feront procéder à une étude fiscale et financière auprès de leur conseil avant de choisir le moment de leur union, le type de cette union, le contenu du contrat qui sera ainsi réalisé.

Nous en arrivons ainsi au danger de ce texte, danger essentiel pour les plus faibles de notre société. Danger dans les couples homosexuels où, par leur nature même, les dispositions contenues dans ce texte feront des plus faibles les victimes désignées de ceux qui auront décidé d'utiliser les mesures qui peuvent les intéresser. Vous qui n'avez pourtant à la bouche que des mots qui voudraient dire que vous êtes les seuls à vous occuper des plus faibles, on peut se demander encore ce soir, même après aussi écouté le discours de Mme Gillot, comment vous avez pu méconnaître à ce point le devoir de protection des plus faibles dans tous les couples qui peuvent exister.

Mme Dominique Gillot.

Ce n'est pas le mariage qui protège les plus faibles !

M. Bernard Accoyer.

Danger également pour les femmes. La présomption de paternité n'existe pas dans le PACS parce qu'il n'y est pas question d'enfant. C'est l'une de ces données incompréhensibles que la députée chargée de la famille pour le parti socialiste vient pourtant de nous présenter comme une avancée.

Danger ensuite pour les enfants eux-mêmes, ignorés, méconnus. Danger pour leur développement psychoaffectif (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste), comme cela a été développé à de multiples reprises dans des congrès dont Mme Gillot connaît très bien les travaux.

M. Jean-Pierre Blazy.

Le PACS, c'est le diable !

M. Bernard Accoyer.

Il est bien évident, en effet, que, comme l'a dit avec honnêteté le rapporteur, le PACS conduit naturellement à l'adoption des enfants par les couples homosexuels, en dépit des dénégations du parti socialiste et d'une grande partie des députés de la majorité. C'est un des dangers de ce texte, et il est essentiel.

Pour toutes ces raisons, sans revenir sur les conséquences financières, sur la priorité donnée au PACS par rapport à la famille, le groupe RPR votera la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe UDF, la parole est à

M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet.

Je vois trois bonnes raisons de voter le renvoi en commission présenté par

M. Goulard.

La première raison serait d'accorder un peu de temps à nos collègues de la gauche plurielle pour qu'ils retrouvent un peu de sérénité.

M. Yann Galut.

Parlez-en à Sarkozy !

M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Goulard a fort opportunément rappelé, en effet, le long et sinueux cheminement de ce texte, qu'il s'agisse de sa rédaction ou de ses examens divers et variés. Tout cela traduit tout de même la gêne, la réserve et l'inquiétude d'un certain nombre de nos collègues de la gauche plurielle. Le discours de Mme Gillot, qui n'est pas conforme à son discours habituel, semble prouver que, petit à petit, la contrainte politique a remplacé les légitimes inquiétudes de nos collègues de la gauche plurielle,...

Mme Christine Boutin.

C'est le garde-à-vous !

M. Pierre-Christophe Baguet.

... inquiétudes qui étaient largement partagées par un grand nombre de maires. C'est entre autres pour cette raison, mes chers collègues de la majorité, que vous avez souhaité que ces contrats soient signés au greffe du tribunal et non pas chez les maires. Vous saviez pertinemment, en effet, que vous n'auriez pas du tout de majorité sur ce point.

Puis, François Goulard a rappelé le travail remarquable effectué par Jean-Claude Lenoir sur vos professions de foi. Aucun des 577 candidats de la gauche plurielle aux dernières élections législatives n'avait fait référence à ce texte. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Blazy.

N'importe quoi !

M. Pierre-Christophe Baguet.

Il ne faut pas prendre les électeurs pour des imbéciles. Il faut annoncer son programme avant et le mettre ensuite en application. Or,


page précédente page 05549page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

vous avez évolué sur ce sujet et, d'inquiétude, vous êtes tombés maintenant dans la doctrine. C'est ce qui m'inquiète.

C'est la première raison pour laquelle il faut voter ce renvoi en commission, pour que vous retrouviez un peu de sérénité.

La deuxième raison, c'est le contenu même de ce texte et ses conséquences. On a fait tout à l'heure référence au congrès des notaires. (Exclamation sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) J'ai cru entendre ici lors de la première lecture que ce sont des notaires qui auraient réclamé le PACS pour régler des problèmes de succession, de descendance, des problèmes fiscaux pour les couples homosexuels de ce pays.

Mme Véronique Neiertz.

Ils ont une vision notariale de la société.

M. Pierre-Christophe Baguet.

Or les notaires, dans leur congrès, viennent d'expliquer que cela allait au contraire rajouter à la complexité de notre droit aujourd'hui et qu'on ne mesurait pas concrètement les conséquences du vote d'une telle loi. Notre devoir en tant que législateur est de voter des lois qui ne remettent pas en cause l'équilibre de notre société et qui sont applicables. Or on se demande comment cette loi pourrait être applicable. Les notaires se posent eux-mêmes la question et ce sont, en la matière, des hommes de l'art.

La troisième raison, enfin, ce sont les enfants. Comme François Goulard l'a rappelé, ce texte ne fait aucunement référence aux enfants. Au moment où Mme la garde des sceaux va lancer une grande réforme du droit de la famille, il me paraît pour le moins opportun de différer l'examen de ce texte pour essayer d'en intégrer les conséquences sur la réforme du droit de la famille, réforme qu'on nous avait annoncée pour le mois de juin, qu'on nous annonce pour octobre...

M. Thierry Mariani.

C'est comme pour les retraites !

M. Pierre-Christophe Baguet.

Comme pour les retraites, effectivement, c'est toujours reporté à un peu plus tard. Vous n'avez peut-être pas envie d'étudier la réforme du droit de la famille. C'est pourtant une priorité du pays et c'est peut-être la raison pour laquelle vous voulez précipitamment voter le PACS.

En tout cas, je note moi aussi, comme M. Goulard, les incohérences profondes entre les propositions d'un certain nombre de nos collègues de la gauche plurielle, notamment sur l'adoption des enfants par le couple pacsé, et le refus de la ministre.

C'est pour toutes ces raisons, et notamment la dernière, qui me paraît fondamentale, l'absence de référence aux enfants, que le groupe UDF votera le renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe DL, la parole est à

M. Jean-Claude Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir.

Pour ceux qui suivent le débat depuis la fin de l'après-midi, il est évident que plusieurs des interventions de celles et de ceux qui, au nom de l'opposition, se sont exprimés à la tribune ou de ces bancs, auront particulièrement marqué le débat et provoqué chez certains des membres de la majorité plurielle une réaction ou, au contraire, une sorte de torpeur devant la force de plusieurs des arguments qui ont été avancés.

Mon excellent collègue François Goulard offre à l'Assemblée toute entière la chance de se ressaisir (Sourires) , et je ne voudrais pas que celle-ci soit trop rapidement gaspillée.

François Goulard a rappelé dans un propos sans doute trop bref...

M. Yann Galut.

C'est de l'humour !

M. Jean-Claude Lenoir.

... les raisons pour lesquelles le texte qui nous est proposé devait être, sinon complètement rejeté, du moins sérieusement réexaminé.

En effet, ce texte apparaît aujourd'hui marqué par un certain nombre de traits qui vont le défigurer. C'est unr assemblement d'incohérences, de contradictions, un ensemble d'une rare complexité qui fait que, demain, les plus faibles seront démunis...

M. Jean-Pierre Blazy.

Oh !

M. Jean-Claude Lenoir.

... face à celles et à ceux qui utiliseront le dispositif à des fins particulièrement intéressées. C'est l'une des raisons pour lesquelles le groupe Démocratie libérale votera la motion de renvoi en commission.

Par souci d'honnêteté, monsieur le rapporteur, honnêteté qu'a soulignée un des orateurs qui m'a précédé, vous avez évoqué un point sur lequel il faut s'arrêter quelques instants. Vous avez eu le courage de dire publiquement ce que vous pensiez, à savoir que le PACS pouvait c onduire deux personnes homosexuelles qui vivent ensemble à adopter un enfant. Il s'agit là d'une contradiction par rapport à tout le discours officiel que nous entendons depuis des mois et d'une incohérence par rapport à la ligne que vous nous présentez.

Il y a dans tout cela, et personne ne peut s'y tromper, un faux-semblant : cette revendication que vous défendez aujourd'hui fait partie de ces revendications spontanées dont les électeurs n'ont jamais entendu parler. J'y reviens rapidement.

M. Patrick Braouezec.

Ce n'est pas la peine !

M. Jean-Claude Lenoir.

Ni à gauche ni à droite, un candidat, surtout un candidat qui a été élu, n'a proposé aux électeurs d'organiser l'union entre deux personnes de même sexe dans la forme que vous préconisez aujourd'hui.

Mme Muguette Jacquaint.

Vous avez proposé aux électeurs des choses que vous n'avez jamais tenues !

Mme Monique Collange.

Il dit n'importe quoi ! C'est vraiment parler pour ne rien dire !

M. Jean-Claude Lenoir.

Je ne comprends toujours pas comment vous pouvez aujourd'hui afficher une telle constance, une telle détermination sur un sujet dont vous n'avez jamais parlé aux électeurs.

M. François Goulard.

Il y a tromperie sur la marchandise !

M. Jean-Claude Lenoir.

Je pourrais, si j'avais un peu de temps, reprendre une par une les professions de foi de la majorité plurielle.

Mme Muguette Jacquaint.

Cela vous a réussi de parler aux électeurs !

M. Jean-Claude Lenoir.

Je les ai ici. Qu'il s'agisse de M. Michel, de M. Bloche, sans parler des candidats élus qui sont devenus ministres, Mme Guigou, M. Jospin, et combien d'autres, personne n'en a jamais parlé !


page précédente page 05550page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Jean-Pierre Blazy.

Vous l'avez déjà dit !

M. Jean-Claude Lenoir.

Or le texte dont nous discutons est sans doute celui qui, pendant cette législature qui peut encore durer quelques mois, qui n'est pas achevée, aura mobilisé le plus longtemps l'Assemblée nationale et le Sénat.

M. Patrick Braouezec.

A cause de qui ?

M. Jean-Claude Lenoir.

Sur des textes importants sur lesquels vous avez engagé votre crédit, sur lesquels vous vous êtes engagés vis-à-vis de l'électorat qui vous a désignés pour être aujourd'hui majoritaires, nous le comprendrions. Sur un texte dont vous n'avez jamais parlé, il faut convenir qu'il y a là une interrogation qui justifie les mots très graves que nous pouvons prononcer dans cet hémicycle : il s'agit véritablement d'une tromperie à l'égard de l'opinion qui vous a fait confiance, et vous le vérifierez très rapidement.

M. Daniel Marcovitch.

Les électeurs jugeront dimanche !

M. Jean-Claude Lenoir.

Notre collègue aura eu le mérite de s'exprimer avec modération, tranchant là avec un climat qui, en fin de journée et dans la soirée, était devenu intolérant. Il s'est exprimé avec conviction, et c'est encore une sérieuse différence avec les propos souvent lus, et donc préparés par d'autres, de la gauche plurielle. Enfin, il l'a fait avec talent. Je n'aurai pas la cruauté de souligner la différence avec des discours qui venaient de la gauche de l'hémicycle.

C'est donc avec résolution que nous voterons la motion de renvoi en commission, et c'est avec détermination que nous allons engager la discussion, sur la base des amendements qui ont été préparés et que nous allons défendre un par un, quel que soit le temps qui sera nécessaire, afin de vous convaincre de nous suivre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.

(La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, et conformément à l'article 109 du règlement, les articles de la proposition de loi précédemment adoptée par l'Assemblée nationale et qui a été rejetée par le Sénat dans sa deuxième lecture.

Article 1er A

M. le président.

L'Assemblée a supprimé l'article 1er A. Article 1er B

M. le président.

L'Assemblée a supprimé l'article 1er B. Article 1er C

M. le président.

L'Assemblée a supprimé l'article 1er

C. Avant l'article 1er

M. le président.

M. de Courson a présenté un amendement, no 118, ainsi libellé :

« Avant l'article 1er , insérer l'article suivant :

« I. - Il est inséré, après le tableau III de l'article 777 du code général des impôts, un tableau IV ainsi rédigé :

« Tableau IV

« Tarif des droits applicables entre non-parents FRACTION DE PART NETTE TAXABLE TARIF APPLICABLE Entre les personnes hétérosexuelles non mariées vivant en couple ayant ou ayant eu au moins un enfant à charge pendant dix ans % N'excédant pas 100 000 F 40 Supérieure à 100 000 F 50 Entre autres personnes non parentes 60

« II. - L'article 779 du code général des impôts est complété par un III ainsi rédigé :

« III. - Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il est effectué un abattement de 250 000 francs sur la part de la personne survivante du couple hétérosexuel non marié ayant ou ayant eu au moins un enfant fiscalement à charge pendant au moins dix ans, et ayant au moins un an de vie commune à la date du décès, visé au I de l'article 6 du code général des impôts. »

« III. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er janvier 1998.

« IV. - La perte de recettes est compensée, à due concurrence, par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour soutenir cet amendement.

M. Pierre-Christophe Baguet.

M. de Courson, dont on connaît l'expérience et la qualification s'agissant des mesures fiscales, nous propose d'introduire un peu de bon sens dans ce texte. Il s'agit d'accorder aux couples hétérosexuels ayant eu au moins un enfant à charge pendant dix ans certains avantages qui, sans être équivalents à ceux accordés aux couples mariés, permettent néanmoins de résoudre les problèmes posés en matière de droits de succession.

Ce premier amendement porte sur les droits de mutation. C'est une approche tout à fait réaliste que nous devons à M. de Courson.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Où est-il ?

M. Pierre-Christophe Baguet.

Comment ? Mais il peut être remplacé.

M. Jean-Pierre Blazy.

Non, il est irremplaçable !

M. Pierre-Christophe Baguet.

Je ne sais pas mais l'attention de notre assemblée doit être attirée sur l'importance de cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

C'est la troisième fois que ces amendements sont présentés en séance publique...

Mme Christine Boutin.

Et ce n'est pas fini !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... ce qui prouve à quel point l'opposition veut faire de l'obstruction (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la


page précédente page 05551page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), et c'est la troisième fois qu'à la demande de la commission des lois, l'Assemblée les repoussera.

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 118.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Je redis mon opposition à cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Vous remarquerez que je ne suis pas du tout intervenu dans le débat (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)...

M. Jean-Pierre Blazy.

Vous n'étiez pas là !

M. Thierry Mariani.

Effectivement, car j'étais à Carpentras. Mme la ministre connaît bien un département qui nous est cher.

L'usage n'est pas d'inscrire à l'ordre du jour des textes aussi importants trois jours avant une élection. Il y a quelques jours, M. le ministre de l'économie a fait lever la séance pour partir en campagne. Modeste député de l'opposition, je n'ai pas ce pouvoir. Comprenez donc que je ne sois pas arrivé au début du débat, mais je vous rassure : je suis prêt à siéger trois jours et trois nuits.

Dès ce premier amendement, notre estimé collègue

M. Charles-Amédée de Courson...

M. Alain Rodet.

Dubuisson de Courson !

M. Thierry Mariani.

... essaie de mettre l'accent sur un élément qui est absolument absent de votre texte, je veux parler de l'enfant.

Est-il utile de rappeler que c'est cette majorité qui, depuis deux ans, a taxé honteusement les familles ?

Mme Dominique Gillot.

Ce n'est pas vrai !

M. Thierry Mariani.

Est-il utile de rappeler que c'est cette majorité qui, après avoir bafouillé sur les allocations familiales, a décidé cette année de plafonner le quotient familial ?

M. Alain Rodet.

Et la diminution par Balladur de l'aide accordée pour les frais de cantine, cela ne concernait pas les enfants ? Les frais de cantine, on connaît à Valréas ?

M. Thierry Mariani.

Si je vous répondais, mon cher collègue, cela diminuerait d'autant mon temps de parole déjà fort limité !

M. le président.

Concluez, monsieur Mariani.

M. Thierry Mariani.

L'amendement de M. CharlesAmédée de Courson vise simplement à accorder un léger avantage aux couples hétérosexuels ayant eu au moins un enfant à charge pendant dix ans.

Je le répète, il me semble totalement illusoire et aberrant de considérer que l'on peut accorder les mêmes avantages à des personnes ayant élevé des enfants et à des couples homosexuels, lesquels ont certes le droit de s'aimer mais pas vocation à élever des enfants.

Dès ce premier amendement, qui me semble aller dans le bons sens, l'opposition entend manifester qu'elle est attachée à une certaine conception de la famille.

M. Alain Rodet.

C'est du jus de boudin !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 118.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. de Courson a présenté un amendement, no 119, ainsi libellé :

« Avant l'article 1er , insérer l'article suivant :

« I. - Après le quatrième alinéa de l'article 885 A du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes hétérosexuelles non mariées vivant en couple ayant ou ayant eu au moins un enfant à charge pendant dix ans font l'objet d'une imposition commune. »

« II. - Au II de l'article 885 W du code général des impôts, après les mots "les époux" sont insérés les mots "et les personnes hétérosexuelles non mariées vivant en couple ayant ou ayant eu au moins un enfant à charge pendant dix ans".

« III. - A l'article 1723 ter -00 B du code général des impôts, après les mots "les époux", sont insérés les mots "et les personnes hétérosexuelles non mariées vivant en couple ayant ou ayant eu au moins un enfant à charge pendant dix ans".

« IV. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du premier janvier 1998.

« V. - La perte de recettes est compensée, à due concurrence, par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Cet amendement a pour objet d'accorder aux couples hétérosexuels certains avantages qui, sans aller jusqu'à ceux dont bénéficient les couples mariés, permettent néanmoins de résoudre leurs difficultés financières.

L'idée de l'opposition est qu'il convient de créer un système intermédiaire entre le célibat, au sens fiscal du terme, et les couples mariés, mais sans déstabiliser le mariage.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Rejet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 119.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. de Courson a présenté un amendement, no 117, ainsi rédigé :

« Avant l'article 1er , insérer l'article suivant :

« I. Les règles d'imposition et d'assiette, autres que celles mentionnées au dernier alinéa du 1 et au 7 de l'article 6 du code général des impôts, les règles de liquidation et de paiement de l'impôt sur le revenu et des impôts directs locaux ainsi que celles concernant la souscription des déclarations et le contrôle des mêmes impôts prévues par le code général des impôts et le livre des procédures fiscales pour les contribuables mentionnés au deuxième alinéa du 1 de l'article 6 du code général des impôts s'appliquent aux couples visés au dernier alinéa du 1.

« II. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er janvier 1998.

« III. - La perte de recettes est compensée, à due concurrence, par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Charles de Courson.


page précédente page 05552page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Charles de Courson.

Actuellement, les concubins hétérosexuels chargés de famille doivent faire une déclaration distincte. Pourquoi ? Tout simplement parce que, en droit fiscal, il n'existe que deux situations : le célibat ou le mariage. Dans la mesure où le quotient familial est destiné à aider les familles élevant des enfants, il est proposé de rendre obligatoire l'imposition commune des couples hétérosexuels ayant la charge d'au moins un enfant et de leur accorder les mêmes avantages que les couples mariés en contrepartie du fait qu'ils transmettent la vie et éduquent leurs enfants.

Il s'agit tout simplement de la traduction fiscale d'une idée que nous avons défendue constamment et selon laquelle dès lors qu'une famille non mariée remplit les m êmes fonctions sociales qu'un couple hétérosexuel marié...

M. Alain Rodet.

C'est du jus de boudin !

M. Charles de Courson.

Non, c'est très clair, mon cher collègue, je me permets de vous rappeler que le texte que vous soutenez aboutit à quelque chose de complètement incohérent dans la mesure où, en prévoyant l'imposition commune, vous accordez les mêmes droits, au sens fiscal, à des personnes qui sont dans des situations totalement différentes. Or il faut tout de même rappeler que l'idée de famille n'était pas absente lorsque l'impôt sur le revenu a été créé en 1917 - d'où le quotient familial et certains avantages accordés aux familles.

Et si vous décidez d'adopter le droit anglo-saxon, il faut réformer l'actuel impôt sur le revenu, car, en droit anglais, on n'impose pas la famille mais la personne.

Mais si l'on s'en tient au concept familial en matière d'impôt sur le revenu - et c'est la position de toute l'opposition -, le seul problème qui se pose est celui des couples hétérosexuels qui ont des enfants.

M. François Goulard.

Il a raison !

M. Charles de Courson.

Si l'on accorde des avantages aux couples mariés avec des enfants, il n'est pas infondé, du point de vue de l'équité sociale, d'étendre ces avantages aux couples hétérosexuels non mariés avec enfants.

Tel est l'objet de l'amendement. Par conséquent, contrairement à ce que vous pensez, mes chers collègues de la majorité, c'est un amendement de justice, car il a un fondement social !

M. Alain Rodet.

Vous trahissez la pensée de Joseph Caillaux !

M. Charles de Courson.

Comment défendrez-vous l'imposition commune de deux veuves qui, parce qu'elles s'ennuyaient, ont décidé de vivre sous le même toit ? Pour reprendre un exemple que j'ai déjà cité, je dirai que, avec votre texte, la mère abbesse d'un couvent pourra demander à ses nonnes de se pacser deux par deux et de reverser à la communauté l'économie fiscale ainsi réalisée. Pensez-vous qu'il y a un fondement social à cela ? Quand j'avais évoqué cet exemple, un mauvais esprit parmi vous...

M. Jean-Paul Bret.

Lucifer !

M. Charles de Courson.

... avait dit : « Et pourquoi pas la bonne du curé ? » Ben oui ! Pourquoi pas la bonne du curé pendant que vous y êtes ? On pourrait multiplier les exemples.

Du reste, l'exemple des deux veuves, ce n'est pas moi qui l'ai inventé, mais c'est vous, mes chers collègues, en n ous expliquant qu'il fallait étendre le PACS aux communautés de vie à caractère non sexuel. Les communautés de vie à caractère non sexuel sont très sympathiques mais je ne vois pas pourquoi on leur accorderait les mêmes droits qu'aux couples mariés.

L'amendement no 117, lui, à une cohérence intellectuelle en matière fiscale, ce qui n'est pas le cas de votre texte. Comme je l'ai dit en défendant l'exception d'irrecevabilité, il y a là incontestablement une rupture de l'égalité des citoyens devant l'impôt,...

Mme Christine Boutin.

Très juste !

M. Charles de Courson.

... puisque vous allez donner les mêmes avantages à des personnes qui n'assument absolument pas les mêmes fonctions sociales.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement.

Monsieur de Courson, contrairement à ce que vous prétendiez faussement en défendant votre exception d'irrecevabilité,...

M. Bernard Accoyer.

Oh !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... le président de la commission des finances a bien été saisi de vos amendem ents pour examiner leur recevabilité au titre de l'article 40. Mais il ne les a renvoyés au service de la séance qu'après que la commission des lois eut délibéré ce matin.

M. Charles de Courson.

Je n'y peux rien !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Cela dit, la commission a rejeté ces amendements en première et en deuxième lecture. Je demande donc à l'Assemblée de confirmer ses votes.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Parmi les choix financiers qui sont faits par le Gouvernement, il y en a un qui va à l'encontre des familles et de leur fonction fondamentale dans notre société, laquelle consiste à assurer la solidarité entre les générations.

A ce stade de la discussion, la seule information qui a pu filtrer sur le coût du PACS résulte d'une note de François Villeroy de Galhau, directeur de cabinet du ministre de l'économie des finances et de l'industrie, à Olivier Schrameck, directeur de cabinet du Premier ministre, note publiée par Libération le 3 septembre 1998.

Je cite : « S'agissant de l'imposition commune des concubins, il s'agit d'une mesure coûteuse. Les chiffrages, nécessairement approximatifs, font apparaître un coût compris entre 4 et 6 milliards de francs. »

Il apparaît par ailleurs clairement aux fiscalistes que le PACS sera antiredistributif, car il favorise les ménages monoactifs et à grande disparité fiscale. C'est toujours le problème du plus fort, du plus riche contre le plus faible.

M. Charles de Courson.

C'est la politique de gauche !

Mme Christine Boutin.

C'est la nouvelle politique de gauche !

M. Bernard Accoyer.

Il n'y a pas de raison d'étendre le bénéfice de l'imposition commune aux couples hors mariage, car si l'on compare leur situation à celle des personnes seules, il apparaît, d'après les études de l'INSEE, qu'ils bénéficient, à revenu égal, d'un train de vie de 30 % supérieur. Ainsi, le PACS mérite bien l'appellation de pacte des célibataires sacrifiés.


page précédente page 05553page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. François Goulard.

Très juste !

M. Bernard Accoyer.

De plus, il est choquant que le Gouvernement s'apprête à demander à la nation de financer le PACS à hauteur de plusieurs milliards de francs, alors qu'il vient de faire passer une série de mesures antifamille que je vais rappeler à nos collègues de la majorité, et en particulier à ceux qui tout à l'heure nous ont donné des leçons en nous expliquant que le PACS était une grande avancée pour la famille et que toutes les décisions de ce Gouvernement étaient favorables à la famille. Je vais leur rafraîchir la mémoire...

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Histoire de faire durer le plaisir !

M. Bernard Accoyer.

... en citant ces mesures : mise sous condition de resssources des allocations familiales pendant un an ; abaissement du quotient familial, ce qui coûté plus de 4 milliards aux familles ; diminution de l'AGED ; réduction de la déduction fiscale pour emploi d'une personne à domicile ; plafonnement de la demipart accordée aux personnes ayant élevé seules un ou plusieurs enfants ; refus, en janvier dernier, de donner suite à la proposition de loi de l'opposition visant à revaloriser l'allocation veuvage.

Je rappelle que le Sénat avait remplacé l'imposition commune des pacsés par la possibilité pour tout contribuable de bénéficier d'un abattement au titre d'une personne vivant sous son toit et étant à sa charge.

Dans ces conditions, nous considérons que l'amendement de Charles de Courson est particulièrement opportun et qu'il pourrait offrir à l'Assemblée l'occasion de faire un signe en direction des familles qui élèvent des enfants.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 117.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. de Courson a présenté un amendement, no 116, ainsi rédigé :

« Avant l'article 1er , insérer l'article suivant :

« Le pacte civil de solidarité n'ouvre à aucun droit en matière de pension de réversion, au titre du régime obligatoire de base, complémentaire ou surcomplémentaire. »

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Je vais donner lecture de l'amendement no 116, car il est tout de même d'une grande portée : « Le pacte civil de solidarité n'ouvre à aucun droit en matière de pension de réversion, au titre du régime obligatoire de base, complémentaire ou surcomplémentaire. »

Si j'ai déposé cet amendement, c'est pour susciter la discussion. Vous me rétorquerez sans doute que le présent texte n'ouvre pas de droits, qu'ils soient directs ou indirects, en matière de retraite de base, complémentaire ou surcomplémentaire. C'est exact. Mais j'ai expliqué dans l'exception d'irrecevabilité que vous ne tiendrez pas longtemps face à la demande qui sera inévitable. En effet, comment refuserez-vous à un couple hétérosexuel avec enfant et qui est pacsé les mêmes droits en matière de retraite que ceux dont bénéficient un couple marié avec enfant ?

M. Bernard Accoyer.

Très juste !

M. Charles de Courson.

Au nom de quoi allez-vous refuser à une femme qui a consacré vingt ans de sa vie à éduquer des enfants et qui était pacsée le bénéfice d'une pension de réversion ou, d'une façon plus spéciale, de droits en matière de retraite ? Une telle position est intenable.

