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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

1. Questions au Gouvernement (p. 4604).

CAMPAGNE D'INFORMATION DE LA MISSION DE LUTTE

CONTRE LA DROGUE ET LES TOXICOMANIES (p. 4604)

M. Pierre Morange, Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

BUDGET DE LA DÉFENSE (p. 4605)

MM. René Galy-Dejean, Alain Richard, ministre de la défense.

CONTAMINATION D'UNE HALTE-GARDERIE (p. 4606)

Mmes Martine Aurillac, Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

DIRECTEURS D'ÉCOLE (p. 4607)

MM. Guy Teissier, Jack Lang, ministre de l'éducation nationale.

SERVICE PUBLIC DE LA POSTE (p. 4607)

MM. Georges Sarre, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

ÉVACUATION DU LIBAN SUD PAR L'ARMÉE ISRAÉLIENNE (p. 4608)

MM. Gérard Bapt, Lionel Jospin, Premier ministre.

SERVICE PUBLIC DE LA POSTE (p. 4610)

MM. François Brottes, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

SITES CONTAMINÉS PAR LA RADIOACTIVITÉ À PARIS (p. 4610)

Mmes Michèle Rivasi, Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

ÉCOLE INTERARMÉES DES SPORTS DE FONTAINEBLEAU (p. 4611)

MM. Hubert Grimault, Alain Richard, ministre de la défense.

FINANCEMENT DE LA PROTECTION SOCIALE (p. 4612)

Mmes Jacqueline Fraysse, Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

SITUATION AU PROCHE-ORIENT (p. 4613)

MM. Michel Vaxès, Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Suspension et reprise de la séance (p. 4614)

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA

2. Prestation compensatoire en matière de divorce. - Discussion, en deuxième lecture, d'une proposition de loi (p. 4614).

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Alain Vidalies, rapporteur de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 4616)

Mme Véronique Neiertz,

MM. Emile Blessig, Alain Tourret, Christian Estrosi, Bernard Outin, Claude Goasguen.

Clôture de la discussion générale.

Mme la garde des sceaux.

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 4622)

Avant l'article 1er A (p. 4622)

Amendement no 14 rectifié de M. Blessig : MM. Emile Blessig, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Adoption.

Article 1er A. - Adoption (p. 4623)

Article 1er (p. 4623)

Amendement no 13 de M. de Courson : MM. Emile Blessig, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Adoption de l'article 1er

Article 1er bis A. - Adoption (p. 4623)

Article 1er quater (p. 4623)

Amendement no 15 de M. Blessig : MM. Emile Blessig, ler apporteur, Mmes la garde des sceaux, Véronique Neiertz. - Rejet.

Adoption de l'article 1er quater

Articles 1er quinquies et 2. - Adoption (p. 4624)

Article 2 bis (p. 4624)

Amendement no 7 de M. Quentin : MM. François Guillaume, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 9 de M. Nicolin : MM. Philippe Houillon, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 1 de la commission des lois : M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 10 de M. Nicolin : M. Philippe Houillon. Retrait.

Amendement no 2 de la commission : M. le rapporteur,

Mme le garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 3 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Adoption.

Adoption de l'article 2 bis modifié.

Après l'article 2 bis (p. 4626)

Amendement no 5 de M. Guillaume : M. François Guillaume.

Amendement no 6 de M. Guillaume : MM. François Guillaume, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Retrait de l'amendement no 6 ; rejet de l'amendement no

5. Article 2 ter A (p. 4627)

Amendement no 16 de M. Blessig : M. Emile Blessig. Retrait.


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Amendement no 17 de M. Blessig : MM. Emile Blessig, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Adoption de l'article 2 ter A. Article 2 ter B (p. 4628)

Amendement no 18 de M. Blessig : M. Emile Blessig. Retrait.

Adoption de l'article 2 ter B. Article 2 quinquies (p. 4628)

Le Sénat a supprimé cet article.

Articles 2 sexies et 2 septies . - Adoption (p. 4628)

Après l'article 2 septies (p. 4628)

Amendement no 22 de M. Vidalies : M. le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Adoption.

Articles 2 octies , 2 nonies et 2 decies . - Adoption (p. 4628)

Article 2 undecies (p. 4629)

Amendement de suppression no 4 de la commission : M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Adoption.

L'article 2 undecies est supprimé.

Après l'article 2 undecies (p. 4629)

Amendement no 12 de M. Goasguen : MM. Philippe Houillon, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Article 4 (p. 4630)

Amendement no 19 de M. Blessig : M. Emile Blessig. Retrait.

Adoption de l'article 4.

Article 5 (p. 4630)

Amendement no 20 de M. Blessig : M. Emile Blessig. Retrait.

Amendement no 21 de M. Blessig. - Retrait.

Adoption de l'article 5.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 4630)

Adoption de l'ensemble de la proposition de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 4630)

3. Présomption d'innocence. - Transmission et discussion du texte de la commission mixte paritaire (p. 4630).

Mme Christine Lazerges, rapporteuse de la commission mixte paritaire.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

PRÉSIDENCE DE Mme CHRISTINE LAZERGES

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 4635)

MM. Philippe Houillon, André Gerin.

PRÉSIDENCE DE M. PHILIPPE HOUILLON

M.

Emile Blessig, Mme Frédérique Bredin,

MM. Patrick Devedjian, Alain Tourret, Jacques Floch.

M. Bernard Roman, président de la commission mixte paritaire ; M. le président.

Clôture de la discussion générale.

TEXTE DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (p. 4645)

Amendement no 1 de Mme Lazerges : Mmes la rapporteuse, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 2 (pour coordination) de Mme Lazerges :

Mmes la rapporteuse, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 3 de Mme Lazerges : Mmes la rapporteuse, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 7 de Mme Lazerges : Mmes la rapporteuse, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 4 de Mme Lazerges : Mmes la rapporteuse, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 5 de Mme Lazerges : Mmes la rapporteuse, la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 6 de Mme Lazerges : Mmes la rapporteuse, la garde des sceaux. - Adoption.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 4665)

M. Patrick Devedjian,

Mme Frédérique Bredin.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 4665)

Adoption de l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié.

4. Dépôt d'un projet de loi (p. 4665).

5. Dépôt d'une proposition de loi organique (p. 4665).

6. Dépôts de rapports (p. 4666).

7. Dépôt d'un rapport d'information (p. 4666).

8. Ordre du jour des prochaines séances (p. 4666).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par le groupe du Rassemblement pour la République.

CAMPAGNE D'INFORMATION DE LA MISSION DE LUTTE

CONTRE LA DROGUE ET LES TOXICOMANIES

M. le président.

La parole est à M. Pierre Morange.

M. Pierre Morange.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, le député et médecin généraliste que je suis souhaiterait que vous entendiez quelques citations. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Je précise que je suis médecin généraliste en exercice. (Huées sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)

M. Didier Boulaud.

Cumulard !

M. le président.

Mais qu'est-ce qui suscite cette réaction ? Je vous en prie, mes chers collègues, laissez parler M. Morange ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Pierre Morange.

Merci, monsieur le président.

« Rituel de plaisir pour les uns, recherche de performances physiques ou sexuelles, cérémonie initiatique pour les autres, l'usage des produits psycho-actifs n'entraîne pas obligatoirement de troubles sur la santé ou sur le comportement. » «

Il s'agit le plus souvent d'un moment de la vie. » «

Entourez-vous d'amis qui puissent vous accompagner sans forcément consommer et vous donner des conseils sur les usages, les produits et les risques. »

« Dialoguez avec des personnes de confiance ayant déjà expérimenté, surtout pour un produit que vous ne connaissez pas, et prenez-le dans un contexte rassurant. »

« Faites des pauses, changez d'univers, aérez-vous régulièrement, mangez des sucreries, buvez des jus de fruits vitaminés, fractionnez les doses, espacez les prises, surtout la première fois de la prise d'un toxique. »

M onsieur le Premier ministre, ces citations sont extraites de la dernière campagne d'information financée par la mission interministérielle de lutte contre la drogue et les toxicomanies. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Bernard Accoyer.

Scandaleux !

M. Pierre Morange.

Il s'agit avant tout d'un catalogue de conseils d'utilisation, de conseils pratiques.

Le Gouvernement s'est donc résigné à ce que les jeunes se tournent vers la drogue avec pour seul objectif de limiter les dégâts sanitaires.

M. Bernard Accoyer.

Quelle honte ! Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

C'est scandaleux !

M. Pierre Morange.

Ce renoncement de l'Etat est très grave lorsqu'on connaît les drames humains engendrés par la drogue tant pour les usagers que pour leurs familles et leurs entourages, souvent totalement impuissants face aux ravages de ce fléau.

Monsieur le Premier ministre, information ne veut pas dire banalisation, et le rôle de l'Etat n'est-il pas avant tout de prévenir et de dissuader ? N'y a-t-il pas là une dérive vers une dépénalisation de fait à défaut d'une dépénalisation de droit ? (Applaudissements sur de nomb reux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Monsieur le député, force est de constater qu'une fois de plus vous caricaturez (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) un programme ambitieux développé par le Gouvernement pour prévenir les comportements à risque des jeunes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Il s'agit d'une campagne d'information qui a été mise au point en fonction des objectifs définis par le Gouvernement en juin dernier pour développer pendant trois ans un plan pluriannuel ambitieux sur la lutte contre la toxicomanie et les comportements à risque des jeunes.

Pour une fois, nous avons cherché à dédramatiser pour aller au coeur du sujet (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste), de manière à inciter les jeunes à avoir un comportement plus responsable, et nous nous attachons davantage aux conduites, aux comportements et aux consommations qui peuvent être nocives, quelle que soit la nature des produits. Nous n'avons pas voulu fixer les interdits qui


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existent par ailleurs du point de vue de la légalité sur les produits, mais bien au contraire avoir une attitude d'accompagnement, d'écoute et de solidarité vis-à-vis de jeunes en grande difficulté de manière à éviter que leurs comportements à risque, leur conduite addictive ne conduisent à des drames contre lesquels nous luttons.

(Protestations sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

N'importe quoi !

M. Philippe Auberger et M. Bernard Accoyer.

C'est scandaleux !

M. Jean-Claude Abrioux.

Et ridicule !

M. Jean-Paul Charié.

Honteux !

M. Lucien Degauchy.

Lamentable !

M. le président.

Mes chers collègues, gardez votre calme !

M. Bernard Accoyer.

Il s'agit de la santé des Français ! C'est honteux.

M. le président.

Les questions sont libres et les réponses le sont tout autant.

M. Jean-Paul Charié.

Pas la consommation de drogue !

M. le président.

Vous avez la parole, madame la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Je vais donc indiquer très précisément, pour ceux qui veulent bien écouter, les grands axes de la campagne d'information qui a été lancée il y a quelque temps et qui est très bien reçue (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. Jean-Paul Charié.

Par les drogués !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

... par les médias, par les éducateurs, mais aussi par les jeunes à qui elle est destinée, et par les parents qui les accompagnent : améliorer la formation des médecins avec la mise en place d'un nouveau diplôme d'études spécialisées en addictologie (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas la question !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

... renforcer les structures de lutte contre l'alcoolisme et de sevrage tabagique avec, dès cette année, plus de 80 millions de francs de mesures nouvelles ; renforcer l'expertise scientifique et la recherche clinique...

M. Bernard Accoyer.

On ne parle pas de ça ! Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Ce n'est pas la question !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

... notamment sur les nouveaux produits qui arrivent sur le marché ; améliorer les connaissances sur les modes de consommation et les produits qui circulent, grâce au réseau sentinelle de médecins, le recueil et l'analyse des produits qui circulent d'une manière extrêmement dangereuse du fait d'un marché qui n'est pas contrôlé.

Cette campagne d'information auprès des professionnels et du grand public permettra d'élever le niveau de connaissance de nos concitoyens et d'allier nos efforts pour protéger nos jeunes contre ce fléau qu'est la drogue.

(Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

BUDGET DE LA DÉFENSE

M. le président.

La parole est à M. René Galy-Dejean.

M. René Galy-Dejean. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, responsable de la défense nationale, aux termes de l'article 21 de notre Constitution.

Monsieur le Premier ministre, alors que, depuis quelque temps, le travail des Français a permis de retrouver les voies de la croissance, que les rentrées fiscales n'ont jamais été aussi élevées, que telle mise aux enchères pourrait rapporter des sommes considérables, il est un budget que vous ne cessez de réduire, celui de notre défense nationale. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Certes, il est plus aisé de s'attaquer à ce budget qu'à d'autres. Il n'y a pas là de risques de grève, et les décisions d'encoche, d'annulation ou de réduction sont, dans l'immédiat, indolores pour les Français.

J'avais déjà, et d'autres avec moi, alerté le Gouvernement sur le fait que nous approchions de la limite de rupture dans l'équipement et dans l'entraînement de nos armées. Cette limite est aujourd'hui franchie, ce qui aura des conséquences graves, pour la professionnalisation de nos forces d'abord, car une armée professionnelle qui n'est pas bien équipée ne peut remplir ses missions, pour la constitution de la défense européenne ensuite - nous demandons à plusieurs de nos partenaires d'accroître leur effort budgétaire de défense alors que nous faisons le contraire -, et, enfin, pour la sécurité de notre pays et celle de l'Europe. Le monde reste dangeureux, nous le constatons tous les jours. C'est l'un des premiers devoirs du Gouvernement que de garantir un bon équipement de nos forces.

Ma question est dès lors la suivante : allez-vous arrêter de diminuer notre effort de défense et, à l'inverse, accroître les moyens financiers qui donneront à nos armées l'efficacité et la cohérence nécessaires pour qu'elles soient à même d'accomplir les missions que la France leur confie ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de la défense.

M. Alain Richard, ministre de la défense.

Votre question, monsieur Galy-Dejean, vient à point nommé pour permettre au Gouvernement de confirmer que la loi de programmation 1997-2002,...

M. Pierre Lellouche.

... que vous n'avez pas respectée !

M. le ministre de la défense.

... que ce Gouvernement et cette majorité n'ont pas votée à l'époque, constitue la charte de notre politique de défense et de nos budgets de défense successifs.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Vous savez, avec quelques autres sur les mêmes bancs qui ont une expérience parlementaire de quelques législatures, que, par comparaison avec de précédentes lois de programmation au cours des deux ou trois dernières décennies, le sort de celle-ci est plutôt serein.

Vous parlez de la professionnalisation. Aujourd'hui à la mi-2000, nous avons atteint entre 70 et 80 % des objectifs fixés pour la fin 2002 en ce domaine, et, en dépit de l'amélioration notable de la situation de l'emploi, les recrutements continuent à attirer un grand nombre de candidats.

En ce qui concerne l'Europe de la défense, vous me donnez l'occasion de préciser que, semaine après semaine, le consensus entre les quinze partenaires de l'Union européenne sur des objectifs ambitieux, pleinement cohérents avec les décisions des conseils européens, est en train de se réaliser. Je pense que la présidence française, au deuxième semestre, sera l'occasion de montrer que les engagements pris sont en train d'être tenus.

Enfin, s'agissant des réalisations d'objectifs d'équipement, et j'aurai l'occasion de revenir le dire devant la commission de la défense, l'ensemble des programmes sur lesquels nous nous sommes engagés sont en cours de réalisation. Il est vrai que certains prennent quelques mois de retard,...

M. Pierre Lellouche.

Merci de le reconnaître !

M. le ministre de la défense.

... notamment parce que la mise au point de programmes européens en commun ne fait que rarement gagner du temps, mais nous avons pu saluer la semaine dernière la décision positive de nos amis britanniques d'y participer.

Bien entendu, il faut que les budgets à venir restent en cohérence avec la loi de programmation en cours et que nous ayons suffisamment d'ambition et de cohérence dans la préparation de la prochaine loi de programmation, mais je ne vois pas aujourd'hui de signes justifiant vos alarmes. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Pierre Lellouche.

Demandez aux militaires !

CONTAMINATION D'UNE HALTE-GARDERIE

M. le président.

La parole est à Mme Martine Aurillac.

Mme Martine Aurillac.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité et n'est pas d avantage caricaturale que celle de notre collègue M. Morange, qui défendait notre jeunesse. La mienne porte sur la défense de nos enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Madame la ministre, la presse se fait depuis trois jours très largement l'écho de la fermeture à Paris, dans le 7e arrondissement, d'une halte-garderie associative à la suite d'une contamination par des radiations ionisantes suscitant, à juste titre, une très grande émotion parmi les parents et le personnel et laissant plusieurs dizaines de familles sans moyens de garde, situation à laquelle la mairie s'efforce, depuis le début de cette affaire, de remédier.

Ce contrôle faisait suite à un précédent contrôle intervenu en septembre 1998 sur les canalisations, qui avait révélé la présence de traces de radioactivité anormales.

Certes, les premiers résultats indiquent que, même dans la salle des grands, la plus touchée, le danger pour les enfants est aujourd'hui pratiquement nul, mais il n'en demeure pas moins que plusieurs milliers d'enfants ont fréquenté auparavant cet établissement qui, par sa qualité, je le rappelle, rend de très grands services à l'arrondissement. L'Office de protection contre les rayonnements ionisants, l'OPRI, qui dépend du ministère de l'emploi et qui est chargé de ces contrôles, s'est déclaré débordé.

Madame la ministre, j'espère que vous aurez une meilleure réponse, pas trop caricaturale en tous cas si possible (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République) à cette question toute simple : comment se fait-il que, dans un domaine aussi sensible et aussi grave, puisqu'il s'agit de la santé de très jeunes enfants, il ait fallu attendre de 1998 à 2000 pour effectuer les vérifications nécessaires ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

En effet, madame la députée, des mesures de radioactivité ont été effectuées par l'Office de protection contre les rayonnements ionisants dans un immeuble privé du 7e arrondissement de Paris, que vous connaissez bien, immeuble qui abrite en particulier une haltegarderie gérée par une association.

L'OPRI est intervenu préalablement à des travaux de dépollution rendus nécessaires en raison de l'histoire de ce site, sur lequel du radium a été manipulé au début du siècle. Un premier contrôle effectué en septembre 1998 dans les parties communes de l'immeuble avait fait apparaître la contamination d'une canalisation isolée dans une cave. Des assurances avaient alors été données par les propriétaires et la direction de l'établissement, faisant état d'une reconfiguration complète des locaux dans les étages supérieurs réalisée au cours des vingt dernières années.

Les travaux avaient dû être contrôlés par la DDASS de Paris, qui avait donné son agrément pour l'ouverture de l'établissement.

M. François Baroin.

La DDASS, c'est vous !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Instruction avait alors été donnée aux propriétaires d'interdire l'accès à cette canalisation, ce qui a été fait immé diatement, et d'engager des travaux d'assainissement.

C'est à l'occasion de ces travaux engagés dernièrement qu'ont été mises en évidence des zones de radioactivité anormale dans la halte-garderie.

D'après les premières mesures et les calculs de l'OPRI, on estime que les enfants et le personnel ont pu recevoir en une année une dose de près de 1 millisievert, soit l'équivalent de deux à trois radiographies du poumon.

M. le président.

Pourriez-vous conclure, madame ?

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Ce niveau, s'il est confirmé, est généralement considéré comme n'ayant pas de conséquence sanitaire.

Toutefois, au vu de ces constatations et de l'émotion légitime immédiate, j'ai décidé la fermeture de cette halte-garderie. Un numéro vert d'information a été mis à la disposition des personnes intéressées dès le vendredi, et, vous le savez, madame la députée, puisque vous étiez présente, les parents ont été reçus longuement à mon ministère mardi soir afin d'avoir des réponses à leur légitime inquiétude.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Un comité de pilotage (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), coanimé par la DGS et les représentants des parents, veillera à la bonne mise en oeuvre des actions qui se révéleront nécessaires, notamment l'assainissement et le maintien de la fermeture de l'établissement pendant ces travaux. Je compte sur votre coopération, madame la maire, pour répondre avec diligence aux besoins des parents pour la garde de leurs enfants. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous passons au groupe Démocratie libérale et Indépendants.

DIRECTEURS D'ÉCOLE

M. le président.

La parole est à Guy Teissier.

M. Guy Teissier.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale. Elle devrait recueillir l'assentiment du plus grand nombre d'entre nous, puisqu'il s'agit de la défense de la fonction de directeur d'école, et je crois savoir qu'il y en a pas mal sur ces bancs.

Les enseignants qui assurent ces responsabilités sont les premiers interlocuteurs des parents d'élèves, des élus locaux et de nombreux intervenants sociaux. L'ouverture de l'école sur le monde extérieur exige d'eux une grande disponibilité, qui dépasse fréquemment le temps scolaire stricto sensu.

Au regard des perspectives de carrière et des traitements auxquels ils peuvent prétendre, les tâches se sont considérablement alourdies au fil du temps. C'est ainsi que votre ministère exige toujours plus des directeurs d'école en leur demandant d'être des gestionnaires, de favoriser l'innovation pédagogique, de remplir une mission de médiation sociale, pour laquelle ils n'ont pas reçu de formation adaptée et qu'ils exercent le plus souvent en dehors de tout cadre réglementaire précis.

Dans le même temps, les cas de mise en cause judiciaire de leur responsabilité personnelle se sont multipliés pour les motifs les plus divers même si l'incompétence, voire le simple défaut de vigilance sont rarement prouvés.

Cela a pour conséquence de générer une certaine désaffection des candidatures et d'entraîner des vacances durables de postes qui perturbent le quotidien de nos écoles. Aussi, monsieur le ministre, la situation exige de procéder à une véritable réforme de fond.

J'ai déposé une proposition de loi d'orientation relative au statut, à la formation et à la protection juridique des enseignants exerçant des fonctions de directeur d'école.

Votre prédécesseur avait affirmé être conscient de ce problème mais, en dehors de quelques déclarations faisant référence à une concertation avec les organisations syndicales d'enseignants, aucune décision notable n'est intervenue. En conséquence, je souhaiterais savoir quelles sont vos intentions sur ce sujet et si vous êtes prêt à déposer un projet de loi en ce sens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale.

Monsieur le député, je crois que nous pouvons tous vous remercier d'attirer l'attention de l'Assemblée nationale et du Gouvernement sur la fonction de directeur d'école, qui est en effet très importante pour les conditions de l'enseignement, la paix à l'intérieur des établissements et la progression des enfants.

M. François Vannson.

Merci de le rappeler ! On ne le savait pas ! Je sais en effet, par l'intermédiaire de leurs représentants que j'ai reçus et des organisations syndicales, que toute une série de questions, dont celle que vous avez évoquée à l'instant, méritent d'être traitées et réglé es, qu'elles concernent la protection juridique ou la responsabilité.

M. François Vannson.

C'est creux !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Du reste, votre question sur les directeurs d'école pourrait être étendue à l'ensemble des chefs d'établissement des lycées et des collèges.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Très juste !

M. François Baroin.

Répondez déjà à celle-là !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Sur ce point, nous avons engagé tout récemment, avec l'accord de M. le Premier ministre, des pourparlers avec les organisations représentatives de ces chefs d'établissement pour que leur statut soit réévalué, leur situation améliorée et leurs conditions de travail renforcées. Je crois pouvoir vous dire que nous pourrons, dans les prochaines semaines, aboutir à des propositions propres à donner aux chefs d'établissement la garantie d'une plus grande sécurité et l'assurance de meilleures carrières.

Pour les directeurs d'école - et je réponds plus précisément à votre question (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) - la vérité sur les postes non pourvus est la suivante : il faut distinguer entre la situation générale, qui veut qu'il n'y ait pas une école en France à la tête de laquelle on ne trouve pas de directeur (« Bravo ! » et rires sur les mêmes bancs), et les situations particulières qui font que 10 % seulement - mais c'est encore trop - des postes de directeur ne sont pas aujourd'hui pourvus par des directeurs titulaires.

Toute une série de mesures sont élaborées pour rendre la fonction plus attractive - et c'est là la question principale : cela passe, dans les communes rurales, par l'amélioration des conditions de vie et de logement et, dans les grandes communes, par la généralisation plus systématique des décharges d'enseignement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous passons au groupe Radical, Citoyen et Vert.

SERVICE PUBLIC DE LA POSTE

M. le président.

La parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

Monsieur le secrétaire d'Etat à l'industrie, au moment où je vous interroge, la Commission de Bruxelles étudie une nouvelle directive de libéralisation de la poste.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

C'est scandaleux !

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

La Commission, c'est la branche armée de l'Europe !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

M. Georges Sarre.

La dernière directive, qui, vous le savez, remonte à 1997, donne du service universel postal une définition en retrait par rapport à la conception française du service public.

Le nouveau projet, dû à l'initiative du commissaire Frits Bolkestein (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), tend à ouvrir à la concurrence le secteur des lettres de plus de cinquante grammes, le courrier international sortant et la publicité adressée.

Une telle réforme aboutirait à la mise en concurrence, notez-le bien, de 27 % des activités actuellement sous monopole.

Or une étude effectuée conjointement par La Poste et par le British Post Office sur le coût du service postal universel montre que, dans un marché totalement libéralisé - et c'est le chemin qu'il nous est proposé d'emprunter -, les usagers résidant en zone rurale devraient payer un prix quatre fois supérieur à celui payé par les clients professionnels. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Il est clair, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il s'agit d'une nouvelle offensive contre le service public postal.

Un député du groupe socialiste.

C'est scandaleux !

M. Georges Sarre.

Monsieur le secrétaire d'Etat, accepter l'évolution proposée par Bruxelles, c'est accepter la dégradation des comptes de l'opérateur national, et donc la qualité du service ; c'est aussi attenter à l'égalité des citoyens en portant un coup fatal à la péréquation.

Qu'allez-vous faire ? (« Rien ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Que décidera, in fine, le Gouvernement ? Etes-vous prêt à faire des contre-propositions pour empêcher cette dérive ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Comment le Gouvernement jugera-t-il les propositions de la Commission ? Je peux vous dire, monsieur le député, que ce jugement sera porté à l'aune de notre projet politique des citoyens et de la cohésion sociale. (Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Un tel projet implique la mise en oeuvre de deux idées forces...

M. Philippe Briand.

Grandiose !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... qui, je le crois, vont dans le sens que vous souhaitez.

D'abord, et c'est très clair, le Gouvernement n'acceptera pas de remise en cause du service public. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Il proposera, au contraire, un renforcement du service universel en présentant des contre-propositions précises sur la mise en place de services accessibles aux populations les plus défavorisées (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) ,...

M. Bernard Accoyer.

Par les 35 heures !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... la définition de règles relatives à la densité de la présence postale territoriale, notamment dans le monde rural et dans les quartiers difficiles,...

M. Lucien Degauchy.

Cela n'en prend pas le chemin !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... et, enfin, sur l'instauration d'un service postal européen acheminant le courrier entre les pays européens avec des délais nettement plus courts.

Ensuite - et nous serons également très fermes sur ce point -, le Gouvernement n'acceptera pas la remise en cause du principe selon lequel de larges secteurs doivent être réservés à La Poste. En effet, le monopole permet à La Poste d'assurer ses missions de service public au même prix sur tout le territoire. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Toute proposition de libéralisation totale, même à échéance lointaine, serait pour nous inacceptable.

M. Philippe Briand.

Vous allez tout de même accepter !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

De même, serait inacceptable toute proposition qui donnerait du monopole une définition tellement floue - par exemple, pour l a publicité adressée - qu'elle permettrait tous les contournements.

Les services réservés doivent, à nos yeux, rester larges pour permettre de financer entièrement, comme vous l'indiquez dans votre question, monsieur le député, les missions de service public, missions qui sont de plus en plus importantes, de plus en plus exigeantes et de plus en plus diversifiées.

Le combat sera difficile, mais nous sommes déterminés.

Je suis certain que nous bénéficions du soutien de l'ensemble de l'Assemblée nationale,...

M. Maurice Leroy.

Certainement pas !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... de l'opinion, des postiers et de leurs organisations syndicales. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe socialiste.

RETRAIT ISRAÉLIEN DU LIBAN SUD

M. le président.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) L'évacuation du Liban Sud par Israël est aujourd'hui une réalité. La résolution 425, vieille de vingt-deux ans, a été appliquée en quarante-huit heures.

L'application de la résolution 426, qui incombe au Conseil de sécurité, notamment au travers du mandat de la FINUL, reste, elle, d'actualité.

On peut d'ailleurs regretter que le Conseil de sécurité ait été une fois de plus surpris par un événement attendu et qui suscitait de graves inquiétudes.

Ces inquiétudes, vous les aviez d'ailleurs vous-même exprimées, monsieur le Premier ministre, et, après vous, M. le ministre de la défense et M. le ministre des affaires


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

étrangères. De son côté, le Président de la République a appelé hier soir la Syrie à la plus grande retenue dans cette circonstance.

Les événements qui étaient craints semblent avoir été pour l'essentiel évités à cette heure, même si l'on peut regretter que l'armée libanaise ne soit pas encore présente dans les territoires libérés.

Le problème de la pacification de la frontière israélolibanaise reste donc posé car Israël, ayant appliqué la résolution 425, a droit à une absolue sécurité sur la frontière internationalement reconnue. Cette sécurité doit être garantie par le Conseil de sécurité de l'ONU.

Mme Christine Boutin.

Très bien !

M. Gérard Bapt.

L'évacuation du Liban Sud survient, en effet, dans un contexte de grande incertitude pour le processus de paix, avec la crise des relations israélopalestiniennes et le blocage des négociations israélosyriennes.

S'agissant du Liban, l'application de la résolution 425 ouvre désormais le dossier de celle de la résolution 520, laquelle implique le retour à la seule légalité libanaise de la responsabilité de la paix civile.

Mme Christine Boutin et M. Laurent Dominati.

Très bien !

M. Gérard Bapt.

Le moment est désormais venu du désarmement des milices et du retrait des troupes syriennes.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, et sur quelques bancs du groupe socialiste, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Le moment est désormais venu d'appliquer, dix ans après leur signature, les accords de Taëf, conformément à leur esprit, et de restaurer la souveraineté libanaise et le droit du peuple libanais à décider de ses affaires dans le cadre démocratique de son choix.

M. Laurent Dominati.

Très bien !

M. Gérard Bapt.

Quelle est, monsieur le Premier ministre, l'appréciation du Gouvernement sur la situation dans la région et quel rôle la France jouera-t-elle dans la phase nouvelle et délicate qui vient de s'ouvrir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le député, comme nous l'avons constaté, les événements se sont précipités depuis lundi. L'allégement du dispositif militaire israélien, entamé en prévision de son retrait définitif du Liban Sud, a entraîné un effondrement de l'armée du Liban Sud, l'ALS. En moins de quarante-huit heures, au fur et à mesure du retrait des troupes israéliennes, le Hezbollah a pris le contrôle de la quasi-totalité de l'ancienne zone de sécurité. La plupart des combattants de l'ALS se sont rendus au Hezbollah ou au mouvement Amal, et les 150 prisonniers de la prison de Khiam ont été libérés. Il ne semble pas qu'il y ait eu d'exactions et les pertes humaines ont été limitées.

L'initiative revient maintenant, monsieur le député, aux Nations unies. A New York, le Conseil de sécurité a adopté hier une déclaration approuvant un premier rapport du secrétaire général concernant le rôle à venir de l'Organisation.

Il relève des points positifs qui semblent traduire la volonté des parties concernées de coopérer pour la mise en oeuvre des résolutions 425 et 426 du Conseil de sécurité. Mais certains aspects doivent être clarifiés, dans la perspective de la certification par le secrétaire général de l'ONU du retrait israélien. L'envoyé spécial de l'ONU, M. Roed Larsen, est donc reparti hier soir dans la région.

A ce jour, toutes les options restent ouvertes. Une fois que le secrétaire général de l'ONU aura certifié au Conseil de sécurité que le retrait israélien est conforme aux exigences de la résolution 425, se posera alors la question d'un éventuel redéploiement de la FINUL, au prix d'un renforcement qui reste à définir, pour compléter son mandat qui est, je le rappelle, d'aider le gouvernement libanais à restaurer son autorité effective dans la région.

Avant que notre pays ne s'engage dans cette voie, nous examinerons la situation sur le terrain et les garanties que les parties sont prêtes à donner. Ces garanties concernent notamment la sécurité des forces de l'ONU, et donc éventuellement de nos propres forces, et les engagements du gouvernement libanais tenant notamment au déploiement de l'armée libanaise.

En tout état de cause, comme l'a rappelé ce matin Hubert Védrine, le ministre des affaires étrangères, si la FINUL devait être redéployée, ce ne pourrait être dans notre esprit que pour une période très courte et à seule fin d'aider l'Etat libanais à restaurer son autorité dans la région.

La France, vous le savez, est particulièrement active.

Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, notre pays ne peut que se réjouir du retrait israélien du Liban Sud, que la communauté internationale réclamait depuis plus de vingt ans. Mais nous aurions préféré, et nous l'avons dit, que ce retrait s'opérât dans le cadre d'un accord de paix global entre la Syrie, le Liban et Israël.

Une fois obtenue la certification du retrait israélien, nous sommes prêts à prendre nos responsabilités au sein des forces des Nations unies, pour autant que l'Organisation aura obtenu un engagement concret des parties concernées - Israël, Syrie, Liban - ainsi que des garanties de sécurité indispensables.

M. Laurent Dominati.

Et le retrait de la Syrie ?

M. le Premier ministre.

C'est ce message que le Président de la République, qui s'est entretenu avec les principaux responsables de la région, et que le Gouvernement - en particulier le ministre des affaires étrangères, qui rencontre aujourd'hui même, à Florence, Mme Madeleine Albright - répètent à toutes les parties au conflit, que nous appelons à respecter la plus grande mesure.

Si toutes les conditions sont remplies, M. Kofi Annan sait qu'il pourra compter sur la détermination de la France à s'engager pour servir la cause d'une paix durable dans toute la région, dont nous espérons qu'elle pourra progresser à partir des événements actuels au Liban Sud et sur la base d'un accord global de paix, négocié entre toutes les parties.

Mme Christine Boutin, M. Pierre Lellouche et M. Pierre Lequiller.

Et le retrait de la Syrie ?

M. le Premier ministre.

Naturellement, nous soutiendrons l'évolution du processus de paix dans toutes ses dimensions, et nous souhaitons que ce processus avance p ositivement entre les Israéliens et les Palestiniens.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

Et la Syrie ?

SERVICE PUBLIC DE LA POSTE

M. le président.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes.

Monsieur le secrétaire d'Etat à l'industrie, je ne me contenterai pas de vous demander qui a déclaré récemment dans la presse que lutter pour le service universel, pour le service public en Europe, était un « combat d'arrière-garde ». Je ne vous le demanderai pas, car j'ai la réponse : il s'agit du commissaire européen Bolkestein, lequel est chargé du secteur postal. Celui-ci n'a d'ailleurs qu'une obsession : casser les postes nationales pour déréguler complètement le marché du courrier ! Dans le prolongement de la préoccupation exprimée par Georges Sarre, je voudrais savoir, monsieur le secrétaire d'Etat, quels sont les moyens - vous nous avez rappelé tout à l'heure les objectifs - que nous devons collectivement nous donner, sur la plupart des bancs de cette assemblée, comme au Gouvernement ou à la présidence de la République, pour que les 300 000 postiers sachent sur qui ils peuvent compter et pour que les Français soient assurés que, malgré M. Bolkestein, le facteur continuera de sonner à leur porte plusieurs fois par semaine, où qu'ils habitent sur le territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie, pour une réponse qui sera brève.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le député, il ne s'agit pas en effet d'un « combat d'arrière-garde » mais d'un combat essentiel à notre vision de la construction européenne.

Pour quoi et pour qui ? D'abord, pour les postiers : ils sont 1,7 million en Europe, dont 306 000 en France. Et ils savent bien les dégâts pour l'emploi que causerait l'option tout-libéral que certains voudraient faire prévaloir aujourd'hui au sein de la Commission européenne.

(Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Ils peuvent compter sur la fermeté et sur la détermination du Gouvernement pour défendre le service public et pour les défendre.

Ensuite, ce combat est essentiel pour les citoyens, car La Poste est un facteur de présence quotidienne, qui permet de communiquer rapidement, en toute sécurité, sur tout le territoire, et au même prix pour tous - ce qui est important.

M. Franck Borotra.

Vous bradez La Poste !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le bureau de poste assure aussi la présence du service public dans certaines zones, et constitue parfois le seul contact avec le système bancaire que peuvent avoir les personnes les plus isolées ou les plus défavorisées.

Ce qu'attendent les Français, mais aussi beaucoup d'Européens, ce n'est la remise en cause ni de la présence postale territoriale ni de la tarification unique, facteur de cohésion sociale et de cohésion territoriale, mais, au contraire, un service public de qualité, enrichi continuellement par de nouveaux apports, et à l'écoute des plus défavorisés. L'Europe doit proposer un tel projet. En tout cas, la France prendra des initiatives en ce sens.

Je peux vous indiquer que nous avons d'ores et déjà reçu le soutien d'un certain nombre de nos partenaires de l'Union et en particulier de dix postes européennes qui partagent la même conception que la poste française et se sont récemment regroupées pour exprimer cette vision convergente. Pour notre part, nous mobilisons nos partenaires. Ainsi, au Parlement européen, nous mobilisons de nombreux députés qui ont la même conception que la nôtre.

Notre vision de l'Europe sera, certes, difficile à faire prévaloir, mais nous oeuvrerons avec une grande détermination pour que l'ensemble des habitants de l'Europe bénéficient du service public de qualité auquel ils ont droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

SITES CONTAMINÉS PAR LA RADIOACTIVITÉ À PARIS

M. le président.

La parole est à Mme Michèle Rivasi.

Mme Michèle Rivasi.

Monsieur le président, ma question, qui s'adresse à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés, concerne une halte-garderie du 7e arrondissement de Paris. Elle me donnera l'occasion d'élargir mon propos au droit à l'information et aux dysfonctionnements des expertises officielles.

M. Jacques Myard.

C'est le Gouvernement !

Mme Michèle Rivasi.

Cette halte-garderie est installée sur un site qui hébergeait au début du siècle la Société f rançaise des applications du radium. En 1996, l'ANDRA, l'Agence nationale de gestion des déchets radioactifs, a été informée par l'association Robin des Bois des problèmes posés par ce lieu. Rien n'a été fait avant 1998. L'OPRI, l'Office de protection contre les rayonnements ionisants, a alors effectué des mesures, dans les sous-sols, mais pas là où se trouvaient les enfants. Il aura fallu attendre le mois de mai 2000 pour que l'OPRI - le ministère chargé de la santé - décide de fermer l'établissement.

Madame la secrétaire d'Etat, qui a donné l'autorisation d'implanter une halte-garderie dans un bâtiment qui abritait une usine de conditionnement de radium ?

M. Dominique Baert.

Très bonne question !

Mme Michèle Rivasi.

Pourquoi, alors que l'information a été donnée aux pouvoirs publics en 1996, a-t-il fallu attendre deux ans pour que l'OPRI effectue une première expertise, d'ailleurs incomplète, et deux ans supplémentaires pour que la décision de fermer la halte-garderie intervienne ? La CRIIRAD, qui vient de réaliser une contre-expertise à la demande des parents, ne comprend pas que la contamination du premier étage, où se trouvaient les enfants, n'ait pas été détectée lors de la première expertise étan t donné le caractère manifeste de l'irradiation.

Je rappellerai enfin, et cela intéressera tous les Parisiens, que quarante-huit sites similaires avaient été identifiés en 1998 dans Paris intra muros.

Cinq d'entre eux présentaient des anomalies, dont la halte-garderie de la rue Chomel.

Pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, que ce bilan est fiable et que les autres sites concernés ont été traités ? Que comptez-vous faire pour que de telles situations ne se renouvellent pas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés, pour une réponse rapide.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Monsieur le président, j'essaierai d'être rapide en dépit des nombreuses questions posées par

Mme Rivasi.

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

Ça, on le sait !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

La halte-garderie est gérée par une association privée qui fonctionne depuis 1978. Elle a obtenu depuis cette date l'agrément de la protection maternelle et infantile de la ville de Paris. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Elle bénéficie en outre d'un financement de la ville de Paris et de la caisse d'allocations familiales. Elle est contrôlée régulièrement par les services de la ville de Paris et de la préfecture de la Seine. A ce titre, toutes les modif ications de conditions d'agrément, notamment en matière d'aménagement et de restructuration des locaux, leur sont soumises pour accord.

Aucune donnée historique ne permettait, à l'époque, de pressentir l'existence dans cet immeuble d'une usine de conditionnement du radium.

L'OPRI, en ce qui le concerne, n'a eu connaissance de ce site, comme d'aileurs des autres lieux parisiens suspects, qu'en 1998, et c'est à ce moment-là qu'il a prescrit une inspection.

M. Francis Delattre.

Et depuis ?

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

L'inspection des étages dédiés aux activités sociales depuis 1938 dans cet immeuble privé n'a pas été réalisée du fait du caractère privé des locaux et de l'interdiction des propriétaires d'entrée et eu égard aux précisions fournies par les personnes rencontrées sur la reconfiguration totale des locaux. Cependant, la cave a été visitée et à cette occasion la contamination d'une canalisation a été mise en évidence.

La décontamination ayant été dernièrement programmée, l'OPRI est intervenu le 18 mai 2000 à la demande de l'ANDRA afin d'évaluer les quantités de matière devant être évacuées à partir de mesures de radiamétrie sur l'ensemble du parcours des canalisations dans l'immeuble.

Dès que les résultats ont été connus, la direction de l'OPRI a mis en place un protocole de contrôle systématique, qui a été mis en oeuvre le soir même. Ce protocole, toujours en cours de réalisation, comporte une cartographie des rayonnements...

M. le président.

Pouvez-vous conclure, madame ? (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Monsieur le président, les questions précises qui m'ont été posées appellent des réponses précises !

M. Maurice Leroy.

Terminez donc !

M. le président.

Monsieur Leroy, je vous en prie !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Je vais terminer, mais je n'ai pas encore répondu à toutes les questions de Mme Rivasi. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues de l'opposition, ce n'est pas vous qui êtes en l'occurrence pénalisés : c'est le groupe socialiste. Alors, je vous en prie, un peu de calme !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Toutes ces données ont été transmises par l'OPRI au fur et à mesure à la direction générale de la santé, assorties de recommandations de fermetures.

Sur un total de quarante-trois autres sites, vingt-sept ne présentent aucune trace de radioactivité. Le 12 de la rue Chomel appartient à la catégorie des cinq sites signalés.

(Exlamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, un peu de silence !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Par ailleurs, une dizaine d'autres n'ont pu être contrôlés en raison du refus des propriétaires. Nous allons donc engager des procédures autoritaires pour contrôler les sites malgré l'avis des propriétaires.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - « N'importe quoi ! C'est nul ! » et huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous passons à une question du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

TRANSFERT DE L'ÉCOLE INTERARMÉES

DES SPORTS DE FONTAINEBLEAU

M. le président.

La parole est à M. Hubert Grimault.

M. Hubert Grimault.

Monsieur le président, permettezmoi en préalable d'exprimer un regret quant au silence appuyé du Premier ministre à propos de l'occupation du Liban par la Syrie. Sur se sujet, il n'a pas daigné répondre à nos interrogations.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.

L'Ecole interarmées des sports de Fontainebleau a été créée en 1967. Cette école avait été mise en place pour regrouper l'ensemble des centres de sports militaires de France avec comme missions majeures la formation de moniteurs de sport des armées et l'entraînement des sportifs de haut niveau.

Après trente années d'existence, on ne peut que constater ses résultats largement positifs : cinquante hectares d'équipements sportifs, deux piscines, cinq salles de sport, de multiples terrains de plein air et, surtout, un centre médical de haut niveau européen. Les dernières années, 80 millions d'investissements supplémentaires ont permis d'y accueillir mille personnes en permanence.

Certes, les réductions drastiques des crédits imposés aux armées et l'arrêt de la conscription imposent des restrictions importantes. Mais le transfert onéreux à Brest, où rien n'est prévu, de la formation des moniteurs des armées suscite une première interrogation.

La rumeur laisse entendre que le site de Fontainebleau serait cédé à un groupe commercial, du style Decathlon.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

M. François Goulard.

Oh ! Quelle horreur !

M. Yves Fromion.

C'est scandaleux !

M. Hubert Grimault.

Qu'en est-il exactement ? Une interrogation subsiste également concernant le camp des Loges à Saint-Germain-en-Laye, propriété de votre ministère. Ne dit-on pas qu'une cession au PSG serait à l'étude ?

M. le président.

Monsieur Grimault, vous n'avez pas d'autre question ? Il vous faudrait conclure...

M. Hubert Grimault.

A l'heure où Paris et la France revendiquent d'organiser les jeux Olympiques de 2008, ne serait-il pas opportun d'envisager à Fontainebleau l'accueil de l'INSEP, des sportifs de haut niveau et des UER-STAPS, actuellement à l'étroit dans leurs installations ? Certains disent que Fontainebleau pourrait devenir, si vous le voulez bien, la Silicon Valley du sport en France.

(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Mme Marie-George Buffet, très engagée en faveur du développement du sport, plaidera, je l'espère, auprès de vous la concrétisation de ce projet.

Monsieur le ministre, qu'allez-vous décider ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de la défense.

M. Alain Richard, ministre de la défense.

Monsieur Grimault, je voudrais d'abord insister sur une information de base : si la réorganisation du système de santé des armées est appelée à se dérouler, ce n'est absolument par défaut de crédits, mais c'est simplement parce que les missions de celui-ci changent. Jusqu'à présent, dans un contexte de conscription, il avait été d'intérêt public que les jeunes conscrits déjà sportifs de haut niveau parachèvent leur entraînement, notamment en vue de compétitions, dans un cadre de rayonnement des armées.

Dans deux ans, il n'y aura plus de conscription. Par conséquent, l'objet de l'école interarmées des sports disparaîtra. Je pense que personne n'envisage qu'on maintienne la conscription pour les seuls sportifs de haut niveau.

(Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

A partir de là, la responsabilité du service interarmées des sports est, d'une part, de maintenir l'entraînement des sportifs de haut niveau dans les sept ou huit disciplines militaires pour lesquelles ont lieu des compétitions régulières - les sportifs concernés sont de haut niveau mais on passe de cinquante-cinq disciplines à huit - et, d'autre part, de poursuivre la formation des formateurs d'éducation physique et sportive militaires.

L'emprise dont nous avons maintenant besoin est donc beaucoup plus faible et, compte tenu des restructurations qui ont pesé et qui continuent de peser sur le bassin de Brest, il a paru équitable, ce dont les représentants des collectivités locales de Seine-et-Marne ont convenu après une discussion loyale, que le système redessiné soit localisé ailleurs.

Il faut donc maintenant faire le meilleur usage des installations de Fontainebleau dans le sens que vous avez décrit. Mais ainsi que je le rappelle souvent à beaucoup d'élus avec qui nous discutons des suites de restructurations, les implantations dont nous parlons ont été financées avec l'argent des contribuables. S'il s'agissait d'installations relevant de nos collectivités locales, il nous paraîtrait tout naturel de les vendre au meilleur prix.

Quand il s'agit du produit du travail ou, plutôt, de la dépense du contribuable national, il faut être évidemment aussi vigilant et aussi efficace que lorsqu'il s'agit de sommes payées par le contribuable local.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Des possibilités d'usage public existent donc. Nous en discutons avec les structures publiques du sport au niveau national et au niveau régional. Il existe aussi des possibilités privées, et vous n'ignorez pas que le financement privé a aujourd'hui une grande part dans le développement du sport de haut niveau.

Les deux solutions restent ouvertes.

Quant au camp des Loges, je considère, par souci de prévoyance, comme pour toutes les grandes infrastructures militaires qui sont situées au pourtour des grandes villes, qu'il est de ma responsabilité de le maintenir sous contrôle public. Peut-être n'aurons-nous pas vraiment besoin de ces infrastructures au cours des dix ans qui viennent. Mais, dans vingt ou trente ans, nos successeurs seront peut-être heureux de les trouver. Il n'est par conséquent pas question d'aliéner le camp des Loges.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe communiste.

FINANCEMENT DE LA PROTECTION SOCIALE

M. le président.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse.

Ma question s'adresse à

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la ministre, pour la première fois depuis 1985, les comptes du régime général de la sécurité sociale sont équilibrés et un excédent est annoncé pour l'année.

M. Yves Fromion.

Sur le dos des travailleurs !

Mme Jacqueline Fraysse.

C'est une bonne nouvelle pour tous ceux qui sont attachés à notre système de protection sociale fondé sur la solidarité nationale.

Cet excédent doit être examiné à la lumière des besoins non satisfaits - je pense notamment à la revalorisation des allocations familiales et des pensions de retraite, au budget des hôpitaux, au niveau des prestations maladie ou aux moyens de traiter les dossiers de remboursement de sécurité sociale en retard.

Vous nous avez annoncé hier un meilleur remboursement des lunettes, des soins dentaires et des prothèses auditives, des thérapies coûteuses pour des maladies graves, l'installation de quatre-vingt-quatorze appareils d'IRM supplémentaires sans oublier les demandes des retraités et l'aide aux personnes handicapées.

Nous prenons acte avec satisfaction de ces engagements.

M. Alain Barrau.

Très bien !

Mme Jacqueline Fraysse.

Néanmoins, ils exigent des moyens.

Comment envisagez-vous de financer tout cela avec un excédent somme toute modeste au regard de ces ambitions légitimes ? Ces résultats, liés à une meilleure situation de l'emploi, confirment que c'est du côté des recettes qu'il faut avancer afin de trouver des financements durables pour une protection sociale moderne à la hauteur des besoins.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Dans le cadre de la poursuite des réformes structurelles du financement de la protection sociale que vous avez engagées, envisagez-vous d'accepter de mettre à contribution les revenus des placements financiers des grandes entreprises, ce qui serait à la fois équitable et source de recettes nouvelles indispensables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, vous m'avez interrogée sur les excédents de la sécurité sociale et sur les moyens de les rendre encore plus forts par une réforme des cotisations.

Tout comme vous je me réjouis de résultats que l'on connaît pour la première fois depuis quatorze ans. Ils réjouissent tous les Français, tous ceux qui sont attachés à notre système de protection sociale.

L'excédent sera de 13,5 milliards en 2000. D'ores et déjà, 8,5 milliards sont réservés pour le fonds de réserve des retraites. Nous devrons, quoi qu'il en soit, continuer d'améliorer notre système de santé.

Je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit hier et sur ce que vous avez, pour une part, rappelé - la prévention du cancer et de l'hépatite C, les quatre-vingt-quatorze appareils d'IRM complémentaires, la prise en charge et le remboursement des compléments nutritionnels pour les personnes atteintes d'un cancer, le vaste plan pour les handicapés, la médicalisation des maisons de retraite - car tout cela est déjà intégré dans le plan de l'an 2000.

M. Yves Fromion.

Il n'y a jamais eu d'appareils d'IRM dans les maisons de retraite !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous devons aller plus loin et je partage les priorités que vous avez fixées.

D'abord, nous appliquons le protocole que nous avons signé avec les organisations du service hospitalier. Il prévoit 10,5 milliards en trois ans, budgétés dès l'an 2000.

Nous devons aussi améliorer les retraites car les retraités souhaitent avoir une partie des fruits de la croissance.

Nous devons encore traiter le problème de l'autonomie, comme l'a récemment annoncé le Premier ministree t nous devons améliorer certains remboursements, comme ceux des lunettes, des prothèses auditives et des soins dentaires.

Tout cela, nous allons le faire en gardant la même vigilance car toute cotisation versée doit être bien utilisée.

Une dépense inutile ne permet pas d'aller plus loin dans la voie d'un meilleur remboursement et d'une meilleure prise en compte des progrès thérapeutiques. Or nous voulons aller plus loin.

J e continuerai donc, avec la même vigilance, à combattre les dépenses inutiles en matière de médicaments, à gérer avec rigueur les hôpitaux et à demander aux professionnels de santé de continuer leurs efforts.

En ce qui concerne le financement et les recettes, nous avons déjà élargi l'assiette des cotisations sociales qui, auparavant, se limitait aux salaires.

Nous avons élargi l'assiette de la CSG et fait en sorte que le prélèvement de 2 % sur les revenus s'applique également aux capitaux, ce qui a rapporté 25 milliards de francs à la sécurité sociale. Nous avons abaissé les cotisations sociales sur le travail pour que celles-ci ne portent pas atteinte à l'emploi.

Les résultats sont là : 140 000 emplois créés au premier trimestre ; plus de 40 % des entreprises de plus de dix salariés sont déjà passées aux 35 heures sans doute aussi grâce à cette baisse des charges.

Faut-il aller plus loin ? Je propose qu'à l'occasion de la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale nous fassions un premier bilan de ces mesures et que nous regardions ensemble les autres mesures éventuellement nécessaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

SITUATION AU PROCHE-ORIENT

M. le président.

La parole est à Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès.

Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères. Mais peut-être le Premier ministre choisira-t-il, en me répondant lui-même, de compléter son intervention précédente puisque, ma question concernant la situation au ProcheOrient, il pourrait élargir son propos au-delà du seul problème du Sud-Liban.

En effet, l'évolution de la situation en Cisjordanie et à Gaza, les récentes manifestations, endeuillées par la mort de six jeunes Palestiniens, et le retrait longtemps espéré et positif des forces israéliennes du Sud-Liban, mais un retrait précipité et non assorti d'accords politiques entre Israël, Beyrouth et la Syrie, ont contribué à accroître de façon particulièrement inquiétante les tensions militaires et politiques au Proche-Orient.

Ces événements surviennent dans un contexte où le processus de paix, auquel s'est pourtant engagé Ehud Barak, demeure aujourd'hui encore dans l'impasse.

Au mois de février dernier, M. le Premier ministre rappelait devant notre assemblée qu'il revenait aux Israéliens de consentir les efforts les plus grands pour relancer le processus. Nous partageons cette conviction et demandons au Gouvernement d'informer la représentation nationale des initiatives diplomatiques qu'il aurait prises ou qu'il envisage de prendre en direction du gouvernement israélien pour obtenir dans les meilleurs délais la reprise des négociations récemment interrompues, et de lui préciser, plus fondamentalement, comment la France entend favoriser la mobilisation de la communauté internationale, et particulièrement celle de l'Union européenne et des Nations unies, pour oeuvrer à la réalisation rapide des conditions politiques d'un accord de paix, de sécurité et de stabilité dans cette région ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Monsieur le député, vous avez raison, les tensions politiques et militaires sont très grandes en ce moment dans cette région du Proche-Orient.

Je vous rappelle que la France n'est pas directement partie au processus de paix, mais elle entend naturellement rester présente, très présente, afin d'oeuvrer à l'él aboration d'une paix globale, juste et durable. Elle cherchera notamment à mettre à profit sa présidence de l'Union européenne pour renforcer le rôle et la visibilité de l'Europe dans ce processus.

S'agissant du Sud-Liban, le Premier ministre a répondu très précisément tout à l'heure à la représentation natio nale. Je n'ajouterai rien, sinon pour rappeler à mon tour


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

les contacts entretenus par les différentes autorités françaises et le fait que nous avons reçu, et tout dernièrement encore, des responsables politiques de la région, notamment les ministres israélien et syrien des affaires étrangères.

Quant aux événements en Cisjordanie et à Gaza, la situation semble redevenir plus calme après les incidents dramatiques de la semaine dernière qui ont fait de nombreuses victimes.

Nous espérons que le transfert de territoires à l'autorité palestinienne pourra bientôt reprendre et que la suspension des pourparlers entre Israël et les Palestiniens, ou plus exactement le rappel, pour consultation, de ses négociateurs par Israël, sera provisoire.

Lundi dernier, le Conseil des affaires générales de l'Union européenne a déploré le regain de tension. Il a lancé un appel à l'autorité palestinienne et à Israël pour qu'ils intensifient leurs efforts afin de conclure les négociations en cours, en témoignant du courage et de l'esprit de compromis que cela exige. Le Gouvernement se reconnaît parfaitement dans cette prise de position des Quinze, à laquelle il a d'ailleurs fortement contribué.

Soyez donc assuré qu'il ne ménagera pas ses efforts auprès de toutes les parties en faveur du processus de paix ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de Mme Nicole Catala.)

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est reprise.

2

PRESTATION COMPENSATOIRE EN MATIÈRE DE DIVORCE Discussion, en deuxième lecture, d'une proposition de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi relative à la prestation compensatoire en matière de divorce (nos 2325, 2404).

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, la proposition de loi relative à la prestation c ompensatoire revient aujourd'hui devant vous en deuxième lecture.

Je constate avec satisfaction que les principes dégagés par la réforme font l'unanimité entre les deux chambres ; je veux souligner la part prise dans cette réussite par votre rapporteur, Alain Vidalies, et l'en remercier.

Je ne peux que me réjouir d'un tel consensus qui montre que les questions relatives au droit de la famille peuvent transcender les clivages partisans et je suis persuadée qu'à l'issue de cette lecture, un accord en commission mixte paritaire permettra une adoption rapide du texte Cette proposition de loi traduit le souci de trouver un équilibre entre les droits des débiteurs et les droits des créanciers, qui ne doivent pas, par l'effet d'une réforme trop radicale, se retrouver démunis et lésés.

Il ne faudrait pas que, par un mouvement de balancier brutal, une nouvelle injustice succèdât à celle qui existe aujourd'hui et dont témoignent de nombreux courriers qui reflètent autant de situations humaines et familiales douloureuses, voire dramatiques.

Cet équilibre se traduit par quelques principes forts dont je voudrais rappeler l'économie.

Premier axe fondamental, la quasi-impossibilité de réviser les rentes est désormais levée. Qu'elles soient antérieures ou postérieures à l'entrée en vigueur de la loi, celles-ci pourront être révisées en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties.

Concrètement, des situations telles que la mise à la retraite, le chômage du débiteur ou l'amélioration substantielle de la situation du créancier ne seront plus ignorées par le droit. Les blocages nés de l'application de la loi seront ainsi levés.

Deux facteurs de souplesse supplémentaires ont été introduits par le Sénat. D'une part, la suspension temporaire du versement de la rente est possible ; d'autre part, la révision peut conduire à une modulation des versements par périodes successives dans la limite de l'enveloppe globale initialement fixée. Votre commission des lois reprend ce mécanisme, qui me paraît en effet intéressant.

Le deuxième axe fondamental réside dans la prééminence conférée au versement en capital. Loin d'en faire un principe technique, la proposition de loi comporte à cet égard des mesures pragmatiques et précises. Comme je m'y étais engagée devant vous lors de la première lecture, le Gouvernement a proposé au Sénat un accompagnement fiscal destiné à rendre attractif le paiement en capital tout en tenant compte des modalités de versement de celui-ci que vous avez adoptées en première lecture. La Haute Assemblée s'est ralliée au mécanisme proposé par le Gouvernement.

Deux régimes fiscaux distincts sont désormais prévus en fonction de l'échelonnement des paiements.

Lorsqu'ils seront effectués sur une durée inférieure à douze mois, le débiteur bénéficiera d'une réduction d'impôt pouvant aller juqu'à 50 000 francs.

Si ces versements sont étalés entre douze mois et huit ans, ils seront pris en compte dans l'imposition sur le revenu des parties ; déduits intégralement des revenus du débiteur, ils seront déclarés par le créancier.

Votre commission des lois adhère à ce dispositif qui s'inscrit pleinement dans la philosophie qui a animé vos travaux.

Troisième avancée essentielle de la proposition, la limitation drastique des rentes viagères qui sont assurément la cause principale du malaise actuel.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Le caractère exceptionnel du recours aux rentes est affirmé en prévoyant expressément qu'elles sont subordonnées à l'impossibilité pour le créancier, en raison de sa situation personnelle, de subvenir à ses besoins. Je crois que cette précision est judicieuse et je constate que votre commission des lois partage cette opinion, suivant ainsi le Sénat.

Reste un dernier point d'équilibre touchant à la transmissibilité de la prestation compensatoire aux héritiers du débiteur.

Je sais que c'est une question sensible. Certains souhaitent que le versement de la prestation cesse définitivement au décès du débiteur. Nos débats ont mis en lumière des situations insupportables. Mais il serait tout aussi inadmissible de laisser brutalement le créancier sans ressource si la rente qu'il percevait constituait sa seule source de revenu.

Je crois que le texte tel que vous l'abordez aujourd'hui est parvenu à concilier les intérêts contradictoires des deux parties. Conformément au droit commun des successions, le principe de la transmissibilité de la prestation est maintenu.

Les héritiers du débiteur auront la possibilité de demander la révision de la prestation si son décès entraîne une modification importante des situations en présence.

En outre, la pension de réversion éventuellement perçue par le créancier viendra en déduction de la rente qu'il perçoit. A cet égard, votre commission des lois s'est interrogée sur la différence de régime entre les rentes qui seront attribuées après l'entrée en vigueur de la loi, pour lesquelles la déduction sera automatique, et celles qui lui sont antérieures.

Pour ces dernières, il est apparu difficile au Gouvernement de transposer la même solution qui, par son caractère abrupt, aurait eu pour conséquence de remettre en cause des droits acquis alors que la prestation compensatoire a pu être fixée en tenant compte de la pension de réversion. C'est pourquoi j'ai déposé en première lecture un amendement, que vous avez voté, laissant au juge le soin d'apprécier, à la demande des héritiers du débiteur, l'opportunité de procéder à une éventuelle déduction de cette pension.

Il est vrai qu'une autre solution aurait pu se concevoir, qui, inversant le mécanisme, aurait retenu une déduction automatique, sauf, pour le créancier, à saisir le juge. Je sais que votre commission des lois était tentée de s'orienter en ce sens, mais la mise en oeuvre technique de cette solution aurait soulevé des difficultés, dans la mesure où le créancier peut être dans l'ignorance de la détermination des héritiers à assigner. Aussi estimons-nous plus prudent de maintenir le texte en l'état et je remercie la commission des lois et son rapporteur d'avoir accepté ce point de vue.

Tels sont les aspects essentiels d'une réforme qui, je le crois profondément, est de nature à répondre aux difficultés actuelles.

Au cours des navettes successives, le texte s'est enrichi.

Les amendements d'ordre technique proposés par votre commission des lois amélioreront encore la lisibilité d'ensemble du dispositif et je pense que nous pouvons tous être satisfaits du travail accompli. Je vous en remercie.

C'est une réforme extrêmement importante que vous allez adopter cet après-midi.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance.)

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législatin et de l'administration générale de la République.

M. Alain Vidalies, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, la deuxième lecture par le Sénat de la proposition de loi relative à la prestation compensatoire apporte deux enseignements majeurs. D'une part, le Sénat a accepté l'architecture du texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, d'autre part, le Gouvernement a présenté devant le Sénat un dispositif fiscal très positif qui conforte nos propositions.

Nous avions, en première lecture, décidé de renforcer le principe du paiement en capital éventuellement payable sur huit ans sans possibilité de révision du capital luimême, les modalités de versement pouvant seules être modifiées en cas de changement notable dans la situation du débiteur. Nous avions retenu le principe que les rentes viagères ne pourraient résulter que d'une décision spécialement motivée en raison de l'âge et de l'état de santé du créancier. Le Sénat a ajouté : « ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins ». Cette précision s'inscrit dans l'esprit de la loi et mérite d'être approuvée.

Les prestations compensatoires sous forme de rentes viagères pourront être révisées uniquement à la baisse, supprimées ou suspendues - précision utilement ajoutée par le Sénat - en cas de changements importants dans les ressources et les besoins des parties.

L'assouplissement des conditions de révision des rentes est à l'évidence le dispositif le plus attendu par les justiciables, confrontés à la rigueur de l'interprétation de la notion d'exceptionnelle gravité dans le droit positif et à l'impossibilité de prendre en compte l'amélioration de la situation du créancier.

Cette action sera ouverte au débiteur ou à ses héritiers tant pour les rentes futures que pour les rentes en cours.

Au surplus, pour les rentes futures, au décès du débiteur, la pension de réversion sera de plein droit déduite de la rente.

J'aurais souhaité que la déduction de plein droit de la pension de réversion - que vous avez évoquée, madame la ministre - s'appliquât également automatiquement aux rentes payées par les héritiers à la date de la publication de la loi. Il aurait été envisageable d'imposer ce principe et de permettre au créancier de saisir le juge pour demander le maintien en tout ou en partie du cumul de la prestation compensatoire et de la pension de réversion.

La logique retenue est inverse, à savoir que les héritiers du débiteur pourront seulement saisir le juge pour demander la suppression de ce cumul.

Les commissions des lois de l'Assemblée nationale et du Sénat avaient adopté un amendement conforme à mes voeux, qui a été rejeté dans les deux assemblées. Votre persuasion l'ayant emporté, madame la ministre, je ne peux qu'acter aujourd'hui que l'article 6 a été adopté dans une rédaction conforme par les deux assemblées et n'entre plus dans le champ de nos délibérations d'aujourd'hui.

Reste le débat sur le principe de la transmissibilité qui a suscité de nombreuses interventions, parfois virulentes, auprès des parlementaires.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Le Sénat, comme l'Assemblée, a décidé de ne pas remettre en cause ce principe.

La prestation compensatoire a un caractère indemnitaire et ne relève pas de l'obligation alimentaire comme la pension alimentaire d'avant 1975. La loi ne peut à la fois reconnaître ce caractère indemnitaire pour exclure la révision à la hausse et considérer qu'il s'agit d'une obligation alimentaire s'éteignant avec le décès du débiteur.

La cohérence juridique s'impose au législateur et si le principe de la non-transmissibilité était retenu, il faudrait alors revenir à la situation d'avant 1975, c'est-à-dire, en réalité, à une pension alimentaire certes non transmissible mais révisable à tout moment, à la hausse ou à la baisse, du vivant du débiteur. Cette solution a entraîné à l'époque les plus vives protestations de la part des débiteurs qui, à juste titre, jugeaient intolérable d'être soumis en permanence au risque de subir une demande d'augmentation de la pension alimentaire, parfois des décennies après le jugement de divorce.

A ces arguments juridiques s'ajoutent des considérations d'équité. Imaginons un homme marié pendant vingt-cinq ans, astreint à verser une prestation compensatoire par le jugement de divorce, qui se remarie puis décède quelques années après. Si cet homme disposait d'un patrimoine d'une certaine consistance, il n'est pas possible d'accepter que la première épouse se retrouve de fait sans ressources et à la charge de la société par l'effet de la non-transmissibilité de la prestation compensatoire.

Il n'est donc pas souhaitable de remettre en cause le principe de la transmissibilité de la rente, d'autant que plusieurs dispositions de la proposition en atténuent la rigueur. Si, au décès de cet homme, la première épouse bénéficie d'une pension de réversion, celle-ci viendra automatiquement en déduction de la prestation compensatoire versée par les héritiers. En pratique, cette nouvelle disposition aboutira à supprimer ou à diminuer considérablement la plupart des rentes viagères.

Par ailleurs, si, au moment du décès, les héritiers se trouvent eux-mêmes dans une situation matérielle détériorée, ils pourront désormais demander soit la révision des modalités de paiement du solde du capital, soit la suppression ou la révision à la baisse de la rente viagère.

Si la situation du bénéficiaire s'est améliorée, les héritie rs pourront également demander la révision ou la suppression de la rente.

Certains héritiers sont aujourd'hui dans une situation difficile, qui a justifié l'examen de la présente proposition de loi. Ce sont les victimes du principe de la non-révision des rentes. Je souhaite, au moment où nous allons modifier la loi pour répondre à ces situations inacceptables, qu'ils comprennent que le principe inverse présente les mêmes défauts et pourrait aboutir à des situations tout aussi inacceptables.

En réalité, chacun admettra qu'il est dangereux de vouloir répondre à des situations d'une extrême diversité par des principes intangibles. Ceux qui en ont fait la douloureuse expérience depuis 1975 doivent admettre que cet enseignement s'applique également aux autres.

La commission des lois vous propose en conséquence de confirmer la rédaction précédemment retenue par les deux assemblées.

Le Gouvernement a proposé devant le Sénat un dispositif fiscal d'accompagnement que nous avions tous appelé de nos voeux en soulignant unanimement qu'il était un préalable indispensable à l'adoption de la réforme des prestations compensatoires. Je veux vous dire, madame la garde des sceaux, toute ma satisfaction sur ce point et, ayant été acteur de la négociation, remercier le ministère des finances qui, une fois n'est pas coutume, s'est associé à cette démarche sans restriction.

Ainsi, les versements échelonnés du capital, au-delà de douze mois et jusqu'à huit ans, seront déductibles des revenus du débiteur dans les mêmes conditions que les rentes actuelles. C'est la disposition essentielle qui assure la cohérence du nouveau régime du paiement en capital que nous avions privilégié.

Mais le Gouvernement a également accepté de renforcer cette logique en proposant pour la première fois une réduction d'impôt sur le revenu de 25 % du capital versé, dans la limite de 200 000 francs, soit une réduction d'impôt maximale de 50 000 francs. Cette réduction d'impôt, par cohérence avec le régime proposé pour les paiements échelonnés du capital, bénéficiera aux débiteurs qui procéderont au paiement dans un délai maximal de douze mois.

Les travaux de la commission des lois ne permettent pas d'aboutir à un vote conforme en raison de quelques amendements de précision et d'une difficulté relative au principe de non-intégration de la capitalisation de la rente dans l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Cette précision retenue par le Sénat ne peut à mon sens recevoir en l'état notre approbation. Mais il est certain que les conditions d'un accord entre les deux assemblées existent.

Nous pouvons donc espérer, avec le concours du Gouvernement, que le calendrier que nous nous étions fixé sera respecté, à savoir le vote définitif de la loi avant le 1er juillet 2000.

J'observe, pour terminer, que la principale association qui militait pour la réforme de la prestation compensatoire a reconnu, dans une déclaration publique, les avancées importantes du texte dont je vous propose l'adoption.

Oui, il s'agit d'une réforme indispensable. Je souhaite que nos débats et nos votes en deuxième lecture marquent à nouveau notre volonté unanime d'aboutir rapidement à cette réforme tant attendue, dans le respect des principes juridiques et d'équité qui s'imposent, dès lors que nous légiférons sur une question qui touche d'aussi près à la vie personnelle de nombre de nos concitoyens.

Une loi juste et comprise par tous, tel est l'objectif naturel du législateur. C'est celui que je vous propose d'atteindre par nos travaux en deuxième lecture.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Discussion générale

Mme la présidente.

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Véronique Neiertz.

M me Véronique Neiertz.

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, la première lecture au Sénat et à l'Assemblée nationale nous avait permis de jeter les bases d'une réforme simple et concrète de la prestation compensatoire, guidée par la souci de ne pas faire succéder une autre injustice à celle qu'avait générée le versement de rentes viagères non révisables en application de la loi de 1975. Le principe avait donc été unanimement adopté de remplacer le versement d'une rente viagère, prescrit presque toujours par les juges - et on sait pourquoi -, par le versement d'un capital.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

A propos de ce texte, nous avons reçu énormément de courrier, et sur toutes sortes de points. Mais, après la première lecture, les lettres ont essentiellement porté sur le principe de transmissibilité aux héritiers. Le rapporteur a donc bien fait de préciser pourquoi nous avions maintenu ce principe tout en l'équilibrant et en le modulant. Ainsi, la prestation pourra désormais être révisée et, à l'initiati ve de notre commission des lois, qui a modifié sur ce point le texte du Sénat, à compter du 1er janvier 2001, le cumul de la prestation compensatoire et de la pension de réversion ne sera plus possible. Il y a là une amélioration du principe de la transmissibilité dont nous pouvons nous féliciter.

Cependant, madame la garde des sceaux, c'est surtout sur votre travail d'accompagnement fiscal de la réforme que je voudrais insister.

M. Alain Vidalies, rapporteur.

A juste titre !

Mme Véronique Neiertz.

Une fois n'est pas coutume, je dois vous dire, au nom de l'Assemblée nationale, que si vous n'aviez pas remporté ce succès - avec notre appui, mais votre action a été déterminante - notre réforme aurait été bien légère et serait probablement restée lettre morte. Vous avez en effet obtenu du ministère des finances - il faudra que vous nous donniez la recette -...

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Oh oui !

Mme Véronique Neiertz.

... d'une part, une réduction d'impôt de 50 000 francs lorsque le capital est versé sur une période de moins de douze mois et, d'autre part, s'il est versé entre douze mois et huit ans, une déduction des revenus de 25 % du capital versé. Nous l'avions demandé, bien sûr, mais en doutant que vous l'obteniez.

Vous n'êtes peut-être pas allée au-delà de nos espérances, mais vous avez comblé tous nos espoirs. Je vous en félicite car cette incitation fiscale, nous le savons bien, est la vraie raison pour laquelle la prestation compensatoire sera désormais versée sous forme de capital et non plus, ou très exceptionnellement, à l'appréciation du juge, sous forme de rente viagère.

Madame la ministre, voilà une occasion exceptionnelle de nous féliciter du travail que nous faisons en commun.

Cette réforme et les mesures fiscales qui l'accompagnent sont le gage que nous n'avons pas travaillé pour rien sur la prestation compensatoire. Avec ce texte, qui vous a permis de montrer toute votre efficacité, vous avez initié le grand projet de réforme du droit de la famille que vous avez mis en chantier. Enfin, la réforme de la prestation compensatoire aura des effets très concrets pour les personnes concernées, car elle définit non seulement le régime applicable aux dossiers à venir, mais elle prévoit également des mesures de transition pour les dossiers existants.

Je pense que nous avons fait le tour de tous les problèmes concrets et pratiques qui se posaient. L'engagement et les efforts de tous, la réflexion de chacune et de chacun, les points de vue pouvant être contradictoires, auront abouti à un résultat dont je vous remercie à nouveau, madame la ministre. Je serai particulièrement heureuse de voter cette réforme, et j'espère qu'elle sera adoptée à l'unanimité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

Madame la ministre, nous sommes en effet d'accord, sur tous les bancs de l'Assemblée, pour considérer que la réforme de la prestation compensatoire était à la fois nécessaire, compte tenu des dérives constatées après vingt-cinq ans d'application de la loi de 1975, et urgente, en raison des situations difficiles relevées de-ci, de-là.

Cette réforme, vous l'avez rappelé, s'articule autour de quatre axes : premièrement, la fixation en capital de la prestation compensatoire, avec la faculté pour le juge de moduler le versement de la prestation, celui-ci pouvant être étalé sur huit ans ; deuxièmement, la possibilité de réviser la prestation ; troisièmement, l'harmonisation fiscale.

A cet égard, permettez-moi à mon tour, madame la ministre, de vous remercier de votre engagement et de votre réussite. Une fois n'est pas coutume, c'est un amendement de l'opposition repris par la commission qui est à l'origine de ce succès et je ne m'associe que plus volont iers aux paroles élogieuses que vous a adressées

Mme Neiertz.

Mme Véronique Neiertz.

Monsieur Blessig, vous êtes parfait ! (Sourires.)

M. Emile Blessig.

Merci, madame Neiertz, mais je ne vous en demande pas tant !

M. Alain Tourret.

Méfiez-vous de tant de compliments !

M. Christian Estrosi.

Cela prépare sans doute un piège !

Mme Véronique Neiertz.

Parfait... sur ce point ! (Sourires.)

M. Emile Blessig.

Alors, je peux reprendre mes esprits.

Le maintien à titre exceptionnel, sur décision spécialement motivée, de la rente viagère en raison de l'âge ou de l'état de santé du créancier est le quatrième axe de cette réforme.

Bien que satisfaisantes pour l'avenir, ces dispositions ont soulevé des interrogations de la part des débiteurs de la prestation compensatoire et suscitent l'inquiétude des créanciers.

Du côté des débiteurs, on évoque les problèmes de la transmissibilité de la prestation aux héritiers, et je m'associe à ce qui vient d'être dit à ce sujet. On évoque aussi la non-prise en compte des sommes déjà versées en cas de révision de la rente.

Quant à l'inquiétude des créanciers, elle est principalement fondée sur leur sentiment d'être marginalisés par les médias et peu écoutés par les parlementaires ou les formations politiques.

De telles objections se comprennent, mais ce texte est à la recherche de justice et d'équilibre et ne peut donc pas satisfaire entièrement toutes les parties. Néanmoins, je souhaite répondre aux inquiétudes qui, nécessairement, se font jour.

Si la transmissibilité de la prestation compensatoire aux héritiers se justifie par le fondement indemnitaire de la prestation, ce fondement même impose de réfléchir à la détermination du préjudice déjà indemnisé à la date de la révision. C'est pourquoi le groupe UDF, à l'occasion de cette deuxième lecture, défendra à nouveau des amendements tendant à préciser que la révision doit également s'apprécier compte tenu des sommes déjà versées.

Il convient aussi d'apporter une réponse aux interrogations des créanciers. Le souci légitime de réparer les injustices apparues depuis vingt-cinq ans dans l'application de la loi de 1975 ne doit évidemment pas conduire à ébranler davantage la situation de certains ex-époux qui, ayant consacré leur vie à leur foyer, n'ont aucune pers-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

pective de trouver ou de retrouver une activité professionnelle. Entre liberté et responsabilité, la mission de la loi au moment de la sortie du mariage est de préserver le plus faible des deux partenaires.

Nous avons trois propositions à faire en ce sens.

La première consiste à subordonner la révision des modalités de paiement ou du montant de la prestation compensatoire à un changement non seulement notable mais aussi imprévu dans la situation du débiteur. J'entends d'ici les objections. La mention de l'imprévisibilité vise en fait à éviter que le débiteur de la prestation compensatoire n'organise son insolvabilité. C'est une situation que l'on a déjà rencontré et dont il convient de se préoccuper.

La deuxième proposition consiste à faire établir, au moment de la fixation ou de la révision d'une prestation compensatoire, une déclaration des deux parties certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, de leurs revenus et de leurs conditions de vie. Là encore, la dissimulation des ressources ou des conditions de vie est parfois utilisée soit pour échapper au versement d'une prestation compensatoire, soit pour en minimiser le montant.

Or il est souvent très difficile à l'ex-époux lésé d'apporter la preuve de cette dissimulation au moment de la fixation de la prestation compensatoire. La mesure que nous proposons me semble donc intéressante et je remercie la commission des lois d'avoir bien voulu la faire sienne.

Troisièmement, enfin, toujours dans le cadre de la révision ou de la capitalisation des prestations compensatoires attribuées sous l'empire de la loi de 1975, compte tenu de la remise en cause de la chose jugée et, il faut bien le dire, de la nécessité pour la loi de protéger la partie la plus faible, nous avons déposé un amendement qui imposerait à la partie qui fait la demande de révision ou de substitution d'un capital à une rente d'établir que la situation de l'autre partie le permet sans bouleversement de son niveau ou de ses conditions de vie.

Telles sont, en deuxième lecture, les améliorations que le groupe UDF souhaite apporter à la proposition de loi.

En règle générale, réparer les injustices en maintenant l'équilibre entre les parties est une mission difficile et il serait illusoire de penser que ce texte en assure définitivement le succès. Nous aurons vraisemblablement l'occasion d'y revenir, car la tâche est toujours à recommencer.

Néanmoins, l'UDF entend apporter sa pierre à ce débat et elle espère que ses amendements y contribueront.

M. Alain Tourret.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la loi de 1975 avait progressivement été détournée de ses fondements par les professionnels du droit, magistrats mais aussi avocats, qui, par facilité, optaient, tant dans leurs décisions que dans les conventions préparées lors des divorces par requête conjointe, pour des rentes souvent illimitées. Profondément marqués par les pensions alimentaires dues pour l'entretien des enfants, et aussi en considération des situations économiques, il faut bien le dire, ils n'avaient pas accepté le caractère indemnitaire d'une prestation qui aurait dû être fixée en capital et qui ne l'était plus que par exception. Le texte qui nous est soumis cherche donc à mettre fin aux déviations de ces dernières années.

La prestation compensatoire n'est pas une pension alimentaire révisable à tout moment, tant à la baisse qu'à la hausse, comme avant 1975 et ainsi que cela continue d'exister dans le cadre du devoir de secours prévu pour la procédure de séparation de corps et de biens.

Il ne s'agit pas non plus d'une rente seulement révisable en cas de situation exceptionnelle survenant dans la situation du débiteur de la prestation, comme actuellement. Il s'agit désormais d'un capital, fixé initialement par le juge, ce qui limitera à l'évidence son montant. En effet, une pension alimentaire de 3 000 francs par mois indexée due à une femme de 35 ans représente un capital de plus de 1,2 million de francs. Or, alors qu'il est extrêmement rare de condamner quelqu'un à payer un capital de 1,2 million, il était courant de prévoir le versement d'une pension alimentaire de 3 000 francs. Par ailleurs, le paiement mensuel du capital ne pourra pas, sauf exception, dépasser huit années, mais ne changera jamais la qualité de capital de la prestation.

La révision n'appartient qu'au débiteur, avec possibilité de se libérer à tout moment du solde du capital. Le projet maintient la transmissibilité aux héritiers, et par exception le principe d'une rente en raison de l'âge et de l'état de santé de l'ex-époux.

Il est vrai que ce projet, déjà amélioré par l'Assemblée nationale, l'a été aussi par le Sénat. Avec beaucoup de talent, notre rapporteur a d'ailleurs souligné les apports des uns et des autres pour parvenir à ce texte novateur pour notre droit.

Ainsi que le Sénat l'a prévu, le juge devra tenir compte de la qualification professionnelle des époux, des situations en matière de retraite et des pensions de réversion, dont le principe de déductibilité sera retenu, et c'est une excellente chose.

Le Sénat a, par ailleurs, retenu la suspension de la prestation compensatoire - principe qui avait déjà été dégagé par la jurisprudence, et en particulier par la cour d'appel de Paris - avec des possibilités élargies d'en revoir le montant.

E nfin, grâce au Gouvernement et à vous-même, madame la ministre, un volet fiscal a été adopté. Les modalités en sont particulièrement heureuses et je m'associe au concert de louanges qui vous est adressé.

Ce nouveau texte est donc globalement acceptable. Il sera vraisemblablement adopté en commission mixte paritaire qui se réunira, je crois, le 7 juin prochain. Notre Assemblée répondra ainsi avec force aux commentaires de certains professeurs de droit - en particulier à ceux de M. Bénabent -, qui ont cherché, mais en vain, à rendre illisible le texte proposé. En effet, les articles de ces juristes de la Gazette du Palais et du Dalloz, publiés ces dernières semaines, étaient tout sauf innocents et, en tout cas, peu légitimés par la volonté de faire du droit, à moins que l'on ne veuille pas tenir compte de la situation de certaines femmes créancières de la prestation compensatoire dont la situation est également susceptible d'être prise en considération.

Ainsi que l'a souligné avec force notre rapporteur : « La loi ne peut à la fois reconnaître le caractère indemnitaire de la prestation compensatoire, exclure la révision à la hausse et considérer qu'il s'agit d'une obligation alimentaire qui s'éteindrait avec le décès du débiteur. »

Cette phrase résume parfaitement les trois critères de la loi qui se répondent les uns les autres sans qu'on puisse en éliminer un, sauf à dénaturer le texte.

Nous approvons donc, madame la ministre, monsieur le rapporteur, ce texte équilibré - c'est son principal mérite - qui devra être voté dans les meilleurs délais, tant les situations dramatiques, mais non voulues - je le rappelle avec force - par le législateur d'hier, étaient deve-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

nues inacceptables pour tous.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je me félicite au nom du groupe RPR que la réforme de la prestation compensatoire en matière de divorce arrive, enfin, dans sa phase finale de discussion.

Alors qu'elle a été adoptée en première lecture au Sénat le 23 février 1998, il aura fallu patienter deux ans pour que le Gouvernement inscrive à l'ordre du jour prioritaire de notre assemblée l'examen de ce texte, pourtant attendu et réclamé par des dizaines de milliers de personnes.

C'est donc avec une certaine satisfaction que je constate l'apparition d'un consensus sur ce sujet, pourtant source de passions et de polémiques. Le débat parlementaire a permis d'aboutir à des dispositions qui, j'en suis convaincu, apporteront beaucoup à celles et ceux qui sont confrontés au versement de la prestation compensatoire, c'est-à-dire quelque 400 000 personnes.

Rappelons-nous, en effet, l'objectif initial de ce texte.

L'application faite par le juge de la loi de 1975 avait entraîné des conséquences sociales dramatiques pour les familles, déjà confrontées à des situations de divorce vécues comme de véritables déchirements humains. Face à cette situation, les juges n'hésitaient pas à condamner lourdement ceux qui ne pouvaient honorer leur dette du fait d'un changement dans leur situation, d'une période de chômage, d'une baisse temporaire et inattendue des revenus, ou encore d'un décès. Certes, de tels cas ne furent pas la majorité, mais les témoignages de ceux qui les ont vécus ont suffi, je crois, à faire naître un sentiment d'injustice.

Ajoutons à cela l'évolution de la société, la recomposition de la cellule familiale, l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, le surendettement croissant, et on aboutit à des situations véritablement douloureuses, insupportables pour ceux qui les vivaient.

C'est en ce sens que la proposition de loi soumise à notre discussion a été déposée et discutée par les deux assemblées. Je regrette simplement que les deux années perdues aient favorisé l'apparition de nouvelles situations difficiles.

Bien sûr, cette loi n'entend pas tout régler. Néanmoins elle constitue une avancée considérable, dans le strict respect des principes posés par la loi de 1975 : remédier aux inégalités économiques des époux à la suite d'un divorce et assurer la réparation financière du conjoint le plus démuni.

Je me réjouis que nous soyons arrivés, au cours de nos débats, à rétablir un équilibre entre les droits de chacun, entre les droits du débiteur et ceux du créancier, souvent mis à mal par la jurisprudence.

La réaffirmation du principe d'un versement en capital, objet d'un article à part entière, était, sans conteste, un pas nécessaire. Mais pour qu'il y ait véritablement réforme, encore fallait-il des mesures incitatives au versement de ce capital.

En effet, la pratique du choix en faveur de la rente ne résultait que d'une inégalité fiscale : les débirentiers préféraient déduire une rente plutôt que de se délester d'un capital non déductible. Le Sénat a donc introduit dans le dispositif d'avantages fiscaux le versement de ladite prestation sous forme de capital. Il faut s'en réjouir et je suis persuadé que, désormais, le versement d'un capital sera préféré à la rente.

Le second point important de cette réforme est la possibilité de procéder à une révision de la rente viagère, lors de changements substantiels de la situation des ex-époux.

Depuis plus de vingt ans, la loi de 1975 faisait l'objet d'une application restrictive et sévère, de la part des juges.

Nous avons tous été sensibles aux témoignages de personnes condamnées à des peines de prison ou complètement ruinées, faute de pouvoir s'acquitter de leur dette, à la suite d'une baisse de revenu, d'une période de chômage ou tout simplement des aléas de la vie.

De telles situations, humainement intolérables, ne doivent plus se produire. Désormais, la révision du montant de la rente viagère sera rendue possible « en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties », et elle se trouve ouverte tant au débiteur qu'à ses héritiers.

Nous sommes donc passés d'un système rigide, injuste, à un dispositif beaucoup plus souple, adapté aux conditions de vie des Français, adapté tout simplement à la vie telle qu'elle est, avec ses joies et ses peines, et qui prend en compte les situations de chacun.

Pour autant, force est de constater que si cette loi, à laquelle le groupe RPR est favorable, vient résoudre des situations humaines inacceptables, il n'en demeure pas moins qu'une grande liberté est laissée au juge dans l'interprétation qu'il peut faire de certaines dispositions.

Il en est ainsi du montant du capital ou de la rente, par exemple, pour laquelle l'article 1er précise les critères retenus à sa détermination sans en fixer précisément un m ontant, ne serait-ce qu'approximatif, à savoir un barème. Certains souhaiteraient, en effet, voir la création d'une telle échelle de réparation, comme il peut en exister une pour la fixation d'un pretium doloris.

En substance, madame la ministre, le groupe RPR votera ce texte. Nous pensons qu'il va dans le bon sens : pour le débiteur, pour le créancier et pour leurs familles.

Je souhaite que le mécanisme de la prestation compensatoire, ainsi modifié, permette de résoudre les difficultés auxquelles sont confrontés à la fois les juges et les parties.

Nous regrettons seulement que vous vous soyez évertuée en vain à vouloir proposer une grande loi sur la famille, faisant ainsi perdre un temps précieux, à la fois au législateur, mais aussi aux dizaines de milliers de familles qui attendaient enfin la prise en compte de leurs attentes. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Bernard Outin.

M. Bernard Outin.

Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit souhaiter que cette loi soit définitivement votée le 1er juillet. Je ne peux, quant à moi, que m'en réjouir, compte tenu des injustices et des drames vécus par un certain nombre de nos concitoyens.

Loin de moi, toutefois, l'idée de remettre en cause la décision du législateur de 1975. Il faut, en effet, la resituer dans son contexte. A l'époque, plus de 40 % des femmes entre ving-cinq et quarante-quatre ans se consacraient, comme on avait coutume de le dire, à leur vie de famille, et ne disposaient, faute d'activité professionnelle, d'aucun revenu propre. Il était donc légitime de prévoir un dispositif permettant de maintenir une certaine égalité dans les revenus des deux ex-conjoints après leur divorce.


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A ujourd'hui, le contexte économique et social a changé. L'application strict du mécanisme de 1975, notamment en ce qui concerne la quasi-impossibilité de réviser la prestation compensatoire versée sous forme de rente, a fait que des débirentiers, en nombre important, n'ont pu honorer leur engagement pour des raisons que l'on peut comprendre - chômage, retraite, baisse brutale de revenu - et se sont trouvés confrontés à des situations inextricables, voire aberrantes.

Les députés communistes ne peuvent que se féliciter du travail sérieux entrepris au sein des deux chambres. Il nous permettra d'aller, je l'espère, en tout cas, jusqu'au bout de la démarche.

Les quelque 400 000 familles concernées attendent que le législateur de l'an 2000 tienne compte des réalités sociales, économiques, humaines de notre société et engage les changements qui s'imposent.

Des avancées sérieuses se sont fait jour, améliorant considérablement les conditions de l'attribution et du versement pour les futurs divorcés assujettis au versement d'une prestation compensatoire. Mais nous devons oeuvrer pour la baisse du nombre de ces prestations en ne ménageant aucun effort pour réduire les inégalités entre les hommes et les femmes dans le domaine professionnel.

Beaucoup de chemin reste à parcourir en ce domaine.

Pour s'en convaincre, il suffit de garder en mémoire le triste bilan dressé lors de l'examen de la proposition de loi sur l'égalité professionnelle.

Les femmes sont les plus durement touchées par le chômage, le temps partiel contraint, la précarité, l'écart salarial alors que, dans le même temps, la charge de la famille monoparentale est assumée par la mère dans la plupart des cas.

Mme Nicole Bricq.

C'est vrai !

M. Bernard Outin.

Lier cette réalité sociale au sujet qui nous occupe aujourd'hui me semble être une évidence.

La proposition de loi telle qu'elle résulte du Sénat et de l'Assemblée nationale réaffirme le principe du versement d'un capital en accompagnant ce dispositif de mesures incitatives et fiscales pour le débiteur, et elle assouplit de façon considérable les possibilités de révision de la rente.

Elle rompt ainsi avec les applications de la loi de 1975 qui faisait que, dans plus de 80 % des cas, la prestation prenait la forme d'une rente mensuelle fixe, faute pour le débiteur de pouvoir verser une somme importante en une seule fois. Mais, au bout du compte, ce dernier aura versé le double, le triple ou le quadruple de ce capital. Ainsi, la loi de 1975 pénalisait les débiteurs aux ressources faibles ou moyennes.

Bien évidemment subsisteront des cas où, malheureusement, le débiteur sera dans l'impossibilité de constituer la prestation en capital. La proposition de loi envisage ces situations, qui devraient devenir exceptionnelles, en encadrant strictement le mécanisme, mais en élargissant les possibilités de révision.

Nous souhaitons, pour notre part, aller plus loin et envisager l'extinction de la prestation en cas de remariage, de concubinage notoire, de conclusion d'un PACS de la créancière ou du créancier.

Comme un sénateur a très justement posé la question : revient-il au débiteur de subvenir aux besoins financiers d'un couple nouvellement formé par son ex-conjoint ? La logique devrait nous conduire à répondre par la négative d'autant que cette charge risque d'être assumée par les héritiers en cas de décès du débirentier.

J'en viens au délicat point de la transmissibilité. Nous aurions souhaité que soit affirmé le principe de nontransmissibilité de cette rente sauf s'il en résultait pour le créancier des conséquences d'une exceptionnelle gravité.

S'agissant des dispositions transitoires de la proposition de loi, c'est-à-dire les mesures de révision ou de substitution d'un capital aux rentes en cours, je persiste à penser, madame la garde des sceaux, que nous sommes restés au milieu du gué. Qu'on le veuille ou non, les obligations seront différentes pour le débiteur d'hier et celui de demain. Certes, la révision, la suspension ou la suppression des rentes viagères attribuées avant l'entrée en vigueur des dispositions que nous allons adopter pourra être demandée. Certes, la substitution d'un capital aux rentes pourra être accordée. Mais à quel prix ? D'abord, le risque est réel de voir les tribunaux, déjà encombrés, assaillis de demandes de révision des rentes.

Madame la ministre, des moyens supplémentaires sont-ils prévus pour répondre dans les plus brefs délais aux attentes ? Ces procédures ne risquent-elles pas d'entraîner des frais supplémentaires pour les parties concernées ? Comment les débirentiers qui sont, depuis des années, parfois de longues années, dans une situation financière insupportable, du fait de la non-révision de la rente qu'ils versent, peuvent-ils humainement vivre cette nouvelle procédure devant le juge, cette nouvelle source de conflits avec leur ex-conjoint ? Ne pourrait-on envisager de supprimer le versement de cette prestation en cas de remariage, de concubinage notoire ou de conclusion d'un PACS du créancier ? Par ailleurs, sous prétexte de « droits acquis pour le créancier », il a été prévu, contrairement au régime des futures prestations compensatoires, que la pension de réversion versée du chef du débirentier décédé sera déduite, non pas de plein droit du montant des rentes en cours, mais éventuellement après décision du juge.

Ce dispositif nous semble source d'iniquité et nous souhaitons, pour notre part, que soit mis fin à cette mesure difficilement justifiable.

Enfin, n'y a t-il pas un mécanisme à inventer en cas de demande de substitution d'un capital aux rentes viagères en tenant compte, par exemple, des sommes déjà versées et qui n'auraient pas dû l'être, à ce niveau, si la révision qui sera possible demain l'avait été au moment où le débiteur aurait pu la formuler ? Les débirentiers d'hier ne sont pas pleinement satisfaits aujourd'hui. Pourtant, c'est grâce à leur mobilisation, à la pression qu'ils ont su exercer, aux propositions qu'ils ont faites que nous pouvons nous féliciter du consensus qui s'est dessiné au sein des deux assemblées pour rechercher des solutions durables à ce dossier délicat.

Je reste optimiste : nous saurons trouver, avant la lecture définitive, les bases d'un dispositif équitable pour toutes les personnes concernées. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, voilà un débat qui ne suscitera pas de grandes envolées de l'opposition, car, après des discussions techniques en commission des lois et malgré l'importance du sujet, nous sommes parvenus à un point d'équilibre, ce qui, dans l'évolution, est un résultat incontestablement positif.

De toute évidence, et c'est ce qui importe aujourd'hui, la prestation compensatoire en matière de divorce avait grand besoin d'être réformée. Je ne pense pas me tromper


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

en disant que tous les parlementaires sont interpellés dans leurs permanences à propos de situations souvent dramatiques, quelquefois ubuesques, mais toujours très pénibles.

La presse n'est pas avare d'exemples particulièrement éloquents de l'injustice que représente la prestation compensatoire sous sa forme actuelle. Certes, tel n'est pas toujours le cas, mais il est des situations frappantes.

De grands quotidiens titraient encore récemment :

« Les députés humanisent le divorce », ou encore : « La fin d'une assurance vie », « La fin d'un système expiatoire », et j'en passe. A l'évidence, la prestation compensatoire, dans sa forme actuelle, fait une quasi-unanimité contre elle, et les termes employés pour dénoncer les dérives qu'elle connaît ne sont pas tendres. Certains parlent de véritable cauchemar pour la deuxième épouse et les enfants du premier lit, voire du deuxième, lorsqu'ils prennent conscience qu'ils auront à donner, pendant des années, de l'argent à une femme qu'ils n'ont quelquefois jamais vue, sous peine d'être condamnés pour abandon de famille. D'autres se considèrent comme des condamnés à perpétuité par la prestation compensatoire, des c ondamnés qui éprouvent un douloureux sentiment d'acharnement et de vengeance.

Il est incontestable que le caractère intangible de la prestation compensatoire a créé des situations humainement intolérables et un sentiment d'injustice d'autant plus fort que les temps ont changé.

Les témoignages abondent de débirentiers chômeurs, retraités, malades, qui voient la majeure partie de leur revenu engoutie dans le versement d'une rente à une exépouse qui, pourtant, travaille et gagne plus que correctement sa vie, ou s'est remariée, ou vit simplement avec quelqu'un dont on dit parfois poliment qu'il n'est pas dans le besoin. La prestation compensatoire est donc souvent perçue comme une injustice et un boulet que le débirentier devra traîner jusqu'au trépas.

Cette formule ne correspond plus non seulement à nos modes de vie actuels, mais aussi à l'évolution de nos mentalités. N'y a t-il pas une contradiction, en effet, entre la recherche d'une égalité des sexes qui gouverne, positivement, nos réformes, et le maintien d'une prestation compensatoire sous une forme qui en fait une sorte de statut social complémentaire, une sorte de droit acquis s'ajoutant au mariage ? Tout cela est perclus de contradictions, alors que, à l'origine, la prestation compensatoire semblait une bonne formule. Cependant s'il était prévu que le versement d'un capital au moment du divorce devait été prioritairement décidé, le plus souvent cela a été transformé en une rente mensuelle versée à vie parce que les époux condamnés ne disposaient pas des sommes nécessaires. Le problème, que nul n'ignore, tient au fait que cette rente n'est pas révisable à la baisse, même si la situation de celui qui la perçoit s'améliore notablement, ou - la jurisprudence est constante dans ce domaine - si celle de celui qui la perçoit se dégrade. Or les temps ont changé : aujourd'hui constituer un capital suffisamment important n'est plus une mission impossible notamment grâce à l'évolution de notre système bancaire.

Il convenait donc de réaffirmer avec force le principe selon lequel la prestation compensatoire doit être versée sous forme de capital, la rente devant être exceptionnelle.

Tel est le cas dans le texte et je sais gré au Gouvernement d'avoir tenu les engagements qu'il avait pris devant nous, ici même en première lecture, quant au régime fiscal de ce capital.

C'est effectivement en l'alignant sur celui de la rente, c'est-à-dire en ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu pour le débirentier, et en permettant aux créanciers d'étaler sur huit ans la déclaration des sommes perçues, que l'on pourra rendre effective cette réforme dont le succès dépend autant du ministère des finances que de celui de la justice.

Le texte que nous examinons aujourd'hui constitue donc une avancée incontestable puisque, les chiffres devant suivre le droit, il sera possible de faire sauter certains blocages.

Cela est vrai en ce qui concerne tant la fixation du montant de la prestation que les modalités de son versement. Et si la rente temporaire est supprimée à bon droit pour les divorces contentieux, c'est seulement à titre exceptionnel que le versement pourra être effectué sous forme de rente viagère en raison de l'âge ou de l'état de santé du créancier.

Il s'agit donc de mesures de bon sens, mais je me garderai de faire part d'une satisfaction complète face à ce texte complexe, car je ne crois pas qu'il réglera tous les problèmes. En effet, il demeure quelques imperfections que l'on devrait pourtant pouvoir gommer au cours du débat puisque j'ai senti, de la part des députés et du rapporteur, de la bonne volonté dans ce domaine.

Quelles sont ces imperfections ? D'abord personne n'ignore que l'un des premiers blocages invoqués à propos de la prestation est son caractère transmissible aux héritiers du débiteur. Or ce texte le maintient en se contentant de donner la possibilité à ces derniers d'en demander la révision en cas de changement substantiel. Néanmoins cela est difficilement concevable, car les héritiers en appelleront vraisemblablement à l'article 283 du code civil.

Par ailleurs comment expliquer à des enfants du second lit qu'ils doivent s'acquitter de la prestation compensatoire, d'ailleurs au même titre que les enfants du premier lit, à la différence près que ces derniers hériteront des biens de leur mère à son décès. Comment justifier cela ? De même je trouve choquant que le créancier ne perde pas le bénéfice de la prestation compensatoire alors même qu'il s'est remarié, qu'il vit en concubinage notoire ou qu'il est pacsé.

La question de la transmissibilité qui est à la base des questions portant sur la prestation compensatoire n'est donc pas complètement réglée.

En ce qui concerne les pensions de réversion, là encore, ne voyez-vous rien de choquant à ne pas appliquer aux rentes en cours les dispositions valables pour les rentes à venir ? D'autres collègues l'ont souligné. Il s'agit d'une grave distorsion et si je vois bien la difficulté juridique, l'application de cette règle sera tout de même très mal perçue par les Français. Sur ce point non plus, le texte n'est pas complètement satisfaisant.

Nous aurons encore une lecture dont nous devrions profiter pour prendre des initiatives. Au cours de sa deuxième lecture, le Sénat a amélioré le texte et nous espérons que le Gouvernement tiendra compte des demandes des parlementaires, à quelque groupe qu'ils appartiennent, ou cours de cette deuxième lecture, pour essayer non pas de trouver des solutions définitives, car, s'agissant d'un sujet en pleine évolution, il ne faut pas brutaliser la société, du moins de gommer les injustices les plus flagrantes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Je lance donc au Gouvernement un appel qui n'a rien de partisan car son contenu est très largement partagé sur tous les bancs de l'Assemblée, ainsi que par ceux qui sont victimes d'une prestation compensatoire injuste : il faut encore apporter quelques améliorations supplémentaires à un système dont on sent bien qu'il vit ses derniers jours.

Dans quelques décennies, voire dans quelques années seulement, la prestation en capital sera devenue la règle commune et la rente viagière, avec ses abus, ne sera plus que l'exception.

Parce que le texte va dans le bon sens, parce qu'il constitue incontestablement un progrès par rapport à un système qui a créé trop d'injustices, le groupe Démocratie libérale - qui défendra quelques amendements allant dans le sens des propos que je viens de tenir - votera le texte en deuxième lecture. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme la présidente.

La discussion générale est close.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je me réjouis d'abord du consensus qui se manifeste sur tous les bancs en faveur de cette réforme.

S'il était nécessaire de modifier la prestation compensatoire instituée en 1975, car elle a été à l'origine de situations très injustes que beaucoup d'entre vous ont rappelées, il fallait éviter que les modifications législatives envisagées créent de nouvelles injustices.

Vous êtes parvenus à un équilibre que j'approuve, mais je tiens à préciser que, même si nous croyons tous ardemment à l'égalité entre les hommes et les femmes, même si nous travaillons tous pour que l'égalité professionnelle soit réalisée, nous devons admettre que, aujourd'hui encore dans notre société, cet équilibre-là n'est pas atteint. Or tant qu'il ne le sera pas, nous aurons besoin d'une prestation compensatoire, même au besoin révisée.

Je me réjouis également que ce texte fasse l'objet d'un accord. Nous avons même tous bon espoir que, comme l'a souligné votre rapporteur, la commission mixte paritaire aboutisse, afin que cette réforme puisse être adoptée définitivement par l'Assemblée nationale avant le 1er juillet prochain. Le Gouvernement a pris les dispositions qu'il fallait pour que son examen soit inscrit assez tôt à votre ordre du jour.

J'en profite pour faire remarquer à M. Estrosi que, si j'avais voulu attendre la réforme du droit de la famille, je n'aurais pas demandé au Gouvernement d'inscrire ce texte important à l'ordre du jour. Cela étant, il est évidemment indispensable d'avoir une vision d'ensemble avant d'en poursuivre l'examen. D'ailleurs, les débats que nous avons eus ont montré à quel point le sujet était délicat.

Enfin, je veux indiquer aux orateurs, en particulier à Mme Neiertz, au rapporteur et à M. Blessig, qui ont bien voulu souligner l'importance de l'effort fiscal consenti par le Gouvernement et m'en remercier, que nous devons cette avancée à l'engagement personnel de ma collègue, Florence Parly, auprès de laquelle j'avais insisté, en appelant son attention sur cette question. Grâce à notre engagement personnel à toutes les deux, nos cabinets ont pu aboutir, avec les services, à un résultat, ce dont je me réjouis. (Applaudissements sur les bancs sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Discussion des articles

Mme la présidente.

Nous abordons la discussion des articles.

En application de l'article 91, alinéa 9, du règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Avant l'article 1er A

Mme la présidente.

Je suis saisie de deux amendements, nos 8 et 14 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 8 n'est pas défendu.

L'amendement no 14 rectifié, présenté par M. Blessig, est ainsi libellé :

« Avant l'article 1er A, insérer l'article suivant :

« L'article 271 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre de la fixation d'une prestation compensatoire ou à l'occasion de l'examen d'une demande de révision, les parties fournissent au juge une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie. »

La parole est à M. Emile Blessig pour défendre l'amendement no 14 rectifié.

M. Emile Blessig.

Ainsi que je l'ai souligné dans la discussion générale, mon amendement vise à faire obligation aux parties, lors de la fixation de la prestation compensatoire ou à l'occasion d'une procédure de révision, de fournir une déclaration sur l'honneur certifiant l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoines et conditions de vie.

Cette disposition devrait faciliter le travail du juge et permettre de trouver plus rapidement une issue favorable dans la mesure où les parties s'engageront sur des bases cohérentes. En outre, elle accroîtrait leur responsabilité.

En cas de dissimulation - cela est parfois malheureusement le cas -, la partie lésée se heurte à un très épineux problème de preuves. L'existence d'une telle déclaration devrait faciliter l'engagement, pour la partie lésée, d'une nouvelle action en révision ou d'une action en indemnisation du fait de la manoeuvre dolosive de l'autre partie.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vidalies, rapporteur.

La commission a accepté cet amendement. Il s'agit d'une bonne initiative car, en l'état actuel de la législation sur le divorce, il n'y a pas, comme le propose le rapport Dekeuwer, obligatoirement concomitance entre la procédure de divorce et la liquidation de la communauté. Tel est, d'une certaine façon, par anticipation l'objet de l'amendement no

8. Dans un souci de cohérence avec l'ensemble du dispositif de la proposition de loi, l'amendement proposé par M. Blessig, rectifié après discussion ce matin, en commission des lois, mérite d'être approuvé.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je comprends l'esprit de cet amendement.

Lorsque les parties produisent des pièces pour appuyer leur demande, on vérifie généralement que leur contenu n'est pas mensonger, car cela engagerait la responsabilité de ceux qui les présentent. Il s'agit d'un principe général qui répond au souci de l'auteur de l'amendement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Vaut-il mieux le préciser ? Cela ne me semble pas forcément utile, mais, puisque je partage l'objectif visé, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 14 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Article 1er A

Mme la présidente.

« Art. 1er A. - L'article 272 du code civil est ainsi modifié :

« I. - Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« la durée du mariage ; ».

« II. Les quatrième et cinquième alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« leur qualification et leur situation professionnelles au regard du marché du travail ; ».

« III. Le septième alinéa est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :

« leur situation respective en matière de pensions de retraite ; ».

Je mets aux voix l'article 1er A. (L'article 1er A, est adopté.)

Article 1er

Mme la présidente.

« Art. 1er L'article 273 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 273. - La prestation compensatoire a un caractère forfaitaire. »

M. de Courson a présenté un amendement, no 13, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 273 du code civil par l'alinéa suivant :

« Cependant, lorsque le débiteur d'une prestation compensatoire bénéficie d'un ou plusieurs avantages vieillesse, la ou les personnes dont il a divorcé ont droit à un tiers du montant de ces avantages vieillesse, multiplié par un coefficient plafonné à un, et égal au rapport entre la durée pendant laquelle il ou ils ont été mariés avec le débiteur de la prestation compensatoire les années de mariage postérieures à la date d'octroi de l'avantage vieillesse n'étant pas prises en compte - et une durée de trente années, ces avantages vieillesse se substituant à la prestation compensatoire uniquement lorsque leurs montants lui sont supérieurs et lui étant versés directement par la ou les caisses responsables du versement au débiteur de la prestation compensatoire. Lorsque leurs montants cumulés sont inférieurs, la prestation compensatoire continue à être versée ».

La parole est à M. Emile Blessig, pour soutenir cet amendement.

M. Emile Blessig.

A l'heure actuelle, compte tenu de l'allongement de l'espérance de vie, la retraite devient le premier actif des ménages. Par conséquent, cet amendement a pour objet d'instaurer un système de versement direct d'une partie des avantages vieillesse au profit de l'ex-conjoint créancier d'une prestation compensatoire.

Cette quote-part des avantages vieillesse serait calculée au prorata de la durée du mariage et serait versée directement par les caisses de retraite dans la mesure où son montant serait supérieur à la prestation.

Ce dispositif existe dans certains systèmes juridiques européens et M. de Courson aura peut-être raison trop tôt sur ce sujet. Mais je crois que cette disposition méritait d'être proposée.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vidalies, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement auquel je suis défavorable.

Aujourd'hui, la procédure de paiement direct est, d'une certaine façon, la sanction de la défaillance du débiteur puisqu'elle n'est mise en oeuvre que si celui-ci n'a pas rempli spontanément ses obligations. Or ce texte aurait pour conséquence de généraliser le paiement direct, que le débiteur remplisse spontanément ses obligations ou non. Dans tous les cas, on ne pourrait pas se limiter au cas de la prestation compensatoire, puisque la question se poserait dans les mêmes termes pour les débiteurs de pension alimentaire.

Je crois donc que la procédure de paiement direct doit rester ce qu'elle est, c'est-à-dire un moyen de contrainte pour ceux qui ne remplissement pas spontanément leurs obligations, et non pas être généralisée dans les termes proposés par M. de Courson.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

J'ai aussi un avis défavorable. Notre débat porte sur l'assouplissement du régime de révision de la prestation compensatoire et non sur la modification des règles du code de la sécurité sociale régissant l'assurance vieillesse.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

13. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 1er

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er bis A

« Art. 1er bis A. - L'article 274 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 274. - La prestation compensatoire prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge. »

Je mets aux voix l'article 1er bis A. (L'article 1er bis A est adopté.)

Article 1er quater

« Art. 1er quater. - L'article 275-1 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 275-1. - Lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser le capital dans les conditions prévues par l'article 275, le juge fixe les modalités de paiement du capital, dans la limite de huit années, sous forme de versements mensuels ou annuels indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires.

« Le débiteur peut demander la révision de ces modalités de paiement en cas de changement notable de sa situation. A titre exceptionnel, le juge peut alors, par décision spéciale et motivée, autoriser le versement du capital sur une durée totale supérieure à huit ans.

« A la mort de l'époux débiteur, la charge du solde du capital passe à ses héritiers. Les héritiers peuvent demander la révision des modalités de paiement dans les conditions prévues au précédent alinéa.


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« Le débiteur ou ses héritiers peuvent se libérer à tout moment du solde du capital.

« Après la liquidation du régime matrimonial, le créancier de la prestation compensatoire peut saisir le juge d'une demande en paiement du solde du capital. »

M. Blessig a présenté un amendement, no 15, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 275-1 du code civil, après le mot : "notable", insérer les mots : "et imprévu". »

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

J'avais incidemment abordé ce sujet lors de la discussion générale. Cet amendement, conformément aux recommandations de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, propose de subordonner la révision des modalités de paiement à un changement non seulement notable, mais également imprévu. Il s'agit en fait d'éviter les changements de situation ou l'insolvabilité organisés par le débiteur aux seules fins d'obtenir une révision.

Certaines évolutions sont évidemment tout à la fois n otables et prévisibles, et la difficulté, que je ne méconnais pas, tient à la distinction entre le notable prévisible et le notable imprévu... Je m'en remets à la sagesse de notre rapporteur qui aura certainement des idées sur la question.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vidalies, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement, toute la difficulté tient évidemment à distinguer ce qui est prévisible de ce qui ne l'est pas... Mais je crois savoir que Mme Neiertz souhaite intervenir sur cet amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Le Gouvernement s'était interrogé sur ce critère d'imprévisibilité mais, ainsi que j'ai eu l'occasion de le dire devant le Sénat, il a finalement décidé de l'abandonner car il nous est apparu très difficile à manier. J'émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente.

La parole est à Mme Véronique Neiertz.

Mme Véronique Neiertz.

J'avoue ma perplexité. Je croyais que l'ordre de la discussion voulait que l'on défende un amendement, puis qu'un orateur s'exprime contre, avant que le rapporteur puis le Gouvernement ne donnent leur avis. Mais j'ai dû me tromper ...

Mme la présidente.

Effectivement, mais je vous laisse tout de même la parole.

Mme Véronique Neiertz.

Tout comme M. le rapporteur, je comprends fort bien le souci de M. Blessig. Je le remercie tout particulièrement de l'attention qu'il porte à la délégation aux droits des femmes ; nous ne sommes pas habitués à une telle sollicitude... Cela dit, je ne crois pas que l'introduction de la notion d'imprévu soit de nature à dissuader qui que ce soit de dissimuler une partie de ses ressources, ou de son patrimoine. Il conviendrait de trouver un autre moyen, d'autant que cette n otion d'imprévisibilité pourrait se retourner contre ceux-là mêmes qui voudraient l'invoquer ; en effet, on pourrait leur opposer que l'incident ou l'accident de la vie dont ils font état pouvait être prévisible et que, dès lors, ils ne peuvent prétendre à aucune compensation. La notion d'imprévu me paraît bien peu solide sur le plan juridique...

M. Bernard Outin.

Et même dangereuse !

Mme Véronique Neiertz.

... et même dangereuse, en effet. C'est pourquoi je m'y opposereai.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

15. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 1er quater.

(L'article 1er quater est adopté.)

Articles 1er quinquies et 2

Mme la présidente.

« Art. 1er quinquies. - L'article 276 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 276. - A titre exceptionnel, le juge peut, par décision spécialement motivée, en raison de l'âge ou de l'état de santé du créancier ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère. Il prend en considération les éléments d'appréciation prévus à l'article 272. »

Je mets aux voix l'article 1er quinquies.

(L'article 1er quinquies est adopté.)

« Art. 2. - I. Le premier alinéa de l'article 276-1 du code civil est supprimé.

« II. Non modifié. - (Adopté) » Article 2 bis

Mme la présidente.

« Art. 2 bis L'article 276-2 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 276-2. A la mort de l'époux débiteur, la charge de la rente viagère passe à l'hérédité. La pension de réversion éventuellement versée du chef du conjoint décédé est réduite de plein droit de la rente versée au créancier, sauf décision contraire du juge saisi par le créancier, une déduction du même montant continue à être opérée si le versement de la pension de réversion cesse pour cause de remariage ou de concubinage notoire du créancier. »

M. Quentin et M. Mariani ont présenté un amendement, no 7, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 276-2 du code civil :

« Art. 276-2. A la mort de l'époux débiteur, la charge de la rente ou du capital est non transmissible aux héritiers. »

La parole est à M. François Guillaume, pour soutenir cet amendement.

M. François Guillaume.

Il est défendu.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Cet amendement est vraiment au coeur du dispositif. Il reprend le principe de la non-transmissibilité de la rente ou du solde du capital aux héritiers. Je me suis déjà très largement exprimé sur cette question lors de la discussion générale. La commission l'a évidemment rejeté pour toutes les raisons que nous avons longuement expliquées et que je ne crois pas utile de reprendre à ce stade.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

J'ai également un avis défavorable. Je partage les arguments que M. le rapporteur vient de rappeler. De surcroît, je ne vois pas de raison de


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déroger au droit commun des successions, dès lors que les héritiers du débiteur peuvent non seulement renoncer à la succession, mais également, demander comme l'a très bien expliqué votre rapporteur, la révision de la prestation. Dès lors, le système proposé me paraît suffisamment souple et équilibré.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Nicolin et M. Goasguen ont présenté un amendement, no 9, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi la première phrase du texte proposé pour l'article 276-2 du code civil :

« Art. 276-2 A la mort de l'époux débiteur, le versement de la rente cesse de plein droit, sauf le cas d'exceptionnelle gravité où sa charge passe à l'hérédité. ».

La parole est à M. Philippe Houillon, pour soutenir cet amendement.

M. Philippe Houillon.

Il est défendu.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Même position, avec toutefois une nuance. Cet amendement tend à empêcher la transmissibilité, sauf cas d'exceptionnelle gravité pour le créancier - encore cette disposition doit-elle se lire à la lumière d'un amendement suivant, qui aurait du reste dû prendre la forme, si l'on suivait la logique des auteurs, d'un sous-amendement. Auquel cas, la charge passerait à l'hérédité.

Pour commencer, ou l'on suit les principes juridiques, ou l'on ne les suit pas. De surcroît, la rédaction proposée est dangereuse ; prévoir en effet que, en cas d'exceptionnelle gravité pour le créancier, la charge passe à l'hérédité, c'est ne tenir aucun compte de la situation des héritiers eux-mêmes. Le système que nous proposons, nous, vise précisément à en tenir compte. Si leur situation matérielle s'est détériorée, ils auront la possibilité de demander la révision, voire la suspension de la prestation compensatoire. Votre rédaction, qui se voudrait plus protectrice des intérêts des débiteurs, consiste en fait à reporter la charge de la créance sur les héritiers en cas d'exceptionnelle gravité. Et quand bien même ceux-là seraient dans une situation difficile, ils n'en seraient pas moins, si l'on retenait votre rédaction en l'état, obligés de payer.

Votre amendement, sous des aspects protecteurs des intérêts des débiteurs, pourrait en fait aboutir à des situations particulièrement regrettables pour eux. C'est pourquoi je propose de le rejeter.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

9. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Vidalies, rapporteur, a présenté un amendement, no 1, ainsi rédigé :

« A la fin de la première phrase du texte proposé pour l'article 276-2 du code civil, substituer aux mots : "l'hérédité", les mots : "ses héritiers". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Amendement d'harmonisation rédactionnelle.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

M. Nicolin et M. Goasguen ont présenté un amendement, no 10, ainsi rédigé :

« Compléter la première phrase du texte proposé pour l'article 276-2 du code civil par les mots : "sauf le cas d'exceptionnelle gravité pour le créancier". »

M. Philippe Houillon.

Il est retiré.

Mme la présidente.

L'amendement no 10 est retiré.

M. Vidalies, rapporteur, a présenté un amendement, no 2, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le début de la deuxième phrase du texte proposé pour l'article 276-2 du code civil :

« Les pensions de réversion éventuellement versées du chef du conjoint décédé sont déduites de plein droit... (le reste sans changement) ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Cet amendement, quoique d'ordre essentiellement rédactionnel, n'est pas dénué d'intérêt. En effet, nous n'avions jusqu'à présent évoqué que le cas où une seule pension de réversion était en jeu ; or il peut arriver qu'il y en ait plusieurs. Aussi avons-nous proposé plusieurs amendements rédactionnels dans le seul but de parler des pensions de réversion et non de la pension de réversion.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 2. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

M. Vidalies, rapporteur, a présenté un amendement, no 3, ainsi rédigé :

« A la fin de la dernière phrase du texte proposé pour l'article 276-2 du code civil, substituer aux mots : "si le versement de la pension de réversion cesse pour cause de remariage ou de concubinage notoire du créancier", les mots : "si le créancier perd son droit à pension de réversion". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Je ne voudrais pas que l'on pense que nous sommes en retrait par rapport à la rédaction du Sénat. Celui-ci a précisé, en deuxième lecture, que le montant de la pension de réversion continuait d'être déduit de la prestation compensatoire si le versement de la pension de réversion cessait, pour cause de remariage ou autre. L'Assemblée n'avait pas pris en compte ce cas de figure dans la rédaction qu'elle avait retenue, si bien que le débiteur aurait pu se retrouver, à un moment donné, à payer la totalité de la prestation compensatoire dès lors que le créancier perdait son droit à sa pension de réversion. Le Sénat a considéré que le montant de la pension devait continuer à être déduit, quand bien même celle-ci n'était plus perçue.

Cela dit, le Sénat n'a visé que les cas de remariage ou de concubinage notoire en se référant au dispositif prévu par le code des pensions. La difficulté tient au fait qu'il y a autant de règles que de régimes de retraite. Aussi nous paraît-il préférable de retenir un terme général qui abou-


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tisse exactement au même résultat plutôt que d'énumérer les cas, dans une liste par nature limitative, avec tous les risques d'exclusion que cela pourrait entraîner.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 3. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 2 bis

Mme la présidente.

M. Guillaume a présenté un amendement, no 5, ainsi libellé :

« Après l'article 2 bis, insérer l'article suivant :

« L'article 1122-2 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le conjoint non salarié agricole qui a participé au développement de l'activité professionnelle de son époux bénéficie de plein droit, à compter de la date du divorce ou de la séparation de corps, au cas où les conjoints n'ont pris aucune disposition quant au partage volontaire des points ouvrant droit à la retraite proportionnelle, d'un montant de points équivalent à celui qui serait résulté d'un tel partage.

Au cas où la liquidation de la retraite proportionnelle est intervenue antérieurement au divorce ou à la séparation de corps, ces points sont convertis en versement d'un montant de retraite proportionnelle équivalent à la durée de la collaboration entre époux. »

La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume.

Les amendements nos 5 et 6 procèdent de la même inspiration. Ils visent à réparer l'injustice qui frappe les femmes d'exploitants agricoles qui, bien qu'ayant effectivement participé au travail de l'exploitation, ne bénéficient pas d'une retraite comparable à celle de leur mari. Cette situation peut poser un grave problème en cas de divorce par le fait que la retraite perçue par l'exploitant et celle perçue par son conjoint se situent dans un rapport qui va du simple au double, voire au triple, sinon plus. Pourquoi ? Tout simplement en raison du statut de l'agricultrice travaillant effectivement sur l'exploitation. Elle peut, si elle le souhaite, sur simple déclaration et au prix d'une cotisation supplémentaire individuelle, bénéficier de la retraite de base. Mais son mari bénéficie quant à lui, en plus de la retraite de base, de la retraite proportionnelle calculée en fonction de l'importance de l'exploitation, ce à quoi peut éventuellement s'ajouter une retraite complémentaire, pour l'instant facultative.

Il y a là quelque chose de tout à fait anormal. C'est pourquoi mon amendement no 5 propose de partager la retraite proportionnelle afin que l'agricultrice puisse bénéficier de la même retraite que son ex-conjoint, c'est-à-dire la retraite de base plus la moitié de la retraite proportionnelle. C'est une mesure de simple justice, d'autant plus légitime que le nouveau statut des conjoints collaborateurs prévoit que ceux-ci peuvent prétendre à une part de la retraite proportionnelle - non à la moitié, ce que je regrette à un moment où l'on parle beaucoup de parité.

Quoi qu'il en soit, on note une évolution dans ce sens.

Mon amendement a pour seul objet de résoudre le problème des femmes divorcées à qui, une fois arrivées à l'âge de la retraite, se retrouvent parfois dans une situation dramatique quand on sait que la retraite de base ne représente guère que 5 000 francs par trimestre.

Mme la présidente.

Monsieur Guillaume, souhaitezvous nous présenter également votre amendement no 6 ?

M. François Guillaume.

Oui, madame la présidente.

Mme la présidente.

Cet amendement est ainsi libellé :

« Après l'article 2 bis, insérer l'article suivant :

« L'article 1122-2 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le conjoint non salarié agricole qui a participé au développement de l'activité professionnelle de son époux et qui bénéficie de plein droit du partage des points de retraite proportionnelle à compter de la date de divorce ou de séparation de corps, se voit accorder de ce fait le droit à versement de la retraite complémentaire proratée en fonction du nombre d'années de collaboration. »

Poursuivez, monsieur Guillaume.

M. François Guillaume.

L'amendement no 5 concernait la retraite proportionnelle ; l'amendement no 6 a trait à la retraite complémentaire. Non seulement celle-ci n'était pas obligatoire, je l'ai indiqué, mais une agricultrice non salariée travaillant sur une exploitation ne peut en bénéficier, sauf dispositions légales prises entre les deux époux.

Cela me paraît tout à fait anormal. Il serait bon que la loi décide que la retraite complémentaire, dont le financement est assuré par des cotisations de l'exploitation sur laquelle travaille l'agricultrice, sera également partagée en deux en cas de divorce.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Ces amendements ont été repoussés par la commission. Pour commencer, ils sortent du champ d'application de la loi : nous débattons d e la prestation compensatoire, c'est-à-dire d'une condamnation prononcée par un tribunal ou décidée dans une requête conjointe en raison de la disparité des situations au moment du prononcé du divorce, et non d'une modification des régimes sociaux et plus particulièrement des retraites.

En effet, si j'ai bien compris le mécanisme, votre amendement reviendrait à partager de fait les points de retraite par moitié, sauf dispositions contraires prises entre les époux. Une telle disposition poserait de nombreuses difficultés, ne serait-ce que parce qu'il faudrait l'appliquer aux autres régimes. Mieux vaudrait examiner cette question, ne serait-ce que sur le plan théorique, à l'occasion du débat qui aura lieu la demaine prochaine sur le statut des conjoints collaborateurs plutôt que dans un texte relatif à la prestation compensatoire où, manifestement, de telles dispositions n'ont pas leur place. La commission a donc repoussé ces amendements.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Tout comme votre rapporteur, je crois que cette question n'a pas sa place dans un débat relatif à la prestation compensatoire. Cela dit, le Gouvernement n'est évidemment pas insensible au sort du conjoint collaborateur agricole. La loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 lui a d'ores et déjà accordé des droits à la retraite plus importants. Dans le cadre du bilan d'application de cette loi, le Gouvernement présen-


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tera un rapport au Parlement, qui fera le point sur les éventuelles modifications techniques encore nécessaires pour améliorer la situation actuelle. C'est la raison pour laquelle je demande à l'auteur de ces amendements de bien vouloir les retirer. Faute de quoi, je ne pourrais qu'y être défavorable.

M. le président.

Monsieur Guillaume, retirez-vous vos amendements ?

M. François Guillaume.

Madame la présidente, j'aimerais bien qu'on ne les confonde pas. Autant je pourrais, à la rigueur, retirer le second, qui porte sur la retraite complémentaire, facultative, autant je souhaite maintenir le premier qui porte sur la retraite proportionnelle. Il ne s'agit pas d'attribuer dans le cas général, à chacun des coexploitants la moitié de la retraite proportionnelle, mais seulement dans le cas d'un divorce. Nous sommes donc bel et bien dans le débat, puisqu'il est question aujourd'hui de la situation des divorcés. Or, c'est justement en cas de divorce que la co-exploitante, l'agricultrice, doit pouvoir bénéficier de la moitié de la retraite proportionnelle, une retraite payée, rappelons-le, par des cotisations de l'exploitation sur laquelle elle travaillait. Elle se trouve pour l'instant injustement privée du fruit de son travail.

J'y insiste d'autant plus que le nouveau statut de conjoint collaborateur le prévoit. Mais toutes celles qui, divorcées, sont déjà à la retraite ne pourront y prétendre et devront se contenter d'une pension de misère.

Mme la présidente.

Dois-je déduire de vos propos, monsieur Guillaume, que l'amendement no 6 est retiré, mais pas l'amendement no 5 ?

M. François Guillaume.

En effet, madame la présidente.

Mme la présidente.

L'amendement no 6 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 2 ter A

M me la présidente.

Art. 2 ter A. Après l'article 276-2 du code civil, il est inséré un article 276-3 ainsi rédigé :

« Art. 276-3 La prestation compensatoire fixée sous forme de rente viagère peut être révisée, suspendue ou supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties.

« La révision ne peut avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge.

« L'action en révision est ouverte au débiteur et à ses héritiers. »

M. Blessig a présenté un amendement, no 16, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 276-3 du code civil, après le mot : "important", insérer les mots : "et imprévu". »

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

Cet amendement est retiré.

Mme la présidente.

L'amendement no 16 est retiré.

L'amendement no 11 n'est pas défendu.

M. Blessig a présenté un amendement, no 17, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 276-3 du code civil par la phrase et l'alinéa suivants : Si la suspension a été accordée par le juge, l'action en révision peut aussi être introduite par le créancier. »

« Si la révision est accordée, le juge fixe en capital le montant résiduel de la prestation compensatoire en se situant à la date de la demande de révision, compte tenu des sommes déjà versées au titre de cette prestation. »

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

Cet amendement vise, en cas de suspension du versement de la prestation compensatoire par le juge, à autoriser l'introduction d'une action en révison par le créancier.

En fait, il s'agit de conférer toute sa portée à la disposition introduire par le Sénat concernant la possibilité d'accorder une suspension de la rente viagère, sachant que, dans ce cas, la révision ne saurait avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui initialement fixé par le juge.

Enfin, il précise les modalités de cette révision au regard de la date à laquelle se place le juge pour estimer le préjudice, le juge devant tenir compte des sommes déjà versées.

J'avais également évoqué ce point. Cet amendement fait partie des trois amendements déposés par l'UDF en deuxième lecture.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vidalies, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement, qui pose un problème de cohérence par rapport au texte. Pour la première fois, on voit apparaître une action à l'initiative du créancier. Or nous avons choisi de rester sur le terrain indemnitaire, en prévoyant uniquement des révisions à la baisse à l'initiative du débiteur ou de ses héritiers. Dans l'hypothèse où une suspension aurait été décidée par le juge, on retrouverait subitement une procédure à l'initiative du créancier. Cela me paraît très dangereux pour la cohérence générale du texte.

Quant à la seconde partie de l'amendement, nous en avons déjà très largement débattu en première lecture et au Sénat. Je ne suis pas favorable à ce que l'on fixe un capital compte tenu des sommes déjà versées. Le capital est fixé par le juge au moment où on le lui demande et non pas, d'une certaine façon, a posteriori en tenant compte des versements échelonnés intervenus depuis, la rente étant alors finalement une sorte de versement par anticipation du capital. Franchement, ce serait un dispositif dangereux et il vaut mieux conserver la cohérence de ce que nous avons écrit aussi bien à l'Assemblée nationale qu'au Sénat en première lecture.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

Mme la présidente.

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

En cas de suspension, il faut pouvoir relancer la procédure. Une suspension peut prendre fin automatiquement parce que le juge indique la période pour laquelle il suspend, mais quid en cas de carence ? C'était une façon de sortir d'une difficulté.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

17. (L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 2 ter A. (L'article 2 ter A est adopté.).

Article 2 ter B

Mme la présidente.

« Art. 2 ter B. Après l'article 276-2 du code civil, il est inséré un article 276-4 ainsi rédigé :

« Art. 276-4. Le débiteur d'une prestation compensatoire sous forme de rente viagère peut à tout moment saisir le juge aux fins de statuer sur la substitution à la rente d'un capital déterminé selon les modalités prévues aux articles 275 et 275-1.

« Cette action est ouverte aux héritiers du débiteur.

« Le créancier de la prestation compensatoire peut former la même demande s'il établit qu'une modification de la situation du débiteur permet cette substitution, notamment lors de la liquidation du régime matrimonial. »

M. Blessig a présenté un amendement, no 18, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 276-4 du code civil par l'alinéa suivant :

« Si la substitution est accordée, le juge fixe en capital le montant résiduel de la prestation compensatoire en se situant à la date de la demande de substitution, compte tenu des sommes déjà versées au titre de cette prestation. »

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

L'amendement est retiré.

Mme la présidente.

L'amendement no 18 est retiré.

Je mets aux voix l'article 2 ter B. (L'article 2 ter B est adopté.)

Article 2 quinquies

Mme la présidente.

Le Sénat a supprimé l'article 2 quinquies.

Articles 2 sexies et 2 septies

Mme la présidente.

« Art. 2 sexies Le premier alinéa de l'article 278 du code civil est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Ils peuvent prévoir que le versement de la prestation cessera à compter de la réalisation d'un événement déterminé. La prestation peut prendre la forme d'une rente attribuée pour une durée limitée. »

Je mets aux voix l'article 2 sexies.

(L'article 2 sexies est adopté.)

« Art. 2 septies Dans le dernier alinéa de l'article 279 du code civil, les mots : « imprévu dans ses ressources et ses besoins » sont remplacés par les mots : « important dans les ressources et les besoins des parties ». - (Adopté.)

Après l'article 2 septies

Mme la présidente.

M. Vidalies a présenté un amendement, no 22, ainsi rédigé :

« Après l'article 2 septies, insérer l'article suivant :

« Dans le premier alinéa de l'article 285 et dans l'article 294 du code civil, après la référence : "275-1", est insérée la référence :, "277". »

La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Il n'a pas été examiné par la commission, mais c'est un amendement de coordin ation qui est indispensable. Il s'agit simplement d'harmoniser les références qui sont dans le code sur la possibilité de constituer des garanties, notamment pour la procédure de divorce pour rupture de la vie commune que nous n'avions pas prise en considération dans les rédactions retenues jusqu'à présent.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

22. (L'amendement est adopté.)

Articles 2 octies à 2 decies

M me la présidente.

« Art. 2 octies I. Dans l'article 80 quater du code général des impôts, les mots :

« rentes prévues à l'article 276 du code civil », sont remplacés par les mots : « versements de sommes d'argent mentionnés à l'article 275-1 du code civil lorsqu'ils sont effectués sur une période supérieure à douze mois à compter de la date à laquelle le jugement de divorce est passé en force de chose jugée et les rentes mentionnées à l'article 276 du même code ».

« II. Dans le 2o du II de l'article 156 du code général des impôts, les mots : « rentes prévues à l'article 276 du code civil et » sont remplacés par les mots : « versements de sommes d'argent mentionnés à l'article 275-1 du code civil lorsqu'ils sont effectués sur une période supérieure à douze mois à compter de la date à laquelle le jugement de divorce est passé en force de chose jugée et les rentes mentionnées à l'article 276 du même code ainsi que les ».

« III. Les dispositions des I et II s'appliquent aux jugements de divorce prononcés à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi et aux versements en capital se substituant à des rentes en application des articles 4 et 5 de la présente loi. »

Je mets aux voix l'article 2 octies.

(L'article 2 octies est adopté.)

« Art. 2 nonies. I. Après l'article 199 septedecies, ile st inséré dans le code général des impôts un article 199 octodecies ainsi rédigé :

« Art. 199 octodecies. Les versements de sommes d'argent mentionnés au 1 de l'article 275 du code civil et à l'article 275-1 du même code s'il sont effectués sur une période au plus égale à 12 mois à compter de la date à laquelle le jugement de divorce est passé en force de chose jugée, ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu lorsqu'ils proviennent de personnes domiciliées en France au sens de l'article 4 B.

« La réduction d'impôt est égale à 25 % du montant des versements effectués conformément à la convention de divorce homologuée par le juge ou fixé par le jugement de divorce, en application de l'article 274 du code civil. Les sommes ouvrant droit à réduction d'impôt sont retenues dans la limite de 200 000 F sur la période mentionnée à l'alinéa précédent.

« Lorsque les versements sont répartis sur l'année au cours de laquelle le jugement de divorce est passé en force de chose jugée et l'année suivante, le montant ouvrant droit à réduction d'impôt au titre de la première


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

année ne peut excéder le montant du plafond mentionné au deuxième alinéa multiplié par le rapport existant entre le montant des versements effectués au cours de l'année considérée et l'ensemble des versements que le débiteur de la prestation compensatoire s'est engagé à réaliser sur la période visée au premier alinéa. »

« II. La seconde phrase de l'article 757 A du code général des impôts est ainsi rédigée :

« Les versements en capital entre ex-époux qui ne sont pas soumis aux dispositions de l'article 80 quater sont assujettis aux droits de mutation à titre gratuit lorsqu'ils proviennent de biens propres de l'un d'eux. »

« III. Les dispositions des I et II s'appliquent aux jugements de divorce prononcés à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. »

(Adopté.)

« Art. 2 decies. L'article 757 A du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ils ne sont soumis qu'au droit de partage visé à l'article 748 lorsqu'ils proviennent de biens acquis en indivision pendant le mariage par des époux séparés de biens. » -

(Adopté.)

Article 2 undecies

M me la présidente.

« Art. 2 undecies. I. L'article 885 K du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Cette exonération s'applique également pour la valeur de capitalisation des rentes viagères perçues au titre d'une prestation compensatoire.

« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application des dispositions du I ci-dessus sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

M. Vidalies, rapporteur, a présenté un amendement, no 4, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 2 undecies. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Le Sénat a décidé d'exclure la valeur de capitalisation des rentes viagères perçues au titre d'une prestation compensatoire du patrimoine du bénéficiaire sur lequel est assis l'impôt de solidarité sur la fortune.

D'abord, je m'interroge pour savoir s'il s'agit de la capitalisation issue de la transformation de la rente en capital telle qu'elle est prévue par le texte ou de la valeur théorique capitalisée de la rente telle qu'elle existe, car le texte se situe dans le code général des impôts à la suite d'un article très particulier qui exclut la valeur de capitalisation des rentes prévues par la loi de 1985 sur les accidents de la circulation. Dans la loi dite Badinter sur les accidents de la circulation, le juge a en effet l'obligation de fixer le capital même lorsqu'il retient le principe d'indemnisation sous forme de rente, alors qu'en l'espèce les rentes qui existent à ce jour sont, par définition, des rentes viagères et il n'existe aucune valeur de capitalisation. Je ne pense donc pas qu'il existe le moindre contribuable à qui l'on ait calculé la valeur de la capitalisation pour voir s'il entrait dans le champ d'application de l'impôt sur la fortune.

C'est donc manifestement à ce moment-là la valeur de la capitalisation issue de la transformation d'une rente en capital qui serait exclue de l'impôt de solidarité sur la fortune. On voit immédiatement quelle porte serait ouverte en matière de fraude, notamment dans les procédures par requête conjointe puisque ceux qui fixeraient directement la prestation compensatoire en capital entreraient, eux, dans le champ d'application de l'impôt de solidarité sur la fortune. Avec l'adoption de cet amendement, il suffirait de prévoir une rente, puis de la transformer en capital. Comme il s'agirait d'une capitalisation, on ne serait plus dans le champ d'application.

Si l'objectif du Sénat, mais, évidemment, cela n'apparaît pas très clairement, c'est d'une manière générale d'écarter de l'assiette de l'ISF à la fois le capital brut et le capital issu de la transformation de la rente, je reconnais que, vu les difficultés qui ont nécessité l'examen en urgence de cette proposition de loi, on n'avait pas jusqu'à présent pris en compte la situation préoccupante des malheureux ou des malheureuses qui risquent de tomber dans le champ d'application de l'ISF et cela me paraîtrait assez surprenant que, au final, ils puissent se réjouir de l'adoption de ce texte.

Cela n'a jamais été l'intention ni des uns ni des autres, me semble-t-il, et il me paraîtrait naturel que nous adoptions cet amendement de suppression.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

J'ai le plaisir d'annoncer à l'Assemblée nationale que la Cour de cassation portugaise a confirmé l'extradition de Sid Ahmed Rezzala.

(Applaudissements sur tous les bancs.)

Mme la présidente.

Nous vous remercions de cette information, madame la ministre. Ces applaudissements traduisent la satisfaction de nos collègues.

Je mets aux voix l'amendement no

4. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 2 undecies est supprimé.

Après l'article 2 undecies

Mme la présidente.

M. Goasguen et M. Nicolin ont présenté un amendement, no 12, ainsi libellé :

« Après l'article 2 undecies, insérer l'article suivant :

« I. Après le 2o quinquies de l'article 83 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 2o sexies. Les annuités d'emprunts souscrits par le contribuable pour la constitution du capital versé au titre de la prestation compensatoire. »

« II. La perte de recettes pour l'Etat est compensée, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Est-il défendu ?

M. Philippe Houillon.

Il est défendu.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Vidalies, rapporteur.

Défavorable.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

12. (L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Article 4

Mme la présidente.

« Art. 4. La révision des rentes viagères attribuées avant l'entrée en vigueur de la présente loi peut être demandée dans les conditions fixées à l'article 276-3 du code civil.

« La substitution d'un capital aux rentes viagères attribuées avant l'entrée en vigueur de la présente loi peut être demandée dans les conditions fixées à l'article 276-4 du même code.

« Toutefois, le refus du juge de substituer un capital aux rentes viagères en cours doit être spécialement motivé. »

M. Blessig a présenté un amendement, no 19, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le dernier alinéa de l'article 4 :

« La partie qui introduit la demande de révision ou de substitution doit établir que celle-ci n'entraîne pas de bouleversement du niveau et des conditions de vie de l'autre partie. Le juge se prononce sur cette demande par une décision spécialement motivée. »

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

Compte tenu de l'adoption de la déclaration sur l'honneur des patrimoines, je retire cet amendement.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Très bien !

Mme la présidente.

L'amendement no 19 est retiré.

Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 5

Mme la présidente.

« Art. 5. La prestation compensatoire versée sous forme de rente temporaire lors de l'entrée en vigueur de la présente loi peut être révisée, suspendue ou supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties. Sa révision ne peut conduire à proroger sa durée initiale, sauf accord des parties. La révision ne peut avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge.

« La prestation compensatoire peut également faire l'objet d'une demande tendant à lui substituer un capital dans les conditions prévues aux articles 275 et 275-1 du code civil.

« Ces actions peuvent être engagées par le débiteur ou ses héritiers. Le créancier peut demander la substitution d'un capital à la rente s'il établit qu'une modification de la situation du débiteur permet cette substitution. »

M. Blessig a présenté un amendement, no 20, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 5, après le mot : "important", insérer les mots : "et imprévu". »

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

C'est la déclinaison d'autres amendements. Je le retire, ainsi que l'amendement no

21.

Mme la présidente.

Les amendements nos 20 et 21 sont retirés.

Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Vote sur l'ensemble

Mme la présidente.

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

A la demande du Gouvernement, je vais suspendre la séance pour quelques instants.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)

Mme la présidente.

La séance est reprise.

3 PRÉSOMPTION D'INNOCENCE Transmission et discussion du texte de la commission mixte paritaire

Mme la présidente.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire (no 2409).

La parole est à Mme le rapporteur de la commission mixte paritaire.

Mme Christine Lazerges, rapporteuse de la commission mixte paritaire.

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, ministre de la justice, mes chers collègues, le texte que nous examinons ce soir est historique.

Oui, ce texte réforme des pans entiers de notre procédure pénale.

Oui, la navette parlementaire a prouvé son utilité : elle a permis d'approfondir le texte et d'aller plus loin dans les ambitions que nous avions pour les victimes et pour les présumés innocents.

Du 25 mars 1999 au 24 mai 2000 : tel a été le délai de gestation de ce grand texte, ce qui demeure un « délai raisonnable ». Le Parlement s'est donc appliqué à luimême les principes qu'il prévoit pour la procédure pénale.

Ce délai est d'autant plus acceptable que le projet de loi est soutenu par les deux assemblées. Au terme de deux lectures, de trente-six heures de débats à l'Assemblée nationale et trente-huit heures au Sénat, après l'adoption de 264 amendements par les députés et de 222 par les sénateurs, une commission mixte paritaire a abouti, après dix heures de discussion, au texte commun qui vous est aujourd'hui soumis.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

On mesure d'ailleurs avec plaisir le rôle tenu par les parlementaires dans l'élaboration de la loi pénale, et plus encore les avancées que va enregistrer notre procédure pénale grâce à ce texte qui, nous le savons tous, n'a pourtant pas manqué de détracteurs.

Au bout du compte, ce n'est certes pas une révolution de notre procédure pénale que le texte opère, mais ce sont plus que des ajustements : c'est une modernisation profonde, au service des libertés, de la dignité des victimes et des personnes poursuivies.

J'insisterai particulièrement sur trois axes de la réforme : l'affirmation claire des principes directeurs de la procédure pénale, le renforcement - enfin - la protection de la dignité des personnes, l'application aux décisions ayant trait à la liberté des personnes principe du « double regard ».

Premièrement, le texte affirme les principes directeurs de la procédure pénale.

On a pu s'interroger sur la nécessité de répéter dans la loi ce qui est déjà inscrit dans la Déclaration des droits de l'homme de 1789, spécialement dans son article 9, ou dans la Convention européenne des droits de l'homme.

Pourtant, dans un souci de pédagogie et de clarté, mais aussi de cohérence puisque le code de procédure civile comporte un dispositif analogue, il s'est avéré indispensable de rappeler ces principes, même si le Sénat s'est montré plus réticent que l'Assemblée nationale sur ce point.

Introduire les fondements même de la procédure pénale dans le code, c'est les insérer dans la pratique même des utilisateurs du code, comme autant de rappels insistants de la raison d'être, avec ses limites et ses fragilités, de la procédure pénale.

Ainsi, la commission mixte paritaire a élaboré une synthèse qui affirme l'essentiel : équité, contradiction, séparation des autorités chargées de l'action publique et de jugement, égalité, information des victimes, présomption d'innocence, droits de la défense, proportionnalité, double degré de juridiction et dignité.

Ce mot de dignité pourrait d'ailleurs résumer cette déclaration de principe et, au-delà, l'ensemble du texte : dignité pour tous et à toutes les étapes, ce qui est bien le moins dans une société démocratique moderne comme la nôtre.

Deuxièmement, le texte renforce la protection de la dignité des personnes.

La place des victimes est confortée. Il est à l'honneur de la gauche de restituer aux victimes une place centrale dans le procès pénal. Le principe est acquis qu'elles devront être informées systématiquement de leurs droits à tous les stades de la procédure, qu'elles bénéficieront désormais d'une procédure simplifiée pour se constituer partie civile et qu'elles pourront être assistées par des associations d'aide, dont le rôle est désormais mieux reconnu.

Outre celui des victimes, c'est le statut de l'ensemble des acteurs du procès pénal qui est revisité. Il est apparu important de rappeler que si le suspect est présumé innocent, à l'instar du témoin assisté et du mis en examen, le témoin simple est purement et simplement innocent. Aussi ce dernier ne pourra-t-il jamais faire l'objet d'une garde à vue. Il est déconcertant d'avoir encore à voter en l'an 2000 une telle disposition ! L'affirmation du caractère tout à fait exceptionnel de la privation de liberté est d'ailleurs un fil rouge dans l'ensemble du projet de loi.

S'agissant du témoin assisté, la recherche d'une solution médiane entre un champ personnel suffisamment large et des droits suffisamment protecteurs a conduit à trouver un équilibre satisfaisant en reprenant largement le contenu du texte adopté part l'Assemblée en deuxième lecture.

Le statut de témoin assisté, moins stigmatisant que celui de mis en examen, doit devenir le statut de droit commun. Tel est le voeu clairement exprimé tant par la ministre de la justice que par les rapporteurs des deux chambres.

J'insiste sur le fait que cette clarification par la gradation des statuts a pour fin première de renforcer la présomption d'innocence et de repousser dans le temps la décision de mise en examen, décision qui est soumise à des conditions plus strictes.

La garde à vue voit également son régime profondément modifié : droit à un entretien avec un avocat dès la première heure, droit d'être informé, droit d'être retenu

« dans des conditions compatibles avec le respect de la dignité humaine ».

Une autre innovation majeure, tant sur le plan pratique que sur le plan symbolique, est celle qui prévoit l'enregistrement audiovisuel des gardes à vue des mineurs.

Son extension aux majeurs pourra être assurée après un an d'application pour les mineurs, et c'est une extension que j'appelle de mes voeux comme beaucoup d'entre nous. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage à la ténacité de ceux qui ont plaidé, ici pour cette réforme.

Les expériences étrangères, la pression du droit européen et les valeurs de responsabilité, de transparence et de dignité exigeaient une telle réforme. Saluons-la, encourageons-la, sans aucune arrière pensée.

Enfin, le statut du présumé innocent a conduit votre assemblée et le Sénat à chercher un équilibre entre le droit à l'image et le droit à l'information. L'exercice a été délicat et marqué, il faut le dire, par le souci de préserver le droit à l'image, au civil comme au pénal. Mais cela ne saurait masquer la dépénalisation des délits de presse, sauf pour de rares et légitimes exceptions : il n'y aura plus de peine de prison pour un article. La réforme est historique, même si, en France, le risque n'était que théorique.

Elle marque le souci de responsabilisation et de dignité qui imprègne l'ensemble du projet de loi.

Troisièmement, le texte prévoit l'application du principe du double regard sur les décisions ayant trait à la liberté des personnes.

Ce double regard, si important, est décliné sous trois aspects : création d'un juge des libertés et de la détention p rovisoire ; instauration d'une possibilité d'appel en matière criminelle ; juridictionnalisation de l'application des peines.

Le projet de loi propose une formule très simple et pragmatique de double regard sur la décision de mise en détention provisoire. Quant aux incertitudes relatives au nom que portera le juge chargé de mettre en oeuvre ce principe, elles ne sont plus qu'un épiphénomène. Distinct du juge d'instruction, le « juge des libertés et de la détention », puisque tel est le nom qu'a retenu la commission mixte paritaire, sera le seul à pouvoir ordonner le placement en détention provisoire. Ce ne sera pas sa seule mission, mais ce sera la plus importante, d'autant que la mise en détention provisoire est rendue plus difficile.

De même, les décisions des cours d'assises seront désormais susceptibles d'appel. A cet égard, saluons le Sénat qui, dès la première lecture, avait prévu de mettre - enfin - notre procédure pénale en conformité avec


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

l'exigence élémentaire de justice qui consiste à pouvoir faire examiner sa condamnation par une autre juridiction.

L'Assemblée nationale, en deuxième lecture, a précisé et affiné le dispositif d'appel des décisions rendues par les cours d'assises, et l'on se souvient que cette disposition fut adoptée à l'unanimité. La CMP n'a fait que modifier le nombre des jurés et admettre l'appel du parquet, ce qui apparaît finalement raisonnable.

M. Alain Tourret.

C'est regrettable !

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

S'agissant de la juridictionnalisation des peines, c'est l'Assemblée nationale qu'il faut saluer. Elle a rendu possible l'introduction d'un recours devant une instance judiciaire contre la plupart des décisions des juges de l'application des peines. Là encore, l'unanimité s'est faite sur nos bancs.

Désormais, les décisions de semi-liberté ou de suspension de peines, par exemple, qui seront prises à l'issue d'un débat contradictoire et qui devront être motivées, seront susceptibles d'appel.

La mission du conseiller chargé de l'application des peines devrait en conséquence être précisée.

Le Sénat a conforté le dispositif concernant la libération conditionnelle en l'étendant selon des modalités spécifiques aux condamnés à des peines de plus de dix ans.

Il a en outre étendu les critères d'admission à la libération conditionnelle de façon générale. Le texte de la commission mixte paritaire reprend ce dispositif.

D'administratives, les décisions du juge de l'application des peines deviennent pleinement judiciaires pour la plupart d'entre elles.

En définitive, c'est bien toute la procédure pénale, de l'interpellation jusqu'à l'exécution de la peine, que le projet de loi renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes revisite de bout en bout.

Madame la ministre, c'est à une très grande réforme que votre très bon projet a conduit. Je vous remercie profondément d'avoir donné la possibilité aux parlementaires de se livrer au travail passionnant qui a été le leur depuis plus d'un an sur ce texte, et je pense que personne sur ces bancs ne me contredira. Ce travail a finalement abouti jeudi dernier à ce texte commun que la commission mixte paritaire a adopté à l'unanimité et que nous allons voter ce soir.

Qui osera prétendre que votre réforme de la justice n'a pas fait un fantastique bond en avant avec la loi renforçant la présomption d'innocence et les droits de victimes ? A l'aube du

XXIe siècle nous pouvons être, me semblet-il, fiers de notre procédure pénale. En conséquence, j'appelle - et c'est le voeu que je veux former en guise de conclusion - à une mise en oeuvre exemplaire de ce texte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je suis particulièrement heureuse que la commission mixte paritaire soit parvenue à un accord dans des conditions qui me paraissent tout à fait satisfaisantes et que vient de rappeler Mme Lazerges.

Une loi de cette ampleur méritait une large approbation.

Lors de la communication que j'avais présentée en conseil des ministres le 29 octobre 1997, j'avais annoncé, vous vous en souvenez certainement, une réforme pour une justice au service des citoyens, pour une justice au service des libertés, pour une justice plus indépendante et impartiale.

Le premier volet de cette réforme - une justice au service des citoyens - concerne la justice au quotidien. Il a déjà donné lieu au vote de deux lois par le Parlement : la loi du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits et la loi du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale, destinée à lutter contre la petite et moyenne délinquance.

Ces deux textes ainsi que les moyens très importants en effectifs et en crédits budgétaires dégagés par le Gouvernement depuis 1998 ont permis en effet que la justice au quotidien soit plus proche de nos concitoyens, plus accessible et plus rapide.

Ce premier volet de la réforme se poursuit d'ailleurs avec la réforme des tribunaux de commerce et avec celle du droit de la famille.

Le deuxième volet de la réforme - une justice au service des libertés - est celui que vous vous apprêtez à parachever aujourd'hui, j'y reviendrai dans un instant.

Le troisième volet - une justice indépendante et impartiale - a donné lieu à une première lecture, devant les deux assemblées, du projet de loi sur l'action publique en matière pénale. Il aurait dû déboucher sur l'adoption par le Congrès du projet de loi relatif au Conseil supérieur de la magistrature. Vous connaissez les raisons qui ont empêché ces projets d'aboutir.

M. Bernard Roman, président de la commission.

Oh oui, nous les connaissons !

Mme la garde des sceaux.

Je rappelle ici que je suis prête, quant à moi, à poursuivre l'adoption de ce troisième volet de la réforme dès que sera levé le blocage actuel, qui n'est le fait ni du Gouvernement ni de la majorité ! Ayant situé la place de ce texte dans l'ensemble des réformes que je propose au Parlement, et avant de revenir sur quelques dispositions essentielles du projet, je souhaite maintenant et avant tout rendre hommage à la qualité du travail parlementaire et plus spécialement, dans cette assemblée, au travail accompli par la commission des lois, par M. Bernard Roman, son actuel président - lequel a présidé la commission mixte paritaire - et, avant lui, par Mme Catherine Tasca, ainsi que par Mme Lazergues, qui a mené ce texte de bout en bout, et par tous les membres de la commission mixte paritaire.

Les débats particulièrement riches et constructifs qui se sont déroulés devant les deux assemblées ont été menés avec le souci d'aboutir ; ils ont permis de parvenir à un accord sur un grand texte, équilibré et fondateur sur bien des points, d'un véritable renouveau de notre procédure pénale.

Je dis un grand texte, car l'ampleur des sujets traités aurait pu justifier quatre grandes lois : Une loi sur l'appel des décisions des cours d'assises ; Une loi sur la réforme de la libération conditionnelle - on se souvient que Robert Badinter en avait proposé une il y a dix-sept ans, mais depuis cette époque il ne s'était rien passé ; Une loi sur le renforcement des droits des victimes - il s'agit là d'une grande première dans notre droit pénal ; Une loi enfin sur le renforcement de la présomption d'innocence accordée aux personnes en cause devant la justice.

J'aborderai succinctement ces différents chapitres.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Concernant, d'abord, l'appel contre les décisions des cours d'assises, j'avais annoncé dans ma communication en conseil des ministres du 29 octobre 1997 mon intention de mettre un terme à l'anachronique absence d'appel contre les décisions des cours criminelles. Il me semblait nécessaire de permettre aux accusés encourant les peines les plus sévères de bénéficier d'une « seconde chance », comme c'est le cas dans tous les autres procès, y compris pour des personnes qui comparaissent, pour des faits relativement anodins, devant le tribunal de police, par exemple.

Des affaires récentes ont montré que, même en invoquant la souveraineté populaire s'exprimant par la voix du jury, on pouvait laisser subsister un doute après le prononcé d'un verdict. Dès lors, l'impossibilité de faire appel constituait une anomalie dans notre système judiciaire.

J'avais toutefois indiqué devant votre assemblée que je ne souhaitais pas voir engager cette réforme sans avoir les moyens, notamment humains, de sa mise en oeuvre. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas été favorable à l'adoption du dispositif proposé par mon prédécesseur, trop coûteux en emplois par rapport au nombre de procès en cour d'assises pour lesquels une « seconde chance » paraissait nécessaire.

J'ai préféré concentrer dans un premier temps les augmentations d'effectifs que votre assemblée a bien voulu voter depuis trois ans sur l'amélioration de la justice au quotidien, qui touche des centaines de milliers de nos concitoyens. J'ai donc augmenté les moyens des cours et des tribunaux pour que la justice non seulement pénale, mais aussi civile, sociale et commerciale, soit rendue plus rapidement. Dans le même temps, j'ai demandé à mes services d'étudier le système de l'appel tournant, qui paraissait susceptible d'être moins coûteux en emplois budgétaires.

J'ai tenu informé le Parlement de l'évolution du dossier en adressant le 13 décembre 1999 à tous les députés et sénateurs un courrier expliquant le dispositif de l'appel tournant. J'ai consulté plus spécialement celles et ceux des parlementaires qui s'étaient particulièrement intéressés à cette réforme : outre les présidents de la commission des lois et les rapporteurs, je pense à M. Forni et à M. Tourret, ou bien encore à Mme Bredin, à M. Floch, à

M. Albertini et à M. Devedjian.

Grâce à trois excellents budgets qui ont permis 422 créations d'emplois de magistrat depuis le début de la législature et qui laissent augurer favorablement de l'exercice 2001, la réforme de la cour d'assises est maintenant possible.

Désormais, les personnes condamnées pour crime et qui contestent leur culpabilité ou le montant de leur peine pourront faire appel de leur condamnation devant une autre cour d'assises selon le dispositif de l'appel tournant par lequel une cour d'assises est appelée à juger en appel ce qu'une autre cour d'assises a jugé en première instance. Ainsi que votre rapporteur l'a rappelé, ce droit d'appel sera reconnu au ministère public et à la partie civile.

La commission mixte paritaire a décidé que le jury de la cour d'assises d'appel comprendrait douze personnes au lieu de neuf jurés en première instance. Ainsi la légitimité de la cour d'assises d'appel sera-t-elle confortée.

Je me réjouis que le Parlement ait, avec le Gouvernement, réussi cette réforme historique, après tant de tentatives restées inabouties.

J'en viens à une autre réforme historique : celle de la libération conditionnelle.

Nous arrivons à une étape importante d'un processus plus que centenaire, commencé le 18 août 1895, date de la première loi sur la libération conditionnelle. Nous sommes aussi au coeur du dispositif qu'il nous appartient de mettre en oeuvre pour la réinsertion des condamnés et la prévention de la récidive. L'efficacité de la libération conditionnelle est prouvée dans ces deux domaines, et cela se comprend aisément : la mesure est individualisée, accompagnée par des travailleurs sociaux et le détenu n'est pas purement et simplement libéré sans contrôle comme c'est le cas lorsqu'une mesure de grâce collective intervient. Autour de la libération conditionnelle peut se construire un projet d'exécution de peine qui donne un sens à la sanction.

Or, au cours des deux dernières décennies, le nombre des libérations conditionnelles n'a cessé de diminuer. Il faut y voir un effet du caractère plus répressif de notre société, marqué par un allongement des peines prononcées, mais aussi le fait que l'obtention d'un emploi comme condition de la libération conditionnelle a limité le nombre des dossiers éligibles.

Enfin, la procédure d'instruction des demandes, administrative et parfois même bureaucratique, ne laissant aucune place au débat contradictoire et favorisant la dilution des responsabilités entre plusieurs intervenants, ne pouvait être propice au développement de la libération conditionnelle.

C'est dans ce contexte que j'ai annoncé ma volonté de relancer le dispositif, en particulier lors de ma communication sur la politique pénitentiaire en conseil des ministres, le 8 avril 1998.

Cependant, la réforme des services pénitentiaires d'insertion et de probation était un préalable indispensable à ce renouveau. Il fallait, en effet, pour une plus grande efficacité, permettre qu'un même travailleur social assure le suivi d'un condamné admis à la libération conditionnelle, sortant de prison mais devant faire l'objet de mesures d'assistance et de contrôle. Il fallait faire en sorte que ce soit le même travailleur social qui suive le condamné à l'intérieur de la prison et lorsque celui-ci serait libéré. Cette réforme a été menée à bien en avril 1999, là encore avec des moyens budgétaires en effectifs très substantiels, ce qui a ouvert la voie à celle de la libération conditionnelle.

J'ai donc annoncé en juillet 1999 au Conseil supérieur de l'administration pénitentiaire ma décision de confier à une commission présidée par M. Farge, conseiller à la Cour de cassation, une mission d'étude sur les moyens de relancer la libération conditionnelle. La commission a été constituée en septembre 1999. M. Farge m'a remis son rapport le 17 février 2000 et, à peine un mois et demi plus tard, l'essentiel de ses propositions a pu, à la faveur d'un travail très constructif effectué avec votre rapporteur et le Sénat, être intégré dans le projet de loi lors des deuxièmes lectures.

L'objectif d'une réforme en profondeur est aujourd'hui atteint avec les deux mesures essentielles qui caractérisent la « nouvelle libération conditionnelle » : d'une part, les critères d'admission ont été élargis, de sorte que la mesure ne sera plus réservée aux seuls détenteurs d'un emploi, mais qu'elle deviendra accessible à tous ceux qui font des efforts sérieux de réinsertion et qui présentent un projet d'apprentissage, de formation scolaire, de soutien essentiel à la vie familiale, voire de soins médicaux ; d'autre part, la décision d'admission à la libération conditionnelle ou


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

de refus sera toujours prononcée par une juridiction, conformément aux propositions contenues dans les rapports que j'avais demandés aussi bien à M. Farge qu'à

M. Canivet.

La décision sera prise après débat contradictoire. Le condamné pourra être assisté d'un avocat et il aura la possibilité d'interjeter appel s'il n'obtient pas satisfaction.

Je ne reviendrai pas sur le détail du dispositif arrêté à l'initative de votre rapporteure. Il a fait l'objet du consensus le plus large au sein des deux assemblées et il est conforme non seulement aux recommandations des rapports Farge et Canivet, mais aussi aux souhaits exprimés par les juges de l'application des peines et par les magistrats du parquet que j'ai tenu à consulter dans le détail.

Enfin, je rappelle qu'en liaison avec la réforme de la libération conditionnelle, vous êtes invités à voter celle des mesures conduisant à la sortie durable de prison d'un condamné : semi-liberté, placement à l'extérieur, suspensions et fractionnement de peine, placement sous surveillance électronique.

Nous mettons ainsi en place un ensemble cohérent qui autorisera une meilleure individualisation des peines, en permettant aux condamnés de bénéficier des garanties judiciaires qu'une démocratie moderne se doit de reconnaître à ses citoyens, fussent-ils détenus, et en garantissant à la société une meilleure prévention de la récidive.

Le projet de loi comporte également des dispositions très importantes relatives au renforcement des droits des victimes.

Après la loi du 17 avril 1998 relative aux infractions sexuelles et à la protection des mineurs, ce texte est le second que vous adopterez au cours de cette législature et qui contienne une série de dispositions spécialement consacrées aux droits des victimes, de toutes les victimes.

Grâce à ce texte, les victimes seront mieux accueillies, mieux écoutées, mieux protégées et mieux indemnisées.

Pour l'essentiel, les mesures que j'ai proposées, enrichies par les apports des deux assemblées, ont fait l'objet d'un large consensus et ont donc été votées conformes sans venir alourdir l'ordre du jour de la commission mixte paritaire.

C'est le cas des dispositions qui, aux différents stades de la procédure - du dépôt de la plainte au jugement en passant par l'instruction préparatoire - obligent les autorités policières et judiciaires à informer les victimes de leurs droits.

C'est aussi le cas des dispositions consacrant le rôle des associations d'aide aux victimes, ou facilitant les constitutions de partie civile à l'audience, ou élargissant les possibilités d'indemnisation des victimes notamment à certaines infractions contre les biens, par les commissions d'indemnisation des victimes d'infractions pénales.

C'est encore le cas des dispositions instituant l'infraction d'atteinte à la dignité de la victime d'un crime ou d'un délit et permettant de sanctionner, à la demande de la victime, la reproduction de certaines images que ne justifie nullement la liberté, pourtant essentielle, de l'information.

C'est enfin le cas des dispositions donnant à certaines associations de victimes le droit de se constituer partie civile en cas d'infractions portant atteinte aux personnes qu'elles défendent.

Les droits des victimes sont également renforcés par des dispositions qui ne leur sont pas spécifiques, mais qui relèvent de l'ensemble des améliorations apportées à notre procédure : le droit de mieux intervenir dans l'information ou dans le procès, le droit de mieux bénéficier du principe contradictoire, de participer au contrôle de la durée des informations sont autant de progrès accomplis pour les victimes.

Quelles sont les améliorations apportées à notre procédure pénale pour améliorer la protection de la présomption d'innocence des personnes mises en cause par la justice ? Vous allez décider, en votant le projet de loi, d'une évolution sans précédent de notre droit. Alors même que les principes directeurs qui fondent notre procédure sont maintenus, il est créé un équilibre, non pas pour plus d'accusatoire ou d'inquisitoire - j'ai déjà dit que ces deux systèmes ont chacun leurs mérites et leurs inconvénients -, mais pour plus de contradictoire.

Les responsabilités des différents acteurs judiciaires, magistrats chargés de l'instruction ou du jugement, du siège ou du parquet, seront mieux définies et mieux réparties afin d'assurer une justice plus impartiale, plus efficace et plus respectueuse des droits de la défense.

Je voudrais rappeler brièvement les principales avancées, en insistant, le cas échéant, sur les questions essentielles qui étaient soumises à la commission mixte paritaire et sur lesquelles des accords sont intervenus.

Les dispositions concernant le déroulement de l'instruction préparatoire n'ont pas fait véritablement l'objet d'une discussion en CMP. Elles sont néanmoins profondément modifiées.

Les modifications les plus notables concernent la refonte complète du statut du témoin assisté, accessible à toute personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants. La possibilité d'être assisté par son avocat sans être mis en examen constitue naturellement une garantie extrêmement importante.

Il est ainsi permis d'espérer une diminution du nombre des mises en examen, mesures stigmatisantes qui pourront être réservées aux personnes contre lesquelles seront réunis des indices graves et concordants.

Corrélativement, la procédure de mise en examen est mieux précisée : les conditions de fond et de forme de son prononcé sont renforcées. La mise en examen interviendra après audition par le juge et non avant, de sorte que la personne aura la faculté de présenter en temps utile les arguments qui permettront au magistrat de reconsidérer éventuellement sa position.

Les droits de la défense des personnes mises en examen sont par ailleurs élargis, quant aux demandes d'actes, aux choix de leur avocat.

Ces droits sont étendus à toutes les parties au procès.

Ainsi, les parties civiles pourront demander des actes, des confrontations, des expertises, perquisitions ou transports sur les lieux. Elles pourront, comme la personne mise en examen, demander que leur conseil assiste à ces actes.

Elles pourront directement interroger les témoins à l'audience.

Nous pouvons mesurer à quel point les droits de la défense sont considérablement renforcés.

Enfin, un calendrier de procédure est institué. A l'expiration d'un délai d'un an pour les délits et de dix-huit mois pour les crimes, les personnes mises en examen, les témoins assistés et les parties civiles disposeront du même droit de demander des comptes sur la durée de l'information. Ainsi, la chambre d'accusation devenue chambre de l'instruction, à la suite d'un salutaire amendement introduit au Sénat, pourra faire mieux respecter le principe du délai raisonnable.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

J'en viens à la garde à vue.

Vous connaissez les importantes modifications apportées au régime de la garde à vue : D'une part, les personnes gardées à vue, qui ne seront plus de simples témoins, pourront dès le début de la mesure compter sur la présence d'un avocat, sauf infraction de criminalité organisée - cette disposition met enfin notre pays au même niveau que la plupart des législations étrangères ; D'autre part, les interrogatoires des mineurs placés en garde à vue devront faire l'objet d'un enregistrement audiovisuel. Il s'agit là d'une garantie nouvelle dont l'initiative revient à votre assemblée - le Gouvernement ne l'avait pas proposée au départ.

M. Patrick Devedjian.

Il était contre !

Mme la garde des sceaux.

Le texte adopté par la commission a le mérite de préciser le statut des enregistrements effectués, sur lequel j'avais exprimé des interrogations, puisqu'il réserve leur utilisation à la phase préparatoire du procès. Il prévoit qu'un rapport devra être rédigé un an après l'entrée en vigueur de cette disposition, pour envisager les modalités d'élargissement du dispositif aux majeurs. Il sera alors possible au Gouvernement de faire le point sur cette innovation essentielle de notre procédure.

Je me réjouis que la commission mixte paritaire soit parvenue sur ce point à un compromis. Au départ, en effet, les positions de l'Assemblée nationale et du Sénat étaient très éloignées. Vous avez accompli un travail de rapprochement considérable.

Les dispositions relatives à la détention provisoire constituent un autre point fort de la loi.

La France, hélas, se distingue en Europe tant par le nombre que par la durée des détentions provisoires.

Aucune des réformes réalisées dans le passé n'a donné les résultats escomptés. Les nouvelles dispositions marquent une rupture avec les textes anciens à deux égards.

En premier lieu, les décisions en matière de détention sont confiées à un magistrat expérimenté, distinct du juge d'instruction : c'est ici la garantie du double regard qui est apportée avec l'intervention d'un magistrat, que l'on ne peut soupçonner de prendre ses décisions en fonction d'une stricte logique d'enquête parfois trop réductrice au regard des enjeux humains attachés à toute privation de liberté.

En second lieu, les seuils minimums de placement en détention sont sensiblement relevés et la durée de la détention provisoire est limitée, même en matière criminelle.

La commission mixte paritaire a décidé que ce magistrat serait dénommé « juge des libertés et de la détention ». Je ne vois pas d'inconvénient à cette appellation puisque tous les juges sont juges des libertés, mais que tous ne sont pas juges de la détention.

Enfin, le mécanisme d'indemnisation des détentions provisoires suivies d'une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement est largement amélioré avec l'adoption du principe d'une indemnisation intégrale et obligatoire du préjudice. Les décisions rendues dans ce domaine seront motivées, publiques et susceptibles de recours.

Le renforcement de la présomption d'innocence se manifeste aussi par la règle nouvelle selon laquelle la diffusion de l'image d'une personne menottée ne pourra se faire sans son consentement.

A l'issue des deux lectures devant les deux assemblées et après le succès, que je veux saluer, de la commission mixte paritaire, nous sommes donc en mesure de dresser un bilan très positif de l'ensemble de nos travaux.

Ce texte, dont les ambitions initiales étaient déjà très vastes, a pu être enrichi, complété et amélioré par le travail parlementaire, effectué de façon constructive avec le Gouvernement tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, et je veux vous en remercier.

Ce texte constituera une étape capitale dans l'histoire de notre procédure pénale et permettra à notre pays de témoigner, une fois de plus, qu'il est et demeure la patrie des droits de l'homme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) (Mme Christine Lazerges remplace Mme Nicole Catala au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE Mme CHRISTINE LAZERGES,

vice-présidente

Mme la présidente.

Nous allons aborder la discussion générale.

Discussion générale

Mme la présidente.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon.

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, « ultime oral » comme il était écrit aujourd'hui dans un quotidien, pour ce texte sur la présomption d'innocence qui, deux ans après sa présentation en conseil des ministres, semble ce soir sur la voie d'un vote définitif. Son adoption marquera peut-être la fin de cette sorte de spirale de la difficulté qui semblait s'attacher à certains volets de la réforme de la justice.

Ce long cheminement est assez normal pour un texte de cette nature, qui dépasse évidemment les clivages politiques et qui contient de nombreuses dispositions attendues résultant du rapport Truche de juillet 1997.

Je soulignerai à mon tour la volonté constructive qui a présidé aux travaux de la commission mixte paritaire, en particulier de la part de l'opposition. On avait déjà perçu quelque chose de cette nature en deuxième lecture puisque votre majorité avait alors adopté nombre d'amendements qui étaient inspirés des suggestions que l'opposition avait faites en première lecture. D'ailleurs, si l'on y regarde bien, on s'aperçoit que les principales innovations sont le fruit d'initiatives de l'opposition - je pense notamment à l'« appel » des arrêts de cour d'assises ou encore à l'assouplissement des conditions de la libération conditionnelle. La CMP a adopté intégralement des critères qui avaient été proposés par le Sénat. Il faut donc s'en féliciter.

En revanche, je ne partage pas l'avis que j'ai entendu martelé selon lequel nous aurions là un grand texte historique de procédure pénale.

M. Jacques Floch.

C'est pourtant vrai !

M. Philippe Houillon.

C'est votre avis, mon cher collègue, pas le mien. Or, c'est le mien que je suis en train d'exprimer ! Ce texte est loin d'être parfait. Il demeure touffu. Je mets au défi les non-initiés de s'y retrouver dans les méandres des procédures et des délais sillonnant ce pro-


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jet, qui ne va pas dans le sens de la clarification. Nous avons affaire à un texte dilué, et c'est précisément la juxtaposition de dispositions disparates qui a entraîné les blocages que nous avons connus. Je pense bien sûr au feuilleton de l'enregistrement sonore des interrogatoires pendant les gardes à vue. Les péripéties rencontrées par cette disposition sont révélatrices de ces blocages. En première et deuxième lecture, nous n'avons peut-être pas vu toutes les difficultés que cela pourrait poser.

Nous avons du mal à trouver l'équilibre entre le droit des justiciables, gage d'une justice moderne et conforme aux dispositions européennes, et l'efficacité de l'enquête, la rapidité de la procédure, l'aboutissement aussi rapide que possible des mesures d'instruction. De ce point de vue non plus nous ne sommes pas en présence d'un grand texte historique, car nous sommes encore en retrait par rapport aux dispositions du droit européen, qui devraient pourtant s'appliquer.

Cela dit, la CMP s'est arrêtée sur une position médiane, mais je doute de l'application effective de cette m esure. Cette remarque est d'ailleurs valable pour l'ensemble de ce projet de loi. Vous-même, madame la ministre, ne prévoyez l'application de l'enregistrement des gardes à vue qu'un an après l'entrée en vigueur de la loi, donc probablement pas avant l'été 2001. Je suis étonné que vous procédiez de la sorte s'agissant d'un si grand texte historique ! De même, vous prévoyez que le Gouvernement, encore un an plus tard, présentera au Parlement un rapport qui précisera les modalités d'un éventuel élargissement du dispositif aux majeurs. On voit bien que, compte tenu des difficultés rencontrées, vous essayez de retarder la mise en place de ce dispositif.

Cela dit, on ne peut qu'être d'accord avec un texte qui entend protéger la présomption d'innocence et le droit des victimes. Encore faut-il que ce soit un bon texte, or je viens de signaler quelques lacunes. Prenons la création du juge des libertés et de la détention ! On ne peut parler en l'espèce d'un grand texte historique, car nous serons en présence d'un pré-jugement, ni plus ni moins. En effet, ce juge sera saisi par le juge d'instruction lorsque celui-ci envisagera la mise en détention, ce qui me paraît contraire aux principes européens que j'ai cités tout à l'heure. Dans les petites juridictions, notamment, le juge des libertés et de la détention hésitera donc à désavouer systématiquement, ou fréquemment, son collègue juge d'instruction et préférera probablement suivre ses conclusions. Nous verrons, à l'usage, comment cela se passera.

Evidemment, l'on ne peut être que favorable au droit à être jugé dans un délai raisonnable prévu par ce texte.

Encore faut-il que les juges aient les moyens matériels de le faire. Vous avez déclaré, madame la ministre, lors de l'examen du budget de la justice, en novembre dernier, que vous seriez en mesure de financer les réformes. Mais, si l'on y regarde de plus près, sur les 212 postes de magistrats créés, 100 seront affectés aux tribunaux de commerce dans le cadre de la réforme dont nous allons connaître et la grande partie restante à la création de ces juges de la détention. Dans ces conditions, pourrons-nous connaître ces délais raisonnables que le texte prévoit ? Encore une fois nous verrons à l'application.

Nous ne pensons donc pas être en présence d'un grand texte historique. Nous souhaitons malgré tout lui donner sa chance mais, à l'inverse de ce que je viens d'entendre, nous continuons de penser que nous sommes passés à côté de la grande réforme dont notre procédure pénale a besoin, réforme qui consisterait notamment à écarter le juge d'instruction de la détention et du contrôle judiciaire. Pour ces raisons, le groupe Démocratie libérale et Indépendants s'abstiendra sur ce texte.

M. Patrick Devedjian.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. André Gerin.

M. André Gerin.

Au pays de la Déclaration des droits de l'homme, « tout homme est présumé innocent jusqu'à ce que la justice l'ait reconnu coupable ». Il est vrai que ce principe a trop souvent été bafoué.

Trouver un équilibre entre les droits de l'individu et les droits de la société au travers de la législation en vigueur pose une difficulté réelle. Vous vous y êtes attaquée, madame la ministre, et nous devons saluer ici votre détermination à faire que l'ensemble des parlementaires contribue à transformer en profondeur la procédure pénale.

L'excellent travail de réflexion et de proposition entrepris tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale avec Mme Lazerges, notre rapporteur, et le président de notre commission des lois a permis que des points de vue se rejoignent pour aller au-delà du projet initial renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes. Il s'agit d'un texte essentiel de la réforme de la justice qu'il nous faudra bien mener à terme dans sa globalité, notamment en ce qui concerne le Conseil supérieur de la magistrature.

L'aboutissement de la commission mixte paritaire traduit une volonté commune de franchir une nouvelle étape, à condition bien sûr que suivent les moyens financiers indispensables à l'application de la loi. Nous savons les efforts que vous avez entrepris dans ce domaine, madame la garde des sceaux, mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Compte tenu du temps qu'il m'est imparti, je ne développerai pas les différentes modifications apportées qui n'appellent aucune réserve de notre part.

Je pense notamment à la présence de l'avocat dès la première heure de garde à vue, cette proposition ayant été celle du groupe communiste durant de longues années. Je pense également à l'élargissement du statut de témoin assisté, à l'encadrement plus strict de la mise en examen, aux délais de procédure, à l'augmentation des seuils en deçà desquels le placement en détention provisoire ne pourra plus être prononcé, même si nous avions envisagé la possibilité d'aller encore plus loin, à cette innovation majeure que constitue le double degré de juridiction en matière criminelle, au renforcement des droits des victimes, à l'introduction dans le projet de loi d'une véritable réforme de la libération conditionnelle, ou encore au droit reconnu aux parlementaires de visiter les lieux de privation de liberté.

Sur la liberté de la presse, la sagesse l'a emporté.

En 1999, on avait pu craindre des restrictions dangereuses pour la moralité politique. Il ne fallait pas toucher à l'article 9-1 du code civil.

Je me permettrai cependant quelques remarques sur des mesures que nous aurions souhaité voir aboutir et qui me laissent un goût d'inachevé.

Concernant la transparence démocratique et procédurale de la garde à vue, c'est-à-dire la possibilité d'un contrôle effectif de son déroulement et le respect des droits individuels, nous ne minimisons pas les avancées réalisées par la CMP, mais nous aurions souhaité que le contenu des gardes à vue puisse être vérifié pour les majeurs comme pour les mineurs. A cet égard, l'enregistrement des auditions du suspect semble être la solu-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

tion la plus aboutie en ce qu'elle constitue une garantie non seulement pour les gardes à vue, mais aussi pour les enquêteurs. Tout le monde s'y serait retrouvé : les centaines de personnes placées en garde à vue chaque année, ainsi que les fonctionnaires de police, souvent accusés d'abuser de leur pouvoir au profit du sens de l'enquête.

L'enregistrement vidéo aurait même pu être institué comme principe. C'est la solution qui a été retenue pour l'ensemble des mineurs, au-delà des victimes d'infractions sexuelles, et nous nous en félicitons, parce que c'est une avancée et un encouragement à aller plus loin dans les années à venir. Le bilan de l'expérience ainsi menée nous conduira sans aucun doute très rapidement à l'application de cette procédure pour l'ensemble des gardes à vue.

Par ailleurs, concernant la dissociation de la fonction d'instruction et de la fonction d'incarcération, nous pensons que ce progrès entraînera une diminution du nombre de placements en détention provisoire, outre qu'il semblait paradoxal de demander à un même juge de présumer de l'innocence d'une personne suspecte alors qu'il était censé réunir les preuves de sa culpabilité. Toutefois, même si les deux magistrats devront être favorables à la mise en détention, il n'en demeure pas moins qu'ils statueront l'un comme l'autre en juge unique. A notre sens, rien ne peut se substituer à la garantie offerte par la collégialité, mais je ne développerai pas ce point sur lequel je suis déjà intervenu plusieurs fois.

J'ouvrirai une parenthèse sur l'application de cette innovation aux mineurs, car il ne m'apparaît pas que soitr equise une spécialisation des magistrats intervenant auprès des mineurs pour leur mise en détention. Sans vouloir ni cacher ni minimiser les réalités de la délinquance des mineurs, je crois qu'il ne faut pas perdre de vue que la finalité de la justice pour les mineurs doit être l'éducation, le civisme, l'apprentissage de la citoyenneté, de la civilité et de la responsabilité.

Une autre mesure très importante permettrait d'éviter à des prévenus d'être placés en détention provisoire : il s'agit du bracelet économique. Nous y sommes pour notre part opposés. Les arguments invoqués depuis 1996 pour vanter les mérites de cette mesure ne nous ont pas convaincus.

Le contrôle, la surveillance électronique, peut ouvrir la voie à une sorte de criminalisation de la misère. Je regrette vivement que cette soumission corporelle soit présentée consensuellement comme une alternative à l'incarcération, surtout quand elle concerne une personne qui n'a pas été jugée. S'agissant de personnes présumées innocentes, le port du bracelet ne les conduirait-il pas à être considérées par la société comme présentant potentiellement un risque ? Qui cherche-t-on ainsi à protéger ? Bracelet ou prison, la détention provisoire est un instrument de procédure pénale attentatoire à la liberté d'aller et venir et au principe de la présomption d'innocence.

J'aurais souhaité aussi, mais peut-être est-ce là un débat pour les mois et les années à venir, qu'une réflexion sur les peines de substitution et de prévention soit engagée et que le travail parlementaire aboutisse. Pourquoi ne pas réfléchir, à court et moyen termes, pour les mineurs, aux moyens de faire en sorte qu'il n'y ait plus d'incarcération, sauf affaire criminelle, et à l'obligation faite à la société d'imaginer massivement des réponses diversifiées pour des parcours de rééducation et de réinsertion, comme un défi pour ces jeunes déstructurés.

Je veux rappeler que votre projet, madame la garde des sceaux, renforce le droit des justiciables, le droit des victimes, ce qui est tout à votre honneur, parce qu'il ouvre un chemin, même s'il est encore limité.

Pour conclure, je rappellerai simplement les propos que je tenais l'an dernier en première lecture et qui conduisaient le groupe communiste à appréhender cette réforme dans un esprit ouvert et constructif : « Il faut se défaire, dans ce pays, d'un penchant humain qui fait que chacun tient la présomption d'innocence pour son droit et la présomption de culpabilité pour le droit des autres. »

Le texte que nous allons adopter sera-t-il de nature à ouvrir cette voie, à renforcer les libertés individuelles ? Nous le pensons vraiment, même si nous considérons qu'il y a encore des choses à faire avancer.

Il faut faire progresser l'Etat de droit et opérer une réforme historique en matière de droits et de liberté. Personne ne peut accepter que la France ait encore des choses à faire vis-à-vis de l'Europe. Je rappelle qu'il serait important de suivre les recommandations du rapport Canivet, même si elles ne sont pas l'objet de notre débat.

La mise en oeuvre de la loi pénitentiaire est un objectif qui nous occupera dans les mois et les années à venir.

C'est le respect de la loi pour chacun d'entre nous. C'est notre engagement de législateur à améliorer la justice.

C'est le respect de la présomption d'innocence pour les autres et pour nous-mêmes. Nous approuvons ce projet parce qu'il va vraiment de l'avant.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

(M. Philippe Houillon remplace Mme Christine Lazerges au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. PHILIPPE HOUILLON,

vice-président

M. le président.

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

M. Pierre Albertini - qui a suivi de bout en bout l'examen de ce texte pour notre groupe ne pouvant malheureusement être présent dans l'hémicycle à cette heure m'a prié de le remplacer.

En 1998, après que le Président de la République eut lancé le grand chantier de la réforme de la justice, vous avez déposé sur le bureau de notre assemblée, madame la garde des sceaux, un projet de loi sur la présomption d'innocence et les droits des victimes. Entre le texte initial et celui qui nous est soumis ce soir, les différences sont sensibles. Il est vrai que, au cours des lectures successives, les parlementaires ont à la fois complété et modifié le dispositif préparé par la Chancellerie. Qui regrettera le temps ainsi consacré à quelques aspects fondamentaux de notre procédure pénale ? A l'issue de la commission mixte paritaire réunie le 18 mai dernier, un accord a été trouvé entre les députés et les sénateurs. Nous nous en réjouissons, même si nous conservons l'impression que nous aurions pu aller plus loin dans la voie du rééquilibrage de notre procédure pénale. La méthode des petits pas l'a emporté sur celle d'une révision plus complète. Tout en saluant les aspects positifs du texte, les députés UDF regrettent cette prudence excessive. Dans le respect des droits de la personne et de la défense, notre procédure pénale était encore trop marquée par son origine. Elle méritait donc mieux qu'une série de mesurettes accumulées depuis une vingtaine d'années et sans grande portée pratique.

Sous plusieurs aspects, le texte proposé par la commission mixte paritaire est positif. Ainsi, nous devons notamment au Sénat la consécration de l'appel tournant du ver-


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dict des cours d'assise qui met fin au dogme de l'infaillibilité du jury populaire et permettra, sinon un véritable double degré de juridiction, du moins un deuxième jugement plus conforme aux principes de la Convention européenne des droits de l'homme.

Nous devons également au Sénat un travail pertinent sur les décisions en matière de libération conditionnelle.

De longue date, la juridiciarisation de cette matière était souhaitée. On peut en espérer une remise en marche d'un mécanisme grippé.

A l'obstination de quelques députés, dont Alain Tourret a été le chef de file résolu, nous devons également la limitation de la détention provisoire, source d'abus régulièrement dénoncés. La publication de la loi devrait d'ailleurs bénéficier immédiatement à un grand nombre de personnes et donner un peu d'oxygène à des prisons surpeuplées.

Enfin, l'élargissement de la notion de témoin assisté, que vous aviez proposé, madame la garde des sceaux, devrait retarder et rendre moins systématique la mise en examen qui est souvent ressentie, hélas ! comme une présomption de culpabilité.

Cependant, au-delà de ces aspects indubitablement positifs, cette réforme reste en deçà de ce que nous espérions en matière de garantie des droits de la personne.

Ainsi, l'institution d'un juge distinct du juge d'instruction demeure hybride. L'appellation qui a été retenue par la commission mixte paritaire traduit bien l'hésitation ressentie par les initiateurs de ce mécanisme. Il sera juge à la fois des libertés et de la détention provisoire. Espérons que l'on ne retiendra, à l'usage, que la première partie de cette expression ! L'encadrement des délais d'instruction obéit à une inspiration louable. Mais, compte tenu de l'encombrement des cabinets des juges et du parquet, et faute de moyens significatifs nouveaux, il risque d'ajouter encore de la complexité à un système déjà difficilement gérable.

En matière de garde à vue, le texte adopté par la commission mixte paritaire est en retrait par rapport à celui qu'avait voté l'Assemblé nationale.

Selon nous, la présence, même muette, de l'avocat pendant l'interrogatoire était la meilleure des garanties. En effet, si toutes les gardes à vue ne donnent pas lieu à des pratiques discutables, loin s'en faut, certaines d'entre elles se déroulent dans des conditions indignes du respect que l'on doit à chaque homme.

Par frilosité et par crainte, cette disposition fut rejetée.

Nous avions alors conçu un mécanisme de repli : l'enregistrement sonore des interrogatoires, déjà accepté pour les mineurs et pratiqué sans difficulté particulière par plusieurs pays européens dont la Grande-Bretagne depuis quinze ans et l'Allemagne, plus récemment. Malgré le ralliement de la majorité des députés à cette idée simple et finalement peu coûteuse - quoi qu'en dise le ministère de l'intérieur -, la prudence excessive l'a malheureusement emporté. La coalition d'intérêts contraires n'est pas le meilleur gage d'un intérêt général bien compris.

Pour toutes ces raisons, l'UDF considère que cette loi marque une étape positive mais encore partielle. Dans quelques années, il faudra aller plus résolument vers une harmonisation des procédures pénales européennes. Prenons acte du compromis élaboré au sein de la commission mixte paritaire. L'UDF s'abstiendra et continuera d'apporter sa contribution à la réflexion commune.

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

M me Frédérique Bredin.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, chers collègues, le Premier ministre s'était engagé dès le départ à réformer la justi ce pour la rendre plus proche des citoyens et plus respectueuse des libertés. Et c'était nécessaire, étant donné le sentiment de défiance qui règne en France envers la justice, alors même que cette dernière est mieux considérée dans le reste des pays européens.

Ce texte sur la présomption d'innocence répond au souhait exprimé par le Premier ministre. C'est un grand texte de libertés publiques qui marquera une étape dans notre droit en raison du rôle que le Parlement a joué dans son élaboration. Le travail fut très long - Mme le rapporteur l'a rappelé -, très riche et les échanges entre le Gouvernement, les députés et les sénateurs extrêmement approfondis. Cela nous a permis, tous ensemble, de faire considérablement évoluer et progresser le texte initial non sur des points de détail mais sur des points fondamentaux.

C'est un grand texte de libertés publiques, d'abord parce qu'il traite à la fois du droit des victimes - ce qui est essentiel pour nous - et du respect de la présomption d'innocence. C'est une nouveauté dans notre droit pénal, mis à part le texte sur les infractions sexuelles sur mineurs.

Des mesures essentielles, très concrètes pour les victimes, ont été prises, que l'Assemblée nationale a tout fait pour renforcer. Je citerai l'information des parties civiles sur l'état d'avancement de l'instruction et sur leurs droits.

Je regrette seulement que la mesure que nous avions adoptée concernant l'information des victimes sur les classements sans suite ait été renvoyée à un autre texte, celui sur le parquet et la chancellerie. Cette réforme reste à faire ; j'espère que nous y procéderons le plus rapidement possible.

En matière de présomption d'innocence, des avancées ont eu lieu. Mais avant de les aborder, je voudrais faire remarquer qu'il s'agissait, pour la France, de se mettre en conformité avec les grands principes de la Déclaration des droits de l'homme. Il y a, dans notre pays, un divorce assez préoccupant entre les discours et les actes.

M. Patrick Devedjian.

Oh oui !

Mme Frédérique Bredin.

400 000 gardes à vue par an, c'est considérable, mais est-ce toujours nécessaire ? 40 % de détenus sont en détention provisoire.

Nous sommes nombreux ici à être membres de la commission d'enquête sur les prisons et, de visite en visite, nous mesurons l'importance de ce problème qui ne peut pas continuer à affecter notre pratique judiciaire.

M. Alain Tourret.

En effet !

Mme Frédérique Bredin.

Les conditions d'enfermement, certes inégales, sont parfois indignes d'une société évoluée et démocratique. Mais je pense que Jacques Floch, rapporteur de la commission d'enquête sur les prisons, fera avec les autres commissaires des propositions pour améliorer la situation.

M. Jacques Floch.

Du moins, on essaiera !

Mme Frédérique Bredin.

Il s'agissait aussi de se mettre en conformité avec la Convention européenne des droits de l'homme. La France est en effet condamnée, de manière répétée, pour non-respect de cette convention.

Quelles sont les mesures qui tendent à renforcer la présomption d'innocence ? Certaines concernent la garde à vue. Elles sont importantes. Le projet du Gouvernement prévoyait l'avocat dès la première heure, ce qui aurait été un progrès considé-


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rable. L'Assemblée nationale a prévu l'avocat en vingtième heure. Elle a exclu la garde à vue pour les témoins et l'a réservée aux seuls suspects. Elle a insisté sur le respect de la dignité, c'est-à-dire des droits élémentaires de l'individu en garde à vue -, notamment, repos et repas et a proposé l'enregistrement des gardes à vue.

La CMP a choisi l'enregistrement vidéo pour les seuls mineurs. C'est déjà une avancée même si, personnellement, je juge qu'elle n'est pas suffisante.

Certains regretteront que l'on n'ait pas admis la présence constante de l'avocat lors de la garde à vue. Peutêtre ont-ils raison.

M. Alain Tourret.

Sans doute !

Mme Frédérique Bredin.

Et sans doute l'obtiendrontils un jour.

M. Alain Tourret.

Très bien ! Mme Frédérique Bredin. Certains, et j'en fais partie, regretteront que l'on n'ait pas admis l'enregistrement de toutes les gardes à vue. Car, par sa neutralité, l'enregistrement permet, en cas de contestation, un contrôle parfaitement objectif du déroulement de la garde à vue.

Comme l'a dit notre collègue M. Gerin, le système protège non seulement la personne gardée à vue, mais également le policier qui peut être injustement accusé de pressions qu'il n'aurait pas exercées.

E n Angleterre, où nous sommes allés avec Mme Lazerges, ce système fut d'abord mal accepté. Mais aujourd'hui, les policiers britanniques le jugent nécessaire à la transparence du déroulement des gardes à vue dans les postes de police et protecteur aussi bien pour les personnes interrogées que pour les personnes qui interrogent.

Ce serait donc un progrès considérable que d'étendre cet enregistrement à tous. La CMP n'y est d'ailleurs engagée : après un bilan dressé par le Gouvernement sur la première année d'expérimentation, cette mesure devra être appliquée à l'ensemble des gardes à vue.

L'enregistrement vidéo de la garde à vue des mineurs s'exercera, bien entendu, sous l'oeil vigilant des avocats.

Au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation, il deviendra sûrement un élément essentiel de la procédure et du respect des droits de la défense. Nous espérons, madame la garde des sceaux - et nous savons que vous y êtes extrêmement attentive -, une application exemplaire de la loi, pour reprendre la formule de Mme Lazerges.

Cela implique, bien évidemment, de commencer tout de suite à équiper les locaux de garde à vue, qu'il s'agisse des postes de gendarmerie ou des postes de police ; car, dans un an, lorsque la loi s'appliquera, il faudra être prêt à procéder à l'enregistrement vidéo de la garde à vue des mineurs - qui ne sont d'ailleurs pas reçus dans des lieux spécifiques. Cela implique aussi, et surtout, d'entraîner rapidement les personnels de police pour qu'ils ne soient pas déconcertés par l'introduction de la vidéo ; leur formation devra donc commencer dès maintenant.

Venons-en aux mesures concernant la détention provisoire.

La création du juge des libertés et de la détention constituait une avancée importante, dans la mesure où elle permet un double regard sur la mise en détention celui du juge d'instruction et celui du juge des libertés et de la détention.

Le projet du Gouvernement prévoyait par ailleurs l'indemnisation facultative en cas de détention provisoire aboutissant à un non-lieu. L'Assemblée nationale est à l'origine de plusieurs avancées en la matière.

Premièrement, l'indemnisation n'est plus facultative mais systématique, en fonction du dommage subi, car nous savons que le simple fait d'être placé en détention provisoire, que celle-ci s'achève sur un non-lieu, une relaxe ou un acquittement, constitue un préjudice.

Deuxièmement, autre avancée importante proposée par notre assemblée, notamment à l'initiative de notre collègue Jacques Floch, le numerus clausus pour la détention provisoire. Nous constatons, à l'occasion de nos visites dans les prisons, que les prévenus souffrent de la surpopulation des maisons d'arrêt - occupées parfois à 130 %, 150 %, 160 % voire 180 % de leur capacité d'accueil -, ce qui n'est pas le cas des condamnés, grâce au code de procédure pénale. Que les personnes mises en détention provisoire aient le droit d'être seules dans une cellule, si elles le souhaitent, relève du bon sens. C'est ce qui leur sera proposé dans trois ans. Un tel progrès, tout à fait considérable, est dû à notre assemblée.

Autre proposition importante du Parlement, la forte limitation de la détention privisoire par l'institution de seuils de peine, de délais butoirs, de durées maximales de détention provisoire. Sur ces questions, nous avons pu progresser.

Dernière mesure importante, l'extension du bracelet électronique à la détention provisoire. Nous attendons son application réelle et générale en France. Mais appliqué à la détention provisoire, le bracelet électronique sera sûrement un outil extrêmement utile, qui permettra de désengorger les prisons.

Concernant l'instruction, le projet gouvernemental a proposé l'élargissement de la notion de témoin assisté ainsi que l'institution d'un débat contradictoire avant la mise en examen ; c'est une mesure, importante. Le Parlement a élargi encore les droits du temoin assisté et a proposé d'encadrer davantage les délais d'instruction, pour en finir avec des instructions... qui, précisément, n'en finissent pas.

Concernant la comparution immédiate, notre assemblée a proposé de raccourcir les délais de jugement. Cette initiative du rapporteur est très importante pour les années à venir.

Je terminerai par la réforme des assises, réforme essentielle bien qu'abordée par l'Assemblée nationale à la faveur de la deuxième lecture. Depuis des années, cette mesure était attendue et espérée. Depuis des années, tous ceux qui se battaient pour le respect des droits de l'homme, députés, avocats, associations des droits de l'homme, citoyens de notre pays la réclamaient parce qu'ils ne supportaient pas l'injustice de notre système judiciaire qui permet un appel pour les petites peines mais n'en prévoit pas pour les très grandes.

L'appel des arrêts de cours d'assises est - enfin - là.

Après tant de tentatives manquées, de belles déclarations jamais traduites dans la réalité, nous y sommes enfin parvenus ! Les députés l'ont réclamé, les sénateurs l'ont proposé, et nous allons, je l'espère, le voter à l'unanimité.

Cette superbe initiative parlementaire donne foi au travail du Parlement. A elle seule, cette mesure symbolique justifierait notre travail et notre présence.

La réforme des assises, jointe à tous les progrès effectués dans les domaines de la garde à vue, de la détention provisoire, du déroulement de l'instruction, des délais de procédure pénale, nous donnera le sentiment précieux, madame la garde des sceaux, chers collègues, d'avoir oeuvré pour la justice de notre pays telle que nous aime-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

rions toujours qu'elle soit, c'est-à-dire efficace et humaine à la fois.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, comme il y a loin de la coupe aux lèvres ! Que d'espace entre le discours et le texte ! Madame Lazerges, je vous ai entendu parler d'un texte historique, d'une modernisation profonde, d'un fantastique bond en avant ! Madame la garde des sceaux, vous avez été plus modeste tout en étant très positive néanmoins vous voyez dans ce texte une réforme historique, un bilan positif, une étape capitale... Madame Bredin, vous voyez un grand texte de libertés publiques...

La satisfaction de soi-même - souvent sentencieuse ne suffit pas à dissimuler la pauvreté de la réforme. Et je voudrais m'attacher à quelques-unes de ces dispositions pour dire nos frustrations et nos regrets.

Nos regrets portent d'abord sur le refus de la présence permanente de l'avocat lors de la garde à vue. On pourra parler d'un texte historique lorsque cela viendra. Car ça viendra... un jour, même si je ne sais pas quand. Sans doute la droite ne vaut-elle pas mieux que la gauche dans ce domaine, elle n'a pas fait mieux dans le passé, mais vous ne faites pas mieux aujourd'hui non plus. Vous faites semblant, un peu plus semblant, mais semblant toujours.

Je regrette la fausse mesure qui a été prise et le compromis boiteux auquel on est parvenu. Car il n'était pas question de donner à l'avocat communication du dossier, ni le droit de poser des questions. Il était simplement envisagé de lui permettre d'assister aux interrogatoires.

M. Alain Tourret.

Ce n'était pas ce que j'avais proposé !

M. Patrick Devedjian.

Monsieur Tourret, vous n'êtes pas en cause ! Que n'avez-vous d'ailleurs été entendu par vos propres amis ! Dans ces conditions, l'adoption de l'enregistrement n'a été qu'un procédé de substitution permettant d'éviter la présence permanente de l'avocat. Pourquoi d'ailleurs réserver l'enregistrement aux seuls mineurs ? En quoi est-ce une garantie ? Et pourquoi tout le monde n'aurait-il pas le droit d'en bénéficier ? C'est une véritable frustration.

Frustration profonde et désaccord total avec votre discours satisfait sur le juge des libertés et de la détention.

Naturellement, cette institution ne durera pas. Elle ne donnera pas satisfaction. Elle ne répond pas à l'exigence de la Convention européenne des droits de l'homme qui veut que l'enquêteur soit séparé du juge.

Je rappelle, et je me demande par quelle aberration vous avez pu imaginer cela, que le juge de la détention est saisi par le juge d'instruction. C'est profondément choquant ! Car c'est le Parquet qui doit déférer ; c'est son rôle, sa vocation ! Vous avez par là même dévoilé la conception que vous avez du juge d'instruction en en faisant un policier, en lui donnant un rôle de parquetier.

Que reprochait-on autrefois au juge d'instruction ? De pouvoir dire : « Parlez, ou je vous mets en prison ». On a donc inventé cette nouvelle petite « usine à gaz », le juge des libertés et de la détention provisoire. Dorénavant, le juge d'instruction pourra dire au prévenu qui est dans son cabinet : « Parlez, et je vous mets en liberté. La liberté, c'est moi, juge d'instruction, qui en décide. Vous pouvez ne pas parler, et je ne peux plus vous mettre en prison. Mais je peux vous déférer devant le juge des libertés et de la détention, avec tous les risques que cela comporte. Alors, il est tellement plus simple et plus utile pour vous de parler ! » Voilà donc votre grande réforme, où le discours change mais où la pression demeure !

M. André Gerin.

Ben voyons !

M. Patrick Devedjian.

D'où une certaine frustration.

L'appel des décisions de la cour d'assises, je ne peux que m'en réjouir. Je rappelle au passage que c'est le Sénat qui l'a réintroduit. En définitive, je préfère le dispositif qui, après bien des tâtonnements, a été adopté par la commission mixte paritaire. Vous aviez initialement prévu un jury de sept personnes pour la cour d'assises de première instance, ce qui aurait constitué une vraie régression. En effet, l'équilibre entre le jury populaire et les magistrats aurait été totalement modifié puisque les magistrats professionnels auraient eu, dans les cours d'assises, un poids qu'ils n'avaient jamais eu jusque-là.

Fort heureusement, la commission mixte paritaire, avec beaucoup de sagesse, a rétabli un équilibre en portant à neuf en premier ressort et à douze en appel le nombre de jurés de la cour d'assises.

Sur le témoin assisté, vous souhaitez, avez-vous dit, que ce statut devienne le cas général. Je comprends bien cela, mais savez-vous ce que je pense ? Vous êtes en train de refaire exactement ce que vous avez fait en adoptant la loi du 4 janvier 1993, avec d'ailleurs les mêmes discours d'autosatisfaction. Reprenez les débats de 1992, madame Lazerges ! Vous y verrez que c'était aussi une réforme historique, un grand bond en avant, bref vous y retrouverez à l'identique les concerts d'autosatisfaction que nous avons entendus aujourd'hui.

Qu'avons-nous dit à l'époque ? Que vous aviez changé le vocabulaire, que l'inculpation devenait la mise en examen, mais qu'il serait aussi dévastateur, on le verrait, d'être mis en examen que d'être inculpé. Eh bien, je vous dis aujourd'hui : vous verrez, dans quelques années, pas longtemps, il sera aussi dévastateur d'être témoin assisté qu'aujourd'hui d'être mis en examen ou, hier, d'être inculpé !

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Quelle mauvaise foi !

M. Patrick Devedjian.

Car l'opprobre ne tient pas au vocabulaire, il tient à la procédure. Et la procédure, vous ne la changez pas ! Le témoin assisté sera donc aussi accablé demain que l'est aujourd'hui le mis en examen.

Encore une fausse réforme ! L'encadrement de la mise en détention provisoire, j'y suis favorable sur le principe. Mais cela revient évidemment à enserrer la machine judiciaire dans une mécanique qui a pour but de raccourcir les délais de fonctionnement. Or elle ne peut y parvenir, par défaut d'organisation. Car, malgré les promesses, malgré les discours, malgré l'autosatisfaction, on n'a toujours pas fait la réforme de la carte judiciaire. Et sans ce préalable, il n'est aucune réforme possible de la procédure pénale. Faute de ce préalable, votre réforme - cette étape, a dit quelqu'un, et c'est en effet une petite étape - ne sera pas plus une révolution que les précédentes. Tout dépend de la refonte de la carte judiciaire. Elle seule permettra à la machine judiciaire d'atteindre la productivité dont elle a besoin pour raccourcir les délais.

La libération conditionnelle, c'est bien.

M. Bernard Roman, président de la commission.

Alors votez pour !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

M. Patrick Devedjian.

C'est bien, mais c'est aussi une initiative, une grande initiative du Sénat !

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Non, c'est aussi une initiative de l'Assemblée nationale !

M. Patrick Devedjian.

Madame Lazerges, je vous ai entendue avec délices vous féciliter du retrait des dispositions relatives à la mise en détention en matière de presse. Vous avez bien raison, mais c'est un désaveu pour vous. J'ai encore entre les mains l'amendement dans lequel vous aviez prévu des peines de prison pour la récidive dans toutes les affaires de presse. Cet amendement porte votre nom et votre signature ! Vous l'avez retiré devant le tollé qu'il avait provoqué à la commission mixte paritaire. Alors, aujourd'hui, votre autocélébration a un côté Tartuffe ! En définitive, malgré ces discours, la montagne a accouché d'une souris. Mais soyons honnêtes : c'est une souris blanche, un charmant petit animal qui a le droit de vivre et qu'il faut plutôt protéger ! (Sourires.)

Car il y a dans ce texte, par ci, par là, presque par hasard, quelques progrès sensibles sur lesquels il ne faut pas cracher.

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Le hasard fait bien les choses !

M. Patrick Devedjian.

Ainsi, je le dis loyalement, j'app récie beaucoup l'amélioration de la procédure à l'audience. C'est un progrès. Historiquement, puisque vous faites appel à l'histoire,...

M. Jean-Pierre Pernot.

Vous voyez, vous le reconnaissez vous-même !

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Il faut consigner précieusement ces propos !

M. Patrick Devedjian.

... ce qui restera de plus important dans ce texte, c'est peut-être même le renforcement du contradictoire à l'audience.

Pour le reste, si vous aviez été plus modestes, si vous aviez reconnu que, face à tous les conservatismes, à toutes les difficultés, et puis face aux échéances électorales qui s'approchent, vous n'aviez ni le courage ni la volonté de faire toutes les réformes nécessaires et attendues, pour être simplement à parité européenne - car nous sommes en retard, mon Dieu ! -, pour le reste, on aurait pu vous suivre et voter avec vous ce texte qui représente un petit progrès, je l'ai dit, qui est une souris blanche...

M. Jean-Pierre Pernot.

Pourquoi pas verte !

M. Patrick Devedjian.

... un charmant animal accouché d'une énorme montagne. Mais, vraiment, nous ne pouvons pas cautionner la satisfaction ampoulée de vousmêmes que vous répétez à satiété et qui nous conduira à nous abstenir, avec l'ensemble de l'opposition !

M. André Gerin.

Quelle dérision !

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Oui, quelle dérision !

M. Patrick Devedjian.

C'est bien vrai !

M. Jean-Pierre Pernot.

Vous n'avez pas changé depuis 1993 !

M. Patrick Devedjian.

Je comprends que ces vérités vous dérangent !

M. le président.

La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, quoi qu'en dise l'orateur précédent, ce texte est un beau texte. Pour moi c'est, en quelque sorte, une symphonie avec deux bémols.

M. Patrick Devedjian.

Deux canards !

M. Alain Tourret.

Premier bémol : l'absence de l'avocat lors de la garde à vue.

Je pense que nous n'avons pas été assez audacieux. Les avocats étaient prêts à faire ce geste. C'était la meilleure des garanties. Et la présence d'un homme vaut toujours mieux que n'importe quelle technique que l'on peut mettre au point. C'était aussi l'occasion de mettre à égalité la procédure devant le juge d'instruction et la procédure devant l'officier de police judiciaire. Voilà une réforme qui aurait été acceptée par tout le monde si nous l'avions osée. Mais j'ai été battu sur ce point, et je le regrette.

Je tiens rappeler pour l'histoire, pour la petite histoire, que cela s'est fait à six voix contre quatre, au moment où un sénateur s'était retiré pour je ne sais quelle affaire, ce qui m'a empêché de voter. Voilà comment, à cause d'une absence de quelques minutes d'un des membres de la commission mixte paritaire, une grande réforme a été écartée.

M. Patrick Devedjian.

Ce que c'est que l'histoire !

M. Alain Tourret.

Le Journal officiel le rappellera et permettra ainsi, sans doute, de réparer cette bavure dans les années qui viennent.

Le deuxième bémol s'applique à l'appel des décisions des cours d'assises.

C'est une très grande réforme, et Frédérique Bredin a eu raison de le souligner. En revanche, à mon sens, l'appel du parquet ne pouvait être qu'un appel incident, et je ne pense pas que ce soit une bonne chose que l'on ait permis un appel principal. Car je vois très bien ce qui va se passer. Supposons un parquetier qui réclame huit ans et qui en obtient six : il n'est pas content et il fait appel. On se retrouve alors devant une deuxième cour d'assises où les jurés sont plus nombreux qu'en premier ressort et qui, nécessairement, sera plus répressive que la première. Car plus il y a de jurés, plus c'est répressif.

M. Patrick Devedjian.

Curieuse vision du jury populaire !

M. Alain Tourret.

Moins il y a de jurés, moins c'est répressif, les magistrats étant, nous le savons tous, moins répressifs que les jurés. Et voilà un condamné qui va se retrouver avec quinze ans au lieu de six à la suite de l'appel du parquet ! Cela me choque profondément. Pour moi, l'appel, c'était une deuxième chance ouverte au condamné. Avec naturellement la possibilité, pour le parquet, d'un appel incident mais certainement pas principal. Nous en avons décidé autrement sous, si je puis dire, les conseils d'un des nôtres qui eut une place éminente dans cette assemblée. Mais je le regrette profondément.

En dehors de ces deux bémols, comment ne pas souligner mon immense satisfaction ? D'abord, pour la qualité du travail qui a été fait. J'aurai l'immodestie de rappeler qu'il y avait à l'origine une proposition de loi des radicaux de gauche que vous avez combattue avec férocité, monsieur Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

Et comment !

Mme Christine Lazerges, rapporteuse, et M. Bernard Roman, président de la commission.

Il est féroce ! (Sourires.)

M. Alain Tourret.

Féroce, oui, car s'il y en a un qui a changé, c'est bien vous !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

M. Patrick Devedjian.

J'assume !

M. Alain Tourret.

Vous assumez, c'est vrai, car vous m'avez dit sans hésiter : « Effectivement, nous avons changé ! » Mais moi, je me rappelle ce que vous m'avez

« passé » lorsque j'étais le rapporteur du texte sur la détention provisoire,...

M. Patrick Devedjian.

C'était mérité !

M. Alain Tourret.

... me traitant de laxiste impénitent...

M. Patrick Devedjian.

C'était justifié !

M. Alain Tourret.

... qui voulait libérer tout le monde et presque mettre en péril les bases de la République ! Sur les seuils, j'ai relu tous les reproches que vous m'avez adressés et je vois que, quelque temps après, vous avez suivi tout ce que j'avais proposé. Car, après tout, c ette immense satisfaction que j'éprouve, elle tient d'abord à l'élévation des seuils, qui empêchera de mettre en détention provisoire pour des délits somme toute mineurs un grand nombre de prévenus.

Pour la première fois, sur la proposition que j'avais faite, on a distingué les infractions contre les biens et les infractions contre les personnes. Je rappelle qu'auparavant on distinguait les infractions en flagrant délit et les autres.

Cette modification radicale de l'esprit de la procédure a consacré ce jugement de bon sens qu'il est plus grave de porter atteinte aux personnes qu'aux biens.

L'abandon des anciens seuils, c'est une réforme essentielle : grâce à elle, au mois de juin, 5 000 personnes actuellement en détention provisoire vont sortir de prison. Ce n'est pas rien ! Les dates butoirs figuraient aussi dans notre proposition de loi. Nous avons été les premiers à les proposer.

Là encore, je m'en félicite.

De même pour la prise en compte de la situation des pères et mères de famille. L'Assemblée avait adopté à l'unanimité cette proposition qui valait tant pour la détention provisoire que pour les condamnations. J'avais rendu la règle obligatoire mais, à la suite des observations des sénateurs et sacrifiant à la volonté d'unanimisme qui était la nôtre en commission mixte paritaire, nous en avons fait une simple faculté. Ce sera déjà un grand pas.

Pour la première fois, on ne pourra plus mettre en détention provisoire le père ou la mère d'un enfant de moins de dix ans sur lequel il exerce l'autorité parentale et qui vit chez lui, sans avoir pris au préalable l'avis d'une commission. Cette prise en compte de l'intérêt des enfants dans le régime de la détention provisoire me semble un immense progrès.

C'est aussi l'extension des pouvoirs du juge d'application des peines, qui pourra désormais accorder la libération conditionnelle au condamné père ou mère d'un enfant de moins de dix ans, lorsque soit la peine prononcée, soit la durée de la détention restant à subir, n'excède pas quatre ans. Cette mesure, que j'avais tirée de la loi italienne, m'apparaît aussi excellente.

Quant à l'indemnisation, elle revêt deux formes.

Elle est destinée d'abord à tous ceux qui ont fait de la détention provisoire et qui bénéficient, si l'on peut dire, d'une décision de relaxe, d'acquittement ou de non-lieu.

Sur les 1 700 à 2 000 personnes concernées chaque année, 45 indemnisations seulement étaient accordées. La proposition de loi que j'avais fait adopter en avril 1998 tendait déjà, dans un article dont j'avais rédigé le texte en accord avec Jean-Denis Bredin, à rendre cette indemnisation obligatoire.

L'autre forme d'indemnisation porte sur les frais de justice, et je me félicite, madame la garde des sceaux, que vous m'ayez écouté à ce sujet, car la décision n'était pas facile à prendre.

Pour la première fois, toute personne poursuivie devant un tribunal de police, un tribunal correctionnel, une cour d'assises ou devant un juge d'instruction et qui sera relaxée aura la possibilité, par décision du tribunal, d'être indemnisée des frais irrépétibles qu'elle aura engagés. Sur cinquante affaires jugées, il y a toujours, quelle que soit la juridiction, trois, quatre ou cinq relaxes qui sont prononcées. Or certaines de ces personnes, nous le savons, peuvent avoir été poursuivies pendant trois, cinq ou même sept ans et elles ont alors dépensé des sommes folles en frais de justice. Jusqu'à présent, elles ne pouvaient même pas être remboursées du premier franc. On mesure l'ampleur du progrès accompli.

Permettez-moi, avant de conclure, et sans insister sur tous les autres aspects positifs qui ont déjà été soulignés, de vous livrer une dernière réflexion.

Après cette belle loi - eh oui, messieurs, il ne faut pas mégoter son plaisir ! - nous devons maintenant réfléchir à la dépénalisation. Madame la garde des sceaux, je vous ai souvent entretenue de ce problème auquel le Gouvernement doit absolument s'atteler. Actuellement, nous ne savons même plus combien il existe d'infractions. Est-ce 10 000, 12 000, 14 000, 15 000 ? Nous en ignorons le nombre. Et elles ne sont même pas dans les codes ! Il faut donc réfléchir à la dépénalisation par désuétude, pour des textes qui n'existent plus en fait, qui ne sont plus appliqués ! Il faut aussi réfléchir à l'harmonisation nécessaire avec ce qui se fait en deçà et au-delà des Pyrénées, comme on disait jadis, c'est-à-dire avec le droit pénal européen. Il est absolument nécessaire de reconcentrer les infractions, de les ramener à 300 ou 400, ce qui serait raisonnable. Mais 14 000, cela ne veut plus rien dire ! D'autant que tous les textes spéciaux, on le sait bien, sont extrêmement répressifs, ne correspondent plus à rien et permettent d'engager n'importe quelles poursuites. Comment ferez-vous, madame la garde des sceaux, quand vous adresserez aux procureurs vos directives générales de procédure, alors qu'ils auront toujours à leur disposition ces textes spéciaux qui leur permettront de poursuivre comme ils l'entendent, des textes inconnus de tout le monde au demeurant ? Comment peut-on affirmer que nul ne peut ignorer la loi alors même que les plus grands spécialistes ignorent tout de ces sanctions pénales éparpillées dans la législation. Vous me répondrez qu'il y a des tas de répertoires à la Chancellerie. J'ai essayé de me faire communiquer ces textes ; je n'ai jamais pu les obtenir ! Je conclurai en associant à l'oeuvre que nous avons accomplie tous ceux qui ont véritablement travaillé dans le sens du bien commun et de l'intérêt général : la commission, bien sûr, son rapporteur, sa présidente puis son président, la Chancellerie et vous tous, mes chers collègues, qui vous êtes passionnés pour ces débats et qui, sur tous les bancs, avez donné le meilleur de vous-mêmes pour que ce texte aboutisse. Je suis fier, ce soir, d'être député ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Floch.

M. Jacques Floch.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, j'ai bien aimé l'argumentation de Patrick Devedjian. Il nous a fait une belle crise de jalousie ! (Sourires.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

« Pourquoi, une fois encore, est-ce la gauche qui propose, qui discute, qui accepte une grande réforme de notre droit pénal ? Pourquoi pas nous ? » C'est ce que j'ai cru vous entendre dire, monsieur Devedjian, du haut de cette tribune.

Pourquoi, en effet ? Vous pouviez le faire entre 1993 et 1997 ; vous ne l'avez pas fait. A l'époque, vous avez même refusé tous les amendements que la gauche avait proposés et qu'on retrouve en partie dans ce projet de loi.

Vous n'allez pas le voter, mais vous allez vous abstenir.

Et quand on est comme vous un éminent représentant de l'opposition, s'abstenir sur un texte signifie qu'il ne fait pas de mal et qu'on peut le prendre en considération.

Alors, beau joueur comme vous l'êtes, dites-nous un grand merci !

M. Patrick Devedjian.

Pas la peine ! Vous vous le dites vous-mêmes !

M. Jacques Floch.

La grande qualité des interventions précédentes m'autorise à ne pas en rajouter, madame la garde des sceaux, mais cette loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, pourvu qu'on se donne les moyens humains et matériels de l'appliquer loyalement, entrera dans l'histoire judiciaire, dans l'histoire de la République, au même titre que les grandes réformes de la fin du

XIXe siècle.

Rappelez-vous la loi sur le sursis défendue par Bérenger, adoptée le 26 mars 1891 ; la loi sur la présence de l'avocat dans le cabinet du juge défendue par Constans, adoptée le 12 novembre 1897 ; mais aussi la loi sur la réhabilitation ou la loi sur la révision des procès pour faits nouveaux découverts après jugement, celle-ci étant toujours très difficile d'application puisque s'opposant au principe de la chose jugée : on le voit pour la malheureuse affaire qui secoue toujours la Bretagne, l'affaire Seznec.

Ces grandes lois, cependant, ne doivent pas faireo ublier les législations spéciales et scélérates de la

IIIe République, dont le but était de contrecarrer la montée du syndicalisme et des forces sociales, assimilés par certains magistrats à l'anarchie particulièrement violente de la fin du

XIXe siècle et du début du XXe . Ce qui avait autorisé Jean Jaurès à écrire, le 6 juin 1895, dans La Dépêche de Toulouse : « Ah ! quelle prostituée que la justice ! » Le grand Jaurès avait tort. Ce n'était pas la justice en tant que corps de l'Etat qui était responsable, c'était le législateur de l'époque.

Cela n'a pas changé. Un siècle plus tard, c'est nous, législateurs, qui sommes et devons être responsables du fonctionnement de l'esprit républicain de la justice. Nous n'avons pas encore notre compte parce que, depuis des années, nous avons été incapables de réformer en profondeur cette grande et indispensable institution. Incapables de faire front à tous les corporatismes, à tous les conservatismes qui règnent dans ce milieu particulier. Incapables de résister aux pressions médiatiques mais aussi d'assumer complètement l'indépendance du juge en lui proposant une prise de responsabilité que son rôle rend indispensable.

Le débat entre l'institution judiciaire et le pouvoir politique est faussé par cette simple question : doit-il y avoir débat ? Oui, mais pas entre deux mondes qui ont défini par avance leurs rôles. Le débat sur la justice doit être un débat public, un grand débat de société avec et pour l'ensemble des citoyens, tout simplement parce que la justice leur appartient.

A cet égard, je me réjouis que l'opposition s'apprête à ouvrir un grand débat sur la justice. Nous attendons avec intérêt les propositions qui en sortiront. Et je le dis sans sourire tant il est vrai qu'il appartient à chacune des forces politiques de notre pays de se préoccuper de cet important problème.

Demander aux juges comment ils conçoivent leur rôle est nécessaire. Mais ils ne sauraient être les seuls à définir ce rôle ; d'autres doivent y participer. On ne peut demander aux juges de définir les procédures, les mécanismes du fonctionnement de la justice qu'à titre consultatif. C'est à vous, madame la garde des sceaux, au titre du pouvoir exécutif, et à nous, en qualité de législateurs, qu'il appartient d'en décider. Voilà pourquoi tous les citoyens de ce pays doivent examiner de très près les propositions que nous examinons aujourd'hui. En effet, nous devons, les uns et les autres, en avoir assez d'entendre dire qu'il faut une justice plus proche des citoyens. Alors, ouvrons largement les cours et les tribunaux, multiplions les maisons de justice et du droit ! Nous devons aussi en avoir assez d'entendre dire qu'il nous faut une justice impartiale et respectueuse du principe de l'égalité des citoyens devant la loi. Que cette phrase puisse être prononcée, en France, pays des droits de l'homme et du citoyen, en dit long sur les dérives de la justice et sur la vision qu'en a le citoyen ordinaire. Elle ne serait pas impartiale, elle ne serait pas respectueuse de l'égalité, elle serait coûteuse, inaccessible aux plus démunis, aux moins fortunés, nous dit-on.

Ces remarques, Mme la garde des sceaux, ont seulement pour but de vous assurer que l'on peut ici, dans cette Assemblée, marcher à vos côtés, chacun à sa place, pour travailler à ces grands projets nécessaires de réforme.

Celui dont nous traitons aujourd'hui vous permettra d'avoir votre place dans l'histoire de la justice républicaine. C'est incontestable et ce sera mérité.

Certes, et comme l'a dit Frédérique Bredin, nous aurions voulu aller plus loin. C'est toujours ce que l'on dit lorsqu'on a le sentiment de ne pas avoir terminé sa tâche. Mais les progrès sont incontestables. Ils le sont tellement que les reproches pleuvent déjà. Ils sont sévères et injustes. La plupart émanent de ce qu'il y a plus de archaïque et de plus conservateur, c'est-à-dire de tous ceux qui sont incapables d'imaginer la moindre réforme.

Ainsi, il est particulièrement inadmissible de lire dans un document largement diffusé, cosigné par l'Association des magistrats instructeurs - heureusement minoritaire chez ceux qui occupent cette fonction -, et par les représentants d'un syndicat minoritaire de policiers que nous, législateurs, députés et sénateurs, allons voter une loi visant à favoriser la délinquance. Peut-on demander à ces pseudo-responsables d'apprendre simplement à lire et à comprendre ce qu'ils lisent ? Madame la garde des sceaux, le groupe socialiste, et notamment ceux de ses membres qui siègent à la commission des lois, n'ont pas ménagé leurs efforts. Ils n'ont pas voulu non plus être plus réservés qu'il ne le fallait. Leur souci d'aboutir à un bon résultat en commission mixte paritaire a obligé plusieurs d'entre eux à modérer fortement leurs ambitions. Je suis de ceux-là. Ils l'ont fait parce qu'ils sont responsables, mais ils sauront être exigeants sur la manière dont sera appliquée la loi.

C'est notre métier, c'est notre travail ordinaire.

Puisque j'ai l'honneur d'être rapporteur pour avis du budget de l'institution judiciaire, je regarderai de très près - avec Patrick Devedjian, lui-même rapporteur de la commission des finances - quels moyens le Gouverne-


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ment proposera pour permettre à cette loi d'entrer dans les faits. L'ensemble des réformes que vous nous avez soumises depuis trois ans, commencent, en effet, à peser sérieusement en termes budgétaires, même si l'on sait que tout cela doit se faire dans le temps. D'ici à 2004 ou 2005, il faudra bien que votre ministère soit doté de 4 à 5 milliards supplémentaires. En septembre prochain nous en reparlerons, et nous vous soutiendrons dans votre démarche auprès du ministre des finances.

M. Bernard Roman, président de la commission.

Très bien !

M. Jacques Floch.

Madame la garde des sceaux, Mme la rapporteuse, dont je salue le grand courage et le travail remarquable, a souvent souligné, rapproché, comparé vos propositions et les nôtres avec ce qui se passe dans les pays membres de l'Union européenne. Nous avons donc pu noter avec intérêt et souvent quelques craintes les différences, voire les grands écarts, qui existent entre les procédures : inégalités de traitements, multiples échelles de peines, particularismes. Bref, la construction européenne en matière de justice est très loin d'être acquise.

Certes, nos cultures dans ce domaine subissent le poids de nos histoires respectives, et nos manières de faire l'expliquent. Mais, au moment où la France va assurer la présidence de l'Union européenne, il m'apparaît indispensable que vous preniez des initiatives qui conduiront, demain, à un droit européen en matière pénale et civile.

Nous sommes prêts à vous apporter notre concours si vous le souhaitez. Comme nous sommes prêts à soumettre quelques idées qui permettraient aux différentes assemblées de prendre des initiatives communes.

D'ores et déjà, il nous faut envisager, dans le cadre de Schengen, d'améliorer notre capacité à instruire de façon plus globale tout ce qui concerne les trafics d'enfants, de femmes, d'hommes, les drogues, d'argent d'origine douteuse et le terrorisme. En la matière, il y a urgence, grande urgence.

Madame la garde des sceaux, vous pouvez être fière d'avoir proposé cette grande réforme. Malgré nos exigences et nos critiques, atténuées toutefois par la compréhension que vous avez manifestée à l'égard de nos soucis, nous sommes aujourd'hui satisfaits. Il ne nous reste plus qu'à poursuivre ce bon travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Avant de clore la discussion générale, je donne la parole à M. le président de la commission mixte paritaire, qui a souhaité intervenir.

M. Bernard Roman, président de la commission.

A vrai dire, monsieur le président, je n'avais pas prévu de prendre la parole mais les interventions de nos collègues de l'opposition m'ont conduit à le faire. Même si je sais que la politique s'éloigne quelquefois du rationnel, j'ai beaucoup de mal à comprendre leur position. Voilà, en effet, un texte qui a été élaboré à l'occasion de navettes f ructueuses entre l'Assemblée et le Sénat et d'une commission mixte paritaire à laquelle, messieurs de l'opposition, vous avez participé, un texte à l'élaboration duquel vous avez activement contribué, un texte que vous avez unanimement voté il y a cinq jours. Dans ces conditions, comment pouvez-vous aujourd'hui prendre la responsabilité, devant l'opinion et la représentation nationale, de revenir sur votre adhésion à ce texte historique, et décider de vous abstenir ? J'avoue que je ne comprends pas.

D'un projet de loi que certains jugeaient timide, notamment sur vos bancs, l'Assemblée nationale et le Sénat, par le jeu de la navette parlementaire, sont parvenus à bâtir - je le dis sincèrement et sans aucune arrièrepensée - une grande réforme pénale qui devrait rester dans l'histoire, ne serait-ce, et le terme n'est pas de moi, qu'en raison de l'institution d'un appel des décisions des cours d'assises. En outre, et ainsi que cela a été souligné par la rapporteuse et la ministre, le travail conjoint des deux assemblées a pu être conduit dans les meilleures conditions, grâce, d'ailleurs, à la collaboration constructive du Gouvernement.

Aujourd'hui, alors qu'à la suite des navettes le texte a été enrichi, que nous pris en compte les propositions des uns et des autres, lesquelles dépassaient d'ailleurs souvent les clivages traditionnels de cette Assemblée, vous nous dites : « Cette réforme est frustrante, faites-la sans nous ! » C'est incompréhensible. Mais, puisque vous en décidez ainsi, vous en prendrez la responsabilité. Ayez bien conscience, toutefois, que vous passez à côté de la signature potentielle d'avancées considérables de la procédure pénale.

A cet égard, alors que l'on a beaucoup mis l'accent sur la présomption d'innocence, on a fini par oublier les dispositions prises en faveur des victimes. J'en rappelle certaines. La protection du droit des victimes figurera désorm ais en tête de l'article préliminaire du code de procédure pénale qui énumère les principes directeurs du procès pénal, avant les droits des personnes poursuivies.

Vous n'allez pas voter cette disposition.

L'information des victimes, trop longtemps négligée par la police comme par la justice, sera obligatoire à tous les stades de la procédure. Vous n'allez pas voter cette disposition.

Le rôle des associations d'aide aux victimes sera dorénavant officiellement consacré dans le code de procédure pénale. Vous n'allez pas voter cette disposition.

La publication de photos portant atteinte à la dignité des victimes d'un crime ou d'un délit sera désormais pénalement sanctionnée. Vous n'allez pas voter cette disposition.

M. Patrick Devedjian.

Nous allons même voter contre !

M. Bernard Roman, président de la commission.

Parmi les dispositions renforçant la présomption d'innocence, il faut noter la présence de l'avocat que vous réclamiez à cor et à cri. Nous l'avons acceptée à la première, à la vingtième et à la trente-sixième heure. Vous n'allez pas voter cette disposition.

Les critères de la mise en examen ont été durcis. Mais vous n'allez pas non plus voter cette disposition.

M. Patrick Devedjian.

Vous n'avez pas bien compris : ils ont été ouverts !

M. Bernard Roman, président de la commission.

De nouveaux seuils d'emprisonnement ont été retenus pour le placement en détention provisoire. Vous n'allez pas voter cette disposition.

Dans le même esprit, nous avons étendu le système du bracelet électronique - M. Floch vient de l'évoquer - aux personnes susceptibles d'être placées en détention provisoire. Vous n'allez pas non plus voter cette disposition.

Quant à la réforme principale de ce texte, qui restera certainement l'appel des décisions de cours d'assises, disposition qui met fin à près de deux siècles d'une tradition interdisant toute contestation sur le fond d'un jugement criminel, en vertu du principe selon lequel le jury souve-


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rain ne saurait être faillible, vous n'allez pas non plus la voter ce soir après l'avoir pourtant, là aussi, réclamée à cor et à cri pendant des années et des années.

Ainsi, vous n'allez pas approuver ce soir un texte que vous avez voté il y a quelques jours en commission mixte paritaire. Comprenne qui pourra ! Nous, nous avons le sentiment de servir une grande ambition. Nous allons donc voter ce texte historique avec une grande fierté.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Patrick Devedjian.

Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président.

Monsieur Devedjian, je comprends que vous souhaitiez intervenir, la discussion ayant été en quelque sorte relancée par le président de la commission qui peut prendre la parole à tout moment et qui a usé de ce droit, alors que tous les orateurs s'étaient exprimés. Je ne peux toutefois vous donner la parole à ce stade du débat. Vous pourrez intervenir dans le cadre des explications de vote.

La discussion générale est close.

Texte de la commission mixte paritaire

M. le président.

Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire :

« Art.

1er . - Il est inséré, en tête du code de procédure pénale, un article préliminaire ainsi rédigé :

« Art.

préliminaire. I. La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties.

« Elle doit garantir la séparation des autorités chargées de l'action publique et des autorités de jugement.

« Les personnes se trouvant dans des conditions semblables et poursuivies pour les mêmes infractions doivent être jugées selon les mêmes règles.

« II. L'autorité judiciaire veille à l'information et à la garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale.

« III. Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été établie. Les atteintes à sa présomption d'innocence sont prévenues, réparées et réprimées dans les conditions prévues par la loi.

« Elle a le droit d'être informée des charges retenues contre elle et d'être assistée d'un défenseur.

« Les mesures de contraintes dont cette personne peut faire l'objet sont prises sur décision ou sous le contrôle effectif de l'autorité judiciaire. Elles doivent être strictement limitées aux nécessités de la procédure, proportionnées à la gravité de l'infraction reprochée et ne pas porter atteinte à la dignité de la personne.

« Il doit être définitivement statué sur l'accusation dont cette personne fait l'objet dans un délai raisonnable.

« Toute personne condamnée a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction. »

....................................................................

TITRE Ier

DISPOSITIONS RENFORÇANT LA PROTECTION DE LA PRÉSOMPTION D'INNOCENCE C HAPITRE Ier Dispositions renforçant les droits de la défense et le respect du caractère contradictoire de la procédure Section 1 Dispositions relatives à la garde à vue

....................................................................

« Art.

2 DA. - Après l'article 63-4 du code de procédure pénale, est inséré un article 63-5 ainsi rédigé :

« Art.

63-5. Lorsqu'il est indispensable pour les nécessités de l'enquête de procéder à des investigations corporelles internes sur une personne gardée à vue, celles-ci ne peuvent être réalisées que par un médecin requis à cet effet. »

« Art.

2 D. - I. Dans le premier alinéa de l'article 63-1 du même code, après les mots : "agent de police judiciaire, ", sont insérés les mots : "de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête, ". »

« II. Le premier alinéa du même article est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article 77-2 sont également portées à sa connaissance. »

....................................................................

« Art.

2 bis A. - Supprimé. »

....................................................................

« Art.

2 ter . - L'article 4 de l'ordonnance no 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est complété par un VI ainsi rédigé :

« VI. Les interrogatoires des mineurs placés en garde à vue visés à l'article 64 du code de procédure pénale font l'objet d'un enregistrement audiovisuel.

« L'enregistrement original est placé sous scellés et sa copie est versée au dossier.

« L'enregistrement ne peut être visionné qu'avant l'audience de jugement, en cas de contestation du contenu du procès-verbal d'interrogatoire, sur décision, selon le cas, du juge d'instruction ou du juge des enfants saisi par l'une des parties. Les huit derniers alinéas de l'article 114 ne sont pas applicables.

« Le fait, pour toute personne, de diffuser un enregistrement original ou une copie réalisée en application du présent article est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende.

« A l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de la date de l'extinction de l'action publique, l'enregistrement original et sa copie sont détruits dans le délai d'un mois. »

Section 1 bis Dispositions relatives au contrôle de l'autorité judiciaire sur la police judiciaire

« Art.

2 quater A. - Après l'article 75 du code de procédure pénale, sont insérés deux articles 75-1 et 75-2 ainsi rédigés :

« Art.

75-1. Lorsqu'il donne instruction aux officiers de police judiciaire de procéder à une enquête préliminaire, le procureur de la République fixe le délai dans lequel cette enquête doit être effectuée. Il peut le proroger au vu des justifications fournies par les enquêteurs.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

« Lorsque l'enquête est menée d'office, les officiers de police judiciaire rendent compte au procureur de la République de son état d'avancement lorsqu'elle est commencée depuis plus de six mois.

« Art.

75-2. L'officier de police judiciaire qui mène une enquête préliminaire concernant un crime ou un délit avise le procureur de la République dès qu'une personne à l'encontre de laquelle existent des indices faisant présumer qu'elle a commis ou tenté de commettre l'infraction est identifiée. »

« Art.

2 quater B. L'article 227 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette décision prend effet immédiatement. »

« Art.

2 quater Après l'article 15-1 du même code, il est inséré un article 15-2 ainsi rédigé :

« Art.

15-2. Les enquêtes administratives relatives au comportement d'un officier ou d'un agent de police judiciaire dans l'exercice d'une mission de police judiciaire associent l'inspection générale des services judiciaires au service d'enquête compétent. Elles peuvent être ordonnées par le ministre de la justice et sont alors dirigées par un magistrat. »

Section 2 Dispositions relatives à la désignation de l'avocat au cours de l'instruction

« Art.

3. I. L'article 115 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la personne mise en examen est détenue, le choix de son avocat peut résulter d'un courrier adressé par cette personne à celui-ci et le désignant pour assurer sa défense : une copie de ce courrier doit être remise par l'avocat, en tout ou partie, au cabinet du juge d'instruction. La personne mise en examen doit confirmer ce choix au juge d'instruction dans les quinze jours. Ce délai ne fait pas obstacle à la libre communication du dossier à l'avocat. »

« II. Supprimé. »

Section 2 bis Dispositions relatives aux modalités de mise en examen

« Art.

3 bis L'article 80-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

80-1. A peine de nullité, le juge d'instruction ne peut mettre en examen que les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi.

« Il ne peut procéder à cette mise en examen qu'après avoir préalablement entendu les observations de la personne ou l'avoir mise en mesure de les faire, en étant assistée par son avocat, soit dans les conditions prévues par l'article 116 relatif à l'interrogatoire de première comparution, soit en tant que témoin assisté conformément aux dispositions des articles 113-1 à 113-8.

« Le juge d'instruction ne peut procéder à la mise en examen de la personne que s'il estime ne pas pouvoir recourir à la procédure de témoin assisté. »

« Art.

3 ter A. Supprimé. »

« Art.

3 ter I. L'article 80-2 du même code est ainsi rétabli :

« Art.

80-2. Le juge d'instruction peut informer une personne par lettre recommandée qu'elle est convoquée, dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours ni supérieur à un mois, pour qu'il soit procédé à sa première comparution dans les conditions prévues par l'article 116. Cette lettre indique la date et l'heure de la convocation. Elle donne connaissance à la personne de chacun des faits dont ce magistrat est saisi et pour lesquels la mise en examen est envisagée, tout en précisant leur qualification juridique. Elle fait connaître à la personne qu'elle a le droit de choisir un avocat ou de demander qu'il lui en soit désigné un d'office, ce choix ou cette demande devant être adressé au greffe du juge d'instruction. Elle précise que la mise en examen ne pourra intervenir qu'à l'issue de la première comparution de la personne devant le juge d'instruction.

« Le juge d'instruction peut également faire notifier cette convocation par un officier de police judiciaire.

Cette notification comprend les mentions prévues à l'alinéa précédent ; elle est constatée par un procès-verbal signé par la personne qui en reçoit copie.

« L'avocat choisi ou désigné est convoqué dans les conditions prévues par l'article 114 ; il a accès au dossier de la procédure dans les conditions prévues par cet article. »

« II. L'article 116-1 du même code est abrogé. »

Section 3 Dispositions étendant les droits des parties au cours de l'instruction

....................................................................

« Art.

4 ter A. L'article 116 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art.

116. Lorsqu'il envisage de mettre en examen une personne qui n'a pas déjà été entendue comme témoin assisté, le juge d'instruction procède à sa première comparution selon les modalités prévues par le présent article.

« Le juge d'instruction constate l'identité de la personne et lui fait connaître expressément, en précisant leur qualification juridique, chacun des faits dont il est saisi et pour lesquels la mise en examen est envisagée. Mention de ces faits et de leur qualification juridique est portée au procès-verbal.

« Lorsqu'il a été fait application des dispositions de l'article 80-2 et que la personne est assistée d'un avocat, le juge d'instruction procède à son interrogatoire ; l'avocat de la personne peut présenter ses observations au juge d'instruction.

« Dans les autres cas, le juge d'instruction avise la personne de son droit de choisir un avocat ou de demander qu'il lui en soit désigné un d'office. L'avocat choisi ou, dans le cas d'une demande de commission d'office, le bâtonnier de l'ordre des avocats en est informé par tout moyen et sans délai. Si l'avocat choisi ne peut être contacté ou ne peut se déplacer, la personne est avisée de son droit de demander qu'il lui en soit désigné un d'office pour l'assister au cours de la première comparution.

L'avocat peut consulter sur-le-champ le dossier et communiquer librement avec la personne. Le juge d'instruction avertit ensuite la personne qu'elle a le choix soit de se taire, soit de faire des déclarations, soit d'être interrogée. Mention de cet avertissement est faite au procès-


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verbal. L'accord pour être interrogé ne peut être donné qu'en présence d'un avocat. L'avocat de la personne peut également présenter ses observations au juge d'instruction.

« Après avoir, le cas échéant, recueilli les déclarations de la personne ou procédé à son interrogatoire et entendu les observations de son avocat, le juge d'instruction lui notifie :

« - soit qu'elle n'est pas mise en examen ; le juge d'instruction informe alors la personne qu'elle bénéficie des droits du témoin assisté ;

« - soit qu'elle est mise en examen ; le juge d'instruction porte alors à la connaissance de la personne les faits ou la qualification juridique des faits qui lui sont reprochés, si ces faits ou ces qualifications diffèrent de ceux qui lui ont déjà été notifiés ; il l'informe de ses droits de formuler des demandes d'actes ou des requêtes en annulation sur le fondement des articles 81, 82-1, 82-2, 156 et 173 durant le déroulement de l'information et au plus tard le vingtième jour suivant l'avis prévu par le dernier alinéa de l'article 175, sous réserve des dispositions de l'article 173-1.

« S'il estime que le délai prévisible d'achèvement de l'information est inférieur à un an en matière correctionnelle ou à dix-huit mois en matière criminelle, le juge d'instruction donne connaissance de ce délai prévisible à la personne et l'avise qu'à l'expiration dudit délai, elle pourra demander la clôture de la procédure en application des dispositions de l'article 175-1. Dans le cas contraire, il indique à la personne qu'elle pourra demander, en application de ce même article, la clôture de la procédure à l'expiration d'un délai d'un an en matière correctionnelle ou de dix-huit mois en matière criminelle.

« A l'issue de la première comparution, la personne doit déclarer au juge d'instruction son adresse permanente. Elle peut toutefois lui substituer l'adresse d'un tiers chargé de recevoir les actes qui lui sont destinés si elle produit l'accord de ce dernier. L'adresse déclarée doit être située, si l'information se déroule en métropole, dans un département métropolitain ou, si l'information se déroule dans un département d'outre-mer, dans ce département. Cette déclaration est faite devant le juge des libertés et de la détention lorsque ce magistrat, saisi par le juge d'instruction, décide de ne pas placer la personne en détention.

« La personne est avisée qu'elle doit signaler au juge d'instruction jusqu'au règlement de l'information, par nouvelle déclaration ou par lettre recommandée avec d emande d'avis de réception, tout changement de l'adresse déclarée. Elle est également avisée que toute notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée sera réputée faite à sa personne. Mention de cet avis, ainsi que de la déclaration d'adresse, est portée au procès-verbal. Ces avis sont donnés par le juge des libertés et de la détention lorsque celui-ci décide de ne pas placer la personne en détention. »

« Art.

4 ter Supprimé. »

« Art.

4 quater A. Supprimé. »

....................................................................

« Art.

5 ter A. Après l'article 174 du même code, il est inséré un article 174-1 ainsi rédigé :

« Art.

174-1. Lorsque la chambre de l'instruction annule une mise en examen pour violation des dispositions de l'article 80-1, la personne est considérée comme témoin assisté à compter de son interrogatoire de première comparution et pour l'ensemble de ses interrogatoires ultérieurs, jusqu'à l'issue de l'information, sous réserve des dispositions des articles 113-6 et 113-8. »

....................................................................

Section 4 Dispositions relatives au témoin et au témoin assisté

....................................................................

« Art.

6 bis I. Après les mots : "force publique", la fin du troisième alinéa de l'article 109 du code de procédure pénale est supprimée.

« II. Dans le quatrième alinéa de l'article 186 du même code, les mots : "ou du témoin condamné en application de l'article 109" sont supprimés.

« III. Après l'article 434-15 du code pénal, il est inséré un article 434-15-1 ainsi rédigé :

« Art.

434-15-1. - Le fait de ne pas comparaître, sans excuse ni justification, devant le juge d'instruction par une personne qui a été citée par lui pour y être entendue comme témoin est puni de 25 000 francs d'amende. »

« Art.

7. Après l'article 113 du code de procédure pénale, il est inséré une sous-section 2 ainsi rédigée :

« Sous-section 2.

« Du témoin assisté.

« Art.

113-1. Toute personne nommément visée par un réquisitoire introductif et qui n'est pas mise en examen ne peut être entendue que comme témoin assisté.

« Art.

113-2. Toute personne nommément visée par une plainte ou mise en cause par la victime peut être entendue comme témoin assisté. Lorsqu'elle comparaît devant le juge d'instruction, elle est obligatoirement entendue en cette qualité si elle en fait la demande.

« Toute personne mise en cause par un témoin ou contre laquelle il existe des indices rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont le juge d'instruction est saisi peut être entendue comme témoin assisté.

« Art.

113-3. Le témoin assisté bénéficie du droit d'être assisté par un avocat qui est avisé préalablement des auditions et a accès au dossier de la procédure, conformément aux dispositions des articles 114 et 114-1.

Il peut également demander au juge d'instruction, selon les modalités prévues par l'article 82-1, à être confronté avec la ou les personnes qui le mettent en cause. Cet avocat est choisi par le témoin assisté ou désigné d'office par le bâtonnier si l'intéressé en fait la demande.

« Lors de sa première audition comme témoin assisté, la personne est informée de ses droits par le juge d'instruction.

« Art.

113-4. Lors de la première audition du témoin assisté, le juge d'instruction constate son identité, lui donne connaissance du réquisitoire introductif, de la plainte ou de la dénonciation, l'informe de ses droits et procède aux formalités prévues aux deux derniers alinéas de l'article 116. Mention de cette information est faite au procès-verbal.

« Le juge d'instruction peut, par l'envoi d'une lettre recommandée, faire connaître à une personne qu'elle sera entendue en qualité de témoin assisté. Cette lettre comporte les informations prévues à l'alinéa précédent.

Elle précise que le nom de l'avocat choisi ou la demande de désignation d'un avocat commis d'office doit être communiqué au greffier du juge d'instruction.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

« Art.

113-5. Le témoin assisté ne peut être placé sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire, ni faire l'objet d'une ordonnance de renvoi ou de mise en accusation.

« Art.

113-6. A tout moment de la procédure, le témoin assisté peut, à l'occasion de son audition ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, demander au juge d'instruction à être mis en examen ; la personne est alors considérée comme mise en examen et elle bénéficie de l'ensemble des droits de la défense dès sa demande ou l'envoi de la lettre recommandée avec avis de réception.

« Les dispositions du premier alinéa de l'article 105 ne sont pas applicables au témoin assisté.

« Art.

113-7. Le témoin assisté ne prête pas serment.

« Art.

113-8. S'il apparaît au cours de la procédure que des indices graves ou concordants justifient la mise en examen du témoin assisté, le juge d'instruction ne peut procéder à cette mise en examen en faisant application des dispositions du quatrième alinéa de l'article 116 qu'après avoir informé la personne de son intention, le cas échéant par lettre recommandée, et l'avoir mise en mesure de faire connaître ses observations. Il peut également procéder à cette mise en examen en adressant à la personne, en même temps que l'avis de fin d'information prévu par l'article 175, une lettre recommandée précisant chacun des faits qui lui sont reprochés ainsi que leur qualification juridique, et l'informant de son droit de formuler des demandes d'actes ou des requêtes en annulation sur le fondement des articles 81, 82-1, 82-2, 156 et 173 pendant une durée de vingt jours. La personne est également informée que si elle demande à être à nouveau entendue par le juge celui-ci est tenu de procéder à son interrogatoire. »

« Art.

8. Après l'article 197 du même code, il est inséré un article 197-1 ainsi rédigé :

« Art.

197-1. En cas d'appel d'une ordonnance de non-lieu, le témoin assisté peut, par l'intermédiaire de son avocat, faire valoir ses observations devant la chambre de l'instruction. La date de l'audience est notifiée à l'intéressé et à son avocat conformément aux dispositions de l'article 197. »

« Art.

8 bis L'article 652 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions de cet article ne s'appliquent pas aux membres du Gouvernement entendus comme témoin assisté. »

Section 5 Dispositions renforçant les droits des parties au cours de l'audience de jugement

....................................................................

« Art.

9 bis A. Supprimé. »

....................................................................

« Art.

9 ter AA. Supprimé. »

« Art.

9 ter A. L'article 429 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Tout procès-verbal d'interrogatoire ou d'audition doit comporter les questions auxquelles il est répondu. »

....................................................................

« Art.

9 quater I. Le deuxième alinéa de l'article 513 du même code est ainsi rédigé :

« Les témoins cités par le prévenu sont entendus dans les règles prévues aux articles 435 à 457. Le ministère public peut s'y opposer si ces témoins ont déjà été entendus par le tribunal. La cour tranche avant tout débat au fond. »

« II. Le troisième alinéa de l'article 513 du même code est ainsi rédigé :

« Après que l'appelant ou son représentant a sommairement indiqué les motifs de son appel, les parties en cause ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460. »

....................................................................

Section 6 Dispositions assurant l'exercice des droits de la défense par les avocats

« Art.

9 octies I. Le premier alinéa de l'article 56-1 du même code est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :

« Les perquisitions dans le cabinet d'un avocat ou à son domicile ne peuvent être effectuées que par un magistrat et en présence du bâtonnier ou de son délégué.

Ce magistrat et le bâtonnier ou son délégué ont seuls le droit de prendre connaissance des documents découverts lors de la perquisition préalablement à leur éventuelle saisie.

« Le bâtonnier ou son délégué peut s'opposer à la saisie d'un document à laquelle le magistrat a l'intention de procéder s'il estime que cette saisie serait irrégulière. Le document doit alors être placé sous scellé fermé. Ces opérations font l'objet d'un procès-verbal mentionnant les objections du bâtonnier ou de son délégué, qui n'est pas joint au dossier de la procédure. Si d'autres documents ont été saisis au cours de la perquisition sans soulever de contestation, ce procès-verbal est distinct de celui prévu par l'article 57. Ce procès-verbal, ainsi que le document placé sous scellé fermé, sont transmis sans délai au juge des libertés et de la détention, avec l'original ou une copie du dossier de la procédure.

« Dans les cinq jours de la réception de ces pièces, le juge des libertés et de la détention statue sur la contestation par ordonnance motivée non susceptible de recours.

« A cette fin, il entend le magistrat qui a procédé à la perquisition et, le cas échéant, le procureur de la République, ainsi que l'avocat au cabinet ou au domicile duquel elle a été effectuée et le bâtonnier ou son délégu é.

Il peut ouvrir le scellé en présence de ces personnes.

« S'il estime qu'il n'y a pas lieu à saisir le document, le juge des libertés et de la détention ordonne sa restitution immédiate, ainsi que la destruction du procès-verbal des opérations et, le cas échéant, la cancellation de toute réfé rence à ce document ou à son contenu qui figurerait dans le dossier de la procédure.

« Dans le cas contraire, il ordonne le versement du scellé et du procès-verbal au dossier de la procédure.

Cette décision n'exclut pas la possibilité ultérieure pour les parties de demander la nullité de la saisie devant, selon les cas, la juridiction de jugement ou la chambre de l'instruction. »

« II. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 56-1 du même code constituent un article 56-3.


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« III. L'article 96 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions des articles 56-1, 56-2 et 56-3 sont applicables aux perquisitions effectuées par le juge d'instruction. »

« Art.

9 nonies Après les mots : "d'un avocat,", la fin de la seconde phrase du quatorzième alinéa (12o ) de l'article 138 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : "le conseil de l'ordre, saisi par le juge d'instruction, a seul le pouvoir de prononcer cette mesure à charge d'appel, dans les conditions prévues aux articles 23 et 24 de la loi no 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ; le conseil de l'ordre statue dans les quinze jours ;". »

C HAPITRE II Dispositions renforçant les garanties judiciaires en matière de détention provisoire Section 1 A Dispositions générales

....................................................................

« Art.

10 B. Le premier alinéa de l'article L.

611-1 du code de l'organisation judiciaire est supprimé. »

Section 1 Dispositions relatives au juge des libertés et de la détention

« Art.

10. Après l'article 137 du code de procédure pénale, sont insérés cinq articles 137-1 à 137-5 ainsi rédigés :

« Art.

137-1. La détention provisoire est ordonnée ou prolongée par le juge des libertés et de la détention.

Les demandes de mise en liberté lui sont également soumises.

« Le juge des libertés et de la détention est un magistrat du siège ayant rang de président, de premier viceprésident ou de vice-président. Il est désigné par le président du tribunal de grande instance. Lorsqu'il statue à l'issue d'un débat contradictoire, il est assisté d'un greffier.

« Il ne peut, à peine de nullité, participer au jugement des affaires pénales dont il a connu.

« Il est saisi par une ordonnance motivée du juge d'instruction, qui lui transmet le dossier de la procédure a ccompagné des réquisitions du procureur de la République.

« Art.

137-2. Le contrôle judiciaire est ordonné par le juge d'instruction, qui statue après avoir recueilli les réquisitions du procureur de la République.

« Le contrôle judiciaire peut être également ordonné par le juge des libertés et de la détention, lorsqu'il est saisi.

« Art.

137-3. Le juge des libertés et de la détention statue par ordonnance motivée. Lorsqu'il ordonne ou prolonge une détention provisoire ou qu'il rejette une demande de mise en liberté, l'ordonnance doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait sur le caractère insuffisant des obligations du contrôle judiciaire et le motif de la détention par référence aux seules dispositions des articles 143-1 et 144.

« Dans tous les cas, l'ordonnance est notifiée à la personne mise en examen qui en reçoit copie intégrale contre émargement au dossier de la procédure.

« Art.

137-4. Le juge d'instruction n'est pas tenu de statuer par ordonnance dans les cas suivants :

« 1o Lorsque, saisi de réquisitions du procureur de la République tendant au placement en détention provisoire ou demandant la prolongation de celle-ci, il ne transmet pas le dossier de la procédure au juge des libertés et de la détention ;

« 2o Lorsqu'il ne suit pas les réquisitions du procureur de la République tendant au prononcé d'une mesure de contrôle judiciaire.

« Art.

137-5. Lorsqu'il n'a pas été fait droit à ses réquisitions tendant au placement en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire de la personne mise en examen, ou à la prolongation de la détention provisoire, le procureur de la République peut saisir directement la chambre de l'instruction dans les dix jours de l'avis de notification qui lui est donné par le greffier. »

« Art.

10 bis AA. I. L'article 396 du même code est ainsi modifié :

« 1o Dans le premier alinéa, les mots : "le président du tribunal ou le juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention" ;

« 2o Au début du deuxième alinéa, les mots : "Le président du tribunal ou" sont supprimés ;

« 3o Dans le dernier alinéa, les mots : "le président du tribunal ou" sont supprimés.

« II. Dans le deuxième alinéa de l'article 706-23 du même code, les mots : "le président du tribunal dans le ressort duquel s'exerce la garde à vue ou le juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention".

« III. L'article 706-24 du même code est ainsi modifié :

« 1o Dans le premier alinéa, les mots : "le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance" ;

« 2o Dans la première phrase du troisième alinéa, les mots : "le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance" ;

« 3o Dans le dernier alinéa, les mots : "le président" sont remplacés trois fois par les mots : "le juge des libertés et de la détention".

« IV. Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 706-28 du même code, les mots : "le président du tribunal ou le juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention".

« V. Dans le deuxième alinéa de l'article 706-29 du même code, les mots : "le président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'exerce la garde à vue ou un juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention".

« VI. Dans le premier alinéa du II de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, les mots : "président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter ou d'un juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter".


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« VII. L'article 64 du code des douanes est ainsi modifié :

« 1o Dans le deuxième alinéa (2.

a ), les mots : "président du tribunal de grande instance du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, ou d'un juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure" ;

« 2o Le cinquième alinéa est supprimé ;

« 3o Dans la seconde phrase du douzième alinéa, le mot : "président" est remplacé par les mots : "juge des libertés et de la détention".

« VIII. L'article 35 bis de l'ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est ainsi modifié :

« 1o Dans le huitième alinéa, les mots : "président du tribunal de grande instance ou un magistrat du siège délégué par lui" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention" ;

« 2o Dans la deuxième phrase du treizième alinéa, les mots : "président du tribunal de grande instance ou d'un magistrat du siège délégué par lui" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention".

« IX. L'article 35 quater de la même ordonnance est ainsi modifié :

« 1o Dans la première phrase du sixième alinéa, les mots : "président du tribunal de grande instance ou un juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention" ;

« 2o Au début de la troisième phrase du même alinéa, les mots : "Le président du tribunal ou son délégué" sont remplacés par les mots : "Le juge des libertés et de la détention" ;

« 3o Dans les quatrième et cinquième phrases du même alinéa, les mots : "président ou à son délégué" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention" ;

« 4o Au début de la sixième phrase du même alinéa, les mots : "Le président ou son délégué" sont remplacés par les mots : "Le juge des libertés et de la détention" ;

« 5o Dans les huitième, neuvième, quinzième et seizième alinéas, les mots : "président du tribunal de grande instance ou son délégué" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention" ;

« 6o Dans le dernier alinéa, les mots : "président du tribunal de grande instance" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention".

« X. L'article 48 de l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence est ainsi modifié :

« 1o Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : "président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter ou d'un juge délégué par lui" sont remplacés par les mots : "juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter" ;

« 2o Dans la seconde phrase du même alinéa, le mot : "présidents" est remplacé par les mots : "juges des libertés et de la détention" ;

« 3o Dans le troisième alinéa, le mot : "président" est remplacé par les mots : "juge des libertés et de la détention".

« XI. L'article L. 351 du code de la santé publique est ainsi modifié :

« 1o Dans le premier alinéa, le mot : "président" est remplacé par les mots : "juge des libertés et de la détention" ;

« 2o Au début du dernier alinéa, les mots : "Le président du tribunal de grande instance" sont remplacés par les mots : "Le juge des libertés et de la détention". »

« Art.

10 bis A. I. L'article 138 du même code est ainsi modifié :

« 1o Dans le septième alinéa (5o ), après le mot : "services", sont insérés les mots : ", associations habilitées" ;

« 2o Dans le huitième alinéa (6o ), après les mots : "de toute autorité", sont insérés les mots : ", de toute association" ;

« 3o Le même alinéa est complété par les mots : "ainsi qu'aux mesures socio-éducatives destinées à favoriser son insertion sociale et à prévenir la récidive".

« II. Le début de la première phrase du septième alinéa de l'article 81 du même code est ainsi rédigé : "Le juge d'instruction peut également commettre, suivant les cas, le service pénitentiaire d'insertion et de probation, le service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse ou toute association habilitée en application de l'alinéa qui précède... (Le reste sans changement) ". »

« Art.

10 bis B. Supprimé. »

....................................................................

« Art.

10 ter L'article 145 du même code est ainsi modifié :

« 1o Les premier et deuxième alinéas sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le juge des libertés et de la détention saisi par une ordonnance du juge d'instruction tendant au placement en détention de la personne mise en examen fait comparaître cette personne devant lui, assistée de son avocat si celui-ci a déjà été désigné, et procède conformémen t aux dispositions du présent article.

« Au vu des éléments du dossier et après avoir, s'il l'estime utile, recueilli les observations de l'intéressé, ce magistrat fait connaître à la personne mise en examen s'il envisage de la placer en détention provisoire.

« S'il n'envisage pas de la placer en détention provisoire, ce magistrat, après avoir le cas échéant ordonné le placement de la personne sous contrôle judiciaire, proc ède conformément aux deux derniers alinéas de l'article 116 relatifs à la déclaration d'adresse.

« S'il envisage d'ordonner la détention provisoire de la personne, il l'informe que sa décision ne pourra intervenir qu'à l'issue d'un débat contradictoire et qu'elle a le droit de demander un délai pour préparer sa défense. »

;

« 2o Dans les quatrième et cinquième alinéas, les mots : "le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention" ;

« 3o Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : "aux deuxième et troisième alinéas" sont remplacés par les mots : "au sixième alinéa". »

....................................................................

« Art.

12. L'article 146 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

146. S'il apparaît, au cours de l'instruction, que la qualification criminelle ne peut être retenue, le juge d'instruction peut, après avoir communiqué le dossier au procureur de la République aux fins de réquisi-


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tions, soit saisir par ordonnance motivée le juge des libertés et de la détention aux fins du maintien en détention provisoire de la personne mise en examen, soit prescrire sa mise en liberté assortie ou non du contrôle judiciaire.

« Le juge des libertés et de la détention statue dans le délai de trois jours à compter de la date de sa saisine par le juge d'instruction. »

« Art.

13. La deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 147 du même code est ainsi rédigée :

« Sauf s'il ordonne la mise en liberté de la personne, le juge d'instruction doit, dans les cinq jours suivant les réquisitions du procureur de la République, transmettre le dossier, assorti de son avis motivé, au juge des libertés et de la détention, qui statue dans le délai de trois jours ouvrables. »

« Art.

14. L'article 148 du même code est ainsi modifié :

« 1o Les trois premiers alinéas sont ainsi rédigés :

« En toute matière, la personne placée en détention provisoire ou son avocat peut, à tout moment, demander sa mise en liberté, sous les obligations prévues à l'article précédent.

« La demande de mise en liberté est adressée au juge d'instruction, qui communique immédiatement le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions.

« Sauf s'il donne une suite favorable à la demande, le juge d'instruction doit, dans les cinq jours suivant la communication au procureur de la République, la transmettre avec son avis motivé au juge des libertés et de la détention. Ce magistrat statue dans un délai de trois jours ouvrables, par une ordonnance comportant l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision par référence aux dispositions de l'article 144. Toutefois, lorsqu'il n'a pas encore été statué sur une précédente demande de mise en liberté ou sur l'appel d'une précédente ordonnance de refus de mise en liberté, les délais précités ne commencent à courir qu'à compter de la décision rendue par la juridiction compétente. »

;

« 2o Au cinquième alinéa, les mots : "le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention". »

Section 2 Dispositions limitant les conditions ou la durée de la détention provisoire

« Art.

15. L'article 144 du même code est remplacé par deux articles 143-1 et 144 ainsi rédigés :

« Art.

143-1. Sous réserve des dispositions de l'article 137, la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que dans l'un des cas ci-après énumérés :

« 1o La personne mise en examen encourt une peine criminelle ;

« 2o La personne mise en examen encourt une peine correctionnelle d'une durée égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement.

« Toutefois, la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que si la peine encourue est supérieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement, s'il est reproché à la personne mise en examen un délit prévu par le livre III du code pénal et que cette personne n'a pas déjà été condamnée à une peine privative de liberté sans sursis supérieure à un an.

« La détention provisoire peut également être ordonnée dans les conditions prévues à l'article 141-2 lorsque la personne mise en examen se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire.

« Art.

144. La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que si elle constitue l'unique moyen :

« 1o De conserver les preuves ou les indices matériels ou d'empêcher soit une pression sur les témoins ou les victimes, soit une concertation frauduleuse entre personnes mises en examen et complices ;

« 2o De protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement ;

« 3o De mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé. Toutefois, ce motif ne peut justifier la prolongation de la détention provisoire, sauf en matière criminelle ou lorsque la peine correctionnelle encourue est supérieure ou égale à dix ans d'emprisonnement.

« Art.

144-1-A. Supprimé. »

« Art.

16. L'article 145-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

145-1. En matière correctionnelle, la détention provisoire ne peut excéder quatre mois si la personne mise en examen n'a pas déjà été condamnée pour crime ou délit de droit commun soit à une peine criminelle, soit à une peine d'emprisonnement sans sursis d'une durée supérieure à un an et lorsqu'elle encourt une peine inférieure ou égale à cinq ans.

« Dans les autres cas, à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut décider de prolonger la détention provisoire pour une durée qui ne peut excéder quatre mois par une ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 137-3 et rendue après un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions du sixième alinéa de l'article 145, l'avocat ayant été convoqué selon les dispositions du deuxième alinéa de l'article 114. Cette décision peut être renouvelée selon la m ême procédure, sous réserve des dispositions de l'article 145-3, la durée totale de la détention ne pouvant excéder un an. Toutefois, cette durée est portée à deux ans lorsqu'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis hors du territoire national ou lorsque la personne est poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, association de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour une infraction commise en bande organisée et qu'elle encourt une peine égale à dix ans d'emprisonnement. »

« Art.

17. Après le premier alinéa de l'article 145-2 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La personne mise en examen ne peut être maintenue en détention provisoire au-delà de deux ans lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles et au-delà de trois ans dans les autres cas. Les délais sont portés respectivement à trois et quatre ans lorsque l'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis hors du territoire national. Le délai est également de quatre ans lorsque la personne est poursuivie pour plusieurs crimes mentionnés aux livres II et IV du code pénal, ou pour trafic de stupéfiants, terrorisme, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour un crime commis en bande organisée. »


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« Art.

17 bis A. Après l'article 145-4 du même code, il est inséré un article 145-5 ainsi rédigé :

« Art.

145-5. Le placement en détention provisoire ou la prolongation de la détention provisoire d'une personne faisant connaître qu'elle exerce l'autorité parentale sur un enfant de moins de dix ans ayant chez elle sa résidence habituelle ne peut être ordonné sans que l'un des services ou l'une des personnes visés au septième alinéa de l'article 81 ait été au préalable chargé de rechercher et de proposer toutes mesures propres à éviter la détention de l'intéressé ou à y mettre fin.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables en cas de crime, en cas de délit commis contre un mineur ou en cas de non respect des obligations du contrôle judiciaire. »

....................................................................

« Art.

18 bis A. Après l'article 144-1 du même code, il est inséré un article 144-2 ainsi rédigé :

« Art.

144-2. Lorsqu'elle est prononcée, la détention provisoire peut être effectuée, sur décision du juge des libertés et de la détention d'office ou sur demande de l'intéressé ou du juge d'instruction, avec l'accord de l'intéressé, selon les modalités prévues aux articles 723-7 et suivants. Le juge des libertés et de la détention prend en considération la situation familiale de l'intéressé, notamment lorsque celui-ci exerce l'autorité parentale à l'égard d'un enfant ayant sa résidence habituelle chez lui et dont l'âge est inférieur à dix ans. Pour l'exécution de cette mesure, le juge des libertés et de la détention exerce les compétences attribuées au juge de l'application des peines. »

....................................................................

« Art.

18 ter I. Il est inséré, après l'article 187-1 du même code, un article 187-2 ainsi rédigé :

« Art.

187-2. La personne qui forme le recours prévu par l'article 187-1 peut demander à ce qu'il soit directement examiné par la chambre de l'instruction. Il est alors statué au plus tard, au vu des éléments du dossier, le cinquième jour ouvrable suivant la demande. »

« II. Au troisième alinéa de l'article 194 du même code, les mots : "dans les quinze jours de l'appel prévu par l'article 186" sont remplacés par les mots : "dans les dix jours de l'appel lorsqu'il s'agit d'une ordonnance de placement en détention et dans les quinze jours dans les autres cas".

....................................................................

« Art.

18 quinquies I. Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 397-3 du même code, les mots : "les deux mois qui suivent", sont remplacés par les mots : "le mois qui suit".

« II. Après la première phrase du même alinéa de l'article 397-3 du même code, il est inséré la phrase suivante : "Ce délai est prolongé d'un mois au maximum à la demande du prévenu". »

....................................................................

Section 3 Dispositions relatives à l'indemnisation des détentions provisoires

« Art.

19 bis Une commission de suivi de la détention provisoire est instituée. Elle est placée auprès du ministre de la justice.

« Elle est composée de deux représentants du Parlement, d'un magistrat de la Cour de cassation, d'un membre du Conseil d'Etat, d'un professeur de droit, d'un avocat et d'un représentant d'un organisme de recherche judiciaire.

« Elle est chargée de réunir les données juridiques, statistiques et pénitentiaires concernant la détention provisoire, en France et à l'étranger. Elle se fait communiquer tout document utile à sa mission et peut procéder à des visites ou à des auditions.

« Elle publie dans un rapport annuel les données statistiques locales, nationales et internationales concernant l'évolution de la détention provisoire ainsi que la présentation des différentes politiques mises en uvre. Elle établit une synthèse des décisions en matière d'indemnisation de l a détention provisoire prises en application des articles 149-1 à 149-4 du code de procédure pénale.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »

C HAPITRE

III Dispositions renforçant le droit à être jugé dans un délai raisonnable

« Art.

20. Après l'article 77-1 du même code, sont insérés deux articles 77-2 et 77-3 ainsi rédigés :

« Art.

77-2. Toute personne placée en garde à vue au cours d'une enquête préliminaire ou de flagrance qui, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la fin de la garde à vue, n'a pas fait l'objet de poursuites, peut interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s'est déroulée sur la suite donnée ou susceptible d'être donnée à la procédure. Cette d emande est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

« Dans le mois suivant la réception de la demande, le procureur de la République compétent doit soit engager des poursuites contre l'intéressé, soit engager l'une des mesures prévues aux articles 41-1 à 41-4, soit lui notifier le classement sans suite de la procédure à son égard, soit, s'il estime que l'enquête doit se poursuivre, saisir le juge des libertés et de la détention. A défaut de saisine de ce magistrat, il ne peut être procédé contre l'intéressé, à peine de nullité, à aucun acte d'enquête postérieurement au délai d'un mois à compter de la réception de la demande.

« Lorsque le juge des libertés et de la détention est saisi en application des dispositions du précédent alinéa, il entend, au cours d'un débat contradictoire, les observations du procureur de la République et de la personne intéressée, assistée le cas échéant par son avocat. A l'issue de ce débat, le juge des libertés et de la détention décide si l'enquête peut être poursuivie. En cas de réponse négative, le procureur de la République doit, dans les deux mois, soit engager des poursuites contre l'intéressé, soit lui notifier le classement sans suite de la procédure à son é gard, soit engager l'une des mesures prévues aux articles 41-1 à 41-4. Si le juge des libertés et de la détention autorise la continuation de l'enquête, il fixe un délai qui ne peut être supérieur à six mois, à l'issue duquel la personne intéressée peut, le cas échéant, faire à nouveau application des dispositions du présent article.

« Si la personne intéressée en fait la demande, le débat contradictoire prévu à l'alinéa précédent se déroule en audience publique, sauf si la publicité est de nature à entraver les investigations nécessitées par l'enquête, à


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nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Le juge des libertés et de la détention statue sur cette demande par une décision motivée qui n'est pas susceptible de recours.

« Art.

77-3. Lorsque l'enquête n'a pas été menée sous la direction du procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la garde à vue a été réalisée, celui-ci adresse sans délai la demande mentionnée au premier alinéa de l'article 77-2 au procureur de la République qui dirige l'enquête. Le délai fixé au deuxième alinéa du même article court à compter de la réception de la demande par le procureur de la République du lieu de la garde à vue. »

....................................................................

« Art.

21. I. Le deuxième alinéa de l'article 89-1 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« S'il estime que le délai prévisible d'achèvement de l'information est inférieur à un an en matière correctionnelle ou à dix-huit mois en matière criminelle, le juge d'instruction donne connaissance de ce délai à la partie civile et l'avise qu'à l'expiration dudit délai, elle pourra demander la clôture de la procédure en application des dispositions de l'article 175-1. Dans le cas contraire, il indique à la partie civile qu'elle pourra demander, en application de ce même article, la clôture de la procédure à l'expiration d'un délai d'un an en matière correctionnelle ou de dix-huit mois en matière criminelle.

« Les avis prévus au présent article peuvent également être faits par lettre recommandée. »

« II. L'article 175-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

175-1. La personne mise en examen, le témoin assisté ou la partie civile peut, à l'expiration du délai qui lui a été indiqué en application du huitième alin éa de l'article 116 ou du deuxième alinéa de l'article 89-1 à compter, respectivement, de la date de la mise en examen, de la première audition ou de la constitution de partie civile, demander au juge d'instruction,s elon les modalités prévues au dixième alinéa de l'article 81, de prononcer le renvoi devant la juridiction de jugement ou de transmettre la procédure au procureur général, ou de déclarer qu'il n'y a pas lieu à suivre, y compris en procédant, le cas échéant, à une disjonction.

Cette demande peut également être formée lorsqu'aucun acte d'instruction n'a été accompli pendant un délai de quatre mois.

« Dans le délai d'un mois à compter de la réception de cette demande, le juge d'instruction y fait droit ou déclare, par ordonnance motivée, qu'il y a lieu à poursuivre l'information. Dans le premier cas, il procède selon les modalités prévues à la présente section. Dans le second cas, ou à défaut pour le juge d'avoir statué dans le délai d'un mois, la personne mise en examen, le témoin assisté ou la partie civile, peut saisir le président de la chambre de l'instruction en application de l'article 207-1.

Cette saisine doit intervenir dans les cinq jours qui suivent la notification de la décision du juge ou l'expiration du délai d'un mois.

« Lorsque le juge d'instruction a déclaré qu'il poursuivait son instruction, une nouvelle demande peut être formée à l'expiration d'un délai de six mois.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables après l'envoi de l'avis prévu au premier alinéa de l'article 175. »

« III. Après l'article 175-1 du même code, il est inséré un article 175-2 ainsi rédigé :

« Art.

175-2. En toute matière, la durée de l'instruction ne peut excéder un délai raisonnable au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen, de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité et de l'exercice des droits de la défense.

« Si, à l'issue d'un délai de deux ans à compter de l'ouverture de l'information, celle-ci n'est pas terminée, le juge d'instruction rend une ordonnance motivée par référence aux critères prévus à l'alinéa précédent, expliquan t les raisons de la durée de la procédure, comportant les indications qui justifient la poursuite de l'information et précisant les perspectives de règlement. Cette ordonnance est communiquée au président de la chambre de l'instruction qui peut, par requête, saisir cette juridiction conformément aux dispositions de l'article 221-1.

« L'ordonnance prévue à l'alinéa précédent doit être renouvelée tous les six mois. »

« Art.

21 bis AA. Supprimé. »

....................................................................

« Art.

21 ter Après l'article 175-1 du même code, il est inséré un article 175-3 ainsi rédigé :

« Art.

175-3. Le juge d'instruction informe tous les six mois la partie civile de l'avancement de l'instruction. »

....................................................................

« Art.

21 quinquies Après l'article 215-1 du même code, il est inséré un article 215-2 ainsi rédigé :

« Art.

215-2. L'accusé détenu en raison des faits pour lesquels il est renvoyé devant la cour d'assises est immédiatement remis en liberté s'il n'a pas comparu devant celle-ci à l'expiration d'un délai d'un an à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive.

« Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut débuter avant l'expiration de ce délai, la chambre de l'instruction peut, à titre exceptionnel, par une décision rendue conformément à l'article 144 et mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation des effets de l'ordonnance de prise de corps pour une nouvelle durée de six mois. La comparution personnelle de l'accusé est de droit si lui-même ou son avocat en font la demande. Cette prolongation peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes. Si l'accusé n'a pas comparu devant la cour d'assises à l'issue de cette nouvelle prolongation, il est immédiatement remis en liberté. »

C HAPITRE III bis Dispositions relatives aux audiences

« Art.

21 sexies Après l'article L. 311-15 du code de l'organisation judiciaire, il est inséré une sous-section 4 bis ainsi rédigée :

« Sous-section 4 bis

« Composition des audiences pénales.

« Art.

L. 311-15-1. La composition prévisionnelle des audiences pénales est déterminée par le président du tribunal et le procureur. »

....................................................................


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C HAPITRE III ter Dispositions instaurant un recours en matière criminelle

« Art.

21 octies -

« I. Le premier alinéa de l'article 231 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« La cour d'assises a plénitude de juridiction pour juger, en premier ressort ou en appel, les personnes renvoyées devant elle par la décision de mise en accusation. »

« II. L'article 296 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Le jury de jugement est composé de neuf jurés lorsque la cour d'assises statue en premier ressort et de douze jurés lorsqu'elle statue en appel. »

;

« 2o Aux deuxième et troisième alinéas, les mots : "des neufs jurés" sont remplacés par les mots : "des jurés de jugement".

« III. Au troisième alinéa de l'article 297 du même code, les mots : "neuf noms de jurés non récusés" sont remplacés par les mots : "les noms de neuf ou douze jurés non récusés, selon les distinctions prévues par le premier alinéa de l'article 296,".

« IV. L'article 298 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

298. Lorsque la cour d'assises statue en premier ressort, l'accusé ne peut récuser plus de cinq jurés et le ministère public plus de quatre. Lorsqu'elle statue en appel, l'accusé ne peut récuser plus de six jurés, le ministère public plus de cinq. »

« V. A l'article 359 du même code, les mots : "à la majorité de huit voix au moins" sont remplacés par les mots : "à la majorité de huit voix au moins lorsque la cour d'assises statue en premier ressort et à la majorité de dix voix au moins lorsque la cour d'assises statue en appel".

« VI. A l'article 360 du même code, les mots : "la majorité de huit voix au moins" sont remplacés par les mots : "la majorité de voix exigée par l'article 359".

« VII. Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 362 du même code, les mots : "qu'à la majorité de huit voix au moins" sont remplacés par les mots : "qu'à la majorité de huit voix au moins lorsque la cour d'assises statue en premier ressort et qu'à la majorité de dix voix au moins lorsque la cour d'assises statue en appel".

« Dans l'avant-dernière phrase de cet alinéa, les mots : "la majorité de huit voix" sont remplacés par les mots : "cette majorité".

« Art.

21 nonies AA. Supprimé.

....................................................................

« Art.

21 nonies B. Après l'article 380 du même code, il est inséré un chapitre VIII ainsi rédigé :

« Chapitre VIII.

« De l'appel des décisions rendues par la cour d'assises en premier ressort.

« Section 1.

« Dispositions générales.

« Art.

380-1. Les arrêts de condamnation rendus par la cour d'assises en premier ressort peuvent faire l'objet d'un appel dans les conditions prévues par le présent chapitre.

« Cet appel est porté devant une autre cour d'assises désignée par le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation et qui procède au réexamen de l'affaire selon les modalités et dans les conditions prévues par les chapitres II à VII du présent titre.

« Art.

380-2. La faculté d'appeler appartient :

« 1o A l'accusé ;

« 2o Au ministère public ;

« 3o A la personne civilement responsable, quant à ses intérêts civils ;

« 4o A la partie civile, quant à ses intérêts civils ;

« 5o En cas d'appel du ministère public, aux administrations publiques, dans les cas où celles-ci exercent l'action publique.

« Art.

380-3. La cour d'assises statuant en appel sur l'action publique ne peut, sur le seul appel de l'accusé, aggraver le sort de ce dernier.

« Art.

380-4. Pendant les délais d'appel et durant l'instance d'appel, il est sursis à l'exécution de l'arrêt sur l'action publique.

« Toutefois, l'ordonnance de prise de corps continue de produire ses effets à l'encontre de la personne condamnée à une peine privative de liberté conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 367.

« Art.

380-4-1. Lorsque la cour d'assises n'est pas saisie de l'appel formé contre le jugement rendu sur l'action publique, l'appel formé par une partie contre le seul jugement rendu sur l'action civile est porté devant la chambre des appels correctionnels. Les articles 380-13 et 380-14 ne sont pas applicables.

« Art.

380-5. La cour d'assises statuant en appel sur l'action civile ne peut, sur le seul appel de l'accusé, du civilement responsable ou de la partie civile, aggraver le sort de l'appelant.

« La partie civile ne peut, en cause d'appel, former aucune demande nouvelle ; toutefois, elle peut demander une augmentation des dommages et intérêts pour le préjudice souffert depuis la première décision. Même lorsqu'il n'a pas été fait appel de la décision sur l'action civile, la victime constituée partie civile en premier ressort peut exercer devant la cour d'assises statuant en appel les droits reconnus à la partie civile jusqu'à la clôture des débats ; elle peut également demander l'application des dispositions du présent alinéa, ainsi que de celle de l'article 375.

« Art.

380-6. Pendant les délais d'appel et durant l'instance d'appel, il est sursis à l'exécution de l'arrêt sur l'action civile, sous réserve des dispositions de l'article 374.

« Art.

380-7. Lorsque la cour d'assises statuant en premier ressort sur l'action civile a ordonné le versement provisoire, en tout ou en partie, des dommages-intérêts alloués, cette exécution provisoire peut être arrêtée, en cause d'appel, par le premier président, statuant en référé si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Le premier président peut subordonner la suspension de l'exécution provisoire à la constitution d'une garantie, réelle ou personnelle, suffisante pour répondre de toutes restitutions ou réparations.

« Lorsque l'exécution provisoire a été refusée par la cour statuant sur l'action civile ou lorsque l'exécution provisoire n'a pas été demandée, ou si, l'ayant été, la cour a omis de statuer, elle peut être accordée, en cas d'appel, par le premier président statuant en référé.


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« Pour l'application des dispositions du présent article, est compétent le premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle siège la cour d'assises désignée pour connaître de l'affaire en appel.

« Section 2.

« Délais et formes de l'appel.

« Art.

380-8. L'appel est interjeté dans le délai de dix jours à compter du prononcé de l'arrêt.

« Toutefois, le délai ne court qu'à compter de la signification de l'arrêt, quel qu'en soit le mode, pour la partie qui n'était pas présente ou représentée à l'audience où le jugement a été prononcé, mais seulement dans le cas où elle-même ou son représentant n'auraient pas été informés du jour où l'arrêt serait prononcé.

« Art.

380-9. En cas d'appel d'une partie, pendant les délais ci-dessus, les autres parties ont un délai supplémentaire de cinq jours pour interjeter appel.

« Art.

380-10. L'accusé peut se désister de son appel jusqu'à son interrogatoire par le président prévu par l'article 272.

« Ce désistement rend caducs les appels incidents formés par le ministère public ou les autres parties.

« Le désistement d'appel est constaté par ordonnance du président de la cour d'assises.

« La caducité de l'appel de l'accusé résulte également de la constatation, par le président de la cour d'assises, que ce dernier a pris la fuite et n'a pas pu être retrouvé avant l'ouverture de l'audience ou au cours de son déroulement.

« Art.

380-11. La déclaration d'appel doit être faite au greffe de la cour d'assises qui a rendu la décision attaquée.

« Elle doit être signée par le greffier et par l'appelant lui-même, par un avocat, par un avoué près la cour d'appel, ou par un fondé de pouvoir spécial ; dans ce dernier cas, le pouvoir est annexé à l'acte dressé par le greffier. Si l'appelant ne peut signer, il en sera fait mention par le greffier.

« Elle est inscrite sur un registre public à ce destiné et toute personne a le droit de s'en faire délivrer une copie.

« Art.

380-12. Lorsque l'appelant est détenu, l'appel peut être fait au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire.

« Cette déclaration est constatée, datée et signée par le chef de l'établissement pénitentiaire. Elle est également signée par l'appelant ; si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement.

« Ce document est adressé sans délai, en original ou en copie, au greffe de la cour d'assises qui a rendu la décision attaquée ; il est transcrit sur le registre prévu par le troisième alinéa de l'article 380-11 et annexé à l'acte dressé par le greffier.

« Section 3.

« Désignation de la cour d'assises statuant en appel.

« Art.

380-13. Dès que l'appel a été enregistré, le ministère public adresse sans délai au greffe de la chambre criminelle de la Cour de cassation, avec ses observations éventuelles, la décision attaquée et, le cas échéant, le dossier de la procédure.

« Dans le mois qui suit la réception de l'appel, la chambre criminelle, après avoir recueilli les observations écrites du ministère public et des parties ou de leurs avocats, désigne la cour d'assises chargée de statuer en appel.

« Il est alors procédé comme en cas de renvoi après cassation.

« Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 380-1, en cas d'appel d'une décision de la cour d'assises d'un département d'outre-mer, de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis-et-Futuna, la chambre criminelle peut désigner la même cour d'assises, autrement composée, pour connaître de l'appel. Les dispositions du présent alinéa sont également applicables en cas d'appel des décisions de la cour criminelle de Mayotte ou du tribunal criminel de SaintPierre-et-Miquelon. En cas de vacance de poste, d'absence, d'empêchement ou d'incompatibilité légale, les fonctions de président de la juridiction criminelle statuant en appel et, le cas échéant, des magistrats assesseurs qui la composent, sont exercées par des conseillers désignés, sur une liste arrêtée pour chaque année civile, par le premier président de la cour d'appel de Paris, ou, pour la cour criminelle de Mayotte, par le premier président de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion.

« Art.

380-14. Si la chambre criminelle de la Cour de cassation constate que l'appel n'a pas été formé dans les délais prévus par la loi ou porte sur un arrêt qui n'est pas susceptible d'appel, elle dit n'y avoir pas lieu à désignation d'une cour d'assises chargée de statuer en appel. »

« Art.

21 nonies I. L'article 181 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

181. Si le juge d'instruction estime que les faits retenus à la charge des personnes mises en examen constituent une infraction qualifiée crime par la loi, il ordonne leur mise en accusation devant la cour d'assises.

« Il peut également saisir cette juridiction des infractions connexes.

« L'ordonnance de mise en accusation contient, à peine de nullité, l'exposé et la qualification légale des faits, objet de l'accusation, et précise l'identité de l'accusé.

« Lorsqu'elle est devenue définitive, l'ordonnance de mise en accusation couvre, s'il en existe, les vices de la procédure.

« Le contrôle judiciaire dont fait l'objet l'accusé continue à produire ses effets.

« La détention provisoire ou le contrôle judiciaire des personnes renvoyées pour délit connexe prend fin, sauf s'il est fait application des dispositions du troisième alinéa de l'article 179. Le délai prévu par le quatrième alinéa de l'article 179 est alors porté à six mois.

« L'ordonnance de mise en accusation ordonne également prise de corps contre l'accusé, et contre les personnes renvoyées pour délits connexes.

« Le juge d'instruction transmet le dossier avec son ordonnance au procureur de la République. Celui-ci est tenu de l'envoyer sans retard au greffe de la cour d'assises.

« Les pièces à conviction, dont il est dressé état, sont transmises au greffe de la cour d'assises si celle-ci siège dans un autre tribunal que celui du juge d'instruction. »

« II. Au premier alinéa de l'article 186 du même code, les mots : "et 179, troisième alinéa" sont remplacés par les mots : ", 179, troisième alinéa, et 181".

« III. Après l'article 186-1 du même code, il est inséré un article 186-2 ainsi rédigé :

« Art.

186-2. En cas d'appel contre une ordonnance prévue par l'article 181, la chambre de l'instruction statue dans les quatre mois de l'ordonnance, faute de quoi, si la personne est détenue, elle est mise d'office en liberté. »

« IV. Le dernier alinéa de l'article 214 du même code est supprimé.


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« V. L'article 215 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

215. L'arrêt de mise en accusation contient, à peine de nullité, l'exposé et la qualification légale des faits, objet de l'accusation et précise l'identité de l'accusé.

« Il décerne en outre ordonnance de prise de corps contre l'accusé et contre les personnes renvoyées pour délit connexe devant la cour d'assises.

« Les dispositions des cinquième et sixième alinéas de l'article 181 sont applicables. »

« VI. L'article 215-1 du même code est abrogé.

« VII. Au deuxième alinéa de l'article 272 du même code, les mots : "à l'article 215-1, deuxième alinéa" sont remplacés par les mots : "à l'article 272-1".

« VIII. Après l'article 272 du même code, il est inséré un article 272-1 ainsi rédigé :

« Art.

272-1. Si l'accusé, après avoir été convoqué par la voie administrative au greffe de la cour d'assises, ne se présente pas, sans motif légitime d'excuse, au jour fixé pour être interrogé par le président de la cour d'assises, ce dernier peut, par décision motivée, mettre à exécution l'ordonnance de prise de corps.

« Pendant le déroulement de l'audience de la cour d'assises, la cour peut également, sur réquisition du ministère public, ordonner la mise à exécution de l'ordonnance de prise de corps si l'accusé se soustrait aux obligations du contrôle judiciaire ou s'il apparaît que la détention est l'unique moyen d'assurer sa présence lors des débats ou d'empêcher des pressions sur les victimes ou les témoins.

Dès le début de l'audience, la cour peut aussi, sur les réquisitions du ministère public, ordonner le placement de l'accusé sous contrôle judiciaire afin d'assurer sa présence au cours des débats ou empêcher des pressions sur les victimes ou les témoins. Les dispositions du présent alinéa sont également applicables aux personnes renvoyées pour délits connexes.

« A tout moment, la personne peut demander sa mise en liberté devant la cour. »

« Art.

21 decies A. Dans toutes les dispositions de nature législative, les mots : "chambre d'accusation", sont remplacés par les mots : "chambre de l'instruction".

....................................................................

« Art.

21 decies I. L'article 367 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

367. Si l'accusé est exempté de peine ou acquitté, s'il est condamné à une peine autre qu'une peine ferme privative de liberté, ou s'il est condamné à une peine ferme privative de liberté couverte par la détention provisoire, il est mis immédiatement en liberté s'il n'est retenu pour autre cause.

« Dans les autres cas, tant que l'arrêt n'est pas définitif et, le cas échéant, pendant l'instance d'appel, l'ordonnance de prise de corps est mise à exécution ou continue de produire ses effets, jusqu'à ce que la durée de détention ait atteint celle de la peine prononcée. Toutefois, si la cour d'assises saisie en appel n'a pas commencé à examiner l'affaire à l'expiration d'un délai d'un an à compter de la date à laquelle a été interjeté l'appel, l'accusé est remis en liberté. La chambre de l'instruction peut toutefois, à titre exceptionnel, par une décision rendue conformément à l'article 144 et mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation des effets de l'ordonnance de prise de corps pour une durée de six mois. La comparution personnelle de l'accusé est de droit si lui-même ou son avocat en fait la demande.

« La cour d'assises peut, par décision spéciale et motivée, décider que l'ordonnance de prise de corps sera mise à exécution contre la personne renvoyée pour délit connexe qui n'est pas détenue au moment où l'arrêt est rendu, si la peine prononcée est supérieure ou égale à un an d'emprisonnement et si les éléments de l'espèce justifient une mesure particulière de sûreté.

« Les sanctions pénales prononcées en application des articles 131-6 à 131-11 du code pénal peuvent être déclarées exécutoires par provision. »

« II. L'article 374 du même code est ainsi rétabli :

« Art.

374. Lorsqu'elle statue en premier ressort, la cour peut ordonner l'exécution provisoire de sa décision, si celle-ci a été demandée, sans préjudice des dispositions de l'article 380-8.

« Toutefois, l'exécution provisoire des mesures d'instruction est de droit. »

....................................................................

C HAPITRE III quater Dispositions relatives aux conséquences d'un non-lieu, d'une relaxe ou d'un acquittement

« Art.

21 undecies. I. Après l'article 177-1 du même code, il est inséré un article 177-2 ainsi rédigé :

« Art.

177-2. Lorsqu'il rend une ordonnance de non-lieu à l'issue d'une information ouverte sur constitution de partie civile, le juge d'instruction peut, sur réquisitions du procureur de la République et par décision motivée, s'il considère que la constitution de partie civile a été abusive ou dilatoire, prononcer contre la partie civile une amende civile dont le montant ne peut excéder 100 000 francs.

« Cette décision ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de vingt jours à compter de la communication à la partie civile et à son avocat, par lettre recommandée ou par télécopie avec récépissé, des réquisitions du procure ur de la République, afin de permettre à l'intéressé d'adresser des observations écrites au juge d'instruction.

« Cette décision peut être frappée d'appel par la partie civile dans les mêmes conditions que l'ordonnance de non-lieu.

« Si le juge d'instruction ne suit pas les réquisitions du procureur de la République, ce dernier peut interjeter appel dans les mêmes conditions. »

« II. L'article 88-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

88-1. La consignation fixée en application de l'article 88 garantit le paiement de l'amende civile susceptible d'être prononcée en application de l'article 177-2.

« La somme consignée est restituée lorsque cette amende n'a pas été prononcée par le juge d'instruction ou, en cas d'appel du parquet ou de la partie civile, par la chambre de l'instruction. »

« III. L'article 91 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

91. Quand, après une information ouverte sur constitution de partie civile, une décision de non-lieu a été rendue, la personne mise en examen et toutes personnes visées dans la plainte, et sans préjudice d'une poursuite pour dénonciation calomnieuse, peuvent, si elles n'usent de la voie civile, demander des dommagesintérêts au plaignant dans les formes indiquées ci-après.

« L'action en dommages-intérêts doit être introduite dans les trois mois du jour où l'ordonnance de non-lieu est devenue définitive. Elle est portée par voie de citation


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

devant le tribunal correctionnel où l'affaire a été instruite.

Ce tribunal est immédiatement saisi du dossier de l'information terminée par une ordonnance de non-lieu, en vue de sa communication aux parties. Les débats ont lieu en chambre du conseil : les parties, ou leurs conseils, et le ministère public sont entendus. Le jugement est rendu en audience publique.

« En cas de condamnation, le tribunal peut ordonner la publication intégrale ou par extraits de son jugement dans un ou plusieurs journaux qu'il désigne, aux frais du condamné. Il fixe le coût maximum de chaque insertion.

« L'opposition et l'appel sont recevables dans les délais de droit commun en matière correctionnelle.

« L'appel est porté devant la chambre des appels correctionnels statuant dans les mêmes formes que le tribunal. L'arrêt de la cour d'appel peut être déféré à la Cour de cassation comme en matière pénale.

« Lorsqu'une décision définitive rendue en application de l'article 177-2 a déclaré que la constitution de partie civile était abusive ou dilatoire, cette décision s'impose au tribunal correctionnel saisi dans les conditions prévues aux alinéas précédents. »

« IV. Le second alinéa de l'article 392-1 du même code est ainsi rédigé :

« Lorsque le tribunal correctionnel, saisi par une citation directe de la partie civile, prononce une relaxe, il peut, par ce même jugement, sur réquisitions du procureur de la République, condamner la partie civile au paiement d'une amende civile dont le montant ne saurait excéder 100 000 francs s'il estime que la citation directe était abusive ou dilatoire. Les réquisitions du procureur de la République doivent intervenir avant la clôture des débats, après les plaidoiries de la défense, et la partie civile ou son avocat doivent avoir été mis en mesure d'y répliquer. Les dispositions du présent alinéa sont également applicables devant la cour d'appel, lorsque le tribunal correctionnel a, en premier ressort, relaxé la personne poursuivie et statué sur des réquisitions du procureur de la République tendant à la condamnation de la partie civile en application des dispositions du présent alinéa. »

....................................................................

C HAPITRE III quinquies Dispositions relatives au réexamen d'une décision pénale consécutif au prononcé d'un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme

« Art.

21 terdecies I. Après l'article 626 du code de procédure pénale, il est inséré un titre III ainsi rédigé :

« Titre III.

« Du réexamen d'une décision pénale consécutif au prononcé d'un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme.

« Art.

626-1. Le réexamen d'une décision pénale définitive peut être demandé au bénéfice de toute personne reconnue coupable d'une infraction lorsqu'il résulte d'un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme que la condamnation a été prononcée en violation des dispositions de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de ses protocoles additionnels, dès lors que, par sa nature et sa gravité, la violation constatée entraîne pour le condamné des conséquences dommageables auxquelles la » satisfaction équitable « allouée sur le fondement de l'article 41 de la convention ne pourrait mettre un terme.

« Art.

626-2. Le réexamen peut être demandé par :

« - le ministre de la justice ;

« - le procureur général près la Cour de cassation ;

« - le condamné ou, en cas d'incapacité, son représentant légal ;

« - les ayants droit du condamné, en cas de décès de ce dernier.

« Art.

626-3. La demande en réexamen est adressée à une commission composée de sept magistrats de la Cour de cassation, désignés par l'assemblée générale de cette juridiction ; chacune des chambres est représentée par un de ses membres, à l'exception de la chambre criminelle qui est représentée par deux magistrats, l'un d'entre eux assurant la présidence de la commission. Les fonctions du ministère public sont exercées par le parquet général de la Cour de cassation.

« La demande en réexamen doit être formée dans un délai d'un an à compter de la décision de la Cour européenne des droits de l'homme.

« La décision de la commission est prononcée à l'issue d'une audience publique au cours de laquelle sont recueillies les observations orales ou écrites du requérant ou de son avocat, ainsi que celles du ministère public ; cette décision n'est pas susceptible de recours.

« Art.

626-4. Si elle estime la demande justifiée, la commission procède conformément aux dispositions ciaprès :

« - si le réexamen du pourvoi du condamné, dans des conditions conformes aux dispositions de la convention, est de nature à remédier à la violation constatée par la Cour européenne des droits de l'homme, la commission renvoie l'affaire devant la Cour de cassation qui statue en assemblée plénière ;

« - dans les autres cas, la commission renvoie l'affaire devant une juridiction de même ordre et de même degré que celle qui a rendu la décision litigieuse, sous réserve de l'application des dispositions des troisième et quatrième alinéas de l'article 625.

« Art.

626-5. La suspension de l'exécution de la condamnation peut être prononcée à tout moment de la procédure de réexamen par la commission ou la Cour de cassation.

« Art.

626-6. Pour l'application des dispositions du présent titre, le requérant peut être représenté ou assisté par un avocat au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation ou par un avocat régulièrement inscrit à un barreau.

« Art.

626-7. Si, à l'issue de la procédure, le condamné est reconnu innocent, les dispositions de l'article 626 sont applicables. »

« II. A titre transitoire, les demandes de réexamen présentées en application des articles 626-1 et suivants du code de procédure pénale et motivées par une décision rendue par la Cour européenne des droits de l'homme rendue avant la publication de la présente loi au Journal officiel de la République française peuvent être formées dans un délai d'un an à compter de cette publication.

Pour l'application des dispositions de ces articles, les décisions du Comité des ministres du Conseil de l'Europe rendues, après une décision de la Commission europ éenne des droits de l'homme, en application de l'article 32 (ancien) de la convention de sauvegarde des droits de l'homme ou de l'article 5 (paragraphe 6) de son protocole no 11, sont assimilées aux décisions de la Cour européenne des droits de l'homme.


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C HAPITRE IV Dispositions relatives à la communication

« Art.

22 AA. I. Dans le premier alinéa de l'article 26 de la même loi, les mots : "d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 300 000 francs ou de l'une de ces deux peines seulement" sont remplacés par les mots : "d'une amende de 300 000 francs".

« II. L'article 27 de la même loi est ainsi modifié :

« 1o Dans le premier alinéa, les mots : "d'un empri-s onnement de trois ans, et d'une amende de 300 000 francs, ou de l'une de ces deux peines seulement" sont remplacés par les mots : "d'une amende de 300 000 francs" ;

« 2o Dans le second alinéa, les mots : "d'un emprisonnement de cinq ans et" sont supprimés.

« III. Dans l'article 30 de la même loi, les mots : "d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 300 000 francs, ou de l'une de ces deux peines seulement" sont remplacés par les mots : "d'une amende de 300 000 francs".

« IV. Dans le premier alinéa de l'article 32 de la même loi, les mots : "d'un emprisonnement de six mois et d'une amende de 80 000 francs, ou de l'une de ces deux peines seulement" sont remplacés par les mots : "d'une amende de 80 000 francs".

« V. L'article 33 de la même loi est ainsi modifié :

« 1o Dans le premier alinéa, les mots : "d'un empri-s onnement de trois mois et d'une amende de 80 000 francs, ou de l'une de ces deux peines seulement"s ont remplacés par les mots : "d'une amende de 80 000 francs" ;

« 2o Dans le deuxième alinéa, les mots : "d'un empri-s onnement de deux mois et d'une amende de 80 000 francs, ou de l'une de ces deux peines seulement"s ont remplacés par les mots : "d'une amende de 80 000 francs".

« 3o Dans le troisième alinéa, les mots : "Le maximum de la peine d'emprisonnement sera de six mois et celui de l'amende de 150 000 francs si l'injure a été commise" sont remplacés par les mots : "Sera punie de six mois d'emprisonnement et de 150 000 francs d'amende l'injure commise".

« VI. Dans l'article 36 de la même loi, les mots : "d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 300 000 francs, ou de l'une de ces deux peines seulement » sont remplacés par les mots : "d'une amende de 300 000 francs".

« VII. Dans l'article 37 de la même loi, les mots : "d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 300 000 francs, ou de l'une de ces deux peines seulement" sont remplacés par les mots : "d'une amende de 300 000 francs".

« Art.

22 A. L'article 9-1 du code civil est ainsi rédigé :

« Art.

9-1. Chacun a droit au respect de la présomption d'innocence.

« Lorsqu'une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme coupable de faits faisant l'objet d'une enquête ou d'une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, sans préjudice de la réparatio n du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que l'insertion d'une rectification ou la diffusion d'un communiqué, aux fins de faire cesser l'atteinte à la présomption d'innocence, et ce aux frais de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte. »

« Art.

22. Après l'article 35 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 35 ter ainsi rédigé :

« Art.

35 ter.

- I. Lorsqu'elle est réalisée sans l'accord de l'intéressé, la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, de l'image d'une personne identifiée ou identifiable mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale mais n'ayant pas fait l'objet d'un jugement de condamnation et faisant apparaître, soit que cette personne porte des menottes ou entraves, soit qu'elle est placée en détention provisoire, est punie de 100 000 francs d'amende.

« II. Est puni de la même peine le fait :

« - soit de réaliser, de publier ou de commenter un sondage d'opinion, ou toute autre consultation, portant sur la culpabilité d'une personne mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale ou sur la peine susceptible d'être prononcée à son encontre ;

« - soit de publier des indications permettant d'avoir accès à des sondages ou consultations visés à l'alinéa pré cédent. »

....................................................................

« Art.

25. I. L'article 11 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, le procureur de la République peut, d'office et à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause. »

« II. Le quatrième alinéa de l'article 145 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Si la personne majeure mise en examen ou son avocat en fait la demande dès l'ouverture de l'audience, le débat contradictoire a lieu en audience publique, sauf si la publicité est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction ou à nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Le juge des libertés et de la détention statue par ordonnance motivée sur cette demande de publicité après avoir recueilli les observations du ministère public, de la personne mise en examen et de son avocat. »

« III. L'article 177-1 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, après les mots : "sur la demande de la personne concernée", sont insérés les mots : "ou, avec l'accord de cette personne, d'office ou à la demande du ministère public" ;

« 2o Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Si le juge ne fait pas droit à la demande de la personne concernée, il doit rendre une ordonnance motivée, qui est susceptible d'appel devant la chambre de l'instruction. »

« IV. L'article 199 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Toutefois, si la personne majeure mise en examen ou son avocat le demande dès l'ouverture des débats, ceux-ci se déroulent et l'arrêt est rendu en séance publique, sauf si la publicité est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction ou à nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. La chambre de l'instruction statue sur cette demande, après


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avoir recueilli les observations du procureur général et, le cas échéant, des avocats des autres parties, par un arrêt rendu en chambre du conseil qui n'est susceptible de pourvoi en cassation qu'en même temps que l'arrêt portant sur la demande principale. »

;

« 2o La seconde phrase du cinquième alinéa est supprimée.

« V. Supprimé.

« VI. L'article 212-1 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, après les mots : "sur la demande de la personne concernée", sont insérés les mots : "ou, avec l'accord de cette personne, d'office ou à la demande du ministère public" ;

« 2o Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Si la chambre de l'instruction ne fait pas droit à la demande de la personne concernée, elle doit rendre une décision motivée. »

....................................................................

« VII. Supprimé.

« Art.

25 bis A. Supprimé

« Art.

25 bis B. Supprimé. »

....................................................................

TITRE II

DISPOSITIONS RENFORÇANT

LES DROITS DES VICTIMES C HAPITRE Ier Dispositions réprimant l'atteinte à la dignité d'une victime d'une infraction pénale

« Art.

27 bis A. Après le 1o de l'article 48 de la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse, il est inséré un 1o bis ainsi rédigé :

« 1o bis Dans les cas d'injure et de diffamation envers un membre du Gouvernement, la poursuite aura lieu sur sa demande adressée au ministre de la justice ; ».

....................................................................

C HAPITRE II Dispositions relatives aux associations d'aide aux victimes et aux constitutions de partie civile Section 1 Dispositions relatives aux associations d'aide aux victimes

....................................................................

« Art.

28 quinquies L'article 2-6 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'association peut également exercer les droits reconnus à la partie civile en cas d'atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne et de destructions, d égradations et détériorations réprimées par les articles 221-1 à 221-4, 222-1 à 222-18 et 322-1 à 322-13 du code pénal, lorsque ces faits ont été commis en raison du sexe ou des m urs de la victime, dès lors qu'elle justifie avoir reçu l'accord de la victime ou, si celle-ci est un mineur ou un majeur protégé, celui de son représentant légal. »

« Art.

28 sexies Après l'article 2-16 du même code, il est inséré un article 2-18 ainsi rédigé :

« Art.

2-18. Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans qui se propose, par ses statuts, de défendre ou d'assister les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues par les articles 221-6, 222-19 et 222-20 du code pénal commises à l'occasion d'une activité professionnelle, lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée.

« Toutefois, l'association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de la victime ou, si celle-ci est mineure, celui du titulaire de l'autorité parentale ou du représentant légal. »

« Art.

28 septies Après l'article 2-16 du même code, il est inséré un article 2-19 ainsi rédigé :

« Art.

2-19. Toute association départementale des maires régulièrement déclarée, affiliée à l'Association d es maires de France, et dont les statuts ont été déposés depuis au moins cinq ans, peut exercer les droits reconnus à la partie civile dans toutes les instances introduites par les élus municipaux à la suite d'injures, d'outrages, de menaces ou de coups et blessures à raison de leurs fonctions.

« Toutefois, l'association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de l'élu. »

Section 2 Dispositions relatives aux constitutions de partie civile

....................................................................

C HAPITRE

III Dispositions relatives à l'indemnisation des victimes

....................................................................

TITRE

III

DISPOSITIONS DIVERSES ET DE COORDINATION C HAPITRE Ier Dispositions diverses

« Art.

32 A. I. Après la première phrase du sixième alinéa de l'article 35 bis de l'ordonnance no 452658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Il visite ces locaux une fois par semestre. »

« II. Le V de l'article 35 quater de la même ordonnance est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le procureur de la République visite les zones d'attente au moins une fois par semestre. »

....................................................................


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C HAPITRE II Dispositions relatives à l'exécution des peines

« Art.

32 C. Après l'article 729-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 729-3 ainsi rédigé :

« Art.

729-3. La libération conditionnelle peut être accordée pour tout condamné à une peine privative de liberté inférieure ou égale à quatre ans, ou pour laquelle la durée de la peine restant à subir est inférieure ou égale à quatre ans, lorsque ce condamné exerce l'autorité parentale sur un enfant de moins de dix ans ayant chez ce parent sa résidence habituelle.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux personnes condamnées pour un crime ou pour un délit commis sur un mineur. »

« Art.

32 D. I. Le dernier alinéa de l'article 709-1 du même code est supprimé.

« II. Dans le deuxième alinéa de l'article 731 du même code, les mots : "de l'un des comités prévus à l'article 709-1 (alinéa 4)" sont remplacés par les mots : "du service pénitentiaire d'insertion et de probation".

« Dans le dernier alinéa du même article, les mots : ", la composition et les attributions des comités de probation et d'assistance aux libérés" sont supprimés.

« III. Dans le dernier alinéa de l'article 732 du même code, les mots : "des membres du comité de probation et d'assistance aux libérés qui ont pris en charge le condamné" sont remplacés par les mots : "du service pénitentiaire d'insertion et de probation".

« IV. Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 733 du même code, les mots : "des membres du comité de probation et d'assistance aux libérés qui ont pris en charge le condamné" sont remplacés par les mots : "du service pénitentiaire d'insertion et de probation".

« V. Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 41 du code de procédure pénale, les mots : "le comité de probation et d'assistance aux libérés" sont remplacés par les mots : "le service pénitentiaire d'insertion et de probation".

« VI. Dans la deuxième phrase de l'article 763-1 du même code, les mots : "le comité de probation et d'assistance aux libérés" sont remplacés par les mots : "le service pénitentiaire d'insertion et de probation".

« VII. Dans la seconde phrase du second alinéa de l'article 763-8 du même code, les mots : "le comité de probation et d'assistance aux libérés" sont remplacés par les mots : "le service pénitentiaire d'insertion et de probation".

....................................................................

« Art.

32 F. I. A. La deuxième phrase du premier alinéa de l'article 720-1 du même code est ainsi rédigée :

« La décision est prise par le juge de l'application des peines dans les conditions prévues par l'article 722. »

« I. B. Le titre de la section V du chapitre II du titre II du livre V du même code est ainsi rédigé :

« Section V.

« Des attributions du juge de l'application des peines, des juridictions de la libération conditionnelle et de la commission de l'application des peines.

« I. Le premier alinéa de l'article 722 du code de procédure pénale est complété par les mots : "pour l'octroi des réductions de peine, des autorisations de sortie sous escorte et des permissions de sortir".

« II. Le dernier alinéa du même article est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Les mesures de placement à l'extérieur, de semiliberté, de fractionnement et suspension des peines, de placement sous surveillance électronique et de libération conditionnelle sont accordées, ajournées, refusées, retirées ou révoquées par décision motivée du juge de l'applicat ion des peines saisi d'office, sur la demande du c ondamné ou sur réquisition du procureur de la République. Cette décision est rendue, après avis du représentant de l'administration pénitentiaire, à l'issue d'un débat contradictoire tenu en chambre du conseil, au cours duquel le juge de l'application des peines entend les réquisitions du ministère public et les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celle de son avocat ; elle peut être attaquée par la voie de l'appel par le condamné, par le procureur de la République et par le procureur général, dans le délai de dix jours à compter de sa notification. L'appel est porté devant la chambre des appels correctionnels.

« Les décisions du juge de l'application des peines sont exécutoires par provision. Toutefois, lorsque l'appel du ministère public est formé, dans les vingt-quatre heures de la notification, contre une décision accordant l'une des mesures prévues par le sixième alinéa, il suspend l'exécution de cette décision jusqu'à ce que la cour ait statué.

L'affaire doit venir devant la cour d'appel au plus tard dans les deux mois suivant l'appel du parquet, faute de quoi celui-ci est non avenu.

« Un décret détermine les modalités d'application des deux alinéas précédents. »

« III. Après l'article 722 du même code, sont ajoutés deux articles 722-1 et 722-2 ainsi rédigés :

« Art.

722-1. Les mesures de libération conditionnelle qui ne relèvent pas de la compétence du juge de l'application des peines sont accordées, ajournées, refusées ou révoquées par décision motivée de la juridiction régionale de la libération conditionnelle, saisie sur la demande du condamné ou sur réquisition du procureur de la République, après avis de la commission d'application des peines.

« Cette juridiction, établie auprès de chaque cour d'appel, est composée d'un président de chambre ou d'un conseiller de la cour d'appel, président, et de deux juges de l'application des peines du ressort de la cour d'appel, dont, pour les décisions d'octroi, d'ajournement ou de refus, celui de la juridiction dans le ressort de laquelle ests itué l'établissement pénitentiaire dans lequel le condamné est écroué.

« Les fonctions du ministère public sont exercées par le procureur général ou par l'un de ses avocats généraux ou de ses substituts ; celle de greffe par un greffier de la cour d'appel.

« La juridiction régionale de la libération conditionnelle statue par décision motivée, à l'issue d'un débat contradictoire tenu en chambre du conseil, au cours duquel elle entend les réquisitions du ministère public, les observations du condamné et, le cas échéant, celles de son avocat.

« Les décisions de la juridiction peuvent faire l'objet d'un appel, dans les dix jours de leur notification par le condamné ou par le ministère public, devant la juridiction nationale de la libération conditionnelle. Ces décisions sont exécutoires par provision. Toutefois, lorsque l'appel du procureur général est formé dans les vingtquatre heures de la notification, il suspend l'exécution de la décision jusqu'à ce que la juridiction nationale ait sta-


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tué. L'affaire doit être examinée par cette juridiction nationale au plus tard deux mois suivant l'appel ainsi formé, faute de quoi celui-ci est non avenu.

« La juridiction nationale de la libération conditionnelle est composée du premier président de la Cour de cassation ou d'un conseiller de la cour le représentant, qui la préside, de deux magistrats du siège de la cour ainsi que d'un responsable des associations nationales de réinsertion des condamnés et d'un responsable des associations nationales d'aide aux victimes. Les fonctions du ministère public sont remplies par le parquet général de la Cour de cassation. La juridiction nationale statue par décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours, de quelque nature que ce soit. Les débats ont lieu et la décision est rendue en chambre du conseil, après que l'avocat du condamné a été entendu en ses observations.

« Un décret précise les modalités d'application du présent article.

« Art.

722-2. En cas d'inobservation par le condamné ayant bénéficié d'une des mesures mentionnées aux articles 722 ou 722-1 des obligations qui lui incombent, le juge de l'application des peines peut délivrer un mandat d'amener contre ce dernier.

« Si celui-ci est en fuite ou réside à l'étranger, il peut délivrer un mandat d'arrêt.

« Les dispositions des articles 122 à 124 et 126 à 134 sont alors applicables, les attributions du juge d'instruction étant exercées par le juge de l'application des peines. »

« IV. Les trois premiers alinéas de l'article 730 du même code sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque la peine privative de liberté prononcée est d'une durée inférieure ou égale à dix ans, ou que, quelle que soit la peine initialement prononcée, la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à trois ans, la libération conditionnelle est accordée par le juge de l'application des peines selon les modalités prévues par l'article 722.

« Dans les autres cas, la libération conditionnelle est accordée par la juridiction régionale de la libération c onditionnelle, selon les modalités prévues par l'article 722-1. »

« V. L'article 732 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, les mots : "le ministre de la justice, celui-ci" sont remplacés par les mots : "la juridiction régionale de la libération conditionnelle, celle-ci" ;

« 2o Au quatrième alinéa, les mots : "et après avis, le cas échéant, du comité consultatif de libération conditionnelle, par le ministre de la justice" sont remplacés par les mots : "par la juridiction régionale de la libération conditionnelle".

« VI. Au premier alinéa de l'article 733 du même code, les mots : "et après avis, le cas échéant, du comité consultatif de libération conditionnelle, par le ministre de la justice" sont remplacés par les mots : "par la juridiction régionale de la libération conditionnelle".

« VII. L'article 733-1 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est supprimé ;

« 2o Au 1o de cet article, les mots : "Les décisions qui c oncernent l'une des mesures prévues par les articles 720-1, 723, 723-3, 723-7 et 730 peuvent être déférées" sont remplacés par la phrase et le membre de phrase : "Les décisions mentionnées au premier alinéa de l'article 722, à l'exception de celles mentionnées par le sixième alinéa de cet article, sont des mesures d'administration judiciaire. Ces décisions peuvent être déférées, à la requête du procureur de la République et, sauf en ce qui concerne les permissions de sortir, seulement pour violation de la loi, " ;

« 3o Le 2o de cet article est supprimé.

« Art.

32 G. Le premier alinéa de l'article 729 du même code est ainsi rédigé :

« La libération conditionnelle tend à la réinsertion des condamnés et à la prévention de la récidive. Les condamnés ayant à subir une ou plusieurs peines privatives de liberté peuvent bénéficier d'une libération conditionnelles'ils manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale, notamment lorsqu'ils justifient soit de l'exercice d'une activité professionnelle, soit de l'assiduité à un enseignement ou à une formation professionnelle ou encore d'un stage ou d'un emploi temporaire en vue de leur insertion sociale, soit de leur participation essentielle à la vie de famille, soit de la nécessité de subir un traitement. »

« Art.

32 H. Il est inséré, dans le titre IV du livre 1er du code de l'organisation judiciaire, un chapitre III ainsi rédigé :

« Chapitre III.

« La juridiction nationale de la libération conditionnelle.

« Art.

L. 143-1. Il y a auprès de la Cour de cassation une juridiction chargée de statuer sur les recours formés contre les décisions de la juridiction régionale de la libération conditionnelle.

« Art.

L. 143-2. Les règles concernant la composition de la juridiction prévue à l'article précédent ainsi que celles qui sont relatives au ministère public près cette juridiction sont fixées par l'article 722-1 du code de procédure pénale. »

« Art.

32 I. Il est inséré dans le titre III du livre VI du même code un article L. 630-3 ainsi rédigé :

« Art.

L. 630-3. Il y a, dans le ressort de chaque c our d'appel, une juridiction de première instance dénommée juridiction régionale de la libération conditionnelle. Les règles concernant la composition, la compétence et le fonctionnement de la juridiction régionale de la libération conditionnelle sont fixées par l'article 722-1 du code de procédure pénale. Le siège des juridictions régionales de la libération conditionnelle est fixé par voie réglementaire. »

« Art.

32 J. Après l'article 720 du code de procédure pénale, il est inséré un article 720-1-A ainsi rédigé :

« Art.

720-1-A. Les députés et les sénateurs sont autorisés à visiter à tout moment les locaux de garde à vue, les centres de rétention, les zones d'attente et les établissements pénitentiaires. »

« Art.

32 K. L'article 723-7 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La décision de placement sous surveillance électronique d'un mineur non émancipé ne peut être prise, dans les mêmes conditions, qu'avec l'accord des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale. »

;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

« 2o Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le lieu désigné par le juge de l'application des peines n'est pas le domicile du condamné, la décision de placement sous surveillance électronique ne peut être prise qu'avec l'accord du maître des lieux, sauf s'il s'agit d'un lieu public. »

C HAPITRE

III Dispositions de coordination

....................................................................

« Art.

33. I. Au troisième alinéa de l'article 83 du même code, les mots : "il a seul qualité pour statuer en matière de détention provisoire" sont remplacés par les mots : "il a seul qualité pour saisir le juge des libertés et de la détention, pour ordonner une mise en liberté d'office".

« II. Supprimé.

« III. L'article 122 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Le juge d'instruction peut, selon les cas, décerner mandat de comparution, d'amener ou d'arrêt. Le juge des libertés et de la détention peut décerner mandat de dépôt. »

;

« 2o La première phrase du quatrième alinéa est ainsi rédigée :

« Le mandat de dépôt est l'ordre donné par le juge des libertés et de la détention au chef de l'établissement pénitentiaire de recevoir et de détenir la personne mise en examen à l'encontre de laquelle il a rendu une ordonnance aux fins de placement en détention provisoire. »

« IV. Le premier alinéa de l'article 135 du même code est supprimé.

« V. Dans le premier alinéa de l'article 136 du même code, les mots : "ou à prise à partie contre le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "contre le juge d'instruction, le juge des libertés et de la détention".

« VI. Supprimé.

« VII. Au premier alinéa de l'article 138 du même code, après les mots : "juge d'instruction", sont insérés les mots : "ou par le juge des libertés et de la détention".

« VIII. Le premier alinéa de l'article 141-2 du même code est ainsi rédigé :

« Si la personne mise en examen se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire, le juge d'instruction peut décerner à son encontre mandat d'arrêt ou d'amener. Il peut également, dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article 137-1, saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de placement en détention provisoire. Quelle que soit la peine d'emprisonnement encourue, le juge des libertés et de la détention peut décerner, à l'encontre de cette personne, un mandat de dépôt en vue de sa détention provisoire, sous réserve des dispositions de l'article 141-3. »

« IX. Au second alinéa de l'article 144-1 du même code, après les mots : "Le juge d'instruction", sont insérés les mots : "ou, s'il est saisi, le juge des libertés et de la détention".

« X et XI. Supprimés.

« XII. Au premier alinéa de l'article 145-2 du même code, les mots : "le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "le juge des libertés et de la détention" et les mots : "par une décision rendue conformément aux dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article 145" sont remplacés par les mots : "par une ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 137-3 et rendue après un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions du sixième alinéa de l'article 145".

« XIII. L'intitulé de la section 12 du chapitre Ier du titre III du livre Ier du même code est complété par les mots : "ou du juge des libertés et la détention".

« XIV. Aux premier et dernier alinéas de l'article 185 du même code, les mots : "du juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention".

«

XIV bis. Dans le premier alinéa de l'article 186 du même code, les mots : "145, premier alinéa" sont remplacés par les mots : "137-3".

« XV. Supprimé.

« XVI. L'article 207 du même code est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, les mots : "une ordonnance du juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "une ordonnance du juge des libertés et de la détention", les mots : "en application du deuxième alinéa de l'article 137"s ont remplacés par les mots : "en application de l'article 137-5", et les mots : "la décision du juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "la décision du juge des libertés et de la détention" ;

« 2o Au troisième alinéa, les mots : "L'ordonnance du juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "L'ordonnance du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention" ;

« 3o Au dernier alinéa, les mots : "le juge d'instruction" sont remplacés par les mots : "le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention".

....................................................................

« Art.

37 bis I. Au deuxième alinéa de l'article 141-2 du même code, les mots : "sur l'ordre du président de la cour d'assises ou, dans l'intervalle des sessions, du président de la chambre d'accusation" sont remplacés par les mots : "sur ordre du président de la chambre de l'instruction, ou, pendant la session d'assises au cours de laquelle la personne doit être jugée, par le président de la cour d'assises".

« II. Le deuxième alinéa de l'article 148-1 du même code est ainsi rédigé :

« Lorsqu'une juridiction de jugement est saisie, il lui appartient de statuer sur la détention provisoire. Toutefois, en matière criminelle, la cour d'assises n'est compétente que lorsque la demande est formée durant la session au cours de laquelle elle doit juger l'accusé. Dans les autres cas, la demande est examinée par la chambre de l'instruction. »

« III. Le 1o de l'article 256 du même code est ainsi rétabli :

« 1o Les personnes dont le bulletin no 1 du casier judiciaire mentionne une condamnation pour crime ou une condamnation pour délit à une peine égale ou supérieure à six mois d'emprisonnement ; ».

«

III bis. Il est inséré, après le premier alinéa de l'article 260 du même code, un deuxième alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d'Etat peut, pour la liste annuelle de chaque cour d'assises, fixer un nombre de jurés plus élevé que celui résultant des dispositions du premier alinéa, si le nombre de sessions tenues chaque année par la cour d'assises le justifie. »


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«

III ter. Au premier alinéa de l'article 266 du même code, les mots : "trente-cinq" et "dix" sont respectivement remplacés par les mots : "quarante" et "douze".

« Aux deuxième et troisième alinéas de cet article, ainsi qu'au premier alinéa de l'article 267, les mots : "des dix jurés suppléants" sont remplacés par les mots : "des jurés suppléants".

« III. Quater - Au premier alinéa de l'article 289-1 du même code, les mots : "il reste moins de vingt-trois jurés sur la liste de session" sont remplacés par les mots : "il reste, sur la liste de session, moins de vingt-trois jurés ou, lorsqu'au cours de la session la cour d'assises doit statuer en appel, moins de vingt-six jurés".

« IV. Au premier alinéa de l'article 268 du même code, les mots : "L'arrêt de renvoi" sont remplacés par les mots : "L'ordonnance ou l'arrêt de mise en accusation".

« Au troisième alinéa du même article, les mots : "l'arrêt de renvoi" sont remplacés par les mots : "l'ordonnance ou l'arrêt de mise en accusation" et les mots : "au procureur général" sont remplacés par les mots : "selon les cas, au procureur de la République ou au procureur général".

« V. A l'article 269 du même code, les mots : "Dès que l'arrêt de renvoi est devenu définitif" sont remplacés par les mots : "Dès que la décision de mise en accusation est devenue définitive ou, en cas d'appel, dès que l'arrêt de désignation de la cour d'assises d'appel a été signifié".

« VI. A l'article 273 du même code, les mots : "de l'arrêt de renvoi" sont remplacés par les mots : "de la décision de mise en accusation ou, en cas d'appel, de l'arrêt de désignation de la cour d'assises d'appel".

« VII. Le dernier alinéa de l'article 316 du même code est ainsi rédigé :

« Lorsque la cour d'assises examine l'affaire en appel, ces arrêts ne peuvent être attaqués que par la voie du recours en cassation, en même temps que l'arrêt sur le fond. Lorsque la cour d'assises examine l'affaire en premier ressort, ces arrêts ne peuvent faire l'objet d'un recours, mais, en cas d'appel de l'arrêt sur le fond et de réexamen de l'affaire devant une autre cour d'assises, ils n'ont pas autorité de la chose jugée devant cette cour. »

« VIII. L'article 327 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

327. Le président invite l'accusé et les jurés à écouter avec attention la lecture de la décision de renvoi, ainsi que, lorsque la cour d'assises statue en appel, des questions posées à la cour d'assises ayant statué en premier ressort, des réponses faites aux questions, de la décision et de la condamnation prononcée.

« Il invite le greffier à procéder à cette lecture. »

« IX. Dans la dernière phrase de l'article 348 et dans le deuxième alinéa de l'article 349 du même code, les mots : "l'arrêt de renvoi" sont remplacés par les mots : "la décision de mise en accusation".

« X. A l'article 351 du même code, les mots : "l'arrêt de renvoi" sont remplacés par les mots : "la décision de mise en accusation".

« X bis. Le premier alinéa de l'article 354 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Si l'accusé est libre, il lui enjoint de ne pas quitter le palais de justice pendant la durée du délibéré, en indiquant, le cas échéant, le ou les locaux dans lesquels il doit demeurer, et invite le chef du service d'ordre à veiller au respect de cette injonction. »

« XI. A l'article 370 du même code, les mots : "de se pourvoir en cassation" sont remplacés par les mots : ", selon les cas, d'interjeter appel ou de se pourvoir en cassation" et les mots : "le délai de ce pourvoi" sont remplacés par les mots : "le délai d'appel ou de pourvoi".

« XII. L'article 594 du même code est abrogé.

« XIII. Dans le dernier alinéa de l'article 599 du même code, après les mots : "la cour d'assises", sont insérés les mots : "statuant en appel".

« XIV. Au premier alinéa de l'article 698-6 du même code, les mots : "est composée d'un président et de six assesseurs" sont remplacés par les mots : "est composée d'un président et, lorsqu'elle statue en premier ressort, de six assesseurs, ou lorsqu'elle statue en appel, de huit assesseurs. Ces assesseurs sont".

« XV. Le deuxième alinéa de l'article 706-25 du même code est ainsi rédigé : "Pour l'application de l'alinéa précédent, le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction qui prononce la mise en accusation constate que les faits entrent dans le champ d'application de l'article 706-16".

« XVI. La première phrase du premier alinéa de l'article 885 du même code est complétée par les mots : "lorsque la cour criminelle statue en premier ressort et de six assesseurs lorsqu'elle statue en appel".

« XVII. L'article 888 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

888. Les majorités de huit ou dix voix prévues par les articles 359 et 362, deuxième alinéa, sont remplacées par des majorités de quatre ou cinq voix ».

« XVIII. L'article 921 du même code est complété par les mots : "lorsque le tribunal criminel statue en premier ressort et de six jurés lorsqu'il statue en appel."

« XIX. L'article 923 du même code est ainsi rédigé :

« Art.

923. Les majorités de huit ou dix voix prévues par les articles 359 et 362, deuxième alinéa, sont remplacées par des majorités de quatre ou de cinq voix. »

« Art.

38. I. Au IV de l'article 4 de l'ordonnance no 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, les mots : "de seize ans" sont supprimés.

« II. Au premier alinéa de l'article 11 de la même ordonnance, les mots : ", soit par le juge des enfants, soit par le juge d'instruction," sont remplacés par les mots : "par le juge des libertés et de la détention saisi soit par le juge d'instruction, soit par le juge des enfants,".

« III. Dans le deuxième alinéa du même article, les mots : "par une ordonnance motivée comme il est dit au premier alinéa de l'article 145 du code de procédure pénale et rendue conformément aux dispositions du quatrième alinéa de cet article du même code" sont remplacés par les mots : "par une ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 137-3 du code de procédure pénale et rendue après un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions du sixième alinéa de l'article 145 du même code".

« IV. Au troisième alinéa du même article, les mots : "aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 145 du code de procédure pénale" sont remplacés par les mots : "aux dispositions du sixième alinéa de l'article 145 du code de procédure pénale".

« V. Au quatrième alinéa du même article, les mots : "par une ordonnance rendue conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 145-1 du code de procédure pénale" sont remplacés par les mots :


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

"par une ordonnance rendue conformément aux dispositions du sixième alinéa de l'article 145 du code de procédure pénale".

....................................................................

« Art.

39. Les dispositions des sections 1, 2 bis, 3, 4 et 5 du chapitre Ier , des sections 1 et 2 du chapitre II et des chapitres III et III ter du titre Ier et celles des articles 28 ter, 29 A, 31 sexies , 31 septies , 32 F, 32, 33, 36, 37, 37 bis et 38 entreront en vigueur le 1er janvier 2001 ; les personnes ayant été condamnées par une cour d'assises postérieurement à la publication de la loi, mais dont la condamnation ne serait pas définitive le 1er janvier 2001, pourront cependant, dans les dix jours suivant cette date, former appel de leur condamnation conformément aux dispositions des articles 380-1 à 380-14 du code de procédure pénale, dans leur rédaction résultant de l'article 21 nonies B ; cet appel entraîne le désistement du pourvoi et permet les appels incidents prévus par l'article 380-2.

« Toutefois, les dispositions des articles 2 ter et 21 quinquies entreront en vigueur un an après la publication de la présente loi au Journal officiel ; jusqu'à cette date, à compter du 1er janvier 2001, le deuxième alinéa de l'article 367 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de l'article 21 decies de la présente loi, est ainsi rédigé : "Dans les autres cas, tant que l'arrêt n'est pas définitif, et, le cas échéant, pendant l'instance d'appel, l'ordonnance de prise de corps est mise à exécution ou continue de produire ses effets jusqu'à ce que la durée de détention ait atteint celle de la peine prononcée."

« Les dispositions de l'article 10 bis AA entreront en vigueur deux ans après la publication de la présente loi au Journal officiel ; jusqu'à cette date, le président du tribunal peut confier au juge des libertés et de la détention désigné en application du second alinéa de l'article 137-1, les fonctions visées par l'article 10 bis AA.

« Art.

39 bis Un an après l'entrée en vigueur de l'article 2 ter, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur le bilan de la première année d'expérimentation du dispositif afin de préciser les modalités de l'élargissement de cet enregistrement aux majeurs.

....................................................................

« Art.

42. Supprimé.

« Art.

43. Supprimé.

Conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement, je vais appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisi et qui ont été distribués avec l'accord du Gouvernement.

Mme Lazerges a présenté un amendement, no 1, ainsi rédigé :

« A l'article 21 nomies B, dans le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 380-1 du code de procédure pénale, supprimer les mots : "le président de". »

La parole est à Mme Christine Lazerges.

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Par coordination avec l'article 380-13, cet amendement précise que la cour d'assises d'appel est désignée par la chambre criminelle de la Cour de cassation et non pas simplement par son président.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je vais maintenant appeler l'amendement no 2 présenté pour coordination par Mme Lazerges à l'article 31 octies adopté par les deux assemblées dans un texte identique.

Cet amendement est ainsi rédigé :

« Supprimer le II de l'article 31 octies. »

La parole est à Mme Christine Lazerges.

Mme Christine Lazerges.

rapporteuse.

Amendement de coordination entre les articles 31 octies et 32 G.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges a présenté un amendement, no 3, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa de l'article 32 G par les mots : ", soit de leurs efforts en vue d'indeminiser leurs victimes". »

La parole est à Mme Christine Lazerges.

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Cet amendement est plus important. Il vise à ajouter, dans la nouvelle rédaction proposée par l'article 32 G concernant la libération conditionnelle, l'indication que les efforts faits par le condamné afin d'indemniser ses victimes seront pris en compte pour l'octroi de la libération conditionnelle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Christine Lazerges a présenté un amendement, no 7, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 39, après les mots : "titre Ier et celles", insérer les mots : "du paragraphe II de l'article 25 et". »

La parole est à Mme Christine Lazerges.

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Amendement de coordination avec le report de la création du juge des libertés et de la détention au 1er janvier 2001.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges a présenté un amendement, no 4, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa de l'article 39, après la référence : "32 F,", insérer les références : "32 H, 32I,". »

La parole est à Mme Christine Lazerges.

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Amendement de coordination avec le report des dispositions concernant la libération conditionnelle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

4. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges a présenté un amendement, no 5, ainsi rédigé :


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

« Compléter le premier alinéa de l'article 39 par les mots : " ; les affaires renvoyées devant une cour d'assises après cassation et audiencées après le 1er janvier 2001 seront jugées par une cour d'assises composée de neuf jurés et statuant en premier ressort". »

La parole est à Mme Christine Lazerges.

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Nous avions omis de préciser que les affaires renvoyées devant une cour d'assises après cassation et audiencées après le 1er janvier 2001 seront jugées par une cour d'assises composée de neuf jurés et statuant en premier ressort.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mme Lazerges a présenté un amendement, no 6, ainsi rédigé :

« Après le premier alinéa de l'article 39, insérer l'alinéa suivant :

« Jusqu'au 1er janvier 2001, le président du tribunal de grande instance exerce les compétences que l'article 9 octies confie au juge des libertés et de la détention. »

La parole est à Mme Christine Lazerges.

Mme Christine Lazerges, rapporteuse.

Il s'agit encore d'un amendement de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

6. (L'amendement est adopté.)

Explications de vote

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Patrick Devedjian.

M. Patrick Devedjian.

J'expliquerai le vote de l'ensemble de l'opposition en commençant par indiquer à M. Roman qu'il faut accepter l'existence d'une opposition dans une démocratie, car cela est utile à la majorité ellemême. Il ne saurait y avoir de démocratie sans opposition ; vous en êtes d'ailleurs convaincus. Ne vous plaignez pas que nous assumions notre rôle.

Je veux ensuite souligner que nous ne pratiquons pas la politique du pire. Ainsi que je l'ai loyalement souligné dans mon intervention, ce texte comporte de bonnes dispositions et cela est heureux. Nous n'allons donc pas nous opposer à son adoption et notre abstention sera la conséquence du rôle positif que nous avons joué en commission mixte paritaire pour aboutir à un compromis. Certes, celui-ci est frustrant, insatisfaisant, mais les progrès qu'il a permis de réaliser font que le texte mérite d'être adopté. Cela démontre que nous ne faisons pas de l'opposition systématique.

Je dois néanmoins regretter que vous persistiez à vouloir nous faire prendre pour une statue de marbre ce qui n'est que du plâtre.

(Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

Certes, il n'est pas négligeable d'avoir un modèle en plâtre. Cela peut même être charmant, décoratif, surtout vu de loin, mais nous ne souscrivons pas à votre autosatisfaction permanente. Vous ne cessez de vous rouler dans les plis de l'histoire, vous croyant inspirés, mais nous refusons de vous suivre sur ce terrain.

Il aurait été préférable que vous adoptiez un style plus modeste pour mettre en avant ce qui ne représente au fond qu'un petit progrès. Il faut être raisonnable et rester modeste, même si un petit progrès est toujours bon à prendre. Mais vouloir nous faire prendre des vessies pour des lanternes, et nous demander de tresser nous-mêmes des couronnes de lauriers à votre statue de plâtre en faisant semblant de croire que c'est du marbre de Carrare, est un abus, monsieur Roman.

M. le président.

La parole est à Mme Frédérique Bredin.

Mme Frédérique Bredin.

Le président de la commission n'a nullement remis en cause le rôle de l'opposition.

Il a surtout relevé la pauvreté de son argumentation, qui p eut affliger, et ce qu'a de surprenant l'évolution incompréhensible de son attitude depuis les débats en commission mixte paritaire.

M. Devedjian s'en tient à des effets de style en parlant de modestie et d'orgueil, ce qui est tout de même un peu léger au regard de l'importance du texte.

Restons-en donc au mot de M. Floch : il s'agit sans doute d'un malaise ou d'une crise de jalousie.

(« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par les amendements qui viennent d'être adoptés.

L'ensemble du projet de loi, ainsi modifié, est adopté.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

4 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 24 mai 2000, de M. le Premier ministre un projet de loi de modernisation sociale.

Ce projet de loi, no 2415, est renvoyé à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

5 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

M. le président.

J'ai reçu, le 24 mai 2000, de M. Michel Buillard et M. Dominique Perben une proposition de loi organique tendant à modifier la loi no 521175 du 21 octobre 1952 pour rééquilibrer la répartition des sièges à l'assemblée de la Polynésie française.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 24 MAI 2000

Cette proposition de loi organique, no 2410, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la l égislation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

6 DÉPÔTS DE RAPPORTS

M. le président.

J'ai reçu, le 24 mai 2000, de M. Thierry Mariani un rapport, no 2411, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur la proposition de loi de M. Bernard Accoyer et plusieurs de ses collègues tendant à protéger le patrimoine des artisans et commerçants (no 1988).

J'ai reçu, le 24 mai 2000, de Mme Nicole Catala un rapport, no 2412, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur la proposition de loi de Mme Nicole Catala et plusieurs de ses collègues portant organisation juridique de la coopération professionnelle entre époux (no 2284).

J'ai reçu, le 24 mai 2000, de M. Jean-Pierre Dufau un rapport, no 2413, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur le projet de loi relatif à la sécurité du dépôt et de la collecte de fonds par les entreprises privées (no 2395).

J'ai reçu, le 24 mai 2000, de M. Jean Vila un rapport, no 2414, fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, sur la proposition de loi, rejetée par le Sénat, relative à la constitution d'une commission de contrôle nationale et décentralisée des fonds publics accordés aux entreprises (no 2201).

7 DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président.

J'ai reçu, le 24 mai 2000, de M. JeanClaude Daniel un rapport d'information, no 2416, déposé par la délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire, sur le volet territorial des contrats de plan Etat-région.

8

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SEANCES

M. le président.

Jeudi 25 mai 2000, à quinze heures, première séance publique : Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi organique, no 2341 rectifié, tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes au mandat de membre des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l'assemblée de la Polynésie française et de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna :

M. Bernard Roman, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2368).

Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, no 2402, relatif à l'élection des sénateurs : M. Marc Dolez, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2403).

Discussion, en troisième lecture, du projet de loi, no 2326, portant création d'une commission nationale de déontologie de la sécurité : M. Bruno Le Roux, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2406).

(Procédure d'examen simplifiée. - Art. 106 du règlement.) Eventuellement à vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures quarante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT