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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

1. Réduction négociée du temps de travail. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi (p. 7432).

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) (p. 7432)

Article 9 (p. 7432)

Mme Marie-Thérèse Boisseau, M. François Goulard.

Amendements de suppression nos 75 de M. Mariani et 281 d e M. Goulard : MM. François Goulard, André Schneider, Gaëtan Gorce, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. - Rejet.

Amendements identiques nos 76 de M. Mariani, 664 de M. Goulard, 700 de M. Chabert et 844 de M. Morin : M. François Goulard, Mme Marie-Thérèse Boisseau, M. le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

A mendements nos 780 de M. Accoyer et 389 de M. Goulard : MM. André Schneider, François Goulard, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejets.

A mendement no 545 de M. Accoyer : MM. André Schneider, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 485 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 487 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la ministre, M. François Goulard. - Adoption.

Amendements identiques nos 77 de M. Mariani, 390 de M. Goulard et 546 de M. Accoyer : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 883 de M. Morin et amendements identiques nos 78 de M. Mariani, 667, de M. Goulard et 931 d e M. Nicolin : Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. André Schneider, François Goulard, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet de l'amendement no 883 et des amendements identiques.

Amendement no 882 de M. Morin : Mme Marie-Thérèse Boisseau, M. le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendements identiques no s 486 de la commission, 665 de M. Goulard et 701 de M. Chabert : M. le rapporteur,

Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 884 de M. Morin : Mme Marie-Thérèse Boisseau, M. le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 761 de M. Delnatte : MM. André Schneider, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement no 761 rectifié.

Amendement no 885 de M. Morin : Mme Marie-Thérèse Boisseau, M. le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 424 de M. Gremetz : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 548 de M. Accoyer : MM. André Schneider, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 666 de M. Goulard : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 488 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 107 de M. Fuchs : MM. Gérard Fuchs, le rapporteur, Mme la ministre. - Retrait de l'amendement no 107 rectifié ; M. Maxime Gremetz.

Amendement no 668 de M. Goulard : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 489 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 425 de M. Gremetz : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Adoption de l'article 9 modifié.

MM. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles ; le président.

Avant l'article 10 (p. 7439)

Amendement no 426 de M. Gremetz : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 427 de M. Gremetz : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, Mme la ministre, M. François Goulard. - Rejet.

Article 10 (p. 7440)

Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. François Goulard, Maxime Gremetz, Yves Rome, André Schneider, Mme la ministre.

Amendements de suppression nos 282 de M. Goulard, 452 de M. Proriol, 669 de M. Gremetz, 743 de M. Sarre et 845 de M. Gengenwin : MM. Maxime Gremetz, Gérard Lindeperg, Mme la ministre, MM. François Goulard, le rapporteur, Gérard Terrier. - Retrait de l'amendement no 669 ; rejet des amendements nos 282, 452, 743 et 845.

Amendement no 428 de M. Gremetz : M. Maxime Gremetz. - Retrait.

Amendement no 490 rectifié de la commission, avec less ous-amendements nos 1066 et 1067 de M. Terrier : MM. Gérard Lindeperg, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption des sous-amendements nos 1066 et 1067 et de l'amendement no 490 rectifié et modifié.

Les autres amendements à l'article 10 n'ont plus d'objet.

Adoption de l'article 10 modifié.

M. le président de la commission.

Suspension et reprise de la séance (p. 7445)

Après l'article 10 (p. 7445)

L'amendement no 491 de la commission est retiré.

Amendement no 1056 de M. Gremetz : M. le rapporteur, Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. - Adoption.

Amendement no 939 de M. Proriol : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Article 11 (p. 7446)

Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. François Goulard, Georges Sarre, Yves Rome, Yves Cochet, Maxime Gremetz, Mme la ministre.

Amendements de suppression nos 82 de M. Mariani, 148 de Masdeu-Arus, 283 de M. Goulard, 550 de M. Accoyer, 630 de M. Vannson et 729 de M. Doligé : MM. André


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S chneider, François Goulard, le président, Mme la ministre, M. le rapporteur, Mme Marie-Thérèse Boisseau,

M. Maxime Gremetz. - Rejet.

Amendements nos 677 de M. Goulard, 634 de M. Vannson et 149 de M. Masdeu-Arus : MM. François Goulard, le rapporteur, Mmes la ministre, Marie-Thérèse Boisseau. Rejets.

Amendement no 1057 de M. Gremetz : MM. le président de la commission, le rapporteur, Mmes la ministre, Marie-Thérèse Boisseau, MM. François Goulard, Yves Cochet. - Adoption.

Les amendements nos 852 de M. Barrot, 702 de M. Chabert, 855 de Mme Boisseau, 1016 de Mme Catala, 455 de M. Proriol et 851 de M. Barrot n'ont plus d'objet.

Amendement no 87 de M. Mariani : MM. André Schneider, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Mme la ministre, M. le président.

Amendements identiques nos 371 de M. Goulard et 762 de M. Delnatte : MM. François Goulard, le rapporteur,

Mme la ministre. - Rejet.

Amendements nos 850 de Mme Boisseau, 85 de M. Mariani et 684 de M. Goulard : Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejets.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. N omination d'un député en mission temporaire (p. 7459).

3. Ordre du jour des prochaines séances (p. 7460).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures.)

1 RÉDUCTION NÉGOCIÉE DU TEMPS DE TRAVAIL Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail (nos 1786 rectifié, 1826).

Discussion des articles (suite)

M. le président.

Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'article 9.

Article 9

M. le président.

Je donne lecture de l'article 9 : C HAPITRE VI Compte épargne-temps

« Art. 9. - L'article L. 227-1 du code du travail est ainsi modifié :

« I. - Le deuxième alinéa est complété par la phrase suivante :

« Le congé doit être pris avant l'expiration d'une période de cinq ans à compter de la date à laquelle le salarié a accumulé un nombre de jours de congé égal à la durée minimale définie au huitième alinéa du présent article. »

« II. Au quatrième alinéa, après les mots : " de primes conventionnelles " sont ajoutés les mots : " ou indemnités ".

« III. Les sixième et septième alinéas sont ainsi rédigés :

« Peuvent également être affectées au compte épargnetemps du salarié, dans les conditions fixées par la convention ou l'accord collectif, les heures de repos acquises au titre de la bonification prévue aux premier et deuxième alinéas du I de l'article L. 212-5, du repos compensateur de remplacement défini au premier alinéa du III du même article et du repos compensateur fixé par l'article L. 212-5-1 et une partie des jours de repos issus d'une réduction collective de la durée du travail.

« La totalité des jours affectés au compte épargnetemps en application des troisième et sixième alinéas du présent article ne peut excéder vingt-deux jours par an.

Dans les conditions prévues par la convention ou l'accord collectif, l'employeur peut compléter le crédit inscrit au compte épargne-temps. »

« IV. Au huitième alinéa, les mots : " six mois " sont remplacés par les mots : " deux mois " ; le même alinéa est complété par les dispositions suivantes :

« Le compte épargne-temps est également utilisé pour indemniser tout ou partie des heures non travaillées lorsque le salarié choisit de passer à temps partiel dans les conditions définies aux articles L. 122-28-1, L. 122-28-9 et L. 212-4-9. Lorsque le salarié a un enfant âgé de moins de seize ans, la période dans laquelle il doit utiliser ses droits à congé est portée à dix ans. »

« V. - Il est inséré un neuvième alinéa ainsi rédigé :

« Le compte épargne-temps peut être utilisé, notamment dans le cadre des actions de formation prévues aux articles L. 932-1 et L. 932-2, pour rémunérer les temps de formation effectués hors du temps de travail. Il peut également être utilisé par les salariés âgés de plus de c inquante ans désirant cesser leur activité, de manière progressive ou totale sans que la limite fixée au neuvième alinéa leur soit opposable. »

« VI. Au onzième alinéa, après les mots : " accord interprofessionnel " sont ajoutés les mots : " ou une convention ou un accord collectif étendu. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à Mme Marie-Thérère Boisseau.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Monsieur le président, madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, le compte épargne-temps est un dispositif très intéressant instauré, je le rappelle, par le gouvernement Balladur en 1994.

Je répéterai à propos de l'article 9 ce que j'ai dit à propos de tous les autres : souplesse, souplesse, souplesse ! C'est une nécessité si l'on veut que ces dispositions bénéficient aux salariés en place et si l'on veut créer de l'emploi. Je regrette donc une fois encore que le compte épargne-temps soit trop encadré. Il l'est à un double titre.

Premièrement, alors que le droit en vigueur ne prévoit aucune limite dans le temps, le congé devra désormais être pris dans un délai de cinq ans. Je ne vois pas pourquoi.

Certes, des dérogations sont prévues : quand le salarié a un enfant de moins de seize ans - encore faudrait-il préciser par voie d'amendement que cet enfant doit être à charge - et quand le compte épargne-temps est constitué en prévision d'un retrait anticipé d'activité. Ce sont de bonnes dispositions mais elles ne sont pas, à mon avis, suffisantes. Il faut que le salarié puisse disposer de son compte épargne-temps comme il l'entend. Les repos compensateurs et les congés payés, certes nécessaires pour la récupération, pour la santé, pour l'équilibre physique, sont aussi de plus en plus destinés à permettre au salarié de maîtriser l'organisation de sa vie personnelle dans la durée, au-delà de sa vie professionnelle.


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De très nombreux exemples de situations concrètes militent pour un élargissement du compte épargne-temps.

A vingt ou vingt-cinq ans, un jeune doit logiquement vouloir travailler intensément pour se faire sa place dans l'entreprise. Par contre, à partir de trente ans - c'est une vision schématique mais assez réaliste - il peut vouloir lever le pied. Les femmes, notamment, souhaitent utiliser leur compte épargne-temps pour élever leurs enfants audelà du congé parental. J'espère donc que nous reviendrons sur ce délai de cinq ans que je trouve trop étroit, d'autant que l'article 9 enferme, si j'ose dire, dans le même carcan les jours de repos compensateur dus à la réduction du temps de travail et les autres.

Deuxième élément de ridigité : l'épargne-temps ne peut pas excéder deux mois. Je trouve cela regrettable et je souhaiterais que le salarié puisse épargner davantage, ce qui serait d'ailleurs cohérent avec l'allongement du délai.

Je propose donc de porter le plafond à six mois, ce qui correspond à un CDD.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

En préalable, vous me permettrez de dire, monsieur le président, que les conditions dans lesquelles nous examinons ce texte, en siégeant un vendredi contrairement à nos habitudes, tendraient à faire de nous, à la limite, des partisans de la réduction du temps de travail compte tenu de l'accumulation des heures.

(Sourires.)

Sur le compte épargne-temps, Marie-Thérèse Boisseau s'est exprimée fort pertinemment. La souplesse dans l'organisation de sa vie, dans la répartition de son temps sur une perspective longue, est certainement l'avenir.

Il y a, du reste, un thème que nous avons jusqu'à présent assez peu abordé, c'est la contradiction qui existe entre la réduction imposée du temps de travail et la nécessité aujourd'hui très probable d'allonger la durée de la vie active pour équilibrer les retraites. Dans cette perspective, pourquoi ne pas admettre que nous puissions, à certains moments de la vie, travailler davantage et, à d'autres, alléger nos horaires, prendre des vacances plus longues, voire cesser de travailler plus tôt ?

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est bien ce que nous proposons.

M. François Goulard.

C'est vers cette souplesse dans l'organisation de la période de vie active que nous souhait ons aller. Aussi souhaiterions-nous que le compte épargne-temps soit un instrument dont le salarié puisse disposer avec la plus grande liberté possible, en ayant la faculté d'y imputer toute réduction du temps de travail que vous allez imposer par la loi, de sorte que sa vie soit plus agréable, qu'il puisse consacrer beaucoup de temps au travail quand sa situation familiale ou son âge le lui permet et, au contraire, alléger ses contraintes quand sa situation familiale évolue ou qu'il le juge souhaitable.

Bref, c'est à plus de liberté que nous aspirons. Nous pensons que, là encore, vous réglementez excessivement ce qui devrait être un espace de liberté. Nous sommes d'accord sur le principe du compte épargne-temps, mais pourquoi vouloir imposer des règles qui nous paraissent très largement inutiles ?

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 75 et 281.

L'amendement no 75 est présenté par M. Mariani ; l'amendement no 281 est présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 9. »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no 281.

M. François Goulard.

Cet amendement de suppression ne signifie pas, vous l'aurez compris, que nous sommes hostiles au principe du compte épargne-temps. Mais, tel qu'il est rédigé, l'article 9 ne fait pas une place suffisante à la liberté de choix du salarié.

M. le président.

Même argumentation pour l'amendement no 75, monsieur Schneider ?

M. Bernard Schneider.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements identiques.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Avis défavorable.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, pour donner l'avis du Gouvernement.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avis d'autant plus défavorable, monsieur le président, que je partage assez largement l'analyse de Mme Boisseau sur la philosophie et sur l'objectif du compte épargne-temps. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement en a assoupli le dispositif en ramenant la durée minimale de l'épargne-temps qui permet de prendre le congé de six mois à deux mois, ce qui donne une plus grande liberté au salarié. Je tenais à le préciser, madame Boisseau, car je crois que cette disposition a donné lieu à un malentendu. En réalité, nous poursuivons le même objectif et vous n'avez pas de raison de la critiquer.

De la même manière, nous avons souhaité élargir les possibilités de prendre le congé au-delà des cinq ans, notamment lorsque le salarié a des enfants à charge. Je suis d'ailleurs prête à étendre cette dérogation au cas des personnes âgées dépendantes, comme vous le proposez.

J'estime comme vous que le compte épargne-temps est une bonne chose parce qu'il permet une plus grande liberté dans l'utilisation du temps tout au long de la vie.

Il faut donc maintenir l'article 9.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 75 et 281.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 76, 664, 700 et 844.

L'amendement no 76 est présenté par M. Mariani ; l'amendement no 664 est présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier ; l'amendement no 700 est présenté par M. Chabert ; l'amendement no 844 est présenté par M. Morin, Mme Boisseau, MM. Gengenwin, Blessig, Weber et Bur.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le I de l'article 9. »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no 664.

M. François Goulard.

Madame la ministre, nous apprécions naturellement les quelques assouplissements que le texte apporte à la législation en vigueur, mais nous regrettons qu'il introduise, a contrario, des éléments de rigidité supplémentaires. En tout état de cause, dans la mesure où


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vous allez imposer une forte réduction du temps de travail, il nous aurait paru souhaitable d'être beaucoup plus ouvert sur les possibilités d'utilisation du compte épargnetemps par les salariés.

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau, pour soutenir l'amendement no 844.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Madame la ministre, j'ai bien compris vos arguments en ce qui concerne les deux mois et les six mois, mais il reste le délai de cinq ans. Le droit en vigueur autorise le salarié à utiliser le compte épargne-temps tout au long de sa vie active comme il l'entend, et je regrette que le projet de loi rigidifie, encore une fois, une disposition intéressante pour les salariés. Le dépassement du délai de cinq ans n'est prévu que dans deux cas : pour un enfant de moins de seize ans ou en vue d'une cessation progressive d'activité.

Or il y a bien d'autres raisons, dans la vie d'un salarié, qui peuvent lui faire espérer prendre le congé au-delà de cinq ans. C'est pourquoi je demande la suppression du I de l'article 9.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces quatre amendements ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission les a repoussés. Il est en effet nécessaire de limiter la période durant laquelle peut être pris le congé, de façon à éviter que la réduction du temps de travail ne soit contournée et que le nombre de jours de repos accumulés ne soit excessif.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 76, 664, 700 et 844.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

A une très courte majorité !

M. Jean-Louis Debré.

Nous sommes vigilants, monsieur le président.

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 780 et 389, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 780, présenté par MM. Accoyer, Mariani et M. André Schneider, est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du I de l'article 9, substituer aux mots : "de cinq ans", les mots : "définie par la convention ou l'accord ayant prévu la création du compte épargne-temps et qui s'ouvre". »

L'amendement no 389, présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier, est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du I de l'article 9, substituer aux mots : "cinq ans", les mots : "dix ans". »

La parole est à M. André Schneider, pour soutenir l'amendement no 780.

M. André Schneider.

Conformément à la logique qui nous inspire depuis le début de la discussion, nous souhaitons que les partenaires sociaux soient libres de définir dans les conventions ou accords instituant le compte épargne-temps le délai d'utilisation des jours de congé capitalisés et qu'on ne leur impose pas arbitrairement un délai de cinq ans.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no 389.

M. François Goulard.

Je constate que nos collègues de la majorité, qui devraient être enthousiastes à l'idée de progresser dans l'examen de ce texte, ont finalement fait valoir leur droit à la réduction du temps de travail.

(Sourires.)

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ils sont quand même plus nombreux que les députés de l'opposition.

M. François Goulard.

Oui, mais ceux de la majorité devraient être beaucoup plus mobilisés que nous ne le sommes.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Et pourquoi ?

M. François Goulard.

Pour une raison évidente : leur passion pour la réduction du temps de travail. Mais ils préfèrent la pratiquer qu'en discuter.

En ce qui nous concerne, nous continuons à militer pour un assouplissement en proposant un délai de dix ans au lieu de cinq ans.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Défavorable, pour la raison que j'ai déjà exposée.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 780.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 389.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Accoyer, Demange, Hamel, Jacob, Mariani, Muselier et André Schneider ont présenté un amendement, no 545, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa du I de l'article 9 par la phrase suivante : "Si le congé n'est pas utilisé avant cette date, il est liquidé en argent". »

La parole est à M. André Schneider.

M. André Schneider.

Dans la mesure où le législateur fixe une limite de validité au compte épargne-temps, il importe de ne pas laisser penser que, par là même, le salarié pourrait être dépossédé automatiquement du fruit de son travail.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Nous avons préféré renvoyer cette question à la convention. C'est donc la négociation qui la réglera, même si le principe est abordé.

Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis que la commission.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 545.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Gorce, rapporteur, MM. Rome, Terrier et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 485, ainsi rédigé :

« I. - Compléter le dernier alinéa du I de l'article 9 par la phrase suivante :


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« Lorsque le salarié a un enfant âgé de moins de seize ans à l'expiration de ce délai, la période dans laquelle il doit utiliser ses droits à congé est portée à dix ans.

« II. - En conséquence : après le mot "par", rédiger ainsi la fin du premier alinéa : "les deux phrases suivantes". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 485.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 547 de M. Accoyer n'est pas défendu.

M. Gorce, rapporteur, MM. Rome, Terrier et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 487, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa du III de l'article 9, supprimer les mots : "et du repos compensateur fixé par l'article L.

212-5-1". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Cet amendement vise non à limiter les sources d'alimentation du compte épargne-temps, mais à faire en sorte que ne puissent pas l'alimenter les repos compensateurs obligatoires au-delà de la quarante et unième heure, car ils sont justifiés essentiellement par le souci de veiller à la santé du salarié. Ces repos doivent être pris dans un délai beaucoup plus bref que celui qu'autorise le compte épargne-temps.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, contre l'amendement.

M. François Goulard.

Je comprends bien le souci du rapporteur de protéger les salariés. Mais ne peut-on pas, dans ce pays, faire confiance aux gens pour se protéger eux-mêmes et refuser, si tel est leur désir, l'affectation au compte épargne-temps ? En revanche, si le salarié considère qu'il peut travailler un peu plus longtemps sans avoir besoin de repos compensateurs, pourquoi ne pas le laisser profiter de cette souplesse ? C'est un problème de conception des relations entre la loi et les hommes.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Vous oubliez de préciser, monsieur Goulard, que le texte prévoit d'alimenter le compte épargne-temps bien au-delà de ce qui était autorisé par la rédaction antérieure, notamment en utilisant les possibilités offertes pour partie par la réduction du temps de travail et par le repos compensateur accordé en d'autres circonstances, par exemple pour indemniser des heures supplémentaires.

L'amendement de la commission vise le cas très spécifique du repos compensateur exceptionnel accordé audelà de 41 heures de travail. Il paraît logique que ce repos compensateur, qui est vraiment une protection pour la santé du salarié, ne puisse pas être affecté à l'épargne-temps. Pour le reste, j'y insiste, toutes les autres dispositions visent au contraire à élargir les sources d'alimentation du compte.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 487.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 423 de M. Gremetz n'est pas défendu.

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 77, 390 et 546.

L'amendement no 77 est présenté par M. Mariani ; l'amendement no 390 est présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier ; l'amendement no 546 est présenté par MM. Accoyer, Demange, Hamel, Jacob et Muselier.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer la première phrase du dernier alinéa du III de l'article 9. »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Ils sont défendus.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 77, 390 et 546.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de quatre amendements, nos 883, 78, 667 et 931, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 883, présenté par MM. Morin, Gengenwin, Mme Boisseau, MM. Blessig, Bur, Weber et Barrot, est ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du dernier alinéa du III d e l'article 9, substituer aux mots : "vingtdeux jours", les mots : "quarante-cinq jours". »

Les amendements nos 78, 667 et 931 sont identiques.

L'amendement no 78 est présenté par M. Mariani et M. Schneider ; l'amendement no 667 est présenté par M. Goulard et M. Dord ; l'amendement no 931 est présenté par M. Nicolin et M. Forissier.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans la première phrase du dernier alinéa du III de l'article 9, substituer aux mots : "vingt-deux", les mots : "trente-cinq". »

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau, pour soutenir l'amendement no 883.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Dans les vingt-deux jours qui peuvent être versés au compte épargne-temps, on mélange les jours issus de la réduction du temps de travail, les jours de congé et les repos compensateurs.

C'est contraire à l'effet recherché, me semble-t-il.

Au-delà de la liberté du salarié que nous défendons depuis le début, qui est théoriquement adulte et qui doit pouvoir décider lui-même ce qu'il veut faire de ses congés et des repos compensateurs, se pose le problème de l'emploi. Plus on versera de jours au compte épargnetemps, plus les périodes d'absence des salariés en question seront longues et plus l'effet sur l'emploi sera bénéfique.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

Un congé de quinze jours ne contraint pas à un renforcement, tandis qu'un congé sabbatique de longue durée oblige à recruter.

M. le président.

La parole est à M. André Schneider, pour soutenir l'amendement no

78.

M. André Schneider.

L'esprit de l'amendement no 78 est le même que celui de l'amendement précédent, seul change le nombre de jours pouvant être cumulés.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no 667.

M. François Goulard.

L'augmentation du nombre de jours pouvant être versés dans le compte épargne-temps p eut, dans certaines situations, créer des difficultés d'organisation aux entreprises, mais nous pensons que c'est un droit qui doit être reconnu aux salariés.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission a émis un avis défavorable sur ces propositions.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis, monsieur le président.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 883.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 78, 667 et 931.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Morin a présenté un amendement, no 882, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du IV de l'article 9, substituer aux mots : "deux mois", les mots : "une durée minimale de huit jours". »

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau, pour défendre cet amendement.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Pour la énième fois, je souhaite qu'on introduise plus de souplesse dans le mécanisme du compte épargne-temps et je souscris à l'explication que Mme la ministre a donnée tout à l'heure.

Le salarié doit pouvoir disposer comme il l'entend de ses droits à congé, y compris pour indemniser des congés sans solde sur une courte période, en accord bien sûr avec le chef d'entreprise.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Je relève une contradiction dans les propositions successives qui nous sont faites. Alors que l'on nous demandait tout à l'heure d'accroître le nombre de jours susceptibles d'alimenter le compte épargne-temps, on propose maintenant de réduire la durée des congés qui pourraient être pris dans ce cadre, mesure qui ne serait pas favorable à l'emploi.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

L'un n'empêche pas l'autre !

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Il faut concilier la souplesse du CET avec une bonne gestion des effectifs de l'entreprise et la recherche d'un effet sur l'emploi.

La commission a donc émis un avis défavorable sur l'amendement no 882.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis que la commission. Il ne faut pas confondre les choses. Nous avons voté hier soir, à l'initiative du groupe Radical, Citoyen et Vert, un amendement qui permet de reporter, d'une année sur l'autre notamment, les congés de faible durée, de huit jours par exemple.

Nous souhaitons en revanche conserver la possibilité d u report du compte épargne-temps pour des circonstances plus exceptionnelles : pour se former, pour élever des enfants, et éventuellement pour s'occuper de parents âgés. En ramenant la limite à huit jours, nous détournerions de son objet le compte épargne-temps.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 882.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 486, 665 et 701.

L'amendement no 486 est présenté par M. Gorce, rapporteur, MM. Rome, Terrier et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement no 665 est présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier ; l'amendement no 701 est présenté par M. Chabert.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer la dernière phrase du dernier alinéa du IV de l'article 9. »

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement no 486.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

L'amendement no 486 est la conséquence de l'amendement no 485 que nous avons adopté précédemment.

M. le président.

Il en est de même pour les deux suivants ?...

M. François Goulard.

Tout à fait.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 486, 665 et 701.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président.

M. Morin a présenté un amendement, no 884, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du IV de l'article 9, après les mots : "seize ans", insérer les mots : "à charge". »

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau, pour défendre cet amendement.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Il me paraît important de préciser, pour sécuriser le dispositif, que l'enfant de seize ans est bien à la charge de la personne qui veut bénéficier du compte épargne-temps.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 884.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Delnatte et M. Schneider ont présenté un amendement, no 761, ainsi rédigé :


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du IV de l'article 9, après les mots : "seize ans", insérer les mots : "et lorsque l'un des parents du salarié est dépendant ou âgé de plus de soixante-dix ans". »

La parole est à M. André Schneider, pour défendre cet amendement.

M. André Schneider.

La durée de validité des congés capitalisés sur le compte épargne-temps peut être portée à dix ans lorsque son titulaire a un enfant âgé de moins de seize ans. L'amendement propose d'élargir ce bénéfice aux salariés dont l'un des parents est dépendant ou âgé de plus de soixante-dix ans.

A l'heure où l'espérance de vie de nos concitoyens ne cesse de progresser, il serait en effet opportun que le compte épargne-temps soit mis au service des solidarités familiales destinées à se développer.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission a repoussé l'amendement, mais elle n'est pas défavorable au principe. Elle est prête à engager la discussion sur ce point.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je ne suis pas défavorable au principe. Je voudrais simplement faire remarquer à M. Schneider que nous avons déjà allongé la période d'utilisation de ce congé pour les parents qui ont des enfants à charge. Si l'on fait de même pour les personnes dont les parents ont plus de soixantedix ans, cela revient à accorder cette possibilité à presque tout le monde. Je ne suis pas sûre que le parent âgé de plus de soixante-dix ans constitue aujourd'hui un critère déterminant. En revanche, je suis d'accord pour les personnes dépendantes, qui en effet nécessitent une prise en charge. Je vous propose donc de vous en tenir à ce cas.

M. le président.

Monsieur Schneider, cette proposition vous semble-t-elle bonne ?

M. André Schneider.

Madame la ministre, si j'ai bien c ompris, vous acceptez la première partie de l'amendement et vous ouvrez la discussion pour la seconde partie ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

En effet.

M. le président.

Vous acceptez cette modification, monsieur Schneider ?

M. André Schneider.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 761 compte tenu de la suppression des mots : « ou âgé de plus de soixante-dix ans ».

(L'amendement, ainsi rectifié, est adopté.)

M. le président.

Quelle unanimité !

M. Jean-Louis Debré.

Quelle ouverture d'esprit !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous avez bien fait de venir !

M. le président.

MM. Morin, Gengenwin, Bur, Blessig, Mme Boisseau, MM. Weber et Barrot ont présenté un amendement, no 885, ainsi rédigé :

« Compléter le IV de l'article 9 par l'alinéa suivant :

« Dans les conditions prévues par la convention ou l'accord collectif, et avec l'accord de l'employeur, la consommation de ces droits à congé peut se faire sur une période fractionnée ».

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Nous proposons que le compte épargne-temps fonctionne sur le mode d'un c ompte épargne classique : le salarié doit pouvoir capitaliser du temps et en disposer, sous certaines conditions - les plus souples possible -, à sa convenance.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 885.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Gremetz, Outin, Dutin, Patrick Leroy, Malavieille, Mme Jacquaint et les membres du g roupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 424, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le dernier alinéa du V de l'article 9 :

« Le compte épargne-temps peut être utilisé par les salariés âgés de plus de cinquante ans désirant cesser leur activité, de manière progressive ou totale sans que la limite fixée au 9e alinéa leur soit opposable ».

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

L'amendement no 424 propose d'exclure l'utilisation du compte épargne-temps pour la formation professionnelle, qui doit rester dans le cadre du temps de travail. Il me semble que c'est une amélioration sensible.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission a émis un avis défavorable. Nous comprenons la préoccupation de M. Gremetz, qui est d'éviter la confusion entre temps de formation et temps de travail - cette question sera d'ailleurs abordée à l'article 10 -, mais il nous semble souhaitable de favoriser les actions de formation dans des conditions fixées par les partenaires sociaux. Vous savez que la question du co-investissement renvoie à un accord national interprofessionnel. Il faut laisser cette porte ouverte.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 424.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Accoyer, Mariani et Schneider ont présenté un amendement, no 548, ainsi rédigé :

« Après la première phrase du dernier alinéa du V de l'article 9, insérer la phrase suivante : "Dans cette h ypothèse, le compte épargne-temps peut être crédité au-delà de vingt-deux jours". »

La parole est à M. André Schneider.

M. André Schneider.

La qualité des formations qui seront mises en oeuvre dans le cadre des comptes épargnetemps risque de ne pas être compatible avec la limite de vingt-deux jours. Nous proposons donc d'allonger cette durée.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 548.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier ont présenté un amendement, no 666, ainsi rédigé :

« Après le mot : "totale", supprimer la fin de la d ernière phrase du dernier alinéa du V de l'article 9. »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 666.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Gorce, rapporteur, MM. Rome, Terrier et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 488, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du V de l'article 9, substituer au mot : "neuvième", le mot : "deuxième". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 488.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 79 de M. Mariani n'est pas défendu.

M. Fuchs a présenté un amendement, no 107, ainsi rédigé :

« Après le V de l'article 9, insérer le paragraphe suivant :

« V bis. - Il est inséré, après le dixième alinéa de l'article L.

227-1 du code du travail, l'alinéa suivant :

« Pour les entreprises dont l'activité ou le type de p roduction suit un rythme de fluctuation pluriannuel, une convention, un accord collectif de b ranche étendu ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir les conditions dans lesquelles une alimentation collective en jours et une utilisation collective de ces jours épargnés peut être organisée. Dans ce cas, l'accord prévoit un nombre m aximal de jours de repos susceptibles d'être épargnés, les modalités de leur prise collective ou de report sur le compte épargne-temps individuel et les modalités d'information du salarié. »

La parole est à M. Gérard Fuchs.

M. Gérard Fuchs.

L'amendement no 107 a pour but d'introduire une notion de pluriannualité dans la gestion collective du compte épargne-temps. Il reprend une p roposition faite l'année dernière par la mission d'information sur l'industrie automobile, dont j'avais été le rapporteur. Mais il peut concerner, outre le secteur de l'automobile, d'autres secteurs d'activité à caractère cyclique.

La commission des affaires sociales l'a rejeté parce que, dans sa rédaction actuelle, il paraissait pouvoir ouvrir la voie à un transfert massif de jours de repos sur plusieurs années, ce qui désorganiserait le travail. Mon intention n'était évidemment pas d'aller aussi loin.

Voilà pourquoi, je propose à notre assemblée d'ajouter dans la dernière phrase de l'amendement les mots « d'une année sur l'autre ».

Cette phrase se lirait ainsi : « Dans ce cas, l'accord p révoit un nombre maximal de jours de repos susceptibles d'être épargnés d'une année sur l'autre, les modalités de leur prise collective ou de report sur le c ompte épargne-temps individuel et les modalités d'information du salarié ». Ainsi il serait clair que la possibilité est ouverte d'un report d'une année sur l'autre et pas sur cinq ou six ans, ce qui conduirait évidemment à des excès que je ne souhaite pas.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 107 ainsi rectifié ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Le dispositif proposé est relativement novateur, il mérite donc attention, mais je ne suis pas sûr qu'il puisse être adopté dans le cadre du compte épargne-temps qui est d'abord un mécanisme individuel reposant sur le libre choix du salarié. C'est pourquoi la commission a repoussé l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Comme vient de le rappeler M. le rapporteur, il s'agit d'un mécanisme volontaire et individuel. Nous savons toutefois que certaines entreprises veulent mettre en place une forme de mutualisation des jours non travaillés, affectés à titre collectif sur le compte mais aussi utilisés en dehors du cadre annuel en cas de surcroît d'activité.

Même dans ce cas, la rédaction de l'amendement, en permettant de cumuler d'une année sur l'autre les temps collectifs apportés aux comptes épargne-temps, est trop extensive. Des accords ont pu être signés mais il ne faudrait pas que nous aboutissions à une flexibilité pluriannuelle - ce n'est d'ailleurs pas, je crois, le souhait de l'auteur de l'amendement. Je vous propose donc d'étudier la question d'ici à la seconde lecture. En attendant, l'avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Gérard Fuchs.

M. Gérard Fuchs.

Dans la mesure où, malgré son avis défavorable, le Gouvernement s'engage à examiner les ujet d'ici à la deuxième lecture, je retire mon amendement.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Je suis absolument opposé à une telle utilisation du compte épargne-temps. Celle-ci, qui a déjà été élargie, ainsi que l'indiquait le rapporteur, doit être laissée au libre choix du salarié. Si on autorise le report d'une année sur l'autre du compte épargne-temps, certaines personnes ne prendront jamais leurs congés.

Cela ne favoriserait pas du tout la création d'emplois.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

M. le président.

Vous avez été entendu puisque l'amendement no 107 rectifié est retiré.

MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier ont présenté un amendement, no 668, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le VI de l'article 9 :

« VI. - Au dixième alinéa, les mots : "les modalités de conversion en temps des primes et indemnités" sont remplacés par les mots : "les modalités de valorisation en temps ou en argent des éléments affectés au compte". »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Des salariés peuvent préférer une hausse derevenu à une augmentation du temps libre.

Notre amendement leur en donne la possibilité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission a rejeté ce dispositif qui va vraiment à l'encontre de ce que nous souhaitons développer au travers du CET.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis. Les propos qui viennent d'être tenus sont totalement contraires à ceux que Mme Boisseau avait, à juste titre, prononcés en début de séance.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 668.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Gorce, rapporteur, MM. Rome, Terrier et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 489, ainsi rédigé :

« Au début du VI de l'article 9, substituer au mot : "onzième" le mot : "dixième". »

Il s'agit d'une mise à jour des alinéas.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 489.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

MM. Gremetz, Outin, Dutin, Patrick Leroy, Malavieille, Mme Jacquaint et les membres du g roupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 425, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 9 par le paragraphe suivant :

« VII. - Après le douzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le compte épargne-temps ne peut être alimenté lorsqu'il existe des salariés privés d'emplois dans les catégories professionnelles concernées. En cas de méconnaissance de cette disposition, il est abondé, par l'employeur, d'un nombre d'heures égal à 50 % des heures affectées à ce compte. »

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Si nous sommes tous concernés par la question de l'emploi, le chômage n'affecte pas toutes les professions dans les mêmes proportions. Il convient de prendre en compte cette réalité. Aussi, dans notre souci constant de ne pas desservir de quelque manière que ce soit l'objectif de création d'emplois, nous entendons ne pas permettre que le compte d'épargnetemps puisse être alimenté lorsqu'il existe des salariés p rivés d'emploi dans les catégories professionnelles concernées. Afin d'assurer le nécessaire et juste respect d'une telle mesure, nous suggérons de l'assortir d'une majoration de 50 % par heure illégalement affectée à ce compte.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission a rejeté l'amendement no 425. Nous sommes sur deux niveaux de préoccupation différents : d'un côté, la préoccupation de l'emploi qui a été exprimée par M. Gremetz, de l'autre, le CET qui vise à organiser la prise de repos sur plusieurs années et qui n'a pas d'incidence directe, en tout cas défavorable, sur l'emploi, sauf si, comme on nous l'a proposé, cela se faisait dans des conditions mal maîtrisées.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 425.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 9, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 9, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des a ffaires culturelles, familiales et sociales.

Monsieur le p résident, je demanderai une suspension de séance lorsque l'Assemblée en aura terminé avec l'article 10. En effet, je voudrais réunir la commission au titre de l'article 88 pour étudier des amendements sur les articles 11 et suivants.

M. le président.

Je prends note de votre demande.

Avant l'article 10

M. le président.

Je donne lecture de l'intitulé du chapitre VII : « Chapitre VII. - Formation et réduction du temps de travail. »

M

M. Gremetz, Outin, Dutin, Patrick Leroy, Malavieille, Mme Jacquaint et les membres du groupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 426, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'intitulé du chapitre VII : "Sécurité emploi-formation". »

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Nous souhaitons modifier l'intitulé du chapitre parce que nous voudrions qu'il comporte d'autres dispositions.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement. Le titre proposé n'a pas un rapport direct avec l'objet du chapitre.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 426.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

M. le président.

MM. Gremetz, Outin, Dutin, Patrick Leroy, Malavieille, Mme Jacquaint et les membres du g roupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 427, ainsi rédigé :

« Avant l'article 10, insérer l'article suivant :

« Au plus tard le 1er janvier 2001 le Gouvernement présentera au Parlement un projet de loi de programmation destiné à garantir la sécurité de l'emploi et de la formation pour tous.