Nous sommes confrontés à de très graves problèmes en matière de retraite. Nous, nous avons été courageux, nous avons réformé le régime général. Nous avons été de nou veau courageux en 1995, quand nous avons tenté de réformer les régimes spéciaux ; mais vous, vous faisiez partie de ceux qui ont manifesté contre alors que vous saviez parfaitement que la réforme était inéluctable ! D'ailleurs - et j'espère que vous l'avez tous lu - le nouveau livre sur l'avenir des retraites est comparable au Livre blanc sur les retraites de Michel Rocard paru en 1991. Mais vous, vous ne voulez rien faire en matière de retraites, vous ne voulez pas regarder la réalité en face ! Cela dit, je vous demande quelle est votre position sur le problème de l'éligibilité des pacsés au système de retraite français. Moi, je défends la thèse selon laquelle vous ne pouvez pas refuser durablement aux couples pacsés hétérosexuels avec enfant d'avoir les mêmes droits que les couples mariés avec enfant. J'aimerais avoir la position du Gouvernement et des rapporteurs sur ce point et j'apprécierais qu'ils ne se contentent pas de répondre par une pirouette consistant à dire : « non ».

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement.

M. Thierry Mariani.

Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ? Il n'y a pas de débat !

M. Bernard Birsinger.

Il a déjà eu lieu !

Mme Christine Boutin.

Vous n'aviez déjà pas répondu lors des deux précédentes lectures !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement ?

Mme la garde des sceaux.

Le texte de la proposition de loi ne prévoit pas que le pacte civil de solidarité ouvre droit à réversion dans un régime quelconque. L'amendement est donc sans objet.

Mme Christine Boutin.

Vous ne répondez pas à la question posée !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Parce que le PACS n'est pas le mariage !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 116.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. de Courson a présenté un amendement, no 120, ainsi rédigé :

« Avant l'article 1er , insérer l'article suivant :

« En cas de conclusion d'un pacte civil de solidarité, les allocations familiales ne peuvent être versées que sur le compte de celui des signataires du pacte qui possède l'autorité parentale. »

Sur cet amendement, M. Mariani a présenté un sousamendement, no 323, ainsi rédigé :

« Dans l'amendement no 120, après les mots : "sur le compte" insérer le mot : "personnel" ».

La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 120.

M. Charles de Courson.

Vous le savez, le droit des allocations familiales n'établit aucune distinction entre les couples mariés et les couples non mariés, puisque les


page précédente page 05554page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

prestations familiales ne sont pas destinées aux parents, mais aux enfants. Il existe donc un système de neutralisation au regard du régime juridique des parents.

Toutefois, à partir du moment où les parents sont pacsés et où il ont des enfants, la question se pose de savoir à qui seront versées les prestations familiales. L'amendement vise donc à empêcher que le cosignataire d'un PACS ne détourne à son profit des allocations familiales destinées aux besoins des enfants de son cocontractant, celles-ci devant être versées sur le compte de celui des signataires du pacte qui possède l'autorité parentale. On pourra objecter que les deux signataires peuvent avoir l'autorité parentale. Dans ce cas, le système actuel s'appliquera et il suffira que les parents choisissent sur le compte duquel d'entre eux iront les allocations.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement.

M. Thierry Mariani.

Pour quel motif ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Rejet.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir le sous-amendement no 323.

M. Thierry Mariani.

Sur la question des allocations familiales, l'Assemblée ne doit pas se hâter car nous savons que, au sein de la majorité plurielle, un vrai débat est en cours, notamment entre le ministre de l'intérieur, qui a publiquement reconnu que les allocations familiales pouvaient éventuellement être remises en cause si les parents n'assumaient pas leur autorité parentale, et Mme la ministre de la justice, qui ne partage pas cette position.

Mon sous-amendement propose de préciser que le compte sur lequel seront versées les allocations familiales est « personnel », deux conjoints pacsés pouvant avoir un compte joint.

M. François Goulard.

Le droit bancaire le permet !

M. Thierry Mariani.

Le droit bancaire le permet, c'est un expert qui l'affirme.

Une fois de plus, le faible ne doit pas être la victime de votre texte, il doit pouvoir être protégé. Aussi faut-il veiller à ce que les allocations familiales aillent bien sur le compte personnel de la personne ayant l'autorité parentale, et non sur un compte joint, et ce afin d'éviter tout détournement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Non examiné par la commission. A titre personnel, rejet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Cet amendement est inutile. Rejet.

M. Charles de Courson.

On peut savoir pourquoi ?

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 323.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 120.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er

M. le président.

« Art. 1er . - Le livre Ier du code civil est complété par un titre XII ainsi rédigé :

«

TITRE

XII

« DU PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ ET DU CONCUBINAGE

« C HAPITRE Ier

« Du pacte civil de solidarité

« Art. 515-1. - Un pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune.

« Art. 515-2. - A peine de nullité, il ne peut y avoir de pacte civil de solidarité :

« 1o Entre ascendant et descendant en ligne directe, entre alliés en ligne directe et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus ;

« 2o Entre deux personnes dont l'une au moins est engagée dans les liens du mariage ;

« 3o Entre deux personnes dont l'une au moins est déjà liée par un pacte civil de solidarité.

« Art. 515-3. - Deux personnes qui concluent un pacte civil de solidarité en font la déclaration conjointe au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel elles fixent leur résidence commune.

« A peine d'irrecevabilité, elles produisent au greffier la convention passée entre elles en double original et joignent les pièces d'état civil permettant d'établir la validité de l'acte au regard de l'article 515-2 ainsi qu'un certificat du greffe du tribunal d'instance de leur lieu de naissance ou, en cas de naissance à l'étranger, du greffe du tribunal de grande instance de Paris, attestant qu'elles ne sont pas déjà liées par un pacte civil de solidarité.

« Après production de l'ensemble des pièces, le greffier inscrit cette déclaration sur un registre.

« Le greffier vise et date les deux exemplaires originaux de la convention et les restitue à chaque partenaire.

« Il fait porter mention de la déclaration sur un registre tenu au greffe de tribunal d'instance du lieu de naissance de chaque partenaire ou, en cas de naissance à l'étranger, au greffe du tribunal de grande instance de Paris.

« L'inscription sur le registre du lieu de résidence confère date certaine au pacte civil de solidarité et le rend opposable aux tiers.

« Toute modification du pacte fait l'objet d'une déclaration conjointe inscrite au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial, à laquelle est joint, à peine d'irrecevabilité et en double original, l'acte portant modification de la convention. Les formalités prévues au quatrième alinéa sont applicables.

« A l'étranger, l'inscription de la déclaration conjointe d'un pacte liant deux partenaires dont l'un au moins est de nationalité française et les formalités prévues aux deuxième et quatrième alinéas sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français ainsi que celles requises en cas de modification du pacte.

« Art. 515-4. - Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'apportent une aide mutuelle et matérielle.

Les modalités de cette aide sont fixées par le pacte.

« Les partenaires sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante et pour les dépenses relatives au logement commun.

« Art. 515-5. - Les partenaires d'un pacte civil de solidarité indiquent, dans la convention visée au deuxième alinéa de l'article 515-3, s'ils entendent soumettre au


page précédente page 05555page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

régime de l'indivision les meubles meublants dont ils feraient l'acquisition à titre onéreux postérieurement à la conclusion du pacte. A défaut, ces meubles sont présumés indivis par moitié. Il en est de même lorsque la date d'acquisition de ces biens ne peut être établie.

« Les autres biens dont les partenaires deviennent propriétaires à titre onéreux postérieurement à la conclusion du pacte sont présumés indivis par moitié si l'acte d'acquisition ou de souscription n'en dispose autrement.

« Art. 516-6. - Les dispositions de l'article 832 sont applicables entre partenaires d'un pacte civil de solidarité en cas de dissolution de celui-ci, à l'exception de celles relatives à tout ou partie d'une exploitation agricole, ainsi qu'à une quote-part indivise ou aux parts sociales de cette exploitation.

« Art. 515-7. - Lorsque les partenaires décident d'un commun accord de mettre fin au pacte civil de solidarité, ils remettent une déclaration conjointe écrite au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel l'un d'entre eux au moins a sa résidence. Le greffier inscrit cette déclaration sur un registre et en assure la conservation.

« Lorsque l'un des partenaires décide de mettre fin au pacte civil de solidarité, il signifie à l'autre sa décision et adresse copie de cette signification au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.

« Lorsque l'un des partenaires met fin au pacte civil de solidarité en se mariant, il en informe l'autre par voie de signification et adresse copies de celle-ci et de son acte de naissance, sur lequel est portée mention du mariage, au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.

« Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès de l'un au moins des partenaires, le survivant ou tout intéressé adresse copie de l'acte de décès au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.

« Le greffier, qui reçoit la déclaration ou les actes prévus aux alinéas précédents, porte ou fait porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte initial. Il fait également procéder à l'inscription de cette mention en marge du registre prévu au cinquième alinéa de l'article 515-3.

« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation de la déclaration ou des actes prévus aux quatre premiers alinéas sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français, qui procèdent ou font procéder également aux mentions prévues à l'alinéa précédent.

« Le pacte civil de solidarité prend fin, selon le cas :

« 1o Dès la mention en marge de l'acte initial de la déclaration conjointe prévue au premier alinéa ;

« 2o Trois mois après la signification délivrée en application du deuxième alinéa, sous réserve qu'une copie en ait été portée à la connaissance du greffier du tribunal désigné à cet alinéa ;

« 3o A la date du mariage ou du décès de l'un des partenaires.

« Les partenaires procèdent eux-mêmes à la liquidation des droits et obligations résultant pour eux du pacte civil de solidarité. A défaut d'accord, le juge statue sur les conséquences patrimoniales de la rupture, sans préjudice de la réparation du dommage éventuellement subi. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Certains de mes collègues socialistes ont déploré mon absence en début de séance : eh bien, je vais les combler en intervenant sur l'article 1er

Au cours de cette troisième lecture, ou plutôt de cette quatrième lecture, puisque la première lecture a dû être bissée en raison de l'absence des députés socialistes, l'article 1er reste toujours l'article essentiel de la proposition de loi.

Nous abordons en effet le rétablissement des dispositions concernant le pacte civil de solidarité. Il s'agit en fait de la dernière discussion réelle de cette proposition, puisque la lecture définitive ne sera que formelle.

Votre texte sent un peu le réchauffé et ne comporte rien de neuf. L'opposition donne peut-être par moments l'impression de se répéter mais, comme le disait tout à l'heure mon collègue Lenoir, nous voulons saisir cette dernière occasion pour éviter que ne se produise un véritable séisme dans le droit des personnes et le droit de la famille.

En effet, si vous avez tenu compte de la première navette pour réparer quelques-unes des erreurs les plus grossières du texte initial, il n'en demeure pas moins que cette proposition continue de receler nombre d'incohérences, d'imprécisions et de contradictions qui seront à coup sûr une source de grandes difficultés et de fraudes en tous genres.

En première lecture, la plus grande partie de l'opposition avait mis en avant le fait que la disposition relative aux fratries était non seulement aberrante mais en outre inconstitutionnelle.

Elle avait également souligné qu'il était nécessaire de prendre certaines dispositions concernant les tutelles.

Vous nous avez répondu que c'était totalement inutile, mais vous avez finalement repris nos propositions en deuxième lecture.

Votre texte créera de grandes difficultés pour les personnes qui, vous faisant confiance, vont entrer dans la mécanique infernale de ce dispositif. Contrairement à ce que vous essayez de nous faire croire, il risque de se retourner contre ceux-là mêmes qui devraient bénéficier de ce texte.

En effet, nous le répétons, le PACS est tout sauf protecteur des partenaires. Plusieurs problèmes restent en suspens et j'espère, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, que cette troisième lecture sera l'occasion de nous donner enfin les réponses que nous attendons désespérément, car vous ne savez que répondre : avis défavorable.

Vous instaurez une totale liberté contractuelle en ce qui concerne le contenu des pactes qui seront rédigés. En clair, les personnes intéressées par votre dispositif pourront s'engager mutuellement et conclure des obligations dont la portée juridique pourrait être nulle, et mon collègue Accoyer l'a signalé à de multiples reprises en première lecture. Que se passera-t-il lors de la rupture d'un pacte s'il s'avère que ce dernier est manifestement contraire à la loi ? Comment voulez-vous que le juge confère des effets juridiques à des textes rédigés sans le conseil d'un professionnel du droit dans une matière aussi complexe ? Nous attendons toujours une réponse.

Autre source d'inquiétude : la proposition de loi instaure une présomption d'indivision pour le régime des biens acquis postérieurement à la conclusion du pacte ou dont on ne peut connaître la date d'acquisition. Là encore, vous retenez la solution la plus complexe. Et les députés de l'opposition ne sont pas les seuls à le dire : la plupart des professionnels du droit partagent cet avis ; car le choix de l'indivision va créer de véritables imbroglios


page précédente page 05556page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

juridiques lors de la rupture. Vous me répondrez sans doute : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Nous aurions préféré le régime de la séparation de biens ou celui de la communauté réduite aux acquêts, qui ont au moins le mérite de la simplicité. Pourquoi, monsieur le rapporteur, avez-vous proposé le régime le plus complexe en cas de rupture ? Nous attendons toujours votre réponse.

Par ailleurs, ce texte ne protège pas l'enfant. On nous rétorquera que l'enfant n'est pas concerné. C'est faux car, si j'ai bien compris, le texte est censé s'adresser aussi à des couples hétérosexuels, lesquels, même si cela peut sembler bizarre, sont susceptibles d'avoir des enfants.

L'alternative est simple. Soit vous considérez que le PACS ne concernera que les homosexuels, et, dans ce cas, je suis d'accord avec vous, point n'est besoin de parler des enfants. Soit vous considérez, et c'est votre discours officiel, que cette proposition de loi s'adresse aussi aux couples hétérosexuels, et, dans ce cas, elle comporte une énorme lacune qui sera dangereuse et préjudiciable pour les enfants issus de ces PACS.

Enfin, comment accepter ce qui ressemble à s'y méprendre à l'introduction dans notre droit de la répudiation ? Ici encore, malgré les soupirs que vous faites entendre, c'est l'insécurité la plus totale pour le partenaire le plus faible qui, du jour au lendemain, pourra être délaissé par son partenaire alors que ce dernier aura bénéficié d'avantages liés à la signature du PACS ; et le délai pour prévenir ainsi que la signification par voie d'huissier ne changeront rien à l'affaire.

M. le président.

Je vous propose de conclure, monsieur Mariani, car vous avez dépassé le temps de parole qui vous était imparti.

M. Thierry Mariani.

Le pacte civil de solidarité peut être rompu à tout moment, brutalement, ce qui déroge au droit des contrats.

En conclusion, s'il représente un danger pour les futurs partenaires, il représente aussi un danger pour la société, et mon collègue Patrick Devedjian a développé ce thème.

Ce sont désormais plus de six statuts qui sont mis en place, et la discussion qui commence va être pour nous l'occasion de démontrer les incohérences et les dangers de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Cet article est très important, et vous avez choisi de le faire figurer dans le livre Ier du code civil, consacré aux personnes. Parallèlement, vous nous avez dit et répété que le PACS était un contrat.

Or, en le faisant figurer dans le livre Ier du code civil, consacré aux personnes, vous avez donné une connotation particulière au PACS, qui se trouvera en réalité placé dans notre droit à côté des dispositions régissant le mariage, la filiation et l'adoption.

De deux choses l'une : ou vous nous racontez des histoires, ou vous êtes d'une incohérence absolue.

M. Thierry Mariani.

Les deux !

Mme Christine Boutin.

Le PACS prendrait ainsi place au côté du mariage. Vous dites que ce n'est pas vrai mais vous affirmez sans démontrer. Le PACS est très proche du mariage, et c'est bien la raison pour laquelle on a parlé de mariage bis ; ce n'est d'ailleurs qu'un mauvais plagiat du mariage.

J'ai beaucoup apprécié l'analyse de Patrick Devedjian, qui a montré que ce n'était peut-être pas un sousmariage, non plus qu'un mariage bis, mais que c'était peut-être une nouvelle catégorie de mariage.

Vous avez essayé, timidement, maladroitement et sans conviction de « dématrimonialiser » ce texte, en évitant de reprendre toutes les dispositions du mariage, ce qui le rend en fait impraticable et boiteux.

En effet, quand on regarde de très près l'article 1er , les parallèles entre l'institution du mariage et le PACS apparaissent de façon évidente. S'il n'en est qu'une timide reproduction, le PACS ressemble beaucoup au mariage.

Tout d'abord, les pacsés ne s'apportent qu'une aide mutuelle et matérielle, alors que les époux se doivent fidélité, secours et assistance. Mais ces deux formules sont très voisines, la première n'étant qu'une forme édulcorée de la seconde.

La bipacsie est, comme la bigamie, interdite. On ne peut pas contracter un PACS et être engagé dans le mariage. Mais, curieusement, le PACS est dissous du seul fait du mariage. Cependant, vous nous dites qu'il n'a absolument aucun lien avec le mariage.

Le PACS, comme le mariage, est interdit entre ascendant et descendant en ligne directe, entre alliés en ligne directe et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus. Les empêchements au mariage sont les mêmes que ceux que vous prévoyez pour le PACS, si bien que les deux seules différences qui séparent le PACS du mariage, sont, d'une part, le fait qu'il soit accessible à deux pesonnes du même sexe, et, d'autre part, le fait qu'il puisse facilement être rompu, par une nouvelle forme de répudiation qui semble pour vous être un signe de progrès. Or la répudiation n'a jamais été considérée comme un progrès pour les droits de l'homme et de la femme.

Le PACS refuse toute contrainte. Par ailleurs, s'il ne c omporte pas qu'une dimension sexuelle, pourquoi n'acceptez-vous pas l'ouverture du pacte à plus de deux personnes, trois, quatre ou cinq ? Est-ce parce que le PACS veut procéder à une officialisation, voire à une institutionnalisation de l'union de deux personnes uniquement ? Là aussi, je tiens à souligner votre manque de courage.

Ce texte était une merveilleuse occasion pour aider notre pays à regarder la situation de façon responsable et à poser un regard positif sur la façon dont il traite l'homosexualité ; vous n'avez jamais eu le courage d'aborder directement ce problème.

En outre, toutes les règles de publicité, de nullité ou d'opposabilité ont été omises en ce qui concerne le PACS, ce qui va poser d'importants problèmes à l'égard des tiers.

Le lieu d'enregistrement a donné lieu à de nombreuses discussions, et notre président de séance en a reparlé tout à l'heure avec talent. Les maires se sont opposés avec force au choix de la mairie. Mais c'est pourtant le lieu auquel vous aviez pensé au départ. Et vous nous dites qu'il n'y a pas de lien avec le mariage ! Mais la mairie avait une trop grande valeur symbolique, et, pour ne pas l'assumer, on a tout de suite essayé de trouver d'autres lieux.

M. le président.

Vous avez épuisé votre temps de parole, madame Boutin, il faut conclure.

Mme Christine Boutin.

Je termine, monsieur le président.


page précédente page 05557page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Sur la lancée de la « dématrimonialisation », pour faire oublier que le PACS est un mariage bis, on a proposé comme lieu d'enregistrement la préfecture ou le tribunal d'instance.

En troisième lecture, vous répondez de façon laconique

« défavorable » aux amendements que nous avions déposés, sans aucune explication. Vous continuez comme vous l'avez fait en première et en deuxième lecture. Je souhaite que des étudiants en droit analysent de façon précise les positions que vous avez prises. On verra que vous n'avez pas eu de courage, mais aussi que vous n'avez même pas eu la courtoisie de nous donner des arguments à l'appui de votre position.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

L'article 1er est essentiel mais je m'exprimerai brièvement car M. Mariani et Mme Boutin sont déjà intervenus.

Je soulignerai certaines caractéristiques particulièrement inquiétantes, eu égard au caractère improvisé de ce texte, et à la procédure confidentielle choisie pour l'élaborer.

Les rapporteurs ont en effet travaillé en petit comité, de façon presque cachée, alors que le Sénat a procédé à vingt-neuf auditions de personnalités éminentes compétentes dans tous les domaines qui touchent à l'équilibre de notre société et à l'équilibre du couple.

Le Sénat a par ailleurs procédé à des auditions publiques alors que, comme on a pu le lire dans le rapport sur le PACS 1, le travail du rapporteur de l'Assemblée était confidentiel.

J'insiste une nouvelle fois sur le fait que cet article accorde un avantage au plus fort sur le plus faible, un avantage au couple sans finalité de procréation par rapport aux familles avec enfants, un avantage à ces mêmes couples sans finalité de procréation par rapport aux célibataires et aux veufs.

En conclusion, je citerai un juriste, Jacques Lassaussois, avocat au barreau de Paris : « On frémit. La rédaction du contrat d'organisation sera libre et laissée à l'imagination des partenaires. Comme on sait, les conventions librement consenties, non contraires à l'ordre public, font la loi des parties. Verra-t-on des contrats de plusieurs pages établis par des intéressés plus ou moins instruits, fixant l es pourcentages de participation aux dépenses communes, un minimum de relations sexuelles par jour, semaine ou mois, organisant des vacances de célibataires, établissant une alternance du partage de la vaisselle, etc.

? »

M. Alain Rodet.

On va faire part de ces propos à vos électeurs de Haute-Savoie. Ils vont vous tailler un short ! N'en faites pas trop !

M. Bernard Accoyer.

M. Lassaussois poursuit : « Mieux vaudrait prévoir la rédaction de la convention par un professionnel averti [...]. Cette petite complication serait, sans doute par la suite, une utile simplification. »

Mais notre rapporteur, Jean-Pierre Michel, s'est luimême exprimé sur le rôle des juristes dans l'élaboration de ces contrats. Selon lui, l'intervention d'un avocat, d'un notaire ou d'un juriste pourrait être « bienvenue, sans cependant être obligatoire ».

On voit bien que ce texte ouvre une nouvelle fois toute grande la porte des avantages à ceux qui savent en user.

M. Alain Rodet.

En user est une chose, en abuser une autre !

M. Bernard Accoyer.

C'est pourquoi nous voterons contre cet article qui, nous l'avons déjà dit, constitue le coeur du texte. (Applaudissement sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

L'intitulé de l'article 1er , simple encore qu'il ait été modifié, est l'illustration parfaite de ce que nous reprochons au texte. Il comporte en réalité quatre éléments et, en les examinant de près, on s'aperçoit que rien n'est vrai dans cet article.

Premier élément ; la place du pacte civil de solidarité dans notre droit se situe au livre Ier du code civil.

Côtoyant les titres consacrés au mariage et au divorce, il s'inscrit donc dans le droit des personnes et de la famille.

Or on nous dit qu'il n'en relève pas, que c'est un contrat.

Que fait-il alors à cette place ? Première anomalie, un peu dissimulatrice.

Deuxième élément : on nous dit qu'il s'agit d'un pacte civil. Mais, je l'ai dit lors des lectures précédentes, cette notion n'existe pas en droit français, elle appartient au droit international. Elle renvoie à la sujétion, au droit des gens, ce n'est absolument pas une notion de droit civil.

Alors, pourquoi parler de pacte civil ? En réalité, c'est parce que « contrat » n'était pas assez et qu'« institution » était trop. Mais on a créé une notion qu'il faudra définir devant les tribunaux, et c'est donc une nouvelle dissimulation.

On nous affirme en troisième lieu qu'il s'agit d'un pacte de « solidarité ». Mais la solidarité est précisément ce qui manque dans le pacte civil, à moins que la solidarité ne soit unilatérale. Il n'y a pas en effet dans le pacte civil d'obligations réciproques traduisant la solidarité.

Alors que l'institution matrimoniale est fondée sur des obligations réciproques, ce qui caractérise le pacte civil, c'est qu'il ne comporte pas d'obligations réciproques. Et pourtant, on parle de solidarité. Là encore, il y a dissimulation.

Quatrième dissimulation - et il y a même un peu tromperie - vous ajoutez : « et du concubinage ». En réalité, vous vous êtes servi du texte du Sénat, qui était un texte alternatif visant à remplacer le PACS, et vous avez ajouté la notion de concubinage afin de susciter un débat interne au sein de l'opposition et de montrer ses contradictions. Mais cela n'a trompé personne, car l'opposition n'a pas manifesté de faille sur cette question. Vous savez d'ailleurs très bien qu'avoir ajouté le concubinage ne sert strictement à rien, sinon à ajouter un sous-titre.

Lorsqu'on fera la glose de l'article 1er , on verra quelle était l'intention du législateur. Nous l'avons dénoncée sans relâche et nous la dénoncerons encore. En réalité, vous aviez une perspective politique que M. Michel a avouée franchement, car son propos est clair, et il eût été souhaitable que l'Assemblée en discutât.

Non, vous avez procédé à un camouflage, dont le titre lui-même est l'illustration. On ne fait pas une réforme de la société, du droit des personnes et de la famille sur un camouflage.

L'un des reproches principaux que nous adressons à ce texte, c'est qu'il n'est pas sincère. Il est fallacieux. Nous le dénonçons. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Je suis saisi de quatre amendements identiques.


page précédente page 05558page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

L'amendement no 6 est présenté par MM. Goasguen, Dord et Goulard ; l'amendement no 41 par M. Mariani ; l'amendement no 82 par M. Plagnol, Mme Boutin, M. de Courson et M. Dutreil ; l'amendement no 180 par

M. Accoyer.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 1er »

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements déjà défendus ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Pour la troisième fois, la commission des lois a repoussé ces amendements ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix, par un seul vote, les amendements nos 6, 41, 82 et 180.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Avant l'article 515-1 du code civil

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 237, ainsi rédigé :

« I. Supprimer les cinq premiers alinéas de l'article 1er

« II. En conséquence, supprimer les références : " Art. 515-1", "Art. 515-2", "Art. 515-3", " Art. 515-4", "Art. 515-5", "Art. 515-6", et "Art. 515-7". »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Si le Gouvernement et la majorité des députés ne veulent pas d'un sous-mariage, comme paraît l'attester le refus d'une célébration devant le maire, il faut pousser la logique jusqu'au bout et quitter le terrain du code civil, sur lequel se regroupent les institutions de base de la société par exemple la famille, la propriété.

Ce serait tout un symbole, comme c'est le lieu d'enregistrement du PACS. Car les symboles sont importants dans une société.

A noter que le PACS n'assure aucune protection aux faibles : libre rupture, absence de pension alimentaire, et j'en passe. Le code civil, au contraire, assure généralement cette protection. Il faut donc éviter que les citoyens qui auraient pu se marier ne concluent un PACS en se croyant protégés par le code civil alors qu'ils ne trouveront dans le pacte aucune protection ni aucune sécurité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement parce qu'elle veut que les dispositions relatives au PACS soient intégrées dans le code civil au lieu de lui être extérieures au code, comme le propose Mme Boutin.

Mme Christine Boutin.

Mais pourquoi veut-elle cela ? On ne le saura jamais...

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 237.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 42, ainsi rédigé :

« I. Substituer aux cinq premiers alinéas de l'article 1er l'alinéa suivant :

« Il est inséré après le titre V du livre III du code civil un titre V bis intitulé : "Du pacte civil de solidarité" et comportant les articles 1581-1 à 1581-7 ».

« II. En conséquence, dans le reste de cet article, substituer :

« à la référence : "Art. 515-1" la référence : "Art. 1581-1" ;

« à la référence : "Art. 515-2" la référence : "Art. 1581-2" ;

« à la référence : "Art. 515-3" la référence : "Art. 1581-3" ;

« à la référence : "Art. 515-4" la référence : "Art. 1581-4" ;

« à la référence : "Art. 515-5" la référence : "Art. 1581-5" ;

« à la référence : "Art. 515-6" la référence : "Art. 1581-6" ;

« à la référence : "Art. 515-7" la référence : "Art. 1581-7" ».

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

J'espérais, à l'occasion de cette troisième discussion, que nous obtiendrions enfin les réponses à des questions que nous ne cessons de poser.

Mais dès le premier amendement défendu par notre collègue Christine Boutin, je constate le même laconisme que lors des deux précédentes lectures de la part du rapporteur de la commission et du ministre.

L'amendement no 42 rejoint en fait l'amendement précédent. Il est absolument illogique de placer des dispositions relevant du droit des contrats dans le titre du code civil traitant des personnes. On le sait très bien, avec le PACS et dès l'article 1er , nous entrons dans l'essentiel du sujet et nous allons avoir à déplorer de multiples incohérences, qui seront ingérables.

Tout à l'heure, notre collègue de Courson a exposé un certain nombre de problèmes fiscaux. Nous constatons, de notre côté, que vous allez créer six statuts : les personnes mariées ; les personnes pacsées ; les personnes vivant en concubinage ; les personnes vivant en concubinage avec une personne ayant signé un PACS avec une tierce personne ; les personnes mariées et vivant en concubinage puisque, selon vos propres dires, le concubinage est une situation de fait ; enfin les célibataires vivant seuls et qui peuvent se rassurer, puisqu'ils devront payer pour tous les autres...

Introduire les articles du PACS dans le code civil c'est contribuer à désorganiser un peu plus l'édifice législatif français. Nous vous demandons une dernière fois d'accepter notre proposition et de placer cet article, qui concerne les contrats, dans le livre troisième du code civil. Il convient d'être cohérent.

M. le président.

Quel est l'avis la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement. Le PACS, on l'a dit à de nomb reuses reprises, est une convention solennelle, un contrat. Mais bien entendu, comme l'a fort bien dit M. Goasguen à cette tribune, il a des répercutions sur l'état des personnes. Il est donc tout à fait naturel qu'il soit inscrit, comme il l'est, dans le titre sur le droit des personnes, et non dans le titre sur les contrats.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?


page précédente page 05559page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Mme la garde des sceaux.

Je confirme. Même avis défavorable que sur l'amendement précédent.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

42. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Plagnol, Mme Boutin, M. de Courson et M. Dutreil, ont présenté un amendement, no 80, ainsi libellé :

« I. Rédiger ainsi les deux premiers alinéas de l'article 1er :

« Titre V bis "Du pacte civil de solidarité et du concubinage" ».

« II. En conséquence, dans cet article, substituer :

« à la référence : "Art. 515-1" la référence : "Art. 1581-1" ;

« à la référence : "Art. 515-2" la référence : "Art. 1581-2" ;

« à la référence : "Art. 515-3" la référence : "Art. 1581-3" ;

« à la référence : "Art. 515-4" la référence : "Art. 1581-4" ;

« à la référence : "Art. 515-5" la référence : "Art. 1581-5" ;

« à la référence : "Art. 515-6" la référence : "Art. 1581-6" ;

« à la référence : "Art. 515-7" la référence : "Art. 1581-7" ».

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Amendement défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Contre.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Rejet.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

80. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. de Courson présenté un amendement, no 115, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi la première phrase de l'article 1er :

« Le livre troisième du code civil est complété par un titre XXI intitulé "Du contrat civil de solidarité" et comportant les articles 2284 à 2291. »

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Cet amendement est du même type que les précédents. Les liens juridiques, objets du présent texte, constituent ce qui revêt la qualification juridique de « contrat ».

Il n'y a plus de discussion. La majorité, après bien des débats, a fini par reconnaître qu'en raison de son objet, c'était un contrat. Et non pas un contrat solennel : le qualificatif de « solennel » n'a pas de sens juridique, comme nous l'avons toujours fait remarquer au rapporteur. C'est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose - article 1101 du code civil, bien connu de tous les juristes.

Il est donc logique d'insérer les dispositions concernant la convention, objet du présent texte, dans le livre du code civil qui dispose des contrats ou des obligations conventionnelles en général.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement pour les mêmes raisons qu'elle a rejeté l'amendement défendu par M. Mariani tout à l'heure.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 115.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 178, présenté par M. Accoyer, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le troisième alinéa de l'article 1er : " Du pacte relatif aux concubins, concubins mariés et pacsés, concubins mariés et pacsés". »

L'amendement no 7, présenté par MM. Goasguen, Dord et Goulard, est ainsi libellé :

« Avant le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, rédiger ainsi l'intitulé du titre XII : " Du contrat civil de solidarité". »

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour défendre l'amendement no 178.

M. Bernard Accoyer.

Mon amendement introduirait un peu de transparence et de franchise, dans un texte marqué par l'improvisation. Malgré une troisième lecture, il reste toujours un objet juridique non identifié. Il en résulte des situations inextricables et si diverses que l'on voit mal comment notre société pourrait s'y retrouver.

Le choix qui s'offrira à ceux qui souhaitent concrétiser leur union sera tel qu'ils devront se renseigner pour savoir ce qui conviendra le mieux à leurs intérêts. Les intérêts matériels guideront certaines décisions que les couples, ou futurs couples seront conduits à retenir.

Une telle situation est pour nous complètement inacceptable.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen, pour soutenir l'amendement no

7.

M. Claude Goasguen.

Cet amendement ne tend pas à une simple modification sémantique. Il entend résoudre un problème juridique très sérieux, comme l'a dit M. de Courson. Le PACS est-il un vrai contrat ? Est-ce un contrat solennel ? Au vu des modifications apportées en première lecture, le pacte n'était que contractuel. Il est désormais enregistré d'une manière qui lui donne un degré de solennité et de publicité suffisants pour dire qu'il s'agit d'une convention solennelle.

Le pacte est une notion tout à fait fortuite et très mal définie dans le droit français. Son emploi va entraîner des complications. Je le dis pour le Journal officiel et pour faciliter l'interprétation des débats - car, depuis le début ce n'est pas un débat parlementaire, mais une suite de monologues. La nature de ce contrat est plutôt solennelle que strictement conventionnelle.

M. Bernard Accoyer.

Tout à fait !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean Michel, rapporteur.

Rejet. La commission souhaite conserver l'appellation : « pacte civil de solidarité ».

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?


page précédente page 05560page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 178.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 177, ainsi rédigé :

« I. - Dans le troisième alinéa de l'article 1er , substituer aux mots : "pacte civil de solidarité" les mots : "pacte d'accès à des avantages accordés en dehors du célibat et du mariage".

« II. - En conséquence, procéder à la même substitution dans le reste de cet article. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir cet amendement.

M. Thierry Mariani.

On comprend que M. le rapporteur préfère conserver l'appellation actuelle. Nous sommes dans le symbole. Mais, comme l'a démontré notre collègue Goasguen, cette appellation ne correspond à rien.

Voilà pourquoi nous proposons de la modifier. La rédaction que nous suggérons aurait l'avantage de la clarté, de la transparence et de la vérité.

M. Bernard Outin.

N'importe quoi !

M. Thierry Mariani.

Vous nous avez expliqué, tout au long des deux premières lectures, et je pense que votre discours ne changera plus, qu'il ne s'agit, dans ce texte, de ne parler ni de la famille, ni des enfants, ni d'amour.

Finalement, de quoi parlons-nous ? Uniquement d'avantages fiscaux.

Mme Dominique Gillot.

De solidarité, aussi, et de responsabilité !

M. Thierry Mariani.

Les seuls qui en sont exclus, ce sont les célibataires ou ceux qui ne passeront pas de PACS de complaisance.

Parler de pacte d'accès à des avantages accordés en dehors du célibat et du mariage », montrerait quel est le véritable but de ce texte. En dehors des avantages fiscaux, en dehors des avantages matériels, il n'y a rien. Ni affection ni sentiment. C'est une discussion purement mercantile !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Comment ?

M. Thierry Mariani.

Madame Tasca, si vous voulez nous expliquer ce soir que le PACS a un rapport avec l'affection, ce sera une révélation ! Car jusqu'à présent, on nous a expliqué à longueur de temps qu'il ne s'agissait pas de sentiment.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

N'importe quoi !

M. Thierry Mariani.

La rédaction proposée par mon collègue Accoyer a au moins l'avantage de la clarté.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Rejet également, monsieur le président.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 177.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 239, ainsi rédigé :

« Dans le troisième alinéa (intitulé du titre XII) de l'article 1er , supprimer les mots : "et du concubinage". »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Cet amendement a pour objet d'éviter que soit insérée une définition du concubinage dans le code civil. Le concubinage, union de fait, ignore le droit. Il n'y a pas de raison de le faire figurer dans le code civil.

Monsieur le président, je constate que nous n'arrivons pas à obtenir de réponse, ni de la part du rapporteur, ni de la part de Mme la ministre. Il est cependant tout à fait intéressant de rappeler qu'à la suite du congrès des notaires, notre rapporteur, M. Michel a déclaré, dans Le Figaro du 10 mai 1999 : « Si le fait de placer le PACS dans les contrats peut être un signe d'ouverture par rapport au Sénat et peut faire aboutir à un meilleur consensus, personnellement, cela ne me gêne pas. »

Monsieur Michel, au moins, vous, vous dites les choses ! Vous avez compris le sens de notre interrogation.

Il est bien évident que mettre le PACS dans le code civil a une grande signification. Et vous avez poursuivi en disant : « Pour le PACS qui n'est pas de même nature que l'institution du mariage et n'en comporte pas le mêmes devoirs, notamment celui de la fidélité... » Ainsi

pour vous, la différence entre le mariage et le PACS, c'est que, dans le mariage, on doit être fidèle et que, dans le PACS, on peut être infidèle.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Mme Boutin ayant avancé des affirmations qui ne sont pas très exactes, je suis forcé de lui répondre.

Mme Christine Boutin.

J'ai cité Le Figaro !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Les propos que j'ai tenus dans Le Figaro sont exacts. Mais pour avoir une discussion avec le Sénat, encore eût-il fallu, ma chère collègue, que le Sénat se prêtat à la discussion,...

Mme Christine Boutin.

Nous, nous nous y prêtons !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... qu'il n'adoptât pas une question préalable et qu'il ne rejetât pas le texte.

Or le Sénat a refusé toute discussion.

Vous-mêmes, en redéposant en troisième lecture trois cents et quelque amendements exactement semblables à ceux des deuxième et première lectures, montrez que vous n'êtes pas pour une discussion sérieuse et que vous voulez repousser le texte en bloc. C'est la raison pour laquelle je ne vois pas pourquoi la majorité aurait changé sa façon de voir.

Madame Boutin, la commission a bien entendu rejeté votre amendement. Le concubinage est une union de fait qui ignore le droit, peut-être. Pour autant, le droit doit-il ignorer le concubinage ? Non. C'est d'ailleurs ce qu'ont voulu les sénateurs et que nous avons repris.

Je sais bien qu'il y a des divisions entre vous. Certains étaient favorables au concubinage, d'autres pas.

Mme Christine Boutin.

Comme chez vous !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Nous, nous pensons que le concubinage doit rester inscrit dans la loi.


page précédente page 05561page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Pourquoi l'obligation de fidélité ne figure-t-elle pas dans le texte sur le PACS ? Tout simplement, madame Boutin, parce que le PACS peut concerner deux personnes qui pour vivre sous le même toit ne partagent pas le même lit ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Christine Boutin.

Ah, mais et cet amour dont parlait Mme Collange ?

M. Bernard Accoyer.

Mais oui, et l'amour dans tout ça ? C'est le contraire de ce que vous disiez cet aprèsmidi !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Calmez-vous, chers collègues !

M. Bernard Accoyer.

Avec les socialistes, plus d'amour après minuit !

M. Alain Rodet.

L'amour est enfant de Bohème, il n'a jamais connu de loi...

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Il aurait été totalement inconséquent de prévoir une obligation de fidélité entre deux personnes, deux partenaires, qui souhaitent bénéficier du PACS. Rejet de l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 239.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 238, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le cinquième alinéa (intitulé du chapitre Ier ) de l'article 1er :

« Du contrat civil de solidarité. »

Mme Christine Boutin.

On ne sait pas trop ce qu'est le pacte. En l'insérant dans le code civil, vous créez une confusion, nous venons de le démontrer en long, en large et en travers. Du reste, même M. Michel était d'accord, dans le Figaro du 10 mai dernier, pour que ce pacte figure dans le livre des contrats.

Mieux vaut donc être clair : puisque vous reconnaissez tous qu'il s'agit d'un contrat, je propose que nous appelions ce nouvel objet juridique non identifié le « contrat civil de solidarité ».

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement pour les mêmes raisons qu'elle avait repoussé un amendement précédent de même facture.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 238.

(L'amendement n'est pas adopté.)

ARTICLE 515-1 DU CODE CIVIL

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement no 8 est présenté par MM. Goasguen et Goulard ; l'amendement no 83 par M. Plagnol, Mme Boutin, MM. de Courson et Dutreil ; l'amendement no 179 par M. Accoyer.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil. »

Ces amendements ont déjà été défendus.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je ne suis pas certain que tous nos collègues de la majorité aient bien mesuré la complexité et les conséquences de cet article 1er , qui ne modifie pas moins de sept articles du code civil.

M. Alain Rodet.

M. Bernard Accoyer est sur le point d'être redondant !

M. Bernard Accoyer.

Dans l'article 515-1 du code civil, que mon amendement no 179 vise à supprimer, il est enfin précisé, et c'est une nouveauté, que le PACS est un contrat. Nous sommes heureux de constater que la majorité et le Gouvernement progressent à petits pas.

Mais nous nous inquiétons des insuffisances d'une telle construction et des difficultés et des contentieux ultérieurs qu'elle laisse augurer. Ne s'agit-il pas, là encore, de l'une de ces divagations oniriques de nos rapporteurs qui, au fil du temps, ont fait varier cet objet aux contours de plus en plus flous qu'est le PACS ? Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer l'article.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a bien entendu repoussé ces amendements de suppression.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Evidemment défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix, par un seul vote, les l'amendements nos 8, 83 et 179.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

MM. Goasguen, Goulard, Mattei, Dord, Herbillon, Teissier et Forissier ont présenté un amendement, no 9, ainsi rédigé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil :

« Art. 515-1. - Une attestation civile de solidarité enregistrée devant notaire peut être délivrée à deux personnes physiques, quel que soit leur sexe, pour organiser leur vie commune.

« Seuls les majeurs capables peuvent contracter. »

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Il s'agit d'un amendement alternatif, puisqu'il a pour objet de substituer à la conception dominante de cette assemblée, qui repose sur une convention faisant ressembler furieusement le PACS à l'institution matrimoniale, une autre conception, à notre avis beaucoup plus conforme à l'état de la société et finalement au souhait des Français, qui repose sur une attestation civile enregistrée devant notaire - c'est-à-dire un acte privé, encore que le notaire soit un officier public - pouvant être délivrée à deux personnes physiques, quel que soit leur sexe, pour organiser leur vie commune.

Cette proposition alternative n'a pas, bien entendu, satisfait la majorité, qui n'en a même pas discuté. M. le rapporteur va nous dire que « pour la troisième fois, la


page précédente page 05562page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

commission a examiné cet amendement et l'a repoussé ».

De la même voix triste qu'on dit dans l'Evangile que le Christ est tombé pour la troisième fois... (Sourires.)

M. Alain Rodet.

On appelle cela un blasphème !

M. Claude Goasguen.

En matière de religion, je n'ai pas de leçon à recevoir de vous, mon cher ami !

M. Alain Rodet.

« Mon cher ami » : n'exagérez pas !

M. Claude Goasguen.

Que me reprochez-vous ? Je n'ai pas bien entendu.

M. le président.

Reprenez votre propos, monsieur Goasguen.

M. Alain Rodet.

Vous gagnez du temps, vous n'avez plus rien à dire !

M. Claude Goasguen.

C'est vous, monsieur Rodet, qui perdez du temps. Si vous avez quelque chose à dire, il faut le dire publiquement et nous vous répondrons.

L'Assemblée est faite pour cela. Moi, je n'ai jamais refusé la confrontation. Elle est démocratique. A condition qu'elle soit courtoise.

M. Maurice Adevah-Poeuf.

On ne sait pas pour qui c'est un chemin de croix !

M. Claude Goasguen.

Donc, il serait souhaitable que, de temps en temps, la majorité reconnaisse que d'autres conceptions que les siennes, qui pourraient répondre aux attentes d'un certain nombre de Français, méritent d'être prises en considération et non pas écartées d'un revers de main parce qu'elles ne sont pas conformes à l'idéologie dominante.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Il est vrai que la commission a repoussé cet amendement. Je m'étais longuement expliqué sur ce point en première et en deuxième lecture. C'est la solution du professeur Hauser, le PIC, c'est-à-dire un contrat sous seing privé passé devant notaire exclusivement. Ce n'est pas celle qu'ont retenue les rapporteurs, la commission des lois et la majorité. Donc, je propose de repousser cette proposition alternative, comme l'a si bien dit M. Goasguen, mais qui ne s'inscrit pas dans la philosophie du texte sur le PACS que nous souhaitons voir adopter.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

9. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 54, ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, après les mots : "est un contrat", insérer les mots : "à durée indéterminée". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Il est intéressant, l'amendement no 54, parce qu'il pose un vrai problème - un de plus que l'opposition soulève - et j'espère, monsieur le rapporteur, que vous allez y répondre.

Je suggère de préciser que le PACS est un contrat à durée indéterminée. Et ce n'est pas du tout de l'obstruction ; il s'agit d'éviter que les parties, qui peuvent rédiger librement leur contrat, n'y stipulent un délai. Dans la rédaction actuelle, monsieur le rapporteur, qu'est-ce qui interdit aux contractants de conclure un pacte à durée déterminée : par exemple, M. Mariani et Mme X ou M. X font un PACS pour cinq ans ? Rien ! Nous avons consulté un certain nombre de juristes et je ne vois pas sur quelle base, si le texte reste en l'état, vous pourrez vous appuyer pour éviter un pacte à durée déterminée.

D'où la nécessité, ce texte permettant toutes les fraudes, d'exclure au moins clairement cette possibilité, même s'il n'y a pas d'amour, même s'il n'y a pas de sentiment, même s'il n'y a pas d'affection, même si l'on a compris depuis longtemps, monsieur Michel, qu'il s'agit essentiellement d'avantages fiscaux et de questions d'intérêt !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

On ne peut pas laisser dire cela !

M. Thierry Mariani.

C'est ce que vous nous avez expliqué, madame la présidente. Ayez le courage de vos opinions !

M. Daniel Marcovitch.

Vous êtes obsédé par le fric !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Vous oubliez ceux qui attendent depuis des années de pouvoir signer un PACS.

M. Thierry Mariani.

Vous nous avez répété que ce texte n'avait rien à voir avec l'affection et les sentiments. Alors soyez cohérente !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

C'est vous qui ramenez tout à l'intérêt !

M. le président.

Allons ! M. Mariani va conclure.

M. Thierry Mariani.

Je vais conclure en vous posant à nouveau cette question, monsieur le rapporteur : qu'est-ce qui interdit de conclure un PACS à durée déterminée ?

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

L'amour !

M. Thierry Mariani.

Dans le texte actuel, tel qu'il est rédigé, je vous mets au défi de trouver une disposition qui l'empêche. Elle n'existe pas ! Madame la ministre, cet amendement me paraît tout à fait justifié. Essayez d'oublier qu'il vient de l'opposition.

En trois lectures, nous avons réussi à vous en faire admettre un, un seul. Comprenez que celui-là mérite vraiment d'être accepté.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé l'amendement. Monsieur Mariani, le PACS est un contrat à durée indéterminée parce que la loi dispose que tous les contrats sont à durée indéterminée sauf si la loi elle-même ou le contrat prévoit le contraire. A mon avis, bien que cela soit contraire à l'esprit du texte, rien n'interdit que les deux parties concluent un PACS pour une durée déterminée.

M. Thierry Mariani.

Merci de le reconnaître !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Mais elles n'auraient aucun intérêt à le faire, puisque le PACS, contrat à durée i ndéterminée, peut être rompu unilatéralement sans motif. Vous le savez très bien : vous avez assez critiqué ce que vous appelez une répudiation.

Un PACS à durée déterminée ne présentant aucun intérêt, il est inutile d'exclure cette possibilité dans le texte. Le PACS est un contrat à durée indéterminée.

C'est bien la raison pour laquelle, je le répète, il peut être rompu de façon unilatérale.


page précédente page 05563page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je pense moi aussi que cet amendement n'a aucun sens. J'y suis défavorable.

M. Claude Goasguen.

C'est un peu court !

M. Thierry Mariani.

Comme toujours !

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

M. Mariani a posé une vraie question et le rapporteur lui a répondu qu'une clause d'un PACS prévoyant sa durée déterminée serait parfaitement compatible avec le texte tel qu'il est. Autrement dit, si je conclus un PACS d'une durée de cinq ans, par exemple, il prendra fin automatiquement à cette échéance par consentement mutuel et, dès lors, ni moi ni mon partenaire ne pourrons présenter la moindre revendication.

La clause de durée déterminée implique que la rupture ait lieu sans aucune possibilité de réclamer des dommages et intérêts.

Nous retombons ainsi dans un problème que nous soulevons depuis des mois, à savoir que le PACS permet la répudiation, y compris par un accord conventionnel conclu initialement, lors de la signature du contrat.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

La répudiation par consentement mutuel, c'est fort !

M. Charles de Courson.

C'est ainsi, madame la présidente, dès lors que le pacte est à durée déterminée. Et n'allez pas contredire le rapporteur, qui a parfaitement raison : rien n'interdit dans ce texte de fixer une durée déterminée au PACS. Si vous n'êtes pas d'accord, prenez la parole et citez-nous l'article qui s'y oppose. Il n'y en a pas ! C'est pourquoi l'amendement de M. Mariani est pleinement justifié.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

On vous a dit qu'une telle clause n'avait aucun intérêt !

M. Thierry Mariani.

Si, pour la répudiation !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

54. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. Thierry Mariani.

Mais nous venons d'apprendre que le PACS pouvait être à durée déterminée. Quelle information !

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 176, présenté par M. Accoyer, est ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, après le mot : "conclu", insérer les mots : "devant un professionnel du droit". »

L'amendement no 181, présenté par M. Delnatte, est ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, après le mot : "contrat", insérer les mots : "rédigé devant notaire". »

L'amendement no 46, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, après les mots : "contrat conclu", insérer les mots : "devant notaire". »

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l'amendement no 176.

M. Bernard Accoyer.

Nous vivons un moment important puisque notre rapporteur, auquel nous reconnaissons unanimement le mérite de n'avoir jamais caché ses intentions, vient de nous faire connaître que le PACS, dont nous avons dénoncé à de multiples reprises la conclusion dans un but de convenance, dans un but d'intérêt, pouvait de surcroît être un contrat à durée déterminée. Permettez alors que nous nous interrogions à nouveau sur les fondements sentimentaux sur lesquels serait bâti le PACS.

Mme Christine Boutin.

Et on nous reproche de ne pas parler d'amour ! Elle est belle la majorité plurielle : voilà qu'elle veut l'amour en tranches !

M. Bernard Accoyer.

On croirait presque que l'amendement no 176 a été préparé dans le seul but d'apporter à notre rapporteur une parade à son aveu. Il tend en effet à imposer que le contrat soit conclu devant un professionnel du droit.

On voit bien, et nous l'avons aussi dénoncé à de multiples reprises, que ce contrat est particulièrement dangereux et pernicieux pour les plus faibles, ceux qui n'ont pas l'instruction et les moyens nécessaires pour s'offrir les services d'un homme de loi compétent, notaire ou avocat.

Dans ces conditions, il y a lieu que ce contrat soit obligatoirement conclu devant un professionnel du droit.

J'ajoute qu'il serait nécessaire que la responsabilité de ce dernier puisse être engagée au cas où le contrat contiendrait des clauses inacceptables. S'il se peut qu'il prévoie une durée déterminée, on peut aussi imaginer qu'il soit passé sous des conditions suspensives, de nature financière, sanitaire ou fiscale. Et l'on pressent les dérapages scandaleux auxquels le PACS pourrait ainsi donner lieu. Raison de plus pour qu'il soit conclu devant un professionnel du droit.

M. le président.

M. Delnatte n'est pas là pour soutenir l'amendement no 181, mais on peut considérer que M. Mariani le défendra en même temps que son amendement no 46, qui prévoit également le recours à un notaire.

Vous avez la parole, monsieur Mariani.

M. Thierry Mariani.

L'information qui vient de vous être donnée...

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Arrêtez !

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

C'est nul !

M. Thierry Mariani.

Excusez-moi, mais si cela vous semble dérisoire, pourquoi n'avez-vous pas accepté mon amendement ? Adopter un deuxième amendement de l'opposition en neuf mois, ce n'aurait tout de même pas été infamant.

En tout cas, grâce à l'aveu honnête du rapporteur, il est clair maintenant que rien ne s'oppose à ce qu'il y ait des PACS à durée déterminée. J'en étais à six possibilités de statut. Si on y ajoute le célibataire vivant en concubinage dans le cadre d'un PACS soit à durée déterminée soit à durée indéterminée, on arrive maintenant à neuf.

La liste s'allonge au fur et à mesure de l'examen du texte, et nous n'en sommes qu'aux premiers amendements ! Pourquoi faut-il conclure le PACS devant notaire ? Votre aveu, monsieur le rapporteur, montre bien que le recours à un professionnel du droit, pas forcément un notaire mais toute personne compétente - l'opposition, là encore, se veut constructive -, est nécessaire pour protéger le plus faible.

Qu'en pensent d'ailleurs les notaires ? Si j'en crois la presse locale et nationale, vous avez assisté à leur dernier congrès, madame la ministre, et vous serez certainement sensible à leur opinion.


page précédente page 05564page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Selon le compte rendu de la première commission de ce congrès, « le défi paradoxal d'encadrer dans des textes législatifs les relations de ceux qui souhaitent avant tout n'avoir aucune contrainte » - pas même la durée indéterminée, monsieur Michel -, « n'est pas nouveau. Si le code civil n'a pas encore été véritablement adapté pour prendre en compte cette évolution, ce n'est pas faute d'avoir vu se succéder de nombreuses propositions de loi : le CUCS, le PIC, le PACS, pour ne parler que de ces dernières. Il ne nous appartient pas de discuter les choix idéologiques et moraux propres à chacun. Notre mission quotidienne est d'appliquer la loi et de fournir des solutions raisonnées, équitables et sécurisées aux problèmes qui nous sont posés. Il semble, à l'heure où nous écrivons, que le dernier texte sur le PACS ne constitue pas une réponse claire et adaptée ».

Mme Christine Boutin.

Très bien !

M. Thierry Mariani.

« Ses lacunes techniques sont nombreuses et la volonté politique est tellement présente qu'elle s'exprime au détriment de l'efficacité technique. »

Voilà l'opinion de professionnels qui s'interdisent honnêtement tout choix idéologique, mais font simplement part de leurs constatations quotidiennes. Si un minimum de sécurité juridique n'est pas introduit dans ce texte, on ira vraiment vers le plus grand désordre et la plus rude exploitation du faible par le fort. C'est pourquoi je vous propose d'imposer le recours à un notaire.

Les notaires eux-mêmes, j'en ai discuté avec eux, chiffrent leur intervention entre 1 000 à 1 300 francs pour un PACS. Même si l'on met en place une sorte d'aide juridictionnelle à la rédaction du contrat devant notaire, ce sera beaucoup moins coûteux pour les finances publiques que les contentieux inutiles auxquels donneraient lieu des contrats mal rédigés.

M. Pierre-Christophe Baguet.

Très bien !

Mme Christine Boutin.

Exactement !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Pour ma part, je l'ai dit à plusieurs reprises, je conseille à ceux qui voudront conclure un PACS de prendre les conseils d'un professionnel du droit, notaire ou autre. Mais la commission ne souhaitait pas rendre ce recours obligatoire. C'est pourquoi elle a repoussé ces trois amendements.

J'ajoute, monsieur Mariani, que vous n'avez rien appris ce soir. Le PACS est un contrat à durée indéterminée.

M. Thierry Mariani.

Mais vous avez reconnu qu'il pouvait être à durée déterminée !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Cessez de jouer la comédie !

M. Thierry Mariani.

Vous faites marche arrière !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Pas du tout ! Stipuler dans la convention que le PACS est conclu pour une certaine durée, on peut toujours le faire.

M. Bernard Accoyer.

Voilà !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Bien entendu ! Mais quel intérêt aurait-on à le faire puisque le PACS peut être dissous à tout moment et sans aucun motif par la volonté commune - ou non d'ailleurs - des deux partenaires. Il ne s'agit pas d'une procédure de divorce. Pourquoi prévoiraient-ils une durée de cinq ans alors qu'ils peuvent rompre le PACS au bout de six mois ou deux ans ? Le PACS est donc bien un contrat à durée indéterminée. Certains voudront peut-être conclure des conventions à durée déterminée, mais cela n'aura vraiment aucun sens !

M. Thierry Mariani.

Alors interdisez-le !

M. Jean-Pierre Michel, Je ne vois pas pourquoi puisque, encore une fois, on peut sortir du PACS à tout m oment, d'un commun accord ou par volonté unilatérale.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M me la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Je n'entrerai pas dans le débat sur le déterminé ou l'indéterminé, à cause de l'heure tardive et parce que ces subtilités m'échappent.

Ce que je note, monsieur le rapporteur - et c'est d'ailleurs évident à la lecture du texte - c'est que vous venez d'accréditer l'idée d'un PACS à deux vitesses. En recommandant l'assistance d'un professionnel du droit qui, en général, n'intervient pas à titre gratuit, soit vous laissez entendre que le texte est si flou qu'il a besoin d'être éclairé par un spécialiste, mais je ne pense pas que ce soit votre intention, soit vous reconnaissez que vous envisagez sereinement de réserver les services d'un notaire à ceux qui peuvent se les payer et de laisser les autres se débrouiller.

Mme Christine Boutin.

C'est vrai !

M. Claude Goasguen.

C'est un point de vue singulier.

Et j'en reviens ainsi à cette ambiguïté fondamentale qui, tout à l'heure, m'a un peu opposé à Charles de Courson.

Finalement, dans cette affaire, je pense que l'innovation est encore immature. J'aurais préféré qu'il y ait des formalités protectrices. On crée un nouveau droit des personnes, mais sans filet, et ceux qui en pâtiront seront les plus défavorisés. M. le rapporteur lui-même recommande le recours à un notaire. Les notaires lui en sauront gré, je suppose, qu'il me pardonne cette plaisanterie. En tout cas, il vient de le reconnaître, il sera difficile, pour celui qui n'a pas les moyens, de ne pas être soumis au plus fort dans ce qui apparaît comme un contrat léonin.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Les réponses apportées sont particulièrement démonstratives des conséquences du PACS, ce contrat qui, chacun peut le constater maintenant, sera bâti, modelé, uniquement dans l'intérêt de celui qui en aura compris les atouts pour en tirer des bénéfices.

Le rapporteur s'est demandé dans quel but le contrat serait à durée déterminée. Il s'agirait tout simplement de faire en sorte que le plus fort n'abuse pas du plus faible et qu'il ne prépare pas une cohorte de PACS, une succession de manoeuvres qui lui permettraient d'échapper ici à telle fiscalité, là à telle cotisation supplémentaire, voire de bénéficier de vacances avec son pacsé. Bref l'aveu du rapporteur a mis en évidence toutes les conséquences que le PACS va introduire dans les droits fondamentaux des personnes. Cela est de plus en plus inquiétant.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 176.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 181.

(L'amendement n'est pas adopté.)


page précédente page 05565page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

46. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 48, ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, substituer au mot : "majeures", les mots : "âgées de 18 ans révolus". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Pour répondre à M. Michel qui a parlé de comédie, je veux donner un exemple dans lequel un PACS à durée déterminée serait utile pour une simple question de clarté.

Deux fonctionnaires souhaitent conclure un pacte avec l'intention évidente de favoriser un rapprochement. Afin d'éviter toute ambiguïté - nous reviendrons sur le problème de communicabilité des listes des personnes pacsées - et bien montrer qu'aucune relation affective n'est en cause en l'occurrence, les PACS pouvant être passés aussi bien avec M. ou Mme Untel, il serait bon de permettre la signature d'un PACS à durée déterminée. Il y serait mis fin le jour ou le deuxième pacsé obtiendrait son rapprochement professionnel.

Cet exemple éclairant montre l'intérêt des PACS à durée déterminée, ne serait-ce que par volonté d'affichage.

M. Daniel Marcovitch.

Il faut vraiment avoir l'esprit tordu !

M. Thierry Mariani.

Il faut surtout avoir l'esprit scabreux pour élaborer une telle loi ! Permettez donc à l'opposition de se poser des questions sur les intentions cachées ou non cachées et de dénoncer les lacunes de ce texte.

A propos de l'amendement no 48 qui propose de substituer à l'adjectif « majeures » les mots « âgées de dixhuit ans révolus », certains pourraient estimer qu'il y a redondance. Or tel n'est pas le cas : il s'agit de faire en sorte que les mineurs émancipés ne puissent pas conclure de PACS.

Ainsi que je l'ai déjà souligné, les mineurs émancipés sont considérés comme des majeurs. Compte tenu de la rédaction actuelle de l'article 1er , ils pourraient signer un pacte. Peut être Mme la ministre ou M. le rapporteur me démontreront-ils le contraire. En tout cas, il n'est pas opportun de permettre à un jeune de seize ans de conclure un PACS. Peut être nos positions divergent-elles sur ce sujet ? Pour le moins il conviendrait, comme M. Michel l'a indiqué, qu'il y ait recours à un notaire, car je ne pense pas qu'il soit judicieux de permettre à un mineur de seize ans, même émancipé, de souscrire un PACS sans passer devant un professionnel du droit.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Contre ! La commission a estimé que les mineurs émancipés pouvaient conclure un PACS, de la même manière qu'ils peuvent se marier, acte qui est beaucoup plus grave.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Substituer l'expression

« dix-huit ans révolus » à « majeurs » n'apporte rien au texte. Je suis donc défavorable à cet amendement inutile.

M. Thierry Mariani.

Non, pas inutile ! Il écarte les mineurs émancipés !

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Monsieur le rapporteur, on permet à un mineur émancipé de se marier parce que le mariage est une institution contrôlée. Avec le PACS, en revanche, vous avez un simple contrat, qui n'est même pas formel. J'essaie d'ailleurs vainement de le solenniser pour les raisons que j'ai déjà évoquées.

La différence tient donc au fait que, dans le PACS, le risque est énorme d'avoir un mineur - une jeune garçon ou une jeune fille - capté par tel ou tel individu, sans contrôle. Alors que le mariage donne des garanties institutionnelles, car il est public, contrôlé et différé dans le temps, il n'y en a pas avec le PACS. C'est la raison pour laquelle je crois que vous devriez, par exception, renoncer à laisser un mineur émancipé pacser parce que ce contrat n'est pas suffisamment encadré. Il s'agit non de faire de la discussion pour la discussion, mais d'éviter des abus.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

48. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 51, ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, après les mots : "deux personnes physiques majeures", insérer les mots : "au moins". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

A partir du moment où il s'agit simplement d'avantages fiscaux, il est proposé de préciser

« deux personnes physiques au moins » puisque, le PACS concernant, non la vie de couple, mais la vie en commun, il n'est pas justifié de le limiter à deux personnes physiques majeures. Pourquoi interdire à trois amis de vivre ensemble et de conclure un PACS afin d'organiser leur vie commune ? Là non plus on ne saisit pas la cohérence du texte. On comprend surtout que la majorité n'a pas eu le courage de l'affichage que seul notre collègue rapporteur assume.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement. J'ai déjà expliqué pourquoi.

Le PACS est un texte pour les couples, qu'ils soient sexués ou pas sexués. Il n'est pas destiné à instituer la partouze juridique.

M. Thierry Mariani.

Qu'est-ce qu'un couple sexué ?

Mme Christine Boutin.

Je croyais qu'ils étaient tous sexués !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Comme je l'ai déjà souligné en première et en deuxième lecture, la pluralité des partenaires risque de conduire au communautarisme et à des dérives sectaires, ce qui serait très grave.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Tout à fait !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

51. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 55, ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, après les mots : "deux personnes physiques majeures", insérer les mots : "résidant en France de façon stable et régulière,". »

La parole est à M. Thierry Mariani.


page précédente page 05566page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Thierry Mariani.

Entre la deuxième et la troisième lecture du PACS est intervenu le texte sur la couverture médicale universelle. L'amendement no 55 tend donc à retenir un critère adopté pour ouvrir droit à la CMU.

Cet amendement ne devrait choquer personne, y compris sur les bancs de la gauche, car, compte tenu des avantages liés à la conclusion d'un PACS, il convient de le réserver aux personnes résidant en France de façon stable et régulière, afin d'éviter les abus.

A Las Vegas, on se marie un peu pour le folklore. Je ne voudrais pas que la France devienne aussi un lieu de folklore où des personnes ne résidant pas de manière stable et régulière pourraient signer un PACS à l'occasion d'un voyage. On me répondra peut-être qu'il s'agit encore d'une précaution stupide, mais, puisque vous avez posé cette condition pour la CMU, vous pourriez la retenir pour le PACS.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement comme elle l'avait déjà fait.

Monsieur Mariani, le mariage implique des droits et des obligations beaucoup plus fortes que le PACS. Pourtant, des personnes peuvent se marier même si elles ne sont pas en situation stable et régulière. La question de la régularisation de leur séjour est indépendante de la célébration du mariage, même si cette dernière peut y aider.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Cette question rejoint celles de l'émancipation, monsieur le rapporteur.

Certes, le mariage offre des possibilités. Nous avons ainsi le fameux problème des mariages blancs qui donne lieu à de nombreux contentieux, mais le mariage est contrôlé ! Il est sous l'autorité du juge et du maire. En la matière, de nombreux arrêts font jurisprudence. En revanche le PACS est un contrat informel.

Nous reviendrons d'ailleurs sur la question de l'immigration puisqu'un autre article la concerne. Que le PACS soit contestable et contesté, soit ! Il correspond à une philosophie qui n'est pas la mienne, mais je conçois, surtout de votre part car votre position est claire, qu'elle puisse être défendue. En revanche, je ne comprends pas ce que viennent faire au milieu de ce texte les dispositions sur l'immigration. Il s'agit en effet d'un problème complètement indépendant. Nous avons l'impression que vous avez greffé, dans le texte sur le PACS, un article additionnel de la loi sur l'immigration. Or cela n'a rien à voir, ou, alors, ce n'était pas la peine de nous avoir fait passer d'autres nuits sur la loi relative à l'immigration.

S'il est une disposition que je vous demande vraiment de supprimer, c'est bien celle-là. Ne vous rendez-vous pas compte que, par le biais de ce contrat informel que vous instituez, vous remettez en cause une législation délicate, qu'il a été difficile d'équilibrer - elle ne l'est d'ailleurs p as vraiment - au risque de porter atteinte à la régulation des flux migratoires ? Cela aura même des conséquences européennes, car il faudre rendre ces dispositions compatibles avec le traité d'Amsterdam. Il s'agit d'un autre problème que j'évoquerai un peu plus tard dans la nuit.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

55. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de six amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

Les deux premiers amendements sont identiques.

L'amendement no 11 est présenté par MM. Goasguen, Dord, Goulard et Perrut ; l'amendement no 241 par

Mme Boutin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, supprimer les mots : ", de sexe différent ou de même sexe,". »

L'amendement no 47, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, supprimer les mots : ", de sexe différent ou". »

Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement no 49 est présenté par M. Mariani ; l'amendement no 175 par M. Accoyer ; l'amendement no 240 par Mme Boutin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, supprimer les mots : "ou de même sexe". »

La parole est à Mme Christine Boutin pour soutenir les amendements nos 11 et 241.

Mme Christine Boutin.

Ces amendements sont proposés dans un esprit constructif. Ils sont d'ailleurs en parfaite cohérence avec les indications qui le rapporteur, M. Michel qui a dit très clairement et écrit à de nombreuses reprises dans la presse que la seule distinction fondamentale entre le PACS et le mariage était la fidélité, c'est-à-dire la relation sexuelle.

Le fait qu'il ne soit pas nécessaire d'avoir une obligation de fidélité dans le PACS, comme il est prévu dans le mariage, prouve qu'il n'y a pas de relation sexuelle dans le PACS. Dans ces conditions allons jusqu'au bout de la démonstration et supprimons « de sexe différent ou de même sexe. »

M. le président.

La parole est à M. Mariani, pour défendre l'amendement no

47.

M. Thierry Mariani.

Je défendrai en même temps l'amendement no 49, car si ces deux amendements sont opposés, ils procèdent de la même logique.

Ainsi que je le répète depuis le début de la discussion, je ne pense pas que l'on puisse dans le même texte mélanger les relations hétérosexuelles et les relations homosexuelles.

Mme Christine Boutin.

Tout à fait !

M. Thierry Mariani.

Soit le texte a le courage de ses ambitions premières et il faut adopter l'amendement no 49 qui réserve le PACS aux personnes de même sexe. Nous pourrions alors aborder franchement le débat sur les problèmes juridiques liés à l'homosexualité.

Mme Christine Boutin.

Absolument ! C'est ce qu'il aurait fallu faire depuis le début !

M. Thierry Mariani.

Soit vous nous expliquez que cela n'a strictement rien à voir, qu'il ne s'agit pas de bouleverser le droit de la famille et on doit retenir l'amendement no 47, qui n'ouvrirait le PACS qu'aux personnes de sexe différent.

L'une ou l'autre solution vaudrait mieux que l'expression de « sexe différent ou de même sexe ». A ce propos je suppose que c'est à cause de l'heure tardive que M. le rapporteur à employé des propos peu adéquats en parlant de couples sexués ou pas sexués.


page précédente page 05567page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer pour défendre l'amendement no 175.

M. Bernard Accoyer.

Le principal problème du texte réside dans l'amalgame entre le souhait légitime, compréhensible de la majorité de modifier notre législation pour résoudre certaines difficultés rencontrées par les couples homosexuels et l'introduction de dispositions concernant les couples hétérosexuels. Cela aboutit à un texte dont nous avons relevé à plusieurs reprises les nombreuses confusions et les dangers.

Or il serait relativement simple d'y remédier en supprimant, dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, l'expression « ou de même sexe ». Ainsi, les avantages essentiellement matériels qu'offre ce texte et qui, par définition, seront supportés par le reste de la nation, c'est-à-dire par les célibataires, les couples mariés, les familles, seraient réservés à des couples hétérosexuels, ceu x dont la vocation est de procréer.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Christophe Baguet, pour soutenir l'amendement no 240.

M. Pierre-Christophe Baguet.

Cet amendement a le mérite d'inviter le rapporteur à clarifier sa position sur un sujet que nous avons déjà abordé à plusieurs reprises lors des précédentes lectures.

Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de trouver une solution juridique et fiscale décente pour les couples homosexuels. Malheureusement la texte proposé vise à la fois les relations homosexuelles et les relations hétérosexuelles, ce qui ne peut être que source de confusion.

Ainsi que nous l'avons répété souvent depuis le début de cette troisième lecture et, comme le congrès des notaires l'a demandé une nouvelle fois, il faudra absolument préciser les choses.

Si le rapporteur voulait bien se déterminer, nous pourrions sérieusement envisager d'étudier en profondeur le problème des relations homosexuelles, notamment pour ce qui est de la protection de ceux qui ne sont couverts.

Cet amendement arrive à un moment crucial du texte puisqu'il tend à préciser les orientations que l'on veut lui donner.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces six amendements ?

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Monsieur le président, je voudrais tenter de nous sortir de la confusion dans laquelle l'opposition essaie de nous enfermer.

M. Bernard Accoyer.

Pas du tout !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Je vais en tout cas essayer de répondre aux questions très précises qu'elle vient de poser.

Mme Christine Boutin.

Très bien !

M. Thierry Mariani.

Enfin !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

D'abord, l'opposition propose de montrer du doigt les homosexuels et de les enfermer dans un statut communautaire. Telles n'est pas la voie que nous avons choisie.

Au contraire, notre texte veut reconnaître les couples homosexuels et les intégrer dans notre société. Il s'agit de deux points de vue radicalement distincts, mais nous n'avons aucun problème de choix : nous nous sommes clairement déterminés.

Ensuite, vous avez dit, madame Boutin, qu'il s'agissait de couples asexués. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Thierry Mariani.

Non, c'est M. Michel qui en a parlé !

Mme Christine Boutin.

En effet, ce n'est pas moi, mais le rapporteur !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Me permettez-vous de vous éclairer ?

Mme Christine Boutin.

J'ai seulement relevé en souriant les propos de M. Michel. Je ne peux donc pas vous laisser dire cela !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Voulez-vous bien me laisser exprimer notre position ? Il ne s'agit pas de couples asexués mais de couple libres de vivre ou non une relation sexuelle.

Mme Christine Boutin.

Absolument !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Telle est aussi, je vous le fais remarquer, et plus souvent qu'on ne le croit, la situation des gens mariés. (Murmures.) Enfin, l'obligation de fidélité n'a absolument aucun sens dans le PACS, alors qu'elle en a pleinement dans le mariage puisque cette institution sert notamment à établir la présomption de paternité, ce qui n'est pas le cas dans le cadre du PACS.

Mme Christine Boutin.

Et les enfants nés dans le cadre d'un PACS ?

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Nous avons donc des réponses extrêmement claires aux interrogations très confuses et très embrouillées que vous formulez ce soir.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Je souhaite répondre à Mme la présidente de la commission. C'est un sujet très politique.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Juridique aussi !

M. Claude Goasguen.

Nous sommes, il est vrai, en complet désaccord mais pas dans les termes que vous avez dits, madame la présidente. Pour reprendre vos propres mots, nous n'avons jamais enfermé l'homosexualité dans une communauté. Ce n'est absolument pas l'intention de l'opposition. Et comme, depuis le début du débat, revient régulièrement l'antienne selon laquelle l'opposition serait homophobe, je préfère mettre les points sur les « i » tout de suite : jamais vous n'avez entendu dans les propos de l'opposition une quelconque attaque contre une liberté reconnue, l'homosexualité.

M. Pierre-Christophe Baguet.

Tout à fait !

Mme Christine Boutin.

Absolument !

M. Claude Goasguen.

Nous ne voulons enfermer personne dans quoi que ce soit. Au contraire, nous voulons laisser s'exercer une liberté privée.

Vous vous êtes référée dans votre intervention au principe de non-discrimination dans un sens qui n'est pas le sien. Le principe de non-discrimination veut dire qu'à


page précédente page 05568page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

situation comparable on ne fait pas de discrimination. Et c'est là où nous ne sommes pas d'accord ; les situations ne sont pas comparables.

Que deux personnes du même sexe soient sous le même toit aurait, selon vous, la même signification que deux personnes de sexe différent unies par le lien matrimonial et vivant sous le même toit. Nous ne sommes pas d'accord. Nous considérons qu'il ne s'agit pas de la même liberté. Dans le premier cas, il s'agit d'une liberté privée, tout à fait normale et tout à fait reconnue par l'opposition comme par la majorité. Dans le second cas, il s'agit d'une institution dont l'objet est social. Par conséquent, les deux choses ne sont pas comparables et on ne peut donc pas se servir du principe de nondiscrimination.

C'est un sujet fondamental alors, je vous en prie, cessez de caricaturer en essayant de faire croire - vous n'y arrivez pas d'ailleurs - qu'il y aurait, d'un côté, les homophiles et, de l'autre, les homophobes. Et ne nous parlez plus d'enfermement. Nous essayons tous, avec des philosophies politiques différentes, de remédier à des questions sociales sans attenter à la liberté individuelle des hommes et des femmes de ce pays. Je vous saurais gré de le reconnaître de temps en temps.

M. Thierry Mariani et M. Bernard Accoyer.

Très bien !

M. le président.

La parole est à Mme Boutin.

Mme Christine Boutin.

Je remercie Mme la présidente de la commission des lois parce que la réponse qu'elle vient de nous faire m'éclaire, à l'approche de trois heures du matin. Au cours des trois lectures, les réponses de la majorité plurielle n'ont été que successions d'incohérences.

Madame la présidente de la commission des lois, vous venez de me donner la clé de cette incohérence évidente : comme vous ne voulez pas assumer le caractère sexuel des dispositions de ce texte, ni le côté particulier de l'homosexualité, vous souhaitez que le texte concerne les personnes « de sexe différent ou de même sexe ». Et, suivant les articles, vous vous appuyez sur le caractère homosexuel ou, au contraire, hétérosexuel pour justifier votre position. Comme ce sont deux choses incompatibles, vous arrivez à des incohérences.

J'en veux pour preuve, madame la présidente, ce que vous venez de nous dire. Dans le mariage, nous avez-vous dit - qui concerne donc les personnes hétérosexuelles, puisque jusqu'à présent le mariage n'est autorisé qu'entre un homme et une femme - il y a des enfants. Dans le PACS, il y en aura également puisque vous acceptez que le pacte puisse être conclu par des personnes hétérosexuelles.

Dans le mariage, nous avez-vous encore dit, il y a la paternité. Et dans le PACS, sera-t-elle absente si les couples pacsés sont hétérosexuels ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Il s'agit de présomption de paternité. Ne dites pas n'impore quoi !

Mme Christine Boutin.

Monsieur le rapporteur, je veux savoir ce qui se passe pour les pacsés hétérosexuels qui, au cours de leur vie de pacsés, auront vraisemblablement des enfants.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Je sais bien qu'il n'est pas besoin d'être juriste pour être député mais, tout de même, il y a un minimum !

Mme Christine Boutin.

Vous me dites que ce n'est pas la même chose. Je voudrais que vous me répondiez.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 11 et 241.

Mme Christine Boutin.

Encore une fois, je n'ai pas de réponse.

M. Bernard Accoyer.

Les enfants, ne n'est pas leur souci ! (Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

L'amendement no 47 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 49, 175 et 240.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 52, ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, après les mots : "ou de même sexe,", insérer les mots : "vivant effectivement sous le même toit,". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Nous arrivons à un moment clé de la discussion.

M. le président.

Monsieur Mariani, peut-être pourriezvous défendre en même temps votre amendement no 53, ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, après les mots : "ou de même sexe,", insérer les mots : "vivant effectivement sous le même toit depuis au moins un an, ". »

Poursuivez, je vous prie.

M. Thierry Mariani.

Après notre collègue Claude Goasguen, je veux, au nom du RPR, rappeler notre position.

La liberté, oui, le désordre, non. La tolérance sexuelle, oui ; la confusion dans le droit de la famille, non.

Comme l'a signalé mon collègue de Démocratie libérale -e t, au bout de la troisième lecture, les choses commencent à s'éclaircir - il ne s'agit pas, de faire passer le texte de la gauche pour progressiste...

Mme Christine Boutin.

C'est ce qu'ils veulent faire croire !

M. Thierry Mariani.

... allant dans le sens de l'histoire, et la droite pour un ramassis de ringards arriérés, totalement homophobes et réactionnaires.

M. Bernard Accoyer.

Et rétrogrades !

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est pourtant la vérité !

M. Thierry Mariani.

Je répète que le débat, pour nous, n'est pas sur l'homosexualité. La liberté sexuelle est acquise.

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est M. Mariani qui le dit : c'est un moment clé du débat !

M. Thierry Mariani.

Je n'habiterais pas dans la partie de Paris où j'habite si je n'étais pas tolérant.

La liberté sexuelle est acquise. Simplement, on peut être pour la liberté sexuelle et contre le désordre que vous instaurez par ce texte.

Je ne vais pas reprendre l'énumération des six possibilités. L'occasion se représentera. Il est inutile de continuer à caricaturer la position de l'opposition. Ce que nous demandons - et c'est l'objet des amendements nos 52 et 53 - c'est un minimum d'ordre.

L'amendement no 52 tend à rajouter les mots : « vivant effectivement sous le même toit, ». Vous allez m'expliquer qu'il n'y a pas de communauté de toit. Je sais que c'est


page précédente page 05569page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

une de vos positions constantes. Mais, si nous ne mettons aucun garde-fou, le PACS pourra être signé dans n'importe quelle condition, et, pour les personnes peu averties du droit, sans aucune précaution. Nous persistons à dire que c'est dangereux pour ceux qui signeront ce texte sans être avertis de toutes les conséquences.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté ces amendements, comme elle l'avait fait lors des lectures précédentes. On ne peut pas imposer de vivre sous un même toit à des gens pacsés alors que le mariage ne l'impose même pas, monsieur Mariani.

De plus, le délai d'un an, proposé par l'amendement no 53, serait inconstitutionnel.

M. Thierry Mariani.

La mariage impose communauté de vie et fidélité !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Il impose un domicile commun et non une communauté de même toit.

C'est tout à fait différent. Il faut s'entendre sur les termes juridiques.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

52. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

53. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 242, ainsi rédigé :

« A la fin du texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, supprimer les mots : "pour organiser leur vie commune". »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Comme aucun des amendem ents n'a été acceptés, le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil demeure sous la rédaction suivante : « Un pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune. »

Aucune clarification n'a été donnée, alors que nous avons essayé véritablement de clarifier ce texte et ses objectifs.

Vous avez refusé précédemment que le PACS soit conclu devant un professionnel du droit. Nous vous avons proposé qu'il soit conclu devant le notaire. Vous avez préféré laisser la liberté totale, en donnant du reste une priorité, une faveur, à ceux qui ont la possibilité de se défendre par rapport à ceux qui ne l'ont pas.

Je propose moi, de supprimer les mots « pour organiser leur vie commune ». Que signifie vraiment « organiser leur vie commune » s'il n'y a pas de possibilité de conclure ce PACS devant un professionnel du droit ? Irat-on jusqu'à la répartition de la salière et de la cuiller à café ? Jusqu'à la communauté de vie ? Jusqu'au partage des biens et des immeubles ? Il faut éviter de tomber dans ce vague général et cette ambiguïté.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement.

Mme Christine Boutin.

Pourquoi ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

Mme Christine Boutin.

Pourquoi ?

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 242.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme Christine Boutin.

Encore une fois, aucune explication n'est donnée !

M. le président.

MM. Goasguen, Mattei, Dord et Goulard ont présenté un amendement, no 10, ainsi rédigé :

« A la fin du texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, substituer aux mots : "vie commune", les mots : "cohabitation". »

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour soutenir cet amendement.

M. Pierre-Christophe Baguet.

Le rapporteur vient de nous expliquer que le mariage n'obligeait pas à une communauté de vie, dans un domicile commun, pour être précis.

Comme il n'y a pas, dans le PACS, d'obligation de fidélité, contrairement à ce qui se passe pour le mariage, le pacte pourrait comporter, un élément de stabilité, qui pourrait être justement la notion de « cohabitation » entre les cocontractants pour les obliger à vivre sous le même toit. Cet engagement qui pourrait être pris par les deux cocontractants permettrait peut-être un meilleur respect et en tout cas une plus grande considération, surtout quand nous en viendrons à la rupture du PACS avec possibilité de rupture unilatérale.

En bref l'amendement a pour objet de renforcer les engagements entre les deux cocontractants avec l'obligation de vivre sous le même toit.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

10. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 50, ainsi rédigé :

« A la fin du texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, substituer au mot : "commune", les mots : "de couple" .» La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Il convient de délimiter le champ d'application du PACS en prévoyant que ce dernier concerne la vie de couple des intéressés, faute de quoi les empêchements de l'article 515-2 n'auraient plus aucune justification.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

50. (L'amendement n'est pas adopté.)


page précédente page 05570page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. le président.

MM. Goasguen, Mattei, Dord, Perrut et les membres du groupe Démocratie libérale et Indépendant ont présenté un amendement no 12, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Lorsqu'il est conclu par deux personnes de même sexe, le pacte civil de solidarité exclut tout droit à l'adoption prévue aux articles 343 et 343-1 du code civil. »

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Nous abordons les sujets qui fâchent. Est-il bien nécessaire vraiment de se répéter ici ? Nous avons eu tant de déclarations contradictoires dans ce domaine entre la première, la deuxième lecture et à l'intérieur même de la première lecture ! Comment expliquer que vous laissiez courir une évolution qui, de toute évidence, confirmera celle de nos voisins européens ? On nous avait promis une « promenade juridique » au début.

Mais il faudrait peut-être regarder comment les choses se passent aux Pays-Bas, en Suède. Bien entendu, la question de l'adoption par le couple homosexuel se pose tout naturellement après un débat de ce genre. Oui, elle se posera et nous sommes démunis avec notre système juridique. Nous sommes démunis pour deux raisons essentielles.

D'abord, quoi que vous puissiez en penser, la jurisprudence n'est pas fixée dans ce domaine. Les arrêts sont contradictoires. Vous ne pouvez pas demander au juge, dans l'incertitude de la loi, de se substituer au législateur.

Il y a même un élément nouveau qui intervient : désormais l'égalité de situation entre le couple homosexuel et le couple hétérosexuel. On ne voit pas pourquoi le juge ne s'inspirerait pas de cette intention forte du législateur pour dire que, dans ces conditions, l'homosexualité n'est plus un élément excluant l'adoption, y compris lorsqu'elle est démontrée dans le cas du célibat autorisé par la loi.

La loi est donc insuffisante dans ce domaine pour éviter une évolution que nous ne voulons pas.

Ensuite, vous ne pourrez pas refuser l'égalité de situation que vous avez acceptée aujourd'hui. Je dirais même que désormais un arrêt dans ce domaine serait attaqué devant la Cour européenne. Vous ne pourrez pas tenir cette position sans intervenir.

Bien sûr, c'est un problème politique grave pour vous.

Vous ne voulez pas vous y engager, parce que vous avez le sentiment que ce sujet tient à coeur à des associations qui soutiennent et sous-tendent ce texte. Vous ne voulez pas les décevoir. Mais je vous demande de sortir pour une fois, de la position hypocrite qui est la vôtre, celle qui consiste à dire oui à tout le monde. Pour le coup, essayez de trancher définitivement et inscrivez dans la loi ce que vous nous avez dit, ce que vous nous soutenez en catimini, je veux dire l'interdiction de manière stricte, dans la loi française, de la possibilité d'adoption pour le couple homosexuel.

Oh, cela n'a rien de révolutionnaire. Je sais bien que, fondamentalement, dans cet hémicycle, à droite comme à gauche, nous pensons tous à peu près la même chose à l'exception de notre rapporteur qui, lui, au moins a une position tranchée. Mais sortons de cette incertitude.

Soit vous vous rangez à la position de M. Michel, car elle est claire, et nous la combattrons, dans un vrai combat politique.

Mme Christine Boutin.

Eh oui !

M. Claude Goasguen.

Soit vous considérez notre position, elle est claire également, et c'est aussi un vrai combat politique.

En tout cas, mettons un terme à une incertitude qui laisse planer la menace de toutes les évolutions et qui renvoie à un rapport de forces incertain une évolution fondamentale de notre droit des personnes et de la famille.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a bien entendu rejeté cet amendement, comme elle l'avait fait en deuxième et en première lecture.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

12. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 173, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par les deux alinéas suivants :

« Le recours à la procréation médicalement assistée est strictement interdit pour les personnes de même sexe ayant conclu un pacte civil de solidarité.

« Toute personne qui transgressera ou aidera à transgresser cette interdiction sera passible de 2 ans d'emprisonnement et 500 000 francs d'amende ».

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement aborde, dans le m ême esprit que l'amendement de notre collègue Goasguen, le problème de la procréation médicalement assistée, un problème qui se posera immanquablement pour les couples pacsés de même sexe.

Un certain nombre de couples homosexuels qui ont le désir d'assumer un rôle de parent vont être conduits à rechercher une forme de procréation en mettant à profit des avancées scientifiques récentes qui soulèvent au demeurant, dans ce cas précis, des problèmes de bioéthique.

Je me plais ici à rappeler que le Gouvernement aurait dû déjà prévoir la révision quinquennale des lois bioéthiques - cela avait été fixé dans la loi.

Permettez-moi d'insister sur ce point, parce que, dans Le Quotidien du Médecin paru il y a quelques jours, j'ai relevé que les homosexuels danois pourront adopter les enfants de leur conjoint. En lisant dans le détail, on s'aperçoit que cela va beaucoup plus loin. La recherche de paternité ou de maternité, la recherche d'enfants par les couples homosexuels s'inscrit d'ailleurs - notre rapporteur l'a bien dit, repris par la presse - dans le cours des choses. Que ne disait-il pas selon La Croix du 12 septembre 1998 ? « Le PACS évoluera forcément un jour ou l'autre pour intégrer les aspects d'adoption. »

M. Thierry Mariani.

Eh oui !

M. Bernard Accoyer.

« Comment refuser l'adoption aux pacsés alors qu'on l'autorise aux célibataires de plus de vingt-huit ans dont certains vivent en couple homosexuel ? »

M. Thierry Mariani.

Tout à fait !

M. Bernard Accoyer.

En outre, un arrêt fait jurisprudence dans la mesure où il a prévu en principe - c'est un arrêt du Conseil d'Etat du 18 février 1994 -, que les demandes d'adoption d'un même enfant par un couple homosexuel ne peuvent être refusées au prétexte que cette demande émanerait de personnes célibataires homosexuelles.


page précédente page 05571page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Nous sommes bien là devant l'obligation morale et juridique d'inscrire, pour des raisons de santé et d'harmonie du développement psycho-affectif des enfants, l'interdiction aux couples homosexuels d'adopter ou d'utiliser les moyens scientifiques modernes qui leur permettraient d'avoir des enfants légitimes.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement.

Mme la garde des sceaux.

Rejet.

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Je suis très étonnée de la réponse lapidaire de Mme la garde des sceaux. Chaque fois qu'elle est intervenue à la tribune pour défendre ce texte, elle a très clairement indiqué qu'il n'était pas question d'ouvrir le droit d'adoption aux homosexuels. Mais, depuis presque neuf mois, les choses ont évolué, des articles de presse ont été publiés, des positions se sont exprimées, notre rapporteur lui-même répète depuis très longtemps que c'est inéluctable - au moins a-t-il l'honnêteté de dire les choses clairement.

On se demande pour quelles raisons le Gouvernement ne souhaite pas que cette interdiction soit explicitement inscrite dans la loi. Si vous vous y refusez, madame la garde des sceaux, c'est donc que vous laissez au juge une liberté d'interprétation au vu des situations factuelles qu'on lui soumettra ? On verra très rapidement des c ouples homosexuels autorisés à adopter. Ce texte, madame la garde des sceaux, n'est qu'une suite d'hypocrisies et d'incohérences. Vous nous racontez n'importe quoi. Vous voulez faire plaisir à un certain électorat parce que vous en avez besoin.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Ça suffit !

Mme Christine Boutin.

En réalité, le PACS est fait pour les personnes homosexuelles. Vous avez le droit de défendre cette position, mais ayez au moins le courage de l'assumer jusqu'au bout !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 173.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 174, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Lorsqu'une personne ayant obtenu la garde d'un enfant à l'issue d'un jugement de divorce conclut un pacte civil de solidarité avec un signataire de même sexe, cela entraîne la saisine systématique du juge afin de réexaminer la question de la garde de l'enfant. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement pose un problème particulièrement grave. Aussi souhaiterais-je un peu de tolérance afin que notre débat puisse rester serein, à la différence de ce qui s'était passé en première lecture.

J'ai déjà évoqué la nécessité pour le législateur de p rivilégier à tout prix l'enfant, son développement, sa santé, son équilibre. Sans prolonger inutilement les explications, je me contenterai de citer un psychothérapeute spécialiste des enfants, M. Jean-François Bonneville : « Les enfants ont besoin de modèles pour grandir. A partir de ceux-ci, ils intériorisent des personnes, avec leurs comportements, leurs pensées, leurs façons d'être et d'agir et des relations ou modes de relations. Nous avons tous intériorisé des modèles, à la fois sous forme de personnes et sous forme de relations, familiales, sociales, qui concernent le milieu éducatif. On peut se demander ce qu'il adviendrait si on arrivait, comme l'évoque Guy Coq, à imposer à l'enfant un modèle tout à fait unilatéral et sans répartition symbolique des rôles du père et de la mère. Il y a souvent confusion sur la notion d'identité, et notamment d'identité sexuelle - être homme ou femme - et sur celle de rôle. »

Vous mesurez, mes chers collègues, les conséquences que ce texte pourrait avoir pour les enfants s'il n'était pas bordé par les dispositions proposées dans cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission avait repoussé un amendement à peu près semblable en première ou en deuxième lecture. Je vous le dis comme je le pense, monsieur Accoyer : cet amendement me paraît assez scandaleux.

M. Thierry Mariani.

Pourquoi ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

De tels faits se produisent d'ores et déjà dans la société sans que personne n'y trouve rien à redire, à ceci près que les partenaires sont en concubinage.

Mme Christine Boutin.

En général, les familles disent quelque chose !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Quant aux citations de psychothérapeutes, on pourrait en trouver qui vont en sens inverse. Si les assistantes sociales, le voisinage, un des deux parents s'inquiètent pour l'enfant, le juge des enfants pourra être saisi. Mais pourquoi le saisir systématiquement ? Je n'hésite pas à le dire : cette discrimination a priori me paraît totalement scandaleuse. Pour sa part en tout cas, la commission des lois a repoussé cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je m'associe entièrement aux remarques du rapporteur. Cet amendement témoigne d'une totale méconnaissance de l'évolution de la législation sur l'autorité parentale ainsi que des pratiques sociales et juridictionnelles.

Mme Christine Boutin.

Vous n'avez pas besoin de prendre un ton si solennel !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

A mon tour d'utiliser le mot que le rapporteur a employé à mon endroit tandis que Mme la ministre me traite d'ignare ou d'ignorant total s'agissant de l'évolution.

Mme la garde des sceaux.

Je n'ai pas dit cela, je ne suis pas grossière...

M. Bernard Accoyer.

Madame la ministre, je suis profondément peiné pour notre pays...

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Laissez le pays en juger !

M. Bernard Accoyer.

... d'entendre le garde des sceaux réagir ainsi alors qu'il s'agit de la santé des enfants, alors que le simple bon sens met en évidence qu'on les place


page précédente page 05572page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

dans une situation psychologique inextricable : déjà, en situation de rupture familiale, par définition, les voilà plongés dans une situation où tous les repères fondamentaux qui vont bâtir leur équilibre sont brouillés ! Non seulement votre réponse ne me convient pas, madame la garde des sceaux, mais elle me scandalise à mon tour, pour les enfants de France.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Ce débat mérite qu'on s'y attarde. Il existe aujourd'hui une jurisprudence, monsieur Accoyer...

M. Bernard Accoyer.

Et alors ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Je regrette de vous le dire à trois heures du matin, mais vos propos sont homophobes.

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

Parfaitement !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Vous proposez dans cet amendement de recourir a priori et systématiquement au juge. Pour vous, dès lors qu'un enfant serait élevé par deux femmes ou par deux hommes, sa santé mentale et physique serait en danger. Or il arrive que des tribunaux après un divorce confient la garde des enfants dans de telles conditions et en connaissance de cause. Que le juge soit saisi et décide lorsque cela apparaîtra nécessaire, d'accord. Mais cette saisine systématique me choque profondément...

M. Bernard Accoyer.

Qui saisira le juge ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... d'autant plus qu'elle infère l'idée que, a priori, la santé morale et physique des enfants serait mise en danger par le fait même qu'ils soient élevés par deux hommes ou par deux femmes. Vos paroles ont certainement dépassé votre pensée, monsieur Accoyer ; je ne crois pas que vous ayez voulu dire cela.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Je comprends l'émotion du rapporteur mais il convient d'examiner ce texte sereinement.

En fait, il ne s'agit pas de santé. Je veux bien reconnaître que certains mots ont peut-être été trop lourds, monsieur le rapporteur, mais vous ne pouvez pas exciper de la jurisprudence quand cela vous arrange et ne pas en tenir compte quand cela ne vous arrange pas, comme vous l'avez fait à propos de l'adoption. Nous ne sommes pas à interpréter la jurisprudence ; nous essayons de donner une direction à notre législation. De toute évidence, nous ne sommes pas d'accord, mais débattons-en au moins loyalement.

Je conçois bien que les outrances ne soient pas de mise et que tout cela mérite d'être nuancé en fonction de l'enfant, sans schématiser ; mais nous nous efforçons de vous expliquer que l'égalité systématique que vous instaurez entre les situations homosexuelles et hétérosexuelles dans le domaine de la garde de l'enfant, contrairement à ce que vous défendez, ne va pas de soi. En toute franchise, je ne crois pas, sans pour autant en tirer de conséquences théoriques démesurées, que l'homosexualité offre dans tous les cas les conditions les plus favorables pour élever un enfant. De ce fait, l'examen par un juge, au sens le plus neutre du terme, ne me paraît pas discriminatoire. Ce n'est en tout cas pas l'intention de cet amendement, je vous demande de le croire. Si nous l'avons déposé et si je l'ai soutenu, c'est parce que nous entendons marquer notre désaccord avec l'égalité systématique que vous voulez instaurer dès lors qu'il s'agit de l'enfant.

C'est là une attitude tout aussi estimable que la vôtre.

Nous n'avons pas employé de mots outranciers à votre endroit ; faites-en de même à l'égard de l'opposition.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 174.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 56, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Chaque partenaire le fait contresigner par un témoin de son choix. »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Cet amendement vise à assurer la protection du partenaire du PACS le moins averti juridiquement en prévoyant que chaque contractant fasse contresigner son PACS par un témoin de son choix. Il ne s'agit en rien de singer le mariage ou d'établir un quelconque parallélisme : il nous paraît simplement important qu'un tiers puisse donner son avis lors de la conclusion d'un PACS. Cet amendement permettra de protéger le plus faible et d'éviter que certains ne se lancent dans l'aventure sans aucun conseil extérieur.

Vous avez clairement accepté la possibilité pour un mineur émancipé de conclure un PACS. Très sincèrement, croyez-vous qu'un mineur de seize ans, fût-il émancipé, dont on nous explique par ailleurs qu'il n'est pas responsable dans certains autres domaines a la maturité nécessaire pour conclure un PACS sans l'assistance d'un notaire, d'un professionnel du droit ou tout simplement d'un témoin ? Toute personne sérieuse est obligée de reconnaître que non.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement.

Monsieur Mariani, je comprends bien vos arguments, mais je ne suis pas certain que des témoins pourraient empêcher quoi que ce soit, si tant est qu'il faille empêcher quelque chose. Vous êtes maire comme moi, vous célébrez donc quelques mariages dans l'année...

Mme Christine Boutin.

De plus en plus !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Vous avez donc bien dû le constater : les témoins sont des copains, des amis, des frères, des soeurs ; ils sont tout contents d'être pris en photo au moment de signer les registres, point final. Avis défavorable.

M. Bernard Accoyer.

Interprétation très personnelle !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

56. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme Boutin a présenté un amendement, no 243, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article par l'alinéa suivant :

« Les personnes concluant un pacte civil de solidarité ne peuvent déroger aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs. »

La parole est à Mme Boutin.

Mme Christine Boutin.

Avec tout le respect que je vous dois, monsieur Michel, et même la considération et l'amitié que je vous porte, je trouve que vous traitez un peu à


page précédente page 05573page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

la légère la démarche des témoins à l'occasion d'un mariage. Lorsque des personnes décident de se marier et choississent un témoin, ce n'est pas par hasard. En général, les témoins sont choisis avec un soin particulier et sont honorés d'être présents et de témoigner à l'occasion de cet engagement devant la société. Vous ne pouvez pas soutenir que le rôle du témoin se borne à faire risette devant l'appareil photo.

L'amendement a pour objet de nous prémunir de tout le cortège des conséquences de l'illicite en prohibitant notamment les pactes sur successions futures. Le PACS permet déjà le dépouillement facile du partenaire le plus faible par le plus fort. L'interdiction des pactes sur successions futures est une des sentinelles de la République et de la justice.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission avait déjà repoussé cet amendement. La convention qui sera déposée devant le greffe du tribunal d'instance est un contrat ; elle ne peut donc, je le répète, déroger à l'ordre public et aux bonnes moeurs. C'est un principe général du droit civil. Cela va donc de soi, mais je le redis officiellement pour que vous en soyez bien convaincue. Par conséquent, la présence d'une disposition contraire à l'ordre public et aux bonnes moeurs entraînerait immédiatement la nullité de la convention, à la demande des intéressés ou même du procureur de la République.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Rejet.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 243.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 244, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« L'aptitude à conclure un pacte civil de solidarité relève de la loi personnelle de chaque individu. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Vous avez tenu à préciser dans le texte que le PACS a pour objet la communauté de vie entre deux personnes. Il relève donc du statut des personnes. Cela va mieux en le disant qu'en ne le disant pas.

Or une difficulté très réelle peut se présenter lorsque l'un des deux contractants est ressortissant d'un Etat qui ne connaît que le mariage et ignore tout équivalent du PACS, comme c'est le cas dans les pays musulmans et dans de nombreux autres comme l'Allemagne. Contrairement au mariage, connu dans le monde entier, le PACS posera donc de très graves problèmes d'application au regard du droit international privé. Un PACS pourra-t-il se conclure avec un national d'un pays qui ne connaît pas le PACS, madame la garde des sceaux ?

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

J'ai déjà répondu par l'affirmative à Mme Boutin. Son amendement a été rejeté par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement.

Mme la garde des sceaux.

Défavorable. Cet amendement est inutile.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 244.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin présente un amendement, no 245, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Il n'y a pas de pacte civil de solidarité lorsqu'il n'y a pas de consentement. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Alors là, c'est le fin du fin !

Mme Christine Boutin.

Cet amendement, déjà évoqué tout à l'heure par un de mes collègues, a pour objectif d'éviter les PACS blancs. Il arrive déjà, malheureusement, que certains mariages soient détournés de leurs objectifs et conclus aux seules fins d'obtenir la nationalité française. C'est ce qu'on a appelé « le marché noir des mariages blancs ».

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Oh, oh, oh !

Mme Christine Boutin.

A plus forte raison, le PACS, dont les conditions de forme sont plus légères que celles imposées pour le mariage, risque de susciter des convoitises du même ordre. Aussi mon amendement tend-il à préciser qu'il ne peut y avoir de PACS lorsqu'il n'y a pas de consentement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 245.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le président, je demande une suspension de séance de dix minutes pour réunir mon groupe et permettre du même coup à nos collègues socialistes, nombreux à dormir sur leurs bancs, de retrouver leurs esprits.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à trois heures quinze, est reprise à trois heures trente.)

M. le président.

La séance est reprise.

ARTICLE 515-2 DU CODE CIVIL

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 57, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« I. - Supprimer les septième (art. 515-2) à dixième (3o ) alinéas de l'article 1er

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« 1o Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


page précédente page 05574page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

« 2o Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

Les amendements nos 13 et 84 sont identiques.

L'amendement no 13 est présenté par M. Goasguen et M. Goulard ; l'amendement no 84 par M. Plagnol, Mme Boutin, MM. de Courson, Dutreil et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance. Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour défendre l'amendement no

57.

M. Thierry Mariani.

L'article 512-2 prévoit, comme pour le mariage, des empêchements à la signature d'un PACS. C'est ainsi qu'elle est interdite entre ascendant et descendant, entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus, entre deux personnes dont l'une au moins est engagée dans les liens du mariage, et entre deux personnes liées par ailleurs déjà par un PACS.

S'agissant d'une institution destinée à concurrencer le mariage et concernant la vie de couple, l'instauration de tels empêchements est tout à fait justifiée. Dans ce cas, il faut le dire. Or M. le rapporteur et Mme la ministre n'ont cessé de répéter, au cours des débats, que le PACS n'était pas le mariage, qu'il n'avait aucun lien avec ce d ernier, et qu'il concernait deux personnes vivant ensemble, mais pas forcément comme un couple, et souhaitant développer une nouvelle forme de solidarité l'une envers l'autre. Si tel était le cas, il n'y avait aucune raison d'instaurer des empêchements.

Cet article démontre bien que l'on ne peut pas légiférer de façon universelle sur des questions aussi différentes que la vie de couples hétérosexuels, celle de couples homosexuels, ou celle de deux personnes âgées.

On nous explique que le PACS n'est pas le mariage, qu'il ne concerne pas les enfants, tout en reprenant certaines dispositions relatives au mariage. En l'occurrence, les empêchements prévus à l'article 515-2 sont, de toute évidence, calqués sur ceux applicables au mariage.

Cet article est, certes, moins primordial que le précédent dont la discussion nous aura tout de même permis d'apprendre, officiellement, que le PACS pourrait être un contrat à durée déterminée. Nous démontrerons par la suite que cela peut avoir un intérêt.

A l'heure où le leader de la gauche plurielle, M. Hollande, dans la campagne pour les élections européennes, nous explique qu'il faut étendre les droits nouveaux et prend souvent exemple sur les pays nordiques, quand on sait l'évolution de la législation dans ces pays, je regrette qu'on n'ait pas saisi l'opportunité offerte par l'opposition d'interdire toute possibilité d'adoption aux couples pacsés homosexuels.

Voilà une lacune coupable dont certains se serviront très probablement, dans les mois à venir, pour réclamer un droit nouveau, que vous refusez aujourd'hui d'inscrire dans la loi.

L'incohérence continue !

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen pour soutenir l'amendement no

13.

M. Claude Goasguen.

Cet article - intéressant - il nous permet de voir la réalité juridique du PACS - est composé de trois alinéas. On pourrait penser que les deux derniers visent à interdire de faire deux contrats : mariage et PACS ou deux PACS. En réalité, on voit bien qu'il s'agit d'interdire la polygamie, même dissimulée sous le PACS.

Quant au premier alinéa, il reprend, M. Mariani vient de le dire, les dispositions relatives au mariage. C'et bien dire qu'il s'agit d'un contrat sexué. Et vous vous acharnez, depuis des mois, à nous démontrer le contraire, alors que le moindre capacitaire en droit débutant interpréterait l'article 512-2 comme relatif à un contrat solennel sexué. Admettez, monsieur le rapporteur, qu'il ressemble furieusement à quelque chose qui ressemble au mariage !

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin pour défendre l'amendement no

84.

Mme Christine Boutin.

Je ne rallongerai pas les débats, mon collègue, Claude Goasguen, ayant excellement développé les arguments qui justifient la suppression de cet article.

Une fois de plus, nous proposons à la majorité d'être cohérente avec ses allégations : puisque le PACS n'a rien à voir avec le mariage, retirons tout ce qui est inscrit à l'article 515-2, puisqu'il s'agit des mêmes interdictions que celles du mariage. Ainsi le PACS ne sera pas une nouvelle catégorie de mariage, comme le disait M. Patrick Devedjian, un mariage bis ou un sous-mariage. Les choses seront beaucoup plus claires.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements de suppression ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé ces amendements, comme elle l'avait fait en première et en deuxième lectures.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

57. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 13 et 84.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 247, ainsi rédigé :

« Au début du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, après les mots : " A peine de nullité", insérer le mot : "absolue". »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

J'ose espérer qu'à l'un au moins des très nombreux amendements que nous avons déposés, M. le rapporteur n'opposera pas, comme il le fait systématiquement, un « avis défavorable, comme en première et en deuxième lectures » et que lui et Mme la ministre l'accepteront...

M. Jean-Pierre Blazy.

Jamais !

Mme Christine Boutin.

D'autant, monsieur Michel, que ni en première ni en deuxième lecture, vous ne nous aviez donné d'explication pour justifier ces rejets ! Pas plus que dans le peu de temps dont nous avons disposé en commission.

L'amendement no 247 a pour objectif de préciser le caractère absolu de la nullité, ce à quoi les grands juristes que vous êtes tous ne pourront s'opposer. En effet, l'action en nullité absolue est ouverte à tous ceux qui y


page précédente page 05575page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

ont intérêt, à la différence de l'action en nullité relative qui est exclusivement rattachée à la personne dont le consentement a été vicié.

Il convient donc de préciser la nature de la nullité, car le critère de distinction entre la nullité relative et la nullité absolue n'est guère fiable dans le silence de la loi.

Nous essayons de mieux protéger l'ensemble de nos concitoyens.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

Mme Christine Boutin.

Et voilà, ça continue ! Pourquoi défavorable ? On ne sait pas !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Madame Boutin, vous savez, puisque vous vous tenez très au courant des travaux du Parlement sur le PACS, que la commission des lois a repoussé tous les amendements déposés, et que je ne suis que le rapporteur.

Mme Christine Boutin.

Ce n'est pas une raison pour ne pas nous donner d'explication !

M. Bernard Accoyer.

On veut des explications !

M. Thierry Mariani.

Nous voudrions avoir l'avis de la commission des affaires sociales.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 247 ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Monsieur le rapporteur, nous avons été en commission des lois d'une correction exemplaire. Nous étions présents et nous avons estimé qu'il fallait débattre en séance plénière. Ne prétextez pas que vous avez répondu en commission, ce que vous n'avez pas fait. C'est un amendement important, même s'il ne faut pas trop allonger le débat il serait souhaitable d'avoir un minimum d'explications. La nullité relative et la nullité aboslue, ce n'est pas pareil ?

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est sûr !

M. Claude Goasguen.

Mme Boutin a tout à fait raison, il s'agit de protéger des gens en difficulté. C'est toujours le même problème, vous refusez de protéger le plus faible. Si vous acceptez la nullité absolue, vous lui donnez la possibilité d'être défendue par un tiers. Avec la nullité relative, sa situation est, juridiquement, plus défavorable.

Mme Christine Boutin.

Bien sûr !

M. Claude Goasguen.

Ce n'est pas neutre, ce n'est pas un petit problème politique ou juridique.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 247.

Mme Christine Boutin.

Nous n'avons pas de réponse !

M. Bernard Accoyer.

Encore une fois ! (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 58, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« I. - Supprimer le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil.

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« 1o Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

« 2o Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

Les amendements nos 14 et 246 sont identiques.

L'amendement no 14 est présenté par MM. Goasguen, Mattei, Goulard et Dominati ; l'amendement no 246 par Mme Boutin. Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no

58.

M. Thierry Mariani.

Le débat que nous venons d'avoir ou plutôt l'absence de débat, parce que nous n'avons toujours pas de réponse - me rappelle tristement ce qui s'est passé en première lecture. On expliquait exactement de la même manière qu'il était opportun de prendre des dispositions sur les tutelles. On nous répondait : « refusé ». On s'est aperçu après que les arguments de l'opposition avaient été repris par la majorité.

Le débat sur la nullité relative ou absolue est important, et je regrette que nous n'ayons aucune réponse. Il ne faudra pas se plaindre si la jurisprudence flotte et va peut-être un peu trop loin. Le Parlement, parfois, ne précise pas assez ses textes.

L'amendement no 58 vous propose de supprimer le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 515-2. Il faut être cohérent, je le répète. Puisqu'on nous a dit pour la vingtième fois que le PACS n'est pas le mariage, pourquoi prévoir les mêmes empêchements ?

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen, pour défendre l'amendement no

14.

M. Claude Goasguen.

Défendu.

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin, pour défendre l'amendement no 246.

Mme Christine Boutin.

Il n'y a pas de raison d'interdire un PACS entre collatéraux. Je ne comprends pas cette obstination du Gouvernement, de la majorité plurielle et du rapporteur à ne pas entrendre les raisons de l'opposition.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission les a rejetés.

J'ai déjà répondu sur les nullités. Le droit des nullités s'applique, Mme Boutin. Si, dans la convention, qui est un contrat, il y a des dispositions contraires à l'ordre public et aux bonnes moeurs, c'est la nullité absolue.

Dans les autres cas, c'est la nullité relative.

M. Claude Goasguen.

C'est très bien de l'avoir dit, monsieur le rapporteur !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Tous ces arguments ont été abondamment développés en première et en deuxième lecture. J'ajoute que les amendements qui nous sont présentés aboutiraient à cautionner l'inceste. (Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Christine Boutin.

N'importe quoi ! Il est quatre heures du matin et vous êtes fatiguée. Cela n'a rien à voir !


page précédente page 05576page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Thierry Mariani.

Le Gouvernement nage dans la confusion !

M me Christine Boutin.

Vous vous êtes trompée d'amendement !

M. Thierry Mariani.

C'est de la provocation !

M. Bernard Accoyer.

C'est vous qui vouliez l'inceste avec les fratries.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Madame le garde des sceaux, prenons votre remarque pour une plaisanterie due à l'heure tardive.

Nous essayons de démontrer que vous n'avez pas dit la vérité sur la nature du contrat. Nous vous prouvons ici que c'est un contrat sexué, et vous nous répondez que nous favorisons l'inceste. Il ne faudrait tout de même pas se moquer du monde ! On peut jouer au plus malin longtemps, et le débat peut durer des nuits et des nuits.

Vous êtes déjà suffisamment entortillée sur votre texte.

N'essayez pas de compliquer le débat.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

58. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 14 et 246.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 59, ainsi rédigé ;

« I. Supprimer le troisième alinéa (2o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil.

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« 1o Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

« 2o Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Plus le matin approche, plus le Gouvernement s'embrouille.

Mme Christine Boutin.

Eh oui !

M. Thierry Mariani.

Après nous avoir expliqué que ce texte n'avait aucun rapport avec les relations sexuelles, quand l'opposition pousse jusqu'au bout la logique de la majorité plurielle, on nous répond que faire sauter certains empêchements, c'est favoriser l'inceste.

Mme Christine Boutin.

C'est incroyable !

M. Bernard Accoyer.

Mme la ministre est fatiguée.

M. Thierry Mariani.

Vous plaidez à deux heures du matin une chose, et à trois heures une autre. On est en pleine contradiction ! Un fois de plus, on constate que votre texte est mal ficelé et que vous ne savez pas comment vous en sortir.

M. Jean-Pierre Blazy.

Vous vous répétez, monsieur Mariani. Avancez !

M. Thierry Mariani.

Nous avons tout notre temps.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Nous aussi !

M. Thierry Mariani.

C'est très bien. Le Palais-Bourbon, la nuit, est agréable.

Mme Christine Boutin.

C'est plus calme !

M. Bernard Accoyer.

Il fait un peu froid dans l'hémicycle quand même !

M. Thierry Mariani.

C'est vrai ! Avoir essayé de provoquer maladroitement l'opposition en expliquant que nous étions favorables à l'inceste... Je préfère mettre cela sur le compte d'une provocation maladroite due à l'heure tardive que sur l'expression d'une volonté.

Mme Christine Boutin.

C'est la fatigue !

M. Thierry Mariani.

L'amendement no 59 ne tend donc pas du tout à favoriser l'inceste ou je ne sais quoi. C'est la même logique. Puisqu'il n'y a pas de parallélisme avec le mariage, c'est un empêchement totalement inutile.

Soyez cohérents !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission n'a pas discuté de cet amendement - qui avait été soumis au président de la commission des finances pour être examiné au regard de l'article 40 de la Constitution, - mais elle l'aurait vraisemblablement repoussé.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Je voudrais très rapidement faire une petite mise au point.

De façon systématique, mesdames, messieurs de la majorité, vous avez essayé de faire passer l'opposition pour homophobe. Ensuite, vous avez essayé d'expliquer que nous souhaitions favoriser l'inceste. C'est véritablement un peu fort alors que vous n'avez même pas le courage d'assumer la responsabilité de l'enjeu de ce texte...

M. Bernard Accoyer.

Tout à fait !

Mme Christine Boutin.

... qui est le statut des personnes homosexuelles. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ? Pourquoi n'osez-vous pas le faire !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

On l'assume très bien !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

59. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 60, ainsi rédigé :

« I. Supprimer le dernier alinéa (3o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil.

« II. Compléter cet article par le paragraphe :

« 1o Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

« 2o Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

La parole est à M. Thierry.

M. Thierry Mariani.

Si nous avions dit, quand la majorité a explicitement prévu qu'un PACS pourrait être passé entre des mineurs émancipés, que vous encouragiez la


page précédente page 05577page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

pédophilie, vous auriez hurlé sur vos bancs et vous auriez eu raison. Nous n'avons pas tenu de tels propos. Et l'amalgame que vous avez fait est un peu déplorable.

Mme Christine Boutin.

Insupportable.

M. Thierry Mariani.

Avec cet amendement nous quittons le cadre de la famille.

Le 3o du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil prévoit qu'un PACS n'est pas possible entre deux personnes dont l'une au moins est déjà liée par un pacte civil de solidarité. Allons jusqu'au bout de votre incohérence. Puisque vous nous répétez qu'il n'y a pas de relation sexuelle et qu'on peut passer plusieurs PACS, pourquoi ne pas en passer deux ? Après tout, ce serait peut-être l'occasion pour la gauche de nous faire un discours sur la conquête de libertés nouvelles.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

60. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 172, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa (3o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, après les mots : "est déjà liée", insérer les mots : "ou a déjà été liée depuis moins de trois ans". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

L'amendement no 172 vise à préciser un cas d'exclusion, puisque nous sommes dans la partie de la proposition de loi qui prévoit un certain nombre d'interdits. J'ose employer ce mot. Cela donne l'illusion que ce texte apporte une garantie.

C'est également un amendement de conséquence.

Nous avons appris tout à l'heure de la bouche même du rapporteur que le PACS pouvait être à durée déterminée.

Nous proposons qu'il faille attendre un certain délai avant de pouvoir conclure un autre pacte. Le PACS est en effet un moyen de fraude. Vous allez bien entendu répondre que nous prêtons des intentions malveilantes à un certain nombre de futurs pacsés, mais c'est la réalité.

Il y a aura des abus et des fraudes ! C'est pourquoi il y a lieu de prévoir un délai de sécurité pour qu'un autre pacte donnant droit à de nouveaux avantages fiscaux ne puisse être conclu, de convenance, après la répudiation mettant un terme à un pacteantérieur.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement. Imposer un certain délai après la dissolution d'un PACS avant d'en faire un nouveau serait contraire aux principes qui garantissent la liberté individuelle.

M. Thierry Mariani.

On pourra donc en faire quatre par an !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme le garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 172.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de cinq amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 183, présenté par M. Delnatte, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o avec des personnes entrées et séjournant illégalement sur le territoire national. »

Les amendements nos 62, 63 et 61 sont présentés par

M. Mariani.

L'amendement no 62 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est un étranger entré de façon irrégulière sur le territoire français. »

L'amendement no 63 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est un étranger entré de façon irrégulière sur le territoire de l'espace Schengen. »

L'amendement no 61 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est un étranger dont le séjour en France est irrégulier au regard des lois et conventions relatives au séjour des étrangers en France. »

L'amendement no 171, présenté par M. Accoyer, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte poposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o avec des étrangers séjournant illégalement sur le territoire national. »

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour défendre l'amendement no 183.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement souligne encore une des défaillances de ce texte, à moins que, avec une intention plus perfide, le Gouvernement ou les promoteurs du texte n'aient laissé s'ouvrir toute grande cette porte pour permettre de nouveaux flux d'immigration illégale.

Afin que les étrangers séjournant illégalement sur le territoire national ne puissent pas utiliser le PACS pour obtenir un titre de séjour pour en faire, comme le disait tout à l'heure Christine Boutin, un PACS blanc, il est proposé qu'un pacte ne puisse pas être conclu avec une personne séjournant illégalement sur le territoire national.

M. le président.

La parole est à M. Mariani, pour soutenir les amendements nos 62, 63 et 61.

M. Thierry Mariani.

J'avais dit, et cela avait hérissé le poil de certains de mes collègues, que le PACS était la voiture-balai de la régularisation des sans-papiers.

M. Bernard Accoyer.

C'est vrai !

M. Thierry Mariani.

Et ce sera la voiture-balai. C'est vraiment doper les régularisations des sans-papiers à l'EPO parce que cela va entraîner des régularisations à tout-va. Puis-je répéter une fois de plus, pour ceux qui ont participé des nuits durant au débat sur la nationalité ou au débat sur l'immigration, que, lorsque j'avais demandé à M. Chevènement ou à Mme la garde des sceaux si ce qui ne s'appelait pas le PACS à l'époque mais le PIC ou le CU serait considéré de la même manière que le mariage, on m'avait répondu que ma question


page précédente page 05578page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

était déplacée et que c'était un fantasme. A chaque fois, on nous explique que ce sont des fantasmes mais le drame, avec votre majorité, c'est que six mois après, ils se transforment en général en cauchemars ! Le PACS sera le moyen pour votre Gouvernement de régulariser, plus ou moins discrètement, un certain nombre de sans-papiers dont vous ne savez que faire, n'osant pas les expulser actuellement du territoire français,

M es amendements ne sont que des propositions logiques. L'amendement no 62 prévoit d'interdire le PACS entre deux personnes dont l'une au moins est un étranger entré de façon irrégulière sur le territoire français. Quoi de plus logique ? L'amendement no 63 prévoit d'interdire un PACS entre deux personnes dont l'une au moins est un étranger entré de façon irrégulière dans l'espace Schengen, l'amendement no 61, entre deux personnes dont l'une au moins est un étranger dont le séjour en France est irrégulier au regard des lois et conventions relatives au séjour des étrangers en France, et l'amendement no 171 avec des étrangers séjournant illégalement sur le territoire national.

De même qu'on a vu certaines organisations gauchistes, aujourd'hui rebaptisées écologistes, et certains de nos collègues se retrouve sur les quais pour interdire l'expulsion de certains immigrés en situation clandestine, je prends le pari que nous verrons sous peu des association appeler au PACS républicain pour empêcher les sanspapiers de quitter le territoire national, amis, camarades, pacsez ! Une simple lettre suffira ensuite pour répudier la personne.

Ces amendements tendent simplement à éviter ce genre d'abus. Voilà pourquoi je souhaite très vivement que, à moins que le Gouvernement ait, ce qui est à mon avis le cas, les idées cachées qu'on lui prête, ces amendements soient acceptés.

M. Bernard Accoyer.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces cinq amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission les a repoussés comme elle l'avait fait d'ailleurs lors des précédentes lectures.

D'abord, conclure un PACS n'ouvre pas un droit au séjour automatique, M. Mariani le sait très bien, car l'article de la loi qui le prévoit permet simplement de faire valoir la vie privée et familiale. Il est de même d'ailleurs pour le mariage. On peut marier des gens en situation totalement irrégulière. La question du séjour se pose ensuite d'une façon différente et séparée.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Dans ce domaine, monsieur le rapporteur, l'administration n'est pas un juge. Elle est soumise à un pouvoir hiérarchique. Comme le ministère de l'intérieur ne nous a pas dit exactement comme il entendait interpréter l'article concernant la vie privée, vous comprendrez que le législateur ait quelque doute et quelque méfiance, et ne s'en remette pas à un hypothétique jugement de l'administration, parce que l'administration ne juge pas, elle obéit.

Comme je doute vraiment de l'interprétation que fait M. Chevènement de cette disposition de la loi, pour avoir vécu moi aussi les longues nuits de la loi sur l'immigration, je préférerais avoir une garantie explicite de la part du législateur.

Monsieur le rapporteur, n'oubliez jamais que l'administration est soumise au pouvoir hiérarchique, à la différence du juge.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 183.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

62. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

63. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

61. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 171.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 64, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est un mineur émancipé. »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Sans porter à l'encontre de la majorité plurielle les accusations que je laissais entendre tout à l'heure, je propose d'interdire à deux personnes dont l'une au moins est un mineur émancipé de passer un PACS.

A seize ans, à moins d'être un juriste un peu éclairé ou d'être particulièrement conseillé, on n'est pas totalement apte à peser les conséquences juridiques d'un texte comme le PACS.

Par ailleurs, trouvez-vous normal qu'un mineur puisse signer un tel texte qui aura, par moments, qu'on le veuille ou non, des connotations sexuelles ? Très sincèrement, je ne pense pas.

A un moment où le Gouvernement, comme l'ensemble de la France, combat les réseaux pédophiles, c'est vraiment le style d'article qui peut être dangereux.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. Bernard Accoyer.

Peut-on avoir des explications ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable. L'explication détaillée a été donnée - j'ai ici le Journal officiel - le 8 novembre 1998.

M. Bernard Accoyer.

Nous, nous n'avons pas le Journal officiel sous les yeux !

M. Claude Goasguen.

Nous demandons des explications !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

64. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. Claude Goasguen.

N'empêchez pas le débat !

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 65, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins vit en état de concubinage avec une autre personne. »


page précédente page 05579page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Il est tout de même curieux que, en troisième lecture, on nous renvoie à la lecture du Journal officiel ! Bientôt, on nous renverra à Internet !

M. Bernard Accoyer.

Ce sera tout de même une nouveauté !

M me Christine Boutin.

Quel mépris vis-à-vis de l'opposition !

M. Thierry Mariani.

Par l'amendement no 65, je propose qu'il soit impossible de conclure un PACS entre deux personnes dont l'une au moins vit en état de concubinage avec une autre personne. C'est ce que j'ai appelé le concupacsage.

Est-il sain de pouvoir vivre en concubinage avec X ou avec Y, quel que soit le sexe de X ou de Y, et, en même temps, de pouvoir pacser avec Z ou avec W, quel que soit le sexe de Z ou de W ? Cela ne manquera pas de soulever des problèmes concrets, notamment au moment des successions.

On ne peut pas permettre aux gens de picorer à droite ou à gauche, dans une sorte de catalogue, les dispositions qu'ils souhaitent se voir appliquer. Il faut choisir : ou vivre en concubinage ou être pacsé, mais on ne peut pas être en même temps concubin avec X et pacsé avec Y.

Arrêtons là ce jeu de massacre !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission s'est expliquée sur cet amendement en deuxième lecture, mais je crois que M. Mariani n'a pas voulu comprendre.

Le concubinage est un état de fait. Il n'a pas à être prouvé, il n'est inscrit nulle part. Qui peut savoir qu'untel et untel vivent en concubinage ? Personne, sinon peutêtre l'entourage, les voisins ou les amis. Aujourd'hui, des gens mariés vivent en concubinage avec de tierces personnes. Je ne vous dis pas que c'est une bonne chose, que c'est bien, que cela facilite les rapports juridiques, mais je vous dis simplement que c'est une réalité. La loi ne peut pas interdire à des gens de se pacser sous prétexte qu'ils vivraient en concubinage, car, juridiquement, on ne le sait pas ; on n'en a aucune preuve.

C'est la raison pour laquelle cet amendement, que vous avez déjà présenté en deuxième lecture, est totalement inutile. Il faut arrêter avec ce genre de plaisanterie !

M. Thierry Mariani.

Ce n'en est pas une !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Comme un certain nombre d'élus ici, je siège dans une commission locale d'insertion. Et je sais bien que, s'agissant du seuil de déclenchement du RMI, les revenus de deux personnes vivant en concubinage sous le même toit sont pris en compte.

Il n'est pas possible de balayer cela d'un revers de main en disant qu'il s'agit de la vie privée des gens. Vous savez très bien que, dans de très nombreux domaines, notamment dans le domaine social, on tient compte de cette vie privée.

Mme Christine Boutin.

Mais oui !

M. Thierry Mariani.

On va se retrouver dans un imbroglio inextricable. Par pitié, un peu de cohérence ! On ne peut pas être à la fois concubin avec l'un et pacsé avec l'autre.

Par ailleurs, quel sera le seuil de déclenchement du RMI pour deux personnes pacsées ?

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

65. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 170, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o entre deux personnes de même sexe dont l'une a été autorisée à adopter un enfant. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

A quatre heures cinq du matin, nous devons constater que M. le rapporteur et Mme la ministre ne nous répondent pas ou nous font des réponses lapidaires en nous renvoyant au Journal officiel , dont nous n'avons pas ici la collection. Cette façon de faire est particulièrement préoccupante et, je le dis, méprisante à l'égard de l'opposition.

Mme Christine Boutin.

Absolument !

M. Bernard Accoyer.

Cela est grave, compte tenu de l'inconséquence de ce texte dont nous voyons, au cours de cet énième examen, qu'il n'a pas été construit sérieusement. Nous apprenons encore ce soir qu'il offre des perspectives surprenantes, qu'il s'agisse du PACS à durée déterminée ou du PACS sous conditions suspensives.

M. Jean-Pierre Blazy.

Vous vous répétez ! Vous dites toujours la même chose !

M. Bernard Accoyer.

L'amendement no 170 va, je n'en doute pas, soulever encore l'émotion de M. le rapporteur et d'un certain nombre de membres de la majorité, en tout cas de ceux qui sont encore vigilants à cette heure.

Par cet amendement, il s'agit de mettre fin à une hypocrisie ou à une cryptométhode ayant pour but de permettre l'adoption par des couples homosexuels. Je propose donc d'ajouter aux interdits de l'article 515-2 l'impossibilité de conclure un PACS entre deux personnes de même sexe dont l'une a été autorisée à adopter un enfant.

Vous affirmez solennellement, madame la ministre, que le PACS ne permettra pas l'adoption par les couples homosexuels. Or chacun sait que ce sera le contraire qui se réalisera. Pour autant, puisque vous avez pris un engagement, à quel moment cette interdiction prendra-t-elle corps ? Avant le PACS ? Après le PACS ? Ou pendant le PACS ? J'ajoute que cet amendement n'a pas pour objet d'empêcher les couples homosexuels de mener la vie qu'ils veulent. Ils ont toujours la possibilité de vivre dans l'union libre. Cet amendement prévoit simplement que la République, les contribuables, les familles, les célibataires ne doivent pas leur donner des avantages financiers et fiscaux.

Mme Christine Boutin, Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement.

Prenons le cas d'un célibataire qui a été autorisé par un tribunal a adopter un enfant. A ce moment-là, le tribunal ne savait pas comment cette personne allait vivre par la suite. Or, si plus tard, elle désire se pacser, votre amendement l'en empêchera, monsieur Accoyer. C'est donc totalement inacceptable.


page précédente page 05580page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

Très juste !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Voilà un nouvel aveu ! En vérité, ce n'est pas une surprise de la part du rapporteur, qui lui n'a jamais caché que le PACS devrait permettre l'adoption par les couples homosexuels. D'ailleurs, M. le rapporteur, par son haussement d'épaule, considère que c'est une banalité. Mais il fallait que la représentation nationale soit informée.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Vous réclamez des réponses, mais vous les « retournez toutes » !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 170.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 248, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes de même sexe dont l'une au moins a la garde légale d'un mineur. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Au fur et à mesure que les heures avancent, nous nous rendons compte que ce texte est un tissu de contradictions.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

C'est vous le tissu de contradictions !

Mme Christine Boutin.

Et c'est sans doute pour ne pas mettre trop en évidence ces contradictions que nous obtenons des réponses aussi brèves, en particulier de la part de Mme la ministre.

Cela dit, j'aimerais bien que Mme Guigou ait la courtoisie de nous relire, quand elle nous y renvoie, les explications qui figurent au Journal officiel des débats précédents. Du reste, elle nous a montré en première lecture qu'elle était fort capable de lire une deuxième fois son discours ; elle nous a déjà habitués à ce type d'exercice.

De surcroît, la lecture du Journal officiel établira que le Gouvernement s'empêtre dans ces contradictions. En ce qui concerne plus particulièrement cet amendement, il vous est proposé, puisque vous n'avez pas voulu interdire l'adoption des enfants par les personnes pacsées, une nouvelle chance de clarifier les choses en interdisant la conclusion d'un PACS entre deux personnes de même sexe dont l'une au moins a la garde légale d'un mineur.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?.

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 248.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 169, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« Le procureur de la République peut former opposition à l'enregistrement d'un pacte qui serait conclu en violation de l'une des prohibitions énoncées ci-dessus. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Afin d'accélérer le débat, je défendrai en même temps l'amendement no 182 de Patrick Delnatte.

M. le président.

L'amendement no 182, présenté par M. Delnatte, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« Les personnes qui contreviendraient à l'une de ces prohibitions seront passibles d'une peine d'un an d'emprisonnement et 300 000 francs d'amende. »

Poursuivez, monsieur Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Ces deux amendements, qui ont la même finalité, tendent à dénoncer une autre hypocrisie de ce texte. A ce sujet, j'interroge directement le Gouvernement parce que cela relève de sa responsabilité.

Le texte proposé pour l'article 515-2 énonce un certain nombre de cas qui rendent impossible la conclusion d'un P ACS. Toutefois, aucune sanction n'est prévue à l'encontre de ceux qui enfreindraient ces dispositions.

Aussi l'amendement no 169 prévoit-il que le procureur de la République peut former opposition à l'enregistrement d'un PACS qui serait conclu en violation de l'une des prohibitions énoncées.

Quant à l'amendement no 182, il prévoit que cette violation peut être punie d'une peine d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé ces deux amendements.

Je comprends bien ce que souhaite M. Accoyer, mais je lui répondrait que cela va de soi. Le greffe du tribunal ne pourra pas enregistrer un PACS qui serait contraire aux prohibitions énoncées dans la loi. Il devra vérifier que les conditions sont remplies et, pour cela, il disposera des actes d'état civil. S'il ne le faisait pas, le PACS serait d'une nullité absolue, laquelle peut d'ailleurs être soulevée par le procureur de la République lui-même. L'amendement no 169 est donc satisfait.

S'agissant de l'amendement no 182, je suis défavorable à la création d'un délit pénal supplémentaire.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que la commission.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Cela pose un vrai problème, monsieur le rapporteur. Par exemple, si je conclus un premier PACS à Carpentras et un second, six mois après, à Paris, comment peut-on savoir, au moment de l'enregistrement de ce deuxième PACS, qu'un autre PACS a été conclu à Carpentras ? Il n'y a pas de fichier central que je sache.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Le texte stipule que vous devez produire l'extrait du registre des PACS de la ville où vous êtes né. Si vous êtes né à Orange, par excemple, c'est dans le registre de cette ville que l'on trouvera la trace du PACS que vous avez conclu à Carpentras.

M. Claude Goasgen.

C'est un état civil bis !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Le greffe doit disposer de ces pièces. Certes, on peut lui mentir, il peut y avoir des fraudes, comme d'ailleurs pour les mariages.

Mais à ce moment-là, le PACS est frappé de nullité absolue.


page précédente page 05581page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Ce soir, nous obtenons une série d'informations qui nous font progresser dans notre connaissance du PACS.

M. Francis Hammel.

Voilà à quoi sert le débat !

M. Bernard Accoyer.

Le rapporteur vient de nous confirmer qu'un listing des pacsés sera soigneusement tenu. Il s'agit là, bien évidemment, d'un risque nouveau qui ne pourra que mettre à mal la vie privée de nos concitoyens.

M. Francis Hammel et M. Jean-Pierre Blazy.

Ridicule !

M. Bernard Accoyer.

Si j'ai bien compris, monsieur le rapporteur, vous nous dites que dans les mairies, on tiendra à jour la liste des personnes pacsées. C'est important, et cela mérite des explications complémentaires.

M. René Leroux.

Les mairies tiennent bien à jour la liste des personnes mariées ! Et il y a bien des fichiers pour les concubins !

M. Bernard Accoyer.

Nous ne savons plus où nous en sommes, monsieur le président. Nous avions pourtant cru avancer. La question soulevée par Thierry Mariani est une question de fond très importante.

M. le président.

Eh bien, c'est Mme la ministre qui va vous répondre, monsieur Accoyer.

Mme la garde des sceaux.

Je conseille tout simplement à M. Accoyer de lire le texte de la proposition. Il y trouvera la réponse à sa question.

M. Thierry Mariani.

Tiens, on ne nous renvoie pas au Journal officiel

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Voyez l'article 515-3, deuxième alinéa !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 169.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 182 (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 249, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2 bis. - L'action en nullité du pacte civil de solidarité peut être intentée par toute personne intéressée. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Les interventions de mes collègues Mariani et Accoyer ont suscité certaines réactions sur les bancs de la majorité. Je voudrais y répondre avant de présenter l'amendement no 249. Pourquoi l'inscription du PACS à un registre tenu en mairie nous choque-telle ? C'est parce que nous avons la naïveté, la candeur de croire que cette proposition de loi est faite pour les personnes homosexuelles. Or nous ne voulons pas l'établissement d'un fichier des personnes homosexuelles. Et si nous nous opposons à vous, c'est pour protéger ces dernières ! De la sorte, vous comprendrez un peu mieux l'essence de nos préoccupations. Nos positions sont dictées non par un esprit d'opposition systématique, mais par un souci de protection de la vie privée de chacun de nos compatriotes.

L'objet de l'amendement no 249 consiste à faire en sorte que l'action en nullité puisse être ouverte à tous ceux qui y ont intérêt. En effet, le PACS peut porter atteinte aux droits des membres de la famille, des créanciers, des ayants cause à titre particulier et du ministère public. Il paraît donc indispensable de préciser que l'action de nullité d'un PACS peut être ouverte à toute personne intéressée, sous peine de connaître, après adoption du texte, et avant interprétation de la Cour de cassation, une période d'incertitude jurisprudentielle.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 249.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 250, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 512-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 512-2 bis. - Le pacte civil de solidarité conclu en fraude de la loi peut être annulé à la suite d'une demande de nullité formée dans les trente ans suivant la date de conclusion du pacte civil de solidarité. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

J'aimerais qu'on nous apporte le Journal officiel de la première lecture et celui de la deuxième lecture, pour avoir les explications précises qui fondent le rejet systématique de nos amendements par le Gouvernement.

Quant à l'amendement no 250, il prévoit que le pacte civil de solidarité conclu en fraude de la loi peut être annulé à la suite d'une demande de nullité formée dans les trente ans suivant la date de conclusion de celui-ci. Il est en effet très important de prévoir dès maintenant les délais pour l'action en nullité. C'est en quelque sorte un amendement de précision.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Non, vous ne précisez rien du tout !

Mme Christine Boutin.

Si c'est préciser que la prescription est trentenaire, c'est-à-dire identique à celle du droit commun, qui est de trente ans pour l'action en nullité absolue.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

Madame Boutin, je vous signale que le texte de votre amendement est en contradiction avec votre exposé sommaire. La prescription trentenaire s'impose de par la loi.

Cela dit, j'aurais compris que vous eussiez voulu une prescription plus courte ou plus longue : dix ans, vingt ans ou quarante ans. Bref, votre amendement est inutile.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Vous serez d'accord avec moi, monsieur le rapporteur, pour reconnaître que la valeur juridique d'un exposé des motifs et d'un texte de la loi sont tout de même de nature différente : le premier n'a pas force de loi.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 250.

(L'amendement n'est pas adopté.)


page précédente page 05582page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

ARTICLE 515-3 DU CODE CIVIL

M. le président.

Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L'amendement no 15 est présenté par M. Goasguen et M. Goulard ; l'amendement no 66 par M. Mariani ; l'amendement no 85 par M. Plagnol, Mme Boutin, MM. de Courson, Dutreil et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ; l'amendement no 168 par M. Accoyer.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil. »

La parole est à M. Claude Goasguen, pour soutenir l'amendement no

15.

M. Claude Goasguen.

Le texte proposé pour l'article 515-3 est un de ceux qui a le plus évolué dans cette proposition. Nous y sommes un peu pour quelque chose, mais je ne sais pas s'il faut s'en féliciter ou le déplorer.

Bien entendu, l'opposition veut protéger la situation des personnes et, par conséquent, améliorer le texte en ce sens. Mais, dans le même temps, la nature hybride du texte nous conduit à nous opposer complètement à celui-ci. Nous sommes donc constamment tiraillés entre deux impératifs contradictoires, ce qui ne vous a sans doute pas échappé.

M. Jean-Pierre Blazy.

Il ne nous a pas échappé que vous aviez des contradictions !

M. Claude Goasguen.

Mais vous en avez aussi ! Si vous croyez que votre texte est simple, vous vous trompez ! Vous avez transféré le lieu d'enregistrement au greffe du tribunal d'instance. Mais l'ouverture d'un registre spécifique implique que les greffes des tribunaux d'instance soient en mesure de le tenir ; et vous qui connaissez un peu ces tribunaux, vous savez que ce n'est pas évident. A la réflexion, je ne suis pas sûr que la demande, présentée par certains de nos collègues, consistant à choisir la mairie, ne soit pas plus protectrice. Par conséquent, j'émets des réserves et je demande qu'il y ait un débat sur ce point. Choisir le registre d'état civil faciliterait le contrôle.

Je ne suis pas du tout convaincu par les dispositions améliorées prévues dans le texe et, au fond, je me demande si la simplicité ne consisterait pas à s'en remettre, non à un registre tenu par le greffe du tribunal d'instance, mais à un double du registre d'état civil dans les mairies.

M. Thierry Mariani.

Très bien !

M. Claude Goasguen.

Dernier point : je ne sais pas du tout quelle sera la nature du document qui sera délivré par le greffe du tribunal d'instance, car le texte n'est pas précis. En particulier, est-ce que les tiers auront accès au contenu du PACS, ou auront-ils simplement connaissance de son existence ? S'agira-t-il d'une formule ronéotée qui sera distribuée ? Vous en conviendrez, cela diminuerait singulièrement la protection. Le tiers qui essaye de se renseigner aura-t-il accès à des dispositions un peu plus complètes ? Quelle sera la nature de la déclaration du PACS devant le greffe du tribunal d'instance ? Il est important de le savoir car la nature du contrat est en cause.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no

66.

M. Thierry Mariani.

Cet article est important car il précise les conditions formelles d'enregistrement et de dépôt des pactes civils de solidarité. Avouez que, là aussi, nous sommes entrés dans une présentation un peu simplifiée.

Cohérent avec ce que j'ai dit en deuxième lecture, je suis opposé à toute célébration en mairie - il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté sur ce point -, par contre, je suis favorable à ce que le lieu d'enregistrement soit le service d'état civil de la mairie, parce que c'est la seule façon d'éviter une dispersion, notamment au moment des successions.

La proposition de loi, après avoir longtemps hésité quant au lieu d'enregistrement des pactes - mairie, préfecture, tribunal de grande instance - prévoit, dans cette huitième version, comme dans la version précédente, que les PACS seront enregistrés dans les tribunaux d'instance.

Cela pose deux problèmes. D'abord, il faudra créer un état civil bis auprès des greffes des tribunaux d'instance, dont la mission n'est pas de procéder à de tels enregistrements. Le second est dû à l'absence de greffe à temps p lein dans certains tribunaux d'instance ainsi qu'à l'absence de moyens matériels dans de nombreux tribunaux situés dans de petites communes. A l'heure où nos tribunaux sont engorgés, et où l'on tente de développer des solutions alternatives aux poursuites afin de désengorger les juridictions, n'est-il pas complètement incohérent et illusoire de confier une nouvelle mission, pour laquelle ils ne sont pas faits, à des services déjà surchargés de travail et en sous-effectif notoire ? D'autres questions se posent également. Le greffier pourra-t-il refuser d'enregistrer un PACS qu'il jugerait notoirement contraire à certaines dispositions législatives ? Les registres sur lesquels seront notées les déclarations seront-ils publics ? Qui pourra les consulter ? Dans quelles conditions ? La réponse à ces questions est importante dans la mesure où le pacte civil de solidarité prévoit des effets à l'égard des tiers, notamment la solidarité des dettes. Comment, en effet, mettre celle-ci en jeu si personne ne peut avoir connaissance du pacte ? Il faut donc assurer à la conclusion de ces contrats une certaine publicité. Enfin, est-il nécessaire de prévoir la possibilité de conclure un PACS à l'étranger dans la mesure où ce contrat produit des effets quant au droit au séjour en France ? Je le répète, nous sommes radicalement contre la conclusion des PACS, mais nous cherchons à éviter les dégâts. Je rappelle que je suis opposé à toute cérémonie à la mairie mais, comme le congrès des notaires l'a suggéré, on pourrait porter une mention en marge de l'état civil, comme pour les enfants naturels. Et cette mention réglerait bien des problèmes d'application.

M. le président.

La parole est à M. Christine Boutin, pour défendre l'amendement no

85.

Mme Christine Boutin.

Nous demandons nous aussi la suppression de l'article 515-3. M. Mariani l'a justifiée, M. Goasguen a développé une argumentation propre, et c'est pour une troisième raison, différente, que nous demandons pour notre part la suppression de cet article.

Ce qui nous gêne, c'est l'établissement d'un registre.

Bien que les réponses à cet égard aient été très variable s, ce texte a une connotation sexuelle évidente. Nous sommes par conséquent très inquiets de l'établissement d'un registre qui identifiera obligatoirement les comportements sexuels de nos compatriotes.

Or l'histoire nous a montré à quel point c'était dangereux, en particulier pour les personnes homosexuelles.

Nous demandons par conséquent la suppression de cet article dans un but de protection des personnes.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour défendre l'amendement no 168.


page précédente page 05583page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Bernard Accoyer.

Au fil des lectures, l'article 515-3 du code civil a été modifié. On distingue finalement aujourd'hui la convention passée entre les partenaires et la déclaration effectuée au greffe du tribunal. Désormais, il est prévu que le greffier visera et datera les deux exemplaires originaux de la convention et les restituera aux deux partenaires, qui en assureront eux-mêmes la conservation. On imagine la source de falsifications et de contentieux que ces documents vont créer.

La même procédure est d'ailleurs nécessaire pour les modifications ultérieures de la convention, et c'est, là encore, la porte ouverte à toute sorte de manipulations et de recours. Mais il est également prévu que les partenaires fourniront au greffier les documents attestant l'absence des empêchements prévus à l'article 512-2. Le PACS devient opposable aux tiers à compter de son inscription au registre du greffe.

C'est l'illustration, que nous avons dénoncée, d'un cafouillage et de changements qui n'en finissent pas.

D'abord prévu en mairie, puis en préfecture, avant d'être renvoyé aux tribunaux d'instance, l'enregistrement des PACS conduit maintenant à une distinction entre la convention et la déclaration - la convention pouvant d'ailleurs être modifiée -, et l'on distingue entre celui qui enregistre le PACS, c'est-à-dire le greffier, et les conservateurs du PACS, c'est-à-dire les deux partenaires.

Il faudra être vraiment très fort pour s'y retrouver et, là encore, ce seront les plus faibles qui seront lésés. Par ailleurs, comme l'a très bien souligné Christine Boutin, l'archivage qui sera fait, si nous avons bien compris, dans les registres d'état civil des mairies permettra d'avoir une idée précise sur la vie privée de nos concitoyens. Il y a là un danger que nous entendons dénoncer.

De la même façon, lorsqu'il y aura un PACS à durée déterminée, qui cessera par conséquent de plein droit, et qu'il n'y aura donc pas de modification du contrat, puisqu'il s'éteindra de lui-même, comment les choses se passeront-elles, monsieur le rapporteur ?

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les quatre amendements en discussion ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé ces amendements de suppression.

Dans le cas, fort improbable, que vous soulevez, monsieur Accoyer, les gens ne seront pas dispensés de toutes les formalités prévues dans le texte. Car même contrat à durée déterminée, le PACS ne s'éteint pas de lui-même.

Il faudra une signification, et la procédure prévue dans le texte devra obligatoirement être respectée.

Ce cas est totalement improbable, je le répète, et il n'a strictement aucun intérêt.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 15, 66, 85, et 168.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 16, présenté par MM. Goasguen, Mattei et Goulard, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil :

« Art. 515-3. - L'attestation civile de solidarité est un acte sous seing privé passé devant notaire.

« La publicité de l'attestation civile de solidarité, de ses modifications et de son extinction doit être assurée aux services de l'état civil, par des mentions en marge de l'acte de naissance des partenaires. »

L'amendement no 251, présenté par Mme Boutin, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil : Le pacte civil de solidarité fait l'objet d'un acte écrit sous seing privé. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no

16.

M. Thierry Mariani.

Mon collègue Goasguen, qui va nous rejoindre, propose que le notaire, officier public, professionnel de la rédaction des actes, soit l'autorité qui assurera l'enregistrement de l'attestation. Par ailleurs, il est logique d'assurer la publicité par le biais de l'état civil, sans intervention du maire ou des ses adjoints, et non par le biais d' un registre spécial tenu en préfecture.

Franchement, si la droite avait proposé un registre spécial où auraient figuré tous les couples pacsés,...

Mme Christine Boutin et M. Bernard Accoyer.

Que n'aurions-nous pas entendu ?

M. Thierry Mariani.

... que n'auriez-vous dit ! M. X et Mme Y seront supposés hétérosexuels tandis que M. X et M. Y ou Mme X et Mme Y seront supposés homosexuels.

Il y a là un véritable danger. Je répète donc la question que j'avais posée en deuxième lecture : qui interdira l'accès de n'importe qui à ce registre, ainsi que la publication dudit registre ? La presse locale contient les avis de mariage. Mais qu'est ce qui interdira à un journaliste d'aller constater au tribunal de Carpentras la liste des PACS et de la publier ? Et la presse contiendra la liste des PACS concernant deux hommes, ou deux femmes, ce qui est la pire des solutions.

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin, pour soutenir l'amendement no 251.

Mme Christine Boutin.

Ce qu'a dit M. Mariani est très important. La publication des PACS dans les journaux locaux protégerait d'une certaine façon l'intérêt des tiers et des créanciers, ce qui n'est pas du tout prévu dans cette loi. Mais cela aurait l'effet pervers que nous dénoncions.

L'amendement no 251 propose que le PACS fasse l'objet d'un acte écrit sous seing privé. Il est inspiré par la volonté de protéger les relations privées, dans lesquelles l'Etat n'a pas à intervenir. Si le mariage fait l'objet d'une reconnaissance par l'Etat, c'est qu'il est en principe garant de la continuité et de la stabilité de la société. Or, nos débats l'ont clairement montré, le PACS n'assure aucune de ces fonctions ; il est donc préférable qu'il reste dans la sphère privée et fasse l'objet d'un acte écrit sous seing privé.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé ces amendements. Je l'ai dit à M. Goasguen : il s'agit là d'une autre logique, celle du professeur Hauser, qui préconise que le PACS fasse l'objet d'un acte sous seing privé passé devant notaire. Ce n'est pas la logique de notre texte.

M. Thierry Mariani.

Et pour ce qui est des problèmes que pose le registre ?


page précédente page 05584page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Bernard Accoyer.

Qui pourra être publié dans la presse !

Mme Christine Boutin.

Ils ne répondent jamais !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

Je précise par ailleurs que, de toute façon, les personnes qui n'ont pas d'intérêt à agir n'ont pas accès aux informations nominatives. Je l'avais déjà dit en première et en deuxième lecture et je le répète aujourd'hui.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

C'est un vrai problème. Vous avez parlé, madame la ministre, des personnes qui n'ont pas intérêt à agir. Mais la seule obligation du PACS, c'est la solidarité à l'égard des dettes. Imaginons que quelqu'un ait contracté une dette importante envers moi. Je suppose qu'il est pacsé avec telle ou telle personne et j'ai donc intérêt à en avoir le coeur net, pour savoir si cette personne est bien solidaire en ce qui concerne la dette.

M. Bernard Accoyer.

Evidemment !

M. Thierry Mariani.

En suivant votre raisonnement, j'aurai donc le droit d'avoir accès au registre. Mais, en fait, tout le monde pourra y avoir accès par le biais de la solidarité concernant les dettes. Sinon, la seule obligation que comporte le PACS est complètement creuse. Soyez cohérents : c'est soit l'un, soit l'autre.

Mme Christine Boutin.

C'est évident !

M. Thierry Mariani.

Soit le registre est public, soit la solidarité concernant les dettes est inapplicable. Mais dites-nous la vérité.

M. Bernard Accoyer.

Il nous faut une réponse !

M. Jean-Pierre Blazy.

Au vote !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

16. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 251.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 1 et 69, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 1, présenté par MM. Birsinger, Braouezec et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, substituer aux mots : "au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel", les mots : "à la mairie de la commune dans laquelle". »

« II. - En conséquence, dans le reste de cet article :

« 1o Substituer aux mots : "au greffier", les mots : "à l'officier d'Etat civil", et aux mots : "le greffier ", les mots : "l'officier d'état civil". »

« 2o Substituer aux mots : "du greffe du tribunal d'instance", les mots : "de la mairie", et aux mots : "au greffe du tribunal d'instance", les mots : "à la mairie". »

L'amendement no 69, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, substituer aux mots : "greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel", les mots : "service de l'état civil de la mairie de la commune dans laquelle". »

« II. - En conséquence, dans le reste de la proposition de loi, substituer aux mots : "greffe du tribunal d'instance", les mots : "service de l'état civil de la mairie". »

« III. - En conséquence, dans le reste de la proposition de loi, substituer au mot : "greffier", les mots : "service de l'état civil de la mairie". »

La parole est à M. Bernard Birsinger, pour défendre l'amendement no

1.

M. Bernard Birsinger.

Depuis le début de nos débats, le groupe communiste défend l'idée que la mairie est le meilleur endroit pour la signature du PACS. Il faut nous reconnaître une certaine constance en ce domaine.

Mme Christine Boutin.

A nous aussi !

M. Bernard Accoyer.

La constance n'est pas en odeur de sainteté, ici !

Mme Christine Boutin.

Elle n'est pas bien vue !

M. Bernard Birsinger.

Nous sommes favorables à cette solution pour trois raisons simples.

D'abord, la mairie est connue de tous. Dès lors que nous voulons que des millions de gens aient accès à des droits nouveaux, autant faciliter les démarches et choisir le lieu le plus simple pour tout le monde.

En second lieu, le PACS est une reconnaissance sociale des couples qui ne peuvent pas ou ne veulent pas se marier. Le meilleur lieu pour cette reconnaissance sociale, celui où s'établissent déjà tous les actes d'état civil, c'e st la mairie.

Enfin, je l'ai dit dans la discussion générale, si cet acte s'accomplit à la mairie, sa mise en oeuvre sera immédiate, grâce à un personnel efficace et déjà qualifié pour ce type d'acte. Dans la mesure où il n'y a aucune confusion possible avec le mariage, je crois que la mairie est le lieu tout indiqué pour la signature du PACS.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani, pour défendre l'amendement no

69.

M. Thierry Mariani.

L'idée est semblable, mais les m odalités d'application sont légèrement différente.

L'amendement no 1 propose la mairie tandis que je propose les services de l'état civil de la mairie. Ce n'est pas uniquement parce que je suis catégoriquement opposé à toute forme de célébration, mais l'idéal, notamment pour l'ouverture des successions, est de porter les mentions en marge de l'état civil, ce qui permettra d'avoir la totalité des informations sur le même document.

De même que vous avez manifesté une véritable obsession à viser dans le même texte les couples hétérosexuels et les couples homosexuels, parce que vous n'aviez pas le courage de l'affichage, de même il serait beaucoup plus clair de reconnaître que la pseudo-célébration est une erreur et qu'on n'en parle plus.

Par contre, la mention des PACS en marge des registres d'état-civil serait, selon moi, la meilleure façon d'appliquer ensuite ce texte.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Contre ces deux amendements.

Monsieur Mariani, il n'a jamais été question de célébration par l'officier d'état civil.

Mme Christine Boutin.

C'est faux !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Jamais ! Sauf dans la pétition mensongère envoyé par M. Pinton.


page précédente page 05585page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Jamais, je le répète, il n'a été question d'une célébration par l'officier d'état civil. Il était question de l'organiser dans les mairies, certes, et je l'ai toujours dit, mais dans les services de l'état civil.

Mme Christine Boutin.

Vous oui, mais pas le collectif Pouliquen !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Au cours des auditions que nous avons faites, Patrick Bloche et moi-même, certains membres de l'Association des maires de France, comme M. Delevoye et M. Hoeffel, nous ont dit - M. Delevoye à titre personnel - qu'ils n'étaient pas défavorables à l'idée du PACS mais qu'ils souhaitaient, pour ne pas envenimer cette polémique et parce que de nombreux maires avaient signé, qu'on trouve un autre lieu que la mairie. Voilà ce qui nous a conduits à proposer un autre choix. Aujourd'hui, nous nous y tenons. Si l'Assemblée ne le souhaite pas, qu'elle le dise.

M. Thierry Mariani.

Au moment des successions, comment va-t-on faire ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable à ces amendements.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme Christine Boutin.

Même les communistes n'ont pas satisfaction !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

69. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 167, ainsi rédigé :

« A la fin du premier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, substituer aux mots : "résidence commune " le mot "domicile". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

On a tellement entendu M. le rapporteur nous expliquer que le problème de la résidence commune ne posait pas de difficultés, qu'il n'y avait aucun risque de fraude et que ce n'était pas significatif, que je tenais, en cette nouvelle et dernière lecture, à revenir sur une situation surprenante, qui fait que les obligations réservées aux pacsés sont quasiment nulles.

Ceux qui auraient l'intention de conclure un PACS dans un but frauduleux auraient bien tort de ne pas se gêner, tant les contraintes sont limitées !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 167.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 73, ainsi rédigé :

« Compléter le premier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par les mots : "dix jours francs après avoir fait procéder à la mention de leur intention de conclure un pacte dans un journal départemental d'annonces légales". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Quand nous disons que le PACS n'entraîne aucune obligation, la gauche plurielle nous répond : mais si, la solidarité des dettes ! Certes, celle-ci est inscrite dans le texte. Seulement, elle est inapplicable.

Comment savoir que deux personnes sont solidaires d'une dette si l'on ne sait pas qu'ils ont été unis par un PACS ? Par ailleurs, je vois mal comment on pourra éviter dans les formulaires administratifs la mention : « célibataire, marié ou pacsé ».

Cet amendement no 73 vise à assurer un minimum de publicité.

On hésite en permanence entre deux hypothèses. Si le PACS n'a aucune connotation sexuelle, c'est un contrat comme un autre et il faut le publier dans un journal d'annonces légales. S'il est de nature sexuelle, les registres sont complètement déplacés.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

73. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 76, ainsi rédigé :

« Compléter le premier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par la phrase suivante : "Ils annexent à la déclaration un inventaire détaillé des biens leur appartenant". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Avant de défendre cet amendement, j'essaie d'assimiler les explications pertinentes données par la commission et le Gouvernement sur mon amendement précédent (Sourires).

Cet amendement est de bon sens. Un de plus, me direz-vous. Mais je suis persuadé que le bon sens, à cinq heures moins le quart, n'est pas la chose la mieux partagée dans cet hémicycle et je suis assez pessimiste sur le sort qui sera réservé à l'amendement.

Cet amendement vise à prévenir la multiplication des contentieux sur l'appartenance des biens. Puisque votre choix, c'est l'indivision, système que tous les professionnels s'accordent à considérer comme étant le plus compliqué, nous vous proposons d'annexer au PACS une décla-r ation présentant un inventaire détaillé des biens appartenant à chacun des pacsés.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable. Monsieur Mariani, le système retenu, c'est bien l'indivision, sauf stipulation contraire. Les intéressés pourront donc en choisir un autre.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

76. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 166, ainsi rédigé :

« Compléter le premier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par la phrase suivante : "Cette déclaration conjointe donne lieu à la création d'une taxe d'enregistrement du pacte civil


page précédente page 05586page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

de solidarité. Son montant est fixé et révisé en fonction du coût d'installation et de gestion administrative à la charge des tribunaux d'instance". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je suis plein d'espoir pour cet amendement...

M. le président.

C'était un bon argumentaire ! (Sourires.)

M. Bernard Accoyer.

En effet, l'amendement vise à créer un nouvel impôt ! (Rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il s'agit d'une taxe d'enregistrement destinée à couvrir les frais qu'entraînera, pour les tribunaux d'instance, la gestion du PACS.

Les nombreuses tâches prévues, l'enregistrement des documents, la fourniture des pièces demanderont du personnel. Or les tribunaux d'instance manquent précisément de personnel.

Afin que la chancellerie puisse créer de nouveaux postes, il est donc proposé que les dépenses entraînées par cette nouvelle contrainte soient couvertes par une nouvelle taxe d'enregistrement.

Je ne doute pas que, s'agissant de créer de nouveaux impôts, la majorité, qui nous y a habitués, ne se rallie à mon amendement...

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé l'amendement. Je suis défavorable à la création d'une taxe supplémentaire. Je constate d'ailleurs que la tendance est plutôt à la suppression des droits d'enregistrement - ce gouvernement les a supprimés sur la carte d'identité, le passeport, par exemple.

Je serais étonné que le Gouvernement y soit favorable, car la tendance est plutôt à la baisse des impôts. (Rires et exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas ce que disent nos concitoyens !

M. Thierry Mariani.

Disons que c'est une tendance littéraire !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Il s'agit du premier amendement nouveau, depuis le début de ces débats en troisième lecture, voici douze heures !

M. Thierry Mariani.

Nous pouvons en proposer d'autres !

Mme la garde des sceaux.

Je vais répondre, puisque je ne me suis pas exprimée en première et deuxième lectures à ce propos.

Je suis défavorable à cet amendement. La mesure proposée risquerait d'aller à l'encontre de la règle budgétaire de non-affectation des recettes.

J'ajoute que j'appartiens à un gouvernement qui, contrairement à d'autres, ne crée pas des impôts mais a plutôt tendance à en supprimer. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas l'avis de nos concitoyens !

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Je souhaitais intervenir contre cet amendement. Bien sûr, mon collègue Accoyer a proposé un amendement de dérision, pour tendre la perche au Gouvernement. Il n'a jamais été vraiment dans son idée de proposer un nouvel impôt.

M. Bernard Accoyer.

Merci !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Si vous êtes là pour vous amuser, il faut le dire !

M. Thierry Mariani.

Ce n'est pas du tout dans l'optique de l'opposition actuelle. D'ailleurs, mes chers collègues, si on levait un impôt sur les personnes pacsées, qu'entendrions-nous ! Vous nous expliqueriez qu'un tel impôt aurait une connotation sexuelle. Cette mesure ne me semble donc pas applicable.

Néanmoins mon collègue Accoyer a soulevé un vrai problème, et c'était le but de son amendement : comment allons-nous faire pour que des tribunaux déjà surchargés, et manquant de personnel, puissent assurer cette nouvelle mission ?

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 166.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Goasguen, Goulard et Perrut ont présenté un amendement, no 17, ainsi rédigé :

« Compléter le premier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par la phrase suivante : "Les partenaires doivent ensuite signer une convention devant le notaire, qui précise les modalités de leur pacte". »

Le parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Je tiens d'abord à dire à Mme la garde des sceaux qu'à cinq heures du matin, si elle le souhaite, nous pouvons débattre de questions financières.

Mais je ne vais pas laisser dire que ce gouvernement a tendance à diminuer les impôts. Ce serait vraiment tromper les lecteurs du Journal officiel et, par conséquent, les Français. J'affirme donc que non seulement ce gouvernement ne diminue pas les impôts, mais qu'il a une forte tendance à profiter de l'augmentation fiscale.

Quant à l'amendement no 17, c'est un amendement de retrait. Je considère que le PACS devrait plutôt faire l'objet d'un acte sous seing privé. Mais dans la mesure où il donne lieu à un acte solennel, la protection accordée aux parties devrait être égale pour tous. Je suggère par conséquent que l'on protège les plus faibles par un contrat devant notaire. C'est un débat que nous avons déjà eu, et nous ne sommes pas d'accord.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable. Nous avons déjà repoussé des amendements présentés par M. Goasguen, qui allaient dans le même sens, celui d'une convention sous seing privé passée devant notaire. Ce n'est pas la philosophie du texte.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

17. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présentée un amendement, no 253, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, après les mots : "en double original", insérer les mots : "dans laquelle les partenaires auront fixé librement les modalités de leur vie commune". »


page précédente page 05587page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Monsieur le président, pour montrer la bonne volonté de l'opposition, je retire cet amendement.

M. le président.

Je vous en remercie beaucoup, madame Boutin.

L'amendement no 253 est retiré.

M. Mariani a présentée un amendement, no 68, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, après les mots : "les pièces d'état civil permettant d'établir", insérer les mots : "leur nationalité et". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

A la provocation visant à laisser croire que ce Gouvernement avait diminué les impôts, le nombreux public a réagi... en restant muet ! (Sourires.)

L'amendement no 68 est important, puisqu'il tend à obliger les parties à joindre à la convention les pièces d'état civil permettant d'établir leur nationalité. Au moment de la conclusion d'un PACS, cela me semble nécessaire.

Mme la présidente de la commission hoche la tête.

Mais tous les maires ici présents savent très bien qu'à l'heure actuelle, des milliers de nos concitoyens sont

« empoisonnés » parce que, étant nés sur un territoire aujourd'hui étranger, au moment du renouvellement de leurs pièces d'identité, ou de leur passeport, ils doivent fournir trente-six pièces justificatives !

Mme Christine Boutin.

Absolument !

M. Thierry Mariani.

Nous sommes peut-être un petit peu tâtillons. Je pense néanmoins que la carte d'identité française ne se distribue pas sans un minimum de précautions.

Alors qu'il faut fournir des justificatifs pour obtenir des papiers d'identité, le PACS ne nécessiterait même pas un papier permettant d'établir la nationalité ? Cela me semble paradoxal.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement, qui procède de la même idée que d'autres amendements de M. Mariani qui veut que soit contrôlée la régularité du séjour des étrangers, leur nationalité, etc. C'est contraire à l'esprit du texte.

M. Bernard Accoyer.

C'est de la folie !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Demander le contrôle de la régularité du séjour, je vous prie de m'excuser, c'est vouloir l'application des lois de la République ! Vous considérez donc qu'on ne doit pas contrôler l'application des lois de la République ? Même à cinq heures, votre position constitue une révélation et un aveu.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

68. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 254, ainsi rédigé :

« Compléter le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par la phrase suivante : "Est joint à la convention l'acte d'inventaire patrimonial des contractants au pacte civil de solidarité passé devant notaire". »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Cet amendement tend à clarifier la situation patrimoniale des intéressés au PACS et à éviter les contentieux éventuels. Il est indispensable que l'inventaire patrimonial des contractants soit joint à la convention, notamment lors du passage devant notaire, parce que la répartition des patrimoines fera l'objet de contentieux énormes.

M. le président.

Merci de votre brièveté.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 254.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 252, ainsi rédigé :

« Après le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, insérer l'alinéa suivant :

« Le pacte civil de solidarité même enregistré à l'étranger requiert la présence des contractants. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Cet amendement a pour objet de combler une lacune du texte qui n'exclut pas la nonreprésentation. Cette omission pourrait donner lieu à une fraude considérable. Il rend donc obligatoire la présence des contractants, y compris à l'étranger, lors de la conclusion d'un PACS.

Il est très important de prévoir une telle mesure.

Sinon, il y aura des fraudes invraisemblables lors de la conclusion des PACS. Et j'espère que si l'on m'oppose un avis défavorable, on m'indiquera la page du Journal officiel dans lequel la réponse a déjà été donnée.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

C'est un amendement inutile. Le texte prévoit que « deux personnes qui concluent un pacte civil de solidarité en font la déclaration conjointe au greffe », ce qui implique qu'elles doivent être présentes, que la convention soit déposée en France ou à l'étranger.

Mme Christine Boutin.

La précision est importante !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 252.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 321, ainsi rédigé :

« Compléter le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par les mots : "sauf s'il considère que la convention conclue entre les partenaires contient des dispositions manifestement contraires à l'ordre public ou aux bonnes moeurs". »


page précédente page 05588page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

La droite veut protéger le plus faible. Nous l'avons répété, nous continuons de le faire.

L'amendement no 321 propose que le PACS puisse être refusé si le tribunal considère que la convention conclue entre les partenaires contient des dispositions manifestement contraires à l'ordre public ou aux bonnes moeurs.

M. le président.

Vous avez déjà défendu la même chose !

M. Thierry Mariani.

En effet, en deuxième lecture.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable. Cela va de soi. Cet amendement est donc inutile.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 321.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 322, ainsi rédigé :

« Compléter le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par les mots : "sauf s'il considère que la convention conclue entre les partenaires contient des dispositions manifestement défavorables pour l'un d'entre eux". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Il s'agit là encore de protéger le plus faible.

Un an après la mise en place du PACS, il serait intéressant de disposer d'une analyse des contrats. Par moment, je crains le pire. Si certains seront éclairés par les conseils émanant de professionnels du droit, d'autres, je le crains, risquent d'être floués au moment de la rédaction du PACS. Celui qui tiendra la plume aura tendance à s'avantager.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 322.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 77, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Compléter le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par le mot : "public". »

L'amendement no 78, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Compléter le troisième alinéa du texte proposé pour l'artice 515-3 du code civil par les mots : "consultable par toute personne justifiant d'un intérêt légitime". »

L'amendement no 162, présenté par M. Accoyer, est ainsi rédigé :

« Compléter le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par la phrase suivante : "Toute personne qui en fera la demande auprès du greffe du tribunal d'instance pourra consulter ce registre relatif aux déclarations de pacte civil de solidarité". »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no

77.

M. Thierry Mariani.

C'est une question-clef.

M. Jean-Pierre Blazy.

Une nouvelle question-clef !

M. Thierry Mariani.

M. Michel ironisait sur le fait que peu d'amendements nouveaux avaient été déposés par rapport à la lecture précédente. Il y a quand même une nouveauté : dans cette soirée nous avons a appris que le PACS pourrait être « à durée déterminée ».

Mais la question du registre, alors qu'on en est à la deuxième lecture, n'est toujours pas éclaircie. Si l'on veut que la loi comporte vraiment des obligations, il faudrait proposer que le registre soit public. Or vous ne pouvez pas le rendre public, car ce serait dangereux - sur ce point, je vous suis. Et si c'est dangereux, c'est bien la preuve que la solution qui a été choisie n'est pas la bonne. Si vous ne le rendez pas public, cela implique que la loi n'aura pas d'effets puisqu'on ne pourra pas faire appliquer la solidarité des dettes. Sans mauvais jeu de mots, c'est un cercle vicieux, on ne sait pas comment s'en sortir ! C'est une très bonne disposition sur le papier, mais en fait elle est inapplicable.

J'en viens à l'amendement no 78. Mme la ministre, qui, je pense, y reviendra dans ses explications, a dit qu'il fallait avoir un intérêt pour consulter le registre. De mon côté, si M. X a des dettes envers moi et que je veux me faire rembourser, je considère que j'ai intérêt à savoir si M. X est pacsé avec une personne qui serait solidaire de cette dette.

A chaque lecture, en première, deuxième et maintenant troisième lecture, vous nous avez dit que la contrepartie aux droits nouveaux qu'ouvrait le PACS était la solidarité des dettes. C'est, d'ailleurs, la seule obligation attachée au PACS. Mais cette solidarité des dettes, pour être applicable, doit être rendue publique. Et cette publicité doit pouvoir être assurée par un moyen quelconque. Vous êtes pris au jeu de vos propres contradictions !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l'amendement no 162.

M. Bernard Accoyer.

Il s'agit, là encore, d'obtenir quelques précisions, qui nous ont été refusées jusqu'à présen t. Rien n'est prévu sur les modalités de communication des informations aux tiers. Aucune publicité n'est organisée, alors que le pacte implique une indivision et une solidarité pour les dettes.

L es tiers pourront-ils obtenir communication des conventions ? Comment les tiers, en particulier les tiers créanciers, pourront-ils savoir qu'un pacte a été conclu ? Une publicité sera-t-elle organisée pour les commerçants au registre du commerce et des sociétés ? Je rappelle que le mariage fait l'objet d'une procédure publique, qui est même un des fondements du déroulement de cet acte.

Le PACS sera le seul acte sous-seing privé à n'avoir pas de date certaine contre les tiers en dehors des conditions prévues par l'article 1328 du code civil. Le système actuel assure, certes, le respect de la vie privée, mais il le fait au détriment le plus total de la sécurité juridique des tiers.

J'ajoute qu'en raison de l'existence du registre, dont nous avons pris connaissance, en lisant attentivement l'article 515-3, la vie privée risque de n'être pas si soigneusement protégée.


page précédente page 05589page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Il y a donc une ambiguïté entre la volonté de cacher aux tiers la conclusion d'un PACS et celle de permettre l'établissement d'une liste qui méconnaît le respect de la vie privée. Nous avons tout lieu de demander à être mieux informés.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission les a repoussés.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

77. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

78. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 162.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, présentés par M. Mariani, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 72 est ainsi rédigé :

« Après le quatrième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, insérer l'alinéa suivant :

« Il informe la préfecture dans le cas où un des cocontractants est un étranger en situation irrégulière de la situation de celui-ci. »

L'amendement no 193 est ainsi rédigé :

« Après le quatrième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, insérer l'alinéa suivant :

« Quand un des partenaires au moins est de nationalité étrangère, il vérifie auprès des services de la préfecture la régularité de son séjour en France. »

C es amendements sont-ils défendus, monsieur Mariani ?

M. Thierry Mariani.

Bien sûr ! Au risque de choquer M. le rapporteur, je pense qu'on doit faire appliquer les lois. Alors, quaqnd ce gouvernement édicte des lois sur la régularité du séjour des étrangers en France et que l'occasion se présente d'en vérifier concrètement l'application, je ne vois pas pourquoi on la laisserait passer.

L'amendement no 72 prévoit que le greffier du tribunal d'instance « informe la préfecture dans le cas où un des cocontractants est un étranger en situation irrégulière de la situation de celui-ci », et l'amendement no 193 que

« quand un des partenaires au moins est de nationalité étrangère, il vérifie auprès des services de la préfecture l a régularité de son séjour en France ».

Peut-on en permanence demander à bénéficier de nouveaux droits en France quand on ne respecte pas les lois de la République ? Un étranger peut-il demander à bénéficier des avantages du PACS quand il est entré et séjourne irrégulièrement sur notre sol ? Je pense que la République impose des droits et des devoirs.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé ces amendements. Nous nous en sommes expliqués très longuement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

72. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 193.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 75, ainsi rédigé :

« Dans le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, après les mots : "de la déclaration", insérer les mots : "en marge de l'état civil des partenaires". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Comme je l'ai déjà dit, la mention du PACS en marge de l'état civil des partenaires permettrait d'éviter la conclusion de PACS simultanés et d'assurer une meilleure publicité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

75. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements, nos 70, 71 et 255, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 70, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Dans le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, après les mots : "de la déclaration", insérer les mots : "dans un journal départemental d'annonces légales et". »

L'amendement no 71, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Dans le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, après les mots : "de la déclaration", insérer les mots : "sur un panneau municipal réservé à cet effet et". »

L'amendement no 255, présenté par Mme Boutin, est ainsi rédigé :

« Après le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, insérer l'alinéa suivant :

« Le projet de pacte civil de solidarité fait l'objet d'une publication dans un journal d'annonces légales du département et aux portes du tribunal d'instance au moins dix jours avant son enregistrement. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir les amendements nos 70 et 71.

M. Thierry Mariani.

Ces deux amendements tendent aux mêmes fins selon des modalités différentes.

Le premier, qui s'inspire du droit des contrats, prévoit d'assurer la publicité du PACS dans les journaux d'annonces légales, comme on le fait notamment pour la constitution de sociétés.

Le second, qui s'inspire de la législation du mariage, même si je sais que le PACS n'a rien à voir avec le mariage, prévoit l'inscription sur un panneau municipal.

Mais quel que soit le moyen retenu, je répète une fois de plus que, sans publicité, la loi sera inapplicable et qu'il sera impossible, en particulier, de faire jouer la solidarité des dettes.


page précédente page 05590page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin, pour soutenir l'amendement no 255.

Mme Christine Boutin.

L'opposition a la volonté forte d'éviter que ce texte mal ficelé ne cause de trop nombreux contentieux. C'est pourquoi je propose d'organiser la publicité du PACS avant même sa conclusion afin de le rendre opposable aux tiers, qui pourront ainsi faire valoir leurs intérêts avant que la situation juridique ne soit figée.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission les a repoussés.

Mme Christine Boutin.

Comme c'est surprenant !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Rejet également.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

70. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

71. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 255.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 256, ainsi rédigé :

« Après le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, insérer l'alinéa suivant :

« Le père, la mère, et à défaut de père et de mère, les aïeuls et aïeules, les enfants, le conjoint d'un précédent mariage ou le contractant d'un précédent pacte civil de solidarité peuvent former opposition à la conclusion du pacte civil de solidarité par leurs enfants, descendants, parents ou par son précédent conjoint ou contractant. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Voici un amendement important pour la famille, valeur qui nous rassemble tous.

En effet, et c'est encore un vide juridique dont souffre cette proposition de loi, rien n'y a été prévu en matière d'opposition à la conclusion d'un PACS. Or, il est évident que les membres de la famille du contractant, l'ex-époux ou le contractant d'un précédent PACS peuvent avoir un légitime intérêt à s'y opposer. Mon amendement tend à combler cette lacune.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Et du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 256.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 257, ainsi rédigé :

« Après le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, insérer l'alinéa suivant :

« Le ministère public peut former opposition à la conclusion d'un pacte civil de solidarité. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Là encore, il s'agit de combler un vide juridique en autorisant le ministère public à s'opposer à la conclusion d'un PACS. Pourquoi, d'ailleurs, cette proposition de loi ne prévoit-elle rien en matière d'opposition ? Comme je n'attends plus de réponse de Mme la ministre, c'est à M. le rapporteur, un peu plus courtois, que je pose la question. Pouvez-vous me répondre, monsieur le rapporteur ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Mais certainement, chère collègue. Les oppositions ne figurent pas dans le texte, il est vrai, mais le droit des nullités s'appliquera.

Donc, toute personne qui y aura intérêt pourra demander la nullité relative et le procureur pourra demander la nullité absolue lorsque la convention comportera des dispositions contraires à l'ordre public ou aux bonnes moeurs.

C'est la raison pour laquelle la commission a repoussé l'ensemble de ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Quelle incohérence que la vôtre ! Lorsque nous vous avons proposé, au début de la discussion, d'inclure le PACS dans le livre des contrats pour plus de clarté, vous avez persisté à le maintenir dans le code civil. Et maintenant vous invoquez le droit des contrats ! Suivant les questions que l'on vous pose, vous répondez en opportunité, en évoquant soit le cas des hétérosexuels, soit celui des homosexuels ; soit la sexualité, soit l'absence de sexualité; soit le droit des contrats, soit le droit des personnes. Vous trouvez toujours une réponse adaptée que vous picorez dans l'ensemble du corpus juridique, ce qui aboutit naturellement à des incohérences.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 257.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 194, ainsi rédigé :

« Dans le sixième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, substituer aux mots : "L'inscription sur le registre du lieu de résidence", les mots : "La publication de la mention de la déclaration dans un journal départemental d'annonces légales". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Aux termes du sixième alinéa de l'article 515-3, « l'inscription sur le registre du lieu de résidence confère date certaine au pacte civil de solidarité et le rend opposable aux tiers ». L'opposabilité aux tiers impose, d'une part, qu'ils puissent déterminer une date certaine à la convention et, d'autre part, que celle-ci fasse l'objet d'une publication.

Le dispositif proposé par la commission ne répond à mon avis à aucune de ces conditions. L'amendement no 194 a pour objet de combler cette double lacune en imposant la publication de la mention de la déclaration dans un journal départemental d'annonces légales.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Et du Gouvernement ?


page précédente page 05591page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Mme la garde des sceaux.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 194.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 165, ainsi rédigé :

« Compléter le sixième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par les mots : " , après un délai de 15 jours au cours desquels les tiers ont le droit de former opposition à l'enregistrement d'un acte qui serait conclu en violation de l'une des prohibitions énoncées à l'article 515-2 du présent code". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Pas le moindre argument du G ouvernement ou de la commission : toujours des réponses lapidaires !

Mme Christine Boutin.

Il est tard !

M. Jean-Pierre Blazy.

Il est tôt !

M. Bernard Accoyer.

Il est vrai qu'à cinq heures dix du matin la lassitude commence à se faire jour.

M. Jean-Pierre Blazy.

Avec le jour !

M. Bernard Accoyer.

Mais, même quand il n'était pas fatigué, le rapporteur ne nous donnait pas plus de précisions. Peut-être aurai-je plus de chance pour l'amendement no 165.

Afin de nous rassurer, le texte fixe un certain nombre de limites à la conclusion d'un PACS, mais il ne prévoit aucune sanction si elles ne sont pas respectées, aucun moyen, ni en temps ni en personnel, pour que l'on puisse contrôler et valider les déclarations et les pièces produites par les candidats au « pacsage ». Il est préoccupant de voir le peu de cas que le Gouvernement et les instigateurs de cette proposition font de la sécurité juridique de ce nouveau contrat.

M. Bernard Birsinger.

Laborieux, on s'endort !

M. Bernard Accoyer.

Je propose donc d'instituer un délai de quinze jours pendant lequel les tiers pourront former opposition à l'enregistrement d'un pacte qui serait conclu en violation de l'une des prohibitions énoncées à l'article 515-2.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Monsieur Accoyer, c'est parce que je ne suis pas fatigué que je maîtrise totalement les réponses que je veux ou ne veux pas vous faire. Et là, je vais vous en faire une. (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Le droit d'opposition n'est pas prévu, mais la nullité ne se prescrit pas dans un délai de quinze jours. Ce régime est donc beaucoup plus protecteur que celui que vous proposez. Contre l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis, monsieur le président.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 165.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Delnatte a présenté un amendement, no 185, ainsi rédigé :

« Compléter le sixième alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par les mots : ", qui disposent du droit de consulter ce registre". »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour défendre cet amendement.

M. Thierry Mariani.

A cette heure tardive de la nuit ou précoce du jour, je me souviens de cette citation de Lawrence : « Tous les hommes rêvent, mais pas de la même façon. Ceux qui rêvent la nuit dans les recoins poussiéreux de leur esprit s'éveillent au jour pour découvrir que ce n'était que vanité. Mais les rêveurs du jour sont des hommes dangereux, car ils peuvent rêver leurs rêves pour les rendre possibles. »

M. le rapporteur vient de nous permettre de rêver les yeux ouverts, puisqu'à cinq heures du matin il nous a enfin octroyé une réponse. Alors continuons notre rêve éveillé et espérons qu'il acceptera l'amendement de M. Delnatte. Dans la mesure où le PACS est opposable aux tiers, il est normal qu'ils puissent consulter le registre du tribunal d'instance.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 185.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement no 67 est présenté par M. Mariani ; l'amendement no 160 par M. Accoyer.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil. »

Une seule présentation suffira peut-être, monsieur Mariani ?

M. Thierry Mariani.

L'opposition est plurielle, monsieur le président, et je ne me permettrai pas de préjuger des arguments de M. Accoyer.

M. le président.

Vous êtes dans le même groupe.

M. Thierry Mariani.

Et vous dans le même groupe que les chevènementistes et les radicaux, mais vous ne pensez pas forcément la même chose.

Pourquoi envisager la conclusion d'un PACS à l'étranger ? Je pense qu'il convient de réserver ce droit aux personnes vivant en France et je souhaite donc la suppression du dernier alinéa de l'article 515-3, qui autoriserait beaucoup d'abus.

Vous avez raison, monsieur le rapporteur, de rappeler que la signature d'un PACS n'entraîne pas la délivrance d'une carte de séjour au titre de la vie privée et familiale.

Mais, comme le rappelait M. Goasguen, ce sera un élément d'appréciation déterminant pour l'attribution de cette carte. Je suis curieux de savoir comment, dans deux ou trois ans, l'administration appliquera ces dispositions.

En effet, je ne vois pas pourquoi deux personnes qui signent un PACS et déclarent avoir un projet de vie commune se verraient refuser un titre de séjour. Il faut aller au bout de la logique. Et votre texte est d'autant plus dangereux qu'il offre la possibilité de conclure des PACS hors du territoire national.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour défendre l'amendement no 160.


page précédente page 05592page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

M. Bernard Accoyer.

Je voudrais, à mon tour, exprimer ma diversité en faisant valoir que le dernier alinéa de l'article 515-3 ouvre un canal supplémentaire à de nouveaux flux d'immigration clandestine. Compte tenu des nombreux textes, lois, décrets ou circulaires, pris à l'instigation du Gouvernement et de sa majorité, qui ont déjà créé un appel d'air considérable, il serait irresponsable de ne pas supprimer cet alinéa.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé ces amendements identiques.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 67 et 160.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 74, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil, supprimer les mots : "dont l'un au moins est". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Cet alinéa illustre la diversité des dérives programmées par le texte. Je pense sincèrement qu'à l'étranger, il est normal et prudent de réserver la conclusion d'un PACS aux seuls nationaux.

M. Bernard Accoyer.

Oh oui !

M. Thierry Mariani.

Autrement, il suffira de signer un PACS dans un consulat avec un ou une étrangère et d'en tirer ensuite argument pour demander un titre de séjour.

Franchement, comment un consulat pourra-t-il apprécier la nature des relations entre les contractants pour s'opposer à l'attribution d'une carte « vie privée et familiale » ? Il y a là une nouvelle brèche ou plutôt une nouvelle porte qui s'ouvre. Je crois urgent de la refermer.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Et du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

74. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 159, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par la phrase suivante :

« Les agents diplomatiques et consulaires français ne peuvent valablement accepter d'inscrire la déclaration conjointe d'un pacte si le partenaire de nationalité française n'est pas lui-même présent. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement est défendu.

M. le président.

Avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 159.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Delnatte a présenté un amendement, no 184, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par la phrase suivante :

« Les signataires étrangers doivent produire une copie de leur titre de séjour. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir cet amendement.

M. Thierry Mariani.

On me dira que c'est toujours la même idée. Oui : celle qui consiste à essayer de maîtriser les flux migratoires en France. Mais visiblement, là n'est pas votre principale préoccupation.

M. Bernard Accoyer.

Oh que non !

M. Thierry Mariani.

Ce serait plutôt de savoir comment régulariser les quelque 70 000 sans-papiers que vous avez recensés sans les expulser.

En exigeant la production du titre de séjour, cet amendement tend à éviter que la signature d'un PACS ne soit une voie privilégiée de régularisation pour les étrangers entrés et séjournant illégalement sur notre territoire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 184.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi deux amendements nos 258 et 279, présentés par Mme Boutin, pouvant faire l'objet d'une présentation commune.

L'amendement no 258 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par l'alinéa suivant :

« Le pacte civil de solidarité fait l'objet d'une publication dans un journal d'annonces légales du département. »

L'amendement no 279 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil par l'alinéa suivant :

« Le pacte civil de solidarité fait l'objet d'une publication à l'entrée du tribunal d'instance. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Ces deux amendements sont défendus, monsieur le président.

Mais je voudrais faire part à l'Assemblée nationale de ma stupéfaction à la lecture d'un journal du soir, paru hier. On y apprend à propos de Jean-Pierre Galland que

« à moitié dissimulé derrière une touffe verdoyante de feuilles de cannabis, son visage hilare apparaît depuis quelques semaines sur les murs de la capitale et d'une cinquantaine d'autres villes ».

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Cela n'a rien à voir !

Mme Christine Boutin.

Ce monsieur, qui avait été condamné à verser 50 000 francs au Trésor public pour avoir cru intelligent d'envoyer un « joint » à tous les députés français...

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Et alors ?


page précédente page 05593page suivante

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Mme Christine Boutin.

... est soutenu par les Verts et même candidat sur la liste qu'ils présentent aux élections européennes. Voilà qui illustre très précisément l'idée qu'on se fait du respect de la loi du côté de la gauche plurielle.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 258 et 279 ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission les a repoussés, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 258.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 279.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3

PUBLICATION DU RAPPORT D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE

M. le président.

Le 2 juin 1999, j'ai informé l'Assemblée nationale du dépôt du rapport de la commission d'enquête sur certaines pratiques des groupes nationaux et multinationaux industriels, de services et financiers et leurs conséquences sur l'emploi et l'aménagement du territoire.

Je n'ai été saisi, dans le délai prévu à l'article 143, alinéa 3, du règlement, d'aucune demande tendant à la constitution de l'Assemblée en comité secret afin de décider de ne pas publier tout ou partie du rapport.

E n conséquence, celui-ci, imprimé sous le numéro 1667, sera distribué.

4 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

M. le président.

J'ai reçu, le 8 juin 1999, de M. JeanFrançois Mattei, une proposition de résolution tendant à l a création d'une commission d'enquête sur les dysfonctionnements en matière de sécurité alimentaire révélés par l'affaire du poulet à la dioxine.

Cette proposition de résolution, no 1681, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

5 DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président.

J'ai reçu, le 8 juin 1999, de M. JeanClaude Boulard, un rapport, no 1680, fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle.

6 DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président.

J'ai reçu, le 8 juin 1999, de M. Bernard Schreiner, un rapport d'information, no 1678, déposé en application de l'article 29 du règlement, au nom des délégués de l'Assemblée nationale à l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale (UEO), sur l'activité de cette assemblée au cours de sa 44e session ordinaire (mai 1998-décembre 1998).

7

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique : Questions au Gouvernement ; Suite de la discussion, en nouvelle lecture, de la proposition de loi, no 1587, relative au pacte civil de solidarité : M. Jean-Pierre Michel, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 1639) ; M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1674) ; Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, no 1589, renforçant l'efficacité de la procédure pénale : M. Louis Mermaz, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 1607) ; (Procédure d'examen simplifiée.)

Discussion de la proposition de loi, no 1235, de G érard Gouzes, modifiant la loi no 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé : Mme Nicole Feidt, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 1361).

(Procédure d'examen simplifiée.)

Discussion de la proposition de loi organique, no 1494, de Mme Nicole Feidt et plusieurs de ses collègues relative au statut de la magistrature : Mme Nicole Feidt, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 1664).

A vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à cinq heures vingt.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


page précédente page 05594

ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 JUIN 1999

Textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution TRANSMISSION

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale le texte suivant : Communication du 7 juin 1999 No E 1264. Proposition de décision du Conseil et de la commission concernant la conclusion de l'accord de commerce, de développement et de coopération entre la Communauté européenne, d'une part, et la République d'Afrique du Sud, d'autre part. Proposition de décision du Conseil concernant la signature, au nom de la Communauté européenne, de l'accord de c ommerce, de développement et de coopération entre la Communauté européenne et la République d'Afrique du Sud (COM [99] 245 final).

NOTIFICATION D'ADOPTIONS DÉFINITIVES Il résulte d'une lettre de M. le Premier ministre qu'ont été adoptés définitivement par les instances communautaires les textes suivants : Communication du 8 juin 1999 No E 619. - Proposition de décision du Conseil et de la commission relative à la conclusion de l'accord de partenariat et de coopération entre les CE et leurs Etats membres, d'une part, et la Géorgie, d'autre part (décision du Conseil du 28 mai 1999) (COM [96] 135 final).

No E 620. - Proposition de décision du Conseil et de la commission relative à la conclusion de l'accord de partenariat et de coopération entre les CE et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Arménie, d'autre part (décision du Conseil du 28 mai 1999) (COM [96] 136 final).

No E 621. - Proposition de décision du Conseil et de la commission relative à la conclusion de l'accord de partenariat et de coopération entre les CE et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Azerbaïdjan, d'autre part (décision du Conseil du 28 mai 1999) (COM [96] 137 final).

N E 651. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la vente et les garanties des biens de consommation (décision du Conseil du 18 mai 1999) (COM [95] 520 final).

No E 666. - Proposition de décision du Conseil et de la commission relative à la conclusion de l'accord de partenariat et de coopération entre les CE et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Ouzbékistan, d'autre part (décision du Conseil du 28 mai 1999) (COM [96] 254 final).

No E 1052. - Propositions de règlements (CE) du Conseil relatifs à la réforme de la politique agricole commune (décision du Conseil du 18 mai 1999) (COM [98] 158 final).

No E 1193. - Proposition de directive du Conseil modifiant, en ce qui concerne le taux normal, la directive 77/388/CEE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (décision du Conseil du 25 mai 1999) (COM [98] 693 final).

No E 1198. - Proposition de règlement (CE, EURATOM) du Conseil instituant un Office européen d'enquêtes antifraude (décision du Conseil du 25 mai 1999) (COM [98] 717 final).

No E 1219. - Attribution d'une base juridique pour l'intégration de l'acquis de Schengen : décision du Conseil déterminant, conformément aux dispositions pertinentes du traité instituant la Communauté européenne et du traité sur l'Union européenne, la base juridique de chacune des dispositions ou décisions constituant l'acquis de Schengen (décision du Conseil du 20 mai 1999) (6816/4/98, rév. 4, Schengen 11).

No E 1227. - Proposition de décision du Conseil portant conclusion du protocole additionnel à l'accord d'association CEE/Chypre visant à associer la République de Chypre à la réalisation du cinquième programme-cadre de recherche, de développement technologique et de démonstration (1998-2002) (décision du Conseil du 20 mai 1999) (COM [99] 57 final).

No E 1235. - Proposition de règlement (CE) du Conseil relatif à l'application des mesures spécifiques à l'importation de jus et moûts de raisins originaires de Chypre (décision du Conseil du 18 mai 1999) (COM [99] 85 final).

No E 1250 (7417/99 Schengen 26). - Décision du Conseil du ...

relative à la conclusion de l'accord avec la République d'Islande et le Royaume de Norvège sur l'association de ces deux Etats à la mise en oeuvre, à l'application et au développement de l'acquis de Schengen (décision du Conseil du 18 mai 1999) (7417/99 Schengen 26).

No E 1254. - Proposition de règlement (CE) du Conseil concernant l'interdiction des vols entre les territoires de la Communauté européenne et la République fédérale de Yougoslavie et annulant le règlement (CE) no 1901/98 du Conseil (décision du Conseil du 21 mai 1999) (COM [99]).