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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

SOMMAIRE

PRE

SIDENCE DE M. YVES COCHET

1. Assemblée de la Polynésie française. Transmission et discussion du texte de la commission mixte paritaire (p. 10199).

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 10201)

MM. Jean Pontier, Michel Buillard, Jérôme Lambert, François Goulard, Patrice Carvalho, Emile Blessig.

Clôture de la discussion générale.

TEXTE DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (p. 10205)

Adoption de l'ensemble de la proposition de loi organique compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

2. Farines animales. Discussion d'une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête (p. 10205).

M. Michel Vergnier, rapporteur de la commission de la production.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 10207)

MM. François Goulard, Joseph Parrenin, Pierre Morange, Patrice Carvalho, François Sauvadet, Jacques Rebillard.

Clôture de la discussion générale.

M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Article unique (p. 10216)

M. Léonce Deprez.

Amendement no 2 de M. Sauvadet : MM. François Sauvadet, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Amendement no 1 de M. Sauvadet : MM. François Sauvadet, le président. - Retrait.

Amendement no 4 de M. Sauvadet : MM. François Sauvadet, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Titre (p. 10218)

Amendement no 3 de M. Sauvadet : M. François Sauvadet.

- Retrait.

Adoption de l'article unique modifié de la proposition de résolution.

CONSTITUTION DE LA COMMISSION D'ENQUÊTE (p. 10218)

3. Retrait d'articles d'un projet de loi (p. 10218).

4. D épôt d'une proposition de loi constitutionnelle (p. 10218).

5. Dépôt de propositions de loi (p. 10218).

6. Dépôt de rapports (p. 10219).

7. Dépôt de rapports d'information (p. 10219).

8. Ordre du jour des prochaines séances (p. 10219).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1 ASSEMBLÉE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE Transmission et discussion du texte de la commission mixte paritaire

M. le président.

J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi organique destinée à améliorer l'équité des élections à l'assemb lée de la Polynésie française.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire (no 2772 rectifié).

La parole est à M. Jean-Yves Caullet, rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur de la commission mixte paritaire.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, mes chers collègues, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de cette proposition de loi est parvenue à un accord. Je serai donc bref s'agissant d'un texte simple, mais fondamental pour l'expression démocratique en Polynésie française.

Il fallait procéder à une nouvelle répartition des sièges au sein de l'assemblée territoriale de la Polynésie française - tout le monde était d'accord sur ce point, tant dans cette dernière assemblée qu'au Sénat ou à l'Assemblée nationale - afin de tenir compte de l'évolution démographique. En effet, actuellement, les trois quarts de la population ne sont représentés que par la moitié des sièges. Et ce déséquilibre était d'autant plus ennuyeux que le législateur s'apprêtait à élargir encore les larges préro gatives de l'assemblée territoriale de la Polynésie française, réforme qui a été différée, la loi constitutionnelle néce ssaire n'ayant pu être examinée par le Congrès pour des raisons qui ne correspondent pas à l'intérêt de la conduite des affaires en Polynésie et qui nous échappent.

Il était donc nécessaire, à la veille d'une réforme confiant encore davantage de responsabilités à une assemblée, de vérifier que la représentativité démocratique de celle-ci était la meilleure possible. Pour ce faire, deux dispositifs s'offraient à nous : une nouvelle répartition d'un nombre de sièges identique ou l'augmentation du nombre de sièges dans la circonscription sous-représentée la plus peuplée. En première lecture, l'Assemblée avait choisi le premier dispositif en proposant une nouvelle répartition des quarante et un sièges de l'assemblée territoriale de la Polynésie française. Le Sénat, pour sa part, avait choisi l'autre solution consistant à renforcer de huit sièges la représentation des Iles du Vent, circonscription la plus peuplée. Toutefois, aucune de ces deux solutions n'était pleinement satisfaisante.

La proposition adoptée par l'Assemblée nationale était tout à fait pertinente en termes d'égalité de représentation. En revanche, elle aurait entraîné une forte diminution du nombre de sièges des archipels les moins peuplés, réduisant même à deux le nombre de représentants des plus petits, ce qui, dans un scrutin par circonscription proportionnel, aurait quelque peu limité la juste expression des suffrages. Quant à la solution retenue par le Sénat, elle maintenait le statu quo pour la représentation de l'ensemble des archipels les moins peuplés, mais péchait par le fait que, souhaitant limiter l'augmentation globale du nombre de sièges, elle ne pouvait rétablir réellement l'équilibre en matière de représentativité en ajoutant simplement huit sièges à la circonscription des Iles du Vent.

Après un long débat, la commission mixte paritaire est parvenue à une solution combinant les deux dispositifs.

Reprenant l'idée du Sénat d'augmenter de huit le nombre global de sièges à l'assemblée territoriale, elle a aussi suivi l'Assemblée nationale en proposant une répartition un peu différente et en acceptant de réduire dans une moindre mesure le nombre de sièges des îles Sous-le-Vent et des Tuamotu-Gambier qui n'en perdraient qu'un. La répartition serait donc la suivante : trente-deux sièges pour les îles du Vent, sept pour les Iles Sous-le-Vent, quatre pour les Iles Tuamotu et Gambier, trois pour les îles Marquises, trois pour les îles Australes, soit quaranteneuf sièges au total.

Cette répartition présente l'avantage de respecter la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à l'égalité de suffrage et au découpage des circonscriptions pour les trois circonscriptions les plus peuplées. Bien entendu, il n'en va pas de même si l'on considère l'ensemble des cinq circonscriptions, la distorsion constatée tenant au fait que les îles Marquises et les îles Australes disposeront encore de trois sièges.

Mais cela permettra d'assurer le pluralisme dans la représentation de ces petits archipels. Il est assez logique de leur donner une telle garantie pour éviter qu'à leur éloignement ne s'ajoute une sous-représentation à l'assemblée de la Polynésie française.

Combinant les deux solutions choisies alternativement par l'Assemblée et le Sénat, cet accord, intervenu en commission mixte paritaire, permettra à la fois d'assurer une bonne représentation de l'ensemble des archipels et de garantir l'égalité. J'espère que l'assemblée territoriale disposera bientôt des nouvelles compétences dont le législateur souhaite la doter.

M'étant récemment rendu en Polynésie dans le cadre d'une mission, je tirerai maintenant les conclusions de ma courte expérience. Il me semble en effet nécessaire, monsieur le secrétaire d'Etat, d'examiner rapidement, sans


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a priori mais en profondeur, la situation des communes de Polynésie française qui, à l'évidence, permettent d'assurer un équilibre démocratique entre le territoire, partenaire privilégié de l'Etat pour différents contrats, et les citoyens, au plus près du terrain, dans ces archipels dont la diversité m'a si souvent été vantée comme une réalité à laquelle les Polynésiens sont très attachés. Les communes de Polynésie sont récentes : elles datent de 1972. Leurs ressources sont limitées et dépendent en grande partie du territoire. En outre, les capacités de leurs services sont faibles et elles dépendent, pour cela aussi, de l'assemblée territoriale. A l'avenir, la Polynésie doit disposer d'une plus grande vitalité, d'une plus grande indépendance. Ses communes doivent être plus autonomes. Un territoire doté de larges prérogatives, des communes aux compétences et à l'indépendance financière renforcées constitueraient, je n'en doute pas, un gage de démocratie et de vitalité pour l'avenir.

M. Jérôme Lambert et M. Jean Pontier.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, en m'adressant ce soir à votre assemblée pour évoquer en nouvelle lecture, après examen, le 29 novembre 2000, par la commission mixte paritaire la proposition de loi organique destinée à améliorer l'équité des élections à l'assemblée de la Polynés ie française, je tiens d'abord à vous dire combien j'ai apprécié les efforts de tous, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, pour trouver un compromis. C'est aujourd'hui dans un climat heureusement apaisé que cette proposition revient devant vous, à tel point d'ailleurs que le Sénat a adopté cet après-midi le texte issu de la commission mixte paritaire par 318 voix pour et une voix contre.

Je voudrais saluer ici la qualité du travail de votre rapporteur Jean-Yves Caullet qui, avec beaucoup de rigueur, a su être à l'écoute des préoccupations de la Polynésie française ici à l'Assemblée nationale ou bien en se rendant sur place pour y apprécier l'ensemble des sensibilités qui s'exprimaient sur cette question, parfois de façon très passionnée. Le travail réalisé par Jean-Yves Caullet est pour beaucoup dans le point d'équilibre qui a été trouvé.

J'y associe naturellement le président de la commission des lois, Bernard Roman, qui a su, en tant que président de la commission mixte paritaire, faire aboutir un compromis équilibré et juste pour tous les Polynésiens.

Le renforcement de la représentativité des élus et l'équilibre de la répartition des sièges constituent, en Polynésie comme ailleurs, un objectif partagé par tous.

Cet équilibre n'est pas satisfaisant aujourd'hui et il doit être modifié afin d'assurer à la circonscription électorale des Iles-du-Vent une représentation plus en rapport avec sa population.

Votre assemblée a adopté en première lecture la proposition de loi organique déposée par votre collègue Emile Vernaudon, qui a été le premier à demander une solution plus respectueuse de l'égalité des Polynésiens devant les uffrage. Cette proposition - je le rappelle pour mémoire - attribuait, à effectif constant de l'assemblée, vingt-neuf sièges aux Iles-du-Vent au lieu de vingt-deux actuellement, cinq sièges aux îles Sous-le-Vent au lieu de huit, deux sièges aux Marquises au lieu de trois, deux sièges aux îles Australes au lieu de trois et trois sièges aux Tuamotu-et-Gambier au lieu de cinq. Le nombre des membres de l'assemblée territoriale n'était pas augmenté et la représentation des Iles-du-Vent bénéficiait de la diminution de la représentation de tous les autres archipels.

L e Gouvernement, notamment mon prédécesseur, Jean-Jack Queyranne, avait accueilli favorablement cette proposition en première lecture, car elle constituait un progrès significatif par rapport à la situation actuelle.

Mais la discussion n'avait pu alors être menée à son terme. En effet, la diminution de la représentation des archipels les plus éloignés - je pense notamment aux Iles Marquises ou Australes -, bien que tout à fait justifiée arithmétiquement, aurait un impact psychologique qui ne doit pas être sous-estimé. Les entretiens que nous avons pu avoir, M. le rapporteur et moi-même, à Paris et en P olynésie avec les maires de ces deux archipels, démontrent que cette diminution peut être vécue, d'une façon certes un peu irrationnelle, comme renforçant leur sentiment habituel d'isolement, voire comme un abandon, ce qui, bien évidemment, est tout à fait l'opposé de ce que souhaite le Gouvernement et, j'en suis sûr, votre assemblée. Nous sommes en effet bien sûr très attentifs aux difficultés des archipels de Polynésie.

Le Sénat, qui a examiné le texte lors de sa séance du 22 novembre 2000, a adopté une rédaction portant le nombre total des membres de l'assemblée territoriale à quarante-neuf sièges au lieu de quarante et un actuellement. Il avait attribué, sur proposition de son rapporteur, M. Lanier, trente sièges au lieu de vingt-deux aux îles du Vent, la représentation des autres archipels demeurant i nchangée. Cette rédaction présentait l'inconvénient majeur de ne pas corriger totalement le déséquilibre existant.

Aussi le Gouvernement avait-il exprimé le souhait que la représentation nationale dans son ensemble recherche une solution qui puisse recueillir un large consensus afin, d'une part, de rendre le scrutin plus équitable, d'autre part, de satisfaire aux exigences du Conseil constitutionnel, comme vient de le rappeler M. Caullet. Il s'agissait avant tout de ne pas créer un nouveau déséquilibre qui se serait substitué au déséquilibre actuel.

La commission mixte paritaire, réunie le 29 novembre dernier, a formulé une nouvelle proposition qui est soumise aujourd'hui au vote de votre assemblée. Elle consiste à accorder trente-deux sièges aux îles du Vent, au lieu de vingt-deux actuellement, sept sièges aux îles Sous-le-Vent, quatre sièges aux Tuamotu et Gambier, la représentation des Marquises et des Australes étant maintenue à trois sièges, pour que chacune de ces circonscriptions, les moins peuplées et les plus éloignées, puisse maintenir sa représentation.

Cette solution de compromis augmente la représentation des îles du Vent par rapport au texte adopté par le Sénat. Elle permet, avec 62,7 % des sièges - trente-deux sièges - de mieux représenter les 73,7 % que représente la population de cet archipel. Le déséquilibre actuel s'en trouve donc très sensiblement corrigé.

La solution pour les archipels, bien qu'entraînant une diminution de deux sièges, conforte la démarche de rééquilibrage entreprise, puisque cette solution est celle qui donne les écarts à la moyenne territoriale les plus faibles.

Ainsi que l'a souligné M. Caullet, le texte qui vous est soumis aujourd'hui a su prendre en compte non seulement l'augmentation du nombre de repésentants, comme l'avait souhaité le Sénat, mais également la répartition de ceux-ci entre les différents archipels, comme l'a proposé l'Assemblée nationale. La proposition de la commission


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mixte paritaire réalise un bon compromis puisque l'objectif d'équité est satisfait et la nécessaire représentation des archipels assurée. Je partage avec vous, monsieur le rapporteur, le sentiment que seule une meilleure répartition des sièges est de nature à garantir une plus grande équité dans la représentation politique. L'accord obtenu en commission mixte paritaire marque de son sceau cette exigence. Le Gouvernement souhaite une adoption rapide de cette proposition compte tenu de la prochaine échéance de mai 2001 pour le renouvellement général des membres de l'assemblée de la Polynésie française.

Pour autant, les équilibres démocratiques en Polynésie devront être encore améliorés par la réforme communale que vous avez appelée de vos voeux, monsieur le rapporteur. Je souhaite que nous puissions débattre de cette réforme en temps utile, car elle permettra d'améliorer la place des communes polynésiennes dans l'organisation du territoire et de modifier le mode de scrutin pour que les oppositions soient mieux représentées. C'est à ce prix que n ous répondrons ensemble à cette demande de République qu'expriment très sincèrement et très majoritairement les Polynésiens et leurs élus. Au-delà du texte dont l'adoption vous est proposée ce soir, il y a donc d'autres chantiers à ouvrir et à poursuivre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à Jean Pontier.

M. Jean Pontier.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, mes chers collègues, fin septembre-début octobre, j'ai été accueilli en Polynésie par de nombreux amis, dont le député Emile Vernaudon.

Je ne pensais pas alors que, deux mois plus tard, je serais amené à intervenir sur ce merveilleux endroit du monde.

Mais je le fais vraiment avec beaucoup de plaisir et de conviction.

Monsieur le secrétaire d'Etat, la Polynésie française est en passe de connaître une nouvelle répartition des sièges au sein de son assemblée ; la représentation actuelle des différents archipels date de 1985.

Tout le monde s'accorde à dire qu'une réforme électorale est nécessaire pour rétablir l'équilibre de la représentativité des sièges à l'assemblée, tant la sous-représentati on des îles du Vent est devenue pesante et flagrante.

Nous comprenons que cette initiative parlementaire n'ait pas été du goût de M. Flosse qui s'est battu corps et âme pour préserver son « fonds électoral » dans les îles.

La commission mixte paritaire en a jugé autrement, puisque, le 29 novembre dernier, elle a adopté un texte tendant à rétablir l'équilibre électoral entre les différents archipels.

Elle s'est prononcée pour la réduction de deux sièges dans deux archipels, dont un aux îles Sous-le-Vent et un aux Tuamotu-Gambier. Les îles du Vent voient, quant à elles, le nombre de leurs sièges augmenter de dix, ce qui porte ainsi leur représentativité à trente-deux membres.

Le texte adopté par la CMP diffère quelque peu de celui présenté par mon collègue Emile Vernaudon, à qui l'on doit la paternité de cette réforme électorale.

M. Jean-Yves Caullet, rapporteur.

Tout à fait !

M. Jean Pontier.

Celui-ci a été en effet à l'origine de la première proposition de loi destinée à l'équité des élections à l'assemblée de Polynésie.

Le seul et unique objectif de cette réforme a été de mettre fin à un système totalement injuste pour les élus et les populations et de défendre le principe de l'équité électorale : « un homme, une voix », qui est l'essence même de la démocratie. C'est d'ailleurs par souci d'équité q u'un deuxième texte relatif à la « circonscription unique » a fait l'objet de débats juridiquement et politiquement passionnants. Ce mode électoral nous paraît être le plus juste pour la Polynésie française ; cependant, les avis des constitutionnalistes nous ont contraints à abandonner cette voie.

Dans cette bataille parlementaire, l'histoire retiendra que sur l'initiative d'un député polynésien, en l'occurrence Emile Vernaudon, de nouvelles règles démocratiques ont été établies, rompant avec l'actuel système électoral qui a prévalu depuis 1985 et qui était devenu totalement obsolète au regard des évolutions démographiques dans les archipels.

L'Assemblée nationale devrait sans surprise suivre l'avis de la CMP. La Polynésie française élira ainsi en mai 2001 quarante-neuf conseillers territoriaux, dont trente-deux aux îles du Vent, sept aux îles Sous-le-Vent, quatre aux Tuamotu-Gambier, trois aux Australes et trois aux Marquises. Mais de là à dire que « Emile Vernaudon est lâché par ses amis de Paris », comme l'a déclaré M. Flosse, c'est prendre ses désirs pour des réalités ! Et nous pensons, dans notre groupe, que la ficelle est un peu grosse.

A tous les Polynésiens, je puis affirmer que nous sommes à leurs côtés afin de les accompagner pour relever le défi de la reconversion économique de la Polynésie.

Plus que jamais, le Parti radical de gauche souhaite dire à Emile Vernaudon qu'il peut compter sur ses amis et alliés pour instaurer en Polynésie la démocratie, la justice et la sérénité dans la gestion des affaires du territoire. Nous sommes et nous resterons ses partenaires les plus sûrs.

Je ne pourrais en dire autant concernant le présidentsénateur Flosse, qui a entendu l'un de ses amis RPR émettre des critiques à l'encontre de la gestion financière du territoire du haut de cette même tribune. C'était le 15 novembre dernier.

Je ne voudrais pas conclure sans rappeler ici la déclaration publique du président du Tahoera'a faite au nom de son comité central politique, qui s'est dit prêt à « boycotter les élections territoriales de 2001 si l'on venait à toucher un seul siège des îles ». Belle leçon de démocratie de la part d'un élu de la République ! Nous attendons ce jour. En tout état de cause, nous constatons, sans pour autant être surpris, l'éclatement progressif et réel du Tahoera'a. J'en ai pour preuve l'apparition, au sein même de son parti, de plusieurs dissidents politiques - à Faa'a, aux îles Sous-le-Vent, pour ne citer que ceux-là - qui n'hésitent pas à s'opposer aux décisions de leurs instances dirigeantes. Mais de là à vouloir accuser l'Etat, le Gouvernement, le parti socialiste de chercher à la déstabiliser et de mener en Polynésie une politique de blocage... C'est du délire ! Comment M. Flosse peut-il accuser vertement le pouvoir central, quand on sait que la Polynésie reçoit chaque année plus de 6 milliards de francs français injectés directement dans l'économie locale, sans compter les 2 milliards versés au titre du contrat de développement et du fonds de reconversion ?

M. François Goulard.

Vous semblez le regretter ?

M. Jean Pontier.

Non, pas du tout ! Je le rappelle seulement, cher collègue. Il faut bien que tout le monde vive.


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Ce comportement n'étonne plus personne, et je voudrais dire à M. Flosse que la population locale n'est plus dupe.

Quant au Ai'a Api, il fera sa campagne comme indiqué dans son programme politique et se battra, avec le soutien de ses amis de la majorité plurielle, pour retirer au T ahoera'a la majorité aux élections territoriales de mai 2001. Le Ai'a Api sera une composante politique incontournable, sur qui il faudra compter pour la gestion du pays et qui saura prendre ses responsabilités.

J'engage ce soir le président du territoire à méditer sur le principe d'incertitude cher aux physiciens et que las agesse populaire résume ainsi : « Rien n'est jamais acquis. »

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Michel Buillard.

M. Michel Buillard. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce soir notre assemblée va se prononcer sur les conclusions de l'accord intervenu, lors de la commission mixte paritaire du 29 novembre dernier sur les élections à l'assemblée de la Polynésie française.

Cette étape marque le terme d'une longue procédure qui s'est accompagnée d'une mobilisation sans précédent de toutes les forces vives de notre territoire.

Cette procédure fut mal engagée. J'ai encore en mémoire les déclarations fracassantes de mon collègue Vernaudon sur la nécessité de réformer nos élections pour, disait-il, « plus d'équité en Polynésie ». Dans l'euphorie des rencontres avec les indépendantistes, le premier secrétaire du parti socialiste lui répondit en écho :

« Il faut réformer le mode de scrutin en Polynésie pour permettre de renverser la majorité actuelle. »

M. François Goulard. Cela a le mérite d'être clair ! (Sourires.)

M. Michel Buillard. Que penser de ces discours moralisateurs qui, sous prétexte d'améliorer l'égalité du suffrage en Polynésie française en prenant davantage en compte les évolutions démographiques, ne parviennent pas à cacher de sombres desseins : tout faire pour renverser notre majorité locale ? Et je cite pêle-même les déclarations de ces porteurs de bonne parole, de ces visiteurs d'un jour qui veulent « provoquer un sursaut républicain » en Polynésie, demander un « rassemblement pour faire échec à l'imposture »...

Mais d'où vient l'imposture lorsque l'on n'hésite pas à bafouer l'usage républicain qui veut que l'on ne modifie pas les règles électorales dans l'année précédant le scrutin ? Dois-je vous rappeler que nos élections territoriales auront lieu dans moins de cinq mois ? D'où vient l'imposture lorsque l'on ne tient pas compte des avis défavorables de l'assemblée de Polynésie, du Conseil économique, social et culturel, de l'association des maires de Polynésie, des parlementaires de Polynésie, du gouvernement du territoire et d'une partie de l'opposition qui s'est unie à nos côtés pour défendre la représentation de nos archipels ? La Polynésie a participé à la défense de la grandeur et de l'intégrité de la France en accueillant sur son territoire, pendant trente-deux ans, le centre d'expérimentation du Pacifique.

M. Emile Blessig et M. François Goulard.

Très bien !

M. Michel Buillard.

Le peuple polynésien a subi les profonds bouleversements qu'à entraînés l'installation du centre. Cette période a, bien sûr, été génératrice de dé veloppement économique et de progrès social ; mais elle a provoqué des déséquilibres et des bouleversements socioculturels. Attirée par les perspectives d'emplois, la population des archipels s'est massivement déplacée vers l'île de Tahiti, rompant ainsi l'équilibre démographique entre les Iles du Vent et les autres archipels.

Avec l'arrêt des essais nucléaires, nous sommes entrés dans une période de profonde mutation. En dix ans, la Polynésie a dû opérer sa reconversion économique, tout en renforçant sa cohésion sociale : dès 1995, par exemple, nous avons mis en place la protection sociale généralisée.

Nous pouvons être satisfaits des résultats : en dix ans, nous avons construit une Polynésie prospère, tournée vers l'avenir, paisible, solidaire et maîtresse d'elle-même.

L'Institut d'émission d'outre-mer, dans son rapport sur la situation de la Polynésie en 1999, souligne que, « à l'image des pays occidentaux, la Polynésie semble être entrée dans un cycle long de croissance. Pour le troisième exercice consécutif, l'économie a enregistré des résultats favorables, fondés sur un climat social serein, sur la confiance des opérateurs économiques et sur le maintien d'un niveau élevé de transferts en provenance de la métropole ». Par ailleurs, l'organisme international Standard and Poors vient de classer la Polynésie dans « la catégorie de tête des pays financièrement fiables ».

En dix ans, d'une situation de quasi-faillite, héritée du gouvernement de M. Alexandre Léontieff, nous avons construit une économie aujourd'hui en pleine expansion.

Nous l'avons fait en dix ans seulement, grâce aux efforts de toute une population, accompagnés dans notre démarche par le soutien financier du gouvernement central dans le cadre du pacte de progrès.

Lorsque l'on examine de plus près les liens qui nous unissent à la République, au fil des décennies, il a souvent été question du « pacte de vivre ensemble », fondé sur des relations de confiance réciproque.

Nous sommes fiers d'être les représentants politiques, économiques et culturels de la France dans le Pacifique Sud.

La France, après avoir accompagné la Polynésie sur le chemin d'une autonomie modèle et accomplie, ne peut remettre en question cette réussite pour des raisons de convenance politicienne.

Certes, le contexte a changé et des critiques se font entendre à l'approche des élections. Mais où étaient les Verts et les Radicaux de gauche lorsque, sous le contrôle de l'Etat, la manne des crédits du nucléaire a été généreusement déversée sur la Polynésie, sans que l'on tienne compte de l'avis ou du bien-être de ses habitants ? Maintenant que nous disposons de la force de frappe, voilà que résonnent les tambours des censeurs d'opérette qui pointent du doigt des réalisations prétendues somptuaires ! Dans le même registre, et pas très loin de chez nous, nous avons pourtant approuvé la construction d'hôtels de province érigés dans la foulée des Accords de Matignon. Et aujourd'hui, on fait mine de croire que la construction du siège du gouvernement polynésien ne se justifie pas. Pourquoi deux poids deux mesures ? Après la circonscription unique, l'amputation des sept sièges des archipels, la prétendue gabegie des crédits publics, voilà que l'on brandit l'épouvantail de la concomitance des élections municipales et territoriales.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez souhaité cette concomitance, afin « d'encourager les électeurs à se rendre aux urnes ». Mais les Polynésiens savent depuis longtemps que voter est non seulement un droit, mais aussi un devoir.


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Sommes-nous des citoyens de seconde zone pour que l'on dissocie les élections municipales en Polynésie de celles de la métropole ? Pourquoi un tel régime dérogatoire ? La campagne des municipales n'a rien à voir avec celle des territoriales. Pourquoi, alors, vouloir les coupler si ce n'est pour compenser la faiblesse de nos adversaires indépendantistes ? Il me revient aujourd'hui la lourde charge de représenter mes concitoyens des archipels, auxquels nous avons dû annoncer l'amputation de leur représentation à l'assemblée de la Polynésie.

Cette remise en cause est particulièrement injuste.

Injuste au regard des efforts accomplis en matière économique par les archipels des îles Sous-le-Vent et des Tuamotu-Gambier, grâce, notamment, à leurs élus avec

M. Gaston Ton Sang à leur tête.

Avec l'île mythique de Bora-Bora, les îles Sous-le-Vent constituent le pôle touristique de la Polynésie. Les Tuamotu-Gambier se sont quant à eux développés autour de la perliculture, devenue l'un des secteurs moteurs de l'économie polynésienne et la principale exportation du territoire après le tourisme.

Injuste au regard de la forte croissance démographique observée dans ces archipels : 20,7 % pour les îles Sous-leVent et 24,2 % pour les Tuamotu, contre 15,9 % aux îles du Vent.

Réalise-t-on que l'on remet en cause la politique de décentralisation économique mise en place par le gouvernemnet territorial afin de favoriser le maintien, voire le retour des populations dans leurs îles d'origine ? Ne pas tenir compte de ces considérations, c'est imposer à notre territoire des décisions prises par la métropole, alors que la Polynésie est sur le point de devenir un pays d'outre-mer.

Je dois reconnaître le rôle positif joué par les représentants de la Haute Assemblée, comme par certains de mes collègues députés, lors de la CMP. Mais l'accord qui est intervenu est un accord a minima , donc à moitié convenable. Il s'est conclu contre la volonté des trois parlementaires de Polynésie : contre la volonté du sénateur Flosse et la mienne - car nous restons en effet fermement opposés à la diminution de la représentation des archipels -, et contre la volonté de mon collègue Vernaudon, fâché de voir s'envoler ses espoirs de faire basculer la majorité en Polynésie.

Aujourd'hui, deux sièges manquent encore à l'appel pour assurer la représentativité des archipels. Nous ferons tout pour les rétablir dans leurs droits dès que possible.

Je terminerai en rappelant à quel point je regrette que mon collègue Vernaudon utilise - par personne interposée - la tribune de notre Assemblée pour régler des comptes personnels qui n'ont pas leur place ici et qui ne font que nuire à l'image de la Polynésie et de ses habitants.

En attendant, je vous donne rendez-vous en mai prochain pour le verdict des urnes.

M. Emile Vernaudon.

Tout à fait !

M. Michel Buillard.

Il faudra bien à un moment ou à un autre rendre des comptes devant notre population. A ce moment-là, les habitants des archipels exerceront, j'en suis sûr, leur devoir de mémoire, en sanctionnant ceux qui auront trahi leur confiance.

Les résultats marqueront l'approbation par la population polynésienne de la politique de reconversion économique et de progrès social mise en place depuis 1991 par le président Flosse et sa majorité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, après la réussite de la commission mixte paritaire, dans les conditions que notre rapporteur, Jean-Yves Caullet, vient de nous exposer, il nous reste ce soir à examiner cet accord, et à l'approuver, pour que ce texte, attendu par nos compatriotes de Polynésie, prenne force de loi. C'est, je le pense, ce que nous allons faire car ce texte répond à l'impératif, parfaitement admis par tous, de corriger un trop important déficit de représentativité de certaines entités de la Polynésie française au sein de l'assemblée du territoire. Améliorer la représentativité des élus de l'assemblée de la Polynésie française est d'autant plus nécessaire qu'elle devrait voir ses prérogatives, déjà importantes, largement étendues par la réforme constitutionnelle qui a été engagée. A ce propos, je souhaiterais que cette réforme, que nous souhaitons sur tous les bancs de notre Assemblée puisque nous l'avons adoptée, puisse enfin aboutir.

Il me faut rappeler, pour le déplorer, qu'il y a quelques mois, le Président de la République, qui avait convoqué le Congrès pour procéder, entre autres, à la réforme constitutionnelle nécessaire à l'évolution institutionnelle de la Polynésie française, a brusquement changé d'avis et annulé cette convocation.

Il est vrai que l'évolution institutionnelle de la Polynésie n'était pas la cause de son revirement, il s'agissait plutôt d'une autre question à l'ordre du jour du Congrès, à savoir la réforme du Conseil supérieur de la magistrature, destinée à garantir l'indépendance de la justice...

La Polynésie a donc été sacrifiée, pour le moment, à la raison d'Etat, ou plutôt à la raison du chef de l'Etat...

attitude que chacun d'entre nous, et surtout l'ensemble des Français, apprécie mieux aujourd'hui à la lumière d'événements, survenus depuis, qui touchent à la relation, ou plutôt à l'absence de relations, que le Président de la République souhaite entretenir avec la justice de notre pays.

M. François Goulard.

Epargnez-nous ce genre de propos ! Il faut du talent pour être un tribun.

M. Jérôme Lambert.

Compte tenu de ces péripéties, jugées à juste titre sévèrement par nos concitoyens, pouvons-nous espérer une prochaine convocation du Congrès pour ratifier les dispositions nécessaires à l'évolution institutionnelle de la Polynésie française ? La question est posée. Elle doit obtenir une réponse de la part du chef de l'Etat, car le Parlement et le Gouvernement ont, en ce qui les concerne, accompli leur mission, qui était de définir le cadre d'une meilleure organisation institutionnelle pour l'avenir de la Polynésie française.

Le texte que nous examinons ce soir apporte son concours à cette entreprise, en permettant une meilleure représentation des différents archipels qui composent le territoire de la Polynésie française et qui composeront demain le « pays d'outre-mer » de Polynésie française.

Issu d'une proposition de loi de notre collègue Emile Vernaudon et des travaux de la commission mixte paritaire, le texte concilie des critères de représentation démographique et géographique définis par le Conseil constitutionnel dans plusieurs de ses décisions.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

Nous avons eu le souci de limiter les déséquilibres démographiques entre les cinq circonscriptions électorales qui constituent le territoire de la Polynésie française, tout en tenant compte du critère de la représentation géographique, que le Conseil constitutionnel avait également pris soin de respecter, afin de permettre la représentativité de territoires peu peuplés qui, connaissant des problématiques particulières, justifient une représentation minimale. En effet, la Polynésie française comptant cinq archipels, plus d'une centaine d'îles, sur une superficie supérieure à celle de l'Europe, le critère géographique d evait être nécessairement pris en compte dans la recherche de l'accord qui est intervenu en commission mixte paritaire.

Un nombre minimal de trois sièges est ainsi garanti à chacun des deux archipels les moins peuplés, les îles Marquises et Australes.

L'attribution, par rapport à la situation actuelle, d'un siège supplémentaire permettra une meilleure répartition proportionnelle entre les différentes listes en présence.

Pour rendre plus juste la représentation démographique de l'archipel le plus peuplé, les îles du Vent, son nombre de sièges passera de vingt-deux à trente-deux, soit dix sièges supplémentaires, tandis que les îles Sous-le-Vent et les îles Tuamotu-et-Gambier, avec respectivement sept et quatre sièges, ne perdront qu'un seul élu chacune.

Avec un total de quarante-neuf sièges, nous parvenons ainsi, au terme d'un compromis, à un accord lisible, garantissant une représentativité plus juste et, de ce fait, un meilleur fonctionnement de la démocratie en Polynésie française, ce que chacun de nous appelle de tous ses voeux afin de mieux assurer l'avenir de ces territoires et de nos concitoyens polynésiens.

Grâce au travail accompli par tous, à l'Assemblée nationale, au Sénat et au Gouvernement, le cadre législatif est maintenant fixé. Il appartient désormais au Président de la République, j'y insiste, de permettre sa mise en place définitive en faisant aboutir une réforme de la Constitution, qu'attendent tous ceux qui sont soucieux de l'avenir de l'outre-mer et de la Polynésie en particulier, et qui ne se contentent pas de mots et de déclarations d'intention quand elles ne sont pas suivies d'effets. Le proche avenir aura certainement valeur de démonstration, non seulement pour la Polynésie mais, à travers elle, pour l'ensemble de l'outre-mer, auquel le groupe socialiste accorde un grand intérêt, comme la récente loi d'orientation que nous avons adoptée récemment, vient de le démontrer.

Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, puissions-nous être entendus au plus haut sommet de l'Etat ! J'espère que les préoccupations du Président de la République ne sont pas par trop éloignées des nôtres et de celles de nos concitoyens de Polynésie, afin que soit parachevé l'édifice législatif que nous avons construit et auquel, ce soir encore, nous allons ajouter une nouvelle pierre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je voudrais d'abord dire que j'ai été impressionné par la hauteur de vues de notre collègue Michel Buillard, dont le discours résume très bien l'enjeu et la situation.

Je voudrais aussi poser une question très simple au Gouvernement. Si la loi électorale était, à en croire certains orateurs de la majorité, si injuste et si inadaptée, pourquoi avoir attendu, après l'ajournement du Congrès, des propositions de loi au lieu d'agir, comme c'est son rôle, en déposant un projet de loi visant à modifier cette loi électorale ? En réalité, chacun l'a compris à demi-mot ou plus ouvertement selon les propos, il s'agit d'une tentative assez classique pour tordre la loi électorale à l'avantage de la majorité nationale. On utilise alors de mauvais arguments.

Le mauvais argument, c'est celui de la proportionnalité de la représentation à la population. Il devrait être enfin admis qu'il existe un droit des territoires à être suffisamment représentés comme il existe un droit des minorités à être protégées des éventuels abus des majorités. Ce principe démocratique en vaut bien d'autres.

C'est pourquoi l'accord de la commission mixte paritaire, pour souhaitable qu'il soit - et je reconnais qu'il traduit un progrès évident par rapport à la proposition initiale, ce dont nous nous réjouissons les uns et les autres -, ne me convainc pas tout à fait personnellement.

Je considère, et le groupe Démocratie libérale avec moi, que la manière utilisée et la tentative initiale ne sont pas convenables. Parce que nous baignons dans un climat où, sous couvert de sacrifier à de grands principes, la manipulation à des fins électorales semble être devenue la règle, je voterai contre ce texte car son intention première en corrompt la forme, qui, bien que plus acceptable, n'en demeure pas moins, à nos yeux, condamnable.

(Applaudissemments sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, les députés communistes ont eu plusieurs fois l'occasion d'exprimer leur accord avec le principe de l'autonomie amorcée en Polynésie depuis seize ans. Ils ne peuvent donc qu'être préoccupés par les conditions de l'exercice du pouvoir en Polynésie et par la représentativité des élus.

Il faut reconnaître que les données géographiques, une superficie comparable à celle de l'Europe et une population équivalente à celle du département du Gers, constituent un casse-tête.

Le mode de scrutin en vigueur génère une inégalité du suffrage, certains pouvant être élus avec presque trois fois moins de voix que d'autres, avec toutes les dérives clientélistes que cela comporte.

M. François Goulard.

Vous savez de quoi vous parlez !

M. Patrice Carvalho.

Même si nous savons que le nouveau mode de scrutin ne corrigera pas l'inégalité des moyens dont disposent les forces politiques, nous sommes sensibles à ce qui est de nature à assurer une représentation plus équitable des archipels les moins peuplés et à garantir dans le même temps aux Iles du Vent un nombre correct d'élus.

Le groupe communiste avait voté le 22 juin dernier à l'Assemblée nationale une proposition de loi visant à réparer l'oubli de deux recensements démographiques successifs tout en respectant la spécificité géographique des archipels et leurs originalités culturelles, qui ne remettent pas en cause l'unité du peuple polynésien. Mais les sénateurs communistes n'avaient pas voté la proposition de loi modifiée par la majorité sénatoriale.

Le texte présenté aujourd'hui par la commission mixte paritaire correspond bien à une avancée : il approche l'équité démographique sans méconnaître la particularité


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des archipels les moins peuplés. Pour permettre un compromis acceptable, l'effectif de l'assemblée territoriale se trouve relevé à quarante-neuf membres, avec notamment trente-deux sièges pour les Iles du Vent et sept pour les îles Sous-le-Vent.

Le groupe communiste se rallie à cette proposition, tout en maintenant qu'il est favorable à la simultanéité des élections municipales et territoriales.

Le processus de décolonisation est mis en oeuvre. Les députés communistes souhaitent une évolution institutionnelle responsable sans crispation sur le passé et sans p sychodrame. Ils soutiennent le mémorandum du 15 mars 2000 des progressistes de la Polynésie pour construire une souveraineté auprès de laquelle la France continuera à exercer son influence.

M. Jérôme Lambert.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Emile Blessing, dernier orateur inscrit.

M. Emile Blessig.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'accord qui est intervenu en commission mixte paritaire est le résultat d'un compromis qui est parvenu à conjuguer la spécificité de la Polynésie française et de ses archipels avec l'évolution démographique. Nous nous sommes efforcés de respecter au plus près les principes démocratiques qui sont les nôtres, en conformité avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à l'égalité des suffrages.

Nous avons entendu ici les points de vue de différents orateurs. Il est dans ce compromis un indice qui ne trompe pas : aucun des parlementaires polynésiens ne l'a approuvé. Néanmoins, ce texte marque, par-delà la diversité des opinions qui se sont exprimées, la préoccupation du Parlement d'affirmer, devant les populations polynésiennes, la volonté nationale de trouver un accord équilibré, qui tienne compte à la fois des évolutions intervenues, notamment sur le plan démographique, et des spécificités géographiques propres à la Polynésie.

Dans cette perspective, il était important que le pacte républicain, qui lie, malgré la distance, la Polynésie à la France, puisse s'exprimer dans le cadre d'un accord entre le Sénat et l'Assemblée nationale et que la règle qui présidera au déroulement des futures élections en soit l'expression.

Dans ces conditions, la Polynésie pourra continuer dans la voie du progrès qu'elle suit depuis quelques années, en matière démographique et économique, et les résultats qu'elle obtient contribuent au maintien d'une présence française extrêmement importante à l'autre extrémité du monde. Un tel compromis m'apparaît comme le signe tangible de ce pacte républicain, un signe d'espoir qui, en dépassant les divergences locales et les oppositions politiques, normales et compréhensibles, permettra, je l'espère, à la Polynésie de continuer à progresser.

Pour ces raisons, comme en commission mixte paritaire, le groupe UDF soutiendra le texte aujourd'hui proposé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste aujourd'hui proposé et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Texte de la commission mixte paritaire

M. le président.

Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire :

« Art. 1er . - L'article 1er de la loi no 52-1175 du 21 octobre 1952 relative à la composition et à la formation de l'assemblée territoirale de la Polynésie française est ainsi rédigé :

« Art. 1er . - L'assemblée de la Polynésie française est composée de quarante-neuf conseillers élus pour cinq ans et rééligibles. Elle se renouvelle intégralement.

« La Polynésie française est divisée en cinq circonscriptions électorales. Les sièges sont répartis conformément au tableau ci-après :

DESIGNATION DES CIRCONCRIPTIONS

NOMBRE DE SIEGES Iles du Vent

...........................................................................

..........

32 Iles Sous-le-Vent

...........................................................................

7 Iles Australes

...........................................................................

........

3 Iles Tuamotu et Gambier

............................................................

4 Iles Marquises

...........................................................................

......

3 Total

...........................................................................

................

49

....................................................................

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi organique, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

(L'ensemble de la proposition de loi organique est adopté.)

2 FARINES ANIMALES Discussion d'une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution de MM. Philippe DousteBlazy, Jean-Louis Debré et Jean-François Mattei, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires de l'alimentation des animaux d'élevage par des farines carnées de viande et d'os (nos 2687, 2787).

La parole est à M. Michel Vergnier, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

M. Michel Vergnier, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation, mes chers collègues, notre assemblée est saisie d'une proposition de résolution en date du 10 novembre 2000, déposée par nos collègues Philippe Douste-Blazy, JeanLouis Debré et Jean-François Mattei, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires de l'alimentation des animaux d'élevage par des farines carnées de viandes et d'os.

Cette proposition vient à un moment où nombreuses sont les inquiétudes, les préoccupations des éleveurs et des consommateurs tant en France que dans toute l'Europe. L'examen de ce texte s'inscrit donc dans un


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

contexte précis : on parle et on entend beaucoup parler de ce qu'il est convenu d'appeler la crise de la vache folle, c'est-à-dire l'ESB.

Les émissions spéciales sur l'ESB et la sécurité alimentaire se multiplient dans les médias. Les débats sont également nombreux au sein de notre assemblée. Une séance exceptionnelle de questions orales avec débat consacrée à la sécurité alimentaire s'est tenue mardi 28 novembre dernier dans notre hémicycle. Le Gouvernement est régulièrement interpellé par la représentation nationale sur la crise de l'ESB lors des séances de questions au Gouvernement.

Toujours à l'Assemblée, mais hors de l'hémicycle, ce sujet continue de faire l'objet de débats et de questions.

Ainsi, mardi dernier a été organisée dans nos murs une audition publique par le groupe d'études sur l'élevage bovin en bassin allaitant, dont je salue le président, intitulé : « Viande bovine : restaurer la confiance ».

Restaurer la confiance, tel est bien le but de notre démarche. Aujourd'hui, en effet, la fièvre, la psychose sont en train de gagner tout le monde, ce qui se traduit par une grave crise de la filière bovine, encore plus grave que celle de mars 1996.

Alors que, à l'époque, cette première crise de la vache folle était la conséquence de la découverte de la possibilité de transmissibilité de l'agent pathologique de l'ESB à l'homme, la crise actuelle est due à la conjonction de plusieurs événements : découverte de la présence dans un abattoir d'un bovin atteint d'ESB et qui provenait d'un troupeau de bête dont la viande pourrait avoir été commercialisée ; diffusion par une chaîne de télévision de l'agonie d'une personne présentée comme atteinte de la nouvelle forme de la maladie de Creutzfeldt-Jackob ; découverte régulière de nouveaux cas de vache folle, résultat de la politique de dépistage et de surveillance clinique menée par les pouvoirs publics.

Bref, il est difficile de ne pas céder à des réactions irrationnelles, face à la prolifération d'informations, de questions, d'incertitudes concernant la maladie de l'ESB et celle du nouveau variant de la maladie de CreutzfeltJackob, même si la France a toujours suivi les recommandations des scientifiques en prenant les mesures les plus rigoureuses de l'Union européenne en matière de lutte contre l'ESB.

Beaucoup de questions sont soulevées. Or l'impossibilité, dans l'immédiat, de répondre à toutes provoque la peur des consommateurs, une peur réactivée avec d'autant plus d'ampleur que la crise s'inscrit dans le prolongement des inquiétudes suscitées par d'autres crises concernant la sécurité alimentaire - tout le monde les a en mémoire poulet à la dioxine, listériose, effets de la dissémination possible des OGM.

Les consommateurs n'ont plus confiance. Il faut les rassurer, en les informant, en prenant des mesures de précaution, de prévention, de lutte contre l'ESB au niveau européen, et en contrôlant la bonne application de ces dispositions.

Tout récemment, la France a convaincu ses partenaires européens de décider un élargissement des tests pratiqués sur les bovins et une interdiction des farines carnées pour tous les animaux d'élevage, mesure que la France avait d'ailleurs prônée en vain, plusieurs fois, notamment en juin 1999.

En ce qui concerne la question des farines animales, des mesures nationales ont été prises dès le début des années 90 avec, en juillet 1990, l'interdiction des farines animales dans l'alimentation des bovins, en mars 1996, l'embargo sur les bovins vivants, les viandes et produits à base de viande en provenance du Royaume-Uni, en avril 1996, la sécurisation des farines utilisées dans l'alimentation des autres animaux.

Aujourd'hui, certains doutent du respect de l'application de ces mesures. Sont évoquées notamment des fraudes à l'interdiction d'importer des farines animales britanniques, favorisant ainsi les risques de contamination croisées.

Le texte initial de la proposition de résolution examiné par la commission de la production et des échanges propose « la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires de l'alimentation des animaux d'élevage par des farines carnées de viande et d'os ». Cette dernière s'est prononcée favorablement sur cette réflexion.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Michel Vergnier, rapporteur.

En effet il faut faire le point sur la possible introduction en France de farines animales d'origine britannique...

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Michel Vergnier, rapporteur.

... et sur l'éventuelle utilisation de farines animales dans l'alimentation des bovins après les mesures d'interdiction par les pouvoirs publics français. Il faut également examiner les problèmes que posent l'élimination de ces farines.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Les responsabilités, toutes les responsabilités doivent être mises en évidence.

M. François Sauvadet.

Très, très bien !

M. Germain Gengenwin.

Tout à fait !

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Cependant, les membres de la commission de la production ont estimé que la future commission d'enquête ne devra pas s'en tenir à une réflexion sur les seules farines animales. C'est pourquoi a été adopté un amendement de rédaction globale que j'ai eu l'honneur de présenter afin de compléter la proposition de résolution initiale. Il a pour objet d'élargir le champ d'investigation et les thèmes de réflexion de la future commission d'enquête.

La proposition de résolution ainsi adoptée tend à « la création d'une commission d'enquête sur le recours aux farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage, sur la lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine et les enseignements de la crise en termes de pratiques agricoles et de santé publique ». Il apparaît en effet indispensable d'intégrer la réflexion sur le problème des farines animales dans une réflexion plus globale sur l'ESB et sur les enseignements à tirer de la crise provoquée par cette maladie.

Les citoyens se posent des questions sur les farines animales et il faut leur apporter des réponses, mais ce qui les préoccupe avant tout c'est la maladie de l'ESB et ses conséquences sur la santé publique. Il est donc indispensable de répondre à leur attente et de leur envoyer un signe fort de notre volonté de lutter contre ce fléau.

Des travaux ont déjà été menés sur ce sujet, notamment par des parlementaires. Ainsi, l'opinion et les pouvoirs publics ont largement été éclairés par le rapport de M. Mattei sur « l'ensemble des problèmes posés par le développement de l'épidémie d'ESB » et par les travaux de la commission d'enquête « sur la transparence et la sécurité alimentaire en France », présidée par Félix Leyzour et rapportée par Daniel Chevallier. Les travaux de la


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

future commission d'enquête que nous proposons de créer pourront s'appuyer sur l'excellent travail réalisé par nos collègues.

Ces travaux sont essentiels, mais ils doivent être complétés car de nouvelles découvertes ont été réalisé es, de nouvelles mesures ont été prises et la position de nos partenaires européens a évolué.

Ainsi, il convient de réactualiser les données dont on dispose sur l'ESB, d'autant que ces données et la connaissance qu'on de la maladie s'affinent au fur et à mesure du travail des scientifiques. Avant-hier, par exemple, le directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, M. Hirsch, a rendu publics les premiers résultats du programme pilote de dépistage rapide de l'ESB, programme lancé au début du mois d'août 2000, dans le but d'établir une estimation de la proportion des bovins âgés de plus de deux ans qui se trouveraient actuellement en phase d'incubation de la maladie. Cette étude révèle, entre autres, que 2,1 des bovins sont atteints de la maladie de l'ESB, et que les animaux les plus touchés sont ceux nés entre 1993 et 1995. Une telle étude facilitera la mise en place d'un test de dépistage systématique au niveau européen.

Il convient aussi de montrer la pertinence des dernières mesures qui ont été prises récemment par le Gouvernement et de réfléchir aux moyens de promouvoir une agriculture tournée vers la sécurité sanitaire de l'alimentation.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Michel Vergnier, rapporteur.

De nombreux défis sont à relever, de nombreuses questions doivent trouver réponse. C'est pourquoi il est apparu aux membres de la commission de la production et des échanges la nécessité de ne pas créer une commission d'enquête trop restrictive.

Il est cependant une question que nous devons nous poser, celle de la recevabilité de la proposition de résolution. En effet, l'ordonnance organique sur le fonctionnement des assemblées ainsi que notre règlement interdisent, au nom de la séparation des pouvoirs, la création d'une commission d'enquête sur des faits à propos desquels des intances judiciaires sont en cours. Or, par lettre en date du 1er décembre, Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, a fait savoir à M. le président de l'Assemblée nationale que diverses procédures judiciaires étaient en cours sur les questions qui nous préoccupent.

M. François Goulard.

Il n'y a pas d'obstacle !

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Toutefois, Mme la garde des sceaux a aussi indiqué qu'elle laissait à l'Assemblée le soin d'apprécier la possibilité, cela étant précisé , de créer une commission d'enquête parlementaire.

Compte tenu de cette réponse, il apparaît donc légitime que la commission d'enquête qui va être mise en place explore l'ensemble des pistes. Elle doit être la plus précise possible, mettre à jour les responsabilités, évaluer les risques, proposer des solutions. Ce n'est qu'à ce prix que les professionnels qui, pour la quasi-totalité d'entre eux, exercent leur métier avec passion, pourront à nouveau regarder l'avenir avec confiance.

Je terminerai donc en rappelant les principaux axes de réflexion de la commission d'enquête, à savoir : santé publique, protection des consommateurs, recours aux farines animales, mesures de lutte contre l'ESB, évolution de l'agriculture.

L'amendement que j'ai présenté a été complété par des sous-amendements de nos collègues du groupe RCV sur deux points : l'un concerne les productions alternatives pour remplacer les farines, l'autre porte sur l'importance plus grande à donner à l'herbe. La commission de la production et des échanges a approuvé ces sous-amendements.

D'autres amendements seront examinés au cours de notre séance, mais aucun n'a fait apparaître d'opposition de fond.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Je pense plutôt qu'il est nécessaire, compte tenu de l'importance du travail que nous aurons à effectuer ensemble, que nous soyons sur une ligne constructive qui nous conduise les uns et les autres à une complémentarité intelligente qui serve les intérêts de la filière viande et des consommateurs.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. François Goulard, premier orateur inscrit.

M. François Goulard.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, alors que nous entamons l'examen de cette proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires de l'alimentation des animaux d'élevage par des farines carnées de viande et d'os, je tiens à souligner d'emblée que j'ai apprécié, visiblement comme plusieurs de mes collègues de l'opposition, la teneur du rapport que M. Vergnier vient de nous présenter. Il a su comprendre quelles étaient les attentes de nos c oncitoyens et combien cette commission pouvait répondre au réel besoin d'informations de l'ensemble de nos compatriotes.

Il y a incontestablement matière à enquête, en raison de l'émotion considérable qu'a provoquée l'affaire de l'ESB, de l'incertitude de l'information, difficilement accessible au grand public, et aussi d'un flottement des positions gouvernementales successives, mais je ne vais pas les rappeler. Monsieur le secrétaire d'Etat, ne prenez pas cette dernière remarque pour une critique, car tout gouvernement, confronté à une crise comme celle-là, adopte des positions qui ne sont pas toujours parfaitement cohérentes dans le temps. Cela est à peu près inévitable.

Force est d'ailleurs de constater que les gouvernements ont beaucoup de difficulté à réagir à des crises qui concernent la santé des Français, surtout quand elles sont provoquées par des phénomènes quelquefois mal cernés scientifiquement et qu'elles présentent des aspects d'ordre psychologique très difficilement maîtrisables.

Tous ces éléments appellent à l'évidence une enquête de notre part.

En outre, certaines questions sont restées sans réponse.

Je pense notamment au problème essentiel, fort bien relevé par le rapporteur, des importations de farines britanniques, ou de farines « débaptisées », c'est-à-dire portant le label d'un autre pays de l'Union européenne alors qu'elles proviennent probablement de Grande-Bretagne.

Cela avait été mis en évidence en janvier 1997 par la mission d'information Guilhem-Mattei et nous devons résoudre aujourd'hui cette difficulté d'une façon convaincante.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

J'ajoute que la commission d'enquête sur la transparence et la sécurité de la filière alimentaire française n'avait pas été jusqu'au bout des investigations sur le sujet proposé comme objet de la commission d'enquête dont nous parlons ce soir.

Sur un plan très général, je tiens également à vous rappeler que nous avons, les uns et les autres, des discours quelquefois incantatoires sur la restauration du rôle du Parlement. Or je ne suis pas certain que nous parviendrons à passionner les Français pour les aspects quelquefois très techniques, très abscons, voire éloignés de leur réalité quotidienne, de notre travail législatif. Nous devons en effet bien admettre que la plupart de nos discussions échappent au grand public et ne suscitent pas son intérêt direct. On peut le déplorer, mais c'est un fait.

En revanche, je suis persuadé que les commissions d'enquête sur des sujets totalement d'actualité sont un excellent moyen de réveiller l'intérêt des Français pour l'activité parlementaire. De plus, elles remplissent un rôle extrêmement utile dans une démocratie comme la nôtre à chaque fois qu'apparaissent des doutes sur la réalité d'un problème ou sur les fondements de l'action gouvernementale. Et cela vaut pour tous les gouvernements.

Je suis convaincu depuis longtemps qu'en donnant plus de lustre, plus d'importance à nos commissions d'enquête, même au prix de certaines révisions constitutionnelles - en effet, la Constitution de 1958 a enserré dans des limites assez étroites les travaux de ces commissions -, nous concourrions à rapprocher le Parlement des Français, ce qui est notre objectif commun.

Confrontés à des crises comme celle dont il est question ce soir, les gouvernements ont, je l'ai dit, beaucoup de mal et, il faut le reconnaître, bien du mérite. Les problèmatiques qui se posent à eux nous concernent tous quelle que soit notre appartenance politique, et méritent, de ce fait, notre réflexion. Relativement nouvelles - nous en avons eu plusieurs exemples depuis quelques années elles ont en commun le fait qu'elles touchent à la santé, et donc concernent l'ensemble de la population, et qu'elles portent sur des sujets pour lesquels l'information scientifique est difficile à traduire en langage accessible parce que très complexe et aux conclusions parfois incertaines la science n'étant jamais définitive ni parfaite.

Les discours gouvernementaux, dans ces situations, perdent très vite de leur crédibilité et suscitent même la méfiance. « On nous ment ! », « On ne nous dit pas la vérité ! » « On n'a pas pris à temps les bonnes mesures ! », ou - pis - « On a pris sciemment les mauvaises mesures, celles qui menacent la santé publique ! » entendons-nous dire dans ces occasions. Face à ces crises, qui se reproduiront, nous devons tenter de définir des méthodes préventives pour tenter d'être plus efficaces.

Une condition nécessaire pour cela, mais sans doute pas suffisante, est de scinder ce qui est information de ce qui est action gouvernementale. Malgré les efforts réalisés et les progrès accomplis, grâce, en particulier, à la création d'un certain nombre d'agences, notre pays ne dispose pas d'un organe totalement indépendant des pouvoirs politiques susceptible de fournir une information scientifique aussi incontestable que possible permettant aux gouvernants de prendre, sous leur entière responsabilité parce que c'est leur rôle et leur honneur, leurs décisions en toute connaissance de cause et sans contestations possibles.

Telle est la réflexion que je voulais très simplement et très brièvement vous livrer ce soir. Dans les situations de crise, les commissions d'enquête gardent une crédibilité.

La pluralité politique des membres qui les composent sont aux yeux des Français un gage d'impartialité.

Si nous savons partager les rôles et donner en particulier à l'opposition la place qui lui revient comme contrepouvoir dans la commission que nous allons créer ce soir, nous aurons fait, je pense, oeuvre utile pour tenter sinon de rassurer totalement, du moins d'éclairer nos compatriotes dans cette malheureuse affaire qui touche l'ensemble de la population et, plus particulièrement, la filière agricole. Nous avons, les uns et les autres, une pensée particulière ce soir pour celle-ci en raison des conséquences de la crise sur elle. Nous y sommes tous, je crois pouvoir le dire, particulièrement sensibles. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.)

M. le président.

La parole est à M. Joseph Parrenin.

M. Joseph Parrenin.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pourquoi une nouvelle commission d'enquête touchant à la sécurité alimentaire ? C'est la question que me posait un journaliste tout à l'heure au téléphone.

En fait, il semble indispensable - et je crois que nous sommes tous d'accord à ce sujet sur ces bancs - que la représentation nationale exerce une fois de plus son travail non seulement de contrôle de l'exécutif, mais aussi de réflexion et de proposition.

Il ne fait aucun doute qu'il y a unanimité sur l'ensemble des bancs de cette Assemblée pour accomplir ce travail d'analyse et de propositions tellement nous sommes, comme l'est d'ailleurs l'ensemble de la population, préoccupés par la sécurité alimentaire, par la santé publique, et par l'avenir de notre agriculture et des filières agro-alimentaires.

La commission d'enquête plus large sur la sécurité sanitaire de la filière alimentaire présidée par Félix Leyzour et rapportée par Daniel Chevallier, à laquelle plusieurs d'entre nous ont participé, avait déjà fait un certain nombre d'observations sur les farines animales.

Il s'agit aujourd'hui de faire une analyse, un inventaire le plus complet possible sur ce qui s'est passé. Cette étude portera à la fois sur l'utilisation des farines animales, le respect ou non des différentes décisions concernant l'élimination des matériaux à risque,...

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Joseph Parrenin.

... et la prise en compte de leur interdiction dans l'alimentation des ruminants.

Il n'est pas question, bien entendu, de faire le procès de tel ou tel. Il ne serait en effet pas sérieux de mettre en accusation les agriculteurs touchés directement par des cas d'ESB.

Nous aurons aussi à évaluer l'état d'avancement des connaissances et de la recherche et à nous pencher sur l'ensemble des dispositifs de surveillance et de dépistage.

Comme il a été dit tout à l'heure, les gouvernements sont parfois obligés de prendre des décisions dans l'urgence.

Notre travail sera de faire l'analyse des décisions qui ont été prises depuis déjà de nombreuses années et des dispositifs mis en places. Je crois pouvoir affirmer d'ores et déjà que tous les gouvernements ont porté une attention particulière à ce dossier et que celui-ci n'a été traité à la légère par personne.


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Nous aurons à nous prononcer également sur les raisons qui ont poussé à de telles pratiques. Cette question a fait l'objet d'amendements, le rapporteur en a parlé. Ces raisons sont à rechercher dans une politique trop orientée vers la quantité au détriment de la qualité, vers les bas p rix, vers un productivisme sans réserve. Dans ce domaine également, notre commission d'enquête pourra faire un travail intéressant. Elle pourra en particulier auditionner l'ensemble des partenaires du monde agricole et des différentes filières pour poser les vraies questions : les consommateurs, comme les agriculteurs s'interrogent en effet aujourd'hui sur la politique agricole suivie depuis quelques dizaines d'années.

Nous aurons à nous interroger sur le rôle de l'agroindustrie, de la transformation, mais aussi sur celui de la grande distribution qui a parfois contraint des filières entières à des pratiques risquées pour satisfaire ses exigences de prix bas à l'achat afin d'atteindre elle-même une marge maximum.

Ce sera également l'occasion de faire une analyse et une réflexion approfondies et d'avancer des propositions sur des systèmes de production susceptible d'assurer une sécurité alimentaire plus grande - le risque zéro n'existant pas, nous le savons -de restaurer l'indispensable confiance des consommateurs.

J'ajoute que, si les consommateurs sont troublés, les agriculteurs, eux, sont dans le désarroi. Notre travail devra permettre de leur redonner espoir ainsi qu'à l'ensemble de la filière, afin que le blason de la France qu'était l'alimentation revienne au premier plan. Il a, depuis quelques mois, été sérieusement mis à mal. Notre agriculture doit trouver des orientations nouvelles et nous devrons faire des propositions en ce sens en nous appuyant sur nos réflexions et nos débats lors de l'examen de la loi d'orientation agricole en 1999. Ces orientations doivent être mises en application afin de répondre à l'attente des consommateurs et des agriculteurs.

Le groupe socialiste votera la proposition de résolution, modifiée par les amendements adoptés en commission, en souhaitant bien sûr à l'ensemble des membres qui feront partie de la commission d'enquête de réaliser un bon travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Morange.

M. Pierre Morange.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la crise liée à la maladie de la « vache folle », qui a entraîné dans notre pays une véritable psychose, a mis en exergue la nécessité pour le Parlement de s'intéresser aux questions de sécurité alimentaire.

Depuis la fin des années quatre-vingt, période à laquelle l'encéphalopathie spongiforme bovine a été identifiée comme une maladie épidémique du bétail, alors britannique, plusieurs séries de mesures ont été mises en oeuvre pour tenter d'éradiquer l'épidémie.

En juillet 1990, la France a décidé de retirer les farines animales de l'alimentation des bovins. En décembre 1994, l'interdiction a été étendue à l'ensemble des ruminants : bovins, ovins et caprins.

Enfin, le gouvernement d'Alain Juppé a interdit dans les farines les matériaux à risques spécifiés, tels la moelle, la cervelle, ou bien encore les yeux. Malgré ces règles strictes, nous n'avons pu que constater la multiplication des cas d'animaux malades, y compris d'animaux nés après l'interdiction des farines, et notamment après 1990.

Plusieurs hypothèses sont invoquées pour tenter d'expliquer la progression de la maladie malgré les mesures d'interdiction.

Ces explications tiennent aux farines : ou bien leur interdiction n'a pas été respectée, ou bien des contaminations croisées entre filières d'aliments pour ruminants et non ruminants ont eu lieu lors de la fabrication, du transport ou du stockage.

Je souhaiterais citer, à ce propos, M. Hirsch, directeur général de l'AFSSA qui situait de manière parfaite le débat dans un entretien paru dans un quotidien du soir, le 31 octobre 2000 : « On sait que l'emploi des farines animales et le recyclage de l'agent infectieux sont à l'origine du développement spectaculaire des cas d'encéphalop athies spongiformes bovines. C'est la raison pour laquelle des restrictions de leur usage ont été décidées.

Or, on voit encore apparaître dans plusieurs pays, dont la France, des cas d'ESB et l'on sait que les farines animales ne sont pas interdites dans l'ensemble des espèces animales. Il est tentant de faire le rapprochement entre ces deux faits et naturel de se poser la question d'une interdiction totale. »

C'est dans ce contexte que l'opposition unie a souhaité déposer une proposition de résolution visant à créer une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires de l'alimentation animale par des farines carnées.

Cette initiative a été confortée tout récemment par la décision des Quinze de suspendre l'utilisation des farines animales dans l'alimentation du bétail. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette initiative de précaution, qui montre, s'il en était besoin, que le Président de la République avait raison avant tout le monde en réclamant, dès le 25 octobre, une suppression de l'utilisation des farines carnées pour tous les animaux d'élevage.

Lors de sa réunion du 6 décembre dernier, la commission de la production et des échanges a examiné la proposition de résolution en précisant sa portée et en élargissant son champ d'investigation. Celle-ci devra s'intéresser à cinq domaines : la santé publique, la protection des consommateurs, le recours aux farines animales, la lutte contre l'ESB et l'évolution de notre agriculture.

La santé publique tout d'abord : il s'agira d'établir un bilan des recherches en cours, une estimation objective des risques et un état des ressources disponibles en termes d'information du public et de capacité du diagnostic.

Nous souscrivons à cette proposition. En effet, notre assemblée - et, à travers elle, nos concitoyens - doit pouvoir être informée de l'état d'avancement des recherches scientifiques sur la maladie de Creutzfeldt-Jakob et sur l'ESB. La psychose qui s'est développée tient aussi au manque d'informations scientifiques avérées sur cette question.

Où en sommes-nous des recherches ? Quelle valeur scientifique devons-nous accorder aux différentes informations que nous avons à connaître ? Telles sont les questions auxquelles la commission d'enquête devra répondre.

Le deuxième point concerne la protection des consommateurs : ici encore, pour rassurer, il convient de s'informer.

De quel dispositif d'alerte et de précaution disposonsnous réellement ? Des crises récentes ont semblé confirmer le bon fonctionnement des différents dispositifs d'alerte et de retrait des produits suspects.

Quels progrès pouvons-nous faire en matière de traçabilité ou d'étiquetage ? Certains pays, comme la Suède, sont particulièrement avancés en ce domaine. Ils ont mis au point un système permettant à partir d'un numéro


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d'identification inscrit sur le produit, de suivre par Internet tout le cheminement de celui-ci. Devons-nous mettre en place un tel système ? La troisième question a trait à l'utilisation des farines animales. C'est la question centrale, le point essentiel de la commission d'enquête. Que s'est-il exactement passé après l'interdiction officielle des utilisations des farines carnées en France ? Des produits contaminés ont-il été importés ? Des stocks ont-ils été écoulés ? Comment expliquer le développement de l'épidémie, malgré les différentes mesures de précaution ? Ici encore, il faudra trouver des réponses.

De la même manière, pour l'avenir, se pose le problème du stockage et de l'élimination de ces farines et leur remplacement par des protéines végétales.

Sommes-nous prêts à relever ce défi, dans quelles conditions et selon quel calendrier ? L'avant-dernier point d'investigation confié à la commission d'enquête concerne la lutte contre l'ESB et pose la question du test. Les auditions menées par l'office parlementaire des choix scientifiques et technologiques ont déjà mis le problème en exergue. Il nous faudra faire la lumière sur ce sujet. Pouvons-nous nous attendre à des progrès rapides en matière de dépistage des cas de « vache folle » ? Quel pourrait être le bon format du dispositif de surveillance des troupeaux bovins ? Comment interpréter les résultats des tests en fonction de leur fiabilité, et quelles conséquences devrons-nous en tirer ? Le dernier point concerne « l'évolution de notre agriculture ». Il s'agit de réaffirmer l'excellent travail de nos éleveurs, le souci de qualité qui les anime et la grande compétence dont ils ont toujours fait preuve.

M. François Goulard.

Très bien !

M. Pierre Morange.

Il conviendra d'étudier les moyens qu'il nous faudra mettre en oeuvre pour soutenir la filière bovine et lui donner les moyens de poursuivre ses efforts afin de sécuriser autant que faire se peut leurs productions.

J'insiste sur ce point : la filière bovine française qui constitue un exemple pour l'Europe, ne doit pas faire les frais des différentes crises qui se sont succédé.

Tels sont, mes chers collègues, les enjeux, innombrables, de cette commission d'enquête voulue par l'opposition.

Bien entendu, dans un souci d'ouverture, dans un domaine où la polémique ne saurait trouver sa place, nous approuvons les quelques modifications voulues par la majorité, tant dans le titre de la commission que dans les objectifs qui lui sont assignés.

La sécurité alimentaire est l'affaire de tous : producteurs, intermédiaires, distributeurs, chercheurs, parlementaires... Tous, nous devons agir pour relever ce défi et sortir de cette épreuve.

La représentation nationale, que nous sommes, doit se saisir de ce dossier, s'informer, et rendre compte à nos concitoyens de ses travaux.

Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe RPR soutiendra la création de cette commission d'enquête dont il a eu, avec ses partenaires de l'opposition, l'initiative. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il n'est pas excessif de dire qu'une véritable angoisse s'est emparée des Français suite aux révélations sur l'ESB qui touche le cheptel bovin.

Les conséquences en sont mesurables. Plusieurs études montrent que nos concitoyens ont réduit, voire interrompu, leur consommation de viande de boeuf. La chute des ventes se situe, en effet, à environ 50 %. Toute une filière est en crise. Elle concerne 350 000 personnes et près de 8 000 emplois sont menacés.

A l'évidence, il existe une disproportion entre la psychose qui s'est emparée de la population, la modification des comportements alimentaires qui s'en est suivie et la réalité des risques existants lorsque nous consommons de la viande de boeuf, puisque l'agent infectieux n'a jamais été détecté dans le muscle et qu'aucune donnée scientifique ne permet de suspecter que la consommation entraîne un risque. Il faut rappeler combien la France a été en pointe dans la politique de précaution avec l'interdiction des farines animales pour les ruminants dès 1990, la sécurisation de ces farines pour les autres animaux d'élevage à partir de 1996 et la multiplication des tests jusqu'à l'interdiction récente des farines.

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Très bien !

M. Patrice Carvalho.

Toutefois, ces mesures indispensables ne sont pas suffisantes. Il nous faut relever un défi majeur si nous voulons sortir de la crise : regagner la confiance des consommateurs. Cela implique de nous fixer deux objectifs. Le premier concerne l'exigence de transparence sur la manière dont sont élevés les animaux dont nous consommons la viande. Le second concerne les enseignements qu'il nous faut tirer de la crise actuelle en termes de pratiques agricoles et de santé publique.

De ce point de vue, la proposition de création d'une commission d'enquête concernant le recours aux farines animales dans l'alimentation du bétail d'élevage, la lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine et les enseignements dont je viens de parler, peut être d'une réelle utilité.

Quelques mots sur le premier objectif. Je crois, en effet, utile de faire toute la lumière sur les conditions d'introduction et d'utilisation des farines d'origine britannique après leur interdiction par les pouvoirs publics, d'examiner les mesures de précaution prises dans la chaîne alimentaire, de faire le point des recherches en cours, d'analyser le dispositif de surveillance des troupeaux bovins, et les pratiques possibles en matière de tests et d'utilisation de leurs résultats. Tout cela concourt à cette exigence de transparence et à un renforcement de la politique de prévention et de précaution.

Je crois, néanmoins, que la commission de la production et des échanges a été bien inspirée d'amender la proposition initiale qui nous était soumise, en la complétant du second objectif que j'ai rappelé au début de mon propos.

Depuis maintenant plusieurs années, nous sommes confrontés de plus en plus fréquemment à ce que nous avons désormais coutume d'appeler des « crises » ou encore des « scandales » dans le domaine de la sécurité alimentaire.

La liste n'est pas exhaustive mais j'en rappelle tout de même, pour mémoire, quelques épisodes marquants : listéria dans des fromages au lait cru, salmonelles dans des volailles, pollution chimique d'une eau de source, vache


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folle, Coca-Cola empoisonné, peste porcine, boeuf aux hormones, poulet, oeufs et produits laitiers contenant de la dioxine.

Nous pourrions, certes, considérer qu'il s'agit là d'accidents de parcours, ou d'erreurs humaines. Ce ne serait pas crédible. La vérité est ailleurs. A les examiner un par un, on s'aperçoit qu'il y a à l'origine des fléaux que je viens de citer l'intérêt mercantile et que les appétits financiers l'emportent sur tout autre considération, même lorsque la santé publique est menacée. M. Goulard a complètement oublié, dans ses propos qui se voulaient rassurants, qu'en fait, cette crise avait pour cause la recherche du profit.

Pourquoi, en effet, décide-t-on un jour que des herbivores mangeront des farines carnées ? Simplement parce que cette nourriture coûte moins cher, parce que le bétail croît plus vite grâce à l'apport de protéines et que les margfes sont, en conséquence, plus grandes. Dès lors, nous sommes face à une logique qui devient implacable : comment accroître encore les marges ? Poser cette question revient à en poser une autre : comment repousser les limites ? Cette logique conduit, par exemple, à moins chauffer les farines carnées pour diminuer les coûts de fabrication et en accroître la valeur nutritive. Nous savons que c'est ainsi qu'ont été produites les farines britanniques qui sont à l'origine de l'épizootie.

Certes, nous pouvons montrer du doigt les éleveurs qui acceptent de nourrir ainsi leur bétail, mais ce serait ne pas voir qu'eux aussi sont pris dans cette spirale, qu'eux aussi sont contraints de faire des économies, non pas, surtout pour les plus modestes d'entre eux, pour accroître des marges énormes mais simplement pour que leur exploitation et leur famille survivent.

Une leçon se dégage de ces événements. Lorsque la société est livrée aux lois du marché, voilà ce qu'elle est capable de produire. De ce point de vue, il est significatif de constater que le pays le plus frappé par l'épidémie est la Grande-Bretagne, c'est-à-dire celui qui, en Europe, a sans doute poussé le plus loin le libéralisme. Nos voisins britanniques ont à déplorer 85 décès dus à cette nouvelle variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Lorsqu'on sait que la durée d'incubation est longue, probablement en moyenne entre dix et trente ans, cela en dit long sur les pratiques qui ont eu cours pour pousser toujours plus loin les économies réalisées sur les aliments donnés au bétail et les performances de croissance rapide des animaux.

Voilà qui devrait faire réfléchir ceux qui nous proposent le libéralisme comme modèle économique et politique, n'est-ce pas, monsieur Goulard ! Cela nous renvoie également à ce qui guide la construction européenne et qui est inspiré, en permanence, des recettes libérales.

M. Germain Gengenwin.

Même dans ce débat, on peut être partisan !

M. Patrice Carvalho.

Il aura fallu beaucoup d'efforts pour que la France parvienne à se faire entendre, notamment en ce qui concerne l'utilisation des farines et l'extension des tests de dépistage. La Commission de Bruxelles nous a montrés du doigt lorsque nous avons lucidement décidé de boycotter le boeuf anglais. L'Allemagne et l'Italie nous ont raillés pour le luxe de précautions que nous prenions. Ils ne comptaient alors aucun cas de vaches folles, et pour cause : ils ne pratiquaient pas de tests. Dès lors qu'ils y ont eu recours, il leur a bien fallu constater que leur cheptel comptait également des bêtes malades. D'autres pays continuent à se montrer très réticents sur la généralisation des tests au motif que la dépense est importante.

Voilà qui éclaire le débat sur l'Europe que nous voulons. La voulons-nous libérale ? Nous mesurons aujourd'hui les conséquences que peut avoir un tel choix. Ou bien travaillons-nous à encadrer les lois du marché de telle sorte que la satisfaction des besoins humains - et la santé publique en est un, majeur - demeure en toute circonstance ce qui guide les décisions prises ? Dans cette optique, l'argent n'est pas une fin mais un moyen.

S ur l'ensemble de ces questions, la commission d'enquête dont la création nous est proposée peut jouer un rôle important, dès lors qu'à partir de ses investigations pour garantir la transparence, elle débouche sur des propositions d'organisation d'une politique agricole et alimentaire saine.

Dans cette perspective, le groupe communiste votera la proposition de résolution qui nous est présentée. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous sommes réunis ce soir pour examiner la proposition der ésolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur le recours aux farines animales, la lutte contre l'ESB et les enseignements de la crise en termes de pratiques agricoles - aspect un peu nouveau, d'ailleurs introduit par notre rapporteur - et de santé publique.

Tout cela est lié.

Je rappelle qu'à l'origine, cette proposition avait été déposée par l'UDF et par les présidents des trois groupes parlementaires de l'opposition qui voulaient ainsi contribuer à éclaircir ce débat.

Il est du rôle du Parlement d'adresser un message clair à l'opinion, dans des périodes de crise comme celle que nous traversons depuis plusieurs mois. Et je me réjouis que cette proposition de commission d'enquête ait été retenue et qu'elle soit aujourd'hui inscrite à notre ordre du jour.

Nous l'abordons avec une vraie volonté, affirmée par l'ensemble des orateurs, d'éclairer l'opinion, de lever les doutes existants, mais aussi de faire le point sur l'état de la recherche - c'est une nécessité - et d'établir sans faiblesse les responsabilités éventuelles.

Je crois qu'il est à l'honneur d'un parlement d'exercer cette mission de contrôle sur des sujets qui touchent à l'essentiel, c'est-à-dire à l'avenir d'un pan entier de notre économie - et aux emplois qu'il génère - et à la santé publique.

Cette proposition a fait l'objet d'une discussion, cet après-midi encore, en commission de la production et des échanges. Nous avons discuté quelques amendements qui visent à bien définir le cadre de cette future commission d'enquête.

C'est dans cet esprit notamment, très largement partagé, que nous avons souhaité revoir le chapitre lié à la

« désintensification » du système de production agricole, mot un peu impropre qui ne figure d'ailleurs pas dans le dictionnaire usuel de la langue française, et qui, au fond, ne semblait pas correspondre à notre ambition commune, à ce que nous recherchons ensemble dans cette commission d'enquête. Nous avons d'ailleurs convenu, ce qui tra-


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duit bien la volonté de ceux qui ont participé à ce débat, d'un amendement commun entre nos groupes, opposition et majorité, que vous avez accepté, monsieur le rapporteur, visant à permettre à la future commission d'enquête d'étudier certes les différentes formes de productions agricoles, mais en liant très directement cet examen à l'objet de la commission d'enquête, c'est-à-dire aux exigences de la sécurité alimentaire.

Imposer à tous les modes de production la même exigence de sécurité sera le moyen d'éviter une alimentation à deux vitesses, l'une chère avec une sécurité maximale, et l'autre bon marché dont on ne pourrait que s'accommoder.

Je crois que l'exigence de sécurité et de qualité - M. Patriat partagera, je pense, ce sentiment - s'impose de la même manière à tous les types de production. Il est de notre devoir de s'assurer qu'à chaque niveau de consommation - certains sont élus de pays qui produisent des AOC avec des grands crus qui coûtent parfois très cher et qui ne sont pas de consommation courante - nous ayons une sécurité maximale.

A cet égard, je salue le travail de la commission et l'esprit dans lequel elle a, avec son rapporteur, M. Vergnier, abordé ce sujet ; cela témoigne bien de notre volonté commune d'avancer pour répondre aux interrogations légitimes de nos compatriotes et formuler des propositions en vue d'atteindre cet objectif qui nous est commun, d'une sécurité maximale.

Je souhaite, dans cet esprit, que M. le rapporteur nous précise - ce sera l'objet d'un amendement - ce qu'il entend par « pratiques agricoles », afin d'éviter, là encore, que notre commission d'enquête ne s'engage dans des débats qui relèvent de ce que nous avons déjà débattu lors de l'examen de la loi d'orientation agricole et des conditions de son application, débat qui, parfois, n'a pas manqué de vigueur. Mais c'est un autre débat qui ne doit pas être celui de notre commission d'enquête.

L'amendement que j'ai déposé sur les « pratiques agricoles » vise à bien préciser cet objectif devant l'Assemblée nationale, comme cela a été très bien fait devant la commission de la production et des échanges tout à l'heure. Dans ces conditions, je serai amené tout naturellement à retirer mon amendement, comme nous en étions convenus.

Pour ce qui nous concerne, au groupe UDF, nous attendons de cette commission d'enquête qu'elle réponde à des questions exprimées à cette tribune, que nous nous posons tous et dont l'enjeu est d'abord d'assurer la transparence.

Mes chers collègues, ce sera notre responsabilité collective que d'y contribuer. Nous devrons notamment nous pencher sur les conditions dans lesquelles des farines animales d'origine britannique ont pu être importées en France après leur interdiction et sur leurs conditions d'utilisation, sans oublier - cela a été peut-être un peu moins dit - les produits dits à risques, eux aussi d'origine britannique, qui ont continué à être importés.

Une autre de nos ambitions sera de faire le point sur l'état de la recherche. N'oublions pas qu'on ne peut pas juger le passé avec les connaissances d'aujourd'hui : la recherche a beaucoup évolué ces derniers mois et elle évoluera encore. Il faudra également évaluer les tests, cela a déjà commencé, je crois. Nous étions d'ailleurs de ceux qui ont souhaité leur généralisation pour répondre aux attentes de l'opinion publique et aux impératifs de santé publique. J'ai la conviction que nos travaux participeront au retour de la confiance, que nous appelons tous de nos voeux, mais qui doit s'appuyer sur des éclaircissements.

Nous sommes dans une situation à tout le moins paradoxale. Notre pays a consenti, avec l'implication des éleveurs, des efforts considérables pour garantir la sécurité alimentaire. Il ne s'en est pas moins retrouvé le premier au coeur de la tourmente parce qu'il a joué un rôle précurseur en se dotant d'outils dont nous attendons la mise en place au niveau européen. Je fais allusion, bien sûr, à l'agence de sécurité alimentaire. Notre parlement peut contribuer à faire avancer ce volet essentiel de la sécurité.

Je ne reviendrai pas sur les chiffres qui caractérisent une crise sans précédent : la consommation a chuté de plus de 60 % et nos exportations de 70 %. Cette situation traduit l'inquiétude des consommateurs et elle est ressentie par les éleveurs et par toute la filière comme une injustice. La meilleure réponse à ce sentiment, c'est l'exig ence de vérité, laquelle s'imposera à chacun des membres de la commission d'enquête.

Cette commission d'enquête aura une lourde charge.

En élargir le champ, comme cela a été fait, était tout à fait légitime. Ainsi, en matière de santé publique, elle devra établir un bilan de la recherche et du système de veille sanitaire lié à l'ESB. Elle s'appuiera sur les travaux déjà entrepris - on a cité ceux de MM. Mattei, Leyzour et Chevallier. Toutes ces contributions nous seront utiles.

Nous aurons aussi à nous préoccuper des conséquences de l'utilisation systématique des meilleurs tests, ce qui aura un coût - mais je crois qu'il faut faire le choix de la sécurité avant tout -, ce qui pose la question de la recherche et des moyens de l'accompagner.

Enfin, nous aurons à nous préoccuper des conséquences de l'interdiction des farines carnées dans l'alimentation animale. Cette interdiction, aujourd'hui prévue pour quelques mois en Europe, je souhaite que nous en tirions vraiment les enseignements et que nous la décrétions définitive. Mais c'est un autre débat. Quoi qu'il en soit, nous aurons à trouver des solutions pour faire face à la suppression des farines carnées dans l'alimentation animale, et donc à examiner la question des protéines végérales, sans occulter le problème des OGM, qui doit faire l'objet d'un vrai débat.

L'insuffisance de la production communautaire oblige en l'état actuel des choses - mais nous souhaitons tous que l'Europe, en tout cas la France, s'engage dans un plan de production de protéines végétales -...

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Absolument !

M. François Sauvadet.

... à des importations nouvelles de soja en provenance du continent américain. Or, il faut savoir qu'une partie de ce soja est transgénique. Voilà d'autres questions que nous devrons aborder et sur lesquelles nous aurons aussi probablement des recommandations à faire. Mais elles seront le fruit de nos travaux, il est inutile d'anticiper.

Mes chers collègues, nous savons bien, dans cette assemblée, et sur tous les bancs, que rien ne peut se faire, dans un pays où les échanges agricoles et agro-alimentaires contribuent largement à la vitalité de l'économie, sans une harmonisation des règles au niveau européen. Je salue tous les efforts qui pourraient être faits en c e sens. L'opposition les a déjà demandés, sans méconnaître les difficultés soulevées. L'harmonisation des règles est une des clés de la réussite en matière de sécurit é sanitaire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

Et, je le dis avec solennité, ceux des pays qui n'auraient pas consentis les mêmes efforts que nous avons entrepris depuis 1990 en matière de sécurité alimentaire, auront demain des comptes à rendre à leur opinion publique...

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Vous avez raison !

M. François Sauvadet.

... lorsque des cas de vache folle apparaîtront sur leur propre sol. Vous l'avez vu, l'apparition de cas d'ESB en Allemagne et en Espagne a conduit certains pays à se rallier à notre préconisation d'interdire les farines carnées dans l'alimentation animale. Vous avez vu comme la découverte d'un ou de plusieurs cas d'ESB a contribué à débloquer la situation. Eh bien, ces pays, notamment ceux qui ne s'étaient toujours pas engagés, bien après 1996, dans la sécurisation des farines comme nous l'avions fait, ces pays, je le répète, auront rendezvous avec leur opinion publique. Cela aussi, nous aurons à l'étudier, mais je n'irai pas plus loin.

En tout cas, je suis convaincu d'une chose : la commission d'enquête aura une lourde tâche et, plus encore, une lourde responsabilité vis-à-vis de l'opinion publique.

Cette responsabilité, il appartiendra à chacun de ses membres de l'assumer sans faiblesse, sans esprit partisan - en tout cas, c'est notre ferme intention - ...

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Très bien !

M. François Sauvadet.

... et avec la volonté réaffirmée de tirer tous les enseignements de la crise que nous traversons. Ce sont des défis importants qui ne souffrent pas, me semble-t-il, la polémique, qui ne sont pas lancés seulement à l'agriculture, mais qu'il appartient à la société tout entière de prendre en charge. Il est de notre responsabilité, à nous, représentation nationale, d'y contribuer.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Rebillard, dernier orateur inscrit.

M. Jacques Rebillard.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la crise de la vache folle est une crise complexe qui nécessite une approche globale. La recherche d'une complémentarité entre les pouvoirs publics, les politiques, les scientifiques, les agriculteurs, les industriels et les responsables de l'aval - transformation et distribution - est indispensable.

Alors que les conséquences sanitaires de cette maladie sont encore mal connues, Martin Hirsch, directeur général de l'AFSSA, nous indique que, selon le nombre de critères retenus pour la transmission de cette maladie, on pourrait avoir en Angleterre entre 60 et 136 000 cas déclarés du nouveau variant de cette maladie. Les décisions à prendre ne seront pas de même nature dans le premier ou le second cas.

L'agent pathogène du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob est un agent pathogène non conventionnel mal connu. Les connaissances et les doutes des chercheurs sont diffusés en direct par la presse et livrés comme tels au consommateur. L'émotionnel l'emporte sur la rationalité. Il s'agit donc d'une crise d'un nouveau type qui doit appréhendée comme telle par les parlementaires, et à laquelle des réponses de nature simpliste ne peuvent être données.

Pour reprendre les termes de Mme Marie-José Nicoli, présidente de l'UFC, « la crise de 1996 fut une crise sanitaire, la crise de novembre 2000 est avant tout une crise politique ». Cette crise politique révèle les difficultés des pouvoirs publics à faire respecter une législation et des principes de précaution. J'ajouterai qu'il s'agit aussi d'une crise de société. Pour avoir sacrifié au profit à court terme, nous nous retrouvons dans l'obligation de prendre des mesures dans l'urgence.

Il n'y a pas un responsable, mais une chaîne décisionnelle qui n'a pas voulu se remettre en cause. Le plus grave serait que, passé ce moment d'émotion, tout recommence comme avant : les petits arrangements avec la sécurité sanitaire, la tricherie sur la qualité des produits, la course au productivisme.

La mission du politique est d'anticiper. Dans le cas présent, il se retrouve dans la situation délicate du pompier face à un incendie qu'il a du mal à maîtriser. Pour tirer les enseignements du passé, il est légitime que les parlementaires se saisissent de ce dossier pour l'aborder dans son intégralité et dans sa globalité. Cette commission d'enquête ne doit pas être faite seulement pour régler des comptes avec le passé.

Les consommateurs qui retrouvent petit à petit le chemin de leur boucherie, attendent de leurs responsables un discours cohérent.

M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Très bien ! La surenchère et la démagogie de certaines annonces ont beaucoup nui à la filière bovine et aggravé les conséquences de la crise actuelle. Il est temps de retrouver un peu de sérénité. C'est dans cet esprit que devra travailler la commission d'enquête.

Les parlementaires n'ont pas vocation à apporter des réponses scientifiques, mais à définir des orientations politiques, à arrêter un cadre réglementaire et, surtout, à se donner les moyens de le faire respecter. Ils doivent aujourd'hui éclairer l'opinion sur une stratégie d'avenir.

A quelles questions devront-ils répondre ? Comment renforcer les systèmes de veille sanitaire et apprécier la fiabilité des dépistages ? Comment actualiser nos connaissances pour sécuriser la chaîne alimentaire ? Comment traiter dans son ensemble le dossier des farines animales : élimination des farines, recours aux protéines végétales, conditions d'introduction des farines anglaises sur notre territoire ? Comment promouvoir une agriculture raisonnée et raisonnable ? Comment convaincre nos partenaires européens de la pertinence de nos démarches ? A toutes ces questions, pourtant, une partie des réponses a déjà été fournie dans la loi d'orientation agricole ou dans le projet de loi sur les nouvelles régulations économiques. Pourquoi, alors, tant de difficultés à traduire la loi dans les comportements individuels ou collectifs ? Le retrait des farines animales de l'alimentation de tous les animaux est le prétexte à une réflexion plus large, il est le révélateur de bien d'autres dysfonctionnements dans notre société. Il est grand temps d'en tirer les enseignements.

C'est l'objectif que notre collègue Michel Vergnier s'est fixé en nous présentant sa proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur le recours aux farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage, la lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine et les enseignements de la crise en termes de pratiques agricoles et de santé publique. Je crois que chacun de ces termes est important. En tout état de


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cause, les députés du groupe RCV approuveront unanimement cette proposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, compte tenu de la séparation du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif, vous comprendrez que le Gouvernement ne souhaite pas s'exprimer longuement sur une proposition à laquelle il adhère et qu'il soutient, mais je voudrais simplement vous rappeler en quelques instants dans quel contexte elle survient et quelle est la ligne de conduite du Gouvernement.

Je tiens auparavant à saluer la hauteur des propos et le sens des responsabilités de tous ceux qui sont intervenus, le rapporteur, Michel Vergnier, que je salue, et l'ensemble des orateurs, sur tous les bancs. Vous voulez essayer non seulement de faire la lumière, mais aussi d'aider les pouvoirs publics à gérer cette crise et celles que l'on voit poindre, comme M. Goulard l'a souligné, et qui ne manqueront pas de survenir au cours des années à venir.

Au-delà des problèmes de la filière, je voudrais que nous ayons une pensée pour tous ceux qui vivent dans leur famille, dans leur chair, le problème dramatique du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob et de l'ensemble de ces maladies nouvelles qui apparaissent aujourd'hui, auxquelles les nouvelles découvertes et la recherche, bien qu'accrue, ne font pas face dans l'imméd iat. Ils nous interpellent aujourd'hui, parce qu'ils pensent toujours qu'il y a ici ou là mieux à faire en politique et peut-être ensemble à trouver des solutions.

Comme M. Sauvadet l'a rappelé, la sécurité pour tous est un impératif. Il ne peut pas y avoir de sécurité à deux vitesses, pour tel ou tel type de produit, pour tel ou tel type de population. L'objectif des pouvoirs publics est d'assurer la sécurité alimentaire par des mesures prises en temps voulu, sur des bases scientifiques.

J'ai assisté cet après-midi aux assises de l'alimentation avec le Premier ministre, M. Glavany et Mme Gillot.

Le Premier ministre a fixé quatre objectifs, à travers quatre missions nouvelles, pour renforcer à l'avenir la sécurité et, au-delà même de la confiance, donner à l'ensemble de la filière et des différentes sciences dans le domaine de la santé humaine, de la santé animale, de la sécurité alimentaire, les moyens de faire face, par des circulaires, des directives, des missions et des moyens financiers.

Je suis d'accord avec vous : de la vérité et de la transparence naîtra la confiance.

M. François Sauvadet.

Très bien ! M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le temps n'est pas à jeter des anathèmes.

M. François Sauvadet.

Très bien ! M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Aujourd'hui, l'Etat n'a rien à cacher et l'opacité ne peut être une règle de conduite pour favoriser tels ou tels intérêts financiers...

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Très bien ! M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

... comme ceux que vous avez évoqués, parfois à juste titre.

M. François Goulard.

Oui ! M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Il doit adopter une méthode, qu'on peut contester, mais qui, je crois, est acceptée par tous aujourd'hui. Elle repose sur l'expertise, la gestion et le contrôle.

Pour l'expertise, il faut fixer à des organismes indépendants le soin de nous dire l'état de la science, et avouez que nous vivons actuellement et dans le doute et l'incertitude.

Certains ont dit qu'on ne pouvait juger un état de fait aujourd'hui à l'aune des connaissances d'alors. Ils ont eu raison.

M. François Sauvadet.

Merci.

M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

J'entendais tout à l'heure, à La Défense, Mme BrugèrePicou, mon ex-collègue et amie de l'école vétérinaire, expliquer comment, aujourd'hui, alors qu'elle travaille sur le prion depuis maintenant plus de douze ans, elle est incapable encore de dire quelle est la dose minimale infectante, la voie réelle d'infection, de savoir quels sont les temps d'incubation réels. Or, avec une aussi grande incertitude et un doute permanent, il nous faut malgré tout tendre vers le risque zéro.

Le Gouvernement français, depuis 1990, a pris des mesures de fermeté.

Lorsqu'on a découvert un cas d'encéphalopathie spongiforme féline, laissant penser à un franchissement des

« barrières d'espèces », le Gouvernement a décrété un embargo total sur les viandes, le 30 mai 1990. Puis, quand on a évoqué la possibilité d'une transmission à l'homme, il a décrété un nouvel embargo le 21 mars 1996, et pris des mesures pour améliorer le traitement des farines.

Le premier embargo a été levé le 6 juin 1990. Quant au second, la France, rejoint par l'ensemble de l'Union européenne le 27 mars 1996, le maintient aujourd'hui, seule en Europe, au vu de l'avis émis par l'AFSSA à la fin de 1999.

Dès juillet 1990, soit avant la plupart des autres Etats de l'Union, la France interdit l'usage des farines animales dans l'alimentation des bovins. Dès avril 1996, le Gouvernement français sécurise les farines utilisées dans l'alimentation des animaux d'élevage en prévoyant l'élimination des « matériaux à risque spécifiés ».

Je ne fais de procès à personne mais je rappelle à ceux qui disent aujourd'hui, à juste titre, qu'il faut interdire les farines et, comme je le crois, les interdire définitivement, qu'il y a encore deux ou trois ans en France, des responsables agricoles expliquaient que les farines animales faisaient partie de la modernité de l'agriculture.

Je sais bien qu'on a toujours tort d'avoir raison trop tôt, mais, en l'occurrence, ni vous, ni nous, n'avons de leçons de sécurité à recevoir en la matière ! La France s'est dotée en 1998, grâce, je le reconnais devant les parlementaires de l'opposition, à une proposition de loi du Sénat de 1997, d'un dispositif de veille sanitaire reposant en particulier sur la mise en place de l'AFSSA, que vous avez citée abondamment à travers les propos de son directeur, M. Hirsch. Ses avis constituent


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des références scientifiques et elle sert de modèle à cette autorité de l'alimentation qui, le Conseil de Nice l'a rappelé, devra être opérationnelle le 1er janvier 2002.

J'ai participé avec vous à la création de cette agence française de sécurité sanitaire des aliments. A l'époque, nous y travaillions tous, sur tous les bancs. Nous avions le sentiment de monter quelque chose de difficile, de plus opérationnel. J'ai même entendu les mots d'usine à gaz ! Je peux vous dire aujourd'hui, pour la voir travailler de près à Maisons-Alfort, avec le CNEVA, avec l'ensemble des dispositifs qui lui ont été adjoints, qu'elle travaille bien, vite, et rend des avis éminents qui apparaissent aujourd'hui incontestables.

J'ai rencontré à plusieurs reprises le commissaire européen M. David Byrne, qui m'a demandé comment nous avions créé en France une telle agence. J'ai rencontré la semaine dernière à l'Assemblée nationale, lors d'un colloque qui réunissait tous les directeurs, tous les présidents d'agences qui existent actuellement en Europe. Aucune d'entre elles n'a une même approche du problème, mais toutes tendent vers le même but : être des instruments d'évaluation au service des politiques pour leur permettre de prendre des décisions.

L'ambitieux programme annoncé par le Gouvernement le 14 novembre comprend différents points, dont l'extension du dépistage de l'ESB par les tests biologiques, l'élargissement des conditions d'exclusion de certaines catégories de bovins de la chaîne alimentaire, la poursuite des mesures de retrait des tissus à risque.

Depuis hier, aucun animal malade ou accidenté ne pourra entrer dans la chaîne alimentaire. Jusqu'à présent, on euthanasiait les animaux malades ou suspects. Désormais, même les animaux ayant une fracture, qui allaient à l'abattoir d'ugence, ne pourront plus entrer dans la chaîne alimentaire. Cela aura un coût et il faudra bien entendu que nous en parlions.

L'Agence a fait des révélations, et la transparence a un prix, elle est difficile à gérer. Quand on dit la vérité, on crée dans un premier temps l'inquiétude ! La France a eu le mérite, avant d'autres, de dire jour après jour le nombre de cas cliniques détectés par les services d'épidémio-surveillance. Le président du groupe d'études sur l'élevage bovin en bassin allaitant à l'Assemblée, qui enquêtait hier sur la traçabilité, évoquait bien ce p roblème. Regardez comme nous sommes devenus majeurs en quelques semaines. En annonçant à l'AFSSA hier que le pourcentage d'animaux atteints, dans un cheptel certes beaucoup plus à risque, centré sur une partie ouest de la France se situait dans le haut de la fourchette, et très haut pour les animaux accidentés, avec plus de 3,1 , on pouvait à nouveau créer une psychose. Il n'y en a pas eu, parce que nous avons su donner des explication, déterminer la cause, et parce que nous avons pris des décisions en conséquence.

Ce sont des mesures courageuses dans l'immédiat, mais c'est de la vérité et de la transparence que renaîtra demain la confiance. Ceux qui ne veulent pas regarder les choses en face, ceux qui nient l'évidence, la contamination dans leur pays dans les mêmes conditions que nous et à la même époque, auront demain à rendre compte devant leur opinion publique, et les mêmes questions leur seront posées.

M. Germain Gengenwin.

C'est vrai !

M. François Sauvadet.

Très bien ! M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Pour revenir à votre proposition de résolution, il me semble important d'articuler le travail du Parlement et celui du Gouvernement. Au-delà de vos fonctions de législateur, que vous exercez avec une compétence que je connais bien, depuis longtemps, au-delà de vos fonctions de contrôle qui sont éminemment nécessaires, particulièrement sur un tel sujet, il est pertinent que le Parlement puisse éclairer l'action du Gouvernement.

M. Germain Gengenwin.

Très bien ! M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Dans la gestion de telles crises, nous sommes souvent amenés à gérer les événements au jour le jour. Afin d'avoir le recul indispendable et une vision globale des problèmes, disposer d'un audit exhaustif de la situation me semble être un outil essentiel dont le Gouvernement souhaite disposer.

Je suis donc tout à fait favorable à l'initiative que vous prenez et vous assure que le Gouvernement mettra tout en oeuvre pour faciliter votre travail.

Aussi, je me réjouis que la proposition de résolution initiée par MM. Debré, Douste-Blazy et Mattei, amendée par le rapporteur et modifiée encore aujourd'hui, si j'ai bien compris, soit adoptée par votre assemblée.

Sur un sujet aussi grave, il me semble important que votre assemblée puisse dépasser ses clivages, et je suis heureux de constater que tel est le cas.

La commission de la production s'est donc prononcée en faveur d'une réflexion menée sur la question du recours aux farines animales telle qu'elle était proposée dans le texte initial, tout en considérant qu'il fallait élargir le champ d'investigation de la future commission d'enquête.

Il y a quelque deux ans, les membres de la commission s'en souviennent, j'étais rapporteur de la loi d'orientation agricole. Nous disions à l'époque qu'il fallait peut-être réorienter les crédits de l'agriculture vers une agriculture moins polluante, moins utilisatrice d'intrants et de pesticides, toxiques par ailleurs, vers une agriculture tournée vers des produits adossés à des signes de qualité et adossés au territoire, capable de produire des emplois et de la valeur ajoutée.

C'est peut être le moment d'avoir une prise de conscience, sans rejet par ailleurs. Nous avons besoin des deux agricultures qui existent en France : une agriculture capable de gagner des parts de marché et sûre de son savoir-faire aujourd'hui, et une agriculture plus présente encore, qui occupe le territoire, la montagne, les zones intermédiaires, les zones difficiles, et je pense en particulier à la diagonale aride et au Massif central. Si nous pouvions avoir ensemble une telle réflexion, nous aurions fait un grand pas ! Aussi, j'espère qu'une meilleure compréhension naîtra du débat qui s'engage ce soir dans la sérénité, dans le but de faire la lumière - exigence à laquelle le Gouvernement, bien entendu, répondra, car il n'a rien à cacher.

Une meilleure compréhension pour nous, d'abord - et les scientifiques nous y aideront -, mais aussi pour nos concitoyens, qui attendent des pouvoirs politiques qu'ils gèrent non seulement le risque mais aussi la perception du risque. C'est ainsi que nous pourrons, demain, restaurer la confiance et permettre, d'une part, l'amélioration de l'état sanitaire du cheptel, mais surtout la sécurité sanitaire et humaine à laquelle nous sommes, vous et nous, tant attachés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, l'article unique de la proposition de résolution dans le texte de la commission.

Article unique

M. le président.

« Article unique. - Il est créé, en application de l'article 140 du règlement, une commission d'enquête parlementaire de trente membres sur le recours aux farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage, la lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine et les enseignements de la crise en termes de pratiques agricoles et de santé publique.

« Cette commission devra notamment :

« en ce qui concerne la santé publique : établir un bilan des recherches en cours, une estimation objective des risques et un état des ressources disponibles en termes d'information du public et de capacités de diagnostic ; formuler des recommandations visant à renforcer le système de veille sanitaire ;

« en matière de protection des consommateurs : vérifier, que, à mesure de l'avancée des connaissances scientifiques concernant l'ESB, la chaîne alimentaire a fait l'objet de mesures de prévention appropriées ;

« -en matière de recours aux farines animales : faire le point sur les données disponibles sur l'introduction en France de farines animales d'origine britannique et sur l'utilisation de farines carnées dans l'alimentation des bovins après les mesures d'interdiction prises par les pouvoirs publics ; examiner les problèmes que posent l'élimination des farines carnées et leur remplacement par la production de protéines végétales non génétiquement modifiées ; envisager les soutiens nécessaires aux cultures fourragères et la revalorisation de la prime à l'herbe ;

« en matière de lutte contre l'ESB : apprécier le dispositif de surveillance du troupeau bovin et se prononcer sur les diverses pratiques possibles en matière de tests et d'utilisation de leurs résultats ;

« en ce que concerne l'évolution de notre agriculture : formuler des suggestions visant à la "désintensification" du système de production agricole et à la promotion d'une agriculture tournée vers la sécurité sanitaire de l'alimentation. »

La parole est à M. Léonce Deprez, inscrit sur l'article unique.

M. Léonce Deprez.

Monsieur le président, mes chers collègues, cet article unique est lourd de questions importantes qui se résument ainsi : baisse de 40 % des ventes de viande bovine. La réalité est là, et je ne pense pas que nous devions l'appeler psychose. Les Français ont du bon sens. Ils ne cèdent pas à un mouvement de panique. Ils ont dans l'esprit les épisodes de la grave histoire du sang contaminé. Ils savent désormais qu'on les a peu informés et même mal informés à propos du drame de la vache folle, car c'est un drame. Nous avons reçu en réunion de travail Mme Brugère-Picoux, l'une des spécialistes les plus reconnues, professeur à l'école vétérinaire de MaisonsAlfort. Elle avait écrit, en 1989, monsieur le secrétaire d'Etat, dans le Bulletin de la société vétérinaire, qui vous est cher, qu'il ne fallait « rien importer de GrandeBretagne ». On ne l'a pas écoutée. Pourquoi ? Nous demandons une commission d'enquête parce qu'il faut mettre un terme à la désinformation de nos populations. Nous savons aujourd'hui qu'à partir de l'année 1988, les gouvernements britanniques savaient que l'épidémie d'ESB était liée à la consommation des farines carnées par les bovins. On savait aussi, en France et en Grande-Bretagne, que le problème anglais était épidémique.

Nous voulons savoir pourquoi on a, d'une part, laissé des animaux consommer des farines en provenance du Royaume-Uni et, d'autre part, laissé des produits anglais d'origine bovine s'exporter dans notre pays.

Nous voulons savoir pourquoi on n'a pas entendu les alertes, pourquoi la Grande-Bretagne a continué d'exporter vers la France, jusqu'à un arrêté en date du 15 février 1990, les farines de viande qu'elle avait interdites à tous ses ruminants et qui se trouvaient, de ce fait, 30 % moins chères que les autres.

Pire encore, pourquoi a-t-on laissé la Grande-Bretagne exporter en France, dans des proportions massives, des abats de bovin ? C'est grave, car ce n'est qu'en cette année 2000, pour certains d'entre nous, que nous avons appris que le risque pour l'homme était, du fait des abats de bovin, bien supérieur à celui de la simple absorption d'une farine contaminée par un bovin. Ce n'est qu'en l'an 2000 que nous avons appris que les abats pouvaient entrer directement dans la chaîne alimentaire humaine et exposer l'homme à une contamination directe.

Or les incertitudes scientifiques viennent de ce que l'on ne savait pas précisément à cette période ce qui entrait d ans l'alimentation : préparation de certains steaks hachés, alimentation infantile.

Nous voulons donc aussi savoir pourquoi les pouvoirs publics n'ont pas choisi le test de dépistage le plus sensible, celui du CEA, et pourquoi on n'a pas donné plus tôt aux abattoirs l'ordre de réaliser des tests systématiques, ce qui doit se faire impérativement désormais.

Nous voulons savoir pourquoi la priorité n'est pas donnée, actuellement, aux moyens financiers nécessaires pour réaliser le test du CEA.

Nous voulons savoir si la possibilité de diagnostiquer la maladie d'un animal à partir d'un simple prélèvement de sang serait un progrès scientifique considérable.

Nous voulons savoir scientifiquement s'il est bien vrai que le prion n'est pas dans les muscles alors qu'il progresse par les ramifications nerveuses.

Nous voulons savoir, la période d'incubation chez les bovins étant de cinq ans, quand les mesures prises au niveau national et, enfin, au niveau européen pourront rendre à nos éleveurs, aux professionnels de la viande et aux consommateurs, la garantie de la sécurité alimentaire par l'effet de l'éradication de la maladie.

Ce sont les mesures de vérification systématique mises en place par notre pays qui ont permis de déceler les cas supplémentaires en France. On peut donc penser que le nombre de cas d'ESB est sous-estimé, et même très sousestimé, dans la plupart des pays d'Europe, notamment en Allemagne et en Espagne.

Nous pensons donc nécessaire et urgent de clarifier les réponses à toutes ces inquiétudes. C'est pourquoi nous sommes tous désireux de demander la création de cette commission d'enquête et de faire en sorte que son travail puisse enfin éclairer les élus de la nation et l'opinion. Il s'agit de restaurer la confiance dans nos élevages bovins, dans la protection de la viande et, plus généralement, dans la sécurité alimentaire en France et en Europe.

M. François Sauvadet et M. Germain Gengenwin.

Très bien !


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M. le président.

M. Sauvadet a présenté un amendement, no 2, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa de l'article unique, supprimer les mots : "de pratiques agricoles et". »

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Je vais, monsieur le président, répondre à votre invitation, que vous n'avez pas encore formulée mais que je pressens, d'être bref. (Sourires.)

C'est pourquoi je renvoie à ce que j'ai dit dans la discussion générale au nom de mon groupe, quand je demandais simplement à ce qu'on nous précise - ce qui a d'ailleurs été fait en commission - le pourquoi des mots

« pratiques agricoles ». Mais je crois que les amendements suivants contribuent à la précision, aussi bien l'amendement no 1 que l'amendement no 4, signé par moi-même mais aussi et surtout par MM. Parrenin, Bataille, Birraux, Brottes, etc.

M. le président.

Dois-je comprendre, monsieur Sauvadet, que vos amendements nos 2 et 1 sont retirés au profit de l'amendement no 4 ?

M. François Sauvadet.

Je les retirerai, mais je veux d'abord entendre les explications de M. le rapporteur.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 2 ?

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Nous avons discuté tout à l'heure de l'expression que l'amendement propose de supprimer. Nous vous avions aussi éclairé, monsieur Sauvadet, en commission. Il m'appartient de dire, car c'est mon rôle, que cet amendement a été repoussé par la commission. Elle a observé que cette dénomination de « pratiques agricoles » était utilisée, comme je l'avais indiqué, par les professionnels eux-mêmes. Nous avons estimé que des enseignements pouvaient être tirés, et notamment s'agissant de la crise de l'ESB, je le dis très clairement ici, en ce qui concerne les modes de production. C'était bien cela qui nous préoccupait, comme nous aurons l'occasion de le voir plus loin. Il ne s'agit pas d'opposer les uns aux autres, comme vous l'avez bien dit tout à l'heure. Je partage tout à fait votre avis sur le fait qu'il ne peut pas y avoir une agriculure à deux vitesses.

Nous ne pouvons pas chercher à faire la lumière sur tel type d'agriculture et pas sur tel autre. D'ailleurs, nous passerions ainsi à côté de l'objet de notre propre travail.

Que ce soit très clair.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Si vous le permettez, monsieur le président, je voudrais répondre d'un mot à M. Deprez sur un point qu'il a évoqué tout à l'heure, à savoir la position qu'a prise

Mme Brugère-Picoux en 1989, position que je connais, comme je connais bien cette chercheuse. Il faut savoir que Mme Brugère-Picoux n'a pas dit ce que vous avez rapporté. Elle a fait une communication...

M. Léonce Deprez.

Ecrite ! M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

... pour la revue de l'école vétérinaire d'Alfort. Le comité scientifique vétérinaire d'Alfort dans son ensemble n'a pas reçu sa communication et a souhaité ne pas la faire paraître dans la presse, considérant que la maladie de Creutzfeldt-Jakob n'était qu'une variante, nouvelle mais très connue, de la tremblante du mouton, découverte par des vétérinaires français en 1920. A l'époque, les pouvoirs publics, qui avaient saisi les autorités scientifiques, en matière humaine et vétérinaire, avaient eu la même réponse.

On peut dire, a posteriori , que, c'est vrai, Mme BrugèrePicoux avait pressenti ce qui allait s'avérer par la suite, mais avouez qu'il était difficile pour les pouvoirs politiques de l'époque de gérer à partir de simples pressentiments ce qui est devenu ultérieurement une crise. En tout état de cause, dès que la barrière a été franchie, dès que la preuve qu'un félin avait été atteint, le Gouvernement a aussitôt pris des mesures d'embargo draconiennes.

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Monsieur le président, compte tenu des éléments extrêmement clairs qu'ont apportés à la fois le rapporteur et le secrétaire d'Etat, je retire l'amendement no

2.

M. le président.

L'amendement no 2 est retiré.

M. Sauvadet a présenté un amendement, no 1, ainsi rédigé :

« Supprimer le dernier alinéa de l'article unique. »

Monsieur Sauvadet, je suppose que vous allez également retirer cet amendement et défendre l'amendement qui suit, l'amendement no 4 ?

M. François Sauvadet.

L'amendement no 4 est lié à l'amendement no 1, monsieur le président. Je n'ai retiré que l'amendement no

2.

M. le président.

J'avais cru comprendre tout à l'heure que vous retireriez aussi l'amendement no

1.

M. François Sauvadet.

Non.

M. le président.

Mais dans l'amendement no 1, vous proposez de supprimer le dernier alinéa, alors que, dans l'amendement no 4, vous proposez au contraire de le rédiger autrement...

M. François Sauvadet.

Monsieur le président, il faut procéder dans l'ordre. Si nous voulons examiner l'amendement no 4, qui prévoit de rédiger autrement le dernier alinéa, nous devons d'abord examiner l'amendement no 1, qui propose de le supprimer.

M. le président.

Pas du tout ! Cela dit, vous êtes libre, évidemment, de défendre l'amendement no 1. Mais si jamais celui-ci était adopté, l'amendement no 4 tomberait.

Voilà pourquoi je vous propose plutôt de retirer l'amendement no 1 et de passer directement à l'amendement no

4.

M. François Sauvadet.

Je vais suivre votre recommandation, monsieur le président, et je retire l'amendement no

1.

M. le président.

L'amendement no 1 est retiré.

MM. Sauvadet, Parrenin, Bataille, Birraux, Brottes, Daniel, Mme Denise, MM. Grimault, Lestas, Revol, Rimbert, Robert et Vuillaume ont présenté un amendement, no 4, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le dernier alinéa de l'article unique :

« étudier les diverses formes de production agricole et leurs effets sur la sécurité sanitaire de l'alimentation. »

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

L'amendement no 4, que mes collègues cosignataires pourraient d'ailleurs défendre tout aussi bien que moi, vise à lier l'examen des diverses


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

formes de production agricole à celui de leurs effets sur la sécurité sanitaire de l'alimentation, reprenant d'ailleurs en cela ce que M. le rapporteur a parfaitement bien exprimé : il ne peut y avoir de sécurité à deux vitesses, elle doit être établie - c'est une exigence que nous partageons tous - pour l'ensemble de la production et de la chaîne alimentaire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Vergnier, rapporteur.

Cet amendement a été accepté par la commission. Il est d'ailleurs cosigné par tous ceux de ses membres qui étaient présents.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

4. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Titre

M. le président.

Avant de mettre aux voix l'article unique de la proposition de résolution, j'indique à l'Assemblée que, conformément aux conclusions de la commission, son titre est ainsi rédigé :

« Proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur le recours aux farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage, la lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine et les enseignements de la crise en termes de pratiques agricoles et de santé publique. »

Sur cet intitulé, je suis saisi d'un amendement no 3 de M. Sauvadet.

Cet amendement est ainsi rédigé :

« Dans le titre de la proposition de résolution, supprimer les mots : "de pratiques agricoles et". »

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 3 est retiré.

Je mets aux voix l'article unique de la proposition de résolution, modifié par l'amendement no

4. (L'article unique de la proposition de résolution, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Constitution de la commission d'enquête

M. le président.

Afin de permettre la constitution de la commission d'enquête dont l'Assemblée vient de décider la création, MM. les présidents des groupes voudront bien faire connaître, conformément à l'article 25 du règlement, avant le mercredi 20 décembre 2000, à dixsept heures, le nom des candidats qu'ils proposent.

La nomination prendra effet dès la publication de ces candidatures au Journal officiel.

3

RETRAIT D'ARTICLES D'UN PROJET DE LOI

M. le président.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité la lettre suivante :

« Le 12 décembre 2000.

« Monsieur le président,

« Le 24 mai dernier, le Gouvernement avait déposé devant votre assemblée un projet de loi de modernisation sociale (no 2415) présenté la veille en C onseil des ministres. Le texte de ce projet comprend deux volets distincts, l'un portant sur des dispositions relatives à la santé, la solidarité et à la sécurité sociale, l'autre portant sur des dispositions relatives au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.

« L'examen de ce projet ayant dû être déplacé dans l'ordre du jour prioritaire fixé par le Gouvernement en vertu de l'article 48 de la Constitution, un certain nombre des dispositions initialement prévues dans ce texte ont entre-temps fait l'objet d'une adoption ou d'un examen au travers d'autres projets ou propositions de lois.

« Le Gouvernement ayant décidé d'inscrire le projet de loi de modernisation sociale à l'ordre du jour prioritaire pour les 9, 10 et 11 janvier 2001, j'ai l'honneur de vous communiquer la liste des articles dont l'examen n'est plus envisagé : il s'agit des articles 3, 4, 7, 12, 13, 15, 18, 23, 27, 46, 47, 48, 49, 53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61 et 66.I.

« L'ensemble des autres articles du projet de loi seront donc soumis à la discussion de votre assemblée et de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales dès le 13 décembre prochain.

« Je vous prie d'agréer, monsieur le président, l'expression de ma haute considération.

« Signé : É

LISABETH G

UIGOU » Acte est donné de cette communication.

4 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

CONSTITUTIONNELLE

M. le président.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Pierre Lellouche une proposition de loi constitutionnelle visant à consulter par référendum les populations des collectivités territoriales de la République.

Cette proposition de loi constitutionnelle, no 2808, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la l égislation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

5 DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Charles Cova une proposition de loi tendant à modifier les dispositions de l'article L.

2213-2 du code général des collectivités territoriales relatif au stationnement des véhicules arborant les macarons GIC et GIG.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

Cette proposition de loi, no 2802, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Pierre Hellier une proposition de loi visant à restaurer la gynécologie médicale.

Cette proposition de loi, no 2803, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de Mme Marie-Jo Zimmermann une proposition de loi abrogeant de plein droit toutes les dispositions juridiques discriminatoires entre les hommes et les femmes et permettant à toute personne concernée de saisir l'Observatoire de la parité.

Cette proposition de loi, no 2804, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de Mme Christine Boutin et MM. Jean-François Chossy et Jean-Pierre Foucher une proposition de loi tendant à rendre irrecevable toute demande d'indemnisation du seul fait de sa naissance.

Cette proposition de loi, no 2805, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Jean-François Mattei une proposition de loi relative à l'interdiction de poursuivre une action en indemnisation du fait d'un handicap naturellement transmis.

Cette proposition de loi, no 2806, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Marc Dumoulin une proposition de loi visant à autoriser l'accès payant à certaines portions du domaine public communal lors de manifestations associatives.

Cette proposition de loi, no 2807, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

6 DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Didier Migaud, rapporteur général, un rapport, no 2795, fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2001.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de Mme Christine Lazerges un rapport, no 2796, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à faciliter l'indemnisation des condamnés reconnus innocents et portant diverses dispositions de coordination en matière de procédure pénale (no 2740).

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Jacques Brunhes un rapport, no 2797, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République sur la proposition de loi de Mme Jacqueline Fraysse et plusieurs de ses collègues, tendant à améliorer l'accès aux fonctions électives locales (no 2738).

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Eric Besson un rapport, no 2799, fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, un rapport, no 2809, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur le projet de loi de modernisation sociale (no 2415) : de M. Philippe Nauche, sur le titre Ier : Santé, solidarité et sécurité sociale ; de M. Gérard Terrier, sur le titre II : Travail, emploi et formation professionnelle.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Didier Migaud, rapporteur général, un rapport, no 2810, fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en nouvelle lecture, sur le projet de loi de finances pour 2001, modifié par le Sénat (no 2794).

7 DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

M. le président.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de Mme Hélène Mignon un rapport d'information, no 2798, fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, sur le projet de loi de modernisation sociale (no 2415).

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de Mme Martine Lignières-Cassou un rapport d'information, no 2800, déposé en application de l'article 6 septies de l'ordonnance no 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, sur son activité au cours de l'année 2000.

J'ai reçu, le 13 décembre 2000, de M. Yves Tavernier un rapport d'information, no 2801, déposé en application de l'article 146 du règlement par la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, sur les activités et le contrôle du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale.

8

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Jeudi 14 décembre 2000, à neuf heures, première séance publique : Discussion de la proposition de loi no 2738, de Mme Jacqueline Fraysse et plusieurs de ses collègues tendant à améliorer l'accès aux fonctions électives locales :

M. Jacques Brunhes, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2797).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 13 DÉCEMBRE 2000

A quinze heures, deuxième séance publique : Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale : M. Jean-Yves Caullet, rapporteur (rapport no 2790).

Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat no 2740, tendant à faciliter l'indemnisation des condamnés reconnus innocents et portant diverses dispositions de coordination en matière de procédure pénale : Mme Christine Lazerges, rapporteure, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2796).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances pour 2001 : M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 2810).

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures trente-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT