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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

1. Questions au Gouvernement (p. 5856).

M. le président.

SMIC (p. 5856)

M. Jean Vila, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

EMPLOI DANS L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE (p. 5857)

MM. Jean-Claude Sandrier, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

TÉLÉPHONE MOBILE (p. 5857)

MM. Jacques Barrot, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

GÉNOME HUMAIN (p. 5858)

MM. Alain Claeys, Roger-Gérard Schwartzenberg, ministre de la recherche.

DISPOSITIF VILLE VIE VACANCES (p. 5859)

Mme Nicole Feidt, M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville.

TRAFIC AÉRIEN (p. 5859)

MM. Jean-Pierre Blazy, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

CENTRES D'HÉBERGEMENT ET DE RÉADAPTATION SOCIALE (p. 5860)

Mmes Martine David, Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

CONTRÔLE AÉRIEN (p. 5861)

MM. Georges Sarre, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, du transport et du logement.

STATISTIQUES DE LA DÉLINQUANCE (p. 5862)

MM. Yves Nicolin, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

JOSÉ BOVÉ FACE À LA JUSTICE (p. 5863)

M. Christian Jacob, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. JACK LANG ET L'ECSTASY (p. 5863)

MM. Jean-Claude Lemoine, Jack Lang, ministre de l'éducation nationale.

FINANCEMENT DES 35 HEURES (p. 5864)

M. Jean-Marc Nudant, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

2. Hommage à Pierre Pflimlin (p. 5865).

M. le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 5865)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

3. Solidarité et renouvellement urbains. - Suite de la discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi (p. 5865).

DISCUSSION GÉNÉRALE (suite) (p. 5865)

MM. Pierre Cardo, Daniel Marcovitch, Serge Poignant, Jean-Michel Marchand, Jean-Jacques Filleul.

Clôture de la discussion générale.

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION (p. 5870)

Motion de renvoi en commission de M. Philippe DousteBlazy : MM. Henri Plagnol, Alain Cacheux, Gilles Carrez, Dominique Bussereau, Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. - Rejet.

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 5877)

Article 1er A (p. 5877)

M. Pierre Cardo.

Amendement de suppression no 64 de la commission de la production : MM. Patrick Rimbert, rapporteur de la commission de la production ; le secrétaire d'Etat, Gilles Carrez, Jean-Michel Marchand, Francis Delattre. - Adoption.

L'article 1er A est supprimé.

Article 1er B (p. 5880)

MM. Pierre Cardo, Jean-Michel Marchand.

Amendement de suppression no 65 de la commission : M. le secrétaire d'Etat. - Adoption.

L'article 1er est supprimé.

L'amendement no 530 de M. Jean-Michel Marchand n'a plus d'objet.

Suspension et reprise de la séance (p. 5881)

Article 1er (p. 5881)

MM. Daniel Marcovitch, Gilles Carrez, le secrétaire d'Etat.

Amendement no 66 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Gilles Carrez. - Adoption.

Amendement no 67 de la commission ; MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Gilles Carrez. - Adoption.

Amendement no 68 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 9 de M. Marchand : MM. Jean-Michel Marchand, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Amendement no 69 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 70 de la commission ; MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 71 de la commission, avec le sousamendement no 557 rectifié du Gouvernement : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption du sousamendement no 557 rectifié.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

MM. le secrétaire d'Etat, le président. - Adoption de l'amendement no 71 modifié.

Amendement no 72 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 73 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 74 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 75 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Michel Bouvard. - Adoption.

Amendement no 76 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 77 de la commission, avec le sousamendement no 489 de M. Poignant : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Serge Poignant, Gilles Carrez, Francis Delattre. - Rejet du sous-amendement no 489 ; adoption de l'amendement no

77. Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

4. Saisine du Conseil constitutionnel (p. 5889).

5. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 5889).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

M. le président.

Mes chers collègues, j'ai le plaisir de souhaiter la bienvenue à notre nouveau collègue, M. Francis Hillmeyer.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Il n'est pas encore là ! 1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par le groupe communiste.

SMIC

M. le président.

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Madame la ministre de l'emploi et de solidarité, les chiffres annoncés pour l'augmentation du SMIC sont de 3,2 % pour les salariés à 39 heures et de 1,4 % pour les salariés à 35 heures. L'évolution du pouvoir d'achat est donc plus faible pour ceux qui sont passés aux 35 heures. Ainsi, ce sont les salariés qui paient de leur poche la réduction du temps de travail.

(« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jean-Luc Préel.

Eh oui !

M. Jean Vila.

Lors des débats sur la deuxième loi concernant la réduction du temps de travail, le groupe communiste avait demandé une revalorisation du SMIC horaire de 11,4 % équivalente en proportion au passage de 39 à 35 heures. Cette mesure éviterait le double SMIC et serait conforme aux engagements du Gouvernement qui promettait une réduction du temps de travail sans baisse de salaire.

Rappelons que les dividendes versés aux actionnaires entre 1992 et 1998 ont augmenté six fois plus que les salaires. Relever le SMIC horaire de 6 %, comme l'a suggéré Alain Bocquet la semaine dernière, ne représenterait que 7 milliards, alors que les plus-values potentielles des stocks-options se chiffrent à 72 milliards. La part des salaires dans la valeur ajoutée a diminué de 11 % depuis quinze ans et une baisse est encore prévue pour cette année. Il s'agit donc bien de choix sur le partage des richesses. L'augmentation des bas salaires est une question de justice sociale, mais elle permettrait surtout de consolider la reprise tout en combattant les inégalités.

Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour revaloriser réellement les salaires, dont le

SMIC (A cet instant, M. Francis Hillmeyer entre dans l'hémicycle. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur de nomb reux bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.), et pour supprimer votre mécanisme inacceptable de double SMIC ?

M. Georges Hage.

Quel est ce malotru qui s'introduit pendant que l'on pose une question ?

M. le président.

Mes chers collègues, ne nous méprenons pas : ces applaudissements étaient destinés à M. Hillmeyer et non pas, je l'imagine, à la question de M. Vila, qui pourtant était fort intéressante.

(Sourires.)

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je pense que la question de M. Vila méritait aussi des applaudissements et peut-être ceux-là lui étaientils destinés.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il m'interrogeait en effet sur deux points importants : l'évolution du SMIC et la garantie complémentaire pour les salariés à 35 heures.

Comme vous le savez, la loi prévoit chaque année, au 1er juillet, une revalorisation du SMIC qui doit au moins être égale à la moitié du gain du pouvoir d'achat du salaire horaire ouvrier. Le Gouvernement a décidé, en application de ces règles légales, une augmentation de 3,2 % du SMIC au 1er juillet. Cette augmentation, plus importante que celle des deux années précédentes - 2 % en 1998, 1,24 % en 1999 -, est largement la conséquence du fait que les entreprises ont maintenu les salaires lors de la réduction du temps de travail, sans devoir toutefois supporter un surcoût important, puisque les accords ont prévu à la fois des gains de productivité, des allègements de charges et, souvent, une modération salariale.

En outre, la loi sur la réduction du temps de travail a prévu non pas un double SMIC, mais une garantie supplémentaire pour les salariés qui passent à 35 heures. Ces salariés, de plus en plus nombreux, ce qui explique en grande partie les bons résultats que nous obtenons en matière d'emploi (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), sont payés 39 heures pour 35 heures de travail. C'est donc sur une rémunération garantie de 6 882 francs par mois qu'est acquise une augmentation de 1,45 % cette année.


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Le pouvoir d'achat des salariés payés au SMIC dans les entreprises passées à 35 heures a augmenté de 6,5 % depuis quatre ans, alors qu'il n'avait augmenté que de 1,1 % pendant les quatre années précédentes. Cela signifie que le salarié payé au SMIC à 35 heures a obtenu un gain de pouvoir d'achat annuel de 4 300 francs nets puisqu'il est payé 39 heures.

Ces règles de revalorisation du SMIC sont transitoires, et c'est d'ailleurs pourquoi le Conseil constitutionnel a considéré que la garantie complémentaire était conforme à la Constitution. Cette rémunération particulière rejoindra le taux d'augmentation du SMIC au plus tard en 2005.

La mise en oeuvre de ces règles en application de la loi sur la durée du travail permet une répartition équilibrée des fruits de la croissance. Elle maintient une progression importante du pouvoir d'achat tout en préservant la compétitivité des entreprises.

Ainsi, je crois que nous arrivons à démontrer depuis trois ans que la dynamique de croissance et la réduction du chômage n'opposent pas, comme cela avait été trop souvent le cas par le passé, emploi et salaire, car nous savons bien qu'il y a là un cercle vertueux : l'augmentation des salaires accroît la consommation, qui soutient la croissance, celle-ci favorisant elle-même les créations d'emplois.

M. Bernard Accoyer.

C'est la méthode Coué !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est l'ensemble de ces éléments qui nous permet d'assurer un équilibre entre le revenu salarial et l'emploi, et c'est pourquoi le Gouvernement a pris ces décisions pour le 1er juillet. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

EMPLOI DANS L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

(« Allô ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Le lancement de l'A3XX est un très grand succès pour l'industrie aéronautique française et européenne. Il confirme la compétence et les capacités d'innovation technologique de ses salariés. On ne peut que s'en féliciter.

Le succès d'Airbus est aussi celui d'une coopération européenne originale qui ne s'est pas appuyée sur une structure privée.

Par ailleurs, la constitution d'EADS, si elle prend en compte la nécessité de coopérations en Europe et peut permettre la création de nombreux emplois dans le cadre de l'aviation civile, risque de se traduire de manière beaucoup plus négative dans le secteur de la défense. Il ne faudrait pas que l'obsession de la rentabilité financière vienne remettre en cause les créations d'emplois aujourd'hui annoncées, en particulier sur le site de Toulouse, et se traduise par des hémorragies d'emplois sur d'autres sites - je pense notamment à Bourges - où est également impliquée EADS.

Si nous devons être légitimement fiers d'Airbus et du lancement de l'A3XX, pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, quelles seront les retombées positives pour l'emploi dans notre pays et comment le Gouvernement compte empêcher ou compenser les pertes envisagées pour certaines régions ? N'y a-t-il pas là une opportunité en matière de diversification industrielle ? Quelles sont les capacités d'action et de décision de la France et de l'Etat actionnaire au sein d'EADS ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, vous vous félicitez à juste titre, comme chacun de nous ici, du lancement de l'avion Airbus gros porteur, l'A3XX. Au t otal, ce sont plus de 30 000 emplois, dont 10 000 emplois directs, qui seront créés dans notre pays.

Cela concerne Toulouse et sa région, mais aussi SaintNazaire, Nantes ou encore le département de la Somme.

Quant à la création de la société Airbus de plein exercice, elle ne modifie pas la dominante privée qui existait déjà mais permet de renforcer l'efficacité de cette société.

Quel chemin parcouru en deux ans, depuis le mois de décembre 1997, lorsque les chefs de Gouvernement ont lancé un appel au regroupement de l'industrie aéronautique sur le plan civil et militaire ! Dans le domaine militaire, la société Airbus est également concernée avec la perspective de la réalisation de l'avion militaire gros porteur, l'A400

M.

Quant à EADS, société aujourd'hui à dominante privée, mais où l'actionnaire public garde son mot à dire, ses activités concernent aussi bien le civil que le militaire et je puis vous assurer que rien, dans la démarche suivie, ne vise à opposer l'un à l'autre. Bien sûr, et M. Alain Richard, ministre de la défense, pourrait vous apporter plus de précisions, nous attendons la finalisation des arbitrages sur la programmation militaire. Mais vous ne pouvez imaginer que la France, pour elle-même et pour l'Europe de la défense, se désengage de ce secteur.

S'agissant plus particulièrement de Bourges, et je comprends vos préoccupations à ce sujet, la direction d'Aerospatiale-Matra est consciente des contraintes auxquelles elle doit faire face. Mais, en attendant les arbitrages dont je viens de parler, aucun décision de restructuration n'est à l'ordre du jour. Dans tous les cas, la concertation la plus large sera assurée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous passons au groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

TE LE

PHONE MOBILE

M. le président.

La parole est à M. Jacques Barrot.

M. Jacques Barrot.

Monsieur le président, avant de poser ma question, laissez-moi exprimer l'émotion de notre groupe parlementaire à l'annonce du décès de Pierre Pfimlin.

Sa disparition, en une journée manifestement très importante pour la relation franco-allemande, ne nous fait pas oublier ce grand parlementaire. Je pense notamment au discours qu'il prononça, et dont je fus le témoin dans les tribunes, à l'occasion de la ratification du traité franco-allemand, discours magnifique sur l'amitié entre nos deux pays.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

Nous voulions, par ces quelques mots, dire notre attachement à ce grand parlementaire, qui fut aussi un très grand européen (Applaudissements sur de très nombreux bancs.)

Ma question s'adresse à M. le ministre chargé des télécommunications.

Plus de 22 millions de personnes sont aujourd'hui abonnées au téléphone mobile et leur nombre pourrait bien dépasser celui des abonnés au téléphone fixe. Grâce au WAP, l'enjeu du téléphone mobile va devenir de plus en plus vital pour les particuliers comme pour les entreprises.

Or, monsieur le ministre, la couverture du territoire f rançais par les réseaux de téléphone mobile reste lacunaire : 16 % du territoire national n'est pas couvert et les zones couvertes ne le sont pas toujours convenablement.

(« En effet ! », sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Le Gouvernement est-il résolu à fournir à tous les Français un service de téléphonie mobile de qualité à prix abordable, ainsi qu'à assurer l'acheminement gratuit des appels d'urgence à partir de ce réseau ? Pourquoi France Télécom, en partenariat financier avec les autres opérateurs, Bouygues Télécom et SFR, ne recevrait-elle pas la mission d'assurer un service universel élargi au téléphone mobile ? Pourquoi une partie de la cagnotte collectée par le Gouvernement lors de l'attribution des licences de téléphonie mobile ne serait-elle pas consacrée à la couverture de l'ensemble du territoire français en réseaux mobiles ? En résumé, quelles assurances pouvez-vous donner aux 10 % d'usagers non raccordés ainsi qu'à ceux qui le sont théoriquement mais qui subissent des coupures fréquentes, notamment ces usagers chercheurs d'emploi ou artisans pour qui le mobile est devenu un précieux outil ? Les beaux discours sur le service public à la française ne suffisent pas : que fait l'Etat pour le service du public ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M.

le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M

Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le président, puisque je suis le premier membre du Gouvernement à intervenir après M. Barrot saluant la mémoire de Pierre Pflimlin, je voudrais exprimer, au nom de M. le Premier ministre, l'émotion de l'ensemble du Gouvernement à la suite de la disparition du grand européen qu'il fut.

Votre question, monsieur Barrot, porte sur la relation entre les nouvelles technologies de la communication, notamment le mobile, et l'aménagement du territoire.

Ainsi que le Premier ministre l'a annoncé lors du dernier comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire, nous souhaitons qu'à terme les réseaux mobiles soient accessibles à tous sur l'ensemble du territoire. C'est d'ailleurs en ce sens - votre question appelle aussi cette réponse - que nous travaillons au niveau européen sur le concept même de service universel. Pour cela, nous avons choisi une procédure en trois temps.

D'abord, fixer une couverture ambitieuse au moyen d'un cahier des charges très strict pour les opérateurs du téléphone mobile. C'est ce que j'ai fait en 1998 en augmentant l'obligation de couverture à 90 % de la population, et c'est ce que le Gouvernement compte faire - je vous rassure par avance - pour la couverture du territoire en ce qui concerne la norme UMTS.

Ensuite, favoriser une dynamique concurrentielle entre les différents opérateurs, qui les pousse à étendre la couverture du territoire. Aujourd'hui, 98 % de la population et 85 % du territoire peuvent accéder au réseau mobile GSM.

M.

Jean Auclair.

Allons donc !

M.

le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Enfin, il appartiendra au Gouvernement, à la fin de cette année, de dresser un état des lieux de la couverture mobile et de déterminer les moyens à mettre en oeuvre afin d'assurer la couverture de tout le territoire et de l'ensemble de la population, avec le souci de la solidarité et de l'égalité des citoyens devant ce moyen de propagation de l'information, de la communication et de la culture.

M.

Lucien Degauchy.

Paroles, paroles !

M.

le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Soyez assuré que ce mouvement sera parallèle à celui que, par ailleurs, nous poursuivons sur les hauts débits, c'est-à-dire sur la capacité pour tous - petites et grandes entreprises, personnes aisées et modestes - d'accéder aux moyens de la culture, d e la communication et, finalement, de l'emploi.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M.

le président.

Nous en venons au groupe socialiste.

GÉNOME HUMAIN

M.

le président.

La parole est à M. Alain Claeys.

M.

Alain Claeys.

Monsieur le ministre de la recherche, avec la publication du décodage de la majeure partie du génome humain, ce sont d'immenses perspectives qui s'ouvrent pour la prévention et le traitement de maladies aujourd'hui incurables. Face à cette révolution scientifique sans précédent, il est important que nous réaffirmions notre attachement à deux principes fondamentaux : la non-commercialisation du corps humain et le libre accès à la connaissance des gènes.

Alors qu'elle présentait ces nouvelles découvertes, la presse s'est également fait l'écho de la course aux brevets à laquelle se livrent actuellement les sociétés qui travaillent sur le génome humain, en particulier aux EtatsUnis. En effet, la brevetabilité des inventions tirées de la connaissance du génome n'est pas sans soulever des questions d'ordre éthique, mais également juridique et économique.

Monsieur le ministre, quelles garanties le Gouvernement souhaite-t-il mettre en oeuvre pour éviter de voir des brevets déposés sur des séquences isolées du génome sans que soient clairement définies les fonctions et les applications industrielles de ces inventions ? (Applaudisssements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M.

le président.

La parole est à M. le ministre de la recherche.

M

Roger-Gérard Schwartzenberg, ministre de la recherche.

Monsieur le député, le séquençage du génome humain, ce décryptage du grand livre de la vie, vient en effet de s'achever. Je tiens à saluer tout particulièrement les recherches menées par le Consortium public international, qui rassemble mille chercheurs de six pays, dont la France, avec le Centre national de séquençage d'Evry.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

Le génome humain, c'est le patrimoine commun de l'humanité. Sa connaissance doit donc appartenir à tous et il ne peut en aucun cas y avoir confiscation du savoir génétique.

M. Jean-Claude Lefort Très bien ! M. le ministre de le recherche Grâce à la recherche publique menée sur fonds publics, c'est ce qui se passera : les données brutes du séquençage seront librement accessibles à tous. Sans la recherche publique et du fait du comportement initial de certaines sociétés de recherche privées aux Etats-Unis, il aurait pu en être autrement. La logique est donc la suivante : à recherche publique, information publique ; à fonds publics, données publiques.

En ce qui concerne les problèmes de brevetabilité, notre position repose sur trois principes.

Premièrement, les séquences brutes du génome humain doivent être mises dans le domaine public ; elles ne sont pas brevetables.

Deuxièmement, une simple découverte de ce qui existe à l'état naturel n'est pas une véritable invention biotechnologique. Seule une véritable invention biotechnologique peut être brevetée.

Troisièmement, la brevetabilité requiert l'identification de la fonction d'un gène réalisée non seulement sur ordinateur, « in silico », mais également par voie expérimentale, ainsi que la détermination des applications pratiques, c'est-à-dire thérapeutiques ou diagnostiques, de la fonction de ce gène pour la mise au point de nouveaux médicaments ou de nouveaux tests diagnostiques.

C'est seulement à ce niveau d'inventivité que peut intervenir le brevet. C'est ainsi qu'à notre sens doit s'interpréter la directive européenne du 6 juillet 1988 sur la protection juridique des inventions biotechnologiques.

Le brevet protège et donc encourage l'activité inventive des chercheurs qui pourront mettre au point des tests diagnostics et des médicaments nouveaux pour mieux lutter contre le cancer, le diabète, les maladies cardiovasculaires ou neurologiques, par exemple. Guérir davantage de patients, mieux les soigner est aussi un grand objectif éthique.

Je terminerai en rappelant les trois principes qui guident notre comportement et qu'a cités M. Alain Claeys : refuser la commercialisation d'éléments du corps humain, assurer le libre accès au savoir génétique fondamental, enfin, protéger les chercheurs qui feront des inventions véritables à partir du gène, à partir de cet alphabet de la vie, et qui, ainsi, amélioreront la santé humaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

DISPOSITIF VILLE VIE VACANCES

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Feidt.

Mme Nicole Feidt Monsieur le ministre délégué à la ville, le dispositif Ville Vie Vacances mis en oeuvre par le premier conseil de la prévention et de la délinquance fonctionne depuis près de vingt ans. Il y eut d'abord les opérations « anti-été chaud » puis « prévention été ».

Grâce à ce dispositif, nombre de jeunes de nos quartiers difficiles ont pu sortir de ces quartiers et connaître diverses activités porteuses d'intégration. En dépit de certaines difficultés, le succès de ces opérations est indéniable ; les maires et les parlementaires que nous sommes en sont bien conscients. Pour passer à une nouvelle étape, monsieur le ministre et mieux en faire profiter un plus grand nombre de jeunes, quelles perspectives d'évolution envisagez-vous ? Quelles sont les orientations prioritaires retenues pour l'an 2000 ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la ville.

M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville.

Madame la députée, comme vous l'avez souligné, nous avons, en effet, étendu le nombre de départements qui peuvent faire appel au dispositif Ville Vie Vacances tout en recentrant cet outil sur les jeunes qui ne peuvent pas partir dans le cadre d'un système traditionnel - colonies de vacances ou stages pour adolescents. Nous voulons réserver Ville Vie Vacances aux jeunes qui ont le plus besoin de faire l'objet de prévention ou d'un suivi pour leur assurer une insertion de qualité.

L'an dernier, 850 000 jeunes ont ainsi participé aux 12 000 actions mises en place par les collectivités locales - et je veux saluer le travail accompli par les municipalités, en la matière - les associations, mais aussi par la police et la gendarmerie.

Cette année, l'Etat va débloquer 50 millions de francs - et cela entraînera une mobilisation de 92 millions de francs - pour permettre à ces jeunes, qui ne partiraient pas sans cette initiative, d'accéder, eux aussi, à des loisirs.

Nous voulons sensibiliser l'ensemble des protagonistes afin que soient mises en place des actions permettant la détente mais aussi destinées à promouvoir la citoyenneté, la solidarité et la lutte contre la ségrégation, notamment raciale.

Nous souhaitons également permettre à ces jeunes de découvrir un espace de loisirs avec leur famille. Nous avons donc décidé de renforcer les actions qui toucheront les loisirs parents-enfants. Ce sera l'une des priorités du programme 2000.

Enfin, madame la députée, afin que le voyage et le séjour de ces jeunes se déroulent dans de bonnes conditions, j'ai signé, voilà quelques jours, avec Mme Demessine et Mme Buffet ainsi que l'ensemble des associations d'élus concernés par les villes de départ et d'arrivée, un accord visant à mieux encadrer les voyages et les séjours dans les différents sites touristiques. L'objectif est de faire en sorte que chacun puisse passer des vacances de qualité.

Le droit aux vacances, le droit aux loisirs doit être ouvert à tous. Avec ce dispositif original Ville Vie Vacances, nous permettons à celles et ceux qui ont le plus besoin de la solidarité nationale de pouvoir bénéficier eux aussi de vacances. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

TRAFIC AÉRIEN

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy Monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, la grève des contrôleurs aériens, qui a paralysé hier le ciel français, a conduit à l'annulation de 90 % des vols. Cette grève fait suite à un rapport intermédiaire de la Commission européenne sur la mise en place possible d'un ciel unique européen.

La déréglementation et la libéralisation du ciel, intervenues à la fin des années 80, ont conduit, en effet, à une véritable explosion du transport aérien civil. Celle-ci i mpose aujourd'hui aux responsables européens de


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prendre très au sérieux les risques, tant sur le plan économique du fait de la multiplication avérée des retards, que sur le plan de la sécurité, du fait de la saturation de plus en plus évidente du ciel.

Dans le même temps, le Parlement européen s'interroge sur les limites de l'accroissement du trafic aérien à cause de son impact sur l'environnement, notamment au voisinage des aéroports ; il commence à envisager de gérer la pénurie d'espace aérien par une nouvelle régulation de ce mode de transport.

En France, aucune amélioration notable n'a pu être encore enregistrée, en dépit pourtant des concessions des autorités militaires en matière d'utilisation de l'espace aérien et des mesures prises au début de cette année. En outre, la limite infranchissable de 55 millions de passagers pour l'aéroport de Roissy, que vous aviez fixée en 1997, monsieur le ministre, sera très prochainement atteinte. Or la question de la réalisation du troisième aéroport dans le grand bassin parisien n'est toujours pas réglée.

M. Eric Doligé.

Il faut répondre clairement à cette question !

M. Jean-Pierre Blazy.

Par ailleurs, l'affirmation de l'excellence du service public du contrôle aérien français passera inévitablement par sa capacité à s'adapter aux nouvelles contraintes liées à l'explosion du trafic.

M. le président.

Monsieur Blazy, posez votre question, je vous prie.

M. Jean-Pierre Blazy.

J'y viens, monsieur le président.

Au moment où la France va présider l'Union européenne, quelles propositions pouvez-vous faire, monsieur le ministre, pour favoriser une politique de développement durable du transport aérien en Europe tendant à une gestion plus intégrée de l'espace aérien européen et à un renforcement des pouvoirs d'Eurocontrôle tout en refusant la privatisation du contrôle aérien en France ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, du fait des besoins de mobilité accrus dans un contexte économique favorable, l'augmentation du trafic aérien est effectivement forte. Cela entraîne des avantages, mais aussi des contraintes nouvelles en termes de gestion du trafic aérien et d'environnement. Face à cette tendance qui apparaît durable, des évolutions devront être envisagées. Je pense notamment à la substitution air-fer à grande vitesse pour des distances de plusieurs centaines de kilomètres. Nous nous inscrivons dans ce schéma lorsque nous développons le réseau ferroviaire à grande vitesse dans notre pays et en Europe.

Monsieur le député, il n'est pas juste de dire qu'il n'y a aucune amélioration, même si j'admets qu'il y a encore des retards. Après le pic lié à la guerre du Kosovo, nous avons en effet retrouvé le niveau d'il y a deux ans, malgré la croissance du trafic aérien. C'est grâce aux mesures que nous avons arrêtées.

S'agissant de l'éventuelle réalisation d'un troisième aéroport dans le grand bassin parisien (« Ah ! » sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), des décisions seront prises dans le cadre des schémas collectifs dans les prochaines semaines. Mais je peux d'ores et déjà vous assurer, monsieur le député, que les engagements concernant la lutte contre les nuisances sonores seront tenus.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jacques Myard.

Cela ne suffit pas ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

S'agissant de la meilleure utilisation de l'espace aérien, je veux réaffirmer mon attachement et celui du Premier ministre à faire en sorte que le contrôle aérien demeure une structure au sein de la fonction publique.

C'est ce que j'ai indiqué hier au conseil des ministres des transports européens. Je souhaite que le délai proposé par le Conseil européen de Feira, qui renvoie la décision à la fin du premier semestre 2001, soit utilisé pour trouver justement les procédures et les propositions de concertation nécessaires pour renforcer l'efficacité contre les retards aériens.

M. Yves Nicolin.

Baratin ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Soyez assuré, monsieur le député, de ma détermination à faire en sorte que les objectifs légitimes de réduction de retards, comme ceux de la lutte contre les nuisances, soient atteints en veillant au respect absolu de la sécurité dans le transport aérien.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

CENTRE D'HÉBERGEMENT ET DE RÉADAPTATION SOCIALE

M. le président.

La parole est à Mme Martine David.

Mme Martine David.

Madame la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés, alors que l'on peut se féliciter des bons résultats enregistrés semaine après semaine par le Gouvernement en matière d'emploi (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), le sort de ceux que l'on a qualifiés d'exclus de l'exclusion n'apparaît que plus préoccupant. Certes, la loi de finances pour 2000 a confirmé la détermination de l'Etat, déjà inscrite dans la loi de lutte contre l'exclusion, à agir dans ce domaine. Pourtant, les responsables de centres d'hébergement et de réadaptation sociale s'inquiètent d'un surcroît de demandes auxquel ils n'ont pas toujours les moyens de répondre.

Malgré le dévouement et le dynamisme des personnels, les associations rencontrent en effet des difficultés pour remplir leur mission de service public. Ainsi, pour la quatrième année consécutive, les trente CHRS du département du Rhône n'ont pas vu leur budget de fonctionnement augmenter.

Madame la secrétaire d'Etat, quels moyens le Gouvernement entend-il dégager dans le cadre de la lutte contre les exclusions pour redonner espoir à ceux de nos concitoyens qui sont encore oubliés de la croissance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.).

M. Laurent Dominati.

Il faut changer de Gouvernement !

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Madame la députée, nous pouvons en effet nous réjouir des bons résultats enregistrés en matière de lutte contre le chômage, qui est passé sous la barre des 10 %. Le chômage de longue durée a même diminué plus rapidement que les autres types de chômage.

S'agissant de la loi de lutte contre les exclusions, nous avons inscrit le principe d'un accès aux droits fondamentaux. Martine Aubry, qui travaille à l'élaboration du bilan de l'application de cette loi - il sera présenté dans les prochains jours - montrera bien que, si certains points méritent encore d'être confortés, des avancées considérables ont d'ores et déjà été opérées concernant notamment l'hébergement. La loi a en effet précisé l'assise juridique des centres d'hébergement et de réinsertion sociale en diversifiant les missions vers toujours plus et mieux d'insertion. Elle a également clarifié les relations financières de l'Etat avec ces établissements. Le déblocage de moyens supplémentaires a permis de créer 1 700 places au cours des deux dernières années, portant à 30 000 le nombre de places de CHRS sur l'ensemble du territoire, même si nous pouvons toujours déplorer l'inégalité de leur répartition, certaines communes se refusant à assumer leur part de solidarité.

Dans certains départements, cet effort considérable peut se trouver masqué par la nécessité de faire face à un afflux de demandeurs d'asile qu'il faut accueillir et héberger. En réaction à cette situation, le Gouvernement a mis en place un « plan asile ». Il s'agit de mobiliser des crédits importants des ministères des affaires sociales et de l'intérieur pour prendre en compte les demandes d'asile à la frontière et d'accorder des moyens supplémentaires à l'OFPRA pour raccourcir les délais d'instruction. Par ailleurs, 1 000 nouvelles places en centre d'accueil des demandeurs d'asile seront créées dès cette année, et 1 000 autres l'an prochain, afin d'éviter que les places d'hébergement réservées à nos concitoyens les plus démunis soient occupées par les demandeurs d'asile.

Vous le voyez, madame la députée, les capacités d'accueil ont été relevées, les crédits notifiés cette année ont augmenté partout - y compris dans le département du Rhône - de plus de 20 % cette année (« Non ! » sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et les établissements, dont vous saluez la détermination et le professionnalisme des agents, ont été invités à participer à une réflexion et à présenter des propositions, dans le but d'évoluer vers plus de partenariat et de complémentarité avec les collectivités locales et d'améliorer l'accueil et l'insertion de nos concitoyens qui en ont encore besoin.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons au groupe Radical, Citoyen et Vert.

CONTRÔLE AÉRIEN

M. le président.

La parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

Monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, au lendemain du blocage du ciel français par les contrôleurs aériens, il est bon de poser sans détour les vraies questions.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

La stratégie élaborée par la Commission, exposée dans la récente communication sur le ciel unique, consiste à tirer argument de l'augmentation des retards aériens dans le ciel européen, pour faire prévaloir la privatisation de cette activité qui, en France, relève du service public. Qui veut noyer son chien, l'accuse de la rage.

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

Sauvageon ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Georges Sarre.

Au lieu de reconnaître que l'augmentation du trafic, et donc des retards, est justement le résultat de la déréglementation, on fait porter la responsabilité sur le contrôle aérien. Au lieu d'examiner comment les autorités des Etats membres peuvent rationaliser le trafic chez elles, et bien sûr entre elles, de façon coordonnée, on vient nous expliquer que le salut passe toujours par plus de déréglementation, de concurrence, de libéralisme.

C'est faire bien peu de cas des contraintes qui pèsent sur notre pays, que la géographie a institué plaque tournante des transports de toute nature. C'est ignorer les impératifs de notre souveraineté s'agissant des besoins de notre défense et de la nécessité de conserver des zones affectées à la circulation militaire.

Monsieur le ministre, quelle est votre analyse des projets de Mme le commissaire de Palacio ? N'est-il pas temps de substituer une coopération intergouvernementale très élargie - au moins à l'ensemble de toute l'Europe, Russie comprise - et donc très efficace, à ce projet d'instance supranationale ? La fuite en avant vers plus de libéralisme défendu par certains au nom de la concurrence se fera au détriment de la sécurité des vols.

J'attends de vous une réponse claire.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, vous avez eu raison de souligner la place particulière de la France dans le transport aérien du fait de sa position géographique.

Je tiens par ailleurs à préciser que les retards, qui sont réels et auxquels il faut s'attaquer, ne sont pas tous imputables à la navigation aérienne. Certains sont liés au dysfonctionnement sur les plates-formes aéroportuaires, voire aux difficultés que peuvent connaître des compagnies elles-mêmes. Cet élément est essentiel si l'on veut vraiment s'attaquer à toutes les causes des retards et pas simplement désigner un bouc émissaire pour continuer à ignorer les moyens de résoudre les problèmes.

Monsieur le député, le Gouvernement est favorable - et je l'ai répété hier encore lors du conseil des ministres des transports européens - à une coordination au niveau des

Etats pour améliorer les capacités de trafic avec une primauté absolue : la sécurité.

Lors de la réunion d'hier, j'ai demandé que soit écartée toute idée de concurrence et de séparation entre régulateurs et opérateurs, ce qui est la cause des inquiétudes de nos professionnels. J'ai pris acte des propos de Mme la commissaire qui affirmait qu'il n'était nullement dans ses intentions de mettre en concurrence les services du contrôle aérien ou de les privatiser - ce que nous pouvons considérer comme un élément positif. Je ferai tout pour trouver un accord sur les objectifs globaux tout en laissant à chaque pays le mode d'organisation qui lui semble le plus efficace et le plus approprié.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

Pour la France, vous l'avez bien compris, notre position est claire, je l'ai dit tout à l'heure à M. Blazy.

C'est vrai, monsieur le député, la pression libérale, ultralibérale même, est forte. Vous voulez une réponse claire aussi. Mais je citerai à mon tour La Fontaine :

« Quand l'eau courbe un bâton, ma raison le redresse. »

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous passons au groupe Démocratie libérale et Indépendants.

STATISTIQUES DE LA DÉLINQUANCE

M. le président.

La parole est à M. Yves Nicolin.

M. Yves Nicolin.

Monsieur le ministre de l'intérieur, la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. Le citoyen auquel vous aimez vous référer si souvent tient ce droit de l'article XV de la Déclaration des droits de l'homme de 1789.

Or il semble que l'administration que vous dirigez ne s'encombre guère des principes que vous proclamez.

En effet, mes chers collègues, vouloir dresser un état des lieux de l'évolution de la criminalité et de l'efficacité de l'Etat face à la délinquance dans notre pays est un véritable parcours du combattant : on interdit les reportages dans certains commissariats, on contrôle les interviews, on donne l'ordre aux préfets de ne pas communiquer aux élus les statistiques les concernant (Protestations sur quelques bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) et on cultive l'opacité sur des chiffres sensibles, comme ceux des faits élucidés.

Vous déclariez pourtant la semaine dernière, sur un ton satisfait, qu'en matière d'élucidation des faits délictueux, nous étions dans la norme européenne et que la délinquance des mineurs connaissait un léger tassement.

Si votre bilan depuis 1997, place Beauvau, était à ce point positif, monsieur le ministre, si vos prédécesseurs étaient à ce point incompétents, alors pourquoi organiser, via la direction générale de la police nationale, cette obstruction méthodique pour empêcher nos concitoyens de connaître la réalité des chiffres de la criminalité dans chaque circonscription de sécurité publique ?

M. Arnaud Montebourg.

Et la question ?

M. Yves Nicolin.

Elle va venir ! Depuis le début des années 80, le nombre de crimes et de délits contre les personnes a doublé dans notre pays, (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) et le taux d'élucidation atteint péniblement 20 %. L'insécurité, il faut le reconnaître, est une des préoccupations majeures des Français. Or, vous n'apportez pas à nos nombreuses questions sur ce sujet les réponses que nos concitoyens attendent.

M. le président.

Posez donc la vôtre, monsieur Nicolin !

M. Yves Nicolin.

Ainsi, l'année dernière, trois malfaiteurs sur quatre étaient sûrs de ne pas être arrêtés.

Dès lors, monsieur le ministre, après le discours de Villepinte, après la mise en place d'une prétendue police de proximité, ne pensez-vous pas qu'il devient urgent de traiter réellement le problème ? Car pendant que vous faites, semaine après semaine, des annonces teintées d'autosatisfaction, nos compatriotes, eux, continuent de souffrir de l'insécurité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Christian Bataille.

Langue de bois !

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Cette question devient rituelle ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Souffrez donc, monsieur le député, que je ne puisse y apporter, d'une semaine à l'autre, une réponse différente.

Au début de chaque année, le directeur général de la police nationale et le directeur général de la gendarmerie nationale, dans une conférence de presse commune, communiquent les statistiques de la criminalité et de la délinquance de manière détaillée. Vous pouvez vous référer à ces états qui sont publics.

J'aimerais que la transparence soit aussi totale dans tous les domaines qu'elle l'est dans celui de la police nationale et, de manière générale, dans tous ceux qui sont de ma compétence ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe libérale et Indépendants.)

M. Jean-Louis Debré.

Qu'est-ce que cela veut dire ?

M. le ministre de l'intérieur.

S'agissant des statistiques de la délinquance, sur la base de 100 en 1990, l'indice pour 1999, est de 102,6, ce qui montre une certaine stabilisation, à un niveau malheureusement élevé. Je vous confirme les chiffres que je vous ai donnés la semaine dernière pour le taux d'élucidation dans la police : il est passé de 22,2 % en 1995 à 23,4 % en 1999 (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et la moyenne, tous services confondus, est de 27,6 %. J'ai démontré que nous étions tout à fait dans la norme des pays occidentaux, et même au-dessus si on veut bien tenir compte du nombre de faits recensés.

Je tiens à donner un éclairage rapide des tendances que nous constatons parce que je dois à la représentation nationale une information aussi complète que possible.

Depuis que nous avons donné la priorité à la lutte contre l'insécurité au quotidien, nous constatons un recul de la délinquance sur la voie publique, particulièrement sensible dans des départements comme la Gironde, le Gard et le Rhône où elle régresse respectivement de 6,5 %, 11,5 % et 13,6 %.

Nous observons, en revanche, une augmentation des vols à main armée et chacun connaît la recrudescence des attaques contre les convoyeurs de fonds. Mais je vous signale à cet égard que la brigade de répression et d'intervention de la préfecture de police de Paris a remporté, il y a trois jours, un très beau succès en Seine-et-Marne, en éliminant une équipe de leurs agresseurs.

Je veux aussi attirer votre attention sur la mutation de la délinquance, liée au nouvelles technologies : explosion des vols de portables et des fraudes à la carte à puce, qui sont considérables en particulier dans votre département, monsieur le député, où je note une augmentation de 60 % dans les cinq premiers mois de cette année.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

Cela dit, je vous invite à raison garder et à ne pas renouveler, d'une manière aveugle, des questions qui n'ont pour but que d'exploiter un sentiment d'insécurité (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) alors qu'il s'estompe dans les quartiers difficiles grâce à la politique définie par le Gouvernement.

(Applaudissements sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous passons au groupe du Rassemblement pour la République.

JOSÉ BOVÉ FACE À LA JUSTICE

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Monsieur le Premier ministe, je veux vous interroger sur le fonctionnement de notre justice.

D'un côté, un agriculteur de l'Eure, M. Capelle, est condamné sans aucune preuve formelle à huit mois de prison, dont quatre fermes, avec privation de ses droits civiques et familiaux, pour avoir prétenduement - il y a eu beaucoup de témoignages contradictoires - lancé un pétard sur un CRS, lequel, pour un doigt écorché, a bénéficié de quatre jours d'arrêt de travail.

(« Et alors ? » sur les bancs du groupe socialiste.)

D'un autre côté, M. José Bové, lui, bénéficie de toutes les sollicitudes du Gouvernement (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

: alors qu'il fait l'objet d'une procédure judiciaire en cours pour avoir saccagé des biens privés, vous l'avez reçu à Matignon ! Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

C'est un scandale !

M. Christian Jacob.

Par ailleurs, vous acceptez que les juges soient soumis à une pression inacceptable. Les services de l'Etat ont reçu des consignes d'accueillir au mieux les militants gauchistes et le gotha de la gauche caviar qui sera présente à Millau.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Pis encore, monsieur le Premier ministre, alors que les forestiers ont les plus grandes difficultés à trouver des trains pour évacuer les bois abattus pendant la tempête de décembre dernier, M. Gayssot n'hésite pas à mettre des trains à disposition des militants de la CGT chargés d'aller faire du nombre à Millau.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Enfin, le plaignant, victime du saccage orchestré par M. Bové, vient de retirer sa plainte, à l'évidence à la suite de pressions scandaleuses, d'autant plus scandaleuses que vous les auriez vous-même cautionnées.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Mes chers collègues, laissez M. Jacob poser sa question !

M. Christian Jacob.

Ma question est simple : pourquoi y a t-il, dans ce pays, en matière de justice, deux poids et deux mesures ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Jean Auclair.

La gauche caviar prend la parole !

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur Jacob, il faut vous faire une raison : la justice, dans notre pays, est indépendante.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Par conséquent, on ne peut pas confondre, en permanence, notamment lorsqu'on siège ici, à l'Assemblée nationale, la définition de la loi par le Parlement et l'application qui doit en être faite, en toute indépendance, par les tribunaux.

(Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

J'ajoute que, s'agissant des manifestations qui dégénèrent, quelquefois, le Gouvernement a envoyé une circulaire de politique pénale à l'ensemble des parquets pour dire...

M. Christian Jacob.

Que pour M. Bové, ce n'est pas grave !

Mme la garde des sceaux.

... d'abord, que les manifestations, dans notre pays comme tout pays démocratique, sont un mode normal d'expression...

M. Jacques Godfrain.

Pas devant un tribunal !

Mme le garde des sceaux.

... qu'en revanche il ne peut pas être toléré de dégradation des biens d'autrui, et encore moins, naturellement, de violences sur les personnes. Voilà les indications que le Gouvernement, comme c'est son rôle, dans la circulaire de politique pénale, a données aux parquets et voilà ce à quoi ils se tiennent en France.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. JACK LANG ET L'ECSTASY

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale, s'est déclaré favorable au contrôle, par des associations, de la drogue ecstasy, lors des soirées rave. Ces propos ont stupéfié tous ceux qui combattent l'utilisation de ces substances, véritable fléau social frappant particulièrement une partie de notre jeunesse. Ils ont également semé la colère dans toutes les fédérations de parents d'élèves qui ont unanimement estimé qu'il n'était pas du rôle d'un ministre de l'éducation de développer de tels arguments.

Une drogue reste une drogue quelle que soit sa pureté.

Aucune n'est sans danger : n'estime-t-on pas qu'environ 1 500 jeunes meurent chaque année sur la route à cause de la drogue au volant, pour ne parler que de ce risque ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

Alors même que l'Union européenne a décidé, le 20 juin dernier, d'adopter un plan d'action antidrogue, le ministre de l'éducation nationale, lui, sous-estime gravement les ravages liés à leur consommation. M. Jack Lang banalise dangereusement ces pratiques et, du coup, déstabilise notre jeunesse.

(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Monsieur le Premier ministre, ma question est simple et précise : désavouez-vous les propos de votre ministre ou vous engagez-vous sur la voie de la dépénalisation de ces substances ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale. (Huées sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale.

Monsieur le député, quand, en 1987, le Premier ministre Jacques Chirac et la ministre de la santé, Michèle Barzach, ont autorisé la vente de seringues pour prévenir et empêcher la propagation du sida, ils ont pris une position courageuse de sauvegarde de la vie humaine.

(« Rien à voir » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Bernard Accoyer.

Scandaleux amalgame !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Nul ne les a accusés, ni à droite ni à gauche, de favoriser la consommation d'héroïne.

Quand, quelques années plus tard, Simone Veil et Philippe Douste-Blazy, chargés de la santé dans le Gouvernement de M. Balladur, reprenant une proposition de Bernard Kouchner, ont autorisé la diffusion de méthadone...

Mme Christine Boutin.

Il a besoin de se dédouaner !

M. le ministre de l'éducation nationale.

... ils ont fait à leur tour prévaloir une exigence de santé publique.

(Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Du calme !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Ici encore, l'impératif de protection des jeunes l'a emporté sur toute autre considération.

(Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Franck Borotra.

Lamentable !

M. Renaud Muselier.

N'importe quoi !

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Les éructations ne m'empêcheront pas de poursuivre ! Face au danger mortel, destructeur pour la santé, qu'est la consommation d'ecstasy, une information sur les contenus de ces drogues est souvent assurée, à l'entrée des manifestations fréquentées par les jeunes, par des associations comme Médecins du monde...,

Mme Christine Boutin.

Qu'ils la gardent !

M. le ministre de l'éducation nationale.

... avec le soutien de la mission interministérielle de lutte contre la toxicomanie, dans un souci de santé publique. Monsieur le député, mon ambition...

M. Yves Nicolin.

Démesurée !

M. le ministre de l'éducation nationale.

... avec le Gouvernement, en particulier Mme Gillot, est d'engager auprès des jeunes des actions d'information puissantes sur les graves dommages causés par les drogues, y compris le tabac et l'alcool qui, comme vous le savez, font chaque année des milliers de morts dans notre pays.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Franck Borotra.

C'est de la désinformation !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Naturellement, messieurs les protestataires, messieurs les « éructateurs », je compte sur votre soutien ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Verts - Huées sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Jacques Myard.

Apprenti sorcier !

FINANCEMENT DES 35 HEURES

M. le président.

La parole est à M. Jean-Marc Nudant.

M. Jean-Marc Nudant.

Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, le financement des 35 heures est dans l'impasse. Pour l'année 2000, le coût de ce dispositif dépassera le montant prévu initialement alors que celui-ci était déjà de 63,9 milliards de francs. Pour 2001, le trou à combler atteindra probablement 15 milliards de francs.

Face à ce nouvel exemple de gestion pour le moins approximative de votre gouvernement, mes questions seront simples : comment comptez-vous financer les dépenses liées aux 35 heures ? Allez-vous de nouveau recourir à des taxes qui pèseront, une fois de plus, sur les entreprises ? Qu'entendez-vous faire pour redresser la situation ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, il y avait en effet - mais j'en ai parlé devant l'Assemblée - un problème de financement pour les 35 heures dès lors que le Conseil constitutionnel avait annulé la taxation complémentaire des heures supplémentaires pour les entreprises restant à une durée du travail supérieure à 35 heures en 2000. Le manque équivalait à 7 milliards de francs. Mais je l'ai dit à plusieurs reprises dans l'hémicycle et devant les commissions, les taxes instaurées par le Gouvernement je pense notamment à la taxe sur les bénéfices - grâce aux très bons résultats des entreprises cette année, ainsi que la taxe sur les tabacs, devraient rapporter plus que prévu : très certainement 4 à 5 milliards de plus. Les deux autres milliards seront trouvés par redistribution de fonds sur mon propre budget.

Pour 2001, comme pour 2000, d'ailleurs - je tiens à réitérer devant vous cet engagement du Gouvernement -, il n'est pas question de financer la réduction de la durée d u travail par les cotisations des salariés et des employeurs. Lorsque le budget de mon ministère sera présenté - dans quelques semaines - je serai amené à vous exposer les mesures prises par le Gouvernement pour garantir le financement du dispositif en 2001.

C'est vrai, nous avons besoin d'argent, car la réduction du temps de travail, ça marche ! Et ça marche même beaucoup plus vite que prévu, beaucoup plus vite que ne le prétendaient les instituts économiques eux-mêmes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

Dans quelques semaines, nous en dresserons un bilan complet, mais je le répète : les 35 heures et les baisses de charges sociales qui y sont associées seront financées, et elles le seront par le budget de l'Etat.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

2 HOMMAGE A

PIERRE PFLIMLIN

M. le président.

Mes chers collègues, je m'associe à la peine qu'a exprimée il y a quelques instants M. Jacques Barrot, peine partagée par ses collègues du groupe UDF, ainsi que par beaucoup de Français qui ont apprécié non seulement les qualités mais aussi la stature d'homme d'Etat de celui qui vient de nous quitter, Pierre Pflimlin.

Il a siégé sur nos bancs de 1945 à 1967, et personne n'oubliera qu'au cours de ces années, sa foi européenne ne s'est jamais démentie. Il a préféré sacrifier sa carrière à ses convictions.

(Applaudissements sur de nombreux bancs.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Patrick Ollier.)

PRE SIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

3 SOLIDARITÉ ET RENOUVELLEMENT URBAINS Suite de la discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains (nos 2408, 2481).

Discussion générale (suite)

M. le président.

Ce matin, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans cette discussion générale.

Dans la suite de cette discussion, la parole est à

M. Pierre Cardo.

M. Pierre Cardo.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat au logement, mes chers collègues, nous examinons en nouvelle lecture le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, et je voudrais juste faire remarquer que l'on ne nous a pas facilité le travail...

M. Henri Plagnol.

C'est le moins qu'on puisse dire !

M. Pierre Cardo.

... puisque nous n'avons eu le rapport de la commission de la production que hier soir, sur Internet, aux alentours de dix-neuf heures, ce qui ne nous a pas aidés pour compléter notre réflexion et rendre le débat enrichissant, comme je crois, tout le monde le souhaite.

C'est en tout cas ce que nous avons essayé de faire en première lecture. Le débat fut peut-être animé, mais tout de même riche en propositions, et il me semble que le texte qui nous revient du Sénat apporte quelques éléments nouveaux, qui reprennent en partie, d'ailleurs, un certain nombre des questions soulevées ici en première lecture avec, parfois, quelques réponses de sagesse sur des problématiques évoquées par le texte.

Il est intéressant d'observer, comme le faisait ce matin le rapporteur, qu'on est passé de 87 à 233 articles. C'est le signe que les sénateurs ont travaillé assez sérieusement, ce dont on ne doutait d'ailleurs pas. Mais c'est peut-être aussi le signe que ce texte était un peu vaste par rapport à l'objectif fixé. Peut-être aurait-il fallu quatre textes au lieu d'un, au moins un par chapitre, et même un cinquième au vu de ce qu'a ajouté le Sénat.

Le Sénat a en effet introduit plusieurs mesures concernant le sous-sol. J'ai bien noté que M. le rapporteur considérait que les problèmes d'urbanisme liés au sous-sol ne relevaient pas tout à fait du sujet évoqué. Toutefois, quand on sait les difficultés que connaissent certaines communes - qui, par exemple, ont sur leur territoire des carrières souterraines -, pour délivrer des permis de construire en l'absence de plan de prévention des risques, on peut considérer que l'apport du Sénat n'était pas totalement inutile, qu'il appelait une réflexion un peu plus approfondie.

Je regrette d'ailleurs que, dans la foulée, il n'ait pas aussi proposé des mesures concernant le traitement du sous-sol lorsque cela s'avère nécessaire, car ce problème est en suspens - cela dit sans jeu de mots - depuis plusieurs années - soit depuis la loi Barnier - en raison d'un vide juridique.

Je rappelle à ce propos que le plan de prévention des risques est annexé au POS et qu'il est opposable aux tiers : un permis de construire peut-être attribué, s'il n'y a pas de PPR, dans le cas où une cavité n'est pas tout à fait à la verticale d'une construction, alors que, avec un PPR, les zones de reculement sont prises en compte. Si nous adoptions rapidement des dispositions dans ce domaine, nous pourrions éviter quelques drames humains. Je connais plusieurs communes qui, comme la mienne, ont plus d'une centaine de pavillons en zone rouge, c'est-àdire en danger permanent : la loi actuelle n'apporte aucune réponse à cette situation.

Le Sénat a donc introduit cet intéressant sous-chapitre qui concerne beaucoup plus de communes qu'on ne le pense.

Le deuxième aspect concerne un débat que nous avons eu, en première lecture, lorsque nous nous sommes interrogés, à propos des plans locaux d'urbanisme et des schémas territoriaux, sur les éléments normatifs sur lesquels on peut se fonder pour attribuer un permis de construire.


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Le projet de loi qui nous a été soumis ne faisait plus allusion aux coefficients d'occupation des sols et autres éléments normatifs. Le Sénat a réintégré ces notions. J'a i assisté à la commission mixte paritaire et n'ai pas cru comprendre que l'Assemblée, en nouvelle lecture, changerait de position, sur ce thème, par rapport à la première lecture. Il me paraît un peu dangereux, pour les élus l ocaux et pour le développement d'un urbanisme cohérent, de ne pas maintenir des éléments normatifs, q uantitatifs dans les futurs documents d'urbanisme.

Quand on connaît la mentalité de certaines associations ou de certains particuliers, qui sont parfois des écologistes d'opportunité, on peut s'inquiéter du nombre de contentieux qui vont surgir et freiner les politiques d'urbanisme, et l'on est en droit de s'interroger sur l'attitude des tribun aux qui, interpellés sur le refus d'un permis de construire, rechercheront dans les documents l'élément normatif qui justifie ce refus et ne le trouveront pas.

Il serait donc intéressant de débattre de ce problème en dernière lecture, afin d'éviter que les élus locaux ne se retrouvent dans des situations délicates, et que les tribunaux ne soient débordés par des contentieux, le plus souvent inutiles.

Dans le deuxième chapitre, qui concerne le logement social, l'article 25, qui fixe le seuil de 20 % de logement social, a particulièrement retenu l'attention de l'Assemblée, mais aussi celle des médias et des élus locaux.

Ce texte essaye de régler le problème du logement social et de promouvoir la mixité sociale, ce que d emandent nombre d'élus et d'habitants de nos communes. Hélas, une fois de plus, on aborde le problème en se focalisant sur le logement : on parle de la pierre, en laissant de côté le problème social, c'est-à-dire la question de l'homme, de la façon dont il habite le territoire et dont il s'inscrit dans la société.

Je ne crains pas, comme certains de mes collègues, l'édification de nouvelles concentrations urbaines, mais, dès lors que des communes à la sociologie relativement équilibrée, jouissant d'un cadre de vie agréable, vont construire progressivement, sur vingt ans, de petits ensembles sociaux bien répartis sur leur territoire, j'ai peur que nos quartiers, qui souffrent de la concentration des logements sociaux - du reste, si, la plupart du temps, on y note 20 % de logements vacants, c'est que peu de gens ont envie d'y habiter en raison des difficultés qu'on y rencontre - n'assistent à une évasion des familles les plus équilibrées en direction de ces nouveaux logements sociaux. C'est en tout cas l'inquiétude du maire d'une collectivité qui compte 80 % de logement social locatif.

Certes, on ne peut pas lutter contre tous les effets pervers d'une loi, mais on peut tenter de les limiter. Je pense à une question sur laquelle j'ai déjà attiré votre attention, et sur laquelle il faudrait à nouveau se pencher en deuxième lecture : de même que je vous ai demandé de ne pas supprimer tous les éléments normatifs, je trouve que la norme de 20 % n'est pas assez précise. Vous souhaitez que le logement social soit locatif. Mais quels sont les facteurs qui posent les plus grands problèmes dans les quartiers ? La pauvreté n'explique pas tout. Il y a aussi la concentration de familles nombreuses. Vous ne pouvez pas fixer le seuil de 20 % de logement social sans préciser un équilibrage de la nature de ces logements. Car, si on construit uniquement des studios et des deux-pièces, les familles nombreuses ne s'installeront pas dans ces nouveaux logements sociaux.

M. Henri Plagnol.

Très juste !

M. Pierre Cardo.

Ce serait un coup d'épée dans l'eau ! Il faut ouvrir l'éventail de ces logements du studio au F 6, voire au F 7, car, la plupart du temps, dans ces quartiers, on ne dépasse pas le F 5. Et l'on s'étonne, après, de voir errer des gamins dans les parties communes.

Sur ce même chapitre des 20 %, je regrette que vous vous soyez contentés d'une politique fondée sur l'aspect répressif, sans envisager aussi un volet préventif. Deux paradoxes nous posent en effet problème. Comment peut-on continuer à construire des logements sociaux dont la plupart ne dépassent pas le F5 et poursuivre en même temps une politique familiale qui a tendance à donner la prime maximale à ceux qui ont le plus d'enfants ? Quand on a peu d'argent, beaucoup d'enfants et que l'on rentre dans un logement social qui ne dépasse pas le F5, expliquez-moi comment on peut harmoniser les deux critères ?

M. le président.

Monsieur Cardo, veuillez conclure s'il vous plaît...

M. Pierre Cardo.

Déjà ? Le temps passe vite quand on parle sans notes. Je vais abréger pour arriver très vite à ma conclusion.

A insi, politique familiale et logement social me paraissent très liés : comment peut-on répondre aux besoins des familles quand on les incite à avoir beaucoup d'enfants et qu'on ne construit pas de logements adaptés.

Deuxième paradoxe : quand on sait que 20 % des logements sociaux sont vacants dans les quartiers en difficulté, la priorité ne devrait-elle pas être de mieux faire vivre le logement social, donc de remplir les logements vides plutôt que d'en construire de nouveaux ?

M. Patrick Rimbert, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Il faut faire les deux.

M. Pierre Cardo.

Pour conclure, je dirai que le problème n'est pas le logement, mais la faillite de notre système institutionnel. Nous avons failli à notre mission de service public dans les quartiers en difficulté. Nous n'avons pas su, et nous ne savons toujours pas, faire régner la police, la justice, l'éducation nationale comme des institutions capables d'apporter de vraies réponses et de développer la citoyenneté aux habitants. Tant que nous ne saurons pas le faire, tant que nous ne nous en donnerons pas les moyens, nous aurons ces logements vides.

Pour ma part, je regrette que ce texte ne soit pas allé assez loin, qu'il n'ait pas prévu la notion d'itinéraire résidentiel, que j'appelle de mes voeux depuis assez longtemps, comme d'autres de mes collègues, car la solution, nous la trouverons chez nous, pas ailleurs : à la longue, il n'y a plus d'ailleurs.

Je voudrais dire simplement...

M. le président.

Ce sera votre conclusion, monsieur Cardo.

M. Pierre Cardo.

... que le groupe Démocratie libérale votera a priori contre le texte final qui risque de revenir à la version initiale, la commission mixte paritaire n'ayant pas abouti à un accord. Pour ma part, je n'ai pas changé de position depuis la première lecture.

(Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Daniel Marcovitch.

M. Daniel Marcovitch.

Après la commission mixte paritaire du 6 juin, et à voir l'ambiance satisfaisante, presque chaleureuse, qui régnait entre la majorité sénatoriale et la


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majorité de l'Assemblée nationale, on aurait pu croire que nous nous dirigions vers une deuxième lecture facile, ouverte et constructive.

Au-delà des divergences politiques fondamentales qui font que les uns sont de droite et les autres de gauche, il semblait que nous devions aboutir à un certain accord, à un certain consensus, que nous pourrions travailler de façon constructive. Force est de constater, avec le dépôt de trois motions de procédure, que nous nous arrêtons beaucoup plus à la forme qu'au fond : ces motions de procédure sont bien sûr un droit de l'opposition, qu'il n'est pas question de contester, mais elles m'évoquent davantage des combats d'arrière-garde qu'une volonté de construction nouvelle autour des articles qui restent en discussion et sur lesquels nous n'avions pas obtenu d'accord, même formel, avec le Sénat.

Comme en première lecture, nous aurons donc un vrai débat entre la droite et la gauche, pour affirmer nos visions de la société. Ce ne sera pas le bétonnage contre le non-bétonnage, mais l'exigence de plus de mixité sociale, le refus des ghettos, qu'ils soient de pauvres ou de riches, et, peut-être, une vision tout à fait différente de notre société.

En effet, la vraie divergence ne porte pas sur le fait de déterminer si le plan d'occupation des sols doit s'appeler plan urbain ou PLU, ou si les SDAU doivent s'appeler SCT - les amendements, incroyablement nombreux, qui tournent autour de ces questions ne tendant qu'à esquiver le vrai débat -, mais de savoir si nous sommes déterminés à réparer les injustices créées par la politique qui fut celle de la droite...

M. Francis Delattre.

Depuis douze ans, la gauche a tout de même gouverné huit ans !

M. Daniel Marcovitch.

... dans le domaine de l'urbanisme et de la construction, et qui, pendant des années, a créé ces grandes barres, ces tours, que nous déplorons aujourd'hui.

M. Delattre a regretté ce matin la médiatisation particulière de l'article 25 ; pourtant, dans sa motion de procédure, il n'a lui-même parlé que de cet article, qui est l'un des aspects les plus symboliques de ce que représentera cette loi. Il est vrai que nous sommes parvenus, sur de nombreux autres articles, à des accords avec le Sénat, que l'opposition, à l'Assemblée, respectera ou non, selon qu'elle aura l'intention de retarder ou non l'adoption d'une loi qui, de toute façon, sera votée avant la fin de la présente session.

Ne nous illusionnons pas : nous ne pouvons pas décider d'obliger, demain, les villes à construire du logement social, mais nous devons nous en donner les moyens et, au moins, aux yeux de la population et sans jeter l'opprobre sur quiconque, montrer que, dans certaines circonstances, on peut aussi, comme l'a dit M. Carrez, avoir du logement social diffus, intégrable dans notre société. Il est difficile de ne faire que du pavillon de banlieue, surtout quand on est en milieu urbain surbétonné, à moins, comme le préconisait Alphonse Allais, de transporter les villes à la campagne. Nous n'aurons pas de petits pavillons à Paris, nous n'en aurons pas dans toutes les villes, mais pourquoi, là où il y en aura, ne pas les construire avec une vision sociale ? Ce débat reste vraiment politique. On nous accuse d'y mettre de l'idéologie. L'idéologie, c'est l'idéal, ce sont les idées - c'est un mot qui recouvre bien des réalités. Ce n'est pas faire de la politique, ce n'est pas se plier uniquement aux nécessités du marché et du système mondial. Il faut être capable aussi, de temps en temps, de résister, de garder ses idées et d'avoir une vision idéologique de ce que peut être la ville de demain.

Pour nous, la construction de cette ville passe par la mixité, qui comporte devoirs et obligations, pour toutes les communes. J'en resterai là pour l'instant...

M. Francis Delattre.

Très bien !

M. Daniel Marcovitch.

... mais serai certainement amené à reprendre la parole au cours de la discussion des articles pour rappeler que, malheureusement, si nous n'obtenons pas, ici, le consensus qui semblait se dessiner au Sénat, ce ne sera que partie remise.

Concernant le logement social, je regrette que tout le monde ne fasse pas preuve de la même ouverture d'esprit et de la même intelligence que M. Cardo - ce n'est pas que je veuille le marginaliser au sein de son parti, il le fait très bien lui-même.

(Sourires.)

Le groupe socialiste et apparentés votera ce projet de loi en le ramenant à la version issue de la première lecture, tout en conservant un certain nombre d'amendements du Sénat qui, je le rappelle, a fait, lui, un travail constructif.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Eric Doligé.

Vous devriez voter comme M. Cardo !

M. Daniel Marcovitch.

M. Cardo votera comme nous !

M. Pierre Cardo.

Je ne voterai pas pour : il y a quand même quelques petits problèmes !

M. le président.

La parole est à M. Serge Poignant.

M. Serge Poignant.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'Assemblée nationale est saisie en nouvelle lecture du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains. Le Gouvernement a déclaré l'urgence, ce qui, en l'absence de plusieurs lectures entre les deux assemblées, affectera la qualité du projet, car s'il est un texte de loi qui imposait réflexion, concertation et échange, c'était bien celui-ci, monsieur Marcovitch.

M. Henri Plagnol.

En effet !

M. Francis Delattre.

Nous allons le renvoyer en commission !

M. Serge Poignant.

Dans une vision constructive et non partisane, le Sénat a apporté de fortes améliorations au texte voté par l'Assemblée nationale, aboutissant à un compromis législatif auquel nous pouvions nous rallier, dans un esprit de construction et d'ouverture ; malheureusement, la majorité en a décidé autrement.

La commission de la production et des échanges a, sur de nombreux points, remis en cause les acquis du Sénat et a très largement rétabli le texte adopté dans sa version initiale, ce que, à ce stade de la discussion, nous ne pouvons accepter.

Aussi, je me propose de vous faire part de notre position sur les principales dispositions du projet.

En ce qui concerne le volet consacré à la réforme de l'urbanisme, au-delà de la sémantique - POS devenu PLU, schéma directeur transformé en schéma de cohérence territoriale - des divergences majeures subsistent autour des dispositions relatives à l'urbanisme et à l'habitat.

La commission de la production et des échanges a rétabli le texte initial pour ce qui est du rôle prépondérant de l'Etat dans la mise en oeuvre des schémas de cohérence


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territoriale, des plans d'urbanisme, des cartes commun ales. On peut donc légitimement s'interroger sur l'appauvrissement du rôle laissé à l'élu local dans ce projet et, par conséquent, sur la véritable volonté du Gouvernement d'aller plus loin dans la décentralisation.

Le schéma de cohérence territoriale ne saurait par ailleurs constituer pour l'agglomération un moyen de bloquer toute possibilité d'urbanisation dans les communes.

En effet, la commission de la production et des échanges a rétabli l'article L.

122-2 du code de l'urbanisme. Elle interdisait ainsi aux communes dépourvues de schéma de cohérence territoriale d'ouvrir des zones à l'urbanisation à compter du 1er janvier 2002 si le préfet ne donne pas son aval. Soyons réalistes : il serait bien utopique de croire que tous les schémas de cohérence territoriale seront approuvés à la fin de l'année 2001 - année de renouvellement des équipes municipales -, voire d'ici à deux ou trois ans, et vous le savez bien, monsieur le secrétaire d'Etat.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Ils seront engagés !

M. Serge Poignant.

Le Sénat a donc proposé très judicieusement de supprimer cet article, comme j'avais moimême proposé de le faire en première lecture.

Pour ce qui est de la fiscalité locale, le Sénat a, à juste titre, supprimé la modification des taux de la taxe locale d'équipement qui avaient été fixés en première lecture.

Malheureusement, la commission propose de rétablir le texte initial en instaurant un abattement de 30 % pour les immeubles collectifs et en majorant la base de la taxation des logements individuels sans pour autant examiner les conséquences de ces décisions sur les ressources locales, ce que, bien entendu, je regrette. Tout cela montre bien le caractère idéologique de votre texte.

En ce qui concerne le volet logement social du texte, et toujours pour poursuivre dans le registre fiscal, je note que vous instituez un prélèvement à la source sur les recettes fiscales des communes n'ayant pas suffisamment de logements sociaux, ce qui, ainsi que l'a démontré ce matin Francis Delattre, est contraire à l'article 72 de la Constitution et au principe de la libre administration des collectivités locales.

M. Francis Delattre.

Bien sûr !

M. Serge Poignant.

Notre collègue a eu parfaitement raison de l'affirmer en défendant l'exception d'irrecevabilité.

Le Sénat a proposé que le dispositif relatif aux 20 % de logements sociaux respecte les périmètres des structures intercommunales existantes, notamment celles qui ont été mises en place par la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement de l'intercommunalité. Comme je l'ai souligné en commission, je regrette qu'il soit proposé de rétablir le texte initial. En effet, il serait plus cohérent d'apprécier la réalité des efforts effectués en faveur du logement social en prenant pour base un périmètre intercommunal dans la mesure où des communes sont déjà engagées dans la réalisation de programmes de type PLH.

De même, il serait plus logique de poser un véritable diagnostic des besoins avant d'avoir recours à des mesures contraignantes. Chacun est favorable à une plus grande mixité sociale - cela a été dit régulièrement à cette tribune -, mais il ne faut pas renouveler les erreurs du passé en privilégiant la quantité au détriment de la qualité. Je réaffirme, au nom du groupe du RPR, que ce texte ne peut pas, ne doit pas faire l'impasse sur l'accession sociale à la propriété.

Il ne doit pas non plus faire l'impasse sur la nécessaire reconstruction ou réhabilitation des quartiers dits sensibles.

Améliorer l'environnement, bien intégrer les logements sociaux dans un urbanisme de qualité, tout en les accompagnant des équipements collectifs nécessaires à la vie quotidienne, tel aurait dû être l'objectif d'un gouvern ement soucieux d'un aménagement cohérent de l'ensemble du territoire, qu'il soit urbain, périurbain ou rural.

Concernant les transports, le texte ne va pas assez loin en matière de régionalisation, même si nous convenons qu'il comporte des mesures intéressantes.

L'insuffisance des moyens financiers consacrés au développement des transports collectifs doit être examinée plus sérieusement, de même que le renforcement des autorités régionales dans l'organisation des transports à l'intérieur des périmètres de compétence.

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Très juste !

M. Serge Poignant.

Pour ce qui est du versement transport, je regrette, là encore, qu'il soit proposé de rétablir le texte initial. La perception de cette taxe parafiscale pèse déjà lourdement sur les employeurs, handicape la compétitivité des entreprises et pénalise donc l'emploi.

M. Francis Delattre.

Eh oui !

M. Serge Poignant.

La proposition du Sénat d'assujettir le produit des amendes à une taxe additionnelle allait dans le bon sens, par conséquent, nous soutenons cette proposition.

En conclusion, je regrette que l'urgence ait été déclarée sur ce texte, ce qui nous prive d'un véritable débat.

Comme cela a été dit, le présent projet de loi néglige la dimension humaine et les aspirations du chacun.

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Bien sûr !

M. Serge Poignant.

Vous auriez dû, monsieur le secrétaire d'Etat, lancer une réflexion d'ensemble sur la politique du logement intégrant le public, le privé, l'aide à la pierre et l'aide à la personne.

M. Serge Poignant.

Cette absence de cohérence est attestée par votre annonce il y a quelques jours, lors de la conférence de la famille, d'une réforme de l'allocation logement.

Ce projet de loi ne répond pas à une vision prospective d e l'avenir. Il marque une volonté indéniable de contrainte et sert une idéologie de densification que nous ne partageons pas.

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Bravo !

M. Serge Poignant.

Il marque, tout aussi indéniablement, une volonté de recentralisation et il aura un réel effet déstabilisateur pour les communes. C'est pourquoi le groupe du Rassemblement pour la République votera contre ce texte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le texte qui nous revient du Sénat met en cause certains des objectifs politiques du projet de loi et aggrave encore diverses dispositions qui pourtant nous paraissaient déjà insuffisantes.


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Rénover les politiques urbaines avec les schémas de cohérence territoriale prenant en compte habitat et déplacements ; conforter la politique de la ville par un meilleur partage de l'espace public et par des dispositions favorisant la solidarité entre communes ; promouvoir la mixité sociale en ayant soin de procéder à une répartition harmonieuse et équilibrée sur le territoire urbain ; développer les transports collectifs en s'appuyant sur la multimodalité, en favorisant les transports alternatifs et en recherchant une meilleure gestion des flux des marchandises, grâce notamment aux plates-formes chargementdéchargement ; renforcer le volet habitat pour répondre aux préoccupations et aux difficultés de nos concitoyens, liées à l'habitat insalubre, à la défaillance de propriétair es ou à des conflits entre copropriétaires et syndic ; donner les mêmes droits aux travailleurs migrants qui habitent les logements-foyers : voilà des objectifs à réaffirmer et à conforter au cours de cette nouvelle lecture.

Je ferai porter ma réflexion sur quatre points.

Le premier concerne le renforcement indispensable de la participation des citoyens aux décisions qui touchent à leur cadre de vie. Il faut, pour cela, affirmer le droit des associations à être consultées dans la procédure d'élaboration des documents d'urbanisme et à agir en justice contre des décisions jugées contestables.

A cet égard, nous devons tenir compte de deux textes : d'abord, la convention d'Aarhus, que la France a signée mais, malheureusement, pas encore ratifiée, et qui renforce le droit à l'information en matière d'environnement et la participation du public aux processus de décision, notamment en matière d'urbanisme ; ensuite, la proposition de directive communautaire tendant à soumettre à évaluation environnementale préalable les plans et programmes d'urbanisme, laquelle a fait l'objet d'une position commune des Etats membres lors du Conseil « environnement » de décembre 1999.

Le deuxième point concerne l'organisation d'un meilleur partage de l'espace public, afin de faire des « villes à vivre ». C'est, entre autres, le volet « déplacements » du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains qui est en cause, avec en corollaire la gestion du stationnement public et la réglementation du stationnement privé pour les bureaux, les surfaces commerciales et les salles multiplex.

Plusieurs mesures peuvent concourir à cet objectif : l'obligation de créer dans les immeubles collectifs des espaces de stationnement pour les véhicules autres que les automobiles - je pense aux vélos ; la fixation de normes plafonds de stationnement pour des bâtiments autres que les logements ; l'instauration d'une taxe sur l'imperméabilisation des sols.

Le troisième point est relatif à l'aménagement du territoire. Mais il ne suffit pas de l'aménager, il faut aussi le ménager, et, pour cela, revenir sur des dispositions, adoptées par l'Assemblée nationale et aggravées par le Sénat qui modifient profondément la loi montagne et la loi littoral en leur faisant perdre leur spécificité. Il n'est pas admissible que, au détour de différents projets de loi dont celui relatif à la SRU, on cherche à affaiblir le dispositif interdisant la construction dans les espaces naturels à protéger.

M. Henri Plagnol.

Très bien !

M.

Jean-Michel Marchand.

Il faut au contraire améliorer le contenu des schémas de cohérence territoriale.

Le dernier point que je souhaite aborder concerne les plans locaux d'urbanisme. Ceux-ci tendent à remplacer des dispositions prescriptives par des documents d'objectifs, introduisant ainsi plus de souplesse dans le but de réduire les contentieux.

Mais avec le remplacement des plans d'occupation des sols par les PLU,...

M.

Francis Delattre.

Ça, c'est une avancée !

M.

Jean-Michel Marchand.

... on risque de supprimer tout ou partie des avancées obtenues par les luttes des citoyens et des associations et qui ont fait jurisprudence.

M.

Henri Plagnol.

Très juste !

M.

Jean-Michel Marchand.

J'avais demandé en première lecture que l'on puisse lier formellement PLU et POS pour continuer à bénéficier des acquis, qui sont autant de remparts contre l'urbanisation désordonnée des milieux ruraux, naturels ou agricole mais aussi des milieux urbains et péri-urbains à protéger. Je réitère cette demande.

Tels sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les améliorations et les dispositifs que les députés Verts attendent pour voter ce projet de loi.

M.

Gilles Carrez.

Ils risquent d'attendre longtemps !

M.

le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, dernier orateur inscrit.

M.

Jean-Jacques Filleul.

Monsieur le secrétaire d'Etat, ce projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbains a, été comme l'a souligné M. Gayssot ce matin, longuement débattu en première lecture. Il reste néanmoins, après le passage de ce texte devant le Sénat, à revenir à l'esprit initial du texte tel qu'il a été voté ici.

Du reste, je tiens à souligner l'appréciation positive qui en a été faite par l'opinion publique et les élus. Ceux-ci ont bien compris qu'avec ce texte, le Gouvernement entend compléter l'efficacité du dispositif majeur liant, dans la ville et l'agglomération, l'urbanisme, le logement et les transports après les deux textes votés en juin et juillet 1999 sur l'aménagement du territoire, les schémas de services et l'organisation de l'intercommunalité.

Lorsque ce texte sera voté, ce sera toute une vision nouvelle de l'organisation de la ville, de l'agglomération, qui s'imposera dans l'avenir. Ce sera aussi une chance nouvelle pour la mixité et la cohabitation dans les quartiers, pour l'intégration des femmes et des hommes dans la cité.

Le volet « déplacements » contribuera manifestement à la mise en oeuvre de telles avancées.

Sans pour autant revenir sur nos débats précédents, q ue l'on me permette de souligner l'appréciation commune que nous avons avec M. le secrétaire d'Etat quant à l'importance qu'il y a à rétablir la compatibilité du PLU avec le PDU, afin que ce document puisse être un outil opérationnel de la politique des transports dans le schéma de cohérence territoriale.

Je tiens à souligner que l'amendement déposé par JeanMichel Marchand à l'article 37 et qui tend à rendre prescriptif le PDU en matière d'aires de stationnement est important.

Je me réjouis aussi que, avant l'article 50 bis, il ait été reconnu un droit aux transports pour les chômeurs et les bénéficiaires de la CMU, sans que cela mette pour autant en péril les finances des collectivités. Ce sera, à coup sûr, un acquis essentiel, car il permettra la mise en oeuvre de


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la nécessaire solidarité que doit assumer la collectivité avec celles et ceux qui sont des laissés-pour-compte de la société.

Je me dois d'évoquer également l'amendement qui vise à permettre aux petites villes de bénéficier de l'extension du versement transport. Cela me paraît particulièrement judicieux dans la mesure où un tel dispositif permettra d'assurer l'organisation du transport public dans des secteurs situés hors des grandes agglomérations, conformément d'ailleurs aux souhaits du Gouvernement.

Je me félicite que le Sénat ait adopté l'amendement du Gouvernement destiné à permettre à la RATP, par le biais de filiales interposées, d'étendre son activité hors de son champ habituel, en province et à l'étranger. Après avoir entendu ce matin les engagements de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement, nous confirmerons le vote du Sénat. Cette grande entreprise, forte de 38 000 agents et détentrice d'une très haute technicité, saura, tout en poursuivant son développement en Ile-de-France, montrer ses capacités et son savoir-faire sur le marché extérieur du transport collectif.

Je terminerai en évoquant l'extension sur tous les territoires régionaux de la compétence « transport de voyageurs » exercée par les TER. Qui peut douter de l'importance majeure de la poursuite d'une décentralisation bien comprise ? La droite sans doute, étant donné son obsession à dénaturer le texte.

Pour notre part, acteurs de l'évolution de ce projet de loi, nous l'apprécions pour l'extrême intérêt qu'il présente en matière d'organisation des transports péri-urbains, des transports de ville à ville, car il permettra à la région, grâce à ce nouvel outil qu'est le syndicat mixte, de travailler avec d'autres autorités organisatrices de transports.

D'autres amendements permettront d'enrichir ce texte, notamment ceux qu'a déposés le Gouvernement. Celui que vous avez présenté à l'article 52 quarter, monsieur le secrétaire d'Etat, article dont nous avons défendu l'esprit en première lecture, contribuera à l'effort de modernisation des gares à vocation régionale dans le cadre d'un programme d'investissements d'une durée de cinq ans.

L'amendement que vous avez annoncé ce matin et qui porte sur l'article 52 ter permettra d'apporter aux régions, face à la recomposition de l'offre des services ferroviaires d'intérêt national, des compensations financières, en application des principes de décentralisation. Je souhaite évidemment le vote de cet amendement attendu par les conseils régionaux. Je souhaite également le rétablissement d'un article, lui aussi essentiel et supprimé par le Sénat, qui vise à permettre à l'Etat, à l'article 21-1 de la LOTI, de choisir le mode de dévolution de l'exploitation des services régionaux de voyageurs. Il en va, me semblet-il, de la bonne qualité du service public dans l'avenir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Motion de renvoi en commission

M.

le président.

J'ai reçu, de M. Philippe DousteBlazy et des membres du groupe UDF, une motion der envoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.

La parole est à M. Henri Plagnol, pour une durée qui, je le rappelle, ne peut excéder trente minutes.

M.

Henri Plagnol.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, s'il est un sujet qui, par nature, nécessite un débat parlementaire consensuel, laissant aux navettes entre les deux assemblées le soin de perfectionner ce qui doit l'être et de faire en sorte que la loi, une fois votée, soit appliquée par l'immense majorité des élus locaux de ce pays, c'est bien celui de la ville. Or force est de constater que le projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbains fait exception, puisque le Gouvernement a malheureusement choisi d'ignorer très largement le travail du Sénat en passant en force en commission mixte paritaire et en déclarant l'urgence.

Cette attitude est d'autant plus regrettable qu'il existait un accord très large, sur tous les bancs de cette assemblée, sur les objectifs de ce texte.

En effet, nous sommes tous d'accord sur le diagnostic : des erreurs désastreuses ont été commises durant les années 60 et 70, du fait du caractère ségrégatif d'un urbanisme conçu par fonctions ou par zones, concentrant de façon massive les logements sociaux - les fameuses barres - et donnant ainsi naissance à des quartiers dits « sensibles » où se multiplient les problèmes de délinquance et où se cumulent les handicaps sociaux, culturels et éducatifs.

Il existait également un accord très large pour prendre en compte les nouvelles aspirations de nos concitoyens en matière d'écologie urbaine. Ceux-ci veulent une ville où il fasse bon vivre, où l'on puisse respirer, où l'on aménage des espaces verts, où l'on développe des modes de transports alternatifs, où l'on réhabilite le vélo, où l'on puisse se promener, bref, une ville qui ne soit plus celle du toutvoiture.

Enfin, un autre objectif pouvait nous rassembler : celui consistant à renforcer la démocratie locale. C'est d'ailleurs un thème qui revient constamment dans l'exposé des motifs du projet de loi et dans les interventions des orateurs. Chacun ressent en effet la nécessité de parvenir à une clarté plus grande dans le labyrinthe administratif et réglementaire de tout ce qui concerne l'urbanisme, c'està-dire de la vie quotidienne des gens. Au-delà des clivages politiques traditionnels, nous sommes nous aussi très largement partisans d'un approfondissement de la décentralisation afin de savoir qui, dans la réalisation des projets, est responsable de quoi.

Malheureusement, vous avez fait des choix idéologiques, destinés, encore une fois, à opposer le camp des méchants, des rétrogrades, de ceux qui seraient par principe opposés à la mixité sociale et qui siègent à droite de cette assemblée, au camp des bons, de ceux qui sont à l'avant-garde du progrès, favorables au renouvellement urbain et qui siégent à gauche de cet hémicycle. En ressuscitant cette opposition artificielle, vous avez montré que vous ne vouliez pas du consensus, qui, seul, permettrait de mettre en oeuvre les dispositions que la majorité de cette assemblée va voter.

M.

Patrick Rimbert, rapporteur.

Vous êtes le seul à parler des bons et des méchants ! Cela relève de la psychanalyse.

M. Henri Plagnol.

Pour sa part, le groupe UDF déplore que, sur trois points essentiels, vous n'ayez pas tenu compte des amendements fort sages adoptés par le Sénat.

Le premier point concerne l'absence de clarification des compétences entres les différents échelons de décision en matière d'urbanisme, laquelle risque de créer un imbroglio juridique.

Le deuxième point a trait à la conception extrêmement réductrice que vous avez du logement social, lequel se limite au tout HLM.


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Enfin, le troisième point est relatif au retour en force d'un jacobinisme que l'on croyait dépassé, processus qui risque de conduire à rééditer les erreurs du passé, qui ont coûté tellement cher à l'équilibre de nos villes.

Premier point : le risque réel d'aggravation de la confusion due à l'empilement des normes réglementaires en matière d'urbanisme.

Votre loi s'appuie sur trois piliers : le schéma de cohérence territoriale, le plan de déplacements urbains et le plan local d'urbanisme qui succède au plan d'occupation des sols.

En ce qui concerne le schéma de cohérence territoriale, on ne peut que s'interroger sur les contradictions entre le périmètre qui figure dans la loi, rattaché aux bassins de vie et aux agglomérations au sens de l'INSEE, mais qui ne recoupe pas celui de la loi Chevènement. Vous avez refusé les amendements de simplification et de cohérence du Sénat, qui visaient à faire en sorte qu'au moins on ne superpose pas, sur un même ressort territorial, les schémas d'agglomération voulus par la loi Chevènement et les schémas de cohérence territoriale qui sont censés succéder aux SDAU.

Mais la difficulté va bien au-delà : on ne peut que s'inquiéter des délais de mise en oeuvre des schémas de cohérence territoriale. Vous avez dit vous-même que les SDAU n'avaient pas fonctionné parce qu'ils étaient trop complexes et qu'ils demandaient l'accord de collectivités différentes. Il est plus que probable qu'il en va de même avec les schémas de cohérence territoriale. On peut estimer que ce n'est pas avant six ans au moins que ces nouveaux documents d'urbanisme pourront être appliqués, ce qui veut dire que, pendant six ans au moins, nous connaîtrons une paralysie très étendue de toutes les opérations d'urbanisme, dont vous avez pourtant souligné l'urgence dans notre pays.

Cela est d'autant plus préoccupant, mes chers collègues, que vous avez encore aggravé la confusion en votant un amendement étrange pour tenir compte des objections des Verts touchant à la remise en cause, que M. Marchand vient de rappeler avec force, des protections du littoral et de la montagne. Cet étrange amendement veut que, dans la limite de quinze kilomètres à compter de la mer ou à compter d'une agglomération au sens de la loi de Chevènement, on ne soit pas obligé de mettre en oeuvre un schéma de cohérence territoriale pour pouvoir construire. Je mets au défi quiconque d'expliquer comment un tel système pourra fonctionner.

Nous allons ainsi vers une France à deux vitesses en matière d'urbanisme, et nous n'y gagnerons certainement pas en clarté.

Quant aux plans de déplacements urbains, j'insisterai sur le dessaisissement des maires, puisque vous avez même refusé que, pour ce qui concerne le stationnement, les compétences des maires soient réaffirmées.

Est-il vraiment sérieux d'obliger des communes à entrer dans le périmètre d'un plan de déplacements urbains alors qu'il s'agit, pour certaines, de dispositions qui touchent à la vie quotidienne des habitants et qui relèvent même de la vie des quartiers ? Sur ce point au moins, ne pourriez-vous pas tenir compte du travail du Sénat et réaffirmer, pour ce qui concerne le stationnement, la compétence première des maires, qui sont les seuls à même de pouvoir tenir compte des aspirations contradictoires des habitants et à nouer un dialogue avec leurs populations ? J'en arrive aux PLU, qui vont succéder aux POS. A cet égard, on peut sans exagérer parler d'un vrai recul de la démocratie locale.

S'il y avait des documents d'urbanisme qui étaient bien compris de nos concitoyens, qui signifiaient quelque chose, qui avaient un caractère protecteur, notamment en raison du coefficient d'occupation des sols, et qui permettaient, par le biais d'enquêtes publiques, à chacun de s'exprimer, de faire valoir ses objections, de peser sur l'élaboration du document d'urbanisme, c'étaient bien les POS.

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Très juste !

M. Henri Plagnol.

D'abord, est-il nécessaire - la question n'est ni accessoire ni dérisoire, contrairement à ce que certains ont dit - de modifier le sigle ? Cela va-t-il favoriser la lisibilité des textes et la compréhension par nos concitoyens des documents d'urbanisme ? Je ne le pense pas.

« Plans d'occupation des sols » : chacun sait ce que cela veut dire. « Plans locaux d'urbanisme » : il faudra des années pour que nos concitoyens se les approprient. Là aussi, l'amendement du Sénat était de simple bon sens.

Mais il y a plus grave. Vous avez considérablement affaibli le caractère normatif des plans d'occupation des sols afin de donner aux nouveaux plans une souplesse, une flexibilité, des objectifs certes généreux, mais tout à fait contradictoires, notamment en ce qui concerne la mixité sociale. La capacité du juge administratif à évaluer la conformité d'un permis de construire à ces documents sera donc gravement réduite, ce qui ouvrira la porte à toutes les dérives...

M. Nicolas Dupont-Aignan.

C'est sûr !

M. Henri Plagnol.

... et à tous les abus des promoteurs immobiliers, au risque de voir se développer la densification.

Les citoyens, une fois que les conseils municipaux auront approuvé les plans locaux d'urbanisme, n'auront pas la garantie de voir respecter avec la même fermeté, la même vigilance, les normes qui seront en vigueur et ce sera le juge et lui seul qui arbitrera les conflits et les contentieux multiples qui ne manqueront pas de surgir.

Je ne crois pas que ce soit un progrès pour la démocratie, bien au contraire.

Il est donc indispensable, comme le demande l'Association des maires de France, de rétablir des règles normatives claires en conservant les deux prescriptions obligat oires qui figurent actuellement dans les plans d'occupation des sols, celle relative à la détermination de l'affectation des sols...

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Très bien !

M. Henri Plagnol.

... et celle relative à la définition des règles concernant le droit d'implantation des constructions, leur destination et leur nature.

M. Gilles Carrez.

C'est en effet indispensable si l'on veut éviter la confusion !

M. Henri Plagnol.

Imaginez l'embarras du juge pour statuer sur un permis de construire qui serait conforme au plan local d'urbanisme, mais attaqué par le préfet pour non-conformité à l'impératif de mixité sociale figurant dans les schémas de cohérence territoriale ou dans les plans locaux d'habitat ou même encore dans d'autres documents - il y en a tellement que tout le monde y perd son latin ! Devant un tel empilement de normes législatives et réglementaires, le contrôle des citoyens sera beaucoup plus difficile. Mais peut-être est-ce là l'objectif caché de votre loi ?


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M. Nicolas Dupont-Aignan.

On risque de revenir au

« bétonnage » !

M. Henri Plagnol.

De plus, votre projet remet systématiquement en cause le pouvoir des maires, qui sont les seuls élus à être quotidiennement au contact de la population. C'est une erreur profonde que de mépriser l'identité communale et le lien irremplaçable existant entre le maire et les habitants d'une ville.

Qu'il s'agisse du périmètre des schémas de cohérence territoriale ou des plans de déplacements urbains, il sera possible de contraindre une commune, y compris pour ce qui concerne des dispositions touchant à la vie quotidienne de ses habitants.

Quant à la mise en place de la politique relative au logement social, nous assistons à un retour en règle des prérogatives de l'Etat jacobin : on ira jusqu'à contraindre par la force les maires et à les faire dessaisir par le préfet de leur prérogative la plus essentielle, celle relative aux logements.

Ainsi, votre projet ne marquera certainement pas un approfondissement de la démocratie locale pourtant bien nécessaire.

J'en viens maintenant aux dispositions concernant le logement social, sur lesquelles s'est largement focalisé le débat médiatique et le conflit qui a opposé la majorité sénatoriale à la majorité de notre assemblée.

A l'UDF, nous sommes pleinement convaincus que la conception réductrice que vous avez du logement social, confirmée par votre refus systématique des amendements pourtant bien modérés du Sénat, est une erreur et qu'elle ne pourra que desservir l'objectif de mixité sociale qui est le vôtre.

Première erreur : vous donnez la priorité absolue au tout locatif social.

Je suis élu d'un département, le Val-de-Marne, dont 30 % du parc de logements sont des HLM, soit environ 150 000 logements. Ce département est très révélateur de la façon dont la surconcentration de logements sociaux construits dans les années 60 et 70 a largement contribué à l'accumulation des difficultés sociales et aux graves problèmes d'insécurité ressentis quotidiennement par les habitants. Or votre projet ne dit rien du nécessaire rééquilibrage du parc de logements dans les communes qui concentrent les problèmes et qui sont caractérisées par une surconcentration de logements sociaux. C'est à ce niveau qu'il fallait prévoir tous les moyens nécessaires.

Les instruments existent cependant. Dans le Val-deMarne ont été utilisées à plusieurs reprises les conventions dites « de conversion », qui permettent, dans le cadre d'un dialogue contractuel entre l'Etat et les maires, de rééquilibrer progressivement le parc de logements sociaux.

Deuxième erreur : vous refusez de reconnaître l'aspiration à l'accession à la propriété,...

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Vous n'êtes pas honnête !

M. Henri Plagnol.

... qui demeure très largement majoritaire chez nos concitoyens.

Vous avez dit vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, que plus de 120 000 prêts conventionnés seraient accordés cette année, alors qu'à peine plus de 40 000 logements sociaux seraient programmés.

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Et c'est en vous fondant sur ces chiffres que vous nous faites un procès d'intention ?

M. Henri Plagnol.

Ecoutez-moi donc ! Cela signifie bien que vous devriez intégrer, dans l'objectif du logement social, l'accession sociale à la propriété. Vous devriez favoriser le libre choix des Français : c'est à eux de choisir de vivre dans un logement locatif ou de devenir propriétaires en empruntant à des taux encouragés par les pouvoirs publics.

Pourquoi vous obstinez-vous à refuser ce que vous a proposé le Sénat, relayant ce que beaucoup d'entre nous avaient dit, à savoir élargir votre conception du logement social à l'accession sociale à la propriété ? Au nom de quoi favorisez-vous les ménages qui ne font pas d'effort d'épargne et qui préfèrent bénéficier d'un logement locatif (Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

, plutôt que ceux qui, au prix d'un effort considérable, souhaitent devenir propriétaires ? C'est cela, la société de liberté et de responsabilité que nous voulons encourager ! Il est aberrant d'exclure a priori de votre définition du logement social les logements acquis grâce à un prêt à taux zéro. Pourquoi ce parti-pris contre la propriété ? Sans doute préférez-vous entretenir une clientèle dans l'assistance.

M. Alain Cacheux.

Ben voyons !

M. Henri Plagnol.

Troisième erreur : la réduction du locatif aux HLM et le refus d'aller plus loin dans la mixité, dans un même quartier ou dans une même cité, entre propriétaires et locataires.

Pourquoi vouloir à tout prix agiter le drapeau rouge du tout-HLM,...

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Vous êtes bien le seul à le voir !

M. Henri Plagnol.

... au risque de créer une réaction de rejet et d'entraver la réalisation de logements sociaux bien intégrés dans les quartiers ? Monsieur le secrétaire d'Etat, selon moi, le bon logement social est celui qu'on ne voit pas : on ne peut plus alors faire la différence entre les logements HLM et le reste du quartier.

M. Daniel Marcovitch.

Bravo !

M. Bernard Outin.

C'est vrai !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

C'est exactement ce que nous pensons !

M. Henri Plagnol.

Mais tout se passe comme si vous vouliez souligner la visibilité et, en quelque sorte, stigmatiser le logement social.

M. Daniel Marcovitch.

C'est tout le contraire !

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Et c'est vous qui dites cela, monsieur Plagnol ?

M. Henri Plagnol.

C'est là que réside notre divergence la plus profonde.

Enfin, alors même que nous n'avons pas dressé un bilan réaliste de la loi d'orientation sur la ville, qui a donné des résultats grâce à une approche contractuelle et incitative, est-il sérieux de prétendre dessaisir les maires et d'imaginer un système de sanctions au profit des préfets ? Pensez-vous vraiment que vous allez pouvoir construire des logements sociaux par la force en passant par-dessus la tête des maires désignés comme boucs émissaires ? Bien évidemment, non !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

Vous agitez, là encore, le drapeau idéologique, stigmatisant les communes dites bourgeoises ou résidentielles, alors que vous savez très bien que vous ne pourrez mettre en oeuvre des dispositions qui ne seront pas acceptées par les maires et par les populations des quartiers.

Votre fameux article 25, sur lequel s'est concentré l'essentiel de nos débats, va extrêmement loin dans cette reprise en main par les préfets, puisqu'il prévoit non seulement un dispositif de sanctions financières automatique - 1 000 francs par logement social manquant -...

M. Bernard Outin.

Ce n'est pas cher !

M. Henri Plagnol.

... mais aussi l'inscription obligatoire de ces dépenses par le préfet dans le compte des communes et, en cas de non-réalisation des logements sociaux dans le délai imparti, la possibilité théorique pour le préfet de délivrer lui-même les permis de construire et de procéder à l'achat des terrains. C'est donc le grand retour de la domination des ingénieurs de l'équipement, laquelle a été à l'origine des erreurs tragiques commises dans les années 60 et 70 et sur lesquelles vous prétendez revenir.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous savez bien que vous ne pourrez pas aller aussi loin dans la voie du dessaisissement des élus locaux. Alors, pourquoi l'écrire dans la loi ? Est-ce faire une bonne législation que de prévoir des dispositions qui ont pour seul effet de susciter des réactions indignées des populations concernées et dont on sait qu'elles ne seront pas appliquées ? Vous en parlez d'ailleurs un peu comme s'il s'agissait de la dissuasion nucléaire. Vous dites que vous les écrivez dans le texte tout en espérant qu'elles ne seront pas appliquées. Ce n'est pas, je le répète, une bonne façon de légiférer, et ce n'est sûrement pas le meilleur moyen de nouer un dialogue fécond avec les maires, qui sont confrontés aux demandes de leurs administrés.

Tout cela est d'autant plus irréaliste que, dans la plupart des communes concernées, notamment dans la ville dont je suis l'élu, Saint-Maur, il n'y a pas de terrain disponible pour mener à bien ces projets et combler de façon réaliste le déficit de logements sociaux.

Un député du groupe socialiste.

Il fallait vous y prendre avant !

M. Henri Plagnol.

Pourquoi voulez-vous faire payer aux communes qui n'ont pas fait les erreurs d'urbanisme que vous dénoncez...

M. Michel Vergnier.

Ces propos sont scandaleux !

M. Daniel Marcovitch.

Pauvres communes riches !

M. Henri Plagnol.

... et qui sont les héritières d'une géographie, d'une histoire, le prix de cet environnement de qualité ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Il n'y a pas de terrain disponible à Saint-Maur pour répondre dans les délais prévus par la loi au déficit de logements sociaux,...

M. Marcel Rogemont.

Pas de prime à l'égoïsme !

M. Henri Plagnol.

... à moins de raser des centaines de pavillons, comme dans la commune du Perreux, ainsi que l'a démontré ce matin Gilles Carrez...

M. Alain Cacheux.

Encore des banlieues ouvrières !

M. Henri Plagnol.

Mais est-ce vraiment ce que vous voulez ? Dans ces communes, le foncier est cher, très cher. Il y est donc bien plus difficile qu'ailleurs de réaliser des logements sociaux à un prix accessible. Or vous refusez de prendre en compte la diversité de leur potentiel fiscal. Le Sénat avait, là encore, proposé un amendement intelligent tendant à opérer une pondération en fonction des seuils fiscaux. C'était la le minimum du réalisme : on aurait tenu compte de la diversité des situations concrètes.

Vous savez bien, monsieur le secrétaire d'Etat, que le prix du foncier dans des villes résidentielles situées à quelques kilomètres de Paris n'est pas le même qu'en Auvergne ou dans d'autres régions où le problème est exactement inverse puisqu'elles sont en voie de désertification.

M. Michel Vergnier.

Jaloux !

M. Henri Plagnol.

Il n'y a donc pas de terrains disponibles et le foncier est cher.

De plus, si l'on vous suit dans cette démarche autoritaire et répressive, que restera-t-il des derniers poumons verts de l'Ile-de-France, région déjà tant massacrée ? Avezvous pris en compte l'aspiration réelle des Franciliens à conserver ces quelques espaces conviviaux disponibles auxquels ils sont tellement attachés ? Les communes résidentielles que vous stigmatisez artificiellement offrent aussi, ne l'oubliez pas, des espaces verts accessibles à tous les habitants de la région. Ainsi, à Saint-Maur, des d izaines de milliers de personnes viennent chaque semaine se promener sur les bords de Marne.

Spontanément, des milliers de pétitions ont été signées dans les communes concernées pour réagir à votre projet.

On peut se demander si elles aideront les élus locaux et les maires à poursuivre dans la voie qu'ils avaient choisie : réaliser de manière progressive des logements sociaux intégrés dans les quartiers et ne remettant pas en cause l'équilibre résidentiel et urbain des communes. Le système contractuel de la loi d'orientation pour la ville a relativement bien fonctionné. Il a permis de faire progresser le nombre de logements sociaux de façon non négligeable, en particulier dans les communes résidentielles du Val-de-Marne. Mais à l'avenir, cela risque d'être plus difficile car vous avez divisé artificiellement nos villes en deux camps et partagé les Français sur ce grand sujet.

En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite que vous acceptiez d'amender votre projet dans un sens plus respectueux de la volonté des élus locaux, plus respectueux de l'extraordinaire diversité des situations concrètes de nos villes, de leurs équilibres et des aspirations de leurs habitants afin d'aller, ensemble, vers une mixité sociale construite non par la force - cela ne peut qu'échouer - mais par le volontariat des élus et l'adhésion des populations. Un logement social de qualité, tiré vers le haut, intégré dans une logique de quartier, voilà notre conception de l'urbanisme que je résumerai d'une formule : faire de nos quartiers des villages où il fasse bon vivre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous en arrivons aux explications de vote, d'une durée de cinq minutes.

La parole est à M. Alain Cacheux.

M. Alain Cacheux.

Monsieur le président, je n'aurai pas besoin de cinq minutes pour répondre à M. Plagnol, qui n'a pas vraiment défendu une motion de renvoi en commission !

M. Michel Vergnier.

On ne sait pourquoi il était là !

M. Alain Cacheux.

A aucun moment il ne l'a fait.

M. Gilles Carrez.

Il n'a fait que ça !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

M. Alain Cacheux.

Il a mis en avant des arguments qui sont tout sauf nouveaux. Faire un plaidoyer pour la décentralisation est d'autant plus sympathique de la part de nos collègues qu'ils n'ont pas voté les lois de décentralisation de 1982 et 1983 et s'y sont opposés pendant longtemps. Ils ont d'ailleurs oublié que le logement social y restait une compétence d'Etat, qui n'était pas décentralisée.

M. Francis Delattre.

C'était une erreur !

M. Alain Cacheux.

M. Plagnol a voulu stigmatiser le logement social en faisant référence aux constructions des années 1960. Mais rappellons qu'elles ont eu leur utilité à une époque où il fallait répondre à la demande de logements due au baby-boom et que cela fait plus de vingt ans que le logement social ne se réduit plus à des barres et à des tours.

Je ne vois pas en quoi quelques séances supplémentaires de commission devraient modifier le projet dans la mesure où nos collègues se contentent de répéter à satiété les arguments déjà invoqués en première lect ure.

Nous allons donc repousser cette motion de renvoi en commission pour arriver enfin à l'examen des différents amendements, comme l'a d'ailleurs suggéré M. Plagnol lui-même.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le président.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez. Chers collègues, l'excellente intervention d'Henri Plagnol a mobilisé votre attention et je ne doute pas que vous ayez été sensibles à ses arguments.

M. Michel Vergnier. Disons qu'on a les a écoutés ! M. Gilles Carrez. En tout cas, j'ai senti un malaise certain sur vos bancs lorsqu'il a regretté que sur un texte aussi fondamental, qui touche à la vie quotidienne des Français, vous ayez refusé de façon délibérée le consensu s. Nous, dans l'opposition, nous sommes prêts à prendre nos responsabilités. Nous l'avons prouvé à l'occasion de l'examen d'un texte proche de celui-ci, la loi Chevènement sur l'intercommunalité.

Vous, en revanche, s'agissant d'un texte qui est complémentaire, non contents de déclarer l'urgence, vous avez fait échouer la commission mixte paritaire. Le rapporteur nous a indiqué ce matin que la plupart des amendements du Sénat seraient supprimés. Comme nous le rappelait Serge Poignant, la commission de la production et des échanges a pratiquement réduit à néant l'excellent travail de la Haute Assemblée.

Il faut que nous ayons bien conscience, sur tous ces bancs, que des lois de cette nature ne peuvent être appliquées correctement, acceptées, mises en oeuvre, que si elles font l'objet d'un consensus. Et Henri Plagnol a parfaitement raison de regretter votre approche dogmatique.

Permettez-moi de revenir sur quelques points fondamentaux qu'il a évoqués.

Le premier concerne la simplification des règles d'urbanisme, la fausse simplification devrais-je dire.

Souvenez-vous en première lecture, la généralisation des schémas de cohérence territoriale s'est révélée impraticable et elle a été corrigée à la sauvette, dans la plus grande des improvisations, par la règle des quinze kilomètres dont je parie dès à présent qu'elle sera la source de contentieux à l'infini.

M. Marcel Rogemont.

Cela a déjà été dit.

M. Gilles Carrez.

Pensons encore à l'affaiblissement du caractère normatif des plans d'occupation des sols. Ceux d'entre nous qui sont maires savent bien qu'il est fondamental, quand on délivre un permis de construire, de pouvoir s'appuyer sur un plan d'occupation des sols qui définisse et des règles d'affectation des terrains et des règles de constructibilité.

M. Daniel Marcovitch.

Quel rapport avec le renvoi en commission ?

M. Gilles Carrez.

Désormais, comment ferons-nous, nous les maires, pour délivrer des certificats d'urbanisme et sur quelle base solide établirons-nous les permis de construire ? Bref, cette fausse simplification, assortie d'un changement de vocabulaire, entraînera la plus grande des confusions et aura pour seul résultat de déstabiliser les maires dans l'exercice d'une responsabilité pourtant difficile, l'urbanisme.

Le deuxième point qu'a évoqué Henri Plagnol est essentiel, ...

M. Marcel Rogemont.

Cinq minutes, monsieur le président !

M. Bernard Outin.

Il rabâche !

M. Gilles Carrez.

... c'est votre conception incroyablement réductrice du logement social. Le logement social, nous le répéterons inlassablement, doit comprendre également l'accession sociale à la propriété.

M. Daniel Marcovitch.

40 % de logements ! Soyez cohérent.

M. Charles Cova.

On dirait que la vérité vous gêne !

M. Gilles Carrez.

Dans le parcours résidentiel de nos compatriotes, HLM est une étape nécessaire : on se plaît dans ce type de logement mais on souhaite aussi pouvoir le quitter.

M. Marcel Rogemont.

Il faut pouvoir !

M. Gilles Carrez.

Mes chers collègues, si la politique des prêts à l'accession à la propriété, lancée dans les années 70, a eu un succès aussi considérable auprès des habitants des cités HLM, c'est qu'elle leur offrait, d'une part, la possibilité de devenir propriétaire et, d'autre part, souvent, d'avoir un logement individuel.

M. Eric Doligé.

Nos collègues sont contre la propriété individuelle !

M. Gilles Carrez.

Vous niez cette aspiration profonde des Français à un habitat diversifié et à l'accession sociale.

M. Marcel Rogemont.

Vous mélangez tout !

Mme Janine Jambu.

C'est tout et son contraire !

M. Gilles Carrez.

Troisième point : ce texte est terriblement recentralisateur. Il traduit un manque de confiance envers les élus locaux, à rebours de l'esprit qui avait animé les lois Defferre qui, elles, faisaient davantage confiance aux élus locaux qu'aux fonctionnaires de l'Etat.

M. Christian Paul.

C'est vous qui êtes à rebours.

M. Gilles Carrez.

Nous revenons des années en arrière, avec des méthodes calquées sur ce qu'on a connu il y a des lustres. Soyez sûrs que, malheureusement, les mêmes méthodes engendreront les mêmes erreurs. Or nous savons à quel point il est difficile de corriger des erreurs aussi fondamentales que celles qui ont été commises dans les années 60.

Pour toutes ces raisons, le groupe RPR votera la motion de renvoi en commission.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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Plusieurs députés du groupe socialiste.

C'est trop long !

M. le président.

Je vous rassure, chers collègues, j'ai un chronomètre sous les yeux et je veille à ce que le temps de parole imparti ne soit pas dépassé. M. Gilles Carrez a parlé cinq minutes et quatre secondes.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Je lui ai fait grâce de quatre secondes, comme j'ai fait grâce précédemment de plusieurs secondes à d'autres orateurs.

La parole est à M. Dominique Bussereau H.

M. Dominique Bussereau.

Monsieur le président, je vais essayer de parler quatre minutes et cinquante-six secondes.

(Sourires.)

Notre règlement prévoit le renvoi en commission lorsque la majorité de l'Assemblée estime que le texte mérite d'être retravaillé.

M. Eric Doligé.

Voilà !

M. Daniel Marcovitch.

Le problème, c'est que vous n'êtes pas majoritaires !

M. Dominique Bussereau.

Or cette loi fourre-tout mérite d'être longuement retravaillée en commission...

M. Daniel Marcovitch.

Pourquoi n'y êtes-vous pas venu alors ?

M. Dominique Bussereau.

... où les réflexions du Sénat devraient être prises en compte.

Comme dans tout fourre-tout, il y a du bon et du moins bon. Le Sénat a voté un amendement visant à élargir les missions de la RATP qui a notre soutien. Il a adopté des mesures intéressantes que l'Assemblée reprendra, je l'espère. Mais pour le reste, notre opposition à ce texte est forte.

M. Alain Cacheux.

Oui, mais vous n'êtes pas nombreux !

M. Dominique Bussereau.

Je me contenterai de donner trois exemples pour justifier le vote de cette motion de renvoi en commission.

D'abord, comme l'ont excellemment dit Henri Plagnol et Gilles Carrez, la recentralisation.

M. Marcel Rogemont.

C'est nous qui avons fait les lois de décentralisation, pas vous !

M. Dominique Bussereau.

La recentralisation est au coeur du projet politique du Parti socialiste. Dans les travaux, forts modestes, mais néanmoins intéressants sur le plan idéologique de la convention de Clermont-Ferrand, il n'était question que de redonner du pouvoir à l'Etat central et de le reprendre aux communes, aux départements et aux régions. On l'a vu tout à l'heure dans les réponses de M. Gayssot aux questions d'actualité sur le transport aérien : surtout pas d'Europe, le pouvoir de l'Etat, le pouvoir des fonctionnaires ! Ce n'est pas notre conception de la démocratie française.

Ensuite, la transformation des plans d'occupation des sols.

Voilà des années que les maires se battent pour avoir un urbanisme protecteur. Voilà des années qu'on essaye de faire en sorte que les plus petites communes se dotent de plans d'occupation des sols. Et au moment où notre droit de l'urbanisme commence à se stabiliser - et Dieu sait si c'est un domaine où la stabilisation du droit est nécessaire -, on casse les plans d'occupation des sols qui réussissaient pour les remplacer par un nouveau système au nom incompréhensible, les PLU ! Moi qui suis maire, j'en ai fait directement l'expérience. J'ai dû arrêter la révision d'un plan d'occupation des sols que je menais avec les services de l'Etat à cause de cette nouvelle loi. Et je m'aperçois d'ailleurs, dans ma commune littorale, que ces PLU seront beaucoup moins protecteurs pour l'environnement que les POS.

M. Francis Delattre.

Bien sûr !

M. Dominique Bussereau.

Si nos collègues Verts étaient là, j'aurais aimé qu'ils puissent nous en parler car faire, aujourd'hui, dans cette France de l'an 2000 menacée par le béton, un nouveau système d'urbanisme moins protecteur pour l'environnement est tout simplement scandaleux sur le plan politique ! Enfin, dernier point de désaccord : la régionalisation ferroviaire que nos collègues sénateurs ont fortement déplorée. On demande aux régions de payer sans leur laisser le choix de l'opérateur qui est imposé. On leur demande de financer les grandes infrastructures nationales : plus de nouvelles lignes de TGV sans leur contribution ! La convention de financement du TGV-Est n'a d'ailleurs même pas pu encore être signée faute d'un accord de cofinancement Etat-régions. En outre, on leur demande de financer les infrastructures régionales, les TER. En vertu des contrats de plan, qui ne sont même pas encore précédés des schémas de service que le Gouvernement a renvoyés à on ne sait quand, elles doivent en effet co-payer avec l'Etat. Bientôt, on exigera d'elles de payer les gares et d'intervenir sur le fret.

On impose donc à nouveau la régionalisation ferroviaire que les socialistes avaient refusé de voter lors de la loi Pons-Idrac, en instaurant un véritable impôt ferroviaire. Et en faisant peser sur les régions des contraintes financières qu'elles ne pourront tenir, on finira par détruire la part du ferroviaire dans notre pays.

Pour toutes ces raisons, le groupe Démocratie libérale votera la mention de renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat au logement.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, il va sans dire que le Gouvernement espère le rejet de la motion de renvoi en commission.

M. Marcel Rogemont.

Il ne sera pas déçu.

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Il est, en effet, c onscient de l'importance des travaux qui ont été conduits et il tient à remercier tous ceux qui ont eu une vision positive de la démarche poursuivie et qui l'ont enrichie. M. Plagnol, lui, a préféré la caricature en refusant a priori d'écouter tout argument pour mieux répéter les siens à l'infini, citant même des chiffres qui démentaient son propos.

Je souhaite remercier M. Marcovitch de l'appui qu'il vient, comme en première lecture, d'apporter à ce texte.

Je voudrais confirmer à Mme Jambu que le Gouvernement est attentif à ce que les organismes HLM remplissent bien leur mission première, à savoir la construction et la gestion de logements locatifs sociaux. Mais il convient également que, sans concurrencer cette mission fondamentale, ils puissent jouer pleinement leur rôle d'opérateur urbain au service de la mixité sociale et de la diversité de l'offre de logement, et je pense aux actions qu'ils pourront conduire en matière d'accession à la pro-


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priété et d'aménagement urbain. Comme je l'ai dit précédemment, le Gouvernement estime que, sous réserve des précisions que la commission a retenues pour l'article 61, le texte tel qu'il ressort du Sénat apporte un équilibre satisfaisant.

Comme vous l'avez très justement souligné, madame Jambu, la mission des organismes HLM sera d'autant m ieux assurée que la pérennité des caractéristiques sociales de leur parc sera elle-même clairement affirmée.

C'est bien là une des dispositions essentielles du projet de loi. L'extension de cette mesure à la partie du parc de la SCIC qui possède des caractéristiques proches de celles du logement social est donc légitime à condition de tenir compte des spécificités juridiques et financières de ce patrimoine. Le Gouvernement, comme je l'avais indiqué en première lecture, est prêt à aller dans ce sens.

En ce qui concerne les plafonds de ressources, nous avons, depuis 1997, procédé à plusieurs relèvements successifs. Vous y avez d'ailleurs largement contribué, je pense en particulier au rôle que M. Cacheux a tenu dans la discussion de la loi relative à la lutte contre les exclusions. Désormais, les plafonds ne sont plus indexés sur les prix mais sur le SMIC qui, vous le savez, progresse plus rapidement que les autres indicateurs. Aujourd'hui, deux tiers de nos compatriotes sont éligibles à l'offre HLM et trois quarts ont accès aux nouveaux prêts locatifs à usage social.

S'agissant des surloyers, je ne veux pas masquer le débat qu'ils suscitent entre nous. Ils ont été encadrés et leur champ d'application a été très réduit. Aujourd'hui, selon les informations dont nous disposons, 5 % seulement des locataires de HLM sont soumis au supplément de loyer de solidarité.

J'appelle votre attention sur le fait que, dans la définition du logement social, il y a toujours eu la notion de plafond de ressources. Si elle disparaissait totalement, c'est un des critères de la définition du logement social qui disparaîtrait aussi, ce qui fragiliserait les financements du logement social, notamment l'aide à la pierre au rétablissement de laquelle nous avons concouru. Un équilibre a été atteint et il faut nous y tenir.

L'article 25 du projet, qui est à l'origine de tant de débats, met l'accent sur la nécessité de construire ceux des logements sociaux dont certaines communes ne veulent pas sur leur territoire. Il y a en effet quantité de logements qui ne posent pas de difficultés. Ceux que l'on veut rendre obligatoires, ce sont ceux qui, parce qu'ils sont rejetés par certaines communes,...

M. Gilles Carrez.

Par une dizaine de communes ! Faire une loi pour si peu, est-ce bien raisonnable ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

... se trouvent forcément concentrés à l'excès sur les autres. Si l'on veut s'attaquer à la déconcentration qui existe dans certains cas, il est impératif d'assurer une meilleure répartition des nouvelles constructions. C'est tout le sens de ces dispositions. Point n'est besoin de les caricaturer, sauf à vouloir déformer la vérité.

Madame Jambu, vous avez souhaité qu'un effort soit fait pour alléger la taxe foncière sur le foncier bâti en faveur des HLM, en particulier dans les quartiers en difficulté. Nous y reviendrons au cours du débat, mais je peux d'ores et déjà vous indiquer que le Gouvernement a bien entendu ce message. Il partage votre préoccupation.

Il y aura donc une avancée dans cette direction.

Mme Janine Jambu.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

S'agissant de l'urbanisme, je suis surpris, monsieur Daubresse, que vous puissiez penser que nous allons mettre en péril la décentralisation. Nous donnons au contraire plus de responsabilités aux élus dans la conception des documents d'urbanisme. Et si vous faites une présentation noire de ce que sera le PLU par rapport au POS, c'est manifestement que vous doutez de la capacité des élus locaux à se servir des libertés et des responsabilités nouvelles que nous leur donnons avec ce texte.

M. Dominique Bussereau.

Vous allez défigurer la France !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Vous n'avez donc pas confiance en eux. Les élus locaux vont pouvoir agir sous le contrôle renforcé des associations, des citoyens, avec le développement de l'enquête publique. Nous atteindrons là un bon équilibre. Je souhaitais le souligner.

M. Dominique Bussereau.

C'est l'inverse !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Comme l'a indiqué M. Charasse, ce texte permettra un approfondissement de la décentralisation, dans le droit-fil de loi sur l'intercommunalité de mon collègue Jean-Pierre Chevènement, à l'échelle intercommunale, au niveau de l'aire urbaine, avec les schémas de cohérence territoriale, et à l'échelle communale avec le PLU la carte communale permettra aux communes qui le souhaite de délivrer des permis de construire au même titre que celles dotées de PLU. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura plus de contentieux, nous en sommes bien conscients, mais ceux-ci devraient, à l'avenir, porter davantage sur le contenu des documents que sur les règles de procédure, ce qui les rendra plus utiles et, je l'espère, moins nombreux.

Monsieur Daubresse, vous l'avez noté, le prélèvement sur les communes déficitaires en logement sociaux diminuera au fur et à mesure qu'elles en réaliseront ou par construction ou par acquisition. Le produit de ce prélèvement reviendra à la communauté d'agglomération lorsque celle-ci existera et qu'elle en aura la compétence, au profit du logement social. Le mécanisme se veut au moins autant incitatif que coercitif, les dispositions coercitives, c'est-à-dire l'action du préfet, n'intervenant que dans le cas où la commune n'aura pas rempli ses engagements.

Ces dispositions ne s'appliqueront donc que lorsque des communes se seront affranchies de la loi, c'est-à-dire auront négligé la volonté du législateur. Vous devriez y être sensibles !

M. Francis Delattre.

Dans certains secteurs ce sera inapplicable !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

En tant que législateurs, vous seriez mal fondés à redouter que la loi s'applique partout. C'est en effet sa vocation et je suis sûr que cela correspond à votre éthique profonde, à vous élus de la République.

Je vous le confirme, monsieur Daubresse, il sera possible de réaliser des logements locatifs sociaux dans les communes de moins de 3 500 habitants. J'appelle d'ailleurs votre attention sur un décret récent du 9 février 2000 qui autorise les communes à accéder au financement HLM pour l'acquisition-amélioration. Cette disposition est prévue spécifiquement pour les communes rurales, qui disposent souvent de bâtiments vacants qu'elles peuvent transformer en logements locatifs sociaux. Nous leur avons donc donné cette possibilité.

Monsieur Filleul, j'ai bien noté que vous souteniez le nouveau transfert de compétences dans le domaine des transports. Ce soutien actif est évidemment important. Il


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témoigne du souhait de la représentation nationale de rapprocher les lieux de décision des réalités de terrain, et cela au plus près des besoins, comme le veut le Gouvernement.

Monsieur Poignant, vous avez critiqué l'insuffisance des moyens qui accompagnent la régionalisation des transports régionaux. Le Gouvernement s'est engagé à doter, par la DGF, les régions des moyens d'équilibre des services transférés. Les charges afférentes à ces services feront l'objet d'un examen concerté avec les régions dans le cadre de la commission d'évaluation des charges. De plus, l'Etat s'est engagé à faire un effort supplémentaire pour la rénovation des gares. Enfin, dès 2001, les crédits de l'Etat pour les transports collectifs seront majorés d'un milliard de francs, ce qui représente un quasi-doublement par rapport à la période précédente. Cela a été annoncé par Jean-Claude Gayssot lors de la première lecture, mais votre propos me donne à penser que cela vous avait échappé.

Monsieur Cardo et monsieur Marchand, les PLU auront bien évidemment un contenu normatif. Demain, comme aujourd'hui, les élus pourront choisir de donner ou pas un contenu concret aux différentes règles définies par ce qui est aujourd'hui le POS, et qui sera demain le PLU. Ce contenu est aujourd'hui normatif et il le sera demain. La seule différence réside en ce que les PLU, tels qu'ils sont définis par le texte voté en première lecture par l'Assemblée nationale, n'obligent pas, contrairement aux POS, à un zonage monofonctionnel. Or c'est justement une dimension de l'urbanisme des années 1970 que vous avez été nombreux à critiquer et que nous critiquons également. Voilà à quoi nous essayons de nous attaquer avec les dispositions nouvelles.

Monsieur Marchand, notre volonté est bien de développer le débat sur les documents d'urbanisme. A cet égard, le Gouvernement espère que la majorité de l'Assemblée nationale reviendra sur les articles adoptés par le Sénat qui visent à limiter les possibilités de recours des associations. En clair, les PLU ne suppriment aucun des acquis des POS. Ces documents seront aussi protecteurs que pouvaient l'être les POS. Ils répondent en effet aux mêmes exigences de fond, qui sont d'ailleurs à nos yeux renforcées par les dispositions de l'article 1er du projet de loi. Les PLU pourront prévoir des COS.

M. Henri Plagnol.

« Pourront » !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Les COS sont déjà facultatifs aujourd'hui, vous le savez. M. le rapporteur est d'ailleurs élu d'une grande ville dont le POS ne prévoit pas de COS. La loi ne l'y obligeait pas. Il n' y a donc pas d'innovation en la matière, contrairement à ce que vous avez dit de façon caricaturale.

Le PLU indiquera clairement ce qui sera possible et ce qui ne le sera pas. Et il me semble, monsieur Plagnol, qu'en la matière, vous faites un contresens total. La priorité donnée à l'expression du projet urbain permettra au contraire aux citoyens eux-mêmes de mieux appréhender le contenu des documents d'urbanisme. A partir de là, ils pourront mieux comprendre les enjeux et participer plus activement au débat.

Monsieur Cardo, il est un point de votre intervention sur lequel je ne suis pas encore revenu et qui mérite de rencontrer un écho, c'est l'affirmation selon laquelle politique familiale et politique du logement se croisent forcément quelque part. C'est rigoureusement vrai. Il faut pouvoir disposer d'une offre de logements adaptée à tous les types de familles. Mais si nous allions jusqu'à préciser le nombre de logements de chaque taille qu'il faut construire, nous serions accusés d'un excès de bureaucratie. Sur ce point, nous avons tendance à faire confiance aux élus car nous pensons qu'ils auront le souci d'accueillir toutes les populations. Certes, nous ne nous sommes pas prémunis contre l'attitude, dans laquelle nous pourrions voir quelque perversion, qui consisterait à s'acquitter de ses obligations en contruisant des logements sociaux, mais en en plafonnant la superficie de manière à n'accueillir que des célibataires ou des retraités. Si nous constations une situation aussi caricaturale, il faudrait réagir, mais nous ne sommes pas allés jusqu'à ce degré de suspicion à l'encontre des acteurs locaux. Cela dit, je souhaite qu'ils vous entendent s'agissant de la nécessité de prendre en compte la diversité des besoins familiaux.

Enfin, monsieur Plagnol, je vous invite à reprendre les réponses qui ont été données en première lecture et ce matin à l'occasion des premières motions de procédure.

Dire que nous accordons une priorité absolue au toutlocatif social n'a pas de sens puisque vous indiquez vousmême que nous n'atteignons pas les 50 000 logements locatifs sociaux et que nous avoisinons les 120 000 logements aidés en accession à la propriété. Vous faites à la fois la demande et la réponse ! Vous nous faites un procès et vous dégagez notre responsabilité avec les chiffres que vous donnez. Soyons honnêtes intellectuellement, nous aurons beaucoup plus de possibilités de nous rencontrer ! L'honnêteté intellectuelle est d'ailleurs la première condition du consensus que vous nous accusiez de refuser.

Voilà ce qu'il me semblait indispensable d'indiquer.

Au-delà de la nostalgie qui nous inciterait à vouloir reconstruire les villages d'hier dans les villes de demain, l'essentiel est de retrouver des villes vivantes, actives, modernes, équilibrées, solidaires où la citoyenneté, la cité dans le sens le plus qualitatif du terme, puisse vivre et s'épanouir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.

(La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique, dans le texte du Sénat.

Article 1er A

M. le président.

« Art. 1er A. - I. - L'intitulé du titre Ier du livre 1er du code de l'urbanisme est ainsi rédigé : "Règles générales d'utilisation du sol et du sous-sol".

« II. Dans la dernière phrase de l'article L. 110 du même code, après les mots : "gérer le sol", sont insérés les mots : "et le sous-sol". »

La parole est à M. Pierre Cardo, inscrit sur l'article.

M. Pierre Cardo.

Le Sénat a introduit l'article 1er A parce qu'il a jugé utile que les documents d'urbanisme, dans le cadre de ce projet de loi sur la cohérence des politiques urbaine et territoriale, intègrent des règles générales d'utilisation du sol et du sous-sol. Je sais que la majorité de cette assemblée et le Gouvernement veulent


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supprimer cet article. Je voudrais donc préciser dès maintenant que ce qui se passe sur le sol dépend un tant soit peu du sous-sol. Aux termes du code civil, le propriétaire du sol est aussi propriétaire du tréfonds et, a priori, certains éléments du sous-sol ont une très forte incidence sur les problèmes d'urbanisme que nous connaissons.

Je ne prendrai qu'un exemple, celui des carrières souterraines. Je le connais bien puisque, depuis plusieurs années, des décès ont été à déplorer dans ma commune après des accidents dus à des catastrophes naturelles.

Lorsqu'un plan de prévention des risques existe, ce qui suppose que les élus locaux l'aient voulu, le plan d'occupation des sols - le futur PLU - contient des règles extrêmement strictes élaborées d'après les travaux de l'Inspection générale des carrières qui établit un zonage comprenant trois catégories : les zones rouges dont les habitants sont en danger, les zones bleues et les zones blanches. La loi Barnier, qui traite les risques majeurs, a prévu, dans certains cas, l'expropriation des habitants d'une zone rouge pour les mettre en sécurité.

En l'absence de plan de prévention des risques et si l'on ne tient pas compte du sous-sol, comme dans le cadre de cette loi, que va-t-il se passer si on me demande un permis de construire dans une zone de carrières ? L'on se contentera de procéder à des sondages au droit de la maison pour savoir s'il y a des carrières. S'il n'y en a pas, le maire que je suis sera tenu de délivrer le permis de construire. Le PPR, quant à lui, prend en compte le fait que, dans un grand nombre de cas, les trous ne se font pas à la verticale des cavités situées cinquante ou cent m ètres en dessous. Il prévoit donc des zones de reculement, des zones de décompression pour éliminer le danger.

En effet, d'ordinaire, dans une zone de sablons, les trous qui se forment en sous-sol ont tendance à s'évaser à 45 degrés quand ils arrivent à la surface. Ainsi, une maison qui ne sera pas à l'aplomb direct d'une cavité finira par tomber dedans, même si elle a une dalle antisismique.

On risque fort d'assister à un enterrement de première classe, si j'ose dire, alors que le permis de construire est tout à fait régulier. Nous aurions donc été bien inspirés de prendre en compte les dispositions introduites par le Sénat. Cela aurait permis de déterminer les règles d'attribution des permis de construire en fonction de la nature du sous-sol, et non pas seulement en fonction de ce qui est au droit des propriétés.

Je me doute bien que les deux articles introduits par le Sénat posent des problèmes. Et si je ne partage pas totalement sa position, je crois néanmoins qu'il serait intéressant de prendre en compte la notion de sous-sol dans le projet de loi.

Beaucoup de maires, en effet, sont très inquiets à l'idée de lancer un PPR. Pourquoi ? Parce que les PPR aujourd'hui, faute de moyens à la clef, restent imprécis. Alors, par prudence, l'IGC, quand elle ne sait pas, étend la zone rouge. Cela veut dire qu'elle met en zone dangereuse des gens qui, si cela se trouve, ne devraient pas y être. Symétriquement, des gens peuvent s'installer dans des zones certainement dangereuses mais qui ne figurent pas en zone rouge parce que l'IGC n'a pas non plus les moyens de s'en assurer.

Prévoir, à l'article 1er B, les moyens d'assurer la gestion du sous-sol est donc une initiative très intéressante car, en l'état actuel des textes, quand il n'y a pas de PPR, nous continuons à délivrer des permis de construire dans des zones dangereuses, en le sachant parfois, mais sans pouvoir nous y opposer.

Je souhaiterais donc que le Gouvernement réfléchisse aux mesures à prendre et cesse de se désintéresser d'un problème qui me paraît essentiel.

M. le président.

M. Patrick Rimbert, rapporteur de la commission de la protection et des échanges, a présenté un amendement no 64, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 1er A. » La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur de la commission de la protection et des échanges.

Je suis assez d'accord avec M. Cardo : quand on s'intéresse à l'urbanisme, on ne peut pas se désintéresser du sous-sol. Cependant, je crois dangereux d'introduire dans cette loi des articles que l'on pourrait considérer comme valant solde de tout compte, et de le faire de surcroît, vu la complexité du problème, avec une certaine précipitation.

M. Francis Delattre.

C'est votre faute !

M. Patrick Rimbert.

rapporteur.

Pas vraiment ! J'ai bien suivi les travaux de M. Maurice Doublet, ancien préfet de la région parisienne et aujourd'hui président d'Espace souterrain, qui, malgré la qualité des études publiées sous sa direction, a reconnu qu'elles n'étaient pas encore abouties. Alors, ce ne sont pas les réflexions préparatoires d'une commission créée par une agence qui permettront de trancher.

Il y a soixante-dix ans déjà, la France, sous l'impulsion d'Edouard Utudjian, a lancé le concept d'urbanisme souterrain. Nous avions alors un peu d'avance. Depuis, nous avons pris un peu de retard. La Suède, dès 1976, a développé des schémas directeurs d'utilisation du sous-sol.

L'Angleterre a engagé des études au début des années 80.

Et d'autres pays les ont suivies.

Indéniablement, monsieur le secrétaire d'Etat, il y a là une faille, il y a là un manque. Et si je demande la suppression des articles 1er A et 1er B, c'est que je pense personnellement que la réponse n'y figure pas. En CMP, monsieur Cardo, vous avez reconnu qu'à ma place, vous auriez eu le même raisonnement : on nous propose une agence sans en prévoir ni le financement ni le fonctionnement, et on annonce que le problème est réglé ; il y a là, surtout, un effet d'affichage.

Je pense donc nécessaire d'approfondir la réflexion en vue d'aboutir sans doute à une loi, proposition ou projet.

Il serait bon, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous donniez suite à la démarche du Sénat et à nos propres demandes.

Mon intervention, monsieur le président, vaut également pour la suppression de l'article 1er B, qui se justifie pour les mêmes motifs.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Le Gouvernement est favorable, je l'indique d'emblée, aux deux amendements de suppression. Non que le problème ne se pose pas. Connaissant toutes les démarches faites à ce sujet, notamment par M. Jean-Michel Marchand, nous avons pleinement conscience de sa réalité. Mais il nous semble que la gestion du sous-sol n'entre pas dans les objectifs de la loi de solidarité et de renouvellement urbains et qu'il est donc préférable d'en disjoindre les dispositions relatives à ce domaine.

Je rappelle à la représentation nationale que la loi du 30 mars 1999 sur les risques miniers a été votée il y a quinze mois et qu'elle prévoit l'élaboration de PPR. A ma connaissance, un certain nombre sont en voie d'élaboration.


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M. Pierre Cardo.

Peu !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Il faut, bien sûr, que ces projets aboutissent. Il y a des problèmes d'étude et de responsabilité. Mais, en termes de compétences, ce sont les ministères de l'industrie et de l'environnement qui sont concernés et non le ministère de l'équipement, des transports et du logement.

M. Pierre Cardo.

C'est vrai !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Il est donc normal que nous approuvions ces amendements de suppression qui ne nient pas le problème posé, mais en renvoient le règlement à une autre législation, en particulier la loi du 30 mars 1999.

M. le président.

La parole est à M. Gilles Carrez, contre l'amendement.

M. Gilles Carrez.

Contre la suppression de l'article, en effet, car le Sénat évoque un problème très réel. Je puis moi-même, en complément de ce que disait Pierre Cardo, en apporter le témoignage.

Dans plusieurs départements d'Ile-de-France, et notamment dans le Val-de-Marne, est en cours d'élaboration un plan de prévention contre le risque d'inondation. Les services de l'Etat ont expliqué aux élus locaux qu'une fois approuvé, ce plan de prévention s'imposerait, comme il est normal, aux plans d'occupation des sols et devrait y être intégré. Or il s'avère qu'une partie du risque d'inondation est liée aux caractéristiques du sous-sol, qu'il faut donc prendre en compte.

On voit bien ainsi que de nombreuses difficultés que n ous rencontrons dans l'élaboration des documents d'urbanisme, puis pour la délivrance des certificats d'urbanisme et des permis de construire, proviennent de la nature des sols. Or nous avons beaucoup de mal à obtenir des informations. Autant il est aisé de dialoguer avec les directions départementales de l'équipement sur l es problèmes d'urbanisme, autant les choses se compliquent quand il s'agit de travailler avec des administrations très techniques sur les problèmes de sous-sol.

Le Sénat a donc eu totalement raison d'introduire ces dispositions complémentaires.

Quant à l'argument du rapporteur selon lequel on prendrait à la va-vite une disposition qui n'est pas très satisfaisante, je ne peux que le réfuter. L'intérêt de ce texte, nous l'avons dit, est qu'il comporte de très nombreuses dispositions, finalement assez disparates, rassemblées sous différents titres. On ne vous en fait pas grief, mais pourquoi ne pas en profiter pour y intégrer l'excellent dispositif que nous présente le Sénat ?

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Monsieur le secrétaire d'Etat, cet ajout du Sénat a au moins l'intérêt de nous permettre d'aborder le sujet. Nous ne pouvons pas nous contenter de votre réponse, lorsque vous dites que la compétence appartient au ministère de l'industrie. J'ai en effet défendu la même idée lors de l'examen de la loi sur les risques miniers et on m'a alors rétorqué que le code minier ne concernait pas les carrières...

Pierre Cardo a parlé à juste titre des permis de construire.

M. Pierre Cardo.

Eh oui !

M. Jean-Michel Marchand.

J'ajoute que cela concerne aussi l'habitat existant, situé au-dessus de cavités - j'emploie ce terme générique car elles sont de nature diverse dont l'usage a été abandonné. J'habite, comme Yves Dauge, un secteur de coteaux où l'on trouve un nombre i nimaginable de ces cavités, parfois ignorées de la mémoire humaine et dont le plan, bien entendu, n'a jamais été dressé. Elles sont situées sous des maisons ou des édifices. Certains maires sont en train de fermer leur église, devenue dangereuse. Des particuliers ont vu le coût de leur maison multiplié par cinq ou six parce qu'il fallait absolument, au-delà des fondations, consolider jusqu'à plusieurs étages de galeries.

Parmi ces cavités, on trouve d'anciennes habitations troglodytiques, dont certaines pourraient être rénovées.

D'autres sont destinées à des activités industrielles, culture des champignons ou caves à vins, et elles ne présentent pas de difficulté parce qu'elles sont entretenues et aérées. Mais d'autres encore ont été fermées, la plupart du temps pour raison de sécurité, et on ignore leur état.

M. Pierre Cardo.

Elles ne sont même plus accessibles !

M. Jean-Michel Marchand.

Je parle ici du tuffeau des bords de Loire, mais d'autres formations géologiques sont également concernées dans de nombreuses régions de France. Je pense en particulier à la forêt de Fontainebleau et à d'autres secteurs de la région parisienne où il existe tout un réseau de galeries souterraines sous surveillance.

Il nous faut donc, monsieur le secrétaire d'Etat, trouver une solution pour évaluer les risques. Et ce ne sont pas des risques à moyen terme. En géologie, les évolutions sont certes lentes et se font parfois sur le très long terme avec des infiltrations d'eau, des dissolutions de minéraux, mais les éboulements ne préviennent pas. Et il y a déjà eu des morts !

M. Pierre Cardo.

Chez moi !

M. Marc-Philippe Daubresse.

C'est de la non-assistance à personne en danger !

M. Jean-Michel Marchand.

On ne peut donc pas se contenter de dire, même si je comprends parfaitement cette objection, que le texte proposé par le Sénat mérite une réflexion et un approfondissement. Il nous faut maintenant désigner un organisme, soit l'IGC, comme le suggère Pierre Cardo, soit le BRGM en élargissant ses missions, soit encore une nouvelle structure, et lui donner les moyens nécessaires pour suivre régulièrement l'évolution des sous-sols et donner des conseils aux élus, mais aussi aux propriétaires pour leur éviter de prendre des risques analogues à ceux qui ont précédé les catastrophes minières.

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Si nous ne mettons pas en place cette agence ou cet organisme, peu importe, nous aurons à le regretter, et douloureusement.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Vous avez raison !

M. le président.

La parole est à M. Francis Delattre.

M. Francis Delattre.

Ce serait une grave erreur de ne pas suivre le Sénat. En effet, les problèmes de ce type se multiplient et je vais vous expliquer, en prenant moi aussi un exemple, pourquoi il est urgent de les résoudre.

Dans ma région, on exploite le gypse dans des carrières souterraines, essentiellement sous la forêt de Montmorency, mais aussi dans le secteur de Taverny, où se trouve le centre stratégique, et cela se fait dans l'indifférence générale. Il y a bien un cahier des charges mais il est rarement respecté par l'exploitant, et on se retrouve


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avec des milliers de kilomètres de galeries à l'abandon.

On a souvent affaire à des exploitants assez arrogants, entretenant les meilleures relations avec l'administration des mines, qui mène une enquête très formelle, à l'issue de laquelle elle autorise l'exploitation, en dépit de l'opposition unanime des communes concernées. Ainsi, les milliers de kilomètres continuent à s'étendre et personne ne cherche vraiment à savoir comment combler ces galeries.

Alors, au bout d'un moment, quand le problème devient trop grave, que fait-on ? On foudroie, monsieur le secrétaire d'Etat ! Et le foudroyage, c'est horrible : vous partez le matin, en laissant une maison à peu près intacte, et vous retrouvez le soir, après foudroyage - effectué naturellement dans le plus grand secret pour éviter de déclencher la révolution dans le secteur -, une maison fissurée et descendue de trois mètres !

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

C'est une grosse fissure !

M. Francis Delattre.

Vous croyez que j'exagère ? Non.

Allez vous renseigner dans des villes comme Saint-Leu-laForêt - il n'y a pas que des mairies de droite dans le secteur - et vous verrez que cela se passe bien ainsi.

Face à de telles nuisances, nous aimerions quand même disposer d'un outil pour pouvoir contribuer à l'objectif de gestion rationnelle du sol et du sous-sol. Ce serait la moindre des choses que nous ayons enfin notre mot à dire pour nous opposer à ces autorisations d'exploiter du gypse dans des conditions où l'on ne prévoit même pas le remblayage des souterrains. Vous savez ce que m'ont dit les industriels ? « Monsieur le maire, nous avons fait fortune en creusant les trous et nous avons l'intention de faire encore fortune en les rebouchant avec des inertes ! » Il a fallu se mobiliser très fortement pour les en empêcher, compte tenu des problèmes de qualité de l'eau.

Les conséquences sur l'urbanisme et l'environnement sont certaines. Le massif forestier situé aux abords de Roissy reçoit déjà le kérosène de tous les avions qui décollent. En prime, on laisse dans le sous-sol des carrières de gypse abandonnées. Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, vous devriez, même s'il y a eu des arbitrages interministériels et si le dispositif du Sénat ne vous convient pas, essayer d'associer les communes concernées à la recherche de solutions.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

64. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 1er A est supprimé.

Article 1er B

M. le président.

« Art. 1er B. - I. - Le titre Ier du livre Ier du code de l'urbanisme est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :

« Chapitre IV.

« La valorisation du sous-sol.

« Art. L. 113-3 . - Un établissement public dénommé Agence de valorisation du sous-sol est créé. Il a pour mission :

« - de promouvoir la mise en valeur et l'aménagement durable du sous-sol par des études, actions et prestations de service qui peuvent donner lieu à rémunération, notamment par les opérateurs de travaux souterrains ;

« - d'élaborer des outils informatiques de collecte et de diffusion des informations de toute nature relatives au sous-sol à des fins de prévention des risques, d'urbanisme et d'aménagement du territoire ;

« - de contribuer à l'objectif de gestion rationnelle du sol et du sous-sol défini par l'article L. 110 et à son application par l'article L. 121-1 relatif aux documents d'urbanisme, notamment par des recommandations de nature à faciliter la coordination administrative et les partenariats à l'échelon régional.

« L'agence peut être consultée sur l'opportunité des travaux et aménagements intéressant le sous-sol.

« Art. L. 113-4 . - L'Agence de valorisation du sous-sol est administrée par un conseil d'administration composé de :

« - représentants des collectivités locales ;

« - représentants des entreprises et des associations compétentes en matière d'aménagement souterrain ;

« - représentants de l'Etat et des personnalités qualifiées ;

« - représentants du personnel de l'agence.

« Art. L. 113-5 . - Le vendeur d'un terrain est tenu de communiquer à l'Agence de valorisation du sous-sol les informations qu'il détient sur la composition et l'état des éléments souterrains de son bien.

« Art. L. 113-6 . - Les ressources de l'Agence de valorisation du sous-sol sont notamment constituées par la rémunération des prestations de service mentionnées à l'article L. 113-3. »

« II. Les charges éventuelles résultant pour l'Etat de l'application du I sont compensées, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »

Vous souhaitez également intervenir sur cet article, monsieur Cardo ?...

M. Pierre Cardo.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Bien.

Je vous demande, mes chers collègues, de respecter votre temps de parole. Ce débat est certes important, mais l'essentiel peut être dit en cinq minutes.

Vous avez la parole, monsieur Cardo.

M. Pierre Cardo.

Je vous remercie, monsieur le président, de votre tolérance pour ma première intervention.

Le Sénat prévoit la création d'un établissement public.

Je suis un peu réservé sur le principe. Ayant dit, à propos de l'archéologie préventive, ce que je pensais de la création d'un établissement public proposée par le Gouvernement, je ne vais pas me dédire s'agissant de la gestion du sous-sol. L'inspection générale des carrières peut très bien se charger de mettre à la disposition du public et des élus des informations sur le sous-sol. Encore faudrait-il qu'elle ait les moyens de remplir cette mission qui lui a été confiée par l'Etat. Or il s'avère - je le constate dans mon département et ce ne doit pas être le seul - que lorsqu'on demande des renseignements à l'IGC, elle n'a pas les moyens de les obtenir parce qu'il faudrait réaliser des sondages. Chez moi, en effet, 85 % du réseau souterrain des carrières de gypse n'est plus accessible. J'ai donc été obligé, ainsi que les maires des commune voisines, de financer la plupart des sondages. Vous imaginez le coût que cela représente ! Or la loi Barnier a prévu un fonds d'intervention pour la prévention des risques, notamment souterrains. Pour l'instant, il ne sert qu'à l'expropriation des immeubles menacés. Mais, avant d'exproprier les gens, il faudrait savoir s'ils sont vraiment en danger. C'est tout l'intérêt de l'article 1er B, qui permet de donner les moyens d'enquêter à un organisme, établissement public ou IGC, peu importe.


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De plus, nous pourrions, au lieu d'exproprier systématiquement, prendre des mesures de prévention dont, pour l'instant, la loi ne prévoit pas le financement.

Le fonds d'intervention pour la prévention des risques doit dépasser les 500 millions de francs. La Séchilienne, premier dossier qui devrait bénéficier de l'indemnisation, n'en a pas encore consommé le premier centime, compte tenu des procès en cours. Il est donc vraisemblable que ce seront Chanteloup-les-Vignes, Triel-sur-Seine et la forêt de l'Hautil qui consommeront les premiers crédits du fonds.

Je trouve dommageable, alors qu'on laisse des gens en danger de mort dans des zones urbanisées, de ne pas se donner les moyens législatifs d'intervenir sur ce problème de fond.

Que le Gouvernement ne veuille pas accepter ces articles parce que la question mérite d'être approfondie, je peux le comprendre. Cela dit, voilà maintenant des années que nous sommes plusieurs à nous battre pour faire modifier la loi Barnier qui a, certes, constitué une avancée considérable mais qui n'est pas suffisante. Le Sénat a mis le doigt sur un point extrêmement sensible.

Dans ma circonscription, comme dans d'autres d'ailleurs, il y a eu des morts et il y en aura encore. J'ai mal au coeur en pensant que, dans certaines communes, le maire sera obligé d'accorder un permis à une personne qui prétendra constuire sur un pilier, lequel est censé garantir qu'il n'y a pas de trou. Chacun sait bien qu'en réalité, s'il y avait un PPR et si l'IGC en avait les moyens, on interdirait une telle construction. Mais devant un tribunal cet argument ne tiendrait pas et le maire ne peut refuser le permis. On met donc sciemment des gens en danger et je trouve cela inacceptable.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ajouterai un argument visant à impliquer davantage le ministère que vous représentez. Il ne faut pas oublier que ces cavités existent aussi sous des routes,...

M. Pierre Cardo.

C'est vrai !

M. Jean-Michel Marchand.

... voire des rues de nos villages ou de nos villes, qui n'avaient pas été conçues, à l'origine pour supporter la circulation de voitures et de poids lourds. Or le développement économique de nos régions, même rurales, a multiplié le trafic de ces types de véhicules et nous sommes à la merci du moindre effondrement et donc de l'accident.

Pourtant, les propriétaires, dans leur ensemble, sont tout prêts à accepter les solutions qu'on pourrait leur apporter et qui sont hors de leur portée financière. Monsieur le ministre, j'appuie l'intervention de mon collègue Cardo : faites-nous des propositions. Certes, pas forcément tout de suite puisque vous n'êtes effectivement pas le seul concerné. Nous ne voyons aucun inconvénient à ce que cela se passe dans un cadre interministériel, bien au contraire. Mais nous voudrions qu'il puisse au moins sortir de notre discussion des perspectives pour trouver des solutions à ces problèmes particulièrement graves.

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 65, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 1er B. » Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement no 65 dans la stricte continuité de ce qu'il a indiqué pour l'amendement précédent.

Encore une fois, je ne nie pas la réalité du problème que vous posez. Tout simplement, il mérite un approfondissement qui implique la participation des deux ministères les plus directement concernés, ceux de l'industrie et de l'environnement.

M. Francis Delattre.

Ils ne veulent rien lâcher !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

En effet, une cavité issue d'une carrière dont on connaît l'exploitant constitue un risque minier. En revanche, une cavité abandonnée, dont on ne sait plus à qui imputer la responsabilité, constitue un risque naturel. Sans compter qu'il existe des cavités d'origine encore différente, je pense notamment à celles issues de certains conflits, aux tranchées qui n'ont pas été cartographiées. Chacun a le souvenir de l'affaissement qui s'est produit peu après la mise en service du TGV-Nord : il était dû à une galerie de la guerre de 1914, qui ne figurait sur aucun plan.

M. Alain Cacheux.

Tout à fait !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Le problème est donc bien réel, et vous avez parfaitement raison de le poser, messieurs. Mais on ne le résoudra pas par une disposition qui viendrait s'insérer dans une loi sur l'urbanisme, ni par la création d'une agence, ni par une extension de la compétence du BRGM.

M. Francis Delattre et M. Pierre Cardo.

Nous sommes d'accord !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Il y a déjà, vous l'avez indiqué, la loi Barnier et la loi de 1999 sur les risques miniers. Il faut avant tout confronter ces deux textes et pointer leur éventuelles insuffisances. Il conviendra ensuite d'édicter des règles et de rassembler des moyens et il faut pour cela saisir les deux ministères les plus directement impliqués.

Quant à moi, je prends l'engagement de me faire l'écho de ce débat auprès de mes deux collègues, et de faire part de la forte sensibilisation de la représentation nationale à ce problème. Je leur dirai que je suis disposé à aller dans le sens de l'approfondissement que vous appelez de vos voeux, messieurs Marchand, Cardo et Delattre.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

65. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 1er B est supprimé et l'amendement no 530 du M. Marchand n'a plus d'objet.

A la demande du Gouvernement, je vais suspendre la séance pour une quinzaine de minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)

M. le président.

La séance est reprise.

Article 1er

M. le président.

« Art. 1er . - A. - Le chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l'urbanisme est ainsi modifié :

« I. - L'intitulé du chapitre est ainsi rédigé : "Dispositions générales communes aux schémas de cohérence territoriale, aux plans d'occupation des sols et aux cartes communales". »


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« II. Les articles L.

121-1 et L.

121-2 sont ainsi rédigés :

« Art. L.

121-1 . - Les schémas de cohérence territoriale, les plans d'occupation des sols et les cartes communales déterminent les conditions dans lesquelles sont pris en considération :

« 1o L'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages, en respectant les objectifs du développement durable, tels que définis notamment aux articles L.

200-1 du code rural et L.

110 du présent code ;

« 2o La diversité urbaine et la mixité sociale dans l'habitat urbain et dans l'habitat rural en prévoyant des capacités de construction et de réhabilitation suffisantes pour la satisfaction, sans discrimination, des besoins présents et futurs en matière d'habitat, d'activités économiques, commerciales, sportives ou culturelles et d'intérêt g énéral ainsi que d'équipements publics, en tenant compte notamment de l'équilibre territorial entre emploi et habitat ainsi que des moyens de transport, de la gestion des eaux et des sources d'énergie ;

« 3o Une utilisation économe et équilibrée des espaces naturels, urbains, périurbains et ruraux, la maîtrise de la demande de déplacement et de la circulation automobile, la préservation de la qualité de l'air, de l'eau, du sol et du sous-sol, des écosystèmes, des espaces verts, des milieux, sites et paysages naturels ou urbains, la réduction des nuisances sonores, la sauvegarde des ensembles urbains remarquables et du patrimoine bâti, la prévention des risques naturels prévisibles, des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature ;

« 4o La qualité des constructions et leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant par la création architecturale.

« Les dispositions des 1o à 3o sont applicables aux directives territoriales d'aménagement visées à l'article

L. 111-1-1.

« Art. L.

121-2 . - Dans les conditions précisées par le présent titre, l'Etat veille au respect des principes définis à l'article L.

121-1 et à la prise en compte des projets d'intérêt général ainsi que des opérations d'intérêt natio nal.

« Le représentant de l'Etat dans le département porte à la connaissance des communes ou de leurs groupements compétents les informations nécessaires à l'exercice de leurs compétences en matière d'urbanisme. Tout retard ou omission dans la transmission desdites informationse st sans effet sur les procédures engagées par les communes ou leurs groupements.

« Le représentant de l'Etat dans le département fournit notamment les études techniques dont dispose l'Etat en matière de prévention des risques et de protection de l'environnement.

« Une synthèse des principales informations portées à la connaissance des communes ou de leurs groupements compétents est annexée au dossier d'enquête publique. »

« II bis. L'article L.

121-3 est ainsi modifié :

« 1o Dans la deuxième phrase, après les mots : "de participer à la définition des politiques d'aménagement et de développement", sont insérés les mots : ", à l'élaboration des documents d'urbanisme, notamment des schémas de cohérence territoriale," ;

« 2o La dernière phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :

« Elles peuvent prendre la forme d'association ou de groupement d'intérêt public. Ces derniers sont soumis aux dispositions de l'article 21 de la loi no 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France. »

« III. L'article L.

121-4 est ainsi rédigé :

« Art. L.

121-4 . - L'Etat, les régions, les départements, les autorités compétentes en matière d'organisation des transports urbains et les organismes de gestion des parcs naturels régionaux sont associés à l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans d'occupation des sols dans les conditions définies aux chapitres II et III.

« Il en est de même des chambres de commerce et d'industrie, des chambres de métiers, des chambres d'agriculture et, dans les communes littorales au sens de l'article 2 de la loi no 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, des sections régionales de la conchyliculture. Ces organismes assurent les liaisons avec les organisations professionnelles et les organisations représentatives des usagers intéressées. »

« III bis. Après l'article L.

121-4, il est inséré un article L.

121-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

121-4-1 . - Les études économiques nécessaires à la préparation des documents prévisionnels d'organisation commerciale et artisanale peuvent être réalisées à l'initiative des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers. »

« IV. L'article L.

121-5 est ainsi rédigé :

« Art. L.

121-5 . - Les associations locales d'usagers agréées dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, les représentants des propriétaires immobiliers, bailleurs et occupants ainsi que les associations agréées mentionnées à l'article L.

252-1 du code rural, le Conservatoire du littoral et, le cas échéant, le Conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement, sont consultés, à leur demande, pour l'élaboration des schémas de cohérence territoriale, des schémas de secteur et des plans d'occupation des sols. Ils ont accès au projet de schéma ou de plan dans les conditions prévues à l'article 4 de la loi no 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal. »

« V. - L'article L.

121-6 est ainsi rédigé :

« Art. L.

121-6 . - Il est institué, dans chaque département, une commission de conciliation dont la compétence s'étend à :

« a) L'élaboration des schémas de cohérence territoriale, des schémas de secteur, des plans d'occupation des sols et des cartes communales ;

« b) La délivrance, au nom de l'Etat, des autorisations d'occupation du sol.

« Elle est composée du président du conseil général et, à parts égales, d'élus communaux désignés par les maires et les présidents des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de schémas de cohérence territoriale ou de plans d'occupation des sols du département, et de personnes qualifiées désignées par le représentant de l'Etat dans le département. Elle élit en son sein un président qui est un élu local.

« La commission peut également être saisie par ler eprésentant de l'Etat dans le département, les communes, les groupements de communes et les per-


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sonnes publiques mentionnées à l'article L.

121-4, ainsi que pour les questions relatives aux autorisations d'occupation du sol visées au b, par les demandeurs et les bénéficiaires de telles autorisations. Elle entend les parties intéressées et, à leur demande, les représentants des associations mentionnées à l'article L.

121-5, et peut recueillir l'avis de tout organisme compétent. Elle formule en tant que de besoin des propositions dans le délai de deux mois à compter de sa saisine. Ces propositions sont publiques.

« En zone de montagne, la commission de conciliation présente, sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux, des suggestions relatives à l'interprétation des dispositions particulières mentionnées à l'article L.

111-1 et à la compatibilité entre les plans d'occupation des sols, les cartes communales et les schémas de cohérence territoriale.

« La saisine de la commission dans les conditions prévues par le b suspend, le cas échéant, les délais de recours contentieux prévus à l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel jusqu'à la décision de la commission. Les délais de validité des autorisations d'occupation du sol et d'exercice du recours pour excès de pouvoir sont, dans le même cas, augmentés à proportion du délai qui s'étend entre la date de saisine de la commission et celle de sa décision. »

« VI. L'article L.

121-7 est ainsi rédigé :

« Art. L.

121-7 . - Les dépenses entraînées par les études et l'établissement des documents d'urbanisme sont prises en charge et inscrites à la section investissements de leur budget par les communes ou groupements de c ommunes compétents pour leur élaboration. Ces dépenses font l'objet d'une compensation par l'Etat dans les conditions définies aux articles L.

1614-1 à L.

1614-3 du code général des collectivités territoriales.

« Toutefois, les services déconcentrés de l'Etat peuvent être mis gratuitement et en tant que de besoin à la disposition des communes ou des groupements de communes compétents, pour élaborer, modifier ou réviser les schémas de cohérence territoriale, les schémas de secteur, les plans d'occupation des sols ou tout autre document d'urbanisme. Pendant la durée de cette mise à disposition, les services et les personnels agissent en concertation permanente avec le maire ou le président de l'établissement public qui leur adresse toutes instructions nécessaires pour l'exécution des tâches qu'il leur confie, ainsi que, le cas échéant, avec les professionnels qualifiés travaillant pour le compte de la commune ou de l'établissement public.

« L'Etat est responsable pour faute du fait de l'activité exercée par ses services au titre du présent article. »

« VI bis. 1o Pour l'année 2000, les dépenses supportées par les communes et leurs groupements en application du présent article sont compensées, à due concurrence, par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement ;

« 2o La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du 1o sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

« VII. Les articles L.

121-8 et L.

121-9 sont ainsi rédigés :

« Art. L.

121-8 . - L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'une carte communale, d'un schéma directeur ou d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le schéma directeur, la carte commu nale ou le plan d'occupation des sols ou le docum ent d'urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur.

« Art. L.

121-9 . - Non modifié. »

« A bis . - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'inscription des dépenses d'établissement des documents d'urbanisme à la section investissements du budget des communes est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

« B. - Supprimé. »

La parole est à M. Daniel Marcovitch, premier orateur inscrit sur l'article.

M. Daniel Marcovitch.

Dans le texte proposé à l'article 1er du projet pour l'article L.

121-4 du code de l'urbanisme, il est prévu que les chambres consulaires sont consultées pour l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme et des PLU, selon les modalités fixées aux chapitres II et III, c'est-à-dire « à leur demande ».

Il faut qu'il soit bien clair qu'à partir du moment où ces demandes sont faites, la consultation est de droit. Des représentants des chambres consulaires ont manifesté leur inquiétude à ce sujet. Il faut qu'ils sachent qu'à aucun moment elles ne seront mises à l'écart de la réalisation des SCT et des PLU, de même d'ailleurs que toutes les autres institutions prévues à cet article.

Il n'y aura aucun recul par rapport à la situation antérieure : leur consultation et leur audition seront de droit dès lors qu'elles en feront la demande. Il serait bon que

M. le secrétaire d'Etat le rappelle.

M. le président.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si je me suis inscrit sur cet article, c'est parce que je souhaiterais que nous levions ensemble une a mbiguïté sinon un malentendu, en tout cas une incompréhension qui revient constamment dans les interventions des uns et des autres.

Vous avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat, que POS et PLU, c'était exactement la même chose du point de vue normatif, étant la seule différence que, dorénavant, dans les plans locaux d'urbanisme, on pourrait affecter plusieurs usages à une même zone.

Je ne fais pas du tout la même lecture que vous et je rejoins ce que disaient notre collègue Marchand et plusieurs autres intervenants.

Dans la rédaction actuelle du code de l'urbanisme, à l'article L.

123-1, il est indiqué que les plans d'occupation des sols « doivent » - j'insiste sur ce mot - premièrement, délimiter les zones et déterminer l'affectation des sols, deuxièmement, définir, en fonction des situations locales, les règles concernant le droit d'implanter des constructions, leur destination et leur nature.

Ensuite, le code de l'urbanisme dispose que les plans d'occupation des sols « peuvent, en outre,... »

; suivent des dispositions telles que la fixation des coefficients d'occupation des sols, règles d'architecture, réserves, emprises pour équipement public.

Or nous sommes très nombreux, y compris sur les bancs de la majorité plurielle, à dire que les PLU perdent ce caractère normatif auquel nous sommes extrêmement attachés et qui réside dans l'obligation pour le plan d'occupation des sols - demain un PLU - de comporter la délimitation et l'affectation des sols, d'une part, les règles de construction, d'autre part. Cela relève d'ailleurs du


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s imple bons sens : tous ceux qui sont maires se demandent certainement comment ils feraient, demain, pour délivrer des permis de construire sur la base de documents d'urbanisme qui ne comprendraient ni l'affectation des sols ni les règles de construction dans le cadre des différents zonages établis.

Or, dans la rédaction issue de la première lecture à l'Assemblée, les plans locaux d'urbanisme fixent les règles p ermettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L.

121-1 - c'est-à-dire les objectifs généraux - et, à ce titre, ils « peuvent » - et non plus « doivent » -, premièrement, préciser l'affectation des sols selon les usages principaux, deuxièmement, définir, en fonction des situations locales, les règles concernant le droit d'implanter les constructions, leur destination et leur nature, Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez expliqué que, selon le droit actuel de l'urbanisme, il peut très bien ne pas y avoir de coefficient d'occupation des sols dans un plan d'occupation des sols ou dans certaines zones de ce POS. Je suis totalement d'accord avec vous : un certain nombre de POS n'en comportent pas, et un grand nombre gardent des zones, notamment en centre-ville où, pour des raisons de plus grande souplesse, pour favoriser les évolutions, on ne prévoit pas de coefficient d'occupation des sols.

En revanche, tous les plans d'occupation des sols ont un aspect normatif, en rendant obligatoire la mention, premièrement, de l'affectation des sols et, deuxièmement, des règles de construction sur les zones ainsi établies.

S'agissant d'un point aussi important, je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous apportiez, au cours de la discussion, une réponse précise afin de nous rassurer. Nous sommes, en effet, persuadés que les documents d'urbanisme doivent conserver un caractère normatif, même si, et c'est ce que j'ai expliqué ce matin, il faut accorder - c'est ça la décentralisation - un grand crédit à la responsabilité des élus locaux et leur faire une grande confiance.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Je souhaite répondre à M. Marcovitch que son interprétation est bien celle du Gouvernement : la consultation des chambres consulaires est de droit dès lors qu'elle est demandée. Sur ce point, il n'y a pas d'ambiguïté.

Quant à M. Carrez, qui s'est inscrit sur l'article 1er , il a, en fait, exprimé ses préoccupations sur l'article 3. J'aurai l'occasion, au moment de la discussion de cet article et des amendements qui s'y rapportent, d'être aussi précis qu'il le souhaite.

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 66, ainsi rédigé :

« Dans le I du A de l'article 1er , substituer aux mots : "d'occupation des sols", les mots : "locaux d'urbanisme". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

L'article 1er concerne les principes généraux des documents d'urbanisme. J'indique d'ores et déjà à l'Assemblée que, pour prendre en compte le changement de logique de ce document, il me semble nécessaire de retenir l'expression de « plan local d'urbanisme ». J'ajouterai quelques explications au moment de l'examen de l'article 3 dont le sujet est le plan local d'urbanisme. Ensuite, je me contenterai de qualifier d'amendements de coordination tous ceux, identiques, qui auront pour objet la même substitution.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Avis favorable.

M. le président.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

Le Sénat a souhaité rétablir les termes : « plan d'occupation des sols ». Il a tout à fait raison. Je crains beaucoup ce changement de vocabulaire, monsieur le secrétaire d'Etat. Certes, les plans d'occupation des sols datent de la loi de 1967, mais il a fallu plusieurs décennies pour enraciner, petit à petit, ce vocabul aire dans les esprits et pour que la population comprenne bien qu'on puisse accorder ou refuser un permis de construire, ou en demander la modification, en fonction de ces notions - plans d'occupation des sols, coefficient d'occupation des sols.

Si les fonctionnaires qui vous entourent, monsieur le Secrétaire d'Etat, ont l'esprit infiniment plus rapide que les élus que nous sommes (Sourires) et ne sont pas gênés de passer d'une réforme à une autre, il n'en va pas de même pour nous qui comprenons plus lentement ! Vous avez envoyé l'an dernier aux 36 000 maires de France un magnifique manuel de deux cents pages intitulé « Manuel d'élaboration et d'interprétation des plans d'occupation des sols » ! A peine ce travail exhaustif et extrêmement intéressant achevé et envoyé aux maires, qu'on décide qu'il n'y aura plus de plans d'occupation des sols mais des PLU ! Je ne reviens pas sur la différence fondamentale qui existe entre le POS et le PLU, puisque la discussion à ce sujet est renvoyée à l'article 3, mais je souhaite que vous preniez en compte, vous qui savez ce qu'être maire veut dire, les difficultés concrètes de ces élus. Vos fonctionnaires, eux, n'ont pas à recevoir les demandes d'explications de ceux qui trouvent un certificat d'urbanisme mal rédigé ou à qui l'on a refusé un permis de construire. Si nous parvenions à répondre, c'est que les esprits avaient progressivement intégré cette notion de plan d'occupation des sols.

Nous sommes un vieux pays où les habitudes sont longues à modifier, l'assimilation et la « digestion » des notions, longues à réaliser. Jeter par-dessus bord ce vocabulaire est extrêmement dangereux.

Certes conserver le vocabulaire ancien plutôt que lui substituer un nouveau peut paraître mineur. C'est tout de même très important. Sur ce sujet, ne pourriez-vous faire un geste de compréhension et reconnaître la sagesse de nos collègues du Sénat ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Monsieur Carrez, la vie a voulu que je devienne maire de ma commune de naissance très peu d'années après avoir atteint l'âge requis pour occuper cette fonction. Aussi, le premier document d'urbanisme que j'ai eu à élaborer s'appelait-il encore le PUD, le plan d'urbanisme de détail - c'était avant la loi de 1967.

M. Gilles Carrez.

Je n'ai pas connu cela !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Ensuite, j'ai dû m'adapter à la nouvelle nomenclature, celle des plans d'occupation des sols.

Je peux vous affirmer qu'on s'en remet ou, plus exactement, qu'on sait s'y mettre ! (Sourires.)

Quant aux fonctionnaires que vous évoquez, sachez qu'ils ne revendiquent pas la paternité de ce changement de dénomination. Le souci pédagogique l'a emporté chez le Gouvernement, qui a souhaité bien faire percevoir qu'il


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s'efforçait de tirer les enseignements de ce qu'il pouvait y avoir d'insuffisant dans la notion de POS et dans le monofonctionnalisme des zones, et d'insatisfaisant dans la terminologie - réductrice - de simple « occupation des sols ».

Par ailleurs, ayant été élu très jeune, sans être issu d'une quelconque grande école, je dois vous confesser que les fonctionnaires - et notamment ceux de l'équipement m'ont beaucoup aidé à apprendre le métier d'élu local.

M. Gilles Carrez.

Ils sont, en effet, d'une grande qualité !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Et je ne doute pas que, dans le cadre du nouveau dispositif du PLU, ils sauront aussi accompagner l'évolution souhaitable et que, tous, nous en tirerons profit.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

66. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement no 67, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi les deuxième, troisième et quatrième alinéas du II du A de l'article 1er :

« Art. L.

121-1. Les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer :

« 1o L'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural, d'une part, et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages, d'autre part, en respectant les objectifs du développement durable ;

« 2o La diversité des fonctions urbaines et la mixité sociale dans l'habitat urbain et dans l'habitat rural, en prévoyant des capacités de construction et de réhabilitation suffisantes pour la satisfaction, sans discrimination, des besoins présents et futurs en matière d'habitat, d'activités économiques, notamment commerciales, d'activités sportives ou culturelles et d'intérêt général ainsi que d'équipements publics, en tenant compte en particulier de l'équilibre entre emploi et habitat ainsi que des moyens de transport et de la gestion des eaux ; » La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

C'est un amendement de synthèse entre le texte voté par l'Assemblée nationale et celui adopté au Sénat.

L e Sénat a apporté des ajouts intéressants à l'article L.

121-1. Notamment, le principe d'équilibre entre le développement urbain, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et de paysages a remplacé un objectif d'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural et la préservation des espaces précédemment mentionnés. Le Sénat a bien pris en considération l'ensemble du territoire.

Il a parlé aussi de diversité urbaine à la place de mixité urbaine. Cela me paraît plus facilement compréhensible, ce qui est l'objectif de la loi.

Il a également précisé que l'objectif de mixité sociale s'appliquait à l'habitat urbain et à l'habitat rural. Il me paraît important de le préciser.

L'amendement reprend des dispositions du Sénat relatives à la diversité des fonctions urbaines, qui se substitue à la mixité urbaine.

J'ai repris le texte de l'Assemblée nationale en y ajoutant les propositions du Sénat. Pour être correct vis-à-vis du Sénat et respecter l'effort réalisé par M. Althapé, rapporteur,...

M. Michel Bouvard.

Excellent rapporteur !

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

... excellent rapporteur, avec qui j'ai eu de très bons contacts, je lui ai soumis, ainsi qu'à M. Jarlier, les amendements de la commission dès qu'ils étaient rédigés. Nous avons bien travaillé ensemble.

L'Assemblée nationale garde toute sa liberté, le Sénat garde la sienne, mais je tenais à souligner le fait que j'ai pu travailler avec nos collègues sénateurs.

Par contre, le Sénat a affaibli la portée des principes généraux s'imposant aux documents d'urbanisme. Je pense que les principes généraux, qui sont fondateurs et doivent se décliner dans l'ensemble des documents, sont importants. Nous voulons que s'il y a des contentieux, ceux-ci ne portent que sur des règles de fond, définies dans cet article 1er , plutôt que sur des points de procédure que nous avons, comme vous le savez, simplifiés par la suite.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Très favorable.

C'est un bel exemple d'approfondissement positif du travail entre les deux assemblées, que le Gouvernement salue.

M. le président.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

Je soutiens l'amendement du rapporteur, parce qu'il reprend fidèlement un apport du Sénat qui me paraît essentiel et sur lequel j'insisterai un instant.

Deux notions sont plus explicitement introduites : le renouvellement urbain, c'est-à-dire le fait que l'urbanisme, c'est aussi la reconstruction de la ville sur ellemême, et, point essentiel, le développement de l'espace rural, et pas seulement sa protection. Il est vrai que la rédaction retenue lors de la première lecture donnait l'impression d'une trop grande dualité entre des zones urbaines destinées à se développer et un espace rural dont la seule vocation était de se protéger.

Cet amendement propose une rédaction beaucoup plus équilibrée, qui est d'ailleurs complétée par l'introduction de la notion de diversité des fonctions urbaines.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

67. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 68, ainsi rédigé :

« Au début du cinquième alinéa (3o ) du II du A d e l'article 1er , substituer aux mots : "de la demande", les mots : "des besoins" » La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

La demande est une notion très économique. Elle suppose la solvabilité du d emandeur. Le terme « besoins » permet de mieux prendre en compte les aspirations de la population. Cette nuance n'est pas uniquement d'ordre technique, c'est aussi un problème de fond.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Favorable.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

68. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Marchand, M. Aschieri, Mme Aubert, M. Cochet et M. Mamère ont présenté un amendement, no 9, ainsi rédigé :

« Compléter le cinquième alinéa du II du A de l'article 1er par la phrase suivante : "La conservation des voies publiques et chemins ruraux notamment s'ils peuvent constituer une liaison ou un même itinéraire entre deux intersections, ou être destinés à une fin d'intérêt général". »

La parole est à M. Jean-Michel Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Il s'agit d'insister sur la nécessaire préservation des chemins ruraux.

Avec le développement d'une agriculture plus extensive et des grandes surfaces, on a vu disparaître ce type de chemin, non pas à cause du remembrement, parce que, dans ce cas, les chemins sont généralement réinstallés ailleurs, mais tout simplement parce que, ne semblant plus avoir une véritable utilité agricole, ils finissent par être accaparés par les riverains. Et, lorsque dans les années qui suivent, un maire ou un conseil municipal souhaite récupérer ces espaces pour en faire des chemins de randonnée ou établir des liaisons entre différents lieux de la commune nouvellement installés je pense à des plans d'eau ou à des aires de camping -, il est confronté à de grandes difficultés. Vous savez, en effet, que l'acquisition de ces espaces, même lorsqu'elle s'effectue de façon quelque peu volontariste et à l'encontre de toute règle de propriété, devient effective au bout de trente ans, je crois.

Cet amendement a donc pour but d'attirer l'attention des élus, pour qu'ils ne soient pas piégés, comme certains l'ont été récemment.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Défavorable.

Il est légitime de s'intéresser aux voies publiques et aux chemins ruraux, mais cette rédaction est vraiment systématique. Elle ne prend pas en compte les voies nouvelles qui ont pu être tracées pour les remplacer et implique une obligation d'entretien que la commune n'a pas forcément la capacité d'assumer.

Il y a les plans départementaux, les PLU et de nombreuses autres possiblités. Ce systématisme me semble dangereux.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

A ma connaissance, cet amendement est satisfait par un article de la LOADT, de mémoire le 52, dont le décret d'application en conseil d'Etat est en cours de rédaction.

Cette préoccupation touche à la fois l'aménagement et l'urbanisme, les deux domaines arrivent à se chevaucher, et je relève une belle continuité de pensée entre les deux lois successivement débattues ici, puisque la même proposition avait été faite. Puisqu'elle a été retenue une première fois, vous me permettez de confirmer qu'elle est satisfaite.

M. le président.

Monsieur Marchand, retirez-vous votre amendement ?

M. Jean-Michel Marchand.

Merci, monsieur le secrétaire d'Etat, de reconnaître cette continuité de pensée mais le décret n'est toujours pas sorti, et rien ne se fait.

M. Michel Bouvard.

Comme le décret sur les pays !

M. Jean-Michel Marchand.

Vous ne pouvez me faire aucune promesse puisque ce décret n'est pas de votre responsabilité (Sourires) , mais je fais le pari que le message sera entendu par une ministre qui est chargée de cette loi...

M. Michel Bouvard.

Il serait temps !

M. Jean-Michel Marchand.

... et je retire cet amendement.

M. le président.

L'amendement no 9 est retiré.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 69, ainsi rédigé :

« Supprimer le sixième alinéa (4o ) du II du A de l'article 1er »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Cet amendement vise à supprimer un alinéa qui impose à tous les documents d'urbanisme l'objectif de qualité architecturale des constructions.

S'agissant des schémas de cohérence territoriale, il me semble dangereux d'imposer une telle condition dans l'article 1er . Après en avoir longuement discuté avec M. Jarlier, rapporteur du Sénat, j'ai plutôt assigné cet objectif aux PLU et non pas aux SCT. Je croix, sans trahir sa pensée, qu'il était assez d'accord. L'amendement no 117, que je vous présenterai à l'article 3, tend à permettre aux PLU de comporter des prescriptions architecturales.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

69. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 70, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi les neuvième, avant-dernier et dernier alinéas du II du A de l'article 1er :

« Le préfet porte à la connaissance des communes ou de leurs groupements compétents les informations nécessaires à l'exercice de leurs compétences en matière d'urbanisme. Tout retard ou omission dans la transmission desdites informations est sans effet sur les procédures engagées par les communes ou leurs groupements.

« Le préfet fournit notamment les études techniques dont dispose l'Etat en matière de prévention des risques et de protection de l'environnement.

« Les porters à connaissance sont tenus à la disposition du public. En outre, tout ou partie de ces p ièces peut être annexé au dossier d'enquête publique. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Le Sénat a modifié la procédure du porter à connaissance et l'a considérablement alourdie. Cet amendement est un retour au texte de l'Assemblée. Je vous rappelle que le préfet est censé porter l'ensemble des documents qu'il possède à connaissance dès le début de la procédure d'élaboration ou de révision d'un document d'urbanisme.

J'ai cependant incorporé une disposition sénatoriale qui me semble utile, pour préciser que le préfet fournit les études disponibles en matière de prévention des risques et de protection de l'environnement. On obtient ainsi un dispositif souple, qui devrait permettre une bonne information des communes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Le Gouvernement est d'autant plus favorable à cet amendement qu'il avait exprimé une certaine inquiétude sur la notion de note de synthèse. Il préfère que le porter à connaissance soit complet, une note de synthèse pouvant toujours être accusée d'avoir quelque peu condensé ou écarté telle ou telle précision. Pour la transparence de la communication des éléments, la rédaction de la commission paraît plus satisfaisante.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

70. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement no 71, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa du II bis de l'article 1er par la phrase suivante : Ils peuvent recruter du personnel propre régi par les dispositions du code du travail. »

Sur cet amendement, le Gouvernement a présenté un sous-amendement no 557 rectifié, ainsi rédigé.

« Compléter l'amendement no 71 par l'alinéa suivant :

« Un commissaire du Gouvernement est nommé auprès du groupement lorsque la part de la participation de l'Etat excède un montant déterminé par décret en Conseil d'Etat. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

71.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Il s'agit simplement de permettre aux agences d'urbanisme de recruter leur propre personnel. On connaît l'importance des agences dans l'élaboration des futurs documents d'urbanisme.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 71 et défendre le sous-amendement no 577 rectifié.

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Comme je l'avais indiqué lors du débat sur cet article au Sénat, il est nécessaire de compléter les dispositions relatives à la transformation des agences d'urbanisme en GIP, pour leur permettre de conserver un personnel propre.

Le Gouvernement propose, par son sous-amendement no 557 rectifié, d'ajouter un alinéa supplémentaire pour dispenser les GIP « agences d'urbanisme » de l'obligation que soit nommé auprès d'elle un commissaire du Gouvernement lorsque l'Etat ne participe que très marginalement au financement de l'organisme.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Favorable, mais il aurait été peut-être préférable de parler de la participatio n de l'Etat plutôt que de la part de la participation.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 557 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat au logement.

La modification rédactionnelle suggérée par le rapporteur ne déplaît pas au Gouvernement. On peut alléger le texte en parlant de la participation de l'Etat.

M. le président.

Je suis désolé, monsieur le secrétaire d'Etat, mais le vote est acquis.

Je mets aux voix l'amendement no 71 ainsi sousamendé.

(L'amendement, ainsi modifié est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 72, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa du III de l'article 1er , substituer aux mots : "d'occupation des sols,", les mots : "locaux d'urbanisme". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

C'est un amendement de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

72. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 73, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du III de l'article 1er , supprimer les mots : "et les organisations représentatives des usagers". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Le Sénat a précisé que les organismes consulaires devaient assurer la liaison entre les organisations représentatives des usagers lors de l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et du plan local de l'urbanisme. Cela ne me semble pas pertinent.

Les organismes consulaires, et notamment les CCI, ne sont pas des intermédiaires adéquats pour assurer la liaison avec les usagers.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

73. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 74, ainsi rédigé :

« Compléter le III de l'article 1er par l'alinéa suivant :

« Les études économiques nécessaires à la préparat ion des documents prévisionnels d'organisation commerciale et artisanale peuvent être réalisées à l'initiative des chambres de commerce et d'industrie et des chambres des métiers. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

C'est un amendement de précision.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

74. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 75, ainsi rédigé :

« Substituer au dernier alinéa du III bis de l'article 1er , les deux alinéas suivants :

« Art. L.

121-4-1. Les documents d'urbanisme applicables aux territoires frontaliers prennent en compte l'occupation des sols dans les territoires des

Etats limitrophes.

« Les communes ou groupements compétents peuvent consulter les collectivités territoriales de ces

Etats ainsi que tout organisme étranger compétent en matière d'habitat, d'urbanisme, de déplacement, d'aménagement et d'environnement. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Cet amendement transfère les dispositions adoptées par le Sénat et relatives aux collectivités frontalières, pour les placer à l'article 121-4-1 et modifie le dispositif pour supprimer la navette des documents d'urbanisme entre les ministères des affaires étrangères respectifs des Etats concernés.

Bref, on garde le même esprit, on place ces dispositions au bon endroit et on évite les lourdeurs.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Il est favorable à la suppression d'un formalisme qui n'apportait rien de spécialement positif.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Je comprends qu'on supprime le formalisme, et je suis heureux qu'une disposition introduite par le Sénat soit maintenue.

Cela dit, le mettre dans la loi, c'est bien, mais faire en sorte que les élus puissent recueillir l'information sur des documents territoriaux frontaliers est encore mieux. Or, s'agissant par exemple du dispositif Natura 2000, qui est en cours d'élaboration dans notre pays depuis maintenant plusieurs années, les élus frontaliers réclament avec insistance de savoir ce qui est classé dans les territoires frontaliers voisins à ce titre, et nous n'avons toujours aucune information à ce sujet.

J'espère donc que nous n'entrerons pas dans le même cycle avec cette disposition qui est tout à fait utile s'agissant des territoires frontaliers, et qu'il n'y aura pas ensuite une fin de non-recevoir pour son application.

M. le président.

Je mets au voix l'amendement no

75. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 76, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le dernier alinéa du IV de l'article 1er :

« Art. L. 121-5. - Les associations locales d'usagers agréées dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, ainsi que les associations agréées mentionnées à l'article L. 252-1 du code rural sont consultées, à leur demande, pour l'élaboration des schémas de cohérence territoriale, des schémas de secteur et des plans locaux d'urbanisme. Elles ont accès au projet de schéma ou de plan dans les conditions prévues à l'article 4 de la loi no 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

C'est un retour au texte de l'Assemblée nationale pour cet alinéa, le CAUE et le Conservatoire du littoral ne pouvant pas être assimilés à des associations agréées. Cependant, je remettrai le CAUE, qui est un organisme très intéressant, dans un autre amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets au voix l'amendement no

76. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Rimbert, rapporteur, a présenté un amendement, no 77, ainsi rédigé :

« Substituer aux deuxième à dernier alinéas du V de l'article 1er , les deux alinéas suivants :

« Art. L. 121-6. - Il est institué, dans chaque département, une commission de conciliation en matière d'élaboration de schémas de cohérence territoriale, de schémas de secteur, de plans locaux d'urbanisme et de cartes communales. Elle est composée à parts égales d'élus communaux désignés par les maires et les présidents des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de schémas de cohérence territoriale ou de plans locaux d'urbanisme du département et de personnes qualifiées désignées par le préfet. Elle élit en son sein un président qui doit être un élu local.

« La commission peut être saisie par le préfet, les communes ou groupements de communes et les personnes publiques mentionnées à l'article L. 121-4.

Elle entend les parties intéressées et, à leur demande, les représentants des associations mentionnées à l'article L. 121-5. Elle formule en tant que de besoin des propositions dans le délai de deux mois à c ompter de sa saisine. Ces propositions sont publiques. »

Sur cet amendement, M. Poignant a présenté un sousamendement, no 489, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa de l'amendement no 77, après les mots : "elle est composée", insérer les mots : "du président du conseil général ou son représentant, et". »

La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l'amendement no

77.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Cet amendement concerne le rôle de la commission de conciliation.

Selon la rédaction du Sénat, cette commission peut se prononcer sur les permis de construire. Cela me semble être relativement dangereux. Je pense que c'est le rôle du juge administratif de se prononcer sur un acte administratif et sur un différend. En étendant ses compétences, le Sénat a profondément modifié la nature de cette commission de conciliation. Pour ma part, je considère qu'elle doit rester une instance relativement souple, permettant la conciliation en cas de divergences lors de l'élaboration des documents d'urbanisme, mais en aucun cas s'ériger en juge administratif. A chacun son rôle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Favorable.

M. le président.

La parole est à M. Serge Poignant, pour soutenir le sous-amendement no 489.

M. Serge Poignant.

Le rapporteur explique que le Sénat a donné à la commission de conciliation la possibilité de délivrer, au nom de l'Etat, des autorisations d'occupation des sols. J'entends bien qu'il faille éviter toute confusion. Mais il a oublié de dire que le Sénat avait prévu la présence du président du conseil général ou de son représentant au sein de la commission.

J'estime que des discussions avec un représentant du département peuvent être importantes. Mon sous-amendement ne réintroduit cependant pas la délivrance, au nom de l'Etat, des autorisations d'occupation des sols.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Défavorable. Cette commission de conciliation n'étant composée que de maires, on ne peut la placer sous la tutelle du conseil général.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 27 JUIN 2000

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Il s'agit de régler des problèmes locaux. Le Gouvernement s'en tient donc à ce principe - qui a longtemps été défendu sur tous les bancs de cette assemblée - selon lequel on ne crée pas de tutelle d'un niveau de collectivité sur un autre. Il reste favorable à sa rédaction initiale, qui institue une commission composée d'élus communaux.

M. le président.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

J'interviendrai sur la question de la délivrance, au nom de l'Etat, des autorisations d'occupation des sols. En fait, le Sénat a pour souci de limiter les contentieux avec l'Etat, car force est de constater que plusieurs autorisations de ce type, délivrées au nom de l'Etat, de façon unilatérale, ont été ressenties comme sans appel et ont débouché sur des conflits locaux.

Il vaudrait donc mieux - et je pense que le Sénat a agi dans cet esprit - que la commission de conciliation permette, grâce à un examen préalable, d'éviter des conflits qui conduisent à des recours juridictionnels. Il serait dommage de supprimer ce qui paraît une mesure de sagesse.

M. le président.

La parole est à M. Francis Delattre.

M. Francis Delattre.

L'argument de la tutelle de fait ne m'a pas convaincu. Ainsi, il suffirait que siègent, dans une même commission, des maires, des représentants des EPCI, des personnes nommées par le préfet, et le président du conseil général ou son représentant - car, la plupart du temps, ce sera son représentant - pour que, de facto, on organise la tutelle d'une collectivité sur l'autre.

Cela ne tient pas debout.

Tout le monde sait que le département exerce des responsabilités dans l'aménagement, installant les collèges, participant à nos réflexions dans les agglomérations, à la mise en place des voiries nationales qui ont été départementalisées. Il joue un rôle éminent dans la mise en place des schémas de cohérence territoriale. Pourquoi refuser qu'un représentant du conseil général siège dans cette commission ? Mais sans doute, derrière cela, y a-t-il une réelle cohérence. Il est vrai qu'on ne pourra pas empiler à l'envi toutes les structures territoriales : dès lors, le problème du département est posé, notamment en zone urbaine.

Et c'est être cohérent que de dire qu'il faut écarter de la commission le président du conseil général, car, si sa propre structure n'est peut-être pas condamnée, elle est mise en cause. Du reste, avec la mise en place des communautés d'agglomération, les cantons urbains n'ont que peu de réalité.

Mais cela, il faut le dire franchement, et ne pas prétexter que, avec un représentant du conseil général dans la commission, on risque d'organiser la tutelle d'une collectivité sur l'autre.

C'est faux. Cette volonté d'écarter le conseil général de la commission de conciliation cache autre chose, qui appellerait une réflexion globale sur le nombre de nos c ollectivités. Mais ce n'est peut-être pas encore le moment d'en parler.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 489.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

77. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

4 SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le président.

J'ai reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une lettre m'informant qu'en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, plus de soixante sénateurs ont saisi le Conseil constitutionnel d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution de la loi relative à l'élection des sénateurs.

5

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, no 2408, relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

M. Patrick Rimbert, rapporteur, au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 2481.)

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT