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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE MME NICOLE CATALA

1. Désignation de candidats à des organismes extraparlementaires (p. 5147).

2. Loi de finances rectificative pour 2000. - Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire (p. 5147).

3. Pollution par les navires. - Discussion d'une proposition de loi (p. 5147).

M. Gilbert Le Bris, rapporteur de la commission de la production.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 5150)

MM. René Leroux, Louis Guédon, Daniel Paul, Edouard Landrain, Jean-Michel Marchand, Bernard Deflesselles, Jean-Pierre Dufour, André Aschieri, Mme Jacqueline Lazard.

Clôture de la discussion générale.

M. le ministre.

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 5162)

Article 1er (p. 5162)

Amendement no 5 de M. Paul : MM. Daniel Paul, le rapp orteur, le ministre, Edouard Landrain, Jean-Pierre Dufau, Bernard Deflesselles. - Rejet.

Amendement no 1 de M. Paul : MM. Daniel Paul, le rapp orteur, le ministre, Edouard Landrain, Jean-Pierre Dufau, Jérôme Lambert, Louis Guédon. - Rejet.

Amendement no 11 de M. Besselat : MM. Jean-Yves Besselat, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Dufau. - Rejet.

Adoption de l'article 1er

Article 2. - Adoption (p. 5165)

Article 3. - Adoption (p. 5165)

Article 4.- Adoption (p. 5165)

Après l'article 4 (p. 5165)

Amendement no 10 de M. Besselat : MM. Jean-Yves Besselat, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Article 5 (p. 5166)

Amendement no 9 de M. Dufau : MM. Jean-Pierre Dufau, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

L'article 5 est ainsi rédigé.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 5167)

MM. Bernard Deflesselles, Edouard Landrain, Jean-Pierre Dufau, Louis Guédon, Jean-Michel Marchand, Daniel Paul.

M. le rapporteur.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 5169)

Adoption de l'ensemble de la proposition de loi.

4. Ordre du jour de l'Assemblée (p. 5169).

5. Ordre du jour des prochaines séances (p. 5169).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures.)

1 DÉSIGNATION DE CANDIDATS À DES ORGANISMES

EXTRAPARLEMENTAIRES

Mme la présidente.

J'ai reçu de M. le Premier ministre d es demandes de renouvellement des membres de l'Assemblée nationale au sein du Comité des finances locales.

Conformément à l'alinéa 2 de l'article 26 du règlement, j'ai confié : à la commission des lois constitutionnelles, de la l égislation et de l'administration générale de la République le soin de présenter un candidat titulaire et un candidat suppléant ; à la commission des finances, de l'économie des finances, de l'économie générale et du Plan le soin de présenter un candidat titulaire et un candidat suppléant.

Les candidatures devront être remises à la présidence avant le mercredi 21 juin, à dix-huit heures.

2

LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire

Mme la présidente.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 7 juin 2000,

« Monsieur le président,

« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2000.

« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter l'Assemblée nationale à désigner ses représentants à cette commission.

« J'adresse ce jour à M. le président du Sénat une demande tendant aux mêmes fins.

« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

Cette communication a été notifiée à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

3

POLLUTION PAR LES NAVIRES Discussion d'une proposition de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Gilbert Le Bris et des membres du groupe socialiste et apparentés modifiant la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires (nos 2371, 2445).

La parole est à M. le rapporteur de la commission de la production et des échanges.

M. Gilbert Le Bris, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Madame la présidente, monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, mes chers collègues, le 25 mai dernier, au large de Toulon, une nappe d'hydrocarbures de 300 mètres sur 200 mètres est signalée de provenance inconnue, c'est-àdire d'un dégazage sauvage ; même jour, même chose à proximité de Cherbourg ! Depuis le début de l'année, pas moins de quarante-deux alertes de pollution par hydrocarbures pour la seule Méditerranée, côté littoral français.

En une semaine, entre le 18 et le 23 février 2000, sur l'axe de circulation situé à la pointe de la Bretagne, une opération « coup de poing » menée par la marine nationale et les douanes a permis de repérer trente-neuf dégazages sauvages. Les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage - CROSS -, quant à eux, ont répertorié 308 pollutions de dégazage en 1999.

Il suffit d'écouter les marins-pêcheurs ou les plaisanciers pour prendre conscience de ce qu'ils observent en mer. Il suffit de se promener sur nos plages ou sur nos zones littorales pour constater le véritable fléau environnemental que constituent ces dégazages, ou plutôt ces déballastages, sauvages sur nos côtes. Il suffit d'interroger les associations écologistes pour savoir qu'après chaque coup de vent on retrouve des oiseaux mazoutés, que la clinique permanente des soins ornithologiques de l'Ile Grande, dans les Côtes-d'Armor, soigne à elle seule, bon an mal an, 300 oiseaux victimes de ces dégazages clandestins ; que de ce fait des oiseaux marins comme le macareux-moine, la mouette tridactyle, le guillemot de Troïl ou le pingouin Torda sont en constante régression quantitative.


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Alors oui, il nous faut réagir, en unissant toutes nos forces à celles du Gouvernement, qui, comme l'a dit le ministre Jean-Claude Gayssot le 1er mars 2000, « veut en finir avec ces comportements scandaleux ».

Scandaleux, ils le sont, car, au-delà de l'exceptionnel et du dramatique, comme le naufrage de l' Erika, non sciemment voulu, même si la négligence a favorisé l'accident -, il y a le quotidien des pollutions volontaires, elles, qui - à coup de micro ou de miniErika - déversent sur nos côtes plus qu'une pollution Erika par an.

Comme les 577 députés-juniors, réunis ici en mai, et qui ont choisi un texte de lutte contre la pollution de l'eau, marquant ainsi la préoccupation environnementale des jeunes générations, agissons pour préparer un monde meilleur, un monde où nos ressources halieutiques, nos écosystèmes, nos paysages ne subiront plus les effets nocifs de ces atteintes répétées, un monde où les professionnels de la mer, les amoureux de la nature, les simples promeneurs ne seront plus affectés par ce crime, devenu ordinaire, des dégazages sauvages.

D'abord, interrogeons-nous sur le phénomène. Pourquoi ces rejets volontaires en mer ? C'est bien sûr un motif économique, et surtout financier, qui explique cette attitude. Là où la recherche d'un transport au moindre coût est la devise, souvent au détriment de la sécurité et de l'environnement, le coût d'un nettoyage dans un port des cuves, soutes et autres éléments polluants et pollués du navire est estimé hors de propos, compte tenu du prix demandé mais surtout de l'immobilisation requise.

De même, l'éventualité de dérouter le navire vers la haute mer pour respecter les normes prescrites par la convention de Londres du 2 novembre 1973 est considéré comme une perte de temps et d'argent. Le coût d'une opération de déballastage dans un port est sans doute aujourd'hui de l'ordre du double de l'amende encourue pour un rejet illégal en mer.

Et puis, reconnaissons-le, même si le navire est pris sur le fait, un bon avocat, l'absence de pratique de nombre de tribunaux, notre surprotection de l'accusé pour accepter les preuves nécessaires sont autant d'éléments qui oeuvrent pour une certaine impunité.

Dès lors que le risque d'une amende, fort minime et de toute façon modérée, est considéré comme moindre que la certitude d'un coût considéré, lui, comme élevé, d'un nettoyage au port, notre dissuasion n'est guère efficace.

Et puis, on le sait, les considérations à l'égard des graves nuisances collectives suscitées sont tout à fait négligeables pour les intéressés - parfois cyniques, comme ceux qui n'ont pas hésité à déballaster dans le secteur de l' Erika -, face aux enjeux financiers en cause.

Seule la peur du gendarme, seules des sanctions pécuniaires dissuasives peuvent être efficaces pour lutter contre ces pollutions. C'est l'objet même de la proposition de loi que je vous présente et qui vise, entre autres, à multiplier par trois le montant des amendes encourues, de telle sorte qu'elles deviendront ainsi nettement supérieures au coût d'un déballastage dans un port.

Ces dispositions seront applicables à tout capitaine de navire, français ou étranger, naviguant dans les eaux intérieures, les eaux territoriales et la zone économique exclusive. Pourquoi le capitaine ou le commandant ? Tout simplement en vertu de ce principe de base, juridiquement évident et de bon sens, symboliquement connu et parfois chanté : il est le « maître à bord ».

Mais nous ne sommes pas naïfs et nous savons que le commandant n'est souvent qu'un maillon dans une chaîne opérationnelle où d'autres - l'armateur, le propriétaire - ont plus que largement leur part. Aussi, sans préjudice des sanctions frappant le capitaine, le propriétaire, l'armateur ou l'exploitant qui aura donné l'ordre de commettre l'infraction pourra être puni des mêmes peines, notamment en application du code pénal et des articles 6 et 10 que nous modifions. Ces sanctions sont également applicables aux navires étrangers, même immatriculés dans un territoire relevant d'un gouvernement non partie à la convention de Londres de 1973.

Mais si l'augmentation des amendes est une arme certaine, nécessaire, contre les dégazages, elle ne doit pas être la seule. Je suis favorable, pour aborder ce grave problème, à une trilogie qui tournerait autour des termes de prévention, vérification et sanction.

La prévention consiste, bien sûr, à mettre à la disposition des bateaux, très rapidement, dans le maximum de ports et à des coûts abordables, les infrastructures nécessaires pour vidanger les ballasts mais aussi les huiles moteur et autres résidus de cargaison. Je voudrais mentionner, à cet égard, l'amendement que mon collègue Jean-Yves Le Drian, M. Leroux et moi-même avons fait introduire à l'article 11 du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation du droit communautaire dans les transports. Il prévoit le contrôle du déballastage et du dégazage par l'Etat du port. Il sera ainsi interdit aux bateaux ne disant pas comment ils vont régler ce problème de quitter le port. Et ils devront le faire dans des stations portuaires prévues à cet effet. Nous anticipons ainsi sur l'Europe puisque, je vous rappelle, le conseil des ministres européen du 8 novembre 1999 a adopté une position commune, notée CE no 2/2000, en vue de l'adoption d'une directive sur les infrastructures portuaires pour les déchets d'exploitation des navires et des résidus de cargaison. Il s'agit d'aller au-delà de dispositif Marpol 73/78 et de confirmer le principe pollueur-payeur.

Il faudra néanmoins trouver une solution consensuelle et fiable sur le mode de règlement des frais et sans doute permettre, par des aides ou des incitations gouvernementales, le développement des infrastructures nécessaires dans tous les ports.

La vérification, elle passe par des mesures comme celles prises par le CIADT du 28 février 2000 à Nantes, en dotant les douanes de deux nouveaux avions équipés d'appareils de télédétection dans le cadre de l'accélération du plan Polmar-Douanes.

La vérification, c'est ce qui commence à se passer dans d'autres pays, par exemple aux USA, où à partir d'échantillons prélevés à l'escale, les cost-guards arrivent parfois à identifier et arraisonner les pollueurs.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Voilà !

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

C'est aussi peut-être ce qui est envisagé avec la spécialisation des CROSS, dont celui de Jobourg, qui pourrait devenir le coeur du dispositif de lutte antidégazage dans tout son secteur.

La vérification attend aussi beaucoup des progrès techniques, avec en particulier un marquage de plus en plus fiable du pétrole. Un traçage des produits pétroliers et dérivés ainsi que la mise en place d'un quasi-ADN du pétrole pourraient bientôt permettre de lever tout doute sur la détermination du navire dont est issue la pollution.

Mais la nature humaine est ainsi faite que l'on ne pourra jamais se passer de sanctions.


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Cette proposition de loi a pour objectif de rendre ces sanctions réellement dissuasives en modifiant la loi no 83583 du 5 juillet 1983, elle-même modifiée et complétée par la loi du 31 mai 1990.

D'ailleurs, de telles dispositions s'inscrivent dans le droit fil de celles contenues à l'article 4 de la convention de Londres de 1973, qui stipule que les sanctions fixées par les législations des Etats membres « doivent être, par leur rigueur, de nature à décourager les intervenants éventuels, et d'une sévérité égale, quel que soit l'endroit ou l'infraction a été commise ».

Permettez-moi enfin de m'interroger sur la complexité du système et la multiplicité des tribunaux devant lesquels sont portés les plaintes relatives aux infractions concernant les rejets d'hydrocarbures en mer : tribunaux du territoire concerné pour les eaux intérieures et territoriales, tribunal du port d'immatriculation dans la zone d'exclusivité économique pour les Français et tribunal de grande instance de Paris pour les étrangers.

Tout cela entraîne une jurisprudence incertaine, y compris quant aux preuves, des procédures longues et une trop fréquente impunité. J'observe avec plaisir néanmoins que Mme la garde des sceaux, Elisabeth Guigou, a

« attiré l'attention des parquets sur la nécessité de réprimer ces délits avec détermination ».

J'ai pensé, dans un but de déconcentration, de proximité, génératrice de meilleure connaissance des problèmes, de simplicité et d'efficacité, que l'on pouvait envisager de confier aux tribunaux des chefs-lieux des préfectures maritimes, chargées de la police en cette matière, la compétence pour juger de telles infractions.

Cela donnerait la responsabilité aux tribunaux de Cherbourg pour la mer du Nord et la Manche, Brest pour l'Atlantique, Toulon pour la Méditerranée, sans préjudice, bien sûr, du rôle exercé par le TGI de Paris.

Le débat est ouvert. Il a son importance, mais l'essentiel est bien que soient prépositionnés, judirictionnellement parlant, les moyens de réprimer efficacement, rapidement et avec le souci de l'intérêt collectif ceux qui prennent la mer pour une poubelle, nos côtes pour un dépotoir et qui recherchent le profit au mépris de tout le reste, y compris l'environnement.

La commission de la production et des échanges a donné un avis favorable à cette proposition de loi. Je vous demande de la suivre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, il y a maintenant six mois, le 12 décembre dernier, le pétrole s'échappait des soutes de l' Erika et venait souiller l'espace marin puis nos côtes de l'Atlantique, causant ainsi un très grave préjudice à l'environnement et à tous ceux qui vivent des activités maritimes et du tourisme sur le littoral.

Ce naufrage a marqué les consciences, comme ce fut le cas pour les catastrophes du Torrey-Canyon, de l' AmocoCadiz, ou de l' Exxon-Valdes.

L'ampleur de ses conséquences ne saurait cependant faire oublier qu'au quotidien d'autres navires procèdent sciemment, sans se soucier des conséquences de leurs actes, et en toute illégalité, à des dégazages, à des déb allastages en pleine mer ou à proximité des côtes.

Pendant toute la période qui a suivi le naufrage de l' Erika , il semble même que des navires aient régulièrement poursuivi, dans la zone où le pétrolier a sombré, leurs rejets volontaires en mer des résidus de leurs cuves ou de leurs soutes.

M. Jean-Pierre Dufau.

Tout à fait ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ces pollutions de deux types sont inacceptables. Elles mettent en péril l'écosystème marin, les activités halieutiques et conchylicoles, elles souillent les plages. Mais si elles sont inacceptables, c'est aussi qu'elles sont le fruit d'un système, vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur, qui privilégie la recherche du moindre prix et du moindre coût au détriment de l'environnement ; d'un système qui préfère rogner sur le contrôle et la remise en état des navires ou sur les conditions de travail des marins, au mépris des risques d'accident ; d'un système qui récompense les déballastages en mer plutôt que les quelques heures passées à nettoyer les cuves dans un port.

Des dispositions de la convention Marpol de 1973, amendée par le protocole de 1978, fixent les règles en matière de déballastage. La loi du 5 juillet 1983 prévoit de réprimer les rejets illicites d'hydrocarbures en mer.

Malgré cela, force est de constater que le dispositif juridique actuel est insuffisant.

Certains navires ont voulu profiter du naufrage de l' Erika pour déballaster au large des côtes bretonnes, ajoutant ainsi d'autres pollutions aux nappes qui dérivaient vers nos côtes, en pensant que cela ne se verrait pas. Ce comportement est à la fois inacceptable et cynique.

Comme vous le savez, nous avons décidé, avec les moyens des douanes et de la marine nationale, de lancer une opération de surveillance : l'opération « Rail propre ».

Quatre avions de surveillance ont été engagés sur la zone : deux avions Polmar des douanes et deux avions de surveillance maritime basés à Lann Bihoué. Plus d'une quarantaine de pollutions ont ainsi été constatées entre le 18 et le 23 février.

Pour lutter contre cette délinquance écologique, le Gouvernement a engagé plusieurs mesures dans le cadre du dernier comité interministériel à la mer, qui s'est tenu à Nantes le 28 février sous la présidence du Premier ministre, M. Lionel Jospin.

Premièrement, il a décidé de doter la France de nouveaux moyens de surveillance, consistant en l'accélération du plan « Douanes-Polmar » afin de disposer dès l'an prochain de deux nouveaux avions modernisés.

Deuxièmement, en matière de prévention, la France soutiendra activement l'adoption de la directive européenne obligeant les navires à attester du dépôt de leurs déchets avant de quitter un port de l'Union. Mais, sans attendre l'adoption de cette directive, le Gouvernement a décidé d'anticiper ce dispositif européen dans la réglementation française.

Le récent projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation communautaire dans le domaine des transports, que vous venez d'examiner, a été l'occasion d'entamer ce processus et un amendement en ce sens, déposé à l'initiative de Mme Odile Saugues, MM. Jean-Yves Le Drian, René Leroux et M. Gilbert Le Bris, votre rapporteur, a été adopté.


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Enfin, la décision d'augmenter de trente postes le nombre des officiers de port et de doubler le nombre des inspecteurs de sécurité, permettra d'appliquer avec la rigueur nécessaire ces nouvelles réglementations et d'effectuer de nouveaux contrôles.

Depuis, j'ai demandé que des études soient engagées pour développer des systèmes de contrôle et de vérification plus efficaces des rejets illicites d'hydrocarbure en mer. Deux solutions peuvent être envisagées à ce stade : D'une part, l'identification des produits transportés par marquage, comme aux Etats-Unis, qui permet d'assurer une parfaite traçabilité de la pollution et l'identification du contrevenant.

D'autre part, la possibilité de compléter les projets existants de boîtes noires sur les navires en prévoyant d'inclure des données sur les déballastages.

Au-delà, il est indispensable de mieux responsabiliser les armateurs et les capitaines, de mettre en place des mesures de prévention et, bien sûr, de renforcer notre outil de répression. C'est l'objectif de cette proposition de loi dont le Gouvernement ne peut que souligner l'opportunité et la pertinence.

Le Gouvernement a, en effet, apprécié l'esprit de responsabilité et d'initiative des élus, des professionnels et des bénévoles des départements touchés par la pollution de l' Erika, qui trouve son prolongement avec le dépôt de cette proposition de loi qui va dans le sens d'une plus grande fermeté à l'encontre des pollueurs.

Celle-ci prévoit, dans ses quatre premiers articles, un triplement des amendes encourues et un doublement des peines d'emprisonnement, ce qui, de toute évidence, aura un caractère plus dissuasif.

L'autre objectif du texte proposé est, par son article 5, de désigner des juridictions spécialisées pour ces délits de pollution, afin de rendre des décisions plus rapides et de qualité.

Enfin, comme le souligne dans son rapport écrit votre rapporteur, M. Le Bris, ces sanctions seront applicables à tous les navires, même s'ils sont sous pavillon d'un pays qui n'est pas partie à la convention de Londres du 2 novembre 1973.

Il est par ailleurs utile de souligner que notre pays aura les moyens de faire appliquer cette nouvelle législation, puisque la convention des Nations unies sur le droit de la mer, signée à Montego Bay en 1982, permet aux autorités côtières de prendre les mesures visant à la protection du milieu marin.

Le Gouvernement, qui partage les préoccupations des parlementaires, ne peut que se réjouir de l'inscription de cette proposition de loi à l'ordre du jour de l'Assemblée n ationale.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

Discussion générale

Mme la présidente.

Dans la discussion générale, la parole est à M. René Leroux.

M. René Leroux.

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, depuis décembre dernier, une partie des côtes atlantiques de notre pays est à nouveau souillée. Comme précédemment avec l' Amoco-Cadiz , le naufrage du navire-citerne Erika constitue une atteinte écologique et économique majeure à notre littoral.

Le spectacle quotidien des plages et des rochers salis par le pétrole est insupportable. Depuis des semaines, des hommes et des femmes, qu'ils soient bénévoles, pompiers, militaires ou employés communaux, travaillent d'arrachepied pour redonner au littoral sa propreté et sa beauté.

Les résultats sont indiscutables. Bien sûr, la tâche est encore immense, mais, petit à petit, on retrouve les paysages habituels.

Les conséquences ne sont évidemment pas qu'esthétiques, les dommages sont tout d'abord écologiques : des centaines d'oiseaux morts, une faune et une flore détériorées, un patrimoine écologique en danger.

Mais c'est aussi une catastrophe économique. De la pêche à la conchyliculture en passant par la saliculture, de la restauration à l'hôtellerie, de nombreux professionnels pâtissent de la pollution. Le préjudice est considérable.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Absolument !

M. René Leroux.

Cette marée noire accidentelle s'explique notamment par l'état de vétusté du navire, par la complaisance d'Etats complices peu regardants qui n'appliquent pas les contrôles nécessaires et tolèrent les poubelles flottantes qui sillonnent les mers.

Si ce naufrage accidentel soulève, à juste titre, autant de réactions d'indignation et de colère, comment supporter plus longtemps les pollueurs volontaires, tous ces bateaux criminels qui dégazent sciemment en pleine mer, pour des motivations uniquement mercantiles, portant gravement atteinte à l'environnement ? Ces dégazages ou déballastages sauvages sont quotidiens. Ils font pourtant l'objet de sanctions puisque la loi du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires punit d'une amende pouvant atteindre 1 million de francs et d'une peine d'emprisonnement de deux ans maximum les capitaines de pétroliers et autres navires qui ont enfreint les règles internationales. Ces peines sont valables également pour les propriétaires des navires.

Mais il semble bien que ces sanctions ne soient plus adaptées à la réalité actuelle et aux enjeux économiques.

Le risque d'une amende semble mince et le coût de la sanction pas assez dissuasif comparé au coût d'une vidange organisée et maîtrisée dans les ports. Il est donc temps de réagir et d'adapter la législation et le régime des sanctions pour obtenir enfin des résultats. Le rapporteur l'a rappelé, on compte, chaque semaine, 39 dégazages sauvages en moyenne. Le chiffre fait peur et suppose une réaction forte des pouvoirs publics.

Je peux témoigner, en ma qualité de maire d'une commune particulièrement touchée par la marée noire, de l'effet catastrophique de ces déballastages. Toute la semaine dernière, au cours du travail de nettoyage du port, qui a mobilisé 550 militaires, grâce au concours du ministère de la défense, de nombreuses traces d'hydrocarbures totalement étrangers à la cargaison de l' Erika ont été recensées.

A un autre niveau, des bateaux de plaisance et certains bateaux de pêche se rendent coupables, au quotidien, d'infractions lourdes de conséquences, au mépris des règles en vigueur. Toutes ces pollutions, relativement limitées en apparence, constituent dans leur ensemble un fléau majeur.

Comment mettre un frein rapide à ces infractions ? D'abord en renforçant les moyens de contrôle. Le Gouvernement doit prendre des engagements forts et donner les moyens aux services des douanes pour améliorer la surveillance et détecter les pollutions et surtout les pollueurs, puisque la difficulté réside dans le fait d'identifier le navire pollueur.


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Ensuite, il convient d'améliorer les capacités portuaires de vidange et faire en sorte que les navires puissent plus facilement accéder aux installations de nettoyage des cuves.

Enfin, et c'est l'objet de la proposition que nous étudions aujourd'hui, il faut alourdir les sanctions et faire en sorte que l'arsenal répressif dissuade les criminels que sont ces pollueurs en mer.

Le groupe socialiste votera avec conviction ce texte, qui s'avère nécessaire face aux comportements irresponsables de certains. C'est une vraie réponse aux attentes des citoyens, et notamment des habitants du littoral. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Louis Guédon.

M. Louis Guédon.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 10 mai dernier, la présidence de l'Assemblée nationale enregistrait une proposition de loi, cosignée par tous les députés socialistes et apparentés, modifiant la loi du 5 juillet 1983 et visant à réprimer davantage la pollution par les navires.

Pourquoi une telle précipitation, alors que le pays, et plus particulièrement le littoral atlantique, reste traumatisé plus par les conséquences catastrophiques du naufrage de l' Erika et de celles qui ont suivi l' Amoco-Cadiz que par les effets condamnables des opérations de dégazage ? Un consensus national dépassant toutes les sensibilités politiques ne semblait-il pas s'être constitué autour du drame de l' Erika ? N'avons-nous pas vu au coude à coude, à Lorient, Vannes, Rennes et ailleurs, tous les maires, tous les parlementaires, tous les élus, s'exprimant d'une seule voix toutes tendances confondues, dénoncer une catastrophe écologique et économique, réclamer des mesures de prévention et des solutions adaptées à la situation, attendre les justes dédommagements indispensables à la survie économique des sinistrés que sont les pêcheurs, les ostréiculteurs et les professionnels du tourisme ? La précipitation de nos collègues de la majorité, la solidarité exprimée par de nombreux députés que nous n'avons jamais vus sur le terrain...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Oh !

M. René Leroux.

Ce n'est pas gentil.

M. Louis Guédon.

... s'expliquerait si l'opposition n'avait pas assumé ses responsabilités ou proposé la mise en place de mesures appropriées.

Or il n'en est rien, bien au contraire. En effet, en septembre 1999, alors que l' Erika et ses drames n'effleuraient pas les esprits, un de nos collègues de l'opposition, B ernard Deflesselles, présentait sur le même sujet,

« l'accentuation des pénalités à l'endroit des navires coupables de dégazage », une proposition de loi. Celle-ci, que j'avais d'ailleurs cosignée, n'a jamais eu l'honneur d'être débattue. Que faut-il retenir sinon que l'opposition, dans le calme, avait soulevé sans être entendue ce grave problème ? Pourquoi débattre de cette question aujourd'hui et dans quel but, alors que notre assemblée a constitué une commission d'enquête qui, par la voix de son rapporteur, Jean-Yves Le Drian, doit faire connaître dans quelques jours les conclusions de son travail sur l'ensemble des problèmes que pose la pollution en mer par les hydrocarbures ?

M. Jean-Pierre Dufau.

Ce n'est pas le même sujet !

M. Louis Guédon.

Nous pensions que, à défaut de reprendre nos propositions, en triplant les peines au lieu de les doubler, le Parlement allait au moins mûrir sa réflexion et proposer un plan de lutte efficace. Il n'en est rien. C'est dommage, car vous aviez la possibilité de proposer des mesures utiles qui, je le répète, fortes du consensus qui s'impose en la matière et des attentes de la population, auraient été accueillies positivement et unanimement par l'ensemble des représentants de la nation.

C'est d'ailleurs dans cet esprit que la commission d'enquête sur la sécurité du transport maritime des produits dangereux ou polluants a vu le jour. Vice-président de celle-ci, il me semblait plus approprié d'attendre ses conclusions, prévues pour le début du mois de juillet, afin de fixer les axes d'une nouvelle politique maritime rationnelle et efficace. Mais je constate que nous ne partageons pas cette vision.

J'aurais préféré voir au cours de ce débat la majorité montrer plus d'égards à l'endroit du Parlement. Cela dit, il est évident que le groupe du Rassemblement pour la République votera ce texte.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ah !

M. René Leroux.

Très bien !

M. Jean-Pierre Dufau.

Enfin une parole sensée !

M. Louis Guédon.

Toutefois, il n'échappe à personne qu'en raison de l'actualité ce texte ne répond pas à la première urgence. Quelles que soient les mesures répressives que justifient, par exemple, les 39 dégazages sauvages enregistrés entre le 18 et le 23 février dernier, la priorité doit être donnée aux grandes catastrophes libérant des milliers de tonnes d'hydrocarbures.

Ce texte, dans la situation actuelle, c'est-à-dire en pleine crise, déçoit les Français par sa portée limitée. Il leur donne l'impression de ne pas avoir été entendus.

Les Français attendent un traitement et des propositions adaptés à l'importance quantitative de l'agression q u'ils subissent. Ils n'attendent pas seulement des amendes et des peines de prison. Ils refusent d'entendre que le « risque zéro » en matière de pollution n'existe pas et qu'une catastrophe semblable pourrait à nouveau les accabler. Ils souhaitent un langage responsable à la hauteur du sujet.

Les habitants du littoral, nourris de culture maritime, savent bien évidemment que les naufrages font partie des dangers et des drames de la mer. Unissant leurs efforts pour que, dans de telles circonstances, la vie des équipages soit sauvée, ils font la distinction entre la perte de navires, qui ne peut atteindre le « risque zéro », et les pollutions inacceptables, qui doivent, dans le cadre du transport des produits dangereux, tendre vers cet objectif.

La voie maritime doit imposer aux transporteurs des hydrocarbures des exigences qui assurent la sécurité. Ne sont-elles pas d'ailleurs pratiquement obtenues pour les produits radioactifs transportés en fûts d'acier de vingtcinq centimètres d'épaisseur ? La première des exigences est d'étendre au propriétaire de la cargaison le partage des responsabilités avec l'armateur et l'équipage. Le propriétaire d'une cargaison de produits dangereux doit à tout moment rester responsable de son bien, y compris durant le transport. Est-il normal de s'en remettre à un fonds d'indemnisation, dont on voit actuellement combien les limites de compétences et de moyens sont rapidement atteintes ? Est-il concevable que les propriétaires de cargaison dont les bénéfices sont


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considérables fassent appel, allégeant ainsi leurs frais de transport, à des pavillons de complaisance ? L'Assemblée nationale n'aurait-elle pas mérité en priorité un débat sur l'évolution du droit du pavillon et sur celui du port ? Au moment où la France s'apprête à présider l'Union européenne, n'aurait-il pas fallu proposer en premier lieu une adhésion de toutes les puissances maritimes européennes à une politique protectrice et efficace partagée par tous ? L'affaire de l' Erika ne relance-t-elle pas l'idée d'une agence maritime européenne ? La chambre syndicale des constructeurs de navires, le comité central des armateurs de France, l'Institut français de la mer, le Comité national des pêches maritimes et l'Association pour le développement des ports français se sont associés, le 17 janvier dernier, pour en demander la constitution.

Il est indispensable de créer une nouvelle structure entre l'Organisation maritime internationale et les autorités nationales chargées de la sécurité maritime dans les eaux relevant de leur responsabilité. Le niveau européen est indispensable pour plusieurs raisons.

Il n'est pas normal que seuls les Etats membres dont les zones maritimes sont traversées par les voies maritimes dont bénéficient l'ensemble de l'Union européenne supportent le fardeau de leur entretien et soient pénalisés par les accidents de mer qui y surviennent.

Il n'est pas normal que les Etats membres puissent avoir des comportements différents en matière de règles de sécurité, s'agissant de la façon de les appliquer et de sanctionner les infractions.

Il n'est pas normal que les questions de sécurité puissent dépendre de facteurs commerciaux et de concurrence entre les ports et entre les pays de l'Union européenne.

M. Jean-Pierre Dufau.

Ça s'appelle le libéralisme !

M. Louis Guédon.

Ces diverses raisons concourent à la nécessité de mettre en place, à bref délai, une agence maritime européenne responsable de la voie maritime communautaire. L'Europe, parlant à l'unisson, peut-elle imposer la voix de l'équité, de la justice et de la raison ? Capables de réagir aux catastrophes naturelles, les populations de l'ouest de la France peuvent-elles espérer ne plus connaître des circonstances inacceptables, engendrées involontairement en mer par certains de leurs semblables ? Nos concitoyens du littoral ne peuvent accepter que, par ses exigences, la technologie puisse revêtir la fausse apparence d'un prédateur.

Devant la gravité de la situation, le débat ne peut se limiter à une déclaration d'intention ou à un effet d'annonce. Avons-nous, par exemple, au sein du corps des i nspecteurs, les effectifs suffisants pour assurer les contrôles nécessaires ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ils vont doubler !

M. Louis Guédon.

Cela n'est pas fait, monsieur le ministre ! Avons-nous, dans nos ports, des stations de dégazage en nombre et en importance suffisants pour faire face à cette juste obligation ? Avons-nous, en règle générale, les moyens de prouver devant les juridictions compétentes les responsabilités de tous les commandants utilisant ce procédé que nous sommes unanimes à condamner ? Si, à ces questions, les réponses ne peuvent être affirmatives, alors ce débat n'est pas satisfaisant. Il eût fallu le précéder d'une analyse des moyens et d'une programmation des recrutements ou d'équipements nécessaires.

Pourquoi, enfin, l'Assemblée nationale donne-t-elle la priorité à ce texte répressif ? Nos concitoyens attendent que l'on débatte d'abord de la prévention, que l'on prenne des mesures visant à assurer leur protection, celle de leur environnement, celle de la faune les oiseaux et la ressource halieutique -, celle de la flore et la défense de leurs ressources économiques. Ils attendent des mesures visant à rendre impossibles de nouvelles marées noires.

Ne sont-ils pas troublés actuellement de voir la majorité proposer, dans une apparente sérénité, un texte dont elle a délaissé l'idée en septembre dernier ? Il n'est fait aucune allusion au naufrage de l' Erika dans l'exposé des motifs de votre proposition. Il n'en reste pas moins vrai que c'est cette catastrophe qui actuellement focalise, et à juste titre, l'attention de nos concitoyens.

Ne sont-ils pas étonnés de voir que la proposition de loi rapportée par Gilbert Le Bris a été précédée, le 30 m ai dernier, d'amendements comparables soutenus par JeanYves Le Drian ? Cela ne fait-il pas double emploi ? Quelle peut être l'espérance d'application de votre texte puisque vous reconnaissez que l'existant moins contraignant n'est pas appliqué ? Nous sommes certains que, contrairement à l'argumentation figurant dans l'exposé des motifs de la proposition, l'augmentation des amendes encourues ne sera pas la seule voie possible pour lutter contre le problème des dégazages en mer.

La gravité de la situation imposait en priorité un débat de fond.

Quel doit être le rôle de l'Europe pour échapper aux problèmes que suscitent les pavillons de complaisance ? Comment doivent évoluer le droit du pavillon et le droit du port ? Quelle évolution peut-on attendre de l'Organisation maritime internationale ? Quand la responsabilité des propriétaires de cargaisons de produits dangereuxs era-t-elle engagée comme celles de l'armateur, du commandant et de son équipage ? Comment améliorer la conception et le contrôle des navires ? La sagesse n'est-elle pas d'attendre les conclusions de notre commission d'enquête ? A toutes ces interrogations s'ajoutent celles que suscite le déroulement des plans Polmar mer et Polmar Terre.

Quelle doit-être l'attitude d'un pays qui reçoit un message de détresse, même ultérieurement annulé, d'un navire transportant une cargaison dangereuse ? Que penser des systèmes de pompage dont nous disposons actuellement ? Que penser d'images présentant avec précision la situation d'une nappe de mazout et qui se trouvent démenties lorsque cette dernière touche le littoral ? Comment accélérer le règlement des dommages et préjudices attendu avec anxiété par les victimes ? Telles sont quelques-unes des questions primordiales qui auraient dû en priorité nous mobiliser. Toutes ces questions auraient mérité un vaste débat au sein de notre assemblée, plus qu'une reprise substantielle des termes d'une proposition de loi que nous avions soutenue.

Le groupe RPR va, bien entendu, voter ce texte...

M. Jean-Pierre Dufau.

Très bien !

M. Louis Guédon.

... en sachant néanmoins qu'il ne répond pas du tout à l'inquiétude des populations et qu'il ne correspond pas à l'ampleur des dangers.

M. Daniel Paul.

Vous votez n'importe quoi alors !

M. Louis Guédon.

Conscients de devoir mettre en place des moyens propres à améliorer la prévention, à sécuriser au maximum notre littoral et à protéger au


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mieux l'écosystème marin, nous regrettons qu'aucune thérapeutique ne soit envisagée dans ce dispositif. Nous formons donc des voeux pour qu'un large consensus puisse intervenir dans un bref avenir et qu'il se traduise par l'édiction d'une réglementation complète, réaliste et constructive afin de protéger les populations maritimes de catastrophes intolérables, inadmissibles et, pour certains, inexcusables.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la catastrophe de l' Erika est encore présente dans nos esprits. Elle nous est rappelée non seulement par les usagers du littoral, par les professionnels, mais aussi par le désastre sur la faune et la flore qu'elle a causé et laissé derrière elle. Ce sont des dommages écologiques et économiques considérables.

Cette catastrophe a tué des dizaines de milliers d'oiseaux. Elle a abîmé des ressources halieutiques et nos paysages. C'est tout un écosystème et un biotope qui souffrent de la priorité donnée à la loi du marché. Les conséquences ne sont pas encore toutes mesurées à nos jours et sans doute faudra-t-il plusieurs années pour les mesurer.

Catastrophe écologique donc, mais également économique pour tous les professionnels de la mer comme les pêcheurs, les paludiers et les ostréiculteurs, pour ne citer qu'eux, auxquels il convient d'ajouter les professionnels du tourisme. Néanmoins, la solidarité, le courage, la générosité et l'abnégation des habitants du littoral atlantique et de tous ceux qui s'y sont joints, ainsi que leur rapidité de réaction, ont permis de limiter les effets produits par la dégradation de notre littoral. Sans leurs interv entions, la situation serait bien pis encore. Cela démontre l'attachement de nos concitoyens à l'environnement, leur souci d'un milieu paisible, sain, où il fait bon vivre, pour eux, mais aussi pour les générations à venir.

Le transport maritime doit se développer dans le respect des hommes, des mers, des côtes, des faunes et des flores, et il est totalement inadmissible que des navires sous normes, battant pavillon de complaisance, avec des équipages sans droits, continuent de fréquenter les mers pour le plus grand profit de quelques armateurs camouflés derrière des sociétés écrans afin d'échapper non seu lement aux contrôles, mais aussi au fisc et d'augmenter encore leurs profits.

Il est totalement inadmissible que des réglementations insuffisantes ou inappliquées ne permettent pas de mieux lutter contre ces dérives, et il serait encore plus inadmissible que, sachant ce qui se cache derrière ces situations, nous ne prenions pas les initiatives qui s'imposent.

Le gouvernement français agit depuis décembre dernier, répondant à l'attente des populations et des professionnels, en se tournant vers la Commission européenne, d'une part, car ces questions ont une dimension politique qu'il convient de placer au niveau communautaire, et vers les instances maritimes internationales - l'OMI -, d'autre part, car ces questions interpellent toutes les communautés maritimes. Le Parlement a, pour sa part, désigné une commission d'enquête sur la sécurité des transports maritimes qui rendra son rapport dans un mois.

Les habitants du littoral atlantique ont dit avec force :

« Plus jamais ça ! ». Il y a, d'une certaine manière, obligation de résultats, d'avancées, d'efforts reconnus. La jungle qui s'est imposée dans les transports maritimes dans le cadre d'une mondialisation dominée par des intérêts financiers, avec pour corollaires la recherche des moindres coûts et le dumping social, est pour une grande part à l'origine de ces catastrophes. Toute bataille contre cette logique est favorable à l'homme, à l'environnement. C'est une bataille difficile, mais elle est incontournable et nécessaire à la survie de nos activités, de leur qualité et des emplois qu'elles signifient. Le texte qui nous est proposé aujourd'hui s'inscrit dans cette bataille et poursuit la logique des interventions justifiées par le naufrage de l' Erika

Les propositions faites à l'OMI et à la Commission européenne, celles qui seront dans le rapport de la commission d'enquête parlementaire, la transposition de directives européennes dans le domaine des transports, cette proposition de loi, tout cela confirme notre volonté d'inscrire notre action dans la durée, dans la recherche de résultats et de solutions durables.

Mais nos mers et océans ne souffrent pas que de pollutions pétrolières. Les chimiquiers et porte-conteneurs contiennent aussi des produits extrêmement dangereux et polluants. Par ailleurs, nos mers et océans ne souffrent pas que de pollutions causées par des naufrages. Fort heureusement, et même si leur nombre est bien trop élevé, ceux-ci restent exceptionnels.

Chaque jour nos mers et océans sont souillés par des dégazages et déballastages qui polluent gravement l'espace maritime. Certaines sources ministérielles ou européennes indiquent que, chaque année, la mer Méditerranée reçoit ainsi 600 000 tonnes de déchets issus des navires. La flotte mondiale est composée de 54 000 unités. Si chacune d'entre elles ne perd, volontairement ou accidentellement, que 100 tonnes de déchets de soute ou de ballast, ce sont 5 400 000 tonnes qui sont rejetées à la mer et ces chiffres ne sont pas fantaisistes ! Selon la direction environnement de la Communauté européenne 5 000 tonnes par jour sont rejetées dans la Baltique et 8 000 tonnes par jour dans la mer du Nord, soit plus de 3 millions de tonnes par an uniquement pour ces deux mers, soit dix Amoco-Cadiz par an ! Les raisons sont connues. Il faut gagner du temps, éviter de rester plus longtemps que nécessaire dans un port.

Le dégazage et le déballastage en mer, si possible à l'abri des regards, sont donc monnaie courante. Force est aussi de reconnaître que l'absence ou l'insuffisance d'installations adaptées à ce genre d'opérations permet difficilement d'imposer une obligation absolue. Dans notre pays, seuls deux ports disposent d'installations fixes : Le Havre et Marseille.

Parallèlement à l'adoption du texte dont il est aujourd'hui question, il convient donc de prendre les dispositions permettant d'équiper les ports et pas seulement les plus importants. De simples caboteurs faisant des opérations entre des ports d'importance régionale ont aussi besoin de se débarrasser de leurs déchets. Dès lors, il convient de réfléchir au problème du coût du service ainsi offert. Aujourd'hui, ce qui pose problème, c'est que ce coût, comparé à celui de l'amende encourue pour un déballastage en mer, n'est pas attractif, ou plutôt le montant de l'amendement n'est pas dissuasif.

Il faut donc augmenter de façon très significative le montant de cette amende en même temps qu'il convient de mettre au point les moyens permettant de découvrir les auteurs des infractions. Les Etats-Unis, en intégrant dans une base de données toutes les sortes de pétrole et de résidus pétroliers existant, nous ont affirmé être capables de connaître les responsables des déballastages ou dégazages. Sans doute notre situation en Europe est-elle


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différente, mais tout semble indiquer que l'on devrait pouvoir introduire dans les cargaisons, au chargement, un produit identificateur. Vaste projet à mener au niveau européen, au niveau international, mais le jeu en vaut sûrement la chandelle ! Qui est responsable de ces infractions ? Sans doute le capitaine n'est-il jamais à l'écart d'une telle opération, mais faut-il s'en tenir à sa responsabilité et à sa culpabilité ? Les conditions de transport maritime sont telles aujourd'hui que tout confirme les pressions fortes exercées sur les commandements pour ne pas perdre de temps dans les ports, pour ne pas payer les services de déballastage ou de dégazage et pour ne pas se faire prendre en infraction. Sans nul doute, ces pressions peuvent aller jusqu'au chantage à la prime, ou à l'emploi. Par un amendement, le groupe communiste vous proposera donc d'intégrer la possibilité de mettre en cause l'armateur et de rompre avec la logique d'un texte de 1983 que les officiers de la marine marchande considèrent comme « scélérat », même si le mot peut sembler fort, parce qu'une fois de plus les véritables responsables des conditions de fonctionnement du transport maritime international ne sont pas mis en cause.

La complexité des procédures judiciaires rend plus difficile la recherche des coupables et leur traduction devant les tribunaux. La compétence donnée aux tribunaux des chefs-lieux de préfecture maritime est une bonne proposition. Je pense d'ailleurs qu'il faudra assortir ces opérations de la publicité la plus large possible pour renforcer la dissuasion en dénonçant ces atteintes au monde maritime et en montrant du doigt les coupables. Ne faudrait-il pas aussi réfléchir à des sanctions touchant les brevets des officiers et le blocage des navires dans les ports à l'escale suivante ? Notre pays est engagé aux plans national, européen et international dans de nombreux combats justes que les députés communistes soutiennent totalement. Mais j'ai évoqué tout à l'heure la nécessité de mettre en place, dans les ports, les outils nécessaires aux contrôles, qu'ils soient fixes ou mobiles, et il conviendra d'arrêter les modalités de leur utilisation. Il faudra aussi des moyens humains en nombre suffisant si nous voulons que nos textes soient appliqués et il faudra que ces moyens humains soient qualifiés pour qu'ils puissent lutter dans le cadre des missions qui leur seront dévolues.

L'enjeu est d'importance si l'on veut que nos mers et nos océans redeviennent des lieux de sécurité pour les hommes et de vie pour la flore et la faune. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Edouard Landrain.

M. Edouard Landrain.

Si besoin était, les conversations que j'ai pu avoir avec certains de nos concitoyens lors de ces quelques jours de congé de la Pentecôte m'ont renforcé dans l'idée que l'opinion juge sans indulgence les politiques et attend qu'ils fassent preuve d'un peu de courage dans leurs décisions.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ils en ont !

M. Edouard Landrain.

Les gens en ont marre ! Les populations des bords de mer en ont marre ! Les professionnels vivant de la mer et du tourisme en ont marre ! Le Torrey Canyon , l' Amoco-Cadiz en 1978, le Tanio en 1980 ! Des dégazages journaliers au pied de nos falaises, nos côtes meurtries, la Bretagne massacrée, j'allais dire sacrifiée !

M. Daniel Paul.

Par qui ?

M. Edouard Landrain.

De bonnes intentions certes, des rapports de qualité, des cris du coeur, des conseils comme ceux de Guy Guermeur, mais jamais appliqués ou peu ! Des populations en colère, la nature massacrée, des milliers d'oiseaux assassinés, des paysages enlaidis, des plages souillées, c'est un simple constat ! Depuis plus de vingt ans, on en parle en espérant secrètement que la misère se portera chez les autres. Les Américains eux-mêmes n'ont vraiment pris conscience du problème que lorsqu'ils ont été frappés chez eux par le naufrage de l' Exxon Valdes . Ils ont pris les mesures qu'il fallait avec égoïsme, mais avec pragmatisme. Ils ont voté des lois sans concession et ont doté leurs gardes-côtes de pouvoirs considérables.

Depuis vingt ans, nous aurions pu prendre des mesures comparables et nous attendions... Les interdictions de dégazage ? On les évoquait ! Les gardes-côtes ? On en discutait ! Les responsabilités des armateurs, des affréteurs, le problème des assurances ? On en parlait ! Et là, brutalement, parce que le naufrage de l' Erika s'est produit dans des conditions inconcevables, invraisemblables, nous prenons des mesures rapides en matière de dégazage, de déballastage, sans attendre les conclusions de la commission chargée d'examiner les problèmes posés par le transport maritime des produits dangereux et polluants ! Cosignataire de la proposition de loi de notre collègue Bernard Deflesselles, proposition jumelle, je voterai, ainsi le groupe UDF, la présente proposition. Mais je voudrais faire quelques suggestions que le Gouvernement pourrait peut-être prendre en compte.

La loi du 5 juillet 1983 était insuffisante, tout le monde le savait. Encore que tout le monde savait qu'elle était mal ou insuffisamment appliquée et que les intérêts primaient sur la raison. Dans son rapport, Gilbert Le Bris indique que dégazage et déballastage en mer ne sont pas systématiquement interdits et que la convention internationale de Londres, du 2 novembre 1973, souvent modifiée, est elle aussi très insuffisante. A la vérité, il fau t en arriver à interdire totalement dégazage et déballastage en mer, quelle que soit la zone, et pas seulement en Méditerranée - où la convention n'est d'ailleurs pas respectée non plus.

Mais les moyens juridiques, les moyens de contrôle et d'intervention, les sanctions prévues par nos lois sont trop limités. Donnons-nous donc suffisamment de navires, d'avions de contrôle, dotons-nous d'un corps de gardescôtes, style coast guards, avec de vrais pouvoirs. Donnonsnous les moyens de faire respecter nos réglementations et nos lois. Plaidons pour un élargissement à l'Europe entière d'abord, au monde entier ensuite.

Quand la raison règnera sur l'ensemble du globe, le problème sera résolu, du moins en cas de pollution volontaire, en cas de « gangstérisme maritime », comme certains ont pu l'écrire. Déballaster dans le sillage d'un autre navire, dégazer dans la zone de la catastrophe de l' Erika sont encore plus odieux et le fait de ne risquer qu'une amende modérée est une incitation au vice. Ne lésinons pas, soyons sévères. Donnons aux préfets maritimes et aux tribunaux de proximité les pouvoirs qu'ils nous demandent pour être respectés.

Francis Vallat, président de l'Institut français de la mer, le dit, nous n'aurons une efficacité comparable à celle des Américains que si nous acquérons le nombre, la qualité, la compétence et l'intransigeance des coast guards.


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Et il poursuit en réclamant une agence européenne vraiment opérationnelle et quasiment dotée d'un pouvoir de sanction immédiate.

Les bons professionnels et l'Institut français de la mer savent que les textes comptent moins que la volonté de les appliquer et que toute législation unilatérale affaiblit encore le poids des textes internationaux.

L'amendement de Jean-Yves Le Drian du 30 mai, la proposition de loi d'aujourd'hui, celle de Bernard Deflesselles, celle que j'avais rédigée avec Pierre Hériaud et Dominique Caillaud sur la création d'un corps de gardescôtes vont dans le bon sens. Mais il faudra, à l'issue du rapport de la commission, aller encore plus loin que le texte dont nous discutons aujourd'hui. N'oublions jamais que chaque année les dégazages seuls libèrent 1,2 million de tonnes d'hydrocarbures et que 6 millions de tonnes de déchets sont déversés dans les océans.

Pour conclure, monsieur le ministre, permettez-moi quelques recommandations.

Premièrement, que dans ce texte le prix des amendes soit notifié en euros.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Et en dollars, aussi ?

M. Edouard Landrain.

Cela illustrerait davantage encore notre volonté d'étendre nos ambitions à l'échelle de l'Europe. A la veille de la présidence française, cela aurait encore plus de valeur.

Deuxièmement, que les amendes soient indexées sur le prix du pétrole. Ainsi n'y aurait-il pas de risque de décrochage au fil du temps.

Troisièmement, que la solvabilité des affréteurs et des armateurs soit encore mieux recherchée et que les assurances obligatoires de ceux-ci soient examinées à chaque affrètement.

Quatrièmement, que les navires ne puissent vraiment quitter un port qu'après avoir été vérifiés.

Cinquièmement, que la France ne navigue pas en solitaire ; il faut inscrire nos préoccupations au programme des six mois de la présidence française.

Il faut également prévoir une grande loi sur la mer dès la parution du rapport de Jean-Yves Le Drian et de la commission d'enquête sur les transports maritimes.

Il faut enfin que nous nous dotions sans délai des moyens réclamés - les bateaux, les avions, les garde-côtes évoqués tout à l'heure - et que les navires « épinglés » dans une zone à déterminer, peut-être la zone des cinquante milles, soient déroutés sans ménagement vers les ports où se situent les tribunaux de proximité. Il existe des règles particulières pour la drogue, appliquons-les aux hydrocarbures.

Il ne faudrait pas que, comme en 1993, les mesures que nous allons voter et qui pourraient être reprises dans une résolution au Parlement européen soient enterrées par le Conseil des ministres européens, sous prétexte que les Pays-Bas et la Norvège, de peur de perdre du trafic au profit des ports russes, ne veulent pas de normes d'entrée plus sévères dans leurs ports.

Que les mesures que nous prenons aujourd'hui et que celles que nous prendrons encore demain soient l'amorce d'une vraie politique du respect de la mer, pour les générations futures ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand, pour le groupe Radical, Citoyen et Vert.

M. Jean-Michel Marchand.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'émotion est toujours grande, la colère toujours vive et l'inquiétude perdure, six mois après le naufrage de l' Erika , alors que les effets de la marée noire sont encore visibles sur nos côtes, parfois sur nos plages. Les conséquences économiques et écologiques ne sont pas encore évaluées, certaines resteront irréparables. Chacun forme le voeu que le pompage des soutes de l'épave mette un terme à l'arrivée répétée d'hydrocarbures sur le littoral. Mais cet espoir est vain puisque l'on sait que les navires, profitant de cette pollution accidentelle et suivant la logique d'un système mondial ultralibéral...

M. Jean-Pierre Dufau.

En effet !

M. Jean-Michel Marchand.

... ont été encore plus nombreux que d'habitude à pratiquer des dégazages illégaux.

Nous savons que les quantités ainsi répandues à la surface des mers, sont, et de très loin, supérieures à cellesr ésultant des catastrophes qui mobilisent opinion publique et média. Des centaines de milliers de tonnes, chaque année, portent atteinte au patrimoine maritime.

On avance le chiffre de 600 000 tonnes, rien que pour la Méditerranée, on parle de dizaines de déballastages, chaque jour, en mer du Nord et en Belgique, alors que ces zones sont considérées comme particulièrement fragiles.

Ces déballastages délictueux font périr des milliers d'oiseaux, menacent la biodiversité et détruisent les écosystèmes. Les associations comme la Ligue de protection des oiseaux ou la société pour l'étude et la protection de la nature en Bretagne le savent bien, elles qui procèdent tout au long de l'année au sauvetage des oiseaux mazoutés et estiment que 10 % seulement de ces derniers arrivent sur les côtes.

C'est cette pratique illégale qu'il faut enrayer, qu'il faut bannir ! Des mesures significatives et efficaces doivent être prises. La proposition de tripler le montant des amendes apparaît comme juste et méritée. Il est tout aussi important, monsieur le rapporteur, de réaffirmer le principe « pollueur, payeur » et de l'appliquer.

Mais qui est le pollueur ? La convention Marpol, qui interdit le rejet volontaire d'hydrocarbures ou de mélange d'hydrocarbures, vise le navire ; la législation française, le capitaine. Or celui-ci n'est plus le seul maître à bord après Dieu. C'est un salarié placé au sein d'un système qui a été volontairement complexifié afin que les responsabilités soient difficiles à déterminer.

M. Michel Morin, dans sa thèse sur la pollution par les navires et les Etats côtiers, écrivait en juin 1995 : « Le capitaine le moins bien protégé dans son statut et qui a le moins de moyens pour effectuer son travail sera celui qui a le plus de risques de subir une condamnation. »

La loi devra donc permettre d'établir la chaîne des responsabilités, de l'armateur à l'affréteur, sans oublier le propriétaire de la cargaison, les autorités portuaires ou les sociétés de certification. Car si le capitaine, qui reste responsable, est celui qui fait exécuter les opérations de rejet en mer, il n'en reçoit jamais l'ordre, du moins écrit.

Pour être efficace, il faut des moyens pour repérer les nappes de fioul en mer et l'idée de « marquer » chaque cargaison doit être très rapidement opérationnelle afin que l'on puisse identifier les navires coupables.

Mais plutôt que de punir, il est préférable de prévenir.

Il faut que chaque port soit doté de moyens techniquess uffisants pour recevoir à tout instant les déchets


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d'exploitation et les résidus de cargaison. Le coût de ces opérations, raisonnable et attractif, devrait en outre faire l'objet d'une harmonisation entre les différents ports de la façade atlantique et de la Méditerranée. Aujourd'hui, de trop nombreux ports ne peuvent fournir de tels services, car ils ne sont pas équipés pour stocker et traiter les résidus. Un tel équipement doit être une priorité impérieuse.

On peut envisager, et nous l'avons fait lors du débat sur les dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports, qu'un navire puisse quitter un port si ses capacités de stockage des différents résidus sont suffisantes. Mais il faut compléter cette mesure par l'obligation de déclarer aux autorités portuaires le port où a été effectuée l'opération de déballastage. J'av ais déposé un amendement en ce sens, mais il n'a pas été retenu ; il nous faudra bien y revenir lors d'une prochaine lecture. Sinon, des navires continueront à polluer les mers en toute impunité et à provoquer des catastrophes écologiques et économiques.

Cette proposition de loi aborde un sujet particulièrement sensible aujourd'hui encore. Les Verts avaient déjà déposé une proposition de loi sur ce thème dès janvier.

Les sanctions pécuniaires instituées ici se veulent dissuasives. C'est un premier pas, mais seulement un premier pas. Les mesures à prendre sont bien plus complexes, si l'on veut renforcer efficacement la sécurité maritime. Elles sont du ressort de l'Organisation maritime internationale.

Mais nous ne devons pas exclure que l'Union européenne prenne ses responsabilités et la France, qui prend la présidence de l'Union, a un rôle essentiel à jouer dans ce domaine.

Nous voterons bien sûr cette proposition de loi. Mais nous souhaitons que, s'agissant de la sécurité maritime, la France puisse délibérer sur un texte complet, plus performant que les mesures que vous préconisez, monsieur le rapporteur ; celles-ci sont indispensables, certes, mais elles ne balaient pas l'ensemble du problème. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Bernard Deflesselles, pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants.

M. Bernard Deflesselles.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons aujourd'hui à débattre d'une proposition de loi visant à durcir les peines applicables aux capitaines indélicats et peu scrupuleux qui effectuent des dégazages ou des déballastages sauvages en mer.

Monsieur Le Bris, ce texte, dont vous êtes l'auteur et le rapporteur, suscite de ma part un double sentiment.

D'abord, un sentiment de satisfaction ; car tout ce qui peut contribuer à réduire les atteintes à l'environnement emporte mon adhésion. Ensuite, un sentiment d'amertume, voire d'irritation ; car, en découvrant ce texte, j'y ai retrouvé, à quelques mots près, ma proposition de loi déposée le 8 septembre dernier. Quelle ne fut donc pas ma surprise : c'est un plagiat en bonne et due forme !

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

N'exagérons rien !

M. Bernard Deflesselles.

Je sais que c'est une pratique courante, entrée dans les moeurs de notre assemblée ; à n'en pas douter, elle n'honore pas le travail parlementaire et n'en renforce pas la crédibilité. Mais passons... Une v aine susceptibilité, je vous l'accorde, ne doit pas l'emporter sur la raison.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est sage, en effet !

M. Bernard Deflesselles.

Pour autant, je n'ose croire aujourd'hui que ce texte soit un texte de circonstance, concocté uniquement pour apaiser l'amertume, les inquiétudes, voire le découragement de toute une population qui, avec détermination, avec pugnacité, pendant de nombreuses semaines, a tenté de rendre vie à des kilomètres de côtes souillées par la catastrophe de l' Erika

Avec le recul, vous me voyez d'autant plus dépité aujourd'hui de constater que mon texte, cosigné par plus de quatre-vingts parlementaires de l'opposition, dont mes amis Guédon et Landrain ici présents, n'ait pas été discuté et voté l'année dernière.

M. Louis Guédon et M. Edouard Landrain.

En effet !

M. Bernard Deflesselles.

Le Gouvernement n'avait pas jugé alors utile de l'inscrire à l'ordre du jour de notre assemblée. Certes, la catastrophe de l' Erika n'avait pas eu lieu et les pouvoirs publics tardaient à prendre conscience d'un phénomène de plus en plus fréquent.

Un phénomène qui a fortement marqué ces derniers temps un littoral dont je suis un élu, celui de la Méditerranée ; mais aussi celui des côtes bretonnes et atlantiques qui détient un triste record, à la suite d'ailleurs du naufrage de l' Erika : 39 dégazages sauvages dans la semaine du 18 au 23 février dernier.

Il nous appartient donc d'étudier aujourd'hui avec la plus grande attention cette proposition de loi, mais aussi d'aller plus loin.

Si cette proposition peut être qualifiée de tardive, elle n'en demeure pas moins pertinente. Les dégazages et déballastages sauvages constituent un problème récurrent devant lequel les pouvoirs publics sont restés passifs depuis de trop nombreuses années. Il faut donc, vous avez raison, monsieur le rapporteur, durcir très sensiblement la législation en la matière.

Vous trouverez donc en moi un allié objectif, puisque votre texte est pratiquement en tous points similaire au mien. Ma proposition prévoyait de doubler les amendes encourues par les auteurs de rejets polluants ; la vôtre fait, en quelque sorte, de la surenchère en prévoyant de les tripler. Vous êtes, en l'occurrence, sur cette question, un

« Monsieur Plus », monsieur le rapporteur. (Sourires.)

Vous proposez de doubler les peines d'emprisonnement ; cela ne peut qu'emporter notre adhésion, c'était notre proposition. Votre copie, dans les deux sens du terme, est donc parfaite. Nous voterons donc le texte.

Mesdames, messieurs les députés de la gauche plurielle, reconnaissez que l'opposition a souvent de bonnes idées.

Tordons ensemble, une fois pour toutes, le cou à votre malheureuse habitude de dire que nous nous complaisons dans la critique en ne proposant rien ! Cela dit, mes chers collègues, il nous faut aller plus loin en élaborant une véritable politique globale de sécurité des transports maritimes. Le renforcement de la sécurité passe inévitablement par l'accroissement des moyens consacrés à la surveillance et au contrôle des navires.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Eh oui !

M. Bernard Deflesselles.

La sécurité repose aussi sur une plus grande responsabilisation des opérateurs. Cela dit, monsieur le ministre, le Gouvernement entend-il faire pression sur ses partenaires européens pour changer la réglementation relative à la responsabilité des affréteurs ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Oui !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

M. Bernard Deflesselles.

Nous pouvons en douter. Car rappelez-vous, mesdames, messieurs, c'est un gouvernement socialiste qui, en 1992, tout le monde l'a oublié, a négocié, préparé et signé un protocole modifiant la Convention internationale de 1969 sur les pollutions par les hydrocarbures. Celui-ci exonère désormais les pétroliers de toute responsabilité financière. Il institue une limitation de la responsabilité au seul propriétaire et affranchit le pétrolier affréteur de toute responsabilité, alors que l'association française de droit maritime, à l'époque, avait émis un avis contraire. La France ne s'est d'ailleurs pas grandie en étant le premier Etat européen à signer ce protocole.

Devant l'immobilisme des pouvoirs publics, avec trois autres députés de mon groupe, j'avais proposé la constitution d'une commission d'enquête parlementaire dès le 17 décembre dernier. Rappelons que la catastrophe de l' Erika était datée au 12 décembre. Cette commission d'enquête rendra ses conclusions sous peu. Pour autant, il nous appartient de tirer dès à présent les conséquences des expériences passées, mais aussi des expériences malheureuses des autres pays.

Dans ce domaine, les Américains ont su tirer les leçons de la catastrophe de l' Exxon Valdez . Ils ont adopté leur propre législation avec l' Oil Pollution Act en 1990, qui soumet les pétroliers entrant dans les eaux territoriales américaines à des obligations draconiennes en matière de plan de secours et de garanties financières. Ils se sont dotés de moyens de secours et de lutte contre la pollution avec, entre autres : la responsabilité illimitée de l'armateur en cas de dommage et la responsabilité solidaire de l'affréteur quant aux conséquences financières des dommages qu'ils causeraient ; l'obligation de la double coque qui vient progressivement en Europe - pour les navires accostant aux Etats-Unis à partir de 2010 et l'interdiction de naviguer des navires âgés de plus de vingt-trois ans ; enfin, l'obligation, pour chaque navire, de disposer d'un certificat de responsabilité financière. La loi permet également de refuser l'accès à leurs eaux aux armateurs qui ne peuvent justifier, pour leurs équipages, d'un niveau de formation au moins équivalent à celui des équipages américains.

Grâce à ce dispositif, les Etats-Unis ont réussi à lutter contre les marées noires avec quelque succès. Inspironsnous donc, même partiellement, de cette expérience et abstenons-nous des poncifs idéologiques visant à accuser de tous les maux un prétendu « libéralisme débridé » - M. Marchand vient de le faire à l'instant. Parce que les navires russes, cubains, bulgares ne dégazent pas, eux non plus ? Soyons sérieux !

M. Jean-Louis Idiart.

Il y en a de moins en moins...

M. Bernard Deflesselles.

La création de coast guards pour les côtes européennes, à l'exemple des Etats-Unis, pourrait être une mesure bénéfique, monsieur le ministre.

En ce qui concerne la France, cette initiative pourrait être financée par un prélèvement sur la TIPP...

M. René Leroux.

Encore un impôt ?

M. Bernard Deflesselles.

... qui, je le rappelle, représente 85 % du prix du litre d'essence.

Le durcissement de la réglementation passe aussi par la réforme des régimes d'assurance. Personne n'en a parlé.

Aussi aberrant que cela puisse paraître, les primes ne sont pas plus élevées pour un navire âgé de vingt-cinq ans que pour un bateau neuf muni d'une double coque. Pourtant, les chiffres parlent d'eux-mêmes : les navires de plus de quinze ans représentent 40 % de la flotte mondiale et sont la cause de 80 % des sinistres. En outre, 40 % d'entre eux ne répondent pas aux normes de sécurité minimales édictées par l'OMI.

Il faut aussi, à mon sens, lutter contre les certificats de complaisance en vérifiant le sérieux du travail des sociétés chargées des contrôles et des vérifications techniques des navires. La France n'a pas besoin de l'aval de ses partenaires européens pour doubler le nombre des contrôleurs dans les centres de sécurité : pour mémoire, ils ne sont que deux à Dunkerque ! Par ailleurs, le naufrage de l' Erika, qui naviguait sous les couleurs du pavillon maltais, a relancé la polémique sur les pavillons de complaisance. Ayons donc le courage d'y mettre fin une bonne fois pour toutes.

M. René Leroux.

Y compris chez nous !

M. Bernard Deflesselles.

Il est en effet scandaleux qu'un Etat qui immatricule un pavillon ne soit pas inquiété en cas de catastrophe. En outre, monsieur le ministre, vous avez entière liberté, par des mesures fiscales, budgétaires ou sociales appropriées, de rendre le pavillon français plus concurrentiel.

Il serait également souhaitable d'étendre, si possible, la limite des eaux territoriales françaises, afin de mieux contrôler les navires qui y circulent. Rappelons que toute infraction commise au-delà des limites des eaux nationales - actuellement 12 miles - rend quasi inopérantes les poursuites. Les capitaines indélicats le savent parfaitement.

En effet, si les avions Polmar des douanes repèrent ces nappes plutôt aisément, il n'en reste pas moins extrêmement difficile d'identifier l'auteur de la pollution. En la matière, le flagrant délit est une nécessité absolue. Et c'est bien là toute la difficulté. Détecter les auteurs de rejets polluants, certes, mais surtout les sanctionner effectivement, voilà l'objectif.

A cet égard, les statistiques de 1999 sont éloquentes.

L'an dernier, pour 308 cas de pollution repérés par les CROSS, trente navires seulement ont été identifiés et vingt-sept procédures judiciaires entamées. Malheureusement, elles ne seront pas toutes, loin s'en faut, menées à leur terme.

Dans ce drame quasi quotidien, la Méditerranée n'est pas épargnée. Elle constitue, je le rappelle, une zone spéciale où tout rejet est interdit. Mais imaginons un instant que le drame de l' Erika s'y soit produit. Les échanges avec l'Atlantique par le détroit de Gibraltar la rendent particulièrement vulnérable à bon nombre de menaces.

En effet, deux milles navires marchands, dont trois cents pétroliers, se croisent en permanence dans ces eaux. L'intensité du trafic maritime, qui représente 20 % du trafic pétrolier mondial, constitue donc un danger potentiel considérable.

Evaluée chaque année à près de 120 000 tonnes, la quantité d'hydrocarbures rejetée lors des opérations de déballastage génère une pollution intolérable.

La Méditerranée est une mer fragile, fermée, dont le taux de renouvellement des eaux est de l'ordre d'un siècle. Elle s'avère donc particulièrement menacée et l'exemple de la marée noire causée par le pétrolier Haven en 1991, au large de Gênes, a bien montré les conséquences catastrophiques de tels accidents.

Aujourd'hui, il nous faut profiter - plus qu'un voeu, c'est un devoir - de la présidence de l'Union européenne, que nous assurerons dans quelques jours, pour prendre des mesures audacieuses. Mesures d'autant plus indispen-


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sables que notre position géographique et nos 5 000 kilomètres de côtes rendent notre pays particulièrement vulnérable.

Si nous voulons que le drame de l' Erika ne soit qu'un mauvais souvenir, et surtout qu'il ne puisse plus se reproduire, profitons et profitons pleinement de nos six mois de présidence européenne pour faire évoluer très significativement le droit maritime européen et international.

C'est une exigence, et c'est dans cette perspective, mes chers collègues, que nous voterons cette loi, qui ne peut être considérée aujourd'hui que comme une timide avancée dans la défense d'un patrimoine qui nous est commun.

M. Edouard Landrain et M. Louis Guédon.

Très bien !

M. René Leroux.

Nous y parviendrons !

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu'il me soit permis, en préambule, de m'associer à l'amertume de M. Deflesselles, dont la proposition de loi n'a pas été présentée. Mais ce n'est pas la responsabilité du Gouvernement, c'est celle de son groupe qui, dans le cadre des « niches » parlementaires, ne l'a pas retenue. Que M. Deflesselles s'en prenne donc aux vrais responsables !

M. Bernard Deflesselles.

Quelle mauvaise réponse ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Non, elle est logique !

M. Jean-Pierre Dufau.

C'est une bonne réponse à une mauvaise question. La vérité est quelquefois dure à entendre ! Mais j'en viens au sujet.

Comme l'écrit si bien Paul Valéry :...

M. Bernard Deflesselles.

Un grand marin ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Dufau.

... « Ce qui m'intéresse, ce n'est pas l'écume des choses, c'est la mer. » Parce que la mer,

source de vie, appartient au patrimoine commun de l'humanité, la protection du milieu marin et des zones côtières constitue un enjeu majeur. La préservation de la faune et de la flore marines, l'intégrité du littoral et des estuaires ne sont pas seulement une impérieuse nécessité, mais un devoir, un objectif d'intérêt général pour les générations futures.

Cette proposition de loi modifiant la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires, dans le champ d'application qui lui est fixé, est à la hauteur de l'enjeu.

Après avoir précisé le type de pollution visé par le texte, je ferai une brève analyse des articles et présenterai quelques propositions conformes à l'esprit du texte brillamment exposé par notre rapporteur.

Quelle est la pollution concernée ? Ainsi que René Leroux l'a bien montré, le naufrage accidentel de l' Erika s'avère une catastrophe écologique pour le milieu marin et les 400 kilomètres de côtes polluées, et ses conséquences économiques ne sont pas moins graves. Cela est incontestablement dû à la nature du fioul déversé. Mais il faut savoir que la pollution de l' Erika ne représente que 2 à 3 % du tonnage annuel lié aux pollutions intentionnelles, telles que les dégazages ou déballastages, c'est-à-dire tout ce qui concerne le rinçage des ball asts, le curage des cuves de navires aux diverses cargaisons potentiellement polluantes, mais aussi le nettoyage et la vidange des machineries qui entraînent le rejet de fioul et d'huiles nocives. Rien n'échappe à l'irresponsabilité des pollueurs, rien ne doit échapper à notre vigilance et à notre détermination ! Cette proposition de loi, chacun l'a compris, ne traite pas des pollutions accidentelles, qui justifient, elles aussi, des mesures sévères concernant la normalisation des navires, la mise en oeuvre de contrôles approfondis, la définition des responsabilités et l'instauration de sanctions à tous les niveaux de la chaîne du transport.

M. Daniel Paul.

Très bien !

M. Jean-Pierre Dufau.

Le texte dont nous débattons se limite aux pollutions intentionnelles, conscientes et sournoisement organisées. Leurs auteurs sont coupables, forcément coupables. Mais pourquoi ces pollutions délibérées ont-elles lieu ? Parce que nous vivons dans un monde sans scrupule où le temps, c'est de l'argent. Il faut transporter toujours plus, toujours plus vite, au moindre coût.

Dans le domaine du transport en général et du transport maritime en particulier, règne le libéralisme le plus débridé. La moralité s'estompe devant la loi du profit, au mépris des hommes et de leur environnement.

Face à ce déni de responsabilité, une seule réponse : la fermeté contre les pollueurs. Rarement, le principe pollueur-payeur a été aussi pertinent. Tel est l'objet de cette proposition de loi dont nous partageons tous, je pense, l'esprit et la lettre.

J'en viens ainsi à l'analyse de son contenu.

Les quatre articles de cette proposition de loi forment un tout simple et cohérent. Le texte renforce sensiblement les dispositions de la loi du 5 juillet 1983, modifiée par la loi du 31 mai 1990. En effet, les sanctions financières en vigueur ne sont pas vraiment dissuasives. Il faut que le coût des amendes devienne sensiblement supérieur à celui du traitement contrôlé des opérations de dégazage ou de déballastage. Mais il faut aussi, par ailleurs, améliorer le contrôle de traçabilité sur l'origine des pollutions intentionnelles. En ce sens, les mesures préconisées dans d'autres textes par M. Gayssot seront utiles et, espérons-le, efficaces : l'obligation faite à tout bateau de déballaster avant de quitter un port, ainsi que la proposition de doter chaque navire d'une boîte noire, sorte de mouchard permettant le contrôle de pratiques illicites.

Nous attendons avec intérêt ces dispositions techniques qui apporteront la transparence nécessaire pour dénoncer des infractions s'abritant trop facilement derrière le voile de l'impunité.

La proposition de loi accroît sensiblement les sanctions encourues en multipliant par trois les sanctions financières et en doublant les peines d'emprisonnement.

A noter qu'en cas de récidive l'ensemble des sanctions est pratiquement doublé. Nous réclamions de la sévérité et de la fermeté ; cette loi en donne les moyens.

Bien évidemment, ces dispositions s'appliquent à tout capitaine de navire français mais aussi à tout capitaine de navire étranger naviguant dans la zone économique exclusive au large des côtes du territoire de la République, dans les eaux territoriales, les eaux intérieures ou sur les voies navigables françaises jusqu'aux limites de la navigation maritime. Toutes dispositions conformes à la loi du 5 juillet 1983.

Considérant qu'il s'agit d'une proposition de loi forte et juste, le groupe socialiste soutient les amendements du rapporteur. Il me reste à formuler des suggestions de nature plus juridique.


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La motivation qui sous-tend l'article additionnel proposé par le rapporteur et adopté par la commission est claire et je la partage. Il s'agit de donner aux juridictions territoriales de Cherbourg pour la Manche, de Brest pour l'Atlantique et de Toulon pour la Méditerranée une compétence exclusive pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions commises en matière de pollution maritime, cette compétence s'étendant aux infractions connexes. L'article additionnel prévoit donc une modification du code de procédure pénale. Si le souci est légitime dans son principe, les choses deviennent plus complexes dans les faits. L'application de cette modification pose des questions de forme et de fond.

Tout d'abord, la détermination du ressort géographique des tribunaux relève-t-elle du domaine législatif ? La loi ne doit-elle pas plutôt fixer les modalités de détermination de cette compétence ? L'article additionnel prévoit une compétence exclusive. Il a donc pour effet de dessaisir le tribunal de Paris actuellement compétent. Or ce dernier a acquis une expertise incontestable dans ce domaine et travaille efficacement avec les services opérationnels, qui ont avec lui des liens étroits et des habitudes de travail. Est-il si opportun de se priver de cet acquis ?

De plus, la compétence exclusive a pour effet d'entraîner l'incompétence de la juridiction qui serait territorialement compétente au titre de l'infraction. Il peut y avoir là matière à contestation et on court ainsi le risque d'annulations de procédures au stade du jugement. Imaginons, par exemple, le cas d'un bateau en infraction dans une zone donnée, puis interpellé ultérieurement dans les eaux françaises et dérouté dans un port français situé à plusieurs centaines de kilomètres. La même remarque vaut pour les infractions connexes.

Pour faire droit à ces arguments tout en respectant l'esprit de l'article additionnel du rapporteur, je proposerai une nouvelle rédaction de cet article sur les bases suivantes : Premièrement, la liste des tribunaux de grande instance du littoral compétents pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions serait fixée par décret en Conseil d'Etat au plus tard le 31 décembre 2001 : nous tenons à cette date butoir. Le ministère public territorialement compétent serait celui du tribunal dont le ressort comprend les eaux territoriales dans lesquelles les faits ont été commis.

Deuxièmement, la compétence du tribunal de grande instance de Paris s'exercerait pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions commises dans la zone exclusive française.

Troisièmement, le ministère public du tribunal de Paris pourrait être saisi de faits de pollution au titre de la présente loi concurremment avec le ministère public territorialement compétent, lequel pourrait néanmoins accomplir les actes nécessaires à l'enquête et à la manifestation de la vérité.

Quatrièmement, enfin, si les faits de pollution justifient l'ouverture d'une information, le ministère public territorialement compétent transmettrait immédiatement tous les éléments du dossier au ministère public du tribunal de Paris.

Ces propositions associent les tribunaux territorialement compétents et le tribunal de Paris à la poursuite, à l'instruction et au jugement des infractions. Ce mode de fonctionnement permettrait de mieux mobiliser les énergies et les compétences de l'ensemble des magistrats, de répartir progressivement les moyens de justice entre tous les tribunaux compétents et de former les magistrats à ces nouvelles responsabilités. La Chancellerie et les magistrats se concerteraient pour la mise au point de ces dispositions.

Dans cet esprit, il suffit de modifier l'article 12 de la loi du 5 juillet 1983 sans toucher au code pénal, ce qui supposerait pour le moins une discussion plus longue et plus approfondie avec le ministère de la justice.

Pour conclure, le groupe socialiste votera la proposition de loi présentée par le rapporteur et amendée dans le sens que je viens d'indiquer. Il le fera en conscience, persuadé du bien-fondé de ce texte et de son importance pour lutter contre les faits de pollution intentionnelle par les navires. Il importe que cette proposition de loi soit votée rapidement et, de manière symbolique, au moment même où la France s'apprête à exercer la présidence de l'Union européenne. Espérons que cette présidence permettra des avancées décisives en faveur de la lutte contre les pollutions intentionnelles au niveau européen et de la sécurité du transport maritime des matières polluantes ou dangereuses.

Monsieur le ministre, aujourd'hui, l'Assemblée apporte sa pierre à l'édifice. Je ne doute pas de la volonté du Gouvernement de marquer cette présidence européenne de son empreinte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à M. André Aschieri.

M. André Aschieri.

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, Torrey Canyon, Tanio, Amoco Cadiz, Braer, Exxon Valdes, Erika : les multiples catastrophes qui se sont produites ces dernières années soulignent la précarité de l'équilibre écologique et la nécessi té de mettre en oeuvre des mesures de prévention.

Le dégazage en haute mer, motivé par un souci de rentabilité, est l'un des aspects de la pollution marine. Ces rejets volontaires ont des effets désastreux sur le milieu marin, notamment pour les oiseaux. Les conséquences des dégazages sauvages sont connues. Souvent pratiqués lors des tempêtes, ils créent de petites nappes épaisses qui, après plusieurs années, peuvent causer autant de dégâts qu'une marée noire.

L'analyse rapide de la flotte mondiale montre que la moyenne d'âge des navires ne cesse d'augmenter. Le développement de pavillons de complaisance en est la preuve.

La France elle-même a participé à cette manoeuvre puisqu'elle a créé un pavillon bis, celui des Kerguelen.

La pression du « toujours moins cher » dans le transport maritime a des conséquences sur la sécurité des navires : la réduction du nombre de marins, l'augmentation des charges de travail, les économies d'entretien conduisent trop souvent à des accidents. Comment, dès lors, ne pas accueillir avec satisfaction cette proposition de loi réprimant la pollution par les navires ? C'est là un vaste, un ambitieux projet.

Toutefois, mes chers collègues, je crains que la définition proposée des pollutions marines et des moyens de lutte à mettre en oeuvre ne recouvre pas totalement celle des députés verts. On peut toujours supposer que nous arrêterons les marées noires en renforçant les sanctions réprimant le dégazage ; malheureusement, il n'en est rien.

Des mesures importantes de renforcement de la sécurité du transport maritime doivent être arrêtées immédiatement. Dans le mémorandum de Paris, la France a pris des engagements en ce sens, elle se doit dès lors de renforcer les moyens qu'elle affecte à la mission de contrôle des navires.


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Ainsi, nous proposons d'organiser des contrôles renforcés dans les ports, et surtout de permettre aux navires de respecter ces contrôles, en dotant chaque port des équipements nécessaires au traitement des déchets. Le contrôle par examen des documents de bord est insuffisant. Au cours d'une simple visite, l'inspecteur est, le plus souvent, dans l'incapacité de vérifier que tout est en règle, il ne peut que contrôler l'entretien du bateau, et non ses capacités à tenir la mer. L' Erika en est la preuve. Nous proposons que les contrôles portent aussi sur la réalité des indications mentionnées sur le registre des hydrocarbures, pour vérifier qu'il n'y a pas eu de dégazage en haute mer.

La loi de 1983 sur la répression de la pollution des navires doit effectivement être révisée. Les auteurs de la proposition ont raison sur ce point : les amendes prévues sont actuellement trop peu dissuasives. Toutefois, le problème majeur est celui de la responsabilité juridique des compagnies. Or le texte en vigueur ne permet pas d'engager la responsabilité pénale des véritables donneurs d'ordre. La responsabilité ne doit pas s'arrêter à celle du capitaine quand d'autres sont plus fautifs, tels le propriétaire de la cargaison, l'opérateur, l'armateur ou le propriétaire du navire. Ce sont leurs décisions qui doivent être sanctionnées. C'est pourquoi la loi du 5 juillet 1983 doit aussi être révisée pour que puisse être engagée la responsabilité pénale et civile des donneurs d'ordre. Cette responsabilité doit aller jusqu'à la prise en charge intégrale par les affréteurs du coût de la remise en état des milieux naturels affectés par les pollutions. Les vrais responsables doivent réparer tous les préjudices économiques et écologiques. Le principe pollueur-payeur doit être appliqué de façon stricte, mais aussi de façon juste.

Or permettre la réparation du préjudice écologique n'est pas aujourd'hui envisageable en raison de la Constitution. La déclaration de Rio sur l'environnement et le développement durable a proclamé le droit des êtres humains à une vie saine en harmonie avec la nature, et ce droit à l'environnement a été transcrit dans la Constitution de certains Etats, mais la France est demeurée à l'écart de ce mouvement, en refusant de consacrer par une mesure constitutionnelle le droit du citoyen à un environnement de qualité.

La gestion des risques et des pollutions ne peut donc pas être imaginée sans une véritable réforme des institutions, comme la création d'un ministère de la mer et du littoral, qui aurait la responsabilité et assurerait la cohérence de domaines très liés, comme la pollution portuaire, le transport maritime, la gestion de la ressource halieutique et la protection du littoral.

La seule répression n'est pas suffisante. Les Verts pensent que c'est l'amélioration des conditions de travail qui permettra d'éviter les accidents maritimes, à l'image de ce qui a été fait pour le transport routier. On refuserait en effet de laisser conduire un chauffeur sans permis.

De même, il faut engager une politique volontariste pour améliorer les conditions de travail des marins. Je ne peux que vous conseiller l'excellent livre Les Damnés de la mer, qui vous éclairera sur les pratiques des négriers modernes.

Pour conclure, je voudrais souligner qu'un renforcement des contrôles dans les seuls ports français engendrerait automatiquement une fuite des navires vers les autres ports européens. C'est pourquoi, à l'occasion de la présidence de l'Union européenne, la France doit prendre des initiatives au niveau européen pour généraliser le renforcement des normes de sécurité et des contrôles. Monsieur le ministre, les députés Verts voteront votre proposition de loi. Ils tiennent toutefois à souligner son insuffisance et son aspect un peu discriminant.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme Jacqueline Lazard.

Mme Jacqueline Lazard.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi, tout d'abord, de saluer mon voisin de circonscription, M. Gilbert Le Bris, dont nous examinons ce matin la proposition de loi dans le cadre de cette séance réservée aux textes émanant des parlementaires.

L'attention médiatique portée aux pollutions maritimes depuis le récent naufrage de l' Erika a relancé le débat sur la sécurité en mer. Et de nouveaux progrès en matière de prévention et de surveillance de nos côtes semblent se dessiner. Nous devons saluer les efforts entrepris en ce sens par le Gouvernement dans le cadre de la très proc haine présidence française de l'Union européenne.

Ceux-ci ne manqueront pas d'être appuyés et enrichis par les propositions de la commission d'enquête sur le transport maritime des produits dangereux.

M. Bruno Le Roux.

Très bien !

Mme Jacqueline Lazard.

Au-delà des catastrophes écologiques « médiatiques », nul n'ignore les dégâts occasionnés par des pollutions, certes plus discrètes, mais néanmoins destructrices pour l'environnement, et la faune et la flore de nos côtes. Les données dont nous disposons à propos des déballastages sauvages - Gilbert Le Bris les a rappelées - se passent de commentaires. Elles suggèrent que la lutte pour un environnement préservé ne saurait se limiter aux seules périodes de mobilisation médiatique ou citoyenne autour d'une marée noire.

Le présent texte propose d'aggraver les peines encourues par les capitaines de navires français qui enfreignent les règles relatives au déballastage. Je souhaite que notre débat apporte des éclaircissements et des précisions sur plusieurs points.

En l'état actuel du droit international, on ne saurait laisser croire, tout d'abord, que toute opération de ce type est interdite. Comme le rappelle notre rapporteur, trois zones sont distinguées, qui ne sont pas toutes soumises au même régime d'interdiction. Des seuils différents sont pris en compte, qui permettent de pratiquer ce qui semble être conçu comme des opérations maîtrisées.

D'où une première série d'interrogations : ne convient-il pas aujourd'hui de revoir ces interdictions, notamment les seuils de tolérance en deçà desquels les opérations de rejets d'hydrocarbure à la mer sont autorisées ? Ne faudrait-il pas étendre les zones d'interdiction absolue en prenant en compte l'importance du patrimoine maritime à préserver ? Je pense ici notamment à l'interdiction générale en Méditerranée, qui pourrait être étendue, par exemple, sur la zone du futur parc marin d'Iroise.

Par ailleurs, je souhaite que soient prises en compte les inquiétudes formulées par les capitaines de navire qui ont eu l'occasion de s'exprimer sur les orientations de ce texte.

M. Daniel Paul.

Bien sûr !

Mme Jacqueline Lazard.

Il convient notamment de rappeler avec force que les sanctions encourues par les capitaines de navire français sont applicables aux navires étrangers et qu'elles sont applicables aux propriétaires et exploitants qui auront pu donner l'ordre de commettre l'infraction.


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M. René Leroux.

Très bien !

Mme Jacqueline Lazard.

Ce point est essentiel. En effet, les capitaines de navires français se sont inquiétés d'une mesure qu'ils ont parfois perçue comme une mise en cause injuste. Ils ont par ailleurs insisté sur l'inégalité du rapport entre l'armateur et le capitaine : si c'est ce dernier qui procède pratiquement aux opérations de déballastage, il ne faut pas oublier qu'il répond par lamême à des exigences fixées par un donneur d'ordre, en l'occurrence l'armateur.

M. Daniel Paul.

Exactement !

Mme Jacqueline Lazard.

Il me semble qu'il serait judicieux que le droit et les peines encourues reflètent aussi cette relation dissymétrique entre capitaines et donneurs d'ordres.

On connaît les motivations de ces derniers : économiser le moindre franc, notamment en évitant l'immobilisation du navire qui est facteur de dépense, plus encore que le seul coût de l'opération de déballastage.

Ce sont ces motivations qu'il convient de combattre et de réguler. D'une part, il faut instaurer, comme le prévoit l'amendement adopté le 30 mai dernier, une possibilité de contrôle et de certification, ainsi qu'un nouveau pouvoir pour les officiers portuaires à l'encontre de navires quittant un port sans y avoir déballasté. D'autre part, il importe d'équiper nos ports des moyens nécessaires à ces opérations.

Sur ce point, je voudrais appeler votre attention sur le fait que certains pays, pourtant peu soucieux a priori de la protection de l'environnement, n'hésitent pas, pour attirer les navires, à payer les boues. En Chine, par exemple,...

M. Edouard Landrain.

Pays libéral !

Mme Jacqueline Lazard.

... les boues sont payées à concurrence de 25 dollars la tonne, ce qui équivaut à une rémunération d'environ 2 500 dollars pour une opération faisant suite à un voyage de deux mois environ.

La prise en charge partielle ou totale de ces coûts va ainsi devenir un argument dans la compétition entre les ports ; il faudra y être très attentif. L'une des pistes envisageables pourrait consister à mettre à l'étude l'idée d'un service public de la dépollution maritime, dont la prise en charge pourrait être partiellement assumée par un prélèvement sur les compagnies pétrolières.

Enfin, des solutions techniques existent également pour limiter les risques de recours au déballastage. Il s'agirait de réduire sur les bateaux les plus anciens la part du ballast qui consiste à remplir, en plus du ballast permanent, une partie des cuves destinées à contenir du pétrole ou autres produits dangereux pour l'environnement. En transformant en ballast permanent une partie de ces cuves qui ont un double usage, on réduit, certes, les possibilités et les capacités de transport du navire - et, partant, les profits potentiels du transporteur -, mais aussi les risques afférents aux configurations actuelles de ces derniers.

C'est une mesure de bon sens puisque les pétroliers construits depuis une dizaine d'années possèdent tous des ballasts séparés. Il conviendrait donc de travailler à une mise aux normes des anciens bateaux.

Voici, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, quelques-uns des éléments que je souhaitais livrer à votre réflexion.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, je veux d'abord vous remercier pour la qualité de vos interventions. Vous avez su aborder cette question, grave et sérieuse, en prenant en compte l'intérêt général et non pas de manière politicienne. Cette proposition de loi vise à traiter les actes délibérés de pollution, et non pas l'ensemble des problèmes maritimes aujourd'hui posés. A cet égard, et Mme Lazard vient de le souligner, le Gouvernement a engagé une véritable bataille pour une autre sécurité maritime, qui dépasse l'échelon national. C'est ainsi que, voilà quelques mois, j'ai obtenu et c'est très positif que, transporteurs, affréteurs, armateurs et sociétés de qualification signent une charte tendant à la « responsabilisation » des différents acteurs du transport maritime. C'est là l'élément clé sur lequel reposeront toutes les avancées futures.

Par ailleurs, le Gouvernement a déposé trois mémoranda : respectivement auprès de l'OMI, de la Commun auté européenne, et du FIPOL, avec précisément l'objectif de parvenir à cette responsabilisation et de s'attaquer au problème de fond soulevé par plusieurs d'entre vous, ce qui n'a pas manqué de susciter quelques remous sur les bancs de l'opposition. Je veux parler du système qui consiste à rechercher le prix le plus bas du transport maritime au détriment de la sécurité, celle des hommes et de l'environnement. Bien sûr, prétendre faire bouger les choses en la matière, c'est s'attaquer au « gros morceau ».

La présidence française va nous donner l'occasion de progresser réellement sur ce point. J'espère d'ailleurs que, dès le prochain conseil des ministres des transports européens, sous présidence portugaise, des premières avancées vont déjà avoir lieu. En tout état de cause, nous ne nous en tiendrons pas là au cours de la présidence française.

Oui, le transport maritime peut être une chance et ouvre des perspectives de développement, mais le plus grave obstacle à son essor réside dans l'insécurité et le refus d'appliquer les normes à la fois sur le plan des conditions de vie et de travail des marins, et de la qualité des navires transportant notamment des matières pétrolières ou polluantes.

S'agissant précisément des déballastages et des dégazages, nous devons absolument renforcer les sanctions, et nous doter des moyens permettant d'assurer un contrôle et de vérifier l'application des règles, y compris en termes juridiques. Les différents amendements vont d'ailleurs en ce sens.

Actuellement, nous constatons que le sentiment d'impunité l'emporte. Il faut donc alourdir les sanctions financières et les peines d'emprisonnement afin de les rendre assez dissuasives, et renforcer les moyens humains et matériels de contrôle.

Je veux à cet égard adresser une petite critique aux députés de l'opposition qui ont réclamé davantage d'inspecteurs du port et de contrôleurs. Dieu sait si c'est l'un des objectifs du Gouvernement ! Mais, messieurs, je ne n'aurais pas été amené à proposer le doublement des effectifs si, en arrivant en 1997, je n'avais trouvé un si faible nombre d'inspecteurs et de contrôleurs.

Vous critiquez aussi le protocole de 1992. Mais que diantre ne l'avez-vous modifié en 1993 ? (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

Les ricanements ne font pas avancer les problèmes.

C'est trop facile ! Comme il est trop facile de se borner à dire que le Gouvernement n'avait pas repris la proposition de loi que vous aviez rédigée. Votre propre groupe n'avait pas même daigné l'inscrire !

M. Bernard Deflesselles.

Faux ! C'est le bureau de l'Assemblée qui ne l'a pas acceptée ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il faut savoir raison garder si l'on veut aller sur le terrain politicien.

D'autres intervenants, plus raisonnables, ont joué la carte de l'intérêt général et du consensus. Mesdames, messieurs, cette proposition de loi, qui présente des avantages incontestables - vous avez d'ailleurs tous dit que vous alliez la voter et c'est très bien - ne résout pas le problème de fond que nous avons évoqué et qu'il faut absolument faire avancer. C'est ce que s'emploiera à faire le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Discussion des articles

Mme la présidente.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.

Article 1er

Mme la présidente.

« Art.

1er Le début de l'article 1er de la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires est ainsi rédigé :

« Art. 1er Sera puni d'une amende de 3 000 000 F et d'un emprisonnement de quatre ans et, en cas de récidive, ... (Le reste sans changement.) »

M. Daniel Paul et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 5, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'article 1er , substituer à la somme : "3 000 000 F" la somme : "4 000 000 F". »

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul.

Madame la présidente, j'ai déposé des amendements similaires aux articles 2, 3 et 4 : j'en ferai une présentation commune, si vous le permettez.

Le groupe communiste considère que les amendes doivent être augmentées. Aujourd'hui, tout le monde l'a dit, elles sont souvent inférieures au coût que représentent les opérations de déballastage ou de dégazage opérées dans un port. Dès lors, il est difficile de dissuader.

Dans un certain nombre de cas, on peut procéder simultanément aux opérations liées au fret, chargement ou déchargement, et au dégazage ou au déballastage. Il n'y a donc aucune perte de temps, si ce n'est que, dans certains cas, il est impossible de réaliser simultanément ces opérations - cela m'a été confirmé par les autorités portuaires du Havre -, et que le temps passé dans un port augmente alors pour le navire. Si l'on veut dissuader pour de bon, il faut prendre en compte cette perte de temps et renforcer la dissuasion en faisant passer l'amende de trois à quatre millions de francs.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

Je comprends la réaction de notre collègue Daniel Paul, qui connaît bien le sujet, puisque le secteur du Havre n'est pas non plus épargné par les dégazages clandestins. Je souhaite néanmoins lui demander de retirer son amendement et tous ceux qui sont similaires. Pour établir la position du curseur des peines, nous avons en effet respecté une certaine proportionnalité entre l'infraction et l'amende encourue. Je précise, du reste, que l'amende n'est pas exclusive d'une action en responsabilité civile en vue d'obtenir une indemnisation des dommages causés par le dégazage ou le déballastage illicites.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Le Gouvernement était plutôt favorable - je ne sais si, en l'occurrence, l'adverbe « plutôt » peut être utilisé (Sourires) - au renforcement des sanctions, mais il comprend le souci du rapporteur et s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente.

La parole est à M. Edouard Landrain.

M. Edouard Landrain.

Tous les orateurs l'ont dit : il ne faut pas craindre de punir pour dissuader. Or, alors que nous avions, ce matin, l'occasion de légiférer dans cet esprit, voilà que le Gouvernement, ou plutôt la majorité, refuse d'aller plus loin par crainte des problèmes qui pourraient se poser. Ce n'est pas raisonnable ! Le groupe UDF votera cet amendement avec enthousiasme. Il nous paraît très sage.

Je voudrais, en outre, revenir sur deux propositions que je vous ai faites, monsieur le ministre. La première, c'est que le montant des amendes soit libellé en euros.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

En francs et en euros !

M. Edouard Landrain.

On montrerait ainsi une véritable volonté d'européaniser nos décisions. Je ne sais quand vous pourrez le faire, mais je réitère ma proposition.

Seconde proposition. Je vous ai dit tout à l'heure qu'il serait bon d'indexer le prix des amendes sur le prix du pétrole, pour éviter le problème du décrochage. Les amendes auront toujours une valeur réelle par rapport à celle du pétrole. Peut-être cela pourrait-il faire l'objet d'un sous-amendement du Gouvernement ? Je n'aurai pas, dans ce cas, de susceptibilité de propriétaire. (Sourires.) Qu'on y réfléchisse bien : cette indexation dissiperait certaines préoccupations qu'on sent naître, à travers le refus du rapporteur de la commission d'entériner l'amendement proposé par notre collègue Daniel Paul.

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur Landrain, à ma connaissance, un projet de loi doit convertir en euros toutes les amendes qui existent dans notre droit national. Vous aurez donc satisfaction. En tout état de cause, vous avez raison, il est bon de montrer le caractère européen de la démarche.

Par ailleurs, je ne suis pas sûr que votre suggestion tendant à indexer le montant de l'amende soit jouable sur le plan légal. De plus, comme le prix du baril est actuellement très haut, il ne faut pas laisser penser que l'amende baissera au premier retournement de conjoncture.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Je ne suis pas très partisan d'une amende flottante.

Certes, je comprends la position de M. Paul, mais il me paraît indispensable de placer le curseur à un niveau fixe. La proposition du rapporteur, acceptée par la


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

commission au cours de la réunion qu'elle a tenue en application de l'article 88 du règlement, a déjà abouti à un triplement des amendes et, pratiquement à un doublement des peines d'emprisonnement.

A ce stade du débat, en première lecture, cela nous semble suffisant. C'est pourquoi le groupe socialiste votera les propositions du rapporteur et de la commission et se prononcera contre cet amendement.

Mme la présidente.

La parole est à M. Bernard Deflesselles.

M. Bernard Deflesselles.

L'opposition tout entière votera l'amendement de M. Paul. Il nous paraît en effet indispensable d'instaurer des amendes d'un niveau tel qu'elles soient vraiment dissuasives au regard du coût d'un déballastage dans un port, dont chacun sait qu'il est élevé.

Ainsi que cela a été excellement souligné, n'oublions pas non plus que le temps d'immobilisation d'un navire dans un port provoque également un manque à gagner important. Il faut donc absolument que le montant des amendes soit très élevé.

M. Jean-Pierre Dufau.

C'est déjà le cas !

M. Bernard Deflesselles.

Leur quadruplement proposé par cet amendement semble donc une bonne solution.

C'est pourquoi nous le voterons.

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

Je tiens à formuler deux remarques. D'abord on ne peut pas indexer une amende sur un produit. Sinon, nous aurions quelques déboires juridiques et techniques en la matière. Ensuite je relève que mes collègues de l'opposition sont prêts à quadrupler les amendes alors que la proposition de loi qu'ils avaient déposée ne prévoyait que leur doublement.

M. Edouard Landrain.

On progresse !

M. Bernard Deflesselles.

C'est mieux que le plagiat !

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

Voilà qui témoigne d'un manque de réflexion.

J'estime que le triplement correspond à une juste mesure et qu'il faut s'en tenir là. Telle est d'ailleurs la position de la commission.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Daniel Paul et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 1, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'article 1er , après le mot : "récidive", insérer les mots : "du double de ces p eines, tout capitaine ou tout armateur d'un navire". »

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul.

Là encore, mon explication vaudra pour les amendements similaires que j'ai déposés aux articles suivants.

La loi de 1983 est considérée par les officiers de la marine marchande comme une loi scélérate parce qu'elle exonère de responsabilité toute autre personne que le capitaine ou le commandant d'un navire.

Ainsi que l'ont souligné plusieurs orateurs ce matin, compte tenu des conditions dans lesquelles s'effectue actuellement le transport maritime, les marins sont sous la coupe de véritables négriers des temps modernes. Ils sont en effet contraints de respecter des délais très stricts et de réduire les coûts le plus possible. Or chacun sait qu'il coûte moins cher de déballaster en mer que dans un p ort. En conséquence, les consignes données aux commandants et aux capitaines, bien sûr non écrites et non officiellement, les obligent à essayer de déballaster au moindre coût.

Cet amendement tend donc à permettre que l'on pénalise aussi le propriétaire du navire.

Je ne nie pas pour autant la responsabilité du capitaine, qui est indéniable puisque c'est lui qui donne les ordres. Néanmoins il est évident que, dans les conditions actuelles du transport maritime, s'il refusait de déballaster ainsi, il perdrait toute chance d'obtenir un nouveau commandement dans la plupart des compagnies de navigation.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

Comme je l'ai souligné lors de mon intervention initiale, je comprends parfaitement le souci de M. Paul. D'ailleurs, nous ne sommes pas naïfs et nous savons très bien que le commandant n'est souvent que le maillon d'une chaîne opérationnelle dans laquelle d'autres - l'armateur, le propriétaire jouent un rôle plus important.

Néanmoins, il faut éviter d'être redondant en matière législative.

Or la mesure proposée peut déjà être mise en oeuvre en application de la loi de 1983, dont deux articles permettent d'engager la responsabilité d'autres personnes.

Ainsi son article 6 indique : « Sans préjudice des peines prévues aux articles précédents à l'égard du capitaine ou du responsable à bord, le propriétaire ou l'exploitant qui aura donné l'ordre de commettre l'infraction sera puni des peines prévues auxdits articles. » On ne saurait être

plus clair : les peines s'appliquent également à l'armateur et à l'exploitant.

L'article 10 va même plus loin en disposant : « Le tribunal pourra, compte tenu des circonstances de fait et, notamment, des conditions de travail de l'intéressé, décider que le paiement des amendes prononcées à l'encontre du capitaine ou du responsable à bord, en vertu des articles précédents, ainsi que les frais de justice qui peuvent s'ajouter à ces amendes, seront, en totalité ou en partie, à la charge de l'exploitant ou du propriétaire. »

Et, s'il était besoin d'ajouter un argument, je mentionnerais le deuxième alinéa de l'article 121-7 du code pénal, selon lequel est également complice d'un crime ou d'un délit la personne qui, par « menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir, aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre ».

Nous sommes donc plus que bordés juridiquement. En conséquence, même si sa préoccupation est légitime, je demande à M. Paul de retirer son amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Comme la commission, le Gouvernement estime que la préoccupation de M. le député est fondée.

En fait le débat porte uniquement sur le point de savoir s'il vaut mieux inscrire la disposition proposée dans ce texte ou si l'on peut se contenter de la jurisprudence et des textes en vigueur. A cet égard, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente.

La parole est à M. Edouard Landrain.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

M. Edouard Landrain.

Décidement, on fait beaucoup appel à la sagesse de l'Assemblée ce matin. Je vous en remercie, monsieur le ministre, mais je regrette qu'elle ne semble pas présider aux prises de position de la majorité.

(Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

Certes, monsieur le rapporteur, la loi de 1983 permet d'élargir la responsabilité. Néanmoins ce serait tellement mieux si on l'écrivait dans ce texte en adoptant un amendement qui satisfait tout le monde, même le rapporteur, j'en suis persuadé.

Le fond du problème, et le président de notre commission d'enquête le sait mieux que quiconque, tient au fait que c'est toujours le lampiste qui trinque ; rappelez-vous la chanson célèbre. Ainsi le responsable est toujours le capitaine alors qu'il n'est qu'aux ordres. Il doit aller le plus vite possible, transporter au moindre coût et assurer une rentabilité maximale.

Au-delà de tous les grands mots sur le libéralisme, intervenons, mesdames, messieurs, sur un sujet profondément socialisant, puisqu'il s'agit de rendre responsables ceux qui le sont vraiment et de ne pas se contenter de viser le capitaine du navire qui, lui, n'a que Dieu, et quelquefois les hommes, pour faire face aux événements.

M. Bernard Deflesselles.

Très bien !

M. Robert Gaïa.

Comme pour l'amiante !

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Chacun comprend les préoccupations de M. Paul qui sont certainement partagées sur tous les bancs de l'Assemblée. Cependant le rapporteur a bien expliqué que les dispositions nécessaires figurent déjà dans les textes en vigueur qui permettent de viser non seulement les armateurs mais aussi toute personne donnant des ordres. Par conséquent, M. Paul a satisfaction sur le fond.

Nous sommes en première lecture et le groupe socialiste, pour l'instant, suivra le rapporteur. S'il apparaissait nécessaire que cette redondance figure dans la loi, nous aurions la possibilité d'en décider en deuxième lecture.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Pour l'instant, nous nous en tiendrons à la position de la commission.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est sage !

Mme la présidente.

La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert.

La proposition de M. Paul part d'un bon sentiment mais je crains que, en voulant trop bien faire, il ne soit en fait en retrait par rapport aux textes en vigueur. En effet ces derniers permettent d'engager la responsabilité de tous les donneurs d'ordre et pas seulement de l'armateur. C'est indispensable car d'autres personnes peuvent intervenir dans la chaîne de commandement.

En ne visant que l'armateur du navire, cet amendement risquerait d'exonérer de toute responsabilité d'autres personnes de la chaîne de commandement alors que la loi actuelle le permet.

Pour cette raison, je rejoins les avis exprimés par

M. Dufau et par notre rapporteur.

Mme la présidente.

la parole est à M. Louis Guédon.

M. Louis Guédon.

Dans son amendement no 11 mon collègue Jean-Yves Besselat présente une proposition proche de celle de M. Paul. C'est la raison pour laquelle nous soutiendrons cette dernière, étant entendu que, comme l'a rappelé notre collègue M. Landrain, il vaut mieux répéter clairement et de manière plus précise des dispositions, même si cela est évident aux yeux de tous et même si elles figurent dans d'autres textes.

Mme la présidente.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul.

Il semble que les tribunaux qui devraient appliquer la loi de 1983 ne le fassent qu'avec une certaine partialité, si je peux me permettre de formuler cette critique ici même : malgré les dispositions de la loi de 1983 que vient de rappeler M. le rapporteur, ce sont systématiquement les capitaines ou les commandants qui sont punis.

N otre assemblée ne pourrait-elle pas montrer sa volonté de porter le fer dans l'ensemble de la filière en faisant en sorte que la responsabilité des donneurs d'ordre soit mise en cause ?

M. Edouard Landrain.

Très bien !

M. Daniel Paul.

Il est évident qu'un armateur ne donnera jamais à un commandant un tel ordre écrit. Cela relève de l'ordre des indications tacites : personne n'écrit qu'il faut dégazer en mer, mais il est convenu que si cela est possible, il faut le faire. Telle est la mécanique que l'on doit casser en responsabilisant en permanence l'armateur qui, au bout du compte, est le donneur d'ordre.

M. Edouard Landrain.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

Je veux formuler une d ernière observation qui rejoint celle présentée par Jérôme Lambert.

Alors que les textes en vigueur permettent de mettre en cause toutes les responsabilités possibles, cet amendement qui, pour éviter que ne soit engagée que celle du capitaine du navire, ne vise que l'armateur est réducteur, car il y a aussi l'affréteur, l'exploitant et tous les autres donneurs d'ordre éventuels.

M. Daniel Paul.

On dilue !

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

Si les tribunaux n'appliquaient pas la loi comme il le faut, ce serait regrettable, mais je ne crois pas qu'un tel ajout permettrait de renforcer son application. En la matière, l'article 5, notamment, essaie de mieux responsabiliser les tribunaux.

Ainsi que l'a souligné notre collègue Jean-Pierre Dufau, nous pourrions revenir sur ce sujet en seconde lecture si cela se révélait nécessaire, mais en assurant l'équilibre juridique nécessaire et en évitant une redondance affaiblissante, alors que nous disposons déjà d'un panel complet de mesures pour agir dans ce domaine.

M. Jean-Pierre Dufau.

Très bien !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Besselat a présenté un amendement, no 11, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'article 1er , après le mot : "récidive", insérer les mots : "du double de ces peines, tout capitaine, ou tout propriétaire dont la responsabilité directe est avérée, d'un navire français soumis aux dispositions". »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

La parole est à M. Jean-Yves Besselat.

M. Jean-Yves Besselat.

Le capitaine d'un navire est certes responsable de son commandement, mais le dégazage, source de pollution, peut être réalisé à son insu. Par exemple, la technique de rééquilibrage d'un navire exige souvent que les hommes de pont, à l'insu du capitaine, soient conduits à réaliser des opérations de dégazage. Il peut aussi y avoir des pollutions accidentelles.

En France, le nombre des vocations maritimes est déjà insuffisant. Alors que les capitaines sont souvent chargés et accablés de responsabilités, il faut les atténuer. Il convient ainsi de faire en sorte que celles des armateurs puissent être recherchées en raison des consignes données à leurs commandants.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

La commission des lois a émis un avis défavorable.

Aux arguments que j'ai développés contre l'amendement précédent, j'ajoute que M. Besselat vise le propriétaire du navire. Or on a vu, ne serait-ce que dans le cas de l' Erika , combien cette notion est imprécise en la matière. En effet, les montages juridiques sont parfois très complexes entre un propriétaire de la coque, un fréteur de navires, un armateur ou un affréteur et plusieurs autres intermédiaires.

Ainsi, dans la plupart des cas, le propriétaire ne peut pas être considéré comme responsable. Il est donc préférable de viser l'ensemble des donneurs d'ordres, ce qui est moins restrictif.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Fidèle à ma position : sagesse ! (Sourires.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Le groupe socialiste suivra la position du rapporteur !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

11. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 1er

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

Mme la présidente.

« Art. 2. - Le début de l'article 2 de la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 2. - Sera puni d'une amende de 900 000 francs et d'un emprisonnement de deux ans et, en cas de récidive, du double de ces peines, tout capitaine d'un navire... (Le reste sans changement.) ».

Les amendements nos 6 et 2 de M. Daniel Paul ne sont pas défendus.

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3

Mme la présidente.

« Art. 3. - Le début de l'article 4 de la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 4. - Sera puni d'une amende de 30 000 francs et, en cas de récidive, du double de cette peine et d'un emprisonnement d'un an, tout capitaine... (Le reste sans changement.) ».

Les amendements nos 7 et 3 de M. Daniel Paul ne sont pas soutenus.

Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Article 4

Mme la présidente.

« Art. 4. - Après les mots : "sera puni d'une amende de", la fin de l'article 5 ter de la loi no 83-583 précitée est ainsi rédigée : "900 000 francs et d'un emprisonnement de deux ans." » Les amendements nos 4 et 8 de M. Daniel Paul ne sont pas défendus.

Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Après l'article 4

Mme la présidente.

M. Besselat a présenté un amendement, no 10, ainsi libellé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« Après l'article 6 de la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 précitée, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. 6-1. - Un certificat de dégazage délivré par un organisme agréé par l'Etat français doit être présenté par tout navire pénétrant dans les eaux territoriales françaises.

« Si ce document ne peut être présenté, les autorités maritimes françaises seront à même de lui faire exécuter un dégazage réglementaire à quai, sous peine de sanctions pénales. »

La parole est à M. Jean-Yves Besselat.

M. Jean-Yves Besselat.

Le texte de cet amendement est clair et me paraît correspondre à l'opinion exprimée sur tous les bancs de notre assemblée.

Notre collègue Le Drian, à l'occasion d'un débat connexe et récent, avait lui-même souhaité que les autorités françaises aient la possibilité de contrôler tout navire pénétrant dans un port français pour s'assurer que le dégazage a bien été effectué, et, dans le cas contraire, de l'obliger à le faire réaliser au port. Cet amendement traduit une motivation forte et de bon sens : éviter les dégazages volontaires en mer qui continuent à se produire près de nos côtes, même si les mesures prises par la France depuis vingt ans en ont considérablement réduit le nombre. Il confère à la puissance publique des moyens supplémentaires et particulièrement drastiques afin de rendre impossible, du moins en théorie, ces mini-marées noires, volontaires et inadmissibles, pour peu que nous ayons suffisamment de contrôleurs pour contrôler.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

L'amendement de notre collègue Besselat part d'un bon sentiment.

M. Jean-Yves Besselat.

Ce n'est pas un sentiment, c'est la réalité !

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

Malheureusement, il est totalement contraire aux conventions internationales relatives au droit de la mer. En effet, le droit de faire route


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

ne peut pas être réduit de la sorte. Aucun Etat, fût-il la France, ne peut interdire à un navire de traverser pacifiquement ses eaux territoriales. En outre, nous n'avons aucun moyen permettant, en droit international, d'obliger à effectuer un dégazage préventif en France ou à produire un certificat délivré par la France.

Enfin, les dispositions qu'il est proposé d'insérer à l'article 11 bis du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports anticiperont, pour la France, la future directive européenne obligeant les navires faisant escale dans un port communautaire à y déposer leurs résidus et déchets d'exploitation. Nous allons donc dans le même sens que M. Besselat, mais dans le respect des conventions internationales que nous avons signées. La commission s'est donc prononcée contre son amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Bernard Deflesselles.

Sagesse ! (Sourires.)

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le rapporteur, je ne suis pas sûr qu'il ne soit pas possible d'intervenir dans les eaux territoriales.

La mise en place d'un certificat de dégazage délivré par un organisme agréé par l'Etat français et valable uniquement en France pour des navires battant pavillons internationaux me paraît tout à fait envisageable. Cela dit, on le comprend bien, une telle disposition mérite pour le moins d'être étendue à l'ensemble des pays de la Communauté européenne sous peine d'écarter nombre de navires des ports français. Telle est la problématique à laquelle nous sommes confrontés.

Cette mesure de contrôle et de répression viendrait s'ajouter au dispositif retenu par la Commission européenne dans le cadre de la préparation d'une directive qui obligera les navires à dégazer dans les ports de la Communauté européenne. Ce dispositif est d'ailleurs en passe d'être introduit dans le droit français par l'amendem ent proposé par M. Le Drian, M. Le Bris et Mme Saugues dans le cadre du projet de loi du Gouvern ement portant diverses dispositions d'adaptation communautaire, dont nous avons parlé. Le Gouvernement souhaite privilégier cette voie qui recueille l'accord de nos partenaires européens.

Au bénéfice de ces explications, le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement, même s'il n'en conteste pas le bien-fondé.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Yves Besselat.

M. Jean-Yves Besselat.

Monsieur le ministre, vos propos sont frappés au coin du bon sens : dans la mesure où une directive européenne prépare le terrain, nous prendrions le risque de pénaliser les ports français qui ont déjà bien du mal - nous ne le savons que trop en tant qu'élus havrais, défenseurs du port du Havre et de l'activité maritime en France - à lutter à armes égales sur le plan des réglementations avec les ports étrangers, notamment Anvers et Rotterdam.

Pour toutes ces raisons, et dans la mesure où vous m'assurez du quasi-engagement du Gouvernement à faire aboutir la directive européenne, j'accepte de retirer mon amendement pour préparer l'avenir. Vous-même venez de confirmer mes informations selon lesquelles la directive devrait entrer en vigueur dans les prochaines semaines.

Au bénéfice de ces explications, j'accepte de retirer l'amendement no 10 qui ne vaudra plus que pour le procès-verbal.

Mme la présidente.

L'amendement no 10 est retiré.

M. Daniel Paul.

C'est un sage !

M. Jean-Pierre Dufau.

Sagesse toujours ! Article 5

Mme la présidente.

« Art. 5. Il est inséré, après le titre XVII du livre IV du code de procédure pénale, un titre XVII bis, comportant deux articles, ainsi rédigé :

« Titre XVII bis. - De la poursuite, de l'instruction et du jugement des infractions en matière de déchets d'exploitation et résidus de cargaison des navires.

« Art. 706-40-1. Les actes visés par la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires ainsi que les infractions connexes sont poursuivis, instruits et jugés selon les règles du présent code sous réserve des dispositions du présent titre.

« Ces dispositions sont également applicables à la poursuite, l'instruction et au jugement des actes susvisés commis hors du territoire national, lorsque la loi française est applicable en vertu des dispositions d'une convention ou d'un traité international régulièrement approuvé ou ratifié. »

« Art. 706-40-2. Pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions commises en mer du Nord et dans la Manche, entrant dans le champ d'application de l'article 706-40-1, le procureur de la République, le juge d'instruction et le tribunal correctionnel de Cherbourg exercent une compétence exclusive.

« Pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions commises dans l'Atlantique, entrant dans le champ d'application de l'article 706-40-1, le procureur de la République, le juge d'instruction et le tribunal correctionnel de Brest exercent une compétence exclusive.

« Pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions commises en Méditerranée, entrant dans le champ d'application de l'article 706-40-1, le procureur de la République, le juge d'instruction et le tribunal correctionnel de Toulon exercent une compétence exclusive. »

M. Jean-Pierre Dufau a présenté un amendement, no 9, ainsi libellé :

« Rédiger, ainsi l'article 5 :

« L'article 12 de la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 est ainsi rédigé :

« Art. 12.

- I. - Les procès-verbaux dressés par les agents mentionnés à l'article 11 de la présente loi font foi jusqu'à preuve contraire. Ils sont transmis immédiatement et par tous moyens au procureur de la République désigné aux II et suivants du présent article par l'agent verbalisateur qui en adresse en même temps copie à l'administrateur des affaires maritimes lorsqu'il s'agit de navires ou de platesformes ou à l'ingénieur des ponts et chaussées chargé du service maritime, s'il s'agit d'engins portuaires, de chalands ou de bateaux-citernes fluviaux.

« II. - Les infractions aux dispositions de la convention mentionnée à l'article 1er et à celles de la présente loi sont poursuivies, instruites et jugées par un tribunal de grande instance du littoral maritime compétent sur le ressort de plusieurs cours d'appel, dans des conditions déterminées par le présent article et figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d'Etat.

« Le tribunal de grande instance de Paris est compétent pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions commises dans la zone économique exclusive française.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

« III. - Le ministère public territorialement compétent est celui qui est placé près du tribunal de grande instance dont le ressort comporte les eaux territoriales dans lesquelles les faits ont été commis.

« Le ministère public près la juridiction définie conformément au II peut également être saisi de faits de pollutions entrant dans le champ d'application de la présente loi, concurremment avec le ministère public territorialement compétent qui peut néanmoins accomplir les actes nécessaires à l'enquête et à la manifestation de la vérité qui ne peuvent être différés ou qui justifient son intervention.

« Si les faits de pollution justifient l'ouverture d'une information, le ministère public territorialement compétent en application du III transmet immédiatement et par tous moyens les éléments de procédure au ministère public près la juridiction définie conformément au II.

« IV. - Dans chaque juridiction visée au II, un ou plusieurs juges d'instruction est désigné pour l'instruction des faits susceptibles de constituer une infraction à la présente loi.

« V. - La compétence de la juridiction définie au présent article s'étend aux infractions qui seraient connexes aux infractions de pollution.

« VI. - Lorsqu'ils sont compétents en application des dispositions du présent article, le procureur de la République et le juge d'instruction exercent cette compétence sur toute l'étendue du ressort fixé en application du II. »

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

J'ai déjà expliqué les motivations de cet amendement lors de mon intervention liminaire. Il pose le principe d'une compétence mixte entre les tribunaux territoriaux et le tribunal de Paris, de façon à éviter que ce dernier soit dessaisi en matière. La liste des tribunaux compétents territorialement sera fixée par décret en Conseil, lequel devra intervenir, conformément à un sous-amendement que j'ai déposé en commission, au plus tard le 31 décembre 2001.

Le fait que cette compétence mixte pourra être exercée concurremment par les tribunaux territorialement compétents et le tribunal de Paris n'impose plus de modifier le code de procédure pénale, mais seulement la loi du 5 juillet 1983.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

L'amendement no 9 de notre collègue Jean-Pierre Dufau tend à réécrire l'article 5 en proposant une nouvelle rédaction de l'article 12 de la loi no 83-583.

Rappelons pour commencer que le but de la proposition de loi et, notamment, de son article 5 est de permettre l'élaboration d'une jurisprudence moins erratique en confiant aux tribunaux de grande instance des chefslieux des préfectures maritimes le soin de juger des plaintes relatives aux dégazages. Ainsi la preuve photographique des infractions n'est pas admise par des cours peu au fait des agissements de capitaines peu scrupuleux, qui dès lors peuvent continuer impunément à souiller nos côtes. En confiant le soin de juger ces affaires aux tribunaux des régions exposées, on peut raisonnablement penser que les capitaines poursuivis...

M. Christian Paul.

Et les donneurs d'ordre !

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

... et les donneurs d'ordre auront plus de mal à déjouer les actions intentées contre eux. Quant à fixer la liste des tribunaux compétents par décret, pourquoi pas ? Cette solution a en tout cas été adoptée par la commission. Je note cependant que l'article 706-17 du code de procédure pénale permet que la définition des tribunaux compétents relève de la loi.

Nous pourrons en redébattre en deuxième lecture. En attendant, la commission se rallie à l'amendement présenté par notre collègue.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

9. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 5 est ainsi rédigé.

Explications de vote

Mme la présidente.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Bernard Deflesselles, pour le groupe Démocratie libérale.

M. Bernard Deflesselles.

Comme nous l'avons dit lors de la discussion générale, l'opposition unie votera cette proposition de loi.

Monsieur le ministre, vous avez voulu engager avec moi une petite polémique en remarquant que la proposition de loi que j'avais déposée le 8 septembre dernier n'avait pas été discutée. Je vous rappelle que son inscription a été refusée par le bureau de l'Assemblée nationale, lequel, que je sache, reflète la composition de cette assemblée et tout particulièrement la place majoritaire qu'y tient la gauche plurielle.

Seconde petite polémique, tout aussi sobre et gentille, sur le reproche que j'ai adressé au gouvernement socialiste en 1992 d'avoir laisser aller les choses, avec les conséquences que l'on sait aujourd'hui. Ce à quoi vous m'avez répondu en me demandant pourquoi nous n'avions pas cherché à corriger cet état de fait en 1993. Mais à mon tour de vous renvoyer la question, monsieur le ministre : depuis juin 1997...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Trois ans déjà ! (Sourires.)

M. Bernard Deflesselles.

Eh oui, nous avons déjà fêté votre troisième anniversaire, monsieur le ministre ! (Sourires.) Pourquoi n'avoir rien fait pour changer les choses depuis trois ans ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

J'ai commencé !

M. Bernard Deflesselles.

Voilà pour clore cette - petite - polémique. Nous voterons bien évidemment ce texte, en regrettant seulement que nous ayons perdu dix mois. Dix mois, c'est beaucoup. Nous avons pu compter pendant ce temps plus de quarante dégazages sauvages dans toutes les mers qui baignent les 5 000 kilomètres de côtes de notre beau territoire. Nous en avons encore eu un exemple tout récemment en Méditerranée. Tout ce temps perdu, c'est un peu dommage ; reste qu'il vaut mieux voter ce texte aujourd'hui que de ne rien faire.

C'est un pas, un pas timide, vraiment timide, intéressant mais insuffisant.

Insuffisant au niveau des responsabilités : nous nouss ommes focalisés sur les capitaines indélicats qui c ommettent sans vergogne des actes délictueux, en


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

oubliant, M. Paul et d'autres l'ont fait remarquer, les affréteurs et les propriétaires ; c'est un peu dommage. La timidité ne doit pas être confondue avec la sagesse.

« Sagesse, sagesse... » Vous n'avez eu que ce mot à la

bouche pendant toute la discussion, messieurs de la gauche plurielle. Pour ma part, j'aurais souhaité que l'on aille un peu plus loin. J'ai dégagé quelques pistes...

M. Edouard Landrain.

Dégazé ! (Sourires.)

M. Bernard Deflesselles.

D'abord celle de la formation des équipages.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Cela se fera.

M. Bernard Deflesselles.

Oui, monsieur le ministre, mais quand ? C'est toujours le même problème ! Les Etats-Unis ont fait dans ce domaine un effort considérable...

M. André Aschieri.

Au mépris des lois internationales, parce que ce sont les Etats-Unis !

M. Bernard Deflesselles.

Pas parce que ce sont les

Etats-Unis, mais tout simplement parce que ce sont de bonnes règles, toutes simples. Il suffisait de les appliquer en France et en Europe. Ainsi les coast guards, sont un excellent corps qui permet d'effectuer des contrôles efficaces, en tout cas autour des côtes. La technique de la double coque, qui commence à s'imposer en Europe, également,...

M. André Aschieri.

Son efficacité n'est pas prouvée !

M. Bernard Deflesselles.

... même si certains spécialistes estiment qu'elle ne suffit pas. Nous pourrions obliger les navires à présenter des certificats de responsabilité financière, ou encore durcir les régimes d'assurance ; nous avons toute une panoplie de mesures, qu'il nous suffit de mettre en oeuvre.

Monsieur le ministre, vous nous avez assuré que vous agissiez, que l'Europe allait bouger - timidement. J'espère que la présidence que nous allons assurer du 1er juillet au 31 décembre sera exemplaire en ce domaine. Le patrimoine commun que représentent notre mer et notre environnement le vaut bien.

Mme la présidente.

La parole est à M. Edouard Landrain, pour le groupe UDF.

M. Edouard Landrain.

Le groupe UDF votera cette proposition de loi, même s'il pense qu'elle reste bien timorée et que nous aurions pu aller beaucoup plus loin, taper un peu plus fort. Nous avons bien senti, monsieur le ministre, que vous approuviez nos suggestions dans le principe, mais que certaines contraintes vous empêchaient de les reconnaître comme acceptables. Il faudra bien y revenir, en songeant en particulier, j'y insiste, au moyen d'indexer le niveau des amendes sur le prix du pétrole au plan international, par, peut-être, le biais d'une loi annuelle. Faute de quoi, nous aboutirons inévitablement à un décalage entre la réalité économique et la valeur des amendes, devenues insuffisamment dissuasives.

Ce texte n'est qu'une étape en attendant la grande loi sur la mer dont nous devrons débattre, je l'espère, lorsque la commission d'enquête que préside Daniel Paul aura achevé ses travaux. En effet, nous avons bien d'autres soucis que les dégazages et les déballastages. C'est toute la déontologie du transport maritime sur le plan de la probité, de la moralité, qui mérite d'être reprise, affinée et assortie de sanctions sérieuses en cas de dérapage.

Si nous n'avons pas toutes assurances sur l'uniformisation des règles au niveau des européens je crains que nous ne devenions, sinon les dindons de la farce, tout au moins désavantagés par rapport à d'autres. Souvenez-vous comment la Commission avait renvoyé le problème sous la pression de la Norvège et des Pays-Bas, au motif que les ports russes pourraient en tirer avantage ! Le traitement doit être le même pour tous, faute de quoi nous pourrions nous retrouver bien malheureux dans nos décisions. Quoi qu'il en soit, le groupe UDF votera ce texte en attendant l'autre qui, j'en suis persuadé, ne manquera pas de venir.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Dufau.

Madame la présidente, le groupe socialiste étant à l'origine de cette proposition de loi, je me limiterai à en féliciter le rapporteur et les auteurs. Le débat a éclairé les positions en permettant à chacun de s'exprimer. Le groupe socialiste votera ce texte, sans aucune timidité, persuadé qu'il sera rejoint par la sagesse de l'ensemble de l'assemblée.

(Sourires.)

M. Alain Calmat.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Louis Guédon, pour le groupe RPR.

M. Louis Guédon.

Comme je l'ai annoncé dans la discussion générale, le groupe RPR votera cette proposition de loi, même si elle ne répond pas aux attentes des populations maritimes, comme je l'ai largement expliqué. Elle reste également en retrait par rapport aux directives européennes qui paraîtront très prochainement. De surcroît, on l'a dit, nous aurions pu gagner dix mois. Quoi qu'il en soit, nous la voterons.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand, pour le groupe RCV.

M. Jean-Michel Marchand.

Nous avions indiqué dès la discussion générale que nous voterions cette proposition de loi, même si nous en avons souligné les limites. Nous n'entendons pas refuser ce premier pas dans le sens du renforcement de la sécurité maritime, mais il ne faudra pas pour autant laisser l'oeuvre en chantier, car il y a urgence.

Cette urgence doit s'exprimer tout à la fois au niveau de l'OMI - mais nous savons avec quelle célérité fonctionne cette organisation - et au niveau de l'Union européenne, dont la France assurera la présidence dans les prochains jours. Il faudra profiter de ces six mois pour faire avancer le chantier. Et si nous ne réussissons pas à ces deux niveaux, il ne faut pas exclure de proposer, de façon certes unilatérale et peut-être un peu volontariste, des dispositions propres à nous donner les moyens de contrôler de tels agissements sur nos façades atlantique et méditerranéenne.

Mme la présidente.

La parole est à M. Daniel Paul, pour le groupe communiste.

M. Daniel Paul.

Après le naufrage de l' Erika , il y a eu une prise de conscience des risques que nous encourons, une prise de conscience très forte qui a exprimé de diverses façons : « Plus jamais ça ! » On a pris conscience également que les naufrages n'étaient pas seuls à occasionner des dommages, qu'il y avait des dégazages et des déballastages au large de nos côtes.

Ce sont 300 000 navires par an qui passent en Manche. Et des centaines de milliers de navires traversant la Méditerranée entre le canal de Suez et Gibraltar.

Il faut mettre fin au dégazage et au déballastage.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

Le gouvernement français a pris, depuis quelques mois, des décisions fortes qu'aucun autre auparavant n'avait osé prendre dans ce domaine et il a défendu un certain nombre de choses au niveau européen. Diverses rencontres, notamment - je ne veux pas entrer dans le détail -, il y a quelques jours encore, à la Commission européenne avec Mme de Palacio concernant la commission d'enquête, nous ont confirmé que les choses vont évoluer dans ce milieu maritime actuellement soumis simplement à la loi du marché. L'OMI elle-même, l'organisation maritime internationale, consent à examiner quelques possibilités d'avancées.

J'ai le sentiment que notre loi reste un peu « scotchée » à des positions qui sont le reflet des errements et des insuffisances passés. Rejet des sous-normes et obligation de formation avec les normes STCW : nous le faisons.

Pourquoi ne pas franchir un pas supplémentaire en mordant vraiment dans la responsabilité de ceux qui polluent au large de nos côtes et qui polluent, bien évidemment, monsieur le ministre, volontairement ? Car il est évident que les pollutions involontaires sont beaucoup plus difficiles à réprimer.

La responsabilité des armateurs est réelle dans le cadre de la mondialisation actuelle. Ne pas la réinscrire dans la présente loi, alors qu'elle existe dans celle de 1983, me semble une erreur, alors que la mondialisation a fait les ravages que l'on sait. Les Etats-Unis que l'on ne saurait qualifier de bolcheviques... (Sourires.)

M. Edouard Landrain.

Pas encore !

M. Daniel Paul.

... leur ont attribué une responsabilité première, totale et illimitée ; pas à hauteur de 1,2 milliard de francs ni de 1 milliard d'euros ! Une responsabilité

« illimitée » ! Ici, on hésite à mettre en cause des armateurs lorsqu'il y a des dégazages volontaires en haute mer, comme s'ils n'avaient pas leur part dans l'organisation même du transport maritime.

Nous voterons, bien sûr, cette loi mais nous présenterons à nouveau nos amendements en deuxième lecture.

M. Edouard Landrain.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gilbert Le Bris, rapporteur.

Mes chers collègues, ce n'est qu'un premier pas - mais on prouve le mouvement en marchant - d'autres suivront très rapidement dans les différents domaines qui sont de notre compétence et qui nécessitent notre intervention. Nous les ferons en collabo-r ation avec le Gouvernement. Chacune dans son domaine, toutes les instances, au niveau national et européen et au niveau de l'OMI, sont concernées tant par des accidents comme le naufrage de l' Erika qui sont la conséquence de négligences, bien sûr, mais ne sont pas intentionnels, que par ce qui est plus spécifiquement l'objet de la présente proposition de loi, à savoir les actes volontaires, quotidiens, si néfastes, de dégazage sauvage.

Nous avons essayé de mettre en place un corpus de droit qui tienne compte de ce qui existe déjà, monsieur Paul, comme les articles 6 et 10 de la loi de 1983, ou ceux qui traitent de ce problème dans le code pénal et le code de procédure pénale, car point n'est besoin d'être redondant.

Mais nous aurons l'occasion d'en discuter à nouveau, ne serait-ce que lorsque sera publié - très prochainement - le rapport sur les conséquences du naufrage de l' Erika

Je tiens à remercier tous mes collègues pour leurs contributions toujours utiles, leurs discussions raisonnables et empreintes de sagesse, et leur appui à cette proposition de loi que je vous ai présentée et - on n'est jamais si bien servi que par soi-même ! - que j'ai eu le plaisir de vous rapporter.

Nous continuerons de traiter de ces problèmes de pollution car, malheureusement, le risque zéro n'existe pas, monsieur Guédon, pas plus en matière maritime qu'ailleurs. Ce que nous pouvons tenter de faire par le biais des textes de loi, c'est réduire la sphère de l'imprévisible, c'est-à-dire rendre aussi rares que possible tant les accidents graves que les incidents quotidiens qui, par leur répétition, prennent un caractère de gravité.

Vous avez exprimé vos intentions, mes chers collègues.

Je vous ai entendus et je vous en remercie. Je sais que le débat n'est pas clos et que nous y reviendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Vote sur l'ensemble

Mme la présidente.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Mme la présidente.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

4

ORDRE DU JOUR DE L'ASSEMBLÉE

Mme la présidente.

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au vendredi 30 juin 2000, terme de la session ordinaire, a été fixé ce matin en conférence des présidents.

Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu de la présente séance.

Par ailleurs, la conférence des présidents a inscrit à l'ordre du jour complémentaire du jeudi 29 juin la proposition de résolution de M. Bernard Accoyer tendant à la création d'une commission d'enquête sur les pratiques non réglementées de modifications corporelles.

5

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

Mme la présidente.

Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique : Questions au Gouvernement ; Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, no 2427, relatif à la chasse : M. François Patriat, rapporteur au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 2459).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

(1) La Constitution dispose que l'adoption, en dernière lecture, d'un projet de loi organique par l'Assemblée requiert la majorité absolue de ses membres. Le règlement prévoit que les votes pour lesquels la Constitu tion exige une majorité qualifiée ont lieu par scrutin public à la trib une.

La séance est levée.

(La séance est levée à onze heures quarante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

ORDRE DU JOUR ÉTABLI EN CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS (Réunion du mardi 13 juin 2000) L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra du mardi 13 au vendredi 30 juin 2000, terme de la session ordinaire, a été ainsi fixé : Mardi 13 juin 2000 : Le matin, à neuf heures : Discussion de la proposition de loi de M. Gilbert Le Bris modifiant la loi no 83-583 du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires (nos 2371-2445).

(Séance mensuelle réservée à un ordre du jour fixé par l' Assemblée, en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution)

L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures : Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la chasse (nos 2427-2459).

Mercredi 14 juin 2000 : L'après-midi, à 15 heures : Question au Gouvernement.

A dix-huit heures trente, et le soir, à vingt et une heures : Discussion du projet de loi constitutionnelle relatif à la durée du mandat du Président de la République (nos 2462-2463).

Jeudi 15 juin 2000 : Le matin, à neuf heures trente, l'après-midi, à quinze heures, et le soir à vingt et une heures : Suite de la discussion projet de loi constitutionnelle relatif à la durée du mandat du Président de la République (nos 24622463).

Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi modifiant la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication (no 2456).

Vendredi 16 juin 2000 : Le matin, à neuf heures, l'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt-et-une heures : Suite de l'ordre du jour de la veille.

Le mercredi 14 juin 2000, à dix-sept heures, M. Abdelaziz Bouteflika, Président de la République algérienne démocratique et populaire sera reçu dans l'hémicycle.

Mardi 20 juin : Le matin, à neuf heures : Questions orales sans débat.

L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures : Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi constitutionnelle relatif à la durée du mandat du Président de la République.

Discussion, sur rapport de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi relative à la prestation compensatoire en matière de divorce (no 2461).

Discussion, sur rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption (no 2260).

Discussion, soit sur le rapport de la commission mixte paritaire, soit en nouvelle lecture, du projet de loi de finances rectificative pour 2000.

Mercredi 21 juin 2000 : L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement : Discussion, en lecture définitive, du projet de loi organique tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats de membre des assemblées de province et du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l'Assemblée de la Polynésie française et de l'Assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna (1) Discussion, en lecture définitive, du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs.

Jeudi 22 juin 2000 : Le matin, à neuf heures : Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à renforcer le dispositif pénal à l'encontre des associations ou groupements constituant, par leurs agissements délictueux, un trouble à l'ordre public ou un péril majeur pour la personne humaine (no 2034).

(Ordre du jour complémentaire.)

L'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures : Discussion, en lecture définitive, du projet de loi modifiant la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et la promotion des activités physiques et sportives.

Discussion, en lecture définitive, du projet de loi relatif à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.

Discussion, sur rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif au référé devant les juridictions administra tives (no 2460).

(Ce dernier texte faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 106 du règlement.) Discussion des propositions de loi organiques de M. Emile Vernaudon destinée à améliorer l'équité des élections à l'Assemblée de la Polynésie française (no 1448), relative à l'élection de l'Assemblée et de la Polynésie française (no 2329) et de M. Michel Buillard, tendant à modifier la loi no 52-1175 du 21 octobre 1952 pour rééquilibrer la répartition des sièges à l'Assemblée de la Polynésie française (no 2410).

(Ces trois textes faisant l'objet d'une discussion générale commune.)

Mardi 27 juin 2000 : Le matin, à dix heures : Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures : Suite de l'ordre du jour du matin.

Mercredi 28 juin 2000 : Le matin, à neuf heures : Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement : Discussion, en lecture définitive, du projet de loi relatif à la chasse.

Discussion, en lecture définitive, du projet de loi de finances rectificative pour 2000.

Discussion, en lecture définitive, du projet de loi modifiant la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 13 JUIN 2000

Jeudi 29 juin 2000 : Le matin, à neuf heures, l'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures : Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

Discussion de la proposition de résolution de M. Bernard Accoyer tendant à créer une commission d'enquête sur les conditions de sécurité sanitaire liées aux différentes « pratiques n on réglementées de modifications corporelles » (piercing, t atouage, sacrification, implants divers de corps étrangers) (nos 2333-2451).

Vendredi 30 juin 2000 : Le matin, à neuf heures, l'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures : Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.