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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE Mme CHRISTINE LAZERGES

1. Loi de finances pour 2001 (première partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 7039).

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) (p. 7039)

Après l'article 2 (p. 7039)

Amendement no 76 de M. Auberger : MM. Philippe Auberger, Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances ; Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. - Rejet.

Amendement no 214 de M. Gantier : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 460 de M. Reitzer : MM. Jean-Luc Reitzer, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 313 de M. Carrez : MM. Yves Deniaud, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 350 de M. Michel Bouvard : MM. Philippe Auberger, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. Rejet.

Amendement no 291 de M. Gantier : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 260 de M. Michel Bouvard : MM. Christian Estrosi, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. Rejet.

Amendements nos 341 corrigé de M. Christian Estrosi, 366 de M. Gengenwin, 263 de M. Michel Bouvard et 3 de M. Charles : MM. Christian Estrosi, le rapporteur général, Charles de Courson, Philippe Auberger, Yves Cochet, le secrétaire d'Etat, Germain Gengenwin. - Rejets.

Amendement no 213 de M. Goulard : MM. François Goulard, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 212 de M. Gantier : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 32 rectifié de la commission des finances : MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, JeanJacques Jégou, Jean-Pierre Brard. - Adoption.

Amendement no 163 de M. Auberger : MM. Philippe Auberger, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. Rejet.

Amendement no 195 corrigé de M. Baert : MM. Jean-Louis Idiart, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Amendement no 195 corrigé repris par M. Jégou : M. JeanJacques Jégou.

Sous-amendement oral de M. de Courson : MM. Charles de Courson, Augustin Bonrepaux. - Rejet du sousamendement et de l'amendement no 195 corrigé.

Amendements nos 18 de M. Emmanuelli, 311 de M. Carrez et 443 de M. Cuvilliez : MM. Henri Emmanuelli, Philippe Auberger, Jean-Pierre Brard, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement no

18. MM. Philippe Auberger, Jean-Pierre Brard, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement no 443.

M M. Jean-Jacques Jégou, Augustin Bonrepaux, Henri Emmanuelli, président de la commission des finances ; Philippe Auberger. - Rejet de l'amendement no 311.

Amendement no 216 de M. Gantier : MM. Gilbert Gantier, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 262 de M. Michel Bouvard : MM. Christian Estrosi, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Augustin Bonrepaux. - Rejet.

Amendement no 150 de M. Cochet : M. Yves Cochet.

Amendement no 149 de M. Cochet : MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Yves Cochet. - Retrait des amendements nos 150 et 149.

Amendements nos 162 de M. Auberger et 217 de M. Gantier : MM. Philippe Auberger, Gilbert Gantier, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejets.

Amendements nos 164 corrigé de M. Auberger et 218 corrigé de M. Gantier : MM. Philippe Auberger, Gilbert Gantier, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. Rejets.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Ordre du jour des prochaines séances (p. 7058).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE Mme CHRISTINE LAZERGES

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1 LOI DE FINANCES POUR 2001

PREMIÈRE PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585, 2624).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente.

Hier soir, l'Assemblée a commencé la discussion des articles et s'est arrêtée à l'amendement no 76 portant article additionnel après l'article 2.

Après l'article 2 (suite)

Mme la présidente.

M. Auberger a présenté un amendement, no 76, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Après l'article 80 undecies du code général des impôts, il est inséré un article 80 duodecies ainsi rédigé :

« Art.

80 duodecies. - Lorsqu'un salarié a été privé d'emploi pendant plus de six mois et qu'il reprend une nouvelle activité salariée, le montant de la différence entre sa rémunération d'activité et les allocations compensant la perte d'emploi ne fait l'objet d'une imposition qu'à raison d'un tiers l'année de reprise de l'activité salariée et de deux tiers l'année qui suit la reprise de l'activité. »

« II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Philippe Auberger.

M. Philippe Auberger.

Cette nuit, vous vous en souvenez certainement car la discussion s'est terminée fort tard, nous avons évoqué l'importance relative de la réforme fiscale qui nous est proposée en ce qui concerne l'impôt sur le revenu. Je rappellerai simplement deux chiffres : d'après le rapport général, le montant des recettes attendues en 2001 au titre de l'impôt sur le revenu est le même, à 1 milliard de francs près, que celui de 2000, lequel est lui-même en augmentation de 47 milliards de francs par rapport à 1997.

Par ailleurs, en 1999, 1 300 000 contribuables supplémentaires ont été assujettis à l'impôt sur le revenu et, pour cette seule année, l'augmentation du produit de l'impôt a été de 24 milliards de francs, ce qui est trèse xactement le montant des allégements proposés pour 2001.

En résumé, il n'y aura pas, en fait, d'allégement de l'impôt sur le revenu. En 2001, le produit de l'impôt sera simplement stabilisé, ce qui est tout à fait différent.

La réforme proposée vise uniquement à atténuer les graves anomalies constatées en 1999. Si le produit de l'impôt sur le revenu a considérablement augmenté cette année-là et s'est ensuite maintenu, ce n'est pas parce que les revenus par tête auraient eux-mêmes considérablement augmenté depuis 1997, c'est parce que de très nombreuses personnes sont passées de l'état de non-travail à l'état de travail et se sont trouvées, de ce fait, assujetties à l'impôt. Il est vrai que l'on a prévu, dans le cadre de la réforme proposée, une modification de la décote, ainsi qu'un allégement très partiel de la CSG. Mais ces mesures sont insuffisantes et il demeure un certain nombre de trappes à inactivité.

C'est précisément pour remédier à cette situation que mon amendement no 76 vise à atténuer, en l'étalant sur trois ans, la charge fiscale supplémentaire incombant aux personnes privées d'emploi depuis au moins six mois, qui retrouvent un travail et entrent par conséquent dans le champ de l'impôt sur le revenu. Il s'agit donc d'une mesure de justice fiscale conforme aux intentions affichées par le Gouvernement et sa majorité.

M. Jean-Luc Reitzer.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

La commission des finances n'a pas été convaincue de la pertinence de cet amemdement, dont le dispositif apparaît moins performant que celui proposé par le Gouvernement. La lutte contre les trappes à inactivité est depuis longtemps une préoccupation du Gouvernement et de la majorité plurielle. A cette fin, le Gouvernement a prévu l'exonération de la CSG et de la CRDS jusqu'à un SMIC, une ristourne dégressive de ces deux prélèvements jusqu'à 1,3 SMIC, plafond que la commission des finances a porté à 1,4 SMIC, ainsi qu'un aménagement de la décote qui permettra une entrée beaucoup moins brutale dans l'impôt sur le revenu.

Autant de dispositions qui nous font préférer la proposition du Gouvernement à celle de Philippe Auberger.

J'invite donc l'Assemblée à rejeter cet amendement.

Mme la présidente.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.


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M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

J'ajoute que cet amendement conduirait à accorder un avantage croissant avec le niveau de revenu du contribuable, ce qui serait particulièrement favorable à ceux qui sont imposés dans les plus hautes tranches du barème.

Je ne disconviens pas que la motivation de M. Auberger est juste. Mais M. le rapporteur général a rappelé les mesures qui, dans cette loi de finances, vont dans le sens du retour à l'emploi. J'y ajouterai la réforme des modalités d'attribution de l'allocation logement, celle des dégrèvements de taxe d'habitation et l'intéressement des RMIstes à accéder au travail.

Pour ces raisons, je rejoins l'avis négatif de la commission des finances.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

76. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Gantier a présenté un amendement, no 214, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Après le 2o de l'article 83 du code général des impôts, il est inséré un 2o A ainsi rédigé :

« 2o A Les cotisations ou primes versées par les retraités aux régimes complémentaires d'assurance maladie. »

« II. - La perte de recettes est compensée par le relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier.

L'article 83 du code général des impôts permet aux actifs, qu'ils soient salariés ou non salariés, de déduire de leur revenu global imposable les cotisations d'assurance maladie complémentaire. Mais les retraités ne bénéficient pas de cette déduction. C'est pourquoi je demande que les cotisations ou primes versées par les retraités aux régimes complémentaires d'assurance maladie soient déductibles de leur revenu imposable.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Avis défavorable pour trois raisons.

D'abord, cet amendement introduirait une inégalité de traitement avec les salariés et les fonctionnaires.

M. Gilbert Gantier.

Non !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Ensuite, nous en avons débattu en commission, les régimes complémentaires d'assurance maladie dont bénéficient les salariés ont un objectif différent de ceux destinés aux retraités.

Enfin, la seule exception prévoyant la déductibilité des c otisations aux régimes complémentaires facultatifs concerne les non-salariés qui sont, vis-à-vis des régimes sociaux, dans une situation très spécifique.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le droit positif v ise en fait les situations d'activité professionnelle.

Comme M. Gantier l'a indiqué, il s'agit de couvrir non pas des revenus de remplacement mais des revenus liés à l'activité. L'adhésion des personnes retraitées à une mutuelle, par exemple, répond à des motivations certes légitimes, mais d'ordre personnel. Alors que le montant de la pension du retraité n'est pas lié pour le retraité à son état de santé, l'interruption de son activité professionnelle par un actif pour des raisons médicales peut retentir, surtout si elle se prolonge, sur le montant de sa rémunération, salaire ou bénéfice professionnel. Nous avons donc préféré mettre en place en faveur des plus démunis le régime de la CMU qui, depuis le 1er janvier 2000, permet à un million de personnes de bénéficier de la couverture maladie de base et à quatre millions de personnes de prétendre à une protection complémentaire gratuite.

Pour ces raisons, il convient de repousser l'amendement de M. Gantier, si toutefois il le maintient.

M. Gilbert Gantier.

Je le maintiens.

Mme la présidente.

Je mets donc aux voix l'amendement no 214. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Reitzer et M. Vannson ont présenté un amendement, no 460, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Dans le dernier alinéa de l'article 83 du code général des impôts, les mots "quarante kilomètres" sont remplacés par les mots "cinquante kilomètres".

« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Jean-Luc Reitzer.

M. Jean-Luc Reitzer.

Les contribuables peuvent déduire les frais réels de transport de leur domicile à leur lieu de travail dans la limite de quarante kilomètres. En dépit de l'amélioration du marché du travail, nous savons tous que le chômage continue de frapper plus de deux millions de nos concitoyens. Or l'acceptation de la mobilité est l'une des conditions souvent indispensables pour trouver un emploi. Il convient donc de favoriser la mobilité.

De plus - et vous êtes bien placé, monsieur le secrétaire d'Etat, pour le savoir - nous souhaitons tous empêcher que nos vallées et nos zones rurales se désertifient.

M. Philippe Auberger.

Très bien !

M. Jean-Luc Reitzer.

Or si rien n'est fait pour alléger les frais de déplacement domicile-travail de nos concitoyens qui résident en milieu rural, ils iront malheureusement grossir la population des banlieues et des villes.

Pour ces raisons, et aussi pour tenir compte du renchérissement des carburants qui a accru les charges de déplacement, je suggère de porter le nombre de kilomètres déductibles de quarante à cinquante. Je rappelle qu'en 1994 le gouvernement de M. Balladur avait accepté de passer de trente à quarante kilomètres sans effet de seuil.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

C'est à peine démago !

M. Jean-Luc Reitzer.

Le ministre du budget de l'époque, M. Sarkozy, s'était en outre engagé à demander aux services fiscaux d'examiner les cas individuels avec bienveillance. Or, monsieur le secrétaire d'Etat, cette bienveillance n'existe plus, notamment dans les vallées de Thann et de Saint-Amarin, à l'égard des travailleurs frontaliers alsaciens qui se rendent tous les jours en Allemagne ou en Suisse.

Je vous demande donc à la fois de bien vouloir porter le plafond de déductibilité de quarante à cinquante kilomètres et rappeler à vos services la nécessité d'un examen bienveillant des dossiers individuels.


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Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission des finances n'a pas accepté cet amendement. Il peut paraître sympathique, mais nous n'avons pas souhaité remettre en cause l'équilibre actuel.

En outre, il existe des dérogations assez larges prévues par la doctrine à la règle des quarante kilomètres. Le contribuable peut faire état de circonstances particulières pour justifier l'éloignement de son domicile du lieu de travail, notamment la difficulté de trouver un emploi à proximité, la précarité ou encore une mutation géographique professionnelle.

Respectons cet équilibre, quitte à ce que le Gouvernement rappelle à ses agents, par voie d'instruction, la nécessité d'être compréhensif et de prendre en compte les situations particulières.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Pour les mêmes raisons que M. le rapporteur général, je préconise moi aussi le rejet de l'amendement.

Je rappelle en outre à M. Reitzer - dont la préoccupation est légitime, surtout dans nos vallées - que la distance moyenne domicile-travail était de quatorze kilomètres en 1994 et que, selon les dernières statistiques disponibles, même si elle a très légèrement progressé, elle reste très inférieure à quarante kilomètres.

Par ailleurs, le barème de frais kilométriques n'est pas du tout désavantageux en France et les mesures que nous avons prises sur la baisse stabilisatrice de la TIPP permettent de compenser certains désagréments liés à l'éloignement du lieu de travail.

Je pense donc, monsieur le député, que vous pourriez retirer votre amendement dont l'esprit est très largement pris en compte par le droit fiscal existant.

Mme la présidente.

Le retirez-vous, monsieur Reitzer ?

M. Jean-Luc Reitzer.

Je ne le retire pas et je suis déçu par la réponse du Gouvernement, car j'avais aussi demandé que le ministère s'engage à appeler les services à plus de bienveillance. Dans certaines subdivisions des impôts, notamment dans la région de Thann, des contrôles systématiques ont lieu et des contribuables travailleurs, obligés de se rendre tous les jours soit à Mulhouse, soit en Suisse, soit en Allemagne, sont pénalisés par des rappels d'impôt pouvant atteindre 20 000 à 25 000 francs.

Cela n'a rien d'anodin et cet amendement n'est pas simplement « sympathique ». Il s'agit au contraire d'une mesure fondamentale qui permettrait une avancée sociale en faveur du monde du travail.

Mme la présidente.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Mme Françoise Parly rappellera aux services la nécessité d'avoir une vue pragmatique et, dans bien des cas, bienveillante de l'application de ces textes.

M. Philippe Auberger.

Enfin !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Je vous remercie, monsieur Reitzer, d'avoir évoqué cette question.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 460.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Carrez a présenté un amendement, no 313, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Le VI de l'article 83 ter du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Le présent article s'applique aux sociétés nouvelles créées à compter du 1er janvier 1992. »

« II. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par l'augmentation à due concurrence des droits de consommation prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Yves Deniaud, pour soutenir cet amendement.

M. Yves Deniaud.

Il a pour objet de pérenniser la déduction des intérêts d'emprunt dont bénéficient les salariés qui reprennent leur entreprise dans le cadre d'un RES. Ce statut a été mis en place en 1984 ; une loi de 1992 a instauré une telle déduction, mais à titre temporaire, et ce régime expire à la fin de l'année. Compte tenu de ses effets très positifs, M. Carrez et l'ensemble du groupe RPR considèrent qu'il faudrait le pérenniser.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission n'a pas adopté cet amendement. Il existe d'autres dispositifs favorables au rachat de leur entreprise par les salariés, notamment la constitution d'une société holding.

De plus, les salariés qui reprennent leur entreprise peuvent bénéficier de la réduction d'impôt prévue pour les souscriptions en numéraire au capital des entreprises non cotées. Cette réduction d'impôt est égale à 25 % des sommes investies, dans certaines limites comptables et à la condition d'être salarié, à raison de 37 500 francs pour un célibataire et de 75 000 francs pour un couple.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Même avis.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 313.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Michel Bouvard a présenté un amendement, no 350, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. L'article 93 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

«

8. Les intérêts des emprunts contractés pour l'acquisition de parts de société d'exercice libéral. »

« II. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Philippe Auberger, pour soutenir cet amendement.

M. Philippe Auberger.

Je le défendrai, madame la présidente, au nom de M. Bouvard, qui a dû s'absenter, sa circonscription ayant été victime de graves inondations le week-end dernier. Mais il devrait revenir cet après-midi.

Il s'agit de reconnaître que les sociétés d'exercice libéral sont une forme d'exercice extrêmement utile pour les professions concernées. Ce sont des sociétés civiles ; il paraît donc normal que les intérêts des emprunts qu'elles contractent puissent être déduits. Or tel n'est pas le cas, bien que le Conseil des impôts ait recommandé de prendre cette mesure.

Plus généralement, il faut bien reconnaître que les mesures en faveur de la création d'entreprise sont tristement absentes de ce projet de budget. Alors que l'on


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multiplie les grands discours et les colloques à ce sujet, la réalité montre que la création d'entreprise, y compris sous forme libérale, est extrêmement difficile en France.

L'amendement de M. Bouvard vise à atténuer cette difficulté.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Cet amendement soulève une vraie question, mais la solution proposée n'a pas été retenue par la commission des finances, car elle va à l'encontre d'un principe bien établi, que M. Auberger connaît bien, celui selon lequel les parts d'une société soumise à l'IS ne font pas partie du patrimoine professionnel et ne peuvent donner lieu à la déduction des intérêts d'emprunt correspondants. Il serait délicat pour l'administration de déroger à ce principe, la moindre exception pouvant avoir des conséquences très importantes et peut-être même surprenantes.

En outre, la personne qui exerce une activité libérale peut bénéficier de la déduction des intérêts correspondant à l'acquisition de parts de SEL en créant une EURL dont le déficit viendra s'imputer sur son revenu.

Pour ces raisons, rejet.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Même démonstration et même avis que M. le rapporteur général.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 350.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Gantier a présenté un amendement, no 291, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans l'article 150 0A du code général des impôts, la somme "50 000 francs" est remplacée par la somme "100 000 francs".

« II. La perte de recettes est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles sur les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier.

L'article 150, un des plus complexes du code général des impôts, occupe à lui seul une dizaine de pages sur deux colonnes, en petits caractères. Son article 150 OA dispense d'imposition les plusv alues dès lors qu'elles ne sont pas supérieures à 50 000 francs dans l'année. Ce plafond a été fixé il y a déjà un certain temps. Compte tenu des fluctuations fréquentes des cours de la bourse, il serait juste de le relever à 100 000 francs, car les hausses et les baisses, parfois, s'additionnent.

M. Jean-Pierre Brard.

Je pensais qu'elles s'annulaient !

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

L'année dernière, nous avons unifié le régime d'imposition des plus-values et choisi de ne pas relever le montant du plafond. Il n'y a pas de raison de revenir sur le choix fait. La commission demande le rejet de l'amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Rééquilibrer les prélèvements sur les revenus du travail et sur les produits du patrimoine, tel est le sens de la politique de l'épargne du Gouvernement. La baisse du seuil de cession à 50 000 francs à compter du 1er janvier 1998 s'inscrit dans ce cadre. Il n'y a pas de raison légitime d'en changer.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 291.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

MM. Michel Bouvard, Lasbordes et Estrosi ont présenté un amendement, no 260, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Le sixième alinéa de l'article 151 septies du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Des règles prévues aux articles 150 A et 150 J pour les biens non amortissables et les terres à usage agricole et forestier. »

« II. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Le régime de taxation des plusvalues constitue un frein en raison de son caractère discriminatoire et des effets de seuil et de périmètre qu'il comporte.

Le régime d'imposition des plus-values sur l'ensemble des éléments d'actif non amortissables doit être revu dans le sens d'une plus grande homogénéité avec le système des plus-values immobilières privées pour les entreprises passibles de l'impôt sur le revenu. Ces dispositions ne s'appliqueraient qu'aux entreprises exerçant une activité commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 du code général des impôts.

Outre le fait que ce régime comporte une réduction de l'impôt proportionnelle à la durée de détention du bien avec exonération automatique au-delà d'une certaine période, il permet de tenir compte de l'érosion monétaire et de ne pas taxer une plus-value nominale.

Par ailleurs, ce régime comporte des exonérations qui correspondent parfaitement à la situation des très petites entreprises : exonération des plus-values réalisées sur des biens détenus depuis plus de vingt-deux ans selon le dispositif issu de la loi de finances rectificative pour 1993, ce qui permettrait d'exonérer les exploitants qui prennent leur retraite après avoir exercé durablement leur activité ; exonération des mutations à titre gratuit de façon simple ; abattements spécifiques aux expropriations et opérations assimilées ou exonération, sous condition de réemploi dans l'achat d'un ou plusieurs biens de même nature dans un délai de six mois à compter de la date du paiement de l'indemnité en cas d'expropriation avec poursuite de l'activité.

Le calcul de l'impôt selon le système du quotient permet d'atténuer les effets de la progressivité de l'impôt sur le revenu. Cet impôt exigible serait plafonné au taux de l'impôt sur les plus-values à long terme réalisées par les particuliers et les moins-values suivraient le régime des moins-values professionnelles.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission n'a pas retenu cet amendement qui témoigne de la reprise dans le secteur immobilier. Il existe déjà un régime favorable d'exonération lorsque les recettes sont inférieures à un million de francs : taux réduit de 16 %, 26 % avec les contributions additionnelles. Pour cette raison, j'invite l'Assemblée au rejet.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le Gouvernement ne peut pas être favorable à cet amendement qui tend à introduire une exception dans le dispositif d'imposition


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des plus-values professionnelles qui, sauf exception assez rare, sont déterminées à partir de la comptabilité de l'exploitant. Elles traduisent donc bien l'enrichissement.

L'application du régime des plus-values immobilières ce que vous proposez, monsieur Estrosi -, qui prévoit un dispositif d'indexation du coût de revient destiné à intégrer les effets de l'évolution des prix, un abattement annuel conduisant à une exonération au-delà de vingtdeux ans de détention et la mise en oeuvre d'une règle de quotient pour l'application du barème de l'impôt sur le revenu, serait totalement inadaptée. Les plus-values professionnelles n'ont pas à être comparées avec les plusvalues immobilières, dans la mesure où l'amortissement de ces dernières se fait sur une très longue période, ce qui a motivé le seuil de vingt-deux ans. L'indexation serait, d'ailleurs, contraire aux principes habituellement retenus pour tenir compte de l'érosion monétaire dont les conséquences sont forfaitairement prises en compte par l'imposition à un taux réduit - le rapporteur général vient de l'indiquer - et non pas au taux du barème progressif.

Il n'est pas de parallélisme possible entre les plus-values sur biens professionnels et les plus-values immobilières.

Pardonnez-moi, mais l'amendement me paraît donc assez peu logique. J'en demande le rejet.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 260.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je suis saisie de quatre amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 341 corrigé, présenté par M. Estrosi et M. Lasbordes, est ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Le I de l'article 154 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« I Pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux et des bénéfices des professions non commerciales, le salaire du conjoint participant effectivement à l'exercice de la profession peut, à la demande du contribuable, être déduit du bénéfice imposable dans la limite de trente-six fois le montant mensuel du SMIC. Ce salaire est rattaché, à ce titre, à la catégorie des traitements et salaires visés au V de la présente sous-section. »

« II. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 366, présenté par M. Gengenwin, est ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Le I de l'article 154 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« I Pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux et des bénéfices des professions non commerciales, le salaire du conjoint participant effectivement à l'exercice de la profession peut, à la demande du contribuable, être déduit du bénéfice imposable dans la limite de trente-six fois le montant du SMIC. Ce salaire est rattaché, à ce titre, à la catégorie des traitements et salaires visés au V de la présente sous-section. »

« II. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 263, présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Après les mots : "de la profession peut,", la fin de la première phrase du premier alinéa du I de l'article 154 du code général des impôts est ainsi rédigée : "sur demande du contribuable, être déduit du bénéfice imposable dans la limite de trente-six fois le montant mensuel du SMIC".

« II. Le deuxième alinéa du I de l'article 154 du code général des impôts est supprimé.

« III. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 3, présenté par MM. Charles, Rebillard et Rigal, est ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I A. Dans la première phrase du premier alinéa du I de l'article 154 du code général des impôts, la somme : "17 000 francs" est remplacée par les mots : "trente-six fois le montant du salaire minimum de croissance".

« I B. En conséquence, le deuxième alinéa du I de l'article 154 précité est abrogé.

« II. La perte de recettes est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Christian Estrosi, pour soutenir l'amendement no 341 corrigé.

M. Christian Estrosi.

Au moment où, de toute évidence, chacun, sur ces bancs, souhaite donner aux femmes toute la place qui doit leur revenir dans notre société, il me paraîtrait judicieux de retenir un amendement qui tend à permettre aux artisans de déduire du bénéfice imposable le salaire annuel versé à leur conjoint à hauteur de trente-six fois le montant mensuel du SMIC, ...

M. Jean-Pierre Balligand.

Trente-six fois le SMIC !

M. Jean-Pierre Brard.

Ça donne le vertige.

M. Christian Estrosi.

... sans condition de régime matrimonial ou d'adhésion à un centre de gestion agréé.

Cette mesure se justifie pleinement, eu égard à la place de plus en plus grande qu'occupent les femmes dans la vie active et dans le bon fonctionnement des petites entreprises. Par la même occasion, elle contribuera à la reconnaissance du travail des femmes au sein de l'entreprise.

M. Jean-Pierre Brard.

A ce prix-là, il s'agit de femmes entretenues ! (Sourires.)

M. Christian Estrosi.

Les femmes apprécieront, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard.

Nous ne fréquentons sûrement pas les mêmes ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Les amendements en discussion ne concernent que les non-adhérents aux centres ou associations de gestion agréés. Ils visent à leur accorder les mêmes facultés de déduction qu'aux adhérents, ce qui réduirait l'avantage de l'adhésion et ne répondrait pas du tout aux préoccupations de transparence et de justice fiscale qui sont les nôtres.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

L'adhésion n'est d'ailleurs pas une question de coût puisqu'elle procure des avantages fiscaux au titre de l'impôt sur le revenu. Il faut donc encourager les personnes ici visées à adhérer à des centres de gestion agréés.

Mme la présidente.

La parole est à M. Charles de Courson, pour défendre l'amendement no 366.

M. Charles de Courson.

Je ne relèverai pas les propos sexistes et vraiment indécents de notre collègue Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

De la part de M. de Courson, la remarque vaut son pesant de cacahuètes !

M. Charles de Courson.

Voilà qui montre que vous ne connaissez pas bien le monde de l'artisanat et des travailleurs indépendants. Il est vrai que, pour vous, le travail indépendant n'a pas la même valeur que le travail salarié.

M. Philippe Auberger.

C'est un archaïque !

M. Charles de Courson.

Venons-en aux choses sérieuses. Actuellement, la déduction autorisée pour le salaire du conjoint lorsque vous n'êtes pas adhérent à un centre de gestion agréé est d'un montant ridicule puisqu'elle est légèrement supérieure à mille francs par mois.

Mille francs par mois, monsieur Brard ! Selon le rapporteur général, il faut maintenir une différence de régime fiscal entre ceux qui adhèrent aux centres agréés et les autres. Mais si j'admets que cette position est justifiée sur le fond, doit-elle s'appliquer sur le salaire du conjoint ? Est-ce socialement équitable ? L'amendement de M. Gengenwin, comme celui de notre collègue du RPR, propose que le plafond de déductibilité soit le même. Trente-six fois le SMIC, c'est tout à fait correct converti en salaire mensuel. Nous voulons supprimer la discrimination infligée aux conjoints de travailleurs indépendants qui ne sont pas adhérents à un centre de gestion agréé.

M me la présidente.

L'amendement no 263, de M. Michel Bouvard, est-il défendu ?

M. Philippe Auberger.

Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente.

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement no

3.

M. Yves Cochet.

Au nom des députés radicaux du groupe Radical, Citoyen et Vert, je défends l'amendement de MM. Charles, Rebillard et Rigal qui tend également à relever à trente-six fois le SMIC le montant déductible du salaire du conjoint participant effectivement à l'exercice de la profession, lorsque les époux sont mariés sous le régime de la communauté. Limité à 17 000 francs, le montant n'a pas évolué depuis 1982, alors qu'il est plus important en cas d'adhésion à un centre de gestion agréé. En bref, l'amendement de mes collègues vise à établir une égalité de traitement entre les salariés en favorisant la reconnaissance du conjoint salarié.

Mme la présidente.

Monsieur le rapporteur général, désirez-vous apporter une explication supplémentaire ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je suis quelque peu surpris par les arguments. Nous devrions plutôt encourager l'adhésion à des centres de gestion agréés pour limiter les risques de fraude et l'absence de transparence.

Je maintiens donc l'avis que j'ai exprimé précédemment et j'invite au rejet.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Les deux limites, trente-six fois le SMIC et 17 000 francs, ne s'appliquent qu'aux époux mariés sous le régime de la communauté de biens. Dans cette situation, la communauté d'intérêts qui lie les deux époux est telle que le conjoint peut être considéré comme participant de fait à l'exploitation de l'entreprise et ayant une vocation à la propriété d'une quote-part des résultats réalisés.

La déduction du salaire qui lui est versé présente en fait le caractère d'une affectation du bénéfice et non pas d'une charge et apparaît comme une dérogation au principe de détermination du bénéfice imposable. Toute autre solution serait source, je suis certain que vous le comprenez, de contentieux et de difficultés d'application, les intéressés pouvant être tentés de surpayer leur conjoint pour diminuer le bénéfice taxable.

M. Charles de Courson.

Mais non !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

C'est la raison pour laquelle la législation est plus favorable lorsque l'entreprise a adhéré à un centre de gestion agréé car, dès lors, le contrôle des déclarations et des rémunérations peut être correctement assuré. Cette distinction est fondamentale, c'est une question de justice fiscale.

M. François Goulard.

N'importe quoi !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

C'est pourquoi je demande soit le retrait de l'amendement, soit son rejet.

Mme la présidente.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Je ne peux pas laisser passer vos propos sans réagir, monsieur le secrétaire d'Etat. Ce n'est pas possible !

M. François Goulard.

Inadmissible !

M. Charles de Courson.

Vous fondant sur le critère du régime matrimonial, la communauté de biens, vous nous dites qu'après tout ils s'enrichissent tous les deux. Et vous n'acceptez donc pas la déductibilité.

A trente-six fois le SMIC, la déductibilité équivaut mensuellement à trois fois le SMIC. Le plafond est porté à environ 18 000 francs nets par mois. Ce n'est pas un salaire fantastique ! Et la plupart en sont bien loin, qui sont payées péniblement au SMIC !

M. François Goulard.

Eh oui, votre argument est très mauvais, monsieur le secrétaire d'Etat !

M. Charles de Courson.

Par ailleurs, vous supposez que les ménages sont stables. Que se passera-t-il en cas de séparation, de divorce ? Vous me répondrez qu'il y aura un partage puisque nous sommes dans la communauté de biens. Le malheur, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est qu'un divorce, en général, ne se fait pas d'un coup. Dans l'intervalle, le commerce décline. Alors que reste-t-il à la femme ? Rien ! Il faut donc donner au conjoint un salaire qui sera traité du point de vue de sa déductibilité d'une façon homogène. D'ailleurs, une rémunération correcte de l'épouse sera déclarée dans les traitements et salaires, au lieu d'apparaître dans les BIC.

M. François Goulard.

Tout à fait ! Et il s'agit d'une rémunération soumise à des cotisations sociales.

M. Charles de Courson.

En effet. Votre argument ne tient donc pas, monsieur le secrétaire d'Etat. Nous demandons que le conjoint des travailleurs indépendants non adhérents à un centre de gestion agréé soit traité d'une façon correcte et homogène par rapport aux autres.

Sinon, poussez-les à divorcer pendant que vous y êtes ! Raisonnez deux minutes ! Supposez qu'ils soient divorcés ou vivant en concubinage,...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. François Goulard.

C'est la promotion du PACS !

M. Charles de Courson.

... il n'y a pas d'enrichissement. Vous poussez en quelque sorte au « concubinage fiscal », monsieur le secrétaire d'Etat, et je vais vous en décrire le mécanisme - très simple, au demeurant : il suffit de vivre en concubinage pendant votre vie professionnelle et, une fois au bout, votre entreprise vendue, vous vous mariez. L'affaire est réglée ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Balligand.

Pas si sûr ! (Sourires.)

M. Charles de Courson.

Monsieur le secrétaire d'Etat, il ne faut pas inciter nos concitoyens à choisir entre le régime matrimonial ou la vie commune pour des raisons fiscales.

M. Jean-Pierre Brard.

Nous ne vivons plus sous l'Ancien Régime !

M. Charles de Courson.

C'est si vrai que, quand j'ai obtenu la suppression de la demi-part supplémentaire pour les personnes censées élever seules des enfants, qui en fait vivaient maritalement, on a constaté 15 à 20 % d'augmentation des mariages !

M. Gilbert Gantier.

Eh oui !

M. Charles de Courson.

En d'autres termes, le c omportement de nos concitoyens est partiellement conditionné par les règles fiscales que nous posons.

M. Jean-Pierre Brard.

Que faites-vous de l'amour, monsieur de Courson ?

M. Charles de Courson.

Parlons-en de l'amour, monsieur Brard ! Pour votre malheur, il n'est pas encore inscrit dans le code général des impôts. On n'a pas encore réussi à taxer l'amour !

M. Jean-Pierre Brard.

Avec vous, il y a un risque ! (Sourires.)

M. Charles de Courson.

Avec vous plutôt ! Un jour, on taxera l'amour ! Déjà aujourd'hui, avec ces dispositions discriminatoires à l'égard des gens mariés sous le régime de la communauté, monsieur Brard, vous « taxez l'amour », comme vous dites ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Je n'ai rien à ajouter aux excellents arguments que vient de développer Charles de Courson. D'une façon pragmatique, monsieur le secrétaire d'Etat...

M. Jean-Pierre Brard.

Vous êtes un pratiquant, monsieur Gengenwin ! (Sourires.)

M. Germain Gengenwin.

J'ai déposé mon amendement après avoir assisté, la semaine dernière, à une réunion de femmes d'artisans d'Alsace, dont c'était le thème majeur.

Monsieur le secrétaire d'Etat, j'apprécie votre courtoisie et la finesse des arguments que vous avez développés. Vous parlez de justice fiscale, moi, je voudrais parler de justice tout court pour les femmes d'artisans. Ne cherchez pas d'autre explication, ce sont des femmes qui collaborent sincèrement à la vie de leur artisanat, et ce serait leur rendre justice que d'adopter cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République, et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Louis Dumont.

Pareil pour les femmes d'agriculteurs !

M. Philippe Auberger.

C'est le cri du coeur !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 341 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. François Goulard.

Les artisans apprécieront !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 366. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 263. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 3. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Goulard a présenté un amendement, no 213, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Le 4o du I de l'article 156 du code général des impôts est rétabli dans le texte suivant :

« 4o L'imputation exclusive sur les revenus fonciers n'est pas non plus applicable aux déficits fonciers correspondant à la location d'un ou plusieurs immeubles situés dans les départements du Finistère, du Morbihan, de la Loire-Atlantique et de la Vendée, enregistrés entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2004. »

« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création de t axes additionnelles sur les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Mon amendement se veut un geste de solidarité envers une catégorie de victimes de la marée noire qui a touché les côtes atlantiques au début de cette année. Il s'agit en l'occurrence des loueurs de meublés, nombreux dans les départements cités : ce sont généralement des personnes à revenus relativement faibles - pour beaucoup, des retraités -, qui n'ont pas pu, en raison des circonstances, louer leur bien cette année. Je propose que le déficit qui en résulte soit imputable sur l'ensemble des revenus. C'est une manière de manifester à cette catégorie, très touchée par le marée noire, une solidarité de l'ensemble de la nation.

M. Christian Cabal.

Très bien !

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Bien sûr, c'est un sujet sensible. L'amendement répond-il pour autant au problème ? Je n'en suis pas sûr. La commission des finances a trouvé que le dispositif était bien peu précis et sûrement excessif dans la mesure où il vise l'ensemble des départements littoraux.

E n outre, les possibilités actuelles d'imputation semblent pouvoir donner satisfaction, car elle permettent la prise en compte des déficits temporaires pour les personnes concernées. C'est pourquoi la commission des finances vous propose de rejeter cet amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

La mesure proposée ne répond pas à l'objectif que vise l'auteur de l'amendement, qui entend permettre aux loueurs en meublés


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

non professionnels de biens situés dans les départements énoncés dans la liste d'imputer en totalité sur leur revenu global les déficits relatifs à la marée noire. Or les revenus q ui proviennent des locations en meublés relèvent, conformément à une jurisprudence constante du Conseil d'Etat, de la catégorie des BIC et non de celle des revenus fonciers. L'amendement n'est donc pas du tout adapté à la situation. J'en demande le rejet.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 213. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

MM. Gantier, d'Aubert et Goasguen ont présenté un amendement, no 212, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Le II de l'article 156 du code général des impôts est complété par un 12o ainsi rédigé :

« 12o Les sommes versées au titre d'un emploi d'un salarié à domicile travaillant, en France, à la résidence du contribuable sont retenues dans la limite de 90 000 francs. »

« II. L'article 199 sexdecies du code général des impôts est supprimé.

« II. La perte de recettes est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles sur les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la suppression de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 sexdecies »

La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier.

Notre collègue Charles de Courson a apporté la brillante démonstration que les lois fiscales influent beaucoup sur la situation personnelle puisque l'on est taxé différemment selon que l'on est marié, pacsé ou divorcé... En l'occurrence, nous abordons des articles particulièrement savoureux du code des impôts, à savoir l'article 154 qui détermine le revenu imposable et l'article 199, qui nous ramène à notre latin d'école, puisqu'il s'agit de l'article 199 sexdecies ! Contrairement à ce que dit le docteur Knock, on pourrait s'endormir en lisant le code des impôts ! Cet amendement propose une simplification puisqu'il tend à remplacer le système de réduction d'impôt par un abattement à la base, pour l'emploi d'un salarié à domicile.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Depuis quelques années, nous avons l'habitude d'examiner cette proposition de notre collègue. Nous l'avons toujours refusée, estimant qu'il y avait une différence entre une incitation et un privilège fiscal.

M. Gilbert Gantier.

Perseverare diabolicum !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Il n'y a aucune raison de revenir sur nos choix. J'invite donc l'Assemblée à rejeter cet amendement.

M. François Goulard.

Et l'intérêt des familles ?

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le Gouvernement préfère toujours les crédits d'impôt aux déductions du revenu imposable.

M. François Goulard.

De tout petits crédits d'impôt !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

C'est une question de justice fiscale et de logique générale, ce qui me pousse à demander le rejet de l'amendement de M. Gantier.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 212.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Migaud, rapporteur général, MM. Emmanuelli, Bonrepaux et Idiart ont présenté un amendement, no 32 rectifié, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« Le 3 de l'article 158 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'abattement prévu au troisième alinéa n'est pas opéré pour les contribuables pour lesquels le taux prévu au dernier alinéa du I de l'article 197 est appliqué à la fraction supérieure du revenu. »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Il est proposé de supprimer l'abattement annuel sur certains revenus mobiliers, essentiellement des dividendes d'actions, lorsque le foyer fiscal est imposé au taux marginal de l'impôt sur le revenu. Cette proposition devrait apporter au budget de l'Etat 500 millions de francs supplémentaires. D'une part, en effet, nous nous interrogeons - je le précise dans le rapport général - sur l'efficacité de l'incitation fiscale.

D'autre part, nous souhaitons poursuivre dans la voie du rééquilibrage de la charge des prélèvements obligatoires entre les revenus du capital et ceux du travail. Notre proposition va dans ce sens.

Nous estimons qu'il convient de corriger, même si cela doit être progressif, la propension française à afficher des taux d'imposition apparents élevés tout en en limitant l'effet pratique par toutes sortes d'abattements, de réductions d'impôt ou d'exonérations. De ce point de vue, les dispositions qui rendent plus immédiatement perceptible la relation entre la définition du revenu imposable et l'impôt effectif sont à encourager.

Pour toutes ces raisons nous avons adopté une proposition qui contribue à un nouvel équilibre entre la fiscalité pesant sur les revenus du travail et celle relative aux revenus du capital.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le rapporteur général, et je m'adresse à travers vous à la commission des finances, le Gouvernement comprend l'intention qui vous a animé.

Je veux cependant souligner que la politique d'encouragement à l'investissement en actions est nécessaire dans notre pays.

M. Philippe Auberger.

Oh oui !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Celle qui est conduite en la matière par le Gouvernement n'est pas dirigée en priorité vers les 160 000 contribuables concernés par la mesure proposée car ils n'en ont pas nécessairement besoin pour décider d'investir en actions.

Dès lors la suppression des abattements de 8 000 à 16 000 francs sur les dividendes d'actions marque plus clairement l'orientation de la réforme en faveur de l'initiative, du travail et de l'investissement de l'épargne en actions. Je suis donc favorable à l'amendement.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi de souligner, avec toute l'amitié que je vous porte, que votre dernière sortie n'est pas très glorieuse ! Nous savons tous ici que cette proposition est le résultat d'une négociation.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Christian Cabal.

Eh oui !

M. François Goulard.

D'un marchandage !

M. Jean-Jacques Jégou.

J'ai d'ailleurs déjà eu l'occasion de le relever lors du débat sur l'épargne salariale, car vous semblez avoir pris l'habitude de ces discussions de marchands de tapis dans les couloirs, hors de l'hémicycle ou de la commission des finances ! M. Brard prétend que cela m'agace et que j'en serais jaloux.

M. Jean-Pierre Brard.

Oui !

M. Jean-Jacques Jégou.

Une telle attitude me paraît grave. Certes, comme vous venez de le souligner, les 160 000 foyers fiscaux visés sont peut-être privilégiés.

Cependant, au-delà du fait de « piquer » 500 millions à des gens qui ont les moyens, comme pourrait le dire M. Brard - et je ne cherche pas à faire larmoyer l'Assemblée sur leur sort -, il ne faut pas oublier que les intéressés, s'ils ont le souci légitime de faire fructifier leur capit al, veulent aussi participer au développement des entreprises françaises.

Chacun connaît le combat permanent que mène la place de Paris pour conserver son rang parmi les premières bourses mondiales. Il est d'ailleurs indispensable que, au sein même de l'Europe, cette place financière, avec tous ses attributs techniques, offre des avantages fiscaux de nature à intéresser les particuliers qui peuvent alimenter les marchés.

Résultat de la négociation idéologique qui a eu lieu cette nuit...

M. Christian Cuvilliez.

L'idéologue, c'est vous !

M. Jean-Jacques Jégou.

... pour permettre l'adoption de la diminution du taux de 54 % pour la tranche supérieure du barème qui reste en travers de la gorge de la gauche plurielle, cet amendement pénalisera la place de Paris, moins en lui-même que parce qu'il est un élément parmi d'autres. Je peux ainsi citer la non-revalorisation de l'ISF ou l'inclusion des oeuvres d'art dans son assiette, autant de signes presque caricaturaux qui sont mal perçus, au-delà de cet hémicycle, par tous ceux qui peuvent faire en sorte que Paris soit une place financière forte. Or la situation actuelle, avec la fragilité de l'euro et la baisse de la bourse, rebute déjà les Français qui pourraient s'intéresser aux actions.

Ce que nous avons fait dans la discussion du texte sur l'épargne salariale, difficilement et avec, encore, quelques aménagements de la gauche plurielle... Oui, monsieur Cochet ! Vous me regardez, mais c'est bien de vous qu'il s'agit !

M. Yves Cochet.

Je m'attendais à un qualificatif plus critique !

M. Jean-Jacques Jégou.

Non, parce que vous êtes sympathique par ailleurs ! Nous jouons avec une situation fragile. Connaissant votre sentiment sur cette affaire, monsieur le secrétaire d'Etat, je suis persuadé que vous êtes victime d'une négociation idéologique qui me paraît être de plus en plus ringarde. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Ecouter notre collègue JeanJacques Jégou en cette heure matinale, c'est à mourir de rire ! Plutôt que de nous intéresser aux actions, comme il vient de le dire, nous préférons accomplir de bonnes actions. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Jacques Jégou.

Il persiste et signe !

M. Jean-Pierre Brard.

Vous avez, cher collègue, une vue mercantile de la politique. Vous parlez d'échanges, de discussions de marchands de tapis. Ne projetez pas sur les autres ce que vous êtes vous-même.

M. François Goulard.

Décidément, plus c'est gros, plus ça passe.

M. Jean-Pierre Brard.

Nous, nous travaillons dans la transparence, monsieur Jégou, et nous n'échangeons rien.

(Rires sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Nous discutons simplement sur chaque point. C'est d'ailleurs le mérite de la majorité plurielle d'être à l'écoute de chacune de ses composantes.

Il est donc normal que le groupe des députés communistes et apparentés marque aussi de son empreinte la politique menée par le Gouvernement, ne vous en déplaise.

Il est vrai, et j'ai de la compassion pour vous à cet égard, monsieur Jégou, que lorsque vous fûtes député d'une majorité aujourd'hui disparue, vous ne bénéficiiez pas, à l'époque, d'une telle qualité d'écoute. D'ailleurs vous vous en êtes souvent plaint. Aujourd'hui, il en va différemment.

En l'occurrence il s'agit de mieux imposer les revenus du capital.

M. Jean-Jacques Jégou.

On avait compris !

M. Jean-Pierre Brard.

Vous savez bien, monsieur Jégou, que si l'on mettait tous les revenus sur la table, on constaterait que ceux du capital effacent, dans une large mesure, et parfois inversent, la progressivité de l'impôt.

M. Jean-Jacques Jégou.

Ils peuvent aussi être le produit du travail !

M. Jean-Pierre Brard.

Par conséquent, vos comparaisons avec l'étranger constituent des arguments complètement fallacieux. Il est vrai que vous avez des appuis à l'étranger, comme les Britanniques et les Luxembourgeois qui ont fait capoter la discussion au sommet d'Helsinki.

Cela étant, il faut considérer que cet amendement est un premier pas qui en appelle d'autres vers plus de transparence et vers une plus grande égalité dans la participation de tous, quelle que soit l'origine des revenus, à la solidarité nationale.

M. Jean-Jacques Jégou.

Le marché appréciera !

M. Jean-Pierre Brard.

Monsieur Jégou, vous répétez sans cesse : « Le marché, le marché, le marché ! » Il y a pourtant plus important : les hommes et les femmes qui composent notre pays. Ils ne doivent pas être les instruments du marché. Il faut, au contraire, faire en sorte qu'ils bénéficient des progrès de l'économie nationale dans laquelle le marché joue, évidemment, un rôle important.

Nous ne sommes pas des idéologues (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), au sens des idéologues de Prisunic (Sourires)...

M. Jean-Jacques Jégou.

Il y a longtemps que Marx se vend en livre de poche !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Jean-Pierre Brard.

... c'est-à-dire au sens où vous l'êtes, vous.

Nous avons des valeurs qui ne sont pas les seules valeurs cotées en bourse, pour lesquelles vous avez les yeux de Chimène.

M. François Goulard.

En effet, le totalitarisme n'a jamais été coté en bourse !

M. Jean-Pierre Brard.

Quand nous discutons dans cette enceinte, monsieur Jégou, nous pensons toujours à ceux qui nous y ont envoyés. De ce point de vue, nous ne sommes pas schizophrènes.

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est la méthode Coué !

M. Jean-Pierre Brard.

Nous adoptons, dans cette assemblée, une attitude qui correspond à ce que nous disons à nos électeurs dans nos circonscriptions. C'est d'ailleurs pour cela qu'ils vous ont renvoyés dans vos foyers en 1997.

(Rires et protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Goulard.

Non, nous sommes toujours là !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 32 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

L'amendement no 310 de M. Carrez n'est pas défendu.

M. Auberger a présenté un amendement, no 163, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Le I de l'article 163 octodecies A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 2000, la limite mentionnée aux deuxième et troisième alinéas est portée à 300 000 francs. »

« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

La parole est à M. Philippe Auberger.

M. Philippe Auberger.

J'ai déjà souligné que ce projet de budget ne comprenait aucune mesure en faveur des petites et moyennes entreprises, qu'il s'agisse de fonds propres ou d'aide à la création et, de façon plus générale, d'épargne à risque. La seule disposition en la matière, celle qui vient d'être votée par l'Assemblée, est défavorable à son développement.

Nous avons ainsi envoyé un très mauvais signe à nos concitoyens. Alors que, pour se développer, les entreprises ont besoin d'une épargne à risque, on la pénalise en supprimant un avantage qui lui était lié. Mon amendement a, au contraire, pour objet de favoriser l'épargne à risque en portant le plafond des versements en dessous duquel est accordée une déduction fiscale à 300 000 francs. En effet, il est actuellement trop bas et fréquemment atteint.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Les plafonds actuels ne semblent atteints que par un nombre restreint de contribuables. Il ne paraît donc pas opportun de prévoir un tel relèvement de leur niveau. C'est pourquoi la commission des finances vous demande de rejeter cet amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Je ne peux pas laisser passer l'analyse de M. Auberger qui prétend que le Gouvernement n'a rien fait pour l'épargne à risque.

En effet, c'est ce gouvernement, celui de M. Jospin, qui a créé les bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise pour les entreprises de moins de quinze ans ; c'est ce gouvernement qui a très largement détaxé le réinvestissement des plus-values réalisées à l'occasion de cessions de start-up , les jeunes pousses ; c'est ce gouvernement qui, par la création des incubateurs, d'un fonds de capital risque soutenu par la Caisse des dépôts et consignation et par un ensemble de dispositions favorables à la création d'entreprise, a appuyé la nécessité, tout à fait fondamentale dans une économie moderne, notamment vis-à-vis des nouvelles technologies, d'orienter l'épargne vers le risque, vers la constitution d'entreprises, vers la dynamique de croissance.

Monsieur Auberger, même en faisant de l'idéologie, vous ne réussirez pas à caractériser l'action du Gouvernement autrement qu'elle n'est, c'est-à-dire tournée vers la création d'entreprises, vers la croissance et vers le dynamisme économique. Telle est la réalité.

C'est pourquoi je demande instamment à l'Assemblée nationale de repousser des deux mains l'amendement de M. Auberger qui n'est pas digne d'une véritable conception de la dynamique économique et de la croissance aujourd'hui.

M. Philippe Auberger.

C'est excessif ! Et tout ce qui est excessif est insignifiant !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 163. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

MM. Baert, Idiart et Mme David ont présenté un amendement, no 195 corrigé, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Dans la dernière colonne de la première ligne du tableau du I de l'article 194 du code général des impôts, le chiffre : "1" est remplacé par les mots : "1,05 pour les trois premières tranches du barème".

« II. - Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par une majoration des droits visés aux articles 575 ou 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Jean-Louis Idiart.

M. Jean-Jacques Jégou.

Lequel a voté contre un amendement similaire hier soir ! (Sourires.)

M. Jean-Louis Idiart.

Ne tirez pas sur le pianiste, monsieur Jégou ! La personne vivant seule, qu'elle soit célibataire, divorcée ou veuve, et ne disposant que d'une part, assume de fait une fiscalisation rapidement significative, alors même qu'elle doit supporter un nombre « d'unités de consomm ation » proportionnellement plus important qu'un couple. En effet, les charges fixes de la vie à deux ne sont pas le double de celles d'une personne seule.

Les statisticiens de la consommation ont d'ailleurs depuis longtemps analysé les échelles dégressives de ces charges.

Le présent amendement tend à prendre en compte ce poids relatif plus important des charges fixes pour la personne seule en allégeant la fiscalité de celle-ci et en pla-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

fonnant la portée de cet allégement, en le limitant aux trois premières tranches de l'impôt sur le revenu, là où, dans l'échelle des revenus, les charges dites primaires de la vie - logement, nourriture, assurances, impositions locales - sont proportionnellement les plus lourdes.

Mme Nicole Bricq.

Très bien !

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Nous avons eu l'occasion d'évoquer cette question hier soir. Nous sommes certes sensibles à l'amendement proposé par nos collègues M. Baert et M. Idiart. Néanmoins, mais, pour les raisons que nous avons rappelées et compte tenu des efforts déjà consentis dans le cadre du projet de loi de finances - notamment avec les dispositions concernant la décote -, nous ne pensons pas qu'il faille retenir cet amendement.

J'invite donc nos collègues à le retirer, sinon je serai contraint d'appeler l'Assemblée à le rejeter.

M. Germain Gengenwin.

C'est très enveloppé !

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Ainsi que vient de le rappeler M. le rapporteur général, nous nous sommes déjà exprimés hier soir sur des amendements à peu près identiques, en tout cas qui procédaient du même esprit.

Je demande donc à ses auteurs de bien vouloir retirer cet amendement, puisque nous avons déjà exposé les arguments qui militaient contre son adoption.

Mme Nicole Bricq.

D'année en année, ce sont les mêmes arguments !

Mme la présidente.

Monsieur Idiart, retirez-vous votre amendement ?

M. Jean-Louis Idiart.

Monsieur le secrétaire d'Etat, nous vous avons écouté, tant hier soir que ce matin, comme nous avons déjà écouté vos prédécesseurs les années précédentes. Or nous estimons que l'on ne peut plus continuer sans adopter ce genre de mesures. Nous reconnaissons les efforts accomplis dans le projet de loi de finances, mais il va falloir que le Gouvernement prenne convenablement conscience de ce problème, afin que nous arrivions rapidement à une solution. Je suis prêt à retirer mon amendement, mais je souhaiterais que des engagements soient pris sur ce sujet pour la prochaine loi de finances.

M. Germain Gengenwin.

Voilà, il a fait son numéro et il retire l'amendement !

Mme Nicole Bricq.

Ce n'est pas un numéro. Nous sommes à l'Assemblée nationale, pas au théâtre !

M. Germain Gengenwin.

Si vous le dites !

Mme la présidente.

L'amendement no 195 corrigé est retiré.

M. Germain Gengenwin.

Et voilà.

M. Jean-Jacques Jégou.

Je reprends l'amendement.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est peut-être un peu désagréable pour vous, mon cher collègue Idiart ; mais je suis mieux placé que vous pour le défendre, puisque vous êtes, vous, obligé de caler...

M. Jean-Louis Idiart.

Vous avez déjà vécu cela dans une vie antérieure...

M. Jean-Jacques Jégou.

Qui sait ? En tout cas, quelquefois, la position d'opposant n'est pas la plus difficile.

Je puis en parler pour avoir vécu les deux situations.

Le problème est plus sérieux que les attaques personnelles. Je considère, permettez-moi de vous le dire avec beaucoup d'amitié puisque nous travaillons ensemble depuis plusieurs années, qu'à un moment donné la parole revient aux parlementaires.

M. Jean-Pierre Brard.

Voilà qui est bien dit !

M. Charles de Courson.

En théorie, c'est ainsi. C'est ce qui devrait être !

M. Jean-Jacques Jégou.

Dans une heure exactement, nous allons suspendre la séance pour discuter de la réforme de l'ordonnance de 1959. Cela contribuera peutêtre à faire reconnaître le rôle du Parlement.

M. de Courson a dit que les parlementaires étaient des boeufs. Le mot était peut-être à la fois un peu fort et pas assez imagé. Je dirai pour ma part que le Parlement français doit cesser d'être émasculé en permanence.

M. Jean-Pierre Brard.

Oh !

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est clair. Des problèmes de société aussi importants que celui dont nous discutons demandent que soient dépassés les clivages entre majorité et opposition, entre gauche et droite dans cet hémicycle.

Voilà pourquoi, madame la présidente, je reprends l'amendement. Comme j'ai déjà présenté hier soir des amendements similaires dans lesquels je proposais un quotient familial de 1,2 ou de 1,1 - en plafonnant l'avantage fiscal qui ne convenait pas à M. le secrétaire d'Etat -, je ne peux personnellement que reprendre l'amendement déposé par MM. Baert, Idiart et

Mme David, qui propose un quotient familial de 1,05.

Mon collègue et ami Charles de Courson va plafonner l'avantage fiscal en le sous-amendant.

Mme la présidente.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Conformément à ce que nous avons fait la nuit dernière, je propose de plafonner l'avantage fiscal à 4 800 francs.

Nous sommes d'accord sur le principe de votre amendement, monsieur Idiart, mais nous trouvons anormal que son montant ne soit pas plafonné. Ce faisant, vous favoriseriez les riches, comme dirait M. Brard.

(Sourires.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

Je n'ai pas entendu autrefois les mêmes propos moralisateurs que l'on nous tient ce matin sur le rôle du Parlement.

M. Charles de Courson.

Oh que si !

M. Augustin Bonrepaux.

Si nous raisonnons par rapport à ce qui a été fait dans le passé, force est de constater qu'aujourd'hui le Parlement arrive à imposer ses vues puisque nous avons fait adopter ce matin un amendement qui vous a déplu, monsieur Jégou et monsieur de Courson.

M. Jean-Jacques Jégou.

Le Gouvernement était d'accord.

M. Augustin Bonrepaux.

Dans cette réforme de l'impôt sur le revenu, nous avons essayé de régulariser un peu et de mieux harmoniser.

Contrairement à ce que dit M. Jégou, la commission des finances s'est prononcée et a même voté contre.

Donc, le Parlement s'est déjà prononcé par sa commission et j'appelle le groupe socialiste à voter contre.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

Mme la présidente.

Je mets aux voix le sous-amendement présenté verbalement par M. de Courson.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 195 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Olivier de Chazeaux.

M. Idiart a voté contre son propre texte !

Mme la présidente.

Je suis saisie de trois amendements, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 18, présenté par M. Emmanuelli, est ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans le deuxième alinéa de l'article 199 quarter C du code général des impôts, le taux : "30 %" est remplacé par le taux "50 %".

« II. Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par une majoration du tarif ment ionné à la dernière ligne du tableau de l'article 885 U du code général des impôts. »

L'amendement no 311, présenté par M. Carrez, est ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans le deuxième alinéa de l'article 199 quater C du code général des impôts, le taux : "30 %" est remplacé par le taux "50 %".

« II. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

L'amendement no 443, présenté par MM. Cuvilliez, Bocquet, Brard, Feurtet, Vila et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans le deuxième alinéa de l'article 199 quater C du code général des impôts, le taux : "30 %" est remplacé par le taux : "50 %".

« II. Les trois plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu sont relevées à due concurrence. »

La parole est à M. Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

L'amendement tend à porter de 30 à 50 % le montant de la réduction d'impôt applicable aux cotisations versées aux organisations syndicales, taux déjà appliqué pour de nombreux dons ou cotisations aux partis politiques.

En déposant cet amendement, j'ai voulu donner un signal, et un signal du Parlement, pour que soit pris en compte un problème pour lequel il me paraît devenu urgent de trouver une solution, celui du financement, qui devrait être un financement public des syndicats.

Notre pays a connu et continue malheureusement à connaître un certain nombre de péripéties liées au financement de la vie politique. Nous avons tous pu constater que la mise en place des financements publics avait changé les comportements et mis un terme à ce genre de mises en cause. En tout cas, ce devrait être le cas. Il n'y a plus de raison que ce ne le soit pas.

Personnellement, et je crois être bien placé pour pouvoir le dire, je ne souhaite pas que, dans un second temps, on observe les mêmes problèmes pour les syndicats.

Je sais qu'un certain nombre de centrales syndicales ont travaillé sur des projets. Ces projets, sauf erreur de ma part, ont été envoyés au Premier ministre. J'appelle de mes voeux la constitution au Parlement d'un groupe de travail sur ce sujet où tous les parlementaires qui le souhaiteront seront les bienvenus.

Je souhaite que cet amendement soit adopté pour marquer notre volonté de nous saisir du problème. Son coût, monsieur le secrétaire d'Etat, est assez élevé : entre 100 et 200 millions de francs, selon le plafonnement retenu. Il m'a été suggéré de retirer cet amendement et de le représenter en deuxième partie de la loi de finances...

M. Jean-Jacques Jégou.

Il sera toujours aussi cher !

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Non !

Il ne pèsera pas sur l'équilibre du présent budget, monsieur Jégou !

M. Charles de Courson.

Mais sur celui de l'année prochaine !

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Il s'appliquera en 2002 et sera supporté par les impôts levés sur les revenus de 2001. Il surgit cette année de manière un peu impromptue. Repousser son application à l'année prochaine donne l'occasion au Gouvernement, je le comprends tout à fait, de prévoir dans le prochain budget l'inclusion de cette dépense non négligeable.

S'il faut le retirer, monsieur le secrétaire d'Etat, pour le représenter en deuxième partie, je m'exécuterai. Je crois que vous avez entendu le sens de ma démarche et compris que la discussion ne faisait que débuter.

Mme la présidente.

La parole est à M. Philippe Auberger, pour soutenir l'amendement no 311.

M. Philippe Auberger.

Le financement des syndicats en France pose, c'est certain, un problème. Je rejoins donc tout à fait l'analyse du président Emmanuelli. Il peut se produire également ici ou là un certain nombre de dérapages dans l'utilisation stricte des fonds de la formation professionnelle ou d'autres fonds. Il est donc nécessaire d'assainir les finances des syndicats et la mesure proposée va dans ce sens.

Cela dit, vous pourriez penser que nous allons nous rallier à l'amendement de M. Emmanuelli. Mais le gage qu'il propose ne peut pas nous convenir. La majorité refuse déjà de réviser le barème de l'impôt de solidarité sur la fortune. Il ne faut pas en rajouter : vouloir majorer la dernière tranche a un côté provocateur et établit un faux équilibre entre la partie positive et la partie négative de l'amendement. C'est pour cette raison que l'amendement de M. Carrez me semble préférable.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement no 443.

M. Jean-Pierre Brard.

Nous adhérons complètement aux propos du président Emmanuelli. La vie démocratique a un coût et il faut s'en expliquer clairement devant l'opinion publique. Cela vaut aussi bien pour les partis politiques que pour les organisations syndicales. De ce point de vue, qui peut contester qu'il faille aider, dans un pays où le dialogue social est insuffisant, le fonctionnement des organisations syndicales, des bourses du travail par exemple ?

Il arrive qu'au moment de contrôles de légalité, les subventions accordées par des municipalités aux bourses du travail soient remises en cause. Il s'agit alors plus d'un contrôle d'opportunité que d'un contrôle de légalité, car il est illégitime de contester l'attribution de ces subventions aux bourses du travail et le faire dénote une position idéologique particulière.

Il faut donc réfléchir sur ce problème. Notre amendement rejoint celui de M. Emmanuelli et celui de M. Carrez, même si le mode de financement proposé donne le


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

grand frisson à nos collègues de droite. Mais l'essentiel n'est pas là. L'essentiel est qu'il y ait un consensus pour un financement transparent des organisations syndicales.

M. Philippe Auberger.

La vente du muguet le 1er mai ne suffit pas ?

(Sourires.)

M. Charles de Courson.

Le muguet, ce n'est plus ce que c'était...

M. Jean-Pierre Brard.

Ce que nous proposons dans notre amendement n'est qu'un premier pas.

Pour ce qui nous concerne, nous ne retirerons pas notre amendement parce que le Parlement doit s'exprimer sur le sujet. Nous verrons quel destin il aura.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission des finances a bien évidemment adhéré au raisonnement de son président.

M. Philippe Auberger.

Et à la cotisation !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Le financement de la démocratie sociale est un vrai sujet de débat. Un certain nombre de demandes ont été exprimées par les organisations syndicales auprès du Premier ministre. Il conviendra que le Gouvernement y apporte des réponses et le Parlement devra en être saisi.

La mesure proposée par le président Emmanuelli et un certain nombre de nos collègues me paraît devoir être reprise, d'autant plus qu'elle va dans le sens d'une harmonisation que nous avons votée l'année dernière au profit des dons pour des associations.

M. Germain Gengenwin.

Pourquoi est-il toujours si difficile de dire clairement que l'on est pour ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

En fait, seules les cotisations syndicales étaient déductibles à 30 %. La mesure proposée relève donc à la fois de la logique et de la justice.

Si la commission des finances a souhaité que cet amendement soit déposé en seconde partie, c'est tout simplem ent parce qu'il doit concerner les revenus de l'année 2001. Son coût immédiat pose également un problème mais il est plus logique que ce soit à partir du 1er janvier de l'année prochaine que la mesure puisse s'appliquer.

Etant entendu que la commission des finances a pris l'engagement de présenter et d'adopter la mesure proposée en seconde partie, j'appelle les auteurs des amendements à les retirer, comme vient de le faire le président Emmanuelli, afin d'éviter une apparence de division au sein de notre assemblée alors même que nous sommes d'accord sur le fond.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le Gouvernement est, comme la majorité, très attaché à ce que l'exercice des droits syndicaux puisse se réaliser dans de bonnes conditions de financement et d'indépendance. C'est pourquoi il souscrit pleinement à l'esprit qui inspire les amendements présentés.

Toutefois, le président de la commission des finances a fait une objection qui apparaît au Gouvernement essentielle : introduire cette disposition en première partie de loi de finances va à l'encontre, et à une hauteur qui n'est pas supportable - 200 millions de francs - la réalisation de l'équilibre budgétaire.

C'est pourquoi, puisque nous sommes d'accord sur le contenu de ces amendements, sur la philosophie qui les inspire, puisque vous savez que le Premier ministre et le Gouvernement souhaitent vraiment faciliter l'exercice du droit syndical et le faire dans de bonnes conditions de financement, je demande aux auteurs des amendements de bien vouloir les retirer pour les reprendre en deuxième partie de loi de finances.

Chacun, je pense, comprendra les impératifs d'équilibre financier au même titre que le Gouvernement mesure bien la dynamique politique qui a inspiré la demande des auteurs des amendements.

Mme la présidente.

Monsieur Emmanuelli, retirezvous votre amendement ?

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Oui, madame la présidente.

Mme la présidente.

L'amendement no 18 est retiré.

Mme la présidente.

Monsieur Auberger, retirez-vous l'amendement de M. Carrez ?

M. Philippe Auberger.

Je ne peux pas, madame la présidente.

Mme la présidente.

Monsieur Brard, retirez-vous votre amendement ?

M. Jean-Pierre Brard.

Pour nous, le problème ne se pose pas en termes d'argent. Nous avons gagé notre amendement. L'enjeu est beaucoup plus important que 200 millions. Qu'est-ce que 200 millions de francs au regard de 1 600 milliards de francs ? Une broutille ! Surtout que, si vous suivez notre proposition de revaloriser les tranches supérieures de l'impôt sur le revenu, cela rapportera bien davantage. Là n'est pas le problème.

Mais, si j'ai bien compris ce que vous dites, monsieur le secrétaire d'Etat, et je vous regarde pour vérifier...

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Droit dans les yeux ?

M. Jean-Pierre Brard.

... droit dans les yeux, vous prenez clairement l'engagement que la mesure envisagée sera présentée en seconde partie et qu'elle s'appliquera pour la déclaration des revenus concernant l'année 2001. Si tel est bien le cas, nous avons satisfaction, il n'y a pas de raison d'en rajouter. Nous retirons donc notre amendement no 443.

Mme la présidente.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Au nom du Gouv ernement, je prends l'engagement de satisfaire en deuxième partie du projet de loi de finances, à la demande de M. Brard comme à celle du président Emmanuelli.

Mme la présidente.

L'amendement no 443 est donc retiré.

L'amendement de M. Carrez est-il toujours maintenu ?

M. Philippe Auberger.

Oui, madame la présidente.

M. Jean-Pierre Brard.

Ce sont des syndicalistes forcenés ! (Sourires.)

M. Christian Cuvilliez.

Ils ne soutiennent que les organisations représentatives !

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

De quoi avez-vous peur, monsieur Cuvilliez ? Que la mesure soit adoptée ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Charles de Courson.

Auraient-ils peur de la démocratie ?

M. Germain Gengenwin.

Ça paraît bizarre !

M. Jean-Jacques Jégou.

Une fois de plus, monsieur le président Bonrepaux - et je vous le dis en toute amitié -, le Parlement se fait ballotter au gré des souhaits du Gouvernement. Nous venons d'assister à un véritable numéro de contorsionnisme de la part de la majorité plurielle.

M. Germain Gengenwin.

Eh oui ! Encore un.

M. Jean-Jacques Jégou.

Pour ma part, je défends l'amendement Carrez pour une raison bien simple.

M. Jean-Pierre Brard.

Par conviction !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Il n'y aurait pas eu d'amendement Carrez sans l'amendement Emmanuelli.

M. Jean-Jacques Jégou.

D'abord parce que la réduction d'impôt applicable aux dons versés aux partis politiques s'élève à 50 %. Pardonnez-moi, monsieur le président Emmanuelli, mais je vous trouve très modeste. Ne venez-vous pas de cosigner un amendement qui, adopté, va rapporter 500 millions de francs. D'ailleurs, M. Brard vous y a poussé.

M. Jean-Pierre Brard.

Il n'en a pas besoin.

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis désolé, mais vous nous prenez pour des enfants.

Comment voulez-vous nous faire admettre qu'inscrire en dépenses 200 millions en première partie de la loi de finances est absolument insupportable, impossible ? Nous allons nous battre sur le fond. L'argumentation de Philippe Auberger a du poids puisqu'il s'exprime en tant qu'ancien rapporteur spécial de la formation professionnelle. Moi-même, j'ai apporté, vous le savez, une contribution importante au gouvernement de l'époque en vérifiant les comptes d'un certain nombre d'associations bien connues. Les sommes en cause étaient bien supérieures à 200 millions puisque ces petites fantaisies ont rapporté plusieurs milliards au Trésor public.

Il faut savoir, comme l'a dit Germain Gengenwin qui lui aussi connaît parfaitement le domaine de la formation professionnelle, que le prélèvement sur la formation des organisations syndicales est de 2 % et qu'il s'effectue souvent, comme Philippe Auberger l'a excellemment dit, dans l'opacité la plus totale.

Je considère que l'amendement Carrez, identique, au gage près, à celui de M. le président Emmanuelli et à celui de votre groupe, monsieur Brard, pourrait parfaitement être adopté en première partie. Que son coût atteigne 200 millions de francs reste d'ailleurs à prouver puisqu'il était question de 100 millions tout à l'heure, et qu'on est passé à 200 millions en un éclair.

Le gage figurant dans l'amendement Carrez me paraît plus convenable que celui prévu dans les autres amendements. On continue à taper sur les mêmes ! D'ailleurs, c'est par provocation que M. Brard propose de financer le fonctionnement des syndicats par une majoration des tranches d'impôts les plus élevées !

M. Jean-Pierre Brard.

Eh oui, financer par les riches !

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est bien une provocation.

Voilà pourquoi, madame la présidente, nous soutenons l'amendement de Gilles Carrez.

M. Germain Gengenwin.

C'est nous qui soutenons le financement des syndicats. Un comble !

Mme la présidente.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

Les motivations de chaque côté de l'hémicycle ne me semblent pas être les mêmes.

Dans le passé et encore récemment, nous n'avons pas vu l'opposition se préoccuper beaucoup du sort et du rôle des syndicats.

M. Charles de Courson.

Et voilà, il y a les bons et les méchants !

Mme Nicole Bricq.

Pour les 35 heures, par exemple !

M. Charles de Courson.

Et l'UNEDIC ? Vous, vous êtes pour l'étatisation !

M. Augustin Bonrepaux.

En ce qui nous concerne, ce ne sont pas des réflexions comptables, monsieur le secrétaire d'Etat, qui doivent motiver notre réflexion.

Nous sommes profondément décidés à adopter cette mesure et vous nous avez donné l'assurance, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'elle serait adoptée en seconde partie de la loi de finances.

Quel est l'objectif ? C'est bien de favoriser l'adhésion aux syndicats.

Annoncer dès aujourd'hui que, l'an prochain, les cotisations seront déductibles va certainement développer l'adhésion. Et nous le souhaitons vivement, c'est notre objectif. Pourquoi dès lors un dispositif qui n'aura pas le même effet ? Vos motivations et vos explications sont tellement alambiquées...

M. Jean-Jacques Jégou.

Pas plus que les vôtres !

M. Augustin Bonrepaux.

... qu'elles ne doivent pas être tout à fait honnêtes.

M. Philippe Auberger.

Et maintenant, des propos insultants !

Mme la présidente.

La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Monsieur Jégou, il y a vingt minutes à peine, vous avez fait une longue déclaration sur le respect dû au Parlement, sur la nécessité de renforcer son rôle, sur la réunion qui nous attend, à onze heures trente, à propos de l'ordonnance de 1959. Croyez-vous que ce sont ces petites agaceries tactiques qui vont rehausser le rôle du Parlement ? J'ai déposé un amendement. Vous l'avez jugé intéressant, et vous l'avez copié, c'est bien. Maintenant, on vous explique, en posant un problème de fond, celui du financement public des syndicats, qu'il passera en seconde partie et qu'il s'appliquera à partir de janvier 2001. Que vous faut-il de plus ? Nous sommes en train de déraper. Cessons de jouer à nous faire peur et à celui qui est le plus beau ! Ce n'est pas ainsi qu'on restaurera le rôle du Parlement et qu'on améliorera son image ! Je vous demande donc de retirer votre amendement, sinon je voterai contre, ce qui serait stupide puisque c'est moi qui suis à l'origine de cet amendement.

Au cas où vous n'auriez pas bien compris, je répète qu'à partir de janvier 2001 on déduira 50 % de la cotisation au lieu de 30 %. Vous verrez qu'entre-temps, il se sera passé bien des choses. Et ce sera bien ce gouvernement et cette majorité qui l'auront fait. Je ne sache pas que vous vous soyiez préoccupé de ce problème à l'époque où vous aviez les moyens de le faire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

L'amendement no 311 est-il retiré ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Philippe Auberger.

Non, madame la présidente.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 311.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

MM. Gantier, d'Aubert et Goasguen ont présenté un amendement, no 216, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans la deuxième phrase du premier alinéa du I de l'article 199 quater D du code général des impôts, la somme : "15 000 francs" est remplacée par la somme "30 000 francs".

« II. La perte de recettes est compensée par la création de taxes additionnelles sur les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier.

Du fait de la diminution de la réduction pour emploi de proximité et de l'AGED ainsi que du plafonnement des allocations familiales, notre amendement propose d'augmenter la réduction d'impôt accordée au titre des frais de garde des jeunes enfants, réduction qui bénéficiera aux contribuables qui font appel à une assistante maternelle mais aussi à ceux qui mettent leurs enfants dans une crèche.

L'amendement porte de 15 000 à 30 000 francs la déduction prévue à l'article 199 quater D du code général des impôts.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission a rejeté l'amendement, souhaitant s'en tenir à l'équilibre actuel entre les différents avantages fiscaux attachés à chaque mode de garde d'enfant.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. Le Gouvernement demande également le rejet, car l'avantage fiscal aujourd'hui limité à 15 000 francs par enfant peut se cumuler avec la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, qui pourra, par exemple, assurer la garde des enfants à la sortie de la crèche et exécuter aussi différentes tâches ménagères.

Monsieur Gantier, deux dispositifs aident les parents.

Votre amendement aurait un coût de l'ordre de 600 millions de francs. Il serait raisonnable de prendre en considération l'équilibre actuel, qui résulte d'ailleurs de déci-s ions de la majorité plurielle, et qui nous paraît satisfaisant.

M. Christian Estrosi.

Vous sacrifiez les familles et les enfants !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 216.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

MM. Michel Bouvard, Lasbordes et Estrosi ont présenté un amendement, no 262, ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 199 decies E du code général des i mpôts, les sommes : "250 000 francs" et "500 000 francs" sont remplacées par les sommes : "350 000 francs" et "700 000 francs".

« II. Les pertes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

C'est en ma qualité de député d'une circonscription de tourisme de montagne que je défends cet amendement.

En effet, notre activité touristique répond mal à la demande, notamment des familles nombreuses, mais aussi d'une clientèle qui souhaite une certaine qualité de confort qu'elle a de plus en plus de mal à trouver, parce que les investisseurs, à cause du plafonnement de la déduction fiscale pour les résidences de tourisme à objet locatif n'investissent, que sur des studios ou au maximum des deux-pièces. Il en résulte que notre parc locatif ne propose plus sur le marché, depuis quelques années, de trois pièces, de quatre pièces, encore moins de maisons.

C'est la raison pour laquelle je vous le propose, dans le but de relancer ce type d'investissements...

M. Yves Cochet. ... et de bétonner la montagne ! M. Christian Estrosi. ... et par là même de relancer notre activité touristique, ce qui générera forcément des recettes fiscales nouvelles, un amendement tendant àr emonter les plafonds de l'incitation fiscale de 250 000 francs à 350 000 francs pour les célibataires et de 350 000 francs à 700 000 francs pour les couples.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ? M. Didier Migaud rapporteur général.

La commission des finances n'a pas voté cet amendement. Mais nous sommes d'autant plus sensibles à la préoccupation qu'il exprime - et je l'ai dit en commission à notre collègue, Michel Bouvard - qu'avec Augustin Bonrepaux et JeanLouis Idiart, nous sommes à l'origine de ce dispositif.

C'est vous dire si nous le suivons avec attention. Je crois d'ailleurs qu'il commence à donner de bons résultats.

Se pose maintenant la question de son éventuelle extension à d'autres zones, ce qui pourrait remettre en cause la priorité que nous avons souhaité affirmer en faveur des zones de revitalisation rurale. Quant aux plafonds de l'incitation fiscale, je reconnais qu'ils posent une petite difficulté. En effet, le tourisme que nous souhait ons encourager est essentiellement, dans les zones concernées, un tourisme familial, pour des couples avec trois ou quatre enfants. Inciter à la création ou à la réalisation de petits appartements peut dont apparaître paradoxal.

Nous y réfléchissons et nous souhaitons poursuivre la discussion avec le Gouvernement sur ce point. Une proposition sera peut-être faite dans la deuxième partie du budget pour lever au moins partiellement cette difficulté.

Nous voulons, avant tout, disposer d'un premier bilan d'un dispositif dont les premiers résultats, je le répète, sont encourageants.

Compte tenu de ces arguments, je vous demande, monsieur Estrosi, de retirer votre amendement. Sinon j'appellerai notre assemblée à voter contre, tout en réaffirmant que nous nous préoccupons du problème et que nous avons la volonté d'apporter des corrections au dispositif.

M. Jean-Louis Idiart. Très bien !

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. Les plafonds actuels de 250 000 francs et 500 000 francs étaient bien adaptés à l'objectif poursuivi par M. Bonrepaux et par le rapporteur général lorsqu'ils ont introduit cette disposition dans la loi de finances rectificative de 1998.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

Il s'agit en l'occurrence d'un tourisme familial. Vous avez pris, monsieur Estrosi, l'exemple des stations de montagne. La taille des appartements concernés permet de les situer dans des tranches de prix qui sont bien couvertes par le droit fiscal aujourd'hui. Il ne paraît pas nécessaire d'aller plus loin, l'essentiel étant de mobiliser l'épargne pour l'investissement dans les stations de tourisme, plus que de faire grimper aux avantages fiscaux une sorte d'échelle de perroquet ! Faisons vivre l'amendement Bonrepaux. Nous verrons, dans quelques années, s'il est nécessaire d'aller plus loin.

Pour l'instant il est tout à fait satisfaisant.

Mme la présidente.

La parole est à M. Auguste Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

Comme le rapporteur général, je pense qu'il faut poursuivre la réflexion pour améliorer le dispositif. Mais, de même que pour l'amendement sur les syndicats, si nous le faisions maintenant, quel bénéfice en tirerait l'investissement puisque les décisions ont été prises et les dépenses effectuées ? En 2001 seront votés les impôts sur les sommes engagées en 2000.

Finalement nous accorderions un avantage fiscal pour des investissements déjà réalisés. L'objectif est d'encourager les investissements futurs. Une telle disposition n'a donc rien à faire en première partie. En revanche, en seconde partie, nous pourrons l'envisager. Je souhaite moi aussi que l'amendement soit retiré.

Mme la présidente.

Monsieur Estrosi, retirez-vous votre amendement ?

M. Christian Estrosi.

Non, madame la présidente. Je comprends mal le raisonnement des uns et des autres et, surtout, je constate que cet amendement met en difficulté la commission et le Gouvernement.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Pas du tout ! Nous ne vous avons pas attendus pour voter le dispositif !

M. Christian Estrosi.

Ils reconnaissent qu'il est particulièrement fondé, mais ils ne souhaitent pas lui donner satisfaction, préférant proposer eux-mêmes d'autres solutions auxquelles ils n'avaient pas, bien sûr, réfléchi jusqu'à présent ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Philippe Auberger.

Le plagiat habituel !

M. Christian Estrosi.

Si je vous reconnais le mérite, m onsieur Bonrepaux, puisque vous le revendiquez, d'avoir pris cette initiative, reconnaissez-nous celui d'avoir institué les zones de revitalisation rurale qui vous ont servi d'appui.

Nos initiatives se sont complétées pour redynamiser le monde rural et favoriser son développement touristique.

Nous avions l'opportunité - et nous vous tendions la perche aujourd'hui - d'améliorer le dispositif pour permettre à des investisseurs potentiels d'anticiper, d'ores et déjà, sur les investissements futurs. Pourquoi remettre à demain ce qu'on peut faire aujourd'hui ? C'est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement et puisque, en somme, vous le trouvez logique, je vous propose de l'adopter.

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je ne comprends pas l'obstination de certains de nos collègues.

M. Philippe Auberger.

Les élus de la montagne sont obstinés !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Nous avons beaucoup travaillé en faveur du développement de la montagne, mais d'un développement maîtrisé, durable, comme le dirait notre collègue Yves Cochet.

M. Yves Cochet.

Attention !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

En plus, il s'agit de la moyenne montagne, les zones qui nécessitent une protection particulière ne sont absolument pas concernées. C'était donc un amendement - je le dis amicalement à Yves Cochet - totalement maîtrisé qui avait d'ailleurs recueilli l'accord de l'ensemble des parties prenantes au sein du Gouvernement. En tout cas, il ne remet pas en cause la protection de l'environnement.

Mais, si nous l'adoptions en première partie, il créerait un effet d'aubaine formidable...

M. Augustin Bonrepaux.

Ça leur plaît, l'effet d'aubaine !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... et plus aucune incitation en faveur de ce dispositif. Votre attitude, chers collègues, est tout à fait démagogique.

Nous avons proposé ce dispositif il y a deux ans. Jusqu'à présent, il vit bien. Sans doute est-il possible de lui apporter quelques corrections, mais sûrement pas cette année !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 262.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M me la présidente.

MM. Cochet, Aschieri, Mme Aubert, M. Mamère et M. Marchand ont présenté un amendement, no 150, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - A. - Dans le premier alinéa du I de l'article 199 terdecies0 A du code général des impôts, après le mot : "souscriptions", sont insérés les mots : "directes ou indirectes au travers d'unes tructure intermédiaire (société d'investissement, club d'investissement, indivision)".

« B. - Ces dispositions s'appliquent à compter de l'imposition des revenus de 2000. »

« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Yves Cochet, qui va sans doute nous dire deux mots du développement durable.

M. Yves Cochet.

Dans le débat qui vient d'avoir lieu sur l'amendement précédent, et dans lequel je n'ai pas voulu intervenir, certains arguments n'ont pas été développés. Pourtant, je les ai entendus déjà au moment de la loi SRU notamment, à propos de laquelle on peut parler d'un certain « grignotage » de la loi montagne et de la loi littoral.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Pas du tout.

M. Yves Cochet.

On peut craindre, hélas ! que cet amendement ne soit une incitation - je vais prononcer les grands mots ! - au « bétonnage » de la montagne, comme d'autres amendements visent à bétonner le littoral.

M. Augustin Bonrepaux.

Ne soyez pas excessifs !

M. Yves Cochet.

Monsieur Bonrepaux, je m'adresse à vous ainsi qu'à d'autres élus de la montagne, M. Bouvard, M. Estrosi ou M. Ollier, ou même M. le rapporteur général.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

J'ai lu des rapports savants qui anticipent sur ce qui pourrait se passer dans les quinze à vingt ans à venir, en disant qu'il ne faut surtout pas investir dans les stations de sports d'hiver - dans les appartements ou les maisons à la montagne - car la neige va fondre ! Déjà les glaciers fondent, conséquence de l'effet de serre. Et, même s'il ne s'agit que d'un demi-degré ou d'un degré en moyenne, il y aura moins de neige dans nos montagnes, dans les Pyrénées comme dans les Alpes ! Il sera donc moins rentable de construire des stations de sports d'hiver ! Ou bien il faudra aller dans l'Himalaya !

M. Jean-Louis Idiart.

N'importe quoi !

Mme la présidente.

Il faudrait en revenir à l'amendement no 150, monsieur Cochet !

M. Yves Cochet.

C'était un préambule, madame la présidente, j'implore votre clémence.

Je souhaite, chers collègues, vous parler de l'économie solidaire en présentant deux amendements nos 150 et 149, qui ont trait à ce domaine, d'ailleurs pas si nouveau.

L'économie solidaire concrétise l'idée que l'on peut travailler autrement : ni dans une logique commerciale, ni dans une logique administrative. En effet, elle participe à l'émergence de nouvelles formes de développement local, plus respectueuses de l'environnement et plus soucieuses d'un usage raisonné des ressources du territoire. Finalem ent, l'économie solidaire, c'est du développement durable.

Plus récemment, l'économie solidaire a croisé la problématique de l'exclusion et a fait naître une autre vague d'initiatives plus centrées vers la création d'emplois pour des personnes qui en sont dépourvues. L'approche reste originale : l'économie solidaire ne considère pas les publics en difficulté, les chômeurs, les exclus, comme des bénéficiaires de politiques publiques de subvention, mais comme des acteurs potentiels de leur propre devenir.

L'accent est mis sur l'auto-organisation, la recherche d'emplois stables, la mutualisation des expériences, mais aussi - et c'est là le sujet des deux amendements - sur l'accès à des financements pérennes et, bien sûr, sur l'interaction des initiatives avec leur environnement. Toutes ces actions collectives ont pour trait commun le combat en faveur d'un droit à l'initiative - je me tourne vers nos amis de l'UDF -, mais de la part de gens qui sont actuellement privés de ce droit et de ces possibilités financières.

En effet, quelle banque installée, classique, va prêter à un chômeur qui veut créer son entreprise ?

M. Charles de Courson.

Une banque solidaire, bien sûr !

M. Yves Cochet.

Bien sûr ! Moi-même, je suis sociétaire de la Caisse solidaire du Nord-Pas-de-Calais, qui prête 50 000, 100 000 francs à un chômeur pour créer, par exemple, une régie de quartier de réparation de vélos, mais il y a mille autres exemples.

Comment peut-on aider les placements dans l'économie solidaire ? Actuellement, la souscription directe au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés industrielles, artisanales ou commerciales, non cotées et non soumises à l'IS, ouvre droit à une réduction d'impôt de 25 %, sous certaines limites. En revanche, la souscription indirecte, via des structures intermédiaires - je le disais, je suis sociétaire de la Caisse solidaire du NordPas-de-Calais, que certains d'entre vous connaissent peutêtre - n'ouvre pas droit à réduction d'impôt. Cela pénalise ce vecteur d'investissement qui, pourtant, peut donner un coup de pouce à ces créateurs d'emplois.

L'amendement vise donc l'équité fiscale. Il s'agit d'appliquer le même traitement fiscal à l'investissement direct et à l'investissement indirect dans les sociétés non cotées.

Mme la présidente.

L'amendement no 149 des mêmes auteurs, a été défendu par par M. Cochet, en même temps que l'amendement no 150. Il est ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Le II de l'article 199 terdecies0 A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 2001 au bénéfice des entreprises contribuant à l'insertion, au développement local et à l'économie solidaire, les limites mentionnées au I sont portéesr espectivement à 75 000 francs et à 150 000 francs. »

« II. - Les catégories d'entreprises concernées sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

« III. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Monsieur Cochet, les zones dont vous avez parlé qui ne correspondent pas aux zones de revitalisation rurale, qui sont tout à fait spécifiques et méritent une considération particulière et quelques encouragements pour qu'y soit organisé un tourisme de qualité et respectueux de l'environnement.

M. Yves Cochet.

Un tourisme vert !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Mais oui ! Un tourisme vert et durable ! (Sourires.)

En ce qui concerne les amendements, la commission des finances, bien évidemment attentive et sensible aux propositions de notre collègue, souhaite que tout le secteur de l'économie sociale et de l'économie solidaire puisse effectivement être développé. Nous avons d'ailleurs eu l'occasion d'en discuter dans le cadre du texte relatif à l'épargne salariale, où un certain nombre de dispositions ont été adoptées.

Toutefois, ces amendements n'ont pas été adoptés par la commission. En effet, une instruction fiscale permet déjà aux particuliers qui investissent dans le cadre des indivisions et des clubs d'investissement constitués entre personnes physiques sous forme d'indivision ou même de société civile de bénéficier de la réduction d'impôts.

L'amendement n'apporte rien sur ce point. Introduire une précision dans la loi pourrait même constituer un facteur de complexité par rapport à la position actuelle de la doctrine.

En deuxième lieu, admettre au bénéfice de la réduction d'impôts les investissements réalisés dans le cadre de ces sociétés d'investissement implique de prévoir un certain nombre de conditions quant à la détention du capital de ce type de société - celui-ci devant être uniquement détenu de la manière la plus directe possible par des personnes physiques - et quant à la composition de l'actif de la société d'investissement. l apparaît que ce dispositif doit mûrir quelque peu ou tout au moins faire l'objet d'une réflexion complémentaire.

En dernier lieu, la proposition de notre collègue s'insère dans un ensemble destiné au financement de l'économie solidaire. Certes, il serait intéressant d'étendre, comme le propose l'amendement no 149, le bénéfice de la


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

réduction d'impôts aux investissements dans les entreprises solidaires. Mais la nécessité d'insérer cette disposition dans un ensemble plus vaste implique de prolonger la discussion et la réflexion et, peut-être, d'envisager, le cas échéant, de la reprendre dans un autre cadre. Donc, si notre collègue était d'accord avec cette démarche, et puisque nous lui confirmons notre sensibilité sur ce point, je lui proposerai de retirer cet amendement. Sinon, je serai dans l'obligation de demander à notre assemblée de le rejeter.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Il s'agit bien d'une réduction d'impôts accordée aux souscriptions en numéraire au capital de sociétés non cotées. J'essaie de recentrer le débat, de manière certes moins durable, sur une question purement fiscale. Car j'ai parfois, personnellement, du mal à suivre l'évolution du concept de durabilité.

M. Yves Cochet.

C'est comme les énergies renouvelables, monsieur le secrétaire d'Etat !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Mais M. Cochet me l'explique souvent et j'essaie de faire des progrès ! Les souscriptions réalisées en indivision par des personnes physiques ou par des clubs d'investissement euxmêmes en indivision - structures souples capables de mobiliser l'épargne de proximité - bénéficient de la réduction d'impôts dont vous parlez dans votre amendement, monsieur Cochet. De ce point de vue, la législation actuelle satisfait déjà, je le crois, votre demande.

Disons-le tout de go, le Gouvernement n'est pas favorable à une extension générale de la réduction d'impôts à t outes les souscriptions en capital de sociétés qui prennent elles-mêmes des participations dans des sociétés non cotées - ce qu'on appelle des investissements intermédiés. Une telle mesure aurait un coût élevé pour une efficacité assez incertaine.

En revanche, monsieur Cochet, une mesure plus ciblée, relative par exemple au financement des entreprises solidaires, qui vous sont chères, à vous comme à nous, pourrait être examinée avec bienveillance.

M. Yves Cochet.

Ah !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Pour une raison de calendrier, elle ne doit pas trouver sa place, de l'avis du Gouvernement, dans le cadre de la loi de finances, car la notion d'entreprise solidaire ne sera définie juridiquement que dans la future loi sur l'épargne salariale. Nous y travaillons d'ailleurs en étroite concertation avec le groupe RCV et avec l'ensemble de la majorité.

Je propose donc, monsieur Cochet, de retenir l'esprit de votre amendement, esprit que partage le Gouvernement, et je vous suggère de retirer l'amendement pour que nous puissions en reparler lors d'une prochaine lecture du projet de loi sur l'épargne salariale.

Mme la présidente.

Monsieur Cochet, retirez-vous vos deux amendements ?

M. Yves Cochet.

Les propos de M. le rapporteur général et de M. le secrétaire d'Etat laissent présager une évolution positive du débat sur ces deux points. Nous y reviendrons en deuxième ou en dernière lecture du projet de loi sur l'épargne salariale. La définition des entreprises solidaires peut encore évoluer. On a vu par exemple que la question de l'éventail des salaires n'a pas été réglée de manière très claire, je me souviens notamment de l'amendement de M. Terrasse portant sur ce point. Si l'on peut davantage cibler cette réduction d'impôts sur les entreprises solidaires au sens qui sera défini par l'article 9 de la future loi relative à l'épargne salariale, et si ces deux amendements peuvent trouver leur place dans ce cadre, je les retire, madame la présidente.

Mme la présidente.

Les amendements nos 150 et 149 sont retirés.

Je suis saisie de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 162, présenté par M. Auberger, est ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Après le II de l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts, il est inséré un paragraphe II bis ainsi rédigé :

« II bis . - Pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 2001, les limites mentionnées au premier alinéa du II sont portées respectivement à 100 000 francs et 200 000 francs.

« La réduction de l'impôt sur le revenu est égale à 50 % des souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de société non cotées.

« Toutefois, l'avantage fiscal s'applique lorsque les conditions visées au I sont remplies. »

« II. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

L'amendement no 217, présenté par M. Gantier et M. Goasguen, est ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Après le II de l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis . - Dans le premier alinéa du II de cet article, pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 2001, les limites mentionnées sont portées respectivement à 100 000 francs et 200 000 francs.

« La réduction de l'impôt sur le revenu est égale à 50 % des souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés non cotées.

« Toutefois, l'avantage fiscal s'applique lorsque les conditions visées au I du présent article sont remplies. »

« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

La parole est à M. Philippe Auberger, pour soutenir l'amendement no 162.

M. Philippe Auberger.

Tout à l'heure, M. le secrétaire d'Etat a tenté une brillante démonstration pour nous convaincre qu'il s'occupait activement du financement des petites et moyennes entreprises. Mais, il y a deux jours, le ministre de l'économie et des finances lui-même a reconnu qu'il existait un problème de l'offre en France et qu'il fallait absolument soutenir le financement des investissements. Nul ne peut ignorer que ce dernier est surtout problématique dans les petites et moyennes entreprises, qui manquent de fonds propres. En fait, on tourne un peu autour du pot, alors qu'il y a là des besoins urgents à satisfaire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. le secrétaire d'Etat se vantait d'être à l'origine de mesures éclatantes dans ce domaine. Or, jusqu'à présent, une seule mesure a véritablement fonctionné. Ce ne sont pas les bons de souscription d'actions qui fonctionnent de façon extrêmement limitée, c'est la mesure dite « Madelin », de 1994, qui permet une réduction d'impôts sur les souscriptions faites en faveur des petites et moyennes entreprises. Mais cette réduction est très sévèrement plafonnée. Le Gouvernement a certes reconnu qu'il s'agissait d'une bonne mesure, puisqu'il a prorogé son application, qui était limitée dans le temps, mais il n'a pas modifié les plafonds. Mon amendement vise donc à les modifier afin que la réduction d'impôts soit plus forte pour ceux qui acceptent de prendre des risques relativement importants dans les petites et moyennes entreprises.

Mme la présidente.

La parole est à M. Gilbert Gantier, pour soutenir l'amendement no 217.

M. Gilbert Gantier.

Cet amendement a le même objet que celui de M. Auberger. Il s'agit, dans le prolongement de la loi Madelin, qui a eu un effet tout à fait bénéfique pour les petites et moyennes entreprises, d'actualiser les plafonds qui sont aujourd'hui trop limités.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Effectivement, monsieur Auberger, le dispositif a été prorogé. Toutefois, la commission des finances considère que les taux et les plafonds actuels sont adaptés, en tout cas que les plafonds ne sont pas saturés. C'est pourquoi elle souhaite en rester au dispositif actuel.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Même avis que le rapporteur général.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 162.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 217.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je suis saisie de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 164 corrigé, présenté par M. Auberger, est ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. - Le 1 du I de l'article 199 terdecies A du code général des impôts est ainsi rédigé :

«

1. Les salariés d'une entreprise qui souscrivent en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital intervenant dans les quatre ans qui suivent la date de constitution d'une société nouvelle ayant pour objet exclusif de racheter tout ou partie du capital de leur entreprise peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt égale à 12 % des versements afférents à leurs souscriptions. Ces versements doivent intervenir dans les quatre ans suivant la date de constitution de la société. Les dispositions du 5 du I de l'article 197 sont applicables.

« Un salarié ne peut bénéficier de l'avantage mentionné à l'alinéa précédent que pour les souscriptions au capital d'une seule société. »

« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

L'amendement no 218 corrigé, présenté par M. Gantier, est ainsi libellé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« I. Le 1 du I de l'article 199 terdecies A du code général des impôts est ainsi rédigé :

«

1. Les salariés d'une entreprise qui souscrivent en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital intervenant dans les quatre ans qui suivent la date de constitution d'une société nouvelle ayant pour objet exclusif de racheter tout ou partie du capital de leur entreprise peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt égale à 12 % des versements afférents à leurs souscriptions. Ces versements doivent intervenir dans les quatre ans suivant la date de constitution de la société. Les dispositions du 5 du I de l'article 197 sont applicables. »

« II. La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

La parole est à M. Philippe Auberger, pour soutenir l'amendement no 164 corrigé.

M. Philippe Auberger.

A l'opposé du dispositif dont nous venons de parler à l'occasion des deux précédents amendements, le régime du rachat des entreprises par les salariés a, lui, disparu. Pourtant, il était intéressant. Ce régime était favorable aux salariés, mais il faut reconnaître que le rachat d'une entreprise est extrêmement risqué pour eux.

La suppression de ce régime n'a certes pas été très significative, dans la mesure où il y a eu peu d'occasions de rachat d'entreprises par les salariés ces dernières années. Toutefois, on remarque un regain d'intérêt pour ces rachats, en raison de l'amélioration de la conjoncture.

Tout récemment, des salariés qui souhaitaient racheter leur entreprise n'ont cependant pas réussi à trouver les fonds nécessaires. Cette entreprise va être démantelée. Il est vrai que ce rachat était problématique étant donné que cette entreprise était importante : elle comptait 5 000 salariés.

La situation devient donc très urgente. C'est pourquoi il est nécessaire de favoriser à nouveau le rachat des entreprises par les salariés.

Mme la présidente.

La parole est à M. Gilbert Gantier, pour soutenir l'amendement no 218 corrigé.

M. Gilbert Gantier.

Il s'agit d'accorder un avantage fiscal aux salariés qui rachètent leur entreprise. De telles initiatives ont été fréquentes et il convient de les aider.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Des mécanismes permettent déjà de favoriser la reprise d'une entreprise par ses salariés, la constitution d'une société holding, par exemple.

Par ailleurs, la réduction d'impôts dite Madelin, que nous venons d'évoquer, répond à peu près aux mêmes besoins. La commission des finances a donc repoussé ces amendements.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

J'ai déjà exprimé la position du Gouvernement sur l'amendement déposé par M. Carrez il y a quelques minutes. Celui-ci procédant de la même démarche, il encourt la même appréciation négative de la part du Gouvernement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 164 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 218 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Dans quelques minutes une réunion qui vous concerne tous. La suite de la discussion est donc renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

Mme la présidente.

Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique : Discussion de l'article 28 du projet de loi de finances pour 2001, no 2585 (évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes) : M. Gérard Fuchs, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 2 du rapport no 2624) ; Mme Marie-Hélène Aubert, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères (tome I de l'avis no 2626) ; Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à onze heures vingt.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT