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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD

1. Loi de finances pour 2001 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8729).

LOGEMENT (Nouvelle procédure) M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le logement.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour le logement et l'urbanisme.

M.

Jean-Michel Marchand, Mme Janine Jambu,

MM. Jean Proriol, Jean-Marie Morisset, Gilbert Meyer, Yves Dauge.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Equipement, transports et logement ÉTAT B

Titre III. - Adoption (p. 8742)

Titre IV (p. 8742)

Amendement no 76 de la commission des finances : MM. le rapporteur spécial, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. - Adoption.

Adoption du titre IV modifié.

ÉTAT C

Titres V, VI et VII. - Adoption (p. 8742)

INDUSTRIE, POSTE ET TÉLÉCOMMUNICATIONS M. Michel Destot, rapporteur spécial de la commission des finances, pour l'industrie.

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. Claude Billard, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour l'industrie.

M. Edmond Hervé, rapporteur spécial de la commission des finances, pour La Poste et les télécommunications.

M. François Brottes, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour La Poste et les télécommunications.

MM. Claude Gaillard et Christian Bataille.

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD

MM. Robert Galley, François Goulard, Roger Meï, Robert Honde, Gabriel Montcharmont, Olivier de Chazeaux, Gilbert Gantier, Mme Janine Jambu,

M.

Jacques Guyard.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Réponses de M. le secrétaire d'Etat aux questions de : MM. Michel Liebgott, Claude Evin, Patrice MartinLalande, Didier Quentin, Robert Galley, Mme Muguette J acquaint, M. Roger Meï, Mme Janine Jambu et

M. Robert Honde.

Les crédits de l'industrie, de La Poste et des télécommunications seront appelés à la suite de l'examen des crédits de l'économie et des finances.

Renvoi de la suite de la discussion budgétaire à la prochaine séance.

2. Saisine du Conseil constitutionnel (p. 8774).

3. Dépôt de propositions de résolution (p. 8774).

4. Dépôt de rapports d'information (p. 8775).

5. Ordre du jour des prochaines séances (p. 8775).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1 LOI DE FINANCES POUR 2001

DEUXIÈME PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585, 2624).

LOGEMENT (nouvelle procédure)

M. le président.

Nous abordons la discussion des crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement, concernant le logement, pour laquelle nous allons mettre en oeuvre, en séance publique, la nouvelle procédure budgétaire définie par la conférence des présidents.

Avant les votes des crédits, je donnerai donc la parole, pour cinq minutes, aux rapporteurs des commissions puis, pour dix minutes, à M. le secrétaire d'Etat au logement et à un orateur par groupe.

Je rappelle que les travaux de la commission élargie consacrés à ce budget, ainsi que les réponses aux questions écrites le concernant, seront publiés en annexe aux compte rendu de la présente séance.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le logement.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le logement. Monsieur le président, mes chers collègues, chacun l'aura remarqué, nous avons un ministre déterminé pour une politique pérenne en faveur du logement social, tant pour ce qui concerne le secteur locatif que l'accession à la propriété, tant pour le patrimoine privé que pour le patrimoine locatif social de caractère public.

Pour 2001, le budget qui nous est proposé s'inscrit donc dans la continuité et la stabilité. Cette stabilité touche d'ailleurs aussi aux structures budgétaires : d'une année sur l'autre, les structures sont identiques, ce qui permet une lecture plus facile.

Pour un droit au logement réaffirmé en direction des plus démunis et une efficacité accrue des attributions, non discriminatoires, de logements, des moyens constants sont prévus. Ils permettront de redynamiser - j'insiste sur ce terme - la production. Ces moyens sont inscrits dans le cadre d'une politique de mixité sociale confortée et de décisions administratives favorisant la déconcentration, au niveau des préfets, de mesures qui faciliteront certainement une consommation augmentée des crédits, consommation qui doit être rendue plus dynamique et plus rapide. Ils permettront aussi de mener, dans le cadre du renouvellement urbain, des actions de construction-démolition à hauteur des projets existants.

Les crédits du département ministériel du logement sont en légère augmentation : les moyens d'engagement progressent de 1,6 %, et les moyens de paiement s'établissent à 48,755 milliards de francs. Ils se déclinent selon trois priorités principales : réforme des aides à la personne ; moyens nouveaux pour l'application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains ; renforcement de la lutte contre les exclusions.

S'agissant des aides à la personne, 35 milliards de francs y seront consacrés en 2001, pour une première étape vers un barème unique visant à mettre en place une aide identique pour des revenus équivalents. La seconde étape, au 1er janvier 2002, concernera les revenus correspondant au RMI. L'augmentation des prestations en 2001 représentera 3,3 milliards de francs pour les ménages.

Une dotation supplémentaire de 655 millions de francs vient s'ajouter au solde de la diminution tendancielle, qui représente 1,345 milliard de francs en année pleine.

La croissance économique retrouvée, et dont nous souhaitons qu'elle se maintienne, monsieur le secrétaire d'Etat, la diminution confortée du chômage permettent un alignement vers le haut des aides à la personne sans surcoût excessif pour le budget de l'Etat. Ainsi, le Gouvernement tient sa promesse, formulée lors de la conférence sur la famille du 15 juin 2000, ce qui le conduit à poursuivre l'actualisation des barèmes au 1er juillet de chaque année.

C'est donc bien une redistribution des fruits de la reprise économique et de la croissance à destination des personnes, des ménages, donc des familles, qui est mise en place. Mais il s'agit également d'une réforme incitant au retour à l'emploi, volet sur lequel il faut insister.

La loi SRU, à appliquer dès 2001, bénéficiera, pour la

« grande ANAH », l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, et la PAH, la prime à l'amélioration de l'habitat, regroupées de 3 milliards de francs en autorisations de programme et, au titre de la résorption de l'habitat insalubre, de 60 millions pour la lutte contre le saturnisme.

Des retards - je parle par euphémisme - sont constatés dans la consommation des crédits de 1999. Certes, il a fallu mettre en place les moyens, et vous avez inscrit des crédits budgétaires. Mais il faut aujourd'hui consommer


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ces crédits si l'on veut que la volonté gouvernementale et parlementaire puisse se concrétiser dans des actions efficaces.

La loi SRU bénéficiera de 17 millions pour les aires d'accueil réservées aux gens du voyage et pour le maillage du territoire, que nous appelons de nos voeux. Le FSL, le fonds de solidarité pour le logement, qu'une réforme pourrait rendre plus efficace, aura 548 millions de francs.

Quant aux associations qui logent les plus défavorisés, elles seront dotées de 170 millions de francs. Enfin, 2 millions de francs sont prévus pour les accédants en difficulté.

La conjoncture économique nous permet de constater que les accédants en difficulté sont de moins en moins nombreux. L'accession à la propriété, à laquelle je porte une attention particulière, sera dotée pour la « mise en force » du PTZ, le prêt à taux zéro, de 5,9 milliards de francs en autorisations de programme et de 5,855 milliards en crédits de paiement.

En ce qui concerne le PTZ, nous avons une crainte : sa « PAPisation », qui n'est pas simplement un mot qui pourrait éveiller l'intérêt des parlementaires ou attirer l'attention du secrétaire d'Etat. Notre crainte est réelle.

De mesure réglementaire en mesure réglementaire, on a tendance à restreindre l'utilisation des PTZ, même si leur nombre est relativement constant d'une année sur l'autre.

Quant à la sécurisation des accédants, monsieur le secrétaire d'Etat, pour une trésorerie de 4,887 milliards de francs, sur sept ans de mise en épargne, vous prévoyez en 2001 une dotation de 370 millions de francs. Je relèv erai simplement que, sur quatre-vingt-sept sinistres déclarés, cinquante-deux dossiers ont été retenus, pour un coût, extraordinaire, de 488 000 francs. On ne peut que s'en réjouir, mais cela me conduit une fois de plus à m'étonner devant vous - j'ai sans doute quelques idées fixes (Sourires) - de la propension qu'ont eue certains des acteurs du logement social à vouloir créer une caisse spécifique pour la garantie de l'accession alors que, manifestement, et j'en apporte de nouveau la preuve, les locataires n'ont en aucun cas payé pour les accédants.

En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, je me réjouirai que vous ayez obtenu des programmes physiques à la hauteur de nos ambitions : 120 000 logements à réhabiliter, 70 000 PLU - prêts locatifs uniques - à mettre en place, une ligne fongible à dynamiser.

Le budget qui nous est présenté est globalement un bon budget, compte tenu des crédits qui ont été utilisés en 1999 et durant le premier semestre 2000. Il est cependant nécessaire, et je me sens à cet égard un peu responsable, de mobiliser les acteurs du logement, tant dans le privé qu'au sein des organismes qui ont une mission de service public et auxquels il faudra peut-être rappeler cette mission.

Nous devons construire, nous devons réhabiliter, nous devons démolir et reconstruire car les besoins sont là, ils sont répertoriés. Tous vos préfets peuvent vous indiquer les besoins en logement social.

M. le président.

Il vous faut conclure, monsieur le rapporteur spécial.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Les acteurs doivent se mobiliser. Nous comptons aussi sur vous pour que ce budget, qui a reçu l'aval de la commission des finances, puisse en 2001 servir effectivement à redynamiser tout le secteur, y compris celui du bâtiment. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour le logement et l'urbanisme, pour un temps, tout théorique, de cinq minutes. (Sourires.)

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour le logement et l'urbanisme.

J'essaierai de m'en tenir aux cinq minutes qui me sont imparties, monsieur le président.

Mesdames, messieurs, notre débat se déroule dans une conjoncture hautement favorable au secteur du bâtiment, dont l'activité a progressé de 6 % en francs constants durant l'année 2000, où 60 000 emplois, peut-être un peu plus, ont été créés depuis quelque deux ans, alors même qu'il avait connu auparavant des dizaines de milliers de suppressions d'emplois. Par ailleurs, nous aurons très probablement cette année, comme l'année dernière, plus de 300 000 mises en chantier.

Les mesures prises par le Gouvernement sont pour beaucoup dans la haute tenue du secteur du bâtiment, qu'il s'agisse de la croissance revenue ou de la forte diminution du chômage et, avec elle, de la confiance retrouvée - nous savons que le bâtiment est très sensible au climat général.

Mais le Gouvernement a également pris de très nombreuses mesures sectorielles, que j'évoquerai sans les détailler : la TVA à 5,5 % pour l'ensemble des travaux d'entretien, la revalorisation et, cette année, la transformation des aides à la personne, la pérennisation tant de l'accession sociale que de l'investissement privé, des droits de mutation fortement abaissés, un droit de bail supprimé, une taxe d'habitation diminuée.

Le projet de budget qui nous est soumis comporte d'autres mesures positives en faveur du secteur du bâtiment. Ainsi, les crédits sont maintenus, consolidés, voire renforcés, tant en ce qui concerne le parc privé que le parc social. Et je ne parlerai pas des crédits affectés à la loi relative à la lutte contre les exclusions, ni des crédits pour le FSL ou la médiation locative, qu'a évoqués

M. Dumont.

Mais il s'agit aussi d'une réforme importante des aides à la personne, avec la suppression d'une trappe à inactivité, un montant d'aides différent selon la nature des revenus, l'harmonisation des aides pour les locataires situés dans le parc privé et dans le parc public. Il est à souhaiter que, dans le parc privé, il n'y ait pas d'effet d'aubaine, qui ferait que les propriétaires récupéreraient la plus grande part des aides.

Le bâtiment est un secteur d'activité à cycle long. Les décisions, les orientations, les inflexions d'aujourd'hui produiront leurs effets dans dix-huit mois, voire dans deux ans. D'où des interrogations de notre part, car nous souhaitons pérenniser l'essentiel de la haute activité du secteur.

S'agissant, d'abord, de l'accession sociale, vous l'avez pérennisée en la rebudgétisant. La mesure était importante,...

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Certes !

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

... mais il ne faudrait pas que la modification des modalités des prêts provoque la réduction de la solvabilité des familles auxquelles ces prêts sont destinés. Si les prêts restent à un niveau très satisfaisant, il ne faudrait pas que nous nous engagions sur une pente descendante.

Quant à l'investissement locatif privé et à ce que l'on commence à appeler l'« amortissement Besson », qui a fait suite à l'« amortissement Périssol », vous avez moralisé le


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système dans la mesure où vous avez demandé des contreparties sociales aux aides fiscales qui étaient accordées. Néanmoins, les ventes qui relèvent de cette mesure ont connu un démarrage relativement modeste. Peut-être faut-il alors s'interroger, monsieur le secrétaire d'Etat, sur l'opportunité d'offrir aux acquéreurs la possibilité de faire bénéficier de l'allocation, dans des conditions très strictes, leurs ascendants ou descendants.

Enfin, mais vous n'en serez pas surpris, notre principale interrogation porte sur la construction locative privée. Les chiffres sont en effet insatisfaisants par rapport aux objectifs forts affichés par le Gouvernement. Certains élus locaux manquent peut-être d'enthousiasme pour réaliser les logements sociaux, mais nous en connaissons aussi beaucoup qui ne voient pas se réaliser les programmes qu'ils souhaitent. Ce manque d'enthousiasme frappe peut-être également certains organismes, parfois submergés par les problèmes de gestion, mais il en est aussi qui déplorent que leurs opérations restent non financées.

Pour ma part, je crois qu'il se pose d'abord et avant tout un problème de financement. Certes, le PLUS, que vous avez mis en place, a heureusement rééquilibré le produit - le PLA n'était quant à lui pas équilibré. Mais la situation n'est pas tout à fait satisfaisante et, de ce point de vue, tant le renchérissement du coût de la construction, que l'on voit poindre, que l'augmentation du livret A que vous avez décidée, même si elle a été neutralisée pour les deux ans qui viennent, ne facilitent pas l'équilibre, ni donc la réalisation des opérations.

Je souhaite que la situation de la construction locative sociale fasse l'objet d'un examen attentif de votre part - vous nous avez assuré en commission que ce serait le cas - et surtout de décisions positives dans les semaines qui viennent.

Le budget que nous examinons est un bon budget et la c ommission de la production et des échanges l'a approuvé. Il demeure que nous devons avoir la préoccupation de maintenir ce secteur d'activité qu'est le bâtiment à un très haut niveau.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Excellents propos, monsieur le rapporteur pour avis ! Vous avez même dit du bien de l'accession sociale ! (Sourires.)

M. Daniel Marcovitch.

Excellent rapporteur !

M. le président.

Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez à peu près respecté votre temps de parole, ce qui est assez remarquable et ce dont je vous félicite et vous remercie.

Pour le groupe RCV, la parole est à M. Jean-Michel Marchand, premier orateur inscrit.

M. Jean-Michel Marchand.

Monsieur le secrétaire d'Etat, le projet de budget pour 2001 que vous présentez s'inscrit dans la droite ligne des politiques annoncées en 1997 par le Premier ministre et conduites depuis lors par le Gouvernement. En progression d'environ 1,2 %, les crédits consacrés à l'habitat et au logement s'élèveront, l'année prochaine, à 48,7 milliards de francs.

En 2000, l'accent avait été mis sur la réhabilitation du parc locatif par la construction de nouveaux logements, sur l'amélioration et la diversification des logements sociaux, sur l'actualisation des plafonds de ressources, en réponse aux exigences de mixité sociale, et sur le renforcement du FSL, en faveur de l'accès des plus démunis à des logements décents et salubres - je pense évidemment à la lutte contre le saturnisme.

Le budget pour 2001 renforcera ces positions, et nous ne pouvons que nous en féliciter. La réforme des aides personnelles au logement, annoncée lors de la conférence de la famille, le 15 juin dernier, sera poursuivie : elles seront harmonisées, simplifiées et regroupées dans un barème unique, puisque l'écart actuel entre les aides octroyées, selon le revenu pris en considération, sera supprimé.

La conséquence de ces mesures, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est une hausse significative en faveur des plus défavorisés, à hauteur de 1 300 francs environ.

Mais ces mesures, dont nous nous félicitons, je le répète, ne peuvent toucher ceux qui n'ont pas de logement. Quelles dispositions sont envisagées pour soutenir les associations comme Habitat solidarité, à Saumur, que je connais bien, qui interviennent, dans le champ social, au profit des plus démunis ? A quand, monsieur le secrétaire d'Etat, un fonds du logement associatif, pour aider ces structures à payer les loyers des logements qu'elles mettent à disposition de nos concitoyens en très grande difficulté ? Votre projet de budget pour 2001 fait du logement social et de l'habitat une priorité. Cependant, malgré les mesures prises en faveur des bailleurs sociaux, on ne peut que constater la stagnation du nombre de mises en chantier de nouveaux logements locatifs sociaux. En Maine-etLoire, sur 400 projets, seuls 180 seront réalisés en 2000, et 730 PLUS seulement seront consommés, alors que l'objectif était de 2 700. Mon département n'est sans doute pas le plus représentatif, mais tout de même.

Nous savons, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous déplorez cet état de fait, vous l'avez déclaré à plusieurs reprises. Nous en connaissons tous les causes : un foncier trop cher, des appels d'offres trop souvent infructueux et des coûts à la construction en augmentation. Mais c'est dans ce domaine que nous attendons des engagements forts pour que la construction sociale soit à la hauteur des besoins et en rapport avec les moyens budgétaires mobilisés.

Pour réduire la pression foncière et ainsi « reconstruire la ville sur la ville », comme le prévoit le projet de loi SRU, nous devons financer des opérations de réhabilitation du parc HLM et de requalification des espaces urbains à reconquérir. A ce propos, je ne reviendrai pas sur nos divergences d'analyse quant au volet urbanisme du projet de loi SRU.

Une baisse de la pression foncière mettrait un terme à la spéculation de certains opérateurs, toujours plus gourmands en aides publiques, ou du moins la réduirait, et constituerait un levier en faveur de la mixité sociale.

N'oublions pas, en effet, que nous nous sommes fixé pour objectif de parvenir à 20 % de logements sociaux dans chaque agglomération au terme des vingt prochaines années. Il s'agit d'un pilier de notre politique de la ville, et il convient d'utiliser, à cet effet, les marges d'aides à la pierre dont nous disposons.

Monsieur le secrétaire d'Etat, avez-vous obtenu du secrétariat d'Etat au budget, pour ne pas dire de Bercy, la réaffectation de vos crédits non consommés ? Ce seraient là, vous le savez bien, des moyens non négligeables pour mettre en oeuvre des PLUS.

Le projet de budget pour 2001, ce sont aussi des crédits pour l'habitat de tous. Ainsi, les dispositions de la loi relative à l'accueil des gens du voyage sont prises en compte, avec 70 millions de francs de crédits dans votre budget et 70 millions supplémentaires dans celui du ministère de l'emploi et de la solidarité pour réaliser des


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aires d'accueil, plus 30 millions de francs au titre de leur fonctionnement. Que ces aires soient collectives ou familiales, c'est un véritable enjeu politique et social vis-à-vis de concitoyens qu'il nous faudra bien consulter. Veulentils conserver leur mode de vie ou en adopter un nouveau ? Quel type d'habitat correspond à leur souhait ? Les offices HLM ont appliqué avec soin les directives gouvernementales en faveur de la qualité du logement social. Ils ont répondu aux aspirations des locataires, leur ont donné plus de confort et de bien-être, notamment en construisant des logements de type pavillonnaire quand, autrefois, on avait plutôt tendance à réaliser des constructions verticales.

C'est très bien, mais de telles opérations entraînent des surcoûts, les offices ont dû emprunter, et certains se trouvent aujourd'hui dans une situation financière particulièrement difficile. Quels moyens budgétaires seront mis à leur disposition pour qu'ils retrouvent leur stabilité financière et reconstituent des fonds propres, afin de poursuivre l'oeuvre de rénovation et d'amélioration de l'habitat social que chacun attend ? Rénover l'habitat, c'est aussi réaliser des travaux qui améliorent la vie quotidienne, et votre budget consacre 100 millions de francs à des actions de ce type. Mais il faudra veiller à ce que cela n'entraîne pas des augmentations de charges locatives, car la stabilité des loyers attendue en 2001 s'en trouverait automatiquement remise en question - n'oublions pas que les hausses de prix de l'eau, du fioul et du gaz vont déjà peser sur le budget des ménages.

Les politiques du logement et de l'habitat menées par nos partenaires européens sont marquées de connotations sociales fortes. C'est du moins ce qui ressort de la rencontre à laquelle vous avez participé en septembre. Nous estimons que la France, qui préside l'Union européenne, peut beaucoup apporter à cet égard.

Pour conclure, votre projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat, nous semble à la hauteur des ambitions affichées et les députés verts le voteront, tout comme l'ensemble du groupe Radical, Citoyen et Vert. Cela dit, comme vous, nous considérons que le rythme de production de nouveaux logements sociaux n'est pas satisfaisant et qu'une telle situation ne peut perdurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Janine Jambu, pour le groupe communiste.

Mme Janine Jambu.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en examinant les crédits du logement, nous abordons une question de première importance pour les jeunes, les familles et l'immense majorité de la population.

Les besoins, les attentes sont majeurs, en premier lieu dans les zones urbaines où la tension entre l'offre et la demande est aiguë. Je pense tout particulièrement au logement social, puisque trois Français sur quatre remplissent les critères pour faire une demande.

Les élus qui, comme moi, gèrent une commune dotée d'un fort parc social et continuent à construire du logement social savent au quotidien ce que sont les attentes, les impatiences et parfois le sentiment d'injustice ressentis par les jeunes couples, les familles monoparentales ou celles qui « décohabitent », suite à une séparation ou à un autre aléa de la vie.

Je suis parlementaire de la petite couronne, et l'une des trois communes de ma circonscription a choisi de favoriser la promotion privée et la stagnation de son parc social. La demande d'accès à un logement moderne et abordable est donc le premier motif pour lequel je suis sollicitée dans mes permanences et lors de mes contacts avec la population.

Je crois enfin que le bilan de la gauche plurielle sera aussi jugé à l'aune de la capacité à donner de l'élan à l a construction sociale.

Or nous sommes dans une situation paradoxale : alors que, depuis 1997, des mesures positives ont été prises pour valoriser, pour impulser le logement social, le rythme annuel de réalisations reste inférieur à celui que nous connaissions sous la droite. Il faut dire que celle-ci avait parachevé le sabordage du soutien public au secteur social.

La croissance et la relance de l'activité dans le secteur du bâtiment, dues en grande partie à la politique gouvernementale, profitent à la promotion privée.

Il serait inquiétant pour l'avenir que persiste le décalage entre le soutien apporté au secteur social, 2,9 milliards budgétés pour l'aide à la pierre, et celui dont bénéficie le secteur privé, 30 milliards d'exonérations.

Il ne serait sans doute pas inutile d'en appeler au comportement « citoyen » des entreprises du BTP, qui profitent du contexte économique et de la TVA à 5,5 % pour relever leurs coûts et se tournent vers les produits les plus juteux.

Il faut aussi, et vous l'avez rappelé devant le congrès HLM comme devant la représentation parlementaire, en appeler à la responsabilité de tous les acteurs. Nous avons pris bonne note des discussions engagées avec le mouvement du 1 % en vue d'atteindre l'objectif d'investissement fixé dans la convention de 1998.

De même, nous savons que vous avez la volonté politique - très nettement perceptible dans les dispositions du projet de loi SRU, que nous allons définitivement adopter dans quelques jours - de promouvoir et revaloriser l'image du logement social, de reconnaître son rôle essentiel pour la mixité et les équilibres des agglomérations. J'estime que c'est fondamental.

Nous soutenons énergiquement les dispositions de l'article 25, qui devraient se concrétiser par un rythme der éalisations de 20 000 logements par an dans les communes comptant moins de 20 % de logements sociaux. Nous serons attentifs à ce que l'impact de ces dispositions ne soit pas amoindri ou dénaturé.

Reste cependant que le solde du parc social total disponible dans le pays risque de rester négatif car, chaque année, 10 000 logements sociaux sont vendus et 10 000 autres démolis. Il faut s'assurer que la reconstruction précède bien la démolition.

Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Tout à fait !

Mme Janine Jambu.

Par ailleurs pardonnez-moi si j'en parle encore, mais vous savez combien le sujet me tient à coeur il faut d'urgence mettre un frein à la politique des bailleurs du type de la SCIC, filiale de la Caisse des dépôts, qui déconventionne et libéralise à tour de bras son patrimoine. A Bagneux, sur 4 000 logements dépendant de la SCIC, il est prévu, à terme, que 647 restent conventionnés ; à Fontenay-aux-Roses, commune voisine, il n'en resterait que 50 sur les 1 500 actuels.

Enfin, si nous ne mésestimons pas du tout l'ensemble des mesures prises depuis 1997 allongement de la durée des prêts, baisse de la TVA sur les travaux et, plus récemment, allègement de 30 % du foncier bâti pour les organismes situés en ZUS -, n'est-ce pas fondamentalement le


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circuit de financement du logement social, le rôle des banques et de la Caisse des dépôts et consignations qu'il faut réformer ?

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Bonne question !

Mme Janine Jambu.

L'aide à la pierre est certes partiellement rétablie, ce qui corrige les effets les plus nocifs des choix Périssol, mais le subventionnement stagne à 5 % par logement. N'est-ce pas cet outil auquel il faudrait donner une nouvelle impulsion pour favoriser l'équilibre des opérations ? Ce serait bien entendu un choix budgétaire et surtout politique quant à l'utilisation des fruits de la croissance. Je comprends bien que votre ministère n'est pas le seul en cause, et je pense notamment à Bercy...

Je reviens quelques instants sur la mesure d'allègement du foncier bâti pour les organismes situés en ZUS, dont nous avons été porteurs dans le débat sur la loi SRU, et qui a connu son aboutissement dans la première partie de la loi de finances. Nous apprécions à sa juste mesure cette disposition...

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Très bonne mesure !

Mme Janine Jambu.

... qui doit bénéficier aux organismes, en particulier aux offices qui gèrent les parcs les plus sociaux, dans les zones les plus difficiles, et donc aux locataires qui y vivent.

De ce point de vue, nous déplorons vivement que cette mesure ne prenne son plein effet qu'en 2002. Nous regrettons que les moyens nécessaires n'aient pas été dégagés pour assurer, en 2001, la compensation du gel des loyers. Tous les organismes HLM ne sont d'ailleurs pas dans une situation financière identique, même si, mon collègue Alain Cacheux a raison, certains d'entre eux rencontrent des difficultés réelles.

M. Jean Proriol.

Bien sûr !

Mme Janine Jambu.

Nous serons attentifs aussi bien à la compensation pour les organismes qui mènent une politique sociale et ne bénéficieront pas de l'allègement de TFPB, qu'aux conditions de la sortie du gel en 2002.

E n ce qui concerne les réhabilitations, 1 20 000 PALULOS sont budgétés et près de 130 000 primes sont sollicitées dans le cadre de la fongibilité, nous avez-vous indiqué. Cela correspond, bien sûr, à la nécessité d'améliorer la qualité de l'habitat ancien.

Mais, là encore, la part d'emprunts dans le financement des opérations est lourde - 70 % - et l'impact à la hausse sur les loyers importante, ce qui peut conduire à abaisser le niveau et la qualité des réhabilitations, avec des conséquences à moyen et long termes sur la requalification des quartiers et l'image de l'habitat social.

En matière d'accession, des dispositions réglementaires ont resserré les conditions d'accès au prêt à taux zéro, ce qui risque d'en réduire l'impact et d'avoir des répercussions négatives sur les familles, en termes d'endettement.

Les familles, les locataires apprécient le maintien du gel des loyers en 2001, et la deuxième phase de la suppression du droit au bail, au 1er janvier 2001 pour les loyers supérieurs à 3 000 francs. Mais, parallèlement, la répercussion de la hausse du fioul et du gaz sur les charges locatives les inquiète. Quelles mesures comptez-vous prendre pour en juguler les effets ? Nous réitérons, cela ne vous surprendra pas, notre demande d'abrogation du surloyer. Ce serait la conséquence logique de l'abrogation de la taxe acquittée par les bailleurs, dont nous avons maintes fois démontré l'injustice et l'inefficacité en termes de mixité et d'équilibre social.

La réforme des aides au logement, avec l'harmonisation des barèmes, est une bonne chose. Il est indiqué qu'elle n'entraînera de baisse pour aucun ménage, mais qu'elle bénéficiera à ceux qui se réinsèrent dans l'emploi, avec des revenus proches des minima sociaux. C'est donc une mesure très juste.

Nous appelons toutefois votre attention sur le nonversement des APL inférieures à 100 francs, ce qui représente tout de même 1 200 francs par an, ainsi que sur la suspension des aides accordées aux personnes en difficulté se trouvant momentanément dans l'impossibilité de payer le reliquat de loyer qu'elles doivent acquitter hors APL.

Il faut sans doute améliorer et accélérer la mise en oeuvre des dispositions de la loi relative à la lutte contre les exclusions - le premier bilan fait en effet apparaître des disparités départementales - et veiller à la progression des moyens des FSL, très sollicités.

Nous aimerions, plus généralement, être rassurés quant à la réalité de l'affectation des moyens, s'agissant aussi bien de la réforme d'ensemble que de l'actualisation des aides, régulièrement effectuée depuis trois ans.

Enfin, pour ce qui concerne le parc privé ancien, nous considérons que la mise sur pied de la grande ANAH, destinée tant aux propriétaires occupants qu'aux bailleurs, doit être accompagnée d'un contrôle plus strict de l'utilisation des subventions. Nous comptons aussi beaucoup sur la lutte contre les pratiques ignobles des marchands de sommeil et la résorption de l'habitat insalubre, ainsi que sur la mise en oeuvre rapide et ferme des dispositions prévues par le projet de loi SRU.

J'en ai terminé avec ce balayage des points positifs et des interrogations que suscite ce projet du budget.

Nous partageons, monsieur le secrétaire d'Etat, la volonté d'assurer le droit au logement pour tous, de revaloriser la place et le rôle du logement social. Des avancées ont été accomplies, mais il faut y consacrer davantage de moyens encore.

C'est à partir de cette analyse équilibrée et en souhaitant contribuer à l'amélioration de la situation que nous émettrons un vote favorable sur les crédits du logement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

Pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants, la parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, notre collègue JeanLouis Dumont, rapporteur spécial, a caractérisé le budget du logement comme étant celui « de la continuité ». D'un montant de 48,755 milliards de francs, les crédits consacrés au logement et à l'urbanisme augmentent de 1,15 %.

Ils présentent donc une grande stabilité. J'en conclus monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il ne faut pas s'attendre, une fois de plus, à de véritables réformes, puisque vous nous présentez un budget de reconduction qui prépare mal, à notre avis, la mise en oeuvre de la loi SRU.

Pour appuyer ce constat, je me permets de citer à nouveau notre excellent rapporteur...

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Je crains le pire !

M. Jean Proriol.

... qui écrit dans son introduction les trois phrases significatives suivantes.

Premièrement : « La situation du logement social est décevante. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Oui, il faut construire plus !

M. Jean Proriol.

Deuxièmement : « Alors que la "grande ANAH" devrait voir le jour au 1er janvier 2001, un ajustement à la baisse des crédits de paiement ne constitue peut-être pas un bon signal. »

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

« Peutêtre »...

M. Gilbert Meyer.

Ce n'en est pas moins vrai !

M. Jean Proriol.

Troisièmement : « On peut s'interroger sur les mesures restrictives prises en 1999 et en décembre 2000 et qui consistent à faire supporter aux emprunteurs la remontée des taux. »

Que pourrais-je ajouter ?

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Cela prouve que M. Dumont est objectif !

M. Jean Proriol.

Eh bien, pour être objectifs nous aussi, nous saluons l'effort réalisé en direction des aides à la personne, qui constituent près de 72 % des dotations, et nous voyons là, monsieur le secrétaire d'Etat, votre empreinte personnelle.

Par contre, je formulerai deux critiques.

La première portera sur l'acharnement du Gouvernement à programmer la construction d'un nombre de logements sociaux dont il sait pertinemment qu'ils ne seront pas réalisés. Vous l'affirmiez d'ailleurs vous-même, lors du congrès annuel des HLM à Bordeaux, le 23 septembre dernier.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Remarquable intervention !

M. Jean Proriol.

Je vous cite : « Le nombre des constructions HLM est insuffisant au regard des moyens que nous nous sommes, ensemble, fixés. »

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

C'est parfaitement exact !

M. Jean Proriol.

En 1999, 47 695 logements sociaux ont été construits, alors que 80 000 étaient prévus.

Par ailleurs, la mission économique de l'Union nationale des HLM a établi, en octobre 2000, que les PLUS, destinés à remplacer progressivement les PLA, sont en recul de 13 % par rapport à la situation partielle des huit premiers mois de 1999.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

C'est désolant !

M. Jean Proriol.

En outre, on constate que la mise en oeuvre de ces fameux PLUS, prêts locatifs à usage social, se révèle lente et entraîne des effets pervers. Des ménages dont les ressources sont inférieures à 60 % des plafonds PLA se voient refuser un logement au motif qu'ils porteraient le nombre des ménages extrêmement modestes audelà des 30 % autorisés par la loi dans un immeuble ou une cité.

Enfin, les PALULOS sont en ralentissement, même si l'on maintient un rythme soutenu de 120 000 unités prévues par an.

Devant ce constat, on comprend très bien la logique du projet de loi SRU. Le Gouvernement veut tenter d'obtenir par la contrainte sur les communes ce qu'il ne parvient pas à faire lui-même par la loi. Car si nous sommes tous attachés au principe de la mixité sociale et à la disparition des ghettos, il me faut bien rappeler que cela ne se décrète pas.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Qui signe les permis de construire ?

M. Jean Proriol.

La loi SRU n'est que la conséquence logique et idéologique de l'échec des mesures en vigueur.

D'un secteur en panne, malgré vos mesures incitatrices, découlent plusieurs interrogations.

Premièrement, pourquoi continuer aveuglément dans cette voie ? Nombre de nos collègues, sur tous les bancs de cet hémicycle, et parfois même les rapporteurs sont à l'unisson pour faire remarquer qu'il serait plus raisonnable d'afficher des ambitions plus modestes mais réalisables.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pourquoi n'écoutez-vous pas les voix des hommes et des femmes élus de terrain ?

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

M. Besson est lui-même un élu de terrain !

M. Jean Proriol.

Peut-être est-ce simplement parce que le Gouvernement veut se présenter comme le champion du logement social. Mais où est le champion lorsqu'on examine les résultats ? Deuxièmement, pourquoi limitez-vous votre vision au parc public ? Il est clair que le parc public peine à réaliser vos objectifs. Et quand je dis « peine », c'est un euphémisme ! A la décharge des organismes HLM, que j'ai de bonnes raisons de bien connaître, il faut dire que leur motivation n'est pas en cause, qu'ils doivent faire vivre et même revivre un parc hérité des années 60 et il faut surtout souligner qu'ils souffrent d'un manque certain de terrain de construction et que, lorsque les terrains existent, il sont en général trop chers.

Lors de votre audition devant la commission de la production, le 9 novembre, notre rapporteur, qui m'inspire décidément beaucoup, indiquait que l'Etat devait donner l'exemple. Puisque des casernes sont maintenant libres et que des hôpitaux sont fermés, il y a là du foncier à récupérer.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Tout à fait !

M. Jean Proriol.

Vous voyez, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous avons, M. Dumont et moi, des points de vue qui convergent.

Les offices HLM, parfois critiqués, ne sont pas en cause. Ils rencontrent de grandes difficultés, nous le savons bien, pour équilibrer leur budget, pour limiter les hausses de loyer, pour faire face aux impayés, aux vacances, aux déséquilibres de leurs opérations prises individuellement.

Face à la panne du parc public, pourquoi n'envisagezvous le logement social qu'à travers ce seul prisme ?

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

C'est excessif !

M. Jean Proriol.

Les Français sont pourtant de plus en plus attachés à la propriété. Une étude du CREDOC de décembre 1999 montre que 58 % des locataires souhaitent un jour acquérir leur résidence principale. En additionnant les propriétaires actuels et ceux qui souhaitent le devenir, plus de huit Français sur dix partagent le même désir de vivre dans des murs bien à eux.

En outre, il est incontestable que le parc privé joue un rôle important dans le logement social. Les derniers comptes du logement établis par la direction générale des impôts ont montré que le parc privé hébergeait plus de ménages disposant de revenus inférieurs à 30 000 francs par an que le parc public. C'est presque incroyable !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

Dès lors, je vous demande s'il vaut mieux construire des nouveaux immeubles HLM dans des quartiers qui n'en disposent pas, au risque de créer de nouveaux îlots d'exclusion, ou s'il n'est pas plus souhaitable de privilégier l'installation individuelle en donnant aux locataires de meilleures chances de s'intégrer.

M. Gilbert Meyer.

Bien sûr !

M. Jean Proriol.

Ces réflexions sur le parc privé m'amènent tout naturellement à la deuxième partie de mon propos, qui porte sur l'absence d'une véritable prise en considération du secteur immobilier privé, c'est-à-dire 29 millions d'immeubles pour 60 millions de Français.

Vos mesures en direction du parc privé sont insatisfaisantes. Car, qu'il s'agisse des dépenses courantes ou des acquisitions et travaux, le parc privé est sur une dynamique porteuse que ne connaît pas actuellement le parc public. Et pourtant, aucun programme de l'habitat privé n'est imaginé. Le contraste entre la réalité et les choix politiques est saisissant.

La dotation budgétaire affectée à la « grande ANAH » s'élève à 2,26 milliards de francs. Or la comparaison entre les crédits qui étaient prévus au titre de la PAH et d u financement des mesures nouvelles pour l'exercice 2000 et ceux inscrits dans le cadre de la future ANAH fait apparaître une diminution de l'ordre de 10 %.

Cette baisse laisse craindre un désengagement de l'Etat en matière d'amélioration du parc privé. Or, je l'ai dit, celui-ci joue un vrai rôle social, qui n'est pas toujours reconnu, ni légalement ni fiscalement.

Par ailleurs, les statistiques de l'INSEE mettent en évidence une baisse globale de la vacance dans le parc privé depuis 1996. Elles montrent également que la taxe sur les logements vacants est très difficile à mettre en oeuvre ets'accompagne d'un recouvrement coûteux et parfois injuste. Bien loin de rapporter les 200 millions annuels attendus par l'Etat, elle plafonne à moins de 80 millions, soit 2 % des sommes dégagées par l'ANAH.

Toujours au chapitre de la fiscalité, monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes loin des attentes du parc privé.

Avec le maintien de la contribution annuelle sur les revenus locatifs, les propriétaires bailleurs se retrouvent soumis à un impôt comparable à une CSG bis.

Dès lors, permettez-moi de vous faire la proposition suivante : pourquoi, au lieu de multiplier les aides de manière anarchique, n'envisagez-vous pas la réduction coordonnée de la fiscalité, véritable mesure en faveur du développement du parc locatif ? Pour finir, monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais rappeler que nous ne remettons pas en cause votre engagement personnel, votre dévouement et votre volonté d'agir.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Très bien !

M. Jean Proriol.

Mais nous ressortons quelque peu déprimés de l'examen du budget du logement, secteur dont l'image est incontestablement brouillée. En effet, emprisonné par les contraintes de la future SRU, votre budget ne se donne pas les moyens d'un véritable redressement, et nous n'y voyons pas les solutions pour sortir le logement social du marasme dans lequel il se trouve.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Il faut des terrains et des permis de construire, monsieur le maire !

M. Jean Proriol.

Pour des raisons qui tiennent très certainement à l'idéologie, nous passons encore une fois à côté d'une véritable politique de l'habitat et du logement qui prendrait en compte tous les acteurs de ce domaine, qu'ils soient publics ou privés. C'est pourquoi le groupe Démocratie libérale ne peut apporter son soutien à un tel budget. (M. Gilbert Meyer applaudit.)

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Vous auriez dû reprendre aussi la conclusion de M. Dumont.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Nous notons cependant cette reconnaissance de l'action ministérielle.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

M. Jean-Marie Morisset.

Monsieur le secrétaire d'Etat, les mesures prises par votre gouvernement l'année dernière ont-elles montré leur efficacité ? Nous aurions pu l'espérer dans la mesure où le secteur du bâtiment reste un moteur de l'économie et joue un rôle majeur pour conforter l'emploi dans les entreprises. L'environnement économique et institutionnel était donc favorable en 2000 pour la réalisation des objectifs prioritaires que vous aviez annoncés. Or quel a été le résultat ? Nos rapporteurs n'ont pas été très euphoriques, c'est le moins qu'on puisse dire. Je prendrai, quant à moi, deux dossiers pour exemples : le logement social et le volet logement de la loi de lutte contre les exclusions.

Chaque année à pareille époque, et maintenant depuis trois ans, nous constatons que la construction locative sociale est en panne.

Le budget pour 2000 avait pourtant l'ambition de relancer le logement social, grâce à la mise en place d'un nouveau produit financier, le PLUS, et grâce au maintien des moyens budgétaires, ce dont nous vous remercions.

L'année 2000 devait donc voir la pleine application de ce dispositif ; 70 000 logements étaient prévus ; le bilan montre à l'évidence que cet objectif est loin d'être atteint.

Compte tenu de ce constat, monsieur le secrétaire d'Etat, était-il bien raisonnable de prévoir 70 000 logements finançables en 2000 sans mesures d'accompagnement significatives pour relancer le dispositif ? Pas davantage que celui de 2000, votre budget pour 2001 n'apporte les correctifs indispensables pour relancer le logement social. Pourtant, la conjoncture est favorable.

Il aurait donc fallu trancher et donner l'impulsion nécessaire.

Certes, vous allez nous expliquer que votre gouvernement avait tout mis en oeuvre avec les mesures proposées dan s le cadre du PLUS et, à l'évidence, la baisse des taux, l'amélioration de la subvention, l'allongement de la durée d'amortissement ont eu des effets positifs.

Certes, vous allez nous expliquer que les collectivités locales sont réticentes à s'investir et que le mouvement HLM est démobilisé. Mais, vous le savez bien, le gel des loyers, l'augmentation des taux d'intérêt et la pression sur les prix ne facilitent pas le bouclage des plans de financement.

Certes, vous allez nous expliquer que vous comptez beaucoup sur les effets de la loi SRU. Mais vous savez bien que ce texte ne concernera que les zones urbaines.

De plus, nous ne sommes convaincus ni de son application effective dès 2001, ni de son efficacité pour accroître le parc de logements sociaux.

Le redémarrage de la construction locative sociale ne pourra intervenir que si l'incitation est jugée suffisante par les bailleurs sociaux. A cet égard, il me semble qu'un réajustement de la subvention devient indispensable pour que les dotations du PLUS puissent être consommées.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

C'est vrai !

M. Jean-Marie Morisset.

La crise du logement social conduit inévitablement à se demander si le parc public est toujours en mesure de remplir sa mission. Les débats sur la loi SRU dans cet hémicycle ont été l'occasion de mettre en lumière le rôle économique et social incontestable du parc privé, qui représente aujourd'hui 50 % du parc locatif. Et sans doute convient-il, nous le répétons tous les ans, de réorienter la politique du logement social pour qu'elle prenne mieux en compte le rôle social des propriétaires bailleurs, lesquels souhaitent être reconnus comme des partenaires économiques et sociaux à part entière. Encore faut-il, monsieur le sécrétaire d'Etat, leur en donner les moyens.

D'ici là, je vous l'ai dit en commission la semaine dernière, je pense que l'on peut améliorer la gestion du produit PLUS par les services de votre ministère afin d'accélérer les procédures d'agrément. Lors de cette réunion de la commission, j'ai eu l'occasion de vous montrer, à partir de la chronologie des décisions et notifications concernant la programmation des PLUS en 2000 pour le département des Deux-Sèvres, comment s'explique le décalage constaté entre, d'un côté, la sous-consommation des crédits au niveau national et, de l'autre, la couverture insuffisante des besoins par les dotations accordées aux départements. Pour un total de 10 millions de francs attribués à mon département, 5 millions de francs d'autorisations préalables lui ont été notifiées le 5 avril et les 5 autres millions le 2 novembre seulement. On comprend aisément qu'il soit impossible, dans ces conditions, de remplir les objectifs et de satisfaire les besoins constatés sur le terrain.

Nous comptons donc sur vous pour que les procédures soient simplifiées et les notifications accélérées, de telle sorte que nous n'ayons pas à faire les mêmes observations l'année prochaine.

A propos de la loi sur l'exclusion, je voudrais revenir sur l'application concrète des mesures relatives au logement.

L e 13 septembre dernier, accompagnée de cinq ministres dont vous-même, Martine Aubry tirait un bilan positif des deux premières années et précisait que le pari était tenu.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Excellente ministre !

M. Jean-Marie Morisset.

Ce constat n'est malheureusement pas confirmé sur le terrain, ni par les associations, ni par les collectivités départementales partenaires, qui vivent au quotidien l'application de ces mesures, et encore moins par le budget que vous nous présentez.

Je ne vais pas rappeler ce que nous constatons sur le terrain : aux termes mêmes d'une étude de votre ministère, le délai maximal de réponse sous deux mois pour les aides n'est pas respecté dans 40 % des cas.

A cause du retard pris pour la parution du décret, le n uméro d'enregistrement unique pour le suivi des demandes de logements sociaux, même s'il est déjà partiellement appliqué, n'a pas pu être généralisé sur tout le territoire.

Quant aux chartes de prévention, elles ne sont effectives que dans une vingtaine de départements.

On aurait pu penser que votre budget allait infléchir notablement l'action publique en faveur du logement. Or que constate-t-on ? Que les moyens consacrés au logement des plus démunis sont manifestement en baisse.

Les crédits d'intervention au titre de la participation de l'Etat aux FSL et aux fonds d'aide aux accédants en difficulté ont fait l'objet d'une simple reconduction, soit 720 millions de francs.

Les subventions d'investissement en faveur des opérations les plus sociales et des ménages défavorisés diminuent de manière significative : 205 millions de francs contre 290 millions en 2000.

Alors que la loi SRU contient des dispositions précises et contraignantes en matière de lutte contre l'insalubrité, il est pour le moins surprenant de constater que les crédits destinés à la résorption de l'habitat insalubre diminuent dans des proportions inquiétantes. De la même manière, les moyens affectés à la lutte contre le saturnisme passent de 75 à 60 millions de francs. On a peine à comprendre que le Gouvernement ne consacre pas plus de moyens à des questions qui touchent à la santé publique.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Ce sont des crédits reportés.

M. Jean-Marie Morisset.

Compte tenu de ces remarques, il est difficile, monsieur le secrétaire d'Etat, de conclure que le Gouvernement a la volonté de poursuivre et d'intensifier ses efforts, sauf à demander toujours plus aux partenaires qui l'accompagnent dans la mise en oeuvre de ces dispositifs, à savoir les collectivités départementales.

On peut certes noter sur le terrain une mobilisation des acteurs et un renforcement des partenariats pour une gestion de proximité. Mais l'efficacité de cette politique ne se mesure pas au nombre de PDALPD validés au niveau national ou au nombre d'instances ou de comités de pilotage mis en place, mais à l'accroissement réel des attributions de logements sociaux.

Je terminerai mon intervention en formulant une proposition sur le dispositif de conventionnement qui porte votre nom et en faisant le point sur les traditionnels outils concernant la réhabilitation.

Il apparaît, et les rapporteurs l'ont souligné, que le passage du « système Périssol » au « mécanisme Besson » a généré un creux très sensible au niveau de la construction et du rythme des ventes. Lors de l'examen de la loi de finances pour 2000, le groupe UDF avait proposé que le dispositif Besson, à l'instar de l'amortissement Périssol, intègre la possibilité de louer son bien à un ascendant ou à un descendant. Cette proposition, que nous avons renouvelée, n'a pas été retenue par le Gouvernement, mais je ne désespère pas de son succès, car notre rapporteur spécial lui a apporté un appui sans réserve.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

C'est vrai !

M. Jean-Marie Morisset.

Le développement et le renouvellement du parc locatif français passent par les aides versées aux propriétaires bailleurs : celles de l'ANAH et aux propriétaires occupants : les primes à l'amélioration de l'habitat. La loi SRU a prévu d'organiser le regroupement de ces aides en confiant l'ensemble de la gestion à l'ANAH. Elle crée ainsi une « grande Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat » avec malheureusement le même budget global qu'en 1999 et 2000, à savoir une autorisation de programme de 3 milliards de francs et une diminution importante des crédits de paiement : 2,2 milliards seulement.

Cette diminution des crédits de paiement destinés à l'amélioration du parc privé conduit à s'interroger tant sur le devenir de la future ANAH que sur la volonté de consacrer des moyens suffisants à la réhabilitation des logements privés.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

De plus, vous le savez bien, ces crédits financent les opérations programmées d'amélioration de l'habitat, formidable outil de programmation territoriale et sociale à la disposition des collectivités, et qui a montré, à ce jour, toute son efficacité pour revitaliser les centres bourgs et les zones rurales fragiles.

A un moment où les pays contractualiseront prochainement avec l'Etat et la région sur le volet du logement, vous diminuez les moyens disponibles. Or le logement constitue pour les pays un objectif prioritaire dans le cadre de leur charte de développement. Pourtant, aucun moyen supplémentaire n'est dégagé, les crédits de paiement baissant même ! Dès lors, quelle marge de manoeuvre auront les préfets pour répondre en même temps aux besoins actuels des propriétaires, et ils sont nombreux, et aux programmes des pays qui souhaiteront renforcer les politiques locales de l'habitat ? En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, suite à la réforme proposée pour harmoniser et renforcer les aides aux logements, réforme que nous approuvons, nous l'avons dit la semaine dernière, nous aurions pu apporter notre soutien comme l'année dernière en nous abstenant.

Mais vous comprendrez aisément que - et je ne mets en cause ni votre volonté, ni votre connaissance des dossiers - le groupe UDF ne puisse, cette année, voter votre budget, compte tenu du trop grand décalage entre les effets d'annonce et la réalité du terrain.

M. Gilbert Meyer et M. Jean Proriol.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Gilbert Meyer pour le groupe du RPR.

M. Gilbert Meyer.

Monsieur le président, monsieur les ecrétaire d'Etat, mes chers collègues, le débat en commission élargie la semaine dernière a permis de passer en revue les incidences de ce projet de budget.

Vous avez eu la courtoisie, monsieur le secrétaire d'Etat, de répondre à l'ensemble des orateurs, et je tenais à le relever. Les députés du groupe politique au nom duquel je m'exprime n'en sont pas pour autant rassurés, car les réponses données manquent pour la plupart de pertinence.

En ce qui me concerne, compte tenu des arguments que vous avez fait valoir, je reviendrai rapidement sur trois points qui me paraissent essentiels : les difficultés du logement public ; les menaces qui pèsent sur le prêt à taux zéro ; enfin, le rôle du parc locatif privé.

S'agissant de la construction, le constat est édifiant.

Depuis 1997, les mises en chantier de logements locatifs sociaux n'ont cessé de diminuer. Cette année, nous arrivons environ à 44 000 logements neufs, tous financements confondus. On peut difficilement faire plus mal.

Les causes de cette situation sont multiples : raréfaction du foncier conjuguée à une envolée des prix, hausse du coût de la construction et des taux d'intérêt, faible mobilisation des moyens du 1 %. Le gel des loyers aussi joue un rôle important. Je ne peux d'ailleurs pas me contenter de la réponse donnée à ce sujet pour justifier le fait de prévoir 1,6 % d'augmentation dans l'équilibre des opérations.

La conjonction de ces facteurs contribue à rendre le l ogement social plus cher. Les organismes HLM éprouvent dès lors de plus grandes difficultés à équilibrer leurs opérations. Seule une politique volontariste, assortie de mesures d'incitation cohérentes, permettrait de surmonter ces difficultés et de relancer la construction. Or, malheureusement, ce projet de budget ne comporte aucune disposition en ce sens. A cet égard, je tiens à dire que les mesures coercitives de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains ne feront que renforcer les blocages existants.

La ligne rouge a été franchie : 40 000 PLUS consommés sur 60 000 budgétés, 4 000 PLA-intégration sur 1 0 000 prévus, tout juste un peu plus de 100 000 PALULOS sur les 120 000 inscrits ! Ces chiffres sont à comparer avec les promesses que l'actuelle majorité avait faites en 1997 : la consommation annuelle de PLA avait été fixée à 120 000 et celle des PALULOS à 180 000. Nous sommes aujourd'hui bien loin du compte.

L'échec est patent : en trois ans, moins du tiers de votre programme PLA a été mis en oeuvre, pour les PALULOS, nous arrivons péniblement à la moitié.

Dès lors, ne faudrait-il pas changer d'orientation sans attendre ? Plusieurs pistes pourraient être explorées. Deux me viennent à l'esprit.

Nos concitoyens aspirent à trouver dans le parc social un habitat à échelle humaine. Mettons en place une politique d'urbanisme moderne qui aille dans le sens de cette a ttente. Ainsi, plutôt que de focaliser d'importants moyens - chroniquement non consommés - sur la construction ou l'acquisition-amélioration, ne pourrait-on pas en redéployer une partie pour accentuer l'effort en matière de démolition-reconstruction ? L'autre piste concerne le foncier. Tous les opérateurs connaissent les mêmes difficultés pour trouver des terrains à des prix raisonnables. Pourtant, dans pratiquement toutes les villes, l'Etat possède des terrains inutilisés. Ne pourrait-il pas montrer l'exemple, en cédant ces terrains aux organismes qui ont des opérations en réserve ? Vous êtes cité et « recité », monsieur le rapporteur !

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

C'est normal, c'est un excellent rapport ! (Sourires.)

M. Gilbert Meyer.

Je livre ces pistes à votre réflexion, en espérant qu'elles trouveront un écho favorable.

Vous avez aussi plaidé, monsieur le secrétaire d'Etat, pour un changement de culture des organismes HLM.

Vous leur avez demandé de diversifier leur patrimoine locatif, afin de favoriser la mixité sociale.

Nombre d'entre eux avaient devancé votre appel. Or ils rencontrent aujourd'hui, dans la gestion de ce patrimoine, des difficultés insoupçonnées. En effet, la hausse des charges provoque des effets amplifiés.

Parmi ces difficultés, on trouve bien entendu les impayés de loyer. Ces derniers prennent de plus en plus d'importance ; leur gestion exige des moyens particulièrement lourds, qui grèvent les capacités d'intervention des organismes.

Le recouvrement des impayés ne pourrait-il pas, à partir d'un certain moment, être confié aux services du Trésor public ? Cette méthode allégerait d'autant la charge des offices d'HLM, qui pourraient dès lors concentrer leurs efforts sur les missions principales.

La mixité sociale, qui vous est chère, a un coût que l'Etat ne peut ignorer. Or, quels accompagnements avezvous prévus pour aider les organismes qui s'engagent dans cette voie ? Aucun, et je le déplore.

J'observe à cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, que même les orateurs de la majorité plurielle ont mis le doigt sur ce dysfonctionnement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

Face aux craintes unanimement exprimées en ce qui concerne l'accession sociale à la propriété, vos propos se voulaient apaisants. Néanmoins, le doute persiste quant à la volonté du Gouvernement de ne pas remettre en cause la pérennité du prêt à taux zéro.

Ce dernier était, jusqu'à l'année dernière, financé par l'intermédiaire d'un compte d'affectation spéciale. Ce compte a été supprimé ; le financement du prêt à taux zéro est donc désormais budgété. Les conditions d'attribution ont également été modifiées, sans aucune concertation.

Le résultat ne s'est pas fait attendre. De 130 000 prêts accordés en 1999, nous sommes tombés à 100 000 seulement cette année.

Profitant de cette baisse, les services de Bercy ont essayé de récupérer, au profit du budget général, une partie des fonds servant à financer le prêt à taux zéro.

Aussi comprendrez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous attendons sur cette question des actes plutôt que des paroles rassurantes ! Le prêt à taux zéro est un formidable outil de mixité sociale et de promotion du logement. Ne le sacrifiez pas, comme, en son temps, fut sacrifié le prêt d'accession à la propriété.

La diminution constatée pour le prêt à taux zéro se retrouve également dans les ventes de logements neufs, qui ont régressé d'environ 30 % par rapport à l'an dernier.

Le dispositif « Besson 2000 » ne représente plus que 15 % des transactions. Le dispositif « Périssol », lui, en représentait 55 % l'année passée.

La nouvelle formule est donc moins attractive et moins performante. Il serait peut-être opportun de l'étendre aux ascendants et aux descendants. Le groupe RPR, pour sa part, y est largement favorable.

Le parc locatif privé remplit un rôle social incontestable. Il accueille des jeunes et des ménages aux revenus modestes. En outre, ses loyers connaissent une évolution modérée, aussi faible que celle du parc public. Le développement et le renouvellement de ce parc supposent le maintien, voire le renforcement, des aides versées aux propriétaires-bailleurs.

La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains a prévu de regrouper ces aides en confiant leur gestion à l'ANAH. Malheureusement, la dotation prévue pour cet organisme est très largement insuffisante. Il faudrait, une fois pour toutes, reconnaître que la propriété privée est d'utilité publique. Elle est aussi une réalité économique de poids.

En effet, combien de foyers sont logés, en tant que locataires, dans le parc privé ? Jamais l'Etat ne pourrait, même pour ceux qui se situent dans le plafond de ressources, les loger dans le patrimoine public. Combien de centaines de milliers d'emplois sont initiés par les travaux du logement privé ? Il nous faut donc, monsieur le secrétaire d'Etat, trouver un partenariat avec la propriété privée. C'est le moins que l'on puisse faire pour les propriétaires car la propriété privée supplée l'Etat dans le domaine qui est le sien. La loi de 1948 conduira nécessairement vers une dégradation, plus grande encore, des immeubles concernés. De même, il y a lieu de revenir à un taux de déduction forfaitaire de droit commun de 30 %. Enfin, la suppression de la contribution annuelle sur les revenus locatifs et de la taxe sur les logements vacants s'impose.

Comme je l'ai déjà dit la semaine dernière en commission, ce projet de budget aurait dû être plus ambitieux.

Toutes les conditions sont réunies et les partenaires n'attendaient qu'un signe du Gouvernement.

Or nous sommes face à une panoplie de mesures sans grande cohérence, qui se situent dans le prolongement des hésitations passées.

Ce n'est pas de votre fait, monsieur le secrétaire d'Etat.

Je sais que vous êtes prisonnier de la stratégie doctrinaire du Gouvernement.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Ça, il y a longtemps qu'on ne l'avait pas entendu !

M. Gilbert Meyer.

Dans ces conditions, vous comprendrez que le groupe RPR ne puisse voter votre budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Dauge, dernier orateur inscrit.

M. Yves Dauge.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de revenir sur quelques-unes des questions que nous avons déjà évoquées ensemble.

Et, d'abord, l'accession à la propriété. Vous avez réussi, monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens à le rappeler, la performance de régler la très délicate question du financement du prêt à taux zéro qui n'était pas assuré pour 1998.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis, et M. JeanLouis Dumont, rapporteur spécial.

Tout à fait !

M. Yves Dauge.

Les conditions d'octroi de ce prêt ont é té réaménagées pour une économie de seulement 200 millions de francs. Or toute une classe d'accédants, grosso modo la classe moyenne, risque de payer très cher, et nous avec, ce réaménagement.

Comment, monsieur le secrétaire d'Etat, de telles déci-s ions sont-elles prises ? Comment éviter qu'elles le soient ? Comment, enfin, revenir au financement que nous avions arrêté ? Telles sont nos interrogations.

Les décisions prises aujourd'hui auront, comme cela a été dit par le rapporteur, un impact à deux ans. C'est donc maintenant qu'il faut agir ; dans deux ans, il sera trop tard.

Concernant le statut du propriétaire bailleur, nous soutenons les deux propositions qui ont été faites, même si, d'après une enquête réalisée par la fédération du bâti ment, le dispositif actuel est assez performant et ne mérite pas que l'on dise qu'il ne fonctionne pas. Cela dit, on pourrait l'étendre aux ascendants et descendants et, mieux encore - nous l'avons signalé lors du congrès de l'Union nationale de la propriété immobilière, l'UNPI aux locataires en place. Quand un tel élargissement pourrait-il intervenir et comment y parvenir, monsieur le secrétaire d'Etat ? Concernant l'équilibre du prêt locatif à usage social, le PLUS, il faut mobiliser le 1 % dans les 4,5 milliards de la convention, et de façon efficace.

M. Daniel Marcovitch.

Très bien !

M. Yves Dauge.

Il faut prévoir un prêt à taux zéro sur vingt-cinq ans ! Avec 2 % sur quinze ans, on se fera plaisir pour rien. Si on va au bout de la négociation qui est en cours, il faut arriver à cela. Il ne s'agit pas d'aboutir à un simple accord national ; des conséquences pratiques


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doivent s'ensuivre sur le terrain, dans les régions. Car on a beau se mettre d'accord avec les responsables nationaux, après, il ne se passe plus rien !

Mme Janine Jambu.

Très juste !

M. Yves Dauge.

Si nous arrivions à cela, nous consommerions plus facilement des crédits.

Un mot sur le foncier : la politique urbaine que nous voulons a un coût foncier plus élevé peut-être qu'à d'autres époques. Pour autant, il n'est pas très réaliste d'attendre de l'Etat qu'il finance et le logement et le foncier. Mieux vaudrait se tourner vers les régions, les départements et bien sûr les communes et engager une discussion claire sur leur participation au financement du foncier.

J'ai à cet égard en tête l'exemple de l'établissement public régional bien connu de la basse Seine.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Très efficace !

M. Yves Dauge.

Cet établissement finance le foncier par des avances remboursables à taux zéro avec un différé de vingt-cinq ans. L'Etat est certes à l'origine de cet établissement public, mais aujourd'hui il ne paye plus. Et pourquoi pas ? En tout état de cause, je suis persuadé qu'il faut aborder la question du financement du foncier avec les régions, les départements et les communes.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis, et M. JeanLouis Dumont, rapporteur spécial.

Très bien !

M. Yves Dauge.

On ne renouvellera pas, mes chers collègues, les quartiers pas plus qu'on ne pourra dans les pays restructurer les villages et les bourgs sans fortement investir dans le foncier.

Il n'est pas question de faire financer par le seul logement tout ce qui relève de l'aménagement urbain de proximité. Il faut trouver un autre moyen et faire jouer le partenariat avec les régions.

Cela dit, ce partenariat pose aussi le problème de la méthode de programmation de l'Etat. Je ne conteste du reste pas son autorité en matière de programmation de logement mais la méthode qu'il suit. L'Etat, même si cela relève de sa compétence, ne peut pas programmer seul, sans s'entendre avec les élus dans le cadre de politiques de territoire, conformément à l'esprit des lois que nous avons votées - loi Chevènement, loi Voynet ou loi Gayssot, et la vôtre, monsieur Besson - sinon nous aboutirons à des situations désespérantes.

Je me verrai dans l'obligation de dire à mon préfet, ces jours-ci, bien que je sois convaincu qu'il veuille sincèrement m'aider, que si nous ne construisons pas les logements, c'est en raison du refus de l'administration.

Je vous l'ai déjà dit, monsieur le secrétaire d'Etat : bien des fois, on m'a refusé des logements, alors que j'avais présenté de bons arguments. Il est vrai que vous m'avez promis votre aide, mais à la condition de passer en catégorie 1 pour obtenir directement des logements en raison du refus de l'administration locale.

Voilà ce que je ne comprends pas. Il y a d'ailleurs une telle sous-consommation dans mon département que les dotations vont être réduites.

Je m'évertue du reste à l'expliquer à mon préfet même si ce n'est pas lui que je veux convaincre, parce que je pense qu'il est d'accord avec mes arguments. Mais je n'ai aucune raison de dépendre d'une personne qui décide tout simplement parce que c'est son droit.

M. Jean Proriol.

Tout à fait !

M. Yves Dauge.

En tant qu'élu local et parlementaire, je suis, au même titre que d'autres, fondé à participer à la programmation de logements. Or si cette légitimité m'est refusée, l'esprit des lois n'est plus respecté.

Cela dit, je souhaiterais qu'on anticipe sur la décentralisation d'une partie au moins de la programmation des logements, car il faudra bien s'entendre avec les collectivités locales et les régions. L'Etat ne peut persister à vouloir garder tout le pouvoir sans en payer le prix.

M. Jean Proriol.

Il a raison !

M. Yves Dauge.

Je ne dis pas qu'il faille tout décentraliser ; du reste, l'Etat jouera toujours un rôle important sur le plan budgétaire, sur celui de la régulation, sur le plan fiscal enfin, autant de domaines dans lesquels ses compétences resteront très fortes, quand bien même on peut espérer de sensibles progrès en matière de programmation : pour vous dire le fond de ma pensée, j'éprouve à cet égard une certaine insatisfaction.

Quoi qu'il en soit, monsieur le secrétaire d'Etat, je l'ai dit en commençant, votre action et celle du Gouvernement nous auront permis de résoudre des problèmes extrêmement difficiles : celui du financement du prêt à taux zéro, celui du 1 %, ou encore la réforme exceptionnelle des aides personnalisées au logement, dont je connais le coût. C'est la raison pour laquelle, nonobstant ces quelques observations, je soutiens totalement votre action et ce budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat au logement.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, permettez-moi tout d'abord de remercier chaleureusement vos deux rapporteurs, Jean-Louis Dumont et Alain Cacheux, qui vous ont présenté l'essentiel du projet de budget du logement et de l'urbanisme pour 2001. J'y associe, malgré son empêchement d'aujourd'hui, le président Lajoinie qui a organisé la réunion de commission élargie de jeudi dernier, dans le cadre de la nouvelle procédure dont la qualité est désormais démontrée.

M. Alain Cacheux rapporteur pour avis.

C'est vrai !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

C'est l'occasion pour moi de saluer à nouveau celles et ceux qui l'ont fait vivre d'une manière aussi positive. Ainsi que vous le savez, vous retrouverez le compte rendu de cette réunion au Journal officiel des débats, en annexe à celui de cette séance publique, assorti de nos réponses aux quinze questions écrites budgétaires que vous nous avez adressées, lesquelles viennent compléter nos échanges oraux.

Depuis trois ans et demi, l'action de ce gouvernement a permis de mettre en oeuvre les moyens d'une refondation globale de la politique du logement, avec le double souci d'une plus grande justice et d'une plus grande stabilité des règles du jeu. Au fil des lois de finances, cette refondation a porté sur tous les aspects de la politique du logement : parc social et parc privé,...

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Eh oui !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

... construction neuve et amélioration, secteur locatif et accession à la propriété, et ce tant sur le plan des dépenses budgétaires que sur celui des mesures fiscales.

M. Proriol croit percevoir un parc privé négligé,...

M. Alain Cacheux rapporteur pour avis.

Oh !


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M. le secrétaire d'Etat au logement.

... tandis que M. Meyer me gratifie du statut de prisonnier d'une stratégie doctrinaire.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

M. Meyer est un peu excessif !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Mais c'est aux propos de Mme Jambu que je veux en premier lieu faire écho. Elle a cru devoir mettre en parallèle 30 milliards de francs d'exonérations fiscales pour le secteur privé et les 2,9 milliards de francs de crédits budgétaires consacrés au logement social. Elle me permettra de lui indiquer que, en fait, nous avons eu le souci d'un certain équilibre, et de lui expliquer.

Mme Jambu a classé la baisse de la TVA, par exemple, parmi les exonérations fiscales ; or le parc HLM en est bénéficiaire à hauteur de 5 milliards de francs. De la même façon, la suppression, dans le cadre des réformes fiscales engagées, du droit au bail, soit un montant de 7 milliards de francs, bénéficie à l'ensemble des locataires, ceux du parc social mais aussi ceux du parc privé. C'est également le cas de la réforme des aides personnalisées au logement, prévue par ce budget, qui représente 7,5 milliards de francs. Vous y avez, madame, pris une part suffisamment décisive pour que je vous en rende hommage.

S'y ajoutera la baisse de la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui soulagera les organismes dont le patrimoine est situé en zone urbaine sensible.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Excellente mesure ! M. le secrétaire d'Etat au logement. Au total, nous avons fait preuve d'un réel souci de l'équilibre, et pour peu que l'on mette toute ces mesures bout à bout, on s'aperçoit que les écarts sont bien différents de ce qu'il pourrait apparaître à première vue, à plus forte raison lorsqu'il s'agit d'avantages fiscaux, lesquels peuvent se traduire par de moindres dépenses pour l'Etat qu'il est impossible de faire figurer dans la loi de finances telle qu'elle vous est présentée.

Je comprends bien la légitime impatience de vos rapporteurs, relayés sur d'autres bancs par Mme Jambu et par M. Marchand, qui appellent à une véritable relance de la production dans le logement social, que ce soit en construction neuve ou en acquisition dans l'ancien. Le Gouvernement partage cette préoccupation ; je vous ai indiqué les pistes sur lesquelles nous travaillons. Elles concernent tant les crédits budgétaires de l'Etat que les financements complémentaires du 1 % dont les capacités financières ont été reconstituées et doivent être mieux mobilisées.

J'ai entendu, ici ou là, quelques suggestions prônant un prêt à taux zéro pour le logement locatif social, assorti d'une certaine durée. Cette question est déjà en débat avec l'union d'économie sociale du logement. Bien évidemment, monsieur Morisset, je reste très attentif à tout ce qui pourrait être fait pour accélérer la mise en place des crédits, mais également pour faire prévaloir la raison dans les exercices de programmation et pour ne pas laisser perdurer des situations qui n'auraient pas de justification. Je le dis tout net à M. Dauge que j'ai bien entendu sur ce point.

La loi de solidarité et de renouvellement urbains que vous adopterez en dernière lecture la semaine prochaine rend la réussite de cette relance de la construction du logement social d'autant plus impérative, en ce qu'elle nous permettra effectivement, monsieur Proriol, d'exiger des collectivités locales qui s'opposent en zone urbaine au développement de l'offre locative sociale de prendre leur part à la construction des équilibres que nous entendons restaurer dans toutes nos communes et nos quartiers, et dont dépendent, pour le long terme, la pérennité et le respect de valeurs fondatrices de notre société. Lorsque certaines attitudes débouchent sur des concentrations fondées sur la discrimination, beaucoup de nos principes s'en trouvent compromis et c'est l'honneur de la représentation nationale de rappeler à toutes les collectivités de ce pays qu'il y a des règles du jeu, et que toutes doivent les respecter. La décentralisation ne peut se concevoir que dans le respect des lois de la République, faute de quoi nous ne serons plus avec un Etat, mais avec 36 000 petits

Etats qui en feraient chacun à leur tête. Ce n'est pas ce que vous voulez, j'en suis sûr. Comprenez donc la démarche que nous suivons.

J'indique sur ce point à M. Marchand que la loi de solidarité et de renouvellement urbains, une fois adoptée, introduira un mécanisme plus solidaire de financement de la caisse de garantie du logement social. Or c'est elle, vous le savez, qui doit concourir au redressement des organismes en difficulté. Il y a donc là une avancée qui va dans le sens des souhaits qu'il a formulés.

Reste, comme l'a rappelé avec force dans sa conclusion votre rapporteur spécial, que c'est par une mobilisation forte et convergente de l'ensemble des acteurs que les projets se développeront. Cela suppose, au-delà des financements que nous nous attachons à améliorer, une réelle volonté politique des élus et des bailleurs sociaux. C'est donc bien, on le voit, en termes de volonté que le problème se pose : j'appelle votre attention, madame et messieurs les députés, sur le fait que depuis que la durée de l'amortissement a été portée à cinquante ans pour le PLUS en acquisition-amélioration, le taux de consommation a baissé par rapport à ce qu'il était lorsque l'amortissement se faisait en trente-deux ans. Oui, il faut un changement de culture. Oui, il faut presser le pas. Les moyens sont là. Or, paradoxalement, le produit le mieux financé est celui qui est parmi les moins bien consommés.

Au-delà de ces divers aspects se pose évidemment, monsieur Dauge, la question du foncier. Nous avons engagé le dialogue avec les régions. Nous avons été entendus par quelques-unes d'entre elles et, pour la première fois, une ligne « action foncière » figure dans plusieurs contrats de plan Etat-région, à laquelle nous contribuons.

Ce n'est qu'un début, mais nous ne souhaitons qu'amplifier ce mouvement.

Nous portons, monsieur Proriol, la plus grande attention à la mobilisation du foncier public. J'en veux pour preuve la négociation que nous avons engagée autour de la disponibilité foncière que représente l'emprise de l'hôpital Laennec dans notre capitale.

(Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste.) Nous sommes donc bien sur la même longueur d'onde.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Il faut en faire autant avec les anciennes casernes !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

A vous entendre, monsieur Proriol, un budget de continuité ne peut comprendre de grandes réformes. Ce budget nous prouve le contraire, puisqu'il contient une grande réforme des aides au logement. Par quel miracle, me direz-vous ? Un budget qui n'augmente que de 1,6 % peut-il absorber 2 milliards de crédits supplémentaires pour la réforme des aides au logement ? Tout simplement parce que la situation générale s'améliore. Le premier signe que vous


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connaissez bien en est la baisse du chômage. Il en est un autre : la diminution, pour la première fois, du nombre des bénéficiaires du RMI. Il y en a encore un troisième : la légère réduction du nombre des bénéficiaires des aides au logement, à mesure que les revenus s'améliorent,...

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

C'est ce qui s'appelle le résultat d'une bonne politique !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

... notamment chez les 800 000 non-salariés qui sont devenus salariés.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

C'est de la bonne gestion !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

De ce fait, les aides nous reviennent moins cher et nous pouvons financer ces 2 milliards avec une contribution de seulement 655 millions, le reste étant couvert par les reliquats disponibles. Avec une gestion rigoureuse, il est possible, vous le voyez, de faire une belle réforme.

Certe, elle ne touche pas encore les logements foyers ni l'accession à la propriété sur laquelle travaille le conseil national de l'habitat. Sachez toutefois que le secteur locatif hors foyers représente les deux tiers des bénéficiaires de ces aides personnelles et ils y trouvent déjà leur compte.

S'agissant de l'accession à la propriété, rappelons que le prêt à taux zéro aurait été bien mal en point si nous n'avions pas pris la décision de rebudgétisation...

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Eh oui !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

... à laquelle les députés de la majorité ont beaucoup aidé.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

C'est vrai !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Contrairement à ce que laisse entendre M. Meyer, le niveau de consommation de ces prêts ne se situe pas entre 130 000 et 100 000 : en 1999, c'était 117 000, en 2000, nous serons entre 112 000 et 115 000. Le budget 2001 repart sur une hypothèse de 112 000. Mais, de grâce, n'oubliez pas que ce financement n'est pas contingenté : en d'autres termes, nous aurons les moyens de faire face à la demande. J'ose donc espérer, monsieur le rapporteur spécial, que la

« papisation », pour reprendre votre expression, ne nous menacera pas au prochain exercice, et que nous nous battrons pour qu'il en soit de même dans les exercices à venir.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Nous serons avec vous, monsieur le secrétaire d'Etat.

M. Gilbert Meyer.

Ce sera Verdun !

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

On sortira les casques !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

M. Marchand, MM. les rapporteurs et Mme Jambu se sont préoccupés de l'actualisation régulière des aides rendue bien nécessaire par l'évolution des charges. Je leur confirme que l'actualisation 2001 est bien prévue dans la loi de finances. Des dispositions ont été prises pour les produits pétroliers, même si aucune mesure spécifique n'est prévue dans le cadre du budget du logement. Mais la réforme des aides au logement devrait heureusement participer à maintenir un bon niveau, je le souhaite en tout cas, en absorbant une part de ce surcroît de dépenses.

M. Marchand a souligné les mérites du tissu associatif - sur ce point nous le rejoignons tous - et appelé de ses voeux un fonds spécifique. Je souhaite toutefois lui rappeler que, depuis dix ans, nous avons créé le FSL, mis en place l'aide à la médiation locative ainsi que l'aide à la gestion locative sociale, et que nous sommes en train d'améliorer les dispositifs de financement pour les associations. Sur la pluriannualité enfin des engagements de l'Etat, nous aurons un texte avant la fin de l'année.

Toute une évolution est en cours, qui rejoint ses voeux et je m'en réjouis.

M. Marchand entend faire preuve également de vigilance quant à la mise en oeuvre effective de loi du 5 juillet relative aux gens du voyage. Je lui confirme que, en plus des 70 millions de francs inscrits à ce titre dans le budget du logement, il y en a également 70 dans le budget de l'emploi et de la solidarité, et que ces deux crédits s'additionnent.

M. Morisset s'est interrogé sur l'efficacité de la politique suivie. Si je déplore, tout comme lui, l'insuffisance de la production du logement social, je me dois de souligner que nous sommes dans une situation où le secteur du bâtiment et de l'immobilier va bien. "Climat de haute conjoncture", a dit Alain Cacheux.

M. Gilbert Meyer.

Il y a mieux !

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Ça va remonter !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Cent trente mille PALULOS, l'an dernier, monsieur Meyer...

M. Gilbert Meyer.

A comparer aux 180 000 promis !

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Alors que les PALULOS étaient remis en question à une époque !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

... c'est-à-dire 10 000 de plus que ce qui était annoncé au budget, et non 20 000 de moins !

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

C'est vrai !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Soixante mille créations d'emplois directs en deux ans dans le bâtiment et autant dans les secteurs amont. Les transactions atteignent un niveau jamais atteint : 600 000 en un an.

Sur tous ces points, nous pouvons espérer que la politique engagée donnera de bons résultats qui prouveront son efficacité dont les chiffres d'ores et déjà témoignent.

Nous souhaitons évidemment, que les mises en chantier restent à un niveau élevé et nous resterons particulièrement vigilants au suivi du cap, et particulièrement à l'amélioration de la situation du logement social, tout en appelant les professionnels à la responsabilité afin d'éviter qu'une dérive des prix ne vienne déstabiliser la demande. Et si quelques enveloppes, que vous avez citées, sont en baisse, je nous rassure tout de suite : les moyens sont en réalité au moins confirmés, du fait des sousconsommations observées sur les lignes correspondantes.

Ni Jean-Claude Gayssot ni moi-même ne manquerons d'attention sur les efforts qu'appelle le logement des plus démunis.

Je m'en tiendrai là, monsieur le président, ayant dépassé le temps de parole qui m'était imparti,...

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Ils ne s'en lassent pas, monsieur le secrétaire d'Etat !

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

C'était une douce musique ! M. le secrétaire d'Etat au logement. ... même si je n'ai pas réussi, et j'en suis désolé, à rassurer M. Meyer.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis.

Vous n'y parviendrez pas !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Quoi qu'il en soit, je suis convaincu que, depuis trois ans et demi, nous avons ensemble bien travaillé. Il reste évidemment beaucoup à faire. Le budget 2001 permet tout à la foi une consolidation des acquis et de nouvelles avancées au service du droit au logement que nous nous attachons tous à assurer. C'est pourquoi je me réjouis par avance de le voir adopter, puisque plusieurs d'entre vous se sont déjà prononcés dans ce sens.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT

M. le président.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne

« Equipement, transports et logement ».

ÉTAT B Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 1 202 986 420 francs ;

« Titre IV : 701 039 732 francs. »

ÉTAT C Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 11 099 112 000 francs ;

« Crédits de paiement : 5 326 588 000 francs. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 18 339 318 000 francs ;

« Crédits de paiement : 7 230 702 000 francs. »

TITRE VII. - RÉPARATION

DES DOMMAGES DE GUERRE

« Autorisations de programme : " ;

« Crédits de paiement : " »

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix le titre III.

(Le titre III est adopté.)

M. le président.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial, a présenté un amendement, no 76, ainsi rédigé :

« Sur le titre IV de l'état B concernant l'équipement, les transports et le logement : II. - Urban isme et logement : réduire les crédits de 490 000 000 francs. »

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

On me permettra de m'adresser en premier lieu à mes collègues pour les rassurer. Cet amendement n'a aucunement pour but de réduire, sinon de supprimer des crédits destinés à financer l'aide personnalisée au logement. Le problème est qu'il vient tout normalement après l'amendement no 75, lequel nous sera présenté à l'article 30, probablement lundi en fin d'après-midi. La diminution de crédits proposée n'a d'autre objet que de requalifier dans la catégorie des services votés les 490 millions de francs de dotations pour les aides à la personne.

En effet, monsieur le secrétaire d'Etat, la commission des finances, à l'instigation de son rapporteur, a souhaité requalifier les crédits qui sont inscrits sur cette ligne, qu'elle a considérés non pas comme des crédits nouveaux, mais comme l'extension en année pleine - 2001 - d'une mesure qui n'est plus nouvelle puisqu'elle a été prise au 1er juillet 2000. Il s'agit donc simplement - je m'adresse à Bercy - de se conformer à l'orthodoxie budgétaire.

Par conséquent, mes chers collègues, je vous propose aujourd'hui de diminuer une ligne de crédits budgétaires pour les réaffecter, dès lundi, sur la bonne ligne. J'espère vous avoir convaincus de suivre l'avis de la commission des finances qui, dans la grande sagesse qui la caractérise, a adopté ces deux amendements.

M. le président.

La parole est à M. le ministre, de l'équipement, des transports et du logement, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no

76.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le président, nous approchons du moment où l'ensemble du budget va être voté. Je n'aurai donc plus d'autre occasion d'intervenir pour féliciter comme il convient l'Assemblée et les rapporteurs pour leur travail.

Pour ce qui est de l'amendement no 76, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

76. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le titre IV modifié par l'amendement no

76. (Le titre IV, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix le titre VII.

(Le titre VII est adopté.)

M. le président.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement, concernant le logement.

INDUSTRIE, POSTE ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. le président.

Nous abordons l'examen des crédits du secrétariat d'Etat à l'industrie, concernant l'industrie, La Poste et les télécommunications.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'industrie.

M. Michel Destot, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale du Plan, pour l'industrie.

Il m'est fort agréable de rapporter sous votre auto-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

rité, monsieur le président, vous le grand spécialiste des questions énergétiques, et devant mon ami Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, dont je veux saluer le travail. Nous avons aujourd'hui à examiner un bon budget qui est le résultat d'une bonne politique et qui traduit l'effort fait par tout le Gouvernement pour tirer le meilleur parti de l'excellente conjoncture économique que connaît notre pays, dans un contexte international favorable.

L'industrie française tourne aujourd'hui à plein régime avec un taux d'utilisation de ses capacités de production qui frôle actuellement les 90 %, ce que notre pays n'avait pas connu depuis de très nombreuses années.

La vigueur de la production industrielle montre que nos entreprises continuent de bénéficier des bonnes orientations de la conjoncture internationale, malgré le renchérissement brutal de notre facture pétrolière qui a sans doute contribué à freiner légèrement son rythme de croissance.

La très forte progression des investissements industriels, qui devraient atteindre en 2000 leur plus haut niveau depuis dix ans, 12 % environ, est rassurante quant à la capacité des entreprises françaises à adapter leur outil de production, dans ce contexte de forte activité, au profit de la croissance et de l'emploi.

C'est dans ce contexte plutôt favorable que s'inscrit l'examen des crédits de l'industrie pour 2001. Le budget de l'industrie s'élèvera, en 2001, à 15 386 millions de francs, budgétisation comprise, en dépenses ordinaires et crédits de paiement et à 4 835 millions de francs en autorisations de programme. Ces montants, qui représentent une progression de 1,3 % en crédits de paiement par rapport à 2000, permettront de consolider l'effort de mise à niveau engagé depuis la loi de finances de 1998. Je tenais à le souligner à nouveau pour manifester la rupture survenue en 1997.

Ce budget est clairement tourné vers l'avenir puisqu'il met l'accent sur les dépenses liées à l'innovation et à l'amélioration de l'environnement des entreprises.

Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, permettez-moi d'aborder les orientations principales de ce budget en évoquant quelques points qui sont à mes yeux essentiels.

Je commencerai par le soutien à l'innovation. Vous savez l'importance que j'y attache.

L'innovation est au coeur du développement industriel.

On estime que les secteurs les plus innovants, les nouvelles technologies de l'information et de la communication, les biotechnologies, les applications des sciences du vivant, sont responsables, à eux seuls, de plus de 20 % de la croissance. Ils voient leurs emplois augmenter cinq fois plus vite que dans les autres secteurs de l'économie. C'est dire si le soutien à l'innovation du secteur industriel, qui représente plus des deux tiers des efforts nationaux en matière de recherche et développement, est essentiel si l'on veut pérenniser la croissance et générer de nouveaux emplois.

Ainsi, dans le budget 2001, une priorité est accordée à certaines technologies, identifiées comme majeures pour la compétitivité des entreprises, à travers notamment l'appel à projets « technologies clés », doté de 400 millions d e francs. Le soutien aux grands programmes de recherche prolonge cet effort avec un montant de plus de 1,8 milliard de francs, tandis que le thème de la société de l'information mobilise près d'un milliard de francs à lui seul.

Le soutien à l'innovation concerne également les petites et moyennes entreprises, grâce notamment aux actions menées par l'ANVAR dont la capacité d'invervention est maintenue à environ 1,4 milliard de francs, étant précisé que cette dotation est amenée à augmenter dans le cadre du contrat d'objectifs en cours d'élaboration.

L'effort de soutien à l'innovation ne doit cependant pas être relâché. Dans un récent rapport à la commission des finances sur ce thème, j'ai présenté quelques propositions pour dynamiser encore la capacité d'innovation de nos entreprises. J'en évoquerai quatre rapidement.

Tout d'abord, il me semble nécessaire d'envisager une amélioration du dispositif du crédit d'impôt recherche, qui est concentré surtout sur les dépenses de recherche et ne prend pas suffisamment en compte, selon moi, les dépenses liées à l'innovation. Le système en lui-même n'est pas en cause ; tout le monde s'accorde à reconnaître que, depuis maintenant quinze ans qu'il existe, les effets du crédit impôt recherche ont été très bénéfiques. Mais nous pourrions réfléchir à en tirer un meilleur parti, par exemple en adoptant à terme un crédit impôt innovation, qui pourrait bénéficier plus directement encore aux petites et moyennes entreprises, et privilégier notamment les plus innovantes.

Deuxièmement, il me semble que l'innovation ne peut être efficacement encouragée qu'au plus près du terrain.

En effet, à la différence de la recherche, elle ne peut se développer que si elle répond et s'adapte aux besoins émergents. Pour cela, les encouragements à l'innovation doivent être décentralisés, pour s'inscrire au plus près des initiatives. Et pour éviter un saupoudrage des aides, il est essentiel d'identifier des environnements de taille critique qui permettent aux innovations de se développer rapidement.

Dans cet esprit, une réorientation à terme des aides de l'Etat et des aides communautaires vers des zones de haute technologie à fort potentiel en termes de croissance et de création d'emplois doit être envisagée sans remettre en cause, bien sûr, sur un autre plan, la nécessaire solidarité en direction des zones en reconversion.

Troisièmement, l'ANVAR a su parfaitement assumer les missions qui lui ont été confiées. Je pense que l'efficacité de ses actions pourrait encore être renforcée en s'adaptant à certaines modalités d'intervention. Ainsi, la mise en place d'avances remboursables participatives, ou même la transformation de l'aide à l'innovation en fonds propres sont des mesures susceptibles de bénéficier à la fois aux entreprises aidées mais aussi à l'ANVAR, qui pourrait augmenter le volume de ses interventions par réaffectation des produits financiers dans le cycle de l'aide à l'innovation.

Par ailleurs, la création d'une véritable plate-forme Internet de l'innovation à partir du site de l'ANVAR doit être encouragée pour permettre aux PME qui disposent de peu de moyens d'accéder à l'information à un moindre coût.

Enfin, et toujours sur ce chapitre de l'innovation, je veux souligner que l'approche européenne des questions liées à l'innovation est également indispensable. C'est une bonne chose, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'innovation fasse partie des principaux axes de travail que vous avez voulus pour la présidence française de l'Union européenne. Le prochain colloque - je profite de l'occasion pour faire un peu de publicité pour la région RhôneAlpes (Sourires.) - intitulé « Vers un espace européen de l'innovation », organisé le 21 novembre prochain à Lyon par le ministère de la recherche et le ministère de l'écono-


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mie, des finances et de l'industrie, devrait permettre de faire émerger de nouvelles pistes de soutien à l'innovation.

Après l'innovation, j'en viens à la politique énergétique. Je ne reviendrai pas ici sur les débats de fond que nous avons pu mener en votre présence il y a un mois environ, à l'occasion des troisièmes rencontres parlementaires sur l'énergie. Je voudrais seulement revenir sur certains points qui me semblent particulièrement importants.

Tout d'abord, à l'heure où commencent les négociations de La Haye sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, je crois que les esprits ont sensiblement évolué et qu'il existe désormais une prise de conscience générale des enjeux de protection de notre environnement et de la nécessité de préserver les ressources naturelles. La diversification énergétique et les efforts initiés, dès 1998, en matière de maîtrise de l'énergie doivent donc être et poursuivis et approfondis. A cet égard, la dotation de l'ADEME est maintenue à 242 millions de francs d'autorisations de programme, mais s'élève, en crédits de paiement, à 200 millions de francs, soit une progression de plus de 57 % qui traduit la montée en puissance des interventions de l'agence.

En ce qui concerne les énergies renouvelables, il est nécessaire d'encourager encore ces nouveaux modes de production de l'énergie, respectueux de l'environnement, qui assurent une indépendance énergétique, une proximité par rapport aux besoins, et offrent les conditions d'un développement durable pour notre société. Or, même si elles représentent déjà avec l'hydraulique 12 % de la consommation énergétique française, je crois qu'il est nécessaire de se fixer des objectifs plus ambitieux, et même si nous savons que la part en restera limitée. Le projet de directive européenne sur les énergies renouvelables prévoit de quadrupler la part des énergies renouvelables, hors grande hydraulique, d'ici à 2010, ce qui représente un cadre exigeant mais à prendre en considération.

Les nouvelles propositions contenues dans le rapport de notre collègue Yves Cochet, relatives à l'efficacité énergétique et au développement des sources d'énergie renouvelable, sont autant de moyens d'oeuvrer dans cette direction.

Comme l'a très justement affirmé Lionel Jospin, il nous faut développer « une véritable industrie des énergies renouvelables ». Pour cela, des tarifs d'achat concernant l'électricité éolienne, la cogénération biomasse et le photovoltaïque doivent pouvoir être garantis pour une période à déterminer, ni trop courte pour laisser sa chance à l'émergence de cette nouvelle industrie, ni trop longue car ce serait jouer contre Electricité de France et même contre cette nouvelle industrie des énergies renouvelables qui a besoin de se frotter, à terme, au marché.

De même, l'encouragement de la recherche scientifique dans ces domaines doit devenir prioritaire. Je pense par exemple à la recherche en matière de pile à combustible actuellement développée par le CEA.

Et puisque j'évoque le CEA, abordons rapidement la question du nucléaire. Dans l'offre énergétique plurielle vers laquelle nous devons tendre, le nucléaire, indiscutablement, conservera une place importante. Affirmer que, dans un futur proche, la production massive d'élect ricité pourrait totalement être assurée par d'autres sources d'énergie n'est pas concevable. Dans le domaine du nucléaire, comme ailleurs, refusons les tentations de sanctification ou de diabolisation. De toute évidence, pour des pays comme la France, dépourvus de ressources énergétiques propres, le nucléaire reste et restera une source d'énergie incontournable si l'on veut, d'une part, garantir une moindre vulnérabilité de nos économies aux variations des cours du pétrole, et, d'autre part, respecter nos engagements pris en matière de réduction d'émission de gaz à effet de serre.

M. Robert Galley.

Très bien !

M. Michel Destot, rapporteur spécial.

A ce sujet, et je ne pense pas que ce soit mon ami Robert Galley qui me contredira, il vaudrait mieux dire qu'à terme, on réduira la part du nucléaire en France, plutôt que de condamner dès aujourd'hui, sans le dire, en lui interdisant les voies du retraitement, du stockage et de l'élimination des déchets. Il reste d'ailleurs à ce sujet beaucoup à faire pour apporter des solutions à la gestion de l'ensemble des déchets radioactifs, dans le cadre fixé par la loi Bataillle de 1991.

En ce qui concerne le domaine de la sûreté nucléaire, dans le projet de loi de finances pour 2001, l'ensemble des ressources provenant de crédits publics dont bénéficiait l'IPSN, Institut pour la sûreté nucléaire, est regroupé en une subvention unique désormais rattachée au budget du ministère de l'environnement.

Ce rattachement budgétaire ne règle cependant pas la question de la tutelle du futur établissement public. Votre rapporteur considère qu'il est nécessaire qu'elle continue d'être assumée, conjointement avec les ministères chargés de la santé et de l'environnement, par le secrétaire d'Etat à l'industrie qui dispose d'une réelle compétence et d'une longue expérience en matière de sûreté nucléaire. J'ai éc rit en ce sens à M. le Premier ministre pour attirer son attention sur cet important dossier.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Très bien !

M. Michel Destot, rapporteur spécial.

La subvention globale de fonctionnement versée au CEA s'élève à un peu plus de 6 milliards de francs, ce qui représente une progression de 3,9 %. Cette évolution est satisfaisante compte tenu des très importantes missions confiées à cet organismes public : recherches sur la gestion à long terme des déchets nucléaires et sur les réacteurs nucléaires du futur, rôle essentiel en matière d'innovations technologiques - micro-électronique, microsystèmes, nanotechnologies, mais aussi développement des technologies médicales et biomédicales.

J'en viens aux directives européennes concernant l'électricité et le gaz. C'est d'abord pour moi l'occasion de souligner le bon comportement d'EDF. Outre l'extraordinaire engagement de son personnel lors de la tempête de l'hiver dernier, je veux saluer ses performances remarquables au plan international. Mais il reste encore, monsieur le secrétaire d'Etat, à sortir tous les décrets d'application de la loi électricité votée en ce début d'année.

Ce budget prévoit, par ailleurs, 60 millions de francs pour permettre l'installation de la commission de régulat ion de l'électricité, CRE, instituée par la loi du 10 février 2000. Il est en effet essentiel que la CRE, future CREG avec son extension au gaz, puisse disposer de moyens à la hauteur des missions qui lui ont été assignées. Le compte n'y est pas tout à fait, me semble-t-il, mais peut-être pourrez-vous nous rassurer tout à l'heure.

Quant au futur projet de loi sur la modernisation du service public du gaz, il devrait permettre de franchir une nouvelle étape. Faisons vite. A ce propos, je soulignerais


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la nécessité de donner à GDF les moyens de son développement, en oeuvrant plus particulièrement à sa transformation statutaire et en envisageant l'ouverture de son capital. S'il n'est pas question de sortir l'opérateur national du champ du secteur public, convenons qu'on peut renforcer ses chances de réussite en permettant d'abord à EDF, partenaire naturel de GDF, d'entrer dans son capital, mais surtout en étudiant rapidement les alliances ou participations possibles avec les producteurs de gaz que sont les pétroliers français ou européens. Je serai content, monsieur le secrétaire d'Etat, de vous entendre à ce sujet.

L'accent a également été mis dans ce budget sur l'environnement des entreprises, et en particulier des PMI, à travers les contrats de plan Etat-région qui couvrent la période 2000-2006.

Je veux saluer ici la progression en matière de normalisation et de qualité que vous avez voulu encourager puisque les crédits correspondants augmentent de 3,2 %, et l'attention portée aux formations d'ingénieurs, notamment aux écoles de mines, dont les crédits de fonctionnement augmentent de près de 3 millions de francs.

L'accompagnement des mutations industrielles et le respect des engagements de l'Etat sont aussi au rendezvous.

Les crédits de l'industrie pour 2001 permettront de financer les engagements que vous aviez pris au nom du Gouvernement. Ainsi, les actions de restructuration et de reconversion bénéficieront de 275 millions de francs en autorisations de programme, destinés à la fois au fonds d'industrialisation de la Lorraine et au fonds d'industrialisation des bassins miniers.

En matière d'équipement naval, le budget reflète l'arrêt de nouvel engagement, à compter de 2001, conformément au dispositif d'encadrement communautaire, avec l'absence d'inscription de nouvelles autorisations de programme.

Enfin, la subvention aux Charbonnages de France enregistre une augmentation significative, passant de 2 840 millions de francs à 2 993 millions de francs, tandis que le dispositif de surveillance des affaissements miniers en Lorraine est conforté à l'aide de 4,4 millions de francs de crédits supplémentaires.

En conclusion, il s'agit d'un bon budget, traduisant une bonne politique qui permet aux entreprises françaises de s'adapter aux mutations profondes et aux nouveaux défis auxquels elles doivent désormais faire face : mise en place de l'euro, ouverture des marchés, le tout dans une marche profitable en matière d'emplois vers une véritable

« société de l'intelligence », vers une « nouvelle économie de la connaissance » que nous appelons de nos voeux ! La commission des finances ayant adopté les crédits du budget de l'industrie à l'unanimité, je vous invite, mes chers collègues, à faire de même. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

(M. Raymond Forni remplace M. Claude Gaillard au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour l'industrie.

M. Claude Billard, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour l'industrie.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la lecture et l'analyse des crédits du secrétariat d'Etat à l'industrie conduisent en premier lieu à se poser une question essentielle : face aux enjeux de la mondialisation et à l'âpreté des conditions de la concurrence internationale, peut-on affirmer qu'il existe une véritable politique industrielle dont le budget serait l'instrument privilégié ? Assurément non ! Depuis plusieurs années, les crédits affectés au secteur industriel ont pour vocation de promouvoir et d'accompagner l'adaptation de nos entreprises industrielles à la modernisation des modes de production et de consommation. C'est la raison pour laquelle ne subsistent plus aujourd'hui que quelques actions aux liens mal établis visant principalement à soutenir la compétitivité de l'industrie française et que déclinent les intitulés des quatre agrégats du projet de loi de finances : développement des PMI, recherche, innovation et actions conduites dans le secteur de l'énergie, actions sur l'environnement des entreprises, accompagnement des mutations industrielles.

Le budget de l'industrie devrait permettre une présence forte et cohérente de l'action publique dans l'ensemble de la filière industrielle, en amont avec l'énergie, la gestion des ressources et des matières premières, jusqu'aux services aux entreprises.

Au nom de quel principe, en effet, l'Etat devrait-il s'effacer dans la définition d'une ambition plus globale de stratégies industrielles ? L'histoire révèle d'ailleurs qu'il a toujours joué un rôle majeur par ses dotations, ses incitations comme ses commandes publiques, afin de forger, au-delà du secteur nationalisé, l'architecture industrielle de notre pays.

L'Etat est trop souvent mis devant le fait accompli par les grands groupes qui se restructurent, licencient et délocalisent des productions sans contraintes, y compris lorsqu'ils ont perçu des aides publique. Alsthom sur ses différents sites, Dunlop à Montluçon ou Hutchinson à Châlette-sur-Loing en sont les exemples les plus récents.

Ces restructurations sont loin de faire la preuve de leur logique industrielle. En revanche, la logique financière est plus évidente puisqu'elle vise à rassurer les actionnaires sur les capacités de croissance des entreprises et de leurs profits.

Le budget du secrétariat d'Etat à l'industrie augmente de 1,3 % sur l'exercice précédent, ce qui prolonge l'effort de mise à niveau engagé depuis 1998 mais, si l'on raisonne à périmètre constant et hors crédits affectés au secteur de la poste et des télécommunications, les dotations budgétaires s'élèvent à 12,86 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement et s'inscrivent donc en baisse de 2 % par rapport à ceux de l'exercice précédent.

Ce budget se caractérise aussi cette année par des mouvements importants puisque certaines lignes budgétaires baissent fortement.

Il s'agit en particulier de la diminution du soutien p ublic aux chantiers navals imposée par les règles communautaires interdisant les aides à la commande à compter du 31 décembre 2000, mais surtout du transfert sur le budget du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement des crédits de fonctionnement de l'Institut de protection de la sécurité nucléaire, qui s'élèvent à 959,5 millions de francs, et des crédits finançant les analyses de sûreté effectuées par l'institut pour le compte de la direction de la sûreté des installations nucléaires.


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Ce transfert de tutelle budgétaire soulève des questions essentielles et suscite de grandes craintes dont je voudrais brièvement me faire l'écho.

Le souci qui motive cette réforme - séparer l'exploitant de l'expert pour donner des gages d'indépendance et conférer une plus forte crédibilité à l'IPSN - peut certes paraître légitime. Dans la réalité, ce n'est pas sans dangers pour la pérennité de notre programme nucléaire et, par voie de conséquence, pour l'ensemble de notre politique énergétique.

Ces dangers sont de deux ordres.

En premier lieu, on prend le risque de lier de facto l'autorité de sûreté à l'avis d'un expert dépendant financièrement du ministère de l'environnement, ce qui conduit à s'interroger sur la réelle marge de liberté qui restera à la DSIN : pourra-t-elle, ou osera-t-elle, ne pas suivre l'avis de l'expert ? En second lieu, confier au ministère de l'environnement les crédits de l'IPSN, alors que l'institut travaille notamment sur le stockage profond des déchets radioactifs ou sur les options de sûreté de l'EPR, permet d'avoir quelques doutes sur la volonté de son nouveau bailleur de fonds de conserver un caractère prioritaire à ces études. Or la qualité de la sûreté nucléaire est directe ment liée aux volumes de crédits qu'elle mobilise. Autant dire que je pense, comme M. Destot, que la tutelle doit continuer de s'exercer par le canal de votre secrétariat d'Etat.

Ces remarques et ces réserves préliminaires faites, je voudrais noter que, dans le cadre très limité qui est le sien, les crédits du secrétariat d'Etat à l'industrie traduisent néanmoins une volonté et des efforts réels dans un certain nombre de domaines.

L'action engagée dans quatre domaines prioritaires et la décision de consacrer 500 millions de francs à des mesures nouvelles en sont le témoignage.

Ces actions prioritaires ont trait à la recherche industrielle et à l'innovation, à l'amélioration de l'environnement des entreprises, au soutien aux actions de reconversion et de restructuration, et, enfin, à la politique énergétique.

Ainsi, en ce qui concerne la recherche industrielle et l'innovation, les dotations permettront de soutenir les grands programmes, tel «

MEDEA PLUS », dont l'objectif est de renforcer la compétitivité des entreprises dans le domaine de la micro-électronique, ainsi que les actions de promotion de la société de l'information. Pour cela, la dotation de l'ANVAR est consolidée dans sa capacité d'intervention, tandis que la procédure ATOUT, dont l'objectif est de favoriser la diffusion des techniques vers les PMI, est confortée.

Cela illustre bien la volonté de notre pays de rester maître de son destin dans les domaines de l'innovation et des technologies émergentes.

Il faut également apprécier que les moyens consacrés au développement industriel régional en faveur des PMI augmentent de près de 3 % en autorisations de programme et de 6 % en crédits de paiement.

S'agissant de l'amélioration de la compétitivité des entreprises, il faut souligner l'effort consacré à la formation grâce à l'attribution de moyens supplémentaires aux écoles des mines, à SUPELEC et au groupe des écoles de télécommunications.

Pour ce qui concerne ce qu'il est convenu d'appeler l'accompagnement des mutations industrielles, et qui recouvre en fait de façon moins prosaïque les dégâts causés par les restructurations capitalistes et les abandons de production, la dotation s'élève à 275 millions de francs en autorisations de programmes, soit un recul de 9,8 %, et à 143 millions en crédits de paiement, ce qui représente un repli de 44 %.

Ces reculs s'expliquent en fait par le report des crédits non consommés de l'exercice 2000. Au sein de cette enveloppe, les capacités d'intervention du fonds d'industrialisation de la Lorraine sont stabilisées tandis que le fonds d'industrialisation des bassins miniers est abondé à hauteur de 100 millions de francs, permettant ainsi de mettre en oeuvre les décisions prises concernant ce qui subsiste des bassins d'Albi, de Carmaux et de Decazeville.

Avec la prise en charge des intérêts des emprunts contractés, le soutien de l'Etat à Charbonnages de France reste important et enregistre une augmentation significative de 5 %.

Dans cet agrégat, sont également accrus les moyens de

« l'après-mines » : 13,4 millions de francs seront consacrés en 2001 aux affaissements miniers, contre 10 millions en 2000.

Cette augmentation, par ailleurs limitée, des crédits n'apaise pas l'inquiétude des populations et des élus concernés, particulièrement ceux du bassin ferrifère nord de Lorraine. Ceux que vous avez reçus récemment, monsieur le secrétaire d'Etat, vous ont dit combien il était urgent de rechercher des solutions alternatives au traditionnel ennoyage si l'on veut éviter les risques de nouveaux affaissements.

Ils s'inquiètent également des conséquences financières de l'arrêt des pompages par les exploitants miniers.

Enfin, le quatrième et dernier aspect majeur de ce budget a trait à la politique énergétique.

Il faut, à ce propos, se féliciter de l'augmentation importante des moyens attribués au CEA, et de la progression de 57 % des crédits de paiement en faveur de l'ADEME, permettant d'amplifier l'action de l'agence en matière de maîtrise de l'énergie et de développement des énergies renouvelables.

Alors que le discours officiel continue d'évoquer le rôle fondamental de l'énergie nucléaire, que le prix du pétrole importé a été multiplié par trois en un an et que la lutte contre l'effet de serre est un défi majeur, comment comprendre qu'aucune décision ne soit prise pour prévoir et anticiper le renouvellement de notre parc de réacteurs et notamment en concrétisant les études sur l'EPR ? Ces choix sont urgents. Vous le savez, les acteurs de la filière nucléaire ne s'engageront dans des recherches extrêmement coûteuses que si le pouvoir politique traduit dans les faits sa volonté de construire l'avenir du nucléaire.

Enfin, peut-on encore parler d'une politique énergétique équilibrée quand on connaît la rapidité avec laquelle s'est effectuée l'ouverture du marché de l'électricité et que tarde la publication des décrets relatifs au tarif social, par exemple ? L'ouverture du marché pourrait d'ailleurs encore être élargie puisque, à la demande de l'entreprise publique, le Gouvernement semble prêt, anticipant de deux ans les obligations de la directive et l'esprit de la loi que nous avons votée, à abaisser de 16 à 9 gigawattheures le seuil d'éligibilité des clients industriels.

En conclusion, et sous le bénéfice de ces observations, la commission de la production et des échanges a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'industrie


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pour 2001.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour La Poste et les télécommunications.

M. Edmond Hervé, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan pour La Poste et les télécommunications.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au moment où certains parlementaires réclament un grand débat sur La Poste, il nous faut peut-être rappeler que la discussion budgétaire offre toujours la possibilité à notre représentation de s'exprimer.

C'est donc dans cet esprit qu'après avoir décrit les crédits de La Poste et des Télécommunications, je souhaite évoquer certains sujets qui, tout en n'étant pas exhaustifs, me semblent, dans la conjoncture présente, importants.

Voyons d'abord les dotations budgétaires de La Poste et des télécommunications.

Dans le présent projet de loi de finances, ces dotations s'élèvent à 2 806 millions de francs, soit une progression de 1,06 % par rapport à l'an dernier.

L'autorité de régulation des télécommunications disposera d'un budget en augmentation de 9,75 %. Une nouvelle fois, je regrette que l'enveloppe des indemnités et allocations diverses progresse plus rapidement que celle des rémunérations principales : 11,32 contre 5,81. Il s'agit là d'un phénomène qui n'est pas propre à La Poste et qui est général. Raison de plus pour exprimer ce regret.

Si la dotation de l'Agence nationale des fréquences progresse de 1,52 %, le Groupement des écoles de télécommunications bénéficie d'une subvention de 514,5 millions, en augmentation de 4,04 % par rapport à 2000.

L'an dernier, cette augmentation avait été de 7,62 %.

Nous devons nous réjouir de ces progressions, qui assurent l'effectivité du plan de développement dudit groupement.

La contribution de l'Etat au transport et à la distribution de la presse respecte le contrat d'objectif et de progrès. Elle sera en 2001 de 1 900 millions.

Enfin, soulignons l'apport de l'Etat aux DOM-TOM, qui augmente de 15,02 %, passant de 5,43 millions à 6,25 millions.

Je terminerai cette rapide analyse en mentionnant la reconduction de la dotation de fonctionnement de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, reconduction légitimement motivée par la qualité du travail qui s'y accomplit sous la présidence compétente de notre collègue Jacques Guyard.

Par-delà ces références, que la lecture de notre rapport peut permettre de compléter, avançons quelques observations principales, et, tout d'abord, sur le secteur des télécommunications.

Le Gouvernement s'est doté en janvier 1998 d'un programme d'action pour la société de l'information. Nous croyons pouvoir dire qu'il reste fidèle à ce programme, et notre Assemblée, j'en suis persuadé, portera une grande attention au projet de loi sur la société de l'information que vous préparez, monsieur le secrétaire d'Etat.

Vous avez fait le choix de faire croître les crédits de recherche. Dès 2001, les effectifs de l'Institut national de la recherche informatique et en automatique progresseront de 180 personnes, l'objectif étant de passer de 755 à 1 180 personnes pendant le contrat quadriennal. Je souhaite que le réseau national de recherche en télécommunication puisse jouer pleinement son rôle de coordination et d'impulsion.

Vous avez également fait le choix de réduire le fossé numérique. Il y a là une stratégie à mettre en place pour parfaire les formations offertes aux demandeurs d'emploi, et renforcer les filières de formation des professionnels des technologies de l'information et de la communication.

Ces actions ont pour toile de fond une explosion des télécommunications mobiles. Le nombre d'abonnés en France a progressé de 71 %, passant de 14,2 millions à 24,3 millions. Avec un taux de pénétration de 41,6 %, la France se rapproche de la moyenne européenne, qui avoisine les 50 %.

Le support principal demeure bien évidemment la mise en oeuvre de la troisième génération de télécommunications mobiles, la norme UMTS.

La procédure comparative retenue par la France pour sélectionner les opérateurs a pu faire l'objet de critiques.

A partir du moment où l'Union européenne n'a pas retenu une orientation précise pour l'attribution des licences, la démarche française apparaît tout à fait fondée.

La procédure des enchères retenue par l'Allemagne, l'Autriche, l'Italie, le Royaume-Uni, les Pays-Bas ne semble pas la moins contentieuse si l'on en juge par les contestations qui se font jour ici et là. Au début de cette semaine, l'Office fédéral suisse des télécommunications, qui avait opté pour l'enchère, vient de décider de reporter l'attribution. Son directeur a évoqué la possibilité d'attribuer les licences selon le mode retenu par la France.

Le choix de quatre opérateurs constitue, dans l'environnement économique et réglementaire français actuel, une solution optimale pour assurer le développement du marché.

Il a été suggéré d'ajouter un cinquième opérateur. Ce serait faire naître un risque de contentieux du fait de la modification des conditions initiales de l'offre. Au plan financier, la venue d'un cinquième opérateur ferait vraisemblablement reculer d'un an les attributions de licence et d'autant la réception des sommes à percevoir.

En proposant d'affecter ces dernières à titre principal au fonds de réserve pour les retraites - 102 milliards - et à titre subsidiaire au désendettement de l'Etat - 28 milliards -, le Gouvernement a fait preuve de sagesse.

A ce point, une conclusion s'impose, qui est d'ordre politique. Le dossier UMTS doit être pour nous, parlementaires, l'occasion de réfléchir sur le rôle du Parlement.

Force est de constater que les décisions ont été prises ailleurs.

M. François Goulard.

Très juste !

M. Olivier de Chazeaux.

Absolument !

M. Edmond Hervé, rapporteur spécial.

Précisons qu'elles ne sont pas les seules. Il importe, pourtant, que notre institution parlementaire vive avec la fin du XXe siècle et le début du

XXIe siècle.

M. Olivier de Chazeaux.

Tout à fait !

M. Edmond Hervé, rapporteur spécial.

Ces décisions sont d'importance, puisqu'elles concernent des libertés essentielles, la définition de critères d'aménagement du territoire - et je sais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous y êtes attaché et que vous plaidez pour que la couverture du territoire soit la plus large possible -, les collectivités locales, l'Etat enfin.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

Les sommes en jeu sont appréciables. Si ce dossier illustre parfaitement l'évolution parlementaire, il nous rappelle que dans une démocratie moderne, la première fonction du Parlement est de contrôler. Ce fut d'ailleurs la fonction originelle de l'institution parlementaire.

J'en viens au secteur de La Poste. Dans le respect du principe d'autonomie de gestion qui inspire le contrat d'objectifs et de progrès portant contrat de plan entre l'Etat et La Poste pour la période 1998-2001, une question principale doit retenir toute notre attention.

Comment La Poste peut-elle tout à la fois conquérir une place dans un univers concurrentiel et continuer ses missions de service public ? Voilà le défi auquel elle doit constamment faire face. Cette concurrence concerne aussi bien les marchés nationaux que les marchés internationaux, aussi bien les opérateurs postaux classiques que des entreprises comme EDF-GDF.

La première réponse à cette question se trouve bien évidemment dans le dynamisme de La Poste. Celle-ci s'est considérablement transformée et réformée. Et nous devons ici rendre hommage aux hommes et aux femmes qui ont permis cette transformation. Il lui faut poursuivre, tout en prenant en considération le facteur temps.

En effet, il faut pouvoir compter avec ce facteur pour affronter une certaine dérégulation, et la concilier avec l'indispensable péréquation.

A l'opérateur public de gérer le temps et de négocier.

Les actions de modernisation doivent reposer sur la négociation sociale. Cette démarche est en elle-même un atout. La qualité du climat social influence naturellement celle du service, sa productivité et sa modernité.

C'est dans cet esprit qu'en annexe à notre rapport nous avons fait figurer les opinions des dirigeants de La Poste et des organisations syndicales sur le dialogue social.

D euxième réponse : la France, à Bruxelles, doit défendre le service réservé de La Poste. Mardi dernier, ici même, en réponse à une question de notre collègue M. Brottes, vous avez bien voulu, monsieur le secrétaire d'Etat, rappeler votre hostilité à la proposition de directive adoptée le 30 mai dernier par la Commission et qui prévoit un abaissement substantiel des limites de poids et de prix, pour les envois de correspondances du domaine réservable, de trois cent-cinquante grammes et cinq fois le tarif de base à 50 grammes et deux fois et demi le tarif de base. Cet abaissement risque de déstabiliser l'équilibre du prestataire de service universel. Il y a là une remise en cause de la fonction d'aménagement du territoire que remplit La Poste. A ce sujet, il serait souhaitable que les é lus locaux puissent tirer pleinement bénéfice des démarches de coopération intercommunale et des offres de relations contractuelles que La Poste leur fait pour mettre en place des maisons de service public auxquelles nous devons être, les uns et les autres, très attachées.

Troisième réponse : l'Etat impose à La Poste des services obligatoires ; si le champ concurrentiel s'impose à cette entreprise, il faudra qu'entre l'Etat et La Poste s'établisse une relation de loyauté financière aux termes de laquelle l'Etat devra payer au juste prix les services rendus.

Cela concerne la rémunération des services financiers - et j'ai constaté comme vous que deux collègues venaient de déposer une proposition de loi instituant un droit au compte. Cela concerne aussi le transport de la presse et la participation à l'aménagement du territoire.

Le surcoût du service public non couvert par le monopole ou une contribution de l'Etat serait de 8 milliards de francs, dont 3,5 milliards pour la présence en zones urbaines sensibles.

Je suis intimement convaincu, monsieur le secrétaire d'Etat, que le prochain contrat d'objectifs et de progrès devra prendre en considération ces impératifs.

En conclusion, je dirai que ce projet de budget est fidèle à nos principes. Nous vous proposons donc de l'adopter, conformément à la proposition de la commission des finances. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour La Poste et les télécommunications.

M. François Brottes, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour La Poste et les télécommunications.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, lorsqu'un rapporteur pour avis doit intervenir sur un budget qui n'est désormais plus identifié en tant que tel dans les documents budgétaires et que, de plus, il intervient après le rapporteur de la commission des finances, la question qu'il se pose est de savoir comment faire oeuvre utile pour que son intervention ne passe pas à côté de l'essentiel d'un secteur qui, à présent, envahit le quotidien de la population et qui est en mutation permanente.

Bien évidemment, je ne vais pas reprendre l'analyse purement budgétaire, puisque mon collègue Edmond Hervé l'a parfaitement bien fait. Je ne vais pas non plus faire l'autopromotion de mon rapport, même si j'ai veillé à élaborer un document qui permette à tous ceux qui le souhaitent, et qui ne sont pas forcément des spécialistes, de disposer d'une description de cet univers des postes et t élécommunications tel qu'il est dans cette période d'entre-deux siècles.

Quelques mots tout de même sur ce budget, monsieur le secrétaire d'Etat, pour constater à mon tour l'effort fait en direction de la formation, de l'innovation, de la régulation et de la modernisation.

La formation, parce que votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat, donne plus de moyens au groupe des écoles de télécommunications. C'est là une disposition i ndispensable, qui accompagne un secteur créateur d'emplois.

L'innovation, parce que le programme d'action gouvernemental visant à préparer l'entrée de la France dans la société de l'information arrive en pleine puissance pour éviter que ne se creuse le « fossé numérique » : créations de postes de chercheurs, notamment à l'INRIA ; déploiement de nouveaux réseaux ; accompagnement et stimulation de la création d'entreprise ; dispositif ambitieux pour favoriser les transferts de technologies ; programme volontariste de soutien à la création de contenus ; vulgarisation, enfin, de l'usage des technologies de l'information par une diffusion dans toutes les administrations, les entreprises et dans tous les établissements scolaires.

La régulation, avec des moyens significativement accrus pour l'Agence nationale des fréquences et l'Autorité de régulation des télécommunications. Ces mesures mettent d'ailleurs en évidence que les moyens à terme de votre ministère, monsieur le secrétaire d'Etat, tout comme ceux de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications demeurent insuffisants, eu égard au volume de travail grandissant qu'ils ont l'un et l'autre à assumer.


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Enfin, la modernisation. Si cette dynamique s'applique à la plupart des acteurs du secteur des postes et télécommunications, force est de constater que pour ce qui concerne La Poste, la mutation tranquille d'une entité aussi importante, avec ses 312 000 agents, et qui dépasse cette année les cent milliards de chiffre d'affaires, mérite d'être saluée avec beaucoup d'égards, autant pour l'ensemble des personnels que pour les dirigeants.

L'Etat tient ses engagements du contrat d'objectifs et de progrès signé avec La Poste en 1998 : la revalorisation de l'aide au transport de la presse, la stabilisation des charges de retraite - encore très lourdes -, la fiscalité aménagée, la gestion autonome des fonds des CCP.

Mais surtout, La Poste est en passe de réussir sa transformation sur tous les fronts.

Sur le plan social, d'abord, avec un passage progressif et très décentralisé aux 35 heures, même si, ici ou là, le manque de concertation au plan local peut parfois faire l'objet de frictions désagréables pour tous.

Sur le plan social toujours, avec non seulement un coup d'arrêt donné à la réduction des effectifs - j'insiste sur ce point - mais également un effort réel de déprécarisation des emplois, même si, là encore, des solutions transitoires en matière d'aménagement du temps de travail ou de gestion des mutations ne permettent pas encore un infléchissement significatif des statistiques de baisse de la précarité.

Sur le plan du développement : dans tous ses métiers - courrier, colis, logistique, services financiers -, La Poste n'a de cesse d'étendre son rayonnement, par des acquisitions ou des accords commerciaux, par la création de nouvelles offres de produits au plus près des besoins de chaque catégorie de clients, même en milieu rural ou dans les banlieues défavorisées.

Sur le plan de l'utilisation des nouvelles technologies de l'information, La Poste a désormais plus de leçons à donner qu'elle n'en a à recevoir.

Sur le plan financier, je veux redire ici qu'avec un résultat désormais positif, dégagé grâce à des efforts de gestion et de développement remarquables, La Poste continue à assumer sans compensation une charge lourde pour accomplir ses missions de service public, comme le disait fort justement Edmond Hervé avant moi. Voilà qui justifie pleinement le maintien d'un périmètre d'activités sous monopole qui soit suffisamment conséquent.

Monsieur le secrétaire d'Etat, à ce stade de mon intervention et parce qu'il n'est pas possible, en dix minutes, de développer tous les points de mon rapport, je voudrais attirer votre attention sur trois grands chantiers qui sont devant nous, et qui sont des chantiers fondateurs pour le siècle qui vient.

Le premier chantier concerne le secteur postal. Il y a deux grands « bang » - pardonnez-moi cette expression et un petit « flop » qui sont annoncés pour les jours qui viennent.

Le premier bang est la prise de position, dans les prochains jours, du Parlement européen sur le projet de directive de M. Bolkestein, dont je rappelle qu'il vise à réduire à la portion congrue le secteur réservé à La Poste, et à mettre en concurrence la quasi-totalité du courrier, ce qui aurait pour conséquence de mettre fin au financement par la péréquation du prix unique du timbre et de la présence postale territoriale, qui représente dans notre pays 17 000 points de contact.

Ce premier bang sera, je l'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, accompagné en écho par la prise de position - en vue de la codécision - des gouvernements de l'Union, au mois de décembre et sous votre présidence. Dans un cas comme dans l'autre, je serais heureux de vous entendre nous faire le point sur la manière dont pourra être canalisée, dans l'intérêt de nos concitoyens, cette « fureur » dérégulatrice.

J'ai évoqué un petit flop. Je faisais là allusion à la prochaine proposition de loi de privatisation de la poste f rançaise déposée par quelques sénateurs, qui nous annoncent cela pour le 21 novembre prochain, au lendemain du deuxième grand bang, qui sera la mise en bourse de 24,9 % du capital de la Deutsche Post.

Alors là, soyons très clair. L'établissement public de La Poste appartient à tous les Français. Pourquoi vouloir le réserver à une minorité d'actionnaires ? Prétendre que quasiment toutes les postes européennes ont été privatisées, que c'est la panacée, c'est tromper l'opinion en oubliant de dire que ces mesures sont toujours accompagnées, partout, de réductions d'emplois et de fermetures de bureaux de poste. Dire que c'est une meilleure solution pour l'usager tient de la méthode Coué ou de l'aveuglement idéologique, car la conséquence, c'est souvent une forte augmentation du prix du timbre. Et si l'on s'arrête sur l'exemple de l'Allemagne, il faut savoir que les Allemands paient beaucoup plus cher que les Français, puisque le prix du timbre est chez eux de 25 % supérieur et qu'en plus ils vont devoir acheter des actions.

Alors, si être archaïque c'est défendre un large service public de qualité au moindre coût, eh bien j'assume cet archaïsme. Et je suis sûr que les postiers, et les Français en général, face à la proposition de certains sénateurs, sauront voir où se trouve réellement la modernité. Je ne nie pas pour autant la nécessité d'augmentation des fonds propres pour La Poste, pour continuer son développement, mais il y a pour cela d'autres pistes que la privatisation.

Le deuxième chantier concerne la question du haut débit. Nous avons devant nous le double problème de la couverture géographique du territoire, et d'un accès qui n'exclue pas les plus modestes. Le sort de la téléphonie vocale et celui d'Internet sont désormais étroitement liés.

Et si je dois au passage me féliciter avec vous, monsieur le secrétaire d'Etat, de la baisse du coût des télécommunications, y compris du fixe vers le mobile - il était temps ! et me réjouir de la mise en place tant attendue des tarifs sociaux, force est de constater néanmoins que la génération de mobiles GSM ne couvre toujours pas certains cantons à l'heure où est lancée l'attribution des fréquences UMTS.

S'agissant de l'UMTS, le mobile de troisième génération, le Gouvernement a eu raison sur la méthode, comme il a eu raison de faire une proposition raisonnable sur les prix et confortable sur les conditions techniques de mise en oeuvre. Les déboires de l'Autriche et de l'Italie nous éclairent sur ce point. Je suis certain que nous aurons, en bout de course, le nombre d'opérateurs attendu et que nous disposerons d'une qualité de service qui sera véritablement du haut débit.

Et je tiens à vous redire ici, monsieur le secrétaire d'Etat, que notre assemblée souhaite être à nouveau associée, dans une phase préalable, à l'attribution des licences UMTS, pour valider les aspects « couverture du territoire » proposés par les opérateurs.

Toujours dans ce « chantier » des télécommunications, le dégroupage sur le fixe et l'avènement de la boucle locale radio n'attendront pas la génération de l'UMTS pour se mettre en place. Alors, dans ce contexte, et avec la préoccupation, que nous partageons tous, de veiller à


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ce qu'Internet soit accessible au plus grand nombre, il faut régler, monsieur le secrétaire d'Etat, dans les meilleurs délais la question de l'accès forfaitaire illimité à Internet. C'est le meilleur moyen pour avoir une offre l isible et attractive, notamment pour les revenus modestes, qui ont besoin de savoir, avant, combien ça va leur coûter et d'être sûrs que ça rentre bien dans leur budget. Sinon, ce sont l'absence d'accès à Internet ou l'endettement numérique qui seront au rendez-vous.

Je n'ignore pas qu'il y a de petits problèmes techniques de capacité de réseau à régler. Je ne doute pas qu'il faudra partager le coût entre les opérateurs. Mais je suis certain que les Français n'ont pas envie d'attendre plus longtemps qu'une offre de cette nature soit enfin formulée de manière sécurisée, en prix et en qualité.

Le dernier chantier, pour conclure, n'est pas, je le sais, directement piloté par vous, monsieur le secrétaire d'Etat, mais par votre collègue Moscovici. Il concerne l'adoption prochaine d'un texte européen qui doit enfin fixer un cadre politique aux services d'intérêt général, dont beaucoup dépendent de votre ministère, comme le secteur postal, celui des télécommunications, ou encore celui de l'énergie. Je place personnellement beaucoup d'espoir dans cette démarche, qui met la France à l'avant-garde, compte tenu de sa culture et de son expérience en matière de service public.

Je crois qu'il est indispensable de sortir d'une approche purement sectorielle qui, on peut le dire, tue parfois à petit feu l'ambition des services d'intérêt général : on réduit le périmètre du service universel ; on réduit celui du secteur réservé ; on crée des fonds de compensation que l'on vide ensuite de leur financement ; on envisage la création d'un service de base qui devient vite obsolète, compte tenu de l'évolution technologique.

Les Français, comme tous les Européens, ont besoin de garanties sur les services qui leur sont dus, et non pas sur les outils qui les mettent en oeuvre.

Une approche transversale, avec ce futur texte, donnera plus de force au service public, et donnera à la construction européenne une légitimité renouvelée, en affirmant autre chose que le credo de la concurrence exacerbée, en affirmant la volonté de garantir aux citoyens et aux consommateurs un développement social harmonieux sur l'ensemble de nos territoires.

En conclusion, j'inviterai notre assemblée, au nom de la commission de la production et des échanges, à exprimer un vote favorable sur ce budget, compte tenu de la dynamique forte qu'il impulse et qu'il accompagne.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Dans la discussion, la parole est à

M. Claude Gaillard.

M. Claude Gaillard.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez di,t en présentant votre budget devant la commission de la production et des échanges, que vous aviez défini quatre priorités : le soutien à l'innovation ; l'amélioration de la compétitivité des entreprises ; l'accompagnement des mutations industrielles ; la cohérence des politiques énergétiques.

Cette présentation optimiste, défendue avec enthousiasme, ce qui vous ressemble, ne reflète pas la réalité d'un budget que je trouve étonnamment défensif en période de croissance.

Je ferai trois réflexions.

Tout d'abord, ce budget souffre d'une insuffisance structurelle de moyens alloués à l'industrie, qui témoigne, me semble-t-il, de l'absence de volonté de mise en oeuvre d'une véritable politique industrielle.

Et je ferai référence ici à l'excellent rapport de Claude Billard qui écrit lui-même que nous avons affaire à « un exercice de haute école où l'on tente de montrer à la fois le rôle moteur tenu par l'industrie au sein de notre appareil économique et de masquer par divers artifices de présentation comptable le désengagement progressif de l'Etat dans ce domaine ».

L'évolution des crédits n'apparaît pas tout à fait favorable. Mais je ne développe pas, car cela a été dit et sera dit encore.

Certes la politique industrielle ne se limite pas à une politique de guichet, mais il appartient à l'Etat d'encourager les projets, avec des outils appropriés.

Autre témoignage du manque de prospective de la politique industrielle française, la diminution de 10 % d es sommes allouées aux grands programmes de recherche. Cela est dommageable pour l'avenir et le développement de notre industrie, en sachant d'ailleurs que l'innovation ne se limite pas au développement de la société de l'information et aux start-up.

Je sais qu'il y a un report, monsieur le secrétaire d'Etat, de 335 millions. J'aimerais dans ce cas savoir pourquoi il y a une sous-consommation, qui me paraît inquiétante, pour l'année 2000, de ces crédits.

Au-delà des chiffres, toujours susceptibles d'interprétations divergentes, la politique industrielle manque singulièrement de lisibilité et de stratégie. Là encore, je reviens au rapport écrit de M. Billard, qui est devenu ma bible, où il est écrit : « En guise d'action publique, ce type d'interventions relève du "saupoudrage" ; il n'est pas l'image d'une volonté politique globale et cohérente. »

M. Michel Destot, rapporteur spécial.

M. Billard s'est amélioré à l'oral ! (Sourires.)

M. Claude Gaillard.

Je travaille sur l'écrit et je fais confiance à M. Billard.

Il est, à ce titre, révélateur que le secrétariat d'Etat à l'industrie ne dispose pas d'un véritable outil de veille de l'industrie française.

De même, on est en droit de s'interroger sur la nature et sur les raisons d'une nouvelle réforme de la direction générale des stratégies industrielles.

La politique industrielle française subit les mutations plus quelle ne les provoque, ce qui est regrettable. Pour illustrer mon propos, je citerai à titre d'exemple : l'applic ation du calendrier de démantèlement de l'AMF, l'accord multifibre ; les négociations en panne à l'OMC ; la transposition a minima de la directive libéralisant le marché de l'électricité, qui semble d'ores et déjà dépass ée puisque Bruxelles prépare une nouvelle directive ; la libéralisation du marché des télécommunications qui se fait plutôt sous la contrainte européenne, même si je considère que, globalement, les choses se passent plutôt convenablement.

J'en viens à ma deuxième réflexion. A l'absence d'une véritable impulsion en faveur de l'industrie s'ajoutent de nouvelles contraintes pour nos entreprises industrielles.

Le niveau particulièrement élevé des charges pénalise les entreprises implantées en France. Aux 35 heures, il convient d'ajouter la TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes, qui pèse sur les entreprises grandes utilisatrices d'énergie, qui ont fait des efforts considérables, en


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particulier en faisant souvent appel à la cogénération, technique que, par ailleurs, nous préconisons les uns et les autres.

Je peux lire dans ma « bible » - chacun la sienne - que

« la fiscalité, qui dans le domaine de l'énergie pourrait être le levier d'une politique industrielle, n'a soit aucun lien avec celle-ci - TIPP -, soit un lien dont le bénéfice pour l'industrie reste à démontrer - TGAP ». Je trouve que c'est une jolie litote.

L'élargissement en 2001 de la TGAP aux consommations intermédiaires - dispositif qui, pour l'instant, ne fait pas l'objet d'une harmonisation européenne - inquiète beaucoup les industriels, mais aussi les dirigeants de PMIPME, puisque, finalement, 40 000 entreprises seront touchées, le taux applicable passant de 0,4 % à 0,7 % ou à 0,8 % pour un certain nombre d'entreprises.

L'élargissement de cette taxe est particulièrement mal venue au moment où le prix de l'énergie augmente à nouveau fortement. Je ne vois pas comment vous pourrez concilier le développement franco-français de la fiscalité écologique avec la concurrence internationale à laquelle sont exposées nos entreprises. Du reste, la TGAP me semble avoir qu'un lointain rapport avec l'environnement, il s'agit plutôt d'une recette pour les 35 heures. Par ailleurs, sa mise en application n'a pas fait l'objet d'une véritable concertation et est assez éloignée du rapport Baulinet-Bureau, publié en mai 2000.

L'idéologie verte qui, en matière industrielle, caractérise la politique du Gouvernement, ou plutôt explique ses atermoiements, coûtera très cher aux entreprises françaises.

En outre, quel est le lien logique entre la baisse de la TIPP, l'arrêt du rattrapage de la fiscalité applicable au gazole et la taxe sur l'énergie ? C'est une somme de paradoxes. Mais tout est paradoxe ! Troisième réflexion : la politique française se caractérise par l'attentisme, ce qui est regrettable en période de croissance.

Cet attentisme on le retrouve au moment où il s'agit de libéraliser le marché du gaz, ce qui obère le développement de GDF, le rapporteur spécial en a parlé. Vous aviez pourtant déclaré dans cette enceinte, monsieur le secrétaire d'Etat, que la France devait être exemplaire pour la transposition de la directive gaz. Qu'en est-il aujourd'hui ? GDF a besoin de beaucoup d'argent pour son redéploiement. D'ailleurs, ne déclariez-vous pas vousmême : « Il faut que cette entreprise ait les moyens de son développement européen et international. » Comment

lui donner les moyens d'aller vite ? Telle est la question.

La loi de transposition permettra d'y répondre, mais à condition de l'adopter à temps !

M. François Goulard.

Oui !

M. Claude Gaillard.

Parallèlement, GDF doit être de plus en plus proche de l'accès au gaz, se situer plus en amont et avoir un panier d'achats le plus diversifié possible, ce qui est tout à fait capitalistique.

Il faut donc transposer la directive, mais aussi jouer sur le statut de GDF, tout en faisant en sorte qu'elle reste une entreprise publique, afin qu'il se passe ce qui s'est passé à l'époque pour France Télécom. Il y a véritablement urgence, et, en cette affaire, il ne s'agit pas du tout de polémique.

Cet attentisme on le retrouve également quand il s'agit d'assurer pour l'avenir l'indépendance énergétique de la France, le renchérissement du coût du pétrole rendant cette indépendance de plus en plus indispensable. C'est p ourquoi il devient urgent d'engager une nouvelle réflexion sur le nucléaire. Robert Galley interviendra longuement sur ce point, donc je ne le développerai pas.

De même, nous ne savons pas où en est la restructuration de Framatome. Différents schémas ont été proposés et une décision devrait être prise début décembre. Si vous pouviez nous dire deux mots sur cette question, je vous en serais reconnaissant.

Chacun comprend, monsieur le secrétaire d'Etat, que votre aile verte vous empêche de mener sereinement ces réflexions. C'est pourquoi nous sommes inquiets pour l'avenir de l'indépendance énergétique de la France, qui repose sur le nucléaire. D'ailleurs, comment ne pas être inquiet quand votre collègue Guy Hascoët déclare à propos du sommet de la gauche plurielle : « Je n'y retrouve pas notre identité de Verts. On parle... et, pendant ce temps, Christian Pierret balance joyeusement au panier tous les amendements des Verts sur l'énergie. S'ils veulent faire avec les écolos mais sans l'écologie, qu'ils le disent ».

Bonjour, l'ambiance ! Cela étant, en cette affaire, vous avez mon soutien, monsieur le secrétaire d'Etat ! M. Michel Destot On a eu peur !

M. Claude Gaillard.

Cette réflexion de M. Hascoët en dit long sur les contradictions qui animent votre politique énergétique. Personne ne peut sérieusement vous croire lorsque vous affirmez que l'une de vos priorités est la cohérence de votre politique énergétique.

Le seul élément encourageant de votre budget est l'augmentation des crédits du CEA, et je vous en félicite.

A cet égard, vous aviez annoncé que vous étiez d'accord pour qu'un débat sur l'énergie ait lieu à l'Assemblée.

Pensez-vous qu'il pourra se tenir et quand ? S'agissant de La Poste, chacun est frappé du décalage entre l'évolution du marché postal européen et la situation dans laquelle se trouve notre opérateur national face à la concurrence européenne et internationale. A l'heure où DHL passe sous le contrôle de la poste allemande, la poste française est affaiblie par ses problèmes structurels, je pense, entre autres, au passage aux 35 heures.

Autre difficulté structurelle pour La Poste, le financement des pensions de retraite. L'Etat fait un effort, mais c'est un poste qui continue de peser lourd. Quand on voit que Deutsche Post a pu investir quarante milliards de francs depuis 1998 alors que La Poste n'en a investi que cinq en quatre ans,...

M. François Goulard.

Tout est dit !

M. Claude Gaillard.

... cela montre bien qu'il est nécessaire de travailler différemment pour développer stratégiquement ce secteur.

Il devient donc urgent de se pencher sur le dossier de l'avenir de La Poste. Et comme le disait Peter Smedley, président du groupe australien de logistique Mayne Nickless, « l'Europe est maintenant considérée comme un marché unique et cela a conduit à l'émergence d'un petit nombre de superpuissances de la messagerie ».

J'en profite pour rendre hommage au président Claude Bourmaud et à toute son équipe, qui ont su assurer à La Poste une croissance externe, mener une habile politique de partenariat et conclure des alliances.

Quand on sait que le marché potentiel de la logistique liée au développement du commerce électronique est estimé à 800 milliards de francs, on voit que l'enjeu est considérable.


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En ce qui concerne le secteur des télécommunications, il est nécessaire de relever le défi de la démocratisation de l'accès à Internet. A cet égard, vous avez indiqué que le temps de connexion allait devenir illimité.

S'agissant de la norme UMTS, je suis d'accord avec ce qui a été décidé par le Gouvernement, tout en gardant à l'esprit qu'il faut veiller à l'aménagement du territoire.

Me démarquant de certains de mes collègues de l'opposition, je considère que France Télécom a fait un parcours exemplaire depuis quatre ans et qu'on est parvenu à bon compromis : l'opérateur historique ayant su s'adapter à la concurrence. Je voudrais en féliciter l'ensemble du personnel et la direction de France Télécom.

Pour toutes ces raisons, et quelques autres que je n'ai pas eu le temps de développer, vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, que, quelles que soient l'estime personnelle que je vous porte et l'appréciation que je peux avois de votre action - cette dernière est généreuse mais entravée par la solidarité gouvernementale -, le groupe UDF ne puisse pas voter votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Michel Destot, rapporteur spécial.

Dommage !

M. le président.

La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget de l'industrie pour 2001 affiche une progression significative : c'est la poursuite du mouvement dont témoignaient les budgets précédents.

Parmi les évolutions marquantes, je relève une bonne mesure et une moins bonne : la bonne mesure, c'est la poursuite de la budgétisation des crédits des centres techniques industriels ; la mesure très discutable, c'est le versement au budget de l'environnement des moyens de l'institut de sûreté et de protection nucléaire, sujet qui a été parfaitement développé par Claude Billard avec qui je suis totalement d'accord.

Votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat, reste organisé autour de préoccupations que j'examinerai brièvement : le développement des PME et la recherche industrielle, l'aménagement de l'environnement des entreprises, l'accompagnement des mutations industrielles, enfin, la politique énergétique.

En ce qui concerne la recherche industrielle, nous notons une stabilisation des crédits du chapitre 66, coeur du dispositif. La dotation permettra de soutenir la mise en place de réseaux de recherche et d'innovation technologiques dans des domaines clés : technologie de l'environnement, génie logiciel, programme MEDEA destiné à renforcer la compétitivité de la filière micro-électronique.

L'Agence nationale de valorisation de la recherche, l'ANVAR, bénéficie des mêmes moyens qu'en 2000, ce qui lui permettra de développer une capacité d'intervention encore forte en 2001.

S'agissant du soutien aux petites et moyennes entreprises, l'effort entrepris avec le budget de 2000 est accentué. Une large part des crédits est intégrée aux contrats de plan Etat-région et soutient la diffusion des nouvelles technologies dans les PME, via notamment la procédure ATOUT.

Pour ce qui est de l'environnement des entreprises, il est aménagé sur deux terrains. Le premier de ces terrains est celui de la qualité, les moyens des organismes intervenant dans ce domaine étant confortés, notamment ceux du laboratoire national d'essai, du bureau national de métrologie et de l'AFNOR. Le second terrain d'intervention est celui de la formation des créateurs d'entreprise ; à ce titre, les moyens du groupe des écoles des mines progressent de façon significative et ceux de l'école supérieure d'électricité sont stabilisés.

Ce budget accompagne les restructurations et les reconversions industrielles amorcées depuis une génération et qui sont loin d'être terminées. Les sommes destinées au fonds d'industrialisation de la Lorraine et au fonds d'industrialisation des bassins miniers permettront de mettre en oeuvre les dernières décisions du CIADT concernant les bassins d'Albi-Carmaux et de Decazeville.

La subvention à Charbonnages de France progresse également de façon significative ainsi que les aides à l'« après-mine » à propos desquelles nous avions légiféré il y a deux ans.

Les crédits alloués à la construction navale augmentent également.

Voilà pour les points très positifs de votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat.

J'en viens à présent à la politique énergétique qui constitue, en dépit du volontarisme que vous manifestez personnellement en toute occasion, l'un des points faibles de la politique gouvernementale.

Nous devons, s'agissant du long terme, manifester notre refus de nous voir soumis aux mouvements erratiques du marché. Les problèmes économiques et environnementaux actuels, ainsi que l'importance de l'ind épendance des approvisionnements confirment la pertinence des choix antérieurs faits par les gouvernements français dans la durée.

Malgré les effets de manche et les discours de votre collègue de l'environnement, nous sommes, loin de voir poindre le bout du nez de la politique miracle qui permettrait de tout changer dans le présent.

M. François Goulard.

Ça, ce n'est pas faux !

M. Christian Bataille.

Au contraire, tout plaide aujourd'hui en faveur d'une politique qui confirme la prééminence de l'énergie nucléaire, celle-ci étant complétée par d'autres énergies, le gaz notamment bien que le renchérissement actuel de cette énergie en limite tout de même le recours.

Quant aux énergies renouvelables, qui relèvent plutôt du domaine de la recherche, elles sont encore expérimentales et ont des effets limités. Je ne vais pas refaire à cette tribune le calcul dix fois effectué des superficies qui seraient nécessaires pour équiper le pays en éoliennes ou en éoliennes off-shore , comme dit le langage nouv procédé d'ailleurs contesté aujourd'hui par les habitants du Larzac comme en témoigne un journal du soir -, ni parler du recours au gaz de lisier de porc, le GPP, comme l'envisage M. Cochet dans son rapport, car cette énergie m'apparaît plus folklorique que sérieuse.

Nous attendons de votre gouvernement qu'il réponde aux enjeux du point de vue de l'environnement, du point de vue de l'écologie, du point de vue de l'effet de serre.

Je ne crois pas que le charbon ou le lignite allemand soient une énergie propre qui pourrait se substituer au nucléaire, comme certains le prétendent.

Pour ce qui est des coûts, Robert Galley et moi-même avons démontré dans un rapport récent que l'énergie nucléaire était l'énergie la moins chère, y compris en incluant les coûts de l'aval du cycle, et sans intégrer en


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revanche les coûts externes des énergies qui rejettent dans l'atmosphère des « joyeusetés » comme le CO2 ou le SO2 ou encore d'autres gaz polluants ! Enfin, s'agissant de l'indépendance des approvisionnements, j'ai noté ce matin avec beaucoup d'intérêt que la balance des paiements française était revenue à un niveau plus favorable que celui de l'an dernier. Toutefois, il n'échappe à personne que le renchérissement du coût du pétrole, conjugué à une hausse du cours du dollar, constitue une catastrophe pour la France du point de vue de l'énergie. L'on n'ose imaginer quelle serait notre situation énergétique si notre territoire n'était pas équipé comme il l'est en centrales nucléaires.

M. Robert Galley.

Cela coûterait 143 milliards !

M. Christian Bataille.

Aussi, j'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que votre gouvernement reviendra à de meilleurs sentiments et saura refuser des marchandages que l'on devine politiciens et qui remettraient en cause une politique énergétique dont je sais qu'elle est la vôtre et qui est une chance pour la France et pour l'Europe.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) (M. Claude Gaillard remplace M. Raymond Forni au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD,

vice-président

M. le président.

La parole est à M. Robert Galley.

M. Robert Galley.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je voudrais inscrire mes observations sur ce budget dans le cadre européen.

Aujourd'hui, force est de constater que, par rapport aux Etats-Unis, l'Europe a « décroché » en termes de spécialisation industrielle, de recherche et développement, d'innovation et de brevets, et je n'insisterai sur le renouvellement du tissu industriel.

L'écart ne cesse de se creuser dans les nouvelles technologies de l'information. Non seulement les dépenses de recherche et développement ne représentent que 1,9 % du PIB en Europe, contre 2,6 % aux Etats-Unis, mais, en plus, en proportion de ces dépenses, le nombre de brevets déposés est beaucoup plus faible en Europe.

C'est dans ce contexte défavorable que les crédits affectés par le budget pour 2001 à ce domaine chutent de 3,3 milliards de francs à 3,22 milliards de francs, soit une diminution de 3,6 %. Cette baisse est due pour une grande part à la diminution de 10 % des crédits du chapitre 66-01 dont la vocation est de financer les grands programmes de recherche : ce sont donc les grands programmes européens et le programme « Société de l'information » qui vont faire les frais de ce manque de crédits.

Au-delà des discours et je regrette d'ailleurs qu'il ne soit pas possible de répondre à celui que vous ferez tout à l'heure, monsieur le scrétaire d'Etat -, force est de constater que le Gouvernement se désengage dans un domaine qui devrait être une priorité. Le soutien à la recherche industrielle ne figure plus parmi les priorités du Gouvernement, alors que, comme le disait notre excellent collègue Claude Billard dans son rapport documenté, le contexte mondial fonde la nécessité de relancer une politique industrielle au service du pays.

Vous me direz que mon propos n'est pas cohérent avec l a confirmation de la croissance industrielle. Mais reconnaissez avec moi que les nouvelles technologies de l'information, le développement des start up ont ces derniers temps fortement contribué au regain de croissance dont se prévaut le Gouvernement.

M. Olivier de Chazeaux.

Absolument !

M. Robert Galley.

Encore faudrait-il encourager les jeunes entrepreneurs plutôt que les contraindre avec toujours plus de réglementation, toujours plus de tâches administratives, toujours plus de charges.

Vous ne pouvez pas contribuer à bâtir l'avenir en vous référant à l'utilisation des outils du passé. A ce sujet, je voudrais tenter de vous convaincre que la réglementation sur les stock-options n'est pas satisfaisante et révèle la nature profonde de votre politique tout entière.

Mesurez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, les difficultés pour créer une entreprise viable dans notre pays ? Savez-vous le nombre d'heures de travail, de jour comme de nuit, qu'impose l'innovation au départ d'une PMI performante ? Nos jeunes ingénieurs, techniciens de haut niveau, spécialistes des technologies de pointe, devenus jeunes entrepreneurs qui, pendant des mois, des années souvent, travaillent d'arrache-pied pour mener à bien leur projet d'entreprise et qui, bien entendu, se rémunèrent au SMIC, considèrent quant à eux que les stock-options font partie intégrante de leur rémunération. Or le système que vous avez mis en place, parfaitement incompréhensible, décourage et pénalise nos forces vives. Etonnons-nous après cela qu'ils aillent chercher fortune à l'étranger, eux qui sont l'avenir industriel de notre pays ! La récompense qu'ils estiment être une rémunération correcte, et non immédiatement détournée par le fisc, ce n'est certainement pas les 35 heures, qu'ils ont bien souvent déjà faites le mercredi soir.

M. Olivier de Chazeaux.

Exact !

M. Robert Galley.

Faute de temps, monsieur le secrétaire d'Etat, je ne vous parlerai ni des constructions navales, ni de l'industrie textile, qui est le sujet de nos communes préoccupations. Je vous dirai simplement que j'ai été très frappé par l'endettement pour l'année 2000 des Charbonnages de France, avec un résultat net présentant un déficit de 6,5 milliards de francs sur l'année.

Par contre, nous ne connaissons toujours pas le chiffre de la dotation en capital, affecté au redressement de la situation des capitaux propres du groupe, et provenant du compte d'affectation spéciale.

Quoi qu'il en soit, l'endettement et le déficit des Charbonnages de France ne cessent de progresser. On ne peut pas dire qu'il y ait lieu d'être fier de cette situation.

En commission, vous nous avez indiqué que la deuxième priorité de votre budget était de maintenir, voire d'améliorer la compétitivité des entreprises. C'est un objectif auquel, tous sur ces bancs, nous ne pouvons que souscrire. Mais dans cette voie, pouvez-vous nous expliquer en quoi l'écotaxe, une taxe évaluée en fonction du rejet de carbone dans l'atmosphère, va améliorer la compétitivité des 40 000 entreprises concernées ? J'ai bien retenu que les artisans et les entreprises de moins de vingt salariés devaient être exonérées. Merci pour eux ! J'ai également noté que des abattements considérables seront consentis aux gros consommateurs d'énergie. A titre d'exemple, les entreprises qui consomment au-delà


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de 400 tonnes d'équivalent-pétrole bénéficieront d'un abattement de 95 %, sans doute pour leur permettre de survivre.

Mais où est la logique qui, dans les faits, veut qu'au titre de la lutte contre l'effet de serre, ceux qui sont les plus gros producteurs de gaz carbonique soient ceux qui seront les plus exonérés ? Mais il y a plus aberrant, et j'insisterai sur ce point, dans la ligne des propos qu'a tenus tout à l'heure M. Distot : la production d'électricité en France va être taxée indifféremment 1,3 centime par kilowat-heure de gaz naturel industriel consommé, mais 1,3 centime par kilowatt-heure de production d'électricité. Quand on sait qu'en France 90 % au moins de cette électricité est d'origine nucléaire ou hydraulique, donc ne concourant en rien à l'effet de serre, on peut mesurer le niveau d'aberration de ce nouvel impôt réputé préserver l'écologie, mais en fait imposé par la religion de quelques Savonaroles qui font partie de votre majorité.

M. François Goulard.

Très juste !

M. Robert Galley.

Est-ce une coïncidence, mais le jour même où la France annonce, enfin, l'ouverture plus large de son marché de l'électricité, le gouvernement allemande nvisage froidement de bloquer les développements d'EDF outre-Rhin ? Les griefs formulés par M. le ministre Jrgen Trittin sont bien sûr inspirés par ceux des industriels électriciens allemands. Les Allemands ont ouvert leur marché à 100 % alors que la France du protectionnisme n'a fait qu'entrouvrir le sien sous la pression de Bruxelles.

Quoi qu'il en soit, nous vous avions solennellement avertis par la voix de notre collègue Franck Borotra. Pour des considérations politiques qui n'échappent à personne, nous avions développé l'idée qu'en fait de transcription législative de la directive a minima en réalité un parcours d'obstacles destiné à limiter l'exercice de la concurrence - vous compromettiez les chances de notre grande société nationale de trouver son épanouissement à l'international.

Grâce au nucléaire, dont les premières centrales seront prochainement amorties, Electricité de France peut exporter le courant électrique à l'étranger par dizaines de milliards de kilowatts-heure, faire baisser en France le prix du courant facturé aux industriels comme aux particuliers et prendre des participations dans toute l'Union européenne. Mais vous n'avez voulu écouter ni M. Borotra, ni moi-même, ni nos collègues de l'opposition, et aujourd'hui, après les réticences britanniques et les limitations draconiennes imposées par les Italiens, voici le veto allemand ! Monsieur le secrétaire d'Etat, malgré tout la sympathie sincère que je vous porte, je dois vous dire que votre gouvernement n'a pas de politique à long terme, tout au moins dans le secteur qui nous occupe, celui, crucial, de l'énergie.

Vous augmentez les crédits des écoles des mines et des télécommunications. C'est bien ! La très sensible progression des crédits finançant les activités civiles du CEA est très satisfaisante. Mais pour ce qui est de la cohérence de la politique énergétique, c'est la confusion ou le silence.

Fondée sur quatre exigences - la sécurité de nos approvisionnements, l'accès de tous à l'énergie, la compétitivité des opérateurs et la lutte contre la pollution -, notre politique énergétique semblait faire l'objet d'un consensus.

Aujourd'hui, force est de constater que ce n'est plus le cas.

En voici quelques exemples.

Alors que la fermeture de Superphénix, décision funeste, est encore dans tous les esprits, les attaques se concentrent aujourd'hui sur La Hague. On ne semble plus vouloir accroître la quantité de combustible MOX utilisé dans les centrales, on refuse de modifier la capacité de l'usine Melox alors que les clients étrangers, notamment les Japonais, frappent à la porte. Mais d'aucuns s'inquiètent de voir les actinides à vie longue, dont le plutonium, s'accumuler dans les combustibles irradiés.

Comprenne qui pourra ! Où est la ligne politique claire qui permettra à la France de demain d'économiser les 143 milliards de francs qui eussent été dépensés cette année en dollars pour acheter à l'étranger le pétrole brut ou le gaz nécessaires à produire l'électricité ? Faites-moi confiance pour les chiffres, monsieur le secrétaire d'Etat : j'ai fait le calcul deux fois, et à la main.

Quand va-t-on commander l'EPR, dont les plans sont p rêts, pour avoir, le moment venu, l'expérience d'exploitation nécessaire au renouvellement de nos centrales ? Plus grave : ce matin, confirmant en cela certains avis autorisés de l'opposition, une dépêche en provenance de La Haye nous apprenait que « les Etats-Unis se sont dits ouverts à la discussion sur l'exportation de technologies nucléaires vers le tiers monde, dans le cadre des mécanismes qui permettraient aux pays industriels de remplir leurs engagements en matière de réchauffement climatique ».

Allons-nous, par dogmatisme, perdre cette formidable chance fondée sur l'exportation du savoir-faire de nos industriels et de nos savants, parce que nous n'aurons pas à temps lancé le prototype du réacteur à haute température refroidi à l'hélium ? Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai vraiment la conviction qu'au-delà de votre personne, de vos idées et de vos efforts, que je respecte, votre gouvernement se contente de gérer le quotidien et que ce budget, comme le reste, ne marque pas les voies de l'avenir. Nous nous contentons de rester dans la nasse du présent.

Vous comprendrez que, dans ce climat d'incertitude et sans parler des contradictions évidentes, le groupe du Rassemblement pour la République ne vote pas votre buget pour 2001. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je me bornerai à parler de La Poste, d'une part, et des télécommunications, de l'autre, laissant le soin à mon collègue Gilbert Gantier d'aborder le budget de l'industrie.

La Poste, d'abord.

Nous vivons le « drame » du projet de directive postale qu'ont évoqué plusieurs orateurs de la majorité. Il faut dire que ce mouvement de libéralisation qui touche tous les pays, quels qu'ils soient, et tous les secteurs autrefois réservés à des monopoles publics, n'est, contrairement à ce qu'on veut bien croire ou en tout cas dire, du côté g auche de l'hémicycle, ni l'horreur économique ni l'horreur sociale. Nous en avons d'ailleurs sous les yeux un exemple très frappant : les télécommunications.


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La dérégulation des télécommunications dans notre pays est très récente. Elle s'est faite en quelques années.

Et qu'a-t-on vu, au lieu des horreurs annoncées et de la catastrophe promise ?

M. François Brottes, rapporteur pour avis.

Cela n'a rien à voir !

M. François Goulard.

Les tarifs ont considérablement baissé et l'offre de services s'est diversifiée. Nous avons assisté à l'explosion du téléphone mobile et, sur le plan social, nous avons vu une entreprise qui assure un degré de satisfaction élevé de ses salariés.

Dans le domaine postal, les choses sont naturellement différentes. Il ne connaît pas en effet les révolutions technologiques que connaît celui des télécommunications.

Mais il va connaître le même mouvement de libéralisation.

Il s'agit d'un marché en forte expansion, appelé à se développer du seul fait du développement du commerce électronique. Ce marché connaîtra le même mouvement de diversification des services, de baisse des prix, d'adaptation aux besoins d'une clientèle nombreuse et variée.

La question n'est pas de savoir si l'on doit s'opposer au mouvement qui est initié à Bruxelles ou si l'on doit l'accepter. Certes, on peut adopter une posture virile, une posture martiale et assurer que l'ultralibéralisme européen ne passera pas chez nous. Cela fait son effet dans l'hémicycle mais, partout ailleurs, en particulier au-delà de nos frontières, cela provoque au mieux le sourire, sinon la commisération.

La vraie question qui nous est posée est celle de savoir si nous voulons que la poste française aborde d'emblée cette nouvelle phase, cette mutation considérable. Il est vrai que la poste française est une très grande maison, avec ses forces, avec un personnel, un encadrement et des dirigeants de très grande qualité. Claude Gaillard a tout à l'heure rendu hommage au président Claude Bourmaud, qui a fort bien présidé l'établissement public. Mais pourquoi ne pas donner à la poste française les moyens qui sont ceux des grandes postes européennes pour affronter les nouveaux marchés et la nouvelle époque ? Allons-nous condamner la poste française à être en retard, et de façon inéluctable, par rapport à ses grands concurrents européens et mondiaux ?

M. Gilbert Gantier.

Très bonne question !

M. François Goulard.

Cette question est trop lourde de conséquences pour notre pays pour que l'on y réponde par des considérations politiques.

S'agissant des télécommunications, la grande question qui a été évoquée à plusieurs reprises est celle de l'attrib ution des licences de troisième génération.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez fait le choix de désigner vous-même les opérateurs bénéficiaires. Ce choix est critiquable d'un double point de vue.

En premier lieu, ce choix est critiquable vis-à-vis du Parlement. Des collègues de la majorité vous ont reproché, en termes choisis, d'avoir tenu le Parlement à l'écart de ce grand choix concernant l'avenir des télécommunications. Le débat aurait dû avoir lieu au Parlement, d'autant qu'il s'agit, sur le plan financier, de centaines de milliards de francs et, sur le plan industriel et du développement de services, d'un secteur majeur de notre économie. Vous auriez dû associer le Parlement à la désignation.

En second lieu, vous avez, d'une certaine façon, choisi l'arbitraire. Vous avez fait là une profonde erreur.

Vous avancez au surplus des arguments contestables.

Le premier argument, celui de l'aménagement du territoire, n'est pas sérieux. Un appel d'offres, des enchères, pourraient être organisés sur la base d'un cahier des charges imposant une couverture de l'ensemble du territoire.

L'autre argument, selon lequel le fait de ne pas recourir aux enchères pouvait permettre un prix moins élevé pour les usagers, n'est pas non plus recevable. En effet, les licences seront détenues par des sociétés qui peuvent être ou pourront être, demain à vendre, « opéables » comme l'on dit sur les marchés. En réalité, vous faites un cadeau aux heureux bénéficiaires des licences, et non aux consommateurs. Au demeurant, les opérateurs que vous choisirez ont de tels besoins financiers sur les autres marchés, notamment européens, qu'ils utiliseront le cadeau que vous leur ferez pour mieux se placer dans d'autres enchères auxquelles ils participeront dans les autres pays.

Ces arguments sont donc fallacieux. Vous encourez le reproche de faire du favoritisme, de choisir de façon arbitraire des entreprises dont on peut dès aujourd'hui dresser la liste : on peut faire ce soir le pari que les trois opérateurs actuels seront retenus. Quant au quatrième, son nom est déjà cité par les médias.

Il s'agit là de deux erreurs touchant deux secteurs fondamentaux : une frilosité, qui est très largement politique, à propos de La Poste, et un mauvais choix dans l'attribution des licences de télécommunications.

Je ne pense pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que ce soit à vous personnellement qu'on puisse en faire le reproche. Vous avez une très grande compétence et vous avez l'avantage sur la plupart de vos collègues du Gouvernement de connaître réellement le monde de l'entreprise.

Je pense que se sont des considérations politiques qui vous ont conduit à faire ces choix-là. Souffrez que nous les contestions. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, quel est le poids de la puissance publique sur la politique industrielle de notre pays ? Dans les conseils d'administration des entreprises, les décisions sont prises sous la pression des actionnaires, sans souci de l'intérêt général. Les privatisations accentuent encore cette tendance en privant l'Etat d'un certain nombre de leviers. Demain, que restera-t-il du pouvoir de l'Etat ? L'analyse de la situation nous renforce dans la conviction que la France ou l'Europe ont intérêt à conserver la maîtrise des grands secteurs industriels, notamment énergétiques.

Telle n'est pas l'option choisie, et je le déplore.

Une politique se donnant pour objectif l'emploi, le progrès social et l'aménagement harmonieux du territoire ne peut limiter son ambition à accompagner des stratégies élaborées par les grands groupes industriels et financiers.

Défendre l'industrie de notre pays ne peut simplement consister à favoriser la constitution à l'échelon européen de grands groupes capitalistiques ou à gérer les conséquences sociales et spatiales de la déréglementation et des restructurations industrielles.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

Nous partageons à cet égard le diagnostic de notre rapporteur, qui considère que le champ d'intervention dans le domaine industriel s'est réduit comme une peau de chagrin. Les différentes interventions déclinées dans le projet de budget relèvent plus du « saupoudrage » que d'une volonté politique globale et cohérente se donnant l'ambition d'influer effectivement sur les logiques économiques et industrielles à l'oeuvre.

On ne peut concevoir une solution satisfaisante et durable au problème de l'emploi sans industrie dynamique. Si je me réjouis de la confirmation d'une croissance industrielle soutenue, de la compétitivité de l'industrie française à l'exportation et de l'amélioration sensible de l'emploi industriel après des années de marasme, ces résultats positifs ne sauraient occulter la fragilité et les contradictions de cette croissance retrouvée.

La redistribution des fruits de la croissance est insuffisante. Le profit à tout prix au détriment des hommes reste la règle dans l'entreprise comme, plus généralement, dans la société.

En effet, si, ces derniers mois, le rythme des plans sociaux s'est ralenti, des pans entiers de notre économie restent fragiles et subissent de plein fouet des restructurations, fermetures de sites et compressions d'effectifs. Ces mesures, qui ne sont pas toujours justifiées sur le plan industriel, s'inscrivent dans une logique de financiarisation de notre industrie. C'est particulièrement vrai dans les secteurs du textile, de l'habillement et des biens d'équipement, mais également dans ceux de la chimie, de l'industrie pharmaceutique, de la sidérurgie, de l'industrie pétrolière, des pneumatiques, des équipements électriques, etc.

Dans un tel contexte, nous déplorons la généralisation de la précarité et de la flexibilité de l'emploi salarié, même si 10 000 emplois nouveaux ont été créés entre 1999 et 2000, ce qui reste bien peu. Une enquête de l'INSEE le confirme : les emplois précaires sont en augmentation quasi générale.

A ce titre, même si l'amélioration de la situation de l'emploi peut réduire la capacité des directions d'entreprises à imposer la précarité, nous continuons à penser qu'il est nécessaire de légiférer et nous souhaitons que des dispositions soient adoptées pour pénaliser le recours abusif à la précarité, dès l'examen de la loi de modernisation sociale.

Dans ce cadre, des réflexions nouvelles mériteraient d'être engagées sur la place et le rôle des entreprises publiques. L'Etat, grâce aux participations qu'il détient toujours, malgré tout, dans nombre de grands groupes industriels, a les capacités de peser de manière non négligeable sur les choix de gestion de ces entreprises.

Nous avons déjà évoqué, lors de la première lecture de la loi sur les nouvelles régulations économiques, la nécessité d'un nouveau statut juridique de l'entreprise, qui permettrait de faire reculer les exigences des actionnaires quant à la création de valeur.

Autant de pistes qui mériteraient d'être débattues et ouvriraient la perspective d'une véritable politique industrielle.

Venons-en aux données chiffrées de ce projet de budget.

A périmètre constant et hors crédits affectés au secteur de la poste et des télécommunications, les dotations budgétaires s'élèvent à 12,86 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement. Elles s'inscrivent en baisse de 2 % par rapport à celles de l'exercice 2000.

Nous ne pouvons nous satisfaire de cette régression, alors qu'il y aurait tant à faire pour dynamiser notre système productif et favoriser une croissance durable, centrée sur la création de richesses nouvelles et d'emplois stables.

Le niveau des rentrées fiscales rendait possible une bien meilleure copie budgétaire.

Nous avons cependant apprécié la progression de 6,5 % de l'enveloppe budgétaire des écoles des mines, qui prouve l'intérêt manifesté par votre secrétariat d'Etat visà-vis de la formation, ainsi que l'augmentation conséquente du budget de l'ADEME, en progression de 58 % pour les crédits de paiement et 9 % pour les autorisations de programme - ce qui traduit la volonté de l'Etat de développer l'utilisation des énergies renouvelables et la recherche sur la pile à combustible.

Nous avions oublié trop vite que les cours du pétrole sont aléatoires, que la durée d'exploitation des ressources pétrolières et gazières est de l'ordre du demi-siècle. La crise actuelle nous le rappelle cruellement.

Il est indispensable de favoriser les économies d'énergie tout en développant les énergies renouvelables et en modernisant notre filière nucléaire, si l'on veut d'un même pas agir pour l'environnement et assurer l'indépendance énergétique de notre pays.

Nous nous félicitons que la dotation accordée aux activités civiles du commissariat à l'énergie atomique bénéficie d'une progression de 13,8 %, bien qu'il ne s'agisse que de la partie subvention du fonctionnement du CEA et que de nombreuses incertitudes subsistent sur la pérennisation du financement lié aux partenariats noués par le CEA avec de multiples entreprises.

Permettez-moi, en attendant le grand débat sur l'énergie que nous appelons de nos voeux et dont le récent sommet de la gauche plurielle a acté l'urgence, de développer quelques remarques sur le volet nucléaire, qui rejoindront d'ailleurs celles qui ont déjà été émises par des collègues siégeant sur différents bancs.

Notre politique du nucléaire requiert plus de lisibilité.

La communauté scientifique du secteur nucléaire a besoin de certitudes et de moyens pour travailler en toute sérénité. Il est nécessaire de valider et de conforter par nos encouragements les formidables expériences qu'elle a pu entreprendre.

On a souvent critiqué l'opacité de la filière. Ces temps sont révolus. Aujourd'hui, c'est avec transparence et fierté que les centres de recherche ouvrent leurs portes.

En ce qui concerne la fusion thermonucléaire, le centre de Cadarache, dans le département des Bouches-duRhône, dispose, avec Torre-Supra, d'un outil fabuleux grâce auquel la France détient une avance enviable au plan international. Les scientifiques attendent avec impatience la transformation et la concrétisation des essais plus que prometteurs du projet ITER-FEAT. Mais je sais, monsieur le secrétaire d'Etat, que M. le ministre de la recherche et vous-même y êtes très favorables. Ce qui est en jeu, ce sont des ressources sûres pour des milliers et des milliers d'années, mais aussi propres et sans danger, conciliant production énergétique et protection de l'environnement, puisque le deutérium est un des composants de l'eau.

Je m'adresse aux médias et à nos amis les écologistes pour leur demander de cesser d'affoler nos concitoyens avec les risques du nucléaire civil. Si l'on avait appliqué à la filière bovine la même rigueur, les mêmes principes de précaution que ceux imposés au nucléaire civil, elle n'aurait pas subi de tels dégâts.

Mme Muguette Jacquaint.

Très bien !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

M. Roger Meï.

Les risques existent, bien sûr, mais ils sont maîtrisés. De même, sur la question cruciale des déchets, on s'achemine vers des solutions - il faut d'ailleurs, en la matière, que les recherches continuent.

Toujours du point de vue de la lisibilité de notre politique énergétique, nous avons du mal à comprendre la logique de la décision confiant la tutelle budgétaire de l'IPSN au ministère de l'environnement. Ses conséquences continuent à nous inquiéter, malgré les assurances que vous nous avez données, monsieur le secrétaire d'Etat. Tout ce qui est entrepris doit contribuer à l'amélioration de la sécurité et au contrôle de notre filière nucléaire et non annoncer son éventuel démantèlement.

Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, nous déplorons, avec tous nos collègues, l'absence de décision concernant l'EPR et le renouvellement des centrales nucléaires, alors que c'est maintenant qu'il faut trancher. C'est un choix industriel décisif pour l'avenir de notre pays. Il doit se faire non pas sous la pression de quelque lobby - soit-il pro ou anti-nucléaire - mais en toute transparence, après un vrai débat sur les enjeux et dans l'intérêt national.

De manière plus générale, à périmètre constant, les dotations allouées au secteur de l'énergie sont pratiquement stables, mais une analyse plus fine montre que, si l'on ne tient pas compte des sommes destinées à la commission de régulation de l'électricité, ces crédits baissent d'environ 2 %. Je fais d'ailleurs miens les propos de notre collègue Michel Destot sur les moyens financiers qu'il faudrait donner à l'autorité de régulation ; elle souffre effectivement d'un manque de personnel et de moyens. Des mesures sont prévues, je crois, mais tout cela traîne un peu, je me permets de vous le dire, monsieur le secrétaire d'Etat.

Dans le même temps, EDF est engagé dans une logique concurrentielle qui fait fi des engagements pris par le Parlement lors du vote de transposition de la directive électricité. L'accord conclu avec Dalkia a déclenché, pour la première fois, depuis plus de cinquante ans, une procédure d'alerte, sur proposition de la CGT et avec l'approbation de FO et de la CFDT. C'est révélateur du malaise des salariés face aux risques de démantèlement progressif du service public de l'électricité.

Est-ce à dire qu'EDF s'engage à marche forcée vers la privatisation, hors du cadre de la loi ? Monsieur le secrétaire d'Etat, la loi doit être appliquée telle que le Parlement l'a votée, aussi bien dans son volet social que sur le plan de la concurrence. Vous en êtes le garant auprès des parlementaires.

La presse fait état, ce matin, de la décision gouvernementale de ramener le seuil d'éligibilité de 16 à 9 gigawattheures, pour la fourniture des clients sur le marché libre.

Nous attendions une autre attitude de votre part, monsieur le secrétaire d'Etat.

Je suis l'un des rares députés à parler du charbon, vous m'en excuserez, et j'entrerai donc un peu dans le détail.

Pour commencer, je détendrai un peu l'atmosphère en vous racontant une anedocte. A l'occasion d'un voyage en Chine, j'ai appris que mon nom, Meï, peut signifier

« charbon ». Vous comprenez maintenant mon attachement au charbon et à l'industrie charbonnière. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Michel Destot, rapporteur spécial.

Tout s'explique!

M. Roger Meï.

En ce qui concerne l'industrie charbonnière, permettez-moi de dénoncer encore une fois le pacte charbonnier de M. Longuet, acte de décès de la politique charbonnière française. Bien sûr, ce n'est pas la situation des mineurs qui est en cause - on leur offre la possibilité de partir en retraite à quarante ou quarante-cinq ans, et certains gagnent ainsi davantage en restant à la maison que s'ils travaillaient. Mais laissons donc le pacte charbonnier aller à son terme et envisageons une autre politique. Est-ce possible ? J'en suis convaincu, même si je suis le seul député à parler du charbon.

Le pétrole, c'est cinquante ans de réserves, le gaz, un petit peu plus, les énergies renouvelables, y compris l'hydraulique, ne couvriront pas plus de 20 % des besoins énergétiques de notre pays. Le nucléaire, que je viens d'évoquer, jouera un rôle essentiel. Mais le charbon, c'est encore au moins trois siècles d'exploitation. Il est réparti sur l'ensemble des continents et demeure une matière première essentielle pour de nombreux pays en voie de développement.

Oui, le charbon est une énergie d'avenir : on peut le transformer en gaz, en essence, en fioul. Ma commune, il y a une quinzaine d'années, a participé au financement d'une étude sur l'ultra-carbofluide, et j'ai vu tourner un moteur diesel avec du charbon ! Ce produit recèle des possibilités non explorées tant en matière d'utilisation - je viens de le montrer - qu'en matière d'exploitation.

Notre conviction sur l'avenir du charbon se trouve renforcée par de récentes déclarations. A l'issue du sommet des formations de la gauche plurielle, les représentants des différentes composantes de notre majorité se sont prononcés en faveur de « la poursuite d'un effort pour le dévelopement de l'utilisation du charbon, grâce à des technologies propres, et sur la base d'un inventaire des ressources existantes ». Quant à M. Roussely, auquel je me réfère rarement, lors des troisièmes rencontres sur l'énergie organisées par mon collègue Michel Destot, il a déclaré : « La ressource la plus abondante dans le monde est le charbon. Si nous sommes réalistes, nous devrions prêter plus d'attention au charbon. » Enfin, je rappellerai

les conclusions du rapport de la CECA de 1999 :

« Compte tenu du fait que, rien qu'en Europe, la production électrique ira en augmentant de 1 à 1,5 % par an et que l'électricité hydraulique et les renouvelables atteindront en 2020 au maximum 17 % de la production, il reste à couvrir 83 % des besoins. Il est donc clair que l'électricité à base de charbon aura un rôle de plus en plus important à jouer. »

Le charbon est la seule ressource énergétique de beaucoup de pays en voie de développement. Parfois, l'exploitation et la combustion s'y font dans des conditions inacceptables ; ainsi, la maîtrise insuffisante des technologies de combustion contribue à aggraver l'effet de serre - que nous nous attachons tellement à combattre -, avec un rendement moitié moindre que dans les centrales à LFC.

Dans ma commune, à Gardanne, il existe une chaudière à lit fluidisé, dont le rendement atteint presque 50 %, qui élimine totalement le SO 3 ou le SO 2 . La production de CO 2 est certes toujours là, mais rendez-vous compte, son efficacité est deux fois supérieure à celle de certaines centrales en activité dans des pays comme la Chine, où la pollution est donc considérable ! On peut répondre aux critères de Kyoto en choisissant les bonnes technologies de combustion. C'est dans cette voie-là, celle de la combustion propre, qu'il nous faut progresser, plutôt que de s'acheminer vers le rachat des droits à polluer des pays pauvres. Nous devons aider les pays en voie de développement de façon positive, progressiste. En matière d'exploitation et de combustion, la France possède des compétences reconnues qu'elle se doit de développer.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

Le groupe communiste, reprenant la proposition émise le 7 novembre par la gauche plurielle, vous propose, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous nous mettions au travail pour réfléchir à une politique nouvelle d'utilisation du charbon propre, que nous fassions un état des lieux de nos gisements en exploitation et que nous recherchions d'éventuelles nouvelles couches.

Dans le même registre, nous recherchons la cohérence entre la nécessité impérieuse de mobiliser plus de moyens dans la lutte contre l'effet de serre et le choix de fixer un taux unique de TGAP pour les consommations de gaz et d'électricité, alors que, grâce au nucléaire, 75 % de notre production électrique ne rejettte pas le moindre gramme d'oxyde de carbone ou de gaz carbonique. Je regrette aussi que les sommes prélevées ne soient pas réservées à la lutte contre l'effet de serre mais affectées à d'autres postes.

Pour ce qui concerne les fonds de reconversion des bassins miniers, si le budget est reconduit, leur utilisation continue de nous interpeller. Nous attendons toujours un vrai contrôle de ces fonds par les élus.

Un mot sur l'après-mine. Les moyens importants qui seront consacrés au traitement des affaissements miniers et à la mise en sécurité des sites miniers sont significatifs de l'intérêt que vous portez, monsieur le secrétaire d'Etat, au désarroi des populations concernées. Je souhaite cependant que les risques liés aux choix techniques soient évalués - je pense particulièrement à l'ennoyage, qui a déjà provoqué des affaissements importants dans la région d'Auboué. En outre, qu'en est-il des deux derniers décrets d'application, notamment celui créant l'agence des risques miniers ? Par ailleurs, dans les régions où l'activité minière est arrêtée, l'Etat se doit d'assumer ses responsabilités. Il serait inacceptable que s'opère un transfert de charges des exploitants miniers et de l'Etat vers les collectivités territoriales et leurs administrés, comme le craignent les élus des bassins miniers.

Cela dit, les budgets de l'après-mine sont satisfaisants - ils prennent notamment en compte la situation particulière des bassins de Decazeville et de Carmaux.

Nous sommes inquiets pour l'avenir de nos chantiers navals et nous insistons pour que la France propose à ses partenaires européens le principe de nouveaux dispositifs d'aide.

Comme le signale Claude Billard dans son rapport, certains pays signataires de l'accord interdisant les aides à la commande après le 31 décembre 2000, continuent eux-mêmes de soutenir activement leurs chantiers navals.

C'est le cas du Japon, de la Corée du Sud, de la Norvège, mais aussi des Etats-Unis. Ils serait aberrant et paradoxal que la France, se faisant le porte-parole des thèses défendues par les milieux libéraux, soit seule à subir de plein fouet le dumping social de pays comme la Corée du Sud.

Monsieur le secrétaire d'Etat, votre budget est très en deçà, tant par le volume de ses crédits que dans ses orientations, des exigences, mais aussi des possibilités de l'heure. Une politique volontariste préparant plus activement l'avenir économique et industriel du pays et se démarquant plus clairement des conceptions libérales s'imposait.

Ce budget, qui sera le dernier a être mis en oeuvre avant l'échéance électorale de 2002, pouvait être d'une meilleure facture. Nous sommes très perplexes quant à la lisibilité et à la pertinence des choix proposés pour l'industrie de notre pays, notamment dans le secteur stratégique de l'énergie. En conséquence, le groupe communiste s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Robert Honde.

M. Robert Honde.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'essentiel de la prod uction française d'électricité vient aujourd'hui du nucléaire et de l'hydroélectricité. La France est donc très peu dépendante de l'étranger et des variations des marchés internationaux pour son approvisionnement en élect ricité. Elle bénéficie par conséquent d'une grande sécurité d'approvisionnement et d'une stabilité des prix.

C'est ce qui permet à EDF de s'engager dans une baisse tendancielle des ses tarifs, même quand les prix du fioul augmentent.

Les ménages et les industriels profitent directement de cette situation puisqu'elle leur permet de bénéficier de prix parmi les plus bas en Europe. Par ailleurs, cette politique permet de réduire, chaque année, la facture énergétique française. Si notre parc de production était fondé sur des cycles combinés au gaz, l'importation de ce combustible, en 1998, nous aurait coûté environ 40 milliards de francs supplémentaires. Les estimations prév oient une économie d'environ 60 milliards pour l'année 2000. Et encore, ces chiffres ne tiennent pas compte de la valorisation des économies accomplies sur les rejets de CO 2

Pour l'avenir, et conformément aux orientations définies par le Gouvernement, la production nationale d'électricité intégrera davantage d'énergies renouvelables, et vraisemblablement plus de gaz. La part du nucléaire restera néanmoins importante. Avec une telle composition du parc, la production d'Electricité de France restera peu sensible aux fluctuations du prix du pétrole et peu émettrice de gaz à effet de serre.

Mme Loyola de Palacio, vice-présidente espagnole de la Commission européenne, chargée de l'énergie, a illustré les propos précédents en plaidant pour que les Quinze réduisent leur dépendance à l'égard du pétrole : « Nous ne devons pas relâcher nos efforts afin d'avoir une moindre vulnérabilité vis-à-vis des oscillations du brut et d'assurer la sûreté d'approvisionnement énergétique de l'Union. Et sur le moyen terme, nous devons poursuivre la diversification des sources d'énergie, le gaz et les énergies renouvelables en particulier. » Elle reconnaît égale-

ment que « l'Europe est beaucoup moins affectée par cette flambée des prix qu'il y a vingt ans parce qu'elle a pris des décisions très importantes en matière de diversification, dont une augmentation de la part du nucléaire.

L e nucléaire apparaît comme une source d'énergie incontournable pour garantir une plus grande stabilité et une moindre vulnérabilité de nos économies. »

Nous risquons donc d'être engagés dans une démarche qui nécessitera une information précise de nos concitoyens quant à nos choix énergétiques.

En apparence, nous sommes confrontés à l'inconciliable : comment pouvons-nous à la fois respecter nos engagements concernant l'émission de gaz à effet de serre et maintenir le niveau de production d'énergie à un coût acceptable tout en respectant l'environnement ? Il sera donc indispensable de procéder à un arbitrage entre déchets nucléaires et émissions cumulées de gaz à effet de serre.

La Commission européenne a réalisé une étude qui montre la difficulté des choix politiques auxquels devront procéder les Etats confrontés à la fois à une opinion publique peu favorable au nucléaire et à la nécessité de


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respecter les engagements de Kyoto, à savoir la réduction de 8 % en 2010, par rapport au niveau de 1990, des émissions européennes de gaz à effet de serre. Son titre Dilemma évoque bien le problème.

Nous savons que, pour un même niveau de demande électrique, il existe une relation inverse entre les émissions de CO 2 et le recours au nucléaire : plus le recours au nucléaire est important, plus les émissions de CO 2 sont faibles.

Nous savons également que, si l'on fixe au secteur de l a production d'électricité dans l'Union européenne l'objectif de réduire ses émissions de 8 % par rapport à 1990, cet objectif est pratiquement atteint à partir de 2015 dans un scénario fortement nucléaire, c'est-à-dire prévoyant le maintien au niveau actuel de la part du nucléaire dans la production d'électricité, et donc la c onstruction, d'ici à 2025, de nouvelles centrales nucléaires en Europe.

Nous savons enfin qu'en cas de tension sur le prix des énergies fossiles, ce sont les scénarios dans lesquels on renouvelle une large partie du parc nucléaire qui présentent le coût le plus faible.

Dans notre société moderne, la demande en énergie est croissante et, malgré la décision que nous avons prise de multiplier nos efforts pour développer les énergies renouvelables et les économies d'énergie, le recours aux énergies fossiles et nucléaire demeure inéluctable.

Or quel est le reproche fondamental qui a pu être fait au nucléaire ? Ce n'est pas tant une carence concernant la sûreté des centrales et de l'utilisation de cette énergie qu'un défaut de transparence et de communication sur les moyens mis en oeuvre pour assurer cette sécurité.

L'opinion publique ne conçoit plus d'être laissée dans le doute pour ce qui concerne sa sécurité. Le psychodrame que nous vivons à propos de la sécurité alimentaire démontre, si besoin était, à quel point nos concitoyens y sont sensibles.

Il apparaît donc indispensable de faire rapidement aboutir la démarche entreprise pour regrouper les organismes chargés de la sûreté des installations nucléaires dans une direction générale chargée du contrôle et de la réglementation des domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Est-il possible, monsieur le secrétaire d'Etat, de connaître l'état d'avancement de ce projet et les modalités de mise en place de ce nouvel établissement public ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Gabriel Montcharmont.

M. Gabriel Montcharmont.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la discussion budgétaire est une des rares, peut-être trop rares occasions d'évoquer devant la représentation nationale la situation de La Poste et des télécommunications et les grands débats qui les concernent. Ainsi, il est légitime de regretter que l'Assemblée n'ait eu à discuter ni de la procédure d'attribution des licences UMTS, ni du dégroupage de la boucle locale, ni des graves enjeux de la révision de la directive postale.

Monsieur le secrétaire d'Etat, si je n'avais à retenir qu'un seul élément du budget des postes et des télécommunications qui nous est présenté, je choisirais de m'attarder, pour m'en féliciter, sur l'augmentation sensible des crédits affectés aux écoles de télécommunications.

Nous savons bien que la formation en nombre croissant d'ingénieurs de haut niveau est un atout essentiel dans ce secteur au progrès technologique incessant. A cet égard, l'augmentation de 50 % des effectifs des ingénieurs que permet la progression des crédits est tout à fait satisfaisante et mérite d'être soulignée.

Je veux aussi saluer votre détermination dans le grave débat sur la nouvelle directive postale. Les propositions du commissaire européen, M. Bolkestein, sont résolument inacceptables, car elles conduiraient, dans des délais rapides, à la fin du service public postal. Cependant, constituer en Europe un front commun de pays suffisamm ent forts pour combattre les propositions de la Commission n'était pas, a priori, chose aisée. L'exercice était d'autant plus difficile que, ce domaine relevant de la codécision, il fallait que le Parlement européen soit en harmonie avec ce front du refus d'un libéralisme dogmatique et participe à la défense du service public postal.

Il semble que nous soyons aujourd'hui sur la bonne voie et que le compromis qui s'esquisse permette de maintenir un service public postal de haut niveau. Le MEDEF, qui avait réclamé une libéralisation totale, figé dans son dogmatisme libéral et sa volonté de brader le service public, constatera ainsi que, lorsqu'il s'agit de définir l'intérêt général, la politique doit retrouver tous ses droits. Le mérite vous revient, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avoir su définir une position commune garante de la qualité du service public postal.

De la même façon, le Gouvernement a eu raison de refuser les enchères pour l'attribution des licences UMTS.

Pour autant, il lui fallait tenir compte de l'événement politique et économique qu'a représenté le niveau atteint par les enchères en Angleterre. Le montant retenu est-il trop élevé, comme le soutiennent les opérateurs, sans toutefois le dire trop fort, ou trop faible, comme certains l'affirment ? Tout dépendra en réalité du marché que saura conquérir l'UMTS.

Je crains que ceux qui s'inspirent de la progression du marché du GSM pour en déduire celle du marché de l'UMTS se trompent. Le succès inouï du GSM ne relève pas de la rationalité économique ; il répond à un désir profond de l'homme d'être toujours, et où qu'il soit, présent aux autres. Le GSM relie des hommes, l'UMTS mettra l'homme en relation avec une machine. Dès lors, la probabilité existe que la rationalité économique se réintroduise dans le débat. Dans ce cas, l'UMTS de verrait limité à un usage professionnel et confronté à un marché infiniment plus étroit que celui du GSM.

Cependant, alors que le déploiement du réseau UMTS se prépare, il faut se souvenir que l'opérateur GSM le plus performant ne couvre que 89 % du territoire.

Certes, les quatre ou cinq départements les moins peuplés de notre pays ne représentent que 1 % de la population totale, mais leurs habitants ont le droit tout autant que les autres à une couverture GSM. Pour en finir avec ces inégalités inacceptables, il est nécessaire que la couverture de tous les bassins de vie permanents devienne très rapidement une obligation...

M. François Brottes, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. Gabriel Montcharmont.

... tout comme l'itinérance entre les opérateurs, puisqu'ils couvrent à eux trois 93 % du territoire. Pour la part non couverte, il suffirait de distraire un peu des redevances UMTS afin de financer les investissements nécessaires. Toujours est-il que, quel que soit le moyen retenu, cette inégalité choquante entre nos concitoyens doit cesser à brève échéance.

Internet poursuit sa progression dans notre pays, où un foyer sur cinq est connecté. Nous sommes certes en retard par rapport à la Grande-Bretagne : un foyer sur


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trois, et aux Etats-Unis : un foyer sur deux. A ceux qui nous disent que le volume des achats en ligne est en France six fois inférieur à celui des Etats-Unis, il faut rappeler, mais ils ne l'ignorent pas, que les achats en ligne aux Etats-Unis sont exonérés de taxe, que cette exonération commence à poser de redoutables problèmes et qu'elle est une puissante motivation à passer commande par Internet. Si les achats en ligne étaient en France exonérés de TVA, ce que nul ne souhaite, leur volume progresserait rapidement.

Internet verra se développer l'accès à haut débit, que ce soit par l'ADSL et le dégroupage de la boucle locale, par le câble ou par la boucle locale radio. A moyen terme, le haut débit, par le confort d'utilisation qu'il procure, sera la règle.

Cependant, ce moyen terme est encore lointain pour les espaces de notre territoire les moins peuplés. En effet, toutes les technologies du haut débit supposent, pour être é conomiquement rentables, des densités relativement fortes de population. Le risque d'un décalage territorial croissant dans l'usage d'Internet est renforcé par la différence de tarification. Le haut débit, qui se développera rapidement dans les villes, est tarifé au forfait ; le débit normal, qui sera encore longtemps la règle dans le monde rural, à la durée. L'espace rural se voit donc frappé d'un double handicap : les moindres performances d'Internet et son coût proportionnel à la durée.

Il est temps que la tarification de l'accès à Internet par le réseau téléphonique commuté se fasse au forfait. Le coût d'usage du réseau de France Télécom doit être rémunéré à un niveau qui préserve, bien évidemment, les intérêts de l'opérateur historique. Ce calcul, nous n'en doutons pas, donnera lieu aux discussions habituelles, mais elles doivent aboutir rapidement. Répondant la semaine dernière à une question de M. Françaix, vous indiquiez, monsieur le secrétaire d'Etat, un délai de six mois. Je crains que ce délai ne soit trop long. Dès lors qu'un nouveau service peut être offert, l'innovation doit être mise en place sans délai, car elle est porteuse de progrès et source de développement économique.

C'est ce souci constant de favoriser l'innovation qui m'avait conduit, dans mon rapport sur l'application de la loi de réglementation des télécommunications, ...

M. François Brottes, rapporteur pour avis.

Excellent rapport !

M. Gabriel Montcharmont.

... à recommander l'abandon de l'homologation tarifaire préalable pour tout ce qui ne relève pas du service universel. Les progrès constants de la concurrence, à laquelle le secteur des télécommunications sera prochainement totalement ouvert, et les événements récents n'ont fait que me renforcer dans ma conviction. Le temps est venu de faire cesser cette homologation préalable, qui allonge les délais et freine l'innovation. Laissons, en la matière, agir le droit commun de la concurrence.

M. François Brottes, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. Gabriel Montcharmont.

Le secteur des postes et des télécommunications est essentiel. Le service public, dans un environnement de plus en plus concurrentiel, doit y être maintenu et développé. Je souhaite que les discussions au sein de l'Europe sur les services d'intérêt général aboutissent à la notion d'un service public évolutif. Est-il raisonnable, par exemple, que la téléphonie mobile ne fasse pas partie du service public de téléphone ? A l'évidence, non.

Nous savons, monsieur le secrétaire d'Etat, votre attachement à un service public fort. Vous savez, vous, que notre soutien à cet égard ne vous est pas mesuré et que n ous voterons le budget que vous nous proposez.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Olivier de Chazeaux.

M. Olivier de Chazeaux.

Monsieur le secrétaire d'Etat, au-delà de l'analyse budgétaire telle qu'elle a été présentée, à la fois par les rapporteurs et par nos collègues, je souhaiterais m'attacher à la question des nouvelles technologies, et plus précisément à celle de la société de l'information.

Lors de votre prise de fonctions en 1997, un programme d'action pour la société de l'information a été mis en place, marquant ainsi l'intention du Gouvernement d'entrer de plain-pied dans ce que l'on pourrait appeler une nouvelle industrialisation du

XXIe siècle.

Sans limiter la portée de décisions telles que la libéralisation de la cryptologie ou la mise en place de la signature électronique, force est de constater que le déploiement de l'Internet en France est loin de répondre aux exigences de cette industrie de l'information, comme l'a rappelé M. Robert Galley en mettant en exergue quelques carences budgétaires. Cela tient essentiellement au fait que le Gouvernement n'a pas su, ou n'a pas voulu, se libérer de la relation d'actionnaire qu'il entretient avec l'opérateur historique, logique qui le contraint à valider des monopoles là où la concurrence et l'émulation seraient les plus sûrs garants de l'intérêt général.

L'exemple le plus frappant de cette logique est celui du dégroupage de la boucle locale. Certes, monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons enfin un décret. Mais permettezmoi de vous rappeler à quelles difficultés ce décret a donné lieu. Vous avez pu observer, de chaque côté de cet hémicycle, combien nous avons déploré de ne pouvoir débattre sur cette question, notamment lors de l'examen de la loi sur les nouvelles régulations économiques, puisque vous avez, préalablement au débat, retiré les dipositions sur le dégroupage de la boucle locale ...

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Oui !

M. Olivier de Chazeaux.

... pour choisir finalement la voie du décret. C'est bien regrettable. Néanmoins, le décret existe et j'espère bien évidemment qu'il sera mis en application avant le 31 décembre prochain.

Le dégroupage est essentiel puisque, vous le savez tous, il va favoriser l'émergence de la concurrence sur les communications locales et permettre le développement de l'Internet haut débit. Néanmoins, il est clair que certains ont intérêt à se hâter lentement. Je ne parle pas forcément du Gouvernement, mais on sent bien qu'ici et là, certains intérêts se font particulièrement pressants pour faire en sorte que, le 31 décembre 2000, le dégroupage ne soit pas effectivement mis en oeuvre.

Plus il y d'internautes, plus l'accès à l'Internet est embouteillé et plus la facturation en communications locales est élevée. C'est là d'ailleurs le frein principal au développement de l'Internet. Or, pour l'instant, la facturation sur ce type de communications se fait à la durée, indépendamment de la quantité d'informations transmises. De fait, de par la réglementation, l'augmentation du trafic Internet constitue un impôt déguisé au profit de l'opérateur historique.

Mais qui s'en plaindra ? Certainement pas France Télécom, puisqu'une étude de 1999 estimait que les revenus induits du fait de cette surconsommation se chiffrent à


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plusieurs dizaines de milliards de francs, soit presque un demi-point de notre PIB. Certainement pas non plus l'Etat qui, grâce à cette rente réglementaire, offre à son entreprise une capacité inespérée de financer son développement à l'international. Autrement dit, l'internaute français sera heureux d'apprendre qu'il a financé les investissements de l'opérateur historique en Europe, pendant que lui devait se contenter de peiner des heures avant que la moindre image ne puisse se télécharger sur son écran ! Mais si l'Etat actionnaire y a trouvé son compte en voyant le cours de l'action France Télécom plus que quadrupler depuis sa privatisation ce qui peut présenter certains avantages dans une autre politique, nous le verrons à l'avenir -, je crains fort que l'intérêt général ne commande au Gouvernement de changer rapidement de stratégie. Si vous n'y prenez garde, la situation actuelle où nous connaissons un taux de pénétration de l'Internet de 19 %, contre 24 % pour l'Allemagne et 35 % pour la Grande-Bretagne, ne fera que se détériorer.

Monsieur le secrétaire d'Etat, il ne suffit pas de parler de l'Internet pour tous, encore faut-il le faire et donc rendre l'Internet moins cher. J'évoquerai à ce propos la q uestion de l'interconnexion forfaitaire illimitée. La semaine dernière, vous nous avez indiqué que le Gouvernement était favorable à cette mesure, mais pouvez-vous nous assurer qu'elle pourra être mise en oeuvre avant le 31 décembre 2000. Il est important qu'à cette date, les internautes puissent bénéficier à la fois du dégroupage de la boucle locale et de l'interconnexion forfaitaire illimitée.

Nous avons tous intérêt au développement de l'Internet haut débit mais comme l'ont souligné mes prédécesseurs à cette tribune, l'Internet haut débit n'est qu'un objectif à long terme. A court terme, il est important que l'Internet bas débit, tel qu'il est qualifié aujourd'hui par France Télécom, puisse largement se développer et devenir enfin une réalité avant, je l'espère, la mise en place de la nouvelle régulation économique.

Telles sont les questions que je me pose et auxquelles je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez apporter des réponses.

M. Robert Galley et M. Gilbert Gantier.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, mon excellent collègue François Goulard ayant, avec beaucoup de pertinence, parlé des problèmes des postes et télécommunications, je limiterai mon intervention aux problèmes de l'industrie.

Dans une économie, de plus en plus dépendante des nouvelles technologies de l'information et de la communication, de plus en plus tertiaire, la discussion du budget de l'industrie revêt un caractère un peu anachronique. Le Gouvernement s'en est sans doute aperçu puisque les services de l'industrie sont maintenant complètement intégrés aux services du ministère de l'économie et des finances. Certes, l'industrie est et demeurera encore longtemps le coeur de notre économie. Certes, elle emploie encore 18 % de la population active et contribue fortement à la richesse nationale. Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, 15 milliards de francs pour le deuxième secteur d'activités, ou bien c'est trop ou bien ce n'est pas assez.

Pas assez si l'on prend l'agriculture comme base de comparaison ; trop si l'on considère que dans une économie ouverte sur l'extérieur, les subventions sont inefficaces et souvent contre-productives.

La principale caractéristique de ce budget est son manque d'unité. Il prend la forme d'un saupoudrage d'aides. A vouloir couvrir tous les aspects de la vie industrielle, il n'atteint aucune cible. Les crédits ainsi distillés pourraient être rattachés, de manière plus rationnelle, à d'autres ministères, comme celui de la recherche, de l'aménagement du territoire, voire de l'enseignement supérieur.

A titre d'exemple, le budget de l'industrie intervient b ien souvent en complément du ministère de la recherche. Il faut souligner que les dotations allouées à la recherche, à l'innovation et au développement des PMI, qui s'élèveront à 3,2 milliards de francs, baissent de 3,4 %. De même, les crédits destinés à l'ANVAR diminueront aussi. La recherche industrielle ne constitue donc pas, on peut le regretter, une priorité gouvernementale.

Cette baisse est d'autant plus regrettable que la France a toujours été à la traîne en matière de recherche et de développement. Depuis 1997, dans ce domaine, les dépenses financées par l'administration diminuent et, sur ces dix dernières années, l'effort intérieur de recherche et développement a reculé, n'atteignant plus qu'environ 2 % du PIB contre 2,3 % en Allemagne et presque 3 % aux

Etats-Unis. Le budget de l'industrie sert donc avant tout à soutenir les secteurs en crise ou les régions anciennement industrialisées ; les charbonnages de France, les chantiers navals et les mines sont ainsi des abonnés fidèles de ce budget.

Certes, au nom de la modernité, on trouve aussi quelques actions en faveur de la nouvelle économie, mais elles ne perçoivent que quelques centaines de millions de francs, c'est-à-dire rien de véritablement tangible.

Autre axe de ce budget, la politique énergétique. Afin de faire plaisir à Mme Voynet, et de faire grossir son budget, les crédits destinés à l'institut de protection de la sûreté nucléaire ont été transférés au budget de l'env ironnement, soit 1 milliard de francs, ainsi que les crédits finançant les analyses de sûreté, soit 366 millions de francs. Ces transferts n'améliorent pas la cohérence des comptes de l'Etat. En effet, les crédits du CEA et ceux de l'Agence de maîtrise de l'énergie demeurent inscrits au budget de l'industrie.

Du fait de la composition hétéroclite de la majorité, il n'y a ainsi plus de réelle politique énergétique. Aucune décision n'a été prise, par exemple, pour renouveler le parc nucléaire français. Le Gouvernement affirme que les centrales vieillissent plus lentement que prévu, ce qui lui permet de différer la décision de lancement de réacteurs de troisième génération. Mais, pour ma part, monsieur le secrétaire d'Etat, je préférerais que la France dispose d'un parc de centrales nucléaires jeunes et modernes et non d'un parc de centrales vieillissant.

Avec un baril de pétrole qui, ces jours-ci, frise les 35 dollars et un dollar à plus de 7,60 francs, n'y a-t-il pas lieu d'être satisfait que l'énergie nucléaire fournisse plus du tiers de l'énergie totale consommée dans le pays et les trois quarts de l'énergie électrique ? Si le choc pétrolier de cette année n'a pas le même impact que celui de 1973 et celui de 1980, cela est dû, en partie, au poids de l'énergie nucléaire. Et par ailleurs, n'oublions pas que si la France figure parmi les nations qui émettent le moins de gaz à effet de serre, cela s'explique aussi par le recours massif à l'énergie d'origine nucléaire. Les Verts et l'ensemble de la gauche devraient prendre en compte ces éléments au moment où se tient la conférence de La Haye sur la limitation des gaz à effet de serre.


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Je veux vous dire un mot de la taxe sur les activités polluantes qui est l'illustration même de l'incohérence de votre politique budgétaire. En effet, fixer un même taux pour les consommations de gaz et d'électricité, alors que l'électricité produite est majoritairement d'origine nucléaire et ne rejette pas de CO 2 dans l'atmosphère n'est pas logique. En outre, la TGAP ne finance pas les dépenses d'économie d'énergie, mais les 35 heures, ce qui dépasse l'entendement ! Par ailleurs, votre projet de budget ne répond en rien aux attentes des entreprises industrielles françaises, qui sont pénalisées par le poids des prélèvements, par les 35 heures et par l'insécurité juridique. Toutes les études, que ce soient celles de Ernst and Young, ou celle du World Economic Forum, démontrent que la France est maintenant à la traîne en matière de compétitivité, domaine dans lequel nous avons perdu, hélas ! plusieurs place.

Pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe Démocratie libérale et Indépendants ne pourra évidemment pas voter le budget de l'industrie.

M. Robert Galley.

Très bien !

M. le président.

La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, les dotations budgétaires destinées à La Poste et aux Télécommunications proposés pour 2001 progressent de 1,06 % par rapport à celles votées en 1999, au lieu de 4,16 % l'an passé. Mais, au-delà des crédits budgétaires, l'évolution des télécommunications retient toute l'attention.

Evoluant sur un marché totalement libéralisé qui devrait doubler, voire même tripler dans les dix prochaines années, France Télécom se porte très bien, avec un résultat net en progression de 20 % par rapport à 1998.

Avec l'acquisition du britannique Orange, elle accélère sa mue et son internationalisation et devient le deuxième opérateur mobile européen.

La loi du 26 juillet 1996 dispose que le service public des télécommunications comprend le service universel des télécommunications, notion définie par le cadre européen des directives. En France, il comprend notamment la fourniture à tous d'un service téléphonique de qualité et à un prix abordable, l'offre de conditions tarifaires et techniques prenant en compte les difficultés spécifiques rencontrées par certaines catégories de personnes en raison de leurs revenus ou d'un handicap. Aux termes de cette loi, France Télécom est l'opérateur chargé du service universel.

Or à ce sujet je voudrais rappeler que la téléphonie mobile, contrairement à la téléphonie filaire, ne fait pas partie du services universel. A l'époque, la Commission européenne avait jugé l'offre de servives mobiles en Europe suffisamment ouverte à la concurrence pour répondre aux besoins des particuliers et des entreprises.

En conséquence, il n'existe pas de droit à obtenir un abonnement à un service de téléphone mobile, ni d'obligation de desserte de tous les points du territoire.

A ce jour existe-t-il des bilans qui permettent de dire que les besoins sont satisfaits ? Qui aujourd'hui peut se passer du téléphone et a-t-on réellement évalué la charge financière pour les familles et pour les jeunes ? Par ailleurs, il est courant de constater que l'essentiel des efforts de développement de téléphonie mobile portent sur les zones à fort trafic, France Télécom présentant le même comportement que ces concurrents.

Avec le développement des nouvelles technologies, la préservation de l'intérêt général est un minimum si nous ne voulons pas voir s'instaurer une société à plusieurs vitesses.

Or, à l'heure de la téléphonie mobile de troisième génération et de l'attribution des licences UMTS, la fièvre des enchères gagne l'Europe. Le rôle de l'Etat est en l'occurrence indispensable.

Le 6 juin dernier, M. le minstre de l'économie et des f inances annonçait que l'attribution des licences d'exploitation du réseau de téléphonie mobile de troisième génération se ferait selon la procédure de la soumission comparative. Nous avions dit à l'époque que nous ne saurions souscrire à une solution qui ne comporterait pas de fortes obligations de service public pour les opérateurs en matière de couverture du territoire, de niveau d'investissement dans les infrastructures, de tarification et d'emploi.

Où en est-on dans l'élaboration du cahier des charges et de la nécessaire prise en compte des exigences de service public qui seront imposées aux opérateurs, les parlementaires ne pouvant être écartés de ce processus ? Au travers du feuilleton sur le dégroupage de la boucle locale, la question se pose de savoir comment assurer à France Télécom à la fois efficacité économique, préservation de l'emploi et amélioration du service public.

La boucle locale sera dégroupée par décret, mais je me permets de faire remarquer qu'il ne pourrait y avoir de concurrence sans investissement, et cela doit concerner tous les opérateurs.

Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, les intérêts de l'entreprise publique France Télécom seront-ils respectés par l'autorité de régulation, l'ART ? Cette question est d'autant plus pertinente que France Télécom est une entreprise publique parmi les toutes premières entreprises françaises. L'Etat est encore majoritairement présent dans son capital bien qu'ayant profité du rachat d'Orange pour se désengager un peu plus.

Pour financer une partie de cette acquisition, l'Etat a ramené sa participation de 62 % à 55 %. Cette nouvelle étape dans la privatisation suscite de notre part une réprobation très ferme et nous interroge sur la volonté du Gouvernement de conserver un opérateur public puissant.

Il convient pour la gauche d'en faire une entreprise exemplaire qui maintient un dialogue social en son sein pour ne pas fragiliser ses métiers originels, supprimer des services entiers, enfin ne pas rogner sur l'efficacité sociale au seul profit de la rentabilité économique.

Le développement des nouvelles technologies comme la téléphonie mobile ou Internet, dont l'accès ne fait pas partie du service universel, pose des questions nouvelles, celles de l'adaptation et de l'élargissement de la notion de service public.

Monsieur le secrétaire d'Etat, comment comptez-vous répondre à ce défi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Guyard, dernier orateur inscrit.

M. Jacques Guyard.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'interviendrai sur la manière dont est conduite notre politique industrielle sous la pression de la mondialisation des échanges, des règles communes de l'Europe et de l'introduction de la c oncurrence dans des secteurs économiques jusqu'à


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

présent dominés par des monopoles publics.

Cette évolution nous a conduits à créer des autorités de régulation des marchés, juridiquement indépendantes, chargées de veiller au respect d'une concurrence loyale. Il en va ainsi pour les secteurs des télécommunications, des chemins de fer, de l'électricité et demain des marchés financiers, avec la nouvelle autorité issue de la fusion de la commission des opérations de bourse et du conseil des marchés financiers. De plus en plus, le paysage économique voit se dédoubler les instruments traditionnels de contrôle totalement entre les mains de l'Etat et qui se partagent aujourd'hui entre réglementation, assurée par l'Etat, et régulation, exercée par des autorités indépendantes, variées dans leur composition selon les secteurs et leur histoire.

Avec le temps, ces autorités ont prouvé leur utilité et leur capacité de réactivité et de souplesse incontestables pour l'action publique. Je pense en particulier à l'autorité de régulation des télécommunications qui, en quatre ans, a pris une place incontestée dans le paysage institutionnel des télécommunications et qui a facilité l'ouverture progressive mais rapide du marché des télécommunications, contribuant à améliorer l'offre de télécommunication à la population et aux entreprises.

Le principe des autorités de régulation n'est donc pas en cause. Il est probable, d'ailleurs, qu'il en faudra d'autres dans l'avenir, à deux conditions politiques décisives.

La première, c'est que l'Etat n'abandonne pas subrepticement sa responsabilité majeure, à savoir son pouvoir de régulation et de législation, y compris dans la négociation des directives et des règlements européens. Cela suppose qu'il dispose des compétences nécessaires au sein de l'administration ou que, si ces compétences ont été transférées à l'autorité du secteur, je pense là en particulier a ux télécommunications, il puisse les mobiliser en tant que de besoin.

Il en va en effet de l'avenir du service public dont les autorités n'ont pas la charge et qu'elles peuvent même, involontairement, menacer puisque leur rôle premier est de développer la concurrence dont nous savons tous qu'elle conduit immanquablement à négliger l'aménagement équilibré du territoire et l'égal accès de tous les citoyens aux services essentiels. La concurrence préfère les grandes densités de population et les meilleurs pouvoirs d'achat importants. Elle est hostile, par principe, à la péréquation, fondement du service public.

L'expérience nous a montré ces dernières années que le budget de l'Etat ne peut pas prendre en charge les surcoûts du service public. Dans la plupart des cas, François Brottes le rappelait tout à l'heure, les crédits inscrits à cette fin ont fondu comme neige au soleil et leurs sources se sont taries.

Il faut donc - la Poste en est une bonne illustration un domaine réservé assez large pour les entreprises chargées du service public. A ce propos, j'indique à notre collègue Goulard que son information est manifestement tout à fait insuffisante. Là, où La Poste est libéralisée, l es prix augmentent et le service se dégrade.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

La Suède, par exemple.

M. Jacques Guyard.

La Suède en est l'exemple éclatant. Gardons-nous d'aller dans ce sens.

La seconde condition pour que la réorganisation de la politique industrielle soit efficace, c'est que l'Etat se garde les moyens d'une politique industrielle appuyée sur des entreprises nationales ou qui ont fortement investi sur notre territoire. C'est le cas de GDF, de la SNCF, de La Poste, de France Télécom, mais aussi d'Alstom, d'Alcatel, bref de toutes les entreprises privées ou publiques qui ont investi, créé de la richesse et des emplois.

C'était d'ailleurs - notre président de séance s'en souvient - le point d'accord que nous avions dégagé au cours de la discussion de la loi de 1996 sur les télécommunications, à savoir privilégier les créateurs de richesse et d'emplois. Cela, ce n'est pas une autorité indépendante qui peut le faire, mais l'Etat ! La loi de 1996 prévoyait, de faire le point, après quatre ans, sur les changements intervenus et les modifications souhaitables. Ce point est désormais nécessaire.

D'abord, parce qu'en 1996, nous n'avions pas prévu, ni les uns ni les autres, l'irruption de 30 millions de téléphones mobiles, ce qui a complètement changé les modes de communication entre nos concitoyens, non plus que nous n'avions imaginé un tel développement d'Internet, bouleversant les attentes en matière de service public. Ces quatre années ont également révélé que la limite n'est pas toujours évidente entre régulation et réglementation et qu'il conviendra, là aussi, de refaire le point, à la lumière de l'expérience. Ce sera une occasion de redéfinir les responsabilités économiques et sociales de l'Etat, dans le contexte de l'Europe et de la mondialisation, compte tenu de la volonté politique qui est la nôtre de garantir à chacun de nos concitoyens des services publics accessibles, modernes, à des prix abordables.

Cela suppose, du côté de l'Etat, un renforcement du pouvoir de contrôle et d'initiative du Parlement. La commission supérieure du service public des postes et télécommunications doit aussi jouer son rôle. Le Parlement, par l'intermédiaire de la commission supérieure, a été consulté sur les procédures UMTS, et nous avons ainsi recommandé, toutes tendances politiques confondues, la procédure équilibrée qui a été choisie. Nous constatons d'ailleurs, à la lecture de l'histoire récente de la Suisse et de l'Allemagne que nous sommes certainement dans le juste milieu, celui qui garantit le meilleur aménagement du territoire.

Enfin, si dans l'attribution des licences UMTS, on retrouve les trois entreprises qui sont aujourd'hui les opérateurs du GSM, je ne le regretterai pas, pour ma part, car cela permettra aussi de continuer d'améliorer la couverture d'ensemble du territoire et d'éviter des contradictions et des pertes de moyens considérables dans la distribution des équipements. Une politique industrielle ne consiste, en effet, pas seulement à aboutir au prix le plus bas possible ; il convient aussi de créer un pouvoir d'achat suffisant pour que ces services puissent être achetés. Cela suppose une industrie puissante et des services bien organisés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Brottes, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Je tiends d'abord à remercier les rapporteurs spéciaux, M. Michel Destot et

M. Edmond Hervé, ainsi que les rapporteurs pour avis, M. Claude Billard et M. François Brottes. Leurs présentations ont été remarquables et leur travail, comme toujours, de grande qualité.

Le budget que j'ai l'honneur de présenter devant vous, est un budget tout à la fois responsable et dynamique.


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Un budget responsable, puisque sa progression de 1,3 % est dans la ligne des orientations arrêtées par le Premier ministre et de nos engagements européens, essentiels, chacun le reconnaîtra, pour l'avenir de notre pays.

La mobilisation en 2001 de crédits qui resteront disponibles fin 2000 contribue notamment à cette progression modérée, sur le chapitre 66-01 - chapitre névralgique dédié à l'innovation industrielle comme sur le fonds d'industrialisation des bassins miniers.

Il traduit également, conformément au règlement adopté en 1998 par l'Union européenne, l'arrêt, à compter du 1er janvier, de tout nouvel engagement au profit du secteur de la construction navale, tout en respectant intégralement nos engagements antérieurs. J'y reviendrai de façon plus détaillée en répondant aux questions.

Un budget dynamique et résolument tourné vers l'avenir : avec 500 millions de francs de mesures nouvelles, quoi qu'en disent les quelques rares critiques que je viens d'entendre, jamais, depuis de longues années, autant crédits nouveaux n'auront été consacrés au développement de politiques industrielles, avec un renforcement des moyens consacrés aux actions prioritaires que sont l'innovation et le développement des petites et moyennes industries, l'accompagnement des régions en reconversion, la poursuite d'une politique énergétique cohérente et équilibrée, assurant l'indépendance de la France.

D'un mot, je voudrais rappeler la progression des crédits de l'industrie pour la quatrième année consécutive.

Depuis 1997, les crédits en faveur de l'industrie ont augmenté de 5 %. Le titre VI, c'est-à-dire les dépenses d'investissement, tournées vers l'avenir, a progressé encore plus fortement : plus 10 %. Nous faisons encore mieux pour les crédits en faveur des petites et moyennes industries : plus 15 %, et pour ceux destinés aux écoles : plus 20 %.

M. Jacques Guyard.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

On ne peut qu'y voir l'expression d'une ambition pour l'industrie française.

Ces chiffres marquent, chacun doit en convenir, une rupture réelle avec la politique de réduction des crédits de l'industrie trop souvent pratiquée par nos prédécesseurs.

M. Michel Destot, rapporteur spécial.

Malheureusement !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Deux éléments importants modifient le périmètre du budget : la poursuite de la budgétisation du financement des activités d'intérêt général des centres techniques industriels, plus particulièrement cette année du centre technique de la mécanique, et le transfert au budget du ministère chargé de l'environnement de la subvention à l'IPSN et des crédits d'analyse de sûreté de la direction de la sûreté des installations nucléaires. Ce transfert, décidé par le Premier ministre, intervient dans la perspective de la séparation prochaine du CEA et de l'IPSN, qui répond à l'exigence formelle, éthique, de distinguer l'expertise de l'exploitation évoquée dans l'intervention de Robert Honde. Toutefois, en réponse aux interrogations de MM. Bataille, Galley, Gantier, Gaillard et Meï, j'indique clairement que la DSIN demeurera ancrée au ministère de l'industrie, qui continuera à exercer sa cotutelle sur cette très importante direction. Celle-ci verra en outre ses compétences étendues à la radio-protection. Elle continuera de s'appuyer sur l'expertise remarquable de l'IPSN et restera le prescripteur des études qu'elle lui confiera.

Au-delà de ces deux remarques, le budget de l'industrie pour 2001 se décline autour de quatre priorités : innovation, compétitivité des entreprises, mutations industrielles et politique énergétique.

L'effort pour l'innovation est au coeur de la dynamique de croissance et d'emploi que nous avons mise en place depuis 1997. L'économie de la connaissance - je préfère cette expression à celle de « nouvelle économie » - nous a permis de renouer avec une croissance forte. Cette anal yse, je le sais, est partagée par votre rapporteur, M. Michel Destot. Il faut rappeler ici un chiffre qui fait honneur à l'économie et l'industrie françaises : 20 % de votre croissance sont liés aux nouvelles technologies de l'information et de la communication. Le secteur des TIC représente près de 7 % de la production française en 2000, ce qui nous situe au troisième ou au quatrième rang mondial. Nous devons en être fiers. D'une manière générale, nous devons être fiers de notre industrie, et le dire.

M. Gilbert Gantier et M. Patrice Martin-Lalande.

Nous sommes d'accord !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Et je suis également fier que mon ministère consacre une part importance et croissante de ses crédits à soutenir l'innovation, sous toutes ses formes. C'est la clé de la croissance de demain et des emplois de l'avenir : l'étude que j'ai commandée au BIPE montre en effet que l'on peut attendre des secteurs innovants environ un point de croissance supplémentaire et plus de 100 000 emplois par an dans les trois ou quatre prochaines années. L'effort en vaut la peine.

Consolidant la progression des autorisations de programme intervenue en loi de finances initiale en 2000 sur le chapitre 66-01, souvent commenté par les orateurs, à 1 836 millions de francs, mon budget témoigne, contrairement à ce que d'aucuns affirment, de la poursuite de l'effort consacré à la recherche et à l'innovation, avec deux axes majeurs : mettre en réseau les capacités existantes, et étendre le nombre d'entreprises concernées par l'innovation, notamment les PMI. C'est en nous fixant de tels objectifs que les atouts reconnus de la France, en matière de recherche et d'innovation, pourront plus largement et plus rapidement, se diffuser dans l'ensemble du tissu industriel.

Etendre le nombre d'entreprises concernées par l'innovation : tel est l'objet de la réforme ambitieuse que nous n'avons cessé de mettre en oeuvre, concrètement, jour après jour, depuis les assises de l'innovation. Quarante pour cent des crédits du chapitre 66-01 sont désormais accordés sous forme d'avances remboursables - cette technique doit son succès au remarquable effort de l'ANVAR qui applique cette procédure depuis des années. C'était notre objectif et il sera, je vous l'annonce aujourd'hui, atteint en 2000. Les aides en faveur de la recherche industrielle concernent les entreprises nouvelles, plus petites. Cette réforme importante a été difficile à mettre en oeuvre en 1999, ce qui ne nous a pas permis de c onsommer l'ensemble des crédits disponibles.

L'année 2000 sera, j'en suis certain, un bien meilleur cru.

Engagement fort, ensuite, dans la mise en place des réseaux de recherche et d'innovation technologiques dans des domaines à fort impact économique et social : santé, sciences du vivant, technologies de l'environnement, techniques logicielles. On peut citer des programmes tels que PRIAM pour le multimédia, ou encore le réseau GenHomme, qui mobilise une dotation de 100 millions de francs de mon ministère, complétée par une dotation


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équivalente du ministère de la recherche. Les biotechnologies bénéficieront de 40 millions de francs supplémentaires l'année prochaine. Le réseau national des technologies de la santé recevra quant à lui plus de 20 millions de francs en 2000. Nous continuerons, avec mes collègues, à mettre au point et en oeuvre des réseaux dont l'efficacité est désormais établie, codirigés par les industriels, les divers centres de recherche et bien entendu l'Etat à qui revient la mission de coordonner l'ensemble de l'effort national dans ces domaines.

B énéficiant de dotations budgétaires stabilisées - 800 millions de francs d'autorisations de programme et 931 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement -, l'ANVAR, à l'appui d'un nouveau contrat quadriennal, verra renforcer progressivement sa capacité d'intervention de 1 400 millions de francs à 1 600 millions de francs en faveur de l'innovation. Elle accentuera ainsi son effort en faveur des PMI, dans le domaine des technologies de l'information, et consolidera son rôle d'interface dans la création et le développement d'entreprises innovantes. Car ce qui marche bien, nous le développons.

Enfin, pour répondre sur ce volet à M. de Chazeau, le d éveloppement d'accès Internet à haut débit sur l'ensemble du territoire est évidemment un enjeu essentiel pour diffuser l'économie de la connaissance partout et à tous. Le Gouvernement vient de se donner comme objectif que chaque citoyen puisse avoir accès, avant la fin de la décennie, aux hauts débits - deux mégabits environ par seconde. Dès aujourd'hui, la politique d'appel à candidatures que je conduis conjointement avec l'ART repose sur des exigences fortes en matière d'aménagement du territoire, que M. Edmond Hervé a rappelées avec véhémence tout à l'heure. Ainsi, je suis heureux de vous annoncer que l'appel d'offres complémentaire pour des licences

« boucles locales radio » dans les régions qui ont connu des désistements d'opérateurs a été fructueux. Sont concernés l'Auvergne, la Corse, le Limousin, la FrancheComté ; cette nouvelle est toute fraîche, elle date d'hier.

Accès forfaitaire illimité à Internet pour le réseau télé phonique : oui, il faut le faire. Comme je l'ai dit la semaine dernière en réponse à une question d'actualité, ce système sera disponible au premier semestre 2001. Pourq uoi pas avant la fin de l'année ? s'est demandé M. de Chazeaux. Tout simplement parce qu'il faut investir entre 500 millions et un milliard de francs. Et si France-Télécom naturellement doit s'y employer le plus rapidement possible, reconnaissons qu'un milliard d'investissement, c'est plus qu'un détail ! Au vu des nombreux contentieux qui se font jour en Europe, je suis, tout comme M. Hervé et M. Guyard à l'instant, satisfait du choix retenu par notre pays pour les licences UMTS : un niveau de redevance important pour que le spectre hertzien ne soit pas « bradé » - je réponds ainsi à une critique de M. Goulard -, mais néanmoins raisonnable pour que des services à haute valeur ajoutée puissent se développer rapidement et sur la plus grande partie possible de notre territoire. Il ne pouvait être question de sacrifier à une vision budgétaire le développement d'une nouvelle technologie ni les aspects positifs de l'explosion, par le biais du haut débit, des services que permettra la norme UMTS.

Face à l'émergence de toutes ces technologies, France Telecom est bien évidemment, madame Jambu, dans son rôle d'opérateur historique garant du service universel.

Son réseau filaire connaît avec la mise en oeuvre de l'ADSL un véritable bain de jouvence. Alors qu'il était prévu d'équiper seulement 220 villes pour l'ADSL fin 2001, nous en aurons plus de 600 fin 2002 ; près de 75 % des lignes installées supporteront alors cette technologie Internet à haut débit. Avec l'offre Numéris à 128 kilobits par seconde, qui fait partie du service obligatoire, remarquons-le, ces services placent notre pays en tête de l'Union. Par ailleurs, l'alliance européenne conclue avec Orange, évoquée par Mme Jambu et M. Guyard, fait de France Telecom le deuxième opérateur mobile européen. Là encore, il y a lieu d'être fier des réussites de nos entreprises, à plus forte raison lorsqu'il s'agit d'une entreprise publique. France Telecom, devenu le deuxième opérateur européen dans le mobile, a désormais atteint la taille critique nécessaire pour affronter les défis de demain.

Plus globalement, je compte entamer rapidement une concertation avec nos trois opérateurs GSM afin que tous les « bassins de vie » - une vallée en zone de montagne, par exemple - soient rapidement couverts, ce qui donnerait satisfaction à l'impérieuse question posée par M. le rapporteur Brottes. Nous aurons alors satisfait l'objectif d'un GSM quasi universel. Certes, la totalité de la surface française ni même la totalité de la population ne sera pas couverte, mais nous nous approchons des 99 et quelque pour cent.

Après le dégroupage, l'année 2001 sera à nouveau une année d'innovation juridique dans ce domaine. Extension à Bruxelles du service universel des télécommunications, présentation au Parlement français du projet de loi sur la société de l'information, tels seront mes deux objectifs majeurs. je compte m'y atteler dès les premiers mois de l'année.

Deuxième priorité, l'amélioration de la compétitivité des entreprises. Contrairement à certains, notamment M. Gaillard, je ne suis pas inquiet sur la compétitivité globale de notre économie. Les décisions récentes et à venir en matière d'investissements internationaux mobiles devraient être de nature à apaiser les doutes un peu forcés des uns et des autres. Et ni les 35 heures ni la TGAP, monsieur Gaillard, ne viennent remettre en cause ce constat. J'imagine que nous aurons bientôt l'occasion d'y revenir longuement à l'occasion de l'examen du collectif budgétaire.

Pour ce qui concerne le budget de l'industrie, l'impératif de compétitivité s'exprime autour de trois grands axes.

Le premier, c'est la profession des crédits destinés à la modernisation des PMI - chapitre 64-92. Le respect des engagements pris dans le cadre de la nouvelle génération des contrats de plan se traduit par une hausse de 6 % en crédits de paiement, soit plus 14 % en deux ans. Je souhaite ainsi donner aux DRIRE les moyens nécessaires pour mettre pleinement en oeuvre les contrats de plan et pour assurer la diffusion en région des technologies clés dont je viens de publier la liste actualisée après un très gros travail, que je veux saluer en votre nom à tous, de mes collaborateurs au ministère.

Cette forte augmentation de nos crédits déconcentrés reflète également une volonté de se situer très près du terrain et des préoccupations de développement des entreprises. Le soutien à l'investissement immatériel reste une priorité ; la procédure ATOUT a ainsi été rénovée et simplifiée pour mieux répondre aux attentes des entreprises. Le ministère poursuivra la politique engagée en 1998 pour inciter les PME, sur la base de projets collectifs, à s'approprier les technologies de l'information et de la communication. Citons encore une procédure qui marche remarquablement bien, UCIP, utilisation collective d'Internet par les PME.


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En matière de formation, la démarche de qualité engagée en 1999, à laquelle ont adhéré l'ensemble des écoles des mines, a conduit à une très grande diversité d'initiatives. Nous entendons développer chez les élèves ingénieurs le goût d'entreprendre et de risquer la création d'entreprises à la sortie de l'école. Nous sommes encore un peu « faibles » sur ce point en comparaison d'autres pays européens. D'où cet effort que nous encourageons avec vigueur par l'intermédiaire d'une charte signée avec les écoles.

La progression de 2,4 % des crédits de fonctionnement des écoles, les créations d'emplois, la consolidation des actions engagées sur le plan des crédits d'équipement en 2000 en sont autant de marques.

De la même façon, le budget traduit l'effort particulier, annoncé par le Premier ministre au comité interministériel de la société de l'information, en faveur de l'enseignement des télécommunications. Le plan de développement stratégique du groupement des écoles de télécommunications conduit à une augmentation de 25 millions de francs dans le budget pour 2001, soit plus 5 %. Pendant les cinq ans que durera ce plan, le nombre d'élèves ingénieurs formés par le groupe augmentera de 50 %. Enfin, le budget consolide, au niveau atteint dans la loi de finances initiale pour 2000, soit 40,2 millions de francs, la subvention de fonctionnement de l'Ecole supérieure de l'électricité - SUPELEC -, dont l'évolution vers les technologies de l'information et de la communication s'accentue.

Depuis quatre ans, notre effort en matière de formation est donc très significatif. La qualité de nos formations donne à nos jeunes ingénieurs une grande facilité à l'international, ce que j'ai souvent pu constater avec bonheur, comme M. Galley. Je suis cependant moins pessimiste que lui, car, dans un même monde global, je suis convaincu que ce vivier, partout reconnu, saura faire bénéficier notre industrie de son expérience internationale.

Participe également à la compétitivité de nos entreprises le développement de nos actions en matière de qualité. Les dotations progresseront de 3,2 % en dépenses ordinaires et crédits de paiement l'an prochain, et notre effort portera notamment sur la métrologie légale.

Il s'agit là d'un ensemble de crédits essentiels à la compétitivité des entreprises. Tout comme la réforme du brevet européen à propos de laquelle je tiens à répéter ce que plusieurs de mes collègues et moi-même avons déjà exprimé à l'Assemblée nationale : nous voulons concilier à la fois l'efficacité de la propriété industrielle et de sa garantie par le brevet, et la défense de la langue française, et répondre ainsi à des exigences aussi bien technologiques que culturelles. Le français est une grande langue technologique, celle de l'innovation et nous entendons la défendre dans les organisations internationales qui traitent de la question de la propriété industrielle.

Je souhaite terminer mon propos sur la compétitivité en évoquant La Poste et répondre ainsi aux interventions de MM. Guyard, Montcharmont et Gaillard. Le budget que je vous présente respecte scrupuleusement les engagements du contrat d'objectif et de progrès, signé en juin 1998 : 1,9 milliard de francs sont consacrés à soutenir le transport de presse par voie postale ; cela permet de soutenir à la fois l'opérateur postal et les éditeurs de presse ; 750 millions de francs sont consacrés en 2000, - ce montant s'élèvera jusqu'à 900 millions de francs environ en 2001 - à maintenir les charges de retraite de La Poste au niveau qu'elles avaient atteint en 1997. C'est un engagement onéreux pour l'Etat mais qu'il respecte scrupuleusement - je vois que M. Montcharmont m'approuve, je l'en remercie.

Quant à la politique sociale de La Poste, elle est axée autour de l'aménagement réduction du temps de travail.

Ce sont 250 000 postiers qui, aujourd'hui, en bénéficient.

Les 35 heures contribuent d'ailleurs à la réduction de la précarité, et la réorganisation qu'entraîne toute ARTT n'a jamais entraîné de fermeture de bureau de poste contrairement à ce que certains prétendent.

Globalement, c'est donc une politique de rupture avec le passé que le Gouvernement a poursuivi. Depuis 1997, La Poste a renoué avec la croissance : son chiffre d'affaires dépassera, en 2000, 105 milliards de francs et son résultat a atteint 1,9 milliard en 1999. L'acquisition du deuxièmeo pérateur allemand, Deutsch Post Dienst montre la vigueur de La Poste et la capacité, M. Brottes l'a souligné, de cette entreprise publique à accomplir des performances au niveau européen, ainsi qu'à étendre son combat concurrentiel, si vous me permettez cette expression, bien au-delà de nos frontières. La prise de position sur les marchés britannique et américain en est un autre exemple. L'alliance avec Géodis, filiale cotée en bourse de la SNCF, en est une troisième illustration. L'accord, uniquement commercial il est vrai, avec Fedex autour duquel La Poste fédère un ensemble de postes européennes, en est une démonstration patente.

La Poste, suivant son slogan, « bouge » au plan international et elle réussit. Ainsi elle s'est positionnée au niveau de ses concurrents hollandais et allemands sur le marché du colis express. Cette politique sera poursuivie et sera accentuée.

S'agissant des activités non concurrentielles de La Poste, je défends avec fermeté un service universel, ambitieux et rénové, appuyé, cela est décisif et merci du soutien unanime de l'Assemblée nationale sur ce chapitre, des services réservés larges, clairs et non contournables. C'est un objectif pour lequel M. Brottes s'est beaucoup battu, il a créé une association à cet effet et je crois qu'elle rassemble beaucoup de parlementaires de toutes opinions ; je voudrais l'en féliciter. C'est un objectif que le Gouvernement maintiendra au niveau de l'Union européenne, dans le dialogue constructif qu'il noue en tant que représentant des intérêts français et, évidemment, en tant que président en exercice de l'Union. Il faut maintenir la capacité du service public à se financer par des moyens appropriés et à évoluer tout en conservant les valeurs du service public. Il en va de l'égalité des citoyens devant le service public et de la solidarité des territoires.

Développer les missions du service public de La Poste, encourager sa stratégie internationale, rechercher de nouveaux moyens financiers - oui monsieur Guyard, monsieur Brottes - avec, par exemple, la valorisation - je dis bien valorisation et non cession - de ses actifs immobiliers : telle est notre politique. Il faut accroître les possibilités d'évolution de cette entreprise et je compte beaucoup sur le dialogue entre le Gouvernement et le Parlement pour aller plus loin encore.

Troisième objectif : accompagner les mutations industrielles.

Grâce au volontarisme de Lionel Jospin, la conjoncture est aujourd'hui meilleure qu'hier. Reste que nous devons continuer à soutenir les mutations et les reconversions industrielles et ne pas laisser sur le bord du chemin les salariés des bassins d'emplois et des régions concernées.

C'est pourquoi ce volet de mon budget, n'en déplaise à certains orateurs de l'opposition, est prioritaire.


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La solidarité nationale se manifestera donc, comme le souhaite M. Roger Meï, dont j'ai apprécié l'intervention, à l'égard des régions touchées par l'arrêt de l'extraction minière pour les accompagner dans leurs efforts de reconversion économique et industrielle, dans le cadre d'une politique d'aménagement équilibré du territoire.

Les pouvoirs publics ont ainsi pris des engagements vis-à-vis des bassins miniers du sud de la France qui conduisent à mobiliser en leur faveur les crédits du fonds d'industrialisation des bassins miniers pour 2000-2002 : à hauteur de 50 millions de francs pour le bassin du Gard, 110 millions pour celui d'Albi-Carmaux, 90 millions pour celui de Decazeville.

Le budget consolide également l'accroissement du soutien de l'Etat à Charbonnages de France, avec la prise en charge des intérêts financiers sur les emprunts contractés par l'établissement sur la période 1997-1999 : dotation globale de 2 993 millions, hors dotation en capital, à l'opérateur public.

Enfin, les enjeux de sécurité soulevés par la gestion de l'« après-mines », qui sont d'ailleurs essentiellement des problèmes humains, conduisent à renforcer les moyens des organismes chargés de mettre en oeuvre les actions de prévention des affaissements miniers - progression de 10 millions à 14,4 millions de francs - et ceux consacrés aux travaux de mise en sécurité des sites miniers conduits par les DRIRE, portés à 75 millions en autorisations de programme et à 50 millions en crédits de paiement.

Innovation très significative, le budget comporte une dotation de 20 millions en autorisations de programme et de 5 millions en crédits de paiement, destinée à financer la mise en place de nouveaux modes de conversion. Il est, en effet, apparu nécessaire, face aux mutations industrielles, d'intervenir de manière sélective sur les bassins d'emplois ou sur les sites qui en ont besoin. On connaît d'ailleurs le succès des interventions de sociétés comme la SODIE dans certains bassins, je pense à quelques bassins textiles. Un colloque qu'organise Jean-Pierre Balduyck dans ces murs, dans quelques jours, permettra de le démontrer, et de répondre aux orateurs de l'opposition qui se sont préoccupés de cette action en faveur d'un accompagnement humain et solide des mutations.

Quatrième point : la poursuite d'une politique énergétique cohérente.

Trois principes guident notre politique énergétique : sécurité de l'approvisionnement, les prix les plus bas possible, le respect de l'environnement. Pour répondre à l'inquiétude qui s'est manifestée de gauche à droite de cet hémicycle, je veux ici réaffirmer que le nucléaire est un formidable atout pour la France.

M. Patrice Martin-Lalande.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Il est et il restera, monsieur Bataille, monsieur Galley, le môle essentiel de notre politique énergétique...

Mme Muguette Jacquaint, M. Roger Meï et M. Robert Galley.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... au bénéfice de nos concitoyens et de nos entreprises qui disposent ainsi d'une énergie peu chère, propre et abondante, entraînant derrière elle des progrès technologiques dans de nombreux secteurs économiques.

En ce qui concerne la production d'énergie, le soutien à la recherche conduit à renforcer l'effort sur le Commissariat à l'énergie atomique.

M. Michel Destot, rapporteur spécial.

Très bien !

M. Robert Galley.

Merci !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Plusieurs orateurs l'ont souligné, dont M. Destot et M. Galley. La subvention civile globale de l'Etat de 5 milliards 302 millions de francs sur le titre IV est en augmentation de près de 4 % pour le CEA, il faut le souligner, et de 750 millions au titre VI. L'effort proposé traduit l'importance accordée par l'Etat à la mission de l'établissement CEA dans la préparation des choix énergétiques futurs. Et j'espère que cela recueille l'assentiment de l'Assemblée nationale, car c'est un vrai combat pour une vraie politique énergétique.

(Applaudissements sur divers bancs.)

L'augmentation des crédits du FSH - fonds de soutien aux hydrocarbures - correspond à une mise à niveau des moyens nécessaires au maintien de l'engagement du ministère en faveur d'une industrie parapétrolière française, qui est, mesdames et messieurs, la deuxième du monde et dont il faut être fier. Elle est une des meilleures sur le plan technologique, sur le plan des investissements et pour ce qui est de la présence sur tous les continents.

C'est également un de nos succès.

Enfin, le Gouvernement a doté la commission de régulation de l'électricité, dès 2001, de quatre-vingts emplois budgétaires - rappelons que cela représente à peu près le nombre d'emplois de la DIGEC, direction du gaz, de l'électricité et du charbon, c'est considérable ! - et d'un budget de 30 millions pour lui permettre d'excercer ses missions et d'avoir recours à des expertises extérieures qui sont souvent nécessaires. Cet effort sera accru en 2002, lorsque le Parlement aura adopté la loi gaz et que la CRE deviendra CREG. Cette adoption est à mes yeux prioritaire. Il importe que votre assemblée débute ses travaux rapidement, dès le printemps 2001. Il en va de l'avenir de cette belle entreprise qu'est GDF, entreprise internationale, entreprise qui doit devenir producteur de gaz à un niveau plus important qu'aujourd'hui et qui doit trouver les adaptations nécessaires pour que ses moyens financiers de développement et d'investissement soient à la hauteur des enjeux européens et mondiaux qu'elle doit relever avec succès. Nous faisons pleinement confiance à l'entreprise publique Gaz de France, de même que je réaffirmais ma confiance, il y a un instant, comme beaucoup d'entre vous, en l'entreprise publique EDF.

S'agissant des décrets d'application de la loi électricité j'ai été beaucoup interrogé sur ce point sur tous les bancs - et pour répondre à l'inquiétude légitime de M. Destot et de M. Bataille, je dois souligner l'importance de ce qui a été fait en quelques mois et souligner aussi le travail remarquable que vous avez effectué, mesdames et messieurs, à travers le CSEG - Conseil supérieur de l'électricité et du gaz - et de son président dont on ne dira jamais assez l'ardent travail, le président JeanPierre Kucheida. Sur une quarantaire de décrets, onze sont publiés, une demi-douzaine est en consultation au CSEG ou au Conseil d'Etat, vingt seront pris dans les six mois qui viennent. C'est un effort remarquable. Et tous ceux qui sont nécessaires à la mise en oeuvre concrète de la directive, j'en prends l'engagement, seront pris avant la fin de l'année 2000.

M. Michel Destot, rapporteur spécial et

M. Roger Meï.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Nous pouvons dire que nous avons travaillé très vite et que le CSEG qui est l'émanation du Parlement, a fait un travail remarquable.

L'effort en matière de maîtrise des consommations d'énergie va se poursuivre. Je disais hier, lors d'une conférence de presse de l'agence internationale de l'énergie,


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que je voulais être un champion des énergies renouvelables. Je pense que vous aurez compris qu'en développant, comme nous le faisons, les crédits de l'ADEME, avec la pérennisation d'un financement de 500 millions supplémentaires qui lui a été alloué depuis 1999...

M. Michel Destot, rapporteur spécial.

Plus ses réserves !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. ...

nous montrons, autour du Premier ministre, la résolution qui est la nôtre de conclure un pacte avec les Français dans le domaine de la promotion des énergies renouvelables aux côtés des môles de notre politique énergétique, dont je soulignais l'importance tout à l'heure, et notamment le nucléaire.

Vous m'avez interrogé également sur les négociations en cours et sur les tarifs de rachat des énergies renouvelables. Je souhaite voir se conclure les premiers contrats dans les prochains mois. Nous ferons le maximum pour aller vite, c'est important. Ce sera une preuve supplémentaire de notre engagement de tenir les objectifs, ambitieux, 21 % de l'électricité produite à partir des énergies nouvelles renouvelables, c'est ce que nous allons accepter dans la directive que je souhaite promouvoir au niveau européen. C'est énorme par rapport au niveau actuel qui se situe entre 13 et 15 % en fonction des incidences climatiques. Nous aurons une bonne directive européenne sur les énergies renouvelables que la présidence française va s'employer à conclure au cours des prochaines semaines.

Je pense que, le 5 décembre, lors du conseil Energie, nous en saurons plus à cet égard, pour marquer ainsi une volonté politique très claire.

Une ambition, la croissance ; un moyen, le développement de nos entreprises par l'innovation ; un résultat patent, l'emploi ; une répartition des fruits de la croissance plus juste et plus solidaire : en un mot, une véritable stratégie industrielle. Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les députés, vous devez soutenir et approuver mon budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions, en commençant par celles du groupe socialiste.

La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous venez de rappeler tout l'intérêt que vous portez aux secteurs miniers, à ceux qui sont encore « vivants », ou dans le cadre de l'«après-mines ».

Je voudrais appeler votre attention sur la situation personnelle de certains mineurs, ceux-là mêmes qui ont participé à l'édification de territoires entiers de notre pays et qui exercent ou ont exercé un métier difficile, lequel a justifié en son temps la mise en oeuvre de statuts particuliers, comprenant notamment une indemnité de logement et une indemnité de chauffage.

Pendant longtemps, la revalorisation de ces indemnités a été tout à fait acceptable. Mais nous constatons qu'elle n'est plus opérée, quelquefois depuis quinze ans. Il est vrai que nous approchons de certaines échéances, en particulier pour ce qui est du pacte charbonnier. Néanmoins, certaines sociétés, comme la COGEMA pour ce qui concerne l'extraction de l'uranium, se sont saisies de cette question et ont envisagé une revalorisation. Mais tel n'est pas le cas pour tous les mineurs, en particulier des ardoisiers de la société privée Imerys, que j'ai eu le plaisir de recevoir voilà quelques semaines et qui souhaiteraient que soit envisagée une revalorisation de leurs indemnités.

Le Gouvernement entend-il donner un signal, par voie réglementaire, pour inciter à la revalorisation de ces indemnités ?

M. le président.

La parole est M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le député, la revalorisation des indemnités statutaires des mineurs peut, pour un certain nombre de mines métalliques, mines diverses et ardoisières, parce qu'elle est à la charge des exploitants, poser un problème. Il faut donc f aire appel à la collectivité nationale pour qu'elle témoigne de sa solidarité à l'égard des mineurs. Elle a consenti un effort financier important : d'une part, le régime des pensions de base, qui constitue la ressource principale des retraités mineurs et de leurs veuves, a été revu et le taux de réversion des pensions minières a été très récemment porté à 54 % ; d'autre part, les exploitations minières et assimilées, comme les ardoisières d'Angers, par exemple, bénéficient d'aides budgétaires importantes. On a donc bien pris en compte les difficultés de ce type d'activités en France.

M. le président.

La parole est à M. Claude Evin.

M. Claude Evin.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous savez combien, dans la construction navale, la concurrence de la Corée du Sud est féroce. Les pratiques extravagantes de dumping généralisé et de sauvetage systématique des entreprises auxquelles se livre par ce pays ne sont pas compatibles avec son rang de premier producteur mondial.

Les constructeurs européens ont déposé une plainte qui conduira à une procédure devant l'OMC. Mais celle-ci n'aboutira pas avant dix-huit mois, voire deux ans. Or, le règlement européen de 1998 relatif à la construction navale dispose la fin des aides pour les commandes qui seront prises après le 1er janvier 2001. Le gouvernement allemand a récemment signifié au commissaire Monti qu'il souhaitait le maintien de ces aides. Certains, en France, se sont même émus de constater que la loi de finances allemande pour 2001 comportait une ligne d'aide à la construction navale. Je crois par ailleurs savoir que les gouvernements espagnol et italien seraient eux aussi désireux de voir maintenir le système d'aides.

Les chantiers français ont fait, eux, d'énormes efforts de productivité. Il faut, de ce point de vue, saluer les changements que les salariés des chantiers eux-mêmes ont acceptés pour être au sommet de la compétitivité mondiale, notamment en ce qui concerne les paquebots. La récente confirmation de la commande du Queen Mary II montre combien la construction navale française est reconnue sur le plan international pour sa compétence et combien les chantiers de construction navale, en particulier ceux de l'Atlantique, se sont bien situés dans la compétition.

Toutefois, la construction navale française ne peut assurer sa pérennité uniquement sur les paquebots. Il faut aussi pouvoir prendre d'autres commandes de navires de charge. Or c'est particulièrement dans ce secteur que la concurrence avec la Corée est féroce.

Au regard de cette concurrence internationale, ne serait-il pas réaliste de prévoir le maintien du principe de l'aide à la construction navale en fonction du type de navires ? Le taux pourrait être périodiquement redéfini en fonction de cette concurrence. Le système actuel de l'aide conduit de fait à un niveau insuffisant pour assurer la compétitivité des chantiers européens sur les navires de


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charge pour lesquels la concurrence coréenne est la plus agressive. En revanche, ce système d'aides n'apparaît pas justifié pour les paquebots où la concurrence est faible.

Cette formule d'aides modulées selon les types de navires aurait l'avantage d'avoir la force de la logique, d'envoyer un signal aux Coréens que l'Europe n'abandonnera pas sa construction navale. Par ailleurs, cela permettrait de ménager les finances publiques françaises puisque les paquebots, qui constituent aujourd'hui l'essentiel de la construction navale française, se verraient attribuer le taux zéro. Cela freinerait ainsi la conversion des chantiers navals européens, et notamment les chantiers allemands, vers la construction de paquebots.

Quelles mesures envisagez-vous de proposer à vos coll ègues du conseil des ministres de l'industrie le 5 décembre prochain pour faire face à la concurrence déloyale de la Corée au-delà du 1er janvier 2001, et confirmer ainsi votre soutien à la construction navale européenne ?

M. le président.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que vous disposez de deux minutes pour poser une question. Que chacun joue le jeu, sinon je lèverai la séance pour la reprendre à vingt et une heures trente ! La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Seule la Commission, monsieur le député, comme vous le savez, a le pouvoir de proposer une prolongation des aides. Je me suis renseigné, sachant que vous alliez m'interroger sur cette question : elle ne compte pas le faire, et je crois par ailleurs qu'il n'existe pas de majorité qualifiée pour le lui demander.

L'Allemagne ne prévoit pas de nouvelles autorisations de programme en 2001, mais seulement des crédits de paiement pour honorer les engagements qu'elle avait contractés avant la fin 2000.

Sur l'épineux problème de la concurrence déloyale de la Corée, il est vrai qu'elle persiste et que cela déstabilise le marché mondial. Nous sommes très actifs. La France, notamment pendant la présidence française, et l'Union mettent tout en oeuvre pour contrer cette concurrence, d'abord par une plainte ROC, qui est celle des chantiers, qui sera soutenue par notre action et portée, avec ma détermination personnelle, le plus rapidement possible, devant l'OMC. La procédure ne débouchera certes pas immédiatement, mais son déclenchement peut être considéré pour les Coréens comme un véritable signal de la détermination de l'Europe. Je me suis d'ailleurs rendu en Corée cet été pour débattre de cette question.

La Banque mondiale et le FMI, par ailleurs, examinent actuellement leur concours à la Corée.

Enfin, nous prendrons très rapidement une initiative p our faire entrer en vigueur l'arrangement OCDE de 1994 sur les crédits à l'export, qui permettrait d'avoir des conditions de financement plus favorables.

Telles sont les mesures très concrètes que je proposerai le 5 décembre au conseil des ministres de l'industrie.

Vous rappeliez que les efforts de productivité de certains chantiers ont été exceptionnels, et il faut les saluer : 45 % de productivité en trois ou quatre ans pour les chantiers de l'Atlantique.

Vous rappeliez aussi en filigrane dans votre intervention que le programme compatible avec l'Union européenne Cap 21 a permis à ces chantiers de se développer correctement, dans le cadre des règles européennes.

M. le président.

Nous passons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez affirmé à juste titre que nous devions être fiers de l'industrie française, et c'est pour parler de l'une de ses entreprises que je voudrais quelques instants évoquer le cas de Matra Automobile.

Nous savons que Matra Automobile est un créateur d'automobiles particulièrement brillant puisqu'il a, entre autres, à son actif d'avoir inventé, développé et commercialisé avec un très grand succès le concept de monospace, sous le nom d'Espace, distribué par Renault.

Comme j'ai eu de nombreuses fois l'occasion de l'exprimer et de le regretter dans cette enceinte auprès des gouvernements successifs, le succès exceptionnel de Matra Automobile est d'autant plus exemplaire qu'il a dû se forger contre une concurrence mondiale lorsque les grands c onstructeurs américains, japonais et européens ont constaté le succès commercial rencontré par Matra et l'ont imité.

Le paradoxe est que la plupart des concurrents de Matra Automobile ont été d'une manière ou d'une autre aidés par l'Europe et éventuellement par le budget de notre pays. Je songe notamment à Ford, Volkswagen, ou PSA-Fiat. Le préjudice subi par Matra Automobile est facile à imaginer lorsque l'on sait que l'aide publique fournie à l'époque à ses concurrents équivaut à presque 15 000 francs par véhicule.

Le succès de ce qui était au départ une production de niche est tel que la production d'Espace s'élève encore aujourd'hui à 350 véhicules par jour et va conduire Renault à rapatrier cette production dans son usine de Sandouville.

S'il fallait une preuve de l'atout que constitue pour l'industrie automobile et l'économie française la capacité de production de niche en industrie automobile, Renault vient ainsi de l'administrer, en répondant à l'engouement du public pour ce véhicule qui reste le meilleur dans sa catégorie en Europe et qui assure 2 500 emplois à Romorantin, en Loir-et-Cher, et dans les communes environnantes. Matra est d'ailleurs le premier employeur privé de la région Centre.

Matra Automobile vient, à nouveau, de faire preuve de son talent d'innovation en présentant au Mondial de l'automobile l'Avantime, qui a reçu un très bon accueil, et le M 72, véhicule original puisqu'il pourra être conduit dès seize ans.

La production de ces deux nouveaux véhicules donnera du travail à environ 1 300 salariés sur les 2 500 et il faut, pour qu'un troisième véhicule puisse être construit, que soit réalisé un investissement d'environ 700 millions de francs pour achever la modernisation et la rationalisation de l'outil de production.

J'ai trois questions à vous poser, monsieur le secrétaire d'Etat.

Le Gouvernement défendra-t-il au niveau européen l'idée de maintenir en France et en Europe une capacité d'innovation et de production de niche comme celle de Matra Automobile ? En effet, autant les productions de grandes séries souffrent en Europe d'une surcapacité de production, autant les productions automobiles de niche sont parfaitement adaptées à la demande du marché européen et, si elles étaient détruites, l'Europe ouvrirait la porte aux Etats-Unis et à certains pays asiatiques qui menacent déjà cette production en Europe.


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Deuxièmement, le Gouvernement plaidera-t-il auprès de la Commission européenne pour l'inscription d'aides publiques européennes et françaises dans le cadre du DOCUP en cours de négociation, et les obtiendra-t-il ? Enfin, comment la prime d'aménagement du territoire pourra-t-elle bénéficier à cette opération ? Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, d'affirmer ici l'engagement clair et fort du Gouvernement en faveur de l'innovation et de l'emploi.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le député, nous voulons, en effet, maintenir les productions de niche en France, et tout ce que j'ai indiqué tout à l'heure, notamment dans le domaine de l'innovation, est là pour le démontrer.

En ce qui concerne Matra et Romorantin, la responsabilité particulière qui incombe à Matra et à ses actionnaires les incitera certainement à ne pas se dérober devant leurs responsabilités, notamment régionales. Vous et moi en sommes assurés.

Par ailleurs, il y a déjà eu des restructurations de défense dans la région du site de Matra...

M. Patrice Martin-Lalande.

Tout à fait !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... et nous sommes donc particulièrement attentifs. Nous avons pris toutes les dispositions pour être en mesure d'accompagner au mieux les projets de développement du site, en particulier pour la construction d'une nouvelle unité de production qui est envisagée.

Dans ce cadre, Romorantin a été inscrit en zone PAT et en zone objectif 2, ce qui permet à l'Etat et aux collectivités locales de disposer des aides maximales possibles en France.

Le document unique de programmation, qui est en cours d'approbation par la Commission, permettra le recours à tous les fonds européens.

Les encadrements communautaires ne peuvent pas constituer un obstacle majeur à la mise en place d'un tel accompagnement, et nous sommes disposés à aller de l'avant pour tenir compte de la situation particulière de cette région.

M. Patrice Martin-Lalande.

Je vous remercie.

M. le président.

La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin.

Monsieur le ministre, ma question est proche de celle que vient de poser M. Evin.

J'appelle votre attention sur la suppression de la ligne budgétaire « aide à l'équipement naval » dans les crédits de votre budget. Celle-ci pourrait apparaître comme l'application du règlement européen du Conseil de 1998, qui prévoit l'abolition de l'aide à la construction navale en 2001, mais l'article 12 de ce règlement offre la possibilité d'une révision de cette abolition et vos homologues allemands et italiens ont démandé officiellement à la Commission européenne de prolonger les aides d'Etat audelà du 31 décembre 2000.

De plus, la rupture brutale des négociations sur le d umping coréen entre l'Union européenne et la République de Corée, le 29 septembre dernier, devrait entraîner un contentieux commercial.

Dans ce contexte, on voit mal pourquoi, ou par quel masochisme, l'Europe supprimerait la seule mesure de protection de son industrie de la construction navale, alors que celle-ci ne dispose ni d'un marché intérieur, ni de protections tarifaires ou quantitatives, ni d'aides au développement de prototypes.

En dépit des louables efforts de productivité des chantiers français, la suppression de l'aide à la construction navale ne pourrait être envisagée avec sérénité que si cette a ide était effectivement supprimée pour les autres constructeurs européens. Tel n'est cependant pas le cas de nombreux chantiers européens, qui déclarent avoir encore besoin d'un régime de protection.

Les constructeurs français craignent donc de ne pas être mis dans des conditions d'égalité face à leurs concurrents européens ou asiatiques, que ce soit pour des paquebots de croisière, des navires à passagers à usage commercial ou des navires de pêche.

De plus, d'après de récentes déclarations du chancelier Schrder, les Lnder semblent pouvoir subventionner les chantiers d'outre-Rhin, car des aides régionales sont compatibles avec les directives en vigueur.

C'est pourquoi je vous demande si vous comptez rétablir une ligne budgétaire « aide à la construction navale », soit en inscrivant une dotation forfaitaire pour mémoire, sous réserve de la décision du prochain Conseil des ministres de l'industrie qui se tiendra, sous votre présidence, le 5 décembre prochain, soit en vous engageant à inscrire cette ligne budgétaire d'aide à l'équipement naval dans le prochain collectif, en sachant que, dans cette h ypothèse, les commandes prises entre le 31 décembre 2000 et la date du vote du prochain collectif risquent d'échapper à la construction navale française.

Après les naufrages de l' Erika et de l' Ievoli Sun , il serait tout à fait choquant de porter un mauvais coup à nos chantiers navals, qui contribuent, par la qualité de leurs navires, à assurer une meilleure sécurité maritime. C'est pourquoi j'attends de votre part une réponse positive.

M. Patrice Martin-Lalande.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le député, je ne veux pas répéter ce que je disais tout à l'heure à votre collègue, mais je vous rappelle que la Commission a seule pouvoir de proposer une prolongation des aides. Il n'y a pas aujourd'hui de majorité qualifiée pour la contraindre à le faire, et elle n'entend pas le faire elle-même, je l'ai vérifié auprès du commissaire chargé de ces questions.

Nous voulons répondre avec grande fermeté, je l'ai expliqué tout à l'heure, à la pression coréenne qui, en effet, n'est pas admissible. Les termes concurrentiels posés par le dumping ne peuvent pas être acceptés par l'industrie européenne et en particulier par l'industrie française.

Au-delà, la vraie réponse, et la seule mesure efficace qui puisse être prise, c'est le développement de la compétitivité des chantiers, les efforts de productivité, les efforts de recherche.

Les aides à la recherche et à l'innovation, qui existent dans le PCRD, le programme-cadre de recherche et de développement de l'Europe, sont considérables, et il existe une ligne budgétaire destinée à encourager la recherche dans le domaine des constructions navales. Je m'en suis entretenu avec mon collègue allemand, M. Mosdorf, lors du sommet de Vittel, il y a quelques jours, et nous sommes convenus de faire une action commune pour étudier les conditions d'un développement de la recherche-développement dans les constructions navales.

Enfin, nous serons très vigilants sur le respect effectif par tous les états membres de l'Union européenne de la fin des aides à la commande.

Voilà, je crois, une réponse ferme et décidée.


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M. le président.

La parole est à M. Robert Galley.

M. Robert Galley.

Je vous remercie, monsieur le président, de me laisser poser une question à la place d'Olivier de Chazeaux.

Monsieur le secrétaire d'Etat, dans le monde que nous vivons en l'an 2000, le marché textile progresse au rythme de 2,5 à 3 % par an, et les échanges des produits d e cette industrie représentent près de 10 % du commerce mondial des marchandises.

L'industrie textile n'est pas un secteur d'arrière-garde, comme d'aucuns le disent, car elle compte en France 3 000 entreprises et occupe 300 000 salariés.

Vous savez comme moi, peut-être même mieux que moi, le caractère structurant pour la vie locale de ces entreprises, dans la mesure où elles sont les dernières à résister à la désertification industrielle croissante de nombreux territoires.

Pour que l'industrie textile continue à vivre, il faut lui en donner les moyens, car elle veut pouvoir se battre sur le marché mondial et ne souhaite pas s'enfermer derrière des barrières protectionnistes.

C'est d'autant plus urgent que l'échéance de 2005, qui verra disparaître toute limitation quantitative des importations, est extrêmement proche. Je sais, pour en avoir souvent discuté avec vous, que vous êtes décidé à nous aider, et j'évoquerai seulement deux problèmes.

Le premier est le très irritant contentieux qui perdure à la suite de la suppression des dispositions du plan textile, dit plan Borotra, et qui empoisonne la situation de cette industrie dans un certain nombre de départements. Je sais que vous vous en occupez, monsieur le secrétaire d'Etat - j'ai failli dire « monsieur le maire » (Sourires) -, mais je vous demande de bien vouloir essayer de régler rapidement cette affaire, au bénéfice de nos entreprises.

Autre domaine qui appelle à la fois des interventions vigoureuses et une action de longue durée, c'est l'appropriation illégale des innovations de nos entreprises, contre laquelle il est nécessaire de lutter et nous ne sommes pas bien armés.

Ainsi, alors qu'étaient présentés au mois de juin les costumes des écoliers pour la rentrée de septembre, dès le 25 août, les magasins des grandes surfaces avaient des contrefaçons de ces modèles, à des prix asiatiques, bien sûr.

L'action en justice n'a pu être introduite que le 25 septembre, c'est-à-dire longtemps après la fin de cette campagne.

C'est donc un problème extrêmement grave, que vous pouvez, avec votre connaissance du sujet, saisir à bras-lecorps. Voilà pourquoi je me suis permis de vous poser cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le député, le textile-habillement a connu une période très difficile en effet, mais, en l'an 2000, et je suis content de le révéler à l'Assemblée nationale, le chiffre d'affaires global du secteur s'est stabilisé, il y a une croissance de la consommation - après 3 % en 1998, nous avons connu 0 % en 1999, mais 2 % en 2000 - et l'emploi s'est à peu près stabilisé après une terrible année 1999 où nous avons perdu plus de 15 000 emplois. Aujourd'hui, en 2000, on peut tabler sur une stabilisation.

Nous faisons beaucoup de choses pour le textile. Je ne vais pas rappeler ici toutes les mesures, j'ai déjà eu l'occasion de les rappeler devant l'Assemblée nationale et notamment à vous.

Mesures en faveur de l'innovation : le FDPMI, le fonds de développement des PMI est attribué à raison de 12 % pour ce secteur, qui ne représente pas 12 % de la valeur ajoutée industrielle française.

Introduction des nouvelles technologies de l'information et de la communication : l'habillement en profite beaucoup.

Formation : le développement de la formation du secteur est maintenant l'un des plus dynamiques, après avoir connu de nombreuses années objectivement mauvaises.

Application du programme ATOUT : on a à peu près quatre-vingts dossiers par an, entre 15 et 20 millions d'aides.

Sur la contrefaçon, je vous rejoins tout à fait : il faut lutter contre de telles pratiques. Nous avons une loi de 1994 qui le permet par différents moyens. Les services douaniers ont multiplié par dix les saisies en trois ans, ce qui est un beau succès. Nous travaillons à l'émergence d'une véritable culture et de réglementations strictes de propriété industrielle, dans le cadre d'échanges internationaux et de relations bilatérales ou multilatérales avec un certain nombre de pays dont la propension à la contrefaçon est connue, avec lesquels nous devons donc créer une culture commune. Enfin, nous voulons tirer prochainement un bilan de l'action du comité national a nti-contrefaçon et renforcer, vous avez raison, les moyens d'action au niveau des PME-PMI.

Nous vous suivons donc totalement, et la politique du Gouvernement en faveur du textile, de l'habillement, des cuirs et peaux et des chaussures est active, déterminée, une politique qui ne baisse pas les bras mais qui, au contraire, manifeste une véritable volonté et une stratégie industrielle.

M. Robert Galley.

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat.

M. le président.

Nous passons au groupe communiste.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

M me Muguette Jacquaint.

Monsieur le secrétaire d'Etat, le secteur automobile est en plein développement, et les résultats financiers de groupes français sont importants.

Toutefois, les choix du groupe Renault, dans lequel l'Etat possède encore une forte participation, sont, dans certains secteurs, quelque peu contraires au développement industriel. L'abandon de plusieurs succursales dans le réseau commercial en est la preuve.

En Seine-Saint-Denis, l'établissement de La Courneuve a été abandonné il y a quelque temps au profit d'un regroupement des activités sur une autre commune, au détriment de l'emploi et de la capacité commerciale de la marque. Sans projet de redynamisation du site, plus de 5 000 mètres carrés en plein centre-ville sont vacants, se transformant peu à peu en friche industrielle.

Je rappelle que l'existence des succursales a permis un rayonnement important des groupes automobiles, notamment Renault. Leur abandon peut déstabiliser un secteur géographique et être un ralentisseur ou un frein de l'expansion.


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Face à cette situation, quels moyens allez-vous prendre pour impulser sur le réseau des succursales des projets liés à l'industrie automobile, ou d'autres projets d'aménagement dans lesquels on pourrait demander au groupe Renault de s'investir davantage ?

M. le président.

La parole est M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

L'établissement de La Courneuve, madame la députée, dépend de la filiale de distribution de Renault, Renault France automobiles.

Celle-ci en a décidé la fermeture, qui est intervenue fin août. Il s'agit là d'une décision de gestion de l'entreprise sur laquelle les actionnaires ne peuvent guère peser. Toutefois, je me suis renseigné sur la situation et je peux vous apporter quelques indications plutôt positives.

Selon les informations qui m'ont été transmises par Renault, le regroupement des services après-vente de La Courneuve sur le site de Saint-Denis doit permettre une amélioration de la qualité des services. Renault France automobiles a réalisé d'importants travaux de rénovation sur le site de Saint-Denis, mais la réorganisation des différentes structures ainsi intervenue dans le nord-ouest de la Seine-Saint-Denis conduit à une meilleure utilisation du site principal. Renault souligne que les investissements réalisés sur ce site démontrent sa volonté de maintenir sa présence - et j'y veillerai - dans le nord-ouest de la Seine-Saint-Denis.

Il convient de noter aussi que les postes de travail ont été transférés dans la même zone, sans aucune réduction du nombre d'emplois. C'est important, pour vous comme pour moi. Le groupe ne manquera pas de veiller - et je serai attentif à cela - à trouver une destination adéquate pour le terrain maintenant disponible au centre-ville de La Courneuve. Nous aurons l'occasion, si vous le voulez, d'en reparler.

M. le président.

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez ignoré les propositions que nous avons faites en matière d'exploitation et d'utilisation du charbon. Je vais donc vous poser une question précise. La Nièvre possède un gisement de charbon récemment reconnu, de 80 mètres d'épaisseur. Il s'agit d'un excellent charbon, enfoui à 300 mètres sous terre, et pouvant donc être exploité à ciel ouvert. Il semble d'ailleurs exciter la convoitise de groupements étrangers. Quelles sont les intentions du ministère de l'industrie quant au gisement de Lucenaylès-Aix ? Et y a-t-il des propositions de groupes étrangers, notamment anglais, pour l'exploitation de ce riche gisement ?

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le gisement de Lucenay-lès-Aix, dont les réserves sont estimées à 250 millions de tonnes, à des profondeurs comprises entre 190 et 600 mètres, a fait l'objet d'une étude du BRGM, qui avait conclu, en 1986, à la possibilité d'exploiter ce gisement. Mais, depuis, les perspectives économiques du charbon ont fortement évolué.

A l'époque, le charbon était valorisé aux environs de 500 francs la tonne - en valeur 1986 : on serait, aujourd'hui, à 700 ou 800 francs. Le charbon importé, rendu dans les ports européens, se négociait à environ 30 dollars américains la tonne, soit environ 200 francs.

Ainsi peuvent s'expliquer, d'une part, le pacte charbonnier qui prévoit la cessation de toute extraction de charbon en France au plus tard en 2005 et, d'autre part, le fait qu'il ne puisse être envisagé, aujourd'hui, de mettre en exploitation le gisement de Lucenay-lès-Aix.

M. le président.

La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaiterais vous interpeller sur trois axes du développement de La Poste qui, à nos yeux, ne répondent pas à ce que l'on attend des missions d'un service public.

Le premier concerne les fermetures et les réductions d'horaires des bureaux de poste sur notre territoire. Cette restructuration, présentée bien souvent par La Poste comme une conséquence de l'application de la loi sur la réduction du temps de travail,...

M. Patrice Martin-Lalande.

Ah ! Il n'y aurait pas que des avantages aux 35 heures ?

Mme Janine Jambu.

... ne peut provoquer que désapprobation, car elle contribue à dénigrer la portée sociale de la loi des 35 heures, qui a pourtant but de créer des emplois tout en réduisant le temps de travail et en améliorant les conditions de travail.

Comment se fait-il que la loi sur les 35 heures ne soit pas au contraire l'occasion de développer l'emploi et les formations au sein de La Poste, pour augmenter sa présence sur le territoire ? Le deuxième point concerne l'intégration dans le statut de la fonction publique des contractuels de La Poste. La présence, l'efficacité, et la qualité du service public de La Poste sont étroitement liées au statut des personnels.

Le 10 juillet 2000, un protocole d'accord a été signé entre le Gouvernement et six fédérations syndicales, instaurant un plan de résorption de la précarité dans la fonction publique et prévoyant la titularisation de nombreux contractuels. Ni ce plan ni même le projet de loi prévu pour décembre prochain n'abordent la situation des 80 000 agents contractuels de La Poste. Cette situation est difficilement compréhensible.

Subissant une disparité salariale importante, des conditions de travail pénibles, des droits réduits en matière de promotion et de déroulement de carrière, ces personnels attendent la reconnaissance de leur travail car ils sont attachés aux missions de service public. Monsieur le secrétaire d'Etat, comment comptez-vous réduire les emplois précaires à La Poste ? Enfin, le troisième point concerne la décision de la direction de La Poste de mettre un terme au transport du courrier par rail entre Paris et Besançon. Cette étape est la conclusion d'un long processus. Profitant de l'abaissement des coûts du transport routier, la direction de La Poste a donc transféré la plus grande partie de la distribution du courrier sur ce mode de transport. Ces choix d'économie, purement comptables, se font au mépris des p roblèmes graves que soulève la généralisation du transport routier : condition de sécurité, conditions de travail, etc.

De la part d'une entreprise publique, on attendait plutôt une recherche de coopération entre secteurs publics et la mise en oeuvre de solutions nouvelles avec la SNCF, surtout qu'il existe des TGV postaux.

Monsieur le secrétaire d'Etat, cette situation est grave, selon nous. Comment comptez-vous faire respecter la politique du Gouvernement, qui repose sur le rééquilibrage du fret en faveur du rail ?

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Vous posez deux questions, madame la députée. La première concerne la résorption de la précarité à La Poste. Je suis un fervent partisan de cette réduction. C'est pourquoi j'ai incité l'entreprise publique, lors de la signature du contrat


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d'objectifs et de progrès en juin 1988, à développer dans plusieurs paragraphes de ce contrat, qui la lie à l'Etat, un objectif clair de réduction de la précarité. Le contrat signé sur la résorption de la précarité prévoit la transformation de 50 % des CDD en CDI et un passage progressif du temps partiel au temps complet. Cet effort sera poursuivi et accentué. Je suis heureux de voir que La Poste suit bien, dans ce domaine, le contrat d'objectifs et de progrès.

Pour ce qui est de la suppression du train-poste de Paris à Besançon, je dis très clairement qu'il n'est pas question pour La Poste de se désengager par principe du transport ferroviaire. Elle a d'ailleurs investi plusieurs dizaines de millions de francs dans des rames TGV sur l'axe Paris-Méditerranée, qui comportent des sections postales. C'est donc bien la preuve que l'on continuera à procéder à du tri dans des wagons. Il s'agit, pour le cas du train-poste de Paris à Besançon, d'un service de faible effectif. Les personnels, qui avaient été informés de ce projet et qui ont pu en discuter avec leur direction, ne voient pas leur emploi menacé. Et l'entreprise veille, en concertation avec les organisations syndicales, à aménager au mieux l'avenir personnel et collectif de ces personnes.

J'ai par ailleurs, pour satisfaire votre requête, demandé à La Poste de renforcer sa concertation avec la SNCF pour développer ce que vous et moi pourrions appeler des « solutions nouvelles », afin que les tarifs de la SNCF soient compétitifs par rapport à ceux d'autres moyens de transport et qu'elle puisse offrir à ses clients un service de plus grande proximité, plus fin. La Poste et la SNCF, sous l'impulsion de l'Etat, doivent se rapprocher et doivent travailler de telle manière que le rôle du train dans le transport postal puisse être réaffirmé, avec un service réinventé, renouvelé, innovant. Dans ces conditions, oui, je crois qu'il y a toujours un avenir pour le transport postal par le train.

M. le président.

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Monsieur le secrétaire d'Etat, le 18 janvier, lors de la deuxième lecture du projet de loi portant transposition de la directive sur l'électricité, vous avez confirmé dans cet hémicycle la création d'un nouveau groupe à lit fluidisé circulant sur le site de la centrale thermique de Gardanne, en déclarant : « Pour ce qui est de Gardanne, la décision de réaliser un lit fluidisé circulant est prise. Nous lancerons l'appel d'offres nécessaire. »

Je souhaite aujourd'hui faire le point avec vous sur cet engagement. Où en est la procédure ? Je veux aussi rappeler l'engagement, pris lors de rencontres avec vous-même et M. Strauss-Kahn, d'établir un centre de recherche sur les énergies propres sur le territoire de ma commune.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le député, je réitère les engagements que j'avais pris dès 1999 avec Dominique Strauss-Kahn, et que j'ai renouvelés lors des débats parlementaires ici même le 18 janvier 2000. Je déclarais alors : « Dans le cadre de la loi, nous lancerons le ou les appels d'offres nécessaires pour réaliser cet équipement structurant. » Je n'ai pas changé

d'avis. Je vous rappelle ce qui a été fait depuis.

L'article 8 de la loi du 10 février 2000 sur le service public de l'électricité précise que le ministre chargé de l'énergie peut recourir à la procédure d'appels d'offres lorsqu'il constate que « les capacités de production ne répondent pas aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements, notamment ceux concernant les techniques de production ». Cette programmation pluriannuelle des investissements est donc un préalable au recours à l'appel d'offres, et la réalisation des instruments indispensables à son élaboration est très largement engagée.

En témoignent les deux points suivants. D'une part, le schéma des services collectifs de l'énergie, dont l'adoption est prévue au printemps 2001, fait l'objet de consultations au niveau régional - auxquelles vous participez probablement en tant qu'élu local -, réunissant l'Etat, l'opérateur, le conseil régional et différents élus.

D'autre part, à la suite de la demande formulée par mes services en juillet 2000, le gestionnaire du réseau de transport, le GRT, devrait transmettre très prochainement le bilan prévisionnel qui est requis par la loi.

L'étude et la synthèse de ces documents permettront l'élaboration prochaine de la première programmation pluriannuelle des investissements et le lancement sur cette base des appels d'offres destinés à répondre aux besoins en matière de production d'électricité.

Voilà qui est clair et qui correspond parfaitement à l'article 8 de la loi que vous avez probablement votée et que vous soutenez.

Enfin, comme l'a décidé le comité interministériel d'aménagement du territoire, l'école de la micro-électronique s'installera à Gardanne. M. le député-maire le sait sans doute, mais il vaut mieux que l'ensemble de l'Assemblée nationale en soit informée.

M. François Brottes, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. le président.

Je félicite le maire, et je donne la parole à Mme Janine Jambu. (Sourires.)

Mme Janine Jambu.

Je voudrais à nouveau, monsieur le secrétaire d'Etat, revenir sur le projet de libéralisation de La Poste, adopté en mai dernier par la Commission de Bruxelles. Actuellement, ce marché est ouvert à la concurrence à hauteur de 3 %. Les propositions du commissaire européen prévoit une ouverture à plus de 20 % en 2003, et plus encore en 2007. Les suppressions d'emplois, la diminution et la disparition des services apportés aux citoyens en seront, me semble-t-il, les conséquences immédiates, comme aujourd'hui les fermetures et les réductions d'horaires des bureaux de poste.

Au niveau européen, les différences sont fortes. Deux groupes de pays s'opposent. Le premier, dont notre pays fait partie, affiche un refus net de voir cette directive appliquée en l'état.

Vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez fait valoir que « nous ne pouvons accepter que seul le courrier inférieur à 50 grammes ou affranchi à moins de 2,5 fois le tarif de base demeure le seul domaine réservé des postes, car elles seraient incapables de financer leurs missions de service public, notamment sur tout le territoire ». Mais il y a deux façons de comprendre l'expression « inacceptable en l'état ».

De deux choses l'une : soit la directive est retirée, soit elle est aménagée, notamment sur les questions de calendrier ou de seuils.

Face à la perte de revenus provoquée par la suppression progressive du domaine réservé à l'opérateur public, la Commission européenne répond qu'il revient « aux Etats membres d'assurer le service universel et d'assumer les conséquences de la libéralisation ». Elle envisage, quand cela sera nécessaire, la création d'un fonds de compensation !


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Il se dit par ailleurs que « la France ne veut pas d'un passage aussi brutal et aussi rapide ».

Ma question est donc simple, monsieur le secrétaire d'Etat. Si vous dites que la directive n'est pas « acceptable en l'état », est-ce parce que vous considérez qu'il faut du temps pour envisager une stratégie afin d'assumer les conséquences financières de la libéralisation ?

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

C'est très simple, madame la députée : je suis résolument contre la privatisation et j'approuve ce qu'a dit tout à l'heure M. Brottes dans ce qui était un véritable plaidoyer en faveur du service public, un plaidoyer vraiment vécu et que l'immense majorité des députés, je crois, partagent. Pour nous, les premières propositions de la Commission, celles de M. Bolkestein, ne sont pas acceptables : ni l'abaissement du rapport poids-prix à 50 grammes et 2,5 fois le tarif de base ni la définition - ou même l'absence de définition des services spéciaux, c'est-à-dire à valeur ajoutée. Car la conséquence en serait que le service réservé à La Poste se réduirait comme peau de chagrin. Si ces mesures étaient a doptées, elles réduiraient tellement la capacité de La Poste à financer le service public qu'on ne pourrait plus parler de service public. Il n'y aurait plus ni possibilité d'assurer la péréquation tarifaire ni égalité entre les usagers, pas plus qu'entre les territoires. Bref, ce serait un tout autre contexte, alors que nous, comme vous, nous voulons défendre le service public. Nous excluons donc toutes ces évolutions dont vous avez parlé : privatisation, changement de statut, ouverture du capital, etc. Tout cela ne fait pas partie de nos références. Ce que nous voulons, c'est au contraire un vrai service public, moderne, entrepreneurial - car La Poste est une entreprise, et même une belle entreprise -, ouvert sur l'international, conquérant, mais qui conserve les valeurs qui sont les siennes et qui seront encore longtemps, croyez-en le Gouvernement, madame la députée, les valeurs du service public de La Poste. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Patrice Martin-Lalande.

Il ne faut pas se laisser faire !

M. le président.

Nous en arrivons au groupe Radical, Citoyen et Vert.

La parole est à M. Robert Honde.

M. Robert Honde.

Tout à l'heure, j'ai un peu dépassé mon temps de parole, mais là, je vais me rattraper parce que ma question sera très courte (Sourires) , ce qui permettra à M. le secrétaire d'Etat de me répondre plus longuement, et sûrement de manière très positive. Elle concerne le projet ITER, ce qui signifie, je le dis pour les non-initiés, projet de réacteur thermonucléaire expérimental international. Ma question est très simple : le site de Cadarache - qui n'est pas dans mon département, mais dans celui de Roger Meï - pourrait-il être retenu comme site d'implantation ?

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le projet de réacteur ITER est un dispositif expérimental de fusion thermonucléaire. Je sais que M. Destot connaît bien ce sujet, en tant qu'ancien du CEA.

L'accord de coopération internationale que nous avons conclu entre l'Union européenne, la Russie, le Japon et, jusqu'en 1999, les Etats-Unis et qui concerne les activités ayant trait à ce projet arrive à expiration l'année prochaine, en juillet 2001. Dans ce cadre, la procédure d'instruction du choix d'un site d'accueil pourrait démarrer dans le courant de l'année prochaine, si ce projet est avalisé. Le choix du site d'implantation d'une telle installation est une décision de nature scientifique, mais c'est aussi largement un choix d'opportunité politique et un choix aux conséquences financières énormes, il faut bien le dire. Tout cela mérite un examen approfondi. A cet égard, un récent comité à l'énergie atomique, que j'ai présidé, a été consacré à ce sujet. Il a permis d'apporter des éléments d'information utiles concernant l'avancement des recherches sur la fusion thermonucléaire contrôlée. Des premiers éléments concernant l'installation éventuelle d'ITER sur le site de Cadarache ont été présentés à ce comité. Ce dernier a conclu que le CEA et ses partenaires devaient élaborer un dossier plus complet, présentant les atouts d'une pareille implantation, qui reste éventuelle, je le souligne.

A la lumière de ces éléments, le Gouvernement pourra prendre position le moment venu sur une éventuelle candidature de la France à ce programme. Je pense que nous n'avons pas encore complètement maîtrisé les aspects technologiques et scientifiques de ce programme, de sorte qu'il nous faut encore approfondir la réflexion.

J'en profite d'ailleurs pour remercier le rapporteur pour avis, M. Billard. Le rapport sur l'énergie qu'il nous a présenté a permis de faire de très grandes avancées. J'ai oublié de le remercier tout à l'heure, dans mon intervention à la tribune. Je veux réparer cette omission, parce que je connais bien, pour la pratiquer depuis trois ans et demi, la qualité des rapports de M. Billard et je tiens à en souligner l'efficacité et la remarquable pertinence.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Nous avons terminé l'examen des crédits de l'industrie, de La Poste et des télécommunications qui seront appelés à la suite de l'examen des crédits de l'économie et des finances.

La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

2 SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le président.

J'ai reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une lettre m'informant qu'en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, plus de soixante sénateurs ont saisi le Conseil constitutionnel d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution de la loi d'orientation pour l'outre-mer.

3 DÉPÔTS DE PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION

M. le président.

J'ai reçu, le 16 novembre 2000, de M. Alain Barrau, rapporteur de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, une proposition


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de résolution sur la proposition de décision du Conseil sur les lignes directrices pour les politiques de l'emploi d es Etats membres en 2001 (COM [2000] 548 final/E 1559) et la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative aux mesures d'incitation communautaire dans le domaine de l'emploi (COM [2000] 459 final/E 1528) déposée en application de l'article 151-1 du règlement.

Cette proposition de résolution, no 2728, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 16 novembre 2000, de M. Gaëtan Gorce, rapporteur de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, une proposition de résolution sur la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions relative à l'agenda pour la politique sociale (COM [2000] 379 final/E 1497), déposée en application de l'article 151-1 du règlement.

Cette proposition de résolution, no 2730, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

4 DÉPÔTS DE RAPPORTS D'INFORMATION

M. le président.

J'ai reçu, le 16 novembre 2000, de M. Alain Barrau un rapport d'information, no 2727, déposé par la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur la proposition de décision du Conseil sur les lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres en 2001 (COM [2000] 548 final/E 1559) et sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative aux mesures d'incitation communautaire dans le domaine de l'emploi (COM [2000] 459 final/E 1528).

J'ai reçu, le 16 novembre 2000, de M. Gaëtan Gorce un rapport d'information, no 2729, déposé par la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur l'agenda pour la politique sociale (COM [2000] 378 final/E 1497).

J'ai reçu, le 16 novembre 2000, de M. François Guillaume un rapport d'information, no 2731, déposé par la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur le programme de soutien à l'industrie audiovisuelle européenne (MEDIA Plus, 2001-2005) (COM [1999] 658 final/E 1422).

5

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Vendredi 17 novembre 2000, à neuf heures, première séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001, no 2585 : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 2624).

Economie et finances : charges communes, services financiers, budget annexe des Monnaies et médailles, comptes spéciaux du Trésor (articles 37 à 41), taxes parafiscales (lignes 1 à 39 et 42 à 44 de l'état E et article 42) , commerce extérieur (nouvelle procédure).

Charges communes : M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 11 du rapport no 2624).

Services financiers, Monnaies et médailles : M. Henry Chabert, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 16 du rapport no 2624).

Comptes spéciaux du Trésor : M. Dominique Baert, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 43 du rapport no 2624) ; M. Loïc Bouvard, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome XI de l'avis no 2627).

Taxes parafiscales : M. Daniel Feurtet, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 44 du rapport no 2624).

Commerce extérieur : M. Gilles Carrez, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 12 du rapport no 2624) ; M. Marc Reymann, rapporteur pour avis, au nom de l a commission des affaires étrangères (tome V de l'avis no 2626) ; M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la production et des échanges (tome V de l'avis no 2629).

Solidarité et santé ; économie solidaire.

Affaires sociales : M. Pierre Forgues, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 19 du rapport no 2624).

Action sociale : M. Francis Hammel, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome VIII de l'avis no 2625).

Rapatriés : M. Francis Delattre, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 21 du rapport no 2624).

Santé : M. Gilbert Mitterrand, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 22 du rapport no 2624) ; M. Pierre Morange, rapporteur pour avis, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (tome X de l'avis no 2625).

A quinze heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures quarante.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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Projet de loi de nances pour 2001 Réunion de la commission de la production et des échanges COMPTE RENDU INTÉGRAL

(Les questions écrites et les réponses concernant ces crédits s ont publiées page 8794) Séance du jeudi 9 novembre 2000

SOMMAIRE Crédits du logement M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial de la commission des nances de l'économie générale et du plan.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges.

MM. Yves Dauge, Gilbert Meyer, Mme Jeanine Jambu, MM. Jean-Marie Morisset, Patrick Rimbert, Guy Malandain, Pierre Méhaignerie, Jacques Guyard, Patrick Braouezec, Daniel Vachez.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

M. le président de la commission.

Adoption par la commission des crédits du logement pour 2001.

PRESIDENCE DE M. ANDRE LAJOINIE, président de la commission de la production et des échanges (La séance est ouverte à neuf heures.)

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La séance est ouverte.

Mes chers collègues, nous sommes réunis pour entendre M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, nous présenter les crédits de son ministère. A la suite, la commission émettra son avis sur ces crédits.

Nous voici à la deuxième année d'application de la nouvelle procédure de commission élargie. L'objectif de cette réforme est, d'une part, de rendre la discussion budgétaire plus vivante, d'autre part, d'éviter la répétition de la même discussion en commission et en séance.

A n de concentrer nos débats sur l'essentiel, c'est-à-dire les questions au ministre, la note de présentation de la commission des nances et le projet de rapport de notre rapporteur pour avis, M. Alain Cacheux, ont été mis en distribution. En outre vous avez dû recevoir hier les réponses aux questions écrites.

Notre objectif d'un dialogue plus vivant entre les députés et le Gouvernement devrait être ainsi atteint. L'expérience de l'année dernière a été tout à fait concluante.

Je vous précise que nos débats feront l'objet d'un compte rendu analytique, publié dans le rapport de la commission, et d'un compte rendu intégral publié au Journal of ciel.

Au cours de cette séance, je donnerai successivement la parole à M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, au rapporteur spécial de la commission des nances, M. Jean-Louis Dumont, à notre rapporteur pour avis, M. Alain Cacheux, et aux porteparole des groupes. Je les invite à ne pas dépasser dix minutes chacun. Ensuite, auront la parole tous ceux qui souhaitent interroger le ministre, qui répondra à tous à la n de notre réunion.

Que chacun fasse preuve d'un maximum de concision ! Je vous remercie d'avance des efforts que vous consentirez pour respecter cette consigne.

La parole est à M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Monsieur le président, je vous remercie de votre accueil et des propos que vous venez de tenir à mon endroit. L'an dernier, nous étions parmi les ministères choisis pour l'expérimentation. Nous avons un petit entraînement à la méthode nouvelle dont je souhaite qu'effectivement elle permette de bien approfondir vos travaux dans des conditions utiles et dans un cadre moins formel que celui de la séance publique. Cela peut permettre un échange plus complet, plus direct et, je l'espère, plus riche. Nous avons répondu à une quinzaine de questions écrites qui nous avaient été adressées sur le budget. Elles seront publiées au Journal of ciel des débats avec le compte rendu des échanges de cette matinée, en annexe du compte rendu de la séance publique, xée, elle, au 16 novembre prochain.

Avant d'écouter les observations de vos rapporteurs et des porte-parole des groupes, une présentation rapide de ce budget 2001 me permettra de vous en rappeler les grandes lignes ainsi que de le situer dans un contexte un peu élargi, mis en perspective, puisque c'est la quatrième année que nous nous livrons à cet exercice. Les budgets du logement et de l'urbanisme qui se succèdent apportent chacun leur pierre à l'édi ce d'une politique


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que nous voulons pérenne au service de tous nos concitoyens, comme vous le souhaitez vous-mêmes, j'en suis certain, et cela pour leur permettre d'exercer pleinement leur droit au logement.

Les années 1998 et 1999 avaient vu l'effort porter principalement sur les aides à la pierre, avec notamment la croissance des aides à la réhabilitation pour le parc ancien, tant public, avec les PALULOS, que privé avec la PAH et l'ANAH, avec la rebudgétisation du prêt à taux zéro dans le cadre de la convention passée le 3 août 1998 avec les partenaires sociaux du 1 % logement. En outre, avec le statut du bailleur privé, nous assurions un avenir stabilisé aux dispositifs scaux d'incitation à l'investissement, jusque-là trop conçu sur une base conjoncturelle et sans contrepartie sociale. L'année 2000 a été celle des grandes mesures scales concernant le logement. Elles portent leurs effets. J'en rappelle très brièvement les principales : d'abord, le taux réduit de TVA sur les travaux dans les logements de plus de deux ans, qui a permis de con rmer la bonne santé économique du secteur du bâtiment dont vous savez qu'il contribue activement à la croissance de l'emploi. Ensuite, la réduction concernant les droits de mutation, désormais xés à un taux uniforme de 4,8 % dans tous les départements pour favoriser à la fois la uidité du marché immobilier et la mobilité géographique. Je citerai encore la suppression du droit au bail, effective en l'an 2000 pour plus de 80 % des locataires, les plus modestes, et qui sera complète en 2001 pour tous, sans qu'il soit besoin d'un nouvel article dans la loi de nances puisque la loi pour 2000 a organisé à l'avance la suppression totale sur deux ans. La loi de nances recti cative pour 2000 a complété ces mesures, qui représentaient déjà globalement plus de 30 milliards de francs d'allégements scaux, avec la réduction de la taxe d'habitation, notamment la suppression de la part régionale.

L'année 2001 sera d'abord l'année de la mise en oeuvre de la très profonde réforme des aides personnelles au logement qui représentent une part considérable de nos dépenses budgétaires, poursuivant en cela l'effort continu engagé depuis juin 1997 avec un rattrapage et une actualisation régulièrement reconduite année après année. La réforme des aides à la personne, dé cidée le 15 juin dernier lors de la conférence de la famille, poursuit deux objectifs, d'une part, harmoniser et simpli er les barèmes de ces aides qui, devenues très complexes avec le temps, seront donc regroupées dans un barème unique pour le secteur locatif, hors le cas particulier des foyers, d'autre part, améliorer l'équité de ces aides en prenant en compte tous les revenus de la même manière, qu'il s'agisse de revenus de travail ou des minima sociaux comme le RMI. Il s'agit là de supprimer un obstacle à la reprise d'activité, souvent dénoncé, car un RMIste reprenant un emploi voyait son aide au logement fortement baisser annulant, en grande partie, le gain apporté par le nouveau salaire. Cette mesure est complémentaire de celle qui concerne la CSG ou de celle déjà prise sur la taxe d'habitation pour les ménages modestes. Ces modi cations se font par le haut, comme le disait Jean-Claude Gayssot, c'est-à-dire qu'aucun béné ciaire ne verra son allocation diminuer du fait de la réforme. Le gain moyen sera de 1 300 francs par an et par ménage béné ciaire, mais pourra représenter beaucoup plus. Je pense aux ménages qui logeaient dans un logement locatif privé, ne disposant que de ressources faibles -par exemple, plus de 5 000 francs par an pour les ménages. Le gain, au lieu de 1 300 francs, peut aller jusqu'à 5 000 francs par an. Je pense donc aux ménages qui étaient dans un habitat privé, pénalisés par le barème de l' allocation logement, disposant d'un revenu équivalent au minima social et qui reprennent une activité, faiblement rémunérée. La différence peut être en région parisienne de l'ordre que je viens de dire, c'est-à-dire quasiment un SMIC qui peut être gagné en allocation logement sur la durée d'une année.

Cette réforme ambitieuse est l'aboutissement d'un long travail.

Elle représentera au total 6,5 milliards de francs et sera mise en oeuvre en deux étapes : 1er janvier 2001 pour 3,3 milliards et 1er janvier 2002 pour 3,2 milliards. Ensuite, nous aurons régulièrement 6,5 milliards, bien évidemment, à partir de 2002 et d'une manière continue. La première étape, celle de 2001 de 3,3 milliards, représente 2 milliards pour le budget de l'Etat, puisque 1,3 milliard se retrouve couvert par les prestations de la branche famille. Ces 2 milliards n'apparaissent pas immédiatement à la lecture de la loi de nances, vous avez pu l'observer, puisque le chapitre budgétaire est en hausse apparente de près de 700 millions seulement. La réforme est pourtant bien nancée, je veux vous l'assurer, car, en réalité, comme on a pu le constater les années précédentes, le retour de la croissance et la baisse du chômage conduiraient, sans réforme, à une baisse de la ligne budgétaire. Ces économies tendancielles sont en fait, vous le comprenez, recyclées pour nancer une partie de la réforme qui n'a besoin de n'être complétée que par une dotation budgétaire en hausse de 655 millions. C'est intéressant parce qu'après l'indicateur baisse de chômage, après l'indicateur baisse du nombre de béné ciaires du RMI, on a aussi une baisse du nombre de béné ciaires des allocations logement. Cet ensemble d'indicateurs, vous le connaissez, mais je tenais à vous le rappeler. Cela n'a pas été l'occasion d'une économie. Il y a recyclage, réaffe ctation, et on ajoute 655 millions pour le nancement de la première année de mise en oeuvre de la réforme des aides au logement. Vous le voyez, cette réforme ne va pas conduire à une économie, d'autant plus que ce qui vous est proposé comporte la con rmation de l'engagement d'une actualisation aura lieu au 1er juillet 2001, comme elle s'est faite en 2000, 1999, 1998 et 1997. L'actualisation est d'autant plus nécessaire que les charges, sinon les loyers, augmentent plus rapidement, ce qui est le cas actuellement en particulier avec le chauffage, compte tenu du renchérissement des prix de l'énergie.

Le second grand axe du budget 2001 concerne la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain en voie d'adoption par le Parlement et qui sera opérationnelle en 2001. Si elle ne crée pas à proprement parler de nouveaux outils nanciers, elle n'est pas sans conséquence sur nos différentes lignes budgétaires. Par exemple, les aides à la pierre, bien que sous-consommées pour la construction neuve, sont con rmées parce que la loi SRU avec l'obligation d'atteindre les 20 % en vingt ans devrait notamment déboucher sur un accroissement de la consommation des crédits, même si l'on peut avoir à regretter qu'une obligation soit à l'ori gine d'une augmentation de la production. Pour la réhabilitation, je le dis entre parenthèses, ce sont bien 120 000 PALULOS qui sont budgétisés comme les années précédentes. Dans le contexte de renouvellement urbain que la loi SRU entend favoriser, les crédits consacrés aux démolitions sont en hausse de 21 % à 170 millions, pour que progressivement soit nancé l'objectif de 10 000 logements démolis par an, évoqué, vous le savez, dans un CIV, comité interministériel des villes.

Dans le même esprit, le budget 2001 prévoit un doublement des crédits de qualité de service rétablis à hauteur de 50 mill ions l'an dernier après plusieurs années d'interruption et qui seront portés de 50 à 100 millions pour 2001. Il s'agit là d'aider à l a réalisation par les organismes HLM de travaux d'amélioration de la vie quotidienne. Les travaux sont très bien perçus par les locataires qui voient une amélioration directe de leur cadre de vie.

Bien évidemment, notre principale préoccupation pour 2001 porte sur la production de nouveaux logements sociaux, que ce soit en construction neuve ou en acquisition dans l'ancien. Les dispositifs de la loi SRU renforcent cette obligation pour tous les acteurs. J'ai compris à travers les questions écrites qui nous ont été posées que cette préoccupation était largement partagé e. J'ai déjà eu de nombreuses occasions de m'exprimer sur le sujet, notamment devant le congrès de l'union des fédérations HLM à Bordeaux, ou plus récemment en réponse à la question d'actualité que m'a posée dans l'hémicycle votre collègue M. de Robien

Je vais le dire de nouveau à cette tribune, les chiffres de la production de logements sociaux nouveaux qui nous parviennent ne sont pas satisfaisants. Ils ne permettraient pas, si les tendances se poursuivaient d'engager l'effort important d'accroissement et de renouvellement du parc, un effort dont nous savons qu'il est nécessaire. Certes, nous sommes bien conscients que le niveau relativement élevé des prix de la construction n'a pas favorisé au cours des derniers mois la production d'un plus grand nombre de logements. C'est pourquoi, tout en appelant l'ensemble des acteurs organismes HLM élus collecteurs du 1 % à davantage de dynamisme, le Gouvernement a engagé une ré exion sur les modi cations des modalités d'utilisation des crédits budgétaires qui pourraient permettre une relance de la construction dès 2001. Peut-être, comme certains l'ont évoqué, cela pourra-t-il se traduire, à ligne inchangée, par une concentration des nancements sur un nombre un peu moins important de logements, ce qui améliorerait d'autant les conditions de nancement.


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Une des pistes sur lesquelles nous travaillons consisterait à adapter les paramètres de calcul des aides à la pierre à l'évol ution des coûts de construction réellement constatés.

L'ICC qui a été très bousculé dans la période récente. Vo us voyez que l'Etat interpelle les autres intervenants mais il cherche aussi, de son côté, à améliorer l'ef cacité de ses propres nancements.

La loi de solidarité et de renouvellement urbain organise en n, vous le savez, le regroupement des aides à l'amélioration des logements privés en con ant la gestion de la PAH à l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat. Nous en attendons, bien sûr, une plus grande cohérence, une plus grande ef cacité, notamment dans les copropriétés qui regroupent des propriétaires et des locataires et pour lesquelles le nancement des travaux dans les parties communes était peu satisfaisant. Le budget 2001 reconduit les crédits pour la grande ANAH à 3 milliards de francs. Ces 3 milliards, on peut dire que c'est le même montant que l'an dernier. Je rappelle qu'est intervenue une baisse de la TVA sur les travaux, c'est-à-dire que les crédits de subvention restent les mêmes, mais pour des travaux dont les coûts ont été abaissés ou dont le volume subventionnable sera élargi puisque nous avons les mêmes moyens.

Autre texte législatif entrant en vigueur, et certains d'entre vous l'ont particulièrement suivi, c'est la loi du 5 juillet 2000 sur l'accueil des gens du voyage. Là, nous avons une dotation portée à 70 millions, mais elle est doublée d'un montant équivalent inscrit au budget du ministère de l'emploi et de la solidarité. Un certain nombre de projets ont déjà démarré puisque, vous le savez, cette aide pouvait connaître une application anticipée. En tout cas, face à cette somme, c'est bien une aide à 70 % du coût des travaux tels que prévus par la loi qui sera retenue. En outre, en 2001 se mettra en place l'aide au fonctionnement des aires existantes à raison de 10 000 francs par place et par an. A cet effet, une enveloppe de 30 millions de francs gure dans notre budget.

Les orientations prioritaires que je viens de développer ne se sont pas faites au détriment des autres lignes budgétaires. Dans le parc privé, les aides à l'accession sociale, à la propriété notamment, ne sont pas sacri ées, puisque le prêt à taux zéro voit sa dotation en légère progression à 5 milliards 900 millions. Cette dotation tient compte de la hausse des taux d'intérêt, mais elle recouvre, c'est vrai, une légère réduction des durées de remboursement de certains prêts, avec, en revanche, une amélioration de la quotité du prêt à taux zéro dans les zones urbaines sensibles a n d'y favoriser les programmes permettant une diversi cation de ces secteurs où la mixité n'est pas assurée. En tout cas, cette dotation en 2001 comme en 2000, et les années précédentes, assurera le nancement de plus de 110 000 prêts.

Un mot pour souligner la hausse de 4,5 % des subventions de l'Etat aux ADIL, associations départementales pour l'information sur le logement dont, je le sais, vous appréciez sur le terrain le service de conseil qu'elles rendent aux particuliers. Cette augmentation accompagne le mouvement de généralisation des ADIL dans un nombre croissant de départements puisqu'on approche aujourd'hui des deux tiers des départements. Nous espérons bien que ce mouvement se poursuivra, bien évidemment en liaison avec les collectivités territoriales, notamment des conseils généraux, voire à leur initiative.

Concernant l'urbanisme en n, la politique des grandes opérations d'aménagement se traduit par une hausse de 35 % de l'article budgétaire concerné qui permet l'intervention sur les grands sites stratégiques que sont Euroméditerranée, à Marseille ou la plaine de France et le secteur Nanterre Arche-Seine en région parisienne. Cette dotation permet également l'engagement des actions foncières contractualisées dans le cadre du XIIe plan entre l'Etat et un certain nombre de régions de province, comme vous le savez.

Pour la deuxième année consécutive, nous devrions atteindre les 300 000 logements mis en chantier dans l'année. Objectif un peu mythique, mais qui paraissait loin du compte naguère. Nous aurons 600 000 logements réhabilités avec une aide publique, si on ajoute aux PALULOS les opérations aidées par une scalité améliorée, également l'APH et l'ANAH, dont 300 000 logements mis en chantier. Il y aura aussi 600 000 transactions dans l'ancien, donc des ventes de logements qui changent ainsi de propriétaire. Ce sont des signes, signes que le secteur de l'immobilier et avec lui celui du bâtiment sont redevenus un moteur de la croissance. Bien sûr, et je sais que c'est votre état d'esprit, nous devons tous rester vigilants et faire en sorte que la reprise soit durable. Les pouvoirs publics, en restant à l'écoute et en procédant aux ajustements nécessaires, les professionnels euxmêmes en tenant leur rôle dans le maintien de cette situation, en veillant à ne pas entretenir ni favoriser une dérive des prix qui déstabiliserait ou désolvabiliserait la demande. Nous pouvons nous réjouir de cette croissance retrouvée qui fait que le bâtiment aura créé, en deux ans, plus de 60 000 emplois directs. On nous dit que les emplois indirects, notamment des industries en amont fournisseurs du bâtiment, créeraient autant d'emplois que les emplois directement créés. Ce secteur dépasserait les 100 000 emplois créés en deux ans. Alors que, vous le savez, il en avait perdu sans discontinuer pendant plusieurs années consécutives auparavant.

Au total, le budget 2001 con rme bien la priorité accordée par le Gouvernement depuis trois ans au secteur de l'habitat et du logement, dont vous savez qu'il constitue le premier poste de dépenses dans le budget des ménages et pour lequel les besoins à satisfaire restent tout à fait considérables. Globalement, nous parlons aujourd'hui de près de 50 milliards de francs de dépenses budgétaires. Nous parlons aussi de contributions sociales d'un montant équivalent, et nous parlons d'avantages scaux de l'ordre de 60 milliards de francs. Telles sont les trois grandes masses de l'effort public en faveur du logement et de l'urbanisme. Il nous faut souhaiter bien sûr que ce soit à la hauteur des enjeux de ce secteur important.

Je vous remercie de votre attention et je suis maintenant tout à fait à votre écoute pour échanger.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Merci, monsieur le secrétaire d'Etat. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial de la commission des nances, de l'économie générale et du plan.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial de la commission des nances, de l'économie générale et du plan.

Monsieur le secrétaire d'Etat, nous savons votre implication personnelle dans la politique du logement, y compris en dehors de vos responsabilités ministérielles. Nous savons combien sont grandes les batailles que vous avez menées et gagnées, pour faire partager, lorsque vous étiez président du haut conseil, votre analyse sur les plus démunis et les moyens à mettre en action pour répondre à une politique de plus grande solidarité.

Nous savons aussi que, pour le budget 2001, vous avez été amené à peser de tout votre poids, a n que les chiffres des lignes budgétaires soient à la hauteur non seulement des ambitions d'un pays comme le nôtre, mais répondent au plus près aux besoins réels en logements pour l'ensemble de notre population.

C'est pourquoi monsieur le secrétaire d'Etat, avant d'étudier les inscriptions budgétaires pour 2001, je souhaite exprimer quelques observations et questions. Puis, à partir de trois exemples pris tout à fait au hasard, mais rencontrés sur le terrain, donner un éclairage particulier à ce budget 2001. En effet, le budget de votre département doit être mis en oeuvre et trouver son application sur le terrain avec une utilisation maximale de ses crédits.

Tout d'abord, peut-on dire que le patrimoine actuel du logement locatif et social joue pleinement son rôle pour l'aide à la mobilité résidentielle des personnes et des ménages, mais aussi pour l'accueil des nouveaux locataires ? Pour la prise en compte de la mobilité et de la uidité des familles ? Celles-ci sont de plus en plus souvent recomposées, avec d'ailleurs des recompositions successives. Le parc locatif social, par sa localisation, par sa qualité, répond-il aux besoins et aux attentes du plus grand nombre ? En dé nitive, y a-t-il adéquation entre la demande et le niveau de la construction ? Les pouvoirs publics font-ils face au ux constitué par la croissance, même ralentie, du nombre des ménages ? Le déphasage trop souvent constaté sur le terrain peut-il être corrigé, s'il doit l'être, par le niveau des crédi ts arrêtés depuis quelques années ? En n l'attribution des logements, la mixité sociale, les politiques de peuplement sont-elles des notions théoriques, voire dépassées ou correspondent-elles à des volontés politiques qui trouvent une réelle application sur le terrain ?


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J'en viens à mes trois exemples. Le premier, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est simplement, dimanche soir, sur France Info une page consacrée à un département, la Charente-Maritime, une information qui précisait que le nombre de logements construit en 2000 était de l'ordre de cinquante alors que les besoins estimés, recensés seraient de l'ordre de 300. Selon l'information, M. le préfet du département allait mobiliser les organismes du logement social pour les inviter à produire plus.

Deuxième exemple, pris aussi tout à fait au hasard. L'OPAC de Metz gère un parc très important, il réhabilite de façon volont ariste et avec des opérations de grande qualité. Dans un des quartiers quali és les plus dif ciles, cet organisme monte un dossier de construction-démolition qui obtient l'aval du préfet de région, des préfets concernés et de l'ensemble des élus locaux.

Ce dossier, qui engage des fonds très importants, bien évidemment, monte à Paris, pour obtenir le feu vert de la commission ad hoc.

Or, devant cette commission, le dossier est rejeté. En effet, un architecte, dont le nom m'échappe, a émis une observation quant à la nécessité de fournir un schéma plus explicite d u quartier après transformation. Qu'importe l'attente des populations, le travail de concertation sur le terrain, le plan de nancement qui, évidemment, sera à revoir compte tenu du retard que va prendre ce dossier et de l'augmentation manifeste de l'opération ! L'organisation spatiale future de quelques ares de terrain permet à une personne à Paris de bloquer tout un processus qui a fait appel, certes, à de nombreuses compétences, mais certainement par trop provinciales. Troisième exemple, à Saint-Dié, une SA d'HLM monte une opération de sept logements pour un prix de revient estimé à 4,7 millions de francs et un plan de nancement qui comprend une subvention d'Etat à hauteur de 171 000 francs ; un prêt de la caisse des dépôts et consignations sur trente-cinq ans à 4,20 % pour 2 170 000 francs ; en n un prêt de la chambre de commerce et d'industrie pour une durée de vingt-cinq ans sur les fonds du 1 %. Ces fonds sont encore, et heureusement, gérés ici ou là par des chambres de commerce, soit 900 000 francs. J'insiste sur cet aspect, il y a un apport sur les fonds propres de l'organisme précité de l'ordre de 30 %. Le prix de l'acquisition des terrains, dans le cadre de la loi Sapin, auprès de la collectivité locale, atteint un prix tout à fait rais onnable. Néanmoins, l'exploitation indique un dé cit prévisionnel annuel de plusieurs dizaines de milliers de francs. Une des causes serait éventuellement le coût de la construction qui a augmenté de plus de 12 % alors que, selon les indicateurs nationaux, le taux devrait être de l'ordre de 6 %. Des efforts ont été faits pour réduire une première estimation et on est parvenu à réaliser 400 000 francs d'économies. Peut-être une conclusion par trop hâtive pourrait-elle conduire à dire que le nancement du PLUS serait inadapté pour des opérations de moins de dix logements.

Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, que si je prends cet exemple, entre autres, c'est pour faire comprendre que, dans le milieu rural qui s'est mobilisé énormément ces dernières années pour créer un parc locatif social, manifestement, il y a des produits pas toujours très adaptés. Cet exemple est corroboré dans le même département par un OPAC sur des opérations identiques en milieu rural de moins de dix logements.

Pour l'ensemble de ces opérations, les organismes concernés se sont impliqués en apportant des fonds propres entre 17 % et 30 %. Malgré tout, le dé cit d'exploitation, comme je l'ai indiqué, est encore pénalisant. Ces exemples n'ont qu'une valeur indicative et on peut tout de même en tirer quelques enseignements. Pour mener des opérations nancièrement équilibrées, l'aide à la pierre est redevenue indispensable. Les besoins quantitatifs existent, encore faut-il que les loyers de sortie soient compatibles avec la capacité des ménages à y faire face.

Troisièmement, il faut déconcentrer les pouvoirs de décision et de contrôle au plus près du terrain. Nous ne sommes plus au temps de la grande pénurie. Il faut donc analyser les besoins et décider les opérations rapidement et ef cacement. Entre la dé nition d'un objectif et l'entrée des locataires dans le logement, il peut s'écouler de trois à cinq ans. C'est un délai qui, aujourd'hui, devient par trop important. Il faut prendre les moyens administratifs pour rendre plus opérantes encore les lignes budgétaires que vous nous présentez.

Quatrièmement, les collectivités locales départementales ou régionales sont de plus en plus impliquées dans la politique de l'habitat, y compris avec des interventions nancières. C'est pourquoi votre décision d'autoriser les préfets à décider la ré alisation des opérations de construction-démolition pour des projets de moins de cent logements va dans le bon sens.

Comme d'ailleurs va dans le bon sens le projet de loi de nances 2001, sans modi cation de structure, ce qui lui donne une lisibilité réclamée depuis longtemps. Vous avez vous-même parlé, en répondant à une question, de « politique pérenne ».

Avec une légère augmentation des crédits de l'ordre de 1,61 %, à hauteur de 49 milliards 677 millions de francs, pour les moyens d'engagement, c'est une continuité qui fait mieux apparaître vos priorités gouvernementales : réforme des aides à la personne, moyens nouveaux pour appliquer la future loi SRU, que nous allons voter dans quelques jours a n de renforcer la lutte contre les exclusions. La structure budgétaire inchangée nous permet de constater que malgré toutes les mesures incitatives au béné ce des bailleurs sociaux, et vous en avez rappelé un certain nombre, les mises en chantier des logements locatifs stagnent à un faible niveau au regard des besoins, particulièrement d'ailleurs en Ile-de-France. Nous sommes passés de 72 000 mises en chantier en 1993 à 54 000 en 1996. Puis, c'est la descente : 45 600 en 1997, 44 000 en 1998, 42 500 mises en chantier en 1999.

Les chiffres connus pour 2000, au moins en ce qui concerne le p remier semestre, étaient relativement catastrophiques. Au second semestre, il y aurait un léger mieux. Atteindrons-nous le même niveau qu'en 1999 ? Nous le saurons dans quelques semaines.

Nous nous reporterons au rapport pour y lire la liste des mesures et leurs conséquences nancières pour les bailleurs. Elle rappelle en partie celles que vous avez indiquées il y a quelques minutes, monsieur le secrétaire d'Etat. Je retiendrai parmi elles u ne décision très positive et ef cace immédiatement qui concerne tout simplement la durée d'amortissement portée à cinquante ans pour la partie foncière dans les constructions neuves comme pour les opérations d'acquisition amélioration. Quant au relèvement du taux du livret A, le Gouvernement a décidé de compenser son impact pour les encours des organismes HLM.

Ainsi, les loyers, tout comme pour l'année 2000, ne devraient pas augmenter en 2001. Néanmoins, qu'en sera-t-il pour les charges locatives ? Dans le cadre de la procédure de la commission élargie, j'ai déposé une question écrite, je n'insiste donc pas, sauf pour indiquer que l'eau froide, par exemple, a « augmenté » - des guillemets car le sujet est un peu plus vaste que l'eau qui arrive simplement au robinet - en moyenne de 9 % par an au cours de ces dernières années. Les indicateurs nous montrent que cette augmentation se poursuivrait dans les années à venir à hauteur de 2 % par an. Quant à l'énergie, le fuel lourd en 1999-2000 a augmenté de 30 %. Pour 2000-2001, les estimations sont de l'ordre de 50 %. Pour le gaz, l'indicateur arrêté actuellement serait de l'ordre de 30 %. Je ne parle pas de la collecte sélective qu'il faudrait ampli er, ni de l'individualisation du comptage de l'eau réclamée par tout un chacun.

Monsieur le secrétaire d'Etat, votre particulière attention est sollicitée pour qu'aboutissent en n les négociations entre bailleurs et locataires, car il serait pour le moins fort regrettable que les efforts de la collectivité nationale, vos efforts en particulier, pour solvabiliser les locataires, soient réduits à néant par une accélération de l'augmentation des charges locatives. Sur 48,755 milliards de francs de moyens de paiement, 2,946 milliards seront consacrés au logement locatif social ; 5,9 milliards iront abonder le prêt à taux zéro ; 3 milliards de crédits sont rassemblés pour la grande ANAH et PAH ; 419 millions seront réservés aux acquisitions foncières en Ile-de-France. Que l'on me permette une remarque : lorsque l'on se tourne vers les opérateurs de terrain pour leur demander pourquoi ils ne construisent pas davantage, alors que la demande existe, pour leur dire qu'ils ont des opérations en attente, en portefeuille, la réponse est la même partout, surtout en Ile-de-France. Peut-être les collectivités s'impliquent-elles moins, encore que le conseil régional vienne de prendre un certain nombre de décisions très positives ? Chaque fois on nous répond : « pas de terrain, le foncier est trop cher ». Peut-être l'Etat, votre gouvernement, notre gouvernement, pourraient-ils montrer le bon exemple. Il me semble que des casernes ont été libérées, que des hôpitaux sont fermé s dans le cadre d'une vaste et grande restructuration-modernisation. Là, il y a un exemple à donner. Peut-être que l'opération coûte che r,


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mais il est des valeurs symboliques qui méritent que l'on s'y attache. Il me semble que dans un arrondissement pas loin d'ici, le VIIe , il y a de vastes terrains, plus de 3,5 hectares. Il serait peut-être dommageable que l'on se contente d'une centaine de logements, alors qu'une vaste opération de mixité sociale pourrait être entreprise. Vous pourriez là au moins avoir l'appui des parlementaires de la province.

La grande nouveauté pour 2001 sera l'application, dès le 1er janvier, d'une première étape de la réforme des aides personnelles au logement, pour aller vers un barème unique. Ce sont 35 milliards de francs qui sont inscrits dans ce budget a n de solvabiliser les ménages à faible revenu. C'est une volonté politique pour un traitement équitable et cohérent, allant vers l'uni cation de l'aide jusqu'à un revenu équivalent à 75 % du RMI. La deuxième étape, au 1er janvier 2002, portera le barème unique des APL pour des ressources égales au RMI. L'aide supplémentaire annuelle par ménage atteindra, comme vous nous l'avez indiqué, 1 300 francs et aucune famille ne verra son aide actuelle diminuer. L'augmentation en masse est de 3,3 milliards de francs dès 2001 dont 2 milliards de francs à la charge de l'Etat. La progression budgétaire pour la même année est donc de 655 millions de francs puisque la diminution tendancielle observée depuis le retour de la croissance et la décrue du chômage est estimée à 1 milliard 345 millions pour 2001, cette somme étant maintenue dans le budget.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous devrez attirer l'attention de vos services sur la consommation des crédits correspondant à vos priorités. Certes, le temps pour la mise en place des actions, par exemple, de lutte contre le saturnisme, peut expliquer la faiblesse de la consommation

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le rapporteur, vous avez dépassé votre temps, veuillez conclure.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Pardonnez-moi, je vais accélérer. La lutte contre le saturnisme n'a pas vu ses cré dits consommés en 1999 et surtout en l'an 2000. Il faudra donc aller plus vite.

Une remarque brève sur le FSL. C'est votre oeuvre, monsieur le secrétaire d'Etat, mais vous savez qu'aujourd'hui les critiques sont fortes sur la lourdeur administrative, sur la complexité des démarches, sur l'espèce de gel de ce qui a été à une époq ue, non seulement une grande idée, mais aussi une idée d'une grande ef cacité. Les informations ne nous sont pas fournies en temps et en lieu. Je pourrais dire aujourd'hui que la liste est longue des manquements à l'esprit de la loi de 1990. En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, la commission des nances a émis un vote positif sur les crédits de votre département. J'invite tous mes collègues à en faire autant.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Merci. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges.

M. Alain Cacheux, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, notre débat se déroule dans un contexte de marché immobilier très dynamique et donc, d'une activité très soutenue dans le secteur du bâtiment. Vous avez, d'ailleurs, rappelé monsieur le secrétaire d'Etat, la forte progression de l'activité ces dernières années en particulier en 1999. Ce sera le cas aussi en 2000. Il y a eu une progression importante des créations d'emplois, plus de 60 000 durant la même période, alors que le secteur avait supprimé des dizaines de milliers d'emplois dans la décennie précédente. Ce sont plus de 300 000 logements qui seront mis en chantier en 1999 et, très probablement, autant en 2000.

La très bonne santé du secteur immobilier et du secteur du bâtiment doit beaucoup à l'action gouvernementale. D'abord à la croissance, certes, au retour de la con ance, à la forte diminution du chômage et à la baisse des taux d'intérêt. Mais aussi, à de très nombreuses décisions gouvernementales positives qui concernent très directement le secteur du logement. Je cite, sans vouloir être exhaustif, la consolidation de l'accession sociale par la rebudgétisation du prêt à taux zéro, la pérennisation de l'investissement locatif privé, d'ailleurs étendu au parc ancien, la diminution de la TVA sur les travaux d'entretien dans les logements, la baisse sensible des droits de mutation et de nombreuses mesures ponctuelles en faveur du logement social.

De très nombreuses mesures positives ont également été prises en direction des locataires et, là aussi, je ne cite que quelques exemples, qu'il s'agisse de la revalorisation systématique des aides à la personne, depuis 1997, de la suppression du droit au bail, de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation ou encore, du volet logement de la loi de prévention et de lutte contre les exclusions. Je crois que la bonne santé du secteur doit beaucoup à l'action gouvernementale. Et c'est vrai que le projet de loi contient d'autres mesures positives qui consolident l'action menée maintenant depuis près de quatre ans. C'est en particulier le cas de la réforme des aides à la personne, à laquelle 6 milliar ds et demi de francs seront consacrés dans les deux ans qui viennent. Cela se traduit, vous l'avez dit, mais je crois qu'il faut y insister, par l'harmonisation des aides, quelle que soit la source des revenus. On supprime ainsi une pénalisation un peu anormale des revenus salariaux. Je ne parle pas de l'alignement du barème des allocations logement sur celui de l'APL.

Au total, personne n'y perd et pour plus de 4 800 000 personnes, le gain sera égal ou supérieur à 1 300 francs par an. Il faut d'ailleurs souhaiter, à ce sujet, que l'harmonisation entre les aides au logement ne se traduise pas, pour un certain nombre de propriétaires, par des effets d'aubaine, et donc par des augmentations de loyer puisque, dans l'immense majorité du parc privé, ils ne sont soumis à aucun plafond. Il faut que ce soit en réalité les locataires qui béné cient de l'augmentation de l'aide.

Le projet de budget contient d'autres mesures que j'évoque très brièvement pour essayer, selon le voeu du président, de m'e n tenir à dix minutes. Je passe sur le maintien des crédits, voire leur légère progression, pour la réhabilitation du parc privé d ans la nouvelle ANAH. Je passe sur l'accession sociale à la propriété - légère progression -, sur la réhabilitation du parc locatif s ocial ou encore sur les crédits consacrés à la lutte pour l'exclusion, crédits stabilisés, mais qui avaient fortement augmenté ces dernières années.

Cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, le secteur de la construction et du bâtiment - vous le savez mieux que d'autres est un domaine d'activité à cycle lent, où les décisions prises aujourd'hui auront des effets dans dix-huit mois ou deux ans.

Cela veut dire qu'au-delà de la bonne santé actuelle, il nous faut regarder certaines réalités pour prendre des décisions qui produiront leur effet à la n de 2001 ou durant l'année 2002. De ce point de vue, ce secteur, qui a béné cié d'un climat très favorable ces dernières années, change un peu, en particulier avec la remontée des taux d'intérêt et la hausse des prix et du coût de la construction, d'ailleurs liée, pour certains matériaux, à la hausse du pétrole.

Je voudrais mettre l'accent, pour ce qui me concerne, sur trois préoccupations.

D'abord, sur le démarrage particulièrement modeste de ce que l'on appelle désormais « l'amortissement Besson ». Certes, les avantages scaux sans contrepartie sociale du dispositif Périssol, et par ailleurs la campagne de communication qui avait été menée par les promoteurs durant l'été 99, avaient quelque peu asséchés le marché. Mais cela fait désormais plus d'un an et les ventes « en Besson », comme ils disent, ne sont pas vraiment reparties. Le moment ne serait-il pas venu d'ouvrir le dispositif aux ascendants descendants ? C'est d'ailleurs une interrogation qui avait fait l'objet d'une question que je vous avais adressée. Je dois vous avouer que la réponse ne m'a pas paru complètement satisfaisante. En effet, en quoi l'ouverture aux ascendants descendants constitue-t-elle un avantage à la constitution d'un patrimoine familial par rapport aux autres solutions ? Dans tous les cas, c'est la construction d'un patrimoine familial. Même s'il convient de mettre un certain nombre de garde-fous, je pense qu'il faudrait examiner attentivement cette disposition. C'est pourquoi je souhaite un éclaircissement sur ce point. Je ne souhaite évidemment pas que l'on entende dire un jour que le dispositif mis en place manque d'ef cacité.

Ma deuxième préoccupation, vous l'avez évoquée, monsieur le secrétaire d'Etat, je veux y insister, c'est le ralentissement des prêts à taux zéro nancés, ralentissement certes léger mais signi catif, avec en particulier la réduction de la durée de remboursement qui va peser sur la solvabilité d'un certain nombre de


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ménages. Même s'il y a eu ouverture réciproque d'un prêt plus important, notamment dans les zones urbaines sensibles, il faut bien voir que l'activité de l'accession dans ces zones est particulièrement faible et que donc les deux mesures ne se compenseront pas.

En n, ma troisième préoccupation va dans le droit l de ce qu'a évoqué Jean-Louis Dumont il y a quelques minutes. Il s'agit, bien entendu, du problème du nancement de la construction du logement locatif social. Ralentissement du rythme depuis 94 : notre collègue rappelait les chiffres il y a quelques instants. Il faut bien reconnaître que la mise en place du PLUS ne semble pas avoir inversé la tendance. C'est d'autant plus préoccupant que les besoins de nos concitoyens restent importants, notamment là où des tensions fortes existent sur le marché privé. Bien entendu, chacun a en tête la région parisienne, la région Ile-de-France et Paris même, mais également les régions où les ressources des ménages sont faibles. Or cette construction est également une nécessité pour le renouvellement du parc locatif social et le renouvellement urbain.

Chacun sait bien que dans un certain nombre de quartiers que l'on veut requali er, les premières opérations qui transforment la réalité, donc l'image de ces quartiers, sont souvent des opérations réalisées par les bailleurs sociaux qui, ensuite, créent une dynamique, que le privé vient relayer, voire ampli er. J'ajoute que le locatif social constitue un segment tout à fait incontournable d'un parcours résidentiel cohérent. En n, dernier argument et non le moindre, la loi de solidarité et de renouvellement urbain, que nous allons voter dans moins de quinze jours maintenant, de manière dé nitive, crée pour les communes un certain nombre d'obligations.

Les raisons de cette modestie ? Je veux reprendre et appuyer ce que disait Jean-Louis Dumont. Certes, il peut exister des collectivités locales qui ne manifestent aucun enthousiasme à permettre - c'est un euphémisme - la réalisation d'un certain nombre de logements locatifs sociaux. Mais il existe aussi des collectivités locales qui aimeraient beaucoup voir un certain nombre de programmes réalisés et qui n'arrivent pas à avoir la réalisation de ces programmes. Si donc cela doit jouer sur l'équilibre social des quartiers et des villes, cela n'explique pas, me semble-t-il, la faiblesse de la construction actuelle. Je pense d'ailleurs que, pour ce qui est de cet argument, la loi de solidarité et de renouvellement urbain devrait apporter les remèdes. C'est vrai qu'il existe aussi parfois un manque d'enthousiasme, vous l'avez évoqué au congrès de l'Union de Bordeaux, de la part d'un certain nombre d'organismes, parfois submergés, il faut bien le dire, par les problèmes de gestion et les problèmes posés par un certain nombre de populations dif ciles qu'on leur a demandé de loger. C'est bien naturel puisque c'est leur mission, mais là aussi, je crois que cela n'explique pas l'essentiel de la baisse.

Je crois que, et Jean-Louis Dumont l'a très bien démontré par des exemples très parlants, c'est surtout l'équilibre des opératio ns qui n'est pas assuré. Là encore, des mesures positives pour l'équilibre des opérations ont été prises, qu'il s'agisse du re tour de l'aide à la pierre, qu'il s'agisse de l'allongement de l'amortissement de trente-cinq à cinquante ans. Constatons, cependant, que le loyer d'équilibre, le loyer plafond, a baissé de 10 % et que donc, l'équilibre des opérations n'a pas été transformé radicalement même s'il s'est sensiblement amélioré. Les opérations restent déséquilibrées. Elles le sont d'autant plus qu'il y a eu ce relèvement du livret A, neutralisé pour les premières années ma is qui pèse sur l'équilibre des opérations. Par ailleurs, l'augmentation d'un certain nombre de prix de la construction conduit à un renchérissement des prix et très naturellement à u n certain nombre d'appels d'offre infructueux. Si l'on veut remédier à cette situation, il faut revoir le nancement de la construction du logement locatif social.

J'évoquerai à cet égard deux pistes. La première, c'est l'augmentation de l'aide à la pierre de la part de l'Etat et donc la possibilité de moduler l'aide de l'Etat en fonction du coût des opérations. J'ajoute d'ailleurs, que la piste que vous avez tracée, à ligne budgétaire constante, serait la première à évoquer, mais il ne faut pas non plus s'interdire dans les années qui viennent une augmentation raisonnable de cette ligne. Vous l'avez dit, 2,9 milliards pour l'aide à la pierre, pour le logement social, plus de 30 milliards d'exonérations scales accordées à d'autres secteurs de l'activité du logement. La seconde piste, c'est bien entendu la contribution du 1 % qui n'atteint pas les engagements pris par les unions d'économie sociale. Essentiellement, me semble-t-il, parce que les conditions faites aux organismes ne sont pas suf samment attractives pour équilibrer les opérations. Par rapport aux 4,5 milliards d'engagements pris par l'union d'économie sociale, vous faites des conditions de prêt qui sont certes un peu meilleures, mais pas très signi cativement différentes de celles de la Caisse des Dépôts. A ce moment-là, les organismes y recourent assez faiblement. Il faudrait avoir des prêts à taux très faible, à taux très très faible, avoir même des différés d'amortissement relativement importants.

J'appelle à une négociation avec les partenaires du 1 % logement, de façon que les crédits qu'ils sont prêts à consacrer au logement social, soient effectivement consommés, de manière à rééquilibrer des opérations. Tous les chiffres montrent que, év idemment, cela varie d'une opération à l'autre, mais, en moyenne, il manque pour assurer un véritable équilibre nancier d es opérations une somme comprise entre 60 000 et 100 000 francs.

Voilà ce que je souhaitais dire à propos de ce budget et de la réelle préoccupation qui est la nôtre à propos de la relance nécessaire de la construction du logement locatif social.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Merci, monsieur le rapporteur. Nous allons entendre les porte-parole des groupes.

Pour le groupe socialiste, la parole est à M. Yves Dauge.

M. Yves Dauge.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, autant aller directement à l'observation centrale que je voudrais formuler. C'est vrai, beaucoup de points ont été marqués depuis deux ans grâce à vous, mais les parlementaires vous ont soutenu. Et ensuite, que voit-on ? Des dispositions que nous avions prises, des mécanismes que nous avions décidé de mettre en place sont, d'une certaine manière mis en cause derrière vous, derrière nous, par le budget a n de rendre inconsommables un certain nombre de produits auxquels nous avons cru.

On vient d'évoquer le prêt à taux zéro. Je me demande dans quelles conditions ont été prises les mesures qui ont modi é les conditions de consommation du prêt à taux zéro. Qui prend ces décisions ? Pourquoi les prend-on ? Dieu sait si vous vous êtes battus avec nous pour régler un problème de nancement du prêt à taux zéro, en 1998, parce qu'on allait alors dans le mur.

Vous avez réussi à budgétiser, c'est une grande victoire. Et on passe par derrière pour remettre en cause ce que nous avons obtenu. C'est vraiment une question grave pour l'avenir de ce mécanisme. On voit dans les chiffres une baisse assez sensible des constructions de l'accession à la propriété. On était à environ 130 000 et l'on va vers les 100 000 si on continue. Au-delà, les collègues l'ont dit, on joue sur des effets à retardement. Que se passe-t-il en 2001-2002 pour l'accession à la propriété dont vous avez fait un axe fort de votre politique ? La loi SRU d'ailleurs a reconnu le rôle social de l'accession. Il faut absolument une cohérence. Il faut, pour l'accession à la propriété, prendre les mesures qui permettent de tenir dans la durée. Sinon nous nous réservons des lendemains très dif ciles.

Pour le PLUS, effectivement, que voyons-nous ? Un budget qui n'attend qu'une chose : récupérer l'argent non consommé.

Pour en faire quoi ? Je ne sais pas. Est-on sûr qu'on va récupérer les crédits pour la politique du logement s'il y a des sousconsommations ? Et il y en a. Où va aller cet argent ? On me parle de sommes très importantes non consommées. Peut-on avoir le chiffre ? Et peut-on utiliser cette marge de manoeuvre pour rendre plus performant le produit PLUS qui, manifestement aujourd'hui, ne l'est plus. Personnellement, je pensais que l'on avait du mal à régler le problème par le budget, sauf s'il y a des sous-consommations pour améliorer les subventions. Il est vrai que la meilleure solution serait, comme l'a dit notre collègue M. Cacheux, l'application des conventions passées avec le 1 %. Il était bien question, quand nous avons renégocié les prê ts à taux zéro, dans le cadre de la convention avec les organismes du 1 %, qu'ils apporteraient environ -je n'ai pas le chiffre en tête, c'est un ordre d'idées- 4,5 milliards, à des actions cibl ées y compris pour le patrimoine privé. J'étais dernièrement à Tours, au congrès de l'UNPI, qui était très mécontent des organismes du 1 %, qui n'ont pas apporté la contribution qu'ils auraient dû


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apporter à l'équilibre des opérations privées ; a fortiori, pour le PLUS. Parce que si on nous apporte du prêt à 1 % ou à 2 % en complément du PLUS, ce que vous avez dit tous les deux, il faut l'apporter pour des montants signi catifs. Il nous manque 100 000 francs ou 150 000 francs chaque fois seulement pour équilibrer chacune des opérations. On n'est pas à 10 000 ou 15 000 francs près. C'est plutôt le zéro de plus qu'il faut. Là, i l faut absolument mobiliser cet argent tout de suite. Je préférerais que l'on mette l'argent budgétaire sur la ligne prêt à taux zér o, puisque telle était la stratégie, et que l'on garde les moyens du PLUS avec l'application stricte des conventions passées. Effectivement, grâce au formidable mouvement politique que vous enclenchez quand vous obtenez le soutien de la majorité, on marque des points. La conjoncture nous porte aussi. Ensuite, grignotage systématique derrière nous, remise en cause et, plus encore, évidemment, retournement de certains éléments de conjoncture. Alors à ce train-là, je dis que nous allons, dans deux ans, vers une situation critique. Il faut vraiment se dire ces choses-là franchement. Il y a tous les moyens de les régler, surtout que tout le monde ici reconnaît qu'évidemment vous avez réalisé un travail exceptionnel.

Lorsque j'étais à l'UNPI, j'ai entendu parler longuement de cette question, du dispositif Périssol-Besson, notamment Besson.

On y a demandé ce qu'Alain Cacheux a demandé, mais aussi l'extension du dispositif aux locataires en place. Parce que, justement, vous l'avez étendu à l'ancien. La disposition serait encore plus appréciée par eux que le dispositif ascendant-descendant.

Encore que le dispositif ascendant-descendant, si on le cadre, comme a dit Alain Cacheux, est légitime, mais un dispositif pour les locataires en place, là vraiment, ce serait formidable. Je crois savoir que vous n'y êtes pas du tout opposé, bien au contraire, mais comment y arriver ? L'impact budgétaire de cette affaire, il faut le calculer. On m'a dit qu'il n'était pas considérable, mais cela donnerait au secteur du locatif privé un dynamisme attendu et absolument nécessaire.

Je crois beaucoup qu'il va falloir ouvrir le chantier, délicat, de la décentralisation régionalisation des politiques de l'habitat, parce que vous n'empêcherez pas, même si l'Etat est parfait, que les régions et les communes soient des partenaires absolument incontournables dans la mise en place des programmations. Si nous voulons travailler avec le 1 %, il faudra bien travailler aussi avec les régions, au niveau régional. De toute façon, il ne serait pas choquant que les régions interviennent massivement dans le coût du logement ; elles le font certaines fois, peut-être pas sur le bâtiment lui-même, mais sur l'urbain, le foncier, l'accompagnement. Si nous faisons du logement dans les quartiers et les centres-villes, et j'en fais beaucoup, le coût du logement devra bientôt supporter tout le projet urbain. Il n'y a personne pour nancer le foncier ou les éléments d'accompagnement du logement. Nous voulons bien nancer parfaitement le logement, mais il ne faudrait tout de même pas qu'en plus il faille nancer le projet urbain, l'aménagement des voiries et des réseaux divers ; sinon il n'y a plus personne. La politique de la ville peut nous apporter beaucoup, mais en milieu rural il n'y a pas grand monde.

Dans une ville comme la mienne, où il y a un secteur sauvegardé superbe, je fais du HLM à 10 000 francs le mètre carré. Je ne peux pas faire moins, malheureusement. Du HLM, j'en fais beaucoup cependant. Il me faut cinq ans pour monter une opération et croyez-le bien, pendant ces cinq ans-là, on se donne beaucoup de mal. Vous le savez bien, monsieur Besson, parce que vous faites pareil, vous tous, vous faites pareil. On se donne beaucoup de mal, on n'a pas le 1 %, on a des fonds propres, heureusement, des organismes qui mettent ce qu'ils peuvent. On va pleurer à la région qui fait quand même quelque chose. On va au département qui préférerait que l'Etat fasse son travail, car il ne veut pas trop s'engager là-dedans. Tout le monde se regarde, on tourne en rond. En réalité, il y a une grande part, dans ces 10 000 francs le mètre carré, qui relève du projet urbain, qui ne devrait pas être nancée par le budget spéci que du logement. Voilà pourquoi je vous dis que cette question-là, on la réglerait mieux si on allait franchement voir les régions pour discuter avec elle de la régionalisation de la politique de l'habitat.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Pour le groupe du RPR, la parole est à M. Gilbert Meyer

M. Gilbert Meyer.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je pense pouvoir dire que le logement social est en crise. Le parc vieillit. Par ailleurs, le niveau des construction de logements neufs se situe bien en deçà du minimum acceptable. Vous venez de le rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, je suis également prêt à cosigner le cri d'a larme des trois orateurs précédents. Force m'est pourtant d'admettre que vous avez mis en place, depuis trois ans, un certain nombre de mesures positives.

Mais pourquoi alors la construction ne redémarre-t-elle pas ? Les raisons sont multiples. Vous avez cru devoir dénoncer un blocage. Vous visiez les sociétés d'HLM, également les collectivités locales. Aux premières, vous reprochez de ne pas être suf samment dynamiques, aux secondes, vous reprochez un manque de volonté politique. C'est, pardonnez ma franchise, un peu trop facile, et surtout, injusti é. Je parle en connaissance de cause.

Dans ma ville de Colmar, le logement social représente 34 % de la capacité de l'habitat. A titre de comparaison, ce taux est, à Strasbourg, seulement de 28 % et à Mulhouse, de 24 %. Pourtant, un cinquième de ma ville est dans un secteur protégé. Je suis très à l'aise pour soutenir une discussion sur le logement social.

La problématique du logement social se fonde aujourd'hui sur les conditions du montage des opérations, mais également sur la gestion du patrimoine. Cette problématique n'est pas prise en considération dans les décisions gouvernementales. Ainsi, pour l'amortissement du coût des nouvelles constructions, malgré l'allongement de trente-deux à trente-cinq ans, la durée trop courte, l'amortissement technique, souvent poussé au maximum, en l'occurrence jusqu'à cinquante ans, génère un amortissement dérogatoire très coûteux. Ces effets combinés chargent lourdement les conditions d'exploitation des bailleurs.

Au nombre des autres incohérences qui émaillent la politique du logement public, je veux relever le gel des loyers. Il s'agit d'une mesure non prévue dans le montage des opérations.

Peut-il y avoir gel des loyers, alors que l'Etat continue d'intégrer une augmentation annuelle à hauteur de 1,6 % dans ses calculs de véri cation des équilibres nanciers ? C'est totalement illogique ! Puisque 1,6 % représente le coût de l'in ation, deux fois 1,6 % égale 3,2 %. Vous ne pouvez plus aujourd'hui produire un montage d'équilibre nancier dans ces conditions. Le résultat économique est immédiat. Les opérations montées et réalisé es avec des projections d'augmentation de loyer deviennent structurellement dé citaires. Voilà pourquoi, tout à l'heure, je plaidais pour plus de cohérence dans les décisions prises.

Ensuite, la hausse des taux d'intérêt déséquilibre le montage économique des opérations. L'équilibre de celles déjà achevé es se trouve rompu. Celles qui sont en projet ne peuvent plus être réalisées. A ce moment-là, il faut appeler au secours les collecti vités locales. Pourtant, celles-ci sont déjà fortement impliqué es dans la plupart des réalisations à travers la mise à disposition d es terrains. Terrains qui se font de plus en plus rares et de plus en plus chers. Je viens de vous rappeler l'exemple de Colmar.

Une réelle compensation de l'augmentation du taux de rémunération du livret A sur l'encours de la dette des organismes d'HLM est donc indispensable. Vous avez pris un engagement dans ce sens. Néanmoins, l'effort prévu est notoirement insuf sant. L'in ation également freine la construction par le coût des travaux tout d'abord, et il convient de noter que l'augmentation réelle des prix est beaucoup plus importante que l'indice of ciel.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous ai entendu tout à l'heure, mais après la ré exion installée, il faudra rapidement passer aux actes.

Par ailleurs, l'in ation et les mesures de gel des salaires consécutives à la mise en oeuvre des trente-cinq heures créent de réelles dif cultés pour les locataires. Ceux-ci ont de plus en plus de dif cultés à payer le loyer. L'exigence de qualité indispensable dans le logement public ne permet pas non plus de réaliser des i mmeubles à moindre coût. Les petites unités souhaitées construites à l'heure actuelle pour arriver à une meilleure cohabitation, à de meilleures conditions de vie, à un meilleur envi-


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ronnement, reviennent proportionnellement plus cher que les grands ensembles érigés il y a trois ou quatre décennies. Les loyers restent donc élevés. Dès lors, les impayés augmentent.

A toutes ces dif cultés, le projet de budget sur lequel nous devons nous prononcer n'apporte malheureusement aucune réponse déterminante. Je crains alors que la ré exion annoncée ne soit pas le diagnostic réel de toutes les dif cultés que je viens d'évoquer. Alors, où en sommes-nous aujourd'hui ? Pour l'année 2000, sur les 60 000 logements PLUS projetés, nous allons péniblement arriver à 40 000. Et encore ! Le seul chiffre véri é est celui du premier semestre. Les constructions autorisées étaient de 11 000 logements à comparer avec la moitié des 60 000 prévus.

Quant aux 10 000 PLA d'intégration escomptés, nous plafonnerons à 4 000 environ. Même l'utilisation des crédits PALULOS, pourtant toujours très discutée sur le plan régional dans la ré partition entre les différents départements, laisse un solde non utilisé. Alors, s'il y a déjà fongibilité au niveau des régions , ne peut-il pas aussi y avoir fongibilité entre les régions pour ne pas passer à côté de ce solde positif, pour répondre aux besoins de lutte de l'une ou l'autre région, de l'un ou l'autre département concerné ? La mise en oeuvre du budget du logement pour l'année 2000 est donc très mitigée. On peut même dire qu'elle se solde par un échec. Actuellement, l'enveloppe des crédits est prévue pour 70 000 logements. Ne vaudrait-il pas mieux, monsieur le secrétaire d'Etat, l'utiliser pour en construire ne serait-ce que 50 000 plutôt que faire un autre constat d'échec en n d'année ? En invoquant un exemple précis, le rapporteur, M. Dumont, vient de conclure dans le même sens. M. Cacheux a fait une proposition qui emboîte le pas à M. Dumont. Sortir le logement public de l'ornière dans laquelle il se trouve ne se fera pas sans audace.

C'est, avant tout, une question de volonté politique. S'agissant de l'accession à la propriété, nous savons que le prêt à tau x zéro a été mis sur la guillotine par certains de vos collègues du Gouvernement. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'en faites pas partie, je le sais. Mais personne ne pourrait accepter une remise en cause de cette incitation qui était la meilleure promotion du logement auprès des Français.

J'en arrive à la situation du parc locatif privé, pour lequel une profonde réforme du système scal serait nécessaire. La taxe sur le logement vacant, d'une ef cacité controversée, constitue l'exemple type de ces mesures qui pénalisent les propriétaires bailleurs. D'après les chiffres dont nous disposons tous, cette taxe doit rapporter cette année moins de 77 millions. Elle représente pour l'ANAH environ 2 % de ses moyens d'engagement, c'est dérisoire, d'autant plus que personne ne connaît le coût du recouvrement. Le bon sens commanderait que la taxe soit, dès lors, supprimé. Il en est de même pour la contribution additionnelle au revenu locatif, anciennement taxe additionnelle au droit de bail. Cet impôt s'apparente à une CSG bis.

Monsieur le secrétaire d'Etat, votre projet de budget aurait dû être plus ambitieux. La conjoncture s'y prête et les partenaires publics ou privés n'attendaient qu'un signe du gouvernement pour relancer la machine. Or nous sommes face à une panoplie de mesures sans grande cohérence qui se situent dans le prolongement des hésitations passées. Comprenez que dans ces conditions, il ne nous soit pas possible de voter votre budget.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La parole est à Mme Jeanine Jambu, pour le groupe communiste.

Mme Janine Jambu.

Monsieur le secrétaire d'Etat, l'examen des crédits et des mesures pour 2001 sont, nous semble-t-il, en cohérence avec ce qui a été mis en oeuvre depuis 1997 par le gouvernement et la majorité plurielle. C'est ce qui a permis de gommer les aspects les plus nocifs de la politique de la droite. Je pense aux différents dispositifs Périssol, par exemple. On doit tenir compte aussi, me semble-t-il, des débats et du contenu de la loi SRU. C'est pourquoi mon intervention portera à la fois sur les efforts accomplis, parce qu'ils sont réels, mais aussi sur les insuf sances qui demeurent.

Pour ce qui est de l'objectif de la loi, assurer le droit au logement pour tous, revaloriser la place et le rôle du logement social, suppose d'y mettre les moyens nanciers. L'objectif me semble tout à fait louable. Beaucoup de collègues avant moi ont posé le problème de la construction sociale. C'est un problème évidemment qui nous touche tous de près. Le secrétaire d'Etat d'ailleurs, dans son intervention ce matin, mais aussi dans différentes interventions, notamment au congrès des HLM et ailleurs, montre aussi sa préoccupation. Je considère que 70 000 PLUS, subventionnés à 5 % dont 10 000 PLA en intégration, à 20 %, et 10 000 PLA démolition-construction, subventionnés à 12 %, c'est extrêmement important. D'ailleurs, je sais qu'il y a une étude qui vient de nous être donnée pour la région parisienne.

Elle con rme tout à fait la réalité à Bagneux. Les deux tiers des demandeurs de logements sont inscrits soit en préfecture soit en mairie. Ils entrent dans la catégorie plafonnée, encadrée des PLUS. Ce qui veut dire qu'il y a de réels besoins, une réelle attente. Ce n'est donc pas le dispositif que je mets en cause, mais ce que le secrétaire d'Etat nous a dit, notamment en réponse à ma question écrite, ce qu'il a dit en préambule aussi, au sujet des dif cultés réelles auxquelles nous sommes confrontés pour le développement de la construction. Ce qui fait que, par exemple, le bilan des réalisations est tout à fait insuf sant, autour de 40 000. Je vois, dans le département des Hauts-de-Seine, qu'il y a beaucoup de crédits non consommés. Là aussi, je note la volonté politique de construire du logement social, et d'en revaloriser l'image. J'ai vu qu'au congrès HLM, vous, monsieur Besson, et le ministre Gayssot également, êtes longuement intervenus sur l'idée de la revalorisation de l'image du logement social. Je considère qu'il est absolument nécessaire, nous l'avons dit, d'avoir un logement social de qualité à un prix abordable. Je pense aussi que la volonté de construire du logement social a été concrétisée d'une large manière, il ne faut pas la sous-estimer, par les dispositions de la loi SRU sur l'objectif de 20 % de logements sociaux. Je sais aussi que 20 % de logements sociaux, c'est à peu près 20 000 logements par an. Cela est aussi appréciable et permettrait de modi er la situation. Loin de moi l'intention de sous-estimer cet aspect.

Juste un mot sur ces résultats qui correspondent à une demande, à un besoin. Mais si on est décidé à mettre le doigt sur ce qui ne va pas, le 1 %, ou certaines résistances des of ces HLM, il me faut dire un mot sur quelques points. Vous savez bien que c'est la question très sensible. Je dois donc dire que, parallèlement, notamment dans la région parisienne, la politique de l'ASIC s'inscrit dans une diminution du patrimoine du logement social ; 15 000 logements en région parisienne : à Bagneux, 4 000. Of ciellement, on a af rmé qu'il n'y en aurait plus que 640 de conventionnés. A Fontenay-aux-Roses, ville voisine, 1 500 logements de l'ASIC, il n'y en aura plus que 50 conventionnés. Malgré les efforts que vous faites, monsieur le secrétaire d'Etat, parallèlement, l'ASIC, la Caisse des dépôts et consignations se désengagent du logement social. Cela va aggraver de fait la situation. C'est d'ailleurs ce que m'a dit le préfet des Hautsde-Seine en réponse à un courrier que je lui avais adressé.

En face, je prends en compte les efforts faits pour remédier à la volonté de construire du logement social. Je pense que, comme d'autres collègues l'ont dit, il y a besoin d'une réforme des conditions du nancement. Bien sûr, il y a de bonnes dispositions, l'allongement de la durée des prêts pour le foncier, la baisse de la TVA sur les travaux, plus récemment l'allégement de 30 % du foncier bâti pour les organismes en ZUS. Moi je pense, notre groupe pense, que l'aide à la pierre qui est, certes, partiellement rétablie, mais qui stagne, ne l'oublions pas, cette année, nécessiterait une nouvelle impulsion. J'insiste sur ce critère fondamental. Ne faut-il pas réformer les circuits de nancement du logement social ? Je pense aussi au rôle de la Caisse des dépôts et consignations.

S'agissant de l'allégement du foncier bâti, nous apportons une appréciation positive. Cette mesure doit béné cier aux organismes qui ont le parc le plus social dans les zones les plus dif ciles. Je pense, par exemple, qu'elle devrait béné cier plus aux of ces qu'aux SA, par exemple. Mais je regrette que, pour 2001, la contrepartie de l'allégement soit le gel des loyers. Non pas que je considère que le gel des loyers ne soit pas important, mais j'aurais préféré, bien évidemment, qu'il y ait des moyens suppl émentaires dans le budget pour régler le problème du gel de loyer et l'application du foncier bâti dès l'année 2001. De plus, tous les organismes HLM, je voulais insister, ne sont pas dans une


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situation nancière identique. Quelle va être la compensation pour ceux qui ne béné cient pas de l'allégement de la taxe foncière sur les propriétés bâties ? La question de fond, me semble-t-il, reste le déséquilibre persistant dans l'aide publique au secteur social et au secteur privé.

Je pense aux secteurs de la promotion privée, notamment avec l'aide sous forme d'avantages scaux. Il y a un rapport de un à cinq. Pour les locataires, nous notons des conséquences positives.

La deuxième phase de la suppression du droit au bail, 2,5 % du loyer brut, c'est important, au 1er janvier 2001 ; pour les loyers supérieurs à 3 000 francs, la poursuite de l'engagement de gel des loyers pour 2001.

Pour ce qui est de la réforme de l'APL, avec l'harmonisation des barèmes, il est indiqué qu'elle n'entraînera aucune baisse pour aucun ménage, mais une amélioration pour ceux qui se réinsèrent dans l'emploi avec des revenus proches des minima sociaux. C'est une bonne chose. Toutefois ne sont pas versées les APL inférieures à 100 francs, soit 1 200 francs par mois, ce qui n'est pas négligeable me semble-t-il, notamment du fait de l'aggravation de la fracture sociale. De même, les aides sont suspendues pour les personnes en dif culté, momentanément dans l'impossibilité de payer le reliquat de loyer qu'elles doivent hors APL. Je sais à ce propos, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous avez reçu une lettre de l'un de mes collègues, Daniel Paul, qui vous interpelle à ce sujet.

Je pose surtout la question : ne faut-il pas améliorer ou accélérer, car je sais qu'il y a des disparités suivant les départements, les régions, les dispositions de la loi de lutte contre les exclusions ? D'une manière générale, nous souhaitons être rassurés : les moyens sont-ils bien engagés, à la fois pour assurer le coût de la réforme et le coût de l'actualisation ? En n une question annexe à celle du budget me préoccupe : celle du traitement des attributions vues à travers le prisme de l'intercommunalité et des bassins d'habitat. Nous avons obtenu dans le cadre de la loi SRU l'introduction de la notion de conférence communale dans les communes comptant plus de 2 000 logements sociaux. Je tiens beaucoup personnellement à ce que soit con rmée une disposition qui est l'un des éléments de l'intervention pour la mixité sociale et spatiale.

En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, je crois qu'il faut, dans une analyse, faire le bilan à la fois de ce qui est intéressant, des points sur lesquels nous avons avancé, et de ce qui reste, bien sûr, à améliorer. Il ne faut pas sous-estimer ce qui reste, mais nous avons une appréciation favorable, même si le budget du logement n'augmente pas. Il s'agit surtout des dispositions prises pour améliorer la situation du logement.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour le groupe UDF.

M. Jean-Marie Morisset.

Monsieur le secrétaire d'Etat, l'environnement économique et institutionnel en l'an 2000 a été favorable, et devait permettre de réaliser les objectifs prioritaires que vous nous aviez annoncés l'année dernière. Quel a été le résultat ? Je l'évoquerai à travers deux dossiers, la situation du logement social et le bilan de la loi sur l'exclusion dans son volet logement.

D'abord, la situation du logement social. Tous les ans à pareille époque, depuis trois ans, nous constatons que la construction est en panne. Le budget de 2000 avait pour ambition de relancer le logement social. Un dispositif global que nous avions, à l'époque, con rmé, avait été conçu pour le relancer. Il s'appuyait sur un nouveau produit nancier, le PLUS, et le maintien à un haut niveau des moyens budgétaires. L'année 2000 devait voir la pleine application du dispositif. Je rappelle que vous l'aviez mis en place en juillet 1999, soit six mois de préparation sur l'année 1999 ; ainsi 70 000 logements avaient été prévus dans votre budget. Le nombre de PLA-PLUS commencé en 2000 devait à nouveau se réduire et s'établir à un niveau de l'ordre de 36 000 unités contre 39 000 en 1999.

A partir de là, monsieur le secrétaire d'Etat, compte tenu de ce que les uns et les autres ont dit, est-il bien raisonnable de prévoir 70 000 logements nançables en 2000 sans mesures d'accompagnement signi catives ? Même si, précédemment, vous nous avez rassurés et dit que vous n'étiez justement pas opposé à en étudier. Pas davantage que celui de 2000, votre budget pour 2001 n'apporte les correctifs nécessaires pour relancer le logement social. Pourtant la conjoncture est favorable. Il aurait fallu trancher et donner, me semble-t-il, l'impulsion nécessaire.

Certes, vous allez nous expliquer que votre gouvernement avait tout mis en oeuvre lors du budget 2000, suite aux mesures proposées par l'intermédiaire du PLUS. Certes, vous allez nous expliquer que les collectivités locales sont réticentes à s'invest ir et que le mouvement HLM est démobilisé, mais vous le savez bien, le gel des loyers, l'augmentation des taux d'intérêt, la pression sur les prix, ne facilitent plus les bouclages des plans de nancement. Certes, vous allez nous dire, et vous nous l'avez dit, que les problèmes vont être réglés par la loi SRU. Vous savez bien que cette opération ne va concerner que les zones urbaines, je le rappelle tout de même. De plus, nous ne restons pas convaincus de son application effective dès 2001, vous le savez bien aussi.

Le PLUS a été annoncé en juillet, et un an et demi après nous ne voyons pas encore les résultats. Par ailleurs nous ne sommes pas convaincus de son ef cacité pour accroître le parc de logements sociaux.

Le redémarrage de la construction locative sociale ne pourra intervenir que si l'incitation est jugée suf sante par les bailleurs sociaux. Un réajustement de la subvention est donc indispensable, et c'est urgent, pour la rendre la plus consommable possible. Nous pouvons regretter qu'aucune mesure corrective ne soit proposée dans votre budget.

La crise du logement social conduit inévitablement à la question de savoir si le parc public est toujours en mesure de remplir sa mission. Les débats que nous avons eus sur la loi SRU ont été l'occasion de mettre en lumière le rôle économique important et le rôle social du parc privé dans notre pays. Il représente aujour d'hui 55 % du parc locatif. Alors pourquoi ne pas réorienter aussi la politique du logement social vers une meilleure prise en compte du rôle social des propriétaires bailleurs ? La mobilisation de l'épargne privée pourrait nancer une nouvelle lière de logements locatifs à vocation sociale et compléter ainsi l'offre locative sociale des HLM. Il s'agit certes d'une orientation à ne pas écarter mais qui n'apportera de solution ef cace qu'en fonction d'un choix politique évident.

D'ici là, monsieur le secrétaire d'Etat, je pense qu'il peut y avoir des améliorations à apporter dans la gestion du produit PLUS par les services de votre ministère pour accélérer les procé dures d'agrément et de noti cation des crédits de paiement.

Comme M. Dumont, je prendrai un exemple concret pour apprécier le bon fonctionnement de nos procédures, la chronologie des décisions et noti cations dans un département que je connais bien. D'ailleurs, M. Dumont me donne un argument puisqu'il a évoqué la Charente-Maritime, une région où se fait justement une gestion cohérente des noti cations. Les besoins exprimés par notre département avaient été recensés par les bailleurs sociaux, à la demande des communes, en l'an 2000, à hauteur de 300 PLUS. Le département s'engageait sur un programme de 200. La dotation communiquée en avril dernier n'a permis de prendre en compte, dans un premier temps, que seulement la moitié de ces 300, 160 PLUS. Le message donné au niveau national était que les enveloppes de logements sociaux ne sont pas consommées. Mais on constatait en outre que dans notre département, 70 % des 150 étaient pris par une grosse enveloppe pour Niort. Nous avions quoi ? Nous avions 30 PLUS pour couvrir 250 000 habitants sur 300 communes alors que nous avions naturellement recensé beaucoup plus de besoins.

V ous comprendrez facilement que sur 300 communes, 250 000 habitants, nous pouvions avoir une ambition supérieure à 34 logements. Certes, vous allez me dire qu'un réajustement a eu lieu en septembre dernier où nous avons récupéré 200 PLUS sur les 300 demandés. Mais ce qui est le plus grave, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est que l'autorisation de programme a été annoncée au mois d'avril dernier pour 50 % de l'enveloppe et que vos services viennent juste d'avoir noti cation des autres 50 %, au mois de novembre. Vous comprendrez que dans la complexité des procédures les constructions que nous pouvions avoir en l'an 2000 ne pourront se faire qu'en 2001.

Je crois que sur ce point, il y a nécessité urgente de mieux programmer. D'autant plus que vous pourriez dire qu'il y avait des problèmes d'enveloppe. Mais, comme en Charente-Maritime


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ou en Poitou-Charente, justement, il y avait consolidation de l'enveloppe régionale, ce n'était pas un problème de dotation puisque nous avions, il me semble, des crédits disponibles.

J'en viens à une seconde ré exion relative à la loi sur l'exclusion dans son volet logement. Le 13 septembre dernier, accompagné de cinq ministres, dont vous-même, Martine Aubry tirait un bilan positif des deux premières années, et précisait que le pari était tenu. Ce constat n'est malheureusement pas con rmé.

En tant que président d'un exécutif départemental et aussi pour bien connaître ces procédures, je peux en témoigner. Les collectivités départementales sont partenaires dans ces opérations. Je crois que, là aussi, le délai maximum des réponses sous deux mois pour les aides n'est pas respecté dans 45 % des cas. Le retard pris dans la parution du décret de mise en place du numéro d'enregistrement unique pour le suivi des demandes de logements sociaux n'a pas permis à ce jour de généraliser le dispositif. Les commissions de médiation ne sont pas effectives et l'adoption des chartes de prévention n'est effective à ce jour que dans une vingtaine de départements.

Nous aurions pu penser alors que votre budget allait in échir de manière notoire l'action publique en faveur du logement. Or que constatons-nous ? Les moyens consacrés au logement des plus démunis sont en baisse, les crédits d'intervention au titre de la participation de l'Etat sont maintenus à hauteur de 720 millions alors que les besoins sont nombreux. Les subventions d'investissement en faveur des opérations les plus sociales et les plus défavorisées diminuent de manière signi cative : 205 millions contre 290 millions en 2000. Je ne rappellerai pas l'évolution négative des programmes de réalisation de logements sociaux.

Alors qu'il y a urgence sociale et que la loi SRU contient des dispositions précises et contraignantes en manière de lutte contre l'insalubrité, nous constatons une diminution des crédits de 79 millions à 45 millions. Je pense également que les moyens affectés à la lutte contre le saturnisme, qui passent de 75 millions à 60 millions, ne permettront pas de couvrir les besoins.

Quant au fonctionnement du système, le PDALPD a produit, certes, un important potentiel d'outils sur le terrain. Il a permis aussi de mobiliser beaucoup d'acteurs. Il y a de nombreux côtés positifs, mais je crois que le bon bilan d'un PDALPD est non pas le nombre de plans validés au niveau des parts nationales, pas plus que le nombre d'instances et de réunions, mais bien le nombre réel de logements sociaux mis sur le terrain. Nous en revenons toujours au constat effectué.

Je voudrais terminer, monsieur le secrétaire d'Etat, en formulant une proposition sur le dispositif du conventionnement qui porte votre nom et en faisant le point aussi sur les traditionnels outils concernant la réhabilitation, à savoir l'ANAH, l'APH et les OPA. Il apparaît en effet, et cela a été dit par certains de m es collègues, que le passage du système Périssol au mécanisme Besson a généré un creux très sensible au niveau de la constructio n et du rythme des ventes, même si une légère amélioration est constatée au second trimestre 2000. Lors de l'examen de la loi de nances pour 2000, comme pour 2001 - mon collègue Pierre Méhaignerie pourrait le con rmer -, le groupe UDF a proposé que le dispositif Besson, à l'instar de l'amortissement Périssol, intègre la possibilité de louer son bien à un ascenda nt ou à un descendant. Je rappelle que cette proposition n'a pas été retenue par votre gouvernement lors de l'examen de la loi de nances. Je ne désespérais pas car j'ai compris que sur ce point j'avais l'appui de M. Cacheux et de M. Dauge. Nous pouvons espérer une amélioration.

Quant au parc locatif privé il remplit, je le disais tout à l'heure, un rôle social économique incontestable, avec 55 % du parc locatif. Il est diffus et bien réparti géographiquement. Il accueille majoritairement des jeunes et des ménages aux revenus modestes. Les loyers connaissent une évolution modérée plutôt plus faible que celle du parc public. Le développement et le renouvellement du parc privé passent par les aides traditionnelles versées aux propriétaires bailleurs - aide de l'ANAH - et propriétaire occupant - aide la prime de l'amélioration de l'habitat.

Chacun le sait, la loi SRU a prévu d'organiser le regroupement de ces aides par l'ANAH pour une meilleure gestion. S'il y a eu regroupement, il y a eu malheureusement la même dotation en autorisations de programmes, soit 3 milliards. Ce qui est inquiétant, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est la baisse importante des crédits de paiement destinés à l'amélioration du parc privé.

Alors qu'en fait, chacun le sait, ces crédits accompagnent les opérations programmées d'amélioration de l'habitat, le seul outil de programmation territoriale et sociale à la disposition des collectivités. Cet outil permet également d'intervenir, non pas dans les zones urbaines, mais surtout pour revitaliser les bourgs-centres et les zones rurales fragiles.

A une époque où les pays, dans le cadre du volet territorial du contrat de plan, vont prochainement contractualiser avec l'Etat et la région sur le volet logement, qui est souvent l'une des priorités retenues dans les chartes de développement, non seulement vous ne prévoyez pas des moyens supplémentaires, mais encore vous diminuez les moyens de paiement à hauteur de 2,2 milliards de francs. Quelle marge de manoeuvre auront les préfets pour répondre en même temps aux besoins actuels des propriétaires, bien réels sur le terrain, et les programmes des pays qui souhaitent renforcer les politiques locales de l'habitat ? Je crois que c'est une question importante. Même s'il est vrai que ces démarches de pays se mettent en place tout doucement, parce qu'il faut beaucoup de ré exion, les chartes de développement vont permettre de contractualiser, dès l'année prochaine. Je crois que sur ce point, il faut que vous rassuriez justement ces démarches un peu collectives parce qu'il ne faudrait pas d'incohérence entre une loi Voynet que l'on essaie d'appliquer sur le terrain et les moyens de la politique sur le volet logement.

En conclusion, l'année dernière, le groupe UDF avait apporté son soutien en s'abstenant compte tenu des propositions annoncées. Vous comprendrez aisément que eu égard au constat effectué, surtout sur le logement social, alors que nous avions une garantie que le programme PLUS devait permettre de l'améliorer, notre groupe ne votera pas, cette année, votre budget.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Nous avons entendu les porte-parole des groupes. Nous allons entendre maintenant les autres députés qui ont des questions à poser.

La parole est à M. Patrick Rimbert.

M. Patrick Rimbert.

Monsieur le secrétaire d'Etat, votre budget qui, une fois de plus, est un bon budget, pose quand même un problème d'interprétation dans le contexte actuel.

Quand on se réfère à ce contexte, il faut penser au temps long, comme le disait Alain Cacheux, c'est-à-dire qu'il faut prévoir ce budget avec un effet jusque dans les années 2002.

D'un côté, je dirai que le contexte est favorable à cause des réformes institutionnelles et législatives qui ont été faites, notamment la loi SRU qui incite à la mixité sociale et qui oblige chaque commune, dans les agglomérations, à avoir 20 % de logements sociaux soit par des acquisitions-améliorations soit par des logements neufs. Votre outil, le PLUS, est l'outil de la réalisation de ces objectifs. En outre, toujours dans le contexte législatif, on voit que les intercommunalités sont plus fortes et peuvent apporter au logement un complément pour essayer d'atteindre les objectifs de mixité sociale. Les outils institutionnels sont là. D'un autre côté, il y a des points plus négatifs, l'au gmentation des prix du foncier, du prix de la production, des taux d'intérêt, qui a entraîné le relèvement du livret A, ma is on le sait maintenant, si le taux d'intérêt devait s'accroître encore en année 2001, le taux du livret A suivrait avec toutes les conséquences sur le PLUS. Dans la conjoncture, je crois qu'il faut bien avoir en tête que la reprise actuelle du bâtiment, qui est pour partie un rattrapage et pour partie liée à la croissance retrouvée depuis 1997, il faut garder à l'esprit, disais-je, que cette reprise aura un atterrissage. Pour se mettre dans un contexte de

« développement durable », il faut faire en sorte que l' atterrissage ne soit pas brutal, faire en sorte que l'on ne retrouve pas les conséquences qui se sont produites dans le bâtiment, avec, notamment, des licenciements, des pertes de savoir-faire, qui aujourd'hui, se payent par ce que l'on appelle le « manque de main d'oeuvre ». Le manque de main d'oeuvre correspond en fait à un manque de prévoyance. Les hommes ont été très souvent licenciés, mis à la retraite par anticipation. Il ne faut pas répé ter les mêmes erreurs dans les années à venir. Votre budget doit permettre d'étaler et de conforter ce secteur dans un développement durable.

Le contexte me paraît important pour analyser votre budget, qui montre que vous suivez tout à fait la ligne donnée dans son discours de politique économique générale par le Premier


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ministre en juin 1997. Mais la question posée par M. Dauge me semble également centrale. Que votons-nous ? Voter un budget ne suf t pas. Comment l'application de ce budget se fait-elle ? Je regarde, par exemple, le prêt à taux zéro : aujourd'hui, il favorise la maison individuelle, élément de mixité, contrairement à ce que l'on pourrait nous faire croire dans les débats notamment sur la loi SRU, élément de mixité sociale important, et donc à conforter. Or ce prêt à taux zéro, dont on voit d'ailleurs que la consommation baisse, a plus ou moins été « saboté » -le mot est un peu fort, je le reconnais. Lorsque l'on réduit la durée de remboursement de ce prêt, on sait que l'on désolvabilise les ménages à revenus moyens et dès lors, on porte atteinte à la mixité. Une mesure administrative peut rendre « non consommables » des produits tout à fait adaptés à votre volonté politique. Et cela a lieu, bien entendu, sans information des parlementaires, sans concertation avec eux. Nous votons un produit dans un certain contexte et il est appliqué dans un autre. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande de reconstituer la solvabilité des ménages, notamment de retrouver la durée d'amortissement qui permettrait aux ménages à revenus moyens de pouvoir accéder de nouveau à un prêt qui me semble fondamental. Il faut le rendre consommable et il faut retrouver son pouvoir solvabilisateur.

Le PLUS, nous l'avons voté, vous en avez fait un produit bien adaptable, mais force est de constater, qu'il n'est pas suf samment consommé. Il date de 1999. Du fait que le PLUS n'est pas consommé, il y a des reports, des reports qui entraînent des aliénations de dotations budgétaires. Petit à petit, on risque de voir, de manière insidieuse, les crédits affectés dans le collectif budgétaire être supprimés. On voit bien à travers les autorisation s de programme une esquisse de ce mouvement. Les opérations liées au PLUS sont longues. Yves Dauge l'a dit, il met cinq ans pour monter ses opérations. Je ne pense pas que les critères mécaniques d'une gestion annualisée puissent servir à des projets nancés par les PLUS, qui sont des projets à long terme. Les crédits pour les conventions que vous signez, et pour l'action de consolidation de la mixité sociale grâce notamment au 1 % devraient être effectivement consommées. Or que constatonsnous là aussi ? Que la mise en oeuvre de ce que vous avez signé, de ce que nous croyons voter en complément du 1 % ne se fait que dif cilement. Des organismes sont exclus, des opérations sont exclues. Il me semble nécessaire de mettre en oeuvre le 1 % au niveau régional, avec les agglomérations, avec les préfets, et il faut la transparence pour ce qui est demandé, ce qui est proposé et ce qui est versé. La transparence est fondamentale, sinon, nous voterons des budgets « d'af chage », et ce n'est pas du tout notre volonté.

Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire, monsieur le secrétaire d'Etat, mais je ne suis pas rapporteur, je n'interviens pas pour mon groupe, je ne pose que des questions. Aujourd'hui, dans les grandes cités monosociales où l'on réalise des opérati ons de démolition reconstruction, où l'on essaie d'introduire un autre type d'habitat, il est certain qu'une bonne partie de l'habitat existant restera en place encore longtemps. Il faudrait donc, par le biais des réhabilitations de logements, de logements qui vont rester longtemps, je le répète, où les gens vont rester encore longtemps - pas forcément les mêmes habitants, bien sûr - il faudrait, dis-je, que les PALULOS, qui sont des mises aux normes techniques, des travaux d'entretien, permettent de nancer également des mises aux normes sociales.

Qu'entends-je par mise aux normes sociales ? Lorsque, il y a trente ans, les cités ont été construites, il y a eu là une vé ritable ascension sociale, parce qu'il y avait l'eau chaude, de la place, de la lumière. Maintenant, la société s'est transformée. Les popul ations qui sont dans d'autres types de logement ont des logements plus grands. Les familles monoparentales, notamment, et les personnes seules se doivent d'avoir une pièce de plus pour accueillir leur enfant. L'ascension sociale d'un certain nombre de jeunes qui deviennent étudiants suscite des besoins, il y a besoin d'une pièce de plus pour étudier. Le travail à domicile entraîne parfois une augmentation de la dimension des logements. Ce ne sont que des exemples, mais je crois, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il faudrait, au-delà de la réhabilitation technique, penser à la mise aux normes sociales. Il me semble qu'aujourd'hui la mise aux normes techniques « mange », si je puis dire, une partie trop importante des crédits de réhabilitation au détriment de la mise aux normes sociales.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La parole est à M. Guy Malandain.

M. Guy Malandain.

Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, trois ré exions brèves et forcément incomplètes, c'est la loi du genre, sur la politique du logement.

Première ré exion. Tout à l'heure le rapporteur pour avis,

M. Cacheux, parlait de la situation de l'industrie du bâtiment.

Pour nuancer ses propos, je dirai que j'ai plutôt l'impression que nous sommes actuellement dans une situation de tension du marché, une tension qui est la conséquence de l'action de l'Etat, des collectivités locales, mais aussi de la reprise économique.

Dans les conditions actuelles, l'industrie du bâtiment ne peut plus produire, l'offre est inférieure à la demande alors que pendant des années, ce qui est bien d'ailleurs, nous nous sommes battus pour le contraire. Heureusement, nous sommes dans une situation de réussite. Cela pose deux problèmes évidents que nous ne pouvons pas éliminer de notre ré exion au moment où nous parlons d'un budget du logement.

Le premier est une élévation importante des coûts. On ne voit plus un seul appel d'offre obtenir des réponses positives dès la première séance. Il arrive même, au moins dans la région Ile-de France, que l'on recherche des entreprises de gros-oeuvre parce qu'aucune ne répond au marché. On ne peut pas passer sur cette question dans la logique d'évolution de l'industrie du bâtiment.

Second problème, celui de la main-d'oeuvre et de sa quali cation. En même temps que l'on assiste à un accroissement des emplois dans ces industries, on entend aussi les chefs d'entreprise dire : « je ne peux pas prendre plus de travail car je manque de main-d'oeuvre ». Parallèlement, toute une série de sections de formations aux métiers du bâtiment ont été fermées dans des lycées professionnels publics. Nous sommes dans l'incohérence, nous devons y ré échir. Je n'ai pas aujourd'hui la réponse.

Deuxième élément de ré exion, la mixité dans l'habitat. Un peu plus simple comme hypothèse, la mixité sociale dans l'habitat, pour moi, mais aussi pour l'ensemble de mes collègues, je le pense, ne consiste pas seulement à garantir un accueil suf sant aux familles en situation de pauvreté, elle consiste aussi à garantir que d'autres familles vont amener une diversité de la vie sociale et de l'occupation des logements. Nous avons une panoplie d'outils assez extraordinaires, mais deux points ne sont pas très bien traités, et peut-être pourrions-nous mieux le faire.

Le premier point est le problème de la vacance. Quand on met en place une politique de peuplement dans une ville où le patrimoine HLM représente 80 % de l'habitat -ce qui n'est pas rare en région Ile-de-France- entreprendre une politique de peuplement, au sens noble que nous donnons les uns et les autres à ce terme, cela oblige les sociétés HLM, quel que soit leur statut juridique à garder vacants, pendant très longtemps, un certain nombre de logements. Il en résulte pour elles une dif culté. On s'aperçoit que, petit à petit, les bonnes intentions exprimées lors de la signature de la charte du logement s'en vont, parce qu'il y a des équilibres nanciers à trouver. On ne peut pas laisser les logements vides, d'autant plus que des logements vides peuvent susciter des squats qui deviennent vite incontrôlables.

Le second point est celui de l'accession à la propriété. Quand on trouve en n un promoteur qui accepte de faire de l'accession à la propriété au sein d'un ensemble de logements sociaux, soit dans une opération de restructuration urbaine, soit parce qu'il restait des terrains, on impose à cette société un temps de vente extrêmement long, tout simplement parce que les appartements ne se vendent pas dès qu'on a mis la pancarte, comme cela se produit dans d'autres quartiers. Ces promoteurs nalement ont un petit côté dévoué, puisqu'ils manifestent du dévouement d ans des opérations de ce genre. Mais ils se trouvent très rapidement avec des impôts fonciers à payer sur des logements qu'ils vendront au bout d'un an, un an et demi à raison de un par mois, ou de un tous les deux mois. Les choses se passent ainsi dans la réalité. Le dégrèvement d'impôt foncier pour les logements l ocatifs non occupés pourrait s'étendre, à mon avis, dans des zones très précises. Je parle là des zones de restructuration urbaine, c ela


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va de soi, mais aussi de l'accession à la propriété. J'en conclus que le prix de vente de ces appartements est forcément extrêmement tiré.

Troisième élément de ré exion, les dif cultés de construction des logements sociaux. Chacun le constate, depuis des années nous n'atteignons pas nos ambitions et nos perspectives. Je ne suis pas si sûr qu'il n'y ait, dans cette affaire, que des problèmes de technique et de nancement. Il y a aussi à mes yeux, mais je ne dois pas être non plus isolé dans cette ré exion, une véritable question politique. Elle se pose à trois niveaux.

Premièrement, la position, de « refus », disons le mot, d'un trop grand nombre de collectivités locales d'avoir du logement social sur leur territoire. Je ne voudrais pas, sans être rabat-joie, que l'on rêve de la loi de solidarité urbaine comme on a rêvé, il y a dix ans, de la loi d'orientation sur la ville. Une loi est nécessaire, il faut la faire, puisqu'une loi marque l'autorité, la solidarité de l'Etat dans ce domaine. Après, il y a l'application de la loi. Nous avons déjà eu une expérience, il ne faudrait pas la renouveler.

Deuxièmement, l'image des HLM. Notre collègue disait qu'il fut un temps où, accéder à un logement HLM c'était sortir d'un taudis, d'un endroit où il n'y avait aucun confort. Ce fut le cas pour quelques-uns d'entre nous. C'était une promotion sociale.

Maintenant les HLM sont considérés, au contraire, comme les endroits où l'on doit accueillir les populations en dif culté culturelle, sociale ou économique. Il y a tout un travail politique à faire à ce sujet. Ce disant, j'enfonce sans doute une porte ouverte, mais je ne voudrais pas que l'on cherche des solutions à l'insuf sance de construction seulement avec des réponses techniques ou nancières.

Troisièmement, le terrain, qui me paraît important. Je passe sur les politiques d'aménagement d'ensemble urbains parce que Yves Dauge a bien dit ce qu'il fallait en dire. Tant que nous ferons payer au logement tout ce qui est autour du logement, nous aurons de grandes dif cultés. De même, tant que nous ferons payer aux salaires tout ce qui est la couverture sociale, nous aurons aussi des dif cultés pour les salaires. Mais ce n'est pas l'objet de ce débat. Il s'agit du terrain. Je souhaite vraiment que l'on se penche sur une politique qui ne nécessite pas forcément l'appropriation du terrain. L'acquisition, c'est une maladie française. Dans de nombreux pays, les baux emphytéotiques, ou ce qui y ressemble, sont utilisés. Et tant que les collectivités locales et l'Etat contribueront à payer la surenchère sur le foncier, qui mange la moitié du prix de revient des constructions sociales, nous serons dans une mécanique dont nous ne sortirons jamais. Notre législation et nos accompagnements nanciers, et même nos conditions de nancement liées à l'accession des sols, devraient chercher des pistes et des ouvertures vers le bail à construction, le bail emphytéotique. Je ne veux pas rentrer dans les données juridiques mais, nalement, pourquoi nous rendre propriétaires d'un terrain sur lequel nous construisons des logements alors que nous faisons des baux emphytéotiques pour des parkings, pour des aménagements de loisir. Je sais que ce n'est pas facile, mais c'est une piste qu'il ne faut pas abandonner, qu'il ne faut pas envisager, un peu comme si elle n'existait pas.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, quelques brèves observations qui rejoignent certains propos tenus ici.

Un premier point, positif, l'harmonisation des aides, qui va dans le bon sens ; elle a été entamée voici quelques années et elle devait se poursuivre. En revanche, là où, vraiment, il y a un problème, qui ne permet pas de voter ce budget, comme l'a dit M. Morisset, c'est dans une certaine hypocrisie. Hypocrisie entre d'une part, les objectifs de la loi SRU, d'autre part, l'absence de moyens permettant de boucler les plans de nancement. Je crois que nous nous préparons là des retournements de conjoncture qui, à terme de dix-huit mois, peuvent devenir dangereux. Nous pouvions comprendre, à la limite, que le ministère des nances, compte tenu des risques d'in ation du logement, retarde l'adaptation, soit par des loyers, soit par la subvention, du régime des PLUS, eu égard, non seulement aux prix du foncier, mais aux 35 heures et au renchérissement des prix des matériaux. Mais aujourd'hui, en préparant la conjoncture de 2001, je crois qu'il n'est plus permis d'attendre. Là, nous avons des réponses. En créant vous-même, par ce moyen, la réticence des collectivités locales à construire du logement en locatif social, des maires, qui seraient enclins dans quelques années à être condamnés parce qu'ils n'ont pas les 20 % de logement social, ont tous moyens de retourner l'argument en leur faveur devant les tribunaux administratifs, après avoir démontré que les conditions de l'éq uilibre des opérations n'est absolument pas possible.

Je crois que des décisions devraient là être prises. Il est toujours agréable de bloquer les loyers, mais tôt ou tard, on le paye.

Alors, ou on adapte un peu les loyers, ou on majore les subventions. Mais la participation nancière des collectivités locales ne peut pas dépasser un certain pourcentage. Elle est déjà élev ée dans beaucoup de cas. Aller au-delà, c'est risquer de diminuer fortement, comme cela se passe, le nombre de logements sociaux construits.

Comme l'a dit un de nos collègues, en ce qui concerne l'accession sociale à la propriété, il faut reconstituer un peu la solvabilité des ménages. Il y a une perte dans la revalorisation, ne serait-ce que pour suivre l'in ation depuis quelques années.

Les coups de pouce nécessaires pour s'adapter à la réalité du marché ne sont pas présents dans le budget. C'est sa faiblesse, remarquée d'ailleurs par beaucoup de nos collègues. Elle a conduit l'un d'entre eux à dire : « nous votons des budgets d'af chage ».

Je pense maintenant à l'initiative de notre collègue Yves Dauge, dans la région de Chinon. Les problèmes d'urbanisme et d'environnement vont devenir, pour les petites villes et le milieu rural, comme ils l'ont été pour les grandes villes, l'un des problèmes essentiels, si l'on veut que la qualité de vie s'améliore nettement. Là, monsieur le secrétaire d'Etat, je pense que nous pourrions peut-être avec la DATAR, pas nécessairement avec votre ministère, faciliter la mise en place, comme dans les grandes zones urbaines, d'agences d'urbanisme et d'environnement au niveau de l'intercommunalité. C'est probablement le service le plus important que l'on puisse rendre à des collectivités locales pour qu'ensemble elles imaginent ce que doit être la qualité de vie et la qualité de l'urbanisme et de l'environnement dans les années à venir. Si l'on pouvait avoir un nancement de l'ordre de 25 % comme pour les agences urbaines, je pense que nous pourrions faire un progrès signi catif de qualité dans les dix prochaines années.

En n, sans changer la loi sur les trente-cinq heures, mais en intervenant peut-être dans les décrets d'application, laissez donc la liberté aux salariés de choisir au-delà des trente-cinq heures, repos compensateur ou paiement d'heures supplémentaires.

Beaucoup de salariés, à quarante ans ou à trente ans, souhaitent d'abord du salaire. C'est facile à réaliser, il n'y a pas besoin de changer la loi, simplement de laisser la liberté entre repos compensateur et paiement d'heures supplémentaires. Ce sont les salariés qui choisiront.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La parole est à M. Jacques Guyard.

M. Jacques Guyard.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, dans ce budget, et dans ce contexte, globalement tout va bien. Les problèmes me paraissent être d'abord des problèmes de mise en oeuvre, davantage que des problèmes de montant budgétaire. Vous avez rappelé les chiffres, 300 000 logements construits, 600 000 réhabilités avec aide publique, 600 000 ventes dans le privé, c'est un dynamisme du marché du logement que nous n'avons pas connu depuis longtemps. Si notre ex-collègue Périssol avait connu cela en 1997, nous ne serions probablement pas dans cette situation. Cela dit pour mémoire.

Reste que la mise en oeuvre de ce budget pose vraiment problème. J'ai le sentiment que dans les crédits annoncés, une partie, et on le sait, ne sera pas utilisée et une autre le sera mal. Je commence par le 1 %. Aujourd'hui, les prêts du 1 % pour le logement social sont en général à 2 % sur quinze ans. Quand on globalise l'impact des remboursements avec ceux du PLUS normal, il en résulte des pro ls plus durs que ne l'étaient les pro ls des prêts HLM il y a dix ans du fait du raccourcissement de la durée. Nous avons tous connu des prêts 1 % qui étaient sur vingt-cinq ans, il n'y a pas si longtemps, avec dix années de différé. Là-dessus, je considère qu'il y a eu vraiment un vol par


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rapport à l'esprit de la convention passée avec l'union d'économie sociale. Et il ne s'agit pas de quelques millions, mais de 4 milliards et demi dont l'impact sur les pro ls de retour sur investissement des organismes HLM serait décisif dans leur envie de construire.

S'agissant du prêt à taux zéro, j'ai le sentiment que les crédi ts de participation de l'Etat pour le budget de 2001 ne seront pas pleinement utilisés à cause du raccourcissement. Comme le disent les spécialistes, nous sommes clairement là dans la « papisation » du prêt à taux zéro. Nous savons comment un ministère voisin a tué le PAP avec une ef cacité remarquable au l des années. Le prêt à taux zéro est sur la même pente. A part ce la, ce doit être un outil appréciable et suf samment souple pour être ef cace.

Parmi les dif cultés pour construire, il y a le coût du foncier.

Là, je parle plus en élu d'Ile-de-France, parce que le cas est extrême. Ce n'est pas spéci que à l'Ile-de-France, je dois le dire.

Dans la construction, la montée du coût du foncier pèse très lourd. Je vois nombre d'organismes qui n'arrivent pas à à boucler leurs projets, organismes publics ou privés, HLM ou pas. Le prix des terrains a monté. La loi SRU offre un avenir, mais un avenir dont on sait bien qu'il ne sera pas productif, concrètement, avant le moyen terme. C'est ou quatre ou cinq ans qu'il faudra attendre les sorties concrètes de logements liées à cette loi.

J'ai entendu avec plaisir notre collègue Méhaignerie dire quelque chose que je pense profondément : nous avons besoin d'outils de ré exion collective. Au moment où 53 communautés d'agglomérations viennent de se mettre en place, où vingt autres vont sortir, nous avons besoin d'outils de création collective pour dé nir les terrains. Nous les dé nirons mieux en groupe si nous avons des outils de ré exion. Si vraiment il est un endroit où il faut mettre un peu plus d'argent dans ce budget, c'est bien sur les ANIL, pour l'information des gens, et sur les agences d'urbanisme. Mettez trois millions d'un côté, six millions de l'autre, c'est moins de un dix millième du budget, ce n'est vraiment pas grand-chose. Auquel cas, nous aurons un impact dans les deux années à venir sur la production de terrains, donc sur la baisse du prix des terrains. Sachant que la seule manière de faire baisser le prix des terrains, c'est d'en mettre davantage sur le marché.

J'en viens aux organismes HLM et à leurs réticences à construire. Il y a deux très bonnes mesures dans ce budget : les 830 millions destinés à compenser la hausse des taux d'intérêt du livret A et la réduction de la taxe foncière sur les propriétés bâties. A mon avis, elles exigent toutes les deux une mise en oeuvre extrêmement ne. En effet, si on les applique brutalement, proportionnellement pour tous les organismes, l'impact sera diminué, je le crains. Sur les 830 millions destinés à compenser les hausses des taux d'intérêt du livret A, les organismes ne savent pas dans quelle mesure les amortissements dérogatoires seront pris en compte. Cela joue à peu près sur le quart de la somme af chée. Ils ne le sauront qu'en 2000, c'est-àdire après la production de leurs propres comptes. Cette situation anormale décale d'un an la prise en compte par les organismes de l'amélioration, et donc de leur décision éventuelle de construire.

La taxe foncière sur la propriété bâtie, nous savons que c'est ce qui tue le plus le bilan des HLM. Mais si on accorde 10 % partout, on va aider des organismes qui n'ont pas de dif culté de ce genre, parce que la taxe à laquelle ils sont soumis n'est pas très élevée par exemple. On n'aidera pas suf samment d'autres organismes qui, eux, sont écrasés. Il convient donc de mettre en oeuvre la mesure de manière adaptée au terrain si l'on veut qu'elle trouve toute son ef cacité.

C'est d'ailleurs ce qui me semble être la caractéristique principale de la mise en oeuvre du budget du logement, comme de l'ensemble de notre politique économique et sociale. Aujourd'hui le problème est de maintenir la croissance et, pour maintenir la croissance, d'adapter au terrain les outils que vous avez mis en place depuis trois ans, des outils ef caces et qui donnent leurs résultats. Mais il faut continuer et, de ce point de vue, aller plus loin dans la déconcentration de l'Etat et dans la décentralisation des décisions.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La parole est à M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec.

Cinq questions assez brèves, monsieur le secrétaire d'Etat. D'abord, sur la nécessité de créer des zones sans loyer au béné ce des associations, notamment des zones parties prenantes des contrats de ville, sur lesquelles j'avais interrogé votre collègue, M. Bartolone, ministre délégué à la ville. Une telle mesure marquerait à nos yeux la reconnaissance de leur utilité en termes de vie et de liens sociaux au sein des quartiers. La précarité matérielle absorbe une trop large part de l'énergie des associations et des militants associatifs. En outre, dans certains quartiers, les structures occupent des locaux qui ne trouvent pas d'autres destinataires. Elles contribuent, par leur implantation, à la fois à l'animation et à la qualité de vie de leur quartier. Pour ces associations, les modalités de la participation de l'Etat au paiement des loyers au bailleur pourraient passer par un conventionnement des locaux ou par la création d'un fonds d'Etat pour le logement associatif. Cette participation est essentielle dans la mesure où les bailleurs répercuteraient le coût sur les locataires. Je sais qu'il y a, dans le cadre de la loi de solidarité et de renouvellement urbain, un amendement dans ce sens, mais il ne règle pas la question du paiement des loyers des locaux qui pourraient être accordés aux associations.

Ma deuxième question a trait au nancement des opérations de réhabilitation et de requali cation du parc HLM. Ce nancement, bien qu'amélioré, demeure insuf sant et revient à faire payer une grande partie par les locataires, au risque d'ailleurs d'accentuer la précarisation de certains. Les crédits, nous l'avons tous souligné, sont souvent sous-consommés. La réhabilitation devient un enjeu de plus en plus important, notamment en milieu urbain dense, et aussi avec le renchérissement des terrains à bâtir.

Ma troisième question rejoint l'interrogation formulée par un certain nombre d'entre nous ici, notamment sur nos capacités à consommer le budget que vous nous proposez pour la production du logement social. Il me semble que si l'on veut véritablement requali er le logement social aujourd'hui, lui donner une autre image, il faut relever les plafonds. J'irai même jusqu'à demander : ne faut-il pas déplafonner aujourd'hui le logement social et permettre ce qui existait dans les années 60, à savoir une véritable mixité au niveau socioprofessionnel à l'intérieur du logement social ? Qui sait ? J'en connais qui, aujourd'hui, accéderaient, s'ils en avaient la possibilité, au logement social, mais leur salaire, leurs revenus les en empêchent.

Ma quatrième question concerne la réhabilitation des logements dans le parc privé, notamment le parc ancien dégradé, le soutien aux copropriétés en dif culté et la lutte contre les marchands de sommeil. Le projet de loi SRU prévoit la fusion du régime de l'ANAH et de la prime à l'amélioration de l'habitat au 1er janvier 2001. Par cette fusion, l'amélioration du parc privé doit se contenter dans le projet de budget 2001 du simple maintien des moyens d'engagement à hauteur de trois milliards de francs. Ce simple maintien paraît en contradiction avec les objectifs de la loi en discussion. Est-il imputable à une sousconsommation des crédits dont la source résiderait dans une réglementation et une pratique trop respectueuse de la propriété privée, surtout lorsqu'elle s'avère défaillante ou indélicate ? Ce même projet de loi prévoit un certain nombre de dispositions et une simpli cation administrative visant à lutter contre les logements insalubres qui risquent de s'avérer inopérantes faute de s'accompagner de moyens nanciers renforcés. L'habitat ancien dégradé accueille nombre de familles modestes, victimes de la pénurie de logements sociaux ou qui en sont de fait exclues. Les conséquences sont énormes sur l'ensemble de la vie sociale dans des domaines aussi différents que la santé ou l'échec scolaire. Les communes confrontées à ce dé disposent souvent de peu de moyens pour le relever et ne recouvrent les investissements qu'elles engagent que de façon incomplète et avec retard, De plus, elles sont confrontées à un cercle vicieux en matière de relogement des familles, le logement dégradé étant souvent immédiatement reloué sans que les travaux indispensables à sa mise en conformité avec des conditions de logement décentes aient pu intervenir.

Ma dernière question, en lien avec ce que je disais sur les aspects santé, concerne le diagnostic, le traitement et le contrôle du saturnisme. Lors d'une visite que vous avez faite voici quelques temps à Saint-Denis, vous avez acquiescé à notre demande, faite d'ailleurs par d'autres collectivités locales, de s'investir dans


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la lutte contre ce éau et de pouvoir béné cier de nancements pour le diagnostic, le contrôle voire le traitement du saturnisme, au même titre que les organismes privés habilités. Pourriez-vous nous con rmer votre accord dans ce sens et préciser les délais de mise en oeuvre de tels moyens ?

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La parole est à M. Daniel Vachez.

M. Daniel Vachez.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je vais faire une intervention un peu déconnectée des précédentes, mais que je crois très importante. Je me suis félicité, comme tous les députés de la majorité, du vote, juste avant l'été, de la lo i sur l'accueil des gens du voyage. Nous avons en n des dispositions législatives qui devraient permettre, dans les prochaines années, de résoudre progressivement le problème de ce stationnement illicite des caravanes - stationnement quali é parfois de « sauvage » - avec les conséquences que l'on connaît, de plus en plus négatives, pour les riverains, les entreprises, les municipalités, mais aussi pour les gens du voyage eux-mêmes. Après des années d'immobilisme, nous savons bien que c'est grâce à votre action et à votre ténacité, que nous pouvons béné cier d'un tel dispositif, qui prévoit un effort très important du budget de l'Etat. Il reste maintenant à appliquer cette loi et à inscrire des crédits suf sants dans les budgets successifs.

Alors, j'apprécie à leur juste mesure les réponses que vous avez apportées tant pour l'investissement que pour le fonctionnement, 70 millions de francs d'un côté, 30 millions de l'autre, et ce n'est pas négligeable. J'imagine bien les efforts que vous avez dû déployer pour obtenir ces crédits. Néanmoins, je crains que ces montants ne soient pas suf sants. Je mesure bien l'effet paralysant de l'approche des élections municipales pour de nouveaux projets. Maintenant, au projet préparé depuis des années et qui attendait l'adoption de la loi et de nancements plus importants, il faut ajouter la rénovation inévitable des quelques 5 000 emplacements déjà aménagés, rénovation qui va s'avérer indispe nsable pour satisfaire aux normes que vous préparez a n de béné cier de l'aide au fonctionnement. Pour ces emplacements, je dirai, au contraire, que les prochaines élections devraient avoir un effet accélérateur. Les municipalités voudront, le plus rapidement possible, obtenir le conventionnement et les nancements correspondants. Aussi la budgétisation de 2 000 emplacements en investissement et de 3 000 en fonctionnement risque d'être trop limitée.

Quelle réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, apporterez-vous, si, au cours de l'année 2001, vos crédits s'avéraient insuf sants ? Après avoir écouté tous mes prédécesseurs, je ne voudrais qu and même pas que la réponse soit un collectif budgétaire, avec redé ploiement de crédits qui ne seraient pas utilisés parce que je m'associe totalement à toutes les déclarations faites précédemment par les députés de mon groupe.

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous l'aurez remarqué, les députés ont apprécié à la quasi unanimité les mesures positives de votre budget. Sachez que vous aurez notre soutien pour son exécution.

Néanmoins, les députés vous ont posé des questions sérieuses sur une bonne mise en oeuvre. Nous serons donc très attentifs à vos engagements. Nous savons bien que vous n'êtes pas seul à décider, ni votre ministère ni vous-même, mais nous serons très attentifs à ce qui pourra se passer.

Vous avez la parole, monsieur le secrétaire d'Etat.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que tous les intervenants, à commencer par vos rapporteurs, dont les contributions, bien évidemment, nous ont apporté non seulement des encouragements pour ce qui a été fait, mais aussi des stimulations pour ce qu'ils aimeraient que l'on puisse faire, ou que l'on puisse faire mieux.

Si, par hasard, je ne pouvais pas répondre précisément à toutes vos questions, sachez que j'ai pris bon nombre de notes et que je m'y reporterai, convaincu que je suis qu'elles pourront nous aider au l de l'année dans les travaux que nous aurons à conduire. Au l de l'année, dis-je, parce que je pense à cette mesure que vous avez regretté de voir prise en septembre dernier, sans consultation des parlementaires, en ce qui concerne la modi cation des barèmes du prêt à taux zéro. C'est vrai qu'un problème de calendrier existe. Pendant trois trimestres, le parlement siège, il est présent, vigilant et il aide beaucoup. Mais durant l'été, tous les ajustements au projet de loi de nance sont à faire. Des décisions doivent souvent être appliquées administ rativement dès cette période pour prendre effet au 1er janvier suivant. Il m'arrive parfois de regretter que le Parlement ne soit pas mobilisé à ce moment-là. Je crois quand même que nous risquons d'avoir durablement à subir cette épreuve du calendrier...

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Il faudrait organiser des permanences. (Sourires.)

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Ce n'était qu'une simple parenthèse. Mesdames, messieurs, vous avez soulevé, je pense, l'essentiel des dif cultés auxquelles nous sommes confrontés. Comme vous, nous enregistrons avec conviction un certain nombre d'avancées fructueuses qui continuent à avoir une très bonne traduction. Comme le disait à l'instant Jacques Guyard, après les rapporteurs, le niveau de l'activité témoigne en lui-même de l'ef cacité de beaucoup des mesures adoptées. La création de 70 000 emplois directs par les seules entreprises du bâtiment -mais on nous dit qu'indirectement les fournisseurs en ont créé sans doute autant- nous permet d'af rmer que nous avons franchi au moins le cap des 100 000 emplois créés. Ce n'est pas négligeable, bien évidemment.

Comme ne l'est pas non plus le souci qui a prévalu de prendre les mesures les plus équilibrées possible dans leurs retombées pour les publics concernés. Quand ont été prises des mesures scales très fortes pour alléger la pression existant sur l'immobilier, c'était une petite révolution, parce qu'il existait une espèce de tradition paresseuse selon laquelle l'imagination scale s'arrêtait au plus visible, au plus facilement localisable ou indélocalisable, et c'était toujours l'immobilier qui était largement mis à contribution. Quand ces mesures ont été retenues notre idée était, bien évidemment, qu'elles auraient davantage de retours pour la propriété que pour la location. Ce fut un argument pour que soit admis, par exemple, dans la loi de nances pour 2000, la suppression du droit au bail, 7 milliards de francs. Ce fut aussi un argument pour légitimer qu'aboutisse en n une réforme des aides au logement qui représentera 6 milliards et demi de francs. Ainsi, 13 milliards et demi pour les locataires les plus modestes. C'est une façon d'avoir une politique équilibrée quelque part, une politique à laquelle nous étions très attachés pa rce que nous avons toujours vos propres attentes présentes à l'esprit.

Vous les aviez formulées, nous n'avons rien inventé.

De même, le gel des loyers pour le secteur HLM, quelle légitimité ? A l'origine, essentiellement, un constat. Dans la décennie 90, le logement a con rmé qu'il était bien de plus en plus le premier poste dans les dépenses des ménages. A regarder de près l'évolution respective des loyers dans l'offre privée et dans l'offre des HLM, l'ICC a été un élément de maîtrise des loyers, pour ne pas dire de blocage, dans les années de dif culté du bâtiment.

Les organismes HLM n'étaient pas liés, pour ce qui est notamment des of ces, à cette ICC. Pendant toutes ces années-là, tous les organismes ont augmenté leurs loyers, par nécessité, davantage que ne pouvaient le faire les propriétaires privés. Les locataires HLM étaient à même de faire valoir qu'ils n'avaient pas eu le même traitement. Des mesures ont été prises pour donner de l'oxygène aux organismes, et le souci du gouvernement a donc été de trouver des dispositifs permettant que cet oxygène pro te, pour une part au moins, de manière lisible et directe aux locataires. D'où l'idée du gel qui n'était pas rattachée à une a nalyse d'ensemble. Il y avait là une vraie légitimité, mais bien évide mment, la décision de gel n'est ni irréversible ni dé nitive. Nous nous mobilisons en ce moment dans une discussion avec le mouvement HLM pour lui assurer les moyens d'honorer l'engagement de l'an dernier, c'est-à-dire un gel portant sur deux années. Et c'est bien pourquoi vous avez pu souligner les mesures que vous avez effectivement soulignées. Ces quelques observations liminaires pour que nous soyons bien au clair sur ce point.

La question de la construction sociale est revenue dans la plupart de vos interventions. Il faut la traiter un peu de manière liminaire, mais complètement et clairement dans le cadre des travaux de votre commission. On peut mettre en cause les effets des augmentations observées, soit sur le foncier, soit sur le coût de la construction. Les effets, personne ne peut les nier. Ce sont des éléments défavorables qui sont survenus après la créatio n du


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PLUS durant l'été 1999. Nous sommes là en discussion avancée avec l'union d'économie sociale du logement. On peut aussi regretter que l'engagement de la convention du 3 août 1998 ne soit pas rigoureusement tenu. Quel engagement ? L'engagement d'affecter à la construction sociale sur la collecte du 1 % et les moyens que dégagent ses retours, un minimum de 4 milliards et demi alors que nous étions en deçà des 4 milliards et dans une démarche de régression progressive de l'engagement du 1 %.

Peu de temps après avoir signé l'engagement de 4 milliards et demi, le président de l'union d'économie sociale du logement, à l'époque encore M. Barri, nous a indiqué : « vous savez, nous avions vraiment la volonté d'aller dans cette direction ; nos capacités porteront très vraisemblablement sur une somme qui ira au-delà de l'engagement des 4 milliards et demi. » Il a même

parlé de 5 milliards, et ce devait être un minimum. Je crois qu'au niveau des dirigeants nationaux, il y avait sincérité. Simplement, c'est un point où les choses méritent d'être clari ées.

Les organismes collecteurs du 1 % sur le terrain, les CIL, sont restés dans la logique traditionnelle d'une contribution à l'effort de construction de logements sociaux, avec des réservations en contrepartie.

C'est une vieille culture dans le mouvement du 1 %, que cette culture des réservations. Elle a été réactivée par la réalité de l'organisation sociale, le salariat des grandes entreprises, avec de gros effectifs, intéressé par les réservations dont on pouvait bé né cier et dont les comités d'entreprise parlaient. L'entreprise ellemême disait qu'il s'agissait d'un complément de ressource ou d'un avantage complémentaire dans la rétribution. Ces organismes continuent encore aujourd'hui à faire des réservations, mais, à regarder un peu les choses de près, j'ai le sentiment qu'ils en font beaucoup moins. C'est le problème. Si, sur un programme de cinquante logements, les réservations, même revalorisées en coût unitaire, tombent à 10,5 % au lieu d'être, comme elles ont longtemps été, à 12 ou 15 %, il est clair qu'il y a une rétraction du 1 %. Quelque part, c'est ce que nous sommes en train de voir avec nos interlocuteurs du 1 %. Il n'y a pas à examiner nalement les bases sur lesquelles interviennent les CIL, avec, bien sûr, le souci du pro l des contributions apportées. Car on ne peut pas accepter le raccourcissement, quand il s'opère, ni le renchérissement des taux. Il faut que ce soit une réelle contribution à l'équilibre des opérations. Nous espérons, dans les prochaines semaines, aboutir sur ce point à des avancées. Néanmoins, je vous l'ai dit, mais je souhaite le con rmer, l'Etat ne va pas se dispenser d'un effort. A notre initiative, une discussion est ouverte sur la révision de ces paramètres de manière à ce ne pas laisser se créer de décalage e ntre la réalité des coûts du marché et l'ICC, faute de quoi effectiv ement il se produit une désolvabilisation inacceptable de la subvention aide à la pierre. Nous espérons que, sur ce point, nous avancerons aussi. Cela dit sur les nouveaux facteurs négatifs apparus, sur ce que pourrait faire mieux le 1 % et l'Etat luimême, nous sommes obligés de remarquer que le produit aujourd'hui le mieux nancé, c'est-à-dire le PLUS ou PLAI acquisition, que l'on appelle toujours « acquisition-amélioration » -j'espère que dans les prochaines circulaires on parlera d'acquisition avec ou sans travaux- continue à stagner. Très souvent on voit trop d'organismes qui interprètent le recours à ce mode de nancement comme devant déboucher sur des travaux très coûteux. Ensuite on a des loyers de sortie inacceptables. Sur l'acquisition-amélioration, alors que le prêt à cinquante ans joue sur la valeur d'achat du bâtiment lui-même, et pas seulement sur le foncier, on s'aperçoit que nous sommes en baisse de production.

Et c'est le mieux nancé ! Alors qu'il y a un très léger tassement dans la construction neuve, une quasi stabilisation, nous observons dans ce domaine une régression davantage imputable à l'acquisition-amélioration qu'à la construction neuve.

Là, j'en suis convaincu, il y a un problème de ressaisissement nécessaire de tous les acteurs. Il est vrai que quelque part un changement de culture est demandé aux organismes HLM. Traditionnellement, ils avaient un patrimoine uniquement en immeubles complets. Si l'on veut la mixité sociale, y compris dans les quartiers construits sans la prévoir, c'est bien par les acquisitions qu'on peut la créer après coup. Il faut donc que nos organismes HLM se donnent l'objectif de se constituer un patrimoine locatif dans le diffus, que ce soit dans le diffus collectif ou dans le diffus individuel. C'est ainsi que l'on obtiendra des résultats dans la double direction qui les motive et que nous partageons : l'objectif de mixité, l'objectif de satisfaction du droit au logement. Il faut donc que les organismes évoluent culturellement dans cette direction. Et il faut que les collectivités locales les accompagnent. Quand nous mettons en cause l'insuf sance de la construction, ce n'est pas pour adresser des reproches à des communes qui, d'une manière excessive, ont accueilli du logement social pour 40, 50, 60, 70, parfois 80 % de leur patrimoine immobilier. Ceux que l'on doit mettre en cause, ce sont ceux qui, par leur inertie, ont fait se créer ces concentrations qui posent tant de problèmes, qui mettent en échec tant de travail social. Il faut bien voir là que c'est la logique de la loi SRU qu'il nous faut absolument faire prévaloir.

Il est vrai que la LOVE avait créé des espérances. Il est vrai qu'on a pu se dire à l'usage que, ces espérances, nous ne les retrouvions pas concrètement. C'est la raison pour laquelle nous avons la LOVE renforcée. La SRU n'a pas défriché de terrains nouveaux. Elle a essayé de valoriser les acquis de la LOVE en allant plus loin dans la fermeté. Effectivement, le dé cit global des communes de plus de 3 500 habitants dans les agglomérations de plus de 50 000 habitants ou de 1 500 dans l'agglomération parisienne, s'apprécie dans les 450 000 ; il nous manque 450 000 logements sociaux.

Cela veut dire très clairement que si l'on veut combler ce dé cit et stopper le mécanisme de concentration excessive dans certaines communes, il faut que, dans les vingt ans, nous ayons ces 450 000 logements. Cela veut dire que les communes actuellement « inaccueillantes » au logement social doivent appliquer la loi à hauteur de 22 000 logements par an. Il est évident que si nous ajoutons ces 22 000 logements, qui ne se font pas mais que la loi rend obligatoires, nous retrouvons un rythme de construction autour de 60 000 logements, nous nous rapprochons de ce qui est nançable, les 70 000 logements. Je crois qu'il faut bien dire tout cela, avoir tout cela présent à l'esprit pour que notre débat puisse être utile sur ce point.

Je vais essayer peut-être d'en venir à quelques-unes de vos questions de manière à ne pas m'en tenir à des données que vous pourriez considérer comme trop générales.

Votre rapporteur, Jean-Louis Dumont, a pris des exemples concrets pour poser le problème. Il a pris notamment pour la construction sociale le cas de la Charente-Maritime. Il est parfaitement vrai que nous avons beaucoup incité les préfets à mobiliser le plus possible élus et organismes HLM. On constate des progrès dans deux régions, ce qui nous donne un peu à espérer que la mobilisation, si elle se généralise, pourra porter des fruits. Je pense à l'Ile-de-France et à la PACA. L'Ile-deFrance, c'est y compris Paris, il faut dire les choses telles qu'elles sont. Nous avons eu des discussions délicates, mais fermes avec les élus parisiens. Nous en sommes venus à la signature d'une convention. Le niveau de la construction était tombé à quelque 700 logements locatifs annuellement. Dans la convention, nous avons obtenu un engagement, une signature pour retrouver le niveau de 2 000 logements par an. Selon les dernières indications que nous avons, nous serions passés, dès la première année d'application de la convention, de 700 à 1 700. Nous sommes donc effectivement en route vers les 2 000 logements. Il y a des cas du même type en région PACA.

S'agissant de la déconcentration pour activer la mise en place d'opérations, je pense à l'opération de construction-démolition à Metz. C'est vrai qu'il y a eu la décision de faire traiter les problèmes au niveau départemental jusqu'à 100 logements démolis.

Maintenant, dans le cas précis de Metz, il faut savoir qu'il y a le souci de bien préciser, avant la démolition, quelles sont les intentions. Ce ne sont pas les intentions qui doivent être traduites dans un plan de masse, je ne sais pas si les services instructeurs iraient jusque là. Nous savons tous qu'entre le moment où l'on démolit et le moment où l'on réutilise le foncier, se d onner le temps d'un peu de ré exion ne serait pas mal venu. Avant de démolir, il faut reconstruire si possible ailleurs, et donc si possible en mettant en oeuvre les objectifs de mixité dans les quartiers qui peuvent y contribuer. Mais il faut quand même être clair sur les perspectives retenues car le projet urbain, non pas dans sa concrétisation graphique -car si on va jusque là on va tout bloquer- mais au moins dans ses orientations et ses options, doit pouvoir comporter des engagements clairs. Je crois savoir que c'est bien ce message qui a été demandé dans le cas


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de Metz. La réponse est parvenue et elle est rassurante. La prochaine commission, qui se réunira début décembre, devrait pouvoir examiner favorablement l'opération. En ce qui concerne Saint-Dié, nous serons attentifs, mais je crois savoir que les petites opérations en cause font encore l'objet de débats avec les élus locaux eux-mêmes. Dès que les choses seront clari ées, tout cela pourra progresser.

M. Alain Cacheux a fait part de ses craintes de ralentissement de l'accession sociale. S'agissant de l'accession sociale, nous ne sommes pas exposés à des blocages car nous sommes quand même dans un système où il n'y a pas de contingentement, c'est-à-dire que nous ne pouvons pas limiter la distribution annuelle des prêts. En revanche, nous pouvons, et plusieurs d'entre vous l'ont souligné, débattre du bon ajustement de la durée des différés en fonction des différentes tranches de ressources. Nous y sommes bien sûr attentifs. Il faut quand même bien voir que le prêt à taux zéro ne nance que 20 % des opérations, qu'il est complété par d'autres prêts, et que l'augmentatio n du taux d'intérêt des autres prêts est sans doute plus à l'orig ine de la remise en cause de certaines opérations que le simple réajustement du différé sur un prêt qui, lui, est à 0 %. Il n'y a pas encore, me semble-t-il, d'alarme sérieuse sur ce point. J'étais hier, pendant une bonne heure, à la « semaine de la maison individuelle » qui a remplacé le salon de la maison individuelle.

Le président de l'UNCMI, organisatrice de ce salon, m'a dit qu'il voyait moins de sociétés de constructeurs de maisons individuelles intéressées par le salon. Quand il a demandé à ses adhérents pour quelles raisons ils désertaient le salon, la réponse a été celle-ci : « Les carnets de commandes sont trop remplis, pourquoi consacrer du temps à aller chercher de nouveaux clients ? » Cette année, au salon de la maison individuelle, il y a moins d'exposants et la raison, c'est les carnets de commandes, le président de l'union des constructeurs me l'a indiqué. Il m'a précisé aussi que les chiffres dont nous pouvions disposer étaient quelque peu altérés à la baisse d'une façon arti cielle. Il faut mettre beaucoup en cause les délais de livraison des fournisseurs, y compris des grands groupes. Ils les évaluent maintenant à trois mois au lieu de quinze jours ou trois semaines. « En réalité, dans les chiffres que nous aurons cette année, de par les retards que prennent nos propres fournisseurs, il y aura une réduction de notre activité qui sera arti cielle car ce sont des commandes que nous gardons sous le pied ». Telle est son interprétation. Son analyse de la conjoncture lui faisait dire : « Nous avons eu un moment où nous aurions pu redouter une certaine surchauffe ».

Dans le propos public qu'il a tenu à l'adresse de tous les exposants, il a fait état devant les professionnels d'une phase d'atterrissage, pas d'un crash, et il a même parlé d'un atterrissage « sur les cimes ». Un « atterrissage sur les cimes », essayons bien sûr de nous y tenir.

J'en viens au foncier. Il est vrai que peut-être les sollicitations des régions n'ont pas été aussi grandes que nous pouvions nous y attendre. Nous avions obtenu que dans les mandats de négociation donnés aux préfets de région, il soit possible de proposer des conancements pour des opérations foncières dans le cadre du contrat de plan correspondant au XIIe Plan. C'est la première fois que des crédits ont ainsi été réouverts pour le f oncier dans le cadre des contrats de Plan. Peut-être est-ce parce que nous en sommes au début que les demandes sont relativement modestes ? Beaucoup de régions n'ont pas voulu s'engager dans cette voie.

En ce qui concerne l'Ile-de-France, je veux souligner à Jacques Guyard que le décret de juin 2000 a précisé, en les améliorant, les aides du FARIF, désormais budgétisées, les aides à la surcharge foncière. Sur ce point, nous avons obtenu des garanties et j'espère que tout cela fonctionnera au mieux. Cette ligne nous semble, en fonction de la demande que nous connaissons à ce jour, calibrée de manière à pouvoir effectivement y répondre.

M. Meyer a parlé du gel des loyers. J'ai dit dans quel esprit il avait été décidé. Il n'y a pas de contradiction entre le gel des loyers et le fait que, dans l'équilibre des opérations, on soit passé de 1,2 % à 1,6 % pour les hausses prévues pour les loyers. Simplement, on tient compte de l'évolution de l'ICC. Mais pour les nancements 2000 et 2001, ce ne seront que des livraisons n 2001 et début 2002 et nous serons sortis du gel des loyers. Je veux dire par là que le passage du 1,2 % au 1,6 % facilite les équilibres d'opérations qui ne seront pas concernées par le gel des loyers. Voilà pourquoi il n'y a pas contradiction sur ce point.

Pour la réhabilitation, je souhaite indiquer que nous avançons avec 120 000 PALULOS nancés, mais comme il y a fongibilité, il y a un peu débordement. Nous sommes plutôt à 130 000.

Dans bien des cas, c'est mieux nancé que le taux de base, parce que la fongibilité nous donne quelque aisance, si bien que la sous-consommation des crédits d'aide à la pierre n'est pas intégrale. Quelque part, la réhabilitation en pro te. Nous avons introduit, depuis maintenant trois ans, l'habitude de procéder à l'automne à des redistributions de crédits entre régions en fonction de la consommation des crédits. Là encore, avec le souci d'éviter le paradoxe de quelques régions manquant de crédit alors que d'autres auraient été particulièrement inac tives et n'auraient pas consommé les leurs.

La taxe sur la vacance n'était pas du tout un objectif de ressources pour le budget de l'Etat, puisque le produit va à l'ANAH. La nalité de la taxe sur la vacance est essentiellement pédagogique. Nous souhaitons que les propriétaires d'un bien vacant recevant cette taxe à payer se disent : « Devons-nous payer cette taxe ? Ne ferions-nous pas mieux de remettre ce logement en location ? ». D'autant que l'ANAH leur indique à ce moment-là qu'en plus d'aides habituelles elle met 20 000 francs sur la table pour la remobilisation d'un logement vacant. Nous, nous souhaitons que le dispositif ait le plus faible rapport possible. Il est vrai qu'au mois de juin, nous étions à 77 millions.

Mais il est vrai aussi que les services scaux ont à gérer des réclamations et que nous ne saurons réellement le produit 2000 qu'en n d'année, car beaucoup de rôles ont fait l'objet de réclamations. C'est un peu l'objectif de cette taxe que d'obliger à la discussion, que de clari er la réalité de la vacance. Bref, espérons surtout que ce sera une occasion de remobilisation, parce que, sur la période 1990-1999, le recensement dont on commence de plus en plus à disposer des éléments, nous apprend que, malheureusement, le développement de la vacance a été une réalité plutôt en zone urbaine qu'en zone rurale et plutôt là où il y a des tensions sur la demande de logements qu'ailleurs. Quelque part, il me semble que la taxe est largement légitimée. Une toute petite parenthèse : c'est au moins un point sur lequel le Président de la République a félicité le gouvernement parce que, disait-il, la mesure aurait du être prise depuis longtemps.

M. Morisset m'a interrogé sur le bilan de la loi exclusion. Je souhaite indiquer qu'une plaquette a pu vous être adressée il y a quelques jours. Elle fait le point chiffré de l'utilisation de toutes les lignes nouvelles que la loi exclusion a permis de mobiliser. Je dirai simplement une chose sur les FSL dont on aurait souhaité qu'ils puissent être moins sollicités. Effectivement, ils l'ont ét é beaucoup et ils demeurent bien sollicités puisque, depuis leur doublement, dans les trois dernières années, ce sont 500 000 ménages supplémentaires qui ont été aidés par les FSL. Au to tal, depuis leur création en 1990, ont été concernés 1 500 000 ménages, soit un million entre 1991 et 1997 et 500 000 depuis trois ans. On peut en déduire que, sans doute, ce sont des centaines de milliers de procédures d'expulsions qui n'ont pas eu lieu ou, en tout cas, n'ont pas abouti grâce au FSL, même si on peut surtout fonder des espoirs sur le fait qu'il y a moins de ménages éligibles aux aides au logement à barème inchangé. Ce qui signi e quand même qu'il y a une amélioration de la situation et c'est bien cela l'essentiel. L'aide à la médiation locative aura pris un peu de retard. Instituée par la loi exclusion, elle nécessitait des textes d'application. La circulaire est sortie dans l'été, elle est interministérielle et dès cette année, 20 000 logements sont concernés avec une somme de 60 millions de francs.

Le saturnisme a eu droit à une ligne nouvelle de 75 millions de francs. Ces ajustements ne correspondent qu'à la réalité des besoins constatés. Il est bien évident que ces petites lignes sont appelées à connaître des révisions à la hausse si les besoin s sont là, car je ne vois pas quel ministère pourrait proposer de faire des économies sur des actions aussi fondamentales, aussi vitales, puisqu'il y a l'enjeu de la précarité des personnes concernées et l'enjeu de leur santé, donc l'extrême nécessité de faire face a ux besoins.

Je sais la préoccupation de Mme Janine Jambu à propos de la facilité de gestion que représente la mesure de non-versement des aides personnelles en dessous de cent francs par an. Il est sûr


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que c'est une facilité de gestion. Plus les sommes sont modestes, plus le coût de leur mise en place est proportionnellement élevé.

Je pense qu'il faut aussi savoir que la mesure joue dans les deux sens, c'est-à-dire que l'on est là dans la frange des familles, des ménages qui deviennent imposables sur le revenu de manière plus signi cative. Tant que l'impôt sur le revenu n'atteint pas cent francs, lui non plus n'est pas mis en recouvrement. Ce n'est pas une mesure de simpli cation à sens unique, uniquement quand il y a des prestations à verser. C'est vrai aussi quand il y a un impôt à percevoir. J'ose espérer également un effet positif sur ce seuil qui depuis douze ans n'a pas été revalorisé. Quelque part, en francs constants, il s'est amenuisé. J'ose en n espérer que la réforme des aides au logement, par les avantages qu'elle va apporter à la plupart des béné ciaires, réduira le nombre de ceux qui seront dans une situation tangente.

Bien évidemment, pour les conférences communales rétablies en Ile-de-France, nous avons l'article 63 ter de la loi SRU. Elle devrait normalement être adoptée le 21 novembre. Une saisine du Conseil constitutionnel pourrait différer sa publication et donc son application de quelques semaines. Mais j'ai le sentiment que l'on est quand même dans un calendrier qui nous donne à penser, n'est-ce pas, monsieur le rapporteur, que vous n'aurez pas consacré tant d'énergie en 2000 pour que les dispositions ne soient pas applicables dès 2001. J'ai l'impression que l'on va pouvoir tenir ce délai.

Pour ce qui est de vos préoccupations sur le patrimoine de la SCIC, madame Jambu, là aussi, vous le savez, un amendement en deuxième lecture a été voté dans la loi SRU, non con rmé par le Sénat, mais dont votre rapporteur et vous-même aurez le souci qu'il soit sans doute repris dans le texte dé nitif. Il reste que des logements sont sortis des conventions avant la mise en oeuvre de la loi SRU, et qu'effectivement, il est souhaitable que le souci existe de préserver des équilibres dans les territoires. Il faut donc avoir une concertation collectivités locales, Etat et Caisse des Dépôts.

Indépendamment d'une mesure qui aille dans le sens de vos préoccupations, insérée dans la loi SRU, nous prendrons, dès que cette mesure sera votée, l'attache de la Caisse des Dépôts et de la SCIC pour essayer de faire prévaloir l'approche territoriale, de manière que l'on ne s'en tienne pas à une approche strictement juridique. Dans ce cas, ce qui aurait échappé serait irréversible. Il faut, je le crois, arriver à des mesures les plus intelligentes possible et les plus socialement convenables. Voilà en tout cas les préoccupations que nous essaierons de faire prévaloir en sachant que nous sommes en parfaite harmonie de point de vue avec vous sur ce point.

Pour le livret A, je vous donne acte que quelques modalités sont encore à préciser dans les mesures de compensation, notamment pour ce qui est des dispositions concernant les dérogatoires d'amortissement. Pour les nouveaux prêts, passés de 32 à 35 ans, normalement, l'allongement de la durée permet de maintenir les conditions précédentes.

Vous avez été plusieurs à soulever le problème des charges locatives, notamment en fonction de l'évolution des prix de l'énergie. Le projet de loi de nances comporte une mesure de baisse de la TIPP applicable au oul domestique. A été posé, d'une manière légitime, le problème des logements qui béné cient d'un chauffage par des réseaux de chaleur ou des réseaux collectifs utilisant le fuel lourd. Une mesure analogue en leur faveur mérite sûrement un examen attentif. Je crois que les préoccupations de mon collègue du budget portent sur le souci que ne soit bien concerné que le chauffage des logements, faute de quoi on créerait d'autres disparités entre utilisateurs du oul lourd. C'est donc un point qui mérite d'être approfondi. Pour ce qui est du gaz, il y a à la fois décalage et moindre impact, même s'il y a un lien avec l'évolution des coûts des produits pétroliers. Ce décalage se traduira notamment par un étalement dans le temps, GDF ayant précisé que son ajustement passerait par une première étape au 1er novembre, une seconde étape étant prévue le 1er mai, c'est-à-dire après la période de chauffe à venir.

Nous attendons aussi, pour ce qui nous concerne, des avancées provenant de la réglementation thermique dont vous savez que le texte va paraître. On peut en espérer une diminution de l'ordre de 20 % des coûts de chauffage lorsque la réglementation sera appliquée dans le résidentiel, 40 % même dans le non résidentiel.

Bien évidemment, nous ne perdons pas de vue qu'il serait positif qu'un décret puisse paraître sur les charges, notamment les charges récupérables et leur ventilation entre bailleurs et locataires. La question a été ouverte devant la commission nationale de conciliation, la CNC. Elle n'a pas abouti à ce jour. J'ose espérer que ce n'est pas un problème qui restera en l'état et que la discussion reprendra.

S'agissant de l'ANAH nouvelle mouture, précédemment il était indiqué que les moyens de paiement étaient inférieurs aux moyens d'engagement. C'est uniquement à partir du constat de l'existence effective d'une trésorerie. Nous veillerons, bien sûr, à ce que ces retards de consommation de crédits ne proviennent pas, comme le redoutait Patrick Braouezec, de l'adoption de dispositions restrictives à l'encontre des volontés de la représentation nationale et du gouvernement. On a déjà vu pas mal de choses en ce qui concerne ces problèmes.

M. Guy Malandain a soulevé la question des tensions dans le bâtiment, mais j'y ai également fait référence. Sur le recrutem ent dans le bâtiment, je veux signaler qu'il y a eu des efforts des organisations professionnelles, mais aussi des ANPE, avec des accords FFB-ANPE ou CAPEB-ANPE. Jean-Claude Gayssot s'est également efforcé de dynamiser le recrutement sur un thème, dont vous avez pu voir quelque communication, utilisé à l'adresse des jeunes : « Tu sais, on te prend, tu ne sais pas, on t'apprend ». C'est une formule dynamique, laissant entendre qu'il n'y a pas d'impossibilité d'accéder à des emplois disponibles dans ce domaine. Bien évidemment, nous restons vigilants sur tous les efforts qui touchent à la formation, et qui sont une réponse de fond à un problème révélé par la bonne santé du bâtiment. C'est un problème récurrent. Même quand les établissements d'enseignement technique public produisaient un certain nombre de diplômés dans ces métiers, une évasion se produisait dans les années suivant la sortie des établissements.

C'est donc un problème très durable, et c'est sans doute sur ce point qu'il faut saluer l'engagement des organisations professionnelles du bâtiment, notamment de la CAPEB, qui a été parmi les premières à signer les 35 heures, avec le souci de donner de l'attractivité à ses emplois pour recruter plus facilement.

J'ai bien entendu ce qui a été indiqué par Jacques Guyard et Pierre Méhaignerie sur le nancement des agences d'urbanisme et des ADIL. Nous sommes là en phase parfaite. Pour les ADIL, il y a une augmentation conforme à l'augmentation à soutenir du nombre des ADIL, mais si ce nombre devait s'accroître nous devrions être au rendez-vous. Il est vrai qu'un « plus » budgétaire serait nécessaire à ce moment-là et faciliterait les choses. Sur l es agences d'urbanisme, il n'y a pas de restrictions juridiques à la création d'agences en milieu rural. Il faut cependant souligner qu'une agence, pour avoir une réelle valeur ajoutée par rapport à ce que pourraient faire les services techniques des collectivités elles-mêmes, doit se doter d'une équipe pluridisciplinaire, ce qui est coûteux et ne se conçoit que dans un périmètre assez large pour une valorisation utile.

Je veux souligner, parce que cela me semble constituer une piste intéressante, le fait que dans plusieurs régions, on voit les agences de grandes agglomérations proposer leurs services à de plus petites agglomérations, étendre leur compétence aux périphéries des agglomérations dans lesquelles elles intervenaient. Il n'y a pas une augmentation du nombre des agences, mais une augmentation de leur activité et de leur ef cacité. Il faut effectivement soutenir le mouvement. Nous encourageons le phénomène après avoir, vous le savez, redonné un fondement législati f à l'existence des agences et conforté leur statut.

Je comprends que votre collègue M. Vachez ait eu des interrogations particulières sur la loi qu'il a suivie avec tant d'attention et à laquelle il a beaucoup apporté, la loi sur l'accueil des gens du voyage. Je souhaite lui con rmer que nous avons bien, en 2000, 75 millions de crédits et que nous passons à 140 millions en 2001, puisqu'il y a bien deux fois 70 millions inscrits, même si nous avons un accord avec le ministère de l'emploi et de la solidarité pour qu'il y ait une gestion unique des deux fois 70 millions de dotation et non pas deux instructions de dossier.

Nous avons un souci de la simpli cation. A notre connaissance, l'enveloppe devrait être à l'échelle des besoins, dans la mesure où, malheureusement, beaucoup de discussions n'ont pas encore abouti, mais elles devront aboutir avant le 5 janvier 2002, puisque ce sont les dix-huit mois pour les schémas départe-


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mentaux d'accueil des gens du voyage qui, bien évidemment, vont déclencher des opérations plus nombreuses à partir de 2002. Mais pour 2001, nous avons le sentiment que nous devrions pouvoir faire face. Si ce n'était pas le cas, nous y penserions, et si possible de meilleure façon que par le redéploiement que vous pouvez appréhender.

Vous avez été nombreux, M. Alain Cacheux, M. Morisset, M. Dauge et d'autres, à parler du statut des bailleurs dans son volet aussi bien constructions neuves que patrimoine ancien existant. Je peux vous rassurer sur ce point, le ministère du logement est très attentif aux propositions que vous faites. Il serait heureux de pouvoir accompagner leur aboutissement avec, pour le neuf, néanmoins, la nécessité de trouver un encadrement évitant des abus que le service de législation scale avait relevé d'une manière, je le crois, pertinente. Il est vrai que des cas se sont présentés où des investissements pour descendants débouchaient sur des descendants étudiants, qui émargeaient à l'ALS, et pour lesquels étaient demandées par les parents des réductions scales au titre de la contribution alimentaire des parents. Quelque part, cela faisait quand même beaucoup. Il convient donc de trouver une solution moralisante pour que ces situations ne se reproduisent pas. Nous sommes attentifs à la recherche d'une formule qui pourrait éviter ces légitimes critiques, et qui pourrait aussi ne pas donner le sentiment à des couches moyennes d'être pénalisées inutilement, alors qu'il y a bien quelquefois légitimit é à accompagner les études supérieures d'enfants obligés de quitt er le domicile familial.

Pour ce qui est du logement ancien, nous sommes, en ce qui nous concerne, complètement d'accord. Il y a quelque part une anomalie à avoir voulu le statut du bailleur et à avoir, dans le même temps, introduit des disposions trop restrictives pour sa mise en oeuvre. Les locataires peuvent y gagner car il y a le plafonnement des loyers. C'est donc une mesure assurée d'être équilibrée. Alors a-t-elle un coût budgétaire ? A mon avis, il est très limité. Mais avec l'avantage loyer, il y a sans doute un avantage au niveau des aides au logement. Quelque part, il faut que sur ce point nous fassions aboutir les choses en mobilisant nos énergies respectives : non pas qu'il y ait un grand méchant loup à dénoncer, mais simplement un souci de réaliser les choses de manière juste équitable, ef cace. J'espère que grâce à tous, nous y parviendrons.

On a dit que l'Etat devrait rechercher l'exemplarité. Je crois que c'est M. Jean-Louis Dumont. Le cas des terrains de Laennec a été cité. Nous avons bloqué le processus de vente qui étai t engagé avec un promoteur privé qui ne comptait pas réaliser effectivement de PLUS. Nous sommes en négociation pour que, même dans cette opération et même dans cet arrondissement, on ne se dispense pas de respecter l'esprit et la volonté de la loi SRU. Il faut que dans cette opération nous ayons les 20 % de logements sociaux au minimum.

M. Jean-Louis Dumont, rapporteur spécial.

Notre collègue Malandain a donné d'excellents conseils sur l'utilisation de ces terrains.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Je crois que j'ai dû faire écho à beaucoup d'interrogations et que ne devrait pas demeurer dans les esprits l'accusation d'hypocrisie que j'ai entendue de la part de Pierre Méhaignerie que j'écoute toujours avec beaucoup d'attention. Le Gouvernement veut être bien cohérent entre la loi SRU et les modalités de nancement du logement social. Je crois que n'est pas anormale une implication des collectivités locales dans le développement du logement social. Je parle en ayant le souvenir de mes plus petites responsabilités locales, que j'ai d'ailleurs conservées. C'est un levier du développement local. Je peux vous indiquer que dans une ville moyenne que je connais bien, une ville éligible à la DSU, donc une ville qui n'est pas riche, on s'est xé l'objectif de ne jamais tomber au-dessous de la barre annuelle de 5 millions de francs apportés par la ville elle-même aux opérations des organismes HLM. Croyez-moi, cela a été un élément déterminant pour la diversi cation. On a pu créer, dans cette ville, quelque 3 000 logements au total, moitié privés, moitié sociaux, HLM.

En n, M. Jacques Guyard a tenu quelques propos clairs et forts au sujet de la taxe foncière sur les propriétés bâties. N ous sommes en fait complètement d'accord. Nous sommes sur l'approche d'une diminution de 30 % pour tout le patrimoine des ZUS. Je crois que ce sera sensible pour les organismes qui ont les plus grandes dif cultés. Vous avez laissé entendre qu'il y aurait des menaces sur le prêt à taux zéro, qui serait en voie de

« papisation », menacé du même sort que les PAP. Je regrette que M. Pierre Méhaignerie ait dû nous quitter avant la n de cette séance, mais elle a été longue et je comprends qu'il ait pu avoir une autre obligation. Je voudrais rappeler qu'en 1990 nous avions procédé à la première actualisation des plafonds de ressources depuis 1985. C'est-à-dire qu'en 1986, en 1987, en 1988 et encore dans le budget 1989, avec un panel de gouvernements qui se sont succédé, le processus d'assassinat du PAP était en cours. Nous nous étions battus et, avec vous, nous avions pu le rétablir et recréer des PAP, réinscrire des crédits pour les PA P pour la première fois. C'est vrai que l'on n'est plus dans le système des PAP, il y a eu la réforme. Le prêt à taux zéro a é té un coup médiatique assez fort. Il faut saluer au moins cette dimension, car le coût de l'accession à la propriété dans les anné es 1995 représentait encore, pour le budget de l'Etat, plus de 8 milliards, près de 9 milliards. Avec la suppression de tous les avantages scaux, la suppression du PAP, le prêt à taux zéro a pris le relais, mais à 2 milliards de moins. Vendre un produit et le faire réussir en réalisant en même temps des économies budgétaires , je crois que c'est quelque part un tour de force. C'est vrai qu'il ne faut pas laisser se recréer le même processus. Il faut être totale ment vigilant. Tel est vraiment notre état d'esprit.

La contribution de M. Patrick Braouezec portait sur des points sur lesquels nous sommes très sensibilisés. Il faut effectivement que soit soutenu le développement du partenaire associatif. Là encore, je compte beaucoup sur l'Assemblée nationale pour rétablir dans la loi SRU les moyens de nancement votés en deuxième lecture, mais non con rmés. Sur ce point, M. le rapporteur m'adresse des signes qui me paraissent tout à fait rassurants. Il faut tenir bon sur ce point, car nous partageons tout à fait le même objectif.

Il faut aussi que les moyens puissent suivre dans l'effort accru que nous souhaitons dans la lutte contre l'insalubrité et, en même temps, contre ces propriétaires indélicats que l'on baptise justement « marchands de sommeil ». C'est vrai qu'il y a un lien à établir entre les taudis et la précarité, entre les taudis et l'exploitation des pauvres. J'espère que vos contributions, notamment celle de M. Alain Cacheux, en faveur d'un logement décent nous aideront. Je pense aux possibilités de recours qui vont être ouvertes par la loi SRU. Des relocations de logements dégradés ne devraient plus pouvoir intervenir. La relocation est quand même un moment privilégié pour entamer des travaux qui auraient pu éventuellement être différés. On devrait empê cher que ce soit un phénomène reproductible. Il faudrait aussi avoir les éléments d'intervention pour que ce ne soit pas une situation qui se pérennise pour les locataires qui ne connaîtraient pas d'attribution de nouveau logement. Sur ce point, il est essentiel que nous restions mobilisés. Pour faciliter la lutte contre le saturnisme, il y a des dispositions nouvelles s'agissant de l'intervention de l'ANAH qui, normalement, ne pouvait pas faire d'avances aux collectivités territoriales. Là, nous allons les avoir. Dans les mesures d'ores et déjà prises pour traiter les problèmes de copropriété dégradée, l'ANAH va pouvoir intervenir même quand ce que sont des bailleurs sociaux qui font le portage du rétablissement de la copropriété dégradée. Il s'agir a là, bien sûr, d'intervenir dans des copropriétés sous plan de sauvegarde. Vous savez que la loi SRU les a étendues assez largement.

Il y a possibilité d'attribution de subventions de l'ANAH aux syndicats de copropriétés pour les travaux réalisés sur les par ties communes dans les copropriétés dégradées qui n'étaient pas s ubventionnables. Il y aura, lorsque les communes seront amenées à se substituer aux propriétaires défaillants dans la lutte contre l'insalubrité, l'attribution directe de la subvention de l'ANAH.

Elle n'ira pas aux propriétaires défaillants mais bien sûr à la commune qui s'est substituée. J'ai le sentiment que nous sommes là sur des voies et moyens de plus grande ef cacité, dans une action ou se rejoignent les volontés de la loi de lutte contre les exclusions et les volontés de la loi de solidarité et de renouvellement urbain.

Monsieur le président, mesdames, messieurs, vous aviez beaucoup d'interrogations. J'ose espérer que la plupart auront eu quelques échos, sinon une réponse aussi complète que leurs auteurs auraient pu souhaiter. De toute façon, nous resterons en contact et nous essaierons de continuer le travail que nous conduisons ensemble depuis plusieurs années.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 NOVEMBRE 2000

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

Merci, monsieur le secrétaire d'Etat.

La commission de la production et des échanges doit maintenant émettre un avis sur les crédits du logement, étant entendu que seuls votent les membres de la commission.

Je mets aux voix les crédits du logement et de l'urbanisme.

(Les crédits du logement et de l'urbanisme, mis aux voix, sont adoptés.)

M. André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges.

La commission de la production et des échanges émet donc un avis favorable à l'adoption par l'Assemblée nationale des crédits du logement et de l'urbanisme.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures vingt.)

QUESTIONS BUDGÉTAIRES

LOGEMENT 1. M. Robert Honde attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement dans le cadre de la présentation du budget 2001, qui devra être marquée comme l'année de la grande réforme des aides à la personne, poursuivant en cela l'effort continu depuis juin 1997. Outre la réforme des aides à la personne qui a été décidée le 15 juin dernier lors de la confér ence de la famille, qui vise à améliorer l'équité et la solidarité e nvers nos concitoyens à faibles revenus, il lui précise qu'un point d'honneur est mis sur les aides à la pierre pour le parc HLM ainsi que l'augmentation des crédits concernant les actions qui doivent améliorer le cadre de vie des habitants des cités HLM. La mise en oeuvre de ces mesures passe en particulier par l'organisation sur le terrain des organismes susceptibles de faciliter l'accès des demandeurs aux aides dont ils ont besoin. Il a été évoqué que le mouvement de généralisation des ADIL dans les départements devrait se poursuivre. Or en tant qu'élu des Alpes-de-Haute-Provence, il constate que dans ce département on ne dispose toujours pas d'un outil de ce type. Souhaitant que ce budget entraîne des résultats concrets, en particulier dans les départements ruraux, il lui demande quelles mesures il compte mettre en place concrètement a n de développer ces implantations.

Réponse. Le réseau des associations départementales pour l'information sur le logement (ANIL) couvre aujourd'hui près des deux tiers des départements et s'enrichit régulièrement de nouvelles unités (dernièrement le Haut-Rhin et la Charente). Le Go uvernement est effectivement attaché à ce réseau et à sa géné ralisation et plusieurs projets de création avancent bien, y compris dans des départements ruraux tels que l'Orne. Le bon fonctionnement du secteur de l'habitat nécessite une égalité d'accès à l'in formation de tous les acteurs de ce secteur. Dans ce cadre, une bonne information des usagers est indispensable ; elle constitue donc un axe important de la politique du ministère de l'équipement, des transports et du logement. Son objectif est de permettre aux usagers de procéder plus librement, c'est-à-dire en toute connaissance de cause, à leurs choix en matière d'habitat et à l'exercice de leurs droits à travers une information objective, personnalisée et gratuite. Les ADIL, qui répondent à plus de 800 000 consultations par an, répondent à cet objectif et participent ainsi directement à la mise en oeuvre du droit au logement pour tous, notamment les ménages les plus démunis. Ce rôle est reconnu par un article du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains en cours de discussion au Parlement. Ces associations regroupent tous les acteurs locaux du logement, en premier lieu les collectivités locales et notamment les conseils généraux. Ceux-ci assurent une part importante du nancement, conjointement avec l'Etat, les établissements de crédit, les organismes HLM ou collecteurs du 1 % logement. La procédure de création de nouvelles ADIL suppose donc un accord et des initiatives de ces différents acteurs.

Le ministère de l'équipement, des transports et du logement qui participe au fonctionnement de ces structures, prend bien sûr une part active au plan local pour susciter et accompagner ces initiatives. Le budget 2001 traduit cet engagement puisque la dotation de l'Etat pour les ADIL passe de 33,5 MF en 2000 à 35 MF, soit une augmentation de près de 5 %, qui accompagne le développement du réseau sur le territoire national.

2. M. Jean Proriol attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur la nouvelle injustice susceptible de frapper les propriétaires bailleurs. Le maintien, pour les bailleurs privés, de la taxe additionnelle sur le droit de bail avait déjà été resse nti par ces derniers comme une injustice. Sans compter que cette mesure revenait, en outre, à décourager tout investissement dans la pierre.

Les modi cations touchant l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) leur font craindre une autre iniquité. Dans le cadre du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), une extension des compétences de l'ANAH est prévue. L'Agence devrait en effet avoir désormais vocation à inter venir sur l'ensemble du parc privé. Ainsi, ce sont tous les propriétaires occupants qui pourraient béné cier de ses crédits. Toutefois, seuls les propriétaires bailleurs en resteraient les contributeurs. Il lui demande donc ce qu'il compte faire pour apaiser les propriétaires bailleurs émus, à juste titre, par cette nouvelle mesure qui leur est défavorable. Il s'interroge également sur la cohérence de la politique gouvernementale en matière de logements sociaux. La loi SRU rend prioritaire la réhabilitation de ceux-ci, or, les crédits qui sont affectés à ce poste pour 2001 ne semblent pas traduire cette préoccupation. Ils restent, en effet, reconduits à leur niveau de 2000.

Réponse. S'agissant du parc privé, la loi de nances pour 1988 a prévu le versement au budget général de l'Etat du produit de la taxe additionnelle au droit de bail (TADB) (devenue, depuis la loi de nances pour 2000, la contribution annuelle sur les revenus locatifs), qui était jusqu'alors directement perçue par l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH). Depuis 1988, l'agence béné cie d'une subvention d'investissement et d'une subvention de fonctionnement, inscrites au budget de l'Etat et les propriétaires bailleurs ne sont donc plus les contributeurs de ces a ides. La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) permettra de con er à l'ANAH l'ensemble des outils et moyens nanciers mis en oeuvre par l'Etat en faveur de l'amélioration du parc privé, dont la prime à l'amélioration de l'habitat (PAH), destinée aux propriétaires-occupants. L'éli gibilité des logements aux aides de l'agence sera soumise à un critère d'âge uni é. La dotation budgétaire affectée à l'agence a été porté e à 3 milliards de francs dans le projet de loi de nances pour 2001 par addition des 2,2 milliards de francs accordés à l'ANAH par le budget 2000 et des 800 MF affectés à la PAH. Cette réforme permettra notamment une harmonisation des procédures et des règles d'attribution des subventions aux propriétaires bailleurs et aux propriétaires occupants qui cohabitent souvent au sein des mêmes immeubles, tout en préservant la spéci cité des deux aides : ainsi les propriétaires-occupants resteront soumis à des conditions de ressources pour l'attribution des aides. Pour les logements sociaux, les crédits affectés à la réhabilitation du parc HLM permettent , comme les années précédentes, le nancement de plus de 120 000 primes PALULOS. En outre, dans le contexte de renouvellement urbain que le projet de loi SRU entend favoriser, les crédits consacrés aux démolitions sont en hausse de 21 % à 170 MF, pour passer progressivement à l'objectif de 10 000 logements démolis par an qui avait été retenu dans le cadre du comité interministériel des villes. Dans le même esprit, le budget 2001 prévoit aussi un doublement des crédits dits de « qualité de service », qui atteindront 100 MF l'an prochain. Il s'agit d'aider à la réalisation par les organismes HLM de travaux d'amélioration de la vie quotidienne, proches des locataires et appréciés par eux car améliorant directement leur cadre de vie.

3. M. Jean Proriol attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur les contraintes pesant sur les mises en chantier de constructions nouvelles ou de réhabilitations. En effet, dans un contexte économique porteur, qui est celui que nous rencontrons actuellement, la construction neuve de logements, sous forme de maison individuelle, ou la réhabilitation, l'entretien et l'amélioration du parc bâti connaît une croissance sectorielle.

Pourtant, nous ne pouvons que déplorer le goulet d'étranglement administratif qui ralentit les mises en chantier. Les délais sont très longs pour obtenir un certi cat d'urbanisme, ils sont trop longs pour décrocher le permis de construire. Les causes en sont multiples sans doute. La plus couramment avancée par les DDE est l'insuf sance de personnels spécialisés affectés à l'instruction des do ssiers. A cela, s'ajoutent des mutations très fréquentes. Cette situation s'aggrave encore plus en milieu rural, où les subdivisions de terrain rencontrent de nombreuses dif cultés pour garder leurs effectifs budgétaires. Il s'interroge donc sur la politique en matière d'instruction des documents d'urbanisme, des permis de construire dans nos communes, ainsi que des dossiers d'amélioration de l'habitat (ANAH, OPAH), a n de répondre aux attentes impa-


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tientes des candidats au logement. Il se demande également si, plus généralement, le secrétariat ne doit pas, le cas échéan t, af cher clairement sa politique de désengagement dans la conduite d'opérations et la direction de travaux dont les collectivités locales sont maîtres d'ouvrage. Cela permettrait aux cabinets privés de s'organiser, de s'étoffer, voire de se créer, pour répondre à u ne situation inquiétante dans le présent et le futur, d'autant plus que la prochaine loi SRU va inévitablement entraîner de nouvelles perturbations.

Réponse. S'agissant des effectifs du ministère, le budget 2001 est le premier qui stoppe le mouvement de diminution, au rythme de 1 000 pertes d'emploi par an avant 1997 et que le Gouvernement s'était attaché à ralentir régulièrement depuis. Le pro jet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) procède à la simpli cation d'un certain nombre de procédures et notamment à la suppression de formalités obligatoires, en ce qui concerne tant les documents de plani cation urbaine que les certi cats ou autorisations d'urbanisme. Il clari e et assouplit l'ensemble des procédures relatives aux documents d'urbanisme. Il redé nit notamment l'association des personnes publiques à l'élaboration des documents d'urbanisme ; il supprime le formalisme de la procédure qui était source d'un abondant contentieux, il permet aux personnes publiques concernées de dé nir librement les modalités de leur association, d'être consultées à tout moment et sans limitation du nombre de leurs interventions. Il prévoit également des règles facilitant l'évolution des périmètres des sché mas de cohérence territoriale et améliorant l'élaboration et la révisi on de ces documents ainsi que celles des plans locaux d'urbanisme.

En n, en matière de droit des sols, le projet de loi supprime l'obligation d'obtenir un certi cat d'urbanisme préalablement au détachement d'une partie d'un terrain bâti et, pour les constructions non permanentes, destinées à être régulièrement dém ontées et réinstallées, l'obligation d'obtenir un nouveau permis de construire lors de chaque réinstallation. Ces diverses mesures permettront aux autorités compétentes de gagner du temps dans la délivrance des autorisations ou actes d'urbanisme. S'agissant de l'amélioration de l'habitat, le projet de loi SRU permet d'engager une réforme de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) qui se traduira notamment par le regroupement auprès d'un seul organisme public des outils et moyens nanciers mis en oeuvre pour l'amélioration des logements privés, dont l'actuelle prime à l'amélioration de l'habitat destinées aux propr iétaires-occupants attribuée jusqu'à présent par l'Etat. Cette ré forme permettra, en outre, de renforcer les liens contractuels entre l'Etat et l'agence et de clari er les responsabilités entre les directions départementales de l'équipement et l'agence, notamment en ce qui concerne les moyens de fonctionnement locaux. Ces relations donneront lieu à la conclusion d'une convention passée avec le ministre chargé du logement, qui xera notamment les objectifs à atteindre en matière de qualité et de niveau de service et les conditions dans lesquelles les moyens de fonctionnement seront affectés à l'ANAH, en particulier au niveau local. En matière de conduite d'opération et de direction de travaux, suite aux décisions du comité interministériel pour la réforme de l'Etat (13 juillet 1 999), un plan de modernisation de l'ingénierie publique est mis en oeuvre au sein du ministère de l'équipement. Le développement des missions d'assistance à maîtrise d'ouvrage pour accompagner les collectivités, depuis la phase de diagnostic jusqu'à la mise en service des projets publics, constitue pour elles un besoin croissant.

La recherche de la complémentarité entre ingénierie publique et privée constitue également l'une des orientations de ce plan de modernisation, dans le cadre juridique général du droit de la concurrence et des marchés. En raison de la complexité accrue des opérations, il est important de pouvoir réunir autour d'un projet l'ensemble des compétences nécessaires dans un souci de qualité de réalisation. Il ne s'agit donc pas pour l'Etat de se désengager de ce type de missions. Par ailleurs, il a été demandé à chaque DDE de traduire concrètement ces orientations par l'élaboration d'un document stratégique local en matière d'ingénierie publique, qui prend en compte les besoins des collectivités notamment sur les territoires à forts enjeux, l'offre d'ingénierie tant publique que privé e, la déclinaison locale des politiques publiques. Ce document, en cohérence avec le projet territorial de l'Etat, doit permettre de pré ciser au niveau de chaque département le rôle des services de l'Etat en matière d'ingénierie publique et les priorités d'intervention. Il est actuellement en cours d'élaboration dans chaque département et doit être validé par les préfets en n de cette année. Il sera complété par la dé nition et la mise en oeuvre d'un plan d'actions locales.

4. M. Bernard Schreiner attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur la nécessité de pouvoir adapter au niveau local la réglementation régissant les nancements PLA-I.

Ces prêts aidés par l'Etat sont destinés à l'insertion de famil les modestes ou en situation de dif culté. Il s'avère que les bailleurs sociaux rencontrent régulièrement des dif cultés liées à l'évolution des situations familiales de personnes déjà locataires dans le parc conventionné, sans qu'il soit possible de proposer un échange au sein du patrimoine pour pouvoir adapter la taille du logement à celle des familles. Cette dif culté est aggravée lorsqu'il s'agit de logements situés dans des secteurs ruraux fragilisés où le parc so cial est réduit. Il est néanmoins indispensable de pouvoir y maintenir des familles qui s'y sont établies et intégrées, tant pour elles-m êmes et leurs enfants par rapport à l'école et à la vie sociale, que po ur le besoin d'y préserver une population jeune et éviter le dépeuplement local. Les bailleurs sont ainsi confrontés au problème d'adaptation de pavillons nancés en PLA-I devenus trop petits pour l'accueil de familles nombreuses (enfants en bas âge). Les aides de l'Etat de type PLA-I ne peuvent pas, en l'état actuel de la réglementation, être accordées pour nancer l'agrandissement ou l'adaptation de l'habitat, alors qu'il serait très important de pouvoir maintenir la population sur place et continuer de les accompagner eu égard à leur situation. Il lui demande s'il ne serait pas judicieux, dans ces conditions, d'autoriser des mesures dérogatoire sur le plan local pour permettre l'attribution des aides de l'Etat PLA-I et mettre en place un avenant au conventionnement, de manière à proposer une offre de logement réellement adaptée aux besoins des familles.

Réponse. Plusieurs solutions peuvent être envisagées pour améliorer les conditions de logement des ménages habitant dans des locaux nancés en PLA-I. Lorsque l'organisme bailleur est propriétaire d'un parc de logements sociaux d'une certaine importance, il peut proposer à la famille, dans le cadre d'un échange de logement, un logement adapté au nombre de personnes constituant le ménage. Une autre solution consiste à procéder à un agrandissement du logement nancé par une subvention PALULOS. Un tel agrandissement peut être envisagé dans le cas de la réalisation de travaux prioritaires consistant en une restructuration du logement.

Cette intervention portant sur un logement ayant béné cié depuis moins de dix ans d'un nancement PLA-I doit être accompagnée d'une dérogation préfectorale. Par ailleurs, une extension nancée par un complément de PLA-I, si elle n'est actuellement pas prévue par la réglementation, constitue une réponse qui pourrait être é tudiée. En n, dans le cas d'une famille qui connaît une augmentation très substantielle du nombre des personnes qui la composent, une étude visant à créer un second logement d'insertion peut être envisagée lorsqu'une ou plusieurs des personnes qui la composent sont susceptibles de conclure un nouveau contrat de location. Si aucune de ces solutions ne s'avère praticable, la réalis ation par un organisme HLM ou par une collectivité locale d'une acquisition-amélioration portant sur un logement plus grand est également possible, de façon à constituer progressivement un parc de logements adaptés aux besoins des ménages en dif culté, particulièrement exposés en secteur rural compte tenu de la rareté de l'offre disponible.

5. M. Gilbert Meyer attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur les dif cultés d'utilisation du prêt locatif d'usage social (PLUS). Le PLUS est venu se substituer en 1999 au prêt locatif aidé (PLA), avec pour objectifs principaux de rela ncer la production de logements publics, de baisser les loyers à hauteur des assiettes de l'aide personnalisée au logement (APL) et de favo riser la mixité sociale. La faisabilité économique des opératio ns PLUS était a priori rendue possible par quatre postulats : application du taux de TVA réduit, soit 5,5 % ; taux d'intérêt du PLUS à 3,45 % ; subvention de 5 % sur une assiette globale et forfaitaire ; durée d'amortissement nancier pour la charge foncière, portée à cinquante ans. Les études de faisabilité de ces opé rations reposaient donc sur une analyse conjoncturelle qui était la suivante : taux d'intérêt bas ; faible coût des travaux ; augmentations de loyers possibles et intégrées dans les montages. Or, force est de constater que le montage des opérations PLUS est devenu excessivement ardu, voire irréalisable. En effet, la conjoncture a évolué très défavorablement : les coûts de contruction ont subi une véritable déviance in ationniste en l'espace de quelques mois ; la hausse du livret A s'est répercutée sur le taux du PLUS, lequel est passé de 3,45 % à 4,20 % ; lors de la mise en place du PLUS, leshypothèses économiques exigées par le ministère du logement pour


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l e montage des opérations portaient sur une augmentation annuelle des loyers de 1,60 %. Or, par la suite, les loyers ont été gelés. Toute augmentation est donc rendue dif cile, voire impossible. La conséquence directe de ces dérives a été de rendre qu asiment utopique le montage équilibré des opérations PLUS, sauf à y injecter des fonds propres - non récupérés - importants et à obtenir des aides plus que conséquentes des collectivités territoriales. Se pose dès lors un véritable problème de principe : est-il envisageable de poursuivre dans cette voie, en accusant publiquement les bailleurs sociaux et les collectivités locales de ne pas produire suf samment de logements publics, alors que, manifestement, les conditions de cette production ne sont pas réunies ? Il lui demande par conséquent de lui faire connaître son sentiment par rapport à ce constat et les mesures qu'il entend prendre pour remédier aux dif cultés évoquées.

Réponse. Le PLUS est un produit adapté en termes de mixité sociale et de situation nancière des locataires avec le calage des loyers plafonds sur ceux des aides personnelles au logement. De fait, la mixité qu'il garantit et les orientations de la loi solidarité et renouvellement urbains (SRU) devraient inciter les collectivités locales à s'investir fortement dans le produit. La cause de la faible consommation de PLA et de PLUS ne semble pas à rechercher prioritairement du côté d'une insuf sance des subventions d'Etat dont sont dotées les opérations. En effet, depuis la réforme du PLUS, les subventions de l'Etat ont été réévaluées et l'insu f sante production d'opérations enregistrée concerne aussi bien l'acquisition-amélioration, pourtant davantage aidée, que le neuf. L'insuf sance de la mobilisation des acteurs est un des aspects préoccupants de la situation actuelle. La réticence de certains élus à utiliser l'ensemble des marges de manoeuvre que leur offre le produit et la volonté de certains organismes HLM de se recentrer sur une approche patrimoniale, au détriment de la production neuve, ne contribuent pas au développement du produit. Cependant, en termes d'équilibre nancier, des facteurs défavorables sont apparus dernièrement : l'implication du 1 % logement dans les opérations apparaît insuf sante : la convention de 1998 xe une obligation d'investir à hauteur de 4,5 milliards de francs par an, qui n'est que partiellement acquittée par les collecteurs, entraînant un désé quilibre des opérations ; l'augmentation récente importante des coûts de foncier et de construction. Un ressaisissement de l'ensemble des acteurs est donc un préalable au succès du PLUS. S'agissant du 1 %, en 1999, les CIL et CCI ont versé aux organismes contructeurs 3,5 milliards de francs de concours long terme, en baisse de 8 % par rapport à 1998. La baisse de l'intervention du 1 % est sans doute à relier en partie avec la faible consommation de PLA ou PLUS, mais il est également indéniable qu'atteindre le niveau de l'objectif convenu en 1998 aurait permis à beaucoup d'opérations de s'équilibrer et de se réaliser. Des discussions sont en cours avec l'Union d'économie sociale du logement (UESL) pour mieux mobiliser et adapter ces nancements aux réalités auxquelles sont confrontées les productions des organismes HLM. Cette mobilisation sera mise en oeuvre en laissant une large part à l'initiative des acteurs locaux. De plus, la hausse récente des prix de revient a eu pour conséquence d'éloigner les paramètres retenus pour le calcul des subventions des coûts du marché. Pour répondre à ce phén omène, le Gouvernement va engager une ré exion sur ces paramètres permettant un meilleur nancement des opérations PLUS.

D'ores et déjà, le effets de la hausse du livret A de juillet 2000 on t été compensés par les mesures suivantes : allongement de la durée des prêts nouveaux de trente-deux à trente-cinq ans ; modi cation des hypothèses économiques retenues pour le montant des opérations, qui porte à 1,6 % l'hypothèse d'évolution des loyers (co ntre 1,2 % précédemment). Cette dernière mesure, cohérente avec l'évolution de l'in ation et de l'ICC sur la période, n'est pas en contradiction avec l'engagement de gel des loyers. En effet, les générations dont il s'agit seront mises en service au plus tôt n 2001 et ne sont donc pas concernées par les mesures de gel des loyers 2000-2001.

6 M. Joseph Rossignol appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur la question du foncier, dans le cadre du budget pour 2001. En effet, l'action foncière n'est pas un simple accessoire de la politique du logement ou des grandes opérations d'urbanisme nationales. Elle est au coeur de toute politique d'aménagement local, elle détermine au quotidien les possibilités pour les élus d'implanter les équipements publics, de créer des logements sociaux dans un cadre de mixité sociale, de réaménager des quartiers, de dessiner des voiries nouvelles, de développer des espaces verts ou de réconquérir des friches industrielles. L'action foncière est une politique fondamentale au sens propre du terme, car elle est le point d'origine obligé de toutes les politiques d'équ ipement et de construction ou d'acquisition de logements sociaux des collectivités locales. Elle est le moyen privilégié de s'oppos er aux effets négatifs de la spéculation foncière et immobilière s ur un marché de rareté. Elle permet aussi l'acquisition immédiate et la constitution de réserve à long terme ainsi que des interventions de régulation dans les zones d'intervention foncière. Sans intervention foncière préalable et organisée, de trop nombreux projets locaux sont condamnés dès le départ. Or, la suppression du Fonds national d'aménagement foncier et d'urbanisme a été à cet égard u n acte grave matérialisant un désengagement de l'Etat en matière d'intervention foncière. La création d'établissements publics fonciers alimentés par une scalité locale devrait en être la contrepartie. Il faut bien constater aujourd'hui que le nombre d'établissements fonciers est insuf sant et que les incitations de l'Etat à leur création sont inexistantes. De nombreuses régions urbanisées et attractives en sont dépourvues malgré une situation foncière parfois tendue. Par conséquent, il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement a n d'inciter nancièrement à la création d'établissements publics fonciers par le biais d'une dotation de démarrage, comme cela a été le cas pour inciter les collectivités locales à se regrouper au sein de structures intercommunales. Cette dotation pourrait se matérialiser par une subvention signi cative, proportionnelle à la population de la zone concernée, reportée au contribuable après la constitution du premier fonds de roulement.

Cette première dotation de principe faciliterait ainsi la prise de décision des instances régionales et locales concernées en matiè re de gestion foncière.

Réponse. Le Gouvernement est conscient de l'importance du foncier dans le développement des politiques d'équipement et de renouvellement urbains, en particulier en vue de la production de logements sociaux. Ainsi, la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 25 juin 1999, a rendu obligatoire un volet foncier dans les contrats d'agglomération, seul volet de ces contrats que la loi ait prescrit aussi impérativement. Parallèlement, l'Etat a décidé de donner, dans le cadre de l'élabora tion des contrats de plan Etat-région (CPER), une importance particulière aux questions foncières, et pour la première fois depuis de nombreuses années, une dotation a été inscrite à ce titre au bu dget de l'urbanisme et du logement. L'Etat a inscrit sur la ligne 6523/50 de ce budget 435,2 MF dans les CPER de France métropolitaine, hors Ile-de-France (66 MF en 2001). Une circulaire du 3 août 2000 précise les modalités d'utilisation de ces crédits qui pourront servir notamment à faciliter le démarrage d'établissements publics fonciers (EPF) locaux dont le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, en son article 17, améliore les conditions de création et de fonctionnement. En effet, les EPF constituent l'un des moyens pour mettre en place une politique foncière au service des objectifs d'aménagement des collectivités locales ou de l'Etat grâce à leur capacité à assurer l e portage de terrains, limiter la spéculation et à garantir une certaine pér ennité de l'action foncière. Pour ce qui est de ces EPF locaux, la circulaire du 3 avril 2000 prévoit, lorsque les enjeux et le programme prévisionnel d'intervention de l'établissement pour ses premières années de fonctionnement le justi ent, une aide consistant en une dotation en capital proportionnelle à la population des EPCI et communes membres à raison de 5 francs par habitant et dans la limite de 5 MF, cette dotation ayant vocation à être complétée par les départements et la région, qui peuvent adhérer à l'établ issement. La création d'EPF d'Etat, même si elle a vocation à rester exceptionnelle, peut également être envisagée dans certains cas pa rticuliers comme l'a montré la création récente de l'établisseme nt public foncier de l'Ouest Rhône-Alpes (EPORA) en 1998. Pour ces EPF d'Etat la circulaire visée ci-dessus rappelle que la dotation est xée au cas par cas. Dans celui de l'EPF Provence-Alpes-Côte d'Azur en cours de pré guration, cette dotation est xée à 47 MF et abondée du même montant par la région. Par ailleurs, le conseil des ministres du 31 octobre 2000 a approuvé le décret étendant le périmètre de pleine compétence de l'EPF de la Basse-Seine à l'ensemble des départements du Calvados, de l'Eure et de la SeineMaritime et l'autorisant à intervenir pour le compte des collectivités et établissements publics dans l'Orne et dans la Manche.

7. M. Daniel Vachez appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur les crédits affectés à l'aménagement d'aires de stationnement des gens du voyage dans le cadre du budget pour 2001. La loi du 5 juillet 2000 a précisé les obligations des communes en matière d'accueil des gens du voyage et renforcé


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sensiblement le soutien nancier que leur apporte l'Etat pour remplir ces obligations. L'objectif du gouvernement est ainsi de permettre la création d'un maximum d'aires, qui correspondent aux besoins des gens du voyage, en un minimum de temps, a n de corriger l'actuelle pénurie en places de stationnement, source de la plupart des tensions entre sédentaires et itinérants constatées en différents points du territoire national. Pour éviter un gel des projets d'aménagement en cours, le Gouvernement a anticipé la majo-r ation de l'aide plafonnée à l'investissement, effective dès l'automne 1999 avant même la promulgation de la loi et la publication de ses décrets d'application. Pour parvenir pleinement aux objectifs que s'est assignée cette nouvelle loi, c'est-à-dire l'amé nagement ou la réhabilitation d'environ 30 000 places de stationnement dans un délai de trois ans et demi, il est donc indispensable que des crédits suf sants soient affectés pour répondre rapidement aux demandes formulées par les collectivités locales engagées dans de tels projets. En conséquence, il le prie de bien vouloir lui préciser, d'une part, le montant des crédits affectés à ce titre dans le cadre du budget du logement pour 2001 et, d'autre part, s'il s'est assuré que les sommes correspondantes sont également inscrites au budget du ministère de l'emploi et de la solidarité, puisqu'il est prévu que ce dernier participe à hauteur de 50 % du montant des subventions accordées.

Réponse. Pour le nancement de l'investissement nécessaire à l'aménagement et à la réhabilitation des aires dans la proportion de 70 % de la dépense engagée, il est bien inscrit au budget 2001 du secrétariat d'Etat au logement comme à celui du ministère de l'emploi et de la solidarité des moyens d'engagement d'un montant identique de 70 millions de francs pour chacun. Ce montant est en augmentation sensible sur celui du budget 2000 et il devrait suf re à accompagner la montée en charge progressive de la réalisation d'aires nouvelles. En effet, l'année 2001 sera, dans la très grande majorité des départements, consacrée à l'élaboration et à l'adoption des schémas départementaux. C'est après cette adoption que la réalisation d'aires nouvelles connaîtra une accélération plus rapide. En n, pour éviter une double instruction des dossiers par chacun des services déconcentrés des deux ministères concernés, il a été convenu par souci de simpli cation que les crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité seraient transférés sur la ligne budgétaire correspondante du secrétariat d'Etat au logement.

8. M. Philippe Decaudin attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur la taxe foncière sur la propriété bâtie (TFPB) dans le cadre du budget pour 2001. En effet, cette taxe constituait avec la taxe sur le supplément de loyer de solidarité les deux points d'accroche avec les responsables des organismes d'HLM. Après la disparition de la taxe sur le surloyer, seule persiste la taxe foncière sur la propriété bâtie. Or cette taxe re présente plus de 10 % des recettes des organismes d'HLM, elle a donc un poids considérable sur l'équilibre d'exploitation des organismes.

Après l'essai et l'échec de la révision des bases, force est de co nstater que les organismes d'HLM supportent le poids considérable de cet impôt. Il lui demande, en conséquence, dans quelle mesure une réduction de cette taxe foncière sur la propriété bâtie pourrait intervenir dans le cadre du projet de loi de nances pour 2001. Si cette éventualité lui est assurée, il le prie de bien vouloir pré ciser les modalités possibles dans les cas suivants : soit une réduction de la TFPB en zones urbaines sensibles, soit une suppression de la TFPB aux immeubles concernés par un programme de rénovation urbaine.

Réponse. Le Gouvernement est conscient du poids croissant que constitue pour les organismes d'habitations à loyer modéré la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). C'est pou rquoi un article additionnel au projet de loi de nances pour 2001 après l'article 26 a été voté en première lecture par l'Assemblée nationale avec l'accord du Gouvernement. Cet article contient deux mesures pour diminuer ce poids. Il prévoit ainsi d'instaurer un abattement de 30 % sur la valeur locative servant de base à la TFPB pour les logements sociaux situés dans les zones urbaines sensibles (ZUS).

Cet abattement s'appliquera aux impositions établies de 2001 à 2006. A n que cela se traduise par une amélioration des conditions de vie des locataires, cette mesure sera subordonnée au maintien du gel des loyers en 2001 et, à partir de 2002, à des contreparties des organismes bailleurs en terme d'actions d'entretien et de gestion de proximité, dont le coût est plus important dans les grands ensembles en dif culté. D'autre part, les logements HLM vacants en attente d'une opération de restructuration ou de démolition seront exonérés de TFPB. Au total, ces mesures représentent un montant de 800 millions de francs, soit un allégement moyen d'environ 10 % de la charge constituée par la TFPB pour les organismes HLM et SEM.

9. M. Daniel Marcovitch attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur la politique du Gouvernement pour favoriser le logement social. Depuis 1997, ce sont quelque 80 000 logements sociaux qui sont budgétisés chaque année, ce qui traduit bien la priorité du Gouvernement pour le logement social. Après la création du PLUS (prêt locatif à usage soci al), à budget constant, 70 000 programmes sont désormais prévus. Malgré ces efforts, une baisse des crédits consommés est malheureusement constatée chaque année. Ainsi, cette année, nous risquons de ne pas dépasser 35 000 programmes engagés. Il lui demande s'il ne faudrait pas mieux, toujours à budget constant, af cher une ambition peut-être moins importante - à hauteur de 50 000 logements sociaux par an, par exemple et les construire réellement - mais avec des budgets plus élevés, de manière à rendre les projets de construction plus équilibrés nancièrement et donc plus attractifs pour les bailleurs. Il lui demande s'il ne pense pas que cette mesure permettrait une réalisation effective des programmes de construction de logements sociaux. Par ailleurs, il rappelle que l'action engagée par M. le secrétaire d'Etat au logement a permis en 1998 la restitution à l'UESL de la contribution nancière des employeurs à l'effort de construction, lors d'un accord qui a trouvé sa traduction législative dans le cadre de la loi de nances pour 1999. Cet accord prévoyait le versement de 4,5 milliards de francs pour servir au co nancement du logement social.

Il lui demande un point précis sur l'application de cette disposition.

Réponse. Le PLUS est un produit adapté en terme de mixité sociale et de situation nancière des locataires avec le calage des loyers plafonds sur ceux des aides personnelles au logement. De fait, la mixité qu'il garantit et les orientations de la loi solidarité et renouvellement urbains (SRU) devraient inciter les collectivités locales à s'investir fortement dans le produit. La cause de la faible consommation de PLA et de PLUS ne semble pas à rechercher prioritairement du côté d'une insuf sance des subventions d'Etat dont sont dotées les opérations. En effet, depuis la réforme du PLUS, les subventions de l'Etat ont été réévaluées et l'insu f sante production d'opérations enregistrée concerne aussi bien l'acquisition-amélioration, pourtant davantage aidée, que le neuf. L'insuf sance de la mobilisation des acteurs est un des aspects préoccupants de la situation actuelle. La réticence de certains élus à utiliser l'ensemble des marges de manoeuvre que leur offre le produit et la volonté de certains organismes HLM de se recentrer sur une approche patrimoniale, au détriment de la production neuve, ne contribuent pas au développement du produit. Cependant, en terme d'équilibre nancier, des facteurs défavorables sont apparus dernièrement : l'implication du 1 % logement dans les opérations apparaît insuf sante : la convention de 1998 xe une obligation d'investir à hauteur de 4,5 milliards de francs par an, qui n'est que partiellement acquittée par les collecteurs, entraînant un désé quilibre des opérations ; l'augmentation récente importante des coûts de foncier et de construction. Un ressaisissement de l'ensemble des acteurs est donc un préalable au succès du PLUS. S'agissant du 1 %, en 1999, les CIL et CCI ont versé aux organismes constructeurs 3,5 milliards de francs de concours long terme, en baisse de 8 % par rapport à 1998. Ces concours se répartissent par nature d'opération de la façon suivante : 62 % sont affectés à des opérations de construction neuve, 16 % à des opérations d'acquisitionamélioration, 19 % à des opérations d'amélioration seule et 3 % à de l'acquisition dans l'ancien sans travaux. La baisse de l'intervention du 1 % est sans doute à relier en partie avec la faible consommation de PLA ou PLUS, mais il est également indéniable qu'atteindre le niveau de l'objectif convenu en 1998 aurait permis à beaucoup d'opérations de s'équilibrer et de se réaliser. Des discussions sont en cours avec l'Union d'économie sociale du logement (UESL) pour mieux mobiliser et adapter ces nancements aux réalités auxquelles sont confrontées les productions des organismes HLM. Cette mobilisation sera mise en oeuvre en laissant une large part à l'initiative des acteurs locaux. De plus, la hausse récente des prix de revient a eu pour conséquence d'éloigner les paramètres retenus pour le calcul des subventions des coûts du marché. Pour répondre à ce phénomène, le gouvernement va eng ager une ré exion sur ces paramètres permettant un meilleur nancement des opérations PLUS. D'ores et déjà, les effets de la hausse du livret A de juillet 2000 ont été compensés par les mesures suivantes : allongement de la durée des prêts nouveaux de 32 à


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35 ans ; modi cation des hypothèses économiques retenues pour le montant des opérations, qui porte à 1,6 % l'hypothèse d'évoluti on des loyers (contre 1,2 % précédemment). Cette dernière mesur e, cohérente avec l'évolution de l'in ation et de l'ICC sur la période, n'est pas en contradiction avec l'engagement de gel des loyers. En effet, les générations dont il s'agit seront mises en service au plus tôt n 2001 et ne sont donc pas concernées par les mesures de gel des loyers 2000-2001.

10. M. Jacques Guyard demande à M. le secrétaire d'Etat au logement comment il compte prendre en considération le fait que l'organisation tardive, mais rapide, de l'intercommunalité en milieu urbain et péri-urbain rend à la fois possible et indispensable une relance de l'urbanisme opérationnel. Les quelque 70 ou 80 communautés d'agglomération décidées ou en gestation auront besoin d'outils d'analyse et de propositions pour maîtriser leur avenir, surtout là où les contrats de plan reconnaissent une dimension stratégique au développement, et donc un intérêt national. L'Et at doit être présent dans les agences d'urbanisme qui ne manqueront pas de se créer, à la fois pour garantir leur liberté d'analyse, l a qualité de leurs équipes, et la possibilité de mise en commun des travaux. Le simple maintien, depuis longtemps, des crédits d'aide aux agences d'urbanisme (58 millions de francs) et pour les études locales des DDE (64,8 millions de francs) apparaît nettement insuf sant pour accompagner la mutation dans l'organisation du territoire et l'exceptionnelle opportunité qu'offre la création des communautés d'agglomération. Une ré exion collective sur les territoires aidera à résoudre l'un des principaux verrous à la constr uction neuve que nous connaissons aujourd'hui. En zone urbaine, les prix des terrains ne permettent pas aux promoteurs de l'habitat social, et souvent même à ceux qui s'engagent à respecter les plafonds de l'investissement Besson, de réaliser des opérations équil ibrées. Dans l'immédiat, il faut certes aider nancièrement les projets bloqués, mais la vraie solution est dans la mise sur le marché de nouveaux terrains bien placés, choisis par le jeu convergent des contraintes de la loi SRU et des analyses intercommunales d'urbanisme. En conséquence, il lui demande comment le Gouvernement entend faciliter ce déblocage du foncier et la ré exion sur l'espace habité solidaire.

Réponse. Très conscient de la nécessité de con rmer le rôle irremplaçable des agences d'urbanisme compte tenu des évolutions récentes, le Gouvernement a souhaité marquer son attachement à ces structures par une série de mesures concrètes. Les agences d'urbanisme seront en premier lieu confortées par un dispositif législatif en deux étapes. La loi d'orientation relative à l'amé nagement et au développement du territoire (LOADT) a redonné aux agences d'urbanisme le fondement législatif qu'elles avaient perdu, et élargi leur mission à la préparation des projets d'aggloméra tion.

La future loi SRU devrait bientôt con er aux agences un champ de compétences élargi aux nouveaux documents d'urbanisme et leur ouvrir la double possibilité, à apprécier au cas par cas, de conserver le statut associatif ou de se constituer en groupements d'intérêt public. La participation nancière de l'Etat aux agences d'urbanisme se fera désormais sur un chapitre de fonctionnement plutôt que d'investissement, ce qui permettra notamment d'accélérer le paiement des dotations. Ces dernières sont passées de 50 millions de francs en loi de nances initiale 1997 à 53 millions de francs en 1998 et 58 millions de francs en 1999, montant reconduit depuis. Toutes ces avancées feront bientôt l'objet d'une charte refondatrice des rapports entre l'Etat et les agences, donnant une dimension nouvelle aux relations nouées entre l'Etat et les collectivités locales sur cette question. En n, la création de nouvelles agences a par ailleurs fait l'objet d'engagements pris dans le cadre des CPER. Les agences d'urbanisme peuvent en particulier constituer des points d'appui importants dans la mise en place d'observatoires fonciers et dans la conduite d'études foncières permettant aux collectivités locales et à leurs établissements publics de coo pération intercommunale de conduire des actions en faveur du logement social et de la mixité urbaine. Le projet de loi SRU, pour sa part, contraint effectivement les communes qui comptent moins de 20 % de logements locatifs sociaux à atteindre ce ratio dans les vingt ans, mais permet aux EPCI de jouer pleinement leur rôle en les autorisant, dans le cadre d'un PLH, à répartir l'objectif de ré alisation de logements sociaux manquants sur l'ensemble de l'agglomération. En outre, le projet de loi, en donnant la possibilité aux communes d'augmenter le rendement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, leur offre des moyens supplémentaires po ur nancer les opérations de renouvellement urbain et encourager la mobilisation de ces terrains. Il facilite également la création et le fonctionnement d'établissements publics fonciers locaux. A travers les contrats de plan, l'Etat s'est engagé à soutenir les actions visa nt à la production de foncier au service de politiques d'équilibre de l'habitat, dans le cadre notamment des contrats d'agglomération.

En n, a été ouverte la possibilité pour les collectivités locales d'obtenir des prêts à long terme de la Caisse des dépôts et consign ations sur fonds d'épargne, pour permettre la constitution de réserves foncières.

11. M. Alain Cacheux attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur la question relative à l'« amortissement Besson ». La loi de nances pour 1999 a mis en place un dispositif d'incitation scale en faveur des personnes qui acquièrent un logement neuf et s'engagent à le louer à usage d'habitation principale pendant une durée minimale de 9 ans. Ce dispositif, applicable à partir du 1er septembre 1999, prenait la suite du dispositif communément appelé « amortissement Périssol », mais l'encadrait en limitant la location à des personnes dont les revenus, lors de l'entrée dans les lieux, sont inférieurs à des plafonds et pour un loyer dont le montant est également plafonné. Or, ce nouveau dispositif d'incitation scale, qui se veut permanent, a connu un démarrage particulièrement modeste. Ceci s'explique sans doute pour partie dans le fait que l'« amortissement Périssol » avait largement « asséché » le marché en attirant les personnes susceptibles d'être intéressées par un tel dispositif. Cependant, il apparaî t, après un an de fonctionnement, que l'impossibilité, dans le cadre du nouveau dispositif, de louer l'habitation aux ascendants et descendants des bailleurs, est un obstacle sérieux à la montée en rég ime du dispositif. En conséquence, il lui demande si le ministère de l'équipement et du logement, sur la base des premiers résultats du dispositif Besson, entend revenir sur cette disposition, au besoin en l'encadrant et permettre ainsi au nouveau dispositif de prendre son régime de croisière.

Réponse. La location à des membres de la famille a été admise par le passé au béné ce de certains régimes d'incitation scale. L'expérience a montré que, par ce biais, les avantages scaux pouvaient être détournés de leur objet. Ils ne servaient plus à nancer des biens destinés à être mis de manière effective et durable sur le marché locatif, mais à constituer un patrimoine familial. Une telle orientation ne serait évidemment pas justi able dans le cadre du statut du bailleur privé conventionné, dont l'objectif est de développer une offre de logements locatifs accessibles aux personnes de condition modeste ou moyenne. Un encadrement tel que suggéré par l'honorable parlementaire devrait donc en tout état de cause répondre à cette double exigence d'empêcher le transfert de patrimoine et de garantir la mise effective sur le marché locatif d'un logement conventionné pendant la durée requise.

12. M. Jean-Louis Dumont appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur une question relative aux charges locatives, dans le cadre du budget pour 2001. En effet, les locataires du parc social doivent acquitter des charges locatives chaque mois, qui sont pour une grande part non comprises dans la quittance de loyer et par conséquent mal ou non intégrées dans le calcul des aides à la personne. Le décret qui régit le calcul de ces charges locatives date de 1982. Il instaure un forfait charge identique, quelque soit l'endroit où se situe le parc locatif. De plus, le forfait représente souvent moins de 50 % du montant de ces charges. On peut considérer que, face à des charges trop élevées, les personnes et les ménages aux faibles ressources ne peuvent accéder au parc HLM et sont donc exclus de ces logements. Or, une négociation avait été engagée en 1996 sur le thème des charges locatives, au sein de la Commission nationale de concertation. Depuis, elle a été suspendue en 1997, reprise et de nouveau interrompue en 1998. Néanmoins, elle avait permis de dégager des avancées signi catives à ce sujet, même si celles-ci sont restées en suspens depuis. Ainsi, il avait été évoqué la possibilité de préciser et de moderniser la liste limitative des charges récupérables, ainsi que la prise en compte des charges locatives dans le calcul des aides à la personne. Le Gouvernement mène actuellement une politique active basée sur la solidarité nationale dans la perspective de solvabiliser les ménages du parc locatif social de statut ou de fait. En conséquence, pour aller au bout de cette démarche, il le prie de bien vouloir lui préciser s'il a l'intention prochainement de réformer le système des charges locatives, devenu caduc et dont la mise en place date de 18 ans.


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Réponse. La liste exhaustive des charges récupérables par les bailleurs auprès des locataires est xée par le décret no 82-955 du 9 novembre 1982 modi é en ce qui concerne le parc HLM et le décret no 87-713 du 26 août 1987 pour les logements situés dans le parc privé. Ainsi que l'a rappelé l'honorable parlementaire dans sa question, la commission nationale de concertation a déjà étudié l'éventuelle refonte des décrets relatifs aux charges. Faute de consensus entre les représentants des bailleurs et les représentants des locataires, ces travaux n'ont pu aboutir. Pour l'heure, le Gouvernement n'envisage pas de modi er sans l'accord des partenaires la liste des charges récupérables. En ce qui concerne les aides à la personne, les charges locatives sont prises en compte sur la base d'un forfait variable selon la taille de la famille. Ce forfait est effectivement souvent critiqué pour son inadéquation à la réali té des charges réellement supportées par les ménages. La réforme d es aides personnelles, qui trouve sa traduction pour la première étape dans le budget 2001, s'est concentrée sur la réponse aux problèmes du traitement équitable des « bas revenus » et de l'harmonisation des barèmes et n'a pas traité la question de la prise en compte des charges. Elle aboutit cependant à une revalorisation sensible des aides au logement versées. La prise en compte des charges réelles dans le calcul des aides poserait de réels problèmes : nature des charges à retenir (faut-il se limiter aux charges uniquement quittancées, ce qui peut être source d'injustice lorsque des postes importants sont individualisés ?) ; dif cultés de gestion pour les CAF, qui devraient interroger tous les béné ciaires et intégrer ces données. Le forfait est un compromis entre la volonté de prendre en compte dans le calcul de l'aide la totalité de la dépense de logement (en ne se limitant pas au seul loyer) et la dif culté de dé nir et d'apprécier ce que sont les charges « réelles ». Il a été proposé que le Conseil national de l'habitat engage prochainement une ré exion sur ce sujet.

13. M. Patrick Rimbert appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur une question relative aux mesures de mise en oeuvre de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains, dans le cadre du budget pour 2001. En effet, après une année exceptionnelle en 1999, l'année 2000 semble maintenir le niveau du marché immobilier et l'année 2001 devrait au moins en faire de même, grâce à une croissance retrouvée depuis 1997. Les mesures que le Gouvernement a mis en place participent largement à ce mouvement : réduction de la TVA sur les travaux, baisse des droits de mutation, etc. Cependant, malgré les crédits ouverts depuis trois ans, il reste des efforts à faire dans le domaine de la construction de logements sociaux. De plus, la hausse des taux d'intérêt, la montée du coût du foncier ne seront pas sans conséquence sur la solvabilité des ménages. En n, la convention sur le 1 % logement n'atteint pas ses objectifs et participe insuf samment au nancement des logements sociaux. A ce contexte conjoncturel s'ajoute un événement important, la loi solidarité et renouvellement urbains xe à 20 % le nombre des logements locatifs sociaux dans les communes qui composent une agglomération.

Elle ancre les principes de mixité sociale et de renouvellement urbain au coeur des projets de ville. En conséquence, il le prie de bien vouloir lui préciser les modi cations qui pourraient être apportées au prêt locatif à usage social (PLUS), a n de produire un nombre suf sant de logements sociaux demandé par la loi SRU et de faire face aux éléments conjoncturels évoqués précé demment (coût du foncier, augmentation des taux d'intérêt, etc.) De même, il souhaite savoir les changements éventuels qui pourraient être apportés au prêt à taux zéro (PTZ), consacré à 90 % à l'heure actuelle à l'habitat individuel en périphérie des villes (coû t du foncier moins cher), a n que celui-ci mette en application les nouvelles règles d'urbanisme axées sur la maîtrise de la croissance urbaine. En effet, il serait souhaitable que le PTZ soit utilisé pour le prénancement de logements groupés dans le cadre d'opérations de renouvellement urbain. Dans le même esprit de recherche d'un meilleur nancement des opérations de construction sociale, il souhaite attirer son attention sur la possibilité de mobiliser au mieux la ligne fongible nançant les différents prêts à la construction, selon des critères plus souples a n que localement les opérations de mixité sociale et de renouvellement urbain puissent être nancées correctement. La décentralisation des aides nancées par la politique du logement semble un des enjeux fondamentaux sur lequel le Gouvernement est attendu : elle devrait s'adapter à des opérations complexes et singulières qui demandent des nancements sur mesure et qui ne correpondent pas à la gestion centralisée actuelle.

Réponse. Le PLUS est un produit adapté en terme de mixité sociale et de situation nancière des locataires avec le calage des loyers plafonds sur ceux des aides personnelles au logement. De fait, la mixité qu'il garantit et les orientations de la loi Solidarité et renouvellement urbains (SRU) devraient inciter les collectivités locales à s'investir fortement dans le produit. La cause de la faible consommation de PLA et de PLUS ne semble pas à rechercher prioritairement du côté d'une insuf sance des subventions d'Etat dont sont dotées les opérations. En effet, depuis la réforme du PLUS, les subventions de l'Etat ont été réévaluées et l'insu f sante production d'opérations enregistrée concerne aussi bien l'acquisition-amélioration, pourtant davantage aidée, que le neuf. L'insuf sance de la mobilisation des acteurs est un des aspects préoccupants de la situation actuelle. La réticence de certains élus à utiliser l'ensemble des marges de manoeuvre que leur offre le produit et la volonté de certains organismes HLM de se recentrer sur une approche patrimoniale, au détriment de la production neuve, ne contribuent pas au développement du produit. Cependant, en terme d'équilibre nancier, des facteurs défavorables sont apparus dernièrement : l'implication du 1 % logement dans les opérations apparaît insuf sante : la convention de 1998 xe une obligation d'investir à hauteur de 4,5 milliards de francs par an, qui n'est que partiellement acquittée par les collecteurs, entraînant un désé quilibre des opérations ; l'augmentation récente importante des coûts de foncier et de construction. Un ressaisissement de l'ensemble des acteurs est donc un préalable au succès du PLUS. S'agissant du 1 % en 1999, les CIL et CCI ont versé aux organismes constructeurs 3,5 milliards de francs de concours long terme, en baisse de 8 % par rapport à 1998. Ces concours se répartissent par nature d'opération de la façon suivante : 62 % sont affectés à des opérations de construction neuve, 16 % à des opérations d'acquisitionamélioration, 19 % à des opérations d'amélioration seule et 3 % à de l'acquisition dans l'ancien sans travaux. La baisse de l'intervention du 1 % est sans doute à relier en partie avec la faible consommation de PLA ou PLUS, mais il est également indéniable qu'atteindre le niveau de l'objectif convenu en 1998 aurait permis à beaucoup d'opérations de s'équilibrer et de se réaliser. Des discussions sont en cours avec l'Union d'économie sociale du logement (UESL) pour mieux mobiliser et adapter ces nancements aux réalités auxquelles sont confrontées les productions des organismes HLM. Cette mobilisation sera mise en oeuvre en laissant une large part à l'initiative des acteurs locaux. De plus, la hausse récente des prix de revient a eu pour conséquence d'éloigner les paramètres retenus pour le calcul des subventions des coûts du marché. Pour répondre à ce phénomène, le Gouvernement va engager une ré exion sur ces paramètres permettant un meilleur nancement des opérations PLUS. D'ores et déjà, les effets de la hausse du livret A de juillet 2000 ont été compensés par les mesures suivantes : allongement de la durée des prêts nouveaux de 32 à 35 ans ; modi cation des hypothèses économiques retenues pour le montant des opérations, qui porte à 1,6 % l'hypothèse d'évolution des loyers (contre 1,2 % précédemment). Cette de rnière mesure, cohérente avec l'évolution de l'in ation et de l'ICC sur la période, n'est pas en contradiction avec l'engagement de gel des loyers. En effet, les générations dont il s'agit seront mises en service au plus tôt n 2001 et ne sont donc pas concernées par les mesures de gel des loyers 2000-2001. Pour le prêt à taux zéro, le Gouvernement a décidé, à compter du 1er janvier 2001, de porter la part maximum de nancement des opérations couverte par ce prêt de 20 % à 30 % en zone urbaine sensible ou en zone franche urbaine, a n d'y favoriser la mixité sociale. Au-delà de cette mesure, une évaluation d'ensemble du dispositif après cinq ans d'existence permettra de préciser, au terme d'un diagnostic précis de son impact, quels changements pourraient y être apportés.

En n, la question de la décentralisation des aides renvoie à un débat plus large, enrichi récemment avec la remise du rapport de M. Mauroy au Premier ministre. S'agissant des aides au logement, on peut toutefois rappeler que leur gestion est totalement fongible et déconcentrée, au sein des DDE, a n de bien s'adapter aux contextes locaux.

14. Mme Janine Jambu appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur les problèmes soulevés par l'insuf sance de la construction sociale locative neuve, insuf sance qui prolonge l'écart entre les besoins et l'offre et exacerbe les attentes.

Si les mesures successivement prises au cours de la législature sur les conditions de nancement du logement social (allongement des


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prêts, baisse de la TVA, compensation de la hausse du livret A, dispositif SRU et appel à la responsabilité des différents acteurs ) ne sont pas négligeables, il reste que la clé de voûte réside dans l'aide à la pierre. Or celle-ci, après avoir connu un rétablissement posi tivement apprécié, est marquée aujourd'hui par la stagnation (15 000 F de subvention moyenne pour un coût de construction par logement de 300 000 F). Elle lui demande quelles mesures sont envisagées pour lui donner une nouvelle impulsion.

Réponse. Le PLUS est un produit adapté en terme de mixité sociale et de situation nancière des locataires avec le calage des loyers plafonds sur ceux des aides personnelles au logement. De fait, la mixité qu'il garantit et les orientations de la loi Solidarité et Renouvellement Urbains (SRU) devraient inciter les collectivités locales à s'investir fortement dans le produit. La cause de la faible consommation de PLA et de PLUS ne semble pas à rechercher prioritairement du côté d'une insuf sance des subventions d'Etat dont sont dotées les opérations. En effet, depuis la réforme du PLUS, les subventions de l'Etat ont été réévaluées et l'insu f sante production d'opérations enregistrée concerne aussi bien l'acquisition-amélioration, pourtant davantage aidée, que le neuf. L'insuf sance de la mobilisation des acteurs est un des aspects préoccupants de la situation actuelle. La réticence de certains élus à utiliser l'ensemble des marges de manoeuvre que leur offre le produit et la volonté de certains organismes HLM de se recentrer sur une approche patrimoniale, au détriment de la production neuve, ne contribuent pas au développement du produit. Cependant, en terme d'équilibre nancier, des facteurs défavorables sont apparus dernièrement : l'implication du 1 % logement dans les opérations apparaît insuf sante : la convention de 1998 xe une obligation d'investir à hauteur de 4,5 milliards de francs par an, qui n'est que partiellement acquittée par les collecteurs, entraînant un déséquilibre des opérations ; l'augmentation récente importante des coûts de foncier et de construction. Un ressaississement de l'ensemble des acteurs est donc un préalable au succès du PLUS.

S'agissant du 1 %, en 1999, les CIl et CCI ont versé aux organismes constructeurs 3,5 milliards de francs de concours long terme, en baisse de 8 % par rapport à 1998. La baisse de l'intervention du 1 % est sans doute à relier en partie avec la faible consommation de PLA ou PLUS, mais il est également indéniable qu'atteindre le niveau de l'objectif convenu en 1998 aurait permis à beaucoup d'opérations de s'équilibrer et de se réaliser. Des discussions sont en cours avec l'Union d'économie sociale du logement (UESL) pour mieux mobiliser et adapter ces nancements aux réalités auquelles sont confrontées les productions des organismes. Cette mobilisation sera mise en oeuvre en laissant une large part à l'initiative des acteurs locaux. De plus, la hausse récente des prix de revient a eu pour conséquence d'éloigner les paramètres retenus pour le calcul des subventions des coûts du marché. Pour répondre à ce phénomène, le gouvernement va eng ager une ré exion sur ces paramètres permettant un meilleur nancement des opérations PLUS. D'ores et déjà, les effets de la hausse du livret A de juillet 2000 ont été compensés par les mesures suivantes : allongement de la durée des prêts nouveaux de 32 à 35 ans ; modi cation des hypothèses économiques retenues pour le montant des opérations, qui porte à 1,6 % l'hypothèse d'évol ution des loyers (contre 1,2 précédemment). Cette dernière me sure, cohérente avec l'évolution de l'in ation et de l'ICC sur la période, n'est pas en contradiction avec l'engagement de gel des loyers. En effet, les générations dont il s'agit seront mises en service au plus tôt n 2001 et ne sont donc pas concernées par les mesures de gel des loyers 2000-2001.

15. M. Patrick Braouezec appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur la question de la réhabilitation des logements dans le parc privé, notamment du parc ancien dégradé et du soutien aux copropriétés en dif culté. Le projet de loi Solidarité et renouvellement urbain, qui doit être voté avant la n de l'année, prévoit la fusion du régime de l'Agence nationale de l'amélioration de l'habitat et de la prime à l'amélioration de l'habitat au 1er janvier 2001. A travers cette fusion, l'amélioration du parc privé doit se contenter, dans le projet de budget 2001, du maintien des moyens d'engagement à hauteur de 3 milliards de francs. Ce simple maintien apparaît en contradiction avec les objectifs de la loi en cours de discussion. Est-il imputable à une sous-consommation des crédits, dont la source résiderait dans une réglementation et une pratique trop respectueuses de la propriété privée surtout lorsqu'elles s'avèrent défaillantes ou indélicat es ? Ce même projet de loi prévoit un certain nombre de dispositions et une simplication administrative visant à lutter contre les logements insalubres, qui risquent de s'avérer inopérantes faute de s'acc ompagner de moyens nanciers renforcés. L'habitat ancien dégradé accueille nombre de familles modestes, victimes de la pénurie de logements sociaux et qui en sont de fait exclues. Les conséquences sont énormes sur l'ensemble de la vie sociale, dans des domaines aussi différents que la santé ou l'échec scolaire. Les communes confrontées à ce dé disposent souvent de peu de moyens pour y faire face et ne recouvrent les investissements qu'elles engagent que de façon incomplète et avec retard. Elles sont de plus confrontées à un cercle vicieux en matière de relogement des familles, le logement dégradé étant souvent immédiatement reloué sans que les travaux indispensables à sa mise en conformité à des conditions de logement décentes aient pu intervenir. Le projet de loi Solidarité et renouvellement urbain contient un certain nombre de dispositions et une simplication administrative visant à remédier à ces situations, mais qui risquent de s'av érer inopérantes faute de s'accompagner de moyens nanciers renforcés.

Aussi, compte tenu de l'enjeu que constitue la réhabilitation de l'habitat ancien dégradé mais aussi dans le souci de l'ef cacité des dispositions en cours de discussion, il lui demande quelles mesures sont, par ailleurs, envisagées.

Réponse. Le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) permet d'engager une réforme du nancement des travaux d'amélioration du parc privé qui se traduira par le regroupement auprès d'un seul organisme public, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH), des outils et moyens nanciers mis en oeuvre pour l'amélioration des logements privés, dont l'actuelle prime à l'amélioration de l'habi tat destinée aux propriétaires occupants. Outre une uniformatisation de la gestion des aides au parc privé, cette « grande ANAH » a pour objectif de mobiliser au service de la politique de renouvellement urbain les dispositifs d'aides à l'habitat privé, comme notamment le soutien aux copropriétés dégradées ou la lutte contre l'insalubrité. Dans ce cadre, il est prévu de renforcer les premières mesures prises en 2000 sur les copropriétés par l'adoption de dispositifs complémentaires, parmi lesquels : le nancement, par l'ANAH, des interventions des bailleurs sociaux lorsqu'ils réhabilitent en vue de leur vente des logements acquis dans les copropriétés faisant l'objet d'un plan de sauvegarde ; l'attribution de la subvention au syndicat de copropriété pour les travaux réalisés sur les parties communes visant à la requali cation des copropriétés dégradées ; en matière de lutte contre l'insalubrité, l'attribution directe de la subvention aux communes qui se substitueraient aux propriétaires défaillants dans leur obligation de réaliser les travaux nécessaires à la sort ie d'insalubrité. Cette disposition a pour nalité de renforcer le caractère opérationnel du régime de travaux d'of ce en évitant à la collectivité locale de supporter seule le poids des avances de fonds nécessaires à la réalisation de ces travaux. La dotation bud gétaire affectée à l'agence a été portée à 3 milliards de francs dans le projet de loi de nances pour 2001 par addition des 2,2 milliards de francs accordés à l'ANAH par le budget 2000 et des 800 MF affectés à la PAH. L'aide de l'ANAH n'est cependant pas le seul élément qui joue dans la décision de démarrer des travaux d'amélioration. La scalité joue également un grand rôle, comme l'a montré l'effet très positif généré par la baisse au taux réduit de 5,5 % de la TVA sur les travaux dans les logements, décidée par la loi de nances pour 2000. Cette mesure permet en réalité, avec le même budget, d'augmenter le montant des travaux subventionnés par l'ANAH.

CONVOCATION DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 21 novembre 2000, à 10 heures, dans les salons de la présidence.


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TEXTE SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION Transmission

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, le texte suivant : Communication du 15 novembre 2000 No E 1597. - Proposition de directive du Parlement européen et d u Conseil modi ant la directive 73/239/CEE du Conseil en ce qui concerne l'exigence de marge de solvabilité des entreprises d'assurance non-vie (COM [634] nal).