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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. le président.

1. Questions au Gouvernement (p. 9077).

NOTE D'UN CONSEILLER (p. 9077)

MM. Philippe Briand, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

POLITIQUE DE L'ÉNERGIE (p. 9077)

MM. Didier Julia, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE (p. 9078)

MM. Jean-Claude Mignon, Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur.

2. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère (p. 9079).

3. Questions au Gouvernement (suite) (p. 9079).

CRISE DE LA VIANDE BOVINE (p. 9079)

MM. Jean-Claude Lenoir, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

AVENIR DE L'ÉNERGIE NUCLÉAIRE (p. 9080)

MM. Jean-Pierre Chevènement, Lionel Jospin, Premier ministre.

4. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère (p. 9082).

5. Questions au Gouvernement (suite) (p. 9082).

JOURNÉE INTERNATIONALE DES DROITS DE L'ENFANT (p. 9082)

M. Jean-Paul Bret, Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille et à l'enfance.

P

ERSONNELS D'ENCADREMENT DES HÔPITAUX PUBLICS (p. 9083)

M. Laurent Cathala, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

POLLUTION PAR LES LOCOMOTIVES DIESEL (p. 9083)

MM. Tony Dreyfus, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

CRISE DE LA FILIÈRE BOVINE (p. 9084)

Mme Monique Denise, M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

DÉCENTRALISATION (p. 9085)

MM. Maurice Leroy, Lionel Jospin, Premier ministre.

NÉGOCIATIONS SALARIALES DANS LA FONCTION PUBLIQUE (p. 9086)

MM. Jean Vila, Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

6. Loi de finances pour 2001. Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi (p. 9087).

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 9089)

MM. Gilbert Gantier, Augustin Bonrepaux, Philippe Auberger, Alain Bocquet, Pierre Méhaignerie, Jean Rigal.

APPLICATION DE L'ARTICLE 44, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION (p. 9094)

Adoption, par un seul vote, par scrutin, des dispositions qui ont fait l'objet de la seconde délibération et de l'ensemble du projet de loi de finances pour 2001.

Suspension et reprise de la séance (p. 9094)

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD

7. Ordre du jour de l'Assemblée (p. 9094).

8. Solidarité et renouvellement urbains. Discussion, en lecture définitive, d'un projet de loi (p. 9094).

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Patrick Rimbert, rapporteur de la commission de la production.

EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ (p. 9099)

Exception d'irrecevabilité de M. Philippe Douste-Blazy : MM. Henri Plagnol, Louis Besson, secrétaire d'Etat au l ogement ; Alain Cacheux, Jacques Brunhes, MarcPhilippe Daubresse, Pierre Cardo. - Rejet.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 9105)

MM. Yves Dauge, Jean-Claude Mignon, Mme Janine Jambu,

MM. Pierre Cardo, Marc-Philippe Daubresse, Jean-Jacques Filleul, Francis Delattre, Noël Mamère.

Clôture de la discussion générale.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

9. Saisine pour avis d'une commission (p. 9115).

10. Désignation d'un candidat à un organisme extraparlementaire (p. 9115).

11. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 9115).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

M. le président.

Mes chers collègues, j'ai le plaisir de souhaiter la bienvenue à notre nouveau collègue, M. JeanClaude Robert, qui remplace M. François Patriat, nommé membre du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Je vous indique dès à présent que la séance ne sera pas suspendue à la fin des questions au Gouvernement ; nous passerons immédiatement aux explications de vote et au vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2001.

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par les questions du groupe du Rassemblement pour la République.

NOTE D'UN CONSEILLER

M. le président.

La parole est à M. Philippe Briand.

M. Philippe Briand.

Monsieur le président, ma question s'adresse au ministre de l'agriculture, mais M. le ministre de l'intérieur comprendra que je fasse appel à sa bienveillance.

J'ai récemment reçu, sûrement par erreur, une note signée de M. Jean-Pierre Pouzoulet, votre conseiller aux relations avec le Parlement, monsieur le ministre de l'agriculture, adressée aux élus de la majorité, dont je ne fais pas partie, note polémique (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) accompagnée d'un bordereau portant la mention manuscrite : « pour diffuser et cogner ».

Cogner sur qui, monsieur le ministre ? (« C'est scandaleux ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Sur les parlementaires de l'opposition (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), alors que M. le Premier ministre nous donne chaque semaine des leçons sur une certaine forme de politique ? Tenez-vous un double langage : ouvert et g énéreux devant les médias, politicien et miséreux derrière ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Merci de nous répondre, car les parlementaires, quels qu'ils soient, ne sauraient être « cognés » par qui que ce soit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Merci, monsieur Briand. On peut toujours aspirer à devenir membre d'une majorité, quelle qu'elle soit ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur le député, je vous remercie de poser cette question qui sera probablement de celles qui intéresseront le plus les Français cet après-midi ! (« Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Je connais très bien Jean-Pierre Pouzoulet, l'un de mes collaborateurs, qui est aussi un ami. Son expérience de l'hémicycle est telle, depuis de nombreuses années, que je m'étonne qu'il ait pu faire cette confusion entre un député de la majorité et un de l'opposition. Cela étant, j'espère que vous ferez bonne lecture de cette note. Je peux vous dire que, depuis qu'elle a été diffusée, je n'en ai reçu que des compliments sur ces rangs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Vives exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

POLITIQUE DE L'ÉNERGIE

M. le président.

La parole est à M. Didier Julia.

M. Didier Julia.

Monsieur le Premier ministre, les questions d'environnement sont toutes des questions de santé publique et, à ce titre, elles doivent mobiliser tous les parlementaires, quels que soient les clivages partisans, sans que les uns aient besoin de « cogner » sur les autres sur directive gouvernementale.

Ma question porte sur votre politique de l'énergie et sur le problème de l'effet de serre qui est aussi une question de santé publique, car l'effet de serre, ce n'est pas seulement la montée à terme des eaux ou la perspective de tempêtes dans les zones tempérées, c'est aussi la pollution atmosphérique et les maladies inflammatoires liées aux rejets polluants générés par les activités humaines.

Le Président de la République a clairement défini hier, dans son intervention à La Haye, lors de la sixième conférence mondiale sur les changements climatiques, la conclusion des accords de Kyoto : « Chacun a le droit de construire des structures qui minimisent durablement ses propres émissions de gaz à effet de serre. Nul ne peut s'épargner la part de l'effort collectif qui lui revient.

Notre responsabilité, c'est de prendre des décisions qui préservent les chances des générations futures. »

Monsieur le Premier ministre, qu'avez-vous fait en matière de politique de l'énergie ? Comptez-vous appliquer rapidement les propositions concrètes formulées par le Président de la République ? (Exclamations sur les bancs


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du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Je vous rappelle que les députés de votre propre majorité déplorent une « politique énergétique brouillée » - ce sont les termes mêmes utilisés par mon collègue communiste Claude Billard, dans son rapport sur les crédits de l'industrie. Quant à notre collègue socialiste Christian Bataille, il va jusqu'à dire que « le volet énergie est sans doute l'un des volets les plus faibles de la politique gouvernementale ».

Déjà, à la conférence de Kyoto, Mme Voynet rasait les murs parce que la France, grâce à sa politique nucléaire, avait été citée parmi les pays contribuant le moins à la pollution atmosphérique et que sa religion l'empêchait de s'en féliciter. Mais est-ce une raison pour refuser la généralisation de la voiture électrique en ville, qui a été prop osée au sein même de votre Gouvernement par Claude Allègre, au moment où EDF vous proposait d'installer gratuitement des milliers de bornes électriques en ville ? Est-ce une raison pour refuser toutes nos propositions en la matière ? A l'occasion de l'examen de la loi sur l'air, nous avons voté contre vous la détaxation pour les carburants, non polluants tels le GPL et le GNV, mais nous sommes prêts à voter avec vous une détaxe sur les véhicules diesel disposant de filtres à particules.

M. Christian Bourquin.

La question !

M. Didier Julia.

Nous sommes prêts à voter avec vous l'incorporation d'une bonne quantité de colza dans le fioul domestique, ce qui réduirait les émanations de soufre provoquant des maladies cardiaques. Nous sommes prêts à voter pour une proportion supérieure d'éthanol dans l'essence, ce qui permettrait une meilleure combustion, moins de rejets et moins de maladies respiratoires.

M. Christian Bourquin. La question !

M. Didier Julia. Monsieur le Premier ministre, la France ne peut parler fort et être entendue à l'extérieur que si elle donne l'exemple en la matière. Je vous le demande au nom de toute l'opposition nationale : quel exemple proposez-vous donc en matière de politique de l'énergie ?

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur le député, je répondrai à la place de Dominique Voynet, ministre de l'environnement, retenue à la conférence de La Haye.

La politique de la France est en effet de lutter résolument contre l'effet de serre et l'émission des gaz à effet de serre, dans le droit-fil des décisions qui ont été prises, notamment sous inspiration française, à Kyoto il y a deux ans. Les propositions des pouvoirs publics français sont défendues à La Haye par Mme Voynet et nous sommes heureux de constater que la déclaration de M. le Président de la République est en parfaite cohérence avec ce que le gouvernement français avait déjà avancé concrètement sur le plan politique de telle manière que la présidence française de l'Union européenne puisse continuer à influencer dans un sens positif les décisions des Quinze.

La maîtrise des émissions de gaz à effet de serre, la promotion des nouvelles énergies, l'application d'une politique industrielle et énergétique équilibrée, prenant appui sur la diversité des capacités technologiques françaises, le nucléaire, les nouvelles énergies et l'ensemble desr echerches et du développement dans ce domaine, permettent à la France d'être l'un des pays les mieux placés s'agissant de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Nous en émettons actuellement beaucoup moins que la moyenne des Etats membres de l'Union européenne...

M. René André. Grâce au nucléaire !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. ... et beaucoup moins que la moyenne des pays membres de l'OCDE. La position française à cet égard consiste à défendre en Europe et dans le monde la meilleure politique en cohérence avec les objectifs qui seront probablement signés à La Haye et avec ceux fixés à Kyoto. Je vous félicite, monsieur le député, de vous rallier ainsi aux propositions du gouvernement français et aux décisions que nous avons déjà prises en la matière. Réduction des gaz à effet de serre, promotion d'une politique énergétique équilibrée, tels sont les objectifs auxquels vous venez de vous rallier.

Je vous félicite d'approuver le gouvernement français !

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Mignon.

M. Jean-Claude Mignon.

Ma question, que je pose au nom des trois groupes unis de l'opposition (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), partageant les mêmes valeurs et visant le même objectif (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste), s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, cela fait maintenant trois ans et demi que la majorité est au pouvoir et les Français attendent toujours de voir les effets positifs de votre politique de lutte contre la délinquance. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Au cours des neuf premiers mois de l'année, les crimes et délits en Ile-de-France ont augmenté de plus de 4 % par rapport à la même période de l'an passé. La part des mineurs dans la délinquance générale continue de croître, pour atteindre plus de 22 %. Ce sont près de 35 000 mineurs qui ont ainsi été mis en cause ! De plus, les vols avec violence ont augmenté de plus de 16 % et les vols à main armée de plus de 26 %. Les Français ont peur. Ils ne peuvent comprendre que le Gouvernement reste impuissant dans l'exercice de l'une des principales missions régaliennes de l'Etat. Au-delà des effets d'annonce et des mesures inefficaces, qu'allez-vous faire concrètement pour lutter contre le développement de la délinquance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur.

Monsieur le député, oui, la sécurité est un droit pour toutes et pour tous sur l'ensemble du territoire ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Oui, la sécurité est l'une des premières libertés ! Oui, l'insécurité est une injustice sociale qui s'ajoute aux autres ! Oui, elle doit être combattue ! mais il faut, en ce domaine, savoir


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faire preuve d'objectivité et apprécier les chiffres avec honnêteté et rigueur. Nous nous félicitons, comme vous j'imagine, de la baisse sensible de la délinquance sur la voie publique et principalement des vols à la roulotte ou des cambriolages, tout en reconnaissant que les vols avec violence sont en augmentation malgré une stabilisation au mois de septembre. La baisse des délits de voie publique est malheureusement absorbée par l'augmentation significative des délits économiques et financiers, en particulier les vols de chèques et de cartes de crédit ainsi que les détournements des nouvelles techniques informatiques.

M. Lucien Degauchy.

Et les vols de portables ?

M. le ministre de l'intérieur. Il faut cependant savoir qu'en Ile-de-France, comme ailleurs, le nombre des faits élucidés progresse. Les premiers résultats, les « retours d'expérience » comme on dit, observés sur les cinq premiers sites pilotes de police de proximité et les soixantetrois circonscriptions où il y a eu généralisation de la police de proximité, sont encourageants et nous attendons des effets positifs dans les 180 circonscriptions de police que j'ai déterminées. Je pense que vous souhaitez, comme moi, que des encouragements soient prodigués à la police.

M. Maurice Leroy. Baratin !

M. le ministre de l'intérieur. En outre, la sécurité ne peut être que coproduite. Il nous faut, les uns et les autres - police, justice, élus de proximité, acteurs sociaux, acteurs associatifs -, agir sur le terrain pour coproduire de la sécurité. Et de ce point de vue, permettez-moi de rappeler que la police de proximité, c'est nous ! Les contrats locaux de sécurité, c'est nous ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Louis Debré.

Zéro !

M. le ministre de l'intérieur.

La création d'emplois administratifs pour permettre aux policiers de retourner sur le terrain (« C'est nous ! »

sur les bancs du groupe socialiste), c'est nous ! Les mesures budgétaires et d'embauche propres à augmenter les effectifs de la police, c'est nous !

Mais les baisses - n'est-ce pas monsieur Debré ? - par manque de prévisions et de gestion des départs à la retraite, ça, c'était vous !

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Protestationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) M. Patrick Ollier. L'augmentation de la délinquance, c'est vous !

M. le ministre de l'intérieur. Permettez-moi d'ajouter que la mise à disposition de compagnies républicaines de sécurité et d'escadrons de gendarmes mobiles aux côtés des policiers pour faire reculer l'insécurité, c'est nous !

(Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) En revanche, la critique systématique des forces de sécurité et l'absence de propositions sérieuses pour lutter contre l'insécurité de la part des trois groupes de l'opposition, hélas, c'est bien vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)

2

SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE ÉTRANGÈRE

M. le président.

Je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire, conduite par M. Henrik Lax, président du groupe d'amitié Finlande-France du Parlement de la République de Finlande. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Il serait souhaitable que des délégations viennent plus souvent dans cette maison ! (Sourires.)

3 QUESTIONS AU GOUVERNEMENT (suite)

M. le président.

Nous reprenons les questions au Gouvernement.

Nous passons au groupe Démocratie libérale et Indépendants.

CRISE DE LA VIANDE BOVINE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir.

Monsieur le Premier ministre, je crois pouvoir parler au nom de l'ensemble des députés de cet hémicycle (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) ,...

M. Bernard Outin.

Ce n'est pas sûr !

M. Jean-Claude Lenoir.

... mais je suis en tout cas certain de le faire au nom des trois groupes de l'opposition.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

La grave crise qui affecte aujourd'hui le monde de l'élevage doit être considérée à trois niveaux : européen, économique, mais aussi moral. Aujourd'hui, l'Europe agricole a marqué ses limites. La France est présentée comme une pestiférée. Son boeuf est suspect du fait même qu'il est mieux contrôlé que d'autres.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Merci Chirac !

M. Jean-Claude Lenoir.

Vous avez, monsieur le Premier ministre, avec le ministre de l'agriculture, la charge de cet important dossier. Hier, une réunion se tenait à Bruxelles. Qu'entendez-vous obtenir de nos partenaires pour assurer la cohésion et l'harmonisation des mesures de santé publique et de protection des consommateurs comme des éleveurs ?

Sur le plan économique, ce n'est pas diminuer l'importance de cette crise que la ramener au niveau de mon département qui, avec 6 000 éleveurs, est le premier


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département d'élevage bovin du grand Ouest. Une véritable détresse s'est aujourd'hui emparée non seulement des éleveurs, mais également de tous les acteurs de la filière bovine, qu'il s'agisse des salariés, des personnels des abattoirs, des négociants ou des bouchers. (« Chirac ! » sur

les bancs du groupe socialiste.)

Quelles mesures entendezvous prendre au nom de la solidarité nationale pour leur permettre de faire face rapidement ? Les aides, fussentelles importantes, ne doivent pas masquer la préoccupation des éleveurs. Ce qui compte, c'est la rapidité avec laquelle elles interviendront.

Enfin, c'est une détresse morale qui affecte aujourd'hui le monde de l'élevage. Cette crise atteint la fierté des éleveurs. Nous devons les aider à remonter une pente difficile et à retrouver foi en leur métier. Monsieur le Premier ministre, quelles perspectives, j'allais dire quelles ambitions, fixez-vous à la France pour son agriculture du

XXIe siècle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur le député, vous posez trois questions : je vais m'efforcer de répondre aussi bien que possible à la première, puis j'évoquerai les deux autres sur lesquelles je reviendrai sans doute plus tard.

Hier et cette nuit jusqu'à ce matin très tôt, le Conseil agriculture s'est effectivement réuni pour faire le point sur un certain nombre de dossiers, et notamment sur la crise de la vache folle. Or cette réunion se présentait très mal pour la France. Par une sorte de paradoxe assez ahurissant, en effet, les éleveurs et les agriculteurs français se sont trouvés presque mis en cause à travers les propositions qui ont fleuri tout au long de ces dix-sept heures de négociations, alors même qu'ils consentent plus d'effort, que les autres pour assurer la qualité et la sécurité de leurs bovins. Cette réunion aurait donc pu se conclure cela a été proposé à de nombreuses reprises - par une sorte d'embargo, partiel certes, sur le boeuf français, ce qui eût été un comble compte tenu des précautions que prend la société française dans son ensemble. Cela montre bien en tout cas le degré d'irrationalité qui préside à la gestion de cette crise dans l'ensemble de l'Europe.

Au terme de cette longue nuit de discussion, nous sommes parvenus à un certain nombre de résultats.

D'abord, nous avons évité le pire, c'est-à-dire un embargo. Et, compte tenu de la manière dont les choses se présentaient, ce n'est pas si mal. Ensuite, nous avons obtenu que les délégations s'entendent sur un texte à l'unanimité pour faire prévaloir des règles communautaires, ce qui n'était pas gagné non plus. Enfin, et c'était fondamental mais pas facile à obtenir non plus, nous avons décidé d'étendre le programme de tests au niveau européen, ce que la France demandait depuis plusieurs mois. Cette extension sera mise en oeuvre en deux étapes : la première à partir du 1er janvier 2001, la seconde au 1er juillet 2001.

Nous avons donc obtenu toutes ces avancées ainsi que d'autres, plus timides, je le reconnais. C'est le cas, par exemple, s'agissant de la définition d'un plan pour les protéines végétales au niveau européen. Une mission a été confiée à ce titre à la Commission, qui devra y revenir dans les prochaines semaines. De même, le Gouvernement considère que nous avons insuffisamment avancé sur le dossier de l'interdiction des farines animales, dont la France souhaitait l'extension au niveau européen. Là, c'est le comité scientifique directeur qui est chargé d'une mission.

Vous le voyez, le bilan est mitigé. Mais compte tenu de la manière dont les choses se présentaient et des quelques avancées que nous avons obtenues, notamment sur les tests, ceux-ci étant indispensables pour faire la transparence sur la réalité de cette épidémie en Europe,...

M. Christian Jacob.

Pourquoi cela était-il impossible il y a trois semaines ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... ce conseil n'aura finalement pas été inutile.

Quant aux mesures que nous devons prendre au niveau national, j'y reviendrai tout à l'heure. Elles ont été annoncées ce matin et représentent un effort de solidarité considérable du Gouvernement à l'égard de la filière bovine. Après le début de la crise, nous avons mis trois semaines pour arrêter ce plan. En 1996, il avait fallu trois mois pour définir un plan comparable. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Nous n'avons donc pas tardé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M. le président.

Nous arrivons au groupe Radical, Citoyen et Vert.

AVENIR DE L'ÉNERGIE NUCLÉAIRE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.

M. Jean-Pierre Chevènement.

Monsieur le Premier ministre, le triplement du prix du pétrole, sur lequel est indexé le prix du gaz, apparaît comme constituant une donnée structurelle pour les années et vraisemblablement les décennies à venir. Cela ne peut pas ne pas modifier l'équation à long terme de notre politique énergétique.

Chacun le sait, actuellement, 80 % de notre électricité est d'origine nucléaire (« Heureusement ! » sur plusieurs bancs

du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), ce qui est avantageux puisque son prix est de 20 % inférieur à celui des énergies fossiles, tandis que les émissions de gaz à effet de serre sont trente fois inférieures. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste, et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Faire des économies d'énergie, comme le propose Yves Cochet, c'est bien, mais jusqu'à une certaine limite car on ne peut pas aller vers une société trop bureaucratique, voire trop tracassière. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du

groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Par conséquent, on n'évitera pas de poser le problème de la modernisation de notre filière électronucléaire si l'on veut prendre en considération les exigences du long terme. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste, ainsi que sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

Compte tenu des délais nécessaires à la mise au point d'un prototype et à l'industrialisation des réacteurs de nouvelle génération, qu'il s'agisse de l'EPR ou des réacteurs à haute température, il n'est pas trop tôt pour en débattre. Les centrales nucléaires qui ont été construites il y a plus de vingt ans arriveront en effet à obsolescence dans dix ou quinze ans.

M. Bernard Accoyer.

Très juste !

M. Jean-Pierre Chevènement.

Dans ce domaine, rien n'est remis en cause, mais rien n'est encore mis en oeuvre.

L'EPR n'est certes pas abandonné, mais il est différé. Je constate que le savoir-faire et la capacité de production d'une entreprise aussi performante qu'Alsthom sont dispersés. En outre, la seule maintenance des centrales nucléaires actuelles ne suffira pas à assurer le maintien de ces compétences, au Creusot comme à Belfort, où se situe, par exemple, la seule usine en Europe capable de faire des turbines et des alternateurs de 1 500 mégawatts.

Y a-t-il une autre manière de passer le cap des dix prochaines années qu'en décidant de lancer le prototype de l'EPR,...

M. Bernard Accoyer.

Non !

M. Jean-Pierre Chevènement.

... pour un coût de financement qui est d'ailleurs parfaitement supportable par EDF ?

M. Bernard Accoyer.

Tout à fait !

M. Jean-Pierre Chevènement.

Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement a-t-il la volonté de préserver la cohérence de la filière énergétique française et particulièrement l'atout maître que constitue la maîtrise du nucléaire civil ? (« Non ! » sur les bancs du groupe du Ras-

semblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Que prévoit-il pour maintenir notre savoir-faire industriel, notamment à Belfort ? A l'occasion de la conférence de La Haye, le Gouvernement demandera-t-il que l'énergie nucléaire soit inscrite dans la liste des énergies propres du protocole de Kyoto ? Enfin, - cela me semblerait bien -, le Gouvernement prévoit-il d'organiser à l'Assemblée nationale un débat sur l'avenir de notre politique énergétique (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) , qui revêt à l'évidence un intérêt national majeur ; lequel je n'en doute pas une seconde, est partagé sur tous les bancs.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre. (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemble-

ment pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le député, cher Jean-Pierre (Sourires), je note votre capacité à rallier au Gouvernement jusqu'à l'opposition ! Je ne sais pas ce que seront durablement les prix du gaz et du pétrole, mais la volonté du Gouvernement est de peser dans les discussions qui vont avoir lieu bientôt, et où Christian Pierret nous représentera, dans le sens d'un prix du pétrole et du gaz rémunérateur pour les producteurs, stable pour les données économiques internationales et non pénalisant pour la croissance dans l'ensemble du monde, notamment dans les pays les plus pauvres, pour lesquels la facture pétrolière est un lourd fardeau. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Comme vous, le Gouvernement reconnaît les bénéfices que la France tire actuellement de l'existence d'un parc important de centrales nucléaires.

M. Jacques Myard et M. Jacques Godfrain.

Grâce à nous !

M. le Premier ministre.

Ce parc lui permet de disposer d'une énergie à bon marché et la place, comme vous l'avez dit, en bonne situation dans la lutte contre l'effet de serre.

M. Edouard Landrain.

Très bien !

M. le Premier ministre.

Il importe que ce parc continue de fonctionner avec le maximum de sûreté, comme c'est le cas aujourd'hui - nous y veillons -,...

M. Jean-Jacques Jégou et M. Patrick Ollier.

Très bien !

M. le Premier ministre.

... et que l'on ne perde pas de temps pour trouver, pour la gestion des déchets radioactifs, au-delà des entreposages actuels, sûrs mais temporaires, des solutions définitives comme le stockage ; nous y travaillons.

Pour l'avenir, le Gouvernement compte annoncer avant la fin de l'année un grand programme d'économies d'énergie et le soutien à des énergies nouvelles et renouvelables. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas sérieux !

M. Patrick Ollier.

Et l'EPR ?

M. le Premier ministre.

Je crois, messieurs de l'opposition, que vous n'êtes pas bon juges du dialogue qui se noue entre un député de la majorité et le Gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Patrick Ollier.

Répondez au moins à la question !

M. le Premier ministre.

En tout cas, l'évolution de la place de l'énergie nucléaire dans le futur fera, le moment venu, et comme je l'ai déjà dit (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

M. Franck Dhersin.

Pirouette !

M. le Premier ministre.

... l'objet d'un débat scientifique et démocratique qui permettra d'examiner toutes les conséquences des choix possibles et de peser tous les arguments. Les modalités du renouvellement du parc seront évidemment centrales dans ce débat. EDF et les électriciens allemands, ainsi que Framatome et Siemens, mènent des études et des recherches sur une nouvelle génération de réacteurs électronucléaires à eau sous pres sion, le réacteur EPR, doté de performances techniques et de caractéristiques de sûreté encore améliorées.

Ces études et ces recherches peuvent également avoir des retombées tout à fait positives pour le maintien et l'augmentation de la sûreté du parc nucléaire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

M. André Billardon.

Très bien !

M. le Premier ministre.

Ces études se poursuivent actuellement. Elles ne sont pas encore suffisamment avancées pour ouvrir un débat sur l'opportunité du lancement industriel d'un prototype du réacteur EPR.

(Protestationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Au demeurant, la demande actuelle d'énergie électrique et la durée de vie de nos centrales ne justifient pas une telle commande dans l'immédiat. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Vous voyez donc que la volonté du Gouvernement est bien de préserver la cohérence de la filière énergétique française, sans brusquer ni hâter le déroulement normal des études et des recherches.

Comme vous l'avez souligné, monsieur le député, la politique énergétique de la France depuis trente ans a fondé une compétence industrielle de tout premier plan, autour d'EDF, de la Cogema, de Framatome et de leurs équipementiers, dont Alstom, et en particulier son établissement de Belfort. (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) La qualité de sa recherche en matière nucléaire, avec le CEA, est internationalement reconnue. La construction de centrales neuves pour la production d'électricité en France marque inévitablement une pause, le parc électronucléaire français étant aujourd'hui formaté à un niveau suffisant.

Mais la mobilisation de cette filière, aujourd'hui arrivée à maturité, dans l'entretien du parc actuel, la participation aux études et recherches évoquées plus haut et à l'exportation lui permettra de maintenir ce patrimoine techn ologique et ces compétences, afin que toutes les possibilités soient en effet laissées ouvertes.

Enfin, la politique énergétique de la France est une question d'intérêt national, par les enjeux qu'elle induit pour notre développement économique et pour la qualité de notre environnement.

M. Thierry Mariani.

Langue de bois !

M. le Premier ministre.

Je me réjouis que ces questions f assent régulièrement l'objet de débats dans cette enceinte.

M. Philippe Auberger.

C'est creux !

M. le Premier ministre.

J'ai moi-même pu participer à un tel débat en juin 1988, et M. Christian Pierret en octobre 1999 et cette année encore. Les nombreux rapports publics réalisés à la demande du Gouvernement ou dans le cadre des travaux de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques permettent également d'éclairer ces questions.

Mesdames, messieurs les députés, des choix déterminants pour notre politique énergétique devront être faits dans les années qui viennent. Le lancement du programme EPR en fait partie. Compte tenu des enjeux, ce choix devra être opéré en étroite concertation avec la représentation nationale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

4

SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE ÉTRANGÈRE

M. le président.

Mesdames, messieurs, je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire conduite par M. Luciano Caveri, président du groupe d'amitié Italie-France de la Chambre des députés d'Italie. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

5 QUESTIONS AU GOUVERNEMENT (suite)

M. le président.

Dans la suite des questions au Gouvernement, nous en venons au groupe socialiste.

JOURNÉE INTERNATIONALE DES DROITS DE L'ENFANT

M. le président.

La parole est à M. Jean-Paul Bret.

M. Jean-Paul Bret.

Madame la ministre déléguée à la famille et à l'enfance, hier, lundi 20 novembre, les quinze ministres de l'Union européenne chargés de l'enfance se sont retrouvés à votre initiative, à Paris, à l'occasion de la journée internationale des droits de l'enfant, instituant ainsi la première journée européenne de l'enfance.

Cette rencontre s'inscrit parfaitement dans la continuité des travaux engagés par notre assemblée, dans le cadre notamment de la commission d'enquête parlementaire sur les droits de l'enfant en France.

Je vous poserai deux questions. La première concerne p lus particulièrement la France. Notre commission d'enquête avait souligné la nécessité de se mettre en conformité avec la convention internationale des droits de l'enfant, s'agissant notamment du droit de l'enfant à connaître ses origines. Où en sommes-nous sur ce point ? La création d'un conseil national pour la conservation des origines avait été envisagée. Qu'en est-il ? La seconde question concerne tous les Etats de l'Union européenne qui ont réaffirmé le droit de l'enfant à être protégé contre toutes les formes de violence et à être éduqué, quel que soit son milieu social. Quels moyens comptez-vous mettre en oeuvre avec vos collègues européens pour faire en sorte que les droits de l'enfant soient respectés et que les devoirs des Etats soient effectivement observés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre déléguée à la famille et à l'enfance.

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille et à l'enfance.

Monsieur le député, en effet, cette première journée européenne de l'enfance a été le point de départ d'un travail au long cours qui se poursuivra dans les semaines et les mois à venir.

Par cette réunion dans le cadre de la présidence française, j'ai voulu marquer nos préoccupations et amener les différents pays à mettre en commun leur savoir-faire et à


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

comparer leur législation pour trouver les dispositions les plus efficaces. En effet, si nous alignons notre action vers le haut, nous réussirons à préfigurer une formidable Europe des droits de l'enfance et des devoirs des pays qui s'y attachent.

Trois thèmes ont été évoqués. D'abord, celui des droits de l'enfant à être protégé, qui recouvre toutes les luttes contre les violences. A cet égard, nous avons mis en commun notre expérience et plusieurs pays européens devraient mettre en place un numéro d'appel analogue à notre 119. Ensuite, nous avons décidé de renforcer la coopération internationale en matière de lutte contre toutes les formes d'exploitation sexuelle des enfants. Nous avons également débattu du droit de l'enfant à l'éducation. Cela nous a conduits à comparer nos politiques de lutte contre l'exclusion, puisque la pauvreté peut faire obstacle au droit des familles à élever leurs enfants. Enfin, nous avons abordé la question du droit des enfants à être respectés, en particulier en confrontant les droits de la famille et en évoquant la participation des enfants aux décisions les concernant.

Au nom de la France, j'ai rappelé les engagements que le Gouvernement a pris pour modifier le droit à la famille, spécialement pour établir l'égalité entre tous les enfants quelle que soit leur filiation - enfants légitimes et enfants naturels -, et pour permettre aux enfants d'avoir accès à leur histoire lorsque leur mère a accouché sous secret.

Monsieur le député, vous le savez, car vous êtes l'auteur d'un rapport parlementaire sur le sujet, la convention internationale des droits de l'enfant est un guide d'action concret qui nous engage. J'en veux pour preuve que les Etats-Unis n'ont pas signé cette convention au motif qu'elle fait obstacle à la peine de mort qui s'applique encore pour les mineurs dans un certain nombre d'Etats. C'est dire à quel point l'Europe est porteuse d'un message fort. Si nous avons décidé de nous engager, c'est que nous pensons que cette « utopie » est réalisable. Nous ferons ainsi de l'Europe, que nous construisons d'abord pour les générations futures, le territoire des droits partagés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

PERSONNELS D'ENCADREMENT DES HÔPITAUX PUBLICS

M. le président.

La parole est à M. Laurent Cathala.

M. Laurent Cathala.

Je voudrais me faire l'écho auprès de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité du profond malaise ressenti par le personnel d'encadrement de soins de nos hôpitaux.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Au fil des années, leurs fonctions, notamment celles des cadres infirmiers et des cadres supérieurs infirmiers, ont considérablement évolué, jusqu'à en faire des maillons essentiels de la sécurité et de la qualité des soins dans nos services. En effet, ils participent activement aux projets d'établissement, assurent tant la gestion financière que celle du personnel, tout en assumant des tâches de plus en plus diversifiées. En outre, depuis quelques années, ils sont les premiers confrontés aux contraintes budgétaires de l'hôpital public et, bien sûr, à leurs conséquences en termes de personnel et de moyens.

Cette situation a engendré peu à peu une véritable crise. En effet, ces personnels, parce qu'ils sont au centre d u dispositif administratif, médical, hospitalier, concentrent sur leurs fonctions toutes les difficultés et tous les conflits, tout en assurant coûte que coûte la permanence et la continuité des soins.

Il est évident que, au regard de leurs charges de travail, leur statut ne correspond plus à la réalité de leur mission et de leur rôle.

M. Thierry Mariani.

Qu'attendez-vous ?

M. Laurent Cathala.

Ils revendiquent par conséquent la reconnaissance d'un véritable statut ainsi qu'une revalorisation de leur grille indiciaire.

Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer quelles mesures vous comptez prendre pour répondre aux demandes formulées. Est-il envisagé de reconnaître, à court terme, la spécificité de ces fonctions et leur rôle essentiel dans le fonctionnement de l'hôpital public ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - « Gillot ! Gillot ! » sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. François Goulard.

Mme Gillot est-elle muette ?

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, je vous remercie d'avoir appelé l'attention de l'Assemblée nationale sur la situation des cadres hospitaliers, dont les responsabilités ont évolué, en même temps, d'ailleurs, que les missions de l'hôpital tout entier.

Il est en effet indéniable que c'est désormais sur ces 36 500 cadres administratifs, techniques et, surtout, paramédicaux que repose essentiellement la responsabilité de la qualité et de la sécurité des soins, de l'animation des équipes, de la participation à l'élaboration du projet d'établissement et, plus généralement, à celle du projet social. Leurs fonctions se sont diversifiées ; elles se sont modifiées et leurs responsabilités sont plus lourdes.

M. Bernard Accoyer.

Et dans le secteur de l'hospitalisation privée ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est pourquoi nous avons besoin qu'une réflexion nationale soit lancée sur leur rôle, leurs missions et leur place dans l'organisation hospitalière.

Puisque vous avez évoqué des difficultés, je vous rappelle que, dans le protocole du 14 mars 2000, un effort sans précédent a été consenti en faveur de l'hôpital public. A cette occasion, il avait été convenu que, dès le début du mois de décembre, une réflexion serait engagée avec les organisations syndicales représentatives sur la fonction et le statut des cadres hospitaliers. La formation de l'encadrement devrait également être traitée. L'objectif de cette démarche est de reconnaître la spécificité des fonctions des cadres hospitaliers ainsi que leur rôle essentiel dans le fonctionnement de l'hôpital public.

Dans le respect des engagements pris dans le cadre de ce protocole, j'annoncerai d'ailleurs, avant la fin de cette semaine, le calendrier et le déroulement des différents chantiers que nous mettrons en oeuvre pour revoir le statut et les fonctions des cadres hospitaliers. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

POLLUTION PAR LES LOCOMOTIVES DIESEL

M. le président.

La parole est à M. Tony Dreyfus.

M. Tony Dreyfus.

Monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, vous avez été régulièrement informé par les maires des arrondissements de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

l'Est parisien des réactions très vives des riverains touchés par les émanations polluantes du trafic des locomotives transitant par la gare de l'Est.

Selon les termes mêmes du rapport que vous avez vous-même commandé, il y a pollution inacceptable dans un périmètre évalué à 500 mètres autour des voies. Or la SNCF n'a jamais rendu public le nombre de locomotives diesel en activité ni présenté les solutions techniques qu'elle envisage pour mettre fin à ces risques. J'ajoute qu'elle n'a pas davantage pour habitude de répondre aux questions des élus de banlieue qui se plaignent de cette pollution dont ils sont quotidiennement saisis.

M. Daniel Marcovitch.

Eh oui !

M. Tony Dreyfus.

C'est donc au nom d'une exigence de santé publique, aujourd'hui ressentie par tous les habitants concernés, que je vous demande de me faire savoir les mesures techniques qui peuvent être envisagées pour supprimer ces risques dans les plus brefs délais, ainsi que les mesures provisoires qui pourraient être prises pour réduire aussi rapidement que possible le niveau d'exposition des populations concernées. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Comme vous, monsieur le député, nous sommes tous soucieux de la qualité de vie des riverains de la gare de l'Est. Des élus parisiens ou de banlieue, M. Vaillant comme M. Bersinger, m'interpellent souvent sur ce dossier. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous savez que j'ai encouragé la SNCF à prendre les engagements suivants concernant les locomotives diesel de Paris La Villette : arrêt des mouvements de locomotives diesel de ligne pendant les heures d'ouverture des écoles dès le mois de septembre 1999 - en règle générale, cet engagement est respecté ; transfert, en un an - soit en mars 2000 - de la station service de La Villette sur le site de l'Ourcq : cela a été fait ; engagement de remotorisation des locomotives diesel de la ligne Paris-Bâle, de manière à diminuer de moitié les rejets atmosphériques et de supprimer les panaches de fumée au démarrage des engins. Cette remotorisation a fait l'objet d'études et la SNCF a lancé un appel d'offres. L'Etat s'est engagé à apporter sa contribution. Le dossier sera bouclé dès que la région aura confirmé sa participation. Je précise que la ville de Paris a refusé de s'associer à ce financement.

(Exclamations sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Enfin, la SNCF s'est engagée à électrifier la ligne Paris-Bâle, ce qui supprimera toute nuisance. J'ai indiqué que l'Etat était prêt à prendre à sa charge 25 % des investissements nécessaires. Dans cette perspective, un montant total de 300 millions de francs a été arrêté dans le cadre du contrat de plan Etat-région ChampagneArdenne, avec une participation de l'Etat de 75 millions de francs.

Par ailleurs, j'ai demandé que soit mis en place un comité de suivi comprenant des élus et des représentants des associations. Cela a été fait et tous les éléments utiles doivent lui être communiqués, y compris ceux portant sur le nombre de locomotives.

Monsieur le député, puisque vous m'avez demandé si des mesures nouvelles d'exploitation pouvaient être prises dans l'immédiat, je vous indique que le président de la SNCF m'a fait connaître celles qui seraient mises en oeuvre dès 2001. Ainsi les locomotives les plus polluantes, les fameuses CC 72000 - ce sigle a un sens pour les cheminots ! - seront désormais tractées, à partir de la gare de l'Est, vers leur point de départ par des locomotives électriques, ce qui réduira de moitié la circulation diesel sur la ligne Paris-Bâle à la gare de l'Est.

Toutes ces mesures devraient permettre de répondre à vos préoccupations en attendant l'indispensable électrification de la ligne Paris-Bâle. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. Jean Ueberschlag.

Quand sera-t-elle réalisée ?

CRISE DE LA FILIÈRE BOVINE

M. le président.

La parole est à Mme Monique Denise.

Mme Monique Denise.

Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, la situation de crise que nous vivons actuellement concernant la viande bovine touche l'ensemble de la population, des consommateurs aux producteurs que sont les éleveurs. Ces derniers subissent en effet un séisme sans précédent. Ils ne parviennent plus à vendre leurs bêtes, même à un prix dérisoire. Leur situation financière devient dramatique, car ils doivent acquitter, en cette fin d'année, impôts et taxes, comme tout le monde, mais aussi droits de fermage et cotisations à la MSA.

Je vous félicite d'avoir annoncé diverses mesures d'aide en faveur de ces éleveurs, mais je me permets d'insister sur la nécessité de les mettre en oeuvre d'extrême urgence.

Par ailleurs, chacun de nous se pose la question du déclencheur de cette affaire. Pour quelles raisons en sommes-nous arrivés là ? Les mesures prises pour rassurer les consommateurs, notamment la mise en place d'un numéro vert pour répondre à leurs questions, sont bonnes. J'espère qu'elles permettront d'enrayer rapidement cette psychose.

Il n'empêche qu'il devient indispensable que nous menions collectivement une réflexion sur l'avenir de notre agriculture, afin de déterminer quelle agriculture nous voulons pour nos enfants et pour la France de demain.

M. Thierry Mariani.

Pas celle des socialistes !

Mme Monique Denise.

La loi d'orientation agricole que nous avons votée l'an dernier trace le chemin d'une agriculture équilibrée et raisonnée.

M. Thierry Mariani.

C'est un échec !

Mme Monique Denise.

Cette réflexion de fond doit être menée le plus largement possible avec l'ensemble de la profession. En effet, notre agriculture ne doit pas devenir une industrie qui recherche la productivité à tout prix. Il faut qu'elle assure une production de qualité au meilleur prix pour le consommateur.

Monsieur le ministre, pensez-vous pouvoir organiser cette réflexion ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Madame la députée, à la demande de M. le Premier ministre, j'ai effectivement annoncé un plan gouvernemental d'urgence de soutien à la filière bovine. Il comporte un très large éventail de mesures pour soutenir,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

directement et indirectement, non seulement les éleveurs de bovins mais aussi les entreprises situées en aval : les abattoirs et les industries de transformation, qui sont très touchés par des mesures de chômage partiel.

Il convient également d'aider la filière avicole, menacée dans ses équilibres par les décisions que nous avons prises sur l'interdiction des farines animales.

Ce plan d'envergure, qui permettra de mettre en oeuvre une palette d'instruments très variée pour soutenir ces éleveurs, a fait l'objet de très longues négociations avec les professionnels depuis plus d'une semaine ; je me contenterai d'insister sur quelques-uns de ses éléments.

Comme il est évident que, pour sortir de cette crise, il faut d'abord redonner confiance dans la consommation de viande bovine, ce plan comporte un volet relatif à la communication et à la diffusion d'informations par le biais d'annonces - vous en avez sans doute déjà vu dans vos quotidiens -, du numéro vert auquel vous avez fait allusion, de brochures, de circulaires aux préfets, destinées aux responsables de cantines scolaires ou de restauration collective.

Ce rétablissement de la confiance dans la consommation de la viande française est indispensable. En effet, je le répète dans cet hémicycle, il s'agit de celle pour laquelle sont prises le plus grand nombre de mesures de précaution et de sécurité dans toute l'Union européenne.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Plus vite nous restaurerons cette confiance, plus vite nous pourrons sortir de cette crise.

M. Christian Jacob.

Il ne fallait pas la provoquer !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

En second lieu, je souligne que ce plan représentera un effort de 3,2 milliards de francs.

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas assez !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Cela montre l'importance de l'engagement de l'Etat en faveur du soutien à cette filière. Vous pouvez certes toujours prétendre que c'est insuffisant...

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est rien à côté du coût des 35 heures !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... mais c'est le double de ce que vous avez fait en 1996. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Pourtant, à l'époque, vous aviez été appuyés par la Commission européenne. Quand celle-ci interviendra pour nous aider nous pourrons faire encore plus, et je ne doute pas que ce sera bientôt le cas compte tenu de la situation des marchés européens.

Du reste, ce plan n'est pas pour solde de tout compte.

En effet, nous devrons suivre au jour le jour l'évolution de cette crise. Ainsi, dès demain, sera mise en place au sein de l'office national interprofessionnel des viandes, l'OFIVAL, une cellule de suivi de la crise pour adapter le dispositif et l'amender au fur et à mesure de l'évolution de cette crise.

Enfin, je dois répondre aux parlementaires, aux organisations et confédérations syndicales de salariés, qui se sont inquiétés des graves menaces - quand elles ne se sont pas concrétisées - de chômage partiel pesant sur les employés des entreprises d'abattage et de transformation frappées de plein fouet par cette crise.

A cet égard, je peux indiquer que, avec ma collègue ministre de l'emploi et de la solidarité, nous organiserons, le 24 novembre, c'est-à-dire cette semaine, une table ronde qui réunira des représentants de nos deux ministères et des organisations de salariés de cette branche pour élaborer les mesures économiques et sociales nécessaires pour aider ces entreprises et assurer le suivi social de leurs salariés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons au groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

DÉCENTRALISATION

M. le président.

La parole est à M. Maurice Leroy.

M. Maurice Leroy.

Monsieur le Premier ministre, les maires de France, réunis en congrès depuis ce matin, jugent vos actes, et non vos discours, en matière de décentralisation.

A cet égard, quels sont les derniers avatars ? Suppression de la part régionale de la taxe d'habitation (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste), suppression de la vignette (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) que vous avez décidée sans concertation avec les départements. Il est vrai, mes chers collègues, que votre gouvernement est beaucoup plus fort pour s'attaquer à la suppression d'impôts (Applaudissements sur les mêmes bancs) dont il n'a pas la responsabilité. Il serait mieux inspiré de s'attaquer aux impôts d'Etat et à la réforme de l'Etat.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Tiens, c'est étonnant, vous n'applaudissez plus à gauche ! C'est un peu tristounet ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vingt-quatre mesures au total ont détérioré le lien fiscal entre les collectivités locales et l'Etat. Certes, elles ont été accompagnées du maître mot de compensation, mais les maires - tous les maires, mes chers collègues - savent d'expérience la fiabilité qu'on peut accorder à un tel engagement et ce qu'il faut en penser.

En fait, monsieur le Premier ministre, vous n'avez jamais autant parlé de décentralisation qu'au moment même où vous n'avez jamais autant recentralisé les ressources pour décentraliser les charges. (Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vous n'applaudissez toujours pas, à gauche ? Vous ne cessez de vous autoproclamer l'héritier de Gaston Defferre. N'êtes-vous pas plutôt, en ce domaine, le dauphin de Mme Thatcher ? (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie franç aise-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Oui, monsieur le Premier ministre, les maires de France s'interrogent gravement et vous interrogent à ce sujet. Je pose donc ma question au nom des trois groupes de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Q uelles sont vos intentions sur l'autonomie des communes de France ? A quelle sauce avez-vous décidé de manger les collectivités locales ? (Applaudissements sur les


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le député, si j'étais l'héritier de Mme Thatcher, vous m'adresseriez des compliments enthousiastes, comme vous le faisiez lorsqu'elle était aux responsabilités. Vous ne devriez d'ailleurs pas oublier que c'est à son époque, et en raison d'une vision libérale étroitement mercantile, qu'a commencé, à la suite du changement des modes de traitement des farines animales, l'épidémie d'ESB. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Si vous étiez les héritiers de Gaston Defferre, qui était mon ami (Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), vous auriez voté les lois de décentralisation en 1982, or vous avez voté contre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean Ueberschlag.

Changez de disque ! Ça fait trois fois que vous le dites !

M. Thierry Mariani.

Parlez-nous plutôt de Mitterrand !

M. le Premier ministre.

Parce que ça fait trois fois que vous êtes en contradiction ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Moi, je reste cohérent et logique. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Charles Ehrmann.

Pitoyable !

M. le Premier ministre.

Si vous étiez des partisans de la réforme de l'Etat, vous nous féliciteriez d'avoir opéré, dans l'éducation nationale, la déconcentration du mouvement dans le second degré. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous nous apporteriez votre soutien lorsque le ministre de l'économie et des finances lance la grande réforme des marchés publics, qui permettra de clarifier les règles aux yeux des élus et de favoriser l'accès des petites et m oyennes entreprises aux marchés des collectivités publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) En matière de réforme de l'Etat - à cet égard, je veux faire preuve d'objectivité -,...

M. Thierry Mariani.

Ça changera !

M. le Premier ministre.

... je reconnais que les débuts ne sont pas totalement négatifs. Vous devriez donc vous associer à la démarche du rapporteur général du budget, Didier Migaud, et du président de l'Assemblée nationale pour réformer enfin l'ordonnance de 1959 sur les procédures budgétaires.

M. Gilbert Meyer.

Ce n'est pas suffisant !

M. le Premier ministre.

J'espère que nous pourrons accomplir ce travail ensemble.

M. Patrick Devedjian.

Il faudrait que vous teniez un autre discours !

M. le Premier ministre.

De toute façon, nous, majorité et Gouvernement, nous mènerons ce projet jusqu'à son terme. Nous allons engager la réforme de l'Etat et sa modernisation la plus importante depuis quarante ans.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Je me réjouis aussi, monsieur le député, que vous ayez enfin remarqué que nous baissons les impôts. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ceux qui n'ont plus à payer la vignette ou la part régionale de la taxe professionnelle ou qui voient diminuer leur taxe d'habitation s'en félicitent.

M. Maurice Leroy.

Ce n'est pas la question !

M. le Premier ministre.

De même, nous compensons intégralement les diminutions de produit qui en résultent pour les collectivités locales.

M. François Baroin.

C'est faux !

M. le Premier ministre.

On ne peut pas à la fois réclamer que l'impôt baisse et protester lorsque celui-ci diminue.

M. Serge Poignant.

Mais c'est faux !

M. le Premier ministre.

C'est ce que je dirai aux maires de France réunis cet après-midi, puisque j'aurai l'occasion d'aller les revoir après les questions d'actualité. Je compte sur leur courtoisie républicaine et, plus encore, sur leur lucidité. Ils savent qu'avec nous, depuis trois ans et demi, ils y ont gagné sur le plan des ressources. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Il nous reste malheureusement trop peu de temps pour entendre M. Leonetti. Nous passons au groupe communiste.

NÉGOCIATIONS SALARIALES DANS LA FONCTION PUBLIQUE

M. le président.

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Ma question s'adresse à M. le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Dans nombre de départements s'organisent aujourd'hui des rassemblements de fonctionnaires auxquels les députés c ommunistes et apparentés entendent exprimer leur entière solidarité. Pourquoi agissent-ils ainsi précisément le jour où s'ouvrent les négociations salariales ? Tout simplement parce que le projet de budget n'a pas, loin s'en faut, levé leurs inquiétudes.

Chacun sait en effet que les 3,250 milliards qui y ont été inscrits représentent moins de 0,5 % d'augmentation.

On est loin du compte pour envisager de revaloriser dans des proportions décentes leur traitement en 2001 et faire en sorte que l'année 2000 ne soit pas une année

« blanche », comme vous-même ainsi que M. le ministre de l'économie et des finances vous y êtes engagés.

La compétence, le courage, le dévouement, l'attachement de nos fonctionnaires au service public ne sont plus à prouver. Ils le démontrent au quotidien comme dans les circonstances exceptionnelles, par exemple l'hiver dernier.

Comment peut-on les motiver davantage s'ils sont exclus de la croissance ? C'est plutôt un sentiment d'injustice qu'ils ressentent. Alors que 43 % d'entre eux


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

seront partis à la retraite dans les quinze années à venir, comment renouveler les effectifs si on ne les paie pas ? Comment justifier que la valeur du point d'indice dans la fonction publique, base de calcul des rémunérations et pensions de neuf millions de personnes, fasse passer le salaire minimum de la fonction publique en dessous du SMIC, qui est déjà très en deçà de ce qu'il devrait être ? Les députés communistes et apparentés, qui, chaque année, ont dénoncé le dogme du gel de l'emploi public, n'entendent pas aujourd'hui lui voir substituer celui du gel des salaires. Si nous sommes satisfaits de la création de 11 000 emplois publics en 2001, qui viennent compenser les suppressions d'effectifs décidées par la droite en 1996 et 1997, nous pensons devoir afficher la même ambition pour les salaires. Sachant que votre budget n'est pas élastique et ne prévoit même pas 0,5 % d'augmentation pour 2001, comment entendez-vous, monsieur le ministre, satisfaire les revendications des salariés et des retraités de la fonction publique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Monsieur le député - ou plutôt monsieur le rapporteur spécial du budget de la fonction publique -, je vous remercie de votre question.

Comme vous le savez, je vais dans quelques minutes rencontrer les représentants de l'ensemble des fonctions publiques - fonction publique de l'Etat, mais également fonctions publiques territoriale et hospitalière -, pour engager avec eux des discussions sur les questions salariales.

Ce n'est pas la première fois : depuis que j'ai été nommé au Gouvernement, j'ai souhaité aborder, en toute clarté et en toute franchise, avec les organisations syndicales les questions qui tournent autour de la rémunération, principale ou accessoire, des fonctionnaires. Ce ne sera pas non plus la dernière ; d'autres réunions, d'autres contacts auront lieu dans les semaines qui viennent pour nous permettre d'aboutir à ce que souhaite le Gouvernement : un accord salarial à la fois juste et sérieux.

Un accord juste, c'est un accord qui ne laissera pas l'année 2000 de côté et qui, contrairement à ce que nos prédécesseurs avaient fait en 1996, ne décrète pas une année blanche pour la variation de la rémunération des fonctionnaires.

Un accord juste, c'est également un accord qui se préoccupe du devenir de nos fonctionnaires, en particulier des jeunes. En effet, j'entends bien que, dans les années qui viennent, soit relevé le grand défi du recrutement de jeunes générations qui remplaceront celles qui partent à la retraite ; cela passe évidemment par les conditions de rémunération.

Mais nous voulons aussi un accord sérieux.

Cela implique de reconnaître que l'accord conclu en 1998 et 1999 a été positif pour l'ensemble des fonctionnaires. La preuve en est que, depuis le début de l'année, je n'ai pas senti de tension particulière sur les questions salariales.

Vouloir un accord sérieux, c'est aussi tenir compte du fait que, lorsqu'on parle de rémunérations, on parle de près de la moitié du budget de l'Etat. Plus de 700 milliards de francs sont en jeu. Je suis persuadé que l'ensemble des fonctionnaires, quelles que soient leurs légitimes attentes, se préoccupent également de cet élément. Parler de la rémunération des fonctionnaires, c'est faire face à l'équilibre de nos comptes, c'est aussi faire face à l'avenir de la France. Je suis sûr que mes interlocuteurs tiendront compte de ces deux aspects. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

6 LOI DE FINANCES POUR 2001 Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle les explications de vote sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2001.

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que le vote aurait lieu par scrutin public, en application de l'article 65-1 du règlement.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, l'Assemblée va dans quelques instants procéder au vote en première lecture du projet de budget pour l'année 2001. Avant les traditionnelles explications de vote, je veux souligner la qualité du travail effectué pendant toutes ces semaines, qui a permis de préciser ce texte sans le dénaturer, de l'adapter sans le travestir et, du même coup, de renforcer les hypothèses et les objectifs économiques proposés par le Gouvernement.

Il y a de cela presque un mois, m'exprimant sur la première partie du projet de loi de finances au moment de son adoption par votre assemblée, j'avais déjà salué cette complémentarité entre l'exécutif et le législatif au service des objectifs de croissance, de solidarité et d'emploi.

Vous êtes intervenus, et de façon très forte, dans le débat sur cette première partie.

Pour favoriser l'activité et l'innovation, vous avez souhaité moderniser le régime fiscal des sociétés de capitalrisque, renforcer la condition d'emploi pour bénéficier de la défiscalisation dans les DOM, élargir la ristourne de CSG, qui s'appliquera dorénavant jusqu'à 1,4 fois le SMIC.

Pour renforcer la solidarité entre les générations, les territoires et les catégories socio-professionnelles, vous avez réévalué le plafond du mécanisme dit de ticketrestaurant, adopté l'abattement de taxe foncière pour les HLM en zone urbaine sensible, décidé un dégrèvement de la taxe foncière et exonéré de redevance audiovisuelle les personnes de plus de soixante-dix ans non imposables, majoré la dotation de solidarité rurale et le financement de l'intercommunalité dont je veux souligner le grand succès, supprimé, enfin, l'indexation du barème de l'ISF.

Pour améliorer la protection de l'environnement, vous avez décidé d'abaisser la taxe sur l'aquazole et amélioré les conditions d'amortissement pour les équipements de production d'énergies renouvelables.

Enfin, vous avez choisi de moderniser la fiscalité des agriculteurs, supprimé la vignette pour les associations, les syndicats et les entrepreneurs individuels, et accru la taxation prévue pour les compagnies pétrolières.


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L'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 me semble avoir conforté cette orientation constructive. Vous avez souhaité marquer plus particulièrement les droits qu'auront toujours sur nous les anciens combattants en majorant les crédits d'action sociale de leur office national et en élargissant l'accès à lar etraite du combattant pour les ressortissants des anciennes possessions françaises. Vous avez donné une application concrète aux principes de prudence et de précaution en prévoyant la création de plusieurs dizaines d'emplois supplémentaires de techniciens dans le secteur vétérinaire, qui permettront d'intensifier les contrôles sanitaires, et en renforçant les moyens destinés à l'inspection des navires. Après le naufrage du Ievoli Sun, et dans un contexte troublé par les conséquences de la maladie de la vache folle, vous avez montré ce qu'était le rôle d'une assemblée responsable.

Je conclurai ce court propos par trois remarques.

J'ai tout d'abord noté qu'aucun budget n'a été réservé dans le courant du débat budgétaire, ce qui confirme la qualité du dialogue entre le Gouvernement et l'Assemblée, entre vos formations politiques, et singulièrement celles de la majorité plurielle, les ministres et l'ensemble des parlementaires.

Je veux remercier les députés des différents groupes qui ont pris part aux discussions en y apportant la diversité de leurs opinions et de leurs convictions, mais aussi la singularité de leur expérience et de leur expertise. Je veux notamment témoigner ma gratitude à l'ensemble de la commission des finances ; elle n'aura, comme d'habitude, compté ni ses jours ni ses nuits. Je veux remercier son président, qui a toujours été très attentif aux grands équilibres de la nation, y compris lorsque Bercy s'appelait Rivoli. Je salue le rapporteur général pour la qualité et la précision des informations et des propositions qu'il a bien voulu apporter à la représentation nationale comme au Gouvernement.

Je tiens enfin à remercier, au nom du Gouvernement et en votre nom à tous, les fonctionnaires de l'Assemblée nationale, qui ont permis le bon déroulement de nos discussions, lesquelles, l'année prochaine, auront lieu, je l'espère, dans le cadre d'une ordonnance du 2 janvier 1959 réformée. Ajoutons que ce budget est le dernier que je vous présente en francs ; le prochain sera présenté en euros.

Vous me permettrez pour terminer un mot particulier à l'adresse de Christian Pierret, qui a défendu devant vous l'essentiel de la première partie de cette loi de finances, avec la compétence et le dynamisme qu'on lui connaît. Je tiens à lui faire part de ma reconnaissance ainsi qu'à Mme Florence Parly qui, à l'issue d'un congé qui est de droit pour toute femme, fût-elle ministre, a repris son travail avec la compétence et la simplicité qui devraient être le fait de tout ministre fût-il un homme.

Il ne me reste plus, mesdames, messieurs les députés, qu'à vous inviter à adopter, à une large majorité, je l'espère, le projet de loi de finances pour 2001. Sachez que, s'il reste sûrement des progrès à accomplir, le Gouvernement travaille sincèrement, positivement, pour l'intérêt général et l'avenir du pays. Priorité à l'emploi, c ap sur la solidarité, désendettement et diminution des déficits, baisse des impôts et plus grande justice fiscale, maîtrise des dépenses, hausse du pouvoir d'achat et renforcement des investissements : voilà ce qu'une croissance solide et durable doit rendre chaque jour davantage possible et nécessaire, voilà ce à quoi, au nom de notre pays, nous travaillons.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Monsieur le président, monsieur le ministre des finances, madame la secrétaire d'Etat au budget, nous voilà arrivés au terme de quatre semaines de débats publics sur ce projet de loi de finances pour 2001, après plus de cent trente heures de débats, première et deuxième parties confondues.

Après M. le ministre des finances, je forme le voeu que nous examinions le prochain budget dans un cadre renouvelé puisque, ainsi que l'a rappelé tout à l'heure le Premier ministre, nous devrions avoir réformé l'ordonnance de 1959 et toiletté notre procédure budgétaire afin de la rendre plus transparente, plus efficace, pour que l'Etat lui-même soit plus transparent, plus efficace et mieux contrôlé.

Au cours de la première partie, 557 amendements ont été déposés, et 172 pendant la seconde partie, au total 820 amendements, dont 172 ont été adoptés, soit un amendement sur cinq. Je veux, à travers ce chiffre, me féliciter de la qualité de nos débats, remercier M. le ministre et Mme la secrétaire d'Etat pour la qualité d'écoute dont ils ont fait preuve. Ces amendements sont certes issus pour la plus grande part de la majorité plurielle ; les propositions formulées par ses divers groupes pour renforcer les orientations initiales ont été accueillies favorablement par le Gouvernement et nous devons nous en réjouir. Mais nous avons également su nous montrer attentifs à certaines propositions de l'opposition (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

Mme Nicole Bricq.

Si, si !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... puisque plusieurs amendements pertinents proposés par nos collègues ont été repris, et en plus grand nombre que les années précédentes, par la majorité de cette assemblée.

Le projet de loi se situait dans la continuité des orientations définies depuis juin 1997, avec une dépense publique maîtrisée, orientée vers des priorités clairement définies comme l'emploi, l'éducation, la justice, l'environnement et la sécurité, avec la poursuite de la réduction du déficit - et, là aussi, les chiffres correspondent à la réalité - la diminution des impôts visant à concilier justice sociale, justice fiscale et efficacité économique.

Toutes les propositions formulées par les groupes de la majorité plurielle tendaient à renforcer ces orientations.

L'équilibre final a en fait été peu modifié puisque le déficit est, à 50 millions de francs près, égal à celui proposé initialement. Cependant, si l'on raisonne en termes de masses déplacées, l'Assemblée a modifié les recettes à concurrence de 8,3 milliards et les dépenses de 3,8 milliards, soit un total de 12,1 milliards, ce qui est supérieur aux années précédentes. Bien entendu, cela doit être mis en regard non pas de la totalité du budget, mais de la marge de manoeuvre que le Gouvernement a lui-même par rapport au budget voté l'année précédente.

Je veux à mon tour remercier chacun d'entre vous pour le travail effectué depuis plusieurs semaines, ainsi que les services de l'Assemblée et ceux du ministère.

Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, nous nous sommes donné quelques rendez-vous. Nous d evrions examiner un projet de loi de finances


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rectificative, dense lui aussi, puisque nous sommes convenus de revenir sur la question des imprimés publicitaires et sur celle des véhicules propres, et de faire avancer le dossier de la taxe professionnelle de France Télécom, sujets qui viendront s'ajouter à un collectif déjà bien chargé. Je suis persuadé que nous retrouverons, lors de son examen, la sérénité et la qualité qui ont caractérisé nos débats sur le projet de loi de finances.

Une grande partie de nos propositions ont été entendues. La deuxième délibération s'est bien passée. Vous avez souhaité, madame la secrétaire d'Etat, que l'Assemblée revienne notamment sur deux dispositions qu'elle avait votées en première délibération. Rares ont été les deuxièmes délibérations aussi légères. Cela traduit la qualité de nos débats.

Je vous invite donc, mes chers collègues, au nom de la commission des finances, à adopter ce projet de budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Explications de vote

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Gilbert Gantier, pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants.

M. Gilbert Gantier.

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous arrivons ce soir au terme de la première lecture du budget pour l'année 2001 et au vote solennel qui permet à l'Assemblée nationale de se prononcer sur ce budget.

Pendant trois ans, le Gouvernement a utilisé la croissance de l'économie mondiale comme paravent pour faire croire aux Français qu'il avait trouvé une recette infaillible pour dépenser plus, réduire le déficit et baisser les impôts.

Aujourd'hui, hélas, la croissance donne des signes d'essoufflement. Les goulets d'étranglement de l'appareil productif, largement créés par l'absurde réforme des 35 heures, le regain d'inflation, le nivellement du pouvoir d'achat, la hausse des taux d'intérêt, la hausse du prix du pétrole constituent autant de menaces réelles qui obscurcissent l'horizon budgétaire. L'INSEE et l'OCDE ne partagent d'ailleurs pas vos prévisions optimistes pour l'an prochain.

Mais vous avez incontestablement bénéficié pendant trois ans de la croissance. Qu'en avez-vous fait ? Pas grand-chose ; en fait, vous l'avez gaspillée ! La dérive de nos finances publiques continue. Avec 186 milliards de francs de déficit annoncé, la France est la lanterne rouge de l'Europe, alors qu'une grande partie de ses partenaires enregistrent d'ores et déjà un excédent budgétaire et commencent même à rembourser leur dette publique, quand la nôtre continue à croître.

Et pourtant, qu'écriviez-vous, monsieur le ministre, dans un journal du soir, il y a quelques jours ? « Je souhaite que l'on maintienne le cap sur la réduction des déficits et de l'endettement. On ne doit pas charger la barque des dépenses publiques et des déficits, donc de l'endettement, sauf à reporter le financement de nos décisions sur nos enfants. »

M. François d'Aubert.

Eh oui !

M. Gilbert Gantier.

Cependant, monsieur le ministre, vous continuez imperturbablement à dépenser toujours plus : 22 milliards de dépenses nouvelles dans le collectif budgétaire pour 2000 dont nous venons d'avoir connaissance, 20 000 nouveaux postes dans la fonction publique en 2001 - sans compter les 28 000 créations de postes que nous annonce le plan Lang pour l'éducation nationale - et sans oublier le plan Sapin de revalorisation des salaires dans la fonction publique.

Alors que l'ampleur des départs à la retraite jusqu'en 2012 nous offrait une formidable occasion pour engager la réforme de l'Etat et réduire le nombre des fonctionnaires, sans diminuer pour autant la qualité du service public, cette possibilité se transforme en occasion manquée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Sans aucune maîtrise de la dépense publique, sans volonté politique de réduire les déficits, le Gouvernement dilapide les efforts engagés par la majorité précédente pour assainir les comptes publics et gaspille le capital laissé par la croissance. (« Caricature ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Quant aux prélèvements obligatoires, permettez-moi de rappeler qu'ils ont atteint le niveau record de 45,7 % du PIB sous votre gouvernement. Ils continuent, malgré les baisses d'impôts annoncées, à capter près des deux tiers de la richesse supplémentaire créée. Et votre effort de réduction des impôts n'est en fait qu'une aumône : 120 milliards sur trois ans, alors que, depuis 1997, je le rappelle, les Français ont versé au fisc plus de 555 milliards de francs de prélèvements supplémentaires.

Vous aviez annoncé, au cours de l'été dernier, un déficit pour 2000 de 190 milliards de francs ; le collectif d'automne, que nous allons examiner prochainement, affiche un déficit de 209,5 milliards de francs, c'est-à-dire 20 milliards de dépenses en plus.

Vous aviez annoncé une modération salariale pour les traitements dans la fonction publique ; vous avez été d ésavoué par l'arbitrage du Premier ministre. Les dépenses de fonctionnement vont donc continuer à filer.

Vous aviez annoncé un gel des dépenses en 2000 ; or les dépenses augmenteront, cette année, de plus de 3 %. E tes-vous encore crédibles quand vous annoncez à Bruxelles une maîtrise des dépenses et un équilibre des comptes publics pour 2004 ? Cette cacophonie budgétaire et ces arbitrages contradictoires révèlent une dangereuse politique de pilotage à vue de notre économie, faite de saupoudrage électoraliste et de manipulation des chiffres. Sans la volonté politique d'assainir les comptes publics, sans la moindre velléité de maîtriser la dépense, avec des baisses d'impôts minimalistes ou compensées par des hausses ou par des créations d'impôts nouveaux, le budget pour 2001 ne nous paraît pas acceptable ; c'est pourquoi le groupe Démocratie libérale et Indépendants votera contre le projet de loi de finances pour 2001.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour le groupe socialiste.

M. Augustin Bonrepaux.

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la loi de finances pour 2001 que nous allons voter a été fortement améliorée par les débats de notre assemblée. Elle est conforme aux orientations pluriannuelles que nous avons adoptées et qui assurent, depuis trois ans, la réussite économique de notre pays : maîtrise des dépenses, réduction progressive du déficit et des prélèvements obligatoires.

Les dépenses seront limitées à une progression de 0,3 % en volume, avec une priorité pour l'éducation nationale, la sécurité et la justice. Le déficit budgétaire connaîtra une réduction de 30 milliards. Quant aux prélèvements


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obligatoires, ils seront ramenés de 45,7 % à 44,7 % du produit intérieur brut, c'est-à-dire une réduction d'un point.

Ce plan de réduction massive de la fiscalité concerne aussi bien les ménages que les entreprises. Pour les ménages, les réductions de TVA réalisées en 1999 et en 2000 représentent plus de 60 milliards de francs et ont déjà permis d'effacer les augmentations du gouvernement Juppé. Pour 2001, la baisse de l'impôt sur le revenu est concentrée sur les quatre premières tranches et concernera donc surtout les 15 millions de contribuables les plus modestes.

Cette réforme est équilibrée et juste parce qu'elle s'applique aussi à tous ceux qui ne sont pas assujettis à l'impôt sur le revenu. Ainsi, la réduction de la CSG et de la CRDS, pour les revenus compris entre le SMIC et 1,4 fois le SMIC, concernera huit millions de personnes.

Au terme de la réforme, cette réduction représentera l'équivalent d'un mois de salaire pour un salarié au SMIC.

Le même souci de justice nous a conduits à demander un effort supplémentaire aux plus favorisés en supprimant les déductions fiscales pour les dividendes et en ne réactualisant pas le barème de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Enfin, nous avons tenu à annuler les conséquences du décret Balladur qui rétablissait la redevance audiovisuelle.

Celle-ci sera supprimée pour les non-imposables âgés de plus de soixante-dix ans.

Mme Nicole Bricq.

Et ce n'est qu'un premier pas !

M. Augustin Bonrepaux.

Pour les entreprises, après la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle, le projet de loi supprime la majoration de 10 % instituée par le gouvernement Juppé. Celle-ci sera supprimée en trois ans, et le taux de l'impôt sur les sociétés sera ramené de 36,6 % à 33,3 % et même, pour les plus petites, à 25 % en 2001 et 15 % en 2002.

La suppression de la vignette, qui s'inscrit dans la démarche de suppression des taxes engagée depuis trois ans, concernera cette année toutes les personnes physiques mais aussi les associations, les syndicats et tous les artisans sous le régime unipersonnel pour les véhicules de moins de deux tonnes.

Quant à la fiscalité agricole, elle a bénéficié aussi d'avancées sensibles.

Enfin, je souligne la stabilisation de la fiscalité sur les carburants, qui permet de garantir que les prélèvements de l'Etat n'augmenteront pas même si le prix du pétrole augmente.

Pour les dépenses, la priorité a été accordée à l'éduc ation nationale, à la justice et à la sécurité.

Les créations de postes dans l'éducation nationale traduisent tout particulièrement le souci d'accorder à notre jeunesse les meilleures chances de formation et d'avenir.

Notre solidarité s'exerce aussi à l'égard des retraités agricoles, puisque la revalorisation des pensions se poursuit. Nous voulons les porter, dans une première étape, au minimum vieillesse, et instituer ensuite, le plus tôt possible, une retraite complémentaire.

Ce budget permet aussi, grâce à des amendements des groupes de la majorité, d'apporter des réponses positives à la plupart des demandes des anciens combattants.

L'investissement et l'aménagement du territoire ne sont pas oubliés pour autant puisque les engagements des contrats de plan sont inscrits dans les budgets des différents ministères, en particulier celui de l'équipement et des transports et celui de l'aménagement du territoire.

Pour la première fois, il y aura des contrats spécifiques pour l'aménagement et le développement des zones de montagne vous comprendrez que j'y sois particulièrement sensible.

Mme Nicole Bricq et Mme Béatrice Marre.

Très bien !

M. Augustin Bonrepaux.

Au cours des discussions qui ont eu lieu, et encore hier soir, ce projet a été fortement amélioré puisque plusieurs amendements provenant de tous les groupes, même de l'opposition, ont été retenus et constituent des progrès importants.

Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie d'avoir été attentive aux préoccupations que nous avons exprimées sur tous les bancs. Grâce à votre compréhension, nous avons pu réaliser des avancées ; j'en citerai quelquesunes.

Pour favoriser les syndicats dans ce pays, nous avons porté les déductions fiscales au titre des cotisations syndicales de 30 % à 50 %. Afin d'aider les collectivités en difficulté, c'est-à-dire celles qui sont éligibles à la DSU et à la DSR, nous avons garanti que la compensation de la taxe professionnelle ne serait pas réduite.

Enfin, nous avons pu améliorer les incitations fiscales concernant la création de résidences de tourisme dans les zones défavorisées, et nous avons étendu ce dispositif à l'ensemble des zones rurales qui relèvent de l'objectif 2.

Je n'oublie pas la suppression de la taxe sur les frais de contrôle, qui incitera les stations de sports d'hiver à prendre en charge la mutualisation de tous les risques d'une baisse de fréquentation.

En conclusion, mes chers collègues, c'est un budget pour l'emploi, pour la croissance, la solidarité et la modernisation de notre pays que nous allons voter.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Philippe Auberger pour le groupe du Rassemblement pour la République.

M. Philippe Auberger.

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au terme de cette trop longue discussion budgétaire, il est clair que ce projet ne répond pas au souhait des Français, qui attendent du Gouvernement une action déterminée dans quatre domaines : l'emploi, la réforme fiscale, la réforme des retraites et la réforme de l'Etat.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est quand même mieux que le plan Juppé !

M. Gilbert Meyer.

Non : c'est en retrait par rapport au plan Juppé !

M. Philippe Auberger.

L'emploi ne peut venir que de la croissance. Or notre croissance s'essouffle actuellement ; elle bute sur l'insuffisance des capacités de production et sur la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée. Comment le Gouvernement répond-il à ces deux problèmes ? Au lieu d'aider l'investissement productif, il revoit à la baisse les modalités de l'amortissement dégressif, il multiplie les charges nouvelles sur les entreprises - 35 heures et taxe générale sur les activités polluantes notamment -, il laisse se dégrader la compétitivité, nous le constatons avec les récents résultats de notre balance commerciale, et il organise la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée avec la réduction du temps de travail.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

Il prétend limiter la réforme fiscale à la baisse des impôts. Mais peut-on sérieusement parler de baisse des impôts alors que le produit de tous les impôts, y compris celui de l'impôt sur le revenu et de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, augmentera encore en 2001 ? Il serait plus honnête de parler de moindre hausse.

Peut-on vraiment parler de réforme de l'impôt sur le revenu alors que le produit de cet impôt a augmenté, depuis 1997, de 17 % et qu'il sera seulement stabilisé l'année prochaine ? Peut-on considérer que les modifications prévues pour la CSG constituent une bonne réforme fiscale alors que, moins de deux ans après avoir admis que cet impôt devait s'appliquer à tous les revenus, quelle que soit leur origine, on en réduit la portée en multipliant les exonérations et les allègements, et on le rend progressif au risque de créer des trappes à pauvreté et des injustices ? Peut-on parler d'une réforme de la retraite alors qu'on s'est contenté de créer un fonds de réserve, dont on n'est pas parvenu à préciser le statut un an après sa création, et qu'on vient de le doter d'une partie du produit des licences UMTS, ressources non permanentes qui n'ont aucun rapport avec les retraites ? Est-il raisonnable de placer les fonds disponibles dans des obligations du Trésor, ce qui va encore gonfler la dette publique ? Qui peut croire le Premier ministre lorsqu'il dit que ce fonds sera doté d'ici à 2020 de 1 000 milliards de francs, alors qu'il n'aura au mieux que 23 milliards de francs à la fin de l'année et 36 milliards de francs à la fin de 2001 ? Pourquoi n'a-t-on pas le courage d'aborder le problème des retraites de la fonction publique ? Peut-on, enfin, parler de réforme de l'Etat avec ce projet de budget ? On nous dit que l'alpha et l'oméga de la réforme de l'Etat seront l'établissement d'un budget non plus de moyens mais d'objectifs, et M. le Premier ministre a fait p récisément allusion à la réforme de l'ordonnance de 1959.

Or, au même moment, le ministre de l'éducation nationale nous annonce que son ministère va recruter 185 000 personnes dans les cinq années à venir, qu'il y aura en trois ans au moins 18 000 créations de postes et 33 000 titularisations. Pour quels objectifs ? Le plus gros employeur de l'Etat est totalement muet sur ce plan ! C'est dire que, pour lui, la réforme de l'Etat, c'est du vent !

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Pour ce qui est du vent, avec vous, on n'est pas privé !

M. Philippe Auberger.

Comment peut-on croire à une quelconque réforme de l'Etat alors que, dans un domaine aussi sensible que celui de la justice, on vient de voter une loi sur la présomption d'innoncence et que les moyens mis en oeuvre pour son application sont dramatiquement insuffisants : il manquera au 1er janvier prochain 1 000 magistrats et, déjà, certaines juridictions ont pris des dispositions pour déshabiller Pierre afin d'habiller Paul.

En vérité, ce projet de budget ne répond à aucune des attentes des Français.

En outre, pour afficher un déficit en recul par rapport à celui de l'année 2000, on a été obligé de reporter d'une a nnée l'encaissement de 18 milliards de francs de recettes ; c'est dire sa sincérité. Et déjà, on est obligé de prévoir une charge de la dette en augmentation. Ce budget traduit donc un net relâchement par rapport aux exigences du pacte de stabilité et aux prévisions triennales notifiées à l'Union européenne. Dans ces c onditions, le groupe du Rassemblement pour la République ne peut que confirmer le vote qu'il a émis sur la première partie et votera contre ce projet de budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

C'est un scoop !

M. le président.

Avant de donner la parole aux orateurs suivants, je vais d'ores et déjà faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collèges de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Alain Bocquet, pour le groupe communiste.

M. Alain Bocquet.

Il est inutile d'entretenir un suspense de forme le groupe communiste et apparentés votera le projet de loi de finances en première lecture.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Pourquoi ? Tout d'abord, parce que les députés communistes ont travaillé avec détermination, avec de nombreuses propositions tout au long des débats, soit pour approuver, soit pour formuler des réserves et des critiques, souvent fortes, tant sur la logique d'ensemble de la loi de finances que sur différents budgets.

La preuve : nous avons même été amenés à nous abstenir sur le vote de la partie « recettes » pour exprimer le souhait d'une fiscalité plus juste afin d'orienter les ressources financières pour la croissance.

Les grandes entreprises françaises, nous le savons, se portent de mieux en mieux. Nous nous en félicitons. Les cent plus importantes ont réalisé au cours du premier semestre autant de bénéfices que pendant toute l'année dernière.

Cette croissance, il faut la conforter et mieux la partager. Les moyens existent. Tous ceux qui s'expriment actuellement dans le mouvement social veulent tout simplement leur part, et c'est justice. Loin d'être un handicap, les exigences sociales qui montent sont un atout pour donner un nouvel élan à la croissance.

Oui, notre action a permis de faire bouger les choses sensiblement. La liste serait trop longue. Vous avez cité quelques exemples, monsieur le ministre. Je cite pêlemêle : la contribution sur les bénéfices des compagnies pétrolières ; l'extension de la ristourne de CSG et de

CRDS ; la suppression de la vignette pour les véhicules des associations ; l'exonération de la redevance télé pour les personnes âgées de plus de soixante-dix ans ; l'abattement sur le foncier bâti des organismes HLM ; la réduction de la cotisation du foncier bâti pour les personnes âgées de plus de soixante-dix ans ; le coup d'arrêt au dogme du gel de l'emploi public, avec les 11 000 emplois publics annoncés pour 2001 et les créations de postes dans l'éducation nationale ; un budget de la politique de la ville qui reprend pour l'essentiel des propositions formulées depuis des années par notre groupe.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

En second lieu, nous votons le budget parce que nous sommes partie prenante de la majorité de la gauche plurielle (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et que le budget est un acte majeur de la politique économique et sociale comme du contrat majoritaire entre le Gouvernement et les formations de la gauche plurielle.

Evidemment, ce serait beaucoup dire que c'est le budget de nos rêves.

M. Christian Jacob.

Mais vous allez vous coucher !

M. le président.

Monsieur Jacob, respectez un minimum vos collègues : cela fera gagner de la crédibilité à l'ensemble de l'Assemblée.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

On n'a pas vu M. Jacob de toute la discussion budgétaire !

M. le président.

Poursuivez, monsieur Bocquet.

M. Alain Bocquet.

Nous n'avons cessé d'alerter sur la nécessité de donner un nouveau souffle à la politique gouvernementale. La question des priorités budgétaires reste posée.

Rien n'est acquis. Les licenciements économiques se poursuivent. Le programme européen de stabilité pèse sur la croissance. L'euro devient une prime à l'achat des entreprises françaises par les sociétés américaines. La part des salaires dans le partage de la valeur ajoutée continue à stagner.

Le choix d'une croissance durable implique une augmentation significative du SMIC, des petites retraites et des minima sociaux.

Nous regrettons que cette première lecture n'ait pas permis d'aller plus loin au profit des plus modestes par de nouvelles baisses ciblées de TVA ou la diminution de la CSG, dès janvier prochain, pour les salaires inférieurs à 1,8 fois le SMIC, mais aussi pour les retraites.

Il y a aussi, parmi d'autres sujets cruciaux, le nécessaire relèvement des rémunérations des fonctionnaires - très franchement, monsieur le ministre, 0,5 % c'est trop peu ! - le danger qui pèse sur la situation de très nombreux contrats CES ou CEC, ou l'avenir des emploisjeunes et des nouveaux métiers.

Il est nécessaire de faire beaucoup plus pour la santé.

La situation est tendue, pour ne pas dire explosive, dans de très nombreux hôpitaux où les moyens et les emplois f ont encore cruellement défaut, notamment pour répondre à la légitime revendication de voir appliquer les 35 heures.

Les choses peuvent encore évoluer d'ici au vote final de la loi de finances.

M. François Rochebloine.

Non !

M. Alain Bocquet.

Celle-ci serait plus le reflet des aspirations de notre peuple si les conditions mêmes de son examen étaient modernisées et démocratisées, et si, notamment, l'on faisant sauter le verrou de l'article 40.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste.) Par ailleurs, monsieur le ministre, vous vous êtes engagé à prendre en compte certaines de nos propositions dans le collectif.

Le sommet de la gauche plurielle a, pour sa part, insisté sur les urgences sociales qui s'imposent et formulé des propositions pour y répondre. Notre action, à l'Assemblée, a contribué à les définir. Il reste à les concr étiser plus rapidement dans la loi et dans la vie. L'action du mouvement social et l'intervention citoyenne peuvent y aider.

Comme les Françaises et les Français l'ont exprimé majoritairement dans une récente enquête d'opinion, nous attendons du Gouvernement une politique plus sociale et plus dynamique. Nous voulons continuer d'y travailler de manière constructive. C'est pourquoi il faut mieux entendre, mieux écouter et mieux prendre en compte ce qu'avancent tous les groupes de la majorité, et singulièrement le groupe communiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie, pour le groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.

M. Pierre Méhaignerie.

Des quatre derniers budgets, monsieur le ministre, c'est celui de 2001 qui appelle les critiques les plus sévères (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste),...

M. Jean-Pierre Brard.

On sent que les élections approchent !

M. Pierre Méhaignerie.

... non seulement en tant que budget, mais aussi quant à ses effets sur la croissance.

N'est-ce pas l'OCDE qui, les journaux de ce matin le signalent, doute de la croissance française ? Tous les pays riches voient leurs performances pour 2000 et 2001 révisées à la hausse ; seule la croissance française serait révisée à la baisse. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Jean-Pierre Brard.

Cassandre !

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Et les résultats réels ?

M. Pierre Méhaignerie.

Ce sont des prévisions comme les autres, il faut les écouter ! L'OCDE donne trois raisons à cette révision : la satu-r ation des capacités de production des entreprises, l'absence d'assainissement des finances publiques et l'augmentation du nombre des fonctionnaires.

L'augmentation des dépenses de l'Etat, nous verrons que la Cour des comptes, dans un an, la situera autour de 4 %.

M. Jean-Pierre Brard.

Il vaut mieux avoir le soutien des électeurs que celui de la Cour des comptes !

M. Pierre Méhaignerie.

Ce budget est d'une extraordinaire opacité. Jamais, je crois, le budget n'a été aussi opaque et le contrôle parlementaire aussi impossible. Le Parlement est dépossédé de tout contrôle...

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

On ne vous a pas beaucoup vu contrôler, monsieur Méhaignerie !

M. Pierre Méhaignerie.

... et le budget n'est pas du tout conforme aux engagements pris en matière de maîtrise de la dépense publique.

Il est bon de rappeler qu'il y a une relation directe entre le montant de la dépense publique et le faible niveau de certains salaires. Quand on compare les différents pays européens, on constate que la moyenne des salaires payés par l'employeur est plutôt légèrement supérieure, en France, à la moyenne des autres pays, alors que le salaire net y est légèrement ou assez nettement


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inférieur. Tout cela est dû au poids trop élevé des dépenses publiques. Puis-je vous rappeler les propos du ministre allemand, social-démocrate, de l'économie et des finances ? Je sais que c'est un social-libéral...

M. Jean-Pierre Brard.

L'horreur !

M. Pierre Méhaignerie.

... mais il est tout de même bon de l'écouter !

M. Jean-Pierre Brard.

Ce n'est pas un social-démocrate : c'est un social-traître ! (Sourires.)

M. Pierre Méhaignerie.

Il a déclaré : « Un taux de dépenses de l'Etat plus bas n'est pas le signe d'un retrait de l'Etat ou d'un Etat faible. Simplement, celui-ci doit se concentrer sur ce qu'il a à résoudre de manière obligatoire. »

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

« Nous savons depuis longtemps que beaucoup de choses peuvent être réalisées bien, voire mieux, sans l'Etat. Là où l'individu peut s'aider lui-même, une aide de l'Etat n'est absolument pas nécessaire. »

L orsqu'on voit les engagements en matière de retraites, d'application des 35 heures, de recrutements supplémentaires de nombre de fonctionnaires, nous avons des raisons de nous inquiéter.

Monsieur le ministre de l'économie, vous avez tenu des propos lucides il y a six mois. Pourquoi une telle contradiction entre ces propos lucides sur une majorité dépensière, étatolâtre, comme elle l'a confirmé une nouvelle fois, et vos actes contraints ou contraires ? Tout simplement, vous êtes pris dans une surenchère de la gauche plurielle et idéologique. De nombreux pays européens démontrent qu'on peut dépenser moins sans nuire à la qualité des services.

Les orientations prises ici par le Gouvernement français nous conduisent à vous donner rendez-vous dans les deux ou trois ans. Je crains que, comme dans les années 19881992, nous soyons le pays qui aura la moindre croissance et le plus de difficultés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean Rigal, pour le groupe Radical, Citoyen et Vert.

M. Jean Rigal.

Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de la discussion, en première lecture, du projet de loi de finances pour 2001. Le moment est donc venu pour chaque groupe d'expliquer son vote sur l'ensemble du projet.

Le projet de loi de finances pour 2001 traduit la continuité des choix économiques et budgétaires opérés par le Gouvernement dès 1997 et maintenus depuis lors. Il est fondé sur une croissance dynamique et poursuit en particulier l'effort mené en faveur de la création d'emplois, ce qui recueille notre accord.

Le plan triennal de réduction des impôts 2001-2003 en faveur des ménages et des entreprises, notamment des

PME ; la réduction du déficit budgétaire, quoi qu'en disent certains, et de l'endettement, ainsi que la maîtrise de l'évolution des dépenses publiques constituent l'ossature de ce projet de loi de finances.

Cependant, nous déplorons que le Gouvernement n'ait pas accepté davantage d'améliorations d'origine parlementaire. Les modifications acceptées n'ont conduit qu'à déplacer quelque 8,2 milliards de francs de recettes sur un total de plus de 1 500 milliards.

Revaloriser le rôle du Parlement, notamment en matière budgétaire, avec la modification de la loi organique du 2 janvier 1959 est un impératif désormais urgent.

Pour la partie dépenses du projet de loi de finances, quatre priorités se dégagent : l'éducation nationale, la sécurité, la justice et l'environnement, et cela correspond à nos voeux.

Le budget de l'éducation nationale pour 2001 augmentera de 2,7 % par rapport à 2000 et constituera la première étape du plan pluriannuel qui prévoit, d'une part, 33 200 créations d'emplois d'enseignants et de nonenseignants sur trois ans, ce que nous approuvons, et, d'autre part, une programmation des recrutements sur cinq ans.

Il conviendra de veiller à ce que ce plan permette un enseignement de haute qualité sur l'ensemble du territoire national.

En matière de sécurité, deuxième préoccupation de nos concitoyens après l'emploi, les crédits consacrés à la police nationale et à la gendarmerie progresseront de près de 5 %.

Les crédits du ministère de la justice augmenteront de 3 % en 2001, confirmant ainsi la priorité accordée à ce ministère. Par ailleurs, 10 milliards de francs seront dégagés pour les prisons pour l'humanisation et la modernisation dans les six prochaines années.

Le budget de l'environnement progressera de 8,2 % pour renforcer les capacités d'action du ministère et accroître la politique de prévention des risques.

Nous nous réjouissons également de l'augmentation des crédits consacrés à la recherche.

Enfin, nous apprécions le maintien de l'exonération de cotisations familiales sur les bas salaires pour les entreprises des zones de revitalisation rurale.

Cependant, nous avons d'importantes réserves concernant en particulier la répartition des fruits de la croissance et la réduction des inégalités.

Les députés du groupe RCV n'ont pas enregistré que des satisfactions dans le débat sur la partie « recettes » du projet de loi de finances.

Le choix de baisser l'impôt sur le revenu, notamment ses tranches supérieures, heurte notre conception de la redistribution (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste) et ne devrait pas être un objectif prioritaire du Gouvernement.

La suppression partielle de la vignette automobile nous laisse dubitatifs. Sévèrement critiqué à son origine en 1956, puis détourné de son affectation initiale, cet impôt sur tous les véhicules à moteur avait le mérite d'être universel.

Désormais, il ne frappera plus les véhicules, mais certaines catégories de professionnels qui pourraient être taxés sous d'autres formes, à la fois plus logiques et plus équitables.

La revalorisation des petites retraites, du SMIC et des minima sociaux demeure pour nous une priorité absolue.

Par ailleurs, nous ne comprenons pas pourquoi nos amendements concernant la baisse du taux de TVA à 5,5 % pour la restauration traditionnelle n'ont pas été pris en compte. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert ainsi que sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Cela


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aurait permis à ce secteur important de l'activité économique et touristique de revenir dans le droit commun, d'appliquer plus facilement la loi sur les 35 heures, tout en créant des emplois, y compris par insertion.

Nous demandons bien sûr au Gouvernement de veiller davantage au maintien des services publics dans les zones fragiles afin de ne pas ajouter des inégalités territoriales aux inégalités sociales.

M. le président.

Monsieur Rigal, il vous faut conclure.

M. Jean Rigal.

J'ai pratiquement terminé, monsieur le président.

Enfin, je veux évoquer le sort des éleveurs durement touchés par la crise de la vache folle, sans oublier, bien entendu, les victimes humaines de cette terrible maladie.

Il appartient aux pouvoirs publics français et européens de prendre des mesures de soutien à la filière bovine - j'ai cru comprendre que c'était en bonne voie - et de s'interroger sur le modèle agricole productiviste.

Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, les députés du groupe RCV n'éprouvent pas un enthousiasme véritablement franc et massif pour le contenu de ce budget (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) , mais ils sont lucides et ils savent distinguer ce qui n'est pas pleinement satisfaisant de ce qui serait franchement intolérable (Exclamations sur les mêmes bancs) si nous devions progressivement glisser vers un libéralisme fondé sur des valeurs antisociales qui, vous le comprenez, ne sont pas les nôtres.

C'est par solidarité majoritaire (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) qu'ils adopteront le projet de loi de finances pour 2001, en demandant au Gouvernement de mieux prendre en compte les aspirations de toutes les composantes de la majorité plurielle lors de la deuxième lecture. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

APPLICATION DE L'ARTICLE 44, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION

M. le président.

Je rappelle qu'à la demande du Gouvernement, et en application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, l'Assemblée est appelée à se prononcer, par un seul vote, sur les dispositions ayant fait l'objet d'une seconde délibération, à savoir : l'article 31 et l'état B modifié par les amendements nos 1 à 28 ; l'article 32 et l'état C modifié par les amendements nos 29 à 42 ; l'article 36 modifié par l'amendement no 43 ; l'amendement no 44 rétablissant l'article 57 ; l'article 29 et l'état A modifié par l'amendement no 45, ainsi que sur l'ensemble du projet de loi de finances.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2001 : Nombre de votants ...................................

557 Nombre de suffrages exprimés .................

556 Majorité absolue .......................................

279 Pour l'adoption .........................

300 Contre .......................................

256 L'Assemblée nationale a adopté l'ensemble du projet de loi de finances pour 2001. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dixsept heures quinze, sous la présidence de M. Claude Gaillard.)

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

7

ORDRE DU JOUR DE L'ASSEMBLÉE

M. le président.

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au jeudi 7 décembre 2000 inclus a été fixé ce matin en conférence des présidents.

Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu de la présente séance.

Par ailleurs, en application de l'article 65-1 du règlement, la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception auraient lieu le mardi 5 décembre après les questions au Gouvernement.

8

SOLIDARITÉ ET RENOUVELLEMENT URBAINS

M. le président.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 20 octobre 2000.

« Monsieur le président,

« J'ai l'honneur de vous transmettre, ci-joint, le texte du projet de loi relatif à la solidarité et aur enouvellement urbains, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture dans sa séance du 29 juin 2000 et modifié par le Sénat dans sa séance du 19 octobre 2000.

« Conformément aux dispositions de l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, le Gouvernement demande à l'Assemblée nationale de bien vouloir statuer définitivement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

« Je vous prie d'agréer, Monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion de ce projet de loi en lecture définitive (nos 2671, 2700).

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, Louis Besson, Claude Bartolone et moi-même revenons aujourd'hui devant vous pour la dernière lecture du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

Tant devant votre assemblée, en février puis en juin, que devant le Sénat - au printemps, puis en octobre -, le débat sur ce texte a été intense. Les échanges ont été souvent passionnés, à la mesure de l'enjeu du texte, souvent constructifs, parfois polémiques, mais je ne veux retenir que les contributions, venues de tous les bancs, qui ont permis d'enrichir le texte initial.

Au terme de ces deux navettes, des désaccords persistent entre les deux assemblées, non à cause d'un désaccord général sur l'ensemble des dispositions de ce texte, dont une large partie a été adoptée avec de fortes majorités dans les deux assemblées, mais du fait d'oppositions profondes sur quelques dispositions.

Je citerai en particulier les dispositions qui touchent à la mixité sociale dans l'habitat et les mesures plus volontaristes que le Gouvernement et la majorité souhaitent voir adopter en ce domaine.

Trente ans après la dernière grande loi sur l'urbanisme, dix ans après la première loi sur la ville, ce texte a pour vocation d'indiquer quelle ville, quelle société nous voulons pour demain. Assurer l'équilibre entre ville et campagne tout en maîtrisant le développement urbain, dans une double optique de solidarité et de progrès : les enjeux auxquels entend répondre cette loi sont de taille.

En discutant, avant cette lecture définitive, plus de 3 700 amendements, la représentation nationale s'est, je crois, pleinement investie. Tant sur le volet urbanisme que sur les questions d'habitat ou de déplacements, les c ontributions ont été nombreuses et, vous l'aurez constaté, le Gouvernement a été à l'écoute des parlementaires.

Je n'en veux pour preuve que l'accroissement du nombre des articles, qui est passé de 87 à environ 170.

Loin de le regretter, j'y vois la marque de l'intérêt que vous avez manifesté. Le fait de déclarer l'urgence sur ce texte n'a donc empêché ni le débat ni les apports, d'où qu'ils viennent.

Je ne vais pas procéder, mesdames, messieurs les députés, à une présentation détaillée des mesures contenues dans ce projet de loi car vous les connaissez.

Je veux simplement évoquer les principaux thèmes du projet de loi et, pour chacun d'entre eux, indiquer les principaux points d'accord ou de désaccord, sachant qu'au stade de la lecture définitive tous ne feront pas l'objet d'une discussion puisque le texte à partir duquel va s'organiser aujourd'hui le débat est celui que vous avez adopté en juin dernier.

Sur certaines dispositions, toutefois, la nouvelle lecture au Sénat a permis, je veux le souligner, d'améliorer ou de préciser la rédaction. Votre rapporteur a d'ailleurs luimême repris certains des amendements adoptés par la Haute Assemblée et le Gouvernement vous proposera, lui aussi, de reprendre, sur certains points, la rédaction adoptés par le Sénat.

En ce qui concerne le premier axe, qui vise à renforcer, par la réforme des documents d'urbanisme, la cohérence des politiques urbaines à l'échelle de l'agglomération, la double navette a permis d'identifier de nombreux points de convergence.

Constatant que, malgré certaines différences d'appréciation - en particulier sur les périmètres des schémas de cohérence territoriale et sur l'article L.

122-2 du code de l'urbanisme, mais aussi sur le rôle de la commission de conciliation -, un accord entre les deux assemblées lui semblait possible, le Gouvernement ne s'était pas opposé, lors de la première lecture au Sénat, à l'adoption de dispositions différentes de celles adoptées par votre assemblée.

En nouvelle lecture, ici même, votre rapporteur a repris, sur le fond, de nombreuses propositions des sénateurs. Toutefois, nous avons dû constater que le Sénat n'a pas, par la suite, pris acte de cette volonté d'ouverture de la majorité de votre assemblée et a purement et simplement rétabli son texte.

Sur certains points, le Sénat a adopté à nouveau des amendements auxquels le Gouvernement ne peut souscrire. Je pense en particulier aux nombreux amendements relatifs aux lois « montagne » et « littoral », grandes lois dont nous entendons garantir le caractère protecteur. Le Gouvernement a eu en effet l'occasion de dire à différentes reprises qu'il ne souhaitait pas que le texte serve de support à une modification de l'équilibre de ces deux lois, au-delà, quelques modifications adoptées par votre assemblée et qui pourront apporter, dans un cadre bien déterminé, des éléments de souplesse parfois utiles.

Il en va de même pour tous les amendements qui pouvaient porter atteinte au droit de chaque citoyen de contester devant le juge des décisions qui lui apparaîtraient injustifiées. Même si des excès sont parfois à déplorer, ce droit, inscrit dans la Constitution, constitue un élément essentiel de notre démocratie. Le Gouvernement souhaite donc le maintien, à quelques précisions rédactionnelles près, du texte que vous avez adopté en juin.

Le deuxième volet concerne l'habitat. Le débat parlementaire a permis de confirmer de larges convergences.

T out d'abord, le Gouvernement souhaitait, en commençant le débat, que ce texte permette de conforter et d'adapter les compétences des organismes d'HLM aux missions qui sont les leurs et aux enjeux auxquels ils auront à faire face à l'avenir. C'est le sens des dispositions des articles 62 et 63, qui consolident les capacités des organismes d'HLM à intervenir, en complément de leur mission fondamentale de production de logements locatifs sociaux, dans le champ de l'accession sociale à la propriété et de l'aménagement urbain, avec l'objectif de les faire contribuer à la fois au renouvellement urbain et à une véritable politique de mixité sociale dans les quartiers, les villes et les agglomérations.

Par-delà quelques divergences sur des points qui ne sont pas essentiels, le débat a permis de faire progresser notre réflexion et d'aboutir à des solutions raisonnables, qui recueillent l'accord du mouvement HLM et qui ont été adoptées par le Sénat. Il faut, je le crois, se féliciter qu'un accord très large ait pu être trouvé entre les deux assemblées sur ces questions qui concernent le monde HLM et plusieurs millions de locataires modestes.

En outre, d'importantes avancées ont été faites pour adapter le régime de la copropriété aux enjeux actuels, préciser son organisation et assurer plus de transparencee nvers chaque copropriétaire. Vous savez que ces


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questions sont sensibles et je crois pouvoir dire que les améliorations qui vous sont aujourd'hui proposées respectent les grands principes et l'équilibre de la loi de 1965.

Je souligne par ailleurs l'avancée majeure pour le droit au logement que constituent l'inscription dans la loi de la notion de logement décent et la possibilité donnée à chaque locataire de saisir le juge afin que les travaux nécessaires pour la mise aux normes soient entrepris. Il convient de se féliciter du vote unanime de vos deux assemblées, qui montre à quel point cette avancée dépasse les clivages politiques.

M. Alain Cacheux.

C'est vrai ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est, je crois, un signal fort en direction de nos concitoyens, sur un enjeu essentiel pour la vie quotidienne et la dignité.

Enfin, je souligne l'accord qui s'est réalisé sur tous les bancs, suivant les propositions du Gouvernement, pour la modernisation des procédures, afin d'intervenir plus efficacement pour lutter contre l'insalubrité dans le logement ; je pense en particulier à la suspension du paiem ent du loyer en attendant la réalisation, par le propriétaire, des travaux prescrits. Cela permettra de répondre concrètement à la situation des plus démunis, qui vivent souvent dans ce parc, et aux associations qui les soutiennent.

En revanche, et cela n'étonnera personne, je crois que le Gouvernement a dû constater que des désaccords fondamentaux subsistaient sur les dispositions relatives à la mixité sociale dans l'habitat, c'est-à-dire sur l'article 25 du projet de loi.

Permettez-moi de rappeler en quelques mots l'importance que le Gouvernement accorde à la mise en oeuvre d e dispositions claires, raisonnables mais fortes, en matière de mixité sociale. A entendre les déclarations d'intention des uns et des autres, on pourrait penser qu'un accord pourrait être trouvé. Mais la volonté politique se juge sur des actes et des choix, non sur des déclarations d'intention.

M. Alain Cacheux.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Sur trois points fondamentaux, les divergences de fond qui subsistent traduisent d'abord des oppositions de nature politique.

Premièrement, il faut rappeler que l'objectif principal du texte proposé est de mieux répartir l'offre de logement locatif social à l'intérieur de chaque agglomération. C'est pourquoi, dans cette assemblée comme au Sénat, le Gouvernement n'a pu accepter les propositions de l'opposition visant à fixer un objectif global au niveau de l'agglomération. Cela viderait de sens la mesure proposée et conduirait à nier, concrètement, les objectifs de mixité.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Oh ! C'est faire preuve de défiance à l'égard des collectivités locales ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Cela reviendrait à se résigner à voir perdurer, vous le savez bien, les inégalités inacceptables qui existent entre communes membres d'une même agglomération.

M. Francis Delattre.

Et la loi Chevènement ? Vous l'avez lue, quand même ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Deuxième point de désaccord : le champ des logements pris en compte dans le calcul des 20 %. Retenir, comme la droite n'a cessé de le proposer, une définition extrêmement extensive des logements pris en compte dans l'objectif des 20 % aurait traduit en réalité un refus de conférer réellement au logement locatif social sa juste place dans chaque commune urbaine et chaque agglomération.

M. Henri Plagnol.

Il faut encourager le parc privé ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il faut le dire et le redire, ne vous en déplaise : deux Français sur trois, et trois sur quatre avec le PLUS, le prêt locatif à usage social qu'a lancé mon collègue Louis Besson, peuvent, du fait de leurs revenus, accéder aujourd'hui au logement locatif social.

M. Henri Plagnol.

Vous n'avez pas d'autre rêve à proposer, monsieur le ministre ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Est-ce trop demander que, dans chaque commune, un logement sur cinq permette de répondre à cette demande ? Vous savez qu'une telle demande existe chez nos concitoyens, en tout cas au moins durant une partie de leur vie.

A contrario , cela signifie que l'accession sociale à la propriété et l'investissement locatif privé, tous deux aidés par l'Etat,...

M. Henri Plagnol.

Ah ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... ont toute leur place dans l'offre de logements, puisque quatre logements sur cinq relèvent de ces deux secteurs.

M. Alain Cacheux.

Très bien ! Ils sont en effet nécessaires aux équilibres sociaux !

M. Henri Plagnol.

Alors ? Conclusion ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Sur ce point également, les termes du débat sont clairs.

M. Alain Cacheux.

Evidemment !

M. Francis Delattre.

Les trois quarts des Français aspirent à être propriétaires ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Dernier point de divergence : le pouvoir de substitution de l'Etat, en dernière extrémité, et je souhaite qu'il ne soit pas nécessaire d'y recourir.

M. Francis Delattre.

Supprimez cette possibilité, alors ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il faut bien fixer des limites. Ce pouvoir de substitution peut seul garantir que la loi sera appliquée partout et par tous. Le refuser, c'est accepter, sans le dire, que certaines communes se soustraient à l'application de la loi. Pour tout républicain, une telle perspective est inacceptable.

Avec Louis Besson et Claude Bartolone, nous souhaitons donc que l'Assemblée nationale confirme, au cours de cette dernière lecture, la logique politique du dispositif qu'elle avait adopté en première lecture, afin que ce texte soit vraiment l'occasion de progresser vers plus de mixité sociale dans nos villes. Je ne doute pas qu'elle le fera.

Nous avons voulu que ce texte aborde aussi les questions de déplacements.

Je ne reviendrai pas dans le détail sur l'ensemble des dispositions relatives aux déplacements inscrites dans le titre III de ce texte ; elles ont d'ailleurs souvent recueilli l'assentiment des deux assemblées. J'indique seulement


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

que le Gouvernement souhaite que l'Assemblée nationale revienne sur les amendements du Sénat qui visaient à affaiblir la portée des plans de déplacements urbains, les PDU, à ne pas retenir le versement transport additionnel, pourtant indispensable au développement des transports collectifs, ou encore à supprimer l'article 50 bis , destiné à la mise en oeuvre de réductions tarifaires pour les plus défavorisés.

S'agissant de l'article 41, le Gouvernement a une légère préférence pour la version proposée par le Sénat et je vous prie de m'en excuser, monsieur le rapporteur.

Celle-ci suggère de ne pas accepter la coopération conventionnelle entre autorités organisatrices introduite par l'Assemblée nationale et de maintenir seulement celle des syndicats mixtes, comme cela était initialement prévu par le texte du Gouvernement. C'est une solution sans doute un peu moins souple que ce que vous auriez souhaité, mesdames, messieurs les députés, mais elle nous apparaît, dans le fond, plus conforme aux lois Chevènement sur l'intercommunalité.

M. Francis Delattre.

C'est vrai ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Et il est de notre intérêt que ces lois soient cohérentes pour empêcher toute ambiguïté dans l'application des textes.

Je souhaite également appeler votre attention sur une disposition de l'article 45. Il doit être clair que le 4o de cet article autorise le syndicat des transports d'Ile-deFrance à confier à un département des missions d'autorité organisatrice de second rang. Ce point ayant pu soulever quelques interrogations, je tenais, comme je l'ai fait au Sénat, à apporter cette précision afin de lever par avance toute ambiguïté.

Enfin, en ce qui concerne la décentralisation de l'organisation et du financement des services régionaux voyageurs, je vous confirme notre volonté de faire aboutir ce dossier dans les meilleures conditions possibles.

M. Jean-Jacques Filleul.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Nous avons su tenir compte du bilan de l'expérimentation en cours dans les sept régions concernées, pour bâtir un projet de loi équilibré, répondant aux souhaits des régions et permettant de développer réellement une offre ferroviaire adaptée aux besoins exprimés localement.

Pour ma part, je considère que le texte adopté par votre assemblée en juin dernier, à une large majorité, est conforme à l'état d'esprit qui a animé l'ensemble des partenaires impliqués dans la préparation de ce projet de loi.

Ainsi, la dotation financière de l'Etat au titre du transfert de compétences reposera sur trois éléments : une contribution pour l'exploitation définie au regard des résultats constatés pour les services mis en oeuvre au cours de l'année 2000 ; une dotation complémentaire pour assurer un renouvellement plus rapide du matériel roulant ; le transfert de la compensation tarifaire versée par l'Etat au titre des tarifs sociaux appliqués à sa demande.

Deux amendements du Gouvernement adoptés par votre assemblée ont permis de compléter ce dispositif, afin de tenir compte au mieux de la situation de chaque région.

Le premier a ouvert la possibilité de prendre en compte les modifications des services d'intérêt régional pouvant intervenir suite à la mise en service d'une ligne nouvelle à grande vitesse - cela peut être nécessaire - ou à la réalisation d'un projet de modernisation de l'infrastructure approuvé par l'Etat.

Le second engage l'Etat à participer à l'effort de modernisation des gares à vocation régionale. Un programme d'investissements d'une durée de cinq ans, permettant d'aider à la remise à niveau de ces équipements, a ainsi été prévu.

Le Sénat a été amené à débattre d'une possibilité de révision de la dotation de référence pour tenir compte des incidences des nouvelles règles comptables mises en oeuvre par la SNCF sur les charges du service ferroviaire régional.

Je souhaite que cette disposition, adoptée par le Sénat et sous-amendée par le Gouvernement, soit maintenue.

En effet, l'effort demandé à la SNCF pour la réforme de sa comptabilité et de sa gestion est considérable et doit se faire dans un laps de temps relativement court. C'est pourquoi il me paraît souhaitable de prévoir, une fois les comptes pour 2000 établis, la possibilité de se revoir si nécessaire.

Je sais que certains aspects vous préoccupent encore, comme la question du matériel roulant et de son renouvellement, ou les litiges pouvant apparaître entre les différents partenaires. Il reviendra au décret d'aborder plus en détail ces questions et d'y apporter des réponses.

Je souhaite que le cadre législatif qui sera adopté permette aux régions d'assumer entièrement leurs nouvelles responsabilités et, bien entendu, que l'offre ferroviaire se développe dans toutes les régions de France, comme cela a été constaté dans les régions expérimentales.

Mesdames, messieurs les députés, nous arrivons au terme du débat sur un projet de loi qui est, je le crois, porteur d'un vrai projet de société. Pour la première fois, les différentes politiques de déplacements, d'habitat et d'urbanisme sont mises en cohérence dans une seule et même démarche.

Nous avons tous conscience que ce texte ne suffira pas, à lui seul et en dépit des ambitions qu'il porte, à surmonter comme par magie toutes les injustices et toutes les violences de notre société.

M. Francis Delattre.

Au contraire, il va tout compliquer ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais j'ai aussi la ferme conviction qu'il constitue une étape importante dans la préparation de l'avenir.

En concluant mon propos, je voudrais remercier celles et ceux d'entre vous qui, sur tous les bancs, ont contribué à animer un véritable débat et ont confirmé - par la vigueur de leurs propos parfois, mais c'est bien naturel l'importance qu'ils ont accordée à ce texte.

Je remercie plus particulièrement votre rapporteur,

M. Patrick Rimbert.

M. Daniel Marcovitch.

Excellent rapporteur ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il a accompli sur ce texte, parmi les plus denses qui aient été soumis à votre assemblée depuis plusieurs années, un travail considérable.

M. Pierre Cardo.

Pour être dense, il l'est ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il a su également, je tiens à le souligner, accepter ou reprendre à son compte des propositions émanant de tous les bancs, dès lors qu'elles lui paraissaient positives.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

Je veux associer à ces remerciements le président et les membres de la commission de la production et des échanges, qui ont réalisé, eux aussi, un travail important, de même que les administrateurs qui, à leurs côtés et aux côtés du rapporteur, ont analysé ce texte et chacun des amendements, favorisant un travail législatif de qualité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission de la production et des échanges.

M. Patrick Rimbert, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat au logement, mes chers collègues, la commission mixte paritaire n'ayant pu parvenir à un accord, l'Assemblée ne peut que reprendre le texte voté par elle en nouvelle lecture, modifié le cas échéant par un ou plusieurs amendements adoptés par le Sénat. C'est dans ce contexte que je vous proposerai 69 amendements adoptés par le Sénat : certains répondent à l'esprit du texte voté par l'Assemblée nationale, d'autres proposent des améliorations d'ordre rédactionnel ou des modifications de codification.

A près 1 565 amendements examinés en première lecture en commission - je vous remercie, mes chers collègues, de votre écoute et de votre travail - et environ 600 amendements en nouvelle lecture, nous parvenons à un texte dans lequel la part du travail parlementaire aura été conséquente et, j'ose le dire, de qualité. En tenant compte du débat au Sénat, ce sont 3 700 amendements au total qui auront été discutés, et le nombre d'articles est passé de 87, dans le projet de loi initial, à 170.

Ayant participé à de nombreux colloques et réunions avec les professionnels et les associations, je pense pouvoir affirmer que cette loi est attendue. En effet, partout le constat est le même : les quartiers mono-fonctionnels, le zonage et l'extension anarchique des villes ont créé des problèmes auxquels les collectivités se sont attaquées sans disposer des outils nécessaires. L'ambition de cette loi est de remédier à cette situation.

Les habitants sont attachés à leur ville, de récents sondages l'ont montré ; mais ils souhaitent qu'elle soit plus solidaire et plus conviviale. Ils souhaitent également que les problèmes de déplacements soient résolus et que des espaces de qualité soient conservés, ou reconquis quand l'extension de la ville les a détruits. Ils souhaitent, enfin, participer à l'élaboration des projets de leur ville, aux côtés des élus, même si ce sont les élus qui portent les projets. D'ailleurs, la future loi imposera, dans nombre de ses articles, une concertation afin que les projets de ville auxquels nous invitons l'ensemble de nos concitoyens soient partagés par tous.

Consacrant la cohérence dans le développement du territoire et les projets de renouvellement de quartiers d'habitat ou d'activités, que l'on désigne souvent par le n om de « zones » - sans commentaire -, cette loi comporte trois volets, qui sont au centre de la construction et de la vie quotidienne de nos villes : l'urbanisme, l'habitat, les déplacements.

L'urbanisme, d'abord.

L'urbanisme nous invite aujourd'hui à supprimer les zonages et à donner à nos villes une diversité urbaine où les activités, les logements, les équipements collectifs et les transports soient les atouts des quartiers.

Il faut penser à renouveler la ville plutôt qu'à l'étendre en s'éloignant toujours plus de son centre, ce qui entraîne souvent une désertification et multiplie les déplacements, cause de nombreuses gênes et de traumatismes pour les habitants.

L'habitat, ensuite.

L'habitat est essentiel. La politique sociale du logement, contrairement à ce qu'affirment certains collègues, incite à l'accession sociale à la propriété. Le budget que nous venons de voter prévoit de débloquer 110 000 prêts à taux zéro pour l'accession à la propriété et 70 000 constructions nouvelles de logements sociaux...

M. Marc-Philippe Daubresse.

C'est bloqué sur le terrain !

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Mais la politique sociale du logement ne se limite pas à faire du logement locatif social.

L'objectif prévu dans la loi de 500 000 logements sociaux en vingt ans pour que le droit au logement soit respecté est ambitieux, mais difficile à atteindre.

M. Francis Delattre.

Les constructions sont en chute libre !

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Mon cher collègue, il ne s'agit pas simplement de construire ! Vous avez mal lu la loi !

M. Jean-Louis Dumont.

Qui signe les permis de construire ? Qui offre les terrains ?

M. le président.

Monsieur Dumont, je vous en prie !

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Il s'agit aussi de faire en sorte que certains logements existants soient mis à disposition pour que des personnes à faibles ressources puissent y habiter.

Il s'agit de faire en sorte que 500 000 logements soient disponibles pour les personnes à faibles ressources, qui paieront des loyers contrôlés et encadrés, afin que le marché ne règle pas le problème de la pauvreté dans des conditions que nous connaissons et que nous regrettons.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

J'en viens aux déplacements.

La socialisation exige des échanges, une mobilité.

L'éloignement des quartiers les uns par rapport aux autres comme parfois le coût élevé de leur accessibilité - je pense notamment au coeur des villes-centres - ont pour conséquence que les habitants restent dans leur quartier, sans participer à la vie de leur ville. Il nous faut donc résoudre le problème de la mobilité, c'est-à-dire de la socialisation et de l'échange entre les générations et les catégories sociales.

Les déplacements sont donc un élément majeur de la ville.

En développant les transports en commun, en mettant en avant la nécessité de lier l'urbanisation à ces transports en commun, nous luttons contre l'un des maux majeurs de nos villes : la réclusion trop fréquente dans les quartiers à partir de huit heures du soir, l'impossibilité pour les personnes âgées de maintenir des liens avec leur famille. Cela me rappelle le slogan que certains sur ces bancs ont pu clamer dans les rues : « Non au métro, boulot, dodo ! »

« Métro, boulot, dodo » : ce n'est pas l'espoir d'une ville, c'est le contraire, et c'est à quoi cette loi s'attaque.

Le dialogue qui s'est établi entre les deux assemblées et le Gouvernement a été fructueux mais il faut parvenir à un texte définitif. Ce ne sera plus tout à fait le projet du


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

Gouvernement, ni forcément le texte voulu par le Sénat : ce sera, par définition, celui de l'Assemblée nationale puisque c'est elle qui adoptera le texte définitif, mais ce texte prend en considération nombre des remarques qui ont été faites sur ces bancs comme sur ceux du Sénat.

M. Jean-Louis Dumont.

C'est vrai !

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Je vous remercie, monsieur le ministre, vous et vos collaborateurs, pour la façon dont nous avons pu dialoguer, sans toujours nous mettre d'accord, ce qui se produira peut-être encore une ou deux fois ce soir, mais peu importe.

M. Jean-Louis Dumont.

De toute façon, c'est le Parlement qui a le dernier mot !

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Cette lecture définitive devra aussi, il faut le rappeler, à la qualité des administrateurs de l'Assemblée nationale, qui ont été notre bras armé, si je puis dire : ils nous ont permis de transformer nos réflexions politiques en propositions juridiques. Ils ont accompli leur travail en toute neutralité, et je les remercie.

Mes chers collègues, je n'ai pour ma part rien d'autre à faire qu'à entrer dans l'action, c'est-à-dire à voter le texte dans sa version définitive. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Exception d'irrecevabilité

M. le président.

J'ai reçu de M. Philippe Douste-Blazy et des membres du groupe UDF une exception d'irrecevabilité, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement. (« Encore ? » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Monsieur le ministre, qui ne souscrirait aux généreux objectifs de la loi : favoriser l'accès de tous au logement, notamment en Ile-de-France et dans les grandes agglomérations, permettre le mieux-vivre en essayant de développer des modes alternatifs de déplacement pour sortir du « tout voiture », encourager une mixité sociale volontaire ? Autant de finalités qui rassemblent très largement sur ces bancs.

Mais on comprend mal pourquoi vous avez fait le choix de l'urgence. Car s'il s'agissait d'encourager le dial ogue avec les élus locaux, pourquoi interrompre l'échange assez brutalement en constatant les divergences qui subsistent, comme s'il fallait à tout prix une loi avant les municipales, une « loi Gayssot », destinée peut-être à rassurer un peuple de gauche...

M. Jean-Louis Dumont.

C'est important !

M. Henri Plagnol.

... qui ne se retrouve pas toujours dans les orientations économiques et sociales du Gouvernement ? Cette loi intervient à un moment où les chiffres du logement, et singulièrement ceux du logement social, n'ont jamais été aussi mauvais : on construit beaucoup moins qu'en 1995 - votre année de référence -, puisqu'on est à peine à 40 000 logements par an.

Ce n'est un secret pour personne que le mouvement HLM est en crise.

M. Jean-Louis Dumont.

C'est un scoop !

M. Henri Plagnol.

Au fond, si nous avons des divergences fondamentales à propos de votre projet de loi, c'est parce qu'il est, dans son essence, idéologique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ah bon ?

M. Jean-Louis Dumont.

Ça alors !

M. Henri Plagnol.

Je m'efforcerai de démontrer que ce texte porte atteinte à plusieurs des principes de notre Constitution, notamment au droit de propriété et à la libre administration des collectivités locales.

Vous avez déclaré que deux Français sur trois rêvaient d'accéder au logement social...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je n'ai pas utilisé cette expression !

M. Henri Plagnol.

... et qu'avec votre projet, deux Français sur trois pourraient en bénéficier. La vérité, c'est que...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

La vérité, c'est que je n'ai pas dit cela ! Vous commencez à tricher dans vos citations ! Ce n'est pas bien !

M. Henri Plagnol.

... beaucoup de Français voudraient devenir propriétaires, ne vous en déplaise ! Or votre projet met à plusieurs reprises en cause le droit de propriété. Je rappelle que la Déclaration des droits de l'homme, en son article XVII, proclame que la propriété est « un droit inviolable et sacré », et que « nul ne peut en être privé ».

Dans une décision d'une importance capitale, par laquelle il a censuré un texte qu'avait présenté le Gouvernement - je veux parler de la loi relative à la lutte contre les exclusions -, le Conseil constitutionnel a parfaitement défini l'équilibre à trouver entre le droit au logement et le droit de propriété. En effet, il a rappelé que le droit au logement constituait un objectif qui, par lui-même, ne pouvait pas être de valeur constitutionnelle, mais que cet objectif ne devait pas être formulé dans la loi de telle façon que le droit de propriété soit mis en cause.

M. Daniel Marcovitch.

Il n'y a pas de mise en cause du droit de propriété dans la loi que nous allons voter !

M. Henri Plagnol.

Au risque de vous surprendre, monsieur le ministre, je ferai observer que, par l'article 85 A, dont vous avez dit qu'il faisait l'unanimité de la représentation nationale et qui tend à répondre à l'aspiration à un logement décent, qu'aucun d'entre nous ne conteste, bien entendu, vous ouvrez la porte à toutes sortes d'abus en prévoyant qu'un locataire, s'il constate que son logement n'est pas décent - notion extrêmement floue qui n'a pas de contenu juridique précis -, pourra interrompre le paiement de son loyer et qu'il appartiendra au juge de se déterminer. Cet article va très loin et s'expose à une censure du Conseil constitutionnel dans les mêmes conditions que certaines dispositions de la loi relative à la lutte contre les exclusions.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Tiens donc !

M. Henri Plagnol.

Plus fondamentalement, votre conception du logement social est tellement restrictive qu'elle porte atteinte au principe d'égalité.

La définition que vous donnez, à l'article L.

302-5 du code de la construction et de l'habitation, du périmètre des logements pouvant bénéficier de l'appellation « logement social »...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Logement « locatif » social !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

M. Henri Plagnol.

... de « logement locatif social », est tellement réductrice qu'elle porte atteinte au principe d'égalité entre les bailleurs privés et les bailleurs publics.

Or, monsieur le ministre, vous savez mieux que personne, que, depuis plusieurs années, c'est le parc privé qui assume la plus grande part du logement des plus démunis et qui est le plus dynamique en ce domaine, ainsi qu'il ressort de tous les rapports sérieux sur le logement.

Mme Janine Jambu.

Cause toujours !

M. Henri Plagnol.

Dans votre définition, vous écartez totalement le parc privé, au point de réduire le logement locatif social aux HLM.

Nous avons déploré à maintes reprises que vous ne preniez pas en compte l'accession sociale à la propriété car, ce qui importe, ce n'est pas le nombre de prêts à taux zéro, que le gouvernement d'Alain Juppé - pas vous ! - a mis en oeuvre...

M. Daniel Marcovitch.

Avec quel argent ?

M. Alain Cacheux.

Avec le 1 % logement !

M. Henri Plagnol.

En 1999, on a recensé 120 000 prêts à taux zéro, alors que seulement 40 000 logements sociaux ont été réalisés, et il en sera probablement de même cette année.

Au nom de quoi interdisez-vous à un ménage qui est bénéficiaire d'un prêt à taux zéro et qui, par conséquent , ne fait pas partie des privilégiés, de voir le logement qu'il réalise répondre à la définition du logement social ? De toute évidence, votre définition du périmètre des logements sociaux porte atteinte au principe d'égalité.

M. Daniel Vachez.

N'importe quoi !

M. Henri Plagnol.

Il en est de même de la disposition, qui offrira certainement un motif de censure constitutionnelle, par laquelle des logements de la SCIC pourront voir remettre en cause d'une manière rétroactive leur destination s'ils ne répondent pas à la définition des logements sociaux.

M. Daniel Marcovitch.

Il s'agit là d'argent public ! Il n'y a pas un centime d'argent privé !

M. Henri Plagnol.

J'en viens à l'essentiel : la conception autoritaire et centralisée que vous avez de la mixité sociale (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), par opposition à celle qui figurait dans la loi d'orientation pour la ville et qui a donné des résultats concrets, faisant de la mixité sociale un objectif volontaire à atteindre en concertation avec les élus locaux.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Le volontarisme a du bon !

M. Henri Plagnol.

J'évoquerai d'abord les problèmes que posent des modifications essentielles du code de l'urbanisme.

Le PLU, le plan local d'urbanisme, va succéder au plan d'occupation des sols.

M. Daniel Marcovitch.

Eh oui !

M. Henri Plagnol.

J'ai déjà dit, et le Sénat a exprimé le même souci, qu'il était contradictoire de parler de démocratie locale et de remettre en cause le seul document d'urbanisme, désormais bien connu de nos concitoyens et des associations, qui veille au respect des droits des gens et des objectifs écologiques dans le domaine de l'urbanisme. Il y a là une des principales raisons pour lesquelles les Verts ne sont pas du tout enthousiasmés par votre projet, qu'ils ne voteront probablement pas.

Vous affaiblissez le plan local d'urbanisme : vous lui enlevez très largement son caractère normatif en y introduisant la fameuse notion de mixité sociale.

Or la mixité sociale n'est pas un concept juridique.

La jurisprudence constante, et de bon sens, du Conseil d'Etat se fonde sur le fait que le droit de construire sur un terrain ou un bien qui vous appartient est, en principe, inaliénable, et que le législateur ne peut lui apporter que des limites précises.

M. Daniel Marcovitch.

Oui : 20 % du total !

M. Henri Plagnol.

Avec la notion de mixité sociale, on sort complètement de la conception classique de l'urbanisme pour introduire des considérations sociales dans des documents normatifs qui concernent la destination des sols.

Que fera un juge administratif saisi d'un recours pour non-conformité d'un permis de construire à un plan local d'urbanisme, non pas au motif que ce permis de construire n'est pas conforme à la destination des sols ou au coefficient d'occupation prévu par ce document d'urbanisme, mais au motif qu'il ne satisfait pas à l'objetif général, flou et impossible à formuler juridiquement, de mixité sociale ? On s'oriente donc vers une multiplication des contentieux, d'autant plus que les documents s'empilent déjà les uns sur les autres et qu'il est très difficile de s'y retrouver.

Vous faites une confusion grave entre, d'une part, l'urbanisme, qui suppose des règles précises, claires et protectrices ne pouvant pas porter atteinte, en dehors d'objectifs très précisément énumérés par la loi, au droit de propriété et au droit de construire, et, d'autre part, des considérations sociales, qui relèvent d'une tout autre logique.

J'en arrive à notre point de divergence essentiel : le fameux article 25, qui porte atteinte directement au principe de libre administration des collectivités locales posé par l'article 72 de notre Constitution, et qui a donné lieu à de nombreuses décisions du Conseil constitutionnel.

Non seulement l'article 25 traduit une conception autoritaire de la mixité sociale, que vous imposez aux collectivités locales, mais, en outre, il prévoit un dispositif de sanctions financières automatiques - 1 000 francs par logement manquant en deçà du fameux seuil de 20 %, dont on ne sait d'ailleurs pas pourquoi il a été fixé à ce niveau puisqu'il n'a pas de fondement juridique clair.

Plus grave encore : après la sanction financière automatique et non proportionnelle, cet article donne aux préfets le pouvoir de prélever directement la ressource f inancière, en cas de carence, dans la caisse des communes concernées.

Il y a donc là une triple attente au principe de libre autonomie des collectivités locales, prévu par l'article 72 de la Constitution, qui dispose que « ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et dans les conditions prévues par la loi. »

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Bonne citation !

M. Daniel Marcovitch.

C'est nous qui décidons des

« conditions prévues par la loi » !

M. Henri Plagnol.

Vous savez très bien que le Conseil constitutionnel a censuré à plusieurs reprises les atteintes excessives à ce principe fondamental de notre Constitution.

M. Jacques Brunhes.

Ce fut un abus de pouvoir du

« gouvernement des sages » !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

M. Henri Plagnol.

Le premier manquement à l'article 72 de la Constitution, c'est l'absence de proportionnalité de la sanction. Dans la plupart des communes d'Ile-deFrance qui n'atteignent pas aujourd'hui le seuil de 20 % de logements sociaux, le foncier est excessivement cher.

C'est le cas dans la commune de Saint-Maur, dont je suis l'élu. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Daniel Marcovitch.

Oh, le pauvre !

M. Alain Cacheux.

C'est une commune sinistrée ! (Sourires.)

M. Henri Plagnol.

Il est donc plus difficile de construire des logements sociaux à Saint-Maur que dans des communes de province comme la vôtre, par exemple, monsieur le ministre, où il y a plus de terrain disponible.

C'est la première considération.

Deuxième considération : dans ces communes, il n'y a pas de foncier disponible.

M. Daniel Vachez.

Et pourtant, on construit !

Mme Janine Jambu.

Il y en a pour les logements de standing !

M. Henri Plagnol.

Donc, on ne pourra exécuter la contrainte imposée par la loi qu'en violant le plan d'occupation des sols voulu par les populations, qu'en préemptant et en rasant des pavillons ; d'où, d'ailleurs, les nombreuses pétitions qui vous ont été adressées par les populations du Val-de-Marne, légitimement inquiètes.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Evidemment : avec ce que vous leur racontez !

M. Henri Plagnol.

L'automaticité de la sanction, qui n'est pas proportionnelle aux situations concrètes, est évidemment une atteinte à l'article 72. Mais, de plus, la récupération autoritaire par le préfet de ressources fiscales librement perçues par ces collectivités est, de toute évidence, une entorse à la libre administration des collectivités locales.

Enfin, et c'est à mon avis le point déterminant, aux yeux des Français, la première des compétences des communes, aujourd'hui, c'est l'urbanisme. Mais que restera-t-il de la maîtrise par les communes de ces compétences si, pour satisfaire aux objectifs de votre loi, monsieur le ministre...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce n'est pas ma loi, ce sera celle de la République !

M. Henri Plagnol.

... il faut réviser un plan d'occupation des sols devenu plan local d'urbanisme, en contradiction flagrante avec ce que souhaitent les habitants ? Je vous donne rendez-vous pour les élections municipales !

M. Daniel Marcovitch.

La gauche sera battue à SaintMaur ! (Sourires.)

M. Henri Plagnol.

Vous savez bien que l'article 25 est devenu un véritable drapeau rouge ! C'est d'ailleurs pourquoi vous avez déclaré l'urgence sur ce texte. Dans certaines communes, on votera pour ou contre la loi Gayssot. Que restera-t-il de la possibilité pour les maires de tenir compte de l'avis de leur population si c'est le préfet qui fait à leur place les choix politiques ?

M. Francis Delattre.

M. Gayssot sera durement sanctionné à Béziers !

M. Henri Plagnol.

Ce choix d'une méthode dirigiste et centralisée - c'est cela qui, sur le fond, nous sépare de vous - ne peut que conduire à l'échec. Aujourd'hui, les chiffres du logement social sont mauvais. Si vous voulez relancer la construction dans notre pays, il faut d'abord encourager l'aspiration à la propriété et dynamiser les bailleurs privés, pour que les offices publics d'HLM puissent répondre à leur vocation, qui est tout naturellement de venir en aide aux plus démunis. Il faut ensuite mettre fin aux ghettos et, pour cela, il faut rééquilibrer le parc de logements, certes, mais par des mesures incitatives, dans le dialogue, sans affoler les populations.

Enfin, vous ne pourrez rien faire, et vous le savez bien, sans une coopération librement consentie des maires et des collectivités locales. Tous les dispositifs dirigistes sont condamnés à l'échec, parce que aucun préfet ne pourra aller jusqu'à faire réaliser dans une commune des logements contre la volonté du maire.

M. Daniel Marcovitch.

Chiche !

M. Henri Plagnol.

Pour renouer le dialogue avec les élus locaux, il vous suffit de ne pas remettre en cause l'aspiration fondamentale des populations à habiter dans des villes où il fait bon vivre, des villes équilibrées, épanouissantes. Bref, il vous suffit de respecter leur droit de citoyen à choisir, au travers de leurs maires et de leurs élus, la ville dans laquelle elles ont envie de vivre, et de ne pas renouer avec les vieilles méthodes dirigistes des années soixante, qui ont produit les catastrophes dont nous souhaitons tous corriger les effets sur le terrain.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Daniel Marcovitch.

C'était vous, à l'époque !

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat au logement.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.

Monsieur le député, vous avez de la constance, je vous en donne acte. Il est en effet assez rare qu'un texte fasse l'objet d'une exception d'irrecevabilité en troisième et dernière lecture devant cette assemblée.

M. Francis Delattre.

C'est dire s'il est nocif !

M. Marc-Philippe Daubresse.

Et ce n'est pas fini !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Il y a donc, derrière cette détermination, une réalité que nous voyons bien et que je vais essayer de préciser.

A vous entendre, l'objectif général de la loi n'est contesté par personne. Vous avez même eu des propos favorables à la mixité, à la condition qu'elle puisse être réalisée de façon volontaire. Mais de quoi souffrent nos agglomérations urbaines aujourd'hui ? Des effets d'un

« volontariat » qui n'a jamais été guidé par des objectifs législatifs ! S'il y a aujourd'hui, dans certaines communes urbaines - je parle d'elles car la loi vise les agglomérations -,...

M. Francis Delattre.

Les communes de 1 500 habitants sont concernées !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

... 60 %, 70 % ou 80 % de logements locatifs sociaux, une concentration de situations difficiles, avec des populations que d'autres villes n'ont pas acceptées, c'est bien parce que tout cela s'est réglé dans le « volontariat ».

M. Henri Plagnol.

Ce n'est pas vrai !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Il faut bien qu'un jour l'intérêt général l'emporte.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

M. Francis Delattre.

Vous avez prospéré politiquement dans ces grands ensembles !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

L'objectif du Gouvernement est bien là : donner aux élus les moyens de bâtir, avec leur population, les villes et les agglomérations de demain, et d'adapter la France aux enjeux du futur en s'appuyant sur des principes clairs, définis tout au long de la loi. Je n'y reviens pas. Il n'y a pas dans cette démarche, monsieur le député, de volonté de recentralisation.

M. Francis Delattre.

Pensez-vous !

M. Marc-Philippe Daubresse.

Que feront les préfets ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Vous laissez entendre que les maires des communes urbaines seraient dorénavant contraints dans leurs décisions en matière d'urbanisme.

M. Henri Plagnol.

Tout à fait !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Permettez-moi d'observer qu'il y a au moins autant d'élus de communes urbaines dans les rangs de la majorité que dans ceux de l'opposition. Pensez-vous que la majorité serait assez masochiste pour retirer des prérogatives à ses propres élus ?

M. Francis Delattre.

C'est vous qui nommez les préfets !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

L'ensemble des mesures prévues par ce texte vise au contraire à permettre aux élus locaux d'assumer pleinement leurs responsabilités dans l'organisation de l'espace et des territoires, dans celle de la mixité de l'habitat au niveau de l'agglomération, et en matière d'urbanisme et d'aménagement. Vous n'avez pas souligné, monsieur Plagnol, que les prérogatives des élus seraient étendues, notamment grâce à la possibilité pour les maires des communes uniquement dotées d'une carte communale de délivrer les permis de construire, comme peuvent actuellement le faire ceux disposant d'un plan d'occupation des sols.

Admettez qu'il s'agit bien d'une extension de la décentralisation, qui profitera au demeurant essentiellement aux communes rurales.

Nous divergeons sur un point : pour nous, la décentralisation n'a jamais signifié ni la disparition de l'Etat ni l'affranchissement d'une collectivité vis-à-vis de la loi républicaine. Le projet de loi de solidarité et de renouvellement urbains s'appuie sur ces principes, confirme ces orientations, d'ailleurs reprises dans la loi Chevènement de coopération intercommunale, qui a été très largement approuvée sur l'ensemble de ces bancs.

M. Francis Delattre.

Et les sanctions financières ?

M. Daniel Marcovitch.

Il n'y a pas de loi sans sanction !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

S'agissant du droit de l'urbanisme, l'argument selon lequel il faudrait voir un retour de l'Etat dans la procédure d'élaboration des documents n'est pas fondé. En effet, vous le savez bien, messieurs les députés, et vous en particulier, monsieur Plagnol, qui êtes toujours le porte-voix de l'opposition pour cette motion de procédure, le rôle de l'Etat sera exactement le même pour les nouveaux documents d'urbanisme que pour les précédents. Il sera associé à la procédure d'élaboration et arrêtera le périmètre : il y a là rien de nouveau. C'est en effet une compétence qui lui est reconnue en matière de coopération intercommunale.

Il est chargé de vérifier la loi au titre de sa mission de contrôle de légalité. Tout cela n'est contesté par personne.

La notion de mixité sociale est à l'origine, pour vous, d'un certain mal-être. Vous y voyez une tutelle de l'Etat et vous avez développé divers arguments en ce sens.

M. Alain Cacheux.

Ils étaient mauvais !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Ils ne sont pas recevables. Vous avez fait référence à la décision du Conseil constitutionnel sur la loi du 31 mai 1990, que nous sommes quelques-uns à avoir bien des raisons de connaître. Vous avez prononcé à haute voix le début de l'attendu du Conseil constitutionnel mais, lorsque ce qui était écrit ne correspondait pas à votre thèse, on ne vous entendait qu'avec peine. Je vais, quant à moi, vous le lire sur le même ton de bout en bout : « Considérant que si, en vertu de l'article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus, chacune d'elles le fait dans des conditions prévues par la loi ». Mais la loi, c'est ce que décide le législateur, et le législateur est issu du suffrage universel ! Où voyez-vous un retour de l'Etat dans la loi ? La loi, c'est votre affaire, c'est l'affaire du Parlement.

M. Francis Delattre.

Celle-ci est une loi étatiste ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Pierre Forgues.

C'est une loi républicaine !

M. Alain Cacheux.

Il y a des parlementaires retors qui ne comprennent pas grand-chose !

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Par ailleurs, monsieur Plagnol, le principe selon lequel les communes qui méconnaissent une obligation posée par la loi peuvent être contraintes par l'Etat de la respecter existe de longue date et je prendrai un exemple auquel, j'en suis sûr, vous serez sensible. La loi qui fixe les relations entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés sous contrat - je n'ai jamais entendu dire que vous étiez contre - dispose très précisément qu'il y a lieu à inscription en dépenses obligatoires des sommes dues par les collectivités locales a ux établissements privés sous contrat. Le principe serait-il bon quand il s'applique à une loi qui vous plaît et condamnable quand il s'applique à une loi qui vous déplaît ? Un principe, c'est un principe ! Il est d'application générale, ou il n'est pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Alain Cacheux.

Ils n'ont plus grand-chose à dire !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Je m'attarderai sur la contribution prévue pour que les choses soient, une fois de plus, clairement dites. Le fondement de cette contribution n'est nullement de sanctionner à titre rétroactif des fautes qui seraient imputables à l'action des communes, il est bien différent. Il s'agit simplement de prendre en compte un simple constat : la différence de situation objective entre les communes urbaines qui ont beaucoup de logements sociaux sur leur territoire, avec les coûts qui peuvent en résulter, et celles qui en ont moins.

La contribution n'est pas une sanction : elle vise simplement à rétablir l'égalité.

Quant au droit de propriété, il serait violé, avez-vous dit, par les dispositions sur le logement décent. En quoi le fait d'autoriser la saisine du juge pour faire constater l'absence d'éléments de confort prioritaires, élémentaires,


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essentiels dans un logement constitue-t-il une atteinte au droit de propriété ? Je vous pose la question. Le juge pourra, le cas échéant, décider la réduction du loyer s'il est fixé à un niveau prohibitif, eu égard à l'état du logement, par des marchands de sommeil, lesquels sont, hélas ! beaucoup trop nombreux dans les grandes agglomérations.

M. Daniel Marcovitch.

Plagnol défenseur des marchands de sommeil : c'est une honte !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Le droit de propriété ne sera donc en rien contrarié. Le juge appréciera la relation entre le niveau du loyer et la décence du logement au regard de critères de confort.

Le principe d'égalité, avez-vous dit encore, serait vidé d e sa substance par la rédaction proposée pour l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, au motif que le parc locatif privé ne serait pas pris en compte et que seuls seraient comptabilisés les logements du parc locatif public. J'ai déjà eu l'occasion de le dire : le Gouvernement veut limiter la contrainte au seul segment du logement que certaines communes s'autorisent à refuser afin que d'autres le prennent en charge. Je n'ai jamais vu de communes faire barrage à des investissements en locatif privé ou à l'accession à la propriété. A quoi bon prévoir dans la loi des obligations là où, spontanément, tout se passe bien ? En revanche, s'il y a des disparités entre les communes urbaines, c'est en raison du refus que certaines d'entre elles opposent à un type d'offre de logements locatifs ; c'est là qu'est le problème.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Donc, il y a une sanction !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Les logements qui répondent aux mêmes critères sont traités de la même manière. Quelles sont les caractéristiques des logements locatifs sociaux ? Un loyer encadré et un plafond de ressources pour le locataire. Le logement locatif privé ne répond pas à cette définition. Il est donc normal de ne pas le prendre en compte. Il n'y a là aucune rupture du principe d'égalité.

Sur le plan local d'urbanisme, vous avez fait des commentaires...

M. Daniel Marcovitch.

Désobligeants !

M. Yves Dauge.

Désagréables !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

... relatifs à l'obligation de la mixité sociale. La loi prévoit que les plans locaux d'urbanisme devront respecter un objectif de mixité sociale, c'est-à-dire qu'ils ne pourront contenir des règles empêchant la réalisation de logements sociaux. Cela n'implique évidemment pas, monsieur le député - vous l'aviez compris tout seul mais vous avez fait comme si ce n'était pas le cas -, que chaque permis pris individuellement doive respecter la mixité, ce qui serait bien évidemment absurde et impossible. Lisez bien le texte proposé : il ne dit pas cela.

Vous avez bien voulu parler, au début de vos propos, d'« objectifs généreux » de la loi. Dont acte ! C'est au moins un point sur lequel nos appréciations peuvent se rejoindre. Vous avez demandé : « Pourquoi avoir choisi l'urgence ? » Ce choix a été dicté par l'importance du débat et le temps dont nous disposions.

En effet, s'il y a urgence, il y a cinq lectures ; sinon, il y en a sept.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Et les élections arrivent !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Mais nous avons fait preuve d'ouverture et un débat approfondi a eu lieu, Jean-Claude Gayssot et Claude Bartolone peuvent en témoigner. Nous avons ainsi passé des dizaines et des dizaines d'heures aux côtés des parlementaires, aussi bien à l'Assemblée qu'au Sénat, et nous avons discuté 3 700 amendements, nombre qui sera porté à 3 800 quand nous nous quitterons ce soir. Je ne pense donc pas que la procédure retenue pour l'examen de ce texte ait nui à son approfondissement. D'ailleurs, nous sommes passés de 87 articles à un peu plus de 170.

Tels sont, monsieur le député, les éléments que je souhaitais exposer en réponse à vos objections. L'objet de l'exception d'irrecevabilité est de montrer que les dispositions législatives proposées sont juridiquement infondées, qu'elles heurtent la Constitution et ses principes. Je pense vous avoir démontré le contraire, à défaut de vous avoir convaincu, mais, pour cela, je recommencerai s'il le faut ! V ous avez indiqué qu'il fallait encourager une construction plus active du logement social : c'est bien n otre conviction. Aujourd'hui, notre pays construit 300 000 logements par an. Beaucoup de gouvernements ont rêvé d'atteindre un tel chiffre ; nous, nous l'avons fait.

M. Daniel Marcovitch.

Bravo !

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Mais, et c'est là le paradoxe, alors que les 110 000 prêts à taux zéro pour l'accession à la propriété sont largement utilisés, nous sommes loin d'avoir chaque année 70 000 logements en locatif social. Vous le savez bien, le pourcentage de 20 % prévu dans le texte n'est pas le résultat d'élucubrations, il est au contraire parfaitement légitime. Aujourd'hui, on compte en moyenne 23 % de logements locatifs sociaux dans les agglomérations urbaines. Le problème est donc non pas une pénurie globale, mais la trop grande disparité dans la répartition de ces logements. Et en fixant le seuil à 20 %, nous sommes en deça de la moyenne constatée.

Vous avez dit aussi qu'il fallait mettre fin aux ghettos dans le dialogue, sans affoler les populations. Mais ce sont précisément les propos que vous tenez, et qui n'ont aucun fondement, qui pourraient avoir un tel effet. Vous allez jusqu'à prétendre que, dans certaines villes dont le territoire est trop bâti, il faudra raser des pavillons pour appliquer la loi. J'ai même lu un tract signé par quelques députés de votre sensibilité qui prétendait qu'on allait construire sur les terrains de sport. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Jamais vous ne trouverez trace dans la loi de ce type d'aberration ! Monsieur le député, pour atteindre ces 20 %, qui vous donnent quelques boutons, il faut produire du logement locatif social, ce qui signifie en construire ou en acquérir.

Tout à l'heure, j'ai indiqué que 300 000 logements était m is en chantier chaque année en France, mais 600 000 logements changent de propriétaire. Il suffirait donc aux communes déficitaires en logement locatif social de préempter 20 000 de ces 600 000 logements et de changer leur statut pour ne pas avoir besoin de construire de bâtiments nouveaux.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Oui, mais combien de temps faudra-t-il ?

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Par ailleurs, vous le savez, nous avons très largement amélioré le financement de l'acquisition.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

Bref, toutes les objections qui ont été soulevées sont de mauvaise foi. Je souhaite donc que nous sortions de la caricature et que la représentation nationale, notamment sa majorité, assurée de la constitutionnalité de ce texte, confirme ses votes antérieurs et rejette, dans l'immédiat, cette exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Alain Cacheux, pour le groupe socialiste.

M. Alain Cacheux.

Après les explications très complètes que vient de donner M. le secrétaire d'Etat au logement, j'irai à l'essentiel pour expliquer la position du groupe socialiste.

Monsieur Plagnol, vous parlez d'arrêt brutal du dialogue. Mais cet argument ne tient pas quand on sait que 3 700 amendements - 3 800 ce soir à l'issue de notre discussion - ont été examinés et que nous avons eu l'occasion, pendant des mois et des mois, d'étudier ce projet de loi dans tous ses aspects.

Pour justifier votre exception d'irrecevabilité, vous avez invoqué des atteintes au droit de propriété. Mais si, pour vous, définir dans la loi la notion de logement décent revient à mettre en cause le droit de propriété, c'est que vous considérez qu'il s'agit d'un droit absolu qui peut aller jusqu'à l'exploitation - n'ayons pas peur des mots de familles en difficulté. Cette conception n'est pas la nôtre.

Vous prétendez que le parc privé assure la plus grande part du logement des plus démunis. Faisons justice de cet argument : lorsque c'est le cas, c'est souvent dans des conditions de précarité extrême, et parfois même d'insalubrité. A l'évidence, c'est le parc social public qui apporte la meilleure réponse aux plus démunis.

M. Francis Delattre.

C'est faux !

M. Alain Cacheux.

Mais si, c'est la réalité ! Vous le savez fort bien : les garanties et les cautions demandées par les propriétaires sont telles que bien peu de familles ayant de faibles ressources peuvent les présenter.

Vous tentez encore d'opposer ce projet à la loi d'orientation sur la ville alors que tout ce que vous critiquez était déjà contenu dans le texte de Michel Delebarre.

C'est vrai pour le quota de 20 %, pour la définition du logement social ou encore pour les sanctions, dont M. le secrétaire d'Etat a dit qu'il fallait les concevoir de manière différente. Après avoir entendu les louanges que vous adressez à la loi d'orientation sur la ville, je m'étonne d'ailleurs qu'en 1993 vous et vos amis ayez décidé d'abord d'en suspendre l'application pour finalement la vider de son contenu en donnant une définition telle du logement social que 35 995 communes répondaient de façon satisfaisante aux critères et que seules 5 communes les enfreignaient.

En réalité, vous êtes très réticents à appliquer des objectifs que vous dites généreux, mais que vous ne partagez pas. Pour nous, le présent texte constitue le volet territorial de la nécessaire solidarité nationale, après le volet emploi avec les emplois-jeunes et le volet santé avec la CMU. C'est un instrument de développement cohérent de nos agglomérations après le succès de la loi Chevènement, avec notamment les dispositions relatives à l'urbanisme, aux déplacements et au stationnement. Enfin, il permettra l'amélioration de la qualité résidentielle dans beaucoup de nos communes, grâce en particulier à la lutte contre l'insalubrité. Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste rejettera cette exception d'irrecevabilité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Brunhes, pour le groupe communiste.

M. Jacques Brunhes.

L'obstination de M. Plagnol ne me surprend pas. L'urbanisme ségrégatif dont nous souffrons existe aussi dans d'autres pays. En 1996, un article du Monde diplomatique intitulé : « Un nouvel apartheid social : hautes murailles pour villes de riches » avait traité de cette question. Il s'agissait alors de la côte ouest des E tats-Unis. Aujourd'hui, l'urbanisme ségrégatif s'est aggravé dans ce pays. Or nous n'ignorons pas que ce qui se produit outre-Atlantique arrive quelquefois chez nous, où nous constatons déjà un véritable apartheid social.

Celui-ci, le recensement en région parisienne le montre, s'est même transformé en apartheid spatial. C'est la raison pour laquelle ce texte est si important. Il vise précisément à donner une inflexion dans l'autre sens pour éviter la relégation des habitants en fonction de leur classe sociale.

Monsieur Plagnol, je raconterai une anecdote qui vous montrera combien vos responsabilités et celles de vos amis sont grandes en la matière. Le maire de Puteaux, qui voulait se débarrasser d'un foyer d'immigrés, a acheté, dans ma commune de Gennevilliers, un immeuble pour reloger ses employés communaux qui n'avaient pas la bonne couleur de peau pour sa ville. Voilà de l'urbanisme ségrégatif en bonne et due forme !

M. Pierre Forgues.

Quelle honte !

M. Jacques Brunhes.

Voilà comment certains maires, celui de Puteaux ou votre ami Balkany à Levallois, dans d'autres circonstances, gèrent leur ville. Il s'agit pour eux de procéder à une forte sélection sociale.

M. Jean-Pierre Kucheida.

Ce n'est pas beau !

M. Jacques Brunhes.

Or c'est terriblement dangereux pour la société, pour l'avenir, de la région parisienne et, au-delà, de toutes les autres agglomérations.

C'est la raison pour laquelle ce texte est si important.

Il définit une nouvelle direction et donne les moyens d'imposer cette orientation, contre laquelle vous vous obstinez à maintenir les fondements d'hier, qui sont pourtant dangereux pour la société. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Marc Philippe Daubresse, pour le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Il y a plusieurs manières de faire des lois. Voilà quelques années, la LOV, la bien nommée loi d'orientation sur la ville, avait été présentée par M. Delebarre, et nous avions été quelques-uns dans l'opposition à la soutenir ici.

M. Francis Hammel.

Quelques-uns !

M. Marc-Philippe Daubresse.

Elle reposait en effet sur l'initiative, la responsabilité et le volontariat,...

M. Alain Cacheux.

Qui l'a vidée de son contenu ?

M. Marc-Philippe Daubresse.

... et non pas sur la contrainte et la rigidité, qui ont également prévalu pour la loi sur les 35 heures. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Le différend entre nous porte sur la méthode. Vous persistez à considérer qu'on règle les problèmes fondamentaux de la société par la contrainte, le knout, les menaces et les sanctions financières. (Exclamations sur les mêmes bancs.) Vos arguties n'y changeront rien, il s'agit bel et bien de sanctions financières, et le Conseil constitutionnel les qualifiera comme telles.

Monsieur le secrétaire d'Etat, votre argumentation ne manquait pas de malice, mais vous n'avez pas répondu à la question portant sur les agglomérations qui vous a été


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

posée à plusieurs reprises par les sénateurs. Or la loi Chevènement va entrer en application. Notons au passage que nous avons voté cette loi. Cela montre bien que, lorsqu'on laisse de côté l'idéologie et qu'on s'efforce de trouver un consensus pour régler des problèmes fondamentaux de société, on peut y parvenir. En tout état de cause, à partir du moment où la loi Chevènement présente le projet d'agglomération comme un élément clé du dispositif, et où elle donne la possibilité aux agglomérations d'acquérir la compétence de l'habitat, il fallait laisser les élus locaux régler entre eux ce problème. Et ils auraient pu le faire de façon harmonieuse.

Vous avez dénoncé, monsieur Brunhes, l'urbanisme ségrégatif, dont vous faites cependant votre fond de commerce et qui, finalement, vous arrange bien. Mais nous sommes un certain nombre de maires, ici, à avoir appliqué en son temps la loi Delebarre et à avoir réussi un urbanisme harmonieux. Sans construire ni tours, ni barres, nous sommes parvenus à mettre en place une véritable mixité sociale, en mélangeant appartements en location et en accession à la propriété.

M. Alain Cacheux.

Qu'est-ce qui vous empêche de continuer à le faire ?

M. Marc-Philippe Daubresse.

Je peux vous faire visiter des quartiers de ma ville qui constituent à cet égard une parfaite réussite. Il n'y a aucun ghetto, toutes les populations se rencontrent, se parlent, s'estiment et se respectent. Mais cela suppose de ne pas avoir recours à des méthodes coercitives. Cela suppose de respecter l'autonomie financière des communes, respecter le principe d'égalité. Pour toutes ces raisons et avant de déférer ce texte au Conseil constitutionnel, nous voterons l'exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Cardo, pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants.

M. Pierre Cardo.

Je ne souhaitais pas m'exprimer sur cette motion d'irrecevabilité, mais les arguments de notre collègue député-maire de Gennevilliers m'ont conduit à demander la parole. En première lecture, nous avons été quelques-uns à aborder la discussion avec un minimum d'intelligence, même en partant de positions parfois très opposées. Résumer le débat à une simple opposition entre droite et gauche me paraît donc un peu facile.

M. Alain Cacheux.

Ça a pourtant démarré comme ça !

M. Pierre Cardo.

Je peux citer un grand nombre de maires de gauche qui refusent d'accueillir des logements sociaux et qui ne manifestent aucune solidarité envers les communes qui en comptent 80 %, comme la mienne.

M. Patrick Lemasle.

Ils ont tort !

M. Pierre Cardo.

Voilà pourquoi je ne peux accepter les propos de M. Brunhes !

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'exception d'irrecevabilité.

(L'exception d'irrecevabilité n'est pas adoptée.)

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Yves Dauge.

M. Yves Dauge.

Monsieur le secrétaire d'Etat, ce texte doit nous donner la possibilité de nous faire entendre et comprendre par nos concitoyens. Ici, c'est plus difficile d'y parvenir car il y a trop d'arrière-pensées. Mais, ces derniers mois, nous avons tous eu l'occasion de participer à des rencontres ou à des colloques. Et, à l'issue de ceux-ci, il apparaissait finalement qu'avec un peu de pédagogie et pas trop de démagogie, on pouvait faire passer les idées essentielles de ce texte. Il va d'ailleurs falloir poursuivre cet important effort d'explication car certains ne se priveront pas d'exploiter cette loi pour faire croire que nous sommes en train de recentraliser, et même de ressusciter le Gosplan.

Notre explication doit comporter plusieurs points forts.

Le premier porte sur notre volonté d'éradiquer l'insalubrité. Les gens sont sensibles à ce thème. Il est vrai que les conditions dans lesquelles un certain nombre de personnes vivent encore aujourd'hui et la façon dont certains propriétaires exploitent la misère du monde sont insoutenables. C'est une bataille qu'il faut mener.

Ainsi que je l'ai déjà dit, j'ai eu l'occasion d'intervenir devant des propriétaires privés qui se sont émus de la disposition relative au logement décent. Mais dès que je leur ai demandé en quoi ils se sentaient concernés, la discussion a tourné court. Nous devons faire savoir que cette mesure ne s'adresse pas aux propriétaires qui font leur travail sérieusement ; je crois donc que nous pouvons nous entendre ici sur cet objectif essentiel.

Le deuxième point porte sur le renouvellement des quartiers et la mixité sociale. Voilà un certain nombre d'années que nous sommes engagés dans cette voie. Mais ce texte va donner un coup d'accélérateur car il offre plus de moyens. C'est par la mixité, c'est en favorisant l'intallation d'activités et en modifiant l'urbanisme que l'on transformera certains quartiers. A cet égard, l'attitude qui consiste à balayer d'un revers de main l'urbanisme des années soixante me semble caricaturale. Il existe de nombreux quartiers construits à cette époque - vous pouvez les visiter - où les gens sont très heureux de vivre. Ne jugeons donc pas trop hâtivement ce qui a été fait dans le passé !

M. Alain Cacheux.

Très bien !

M. Yves Dauge.

Le point sur lequel l'opinion et nos interlocuteurs accrochent le plus porte sur la cohérence en matière d'urbanisme. Ils nous demandent d'y prêter une plus grande attention. Il est vrai que les erreurs se sont accumulées de l'échec des périphéries urbaines au désastre qu'ont constitué ces grandes surfaces qui sont venues déstructurer les centres-villes et les quartiers. Cette politique à coup d'échangeurs et de zones d'activités tue à tel point la ressource financière de ceux qui en ont besoin pour bâtir la ville, qu'on va finalement construire dans des zones rurales qu'il faudrait, au contraire, protéger.

Toutes ces incohérences ne sont plus acceptables.

M. Francis Delattre.

C'est un expert qui le dit !

M. Yves Dauge.

C'est pourquoi l'un des points essentiels de notre travail doit résider maintenant dans l'élaboration des schémas de cohérence territoriale ; j'y mets beaucoup d'espoir.

Ce dispositif très incitatif sera d'autant plus utilisé qu'il est accompagné de l'excellente règle de la constructibilité limitée, qui sera gérée par les élus dans le respect de la décentralisation, avec les syndicats mixtes. Cela me semble donc très positif.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

Cela étant, monsieur le secrétaire d'Etat, je réitère la demande relative aux moyens d'études. Il faut en effet impérativement que les agences d'urbanisme disposent des crédits nécessaires.

Lors du débat sur le budget du logement, notre collègue M. Méhaignerie vous a interrogé à ce propos. Il a même souhaité que de petites agences soient installées dans des villes moyennes. Vous lui avez très justement répondu que l'on pourrait avoir un réseau d'agences s'appuyant sur les plus importantes d'entre elles, lesquelles s'occuperaient des villes qui en seraient démunies. En tout cas, il est indéniable que des efforts doivent être accomplis dans ce domaine, mais où trouver l'argent, car on ne peut pas augmenter indéfiniment les budgets ? J'ai toujours considéré qu'un échangeur dont la réalisation était estimée à 4 millions pouvait être construit pour 3,5 millions et être aussi opérationnel. De même, il est probable que l'on peut réduire d'un million le coût de construction d'un kilomètre de route estimé à 100 millions. Elle n'en sera probablement pas moins sûre ! Je ne demande donc pas que l'on construise moins de kilomètres de route ou moins d'échangeurs, mais je souhaite que l'on expertise avec beaucoup plus d'attention les travaux, sur le montant desquels personne ne discute actuellement. Nous trouverons alors l'argent de l'intelligence et nous en avons vraiment besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Mignon.

M. Jean-Claude Mignon.

Monsieur le secrétaire d'Etat, nous abordons aujourd'hui la lecture définitive du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

Je regrette une fois de plus, comme cela vous a été signalé maintes fois en première lecture, les conditions particulières de ce débat liées à la procédure d'urgence. Il me paraît en effet regrettable pour le bon déroulement du débat démocratique que, sur un texte comportant près de 180 articles et concernant des domaines aussi variés que l'urbanisme, la politique de la ville, le logement et les transports, chaque assemblée n'ait pu bénéficier que d'une seule lecture.

Je me demande d'ailleurs si le choix de la procédure d'urgence, qui court-circuite le dialogue et le débat avec les élus de la nation, lesquels sont souvent aussi des élus locaux, n'est pas le reflet d'un texte qui privilégie au fond la contrainte, la sanction, et apparaît comme une remise en cause de l'article 72 de la Constitution, lequel pose le principe de la libre administration des collectivités locales.

En effet, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ce principe implique une autonomie à la fois institutionnelle et fonctionnelle. Or l'article emblématique de votre projet, à savoir l'article 25, en instituant un prélèvement à la source de 1 000 francs par logement manquant en fonction d'un seuil fixé arbitrairement à 20 % de logements sociaux et en organisant un dessaisissement au profit des préfets des compétences des maires qui sont dans l'impossibilité d'atteindre ce seuil, constitue, pour beaucoup d'élus locaux, une atteinte intolérable au principe de libre administration des collectivités locales.

Votre projet reflète non seulement l'antagonisme entre votre majorité et l'opposition parlementaire, mais, au-delà des clivages politiques, la différence entre tous ceux qui, dans l'esprit de la loi d'orientation de la ville, sont partisans d'une approche contractuelle, privilégiant le pragmatisme, les réalités du terrain, la responsabilité des élus, et ceux qui ont fait le choix du dirigisme étatique privilégiant la densification autoritaire.

Nous avons également deux visions antagonistes des rôles respectifs de l'Etat et des collectivités locales.

Vous avez en effet comme objectif une recentralisation insidieuse et vous utilisez à cette fin des méthodes coercitives. A la contrainte, nous préférons l'incitation ; à la planification, nous préférons le contrat, comme l'ont proposé nos collègues sénateurs, qui ont déposé un amendem ent créant un contrat d'objectifs signé entre la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale et l'Etat, et s'insérant dans les orientations arrêtées par le schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme et le programme local de l'habitat.

Cette contractualisation aurait permis de tenir compte des spécificités de chaque commune, ce qui n'est pas le cas de votre planification dirigiste.

Malgré vos effets d'annonce sur une prétendue nouvelle étape de la décentralisation faisant suite au rapport remis le 17 octobre dernier par la commission présidée par M. Mauroy, ce texte constitue un recul au regard des principes énoncés dans les lois de décentralisation de 1983-1984. Votre projet est en vérité dans la continuité d'une reprise en main entamée par l'Etat et son administration depuis de nombreuses années, de manière rampante et insidieuse.

Vous n'avez de cesse de remettre en cause l'autonomie fiscale des collectivités locales. Ainsi, votre projet opère un véritable prélèvement à la source au profit de l'Etat sans que les communes aient la possibilité de faire valoir leurs spécificités financières, fiscales, sociales, ou de vous signifier qu'elles ne disposent tout simplement pas des réserves foncières suffisantes pour construire le nombre de logements sociaux que vous leur imposez.

De même, en supprimant le versement pour dépassement du plafond légal de densité, les taxes pour dépassement de COS, non seulement vous faites le choix de la densification urbaine, mais vous supprimez également de manière unilatérale plusieurs millions de francs de recettes pour les communes sans aucune compensation.

Votre texte est incohérent par rapport à la loi Chevènement. En effet, vous niez complètement la dimension intercommunale. A quoi a-t-il servi de faire adopter la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement de l'intercommunalité quand le quota de 20 % de logements sociaux est apprécié à l'échelon communal et non intercommunal, comme nous l'avions proposé ? Il fallait saisir l'occasion de ce débat sur la mixité sociale pour faire progresser l'intercommunalité dans notre pays. Il faut faire confiance aux élus qui gèrent les communautés de communes, d'agglomération et urbaines pour répartir de manière équilibrée les logements sociaux au sein des agglomérations.

Par ailleurs, les communes ayant un fort pourcentage de logements sociaux connaissent des difficultés pour se faire accepter au sein d'une communauté ; si vous aviez privilégié une répartition à l'échelle intercommunale, vous auriez contribué à doter ces communes de quelques attraits.

Vous souhaitez renforcer la mixité sociale mais j'observe que vous rejetez l'accession sociale à la propriété.

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Pas du tout !

M. Jean-Claude Mignon.

Avec le dispositif mis en place par M. Périssol, nous avions pourtant obtenu une augmentation importante de l'accession à la propriété pour les ménages les plus modestes. Or vous excluez de la définition des logements sociaux, pour l'appréciation du quota de 20 %, l'accession sociale à la propriété. Elle constitue pourtant un outil de mixité, de cohésion et de stabilité sociales ; c'est également un facteur de diversité


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et d'équilibre de l'habitat. Vous ignorez le souhait des ménages modestes qui aspirent, par leur travail et leur épargne, à accéder à la propriété.

Il semble que en dehors du logement locatif à vie, il ne saurait exister pour vous de logement à caractère social.

Les populations habitant par nécessité des HLM désirent en sortir et, pour peu qu'elles soient aidées, aspirent légitimement à acquérir un logement. Une véritable politique de mixité sociale aurait consisté à permettre à celles et à ceux qui en ont la volonté d'accéder à la propriété dans la diversité de leurs conditions sociales.

Il aurait été juste, monsieur le secrétaire d'Etat, d'insérer dans le quota de logements sociaux les logements des accédants les plus modestes. Il faut savoir en effet que les collectivités, que vous pénalisez injustement, ont favorisé, grâce à leurs efforts financiers, ce genre d'accession en faisant en sorte que le coût final pour les accédants, terrain et maison compris, soit compatible avec la modicité de leurs revenus. Nos collègues sénateurs avaient proposé la mise en place d'un véritable « parcours résidentiel » pour nos concitoyens leur permettant, en fonction de leurs revenus, à un moment donné de leur vie, de passer de la location à l'acquisition.

La complexité juridique de votre texte conduira, comme l'avenir le démontrera, à une déstabilisation des communes. En effet, la suppression de toute référence normative dans les plans locaux d'urbanisme risque de conduire, comme l'a souligné l'Association des maires de France, à une augmentation des contentieux, faute de références suffisamment précises et, par voie de conséquence, à un engorgement des tribunaux administratifs qui n'ont pas besoin de cela.

Il me paraît risqué de rendre facultatifs les deux principes fondamentaux des anciens plans d'occupation des sols, à savoir la détermination de la destination des sols et la fixation des règles de construction, dans les nouveaux PLU.

Cette situation provoquera le retard de nombreux chantiers, et je ne parle pas du coût des procédures juridictionnelles et des risques de pénalités financières grevant les budgets locaux, qui n'ont vraiment pas besoin de cela, eux non plus. Nous risquons également des contentieux à répétition lorsqu'on appréciera la compatibilité des documents d'urbanisme à l'aune de principes aussi vagues que ceux de « mixité sociale », d'« économie de l'espace » ou de « réduction des transports individuels ».

L'expression « porter à connaissance » constituera une autre source de blocage, car il n'y aura plus, désormais, de délai strict obligeant les préfets et les services de l'Etat à signifier clairement leur position aux maires. Vous étalez ce « porter à connaissance » pendant toute la durée des procédures, de telle sorte que les maires seront totalement paralysés et soumis au bon vouloir des services de l'Etat et des préfets. Pourquoi vouloir ainsi déstabiliser les maires, alors que vous savez bien qu'ils restent les interlocuteurs privilégiés de nos concitoyens ? J'observe que votre projet multiplie la participation du public et des associations au déroulement des procédures.

C'est une bonne chose pour la démocratie locale, mais vous ne prévoyez aucun garde-fou limitant les recours abusifs au contentieux après la concertation. Il est bon de pratiquer le plus possible la concertation et la transparence en amont des projets qui touchent à la vie quotidienne de nos concitoyens, mais, de grâce, en contrepartie, une fois le projet défini, donnez aux maires la stabilité juridique dont ils ont besoin pour mener à terme ces projets dans de bonnes conditions.

Ce texte me paraît incohérent : on y décèle, d'un côté, un excès de dirigisme là où il faudrait une contractualisation et, de l'autre, une déréglementation néfaste dans le cadre des PLU, là où il serait nécessaire d'avoir un minimum de normes juridiques.

L'autoritarisme et la partialité de vos méthodes aboutissent à fustiger les communes qui avaient respecté les objectifs de la loi d'orientation pour la ville de 1991 et sont décourageants pour toutes les bonnes volontés qui ont à coeur de favoriser une vraie mixité sociale. Nous ne pouvons cautionner un tel revirement, opéré sans concertation préalable, quant aux règles du jeu revirement effectué en cours de partie -, car nous ne connaissons pas le bilan de la loi d'orientation pour la ville. Nous ne pouvons tolérer que l'on cloue aujourd'hui au pilori les maires qui ont consenti de réels efforts en faveur de la mixité sociale. Il aurait été plus juste de motiver tous ces édiles dans une approche contractuelle plutôt que de les sanctionner.

L'Etat est bien mal placé pour donner ainsi des leçons aux maires. Depuis près de vingt ans, les communes qui souhaitaient développer sur leur territoire des logements sociaux ont vu leurs demandes insuffisamment satisfaites faute de crédits d'Etat. D'ailleurs, notre collègue Gilbert Meyer, orateur du groupe RPR lors de l'examen des crédits du budget du logement, a démontré que, depuis 1997, les mises en chantier de logements locatifs sociaux n'ont cessé de diminuer. Pour 2001, tous financements confondus, l'Etat ne proposera que la construction de 44 000 logements sociaux, chiffre misérable auquel on n'était jamais descendu ! De même, vous menacez la pérennité du dispositif du prêt à taux zéro, que nous avons lancé, alors que c'est un outil formidable de mixité sociale et de promotion du logement auprès de nos concitoyens. Notre collègue Gilbert Meyer a également demandé et je le rejoins sur ce point - que l'Etat accentue son effort budgétaire pour les opérations de démolition-reconstruction.

Comme nous l'avions indiqué en première lecture, ce n'est pas l'objectif qui nous heurte. Bien au contraire, nous souscrivons totalement à la mixité sociale. Et, dans la mesure où je suis maire d'une commune qui dispose de plus de 60 % de logements sociaux, on ne peut mettre en doute ma sincérité sur ce sujet. En revanche, nous d ésapprouvons la méthode que vous retenez pour atteindre cet objectif.

En désignant les maires comme boucs émissaires, vous occultez le fait que votre gouvernement a échoué dans sa politique en faveur des quartiers dégradés, au sein desquels, avant de construire d'autres logements sociaux, il faudrait régler le grave problème de la vacance et, éventuellement, détruire pour définir un urbanisme à taille humaine.

Vous nivelez par le bas. En effet, la plupart des communes que vous sanctionnez sont des communes qui, par leur bonne gestion, ont évité la densification de leur tissu urbain. Il est affligeant qu'elles risquent, à leur tour, de ressembler à certaines cités-dortoirs qui nous posent bien des problèmes aujourd'hui ; il suffit de suivre l'actualité pour le savoir.

Vous comprendrez donc, monsieur le secrétaire d'Etat que, dans un tel contexte autoritaire, coercitif et centralisateur, le groupe RPR, aux antipodes de ces principes d'un autre âge, vote contre l'ensemble de ce texte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement


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pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, nous voici parvenus au terme de l'examen de ce projet de loi intitulé à juste titre « solidarité et renouvellement urbains » qui, en insistant sur la mixité et en définissant les moyens concrets pour l'atteindre a permis d'ouvrir des débats de fond, mais aussi des perspectives sur la société que nous voulons construire et dont la problématique est si bien illustrée par les difficultés surgissant de la vie urbaine.

Nous l'avons pour notre part souligné d'entrée : il était de la responsabilité de la gauche, de ce gouvernement, de proposer et, maintenant, de mettre en oeuvre des mesures répondant aux attentes et aux besoins du plus grand nombre, de leur garantir l'accès au droit de se loger, de se déplacer, de vivre, de travailler, de se distraire dans les agglomérations. Bien entendu, urbanisme, logement et transports sont des volets essentiels et indissociables des c onditions économiques fondamentales, de l'accès à l'emploi, de la progression du pouvoir d'achat.

Ce texte, et tout particulièrement son dispositif emblématique, l'article 25, a suscité une levée de boucliers dans les rangs de la droite la plus protectionniste, celle que ne heurte pas une société entérinant l'existence de ghettos de riches et de ghettos de pauvres. Celle-ci a eu ses représentants tant dans notre hémicycle qu'au Sénat, lequel s'est employé, encore une fois, à l'occasion de la nouvelle lecture, à dénaturer le texte élaboré par notre assemblée.

Néanmoins, c'est sur ce dernier texte, très légèrement modifié, que nous sommes appelés à nous prononcer aujourd'hui, il prend en compte nos amendements qui visaient à en améliorer l'efficacité.

Ainsi en est-il, à l'article 25, de l'alourdissement de la pénalité pour les communes qui ont le potentiel fiscal le plus élevé, de la référence à un seuil obligatoire de construction par commune dans le cadre de l'intercommunalité, de la priorité à accorder à l'habitat social existant et à la requalification des quartiers sensibles, de l'allégement du foncier bâti pour les organismes d'HLM situés en ZUS, avec une contrepartie en termes de services de proximité, d'entretien, de qualité de vie pour les habitants. Cette mesure obtenue dans le cadre du débat SRU a été concrétisée dans la loi de finances pour 2001.

Un autre aspect essentiel de ce projet de loi est constitué par la pérennisation du parc social de l'essentiel des bailleurs : offices, SA, SEM. C'est un point d'appui très fort dans les luttes pour défendre, améliorer, étendre ce parc, mais aussi pour obtenir l'extension des obligations de pérennisation à des bailleurs hors normes comme la SCIC.

Vous savez combien je suis sensible, car je compte 4 000 logements dans ma commune, à la politique libérale et de déconventionnement accéléré menée par cette puissante filiale de la Caisse des dépôts. Avec les dispositions que nous avons pu introduire à l'article 61, nous pourrons protéger la petite partie du parc qui reste conventionnée. C'est un premier pas, c'est un espoir pour les locataires de la SCIC soumis au déconventionnement, à la hausse des loyers, au manque d'entretien du parc, et qui, dans de nombreuses communes d'Ile-de-France et de province, sont entrés en action. Sur ce point, il faut, audelà de la loi SRU, aboutir, en concertation avec toutes les parties concernées, à des décisions reconnaissant et protégeant le caractère social de l'essentiel du parc.

Quant à la politique des attributions, qui nous semble essentielle pour la mixité, nous nous félicitons aussi de la création d'une conférence communale du logement présidée par le maire dans les communes comptant plus de 2 000 logements sociaux. Le maintien de la liberté de choix entre OPHLM et OPAC et les garanties relatives au statut des personnels obtenues à notre initiative sont des points positifs.

Il en est de même pour l'élargissement des droits des locataires et pour les moyens qui leur sont donnés en vue de les exercer, en particulier par le biais de leurs associations représentatives. Je pense à leur financement par la CGLS. Nous regrettons d'ailleurs que les bailleurs du secteur privé ne soient pas mis à contribution de la même façon.

Puisque j'en arrive aux insatisfactions concernant ce volet du logement social, je dois souligner celles qui portent sur la disparition de la notion de mission de service public des organismes, mission qui traduit pour nous, l'affirmation de la responsabilité publique, le rôle d es outils publics en matière de financement, de construction, d'attribution, d'encadrement des loyers et de droits sociaux.

Nous nous interrogeons sur les conséquences d'une orientation qui viserait à développer des produits immobiliers livrés aux critères du marché et à n'assurer qu'un service minimum par le biais du parc social restreint réservé aux plus démunis.

Nous sommes attachés à la réaffirmation de la mission première des organismes d'HLM, le locatif social, et à l'encadrement strict de l'accession sociale à la propriété.

Enfin, nous insistons pour que le relèvement du seuil d'application du surloyer, que nous avions obtenu en deuxième lecture, subsiste. Nous pensons toujours que cette taxe est fondamentalement injuste et inefficace.

Concernant l'habitat privé, les copropriétés dégradées et l'habitat insalubre, problèmes auxquels sont confrontées de façon aiguë et avec toutes les conséquences sociales que cela implique, de nombreuses communes de la proche couronne de Paris et des grandes villes, le texte améliore les moyens de lutte contre les pratiques souvent inqualifiables des marchands de sommeil, donne des possibilités nouvelles d'intervention aux collectivités concernées, notamment avec notre amendement de dernière lecture à l'article 83 qui permet à la commune de concéder à un organisme des immeubles expropriés en état d'abandon en vue de leur réhabilitation et de leur gestion.

De même, l'établissement d'une définition du logement décent liée à l'élargissement des possibilités de recours pour les locataires est un point positif. A ce propos, nous avons souhaité que l'indemnité due à la collectivité par le propriétaire défaillant et de mauvaise foi en cas de nécessité de relogement des occupants soit nettement relevée afin de ne pas être inférieure à celle prévue par le droit existant en la matière.

J'en viens aux deux volets que je n'ai pas encore abordés et sur lesquels je serai moins diserte.

La simplification du code de l'urbanisme est un projet l ouable, indispensable pour que nous puissions reconstruire dans de bonnes conditions la ville sur la ville, et mettre en place les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme.

Ainsi que nous l'avons souligné, l'intercommunalité, qui en est la trame, n'aura d'avenir que si elle est le fruit de la volonté, d'un projet concerté de communes maîtresses de leurs choix, s'appuyant sur la démocratie locale,


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la participation directe des citoyens, et non sur une construction technocratique fondée sur des transferts obligatoires de compétences.

En ce domaine, la vie, les expériences trancheront.

Dans cet esprit, nous attachons beaucoup d'importance à notre amendement à l'article 14 sur la prise en compte de l'avis des communes concernées en matière de SCT et de PLU.

Enfin, pour ce qui concerne la partie transports portant sur la mise en place des PDU, l'organisation des transports en commun en zone urbaine et la régionalisation de la SNCF, nous sommes très attachés aux aspects démocratiques et sociaux : tarifications sociales, comités de partenaires, garantie d'unicité du système ferroviaire.

Nous prêterons, comme pour tout le texte, une vive attention aux moyens qui seront alloués à l'ensemble du dispositif.

Nous émettrons donc à nouveau un vote favorable sur ce projet de loi dont nous souhaitons la mise en oeuvre la plus rapide et la plus efficace possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Cardo.

M. Pierre Cardo.

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous voici à la phase finale de l'examen du projet relatif à la solidarité et au renouvellement urbains. Un texte assez dense, qui ressemble un peu à un patchwork, je l'avais déjà souligné en première lecture : procédure d'urgence, beaucoup d'amendements et une majorité tout feu tout flamme pour les défendre.

Après avoir relu ce que j'avais dit en première lecture, j'avoue que je n'aurais pas changé une ligne de mon intervention si cela ne posait un problème : elle a duré vingt-cinq minutes alors que je n'en ai que dix aujourd'hui.

M. Michel Vaxès.

Nous allons nous y reporter ! (Sourires.)

M. Pierre Cardo.

Elle est dans le Journal officiel.

Aussi me contenterai-je de survoler ce texte qui, finalement, nous revient quasiment dans sa version initiale.

Naturellement, mon groupe maintient sa position : il est majoritairement contre ce texte. J'exprimerai cependant certaines nuances en reprenant la trame de cette loi.

Vous dites vouloir renforcer la cohérence des politiques urbaines ; c'est l'objet du titre Ier , section 1. On peut comprendre ce souci de cohérence, mais la démarche que préconise le texte a ceci de préoccupant qu'elle conduit finalement à un appauvrissement du rôle de l'élu local.

Pour commencer, vous renforcez, quoi qu'on en dise, le rôle du préfet. Cela ne va pas tout à fait dans le sens de l'esprit de la décentralisation que beaucoup défendent ici.

Vous renforcez également le rôle des habitants, ce que je peux comprendre, mais cela ne comportera pas obligatoirement celui du maire et des élus locaux.

Enfin, vous renforcez le pouvoir de l'intercommunalité, notamment dans le cadre des schémas de cohérence territoriaux et des procédures, à tel point que l'on ne demandera même plus l'avis des communes au moment de leur approbation : c'est le préfet qui, à la limite, aura le dernier mot. Cela non plus ne me paraît pas de nature à conforter le pouvoir et la responsabilité des élus locaux, et c'est dommage. Ce sont pourtant eux qui sont les mieux perçus par la population, on les interpelle sur de nombreux problèmes, ils sont les plus proches du terrain.

L'esprit de la décentralisation devrait logiquement pousser à leur faire un peu plus confiance.

Revenons-en aux schémas de cohérence territoriale.

Leur structuration, même si je peux la comprendre, du fait qu'elle imbriquera les communes les unes dans les autres par le biais des plans locaux d'urbanisme, m'inquiète quelque peu. Prenez le cas d'une ville comme la mienne, isolée au milieu de communes résidentielles : il y a tout lieu de craindre ce que donnera l'intercommunalité sur la politique qui en découlera dans la ville qui, à elle seule, regroupe tous les logements sociaux du secteur ! Admettons que le souci d'intercommunalité que vous affichez se justifie globalement par le fait que l'on n'a pas su jusqu'ici régler les problèmes dans un cadre communal ou par des actions conduites sous la seule responsabilité de l'Etat. Mais croyez-vous réellement que la méthode choisie dans ce texte répondra aux besoins ? Je n'ai vu aucun garde-fou susceptible d'éviter les risques que je viens d'évoquer.

Dans la section 2, vous abordez le problème du financement de l'urbanisme. Pour ma part, je trouve plutôt positive l'idée de faire participer aux frais de la collectivité ceux qui bénéficient de ses investissements. Après tout, nous ne sommes pas là pour aider à la spéculation.

La revalorisation des valeurs cadastrales vise à financer les opérations de renouvellement urbain. Mais ce n'est pas un plafond de 5 francs au mètre carré qui permettra de faire grand-chose dans la plupart des cas, et encore moins dans les communes déjà urbanisées, où le foncier bâti représente trois fois rien notamment eu égard aux opérations lourdes de restructuration engagées dans certains secteurs.

Ne voyez là aucun procès d'intention. Je veux simplement vous mettre en garde. Nous en avons déjà fait l'expérience dans bien des domaines : cela ne cache-t-il pas à terme une forme de désengagement de l'Etat en matière de logement social ? Il est tout de même amusant de ne trouver dans une loi de solidarité urbaine aucune trace de solidarité institutionnelle ou financière de l'Etat. Disons que les mesures contenues dans le titre Ier ne sont pas obligatoirement à la hauteur de son intitulé...

Venons-en au titre II, qui concerne la politique de la ville et la solidarité entre communes en matière d'habitat.

Force est de constater l'échec de bien des politiques menées antérieurement dans ce domaine. Cela ne date pas d'aujourd'hui et ne peut être imputé à telle tendance politique plutôt qu'à telle autre. Mais j'ai l'impression que vous donnez à la mixité sociale que vous cherchez à imposer une vertu un peu magique et je crains que vous ne vous fassiez des illusions sur ses résultats.

Nous avons déjà eu en première lecture une discussion sur les conséquences du pourcentage de 20 %. Pour ma part, vous le savez, je suis plutôt favorable à l'idée de demander aux communes qui n'ont pas de logement social d'en accepter. Si l'on veut rendre la vie plus acceptable, y compris dans les communes où le foncier bâti est relativement onéreux, on a tout intérêt à offrir aux jeunes ménages la possibilité de se loger dans la même ville que leur parents propriétaires. Cela aura pour avantage de les inciter à profiter de la solidarité familiale plutôt que de faire appel aux services publics.

Le problème est que l'enfer est parfois pavé de bonnes intentions. Prenons le cas d'une commune qui a 50 %, 60 % ou 80 % de logements sociaux, et dont l'image est relativement négative. Qui se déplacera pour aller habiter


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dans les nouveaux logements sociaux construits petit à petit - sur vingt ans, si j'ai bien compris - dans des villes où le cadre de vie sera a priori très favorable ? J'imagine très bien nombre de mes administrés, qui supportent de plus en plus difficilement l'effet « bocal » un peu étouffant de nos cités, se précipiter, tout au moins ceux qui en ont la capacité, vers les nouveaux logements sociaux des voisins : des petits immeubles bien situés dans un environnement favorable, avec une école où l'on peut réussir, sans zones de non-droit. Ne risquons-nous pas d'assister à une deuxième version de ce que nous avons connu il y a vingt ans avec l'accession à la propriété, c'est-à-dire à un écrémage aboutissant à une paupérisation des populations de quartiers difficiles ? A cet égard, je ne partage pas toujours les arguments évoqués dans une partie de l'hémicycle, selon lesquels la dangerosité de cette loi serait plus à craindre dans les villes aisées sans logement social. Je crois pour ma part que le vrai danger est plutôt à redouter pour les villes en difficulté, qui connaissent déjà une forte concentration de logements sociaux et ont une image négative.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est bien la raison pour laquelle il n'y a pas que cela dans la politique gouvernementale !

M. Pierre Cardo.

Il n'y a pas que cela, monsieur le ministre, mais que se passera-t-il dès lors que votre loi, une fois votée, permettra d'offrir ce nouveau logement social particulièrement adapté, sympathique, construit par petits ensembles dans des endroits différents ? Les maires qui vont l'accueillir ne vont pas se remettre à construire des barres. Ou alors, ils sont fous ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Certes : c'est une vraie question.

M. Pierre Cardo.

Ils ne reviendront pas à l'urbanisme des quarante dernières années, qui a concentré le logement social, ils vont l'éparpiller. Mais, à ma connaissance, l'éparpillement de la misère n'a jamais contribué à la faire disparaître.

A titre personnel, je ne vois pas trop de danger à tenir compte du potentiel fiscal pour fixer le montant des amendes, pour peu que ce soit intelligemment calculé et que le préfet ait de temps en temps le dernier mot dans cette opération. J'ai trop vu de communes voisines de la mienne chercher à me proposer, que ce soit pour des aires à attribuer aux nomades ou pour des logements sociaux, une compensation financière, à charge pour moi d'accueillir toutes ces populations dont j'étais, paraît-il, le spécialiste ! Je trouve dommage, je l'ai déjà dit, que votre loi ne fasse aucune allusion à ce qu'on appelle « l'itinéraire résidentiel ». Nous ne devrions pas nous contenter d'une loi qui prétend traiter de la solidarité urbaine et des communes en grande difficulté, mais qui n'apporte a ucune réponse aux problèmes des communes qui souffrent d'un logement social mal vécu et trop concentré, si ce n'est : « Je vous en prends un peu et je le mets ailleurs... »

J'aurais préféré un texte plus ambitieux, qui intègre la politique de la ville en lui donnant peut-être un champ d'action plus vaste, l'Etat remettant sérieusement en cause le fonctionnement d'institutions qui, de mon point de vue, sont à l'origine du mal de vivre des ghettos : la police, la justice et l'école, pour le moins ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

On nous accuse déjà d'être autoritaires et dogmatiques...

M. Pierre Cardo.

Vous êtes autoritaires et dogmatiques dans certains cas,...

M. Alain Cacheux.

C'est très injuste ! M. Gayssot n'est pas dogmatique !

M. Pierre Cardo.

... mais cela ne dispense pas pour autant l'Etat d'assumer ses responsabilités, particulièrement lorsqu'il s'agit de ses pouvoirs régaliens. Dans les domaines de la sécurité, de la réussite scolaire comme de la santé, il lui appartient de donner à chaque territoire les moyens de ne pas devenir une zone de non-droit. A partir de là, tout ira bien. Mais, à cet égard, il n'y a rien dans ce texte et je le regrette.

Le transfert aux régions des transports de voyageurs est bien dans l'esprit de la décentralisation, mais il serait assez dangereux pour les régions d'accepter ce texte sans s'entourer d'un maximum de garanties. Les transferts de responsabilités de l'Etat vers les régions, les départements ou les communes se traduisent toujours, on ne le sait que trop, par un transfert de charges et rarement par un transfert de recettes en proportion.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est le passé que vous décrivez !

M. Pierre Cardo.

Je vous prends au mot, monsieur le ministre ! J'espère que nous nous retrouverons dans quelques années pour en discuter.

En conclusion, bien que je sois très réservé sur plusieurs points de cette loi, je reste plutôt favorable à l'idée que l'Etat prenne ses responsabilités en matière de logement social et indique le chemin aux collectivités en leur disant ce qu'il faut faire. Sur la procédure, je suis plus partagé. Je me bornerai à rappeler la position de mon groupe : il votera majoritairement contre ce texte. Pour ler este, monsieur le ministre, vous m'avez compris...

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Ce sont les libéraux pluriels !

M. Pierre Cardo.

Les vrais libéraux !

M. le président.

La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma position sera moins nuancée que celle de mon prédécesseur. Nous avons déjà suffisamment débattu, et le projet de loi qui nous est soumis en lecture définitive présente à nos yeux tous les défauts que nous avions dénoncés en première lecture. Allons donc droit au but.

Nous partageons, il est vrai votre volonté de mixité sociale, plusieurs d'entre nous l'ont dit, et ceux qui le d isent n'en restent pas aux discours, monsieur le ministre : ils le prouvent par leurs actes, dans leurs agglomérations et dans leurs communes.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je ne sais pas.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Il nous arrive d'entendre des discours caricaturaux que nous n'approuvons pas.

Nous nous attachons, ceux qui s'expriment ce soir en tout cas, à promouvoir par des actes concrets la mixité sociale dans les collectivités auxquelles nous participons.

Mais nous persistons à dire qu'il y a plusieurs méthodes


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

pour y arriver et nous étions prêts à faire le pari de l'intelligence avec le ministre de la ville, tel qu'il l'avait exprimé à l'Assemblée nationale.

C'était pourtant la même situation lorsqu'il s'est agi de débattre de la loi Chevènement : d'un côté, un intérêt commun entre les différentes collectivités locales ; de l'autre, la difficulté à trouver des possibilités de conciliation. Au sein de la commission mixte paritaire, nous avons essayé d'entendre les arguments des uns et des autres. Au bout du compte, nous avons trouvé des voies d'accord, même si bien des problèmes restaient en suspens. Cette fois-ci, malheureusement, vous n'avez à l'évidence pas voulu que cela se déroule de cette manière, vous avez tout fait pour que capote la commission mixte paritaire. Le rapporteur l'a dit : la plupart des deux cent quarante amendements du Sénat ont été purement et simplement ignorés. On a bien voulu en reprendre quelques-uns, d'ordre strictement technique, mais rien qui aurait permis un rapprochement des deux assemblées ou de l'opposition et de la majorité.

A travers l'attitude du Gouvernement et de sa majorité transparaît la volonté de recentraliser en multipliant les interventions du préfet, amputant du même coup l'autonomie des collectivités locales. Et tout au long de ce projet transpire la même idéologie, qui prône la contrainte, la sanction, la densification autoritaire, le tout-locatif, à l'encontre - nous vous l'avons répété et tous les sondages le démontrent - des attentes des Français. Le Gouvernement devrait pourtant en être conscient.

C e blocage délibéré est parfaitement illustré à l'article 25, puisque les propositions du Sénat ouvraient de réelles possibilités de rapprochement. Malheureusement, aucune avancée sur les périmètres des EPCI, rien sur l'extension du logement social au parc privé, aucune évolution sur l'accession à la petite propriété, aucune ouverture sur la possibilité de verser la contribution des communes aux EPCI dans le cadre d'un contrat d'objectifs, comme l'avait proposé le Sénat.

Pour toutes ces raisons, et compte tenu de vos déclarations liminaires, monsieur le ministre, nous n'allons pas vous faire perdre votre temps tout à l'heure. Je retirerai la plupart des amendements, une vingtaine au total, que j'avais déposés sur l'article 25.

M. Alain Cacheux.

Très bien !

M. Marc-Philippe Daubresse.

Nous irons directement au Conseil constitutionnel : ce sera peut-être plus efficace.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez calqué la méthode de l'article 25 relatif au logement social sur celle appliquée aux 35 heures : vous placez toutes les villes sous la même toise égalitaire, en raisonnant trop à l'échelon communal au lieu de penser l'urbanisme au niveau de l'agglomération.

Contre toute attente, les plus démunis se sont vu également refuser l'accès à la petite propriété à cause d'une vision du logement social exagérément réductrice, alors que l'accession à la petite propriété peut s'inscrire, on l'a dit, dans un parcours, et qu'elle constitue un outil incontestable de mixité et de cohésion sociale. Nous avions les moyens de satisfaire ce rêve légitime des populations les plus modestes de notre pays ; malheureusement, vous n'avez pas voulu entendre les appels à la cohérence de la majorité sénatoriale et de l'opposition à l'Assemblée. Je ne reviendrai donc plus sur l'article 25, puisque force est de constater que nos positions restent fondamentalement opposées.

Le pire, c'est que l'on constate sur le terrain un manque de construction de logements sociaux, par défaut de financement, du fait des problèmes que posent le livret A et les taux. Dans ma propre agglomération, le PACT, qui s'occupe d'un parc de logements fortement dégradés et essaie de construire des logements sociaux, a un an et demi de blocage pour certains dossiers, telle est la réalité du terrain.

M. Alain Cacheux.

C'est parfois vrai !

M. Marc-Philippe Daubresse.

Venons-en à la politique des transports. Sur ce sujet, nous l'avions dit, nous étions dans un état d'esprit très favorable, puisque c'est nous qui avions, avec Anne-Marie Idrac, lancé la période d'expérimentation de la régionalisation que vous avez finalement poursuivie et même accentuée à notre grande satisfaction.

Le problème, vous le savez bien, et les présidents de conseils régionaux de droite comme de gauche vous le disent, c'est le transfert des charges. Or le petit geste que vous avez fait sur ce point en première lecture n'est pas suffisant, je l'ai souligné lors de l'examen du budget de l'équipement et des transports, dans la mesure où le problème du renouvellement des matériels comme celui de l'affectation des gares restent posés. Quant à savoir ce qui se passe du côté de la SNCF, en fait de transparence, c'est le flou total... Elle aura finalement gagné dans cette décentralisation, 800 millions de francs dont personne ne sait ce qu'ils sont devenus ! Nous avions pourtant tous les m oyens de faire une opération « gagnant-gagnant », comme vous dites, dans laquelle les régions s'y seraient retrouvées. Nous verrons bien à l'arrivée si ce que vous nous avez dit s'est traduit dans les faits, monsieur le ministre. Et si tel est le cas, je le reconnaîtrai volontiers.

Pour ce qui concerne l'urbanisme, Yves Dauge y a fait allusion, j'ai travaillé, il y a déjà quelques années, avec Bernard Bosson sur la réforme du code de l'urbanisme.

Sur certains points, nous aurions pu nous retrouver. Le Sénat a tenu compte de certains éléments, relatifs aux schémas de cohérence territoriale ou aux enquêtes d'utilité publique, qui répondent à l'attente des citoyens. Mais les procédures ont été compliquées. En acceptant un certain nombre d'amendements d'une partie de votre majorité, loin de simplifier, de responsabiliser, de donner de la souplesse, de conférer de réels pouvoirs aux maires pour lutter contre la spéculation et éviter des opérations qui défigurent nos villes, vous n'allez pas dans le bon sens. Et nous constatons malheureusement qu'en dernière lecture rien n'a évolué ! Le groupe UDF ne votera pas ce texte parce qu'il va rendre illisibles nos documents d'urbanisme, parce que la compensation financière de la régionalisation du ferroviaire se fera au détriment de l'autonomie financière des collectivités locales, et parce qu'au lieu de contraindre les communes à construire des logements sociaux sans les financer en amont, vous auriez mieux fait de les aider à réaliser des actions de qualité, à taille humaine, bien insérées dans les quartiers, car c'est le meilleur remède aux ghettos et à l'urbanisme ségrégatif.

Moins d'idéologie et plus de courage politique auraient certainement permis de gagner ce pari de l'intelligence.

Nous restons donc résolument opposés à ce projet de loi.

M. Patrick Delnatte.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Filleul.

M. Jean-Jacques Filleul.

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous parvenons enfin à la lecture définitive du


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains. Cette échéance marque une étape décisive dans l'évolution vers la maîtrise du territoire et la poursuite des actes de décentralisation. Le triptyque législatif voulu par le Gouvernement sera, une fois ce texte voté, à la disposition des élus. Adoptant ces textes, nous sommes acteurs conscients d'une révolution territoriale. Le projet de loi SRU vient compléter judicieusement le texte voté en juin 1999 sur l'aménagement durable du territoire et celui voté en juillet 1999 facilitant l'intercommunalité.

Les collectivités territoriales ont ainsi pu enclencher un mouvement fort d'aménagement et d'organisation.

La loi SRU est porteuse d'une vision positive de la ville : une ville sereine, mieux organisée pour l'homme, mais aussi ouverte sur tous les maillages des villes périurbaines. La création des pays ruraux, déjà fort avancée dans l'ensemble des départements, celle des pays d'agglom ération, des communautés d'agglomération, des communautés de communes, celle demain des schémas de cohérence territoriaux vont entraîner forcément une dynamique nouvelle par une approche sous forme de projets, avec des compétences partagées. Nous entrons dans une ère nouvelle, celle d'un développement, non pas contraint, mais partagé.

Dans mon département, l'Indre-et-Loire, peu enclin dans le passé récent à une intercommunalité active puisque les SIVU l'emportaient très largement sur toute autre forme de coopération, le bouleversement est total.

Cette réaction collective est très intéressante car elle montre que, à l'évidence, ces lois étaient attendues. Le G ouvernement et sa majorité ont su apporter des réponses aux besoins des élus locaux. Actuellement, alors que l'année 2000 se termine, quatre pays ruraux sont créés, et certains contractualisent avec la région Centre.

Le territoire départemental sera couvert à la fin de l'année, à 80 %, de communautés de communes et de communautés d'agglomération.

Le présent projet de loi parachève le mouvement engagé dans de nombreux domaines qui intéressent la vie quotidienne des citoyens. Je me contenterai d'énumérer ceux qui concernent les déplacements en ville. En effet, le projet traite des questions de stationnement, de livraison des marchandises, d'organisation de la voirie urbaine, des plans de mobilité et des PDU. Mais ce n'est pas tout puisque ce texte permet une meilleure organisation des transports en Ile-de-France et confère, à partir du 1er janvier 2002, à l'ensemble des régions la compétence sur les transports régionaux de voyageurs.

Pour ce qui a trait aux transports et aux déplacements dans la ville et l'agglomération, j'apprécie que la loi incite les élus locaux à prendre en compte, dans l'organisation urbaine, tous les éléments constitutifs du « bien-vivre la ville ». Le projet de loi répond globalement aux besoins exprimés par les citoyens en recherchant une meilleure cohérence entre urbanisme et déplacements, en affichant une politique de déplacements au service du développement durable, en clarifiant le rôle des autorités organisatrices des transports, et en mettant en cohérence les politiques sectorielles relatives à la ville, aux habitats, aux déplacements et aux équipements dans les aires urbaines.

Quand la loi entrera en application, elle fournira aux élus des outils nouveaux pour collaborer avec la région et le département au sein de syndicats mixtes, afin de mieux organiser le transport urbain. Celui-ci, dont plus personne aujourd'hui n'ose contester l'intérêt, donnera accès à un territoire plus vaste, l'ensemble pouvant se compléter par un maillage de gares desservant les lieux d'habitation des populations.

J'apprécie, monsieur le ministre, les efforts importants que le Gouvernement consent pour les transports collectifs des agglomérations. Lors du débat sur le budget des transports pour 2001, nous avions eu quelques échanges à ce propos. J'ai bien retenu vos choix pour les transports en commun : 1,965 milliard de francs y seront consacrés, soit une augmentation de 60 %. Cette aide de l'Etat est primordiale aussi pour le développement du transport ferroviaire.

L'offre nouvelle de transports maîtrisés territorialement sera partagée, pour la zone urbaine, entre les différentes autorités organisatrices du transport, rassemblées dans le syndicat mixte prévu par la loi SRU. Hors de ce périmètre, ce sont les régions qui ont compétence sur le reste du territoire. Est-il utile, monsieur le ministre, de souligner la réussite exemplaire de l'expérimentation des transports régionaux de voyageurs dans six régions ? Oui, certainement, car s'il y a consensus de part et d'autre de l'hémicycle, c'est bien sur cette réussite. Il faudra l'étendre à l'ensemble du territoire national, avec la même volonté et en y consacrant les moyens financiers adéquats.

Vous savez combien j'estime nécessaire cette nouvelle phase de la décentralisation. Mais elle doit se dérouler dans une transparence totale tant pour ce qui est des moyens mis en oeuvre, donc des dotations de l'Etat, que de la présentation des comptes régionaux de la SNCF, afin qu'ils ne puissent être mis en cause par aucune région. Sur ce point, le doute est parfois permis malgré les efforts engagés par la société nationale. Malgré tout, cette situation ne saurait repousser l'échéance au 1er janvier 2003, comme certains en avaient évoqué publiquement la menace.

Cette seconde étape contribuera, je le souhaite, au renouveau des territoires régionaux, en entraînant dese fforts de modernisation sur des missions d'intérêt commun comme la qualité du service, les tarifications multimodales, l'organisation de systèmes de rabattement vers les gares pôles et un maillage territorial plus affirmé.

Si j'en crois le succès enregistré dans la région Centre - 12 % de passagers supplémentaires en un an -, cette nouvelle offre sera très positive.

Au-delà de ce qui a été déjà dit lors des débats précédents sur la loi SRU, deux problèmes nouveaux se posent. L'un est conjoncturel et est dû aux difficultés de fonctionnement du matériel fourni aux régions. Les automoteurs 74500 et les autorails 73500 connaissent des pannes qui perturbent le service et dérangent les voyageurs. Ces difficultés sèment le doute sur l'opportunité du transport ferroviaire. Il faut que le fournisseur officiel des machines et wagons de la SNCF fasse des efforts substantiels pour y remédier, si nous voulons tenir nos engagements.

L'autre problème est plus complexe et en même temps plus stimulant, puisqu'il s'inscrit dans la perspective d'une croissance très positive du transport ferroviaire : comment faire coexister sur les mêmes voies, les mêmes sillons, les transports de marchandises nationaux et internationaux, les transports de voyageurs grandes lignes et les TER ? Comment conciliera-t-on les exigences du service public du transport de voyageurs avec celles du service d'intérêt général du fret, lorsque toutes les régions, à partir du 1er janvier 2002, seront compétentes ? Des choix difficiles sont faits localement : là, on réduit tel ou tel horaire de TER, ou on supprime un horaire moins utilisé ; ailleurs, on bloque des trains de fret.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

Force est de constater le manque d'infrastructures ferroviaires, l'existence de goulets d'étranglement, la nécessité de remettre en activité des lignes abandonnées. Tout cela s'inscrit dans une logique d'investissement partagé entre l'Etat et les régions. Les moyens de RFF, chargé de l'infrastructure par l'Etat et qui a repris la lourde dette du ferroviaire, sont limités. Parallèlement, les régions seront demandeuses de plus de sillons. La réponse à cette question est en débat actuellement et nous y prenons notre part. Personnellement, je pense que l'on ne pourra pas faire l'impasse sur la nécessité pour certaines régions d'investir dans de nouvelles lignes, en particulier pour contourner les grandes agglomérations.

Je crois nécessaire d'engager les études ferroviaires au niveau du contrat de plan Etat-région. Reprenant une proposition faite par le CSSPF, le Conseil supérieur du service public ferroviaire, je suggère qu'un diagnostic précis soit établi par la SNCF et RFF sur les moyens consacrés aux opérations prévues dans les contrats de plan

Etat-région, notamment aux études. Enfin, il faudrait éviter que le SIES d'automne entérine des crédits de paiement pour 2001-2006 inférieurs aux montants retenus par les contrats de plan Etat-région, et qu'on argue d'une révision à la baisse des besoins. En effet, personne ne comprendrait, face à l'importance de la loi SRU et à la nécessité du développement du transport ferroviaire, que les investissements ne soient pas à la hauteur des prévisions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Francis Delattre.

M. Francis Delattre.

Monsieur le ministre, à cette heure avancée, je me contenterai de vous poser cinq questions : une par minute.

Selon l'intitulé de votre texte, vous voulez agir contre la ségrégation sociale. Or l'essentiel de votre dispositif portera sur les villes qui n'auraient pas 20 % de logements sociaux. Permettez-moi de vous dire que ce n'est pas la bonne cible. La ségrégation sociale, aujourd'hui, sévit plutôt dans les villes qui ont plus de 50 %, voire jusqu'à 70 % de logements sociaux, vous le savez bien ! Au regard de votre objectif, votre texte est donc un peu hémiplégique.

La ségrégration sociale, je le répète, sévit dans des villes, bien connues, où la typologie sociale est trop accentuée : c'est d'ailleurs la définition des ghettos.

Depuis vingt ans, je passe ma vie à essayer de réparer les erreurs du passé. Aussi, revoir un texte de cette nature, plein de contraintes et qui ne fait pas confiance aux acteurs de terrain, aux élus et à leurs conseils, m'inquiète beaucoup.

Ma première question est simple : que comptez-vous faire, messieurs les ministres, pour réduire la ségrégation sociale là où elle sévit le plus ? Nous avions fait des propositions. N'avez-vous pas dit, monsieur le ministre des transports que si vous étiez toujours communiste c'est parce que vous aviez le sentiment qu'il fallait encore transformer bien des choses ? Eh bien, ces gens qui n'ont pas d'autre perpective que de vivre en HLM, ne pourriez-vous pas leur permettre, d'une façon ou d'une autre, d'accéder à la propriété de leur logement, par exemple ? Est-ce une idée complètement délirante que d'envisager de les sortir du statut de locataire à vie ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Pas du tout !

M. André Lajoinie, président de la commission.

C'est notre souhait !

M. Francis Delattre.

Pour les plus modestes d'entre eux, accéder à la propriété, voilà la notion révolutionna ire qu'ils ont retenue ! Avoir un endroit où l'on peut se protéger et où l'on peut exercer toutes ses libertés, voilà ce qu'ils souhaitent.

Alors, comment allez-vous lutter efficacement contre la ségrégation sociale dans ces grands ensembles, ces villes où les logements sociaux sont concentrés, trop nombreux au même endroit ? Ne croyez-vous pas qu'il faudrait surtout permettre aux locataires de sortir de ce qui s'apparente à des ghettos ? Deuxième question,...

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Vous avez déjà utilisé trois minutes !

M. Francis Delattre.

Sans doute n'avons-nous pas les mêmes centres d'intérêt, monsieur le rapporteur ! Vous pourriez m'écouter.

Moi, j'ai bien écouté l'orateur précédent qui nous a fait un cours sur l'évolution globale du trafic de marchandises de la SNCF.

M. Patrick Rimbert, rapporteur.

Un cours magistral !

M. Yves Dauge.

Fort intéressant !

M. Francis Delattre.

Certes, mais hors sujet !

M. Jean-Jacques Filleul.

C'était au coeur du sujet, au contraire !

M. Francis Delattre.

Nous savons tous que si les logements sociaux sont renvoyés à la périphérie des villes - ce qui les déséquilibre - c'est parce que leur financement ne peut couvrir le coût exorbitant des terrains en centre-ville.

Voilà le verrou qui nous empêche d'implanter des logements sociaux dans les quartiers centraux, en harmonie avec des logements en accession à la propriété ; en réalité, il faut faire les deux en même temps, de façon harmonieuse. Comment comptez-vous faire sauter ce verrou ?

M. Alain Clary.

Vous êtes pour l'extinction du paupérisme après dix-neuf heures à l'Assemblée, mais qu'avezvous fait jusqu'à présent ?

M. Francis Delattre.

Je ne sais pas de quelle circonscription vous êtes l'élu et ne vous ai jamais entendu vous exprimer. (Protestations sur les blancs du groupe socialiste.) Moi, j'ai eu le plaisir et l'honneur d'intervenir sur la LOV - la loi d'orientation sur la ville -, que j'ai d'ailleurs soutenue et votée. Vous me demandez ce que j'ai fait. Eh bien, j'ai voté des textes intelligents... même lorsqu'ils émanaient du parti socialiste !

M. Alain Cacheux.

Il n'a jamais dit autant de bien de Delebarre !

M. le président.

Mes chers collègues, laissez M. Delattre poser ses trois autres questions ! Poursuivez, mon cher collègue.

M. Francis Delattre.

Ce verrou qu'est le prix des terrains, qui pénalise beaucoup de projets en centre ville, comment comptez-vous le faire sauter ? Ma troisième question concerne les communautés urbaines. Mon approche sera un peu différente de celle de mes collègues de l'opposition, même si je partage leur analyse. Il est évident que se pose un problème de cohérence avec la loi Chevènement, selon laquelle la principale compétence d'une communauté d'agglomération c'est l'aménagement spatial, donc le logement. Pourquoi, dès lors, ne pas prendre en compte le pourcentage de 20 % dans le cadre de la communauté d'agglomération ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

J e reconnais que, dans la région parisienne, les communes qui n'ont pas 20 % de logement social, répugnent à participer à une communauté d'agglomération. Je suis persuadé que leur dire qu'on raisonnera globalement sur l'agglomération est un moyen de les faire venir volontairement...

M. Maxime Gremetz.

Vous voulez les tromper ?

M. Francis Delattre.

... dans une communauté d'agglomération qui, souvent, ne présente pas de réel intérêt pour elles.

Troisième question : ne pensez-vous pas évoluer sur ce point de façon pragmatique et intelligente ?

M. Alain Cacheux.

Vous n'aurez pas le temps de poser vos cinq questions !

M. le président.

Venez-en à la quatrième.

M. Francis Delattre.

Elle concerne les POS et les PLU.

E n supprimant l'essentiel du pouvoir normatif des POS, ...

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Non ! Nous en reparlerons lors de l'examen des articles !

M. Francis Delattre.

La notion de règlement, est tout de même notablement affaiblie. Ne pensez-vous pas, que dans ce domaine sensible pour les propriétaires, les acteurs, mais aussi les décideurs, les maires, on organise d'une certaine façon l'insécurité juridique ? Au moment où se tient le congrès des maires, cette question peut légitimement vous être posée, et vous répondrez certainement.

Ma cinquième question concerne la loi d'orientation pour la ville. Je confirme que le logement social comprenait tous les logements locatifs dès lors que les bénéficiaires répondaient à des conditions de ressources. C'était une notion certes assez large, mais elle permettait de bien cerner les situations des communes. Vous avez introduit un pouvoir de substitution du préfet ; c'est un peu biaiser avec le principe de la convention.

Redonner un pouvoir au préfet pour l'aménagement des villes et organiser un système de sanctions financières, ne pensez-vous pas, au-delà du problème de la constitutionnalité, que c'est tout de même une régression intellectuelle ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Non !

M. le président.

La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, au moment où nous abordons la lecture définitive de ce texte au nom de mes collègues députés Verts, j'insisterai surtout sur ce qui fait débat parmi nous et sur les aspects de ce projet qui ne correspondent pas à ce que nous attendions.

J'insisterai d'abord sur l'abandon du caractère prescriptif des documents de planification de l'urbanisme. Notre assemblée a en effet littéralement supprimé le caractère prescriptif des plans locaux d'urbanisme. Le rôle de rempart juridique que jouaient les plans d'occupation des sols contre certaines dérives locales en matière d'environnement ne sera plus joué par les plans qui les remplacent.

Auparavant, les POS et les schémas devaient prévoir des protections et prendre en compte un certain nombre d'objectifs. Dorénavant, ils « déterminent les conditions dans lesquelles ils prennent en compte [...] » ; il n'y a donc plus d'obligation. C'est en quelque sorte la liberté totale, sans aucune garantie, et la mise à bas de toute la jurisprudence protectrice que les associations avaient tricotée, recours après recours, sur la base des anciens textes.

Pour les écologistes, c'est un très grand recul du droit de l'environnement.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce n'est pas le cas !

M. Noël Mamère.

Nous allons maintenant aborder la question de la déréglementation du droit de l'urbanisme et nous attacher à trois aspects qui doivent être combattus.

Le Gouvernement avait annoncé qu'on ne toucherait pas à la loi littoral et à la loi montagne. Or, à l'issue de la deuxième lecture, deux amendements déposés par nos collègues socialistes les ont remises en cause.

L'amendement à la loi montagne permet de déroger au principe de la construction en continuité pour faire des lotissements. C'est une dérogation supplémentaire, inacceptable.

M. François Brottes.

L'amendement est très encadré !

M. Noël Mamère.

Peut-être, mais il déroge à la loi montagne. Les engagements pris par le Gouvernement sur cette question auraient dû être respectés à la fois par le Gouvernement et par ceux qui le soutiennent.

M. Jean-Claude Mignon.

C'est vrai !

M. Noël Mamère.

Quant à la loi littoral, un amendement socialiste propose que les constructions antérieures à la loi littoral qui violent la loi soient considérées comme conformes à la loi. En fait, il s'agit tout simplement de légaliser les paillotes et autres constructions réalisées dans la bande des 100 mètres ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous pouvez toujours protester ! C'est pourtant le résultat auquel conduira cette dérogation si nous acceptons un tel amendement.

M. Pierre Cardo.

C'est vrai !

M. Noël Mamère.

Les députés Verts ne sont pas les seuls à protester contre cet amendement. De nombreuses associations se sont élevées contre cette dérogation qui est une atteinte à la loi littoral, laquelle doit être respectée dans son principe et dans son intégralité.

Troisième aspect constitutif de la dérégulation du droit de l'urbanisme : la remise en cause du périmètre de 500 mètres de rayon autour des monuments historiques.

M. Yves Dauge.

Mais non !

M. Noël Mamère.

A croire que le Gouvernement n'aime pas le patrimoine, ou en tout cas n'aime pas le protéger.

M. Yves Dauge.

Ce n'est pas sérieux !

M. Maxime Gremetz.

Pour la cathédrale d'Amiens, il a raison ! C'est une catastrophe !

M. Noël Mamère.

Pour une fois que M. Gremetz est d'accord avec moi, je ne vais pas m'en plaindre (Sourires), et j'insisterai sur cette première conjonction entre nous.

Au moment où l'ensemble du mouvement associatif a réussi à remettre en cause l'urbanisme opérationnel, dont l'objectif est d'abord de passer au bulldozer l'habitat préexistant, cette loi propose un urbanisme fondé sur l'idéologie de la restructuration de la ville, de la reconstruction de la ville sur la ville.

On peut même penser que cet urbanisme opérationnel ira à l'encontre du logement social de fait, car ce type de logement se rencontre souvent dans des quartiers dégradés, et on va plutôt le détruire que le réhabiliter.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

La LOV avait, en instituant le programme de référence, accordé la priorité à la réhabilitation du logement social de fait dans les quartiers anciens, au maintien de la population dans ces quartiers, à la protection et à la mise en valeur du tissu urbain constitué du patrimoine architectural et urbain.

Cette disposition a été annulée en 1994 par la loi Bosson. Il était donc essentiel que le présent projet réintègre le programme de référence ; or le Gouvernement a changé de logique.

Là où, en 1991, il était question de protéger les quartiers anciens au bénéfice d'une population attachée à ses lieux de vie, la loi SRU, en 2000, a pour seul projet politique d'inciter à l'urbanisme opérationnel dans ces quartiers. Elle ouvre donc la porte à ce que l'on pourrait appeler le « béton frais », c'est-à-dire les programmes immobiliers institutionnels et privés qui feront disparaître ce tissu existant.

Cet état d'esprit, cette idéologie de la reconstruction de la ville sur la ville, va contribuer à ajouter des injustices environnementales à des injustices sociales, puisque ce sont les populations démunies, démunies face à l'argent, face au droit, sans recours, qui seront les premières condamnées par cet urbanisme opérationnel, qui vise à désertifier et à liquider les quartiers anciens préexistants, l'habitat social de fait ; on va construire des quartiers neufs et vider les anciens quartiers de leur population.

M. Jean-Jacques Filleul.

Nous ne parlons pas du même texte !

M. Noël Mamère.

Je voudrais, pour conclure, puisque le temps qui m'est imparti arrive à son terme, vous montrer un document que je vous transmettrai, monsieur le ministre, si vous le souhaitez : une quarantaine d'associations, réparties dans toute la France, protestent contre la dérégulation, la déréglementation du droit de l'urbanisme.

Je voulais insister sur ce point, ce soir, au nom de mes collègues députés Verts. Nous avons observé la posture de l'abstention en première et en deuxième lecture. C'est ce que nous ferons également au cours de cette dernière lecture mais vous devez savoir, messieurs les ministres, que l'envie nous démangeait de voter contre, pour toutes les raisons que je viens d'invoquer.

M. le président.

La discussion générale est close.

Je crois comprendre, monsieur le secrétaire d'Etat au logement, que vous souhaitez répondre maintenant, mais cela nous obligerait à retarder la séance de ce soir.

M. le secrétaire d'Etat au logement.

Je souhaite simplement, par courtoisie, répondre à M. Mamère, qui a p osé des questions importantes, et dont j'ai cru comprendre qu'il serait absent ce soir.

M. Noël Mamère.

Pas du tout : je serai là !

M. le président.

La suite de la discussion est donc renvoyée à la prochaine séance.

9 SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION

M. le président.

J'informe l'Assemblée que la commission de la défense nationale et des forces armées a décidé de se saisir pour avis du projet de loi de finances rectificative pour 2000 (no 2704).

10 DÉSIGNATION D'UN CANDIDAT À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président.

J'ai reçu de M. le Premier ministre une demande de désignation d'un membre de l'Assemblée nationale au sein du conseil d'orientation de l'observatoire de l'emploi public.

Conformément à l'alinéa 2 de l'article 26 du règlement, M. le président a confié à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République le soin de présenter un candidat.

La candidature devra être remise à la présidence avant le mercredi 6 décembre 2000, à dix-huit heures.

11

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures quinze, deuxième séance publique : Suite de la discussion, en lecture définitive, du projet de loi, no 2671, relatif à la solidarité et au renouvellement urbains : M. Patrick Rimbert, rapporteur au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 2700) ; Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, no 2526, relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile : M. André Capet, rapporteur au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 2701) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 106 du règlement.) Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, no 2619, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports : Mme Odile Saugues, rapporteure au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 2699).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

ORDRE DU JOUR ÉTABLI EN CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS (Réunion du mardi 21 novembre 2000) L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra du mardi 21 novembre 2000 au jeudi 7 décembre 2000 inclus a été ainsi fixé : Mardi 21 novembre 2000 : L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures : Explications de vote et vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585-2624 à 2629).

Discussion, en lecture définitive, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains (nos 2671-2700).

Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile (nos 2526-2701).

(Ce texte faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 106 du règlement.)

Discussion, en seconde lecture, du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports (nos 2619-2699).

Mercredi 22 novembre 2000 : L'après-midi, à 15 heures : Hommage à la mémoire de Jacques Chaban-Delmas.

A 17 heures, et le soir, à 21 heures : Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (no 2732).

Jeudi 23 novembre 2000 : Le matin, à 9 heures, l'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (no 2732).

Mardi 28 novembre 2000 : Le matin, à 9 heures : Questions orales avec débat sur la sécurité alimentaire.

L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures : Explications de vote et vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, en nouvelle lecture (no 2732).

Discussion, en seconde lecture, du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière de santé des animaux et de qualité sanitaire des denrées d'origine animale et modifiant le code rural (no 2618 rectifié).

Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à l'archéologie préventive (no 2620).

Discussion, sur rapport de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi relative à la contraception d'urgence (no 2734).

Discussion, en seconde lecture, de la proposition de loi relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (no 2604).

Mercredi 29 novembre 2000 : Le matin, à 9 heures, l'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures : Discussion du projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception (nos 2605, 2702-2726).

Jeudi 30 novembre 2000 : Le matin, à 9 heures : Suite de la discussion du projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception (nos 2605, 27022726).

L'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.

Discussion du projet de loi, déposé au Sénat, relatif à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale.

Mardi 5 décembre 2000 : Le matin, à 9 heures : Discussion de la proposition de loi de M. Bernard Accoyer relative à la conduite automobile sous l'emprise de stupéfiants (no 2148).

(Séance mensuelle réservée à un ordre du jour fixé par l' Assemblée, en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution.) L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures : Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception (nos 2605, 2726-2702).

Discussion, en lecture définitive, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire (no 2691).

Mercredi 6 décembre 2000 : L'après-midi, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à 21 heures : Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2000 (no 2704).

Jeudi 7 décembre 2000 : Le matin, à 10 heures : Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à permettre aux conseillers d'arrondissement de siéger au conseil d'une communauté urbaine (no 2480).

(Ordre du jour complémentaire.)

L'après-midi, à 15 heures, et le soir, à 21 heures : Suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2000 (no 2704).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 1re séance du mardi 21 novembre 2000 SCRUTIN (no 267) sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2001 (vote unique).

Nombre de votants .....................................

557 Nombre de suffrages exprimés ....................

556 Majorité absolue ..........................................

279 Pour l'adoption ...................

300 Contre ..................................

256 L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (255) : Pour : 242. - MM. Yvon Abiven , Maurice Adevah-Poeuf , Stéphane Alaize , Damien Alary , Mme Sylvie AndrieuxBacquet , MM. Léo Andy , Jean-Marie Aubron , JeanMarc Ayrault , Jean-Paul Bacquet , Dominique Baert , J ean-Pierre Baeumler , Jean-Pierre Balduyck , Gérard Bapt , Alain Barrau , Jacques Bascou , Christian Bataille , J ean-Claude Bateux , Jean-Claude Beauchaud , Mme Yvette Benayoun-Nakache , MM. Henri Bertholet , Eric Besson , Jean-Louis Bianco , André Billardon , Jean-Pierre Blazy , Serge Blisko , Patrick Bloche , Jean-

M arie Bockel , Jean-Claude Bois , Daniel Boisserie , Maxime Bono , Augustin Bonrepaux , André Borel , JeanMichel Boucheron , Jean-Claude Boulard , Didier Boul aud , Pierre Bourguignon , Christian Bourquin , Mme Danielle Bousquet , MM. Jean-Pierre Braine , P ierre Brana , Jean-Paul Bret , Mme Nicole Bricq ,

M M. François Brottes , Vincent Burroni , Marcel Cabiddu , Alain Cacheux , Jérôme Cahuzac , Alain Calmat , Jean-Christophe Cambadelis , André Capet , Thierry Carcenac , Christophe Caresche , Mme Odette Casanova , MM. Jean-Yves Caullet , Bernard Cazeneuve , Jean-Paul Chanteguet , Michel Charzat , Guy-Michel C hauveau , Jean-Claude Chazal , Daniel Chevallier , Didier Chouat , Alain Claeys , Mme Marie-Françoise Clergeau , MM. Jean Codognès , Pierre Cohen , François Colcombet , Mme Monique Collange , MM. François Cuillandre , Jean-Claude Daniel , Jacky Darne , Camille Darsières , Yves Dauge , Mme Martine David , MM. Bernard Davoine , Philippe Decaudin , Marcel Dehoux , Jean D elobel , François Deluga , Jean-Jacques Denis , Mme Monique Denise , MM. Bernard Derosier , Claude Desbons , Michel Destot , Paul Dhaille , Marc Dolez , François Dosé , René Dosière , Mme Brigitte Douay , MM. Julien Dray , Tony Dreyfus , Pierre Ducout , JeanPierre Dufau , Mme Laurence Dumont , MM. Jean-Louis Dumont , Jean-Paul Dupré , Jean-Paul Durieux , Philippe Duron , Henri Emmanuelli , Michel Etiévant , Claude Evin , Alain Fabre-Pujol , Albert Facon , Mme Nicole Feidt , MM. Jean-Jacques Filleul , Jacques Fleury , Jacques Floch , Pierre Forgues , Jean-Louis Fousseret , Michel F rançaix , Christian Franqueville , Georges Frêche , Michel Fromet , Gérard Fuchs , Robert Gaïa , Yann Galut , Roland Garrigues , Jean-Yves Gateaud , Jean Gaubert , Mme Catherine Génisson , MM. André Godin , Gaëtan Gorce , Alain Gouriou , Gérard Gouzes , Michel Grégoire , Mme Odette Grzegrzulka , MM. Jacques G uyard , Francis Hammel , Mme Cécile Helle , MM. Edmond Hervé , Jacques Heuclin , François Holl ande , Jean-Louis Idiart , Mme Françoise Imbert , MM. Claude Jacquot , Serge Janquin , Jacky Jaulneau , Patrick Jeanne , Armand Jung , Jean-Noël Kerdraon , Bertrand Kern , Jean-Pierre Kucheida , André Labarrère , Mme Conchita Lacuey , MM. Jérôme Lambert , François Lamy , Pierre-Claude Lanfranca , Jean Launay , Mmes Jacqueline Lazard , Christine Lazerges , MM. Gilbert Le B ris , André Lebrun , Mme Claudine Ledoux , MM. Michel Lefait , Jean Le Garrec , Jean-Marie Le Guen , Patrick Lemasle , Georges Lemoine , Bruno Le Roux , René Leroux , Jean-Claude Leroy , Mme Raymonde Le Texier , MM. Alain Le Vern , Michel Liebgott , Mme Martine Lignières-Cassou , MM. Gérard Lindeperg , François Loncle , Bernard Madrelle , Guy Malandain , René Mangin , Jean-Pierre Marché , Daniel Marcovitch , Didier Marie , Jean-Paul Mariot , Mme Béatrice Marre , MM. Daniel Marsin , Marius Masse , Didier Mathus , Gilbert Maurer , Guy Menut , Louis Mermaz , Roland Metzinger , Louis Mexandeau , Jean Michel , Didier Migaud , Mme Hélène Mignon , MM. Gilbert Mitterrand , Gabriel Montcharmont , Arnaud Montebourg , Philippe Nauche , Bernard Nayral , Henri Nayrou , Mme Véronique Neiertz , MM. Alain Néri , Michel Pajon , Joseph Parrenin , Vincent Peillon , Germinal P eiro , Jean-Claude Perez , Jean-Pierre Pernot , Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont , Geneviève Perrin-Gaillard , M. François Perrot , Mmes Annette Peulv ast-Bergeal , Catherine Picard , MM. Paul Quilès , Alfred Recours , Gérard Revol , Mme Marie-Line Reyn aud , M. Patrick Rimbert , Mme Michèle Rivasi , MM. Jean-Claude Robert , Alain Rodet , Marcel Rogemont , Bernard Roman , Yves Rome , Gilbert Roseau , Joseph Rossignol , Mme Yvette Roudy , MM. Jean Rouger , René Rouquet , Michel Sainte-Marie , Mme Odile Saugues , MM. Bernard Seux , Patrick Sève , Henri Sicre , Michel Tamaya , Mme Christiane Taubira-Delannon , MM. Yves Tavernier , Pascal Terrasse , Gérard Terrier , Mmes Marisol Touraine , Odette Trupin , MM. Joseph Tyrode , Daniel Vachez , André Vallini , André Vauchez , Michel Vauzelle , Michel Vergnier , Alain Veyret , Alain Vidalies , Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque

Non-votant : M. Raymond Forni (président de l'Assemblée nationale).

Groupe RPR (138) : C ontre : 136. - MM. Jean-Claude Abrioux , Bernard Accoyer , Mme Michèle Alliot-Marie , MM. René André , André Angot , Philippe Auberger , Pierre Aubry , Jean Auclair , Gautier Audinot , Mmes Martine Aurillac , Roselyne Bachelot-Narquin , MM. Edouard Balladur , Jean Bardet , François Baroin , Jacques Baumel , Christian Bergelin , André Berthol , Léon Bertrand , Jean-Yves Besselat , Jean Besson , Franck Borotra , Bruno Bourg-Broc ,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2000

Michel Bouvard , Victor Brial , Philippe Briand , Michel Buillard , Christian Cabal , Gilles Carrez , Mme Nicole Catala , MM. Jean-Charles Cavaillé , Richard Cazenave , Henry Chabert , Jean-Paul Charié , Jean Charroppin , Philippe Chaulet , Jean-Marc Chavanne , Olivier de Chazeaux , François Cornut-Gentille , Alain Cousin , JeanMichel Couve , Charles Cova , Henri Cuq , Jean-Louis Debré , Lucien Degauchy , Arthur Dehaine , Jean-Pierre D elalande , Patrick Delnatte , Jean-Marie Demange , Xavier Deniau , Yves Deniaud , Patrick Devedjian , Eric Doligé , Guy Drut , Jean-Michel Dubernard , Jean-Pierre Dupont , Nicolas Dupont-Aignan , Christian Estrosi , Jean-Claude Etienne , Jean Falala , Jean-Michel Ferrand , François Fillon , Roland Francisci , Pierre Frogier , Yves Fromion , Robert Galley , Henri de Gastines , Jean de Gaulle , Hervé Gaymard , Jean-Marie Geveaux , JeanPierre Giran , Michel Giraud , Jacques Godfrain , Louis Guédon , Jean-Claude Guibal , Lucien Guichon , François Guillaume , Gérard Hamel , Michel Hunault , Michel Inchauspé , Christian Jacob , Didier Julia , Alain Juppé , Jacques Kossowski , Jacques Lafleur , Robert Lamy , Pierre Lasbordes , Thierry Lazaro , Pierre Lellouche , J ean-Claude Lemoine , Arnaud Lepercq , Jacques Limouzy , Lionnel Luca , Thierry Mariani , Alain Marleix , Jean Marsaudon , Philippe Martin , Patrice MartinL alande , Jacques Masdeu-Arus , Mme Jacqueline Mathieu-Obadia , MM. Gilbert Meyer , Jean-Claude Mignon , Charles Miossec , Pierre Morange , Renaud Muselier , Jacques Myard , Jean-Marc Nudant , Patrick Ollier , Mme Françoise de Panafieu , MM. Robert Pandraud , Jacques Pélissard , Dominique Perben , Pierre Petit , Etienne Pinte , Serge Poignant , Bernard Pons , Robert Poujade , Didier Quentin , Jean-Bernard Raim ond , Jean-Luc Reitzer , Nicolas Sarkozy , André Schneider , Bernard Schreiner , Philippe Séguin , Frantz Taittinger , Michel Terrot , Jean-Claude Thomas , Jean Tiberi , Georges Tron , Anicet Turinay , Jean Ueberschlag , Léon Vachet , Jean Valleix , François Vannson , R oland Vuillaume , Jean-Luc Warsmann et Mme Marie-Jo Zimmermann

Groupe UDF (71) : Contre : 71. - MM. Jean-Pierre Abelin , Pierre Albertini , Pierre-Christophe Baguet , Raymond Barre , Jacques Barrot , Dominique Baudis , Jean-Louis Bernard , Claude Birraux , Emile Blessig , Mme Marie-Thérèse Boisseau , MM. Jean-Louis Borloo , Bernard Bosson , Mme Christine Boutin , MM. Loïc Bouvard , Jean Briane , Yves Bur , Dominique Caillaud , Hervé de Charette , JeanFrançois Chossy , René Couanau , Charles de Courson , Yves Coussain , Marc-Philippe Daubresse , Jean-Claude Decagny , Francis Delattre , Léonce Deprez , Renaud Donnedieu de Vabres , Philippe Douste-Blazy , Renaud Dutreil , Alain Ferry , Jean-Pierre Foucher , Claude Gaillard , Germain Gengenwin , Valéry Giscard d'Estaing , Gérard Grignon , Hubert Grimault , Pierre Hériaud , Patrick Herr , Francis Hillmeyer , Mmes Anne-Marie Idrac , Bernadette Isaac-Sibille , MM. Henry Jean-Bapt iste , Jean-Jacques Jégou , Christian Kert , Edouard Landrain , Jacques Le Nay , Jean-Antoine Leonetti , François Léotard , Maurice Leroy , Roger Lestas , Maurice Ligot , François Loos , Christian Martin , Pierre Méhaignerie , Pierre Menjucq , Pierre Micaux , Mme Louise Moreau , MM. Hervé Morin , Jean-Marie Morisset , Arthur Paecht , Dominique Paillé , Henri Plagnol , JeanLuc Préel , Marc Reymann , Gilles de Robien , François Rochebloine , Rudy Salles , André Santini , François Sauvadet , Michel Voisin et Pierre-André Wiltzer Groupe Démocratie libérale et Indépendants (43) : Contre : 43. - Mme Nicole Ameline , M. François d' Aubert , Mme Sylvia Bassot , MM. Jacques Blanc , Roland Blum , Dominique Bussereau , Pierre Cardo , Antoine Carré , Pascal Clément , Georges Colombier , Bernard Deflesselles , Franck Dhersin , Laurent Dominati , Dominique Dord , Charles Ehrmann , Nicolas Forissier , Gilbert Gantier , Claude Gatignol , Claude Goasguen , François Goulard , Pierre Hellier , Michel Herbillon , Philippe Houillon , Denis Jacquat , Aimé Kerguéris , Marc Laffineur , Jean-Claude Lenoir , Pierre Lequiller , Alain Madel in , Jean-François Mattei , Michel Meylan , Alain Moyne-Bressand , Yves Nicolin , Paul Patriarche , Bernard Perrut , Jean Proriol , Jean Rigaud , Jean Roatta , José Rossi , Joël Sarlot , Jean-Pierre Soisson , Guy Teissier et Gérard Voisin Groupe communiste (35) : Pour : 29. - MM. François Asensi , Gilbert Biessy , Claude B illard , Bernard Birsinger , Alain Bocquet , Patrick Braouezec , Jean-Pierre Brard , Jacques Brunhes , Alain Clary , Christian Cuvilliez , René Dutin , Daniel Feurtet , Pierre Goldberg , Maxime Gremetz , Guy Hermier , Robert Hue , Mme Janine Jambu , MM. André Lajoinie , Jean-Claude Lefort , Félix Leyzour , François Liberti , Patrick Malavieille , Roger Meï , Ernest Moutoussamy , Bernard Outin , Daniel Paul , Jean-Claude Sandrier , Michel Vaxès et Jean Vila

Contre : 3. - MM. Patrice Carvalho , André Gerin et Georges Hage

Groupe Radical, Citoyen et Vert (30) : Pour : 29. - M. André Aschieri , Mmes Marie-Hélène Aubert , Huguette Bello , MM. Pierre Carassus , Gérard Charasse , Bernard Charles , Jean-Pierre Chevènement , Yves Cochet , Jean-Pierre Defontaine , Jacques Desallangre , Roger Franzoni , Claude Hoarau , Elie Hoarau , Robert Honde , Guy Lengagne , Noël Mamère , JeanMichel Marchand , Jean-Pierre Michel , Jean-Paul Nunzi , Jean Pontier , Jacques Rebillard , Jean Rigal , Mme Chantal Robin-Rodrigo , MM. Georges Sarre , Gérard Saumade , Michel Suchod , Alain Tourret , Emile Vernaudon et Aloyse Warhouver

Abstention : 1. - M. Alfred Marie-Jeanne

Non-inscrits (5).

Contre : 3. - MM. Marc Dumoulin , Jean-Jacques Guillet et Charles Millon.