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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

SOMMAIRE

PRE

SIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

1. Proclamation de députés (p. 7339).

2. Questions au Gouvernement (p. 7339).

E

LECTIONS PRE

SIDENTIELLES EN CO TE D'IVOIRE (p. 7339)

MM. Henri Emmanuelli, Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

FARINES ANIMALES ET ESB (p. 7340)

MM. Joseph Parrenin, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

BOURSES D'ENSEIGNEMENT SUPE

RIEUR ET RMI (p. 7341)

M. Albert Facon, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

APPLICATION DES 35 HEURES DANS LES PME (p. 7341)

M. Yves Deniaud, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

SÉCURITÉ ALIMENTAIRE (p. 7343)

MM. Didier Julia, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

TERRORISME (p. 7343)

MM. Renaud Muselier, Lionel Jospin, Premier ministre.

PLAN DE SOINS INFIRMIERS (p. 7344)

M. Emile Blessig, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

INTERDICTION DES FARINES ANIMALES (p. 7345)

M. Claude Gatignol, Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

RETRAITES ET CMU (p. 7346)

M. Patrice Carvalho, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

DIFFICULTE S DE LA PESC (p. 7347)

MM. Michel Suchod, Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

ENCE PHALOPATHIE SPONGIFORME BOVINE (p. 7348)

M. Jean-Michel Marchand, Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

3. Loi de finances pour 2001 (première partie). Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 7349).

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 7350)

MM. François d'Aubert, Jean-Louis Idiart, Philippe Auberger, Christian Cuvilliez, Pierre Méhaignerie, Michel Suchod.

VOTE SUR L'ENSEMBLE DE LA PREMIE RE PARTIE (Application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution) (p. 7355)

Adoption, par scrutin, par un seul vote, des dispositions ayant fait l'objet de la seconde délibération et de l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2001.

Suspension et reprise de la séance (p. 7355)

PRE SIDENCE DE Mme NICOLE CATALA

4. Ordre du jour de l'Assemblée (p. 7356).

5. N omination d'un député en mission temporaire (p. 7356).

6. Nouvelles régulations économiques. - Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire (p. 7356).

7. Loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Discussion d'un projet de loi (p. 7356).

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour les recettes et l'équilibre général.

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance maladie.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance vieillesse.

Mme Marie-France Clergeau, rapporteure de la commission des affaires culturelles, pour la famille.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

8. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 7373).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

PROCLAMATION DE DÉPUTÉS

M. le président.

J'ai reçu, en application de l'article L.O. 179 du code électoral, une communication de M. le ministre de l'intérieur, en date du 23 octobre 2000, m'informant que le 22 octobre 2000, ont été élus députés : Député de la neuvième circonscription de la SeineMaritime, M. Patrick Jeanne (A ce moment, M. Patrick Jeanne entre dans l'hémicycle. - Mmes et MM. les députés du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert se lèvent et applaudissent.)

Député de la deuxième circonscription du territoire de Belfort, M. Jean-Pierre Chevènement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Je suis particulièrement heureux, mes chers collègues, de leur souhaiter la bienvenue...

M. Pierre Lellouche.

Surtout vous ! (Sourires.)

M. le président.

... en mon nom et au nom de l'Assemblée.

2

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

Mes chers collègues, je vous indique dès à présent que la séance ne sera pas suspendue à la fin des questions au Gouvernement. Nous passerons immédiatement aux explications de vote et au vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2001.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par le groupe socialiste.

ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES EN CÔTE D'IVOIRE

M. le président.

La parole est à Henri Emmanuelli.

M. Henri Emmanuelli.

Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères ou à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

L'Afrique tient une place particulière dans l'histoire et dans les préoccupations des Français. Bien qu'elles soient p artielles, les informations en provenance de Côte d'Ivoire nous laissent penser que M. Laurent Gbagbo a gagné les élections présidentielles. Si nous avions le moindre doute à ce sujet, il suffirait d'observer que le général Gueï a fait entourer le siège de la commission électorale par les forces armées pour interrompre ses travaux, décision de nature à lever toute hésitation sur l'issue du scrutin.

Ma question sera donc très simple : est-ce que la France et, au-delà, l'Europe, aujourd'hui présidée par la France, feront pression pour le rétablissement de la démocratie en Côte d'Ivoire avec la même vigueur qu'elles sont su le faire en Serbie ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Monsieur le député, la Côte d'Ivoire traverse en effet des heures graves. Depuis hier, les projecteurs sont braqués sur Abidjan, et en particulier sur les locaux qui abritent la commission nationale électorale.

Dimanche, les Ivoiriens étaient appelés à élire leur président. Ici même, nous avions dit notre espoir que ce scrutin, par ses conditions de déroulement, de dépouillement et de publication des résultats, puisse constituer une étape essentielle dans le retour de la Côte d'Ivoire à la démocratie. Hier soir, nous pouvions penser que cet espoir était en passe d'être satisfait : le calme avait présidé à l'organisation du scrutin ; le taux de participation était satisfaisant, bien qu'affaibli par les mots d'ordre d'abstention ou de boycott du PDCI et du RDR, partis qui avaient été écartés de l'investiture à la présidence ; l'entourage de M. Laurent Gbagbo faisait état d'une avance importante de celui-ci dans de nombreuses régions et les premiers résultats publiés par la commission nationale électorale confirmaient ces chiffres annoncés par anticipation. Pour une estimation qui portait sur 3,5 millions d'inscrits, sur les 5 millions que compte la Côte d'Ivoire, l'avance, selon les amis de M. Gbagbo, était telle que les chiffres non encore connus ne pouvaient plus désormais inverser le résultat.

Nous étions donc en mesure de penser qu'aujourd'hui le général Gueï pourrait déclarer son rival élu. Or nous avons appris que les choses ne se présentaient pas ainsi, que la commission nationale électorale avait suspendu ses travaux hier soir - vous avez rappelé dans quelles conditions - et que le général Gueï avait présenté un recours en annulation des résultats, laissant à la Cour suprême le soin de statuer en définitive.

La question majeure est celle du respect de la volonté du peuple ivoirien. La France et ses partenaires européens - nous avons évidemment commencé d'en parler avec eux - feront tout ce qui est possible pour que cette volonté soit respectée. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)


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FARINES ANIMALES ET ESB

M. le président.

La parole est à M. Joseph Parrenin.

M. Joseph Parrenin.

Monsieur le ministre de l'agriculture, le débat sur la maladie de la vache folle est relancé par une triste affaire. Dimanche dernier, un négociant en bestiaux a été écroué. Il est soupçonné d'avoir dissimulé l'état de santé d'une vache atteinte d'ESB, de l'avoir retirée en fraude de son troupeau d'origine, lequel a été conduit à l'abattoir le 4 octobre puis vendu à la chaîne Carrefour.

Dès le 7 octobre, Carrefour a commercialisé une partie de cette viande bovine dans trente-neuf de ses supermarchés. Heureusement, dès la découverte de la malversation, le groupe a réagi avec célérité en retirant tous les stocks de la vente et en publiant la liste des points de vente concernés.

La lutte contre la maladie de la vache folle a entraîné en France des mesures sévères et un grand déploiement de moyens. Malgré les difficultés rencontrées pour mener cette lutte, le Gouvernement a toujours fait preuve d'une très grande vigilance, grâce à laquelle cette fraude a pu être mise au jour. La manière dont elle a été découverte prouve que les tests de dépistage, les contrôles et le système de traçabilité sont d'une grande efficacité.

Hélas ! cette affaire intervient alors qu'il y a une semaine à peine, les farines animales se trouvaient une fois de plus sur la sellette, après que l'on se fut aperçu que des traces de farines carnées étaient encore tolérées par la direction des fraudes dans l'alimentation des bovins. La peur s'est à nouveau installée non seulement dans la population, mais aussi chez les éleveurs, totalement démunis et aujourd'hui victimes de ce nouveau scandale.

Face à ces événements, il faut encore amplifier nos efforts, car l'ESB représente une réelle menace pour la santé publique, même si rien n'est aujourd'hui quantifiable. De plus, ces scandales à répétition causent du tort à l'ensemble de notre filière alimentaire qui, dans sa grande majorité, participe à cette lutte.

M onsieur le ministre, le Gouvernement entend-il prendre de nouvelles mesures pour renforcer le contrôle de la production d'aliments du bétail, élargir le dépistage de la maladie et accentuer les recherches faites sur l'ESB ? S aisissant l'opportunité de la présidence française, compte-t-il entraîner l'ensemble des pays de l'Union européenne à faire preuve de grande vigilance et à suivre,e n particulier, l'exemple français ? Enfin, comment comptez-vous rassurer l'opinion ? Pour en finir une fois pour toutes avec cette maladie et ces incertitudes, n'est-il pas temps d'interdire les farines animales pour l'alimentation des animaux, comme le souhaitent un grand nombre de consommateurs ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur le député, vous avez posé plusieurs questions, auxquelles je vais essayer de répondre aussi rigoureusement que possible.

Tout d'abord, je veux vous dire, de la manière la plus claire et la plus solennelle, que les farines animales sont interdites en France pour l'alimentation des bovins et qu'il n'y a, à cet égard, aucune tolérance. Quand on trouve des traces de farine animale dans des aliments destinés à des bovins, il y a bien, j'y insiste, une tolérance zéro du point de vue du droit. Simplement - et sans doute la confusion vient-elle de là - les appareils scientifiques de mesure, les densimètres notamment, laissent subsister des marges d'erreur. Si l'on reste à l'intérieur de ces marges d'erreur, on signifie à l'entreprise qu'elle doit respecter l'interdiction ; au-dessus, on transmet le dossier à la justice. Mais les farines animales sont strictement interdites, depuis plusieurs années, pour l'alimentation des bovins.

Que s'est-il passé il y a quelques jours en Normandie ? A l'entrée d'un abattoir, les services vétérinaires ont repéré une vache qui leur semblait malade. Ils l'ont retirée de la chaîne destinée à l'abattage et lui ont fait subir des tests qui se sont révélés positifs, d'abord les tests rapides, puis les test référents. Jusque-là, par conséquent, tout a bien fonctionné.

Ensuite, comme on le fait systématiquement quand on découvre une vache atteinte par l'ESB, on a recherché le troupeau pour l'abattre dans sa totalité. Mais là, première

« tuile », si j'ose dire, le troupeau avait disparu, l'éleveur en question ayant décidé de cesser son activité.

L'enquête se poursuit et - deuxième tuile - on constate qu'il avait vendu son troupeau à un négociant, dont le comportement a éveillé les soupçons de la justice.

Je n'en dis pas plus ; la justice est saisie et ce n'est pas à moi de dire quelles sont les responsabilités.

Troisième tuile, enfin, ce négociant avait vendu les vaches depuis plusieurs jours, parfois plusieurs semaines, et certaines avaient été abattues, ce qui rendait la récupération plus difficile. Cependant, grâce à l'aide de tous les intervenants - auxquels je veux rendre hommage - nous avons pu récupérer la plus grande partie de cette viande.

Je tire de cet incident quelques premières leçons.

D'abord, les services de l'Etat ont très bien fonctionné.

Je veux rendre hommage en particulier aux services vétérinaires, qui ont parfaitement joué leur rôle, notamment pour l'inspection ante mortem (Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants), et je suppose, messieurs les députés de l'opposition, que, quand il faudra renforcer ses moyens, vous m'y aiderez. (Exclamations sur les mêmes bancs.) Ensuite, quelle que soit la réglementation en ce domaine, et la réglementation française est une des plus draconniennes au monde ; quels que soient les contrôles mis en place, et les contrôles français sont parmi les plus rigoureux du monde, il doit être clair que nous ne serons jamais à l'abri d'une légèreté, voire d'une malversation ou d'une fraude. Aucun gouvernement ne peut à lui seul le garantir, nous avons besoin de la mobilisation de tous les professionnels.

Troisième leçon, enfin, dans la mesure où nous sommes engagés dans un programme très ambitieux de 48 000 tests, qui nous permet d'aller chercher la maladie là où, vraisemblablement, elle se trouve, nous repérons plus de cas que quand nous nous bouchions les yeux comme d'autres pays le font encore trop souvent. Malheureusement, il nous faut désormais vivre avec ces révélations permanentes qui donnent l'impression que la maladie se répand, alors que ce n'est sans doute pas le cas et qu'il se trouve simplement que nous la connaissons mieux.

Cela étant, il est de notre responsabilité collective d'aller encore plus loin dans les leçons que nous devons tirer de tels incidents, et le Gouvernement y est fermement déterminé.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

D'ores et déjà, je peux vous dire que le champ du programme de tests en cours sera élargi dans les toutes prochaines semaines, de façon à ce qu'il porte, de manière aléatoire, sur la viande destinée à l'alimentation à l'entrée des abattoirs et que l'on ait une meilleure connaissance encore de l'épidémie à ce niveau.

Quant aux farines animales, hormis quelques médias ou associations, personne à ce jour n'en a réclamé l'interdiction pour les autres animaux, ni les scientifiques de l'AFSSA ni la commission d'enquête parlementaire réunie sous la présidence de Félix Leyzour.

M. Paul Patriarche.

Elle a eu tort !

M. le président.

Monsieur le ministre, ayez l'obligeance de conclure.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Cela étant, le Gouvernement est prêt à ouvrir ce débat. Il demandera à l'AFSSA, dans les prochains jours, une évaluation rigoureuse des risques liés au maintien des farines animales dans l'alimentation des porcins et de la volaille.

Dès aujourd'hui, il lance une étude sur les solutions alternatives à leur emploi.

Soyez assuré, monsieur le député, que nous voulons aller dans le sens que vous souhaitez, dans la plus grande clarté et la plus grande transparence.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

BOURSES D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET RMI

M. le président.

La parole est à M. Albert Facon.

M. Albert Facon.

Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, en 1988, la première loi votée à l'Assemblée nationale eut pour objet la création du revenu minimum d'insertion et nous sommes nombreux, sur ces bancs, à l'avoir soutenue.

(« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Jamais, dans l'esprit du législateur, il n'a été question d'amputer le montant du RMI des parents de la bourse d'enseignement supérieur que touche un de leurs enfants.

Or le décret du 12 décembre 1988 prévoit que les bourses d'études des enfants à charge ne sont pas prises en compte dans la détermination des ressources du foyer, à l'exception des bourses d'enseignement supérieur.

Certaines caisses d'allocations familiales sortent de l'esprit de la loi et appliquent ce décret. Dans le Pas-deCalais, un homme se bat et a entamé une grève de la faim depuis plusieurs semaines pour lutter contre cette injustice. Sa fille vient d'entrer en faculté et ne touchera pas les 21 000 francs de sa bourse car celle-ci viendra en déduction du RMI de ses parents.

Pour 20 881 allocataires du RMI que l'on dénombre dans le même secteur, 178 jeunes seulement vont en faculté, c'est-à-dire moins de 1 %. Dans ces conditions, il est très difficile, voire impossible, à un enfant de RMIste de suivre des études supérieures.

Au nom de ces jeunes et de la majorité de mes coll ègues, notamment Catherine Génisson, Marcel Cabiddu...

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Ne les citez pas tous, monsieur Facon !

M. Albert Facon.

Ce sont les élus du Pas-de-Calais et même de ce secteur, monsieur le président.

En leur nom, madame la ministre, je vous demande instamment de supprimer cette injustice. La plus belle insertion, pour un enfant de famille défavorisée, est de pouvoir accéder à l'enseignement supérieur.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, dès ma nomination au ministère de l'emploi et de la solidarité, vous m'avez alertée sur cette situation...

M. Thierry Mariani.

Et Aubry, qu'est-ce qu'elle faisait ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... et en particulier sur le cas très douloureux de ce père de famille qui a entamé une grève de la faim.

Le décret prévoit effectivement que les familles allocataires dont les enfants bénéficient d'une bourse d'enseignement supérieur voient le montant de leur RMI réduit de celui de la bourse, ce qui n'est pas le cas pour les bourses versées aux plus jeunes, élèves des collèges et des lycées, qui, elles, sont cumulables sans limite avec le revenu minimum d'insertion.

Pourquoi cette réglementation ? Pour se conformer à la règle de non-cumul du RMI et d'un autre revenu, versé en l'occurrence par l'éducation nationale.

M. Thierry Mariani.

Aubry n'a rien fait !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le même système s'applique d'ailleurs pour les revenus que les jeunes tirent d'une quelconque activité, contrat d'apprentissage ou contrat de travail classique. Il s'agissait en réalité, dans le cadre de la règle de non-cumul, de choisir la situation la moins défavorable à un jeune en situation d'autonomie.

Néanmoins, nous ne pouvons pas accepter que ces situations perdurent. Par conséquent, nous allons revoir la réglementation sur le RMI, pour que ces personnes aux revenus très modestes, dont les enfants doivent avoir, comme les autres, la chance d'aller à l'université, puissent dorénavant toucher le RMI et sa majoration, tout en b énéficiant d'une bourse d'enseignement supérieur.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous reprendrons une question du groupe socialiste à la fin de la séance, s'il nous reste du temps.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

APPLICATIONS DES 35 HEURES DANS LES PME

M. le président.

La parole est à M. Yves Deniaud.

M. Yves Deniaud.

La question que je pose au nom des trois groupes de l'opposition, RPR, UDF et DL (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert - Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) s'adresse à M. le Premier ministre.

La semaine dernière, vous avez qualifié de « mesquine » la question d'un de mes collègues de l'opposition sur le bilan de Mme Martine Aubry. Vous auriez été bien ins-


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piré d'orienter votre regard vers les vôtres, car, à peine Mme Aubry a-t-elle tourné les talons, que son oeuvre monumentale sur les 35 heures fait l'objet de sévères mises en doute quant à son application aux petites et moyennes entreprises. C'est ainsi que la Banque de France, qui souhaite une souplesse appropriée, apparaît mesurée au regard des déclarations de certains de vos ministres.

Cela dit, il serait temps que le bon sens l'emporte et que l'on accorde aux petites et moyennes entreprises, déjà en butte à des difficultés de main-d'oeuvre et de hausse de leurs coûts, de quoi franchir le renchérissement et la surcharge administrative qui naîtront des 35 heures. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Mme Odette Grzegrzulka.

N'importe quoi !

M.

Yves Deniaud.

Comptez-vous sortir du dogmatisme intransigeant qui a prévalu jusqu'à maintenant ?

M.

Thierry Mariani.

Non !

M.

Yves Deniaud.

Aurez-vous la pudeur de ne pas infliger à nos petites et moyennes entreprises le surcoût et la surcharge administrative des 35 heures...

M.

Renaud Donnedieu de Vabres.

Non !

M.

Yves Deniaud.

... tant que l'Etat ne se sera pas appliqué la réforme à lui-même, c'est-à-dire à la fonctio n publique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M.

le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

(« Ah ! » sur les mêmes bancs.)

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, je n'étais pas présente lorsque le Premier ministre a répondu à une question d'actualité portant sur le bilan de Martine Aubry. Moi qui la remplace aujourd'hui dans ce grand ministère de l'emploi et de la solidarité, (« Ah ! » sur les mêmes bancs.)

je peux vous dire qu'elle a accompli en trois ans et demi une oeuvre dont nous devrions tous être fiers ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe communiste. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) S'agissant de la réduction de la durée du travail dans les petites et moyennes entreprises, sachez que je trouve tout à fait normal qu'il y ait un débat sur cet important sujet. Il nous faut voir comment répondre aux craintes et aux inquiétudes qui s'expriment.

(Exclamationss sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M.

Yves Fromion.

C'est nouveau ! Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je vais vous donner mon point de vue de ministre de l'emploi et de la solidarité sur ce débat que nous n'avons pas à esquiver.

M. Yves Fromion.

C'est vous qui l'aviez esquivé !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Notons d'abord que beaucoup de petites entreprises sont déjà passées aux 35 heures.

(« Non ! » sur les mêmes bancs.)

Deux tiers des entreprises passées à 35 heures ont moins de cinquante salariés et 40 %, moins de vingt salariés : c'est la preuve que toutes n'ont pas peur des 35 heures.

Par ailleurs, la réduction de la durée du travail n'affectera les petites entreprises de moins de vingt salariés qu'à partir de 2002. Nous avons donc le temps de nous préparer et de les préparer à cette perspective.

M. Jean-Claude Abrioux.

Mais non !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

En outre, celles qui ont franchi le pas des 35 heures l'ont fait avec succès.

M. Yves Fromion et M. Jean-Claude Abrioux.

Pas du tout !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Elles ont pu à la fois réorganiser le travail et mieux satisfaire leurs clients.

(Exclamations sur les mêmes bancs.) Et cela parce que nous avons su négocier avec leurs représentants.

Je veux citer en particulier l'aide considérable apportée par l'UPA et les fédérations artisanales.

M. Yves Fromion.

Elles ont été achetées sur ce point !

M. le président.

Monsieur Fromion !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je pense néanmoins qu'il faut lever les inquiétudes pour celles qui n'ont pas encore franchi le cap des 35 heures.

Il faut leur montrer en quoi nous allons pouvoir les aider.

Rappelons d'abord qu'une période d'adaptation est prévue jusqu'en 2004 puisque la durée légale n'est abaissée à 35 heures qu'au 1er janvier 2002. Et, à partir de cette date, les heures supplémentaires ne seront majorées que faiblement ; c'est dans la loi. Les entreprises pourront faire jusqu'à 40 heures en 2002, ceux qui ont suivi le débat le savent bien. (« Réponse nulle ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Les lois sur les 35 heures ont prévu des souplesses.

M. François Vannson.

Arrêtez ! Nous perdons notre temps !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ainsi, les entreprises qui connaissent des difficultés de recrutement pourront recourir aux heures supplémentaires sans perdre le bénéfice des allégements de charge.

M. Jean-Claude Abrioux.

Vous enterrez l'économie française !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il est possible également de réduire la durée du travail en plusieurs étapes et des allégements de charges extrêmement importants sont prévus.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je veux citer ici le cas d'une entreprise de 14 salariés rémunérés à 1,3 SMIC : elle bénéficiera de 240 000 francs d'allégements de charges. Nous devons également accompagner les PME dans le passage aux 35 heures. Nous avons ainsi prévu que des experts aideraient les PME dans l'organisation de leur travail.

Alors, c'est vrai, il y a des difficultés de recrutement.

Mais ne nous engageons pas dans un faux débat : les difficultés de recrutement ne résultent pas de la création des 35 heures. (Protestations sur les mêmes bancs.) Elles exis-


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taient auparavant. D'ailleurs, c'est dans les secteurs où le travail est particulièrement pénible que nous avons des problèmes à résoudre.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Monsieur le président, c'est trop long !

M. le président.

Madame, pouvez-vous conclure, s'il vous plaît ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le passage aux 35 heures permettra de mieux surmonter les difficultés (Huées sur les mêmes bancs) puisque cela réduira précisément l'écart entre les entreprises déjà passées au x 35 heures et les autres.

Nous aiderons toutes les PME et notamment celles qui ont des difficultés ou des craintes. Et nous mettrons en place les dispositifs prévus, en tenant le cap des lois sur les 35 heures.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe communiste.)

M. Yves Fromion.

Cette réponse est nulle ! SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

M. le président.

La parole est à M. Didier Julia.

M. Didier Julia.

Monsieur le ministre de l'agriculture, je voudrais revenir sur le problème de la sécurité alimentaire, déjà évoqué par notre collègue Parrenin, car les éléments de réponse que vous avez apportés ne nous donnent pas toutes les assurances que nous souhaitons obtenir. Je pose d'ailleurs cette question au nom de l'opposition nationale tout entière, groupes du Rassemblement pour la République, de l'Union pour la démocratie française-Alliance et Démocratie libérale et Indépendants (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Monsieur le ministre, vous avez dit qu'en matière de sécurité alimentaire il fallait atteindre le risque zéro. Nous en sommes tous d'accord. Quelle n'a pas été alors la stupéfaction des Français d'apprendre que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes tolérait une marge d'incorporation des farines animales de 0,3 % ? Vous-même avez parlé de marge d'incertitude. Or cette notion, s'agissant d'un sujet qui ne tolère aucune marge d'erreur ou d'incertitude, est totalement contraire au principe de précaution qui implique une tolérance zéro. Les Français ont besoin de sécurité. On ne peut pas incorporer un peu de farines animales produites à partir de cadavres d'animaux recyclés dans l'alimentation des bovins comme si l'on fabriquait un pâté d'alouette avec de la viande de cheval, et dire ensuite que ce n'est pas important, compte tenu de la faiblesse de la quantité incriminée.

En outre, monsieur le ministre, alors que je vous ai adressé, voilà deux mois, une question écrite concernant les farines animales contenues dans les aliments destinés aux porcs, aux poulets et aux élevages de poissons, je n'ai toujours pas eu de réponse. Je réitère donc ma question.

Avez-vous l'intention d'interdire purement et simplement, et comme nous le souhaitons, l'incorporation de ces farines animales provenant de cadavres recyclés dans l'alimentation de tous les animaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du Centre et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur le député, s'agissant de l'interdiction des farines animales, j'ai déjà répondu. Le Gouvernement considère que ce débat n'est pas tabou. Nous avons à évaluer l'ensemble des conséquences et des risques. Nous avons donc saisi l'AFSSA et nous tirerons toutes les leçons de ses conclusions. Parallèlement, nous étudions les possibilités alternatives. Le Gouvernement est ouvert à ce débat.

Je souligne au passage que si cela avait été fait avant nous, nous n'aurions pas à le faire maintenant.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. René André.

C'est trop facile !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

C'est vous qui le prenez sur ce ton, ce n'est pas moi, messieurs ! S'agissant de la présence dite fortuite des farines animales dans l'alimentation pour les bovins, je répète ce que j'ai dit, la tolérance est de zéro. Puisque vous semblez ne pas comprendre la différence entre un seuil de tolérance et une marge d'incertitude, je vais vous donner un exemple qui va sans doute vous éclairer. La vitesse sur les routes en France est limitée à 90 kilomètres/heure. Audessus, on est en infraction. Il n'y a pas de tolérance.

Simplement, les radars ont une marge d'incertitude pour mesurer la vitesse. Les services de gendarmerie et de police ne transmettent donc à la justice les infractions pour excès de vitesse qu'à partir de 95 ou 96 kilomètres/heure. C'est pareil ici.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

Nous devons tenir compte de la marge d'incertitude des appareils de mesure de farines animales et, en dessous de 0,3 %, nous ne transmettons pas le dossier à la justice.

Cela ne veut pas dire que l'on tolère, puisque, dans tous les cas, nous signifions les traces relevées à l'entreprise : nous lui demandons de donner les preuves aux enquêteurs et à nos services de contrôle qu'il n'y a pas eu incorporation de farines animales. Celles-ci sont toujours interdites, je le réaffirme devant vous.

Monsieur le député, les choses sont très claires. Il faut simplement ne pas confondre la tolérance et les marges d'incertitude des instruments utilisés. Et il n'y a pas de tolérance pour les farines animales destinées aux bovins.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

TERRORISME

M. le président.

La parole est à M. Renaud Muselier.

M. Renaud Muselier.

Monsieur le président, j'adresse cette question à M. le Premier ministre au nom du groupe RPR, du groupe UDF et du groupe DLI.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

Vendredi, cent kilos d'explosif ont été découverts dans une voiture à Marseille, à la suite d'un coup de téléphone anonyme. Ce véhicule piégé n'avait qu'un seul but : tuer.

En effet, l'heure de l'explosion annoncée ne correspondait pas à l'heure de la minuterie. Je tiens donc à rendre hommage à l'efficacité des forces de police, au courage des artificiers et au sang-froid des Marseillais.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ils ont tous réagi comme il le fallait, au moment où il le fallait et dans la plus grande dignité.

Néanmoins, je me dois ici de citer un correspondant anonyme : « On doit considérer cela comme un avertissement à Jospin, car lui seul connaît nos attentes et nos revendications. » Alors, monsieur le Premier ministre,

qu'avez-vous pu dire ou promettre qui entraîne la pose d'engins piégés visant à tuer nos concitoyens ? (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - « C'est nul ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie !

M. Renaud Muselier.

Nous venons d'apprendre qu'un attentat à l'explosif a été perpétré cette nuit à Ajaccio contre la permanence de mon collègue et ami Roland Francisci. Heureusement, il n'y a que des dégâts matériels ! Par ailleurs, depuis quinze jours, se succèdent à un rythme alarmant des agressions et des incendies contre des édifices religieux.

Dans ce contexte, je souhaiterais, monsieur le Premier ministre, que vous nous présentiez les mesures que vous allez prendre pour ne pas laisser les Français sous la crainte d'un terrorisme renaissant ou d'attentats aveugles.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Huées sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le député, dans ma vie personnelle, comme dans ma vie publique, quand je reçois une lettre anonyme, je la mets au panier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Je m'étonne donc qu'un député de la République interpelle le Premier ministre sur la base d'un appel anonyme (Mêmes mouvements) et qu'il accorde crédit à une personnalité obscure qui revendique la possibilité d'un attentat contre le Premier ministre de son pays, monsieur Muselier ! (Mêmes mouvements.)

Je m'étonne d'autant plus de la nature oblique de votre question que, s'agissant de la méthode qui est la mienne - et celle du Gouvernement - depuis le début à propos de la Corse, je n'ai eu, quant à moi, de conciliabule particulier avec personne ! (Applaudissements sur les mêmes bancs.)

Je n'ai eu d'entretiens occultes avec personne ! (Mêmes mouvements.)

Je n'ai organisé de conférences de presse dans le maquis avec personne ! (Vifs applaudissements sur les mêmes bancs.) Je n'ai reçu personne à la halte-garderie du ministère de l'intérieur ! (Applaudissements sur les mêmes bancs.) En revanche, j'ai discuté ouvertement et publiquement avec l'ensemble des élus de la Corse. Je ne suis tenu que par cela et c'est de cette façon que je continuerai à avancer avec le Gouvernement.

(Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie farnçaise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

PLAN DE SOINS INFIRMIERS

M. le président.

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité et je la pose au nom des trois groupes de l'opposition.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Madame la ministre, à l'hôpital, qu'il soit public ou privé, ou à domicile, sous forme d'exercice libéral, la profession d'infirmière occupe une place importante et incontournable dans notre système de soins. Les évolutions actuelles et futures, tant de la médecine que de notre société, vont continuer à générer un besoin accru d'infirmières et d'infirmiers.

Pourtant, il existe aujourd'hui un malaise et la société est en crise. Dans les services hospitaliers, les infirmières et infirmiers ploient sous la tâche et le manque de personnel. La solution ne se résume pas à la multiplication des heures supplémentaires. Par ailleurs, le plan de soins infirmiers pénalise lourdement les infirmières libérales et met en cause la politique de maintien à domicile des personnes âgées.

(« Merci Aubry » ! sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Les étudiants en soins infirmiers, quant à eux, ont choisi cette journée pour manifester leur inquiétude et leur mécontentement. Si vous avez, en un an, augmenté leur nombre de 43 %, pour le porter à 24 436 pour l'an 2000, les moyens n'ont pas suivi. Les hôpitaux n'ont ni les locaux adéquats pour accueillir ces étudiants supplémentaires, ni suffisamment de formateurs, que ce soit dans les écoles ou en stage dans les services de soins. Il en résulte pour ces étudiants de légitimes inquiétudes sur la qualité de leur formation.

Par ailleurs, les étudiants en soins infirmiers souhaitent la reconnaissance de leur statut. Comment expliquer que les études d'infirmières durent trois ans et quatre mois, mais que leur diplôme ne soit reconnu que comme l'équivalent d'un diplôme Bac + 2 ? Comment expliquer aussi que les étudiants en soins infirmiers ne bénéficient pas des bourses de l'éducation nationale ? Comment expliquer enfin qu'ils ne perçoivent aucune indemnité lors de leurs stages, alors que 98 % des stages en alternance sont rémunérés ? La reconnaissance d'une fonction et d'une profession se mesure aux moyens alloués. Pourquoi refusez-vous ces moyens à la profession d'infirmière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, je voudrais d'abord dire, vous remerciant de l'occasion que vous me donnez,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

(« Merci Martine ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) toute la considération que j'ai pour les infirmières et pour les infirmiers.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Leur profession, difficile à exercer, demande beaucoup de compétence et de dévouement.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

Ces personnels expriment, en ce moment même, des inquiétudes qu'il faut entendre.

(« On le sait ! » sur les mêmes bancs.)

Vous m'interrogez sur les questions soulevées par la mise en place du projet de soins infirmiers. A ce sujet, j'entends dire beaucoup de choses fausses. Il est temps, me semble-t-il, de dissiper les malentendus et de faire cesser la désinformation. Il faut savoir de quoi l'on parle.

Que se passe-t-il actuellement ? Le médecin prescrit des séances de soins infirmiers, le plus souvent sans avoir consulté l'infirmier. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Le patient, pas plus que sa famille, ne sait clairement quel est l'objectif des soins. (Protestations sur les mêmes bancs.)

Avec le projet de soins infirmiers, cela va changer. La personne dépendante sera vue par son médecin qui demandera à l'infirmier de faire un diagnostic des besoins médico-sociaux et d'établir un programme de soins. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Voilà de quoi il s'agit.

Le programme de soins proposé donnera lieu, ensuite, à une prescription contresignée par le médecin et l'infirmier, ce qui me paraît extrêmement important dans la mesure où l'infirmier aura plus d'autonomie et jouera un rôle central de coordination.

Ce plan constitue également un progrès considérable dans les soins délivrés aux personnes dépendantes. A ce titre, il est une chance unique pour les infirmiers de montrer qu'ils peuvent être les pivots du dispositif de maintien à domicile. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Thierry Mariani.

Tournez la page !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avec ce projet, l'infirmier pourra délivrer, comme c'est le cas actuellement, jusqu'à quatre séances de soins par jour.

Mais il pourra, et c'est nouveau, aider le patient dont la santé ne se dégrade pas à gagner en autonomie et l'assister dans la recherche de soins à domicile.

Autre innovation, la visite de surveillance et de prévention, qui permettra à l'infirmier de s'assurer que son patient ne rechute pas. Auparavant, cela n'existait pas.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

Enfin, le plan de soins infirmiers s'accompagne d'une revalorisation importante des tarifs pour un coût total de 400 millions de francs. (Mêmes mouvements.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie ! Un peu de tolérance !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Quant aux étudiants, des craintes se sont exprimées parce que nous en avons recruté beaucoup. Il faudra leur assurer une formation ! Sachez que, ce matin même, mes collaborateurs ont reçu les représentants des étudiants et que nous mettons en place un groupe de travail (Exclamations et rires sur les mêmes bancs) pour voir comment mieux résoudre les problèmes ainsi soulevés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe démocratie libérale et indépendants.

INTERDICTION DES FARINES ANIMALES

M. le président.

La parole est à M. Claude Gatignol.

M. Claude Gatignol.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le ministre, vous avez parlé précédemment de la circulation routière. On nous avait annoncé, il est vrai, une semaine de la sécurité routière mais j'ai l'impression que les familles françaises se préoccupent plutôt en ce moment de la sécurité alimentaire, sujet sur lequel porte ma question, posée au nom des trois groupes de l'opposition.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et I ndépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Il y a quinze jours, pas plus que tout à l'heure, le Gouvernement n'a pas jugé bon de répondre à nos questions sur l'interdiction des farines animales.

(« Et Tiberi ? » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Or les derniers événements montrent, s'il en était besoin, l'importance de cette question qui nous concerne tous.

Après le rapport Mattei sur l'ESB en 1997, après les conclusions de la commission d'enquête conduite par notre assemblée en 1999 - conclusions assez peu satisfaisantes, comme le souligne aujourd'hui une note de l'agence française de sécurité sanitaire des aliments - sur l'interdiction des graisses animales, et compte tenu des inconnues qui subsistent sur la maladie qui en découle, le principe de précaution devrait vous conduire, inexorablement, à interdire l'usage de toute farine animale dans l'alimentation de tous les animaux, pas seulement celle des ruminants.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Trois questions se posent aujourd'hui, et les Français se les posent eux-mêmes avec inquiétude. Ils souhaitent l'interdiction de toutes les farines animales. Alors, monsieur le ministre, êtes-vous, oui ou non, décidé à prononcer cette interdiction ? Quelles sont les raisons de votre choix ? Dans l'affirmative, avez-vous les moyens, tant humains que budgétaires, d'assurer, aussi bien avant l'abattage que sur toute la chaîne d'abattage, le contrôle des animaux, puis la surveillance vétérinaire des carcasses et, surtout, de tous les tissus susceptibles d'être source de contamination ? Enfin, avez-vous les moyens d'assurer la destruction réelle des sous-produits d'abattoirs alors que la taxe d'équarrissage est déjà contestée par la filière viande ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

(Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Il faut bien essayer de varier un peu les plaisirs puisque Jean Glavany a déjà répondu deux fois à la même question ! (« Non ! » sur les bancs du groupe Démographie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance).

Mme Sylvia Bassot.

Non, il n'a rien répondu du tout !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Permettez donc qu'une autre voix s'élève pour vous répondre.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

Monsieur le député, aujourd'hui, et je ne sais pas si nous pouvons nous en réjouir, on meurt malheureusement plus sur les routes qu'en mangeant du boeuf.

(Exclamations et rires sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - « Et encore plus dans un lit ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Cependant, le Gouvernement dans son ensemble est quasi journellement mobilisé sur les questions de santé publique et de sécurité sanitaire des aliments, que ce soit des aliments pour les animaux ou des aliments pour les humains, afin de réduire les risques liés à la transmission de l'agent ESB, tant chez les animaux que chez les hommes.

Vous semblez vouloir aller plus vite que les conclusions des experts. Jean Glavany vous a dit que nous étions en liaison permanente avec les agences de sécurité sanitaire, avec le comité d'experts Dormont pour évaluer régulièrement les connaissances qui nous sont livrées et les expertises menées. S'agissant de l'interdiction de certains matériaux à risques, vous avez vu - et l'actualité nous l'a montré - qu'il est difficile d'obtenir le risque zéro. Il est parfois préférable de s'assurer la bonne adhésion de l'ensemble de la chaîne de production, de telle sorte que le dispositif de précaution soit appliqué avec les meilleurs résultats jusqu'au bout de la chaîne. Pour ce qui est des farines animales, Jean Glavany vous a dit qu'aujourd'hui l'interdiction portait sur la totalité des produits animaux à l'intérieur des farines alimentaires. La tolérance n'existe pas, il n'y a qu'un problème d'imprécision.

(« Non, ce n'est pas ce qu'il a dit ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Le ministère de l'agriculture, le ministère de la consommation et celui de la santé ont demandé à l'AFSSA s'il était urgent et nécessaire aujourd'hui d'interdire la totalité des farines animales (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. Yves Fromion.

Le ministre a dit qu'il allait réfléchir !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

... ou s'il existait d'autres procédures progressives qui permettraient de parvenir à un résultat applicable dans les meilleures conditions de sécurité alimentaire des animaux et des hommes.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Yves Fromion.

Réponse pitoyable !

M. Thierry Mariani.

Ce n'est pas ce que le ministre a dit !

M. Bernard Accoyer.

Il a dit le contraire !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Messieurs, j'aurais aimé que, dans votre kyrielle de questions, vous vous intéressiez aussi à la santé de l'homme et aux produits de santé.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe communiste.

RETRAITES ET CM4

M. le président.

La parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho.

Ma question, qui est double, s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Elle porte sur les retraites et la couverture maladie universelle.

En ces temps où le libéralisme rêve d'en finir avec les systèmes de retraite par répartition pour leur substituer, bien sûr, des fonds de pension, il est utile de réfléchir à l'évolution des retraites en France. Aujourd'hui, 4 millions de retraités perçoivent moins de 4 500 francs par mois pour vivre. Depuis 1993, les retraites ne sont plus indexées sur les salaires, mais sur les prix.

M. Thierry Mariani.

Qu'a donc fait Mme Aubry ?

M. Patrice Carvalho.

Les retraites ne sont plus calculées sur la base des vingt-cinq meilleures années d'activité, mais des dix meilleures. Alors qu'en 1980, elles étaient encore exemptes de toute cotisation sociale, elles subissent actuellement des prélèvements au titre de la CSG et du RDS à hauteur de 6,7 % des pensions du régime général de la sécurité sociale et de 16,7 % des retraites complémentaires. Les retraités ont ainsi perdu entre 17 % et 22 % de leur pouvoir d'achat dans les vingt dernières années.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, que nous examinerons après cette séance de questions, prévoit une augmentation des pensions de 2,2 %. Nous mesurons le décalage entre cette disposition et l'évolution de la situation des retraités.

M. Yves Fromion.

Alors, il vous faudra voter contre au moment du vote !

M. Patrice Carvalho.

Les retraités, qui ont cotisé durant toute leur vie active, ont droit à la solidarité nationale. Ils doivent, eux aussi, bénéficier de la croissance que le Gouvernement évalue à 3,3 % pour l'année prochaine. D'autant que ces retraités viennent souvent en aide à leurs enfants et petits-enfants chômeurs ou RMistes. Certes, le rapport entre actifs et retraités conduit désormais à demander à ceux-ci de se résoudre à consentir des sacrifices. C'est faire l'impasse sur les recettes nouvelles que pourrait dégager la taxation des revenus financiers dont nous savons le poids considérable qu'ils ont pris dans les ressources des entreprises.

Le Gouvernement est-il prêt à revaloriser substantiellement le pouvoir d'achat des retraités, à réindexer l'évolution des salaires, à exonérer les petites et moyennes retraites de toute contribution sociale et à réformer les pensions de réversion afin qu'elles permettent aux bénéficiaires concernés de disposer de revenus suffisants ? En ce qui concerne la couverture maladie universelle, nous avions proposé, lors de sa discussion, que le seuil des ressources ouvrant droit à cette protection sociale s'élève à 3 800 francs. Ce chiffre n'était pas arbitraire : il est reconnu communément comme le niveau d'évaluation de la pauvreté. Le Gouvernement n'a pas voulu aller audelà de 3 500 francs. Sa décision a aujourd'hui pour conséquence que des hommes et des femmes qui, hier, bénéficiaient de cartes de santé financées par les conseils généraux, ne peuvent bénéficier de la CMU et n'ont donc pas de protection sociale.

M. François Goulard.

Vous avez raison !

M. le président.

Monsieur Carvalho,...

M. Patrice Carvalho.

Oui, je termine, monsieur le président. Vous reconnaîtrez tous avec moi que c'est un comble quand l'objectif même de la CMU était de per-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

mettre à tous nos concitoyens de bénéficier de la sécurité sociale ! Etes-vous prête, madame la ministre, à porter ce seuil au niveau où nous l'avions proposé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.)

M. le président.

Il vous reste très peu de temps pour la réponse, madame la ministre de l'emploi et de la solidarité !

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Compte tenu de l'heure, et parce que nous allons aborder en détail ces questions lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je répondrai brièvement.

S'agissant de la revalorisation des pensions, le maintien du pouvoir d'achat des retraités est une priorité de ce gouvernement depuis 1998 et ce pouvoir d'achat a été maintenu.

M. Yves Fromion.

Les retraités sont au courant !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avec le PLFSS pour 2001, nous irons au-delà, puisque nous augmenterons les pensions de 2,2 %, alors que l'inflation n'est que de 1,2 %. En outre, la suppression de la CRDS pour les retraités non imposables procurera un gain de pouvoir d'achat supplémentaire de 0,5 % pour 5 millions de personnes. Au total, en quatre ans, nous aurons augmenté le pouvoir d'achat des retraites de 1,3 % pour la moitié des retraités, de 1,8 % pour ceux qui ne sont pas imposables et, pour les plus modestes, nous aurons revalorisé le minimum vieillesse de 4 %. Cette progression tranche agréablement avec les pratiques des gouvernements précédents qui, eux, avaient baissé le revenu disponible des retraités.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Pour ce qui est de la CMU, une question dont nous allons discuter bientôt en détail, le seuil de 3 500 francs par mois constitue un incontestable progrès par rapport à la moyenne de ce que donnaient les conseils généraux, qui était de 2 500 francs par mois. Le dispositif permet de couvrir 4,7 millions de personnes, soit beaucoup plus que les 2,8 millions de bénéficiaires dans l'ancien système.

Bien sûr, je comprends votre préoccupation de faire en sorte que, dans les départements qui donnaient davantage, les bénéficiaires n'y perdent pas. A cet égard, je rappelle que les caisses d'assurance maladie, grâce à la création de la CMU, pourront plus largement disposer des fonds d'action sociale. Ce sont ainsi 400 millions de francs par an qui pourront être consacrés par les caisses à l'aide aux personnes vivant dans les départements les plus généreux et qui donc y perdraient.

M. Bernard Accoyer.

Et le 31 octobre, que fait-on ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous le savez, les départements ont une compétence générale, et rien ne les empêche, dans la même perspective, de maintenir des aides et même de créer un fonds d'accompagnement.

M. Bernard Accoyer.

Que fait-on le 31 octobre ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je crois raisonnable d'évaluer dans quelques mois les résultats de l'application du dispositif de façon à compenser, le cas échéant, les pertes par rapport à la situation antérieure. Je pense que nous avons les moyens de garantir ce résultat.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M.

le président.

Nous en venons aux questions du groupe Radical, Citoyen et Vert.

DIFFICULTÉS DE LA PESC

M.

le président.

La parole est à M. Michel Suchod.

M.

Michel Suchod.

Ma question porte sur une sorte d'OVNI, plus exactement, sur un objet de moins en moins identifié,...

M.

Yves Fromion.

Martine Aubry ?

M.

Michel Suchod.

... la PESC, la politique étrangère et de sécurité commune, pour l'appeler par son nom. Un seul exemple. Jeudi dernier, le Président de la République se trouvait à Séoul, où il était reçu par le président de la Corée du Sud, prix Nobel de la paix. Alors qu'il exposait, en tant que président de l'Union, la position de la France sur les problèmes de la Corée du Nord, notre ambassadeur lui a tendu une dépêche annonçant que le Foreign Office venait de reconnaître la Corée du Nord. Il a découvert dans l'heure suivante que la République fédérale allemande avait procédé de la même manière. Pas un message, pas une consultation.

C'est le traité de Maastricht qui a créé l'institution de la PESC. Nous constatons d'ores et déjà un recul immense, même par rapport à l'époque où cette institution n'existait pas. Des reconnaissances de ce genre se sont révélées déjà extrêmement dommageables dans le passé, car elles ont contribué à lancer le conflit de la Slovénie et de la Croatie. Si nous avions des divergences avec la République fédérale et avec le Vatican au moins en discuta-t-on lors d'entretiens entre ministres.

Sur la base de cet incident coréen et de la gestion par nos gouvernements respectifs de la crise de l'euro, je demande au Gouvernement : que reste-t-il de la PESC ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, sur quelques bancs du groupe socialiste, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Monsieur le député, permettez-moi d'abord une observation factuelle : la reconnaissance de l'établissement de relations diplomatiques relève de la seule compétence des Etats. La situation des Etats membres de l'Union européenne dans leurs relations avec la Corée du Nord est très variable. Cinq d'entre eux avaient établi des relations diplomatiques avant leur entrée dans l'Union européenne - la Suède, le Danemark, la Finlande, l'Autriche et le Portugal. Un autre a établi des relations diplomatiques au mois de janvier de cette année. Quant aux deux autres qui ont, comme vous venez de le rappeler, dit leur intention de rétablir les relations diplomatiques, ils ont précisé l'un et l'autre que cela ne signifiait pas la reconnaissance du régime nord-coréen.

Sur le fond, et c'est l'essentiel, le conseil d'affaires générales du 9 octobre dernier, sous la présidence française, a examiné l'approche européenne vis-à-vis de la Corée du Nord. Des orientations communes ont été adoptées, qui ont d'ailleurs été rappelées à Séoul, en pa rticulier l'appui au processus de réconciliation intercoréen, mais aussi la volonté d'évaluer, et si possible d'apprécier, les résultats en ce qui concerne le libre accès de l'aide humanitaire aux populations en difficulté, la non-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

prolifération des armes nucléaires. C'est au vu de ces résultats que la France, pour sa part, le moment venu, comme l'a rappelé le Président de la République à Séoul la semaine dernière, établira ces relations.

Vous le voyez, la concertation existe bel et bien, mais je ne doute pas que Hubert Védrine, qui rentre en ce moment même de Corée, puisse, dans les jours qui viennent, compléter cette réponse.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

ENCÉPHALOPATHIE SPONGIFORME BOVINE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture mais aussi à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés puisqu'elle porte encore sur l'ESB.

Monsieur le ministre, voilà bientôt vingt ans que l'ESB a atteint le cheptel bovin anglais et la France n'a pas été épargnée, notamment les départements du grand Ouest, parmi lesquels le Maine-et-Loire, dans lequel vous vous êtes rendu la semaine dernière. Si la probabilité de transmission à l'homme se vérifie, qu'adviendra-t-il demain de la santé humaine ? Je ne reprendrai pas les arguments avancés par mon collègue Parrenin faisant suite à l'affaire du département de l'Eure, j'insisterai sur les problèmes de santé publique.

J'ai bien compris votre explication sur le seuil de tolérance et la marge d'incertitude. Mais une autre explication circule, qui dénonce la non-séparation des filières de fabrication des farines animales destinées, d'une part, aux animaux pour lesquels elles sont autorisées, d'autre part, aux animaux pour lesquelles elles ne le sont pas.

Les éleveurs rencontrent une autre difficulté majeure.

Hier comme aujourd'hui, ils sont dans la quasi-impossibilité de déterminer le contenu et la qualité des produits pour bétail qui leur sont proposés. Une solution simple vous a été proposée, semble-t-il : la suppression pure et simple des farines animales pour tous les animaux, bovins, porcs, poulets et poissons.

Le deuxième point concerne la recherche. Il est important de prendre en compte nos connaissances, mais aussi nos méconnaissances et nos ignorances. La traçabilité a montré son efficacité : les lots de viande ont été retrouvés. Le principe de précaution est un principe essentiel, mais comment faire lorsque l'on ignore encore tout de la question de base, celle de la transmissibilité de la maladie ? Vous vous êtes interrogé sur ce problème ; et nousmêmes avons été très inquiets en apprenant qu'un troupeau des Vosges avait dû être abattu alors même que l'éleveur déclare avoir toujours et exclusivement nourri ses animaux avec des produits naturels.

Troisièmement, il faut évidemment rendre systématiques les dépistages sur les animaux qui entrent dans les chaînes d'abattage, mais également sur les troupeaux vivants. Le prix à payer, nous le savons, sera élevé. Mais ne risque-t-il pas d'apparaître dérisoire demain, lorsque la santé publique sera en cause ? Enfin, monsieur le ministre, ne peut-on profiter de la présidence française pour obtenir de la Communauté européenne la généralisation des mesures que nous avons prises nous-mêmes, à un moment où nous étions bien seuls ? Ne pouvons-nous faire preuve d'initiative en lançant la création d'une agence de sécurité sanitaire des aliments à l'échelle européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Monsieur le député, la variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dont la transmission à l'homme de l'agent de l'ESB est à l'origine, est apparue en Grande-Bretagne en 1995. Elle y a fait soixante-dixsept victimes. En France, deux personnes sont mortes de cette maladie, mais les données épidémiologiques actuellement disponibles sont trop parcellaires pour estimer de la prévalence de l'infection. Les nombreuses incertitudes qui restent attachées à cette maladie imposent une réévaluation permanente de notre dispositif de sécurité sanitaire, qu'il s'agisse de la sécurité des animaux ou de la sécurité des hommes.

Si les modes de transmission ne sont pas encore parfaitement connus, le passé récent tout comme la progression des connaissances de la recherche, que vous avez évoquée, nous incitent à la plus grande prudence.

Depuis le début des années 1990, les mesures de précaution et de sécurité décidées par les gouvernements successifs ont été guidées par des hypothèses fondées sur l'anticipation du risque, fût-il potentiel.

Ainsi en a-t-il été de la sécurité des produits sanguins, pour laquelle des publications récentes confirment les hypothèses prises en compte dès 1992 par le ministère chargé de la santé, à savoir la sélection des donneurs, la g énéralisation progressive de la déleucocytation de l'ensemble des produits sanguins et des étapes de filtration dans la fabrication des médicaments dérivés du sang, la réduction des indications des produits sanguins labiles.

Nous sommes aujourd'hui amenés à réévaluer en permanence l'analyse du risque de transmission interhumaine de l'agent du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob par le sang, ses dérivés, les autres produits biologiques issus des corps humains et les procédés de soin.

J'ai donc chargé la direction générale de la santé de réévaluer les dispositifs de sécurité, en liaison avec les agences. De son côté, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé organisera dans les semaines qui viennent une conférence publique pluridisciplinaire d'experts...

M. Yves Fromion.

Une conférence ? Nous sommes sauvés ! Après, on réunira un groupe de travail, puis une commission.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

... visant à réévaluer l'ensemble du dispositif lié à la tra nsmission du risque ESST dans les produits sanguins. Un avis me sera rendu à la fin du mois de novembre.

Les médicaments font eux aussi l'objet d'une évaluation produit par produit par le groupe de sécurité virale de l'AFSSAPS. La sécurité des excipients et réactifs d'origine animale est garantie par la réglementation européenne en fonction du type de tissu utilisé, de son origine géographique et des méthodes de sécurisation qui leur sont appliquées.

Concernant les interventions chirurgicales et les examens invasifs, une circulaire actualisant les mesures de prévention de la transmission des ESST en milieu de soin et élaborée par la DGCS et la DHOS, en cours de validation, sera diffusée aux professionnels concernés à la fin du mois.

M. le président.

Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat.


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Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Les dispositifs médicaux font l'objet d'un programme d'action visant à l'extension de l'usage unique et à la sécurisation des produits de stérilisation.

Enfin, un système d'assurance-qualité est mis en place dans les établissements de santé pour la stérilisation des dispositifs médicaux.

M. Didier Julia.

C'est trop !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Monsieur le président, j'ai bien le sentiment d'avoir été un peu longue,...

M. le président.

C'est malheureusement la difficulté de l'exercice, madame, qui consiste à répondre en deux minutes trente !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

... mais les problèmes de sécurité liés à l'agent ESB ne touchent pas seulement la nourriture des animaux, mais également les procédures de soins appliquées à nos malades.

M. le président.

Madame la secrétaire d'Etat, il ne s'agit pas de méconnaître l'importance de la question.

Mais si l'on veut que ces séances conservent un certain rythme, il faut que les questions posées soient brèves, et les réponses tout autant...

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Très bien ! Nous sommes avec vous !

M. Maurice Leroy.

Il faut lire vite !

M. le président.

... sinon elles n'ont plus de sens : on engage un débat général sur un sujet particulier ! Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

3 LOI DE FINANCES POUR 2001

PREMIÈRE PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585, 2624).

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, monsieur le secrétaire d'Etat à l'industrie, mes chers collègues, je serai très bref, puisque nous avons discuté pendant près d'une semaine sur ce projet de budget.

Le projet s'inscrit dans la continuité des orientations définies depuis juin 1997, lesquelles reposaient sur une triple stratégie : une dépense publique orientée en faveur d'actions prioritaires comme l'éducation nationale, la justice et l'environnement,...

M. Didier Boulaud.

Bravo !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... une maîtrise du déficit, avec la poursuite de l'effort engagé depuis juin 1997, soit 30 milliards de réduction supplémentaire, une diminution des impôts enfin, avec la première année d'application du plan d'allégement présenté par le Gouvernement et le ministre de l'économie et des finances.

Au total, 557 amendements ont été présentés, soit un de plus que l'année dernière, alors même qu'il y avait moins d'articles, dont 93 ont été adoptés, dans le but de renforcer les orientations de justice fiscale et sociale et d'efficacité qui marquent ce budget.

Sans chercher à les rappeler - M. le ministre des finances en avait dressé la liste à la fin du débat de la semaine dernière et chacun les a en tête -, je me bornerai à remarquer que ces amendements adoptés sont en plus grand nombre que les années précédentes, vraisemblablement d'une signification plus forte, et qu'ils émanent de l'ensemble de la majorité plurielle,...

M. Bernard Roman.

Très bien !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... que ce soit du groupe socialiste, du groupe communiste et apparentés ou du groupe Radical, Citoyen et Vert.

M. Jean-Jacques Jégou.

Surtout du groupe communiste !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Il convenait de le souligner en comparant ce qui s'est passé cette année et les années précédentes. A la lumière des statistiques, on s'aperçoit que la représentation parlementaire a pu obtenir bon nombre, non d'infléchissements, mais de prolongements d'orientations qui figuraient déjà dans le projet de budget.

Plusieurs amendements touchant à la fiscalité écologique et aux collectivités locales ont été adoptés, conduisant à déplacer 8,2 milliards de francs au niveau des recettes, soit plus que l'année dernière ; on peut en déduire que le travail parlementaire a, me semble-t-il, porté ses fruits.

Cette première partie a également donné lieu à des débats utiles, même si nous ne les avons pas obligatoirement conclus. Ainsi en a-t-il été de l'UMTS : des engagements précis ont été pris par le Gouvernement et un nouveau rendez-vous fixé afin que nous puissions redébattre, notamment lorsque les cahiers des charges seront rédigés et avant même que les licences ne soient attribuées. Nous avons également vu aussi l'amorce d'un débat sur la politique monétaire et sur les problèmes liés au dessaisissement progressif du pouvoir législatif au profit d'autorités qui se disent indépendantes. Il conviendra bien évidement de prolonger cette discussion : indépendance ne signifie pas absence de contrôle ni irresponsabilité et le législateur que nous sommes devra y veiller.

La deuxième partie qui s'engagera sera l'occasion de débats complémentaires à l'occasion de chaque budget particulier. Nous aurons notamment à examiner des amendements dans le cadre de ce que l'on appelle les articles non rattachés. Ce sera vraisemblablement l'occasion d'améliorer encore ce projet de budget ; quoi qu'il en soit, compte tenu, messieurs les ministres, du projet que vous nous avez présenté et des amendements que votre assemblée a d'ores et déjà adoptés, votre commission des finances propose d'adopter la première partie du projet de loi de finances.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


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M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Mesdames, messieurs les députés, répondant à l'invitation du rapporteur général, je vous rappellerai en quelques mots les principales modifications au projet de loi de finances pour 2001. Mais d'ores et déjà, puisque nous n'avons examiné que la partie relative aux recettes, je tiens à remercier vivement toutes celles et tous ceux qui ont participé à nos débats, M. Christian Pierret, bien évidemment, qui aura fourni l'essentiel du travail pour le compte du Gouvernement, le président et le rapporteur général de votre commission des finances, celles et ceux enfin qui sont intervenus, à quelque groupe qu'ils appartiennent.

Cette première partie visait à permettre l'adoption des ressources publiques en répondant à une double préoccupation : tendre vers une fiscalité plus juste, mais également allégée, cet allégement étant prévu sur trois ans, deux années étant proposées à votre vote.

Ainsi que l'a rappelé M. Migaud, ces allégements ont, pour l'essentiel, porté sur l'impôt sur le revenu, même si d'autres dispositions - car tout cela doit être lié figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que vous examinerez dans quelques instants : c'est le cas notamment des dispositions tendant à réduire, voire supprimer, la CSG pour les revenus modestes, qui devraient être appréciées par la majorité d'entre vous. Mais d'autres mesures ont également été adoptées, qui touchent à l'impôt sur les sociétés, en particulier sur les petites et moyennes entreprises. Nous voulons tous développer l'emploi, ce qui signifie encourager la croissance, rendre plus performantes nos entreprises.

Cela passe, notamment pour les PME, par un allégement de leurs prélèvements, souvent très lourds ; ceux-ci ne seront plus désormais, sous certaines conditions, que de 15 %.

Les dispositions touchant à la fiscalité pétrolière ont donné lieu à bien des discussions. Elles aussi figurent dans cette première partie, tout comme une autre mesure, qui a également donné lieu à beaucoup de commentaires : la suppression de la vignette.

Mais l'idée générale qui sous-tend ce budget, un budget de croissance fait pour soutenir l'emploi et maîtriser la dépense, est d'essayer de rendre l'impôt plus juste et autant que possible moins lourd.

Il est vrai que, par rapport au projet initial du Gouvernement, après des discussions parfois longues, mais toujours dans un très bon climat, beaucoup d'amendements ont été proposés dont un bon nombre, près d'une centaine, ont été adoptés.

Sans chercher à être exhaustif, permettez-moi, mesdames, messieurs les députés, de rappeler les principaux dont l'initiative revient pour l'essentiel, on le comprendra, aux groupes de la majorité. Je n'entrerai pas dans une comptabilité trop précise pour savoir quel groupe exactement fut à l'origine de tel ou tel amendement audelà des spécificités de chacun se dégage une réelle unité de vues et il y a fort à croire que tel amendement déposé par tel groupe aurait pu, dans d'autres conditions, être déposé par tel autre. Quoi qu'il en soit, la liste que je veux citer n'en est pas moins impressionnante et assez diverse.

Nous avons, sur votre proposition, modernisé le régime fiscal des sociétés de capital-risque, nous avons baissé la taxe sur l'aquazole, amélioré la fiscalité des agriculteurs, renforcé la condition d'emploi pour bénéficier de la défiscalisation dans les DOM, réévalué le plafond du ticketrestaurant, amélioré les conditions d'amortissement pour les équipements de production d'énergies renouvelables, supprimé la vignette pour les associations et les syndicats ; nous avons pris des engagements fermes sur l'économie solidaire, sur la dépendance, sur l'UMTS. Nous avons également, sur proposition des groupes de la majorité, supprimé l'abattement sur les dividendes pour les hauts revenus, supprimé la vignette des entrepreneurs individuels, amélioré la ristourne de CSG qui devrait s'appliquer jusqu'à 1,4 SMIC au lieu de 1,3, exonéré de redevance pour les plus de soixante-dix ans les personnes non imposables, majoré la dotation de solidarité rurale et du financement de l'intercommunalité, supprimé l'indexation du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune, prononcé l'abattement de taxe foncière pour les HLM en zones sensibles, obtenu un dégrèvement de la taxe foncière pour les plus de soixante-dix ans non imposables, accru enfin la taxation prévue des compagnies pétrolières.

Par rapport aux propositions initiales du Gouvernement, plusieurs milliards de francs ont ainsi été déplacés.

On peut toujours souhaiter que le dialogue soit amélioré et il faudra qu'il le soit pour les prochaines lois de finances, reste que ce gouvernement, comme c'est normal, a tenu compte des souhaits de la majorité sans compromettre pour autant les équilibres économiques généraux qu'il avait proposés.

M. Jean-Jacques Jégou.

Ça fera cher ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Au total, nous avons privilégié une approche de dialogue. La majorité fait preuve d'une unité de pensée sur les priorités en matière de croissance, sur la nécessité de soutenir la demande, d'assurer un pouvoir d'achat satisfaisant, de développer l'emploi, et en même temps de permettre aux entreprises, de faire face pour avancer. Et c'est autour de ces notions, traduites dans cette première partie strictement fiscale, que les équilibres ont été recherchés. C'est dans ce sens qu'il est demandé à la majorité comme à l'opposition, mais celle-ci a déjà fait connaître son désaccord - de se prononcer.

Je veux ajouter, à l'intention des groupes de la majorité, que nous sommes sensibles à la solidarité qui se manifestera à travers leur vote. On peut éprouver, à l'égard de telle ou telle disposition, des réticences...

M. Jean-Jacques Jégou.

Vous n'êtes pas sûr de votre majorité ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... voire des oppositions, mais pour un texte aussi important que celui qui a trait aux ressources de l'Etat, la solidarité doit prévaloir dans le respect de l'identité de chacun. Voilà pourquoi, au nom du Gouvernement, je souhaite que la majorité se prononce en faveur de cette première partie de la loi de finances.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Louis Debré.

Il n'y a plus de majorité ! Explications de vote

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. François d'Aubert.

M. François d'Aubert.

Monsieur le ministre, avant la discussion sur la première partie du projet de budget nous nous demandions quelles étaient vos stratégies économique, budgétaire et fiscale et votre stratégie pour la réforme de l'Etat. Nous savons maintenant que la réponse est : impasse, impasse, impasse, impasse !


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La stratégie économique, d'abord, est manifestement viciée par les hypothèses pour le moins irréalistes sur lesquelles vous construisez votre budget. Est-ce raisonnable d'avancer que le baril de pétrole sera à 25 dollars en février 2001 alors qu'aujourd'hui il est aux alentours de 35 dollars, que la parité euro-dollar sera à 0,95 alors qu'elle est à 0,83 et, enfin, d'estimer que l'inflation sera à 1,5 % l'année prochaine, alors que nous sommes sur une pente de 2,2 %, voire 2,5 % ? Ce dernier point est particulièrement important pour le pouvoir d'achat. En effet, tous les éléments de vos hypothèses tendent à démontrer que l'inflation sera moins forte, ce qui vous permet d'affirmer que les retraites seront revalorisées et qu'il y aura peut-être quelque chose pour les familles.

Or, vos hypothèses sont irréalistes...

M. Gérard Fuchs.

Vous dites ça tous les ans !

M. François d'Aubert.

... pour ce qui peut concerner le pouvoir d'achat. Pour l'année prochaine, votre budget ne garantit donc ni le maintien ni, surtout, l'augmentation du pouvoir d'achat des retraites, de celui des classes moyennes, ainsi que des salariés puisque s'ajoutent à votre dispositif budgétaire les 35 heures qui non seulement pèsent sur l'offre et par conséquent vont dans le sens de l'inflation - chacun connaît aujourd'hui les goulets d'étranglement de notre économie - mais également sur les salariés compte tenu de la limitation des heures supplémentaires et des modérations salariales prévues dans les accords.

Quant à votre budget lui-même, il a deux faiblesses.

Nous reparlerons ultérieurement des dépenses mais il est démontré qu'elles croissent en volume, non pas de 0,3 %, mais de 3 %. Notre collègue de l'opposition, Charles de Courson, en a fait le calcul mais la Commission européenne l'a dénoncé également : nous ne sommes pas les bons élèves de l'Europe quant à la modération, nécessaire, des dépenses.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Pas plus d'ailleurs que pour le déficit de l'Etat.

Alors, où est la stratégie budgétaire ? Elle n'existe pas ! Où est la stratégie en matière de réforme de l'Etat ? Elle est évidemment liée à la stratégie en matière de dépenses, lesquelles vont déraper. Il n'aura échappé à personne qu'il y aura 19 000 créations de postes dans la fonction publique, et non pas 11 000.

Ne nous faites pas dire que nous ne voulons pas davantage d'instituteurs dans les écoles et d'infirmières dans les hôpitaux ! Ce n'est pas le cas. Simplement, nous pensons que, en revanche, il pourrait y avoir moins de fonctionnaires dans les administrations centrales, dans les rectorats et les inspections d'académies, dans tous ces organismes administratifs que vous multipliez et qui coûtent cher en frais généraux à l'Etat. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Enfin, où est votre réforme fiscale ? Nous sommes, à la vérité, dans un véritable « touche-à-tout » fiscal.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Selon un récent sondage, 86 % des Français trouvent le poids de l'impôt excessif ou insupportable. Croyez-vous que les mesures que vous proposez vont les faire changer d'avis ? Ils savent ce qu'on a pris dans leur portefeuille depuis trois ans et demi : 500 milliards de francs ! Et vous n'allez leur en rendre qu'à peine le tiers ! Les Français voient bien que ça va continuer et que, comme l'année dernière, les prélèvements sociaux et fiscaux représenteront plus de 70 % de la richesse supplémentaire créée d'une année sur l'autre - chiffre qui n'existe dans aucun autre pays.

M. Yves Fromion.

Tout à fait !

M. François d'Aubert.

Voilà la réalité. Vous prétendez que l'impôt baisse d'une quarantaine de milliards, mais, dans votre budget, il est écrit que le rendement de l'impôt sera supérieur à 90 milliards de francs ! Les Français sont capables de faire le calcul ; ils verront que nous sommes loin d'un juste retour fiscal par rapport à la richesse qu'ils ont créée, à la croissance qu'ils ont généré e, depuis trois ans.

Pour toutes ces raisons - des hypothèses économiques irréalistes, une dépense incontrôlée, un déficit insuffisamment maîtrisé et une baisse d'impôt dérisoire par rapport à ce qui a été prélevé -, le groupe Démocratie libé rale votera contre le budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Alain Rodet.

Quelle surprise !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Louis Idiart.

M. Jean-Louis Idiart.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, depuis 1997, le Gouvernement de Lionel Jospin conduit une politique pour l'emploi, pour la croissance et la modernisation de notre pays, au service de tous.

Les résultats économiques permettent aujourd'hui de conduire une politique de baisse de l'impôt tout en réduisant le déficit budgétaire et en répondant aux besoins nouveaux des Français dans les domaines de l'éducation, de la sécurité et de la justice.

L'égalité, c'est assurer le respect des droits de chacun, la sécurité, l'éducation, pour tous mais plus encore pour les plus modestes, plus exposés dans notre société. La dépense publique doit y contribuer.

Pour nous, baisser l'impôt n'a rien à voir avec le culte libéral anti-impôt, anti-redistribution et donc ultra-individualiste. Pour nous, c'est soutenir la croissance et soutenir l'emploi. Cette démarche entreprise, dès la loi de finances pour 2000 et le collectif budgétaire de printemps, par des baisses ciblées de TVA sur les travaux, par la réduction de un point du taux supérieur de la TVA, la diminution de la taxe d'habitation pour les plus humbles, se poursuit aujourd'hui par des baisses au profit des ménages et des petites entreprises, en nous préoccupant, à chaque fois, de leur donner un caractère plus juste et plus dynamique afin de créer des emplois.

Mais nos adversaires, si zélés pour dénoncer l'archaïsme de certaines taxes, se retrouvent, au moment de passer à l'acte, pour stigmatiser leur réforme ou leur suppression.

La taxe professionnelle a retrouvé du charme à leurs yeux et la vignette auto une nouvelle jeunesse. Ils parlent de modernisation. Nous, nous la faisons ! La baisse de l'impôt sur le revenu, très significative en faveur des assujettis les plus humbles et des classes moyennes, a été corrigée, pour les contribuables les plus aisés, par un durcissement de la fiscalité pesant sur les revenus du capital. De même, nous avons, par voie d'amendements, venant de l'ensemble de la majorité, décidé de ne pas revaloriser le barème de l'impôt de solidarité sur la fortune, d'exonérer de redevance de télévision les personnes âgées de plus de soixante-dix ans non imposables à l'IRPP, de relever la part de contribution des employeurs sur les tickets-restaurant, d'étendre la mesure d'extension de la réduction de la CSG et de la RDS pour les salaires allant jusqu'à 1,4 fois le SMIC au lieu de 1,3 fois, de dégrever d'office de 500 francs de taxes foncières les personnes de plus de soixante-dix ans


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

non soumises à l'impôt sur le revenu, enfin, d'alléger la taxe foncière sur les propriétés bâties, en faveur des HLM et des SEM.

Par ailleurs, nous savons tous que les entreprises petites et moyennes jouent, dans la nouvelle croissance, un rôle important de création d'emplois. Le taux d'imposition sur les sociétés sera pour elles ramené à 15 %, afin qu'elles puissent augmenter leurs fonds propres disponibles. La contribution Juppé sera réduite progressivement à partir de 2001 jusqu'à être annulée d'ici à 2003.

La taxe sur les salaires est corrigée ; le statut des sociétés de capital-risque est adapté et modernisé. Enfin l'exonération de vignette a été étendue à certains artisans, associations et syndicats. Les dotations aux collectivités locales ont été abondées par voie d'amendement pour parfaire l'intercommunalité.

Enfin, des mesures de taxation des compagnies pétrolières et des mesures d'adaptation pour contenir le prix des carburants ont été votées, ainsi que d'autres en matière de fiscalité écologique et agricole.

Nous nous réjouissons, en outre, que le Gouvernement ait pris en compte certaines observations de la mission de contrôle de la commission des finances.

Le présent projet de loi de finances est ambitieux ; son orientation progressiste répond à nos attentes ; il marque une étape nouvelle dans la politique conduite après 1997.

Le groupe socialiste le votera.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Philippe Auberger.

M. Philippe Auberger.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, au terme de l'examen de cette première partie de la loi de finances, on voit bien que celle-ci n'apporte aucune réponse sérieuse aux principaux problèmes économiques de l'heure, qu'il s'agisse de l'augmentation des prix du pétrole, de la chute de l'euro ou du poids des contraintes liées aux 35 heures.

Le prix du pétrole a augmenté considérablement depuis un an. La prévision pour 2001 d'une baisse ramenant ce prix à 25 dollars le baril est irréaliste. Les mesures prises pour juguler cette hausse qui menace notre croissance, qui relance l'inflation et qui porte atteinte au pouvoir d'achat des Français, sont insuffisantes : 20 centimes de baisse du prix du carburant et une légère baisse du fioul domestique.

N'oublions pas que nous avons le niveau de taxe intérieure sur les produits pétroliers le plus élevé des pays de l'euro, nettement plus élevé que la moyenne, et que le produit de cette taxe a augmenté de plus de 11 % depuis 1997.

L'euro connaît une chute dramatique depuis dix-huit mois : 28 % par rapport au dollar. Si cette baisse pouvait au départ doper notre activité et nos exportations, elle renchérit désormais considérablement notre énergie et nos matières premières, alimente la hausse des prix, entraîne une augmentation des taux d'intérêt qui va freiner nos investissements.

Ce ne sont pas les palinodies de ce que le Premier ministre appelle la dream team de la commission des finances de notre assemblée, la semaine dernière, qui vont améliorer notre crédibilité dans ce domaine et assurer une meilleure défense de l'euro.

La France occupe la présidence de l'Union européenne ; or rien de significatif n'a été fait pour assurer une plus grande convergence des politiques économiques, en particulier dans le domaine fiscal, pour conforter suffisamment la croissance, ni pour réduire rapidement les déficits et l'endettement.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Philippe Auberger.

C'est ainsi que le déficit annoncé pour 2001 est pratiquement le même que celui prévu en 2000, sauf si le Gouvernement se livre à quelques manipulations de dernière heure.

M. Yves Fromion.

C'est fait !

M. Philippe Auberger.

De ce fait, les charges d'intérêt de la dette publique reprennent leur ascension. Les dépenses publiques, qui auraient dû être au moins stabilisées en volume, vont augmenter près de deux fois plus vite que ne le prévoyait la programmation triennale transmise à Bruxelles. Les effectifs de la fonction publique reprennent une ascension forte, aucun redéploiement n'est prévu, aucune garantie n'est donnée pour un meilleur emploi des fonds publics. La réforme de l'Etat, souvent promise, est totalement absente de ce projet de budget.

Enfin, notre pays va souffrir de plus en plus de la généralisation des 35 heures. Déjà, on constate que la croissance est freinée, du fait de la pénurie de maind'oeuvre liée à l'application brutale de cette réduction du temps de travail.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Les allégements de charges sociales prévus pour les 35 heures coûtent de plus en plus cher : 85 milliards de francs y sont consacrés en 2001, c'est-à-dire plus que le montant des crédits d'investissements civils de l'Etat.

M. François Sauvadet.

C'est la vérité !

M. Philippe Auberger.

Il faut mobiliser pas moins de six ressources fiscales différentes pour faire face à ces dépenses qui vont encore croître à l'avenir. Enfin, le pouvoir d'achat des salariés stagne désormais du fait des accords salariaux passés dans le cadre des 35 heures. C'est dire que notre croissance risque à terme d'être étouffée.

Les recettes fiscales prélevées sur nos concitoyens ont beaucoup augmenté au cours des trois dernières années : la promesse du Gouvernement de stabiliser les prélèvements obligatoires, et a fortiori celle de les baisser n'ont pas été tenues. Il n'est même plus question de parvenir en 2000 à effacer la calamiteuse année 1999. Alors on nous promet pour 2001 la réforme fiscale la plus ample de ces cinquante dernières années. Qu'en est-il au juste ? L'Etat a pris, en trois ans, 90 milliards de francs supplémentaires au titre de l'impôt sur le revenu dont le produit a augmenté de 14 % en trois ans. La réforme annoncée ne fera que stabiliser ce prélèvement l'année prochaine, c'est dire qu'elle est nettement insuffisante.

La cotisation sociale généralisée sera réduite pour une faible partie des salariés ; on remplacera ainsi une trappe à inactivité par une trappe à pauvreté. Mais ni les retraités ni les titulaires d'autres revenus ne bénéficieront de cette mesure, bien insuffisante pour redonner du pouvoir d'achat aux catégories modestes.

Ce ne sont pas davantage les vingt centimes de baisse sur le carburant, déjà absorbés par les hausses récentes, ni la suppression de la vignette qui redonneront davantage de pouvoir d'achat.

Au total, les analyses de l'Observatoire français des conjonctures économiques montrent que plus de la moitié des Français, ceux qui ont des revenus modestes ou moyens, en bref les classes moyennes, ne bénéficieront pas ou très peu des mesures fiscales proposées pour 2001.

Et ce ne sont pas les quelques mesurettes prises à la demande des élus communistes et pour prix de leur abstention, qui y changeront grand-chose.

Le projet de budget n'est ni efficace économiquement, ni juste socialement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

Au surplus, il est d'une opacité jamais égalée puisqu'on y mêle mesures fiscales et mesures sociales, dépenses d'Etat et dépenses de la protection sociale, loi de finances initiale et loi de financess rectificative, au point de rendre le contrôle parlementaire parfaitement illusoire.

Le groupe RPR ne peut que dénoncer pareille caricature de la procédure budgétaire, de même qu'il ne peut que s'élever contre un projet de budget qui ne répondra pas à l'attente des Français. Dans ces conditions, il votera contre la première partie de cette loi de finances.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Christian Cuvilliez.

M. Didier Boulaud.

Et Tiberi ?

M. Christian Cuvilliez.

Monsieur le ministre, depuis la rentrée, et même depuis le débat sur les orientations budgétaires, nous appelons votre attention sur la nécessité d'accroître le pouvoir d'achat et de revaloriser les allocations directes, y compris les retraites. Notre exigence est d'autant plus légitime qu'elle se situe dans un contexte de croissance retrouvée et qu'elle sera, une fois satisfaite, un facteur du maintien de la relance de la croissance par la consommation interne.

Or, dans ce projet de loi de finances, comme d'ailleurs dans les précédentes, les marges de manoeuvre et de progression globales du budget sont restreintes puisqu'elles sont préréparties en fonction des trois principes qui structurent le budget.

Premièrement, la volonté de réduire les déficits budgétaires pour répondre aux contraintes européennes ; deuxièmement, une enveloppe des dépenses actives articulées autour d'un concept désormais appelé « stabcroissance » et qui ne préserve pas l'originalité et l'efficacité des services publics à la française ; troisièmement, une baisse des impôts annoncée urbi et orbi sans présentation p réalable, sans concertation réelle et sérieuse avec l'ensemble des composantes de la gauche plurielle.

M. Jean-Jacques Jégou.

Tout ça pour ça !

M. Christian Cuvilliez.

En fait, dans cette loi de finance élaborée à partir de ce triptyque récurrent - déficit, fi scalité, dépenses utiles -, qu'avons-nous eu à discuter, vous ai-je déjà demandé dans mon intervention générale ? De pas grand-chose. Autrement dit, le budget dont nous avons eu à débattre s'est résumé à une série de mesures fiscales couvrant tout le spectre du champ économique et politique, sans chercher à élaborer une véritable réforme fiscale structurante, plus juste parce que plus solidaire, plus dynamique parce que plus articulée sur l'objectif de l'emploi.

M. Jean-Louis Debré.

Alors, votez contre !

M. Christian Cuvilliez.

Posé ce postulat, les députés communistes se sont attachés, durant toute cette semaine de débat, à corriger les trajectoires, avec pour seul objectif de donner des signes clairs et concrets au peuple qui forme le socle de la majorité plurielle.

Dans ce cadre, et vous l'avez rappelé vous-même, un certain nombre de mesures préconisées par notre groupe ont été retenues, et nous nous en félicitons. Parmi elles, je pense à l'extension de la ristourne de CSG et de CRDS à ceux qui perçoivent de 1,3 à 1,4 fois le SMIC, à l'extension de la suppression de la vignette aux associations loi 1901 et aux organisations syndicales, à l'augmentation du prélèvement exceptionnel sur les profits des compagnies pétrolières qui est porté à 5,5 milliards de francs au lieu des 3,5 milliards initialement prévus, ce qui, ajouté à la TIPP flottante, permet de parer au plus pressé face à l'impatience de nos concitoyens. Je pense également à l'abattement de 30 % sur le foncier bâti pour les organismes HLM situés en zone urbaine sensible, ce qui était prévu dans la loi SRU ; ou bien encore, pour la première fois, à l'abattement de 500 francs sur le foncier bâti pour nos aînés de plus de soixante-dix ans sous condition de ressources, à l'exonération de la redevance TV pour les plus soixante-dix ans non imposés sur le revenu. Ce sont là des modifications qui répondent partiellement à nos préoccupations.

Cependant, même si vous avez alourdi la fiscalité sur les dividendes, pour répondre à nos observations réitérées, vous avez dans le même temps maintenu, envers et contre l'avis de l'ensemble des groupes qui donnent sa dimension plurielle à la majorité, la diminution du taux applicable aux deux tranches supérieures de l'impôt sur le revenu.

Si vous avez diminué l'avoir fiscal sur les participations mineures ou jugées spéculatives des entreprises - ce qui est juste -, vous avez refusé l'ensemble de nos propositions visant à subordonner la suppression de la surtaxe Juppé aux choix des entreprises tournés vers l'emploi.

De la même manière, sans même prendre en compte les analyses de nos collègues Fuchs et Feurtet dans leur rapport relatif aux mouvements de capitaux, vous avez écarté le principal même de l'institution d'une taxe s'inspirant de la doctrine Tobin.

Enfin, une fois de plus, le Gouvernement a renvoyé à plus tard l'application des mesures recherchées, avec notre groupe, afin d'intégrer les actifs financiers dans la taxe professionnelle pour conforter celle-ci et remplacer la part

« salaires ».

S'agissant de l'impôt de solidarité sur la fortune, nous sommes sensibles au fait que vous ayez accepté notre demande de ne pas actualiser le barème. Cependant, nous sommes - et l'ensemble de la majorité avec nous - de nouveau confrontés à un refus d'élargir l'assiette de cet impôt aux éléments de patrimoine confisqués que sont trop souvent les oeuvres d'art et à un refus de modifier le barème de l'ISF pour en améliorer le rendement et l'efficacité économique.

Le Gouvernement a appelé dans la nuit de vendredi à samedi et appelle de nouveau aujourd'hui à la solidarité gouvernementale. C'est un appel légitime, mais qui, pour avoir du sens, ne doit pas être un appel à sens unique.

(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M.

Jean-Jacques Jégou.

Quelle ingratitude !

M. Christian Cuvilliez.

Cet appel doit trouver des prolongements dans la méthode mise en place au sein de notre majorité pour déterminer les choix fondamentaux.

Tout à l'heure va commencer un débat tout aussi important sur la loi de financement de la sécurité sociale.

Parce que tout est dans tout, le soutien du groupe communiste vous sera accordé pour réussir la fin de mandature en fonction des réponses que le Gouvernement apportera aux attentes de nos concitoyens en matière d'augmentation de leur pouvoir d'achat en direct ; des ouvertures qu'il pourra encore consentir dans ce budget en faveur des familles les plus modestes, des salariés et des retraités, et pour revaloriser les minima sociaux ; des


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mesures qu'il prendra pour préserver l'équilibre général du budget de la sécurité sociale.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.)

M. Jean-Jacques Jégou.

Elle est belle la majorité !

M. Christian Cuvilliez.

Nous sommes à une étape importante des choix politiques que doit faire la France, choix qui englobent et qui dépassent les choix budgétaires. Les attentes sociales sont très fortes dans notre pays : il faut les écouter et les entendre.

Le groupe communiste et apparentés fait des propositions en conformité avec ces aspirations, mais elles ne sont pas suffisamment prises en compte par le Gouvernement. Cela dit, nous n'en sommes qu'au début du débat budgétaire au Parlement. Pour autant, une discussion mûrement réfléchie portant sur la nécessité d'un budget plus juste, plus à gauche, pour que la majorité réussisse, nous conduit à une abstention expectative, tranquille (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), constructive, résolue et porteuse des espérances du peuple de gauche, afin de faire évoluer p ositivement les choix de notre majorité plurielle.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie.

Monsieur le ministre, vous avez abandonné beaucoup des convictions que vous aviez énoncées dans votre article du 25 août sur la nécessité de la « stabcroissance ». Et vous les avez abandonnées pour obtenir le soutien de l'ensemble de la majorité plurielle et en particulier du groupe communiste. Or vous pouvez constater que vous n'êtes pas récompensé par les abandons de vos convictions.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jean-Jacques Jégou.

Il a affaire à des ingrats !

M. Pierre Méhaignerie.

Je montrerai en m'appuyant sur quatre faits que les caractéristiques de ce budget sont en contradiction avec votre discours et avec vos écrits.

M. Didier Boulaud.

C'est un spécialiste qui parle !

M. Pierre Méhaignerie.

Premièrement, ce budget se c aractérise par une opacité budgétaire totalement contraire à l'objectif de transparence promis par l'ancien président de cette assemblée.

M. Didier Boulaud.

Parlons plutôt des comptes du

CDS !

M. Pierre Méhaignerie.

Cette opacité rend impossible le contrôle parlementaire. Un système complexe de tuyauterie entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale cache une croissance des dépenses, chacun le reconnaît, supérieure à 4 % !

M. Didier Boulaud.

Les champions de la tuyauterie, ils sont de votre côté !

M. Pierre Méhaignerie.

N'ayant pas obtenu de réponse sur ce point - et pourtant M. de Courson a posé plusieurs questions relatives à celui-ci -, nous vous donnons rendez-vous dans quelques mois. La Cour des comptes révélera alors pour la troisième année consécutive la vér ité budgétaire et mettra en évidence, hélas ! la forte montée des dépenses publiques en 2001.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Deuxièmement, ce budget ne respecte absolument pas - ce qui est relativement grave - les engagements souscrits par la France à Bruxelles en matière de déficit et d'augmentation des dépenses.

Un commissaire européen, qui a été ministre des finances de M. Gonzalez, ne déclarait-il pas : « S'agissant de la France, notre préoccupation, en tant que Commis-s ion, porte sur le taux d'expansion des dépenses publiques, et ceci n'est pas cohérent avec les recommandations de la Commission. »

Ce manque de respect à l'égard des règles budgétaires relatives à l'accomplissement de la monnaie unique témoigne d'une irresponsabilité.

Enfin, à l'heure où l'euro est menacé, est-il bien raisonnable de mettre en cause, dans la nuit du vendredi au samedi, l'autorité de la Banque centrale européenne, alors même que la France préside le Conseil européen ?

(« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocra-

tie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ces critiques auraient toutefois eu beaucoup plus de poids si le Gouvernement français et sa majorité étaient exemplaires et apportaient leur contribution à la convergence économique et budgétaire que rappelait tout à l'heure M. Auberger, ce qu'ils ne font pas.

M. Didier Boulaud.

Pas vous !

M. Pierre Méhaignerie.

Troisièment, ce budget nous place pour l'avenir dans une situation de fragilité.

D'abord, car il manque totalement de crédibilité. Qui peut croire que l'inflation sera limitée à 1,2 % en 2001 ? M. Hervé Morin Personne !

M. Pierre Méhaignerie.

Ensuite, car il alourdit des dépenses futures, en raison de l'absence de toute réforme de l'Etat.

Cet immobilisme fait prendre du retard à notre pays et nous met, en cas de retournement de conjoncture, dans la même situation qu'en 1992-1993, époque où le nouveau gouvernement a dû réparer vos dégâts. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Quatrièmement, l'application des 35 heures conduit, comme nous l'avions dit, à une stagnation du pouvoir d'achat.

S'agissant des allégements de charges, nous avions fait des propositions alternatives, car nous ne voyons pas en quoi 180 francs de plus par mois au bout de trois ans pour un salarié payé 1,2 SMIC...

M. Maxime Gremetz.

C'est combien le SMIC ?

M. Pierre Méhaignerie.

... aura un effet vraiment efficace sur la reprise de l'emploi.

Vous aviez espéré, monsieur le ministre - je cite encore votre article du mois d'août - un véritable changement conceptuel d'une partie de notre classe politique « dépensophile, étatolâtre et conservatrice ». Tout au long de ce budget, vous y avez renoncé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Avant de donner la parole au dernier orateur inscrit pour les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.


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Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Michel Suchod.

M. Michel Suchod.

Monsieur le ministre, le groupe RCV, notamment le Mouvement des citoyens, a le sentiment que ce budget comporte quelques éléments positifs.

D'abord, vous avez fait un signe en matière de réduction des déficits. Du reste, c'est tout de même en période

« de vaches grasses » qu'il faut adresser un tel signe. Le déficit budgétaire, prévu pour 2001, est d'ailleurs le plus bas depuis vingt ans et s'élève à 186 milliards de francs.

Cela nous permet de garder présent à l'esprit que nous disposons de réserves pour la dépense publique.

Nous approuvons également le fait que, pour la première fois depuis 1977, les dépenses progressent, même si c'est de façon modérée - plus 0,3 % -, ce qui rend possible une augmentation, certes limitée mais tout de même réelle, des postes dans la fonction publique : 6 000 créations de postes.

J'invite mes collègues de l'opposition à réfléchir sur cette augmentation des postes dans la fonction publique lorsqu'ils demanderont un accroissement des effectifs des commissariats de leur circonscription (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), même si les 704 postes créés dans ce secteur sont insuffisants.

De même sont insuffisants les crédits alloués à la justice et aux prisons - trente collègues ont présenté un rapport sur ce point - ainsi que ceux destinés aux retraites agricoles et à la santé.

Monsieur le ministre, j'en viens à l'essentiel, c'est-àdire à ce que vous avez appelé vous-même le grand mouvement de baisse des impôts au sein de votre triangle magique.

Vous l'imaginez bien, nous n'avons pas la religion de baisse des impôts.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

En effet, pour nous, ce qui compte, c'est le comment, le pour qui et le pour quoi des baisses ? Celles-ci doivent se décider dans la clarté, au profit de tous, bien sûr, c'est-à-dire non seulement aux deux bouts de la chaîne, mais aussi au milieu de celle-ci en faveur des classes moyennes. Mais elles doivent surtout servir à favoriser la dynamique économique, la croissance et l'emploi.

S'agissant de la méthode, nous n'avons pas apprécié que le Parlement soit informé après la presse de vos propositions.

(Applaudissements sur les mêmes bancs.)

Nous n'avons guère apprécié de ne pas être associés à la dé termination du choix des baisses : je pense au choix qui s'est effectué entre la suppression de la vignette ou celle de la redevance télé. Au moment où l'on parle de réviser l'ordonnance de 1959, il faut surtout changer l'état d'esprit qui prévaut dans les relations du Gouvernement avec le Parlement.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Pour leur part, les radicaux de gauche ont été très sensibles au fait que certains des amendements qu'ils avaient retirés ont été repris par un autre groupe, ce qui a permis que le Gouvernement les accepte.

Enfin, dans le chapitre « pour qui les baisses ? », nous sommes choqués par une contradiction. En effet, alors que l'impôt sur le revenu des personnes physiques - il a fallu quarante-deux ans pour l'obtenir avec Caillaux doit se caractériser par la progressivité, celle-ci est légèrement écornée dans ce projet. Par compensation, la CSG, qui doit se caractériser par l'universalité, voit cette universalité également écornée - j'ai pour ma part parlé d'une sorte de « nonosse » jeté aux classes populaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Par conséquent, la grande réforme fiscale qui reprendrait tous les principes est absolument nécessaire.

Vous savez que j'appartiens à un groupe qui est luimême pluriel. Aussi me dois-je d'indiquer que, en raison d'un certain nombre de considérations de fond portant sur les questions sociales et écologiques, les Verts s'abstiendront sur le vote des recettes.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Quant au parti radical de gauche et au Mouvement des citoyens, ils sont, vous l'aurez compris, l'un et l'autre relativement dubitatifs sur cette première partie de la loi de finances.

(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Toutefois, ils gardent présent à l'esprit les nécessités de la solidarité gouvernementale et voteront donc les recettes.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste. - Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vote sur l'ensemble de la première partie (application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution)

M. le président.

A la demande du Gouvernement, et en application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, l'Assemblée est appelée à se prononcer, par un seul vote, sur les dispositions ayant fait l'objet d'une seconde délibération, ainsi que sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2001.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur la première partie de la loi de finances pour 2001.

Nombre de votants ...................................

564 Nombre de suffrages exprimés .................

522 Majorité absolue .......................................

262 Pour l'adoption .........................

272 Contre .......................................

250 L'Assemblée nationale a adopté.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures quinze, sous la présidence de Mme Nicole Catala.)

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est reprise.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

4

ORDRE DU JOUR DE L'ASSEMBLÉE

Mme la présidente.

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au vendredi 17 novembre 2000 inclus a été fixé ce matin en conférence des présidents.

La conférence des présidents a également fixé le calendrier des séances mensuelles d'initiative parlementaire et des séances de questions orales sans débat pour l'ensemble de la session.

Cet ordre du jour et ce calendrier seront annexés au compte rendu de la présente séance.

Enfin, en application de l'article 65-1 du règlement, la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2001 auraient lieu le mardi 21 novembre, après les questions au Gouvernement.

5 NOMINATION D'UN DÉPUTÉ EN MISSION TEMPORAIRE

Mme la présidente.

J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant de sa décision de charger M. JeanClaude Sandrier, député du Cher, d'une mission temporaire, dans le cadre des dispositions de l'article L.O.

144 du code électoral auprès de M. le ministre délégué à la ville.

Cette décision a fait l'objet d'un décret publié au Journal officiel du mardi 24 octobre 2000.

6

NOUVELLES RÉGULATIONS ÉCONOMIQUES Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire

Mme la présidente.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 19 octobre 2000.

« Monsieur le président,

« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques.

« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter l'Assemblée nationale à désigner ses représentants à cette commission.

« J'adresse ce jour à M. le président du Sénat une demande tendant aux mêmes fins.

« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

Cette communication a été notifiée à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

7

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2001 Discussion d'un projet de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (nos 2606, 2633).

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la présidente, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi de financement de la sécurité sociale constitue un temps fort de l'action du Gouvernement, ainsi que de la discussion parlementaire, parce qu'il touche de très près à la vie quotidienne des Français et qu'il représente des enjeux sociaux, économiques et financiers de premier plan.

Jusqu'à une période récente, les problèmes de sécurité sociale ont été traités dans l'urgence financière. Les plans de redressement ont succédé aux plans d'économies pour combler ce que l'on a appelé le « trou » de la sécurité sociale.

La cause de ces déficits, nous la connaissons bien : elle tenait d'abord au recul de la croissance, qui a frappé notre économie dans la première moitié des annés 90 ; elle tenait aussi à des décisions macro-économiques inadaptées qui, entre 1993 et 1997, n'ont fait qu'approfondir la crise en croyant y porter remède - je veux parler des hausses massives et successives des prélèvements frappant les ménages, y compris les plus modestes, lesquelles ont handicapé le pouvoir d'achat, freiné la consommation, et accru le chômage.

Les efforts entrepris depuis 1997 ont permis, dès 1999, d'inverser cette tendance. Est-il besoin de rappeler que l'un des succès de ce gouvernement est d'avoir inversé la spirale et d'avoir redonné confiance aux Français ? Depuis 1997, l'économie française est sur un rythme de croissance moyen de 3 % et les prévisions économiques du Gouvernement pour 2001 sont de 3,3 %.

Depuis 1997, le chômage a reculé, et ce sont 800 000 personnes qui ont retrouvé un emploi. Jamais un recul aussi important du chômage n'avait été observé. C'est comme si l'équivalent d'une grande agglomération de notre pays s'était tout à coup mise, ou remise à produire, à consommer et, peut-être aussi, tout simplement, à vivre.

Le recul du chômage a été obtenu non seulement par le redémarrage de la croissance, mais aussi par la réduction négociée du temps de travail et les emplois-jeunes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

Parce que la croissance est là, parce que le chômage recule, parce que l'exclusion marque le pas, nous pouvons aujourd'hui porter un autre regard sur notre sécurité sociale. Nous sommes sortis de l'urgence financière. Après les lourds déficits de 1996 - 54 milliards de francs - et de 1997 - 33 milliards de francs -, nous avons renoué avec l'équilibre en 1999. En 2000, notre sécurité sociale sera en excédent de 16,2 milliards et, en 2001, de 18,9 milliards, selon les prévisions du projet de loi qui vous est soumis. Je souligne que cet excédent aura été, pour la troisième année consécutive, sans précédent depuis quinze ans.

Mme Odette Grzegrzulka.

Bravo !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Si je me réfère à l'ensemble des administrations sociales, l'excédent atteindra 0,5 % de la richesse nationale en 2001, ce qui veut dire que les comptes sociaux contribueront désormais à la maîtrise des déficits et au désendettement du pays.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Eh oui !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mais si l'assainissement des comptes est très important, il n'est pas une fin en soi.

M. Alfred Recours, rapporteur.

C'est évident !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est un moyen permettant d'améliorer notre système de protection sociale. Le projet de loi qui vous est proposé comporte ainsi des mesures favorables aux familles et aux retraités ; il améliore sur plusieurs points importants la couverture maladie ; il approfondit aussi la réforme du financement de la sécurité sociale à travers la diversificatin des ressources et la réforme de la contribution sociale généralisée.

C'est parce que les comptes sont aujourd'hui assainis que nous vous proposons de mieux faire contribuer notre sécurité sociale à l'amélioration de la vie quotidienne des Français et à la préparation de l'avenir.

Plusieurs dispositions du projet de loi approfondissent la politique de réformes structurelles qui a été engagée et qui commence à porter ses fruits.

Les principaux axes de la politique que je compte conduire, à travers ce projet de loi et au-delà, sont les suivants : mieux répondre aux aspirations des Français, améliorer notre protection sociale, renforcer la qualité de notre système de santé, amplifier les réformes structurelles tout en préservant l'équilibre.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 s'inscrit totalement dans ces perspectives : il comporte de nouvelles avancées sociales au profit des familles et des retraités, qui vont aussi bénéficier des fruits de la croissance retrouvée ; il autorise une progression plus rapide que l'an dernier des dépenses de santé, gage d'une amélioration de la qualité des soins et de la couverture maladie de nos concitoyens.

Je parlerai d'abord du renforcement de l'aide aux familles, notamment de l'aide à la petite enfance, et de l'aide au logement.

Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, en 1997, la branche famille accusait un déficit de 14,5 milliards de francs. Grâce aux mesures de redressement qui ont été décidées, cette branche est redevenue excédentaire depuis 1999. Ces marges de manoeuvre nous permettent de mener une politique familiale de grande ampleur.

Permettez-moi de rappeler les principales mesures qu'a prises le Gouvernement ces dernières années : l'extension de dix-huit à dix-neuf ans, puis à vingt ans, de l'ensemble des prestations familiales ; l'extension à vingt et un ans en 2000 du complément familial et des aides au logement ; l'amélioration des loyers plafonds pour l'allocation de logement familial ; l'extension à toutes les familles d'un enfant de l'allocation de rentrée scolaire ; la forte progression du budget du fonds national d'action sociale afin d'aider les modes de garde collectifs, lequel a été doté de 1 milliard de francs en 1999 et de 700 millions de francs en 2000.

Cette année encore, les actions décidées en faveur des familles à la conférence de la famille qui s'est tenue le 15 juin dernier montrent la volonté du Gouvernement d'accélérer la rénovation de la politique familiale et de mieux prendre en compte les préoccupations des familles.

C'est ainsi qu'un effort financier de grande ampleur, puisqu'il se chiffre à plus de 10 milliards de francs, sera réalisé. Nous l'utiliserons pour chercher à apporter des réponses aux problèmes concrets que se posent souvent les familles. Deux axes principaux ont été privilégiés : les mesures en faveur de la petite enfance et les aides au logement.

Le projet de loi marque ainsi plusieurs avancées importantes. Je pense d'abord à la création de l'allocation de présence parentale, qui permettra aux parents d'enfants atteints de maladie très grave de demeurer à leurs côtés.

Je pense ensuite à la création d'un fonds d'investissement pour les crèches, doté de 1,5 milliard de francs, qui viendra soutenir les initiatives prises en ce domaine, notamment par les collectivités locales. Je citerai enfin la réforme de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée, qui améliore, dans un souci de justice sociale, la situation des familles modestes.

S'agissant des aides au logement, qui concernent aussi les familles, elles sont financées à la fois par l'Etat et la sécurité sociale. Elles seront réformées, simplifiées et amé liorées, ce qui permettra de donner une portée pratique à ce droit au logement qui est, vous le savez, l'une des priorités de ce gouvernement.

En deuxième lieu, le projet de loi de financement de las écurité sociale pour 2001 traduit également notre volonté d'associer les retraités aux fruits de la croissance et de mieux préparer l'avenir des retraites.

En 1997, nous avons trouvé la branche vieillesse avec un déficit de 5 milliards de francs. Désormais, celle-ci renoue avec les excédents : 3,7 milliards de francs en 1999 et 3,4 cette année, avant versement au fonds de réserve des retraites.

Dès lors que la croissance est là, notre objectif est double : faire profiter les retraités des fruits de la croissance, d'une part, et préparer l'avenir des retraites, d'autre part.

S'agissant de l'association des retraités aux fruits de la croissance d'abord, le Gouvernement vous propose de revaloriser en 2001 les pensions de 2,2 %, alors que l'inflation prévue est estimée à 1,2 %. Ce coup de pouce portera à 1,3 % le gain de pouvoir d'achat des retraités par rapport à l'inflation depuis 1997.

Par ailleurs, aux retraités les plus modestes, qui ne sont pas imposables à l'impôt sur le revenu, le Gouvernement souhaite accorder un gain de pouvoir d'achat supplémentaire. A cette fin, il vous propose de supprimer la contribution au remboursement de la dette sociale frappant les petites retraites. La mesure devrait concerner près de cinq millions de retraités.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

C onformément à ce que le Premier ministre a annoncé, le Gouvernement souhaite veiller à la préparation de l'avenir de nos systèmes de retraite.

Le présent projet de loi comporte plusieurs dispositions destinées à accroître les ressources du fonds de réserve des retraites, qui doit permettre de mieux faire face aux conséquences des évolutions démographiques de long terme.

Le fonds de réserve, créé en 1998, s'est vu affecter des ressources nouvelles dès 1999 : les excédents de la caisse nationale d'assurance vieillesse et du fonds de solidarité vieillesse, la moitié du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine, les contributions des caisses d'épargne et de la Caisse des dépôts et consignations, auxquels s'ajoute la majeure partie du produit de la vente des licences de téléphonie mobile de troisième génération. Si bien qu'à l a fin de l'année prochaine, le fonds de réserve disposera de plus de 50 milliards de francs.

Les ressources du fonds s'accroissent donc conformément aux engagements pris par le Gouvernement. Avec les sources de financement actuels, ce fonds devrait disposer de 1 000 milliards de francs en 2020, dont 300 milliards proviendront des intérêts financiers. Cette somme correspond à la moitié des déficits prévisionnels des régimes de retraite entre 2020 et 2040.

En troisième lieu, nous mettons également en place une meilleure indemnisation des victimes d'accidents du travail et des maladies professionnelles.

Depuis que ce gouvernement est en place, nous avons fait un important travail pour améliorer la reconnaissance et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles : raccourcissement des délais de réponse des caisses, réforme du tableau des maladies professionnelles, garanties quant au délais de réponse aux victimes.

Nous avons déjà pris un certain nombre de mesures particulières en faveur des victimes de l'amiante, comme le dispositif de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante. Cette année, nous irons au-delà.

Nous connaissons tous les souffrances qu'endurent les victimes de l'amiante et le drame que vivent leurs proches. Il nous paraît fondamental d'accorder à ces victimes une juste réparation. Le Gouvernement a donc décidé de créer un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante financé par les employeurs, via la branche des accidents du travail et du budget de l'Etat. Ce fonds sera doté de 2 milliards de francs dès 2001.

Le drame de l'amiante appelait une réponse rapide et forte. Il a également montré les limites de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles tant en ce qui concerne l'indemnisation que les lourdeurs des procédures. C'est pourquoi je compte demander au président de la commission spécialisée du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, chargée des maladies professionnelles, de lancer, dans les plus brefs délais, une large réflexion sur la réparation des risques professionnels, en concertation étroite avec les partenaires concernés.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, et

Mme Odette Grzegrzulka.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

En quatrième lieu, nous voulons encore améliorer la qualité de notre système de santé tout en maîtrisant correctement l'évolution des dépenses.

L'objectif qui vous est proposé pour 2001 a été fixé avec le souci de renforcer l'efficacité de notre système de santé et compte tenu tant de l'impact des politiques structurelles que nous avons lancées que du cadre économique et financier de la nation. Le Gouvernement a retenu un objectif national de dépenses d'assurance maladie pour l'année 2001 de 693,3 milliards de francs,...

M. Jean-Luc Préel.

C'est-à-dire plus de 10 % en deux ans !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... soit une progression de 3,5% par rapport à 2000.

Cette progression autorisée est plus rapide que celle qui vous avait été proposée pour 2000. Elle est cohérente avec la situation économique et financière générale de notre pays et permet de financer de nouvelles avancées dans la qualité de notre système de santé et de la couverture maladie.

En autorisant une évolution plus rapide des dépenses dans le cadre d'un objectif qu'il souhaite voir respecter, le Gouvernement a entendu adresser un message clair aux acteurs de notre système de santé. J'en appelle ici à leur sens des responsabilités.

Quels sont les principaux objectifs pour 2001 que nous vous proposons ? D'abord, il faut répondre aux priorités de santé publique - je pense notamment au plan cancer et au plan greffes. Je souhaite en particulier que l'effort en faveur du dépistage systématique de certains cancers « à risque » soit amplifié.

Nous souhaitons également répondre efficacement aux progrès de la connaissance médicale, notamment en matière de réduction des risques sanitaires - je pense notamment à la maladie de Creutzfeldt-Jacob et à son nouveau variant.

Un effort particulier sera fait, comme les années précédentes, en faveur des établissements médico-sociaux pour accompagner le développement du nombre des places pour les personnes handicapées et la médicalisation des établissements pour personnes âgées dépendantes. Ce secteur verra ses crédits progresser de 5,8 %.

Les budgets hospitaliers pourront augmenter de 3,3 %.

Ce même taux est retenu pour les cliniques privées.

Les soins de ville pourront progresser de 3 %. Les caisses d'assurance maladie et les professionnels de santé devront gérer cet objectif de façon responsable en s'inscrivant dans la volonté d'infléchir durablement les tendances en matière de dépenses de ville. Les outils structurels de maîtrise des dépenses et d'amélioration de la qualité des soins existent et il faut que les professionnels s'en saisissent.

Nous avons également fixé l'objectif pour 2001 en tenant compte de l'évolution des dépenses telle qu'elle est observée cette année.

En 2000, le dépassement de l'ONDAM, l'objectif n ational des dépenses d'assurance maladie, devrait atteindre 1,6 % par rapport à l'objectif fixé de 658,3 milliards de francs, compte tenu des reports de dépenses de la fin 1999. Le dépassement atteindra donc 11 milliards de francs.

Au total, cette année, les dépenses d'assurance maladie devraient suivre un rythme un peu supérieur à 4 %.

Quelles sont les causes du dépassement ? Ce sont, nous le savons, les soins délivrés en ville qui sont cette année encore responsables de ce dépassement : le médicament à hauteur de 6,2 milliards de francs, les honoraires de cer-


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taines professions de ville pour 3,8 milliards de francs, les indemnités journalières pour 1,7 milliard de francs et les divers produits médicaux, ceux inscrits au TIPS - tarif interministériel des prestations sanitaires -, pour 1,6 milliard de francs. En revanche, pour les hôpitaux, les objectifs ont été tenus.

M. Jean-Luc Préel.

Ils ne peuvent pas faire autrement !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Quant aux dépenses des cliniques privées et des établissements médico-sociaux, elles progresseront, en 2000, de 2,2 % et de 4,9 % conformément aux objectifs qui leur avaient été impartis.

Si les dépenses de santé ont évolué plus vite que prévu, elles sont pourtant - je veux le souligner ici - restées en deçà de l'évolution de la richesse nationale.

(M. Alfred Recours applaudit.)

La plupart des pays voisins du nôtre ont également connu une évolution rapide de leur système de santé. Il faut sans doute y voir l'effet de la reprise économique, mais la santé est ce que les économistes appellent un bien supérieur, qui évolue d'autant plus vite que la richesse collective s'accroît. Pour autant, je voudrais souligner que la part de nos dépenses de santé dans la richesse nationale est restée stable depuis 1997 - autour de 10 % du produit intérieur brut - alors qu'elle continuait à augmenter fortement chez certains de nos partenaires, qu'il s'agisse des Etats-Unis d'Amérique, de l'Allemagne ou du Royaume-Uni.

M. Hervé Morin.

Et alors !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je suis attachée à ce que notre système de santé soit préservé parce qu'il conjugue une grande liberté laissée aux a cteurs, une grande exigence de solidarité et une recherche permanente de la qualité des soins. C'est sans doute pour cela l'un des meilleurs systèmes de santé au monde. A la lueur des expériences étrangères, nous voyons d'ailleurs qu'il n'existe pas aujourd'hui de système permettant d'assurer une maîtrise parfaite des dépenses, à l'exception du système anglais, mais nous savons aussi ce qu'il donne,...

M. Hervé Morin. Il est calamiteux !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... à savoir une maîtrise systématique des dépenses qui avait conduit ces dernières années à de tels rationnements que le gouvernement de Tony Blair s'efforce à l'heure actuelle de modifier en profondeur ce système.

Pour autant, la maîtrise des dépenses est une nécessité et elle suppose la responsabilité de chacun des acteurs, non seulement de l'Etat, au premier chef, mais aussi des caisses d'assurance maladie, des praticiens libéraux et des malades eux-mêmes. Il me paraît à cet égard plus que jamais nécessaire que les objectifs votés par le Parlement soient respectés.

M. Yves Bur. C'est nouveau !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est en maîtrisant mieux les dépenses que nous trouverons les marges de manoeuvre permettant de couvrir de nouveaux besoins et d'améliorer le niveau de protection de nos concitoyens, ainsi que la qualité des soins. Chaque franc dépensé doit l'être à bon escient. Les dépenses qui ne correspondent pas aux besoins réels, ce sont des cotisations en trop ou des dépenses justifiées en moins. Il nous faut donc poursuivre l'effort entrepris en matière de réforme structurelle.

C'est tout d'abord le cas pour l'hôpital. Nous menons une politique active de recomposition du tissu hospitalier autour de trois priorités : la réduction des inégalités dans l'accès aux soins, l'adaptation de l'offre de soins aux besoins de la population et la promotion de la qualité et de la sécurité des soins. En particulier, la réflexion pour fonder la tarification des établissements de santé sur les pathologies traitées est engagée à la suite des dispositions que vous avez votées l'an dernier.

M. Jean-Luc Préel. Elle est engagée très doucement !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous devons disposer de données d'activités hospitalières fiables et rapidement disponibles. A cette fin, nous vous proposons de créer une agence technique de l'information sur l'hospitalisation. Cette réorganisation améliore la qualité de la prestation offerte à la population. Elle permet aux établissements de santé de mieux prendre en compte les priorités de santé publique définies par le Gouvernement.

Ainsi, la réorganisation des urgences répond à une nécessité. Le Gouvernement, vous le savez, a renforcé les moyens des services d'urgences qui doivent développer leur coopération avec les médecins de ville.

En matière de sécurité sanitaire, des mesures importantes seront prises, en 2001, pour améliorer la qualité des procédures de désinfection et de stérilisation, pour développer l'utilisation des dispositifs médicaux à usage unique. Le Gouvernement accompagne de manière significative ce mouvement de recomposition de l'offre hospitalière par le fonds de modernisation sociale des établissements de santé dont la création vous est proposée dans le projet de loi.

Il faut aussi que les réformes structurelles s'appliquent à la dépense de médicaments, qui progresse de 6 % à 7 % cette année, soit une évolution très proche de celle de l'année précédente. La France ne constitue pas une exception en ce domaine, puisque la plupart des pays occidentaux connaissent une évolution encore plus rapide de ces dépenses, mais le niveau de notre consommation médicale est toutefois plus élevé que dans de nombreux pays voisins. Plusieurs réformes engagées porteront leurs fruits dès 2001, et plus encore dans les années suivantes.

D'abord, le développement des génériques s'amorce. Il n'était pas normal, en effet, que ces médicaments, dont le principe actif est aussi efficace que celui de leur princeps mais qui sont un tiers moins cher, soient moins utilisés en France que dans d'autres pays. Nous ferons, dans les prochains jours, avec les pharmaciens, un bilan précis de la progression des médicaments génériques et des économies dont la sécurité sociale a bénéficié.

La politique conventionnelle menée par le comité économique des produits de santé porte aussi ses fruits.

Le comité a entrepris des campagnes d'harmonisation des prix sur certaines spécialités. L'année 2000 marque une nouvelle étape. La procédure de réévaluation des médicaments est pratiquement achevée aujourd'hui. Au total, près de 2 663 spécialités ont été évaluées par la commission de la transparence, soit plus des deux tiers des spécialités françaises ; 60 % ont été classées en service médical rendu - SMR - majeur ou important, 15 % en service médical rendu modéré ou faible et 25 % en service médical rendu insuffisant. Nous avons sans tardé tiré les conséquences de cette évaluation en ajustant le taux de remboursement de certaines spécialités. Parallèlement, le comité économique a conduit, avec les laboratoires concernés, des négociations pour faire baisser les prix des spécialités dont le SMR a été jugé insuffisant. Ces spéci alités ne seront, à terme, plus remboursées. Cela ne doit cependant pas se faire dans la précipitation. Il importe de donner non seulement aux patients, aux prescripteurs, mais aussi aux laboratoires le temps de s'adapter aux


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changements qui s'annoncent. Nous aurons donc une période transitoire de trois ans - 2000, 2001, 2002 - avant que les médicaments à SMR insuffisant ne sortent du remboursement.

Certains articles du projet de loi accompagnent cette évolution, notamment en facilitant le recours à la publicité pour les médicaments qui ne seront plus pris en charge par l'assurance maladie. Je crois en effet qu'il faut apporter aux médecins une autre information que celle dont ils disposent aujourd'hui...

M. Dominique Dord.

Ça c'est sûr !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... et qui, nous le savons tous, est essentiellement diffusée par l'industrie pharmaceutique, au prix de budgets publicitaires considérables.

Mme Odette Grzegrzulka.

Absolument !

M. Jean-Luc Préel.

Vive l'information d'Etat !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il suffit pour s'en convaincre de rappeler que les dépenses de promotion pharmaceutique des laboratoires dépassent 12 milliards de francs.

Mme Odette Grzegrzulka.

Scandaleux !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Aujourd'hui, nous souhaitons apporter une information neutre, validée scientifiquement, sur le bon usage du médicament.

Mme Odette Grzegrzulka.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est ainsi que nous allons mettre en place un groupe confraternel d'information des prescripteurs, et ce très prochainement. Dès cette année, nous lui donnerons les moyens de fonctionner. A cette fin, nous vous proposons de créer un fonds de promotion de l'information médicale...

M. Yves Bur.

Encore un fonds !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... alimenté par une fraction de la taxe sur la promotion pharmaceutique.

Enfin, nous vous proposons de modifier la contribution de l'industrie pharmaceutique, que l'on appelle la clause de sauvegarde.

M. Jean-Luc Préel.

70 % ! C'est confiscatoire !

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Ce n'est pas assez !

M. Jean-Luc Préel.

Il faut animer un peu !

Mme Odette Grzegrzulka.

Mais pas en disant des contrevérités !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Son mode de calcul a aujourd'hui besoin d'être revu, car il comporte des effets de seuil peu lisibles. Nous avons retenu un mode de calcul plus simple, plus linéaire avec, pour objectif, de récupérer 70 % du dépassement.

Comme les gestionnaires de la CNAM l'ont souhaité, la régulation de ces dépenses repose, depuis la loi de financement de la sécurité sociale 2000, sur une large délégation de gestion aux caisses d'assurance maladie.

Celles-ci doivent aussi gérer, de façon concertée et négociée, les dépenses d'honoraires, de biologie et de transport sanitaire. Dans ces secteurs aussi, la maîtrise structurelle...

M. Jean-Luc Préel.

La maîtrise comptable !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... doit s'appliquer. Pour la première fois, la CNAM a pris des mesures de redressement cet été. Les professionnels demandaient la possibilité de s'engager avec les caisses sur des actions permettant de sortir d'une régulation qui serait purement financière. Nous leur avons donné les outils pour ce faire, il faut maintenant que ces mécanismes fonctionnent. Il en va ainsi des réseaux et, plus largement, des actions améliorant la qualité des soins. Le fonds d'aide à la qualité des soins de ville, créé à cet eff et, a commencé à fonctionner. Parallèlement à ces réformess tructurelles, nous voulons poursuivre une politique déterminée d'amélioration de la couverture maladie de nos concitoyens.

la couverture maladie universelle : d'ores et déjà plus de 4 700 000 personnes ont pu accéder à ce nouveau droit, soit beaucoup plus que les 2 800 000 personnes de l'ancienne « aide médicale ».

M. Jean-Luc Préel.

Mais beaucoup moins que les 6 millions prévus ! (Sourires.)

Mme Odette Grzegrzulka.

Espèce de pessimiste génétique !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Deux millions de personnes de plus ! Je me félicite à ce propos de la mobilisation de l'ensemble des acteurs - professionnels de santé, caisses d'assurance maladie, collectivités locales, organismes de couverture complémentaire, associations humanitaires - et, bien sûr, du rôle du conseil de surveillance auquel participent certains d'entre vous.

Nous allons avoir un débat sur les effets de seuil dans les jours qui viennent et j'espère que nous pourrons apporter des réponses à ces questions.

M. Gérard Bapt.

Nous n'en doutons pas !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous avons dégagé 10 milliards de francs pour l'hôpital sur trois ans, dont 2 milliards cette année pour pourvoir aux remplacements. Nous améliorons l'équipement sanitaire de la France en appareils d'imagerie à résonance magnétique. Nous favorisons la vaccination des personnes âgées contre la grippe. Nous facilitons l'accès des femmes à la contraception. Nous développons la prise en charge des prothèses auditives pour les sourds.

M. Jean-Luc Préel.

C'est formidable !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je ne vous le fais pas dire et je vous remercie de cette première remarque positive !

Mme Odette Grzegrzulka.

Il n'y en aura pas d'autres !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous mettons en oeuvre un ambitieux programme de lutte contre le cancer.

M. Jean-Luc Préel.

Il y a un retard tellement considérable !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Retard dont vous êtes responsable ! Ce programme propose, pour la première fois, une approche intégrée organisant la mobilisation de tous les acteurs, de la recherche à la prise en charge des personnes malades et de leur famille. Ce plan représente un engagement de 1,8 milliard de francs.

Nous améliorons par ailleurs la nomenclature des actes des professionnels qui exercent en ville. Mieux adaptée aux évolutions de la pratique, elle autorise le remboursement de nouveaux actes - cela aussi mérite de figurer parmi les mesures positives. C'est ainsi que nous avons


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travaillé avec les infirmières, dont la nomenclature a été revue à trois reprises. L'introduction du PSI voulue par les caisses et la fédération nationale des infirmiers constitue un progrès pour les personnes dépendantes en renforçant l'autonomie des professionnels. De même, pour les masseurs-kinésithérapeutes, un grand pas a été franchi...

Mme Odette Grzegrzulka.

Un massage de relaxation pour Préel !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... avec la publication de la nouvelle nomenclature, très attendue par la profession.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Sur les soins dentaires, dans l'attente des conclusions de Michel Yahiel, de nouveaux actes vont être admis au remboursement, anticipant sur la refonte complète de la prise en charge.

Enfin, les non-salariés non agricoles bénéficient d'une amélioration de la couverture maladie. Il y aura donc désormais un socle commun entre le régime général, le régime des exploitants agricoles et des salariés agricoles et ceux des professions indépendandes. Cela, messieurs de l'opposition, vous n'avez jamais réussi à le faire !

M. Marcel Rogemont.

Voilà ! Un à zéro !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Enfin, cinquième axe, nous entendons franchir une nouvelle étape en matière de réforme du financement de la sécurité sociale. Le projet de loi qui vous est soumis comporte une mesure importante d'allégement de la CSG et de la CRDS pour les ménages modestes. Le Gouvernement vous propose en effet d'instituer une ristourne dégressive de la CSG et de la CRDS comprise entre 1 et 1,3 fois le SMIC, ce dernier seuil pouvant être porté à 1,4 fois le SMIC par amendement - le Gouvernement l'acceptera ; je vous le dis d'ores et déjà -, conformément à la demande de la majorité.

Mme Odette Grzegrzulka.

Très bien !

M. Marcel Rogemont.

Ça, c'est une bonne nouvelle !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Cette mesure se déploiera au cours des trois prochaines années et représentera, au terme de ces trois ans, l'équivalent d'un treizième mois pour les smicards.

M. Marcel Rogemont.

Plus qu'un treizième mois !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

A travers cette mesure, le Gouvernement poursuit trois objectifs.

D'abord, réduire l'écart entre salaire brut et salaire net.

C'est une préoccupation que partagent beaucoup d'entre vous, et sans doute pas seulement dans la majorité, d'ailleurs. En 2003, le SMIC net sera relevé de 540 francs par mois.

Deuxième objectif : accroître le pouvoir d'achat. Beaucoup d'inexactitudes ont été dites sur ce sujet. Au total, depuis 1997, le pouvoir d'achat par tête a augmenté de 1,1 % par an en moyenne. En particulier, la suppression des 4,8 points de cotisation maladie, auxquels se sont substitués 4,1 points de CSG, a permis de distribuer du pouvoir d'achat aux salariés.

M. Jean-Luc Préel.

Pas aux retraités !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Au total, depuis 1997, le SMIC net s'est déjà accru de l'équivalent d'un treizième mois. Avec la mesure proposée ici, c'est donc un avantage du même ordre en termes de gain de pouvoir d'achat qui sera consenti aux personnes qui perçoivent le SMIC d'ici à 2003.

M. Marcel Rogemont.

Très bien !

M. Gérard Bapt.

C'est juste !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Enfin, troisième objectif : lutter contre les trappes à inactivité.

Cette mesure renforce l'attrait du revenu d'activité par rapport aux minima sociaux et complète ainsi une série de dispositions déjà prises par le Gouvernement pourr endre financièrement moins pénalisant le retour à l'emploi, qu'il s'agisse de la réforme des dégrèvements de taxe d'habitation, de celle des aides au logement ou de la mise en place de l'intéressement des RMIstes qui permet le cumul d'un revenu d'activité et d'allocations pendant un an. A travers ces trois objectifs essentiels, vous l'avez compris, le Gouvernement maintient plus que jamais sa première priorité, c'est-à-dire l'emploi.

Voilà, mesdames, messieurs les députés, je crois que nous pouvons nous réjouir de la poursuite de l'assainissement financier de la sécurité sociale. Le redressement des comptes est d'abord le fruit des réformes structurelles que nous avons patiemment engagées et qui doivent se poursuivre. Ce rééquilibre nous permettra aussi de continuer à faire progresser les acquis sociaux et, par la mise en réserve d'une partie de ces excédents, de garantir l'avenir de notre système de retraite et, au-delà, de notre protection sociale.

L e Gouvernement attend donc avec intérêt et confiance le débat auquel nous allons nous livrer pendant les jours qui viennent. Au terme de ces discussions, il vous demandera d'approuver le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, pour répondre à l'attente du président de la commission, j'ai réduit mon intervention à l'essentiel de ce que je souhaitais dire à cette tribune.

L'équilibre des comptes de la sécurité sociale a été atteint ; c'était l'objectif voulu et attendu par nos concitoyens, qui savent que, sans cet équilibre, il n'y a pas d'égalité, pas de qualité, pas de justice dans l'accès aux soins. Bien sûr, c'est grâce à la croissance retrouvée, mais aussi grâce à des mesures de redressement, négociées et efficaces, grâce à des politiques structurelles destinées à maîtriser les dépenses que l'objectif que nous avaient fixé les Français a été atteint, ce qui nous permet de voir l'avenir de notre protection sociale avec plus d'optimisme.

Nous n'ignorons pas le mécontentement qu'expriment certains professionnels de santé : nous n'ignorons pas non plus les efforts réalisés par nombre d'entre eux pour nous aider à atteindre cet objectif.

Cependant, parce que cet équilibre est encore fragile - la branche maladie continue à être déséquilibrée -, nous veillerons toujours à ce qu'aucun dérapage ne vienne le compromettre.

Mais nous veillerons aussi, plus que jamais, à ce que le dialogue indispensable entre les pouvoirs publics et les représentants des professions de santé se poursuive ou soit renoué, de sorte que chaque décision soit analysée, expliquée et justifiée devant les intéressés.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

L'équilibre retrouvé nous permet de parler aujourd'hui avec sérénité de la santé publique, et cette sérénité rend encore plus ferme la détermination du Gouvernement à agir dans ce domaine.

D'une importance longtemps sous-estimée, voire ignorée, la définition claire d'une politique de santé publique est devenue en quelques années une exigence des élus, des professionnels et, de façon encore plus large, des usagers et des citoyens.

Alors que, grâce aux résultats obtenus par la politique menée par le Premier ministre et son gouvernement, l'espoir dans des perspectives professionnelles et sociales plus sûres se confirme aujourd'hui, alors que la situation matérielle du plus grand nombre s'améliore, nos concitoyens aspirent maintenant à une politique de santé plus transparente, plus juste, plus égalitaire. Cette exigence constitue pour nous un formidable défi.

Cette politique de santé publique se décline suivant plusieurs axes.

Tout d'abord, il s'agit de rendre égal l'accès aux soins.

Désormais, l'ensemble de nos concitoyens bénéficient d'un accès aux soins de santé. Après quelques mois de mise en oeuvre, le nombre de personnes couvertes par la couverture maladie universelle complémentaire est déjà supérieur de 1,9 million à celui des bénéficiaires de l'ancienne aide médicale.

Seconde avancée notable : l'élaboration de programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins - PRAPS qui a dynamisé la mobilisation de l'ensemble des intervenants dans le domaine de la santé.

Les hôpitaux, quant à eux, ont mis en place des permanences d'accès aux soins de santé qui permettent l'accès à des consultations à tout moment. Près de 300 PASS ont été financées en 1999 et nous allons renforcer les moyens de ces permanences.

D euxième axe important : le renforcement de la sécurité.

Le besoin de sécurités, au pluriel, mais essentiellement de sécurité sanitaire, est une exigence forte de nos concitoyens.

Le 1er janvier 2000, la mise en place, prévue par la loi, de l'Etablissement français du sang est venue renforcer le dispositif de prévention sanitaire. Ce dispositif sera prochainement complété par la création de l'Agence de sécurité sanitaire environnementale, chargée d'expertiser et d'évaluer l'impact potentiel des perturbations de l'environnement sur la santé humaine.

En trois ans, la France s'est dotée d'un dispositif permettant l'évaluation scientifique, la gestion des risques et la transparence des décisions. Ce dispositif a acquis une renommée internationale et permet à notre pays d'impulser - grâce à un savoir-faire et à une expérience reconnus - une politique européenne de sécurité sanitaire.

Nous poursuivons, par ailleurs, les programmes de lutte contre les infections nosocomiales et les accidents iatrogènes. Les techniques de fonctionnement de la sécurité anesthésique, de l'accueil et du traitement des urgences sont progressivement encadrées.

Il nous faut aussi, en troisième lieu, développer la transparence et renforcer les droits des malades.

Nos concitoyens souhaitent un système de soins plus transparent et plus ouvert à leur propre participation. Le développement de l'accréditation contribue à cet effort.

L'ANAES a rendu publics en juin 2000 les premiers c omptes rendus d'accréditation : en juillet, quelque 186 établissements de santé étaient engagés dans la procédure.

Au-delà, les états généraux de la santé ont montré la forte attente de la population, qui souhaite bénéficier d'un système de santé organisé autour du patient et pas seulement autour de sa pathologie. Nous proposerons, dans les semaines qui viennent, à travers le projet de loi de modernisation du système de santé, une réponse aux attentes exprimées, afin de reconnaître et de préciser les droits fondamentaux des personnes dans leurs relations avec le système de santé, en particulier le droit au respect de la dignité et à la protection de l'intégrité du corps.

M. Jean Le Garrec, président de la commission, et

M. Claude Evin, rapporteur.

Très bien !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

L'accès direct au dossier médical sera instauré et garanti, ses modalités seront clairement édictées.

Ce projet de loi aura aussi pour objet de rééquilibrer les relations entre le professionnel de santé et le malade, en faisant de ce dernier un véritable acteur ; de mettre en place les bases de l'expression et de la participation des usagers du système de santé en créant un nouveau statut pour les associations de malades et d'usagers : les associations « reconnues d'utilité sanitaire » ; enfin, de renforcer la régionalisation en regroupant en un seul conseil régional de santé les différentes instances consultatives actuellement rattachées soit aux préfets, soit aux ARH.

Concernant la prise en compte de la réparation des risques sanitaires, nous souhaitons mettre fin à une situation ressentie comme injuste, car fondée sur des règles de reconnaissance de responsabilité essentiellement jurisprudentielles, évolutives et hétérogènes.

Alors que la science, la médecine ont beaucoup progressé et permis un important allongement de la longévité, la prévention, quatrième priorité, doit maintenant être au centre de notre système de santé, et d'abord pour lutter contre les maladies infectieuses.

Le programme national de lutte contre l'hépatite C sera poursuivi. En 2001, ce programme de dépistage et de prévention sera renforcé, en particulier en direction des usagers de drogues, des personnes détenues et des professionnels réalisant des tatouages et des piercing.

Nous poursuivrons avec détermination la lutte contre le VIH-sida. En 2001, nous allons renforcer les actions à destination des publics les plus vulnérables, femmes, migrants, jeunes. Pour améliorer la prise en charge des personnes malades en situation de précarité, nous proposons le transfert du dispositif expérimental des appartements de coordination thérapeutique dédiés aux personnes atteintes du sida dans le cadre commun de la loi de 1975 relative aux institutions médico-sociales. Pour mieux prendre en compte l'évolution de l'épidémie, ces appartements pourront également accueillir des personnes atteintes d'autres pathologies chroniques sévères, notamment les hépatites chroniques et les cancers.

La prise en charge et la prévention des pratiques addictives doit également être renforcée. Il s'agit avant tout du tabagisme et de l'abus d'alcool. Une étude récente montre qu'en France, si nous ne réussissons pas à inverser la tend ance, il s'agira probablement, dans les prochaines années, des causes empêchant la progression de l'espérance de vie.

En ce qui concerne la lutte contre le tabagisme, nous poursuivons les actions annoncées en mai 1999 selon trois axes : renforcement de l'information de la population, aide au sevrage tabagique et protection des nonfumeurs par une meilleure application de la loi relative à la lutte contre le tabagisme.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

La loi Evin !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Loi Evin et rapport Recours au préalable.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Exactement !

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Nous sommes très bien conseillés, soutenus et encadrés.

(Sourires.)

Le délistage des produits de substitution nicotiniques a permis de multiplier par deux le nombre de tentatives de sevrage.

Enfin, le dispositif de prise en charge des dépendances à l'alcool, au tabac et aux drogues illicites a été réorganisé par des circulaires d'avril 2000 sur le tabac, de juillet 2000 sur l'alcool et la toxicomanie, et renforcé par l'affectation de 65 millions de francs de mesures nouvelles.

Pour consolider les consultations de prévention individuelle de l'alcoolisme réalisées dans les structures d'hébergement, nous proposons une prise en charge par l'assurance maladie des organismes locaux chargés de ces consultations.

Ces efforts s'inscrivent dans la poursuite des objectifs fixés par le plan triennal de lutte contre la drogue et de prévention des dépendances, adopté en juin 1999.

D'autres programmes de prévention tout aussi importants sont mis en oeuvre : pour la prévention du suicide, avec le nouveau programme d'actions 2000-2005 que j'ai présenté à Nantes à la fin du mois de septembre ; pour l'application de la loi du 23 mars 1999 relative à la protection de la santé chez les sportifs et à la lutte contre le dopage ; pour la nutrition, qui est le thème prioritaire de santé publique porté par la France pendant sa présidence européenne et qui sera le sujet d'un colloque européen en décembre prochain.

Nous devons, en cinquième lieu, continuer d'améliorer la prise en charge des malades.

La lutte contre le cancer est, pour tout le Gouvernement, une priorité essentielle de santé publique : chaque année, 250 000 malades sont diagnostiqués. Le dispositif français dans ce domaine n'est pas suffisamment organisé.

En février dernier, j'ai annoncé un ambitieux programme national qui s'articule autour de cinq axes. L'un des objectifs les plus attendus de ce programe concerne le dépistage généralisé des cancers du sein, du col de l'utérus et colorectaux. En juillet dernier, la circulaire précisant les modalités du dépistage du cancer du sein a été publiée, celle sur le cancer colorectal le sera dans les semaines qui viennent. Les discussions tarifaires sont en cours. Ces programmes vont donc pouvoir se généraliser progressivement en garantissant l'égalité d'accès à tous.

Pour compléter ce dispositif de lutte contre le cancer, une ambitieuse politique de santé publique du prélèvement et de la greffe a été engagée parallèlement. Nous poursuivons par ailleurs les programmes que nous avions annoncés : lutte contre la douleur, développement des soins palliatifs, organisation de l'hospitalisation à domicile.

Vous connaissez l'engagement du Gouvernement en ce qui concerne la santé des femmes. Je rappelle simplement le projet de loi qui visera à garantir le droit d'accès à l'IVG et à la contraception, en tenant compte des progrès médicaux, de la pharmacopée et des pratiques disponibles aujourd'hui, ainsi que le soutien du Gouvernement à la proposition d'initiative parlementaire sur la contraception d'urgence.

En matière de santé mentale, au-delà du programme d'actions concernant la prévention du suicide que j'ai évoqué, nous avons entamé une large réflexion nationale.

L'attente de nos concitoyens évolue en ce domaine, alors que l'image traditionnelle de la psychiatrie accuse un décalage grandissant, qui se manifeste désormais également par une désaffection des professionnels de santé pour la psychiatrie publique de secteur, qu'il s'agisse des médecins ou des infirmières. Aussi souhaitons-nous travailler avec tous les professionnels à une intégration renforcée du dispositif de prise en charge des maladies mentales dans le dispositif général de l'offre de soins.

Avant de conclure, j'aimerais rappeler deux autres programmes qui me tiennent particulièrement à coeur.

D'une part, la prise en charge des enfants dysphasiques et dyslexiques : 4 à 5 % des enfants sont concernés par ces troubles du langage qui deviennent des troubles de l'apprentissage. Avec Jack Lang, nous avons mis en place un plan d'action qui permettra une prévention de ces troubles du langage, un diagnostic plus rapide et plus sûr et une meilleure prise en charge.

D'autre part, la santé des personnes détenues. Depuis trois ans, nous avons renforcé l'accès aux soins, développé la prévention des pratiques addictives, amélioré le dépistage du VIH et des hépatites. Avec Elisabeth Guigou, nous souhaitons renforcer ces actions en permettant notamment que les personnes détenues qui en ont besoin puissent être hospitalisées dans de bonnes conditions.

Pour cela, des unités hospitalières sécurisées interrégionales seront installées dans huit centres hospitalo-universitaires.

Telles sont, en quelques mots, les grandes lignes de la politique de santé publique que nous menons. Je suis convaincue que cette politique va dans le sens des aspirations et des besoins de nos concitoyens et participe grandement à l'amélioration des conditions de santé de tous.

Mais je suis également convaincue que nous devons nous engager résolument dans la modernisation de notre système de santé, une modernisation voulue et comprise par tous les professionnels de santé et qui doit se traduire par une plus large place faite aux usagers et aux malades.

Aujourd'hui, par la politique que nous menons, et notamment grâce à la loi contre les exclusions, nous c ontribuons à faire reculer les inégalités de santé.

Demain, pour aller plus loin, nous devons introduire plus de démocratie au coeur du système de santé. Cet idéal rencontre l'adhésion de beaucoup d'entre vous et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Madame la présidente, qu'il me soit d'abord permis, au nom de tous les rapporteurs des commissions des affaires sociales et des finances, de me réjouir de la présence parmi nous de Mme Elisabeth Guigou. En guise de cadeau de bienvenue, je lui offrirai tout à l'heure, en leur nom également, un tableau dont elle décidera s'il est plus figuratif qu'abst rait ou le contraire (Sourires) , tableau qui retrace l'ensemble des flux de financement des fonds, caisses et branches de la protection sociale dans notre pays. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Vu la complexité de cet ensemble, le gouvernement actuel a un mérite essentiel, celui d'avoir rétabli l'équilibre des comptes de la protection sociale. Pour la pre-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

mière fois, cette année, la sécurité sociale est en excédent

Le retour à l'équilibre était déjà acquis l'année derniè re ; il est consolidé en 2000 et pour 2001. Certes, la branche maladie reste déficitaire mais c'est la seule à l'être encore, dans le cadre d'une protection sociale qui dégage des excédents.

Sans vouloir faire de polémique, je rappellerai que nous revenons de loin, puisque le déficit de la protection sociale s'élevait à 53 milliards en 1997.

M. Hervé Morin.

Et à 130 milliards en 1993 !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Le financement de la protection sociale a donc été régulièrement amélioré.

C'était indispensable car, sans l'équilibre des comptes, il ne peut y avoir de garantie pour l'avenir de la protection sociale des Français.

Depuis trois ans, nous avons voulu aussi rendre le financement de la sécurité sociale plus solidaire, ce qui veut dire financer la protection sociale sur une assiette plus large que la masse salariale, afin de le rendre plus juste et plus favorable à l'emploi. Ce qui veut dire aussi financer plus de dépenses de solidarité quand il y a des excédents, dans une logique redistributive.

Cette réforme d'ampleur du financement de la sécurité sociale a été réalisée en deux étapes. En 1958, avec le transfert des cotisations salariales d'assurance maladie vers la CSG. En 2000, avec la réforme partielle des cotisations patronales caractérisée par l'institution de la CSB et de la TGAP. Notre protection sociale est donc maintenant équilibrée et elle garantit l'avenir.

Sur l'évolution de l'ONDAM, je ferai entendre une tonalité un peu différente de celle de Mme Guigou. Je considère en effet que si l'assurance maladie est la seule branche qui continue à enregistrer des déficits et à ne pas se conformer aux prévisions, ce n'est pas tout à fait un hasard, c'est tout simplement parce qu'il s'agit de la seule branche pour laquelle nous ne sommes pas les prescripteurs. Pour la vieillesse et la famille, les comptes retracent les décisions prises. Pour la maladie, ce sont les prescripteurs qui, pour l'essentiel, font les comptes.

M. Marcel Rogemont.

Judicieux rappel !

M. Alfred Recours, rapporteur. De ce point de vue, je considère comme très positif le fait que, cette année comme l'an dernier, le Gouvernement ait accepté le rebasage de l'ONDAM, qui revient, d'une certaine façon, à reconnaître les dépenses effectivement réalisées l'année précédente en fonction des besoins constatés.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économlie générale et du Plan.

Très bien !

M. Alfred Recours, rapporteur.

S'agissant de l'ONDAM et de la maîtrise des dépenses de santé, nous devons avoir une attitude à la fois ferme et souple : ni laxisme ni coercition excessive. L'ONDAM, avec ses rectifications possibles en cours d'année, permet d'ailleurs un pilotage macro-économique satisfaisant.

On constate en effet que, depuis 1997, les dépenses réelles d'assurance maladie, et non l'addition des taux prévisionnels, ont progressé de 4 % en moyenne, soit exactement le taux moyen de croissance sur la même période. Autrement dit, depuis 1997, en matière de dépenses d'assurance maladie, nous avons fait profiter la santé de la croissance, sans dépasser l'accroissement du PIB en valeur, mais sans limiter non plus les dépenses, dans la pratique, aux objectifs initialement prévus. Le résultat final est égal à la somme des taux initiaux de l'ONDAM, augmentée des rectifications successives intervenues année après année.

M. Marcel Rogemont.

Très bien !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Permettez-moi d'insister sur ce point s'agissant notamment des médicaments. Bien sûr, je comprends et je partage votre point de vue, madame la ministre ; dans ce domaine aussi la maîtrise doit être la règle. Mais il ne faut pas pour autant laisser de côté un cetain nombre d'éléments qui contribuent à faire croître les dépenses du médicament plus que la moyenne de l'ONDAM. Il importe en effet de prendre en compte le vieillissement de la population, les améliorations thérapeutiques, la découverte de nouvelles molécules, par exemple. Il s'agit donc, là aussi, de prévoir une maîtrise souple d'évolution de la dépense, en étant ni laxiste ni coercitif à l'excès.

J'en viens maintenant aux travaux de la commission concernant la partie recettes et l'équilibre de cette loi de financement de la sécurité sociale. Vous avez évoqué, madame la ministre, la possibilité d'aller un peu au-delà de 1,3 fois le SMIC pour les cotisations de CSG et de CRDS. Eh bien, cela tombe bien car nous avons voté en commission une extension, à 1,4 fois le SMIC du dispositif proposé. Nous nous satisfaisons de cet accord que nous enregistrons d'avance. De surcroît, nous allons ainsi améliorer la dégressivité de la mesure, la pente de dégressivité passant de 25 % à 19 %, ce qui est tout à fait souhaitable.

D'ailleurs, il serait bon d'aller un peu plus loin au cours des prochaines années. La commission souhaiterait que les cotisations de CSG et de CRDS puissent être progressivement exonérées jusqu'à 1,8 fois le SMIC, exactement comme pour les ristournes de cotisations patronales. Il y aurait ainsi une espèce de symétrie.

M. Marcel Rogemont.

Excellente proposition !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Nous reviendrons donc probablement sur ce sujet. Mais pour cette année, vos p ropositions nous agréent tout à fait, madame la ministre.

Toujours dans le souci d'aller un peu plus loin, et puisque nous nous situons dans le cadre du plan gouvernemental général de baisse des impôts, des taxes et des charges, la commission a considéré qu'il était dommage que les chômeurs ne bénéficient pas de dispositions particulières comme les salariés et les retraités.

Nous avons donc adopté un amendement prévoyant l'exonération de CRDS des chômeurs non imposables.

Nous avons d'ailleurs trouvé des modes de financement sur lesquels nous reviendrons lors de l'examen des articles. Mais j'insiste dès à présent sur le fait que le Gouvernement peut, de sa propre initiative, en assurer le financement, de la même façon qu'il envisage de financer l'exonération concernant les retraités, c'est-à-dire sur l'avance dont dispose la CADES d'ici à 2014. C'est contraints par l'article 40 de la Constitution que nous avons été amenés à présenter des propositions.

J'ajoute encore que nous avons déposé de nouveau un amendement qui avait été adopté l'an dernier et il y a deux ans à l'unanimité par l'Assemblée nationale et le Sénat. Nous l'avons baptisé amendement « fermiers généraux », trouvant tout à fait anormal que, au prétexte que les services de l'Etat aident à recouvrer des financements de la sécurité sociale, il faille financer sous forme de primes les frais de recouvrement de ces sommes. Dans le passé, le Gouvernement avait trouvé une astuce consistant


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

à faire raboter cette décision prise à l'unanimité dans une loi de finances rectificative. Nous sommes donc revenus au point de départ. Mais nous avons, nous aussi, de la suite dans les idées.

(Sourires.)

Du coup, nous avons perfectionné nos propositions.

Nous considérons que, dans l'hypothèse où il serait justifié de prévoir des frais de recouvrement, il faudrait, à l'inverse, que l'Etat prévoie des frais de recouvrement et de gestion pour les sommes gérées, par exemple, par la CNAF en matière de RMI ou d'AAH.

M. Marcel Rogemont.

Excellent !

M. Alfred Recours, rapporteur.

J'évoquerai encore l'extension du bénéfice de l'exonération des cotisations sociales pour l'emploi d'aides à domicile, une excellente mesure qui élargit notre dispositif, et le remboursement à la branche famille des frais des prestations qu'elles gèrent pour le compte de l'Etat. Madame le ministre, je conclurai en souhaitant que l'on trouve enfin une solution au véritable casse-tête de la pluralité des pensions de réversion. Du fait d'un système particulièrement injuste, 9 francs de pension supplémentaire de réversion sur le régime agricole entraînent encore aujourd'hui 1 500 francs de moins par mois pour les bénéficiaires.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

C'est très injuste, en effet !

M. Hervé Morin.

C'est totalement anormal !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Nous sommes tous d'accord !

M. Alfred Recours, rapporteur.

La commission espère pouvoir avancer sur ce point.

Madame la ministre, je vous souhaite, encore une fois, la bienvenue. Recevez en cadeau, au nom des rapporteurs et du président de la commission des affaires sociales.

(M. le président de la commission remet à Mme la ministre un graphique.)

M. Marcel Rogemont.

Et des commissaires ! (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

... ce tableau représentant les comptes et les flux de la sécurité sociale.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Merci !

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie.

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Madame la ministre, mes chers collègues, les dépenses d'assurance maladie restent celles qui, au sein de l'ensemble des dépenses de sécurité sociale, sont le moins bien maîtrisées. En effet, le niveau des dépenses est chaque année supérieure à l'ONDAM voté.

Il faut, toutefois, relativiser cette réalité. Ainsi, depuis 1997, et vous l'avez vous-même souligné, madame la ministre, la croissance de ces dépenses est sensiblement égale à celle du PIB, ce qui traduit un lien certain entre consommation médicale et consommation des ménages en général. De plus, il faut regarder de plus près l'évolution des dépenses par secteur d'activité pour apprécier les raisons d'une telle situation.

Tout d'abord, on peut dire que les dépenses d'hospitalisation publique sont maîtrisées. En 1999, elles se sont situées en deçà de l'objectif. Pour 2000, le dépassement que nous constaterons correspond à la mise en place des protocoles hospitaliers de mars dernier, ô combien nécessaire au regard de la situation que connaissaient et que connaissent encore, d'ailleurs, nos établissements publics hospitaliers.

S'agissant des cliniques privées, en 1999, les dépenses ont diminué de 0,6 % à la suite de la baisse du prix de journée intervenue à cause du dépassement de l'objectif de 1998. En 2000, ces cliniques devraient respecter leur objectif en hausse de 2,4 % par rapport aux dépenses constatées en 1999.

Les établissements médico-sociaux ont connu, quant à eux, en 1999, un léger dépassement de 200 millions de francs par rapport à l'objectif fixé. Ce dépassement concerne les dépenses de médicalisation et de soins à domicile des personnes âgées. En 2000, l'enveloppe de ces établissements ne devrait pas être dépassée.

En revanche, c'est dans le domaine des soins de ville que nous connaissons la plus forte augmentation des dépenses. En 1999, nous avions pu déjà constater une progression de près de 13 milliards de francs, constituant l'essentiel du dépassement constaté de l'ONDAM. Cette forte augmentation était principalement imputable à la progression des dépenses de pharmacie et d'indemnités journalières, alors que la croissance des dépenses d'honoraires a été relativement modérée comparativement à l'année précédente - plus 0,5 % en 1999, contre 3,3 % en 1998.

En 2000, les dépenses de soins de ville devraient dépasser de 13,5 milliards de francs l'objectif fixé et c'est l'ensemble des postes qui subit une forte augmentation.

L'article 24 de la présente loi de financement de la sécurité sociale a confié aux caisses de sécurité sociale la gestion d'un objectif de dépenses déléguées. Il faut rappeler que cet objectif ne concerne que les honoraires des professionnels de santé, les prescriptions médicaments et indemnités journalières - en sont exclues. Pour 2000 l'objectif de dépenses déléguées a été fixé à 140,3 milliards de francs à répartir entre chaque profession.

La fixation des objectifs en début d'année et le suivi des dépenses ont fait l'objet de rapports d'équilibre aux mois de mars et de juillet derniers, qui ont été transmis au Parlement et au Gouvernement. Au cas où l'évolution des dépenses constatées ne serait pas compatible avec le respect de l'objectif de dépenses fixé pour chacune des dix professions relevant de cet objectif, les caisses sont tenues de proposer une révision des rémunérations des professionnels par modification des tarifs des honoraires ou des cotations à la nomenclature. C'est dans le cadre de cette procédure que les caisses ont été aménées à prendre un certain nombre de mesures en mars puis en avril.

Je vous renvoie, mes chers collègues, à mon rapport écrit pour mesurer les évolutions des dépenses d'honoraires par profession, ainsi que les dispositions tarifaires qui ont été prises pour respecter les objectifs fixés.

Si cette procédure de gestion de dépenses déléguées a permis d'avancer vers une clarification des responsabilités respectives de l'Etat et des caisses de sécurité sociale dans la relation avec les professions libérales de santé, elle ne saurait toutefois constituer un cadre suffisant pour la gestion de l'ensemble de la médecine de ville. En effet, cette gesion se traite depuis 1971 - trente ans maintenant dans le cadre de conventions avec les professions libérales de santé. Et celle-ci devraient être autre chose qu'une seule discussion de leurs honoraires. Or force est de constater que le système conventionnel ne fonctionne plus aujourd'hui.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Tout à fait !

M. Claude Evin, rapporteur.

J'ai déjà exprimé ce constat, à plusieurs reprises, soit à cette tribune - j'avais dit que ce système conventionnel « était à bout de souffle » -, soit dans différents rapports ou articles de presse. Je relève d'ailleurs que le rapport de la Cour des comptes cette année dresse le même constat. On a noté que les conventions n'ont réussi ni à assurer la régulation des dépenses ni à modifier les pratiques individuelles des professionnels. A ces limites du dispositif conventionnel s'ajoute la fragilité juridique et l'instabilité du système.

Dans la pratique, presque toutes les conventions ont été annulées, soit totalement, soit partiellement.

Face à ce constat, il me semble nécessaire de prévoir que la politique conventionnelle doit être refondée avant d'être relancée. Si je n'avais qu'un seul message à vous transmettre, madame la ministre, au moment où vous prenez la responsabilité de ce secteur, ce serait qu'il faut remettre à plat le fonctionnement actuel et définir de nouvelles relations entre l'Etat, les caisses de sécurité sociale et les professionnels de santé.

M. Jean-Pierre Foucher.

C'est vrai !

M. Claude Evin, rapporteur.

Les rôles de chacun des acteurs doivent être clairement définis. Le cadre juridique des conventions doit être entièrement revu afin de gagner en stabilité dans le temps et en efficacité.

Il est indispensable de redéfinir les domaines respectifs de compétence de la loi, du règlement et de la convention.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Tout à fait !

M. Claude Evin, rapporteur.

De la même façon, une plus grande place doit être laissée aux relations individuelles entre caisses et professionnels de santé afin de donner un contenu à l'adhésion individuelle de ces derniers. L'adhésion est aujourd'hui inscrite dans les textes, mais elle est sans contenu et sans conséquences réelles.

Dans le secteur de l'hospitalisation, un nouvel élan a été donné à la recomposition hospitalière avec la publication des SROS de deuxième génération. Il nous faut, toutefois, bien mesurer les limites de ces outils pour atteindre nos objectifs d'une meilleure offre de soins.

Nous aurons l'occasion d'y revenir, notamment à propos de la question de la tarification à la pathologie, que nous avons adoptée en juillet 1999, mais dont l'expérimention fixée pour cinq ans tarde à se mettre en place en raison de problèmes techniques. Il nous faudra sans doute en débattre de nouveau et peut-être même revoir le statut des établissements de santé.

Les dépenses de médicament ont progressé de 6,3 % pour l'année 1999 et devraient atteindre 6 à 7 % en 2 000. Vous l'avez rappelé dans votre intervention, madame la ministre, dans ce secteur, les contraintes industrielles doivent être prises en compte au même titre que les contraintes de santé publique. Ainsi on sait qu'il faut favoriser un meilleur accès à de nouvelles molécules.

La politique structurelle concernant le médicament doit en effet permettre de développer la recherche. Or, depuis une dizaine d'années, la France a considérablement régressé dans la hiérarchie des pays découvreurs de molécule.

Par ailleurs, ce projet de loi comporte des dispositions intéressantes concernant les médicaments orphelins. Audelà de cette préoccupation impérative pour les patients atteints de maladies rares, il est nécessaire que nous ayons une politique qui permette le développement de la recherche.

De la même manière, vous avez fait allusion, madame la ministre au développement des génériques, et indiqué qu'une évaluation serait demandée. A cet égard, il me semble qu'il conviendrait de hâter le moment où les prescripteurs auront la possibilité de prescrire en dénomination commune internationale, en DCI. Nous attendons cette disposition depuis plusieurs années.

On peut noter encore l'équilibre financier de la branche accidents du travail et maladies professionnelles.

Si le nombre de maladies professionnelles et d'accidents du travail augmente légèrement, leur fréquence est globalement en baisse, compte tenu de l'accroissement des effectifs salariés. Un effort particulier a été réalisé au cours de ces deux dernières années pour les victimes de l'amiante. Ce n'est que justice. Toutefois, des mesures d'ajustement sont encore nécessaires concernant des dispositifs de préretraite. Ainsi, je rappelle que les travailleurs atteints de lésions pleurales ne peuvent toujours pas bénéficier de cette disposition.

Certes, ce projet de loi va créer un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Il s'agira de réparer les préjudices qui sont spécifiquement liés à cette contamination. Mais, au-delà de ce fonds, c'est toute la question du dispositif d'indemnisation des accidents du travail et maladies professionnelles qui est posée et qu'il va nous falloir revoir. Vous avez annoncé que vous alliez saisir le président de la commission supérieure des risques professionnels, je m'en réjouis. Nous suivrons attentivement ces travaux.

Abordant, à la fin de mon intervention, la question de l'indemnisation des victimes de l'amiante, je ne peux passer sous silence, madame la ministre, un texte de loi que nous sommes nombreux à attendre dans cet hémicycle : l'indemnisation des victimes d'accidents médicaux.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

En effet !

M. Claude Evin, rapporteur.

Lorsque nous abordons les questions de sécurité sociale, nous avons tendance à évoquer des chiffres, un équilibre des comptes nécessaire au respect d'objectifs qui répondent à des préoccupations de justice sociale. Mais n'oublions pas que, derrière ces chiffres, il y a des personnes malades, des hommes et des femmes qui attendent de nous des réponses à leur angoisse, à leurs interrogations, des hommes et des femmes qui veulent être reconnus dans leur dignité. Or, malgré les annonces, la question des droits des malades n'a toujours pas fait l'objet d'un texte. Je forme ici le voeu que nous puissions le plus rapidement possible être saisis de ce texte qui, au-delà de la réalité des comptes qui va nous occuper au cours des prochains jours, nous permettra aussi de répondre aux attentes humaines.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à M le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour l'assurance vieillesse.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, pour les retraités de France, les lois de financement de la sécurité sociale se suivent et, hélas ! se ressemblent. En effet, elles arborent de plus en plus les ternes couleurs de l'atonie, de l'inaction et de l'immobilisme. Le présent projet en constitue l'illustration même. Sur neuf articles


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

figurant à la section vieillesse, quatre concernent de façon efficiente ce sujet tandis que les autres sont dignes de figurer dans un DMOS.

Dans ces conditions, à quoi bon une loi de financement de la sécurité sociale ? Le Gouvernement y fait adopter ce que bon lui semble et applique les mesures votées selon son bon vouloir. J'en veux pour preuve les versements au fonds de réserve pour les retraites. Depuis la création de celui-ci par la loi de financement pour 1999 et j'étais pour -, il est prévu d'y verser une fraction du produit de la C3S. Or ce versement n'a été effectué qu'une fois. La même loi prévoyait encore l'affectation de tout ou partie des excédents du FSV. Eh bien, mes chers collègues, vous aurez discuté et voté cette disposition en vain : ce versement-là n'a jamais été effectué alors qu'il est prévu par l'article L.

135-6 du code de la sécurité sociale depuis trois ans.

M. Jean-Luc Préel.

A quoi servons-nous ?

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Je vous laisse juges de la considération dans laquelle l'exécutif tient le travail qu'il fait accomplir tambour battant au Parlement.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

C'est sévère !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Nous faisons pourtant un travail de qualité, et nous travaillons beaucoup, monsieur le président ! Quatre mesures du projet concernent plus spécialement les retraites. La première a trait à la revalorisation des pensions du régime général et des avantages alignés sur l'évolution prévisionnelle des prix, revalorisation qui s'accompagne, comme l'an passé, d'un coup de pouce de la part du Gouvernement. L'exposé des motifs reste muet sur le mode d'indexation sur les prix et donc sur les problèmes ainsi posés aux retraites du régime général. Est-ce là la politique sociale du Gouvernement, livrer le pouvoir d'achat des retraités du régime général à un coup de pouce annuel ? Cela n'est pas sérieux.

La deuxième mesure concerne la stabilisation de l'interdiction du cumul emploi-retraite, sans toutefois régler les nombreuses imperfections qui règnent dans l'application du dispositif.

Les deux autres mesures sont d'ordre financier. L'une attribue à la branche vieillesse l'ensemble du produit du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine, l'autre verse de nouvelles sommes au fonds de réserve pour les retraites.

Sont-ce là les indispensables réformes propres à garantir l'avenir de la répartition ? Répondent-elles aux attentes des Français ? Qu'il me soit permis d'en douter.

Il faut rappeler les chiffres relatifs à la démographie puisque c'est là que l'urgence réside : le vieillissement de la population est inéluctable, l'espérance de vie augmentant de trois mois par an ; l'année 2006 sera celle de l'arrivée à la retraite de la génération du baby-boom, devenue le papy-boom de 110 000 retraités supplémentaires par an aujourd'hui, on passera à cette date à 250 000 ; toutes les personnes qui entreront en retraite en 2040 sont aujourd'hui âgées de dix-neuf ou vingt ans ; entre 1998 et 2040, le nombre de personnes âgées de plus de soixante ans devrait augmenter de 10 millions, alors que les effectifs des moins de vingt ans et des vingt à quarante ans diminueraient chacun de plus de 1 million ;...

M. François Goulard.

C'est très juste !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

... en 2040, un Français sur trois aura plus de soixante ans et il y aura sept retraités pour dix actifs contre quatre pour dix actuellement. A la même époque, l'espérance de vie à la naissance devrait atteindre près de quatre-vingt-un ans pour les hommes et quatre-vingt-neuf ans pour les femmes contre respectivement soixante-quatorze ans et quatre-vingt-deux ans aujourd'hui. Ainsi, la génération née en 1970 pourrait tabler sur une durée de retraite théorique de vingt-trois ans, plus du double de celle de ses aînés nés en 1910.

Ces chiffres sont ceux du rapport Charpin. L'apathie du Gouvernement est incompréhensible.

M. François Goulard.

Très bien !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

J'ai déjà eu, l'année dernière, à déplorer à cette tribune le goût de l'exécutif p our les rapports de préférence à l'action. L'année 2000 n'a pas fait exception à cette règle : de nouveaux rapports ont vu le jour, j'aurai l'occasion d'y revenir.

M. Jean-Luc Préel.

L'observatoire va tout régler !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Le Gouvernement estime-t-il que le discours prononcé le 20 mars dernier par le Premier ministre peut tenir lieu de politique ? Si tel était le cas, l'inquiétude serait de mise puisque ce discours proposait pour seule mesure, à la fois concrète et n ovatrice, la création du conseil d'orientation des retraites, mesure d'ailleurs suivie d'effet. Aussi, rappellerai-je les sujets déjà évoqués par moi à cette tribune l'an dernier et restés en souffrance à ce jour.

S'agissant du fonds de réserve, il est impératif de le doter de versements pérennes et de ne plus s'en remettre à des mesures ponctuelles. En outre, ce fonds ne dispose toujours pas d'une structure de gestion, ce qui est préoccupant sur le plan juridique parce qu'il doit être géré de façon paritaire et posséder suffisamment d'autonomie pour demeurer à l'abri de tous les appétits.

M. François Goulard.

Le Conseil d'Etat en a ainsi décidé !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Cette absence de structure pose encore la question du mode de placement des fonds. En effet, les sommes déjà présentes aujourd'hui gagneraient à faire l'objet d'une véritable politique de gestion.

M. François Goulard.

Très bien !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

L'an dernier, j'avais posé la question de l'éventuelle extension du champ d'action du fonds au-delà du seul régime général. Le Premier ministre n'a fait que la reposer dans son discours. Autrement dit, en l'espace d'un an, le Gouvernement ne s'est pas saisi de la question. Ce fait est grave car, faut-il le rappeler, dans le domaine des retraites les décisions ne portent leurs fruits que des années plus tard. Or les régimes qui ne bénéficieraient pas de l'effet de lissage de la hausse des cotisations auquel est dévolu le fonds devraient faire l'objet de mesures d'adaptation aux évolutions démographiques.

Par ailleurs, peut-on estimer que la question de l'épargne-retraite sera satisfaite par le texte sur l'épargne salariale actuellement en discussion ? J'ai toujours été partisan d'ajouter un troisième étage à la fusée : régime de base, régime complémentaire, épargne personnelle réalisée dans des conditions permettant de garantir la plus stricte égalité pour tous. Sous réserve de la lecture du texte promulgué, la position du Gouvernement me paraît peu claire. Il semble qu'il veuille transformer l'épargne sala-


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riale en fonds de retraite individuels à condition, dans la mesure du possible, de pouvoir le faire sans le dire. Les plus modestes des Français ne s'intéressent pas aux atermoiements terminologiques du Gouvernement. Ce qu'ils veulent, c'est pouvoir, le plus tôt possible, disposer d'un moyen de garantir leur niveau de vie au cours de la retraite.

Dans une perspective connexe, je souhaite indiquer que la nécessaire prise en compte de l'évolution de la durée de vie ne peut que conduire à repenser notre conception de la durée du travail au cours de la vie, ainsi que des périodes pouvant ouvrir droit à cotisation. En effet, les modifications des perspectives démographiques conduisent à un double constat.

D'une part, il faut dissuader les entreprises de se séparer trop tôt de leurs salariés les plus âgés. Cette gabegie humaine, dont la France détient le triste record européen, n'est plus de mise. A cet égard, les propositions de M. Taddei pour des retraites choisies et progressives c onstituent des perspectives incontournables. D'autre part, il faut prendre en compte, pour les retraites, les périodes de formation et d'apprentissage. Le débat sur le départ anticipé à la retraite pour travaux pénibles doit être conduit à son terme et une liste des métiers pénibles et usants doit être mise au point.

Les veuves et les veufs restent les grands laissés-pourcompte du projet de loi de financement pour 2001.

M. Jean-Luc Préel.

Exact, il n'y a rien pour eux !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Déjà oubliés en 2000, ils ne voient pas leur situation améliorée. Quelques mesures simples pourraient être prises. Ainsi, concernant l'assurance veuvage : le montant de l'allocation doit être amélioré, puisque les comptes de ce régime montrent un excédent cumulé qui s'élève à dix milliards de francs et qu'il s'agit d'un dispositif contributif ; les conditions d'attribution de l'allocation liées à l'âge doivent être revues ; la perception de l'allocation ne saurait plus être réservée aux seules veuves ayant élevé un ou plusieurs enfants, cette restriction pénalisant les jeunes veuves sans enfant.

De façon plus générale, il faut considérer qu'aujourd'hui bien des femmes travaillent et qu'en conséquence une remise à plat de l'ensemble des dispositifs liés aux avantages matrimoniaux et familiaux dans le cadre de la retraite est devenue indispensable. Dans cette attente, des améliorations peuvent être apportées au régime de la réversion. Les veuves demeurent pénalisées par le calcul du cumul de la pension de réversion et de l'avantage personnel de retraite. Il faut que la majoration pour enfant ne soit plus prise en compte dans le calcul et que le plafond du cumul soit relevé. Elles sont aussi pénalisées par les règles de cumul des pensions au titre de plusieurs régimes de base, ce qui vient d'être évoqué.

Des perspectives plus agréables ont été ouvertes cette année par le Gouvernement avec l'annonce de la réforme de la loi du 30 juin 1975 sur les équipements sociaux et médico-sociaux et celle, tant attendue, de la loi sur la prestation dépendance, dite PSD. A cet égard, je rappelle mon attachement à la création d'un véritable cinquième risque de la sécurité sociale pour la dépendance. J'y vois la seule garantie de création d'une prestation dont le montant sera égal sur l'ensemble du territoire. Du reste, les errements de la PSD militent en faveur de ce choix.

M. Marcel Rogemont.

Vous avez raison de rappeler vos erreurs !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

C'était une première étape à l'époque.

M. Marcel Rogemont.

Ô combien malheureuse !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Quant aux modalités de calcul et d'attribution de la prestation, les orientations suggérées par le rapport de M. Sueur me semblent, pour la plupart, pouvoir être suivies. La prestation doit être adaptée aux besoins de la personne, l'inverse n'étant pas possible. Seule cette vision permet de prendre en compte le plus grand nombre de dépendants. Nous ne devons pas laisser au bord du chemin les personnes dont le degré de dépendance est considéré comme moindre.

Voilà, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce que j'avais à dire concernant l'assurance vieillesse dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Toutes les forces vives de la nation sont prêtes à construire l'avenir avec vous. Ne les décevez pas.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille.

M me Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires culturelles, famliales et sociales.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale s'inscrit dans la continuité de la rénovation de la politique familiale entreprise par le Gouvernement depuis trois ans. Il marque une nouvelle étape importante en direction des familles, grâce notamment aux nombreuses mesures de solidarité, souvent novatrices, qu'il comporte, telle la création du congé et de l'allocation pour enfant malade.

Que ce soit pour des raisons économiques ou du fait du choix de la mère - ou du père - de poursuivre son activité professionnelle, la question cruciale de la garde du petit enfant se pose et la difficulté de lui trouver une solution adaptée est un obstacle qui doit pouvoir être surmonté pour tous les enfants et pour toutes les familles, indépendamment de leurs moyens financiers. Pour mieux identifier ces besoins et leur trouver la solution la plus appropriée, la concertation est régulière. La tenue, désormais annuelle, de la conférence de la famille en est l'étape la plus visible et le dialogue avec les associations familiales est permanent. Il faut s'en féliciter, comme l'on se félicite de la nomination d'une ministre déléguée à la famille et à l'enfance qui traduit bien la priorité donnée à ces questions.

Il faut souligner, en préalable, que le rétablissement de la situation financière de la branche, après plusieurs années de déficits importants, a rendu possible le financement de mesures nouvelles et des transferts de solidarité qui représentent, pour 2001, un total de 6 milliards de francs. Il faut y ajouter la réaffectation au profit des familles de l'excédent de l'année dernière par la création du fonds d'investissement pour le développement des structures d'accueil de la petite enfance qui sera doté de 1,5 milliard de francs.

Ce projet de loi comporte des mesures de solidarité importantes et attendues, que je rappellerai brièvement.

Elles constituent autant d'avancées qui traduisent une ffort de mobilisation sans précédent pour mieux répondre aux besoins d'accueil des jeunes enfants.

Tout d'abord, le congé et l'allocation pour enfant malade. La création d'un droit à congé et d'une allocation compensatrice de la perte de revenu pour les parents


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qui, confrontés à la maladie ou à l'accident grave de leur enfant, choisissent - ce qu'ils font toujours quelles que soient les difficultés engendrées - de rester auprès de lui, est une mesure de solidarité indispensable et unanimement souhaitée. Elle va entrer dans les faits dès l'année prochaine. Grâce à un dispositif protecteur des droits du salarié, le parent pourra retrouver une situation identique ou équivalente dans l'entreprise et continuera, pendant la suspension de son contrat, à bénéficier d'une protection sociale. C'est un dossier qui nous tient à coeur et sur lequel mon collègue François Brottes a beaucoup travaillé.

J'attache une importance particulière à ce que la situation des familles monoparentales soit prise en compte de façon adéquate. La renonciation à l'exercice d'une activité est évidemment plus coûteuse lorsqu'il n'y a qu'un seul revenu dans la famille. L'allocation versée dans ce cas doit donc être majorée.

Ensuite, la réforme des aides au logement. Conformément aux engagements pris à l'issue de la Conférence de la famille de juillet 1999, la réforme des aides au logement est poursuivie dans le sens d'une unification des barèmes afin de rendre plus cohérente la prise en compte des ressources provenant des minima sociaux ou du travail. C'est un pas important vers la simplification des prestations familiales à laquelle la CNAF, comme nous l'a indiqué sa présidente, continue de travailler.

L'Etat, mais aussi la branche famille, participent chacun pour leur part à cette réforme qui devrait être achevée en janvier 2002. Son coût total est évalué à 6,5 milliards de francs. Son incidence financière pour la branche famille est de 1,3 milliard en 2001 et de 1,6 milliard en 2002. L'Etat assumera, pour sa part, 3,6 milliards. Au total, 4,8 millions d'allocataires seront concernés par cette réforme qui représente une mesure d'équité, de simplification et de solidarité compte tenu de l'importance des aides au logement dans la solvabilisation des familles les plus modestes.

Pour réconcilier vie familiale et vie professionnelle, un effort sans précédent est consenti en faveur de la garde des jeunes enfants et des mesures d'encouragement à la reprise d'activité.

Des moyens nouveaux sont mis à la disposition des collectivités locales pour les encourager à développer des structures d'accueil de la petite enfance. Chacun sait que leur volonté est décisive en ce domaine et c'est bien pourquoi la création d'un fonds identifiable et doté de façon importante est indispensable, même si certains de nos collègues ont regretté, en commission, la complexité qui, selon eux, en résulterait.

Chacun sait aussi que les besoins sont importants et que la difficulté de trouver un mode d'accueil est bien souvent un obstacle à la poursuite d'une activité. C'est alors, dans la quasi-totalité des cas, la mère qui renoncera à la sienne.

M. Marcel Rogemont.

Très juste ! Vous avez raison de le rappeler !

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure.

Merci, cher collègue.

Actuellement, la moitié des enfants de moins de trois ans sont gardés par un de leurs parents qui perçoit, dans un cas sur deux, l'allocation parentale d'éducation, 24 % sont gardés hors du domicile sans aide publique et seulement 9 % bénéficient d'une place en crèche. Les autres, 17 %, sont accueillis selon un mode de garde individuel.

Pas toujours adaptées aux demandes des parents, les structures collectives sont, en outre, mal réparties sur le territoire, et la scolarisation à deux ans est une réponse qui nécessite des moyens spécifiques et dont on ne peut se contenter. Un fonds d'investissement privilégiant les solutions innovantes et intercommunales, des financements supplémentaires pour le fonctionnement - 1,4 milliard au titre du fonds d'action sociale de la CNAF -, une réforme des modes de fonctionnement des structures collectives, la modification du subventionnement par les CAF pour que les collectivités aux populations les plus défavorisées ne soient pas pénalisées forment un ensemble cohérent qui, si on y ajoute la majoration de l'aide à l'emploi d'une assistante maternelle pour les familles les plus modestes, devrait favoriser un rééquilibrage sur le territoire tout en ouvrant aux parents une plus grande liberté de choix.

J'évoquerai, pour terminer, l'aide à la reprise d'activité.

Trop souvent, l'éloignement durable du marché du travail résultant de la prise d'un congé parental d'éducation rend difficile le retour à une activié professionnelle, tout particulièrement pour les femmes qui étaient déjà en situation de travail précaire au moment de la prise du congé -, voire sans emploi. Deux dispositifs sont destinés à faciliter leur réinsertion ou insertion : la possibilité de cumuler pendant un temps l'allocation parentale d'éducation et l'exercice d'une activité et l'aide financière accordée par l'ANPE depuis juillet aux plus en difficulté d'entre elles pour pouvoir organiser la garde de leurs enfants. Les femmes, qu'elles aient ou non décidé de suspendre leur activité pour rester auprès de leur jeune enfant, doivent pouvoir, le moment venu, profitez, elles aussi, de l'amélioration du marché de l'emploi.

A ces mesures, il faut ajouter la continuité de l'action des caisses par leurs dotations d'action sociale, notamment dans le soutien à la fonction parentale : la médiation familiale bénéficie, cette année encore, de moyens supplémentaires.

Toutes ces mesures, prises en concertation avec les associations familiales lors de la Conférence de la famille qui se réunit maintenant régulièrement depuis trois ans, complètent les mesures déjà prises depuis 1998, que Mme Gillot connaît bien puisque, avant moi, elle a défendu le budget de la famille : l'augmentation et la pérennisation de l'allocation de rentrée scolaire, la prolongation des allocations familiales jusqu'à vingt ans, l'allocation logement et le complément familial jusqu'à vingt et un ans, l'augmentation des aides au financement des crèches, la création des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents. Nous pouvons ainsi mieux concilier la reconnaissance du rôle des familles comme lieu d'amour, d'affection, d'écoute, de solidarité, d'éducation, de repère pour l'enfant et la conduite d'une politique d'appui aux familles ayant la volonté de réellement répondre à leurs besoins.

Pour conclure cette intervention, je soulignerai l'importance que j'accorde, dans un souci d'équité, à la situation des conjoints survivants en insistant sur la nécessité d'ouvrir l'assurance veuvage aux veufs et aux veuves ayant eu ou non un enfant, et sur ce que l'on appelle les pluripensions. Actuellement, des personnes veuves peuvent se retrouver défavorisées par les règles de calcul de la pension de réversion lorsqu'il y a plusieurs régimes de sécurité sociale de base par rapport à celles affiliées à un seul régime.

M. Marcel Rogemont.

Très bien !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Exact !


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Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure.

Je souhaite que nous puissions avancer sur ces points lorsque nous aborderons la branche vieillesse.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, faiblement excédentaire l'année dernière, la sécurité sociale affiche cette année un solde positif d'une vingtaine de milliards. L'année prochaine, selon toute vraisemblance, ce solde devrait atteindre une trentaine de milliards. Chiffres spectaculaires, à plus forte raison si l'on se souvient de ce que furent auparavant les déficits : en 1993, une soixantaine de milliards pour le régime général, toutes branches confondues en 1994 et 1995 pour la seule branche maladie, respectivement quarante et trente-cinq milliards de francs.

C'est donc incontestablement un succès. Il n'y a pas de honte à le dire même si certains, on peut le comprendre, ont quelque difficulté à l'admettre.

A cette occasion, qu'il me soit permis de rendre hommage, madame la ministre, à celle qui vous a précédée dans vos fonctions, Martine Aubry. Son action détermin ée, sous l'autorité bien évidemment du Premier ministre, est évidemment pour beaucoup dans les résultats que, d'une certaine manière, nous fêtons à l'occasion de ce débat.

Ce succès indiscutable est aussi un démenti. Un démenti à l'adresse de ceux qui déduisaient des déficits récurrents de notre protection sociale que celle-ci traversait une crise philosophique, estimant que ces déficits révélaient un poids supposé excessif de notre protection sociale dans notre économie alors que nous sommes, Dieu merci ! majoritaires à penser que la protection sociale, via la solidarité nationale, demeure un élément essentiel de l'unité et de la cohésion nationales. Moins éclatant l'année dernière, ce démenti se manifeste de façon tout à fait franche cette année et il en sera bien évidemment de même l'année prochaine.

A quoi est dû ce succès ? Aux mesures prises par le Gouvernement, bien sûr. A la croissance aussi, évidemment. Sur ce constat, tout le monde s'accorde, même si les opinions peuvent diverger lorsqu'il s'agit de savoir les raisons pour lesquelles notre pays connaît une croissance aussi manifestement élevée.

Chez certains, il est de bon ton de prendre un air entendu et d'expliquer que la croissance que connaît notre pays n'est au fond que la conséquence d'une conjoncture internationale favorable. On peut se demander si cette conjoncture est suffisante, voire nécessaire.

Est-elle suffisante ? C'est discutable. Depuis 1990, les

Etats-Unis d'Amérique du Nord connaissent une croissance tout à fait spectaculaire et l'on peut se demander pourquoi, s'il suffisait d'une conjoncture internationale favorable, celle-ci, dans une économie mondialisée, aurait mis sept ans, voir huit, à traverser l'Atlantique pour aborder nos rivages. On peut également se demander pourquoi deux voisins très proches, l'Italie et l'Allemagne, ne connaissent un mouvement comparable que depuis quelques mois. Autrement dit, après avoir mis huit ans à traverser l'Atlantique, la croissance aurait mis trois ans ou un peu plus, à traverser notre pays et à franchir les cols des Alpes et le cours du Rhin ! Si la conjoncture internationale favorable est évidemment souhaitable - qui soutiendrait le contraire ? -, elle saurait difficilement expliquer à elle seule la situation économique de notre pays.

Est-elle nécessaire pour autant ? Là encore, un exemple très récent incite à se poser la question. Lorsque la crise asiatique, puis la crise russe, puis la crise latino-américaine ont éclaté en rafales successives, nombreux furent nos collègues, d'un côté de l'hémicycle, à juger déraison nables les prévisions économiques sur lesquelles le Gouvernement fondait sa loi de finances et sa loi de financement pour 1998. Force est de reconnaître, en dépit d'un certain trou d'air, que les hypothèses retenues se sont avérées exactes.

Ni nécessaire ni suffisante, la croissance que connaît notre pays ne doit évidemment pas tout à la conjoncture internationale. La vérité, c'est que notre pays va bien, et ce depuis le milieu des années 1990. C'est vers 19941995 que commença la période au cours de laquelle notre pays, après dix ans d'efforts considérables consentis par nos concitoyens sous l'autorité de cinq ou six gouvernements d'inspiration politique très variable, vous me l'accorderez, vit progressivement l'inflation maîtrisée, la contrainte extérieure cesser de ressembler à une menace, un commerce extérieur redevenir florissant, la santé financière de nos entreprises redevenir tout à fait satisfaisante et, pour tout dire, une compétitivité n'ayant plus rien à envier aux pays auxquels nous nous comparons habituellement.

Le problème est que fut alors commise une monumentale erreur de diagnostic. Alors que tout était prêt pour une relance de la consommation et des investissements, c'est malheureusement une politique contraire à celle qu'il aurait fallu mener qui fut décidée.

Par qui fut inspiré ce diagnostic ? Je l'ignore. Je sais en tout cas qui l'a mis en oeuvre et l'a assumé politiquement, et les deux conséquences qui en ont découlé. La première fut économique et fiscale, liée à un relèvement massif des impôts de plus d'une centaine de milliards de francs sur une seule année, déprimant une économie qui ne demandait qu'à repartir. La deuxième conséquence fut d'ordre politique : je veux bien évidemment parler de la dissolution de 1997.

Dès la seconde moitié des années 90, les temps étaient mûrs pour une politique de relance et pour une action très volontariste en faveur de l'emploi. C'est cette polit ique déterminée, volontaire, de créations massives d'emplois qui est menée depuis la mi-1997 - en fait, surtout depuis 1998, une fois mis en oeuvre les textes essentiels votés à la fin de l'année 1997.

Cette politique a évidemment porté ses fruits : les années 1998, 1999 et 2000 ont vu en moyenne se créer près de 400 000 à 500 000 emplois nouveaux ce que notre pays n'avait jamais connu, à deux exceptions près peut-être : en 1963, avec l'arrivée massive de nos compatriotes rapatriés d'Afrique du Nord, et en 1969 où, à la suite des accords dits de Grenelle, des centaines de milliers d'emplois furent également créés, avec toutefois une inflation de 8 %.

Ces créations massives d'emplois doivent évidemment beaucoup aux mesures que le Gouvernement a décidées, car celles-ci ont permis de rétablir chez nos concitoyens une confiance sans laquelle la croissance ne serait pas au rendez-vous aujourd'hui.

Quelles conclusions en tirer pour le reste de la mandature ? Il faut naturellement maintenir cette politique et, par voie de conséquence, y consacrer l'essentiel de notre


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croissance, n'en déplaise à ceux qui stigmatisent des financements parfois, il faut le reconnaître, un peu opaques du FOREC. Ce qui suppose d'engager une politique fiscale qui permette aux revenus nets de nos compatriotes de s'accroître. C'est la raison pour laquelle il est prévu dans ce projet de loi une réduction de la CSG qui se traduira par un allègement d'une trentaine de milliards de francs d'ici à trois ans, puisque seront concernés les salaires allant jusqu'à 1,4 fois le SMIC. A cet égard, qu'il me soit permis de faire plusieurs observations.

Premièrement, il est amusant, sinon piquant, de voir ceux qui furent les adversaires les plus rigoureux de la CSG se muer aujourd'hui en partisans non moins acharnés de son maintien,...

M. Alain Calmat.

Absolument !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

... à croire que le dispositif était finalement très satisfaisant ! Parions que ceux qui aujourd'hui critiquent l'allègement de la CSG le défendront dans quelques années... Je regrette seulement de voir l'opposition s'obstiner dans ce domaine à avoir, comme on dit aux échecs, un coup de retard,...

M. Marcel Rogemont.

Dès que la CSG sera sur la feuille de paie, tout le monde la défendra !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

... mais l'essentiel est que les choses avancent.

Deuxième remarque : dès lors que la CSG fait l'objet d'un barème, ce que l'on peut comprendre en voyant son rendement, supérieur à celui de l'impôt sur le revenu, il ne faudra pas s'arrêter à 1,4 SMIC. Comme l'a très bien dit notre collègue Alfred Recours, il conviendra de prolonger la réforme de la CSG jusqu'à 1,8 SMIC.

Troisième observation : on ne saurait réserver cette mesure aux seuls actifs. Il est donc de très bonne politique de prévoir une réforme de la CRDS en faveur des chômeurs et des retraités non imposables.

Dernière observation, de forme celle-là : la loi organique de 1996 n'a pas formellement inscrit la CRDS et la CADES dans le champ de la protection sociale. Autrement dit, toutes les dispositions relatives à la CADES et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale ne peuvent figurer dans la loi de financement que nous nous préparons à examiner ; elles doivent en revanche impérativement apparaître dans la loi de finances initiale, c'est-à-dire dans le budget de l'Etat.

Au stade où nous en sommes, que faire de cette croissance, que faire d'une protection sociale excédentaire ? La rendre évidemment tout à la fois plus juste et plus redistributive. Aussi voudrais-je évoquer rapidement l'assurance maladie.

Rapidement, dis-je, car j'ai longuement hésité avant de me permettre de commenter, du haut de cette tribune, les propos du chef de l'Etat. Etait-il en effet convenable qu'un membre de la représentation nationale se livre dans cette enceinte à quelques commentaires sur le Président de la République ? Mais après tout, me suis-je dit, le Président de la République est celui de tous les Français ; ses propos, dès lors qu'ils étaient publics, s'adressaient à tous...

M. Marcel Rogemont.

Donc à vous !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

... et il aurait été paradoxal d'interdire à un membre de la représentation nationale et de la majorité de les commenter.

M. Marcel Rogemont.

Vous avez raison !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Le Président de la République s'est interrogé, pour s'en inquiéter, sur les dérapages, réels ou supposés, de l'assurance maladie.

Mme Odette Grzegrzulka.

Qu'il s'occupe de politique étrangère !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Cela m'amène à poser une question, à exprimer une crainte et manifester une volonté.

Pour quelle raison serait-on, au motif qu'il s'agit de dépenses de santé, dans l'impossibilité de consacrer à ce secteur des dépenses en croissance comparable à celle de la richesse nationale ? On peut se poser la question.

M. Marcel Rogemont.

Très bien ! Il a raison !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Je ne vois, pour ma part, rien de scandaleux à consacrer à ce secteur des dépenses dont le montant croîtrait à proportion de notre richesse nationale. Dès lors, pourquoi s'inquiéter du dérapage des dépenses de santé puisque « , rebasage » et ONDAM aidant, celles-ci ne fait que traduire une croissance tout à fait comparable à celle du produit intérieur brut ?

M. Alain Calmat.

C'est le double langage à l'égard des médecins !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

En voyant cette inquiétude se manifester au plus haut niveau de l'Etat, je ne puis qu'exprimer une crainte, celle de voir le plus haut responsable de notre pays appeler, pour maîtriser les dépenses qu'il juge excessives, à des diminutions de prestations, d'honoraires de médecins ou encore des moyens alloués aux hôpitaux. Nombreux furent du reste nos collègues de l'opposition, ici même, l'année dernière, à juger excessifs les moyens que nous accordions aux hôpitaux dans la loi de financement !

M. Michel Terrot et Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

C'est faux !

M. Marcel Rogemont.

Ils ne sont pas d'accord avec le Président de la République !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Il est à noter que nous les avons beaucoup moins entendus lorsque des grèves ont éclaté et que des moyens supplémentaires ont dû être alloués aux structures hospitalières !

M. Michel Terrot.

Croyez-vous vraiment à ce que vous dites ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Si vraiment le chef de l'Etat souhaitait - mais je ne veux pas trop l'accabler, ce serait tout à fait inconvenant -...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Non, il ne faut pas !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

... que la représentation nationale vote de telles dispositions, je réponds tout de suite que telle ne serait pas mon intention. Mais la suite du débat donnera à certains de vos collègues, passés maîtres dans l'art de l'exégèse des propos présidentiels, l'occasion à n'en pas douter de nous éclairer sur le sens profond de ces déclarations.

M. Alain Calmat.

Ils ont le même discours !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Un mot enfin sur la branche vieillesse. Il me paraît tout à fait souhaitable, madame la ministre, que la structure appelée à gérer le fonds de garantie des retraites fasse l'objet de quelques éclaircissements. Sous quels délais ces sommes


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seront-elles déposées ? Selon quelles modalités seront-elles gérées ? Quels acteurs s'occuperont de cette gestion, avec quelle légitimité ? J'ai donc présenté à la commission des finances, qui l'a retenu, un amendement dans ce sens.

L'objectif n'est pas, on me pardonnera de le dire aussi crûment, de le voir adopté, mais d'ouvrir un débat et de permettre au Gouvernement de nous éclairer sur ses intentions en la matière.

En conclusion, mes chers collègues, ce projet doit être voté, parce qu'il tient compte de la croissance et que celle-ci ne pourra qu'être confortée si nous l'adoptons, parce qu'il permet aussi de redistribuer les fruits de la croissance. En fait, madame la ministre, vous ne saurez recevoir d'accueil plus favorable dans les nouvelles fonctions qui sont les vôtres que celui que nous manifesterons en votant les dispositions que vous nous proposez.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles familiales et sociales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Qu'il me soit permis, madame la ministre, de vous saluer dans vos nouvelles fonctions, en vous assurant que notre commission travaillera avec vous dans la plus totale concertation, c omme nous l'avons fait pendant trois ans avec Mme Aubry à laquelle je rends hommage. Vous pouvez compter sur le soutien de la majorité plurielle, quand bien même l'adhésion d'une majorité est toujours un combat à mener, et sur l'amitié de beaucoup d'entre nous, ce qui en politique n'est jamais inutile.

Depuis trois ans, cette commission a démontré une grande capacité de travail, de réflexion, de préparation, mais aussi - le fait est plus nouveau - de suivi des textes, dans toute sa diversité évidemment, parfois avec ses divergences - vous venez du reste d'entendre M. Jacquat exprimer une musique quelque peu différente.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Mais de qualité !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Les contacts réguliers que nous entretenons avec la commission sociale de la Cour des comptes, l'excellent travail réalisé par M. Evin dans son rapport sur la décentralisation, tout comme ceux de M. Philippe Nauche, de Mme Catherine Génisson, de M. Francis Hammel, témoignent de notre capacité d'apporter au Gouvernement coopération, soutien et réflexion.

Je tiens à remercier les quatre rapporteurs de la commission des affaires sociales, M. Recours, M. Evin, Mme Clergeau et M. Jacquat pour la qualité de leurs rapports, sans oublier l'excellent rapporteur pour avis de la commission des finances qui nous a permis d'inscrire notre réflexion dans une vision plus planétaire du développement économique. Il était bon qu'il apportât cette touche supplémentaire à la qualité de nos travaux.

Je me contenterai de reprendre quelques-uns des points forts de leurs rapports en les assortissant de remarques un peu plus générales.

J'aurais souhaité que M. Denis Jacquat se félicite davantage qu'il ne l'a fait de l'arbitrage du Gouvernement sur l'augmentation des retraites - 2,2 %, plus 0,5 % ce n'est somme toute pas négligeable. Je n'irai pas jusqu'à lui rappeler comment avaient évolué les retraites sous le gouvernement de M. Juppé, de 1995 à 1997...

M. Denis Jacquat, rapporteur.

C'est pour cela que nous avons perdu les élections ! (Sourires.)

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... par respect pour son rôle de rapporteur de l'opposition. Cela dit, je soutiens pour ma part l'amendement d'appel de M. Cahuzac ainsi que celui de M. Jacquat, tant il est vrai que la gestion du fonds de réserve des pensions suscite plusieurs interrogations.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

C'est ce qu'on appelle l'opposition constructive !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Certes, l'abondement de plus de 50 milliards à la fin de cette année n'est pas négligeable, même si nous sommes encore loin de l'objectif. Restent toutefois en suspens quelques questions auxquelles, je suis sûr, vous apporterez précision : quelle forme de paritarisme sera retenue pour surveiller le fonds ? Plusieurs propositions ont été avancées.

Comment sera assurée la pérennisation de l'alimentation de ce fonds ? Pour tous les citoyens concernés, l'existence de ce fonds de réserve - qui d'ailleurs porte bien son nom - est fondamentale. Le voilà en place : il faut maintenant le gérer. Il faut que le conseil de surveillance puisse exprimer un avis en fonctionnant sous une forme paritaire ; il faut enfin le faire perdurer pour les années à venir.

Mme Clergeau, avec toute sa sensibilité, a, me semblet-il, bien démontré, comme vous l'avez fait vous-même, comment nous construisons, année après année, une grande politique de famille...

M. Denis Jacquat, rapporteur.

En effet !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... et le choix d'en accentuer un aspect particulier chaque année me semble tout à fait judicieux. Cette année a été privilégiée la politique en direction de la petite enfance Mme Clergeau l'a expliquée avec beaucoup de précision : modulation en fonction du revenu des familles pour l'accueil, réforme du financement de l'accueil. C'est là quelque chose de très important, qu'il conviendrait d'ailleurs de lier, on le fait trop peu souvent, avec la remontée de la démographie perceptible depuis quelques années le fait n'est pas mince dans un pays où on a entendu beaucoup de choses en la matière.

Mme Marie-Françoise Clergeau a fort bien expliqué ces choix du Gouvernement. Et si les amendements relatifs à la situation des veuves n'ont pu être retenus par le jeu, parfaitement normal, de l'application de l'article 40, je ne doute pas, madame la ministre, que le Gouvernement les reprendra à son compte.

M. Evin, de son côté, a également beaucoup travaillé et connaît fort bien ses matières. Je reprendrai simplement de son rapport quelques points à mes yeux essentiels. L'article 34 sur l'urgence notamment aborde un aspect fondamental.

L'accroissement de presque 45 % en huit ans du nombre d'accueils en urgence me paraît très significatif d'une évolution du rôle de l'urgence, mais également du rôle de la médecine générale, particulièrement en milieu rural et du problème de la démographie médicale, sur lequel nous devrons nous interroger.

Sur l'article 42, plusieurs amendements importants vous seront proposés, qui ont trait au fonds de l'amiante.

Hier encore, le recours présenté devant le tribunal de grande instance par la famille d'un docker décédé des conséquences de l'amiante a été rejeté au motif que le lien entre l'exposition à l'amiante et la nature de la maladie n'était pas suffisamment établi. Les amendements présentés par M. Evin permettront d'améliorer encore la qualité de cet article. Enfin, les dispositions de l'article 29


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

relatives aux réseaux et aux filières traduisent une volonté politique et un choix structurel. A cet égard, l'amendement déposé par M. Evin est d'une portée considérable : le but est d'amorcer la décentralisation de l'organisation des réseaux et des filières, l'agrément relevant de l'exécutif de l'ARH sur rapport du directeur de l'URCAM. Le développement de réseaux et filières de soins est probablement une des mesures structurelles indispensables pour garantir non seulement la maîtrise, mais aussi la qualité des dépenses de santé. Je viens d'en voir un exemple à Lens, où a été mis en place un réseau permettant une prise en charge totale des habitants de sept communes et liant dans la même démarche hôpital public, clinique privée, médecins généralistes et spécialistes.

C'est l'archétype de ce qu'il nous faut développer. A cet égard, l'amendement de M. Evin permettra d'aller plus loin.

Pour ce qui est de l'ONDAM, M. Recours en a parlé dans son excellent rapport, le Gouvernement a rendu un arbitrage-clé : son évolution sera de 3,5 % après rebasage.

A ce propos, et après M. Cahuzac, je voudrais présenter quelques remarques, sur lesquelles je conclurai mon intervention.

La santé est, aujourd'hui - vous avez vous-même utilisé ces mots, madame la ministre - un bien premier, et le deviendra de plus en plus dans les sociétés des pays développés. C'est légitime et le phénomène ne peut que s'accentuer, ce qui implique de prendre en compte un certain nombre de problèmes fondamentaux.

Le premier est celui de la sécurité, vous l'avez évoqué.

Il faut saluer à cet égard la création des agences de sécurité tant pour les aliments que pour les médicaments, et bientôt de l'agence santé-environnement qui est en cours de navette.

Ensuite, les progrès considérables en chirurgie et l'invention de molécules renforcent la demande de médicaments innovants.

Il ne faut pas pour autant négliger la lutte contre les inégalités. Dans ma région, l'inégalité devant la mort est flagrante : l'écart est presque de quatre ans par rapport aux autres régions et atteint dix ans dans certains bassins d'emploi. Il faut rechercher les relations entre l'inégalité devant le système de santé et devant la mort, et les inégalités sociales. Qui mieux que notre gouvernement et nous-mêmes pourrait le faire ? Cependant, n'oublions pas que pèse sur nous une contrainte : la maîtrise du niveau de prélèvements. Raisonner, comme l'ont fait M. Recours et M. Cahuzac, par rapport à l'évolution du PIB en valeur, c'est-à-dire la véritable richesse, est une démarche juste. On peut se féliciter que, sur les trois dernières années, l'évolution ait atteint le niveau du PIB en valeur, ou un niveau légèrement inférieur. C'est la meilleure réponse à fournir à ceux qui, comme certain Président de la République, jouent sur les dérives tout en appelant à un corporatisme croissant.

M. Alain Calmat.

Absolument !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Des progrès considérables ont été réalisés au cours des dernières années pour améliorer les outils destinés à assurer à la fois qualité des soins et maîtrise des dépenses : PMSI, évolution des points ISA tenant compte de l'invention de nouvelles molécules, évaluation du SMR - service médical rendu - des médicaments - presque 2 700 médicaments ont été examinés à ce jour, mise en place par la CNAM du projet Médicam, qui codifie et permet de suivre l'évolution des médicaments, approche de la CNAM en droits constatés, ce que nous réclamions depuis longtemps. Il s'agit là d'une évolution positive vers une meilleure maîtrise. Mais il faut encore perfectionner ces instruments. N'oublions pas la mise en place progressive, en dépit de certaines lenteurs, de l'outil informatique.

J'en suis d'accord avec M. Evin, il nous faut mettre à plat l'ensemble de la politique conventionnelle. Il est également vrai que les relations entre la caisse centrale et les caisses primaires sont à perfectionner. Nous attendons avec impatience la loi de modernisation sociale qui devrait permettre à la fois de mieux respecter les droits des malades et d'engager les réformes structurelles dont nous avons besoin.

A travers l'ONDAM, nous nous employons à faire pas à pas la synthèse entre plusieurs logiques : celles du financement, de l'efficience et de l'égalité sociale. Pour réaliser cette synthèse, nous avons besoin d'une maîtrise médicalisée et d'une meilleure adaptation à l'expression des besoins. Cela pose le problème des rendez-vous obligatoires pour la CNAM - nous y reviendrons en cours de débat - et de ce que certains d'entre nous ont appelé un

« rebasage glissant », permettant l'ajustement des moyens aux difficultés constatées.

Voilà une grande démarche à engager. C'est sans doute la première fois qu'est affirmée la nécessité de cet ensemble extrêmement complexe. En témoigne le très beau tableau que vous a offert M. Alfred Recours, madame la ministre.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Au nom des rapporteurs !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Au travers de ces rapports, nous voulons exprimer notre forte volonté politique de trouver un équilibre.

Madame la ministre, je suis certain que la suite des débats nous permettra d'approfondir notre réflexion à cet égard. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

8

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

Mme la présidente.

Ce soir, à vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, no 2606 : MM. Alfred Recours, Claude Evin, Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tomes I à V du rapport no 2633), M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (avis no 2631).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures ving-cinq.)

ORDRE DU JOUR ÉTABLI EN CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS (Réunion du mardi 24 octobre 2000) L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra du mardi 24 octobre au vendredi 17 novembre 2000 inclus a été ainsi fixé : Mardi 24 octobre 2000, l'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures : Explications de vote et vote par scrutin public sur la première partie du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585, 2624 à 2629).

Discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (nos 2606-2633-2631).

Mercredi 25 octobre 2000, le matin, à 9 heures, l'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures, jeudi 26 octobre 2000, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures, et, éventuellement, vendredi 27 octobre 2000, le matin, à 9 heures, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (nos 2606, 2633, 2631).

Lundi 30 octobre 2000, le matin, à 10 heures, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585, 2624 à 2629) : Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat ; Légion d'honneur et ordre de la Libération ; Aménagement du territoire.

Mardi 31 octobre 2000 : Le matin, à 9 heures : Culture.

L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement : Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (nos 2606, 2633, 2631) ; Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.

Jeudi 2 novembre 2000 : L'après-midi, à 15 heures : Tourisme.

Le soir, à 21 heures : Recherche et technologie.

Vendredi 3 novembre 2000, le matin, à 9 heures, l'aprèsmidi, à 15 heures, et, éventuellement, le soir, à 21 heures : Anciens combattants ; Environnement.

Lundi 6 novembre, le matin, à 10 heures, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Défense.

Mardi 7 novembre : Le matin, à 9 heures : Affaires étrangères.

L'après-midi, à 15 heures : Questions au Gouvernement.

Le soir, à 21 heures : Suite de l'ordre du jour du matin.

Mercredi 8 novembre 2000, l'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures : Agriculture et pêche ; BAPSA.

Jeudi 9 novembre, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Travail et emploi.

Vendredi 10 novembre, le matin, à 9 heures, et l'après-midi, à 15 heures : Equipements et transports.

Lundi 13 novembre 2000, le matin, à 9 heures : Justice.

L'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Ville (*) ; Enseignement supérieur (*) ; Enseignement scolaire.

Mardi 14 novembre 2000, le matin, à 9 heures : Jeunesse et sports (*) ; Service du Premier ministre ; services généraux, SGDN, Conseil économique et social, Plan, Journaux officiels.

L'après-midi, à 15 heures : Questions au Gouvernement.

Le soir, à 21 heures : Communication.

Mercredi 15 novembre 2000, le matin, à 9 heures : Outre-mer.

L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures : Intérieur (*) ; Outre-mer (suite)

Jeudi 16 novembre 2000, le matin, à 9 heures : Fonction publique et réforme de l'Etat.

L'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Logement (*) ; Industrie, Poste et télécommunications.

Vendredi 17 novembre 2000, le matin, à 9 heures, l'aprèsmidi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Economie et finances : charges communes, services financiers, monnaies et médailles, comptes spéciaux du Trésor, taxes parafiscales : commerce extérieur (*) ; Solidarité et santé ; économie solidaire.

(*) Nouvelle procédure.

C ALENDRIER DES SÉANCES MENSUELLES D'INITIATIVE PARLEMENTAIRE ET DES SÉANCES DE QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT (novembre 2000 juin 2001) Mardi 28 novembre 2000 : questions orales sans débat.

Mardi 5 décembre 2000 : séance mensuelle (groupe RPR), poursuivie le jeudi 7 décembre 2000.

Mardi 12 décembre 2000 : séance mensuelle (groupe communiste), poursuivie le jeudi 14 décembre 2000.

Mardi 19 décembre 2000 : questions orales sans débat.

Mardi 9 janvier 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 16 janvier 2001 : séance mensuelle (groupe UDF), poursuivie le jeudi 18 janvier 2001.

Mardi 23 janvier 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 30 janvier 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 6 février 2001 : séance mensuelle (groupe socialiste), poursuivie le jeudi 8 février 2001.

Mardi 27 mars 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 3 avril 2001 : séance mensuelle (groupe DL), poursuivie le jeudi 5 avril 2001.

Mardi 17 avril 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 24 avril 2001 : séance mensuelle (groupe RCV), poursuivie le jeudi 26 avril 2001.

Mardi 15 mai 2001 : séance mensuelle (groupe RPR), poursuivie le jeudi 17 mai 2001.

Mardi 22 mai 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 29 mai 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 5 juin 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 12 juin 2001 : séance mensuelle (groupe socialiste), poursuivie le jeudi 14 juin 2001.

Mardi 19 juin 2001 : questions orales sans débat.

Mardi 26 juin 2001 : questions orales sans débat.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 1re séance du mardi 24 octobre 2000 SCRUTIN (no 263) sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2001 (vote unique).

Nombre de votants .....................................

564 Nombre de suffrages exprimés ....................

522 Majorité absolue ..........................................

262 Pour l'adoption ...................

272 Contre ..................................

250 L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (254) : Pour : 247. - MM. Yvon Abiven , Maurice Adevah-Poeuf , Stéphane Alaize , Damien Alary , Mme Sylvie AndrieuxBacquet , MM. Léo Andy , Jean-Marie Aubron , JeanMarc Ayrault , Jean-Paul Bacquet , Dominique Baert , Jean-Pierre Baeumler , Jean-Pierre Balduyck , Jean-Pierre Balligand , Gérard Bapt , Alain Barrau , Jacques Bascou , Christian Bataille , Jean-Claude Bateux , Jean-Claude B eauchaud , Mme Yvette Benayoun-Nakache , MM. Henri Bertholet , Eric Besson , André Billardon , Jean-Pierre Blazy , Serge Blisko , Patrick Bloche , Jean-

M arie Bockel , Jean-Claude Bois , Daniel Boisserie , Maxime Bono , Augustin Bonrepaux , André Borel , Jean-

M ichel Boucheron , Jean-Claude Boulard , Didier Boulaud , Pierre Bourguignon , Christian Bourquin , Mme Danielle Bousquet , MM. Jean-Pierre Braine , P ierre Brana , Jean-Paul Bret , Mme Nicole Bricq ,

M M. François Brottes , Vincent Burroni , Marcel C abiddu , Alain Cacheux , Jérôme Cahuzac , Alain C almat , Jean-Christophe Cambadelis , Thierry C arcenac , Christophe Caresche , Mme Odette Casanova , MM. Laurent Cathala , Jean-Yves Caullet , B ernard Cazeneuve , Jean-Paul Chanteguet , Michel Charzat , Guy-Michel Chauveau , Jean-Claude Chazal , D aniel Chevallier , Didier Chouat , Alain Claeys , Mme Marie-Françoise Clergeau , MM. Jean Codognès , Pierre Cohen , François Colcombet , Mme Monique C ollange , MM. François Cuillandre , Jean-Claude D aniel , Jacky Darne , Camille Darsières , Michel Dasseux , Mme Martine David , MM. Bernard Davoine , Philippe Decaudin , Marcel Dehoux , Jean Delobel , François Deluga , Jean-Jacques Denis , Mme Monique Denise , MM. Bernard Derosier , Michel Destot , Paul Dhaille , Marc Dolez , François Dosé , René Dosière , Mme Brigitte Douay , MM. Julien Dray , Tony Dreyfus , P ierre Ducout , Jean-Pierre Dufau , Mme Laurence D umont , MM. Jean-Louis Dumont , Dominique Dupilet , Jean-Paul Dupré , Yves Durand , Jean-Paul Durieux , Philippe Duron , Henri Emmanuelli , Jean Espilondo , Michel Etiévant , Claude Evin , Alain FabrePujol , Albert Facon , Mme Nicole Feidt , MM. JeanJacques Filleul , Jacques Fleury , Jacques Floch , Pierre Forgues , Raymond Forni , Jean-Louis Fousseret , Michel F rançaix , Christian Franqueville , Georges Frêche , Michel Fromet , Gérard Fuchs , Robert Gaïa , Yann Galut , Roland Garrigues , Jean-Yves Gateaud , Jean G aubert , Mme Catherine Génisson , MM. André Godin , Gaëtan Gorce , Alain Gouriou , Gérard Gouzes , B ernard Grasset , Michel Grégoire , Mmes Odette G rzegrzulka , Paulette Guinchard-Kunstler , MM. Jacques Guyard , Francis Hammel , Mme Cécile Helle , MM. Edmond Hervé , Jacques Heuclin , François Hollande , Jean-Louis Idiart , Mme Françoise Imbert , MM. Claude Jacquot , Serge Janquin , Jacky Jaulneau , Armand Jung , Jean-Noël Kerdraon , Bertrand Kern , Jean-Pierre Kucheida , André Labarrère , Mme Conchita Lacuey , MM. Jérôme Lambert , François Lamy , PierreC laude Lanfranca , Jean Launay , Mmes Jacqueline Lazard , Christine Lazerges , MM. Gilbert Le Bris , André Lebrun , Jean-Yves Le Déaut , Mme Claudine Ledoux , MM. Jean-Yves Le Drian , Michel Lefait , Jean Le Garrec , Jean-Marie Le Guen , Patrick Lemasle , Georges Lemoine , Bruno Le Roux , René Leroux , JeanClaude Leroy , Mme Raymonde Le Texier , MM. Alain Le Vern , Michel Liebgott , Mme Martine LignièresC assou , MM. Gérard Lindeperg , François Loncle , Bernard Madrelle , Guy Malandain , René Mangin , JeanPierre Marché , Daniel Marcovitch , Didier Marie , JeanP aul Mariot , Mme Béatrice Marre , MM. Daniel Marsin , Marius Masse , Didier Mathus , Gilbert Maurer , Guy Menut , Louis Mermaz , Louis Mexandeau , Jean

M ichel , Didier Migaud , Mme Hélène Mignon ,

M M. Gilbert Mitterrand , Yvon Montané , Gabriel Montcharmont , Arnaud Montebourg , Philippe Nauche , B ernard Nayral , Henri Nayrou , Mme Véronique N eiertz , MM. Alain Néri , Michel Pajon , Joseph Parrenin , Germinal Peiro , Jean-Claude Perez , JeanPierre Pernot , Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont , G eneviève Perrin-Gaillard , M. François Perrot ,

M mes Annette Peulvast-Bergeal , Catherine Picard , MM. Paul Quilès , Alfred Recours , Gérard Revol ,

M me Marie-Line Reynaud , M. Patrick Rimbert ,

M me Michèle Rivasi , MM. Alain Rodet , Marcel R ogemont , Bernard Roman , Yves Rome , Gilbert R oseau , Joseph Rossignol , Mme Yvette Roudy , MM. Jean Rouger , René Rouquet , Michel SainteMarie , Mme Odile Saugues , MM. Bernard Seux , P atrick Sève , Henri Sicre , Michel Tamaya ,

M me Christiane Taubira-Delannon , MM. Yves T avernier , Pascal Terrasse , Gérard Terrier , Mmes Marisol Touraine , Odette Trupin , MM. Joseph Tyrode , Daniel Vachez , André Vallini , André Vauchez , Michel Vauzelle , Michel Vergnier , Alain Veyret , Alain Vidalies , Jean-Claude Viollet , Philippe Vuilque et Kofi Yamgnane.

Contre : 1. - M. Yves Dauge.

N on-votant : M. François Patriat (membre du Gouvernement).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 24 OCTOBRE 2000

Groupe RPR (138) : Contre : 135. - M. Bernard Accoyer , Mme Michèle Alliot-

M arie , MM. René André , André Angot , Philippe Auberger , Pierre Aubry , Jean Auclair , Gautier Audinot , Mmes Martine Aurillac , Roselyne Bachelot-Narquin , MM. Edouard Balladur , Jean Bardet , François Baroin , Jacques Baumel , Christian Bergelin , André Berthol , Léon Bertrand , Jean-Yves Besselat , Jean Besson , Franck Borotra , Bruno Bourg-Broc , Michel Bouvard , Victor B rial , Philippe Briand , Michel Buillard , Christian Cabal , Gilles Carrez , Mme Nicole Catala , MM. JeanCharles Cavaillé , Richard Cazenave , Henry Chabert , Jean-Paul Charié , Jean Charroppin , Philippe Chaulet , Jean-Marc Chavanne , Olivier de Chazeaux , François Cornut-Gentille , Alain Cousin , Jean-Michel Couve , Charles Cova , Henri Cuq , Jean-Louis Debré , Lucien D egauchy , Arthur Dehaine , Jean-Pierre Delalande , Patrick Delnatte , Jean-Marie Demange , Xavier Deniau , Yves Deniaud , Patrick Devedjian , Eric Doligé , Jean-

M ichel Dubernard , Jean-Pierre Dupont , Nicolas D upont-Aignan , Christian Estrosi , Jean-Claude Etienne , Jean Falala , Jean-Michel Ferrand , François Fillon , Roland Francisci , Pierre Frogier , Yves Fromion , Robert Galley , René Galy-Dejean , Henri de Gastines , Jean de Gaulle , Hervé Gaymard , Jean-Marie Geveaux , Michel Giraud , Jacques Godfrain , Louis Guédon , JeanClaude Guibal , Lucien Guichon , François Guillaume , Gérard Hamel , Michel Hunault , Michel Inchauspé , Christian Jacob , Didier Julia , Alain Juppé , Jacques K ossowski , Jacques Lafleur , Robert Lamy , Pierre Lasbordes , Thierry Lazaro , Pierre Lellouche , JeanClaude Lemoine , Arnaud Lepercq , Jacques Limouzy , Lionnel Luca , Thierry Mariani , Alain Marleix , Franck

M arlin , Jean Marsaudon , Philippe Martin , Patrice Martin-Lalande , Jacques Masdeu-Arus , Mme Jacqueline Mathieu-Obadia , MM. Gilbert Meyer , Jean-Claude Mignon , Charles Miossec , Pierre Morange , Renaud Muselier , Jacques Myard , Jean-Marc Nudant , Patrick Ollier , Mme Françoise de Panafieu , MM. Robert Pandraud , Jacques Pélissard , Dominique Perben , Pierre Petit , Etienne Pinte , Serge Poignant , Bernard Pons , R obert Poujade , Didier Quentin , Jean-Bernard Raimond , Jean-Luc Reitzer , Nicolas Sarkozy , André Schneider , Bernard Schreiner , Philippe Séguin , Frantz Taittinger , Michel Terrot , Jean-Claude Thomas , Jean T iberi , Georges Tron , Anicet Turinay , Jean U eberschlag , Léon Vachet , Jean Valleix , François Vannson , Roland Vuillaume , Jean-Luc Warsmann et Mme Marie-Jo Zimmermann

Groupe UDF (70) : Contre : 66. - MM. Jean-Pierre Abelin , Pierre Albertini , P ierre-Christophe Baguet , Raymond Barre , Jacques Barrot , Dominique Baudis , Jean-Louis Bernard , Claude Birraux , Emile Blessig , Mme Marie-Thérèse Boisseau ,

M M. Jean-Louis Borloo , Bernard Bosson , Mme Christine Boutin , MM. Loïc Bouvard , Jean B riane , Yves Bur , Dominique Caillaud , Hervé de Charette , René Couanau , Charles de Courson , Yves Coussain , Marc-Philippe Daubresse , Léonce Deprez , Renaud Donnedieu de Vabres , Philippe Douste-Blazy , R enaud Dutreil , Alain Ferry , Jean-Pierre Foucher , Claude Gaillard , Germain Gengenwin , Valéry Giscard d'Estaing , Gérard Grignon , Hubert Grimault , Pierre H ériaud , Patrick Herr , Mmes Anne-Marie Idrac , Bernadette Isaac-Sibille , MM. Henry Jean-Baptiste , Jean-Jacques Jégou , Christian Kert , Edouard Landrain , J acques Le Nay , Jean-Antoine Leonetti , François Léotard , Maurice Leroy , Roger Lestas , Maurice Ligot , François Loos , Pierre Méhaignerie , Pierre Menjucq , Pierre Micaux , Mme Louise Moreau , MM. Hervé Morin , Jean-Marie Morisset , Arthur Paecht , Dominique Paillé , Henri Plagnol , Jean-Luc Préel , Marc Reymann , Gilles de Robien , François Rochebloine , Rudy Salles , André Santini , François Sauvadet , Michel Voisin et Pierre-André Wiltzer.

Abstentions : 4. - MM. Jean-François Chossy , Jean-Claude Decagny , Francis Hillmeyer et Christian Martin

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : C ontre : 42. - Mme Nicole Ameline , M. François d' Aubert , Mme Sylvia Bassot , MM. Jacques Blanc , Roland Blum , Dominique Bussereau , Antoine Carré , P ascal Clément , Georges Colombier , Bernard Deflesselles , Francis Delattre , Franck Dhersin , Laurent Dominati , Dominique Dord , Charles Ehrmann , Nicolas Forissier , Gilbert Gantier , Claude Gatignol , Claude Goasguen , François Goulard , Pierre Hellier , Michel Herbillon , Philippe Houillon , Denis Jacquat , Aimé Kerguéris , Marc Laffineur , Jean-Claude Lenoir , Pierre Lequiller , Alain Madelin , Jean-François Mattei , Michel

M eylan , Alain Moyne-Bressand , Paul Patriarche , Bernard Perrut , Jean Proriol , Jean Rigaud , Jean Roatta , J osé Rossi , Joël Sarlot , Jean-Pierre Soisson , Guy Teissier et Gérard Voisin

Groupe communiste (35) : Contre : 2. - MM. André Gerin et Georges Hage

Abstentions : 33. - MM. François Asensi , Gilbert Biessy , C laude Billard , Bernard Birsinger , Alain Bocquet , Patrick Braouezec , Jean-Pierre Brard , Jacques Brunhes , Patrice Carvalho , Alain Clary , Christian Cuvilliez , René D utin , Daniel Feurtet , Mme Jacqueline Fraysse , MM. Pierre Goldberg , Maxime Gremetz , Guy Hermier , Robert Hue , Mmes Muguette Jacquaint , Janine Jambu ,

M M. André Lajoinie , Jean-Claude Lefort , Patrick L eroy , Félix Leyzour , François Liberti , Patrick Malavieille , Roger Meï , Ernest Moutoussamy , Bernard O utin , Daniel Paul , Jean-Claude Sandrier , Michel Vaxès et Jean Vila

Groupe Radical, Citoyen et Vert (29) : Pour : 23. - Mme Huguette Bello , MM. Pierre Carassus , G érard Charasse , Bernard Charles , Jean-Pierre D efontaine , Jacques Desallangre , Roger Franzoni , Claude Hoarau , Elie Hoarau , Robert Honde , Guy Lengagne , Jean-Pierre Michel , Jean-Paul Nunzi , Jean Pontier , Jacques Rebillard , Jean Rigal , Mme Chantal Robin-Rodrigo , MM. Georges Sarre , Gérard Saumade , Michel Suchod , Alain Tourret , Emile Vernaudon et Aloyse Warhouver

Abstentions : 5. - M. André Aschieri , Mme Marie-Hélène Aubert , MM. Yves Cochet , Noël Mamère et JeanMichel Marchand.

Non-inscrits (7).

Pour : 2. - MM. Jean-Pierre Chevènement et Patrick Jeanne

Contre : 4. - MM. Marc Dumoulin , Jean-Jacques Guillet , Charles Millon et Philippe de Villiers

Mises au point au sujet du présent scrutin (Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4, du règlement de l'Assemblée nationale) MM. Yves Dauge, qui était présent au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote a fait savoir qu'il avait voul u voter « pour ».

M M. Jean-Claude Abrioux, Jean-François Chossy, JeanC laude Decagny, Guy Drut, Jean-Pierre Giran, Francis Hillmeyer, Christian Martin, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».