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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

YVES

COCHET

1. Modification de l'ordre du jour prioritaire (p. 8273).

2. Rappel au règlement (p. 8273).

MM. Jean-Luc Préel, le président.

3. Loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8273).

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 8273)

L'article 1er est réservé jusqu'à la fin de l'examen des articles.

Avant l'article 2 (p. 8274)

Amendement no 496 de M. de Courson : MM. Charles de Courson, Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour les recettes et l'équilibre général ; Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. - Retrait.

Amendements nos 753 de M. Cahuzac et 677 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur. - Retrait de l'amendement no 677.

M. le rapporteur pour avis, Mme la ministre, MM. François Goulard, Charles de Courson, Maxime Gremetz. - Adoption de l'amendement no 753.

Amendement no 2 de la commission des finances : MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme la ministre. Retrait.

Amendements nos 488 et 489 de M. Gengenwin : MM. Germ ain Gengenwin, le rapporteur, Mme la ministre,

M. Charles de Courson. - Rejets.

Amendement no 559 de M. Debré : MM. Bernard Accoyer, François Goulard, le rapporteur, Mme la ministre. Adoption.

Amendements nos 108 de la commission des affaires culturelles et 3 de la commission des finances : MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme la ministre, M. Charles de Courson. - Adoption des amendements identiques nos 108 et 3 modifiés.

Amendement no 109 rectifié de la commission des affaires culturelles : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, Mme la ministre, MM. Charles de Courson, François Goulard. Rejet.

Amendements identiques nos 560 de M. Rossi et 593 de M. Gantier, et amendement no 592 de M. Gantier : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la ministre,

M. Pascal Terrasse. - Rejets.

Amendements nos 75 et 76 de Mme Fraysse : Mme Jacquel ine Fraysse, M. le rapporteur, Mme la ministre, MM. Gérard Bapt, François Goulard. - Rejets.

Amendements nos 19 et 20 de M. Bapt : M. Gérard Bapt, Madame la ministre. - Retrait.

Amendement no 73 de M. Gremetz et amendement no 1 rectifié de la commission des finances, avec le sousamendement no 407 de M. Accoyer : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme la ministre. - Retrait des amendements.

Amendement no 73, repris par M. de Courson, avec le sousamendement no 407 rectifié de M. Accoyer : MM. Bern ard Accoyer, le rapporteur, Mme la ministre, MM. Charles de Courson, François Goulard, Maxime Gremetz. - Rejets par scrutin.

Amendements nos 494 rectifié et 495 rectifié de M. de C ourson : MM. Germain Gengenwin, Charles de Courson, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejets.

Article 2 (p. 8290)

MM. Jean-Luc Préel, Yves Bur, Jean-Claude Lemoine, Jacques Barrot, Bernard Accoyer, Jean Bardet, François G oulard, Gérard Bapt, François d'Aubert, Maxime Gremetz, Charles de Courson, Pascal Terrasse, Gérard Terrier, Mme la ministre, MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur.

Rappels au règlement (p. 8308)

MM. Thierry Mariani, Jean Bardet.

Suspension et reprise de la séance (p. 8308)

Amendements de suppression nos 28 de M. Bardet, 352 de M. Préel, 510 de M. Goulard et 584 de M. Debré : MM. Jean-Luc Préel, Jean Bardet, François Goulard, Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

4. Dépôt d'un rapport (p. 8310).

5. Dépôt d'un projet de loi modifié par le Sénat (p. 8311).

6. Dépôt d'une proposition de loi modifiée par le Sénat (p. 8311).

7. Ordre du jour des prochaines séances (p. 8311).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRESIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1

MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR

PRIORITAIRE

M. le président.

J'ai reçu de M. le ministre des relations avec le Parlement la lettre suivante :

« Paris, le 27 octobre 1999.

« Monsieur le président,

« J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'en application de l'article 48 de la Constitution, le Gouvernement fixe ainsi l'ordre du jour du vendredi 5 novembre :

« Vendredi 5 novembre, le matin, l'après-midi et le soir ;

« Suite du projet de loi de finances pour 2000 (deuxième partie) :

« Culture ;

« Projet de loi modifiant le code général des collectivités territoriales et relatif à la prise en compte du recensement général de population de 1999 pour la répartition des dotations de l'Etat aux collectivités locales ;

« Suite du projet de loi de finances pour 2000 (deuxième partie) :

« Intérieur.

« Je vous prie d'agréer, Monsieur le président, l'expression de ma haute considération. »

L'ordre du jour prioritaire est ainsi modifié.

M. Jean-Claude Lemoine.

Et la session unique ?

2 RAPPEL AU RE

GLEMENT

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Luc Préel.

Monsieur le président, il est habituel, en début de séance, de présenter des rappels au règlement.

M. le président.

Cela n'a rien d'obligatoire ! (Sourires.)

M. Jean-Luc Préel.

Non, mais j'en profite ! Ce rappel au règlement est basé sur l'article 91, que je pourrais vous lire mais que vous connaissez par coeur, relatif à la discussion des projets de loi en première lecture.

En l'occurrence, il s'agit bien entendu du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je tiens à protester contre le report du rapport, c'est-à-dire de l'article 1er , en fin de discussion. Pourquoi ? Parce que ce rapport énonce toutes les mesures de santé publique que l'on pourrait présenter. Or l'une des critiques majeures que l'on fait à l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, est que l'ONDAM est essentiellement comptable, puisqu'il s'agit d'un taux appliqué aux dépenses de l'année antérieure sans tenir compte des besoins de la population et donc des mesures prises pour définir la politique de santé.

En réalité, le Gouvernement n'a pas, hélas, de vraie politique de santé publique. Il n'a prévu, en particulier, aucune mesure de prévention coordonnée et financée prenant en compte la mortalité prématurée évitable.

Il y a deux façons de pratiquer : ou bien on définit d'abord les mesures financières et on examine ensuite ler apport, et c'est alors une présentation strictement comptable ; ou bien on examine d'abord le rapport et, de la politique de santé ainsi définie, on déduit les mesures qui permettent de la financer.

C'est cette seconde conception qui est la nôtre. Je souhaite donc, au nom du groupe UDF, protester avec une certaine véhémence, mais néanmoins calmement, contre le report du rapport annexé à la fin de la discussion.

M. le président.

Vous auriez dû lire aussi l'article 95 du règlement, monsieur Préel, car l'un de ses alinéas précise que la réserve est de droit à la demande du Gouvernement ou de la commission. En l'occurrence, les deux l'ont demandée. De plus, la réserve de l'article 1er et du rapport annexé est conforme à la tradition. Cela se fait tous les ans. Par conséquent, il n'y a aucune surprise dans cette procédure.

M. Jean-Luc Préel.

Il n'est pas interdit de changer les mauvaises habitudes ! 3

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000 Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (nos 1835, 1876).

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.


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A la demande de la commission et du Gouvernement, l'article 1er est réservé jusqu'à la fin de l'examen des articles.

Avant l'article 2

M. le président.

Je donne lecture de l'intitulé du titre II : « Titre II. - Dispositions relatives aux ressources ».

MM. de Courson, Hériaud, Loos, Sauvadet, Dutreil, Gengenwin et Perrut ont présenté un amendement, no 496, ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Les VI et VII de l'article 1003-7-1 du code rural sont abrogés.

« II. Les pertes de recettes sont compensées par la majoration à due concurrence du taux visé à l'article 1609 unvicies du code général des impôts. »

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Monsieur le président, madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, chers collègues, cet amendement tend à régler un problème que nous n'avions pas vu l'année dernière.

Auparavant, les exploitants agricoles disposant d'une surface inférieure à une demi-SMI et supérieure à un seuil fixé par décret échappaient à la CSG, à la CRDS et aux deux prélèvements sociaux. Nous avons remédié à cette anomalie dans la précédente loi de financement de la sécurité sociale, mais nous n'avons pas vu que, par voie de conséquence, nous aurions dû demander au Gouvernement de réduire le taux de la cotisation dite de solidarité payée par lesdits exploitants. Le résultat de cet oubli a été qu'en 1999 ils ont subi une augmentation de 42 % de la fiscalité pesant sur le revenu qu'ils tirent de cette activité, puisqu'ils ont cumulé la CSG, la CRDS et le prélèvement social de 10 % avec une cotisation de solidarité au taux de 17 %.

Le vrai problème de la cotisation de solidarité, c'est qu'elle avait une justification à l'époque où la CSG ne s'appliquait pas. A partir du moment où la CSG s'applique, on peut se demander à quoi sert cette contribution. Le minimum eût été d'en réduire le taux à due concurrence de l'augmentation de la CSG, comme nous l'avons fait pour les salariés et les non-salariés, même si l'on peut discuter pour savoir si cette réduction est suffisante.

Le présent amendement a tout simplement pour objet de remédier aux conséquences de cet oubli. Mais nous accepterions également que le Gouvernement s'engage à réduire le taux de la cotisation de solidarité de 17 % à 7 %.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

Nous touchons là à un point de fiscalité agricole qui est intéressant. Pour ma part, monsieur de Courson, j'avais prévu sur la CSG un amendement relatif au report du déficit d'un exercice fiscal en matière agricole. Mais vous savez qu'un rapport sur l'ensemble de la fiscalité agricole doit bientôt être remis par nos collègues Béatrice Marre et Jérôme Cahuzac.

M. François Goulard.

Il y a lieu de frémir !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Il me paraît souhaitable d'attendre les conclusions de ce rapport pour traiter le problème dans sa globalité. C'est la discipline que je me suis imposée à moi-même et je souhaite que vous acceptiez de vous y soumettre.

Donc avis défavorable à l'amendement.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

C'est Béatrice Marre et moi-même qui frémissons, monsieur Goulard, à l'idée de réfléchir et, éventuellement, de proposer sur des matières aussi délicates et périlleuses.

Quoi qu'il en soit, l'amendement de M. de Courson t end à supprimer les paragraphes VI et VII de l'article 1003-7-1 du code rural.

Le VI correspond effectivement à ce qu'il a indiqué.

Mais autant il aurait pu être légitime d'appliquer la réduction de droit commun au taux de la cotisation sociale si ce taux avait été de droit commun, autant, dès lors qu'il ne l'était pas, on peut admettre que le baisser de deux points, de 19 à 17 %, ce qui fut fait par voie réglementaire, ait pu paraître suffisant l'année dernière.

Le taux de droit commun en matière de cotisation sociale est en effet de l'ordre de 33 %. Cela étant, on peut s'interroger sur le point de savoir si cette baisse de deux points suffit à compenser la modification à laquelle vous avez fait référence.

Quant au VII, que M. de Courson n'a pas évoqué, son objet est d'une autre nature, puisqu'il consiste à appliquer un taux global de cotisation CSG, RDS, plus prélèvements sociaux - de 3,4 % à des associés minoritaires de sociétés de personnes. Je ne doute pas que ce régime ait, dans la plupart des cas, des justifications pertinentes et réelles, mais il peut aussi, à l'occasion, et probablement pas de manière marginale, constituer une forme tout à fait légale d'évasion de l'assiette sociale de droit commun.

Ces deux paragraphes génèrent, si j'ose dire, des recettes qui n'ont rien de comparable : 230 à 250 millions de francs pour le premier, 10 millions de francs seulement pour le second.

La vérité est qu'il faut s'interroger sur la cohérence et la pertinence de l'ensemble du système. Autrement dit, doit-on ou non maintenir un système qui permet à ceux qui le peuvent de s'évader de l'assiette sociale ? Réfléchissons d'abord à ce qu'est réellement l'assiette sociale et nous verrons ensuite ce qu'il convient de corriger, c'est-àdire ce qui, aujourd'hui, est présenté par certains comme la conséquence d'une mauvaise définition de l'assiette.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avis défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

J'ai cru comprendre que

M. Cahuzac était ouvert à la réflexion.

Le VII, c'est effectivement trois caramels, puisque, avec un taux de 3,4 %, il rapporte à peine 10 millions. Il est surtout extrêmement « fraudé ». Et là encore, je le rappelle, on a le 10 % de l'autre côté.

Quant au VI, je note, monsieur le rapporteur pour avis, que vous semblez favorable à une réduction de dix points et non plus de deux, puisqu'on est passé de 19 à


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17 %. Je vous rappelle cependant que si le taux appliqué n'est pas le taux de droit commun, c'est parce que la cotisation elle-même ne répond pas aux critères du droit commun, dans la mesure où aucune prestation n'est servie en contrepartie. Cette cotisation de solidarité n'ouvrant aucun droit, elle peut être assimilée à un impôt, bien qu'il s'agisse juridiquement d'une cotisation sociale.

Cela dit, j'ai cru comprendre que vous étiez prêt à examiner ces questions dans un esprit d'ouverture et de simplification. Je retire donc mon amendement.

M. le président.

L'amendement no 496 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 753, présenté par MM. Cahuzac, Caullet et M. Adevah-Poeuf, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. L'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

« A. Dans le paragraphe 5o du II de cet article, après le mot : "loi", sont insérés les mots : ", ou, en tout état de cause, est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du code général des impôts,".

« B. Après le paragraphe 5o du II de cet article, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« 5o bis les indemnités versées à l'occasion de la cessation de leurs fonctions aux mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts, ou, en cas de cessation forcée de ces fonctions, la fraction de ces indemnités qui excède les montants définis au deuxième alinéa du 1 de l'article 80 duodecies du même code ; ».

« II. L'article L.

242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sont aussi prises en compte les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts, à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du même code. »

« III. Après le premier alinéa de l'article 1031 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont prises en compte dans l'assiette des cotisations visées au premier alinéa les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts, à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du même code. »

« IV. L'article 1062 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sont prises en compte dans l'assiette des cotisations visées au 2o les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts, à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du même code. »

« V. Après le premier alinéa de l'article 1154 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont prises en compte dans l'assiette des cotisations visées au premier alinéa les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts, à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du même code. »

« VI. La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L.122-14-13 du code du travail est supprimée. »

L'amendement no 677, présenté par M. Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, est ainsi libellé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Après le deuxième alinéa de l'article

L. 242-1 du code de la sécurité sociale, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Constitue une rémunération toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail, à l'exception des indemnités de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan social au sens des articles L.

321-4 et L.

321-4-1 du code du travail, des indemnités mentionnées à l'article L.

12214-4 du même code ainsi que de la fraction des indemnités de licenciement ou de mise à la retraite qui n'excède pas le montant prévu par la convention collective de branche, par l'accord professionnel et interprofessionnel ou, à défaut, par la loi.

« La fraction des indemnités de licenciement exonérée en application du troisième alinéa du présent article ne peut être inférieure ni à 50 % de leur m ontant, ni au montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de la moitié de la première tranche du tarif de l'impôt de solidarité sur la fortune fixé à l'article 885 U du code général des impôts.

« Constitue également une rémunération toute indemnité versée, à l'occasion de la cessation de leurs fonctions, aux mandataires sociaux, dirigeants et personnes visés à l'article 80 ter du code général des impôts. Toutefois, en cas de cessation forcée des fonctions, la fraction des indemnités qui n'excède pas les montants définis au quatrième alinéa du présent article est exonérée. »

« II. 1o Après le premier alinéa de l'article 1031 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions des troisième, quatrième et cinquième alinéas de l'article L.

242-1 du code de la sécurité sociale sont applicables aux salariés mentionnés à l'article 1144 du présent code.

« 2o L'article 1062 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le deuxième alinéa de l'article 1031 est applicable aux cotisations dues au titre du 2o du présent article.

« 3o Après le premier alinéa de l'article 1154 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le deuxième alinéa de l'article 1031 est applicable aux cotisations dues au titre du présent article. »


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La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l'amendement no 677.

M. Alfred Recours, rapporteur.

La France entière a été choquée d'apprendre qu'on pouvait, dans des conditions quelque peu abracadabrantes, percevoir des indemnités mirobolantes sous différentes formes, mais en particulier sous forme d'indemnités de fin de contrat. Tant mieux pour ceux qui les touchent si la loi et les contrats le permettent ! En revanche, il paraît plus choquant que, lorsqu'elles dépassent une certaine somme, ces indemnités soient totalement exonérées d'impôts et de cotisations sociales.

La commission des finances ayant adopté un amendement au projet de loi de finances qui prévoit leur imposition dans certaines conditions, il m'est apparu juste que nous fassions de même pour les cotisations sociales. D'où l'amendement que j'ai déposé. Mais je me rallie volontiers à l'amendement présenté aux mêmes fins par la commission des finances, la rédaction qu'elle propose ayant le mérite d'être en parfaite cohérence avec le texte adopté par l'Assemblée dans le cadre du projet de loi de finances.

M. le président.

L'amendement no 677 est donc retiré au profit de l'amendement no 753, que va maintenant défendre M. Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Cet amendement est en effet la conséquence logique de l'adoption par notre assemblée, lors de l'examen du projet de loi de finances, de l'amendement dit Hollande qui consiste à fiscaliser les indemnités correspondant à une rupture de contrat entre une société et l'un de ses mandataires sociaux. On a beaucoup parlé d'un « amendement Jaffré », je pense que le cas est beaucoup plus général.

Il est donc proposé de soumettre lesdites indemnités aux cotisations sociales, rigoureusement dans les mêmes conditions que celles dans lesquelles elles sont soumises à l a fiscalité. La différence avec l'amendement que M. Recours vient de retirer, et je l'en remercie, c'est que le dispositif que je propose se cale exactement sur les critères de déclenchement fixés dans l'amendement de M. Hollande. C'est la raison pour laquelle, en accord avec M. Recours, je vous demande, monsieur le président, de bien vouloir soumettre l'amendement no 753 au vote de l'Assemblée.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement est très favorable à cet amendement qui, comme vient de le dire M. Cahuzac, aligne l'assiette des cotisations de sécurité sociale, s'agissant des sommes versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail, sur l'assiette fiscale telle qu'elle a été définie par l'amendement au projet de loi de finances déposé par M. Hollande.

L'amendement de M. Cahuzac, associé à celui de M. Hollande, permettra de renforcer la sécurité juridique des indemnités de licenciement sur le plan social et fiscal.

Il permettra surtout d'éviter un certain nombre d'abus.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Je m'exprimerai contre cet amendement.

Le monde politique, dans son ensemble, a une certaine tendance à réagir excessivement aux fièvres médiatiques.

M. Gérard Bapt.

Ce qui n'est jamais votre cas !

M. François Goulard.

Je parle d'une façon générale, et je fais amende honorable au nom de l'ensemble de la classe que nous constituons.

Mme Odette Grzegrzulka.

Moi, je ne me sens pas concernée !

M. François Goulard.

Jusqu'à présent, le législateur avait eu la sagesse, non pas de se tenir à l'écart de ces mouvements de la société, mais de prendre un certain recul et de se ménager un temps de réflexion. Or je m'aperçois que, depuis quelques semaines, nous assistons tout au contraire à une floraison d'amendements de circonstance, liés directement à des événements qui méritent certainement une analyse plus fine, une réflexion beaucoup plus approfondie que les présentations simplifiées, pour ne pas dire sommaires, qui en sont faites.

Mme Odette Grzegrzulka.

L'indemnité, elle, n'était pas sommaire !

M. François Goulard.

S'agissant en l'occurrence du président d'une ancienne société nationale, je trouve que le cas n'est pas forcément le plus exemplaire, dans la mesure où ce président avait été nommé au départ par la puissance publique. Mais enfin...

M. Gérard Bapt.

Par quel Gouvernement ?

M. François Goulard.

Ce que je conteste dans la façon de faire, c'est la réaction à l'événement sans réflexion plus nourrie et plus construite. Au demeurant, mes chers collègues, la jurisprudence actuelle, s'agissant des impôts comme des cotisations sociales, laisse au juge une appréciation du caractère indemnitaire des sommes versées à l'occasion du départ d'un mandataire social, d'un dirigeant, voire d'un salarié de droit commun. Dans tous les cas, le juge administratif ou le juge judiciaire se réserve la possibilité de requalifier les versements effectués à l'occasion d'un départ.

Je considère, pour ma part, que la jurisprudence actuelle est tout à fait satisfaisante, dans la mesure où elle soumet la nature des versements à un contrôle. Ne négligeons pas le fait que, dans certains cas, il y a indemnisation d'un préjudice.

M. Maxime Gremetz.

Vous avez du mal à le reconnaître !

M. François Goulard.

L'indemnisation est légitime et les indemnités, quelle qu'en soit la nature, versées pour corriger un préjudice...

Un député du groupe socialiste.

Même s'il s'agit de 40 millions !

M. François Goulard.

... ne sont pas imposables et ne sont pas assujetties aux cotisations sociales. Le droit me paraît conforme à l'équité.

C'est la raison pour laquelle je voterai contre l'amendement de M. Cahuzac. Notre groupe avait voté contre un amendement d'inspiration identique lors de l'examen du projet de loi de finances.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Avant de voter, je souhaiterais avoir des explications sur la portée de l'amendement.

D'abord, la mesure proposée est-elle applicable au 1er janvier 2000, ou rétroactivement au 1er janvier 1999 ? Ensuite, et cela me paraît beaucoup plus délicat, l'amendement assimile les indemnités de licenciement versées aux salariés dans le cadre d'un contrat de travail


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aux indemnités de rupture de travail des mandataires sociaux, lesquels ne sont pas liés par un contrat de travail, ne sont pas des salariés et sont donc révocables ad nutum

Si des indemnités doivent être versées à la suite d'une décision de justice, la mesure proposée s'appliquera-telle ? En cas de contentieux, si un mandataire social ou un salarié va en justice parce qu'il estime avoir subi un préjudice moral et que l'entreprise est condamnée à lui verser une indemnité, la mesure proposée s'appliquera-telle aux sommes résultant de la décision de justice ?

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

J'aurais souhaité, comme notre groupe l'avait proposé lors de la discussion du budget, que nous adoptions l'amendement Bonrepaux, qui avait été retiré puis repris. Son objet était de taxer les stockoptions. Quelques chiffres éclaireront notre débat. Les chiffres officiels estiment à 28 000 le nombre des détenteurs de stock-options pour une plus-value potentielle de 45 milliards de francs. Si la proposition de notre groupe avait été suivie, nous aurions pu faire entrer de l'argent dans les caisses de l'Etat. M. Jaffré et les autres peuvent être satisfaits : ils ne seront pas taxés tout de suite. Un peu plus tard : mais, d'ici là, ils auront eu tout le temps d'amasser un beau magot.

Compte tenu de ces considérations, je voterai l'amendement.

M. le président.

Que je vais maintenant mettre aux voix.

M. Charles de Courson.

J'aimerais avoir des réponses à mes questions, monsieur le président !

M. le président.

Souhaitez-vous répondre, monsieur le rapporteur pour avis ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Tout à fait, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Je vais tenter de répondre à vos questions, qui étaient pertinentes, mon cher collègue.

La CSG, dès lors qu'elle est prélevée à la source, est précomptée. Je ne vois donc pas comment la nouvelle disposition pourrait s'appliquer à ce qui a été versé en 1999. Du coup, la remarque de notre collègue Goulard, qui nous a reproché à tort de réagir de manière trop excessive à l'actualité devient sans objet. J'ai d'ailleurs fait remarquer que l'amendement était abusivement qualifié d'amendement « Jaffré ».

Pour ce qui est de votre seconde question, décision de justice ou pas, les sommes versées par l'entreprise restent des indemnités de licenciement. Dès lors, je ne vois pas pourquoi elles échapperaient au droit commun. Cela dit, je suis tout à fait disposé, comme la procédure parlementaire nous en donne la possibilité, d'examiner ce point avec vous plus en détail.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 753.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Cahuzac, rapporteur pour avis, MM. Bonrepaux, Migaud et Idiart ont présenté un amendement, no 2, ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Le deuxième alinéa de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est complété par la phrase suivante :

« Le montant de cette réduction ne peut être inférieure à 500 francs par mois pour les personnes travaillant à temps complet. Cette somme est ajustée au prorata de la durée du travail pour les personnes ne travaillant pas à temps complet auprès d'un seul employeur. »

« II. La perte de recettes est compensée, à due concurrence, pour les organismes de sécurité sociale concernés, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Cet amendement va probablement susciter quelques débats, pour le grand plaisir, j'en suis sûr du président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Comme vous le savez, mes chers collègues, certains parlementaires se sont émus en un temps que la CSG, dont le produit est aujourd'hui supérieur à celui de l'impôt sur le revenu, ne soit pas progressive comme l'est, par exemple, ce dernier. Dès lors qu'il était difficile de jouer sur le taux, il a été suggéré par nos excellents collègues Bonrepaux, Migaud et Idiart, de jouer sur l'assiette puisqu'il est vrai qu'en modulant celle-ci on peut réintroduire une certaine dose de progressivité.

Je crois me faire l'interprète fidèle des auteurs de cet amendement, adopté par la commission des finances, en disant que son but est essentiellement d'interroger le Gouvernement pour lui rappeler notamment d'inclure la CSG dans la réflexion qui aura lieu au sujet de la réforme des impôts directs de toute nature, ce sera un des chantiers du Gouvernement l'année prochaine.

Cela dit, je précise qu'en l'état actuel des choses les prestations, notamment maladie, sont déjà très fortement redistributives, ce qui signifie que, nonobstant l'absence de changement d'assiette ou de taux, la redistribution se fait dans le bon sens, en tout cas dans celui que nous souhaitons sur ces bancs.

C'est la raison pour laquelle, madame la ministre, bien que je formule la proposition à titre personnel, je me considérerais comme tout à fait fondé à retirer cet amendement, dès lors que le Gouvernement nous indiquerait que la CSG ne serait pas écartée, a priori, de la réflexion sur les impôts directs qui sera, en l'an 2000, je le répète, un des chantiers du Gouvernement de Lionel Jospin.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a rejeté cet amendement adopté en commission des finances pour les raisons qui viennent d'être évoquées allusivement par mon collègue Jérôme Cahuzac. En effet, il lui a semblé que trop anticiper sur le débat sur les baisses d'imposition, annoncé pour l'année prochaine, oblitérerait une partie du débat que nous aurons à cette occasion.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement est bien évidemment très sensible à tout ce qui peut améliorer l'équité fiscale, notamment réduire l'impact des prélèvements obligatoires sur les revenus les plus modestes.

Je crois que c'est l'objectif de l'amendement déposé par M. Cahuzac. Comme il l'a dit lui-même, il est essentiel que nous reprenions cette discussion dans le cadre général de la réflexion sur la baisse des impôts directs que le


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Gouvernement compte engager, en s'appuyant notamment sur un rapport du Conseil général des impôts qui sera rendu au printemps 2000.

Si nous réfléchissons sur la baisse des impôts directs, la réflexion doit bien évidemment porter sur tous les impôts directs, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu, de la CSG ou de la taxe d'habitation. Et c'est bien sur l'ensemble de ces éléments que nous travaillerons avant que le Premier ministre ne prenne une décision.

Je peux donc rassurer M. Cahuzac et lui demander comme il l'a lui-même proposé, de bien vouloir retirer son amendement.

M. le président.

Monsieur Cahuzac, le retirez-vous ?

M. Jérôme Cahuzac.

Je le retire.

M. le président.

L'amendement no 2 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements, qui, présentés par M. Gengenwin, peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

L'amendement no 488 est ainsi libellé :

« Avant l'article 3, insérer l'article suivant :

« I. - Dans le III de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un 7o ainsi rédigé :

« 7o L'ensemble des revenus de l'activité salariée des travailleurs frontaliers. »

« II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée par le relèvement à due concurrence des taux de la contribution sociale généralisée et de la contribution de remboursement de la dette sociale. »

L'amendement no 489 est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Le deuxième alinéa de l'article 15 du titre III de l'ordonnance 96-50 du 24 janvier 1996 instituant la caisse d'amortissement de la dette sociale est supprimé. »

« II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée par le relèvement à due concurrence des taux de la contribution sociale généralisée et de la contribution de remboursement de la dette sociale. »

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Ces deux amendements ont le même objet, mais l'un concerne la CSG et l'autre la CRDS. Il s'agit d'exonérer les travailleurs frontaliers du versement de ces contributions.

Le règlement européen pose le principe de l'unicité de la législation européenne, c'est-à-dire qu'une seule législation est applicable : cela vaut pour les travailleurs frontaliers. En vertu de ce principe, la législation sociale du pays où l'on travaille s'applique. Les travailleurs frontaliers ont cependant été soumis au prélèvement de la CSG de 1991 à 1994. A partir de cette date, le prélèvement a été suspendu provisoirement.

En somme, ces deux amendements tendent à faire entrer dans le droit ce qui existe dans les faits, donnant ainsi au Gouvernement l'occasion de régulariser enfin la situation et donc d'éviter à la France d'être condamnée par la Cour européenne saisie actuellement de ce dossier.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Mon argument vaut pour les deux amendements. Le problème soulevé n'est pas réglé, sous certains aspects puisque la Cour de justice des Communautés européennes n'a pas encore statué.

Il me paraîtrait donc plus raisonnable, si M. Gengenwin était d'accord, de renvoyer l'examen de ces amendements au prochain débat portant DMOS. Dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, l'avis de la commission sur ces amendements est donc défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis que M. le rapporteur. Je veux quand même rappeler que le recouvrement de la CSG sur les salaires des travaill eurs frontaliers résidant en France est suspendu depuis 1994.

M. Germain Gengenwin.

Oui je l'ai dit !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il n'y a donc pas de poursuites. Nous avons un contentieux pendant devant la cour de justice des Communautés européennes. Je crois savoir qu'il est sur le point d'aboutir. Je reconnais que c'est un vrai problème.

M. Jean-Jacques Weber.

Il concerne aussi les travailleurs frontaliers qui travaillent en Suisse.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Bien évidemment. J'ai reçu les parlementaires concernés et je connais bien la question. Je crois que nous devons attendre la décision de la Cour européenne de justice qui, d'ailleurs, devrait leur donner satisfaction. A ce qu'on nous a dit, elle devrait être prise très prochainement.

Le Gouvernement tirera bien évidemment toutes les conséquences. Je demande donc à M. Gengenwin, ainsi qu'aux frontaliers, de bien vouloir patienter encore un peu. J'espère que la Cour de justice européenne leur donnera satisfaction.

M. le président.

Monsieur Gengenwin, maintenez-vous vos amendements ?

M. Germain Gengenwin.

Ma patience est sans limite, madame la ministre. (Sourires.) Mais pourquoi voulezvous prendre le risque que la France se fasse condamner par la Cour européenne de justice ? Mes amendements donnent le moyen de régler la question et donc d'annuler tout litige. Acceptez-les, le problème sera réglé, et vous éviterez à la France d'être condamnée.

M. Jean-Jacques Weber.

Cela me semble être la voix de la sagesse.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Vous le voyez, mes chers collègues, après l'adoption de l'amendement Cahuzac, il suffira à des cadres supérieurs ou à des mandataires sociaux de passer le contrat sur une filiale étrangère et vous vous retrouverez dans la même situation ! La plupart des juristes estiment que la France va perdre devant la Cour européenne de justice : nous ne pourrons donc pas lever la CSG sur ces revenus.

M. François Goulard.

Bien sûr !

M. Charles de Courson.

Le vrai problème, c'est le défaut d'harmonisation européenne en la matière, et il est incontournable. L'amendement Cahuzac, lui, par contre, sera contourné sans aucun problème. C'est ce sur quoi je voulais attirer votre attention, mes chers collègues.

M. François Goulard.

Très juste.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 488.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 489.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Debré, Douste-Blazy, Rossi et les membres des groupes du Rassemblement pour la République, de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants ont présenté un amendement, no 559, ainsi libellé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Le premier alinéa du III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le produit de cette contribution est versé à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale sans déduction d'une retenue pour frais d'assiette et de perception ».

« II. - Les droits de consommation sur les tabacs prévus à l'article 575 A du code général des impôts sont majorés à due concurrence. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le président, un certain nombre d'amendements, dont fait partie celui que je vais défendre, ont été présentés de façon commune par l'opposition. Je vous demanderai donc, comme il est devenu de tradition, de permettre aux porte-parole de chaque groupe de s'exprimer.

Je vais de ce fait être très bref.

Cet amendement a été conçu, élaboré et voté, l'année dernière, en commission des affaires sociales sous l'impulsion d'Alfred Recours.

M. Charles de Courson.

Absolument !

M. Bernard Accoyer.

Adopté par l'Assemblée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, il a été supprimé par une loi de finances rectificative.

Réunis afin d'examiner la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 tous, les parlementaires que nous sommes, attachés à l'action sociale et à tout ce qui l'entoure, saurons certainement, comme l'année dernière s'accorder sur cet amendement. Je ne doute pas que notre rapporteur Alfred Recours et Mme la ministre, émettront, comme ils l'avaient fait l'année dernière émettrait un avis favorable.

Il s'agit d'empêcher les services fiscaux qui sont amenés à prélever les contributions sociales sur les revenus du patrimoine de procéder à une retenue pour frais d'assiette et de perception.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, mais brièvement.

M. François Goulard.

Je serai, moi aussi, très bref, monsieur le président. Comme l'a dit Bernard Accoyer, cet amendement résulte d'un épisode à rebondissements.

Nous voulons signifier notre étonnement, voire notre agacement : pour une fois que l'unanimité s'était faite sur tous les bancs de cette assemblée à propos d'une disposition qui nous paraissait équitable et de bon sens, il nous a paru particulièrement regrettable que l'insistance parfaitement déplacée d'une administration vienne contrer la décision du Parlement.

Si nous pouvions, une fois de plus, montrer que nous ne sommes pas, jusqu'à preuve du contraire, soumis à l'administration, fût-elle l'administration des finances, ce serait un petit signe, un petit geste en faveur de la démocratie.

M. le président.

Très bien ! Les membres de l'UDF sont d'accord ?

M. Charles de Courson.

Entièrement d'accord !

M. Jean-Luc Préel.

M. Accoyer et M. Goulard se sont très bien exprimés !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Monsieur le président, mes chers collègues, le rappel des faits de l'an dernier est tout à fait exact.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Oui.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Nous avons effectivement adopté...

M. Bernard Accoyer.

A l'unanimité.

M. Alfred Recours, rapporteur.

... à l'unanimité cet amendement que j'avais déposé. Il avait été ensuite voté conforme au Sénat et, revenu devant l'Assemblée, avait été une deuxième fois adopté à l'unanimité.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Selon la volonté du peuple !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Et la sagesse l'a emporté !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Par la suite, c'est vrai, une loi de finances rectificative balai - le nom, pour une fois, est bien porté - avait balayé ces dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour les réintégrer dans la loi de finances rectificative.

M. Charles de Courson.

Vous pourriez même rappeler - ce serait intéressant - à quelle heure cela s'est passé !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Nous sommes aujourd'hui dans une situation un peu particulière,...

M. Bernard Accoyer.

Ah !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... parce qu'il s'agit de retenue pour frais d'assiette et de recouvrement sur la TGAP et la CESB, deux taxes qui ne pourront pas figurer dans la loi de finances rectificative de cette année.

M. Bernard Accoyer.

Raison de plus !

M. Alfred Recours, rapporteur.

J'apprécie donc à sa juste mesure le cocasse de la situation.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles et sociales.

C'est maintenant notre réforme !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Notre collègue Accoyer aura sûrement remarqué que j'y ai fait allusion dans mon rapport écrit...

M. Bernard Accoyer.

Bien sûr !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... au tout début dans le paragraphe situé où j'énumère les dispositions adoptées l'année dernière qui n'ont pas pu trouver de conclusion positive dans le courant de l'année 1999.

J'ai même signalé, dans mon rapport, que j'avais demandé par écrit des renseignements sur ce point précis, mais que je n'avais obtenu aucune réponse.

M. François Goulard.

C'est normal, vous êtes rapporteur ! (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Autre détail cocasse : l'an dernier, l'amendement avait été déposé par un député de l'Eure ; cette année, c'est encore un député de ce département, Jean-Louis Debré en l'occurrence, qui le présente.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. Debré n'est pas là, faudra attendre l'année prochaine.

(Sourires.)

M. François Goulard.

On peut le réveiller, s'il le faut !

M. Alfred Recours, rapporteur.

A titre personnel, je ne peux me dédire (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union de la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), mais cet amendement n'a pas été examiné par la commission, à laquelle il n'a pas été soumis. Considérant que chacun de nos collègues est parfaitement éclairé sur cette question, je m'en remets à la sagesse d'une assemblée qui fut, à un moment, unanime sur ce point.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement n'a pas changé d'avis depuis l'année dernière et l'Assemblée s'honorerait en ne se déjugeant pas par rapport au vote final qu'elle avait émis alors. Soyons francs : il est tout à fait logique qu'un service qui intervient pour percevoir un prélèvement pour le compte d'autrui soit rémunéré,...

M. Bernard Accoyer.

Et les impôts, ça sert à quoi ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... c'est une question de transparence des coûts. Je demande donc à l'Assemblée de faire preuve de la même sagesse que l'année dernière. Le Gouvernement est opposé à cet amendement. Je vois bien que M. Recours lui-même...

M. Jean-Luc Préel.

Baisse les yeux !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... baisse les yeux, en effet. (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Il ne baissera peut-être pas la main !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Peutêtre pas, l'important reste qu'il n'y en ait pas trop de levées. (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 559.

(L'amendement est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Luc Préel.

Mes chers collègues de la majorité, je vous félicite d'avoir fait passer cet amendement !

M. Bernard Accoyer.

Nous avons un bon rapporteur et un bon président !

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 108, présenté par M. Recours, rapporteur, MM. Charles, Pontier et Mme Robin-Rodrigo, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. A la fin du troisième alinéa du III de l'article L.

136-6 du code de la sécurité sociale, la somme "160 francs" est remplacée par la somme "400 francs". »

« II. Les pertes de recettes éventuelles pour les organismes de sécurité sociale résultant de l'application de ces dispositions sont compensées, à due concurrence, par une augmentation du taux de la contribution mentionnée à l'article L.

136-1 du même code. »

L'amendement no 3, présenté par M. Cahuzac, rapporteur pour avis, MM. Bonrepaux, Migaud et Idiart, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans le troisième alinéa du III de l'article L.136-6 du code de la sécurité sociale, la somme de " 160 francs" est remplacée par la somme de "400 francs".

« II. La perte de recettes est compensée, à due concurrence, pour les organismes de sécurité sociale concernés, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Cet amendement, nous avons comme celui dont nous avons déjà débattu tout à l'heure, a trait à la CSG. Nous avons fort justement institué, vous le savez, un prélèvement sur les revenus du capital. Mais tous ceux qui, à l'image de nos glorieux aînés, restent près du terrain, auront pu constater que le dispositif retenu, en contrepartie d'un bénéfice relativement modéré, entraînait quelques complications pour des retraités non imposables qui avaient peut-être un peu de mal à se faire à l'impôt nouveau et fort moderne que notre assemblée avait adopté au terme de débats houleux, voilà maintenant près de dix ans. C'est la raison pour laquelle il est proposé de relever de 160 à 400 francs le seuil de recouvrement de la CSG sur les revenus du capital.

Je souhaite évidemment que cet amendement soit adopté. Nous avons eu à ce sujet un débat fort intéressant en commission des finances. J'ai cru comprendre que nos collègues de la commission des affaires sociales nous avaient suivis. Je forme le voeu que l'opposition en fasse de même, afin que notre Assemblée unanime donne le témoignage de sympathie que méritent les retraités non imposables qui, malgré tout, disposent de revenus sur le capital, au demeurant fort modestes.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement no 3 et donner l'avis de la commission sur l'amendement no 108.

M. Alfred Recours, rapporteur.

L'avis de la commission ne peut être que favorable, puisque son amendement no 3 est d'esprit identique.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement est favorable à ces amendements. Ajoutons aux excellentes explications de M. le rapporteur pour avis que le relèvement de 160 à 400 francs amènera le seuil de recouvrement à un niveau identique à celui appliqué pour l'impôt sur le revenu. La disposition a en outre le mérite de la simplification !

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Vous vous souvenez tous, mes chers collègues, du débat que nous avions eu l'année dernière (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) sur le problème de nos concitoyens modestes, dont une partie des revenus provient d'un petit patrimoine et qui se retrouvent de fait taxés au premier franc.

Aussi défendrai-je avant l'article 2 deux amendements, dont l'un est identique à celui que j'avais présenté l'année dernière, en proposant une exonération pure et simple des petits revenus.


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On m'avait objecté le coût et, en effet, le vrai problème est là. Or un seuil de 400 francs signifie 4 000 francs de revenus du patrimoine. En d'autres termes, cela ne résout absolument rien. La seule vraie solution viendra de l'amendement dont nous discuterons un peu plus loin, qui propose une exonération de la CSG sur les revenus du patrimoine dès lors que la totalité de ressources de l'intéressé - patrimoine et pensions - est inférieure au minimum de solidarité. Chacun sait en effet que le minimum solidarité est exonéré de CSG.

Cela dit, un problème technique se pose : la situation de l'intéressé n'est pas connue au moment où la CSG est prélevée. C'est pourquoi j'ai proposé le mécanisme tout simple du remboursement sur simple demande. Comment en effet procéder autrement lorsque les revenus du patrimoine ont deux ou trois origines ? Prenons le cas d'un retraité qui a hérité de ses parents deux ou trois terres d'un hectare et demi, lui rapportant chacune 800 francs par an, auxquelles s'ajoute un petit portefeuille de 50 000 francs qu'il se sera mis de côté tout au long de sa vie active. Cela lui fera au total un revenu de 2 000 à 3 000 francs, avec un taux de prélèvement variable selon l'origine. Auquel cas, comment parviendrez-vous à appliquer l'abattement de 400 francs ? Allez-vous l'appliquer pour chaque source de revenus du patrimoine ? La seule solution techniquement valable reste le remboursement à la demande de l'intéressé, dès lors que ses ressources, tous revenus confondus, sont inférieures au minimum de solidarité.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alfred Recours, rapporteur.

La règle est simple : c'est la même que celle qui s'applique pour le recouvrement de l'impôt sur le revenu. Ces 400 francs n'ont pas été proposés au hasard...

M. Charles de Courson.

Oui, on avait compris !

M. Jean-Luc Préel.

Mais cela ne résout pas le problème !

M. le président.

Le Gouvernement lève-t-il le gage sur les amendements nos 108 et 3 ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Finalement oui, monsieur le président. (Sourires.)

M. le président.

Dans ces conditions, les deux amendements deviennent identiques ! Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 108 et 3, compte tenu de la suppression du gage.

(Ces amendements, ainsi modifiés, sont adoptés.)

M. le président.

Je relève que le vote a été acquis à l'unanimité.

M. Recours, rapporteur, Mme Fraysse et Mme Jacquaint, M. Gremetz et les commissaires membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 109 rectifié, ainsi libellé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« Après l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 241-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 241-2-1. - I. - Tout employeur ayant la qualité de personne morale de droit privé occupant un ou plusieurs salariés doit s'assurer contre le risque de non-paiement des sommes dues dont il est redevable au titre de cotisations aux organismes du régime général de sécurité sociale.

« II. Le régime d'assurance est mis en oeuvre par une association créée par les organisations nationales professionnelles d'employeurs les plus représentatives et agréée par le ministre chargé de la sécurité sociale.

« Cette association passe une convention avec l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

« III. L'assurance est financée par des cotisations des employeurs assises sur les rémunérations servant de base au calcul des contributions au régime d'assurance chômage défini par la section première du chapitre premier du titre IV du livre III du code du travail.

« IV. En cas de retard supérieur à deux mois dans le paiement des cotisations, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales établit les relevés des créances que l'association lui verse dans les huit jours suivant la réception des relevés.

« V. Un décret précise les conditions d'application du présent article. »

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Cet amendement s'attaque à une question importante que nous posons, nous, depuis des années : le recouvrement des dettes patronales. Vous avez déjà dû en entendre parler ; c'est comme l'Arlésienne, on ne le voit jamais... Or il faut savoir, que, sur les quelque 100 milliards de dettes patronales cumulées, 40 milliards environ sont recouvrables.

Il serait bon que, à l'exemple des salariés qui se voient sanctionner sitôt qu'il commettent une petite erreur, les patrons - Etat patron ou patrons privés - paient normalement ce qu'ils doivent à la sécurité sociale.

J'aurais évidemment préféré un recouvrement assorti de délais bien précis, afin que l'on puisse immédiatement récupérer toutes les sommes dues. Mais cela semblait bien trop osé... D'où finalement cet amendement, que la commission a retenu. Le but est d'abord de recouvrer toutes les dettes patronales actuellement recouvrables, ensuite de mettre en place un fonds de mutualisation afin d'éviter que les retards de paiement ne se renouvellent et s'accumulent au fil des ans, pour représenter comme aujourd'hui une centaine de milliards de francs qui seraient bien utiles au développement économique, social et humain. Cet amendement paraît finalement très modéré.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

J'ai effectivement marqué ma sympathie pour cet amendement que la commission a du reste adopté. J'avais toutefois précisé que mon approbation s'entendait sous réserve d'expertises techniques. J'ai ainsi pu réunir entre-temps un certain nombre d'informations.

M. Gremetz a raison : le montant cumulé des sommes non recouvrées atteint 92 milliards de francs dont une une bonne part correspond à des créances irrécouvrables dues au fil des ans par des entreprises...

M. François Goulard.

Qui ont déposé le bilan !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... qui ont, par exemple, disparu. Dans d'autres circonstances, on n'en parlerait tout simplement plus.

Cela dit, cette affaire n'en mérite pas moins réflexion.

Ainsi, en 1998, 15 milliards n'ont pu être recouvrés par l'ACOSS - et dans ce cas, il n'est pas question de cumul.

Or ces 15 milliards correspondent exactement au double


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des sommes, que nous nous efforçons depuis plusieurs semaines de trouver afin d'assurer l'équilibre du fonds d'allègement des charges sociales. Autrement dit, pour faibles qu'ils soient en pourcentage - de l'ordre de 1,5 % - les montants en valeur absolue n'ont rien de négligeable.

Au demeurant, l'adoption en l'état de l'amendement de notre collègue viendrait quelque peu en contradiction avec un autre raisonnement assez largement partagé au sein de la commission, selon lequel on ne saurait taxer indéfiniment la masse salariale. Or la cotisation mutualisée proposée par M. Gremetz ne serait pas calculée sur la base d'une valeur ajoutée, encore moins celle d'un ratio à établir entreprise par entreprise, mais bien sur la masse salariale.

M. Gérard Bapt.

C'est exact.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Les éléments techniques d'expertise dont je viens de faire état confirment l'ampleur du problème soulevé par M. Gremetz, mais tendent aussi à montrer que la solution législative retenue n'est pas forcément la bonne. Je souhaite donc que la question soit réexaminée à une autre occasion, au vu de tous les éléments que je m'étais engagé à vous fournir.

M. Gérard Bapt.

Ce serait sage.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Sous le bénéfice de ces indications, il serait bon que l'amendement soit retiré.

M. le président.

Monsieur Gremetz, souhaitez-vous retirer votre amendement ?

M. Maxime Gremetz.

Soyez plus précis, monsieur ler apporteur. Si vous proposez que nous élaborions ensemble, d'ici la deuxième lecture, un nouvel amendement de nature à permettre le recouvrement des dettes patronales tout en évitant les éventuels effets pervers, je veux bien l'envisager. Mais renvoyer à une discussion ultérieure est une promesse bien trop vague pour que je retire mon amendement. J'attends de vous de la rigueur et de la précision.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il faut rappeler de quoi nous parlons. Les sommes non recouvrées par la sécurité sociale sont tout de même moins i mportantes aujourd'hui qu'hier. Le pourcentage pour 1998, dernière année connue, est de 1,24 % contre 1,93 % en 1993. Il s'agit du pourcentage de cotisations qui ne rentrent pas spontanément. Les URSSAF évidemment interviennent sur ce reste à recouvrer, avec des résultats somme toute très encourageants, puisque, au final, le taux de non-recouvrement n'est plus que de 0,72 %. Je reconnais que c'est encore trop et qu'il nous faut nous rapprocher le plus possible du taux zéro.

Autant vous le dire simplement, le système proposé par M. Gremetz ne me satisfait pas. Non que je nie la réalité du problème ; je crois tout au contraire qu'il nous faut poursuivre nos efforts. Je dois à cet égard saluer le travail des URSSAF qui continuent à enregistrer des progrès dans le recouvrement.

Mais le dispositif proposé amènerait à une mutualisation du risque. Non seulement la cotisation conduirait évidemment à renchérir le coût du travail, mais elle pourrait avoir pour effet d'inciter les employeurs à ne pas payer ce qu'ils doivent, puisqu'ils se sentiraient en quelque sorte assurés. Ce prélèvement supplémentaire reviendrait de fait à surtaxer les bons payeurs et à les pénaliser par rapport aux autres.

Je préfère de beaucoup que nous continuions à travailler avec les URSSAF pour améliorer les résultats, d'ores et déjà encourageants, qu'elles ont obtenus dans le recouvrement des cotisations - de ce point de vue, je partage totalement l'objectif de M. Gremetz -, plutôt que de mettre en place un système qui pourrait avoir un effet pervers et contraire à l'objectif visé. Je lui demande par conséquent de retirer son amendement.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Cet amendement est le type même de la mauvaise idée. Mme la ministre nous a indiqué où en était le taux de recouvrement. C'est l'un des meilleurs de tous les prélèvements obligatoires français, bien meilleur que celui des impôts...

M. Maxime Gremetz.

Et pour l'impôt sur la fortune, on en est à combien, monsieur Charles-Amédée de Courson ?

M. Charles de Courson.

... pour lesquels le taux de non-recouvrement atteint en moyenne 4 ou 5 % - sans parler de la Corse où il s'élève à 20 % ! Les URSSAF disposent en effet d'outils beaucoup plus puissants en la matière et constituent des structures très efficaces, même si le taux de mortalité des entreprises s'en ressent.

Mon cher Maxime,...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Quelle collusion ! (Sourires.)

M. Charles de Courson.

... quelle serait la conséquence de l'amendement que vous proposez s'il venait à être voté ? Tout simplement vous feriez payer aux bons payeurs le coût des mauvais payeurs. Trouvez-vous cela conforme à l'idée de justice ? Certainement pas. Au surplus, il faudrait retenir comme objectif un taux de l'ordre de 1 % puisque nous étions déjà à 1,28 % l'année dernière. Or il est pratiquement impossible de descendre en dessous de 1 % sur une moyenne période. Si le taux s'améliore, c'est parce que la situation économique devient plus favorable. Que survienne un ralentissement économique et le taux se dégrade. Il faudrait par conséquent retenir une fourchette entre 1 et 1,5 %. Serait-il juste de le faire supporter aux entreprises qui paient leurs cotisations rubis sur l'ongle ? Je pense que non.

Pourquoi au demeurant y aurait-il besoin de mutualiser, dès lors que l'énormité de l'assiette revient à une mutualisation de fait ? Ou alors il faut en tirer toutes les conséquences et baisser les cotisations de 1 %, à hauteur de l'amélioration obtenue.

M. Maxime Gremetz.

Vous n'en payez déjà plus depuis longtemps !

M. Charles de Courson.

C'est donc vraiment le type même de la fausse bonne idée.

M. le président.

La parole est à M. Goulard.

M. François Goulard.

Je comprends que l'on défende le point de vue des URSSAF. Il est normal que ces organismes cherchent à recouvrer le maximum de cotisations dues. Mais ne négligeons pas pour autant le point de vue des entreprises assujetties. Elles ne sauraient être indéfiniment corvéables et taillables à merci. La disposition proposée par M. Gremetz conduirait à créer une assurance dont le coût alourdirait fatalement la charge qui pèse sur elles.

J'ajoute enfin, pour l'avoir très fréquemment constaté, que les URSSAF ont quelquefois tendance à se montrer par trop rigoristes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Combien d'entreprises - je le dis avec solennité - sont mortes d'une action trop vigoureuse de recouvrement, définitivement condamnées dès lors que les URSSAF ont inscrit leur privilège sur le fonds de commerce ou sur les biens de la société ? L'accès au crédit leur devient immédiatement interdit ; c'est le dépôt de bilan programmé.

Attention le recouvrement est bien sûr : un but, mais la fin ne saurait tout permettre.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 109 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement no 560 est présenté par MM. Rossi, Douste-Blazy, Debré et les membres des groupes Démocratie libérale et Indépendants, de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du Rassemblement pour la République ; l'amendement no 593 par MM. Gantier, Goulard, Mattei, Dord, Nicolin, Proriol, Perrut et Jacquat.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans le deuxième alinéa (a) du I de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, après les mots : "déterminé et", sont insérés les mots : ", à l'exception des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans,".

« II. Les pertes de recettes pour les régimes de sécurité sociale sont compensées, à due concurrence, par une cotisation additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts, dont le produit est affecté aux régimes de sécurité sociale. »

L'amendement no 592, présenté par MM. Gantier, Goulard, Mattei, Dord, Nicolin, Proriol et Jacquat, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans le deuxième alinéa (a) du I de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, après les mots : "déterminé et", sont insérés les mots : ", à l'exception des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans atteintes d'une des affections longues et coûteuses visées aux quatrième (3o ) et cinquième (4o ) alinéas de l'article L. 322-3,".

« II. Les pertes de recettes pour les régimes de sécurité sociale sont compensées, à due concurrence, par une cotisation additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts dont le produit est affecté aux régimes de sécurité sociale. »

Monsieur Goulard vous soutenez ces trois amendements, je vous en sais capable... (Sourires.)

M. François Goulard.

Votre confiance me touche, monsieur le président ! Ces amendements ont pour but d'étendre les exonérations de charges sociales aux personnes employant des aides à domicile. Le code de la sécurité sociale prévoit déjà des exonérations de ce genre dans quelques cas précis, par exemple lorsque des gens ont à charge un enfant handicapé. Nous proposons d'étendre la disposition au bénéfice des employeurs âgés de plus de soixantequinze ans, qui ont très fréquemment recours à des aides à domicile.

J'ajoute que la collectivité a bien souvent intérêt à ce que ces personnes restent à leur domicile. Non seulement cela améliore le confort personnel et la qualité de vie des intéressés, mais évite à la collectivité d'avoir à prendr e à sa charge leur accueil dans une structure par nature coûteuse.

Nous avons prévu un amendement de repli, l'amendement no 592, pour le cas où, manquant à sa sagesse traditionnelle, notre assemblée n'adopterait pas les amendements nos 560 et 593. L'exonération concernerait les p ersonnes âgées de plus de soixante-quinze ans et atteintes d'affections longues et coûteuses telles qu'elles sont définies par le code de la sécurité sociale. C'est une mesure éminemment sociale et, je crois, intéressante pour la collectivité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Les amendements nos 560 et 593 remettent en cause le plafonnement que nous avons adopté l'année dernière. Pour ne prendre qu'un exemple, si M. Jaffré était âgé de plus de soixantequinze ans, il pourrait bénéficier de l'exonération que vous proposez. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il ne faut pas oublier non plus que les emplois en question peuvent aussi ouvrir droit à une déduction fiscale à ceux qui paient des impôts sur le revenu.

Dans ces conditions, je ne vois pas d'intérêt à revenir sur la discussion que nous avons eue l'an dernier. Vous avez fait allusion à la sagesse de notre assemblée. La commission a rejeté ces amendements par cohérence avec le travail déjà effectué.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

C'est un vrai problème et nous avons voté, le 23 décembre dernier, une exonération de charges sociales pour les personnes qui emploient une aide à domicile.

L'amendement de repli est intéressant puisqu'il concerne les personnes atteintes de longue maladie. Je rappelle que la PSD vient en complément de l'aide à domicile qui peut être allouée par les caisses d'assurance vieillesse.

M. François Goulard.

Vous êtes les premiers à dire que c'est insuffisant !

M. Pascal Terrasse.

A l'occasion du DMOS annoncé par la ministre aujourd'hui même, il faudra prendre en compte un certain nombre de maladies de longue durée, et particulièrement la maladie d'Alzheimer.

Le débat est ouvert et nous aurons l'occasion d'évoquer à nouveau ce problème dans le courant de l'année prochaine.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 560 et 593.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 592.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements qui, présentés par Mme Fraysse, Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste, pourraient faire l'objet d'une présentation commune.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

L'amendement no 75 est ainsi libellé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« Dans le paragraphe 1 de la sous-section 2, de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 242-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 242-4-1. Le taux de la cotisation est modulé pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale. Le comité d'entreprise, ou à défaut, les délégués du personnel, sont associés au contrôle de ce ratio. »

L'amendement no 76 est ainsi libellé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« Dans le paragraphe 2 de la sous-section 2, de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 242-4-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 242-4-2. Le taux de la cotisation est modulé pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale. Le comité d'entreprise, ou à défaut, les délégués du personnel, sont associés au contrôle de ce ratio. »

P ourriez-vous les défendre en même temps, madame Fraysse ?

Mme Jacqueline Fraysse.

Tout à fait, monsieur le président. Ces amendements tendent à réformer l'assiette des cotisations pour rééquilibrer la contribution sur les revenus du travail et du capital.

La part des salaires dans la valeur ajoutée globale a beaucoup diminué par rapport à l'époque où la sécurité sociale a été instaurée. Il est donc nécessaire d'élargir l'assiette de cotisations patronales à l'ensemble des richesses produites. Cependant, pour être actifs et favoriser l'emploi, nous proposons de moduler cette cotisation en fonction de la part consacrée aux salaires dans la valeur ajoutée globale.

Cette réforme aurait plusieurs vertus. Elle rapporterait de l'argent aux caisses, qui en ont besoin. Elle favoriserait les entreprises à fort taux de main-d'oeuvre ou créatrices d'emplois. Elle pénaliserait, à l'inverse, les entreprises qui licencient ou recourent au travail précaire. Elle serait donc un frein à la spéculation. Enfin, elle permettrait d'accentuer les prélèvements sur les revenus du capital et d'alléger les prélèvements sur les revenus du travail.

(Exclamations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Ces protestations me sont un hommage ! Mon amendement est donc un bon amendement, c'est vérifié ! Telle est donc notre démarche, s'agissant de l'assurance maladie et de l'assurance vieillesse.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

La mesure proposée n'est pas simple à comprendre et pas simple à appliquer dans chaque entreprise. Les taux seraient totalement différents d'une entreprise à l'autre. Bonjour la transparence ! J'avais souhaité que l'on utilise la valeur ajoutée comme base pour la réforme des cotisations patronales, m ais les mesures proposées dans l'article 2 me conviennent par ailleurs. Nous sommes déjà, en effet, dans le débat sur l'article 2.

Dans la valeur ajoutée d'une entreprise, il y a toute la masse salariale, et l'utilisation de la TGAP et d'une contribution sur les bénéfices pour les entreprises réalisant plus de 50 millions de chiffre d'affaires permet de se rapprocher de cette notion. Par contre, une modulation sur les ratios entreprise par entreprise ne peut offrir une perspective.

On ne peut régler un tel problème en trois lignes. La commission est donc défavorable à ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. le rapporteur a tout dit. Pour financer les 25 milliards complémentaires de baisse de charges, le Gouvernement fait appel à une taxe sur les bénéfices et à une taxe sur les activités polluantes, qui vont taxer davantage les entreprises capitalistiques que les autres.

Si le mécanisme n'est pas tout à fait le même, les objectifs sont les mêmes. Attendons l'article 2. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

M. le président.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt.

Ayant remis à l'office parlementaire d'évaluation de la dépense publique un rapport sur les aides à l'entreprise, je ne peux qu'avoir une grande sympathie pour cet amendement, même si je pense, comme M. Recours, qu'il est un peu bref pour couvrir l'ampleur du problème.

Mme la ministre vient de nous expliquer que la cotisation sociale sur l'impôt sur les sociétés rejoignait la taxation sur la valeur ajoutée. Cela dit, il est très possible que ce chantier soit rouvert dans les années qui viennent et que la perspective d'une discrimination entreprise par entreprise selon la politique d'emploi de chacune d'elles puisse être abordée plus largement que sous l'angle d'une simple cotisation sur l'IS.

Je pense notamment à un système de bonus-malus dont on a parlé après quelques événements sociaux récents qui ont ému l'opion publique. Les entreprises qui licencient sont souvent des entreprises de main-d'oeuvre.

Les entreprises hautement capitalistiques, elles, ne sont pas appelées à licencier. Leur masse salariale est relativement faible et elles ne subiraient pas une telle taxation.

Une référence au rapport de la masse salariale à la valeur ajoutée serait sûrement beaucoup plus opérante à cet égard.

Cela dit, le Gouvernement est allé dans le sens que nous souhaitons tous, une référence à la valeur ajoutée dans le prélèvement social sur l'entreprise. Je pense donc, madame Fraysse, comme M. Recours, et tout en partageant votre préoccupation, qu'il serait opportun que vous retiriez ces amendements, sachant que nous aurons vraisemblablement l'occasion d'en reparler dans les prochaines années.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Cet intéressant débat démontre une seule chose, c'est que nos collègues qui parlent de valeur ajoutée ne savent pas de quoi il s'agit. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Pas de mépris !

M. Maxime Gremetz.

Il va nous expliquer !

M. François Goulard.

La valeur ajoutée, c'est une donnée économique mais aussi une donnée comptable dans les comptes des entreprises. Dire comme Mme Fraysse que cette notion va permettre de sanctionner les entreprises qui réduisent l'emploi pour sous-traiter, c'est tout simplement dénué de sens pour la bonne raison que,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

dans ce cas-là, la valeur ajoutée baissera en même temps que la masse salariale. Le contrôle du fameux ratio par le comité d'entreprise, qui, comme chacun sait, est tout à fait en mesure de le faire, ne donnera donc rien.

Ce qu'a dit M. Recours sur les cotisations sociales, davantage assises désormais sur la valeur ajoutée que sur la masse salariale grâce, par exemple, à la taxe sur les activités polluantes, est aussi absurde. On a un impôt tout à fait spécifique qui va concerner quelques activités bien particulières. Pour la grande masse des entreprises, les cotisations restent assises sur la masse salariale, laquelle, il faut quand même le rappeler, constitue la plus grande part de la valeur ajoutée de la plupart des entreprises.

M. Maxime Gremetz.

On va en parler.

M. François Goulard.

Tous les propos qui viennent d'être tenus sont donc des propos de circonstance, sans aucune réalité comptable ou économique.

M. le président.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse.

Moi, je ne connais rien à la valeur ajoutée mais M. Goulard, qui, lui, y connaît quelque chose, considère qu'il ne faut surtout pas soutenir la démarche que je propose. Cela suffit à confirmer que ma représentation de la valeur ajoutée est la bonne.

Nous ne sommes pas attachés à une technique particulière, et je veux bien admettre que telle proposition concrète n'est pas applicable ou doit être modifiée, mais, comme vient de le dire M. Bapt, il est impératif d'aller vers une prise en compte de l'ensemble des profits - ce mot-là vous convient peut-être mieux ! - par un mécanisme incitant à créer des emplois et dissuadant les placements spéculatifs.

C'est la démarche que nous voulons impulser. Nous tenons à ce débat et nous tenons surtout à ce que des pas soient faits en ce sens. C'est la raison pour laquelle, sans m'attacher à la technique précise que nous proposons, je ne retire pas ces amendements. Je souhaite que l'on se prononce sur notre préoccupation.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

75. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

76. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Monsieur Bapt, je vais vous donner la parole pour défendre votre amendement no 19 qui est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. L'article 6-1 de la loi no 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social est ainsi modifié :

« a) Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "vingtquatre mois" sont par deux fois remplacés par les mots : "douze mois" et les mots : "trente-six mois" sont remplacés par les mots : "dix-huit mois".

« b) Dans le dernier alinéa, les mots : "dixh uit mois" sont remplacés par les mots : "neuf mois".

« II. Les dispositions du présent article s'appliquent aux embauches réalisées à compter du 1er janvier 2000. »

Pouvez-vous également défendre votre amendement no 20 ?

M. Gérard Bapt.

Tout à fait, monsieur le président, puisque c'est un amendement de repli.

M. le président.

L'amendement no 20 ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. L'article 6-1 de la loi no 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social est ainsi modifié :

« a) La première phrase de l'avant-dernier alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : "L'exonération porte sur une période de douze mois à compter de la date d'effet du contrat de travail.

Cette période est portée à vingt-quatre mois pour lese mbauches faites par les associations visées au deuxième alinéa de l'article 6".

« b) Dans la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa, les mots : "vingt-quatre mois" sont remplacés par les mots : "douze mois ou de vingt-quatre mois" et les mots "trente-six mois" sont remplacés par les mots : "dix-huit mois ou trente-six mois".

« c) Dans le dernier alinéa, les mots : "dixhuit mois" sont remplacés par les mots : "neuf mois ou dix-huit mois".

« II. Les dispositions du présent article s'appliquent aux embauches réalisées à compter du 1er janvier 2000. »

Vous avez la parole, monsieur Bapt.

M. Gérard Bapt.

Il s'agit de donner suite aux propositions de la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances dont l'objet est de rendre la dépense publique la plus efficace possible.

L'un des budgets examinés par la MEC fut celui du travail et de l'emploi. Un certain nombre d'approches ont été réalisées, dont celle concernant l'exonération des charges sociales pour l'embauche du premier salarié par les entreprises et les associations.

L'une des mesures proposées par la MEC au mois de juin dernier, votée la semaine dernière lors de l'examen du projet de loi de finances, est la suppression du crédit d'impôt sur les sociétés de 10 000 francs par emploi créé, qui était un pur effet d'aubaine. La mesure correspond à une recette d'environ 1 milliard de francs pour l'Etat dès l'an 2000.

L'amendement no 19 est une proposition qui avait été émise lors de l'audition de représentants des fédérations patronales, le MEDEF et l'UPA, ceux-ci ayant expliqué qu'ils préféraient bénéficier d'un allégement de charges important et durable plutôt que d'aides ciblées et temporaires. Cette proposition avait été formulée avant que ne soit connu l'allégement des charges sur les bas et les moyens salaires qui vient d'être introduit et que nous allons ensemble discuter et, je pense, voter : ce qui limite considérablement l'économie attendue de l'amendement, non pas en 2000 puisqu'il ne s'agissait que de la seconde année, mais en 2001.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Il fallait le retirer !

M. Gérard Bapt.

La recette est d'autant plus limitée que, l'an dernier, à l'initiative du Gouvernement et de Mme la ministre, l'exonération de charges avait été forfaitisée au niveau du SMIC, et non pas étendue à l'ensemble du salaire du premier salarié concerné.

Je sais que la commission a rejeté ces amendements, eu égard à l'ensemble des objections que je viens d'évoquer.

Voilà pourquoi, monsieur le président, si tel est le souhait du Gouvernement, je les retirerai.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je remercie M. Bapt de bien vouloir retirer ses amendements.

M. le président.

Les amendements nos 19 et 20 sont retirés.

Les deux amendements nos 73 et 1 rectifié peuvent être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 73, présenté par M. Gremetz, Mmes Jacquaint et Fraysse, et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« La loi no 97-227 du 25 mars 1997 créant des plans d'épargne retraite est abrogée. »

L'amendement no 1 rectifié, présenté par M. Cahuzac, rapporteur pour avis, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« La loi n p 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite est abrogée, à l'exception de ses articles 19 et 32. »

Sur cet amendement, MM. Accoyer et Mariani ont présenté un sous-amendement, no 407, ainsi rédigé :

« I. Compléter l'amendement no 1 rectifié par les mots : "à compter de l'extension aux salariés et anciens salariés du secteur privé, aux non-salariés non agricoles et aux exploitants et salariés agricoles du bénéfice des retraites complémentaires par capitalisation". »

« II. Compléter cet amendement par le paragraphe suivant :

« La perte de recettes résultant de cette disposition est compensée pour l'Etat par une augmentation, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir l'amendement no

73.

M. Maxime Gremetz.

Par cet amendement, qui va de soi, puisqu'il tend à mettre en oeuvre une décision prise par l'Assemblée il y a deux ans, il s'agit d'abroger la loi Thomas créant les fonds de pension.

J'avais demandé, au nom du groupe communiste, l'abrogation de ce texte, puisque tout le monde s'accordait à reconnaître que la loi Thomas, même si elle créait des fonds de pension à la française, n'était pas une bonne loi. Et quand une loi n'est pas bonne, il vaut mieux l'abroger...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Absolument !

M. Maxime Gremetz.

... plutôt que de réclamer en permanence de ne pas publier les décrets d'application.

Le Gouvernement s'était engagé à procéder à cette abrogation dès qu'un texte législatif le permettrait.

J'ai interrogé Mme la ministre à ce sujet, notamment quand elle a présenté la loi de financement de la sécurité sociale en commission, et elle m'a confirmé la volonté du Gouvernement d'abroger ce texte.

J'ai donc déposé cet amendement pour que Mme la ministre puisse indiquer à la représentation nationale quand la loi Thomas pourra être abrogée, car maintenant il s'agit de passer à l'acte. Quand et comment allons-nous abroger la loi Thomas ?

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement no 1 rectifié.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Il faut rendre à César ce qui appartient à César.

M. François Goulard.

Ici, il s'agit de Maxime !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Il est exact que, l'an dernier, M. Gremetz avait déposé un amendement pour abroger la loi Thomas.

Si j'ai présenté l'amendement no 1 rectifié à la commission des finances, qui l'a adopté, c'est pour trois grandes raisons sur lesquelles je pourrai revenir si vous le souhaitez. J'estime que la loi Thomas ne permettrait pas d'atteindre les objectifs que son auteur lui avait assignés pour les salariés du privé.

L'amendement no 1 rectifié n'est pas tout à fait identique à celui de M. Gremetz dans la mesure où il propose de maintenir les articles 19 et 32 de la loi Thomas : le premier prévoit de réserver préférentiellement aux retraités de France Télécom l'éventuelle ouverture d'une partie du capital, le second tend à mettre de l'ordre dans la durée des mandats des personnes désignées pour contrôler le secteur des assurances. Si j'ai souhaité épargner ces deux articles, c'est parce que je ne vois pas bien le rapport avec la loi Thomas.

En toute hypothèse, et en fonction de la réponse que Mme la ministre pourrait faire, je conseille à M. Gremetz de retirer son amendement, dans la mesure où un prochain DMOS - ce qui exclut tout risque de cavalier qui sera examiné au printemps devrait permettre de régler le problème.

Sous réserve d'un tel engagement formel, il va de soi que je retirerai mon amendement, ce qui aura la redoutable conséquence de faire tomber le sous-amendement de M. Accoyer.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

La commission a rejeté les deux amendements et donc, indirectement, le sousamendement. Si ces amendements n'étaient pas retirés, je serais contraint d'en demander le rejet.

L'an dernier, par un trait d'humour qui a cours ici, le même type d'amendement avait été repris par l'opposition et soumis à un vote par scrutin public. Il ne me paraît pas indispensable de renouveler l'expérience. L'opposition va-t-elle recommencer ? Nous allons bien voir !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Comme l'ont très bien rappelé Maxime Gremetz et Jérôme Cahuzac, la loi Thomas a été contestée sur de nombreux points. Elle bénéficie aux titulaires des revenus les plus élevés, qui ont seuls les moyens d'épargner. Elle fragilise les comptes de la sécurité sociale en limitant les exonérations de cotisations pour les fonds de pension. De plus, les partenaires sociaux ne sont absolument pas associés à sa mise en oeuvre et à son contrôle. Il s'agit donc de plans d'épargne réservés à certains, avec des avantages tout à fait exorbitants, notamment en matière sociale.

L'année dernière, à la demande de Maxime Gremetz et du groupe communiste, le Gouvernement avait accepté le principe de l'abrogation de la loi Thomas assurant que ce texte serait abrogé dès qu'un support législatif le permettrait. Je ne peux que vous confirmer la volonté du Gouvernement, puisque la loi portant diverses dispositions d'ordre social inscrite au programme du Parlement au printemps prochain devrait comporter l'abrogation de la loi Thomas.

Tous en partageant vos objectifs, je vous demande, monsieur Gremetz, de bien vouloir, comme vous l'avez proposé, retirer votre amendement.

M. le président.

Monsieur Gremetz, le retirez-vous ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. Maxime Gremetz.

Mme la ministre m'ayant donné l'assurance que l'abrogation de la loi Thomas figurera dans le prochain DDOS, je retire mon amendement.

M. Charles de Courson.

Je le reprends !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Je confirme mon retrait de l'amendement no 1 rectifié.

M. le président.

L'amendement no 73 retiré par

M. Gremetz, est repris par M. de Courson.

L'amendement no 1 rectifié est retiré.

M. Bernard Accoyer.

Dans ces conditions, je rectifie mon amendement no 407, pour l'appliquer à l'amendement no

73.

M. le président.

Le sous-amendement est ainsi rectifié.

L'amendement no 73 de M. de Courson et sousamendé par le sous-amendement no 407 rectifié de M. Accoyer.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je voudrais appeler l'attention de nos collègues sur ce qui est en train de se passer et sur le sort que l'on veut réserver à la loi sur les fonds de pension adoptée ici même en 1997. Tout cela est extrêmement grave.

Chacun le sait, l'avenir des retraites en France n'est pas assuré.

M. Gérard Bapt.

Celui de la droite non plus !

M. Bernard Accoyer.

Pourtant, un certain nombre de dispositions ont été prises au cours des années. Certaines é taient seulement contemplatives, d'autres étaient concrètes. Je voudrais les rappeler.

En 1989, M. Teulade a commencé à s'inquiéter de l'avenir des retraites.

En 1991, M. Rocard n'avait toujours rien fait. Puis, il a commandé un livre blanc, qui a fait apparaître que le système de retraite français par répartition ne permettrait pas, dès l'année 2005 - et nous y sommes -, de couvrir les pensions de vieillesse quand les nombreuses générations de l'après-guerre partiront à la retraite. C'est donc une situation extrêmement grave qui se profile.

En 1993, M. Balladur, alors Premier ministre, fort de ces éléments, a eu, quant à lui, le courage d'engager la réforme des retraites des salariés du privé. Les 13 millions de salariés du privé sont aujourd'hui couverts par un système de retraite qui est nettement moins favorable que pour les autres salariés, en particulier ceux qui appartiennent soit aux fonctions publiques, soit aux régimes spéciaux, soit à certains régimes particuliers. Cette situation tient notamment à la durée de cotisation qui est passée de 37,5 à 40 années pour les salariés du privé...

M. Maxime Gremetz.

Proposez 45 ans, comme le

MEDEF !

M. Bernard Accoyer.

... et au fait que le montant de la pension de vieillesse est indexé sur une période beaucoup plus longue et nettement moins favorable pour eux.

Telle est la situation de tous nos concitoyens qui travaillent dans le privé ou qui y ont travaillé et qui sont en train de partir à la retraite.

En 1995, Alain Juppé, pour établir une équité entre tous les retraités,...

M. Maxime Gremetz.

Par le bas ! L'égalité par le bas !

M. Bernard Accoyer.

... a décidé d'évaluer le coût de la retraite dans les différentes fonctions publiques et la situation des régimes spéciaux. Il n'a pas pu le faire...

Mme Jacqueline Fraysse.

Il s'est débiné !

M. Bernard Accoyer.

... parce que la gauche, toute la gauche, y compris certains qui siègent aujourd'hui au banc du Gouvernement, s'est mobilisée pour empêcher que la commission Le Vert puisse procéder à cette évaluation.

M. Maxime Gremetz.

Ainsi que 95 % de la population !

M. Bernard Accoyer.

En 1997, la majorité de l'époque a voté une loi sur les fonds de pension, dite loi Thomas, qui était un moyen de permettre aux salariés français d'accéder à un mode de financement moderne d'un complément de retraite, parce que c'est de cela qu'il s'agit,...

Mme Jacqueline Fraysse.

C'était votre dernier mauvais coup !

M. Bernard Accoyer.

... et surtout d'accéder à ce qui existe dans tous les pays modernes, tous les pays industrialisés, tous les pays à forte protection sociale. En plus, il donnait ainsi à la France le moyen de bénéficier d'une épargne salariale pouvant s'investir dans nos propres entreprises nationales, alors que, aujourd'hui, nos entreprises sont rachetées par les fonds de pension hollandais, américains ou canadiens, ce qui fait que les salariés français travaillent chaque jour pour les salariés étrangers. Et la situation actuelle n'est pas sans incidence sur l'emploi et sur les délocalisations.

M. Maxime Gremetz.

Vous parlez pour le CAC 40 !

M. Bernard Accoyer.

C'est ce texte que vous voulez abroger aujourd'hi.

Quant à mon sous-amendement, il ne propose rien d'autre qu'une mesure d'équité, puisqu'il vise à permettre à tous les salariés français, ceux du secteur public comme ceux du secteur privé, puissent accéder, dans les mêmes conditions, à des régimes de retraites complémentaire par capitalisation.

M. Maxime Gremetz.

Et voilà !

M. Bernard Accoyer.

Je rappelle que de tels régimes existent en France depuis 1967. Ils ont été créés à la demande des syndicats de salariés - Force ouvrière, CFDT, CFTC -, ils sont gérés par eux et ils donnent droit à certains avantages fiscaux et à une pension complémentaire.

Ce dispositif a été créé à une époque où la France connaissait le plein d'emploi et où, à qualification égale, les salaires dans le privé étaient plus importants qu'aujourd'hui. Aujourd'hui, la situation s'est inversée : seuls les salariés des fonctions publiques bénéficient de la garantie de l'emploi et, à qualification égale, les salaires sont en moyenne plus élevés dans le public que dans le privé. Je n'en doute pas, la commission et le Gouvernement ne refuseront pas que tous nos concitoyens aient accès à un peu plus d'équité. Je demande donc, par ce sous-amendement, que tous les Français soient traités de la même façon.

Bien entendu, il s'agit d'un sous-amendement de repli.

Un amendement commun aux groupes de l'opposition tendant à instaurer l'égalité d'accès de tous les salariés à des régimes de retraites complémentaires par capitalisation ayant été déclaré irrecevable par le président de la commission des finances, nous avons donc été contraints d'avoir recours à un artifice de procédure pour avoir ce débat. Mais il eût été dommage qu'il n'ait pas lieu, et surtout que la ministre ne puisse pas nous donner son sentiment sur notre souhait de voir tous nos concitoyens avoir accès à plus d'équité en matière de retraite.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le souci d'équité qui se manifeste avec une telle force aurait pu aussi conduire M. Accoyer à proposer que les fonct ionnaires bénéficient d'une retraite calculée sur l'ensemble de leurs revenus, et donc d'un niveau de retraite semblable à celui du secteur privé.

E n tout état de cause, ce sous-amendement est inconstitutionnel : en effet, les ordonnances Juppé ont prévu que la loi de financement de la sécurité sociale ne pouvait comporter que des clauses qui ont des incidences financières directes. Je ne peux donc que m'opposer à ce sous-amendement, sur le fond et sur la forme.

M. le président.

Sur l'amendement no 73, repris par M. de Courson, je suis saisi par le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Je vous remercie, monsieur le président, de donner enfin la parole à l'auteur de l'amendement. (Sourires.)

Je voudrais d'abord rappeler à nos collègues - et notre rapporteur l'a fait avec humour - que c'est la seconde fois que les événements que nous sommes en train de vivre se produisent. Pourquoi ? Qui est à l'origine de la loi de 1997 dite loi Thomas ? Le groupe UDF. J'étais à l'époque le bras droit de Thomas dans cette affaire et j'en suis fier.

M. Maxime Gremetz.

Le bras droit ? Pas le gauche ?

M. Charles de Courson.

Le gauche, si vous voulez, peu importe. Mes chers collègues, le débat que nous avons actuellement est l'illustration de l'archaïsme du débat politique français.

Premier archaïsme : comme l'a rappelé notre collègue Accoyer, la majorité trouve absolument normal que les salariés du secteur public, les exploitants agricoles et les non-salariés non agricoles bénéficient de fonds de pension, mais totalement anormal que les salariés du privé puissent, eux aussi, en bénéficier. Vous êtes, mes chers collègues de la majorité, les antisociaux les plus radicaux que je connaisse ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Maxime Gremetz.

Avec 6 000 francs de salaire, comment voulez-vous qu'ils investissent dans les fonds de pension ?

M. Charles de Courson.

Mes chers collègues, savezvous que nous sommes le dernier pays développé du monde à ne pas avoir doté ses salariés de fonds de pension ?

M. Maxime Gremetz.

Connaissez-vous le montant du

SMIC ?

M. Charles de Courson.

Le parti communiste et le représentant le plus archaïque de ce parti,...

M. Maxime Gremetz.

Combien gagne un salarié payé au SMIC, monsieur de Courson ? Je constate que vous ne répondez pas !

M. Charles de Courson.

... celui dont on dit au sein même du parti communiste qu'il faudra l'empailler pour le conserver dans un musée (Rires sur divers bancs), afin de montrer ce qu'était un stalinien, puisque c'est le dernier de l'espèce, proposent la poursuite de la régression.

sociale. Eh bien, nous, au groupe UDF, nous sommes pour le progrès, pour les fonds de pension pour le dialogue social. Et une nouvelle fois, la société civile a donné raison au groupe UDF, car, nous le verrons à l'article 2, le Gouvernement et toute la majorité plurielle ont été obligés de se coucher devant la société civile qui rappelait que dans une société équilibrée, ce sont les partenaires sociaux qui mettent en place les mécanismes de progrès social.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Sur le sous-amendement no 407, je suis saisi par le groupe du Rassemblement pour la République d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Il nous reste donc cinq minutes à attendre, avant le vote, mais je suis sûr que M. François Goulard, qui avait demandé la parole, est capable de parler cinq minutes.

(Sourires.) Vous avez la parole, monsieur Goulard.

M. François Goulard.

Je n'ai pas uniquement demandé la parole pour vous faire patienter jusqu'au moment du vote.

(Sourires.)

Je constate que ces affaires d'abrogation de la loi Thomas entraînent toujours certains bouleversements au sein de notre assemblée. Ainsi voyons-nous un amendement de M. Gremetz repris par M. de Courson.

L'année dernière, nous avions assisté au même chassécroisé ; nous avions même vu M. Strauss-Kahn venir s'asseoir à côté de Mme Aubry pour mieux nous démontrer la parfaite unité de vues du Gouvernement sur cette question des fonds de pension et des retraites par capitalisation.

En réalité, ces fonds de pension, ces retraites par capitalisation tant décriées par la majorité existent aujourd'hui dans notre pays. Tous les contribuables d'un certain niveau de revenus...

M. Maxime Gremetz.

Ah oui ? Pour se constituer une retraite complémentaire, il faut en avoir les moyens !

M. François Goulard.

... utilisent des possibilités d'épargne défiscalisée pour se constituer une retraite, une épargne de précaution qu'ils utiliseront le jour où leurs revenus directs vont régresser.

M. Maxime Gremetz.

Monsieur Goulard, le SMIC, c'est combien ?

M. François Goulard.

Nous savons également que, dans nombre de grandes entreprises, il existe des retraites complémentaires, qui permettront à des salariés plus privilégiés que d'autres de bénéficier d'un complément de ressources au moment où les retraites du régime général viendront malheureusement à baisser - c'est aujourd'hui certain.

Les plus défavorisés aujourd'hui sont les salariés aux revenus les plus modestes, ceux des PME, dans lesquelles il y a rarement des régimes complémentaires ; c'est à ceux-là qu'il faut penser.

M. Maxime Gremetz.

Donnez-leur des salaires plus élevés !

M. François Goulard.

C'est à ceux-là qu'il faut permettre de se constituer une épargne de précaution (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

communiste), avec l'aide de l'entreprise, dans des conditions incitatives, faute de quoi il n'y aura pas constitution d'une épargne.

Nous sommes bien entendu très ouverts à l'idée d'un contrôle des partenaires sociaux dans l'entreprise, afin que ce système ait la faveur des salariés en leur offrant toutes garanties quant à la bonne utilisation des fonds ainsi constitués. C'est aux salariés les moins favorisés, je le répète, que nous pensons quand nous disons qu'il est urgent de constituer des fonds de retraite par capitalisation ayant vocation à s'ajouter aux fonds de retraite par répartition, le problème majeur étant de sauver les retraites par répartition, car nous ne voyons pas encore les moyens qui leur sont affectés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Maxime Gremetz.

Monsieur Goulard, Monsieur de Courson, à combien est le SMIC ? Vous ne le savez pas ?

M. Charles de Courson.

Il est à 5 800 francs nets !

M. Maxime Gremetz.

Vous vous trompez !

Mme Odette Grzegrzulka.

C'est Questions pour un champion !

M. Maxime Gremetz.

Je vais vous indiquer le chiffre exact, que vous devriez connaître : le SMIC net est à 5436 francs. C'est encore moins que ce que vous dites ! Et vous voudriez que les salariés constituent des fonds de pension et achètent des actions ! Suggérez plutôt au MEDEF d'augmenter leurs salaires !

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 407 rectifié.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

115 Nombre de suffrages exprimés .................

115 Majorité absolue .......................................

58 Pour l'adoption .........................

28 Contre .......................................

87 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 73, repris par M. de Courson.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

115 Nombre de suffrages exprimés .................

115 Majorité absolue .......................................

58 Pour l'adoption .........................

4 Contre .......................................

111 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Maxime Gremetz.

Je crois en la parole de Mme la ministre !

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 494 rectifié, présenté par MM. de Courson, Gengenwin, Jégou, Préel, Méhaignerie et Bur, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Il est institué un remboursement de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et du prélèvement social en faveur de la caisse nationale des allocations familiales et de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés en faveur des ménages non imposables titulaires de revenus de placement.

« II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée par la majoration à due concurrence des taux de la contribution sociale généralisée, de la contribution de remboursement de la dette sociale et des prélèvement mentionnés à l'article L.

245-16 du code de la sécurité sociale. »

L'amendement no 495 rectifié, présenté par MM. de Courson, Jégou, Gengenwin et Bur, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Il est institué un remboursement de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et du prélèvement social en faveur de la caisse nationale des allocations familiales et de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés en faveur des ménages titulaires de revenus de placement, dont le revenu annuel net global, au sens de l'impôt sur le revenu, est inférieur par part au minimum vieillesse.

« II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée par la majoration à due concurrence des taux de la contribution sociale généralisée, de la contribution de remboursement de la dette sociale et des prélèvements mentionnés à l'article L.

245-16 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Germain Gengenwin, pour défendre l'amendement no 494 rectifié.

M. Germain Gengenwin.

Cet amendement propose d'instituer un remboursement de la CSG et de la CRDS pour les personnes à faibles revenus. Nous avons déjà examiné un amendement semblable.

J'ai rencontré il n'y a pas longtemps, dans ma circonscription, un ménage dont le revenu global était compris entre 50 000 et 60 000 francs, dont 15 000 francs tirés de la location du logement acheté pour leurs ses vieux jours. Bien que non imposable, ce ménage est néanmoins obligé de payer 1 500 francs de CSG. Nous avions déjà évoqué ce problème l'année dernière et M. le secrétaire d'Etat au budget avait annoncé une exonération pour les ménages en question. Mon amendement vise à traduire cet engagement.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 495 rectifié.

M. Charles de Courson.

Nous avons commencé à discuter ce problème lors de l'examen du petit amendement qui tendait à remonter à 400 francs le seuil de recouvre-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

ment de la CSG sur les revenus du patrimoine. Les revenus de remplacement sont exonérés de CSG pourvu qu'ils soient au plus égaux aux minima sociaux.

Soit une personne qui gagne 3 500 francs par mois et qui est exonérée de CSG. Sa voisine, une veuve,...

M. Alfred Recours.

rapporteur.

Ah, ça y est, veuve est revenue !

M. Charles de Courson.

... touche une pension de réversion de 2 500 francs et a 1 000 francs de revenu grâce à un patrimoine qu'elle a constitué avec son défunt mari pendant quarante années de travail. Au nom de quoi paie-t-elle 10 % de ces 1 000 francs ? J'avais cru comprendre l'année dernière que les membres de la majorité avaient été convaincus par mes arguments de la totale iniquité consistant à imposer la CSG au taux de 10 %, plus la CRDS, plus deux fois 1 %, au premier franc sur tous les revenus du patrimoine, sans tenir compte du revenu de la personne. J'avais cru comprendre que beaucoup de nos collègues de la majorité, dont le rapporteur, voulaient trouver une solution permettant de résoudre ce problème.

Comme on ne peut pas différencier les détenteurs de revenus du patrimoine, la solution consiste selon moi à faire payer tout le monde, mais à permettre à ceux qui sont en-dessous du minimum de solidarité, c'est-à-dire 3 500 francs par mois, d'obtenir le remboursement de la CSG, de la CRDS et des deux fois 1 % sur le revenu du patrimoine.

On me rétorquera qu'il y a un problème s'il y a deux ou trois personnes dans le même foyer fiscal. C'est pourquoi mon amendement propose de diviser le revenu par le nombre de parts, au sens de l'impôt sur le revenu. Si l'on est en dessous de 3 500 francs par mois, le foyer fiscal a le droit de demander le remboursement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Nous avons déjà eu cette discussion. Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 494 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 495 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 2

M. le président.

« Art. 2. - I. - Il est inséré, au titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale, un chapitre Ier quater ainsi rédigé :

« C HAPITRE Ier quater

« Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale

« Art. L. 131-8 . - Il est créé un fonds dont la mission est de compenser le coût, pour la sécurité sociale, des exonérations de cotisations patronales aux régimes de base de sécurité sociale mentionnées à l'article L. 131-8-1.

« Ce fonds, dénommé : "Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale", est un établissement public national à caractère administratif.

Un décret en Conseil d'Etat fixe la composition du conseil d'administration, constitué de représentants de l'Etat, ainsi que la composition du conseil de surveillance, comprenant notamment des membres du Parlement et des représentants des partenaires sociaux. Ce décret en Conseil d'Etat fixe également les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds.

« Art. L. 131-8-1 . - Les dépenses du fonds sont constituées :

« 1o Par le versement, aux régimes de sécurité sociale concernés, des montants correspondant :

« a) A la prise en charge de l'allégement visé aux articles L. 241-13-1 et L. 711-13-1 du présent code et aux articles 1031, 1062-1 et 1157-1 du code rural au titre des dispositions correspondantes ;

« b) A la prise en charge de l'aide visée à l'article 3 de la loi no 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail ;

« c) A la prise en charge de la réduction visée aux articles L. 241-13 et L. 711-13 du présent code et aux articles 1031, 1062-1 et 1157-1 du code rural au titre des dispositions correspondantes ainsi qu'au IV de l'article 1er de la loi no 95-882 du 4 août 1995 relative aux mesures d'urgence pour l'emploi et la sécurité sociale ;

« 2o Par les frais de gestion administrative du fonds.

« Les versements mentionnés aux a, b et c du 1o ci-dessus se substituent à la compensation par le budget de l'Etat prévue à l'article L. 131-7.

« Art. L. 131-8-2 . - Les recettes du fonds sont constituées par :

« 1o Une fraction du produit du droit de consommation prévu à l'article 575 du code général des impôts, dans les conditions fixées par la loi de finances pour 2000 ;

« 2o La contribution sociale sur les bénéfices des sociétés visée aux articles 235 ter ZC et 1668 D du code général des impôts ;

« 3o La taxe générale sur les activités polluantes prévue à l'article 266 sexies du code des douanes ;

« 4o Une contribution versée par les organismes gérant des régimes de protection sociale relevant du code de la sécurité sociale et du code rural et ceux visés par l'article L. 351-21 du code du travail, dans les conditions prévues par l'article L. 131-8-3 ;

« 5o Une contribution de l'Etat ;

« 6o Les produits non consommés de l'exercice précédent ;

« 7o La contribution visée aux articles L. 212-5 du code du travail et 992-2 du code rural, qui est affectée à la réserve de trésorerie du fonds, dans la limite de 10 % des dépenses de celui ci.

« Art. L. 131-8-3 . - Le montant des contributions mentionnées au 4o de l'article L. 131-8-2 ainsi que les dates de leur versement sont fixés par voie de convention conclue entre l'Etat et chacun des organismes mentionnés audit 4o

« A défaut de signature d'une convention avant le 31 janvier 2000, la contribution de chacun des organismes est déterminée en fonction du surcroît de recettes et des économies de dépenses induits par la réduction du temps de travail pour cet organisme. Les règles servant à calculer le montant et l'évolution de ces contributions sont définies par décret en Conseil d'Etat.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

« Art. L. 131-8-4 . - Pour l'application des contributions visées au 4o de l'article L. 131-8-2 et en l'absence de dispositions conventionnelles, des arrêtés conjoints des ministres chargés de la sécurité sociale, de l'emploi et du budget fixent :

« - le montant prévisionnel des contributions dues au cours d'un exercice ; ce montant peut être, le cas échéant, révisé en cours d'année ;

« - le montant des régularisations dues au titre de l'exercice.

« Les contributions visées au 4o de l'article L. 131-8-2 sont versées au fonds institué à l'article L. 131-8 au plus tard le 15 du deuxième mois de chaque trimestre, pour une fraction correspondant au quart du montant annuel.

« Elles sont recouvrées selon les modalités prévues au 3o de l'article L. 225-1-1 du présent code.

« Art. L. 131-8-5 . - Les frais d'assiette et de recouvrement des impôts, droits, taxes et contributions mentionnés à l'article L. 131-8-2 sont à la charge du fonds, en proportion du produit qui lui est affecté ; leur montant est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale.

« Art. L. 131-8-6 . - Les relations financières entre le fonds et les organismes de protection sociale, d'une part, le fonds et l'Etat, d'autre part, font l'objet de conventions destinées notamment à garantir la neutralité en trésorerie des flux financiers pour les organismes de sécurité sociale. »

« II. Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2000.

« A titre transitoire et jusqu'à la date de création du fonds institué à l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, les produits mentionnés à l'article L. 131-8-2, à l'exception de ceux mentionnés au dernier alinéa, sont versés à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, et les produits mentionnés au dernier alinéa de l'article L. 131-8-2 sont centralisés par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale. L'Agence centrale suit lesdits produits dans des comptes spécifiques ouverts à cet effet. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

C'est un article important de ce projet de loi puisque le Gouvernement propose de créer un fonds de financement des 35 heures. Pourquoi créer un nouveau fonds ? On a l'impression que le Gouvernement adore créer des machins administratifs, avec conseil d'administration et conseil de surveillance ; je remarque au passage que les postes au conseil d'administration sont réservés aux représentants de l'Etat.

Il serait tellement plus simple de respecter le principe admis par la loi de 1994, à savoir que l'Etat compense les exonérations de charges qu'il décide. En effet, toute diminution des cotisations entraîne une baisse des ressources et doit être compensée par celui qui la décide, au franc le franc, si l'on ne veut pas mettre en péril l'équilibre financier de la protection sociale.

Il faut d'ailleurs noter que demeuraient des exonérations antérieures à 1994 qui n'avaient pas été compensées.

Mme la ministre nous dit que la création de ce fonds vise également à financer la diminution des charges. C'est sans doute là une conversion récente. En effet, alors qu'Alain Juppé avait créé une ristourne dégressive allant jusqu'à 1,33 fois le SMIC, le gouvernement actuel, à peine installé, a décidé de diminuer cette exonération, de manière modeste, certes, mais en indiquant que les baisses de charges étaient inefficaces et qu'il fallait revenir sur cette disposition anormale.

Je vois, madame la ministre, que vous êtes convertie.

Et, comme les convertis, vous allez au-delà et vous proposez d'aller jusqu'à 1,8 fois le SMIC, ce dont nous nous réjouissons. Nous regrettons cependant que ces exonérations se fassent à somme nulle pour les entreprises. En réalité, les entreprises françaises ne retireront aucun béné fice de cette mesure.

Vous proposez un nouveau fonds dont les recettes ont été improvisées.

D'abord, une taxe sur les tabacs, pour 39,5 milliards, afin de financer les 35 heures. Elle devrait à notre sens être affectée aux soins des fumeurs, et surtout à la prévention,...

M. Bernard Accoyer.

Tout à fait !

M. Jean-Luc Préel.

... qui est délaissée alors qu'elle est fort utile.

Seconde recette : un deuxième impôt sur le bénéfice des entreprises, pour 4,3 milliards, auquel s'ajoute la taxe sur les heures supplémentaires, pour 7 milliards, qui seront en fait retirés aux salariés.

En troisième lieu, vous affectez à ce fonds la taxe sur les activités polluantes, pour 3,2 milliards. Elle ne servira donc pas, comme cela aurait été logique, à améliorer l'environnement. Je pense que, comme votre collègue Dominique Voynet, monsieur le président, vous êtes tout à fait favorable à cette affectation de la taxe sur les activités polluantes aux 35 heures ; mais, de cette façon, la lutte contre la pollution ne pourra pas être accrue.

M. le président.

Je vous expliquerai.

M. Jean-Luc Préel.

Nous aurions souhaité que cette taxe serve à améliorer la qualité de l'air, de l'eau et de l'environnement en général.

Vous aviez également prévu, madame la ministre - et le mot ne me paraît pas exagéré -, un hold-up sur les organismes sociaux,...

M. Thierry Mariani.

Absolument !

M. Jean-Luc Préel.

... l'AGIRC, l'ARRCO, l'UNEDIC et la protection sociale.

Mais, devant le front uni des organisations syndicales, vous avez dû reculer, désavouée d'abord par les conseils d'administration de chaque organisme. Nous saluons comme il se doit cette reculade.

Mais ensuite, probablement parce que le temps vous manquait, vous avez bricolé et improvisé un nouveau montage très complexe. Vous faites en effet basculer la taxe sur les alcools vers le FSV, toujours pour financer les 35 heures, et vous maintenez, semble-t-il, le prélèvement de 5,6 milliards sur la protection sociale, alors que le conseil d'administration de la CNAM n'était pas très favorable à ce prélèvement que vous affectez au FSV.

Après l'improvisation et la reculade, voici venir le temps du bricolage, mais les 35 heures ne sont toujours pas financées de manière pérenne puisque en 2001 il manquera plusieurs dizaines de milliards.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Des centaines, peut-être même ?

M. Jean-Luc Préel.

D'après ce que j'ai compris, une vingtaine de milliards en 2001.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, 15 milliards dans cinq ans, lorsque nous serons en régime de croisière.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. Jean-Luc Préel.

De combien sera la taxe sur les heures supplémentaires en 2001 ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

De 7 milliards.

M. Jean-Luc Préel.

Mais, en 2001, les entreprises auront appliqué les 35 heures.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Oui, mais 7 ne deviendra pas 20 en 2001 !

M. Jean-Luc Préel.

Comme il vous manque déjà de l'argent, ces 7 milliards vont disparaître !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, il ne manque pas de l'argent !

M. Jean-Luc Préel.

Vous allez sans doute nous expliquer cela. Je le répète : après l'improvisation et la reculade, voici venir le temps du bricolage, nous ne pouvons par conséquent approuver cet article.

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur.

Nous sommes quant à nous favorables depuis de nombreuses années à l'abaissement des charges qui pèsent sur le coût du travail.

M. Gérard Bapt.

Oui, mais vous ne l'avez pas fait !

M. Yves Bur.

Jacques Barrot avait fait un premier pas en ce sens en diminuant les charges jusqu'à 1,33 fois le SMIC, mais l'actuel gouvernement est revenu sur cette mesure en restreignant l'avantage à 1,3 fois le SMIC, niant ainsi l'impact de l'abaissement du coût du travail sur la diminution du chômage. Mais cet impact ne peut bien entendu être évalué que sur la durée, et si les entreprises ont vraiment l'impression que la mesure est pérenne.

Je me réjouis donc que le Gouvernement ait abandonné ses réticences et qu'il amplifie même la démarche de son prédécesseur. Cela va dans le bon sens car tout ce qui diminue le coût du travail, sans se répercuter sur le salaire réel, est une bonne chose pour l'emploi, notamment dans les secteurs où la main-d'oeuvre représente une part importante des coûts et dans les secteurs susceptibles d'employer de la main-d'oeuvre peu qualifiée mais dont le coût, si l'on tient compte des charges, est prohibitif, ce qui favorise la mécanisation des postes de travail. Ce sera, je l'espère, un atout dans la lutte contre l'exclusion.

Cependant, contrairement au dispositif qu'avaient mis en place M. Barrot et le gouvernement de M. Juppé, et qui était compensé par l'Etat en vertu de la loi de 1994, le dispositif d'accompagnement des 35 heures n'est pas compensé par l'Etat mais par de nouveaux prélèvements.

D'abord, par un prélèvement sur la sécurité sociale. Je ne reviendrai pas sur l'imbroglio qui a accompagné la solution retenue en fin de compte. Ce prélèvement ne se fait plus directement, mais de manière plus détournée, par un versement au FSV et un prélèvement. Les apparences sont sauves, même si vous avez dû reculer devant le front uni des organisations professionnelles.

Il y a un second prélèvement sur les entreprises, à travers la CSB, pour un montant de 4,3 milliards.Vous dites vouloir alléger les charges des entreprises mais vous leur reprenez d'une main ce que vous leur accordez de l'autre par le biais des exonérations. Et je parie fort que, l'an prochain, cette contribution sera en première ligne pour contribuer à combler le déficit.

M. Thierry Mariani.

C'est évident !

M. Yves Bur.

Troisième prélèvement : les 10 % sur les heures supplémentaires des salariés. Je l'ai déjà dit hier : c'est un scandale ! Les salariés ont droit à une rémunération intégrale et à l'ensemble de leurs avantages. S'ils font des heures supplémentaires, c'est d'abord pour arrondir leurs fins de mois. Et je crois que la moyenne des salaires n'est pas si élevée que nos salariés puissent s'en passer. Mais s'ils font des heures supplémentaires, c'est aussi parce qu'ils se rendent bien compte que, confrontés à la flexibilité des commandes, les entreprises ont parfois besoin d'une flexibilité dans les horaires de travail. Et cette pratique est d'autant plus courante que les entreprises ont du mal à trouver du personnel qualifié, comme c'est le cas dans ma région.

Il y a enfin un prélèvement sous la forme d'une écotaxe, à travers la TGAP, dont la vocation devrait être non pas, de soutenir l'emploi mais d'intéresser les entreprises à lutter plus efficacement contre les effets polluants que peut avoir leur activité ; tel était bien le sens de cette écotaxe. Mais la ménagère sera ravie d'apprendre qu'elle contribue, en faisant la lessive,...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Pourquoi pas « le ménager » ?

M. Yves Bur.

... au développement de l'emploi.

En fait, les choix proposés par l'article 2 reviennent à dire aux Français : « Buvez, fumez, polluez, car plus vous boirez, plus vous fumerez, plus vous polluerez, plus vous aurez un comportement citoyen et aiderez le Gouvernement à équilibrer ses budgets. » Vous comprendrez que

nous ne puissions nous inscrire dans cette spirale de la taxation. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas un article qui augmente les taxes cette année et les augmentera certainement encore l'année prochaine.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Décidément, madame la ministre, nous allons de surprise en surprise ! Il y a quelques jours, vous nous présentiez un texte sur la réduction du temps de travail, source de dépenses importantes pour l'Etat, mais sans inscrire dans le même temps les recettes correspondantes. Là, je dois avouer que vous faites des envieux : l'élu local que je suis aimerait utiliser de tels procédés pour réaliser ses projets et les parlementaires que nous sommes rencontreraient moins de difficultés et ne se verraient pas opposer l'article 40 de la Constitution en adoptant le même comportement.

Avant-hier, nous nous trouvions en présence d'un texte étudié en commission des affaires sociales et qui, pour financer les 35 heures, rackettait les régimes sociaux. Sans aucune concertation, ignorant le paritarisme, vous vouliez imposer votre loi et la faire financer par d'autres.

Aujourd'hui, enfin, et c'est le troisième acte, vous nous demandez de nous prononcer sur une nouvelle mouture sortie d'un chapeau il y a vingt-quatre heures parce que, à juste titre, les syndicats et le patronat ont refusé le diktat du Gouvernement, et sans doute par peur du verdict du Conseil constitutionnel.

Avouez, madame la ministre, que proposer à la représentation nationale un budget de plus de 1 800 milliards de francs, supérieur à celui de l'Etat, mérite plus de sérieux, plus de préparation et plus de rigueur. Ce budget traduit un sentiment de mépris à l'égard du législateur, qui a appris par la presse les nouvelles dispositions qui lui sont proposées.

Les nouveaux rebondissements de ces derniers jours prouvent que le plan de financement des 35 heures, voté il y a une semaine était loin, contrairement à vos affirmations, d'être bouclé.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

En fait, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 que vous nous présentez est détournée de son objet initial, qui était de donner au Parlement le contrôle du financement de la sécurité sociale et d'assurer la transparence de la gestion des différentes branches. Nous en sommes loin ! Cette loi, en permettant le transfert des d épenses relevant précisément du budget de l'Etat, devient un instrument de gestion des finances publiques à la discrétion de l'Etat.

La création d'un fonds de financement de la réforme des cotisations patronales n'a rien à faire dans ce texte.

Ce fonds a pour objet de retirer du budget de l'Etat un allégement de charges que celui-ci s'était engagé à financer depuis 1994, ainsi que les allégements afférents aux 35 heures.

Qu'en est-il du financement des 35 heures, qui nous occupe en cet instant et que nous aurions dû décider lors de l'examen de la loi sur la réduction du temps de travail ? Certains estiment qu'il deviendra un cas d'école de cours de finances publiques, vu son extrême complexité.

M. Germain Gengenwin.

C'est vrai !

M. Jean-Claude Lemoine.

Déjà, l'estimation des d épenses est floue : de 60 à 65 milliards pour l'année 2000, et de 110 à 150 milliards peut-être en régime de croisière. Mais à chaque jour suffit sa peine : peu importe, de nouveaux impôts pourront toujours être créés.

Les dépenses pour 2000 seront compensées, outre une contribution de l'Etat pour 4,3 milliards, essentiellement par des prélèvements fiscaux : contribution sociale sur les bénéfices des entreprises, taxe sur les énergies polluantes, taxe sur les heures supplémentaires et droits sur les tabacs et alcools. Cinq impôts nouveaux ou détournés de leur objet.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Cinq

« impôts nouveaux » ?

M. Jean-Claude Lemoine.

Quelle complexité et quelle gymnastique pour financer ces 35 heures ! Et qu'en dire ? La contribution sur les bénéfices des sociétés dont le chiffre d'affaires est supérieur à 50 millions ne fait que surcharger les entreprises et pérennise une surtaxe temporaire. Il s'agit d'un impôt nouveau.

Les 3,2 milliards prélevés sur la TGAP constituent un véritable racket. Ce nouveau prélèvement, créé par la loi de finances pour 1999 et qui pénalise particulièrement l'industrie chimique, les agriculteurs et, demain, tous les consommateurs, devait être utilisé pour prévenir les pollutions. La taxe est détournée de son objet et presque entièrement utilisée pour financer les 35 heures puisqu'elle doit rapporter 4 milliards en 2000 et que vous voulez en prélever 3,2 milliards.

Enfin, les 5,6 milliards provenant des droits sur les alcools auraient dû alimenter, au travers de l'excédent du fonds de solidarité-vieillesse, le fonds de réserve des retraites. Quel en sera le montant dans les années à venir ? Pourtant, ce fonds de réserve des retraites mérite un meilleur sort.

M. Pascal Terrasse.

Ce n'est pas l'objet de la discussion !

M. Jean-Claude Lemoine.

J'ajoute que financer les 35 heures par la taxe sur les alcools, dont la consommation excessive coûte chaque année 115 milliards à la collectivité nationale, est affligeant. Le produit de cette taxe devrait plutôt être consacré au financement de la branche maladie, toujours en déficit.

Quant à la taxe sur les heures supplémentaires, comment la qualifier ? Elle revient tout simplement à priver les salariés du fruit de leur travail. Dans certains cas, et vous le savez, madame, une heure supplémentaire effectuée rapportera quatre francs au salarié. Quelle avancée sociale ! Mais une autre inquiétude nous habite.

Pour 2000, votre habile gymnastique vous permet de p résenter un budget qui semble équilibré. Vous reconnaissez que, dans quelques années, il vous manquera de 15 à 20 milliards pour compenser les allégements de charges liés aux 35 heures ...

M. le président.

Je vous prie de conclure, monsieur Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Je vais conclure. Où comptez-vous les trouver ? Au travers d'impôts ou de prélèvements nouveaux, contrairement à ce qu'annonce votre gouvernement ? Ou en reprenant votre idée initiale de ponctionner les organismes sociaux ? L'irréalisme de vos propositions qui risquent de déstabiliser les budgets de l'Etat et la position européenne de la France, l'incertitude de l'avenir et le fait que cette loi est détournée de son objet pour permettre un transfert des dépenses relevant du budget de l'Etat ne peuvent recueillir notre accord.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Barrot.

M. Jacques Barrot.

Madame la ministre, vous avez bien voulu souligner l'intérêt que présente la discussion d'une loi de financement de la sécurité sociale.

Je voudrais simplement exprimer une crainte : en mélangeant le financement de la sécurité sociale et le financement de la politique de l'emploi, j'ai peur que nous n'allions vers des confusions qui risquent de compromettre cet exercice nouveau que constitue l'examen d'une loi de financement. J'en ai d'ailleurs fait le reproche au ministre de l'économie et au secrétaire d'Etat au budget.

Je reste convaincu que le financement de la politique de l'emploi devrait figurer dans le budget de l'Etat. Or il y a là, entre le budget de l'Etat et la loi de financement de la sécurité sociale, une articulation à venir qu'il faudra clarifier, et je pense, madame la ministre, que vous en êtes consciente. Nous avons approuvé le retrait de la mesure qui consistait à aller chercher 12 milliards dans les fonds sociaux affectés et gérés par les partenaires sociaux. Vous êtes conduite à élaborer pour l'année 2000 un montage qui, il faut le dire, est complexe.

La perte de recettes du FSV apparaît possible : la commission des comptes a chiffré l'excédent de ce fonds à 8,5 milliards de francs. Mais cet excédent devrait compenser un encaissement de la C 3 S, qui était normalement destiné au régime des non-salariés non agricoles.

D'autre part, comme le FSV va voir une partie de ses ressources affectée au fonds destiné à payer le coût de la réduction du temps de travail, les excédents ne pourront pas aller au fonds de réserve des retraites, ainsi que M. Lemoine vient de le dire. De ce fait, il faudra faire en sorte que le régime général soit abondé dans des conditions assez complexes remettant en cause les affectations par branche. Je n'entrerai pas dans les détails, mais il faudra nous expliquer comment nous pourrons suivre le solde de chacune des quatre branches, qui se trouvera évidemment modifié.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Je veux croire, madame la ministre, que, pour le proc hain exercice, les choses, au prix d'une grande complexité, trouveront un équilibre. Mais l'année prochaine, quand les 35 heures prendront leur vitesse de croisière, il faudra trouver des financements beaucoup plus importants. Et il faudra alors, je le dis franchement, que le Parlement examine autre chose qu'un dispositif très complexe prévoyant des financements croisés et des transferts de recettes, qui nous rendra à l'avenir difficile l'examen d'une loi de financement de la sécurité sociale dans une clarté minimale.

L'article 2 est très important car il ne renvoie pas simplement à la discussion récurrente sur les 35 heures, il nous inspire aussi la crainte que la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale ne soit occultée par des montages dont la complexité m'inquiète beaucoup.

J'ajoute que je ne comprends pas pourquoi le ministère de l'économie n'a pas voulu, dans cette affaire, consentir les efforts nécessaires qui vous auraient - je le dis car nous sommes entre nous - beaucoup simplifié la tâche.

M. Bernard Accoyer.

Il fallait gager les recettes !

M. Germain Gengenwin.

Bercy n'est pas venu au secours de Mme Aubry !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Comme l'a dit Jacques Barrot, il est particulièrement préoccupant de constater que l'article qui nous occupe le plus, celui qui a le plus inquiété les partenaires sociaux, et qui aura le plus de conséquences, est l'article 2, qui n'a qu'un but : financer, partiellement d'ailleurs, le surcoût du travail lié à la réduction du temps de travail. Cela n'est pas étonnant car nous n'avons pas discuté de ce point, alors qu'il y aurait eu toute sa place, au moment de l'examen de la seconde loi sur la réduction du temps de travail.

Madame la ministre, le gouvernement auquel vous appartenez, ne peut, à partir d'un postulat faux, qu'aboutir à de mauvaises mesures. En effet, la réduction du temps de travail prend appui sur le postulat que l'on pourrait travailler moins en gardant le même salaire et en conservant le même niveau de protection sociale, cette dernière ne résultant d'ailleurs que de salaires différés.

Or il n'est pas besoin d'être un grand analyste économique pour comprendre qu'il n'est de richesse redistribuable que celle produite par les entreprises qui, précisément, ont pour rôle de produire des richesses. C'est cettee rreur basique, fondamentale, que vous essayez, de manière extrêmement partielle, de corriger avec l'article 2.

Lorsque vous évoquez, parlant des 65 milliards de francs, ce que vous appelez la couverture du surcoût de la réduction du temps de travail pour l'année 2000, vous n'apportez que 25,5 milliards nouveaux. Bien que la gauche se soit ralliée tardivement à l'effet bénéfique sur l'emploi des baisses de charges sur les bas salaires, il ne faut pas oublier que près des deux tiers du financement que vous évoquez existaient déjà dans le budget de l'Etat et correpondaient à des réductions de charges pour les salaires représentant jusqu'à 1,3 SMIC.

Vous créez trois impôts nouveaux : une contribution sociale sur les bénéfices, la TGAP et la taxe sur les salaires, dont on a vu combien elle était choquante. Nous aurons l'occasion d'en reparler.

Je voudrais pour ma part revenir sur le mécanisme qu'à la dernière minute, dans l'improvisation, vous avez, dans la journée de lundi, décidé de modifier. Il est finalement dommage que vous l'ayez modifié, madame la minsitre, car en mobilisant en toute clarté les fonds sociaux, vous étiez sincère : vous reconnaissiez que le postulat de départ n'était pas valable et qu'il fallait reconnaître que le coût de la baisse du travail ne pouvait être financé que par les finances sociales.

Jusqu'à lundi, vous nous montriez clairement que les finances allaient abonder très largement - et de plus en plus largement dans l'avenir - la couverture du surcoût.

Depuis lundi, c'est la même chose, mais caché. J'aurai l'occasion de le démontrer en expliquant pourquoi les dispositions nouvelles ne changent rien aux premières : la différence, c'est qu'elles sont masquées, cachées par une multitude de tuyaux, de reversements, de siphonnages, de transferts de la CSG vers le FSV, de la taxe sur les alcools vers le fonds de financement de ce que vous appelez la réforme des cotisations patronales.

En réalité, l'article 2 organise très froidement le financement du surcoût de la réduction du temps de travail sur le dos des salariés, sur le dos des finances sociales.

Comme nous ne pouvons accepter une telle dégradation de la situation sociale des Français, nous nous opposerons avec la plus grande détermination à cet article 2.

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet.

M. Jean Bardet.

L'article 2 a été l'objet d'un mélodrame comme les Français les aiment et dont le dénouement était évident, le Gouvernement ne pouvant se permettre d'être responsable de la sortir du MEDEF des organismes paritaires. Mais le MEDEF n'était pas seul en cause : les syndicats des salariés étaient sur la même longueur d'onde - j'ai ainsi entendu M. Blondel fêter, madame la ministre, votre retraite en rase campagne comme une victoire personnelle.

Je voudrais revenir sur la façon inacceptable dont cet article a été discuté en commission. La semaine dernière, après une demande de réserve de l'article, celui-ci est revenu en discussion en l'état alors que le président de la commission savait qu'il serait profondément modifié et que le rapporteur était absent - peut-être avait-il des discussions importantes à mener ailleurs. C'est par la presse que les parlementaires ont d'abord appris que le Gouvernement renonçait à ponctionner l'UNEDIC...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, c'est par la commission !

M. Jean Bardet.

Je dis bien : par la presse,...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non !

M. Jean Bardet.

... car j'étais en commission. Les parlementaires ont ensuite appris, le lundi 25, que le Gouvernement renonçait aussi à ponctionner les autres organ ismes de sécurité sociale. Dans quel dédain la représentation nationale est-elle tenue ! Le dispositif mis en oeuvre ne semble guère plus satisfaisant puisque le fonds sera alimenté par une fraction des droits sur les alcools, jusqu'à présent versée au fonds de solidarité-vieillesse. On reste donc dans un système de vases communicants dans la mesure où le fonds de solidarité-vieillesse devait lui-même alimenter le fonds de réserve des retraites, qui sera désormais alimenté par la sécurité sociale. Où est la différence par rapport au dispositif initial ? Je suis heureux, madame la ministre, de vous avoir entendu dire que ce financement serait pérenne, car cela signifie que vous n'espérez aucune diminution de l'alcoolisme en France, alors même que Mme Gillot déclarait qu'il était une des principales causes de mortalité évitables. Votre slogan n'est pas : « A consommer modérément » mais : « A consommer largement ».


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ha, ha, ha !

M. Jean Bardet.

Les autres sources de financement ne sont pas plus acceptables car elles ne sont pas pérennes ou ne peuvent être pérennisées que si l'objet de leur création échoue. Je m'explique : la taxation de 10 % des heures supplémentaires des entreprises qui n'auront pas conclu d'accord sur les 35 heures, qui doit rapporter, en 2000, 7 milliards, est appelée à disparaître ; une fraction du produit de la taxe sur la consommation du tabac ne peut être pérenne que si le tabagisme continue.

Dans une loi de financement de la sécurité sociale, vous prenez donc des décisions qui montrent que vous souhaitez que les deux fléaux que constituent l'alcoolisme et le tabagisme continuent de sévir.

Quant à la TGAP, dont je reparlerai, le même raisonnement peut s'appliquer. L'objectif affiché est de lutter contre les activités polluantes, mais l'arrière-pensée est que celles-ci se poursuivent le plus longtemps possible pour que l'on ait le plus de rentrées fiscales possibles.

Je terminerai par le « pompon ». Alors que le Président de la République, le Conseil d'Etat et les partenairess ociaux avaient émis les plus grandes réserves sur l'article 2, alors que, par ailleurs, Mme la ministre des affaires sociales s'accrochait mordicus jusqu'à la semaine dernière à son projet et le laissait discuter en l'état en commission, il ne restait plus à l'opposition qu'une solution : déposer des amendements de suppression. Mais alors que le président de la commission avait été extrêmement strict sur l'application de l'article 40 de la Constitution à plusieurs amendements, il ne disait rien sur ceux concernant l'article 2 du texte. Or aujourd'hui, l'opposition est muselée : ses amendements de suppression sont déclarés irrecevables.

M. Bernard Accoyer.

C'est vrai !

M. Jean Bardet.

Si la majorité semble être particulièrement attachée au caractère recevable de nos amendements, elle semble être beaucoup moins sensible au caractère antidémocratique de l'article 2.

Nous sommes en fait appelés à abonder un fonds destiné à financer les 35 heures, alors même que le projet de loi relatif à la réduction du temps de travail négociée n'a été voté ici même que la semaine dernière.

Sur le plan de la légitimité du travail parlementaire, je me demande ce que nous faisons ici. J'ai l'impression que le Gouvernement n'obéit qu'à la pression de la rue.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Exactement !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Il est assez difficile de s'exprimer dans la limite des cinq minutes qui nous sont imparties sur un article aussi...

M. Charles de Courson.

Monstrueux !

M. François Goulard.

... épouvantable. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Gérard Bapt.

Ce n'est pas possible !

M. François Goulard.

Quel est son objet ? Le financement des 35 heures. On peut appeler un fonds « fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale », mais ce n'est pas parce qu'on colle une étiquette sur un produit que l'on change sa nature : il s'agit en l'occurrence, et exclusivement, de compenser p artiellement certaines conséquences négatives de la réduction du temps de travail.

M. Bernard Accoyer.

Très juste !

M. François Goulard.

En résumé, la réduction du temps de travail imposée augmente les coûts salariaux horaires de 11,4 %, ce qui est insupportable pour un certain nombre de branches d'activité, et dommageable pour toutes les autres : du coup, le Gouvernement se sent obligé de compenser partiellement les conséquences de sa loi et il baptise la compensation partielle « allégement des cotisations sociales », faux-semblant qui ne trompe personne.

Ce faux-semblant nous fait remarquer une conversion récente, madame la ministre : la conversion aux vertus de la baisse des charges, bien qu'il s'agisse en réalité d'une fausse baisse des charges puisque ce seront les entreprises françaises qui paieront intégralement les allégements. Il est donc totalement illusoire, il est inacceptable de parler d'allégements des cotisations sociales.

J'en viens à la place de cet article dans une loi de financement de la sécurité sociale, compte tenu de l'objet du financement qu'il prévoit et du nombre des ressources de nature strictement fiscale auxquelles il fait référence.

Notre assemblée est une, mais comporte néanmoins un certain nombre de clubs, de sous-groupes. Il y a le club très fermé des membres de la commission des finances, de ceux qui s'intéressent au budget de l'Etat.

(Sourires.)

M. Bernard Accoyer.

Ils sont intelligents, eux ! (Sourires.)

M. François Goulard.

Un autre club, un peu moins huppé, examine, lui, la loi de financement de la sécurité sociale. C'est un club auquel nous sommes nombreux ici, ce soir, à appartenir.

M. Bernard Accoyer.

Eh oui, ce sont les besogneux.

(Sourires.)

M. François Goulard.

Or, ce soir, plusieurs membres du premier club, le plus huppé,...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ne soyez pas complexé, monsieur Goulard !

M. François Goulard.

... nous ont rendu une visite inhabituelle. Cela, qui nous fait naturellement grand plaisir, c'est la preuve qu'il y a une interférence grave pour la lisibilité des finances publiques entre ce qui ressort de la loi de finances et ce qui ressort de la loi de financement de la sécurité sociale. C'est une erreur que de s'engager dans cette voie. La lecture des documents financiers de l'Etat et de la sécurité sociale en sera d'autant plus difficile.

J'en viens aux ressources que vous dégagez. Vaste sujet ! Certaines impositions n'ont rien à voir avec le financement des 35 heures. La taxe sur les activités polluantes, par exemple, devrait pas aller au financement des 35 heures - on a quelques scrupules à énoncer de telles évidences. S'il fallait en faire une ressource affectée, elle devait naturellement aller à la lutte contre la pollution.

La même remarque vaut pour les taxes sur le tabac ou l'alcool.

Pis, le principe même d'affectation d'un impôt à des dépenses est contestable au nom des règles régissant les finances publiques, qui ne datent pas d'hier, mais du siècle dernier. Nous sommes un certain nombre ici à bien connaître la jurisprudence Chasseloup-Laubat et à la respecter comme l'une des règles fondatrices de nos finances publiques. Il serait dommage de continuer dans cette voie condamnable de l'affectation des recettes aux dépenses.

Pour le reste, on qualifie généralement le dispositif que vous mettez en place d'« usine à gaz ». C'est une expression couramment employée. Une usine à gaz est, somme


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toute, une installation chimique assez simple. Manifestem ent, le dispositif que vous proposez atteint en complexité les usines chimiques les plus élaborées. (Sourires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépend ants.)

Mais, madame la ministre, dans les usines chimiques les plus complexes, il existe des plans sur lesquels on peut lire le sens, la nature et l'importance des transferts opérés. Dans le cas de l'article 2, on ne sait pas quels seront les transferts. Vos indications sont vagues, changeantes et n'apportent aucune garantie...

M. le président.

Je vous prie de conclure, cher collègue.

M. François Goulard.

Je vais conclure, monsieur le président, mais admettez que l'article 2 n'est pas anodin.

Nous serons plus brefs sur les autres articles.

M. le président.

Chaque orateur dispose de cinq minutes.

M. François Goulard.

Je termine, monsieur le président. Merci de votre tolérance.

M. Albert Facon.

La tolérance a des limites !

M. François Goulard.

Curieusement, votre repli tactique a été annoncé par un dirigeant du Parti socialiste, ce qui laisse supposer qu'il résulte d'un arbitrage rendu en haut lieu et non de votre propre initiative. Cependant, à l'instar des partenaires sociaux, j'estime que nous ne sommes pas quittes : nous ne savons pas si, par un détour quelconque, il n'y aura pas de nouvelles ponctions sur les régimes de protection sociale. En effet, nous savons que les relations financières entre l'Etat et ces régimes sont complexes. Certaines de vos déclarations, sans parler de l'amendement de notre collègue Recours, font craindre que vous ne préleviez d'un côté ce que, sous contrainte, vous avez renoncé à prélever de l'autre.

M. le président.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt.

L'article 2 ne vaut pas ce flot de critiques.

M. Bernard Accoyer.

Oh, juste un hold-up sur les finances publiques, ce n'est pas grave, n'est-ce pas...

M. Gérard Bapt.

Cet article crée un nouveau fonds dans le champ de la sécurité sociale pour financer la réforme des cotisations patronales, en prenant notamment en charge les aides incitatives à la réduction du temps de travail, le montant de la ristourne unique dégressive qui existait déjà, mais aussi le nouveau régime d'allégement des prélèvements sur les bas et les moyens salaires.

C'est une étape importante dans l'histoire des allégements généraux de charges, puisqu'il supprime la trappe aux bas salaires, cet effet pervers qui s'inscrivait dans les statistiques des ASSEDIC et de l'UNEDIC et qui faisait que la proportion des salariés rétribués au-dessous de 1,3 fois le SMIC ne cessait de s'accroître. Pourquoi ? Parce que l'augmentation des charges, créant un effet de seuil, incitait les employeurs à remettre en question, dans les négociations salariales, toute perspective professionnelle et toute revalorisation de carrière.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Tout à fait !

M. Gérard Bapt.

Par ailleurs, l'allégement des charges sur le SMIC est considérablement majoré, passant de 15 000 à 21 000 francs.

M. Pascal Terrasse.

Et même 21 500 francs !

M. Gérard Bapt.

Certes, dans une précédente loi de finances, le plafond donnant droit à cet allégement était déjà passé de 1,33 à 1,3 fois le SMIC. Mais rappelonsnous qu'il s'agissait de faire face au dérapage des dépenses publiques dont nous avions hérité, constaté par un rapport impartial de magistrats de la Cour des comptes, en juillet 1997.

M. Préel a regretté que cet abattement de charges sociales se fasse à coup constant pour les entreprises.

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas à coût constant !

M. Gérard Bapt.

Pour notre part, nous nous réjouissons qu'il ne se fasse pas sur le dos des consommateurs et des ménages,...

M. Charles de Courson et M. François d'Aubert.

Et la lessive ?

M. Bernard Accoyer.

Heureusement que la mère Denis n'entend pas cela ! (Sourires.)

M. Gérard Bapt.

... ce qui serait profondément négatif pour l'emploi.

L'article 2 ne serait pas financé. Je remarque pourtant que tout en tenant compte des récents arbitrages gouvernementaux, cette réforme est financée avant le vote, puisque celui-ci doit intervenir ce soir même.

I nversement, la ristourne unique dégressive de M. Juppé, instituée en 1995, n'avait pas été financée.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas vrai !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Malheureusement si !

M. Gérard Bapt.

En tant que rapporteur du budget de l'emploi et du travail pour la commission des finances, j'avais pu le vérifier. Dans la loi de finances rectificative pour 1997, nous avions dû majorer de 4,350 milliards de francs le budget des charges communes, 2,2 milliards de francs étant consacrés à la régularisation des années 1995 et 1996 - pendant lesquelles le financement n'avait pas été assuré - et 1 milliard de francs à la montée en charge du dispositif. Enfin, 1,1 milliard de francs était destiné à revaloriser le SMIC à compter du 1er juillet 1997. Cela, nous l'assumons et nous ne le regrettons pas. Dans la loi de finances rectificative pour 1998, nous avions dû encore affecter 5,6 milliards de francs à l'apurement de la dette résiduelle de l'Etat, pour 1997 et les exercices antérieurs, figurant dans le budget des charges communes. En vérité, si une réforme n'a pas été financée, c'est bien c elle de M. Juppé relative aux allégements de charges sur les salaires inférieurs à 1,33 % fois le SMIC. (Protestationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Eh oui !

M. Bernard Accoyer.

Vous ne pouvez pas dire cela, monsieur Bapt ! Calmez-le, monsieur le président.

M. Gérard Bapt.

M. Bardet, bardé de mauvaise foi, a ironisé sur la taxe, qui frapperait l'alcoolisme et non pas l'alcool ;...

M. Jean Bardet.

M. Evin est d'accord avec moi !

M. Gérard Bapt.

... je pense très franchement qu'ils 'agit d'une expression particulièrement inélégante.

M. Jacques Barrot a parlé avec une autre intelligence et une autre élégance,...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. Jean Bardet.

C'est une attaque personnelle ? M. Barrot est particulièrement intelligent, mais tout de même !

M. Gérard Bapt.

... en posant le problème du mélange entre politique de sécurité sociale et politique de l'emploi.

M. Jacques Barrot.

Ce n'est pas ce qu'on a fait de mieux... (Sourires.)

M. Gérard Bapt.

L'exonération des charges sociales non compensées pour la sécurité sociale, lors de l'embauche d'un premier salarié, qui faisait l'objet de l'amendement que j'ai retiré tout à l'heure, abordait déjà la question.

L'évolution qui se profile derrière cette loi de financement de la sécurité sociale, et derrière la modification du budget du travail et de l'emploi et du budget des charges communes, vise au contraire à bien séparer les choses.

Dans le budget de la sécurité sociale, on inscrira désormais ce qui correspond aux charges sociales non compensées, non ciblées, sans contreparties et lorsque seront épuisées les aides incitatives ; et, qu'il s'agisse de mesures s'adressant à des publics en difficulté, éloignés de l'accès à l'emploi, ou bien encore d'aides aux entreprises avec contreparties en matière d'emplois tout ce qui concerne les aides ciblées restera dans le budget de l'emploi.

Il s'agit là, au fond, d'une clarification, à laquelle nous procéderons progressivement.

M. François Goulard.

Clarification ? Le mot est juste...

(Sourires.)

M. Gérard Bapt.

Voilà pourquoi l'article 2 ne vaut pas la déconsidération répandue par les orateurs précédents.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Quelle autorité, quelle intelligence, monsieur Bapt !

M. le président.

La parole est à M. François d'Aubert.

M. François d'Aubert.

Monsieur le président, le micro de l'opposition fonctionne mal. Je vous suggère de le faire réparer.

M. le président.

Pas en cours de séance, monsieur d'Aubert. M. Accoyer, qui fut peut-être rock star dans sa jeunesse, a violemment ébranlé le micro tout à l'heure.

(Rires.)

Je vous en prie, monsieur d'Aubert, soyez tendre avec ce matériel.

M. François d'Aubert.

Madame la ministre, il y a longtemps que l'on n'a pas examiné un article aussi imbécile dans une loi de financement, une loi sociale ou une loi budgétaire.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'en est trop ! Attaque personnelle ! (Sourires.)

M. François d'Aubert.

L'article 2 déroge à tous les principes du droit budgétaire, du droit de la sécurité sociale, du droit tout court.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

De la droite tout court ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François d'Aubert.

Calmez-vous, madame la ministre, je vous en prie ! Ecoutez ce que j'ai à vous dire.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous m'avez traitée d'imbécile !

M. François d'Aubert.

Tout à l'heure, M. Goulard a parlé d'usine à gaz. La seule différence, c'est que les usines à gaz, elles, fonctionnent. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Là, le risque, c'est que le système ne fonctionne même pas. De plus, généralement, près d'une usine à gaz, il y a des voitures de pompiers ; la seule dépense administrative que vous avez omise, c'est l'acquisition de voitures de pompiers.

Trêve de plaisanterie. Vous créez un fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale. Peut-être vouliez-vous tout simplement inventer un nouveau sigle, le FDFDLRDCPDSS ? (Rires.)

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Restez poli !

M. François d'Aubert.

C'est une abréviation et en même temps une simplification.

Alors, on peut prendre les choses avec un petit peu d'humour - même si c'est tout à fait déplacé, et vous n'arriverez pas à m'instrumentaliser ainsi.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Au moins, vous reconnaissez que c'est déplacé.

M. François d'Aubert.

Une première constatation s'impose. La création du fonds constitue une véritable débudgétisation, et non pas une rebudgétisation via les comptes de la sécurité sociale. Le Parlement n'exercera aucun contrôle sur ce fonds, qui, d'après vos pronostics - je crois qu'on est plutôt dans le domaine des pronostics que dans celui des prévisions -, représentera une centaine de milliards. Ainsi, 100 milliards vont être gérés par un établissement public administratif dans lequel siégeront un ou deux parlementaires. Voilà pour l'alibi parlementaire.

Deuxième observation, toujours sur le plan budgétaire, il y a une confusion invraisemblable entre droit budgétaire et droit de la sécurité sociale, entre règles budgétaires et règles du financement de la sécurité sociale.

Cela ne s'est jamais vu un système où, avec une telle ampleur, les impôts sont mélangés aux cotisations pour financer une action dont personne ne sait plus si elle relève du budget de l'Etat ou du budget de la sécurité sociale.

D e deux choses l'une. On peut conserver deux domaines séparés, avec une loi de financement de la sécurité sociale et une loi de finances. En principe, c'est le système en place, mais ce n'est manifestement plus le cas avec cette espèce de sas, ce fonds de financement.

Autre solution, on va carrément vers la fusion du budget de la sécurité sociale avec celui de l'Etat. Si c'est cela, il faut le dire ! On ne peut pas conserver le système intermédiaire actuel, système bâtard qui ne tient pas debout.

Troisième observation, les dépenses du fonds ne sont pas évaluées, ou sont évaluées à la louche, y compris pour 2000, puisque vous raisonnez sur des fourchettes, à 3 milliards près. Mais 3 milliards, par rapport à 60 milliards, cela représente tout de même 5 % d'approximation.

Aucun autre crédit budgétaire n'est géré avec 5 % d'approximation. Demandez à M. Strauss-Kahn ce qu'il en pense. Demandez au ministère des finances ! Un tel degré d'amateurisme financier et budgétaire est invraisemblable.

Quand les dépenses atteindront-elles leur régime de croisière ? L'année prochaine ? Dans deux ans ? Dans cinq ans ? Le Parlement ne le sait pas non plus ! Nous sommes dépouillés de certaines des nos prérogatives. C'est scandaleux. On ne peut pas prétendre que, par souci de la démocratie, on veut revaloriser le rôle du Parlement et, en même temps, créer de toutes pièces un outil complètement technocratique comme ce fonds.

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur d'Aubert.

M. François d'Aubert.

J'ajouterai que le fonds est complètement déséquilibré, parce que les dépenses évoluent en figure libre, vouées à augmenter de manière


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

significative, tandis que les recettes vont aller de mal en pis. Vous ne ferez croire à personne que les recettes sur le tabac ou sur l'alccol sont appropriées pour financer un fonds dont les dépenses vont progresser de plus en plus.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Cela, c'est essentiel...

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

L'article 2, en plus de créer un fonds dont l'objectif est de financer le passage aux 35 heures, précise les sources de financement. Il pose la question du financement de notre protection sociale.

Au-delà des remarques que nous avons formulées concernant la nature du fonds, ce qui nous intéresse aujourd'hui, c'est de savoir si le financement et les réformes que vous proposez répondent aux objectifs que nous nous sommes fixés.

En premier lieu, constatons-le, les besoins ne sont pas tous couverts. Des inégalités d'accès aux soins subsistent, même si la loi sur la couverture maladie universelle en atténuera certaines. Toujours est-il que le niveau des remboursements reste parmi les plus faibles d'Europe, que les prothèses dentaires et optiques sont très mal prises en charge.

Par conséquent, l'objectif premier qui, selon nous, doit être assigné à cette réforme, est d'accroître les ressources

La démarche qui consiste à conserver une enveloppe constante tout en souhaitant développer davantage l'offre de soins et répondre plus largement et mieux aux besoins nous semble vouée à l'échec. Nous sommes de ceux qui pensent qu'il ne faut pas gaspiller, de ceux qui aspirent à rétablir les comptes de la sécurité sociale, mais, en aucun cas, nous ne voulons le faire en limitant, pour les assurés sociaux, les possibilités de se soigner, d'élever une famille et de faire face aux aléas de la vie.

Notre position est renforcée par le fait que d'immenses richesses existent dans notre pays. Nous avons les moyens de financer une politique de santé publique et de protection sociale ambitieuse, c'est notre conviction profonde.

Hélas, en l'état, je dois le dire, le projet de loi de financement ne répond pas à notre attente.

Que constatons-nous ? Que le financement des exonérations de cotisations patronales, c'est-à-dire le remboursement à la sécurité sociale de l'extension des allègements de charges, repose essentiellement sur les ménages.

En effet, la taxe sur les tabacs est supportée par des millions de consommateurs comme moi. Il en est de même de la taxe sur les alcools... même si c'est moins vrai pour moi. (Sourires.)

La taxe sur les produits polluants sera étendue aux lessives et assouplissants. Enfin, une partie des heures supplémentaires effectuées par les salariés ne leur seront plus payées. Ainsi, certains d'entre eux seront pénalisés deux fois : non seulement ils n'obtiendront pas la réduction du temps de travail, mais encore on prélèvera une partie de leurs heures supplémentaires. Cela ne s'est jamais vu dans l'histoire de notre pays ! Vous avez renoncé à juste titre, madame la ministre, à mettre à contribution les organismes sociaux comme l'UNEDIC et la sécurité sociale. Nous ne pouvions concevoir, à l'instar des organisations syndicales, de prélever 20 milliards sur l'UNEDIC et 5,6 milliards sur la sécurité sociale, alors que 41 % des chômeurs sont mal ou ne sont pas indemnisés et que des besoins sociaux restent à couvrir ! Nous l'avons dit et nous avons été entendus. Nous nous en félicitons.

La part prise au Fonds de solidarité vieillesse ne posera-t-elle pas problème pour revaloriser le minimum vieillesse, l'allocation mère de famille ou encore les allocations spéciales et complémentaires ? Une nouvelle fois, les entreprises ne sont pas mises à contribution comme il se devrait. La taxe qu'il est prévu d'instituer sur les bénéfices ne rapportera que 4,2 milliards. Il n'y a pas de quoi, messieurs de la droite, crier au scandale ! D'autant que, d'un autre côté, la surtaxe de l'impôt sur les sociétés, qui rapporte 12,5 milliards, est supprimée et que la taxe professionnelle baisse de 2 milliards.

Faisons les comptes et parlons vrai ! Comme le souligne le président de la commission des finances, la réforme proposée n'alourdit pas la charge globale des entreprises. Au contraire. Faut-il le rappeler, les profits dont on ne parle jamais ici, car c'est un mot tabou (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance), représentent 2 136 milliards de francs.

Si on leur applique les 3,3 % proposés dans le rapport,...

M. le président.

Monsieur Gremetz, il vous faut conclure !

M. Maxime Gremetz.

J'ai beaucoup écouté, j'ai beaucoup appris...

M. le président.

Oui, mais il vous faut conclure !

M. Maxime Gremetz.

... on obtient 70 milliards.

J'ai ici la liste des trente premiers grands groupes français : leurs profit ont augmenté de 32,8 % et représentent 126,9 milliards de francs !

M. Germain Gengenwin.

Combien d'emplois ont été créés ?

M. Maxime Gremetz.

Si on leur applique ces 3,3 %, on ramène immédiatement 4 milliards. Cela veut dire qu'on peut largement augmenter les allocations familiales, et les retraites.

M. le président.

Monsieur Gremetz, vous aurez l'occasion de développer vos arguments...

M. Maxime Gremetz.

Monsieur le président, je vous trouve bien à cheval... (Rires.)

M. François Goulard.

Au perchoir ? (Sourires.)

M. Maxime Gremetz.

J'ai également ici les chiffres des comptes de la nation. Car il ne faut pas raconter d'histoires aux gens, il faut parler avec des chiffres vrais.

Que représente donc la part du travail dans la valeur ajoutée ? 71,7 % il y a cinq ans. Aujourd'hui, elle n'est plus que de 60,3 % ! On voit bien que les profits augmentent et que les revenus du travail baissent. Voilà ce qu'il faut changer ! Et je ne parle pas, évidemment, mesdames, messieurs des revenus financiers : « seulement » 6 874 milliards de capitalisation boursière. Un journal titrait d'ailleurs sur l'« explosion des capitalisations boursières ».

Pour nous, la question est la suivante : va-t-on, oui ou non, faire le choix de prendre un peu sur les revenus du capital et sur les revenus financiers pour pouvoir mener une grande politique de protection sociale ? Ou va-t-on continuer à jouer « petits bras » sans répondre aux attentes du pays ?

Mme Jacqueline Fraysse.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Pourquoi a-t-on créé ce fonds ? Et pourquoi le Gouvernement l'a-t-il doté de la personnalité morale et financière ? Vous êtes-vous posé la question, mes chers collègues ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, ils sont moins intelligents que vous...

M. Charles de Courson.

Ce n'est pas du tout dans un but de clarification. Comme l'a dit avec beaucoup d'humour mon collègue Goulard, c'est une véritable usine à gaz ! Si on avait voulu dissimuler la réalité, il n'y avait qu'à créer ce fonds.

Jusqu'à présent, les 40 milliards étaient budgétés dans le budget de l'Etat, en particulier dans le budget de Mme la ministre. Alors, pourquoi créer un tel fonds ? La réponse est très simple : pour dissimuler la croissance des dépenses de l'Etat.

M. Strauss-Kahn nous a dit qu'à périmètre constant en 1999, cette hausse était de 0,9 %. Certes. Mais il n'avait oublié qu'une chose, c'est qu'il débudgétisait trois fonds : celui-ci, qui est le plus important ; un second, qui n'est pas mince, sur la CMU, et un petit troisième, pour mémoire, le fonds d'indemnisation des travailleurs de l'amiante. Si vous rebudgétisez ces trois fonds comme ils auraient dû l'être, savez-vous de combien augmentent les dépenses publiques ? De 3,5 % ! Le but de la manoeuvre est donc de dissimuler, et pas du tout de procéder à une clarification. Il est de dissimuler la réalité de la hausse des dépenses publiques.

D'ailleurs, mes chers collègues, pourriez-vous m'expliquer pourquoi on a fait apparaître dans ce fonds le coût de la loi de 1998, soit 4,3 milliards, tout en laissant dans le budget de Mme Aubry 4,3 milliards que l'on retrouve en recettes dans ce fonds, puisqu'ils vont lui être versés ? En revanche, la loi de Robien, qui rapporte encore 2,3 milliards, est restée sur le budget de Mme Aubry. Où est donc la cohérence ? Il n'y en a pas ! Autre remarque, très grave, et c'est une des causes de l'inconstitutionnalité de cet article, même retoiletté : il porte une atteinte fondamentale aux droits du Parlement.

Pourquoi ? Vous êtes-vous posé la question suivante :...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, on ne se pose pas de questions !

M. Charles de Courson.

Comment peut-on présenter une estimation aussi folklorique des recettes et des dépenses du fonds ? Tout simplement parce qu'il n'y a aucun budget prévisionnel dudit fonds.

Lisez l'extravagant exposé des motifs de l'article 2 :

« En 2000, les dépenses du fonds sont évaluées à un montant de l'ordre de 62 à 67 milliards ... ». Cinq milliards d'écart dans les estimations ! Alors que l'on discute, à quelques dizaines de millions près, sur les chapitres budgétaires du budget de l'Etat ! Si Mme Aubry avait dû, ce qui eût été la logique et l'orthodoxie budgétaire, l'inté grer à son budget, elle aurait bien dû donner un chiffre et n'aurait pas pu se contenter de mettre : « entre 62 et 67 milliards ». C'est incroyable au regard des droits du Parlement ! Autre remarque encore : on nous dit qu'il va y avoir un conseil d'administration et un conseil de surveillance.

Mais avez-vous bien lu le texte, mes chers collègues ? Les représentants du Parlement ne sont pas au conseil d'administration, qui décide, mais au conseil de surveillance.

D'ailleurs, on lit « un conseil de surveillance comprenant "notamment" des représentants ... du Parlement. ». Quel

dédain à l'égard de la représentation nationale ! Je vous le rappelle, mes chers collègues, que nous sommes seuls les représentants du peuple et que c'est nous qui devons arrêter les dépenses et les recettes du budget de l'Etat.

Nous en voilà dessaisis.

Troisième élément d'une totale extravagance budgétaire : où est ce fonds ? Est-il dans la loi de finances ? Non. Est-il dans la loi de financement de la sécurité sociale ? Pas plus. L'article 2 est bien dans la loi de financement de la sécurité sociale, mais si vous lisez l'article 6 qui porte sur les prévisions de recettes, vous constatez que les recettes du fonds n'y figurent pas. Prenez l'excellent rapport, sur ce point, de notre collègue Cahuzac. Celui-ci naturellement un peu gêné, précise qu'il n'est ni dedans, ni dans la loi de finances, ni dans la loi de financement de la sécurité sociale. Il est ... ailleurs ! Le seul malheur, mes chers collèques, c'est qu'en matière de finances publiques, on ne peut pas être ailleurs ! Troisième remarque : Mme Aubry a réinventé un concept du droit budgétaire de l'Ancien régime, qui s'appelait le don gratuit. Savez-vous ce qu'est le don gratuit ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vous nous l'avez déjà faite, celle-là !

M. Charles de Courson.

Oh, mais je vous la refais, parce qu'elle est savoureuse. D'ailleurs Mme Aubry n'était pas là...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je crains que si !

M. Charles de Courson.

Non, c'était M. Strauss-Kahn, pendant la discussion de la loi de finances.

Mme Aubry est telle une reine qui, sous l'Ancien régime, convoquait les prélats responsables de l'Eglise de France (Exclamations sur divers bancs) pour leur dire :

« Les finances du royaume de France sont dans un état désatreux, donnez-moi de l'argent. »

(Sourires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Et les sages prélats de répondre : « Reine, il vaudrait peut-être mieux réduire vos dépenses que de les augmenter pour nous demander de l'argent. » C'est plein de sagesse

! Il arrivait souvent que les sages prélats disent : « Vous n'aurez rien ! Gérez mieux les finances, réduisez votre train de vie. » Et le roi, ou la reine, menaçait les sages

prélats en leur disant : « Si vous ne faites pas ça, je vous aurai au tournant. »

(Rires sur les mêmes bancs.)

« Je vais transférer un certain nombre de dépenses. Je vais vous exiler, etc. ».

Eh bien, mes chers collègues, il y a eu une insurrection républicaine contre la reine. Et les Républicains, c'est l'opposition, ce sont les partenaires sociaux qui ont dit à la reine : « Reine, tu n'as pas le droit de faire cela. »

(Rires et exclamations sur les mêmes bancs.)

Et la reine a craqué.

Elle en a été malade (Applaudissements sur les mêmes bancs) car, vous le savez, elle n'aime pas qu'on la contredise. La reine n'aime pas avoir tort. Elle est d'ailleurs encore plus dure avec ses amis qui la contredisent qu'avec les gens de l'opposition. Parce que nous, c'est notre métier.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Attendez de m'entendre...

M. Charles de Courson.

Le don gratuit n'a pas été réinventé.

M. le président.

Vous devez terminer votre conte, monsieur de Courson. Votre temps de parole est terminé.

M. Charles de Courson.

Troisième point...

M. le président.

Veuillez conclure. A l'impression, c'est la troisième fois que c'est votre troisième point.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. Charles de Courson.

Les 35 heures, sont une véritable bombe budgétaire. Elles coûteront une vingtaine de milliards l'année prochaine. Mais on nous dit qu'à moyen terme, c'est-à-dire dans trois ans, on en sera grosso modo à 60, 70 milliards. Et volent milliards ! La ministre ne sait même pas dire aujourd'hui comme elle va financer dans les trois ans qui viennent. Il lui manque 20 milliards ? Mais qu'est-ce que 20 milliards, comme disait Maxime Gremetz... Il n'y a qu'à mettre une petite taxe sur les grands profits du grand capital, n'est-ce pas ? (Rires.)

M. Maxime Gremetz.

Pas mal...

M. Charles de Courson.

Voilà !

M. le président.

Monsieur de Courson !

M. Charles de Courson.

Pompons, pompons sur les alcools, faisons monter la TGAP...

M. le président.

Très bien, nous avons compris votre raisonnement. Je vous propose vraiment de conclure.

M. Charles de Courson.

Mes chers collègues, en conclusion, prenez garde aux reines. Prenez garde à la censure du Conseil constitutionnel. Ce fonds n'est pas équilibré. Ce fonds n'est situé nulle part. Les recettes du fonds ne figurent pas dans l'article 6. Oh, il ne s'en faut que d'une soixantaine de milliards !

M. le président.

Mais vous avez déjà dit tout ça !

M. Charles de Courson.

En conclusion,...

M. le président.

En conclusion, je vais vous couper le micro.

M. Charles de Courson.

... l'article 2 est l'exemple même du monstre juridique budgétaire auquel on aboutit quand on n'a pas réfléchi à ce qu'est une société moderne. C'est une société dans laquelle les partenaires sociaux négocient et dans laquelle le Parlement essaie d'encadrer et de réguler l'action de la société civile.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse, qui va parler moins de cinq minutes, n'est-ce pas, monsieur Terrasse ?

M. Pascal Terrasse.

Bien moins, monsieur le président.

L'article 2 est effectivement très important. Le Gouvernement a fait de l'emploi sa priorité.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

La mesure aujourd'hui présentée, en particulier la création de ce fonds,...

M. Bernard Accoyer.

Et il s'appelle comment ce fonds ?

M. Pascal Terrasse.

... s'inscrit parfaitement dans le cadre d'un projet global et très cohérent.

En 1997, nous avions réformé les cotisations salariales par la CSG. Cette année, la ministre nous propose de réformer les cotisations patronales, comme elle s'y était d'ailleurs engagée l'année dernière.

Ce dispositif répond essentiellement à l'objectif d'exonération des charges patronales. Et je dois dire que la droite me surprend. Certes, des orateurs de l'opposition ont osé dire, en préambule, qu'ils étaient pour la baisse des charges sociales. Mais certaines interventions ont démenti de tels propos.

On sait que les entreprises à forte main-d'oeuvre, notamment peu qualifiée, sont pénalisées par le poids des charges sociales. D'ailleurs, si on se place au niveau européen, on se rend compte que le poids des charges sociales sur les salaires est un peu plus important en France.

Le mécanisme qui nous est aujourd'hui proposé est beaucoup plus intéressant que la ristourne dégressive proposée par le gouvernement Juppé car il va beaucoup plus loin : 1,8 au lieu de 1,3 SMIC - ce qui constituait, Gérard Bapt a eu raison de le rappeler, une trappe à bas salaire.

C'est important pour l'emploi. Il suffit d'ailleurs de lire certaines revues spécialisées, pour s'en convaincre. Je pense, notamment, à la revue de la CAPEB qui, la semaine dernière, mettait l'accent sur cette baisse des charges sociales qu'elle attendait depuis de nombreuses années. Je crois que nous avons réussi à la faire.

On sait que cette baisse des charges sociales va permettre des créations d'emplois qui vont se traduire par des cotisations sociales et des impôts complémentaires.

C'est un des intérêts de cette mesure.

S'agissant des partenaires sociaux, vous me permettrez de citer un article du journal Le Point , qui date du 30 janvier 1998. On y interrogeait Mme Notat : « Ne serait-il pas opportun et de bonne politique que l'UNEDIC, que vous présidez, apporte sa quote-part à la RTT dans la mesure où si le chômage baisse, elle en bénéficiera ? » Et Mme Notat de répondre : « Mais au départ, c'est ce que nous souhaitions ». « Quand nous avons institué les fonds paritaires pour l'emploi qui aujourd'hui financent entre autres l'ARPE, la CFDT voulait aussi qu'ils prennent en charge la réduction du temps de travail. Nous étions d'ailleurs dans la même logique que la CGC et la CFTC. »

Je n'irai pas plus loin. Effectivement, les partenaires sociaux auraient souhaité, à l'époque que l'UNEDIC participe au financement de la RTT - alors que la loi de Robien a été financée entièrement par l'Etat. Aujourd'hui, il y a eu un changement. Je ne sais pas qui a changé le premier. En tout cas, je crois que la sagesse du Gouvernement a permis de trouver une solution.

Quoi qu'il en soit, la réduction du temps de travail est maintenant votée. La réduction des charges sociales le sera aussi et c'est une bonne chose pour notre pays.

M. le président.

Merci, vous avez parlé moins de cinq minutes. Comme va le faire M. Gérard Terrier ?

M. Gérard Terrier.

Je vais essayer, monsieur le président. Mais permettez-moi de dire que j'ai l'impression que tout ce que je viens d'entendre relève de l'hallucination.

Monsieur de Courson - mais comment dois-je vous appeler : vicomte, baron, roitelet ?

M. Charles de Courson.

Simple citoyen !

M. Gérard Terrier.

Je ne sais pas trop...

Vous n'êtes pas sérieux en traitant de la sorte des affaires aussi importantes que celle-là. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Charles de Courson.

Hélas je suis sérieux !

M. Gérard Terrier.

Vous ne nous avez pas habitués à autant d'approximations. A moins que vous ne soyez très adroit...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Très à droite, plutôt !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. Gérard Terrier.

... pour essayer de tromper l'ensemble des parlementaires et des Français.

Monsieur de Courson, vous nous faites, permettez-moi l'expression, tout un pataquès pour 7,5 milliards (« Une paille ! » et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) sur plus de 1 800 milliards que représente le budget de la sécurité sociale. A peine 0,42 %.

M. Bernard Accoyer.

C'est à peine 500 tonnes d'or !

M. Gérard Terrier.

M. Lemoine a dit que, si les collectivités pouvaient faire des prévisions avec aussi peu d'approximation... Que l'on se penche sur l'ensemble des décisions modificatives et le compte administratif : on verra que, entre le budget voté, le budget primitif et ce qui est réalisé, les 0,5 % sont largement dépassés.

M. Charles de Courson.

10 % !

M. Gérard Terrier.

Mais il y a plus grave. Monsieur de Courson, je crois que vous avez soutenu, avec beaucoup moins d'éloquence et beaucoup moins d'humour, des budgets qui n'étaient pas totalement équilibrés. Si je me souviens bien, vous avez soutenu la réforme Juppé...

M. Charles de Courson.

Tout à fait !

M. Gérard Terrier.

... qui était, tout de même, une catastrophe.

M. Charles de Courson.

C'est pour cela que vous l'avez conservée, d'ailleurs !

M. Gérard Terrier.

Madame la ministre, nous avons là un projet de loi - et je crois que c'est ce qui agace l'opposition - qui est, pour cette année, totalement financé.

M. Yves Bur.

Sans rire ?

M. Gérard Terrier.

Vous avez dû, avec beaucoup de sagesse, prendre en considération un refus. En bonne reine que vous êtes, vous n'avez pas voulu passer en force et vous avez tenu à discuter, ce qui est tout à fait naturel parce qu'il faut réguler les relations entre l'UNEDIC et l'Etat. Tout le monde doit en être satisfait.

Mais je ne suis plus du tout l'opposition quand elle sort de sa propre logique, celle de la réforme des cotisations patronales. Car il ne s'agit que de cela ! Et c'est bien cette logique que vous défendiez.

M. Bernard Accoyer.

Pas en augmentant le coût du travail !

M. Gérard Terrier.

Nous nous engageons dans cette réforme. Nous répondons à vos aspirations. Vous êtes donc en train de vous contredire vous-mêmes.

M. Charles de Courson.

Le problème, c'est le financement !

M. Gérard Terrier.

La réduction du temps de travail, monsieur de Courson, c'est une autre loi. Nous l'avons votée, elle fait presque partie du passé. Aujourd'hui, puisque notre logique est une logique d'emploi, nous avons à décider que ceux qui bénéficieront des mesures d'accompagnement allégeant les charges sociales seront ceux qui généreront de l'emploi. Cela paraît tout à fait naturel, mais telle n'est pas votre logique, et je le regrette.

Pour changer de tonalité par rapport à l'opposition, je dirai que l'article 2 a toute sa place dans ce projet de loi.

C'est un article que je qualifie d'excellent. (Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

L'opposition peut être en désaccord. Comme vient de le dire excellemment Gérard Terrier, vous pouvez fort bien regretter, messieurs, que nous réalisions une réforme que vous avez beaucoup annoncée, mais jamais faite. Peut-être même est-ce justement cela qui vous énerve et qui explique certains de vos propos.

En tout cas, je ne peux pas laisser passer autant de contrevérités, d'incohérences et même d'excès sans y répondre point par point, mais sur un ton différent, bien sûr, de celui dont vous avez usé, sans les noms d'oiseaux ou les insultes (« Oh ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et sans retourner à l'Ancien Régime, car je n'ai pas le talent de M. de Courson, qui en possède aussi beaucoup de qualités. Après les contes de Perrault, nous connaissons maintenant les contes de Courson.

(Sourires.)

Ils sont assez machistes, cela ne nous étonne pas non plus.

M. Goulard et M. Bur, pour commencer par eux, nous ont asséné des contrevérités. J'accepte les critiques, mais j'admets difficilement que l'on énonce comme des faits des assertions contraires à la réalité. Et je veux montrer que, ce soir, à l'exception de M. Barrot, vous en avez tous accumulé un certain nombre. Puisque vous souhaitez un débat démocratique, et je m'en réjouis, je vais vous répondre.

Tout d'abord, vous laissez accroire, monsieur Bur et monsieur Goulard, que l'adhésion à la baisse des charges sociales serait, en ce qui me concerne, une « conversion récente ». Je n'ai pas l'habitude de me citer moi-même, mais je dois néanmoins rappeler qu'en février 1993, exerçant les mêmes fonctions, j'écrivais : « Il n'y a pas en France un problème global de coût du travail, mais en revanche, il apparaît clairement que les charges sociales sur les bas salaires sont trop élevées. Cette question du coût du travail doit être débattue sérieusement, sans arrière-pensées idéologiques - c'était déjà le cas car elle constitue, on l'a constaté précédemment, avec les nouveaux emplois de service, l'un des facteurs clés de nos politiques en faveur de l'emploi. »

Je l'ai réécrit en 1994. Je l'ai précisé à nouveau ici même, le 28 octobre 1997, lors de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale : « Je suis, disais-je, la première à être consciente - je l'ai dit et écrit depuis des années - que le problème du coût du travail pour les bas salaires est un problème auquel il faut s'attaquer. En cette matière, nous allons poursuivre l'action que nous avons engagée, mais sous d'autres formes. »

Lors de la discussion de la proposition de loi sur l'allègement des charges, première séance du 30 juin 1998, au moment de la discussion du budget, à l'occasion encore de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale, j'ai toujours dit clairement que nous estimions nous aussi, dans notre grande majorité, qu'il y avait dans notre pays « un véritable problème des charges sur les bas salaires ».

Je tiens à votre disposition toute une liste de citations qui vont dans le même sens. Je vous en épargne évidemment la lecture.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. Thierry Mariani.

En 1991, vous étiez contre les 35 heures !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Laissez-moi répondre point par point ! Sur celui-ci, je note que ma « conversion récente » remonte quand même à 1993.

En 1991, sur la durée du travail, j'ai dit à la CFDT :

« 35 heures, oui ! 35 heures payées 39, non ! »

M. Thierry Mariani.

Vous étiez contre les mesures généralisées !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Voilà exactement les propos que j'ai tenus : un numéro de CFDT Magazine les reprend dans leur intégralité.

La réforme des charges sociales, en quoi consiste-t-elle ? Certains d'entre vous ont soutenu qu'elle n'existait pas.

Heureusement, les premiers concernés, la Fédération de l'habillement ou l'Union professionnelle artisanale, non seulement la reconnaissent mais s'en réjouissent. Je m'en tiendrai à leurs déclarations les plus récentes. Pour l'UPA, celle-ci remonte à trois jours : « La réforme des cotisations patronales répond enfin - "enfin", parce que vous ne l'avez pas fait ! - à l'urgence de réduire le coût du travail dans les entreprises de main-d'oeuvre. » L'UPA estime

donc que « la remise en cause de cette réforme ou d'autres dispositions favorables adoptées dans la seconde loi sur les 35 heures ne serait pas acceptable ».

Je sais bien que l'opposition aime à nous donner des leçons d'économie, à moi et à certains de mes amis. Mais je pense que l'UPA, qui représente 830 000 entreprises en France, a lu ce projet et l'a compris.

M. Bernard Accoyer.

C'est curieux : dans les départements, ses représentants disent exactement le contraire !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non ! J'ai été à l'assemblée générale de l'UPA il y a dix jours et ce n'est pas le sens de la déclaration du président.

En tout état de cause, pourquoi continuez-vous à défendre la baisse des charges sociales si vous pensez qu'il ne faut pas la faire ?

M. Pascal Terrasse.

Eh oui, l'opposition est contre !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Parlons maintenant du coût des allègements de charges.

Vous nous dites, monsieur de Courson : « C'est absolument aberrant, c'est scandaleux qu'on ne sache pas dire exactement combien ils coûtent ! » Contrairement à vous, je le rappelle, nous avons lié l'allégement du coût du travail au nombre d'accords signés sur la durée du travail. Aussi prévoyons-nous une fourchette, comme vous l'aviez fait pour la loi Robien en inscrivant une provision dans le budget.

M. Charles de Courson.

Justement, c'était budgété !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, il y avait une provision.

M. Charles de Courson.

Mais dans le budget ! Faites de même !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous permettez ? Je vous ai écouté et cela a été parfois difficile.

Alors, laissez-moi terminer ! Vous aviez donc inscrit une provision pour la loi Robien. Nous budgétons de la même manière, à partir de prévisions. Nous ne pouvons pas connaître à l'avance le nombre exact d'entreprises qui vont réduire la durée du travail. Nous prévoyons entre 62 et 67 milliards de francs pour l'année prochaine, c'est-à-dire à 10 % près.

Or, quand je suis arrivée au Gouvernement, en 1997, la première année de l'application de la ristourne dégressive, il manquait 20 % de son financement : 7 milliards.

Et pourtant, vous n'aviez pas à prévoir le nombre d'accords, puisque la ristourne se calculait directement en fonction du niveau des salaires.

Alors, ne soyez pas aussi acides, aussi impertinents ! Vous avez réussi à vous tromper il y a trois ans sur un simple calcul.

M. Bernard Accoyer.

Et le financement des retraites ? On sait le calculer depuis trente ans !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous sommes, nous, face à un mouvement complexe qui est celui de la réduction de la durée du travail. Je ne suis pas capable de dire exactement combien il y aura d'accords en la matière, mais les prévisions que nous avions faites pour l'année dernière n'étaient pas fausses, contrairement à ce que vous avez dit, et je ne vois pas pourquoi celles de cette année le seraient.

Comment financer ces 105 milliards à terme ? Déjà, c'est tout à l'honneur du Gouvernement d'afficher sur cinq ans ce que serait le coût de l'ensemble de la baisse d es charges si toutes les entreprises passaient aux 35 heures. Encore une fois, vous ne l'aviez même pas fait pour la première année d'application de la ristourne dégressive. Alors, là encore, les leçons sont plus faciles à donner qu'à recevoir ! Sur ces 105 milliards, 65 milliards, je le rappelle, correspondent à des baisses de charges et 40 milliards à l'aide structurelle liée au coût de la réduction de la durée du travail. Personne n'avait jamais contesté ces chiffres et je m'étonne que vous l'ayez fait ce soir. Mais après avoir entendu tellement de contrevérités, peut-être n'y a-t-il pas lieu, finalement, de s'en étonner.

Sur la partie baisse des charges - 65 milliards - 40 milliards sont déjà budgétés, ceux destinés à la ristourne dégressive, que nous allons utiliser différemment, de manière plus souple, sans provoquer d'effets pervers.

M. Bernard Accoyer.

Vous voulez dire « débudgété » ! Le financement de la ristourne était, lui, inscrit au budget !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, il ne l'était pas. Il manquait, je l'ai dit, 20 % du financement, donc 7 milliards pour la première année d'application. J'ai pris mes fonctions au milieu de l'année et j'ai dû les trouver !

M. Bernard Accoyer.

C'est faux !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non ! Relisez les documents budgétaires. Les faits sont les faits ! J'ai eu beaucoup de mal à compléter le financement et c'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles j'ai été obligée d'abaisser de 1,33 à 1,3 SMIC le plafond d'application de la ristourne. Ceux qui, ici, sont de bonne foi s'en souviennent et le reconnaissent. Ce n'est pas parce que j'étais contre la baisse des charges !

M. François Goulard.

Si !

M. François d'Aubert.

C'est uniquement pour ça !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Quant aux 25 milliards complémentaires, nous les finançons, nous, non par une augmentation de la TVA, par une hausse des prélèvements sur les ménages, mais au moyen de deux prélèvements sur les entreprises : contribution sociale sur les bénéfices et prélèvement sur les entreprises capitalistiques.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Restent les 40 milliards correspondant au coût de la réduction de la durée du travail. Certains d'entre vous ont parlé de centaines et de centaines de milliards. Peutêtre croient-ils finalement beaucoup plus que nous-mêmes à la création d'emplois liée à la réduction de la durée d u travail. Dans ce cas, je m'en réjouis, car nous pensons que 105 milliards suffiront.

M. Bernard Accoyer et M. Thierry Mariani.

Cela correspond à combien d'emplois créés ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Pour ces 40 milliards, j'avais effectivement pensé - comme certains syndicats, Pascal Terrasse l'a rappelé -, ou plutôt le Gouvernement avait pensé, puisque c'était la décision qui avait été prise par le Premier ministre et l'ensemble des ministres, que nous pourrions, à la suite des partenaires sociaux, activer les dépenses passives. Ce thème avait d'ailleurs été repris à plusieurs occasions par M. Barrot.

M. Pascal Terrasse.

Et par le Président de la République !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

En effet.

Antérieurement, sur le projet ARPE par exemple, nous nous étions félicités d'un mécanisme qui n'était pas un hold-up sur l'UNEDIC, qui n'était pas un racket sur les partenaires sociaux, qui était tout simplement la contribution de cotisations du patronat et des salariés à la solution du problème de l'emploi. Alors, ce qui est bon pour les uns ne peut pas être mauvais pour les autres.

Cela dit, lorsque les premiers concernés ne veulent pas d'une mesure, moi, vous savez, je ne vais pas la leur imposer ! Et je ne l'ai pas dit lundi, monsieur Bardet - mais peut-être n'étiez-vous présent à aucune des deux réunions de commissions auxquelles j'ai participé -, je l'ai annoncé dès le 7 septembre à la commission des affaires sociales, puis, quelques jours après, à la commission des finances. J'ai dit que « si les partenaires sociaux n'étaient pas d'accord, nous trouverions, notamment en ce qui concerne l'UNEDIC, d'autres solutions dans le cadre de la clarification entre l'Etat et l'UNEDIC ».

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Cela a été dit !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Croyez bien, monsieur Bardet, que nous n'avons pas attendu la veille au soir pour concevoir le projet ; nous y avons travaillé pendant des semaines.

M. Jean Bardet.

Ce n'est pas ce qui est apparu en commission, madame la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Comment le savez-vous puisque vous n'y étiez pas ?

M. Jean Bardet.

J'étais à toutes les réunions.

M. Gérard Terrier.

Non !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Pas à celle du 7 septembre !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Relisez les deux procès-verbaux, notamment celui du 7 septembre, c'est écrit noir sur blanc.

M. Jean Bardet.

Le vendredi 19, on ne savait toujours pas ce qu'il en était !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je n'avais pas donné les détails. J'avais simplement dit que nous étions prêts à renoncer à l'activation des dépenses passives si les partenaires sociaux y étaient opposés.

M. Bernard Accoyer.

Et vous avez changé le texte la veille de la discussion !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Une fois la décision prise, nous avons travaillé pour trouver les financements de substitution. Le premier, c'est la taxe sur les heures supplémentaires. Quant au deuxième, je vous demande de m'écouter car, après avoir entendu ma réponse, peut-être ferez-vous preuve d'un peu plus de pudeur et cesserez-vous d'ironiser, monsieur Lemoine, monsieur Goulard et monsieur de Courson, sur le fait que nous puissions recourir à la taxe sur les alcools, de même que, par ailleurs, à la taxe sur les tabacs.

Dois-je vous rappeler que deux de vos propositions de loi n'étaient pas financées autrement ? La première déposée en décembre 1997 par M. Barrot, était financée au moyen de la taxe sur les alcools et de la taxe sur la Française des jeux.

M. François Goulard.

C'est ridicule !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est vous qui êtes ridicules ! Il s'agit de la proposition de loi no 628, discutée en décembre et en janvier.

M. François Goulard.

Toutes les oppositions font cela !

M. Jean-Luc Préel.

Nous n'avons pas d'autres moyens ! C'est un argument de mauvaise foi !

M. Bernard Accoyer.

Vous nous avez habitués à mieux, madame la ministre !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je vois que cela vous ennuie.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Pascal Terrasse.

Eh oui, la réalité est dure à entendre !

M. Charles de Courson.

Vous êtes vraiment de mauvaise foi, madame Aubry !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ne vous énervez pas, monsieur de Courson ! Pour vous, c'était un dispositif « imbécile », il y a dix minutes. Eh bien, nous nous rendons compte que l'imbécillité est largement partagée...

M. Charles de Courson.

C'est nul !

M. Bernard Accoyer.

C'est indigne de la part d'un gouvernement ! Nous sommes à l'Assemblée, pas dans une cour de récréation !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... puisque le Sénat a accepté, le 29 juin 1998, une proposition de loi de M. Poncelet (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

Je vous avais bien dit que ça vous ennuierait !

M. Jean-Luc Préel.

Qui vous a préparé cet argumentaire ? C'est incroyable !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Oui, c'est incroyable que vous puissiez nous reprocher ce que vous faites vous-mêmes !

M. Gérard Bapt.

Calmez-vous, monsieur Préel, vous allez faire une tachycardie !

M. Jean-Luc Préel.

Ça fait du bien !

M. le président.

Allons, monsieur Préel, vous n'allez pas vous y mettre vous aussi !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. François Goulard.

Levez la séance, monsieur le président !

M. le président.

Vous seule avez la parole, madame la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

La proposition de M. Poncelet était, elle aussi, financée par un relèvement des droits sur l'alcool et le tabac.

M. Charles de Courson.

Et c'est reparti ! C'est impensable !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le relèvement des droits de consommation sur le tabac, qui s'est traduit par une diminution de la consommation, a permis de doubler le rendement de la taxe en dix ans.

M. François d'Aubert.

Cela ne durera pas longtemps !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est dire que ce moyen-là, vous l'avez utilisé, comme nous, pour financer bon nombre de dépenses. Et cela montre aussi, dans la mesure où le problème du tabagisme demeure très grave, que cette ressource, monsieur d'Aubert, est relativement pérenne.

Ce qui vous gêne peut-être davantage que le recours à la taxe sur les alcools, que vous sollicitiez vous-mêmes, c'est le fait que nous taxions les entreprises plutôt que les ménages comme vous l'aviez fait précédemment. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Luc Préel.

Et la taxe sur la pollution ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Parlons-en justement ! Vous savez comme moi que la TGAP découle d'une directive européenne qui sera adoptée l'année prochaine mais qui a déjà été mise en oeuvre dans de nombreux pays. Comme nous, M. Blair a utilisé cette taxe pour réduire les charges sociales. D'autres ont choisi d'en faire une contribution globale complémentaire pesant sur les entreprises.

M. François d'Aubert.

Elle n'a pas servi à cela en Angleterre !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. Blair l'a déclaré lui-même, je peux vous montrer les documents.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Pour notre part, nous ne sommes pas favorables à une contribution globale pesant sur les entreprises. C'est pourquoi nous avons prévu une taxe sur les entreprises les plus capitalistiques, servant à réduire les charges sociales des entreprises de main-d'oeuvre, du commerce et de l'artisanat.

J'en viens au fonds spécial pour le financement de la réforme des cotisations patronales.

M. Jean-Luc Préel.

Ouf !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Oh ! n'ayez crainte, vous allez, là aussi, entendre quelques vérités. J'essaie de répondre à chacune de vos questions.

Pourquoi avoir créé un fonds, monsieur Préel ? Et doit- on considérer, monsieur d'Aubert, qu'il n'y aura p lus de contrôle du Parlement ? J'avoue ne pas comprendre vos questions, ou alors c'est que vous n'avez pas assisté au débat sur la durée du travail. M. de Courson nous explique que ce fonds sert à dissimuler les débudgétisations.

M. Charles de Courson.

Absolument !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Or Dominique Strauss-Kahn a déjà expliqué que le taux de croissance de 0,9 % des dépenses de l'Etat...

M. François d'Aubert.

Parlons-en !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... a été calculé à structure constante, c'est-à-dire avant les transferts de recettes et de charges.

Ensuite, je vous rappelle qu'au regard des critères de Maastricht, les dépenses du budget et celles de la sécurité sociale s'additionnent. Par conséquent, monsieur de Courson, votre raisonnement ne tient pas un instant.

Pourquoi créer un fonds indépendant ? Puisque vous posez la question sur un ton aussi critique, je vous rappelle que le premier fonds de cette nature, le FSV, c'est vous qui l'avez créé. C'est exactement le même type de fonds, le même établissement public que nous mettons en place en marge du budget de la sécurité sociale.

M. François d'Aubert.

Pas du tout !

M. Bernard Accoyer.

Le FSV a une vocation sociale : sauver les retraites !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Pourquoi ce choix ? Justement pour pouvoir contrôler - et la gauche y tient beaucoup - l'utilisation des baisses de charges.

Nous avons prévu, dans la loi sur la réduction de la durée du travail, que l'Etat, chaque année, ferait un rapport au conseil de surveillance du fonds et au Parlement, pour montrer quelles sont les conséquences de la réduction des charges sociales sur l'emploi. Si c'est cela, monsieur d'Aubert, refuser le contrôle du Parlement, je ne sais pas comment nous pourrions mieux faire !

M. Charles de Courson.

Si vous aviez intégré le fonds dans le budget, ce serait encore mieux !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, car nous souhaitons que ce fonds soit individualisé pour pouvoir en mesurer les effets bénéfiques et pour pouvoir aussi y affecter certaines ressources.

M. Charles de Courson.

Alors ouvrez un chapitre budgétaire !

M. Bernard Accoyer.

C'est une dépense d'emploi, elle devait figurer dans le budget de l'Etat !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'ai beaucoup entendu parler d'usines à gaz. J'en connais, des usines à gaz, notamment celle que vous souhaitiez mettre en place avec la proposition de loi sur la baisse des charges de M. Barrot.

Je vais vous lire un seul article de cette proposition et v ous comprendrez pourquoi l'UPA applaudit notre barème, qui est en comparaison d'une simplicité lumineuse. Voici donc ce qu'écrivait M. Barrot il y a un an :

« La réduction mentionnée au III de cet article est applicable pour les gains et rémunérations versés au cours d'un mois civil, inférieurs ou égaux à 169 fois le SMIC majoré de 40 % dans les entreprises dont le produit des deux proportions suivantes est supérieur à 0,36 : la proportion de salariés disposant d'un revenu mensuel inférieur à 1,33 multiplié par 169 fois le SMIC par rapport au nombre total de salariés ; la proportion de travailleurs manuels ou d'ouvriers par rapport au nombre total de salariés.

« Le montant de la réduction, qui ne peut excéder 1 730 francs par mois, est déterminé par un coefficient fixé par décret. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Je m'arrête là, mais ce n'est pas tout. Il y a des dispositions aussi limpides lorsque le produit se situe entre 0,36 et 0,20 !

M. Bernard Accoyer.

Vous voulez qu'on vous lise votre propre texte ? Cela ne vaut pas mieux !

M. François Goulard.

Le barème de la TGAP, par exemple !

M. Bernard Accoyer.

Ou juste l'exposé des motifs !

M. François Goulard.

Ou mieux encore, le passage sur les grains minéraux naturels !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Donc, les usines à gaz, vous connaissez.

Eh bien moi, je vais vous dire simplement, et je conclurai par là, que les usines que nous mettons en place sont plutôt des usines à emplois. C'est vrai pour la réduction de la durée du travail et ce sera vrai pour la baisse des charges sociales.

Comme le dit M. Terrier, peut-être votre énervement est-il largement dû à cela. Nous faisons ce que vous n'avez pas fait. Sur le chômage, nous réussissons là où, j'en suis désolée, vous n'avez pas réussi. L'allègement des charges sociales, la réduction de la durée du travail, le soutien de la croissance, la relance de la consommation, les mesures en faveur du développement des nouvelles technologies et de la création d'entreprises, ce sont autant de promesses de réduction du chômage dans les mois qui viennent.

M. François Goulard.

Toujours le même refrain !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'espère que nous pourrons poursuivre sur un autre ton la discussion de l'article 2. Vos résultats du passé justifieraient un peu plus de retenue. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, dans cette avalanche de critiques, une mérite un débat, c'est celle faite par M. de Courson sur la place du fonds d'allégement des cotisations patronales. Faut-il le mettre en dedans ou en dehors du périmètre de la loi de financement de la protection sociale ? Il me semble avoir écrit dans le rapport que ce fonds est actuellement placé en dehors. Les choses me paraissent c laires, et c'est la raison pour laquelle, madame la ministre, je vous suggérerai, en usant de votre faculté d'amendement, de le mettre en dedans. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François d'Aubert.

Quelle audace !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

En effet, de la même manière que le fonds de solidarité vieillesse l'a été, ce fonds doit être placé en dedans.

M. Bernard Accoyer.

Voilà !

M. Charles de Courson.

Bien sûr !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Il s'agit d'un établissement public administratif, il est aussi abondé par des ressources fiscales.

M. Charles de Courson.

Absolument !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Au demeurant, l'article LO.

111-3 du code de la sécurité sociale doit prévaloir en ce domaine. Il me semblerait en outre plus conforme à notre volonté de transparence et de cohérence d'inclure le fonds d'allégement des cotisations patronales dans le périmètre de la loi de financement de la protection sociale.

M. François d'Aubert.

Très juste !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Si j'ai fait un parallèle avec le fonds de solidarité vieillesse, c'est parce qu'il est très instructif de voir ce qui a pu se passer les années précédentes.

Notre collègue Préel, qui est aussi un confrère, a laissé entendre que la création de fonds serait une maladie contagieuse. Je me suis efforcé de voir à partir de quand on pouvait trouver des traces de cette maladie, qui, je le lui concède, peut être qualifiée de contagieuse.

J'en ai trouvé une première trace fin 1993, quand le fonds de solidarité vieillesse a été créé - voulu, pardon par le gouvernement d'Edouard Balladur, et donc voté par la majorité de l'époque, à laquelle la plupart de nos collègues de l'opposition appartenait déjà, me semble-t-il.

Ce fonds de solidarité vieillesse était abondé de 70 à 80 milliards de francs, ce qui relativise, me semble-t-il, les critiques des uns et des autres, et notamment celles de M. d'Aubert, quant à la volonté de camouflage, au désir de débudgétisation, et à la supposée volonté d'opacification. Je ne vois pas quelle différence fondamentale il peut y avoir entre un établissement public administratif alimenté par des ressources fiscales à hauteur de 80 milliards de francs et un autre alimenté par des ressources fiscales à hauteur de 105 milliards de francs. Je n'y vois qu'une différence de 25 milliards de francs.

Quand on suit la trace de cette maladie contagieuse, on trouve ensuite les 20 à 25 milliards de francs affectés à la CADES, un autre établissement public administratif, et une autre débudgétisation, si je comprend bien, mon cher collègue : 80 plus 25 égalent 105.

M. François d'Aubert.

C'était une consolidation d'aides.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Vous avez créé des fonds à hauteur de 105 milliards de francs. Cela relativise les critiques très acerbes, parfois ironiques, que vous avez faites. Il faut savoir prendre les choses du bon côté. Cela dit, n'ayant pas la même expérience que vous du Parlement, j'ai trouvé certains de vos commentaires tout à fait odieux. Je ne vois pas ce qui vous fonde à tenir de tels propos alors que vous avez créé des fonds à hauteur de la même somme, budgétés de la même manière. Dois-je comprendre que les critiques très acerbes que vous nous adressez, c'est à vous que vous les adressez, mais malheureusement un peu tard, puisque vous n'avez plus la majorité ?

M. François d'Aubert.

Pas du tout !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Les accusations de détournement des finances ou des ressources du fonds de solidarité vieillesse sont curieuses dans la bouche de certains, à moins qu'ils n'aient la mémoire courte. Permettez-moi de la leur rafraîchir.

A la fin de 1994, vous avez voté une disposition qui prévoyait très clairement que les avantages familiaux des retraités de la fonction publique soient financés par le fonds de solidarité vieillesse.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Absolument !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Or cette disposition n'est jamais entrée en vigueur, pour une raison très simple : vous avez été censurés par le Conseil constitutionnel. En vous censurant, j'imagine qu'il a aussi censuré votre mémoire, ce qui vous permet aujourd'hui de parler fort et beau.

Je vous vois faire la moue, monsieur d'Aubert. Je conçois que cela ne vous soit pas très agréable. Vous apparteniez au gouvernement qui a été censuré avec la majorité qui le soutenait. C'est la réalité. Elle vous déplaît, j'en conviens. Mais convenez aussi que je puisse vous dire un certain nombre de choses sur un ton un peu différent du vôtre.

M. Georges Tron.

Il n'est pas tellement différent !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

C'est probablement dû à ma jeunesse dans cette enceinte. J'espère que dureront et le ton et la jeunesse ! J'ai cru comprendre qu'il était de bon ton d'ironiser sur les modalités de financement du fonds d'allégement des cotisations patronales. On s'inspire des bons auteurs.

Le même fonds de solidarité vieillesse, créé par le gouvernement d'Edouard Balladur que vous avez soutenu et voté, était abondé par une partie de la CSG, de la C3S et par une taxe sur les boissons. En votant ce texte, cher collègue Bardet, avez-vous eu le sentiment d'encourager l'alcoolisme pour permettre aux chômeurs d'avoir leur retraite ? Ma question est à peu près aussi intelligente que v otre remarque selon laquelle nous encouragerions l'alcoolisme pour payer les 35 heures. Je vois que vous êtes un peu gêné, je le comprends.

M. Jean Bardet.

En augmentant en permanence la taxe, vous la pérennisez !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Avec la contribution sociale de solidarité sur les sociétés, vous aviez taxé les entreprises qui contribuaient aux assurances personnelles complémentaires de leurs salariés. Pouvezvous m'expliquer quel lien il y a entre la CSG, la C3S, une taxe sur les boissons et ladite taxe ? Vous nous accusez de monter des usines à gaz mais le Meccano, nous l'avons sous les yeux. Nous nous sommes inspirés de bons auteurs. Vous qui estimez toujours devoir nous donner des leçons en matière d'économie et de gestion, que nous reprochez-vous de vous imiter ? Vous devriez au contraire vous féliciter du fait que nous reprenons les mêmes méthodes que vous.

M. Georges Tron.

Monsieur Cahuzac, ce n'est pas très intelligent !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Je vous remercie pour votre appréciation, mon cher collègue.

Est-ce parce ce que c'est le gouvernement d'Edouard Balladur qui a créé le fonds de solidarité vieillesse que je vous vois réagir de la sorte ? Pour ma part, j'y vois un certain lien. Mais peut-être ne trouverez-vous pas cela non plus très intelligent.

M. Georges Tron.

Cela n'est dans l'apanage ni de la jeunesse ni de l'intelligence.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Monsieur Bur, il est un peu abusif de prétendre que le fonds d'allégement des cotisations patronales est le fonds de financement des 35 heures. Si vous regardez le tableau de financement - 39,5 milliards de francs pour la ristourne Juppé, 7,5 milliards de francs pour les allégements sur les salaires compris entre 1,3 et 1,5 fois le Smic, avec une montée en puissance au cours des années à venir - vous constatez que moins du tiers du fonds sera consacré aux aides prévues par la première et la deuxième lois sur les 35 heures.

Dès lors, je comprends - c'est de bonne guerre politicienne - que vous disiez que la sécurité sociale va payer pour les 35 heures.

M. Bernard Accoyer.

C'est la vérité. Ce sont les fonds sociaux !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Cela marque les esprits, mais il se trouve que c'est inexact et contredit par les faits puisque moins du tiers de ce fonds servira à financer les aides.

M. Bernard Accoyer.

La pompe est amorcée !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

J'ajoute que moins du dixième des recettes provient de la sécurité sociale. Dès lors, avouez qu'il est abusif d'affirmer que la sécurité sociale finance les 35 heures.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Lisez la page 6 de votre rapport !

M. Jean Bardet.

Gardez votre projet en l'état alors !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Mais je renonce à vous convaincre, tant il me semble difficile que le débat fasse progresser les choses entre nous ! Je voudrais revenir sur ce qu'ont dit M. Lemoine et M. Bardet, qui se sont indignés que l'on utilise des droits sur les alcools pour financer les 35 heures. Selon eux, nous encouragerions ainsi l'alcoolisme.

Monsieur Bardet, j'imagine que, lorsque le gouvernement d'Edouard Balladur a décidé de revenir sur des dispositions très contraignantes en matière de publicité contre les boissons alcoolisées, vous avez voté contre.

M. Jean Bardet.

Vous, vous avez voté contre. Ce n'est pas pour faire la même chose maintenant !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Votre souci de lutter contre l'alcoolisme a dû aller jusqu'à refuser que soient revues des dispositions destinées à lutter contre l'alcoolisme.

M. Jean Bardet.

Votre argument est indigne.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Je ne vous ferai pas l'injure d'aller vérifier en quel sens vous avez voté, même si je crois deviner que ce fut malheureusement dans un sens contraire à ce que vous estimez pourtant très important aujourd'hui.

M. Jean Bardet.

J'était contre les buvettes. Personnellement, je n'ai jamais bu d'alcool !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Comme je ne voudrais pas que la température s'échauffe davantage, je vais en terminer là en regrettant une fois de plus - et je suis totalement sincère - le ton employé par certains.

Chacun d'entre nous a le droit de dire ce qu'il croit bon, et de faire valoir ses convictions mais il n'est pas très agréable ni très bon ni très décent d'user d'insultes ou d'appréciations infamantes.

A cet égard, je dois dire à notre collègue d'Aubert que j'ai été personnellement choqué par le ton et les mots qu'il a utilisés, même si je peux comprendre qu'il se sente autorisé à le faire en sa qualité de champion de France dont le record ne sera jamais égalé. Eh oui, monsieur d'Aubert, vous détenez le record, peu enviable mais incontestable, du nombre de prélèvements nouveaux rapporté au temps passé au ministère du budget : plus de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

100 milliards de francs en quelques semaines. Ce record, vous l'avez, vous le garderez. Nous vous le laissons avec plaisir.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Madame la ministre, si nous vivions sous le régime auquel M. de Courson se réfère avec délectation, je ne doute pas que vous eussiez été notre reine. Vous êtes la reine de la réforme sociale de cette fin du XXe siècle (Rires),...

M. Thierry Mariani.

Marie-Antoinette, ça a mal fini !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... avec les emploisjeunes, la couverture maladie universelle,...

M. Bernard Accoyer.

35 milliards ! Et 50 milliards de francs !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... la loi contre l'exclusion, les lois de financement avec la réforme de fond du financement de la sécurité sociale pour assurer aux Françaises et aux Français une refonte pérenne du système de protection dont ils ont besoin.

M. Bernard Accoyer.

110 milliards !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vous avez commencé cette réforme par les cotisations salariales. Vous la poursuivez maintenant avec les cotisations patronales.

Si vous aviez consacré 25 milliards de francs à diminuer de manière uniforme l'ensemble des cotisations patronales, on n'aurait pas pu dire que les régimes sociaux contribuaient au financement des mesures prises pour l'emploi, même si leurs recettes diminuaient.

Vous n'avez pas voulu faire cela parce que vous avez compris, et vous nous avez fait comprendre, qu'une diminution bien ciblée des charges patronales pouvait être plus profitable à l'emploi.

Première remarque : la réduction des charges patronales se traduira par des créations d'emplois.

Deuxième remarque : vous dites que ces diminutions de charges seront réservées aux entreprises qui seront passées aux 35 heures. Passant aux 35 heures, elles créent de l'emploi ! autre avantage de la réduction des charges patronales ! Troisième remarque : les emplois créés dans ce cadre permettront encore de contribuer à la relance de l'économie et à la croissance de l'année prochaine. Ce n'est peut être pas tout à fait par hasard qu'en prenant en compte un certain nombre de variables, y compris les variables dont nous discutons en ce moment au Parlement, l'OCDE prévoit pour l'année prochaine une croissance de 3,5 % et la création de 400 000 emplois supplémentaires dans le secteur marchand.

En trois ans, 1 million d'emplois, dans les secteurs marchand et non marchand, auront été créés dans ce pays, contribuant à leur tour, dans un cercle vertueux, à la croissance et donc à l'emploi.

On nous rebat les oreilles avec le prétendu manque de financement de la réforme des 35 heures. Ne voit-on pas que le fonds d'allégement des charges patronales a été créé à cet effet ? Mais il n'y a pas que cela. On nous rebat les oreilles aussi avec la difficulté qu'il y aurait à faire contribuer les organismes sociaux. Vous ne les faites pas contribuer, madame la ministre. Par une opération de tiroirs successifs, vous parvenez, dans la dernière proposition, à faire circuler 5,6 milliards de francs et, au bout du compte, après les avoir fait circuler, vous arrivez à un résultat où il n'y a aucune participation formelle des organismes sociaux.

Je reviendrai sur un point qui, soulevé par l'un de nos collègues de l'opposition, n'était pas tout à fait exact. Si vous retirez 5,6 milliards prélévées sur les droits et alcools versés préalablement au FSV dans les conditions qui viennent d'être rappelées, ces 5,6 milliards sont compensés au FSV - c'est du moins ce que j'ai compris à la lecture des propositions du Gouvernement, puisque, par l'intermédiaire de la taxation à 2 % sur les frais financiers, vous avez réabondé ce fonds.

M. Bernard Accoyer.

En déshabillant la CNAF et la CNAM !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vous pouvez donc réabonder le fonds de réserve des retraites.

M. Bernard Accoyer.

Ça, c'est l'article 10 !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Entre temps, l'UNEDIC n'est plus concernée et, par modification des calculs et des variables, la taxation des heures supplémentaires rapporte 1 milliard de francs de plus que prévu.

M. Bernard Accoyer.

C'est comme l'évaluation du surcoût des maladies professionnelles et des accidents du travail !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Il reste donc 0,9 milliards de francs ! Et si j'en crois les prévisions de l'OCDE, mes chers collègues, une croissance de 0,7 point supplémentaire, c'est 25 milliards de francs supplémentaires en l'an 2000 tant sur le plan fiscal que sur le plan des ressources provenant des charges sociales. Il n'y a donc pas de problème de financement.

Vous pouvez nous dire que tout cela repose sur la chance. Encore une fois, ces prévisions, qui ne sont pas contestées, ne sont pas prises en compte dans les calculs prévus pour le financement du fonds d'allégement des cotisations patronales. Ce seront des recettes en plus qui, le moment venu, permettront de diminuer les charges d'impôts des Français.

Je reviendrai enfin sur les menaces d'inconstitutionnalité que l'on agite à propos de chaque projet de loi.

Si nous étions sous l'Ancien Régime, madame la ministre, que vous soyez reine ou pas, nous aurions besoin d'un bouffon, un bouffon qui agite les foudres divines et les menaces qui en découlent.

M. Pascal Terrasse.

Des noms !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Rassurez-vous, ce n'est pas vous !

M. Jean Bardet.

On peut deviner où vous voulez en venir !

M. Thierry Mariani.

Et il va déraper !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Sous notre régime, nous sommes menacés des foudres divines du Conseil constitutionnel. Depuis 1997, on lui a soumis à ce dernier toute une série de textes...

M. François d'Aubert.

Le Conseil constitutionnel fait un travail remarquable.

M. Alfred Recours, rapporteur.

... dont on nous avait dit qu'ils passeraient à la trappe. Or, à l'exception de deux ou trois petits points qui n'ont pas été validés, la quasi-totalité des prévisions qui nous avaient été faites ne se sont pas réalisées.

N'est pas Cassandre qui veut, ce sera ma conclusion.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Rappels au règlement

M. Thierry Mariani.

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani, pour un rappel au règlement.

M. Thierry Mariani.

Mon rappel au règlement est fondésur les articles 58, 92 et 98 de notre règlement. Nous tenons à nous élever avec force contre la manière plus que restrictive avec laquelle la commission des finances apprécie la recevabilité des amendements sur la loi de financement de la sécurité sociale. Il s'agit, à notre sens, d'une atteinte inacceptable au droit d'amendement reconnu par la Constitution. Un nombre élevé d'amendements déposés par mes collègues Accoyer, Goulard et moi-même ont en effet été purement et simplement déclarés irrecevables.

Ainsi, j'avais déposé quelques amendements, à mon sens primordiaux, qui visaient à mettre le Gouvernement face à ses responsabilités en matière de financement des retraites. On a assez dénoncé le manque de lisibilité sur le long terme ! Permettez-moi de lire deux de ces amendements. « Le Gouvernement s'engage à déposer au Parlement un projet de loi relatif à la mise en place d'un système de retraite par capitalisation venant en renforcement du régime général par répartition. » Ou encore

: « Le Gouvernement s'engage à présenter au Parlement un projet de loi relatif à la mise en place d'un régime obligatoire de retraite complémentaire agricole avant le 1er octobre 2000. » Nous avons toujours jusqu'à présent déposé

des amendements de ce type qui ne coûtent pas un centime aux comptes sociaux.

M. le président.

Monsieur Mariani, ce n'est pas un rappel au règlement. Vous défendez des amendements refusés.

M. François d'Aubert.

Non, monsieur le président, il s'agit de la recevabilité des amendements !

M. Thierry Mariani.

Exactement, je ne vois pas en vertu de quoi on a déclaré que les nôtres étaient irrecevables.

M. Bernard Accoyer.

Nous travaillons en commission dans des conditions de précipitation inacceptables et, en plus, nos amendements sont déclarés irrecevables.

M. Thierry Mariani.

L'attitude de la commission des finances est particulièrement inopportune et constitue, à notre sens, une véritable atteinte, je le répète, au droit d'amendement. Où sont les dépenses ou les privations de recettes pour les comptes sociaux dans les dispositifs que j'ai cités ? Les amendements de mes collègues Accoyer et Goulard allaient dans le même sens.

Je demande solennellement l'application du cinquième alinéa de l'article 98 de notre règlement, qui dispose, au sujet des amendements : « Dans le cas litigieux, la question de leur recevabilté »« est soumise, avant leur discussion, à la décision de l'Assemblée. Seul l'auteur de l'amendement, un orateur contre, la commission et le Gouvernement peuvent intervenir. »

Ce n'est pas en nous privant du droit d'amendement que vous allez résoudre les difficultés qui nous attendent, notamment en matière de retraites.

M. Bernard Accoyer et M. François Goulard.

Très bien !

M. le président.

Monsieur Bardet, vous aussi, vous voulez faire un rappel au règlement ?

M. Jean Bardet.

Non, monsieur le président, je demande une interruption de séance.

Nous avons discuté sur l'article 2 en commission vendredi. Il s'agissait évidemment du texte initial : personne ne nous a alors parlé d'une modification, pas plus le rapporteur, que le président de la commission. Mardi matin, annonce soudaine, l'article 2 est réservé.

réservé.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vous n'étiez pas en commission mardi matin !

M. Jean Bardet.

Monsieur Recours, je parle de vendredi dernier. C'est vous qui n'étiez pas là, et c'est

M. Evin qui, au pied levé, vous a remplacé.

M. Pascal Terrasse.

Ce n'était pas le vendredi, mais le jeudi !

M. Claude Evin, rapporteur.

Regardez votre agenda, monsieur Bardet !

M. Thierry Mariani.

Jeudi ou vendredi, ça ne change rien !

M. Jean Bardet.

C'était effectivement jeudi. Mais cela ne change strictement rien, vous le savez fort bien, monsieur Evin.

Vendredi, nous découvrons par la presse que le Gouvernement renonce à ponctionner l'UNEDIC. Lundi, toujours par la presse, nous apprenons que les autres organismes sociaux ne seront pas non plus mis à contribution.

M. de Courson a posé plusieurs questions essentielles : Pourquoi créer un fonds ? Quand bien même il faudrait le créer, doit-on le faire dans le cadre ou en dehors de la loi de financement de la sécurité sociale ? M. Cahuzac lui-même a posé la question à Mme la ministre. Nous devons en discuter au sein de notre groupe. Aussi, monsieur le président, je vous demande une suspension de séance d'une demi-heure.

M. le président.

Je vous accorde cinq minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le 28 octobre à zéro heure quarante-cinq, est reprise à zéro heure quarante-cinq ou cinquante.)

M. le président.

La séance est reprise.

Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L'amendement no 28 est présenté par M. Bardet ; l'amendement no 352 par MM. Préel, Bur, Barrot, Foucher, Blessig, de Courson, Méhaignerie, Jégou, Morin et Mme Boisseau ; l'amendement no 510 par MM. Goulard, Mattei, Jacquat, Dord, Nicolin et Proriol ; l'amendement no 584 par MM. Debré, Douste-Blazy, Rossi et les m embres des groupes du Rassemblement pour la République, de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance et de Démocratie libérale.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 2. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir l'amendement no 352.

M. Jean-Luc Préel.

Nous avons eu droit à de longues et brillantes démonstrations ; nos rapporteurs se sont longuement exprimés après Mme la ministre.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

Si j'ai bien compris, M. Recours a fait allégeance à la reine. Mais un élu de l'Eure peut-il revendiquer le titre de duc de Normandie sans que le président de notre assemblée s'en offusque ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Rustique, peu payant...

M. Alfred Recours, rapporteur.

Le filon me paraît épuisé !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Trouvez autre chose, monsieur Préel !

M. Jean-Luc Préel.

Au moins, M. Cahuzac sait sourire, madame la ministre, et je l'en remercie... Il a eu l'occasion, c'est vrai, de se former à l'humour des salles de garde,...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ce n'est pas tout à fait le même ici...

M. Jean-Luc Préel.

... que tout le monde n'a évidemment pas eu l'occasion de pratiquer ! Monsieur le président, nous en sommes, au bout de quatre heures, au vingt-quatrième amendement sur les 800 et quelque. Je vous laisse calculer le nombre d'heures, de journées et de nuits que nous aurons plaisir à vivre ensemble avant d'épuiser l'examen ce projet de loi.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Quarante jours !

M. René Dosière.

Divisez 800 par 24 et vous le saurez !

M. Jean-Luc Préel.

Je me dois de saluer à nouveau la compétence de mon collègue M. Cahuzac. Si j'ai bien compris, le fameux fonds est bien ailleurs ? M. le rapporteur Cahuzac souhaite qu'il soit intégré dans les dépenses sociales ? Je ne doute pas que Mme la ministre l'entende et lui donne satisfaction avant la fin de la discussion. Il faut en tout cas l'espérer : ainsi les choses deviendront évidemment beaucoup plus claires.

Cela dit, monsieur Cahuzac, dans la liste des fonds que vous avez cités, vous en avez oublié un : le fonds veuvage.

Financé au moyen d'un prélèvement de 0,10 % payé par tous les salariés, il est devenu ce que chacun sait, noyé dans la masse depuis belle lurette...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Le deuil n'est qu'illusion !

M. René Dosière.

Il est mort ! (Sourires.)

M. Jean-Luc Préel.

Exactement, et je ne sais donc ce qu'il adviendra de celui-là... A la différence de tous ces fonds dont l'objet social était au moins clairement défini - ainsi le fonds solidarité vieillesse qui, du fait même de sa mission, le financement de trimestres non cotisés, doit effectivement figurer dans la loi sociale - celui que vous entendez créer n'a pas de justification vraiment définie.

M. Gérard Terrier.

Et la baisse des charges sociales, ce n'est pas du social, monsieur Préel ?

M. Jean-Luc Préel.

La baisse des charges sociales, c'est pour l'emploi et le travail.

M. Gérard Terrier.

Et ce n'est pas social, l'emploi ?

M. Jean-Luc Préel.

La loi de financement de la sécurité sociale a pour objet de traiter de la famille et des retraites...

M. Gérard Terrier.

Pour vous, l'emploi, ce n'est donc pas social !

M. Jean-Luc Préel.

Madame la ministre, une petite remarque d'abord parce que vous avez ironisé sur le fait que les propositions de loi étaient presque toujours, et lourdement, gagées sur le tabac et l'alcool. Sans doute ignorez-vous que c'est le seul gage dont peuvent user les parlementaires ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mais non ! Vous avez la Française des Jeux, par exemple, et bien d'autres !

M. Robert Gaïa.

Le chocolat !

M. Gérard Terrier.

Le café, le sucre, la banane !

M. Jean-Luc Préel.

La proposition de loi de Jacques Barrot était effectivement gagée sur le tabac et l'alcool, le seul gage dont nous disposions. Votre ironie était donc, me semble-t-il, quelque peu déplacée.

J'en termine là. Le fonds en question constituait un maillon essentiel de la loi. Or, du fait de votre reculade, il a été improvisé, bricolé. Il devient indispensable de le supprimer.

M. le président.

Avez-vous parlé pour toute l'opposition, monsieur Préel ?

M. Jean-Luc Préel.

Non, monsieur le président. Je n'ai défendu que mon amendement.

M. François d'Aubert.

L'opposition elle aussi est plurielle, monsieur le président ! (Sourires.)

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet, pour soutenir l'amendement no

28.

M. Jean Bardet.

Ces amendements de suppression sont évidemment identiques, mais nous entendons bien les défendre chacun à notre manière.

Nous sommes dans une situation surréaliste. Après deux heures de discussion sur l'article 2, la représentation nationale ne connaît toujours pas les projets du Gouvernement.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous plaisantez !

M. Jean Bardet.

Nous avons certes eu connaissance des amendements en commission, mais nous sommes en séance publique ; tous les collègues qui y participent ne sont pas nécessairement membres de la commission des affaires sociales. Nous nous retrouvons en définitive à discuter, à disserter, à amender un article 2 dont nous ne savons toujours pas ce que veut faire le Gouvernement.

M. Gérard Terrier.

Vous n'avez qu'à retirer vos amendement de suppression !

M. Jean Bardet.

Cet article tend à créer un fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale. Or son objet réel, il n'est pas mauvais de le répéter, est bel et bien de financer les 35 heures. Ce mélange des genres est à nos yeux totalement inadmissible. M. de Courson comme M. Cahuzac ont demandé si le fonds de financement était intégré dans la loi de financement de la sécurité sociale ou en dehors.

Autant de questions, madame le ministre, que je me permets de vous reposer...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'ai déjà répondu.

M. Jean Bardet.

Je suis vraiment navré de vous agacer ainsi...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mais du tout, monsieur Bardet, au contraire, c'est un plaisir...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

M. Jean Bardet.

Dans ce cas, le plaisir est partagé, madame la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Poser deux fois les questions aide à mieux comprendre !

M. Jean Bardet.

Nous y sommes bien obligés, puisque nous ne recevons pas de réponse. Ces questions, je les avais déjà posées hier, à la même heure ; mais comme vous n'étiez pas là pour m'écouter, je les pose de nouveau.

Depuis la loi de 1994, les exonérations de charges de sécurité sociale doivent être intégralement compensées par l'Etat. Certes, il est bien indiqué dans votre projet que les versements mentionnés aux a, b, et c se substituent à la c ompensation par le budget de l'Etat prévue à l'article L.

131-7. Mais il s'agit là d'un artifice d'écriture et personne ne peut soutenir que la création d'un fonds alimenté par de nouvelles taxes constitue réellement une compensation par le budget de l'Etat. Et je ne reviendrai pas, madame le ministre, de peur de vous exaspérer, sur le fait que les sources d'abondement prévues sont inacceptables. D'où mon amendement de suppression de l'article

2.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no 510.

M. François Goulard.

Personne ne s'étonnera que nous soyons hostiles à l'article 2. Le Gouvernement et sa majorité ont beau feindre la satisfaction, ils n'abusent personne. Cet article a été fortement critiqué dans toute la presse par les partenaires sociaux. Vous pouvez toujours prétendre que la discussion a été franche et ouverte, que des possibilités d'arrangement pouvaient être trouvées jusqu'au dernier moment, ce n'est pas la vérité. Tous les syndicats, tous les représentants du patronat étaient hostiles à ces dispositions.

De toutes les réponses qui nous ont été apportées, une seule mérite un instant de réflexion : celle de notre collègue Cahuzac. Il a remarqué que ce n'était pas la première fois que l'on créait, dans le secteur social, des fonds avec des ressources affectées.

Notre collègue a parfaitement raison car c'est la vérité.

Cela ne veut pas dire pour autant que la méthode soit bonne. L'affectation de ressources trouve rapidement ses limites et la multiplication de tels fonds ne peut qu'aggraver la complexité administrative.

De surcroît, il y a une grande différence entre les fonds mis en place jusqu'à présent, en particulier le FSV, et celui que vous créez aujourd'hui : leur objet restait strictement social. Pour le FSV, il s'agissait d'assurer le financement de prestations sociales. Or ce n'est pas du tout le cas avec celui-ci, dont le but n'est ni plus ni moins que de corriger les conséquences d'une autre loi.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Argument spécieux !

M. François Goulard.

Pour cette raison de principe, bien au-delà des questions d'ordre technique ou administratif, que nous sommes résolument hostiles à votre article

2.

M. le président.

La parole est à M. Accoyer, pour défendre l'amendement no 584.

M. Bernard Accoyer.

Les trois groupes de l'opposition, RPR, Démocratie libérale et UDF, ont déposé ensemble cet amendement...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Bel effort !

M. Bernard Accoyer.

... afin de montrer que l'article 2 regroupe tous les éléments les plus dangereux pour les entreprises, les salariés et la protection sociale.

Contrairement à ce qui est affirmé, il ne réforme pas les cotisations patronales : il a simplement pour objet d'essayer de combler une partie du surcoût du travail créé par la réduction du temps de travail.

Comme il crée trois impôts, la contribution sociale sur les bénéfices, la TGAP et la taxe sur les heures supplémentaires, nouvel impôt particulièrement inique, comme chacun comprend bien qu'il est impossible, en travaillant moins, de gagner autant et de garder la même protection sociale, il est bien évident que la hausse du coût du travail sera financée par les salariés, par les finances sociales et par les entreprises.

Voilà pour quelle raison cet amendement commun de suppression de l'article 2 a été déposé.

M. René Dosière.

Beau programme commun !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Avec vous, monsieur Accoyer, c'était un million de personnes dans la rue. Là, c'est l'opposition de quatre syndicats à une phase seulement de la discussion. Il n'y a plus d'opposition.

J'ai bien écouté tout le débat. Avec M. Préel, seuls les autres sont longs, lui est forcément court, surtout dans l'argumentation (Rires sur divers bancs) , ce qui fait que je suis résolu à vous proposer de voter contre ces amendements de suppression.

M. Jean Bardet.

Oh la, qu'est-ce-que ça veut dire ?

M. François Goulard.

Y a-t-il un médecin dans la salle ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis que le rapporteur. Je voudrais tout de même dire à M. Bardet, pour que les choses soient claires et que cela figure au compte rendu, que j'avais pris la précaution, lundi, de faire envoyer les amendements du Gouvernement à l'ensemble des groupes du Parlement.

M. Bernard Accoyer.

Oui, à vingt heures !

M. Jean Bardet.

Cela ne change rien au procédé !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ce que vous avez dit était donc une fois de plus erroné.

M. Jean Bardet.

L'esprit y est !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Rappelons toujours les faits, monsieur Bardet. C'est souvent utile, vous savez, en démocratie !

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 28, 352, 510 et 584.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

4 DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président.

J'ai reçu, le 27 octobre 1999, de M. René Dosière, un rapport, no 1885, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

de l'administration générale de la République sur le projet de loi modifiant le code général des collectivités territoriales et relatif à la prise en compte du recensement général de population de 1999 pour la répartition des dotations de l'Etat aux collectivités locales (no 1809).

5 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

MODIFIÉ PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 27 octobre 1999, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par le Sénat, relatif à l'action publique en matière pénale et modifiant le code de procédure pénale.

Ce projet de loi, no 1886, est renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

6 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

MODIFIÉE PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 27 octobre 1999, transmise par M. le président du Sénat, une proposition de loi, modifiée par le Sénat après déclaration d'urgence, portant diverses mesures relatives à l'organisation d'activités physiques et sportives.

Cette proposition de loi, no 1887 est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

7

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SE ANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à neuf heures, première séance publique : Suite de la discussion du projet de loi, no 1835, de financement de la sécurité sociale pour 2000.

MM. Alfred Recours, Claude Evin, Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1876, tomes I à V).

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis no 1873).

A quinze heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 28 octobre 1999, à une heure cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 27 OCTOBRE 1999

ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL de la 3e séance du mercredi 27 octobre 1999 SCRUTIN (no 201) sur le sous-amendement no 407 de M. Accoyer à l'amendement no 1 de la commission des finances avant l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (conditions de suppression des fonds de pension).

Nombre de votants .....................................

115 Nombre de suffrages exprimés ....................

115 Majorité absolue ..........................................

58 Pour l'adoption ...................

28 Contre ..................................

87 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Contre : 81 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Laurent Fabius (président de l'Assemblée nationale).

Groupe R.P.R. (136) : Pour : 13 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe U.D.F. (70) : Pour : 11 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe communiste (35) : Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Yves Cochet (président de séance).

Non-inscrits (7).

SCRUTIN (no 202) sur l'amendement no 73 repris par M. de Courson avant l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (suppression des fonds de pension).

Nombre de votants .....................................

115 Nombre de suffrages exprimés ....................

115 Majorité absolue ..........................................

58 Pour l'adoption ...................

4 Contre ..................................

111 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Pour : 4. - MM. Bernard Nayral , Henri Nayrou , Alfred Recours et Bernard Roman

Contre : 77 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Laurent Fabius (président de l'Assemblée nationale).

Groupe R.P.R. (136) : Contre : 13 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe U.D.F. (70) : Contre : 11 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe communiste (35) : Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Yves Cochet (président de séance).

Non-inscrits (7).