« Ce projet de loi sera bâti à partir de la réalité du sous-emploi, de sa diversité selon les qualifications et les niveaux d'instruction, des perspectives et objectifs économiques et sociaux de la nation, des besoins des entreprises.

« Il proposera la sécurité de l'emploi et de la formation comme priorité nationale y compris en ce q ui concerne son financement et comportera notamment :

« une nouvelle étape de réduction du temps de travail ;

« un plan national de formation professionnelle tendant à élever le niveau général de qualification et répondant aux besoins de la production des biens et des services ;

« une garantie de ressources pour tous ceux qui s'inscrivent dans une démarche de formation et d'emploi. »

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Comme nous avons de la suite dans les idées, nous proposons, par cet amendement, de garantir la sécurité de l'emploi et de la formation, qu'il s'agisse de la formation professionnelle et de la formation continue. Ce sont là en effet deux défis majeurs à relever par notre société.

Nous essayons ainsi de répondre à cette grande préoccupation nationale exprimée par le Gouvernement et par la majorité plurielle, sans pour autant remettre en cause le projet de loi de Nicole Péry sur la formation professionnelle. Il s'agit essentiellement de proposer un programme d'action immédiat pour remédier à la pénurie d e personnels qualifiés dans certaines branches de l'industrie et dans les services.

De toute façon, notre proposition a de l'avenir. Même si nous ne décidons rien aujourd'hui, il faudra le faire très prochainement.

M. François Goulard.

Vous partez battu !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Pour les motifs que j'ai déjà indiqués, et sans entrer dans le fond du débat, la commission a repoussé cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Je m'étonne qu'un amendement d e cette importance, qui constitue, en fait, une déclaration forte traçant les grandes lignes de la politique de l'emploi et de la formation de la majorité, sujets on ne peut plus sérieux, soit examiné aussi succinctement, à peine soutenu par son auteur et repoussé sans discussion par la commission et le Gouvernement, alors qu'il devrait être au centre du débat. Vous enfoncez le coin !

M. le président.

Etes-vous bûcheron de votre état, m onsieur Goulard, pour enfoncer ainsi le coin ? (Sourires.)

M. Jean-Louis Debré.

Le Parti communiste se couche ! C'est la vérité qui fait mal.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 427.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 10

M. le président.

« Art. 10. - I. - Au chapitre II du titre III du livre IX du code du travail, l'article L. 932-2 devient l'article L. 932-3 et l'article L. 932-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 932-2 . - Une convention de branche ou un accord professionnel étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement définissant les modalités d'une réduction de la durée du travail ou un avenant à cette convention ou à cet accord peut prévoir les conditions dans lesquelles, après accord du salarié, des actions de formation peuvent être organisées pour partie sur le temps de travail et pour partie en dehors du temps de travail.

« Ces actions de formation, définies par la conventiono u l'accord, ne peuvent être destinées à adapter, entretenir ou actualiser les compétences requises par les activités exercées par le salarié et doivent avoir pour objet le développement professionnel ou personnel du salarié.

« Les dépenses de fonctionnement des actions ainsi effectuées, ainsi que les dépenses liées à la rémunératio n des heures de formation pour la partie réalisée sur le temps de travail effectif, tel que défini à l'article L. 212-4, sont supportées par l'entreprise dans le cadre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle prévue aux articles L. 950-1 et suivants.

« Pendant la durée de ces formations, le salarié bénéficie de la législation de la sécurité sociale relative à la protection en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles. »

« II. Au deuxième alinéa de l'article L. 933-3 du même code, les mots : " à l'article L. 933-2 " sont remplacés par les mots : " aux articles L. 932-1, L. 932-2 et L. 933-2. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Un quart des accords signés traite de formation, ce qui témoigne du souci justifié des entreprises et des salariés en la matière. On ne p eut donc qu'être favorable à des investissements communs dans ce domaine afin que les salariés puissent utiliser quelques-unes des journées de liberté obtenues grâce à la réduction du temps de travail pour se former, mais sous certaines conditions.

En effet, dans le cadre de l'utilisation des heures l ibérées, doivent être définies plus strictement, notamment en ce qui concerne les finalités de la formation, les contreparties à consentir par l'employeur et notamment le pourcentage maximal de co-investissement.

I l est aussi indispensable d'affirmer clairement la possibilité d'utiliser ce dispositif dans le cadre d'une décision unilatérale de l'employeur.

Je veux ensuite appeler l'attention sur le fait que ces f ormations doivent déboucher sur la délivrance de diplômes. Notre société aura de plus en plus besoin de salariés qualifiés. En effet, l'une de mes inquiétudes est de


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voir la réduction du temps de travail, marginaliser un peu plus les salariés non qualifiés au nom de la volonté de réaliser des gains de productivité à tout crin.

I l convient donc non seulement d'espérer, mais d'exiger et de faire en sorte que le co-investissement en m atière de formation débouche sur des formations qualifiantes et sur des diplômes.

Par ailleurs, il faudrait préciser comment et par qui est financée la formation suivie en dehors du temps de travail. Fera-t-on appel à la contribution de l'entreprise pour la formation ou le capital temps-formation auquel le salarié a droit ? Enfin, il existe un problème au niveau des formations par alternance pour lesquelles le capital de formation dans l'entreprise doit être de plus de 800 heures par an, à mitemps. Cela dépasse donc les fameuses 1 600 heures que je considère d'ailleurs comme une mauvaise référence.

Que se passera-t-il alors ? A quel niveau seront opérés les aménagements nécessaires ? Au ministère de l'emploi ou à celui de l'Education nationale ?

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

L'article 10 est un de ces articles que l'on pourrait qualifier de correctifs. Je veux dire par là que la réduction imposée du temps de travail à 35 heures entraîne certaines conséquences négatives. Ce deuxième projet de loi sur le sujet tente donc de corriger les effets pervers de la réduction du temps de travail.

Tel est le cas, en l'occurrence, lorsque des temps de formation précédemment comptabilisés sur le temps de travail seront désormais comptabilisés en dehors parce q ue les entreprises chercheront - cela est assez compréhensible - à limiter l'impact du passage aux 35 heures. Pour tenter de lutter contre cette conséquence incontestablement négative, le projet de loi nous propose une définition de la formation à comptabiliser sur le temps de travail ; a contrario celle n'entrant pas dans ce cadre, ne le sera pas obligatoirement.

Une telle distinction me semble illusoire. Elle sera pour le moins difficile à faire respecter dans les entreprises, compte tenu de la variété des situations. En fait, ce texte tente de réglementer une réalité qui lui échappera très largement.

Pour autant, nous ne nions absolument pas qu'il soit fort utile que les entreprises se préoccupent de la formation de leurs salariés. Tel est d'ailleurs fréquemment le cas dans notre pays, les entreprises allant souvent très au-delà des obligations imposées par la loi. Je profite d'ailleurs de la présence de Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle pour souligner qu'il est temps de procéder à un dépoussiérage sérieux tant elle est inadaptée aux réalités d'aujourd'hui. Je crois savoir que le Gouvernement y travaille.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Tout en formulant quelqueso bservations je défendrai les amendements que j'ai déposés sur cet article.

Chacun aura sans doute relevé que nous avons déposé avec les Verts et avec les députés du Mouvement des citoyens un amendement de suppression. Cela n'est évidemment pas motivé pour le fait que nous sous-e stimerions la nécessité d'une formation allongée, approfondie, modifiée, modernisée ! Nous estimons au contraire que la formation mérite mieux.

Face au double défi que nous imposent le problème de l'emploi et le développement incessant de nouvelles technologies, un formidable effort de formation est indispensable, qu'il s'agisse de sa durée ou de sa qualité.

En la matière, la loi de 1971 a constitué un progrès i ncontestable. Néanmoins, les mutations et les transformations intervenues dans notre société imposent pour le moins une mise à jour. En fait, il faut élaborer une loi fondamentale sur la formation professionnelle et la formation continue tout au long de la vie.

Nous préférerions donc que l'on ne traite pas de ce sujet par le petit bout de la lorgnette comme on le fait dans cet article. Il vaudrait mieux que l'Assemblée nationale soit rapidement appelée à examiner le projet de loi annoncé par Nicole Péry afin de traiter au fond de cette question essentielle, dans toutes ses dimensions.

M. le président.

Monsieur Gremetz, j'ai pris acte du fait que vous aviez défendu vos amendements sur l'article.

La parole est à M. Yves Rome.

M. Yves Rome.

L'accélération du mouvement d'innovation et de progrès entraîne un changement des instruments de travail à un rythme rapide : tous les trois ou quatre ans anviron. Il suffit, pour s'en convaincre, d 'observer l'obsolescence accélérée des ordinateurs.

Chacun aura à connaître plusieurs générations de matériel p endant sa vie professionnelle. Ces bouleversements modifient complètement les conditions de travail. La formation continue et l'adaptabilité deviennent donc indispensables.

Tous les accords récemment intervenus au sein des grands groupes prévoient une nouvelle organisation de la formation associée à la réduction du temps de travail. Les signataires sont amenés à réfléchir sur les responsabilités respectives du salarié et de l'employeur dans l'acte de formation. Les formules de co-investissement tendent à se développer.

Le présent projet ne pouvait pas passer sous silence la formation professionnelle. Avec les nouvelles technologies, la réorganisation des entreprises à la suite de la réduction du temps de travail et le temps libéré donnent l'occasion d'une modernisation et d'un développement de la formation.

L'article 10 insère un nouvel article L. 932-2 dans le code du travail dont le but est d'encourager, dans la droite ligne des accords de réduction du temps de travail conclus, le développement du co-investissement tout en l'encadrant. L'objectif est que la réduction du temps de travail ne soit pas remise en cause en décomptant la formation du temps de travail effectif. Les dispositifs de co-investissement seront donc mis en place par voie d'accord à tous les niveaux de négociation.

Les actions de formation concernées ne peuvent être liées au poste occupé par le salarié. En revanche, ce type de formation favorise « le développement personnel et professionnel du salarié ». Ces termes ne sont pas assez précis et risquent d'élargir la possibilité d'utiliser le coinvestissement. Cette situation pourrait profiter aux chefs d'entreprise qui se dégageraient ainsi d'une obligation contractuelle. La réduction du temps de travail serait également contournée.

La rédaction proposée de l'article 10 pouvant conduire à des interprétations peu souhaitables, la commission a adopté un amendement qui améliore le texte. Celui-ci distingue explicitement les formations relevant du devoir d'adaptation et le développement des compétences du salarié. Il consacre le devoir jurisprudentiel d'adaptation


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du salarié à l'évolution de son emploi, devoir qui incombe à tout employeur, la formation en découlant constituant un temps de travail effectif.

Le développement des compétences des salariés, quant à lui, peut faire l'objet de certaines souplesses. Sous réserve d'un accord de branche ou d'entreprise, la formation peut être organisée en partie hors du temps de travail, après accord écrit du salarié.

L'amendement, en clarifiant l'article 10, apporte ainsi des garanties supplémentaires aux salariés.

M. le président.

La parole est à M. André Schneider.

M. André Schneider.

Nous partageons évidemment les préoccupations exprimées sur la nécessité de la formation continue permanente. Nous savons tous que chaque salarié débutant aujourd'hui dans la vie professionnelle sera amené à se recycler et à se perfectionner.

Je pense également que nous devrions reprendre de fond en comble la loi du 16 juillet 1971 pour l'adapter.

Mais l'article 10 tel qu'il nous est proposé laisse trop de zones d'ombre.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je v eux simplement réexpliquer pourquoi, alors que

M me Péry prépare une loi sur la formation professionnelle qui mettra celle de 1971 à la hauteur des enjeux du XXIe siècle - en espérant que nous pourrons nous appuyer sur une négociation interprofessionnelle -, il nous est apparu souhaitable de saisir cette opportunité historique que constitue la réduction de la durée du travail pour continuer à développer la formation et surtout pour éviter qu'elle ne soit affectée par cette réduction de la durée du travail - ce qui serait très certainement un recul - alors que 40 % de la maind'oeuvre française ne détient aucun diplôme à caractère professionnel et où d'importantes disparités demeurent dans l'accès à la formation.

Les dispositifs existant, qu'il s'agisse du plan de formation, du congé individuel de formation ou d'un c apital temps, n'apportent pas toujours de réponse adéquate au souhait des salariés de se former.

Par ailleurs, un quart des accords sur la réduction du temps de travail signés à ce jour, notamment dans les entreprises, ont traité du problème de la formation, parfois en recourant à des clauses novatrices. Nouss ommes évidemment opposés à des accords quir etireraient du temps de formation des formations d'adaptation au poste de travail, car il ne saurait s'agir de cela. A cet égard, je peux rassurer M. Gremetz.

Dans la majorité des cas, ces accords visent à favoriser les formations suivies en partie sur le temps libéré et dont le but est l'accroissement des compétences du salarié ou son développement personnel.

I l ressort d'ailleurs d'un sondage réalisé par les organismes de formation et publie il y a quelques jours que plus de quatre salariés sur dix ont déjà suivi une formation en dehors de leur temps de travail. Une grande majorité - 56 % - se déclarent d'ailleurs favorables à la mise en place de formations qui seraient dispensées, au moins partiellement, hors du temps de travail.

Nous ne souhaitons évidement pas que toute la formation professionnelle se passe hors du temps de travail. C'est pourquoi nous proposons un cadre strict.

Tel est également l'esprit de la nouvelle rédaction de l'article 10 proposée par l'amendement de M. Lindeperg qu'a adopté la commission.

Le principe est que l'employeur doit adapter le salarié à l'emploi. Bien évidemment, il ne s'agit pas simplement de l'adaptation au poste de travail, mais aussi à l'évolution du métier et aux nouvelles technologies. Une telle formation doit donc être prise sur le temps de travail.

Mais nous devons aussi développer des formations nouvelles dans les accords d'entreprise. Il faut donc, pour accepter, comme cela a été le cas dans un certain nombre d'accords, qu'une partie de la formation se fasse en dehors du temps de travail, qu'il ne s'agisse pas d'une formation d'adaptation au poste de travail et qu'il y ait u n accord écrit du salarié. C'est une innovation.

Aujourd'hui, lorsqu'un salarié demande une formation personnelle qui n'a pas le lien direct avec son emploi, l'employeur ne peut pas le financer. Nous rendons possible - et je réponds par là-même aux questions qui m'ont été posées tout à l'heure - le financement de ces formations par l'employeur. Nous mettons en place un encadrement de la possibilité de prendre une partie de la formation hors du temps de travail : un salarié ne pourra le faire que dans des cas très précis, et s'il en fait la demande expresse. Dans ces conditions, l'employeur pourra financer les formations personnelles que souhaite le salarié, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Nous ne touchons pas au dispositif général de la formation professionnelle. M. Gremetz a eu raison de dire qu'il ne faut pas prendre les choses par le petit bout de la lorgnette. J'emploierai pour ma part une autre expression : il ne faut pas émietter la réflexion large que mène actuellement Nicole Péry.

De nombreux accords, par branche et avec des régions, sont en voie de négociation sur le droit à la formation tout au long de la vie. Le Gouvernement, sous l'égide de Nicole Péry, souhaite faire une intervention législative sur l'apprentissage et la validation des acquis dès l'an 2000, puisque les textes sont prêts, et présenter un projet de loi sur la formation professionnelle en 2001. Nous espérons pour ce faire pouvoir nous appuyer sur une négociation interprofessionnelle. D'où le mouvement que Nicole Péry essaie d'impulser chez les partenaires sociaux. En tout état de cause, le Gouvernement prendra ses responsabilités.

Telles sont les précisions que je souhaitais donner avant l'examen de cet article. Nous nous conformons, me semble-t-il, à ce que nous avons souhaité, c'est-à-dire nous cadrer par rapport aux accords d'entreprise, dans la logique qui reste la nôtre : la formation professionnelle s'effectuera toujours sur le temps de travail mais des formations plus ouvertes, financées par l'employeur avec l'accord du salarié, peuvent être en partie prises en dehors du temps de travail.

M. le président.

La discussion sur l'article aura permis, j e pense, d'informer l'Assemblée sur les cinq amendements identiques, nos 282, 452, 669, 753 et 845.

L'amendement no 282 est présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier ; l'amendement no 452 est p résenté par M. Proriol et M. Gérard Voisin ; l'amendement no 669 est présenté par MM. Gremetz, Cochet et les membres du groupe communiste et apparentés, M. Aschieri, Mme Aubert, MM. Hascoët, Mamère, Marchand, Sarre et Mme Marin-Moskovitz ; l'amendement no 743 est présenté par M. Sarre, Mme Marin-Moskovitz, MM. Desallangre, Carraz, JeanP ierre Michel, Carassus, Suchod et Saumade ; l'amendement no 845 est présenté par MM. Gengenwin, Weber et Blessig.

Ces amendements sont ainsi rédigés : Supprimer l'article 10.


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M. Gremetz a défendu son amendement de suppression dans son intervention sur l'article mais il souhaite ajouter quelques mots.

M. Maxime Gremetz.

J'ai bien entendu Mme la m inistre confirmer qu'il s'agit bien d'encadrer une disposition mais il n'apparaît pas clairement à la lecture de l'article ni à celle de l'amendement adopté par la commission que le financement de la formation est à la charge de l'employeur.

Si nous sommes bien d'accord sur le fait qu'il n'est pas question de traiter dans l'article 10 la question de la formation, laquelle nécessite, comme tout le monde l'a reconnu, un grand débat et des dispositions de grande ampleur pour placer cet enjeu de société, de civilisation, au niveau où il se pose aujourd'hui ; si, de plus, il est a pporté la précision qu'il s'agit de prendre en considération les demandes présentées par écrit des salariés d'avoir une formation personnelle financée par l'employeur ; si, enfin, Mme Péry et le Gouvernement s'engagent à nous présenter un projet de loi sur la formation professionnelle, je proposerais, en accord avec m on ami Cochet puisque nous avons déposé un a mendement commun, de retirer l'amendement de suppression de l'article.

M. Gérard Lindeperg.

Monsieur le président, la précision demandée par M. Gremetz étant liée à la fois à l'article et à l'amendement adopté par la commission, puis-je d'ores et déjà soutenir ce dernier ?

M. le président.

Dans la mesure où M. Gremetz subordonne le retrait de son amendement de suppression à cette précision, cela me paraît bon, monsieur Lindeperg. Vous avez la parole.

M. Gérard Lindeperg.

Il ressort du débat qui vient d'intervenir deux questions. La première est de savoir s'il faut ou non un article 10. La seconde est de définir le contenu de cet article si celui-ci est maintenu.

Je pense qu'il faut un article qui apporte un certain nombre de précisions. Pourquoi ? D'abord, parce que l'article 13 de la première loi sur les trente-cinq heures parlait de la formation professionnelle et renvoyait à un bilan, que nous sommes en train de faire près de 25 % des accords ont porté sur la formation professionnelle. Il faut donc établir des critères de validation de ces accords.

Je note, par exemple, que, dans l'accord de l'Union des industries métallurgiques et minières, le temps passé dans le cadre du plan de formation n'est pas considéré comme du temps de travail effectif et n'est pas pris en compte dans la durée du travail. Cet accord pose de nombreuses questions en ce sens qu'il n'offre aux salariés aucune des garanties prévues dans les systèmes faisant appel au coinvestissement ou au congé individuel de formation.

Par conséquent, l'employeur pourrait, dans le cadre de cet accord UIMM, imposer au salarié des actions de formation sur son temps libre, qui, de fait, deviendrait du temps contraint. Que se passerait-il dans un tel cas ?

M. Maxime Gremetz.

On ne pourrait jamais le valider !

M. Gérard Lindeperg.

Un refus du salarié d'aller en formation pourrait-il justifier un licenciement ? Le salarié serait-il tenu pour responsable de son employabilité ? A ces questions qui sont extrêmement lourdes, il faut apporter des réponses.

L'amendement que je propose et qui a été adopté par la commission modifie tout en gardant l'esprit, l'article 10 proposé par le Gouvernement. Celui-ci nous a en effet semblé une source de contentieux. C'est pourquoi nous avons apporté les précisions qui ont été indiquées tout à l'heure.

Cet amendement est à la fois rigoureux dans sa formulation et dans son application.

Il est rigoureux puisqu'il précise que la formation d'adaptation à l'emploi requiert l'accord du salarié et n'est pas négociable. Ces deux points constituent des verrous, des garde-fous à toutes les dérives, telles que celle que je viens de signaler.

Il est souple puisqu'il invite les partenaires sociaux à débattre de cette question dans un délai de trois ans, la loi n'intervenant que s'ils ne sont pas parvenus à un accord.

L'amendement me semble donc répondre au souci de souplesse et à la volonté de remettre les partenaires sociaux autour de la table.

Cela dit, quelques petits correctifs me paraissent nécessaires...

M. le président.

Des sous-amendements sont proposés qui, je l'imagine, vont vous donner satisfaction, monsieur Lindeperg.

J'organise la discussion autour de la question posée par M. Gremetz qui mérite une réponse précise car elle conditionne le retrait de son amendement de suppression d e l'article et, comme l'adoption de l'amendement proposé par M. Lindeperg ferait tomber tous les autres, je souhaite que nous ayons une discussion assez large maintenant sur cette question.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur Gremetz, dans l'article 10 tel qu'il est présenté p ar le Gouvernement avant modification par l'amendement présenté par M. Lindeperg et adopté par la commission, il est clairement écrit que « les dépenses de fonctionnement des actions ainsi effectuées, ainsi que les dépenses liées à la rémunération des heures de formation pour la partie réalisée sur le temps de travail effectif » - cela concerne bien les deux types de formation - « sonts upportées par l'entreprise dans le cadre de la participation des employeurs au développement de la formation professionnelle... »

Mais la façon dont a été rédigé l'amendement de M. Lindeperg donne l'impression de faire sauter cet alinéa.

M. Gérard Lindeperg.

Non !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est malheureusement le cas.

Je comprends que M. Lindeperg veuille remettre en cause les deuxième et troisième alinéas mais il importe de conserver l'avant-dernier alinéa...

M. Gérard Lindeperg.

Bien sûr !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... qui concerne les dépenses de fonctionnement pour que la précision que souhaite M. Gremetz soit maintenue dans le texte.

M. le président.

J'ai souhaité simplifier le débat mais je crains que cela ne le complique pour l'instant. Je vais maintenant, madame la ministre, monsieur Gremetz et monsieur Lindeberg, si vous en êtes d'accord, demander l'avis de la commission sur les amendements de suppression.

M. François Goulard.

Monsieur le président, puis-je prendre la parole ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

M. le président.

En tant qu'auteur d'un des amendements de suppression, monsieur Goulard, je vais en effet vous donner la parole avant de demander l'avis de la commission.

M. François Goulard.

Au risque d'apparaître comme voulant faire respecter absolument le règlement qui préside à la conduite de nos débats, je trouve, monsieur le président, qu'il serait préférable qu'on examine les amendements les uns après les autres. Je ne crois pas que vous puissiez me contredire sur ce point.

M. le président.

Je me permets pourtant de vous c ontredire, monsieur Goulard, parce que, comme M. Gremetz a indiqué qu'il avait l'intention de retirers on amendement de suppression sous réserve des explications que lui fournirait M. Lindeperg, il me paraissait utile d'entendre ce dernier d'abord afin de p ermettre à M. Gremetz de retirer ou non son amendement. C'est assez logique.

M. François Goulard.

En tout cas, monsieur le président, d'autres députés ont déposé des amendements de suppression. Leurs motivations ne sont pas les mêmes, et ils ont droit, eux aussi, à la parole.

P ersonnellement, n'ayant pas le caractère profondément conciliant de mon collègue Gremetz,...

M. Maxime Gremetz.

Merci, monsieur Goulard !

M. François Goulard.

... caractère dont il nous donne des signes tous les jours, je maintiens mon amendement de suppression au motif que le dispositif retenu par le Gouvernement est totalement inapplicable et inopérant.

La formation professionnelle a aujourd'hui droit de cité dans les entreprises et fonctionne d'une manière extraordinairement positive. Les conventions collectives, dans leur ensemble, lui accordent une place considérable et c'est un terrain trop mouvant, trop évolutif et trop divers pour que la distinction introduite à l'article 10 soit réellement efficace.

C'est la seule raison qui nous a conduits à proposer un amendement de suppression car, naturellement, nous appelons de nos voeux le développement de la formation professionnelle dans les entreprises, y compris sur le temps de travail.

M. le président.

Cette précision n'était pas inutile.

Je vais maintenant demander à M. le rapporteur de donner l'avis de la commission à la fois sur les cinq amendements de suppression et, pour que M. Gremetz soit complètement informé, sur l'amendement no 490 rectifié.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Il était indispensable que la question de la formation soit traitée dans le cadre de c ette loi sur le temps de travail. Il était aussi indispensable d'apporter un certain nombre de précisions comme celle souhaitée par M. Gremetz. C'est le sens de l'amendement qui a été adopté par la commission sur la proposition de M. Lindeperg.

Mais cet amendement appelle, lui aussi, quelques petites modifications, la plus importante étant sans doute, au regard de l'observation fort juste faite par M. Gremetz et reprise par Mme la ministre, de supprimer, si vous voulons adopter cet amendement dans l'esprit qui nous anime par rapport à la question posée, la référence à l'avant-dernier alinéa, et donc d'indiquer que l'amendement se substitue aux deuxième et troisième alinéas, et non à l'avant-dernier.

Il faut en effet maintenir cet alinéa qui garantit, pour répondre à la question posée par M. Gremetz, que les dépenses de fonctionnement sont bien prises en charge par l'entreprise comme cela est demandé. Cette précision est indispensable.

Sous cette réserve, la commission est très favorable à l'amendement présenté par M. Lindeperg et demande donc à M. Gremetz de retirer son amendement de suppression comme il nous l'a indiqué. Nous aurons ainsi trouvé une réponse commune à la question que nous posions ensemble.

M. le président.

Sur l'amendement no 490 rectifié de M. Lindeperg, deux sous-amendements ont été déposés.

Pour simplifier les choses, je vais demander à M. Terrier de bien vouloir les soutenir.

M. Gérard Terrier.

Les deux sous-amendements ont pour objet, bien entendu, d'améliorer l'amendement de M. Lindeperg et, surtout, de préciser les choses.

Le sous-amendement no 1067 tend à garantir que le coinvestissement ne pourra se faire contre l'avis et l'intérêt du salarié.

L e sous-amendement no 1066 vise à valider, provisoirement, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'il y ait un accord interprofessionnel, les clauses de formation qui ont été conclues après la loi de 1998. Il s'agit là aussi d'un sous-amendement de sécurité et de garantie pour le salarié.

M. le président.

Je reviens aux amendements de suppression de l'article.

Monsieur Gremetz, retirez-vous votre amendement ?

M. Maxime Gremetz.

Après les précisions apportées et les engagements pris, M. Cochet et moi-même, puisque nous sommes cosignataires avec le MDC, retirons notre amendement en espérant voir rapidement s'engager un grand débat sur la formation professionnelle grâce au dépôt d'un projet de loi.

M. le président.

L'amendement no 669 est retiré.

Je vais maintenant demander à l'Assemblée de se prononcer sur les autres amendements de suppression quir épondent à d'autres motivations et ont donc été maintenus.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 282, 452, 743 et 845.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

L'amendement no 490 rectifié, dont nous venons déjà de débattre longuement, peut être soumis à une discussion commune avec l'amendement no 428, présenté par MM. Gremetz, Outin, Dutin, Patrick Leroy, Malavieille, Mme Jacquaint et les membres du groupe communiste et apparentés est ainsi rédigé :

« Substituer aux quatre derniers alinéas du I de l'article 10 les huit alinéas suivants :

« Art. L.

932-2. - I. - Tous les trois ans dans les entreprises de cinquante salariés et plus, le chef d'entreprise soumet à l'approbation du comité d'entreprise un plan dit "emploi-formation" permettant le développement de l'entreprise tout en respectant une durée réelle du travail limitée à la durée légale.

« Le plan "emploi-formation" comprend notamment :

« le programme d'embauches des salariés nécessaires ;


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« les mesures de réorganisation portant en particulier sur la redistribution de certaines tâches effectuées par les salariés accomplissant régulièrement une durée de travail supérieure à la durée légale afin de permettre l'embauche de chômeurs ;

« le plan de formation prévu à l'article L.

933 du présent code qui devra tenir compte des objectifs fixés au présent chapitre.

« Le premier plan "emploi-formation" devra être établi et présenté au comité d'entreprise pour le 1er juin 2000 au plus tard.

« II. - Avant le 1er juillet de chaque année, les chefs d'entreprises de dix salariés et plus adressent au directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle un état faisant ressortir le nombre et la qualification des emplois qui n'ont pu être pourvus faute de candidats.

« III. - Le défaut d'approbation du plan "emploiformation" par le comité d'entreprise entraîne las uppression des allégements de cotisations de sécurité sociale prévue à l'article 11 de la loi no du 1999 relative à la réduction négociée du temps de travail selon les modalités prévues à ce même article. »

M. Maxime Gremetz.

Je le répète, monsieur le

président

!

M. le président.

L'amendement no 428 est retiré.

L'amendement no 490 rectifié, présenté par M. Gorce,r apporteur, M. Gorce, rapporteur, MM. Lindeperg, Rome, Terrier et les commissaires membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :

« Substituer aux deuxième et troisième alinéas du I de l'article 10 les quatre alinéas suivants :

« Art. L.

932-2. - L'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation de ses salariés à l'évolution de leurs emplois. Toute action de formation suivie par le salarié dans le cadre de cette obligation constitue un temps de travail effectif.

« Sans préjudice des dispositions du premier alinéa d u présent article, un accord de branche ou d'entreprise peut prévoit les conditions dans lesquelles le développement des compétences des salariés peut être organisé, pour partie hors du temps de travail, après accord écrit du salarié.

« Un accord national interprofessionnel étendu fixe le cadre de ces négociations. Pour les entreprises ne relevant pas de cet accord, le cadre de ces négociations est défini par un accord de branche étendu.

« Les dispositions relatives à la formation négociées dans le cadre de la loi no 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail sont applicables pour une durée maximum de trois ans, sous réserve du respect de l'obligation légale d'adaptation mise à la charge de l'employeur et de l'accord du salarié.

Au terme de cette période, elles doivent être mises en conformité avec les dispositions de l'accord national interprofessionnel étendu. A défaut, un nouveau cadre sera fixé par la loi. »

Sur cet amendement, M. Terrier et M. Yves Rome ont présenté, comme nous l'avons déjà dit, deux sousamendements nos 1066 et 1067.

Le sous-amendement no 1066 est ainsi rédigé :

« Au cinquième alinéa de l'amendement no 490 rectifié, substituer aux mots : "dans le cadre de", les mots : "postérieurement à". »

Le sous-amendement no 1067 est ainsi rédigé :

« I. - Après les mots : "temps de travail", rédiger ainsi la fin du troisième alinéa de l'amendement : " effectif sous réserve que les formations correspondantes soient utilisables à l'initiative du salarié ou reçoivent son accord écrit."

« II. - Après le mot : "employeur", rédiger ainsi la fin de la première phrase du cinquième alinéa de cet amendement : "et de l'initiative du salarié ou de son accord écrit." »

M onsieur Lindeperg, vous souhaitez intervenir à nouveau ?

M. Gérard Lindeperg.

Simplement pour dire que les deux sous-amendements qui sont proposés reçoivent tout à fait mon accord.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux sous-amendements ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Quand je pense du bien d'une disposition, je suis extrêmement bref. Donc, avis favorable, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 1066.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 1067.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 490 rectifié, modifié par les sous-amendements adoptés.

(L'amendemenet, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les amendements nos 358 de M. Goulard, 193 de M. Pontier, 83 de M. Mariani, 857 de M. Morin, 81 de M. Mariani, 623 de M. Philippe Martin, 392 de M. Goulard, 84 de M. Mariani, 393 de M. Goulard, 453 de M. Proriol, 856 de M. Morin, 454 de M. Proriol, 549 et 781 de M. Accoyer et 842 de M. Fousseret n'ont plus d'objet.

J e mets aux voix l'article 10, modifié par l'amendement no 490 rectifié.

(L'article 10, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

Monsieur le président de la commission, vous avez demandé une suspension de séance pour réunir la commission des affaires culturelles.

De combien de temps souhaitez-vous disposer ?

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

La commission se réunira à dix heures trente, pour environ une demi-heure, monsieur le président.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures vingt, est reprise à onze heures dix.)

M. le président.

La séance est reprise.

Après l'article 10

M. le président.

L'amendement no 491 de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales est retiré au profit de l'amendement no 1056.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

Cet amendement, présenté par M. Gremetz, est ainsi libellé :

« Après l'article 10, insérer l'article suivant :

« Les articles L.

212-13 et L.

221-4 du code du travail sont ainsi modifiés :

« I. Le premier alinéa de l'article L.

212-13 du code du travail est ainsi rédigé :

« Après les mots "de moins de dix-huit ans" sont ajoutés les mots "ainsi que les jeunes de moins de dix-huit ans qui accomplissent des stages d'initiation ou d'application en milieu professionnel dans le cadre d'un enseignement alterné ou d'un cursus scolaire". »

« II. L'article L.

212-13 est complété par un alinéa rédigé comme suit :

« Il est tenu compte du temps consacré à la formation dans un établissement d'enseignement par les jeunes visés au premier alinéa pour l'appréciation du respect des dispositions des 1er et 3e alinéas ».

« III. L'article L.

221-4 est complété par les alinéas suivants :

« Les jeunes travailleurs de moins de dix-huit ans ainsi que les jeunes de moins de dix-huit ans qui accomplissent des stages d'initiation ou d'applicatione n milieu professionnel dans le cadre d'une nseignement alterné ou d'un cursus scolaire bénéficient de deux jours de repos [consécutifs] ».

« Lorsque les caractéristiques particulières de l'activité le justifient, une convention ou un accord collectif étendu peut définir les conditions dans lesquelles il peut être dérogé aux dispositions du p récédent alinéa pour les jeunes libérés de l'obligation scolaire, sous réserve qu'ils bénéficient d'une période minimale de repos de trente-six heures c onsécutives. A défaut d'accord, un décret en Conseil d'Etat définit les conditions dans lesquelles cette dérogation peut être accordée par l'inspecteur du travail. »

M. Gremetz n'est pas là ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Je peux soutenir cet amendement, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

M. Gremetz nous propose une meilleure transcription dans le code du travail des dispositions d'une directive européenne sur le travail des jeunes. Cet amendement est encore plus satisfaisant que l'amendement initial qui avait été adopté en commission et j'invite donc l'Assemblée à l'adopter.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.

Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 1056.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 940 de M. Proriol n'est pas défendu.

M. Proriol et M. Dord ont présenté un amendement, no 939, ainsi rédigé :

« Après l'article 10, insérer l'article suivant : "Les dispositions de la présente loi ne s'appliquent pas aux contrats d'apprentissage en cours, et n'entreront en vigueur qu'après signature d'une convention avec le comité de coordination des programmes régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue fixant les modalités de la réduction du temps de travail dans l'apprentissage".» La parole est à M. François Goulard, pour soutenir cet amendement.

M. François Goulard.

Mes collègues appellent l'attention sur les difficultés que pose la réduction de la durée du temps de travail dans le cas de contrats d'apprentissage.

Chacun sait que l'apprentissage consiste à avoir en même temps une activité dans une entreprise et des heures de formation, et l'observation conduit à penser que la réduction du temps de travail aurait en définitive p our conséquence de prolonger les périodes d'apprentissage, ce qui n'est pas forcément souhaitable.

C'est pourquoi nous souhaiterions que la question de l'apprentissage fasse l'objet d'un examen particulier. La présence de Mme la secrétaire d'Etat devrait nous permettre d'avoir une réponse sur des difficultés réelles qui se posent dans ce domaine.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Nous avons déjà eu cette discussion et Mme la ministre s'est engagée à saisir le comité national de coordination sur la base d'une p roposition de M. Gengenwin. Je suppose que le Gouvernement le confirmera.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.

Je confirme, en effet, que, comme l'a indiqué Martine Aubry en répondant à

M. Gengenwin, nous saisirons le comité de coordination.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 939.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 11

M. le président.

Je donne lecture de l'article 11.

C HAPITRE

VIII Développement de la négociation et allégement des cotisations sociales

« Art. 11. - I. - Les entreprises dont la durée collective du travail est fixée au plus soit à trente-cinq heures h ebdomadaires, soit à 1 600 heures sur l'année, bénéficient d'un allégement de cotisations sociales défini à l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale dans les conditions prévues au présent article.

« II. Pour ouvrir droit à l'allégement, la durée collective du travail applicable dans l'entreprise doit être fixée :

« 1o Dans les entreprises dont l'effectif est au moins é gal à cinquante salariés, par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement conclu dans les conditions prévues au III ou IV du présent article ;

« 2o Dans les entreprises dont l'effectif est inférieur à cinquante salariés :

« - soit par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement conclu dans les conditions prévues aux

III, IV et V ;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

« - soit en application d'une convention ou d'un accord de branche étendu ou d'un accord conclu dans les conditions définies à l'article L. 132-30 du code du travail.

« La convention ou l'accord doit fixer la durée du travail et préciser les catégories de salariés concernés, les modalités d'organisation et de décompte du temps de travail, les incidences sur la rémunération de la réduction du temps de travail, les conditions de mise en place des horaires à temps partiel mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 212-4-9 du code du travail, ainsi que les modalités de suivi de l'application de l'accord.

« III. L'accord d'entreprise précise le nombre des emplois créés ou préservés du fait de la réduction du temps de travail. L'accord d'entreprise peut prévoir les modalités de consultation du personnel.

« Pour ouvrir droit à l'allégement, l'accord d'entreprise doit être signé par une ou des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections au c omité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.

« Si cette condition n'est pas satisfaite, une consultation du personnel peut être organisée à la demande d'une ou plusieurs organisations syndicales signataires. L'accord ouvre droit à l'allégement s'il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.

« Participent à la consultation prévue à l'alinéa cidessus les salariés satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 433-4 ou L. 423-7 du code du travail. Les modalités d'organisation et de déroulement du vote sont a rrêtées par l'employeur après consultation des organisations syndicales. La consultation a lieu pendant le temps de travail.

« IV. Dans les entreprises ou établissements d épourvus de délégué syndical ou de délégué du p ersonnel désigné comme délégué syndical, l'accord collectif d'entreprise peut être conclu par un salarié expressément mandaté par une organisation syndicale reconnue représentative sur le plan national.

« Les organisations syndicales définies ci-dessus doivent être informées au plan départemental ou local par l'employeur de sa décision d'engager des négociations.

« Ne peuvent être mandatés les salariés qui, en raison des pouvoirs qu'ils détiennent, peuvent être assimilés au chef d'entreprise, ainsi que les salariés apparentés au chef d'entreprise mentionnés au premier alinéa des articles L. 423-8 et L. 433-5 du code du travail.

« Le mandat ainsi assigné doit préciser les modalités selon lesquelles le salarié a été désigné et fixer précis ément l es termes de la négociation et les obligations d'information pesant sur le mandataire, notamment les conditions selon lesquelles le projet d'accord est soumis au syndicat mandant au terme de la négociation, ainsi que les conditions dans lesquelles le mandant peut à tout moment mettre fin au mandat.

« L'accord signé par un salarié mandaté doit avoir été approuvé par les salariés à la majorité des suffragese xprimés. Participent à la consultation les salariés satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 433-4 ou L. 423-7 du code du travail. L'accord peut prévoir les modalités de cette consultation. La consultation a lieu pendant le temps de travail.

« L'accord est communiqué au Comité départemental de la formation professionnelle, de la promotion sociale et de l'emploi.

« Le temps passé par les salariés mandatés à la négociation de l'accord ainsi qu'aux réunions nécessaires pour son suivi est payé comme temps de travail. Le salarié mandaté peut être accompagné lors des séances de négociation par un salarié de l'entreprise choisi par lui.

« Les salariés mandatés au titre du présent article bénéficient de la protection prévue par les dispositions de l'article L. 412-18 du code du travail dès que l'employeur aura eu connaissance de l'imminence de leur désignation.

La procédure d'autorisation administrative est applicable au licenciement des anciens salariés mandatés pendant une période de six mois courant soit à compter de la date à laquelle il a été mis fin au mandat avant la conclusion de la négociation, soit à compter de la signature de l'accord ou, à défaut, de la fin de la négociation. »

« V. - Dans les entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de délégués syndicaux, en l'absence d'une convention ou d'un accord de branche étendu et lorsqu'aucun salarié n'a été mandaté dans le délai d'un mois à compter de la date à laquelle les organisations syndicales ont été informées, au plan départemental ou local, par l'employeur de sa décision d'engager des négociations, les délégués du personnel peuvent négocier u n accord collectif d'entreprise. L'accord doit être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés et validé par une commission paritaire nationale de branche ou par une commission paritaire locale mise en place dans les conditions prévues à l'article L. 132-30.

Participent à la consultation les salariés satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 433-4 ou L. 423-7 du code du travail. La consultation a lieu pendant le temps de travail.

« VI. A compter du 1er janvier 2002 et par dérogation aux dispositions du II, en l'absence d'une convention ou d'un accord de branche étendu et quand aucun salarié n'a été mandaté dans le délai d'un mois à compter de la date à laquelle les organisations syndicales ont été informées au plan départemental ou local par l'employeur de sa décision d'engager des négociations, les entreprises dont l'effectif est inférieur à onze salariés p euvent bénéficier de l'allégement si le document précisant les modalités selon lesquelles la durée du travail est fixée dans les limites définies au I est approuvé par la majorité des salariés.

« VII. Bénéficient de l'allégement les entreprises qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, ont réduit leur durée du travail en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu ou d'une convention ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement conclu dans les conditions prévues à l'article 3 de la loi no 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail ou d'une convention ou d'un accord fixant la durée du travail dans les limites prévues au I.

« VIII. Par dérogation aux dispositions du II du présent article, les entreprises employant des salariés travaillant de façon permanente en équipes successives selon un cycle continu et dont la durée du travail, en application de l'article 26 de l'ordonnance no 82-41 du 16 janvier 1982 relative à la durée du travail et aux congés payés, ne dépasse pas en moyenne sur une année trente-cinq heures bénéficient, pour ces salariés, de l'allégement.

« IX. Les entreprises créées postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi bénéficient de l'allégement si la durée du travail est fixée par l'employeur dans les limites définies au I. A l'expiration d'une période d'un an courant à compter de la date à


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

laquelle peuvent être élus ou désignés des représentants du personnel, son maintien est subordonné au respect des conditions définies au II.

« X. Pour bénéficier de l'allégement, l'employeur doit transmettre aux organismes de recouvrement des cotisations sociales une déclaration précisant la durée du travail applicable dans l'entreprise accompagnée, le cas échéant, de l'accord d'entreprise ainsi que du document attestant de l'approbation des salariés.

« L'allégement résultant de l'application des dispositions de l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale prend effet le premier jour du mois qui suit la date à laquelle la durée du travail applicable dans l'entreprise a été fixée dans les limites définies au I ou, si elle lui est postérieure, la date de réception par les organismes mentionnés ci-dessus de la déclaration de l'employeur et au plus tôt à compter du 1er janvier 2000.

« XI. Pour l'application du présent article, l'effectif de l'entreprise est déterminé selon les modalités prévues au deuxième alinéa de l'article L. 421-1 et à l'article L. 421-2 du code du travail.

« XII. Les organisations syndicales reconnues représentatives au plan national peuvent bénéficier d'une aide de l'Etat destinée à soutenir les actions de formation des salariés qu'elles mandatent pour la négociation des accords mentionnés au II du présent article.

« XIII. Les branches ou entreprises qui engagent ou qui mettent en oeuvre des réorganisations préalablement ou consécutivement à la réduction du temps de travail p euvent bénéficier d'un dispositif d'appui et d'accompagnement, individuel ou collectif, auquel les régions peuvent, le cas échéant, participer. L'Etat peut prendre en charge une partie des frais liés aux études ou interventions de conseil nécessaires.

« XIV. Le bénéfice de l'allégement est supprimé en cas de fausse déclaration.

« Il est également supprimé en cas de dénonciation, intervenue dans les conditions définies au troisième alinéa de l'article L. 132-8 du code du travail, lorsque la convention ou l'accord mentionné aux II et VII n'a pas été remplacé dans un délai de douze mois suivant la dénonciation.

« Le bénéfice de l'allégement est suspendu lorsque les durées et les horaires de travail pratiqués dans l'entreprise sont incompatibles avec les limites définies au I.

« Le bénéfice de l'allégement est également suspendu pour le salarié ayant effectué un nombre d'heures supplémentaires dépassant le contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 212-6 du code du travail.

« La suspension ou la suppression du bénéfice de l'allégement, assortie le cas échéant du remboursement de son montant, est notifiée à l'employeur par l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale sur le rapport de l'autorité administrative désignée par décret, ou après avis de cette autorité lorsque la suspension ou la suppression est consécutive à un contrôle effectué par un agent assermenté appartenant à cet organisme.

« XV. Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités de suppression ou de suspension du bénéfice de l'allégement et du remboursement du montant de l'aide, ainsi que les conditions dans lesquelles l'employeur recueille l'approbation des salariés en application des III, IV, V et VI du présent article. Un décret détermine les autres conditions d'application du présent article.

« XVI. Le fonds créé par l'article... de la loi no 99-...

de financement de la sécurité sociale pour l'année 2000 a ssure la compensation intégrale, prévue à l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, de l'allégement des cotisations sociales défini par le I ci-dessus aux régimes concernés par cet allégement.

« L'Etat et les organismes gérant des régimes de protection sociale relevant du code de la sécurité sociale et du code rural et ceux visés à l'article L. 351-21 du code du travail contribuent à ce fonds. Leur contribution est déterminée à partir du surcroît de recettes et des économies de dépenses induits par la réduction du temps de travail pour l'Etat et les organismes précités. Les règles de calcul de leur montant et de leur évolution sont définies par décret en Conseil d'Etat après consultation de la Commission des comptes de la sécurité sociale.

« XVII. Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2000. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

C'est un article très important. Je n'ai pas l'intention de tenir des propos exhaustifs, je voudrais aborder simplement trois points.

D'abord, on traite différemment les entreprises de plus d e cinquante salariés et celle de moins de cinquante salariés alors que, dans la réalité, ce sont souvent des entreprises similaires et concurrentes. Les distorsions seront encore beaucoup plus fortes puisque les entreprises de plus de cinquante salariés devront avoir une représentation syndicale ou un mandatement alors que, dans celles de moins de cinquante salariés, un délégué du personnel ou un accord de branche étendu suffira. Une telle différence de traitement ne va pas dans le sens de l'emploi, car de nombreuses entreprises, du fait de ces nouvelles rigidités, feront tout ce qu'elles pourront pour ne pas franchir le seuil de cinquante emplois.

Deuxième point essentiel, la représentativité syndicale.

Certes, les textes sur ce sujet doivent être toilettés, mais est-ce vraiment le moment d'aborder cet important sujet, au détour de la loi sur les 35 heures, surtout sous un angle extrêmement politique puisqu'on ne conteste pas la présomption de représentativité nationale mais que l'on remet en cause la règle de l'unicité de signature. C'est très bien ! Ainsi, les nouveaux syndicats sont écartés et les anciens voient leur paraphe dévalué, dès lors que la négociation collective les place souvent en position de signataires minoritaires. C'est un problème majeur, et je considère que ce n'est pas le moment de l'aborder et de le résoudre.

Le troisième point, enfin, c'est le paragraphe XVI et le fameux fonds pour l'emploi qui est évoqué sans que l'on sache exactement comment seront financées les 35 heures.

Comment se fait-il que ce fonds soit porté au compte de la sécurité sociale et non au budget de l'emploi comme les allégements de charges de la première loi Aubry et ceux de la loi Robien ? Par ailleurs, il est temps de préciser les sources de financement et le montant de celui-ci. Qui paiera ? L'UNEDIC ? La sécurité sociale ? Les caisses de retraite ? Et, surtout, qu'en pensent les partenaires sociaux ? Autant de questions brûlantes auxquelles, je l'espère, il sera répondu au cours de ce débat.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Il convient de mesurer toute l'importance de cet article 11, pour diverses raisons.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

Dans sa rédaction initiale, l'article 11 fait partie de ces articles correctifs que je dénonçais tout à l'heure, un grand nombre des dispositions de la loi visant à corriger les effets négatifs de la réduction du temps de travail. Cet article sur les allégements de charges sociales vise à corriger l'une des conséquences les plus importantes et les plus fâcheuses du passage aux 35 heures, à savoir l'augmentation mécanique du coût de l'heure travaillée, qui est de 11,4 %. D'où la mise en oeuvre d'un considérable mécanisme d'allégement des charges sociales destiné, nous allons y revenir, à compenser la hausse des coûts salariaux, et, dans l'esprit du Gouvernement, à éviter qu'elle se retourne, et très lourdement, contre l'objectif affiché de la loi, à savoir la création d'emplois.

Tel qu'il était conçu initialement, ce mécanisme appelait de nombreux commentaires.

D'abord, cela crée une distorsion évidente entre les entreprises qui auront pu passer un accord et celles qui, pour diverses raisons, auront été dans l'impossibilité de le faire. Je rappelle que, pour passer un accord, il faut généralement être deux. Or un employeur peut fort bien ne pas trouver en face de lui des partenaires qui soient d'accord pour signer une convention. Et, dans ce cas, l'entreprise ne pourra pas bénéficier des allégements de charges sociales. C'est une difficulté considérable car les montants dont il s'agit, rapportés au salaire, sont tels que l'on peut condamner à mort des entreprises qui seraient exclues du mécanisme d'allégement social et subiraient une énorme distorsion de concurrence.

Deuxième grande réflexion, mais nous y reviendrons, ce mécanisme n'est pas neutre. C'est un allégement des charges sur les bas salaires financé pour l'essentiel par des p rélèvements qui vont peser sur l'ensemble des entreprises. Vous organisez donc un gigantesque transfert de fonds en faisant un prélèvement sur l'ensemble des entreprises françaises, un peu plus sur certaines d'entre elles, au bénéfice de celles qui donnent surtout des bass alaires. Je crois personnellement que ce type de mécanisme est mauvais parce qu'il revient à créer des perturbations dans l'économie. Je vous rappelle qu'il y a des entreprises à hauts salaires qui ont un grand rôle dans le développement de l'emploi dans notre pays, et ce t ransfert massif risque d'avoir des conséquences économiques très dommageables.

Mme Marie-Thérèse Boisseau l'a rappelé, ce très long article remet en cause de la représentativité syndicale telle qu'elle est définie dans notre droit du travail. Nous reviendrons sur cette question majeure.

Mais surtout - et c'est l'événement de ce matin - la commission, réunie au titre de l'article 88, a accepté des amendements présentés par le groupe communiste et par le groupe Radical Citoyen et Vert et qui changent du tout au tout la portée de l'article 11. Ces amendements ne doivent pas être considérés comme anodins. Ils ont une importance politique sur laquelle je ne m'étendrai pas car cela ne relève pas directement de ma compétence.

En revanche, je n'hésite pas à dire que, sur un plan économique et social, ces amendements vont avoir des conséquences absolument désastreuses.

A l'heure actuelle, le Gouvernement pratique ce qu'on pourrait appeler un socialisme rationalisé comme, à une autre époque, on parlait d'un parlementarisme rationalisé.

Je veux dire par là qu'il cherche à atténuer certains effets des politiques d'ensemble qu'il met en oeuvre. Et, s'agissant de la réduction du temps de travail, il s'est attaché, par une série de dispositions, à en limiter les conséquences, tout au moins quand elles sont immédiates et directes.

Or ce socialisme rationalisé est battu en brèche par deux groupes de la majorité plurielle. En effet, en cédant à leurs demandes profondément irresponsables, le Gouvernement a abandonné la raison qui inspirait, au moins pour partie, son texte.

(Exclamations sur les bancs du groupe communiste.)

Il va se lancer dans une opération qui condamnera à mort les entreprises qui n'ont pas la possibilité de créer ou de maintenir les emplois.

Dans une économie, on trouve, à tout instant, à côté d'entreprises qui créent des emplois, des entreprises qui, pour des raisons qui leur sont propres et qui tiennent à leur situation objective, réduisent leurs effectifs. En ne permettant pas que les charges sociales de ces dernières soient allégées, alors même qu'elles subiront de plein fouet la hausse des coûts salariaux, vous les condamnez à mort !

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Et les emplois avec !

M. François Goulard.

Les amendements proposés par ces deux groupes sont donc d'une importance gravissime.

D éjà, le texte initial aurait eu, à mon avis, des conséquences globalement négatives sur l'emploi. S'il est amendé tel que le propose ces deux groupes, il aura des conséquences absolument désastreuses sur la situation économique et sociale de ce pays, car il ne pourra que se retourner contre l'objectif affiché de la loi, c'est-à-dire l'emploi dans notre pays.

M. le président.

La parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

L'article 11 est consacré au d éveloppement de la négociation et au dispositif d'allégement de charges.

L'objectif des 35 heures est de faire revenir les chômeurs dans l'entreprise, de créer des emplois, de remettre la France au travail. Dans ces conditions, il ne nous paraissait pas possible de soutenir la philosophie de cet article dans sa version initiale. Toutefois la dernièrer éunion de la commission des affaires sociales a profondément modifié les données de cette question.

Certes, l'article 11 du projet de loi contient des dispositions que nous appelions de nos voeux, comme, par exemple, le développement de la logique majoritaire.

C'est une avancée d'autant plus forte que, avec les 35 heures, il sera moins question pour les salariés et leurs organisations syndicales d'obtenir des améliorations, qui viendraient, au fil des ans, se superposer les unes aux autres, que de négocier du donnant-donnant avec de potentiels sacrifices à la clé pour les salariés.

Je ferai cependant deux remarques. Premièrement, selon la structure de son personnel, un employeur pourra très bien avoir davantage intérêt à se passer de l'aval de ses salariés et, de ce fait des allégements, pour obtenir à t erme des concessions plus avantageuses via un

« mauvais » accord.

Deuxièmement, j'apprécie la technique référendaire, tout en ne la trouvant pas absolument parfaite. C'est pourquoi j'estime que la commission a agi avec sagesse en adoptant le principe de la double validation par une commission paritaire en ce qui concerne les accords qui seront présentés par l'employeur dans les entreprises de moins de onze salariés.

J'en viens au principal reproche que nous adressions à l'article 11.

Nous avions du mal à comprendre pourquoi avait été a bandonnée toute idée de contreparties en termes d'emploi pour bénéficier des aides. Ni l'argument selon lequel la création d'emplois n'est pas quantifiable, ni celui


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d'un prétendu effet mécanique de création d'emplois n'avaient réussi jusqu'à présent à nous convaincre. Certes, on nous avait expliqué que la négociation ne pouvait pas écarter la question de l'emploi. Mais, heureusement, la commission est intervenue pour clarifier l'article et, de fait, a posé le principe que l'accord devra préciser le n ombre d'emplois créés ou préservés. Cela permet d'avancer dans la bonne direction.

Nous avons été un certain nombre - le Mouvement des citoyens, les Verts, les communistes - à militer en faveur de la restauration de la logique du 13 juin 1998.

Nous considérions que sans l'inscription d'une obligation de contreparties en termes d'emploi, c'était l'ensemble de la démarche gouvernementale qui s'en trouvait modifiée.

Il n'y avait aucune surenchère démagogique de notre part, nous tirions simplement les conséquences des engagements que nous avions souscrits en soutenant la première loi sur les 35 heures. Sans contreparties, l'idée même de lutte contre le chômage risquait d'être renvoyée au rayon des accessoires.

Vous nous avez souvent appelé, madame la ministre, à v ous soutenir dans votre démarche. Eh bien, les amendements qui ont été acceptés ce matin lors de lar éunion de la commission des affaires sociales permettront d'élaborer un texte de loi qui fera date, car il représentera une avancée réelle à la fois pour les salariés, quel que soit leur emploi dans l'entreprise, et dans la lutte contre le chômage.

J'ajoute que ce texte permettra de renouer avec les grands moments de l'histoire sociale et politique de notre pays. La gauche et tout ceux qui souhaitent que la société française avance auront l'occasion d'être satisfaits, et je ne doute pas que, pour la manifestation de demain, les conditions seront réunies d'un grand succès et d'une forte mobilisation. Ainsi, il sera plus simple d'expliquer que ceux qui veulent critiquer le Gouvernement ou le c ombattre sont dans l'erreur. Il faut venir à la manifestation de demain pour que le Gouvernement puisse bénéficier d'un rapport de force favorable et pour faire tomber l'arrogance du patronat.

M. le président.

La parole est à M. Yves Rome.

M. Yves Rome.

L'article 11 s'articule autour de deux lignes de force : la création d'un nouveau dispositif d'allégement de charges et l'incitation renforcée au dialogue social.

Le projet de loi tend à simplifier le régime des cotisations patronales en fusionnant les allégements de charges sur les bas et moyens salaires et l'aide pérenne.

Pour les entreprises ayant opté pour une durée du travail de 35 heures par semaine ou de 1 600 heures par an, il crée un barème unique d'allégement. Ces exonérations c ompenseront l'impact financier des embauches consécutives à la réduction du temps de travail et permettront une baisse nette du coût du travail. Les entreprises engagées dans la réduction du temps de travail conserveront donc leur compétitivité.

Selon le présent article, l'accès aux allégements de charges n'est ouvert qu'aux entreprises qui ont signé un accord de réduction du temps de travail. Il s'agit d'une règle impérative qui a pour objectif de développer le dialogue social au sein de l'entreprise, la négociation étant la seule garantie pour que la réduction du temps de travail s'inscrive dans un schéma gagnant-gagnant.

Le texte fixe le cadre juridique des négociations. Il détermine les organisations ou personnes compétentes p our signer l'accord ainsi que les modalités de consultation du personnel. Il met en place le principe de la validation majoritaire des accords d'entreprise : soit l'accord est signé par un syndicat majoritaire, soit il est approuvé par la majorité des salariés. Le personnel devient alors acteur et responsable de ses choix collectifs.

La détermination des conditions de travail n'est plus le seul fait de l'employeur. Les accords bénéficient d'une pleine légitimité démocratique et apportent davantage de protection pour les salariés.

L'article 11 fixe les stipulations qui doivent obligatoirement figurer dans les accords, comme la durée du travail, le lien entre réduction du temps de travail et rémunération, les règles relatives au temps partiel choisi, les modalités de suivi de la réduction du temps de travail.

Les cas de suspension et suppression du bénéfice de l'abattement sont également précisés lorsque les parties ne remplissent pas leurs obligations contractuelles.

Les amendements acceptés par la commission des affaires sociales renforcent les principes d'égalité, de transparence et de démocratie énoncés dans l'article 11.

Sur le plan de l'égalité entre les femmes et les hommes, l'accord devra contribuer à assurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Il devra garantir l'égalité entre les salariés à temps partiel et les salariés à temps complet et prévoir les modalités de passage d'un emploi à temps partiel à un emploi à temps complet.

Pour ce qui est de l'égalité entre les délégués syndicaux et les salariés mandatés, ces derniers bénéficieront de la même protection juridique que les premiers et pourront participer au suivi de l'accord.

Quant aux entreprises créées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, elles bénéficieront comme les autres des allégements de charges si la durée collective du travail est fixée à 35 heures ou à 1 600 heures par an et si les conditions de l'article 11 sont respectés.

Sur le plan de la transparence et de la démocratie, les modalités de suivi de l'accord seront renforcées. Ce suivi pourra être effectué par une instance paritaire créée spécifiquement à cet effet. De plus, il sera établi chaque année un bilan détaillé de la réduction du temps de travail. L'objet de tout cela est de bien vérifier la pertinence des accords, d'en mesurer les effets ainsi que d'en proposer des modifications si c'est nécessaire. Un tel dispositif permettra de maintenir le dialogue social au sein de l'entreprise. A cela s'ajoute l'information deso rganisations syndicales sur la suspension et la suppression du bénéfice des allégements.

Ce texte permet donc de concilier la compétitivité des entreprises et la protection des salariés. Ainsi, il garantit la paix sociale dans l'entreprise et il marque une étape importante dans l'histoire des avancées sociales de ce pays.

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet.

Voilà encore quelques jours, force était de constater que l'allégement de charges défini au chapitre VIII du projet de loi ne semblait plus lié à la création ou à la sauvegarde de l'emploi, comme c'était le cas dans la première loi du 13 juin 1998. Nous avions les entiment que la majorité et le Gouvernement abandonnaient un objectif essentiel et même primordial de l'ensemble du processus, qui est la lutte contre le chômage, c'est-à-dire la lutte en faveur de la création d'emplois.

On aurait eu tort de croire que la seule croissance pouvait suffire pour faire reculer le chômage. En effet, si les statistiques faisaient apparaître, au 1er septembre


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dernier, un recul de 280 000 demandeurs d'emplois, cer ecul était dû aussi à l'action volontariste du Gouvernement, laquelle s'est traduite par la création de 200 000 emplois-jeunes depuis un an et demi et par la création ou la sauvegarde de 120 000 emplois grâce à la réduction du temps de travail - et ce dernier chiffre a encore augmenté.

Selon M. Goulard, les dispositions acceptées par la c ommission des affaires sociales auront un effet destructeur sur les entreprises. Pour ma part, je ne le crois pas. Ainsi, certains accords d'entreprise passés dans de grands organes de presse hebdomadaires ou quotidiens ont permis de créer des emplois sans allégement de charges. Un tel processus n'est donc pas destructeur d'entreprises, au contraire.

Avec nos amis communistes et ceux du Mouvement des citoyens, nous avons insisté sur le fait que l'article 11 et l'ensemble du chapitre VIII devaient conditionner les a llégements de charges à des créations ou à des préservations d'emplois. Après avoir discuté avec nos partenaires de la majorité et le Gouvernement, nous avons fini par trouver une bonne formulation. Ainsi, l'allégement de charges sera, comme dans la première loi sur les 35 heures, conditionné à la création ou à la préservation d'emplois. Et si, au bout d'un an, les engagements en matière d'emploi ne sont pas tenus, les a llégements de charges seront supprimés. C'est du donnant-donnant, du gagnant-gagnant. C'est ce qu'on appelle un vrai contrat.

U ne autre disposition constitue une avancée démocratique. Comme l'a rappelé Georges Sarre, ce qui est formidable dans ce texte, c'est l'introduction de la démocratie dans l'entreprise grâce à l'application de lar ègle majoritaire. Une interprétation restrictive consisterait à dire que ce recours à la règle majoritaire - signature de l'accord par les syndicats majoritaires ou approbation de celui-ci par une majorité de salariés - ne vaut que pour bénéficier de l'ouverture du droit à l'allégement de charges. Selon moi, il faut, au contraire, faire une interprétation large, car les syndicats majoritaires ou les salariés se prononceront sur le fond de l'accord luimême et pas seulement par rapport à l'ouverture du droit à l'allégement de charges.

Enfin, dernier point, je crois que l'ensemble de ce dispositif permet de revenir à l'objectif de la première loi sur les 35 heures : la création d'emplois. Ce sont les chômeurs qui doivent être embauchés, et j'espère qu'ils le seront de plus en plus.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Nous sommes arrivés à un moment important de notre débat, je dirai même à un tournant. En effet, le groupe communiste avait indiqué, comme on a pu le lire dans toute la presse, qu'il déterminerait son vote en fonction des réponses qui seraient apportées à deux questions qui lui semblaient fondamentales.

D'une part, il lui paraissait essentiel d'en revenir à la philosophie qui sous-tendait la première loi sur les 35 heures, les exonérations de charges patronales et les aides financières devant être conditionnées à la création ou à la préservation d'emplois.

D'autre part, le groupe communiste souhaitait, comme tous les Français d'ailleurs, que l'utilisation des fonds publics soit contrôlée. Les scandales, dont celui de Michelin ne sera pas le dernier, ne peuvent qu'inciter à contrôler l'utilisation qui est faite des deniers de la population française.

C'était sur ces deux questions majeures que le groupe communiste, unanime, avait dit, sans pour autant poser un ultimatum au Gouvernement, qu'il ne céderait pas.

Notre groupe veut en effet que le présent texte soit dans le prolongement du premier qu'il avait contribué à enrichir et, en particulier, qu'il soit efficace en termes d'emploi, de temps libéré et de nouvelle organisation du travail.

L'article 11 marque un tournant. La commission s'est à nouveau réunie ce matin après que nous avons déjà beaucoup travaillé avec le Gouvernement. Et je vous remercie, madame la ministre, d'avoir manifesté autant de patience car vous avez dû subir...

M. François Lamy.

... vos assauts !

M. Maxime Gremetz.

... non pas mes assauts (Rires) , mais mes coups de colère.

Je me réjouis que nous ayons aussi bien travaillé et, après la réunion de la commission, je ne doute pas que les amendements proposés seront adoptés par la majorité plurielle, en particulier un amendement que nous avions déposé en commun et qui revient aujourd'hui. Certains voulaient fixer un montant. J'ai toujours dit, et la presse l'a souligné, que ce qui importait, ce n'était pas le m ontant, mais l'affirmation du principe de conditionnalité, afin d'assurer l'efficacité du dispositif.

Nous avons retenu une formule générale qui me paraît tout à fait adaptée. Nous avons insisté sur le suivi de l'impact de la réduction du temps de travail au niveau des branches et des entreprises. Nous avons insisté sur la nécessité, dans les conventions et les accords, d'affirmer la volonté non seulement de réduire le temps de travail, mais aussi de créer des emplois et de préserver l'emploi, sous le contrôle des salariés, car c'est très important. Le comité d'entreprise doit être obligatoirement informé sur les aides financières, et les syndicats doivent pouvoir, si l'accord n'est pas observé, en appeler directement, sans passer par le juge, à la direction départementale du travail, pour qu'il soit respecté. C'est très important car, lorsqu'un contrat est signé, il faut le garantir. Mais il faut aussi affirmer le principe que, si des entreprises qui bénéficient d'aides substantielles, pour ne pas dire plus, ne respectent pas l'accord qu'elles ont signé, elles doivent subir des sanctions, en étant par exemple privées d'aides financières.

Il faut par ailleurs que le bilan de l'impact de la mise en oeuvre de l'allégement structurel soit transmis chaque année au Parlement, afin que nous sachions comment ont été utilisés les fonds et quel est, par exemple, l'impact de la réforme des cotisations patronales. Un bilan sera présenté à la commission nationale de la négociation c ollective et un rapport transmis au conseil de surveillance du fonds de financement.

S'ajoute à cela l'affirmation, qui faisait défaut, du principe majoritaire, qui est un principe démocratique.

Aucun accord ne peut être validé s'il n'est pas signé par un ou plusieurs syndicats représentant la majorité des salariés, la possibilité étant en outre prévue de consulter l'ensemble des salariés.

En accordant un certain nombre de droits nouveaux, ce texte constitue, je le répète, une avancée importante v ers la démocratie élémentaire, qui n'existe pas aujourd'hui dans les entreprises, vers la démocratie citoyenne dans l'entreprise.

Après avoir manifesté beaucoup de patience, après avoir beaucoup travaillé, nous sommes arrivés à élaborer une loi sur laquelle je ne me prononcerai pas au nom de


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mon groupe, car nous devons encore l'examiner en détail, mais dont nous ne pouvons plus dire que, en l'état, elle n'est pas votable.

M. le président.

La parole est Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président, je vous promets de ne pas être longue, et les explications que je donnerai maintenant me permettront d'être plus brève par la suite.

Après les intervenants de la majorité, Yves Rome, Yves Cochet, Georges Sarre et Maxime Gremetz, je constate que nous retrouvons avec cet article l'objet même de la loi sur les 35 heures, dans laquelle nous nous sommes engagés il y a maintenant un an. L'objectif premier de la réduction de la durée du travail a toujours été l'emploi.

Nous le réaffirmons dans cet article, et plus fortement encore avec les amendements que la commission a adoptés ce matin.

Nous avons toujours dit que nous ouvririons toutes les pistes pour lutter contre le chômage. Cet article propose deux pistes majeures, qui se rejoignent : celle de la réduction de la durée du travail et celle de la baisse des charges sociales. Car, pour nous, la baisse des charges sociales n'a de sens que si elle s'accompagne d'une contrepartie en termes d'emplois ; c'est la raison pour laquelle nous avons lié les deux grandes réformes que sont la réduction de la durée du travail et la diminution des charges sociales.

Monsieur Goulard, vous pouvez continuer à affirmer - c'est votre droit - que la baisse des charges sociales annoncée dans ce projet n'a pour objectif que de réduire le coût de la diminution de la durée du temps de travail.

Mais vous savez bien - en tout cas, les entreprises de main d'oeuvre, celles de l'artisanat et du commerce les avent - que cette réforme va bien au-delà. Sur 105 milliards au total qu'il est prévu d'y consacrer, 65 milliards correspondent à des réductions de charges, et 40 milliards seulement, si je puis dire, aideront les entreprises à réduire la durée du travail. Chacun le sait, de nombreuses entreprises du commerce, de l'artisanat et des industries de main-d'oeuvre - je pense notamment à l'habillement, aux cuirs et peaux - qui, confrontées à la compétition internationale, ont aujourd'hui des difficultés pour maintenir des emplois, en créeraient beaucoup plus, comme d'autres secteurs, au demeurant, si nous arrêtions de ne financer la sécurité sociale que sur les salaires. Elles devraient bénéficier de l'ouverture qui est proposée aujourd'hui, et que nous retrouverons dans la loi sur le financement de la sécurité sociale, consistant à faire financer une partie de la baisse des charges par les profits et par une taxe sur les activités polluantes.

Telles sont les deux réformes que nous envisageons aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle, monsieur Goulard, ce texte ne comprend pas l'ensemble du dispositif de financement. Car, je le répète, nous allons bien au-delà de la compensation de la réduction du coût de la durée du travail, nous réalisons une réforme concernant la baisse des charges sociales et le mode de financement de la sécurité sociale, afin que les cotisations patronales ne soient plus uniquement assises sur les salaires.

La loi de financement de la sécurité sociale prévoit le financement global de ces mesures, ce qui répond à l'engagement que j'avais pris au nom du Gouvernement, après la réforme des cotisations salariales, de faire en sorte que les cotisations patronales ne soient pas seulement assises sur les salaires et d'élargir l'assiette. Mais nous serons sans doute amenés à reparler de ce problème.

Par ailleurs, monsieur Goulard, il n'y a pas de distorsions entre les entreprises. C'est ce qu'a confirmé le Conseil d'Etat, lequel n'a fait, je le répète, aucune remarque sur le texte. Le Gouvernement peut tout à fait lier la diminution des charges sociales à un certain nombre de conditions. Nous avons posé une double condition : la négociation d'un accord de réduction de la durée du travail, la création et la préservation des emplois.

C e sont des critères totalement objectifs. Le Gouvernement, dans son projet de loi, repris par la commission, a laissé suffisamment de possibilités aux entreprises, en prenant en compte leur taille afin qu'elles signent un accord sur la durée du travail, pour qu'on ne puisse pas dire que la signature d'un tel accord est impossible pour certaines d'entre elles.

Je rappelle ainsi que, au-delà de l'accord classique, le mandatement est possible, que les petites entreprises peuvent faire appel aux délégués du personnel ou au comité d'entreprise au bout d'un certain temps, qu'il sera p ossible d'appliquer un accord local étendu, qui s'appliquera directement dans l'entreprise, et même, à partir du 1er janvier 2002, pour les entreprises de moins de onze salariés, de réduire la durée du travail sur décision de l'employeur, avec l'accord des salariés, si toutes les autres possibilités ont été utilisées en vain.

Il n'y a donc pas de distorsions entre les entreprises.

N ous leur avons ouvert de nombreuses possibilités permettant d'arriver à un accord et je suis convaincue que l'intérêt de la diminution des charges les conduira à souhaiter cet accord, et donc à mettre sur la table des éléments susceptibles d'être signés par les organisations syndicales. Le Conseil d'Etat en a convenu, sans qu'il y ait, d'ailleurs, de lourds débats sur ce point.

Madame Boisseau, je répète que la règle de la représentativité telle qu'elle est inscrite dans notre code du travail depuis très longtemps, et en vertu de laquelle tout syndicat représentatif au niveau national a le droit d'engager, par sa signature, l'ensemble des salariés, n'est pas remise en cause, même si, comme je l'ai dit hier, certaines organisations syndicales souhaitent engager un débat plus large sur la représentativité. J'ai indiqué que je me tenais à leur disposition si elles souhaitaient que cette réflexion soit menée dans un groupe au sein de la commission nationale de la négociation collective. Mais il s'agit là d'un problème plus large qui ne peut pas être traité à l'occasion de l'examen de ce projet de loi.

Vous comprendrez que, à partir du moment où le G ouvernement souhaitait qu'il y ait de réelles contreparties en termes d'emploi à la réduction des charges, il était important que l'accord sur la durée du travail soit légitimé par le fait qu'il était signé par des syndicats majoritaires, ou qu'il avait reçu l'accord de la m ajorité des salariés. C'est une bonne façon, démocratique, de s'assurer que l'accord a bien une contrepartie et que l'argent public est bien utilisé.

J'ajoute que les amendements qui viennent d'être déposés par Maxime Gremetz, Yves Cochet et Georges Sarre, et qui ont été repris par la commission, visent à mieux afficher les principes et à mieux contrôler leur application, en prévoyant des bilans dans l'entreprise, dans la branche et au niveau national, un bilan annuel q ue le Gouvernement s'engage à présenter à la commission nationale de la négociation collective sur les conséquences en matière d'emploi de la diminution des charges et de la réduction de la durée du travail. Le débat sera contradictoire et les employeurs et les syndicats pourront compléter ce rapport. Celui-ci sera remis au


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conseil de surveillance du fonds de financement et au Parlement. Ce faisant, nous avançons dans la nécessité démocratique de démontrer que, lorsqu'il y a des aides et u tilisation de fonds publics, il doit y avoir des c ontreparties en termes d'emploi, car c'est cela qu'attendent aujourd'hui les Français.

Je me réjouis de ces amendements. Nos débats, monsieur Gremetz, ont parfois été rudes, c'est vrai, mais je préfère retenir les propos d'aujourd'hui et, comme vous, dire que ce texte affirme fortement les priorités des Français, montre que nous souhaitons utiliser l'argent public avec parcimonie, que chaque franc dépensé doit l'être utilement. Tout le monde devrait se retrouver dans cet objectif, car on ne peut pas diminuer les prélèvements obligatoires avant d'avoir fait ce travail. Chaque franc dépensé doit être bien utilisé, en fonction de l'objectif que les Français attendent du Gouvernement et de sa majorité : réduire le chômage.

Ces amendements confortent la politique que nous menons depuis deux ans et ils nous permettront, j'en suis sûre, d'avoir des résultats importants en ce qui concerne le chômage, dans les mois et les années qui viennent.

M. le président.

L'explication a été large ; je pense que nous allons maintenant pouvoir avancer rapidement.

Je suis saisi de six amendements identiques, nos 82, 148, 283, 550, 630 et 729.

L'amendement no 82 est présenté par M. Mariani ; l'amendement no 148 est présenté par M. Masdeu-Arus, Mme Mathieu-Obadia et M. Schneider ; l'amendement no 283 est présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et F orissier ; l'amendement no 550 est présenté par MM. Accoyer, Demange, Hamel, Jacob et Muselier ; l'amendement no 630 est présenté par M. Vannson ; l'amendement no 729 est présenté par M. Doligé.

« Ces amendements sont ainsi rédigés : "supprimer l'article 11". »

La parole est à M. André Schneider, pour soutenir l'amendement no

82.

M. André Schneider.

Nous demandons la suppression de cet article parce qu'il limite trop fortement les conditions d'obtention de l'allégement des cotisations patronales de sécurité sociale. Pour en bénéficier, les entreprises ne doivent pas dépasser 35 heures par semaine ou 1 600 heures par an. Cet horaire doit être fixé en fonction d'un accord collectif. L'accord conclu doit faire explicitement référence à des emplois créés ou préservé s. Les entreprises qui recourent aux heures supplémentaires de façon structurelle sont exclues du bénéfice de la mesure. Autant de conditions qui réduisent le champ d'application d'une mesure pourtant essentielle à la bonne santé de nos entreprises et à la croissance économique.

Par ailleurs, le projet prévoit de faire peser le coût de la réduction des charges sur l'UNEDIC et la sécurités ociale, malgré le déficit flagrant des régimes de protection sociale et l'opposition des principaux conseils d'administration des caisses.

En outre, il modifie sans aucune concertation préalable les règles actuelles de représentativité syndicale au sein des entreprises.

M. le président.

Merci, monsieur Schneider, pour votre concision.

La parole est à M. François Goulard. D'un mot, car je pense que nous avons déjà eu un véritable échange.

M. François Goulard.

Non, monsieur le président, si vous le permettez, pas d'un mot.

M. le président.

Je vous en prie.

M. François Goulard.

Je tiens à défendre complètement cet amendement de suppression et je vous demande solennellement, mesdames les ministres, de revoir votre position.

Cet article, dans sa rédaction initiale, était simplement absurde. Absurde, parce que prélever d'un côté pour donner ailleurs n'aboutit à aucun allégement des charges qui pèsent sur les entreprises, à aucune correction globale des effets de la réduction du temps de travail sur le coût du travail.

Certes, il y aura des conséquences pour certaines entreprises, celles dont les salariés sont peu payés, mais il y aura un alourdissement pour d'autres, pour celles qui font des bénéfices ou dont les salaires sont élevés.

Absurde, antiéconomique ! Mais, d'absurde, cet article devient profondément, scandaleusement nuisible à l'économie et à la société françaises.

M. Georges Sarre.

Oh !

M. François Goulard.

Si vous l'adoptez modifié par les amendements de M. Gremetz, de M. Cochet et de M. Sarre, vous allez condamner à mort des milliers d'entreprises qui ont des difficultés,...

M. Maxime Gremetz et M. Christophe Caresche.

Oh !

M. François Goulard.

... qui sont dans l'impossibilité de s'engager en ce qui concerne la création ou la préservation d'emplois. Vous allez leur retirer le bénéfice des allégements de charges sociales alors que vous ferez profiter celles qui sont en meilleure santé ! Ça signifie tout simplement que vous signez l'arrêt de mort de milliers d'entreprises dans notre pays car, demain, elles rencontreront des difficultés et seront pénalisées par rapport à toutes les autres à cause du mécanisme diabolique que vous mettez en oeuvre.

M. Georges Sarre.

C'est du délire verbal !

M. François Goulard.

Je vous en conjure, mes chers collègues, ne votez pas cet article qui est fou,...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est un peu excessif ! Je me demande qui est fou !

M. François Goulard.

... qui est profondément contraire aux intérêts des salariés français, car ceux qui sont pénalisés par les dépôts de bilan, ce sont avant tout les salariés. Ce que vous faites est criminel (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), fondamentalement contraire aux intérêts de notre pays. Si vous votez cet article, j'en conclurai que vous avez littéralement perdu la raison ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Yves Durand.

Explication modérée !

M. le président.

Je pense, monsieur Goulard, qu'il faut raison garder. Les qualificatifs que vous avez utilisés sont, vous en conviendrez, un peu excessifs, mais je suis sûr qu'ils ont dépassé votre pensée.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'espère !

M. François Goulard.

Je vous dispense de ces commentaires !

M. le président.

On n'utilise pas des termes aussi forts sans que je réagisse.

M. François Goulard.

Ils sont à l'unisson de mes sentiments !


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Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est encore plus inquiétant !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je ne répondrai pas à la fin de l'intervention de M. Goulard c ar je crois effectivement que la fatigue est pour beaucoup dans l'utilisation d'expressions comme « fou »,

« criminel » et « perdre la raison ». En ce qui me concerne je garde la raison. Je pense que ce qui est « absurde » et

« antiéconomique », pour reprendre les mots de M. Goulard, c'est que le poids des cotisations patronales pèse uniquement, aujourd'hui, sur les salaires.

M. Georges Sarre.

Tout à fait !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Les 850 000 entreprises du commerce et de l'artisanat, qui attendent cette réforme des charges sociales que, vous avez par ailleurs défendue avec M. Barrot et d'autres, mais que vous souhaitiez faire financer par les ménages, apprécieront. Elles apprécieront, que selon vous, il soit a bsurde, antiéconomique, voire fou et criminel, de diminuer le coût du travail comme nous allons le faire, et je suis persuadée qu'elles en tireront un certain nombre de conséquences.

Apprécieront aussi toutes les entreprises de maind'oeuvre. Je fais partie d'un département où l'habillements ouffre énormément. Les entreprises attendent cette réduction des charges qui, elle, est véritable et ne porte pas atteinte à nos engagements européens, contrairement à celle que vous aviez décidée précédemment.

Les entreprises de services, qui sont fondées sur l'emploi et qui attendent une baisse du coût du travail pour pouvoir créer des emplois, et qui en créeront d'autant plus que nous réduirons à 35 heures la durée du travail, apprécieront aussi les qualificatifs « absurde et

« antiéconomique ».

Sur ce point, le désaccord est profond entre nous. Et il ne s'agit pas d'une opposition entre l'économique et le social, mais d'un désaccord entre ceux qui essaient d'articuler l'économique et le social et ceux qui tiennent des propos plus politiciens et idéologiques que relevant de la sphère économique et sociale. Pour ma part, je n'emploierai pas des qualificatifs qui dépasseraient ma pensée ; je ne pense pas autre chose que ce que je viens de dire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements de suppression ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission les a rejetés.

M. le président.

Madame Boisseau, vous m'avez demandé la parole. J'imagine que vous n'êtes pas contre les amendements...

M me Marie-Thérèse Boisseau.

Non, monsieur le p résident, mais je vous remercie de me donner néanmoins la parole car ce moment de la discussion me paraît très important.

Je parlerai avec mes mots, avec mon tempérament.

Attention à ce que vous faites, réfléchissez bien, car il me semble que cet article aura des conséquences dramatiques pour un certain nombre d'entreprises. Le tort de ce texte sur les 35 heures, depuis le début de la discussion, est des ans cesse généraliser et de montrer du doigt les entreprises.

Je suis de ceux qui ont toujours cru à la réduction du temps de travail et j'ai d'ailleurs été à l'origine de la loi Robien, pensant que, dans certains cas, la réduction du temps de travail, encouragée par des aides publiques, pouvait créer des emplois, mais qu'il ne fallait accorder ces aides que dans la mesure où des emplois étaient créés.

On ne peut pas mettre tous les paramètres ensemble. Il n'est pas possible d'obliger toutes les entreprises à réduire leur temps de travail à 35 heures et de leur demander dans le même temps de créer ou de maintenir dese mplois. C'est invivable, c'est totalement irréaliste, madame la ministre ! V ous allez au-devant de graves problèmes économiques. S'il existe des entreprises qui peuvent dégager des gains de productivité et créer des emplois sans aides de l'Etat, il en existe d'autres qui ne peuvent créer des emplois qu'avec des aides de l'Etat, et d'autres encore qui, quelles que soient les aides, ne peuvent pas en créer. Vous allez pénaliser celles qui ne peuvent pas créer d'emplois alors qu'elles auraient le plus grand besoin d'un allégement de charges sociales pour survivre.

Vous avez fait allusion au textile et à l'habillement. Ma circonscription est une zone de sous-traitance pour ces secteurs. Je vous assure que les dispositions que vous soutenez aujourd'hui seront absolument invivables pour l es entreprises concernées. Ces entreprises peuvent maintenir leur activité en France au prix d'efforts considérables et dans la mesure où on les aide en allégeant le coût du travail, voilà tout ! Ne leur demandez pas en plus de maintenir ou de créer des emplois car, pour elles, c'est impossible.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Je ne peux pas laisser passer les propos de nos collègues qui siègent de l'autre côté de l'hémicycle.

Ce que nous faisons est « criminel », nous a-t-on dit.

Mais ou bien nos collègues ne connaissent pas la réalité,o u bien ils exagèrent les choses pour des raisons politiques.

Je vous avais promis de vous amener quelque chose.

Comme je tiens toujours mes promesses, j'ai apporté un petit tableau, qui est consultable et qui montre ce que donnera le dispositif pour une entreprise de seize salariés - un garage -, avec les aides et les charges nouvelles...

M me Marie-Thérèse Boisseau.

Ce n'est qu'un exemple ! Il y a mille formes d'entreprises !

M. Maxime Gremetz.

Je vous ai écoutée, madame.

Vous nous avez dit que l'on allait tuer les entreprises, qu'elles auraient des difficultés financières, qu'on les étranglerait,...

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Pas toutes !

M. Maxime Gremetz.

... que l'on se préparait à commettre un crime, et j'en passe.

Quant à moi, je ne parle pas sur un plan général, et je ne me contente pas de phrases : je cite des chiffres ! Mais je reviens à mon exemple : l'entreprise de seize salariés dont je parle paiera zéro franc si elle embauche à 8 000 francs par mois un salarié, à qui elle pourra faire produire des richesses.

Je vous entends défendre les PME-PMI...

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Je défends l'emploi !

M. Maxime Gremetz.

Eh bien ! Pour ce qui concerne la petite entreprise que je prends comme exemple, un accord à été passé, et vous pouvez vérifier mes dires. Je pourrais d'ailleurs citer son nom.

Vous avez parlé du secteur de la confection. Cela t ombe bien parce que ma circonscription compte b eaucoup d'entreprises de confection. Permettez-moi


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donc de prendre un autre exemple, celui d'une entreprise de confection, plus importante que la première dont j'ai parlé et qui ressemble comme une soeur à celle de M. Sarkozy.

M. Yves Cochet.

De quelle entreprise parlez-vous ?

M. Maxime Gremetz.

M. Sarkozy explique qu'on n'arrivera pas à faire les 35 heures car cela étranglera les entreprises. Le tableau que j'ai sous les yeux, et qui peut être publié...

M. le président.

Est-ce raisonnable ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ce n'est peut-être pas la peine !

M. Maxime Gremetz.

... prouve le contraire : pour cette entreprise de plusieurs centaines de salariés, dont des cadres, le gain, compte tenu des dépenses nouvelles et des aides apportés, est de 746 200 francs. Le résultat est là ! Si vous le souhaitez, je vous communiquerai les chiffres dans leur détail.

M. Sarkozy, qui affirme que cette loi est criminelle et qu'elle étranglera les entreprises, va devoir nous dire merci, car on lui donnera 746 200 francs !

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 82, 148, 283, 550, 630 et 729.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements, nos 677, 634 et 149, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 677, présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 11 :

« Les réductions de charges sociales prennent la forme d'un abattement forfaitaire sur les cotisations patronales, d'application uniforme et générale. »

L'amendement no 634, présenté par M. Vannson, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 11 :

« I. - La totalité des entreprises bénéficie quel que soit l'effectif, d'une franchise de cotisations sociales définies à l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale à hauteur de deux SMIC.

« II. - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les pertes de recettes pour le régime général de la sécurité sociale sont compensées par une taxe de 15 % prélevée sur les gains versés par la Française des Jeux à due concurrence et par une taxe additionnelle aux taxes prévues aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 149, présenté par MM. Masdeu-Arus, D upont, Mme Mathieu-Obadia, MM. Lasbordes et Estrosi, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 11 :

« I. - L'ensemble des entreprises concernées par la réduction du temps de travail bénéficient d'un allégement des cotisations sociales, même celles qui sont contraintes de recourir structurellement aux heures supplémentaires.

« II. - Les pertes de recettes sont compensées par une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no 677.

M. François Goulard.

Nous proposons une modalité de réduction de charges sociales qui éviterait les multiples i nconvénients que je décrivais tout à l'heure. Elle prendrait la forme d'un abattement forfaitaire sur les cotisations patronales et son application serait uniforme et générale.

Mme la ministre m'a dit que mon attitude était politicienne. Je voudrais souligner que l'accord réalisé à la dernière seconde entre les groupes de la majorité plurielle est intervenu après des semaines de discussions dont chacun sait qu'elles ont été d'autant plus âpres qu'on partait de positions totalement opposées. J'ajoute qu'il se fonde sur une perspective de manifestation à laquelle

M. Sarre n'a même pas hésité à faire, dans ces lieux, allusion.

Qui est donc politicien aujourd'hui ?

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission a rejeté ces amendements.

Je répondrai à M. Boulard que la majorité plurielle n'a jamais trop de difficultés à assurer sa cohésion, ce qui n'est pas forcément le cas de l'opposition, y compris sur ce sujet. Qu'il ne s'étonne donc pas que la solidarité f onctionne, s'agissant notamment d'enjeux aussi importants que la création d'emplois.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il est vrai que tout le monde n'arrive pas à avoir la même cohésion dans ses rangs ! Il y a une chose que je ne comprends toujours pas : ce sont les mêmes qui, depuis le début du débat, nous expliquent que nous oublions l'emploi, que nous ne parlons que des conditions de vie, que du bricolage ou du jardinage - certains usant pour ces deux dernières occupations d'un ton méprisant que, pour ma part, je n'ai pas - et qui, au moment où nous renforçons l'emploi en abaissant les charges des entreprises - j'avais cru comprendre que cette baisse était la seule proposition de l'opposition pour lutter contre le chômage - nous adressent des attaques virulentes.

T outes ces attaques, mesdames, messieurs de l'opposition tiennent surtout au fait que vous acceptez mal qu'il y ait une majorité plurielle, qui travaille et qui discute - car le débat politique, c'est aussi cela -, qui avance et qui, finalement, se retrouve sur les vrais enjeux et sur les modalités concrètes.

Telle est la vérité ! Vos attaques ne vont pas dans l'intérêt des entreprises.

L'intérêt des entreprises réside aujourd'hui dans les b aisses de charges et dans le fait que le poids considérable, social et financier, du chômage ne pèse plus sur leurs épaules, non plus que sur celles de l'ensemble de nos concitoyens.

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Madame la ministre, j'en suis désolée, mais je ne suis pas sur la même longueur d'onde que vous. Je n'ai quant à moi rien à faire de la majorité plurielle : ce qui m'intéresse, c'est la survie de nos entreprises...

M. Maxime Gremetz.

Arrêtez ! On va pleurer !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

... et le développement de notre économie, conditions sine qua non pour qu'il y ait de l'emploi en France. Et l'emploi est indispensable à l'épanouissement de chacun d'entre nous. Il ne s'agit de rien d'autre.

Nous sommes depuis toujours pour l'allégement des charges sociales. Mais il n'est pas sûr qu'il faille les alléger jusqu'à 1,8 fois le montant du SMIC. Il faudrait à mon avis un allégement uniforme, qui éviterait de « scotcher » une trop grande partie de nos concitoyens aux alentours du SMIC, ce qui aurait inévitablement des effets pervers.

Bien sûr que je suis pour l'emploi ! Bien sûr que je suis persuadée que la réduction du temps de travail peut créer des emplois !

M. Maxime Gremetz.

Vous pensez aux profits de Sarkozy !

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Ce que je dénonce une nouvelle fois, parce que la démarche me paraît tout à fait irréaliste et très dangereuse pour l'économie et les entreprises, c'est la manière extrêmement brutale dont vous vous y prenez, avec vos dispositions généralisées et obligatoires à partir du 1er janvier de l'an 2000 pour toutes les entreprises. Mais il y aura celles qui pourront, et celles qui ne pourront pas ! En fait, au lieu de créer des emplois, vous allez en détruire !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 677.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 634.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 149.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Gremetz et les membres du groupe communiste, M. Sare et M. Cochet ont présenté un amendement, no 1057, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le I de l'article 11 :

« Les entreprises qui appliquent un accord collectif fixant la durée collective du travail au plus soit à 35 heures hebdomadaires, soit à 1 600 heures sur l'année, et s'engagent dans ce cadre à créer ou à préserver des emplois bénéficient d'un allégement de cotisations sociales défini à l'article L.

241-13-1 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Je vous remercie, monsieur le président, de me donner la parole, dont je n'abuse pas étant donné le talent du rapporteur et les interventions de la ministre.

Je voudrais m'élever contre l'utilisation d'expressions du type « folie collective ». Tout cela n'est pas acceptable.

Je comprends très bien qu'il y ait des divergences politiques, et qu'on se batte contre des visions que l'on ne partage pas.

C ela dit, madame Boisseau, quand la ristourne dégressive a été instituée, nous l'avons contestée car nous considérions qu'elle constituait une véritable trappe à bas salaires.

Nous prévoyons aujourd'hui un allégement des charges pour les salariés jusqu'à 1,8 fois le SMIC, si bien que 70 % des salariés seront concernés. Il y a là une avancée considérable, qui créera un souffle dont les entreprises ont besoin.

Vous dites, madame Boisseau, que notre intervention est brutale. Non : elle est discutée, elle est négociée, elle est préparée et elle a donné lieu à des débats qui durent depuis presque un an et demi. Je vous rappelle que la loi de Robien, que je connais bien car j'ai suivi son application dans deux départements, le Nord et le Pas-deCalais, avait concerné, après plus d'une année et demie, 300 000 salariés. J'avais calculé que, pour qu'elle soit vraiment efficace, il aurait calculé qu'il aurait fallu attendre trente ou quarante années d'application.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Ces extrapolations ne veulent rien dire !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Et si - mais vous ne voulez pas le reconnaître - il n'y avait pas eu l'impulsion donnée par la loi d'incitation et un objectif très précis indiqué aux entreprises, nous n'aurions pas eu les résultats que nous constatons aujourd'hui : 28 % des salariés sont déjà concernés.

Les chiffres sont là, et ils ne sont pas contestables. On peut être en désaccord sur l'effet de la réduction du temps de travail - je sais que ce n'est pas votre cas pour en avoir longuement discuté avec vous - mais vous devriez reconnaître que nous nous donnons les moyens indispensables pour prendre en compte cette dimension d ans le cadre d'une économie développée, d'une croissance retrouvée, du développement de nouveaux emplois et de nouveaux services. Tout cela constitue un ensemble très cohérent que nous construisons depuis plus d'un an et demi, avec en outre la préoccupation permanente de ne pas laisser sur le côté de la route 900 000 personnes - souvent des femmes et des jeunes qui risquent d'être les victimes de ce développement.

Oui, c'est là un ensemble cohérent. Nous nous battrons politiquement sur les résultats de cet ensemble.

C'est là une responsabilité politique, que nous assumons totalement.

J'ajoute que lorsque, étant à l'écoute des diverses composantes de la majorité plurielle, nous accentuons la prise en compte de la dimension « emplois » - qu'il s'agisse d'emplois créés ou d'emplois préservés - dans le cadre d'une négociation, nous sommes dans la logique de cet ensemble. Nous avons toujours considéré que les questions qui nous étaient posées étaient fondamentales, et nous nous efforçons d'y apporter une réponse.

Quand on nous interroge sur le suivi de l'effet des financements publics, nous apportons là encore une réponse qui s'inscrit dans la cohérence de ce que nous faisons ensemble. J'ai été le premier à dénoncer l'attitude de grandes entreprises qui font du FNE l'instrument d'une politique visant à faire sortir du champ de l'entreprise des salariés âgés de cinquante-cinq ans - certaines voudraient même le faire beaucoup plus tôt tout en nous disant qu'il faut allonger la durée du travail pour le calcul de la retraite, et qui de plus ne paient pas à l'Etat la part de FNE qui leur incombe - je vous renvoie sur ce point au rapport de la Cour des comptes.

Encore une fois, il y a là une cohérence totale. Et nous avons eu un débat avec M. Gremetz, avec M. Cochet, avec M. Sarre, d'où il est ressorti qu'autant il fallait prendre en compte la nécessité de cette cohérence - ce à quoi nous avons beaucoup travaillé -, autant l'idée d'une n orme intégrée dans la loi était bien entendu contradictoire avec notre démarche.

Le débat au sein de la majorité plurielle a été intéressant, et nous aboutissons à des résultats qui, je l'espère, sont satisfaisants pour chacune des composantes de cette majorité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

Telles sont les choses, madame Boisseau ! Telles sont les choses, monsieur Goulard ! C'est une bataille politique que nous livrons et, je le dis une fois de plus, nous l'assumons totalement,...

M. Georges Sarre.

Très bien !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... dans l'intérêt des entreprises et dans celui des salariés. Aucun d'entre nous ne peut considérer que l'on puisse régler le problème de l'emploi, ni donc celui du chômage, en m ettant les entreprises en danger. Nous sommes convaincus que, par ce que nous faisons, nous donnons une impulsion aux entreprises. L'expérience montre que nous avons raison.

Q uand nous aborderons l'article 16, nous vous démontrerons que les dispositions concernant le SMIC donneront une impulsion supplémentaire à la création d'entreprises.

N'essayez donc pas de faire croire que ce que nous faisons pourrait mettre en danger les entreprises, car c'est le contraire qui est vrai.

M. le président.

Monsieur le président de la commission, j'ai craint un moment que vous n'alliez directement à l'article 16.

(Sourires.)

Nous en sommes pour l'instant à l'article 11, et plus précisément à l'amendement no 1057, qui a déjà été défendu très largement.

L'avis de la commission est favorable, comme celui du Gouvernement...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Tout à fait !

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau...

M. François Goulard.

Je demande la parole contre l'amendement.

M. le président.

Monsieur Goulard, je vous donnerai par la suite la parole, à condition que vous n'utilisiez pas le terme « criminel ».

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Nous avons encore la liberté de parole, monsieur le président.

M. le président.

Bien entendu ! Je relève cependant que vous avez été plus modérée que votre collègue...

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

A chacun son style !

M. Georges Sarre.

Le style, c'est l'homme !

M. le président.

Vous avez la parole, madame Boisseau.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Je n'interviendrai pas particulièrement sur l'amendement. Je voterai bien sûr contre, mais je voudrais pour l'instant répondre à

M. Le Garrec.

Des entreprises en difficulté, il en existe ! C'est la vie ! Certaines entreprises vont bien, d'autres moins bien et d'autres encore connaissent des difficultés momentanées, ont besoin de resserrer les rangs, de réduire leurs effectifs parce qu'elles ne passent plus, si je puis dire, sur le marché national ou international, pour moult raisons.

Ces entreprises vont être obligées de licencier et vous leur enfoncez la tête sous l'eau en leur refusant un allégement de charges,...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non !

M me Marie-Thérèse Boisseau.

... en créant de nouvelles distorsions de concurrence avec les entreprises voisines...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Non !

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

... qui auront la chance d'être momentanément plus florissants et qui pourront quant à elles bénéficier de l'allégement des charges, proposer des produits plus compétitifs et rafler des parts de marché.

Ces dispositions sont éminemment inégalitaires.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je m'interroge sur la force de nos interventions si Mme Boisseau pense que nous n'avons pas pris en compte les entreprises en difficulté. Le texte fait très clairement référence à la création « ou » à la préservation d'emploi. Cela rejoint d'ailleurs l'« amendement Michelin » qui a été voté précédemment. Nous savons bien qu'il y a des entreprises qui se battent pour maintenir l'emploi dans notre pays.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Elles doivent licencier !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Personne ne dit qu'elles doivent préserver l'ensemble de leur emploi : elles négocieront pour réduire le nombre des licenciements ou pour empêcher tous les licenciements lorsque ce sera possible.

Tel est le sens de notre démarche. Nous ne disons pas qu'il faille préserver tous les emplois, mais nous disons qu'il faut préserver des emplois dans la négociation. C'est aussi le sens, je le répète, de l'amendement Michelin, qui prévoit, avant tout licenciement, une réduction de la durée du temps de travail, soit pour éviter complètement les licenciements, soit pour en réduire le nombre.

Nous avons pleinement pris en compte le fait que certaines entreprises sont en difficulté. Nous sommes d'ailleurs d'autant mieux placés pour le savoir que certaines d'entre elles sont dans cette situation parce que le coût du travail est trop élevé en France pour les entreprises de main-d'oeuvre car on ne fait financer que les salaires. Et ce sont bien ces entreprises-là, des secteurs de l'habillement, des cuirs et peaux et de la chaussure, qui attendent les baisses de charges et qui, même si elles doivent licencier, pourront bénéficier de telles baisses à la condition d'avoir réduit la durée du temps de travail et préservé un certain nombre d'emplois.

Je tiens donc à vous rassurer : nous sommes dans la logique de la loi Robien et de la loi incitative, mais nous souhaitons qu'il y ait une négociation sur la préservation comme sur la création d'emplois : c'est la condition des baisses de charges qui seront octroyées.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Les propos de Mme la ministre m ontrent qu'il y a au moins deux lectures de l'amendement no 1057 : celle de notre collègue Gremetz, qui considère qu'il a obtenu, par cet amendement, l'assurance que ne toucheront les allégements de charges que les entreprises qui créent ou maintiennent leur emploi ; et la lecture que vient de nous faire Mme la ministre. Celle-ci nous dit, parce que sa position était intenable, qu'elle prendra en compte les difficultés des entreprises et que, dans la mesure où la baisse de la durée du travail permettra de préserver l'emploi,...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

« Des » emplois !

M. François Goulard.

... cette reconnaissance vaudra à l'entreprise de continuer à bénéficier, comme les autres, de l'allégement des charges sociales.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

Madame la ministre, dans la réalité, croyez-vous qu'une entreprise en difficulté ait pour première priorité de négocier une convention qui obéisse aux canons de votre loi et qu'elle peut s'engager, sur la durée, à préserver l'emploi grâce aux 35 heures ? Beaucoup d'entreprises ne pourront pas prendre un tel engagement. Et je maintiens qu'il est criminel (Murmures sur les bancs du groupe socialiste) de surcharger des entreprises qui, précisément, connaissent les plus grandes difficultés. Ces entreprises-là, vous les condamnez à mort, parce qu'elles seront surchargées par rapport aux autres, au moment même où elles n'arrivent pas à faire face.

Vous allez hâter le dépôt de bilan de toutes lese ntreprises en difficulté ! Naturellement, les grandes entreprises auront le temps, les moyens de négocier et de mettre au point un plan qui satisfasse aux conditions posées par la loi. Mais pensez à l'ensemble des PME, qui sont totalement incapables de passer des heures à mettre au point des documents (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) susceptibles de recevoir l'agrément de vos services, pointilleux comme toutes les administrations.

Et la conséquence pratique sera que ces entreprises n'auront pas le bénéfice de l'allégement des charges sociales et, que par un effet direct de distorsion de concurrence, vous les condamnez à un déclin plus rapide, voire à la mort à laquelle elles pouvaient échapper en étant placées dans les mêmes conditions que les autres ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Voilà l'origine de ma révolte. Voilà pourquoi je reste farouchement opposé à cette combinaison politique que vous nous avez offerte ce matin.

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet, pars olidarité vice-présidentielle et à titre exceptionnel.

(Sourires.)

M. Yves Cochet.

Je vous prie simplement de noter ceci, monsieur le président : de même que, vous le constaterez plus tard, nous sommes cosignataires, avec M. Gremetz et avec M. Sarre, du sous-amendement no 798, de même nous sommes cosignataires des amendements nos 1057, 1058, 1060 et 1061.

M. le président.

C'était noté, monsieur Cochet.

Je mets aux voix l'amendement no 1057.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les amendements nos 852 de M. Barrot, 702 de M. Chabert, 855 de Mme Boisseau, 1016 de Mme Catala, 455 de M. Proriol et 851 de M. Barrot n'ont plus d'objet.

M. le président.

M. Mariani et M. Schneider ont présenté un amendement, no 87, ainsi rédigé :

« I. Supprimer les II à VIII de l'article 11.

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

La parole est à M. André Schneider.

M. André Schneider.

Monsieur le président, je suis a ujourd'hui l'orateur de mon groupe et vous m'accorderez que je n'abuse pas du temps de parole.

M. le président.

C'est pour cela que je vous la donne bien volontiers, monsieur Schneider !

M. André Schneider.

Permettez-moi de faire une petiter emarque : par ma voix, mon groupe n'a agressé personne. Je suis donc très étonné que, sous votre bienveillante autorité, mon collègue M. Gremetz ait brandi un papier, et attaqué nommément, à plusieurs reprises, un collègue de mon groupe politique.

M. Maxime Gremetz.

Vous vous trompez !

M. le président.

Vous faites erreur. Il s'agissait du frère de ce collègue. (Sourires.)

M. André Schneider.

Il me semblait qu'il ne devait pas s'agir du même. Mais enfin...

M. le président.

Si M. Gremetz s'était permis d'attaquer Nicolas Sarkozy...

M. Maxime Gremetz.

Ce n'était pas Nicolas. Je l'aime bien, Nicolas ! Mais il n'est pas bien aimé au RPR.

M. André Schneider.

Autre chose, madame la ministre : heureusement que votre majorité travaille en cohésion derrière vous. Personne ne vous le dénie. Mais acceptez que les collègues de l'opposition aient droit à la réfexion, au travail et à la différence d'approche.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Mais oui !

M. André Schneider.

Nous avons tous ici le souci légitime de préserver l'emploi dans notre pays. Sans doute les démarches sont-elles différentes, mais les objectifs vraisemblablement communs.

J'en viens à l'amendement no

87. Les dispositions prévues aux paragraphes II à VIII de l'article 11 sont relatives au régime des accords collectifs à l'existence desquels le projet subordonne l'allégement des cotisations sociales.

L'exigence d'un accord collectif pour accéder à cet allégement rompt l'égalité entre les entreprises qui auront réduit leur durée du travail à 35 heures, et ce d'autant plus que la garantie du SMIC à 169 heures prévue par l'article 16 jouera, qu'il y ait ou non accord collectif.

Celles qui n'auront pu conclure un accord mais réduiront néanmoins la durée du travail compte tenu des nouvelles dispositions et pour créer des emplois seront mises dans des conditions beaucoup moins favorables que celles qui auront pu réaliser la même chose par un accord collectif au sens légal du terme. Or ce sont les plus fragiles.

Il convient donc de rétablir l'égalité des conditions d'accès aux allégements, dès lors que le but de la loi une durée de travail de plus à 35 heures - est atteint.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement.

Je dirai un mot des réactions de M. Goulard. Je comprends son émotion. Mais je trouve qu'il est allé un peu loin dans ses propos. Et s'il me le permet, je paraphraserai ce qu'il a dit de notre collègue Sarre : j'ai le sentiment parfois, mais je suis sûr que ce n'est pas vrai, que M. Goulard, sous un costume bourgeois, cache parfois l'âme d'un réactionnaire...

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

87. (L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je souhaite annoncer à l'Assemblée une très bonne nouvelle : le prix Nobel de la paix 1999 vient d'être attribué à Médecins sans Frontières, pour son aide h umanitaire sur l'ensemble des continents.

(Applaudissements sur tous les bancs.)

Au nom du Gouvernement et, je pense, au nom de l'ensemble des groupes représentés à l'Assemblée nationale, j'adresse nos félicitations les plus chaleureuses à Médecins sans Frontières, à l'ensemble de celles et de ceux qui subliment leur vocation professionnelle sur tous les continents en se mettant au service de l'homme, partout où la souffrance et la désespérance font parfois douter de ce qu'il est.

Nous pouvons tous saluer les French doctors.

Ils ont acquis leurs lettres de noblesse en nous montrant, tout au long de leur engagement, du Biafra au Kosovo, que les hommes peuvent parfois faire preuve, à côté du pire, du meilleur.

En notre nom à tous, je tenais à leur adresser nos chaleureuses félicitations.

(Applaudissements sur tous les bancs.)

M. le président.

Merci, madame, de nous avoir fait part de cette excellente nouvelle, qui fait unaniment plaisir sur ces bancs.

Nous revenons à la discussion du projet de loi.

Je suis saisi de deux amendements identiques nos 371 et 762.

L'amendement no 371 est présenté par MM. Goulard, Dord, Forissier et Nicolin ; l'amendement no 762 est présenté par M. Delnatte.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le II de l'article 11. »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix, par un seul vote, les amendements nos 371 et 762.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements, nos 850, 85 et 684, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 850, présenté par Mme Boisseau, MM. Blessig, Gengenwin, Weber, Bur et Morin, est ainsi libellé :

« Après les mots : "cinquante salariés", rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa (1o ) du II de l'article 11 : "soit par un accord collectif d'entreprises, ou par un accord d'établissement conclu dans les conditions prévues au III ou IV du présent article, soit en application d'une convention ou d'un accord de branche étendu ou d'un accord c onclu dans les conditions définies de l'article L.

132-30 du code du travail." » L'amendement no 85, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« I. - Compléter le deuxième alinéa (1o ) du II de l'article 11 par les mots : "ou en application d'un accord de branche étendu conclu dans les conditions définies à l'article L.

132-30 du code du travail. »

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« "Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale." » L'amendement no 684, présenté par MM. Goulard, Dord, Nicolin et Forissier, est ainsi rédigé :

« Compléter le deuxième alinéa (1o ) du II de l'article 11 par les mots : "ou en application d'un accord de branche étendu conclu dans les conditions définies à l'article L.

132-30 du code du travail". »

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Encore une fois, nous déplorons une inégalité de traitement entre certaines entreprises.

Les entreprises dont l'effectif est au moins égal à 50 salariés se voient imposer une nouvelle période de négociation, afin de parvenir à la signature d'un accord collectif d'entreprise ou d'établissement afin d'obtenir les allègements. En revanche, les entreprises de moins de 50 salariés, qui sont des entreprises soeurs, qui travaillente xactement dans les mêmes domaines en seront dispensées.

Un accord collectif d'entreprise ou d'établissement prend énormément de temps - une année en moyenne et durant cette négociation, les entreprises ne s'occupent pas de leur marché.

Nous proposons de lutter contre cette distorsion et contre la lourdeur des démarches à accomplir.

M. le président.

Monsieur Goulard, même opinion ?

M. François Goulard.

Tout à fait.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gaëtan Gorce, rapporteur.

Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.

Avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 850.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

85. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 684.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2 NOMINATION D'UN DÉPUTÉ EN MISSION TEMPORAIRE

M. le président.

J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant de sa décision de charger M. JeanP ierre Balligand, député de l'Aisne, d'une mission t emporaire, dans le cadre des dispositions de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 OCTOBRE 1999

l'article L.O. 144 du code électoral auprès de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cette décision a fait l'objet d'un décret publié au Journal officiel du 15 octobre 1999.

3

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi no 1786 rectifié, relatif à la réduction négociée du temps de travail :

M. Gaëtan Gorce, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1 826).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures trente.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT