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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET

1. Loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8483).

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) (p. 8483)

Article 10 (p. 8483)

MM. Jean-Luc Préel, Yves Bur, Bernard Accoyer, Pascal Terrasse, François Goulard, Mmes Marie-Françoise Clergeau, Muguette Jacquaint, M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles ; Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Amendements de suppression nos 588 de M. Debré, 241 de M. Mariani, 337 de M. Accoyer, 474 de M. Bur et 612 de M. Goulard : MM. Bernard Accoyer, Yves Bur, Jean Bardet, François Goulard, Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance vieillesse ; Mme la ministre, MM. Alfred Recours, Pascal Terrasse. - Rejet.

Amendement no 339 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, Denis Jacquat, rapporteur, Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Rejet.

Amendement no 298 de M. Préel : MM. Jean-Luc Préel, Denis Jacquat, rapporteur ; Mme la secrétaire d'Etat. Rejet.

Amendement no 199 du Gouvernement, avec les sousamendements nos 813 et 812 de M. Accoyer : Mme la secrétaire d'Etat, MM. Bernard Accoyer, Denis Jacquat, rapporteur ; François Goulard, Jean Bardet. - Rejet des sous-amendements ; adoption de l'amendement.

Suspension et reprise de la séance (p. 8497)

Amendement no 198 du Gouvernement, avec les sousamendements nos 808 de M. Accoyer, 784 de M. Goulard et 809, 810 et 811 de M. Accoyer : MM. François Goulard, Bernard Accoyer, Denis Jacquat, rapporteur ; Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet des sous-amendements ; adoption de l'amendement.

Amendement no 299 de M. Préel : MM. Jean-Luc Préel, Denis Jacquat, rapporteur ; Mme la secrétaire d'Etat, MM. Léonce Deprez, Pascal Terrasse, Yves Bur. - Rejet.

Mme Muguette Jacquaint, MM. François Goulard, Bernard Accoyer.

Adoption, par scrutin, de l'article 10 modifié.

Après l'article 10 (p. 8501)

Retrait de l'amendement no 10 de la commission des finances.

Amendements nos 475 et 300 de M. Préel et 576 de M. Debré : MM. Jean-Luc Préel, Denis Jacquat, rapporteur ; Mme la secrétaire d'Etat. - Retrait des amendements nos 475 et 300.

MM. François Goulard, Denis Jacquat, rapporteur ; Claude Evin. - Rejet de l'amendement no 576.

Article 11 (p. 8503)

M

M. Jean-Luc Préel, Jean Bardet, François Goulard, Mme Muguette Jacquaint, M. Pascal Terrasse, Mme la secrétaire d'Etat.

Adoption de l'article 11.

Après l'article 11 (p. 8505)

Amendement no 341 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, Denis Jacquat, rapporteur ; Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Article 12 (p. 8505)

MM. Yves Bur, François Goulard, Mme la secrétaire d'Etat.

Adoption de l'article 12.

Article 13 (p. 8506)

MM. Bernard Accoyer, François Goulard.

Adoption de l'article 13.

Après l'article 13 (p. 8507)

Amendement no 755 du Gouvernement : Mme la secrétaire d'Etat, MM. Denis Jacquat, rapporteur ; Bernard Accoyer, François Goulard. - Adoption.

Avant l'article 14 (p. 8508)

Amendements nos 615, 616, 621, 622, 625 et 626 de M. Goulard : MM. François Goulard, Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance maladie et les accidents, du travail ; Mme la secrétaire d'Etat. - Rejets.

Rappel au règlement (p. 8509)

MM. François Goulard, le président.

Reprise de la discussion (p. 8510)

Article 14 (p. 8510)

MM. Jean-Luc Préel, Bernard Accoyer, Jean Bardet, François Goulard.

Amendements de suppression nos 34 de M. Bardet et 343 de M. Accoyer : M. Jean Bardet.

Amendements nos 344 à 348 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, Claude Evin, rapporteur ; Mme la secrétaire d'Etat, M. Jean Bardet. - Rejet des amendements de suppression et des amendements nos 344 à 348.

Adoption de l'article 14.

Article 15 (p. 8515)

MM. Jean-Luc Préel, Bernard Accoyer, Jean Bardet, François Goulard, Mmes la secrétaire d'Etat, Jacqueline Mathieu-Obadia.

Amendements de suppression nos 35 de M. Bardet et 350 de M. Accoyer : MM. Jean Bardet, Bernard Accoyer, Claude Evin, rapporteur ; Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Adoption de l'article 15.

Article 16 (p. 8518)

MM. Yves Bur, Bernard Accoyer, Jean Bardet, Pascal Terrasse, Mmes Muguette Jacquaint, la secrétaire d'Etat.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 8523).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000 Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (nos 1835, 1876).

Discussion des articles (suite)

M. le président.

Ce matin, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles et s'est arrêtée à l'article 10.

Article 10

M. le président.

Je donne lecture de l'article 10 : Section 2 Branche vieillesse

« Art. 10. - I. - A la section II du chapitre Ier du titre V du livre II du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 251-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 251-6-1 . - La Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés affecte au fonds de réserve pour les retraites mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 135-1 :

« 1o Le résultat excédentaire de l'exercice clos de chacun des fonds dont elle a la gestion, à l'exception de celui du régime spécial mentionné à l'article L. 715-1 ; un arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget fixe chaque année la date de ce versement ;

« 2o Le cas échéant, en cours d'exercice, un montant représentatif d'une fraction de l'excédent prévisionnel de l'exercice tel que présenté par la commission des comptes de la sécurité sociale lors de sa réunion du second semestre de ce même exercice ; un arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget détermine les montants à verser ainsi que les dates de versement. »

« II. L'article L. 135-6 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le 3o devient le 4o ;

« 2o Il est inséré un 3o ainsi rédigé :

« 3o Les montants résultant de l'application de l'article L. 251-6-1 ; ».

« III. Les dispositions du présent article s'appliquent à compter de l'exercice comptable 1999. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Monsieur le président, madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, madame la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, après avoir examiné, finalement assez rapidement, ce matin, les problèmes de la branche famille, nous en arrivons donc à ceux posés par la retraite. L'article 10 concerne effectivement la branche vieillesse. Que propose-t-il pour préparer l'avenir ? Quasiment rien, de notre point de vue, en dépit de l'excellent rapport de notre collègue Jacquat...

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance vieillesse.

Je vous remercie !

M. Jean-Luc Préel.

... qui a bien fait apparaître les besoins de notre pays.

Pour notre part, nous souhaitons conforter la retraite p ar répartition. Les données démographiques sont connues de tous ; elles ont d'ailleurs été confirmées, après d'autres, par le rapport Charpin. Rappelons simplement que la durée de vie croît, chaque année, d'un trimestre, augmentant d'autant la durée de paiement des retraites.

Si, aujourd'hui, le régime général est à peu près équilibré et dégage pour cette année des bénéfices, que vous allez d'ailleurs ponctionner, c'est bien parce que Edouad Balladur et Simone Veil ont pris, en leur temps, des mesures courageuses. Malgré tout, il sera assez rapidement déficitaire.

Mais c'est l'avenir des régimes spéciaux, notamment de la CNRACL, bien connue de tous les élus, et le coût de la retraite des fonctionnaires qui devraient nous préoccuper davantage. En 2015, il nous manquera, excusez du peu, près de 350 milliards de francs par an.

M. Pascal Terrasse.

C'est la fourchette haute !

M. Jean-Luc Préel.

Tiens, M. Terrasse vient d'arriver ! Nous le saluons. (Sourires.)

Dans ces conditions, il nous paraît bien peu courageux de reporter encore les décisions à prendre. Certes, madame la ministre, vous avez créé en 1998 un fonds de réserve. Mais il est demeuré virtuel pendant un an exactement. Il a été miraculeusement institué à la veille de l'ouverture des débats. Décidément, lundi 25 octobre fut un jour faste : le fonds de réserve a été enfin officialisé vous avez proposé un nouvel article 2 qui évitait de ponctionner l'UNEDIC.

Donc, le fonds de réserve est effectivement créé. Reste maintenant à l'alimenter suffisamment pour qu'il puisse prendre en charge les retraites de la génération du « babyboom » qui va devenir celle du « papy-boom ».

Nous avons, quant à nous, des propositions à présenter. D'abord, nous considérons qu'il importe d'accroître l'autonomie de la CNAV. En effet, les partenaires sociaux


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savent être responsables lorsqu'on les laisse prendre les décisions - ils le montrent à l'UNEDIC, ils l'ont prouvé à l'AGIRC et à l'ARRCO. Il faut donc laisser le conseil d'administration décider du montant des cotisations en fonction des prestations, ou vice versa.

Dans un esprit de transparence, nous proposons également de créer une caisse unique de retraite de fonctionnaires gérée paritairement par l'Etat et les syndicats. Dans un esprit de justice, nous réclamons également l'harmonisation progressive des règles appliquées dans les divers régimes. Bien sûr, et comme le souhaite le président Laurent Fabius lui-même, nous proposons aussi, pour compléter notre dispositif, la création d'une épargneretraite investie au minimum à 50 % dans des entreprises françaises. Nous vous invitons tous à suivre cette excellente proposition.

Permettez enfin au président du groupe d'études sur les conjoints survivants - ceux que l'on avait l'habitude d'appeler les veufs et les veuves - de dire quelques mots.

Je m'étonne, madame la ministre, que vous ne preniez pas une seule mesure, cette année, les concernant. Pourtant, plusieurs problèmes ne sont toujours pas réglés.

Ainsi, le taux de réversion est toujours à 54 % et le plafond ouvrant droit à l'assurance veuvage toujours trop bas, hélas ! Ce qui fait que peu de veuves peuvent bénéficier de ce fonds qui a pourtant été spécifiquement créé pour leur venir en aide. Il en résulte qu'il est très excédentaire, en théorie en tout cas.

Je voudrais également attirer votre attention sur le problème des polypensionnés, qui sont aujourd'hui injustement pénalisés, puisque, lorsque le mari, ou la femme, avait cotisé à plusieurs régimes, on ne peut pas additionner la totalité des droits acquis. Ils sont en quelque sorte divisés en fonction du nombre de caisses auxquelles le défunt avait cotisé.

La prise en compte injuste de la majoration pour enfant dans l'assiette des revenus est également injuste car elle abaisse de fait le plafond de ressources.

Bref, il n'y a rien dans ce texte pour les veuves, et quasiment rien pour préparer l'avenir de nos retraites, ce que nous regrettons profondément. Cela nous amènera très probablement à voter contre cet article si vous ne l'améliorez pas.

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur.

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, la faiblesse des mesures annoncées par le Gouvernement pour assurer le financement des retraites est en total décalage avec l'importance de ce problème.

En effet, ce problème est important d'abord au regard de son impact social, quand on sait qu'un nombre croissant de Français vont être concernés par l'évolution des retraites. Peut-on encore laisser longtemps dans l'ignorance les milliers de retraités qui se demandent, après tout ce qu'ils ont entendu ou lu dans les médias, si leurs revenus seront assurés à l'avenir et à quel niveau ? Ce problème est également important au regard de son impact financier, car plus on tardera à agir, plus les difficultés financières risquent de se répercuter sur le paiement des pensions.

A cet égard, votre attentisme depuis trois ans tranche avec le courage - le mot n'est pas trop fort - qu'il faudrait pour aborder objectivement le gros dossier des retraites de nos concitoyens. Après avoir contribué par leur travail à faire de la France ce qu'elle est aujourd'hui, ils se demandent s'ils ne vont pas être les sacrifiés de la politique du Gouvernement, qui obéit à des considérations purement politiciennes, liées à d'hypothétiques calendriers électoraux.

Les travailleurs du privé ont accepté, et certainement pas de gaieté de coeur, de prolonger leur durée de cotisation de 150 à 170 trimestres pour obtenir une retraite à taux plein, avec une prise en compte, non pas des dix, mais des vingt-cinq dernières années, ce qui est aussi un sacrifice.

Par ailleurs, l'ARRCO est arrivée à fédérer l'ensemble des régimes. Alors, à quand - et je rejoins là une demande réitérée depuis de nombreuses années par JeanLuc Préel - un régime unique pour l'ensemble des fonctionnaires, qui permettrait de bien identifier les besoins de financement du futur ? Face à l'importance de ces questions, le Gouvernement continue de se perdre en atermoiements et se contente simplement de verser quelques milliards d'excédents au fonds de réserve - et encore de manière incertaine - lào ù il faudrait plusieurs dizaines de milliards pour commencer à préparer l'avenir. Je rappelle que 66 milliards de francs par an seront nécessaires dès 2006, et plus de 300 milliards à partir de 2015. Parmi ces besoins, la commission des finances a relevé que les retraites de la sphère publique nécessiteront 20 % de plus que les retraites du secteur privé.

Bien sûr, il est plus simple pour vous d'annoncer régulièrement l'abrogation de la loi Thomas, abrogation d'ailleurs régulièrement reportée, plutôt que de mettre en oeuvre un véritable plan de sauvetage qui devra d'abord viser à rétablir l'équité entre le secteur privé et le secte ur public et à assurer la pérennité de nos systèmes de retraite en les complétant par l'épargne retraite, que tout le monde considère maintenant comme nécessaire.

Docteur Aubry, il est temps d'oser proposer le traitement approprié au grand malade qu'est notre système de retraite, surtout celui du secteur protégé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) A défaut, le malade risque d'entrer dans une phase aiguë. Les retraités, comme les futurs retraités, ne vous le pardonneraient pas.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

L'article 10 précise que les éventuels excédents du régime général seront affectés à la caisse de réserve des retraites par répartition, la C3R.

Madame la ministre, cet article nous permet de revenir sur un certain nombre de problèmes, à commencer par celui des retraites. Après dix ans d'immobilisme de la gauche, le Gouvernement auquel vous appartenez a demandé, histoire de gagner du temps, et évidemment sans tenir compte de l'intérêt de nos concitoyens et de nous tous, d'ailleurs, puisque nous sommes tous soit retraités soit dans l'espoir de l'être, un rapport à M. Charpin. Ses conclusions sont très simples : en 2005, c'est-àdire, mes chers collègues, dans moins de cinq ans, il manquera chaque année 60 milliards de francs pour payer les retraites ; 300 milliards en 2010 et 600 milliards en 2020. Cela est dû à la pyramide des âges et à l'allongement de la vie, l'incidence du chômage n'étant pas aussi importante qu'on l'avait cru. Mais ne chipotons pas sur les chiffres, ce sont des ordres de grandeur.

Madame la ministre, nous avons, comme vous, et depuis longtemps, le souci de préserver le système de retraite par répartition où les actifs paient en temps réel pour les retraités. La droite a d'ailleurs engagé des réformes courageuses pour essayer de le sauver, alors que vous, vous n'avez jamais rien fait de significatif en ce domaine.


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Savez-vous que si l'on voulait compenser le déficit du régime de la branche vieillesse pour les seuls salariés du privé, il faudrait que, dès 2005, nous puissions dégager 60 milliards de francs d'intérêts par an ? A un taux de 5 %, il faudrait donc disposer de 1 200 milliards de francs. Or, à moins de cinq ans de cette échéance, il n'y a pas un franc dans ce fonds pourtant créé il y a un an à grand renfort de message apaisants. En 2010, c'est 300 milliards de francs par an d'intérêt qu'il faudra dégager. Faites les calculs, cela signifie qu'il faudrait 6 000 milliards de francs de capital. Mais nous n'atteindrons pas de telles sommes, du fait du retard que vous avez pris. Quoi que vous disiez, quoi que vous fassiez aujourd'hui, l'avenir des retraites des Français sont compromises par la faute de la gauche.

Pourtant, il faudra bien trouver des solutions. Malheureusement, elles seront sûrement douloureuses : allongement de la période de cotisation que la gauche, d'ailleurs, avait réduite ; allongement de la période de travail que vous abaissez avec les trente-cinq heures ; augmentation des cotisations - mais ça, on a l'habitude avec vous ! -...

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

C'est avec vous que l'on a l'habitude ! Nous, nous n'avons pas augmenté les cotisations !

M. Bernard Accoyer.

... et diminution des prestations - on a vu que cela non plus ne vous gênait guère.

Mais au-delà de ce mécanisme qui prétend affecter d'hypothétiques excédents du régime général au fonds de la C3R, il y a le système pervers que vous mettez en place pour financer les trente-cinq heures : vous détournez du fonds de solidarité vieillesse une partie de la taxe sur les alcools. Non contents de ne rien prévoir pour financer les retraites de tous les futurs retraités que nous sommes, vous détournez l'argent social au profit de l'abaissement du temps de travail à trente-cinq heures, qui est une mesure purement politique.

Madame la ministre, vous commettez une faute extrêmement grave en n'assumant pas vos responsabilités vis-àvis de la solidarité entre les générations.

Ce matin, vous nous avez expliqué que, dans un an, il y aurait 22 milliards dans le fonds de réserve.

Aussi, ai-je une question sur l'une des hypothèses de recettes que vous avez évoquées ce matin.

M. le président.

Ce sera la dernière, monsieur Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je veux terminer par cette question, monsieur le président, parce que s'il y a un point sur lequel je souhaiterais que Mme le ministre me réponde, c'est bien celui-ci. Vous avez annoncé que la Caisse des dépôts et consignations verserait 6 milliards de francs à ce fonds de réserve.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

3 milliards !

M. Bernard Accoyer.

Ah ! J'ai entendu 6 milliards.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous avez mal entendu !

M. Bernard Accoyer.

Admettons. Mais alors pouvezvous nous expliquer si ce montant provient des produits de l'épargne de la Caisse des dépôts et consignations ou d'un don de la Caisse des dépôts et consignations que vous aurez décidé d'affecter à ce fonds de réserve.

En fait, le fonds de réserve destiné à assurer l'avenir des retraites par répartition a été réellement créé avant hier au Journal officiel et non l'année dernière. Et en annonçant que ce fonds disposera de 22 milliards de francs, dans un an, vous ne cherchez qu'à rassurer les retraités. Dormez tranquille, amis retraités, tel est votre slogan. Ces 22 milliards sont d'ailleurs largement insuffisants. C'est cent fois inférieur à ce qu'il faudrait y consacrer, chaque année, probablement 200 fois d'ailleurs !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Qui dit mieux !

M. Bernard Accoyer.

Vous masquez la vérité par des artifices, ainsi que vous l'avez fait pour les 35 heures en disant aux Français qu'ils pourraient travailler moins, gagner autant et avoir les mêmes prestations sociales en matière de maladie et de vieillesse. La vérité, madame la ministre, ça n'est pas cela.

Alors, si aujourd'hui il y a effectivement de bonnes nouvelles en matière de chômage, nous en sommes particulièrement heureux parce que nous pensons que l'assainissement des finances publiques qui a été opéré a permis la relance et la croissance.

Nous devons nous réjouir ensemble.

M. le président.

Certes, mais j'aimerais que vous concluiez, monsieur Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Mais en refusant de vous attaquer au problème des retraites, c'est une véritable bombe à retardement que vous laissez aux Français.

Je ne doute pas que vous souhaitiez la désamorcer.

Mais alors, pourquoi continuer à cacher la vérité aux Français ?

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

L'article 10 permet d'abonder le fonds de réserve pour les régimes d'assurance vieillesse.

Nous avons déjà eu, lors du précédent débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, l'occasion de débattre très largement de ce fonds de réserve pour lequel il est prévu deux milliards de francs. Ce montant, nous en sommes tous convenus, reste largement symbolique.

Il nous faut aujourd'hui pérenniser ce fonds,...

M. Bernard Accoyer.

Mais il n'existe même pas ! Il n'y a rien dedans !

M. Pascal Terrasse.

Je ne vous ai pas interrompu, monsieur Accoyer. Alors, laissez-moi terminer, d'autant que je serai plus bref que vous ! Le fonds de réserve pour les régimes d'assurance vieillesse a été voté dans le cadre du PLFSS pour 1998. Il revenait donc à l'Etat de le créer dans le courant de l'année 1999. Il aurait tout à fait pu l'être le 30 novembre ou le 30 décembre.

Ce fonds de réserve relève de la double tutelle du ministère de l'emploi et du ministère du budget. Mais il appartient aujourd'hui au ministère du budget d'y affecter les 2 milliards de francs en question.

Je le répète, je partage l'avis de ceux qui estiment qu'il est symbolique. Ce qui m'intéresse plus, c'est que le Gouvernement s'engage à l'abonder fortement.

M. Bernard Accoyer.

C'est incantatoire !

M. Pascal Terrasse.

Non ! Il sera abondé par une partie des excédents de la branche vieillesse... par des dotations de l'Etat, notamment celles des caisses d'épargne, et puis, il pourra y avoir des excédents...

M. Bernard Accoyer.

Eventuellement !

M. Pascal Terrasse.

Oui, éventuellement, des caisses d'assurance.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Globalement, la création de ce fonds de réserve doit permettre de passer le cap des effets du baby-boom en 2005.

M. Bernard Accoyer.

C'est absolument faux !

M. Pascal Terrasse.

Mes chers collègues de l'opposition souhaiteraient que l'on engage un débat sur la capitalisation.

M. Jean-Luc Préel.

Laurent Fabius aussi !

M. Pascal Terrasse.

La ministre de l'emploi et de la solidarité a toujours dit, contrairement à nos collègues de l'opposition, que la priorité des priorités, c'est de consolider nos régimes par répartition, parce que c'est là que réside le problème.

M. Bernard Accoyer.

Qu'avez-vous fait pour cela ? Vous ne faites rien !

M. le président.

Monsieur Accoyer, s'il vous plaît, laissez parler M. Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

Que se passerait-il concrètement si on optait pour un système par capitalisation ? Toutes les générations nées après 1965, celles qui cotisent pour les retraités actuels, seraient spoliées. Or c'est ce que vous voulez aujourd'hui.

M. Jean-Luc Préel.

Quelle caricature !

M. Pascal Terrasse.

Vous êtes dans une logique qui ne correspond pas à la nôtre, celle de l'universalité et de la solidarité.

Je prends acte des positions de la droite qui tient absolument à mettre en place des systèmes par capitalisation, pour conforter un certain secteur assurantiel.

M. Bernard Accoyer.

Nous allons obliger les jeunes à payer de façon excessive.

M. Alfred Recours, rapporteur.

C'est vous qui êtes excessif, monsieur Accoyer, comme d'habitude !

M. Olivier de Chazeaux.

La vérité fait mal !

M. Pascal Terrasse.

Lorsque l'opposition s'est exprimée nous l'avons écoutée attentivement, même si nous ne sommes pas forcément d'accord. Or vous constatez, monsieur le président, qu'à chaque fois que la majorité prend la parole, elle ne réussit pas à se faire entendre parce qu'il y a deux ou trois éléments excités de l'opposition qui n'acceptent pas le débat démocratique.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Il a l'air fatigué M. Goulard !

M. François Goulard.

Monsieur le président de la commission, ne prenez pas vos désirs pour des réalités ! (Sourires.)

La gauche française est durablement fâchée avec l'agriculture, nous l'avons encore vu hier soir lorsqu'elle a réagi à nos propositions en faveur des agriculteurs français.

Ceux qui aiment et qui connaissent l'agriculture savent qu'il y a un temps pour les semailles et un temps pour la récolte. Les semailles ont eu lieu entre 1993 et 1997.

M. Olivier de Chazeaux.

Absolument.

M. François Goulard.

Nous nous réjouissons que le temps des récoltes soit aujourd'hui venu. Mais dans certains domaines, le rythme du temps ne se compte pas en années mais en décennies.

Le grand Colbert le savait, qui, ministre de la marine, plantait des forêts pour que ses successeurs, plusieurs décennies après, puissent y tailler des mâts.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Colbert, la référence de Démocratie libérale, on aura tout entendu !

M. François Goulard.

S'agissant des retraites, c'est bien un rythme de plusieurs décennies qu'il faut viser.

Par votre inaction, depuis deux ans et demi, vous menacez l'avenir des retraites non pas à très court terme, mais pour les générations qui nous suivront. C'est de cette importante question qui concerne nos enfants, nos petits-enfants dont nous devrions parler au lieu de mesures minuscules comme celles que vous proposez dans votre projet de loi.

Concernant le régime par répartition d'abord qui est incontestablement le socle de nos retraites, la réforme engagée par le gouvernement Balladur était de nature à le consolider.

Il conviendrait que d'autres mesures viennent s'y ajouter pour assurer la pérennité de ce qui doit rester la base des retraites de demain.

Depuis deux ans et demi, vous n'avez apporté aucune solution d'avenir à la question posée par le problème de l'équilibre des retraites par répartition. En effet, le fonds de réserve mis en place l'année dernière aura, au bout de deux ans et si nous acceptons vos prévisions, une dotation qui couvrira à peine le quart ou le tiers au mieux du premier déficit qui devrait apparaître en 2006 dans notre régime général de retraite.

Deuxième grand sujet : les régimes spéciaux. Là encore, rien dans l'action du Gouvernement pour réduire progressivement une inégalité entre les Français qui, selon qu'ils travaillent dans le secteur privé ou dans le secteur public, ne sont pas égaux aujourd'hui devant la retraite mais surtout, le seront de moins en moins demain.

Troisième grand sujet concernant l'avenir des retraites : les retraites par capitalisation. Tous les grands pays, sans exception, ont adopté cette solution, ajoutant un étage aux régimes de pension afin d'assurer à celui-ci son avenir. Nous relevons pour le déplorer votre refus, purement idéologique, de vous engager à temps dans une voie qui aurait dû être ouverte depuis déjà longtemps, qui a fait l'objet d'une loi - la loi Thomas, votée en 1997 - que vous n'avez même pas eu le courage d'abroger, alors que vous le promettiez.

M. Pascal Terrasse.

Ce sera fait !

M. François Goulard.

Sur tous ces sujets, nous ne pouvons que regretter, non pour nous, mais pour les générations à venir, que vous viviez dans le court terme et que vous ne soyez pas à la hauteur des responsabilités qui sont les vôtres.

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.

M me Marie-Françoise Clergeau, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, je profite de la discussion de cet article pour attirer l'attention du Gouvernement sur l'assurance veuvage et plus largement la situation des conjoints survivants qui sont, je vous le rappelle, plus de quatre millions en France.

L'élaboration d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale est un véritable travail d'équilibriste, qui nécessite de définir des priorités, marquant chaque année de nouvelles ambitions.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Des avancées importantes ont été réalisées en 1999, il faut les rappeler. Ainsi, depuis la réforme de l'assurance veuvage, l'allocation veuvage est désormais versée pendant deux ans au taux le plus intéressant, au lieu d'un an préc édemment, ce qui a procuré un gain d'environ 1 000 francs par mois. Cette mesure a également permis d'éviter une double inscription au RMI et à l'assurance veuvage la deuxième année.

Pour les conjoints survivants âgés entre cinquante et cinquante-cinq ans lors du décès de leur conjoint, l'avantage pourra désormais être maintenu pendant trois ans, soit un gain de plus de 1 500 francs par mois la troisième année.

On peut également citer la revalorisation exceptionnelle de 2 % du minimum de pension de réversion qui concerne environ 600 000 conjoints survivants.

L'ensemble de ces mesures a permis de concentrer les moyens financiers sur celles et ceux qui en avaient le plus besoin : ceux qui perçoivent l'allocation veuvage, ceux qui sont au minimum de réversion. Elles ont induit une redistribution des dépenses en faveur des conjoints survivants qui en ont le plus besoin.

Néanmoins, il me paraît utile de poursuivre le travail de réflexion afin de répondre à deux problèmes qui se posent à nous : la question de la pluralité de réversion et le dossier des droits de succession.

Les conjoints survivants bénéficiant d'avantages de réversion de plusieurs régimes se trouvent actuellement pénalisés par l'application de l'article D.

171-1 du code de la sécurité sociale.

M. Pascal Terrasse.

Excellent !

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteur.

Il convient en effet que le conjoint survivant ne soit ni lésé ni avantagé par rapport à celui qui ne dépend que d'un seul régime. On peut ainsi relever que, selon les dispositions en vigueur, la perception d'une pension de réversion du régime agricole de 9 francs par mois a pour conséquence une diminution de la réversion du régime général de 1 577,69 francs par mois.

Nous nous devons de traiter cette question au plus vite, peut-être à l'occasion d'un prochain DMOS.

Il serait également utile de s'intéresser aux droits de succession. Ainsi, en droit français, contrairement aux règles successorales en vigueur dans la plupart des pays européens, le conjoint survivant n'est pas l'héritier de l'époux décédé. Seule une minorité de couples, ayant une bonne connaissance de leurs droits, pensent à effectuer une donation au dernier vivant.

A cet égard, les propositions du rapport DekeuwerD efossez constituent une avancée notable pour le conjoint survivant sans enfant. Je pense que ces propositions seront reprises dans un prochain projet de loi.

En ce qui concerne le conjoint survivant avec enfant, l'usufruit total serait une amélioration, mais l'indivision restant source de conflits, il me paraîtrait plutôt nécessaire d'accorder une part réservataire au survivant.

Enfin, dans les successions comportant une entreprise agricole, artisanale, industrielle ou commerciale, le maintien de l'unité économique et de sa continuité doivent être une priorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pascal Terrasse.

Excellente intervention !

M. le président.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint.

L'article 10 précise les modalités de financement du fonds de réserve. Nous souhaitons à cette occasion réaffirmer l'appréciation que nous portons sur ce fonds.

En premier lieu, son objectif doit être clairement défini. Il ne doit pas constituer le troisième étage de notre actuel système de retraite. En termes plus clairs, il ne doit pas se transformer en outil de capitalisation sous forme de fonds de pension.

Si fonds de réserve il doit y avoir, l'existence de celui-ci doit être éphémère, et cesser le jour où nous consoliderons notre système par répartition. Il doit uniquement servir à faire face au pic démographique à venir et aider au financement des pensions de retraites des générations issues du baby-boom, avant de disparaître.

Opter pour la capitalisation serait encourager la financiarisation de notre économie au détriment de l'emploi.

La capitalisation implique en effet d'énormes réserves financières.

Par ailleurs, un régime par capitalisation est beaucoup plus coûteux en prélèvement qu'un système par répartition. Pour pouvoir financer 100 francs de prestation dans le premier, on a besoin de 800 francs de cotisation. Alors que pour pouvoir financer 100 francs de prestation dans un régime de capitalisation, il faut trois fois plus.

M. François Goulard.

C'est un calcul à la Gremetz !

Mme Muguette Jacquaint.

Sans réserves financières, il n'y a pas de capitalisation. Un tel système nous oblige donc à augmenter les prélèvements et à réduire les prestations au nom de la rentabilité. Cela entraîne une réduction du pouvoir d'achat des salariés et des retraités. Or ce dont nous avons besoin aujourd'hui, d'autres l'ont dit, c'est d'une revalorisation des prestations, que ce soit pour les retraités, les bénéficiaires de pensions de réversion, ou les veuves.

Un autre élément mérite d'être souligné. C'est le caractère individualiste de la capitalisation. A l'inverse de la répartition, le niveau de la retraite repose dans ce cas sur la capacité de chacun à épargner pour préparer « ses vieux jours ». Seront donc favorisés les salariés dont les revenus sont importants, qui pourront partir à la retraite dès que le capital constitué le leur permettra. En revanche, ce système peut exclure du droit à la retraite les chômeurs et les salariés faiblement rémunérés, condamnés à travailler plus longtemps.

Ces inégalités ne peuvent prévaloir dans notre société.

D'ailleurs, les Français n'y aspirent pas. Selon un sondage SOFRES publié dans le Nouvel Observateur du 24 avril 1999, ils ne sont que 14 % à préférer « un système de capitalisation où chaque individu finance sa retraite par une épargne personnelle. »

En second lieu, le financement du fonds de réserve ne peut se faire que par des privatisations. Or le recours à la privatisation ne peut être l'ambition d'un gouvernement de gauche, pas plus que la méthode qui consiste à y verser des excédents de la caisse nationale d'assurance vieillesse tant que ne sont pas revalorisées comme il se doit les pensions de retraite.

Telles sont les raisons qui justifient notre opposition à l'article 10.

M. Bernard Accoyer.

Les communistes ne sont d'accord sur rien ! Ils ne peuvent pas voter ce texte !

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Avec les articles 10 et 11, nous abordons un problème difficile, celui de l'avenir du système des retraites.

Je dirai tout d'abord aux orateurs qui sont intervenus sur l'article que je pense que la création d'un troisième étage ne répondrait pas à toutes les préoccupations car il se heurterait au même obstacle démographique. Un colloque récent que j'ai organisé et qu'animait excellemment M. Claude Evin, l'a clairement montré. Le Gouvernement a raison de prendre toutes les précautions et de procéder à toutes les négociations nécessaires, avant d'aborder un problème que nous considérons tous comme extrêmement important - il n'y a pas entre nous la moindre divergence là-dessus - mais sur lequel nous savons très bien ne pouvoir agir qu'après une préparation et une réflexion très approfondie et avec - je crois que c'est le mot qui convient - une pédagogie de la nécessité.

Les discours ne suffisent pas. Encore faut-il que l'ensemble de nos concitoyens soient conscients de l'importance de l'enjeu et des mesures à prendre.

Nous abordons aussi le problème de la revalorisation des retraites. Et j'ai écouté, comme toujours, avec beaucoup d'attention ce qu'a dit Mme Muguette Jacquaint.

Dans l'intervention que vous avez faite devant notre commission, madame la ministre, j'ai retenu deux phrases importantes.

D'une part, vous avez dit, qu'il nous fallait préparer l'avenir et accumuler des réserves.

M. Yves Bur.

Tout à fait !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Je viens d'évoquer ce point très rapidement. Mais vous aurez l'occasion, madame la ministre, d'y revenir plus longuement.

D'autre part, vous avez déclaré que les retraites actuelles ne devaient pas être laissées au bord du chemin alors que la situation de l'ensemble s'améliore. C'est à ce sujet d'ailleurs que Mme Jacquaint vient d'intervenir, et M. Terrasse et Mme Clergeau ont tenu le même discours.

Un effort incontestable a été fait ces dernières années.

La revalorisation d'ensemble des retraites de base est de l'ordre de 1 %. Prenant le simple décompte arithmétique entre les prévisions d'inflation et l'inflation réelle - et on ne peut que se féliciter que celle-ci soit beaucoup plus faible que prévu -, Mme Jacquaint nous dit que nous ne pouvons pas prendre cela en compte. On ne peut pas tenir ce raisonnement parce qu'en définitive le fait d'avoir une inflation plus faible est une très bonne chose pour les salariés et pour les retraités, car on sait très bien que les inflations fortes sont toujours subies plus fortement par les revenus les plus faibles. Mme Jacquaint le sait très bien elle aussi.

Tout compte fait, cela a été une anticipation de coup de pouce. C'est comme cela qu'il faut poser le problème.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Exactement !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Il y a eu une anticipation de coup de pouce en 1999 résultant de la différence entre le taux estimé d'inflation et la réalité.

On ne peut pas en même temps refuser de prendre en compte cette anticipation de coup de pouce et la reporter sur l'année à venir. Il faut avoir un raisonnement cohérent sur l'ensemble.

Ces choses étant clairement dites, je pense qu'il serait souhaitable de poursuivre l'effort entrepris concernant le minimum vieillesse.

M. Pascal Terrasse.

Je vais en parler à propos de l'article 11.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

M. Terrasse y reviendra à l'article 11 mais je me fais son interprète et l'interprète de bien des parlementaires. Même si des progrès notables ont été réalisés, en particulier sur les deux dernières années, les sommes en jeu demeurent relativement faibles : 3 540 francs. On voit bien, dans les décisions politiques que vous prenez, madame la ministre, que vous avez la volonté de rehausser ce niveau. Mais, même si cela ne relève pas de la loi mais du décret, si vous pouviez donner un coup de pouce pour porter ce taux à 1 %, le taux de progression des minima vieillesse sur les trois dernières années frôlerait les 2,3 ou 2,4 %, ce qui serait quand même très significatif.

M. Pascal Terrasse.

Absolument !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Madame la ministre, si vous pouviez répondre favorablement à cette demande, ce serait un signe très fort en direction de ceux qui l'ont exprimée. Je pense à Mme Clergeau, à

M. Terrasse et à Mme Jacquaint.

Dans l'exposé des motifs de l'article 11, je relève également une précision très importante. Vous avez en effet écrit, madame la ministre : « L'élaboration d'une règle pérenne de revalorisation des pensions pour les années suivantes sera examinée dans le cadre de la concertation relative aux retraites ». Il sera impératif dans les mois à venir de donner, à partir de cette concertation, une définition très claire des règles. Vous l'annoncez dans l'exposé des motifs mais, là encore, une prise de position très forte de votre part serait un signe en direction des retraités qui, malgré tout ce que l'on peut dire, ne doivent pas être laissés au bord du chemin. D'ailleurs les mesures prises par le Gouvernement depuis trois ans en ce domaine le démontrent très clairement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, et M. Pascal Terrasse.

Très bien, monsieur le président !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je répondrai de manière globale sur les articles 10 et 11 pour faire le tour des problèmes liés à la retraite et à la branche vieillesse.

Sans revenir sur le fond, dont vient de traiter M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, je répondrai à l'opposition que, si le problème des retraites se pose, certes, avec force, la réponse n'est pas dans la précipitation, mais bien plutôt dans la détermination à trouver les bonnes décisions.

M. Olivier de Chazeaux.

Ce n'est pas le sentiment que vous donnez !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Premier ministre a dit qu'il s'exprimerait en début d'année.

M. François Goulard.

Ne prenez pas ce prétexte pour ne rien faire !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous avons vu ce que la précipitation, en d'autres temps, a donné. Cela a abouti, entre autres, à montrer du doigt certaines catégories.

M. Pascal Terrasse.

Comme en 1995, par exemple !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

M. Olivier de Chazeaux.

Vous n'avez aucune leçon à nous donner !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

A cet égard, l'opposition traite le rapport Charpin par le mépris et considère qu'il n'a rien apporté ; j'estime, pour ma part, qu'il a été un apport précieux.

M. Bernard Accoyer.

Nous sommes d'accord avec le rapport !

M. Olivier de Chazeaux.

Mais vous, vous ne faites rien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il a montré, au-delà, des résultats qui sont inquiétants...

M. Olivier de Chazeaux.

Non seulement vous ne faites rien, mais vous continuez à tromper les Français !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Puis-je parler ?

M. Olivier de Chazeaux.

Dites des vérités !

M. le président.

Mesdames, messieurs de l'opposition, je vous prierai d'écouter la ministre comme les autres orateurs, calmement !

M. Pascal Terrasse.

Les membres de l'opposition n'écoutent jamais !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Oui, c'est à croire que les réponses ne les intéressent pas puisqu'ils répètent trois fois les mêmes questions.

M. Bernard Accoyer.

Au contraire, madame la ministre, nous buvons vos paroles. Avec précaution, certes, mais nous les buvons !

M. Olivier de Chazeaux.

Mais vous ne dites rien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Quant à vous, monsieur le député de Chazeaux, c'est la première fois qu'on vous voit dans ce débat... ce qui n'est pas le cas de vos voisins avec qui j'ai le plaisir de discuter depuis plusieurs jours. Je suis ravie de vous voir mais ne venez pas m'accuser de ne rien dire.

M. Olivier de Chazeaux.

Heureusement, les chaînes câblées permettent de suivre les débats et vous ne nous avez pas convaincus ! Vous ne dites que des lieux communs. Essayez de nous éclairer !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le rapport Charpin nous a au moins permis de déterminer, régime par régime, la part des cotisations par rapport aux rémunérations et les efforts réalisés par les salariés dans ces cotisations indirectes et de comparer les avantages des différents systèmes.

En effet, on ne peut pas se contenter de comparer de manière rapide les différents régimes au régime général.

Croyez bien que je fais partie de ceux qui pensent que l'ensemble des régimes doivent avancer en même temps que le régime général.

Comme le Gouvernement l'a annoncé, il prendra des décisions au début du mois de janvier.

J'ai été chargée par le Premier ministre, avec mes collègues le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le secrétaire d'Etat à l'industrie et le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation d'engager une première concertation avec les organisations patronales et syndicales, ce qui a été fait.

Le Premier ministre travaille actuellement avec nousmêmes sur un certain nombre de propositions. Des groupes techniques vont être mis en place sur deux ou trois problèmes spécifiques. Le Premier ministre annoncera en début d'année ses décisions dans le cadre plus général d'une politique de la vieillesse car, comme je l'ai dit dans la discussion générale, il est tout à fait essentiel que nous parlions aussi de la place des personnes âgées dans la société et des problèmes de dépendance. Beaucoup d'entre vous en ont d'ailleurs parlé, et notamment Mme Guinchard-Kunstler dans l'excellent rapport qu'elle a remis au Gouvernement.

Pour nous, l'important est de consolider les régimes par répartition. Un régime par capitalisation, comme le souhaitent certains, ne réglerait, comme l'a très bien dit le président de la commission, aucun des problèmes actuels, que ce soit les problèmes de démographie ou les problèmes de financement.

En ce qui concerne le fonds de réserve, je voudrais rassurer M. Accoyer. Le rapport Charpin, dont il ne conteste par les résultats d'après ce que j'ai compris...

M. Bernard Accoyer.

C'est un excellent rapport !

M. François Goulard.

Il est incontestable.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... explique qu'il faudra environ 300 milliards de francs en 2020.

Nous n'avons donc pas besoin de mettre 200 milliards chaque année en plus, cela ferait 6 000 milliards en 2020.

M. Bernard Accoyer.

Il faut 200 milliards chaque année.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous avez dit tout à l'heure qu'il faudrait mettre dix fois plus chaque année.

M. Bernard Accoyer.

Oui, madame !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous n'avons pas besoin de rajouter 200 milliards chaque année, nous avons besoin chaque année d'avoir 200 milliards de francs. Si on suivait votre raisonnement, on arriverait à 6 000 milliards d'ici à 2020. Je vous rassure, les 20 ou 22 milliards qui existeront à la fin de l'année, représentent déjà un beau progrès en deux ans, alors qu'il convient d'avoir 300 milliards en 2020.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Absolument !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ce n'est qu'un début. Continuons le combat. Mais ce début aurait pu commencer avant, et nous serions déjà plus avancés.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

La réforme Balladur n'avait pas prévu cela !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'en viens maintenant au fonds de vieillesse. Je répète que les excédents dont il dispose sont dus aux 2 milliards de l'année dernière, aux 4 milliards provenant des caisses d'épargne, à l'excédent de la CNAV - qui a été de 4,4 milliards en 1999 - au versement cette année des 5,5 milliards que nous avions mis de côté pour le fonds de réserve des charges patronales. Donc je redis à M. Accoyer - cela doit faire la quatrième fois que je le dis mais ce n'est sans doute pas la dernière - qu'il n'y a pas de détournement du fonds de la vieillesse pour financer la réduction de la durée du travail. Les 5,5 milliards qui étaient prévus pour aller au fonds de solidarité vieillesse vont y aller comme c'était prévu.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Très bien !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Enfin, nous avons prévu dans la loi de financement de la sécurité sociale - et c'est la première fois - que nous n'at tendrions pas la fin de l'année pour profiter de l'excédent prévu pour l'an 2000. Ainsi, dès le mois de septembre, nous avons décidé de verser 3 milliards sur le fonds, anticipant ainsi l'excédent général de la fin de l'année, dont le reliquat sera aussi versé au fonds.

Nous arrivons à environ 20 milliards de francs.

J'ai entendu, comme vous hier, M. Lebègue, annoncer que la Caisse des dépôts verserait sur ses résultats exceptionnels - vous savez qu'elle a réalisé un certain nombre de résultats et de plus-values sur des opérations de fusionacquisitions - 3 milliards de francs au fonds national de réserve pour les retraites, ainsi qu'une dotation de 3 milliards supplémentaires à un fonds destiné au renouvellement urbain dans le cadre de la politique de la ville.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

C'est une très bonne décision !

M. François Goulard.

C'est un don gratuit !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

La ministre chargée de la ville ne peut que s'en réjouir, comme la ministre chargée des retraites.

M. François Goulard.

Ce n'est pas un prélèvement obligatoire !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je réponds à la question que vous m'avez posée. J'ai appris cette nouvelle hier, et j'en informe le Parlement.

Donc, alors que j'avais prévu, en début de discussion, que nous serions à 15 ou 20 milliards, nous atteindrons sans doute 20 ou 22 milliards à la fin de l'année.

J'en viens maintenant au problème des veuves qui a été soulevé par Mme Clergeau, M. Préel et le président de la commission.

Notre pays compte 3 millions de veuves et 1 million de veufs. Comme le président de la commission l'a rappelé, les montants du minimum de réversion ont été fortement revalorisés en 1999, avec une progression de 2 % pour une inflation de 0,5 %. En l'an 2000, nous souhaitons une revalorisation relativement importante. Je vais y revenir dans quelques instants, en parlant du minimum vieillesse.

Nous avons de plus réformé, l'année dernière, l'allocation veuvage pour supprimer la dégressivité de cette allocation destinée à aider les veufs et les veuves de moins de cinquante-cinq ans à s'insérer ou à se réinsérer dans la vie professionnelle après le décès de leur conjoint.

J'aborderai maintenant le problème des pluripensionnés, qu'a soulevé M. Préel, et qui est soulevé, également, Mme Clergeau l'a indiqué, par la FAVEC. Une veuve perçoit une pension différente pour le même salaire antérieur selon que son mari avait un ou deux régimes d'adhésion. C'est effectivement injuste. Nous travaillons actuellement en étroite collaboration avec la FAVEC pour élaborer des règles plus justes et plus équitables. J'espère que nous pourrons très rapidement tirer les conséquences de ce travail que nous menons en commun.

J'en viens maintenant à la CNRACL, monsieur Préel.

Le Gouvernement a pris une décision il y a quinze jours la concernant. Je comprends donc tout à fait que vous ne soyez pas au courant car cela ne fait pas partie des informations que la presse reprend avec grand fracas.

Les comptes de la CNRACL faisaient apparaître un déficit de 1,7 milliard en 1999 et de 3,7 milliards en l'an 2000. Il y avait un certain nombre de réserves, mais elles n'étaient pas suffisantes. Nous n'avons pas souhaité

« pousser devant nous » un déficit. Nous avons décidé de prendre dès maintenant des mesures. L'effort sera partagé entre une hausse des cotisations des employeurs - 0,5 % au 1er janvier 2000 et 2001 - et par un effort de l'Etat consistant en une baisse de quatre points de la surcompensation. Cela permettra d'améliorer les comptes de la CNRACL de 6 milliards de francs sur deux ans.

Ainsi, à court terme, l'équilibre du régime est assuré.

Avant les décisions structurelles que nous serons amenés à prendre comme pour les autres régimes, il était important de ne pas « pousser devant nous », comme je l'ai dit, un déficit conjoncturel. Donc, le Gouvernement a pris les mesures qui s'imposaient à court terme en attendant les décisions plus générales.

J'en viens maintenant à la revalorisation des retraitres et du minimum vieillesse, comme du minimum de réversion pour les veufs et veuves.

Nous avons, sur deux ans, fait progresser le pouvoir d'achat des retraites de base du régime général de 1 %. Pour certains, cela peut paraître peu important - j'ai entendu ce que m'a dit à ce sujet Mme Jacquaint -, il n'en reste pas moins qu'il y a quand même évolution du pouvoir d'achat.

Cela dit, j'ai bien entendu la demande qu'elle a formulée, comme plusieurs membres du groupe socialiste, et qui a été reprise par le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il est vrai que nous avons engagé, depuis deux ans, une revalorisation du minimum vieillesse en prévoyant que celle-ci atteigne 2 %, ce qui a donné lieu à un gain de pouvoir d'achat de 1,5 %. Le Gouvernement avait provisionné une augmentation liée aux prix, c'est-à-dire la même que pour les retraites : 0,2 %. Mais, pour répondre à la demande qui lui a été faite, il est tout à fait prêt à décider une re valorisation de 1 % du minimum vieillesse au 1er janvier.

M. Pascal Terrasse.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ce qui signifie que les pensions de réversion seront revalorisées de la même manière de 1 %.

M. Pascal Terrasse.

Nous l'attendions !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Cela se traduira par une hausse du pouvoir d'achat de 0,8 %. Sur deux ans, le pouvoir d'achat des retraités les plus modestes aura ainsi progressé de 2,3 %.

M. Pascal Terrasse.

Voilà une bonne nouvelle !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il faudra donc, puisque ce n'était pas prévu, que nous abondions les recettes du FSV de 250 millions lors de l'examen de l'article 6.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteur.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Telles sont, mesdames et messieurs les députés, les réponses que je souhaitais vous faire. Vous voyez que le Gouvernement engage la réforme des retraites et n'oublie pas les plus modestes : je veux parler du minimum vieillesse et des pensions des veufs et des veuves. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Merci, madame.

M. le président.

Je suis saisi de cinq amendements identiques nos 588, 241, 337, 474 et 612.

L'amendement no 588 est présenté par MM. Debré, Douste-Blazy, Rossi et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

p our la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale ; l'amendement no 241 est présenté par M. Mariani ; l'amendement no 337 est présenté par M. Accoyer ; l'amendement no 474 est présenté par MM. Bur, Blessig, Préel et Foucher ; l'amendement no 612 est présenté par MM. Goulard, Mattei, Dord, Nicolin et Proriol.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 10. »

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l'amendement no 588.

M. Bernard Accoyer.

Madame la ministre, la question des retraites fait partie des problèmes que nous devons examiner ensemble et que nous aurions dû examiner depuis longtemps déjà.

M. Pascal Terrasse.

La faute à qui ?

M. Bernard Accoyer.

Je vous félicite, madame la ministre, pour le calme, la sérénité, l'audace dont vous faites preuve pour présenter des mesures dérisoires, insignifiantes sur des questions aussi graves.

M. Pascal Terrasse.

Et vous qu'est-ce que vous avez fait ?

M. Claude Evin, rapporteur.

Il ne mérite même pas qu'on lui réponde !

M. Bernard Accoyer.

Le Gouvernement prouve en ce d omaine sans défaillance et fait montre d'une inconscience, ou d'un machiavélisme politique, inqualifiable, parce que le problème des retraites est au coeur des difficultés que l'on va rencontrer dans les années à venir.

Vous avez essayé de désamorcer une à une, parce que vous avez de la méthode, les mèches qui brûlent et qui se rapprochent inexorablement des bombes qui sont nombreuses.

D'abord, vous avez présenté le fonds de réserve des retraites par répartition comme l'outil permettant, ce que nous souhaitons tous dans cet hémicycle, de sauver le système de la retraite par répartition. C'est faux. Vous l'avez créé en 1998 et, un an après, il n'y a toujours rien et, contrairement à ce que vous avez affirmé avec beaucoup d'aplomb,madame la ministre, en 2005, c'est 60 milliards par an qu'il faudra et, en 2012, 300 milliards par an.

Il est faux également de dire qu'il suffira de mettre 300 milliards dans le fonds de réserve des retraites par répartition d'ici à 2010. Il faudrait, en admettant que cet argent rapporte un intérêt de 5 %, qu'il y ait 6 000 milliards en 2010 et qu'il y en ait déjà 1 200 en 2005. Nous sommes extrêmement loin du compte que vous avez fait.

Quand vous essayez d'éteindre le feu de cette manière, personne ne veut vous suivre.

Si les trois groupes de l'opposition demandent la suppression de l'article 10, ce n'est bien évidemment pas pour supprimer le fonds de réserve de la retraite par répartition. C'est simplement pour empêcher le Gouvernement d'utiliser un alibi, une justification mensongère p our masquer sa passivité concernant l'avenir des retraites.

Vous nous dites qu'il y aura une vingtaine de milliards à la fin de l'année prochaine, madame la ministre. Peutêtre ; encore faut-il prendre en compte le détournement d'une partie du produit de la CSG sur l'épargne, dont nous parlerons tout à l'heure. Mais en admettant même qu'il y ait des excédents, ce que nous souhaitons, que seront ces 20 milliards au regard des besoins que j'ai rappelés tout à l'heure et de l'ampleur de la dette sociale de la CADES, ces 370 milliards que les Français remboursent péniblement par le biais du RDS ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Par qui a été créée la CADES ?

M. Bernard Accoyer.

Je vois que M. Cahuzac n'est pas bien au courant...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

La CADES a été créée en 1995, après deux ans de gestion Balladur !

M. Bernard Accoyer.

... mais je vais lui rafraîchir la mémoire. En 1993, la dette sociale laissée par la gauche atteignait 170 milliards. Pour la seule branche maladie, le déficit s'élevait à 70 milliards de francs.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

La CADES a été créée en 1995 ! Merci Juppé !

M. Bernard Accoyer.

Il faut remonter un peu plus haut. Je vous donne les chiffres de 1993. Mais l'heure tourne, monsieur le président...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Mais non, nous avons tous le temps !

M. Bernard Accoyer.

Aussi me contenterai-je d'énumérer une série de décisions - ou d'absences de décisions.

1989 : M. Teulade s'inquiète de l'avenir des retraites.

Suite donnée, malgré un diagnostic alarmant : rien ! 1991, Michel Rocard, Premier ministre socialiste, s'inquiète à son tour de l'avenir des retraites. Il commande le Livre blanc. Suite donnée, malgré un diagnostic tout aussi alarmant : rien ! 1993 : M. Balladur, Premier ministre, créé la réforme des cotisations et des retraites des salariés du privé...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Et vole les retraités !

M. Bernard Accoyer.

Vous répétez toujours que vous avez réduit les déficits, madame la ministre. Mais sans cette réforme, le déficit de la branche vieillesse s'accentuait chaque année de 15 milliards en moyenne.

1995 : M. Juppé veut évaluer ce qu'il faut faire pour les régimes de la fonction publique...

M. Jean-Claude Lefort.

Monsieur le président, ce n'est pas une défense d'amendement !

M. Bernard Accoyer.

... et aussitôt vous défilez dans la rue avec toute la gauche : non, surtout pas ça !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

C'est pathétique !

M. Bernard Accoyer.

On pourrait ajouter : surtout pas d'équité.

1997 : la droite créé les fonds de pension...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Quel aveu !

M. Bernard Accoyer.

... que vous supprimez en 1998, privant les entreprises françaises de leur autonomie. Du coup, les entreprises françaises et leurs salariés se retrouvent chaque jour à travailler pour les retraités hollandais, britanniques, canadiens et américains.

M. le président.

Vous dépassez encore votre temps de parole !

M. Bernard Accoyer.

J'ai presque fini, monsieur le président.

M. Olivier de Chazeaux.

Il parle pour cinq, monsieur le président !

M. Bernard Accoyer.

C'est un amendement commun et important, monsieur le président.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

1998 : vous créez le fonds de réserve de la retraite par répartition, mais sans y mettre un franc, et pas davantage en 1999. Pour 2000, il n'y aura rien de ferme : Mme la ministre vient de n'évoquer que des hypothèses...

Tout cela est de la plus haute gravité. Nous ne pouvons vous laisser manipuler ainsi des justificatifs mensongers en prétendant que ce fonds résoudrait tous les problèmes. Pour notre part, nous nous intéressons à la retraite des Français, aux revenus des retraités français et nous voulons sauver notre système de répartition, malgré le défi que nous pose l'évolution démographique. Voilà pourquoi l'opposition unanime propose la suppression de l'article 10.

M. le président.

Je crois avoir compris que M. Accoyer s'exprimait sur l'ensemble des amendements de suppression de l'opposition...

M. François Goulard.

Non ! Non !

M. le président.

Dans ces conditions, la parole est à M. Yves Bur, pour soutenir l'amendement no 474.

M. Yves Bur.

Les mesurettes que vous proposez pour abonder ce fonds ne nous convainquent absolument pas.

Elles ne sont pas du tout à la mesure de l'enjeu. Et les 5,6 milliards de taxe sur les alcools prélevés au profit du FSV seront autant de moins pour le fonds de réserve que vous dites vouloir alimenter de manière régulière.

Plus généralement, l'abondement du fonds de réserve pour les retraites par les seules ressources de la sécurité sociale ne suffira pas, tant l'enjeu, sur le plan financier, est énorme : 66 milliards par an dès 2006. L'Etat est le seul capable, en taillant dans la dépense publique, de réduire ces déficits et de dégager les moyens nécessaires p our faire face au vieillissement de la population.

D'autres pays l'ont compris. Voyez le gouvernement dirigé par M. Schroeder : il a taillé à hauteur de 100 milliards de francs dans les dépenses publiques afin de relever le plus rapidement possible le défi des retraites en Allemagne, comparable au nôtre, peut-être plus lourd encore.

M. Jean-Claude Lefort.

En France, c'est la gauche qui est au pouvoir !

M. Yves Bur.

En dehors du paiement des pensions de retraite, il reste aussi les dépenses directement liées au vieillissement de la population. Il faudra bien financer le coût de la dépendance qui, pour le moment, n'est qu'imparfaitement pris en charge par la PSD. Nous avions lancé le premier étage de sa réforme. Plutôt que de critiquer ce premier effort, il est temps de nous indiquer la manière dont vous comptez financer, dans les prochaines années, l'accompagnement dont ont besoin les personnes âgées.

Enfin, si des efforts ont été demandés aux collectivités locales, concuremment à ceux de l'Etat, afin de remédier au déficit de la CRNACL pour les deux ou trois prochaines années, la compensation a corrélativement été réduite. Au profit de qui ? Ou plutôt, aux dépens de qui ? Encore une fois de l'AGIRC et de l'ARRCO, c'està-dire des salariés du privé qui vont peut-être devoir prendre à leur charge ce que n'auront pas fait les salariés du secteur public, les employeurs du secteur public et finalement les contribuables.

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet, pour défendre l'amendement no 241.

M. Jean Bardet.

Monsieur le président, je vais tâcher d'être court.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mais sur quoi parlent-ils ?

M. Jean Bardet.

Madame la ministre, je tiens à vous remercier de l'effort pédagogique que vous déployez depuis le début de la discussion de cette loi pour nous en expliquer les points que nous n'avons pas bien compris.

Or, bien que j'aie été pratiquement toujours présent depuis le début, j'avoue ne pas avoir encore tout saisi...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité et

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ce n'est pas étonnant !

M. Alfred Recours.

Ça viendra !

M. Jean Bardet.

Mais vous me réexpliquerez certainement tout cela. Je n'ai aucune honte, lorsque je ne comprends pas quelque chose, à demander des explications et d'autres compléments d'information si je continue à ne pas saisir. Vous le faites toujours avec une telle bonne volonté que je n'hésite pas à vous interroger.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous avez raison, c'est un plaisir pour moi ! Cela ne fera que la treizième fois !

M. Jean Bardet.

Tout le monde se réfère au rapport Charpin et le juge excellent. J'ai cru vous entendre dire - et c'est pourquoi je crois avoir mal compris - que tout est prévu pour le moment où les retraites se trouveront en difficulté, vers 2005 ou 2010. Or M. Jospin, sur la base du même rapport Charpin, annonce qu'il va sans tarder lancer les études et prendre les décisions qui s'imposent à compter du 1er janvier 2000. Ont-elles été prises ? Seront-elles prises ? Peut-être allez-vous m'expliquer...

L'article 10 prévoit d'abonder le fonds de réserve des retraites grâce aux excédents de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés. C'est le troisième abondement de ce fonds de vieillesse. A ce propos, je repose la question de notre collègue Bur : que devient le fonds de solidarité, puisque le produit de la taxe sur les alcools a été en partie reversé sur le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale ? Comment va-t-il pouvoir abonder le fonds de réserve ? A cela, vous répondez par un prélèvement opéré sur les organismes sociaux, au profit du fonds de solidarité-vieillesse... C'est bien ce que je dénonçais : c'est le serpent qui se mord la queue ! Vous avez cru donner satisfaction à vos propres opposants et aux diverses représentations syndicales paritaires dans l'affaire du fonds prévu à l'article 2 ; en fait, vous n'avez créé aucun abondement supplémentaire.

M. François Goulard.

Ça, c'est bien vrai !

M. Bernard Accoyer.

Très bien !

M. le président.

Je vous remercie de votre brièveté, cher collègue.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Madame la ministre, Bernard Accoyer a eu vraiment raison de vous rappeller que, sans la politique courageuse suivie par les gouvernements précédents, vous auriez dès maintenant énormément de mal à équilibrer le régime général des retraites. Nous constaterions d'ores et déjà que votre politique d'immobilisme se heurte aux réalités et implique des déficits massifs. Cela sera d'autant plus vrai à partir de 2006, et plus encore chaque année qui suivra.

C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons rester silencieux face à l'absence d'action d'envergure de ce gouvernement sur le régime général, sur les régimes spéciaux.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Ils vous est facile d'ironiser sur la tentative, malheureusement non réussie, du gouvernement précédent.

Au moins ce gouvernement-là a-t-il eu le courage d'aborder de front un problème que vous ne pourrez esquiver jusqu'à la fin des temps ! Sur la capitalisation enfin, comment osez-vous soutenir que la réflexion est encore nécessaire ? Chacun sait que le complément apporté par des régimes de retraite par capitalisation sera indispensable, et que d'ores et déjà le retard pris pénalisera toutes les générations qui prendront leur retraite à partir de 2005, puisque aussi bien un régime par capitalisation demande au moins une dizaine d'années pour pouvoir produire ses fruits.

Du fait de l'article 40, nous n'avons pas d'autre possibilité que cet amendement de suppression, alors même que nous souhaiterions abonder davantage le fonds de réserve, seule réponse que vous apportez à l'inéluctable crise des retraites. Nous ne pouvons que souligner une fois de plus l'inaction coupable du Gouvernement face à cette question essentielle.

M. Bernard Accoyer.

Bravo !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Monsieur le président, mesdames les ministres, l'an passé, notre commission des affaires sociales et notre assemblée ont voté favorablement pour la création du fonds de réserve. Je l'avais moi-même approuvée, à titre personnel, estimant ce fonds indispensable pour le lissage de la bosse démographique qui va apparaître en 2006, et tirant les conséquences du texte que j'avais voté en 1993.

Cela dit, j'avais bien relevé le caractère symbolique de l'abondement et souligné que le fonds de réserve n'aurait d'utilité que pour autant qu'il disposerait de sommes conséquentes. Plusieurs orateurs, M. Préel, M. Goulard, M. Accoyer, M. Bur, y ont insisté en rappelant les chiffres du rapport Charpin. J'ai indiqué mardi à cette tribune, toujours à titre personnel, qu'il n'y avait pas à être pour ou contre le rapport Charpin. Ce n'est qu'une base de travail, une bibliothèque de toutes les études menées depuis plusieurs années, dont il nous appartient maintenant de tirer la substantifique moelle.

M. François Goulard a employé tout à l'heure une formule qui a beaucoup plu au rapporteur que je suis : les semailles et la récolte. Semailles effectivement en 1993, puisque le problème des retraites du régime général a été repoussé à 2006. Reste la récolte de 2006, qui suppose que le fonds de réserve soit abondé à la hauteur des besoins : 66 milliards de francs dès 2006, et l'on sait que c ette somme devra augmenter progressivement jusqu'en 2033, voire 2040.

Souvenons-nous qu'une bonne mesure produit toujours de bons effets. En 1993, période des semailles, il n'y a eu aucun retraité dans la rue. Nous pouvons faire aussi bien pour 2006, période de la récolte, pour peu que nous mettions suffisamment d'argent dans le fonds de réserve.

J'ajoute, madame le ministre, que le fonds de réserve à lui seul ne suffira pas. Je ne parle pas des fonds de pension - ce simple mot à la consonance capitalistique provoque immédiatement l'émeute -, mais de l'épargne retraite qui, conjuguée avec le fonds de réserve, permettra aux retraités de toucher les retraites promises. Pour cela, il faut que tout le monde, même ceux qui ont peu de revenus, puisse bénéficier de l'épargne retraite.

Sur ces cinq amendements enfin, la commission n'en a examiné que trois et a rendu un avis défavorable.

M. François Goulard.

Excellente intervention !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Même avis.

M. le président.

La parole est à M. Alfred Recours.

M. Alfred Recours, rapporteur.

La CADES a été créée par une ordonnance de janvier 1996.

M. Pascal Terrasse.

Pouvez-vous préciser la date exacte pour M. Accoyer ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Ordonnance no 96-50 du 24 janvier 1996.

M. Pascal Terrasse.

Sous le gouvernement Balladur !

M. Bernard Accoyer.

Dès 1993, il y avait déjà 170 milliards de francs de déficit !

M. Alfred Recours, rapporteur.

La CADES avait reçu pour mission d'apurer, sur une durée de treize années et un mois, la dette cumulée du régime général de la sécurité sociale correspondant au financement des déficits des exercices 1994 et 1995, à hauteur de 120 milliards de f rancs, et au financement du déficit prévisionnel pour 1996, estimé à 17 milliards de francs. Dans ces 137 millions, il n'est nullement question de 1993 ou des années précédentes.

M. Bernard Accoyer.

Cela ne fait pas le total !

M. Alfred Recours, rapporteur.

La mission de la CADES a par la suite été élargie. Les 17 milliards de prévisions au titre des exercices 1996 et 1997 n'ayant pas suffi, il a fallu prévoir 75 milliards supplémentaires, et encore 12 milliards au titre de l'exercice 1998. Soit au total 220 milliards de francs environ dont 12 milliards en effet, ceux de 1998, relèvent de la gestion de l'actuelle majorité.

M. Bernard Accoyer.

On n'arrive pas à 370 milliards !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Les 200 autres milliards relèvent de vos gestions. Il n'y a rien qui concerne les années antérieures à 1994 dans les chiffres que je vous ai indiqués.

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas vrai !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Si, c'est vrai !

M. Alfred Recours, rapporteur pour avis.

Voilà la stricte vérité. Il y a toujours un moment où il faut que les choses soient dites et que des chiffres soient donnés.

M. Bernard Accoyer.

C'est une dette cumulée !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur.

Faux ! Trop commode !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je voudrais aussi donner quelques éléments d'appréciation sur ces amendements.

Pour ma part, je m'attache toujours à voir ce qui est possible à un moment donné et ce qui ne l'est pas. J'aurais tout à fait compris que nos collègues, conformément à la logique de leur discours, nous proposent des amendements et des sous-amendements tendant à porter ces 20 milliards à 40, voire 60 milliards...

M. François Goulard.

Cela nous est interdit ! Lisez l'article 40 !

M. Bernard Accoyer.

C'est irrecevable, voyons !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Il est toujours possible de les gager. Du reste, vous ne vous êtes pas privés hier de proposer des suppressions de recettes, sur la TGAP, par exemple.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

M. Jean Bardet.

Vous nous reprochiez nos gages sur les tabacs ou les alcools !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Cela aurait été de bonne logique. Eh bien non ! Vous trouvez que 20 milliards, ce n'est pas assez, alors vous les supprimez...

Emportée par un véritable stakhanovisme de la suppression d'article, la droite nous offre le spectacle de gens qui se proposent d'en demander moins au motif qu'ils en veulent plus !

M. Jean Bardet.

Vous baissez ! Vous étiez meilleur hier, et encore meilleur avant-hier ! Les Français comprendront sûrement. Moi, j'y ai quelques difficultés. Il est vrai que le débat dure déjà depuis quelques jours...

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur Recours.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Le rapport Charpin, très intéressant rapport, se fonde sur un certain nombre de variables à prendre en considération. Je n'en retiendrai que trois pour mémoire : l'emploi, la croissance et la population active.

Lionel Jospin a très courageusement, il y a un mois et demi, évoqué la perspective d'un retour au plein emploi dans ce pays. Les indications qui nous sont données aujourd'hui pour le mois de septembre viennent confirmer qu'elle est crédible.

M. Jean Bardet.

Ce n'est pas grâce aux 35 heures !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Deuxièmement, il faut tenir compte des prévisions de croissance. Un point de croissance représente environ 80 milliards de francs.

Pourquoi être alarmiste et laisser penser que nous serions incapables, sur une vingtaine d'années, de tirer profit de la croissance pour régler en partie ce problème des retraites ? Troisième élément - j'en avais d'ailleurs fait mention lors de l'audition publique de M. Charpin par la commission -, la population active.

Que pensez-vous, par exemple, de l'intéressante proposition de M. Juppé que j'avais d'ailleurs déjà faite à M. Charpin en commission, de tenir compte aussi de la variable de l'immigration ? Voilà une contribution positive que M. Juppé a apportée au débat sur les retraites. Je suis étonné que vous ne soyez pas un certain nombre ici à la relayer.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Juppé évolue sur ce sujet ! Qu'en pensez-vous, chers collègues de l'opposition ? Que pensez-vous de la proposition de M. Juppé ?

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

Mme la ministre vient de faire une annonce très importante et qui répond parfaitement aux requêtes de nombre d'entre vous, notamment de nos collègues communistes, qui demandaient une revalorisation sensible du minimum vieillesse. J'en suis personnellement très satisfait.

Je voudrais rappeler que le FSV n'est pas abondé seulement par des taxes sur l'alcool et d'autres boissons, mais aussi par d'autres recettes, cela a été dit tout à l'heure,...

M. Bernard Accoyer et M. François Goulard.

On a lu le rapport !

M. Pascal Terrasse.

... notamment une fraction du produit de la CSG, des prestations complémentaires de prévoyance, impôt que vous avez créé, il faut le rappeler, et les intérêts des placements que le FSV est habilité à pratiquer.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. le président.

Je mets aux voix, par un seul vote, les amendements nos 588, 241, 337, 474 et 612.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

MM. Accoyer, Demange, Jacob, Robert, Lamy, Muselier et Masdeu-Arus ont présenté un amendement, no 339, ainsi rédigé :

« Supprimer l'avant-dernier alinéa (1o ) du I de l'article 10. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement, plus ciblé, tend à supprimer une mesure qui, de toute manière, a de fortes chances - et nous allons le démontrer - d'être tout à fait inefficace. Cet alinéa propose, en effet, que ce soit les hypothétiques excédents de la branche vieillesse qui viennent abonder la C3R, la caisse de réserve des retraites par répartition.

Qui oserait parier que la CNAV sera durablement excédentaire ? Je veux vous livrer quelques chiffres issus du rapport Charpin...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Vous l'avez lu !

M. Bernard Accoyer.

Bien sûr, nous lisons tous les rapports ! Le vieillissement de la population engendrera, tout le monde le sait, des difficultés majeures pour la CNAV.

C'est d'ailleurs ce qu'explique et démontre clairement le rapport Charpin.

A partir de 2006, la population active va baisser de façon rapide. Dès 2015, les plus de soixante ans seront plus nombreux que les moins de vingt ans : un Français sur trois. Cela est dû à la poussée démographique de la fin de la guerre.

Le rapport des retraités au nombre de cotisants sera quasiment multiplié par deux entre 1995 et 2040, passant de quatre pour dix à sept pour dix. C'est dire que nous ne serons pas loin d'un actif pour un retraité.

Les dépenses de retraite tripleront - je rappelle que les dépenses de vieillesse sont plus importantes que les dépenses de maladie, c'est le premier poste de la sécurité sociale - dans les quarante ans qui viennent, alors que le PIB, comme la masse salariale sur laquelle sont assises les cotisations, ne fera que doubler.

Il est donc tout à fait illusoire de penser qu'il pourrait y avoir un excédent durable et significatif de la branche vieillesse, même si le principe de l'affecter à la C3R est relativement logique. Il s'agit encore d'un moyen de détourner l'attention des Français qui sont inquiets pour l'avenir de leurs retraites, tous les sondages le confirment, et pour lesquels il faudrait faire tout autre chose.

Nous ne voulons pas nous contenter de critiquer des mesures, même si elles sont, à l'évidence, inefficaces. Ce qu'il faudrait faire, c'est d'abord le bilan des différents régimes et les équilibrer entre eux, et non pas, comme vous l'aviez fait lorsqu'il a été question de les évaluer, descendre dans la rue en gesticulant et criant qu'il n'y a pas de danger, alors que le feu couve !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ça l'a marqué !

M. Bernard Accoyer.

Deuxièmement, il conviendrait, à côté de ce fonds de réserve destiné à la sauvegarde de la retraite par répartition, de créer des outils de retraite


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

complémentaire par capitalisation qui ne déshabilleront pas l'outil fondamental que nous souhaitons privilégier, la retraite par répartition.

Ces outils existent déjà. Ce sont la Préfon, le CREF et le MRIFEN, systèmes qui existent depuis 1967. Ils ont été créés par les syndicats représentatifs de salariés, à l'exception de la CGT. Ils offrent des possibilités de racheter des points et des avantages fiscaux.

Ils ont été créés à une époque où il était juste de vouloir améliorer la retraite des agents des collectivités p ubliques, auxquels ces caisses complémentaires de retraite par capitalisation sont exclusivement réservées. Ce privilège se justifiait par le fait que régnait dans tous les domaines la sécurité de l'emploi et que les salaires dans la fonction publique étaient inférieurs à ceux du secteur privé à qualification égale. Aujourd'hui, tout a changé.

Désormais, il y a dans le secteur privé l'incertitude de l'emploi, des salaires inférieurs à qualification égale par rapport aux fonctions publiques. Dans ces conditions, sans rien enlever à ce dispositif vieux de plus de trente ans, sans rien retirer aux salariés et anciens salariés de la fonction publique, nous proposons qu'il soit ouvert à tous les salariés. Depuis trois ans que l'opposition et moimême proposons ce geste d'équité, nous serions heureux que le Gouvernement se prononce officiellement. Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Oui, monsieur Accoyer, votre amendement est plus ciblé que les cinq précédents.

Mais, comme il propose de supprimer le versement de l'excédent annuel de la CNAVTS, il aurait pour effet de diminuer l'abondement du fonds de réserve. Aussi la commission a émis un avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

L'avis du Gouvernement n'a pas changé depuis tout à l'heure : rejet.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 339.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Préel, Baguet, Coussain, Birraux, Rochebloine, Ferry, Gengenwin, Foucher et Morin ont présenté un amendement, no 298, ainsi rédigé :

« Dans l'avant-dernier alinéa (1o ) du I de l'article 10, après la référence : "L. 715-1", insérer les mots : "et le fonds veuvage". »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Je crois avoir entendu que les pensions des veuves allaient être revalorisées et qu'on discutait en ce moment, en espérant aboutir, du délicat problème des polypensionnés. Je vous en donne volontiers acte, madame la secrétaire d'Etat.

Quant à mon amendement, il vise à exempter le fonds veuvage des reversements au fonds de réserve. Créé pour assurer une allocation aux veuves, financé par une cotisation spécifique de 0,10 % payée par chaque salarié, ce fonds veuvage, tout le monde le sait est très largement excédentaire puisque à peine 25 % des cotisations sont en fait reversés aux veuves.

Même s'il est « virtuel » aujourd'hui, il serait logique qu'il serve effectivement à améliorer l'assurance veuvage, au lieu de se perdre dans le budget de la CNAVTS. Par conséquent, il nous paraîtrait anormal que ses excédents alimentent le fonds de réserve.

Nous proposons qu'ils servent réellement à améliorer le sort des veufs et des veuves.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Je ne peux que saluer, comme tout le monde dans cette assemblée, la constance de notre ami Jean-Luc Préel qui, depuis des années, en tant que président du groupe d'études sur les problèmes des conjoints survivants, se bat pour défendre les droits des veufs et des veuves.

M. François Goulard.

C'est vrai !

M. Denis Jacquat.

Je le disais à la tribune mardi dernier, les problèmes sont énormes. Des discussions sont en cours avec la FAVEC, Fédération des associations des veuves chefs de famille, Mme Aubry en parlait tout à l'heure, tant sur l'assurance veuvage que sur les taux de réversion.

C'est dire que l'amendement de M. Préel évoque un problème réel sur lequel l'Assemblée doit se pencher.

Mais comme il aurait pour conséquence de réduire l'abondement du fonds de réserve, la commission lui a donné un avis défavorable comme au précédent de M. Accoyer.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

A constance, constance et demie ! Vous souhaitez que le fonds national d'assurance veuvage soit exclusivement réservé aux veuves et veufs de moins de cinquantecinq ans. Or le risque veuvage doit être apprécié dans sa globalité ; il est donc normal que le fonds bénéficie à toutes les veuves et tous les veufs, quel que soit leur âge.

Avant cinquante-cinq ans, ils peuvent bénéficier de l'allocation veuvage qui peut les aider à s'insérer ou à se réinsérer dans la vie professionnelle. Après cinquante-cinq ans, ils peuvent percevoir une pension de réversion calculée sur la base de la pension du conjoint.

L'enjeu du fonds de réserve est d'amortir les effets sur les comptes des régimes de retraite de la forte augmentation des effectifs des classes d'âge à partir de la génération née en 1945.

Je propose donc le rejet de l'amendement no 298.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 298.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 199, ainsi libellé :

« Compléter le II de l'article 10 par les deux alinéas suivants :

« 3o Il est inséré un 3o bis ainsi rédigé :

« 3o bis Une fraction égale à 49 % du produit des prélèvements visés aux articles L.

245-14 à L.

245-16 du présent code. »

Sur cet amendement, je suis saisi de deux sousamendements, nos 813 et 812, présentés par M. Accoyer.

Le sous-amendement no 813 est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'amendement no 199, après les mots : "fraction égale", insérer les mots : "au maximum". »

Le sous-amendement no 812 est ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa de l'amendement no 199 par les mots : ", au cas où les branches famille et vieillesse seraient excédentaires". »

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat, pour soutenir l'amendement no 199.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

L'amendement no 199, ainsi que le no 198, c omplète les amendements du Gouvernement à l'article 2.

Ils utilisent les ressources dégagées par la suppression de la contribution des organismes de sécurité sociale au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales pour alimenter le fonds de réserve pour les retraites, à hauteur de 5,5 milliards de francs. A cet effet, ils procèdent au transfert d'une fraction du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine et de placement de la CNAVTS, de la CNAF et de la CNAMTS vers le fonds de réserve pour les retraites.

L'amendement no 198 prévoit la nouvelle affectation du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine et de placement. Ce prélèvement est, en l'état des textes, réparti comme suit : 50 % au profit de la CNAVTS ; 22 % au profit de la CNAF ; 28 % au profit de la CNAMTS.

Il sera désormais réparti comme suit : 49 % au fonds de réserve ; 30 % à la CNAVTS ; 13 % à la CNAF ; 8 % à la CNAMTS.

Quant à l'amendement no 199, il tire les conséquences de ce transfert de recettes au fonds de réserve.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir les sous-amendements nos 813 et 812.

M. Bernard Accoyer.

Nous sommes au coeur du jeu de tuyauteries que le Gouvernement, dans sa perversité, a mis en place pour masquer le détournement des finances sociales vers le financement des 35 heures. Nous avons déjà vu ce qu'il avait prélevé : 5,6 milliards de francs sur le produit de la taxe sur les alcools. Jusqu'à cette manoeuvre, ces sommes étaient, tout le monde le sait, réservées au fonds solidarité vieillesse. C'est sa première manipulation coupable.

Une deuxième manipulation coupable se trouve dans l'amendement no 199. C'est encore une des manoeuvres auxquelles le Gouvernement s'est livré, dans la plus totale improvisation et la plus grande précipitation, au cours de la journée de lundi, sous la pression des partenaires sociaux. Il s'agit en l'occurrence du détournement du produit de la CSG au profit des régimes sociaux. Voilà la vérité, il faut que nos collègues de gauche le sachent.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Eh oui ! Il est bien compliqué de suivre tous ces tuyaux !

M. Alfred Recours, rapporteur.

C'est tellement difficile que M. Accoyer s'y perd !

M. Bernard Accoyer.

C'est une architecture fallacieuse que le Gouvernement a bâtie.

(Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Jusqu'à présent, le produit de la CSG sur l'épargne était affecté d'abord à la CNAV et à la CNAF. Puis une partie a été affectée, en raison de la CMU, au régime général de l'assurance maladie.

Aujourd'hui, vous détournez la moitié du produit de la CSG sur l'épargne en direction du fonds de réserve de la retraite par répartition, c'est-à-dire que vous privez la branche famille et la branche vieillesse de recettes pérennes en divisant par trois ou quatre leurs ressources provenant de l'épargne.

Le parti communiste a montré combien il tenait à ce qu'une partie de la taxation de l'épargne vienne conforter les régimes sociaux et les différentes branches.

Sur de telles questions, il ne devrait pas être permis de conduire ainsi, sournoisement, des manoeuvres de déshabillage des finances sociales.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Avant c'était le cirque, maintenant c'est le Crazy Horse ! (Sourires.)

M. Bernard Accoyer.

Ces deux sous-amendements ont pour but de démontrer la « crypto-perversité » du Gouvernement, car la majorité, quant à elle, n'a pas compris le montage. De toute manière, dès lors que le Gouvernement était persuadé qu'il fallait faire financer les 35 heures par les finances sociales, il était obligé de se cacher et d'agir en catimini. La vérité, c'est qu'il n'a rien changé : ce sont toujours les finances sociales qui paient les 35 heures, ces sous-amendements le démontrent.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 199 et les sous-amendements nos 812 et 813 de M. Accoyer.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

La commission a accepté l'amendement no 199 et n'a pas examiné les deux sousamendements de M. Accoyer.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable.

M. Bernard Accoyer.

Pourquoi ? Nous voulons des explications sur le déshabillage des régimes obligatoires.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ne confondez pas le Parlement avec le Crazy Horse Saloon !

M. Bernard Accoyer.

Quand on touche les points qui font mal, on voit comment la majorité réagit !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, contre l'amendement.

M. François Goulard.

Monsieur le président, je vous remercie d'appliquer strictement le règlement et je sais que c'est toujours le cas du président de notre Assemblée.

Je me réjouis que l'opposition puisse ainsi s'exprimer.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Le sujet n'est pas mince. Nous avons suivi les uns et les autres le feuilleton de la position gouvernementale sur les prélèvements sur l'UNEDIC et sur les organismes de sécurité sociale. Lundi, il y a eu un rebondissement, le Gouvernement ayant annoncé, et tout le monde l'a cru, de bonne foi, qu'il renonçait à ces prélèvements. Or, comme par miracle, le financement de l'article 2 est toujours assuré. Pourrait-on prétendre qu'il ne l'est plus ? Ce serait une infraction aux règles d'équilibre qui doivent présider à l'élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale. En même temps, nous n'avons pas vu apparaître la moindre ressource nouvelle, la moindre imposition nouvelle, le moindre prélèvement sur quelque organisme que ce soit.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ils nous reprochent maintenant de ne pas faire de prélèvement !

M. François Goulard.

Alors, par miracle, 5,5 milliards sont tombés du ciel pour faciliter la tâche du Gouvernement ! Peut-être nous prend-on pour de parfaits demeurés, ce qui est fort possible dans certains de vos rangs. Toujours est-il que personne nous fera croire que ces 5,5 milliards sont tombés du ciel. Ils sont simplement prélevés par une voie détournée sur les régimes de sécurité sociale par un


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

tour de passe-passe qui n'abuse personne. Vous gonflez un excédent au-delà de toute prévision antérieure et vous effectuez un prélèvement au profit de votre fonds de prétendu allégement des cotisations sociales des entreprises à la suite de la loi sur les 35 heures. C'est ainsi que vous déguisez la réalité, et ce n'est pas à la gloire du Gouvernement.

Le prélèvement sur la sécurité sociale est bien opéré.

Vous n'avez pas pu le faire sur l'UNEDIC parce que le Conseil d'Etat vous l'a interdit en répondant que c'était anticonstitutionnel. Mme Aubry, si elle était présente, affirmerait certainement que ce que je dis est parfaitement inexact. Elle a prétendu dans cette enceinte que le Conseil d'Etat n'avait soulevé aucune réserve d'inconstitutionnalité sur son projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous avons eu la preuve qu'elle mentait effrontément !

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteur.

Oh !

M. François Goulard.

Elle serait capable de mentir une seconde fois. Elle ne le fait pas parce qu'elle n'est pas là mais je maintiens qu'elle prélève bel et bien 5,5 milliards sur la sécurité sociale ! (Applaudissement sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Espérons que cette sortie aura fait du bien à M. Goulard !

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet.

M. Jean Bardet.

Mme la ministre de la solidarité, toujours prompte à donner des leçons aux personnes qui, d'après elle, ne sont pas en commission, en séance ou je ne sais où, n'est malheureusement pas là. Je ne lui en tiens pas rigueur car elle est très sollicitée depuis quelques jours...

M. François Goulard.

Moins que M. le ministre des finances !

M. Jean Bardet.

... et, comme nous, elle doit commencer un petit peu à fatiguer,...

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Vous, certainement !

M. Jean Bardet.

... mais, dans ce cas, il ne faut pas donner trop de leçons.

A une heure du matin, mercredi, j'ai déjà demandé, comme M. Goulard, par quel tour de passe-passe le Gouvernement arriverait à alimenter son fonds. J'ai posé à nouveau la question tout à l'heure lorsque j'ai défendu l'amendement de suppression de l'article 10. Aucune réponse ne nous a été donnée et nous en avons assez.

Nous sommes peut-être des petits garçons ou des petites filles par rapport à la science de Mme la ministre, mais nous aimerions tout de même que, lorsque nous lui posons des questions précises, elle nous réponde de façon précise.

Je vous demande donc une suspension de séance d'une demi-heure, monsieur le président, pour permettre à Mme la ministre de revenir en séance et de répondre à nos questions.

M. Bernard Accoyer.

La suspension durera jusqu'au retour de Mme la ministre !

M. le président.

La suspension est de droit.

Je suggère cependant que nous en terminions avec cet amendement et ces sous-amendements.

Je mets aux voix le sous-amendement no 813.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 812.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 199.

(L'amendement est adopté.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue quelques minutes.

(La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à seize heures cinquante-cinq.)

M. le président.

La séance est reprise.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 198, ainsi libellé :

« Compléter l'article 10 par le paragraphe suivant :

« IV. - Le II de l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Le produit des prélèvements mentionnés au I est ainsi réparti :

« 49 % au fonds mentionné à l'article L. 135-6 du présent code ;

« 8 % à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés ;

« 30 % à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés ;

« 13 % à la Caisse nationale des allocations familiales. »

Sur cet amendement, je suis saisi de cinq sousamendements nos 808, 784, 809, 810 et 811.

Le sous-amendement no 808, présenté par M. Accoyer, est ainsi rédigé :

« Au début du troisième alinéa de l'amendement no 198, substituer au taux : "49 %" le taux : "1 %". »

Le sous-amendement no 784, présenté par MM. Goulard, Mattei, Dord, Nicolin et Propriol, est ainsi rédigé :

« I. - Au début du troisième alinéa de l'amendement no 198, substituer au taux : "49 %", le taux : "30 %".

« II. - Compléter cet amendement par le paragraphe suivant :

« Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

Les sous-amendements nos 809, 810 et 811 sont présentés par M. Accoyer.

Le sous-amendement no 809 est ainsi rédigé :

« Au début du quatrième alinéa de l'amendement no 198, substituer au taux : "8 %" le taux : "33 %". »

Le sous-amendement no 810 est ainsi rédigé :

« Au début de l'avant-dernier alinéa de l'amendement no 198, substituer au taux : "30 %" le taux : "33 %". »

Le sous-amendement no 811 est ainsi rédigé :

« Au début du dernier alinéa de l'amendement no 198, substituer au taux : "13 %" le taux : "33 %". »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

L'amendement no 198 a déjà été défendu par Mme la secrétaire d'Etat.

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir le sous-amendement no 784.

M. François Goulard.

Vous avez noté que j'étais plus modéré dans la réduction que je propose d'opérer que

M. Accoyer, mais ce n'est pas pour vous étonner.

Par ces sous-amendements, nous manifestons notre protestation contre le prélèvement qui est opéré et nous voulons signifier que l'honnêteté aurait consisté à ne pas user d'un procédé aussi détourné pour assurer le financement des 35 heures.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer pour soutenir les sous-amendements nos 808, 809, 810 et 811.

M. Bernard Accoyer.

Il s'agit d'offrir au Gouvernement la possibilité de réduire l'importance du rapt qu'il opère sur les recettes de la CSG.

Monsieur le président, il est assez désagréable que les membres du cabinet du ministre regardent les orateurs en se moquant d'eux. Ça commence à bien faire ! Qu'ils respectent au moins leur devoir de réserve !

M. Pascal Terrasse.

N'attaquez pas les fonctionnaires !

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le président, je vous demande de faire en sorte que nous puissions travailler dans des conditions satisfaisantes.

M. le président.

Il n'y a aucun problème, monsieur Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

S'ils sont incapables de donner des réponses à Mme la secrétaire d'Etat sur les raisons du détournement de l'argent social de la CSG...

M. Pascal Terrasse.

Ils ne font que leur travail !

M. Bernard Accoyer.

... qu'au moins ils fassent preuve de neutralité !

M. Gérard Terrier.

N'attaquez pas les fonctionnaires ! C'est intolérable !

M. Bernard Accoyer.

On a l'habitude que la majorité nous interpelle et nous insulte, mais le cabinet a un devoir de réserve.

M. Gérard Terrier.

M. Accoyer cherche l'incident !

M. le président.

Monsieur Terrier, n'en rajoutez pas.

M. Gérard Terrier.

Mais pour qui se prend-il ?

M. le président.

Monsieur Accoyer, je n'ai pas observé de comportement inhabituel de la part des collaborateurs de Mme la secrétaire d'Etat.

M. Gérard Terrier.

Absolument ! M. Accoyer a un problème !

M. le président.

Je vous en prie ! Continuez, monsieur Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je demande une seule chose, c'est que le Gouvernement assume la responsabilité de ses actes, assume le détournement des finances sociales auquel il se livre...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Oh ! Ça suffit !

M. Bernard Accoyer.

... en prélevant la moitié du produit de la CSG sur l'épargne pour abonder le fonds de financement des retraites par répartition, en en privant la CNAV, la CNAF et la CNAM.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Pour qui se prend-il ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Il ne défend pas ses sous-amendements !

M. Bernard Accoyer.

Je demande donc au Gouvernement de nous expliquer les raisons qui l'ont conduit à agir ainsi.

M. Alfred Recours, rapporteur.

C'est déjà fait !

M. Bernard Accoyer.

Le Gouvernement en est arrivé là parce qu'il a dû céder devant la pression des partenaires sociaux. Alors, que Mme la secrétaire d'Etat veuille bien nous répondre sur ce point.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Elle n'est pas à vos ordres. Elle a déjà répondu dix fois, cent fois !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les cinq sous-amendements et sur l'amendement no 198, monsieur le rapporteur ?

M. Jean-Luc Préel.

Enfin un homme sensé !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

C'est vrai !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Merci ! J'aime bien recevoir des compliments, vous pouvez continuer. (Sourires.)

Les sous-amendements nos 808, 809, 810 et 811 n'ont pas été examinés par la commission. Quant au sousamendement no 784, elle l'a rejeté.

Quant à l'amendement no 198 du Gouvernement, il prévoit un nouveau dispositif pour compenser la diminution de recettes du FSV. En effet, le FSV ne percevant plus le montant de la taxe sur les alcools, le montant de l'excédent du FSV versé au fonds de réserve pour les retraites diminue d'autant.

M. Yves Bur.

C'est un tour de passe-passe !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Le Gouvernement compense en prélevant sur les différents régimes. Reprenant le mot que j'ai utilisé mardi soir - il faut être constant dans ses réponses -, je dirai qu'il s'agit d'un problème de « tuyauterie ». J'ai lu le même mot dans la presse.

La commission a, après l'avoir examiné, émis un avis favorable à l'amendement no 198.

M. Alfred Recours.

Elle a eu raison !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les cinq sous-amendements ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Compte tenu de l'excellent travail de la commission sur l'amendement no 198 et de la clarté des explications du rapporteur, je suis opposée aux cinq sousamendements.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 808.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 784.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 809.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 810.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 811.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 198.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Avant d'en venir au dernier amendement à l'article 10, j'indique dès à présent que je suis saisi par le groupe du Rassemblement pour la République d'une demande de scrutin public sur cet article.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

MM. Préel, Bur, Blessig, Gengenwin, Ferry, Foucher et Morin ont présenté un amendement, no 299, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 10 par le paragraphe suivant :

« IV. Les Français ont la possibilité de souscrire à des fonds de partenariat retraite, ouverts à tout le monde ;

« ces fonds ont au moins 50 % de leurs avoirs investis en actions françaises. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Il s'agit d'un amendement consensuel, qui doit pouvoir être voté à l'unanimité.

M. Alfred Recours, rapporteur.

J'en doute !

M. Jean-Luc Préel.

En effet, monsieur Recours, cet amendement reprend l'une des propositions de Laurent Fabius, président de notre assemblée, auxquelles vous êtes sans doute très attaché.

Nous tenons fortement au principe de la retraite par répartition, qu'il convient de conforter.

Nous bénéficions presque tous d'un régime de retraite complémentaire obligatoire. Les agriculteurs, dont Bernard Accoyer a beaucoup parlé depuis hier, n'en bénéficient pas, mais ils envisagent de mettre en place un tel régime.

Certains bénéficient déjà d'un troisième étage de retraite, puisqu'ils ont des retraites dites « chapeau ».

L'assurance vie assure une retraite complémentaire de troisième étage, pour un montant disponible d'à peu près 3 300 milliards. Elle joue donc un rôle très important de complément de retraite.

Cependant, et cela a déjà été évoqué ici, un troisième étage mérite d'être institué et ouvert à tous les citoyens.

Il y a bien eu la proposition de loi Thomas qui a été votée par notre assemblée, mais dont le Gouvernement n'a pas voulu sortir les décrets. Son abrogation est même demandée, ce qui nous paraît anormal : nous pensons qu'il serait préférable de la modifier éventuellement, mais non de la supprimer.

L'amendement prévoit d'instituer des fonds de retraite partenariaux ouverts à tous les Français, ces fonds - élément très important - devant être investis au moins pour 50 % en actions françaises.

Cette proposition UDF a été soutenue par Laurent Fabius.

M. Yves Bur.

Eh oui !

M. Jean-Luc Préel.

Nous la reprenons bien volontiers, tout en sachant qu'elle ne résoudra pas tout. Elle représenterait en tout cas un progrès considérable. Je serais très étonné que nos collègues de la majorité s'y opposent, car cela contrarierait sans doute beaucoup notre président.

(Sourires.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur.

L'amendement défendu par Jean-Luc Préel est très intéressant.

M. Jean-Luc Préel.

Merci, monsieur le rapporteur !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Jean-Luc Préel a employé des mots forts, tel que « instituer », « pour tous les citoyens », « investis en actions françaises », cette dernière expression allant dans le sens de la protection de notre économie.

M. Jean-Pierre Foucher.

C'est le « double dividende » ! (Sourires.)

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Il faut abonder les fonds de réserve,...

M. Jean-Pierre Foucher.

Très bien !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

... et prévoir parallèlement l'épargne retraite telle que reprise dans l'amendement...

M. Jean-Luc Préel.

C'est ce qu'a dit Laurent Fabius !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

M. le docteur Préel, je suis, comme M. le docteur Accoyer, ORL de profession et je vous ai très bien entendu.

Vous avez parlé de Laurent Fabius, mais je me dois d'éviter, en tant que rapporteur, de citer de nom sauf, bien entendu, ceux des personnes présentes dans cette salle.

M. Jean-Luc Préel.

C'est pourquoi j'ai cité moi-même celui de notre président !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Il faut donc des fonds de réserve abondés et, parallèlement, une épargne retraite pour qu'en 2006 les retraités puissent recevoir la retraite qui leur a été promise pendant leur période d'activité.

Nous lançons un cri à l'adresse du Gouvernement : oui au fonds de réserve, mais abondé ! Oui à l'épargne retraite, mais en son temps ! La commission, après avoir examiné l'amendement, a émis un avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Même avis que la commission.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

Nous avons été nombreux à travailler sur ce texte et, à travers nos groupes respectifs, nous avons cherché à faire oeuvre constructive.

Comme l'a dit tout à l'heure M. Accoyer, nous avons voulu adopter des positions de repli pour montrer que notre objectif était d'aboutir à un dialogue constructif, tout en espérant que le Gouvernement pourrait retenir certains de nos amendements.

N ous sommes très déçus de votre attitude constamment négative, et qui n'est d'ailleurs pas expliquée par vous-mêmes, mesdames, messieurs.

L'amendement que notre collègue Préel vient de défendre correspond non seulement à la pensée de M. Fabius, mais aussi à celle d'un très grand nombre de Français qui souhaite des fonds de retraite partenariaux.

C'est dans un esprit moderne de partenariat que nous avons présenté cet amendement Nous sommes déçus, je le répète, de constater qu'un dialogue n'est pas possible.

Cela m'étonne car j'ai l'habitude de dialoguer avec le pré-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

sident de la commission des affaires sociales dans le Nord-Pas-de-Calais, et je regrette qu'il ne participe pas à un dialogue dans le même esprit à l'Assemblée nationale.

Cela nous permettrait d'aboutir sur certains points à un consensus, qui devrait s'imposer quand il s'agit d'équilibrer les dépenses et les recettes de la sécurité sociale.

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse, brièvement.

M. Pascal Terrasse.

Je serai très bref car je ne veux pas relancer le débat.

Une partie de l'hémicycle souhaite substituer au système par répartition un système par capitalisation. C'est un choix.

Le Premier ministre a engagé un dialogue avec les partenaires sociaux.

Après le rapport Charpin, que nous connaissons tous, des décisions seront prises l'année prochaine. Pourquoi anticiper les réflexions qui seront engagées avec le Premier ministre et les partenaires sociaux ? La discussion que nous avons ajourd'hui, fort intéressante au demeurant, devra être rouverte l'année prochaine à l'occasion du débat auquel le Premier ministre nous invite.

M. François Goulard et M. Jean-Luc Préel.

Reportons, reportons !

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur.

Les fonds d'épargne retraite, comme l'écotaxe et la TGAP, ont la même vertu du double dividende : un dividende au service des retraites de nos concitoyens, dont nous savons qu'elles sont menacées, et un dividende en termes d'emploi, puisque les fonds de retraite devront être investis en actions d'entreprises françaises. De ce fait, on évitera que seuls des fonds étrangers déterminent l'avenir de l'emploi en France.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je voudrais rassurer les députés qui ont regretté le manque d'ouverture au dialogue du Gouvernement.

C'est justement dans le respect des travaux de la commission et des arguments du rapporteur issu de vos rangs que j'ai indiqué que le Gouvernement suivait la sagesse de la commission.

M. Jean Bardet.

Ces propos ne sont pas dignes de vous ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Le dialogue poursuit son chemin. Les arguments sont publics. Je vous donne rendez-vous quand le dossier sera mûr. Vos arguments seront alors pris en compte là où ils doivent l'être : au sein des groupes de travail et de la commission. Le Parlement prendra ensuite connaissance des conclusions de celle-ci.

Voyez-vous, monsieur Goulard, moi, je respecte le Parlement ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Guy-Michel Chauveau.

Un peu de sagesse, messieurs !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 299.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour une explication de vote.

Mme Muguette Jacquaint.

Je m'exprimerai sur les articles 10 et 11, puisque les réponses qui nous ont été faites ont fait référence à ces deux articles.

S'agissant de l'article 10, j'ai fait part de nos interrogations et de nos inquiétudes, qui demeurent en ce qui concerne le fonds de réserve pour les retraites.

Mme la secrétaire d'Etat nous a dit que, dès l'an prochain, nous reviendrions en profondeur sur la question des fonds de réserve à l'occasion d'un débat sur l'avenir des retraites. Nos inquiétudes n'ont pas été apaisées pour autant.

M. Léonce Deprez.

Très juste !

Mme Muguette Jacquaint.

Par conséquent, nous voterons contre l'article 10.

Cela dit, nous prenons acte des efforts consentis à l'article 11. Chacun sur ces bancs s'est inquiété quant au minimum vieillesse qui, si j'ai bien compris, progressera de 1 % à partir du 1er janvier, tout comme les pensions de réversion des veuves, qui augmenteront quant à elles de 2 %.

S'agissant de la revalorisation des retraites, il y a eu 1 % de coup de pouce en deux ans, ce que Mme Aubry a reconnu elle-même. Comme nous l'avons dit dans la discussion générale, ce n'est pas rien,...

M. Léonce Deprez.

Ce n'est pas grand-chose !

Mme Muguette Jacquaint.

... mais je dirai : peut mieux faire ! Nous voterons contre l'article 10 mais, étant donné que nous sommes favorables à tout ce qui va dans le sens d'une amélioration, si minime soit-elle, nous voterons l'article 11.

M. Pascal Terrasse.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour une brève explication de vote, car nous avons saisi ce qu'il pense de l'article 10. (Sourires.)

M. François Goulard.

Monsieur le président, je reçois votre propos comme un hommage, et je vous rends hommage à mon tour pour l'usage, d'ailleurs très positif selon moi, que vous avez instauré...

M. le président.

C'est une faculté et non un droit des parlementaires.

M. François Goulard.

Vous faites preuve d'un esprit libéral...

M. Jean-Luc Préel.

Démocratique surtout !

M. François Goulard.

... dans la conduite de nos travaux, ce qui ne vous empêche pas d'être ferme.

Mme la secrétaire d'Etat vient de nous expliquer de manière assez surprenante que, dans la mesure où la commission avait débattu et adopté une position dont le rapporteur s'était fait, conformément à son rôle, le fidèle écho, le débat était clos.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Non !

M. Guy-Michel Chauveau.

C'est une interprétation !

M. François Goulard.

Elle s'est étonnée qu'on veuille reprendre la discussion au sein de cet hémicyle et a conclu que, pour ce qui la concernait, elle défendait les droits du Parlement, sous-entendu pas moi.

Nous n'avons sans doute pas la même conception du débat parlementaire. J'estime quant à moi que nous avons un droit plein et entier, celui de reprendre les arguments


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

i nvoqués pour les discuter de nouveau en séance publique, bénéficiant alors d'un avantage singulier, à savoir que les propos que nous tenons en séance publique figurent au Journal officiel, dont l'ensemble des Français peuvent prendre connaissance (Sourires sur les bancs du groupe socialiste) et mesurer ainsi l'enjeu de notre débat d'aujourd'hui. Ce n'est pas négligeable.

Vous pouvez sourire, mais je crois que la démocratie fonctionne à ce prix. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Permettez-moi à mon tour de sourire, monsieur Goulard !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, que j'invite également à être bref.

M. Bernard Accoyer.

Le groupe du Rassemblement pour la République votera contre l'article 10...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Quel dommage !

M. Bernard Accoyer.

... pour plusieurs raisons.

D'abord, il est illusoire de penser que la CNAV puisse dégager dans les années à venir, et d'une façon durable, des excédents à un niveau qui permette de pourvoir aux besoins de financement très élevés du fonds de réserve pour les retraites par répartition.

Ensuite, nous voulons affirmer avec force que l'amendement que le Gouvernement a déposé et qui était destiné à suppléer au financement du fonds des 35 heures, tel qu'il l'avait prévu et que les partenaires sociaux rejetaient, procède de l'attitude du sapeur Camember : on creuse un trou qui est simultanément comblé.

En prenant la moitié du produit de la CSG sur l'épargne qui, préalablement, était affectée aux branches famille et vieillesse, et, pour une faible part, à la branche maladie, pour constituer la dotation d'Etat de la CMU, le Gouvernement se livre à un nouveau détournement qui conduira à relever encore les cotisations pour combler les déficits des différentes branches.

Nous dénonçons cette série de manoeuvres, à propos desquelles le Gouvernement n'a d'ailleurs pas voulu nous donner la moindre explication, ce qui est bien la preuve que nous l'avons pris, si j'ose dire, en flagrant délit de détournement de fonds sociaux aux fins d'une politique de l'Etat pour l'emploi.

Pour ces raisons, le groupe du Rassemblement pour la République votera contre l'article 10. (Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Je vais mettre aux voix, par scrutin public, l'article 10.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Je mets aux voix l'article 10, modifié par les amendements nos 199 et 198 du Gouvernement.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

51 Nombre de suffrages exprimés .................

49 Majorité absolue .......................................

25 Pour l'adoption .........................

30 Contre .......................................

19 L'Assemblée nationale a adopté.

Après l'article 10

M. le président.

J'informe l'Assemblée que l'amendement no 10 de la commission des finances a été retiré.

Je suis saisi par M. Préel et plusieurs ses collègues de deux amendements, nos 475 et 300.

Monsieur Préel, acceptez-vous de défendre simultanément ces deux amendements ?

M. Jean-Luc Préel.

Pour faire preuve de très bonne volonté à votre égard, monsieur le président, je suis prêt à défendre en même temps les trois amendements nos 475, 300 et 576.

M. le président.

Soit, mon cher collègue.

L'amendement no 475, présenté par MM. Préel, Bur, Blessig et Foucher est ainsi rédigé :

« Après l'article 10, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au Parlement avant le 1er mars 2000 un rapport relatif à la situation du fonds veuvage et au niveau des allocations accordées aux conjoints survivants. »

L'amendement no 300, présenté par MM. Préel, Bur, Blessig, Baguet, Gengenwin, Birraux, Coussain, Rochebloine, Foucher et Morin, est ainsi rédigé :

« Après l'article 10, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au Parlement avant le 2 avril 2000 un rapport relatif à la situation du fonds veuvage et au niveau des allocations accordées aux conjoints survivants. »

L'amendement no 576, présenté par MM. Debré, Douste-Blazy, Rossi et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union p our la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants, est ainsi rédigé :

« Après l'article 10, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au Parlement avant le 1er juin 2000 un rapport relatif à la situation du fonds veuvage et au niveau des allocations accordées aux conjoints survivants. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Il s'agit d'un problème important, qui a été évoqué tout à l'heure.

J'ai insisté sur le fait que le fonds veuvage avait été créé pour venir en aide aux veufs et aux veuves de notre pays, q u'il était financé par une cotisation prélevée sur l'ensemble des salaires au taux de 0,10 % et qu'il était très largement excédentaire depuis sa création : on n'en utilise qu'environ 25 % pour venir en aide aux veufs et aux veuves, par l'intermédiaire de l'assurance-veuvage.

Nous souhaiterions qu'un rapport soit présenté au Parlement le plus rapidement possible sur la situation du fonds veuvage. Ce rapport devrait, comme c'est l'usage pour un rapport, contenir des propositions.

Nos trois amendements prévoient des dates de présentation du rapport différentes : le 1er mars, le 2 avril et le 1er juin 2000. Le troisième amendement laisserait donc au Gouvernement six mois pour préparer son rapport.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée pour le choix de la date.

Le rapport proposé me paraît très important pour que nous soyons éclairés sur un problème majeur.

M. le président.

Permettez-moi une question, monsieur Préel. Pourquoi la date figurant dans votre amendement no 300 est-elle le 2 avril et non le 1er ? (Sourires.)

M. Jean-Luc Préel.

Nous avions très peur que le 1er avril ne fasse pas sérieux !

M. François Goulard.

C'est la seule raison !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur.

La commission est favorable aux deux premiers amendements. Elle n'a pas examiné le troisième, no 576, mais, à titre personnel je ne peux qu'y être favorable. La seule différence entre ces trois amendements tient à la date prévue pour la présentation du rapport : avant le 1er mars 2000, avant le 2 avril 2000 ou avant le 1er juin 2000. Comme nous sommes fort courtois, nous allons demander à Mme la secrétaire d'Etat de choisir la date !

M. le président.

Sur la forme, monsieur le rapporteur, on ne peut être favorable à deux amendements concurrents !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Vous avez parfaitement raison, monsieur le président. Mais la commission examine des séries d'amendements, puis d'autres en application de l'article 88 du règlement et nous ne nous souvenons pas toujours de tous nos votes.

M. Jean Bardet.

D'où l'utilité de la discussion en séance publique !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Monsieur le rapporteur, je suis désolée de ne pouvoir donner un avis favorable à aucun de ces amendements. En effet, compte tenu de la façon dont la solidarité nationale s'applique à l'égard des veuves et veufs et du coût des mesures prises en leur faveur au titre de l'article 10, il n'est pas souhaitable de prévoir un rapport supplémentaire sur cette question. Mieux vaut poursuivre notre politique de solidarité en général, en versant à ce fonds veuvage les sommes nécessaires.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Les deux premiers amendements ont été adoptés à l'unanimité par la commission.

Je n'appliquerai pas la jurisprudence Séguin à ce cas particulier et, pour ne pas fixer une date trop précoce, je propose le 1er juin.

M. Jean-Luc Préel.

Très bien !

M. le président.

J'en déduis que les amendements nos 475 et 300 sont retirés !

M. Jean-Luc Préel.

Oui, monsieur le président !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, contre l'amendement no 576.

M. François Goulard.

Je suis désolé de faire de la peine à Jean-Luc Préel, mais je suis contre l'amendement et il va comprendre pourquoi.

Depuis l'été 1997, le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale a multiplié les effets d'annonce et les rapports - je passe sur les groupes de travail et d'étude. J'ai relevé quelques-uns de ces rapports : Un rapport sur les suites du groupe de travail sur la santé publique ; Un rapport, rendu en juillet 1998, sur le laboratoire du fractionnement et des technologies ; Un rapport, spécialement critique, du Comité national d'évaluation des EPSCP sur les UFR de pharmacie, qui a été remis en février 1999 ; Un rapport très intéressant des professeurs Reynaud et Parquet sur les personnes en difficulté avec l'alcool, remis le 19 mars 1999 ; Un rapport de M. Biot sur les technologies médicales, remis le 8 avril 1999 ; Un rapport sur l'état de l'organisation de la médecine scolaire - sujet intéressant, qui appelle de profondes réformes - remis le 11 mai 1999 ; Un rapport préparatoire « réflexion et prospective sur la conférence nationale de santé », remis le 19 mai 1999 ; Un rapport intéressant du comité national d'évaluation devant l'Académie de médecine sur le troisième cycle de médecine, qui a été remis le 7 juin 1999 ; Un rapport sur les suites du groupe de travail sur la gynécologie médicale - sujet controversé -, qui date de juin 1999 ; Un rapport des professeurs Reynaud, Parquet et Lagrues ur la santé des quinze vingt-cinq ans, remis le 24 juin 1999 ; Un intéressant rapport du docteur Wieviorka, « les toxicomanes dans la cité », remis le 6 juillet 1999 ; Un rapport de l'IGAS, extrêmement critique, sur l'institut national de recherche et de sécurité, remis le 4 août 1999.

Et je passe sur les rapports parlementaires, parce que nous les connaissons : le rapport Guinchard-Kunstler, le tout récent rapport Recours, etc.

Bref, quel usage le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale fait-il de tous ces rapports, qui sont remis au rythme de un par mois à peu près ? Quel usage fait-il des conclusions des nombreux groupes de travail mis en place, sur les urgences, la médecine libérale, etc.

? Je passes ur les effets d'annonce de votre prédécesseur, de Mme Aubry et de vous-même. Que se passe-t-il dans ce ministère pour que jamais rien ne sorte de tous ces documents et de tous ces groupes de travail ?

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

J'ai bien écouté ce qu'a dit mon ami François Goulard, mais il y une chose qui me gêne beaucoup : l'amendement no 576 est proposé par MM. Debré, Douste-Blazy et Rossi au nom des trois groupes Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et Démocratie libérale et Indépendants. Par conséquent, je ne peux être opposé à cette demande commune, « unanime », ai-je même lu dans la presse, des trois groupes.

Ensuite, adviendra ce qu'il advient des rapports ! (Sourires.)

M. le président.

J'indique à M. Goulard que nous ne manquons pas d'examiner avec attention ses six amendements avant l'article 14 qui, tous, demandent des rapports.

(Sourires.)

La parole est à M. Claude Evin.

M. Claude Evin, rapporteur.

Comme M. Goulard, je suis contre cet amendement. Je partage la philosophie générale de son intervention, mais il conviendrait de faire


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une différence entre les rapports demandés par le Gouvernement afin d'éclairer ses décisions et ceux demandés par le Parlement au Gouvernement. Si l'on veut que ceux-ci soient utiles, il faut leur conserver un caractère solennel et ne pas les multiplier à l'excès. Sinon, nous perdrons en confiance. Voilà pourquoi je suis contre cet amendement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 576.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 11

M. le président.

« Art. 11. - L'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 351-11 . - Au titre de l'année 2000, le coefficient de revalorisation applicable au 1er janvier aux pensions de vieillesse déjà liquidées ainsi qu'aux cotisations et salaires servant de base à leur calcul est de 1,005. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

J'espère, monsieur le président, pouvoir tenir jusqu'à la fin de ces longues séances,...

M. Jean-Pierre Foucher.

Accroche-toi !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je croyais que nous n'avions pas débattu, qu'il n'y avait aucun dialogue et que vous ne pouviez pas vous exprimer !

M. Jean-Luc Préel.

... sans savoir encore très bien aujourd'hui à quel moment nous pourrons conclure cette discussion extrêmement importante.

M. le président.

Vous êtes optimiste, monsieur Préel, quand vous dites aujourd'hui !

M. Gérard Terrier.

Ce sera plutôt demain !

M. Jean-Luc Préel.

Nous attendrons le retour de Mme Aubry pour terminer !

M. François Goulard.

Elle est partie en province !

M. Jean-Luc Préel.

Comme l'a confirmé notre excellent rapporteur Denis Jacquat en commission, les retraités ont vu leur pouvoir d'achat diminuer ces dernières années, surtout depuis l'importante extension de la CSG, qui est bien entendu payée par chacun.

Vous proposez, dans cet article 11, un taux de revalorisation de 0,5 %. Vous prétendez donner un « coup de pouce » de 0,3 %. Vous avez raison à strictement parler, mais en réalité - je le sais pour avoir reçu de nombreuses associations - les retraités ont perçu le gain qu'ils ont eu en 1999 comme un rattrapage de leur perte de pouvoir d'achat des années antérieures et ils le considèrent comme un acquis.

M. Pascal Terrasse.

C'était un rattrapage des années Juppé et Balladur !

M. Jean-Luc Préel.

Mais non ! M. Jacquat vous l'expliquera, cela fait de nombreuses années que le pouvoir d'achat des retraités baisse.

Lorsque vous avez étendu la CSG aux revenus de l'épargne, vous avez contribué à faire baisser leur pouvoir d'achat. En effet, de nombreux retraités qui ont des retraites modestes vivent de leurs placements. C'est le cas notamment des retraités agricoles, auxquels nous nous intéressons tous, et qui ont une retraite modeste puisqu'elle est de l'ordre de 2 500 francs par mois. Heureusement qu'ils ont des placements pour vivre ! Le taux d'inflation prévu pour 2000 est de 0,9 %, mais ce qui intéresse surtout les économistes, c'est le taux implicite du PIB qui comprend notamment le loyer - je voudrais bien savoir quel retraité n'est pas logé ! - et qui augmentera de 1,2 % l'année prochaine. Vous proposez 0,5 % de revalorisation pour un taux implicite du PIB de 1,2 % ! Loin d'être un coup de pouce, cela se traduira plutôt par une baisse réelle, importante et programmée du pouvoir d'achat des retraités pour l'an 2000 !

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet.

M. Jean Bardet.

Sous couvert de l'annonce d'une augmentation des avantages de vieillesse, ceux-ci vont en fait diminuer cette année en termes de pouvoir d'achat.

Certes, l'année dernière, on a anticipé sur l'augmentation de cette année et il faut rattraper cette anticipation. Il n'en reste pas moins que, cette année, le pouvoir d'achat des retraités augmente moins que l'inflation. Et vous aurez beau leur expliquer que c'est pour compenser ce qu'ils ont perçu en trop l'année dernière - en admettant que le raisonnement du Gouvernement soit valable ; je préfère celui de Jean-Luc Préel -, ils trouveront cela totalement inadmissible. Cela montre bien que le Gouvernement n'a aucune politique vis-à-vis des personnes les plus âgées et les plus démunies.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Le taux d'augmentation des retraites est faible, très faible. L'explication technique du Gouvernement est recevable. Il est vrai que l'inflation a été plus faible que prévu en 1999. Donc, le Gouvernement, dans une logique comptable - je ne saurais pas le contester -, corrige le tir cette année en prévoyant un taux pratiquement nul d'augmentation. Les retraités ne seront pas satisfaits, c'est certain, mais cela n'est rien à côté de ce qu'ils auront à subir à partir de 2006. Les chiffres ont été rappelés tout à l'heure. En 2040, il y aura sept retraités pour dix actifs !

M. Pascal Terrasse.

On le sait !

M. François Goulard.

Un tel chiffre appelle autre chose que la tactique de l'édredon qui est visiblement le choix du Gouvernement : édredon quant à la conduite des affaires de l'Etat depuis deux ans et demi, édredon face à nous puisque, nous pouvons dire ce que nous voulons, Mme la secrétaire d'Etat reste de marbre et continue à faire soigneusement son courrier ! Il n'empêche, madame la secrétaire d'Etat, on ne peut pas rester indifférent au problème majeur des retraites ! On ne peut pas nous dire, depuis juin 1997, d'abord qu'il ne faut pas faire les fonds de capitalisation, que c'est mauvais, qu'ils profitent aux riches, que cela ne sert à rien,...

M. Pascal Terrasse.

On ne dit pas ça !

M. François Goulard.

... puis que la question mérite d'être posée ! On ne peut pas dire ensuite qu'on va commander un rapport ! On ne peut pas dire, quand ce rapport a été rendu, qu'il va complètement dans notre sens, c'est-à-dire qu'il y a urgence à agir ! On ne peut pas dire qu'il est urgent alors d'engager une concertation ! On ne peut pas dire ensuite qu'il est urgent d'avoir un rapport sur les résultats de cette concertation ! On ne peut pas dire, comme Mme Aubry l'a fait tout à l'heure, que l'on va se concerter avec son collègue de l'économie et des finances pour savoir quelle solution apporter ! Certes, d'après les informations parues dans la presse, M. StraussKahn est un éminent jurisconsulte, mais n'est-il pas temps d'agir ? N'est-il pas temps de prendre ce problème


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à bras-le-corps ? Est-il acceptable que vous nous proposiez un texte de ravaudage, de petites mesures techniques alors qu'il y a le feu à la maison ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Bernard Accoyer.

Quel talent ! Quelle énergie !

M. le président.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint.

Comme je l'ai précisé tout à l'heure lors des explications de vote sur l'article 10, s'agissant de la revalorisation des retraites, cet article 11 ne fait pas le compte ! Il aurait été souhaitable - peut-être cette proposition sera-t-elle un jour retenue - de revaloriser les retraites en fonction de l'augmentation des salaires moyens. Cela dit, Mme la ministre a réalisé des avancées sur le minimum vieillesse et la pension de réversion des veuves. C'est parce qu'un tel pas en avant a été accompli - nous en attendons d'autres - que nous voterons l'article 11.

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

J'ai été heureux d'entendre M. Préel reconnaître que le pouvoir d'achat des retraités avait diminué les années précédentes.

M. Jean-Luc Préel.

Notamment à cause de la CSG !

M. Pascal Terrasse.

Aujourd'hui, depuis maintenant deux ans, on constate que ce pouvoir d'achat augmente.

Peut-être n'est-ce pas suffisant, mais avec les mécanismes mis en place par le gouvernement Balladur en 1993, la hausse de cette année ne serait que de 0,2 %.

Mme la ministre nous propose aujourd'hui une revaloriastion supérieure, de 0,5 %. On ne peut pas nous accuser d'être laxistes dans notre manière de gérer les finances publiques et, en même temps, en demander toujours plus. Mme la ministre a eu raison de rappeler qu'il fallait faire un effort en direction des bénéficiaires de petites pensions de retraite et du minimum vieillesse. C'est important.

J'insisterai sur la situation dramatique dans laquelle se trouvent cetaines personnes qui dépendent de la caisse de retraite de la CAMAVIC, la caisse mutuelle d'assurance vieillesse des cultes. Il s'agit de prêtres, qui ont quitté leur ministère dans les années 1968-1970.

Je sais, madame la secrétaire d'Etat, qu'ils souhaitent être entendus par votre ministère et il serait bon que l'on puisse examiner la situation de ces quelque 60 000 per-s onnes. Mes collègues Marie-Françoise Clergeau et Robert Gaïa, qui en connaissent un certain nombre, sont très attentifs au problème.

Il serait bon, madame la secrétaire d'Etat, que l'on puisse leur donner satisfaction.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Tout d'abord, monsieur Goulard, je tiens à vous rassurer : je n'écris pas mon courrier, je prends scrupuleusement des notes sur vos interventions.

M. François Goulard.

Pardonnez-moi, je me suis comporté.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

C'est d'ailleurs un véritable florilège, et je ne veux pas vous laisser penser que je pourrais me distraire pendant que vous prenez plaisir à m'informer de votre pensée.

Cela dit, l'article 11 vise à fixer les règles de revalorisation des pensions pour l'année 2000. En effet, celles mises en place en 1993 viennent à échéance fin 1999.

Une règle pérenne de revalorisation sera définie dans le cadre de la concertation sur la réforme des régimes de retraite, réforme qui est en cours. Même si la mesure que nous proposons cette année peut vous paraître insuffisante, surtout quand elle est expliquée de manière à brouiller les esprits, elle tranche avec la pratique des gouvernements précédents. Ceux-ci avaient augmenté les prélèvements pesant sur les retraites de 4,2 % entre 1993 et 1997 ; 1,3 % de CSG en 1993 ; 1,2 % de cotisations maladie et 0,5 % de CRDS en 1996, 0,2 % de cotisations maladie et 1 % de CSG en 1997.

Depuis 1997, nous avons, année après année, redonné plus de pouvoir d'achat aux retraités. Même si je concède que l'on peut juger cet accroissement insuffisant, il n'en est pas moins vrai qu'il existe.

Les règles précédemment en vigueur consistaient en une indexation sur les prix, avec des ajustements pour tenir compte de l'écart éventuel entre l'inflation prévisionnelle et l'inflation constatée. Elles auraient conduit, en 2000, à une revalorisation limitée à 0,2 %. En effet, l'inflation prévisionnelle pour 2000 est de 0,9 %...

M. Jean Bardet.

Je l'ai lu dans le rapport, madame la secrétaire d'Etat ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

... et elle avait été surestimée de 0,7 % pour 1999 : 1,2 % prévu initialement, au lieu de 0,5 % aujourd'hui.

Cependant, le Gouvernement souhaitant faire participer en 2000 les retraités à la croissance, il propose de majorer de 0,3 % cette revalorisation pour la porter à 0,5 %. Après la majoration de 0,7 % effectuée en 1999 - aucun rattrapage négatif n'ayant été effectué début 1999, alors que les prix 1998 avaient été surévalués de 0,7 % -, cela représente une augmentation de 1 % du pouvoir d'achat des retraités sur deux ans.

Le coût de cete revalorisation est de 1,7 milliard de francs pour le régime général, dont 1 milliard de francs pour la majoration de 0,3 %. Cette revalorisation s'applique aussi à un certain nombre d'autres régimes de retraite, artisans, commerçants, professions libérales, salariés agricoles, ainsi qu'aux pensions d'invalidité et rentes d'accidents du travail, le coût global de la mesure est de 3 milliards de francs.

Voilà les explications que je pouvais vous donner à nouveau, monsieur Bardet, pour éclairer votre lanterne.

M. Jean Bardet.

Merci ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

J'en viens à la question évoquée par Pascal Terrasse.

Vous vous souvenez que l'intégration de la caisse de retraite des cultes au régime général a été décidée en 1998. Le déficit sera pris en charge par le régime général.

Il y a eu une diminution des cotisations de maladie et de retraite en 1999, qui représente 31 % de celle des actifs, au lieu de 50 % antérieurement. La loi portant couverture maladie universelle a réduit les cotisations maladie pour les prêtres payant la CSG. Le coût pour la collectivité est de 100 millions de francs. Et pour satisfaire à votre souhait de concertation je vous indique que nous allons recevoir les représentants des cultes, la semaine prochaine, pour faire évoluer ce dispositif. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)


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M. le président.

Personne ne demande plus la parole ? Je mets aux voix l'article 11.

(L'article 11 est adopté.)

Après l'article 11

M. le président.

M. Accoyer et M. Delnatte ont présenté un amendement, no 341, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« I. Dans le dernier alinéa de l'article L.251-6 du code de la sécurité sociale, les mots "en priorité" sont supprimés.

« II. Les diminutions de recettes pour le régime de l'assurance vieillesse sont compensées à due concurrence par une taxe additionnelle au profit des organismes de sécurité sociale sur les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement tend à appeler encore une fois l'attention de notre assemblée sur la situation des veuves. C'est un sujet qui est cher à Jean-Luc Préel, qui travaille, avec un certain nombre d'entre nous, sur ces questions.

Il est vrai que le Gouvernement a malmené les veuves comme d'ailleurs d'une façon générale les prestations sociales ou les avantages fiscaux relatifs aux femmes, aux femmes seules ou aux femmes ayant élevé des enfants ; c'est le cas de beaucoup de veuves.

Nous proposons que l'affectation des crédits du fonds national d'assurance veuvage soit exclusivement réservée à la couverture sociale des veuves de moins de cinquantecinq ans. Ainsi, la dénomination de ce fonds correspondrait aux affectations de son contenu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Comme l'a dit fort excellemment Bernard Accoyer, cet amendement propose d'affecter de façon exclusive les crédits du fonds national d'assurance veuvage à la couverture sociale des veuves de moins de cinquante-cinq ans. Je rappellerai qu'il y a aussi des veufs, même s'ils sont trois fois moins nombreux que les veuves.

C'est un problème de justice, Jean-Luc Préel y insiste très régulièrement, en tant que président du groupe d'études sur les conjoints survivants. Mme Aubry nous a dit, et même redit, qu'elle était en discussion avec la FAVEC sur ce point, comme l'est d'ailleurs le groupe d'études de M. Préel. Il nous a été indiqué que des propositions allaient venir. Nous le souhaitons vivement.

Cela dit, cet amendement a été rejeté par la commission. Avis défavorable, donc.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 341.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 12

M. le président.

« Art. 12. - Au dernier alinéa de l'article L. 161-22 et au premier alinéa de l'article L. 634-6 du code de la sécurité sociale, à l'article L. 353-1 du code rural et à l'article 14 de la loi no 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d'assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, les mots : "31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "31 décembre 2000". »

Sur cet article, deux orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur.

Je m'exprime au nom de mon collègue M. Grignon, qui ne peut être présent ce soir. Celui-ci considère que les dispositions prévues dans cet article, notamment pour Saint-Pierre-et-Miquelon, vont dans le bons sens. Il se réjouit que le dispositif puisse être maintenu et prorogé.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Je suis un peu comme les juges de la Cour suprême américaine qui meurent rarement et ne démissionnent jamais. (Sourires.)

Vous me trouverez toujours face à ce micro, pour exposer nos positions.

Je m'exprimerai donc sur l'article 12, qui concerne le cumul entre retraite et emploi.

Je n'ai pas la même position que le Gouvernement sur ce sujet, comme sur un certain nombre d'autres : en quoi le cumul d'un emploi et d'une retraite serait-il nocif ? Une fréquente erreur consiste à penser qu'une personne qui continue à travailler tout en touchant une retraite occupe l'emploi d'un plus jeune. C'est d'ailleurs le raisonnement même qui sous-tend la réduction du temps de travail : on part de l'idée qu'il y a un nombre d'emplois déterminés et que si quelqu'un sort de l'emploi, il permet à quelqu'un d'autre d'y rentrer. Vous me permettrez de qualifier un tel raisonnement de simpliste : la réalité économique est infiniment plus compliquée. En fait, quand quelqu'un continue à travailler après avoir atteint l'âge de la retraite, il crée des richesses et contribue par là même à la prospérité économique globale et à la création d'emplois.

Limiter le cumul emploi-retraite par des dispositions financières n'est donc pas souhaitable. Je dirai même que c'est injuste. Au nom de quoi empêcherions-nous une personne qui a cotisé toute sa vie de bénéficier d'une retraite ? D'autant qu'il s'agit souvent de petits salaires qui s'ajoutent à de petites retraites pour faire face à un réel besoin de revenus.

Personne ne s'offusque que dans notre assemblée même, ceux d'entre nous qui sont retraités perçoivent comme les autres une indemnité parlementaire. Nous n'y voyons aucune contradiction. Alors pourquoi empêcher des gens beaucoup plus modestes de continuer à travailler ? Il faut admettre ce cumul.

Je suis donc opposé à l'article 12 de ce projet de loi.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la sécrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Aujourd'hui, 280 000 personnes cumulent un emploi et une retraite. La plupart - pratiquement les trois q uarts - n'ont qu'une activité occasionnelle. Seuls 70 000 cumulants ont une activité professionnelle stable leur rapportant plus que le SMIC ; il s'agit essentiellement d'anciens militaires qui ont pris une retraite précoce et se sont reconvertis dans le secteur privé.

Si le dispositif actuel n'était pas reconduit par la loi de financement de la sécurité sociale 2000 alors qu'il arrive à expiration à la fin de cette année, les droits à la retraite pourraient être cumulés sans limitation avec une activité


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professionnelle. Cela aurait un impact négatif, aussi bien en ce qui concerne le chômage qu'en ce qui concerne les caisses de retraite qui devraient faire face à des demandes de liquidation anticipées extrêmement importantes. On ne peut prendre ce risque.

Une mission a été confiée le 30 juillet à M. Balmary pour étudier l'impact d'un aménagement des règles actuelles. Ses conclusions nous serviront à alimenter la concertation en cours sur la réforme des retraites, dans le cadre de laquelle devront s'inscrire les adaptations éventuelles.

Mais rassurez-vous : les rapports demandés par le ministère sont suivis d'effets. Plusieurs d'entre eux sont à l'origine de restructurations et de rénovations. Ce rapport, comme les autres, permettra d'asseoir la réflexion et de formuler des propositions qui vous seront ensuite présentées.

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'article 12.

(L'article 12 est adopté.)

Article 13

M. le président.

« Art. 13. - Un prélèvement est effectué sur le fonds de réserve et de compensation, prévu à l'article R. 642-4 du code de la sécurité sociale, au profit du régime obligatoire géré dans le cadre de l'article L. 644-1 du même code par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, pour financer l'opération d'intégration dans ladite caisse de la Caisse autonome de retraite des géomètres-experts, experts agricoles et fonciers.

« Le montant de ce prélèvement, qui ne peut excéder le tiers des ressources disponibles au 31 décembre 1999 du fonds mentionné au précédent alinéa, est fixé par le conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

L'article 13 concerne un régime particulier, parmi tant d'autres. Il nous donne l'occasion de réfléchir quelques instants, dans le cadre, destiné à cet effet, de la loi de financement de la sécurité sociale, sur le caractère éclaté et inégalitaire de nos régimes de retraite.

Qu'il s'agisse du régime général des travailleurs salariés ou des régimes spéciaux, la situation est très diverse, qu'il s'agisse des niveaux de cotisation, du calcul de la pension de vieillesse ou de l'âge de départ à la retraite.

La caisse des géomètres-experts et experts agricoles et fonciers est essentiellement ciblée dans l'article 13. Mais on connaît aussi les difficultés de la CARMF, la Caisse autonome de retraite des médecins de France, de la caisse des chirurgiens-dentistes et de beaucoup d'autres régimes particuliers qui sont en cessation de paiement potentiel, à court ou moyen terme pour certaines, des prestations qu'ils peuvent servir.

Je ferai également remarquer au Gouvernement qu'il est bien beau de se concentrer sur les problèmes du régime général et de sa branche vieillesse, mais qu'il en reste un autre en suspens, qui relève totalement de sa responsabilité, à savoir les retraites du secteur public. Le montant de ces retraites s'élève à 150 milliards de francs, lesquels ne sont pas clairement différenciés des salaires des agents des fonctions publiques.

Nous demandons de façon itérative, chaque année, qu'une caisse de retraite des agents de la fonction publique d'Etat soit créée, de manière qu'on y voie plus clair. En effet, 10 % du budget de l'Etat est consacré au paiement de pensions de vieillesse des anciens fonctionnaires de l'Etat et une participation des contribuables de 50 milliards de francs doit être ajoutée aux cotisations des fonctionnaires d'Etat pour équilibrer les dépenses.

Il y a donc là des transferts qui mériteraient d'être évalués. Telle était la mission de la commission Le Vert dont la gauche a empêché la mise en place. Pourtant, les projections montrent que, dès l'année 2010, un besoin de f inancement supplémentaire considérable, de 65 à 120 milliards, se fera sentir.

Quand on ajoute ces sommes colossales au déficit de la CADES, 370 milliards, au déficit prévu dès 2005 de 60 milliards par an de la branche vieillesse - qui sera multiplié par cinq en 2010 -, on s'aperçoit que les gesticulations du Gouvernement pour créer le fonds de réserve de la retraite par répartition, sans y avoir mis encore un seul franc, et annoncer d'hypothétiques excédents sont insignifiantes.

C'est en réalité une faute de première grandeur, une dérobade de la plus grande gravité de la part du Gouvernement, alors que nous crions notre inquiétude.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

L'article 13 a trait à l'intégration d'une caisse à faibles effectifs dans une caisse plus importante. C'est un sujet récurrent. Nous voyons chaque année des opérations qu'on pourrait qualifier de « consolidation » revenir dans les différents projets de loi de financement de la sécurité sociale. Ces opérations se font dans des conditions plus ou moins satisfaisantes.

Notre collègue Terrasse a évoqué tout à l'heure l'intégration réussie du régime de retraite des anciens ministres des différents cultes à laquelle il a été procédé en 1998

Elle s'était faite dans de bonnes conditions, même s'il reste des améliorations à apporter.

L'opération avait été moins favorable pour les notaires et les clercs de notaire et la contestation avait été infiniment plus importante.

Ce que vous nous proposez se présente sous des auspices très favorables ; d'ailleurs, les professions concernées n'ont pas émis de protestations, bien au contraire. J'approuve donc l'article sur ce point.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. François Goulard.

Mais, et cela ne vous étonnera pas étant donnée la proximité des différents groupes de l'opposition, je tiens à évoquer, comme Bernard Accoyer, les retraites des fonctionnaires.

Nous avions déposé un amendement sur ce sujet qui n'a pas été jugé recevable. On peut d'ailleurs juger contestable la position de la commission des finances en la matière ; mais enfin c'est le pouvoir qui lui est reconnu. Toujours est-il qu'il nous semblerait souhaitable, exclusivement pour des raisons de clarté, d'instituer une caisse qui serait alimentée en recettes par les crédits que l'Etat consacre actuellement à ce paiement, et qui enregistrerait en dépenses le paiement des retraites des fonctionnaires suivant les modalités qui existent aujourd'hui, si bien que les fonctionnaires n'y perdraient strictement rien.

Au moins aurions-nous une vision du coût actuel des retraites des fonctionnaires et, surtout, une vision prospective de ce coût.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

M. Jean-Luc Préel.

La caisse devrait être gérée paritairement !

M. François Goulard.

Naturellement, cher collègue. Il faudrait concevoir une gestion paritaire, comme toujours dans ce type d'organisme.

L'architecture de nos organismes de retraite est un point très important. Peut-être pourrait-on apporter des améliorations en prévoyant des intégrations dans des régimes plus solides que ceux qui donnent lieu à intégration. Peut-être pourrait-on aussi procéder aux indentifications d'équilibre de régime qui n'ont pas été faites jusqu'à présent et qui mériteraient de l'être.

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'article 13.

(L'article 13 est adopté.)

Après l'article 13

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 755, ainsi rédigé :

« Après l'article 13, insérer l'article suivant :

« Pour les périodes d'activité antérieures au 1er janvier 1973 accomplies dans les régimes d'assurance vieillesse de base des travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales, les intéressés peuvent effectuer un versement de cotisations arriérés, dès lors qu'ils sont à jour, à la date dudit versement, du paiement des cotisations échues depuis le 1er janvier 1973 dans les régimes obligatoires d'assurance vieillesse et invalidité-décès de ces professions.

« Le montant au 1er avril 1972 des cotisations faisant l'objet de cette régularisation de cotisations est revalorisé par application des coefficients dont ont été affectées les valeurs des points de retraite entre cette date et la date à laquelle est effectué le versement.

« La demande de régularisation doit porter sur l'intégralité des cotisations dues ; elle doit être présentée dans l'année suivant l'entrée en vigueur du décret en Conseil d'Etat qui fixera les conditions d'application du présent article. »

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Cet amendement vise à permettre aux artisans et commerçants n'ayant pas payé leurs cotisations retraite antérieures à 1973 de régulariser leur situation. En effet, avant 1973 et avant d'être aligné sur le régime général, le système de retraite pour les artisans et les commerçants, était un système par points. Mais, pour des raisons conjoncturelles liées à un chiffre d'affaires insuffisants, certains artisans et commerçants n'avaient pas pu payer leurs cotisations, ce qui les pénalisera pour leur retraite.

Vous êtes nombreux à nous avoir sensibilisés à cette question.

M. Pascal Terrasse.

Absolument ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

La possibilité de racheter des points leur a déjà été donnée à trois reprises ; la dernière fois en 1990. Ce système de rachat, neutre pour l'équilibre financier à terme des régimes de retraite, constitue néanmoins une exception. C'est pourquoi cette possibilité leur sera offerte pendant un an. En effet, dans le cadre des régimes par répartition, les cotisations des actifs servent à payer immédiatement les pensions des retraités.

Il s'agit donc d'une mesure de bienveillance destinée à prendre en compte les aléas économiques ou financiers propres aux métiers de l'artisanat et du commerce. Cette mesure devrait concerner 3 000 artisans et commerçants.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Denis Jacquat, rapporteur.

La commission a émis un avis favorable.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je souhaiterais exprimer quelques réserves sur cet amendement, non pas que nous soyons défavorables aux possibilités de rachat de points de retraite, mais parce que, selon nous, la période de rachat est trop courte. Nous considérons en effet que, compte tenu de ce qui s'est passé dans le secteur du commerce indépendant et de proximité, la solidarité nationale doit s'exercer plus nettement.

Nous n'avons pu déposer un sous-amendement à cet a mendement du Gouvernement, qui, comme bien d'autres d'ailleurs, a été déposé trop tardivement. En outre, nous n'aurions pu proposer de dispositions visant à allonger la période de rachat, sous peine d'encourir les foudres de M. le président de la commission des finances.

Dans ces conditions, nous voulons rappeler ici que, s'agissant de la situation des caisses d'assurance maladie et de retraite des artisans et des commerçants, il avait été en son temps créé la C3S, qui a été bien souvent détournée de son objet. Le Gouvernement récidive d'ailleurs en ce domaine dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il y aurait donc lieu, pour les anciens commerçants, d'ouvrir de façon permanente un droit au rachat avec des avantages fiscaux.

Je vois que M. Terrasse semble désapprouver une telle mesure en faveur des anciens commerçants. Pourtant, et comme je l'ai dit, depuis 1967 des régimes complémentaires de retraite par capitalisation sont ouverts aux anciens agents ou aux agents des collectivités publiques.

Ne serait-il pas juste que l'on puisse offrir les mêmes dispositions au reste de la population ? Le Gouvernement, par parti pris, refuse de faire le nécessaire cheminement vers l'équité en matière de retraites. Nous voulions le dénoncer. cela étant, nous voterons cet amendement...

M. Maxime Gremetz.

Ah !

M. Bernard Accoyer.

... qui va dans le bon sens, même s'il est encore très insuffisant.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Je suis favorable à cet amendement du Gouvernement, mais je veux faire une remarque sur la méthode. Ne serait-il pas opportun, quand on prend de telles mesures touchant une catégorie de la population, de faire état, dans l'exposé des motifs ou dans la présentation orale de l'amendement, de la concertation qui a eu lieu avec les représentants de cette catégorie professionnelle ? Cela serait extrêmement intéressant pour le Parlement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 755.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Félicitations, madame la secrétaire d'Etat !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Merci, monsieur le président ! Avant l'article 14

M. le président.

Je donne lecture de la section 3 :

« Section 3. - Branche maladie. »

Je suis saisi de six amendements nos 615, 616, 621, 622, 625 et 626, présentés par MM. Goulard, Mattei, Dord, Nicolin et Proriol.

Monsieur Goulard peut-être pourriez-vous défendre ensemble ces amendements ?

M. François Goulard.

Volontiers, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 615 est ainsi rédigé :

« Avant l'article 14, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au plus tard le 31 décembre 2000 un rapport faisant le bilan du nombre de lits d'hospitalisation à domicile existant en France. »

L'amendement no 616 est ainsi rédigé :

« Avant l'article 14, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au plus tard le 31 décembre 2000 un rapport sur la situation de la refonte de la carte hospitalière et précisera à cette occasion l'ensemble de sa politique hospitalière. »

L'amendement no 621 est ainsi rédigé :

« Avant l'article 14, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au plus tard le 31 décembre 2000 un rapport sur le nombre minimal d'accouchements en dessous duquel la viabilité d'une maternité peut être mise en cause. »

L'amendement no 622 est ainsi rédigé :

« Avant l'article 14, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au plus tard le 31 décembre 2000 un rapport sur la campagne nationale d'information sur la contraception. »

L'amendement no 625 est ainsi rédigé :

« Avant l'article 14, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au plus tard le 31 décembre 2000 un rapport sur le dépistage systématique avec prise en charge à 100 % de la sécurité sociale de trois cancers (côlon, sein, utérus). »

L'amendement no 626 est ainsi rédigé :

« Avant l'article 14, insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement présentera au plus tard le 31 décembre 2000 un rapport sur la prise en charge par la sécurité sociale du forfait sevrage tabac. »

La parole est à M. Goulard pour défendre ces six amendements où, je le lui fais observer, il est beaucoup question de rapports, monsieur Goulard. (Sourires.)

M. François Goulard.

Le président se doit de rester neutre quant au contenu des amendements. Je connais sa rigueur de ce point de vue, et je l'en remercie.

(Sourires.)

Je suis très attentivement l'action du Gouvernement, madame la secrétaire d'Etat et, tout spécialement, la vôtre ou celle de Mme Aubry. J'ai pu constater ainsi que vous faisiez, les uns et les autres, beaucoup de déclarations mais que, malheureusement, les actes tardaient parfois à suivre. J'ai même établi un bilan assez précis. Il révèle que, sur un certain nombre de points, la communication gouvernementale ayant été pour une fois prise en défaut, il n'a pas été possible de savoir précisément quelle avait été l'action du Gouvernement après les déclarations faites.

Par exemple, votre prédécesseur à la santé, madame, avait annoncé qu'il fallait doubler le nombre de lits d'hospitalisation à domicile existant en France. Et il avait raison. Mais nous ne disposons d'aucun élément qui nous permette de penser que nous sommes sur cette voie. Je demande donc un rapport au Gouvernement. C'est l'amendement no 615.

Alors pardonnez-moi la méthode qui consiste à demander un rapport. Et ne criez pas à la contradiction avec mes positions précédentes. C'est, je le reconnais, un artifice. C'est un moyen d'obtenir du Gouvernement des explications sur des aspects de sa politique qui sont loin d'être négligeables.

L'amendement no 616 porte sur la refonte de la carte hospitalière qui, selon vos dires, madame la secrétaire d'Etat à la santé, devait faire l'objet d'une grande communication avant la fin de cette année. Nous aimerions donc savoir, très précisément, quels sont vos projets dans ce domaine.

L'amendement no 621, quant à lui, est relatif à une question importante et sensible qu'avait soulevée votre p rédécesseur : à partir de combien d'accouchements annuels une maternité est-elle dangereuse ? En la matière, il avait d'ailleurs tenu des propos parfois contradictoires, affirmant, certains jours, que des établissements pratiquant moins de 200 accouchements par an étaient, par nature, dangereux, et expliquant, à d'autres moments, qu'il n'y avait pas de seuil aussi impératif. Quelle est, aujourd'hui, la doctrine gouvernementale, madame la sécrétaire d'Etat ? Par l'amendement no 622, il s'agit de savoir où en est la grande campagne d'information sur la contraception annoncée par le Gouvernement.

L'amendement no 625 porte sur la promesse de votre prédécesseur de mettre en place un dépistage systématique avec prise en charge à 100 % par l'assurance maladie des cancers du côlon, du sein et de l'utérus qui sont parmi les plus fréquents dans la population et qui restent une cause de mortalité importante. Avez-vous pris des décisions nettes sur ce point ? L'amendement no 626, enfin, revient sur un sujet qui a été abordé par Bernard Accoyer, ce matin. Il avait été annoncé que le forfait sevrage tabac allait être pris en charge par la sécurité sociale. Qu'en est-il ? Voilà, monsieur le président, rapidement présentée, cette série d'amendements.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

M. Claude Evin, rapporteur.

Ces amendements n'ont pas été examinés en commission. Tous ces sujets sont importants et Mme la secrétaire d'Etat apportera les informations nécessaires.

Quant à moi, je ferai simplement observer à M. Goulard et à l'ensemble de nos collègues qu'un rapport est mis en distribution chaque année, avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. C'est l'annexe B. Ce rapport est une mine d'informations particulièrement intéressante mais qui semble, malheureusement, mal connue.

Monsieur Goulard, vous y trouverez, par exemple, des informations sur les restructurations hospitalières. Il existe donc déjà un document qui répond à vos préoccupations.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Peut-être faudrait-il l'enrichir. En tout cas, je ne suis pas favorable à la multiplication des rapports pour les raisons que j'ai déjà évoquées.

S'agissant des maternités viables ou dangereuses, la question est en effet essentielle, mais elle relève plus des enquêtes menées par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé. Cela permettra d'avoir une recommandation globale sur la sécurité en matière d'accouchement. Les procédures d'accréditation devront, en effet, apporter des garanties en la matière.

Sur le fond, plusieurs des demandes de M. Goulard sont donc entièrement satisfaites. En tout état de cause et il en est lui-même d'accord d'une certaine façon -, il ne me semble pas opportun de multiplier les rapports.

Avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

M. Evin vient de donner des précisions sur la restructuration hospitalière. Quant à moi, je vous en apporterai quelques autres concernant l'hospitalisation à domicile qui permet de dispenser au domicile du malade, et pour une période limitée mais révisable en fonction de l'évolution de son état, des soins médicaux et paramédicaux continus, nécessaires et coordonnés, qui doivent être de la même qualité que ceux qui pourraient lui être dispensés dans le cadre d'une hospitalisation traditionnelle.

L'hospitalisation à domicile répond au souhait grandissant des patients, et notamment de ceux qui sont atteints de maladies chroniques graves. Mon prédécesseur et moimême nous sommes donc orientés vers son développement. En effet, elle est malheureusement encore peu développée en France puisque seulement 3 908 places sont autorisées - cinquante-deux départements en sont dépourvus - dont 58 % dépendent d'associations loi de 1901 et 42 % de structures publiques ou privées participant au service public hospitalier.

Cependant, un plan triennal de développement des soins palliatifs décidé en avril 1998 prévoit le renforcement de l'offre de soins et prend en compte cette dimension essentielle. Je compte vraiment que ce développement puisse s'accélérer avec la restructuration hospitalière et la mise en réseau. Ainsi que je l'ai indiqué au sénateur Neuwirth qui, comme vous le savez, est très attaché à cette question, un certain nombre de dispositions vont être prises dans les mois qui viennent.

Comme l'a indiqué Claude Evin, le rapport annexé au plan de financement de la sécurité sociale apporte des réponses régulièrement et témoigne de l'avancée transparente sur ces projets-là.

Quant à la périnatalité, c'est une des priorités de santé publique du Gouvernement. Là aussi, les rapports sur la base desquels les dispositions ont été élaborées peuvent vous être transmis. Ils existent, ils nous permettent même d'avancer dans la définition de nos projets. Je ne pense donc pas qu'un rapport supplémentaire soit nécessaire.

Il en va de même pour la contraception. Une campagne d'information sur la contraception a été décidée et financée dans le budget 1999. Elle est en cours de réalisation et va bientôt être lancée. Si nous avons été amenés à concevoir ce projet-là, c'est bien que nous avions des informations négatives sur la bonne prise en charge par l'ensemble de nos concitoyennes et concitoyens de la responsabilité de la fécondité et des conséquences qui en découlent : grossesses non désirées, recours à l'intervention volontaire de grossesse, pas toujours équitablement accessible, malheureusement, sur l'ensemble du territoire.

Nous avons même noté des différences de qualité qui nous préoccupent et nous travaillons à des rectifications nécessaires pour la santé publique.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 615.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 616.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 621.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 622.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 625.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 626.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Rappel au règlement

M. François Goulard.

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour un rappel au règlement.

M. François Goulard.

Ce rappel au règlement a trait au déroulement de nos travaux. Il se fonde donc sur l'article 58 de notre règlement.

Monsieur le président, nous travaillons depuis de longues heures sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont l'importance pour le pays n'échappe à personne. Et dans ce texte, les questions ayant trait à l'assurance maladie constituent l'un des très grands chapitres. Or le nombre des séances prévues pour l'examen de ce projet et le calendrier retenu par le Gouvernement nous amènent à examiner les articles portant sur l'assurance maladie un vendredi soir, à une heure tardive, et probablement pendant toute la nuit.

M. Maxime Gremetz.

Mais non, il y a demain ! Il y a dimanche !

M. François Goulard.

C'est fort regrettable, car nombre de nos collègues, pour des raisons fort compréhensibles, ne peuvent pas participer à nos débats.

M. Pascal Terrasse.

C'est n'importe quoi !

M. Maxime Gremetz.

Ils sont partis en week-end !

M. François Goulard.

Cet état de fait n'est pas imputable à l'opposition - j'anticipe sur ce que certains d'entre vous pourraient dire. Certes, l'opposition s'est beaucoup exprimée dans cette discussion, mais sur des matières qui, à chaque fois, le méritaient, et sans utiliser d'artifices de procédure, suspensions de séance répétitives ou demandes de vérification du quorum, qui sont des tactiques bien connues, et que certains ont autrefois utilisées. Nous avons exercé notre droit d'opposant en participant largement à cette discussion.

Si nous abordons seulement maintenant l'assurance maladie, la responsabilité en incombe essentiellement à l'ordre du jour fixé par le Gouvernement, mais aussi à la


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structure du texte même du projet de loi. Car l'article 2 n'a pas vraiment de rapport avec les questions de sécurité sociale. Le Gouvernement, s'il l'avait souhaité, aurait puo rganiser la discussion autrement. Je déplore aussi l'absence de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité au moment où nous abordons ce sujet.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Mais je suis là, moi !

M. François Goulard.

Excusez-moi, madame, je vais m'expliquer sur ce point. La règle veut certes qu'un membre du Gouvernement représente et engage totalement celui-ci. C'est bien sûr le cas, et je vous en donne volontiers acte, madame la secrétaire d'Etat. Mais il reste que les questions de sécurité sociale relèvent davantage de la compétence de Mme Aubry que de la vôtre.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Mais il s'agit de la santé !

M. François Goulard.

Monsieur le président, j'entends, par ce rappel au règlement, solliciter une organisation différente de la suite de nos débats, de telle sorte que nous puissions terminer ce soir à une heure raisonnable et que nous trouvions dans le calendrier parlementaire un autre moment pour poursuivre la discussion sur l'assurance maladie. Ainsi, un plus grand nombre d'entre nous pourraient y participer et Mme Aubry pourrait être présente.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Mon cher collègue, nous avons pris acte de vos remarques. Cela dit, la longueur des débats est aussi à mettre en relation avec le nombre d'amendements. Il y a une quinzaine ou une vingtaine d'années, il y en avait beaucoup moins. Leur multiplication allonge évidemment la durée des débats.

Reprise de la discussion

M. le président.

Nous reprenons la discussion des articles.

Article 14

M. le président.

« Art. 14. - I. - Le troisième alinéa de l'article L. 355-23 du code de la santé publique est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les dépenses afférentes aux missions énoncées dans le présent article sont prises en charge par l'assurance maladie, sans qu'il soit fait application des dispositions du code de la sécurité sociale et du code rural relatives à l'ouverture du droit aux prestations couvertes par les régimes de base, au remboursement de la part garantie par l'assurance maladie, à la participation de l'assuré aux tarifs servant de base aux remboursements ainsi qu'au forfait mentionné à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale.

« Un décret fixe les modalités d'application du présent article. »

« II. Au chapitre IV du titre VII du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est inséré une section IX intitulée : "Dépenses relatives aux prestations dispensées dans des consultations à vocation préventive" qui comprend l'article L. 174-16 ainsi rédigé :

« Art. L. 174-16 . - I. - Les dépenses des consultations de dépistage anonymes et gratuites prévues à l'article L. 355-23 du code de la santé publique et réalisées dans les établissements de santé soumis au régime de financement institué à l'article L. 174-1 sont incluses dans la dotation globale annuelle des établissements concernés, dans les conditions prévues par l'article L. 174-1.

« La répartition des sommes versées aux établissements au titre de l'alinéa précédent est effectuée chaque année suivant la répartition de la dotation globale hospitalière pour l'année considérée, telle qu'elle résulte de l'application de l'article L. 174-2.

« Ces dépenses sont incluses dans l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses des établissements prévu à l'article L. 174-1-1.

« II. Les dépenses des consultations de dépistage prévues à l'article L. 355-23 du code de la santé publique et effectuées dans des structures autres que celles mentionnées au I sont prises en charge par l'assurance maladie sous la forme d'une dotation forfaitaire annuelle.

« Les modalités d'application du présent II sont fixées par décret. »

« III. L'article 6 bis de la loi no 67-1176 du 28 décembre 1967 relative à la régulation des naissances et abrogeant les articles L. 648 et L. 649 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. 6 bis . - Sans préjudice des dispositions du titre II du livre III du code de la santé publique, les centres de planification ou d'éducation familiale peuvent, dans le cadre de leurs activités de prescription contraceptive et sous la responsabilité d'un médecin, assurer le dépistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle. Ils assurent de manière anonyme le dépistage et le traitement de ces maladies. Ils interviennent à titre gratuit en faveur des mineurs qui en font la demande et des personnes qui ne relèvent pas d'un régime de base d'assurance maladie ou qui n'ont pas de droits ouverts dans un tel régime. Dans ces cas, les dépenses relatives au dépistage et au traitement sont prises en charge par les régimes d'assurance maladie, sans qu'il soit fait application des dispositions du code de la sécurité sociale et du code rural relatives à l'ouverture du droit aux prestations couvertes par les régimes de base, au remboursement de la part garantie par l'assurance maladie et à la participation de l'assuré aux tarifs servant de base aux remboursements.

Un décret pris après avis du conseil supérieur d'hygiène publique de France fixe les modalités d'application du présent article. Ce décret fixe également les conditions dans lesquelles les dépenses afférentes à ce dépistage et à ce traitement sont prises en charge par les organismes d'assurance maladie sur la base des tarifs déterminés dans les conditions prévues au chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale. »

« IV. Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2000.

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Nous progressons, mes chers collègues, puisque nous arrivons à l'article 14 de ce projet qui en comporte 31. Et je précise que l'article 1er , qui concerne le rapport annexé au projet et traite des problèmes de santé publique de notre pays, est réservé et renvoyé à la fin de la discussion.

L'article 14 me pose quelques problèmes et, bien que je n'aie pas déposé d'amendement, je souhaiterais obtenir des réponses à mes questions.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Le budget du secrétariat d'Etat à la santé et à l'action sociale est extrêmement modeste. Cet article et le suivant déchargent le ministère de certaines compétences importantes. A l'article 14, il est question qu'il se déssaisisse des consultations de dépistage anonyme et gratuit prévues dans les établissements de santé, notamment pour le sida.

Il y est question aussi des centres de planification ou d'éducation familiale dont le Gouvernement souhaite également se décharger.

Je m'étonne que le Gouvernement, qui doit avoir une vue globale de ces problèmes, puisse accepter de se décharger sur la caisse nationale d'assurance maladie de problèmes de santé aussi importants. J'espère qu'il ne s'agit pas d'un problème uniquement financier. Dans un cas, il s'agit de 27 millions de francs, dans l'autre cas, près de 3 millions de francs.

Je souhaiterais donc savoir, premièrement, si l'Etat compensera, hors ONDAM, ces quelque 30 millions de francs ? Deuxièmement, le versement aux établissements chargés des consultations de dépistage sera-t-il effectué hors dotation globale ? Les établissements de santé serontils « rebasés » pour prendre en compte les dépenses qu'ils effectuent et dont l'Etat semble apparemment vouloir se décharger ? Il serait logique, à mon sens, que vous prévoyiez de « rebaser » chaque établissement hors dotation globale.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet article est révélateur de la manière dont le Gouvernement assume ses responsabilités en matière sociale. Il joue dans la confusion, se décharge et transfère le poids des centres de dépistage anonyme et gratuit du VIH ainsi que des centres d'éducation et de planning familial sur la CNAM.

B ien entendu, cette attitude appelle plusieurs remarques et motivera notre opposition.

Le Gouvernement ne veut décidément pas que l'éducation sanitaire et la prévention soient du ressort d'une politique d'Etat. La France est un des seuls grands pays qui n'ait pas de politique de prévention ni de politique d'éducation sanitaire identifiée. La France, hélas ! et tous les gouvernements d'ailleurs y ont leur part de responsabilité, mais l'actuel plus que les autres, a un budget de la santé inférieur à 0,5 % du budget de l'assurance maladie.

Cela continuera à s'aggraver, notamment avec des dispositions de cette nature, parce que l'éducation à la santé, à la prévention des maladies, du tabagisme, des dépendances, l'éducation sexuelle, l'information sur les pratiques à risque, relèvent d'une politique de l'Etat. Bref, c'est la continuité dans la confusion entre les dépenses d'Etat concernant une politique de l'emploi et les dépenses de sécurité sociale concernant l'action sociale.

Mais, sur ce point, la gravité est extrême. L'ensemble de ces dispositions confirment l'absence désolante de volonté de mettre un terme à une situation qui relègue la France au niveau des pays sous-développés en matière d'éducation sanitaire. On oublie trop que l'allongement de la vie considérable depuis plusieurs décennies est essentiellement dû à deux progrès : l'hygiène, d'abord, et les vaccins, ensuite.

Il est donc bien dommage que le Gouvernement décide de se désintéresser de la structuration de la prévention. Mme la secrétaire d'Etat me renverra sans doute à une future loi sur la santé publique, mais je lui répondrai qu'il n'y a pas de loi sans moyens.

Bref, en reportant ces charges nouvelles sur le régime général et l'assurance maladie, le Gouvernement s'engage dans une voie où nous ne pouvons le suivre. Nous dénonçons donc ce mécanisme dangereux.

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet.

M. Jean Bardet.

Je tiens à m'associer aux propos de M. Goulard sur l'organisation de nos travaux. On ne peut en effet pas prétendre que l'opposition a fait de l'obstruction et si nous commençons à peine l'examen des textes consacrés à la maladie, c'est parce que, durant quatre jours, nous avons discuté d'articles qui n'auraient pas dû figurer dans ce projet de loi.

M. Bernard Accoyer.

Très bien !

M. Jean Bardet.

Je me souviens de l'époque - je ne citerai pas de noms -, où certains, maintenant ministres, prenaient la parole des heures durant pour défendre des motions de procédure sans qu'on puisse leur couper la parole, car notre règlement, à l'époque, ne l'autorisait pas encore.

M. Bernard Accoyer.

Il y a eu 4 000 amendements sur les textes sur la sécurité sociale !

M. Jean Bardet.

Exactement ! Or tous les amendements que nous avons proposés étaient intéressants et si, à une époque, il y avait effectivement moins d'amendements, c'est peut-être que parce que les textes étaient moins complexes et portaient sur des sujets plus précis.

J'en reviens à l'article 14. Les lois de décentralisation qui ont été discutées il y a maintenant près de dix-huit ans sous des gouvernements qui n'étaient pas de droite ont, de façon extrêmement stricte, précisé ce qui revenait à l'Etat, aux régions et aux départements. En fait, peu de choses pour la région.

Depuis l'année dernière, nous observons un désengagement de l'Etat en matière de santé dans les domaines qui lui incombaient, les centres d'hygiène alimentaire et d'alcoologie, le programme national de dépistage des cancers par exemple. Je m'étais élevé contre cela, mais cette année, le gouvernement poursuit dans cette voie.

L'article 14 propose en effet de transférer, à compter du 1er janvier 2000, aux organismes d'assurance maladie la part à la charge de l'Etat des dépenses relatives au dépistage et au traitement de certaines maladies réalisés par les consultations de dépistage anonyme et gratuit - en fait, le dépistage des maladies sexuellement transmissibles - et les centres de planification ou d'éducation familiale.

Bien évidemment, cet article prévoit une compensation financière de l'Etat vers l'assurance maladie d'un montant de 27 millions de francs pour les CDAG et de 2,72 millions de francs pour les CPEF. Malheureusement, on sait par expérience que ces transferts ne résistent pas au temps, on l'a vu à propos d'autres sujets. Nous n'avons aucune garantie que ces dotations resteront pour les années à venir à des niveaux satisfaisants.

Pour toutes ces raisons, l'article 14 du projet de loi me semble tout à fait inadapté aux exigences d'une prévention moderne.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

L'article 14 a un enjeu financier apparemment modeste - 2,72 millions de francs pour les centres de planification ou d'éducation familiale, pour ne citer qu'eux. J'admire la précision du chiffrage et observe qu'il est assez rare de consacrer une page complète d'un projet de loi à une somme aussi modeste.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

M. Bernard Accoyer.

Sur les retraites, il y a 20 lignes !

M. François Goulard.

Au-delà de ces chiffres modestes, la question soulevée est celle de la répartition des rôles entre l'Etat, d'une part, l'assurance maladie, de l'autre, en matière de santé publique, de dépistage des maladies et de prévention.

Sans doute avez-vous annoncé une grande loi - quelle loi n'est pas grande ? - sur la santé publique. Mais pour l'instant force est de constater que nous sommes dans le flou le plus total, faute d'avoir précisé le rôle exact de l'assurance maladie dans ce domaine.

Je n'ai, personnellement, rien de particulier contre votre article, sinon qu'on ne voit pas pourquoi vous proposez une telle réforme au moment où vous nous annoncez une loi sur la santé publique.

Il aurait été cohérent de redéfinir les rôles respectifs de l'Etat et de l'assurance maladie dans la loi future - peutêtre est-ce votre projet ? - mais commencer par une mesure mineure qui déplace la frontière traditionnelle, les financements de l'Etat et ceux de la sécurité sociale me paraît assez déplacé, alors même que sont nécessaires une réforme d'ensemble et une vision prospective suffisamment large qui nous dise qui fait quoi dans ce pays, dans un domaine aussi important. Mes collègues qui ont l'avantage sur moi de réagir en tant que spécialistes et d'un point de vue professionnel sur ces sujets vous ont dit à quel point il était essentiel de revoir l'approche française en matière de prévention et de dépistage des maladies. C'est un chantier qui reste à ouvrir. Nous ne comprenons pas dans cette perspective le petit bricolage - pardonnez-moi le terme, qui n'est pas péjoratif dans ma bouche - auquel vous vous livrez en attente de la grande réforme que nous appelons tous de nos voeux.

M. Bernard Accoyer.

Les 35 heures favorisent le bricolage !

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques nos 34 et 343.

L'amendement no 34 est présenté par M. Bardet ; l'amendement no 343 est présenté par MM. Accoyer, Demange, Jacob, Robert Lamy, Mariani, Masdeu-Arus, Muselier et Delnatte.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 14. »

La parole est à M. Jean Bardet, pour soutenir l'amendement no

34.

M. Jean Bardet.

J'ai déjà présenté la plupart de mes arguments. J'ajouterai - c'est un compliment que je fais au Gouvernement et je vous prie d'en prendre note parce que cela ne m'arrive pas vraiment souvent - que l'impact financier de cet article est précisé. C'est un progrès par rapport aux articles un peu semblables que nous avions examinés l'année dernière, mais pour lesquels on étaient dans le plus grand flou artistique quant aux conséquences financières des transferts sur les organismes d'assurance maladie. Mais il n'est pas prévu, alors même que ces dépenses entreront désormais dans l'ONDAM, de fléchages particuliers permettant leur suivi et l'on ignore quels seront les transferts financiers l'année suivante.

De plus, alors que les dépenses de santé publique n'atteignent pas 0,5 % des dépenses de l'assurance maladie, on ne comprend pas bien que l'Etat se dégage d'une mission aussi importante que la préservation de la santé de nos concitoyens.

M. le président.

Monsieur Accoyer pouvez-vous défendre en même temps vos amendements nos 344, 345, 346, 347 et 348 ?

M. Bernard Accoyer.

Certainement, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 344 est ainsi rédigé :

« Supprimer le I de l'article 14. »

L'amendement no 345 est ainsi rédigé :

« Au début du deuxième alinéa du I de l'article 14, insérer les mots : "Sous réserve de l'avis conforme du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie". »

L'amendement no 346 est ainsi rédigé :

« Supprimer le II de l'article 14. »

L'amendement no 347 est ainsi rédigé :

« Supprimer le III de l'article 14. »

L'amendement no 348 est ainsi rédigé :

« Supprimer le IV de l'article 14. »

Vous avez la parole, monsieur Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

J'insisterai en particulier sur l'amendement no 345 qui prévoit que le tranfert de charges financières qui amputera l'ONDAM d'une partie non négligeable, près de 30 milliions de francs, soit soumis à l'avis conforme du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie.

Le Gouvernement se sert de la caisse d'assurance maladie comme d'un bouclier pour éviter les déflagrations du conflit frontal qu'il est en train d'engager avec les professions de santé, et bientôt avec les usagers. Il serait tout à fait normal que la caisse nationale d'assurance maladie puisse accepter ou non ce transfert de charges.

J'ai déposé ces quelques amendements à cet article 14, car j'observe que le Gouvernement refuse désormais d'avoir le sida pour priorité. Les moyens qui ont été affectés à la lutte contre le sida par les précédents gouvernements ont été appréciés à leur juste valeur. Ces moyens étaient considérables, tant sur le plan du dépistage et des soins pour les malades contaminés, et sur le plan des campagnes d'information et de prévention, que sur le plan du développement des centres de dépistage anonyme et gratuit. Il est tout à fait désolant que le Gouvernement abandonne la priorité que les gouvernements précédents ont donnée à la lutte contre le sida.

Certes, le VIH est devenu une maladie sexuellement transmissible banale, et c'est en ce sens qu'elle est particulièrement redoutable. Cette banalité signifie que n'importe qui, quelles que soient ses pratiques, peut être concerné par la contamination. C'est maintenant qu'il faut redoubler de vigilance, d'autant que les traitements par antiprotéase apportent une apparente sécurité et que la peur du virus pourrait s'atténuer, alors qu'il reste au demeurant toujours aussi dangereux, toujours mortel. De surcroît, nous ne sommes pas à l'abri de mutations qui rendraient le virus résistant à tout traitement. D'ailleurs, aucun traitement aujourd'hui n'est encore capable de guérir l'infection au VIH. Il peut simplement atténuer temporairement ses effets.

Il convient donc de garder cette priorité absolue de santé publique, et le fait que le Gouvernement l'abandonne est pour nous de la plus haute gravité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

M. Claude Evin, rapporteur.

La commission est naturellement défavorable aux amendements de suppression.

En réponse aux interventions aussi bien sur l'article que sur les amendements de suppression, je dirai que je considère moi aussi nécessaire de développer une poli-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

tique de prévention. Mais je fais observer à mes collègues que le sujet dont nous débattons à l'article 14 ne concerne pas directement, même si le dépistage en est un élément, l'ensemble des campagnes de prévention dont ils ont parlé.

En ce qui concerne les centres de dépistage anonymes et gratuits, l'Etat prend encore en charge 15 % des dépenses, la prise en charge du reste étant déjà assurée par les caisses de sécurité sociale.

En ce qui concerne les centres de planification et d'éducation familiale, la prise en charge de la majeure partie des dépenses - 70 % - est là aussi assurée par les caisses de sécurité sociale, l'Etat en prenant en charge 30 %.

On s'achemine donc vers un transfert de l'Etat vers les caisses de sécurité sociale de la prise en charge des dépenses de ces centres. Ce mouvement a commencé il y a déjà un certain temps puisque, à l'origine, l'Etat prenait en charge 30 % des dépenses des centres de dépistage anonyme et gratuit.

En tout état de cause, il n'y a pas - je crois qu'il était important de le rappeler - ésengagement de l'Etat. Il y a donc sur ce point désaccord entre nous.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

La proposition procède d'une logique, à savoir que la prévention secondaire doit être prise en charge par les comptes de la sécurité sociale au même titre que les analyses biologiques que les patients vont faire sur prescription médicale. Le mouvement est engagé, comme l'a dit Claude Evin, depuis plusieurs années. L'année dernière, ce sont les CHAA dont les dépenses ont été prises en charge à 100 % par le budget de la caisse primaire d'assurance maladie. Cette année, il est proposé que ce soient les CDAG et les CPEF. Par cette démarche, nous reconnaissons que la prévention est aussi un acte de santé publique qui doit être pris en charge par la protection sociale.

En récupérant l'argent qui était consacré à ces actions, l'Etat pourra ainsi développer d'autres actions de santé publique, de prévention et d'éducation à la santé, qui le mobilisent, croyez-le bien, autant que vous, messieurs de l'opposition.

Il est faux de parler d'un quelconque désengagement de l'Etat. C'est la loi qui fixera les missions et les obligations des organismes concernés. Ces derniers agiront donc en fonction des dispositions qui seront prises dans les décrets. Seul le portage financier est transféré de l'Etat aux caisses d'assurance maladie. Le potentiel financier que pourra ainsi récupérer l'Etat lui permettra de développer d'autres actions.

M. Jean-Luc Préel.

Madame la secrétaire d'Etat, me permettez-vous de vous interrompre...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Non, monsieur Préel, vous nous avez largement abreuvé de vos arguments. Je vous prie d'écouter maintenant les miens. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Luc Préel.

Je vous en prie ! Que signifie ce mot d'abreuver ?

M. Bernard Accoyer.

C'est incroyable !

M. le président.

S'il vous plaît, mes chers collègues !

M. Jean-Luc Préel.

Mesurez vos propos, vous êtes un membre du gouvernement de la République, madame ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Et vous un membre de la représentation nationale !

M. le président.

Veuillez poursuivre, madame la secrétaire d'Etat.

M. Jean-Luc Préel.

Vous manquez d'élégance, madame !

M. Guy-Michel Chauveau.

Du calme !

M. Jean-Claude Lefort.

Allons ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Monsieur Préel, soyez gentil.

M. Jean-Luc Préel.

Si vous le prenez comme ça...

(Sourires.)

M. Recours ayant déjà usé de l'image de l'âne qui ne voulait pas boire, en rapport avec le proverbe,...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Non, moi je ne me suis pas permis de dire cela.

M. Jean-Luc Préel.

... vous comprendrez mon courroux quand je vous ai entendue employer le verbe « abreuver ».

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je voulais simplement dire que vous avez eu à plusieurs reprises l'occasion de vous exprimer. Je retire le mot « abreuver ». (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Luc Préel.

Ah ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Vous nous avez dispensé longuement votre argumentation et nous en avons fait notre miel. C'est pour cela que je souhaite maintenant vous répondre précisément. (Rires sur divers bancs.)

Pourquoi propose-t-on de supprimer la participation à hauteur de 30 % de l'Etat aux dépenses des CDAG ? La détection des anticorps anti-VIH n'était pas, à l'époque, remboursée à 100 % par l'assurance maladie. Il était donc naturel que l'Etat contribue pour partie à la prise en charge des dépenses dans un dispositif qui se voulait anonyme et gratuit. En 1992, la participation de l'Etat a été ramenée à 15 %. Aujourd'hui, et depuis 1993, la prise en charge par l'assurance maladie des frais de dépistage se fait au taux de 100 %. Il n'y a donc plus lieu de prévoir de financement spécifique de l'Etat.

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas valable ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Il ne s'agit en aucun cas d'un désengagement de l'Etat...

M. Bernard Accoyer.

Si ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

... puisque les moyens totaux alloués par la loi de finances en matière de lutte contre le sida et les maladies transmissibles se monteront à près de 525 millions de francs en 2000, soit une progession de 5,6 % par rapport à l'année dernière.

Le transfert du financement des CDAG et des CPEF à l'assurance maladie permet au contraire une réallocation des moyens de l'Etat en matière de lutte contre le sida et


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

l es maladies sexuellement transmissibles sur d'autres actions. Vous nous avez expliqué à juste titre qu'il fallait rester vigilant en ce domaine. Il est donc envisagé, grâce aux sommes récupérées par l'Etat, de renforcer les moyens disponibles auprès des services déconcentrés, qui v ont bénéficier d'une allocation supplémentaire de 6,657 millions de francs, et d'allouer pour la première fois des moyens aux actions de solidarité thérapeutique internationale, pour 21 millions de francs.

Regardons la situation : aujourd'hui, l'assurance maladie prend à sa charge les actes de prévention individuelle.

Et c'est, somme toute, fort logique dès lors qu'on veut intégrer cette pratique à l'offre de soins, ce qui représente une avancée vers la modernité.

Je vous rappelle que, ce titre, l'assurance maladie finance le dépistage des maladies aux conséquences mortelles évitables ainsi que le Parlement en a décidé l'année dernière en adoptant l'article 20 de la loi de financement pour 1999.

Ce mouvement s'inscrit dans une évolution de l'assurance maladie qui ne s'intéresse plus seulement à guérir mais aussi à prévenir et à éduquer. Cette orientation, le Gouvernement l'encourage et la favorise.

Par ailleurs, je vous rappelle l'extension des missions des consultations de dépistage, votée dans le cadre de la loi portant couverture maladie universelle, à d'autres maladies transmissibles comme l'hépatite C.

L'infection à VIH comme l'hépatite C demandent une prise en charge globale et conduisent à réfléchir à un système de paiement plus adapté que le paiement à l'acte.

A une prise en charge globale doit correspondre un financement global.

La prise en charge des consultations par l'assurance maladie, dans des conditions renouvelées, constitue donc une mesure de simplification et de cohérence.

De même, le transfert aux organismes d'assurance maladie de la part à la charge de l'Etat pour les dépenses relatives aux dépistages et traitements réalisés par les centres de planification et d'éducation familiale, pour les mineurs qui en font la demande et les personnes qui ne relèvent d'aucun régime d'assurance maladie, simplifie les démarches de ces centres en vue du remboursement des frais ainsi engagés.

Les CPEF s'adresseront désormais à un interlocuteur unique : l'assurance maladie.

Aussi cet article est-il important et le Gouvernement ne peut être que défavorable à un amendement demandant sa suppression.

M. le président.

Monsieur Bardet, vous souhaitez faire un dernier commentaire ?

M. Jean Bardet.

Nous ne pouvons pas vous reprocher, madame la secrétaire d'Etat, de ne pas nous avoir répondu longuement ; votre réponse était très complète.

J'ai cependant noté deux points qui m'ont un peu inquiété et qui corroborent ce que nous dénonçons.

Vous avez dit que le transfert de charges vous permettrait de dégager de l'argent pour engager d'autres actions.

Si, après le transfert de charges, il reste de l'argent, c'est que le transfert vers l'assurance maladie n'est pas total.

Vous gardez donc un petit pécule pour d'autres actions.

Et c'est ce que nous dénonçons.

Vous avez dit également que, le dépistage du VIH n'étant pas avant pris en charge à 100 % par la sécurité sociale, il était normal que l'Etat contribue, pour partie, à la prise en charge des dépenses. Si, désormais, il est pris en charge à 100 % par la sécurité sociale, cela signifie qu'il y a une charge supplémentaire pour la sécurité sociale et que l'Etat se désengage de ses actions. C'est exactement ce que nous dénonçons.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je ne veux pas que nous restions sur un malentendu.

M. Jean-Claude Lefort.

Mais ce n'est pas un malentendu ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Le budget de la sécurité sociale va effectivement prendre en charge à 100 % le dépistage, monsieur le député. C'est prévu par l'ONDAM.

M. Bernard Accoyer.

Pas pour tous les centres de dépistage.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'actions ociale.

Non, pas pour tous, monsieur Accoyer.

L'article 1er concerne les CDAG dont l'assurance maladie va devenir le seul interlocuteur.

Les sommes que l'Etat consacrait au complément de financement du dépistage effectué dans ces centres vont être affectées à des actions de prévention primaire et d'éducation à la santé, comme vous le souhaitez et comme nous nous y sommes engagés.

Et, vraiment, je ne comprends pas pourquoi vous nous cherchez des poux dans la tête !

M. Jean Bardet.

Oh ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Excusez-moi, je parle de manière directe, tout comme il vous arrive de le faire, afin d'être claire et de me faire bien comprendre.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

34. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 343.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 344.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 345.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 346.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 347.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 348.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Article 15

M. le président.

« Art.

15. I. L'article 3 de la loi no 70-1320 du 31 décembre 1970 modifiée relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et la répression du trafic et de l'usage illicite des substances vénéneuses est ainsi rédigé :

« Art. 3. Les dépenses de prévention résultant du titre VI du livre III du code de la santé publique, ainsi que les dépenses de soins des personnes mentionnées à l'article L. 355-21 de ce code, sont à la charge de l'Etat.

« Toutefois, lorsque la cure de désintoxication est réalisée avec hébergement dans un établissement de santé, les dépenses afférentes à la cure sont prises en charge par les régimes d'assurance maladie, sans qu'il soit fait application des dispositions du code de la sécurité sociale et du code rural relatives à l'ouverture du droit aux prestations couvertes par les régimes de base, au remboursement de la part garantie par l'assurance maladie, à la participation de l'assuré aux tarifs servant de base au remboursement ainsi qu'au forfait mentionné à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale. »

« II. Le second alinéa de l'article L. 628-5 du code de la santé publique est remplacé par les dispositions suivantes :

« Les dépenses d'aménagement des établissements de cure ainsi que les dépenses de soins entraînées par l'application des articles L. 628-1 à L. 628-3 sont prises en charge par l'Etat.

« Toutefois, lorsque la cure de désintoxication est réalisée avec hébergement dans un établissement de santé, les dépenses afférentes à la cure sont prises en charge par les régimes d'assurance maladie, sans qu'il soit fait application des dispositions du code de la sécurité sociale et du code rural relatives à l'ouverture du droit aux prestations couvertes par les régimes de base, au remboursement de la part garantie par l'assurance maladie, à la participation de l'assuré aux tarifs servant de base au remboursement ainsi qu'au forfait mentionné à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application des dispositions des deux alinéas précédents. »

« III. Au chapitre IV du titre VII du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est créé une section X ainsi rédigée :

« Section X

« Dépenses afférentes aux cures de désintoxication

« Art. L. 174-17. Dans les établissements de santé régis par l'article L. 174-1, les dépenses liées à une cure de désintoxication réalisées avec hébergement et prises en charge par l'assurance maladie au titre de l'article 3 de la loi no 70-1320 du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et la répression du trafic et de l'usage illicite des substances vénéneuses et de l'article L. 628-5 du code de la santé publique sont incluses dans la dotation globale annuelle des établissements concernés, dans les conditions prévues par l'article L. 174-1.

« La répartition des sommes versées aux établissements au titre du précédent alinéa est effectuée chaque année suivant la répartition de la dotation globale hospitalière pour l'année considérée, telle qu'elle résulte de l'application de l'article L. 174-2.

« Les dépenses mentionnées au premier alinéa sont i ncluses dans l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses des établissements prévu à l'article L. 174-1-1. »

« IV. Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2000. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

L'article 15 ressemble comme à un frère à l'article 14. Là encore, se pose le problème du désengagement de l'Etat dans des domaines très importants et d'un transfert financier sans compensation sur l'assurance maladie. Les collectivités locales les régions, les départements et les villes sont habituées à des transferts de ce type. Cela ne nous paraît pas raisonnable concernant l'Etat.

L'article 15 modifie de manière importante l'article 3 de la loi du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie. Il prévoit de transférer désormais aux régimes d'assurance maladie les dépenses liées aux cures nécessitant un hébergement dans un établissement de santé.

Il s'agit là d'une disposition relativement grave parce qu'elle pourrait avoir pour conséquence, à terme, un abandon pour l'Etat d'une double fonction régalienne, à savoir sa mission de soins pour ceux qui sont en état de faiblesse et sa fonction de garant de l'ordre public.

Je n'entrerai pas dans les détails pour ne pas prolonger la discussion, mais j'observe qu'il s'agit là d'un transfert financier de 73 millions de francs. Je n'ai pas compris comment seront financés les hôpitaux, et si une dotation hors enveloppe est prévue. Quant au forfait journalier, je voudrais savoir par qui il sera pris en charge pour les toxicomanes hébergés.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je souhaite m'exprimer sur l'article parce qu'il a une importance qui n'échappe à parsonne. Il procède de la même philosophie que l'article 14 et nous le dénonçons de la même façon. Nous n'admettons pas que l'Etat se défile de ses responsabilités.

D'autant que dans le domaine de la prise en charge des cures de désintoxication avec hébergement de toxicomanes un problème va se poser. En effet, en mettant sur le dos de l'ONDAM, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, les dépenses de cure pour les toxicomanes hébergés, nous allons nous trouver devant une difficulté de première grandeur dans les cas où une injonction thérapeutique est prescrite par voie judiciaire.

Lorsqu'un toxicomane est convaincu devant une juridiction d'utiliser des produits stupéfiants provoquant une dépendance, il tombe sous le coup d'une disposition du code pénal qui prévoit l'injonction thérapeutique. Autrement dit, il est obligé de se faire soigner.

Comment, madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous assurer que les dotations d'établissements permettront de satisfaire à cette obligation judiciaire, à cette obligation régalienne en quelque sorte ? Il nous semble que le Gouvernement n'a pas, dans ce cas précis, mesuré les conséquences de son désengagement.

La toxicomanie est, malheureusement, un mal terrible qui frappe nos sociétés, et tout spécialement la jeunesse, et progresse de manière particulièrement rapide. Sur le plan de la symbolique, il est tout à fait désolant que, tout comme il l'a fait à l'article 14 en matière de lutte contre le SIDA qui n'est plus sa priorité, le Gouvernement se désengage là aussi en transférant sur l'assurance maladie le financement des traitements proposés aux toxicomanes.

Les conséquences tant financières que sanitaires sont tellement importantes que nous ne pouvons les accepter.

C'est pourquoi nous nous opposerons à l'article 15.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet.

M. Jean Bardet.

L'article 15 relève de la même logique que l'article 14, mais il est beaucoup plus grave du fait de ses implications judiciaires, comme vient de le dire à juste titre notre collègue Bernard Accoyer. Je ne suis pas sûr que le Gouvernement s'en soit rendu compte, et je souhaite même d'ailleurs qu'il n'en soit pas conscient.

Sinon, ce serait très grave.

L'article 15 du présent projet de loi modifie substant iellement l'article 3 de la loi no 70-1320 du 31 décembre 1999 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie.

Il prévoit de transférer désormais aux régimes d'assurance maladie les dépenses liées aux cures nécessitant un hébergement dans des établissements de santé.

Il s'agit là d'une disposition grave qui pourrait avoir pour conséquence, à terme, un abandon, par l'Etat, d'une double fonction régalienne, à savoir sa mission de soins pour ceux qui sont en état de faiblesse et sa fonction de garant de l'ordre public.

M. Bernard Accoyer.

C'est tout à fait inacceptable !

M. Jean Bardet.

Traditionnellement, les problèmes liés à la toxicomanie font l'objet d'approches différentes selon les personnes en charge de ce fléau.

T out d'abord, le milieu médical est directement concerné quant aux soins à prodiguer.

Ensuite - et c'est tout aussi important -, les acteurs dus ystème socio-éducatif sont impliqués pour ce qui concerne la prévention et l'aspect humain de la réinsertion.

Enfin, les infractions sur la législation des stupéfiants sont du ressort des juridictions répressives.

Le code de la santé publique prévoit que le parquet ou la juridiction de jugement peuvent rendre une ordonnance d'injonction thérapeutique à l'encontre des usagers des stupéfiants.

On est en droit de redouter que, demain, une personne faisant l'objet d'une telle injonction et nécessitant un placement permanent dans un établissement se santé ne puisse trouver de place, car les crédits nécessaires n'auront pas été débloqués.

En effet, il est prévu que les dépenses afférentes à ce transfert seront incluses dans le budget global.

Si, pour l'an 2000, l'impact financier de ce transfert est évalué à 73 millions de francs, qu'en sera-t-il les années suivantes vu les restrictions budgétaires actuelles, surtout dans les hôpitaux situés dans des régions où la dotation sera inférieure à la moyenne ? Outre les conséquences graves pour sa santé, on mesure aisément dans quelle situation se trouverait ce justiciable.

Compte tenu du fait qu'il s'agit d'une injonction et non d'une mesure de placement, il n'appartient pas à l'autorité judiciaire de rechercher un établissement d'accueil.

Il n'est donc pas souhaitable de transférer à un organisme paritaire la gestion de la prévention médicale dans un domaine aussi complexe que les soins aux toxicomanes qui sont en liaison étroite avec l'exécution de décisions de justice.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

L'article 15 comporte plusieurs aspects, dont l'aspect judiciaire traité par les intervenants précédents, sur lequel je ne reviens pas si ce n'est pour souscrire aux propos de mon collègue Bardet.

Comme l'article précédent, cet article opère une modification de frontière entre l'Etat et l'assurance maladie, assortie d'un transfert financier qui, pour être modeste, n'est pas totalement négligeable : 73 millions de francs, si j'en crois l'exposé des motifs. Cette modification de frontière n'est pas opportune dès lors que la répartition des tâches entre la prévention, le dépistage et la couverture des dépenses de santé n'a pas été arrêtée. L'article 15 appelle par conséquent les mêmes critiques de notre part que l'article 14 ; nous ne pouvons que nous y opposer.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

M. Accoyer - ou plutôt M. Bardet, je ne sais plus...

M. Jean Bardet.

Aucune importance, l'opposition est unie ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

L'opposition unie donc rappelait que la toxicomanie est un mal terrible pour notre société. Effectivement ! Mais cet article ne traduit en rien un désengagement de la prévention. Il s'agit simplement d'un transfert de la prise en charge des soins liés à ce fléau.

Il n'y a pas à établir de liaison directe entre l'injonction thérapeutique et la nécessité de soigner les toxocimanes. C'est la reconnaissance des pathologies liées à la toxicomanie et à la dépendance, qui justifie leur prise en charge par l'hôpital.

Le transfert vers l'assurance maladie du financement des cures de sevrage des toxicomanes réalisées en milieu hospitalier s'explique par le fait du caractère médicalisé du sevrage. Il s'agit en effet d'un soin à part entière, qu'il ne paraît pas justifié de distinguer pour sa prise en charge d'autres types de soins de même nature, tels que les cures de sevrage alcoolique. La durée moyenne de la cure est de huit jours. Celle-ci est effectuée en hospitalisation continue.

L'injonction thérapeutique quant à elle ne justifie pas toujours une hospitalisation en continu. Mais si tel est le cas, elle sera prise en charge de la même manière. Cela me paraît de nature à mieux garantir l'anonymat et la prise en chage du bénéficiaire que dans un système où l'hôpital est obligé de se retourner vers les autorités départementales pour se faire rembourser de la prise en charge des injonctions. Le patient est protégé, le toxicomane est considéré comme un malade qui a besoin de soins.

D'après les données de 1998, on peut évaluer à environ 4 000 le nombre de cures de sevrage réalisées sur un an. Il me semble tout à fait logique que l'assurance maladie finance les dépenses de soins et, comme nous l'avons vu à l'article précédent, les dépenses de prévention individuelle. Dès lors que cela entre dans ses missions, le financement doit lui revenir. C'est affaire de bonne administration et finalement de simple logique.

Remettre à la charge de l'Etat le coût occasionné par ce transfert, comme le proposent vos amendements, reviendrait bien évidemment à annuler la portée de cette mesure et à dénier aux cures de sevrage en milieu hospitalier le caractère de soin qu'il s'agit précisément de reconnaître.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Le Gouvernement s'attache à clarifier les responsabilités des pouvoirs publics et des régimes d'assurance maladie ; vous ne pouvez nier l'intérêt d'une disposition qui met de l'ordre dans le financement.

C'est de surcroît une mesure de simplification administrative. Ce nouveau mode de prise en charge par l'assurance maladie permet de simplifier la procédure budgétaire en intégrant cette charge au sein de la dotation globale hospitalière. Les établissements de santé n'auront désormais plus à présenter leurs factures auprès des services déconcentrés de l'Etat pour obtenir le remboursement des frais occasionnés par la prise en charge des cures de sevrage des toxicomanes.

J'ajouterai pour terminer que le transfert vers l'assurance maladie du financement des cures de désintoxication ne modifie pas les modalités de prise en charge vis-àvis du patient. Gratuité et anonymat sont des principes essentiels ; ils seront préservés. Je suis donc défavorable aux amendements de suppression.

M. Jean Bardet.

Ils n'ont pas encore été présentés !

M. le président.

Mme la secrétaire d'Etat peut s'exprimer comme elle l'entend, monsieur Bardet.

La parole est à Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

J'aimerais poser une question à Mme la secrétaire d'Etat. Mais est-ce possible ?

M. Claude Evin, rapporteur.

Sur quel sujet ?

M. le président.

C'est possible, madame MathieuObadia.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Madame le secrétaire d'Etat, vous venez de parler d'un transfert de 73 millions à l'assurance maladie. Comment avez-vous évalué ces 73 millions ? Par ailleurs, comment les fonds nécessaires seront-ils répartis entre les agences régionales d'hospitalisation, puis entre les différents CHU ? Comment un CHU pourra-t-il se prévaloir de ses dépenses en la matière ? Le CHU de Nice est le deuxième de France en nombre de cas de toxicomanie à traiter. D'où mes questions.

M. Robert Gaïa.

C'est une question pour les séances du mardi matin !

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

A cette question tout à fait précise, je vais m'efforcer de répondre avec tout autant de précision. Le montant des transferts est calculé sur la base des frais existants, en l'occurrence des factures jusqu'alors présentées au remboursement des services déconcentrés. Nous disposons donc d'une estimation parfaitement fiable, puisqu'elle correspond à la réalité des dépenses engagées en 1999. Une réévaluation pourra intervenir, s'il en est besoin, à la fin de l'exercice. Les dotations seront attribuées aux différents centres hospitaliers dans le cadre de la circulaire de répartition des dotations hospitalières, en fonction des arbitrages et de l'activité constatée dans chaque CHU, conformément à la procédure normale de fonctionnement des services hospitaliers.

M me Jacqueline Mathieu-Obadia.

Nous pourrons donc nous appuyer sur ce que nous avons déjà fait.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Tout à fait.

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 35 et 350.

L'amendement no 35 est présenté par M. Beudet, l'amendement no 350 est présenté par MM. Accoyer, Demange, Jacob, Lamy, Mariani, Masdeu-Arus, Muselier et Delnatte.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 15. »

La parole est à M. Jean Bardet, pour soutenir l'amendement no

35.

M. Jean Bardet.

Je me suis déjà exprimé sur l'article.

A force de répéter, comme Mme Aubry, que les hôpitaux sont dans les clous, vous finissez par le croire, madame la secrétaire d'Etat. Cela en est touchant ! Malheureusement, la situation...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je crois ce que je dis, moi ! (Sourires.)

M. Jean Bardet.

Cela vous fait rire ? La situation quotidienne n'a pourtant rien de risible, particulièrement en fin d'année. Dès le mois d'octobre ou de novembre, la plupart des services hospitaliers se voient obligés de reporter un certain nombre de soins à l'année prochaine ou de transférer leurs malades ailleurs, parce qu'ils ne peuvent plus mettre de prothèses - j'en parle en connaissance de cause - ou parce qu'ils manquent de matériel.

Attendre un mois ou deux n'a parfois pas grande importance, mais il n'en sera pas de même avec les problèmes de toxicomanie. A la question que j'ai posée, comme d'autres sur l'injonction thérapeutique, vous avez simplement répondu qu'elle ne nécessitait pas toujours d'hospitalisation. Pas toujours, certes, mais il arrive que l'hospitalisation soit indispensable...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Allons !

M. Jean Bardet.

Savez-vous au moins ce qu'est le budget global, madame la secrétaire d'Etat ? Cela signifie que dès que l'enveloppe est dépassée, le directeur de l'hôpital vous dit : on ne peut plus ! Mais si tout vous fait rire...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je reste très calme, monsieur Bardet.

M. Jean Bardet.

Je vous parle de santé, madame ! C'est un problème sérieux, pas comme la TGAP !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l'amendement no 350.

M. Bernard Accoyer.

Alors que notre collègue Jean Bardet soulève des questions d'une gravité exceptionnelle, le Gouvernement réagit avec une légèreté particulièrement affligeante.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Vos propos sont scandaleux !

M. Bernard Accoyer.

Heureusement, nous allons vous montrer qu'il y a dans cet hémicycle des parlementaires qui connaissent les priorités et l'importance des problèmes à traiter.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Jean-Claude Lefort.

Quelle suffisance ! Pour qui vous prenez-vous ?

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Pour un médecin, tous simplement !

M. Gérard Terrier.

C'est de la provocation !

M. Bernard Accoyer.

Le sida et la toxicomanie sont effectivement des fléaux des temps modernes. Or les articles 14 et 15 portent en germe un désengagement de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

l'Etat, que nous tenons à dénoncer. Madame la secrétaire d'Etat, notre collègue Bardet vient de vous exposer les difficultés liées au budget global et à l'insuffisance des dotations. Mais peut-être votre nomination récente ne vous a-t-elle pas permis de prendre la mesure de tous les problèmes que rencontrent nombre d'hôpitaux...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

C'est inacceptable !

M. Bernard Accoyer.

... pour continuer à dispenser des soins de qualité et dans des conditions qui vont en se dégradant. Vous avez reçu et vous recevrez certainement les organisations syndicales représentatives des personnels hospitaliers.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je les reçois tous les jours !

M. Bernard Accoyer.

Toutes vous diront leur inquiétude à cet égard. Dans bien des régions, l'insuffisance des dotations ne permet plus de continuer à dispenser un volume de soins constant et de même qualité. L'hôpital est prêt à craquer. Et si Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité répète à l'envi que l'hôpital public est dans les clous, que l'hôpital est merveilleux, que l'hôpital va bien, c'est qu'elle sent très bien les tensions qui agitent ce maillon essentiel à la vie de la nation. En chargeant encore un peu plus l'hôpital public comme vous le faites avec ces articles, vous dégraderez encore un peu plus les conditions matérielles de travail, vous alourdirez encore un peu plus les missions auxquelles sont tenus de répondre les hôpitaux et leurs personnels. C'était le sens de l'intervention de mon collègue Bardet ; c'est également le sens de l'amendement que je défends.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur.

Ces deux amendements de suppression ont été repoussés par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 35 et 350.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 15.

(L'article 15 est adopté.)

Article 16

M. le président.

« Art. 16. - I. - Le livre VII du code de la santé publique est ainsi modifié :

« 1o L'intitulé du livre VII est ainsi rédigé :

« Livre VII. - Etablissements de santé, thermo-climatisme, laboratoires et centres de santé. »

« 2o Il est inséré un titre IV ainsi rédigé :

«

TITRE IV

« CENTRES DE SANTÉ

« Art. L. 765. - I. - Les centres de santé assurent des activités de soins sans hébergement et participent à des actions de santé publique ainsi qu'à des actions de prévention et d'éducation pour la santé.

« Ils sont créés et gérés soit par des organismes à but non lucratif, à l'exception des établissements de santé mentionnés au titre Ier du présent livre, soit par des collectivités territoriales. Ils sont soumis à l'agrément de l'autorité administrative, dans des conditions prévues à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale. »

« II. La section 7 du chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée :

« Section 7

« Centres de santé

« Art. L. 162-32 . - L'agrément des centres de santé prévu à l'article L. 765-1 du code de la santé publique est délivré par l'autorité administrative, sous réserve du résul tat d'une visite de conformité, au vu d'un dossier justifiant que ces centres fonctionneront dans des conditions conformes à des prescriptions techniques correspondant à leur activité.

« Les caisses primaires d'assurance maladie versent aux centres de santé une subvention égale à une partie des cotisations dues par ces centres en application de l'article L. 241-1 pour les personnes qu'ils emploient et qui relèvent des catégories de praticiens ou d'auxiliaires médicaux relevant des sections 1 et 2 du présent chapitre.

« Lorsque le personnel des centres de soins infirmiers est affilié aux assurances sociales agricoles, la partie des cotisations d'assurance maladie versées en application de l'article 1031 du code rural est prise en charge par la caisse de mutualité sociale agricole compétente et imputée sur les dépenses d'assurance maladie.

« Les conditions d'application du présent article, notamment celles relatives à l'agrément, aux prescriptions techniques ainsi qu'au versement de la subvention par les caisses primaires d'assurance maladie, sont fixées par décret.

« Art. L. 162-32-1 . - Les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les centres de santé sont définis par un accord national conclu pour une durée au plus égale à cinq ans par la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, au moins une autre caisse nationale d'assurance maladie et une ou plusieurs organisations représentatives des centres de soins infirmiers, ainsi qu'une ou plusieurs organisations représentatives des centres de soins médicaux, dentaires et polyvalents.

« Cet accord détermine notamment :

« 1o Les obligations respectives des caisses primaires d'assurance maladie et des centres de santé ;

« 2o Les conditions générales d'application des conventions mentionnées aux sections 1, 2 et 3 du présent chapitre aux différents professionnels exerçant dans des centres de santé ; ces conditions ne peuvent pas modifier les tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires déterminés par ces conventions ;

« 3o Les modalités d'organisation des actions de prévention sanitaire menées par les centres de santé ;

« 4o Les mesures jugées appropriées pour favoriser l'accès aux soins des assurés sociaux et garantir la qualité et la coordination des soins ;

« 5o Les conditions de la dispense de frais pour la part garantie par les organismes d'assurance maladie ;

« 6o Les modes de rémunération, autres que le paiement à l'acte, des activités de soins ainsi que les modes de rémunération des activités non curatives des centres de santé et notamment d'actions de prévention et d'éducation pour la santé.

« Art. L. 162-32-2 . - L'accord national, ses annexes et avenants sont approuvés dans les conditions prévues à l'article L. 162-15.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

« Il est applicable aux centres de santé qui font connaître à la caisse primaire d'assurance maladie dans le ressort de laquelle ils sont situés, dans un délai fixé par cet accord, qu'ils souhaitent y adhérer.

« A défaut d'accord national, les tarifs applicables aux centres de santé sont ceux fixés pour chacune des professions dans les conditions prévues aux sections 1, 2 et 3 du présent chapitre. Ces dispositions sont également applicables aux centres de santé qui n'ont pas adhéré à l'accord national.

« Art. L. 162-32-3 . - La caisse primaire d'assurance maladie peut décider de placer un centre de santé hors de la convention pour violation des engagements prévus par l'accord national ; cette décision doit être prononcée selon les conditions prévues par cet accord et permettre au centre de présenter ses observations ; elle ne fait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 133-4 et du chapitre V du titre IV du livre Ier

« Lorsqu'un centre de santé est placé hors de la convention par la caisse primaire d'assurance maladie, les tarifs qui lui sont applicables sont ceux fixés pour chacune des professions dans les conventions prévues aux sections 1, 2 et 3 du présent chapitre. »

« III. L'ensemble des centres de santé agréés dans le c adre des dispositions applicables avant l'entrée en vigueur de la présente loi conservent le bénéfice de l'agrément qui leur a été antérieurement accordé. Pour ceux des centres qui ne remplissent pas les conditions prévues à l'article L. 162-32, les tarifs applicables sont ceux fixés pour chacune des professions dans les conditions prévues aux sections 1, 2 et 3 du chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur.

L'article 16 a trait aux centres de soins et de santé et à leur situation au regard de l'assurance maladie. Il est tout à fait souhaitable et même normal que l'activité de ces centres, tout comme celle de l'ensemble des professions de santé, s'inscrive dans le cadre d'un dispositif conventionnel assorti d'objectifs. Mais si nombre de centres de santé et de soins jouent un rôle très important dans le domaine préventif...

Mme Muguette Jacquaint.

Pas seulement préventif !

M. Yves Bur.

... je m'étonne que cette capacité d'intervention leur soit aussi facilement reconnue. La rémunération, par exemple, d'une intervention dans le domaine préventif me paraît être totalement justifiée si l'on veut que notre pays développe enfin une véritable politique de prévention, mais on ne peut que regretter de ne pas retrouver le mode de rémunération prévu au 6o de l'article L.

162-32-1 d'une manière aussi explicite dans l'article 17 lorsqu'il s'agit de déterminer celui des professionnels de santé dans le cadre de leurs activités de prévention. Cela est d'autant plus choquant que certains centres de soins et de santé, peut-être plus centres de soins que centres de santé,...

M. Jean-Claude Lefort.

N'importe quoi !

M. Yves Bur.

... en ce sens qu'ils se consacrent davantage à la dispensation de soins qu'à des actions globales au profit de la santé des gens, utilisent parfois la prévention comme prétexte à demandes de subvention.

Mme Muguette Jacquaint.

Où avez-vous vu cela ?

M. Jean-Claude Lefort.

Il ne sait pas ce que c'est !

M. Yves Bur.

J'ai récemment été destinataire d'une revue, le Nouveau Centre de santé, qui fait état d'une enquête de l'IGAS.

Mme Muguette Jacquaint.

Parlons-en, de l'IGAS !

M. Yves Bur.

Je vais vous en lire quelques éléments, certes contestés mais qui n'en émanent pas moins de l'IGAS elle-même : « La plupart des centres ne tentent pas particulièrement de répondre aux besoins de la clientèle spécialement démunie et mal soignée. »

M. Jean-Claude Lefort.

N'importe quoi !

M. Yves Bur.

« La venue de marginaux - toxicomanes, SDF, étrangers - ne semble en général guère appréciée. »

M. Jean-Claude Lefort.

Incroyable !

M. Yves Bur.

« L'accueil des toxicomanes n'est pas organisé, leur présence n'est pas toujours souhaitée. »

Mme Muguette Jacquaint.

Allez-y, dans les centres de soins ! Allez-y donc !

M. Yves Bur.

« Les difficultés d'accès aux soins : si les centres assurent répondre à ce problème, la mission n'a constaté aucun moyen de s'en assurer et, au total, la clientèle des centres n'est ni plus ni moins défavorisée que la clientèle du quartier. »

M. Jean-Claude Lefort.

Il affirme sans savoir !

Mme Muguette Jacquaint.

Ce sont des mensonges purs et simples !

M. Robert Gaïa.

Etes-vous sûr que ce n'est pas le journal du Front National ?

M. Yves Bur.

Non, c'est une revue dans laquelle je retrouve la signature de notre collègue Mme Jacquaint.

M. Bernard Accoyer.

On y voit même sa photo prise à la tribune de l'Assemblée, monsieur le président !

M. Jean Bardet.

On se l'arrache ! (Sourires.)

M. Yves Bur.

Le Gouvernement peut-il nous informer sur les suites qu'il compte donner à ce rapport de l'IGAS et, plus généralement, sur sa capacité d'évaluation des actions de prévention actuellement menées ? Dans bien des cas, ces centres se contentent simplement de faire de la dispensation de soins dentaires, d'optique ou autres, sans autre vocation que celle de concurrencer le secteur de la médecine traditionnelle...

Plusieurs députés du groupe communiste.

Ah !

M. Maxime Gremetz.

Les pauvres !

Mme Muguette Jacquaint.

Voilà le mot lâché !

M. Yves Bur.

... ce qu'ils font souvent en reportant leurs déficits sur les collectivités locales, sur la sécurité sociale, ou les différentes structures qui les mandatent.

M. Jean-Claude Lefort.

Eh bien, ils vont être contents, les centres de santé !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Madame le ministre, il est des articles dans un projet de loi qui font l'effet d'un chiffon rouge devant un taureau. Votre article sur les centres de santé déclenchera à n'en pas douter parmi les professions libérales la même réaction que le chiffon rouge sur ce sympathique bovidé... Alors que la marmite des soins libéraux bout et que vous vous efforcez d'en maintenir le couvercle fermé, vous avez décidé d'allumer un turbo


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

dessous ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Claude Lefort.

Un turbo sous la marmite ? Ridicule !

M. Bernard Accoyer.

La création des centres de santé remonte à l'époque emblématique de M. Ralite, ministre de la santé de M. Mauroy.

M. Pascal Terrasse.

Excellent ministre !

Mme Muguette Jacquaint.

Ça remonte à plus lontemps que ça !

M. Bernard Accoyer.

Le centre de santé c'est également l'enfant chéri de Claude Evin. Notre rapporteur est un garçon sympathique, mais il a quelques marottes...

M. Claude Evin, rapporteur.

C'est une attaque personnelle !

M. Bernard Accoyer.

... parmi lesquelles les centres de santé. Je lui reconnais à cet égard une grande persévérance dans cette fidélité, pour ne pas dire cette faiblesse.

Mais cet article est extrêmement préoccupant, et cela pour plusieurs raisons.

Il y a pour commencer le récent rapport de l'IGAS, évoqué par Yves Bur, qui ne peut que nous interpeller, vous interpeller et vous amener à vous interroger sur la pertinence de ces structures, sur le service rendu au regard du coût, sur la charge qu'elles font peser sur ceux qui les financent, organismes, associations ou mutuelles notamment.

En proposant de nouvelles dispositions qui visent à pérenniser, à développer les centres de santé, vous sèmerez inévitablement un peu plus le trouble parmi vos interlocuteurs naturels, les professionnels de santé libéraux, ceux-là mêmes qui défilaient dans la rue il n'y a pas si longtemps.

Pourquoi considérons-nous que cet article est dangereux ? Parce que le bilan de l'action médico-sociale de ces centres est loin d'être satisfaisant. Pourquoi considéronsnous que ces dispositions sont dangereuses pour l'assurance maladie ? Parce que le coût des soins pratiqués dans ces centres est extrêmement élevé.

Ainsi les centres mutualistes dentaires accusent un déficit important et ce sont finalement les mutualistes euxmêmes qui doivent combler le déséquilibre entre les recettes et les dépenses.

Cette situation est d'autant plus dangereuse que la CMU - ne l'oublions pas - va également peser essentiellement sur les mutualistes, en dépit des dénégations d u Gouvernement. Mais les mutualistes, eux, commencent à s'en rendre compte, et ils viennent nous voir pour nous crier leur inquiétude.

Bien sûr, vous prévoyez de passer des conventions avec les centres mais vous oubliez de prévoir un système de régulation. La CNAM a d'ailleurs saisi tous les députés pour leur demander de présenter un amendement tendant à soumettre les centres de santé à un système de régulation, comparable à celui que vous proposez, vous, pour les professions de santé - avec lequel, d'ailleurs, mais nous en reparlerons, nous ne sommes pas d'accord.

Enfin, le système de subventionnement automatique des centres de santé par les caisses d'assurance maladie ne laisse pas de nous inquiéter parce qu'il s'agit d'un nouveau mécanisme qui alourdira considérablement la charge financière pesant sur l'assurance maladie. Nous avons cru comprendre que ce n'était pourtant pas le moment. Il est vrai que, parfois, la croissance pousse à commettre des erreurs.

Mme Muguette Jacquaint.

Les centres de santé représentent 1 % des dépenses !

M. Bernard Accoyer.

Madame Jacquaint, 1 % des dépenses, c'est la moitié de l'objectif de croissance des dépenses nationales de l'assurance maladie, vous ne pouvez pas le contester.

Nous somme persuadés que l'article 16 n'est pas favorable ni à la santé des Français, ni aux comptes de la sécurité sociale, ni au climat de négociation qui devrait exister entre le Gouvernement et les professionnels libéraux. Voilà pourquoi nous nous opposerons à cet article.

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet.

M. Jean Bardet.

Il s'agit, à l'évidence, d'un article idéologique...

Mme Muguette Jacquaint.

Non, ce sont des réalités !

M. Bernard Accoyer.

Des « Ralités », plutôt !

M. Jean Bardet.

... qui va dans le sens du collectivisme.

M me Muguette Jacquaint.

Voilà bien longtemps qu'on n'avait pas entendu ça !

M. Jean Bardet.

Mes chers collègues communistes, vous êtes pour le collectivisme de la médecine, c'est votre droit, mais assumez vos responsabilités ! Je le répète, il s'agit d'un article totalement idéologique...

M. Jean-Claude Lefort.

Vous êtes « bardet » de certitudes !

M. Jean Bardet.

... qui remet au premier plan de l'actualité une structure qui était en train de disparaître d'elle-même. Ces centres de santé avant été créés par le ministre de la santé communiste...

Mme Muguette Jacquaint.

Ce n'est pas vrai !

M. Jean Bardet.

Vous ne devez pas en avoir honte !...

M. Claude Evin, rapporteur.

Mais c'est faux !

M. Jean Bardet.

... Jack Ralite, lors du premier gouvernement de Pierre Mauroy. Les socialistes les avaient acceptés parce que, déjà, ils devaient donner des gages aux communistes. (Exclamations sur les bancs du groupe socialistes.) Décidément l'histoire se répète !

M. Claude Evin, rapporteur.

Vous la réécrivez !

M. Jean Bardet.

Quoi qu'il en soit, ces centres de santé dont l'objectif était de pourvoir aux soins des plus démunis sont devenus sans objet, du moins je l'espère, depuis que vous avez créé la CMU, grâce à laquelle, selon vos dires, l'accès aux soins sera désormais possible pour tout le monde, ce dont je me réjouis en tant que médecin.

Mme Muguette Jacquaint.

Dire que c'est un médecin qui parle !

M. Jean Bardet.

Chère madame, je ne vous insulte pas dans votre profession que je ne connais d'ailleurs pas ! Alors, laissez-moi assumer la mienne ! Tous les démunis - et je m'en réjouis, je le répète devraient pouvoir accéder aux soins, aussi bien dans le secteur libéral que dans le secteur hospitalier public ou privé. Par conséquent, les centres de santé, qui avaient peut-être une justification à l'époque, n'en ont plus aujourd'hui.

Mme Muguette Jacquaint.

Mais si !

M. Jean Bardet.

En aucun cas, ils ne doivent apparaître comme des concurrents potentiels des structures...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

M. Alfred Recours, rapporteur.

Libérales !

M. Jean Bardet.

Oui, je défends la médecine libérale, je n'en ai pas honte !

M. Jean-Claude Lefort.

Ce n'est plus Hippocrate mais hypocrite !

M. Jean Bardet.

J'assume totalement mes idées ! Vous qui défendez un autre type de médecine, assumez votre choix !

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Et laissez-nous le nôtre !

M. Jean Bardet.

Ces centres de santé ne doivent, en aucun cas, disais-je, apparaître comme des concurrents potentiels pour les structures en place et les autorisations d'ouverture ne devraient être données qu'en respectant un certain nombre de principes.

Pour le cas où la nécessité de tels centres se ferait sentir - vous voyez que je n'y suis pas totalement opposé -, leur rôle devrait se limiter à des actions de prévention ou d'éducation sanitaire, qui sont, d'ailleurs, les deux parents pauvres de votre projet de loi. Vous avez toujours de bonnes idées mais vous en restez aux paroles. C'est normal puisque l'argent qui aurait pu servir à ces actions taxe sur le tabac, sur les alcools et sur les activités polluantes -, est détourné pour financer les 35 heures !

M. Bernard Accoyer.

Ils ont tout asséché ! Il n'y a plus de sous !

M. Jean Bardet.

Pour ne pas prolonger le débat, je m'en tiendrai à un exemple : pourquoi la vaccination contre la grippe n'est-elle pas remboursée ?

M. Jean-Claude Lefort.

Qu'est-ce que à cette question voir avec les centres de santé ?

M. Jean Bardet.

Vous êtes contre la vaccination contre la grippe ? J'en prends acte ! Je terminerai en insistant sur un point extrêmement important.

M onsieur le rapporteur, vous avez convoqué la commission pour qu'elle auditionne M. Spaeth, lequel nous a dit deux choses capitales : qu'il était contre l'article 2 - mais le Gouvernement est revenu sur cet article, avec le tour de passe-passe que nous avons dénoncé - et qu'il trouvait anormal que les centres de santé ne soient pas encadrés financièrement, contrairement aux autres cadres d'activités médicales.

Telles sont les raisons pour lesquelles j'ai déposé un amendement de suppression.

M. le président.

Je le considère donc comme déjà défendu.

La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

Il est stupide d'opposer le secteur libéral et les centres de santé.

M. Jean Bardet.

Merci ! Venant de vous, je prends ça pour un compliment !

M. Pascal Terrasse.

Ils ont l'un et l'autre leur place dans le champ sanitaire. L'article 16 a pour objet d'inscrire le statut et les missions des centres de santé dans le code de la santé publique et de doter ces centres d'un dispositif conventionnel. On sait qu'ils permettent une pratique médico-sociale adaptée aux besoins très divers des populations qu'ils accueillent. Ils contribuent à la réduction des inégalités dans l'accès aux soins en remplissant des missions de solidarité, d'éducation à la santé et de prévention.

Leur travail, dans les villes, notamment, est particulièrement apprécié, surtout dans les secteurs difficiles et pour ces problèmes délicats que sont la lutte contre la toxicomanie et le sida. Bref, l'ensemble des centres de santé accomplit un travail formidable, il faut le dire.

Le projet reconnaît leur spécificité et réserve la possibilité d'ouvrir de tels centres aux seuls organismes à but non lucratif - c'est un élément important - et aux collectivités locales.

Il les dote d'un dispositif conventionnel reposant sur des accords nationaux passés avec leurs organisations représentatives qui, consultés, se sont déclarées satisfaites du contenu de l'article 16.

M. Claude Evin, rapporteur.

Absolument !

M. Pascal Terrasse.

Toutefois, madame la secrétaire d'Etat, il faut aller plus loin en les autorisant à pratiquer le tiers payant. Toutes les associations le demandent et la commission des affaires sociales a déposé un amendement en ce sens.

M. Claude Evin, rapporteur.

Tout à fait !

M. Pascal Terrasse.

Je serai très attentif à ce que vous allez dire, madame la secrétaire d'Etat. Je souhaite que le Gouvernement reprenne cet amendement. Et s'il est adopté, il faudra que, rapidement, l'accord qui se dessine débouche sur un décret d'application.

Le secteur libéral, j'y insiste, n'a pas à avoir peur de la concurrence. Il a, avec les centres de santé, toute sa place dans le champ sanitaire au niveau national. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint.

Faisons un peu d'histoire, monsieur Bardet ! Il y a vingt-cinq, voire trente ans, ont été créés non pas des centres de santé, mais des dispensaires. Ce sont d'ailleurs les villes qui en prenaient l'initiative. Malheureusement, dans ces dispensaires, il n'y avait pas assez de spécialistes...

M. Claude Evin, rapporteur.

Pas de médecins libéraux !

Mme Muguette Jacquaint.

... - les plus défavorisés ne pouvaient pas en consulter, hélas ! - et même pas assez de médecins.

Plus tard, ils sont devenus des centres de santé. Que ce soit par M. Ralite ou quelqu'un d'autre, je me félicite qu'ils aient été créés parce que, dans sa ville comme dans la mienne, cela correspondait à une volonté, à un choix politique de faire en sorte que des populations modestes puissent recevoir des soins de qualité et même rencontrer des spécialistes, si nécessaire.

Mais ces centres ne font pas pour autant de l'ombre à la médecine libérale, dans les villes où ils sont implantés.

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas le problème !

M. Pascal Terrasse.

Mme Jacquaint tient le langage du coeur !

Mme Muguette Jacquaint.

Au contraire, ils travaillent avec les médecins libéraux dont beaucoup envoient leurs malades qui en ont besoin de consulter un spécialiste au centre de santé.

M. Claude Evin, rapporteur.

Très bien !

Mme Muguette Jacquaint.

Si nous tenons tant aux centres de santé, c'est parce que nous sommes attachés au droit à la santé pour tous et pas à une santé pour pauvres mais à une santé de qualité. Ils jouent ce rôle et il n'y en a pas trop !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Dans le système de soins, les centres de santé occupent une place originale. La pratique du tiers payant, la polyvalence des consultations, leur plateau technique sont les facteurs essentiels qui permettent à tous les assurés sociaux de bénéficier de l'accès aux soins de qualité.

La situation présente des centres, malgré les décrets de 1991, est complexe. Cette complexité engendrait des inégalités et des difficultés. Le projet de loi de l'année passé avait relevé des lacunes : ainsi les centres étaient exclus de la campagne de prévention bucco-dentaire des jeunes de quinze ans.

Les acteurs des centres, qu'ils soient mutualistes, associatifs ou municipaux, ont donc demandé une réforme de la législation et de la réglementation.

J'interrogeais le secrétaire d'Etat à la santé de l'époque, M. Kouchner, sur les dispositions à prendre pour combler les lacunes de la loi et enlever les entraves mises aux missions des centres de santé.

Cette démarche s'inscrivait dans la réflexion et l'action que les partenaires des centres mènent depuis de très nombreuses années.

Cette mobilisation a eu des résultats. Les avancées sont certaines - elles ne vous plaisent guère, on le comprend ! Tout d'abord, leur spécificité est reconnue dans le code de la santé publique. Ensuite, dans le code de la sécurité sociale, sont précisées un certain nombre de règles de fonctionnement, notamment l'intégration des décrets de 1991, la subvention dite Teulade.

A présent, il faut inscrire dans l'article 16 la pratique de la dispense d'avance de frais. En commission, plusieurs amendements ont été déposés et adoptés visant à garantir cette pratique indispensable aux assurés sociaux et spécifique aux centres de santé.

Enfin, les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les centres sont définis dans une convention signée par les partenaires. Il faudrait d'ailleurs préciser la notion d'« organisation représentative » des gestionnaires, et de « consultation » des professionnels de santé. Il convient de les associer davantage à cette démarche.

M. le président.

Pourriez-vous conclure, madame Jacquaint ?

Mme Muguette Jacquaint.

D'autres améliorations sont à apporter, notamment le droit pour les personnels des centres de bénéficier de la formation médicale continue, l'équité du financement de la maîtrise de stage des étudiants en médecine.

Naturellement, cet article rencontre notre approbation, à condition que la notion de tiers payant soit précisée dans l'article L. 162-32 du code de la santé publique.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Permettez-moi de rappeler, brièvement, la portée de l'article que vous allez examiner.

Dans sa première partie, cet article inscrit dans le code de la santé publique les missions ainsi que les modalités de création et de gestion des centres de santé. Dans sa seconde partie, il organise le cadre conventionnel entre l'assurance maladie et les centres. Je reviendrai sur ces deux points.

S'agissant des missions et des modalités de gestion des centres de santé, les acteurs des centres de santé, les gestionnaires tout comme les professionnels y exerçant ont souhaité que la loi reconnaisse non seulement leur existence mais également leur spécificité. Convaincus de leur place toute particulière au sein de l'offre de soins, nous avons accédé à la demande, fort légitime, des centres de santé.

Nous procédons à la reconnaissance de la double vocation des centres de santé, à la fois médicale et sociale. Ces structures sont situées au plus proche des besoins et, souvent, dans des quartiers où l'offre de soins est rare ou inexistante. Cela ne signifie cependant pas, comme on l'entend parfois, que ces structures seraient subsidiaires et qu'elles ne devraient naître et prospérer que par défaut, là où nul autre ne souhaite s'installer.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Nous ne souhaitons pas multiplier les obstacles au développement de ces structures, par la multiplication de mesures bureaucratiques. Nous voulons, au contraire, assurer leur pérennité.

Mme Muguette Jacquaint.

Très bien ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

La reconnaissance de la vocation sociale de ces structures et des spécificités de la médecine qu'on y pratique, curative, préventive, sanitaire mais aussi sociale, nous a naturellement amenés à réserver le « label » ainsi c réé aux seules structures dont l'objet social était conforme à ces principes. Aussi avons-nous réservé le

« label » centres de santé à des structures gérées par des organismes à but non lucratif ou à des collectivités locales.

Pour celles qui ne remplissent pas les conditions posées dans cet article, donc qui ne correspondent pas totalement à la vocation des centres de santé, il ne s'agit pas d'une mise à mort : elles continuent à exister et peuvent, si elles l'estiment nécessaire, opter pour une autre forme d'organisation, mais les choses seront clarifiées.

La convention proposée présente de nombreux points positifs pour les centres : elle ouvre la possibilité d'étendre à la pratique en centre de santé les innovations en v igueur dans la pratique de ville ; elle permet la reconnaissance et le financement des actions « hors soins » - prévention, éducation à la santé, accueil médico-social ; elle permet l'ouverture vers des modes de rémunération des soins autres que le paiement à l'acte ; elle autorise la mise en oeuvre de dispositions de nature à faciliter l'accès aux soins.

Nous n'entendons pas encadrer le développement de ces centres. Ils jouent, nous l'avons dit, un rôle social éminent. Il, n'est pas dans notre intention de les brider.

Ils attendent ce texte. Ils ont été largement associés à la réforme...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Tout à fait ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

... et je me réjouis de voir qu'ils sont satisfaits du projet qui vous est présenté. Plusieurs m'ont écrit en ce sens, insistant sur leur volonté de le voir adopté.

Pour rassurer M. Bardet et montrer que nous ne nous engageons pas dans la voie du collectivisme, voici les signataires de la lettre de soutien à cet article : le Comité de liaison des centres de santé, les Religieuses en professions de santé, l'Union nationale des associations d'aide à domicile en milieu rural, l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux, la


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

Croix-Rouge française, l'Union nationale des associations coordinatrices de soins de santé, la Fédération des mutuelles de France, la Fédération nationale de la mutualité française.

Evidemment, la multiplicité des partenaires montre bien que nous ne sommes pas dans une démarche collectiviste ou idéologique.

M. Jean-Claude Lefort.

Ou alors le collectivisme avance ! (Rires.)

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Nous avons la chance d'avoir, du côté des gestionnaires, une structure unique, le regroupement national des organismes gestionnaires des centres de santé, qui a fait des efforts sensibles, compte tenu du nombre des partenaires, pour parler d'une seule voix sur l'ensemble des sujets de la convention, mais qui représente, via les structures qui en sont membres, la multiplicité des structures et l'hétérogénéité du secteur.

La situation financière des centres de santé est souvent délicate. Le cadre conventionnel dans lequel s'inscrivent les relations entre les caisses d'assurance maladie et les centres de santé est aujourd'hui inadapté. Il repose sur un dispositif principalement de nature réglementaire, la convention étant conclue sur la base d'une convention type fixée par décret. Il rend difficile, au plan juridique, l'application aux professionnels de centres de santé des nouvelles dispositions conventionnelles. Il a même fallu une intervention de mes services auprès des caisses d'assurance maladie pour que les centres puissent faire bénéficier leur clientèle du système d'hygiène bucco-dentaire pour les jeunes de quinze à dix-huit ans.

Le cadre conventionnel que prévoit ce texte est aujourd'hui national, chaque centre étant libre d'y adhérer ou non.

Certains soulignent la « mollesse » de cette convention qui ne contient pas de mécanismes de régulation spécifiques aux centres de santé. Je crois qu'il faut proportionner les efforts aux enjeux existants. Les dépenses de centres de santé représentent moins de 1 % des dépenses remboursées en soins de ville. Prévoir un objectif spécifique ou un règlement minimal conventionnel pour des dépenses aussi faibles ne me paraît pas la meilleure solution. Par ailleurs, les mécanismes généraux d'ajustement sont applicables aux professionnels des centres de santé, comme à l'ensemble de leurs collègues installés en libéral.

Enfin, nous savons que les professionnels et gestionnaires des centres de santé se sont émus de voir la pratique du tiers payant, traditionnelle dans les centres de santé, soumise à la négociation et à la conclusion de l'accord national. Un amendement a été déposé pour que les centres de santé bénéficient du tiers payant. Le Gouvernement l'accueillera favorablement.

(« Très bien ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)

Cela conforte la vocation sociale des centres.

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures quinze, troisième séance publique : Suite de la discussion du projet de loi, no 1835, de financement de la sécurité sociale pour 2000 ; MM. Alfred Recours, Claude Evin, Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1876, tomes I à V) ; M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (avis no 1873).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 29 OCTOBRE 1999

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 2e séance du vendredi 29 octobre 1999 SCRUTIN (no 209) sur l'article 10 du projet de loi de financement de la sécurité socia le pour 2000 (abondement du fonds de réserve pour les régimes d'assurance vieillesse).

Nombre de votants .....................................

51 Nombre de suffrages exprimés ....................

49 Majorité absolue ..........................................

25 Pour l'adoption ...................

30 Contre ..................................

19 L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Pour : 30 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Laurent Fabius (président de l'Assemblée nationale).

Groupe R.P.R. (136) : Contre : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe U.D.F. (70) : Contre : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Abstentions : 2. - Mme Nicole Ameline et M. Denis Jacquat

Groupe communiste (35) : Contre : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Non-votant : M. Yves Cochet (président de séance).

Non-inscrits (7).