PROJET DE LOI
[N° 1336]
adopté par le Sénat
relatif au
code de commerce (partie législative).

ANNEXE
CODE DE COMMERCE

LIVRE III
DE LA VENTE ET DES CLAUSES D'EXCLUSIVITÉ
TITRE Ier
DE LA VENTE
Chapitre Ier
Des ventes faites sous forme de soldes,
liquidations ou déballages

Art. L. 311-1. - Les ventes de marchandises neuves, non comprises dans les interdictions de l'article L. 313-1, ne peuvent être faites sous la forme de soldes, liquidations, ventes forcées ou déballage, sans une autorisation spéciale du maire de la commune où la vente doit avoir lieu.
Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités de la demande et de la délivrance de l'autorisation susmentionnée.
Art. L. 311-2. - Sont réputées faites sous forme de soldes, liquidations, ventes forcées ou déballages, les ventes au détail de marchandises neuves définies aux articles L. 311-3 à L. 311-5, quelle que soit la dénomination sous laquelle elles sont présentées et quel que soit le prix pratiqué.
Art. L. 311-3. - Sont considérées comme soldes les ventes présentant un caractère réellement ou apparemment occasionnel, accompagnées ou précédées de publicité et annoncées comme tendant à l'écoulement accéléré de tout ou partie d'un stock de marchandises.
Art. L. 311-4. - Sont considérées comme liquidations les ventes accompagnées ou précédées de publicité présentant un caractère réellement ou apparemment occasionnel ou exceptionnel, annoncées comme tendant à l'écoulement accéléré de la totalité ou d'une partie des marchandises d'une entreprise à la suite de la décision de cesser un commerce, d'en modifier la structure ou les conditions d'exploitation, que cette décision soit volontaire ou qu'elle intervienne sous forme d'une vente forcée rendue nécessaire par un événement indépendant de la volonté du propriétaire.
Art. L. 311-5. - Sont considérées comme ventes au déballage les ventes précédées ou accompagnées de publicité, effectuées sur des emplacements ou dans des locaux non habituellement destinés au commerce considéré et présentant un caractère réellement ou apparemment occasionnel ou exceptionnel. Ce caractère peut résulter du mode d'acquisition des marchandises, de l'importance du stock mis en vente, des prix annoncés ou de toute autre cause.
Ne sont pas soumises aux dispositions du présent chapitre les ventes effectuées par des commerçants ambulants et forains lorsque ces ventes ne présentent pas de caractère exceptionnel, correspondant au commerce dont il est fait mention sur la taxe professionnelle des intéressés et qu'elles sont réalisées sur les emplacements où les commerçants exercent habituellement et régulièrement leur activité.
Art. L. 311-6. - Ne sont pas soumises au régime d'autorisation institué au premier alinéa de l'article L. 311-1 :
a) Les ventes au détail de marchandises réalisées sous forme de soldes périodiques ou saisonniers.
Ces ventes ne peuvent avoir lieu plus de deux fois par an. Chaque période ne peut excéder une durée continue de deux mois.
Les dates de début des périodes sont fixées dans chaque département par le préfet selon des modalités fixées par décret.
b) Les ventes effectuées dans le local ou sur l'emplacement où ils exercent leur commerce, par les professionnels dont l'activité habituelle a pour objet, en vue de les revendre, d'acheter à des commerçants ou à des fabricants, des marchandises neuves dépareillées, défraîchies, démodées ou de deuxième choix.
Art. L. 311-7. - Dans toute publicité, enseigne, dénomination sociale ou nom commercial, l'emploi du mot «solde (s) » ou de ses dérivés est interdit pour désigner toute activité, dénomination sociale ou nom commercial, enseigne ou qualité qui ne se rapporte pas à une opération de soldes telle que mentionnée aux articles L. 311-3 et L. 311-6.
Art. L. 311-8. - Toute infraction aux dispositions du présent chapitre est punie de la confiscation des marchandises mises en vente, et en outre d'une amende de 25 000 F, sans préjudice des dommages-intérêts s'il y a lieu.
Art. L. 311-9. - Pour l'infraction prévue à l'article L. 311-8, la tentative est punie comme le délit consommé.

Chapitre II
Des ventes sans intermédiaires

Art. L. 312-1. - Les ventes directes aux consommateurs et la commercialisation des productions déclassées pour défauts, pratiquées par les industriels, sont soumises à une réglementation fixée par décret.

Chapitre III
Des ventes aux enchères publiques

Art. L. 313-1. - Nul ne peut faire des enchères publiques un procédé habituel de l'exercice de son commerce.
Sont interdites les ventes au détail volontaires des marchandises neuves à cri public soit aux enchères, soit au rabais, soit à prix fixe proclamé avec ou sans l'assistance des officiers ministériels.
Art. L. 313-2. - Sont exclues de l'interdiction prévue à l'article L. 313-1, les ventes prescrites par la loi ou faites par autorité de justice, non plus que les ventes après décès, faillite, liquidation judiciaire ou cessation de commerce ou dans tous les autres cas de nécessité dont l'appréciation sera soumise au tribunal de commerce.
Sont également exceptées les ventes à cri public de comestibles et d'objets de peu de valeur connus dans le commerce sous le nom de menue mercerie.
Art. L. 313-3. - Les ventes publiques et au détail de marchandises qui ont lieu après décès ou par autorité de justice sont faites selon les formes prescrites et par les officiers ministériels préposés pour la vente forcée du mobilier.
Art. L. 313-4. - Les ventes de marchandises après liquidation judiciaire sont faites conformément aux articles L. 623-7 et suivants.
Quant au mobilier du débiteur, il ne peut être vendu aux enchères que par le ministère des commissaires-priseurs, notaires ou huissiers, conformément aux lois et règlements qui déterminent les attributions de ces différents officiers.
Art. L. 313-5. - Les ventes publiques et par enchères après cessation de commerce, ou dans les autres cas de nécessité prévus par l'article L. 313-2 ne peuvent avoir lieu qu'autant qu'elles ont été préalablement autorisées par le tribunal de commerce, sur la requête du commerçant propriétaire, à laquelle est joint un état détaillé des marchandises.
Le tribunal constate, par son jugement, le fait qui donne lieu à la vente; il indique le lieu de l'arrondissement où se fera la vente; il peut même ordonner que les adjudications n'auront lieu que par lot dont il fixe l'importance.
Il décide qui, des courtiers assermentés ou des commissaires-priseurs ou autres officiers publics, est chargé de la réception des enchères. L'autorisation ne peut être accordée pour cause de nécessité qu'au marchand sédentaire ayant depuis un an au moins son domicile dans l'arrondissement où la vente doit être opérée.
Des affiches apposées à la porte du lieu où se fera la vente énoncent le jugement qui l'a autorisée.
Art. L. 313-6. - Les ventes publiques aux enchères de marchandises en gros sont faites par le ministère des courtiers de marchandises assermentés dans les cas, aux conditions et suivant les formes fixées par décret en Conseil d'Etat.
Art. L. 313-7. - Toute infraction aux dispositions du présent chapitre est punie de la confiscation des marchandises mises en vente et, en outre, d'une amende de 25 000 F qui est prononcée solidairement tant contre le vendeur que contre l'officier public, qui l'aurait assisté, sans préjudice des dommages-intérêts, s'il y a lieu.
Est considérée comme complice et frappée des mêmes peines toute personne dont l'interposition a pour but de tourner les interdictions formulées à l'article L. 313-1.
Art. L. 313-8. - Le fait pour les vendeurs ou officiers publics de comprendre sciemment dans les ventes faites par autorité de justice, sur saisie, après décès, liquidation judiciaire, cessation de commerce, ou dans les autres cas de nécessité prévus par l'article L. 313- 2, des marchandises neuves ne faisant pas partie du fonds ou mobilier mis en vente, est passible des peines prévues à l'article précédent.
Art. L. 313-9. - Pour l'infraction prévue à l'article L. 313-7, la tentative est punie comme le délit consommé.
Art. L. 313-10. - Dans les lieux où il n'y a point de courtiers assermentés de commerce, les commissaires-priseurs, les notaires et huissiers font les ventes ci-dessus, selon les droits qui leur sont respectivement attribués par les lois et règlements.
Ils sont, pour lesdites ventes, soumis aux formes, conditions et tarifs imposés aux courtiers.
Art. L. 313-11. - La vente volontaire aux enchères, en gros, des marchandises dont la liste est fixée par décret, après avis de l'Assemblée de chambres françaises de commerce et d'industrie, peut avoir lieu par le ministère des courtiers assermentés, sans autorisation du tribunal de commerce.
Art. L. 313-12. - Les contestations relatives aux ventes réalisées en application de l'article 313-11 sont portées devant le tribunal de commerce.
Art. L. 313-13. - Il est procédé aux ventes prévues à l'article L. 313-11 dans des locaux spécialement autorisés à cet effet, après avis de la chambre de commerce et d'industrie et du tribunal de commerce.
Art. L. 313-14. - Un décret en Conseil d'Etat prescrit les mesures nécessaires à l'exécution des articles L. 313-11 à L. 313-13.
Il détermine notamment les formes et les conditions des autorisations prévues par l'article L. 313-13.
Art. L. 313-15. - Les tribunaux de commerce peuvent, après décès ou cessation de commerce, et dans tous les autres cas de nécessité dont l'appréciation leur est soumise, autoriser la vente aux enchères en gros des marchandises de toute espèce et de toute provenance.
L'autorisation est donnée sur requête ; un état détaillé des marchandises à vendre est joint à la requête.
Le tribunal constate par son jugement le fait qui donne lieu à la vente.
Art. L. 313-16. - Les ventes autorisées en vertu de l'article précédent, ainsi que toutes celles qui sont autorisées ou ordonnées par la juridiction consulaire dans les divers cas prévus par le présent code sont faites par le ministère des courtiers assermentés.
Néanmoins, il appartient toujours au tribunal, ou au juge qui autorise ou ordonne la vente, de désigner, pour y procéder, une autre classe d'officiers publics; dans ce cas, l'officier public, quel qu'il soit, est soumis aux dispositions qui régissent les courtiers, relativement aux formes, aux tarifs et à la responsabilité.
Art. L. 313-17. - Les dispositions des articles L. 313-12 à L. 313-14 sont applicables aux ventes visées aux articles L. 313-15 et L. 313-16.

TITRE II
DES CLAUSES D'EXCLUSIVITÉ

Art. L. 320-1. - Est limitée à dix ans la durée maximum de validité de toute clause d'exclusivité par laquelle l'acheteur, cessionnaire ou locataire de biens meubles s'engage vis-à-vis de son vendeur, cédant ou bailleur, à ne pas faire usage d'objets semblables ou complémentaires en provenance d'un autre fournisseur.
Art. L. 320-2. - Lorsque le contrat dans lequel cette clause est insérée est suivi ultérieurement, entre les mêmes parties, d'autres engagements analogues portant sur le même genre de biens, les clauses d'exclusivité contenues dans ces nouvelles conventions prennent fin à la même date que celle figurant au premier contrat.
Art. L. 320-3. - Toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause.
Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités.
Lorsque le versement d'une somme est exigé préalablement à la signature du contrat mentionné ci-dessus, notamment pour obtenir la réservation d'une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit, ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit.
Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat ou, le cas échéant, avant le versement de la somme mentionnée à l'alinéa précédent.

LIVRE IV
DE LA CONCURRENCE ET DES PRIX
TITRE PREMIER
DE LA LIBERTÉ DES PRIX
ET DES RÈGLES DE LA CONCURRENCE

Art. L. 410-1. - Les règles définies au présent livre s'appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques.
Art. L. 410-2. - Les prix des biens, produits et services sont librement déterminés par le jeu de la concurrence.
Toutefois, dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison, soit de situations de monopole ou de difficultés durables d'approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d'Etat peut réglementer les prix après consultation du conseil de la concurrence.
Les dispositions des deux premiers alinéas ne font pas obstacle à ce que le Gouvernement arrête, par décret en Conseil d'Etat, contre des hausses excessives de prix, des mesures temporaires motivées par une situation de crise, des circonstances exceptionnelles, une calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé. Le décret est pris après consultation du Conseil national de la consommation. Il précise sa durée de validité qui ne peut excéder six mois.

Chapitre Ier
De la transparence et des pratiques tarifaires

Art. L. 411-1. - Les règles relatives aux conditions de vente, aux ventes ou prestations à primes, aux refus de vente ou de prestation, prestations par lot ou par quantités imposées sont fixées par les articles L. l13-3, L. 121-35 et L. 122-1 du code de la consommation reproduits ci-après :
«Art. L. 113-3. - Tout vendeur de produits ou tout prestataire de services doit par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre procédé approprié, informer le consommateur sur les prix, les limitations éventuelles de la responsabilité contractuelle et les conditions particulières de la vente, selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l'économie, après consultation du Conseil national de la consommation.»
«Art. L. 121-35. - Est interdite toute vente ou offre de vente de produits ou de bien ou toute prestation ou offre de prestation de services, faite aux consommateurs et donnant droit à titre gratuit, immédiatement ou à terme, à une prime consistant en produits, biens ou services sauf s'ils sont identiques à ceux qui font l'objet de la vente ou de la prestation.
«Cette disposition ne s'applique pas aux menus objets ou services de faible valeur ni aux échantillons.
«Art. L. 122-1. - Il est interdit de refuser à un consommateur la vente d'un produit ou la prestation d'un service, sauf motif légitime, et de subordonner la vente d'un produit à l'achat d'une quantité imposée ou à l'achat concomitant d'un autre produit ou d'un autre service ainsi que de subordonner la prestation d'un service à celle d'un autre service ou à l'achat d'un produit.»
Art. L. 411-2. - Tout achat de produits ou toute prestation de services pour une activité professionnelle doivent faire l'objet d'une facturation.
Le vendeur est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la vente ou la prestation du service. L'acheteur doit la réclamer. La facture doit être rédigée en double exemplaire. Le vendeur et l'acheteur doivent en conserver chacun un exemplaire.
La facture doit mentionner le nom des parties ainsi que leur adresse, la date de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise et le prix unitaire hors TVA des produits vendus et des services rendus ainsi que tous rabais, remises ou ristournes dont le principe est acquis et le montant chiffrable lors de la vente ou de la prestation de service, quelle que soit leur date de règlement.
La facture mentionne également la date à laquelle le règlement doit intervenir. Elle précise les conditions d'escompte applicables en cas de paiement à une date antérieure à celle résultant de l'application des conditions générales de vente.
Toute infraction aux dispositions du présent article est punie d'une amende de 500 000 F.
L'amende peut être portée à 50% de la somme facturée ou de celle qui aurait dû être facturée.
Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal. Les peines encourues par les personnes morales sont :
1° L'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 dudit code;
2° La peine d'exclusion des marchés publics pour une durée de cinq ans au plus, en application du 5° de l'article 131-39 du code pénal.
Art. L. 411-3. - Tout producteur, prestataire de service, grossiste ou importateur est tenu de communiquer à tout acheteur de produit ou demandeur de prestation de services pour une activité professionnelle qui en fait la demande son barème de prix et ses conditions de vente. Celles-ci comprennent les conditions de règlement et, le cas échéant, les rabais et ristournes.
Les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les modalités de calcul et les conditions dans lesquelles des pénalités sont appliquées dans le cas où les sommes dues sont versées après la date de paiement figurant sur la facture, lorsque le versement intervient au-delà du délai fixé par les conditions générales de vente.
Ces pénalités sont d'un montant au moins équivalent à celui qui résulterait de l'application d'un taux égal à une fois et demie le taux de l'intérêt légal.
La communication prévue au premier alinéa s'effectue par tout moyen conforme aux usages de la profession.
Les conditions dans lesquelles un distributeur ou un prestataire de services se fait rémunérer par ses fournisseurs, en contrepartie de services spécifiques, doivent faire l'objet d'un contrat écrit en double exemplaire, détenu par chacune des deux parties.
Toute infraction aux dispositions visées ci-dessus est punie d'une amende de 100 000 F.
Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal.
Les peines encourues par les personnes morales sont :
1 ° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 dudit code;
2° La peine, mentionnée au 5° de l'article 131-39 dudit code, d'exclusion des marchés publics pour une durée de cinq ans au plus.
Art. L. 411-4. - A peine d'une amende de 500 000 F, le délai de paiement, par tout producteur, revendeur ou prestataire de services, ne peut être supérieur :
- à trente jours après la fin de la décade de livraison pour les achats de produits alimentaires périssables, à l'exception des achats de produits saisonniers effectués dans le cadre de contrats dits de culture visés à l'article 17 de la loi n° 64-678 du 6 juillet 1964 tendant à définir les principes et les modalités du régime contractuel en agriculture;
- à vingt jours après le jour de livraison pour les achats de bétail sur pied destiné à la consommation et de viandes fraîches dérivées;
- à trente jours après la fin du mois de livraison pour les achats de boissons alcooliques passibles des droits de consommation prévus aux articles 402 bis et 403 du code général des impôts;
- à défaut d'accords interprofessionnels conclus en application de la loi n° 75-600 du 10 juillet 1975 relative à l'organisation interprofessionnelle agricole et rendus obligatoires par voie réglementaire à tous les opérateurs sur l'ensemble du territoire métropolitain pour ce qui concerne les délais de paiement, à soixante-quinze jours après le jour de livraison pour les achats de boissons alcooliques passibles des droits de circulation prévus à l'article 438 du même code.

Chapitre II
Des atteintes à la concurrence
Section 1
Pratiques restrictives

Art. L. 412-1. - Est puni d'une amende de 100 000 F le fait, pour un commerçant, de revendre un produit en l'état à un prix inférieur à son prix d'achat effectif. Le prix d'achat effectif est présumé être le prix porté sur la facture d'achat, majoré des taxes sur le chiffre d'affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et, le cas échéant, du prix du transport.
Art. L. 412-2. - Les dispositions de l'article L. 412-1 ne sont pas applicables :
- aux produits périssables à partir du moment où ils sont menacés d'altération rapide;
- aux ventes volontaires ou forcées motivées par la cessation ou le changement d'une activité commerciale;
- aux produits dont la vente présente un caractère saisonnier marqué, pendant la période terminale de la saison des ventes et dans l'intervalle compris entre deux saisons de vente;
- aux produits qui ne répondent plus à la demande générale en raison de l'évolution de la mode ou de l'apparition de perfectionnements techniques;
- aux produits dont le réapprovisionnement s'est effectué ou pourrait s'effectuer en baisse, le prix effectif d'achat étant alors remplacé par le prix résultant de la nouvelle facture d'achat ou par la valeur de réapprovisionnement;
- aux produits dont le prix de revente est aligné sur le prix légalement pratiqué pour les mêmes produits par un autre commerçant dans la même zone d'activité.
Art. L. 412-3. - Les infractions aux dispositions de l'article L. 412-1 sont constatées, poursuivies et réprimées dans les conditions fixées par le présent livre.
Art. L. 412-4. - Tout commerçant, industriel ou artisan qui introduit une action en réparation du préjudice subi du fait d'actes de concurrence déloyale ou illicite peut, en outre, demander suivant une procédure qui sera fixée par décret en Conseil d'Etat que, en attendant qu'il soit définitivement statué au fond, la cessation des agissements reprochés au défendeur soit ordonnée à titre provisoire et sous astreinte.
Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables en matière de propriété industrielle. Les juridictions ayant statué sur les actions visées au premier alinéa peuvent en outre ordonner la publication de leurs décisions, soit par affichage en certains lieux qu'elles fixent, soit par insertion intégrale ou par extraits dans des journaux qu'elles désignent.
Art. L. 412-5. - Est puni d'une amende de 100 000 F le fait par toute personne d'imposer, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de services ou à une marge commerciale.
Art. L. 412-6. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou artisan :
1. De pratiquer, à l'égard d'un partenaire économique, ou d'obtenir de lui des prix, des délais de paiement, des conditions de vente ou des modalités de vente ou d'achat discriminatoires et non justifiés par des contreparties réelles en créant, de ce fait, pour ce partenaire, un désavantage ou un avantage dans la concurrence;
2. De refuser de satisfaire aux demandes des acheteurs de produits ou aux demandes de prestations de services, lorsque ces demandes ne présentent aucun caractère anormal, qu'elles sont faites de bonne foi et que le refus n'est pas justifié par les dispositions de l'article L. 412-11.
La demande d'un acheteur est présumée présenter un caractère anormal au sens de l'alinéa précédent lorsqu'il est établi que cet acheteur procède à l'une ou l'autre des pratiques déloyales visées par les articles L. 411-3 à L. 412-1 et L. 412-5 à L. 412-7;
3. De subordonner la vente d'un produit ou la prestation d'un service, soit à l'achat concomitant d'autres produits, soit à l'achat d'une quantité imposée, soit à la prestation d'un autre service.
L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le parquet, par le ministre chargé de l'économie ou par le président du Conseil de la concurrence, lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée au présent article.
Le président de la juridiction saisie peut, en référé, enjoindre la cessation des agissements en cause ou ordonner toute autre mesure provisoire.
Art. L. 412-7. - Il est interdit à toute personne d'offrir à la vente des produits ou de proposer des services en utilisant, dans des conditions irrégulières, le domaine public de l'Etat, des collectivités locales, et de leurs établissements publics.
Aucune association ou coopérative d'entreprise ou d'administration ne peut, de façon habituelle, offrir des produits à la vente, les vendre ou fournir des services si ces activités ne sont pas prévues par ses statuts.

Section 2
Pratiques anticoncurrentielles

Art. L. 412-8. - Sont prohibées, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendent à :
1. Limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises;
2. Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse;
3. Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique;
4. Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.
Art. L. 412-9. - Est prohibée, dans les mêmes conditions, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises :
1. D'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci;
2. De l'état de dépendance économique dans lequel se trouve, à son égard, une entreprise cliente ou fournisseur qui ne dispose pas de solution équivalente.
Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées.
Art. L. 412-10. - Est nul tout engagement, convention ou clause contractuelle se rapportant à une pratique prohibée par les articles L. 412-8 et L. 412-9.
Art. L. 412-11. - Ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 412-8 et L. 412-9 les pratiques :
1. Qui résultent de l'application d'un texte législatif ou d'un texte réglementaire pris pour son application;
2. Dont les auteurs peuvent justifier qu'elles ont pour effet d'assurer un progrès économique et qu'elles réservent aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, sans donner aux entreprises intéressées la possibilité d'éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits en cause. Ces pratiques ne doivent imposer des restrictions à la concurrence que dans la mesure où elles sont indispensables pour atteindre cet objectif de progrès.
Certaines catégories d'accords, notamment lorsqu'ils ont pour objet d'améliorer la gestion des entreprises moyennes ou petites, peuvent être reconnues comme satisfaisant à ces conditions par décret pris après avis conforme du Conseil de la concurrence.
Art. L. 412-12. - Est puni d'un emprisonnement de quatre ans et d'une amende de 500 000 F le fait, par toute personne physique, de prendre frauduleusement une part personnelle et déterminante dans la conception, l'organisation ou la mise en _uvre de pratiques visées aux articles L. 412-8 et L. 412-9.
Le tribunal peut ordonner que sa décision soit publiée intégralement ou par extraits dans les journaux qu'il désigne, aux frais du condamné.
Art. L. 412-13. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal des infractions définies aux articles L. 412-8 et L. 412-9.
Les peines encourues par les personnes morales sont :
1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal;
2° Les peines mentionnées aux 2°, 3°, 4°, 5°, 6° et 9° de l'article 131-39 du même code.
L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 du même code porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.

Section 3
La concentration économique

Art. L. 412-14. - Tout projet de concentration ou toute concentration de nature à porter atteinte à la concurrence, notamment par création ou renforcement d'une position dominante, peut être soumis, par le ministre chargé de l'économie, à l'avis du Conseil de la concurrence.
Ces dispositions ne s'appliquent que lorsque les entreprises qui sont parties à l'acte ou qui en sont l'objet ou qui leur sont économiquement liées ont, soit réalisé ensemble plus de vingt-cinq pour cent des ventes, achats ou autres transactions sur un marché national de biens, produits ou services substituables ou sur une partie substantielle d'un tel marché, soit totalisé un chiffre d'affaires hors taxes de plus de 7 milliards de francs, à condition que deux au moins des entreprises parties à la concentration aient réalisé un chiffre d'affaires d'au moins 2 milliards de francs.
Art. L. 412-15. - La concentration résulte de tout acte, quelle qu'en soit la forme, qui emporte transfert de propriété ou de jouissance sur tout ou partie des biens, droits et obligations d'une entreprise ou qui a pour objet, ou pour effet, de permettre à une entreprise ou à un groupe d'entreprises d'exercer, directement ou indirectement, sur une ou plusieurs autres entreprises une influence déterminante.
Art. L. 412-16. - Tout projet de concentration ou toute concentration ne remontant pas à plus de trois mois peut être soumis au ministre chargé de l'économie par une entreprise concernée. La notification peut être assortie d'engagements. Le silence gardé pendant deux mois vaut décision tacite d'acceptation du projet de concentration ou de la concentration ainsi que des engagements qui y sont joints. Ce délai est porté à six mois si le ministre saisit le Conseil de la concurrence.
Art. L. 412-17. - Le Conseil de la concurrence apprécie si le projet de concentration ou la concentration apporte au progrès économique une contribution suffisante pour compenser les atteintes à la concurrence. Le conseil tient compte de la compétitivité des entreprises en cause au regard de la concurrence internationale.
Art. L. 412-18. - Le ministre chargé de l'économie et le ministre dont relève le secteur économique intéressé peuvent, à la suite de l'avis du Conseil de la concurrence, par arrêté motivé et en fixant un délai, enjoindre aux entreprises, soit de ne pas donner suite au projet de concentration ou de rétablir la situation de droit antérieure, soit de modifier ou compléter l'opération ou de prendre toute mesure propre à assurer ou à rétablir une concurrence suffisante.
Ils peuvent également subordonner la réalisation de l'opération à l'observation de prescriptions de nature à apporter au progrès économique et social une contribution suffisante pour compenser les atteintes à la concurrence.
Ces injonctions et prescriptions s'imposent quelles que soient les stipulations des parties.
Art. L. 412-19. - Le Conseil de la concurrence peut, en cas d'exploitation abusive d'une position dominante ou d'un état de dépendance économique, demander au ministre chargé de l'économie d'enjoindre, conjointement avec le ministre dont relève le secteur, par arrêté motivé, à l'entreprise ou au groupe d'entreprises en cause de modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé, tous accords et tous actes par lesquels s'est réalisée la concentration de la puissance économique qui a permis les abus même si ces actes ont fait l'objet de la procédure prévue à la présente section.
Art. L. 412-20. - La procédure applicable aux décisions de la présente section est celle prévue au deuxième alinéa de l'article L. 432-4 et aux articles L. 432-6, L. 432-8 et L. 432-9. Toutefois, les intéressés doivent produire leurs observations en réponse à la communication du rapport dans un délai d'un mois.
Ces décisions sont motivées et publiées au bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avec l'avis du Conseil de la concurrence.
En cas de non-respect de ces décisions ou des engagements mentionnés à l'article L. 412-1 6, le ministre chargé de l'économie et le ministre dont relève le secteur économique intéressé peuvent, après consultation du Conseil de la concurrence et dans les limites de son avis, prononcer une sanction pécuniaire dont le montant est défini conformément au troisième alinéa de l'article L. 433-2.

Chapitre III
Sanctions juridictionnelles

Art. L. 413-1. - La juridiction peut condamner solidairement les personnes morales au paiement des amendes prononcées contre leurs dirigeants en vertu des dispositions du présent livre et des textes pris pour son application.
Art. L. 413-2. - En cas de condamnation au titre des articles L. 411-2, L. 411-4, L. 412-1 et L. 412-5 la juridiction peut, outre les peines prononcées, ordonner que sa décision soit publiée, intégralement ou par extraits, dans les journaux qu'elle désigne, aux frais du condamné.
Art. L. 413-3. - Pour l'application des dispositions du présent livre, à l'exception des articles L. 412-1 et L. 412-4, le ministre chargé de l'économie ou son représentant peut, devant les juridictions civiles ou pénales, déposer des conclusions et les développer oralement à l'audience. Il peut également produire les procès-verbaux et les rapports d'enquête.
Art. L. 413-4. - Pour l'application des articles 85 à 87 du Traité de Rome, le ministre chargé de l'économie et les fonctionnaires qu'il a désignés ou habilités conformément aux dispositions du présent livre, d'une part, le Conseil de la concurrence, d'autre part, disposent des pouvoirs qui leur sont reconnus par le présent chapitre et les articles L. 420-1 à L. 420-8 et L. 431-4 à L. 434-3. Les règles de procédure prévues par ces textes leur sont applicables.

TITRE II
DES POUVOIRS D'ENQUÊTE

Art. L. 420-1. - Des fonctionnaires habilités à cet effet par le ministre chargé de l'économie peuvent procéder aux enquêtes nécessaires à l'application des dispositions du présent livre.
Les rapporteurs du Conseil de la concurrence disposent des mêmes pouvoirs pour les affaires dont le conseil est saisi.
Des fonctionnaires de catégorie A du ministère chargé de l'économie, spécialement habilités à cet effet par le garde des Sceaux, ministre de la justice, sur la proposition du ministre chargé de l'économie, peuvent recevoir des juges d'instruction des commissions rogatoires.
Art. L. 420-2. - Les enquêtes donnent lieu à l'établissement de procès-verbaux et, le cas échéant, de rapports.
Les procès-verbaux sont transmis à l'autorité compétente. Un double en est laissé aux parties intéressées. Ils font foi jusqu'à preuve contraire.
Art. L. 420-3. - Les enquêteurs peuvent accéder à tous locaux, terrains ou moyens de transports à usage professionnel, demander la communication des livres, factures et tous autres documents professionnels et en prendre copie, recueillir sur convocation ou sur place les renseignements et justifications.
Ils peuvent demander à l'autorité dont ils dépendent de désigner un expert pour procéder à toute expertise contradictoire nécessaire.
Art. L. 420-4. - Les enquêteurs ne peuvent procéder aux visites en tous lieux ainsi qu'à la saisie de documents que dans le cadre d'enquêtes demandées par le ministre chargé de l'économie ou le Conseil de la concurrence et sur autorisation judiciaire donnée par ordonnance du président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter ou d'un juge délégué par lui. Lorsque ces lieux sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu'une action simultanée doit être menée dans chacun d'eux, une ordonnance unique peut être délivrée par l'un des présidents compétents.
Le juge doit vérifier que la demande d'autorisation qui lui est soumise est fondée; cette demande doit comporter tous les éléments d'information de nature à justifier la visite.
La visite et la saisie s'effectuent sous l'autorité et le contrôle du juge qui les a autorisées. Il désigne un ou plusieurs officiers de police judiciaire chargés d'assister à ces opérations et de le tenir informé de leur déroulement. Lorsqu'elles ont lieu en dehors du ressort de son tribunal de grande instance, il délivre une commission rogatoire pour exercer ce contrôle au président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'effectue la visite.
Le juge peut se rendre dans les locaux pendant l'intervention. A tout moment, il peut décider la suspension ou 1 `arrêt de la visite.
L'ordonnance mentionnée au premier alinéa du présent article n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues par le code de procédure pénale. Ce pourvoi n'est pas suspensif.
La visite, qui ne peut commencer avant six heures ou après vingt et une heures, est effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant.
Les enquêteurs, l'occupant des lieux ou son représentant ainsi que l'officier de police judiciaire peuvent seuls prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie.
Les inventaires et mises sous scellés sont réalisés conformément à l'article 56 du code de procédure pénale.
Les originaux du procès-verbal et de l'inventaire sont transmis au juge qui a ordonné la visite.
Les pièces et documents qui ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité sont restitués à l'occupant des lieux.
Art. L. 420-5. - Le président du Conseil de la concurrence est informé sans délai du déclenchement et de l'issue des investigations mentionnées à l'article L. 420-4 lorsqu'elles ont été diligentées à l'initiative du ministre chargé de l'économie et qu'elles se rapportent à des faits susceptibles de relever des articles L. 412-8 et L. 412-9.
Il peut proposer au conseil de se saisir d'office.
Art. L. 420-6. - Le président du Conseil de la concurrence désigne, pour l'examen de chaque affaire, un ou plusieurs rapporteurs. A sa demande, l'autorité dont dépendent les agents visés à l'article L. 420-1 désigne les enquêteurs et fait procéder sans délai à toute enquête que le rapporteur juge utile. Ce dernier définit les orientations de l'enquête et est tenu informé de son déroulement.
Art. L. 420-7. - Les enquêteurs peuvent, sans se voir opposer le secret professionnel, accéder à tout document ou élément d'information détenu par les services et établissements de l'Etat et des autres collectivités publiques.
Art. L. 420-8. - Est puni d'un emprisonnement de six mois et d'une amende de 50 000 F le fait pour quiconque de s'opposer, de quelque façon que ce soit, à l'exercice des fonctions dont les agents désignés à l'article L. 420-1 et les rapporteurs du Conseil de la concurrence sont chargés en application du présent livre.

TITRE III
DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Chapitre Ier
De l'organisation et de la compétence du conseil
Section 1
Organisation

Art. L. 431-1. - Le Conseil de la concurrence comprend seize membres nommés pour une durée de six ans par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l'économie.
Il se compose de :
1. Sept membres ou anciens membres du Conseil d'État, de la Cour des comptes, de la Cour de cassation ou des autres juridictions administratives ou judiciaires;
2. Quatre personnalités choisies en raison de leur compétence en matière économique ou en matière de concurrence et de consommation;
3. Cinq personnalités exerçant ou ayant exercé leurs activités dans les secteurs de la production, de la distribution, de l'artisanat, des services ou des professions libérales.
Le président et les deux vice-présidents sont nommés, à raison de deux au moins, parmi les membres ou anciens membres du Conseil d'Etat ou de la Cour des comptes ou parmi les magistrats ou anciens magistrats hors hiérarchie de l'ordre judiciaire et un au plus parmi les catégories de personnalités mentionnées au 2 et 3 ci-dessus.
Les quatre personnalités prévues au 2 sont choisies sur une liste de huit noms présentée par les sept membres prévus au 1.
Le mandat des membres du Conseil de la concurrence est renouvelable.
Art. L. 431-2. - Le président et les vice-présidents exercent leurs fonctions à plein temps. Ils sont soumis aux règles d'incompatibilité prévues pour les emplois publics.
Est déclaré démissionnaire d'office par le ministre tout membre du conseil qui n'a pas participé, sans motif valable, à trois séances consécutives ou qui ne remplit pas les obligations prévues aux deux alinéas ci-dessous.
Tout membre du conseil doit informer le président des intérêts qu'il détient ou vient à acquérir et des fonctions qu'il exerce dans une activité économique.
Aucun membre du conseil ne peut délibérer dans une affaire où il a un intérêt ou s'il représente ou a représenté une des parties intéressées.
Le commissaire du gouvernement auprès du conseil est désigné par le ministre chargé de l'économie.
Art. L. 431-3. - Le conseil peut siéger soit en formation plénière, soit en sections, soit en commission permanente. La commission permanente est composée du président et des deux vice-présidents.
En cas de partage égal des voix, la voix du président de la formation est prépondérante.
Le rapporteur général et les rapporteurs permanents sont nommés sur proposition du président par arrêté du ministre chargé de l'économie. Les autres rapporteurs sont désignés par le président.
Les crédits attribués au Conseil de la concurrence pour son fonctionnement sont inscrits au budget du ministère chargé de l'économie.
Le président est ordonnateur des recettes et des dépenses du conseil.

Section 2
Compétence

Art. L. 431-4. - Le Conseil de la concurrence peut être consulté par les commissions parlementaires sur les propositions de loi ainsi que sur toute question concernant la concurrence.
Il donne son avis sur toute question de concurrence à la demande du gouvernement. Il peut également donner son avis sur les mêmes questions à la demande des collectivités territoriales, des organisations professionnelles et syndicales, des organisations de consommateurs agréées, des chambres d'agriculture, des chambres de métiers ou des chambres de commerce et d'industrie, en ce qui concerne les intérêts dont elles ont la charge.
Art. L. 431-5. - Le conseil est obligatoirement consulté par le gouvernement sur tout projet de texte réglementaire instituant un régime nouveau ayant directement pour effet :
1. De soumettre l'exercice d'une profession ou l'accès à un marché à des restrictions quantitatives;
2. D'établir des droits exclusifs dans certaines zones;
3. D'imposer des pratiques uniformes en matière de prix ou de conditions de vente.
Art. L. 431-6. - Le Conseil de la concurrence examine si les pratiques dont il est saisi entrent dans le champ des articles L. 412-8 et L. 412-9 ou peuvent se trouver justifiées par application de l'article L. 412-11. Il prononce, le cas échéant, des sanctions et des injonctions.
Lorsque les faits lui paraissent de nature à justifier l'application de l'article L. 412-12, il adresse le dossier au procureur de la
République. Cette transmission interrompt la prescription de l'action publique.

Art. L. 431-7. - Le conseil peut être consulté par les juridictions sur les pratiques anticoncurrentielles définies aux articles L. 412-8 et L. 412-9 et relevées dans les affaires dont elles sont saisies. Il ne peut donner un avis qu'après une procédure contradictoire. Toutefois, s'il dispose d'informations déjà recueillies au cours d'une procédure antérieure, il peut émettre son avis sans avoir à mettre en _uvre la procédure prévue au présent texte.
Le cours de la prescription est suspendu, le cas échéant, par la consultation du conseil.
L'avis du conseil peut être publié après le non-lieu ou le jugement.

Chapitre II
De la procédure devant le conseil
Section 1
Saisine

Art. L. 432-1. - Le Conseil de la concurrence peut être saisi par le ministre chargé de l'économie. Il peut se saisir d'office ou être saisi par les entreprises ou, pour toute affaire qui concerne les intérêts dont ils ont la charge, par les organismes visés au deuxième alinéa de l'article L. 431-4.
Art. L. 432-2. - Le Conseil de la concurrence peut déclarer, par décision motivée, la saisine irrecevable s'il estime que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de sa compétence ou ne sont pas appuyés d'éléments suffisamment probants.

Section 2
Instruction

Art. L. 432-3. - L'instruction et la procédure devant le Conseil de la concurrence sont pleinement contradictoires.
Art. L. 432-4. - Sans préjudice des mesures prévues aux articles L. 432-11 et L. 434-1, le Conseil notifie les griefs aux intéressés ainsi qu'au commissaire du gouvernement, qui peuvent consulter le dossier et présenter leurs observations dans un délai de deux mois.
Le rapport est ensuite notifié aux parties, au commissaire du gouvernement et aux ministres intéressés. Il est accompagné des documents sur lesquels se fonde le rapporteur et des observations faites, le cas échéant, par les intéressés.
Les parties ont un délai de deux mois pour présenter un mémoire en réponse qui peut être consulté dans les quinze jours qui précèdent la séance par les personnes visées à l'alinéa précédent.
Art. L. 432-5. - Le président du Conseil de la concurrence peut, après notification des griefs aux parties intéressées, décider que l'affaire sera portée devant la commission permanente, sans établissement préalable d'un rapport. Cette décision est notifiée aux parties qui peuvent dans les quinze jours demander le renvoi au conseil.
Art. L. 432-6. - Le président du Conseil de la concurrence peut refuser la communication de pièces mettant en jeu le secret des affaires, sauf dans les cas où la communication ou la consultation de ces documents est nécessaire à la procédure ou à l'exercice des droits des parties. Les pièces considérées sont retirées du dossier.
Art. L. 432-7. - Les juridictions d'instruction et de jugement peuvent communiquer au Conseil de la concurrence, sur sa demande, les procès-verbaux ou rapports d'enquête ayant un lien direct avec des faits dont le conseil est saisi.
Art. L. 432-8. - Est punie des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal la divulgation par l'une des parties des informations concernant une autre partie ou un tiers et dont elle n'a pu avoir connaissance qu'à la suite des communications ou consultations auxquelles il a été procédé.

Section 3
Séances du conseil

Art. L. 432-9. - Les séances du Conseil de la concurrence ne sont pas publiques. Seules les parties et le commissaire du gouvernement peuvent y assister. Les parties peuvent demander à être entendues par le conseil et se faire représenter ou assister.
Le Conseil de la concurrence peut entendre toute personne dont l'audition lui paraît susceptible de contribuer à son information.
Le rapporteur général et le commissaire du gouvernement peuvent présenter des observations.
Le rapporteur général et le rapporteur assistent au délibéré, sans voix délibérative.

Section 4
Prescription

Art. L. 432-10. - Le conseil ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.

Section 5
Mesures conservatoires

Art. L. 432-11. - Le Conseil de la concurrence peut, après avoir entendu les parties en cause et le commissaire du gouvernement, prendre les mesures conservatoires qui lui sont demandées par le ministre chargé de l'économie, par les personnes mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 431-4 ou par les entreprises.
Ces mesures ne peuvent intervenir que si la pratique dénoncée porte une atteinte grave et immédiate à l'économie générale, à celle du secteur intéressé, à l'intérêt des consommateurs ou à l'entreprise plaignante.
Elles peuvent comporter la suspension de la pratique concernée ainsi qu'une injonction aux parties de revenir à l'état antérieur. Elles doivent rester strictement limitées à ce qui est nécessaire pour faire face à l'urgence.
Les mesures conservatoires sont publiées au Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Chapitre III
Des décisions du conseil

Art. L. 433-1. - Le Conseil de la concurrence peut décider, après que l'auteur de la saisine et le commissaire du gouvernement ont été mis à même de consulter le dossier et de faire valoir leurs observations, qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la procédure.
Art. L. 433-2. - Il peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières.
Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions.
Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction.
Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de cinq pour cent du montant du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant n'est pas une entreprise, le maximum est de dix millions de francs.
Le Conseil de la concurrence peut ordonner la publication de sa décision dans les journaux ou publications qu'il désigne, l'affichage dans les lieux qu'il indique et l'insertion de sa décision dans le rapport établi sur les opérations de l'exercice par les gérants, le conseil d'administration ou le directoire de l'entreprise. Les frais sont supportés par la personne intéressée.
Art. L. 433-3. - Si les mesures et injonctions prévues aux articles L. 432-11 et L. 433-2 ne sont pas respectées, le conseil peut prononcer une sanction pécuniaire dans les limites fixées à l'article L. 433-2.
Art. L. 433-4. - Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l'Etat étrangères à l'impôt et au domaine.
Art. L. 433-5. - La commission permanente peut prononcer les mesures prévues à l'article L. 433-2. Toutefois, la sanction pécuniaire prononcée ne peut excéder cinq cent mille francs pour chacun des auteurs de pratiques prohibées.

Chapitre IV
Des voies de recours

Art. L. 434-1. - La décision du conseil prise au titre de l'article L. 432-11 peut faire l'objet d'un recours en annulation ou en réformation par les parties en cause et le commissaire du gouvernement devant la cour d'appel de Paris au maximum dix jours après sa notification. La cour statue dans le mois du recours.
Le recours n'est pas suspensif. Toutefois, le premier président de la cour d'appel de Paris peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution des mesures conservatoires, si celles-ci sont susceptibles d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou s'il est intervenu, postérieurement à leur notification, des faits nouveaux d'une exceptionnelle gravité.
Art. L. 434-2. - Les décisions du Conseil de la concurrence mentionnées aux articles L. 432-11, L. 433-1, L. 433-2 et L. 433-3 sont notifiées aux parties en cause et au ministre chargé de l'économie, qui peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours en annulation ou en réformation devant la cour d'appel de Paris. Les décisions sont publiées au Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Le ministre chargé de l'économie veille à leur exécution.
Le recours n'est pas suspensif. Toutefois, le premier président de la cour d'appel de Paris peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou s'il est intervenu, postérieurement à sa notification, des faits nouveaux d'une exceptionnelle gravité.
Le pourvoi en cassation, formé le cas échéant, contre l'arrêt de la cour, est exercé dans un délai d'un mois suivant sa notification.
Art. L. 434-3. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent livre.

LIVRE V
DES EFFETS DE COMMERCE ET DES GARANTIES
TITRE Ier
DE CERTAINS EFFETS DE COMMERCE
Chapitre Ier
De la lettre de change
Section 1
Création et forme de la lettre de change

Art. L. 511-1. - La lettre de change contient :
1° La dénomination de lettre de change insérée dans le texte même du titre et exprimée dans la langue employée pour la rédaction de ce titre;
2° Le mandat pur et simple de payer une somme déterminée;
3° Le nom de celui qui doit payer (tiré);
4 ° L'indication de l'échéance;
5° Celle du lieu où le paiement doit s'effectuer;
6° Le nom de celui auquel ou à l'ordre duquel le paiement doit être fait;
7° L'indication de la date et du lieu où la lettre est créée;
8° La signature de celui qui émet la lettre (tireur); cette signature est apposée, soit à la main, soit par tout procédé non manuscrit.
Le titre dans lequel une des énonciations indiquées aux alinéas précédents fait défaut ne vaut pas comme lettre de change, sauf dans les cas déterminés par les alinéas suivants.
La lettre de change dont l'échéance n'est pas indiquée est considérée comme payable à vue.
A défaut d'indication spéciale, le lieu désigné à côté du nom du tiré est réputé être le lieu du paiement et, en même temps, le lieu du domicile du tiré.
La lettre de change n'indiquant pas le lieu de sa création est considérée comme souscrite dans le lieu désigné à côté du nom du tireur.
Art. L. 511-2. - La lettre de change peut être à l'ordre du tireur lui-même.
Elle peut être tirée sur le tireur lui-même.
Elle peut être tirée pour le compte d'un tiers.
Elle peut être payable au domicile d'un tiers, soit dans la localité où le tiré a son domicile, soit dans une autre localité.
Art. L. 511-3. - Dans une lettre de change payable à vue ou à un certain délai de vue, il peut être stipulé par le tireur que la somme sera productive d'intérêts. Dans toute autre lettre de change, cette stipulation est réputée non écrite.
Le taux des intérêts doit être indiqué dans la lettre; à défaut de cette indication, la clause est réputée non écrite.
Les intérêts courent à partir de la date de la lettre de change si une autre date n'est pas indiquée.
Art. L. 511-4. - La lettre de change dont le montant est écrit à la fois en toutes lettres et en chiffres, vaut, en cas de différence, pour la somme écrite en toutes lettres.
La lettre de change dont le montant est écrit plusieurs fois, soit en toutes lettres, soit en chiffres, ne vaut, en cas de différence, que pour la moindre somme.
Art. L. 511-5. - Les lettres de change souscrites par des mineurs non négociants sont nulles à leur égard, sauf les droits respectifs des parties, conformément à l'article 1312 du code civil.
Si la lettre de change porte des signatures de personnes incapables de s'obliger par lettre de change, des signatures fausses ou des signatures de personnes imaginaires ou des signatures qui, pour toute autre raison, ne sauraient obliger les personnes qui ont signé la lettre de change, ou du nom desquelles elle a été signée, les obligations des autres signataires n'en sont pas moins valables.
Quiconque appose sa signature sur une lettre de change comme représentant d'une personne pour laquelle il n'avait pas le pouvoir d'agir, est obligé lui-même en vertu de la lettre et, s'il a payé, a les mêmes droits qu'aurait eus le prétendu représenté. Il en est de même du représentant qui a dépassé ses pouvoirs.
Art. L. 511-6. - Le tireur est garant de l'acceptation et du paiement.
Il peut s'exonérer de la garantie de l'acceptation; toute clause par laquelle il s'exonère de la garantie du paiement est réputée non écrite.

Section 2
Provision

Art. L. 511-7. - La provision doit être faite par le tireur ou par celui pour le compte de qui la lettre de change sera tirée, sans que le tireur pour compte d'autrui cesse d'être personnellement obligé envers les endosseurs et le porteur seulement.
Il y a provision si, à l'échéance de la lettre de change, celui sur qui elle est fournie est redevable au tireur, ou à celui pour compte de qui elle est tirée, d'une somme au moins égale au montant de la lettre de change.
La propriété de la provision est transmise de droit aux porteurs successifs de la lettre de change.
L'acceptation suppose la provision.
Elle en établit la preuve à l'égard des endosseurs.
Qu'il y ait ou non acceptation, le tireur seul est tenu de prouver, en cas de dénégation, que ceux sur qui la lettre était tirée avaient provision à l'échéance; sinon, il est tenu de la garantir, quoique le protêt ait été fait après les délais fixés.

Section 3
Endossement

Art. L. 511-8. - Toute lettre de change, même non expressément tirée à ordre, est transmissible par la voie de l'endossement.
Lorsque le tireur a inséré dans la lettre de change les mots «non à ordre» ou une expression équivalente, le titre n'est transmissible que dans la forme et avec les effets d'une cession ordinaire.
L'endossement peut être fait même au profit du tiré, accepteur ou non, du tireur ou de tout autre obligé. Ces personnes peuvent endosser la lettre à nouveau.
L'endossement doit être pur et simple. Toute condition à laquelle il est subordonné est réputée non écrite.
L'endossement partiel est nul.
L'endossement «au porteur» vaut comme endossement en blanc.
L'endossement doit être inscrit sur la lettre de change ou sur une feuille qui y est attachée (allonge). Il doit être signé par l'endosseur. La signature de celui-ci est apposée, soit à la main, soit par tout procédé non manuscrit.
L'endossement peut ne pas désigner le bénéficiaire ou consister simplement dans la signature de l'endosseur (endossement en blanc). Dans ce dernier cas, l'endossement, pour être valable, doit être inscrit au dos de la lettre de change ou sur l'allonge.
Art. L. 511-9. - L'endossement transmet tous les droits résultant de la lettre de change.
Si l'endossement est en blanc, le porteur peut :
1° Remplir le blanc, soit de son nom, soit du nom d'une autre personne;
2° Endosser la lettre de nouveau en blanc, ou à une autre personne;
3° Remettre la lettre à un tiers, sans remplir le blanc et sans l'endosser.
Art. L. 511-10. - L'endosseur est, sauf clause contraire, garant de l'acceptation et du paiement.
Il peut interdire un nouvel endossement : dans ce cas, il n'est pas tenu à la garantie envers les personnes auxquelles la lettre est ultérieurement endossée.
Art. L. 511-11. - Le détenteur d'une lettre de change est considéré comme porteur légitime s'il justifie de son droit par une suite ininterrompue d'endossements, même si le dernier endossement est en blanc. Les endossements biffés sont à cet égard réputés non écrits. Quand un endossement en blanc est suivi d'un autre endossement, le signataire de celui-ci est réputé avoir acquis la lettre par l'endossement en blanc.
Si une personne a été dépossédée d'une lettre de change par quelque événement que ce soit, le porteur justifiant de son droit de la manière indiquée à l'alinéa précédent n'est tenu de se dessaisir de la lettre que s'il l'a acquise de mauvaise foi ou si, en l'acquérant, il a commis une faute lourde.
Art. L. 511-12. - Les personnes actionnées en vertu de la lettre de change ne peuvent pas opposer au porteur les exceptions fondées sur leurs rapports personnels avec le tireur ou avec les porteurs antérieurs, à moins que le porteur, en acquérant la lettre, n'ait agi sciemment au détriment du débiteur.
Art. L. 511-13. - Lorsque l'endossement contient la mention «valeur en recouvrement», «pour encaissement», «par procuration», ou toute autre mention impliquant un simple mandat, le porteur peut exercer tous les droits dérivant de la lettre de change, mais il ne peut endosser celle-ci qu'à titre de procuration.
Les obligés ne peuvent, dans ce cas, invoquer contre le porteur que les exceptions qui seraient opposables à l'endosseur.
Le mandat renfermé dans un endossement de procuration ne prend pas fin par le décès du mandant ou la survenance de son incapacité.
Lorsqu'un endossement contient la mention «valeur en garantie», «valeur en gage» ou toute autre mention impliquant un nantissement, le porteur peut exercer tous les droits dérivant de la lettre de change, mais un endossement fait par lui ne vaut que comme un endossement à titre de procuration.
Les obligés ne peuvent invoquer contre le porteur les exceptions fondées sur leurs rapports personnels avec l'endosseur, à moins que le porteur, en recevant la lettre, n'ait agi sciemment au détriment du débiteur.
Art. L. 511-14. - L'endossement postérieur à l'échéance produit les mêmes effets qu'un endossement antérieur. Toutefois, l'endossement postérieur au protêt faute de paiement, ou fait après l'expiration du délai fixé pour dresser le protêt, ne produit que les effets d'une cession ordinaire.
Sauf preuve contraire, l'endossement sans date est censé avoir été fait avant l'expiration du délai fixé pour dresser le protêt.
Il est défendu d'antidater les ordres à peine de faux.

Section 4
Acceptation

Art. L. 511-15. - La lettre de change peut être, jusqu'à l'échéance, présentée à l'acceptation du tiré, au lieu de son domicile, par le porteur ou même par un simple détenteur.
Dans toute lettre de change, le tireur peut stipuler qu'elle devra être présentée à l'acceptation, avec ou sans fixation de délai.
Il peut interdire dans la lettre la présentation à l'acceptation, à moins qu'il ne s'agisse d'une lettre de change payable chez un tiers ou d'une lettre payable dans une localité autre que celle du domicile du tiré ou d'une lettre tirée à un certain délai de vue.
Il peut aussi stipuler que la présentation à l'acceptation ne pourra avoir lieu avant un terme indiqué.
Tout endosseur peut stipuler que la lettre devra être présentée à l'acceptation, avec ou sans fixation de délai, à moins qu'elle n'ait été déclarée non acceptable par le tireur.
Les lettres de change à un certain délai de vue doivent être présentées à l'acceptation dans le délai d'un an à partir de leur date.
Le tireur peut abréger ce dernier délai ou en stipuler un plus long.
Ces délais peuvent être abrégés par les endosseurs.
Lorsque la lettre de change est créée en exécution d'une convention relative à des fournitures de marchandises et passée entre commerçants, et que le tireur a satisfait aux obligations résultant pour lui du contrat, le tiré ne peut se refuser à donner son acceptation dès l'expiration d'un délai conforme aux usages normaux du commerce en matière de reconnaissance de marchandises.
Le refus d'acceptation entraîne de plein droit la déchéance du terme aux frais et dépens du tiré.
Art. L. 511-16. - Le tiré peut demander qu'une seconde présentation lui soit faite le lendemain de la première. Les intéressés ne sont admis à prétendre qu'il n'a pas été fait droit à cette demande que si celle-ci est mentionnée dans le protêt.
Le porteur n'est pas obligé de se dessaisir, entre les mains du tiré, de la lettre présentée à l'acceptation.
Art. L. 511-17. - L'acceptation est écrite sur la lettre de change. Elle est exprimée par le mot «accepté» ou tout autre mot équivalent; elle est signée du tiré. La simple signature du tiré apposée au recto de la lettre vaut acceptation.
Quand la lettre est payable à un certain délai de vue ou lorsqu'elle doit être présentée à l'acceptation dans un délai déterminé en vertu d'une stipulation spéciale, l'acceptation doit être datée du jour où elle a été donnée, à moins que le porteur n'exige qu'elle soit datée du jour de la présentation. A défaut de date, le porteur, pour conserver ses droits de recours contre les endosseurs et contre le tireur, fait constater cette omission par un protêt dressé en temps utile.
L'acceptation est pure et simple; mais le tiré peut la restreindre à une partie de la somme.
Toute autre modification apportée par l'acceptation aux énonciations de la lettre de change équivaut à un refus d'acceptation. Toutefois, l'accepteur est tenu dans les termes de son acceptation.
Art. L. 511-18. - Quand le tireur a indiqué dans la lettre de change un lieu de paiement autre que celui du domicile du tiré, sans désigner un tiers chez qui le paiement doit être effectué, le tiré peut l'indiquer lors de l'acceptation. A défaut de cette indication, l'accepteur est réputé s'être obligé à payer lui-même au lieu du paiement.
Si la lettre est payable au domicile du tiré, celui-ci peut, dans l'acceptation, indiquer une adresse du même lieu où le paiement doit être effectué.
Art. L. 511-19. - Par l'acceptation, le tiré s'oblige à payer la lettre de change à l'échéance.
A défaut de paiement, le porteur, même s'il est le tireur, a contre l'accepteur une action directe résultant de la lettre de change pour tout ce qui peut être exigé en vertu des articles L. 511-45 et L. 511-46.
Art. L. 511-20. - Si le tiré, qui a revêtu la lettre de change de son acceptation, a biffé celle-ci avant la restitution de la lettre, l'acceptation est censée refusée. Sauf preuve du contraire, la radiation est réputée avoir été faite avant la restitution du titre.
Toutefois, si le tiré a fait connaître son acceptation par écrit au porteur ou à un signataire quelconque, il est tenu envers ceux-ci dans les termes de son acceptation.

Section 5
Aval

Art. L. 511-21. - Le paiement d'une lettre de change peut être garanti pour tout ou partie de son montant par un aval. Cette garantie est fournie par un tiers ou même par un signataire de la lettre.
L'aval est donné soit sur la lettre de change ou sur une allonge, soit par un acte séparé indiquant le lieu où il est intervenu.
Il est exprimé par les mots «bon pour aval» ou par toute autre formule équivalente; il est signé par le donneur d'aval.
Il est considéré comme résultant de la seule signature du donneur d'aval apposée au recto de la lettre de change, sauf quand il s'agit de la signature du tiré ou de celle du tireur.
L'aval doit indiquer pour le compte de qui il est donné. A défaut de cette indication, il est réputé donné pour le tireur.
Le donneur d'aval est tenu de la même manière que celui dont il s'est porté garant.
Son engagement est valable, alors même que l'obligation qu'il a garantie serait nulle pour toute cause autre qu'un vice de forme.
Quand il paie la lettre de change, le donneur d'aval acquiert les droits résultant de la lettre de change contre le garanti et contre ceux qui sont tenus envers ce dernier en vertu de la lettre de change.

Section 6
Échéance

Art. L. 511-22. - Une lettre de change peut être tirée :
a) A vue;
b) A un certain délai de vue;
c) A un certain délai de date;
d) A jour fixe.
Les lettres de change, soit à d'autres échéances, soit à échéances successives, sont nulles.
Art. L. 511-23. - La lettre de change à vue est payable à sa présentation. Elle doit être présentée au paiement dans le délai d'un an à partir de sa date. Le tireur peut abréger ce délai ou en stipuler un plus long. Ces délais peuvent être abrégés par les endosseurs.
Le tireur peut prescrire qu'une lettre de change payable à vue ne doit pas être présentée au paiement avant un terme indiqué. Dans ce cas, le délai de présentation part de ce terme.
Art. L. 511-24. - L'échéance d'une lettre de change, à un certain délai de vue est déterminée, soit par la date de l'acceptation, soit par celle du protêt.
En l'absence du protêt, l'acceptation non datée est réputée, à l'égard de l'accepteur, avoir été donnée le dernier jour du délai prévu pour la présentation à l'acceptation.
L'échéance d'une lettre de change tirée à un ou plusieurs mois de date ou de vue a lieu à la date correspondante du mois où le paiement doit être effectué. A défaut de date correspondante, l'échéance a lieu le dernier jour de ce mois.
Quand une lettre de change est tirée à un ou plusieurs mois et demi de date ou de vue, on compte d'abord les mois entiers.
Si l'échéance est fixée au commencement, au milieu (mi-janvier, mi-février, etc.) ou à la fin du mois, on entend par ces termes le 1er, le 15 ou le dernier jour du mois.
Les expressions «huit jours» ou «quinze jours» s'entendent, non d'une ou deux semaines, mais d'un délai de huit ou quinze jours effectifs.
L'expression «demi-mois» indique un délai de quinze jours.
Art. L. 511-25. - Quand une lettre de change est payable à jour fixe dans un lieu où le calendrier est différent de celui du lieu de l'émission, la date de l'échéance est considérée comme fixée d'après le calendrier du lieu de paiement.
Quand une lettre de change tirée entre deux places ayant des calendriers différents est payable à un certain délai de date, le jour de l'émission est ramené au jour correspondant du calendrier du lieu de paiement et l'échéance est fixée en conséquence.
Les délais de présentation des lettres de change sont calculés conformément aux règles de l'alinéa précédent.
Ces règles ne sont pas applicables si une clause de la lettre de change, ou même les simples énonciations du titre, indiquent que l'intention a été d'adopter des règles différentes.

Section 7
Paiement

Art. L. 511-26. - Le porteur d'une lettre de change payable à jour fixe ou à un certain délai de date ou de vue doit présenter la lettre de change au paiement, soit le jour où elle est payable, soit l'un des deux jours ouvrables qui suivent.
La présentation d'une lettre de change à une chambre de compensation équivaut à une présentation au paiement.
Art. L. 511-27. - Le tiré peut exiger, en payant la lettre de change, qu'elle lui soit remise acquittée par le porteur.
Le porteur ne peut refuser un paiement partiel.
En cas de paiement partiel, le tiré peut exiger que mention de ce paiement soit faite sur la lettre et que quittance lui en soit donnée.
Les paiements faits à compte sur le montant d'une lettre de change sont à la décharge des tireur et endosseur.
Le porteur est tenu de faire protester la lettre de change pour le surplus.
Art. L. 511-28. - Le porteur d'une lettre de change ne peut être contraint d'en recevoir le paiement avant l'échéance.
Le tiré qui paie avant l'échéance le fait à ses risques et périls.
Celui qui paie à l'échéance est valablement libéré, à moins qu'il n'y ait de sa part une fraude ou une faute lourde. Il est obligé de vérifier la régularité de la suite des endossements, mais non la signature des endosseurs.
Art. L. 511-29. - Lorsqu'une lettre de change est stipulée payable en une monnaie n'ayant pas cours au lieu du paiement, le montant peut en être payé dans la monnaie du pays, d'après sa valeur au jour de l'échéance. Si le débiteur est en retard, le porteur peut, à son choix, demander que le montant de la lettre de change soit payé dans la monnaie du pays d'après le cours, soit du jour de l'échéance, soit du jour du paiement.
Les usages du lieu de paiement servent à déterminer la valeur de la monnaie étrangère. Toutefois, le tireur peut stipuler que la somme à payer sera calculée d'après un cours déterminé dans la lettre.
Les règles ci-énoncées ne s'appliquent pas au cas où le tireur a stipulé que le paiement devra être fait dans une certaine monnaie indiquée (clause de paiement effectif en une monnaie étrangère).
Si le montant de la lettre de change est indiqué dans une monnaie ayant la même dénomination, mais une valeur différente, dans le pays d'émission et dans celui du paiement, on est présumé s'être référé à la monnaie du lieu du paiement.
Art. L. 511-30. - A défaut de présentation de la lettre de change au paiement le jour de son échéance, ou l'un des deux jours ouvrables qui suivent, tout débiteur a la faculté d'en remettre le montant en dépôt à la Caisse des dépôts et consignations, aux frais, risques et périls du porteur.
Art. L. 511-31. - Il n'est admis d'opposition au paiement qu'en cas de perte de la lettre de change ou de redressement ou liquidation judiciaires du porteur.
Art. L. 511-32. - En cas de perte d'une lettre de change non acceptée, celui à qui elle appartient peut en poursuivre le paiement sur une deuxième, troisième, quatrième, etc.
Art. L. 511-33. - Si la lettre de change perdue est revêtue de l'acceptation, le paiement ne peut en être exigé sur une deuxième, troisième, quatrième, etc., que par ordonnance du juge et en donnant caution.
Art. L. 511-34. - Si celui qui a perdu la lettre de change, qu'elle soit acceptée ou non, ne peut représenter la deuxième, troisième, quatrième, etc., il peut demander le paiement de la lettre de change perdue et l'obtenir par l'ordonnance du juge en justifiant de sa propriété par ses livres et en donnant caution.
Art. L. 511-35. - En cas de refus de paiement, sur la demande formée en vertu des deux articles précédents, le propriétaire de la lettre de change perdue conserve tous ses droits par un acte de protestation. Cet acte doit être fait le lendemain de l'échéance de la lettre de change perdue. Les avis prescrits par l'article L. 511-42 doivent être donnés au tireur et aux endosseurs dans les délais fixés par cet article.
Art. L. 511-36. - Le propriétaire de la lettre de change égarée doit, pour se procurer la seconde, s'adresser à son endosseur immédiat qui est tenu de lui prêter son nom et ses soins pour agir envers son propre endosseur, et ainsi en remontant d'endosseur à endosseur jusqu'au tireur de la lettre. Le propriétaire de la lettre de change égarée supporte les frais.
Art. L. 511-37. - L'engagement de la caution mentionné dans les articles L. 511-33 et L. 511-34 est éteint après trois ans, si, pendant ce temps, il n'y a eu ni demandes ni poursuites en justice.

Section 8
Recours faute d'acceptation et faute de paiement

Art. L. 511-38. - Le porteur peut exercer ses recours contre les endosseurs, le tireur et les autres obligés :
a) A l'échéance, si le paiement n'a pas eu lieu;
b) Même avant l'échéance :
1° s'il y a eu refus total ou partiel d'acceptation;
2° dans les cas de redressement ou de liquidation judiciaire du tiré, accepteur ou non, de cessation de ses paiements même non constatée par un jugement, ou de saisie de ses biens demeurée infructueuse;
3° dans les cas de redressement ou de liquidation judiciaire du tireur d'une lettre non acceptable.
Toutefois, les garants contre lesquels un recours est exercé dans les cas prévus par le 2° et le 3° ci-dessus peuvent, dans les trois jours de l'exercice de ce recours, adresser au président du tribunal de commerce de leur domicile une requête pour solliciter des délais. Si la demande est reconnue fondée, l'ordonnance fixe l'époque à laquelle les garants seront tenus de payer les effets de commerce dont il s'agit, sans que les délais ainsi octroyés puissent dépasser la date fixée pour l'échéance. L'ordonnance n'est susceptible ni d'opposition ni d'appel.
Art. L. 511-39. - Le refus d'acceptation ou de paiement doit être constaté par un acte authentique (protêt faute d'acceptation ou faute de paiement).
Le protêt faute d'acceptation doit être fait dans les délais fixés pour la présentation à l'acceptation. Si, dans le cas prévu au premier alinéa de l'article L. 511-16, la première présentation a eu lieu le dernier jour du délai, le protêt peut encore être dressé le lendemain.
Le protêt faute de paiement d'une lettre de change payable à jour fixe ou à un certain délai de date ou de vue doit être fait l'un des deux jours ouvrables qui suivent le jour où la lettre de change est payable. S'il s'agit d'une lettre payable à vue, le protêt doit être dressé dans les conditions indiquées à l'alinéa précédent pour dresser le protêt faute d'acceptation.
Le protêt faute d'acceptation dispense de la présentation au paiement et du protêt faute de paiement.
En cas de cessation des paiements du tiré, accepteur ou non, ou en cas de saisie de ses biens demeurée infructueuse, le porteur ne peut exercer ses recours qu'après présentation de la lettre au tiré pour le paiement et après confection d'un protêt.
En cas de redressement ou de liquidation judiciaire du tiré accepteur ou non ainsi qu'en cas de redressement ou de liquidation judiciaire du tireur d'une lettre non acceptable, la production du jugement déclaratif suffit pour permettre au porteur d'exercer ses recours.
Art. L. 511-40. - Lorsque le porteur consent à recevoir en paiement, soit un chèque ordinaire, soit un mandat de virement sur la Banque de France, soit un chèque postal, le chèque ou le mandat doit indiquer le nombre et l'échéance des effets ainsi payés; cette indication n'est toutefois pas imposée pour les chèques ou mandats de virement créés pour le règlement entre banquiers du solde des opérations effectuées entre eux par l'intermédiaire d'une chambre de compensation.
Si le règlement est effectué au moyen d'un chèque ordinaire et que celui-ci ne soit pas payé, notification du protêt faute de paiement dudit chèque est faite au domicile de paiement de la lettre de change dans le délai prévu à l'article 41 du décret - loi du 30 octobre 1935 unifiant le droit en matière de chèques et relatif aux cartes de paiement. Le protêt, faute de paiement du chèque, et la notification sont faits par un seul et même exploit, sauf dans le cas où, pour des raisons de compétence territoriale, l'intervention de deux officiers ministériels est nécessaire.
Si le règlement est effectué au moyen d'un mandat de virement et que celui-ci soit rejeté par la Banque de France ou au moyen d'un chèque postal et que celui-ci soit rejeté par le centre de chèques postaux détenteur du compte à débiter, la non-exécution fait l'objet d'un acte de notification au domicile de l'émetteur dudit mandat ou dudit chèque postal dans les huit jours à compter de la date de l'émission. Cet acte est dressé par un huissier ou par un notaire.
Art. L. 511-41. - Lorsque le dernier jour du délai accordé pour l'accomplissement de l'acte de notification de la non-exécution du mandat de virement ou du chèque postal est un jour férié légal, ce délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable qui en suit l'expiration. Les jours fériés intermédiaires sont compris dans la computation du délai. Aux jours fériés légaux sont assimilés les jours où, aux termes des lois en vigueur, aucun paiement ne peut être exigé ni aucun protêt dressé.
Le tiré de la lettre de change qui reçoit la notification doit, s'il ne paie pas la lettre de change ainsi que les frais de notification et, s'il y a lieu, du protêt du chèque, restituer la lettre de change à l'officier ministériel instrumentaire. Celui-ci dresse immédiatement le protêt faute de paiement de la lettre de change.
Si le tiré ne restitue pas la lettre de change, un acte de protestation est aussitôt dressé. Le défaut de restitution y est constaté. Le tiers porteur est, en ce cas, dispensé de se conformer aux dispositions des articles L. 511-33 et L. 511-34.
Le défaut de restitution de la lettre de change constitue un délit passible des peines prévues par les articles 314-1 et 314-10 du code pénal.
Art. L. 511-42. - Le porteur doit donner avis du défaut d'acceptation ou de paiement à son endosseur dans les quatre jours ouvrables qui suivent le jour du protêt ou celui de la présentation en cas de clause de retour sans frais.
Les notaires et les huissiers sont tenus, à peine de dommages-intérêts, lorsque l'effet indique les nom et domicile du tireur de la lettre de change, de prévenir celui-ci dans les quarante-huit heures qui suivent l'enregistrement, par la poste et par lettre recommandée, des motifs du refus de payer. Cette lettre donne lieu, au profit du notaire ou de l'huissier, à un honoraire fixé par voie réglementaire en sus des frais d'affranchissement et de recommandation.
Chaque endosseur doit, dans les deux jours ouvrables qui suivent le jour où il a reçu l'avis, faire connaître à son endosseur l'avis qu'il a reçu, en indiquant les noms et les adresses de ceux qui ont donné les avis précédents, et ainsi de suite, en remontant jusqu'au tireur.
Les délais ci-dessus indiqués courent de la réception de l'avis précédent.
Lorsqu'en conformité des alinéas précédents, un avis est donné à un signataire de la lettre de change, le même avis doit être donné dans le même délai à son avaliseur.
Dans le cas où un endosseur n'a pas indiqué son adresse ou l'a indiquée d'une façon illisible, il suffit que l'avis soit donné à l'endosseur qui le précède.
Celui qui a un avis à donner peut le faire sous une forme quelconque, même par un simple renvoi de la lettre de change.
Il doit prouver qu'il a donné l'avis dans le délai imparti.
Ce délai est considéré comme observé si une lettre missive donnant l'avis a été mise à la poste dans ledit délai.
Celui qui ne donne pas l'avis dans le délai ci-dessus indiqué n'encourt pas de déchéance; il est responsable, s'il y a lieu, du préjudice causé par sa négligence, sans que les dommages-intérêts puissent dépasser le montant de la lettre de change.
Art. L. 511-43. - Le tireur, un endosseur ou un avaliseur peut, par la clause «retour sans frais», «sans protêt» ou toute autre clause équivalente inscrite sur le titre et signée, dispenser le porteur de faire dresser, pour exercer ses recours, un protêt faute d'acceptation ou faute de paiement.
Cette clause ne dispense pas le porteur de la présentation de la lettre de change dans les délais prescrits ni des avis à donner.
La preuve de l'inobservation des délais incombe à celui qui s'en prévaut contre le porteur.
Si la clause est inscrite par le tireur, elle produit ses effets à l'égard de tous les signataires; si elle est inscrite par un endosseur ou un avaliseur, elle produit ses effets seulement à l'égard de celui-ci. Si, malgré la clause inscrite par le tireur, le porteur fait dresser le protêt, les frais en restent à sa charge. Quand la clause émane d'un endosseur, ou d'un avaliseur, les frais du protêt, s'il en est dressé un, peuvent être recouvrés contre tous les signataires.
Art. L. 511-44. - Tous ceux qui ont tiré, accepté, endossé ou avalisé une lettre de change sont tenus solidairement envers le porteur.
Le porteur a le droit d'agir contre toutes ces personnes, individuellement ou collectivement, sans être astreint à observer l'ordre dans lequel elles se sont obligées.
Le même droit appartient à tout signataire d'une lettre de change qui a remboursé celle-ci.
L'action intentée contre un des obligés n'empêche pas d'agir contre les autres, même postérieurs à celui qui a été d'abord poursuivi.
Art. L. 511-45. - Le porteur peut réclamer à celui contre lequel il exerce son recours :
1° Le montant de la lettre de change non acceptée ou non payée avec les intérêts, s'il en a été stipulé;
2° Les intérêts au taux légal à partir de l'échéance;
3° Les frais du protêt, ceux des avis donnés ainsi que les autres frais.
Si le recours est exercé avant l'échéance, déduction est faite d'un escompte sur le montant de la lettre. Cet escompte est calculé d'après le taux de l'escompte officiel (taux de la Banque de France), tel qu'il existe à la date du recours au lieu du domicile du porteur.
Art. L. 511-46. - Celui qui a remboursé la lettre de change peut réclamer à ses garants :
1° La somme intégrale qu'il a payée;
2° les intérêts de ladite somme, calculés au taux légal, à partir du jour où il l'a déboursée;
3° les frais qu'il a faits.
Art. L. 511-47. - Tout obligé contre lequel un recours est exercé ou qui est exposé à un recours peut exiger, contre remboursement, la remise de la lettre de change avec le protêt et un compte acquitté.
Tout endosseur qui a remboursé la lettre de change peut biffer son endossement et ceux des endosseurs subséquents.
Art. L. 511-48. - En cas d'exercice d'un recours après une acceptation partielle, celui qui rembourse la somme pour laquelle la lettre n'a pas été acceptée peut exiger que ce remboursement soit mentionné sur la lettre et qu'il lui en soit donné quittance. Le porteur doit, en outre, lui remettre une copie certifiée conforme de la lettre et le protêt pour permettre l'exercice des recours ultérieurs.
Art. L. 511-49. - Après l'expiration des délais fixés :
- pour la présentation d'une lettre de change à vue ou à un certain délai de vue;
- pour la confection du protêt faute d'acceptation ou faute de paiement;
- pour la présentation au paiement en cas de clause de retour sans frais;
- le porteur est déchu de ses droits contre les endosseurs, contre le tireur et contre les autres obligés, à l'exception de l'accepteur.
Toutefois, la déchéance n'a lieu à l'égard du tireur que s'il justifie qu'il a fait provision à l'échéance. Le porteur, en ce cas, ne conserve d'action que contre celui sur qui la lettre de change était tirée.
A défaut de présentation à l'acceptation dans le délai stipulé par le tireur, le porteur est déchu de ses droits de recours, tant pour défaut de paiement que pour défaut d'acceptation, à moins qu'il ne résulte des termes de la stipulation que le tireur n'a entendu s'exonérer que de la garantie de l'acceptation.
Si la stipulation d'un délai pour la présentation est contenue dans un endossement, l'endosseur seul peut s'en prévaloir.
Art. L. 511-50. - Quand la présentation de la lettre de change ou la confection du protêt dans les délais prescrits est empêchée par un obstacle insurmontable (prescription légale d'un Etat quelconque ou autres cas de force majeure), ces délais sont prolongés.
Le porteur est tenu de donner, sans retard, avis du cas de force majeure à son endosseur et de mentionner cet avis, daté et signé de lui, sur la lettre de change ou sur une allonge : pour le surplus, les dispositions de l'article L. 511-42 sont applicables.
Après la cessation de la force majeure, le porteur doit, sans retard, présenter la lettre à l'acceptation ou au paiement et, s'il y a lieu, faire dresser le protêt.
Si la force majeure persiste au-delà de trente jours à partir de l'échéance, les recours peuvent être exercés, sans que ni la présentation ni la confection d'un protêt soit nécessaire, à moins que ces recours ne se trouvent suspendus pour une période plus longue par application de l'article L. 511-61.
Pour les lettres de change à vue ou à un certain délai de vue, le délai de trente jours court de la date à laquelle le porteur a, même avant l'expiration des délais de présentation, donné avis de la force majeure à son endosseur; pour les lettres de change à un certain délai de vue, le délai de trente jours s'augmente du délai de vue indiqué dans la lettre de change.
Ne sont point considérés comme constituant des cas de force majeure les faits purement personnels au porteur ou à celui qu'il a chargé de la présentation de la lettre ou de la confection du protêt.
Art. L. 511-51. - Indépendamment des formalités prescrites pour l'exercice de l'action en garantie, le porteur d'une lettre de change protestée faute de paiement peut, en obtenant la permission du juge, saisir conservatoirement les effets mobiliers des tireurs, accepteurs et endosseurs.

Section 9
Protêts
Sous-section 1
Forme

Art. L. 511-52. - Les protêts faute d'acceptation ou de paiement sont faits par un notaire ou par un huissier.
Le protêt doit être fait : au domicile de celui sur qui la lettre de change était payable, ou à son dernier domicile connu; au domicile des personnes indiquées par la lettre de change pour la payer au besoin; au domicile du tiers qui a accepté par intervention; le tout par un seul et même acte. En cas de fausse indication de domicile, le protêt est précédé d'un acte de perquisition.
Art. L. 511-53. - L'acte de protêt contient la transcription littérale de la lettre de change, de l'acceptation, des endossements et des recommandations qui y sont indiquées, la sommation de payer le montant de la lettre de change. Il énonce la présence ou l'absence de celui qui doit payer, les motifs du refus de payer et l'impuissance ou le refus de signer.
Art. L. 511-54. - Nul acte de la part du porteur de la lettre de change ne peut suppléer l'acte de protêt, hors les cas prévus par les articles L. 511-32 et suivants et par les articles L. 511-40 et L. 511-41.
Art. L. 511-55. - Les notaires et les huissiers sont tenus, à peine de destitution, dépens, dommages-intérêts envers les parties, de laisser copie exacte des protêts. Sous les mêmes sanctions, ils sont également tenus de remettre récépissé au greffier du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance statuant commercialement du domicile du débiteur, ou de lui adresser, par lettre recommandée avec accusé de réception, une copie exacte des protêts, faute de paiement des traites acceptées et des billets à ordre; cette formalité doit être accomplie dans la quinzaine de l'acte.

Sous-section 2
Publicité

Art. L. 511-56. - Le greffier du tribunal de commerce, ou du tribunal de grande instance statuant commercialement, tient régulièrement à jour, par ordre alphabétique, d'après les dénonciations qui lui sont faites par les notaires et huissiers, un état nominatif et par débiteur des protêts faute de paiement des lettres de change acceptées, des billets à ordre et des chèques, ainsi que des certificats de non-paiement des chèques postaux qui lui sont dénoncés par les centres de chèques postaux.
Il énonce :
1° La date du protêt ou du certificat de non-paiement du chèque postal;
2° Les nom, prénoms, profession et domicile de celui au profit de qui l'effet ou le chèque a été créé, ou le tireur de la lettre de change;
3° Les nom, prénoms, ou raison sociale, profession et domicile du souscripteur du billet à ordre ou du tiré, pour le chèque, ou de l'accepteur de la lettre de change;
4° La date de l'échéance, s'il y a lieu;
5° Le montant de l'effet;
6° La réponse donnée au protêt ou le motif de rejet du chèque postal figurant sur le certificat de non-paiement.
Art. L. 511-57. - Après l'expiration d'un délai d'un mois à compter du jour du protêt ou de l'établissement du certificat de non-paiement du chèque postal et pendant un an à compter de la même date, tout requérant peut se faire délivrer, à ses frais, par les greffiers des tribunaux susvisés, un extrait de l'état nominatif prévu à l'article L. 511-56.
Art. L. 511-58. - Sur le dépôt contre récépissé par le débiteur de l'effet et du protêt, du chèque postal et du certificat de non-paiement ou d'une quittance constatant le paiement du chèque, le greffier du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance statuant commercialement effectue, aux frais du débiteur, sur l'état dressé en application de l'article L. 511-56 la radiation de l'avis de protêt ou du certificat de non-paiement.
Les pièces déposées peuvent être retirées pendant l'année qui suit l'expiration du délai d'un an visé à l'article L. 511-57, agrès quoi le greffier en est déchargé.
Art. L. 511-59. - Toute publication, sous quelque forme que ce soit, des états établis en vertu des dispositions de la présente sous-section est interdite sous peine de dommages-intérêts.
Art. L. 511-60. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application des dispositions de la présente sous-section. Il fixe notamment le montant des rémunérations dues aux notaires ou huissiers ayant dressé les protêts et aux greffiers des tribunaux de commerce ou des tribunaux de grande instance statuant commercialement pour les différentes formalités dont ils sont chargés.

Sous-section 3
Prorogation des délais

Art. L. 511-61. - Dans le cas de mobilisation de l'armée, de fléau ou de calamité publique, d'interruption des services publics gérés ou soumis au contrôle de l'Etat ou des collectivités territoriales, des décrets en Conseil des ministres peuvent, pour tout ou partie du territoire, proroger les délais dans lesquels doivent être faits les protêts et les autres actes destinés à conserver les recours pour toutes les valeurs négociables.
Dans les mêmes circonstances et sous les mêmes conditions, les échéances des valeurs négociables peuvent être prorogées.

Section 10
Rechange

Art. L. 511-62. - Toute personne ayant le droit d'exercer un recours peut, sauf stipulation contraire, se rembourser au moyen d'une nouvelle lettre (retraite) tirée à vue sur l'un de ses garants et payable au domicile de celui-ci.
La retraite comprend, outre les sommes indiquées dans les articles L. 511-45 et L. 511-46, un droit de courtage et le droit de timbre de la retraite.
Si la retraite est tirée par le porteur, le montant en est fixé d'après le cours d'une lettre de change à vue, tirée du lieu où la lettre primitive était payable sur le lieu du domicile du garant. Si la retraite est tirée par un endosseur, le montant en est fixé d'après le cours d'une lettre à vue tirée du lieu où le tireur de la retraite a son domicile sur le lieu du domicile du garant.

Section 11
Intervention

Art. L. 511-63. - Le tireur, un endosseur ou un avaliseur, peut indiquer une personne pour accepter ou payer au besoin.
La lettre de change peut être, sous les conditions déterminées ci-après, acceptée ou payée par une personne intervenant pour un débiteur quelconque exposé au recours.
L'intervenant peut être un tiers, même le tiré, ou une personne déjà obligée en vertu de la lettre de change, sauf l'accepteur.
L'intervenant est tenu de donner, dans un délai de deux jours ouvrables, avis de son intervention à celui pour qui il est intervenu. En cas d'inobservation de ce délai, il est responsable, s'il y a lieu, du préjudice causé par sa négligence sans que les dommages-intérêts puissent dépasser le montant de la lettre de change.

Sous-section 1
Acceptation par intervention

Art. L. 511-64. - L'acceptation par intervention peut avoir lieu dans tous les cas où des recours sont ouverts avant l'échéance au porteur d'une lettre de change acceptable.
Lorsqu'il a été indiqué sur la lettre de change une personne pour l'accepter ou la payer au besoin au lieu du paiement, le porteur ne peut exercer avant l'échéance ses droits de recours contre celui qui a apposé l'indication et contre les signataires subséquents à moins qu'il n'ait présenté la lettre de change à la personne désignée et que, celle-ci ayant refusé l'acceptation, ce refus n'ait été constaté par un protêt.
Dans les autres cas d'intervention, le porteur peut refuser l'acceptation par intervention.
Toutefois, s'il l'admet, il perd les recours qui lui appartiennent avant l'échéance contre celui pour qui l'acceptation a été donnée et contre les signataires subséquents.
L'acceptation par intervention est mentionnée sur la lettre de change; elle est signée par l'intervenant. Elle indique pour le compte de qui elle a lieu; à défaut de cette indication, l'acceptation est réputée donnée pour le tireur.
L'accepteur par intervention est obligé envers le porteur et envers les endosseurs postérieurs à celui pour le compte duquel il est intervenu, de la même manière que celui-ci.
Malgré l'acceptation par intervention, celui pour lequel elle a été faite et ses garants peuvent exiger du porteur, contre remboursement de la somme indiquée à l'article L. 511-45, la remise de la lettre de change, du protêt et d'un compte acquitté, s'il y a lieu.

Sous-section 2
Paiement par intervention

Art. L. 511-65. - Le paiement par intervention peut avoir lieu dans tous les cas où, soit à l'échéance, soit avant l'échéance, des recours sont ouverts au porteur.
Le paiement doit comprendre toute la somme qu'aurait à acquitter celui pour lequel il a lieu.
Il doit être fait au plus tard le lendemain du dernier jour admis pour la confection du protêt faute de paiement.
Art. L. 511-66. - Si la lettre de change a été acceptée par des intervenants ayant leur domicile au lieu du paiement ou si des personnes ayant leur domicile dans ce même lieu ont été indiquées pour payer au besoin, le porteur doit présenter la lettre à toutes ces personnes et faire dresser, s'il y a lieu, un protêt faute de paiement au plus tard le lendemain du dernier jour admis pour la confection du protêt.
A défaut de protêt dressé dans ce délai, celui qui a indiqué le besoin ou pour le compte de qui la lettre a été acceptée et les endosseurs postérieurs cessent d'être obligés.
Art. L. 511-67. - Le porteur qui refuse le paiement par intervention perd ses recours contre ceux qui auraient été libérés.
Art. L. 511-68. - Le paiement par intervention doit être constaté par un acquit donné sur la lettre de change, avec indication de celui pour qui il est fait. A défaut de cette indication, le paiement est considéré comme fait pour le tireur.
Le lettre de change et le protêt, s'il en a été dressé un, doivent être remis au payeur par intervention.
Art. L. 511-69. - Le payeur par intervention acquiert les droits résultant de la lettre de change contre celui pour lequel il a payé et contre ceux qui sont tenus vis-à-vis de ce dernier en vertu de la lettre de change. Toutefois, il ne peut endosser la lettre de change à nouveau.
Les endosseurs postérieurs au signataire pour qui le paiement a eu lieu sont libérés.
En cas de concurrence pour le paiement par intervention, celui qui opère le plus de libération est préféré. Celui qui intervient, en connaissance de cause, contrairement à cette règle, perd ses recours contre ceux qui auraient été libérés.

Section 12
Pluralité d'exemplaires et des copies
Sous-section 1
Pluralité d'exemplaires

Art. L. 511-70. - La lettre de change peut être tirée en plusieurs exemplaires identiques.
Ces exemplaires doivent être numérotés dans le texte même du titre; faute de quoi, chacun d'eux est considéré comme une lettre de change distincte.
Tout porteur d'une lettre n'indiquant pas qu'elle a été tirée en un exemplaire unique peut exiger à ses frais la délivrance de plusieurs exemplaires. A cet effet, il doit s'adresser à son endosseur immédiat qui est tenu de lui prêter ses soins pour agir contre son propre endosseur et ainsi de suite en remontant jusqu'au tireur. Les endosseurs sont tenus de reproduire les endossements sur les nouveaux exemplaires.
Art. L. 511-71. - Le paiement fait sur un des exemplaires est libératoire, alors même qu'il n'est pas stipulé que ce paiement annule l'effet des autres exemplaires. Toutefois, le tiré reste tenu à raison de chaque exemplaire accepté dont il n'a pas obtenu la restitution.
L'endosseur qui a transféré les exemplaires à différentes personnes, ainsi que les endosseurs subséquents, sont tenus à raison de tous les exemplaires portant leur signature et qui n'ont pas été restitués.
Art. L. 511-72. - Celui qui a envoyé un des exemplaires à l'acceptation doit indiquer sur les autres exemplaires le nom de la personne entre les mains de laquelle cet exemplaire se trouve. Celle-ci est tenue de le remettre au porteur légitime d'un autre exemplaire.
Si elle s'y refuse, le porteur ne peut exercer de recours qu'après avoir fait constater par un protêt :
1° Que l'exemplaire envoyé à l'acceptation ne lui a pas été remis sur sa demande;
2° Que l'acceptation ou le paiement n'a pu être obtenu sur un autre exemplaire.

Sous-section 2
Copies

Art. L. 511-73. - Tout porteur d'une lettre de change a le droit d'en faire des copies.
La copie doit reproduire exactement l'original avec les endossements et toutes les autres mentions qui y figurent. Elle doit indiquer où elle s'arrête.
Elle peut être endossée et avalisée de la même manière et avec les mêmes effets que l'original.
Art. L. 511-74. - La copie doit désigner le détenteur du titre original. Celui-ci est tenu de remettre ledit titre au porteur légitime de la copie.
S'il s'y refuse, le porteur ne peut exercer le recours contre les personnes qui ont endossé ou avalisé la copie qu'après avoir fait constater par un protêt que l'original ne lui a pas été remis sur sa demande.
Si le titre original, après le dernier endossement survenu avant que la copie ne soit pas faite, porte la clause : «à partir d'ici, l'endossement ne vaut que sur la copie» ou toute autre formule équivalente, un endossement signé ultérieurement sur l'original est nul.

Section 13
Altérations

Art. L. 511-75. - En cas d'altération du texte d'une lettre de change, les signataires postérieurs à cette altération sont tenus dans les termes du texte altéré; les signataires antérieurs le sont dans les termes du texte originaire.

Section 14
Prescription

Art. L. 511-76. - Toutes actions résultant de la lettre de change contre l'accepteur se prescrivent par trois ans à compter de la date de l'échéance.
Les actions du porteur contre les endosseurs et contre le tireur se prescrivent par un an à partir de la date du protêt dressé en temps utile ou de celle de l'échéance, en cas de clause de retour sans frais.
Les actions des endosseurs les uns contre les autres et contre le tireur se prescrivent par six mois à partir du jour où l'endosseur a remboursé la lettre ou du jour où il a été lui-même actionné.
Les prescriptions, en cas d'action exercée en justice, ne courent que du jour de la dernière poursuite judiciaire. Elles ne s'appliquent pas s'il y a eu condamnation, ou si la dette a été reconnue par acte séparé.
L'interruption de la prescription n'a d'effet que contre celui à l'égard duquel l'acte interruptif a été fait.
Néanmoins, les prétendus débiteurs seront tenus, s'ils en sont requis, d'affirmer, sous serment, qu'ils ne sont plus redevables; et leurs veuves, héritiers ou ayants cause, qu'ils estiment de bonne foi qu'il n'est plus rien dû.

Section 15
Dispositions générales

Art. L. 511-77. - Le paiement d'une lettre de change dont l'échéance est à un jour férié légal ne peut être exigé que le premier jour ouvrable qui suit. De même, tous autres actes relatifs à la lettre de change, notamment la présentation à l'acceptation et le protêt, ne peuvent être faits qu'un jour ouvrable.
Lorsqu'un de ces actes doit être accompli dans un certain délai dont le dernier jour est un jour férié légal, ce délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable qui en suit l'expiration. Les jours fériés intermédiaires sont compris dans la computation du délai.
Art. L. 511-78. - Aux jours fériés légaux sont assimilés les jours où, aux termes des lois en vigueur, aucun paiement ne peut être exigé, ni aucun protêt dressé.
Art. L. 511-79. - Les délais légaux ou conventionnels ne comprennent pas le jour qui leur sert de point de départ.
Aucun jour de grâce ni légal ni judiciaire n'est admis, sauf dans les cas prévus par les articles L. 511-38 et L. 511-50.

Chapitre II
Du billet à ordre

Art. L. 512-1. - Le billet à ordre contient :
1° la clause à ordre ou la dénomination du titre insérée dans le texte même et exprimée dans la langue employée pour la rédaction de ce titre;
2° La promesse pure et simple de payer une somme déterminée;
3° L'indication de l'échéance;
4° Celle du lieu où le paiement doit s'effectuer;
5° Le nom de celui auquel ou à l'ordre duquel le paiement doit être fait;
6° L'indication de la date et du lieu où le billet est souscrit;
7° La signature de celui qui émet le titre (souscripteur).
Art. L. 512-2. - Le titre dans lequel une des énonciations indiquées à l'article précédent fait défaut ne vaut pas comme billet à ordre, sauf dans les cas déterminés par les alinéas suivants.
Le billet à ordre dont l'échéance n'est pas indiquée est considéré comme payable à vue.
A défaut d'indication spéciale, le lieu de création du titre est réputé être le lieu de paiement et, en même temps, le lieu du domicile du souscripteur.
Le billet à ordre n'indiquant pas le lieu de sa création est considéré comme souscrit dans le lieu désigné à côté du nom du souscripteur.
Art. L. 512-3. - Sont applicables au billet à ordre, en tant qu'elles ne sont pas incompatibles avec la nature de ce titre, les dispositions des articles L. 511-8 à L. 511-14, L. 511-2 à L. 511-26, L. 511-37 à L. 511-47, L. 511-49, L. 511-50 à L. 511-55, L. 511-62, L. 511-63, L. 511-65 à L. 511-69, L. 511-73, L. 511-74 à L. 511-77 et L. 511-79, relatives à la lettre de change.
Art. L. 512-4. - Sont aussi applicables au billet à ordre les dispositions des articles L. 511-2 et L. 511-18 concernant la lettre de change payable chez un tiers ou dans une localité autre que celle du domicile tiré, L. 511-3 relatives à la stipulation d'intérêts, L. 511-4 sur les différences d'énonciations relatives à la somme à payer, et L. 511-5 sur les conséquences de l'apposition d'une signature ou celles de la signature d'une personne qui agit sans pouvoir ou en dépassant ses pouvoirs.
Art. L. 512-5. - Sont également applicables au billet à ordre les dispositions relatives à l'aval de l'article L. 511-21; dans le cas prévu au sixième alinéa de cet article, si l'aval n'indique pas pour le compte de qui il a été donné, il est réputé l'avoir été pour le compte du souscripteur du billet à ordre.
Art. L. 512-6. - Le souscripteur d'un billet à ordre est obligé de la même manière que l'accepteur d'une lettre de change.
Art. L. 512-7. - Les billets à ordre payables à un certain délai de vue doivent être présentés au visa du souscripteur dans les délais fixés à l'article L. 511-15. Le délai de vue court de la date du visa signé du souscripteur sur le billet. Le refus du souscripteur de donner son visa daté est constaté par un protêt (art. L. 511-17), dont la date sert de point de départ au délai de vue.
Art. L. 512-8. - Le règlement par billet à ordre n'est permis au débiteur que s'il a été expressément prévu par les parties et mentionné sur la facture. Même en ce cas, si le billet à ordre n'est pas parvenu au créancier dans les trente jours qui suivent l'envoi de la facture, le créancier peut émettre une lettre de change que le débiteur est tenu d'accepter selon les conditions prévues aux avant-dernier et dernier alinéas de l'article L. 511-15. Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
Art. L. 512-9. - Les dispositions des articles L. 511-56 à L. 511-61 relatives à la publicité et à la prorogation des délais de protêts sont applicables au protêt dressé faute de paiement d'un billet à ordre.

TITRE II
DU CRÉDIT ET DES GARANTIES
Chapitre Ier
De la cession et du nantissement des créances professionnelles
Section 1
Actes de cession ou de nantissement

Art. L. 521-1. - Tout crédit qu'un établissement de crédit consent à une personne morale de droit privé ou de droit public, ou à une personne physique dans l'exercice par celle-ci de son activité professionnelle, peut donner lieu au profit de cet établissement, par la seule remise d'un bordereau, à la cession ou au nantissement par le bénéficiaire du crédit, de toute créance que celui-ci peut détenir sur un tiers, personne morale de droit public ou de droit privé ou personne physique dans l'exercice par celle-ci de son activité professionnelle.
Art. L. 521-2. - Peuvent être cédées ou données en nantissement les créances liquides et exigibles, même à terme. Peuvent également être cédées ou données en nantissement les créances résultant d'un acte déjà intervenu ou à intervenir mais dont le montant et l'exigibilité ne sont pas encore déterminés.
Le bordereau doit comporter les énonciations suivantes :
1° La dénomination, selon le cas «acte de cession de créances professionnelles» ou «acte de nantissement de créances professionnelles»;
2° La mention que l'acte est soumis aux dispositions du présent chapitre;
3° Le nom ou la dénomination sociale de l'établissement de crédit bénéficiaire;
4° La désignation ou l'individualisation des créances cédées ou données en nantissement ou des éléments susceptibles d'effectuer cette désignation ou cette individualisation, notamment par l'indication du débiteur, du lieu de paiement, du montant des créances ou de leur évaluation et, s'il y a lieu, de leur échéance.
Toutefois, lorsque la transmission des créances cédées ou données en nantissement est effectuée par un procédé informatique permettant de les identifier, le bordereau peut se borner à indiquer, outre les mentions visées aux 1°, 2° et 3° ci-dessus, le moyen par lequel elles sont transmises, leur nombre et leur montant global.
En cas de contestation portant sur l'existence ou sur la transmission d'une de ces créances, le cessionnaire peut prouver, par tous moyens, que la créance objet de la contestation est comprise dans le montant global porté sur le bordereau.
Le titre dans lequel une des mentions indiquées ci-dessus fait défaut ne vaut pas comme acte de cession ou de nantissement de créances professionnelles au sens du présent chapitre.
Art. L. 521-3. - Même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, la cession de créance transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée.
Sauf convention contraire, le signataire de l'acte de cession ou de nantissement est garant solidaire du paiement des créances cédées ou données en nantissement.
Les dispositions de l'alinéa premier sont de caractère interprétatif.
Art. L. 521-4. - Le bordereau est signé par le cédant. Il peut être stipulé à ordre.
La date est apposée par le cessionnaire.
Art. L. 521-5. - Le bordereau n'est transmissible qu'à un autre établissement de crédit.
Art. L. 521-6. - La cession ou le nantissement prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date portée sur le bordereau.
A compter de cette date, le client de l'établissement de crédit bénéficiaire du bordereau ne peut, sans l'accord de cet établissement, modifier l'étendue des droits attachés aux créances représentées par ce bordereau.
Sauf convention contraire, la remise du bordereau entraîne, de plein droit, le transfert des sûretés garantissant chaque créance.
En cas de contestation de la date portée sur le bordereau, l'établissement de crédit rapporte, par tous moyens, l'exactitude de celle-ci.
Art. L. 521-7. - L'établissement de crédit peut, à tout moment, interdire au débiteur de la créance cédée ou nantie de payer entre les mains du signataire du bordereau. A compter de cette notification, dont les formes seront fixées par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 521-14, le débiteur ne se libère valablement qu'auprès de l'établissement de crédit.
Art. L. 521-8. - Sur la demande du bénéficiaire du bordereau, le débiteur peut s'engager à le payer directement; cet engagement est constaté, à peine de nullité, par un écrit intitulé : «Acte d'acceptation de la cession ou du nantissement d'une créance professionnelle.»
Dans ce cas le débiteur ne peut opposer à l'établissement de crédit les exceptions fondées sur ses rapports personnels avec le signataire du bordereau, à moins que l'établissement de crédit, en acquérant ou en recevant la créance, n'ait agi sciemment au détriment du débiteur.

Section 2
Mobilisation des crédits

Art. L. 521-9. - L'établissement de crédit cessionnaire ou nanti de créances professionnelles dans les conditions prévues aux articles L. 521-l et L. 521-2 peut, à tout moment, émettre des titres destinés à la mobilisation de tout ou partie des crédits consentis.
Les porteurs successifs de ces titres bénéficient des droits énumérés aux articles suivants sous la condition que les bordereaux aient été mis à la disposition de l'organisme qui assure le financement conformément aux conventions intervenues entre celui-ci et l'établissement prêteur.
Art. L. 521-10. - Les opérations de crédit à court terme n'ayant pas entraîné une cession ou un nantissement de créances professionnelles en faveur de l'établissement de crédit prêteur peuvent donner lieu à l'émission par celui-ci de titres destinés à la mobilisation de tout ou partie des crédits consentis.
Les porteurs successifs de ces titres bénéficient des droits énumérés aux articles suivants sous la condition que les bordereaux constatant ces crédits aient été mis à la disposition de l'organisme qui assure le financement, conformément aux conventions intervenues entre celui-ci et l'établissement prêteur; ces bordereaux qui sont dénommés «actes de cession de créances financières» sont soumis, en tant que de besoin, aux dispositions des articles L. 521-1 à L. 521-8.
Art. L. 521-11. - Les porteurs successifs des titres créés par un établissement de crédit en application des articles L. 521-9 et L. 521-10 bénéficient des droits prévus par les articles L. 511-8 à L. 511-14 en matière d'endossement.
Art. L. 521-12. - Les droits attachés aux titres de mobilisation portent sur l'intégralité des créances désignées sur les bordereaux; ils portent également sur tous intérêts et frais accessoires ainsi que sur les garanties assortissant ces créances.
Art. L. 521-13. - A compter de la mise à la disposition de l'organisme de financement des bordereaux et pendant la durée de celle-ci, l'établissement de crédit ne peut, sauf stipulation contraire, transmettre les créances représentées par les bordereaux, sous quelque forme que ce soit.
Art. L. 521-14. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent chapitre.

Chapitre II
Du crédit-bail
Section 1
Opérations de crédit-bail

Art. L. 522-1. - Les opérations de crédit-bail visées par le présent chapitre sont :
1° Les opérations de location de biens d'équipement ou de matériel d'outillage achetés en vue de cette location par des entreprises qui en demeurent propriétaires, lorsque ces opérations, quelle que soit leur qualification, donnent au locataire la possibilité d'acquérir tout ou partie des biens loués, moyennant un prix convenu tenant compte, au moins pour partie, des versements effectués à titre de loyers;
2° Les opérations par lesquelles une entreprise donne en location des biens immobiliers à usage professionnel, achetés par elle ou construits pour son compte, lorsque ces opérations, quelle que soit leur qualification, permettent aux locataires de devenir propriétaires de tout ou partie des biens loués, au plus tard à l'expiration du bail, soit par cession en exécution d'une promesse unilatérale de vente, soit par acquisition directe ou indirecte des droits de propriété du terrain sur lequel ont été édifiés le ou les immeubles loués, soit par transfert de plein droit de la propriété des constructions édifiées sur le terrain appartenant audit locataire.
En cas d'opération de crédit-bail sur le droit au renouvellement d'un bail, celui-ci ne peut être invoqué que par le crédit bailleur, par dérogation aux dispositions de l'article L. 145-8. Les autres droits et obligations que le locataire tient des dispositions du livre I, titre IV, chapitre 5, sont répartis par contrat entre le propriétaire, le crédit-bailleur et le crédit-preneur;
3° Les opérations de location de fonds de commerce, d'établissement artisanal ou de l'un de leurs éléments incorporels, assorties d'une promesse unilatérale de vente moyennant un prix convenu tenant compte, au moins pour partie, des versements effectués à titre de loyers, à l'exclusion de toute opération de location à l'ancien propriétaire du fonds de commerce ou de l'établissement artisanal.
Art. L. 522-2. - En cas de cession de biens compris dans une opération de crédit-bail, et pendant la durée de l'opération, le cessionnaire est tenu des mêmes obligations que le cédant qui en reste garant.
Art. L. 522-3. - Les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 145-4 ne sont pas applicables aux contrats de crédit-bail immobilier.
Ces contrats prévoient, à peine de nullité, les conditions dans lesquelles leur résiliation peut, le cas échéant, intervenir à la demande du preneur.
Art. L. 522-4. - Les opérations visées à l'article L. 522-1 sont soumises à une publicité dont les modalités sont fixées par décret. Ce décret précise les conditions dans lesquelles le défaut de publicité entraîne inopposabilité aux tiers.
Art. L. 522-5. - Pour les opérations de crédit-bail en matière mobilière, les inscriptions prises en vertu de l'article précédent se prescrivent par cinq ans, sauf renouvellement.
Art. L. 522-6. - Les opérations de crédit-bail visées à l'article L. 522-1 ne peuvent être faites à titre habituel que par des entreprises commerciales.
Ces entreprises sont soumises aux dispositions de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit. A ce titre elles sont tenues d'observer les décisions prises par le comité des établissements de crédit et la commission bancaire.
Sont considérées comme des entreprises de crédit-bail immobilier soumises aux prescriptions du présent chapitre les entreprises qui gèrent à titre de profession habituelle des sociétés créées en vue de la réalisation non habituelle des opérations visées à l'article L. 522-1.
Art. L. 522-7. - Le fait pour toute personne, agissant pour son compte ou pour celui d'une société, d'exercer les activités définies par l'article L. 522-6 sans se conformer aux dispositions de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit ou des règlements pris pour son application est passible des sanctions pénales prévues par ladite loi.
Art. L. 522-8. - Les personnes ou entreprises visées à l'article L. 522-6 qui contreviennent aux dispositions de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 susmentionnée ou des règlements pris pour son application sont passibles des sanctions disciplinaires prévues par ladite loi.

Chapitre III
Du gage commercial
Section 1
Dispositions générales

Art. L. 523-1. - Le gage constitué soit par un commerçant, soit par un individu non commerçant, pour un acte de commerce, se constate à l'égard des tiers, comme à l'égard des parties contractantes, conformément aux dispositions de l'article L. 110-3.
Le gage, à l'égard des valeurs négociables, peut aussi être établi par un endossement régulier, indiquant que les valeurs ont été remises en garantie.
A l'égard des actions, des parts d'intérêts et des obligations nominatives des sociétés financières, industrielles, commerciales ou civiles, dont la transmission s'opère par un transfert sur les registres de la société, ainsi qu'à l'égard des inscriptions nominatives sur le grand-livre de la dette publique, le gage peut également être établi par un transfert, à titre de garantie, inscrit sur lesdits registres.
Il n'est pas dérogé aux dispositions de l'article 2075 du code civil en ce qui concerne les créances mobilières, dont le cessionnaire ne peut être saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur.
Les effets de commerce donnés en gage sont recouvrables par le créancier gagiste.
Art. L. 523-2. - Dans tous les cas, le privilège ne subsiste sur le gage qu'autant que ce gage a été mis et est resté en la possession du créancier ou d'un tiers convenu entre les parties.
Le créancier est réputé avoir les marchandises en sa possession, lorsqu'elles sont à sa disposition dans ses magasins ou navires, à la douane ou dans un dépôt public, ou si, avant qu'elles soient arrivées il en est saisi par un connaissement ou par une lettre de voiture.
Art. L. 523-3. - A défaut de paiement à l'échéance, le créancier peut, huit jours après une simple signification faite au débiteur et au tiers bailleur de gage, s'il y en a un, faire procéder à la vente publique des objets donnés en gage.
Les ventes autres que celles dont les sociétés de bourse et les courtiers en valeurs mobilières sont chargés sont faites par les courtiers. Toutefois, sur la requête des parties, le président du tribunal de commerce peut désigner pour y procéder une autre classe d'officiers publics.
Les dispositions des articles L. 313-12 à L. 313-14 sur les ventes publiques sont applicables aux ventes prévues par l'alinéa précédent.
Toute clause qui autoriserait le créancier à s'approprier le gage ou à en disposer sans les formalités ci-dessus prescrites est nulle.

Section 2
Différentes formes de gage
Sous-section 1
Dépôts en magasins généraux
Paragraphe 1
Agrément, cession et cessation d'exploitation

Art. L. 523-4. - L'exploitant d'un établissement à usage d'entrepôt où des industriels, commerçants, agriculteurs ou artisans déposent des matières premières, des marchandises, des denrées ou des produits fabriqués ne peut émettre des bulletins de gage négociables et qualifier son établissement de magasin général que s'il a obtenu un agrément du préfet.
Art. L. 523-5. - L'arrêté préfectoral statuant sur la demande d'agrément est pris après avis des organismes professionnels et interprofessionnels prévus par le décret pris pour l'application de la présente sous-section. Il est motivé.
Art. L. 523-6. - La cession d'un magasin général est subordonnée à l'agrément du préfet, donné dans les mêmes formes.
Art. L. 523-7. - Toute cessation d'exploitation non suivie de cession est subordonnée à un préavis de six mois, adressé par l'exploitant au préfet. A l'expiration de ce délai, et si les intérêts généraux du commerce l'exigent, un administrateur provisoire peut être désigné par le président du tribunal de grande instance statuant comme en matière de référé à la demande du ministère public.
Art. L. 523-8. - Il est interdit aux exploitants des magasins généraux de se livrer, soit directement, soit indirectement, que ce soit pour leur propre compte ou pour le compte d'autrui, à titre de commissionnaire ou à tout autre titre, à aucun commerce ou spéculation ayant pour objet les marchandises pour lesquelles ils sont habilités à délivrer des récépissés-warrants.
Art. L. 523-9. - Sont réputées tomber sous le coup de l'article précédent les sociétés exploitantes de magasins généraux dont l'un des associés, possédant plus de dix pour cent du capital social, exerce une activité incompatible avec les dispositions dudit article.
Art. L. 523-10. - Toute société exploitante qui, par suite d'une modification intervenue dans la répartition du capital entre les associés, ne se trouve plus dans les conditions exigées par l'article L. 523-9 doit dans le mois qui suit cette modification, solliciter le maintien de l'agrément dont elle est bénéficiaire.
L'agrément reste valable jusqu'à ce que le préfet ait statué par arrêté.
Le préfet peut, soit prononcer le maintien de l'agrément dans les conditions prévues à l'article L. 523-14, soit en prononcer le retrait conformément aux dispositions de l'article L. 523-42.
Art. L. 523-11. - Lorsque l'ouverture d'un établissement est subordonnée à l'intervention d'un décret ou d'un arrêté ministériel, l'agrément de cet établissement comme magasin général est accordé par ce décret ou cet arrêté, après consultation des organismes visés à l'article L. 523-5.
Art. L. 523-12. - Les exploitants d'établissements agréés par arrêté ou par décret n'ont pas à solliciter l'autorisation prévue par les textes réglementant les créations, extensions ou transferts d'établissements.
Art. L. 523-13. - Les décrets ou arrêtés agréant les établissements comme magasins généraux peuvent comporter, pour l'exploitant, l'autorisation d'ouvrir une salle de ventes publiques de marchandises en gros.
Art. L. 523-14. - Les entreprises ne répondant pas aux conditions fixées à l'article L. 523-8 et à l'alinéa premier de l'article L. 523-9 peuvent cependant solliciter l'agrément comme magasins généraux des entrepôts qu'elles exploitent ou projettent d'exploiter et obtenir, à titre exceptionnel, cet agrément s'il est reconnu que les intérêts du commerce l'exigent.
Dans ce cas :
1° La demande d'agrément fait l'objet à la préfecture et dans la commune du lieu de l'établissement des mesures de publicité qui sont prévues par voie réglementaire;
2° L'arrêté d'agrément fixe, en sus du cautionnement prévu à l'article L. 523-15, un cautionnement spécial au moins égal à celui-ci. Le cautionnement spécial est fourni, soit en numéraire, soit par une caution bancaire agréée par le tribunal de commerce dans le ressort duquel est situé l'établissement.
Art. L. 523-15. - L'arrêté préfectoral autorisant l'ouverture du magasin général soumet son exploitant à l'obligation d'un cautionnement.
Sont soumis à la même obligation les établissements visés à l'article L. 523-11.
Le montant de ce cautionnement, proportionnel à la surface affectée au magasinage, est compris entre deux limites fixées par décret en Conseil d'Etat.
Art. L. 523-16. - Un ou plusieurs règlements types fixent, dans le cadre des dispositions de la présente sous-section et du décret en Conseil d'Etat pris pour son application, les conditions de fonctionnement des établissements.

Paragraphe 2
Obligations, responsabilités et garanties

Art. L. 523-17. - Toute personne qui remet une marchandise en dépôt à un magasin général est tenue d'en déclarer la nature et la valeur à l'exploitant.
Art. L. 523-18. - Les exploitants de magasins généraux sont responsables, dans la limite de la valeur déclarée, de la garde et la conservation des dépôts qui leur sont confiés.
Ils ne sont pas responsables des avaries et déchets naturels provenant de la nature et du conditionnement des marchandises ou des cas de force majeure.
Les règlements types et les règlements particuliers prévus aux articles L. 523-16 et L. 523-20 précisent les obligations des exploitants en ce qui concerne la conservation des dépôts.
Art. L. 523-19. - Les marchandises susceptibles d'être warrantées sont obligatoirement assurées contre l'incendie par les polices générales du magasin.
Toutefois, pour les exploitants de magasins généraux établis dans les ports maritimes, cette obligation est suspendue à l'égard des marchandises entreposées couvertes par une assurance maritime tant que cette assurance garantit ces risques.
Si, pendant cette période, un sinistre survient, la responsabilité de l'exploitant du magasin général ne sera pas engagée vis-à-vis des déposants, des compagnies d'assurances et des porteurs de warrants.
A l'expiration de ladite période, les marchandises susmentionnées devront être assurées par les polices générales du magasin.
Art. L. 523-20. - Chaque établissement est doté d'un règlement particulier qui complète les dispositions générales des règlements types en fixant les conditions d'exploitation variant avec la nature et la situation du magasin.
Art. L. 523-21. - Au règlement prévu à l'article précédent sont annexés un tarif général et, éventuellement, des tarifs spéciaux pour la rétribution du magasinage, dans les termes de la présente sous-section, et des services rendus à cette occasion aux déposants. La perception des taxes correspondantes a lieu indistinctement et sans aucune faveur.
Art. L. 523-22. - Les tarifs sont communiqués au préfet un mois au moins avant l'ouverture du magasin général.
Toute modification des tarifs existants doit lui être notifiée, ainsi qu'aux organismes visés à l'article L. 523-5, et ne devient exécutoire qu'un mois après cette notification. Toutefois, ce délai n'est pas applicable aux exploitants dont les tarifs sont soumis à une autorisation administrative.

Paragraphe 3
Fonctionnement et contrôle

Art. L. 523-23. - Les exploitants de magasins généraux peuvent prêter sur nantissement des marchandises qu'ils reçoivent en dépôt ou négocier les warrants qui les représentent.
Art. L. 523-24. - Les présidents, gérants, directeurs et le personnel des exploitations de magasins généraux sont, sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal, tenus au secret professionnel pour tout ce qui regarde les marchandises entreposées.
Art. L. 523-25. - Les magasins généraux sont placés sous le contrôle de l'administration, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
Art. L. 523-26. - La présente sous-section et son décret d'application, le tarif et les règlements, sont affichés dans la partie des bureaux du magasin où le public a accès.

Paragraphe 4
Récépissés et warrants

Art. L. 523-27. - Il est délivré à chaque déposant un ou plusieurs récépissés. Ces récépissés énoncent les nom, profession et domicile du déposant ainsi que la nature de la marchandise déposée et les indications propres à en établir l'identité et à en déterminer la valeur.
Les marchandises fongibles déposées en magasin général et sur lesquelles il a été délivré un récépissé et un warrant peuvent être remplacées par des marchandises de même nature, de même espèce et de même qualité. La possibilité de cette substitution doit être mentionnée à la fois sur le récépissé et sur le warrant.
Les droits et privilèges du porteur du récépissé et du porteur du warrant sont reportés sur les marchandises substituées.
Il peut être délivré un récépissé et un warrant sur un lot de marchandises fongibles à prendre dans un lot plus important.
Art. L. 523-28. - A chaque récépissé de marchandise est annexé, sous la dénomination de warrant, un bulletin de gage contenant les mêmes mentions que le récépissé.
Les récépissés de marchandises et les warrants y annexés sont extraits d'un registre à souches.
Art. L. 523-29. - Les récépissés et les warrants peuvent être transférés par voie d'endossement, ensemble ou séparément.
Art. L. 523-30. - Tout cessionnaire du récépissé ou du warrant peut exiger la transcription sur les registres à souches dont ils sont extraits de l'endossement fait à son profit, avec indication de son domicile.
Art. L. 523-31. - L'endossement du warrant séparé du récépissé vaut nantissement de la marchandise au profit du cessionnaire du warrant.
L'endossement du récépissé transmet au cessionnaire le droit de disposer de la marchandise, à charge pour lui, lorsque le warrant n'est pas transféré avec le récépissé, de payer la créance garantie par le warrant ou d'en laisser payer le montant sur le prix de la vente de la marchandise.
Art. L. 523-32. - L'endossement du récépissé et du warrant, transférés ensemble ou séparément, doit être daté.
L'endossement du warrant séparé du récépissé doit, en outre, énoncer le montant intégral, en capital et intérêts, de la créance garantie, la date de son échéance et les nom, profession et domicile du créancier.
Le premier cessionnaire du warrant doit immédiatement faire transcrire l'endossement sur les registres du magasin, avec les énonciations dont il est accompagné. Il est fait mention de cette transcription sur le warrant.
Art. L. 523-33. - Le porteur du récépissé séparé du warrant peut, même avant l'échéance, payer la créance garantie par le warrant.
Si le porteur du warrant n'est pas connu ou si, étant connu, il n'est pas d'accord avec le débiteur sur les conditions auxquelles aurait lieu l'anticipation de paiement, la somme due, y compris les intérêts jusqu'à l'échéance, est consignée à l'administration du magasin général qui en demeure responsable. Cette consignation libère la marchandise.
Art. L. 523-34. - A défaut de paiement à l'échéance, le porteur du warrant séparé du récépissé, peut, huit jours après le protêt, et sans aucune formalité de justice, faire procéder par officiers publics, à la vente publique aux enchères et en gros de la marchandise engagée, conformément aux dispositions du livre III relatives aux ventes publiques de marchandises en gros.
Dans le cas où le souscripteur primitif du warrant l'a remboursé, il peut faire procéder à la vente de la marchandise, comme il est dit à l'alinéa précédent, contre le porteur du récépissé, huit jours après l'échéance et sans qu'il soit besoin d'aucune mise en demeure.
Art. L. 523-35. - Le créancier est payé de sa créance sur le prix, directement et sans formalité de justice, par privilège et préférence à tous créanciers, sans autre déduction que celles :
1° Des contributions indirectes, et droits de douane dus par la marchandise;
2° Des frais de vente, de magasinage et autres frais pour la conservation de la chose.
Si le porteur du récépissé ne se présente pas lors de la vente de la marchandise, la somme excédant celle qui est due au porteur du warrant est consignée à l'administration du magasin général, comme il est dit à l'article L. 523-33.
Art. L. 523-36. - Le porteur du warrant n'a de recours contre l'emprunteur et les endosseurs qu'après avoir exercé ses droits sur la marchandise et en cas d'insuffisance.
Le délai fixé par l'article L. 511-42 pour l'exercice du recours contre les endosseurs ne court que du jour où la vente de la marchandise est réalisée.
Le porteur du warrant perd, en tout cas, son recours contre les endosseurs s'il n'a pas fait procéder à la vente dans le mois qui suit la date du protêt.
Art. L. 523-37. - Le porteur du récépissé et du warrant a, sur les indemnités d'assurance dues en cas de sinistre, les mêmes droits et privilèges que sur la marchandise assurée.
Art. L. 523-38. - Les établissements publics de crédit peuvent recevoir les warrants comme effets de commerce, avec dispense d'une des signatures exigées par leurs statuts.
Art. L. 523-39. - Celui qui a perdu un récépissé ou un warrant peut demander et obtenir par ordonnance du juge, en justifiant de sa propriété et en donnant caution, un duplicata s'il s'agit du récépissé, le paiement de la créance garantie s'il s'agit du warrant.
Si dans ce cas le souscripteur du warrant ne s'est pas libéré à l'échéance, le tiers porteur dont l'endos aura été transcrit sur les registres du magasin général pourra être autorisé par ordonnance du juge, à charge de fournir caution, à faire procéder à la vente de la marchandise engagée dans les conditions déterminées à l'article L. 523-34.
Le protêt prévu audit article donne copie des mentions telles qu'elles figurent sur le registre du magasin général.
Art. L. 523-40. - En cas de perte du récépissé, la caution prévue à l'article précédent est libérée à l'expiration d'un délai de cinq ans, lorsque les marchandises en faisant l'objet n'auront pas été revendiquées par un tiers au magasin général.
En cas de perte du warrant, la caution est libérée à l'expiration d'un délai de trois ans, à compter de la transcription de l'endos.
Art. L. 523-41. - Il est interdit d'ouvrir et d'exploiter sans l'autorisation prescrite à l'article L. 523-4 un établissement recevant en dépôt des marchandises pour lesquelles sont délivrés aux déposants, sous le nom de warrants, ou tout autre nom, des bulletins de gages négociables.
Toute infraction à cette prohibition est punie d'une amende de quarante mille francs et d'un emprisonnement d'un an.
Le tribunal peut ordonner que le jugement de condamnation sera publié intégralement ou par extraits dans les journaux qu'il désigne et affiché dans les lieux qu'il indique, notamment aux portes du domicile et des magasins du condamné, le tout aux frais du condamné, sans toutefois que les frais de cette publication puissent dépasser le maximum de l'amende encourue.
Art. L. 523-42. - En cas d'infraction commise par l'exploitant d'un magasin général aux dispositions de la présente sous-section ou des décrets en Conseil d'Etat pris pour son application, le préfet peut, l'exploitant entendu et après consultation des organismes professionnels et interprofessionnels visés à l'article L. 523-5, prononcer par arrêté, à titre temporaire ou définitif, le retrait de l'agrément.
Dans ce cas, le président du tribunal statuant comme en matière de référé désigne, à la demande du ministère public, un administrateur provisoire et détermine les pouvoirs dont il dispose pour l'exploitation de l'établissement.
En cas de retrait d'agrément à titre définitif et lorsque l'intérêt du commerce local exige le maintien du magasin général, les pouvoirs de l'administrateur provisoire peuvent comporter la mise aux enchères publiques du fonds de commerce et du matériel nécessaire à son exploitation.
Le retrait d'agrément à titre définitif peut également être prononcé, après consultation des organismes professionnels et interprofessionnels, à l'encontre des établissements qui auraient cessé de fonctionner comme magasins généraux ou comme entrepôts pendant au moins deux ans.
Art. L. 523-43. - Un décret en conseil d'Etat fixe les conditions d'application de la présente sous-section.

Sous-section 2
Le warrant hôtelier

Art. L. 523-44. - Tout exploitant d'hôtel peut emprunter sur le mobilier commercial, le matériel et l'outillage servant à son exploitation, même devenus immeubles par destination, tout en en conservant la garde dans les locaux de l'hôtel.
Les objets servant de garantie à la créance restent, jusqu'au remboursement des sommes empruntées, le gage du prêteur et de ses ayants droit.
L'emprunteur est responsable desdits objets qui demeurent confiés à ses soins, sans aucune indemnité opposable au prêteur et à ses ayants droit.
Art. L. 523-45. - L'exploitant d'hôtel, lorsqu'il n'est pas propriétaire ou usufruitier de l'immeuble dans lequel il exerce son industrie, doit, avant tout emprunt, aviser par acte extrajudiciaire le propriétaire ou l'usufruitier du fonds loué ou leur mandataire légal, de la nature, de la quantité et de la valeur des objets constitués en gage, ainsi que du montant des sommes à emprunter. Ce même avis doit être réitéré par lettre, par l'intermédiaire du greffier du tribunal d'instance compétent sur le lieu d'exploitation de l'hôtel meublé. La lettre d'avis est remise au greffier qui doit la viser, l'enregistrer et l'envoyer sous forme de pli d'affaire recommandé avec accusé de réception.
Le propriétaire, l'usufruitier ou leur mandataire légal, dans un délai de quinze jours francs à partir de la notification de l'acte précité, peuvent s'opposer à l'emprunt par acte extrajudiciaire adressé au greffier, lorsque l'emprunteur n'a pas payé les loyers échus, six mois de loyers en cours et six mois à échoir.
L'emprunteur peut obtenir mainlevée de l'opposition moyennant l'acquittement des loyers précités.
Le défaut de réponse de la part du propriétaire, de l'usufruitier, ou de leur mandataire légal, dans le délai ci-dessus fixé, est considéré comme une non-opposition à l'emprunt.
Le privilège du bailleur est réduit, jusqu'à concurrence de la somme prêtée, sur les objets servant de gage à l'emprunt. Il subsiste dans les termes de droit si l'emprunt est réalisé malgré l'opposition du bailleur.
Le bailleur peut toujours renoncer, soit à son opposition, soit au payement des loyers ci-dessus indiqués, en apposant sa signature sur le registre prévu à l'article L. 523-46.
En cas de conflit entre le privilège du porteur du warrant hôtelier et des créanciers hypothécaires, leur rang est déterminé par les dates respectives de la transcription du premier endossement du warrant et des inscriptions d'hypothèques, sauf l'application des dispositions de l'article 2135 du code civil en ce qui concerne les hypothèques dispensées d'inscriptions.
Art. L. 523-46. - Les constitutions de gages régies par la présente sous-section sont faites dans les formes ci-après :
Il est tenu, dans chaque greffe de tribunal de commerce, un registre à souche, coté et paraphé, dont le volant et la souche portent chacun, d'après les déclarations de l'emprunteur, les indications suivantes :
1° Les noms, professions et domiciles des parties;
2° La nature des objets mis en gage, les indications propres à établir leur identité et à déterminer leur valeur, ainsi que le lieu de leur situation;
3° L'absence de privilège de vendeur, de nantissement ou de gage sur lesdits objets;
4° Le nom de la compagnie à laquelle les biens sont assurés, ainsi que l'immeuble, pendant toute la durée du prêt, contre l'incendie;
5° Le montant de la créance garantie et la date de son échéance, ainsi que toutes les clauses et conditions particulières arrêtées entre les parties;
6° La date de la notification de l'acte extrajudiciaire adressé au propriétaire, à l'usufruitier ou à leur mandataire légal, et celle de leur réponse;
7° Le montant du loyer annuel de l'hôtel et la justification que les loyers énumérés à l'article L. 523-45 ont été acquittés.
Le volant contenant les mentions ci-dessus constitue le warrant hôtelier.
Art. L. 523-47. - Le warrant hôtelier est délivré par le greffier du tribunal de commerce dans le ressort duquel est exploité l'hôtel. L'emprunteur qui le reçoit donne décharge de la remise du titre, en apposant sa signature avec la date sur le registre. Il ne peut être délivré qu'un seul warrant pour les mêmes objets. Le warrant est transféré par l'emprunteur au prêteur par voie d'endossement daté et signé.
Le prêteur doit, dans un délai de cinq jours, faire transcrire sur le registre le premier endossement; mention de cette transcription est également énoncée sur le warrant.
Art. L. 523-48. - Le warrant est transmissible par voie d'endossement établi suivant les prescriptions de l'article L. 523-47, mais non soumis à la formalité de la transcription comme le premier endossement.
Tous ceux qui ont signé ou endossé un warrant sont tenus à la garantie solidaire envers le porteur.
L'escompteur et les réescompteurs d'un warrant sont tenus d'aviser, dans les huit jours, le greffier du tribunal de commerce, par pli recommandé, avec accusé de réception, ou verbalement contre récépissé de l'avis.
L'emprunteur peut, par une mention spéciale inscrite sur le warrant, dispenser l'escompteur et les réescompteurs de donner cet avis; en ce cas, il n'y a pas lieu à application des dispositions des deux derniers alinéas de l'article L. 523-51.
Art. L. 523-49. - Le greffier est tenu de délivrer à tout requérant, soit un état des warrants inscrits depuis moins de cinq ans, soit un certificat établissant qu'il n'existe pas d'inscription.
Art. L. 523-50. - La radiation de l'inscription est opérée sur la justification, soit du remboursement de la créance garantie par le warrant, soit d'une mainlevée régulière.
L'emprunteur qui a remboursé son warrant fait constater le remboursement au greffe du tribunal de commerce; mention du remboursement ou de la mainlevée est faite sur le registre prévu à l'article L. 523-46; un certificat de radiation de l'inscription lui est délivré.
L'inscription est radiée d'office après cinq ans, si elle n'a pas été renouvelée avant l'expiration de ce délai; si elle est inscrite à nouveau après la radiation d'office, elle ne vaut, à l'égard des tiers, que du jour de la date.
Art. L. 523-51. - L'emprunteur conserve le droit de vendre les objets warrantés à l'amiable et avant le paiement de la créance, même sans le concours du prêteur, mais leur tradition à l'acquéreur ne peut être opérée qu'après désintéressement du créancier.
L'emprunteur peut, même avant l'échéance, rembourser la créance garantie par le warrant. Si le porteur du warrant refuse les offres du débiteur, celui-ci peut, pour se libérer, consigner la somme offerte en observant les formalités prescrites par l'article 1259 du code civil; les offres sont faites au dernier ayant droit connu par les avis donnés au greffier, en conformité de l'article L. 523-48. Sur le vu d'une quittance de consignation régulière et suffisante, le président du tribunal de commerce dans le ressort duquel le warrant est inscrit rend une ordonnance aux termes de laquelle le gage est transporté sur la somme consignée.
En cas de remboursement anticipé d'un warrant, l'emprunteur bénéficie des intérêts qui restaient à courir jusqu'à l'échéance du warrant, déduction faite d'un délai de dix jours.
Art. L. 523-52. - Les établissements publics de crédit peuvent recevoir les warrants hôteliers comme effets de commerce, avec dispense d'une des signatures exigées par leurs statuts.
Art. L. 523-53. - Le porteur du warrant a, sur les indemnités d'assurances, en cas de sinistre, les mêmes droits et privilèges que sur les objets assurés.
Art. L. 523-54. - Le porteur du warrant doit réclamer à l'emprunteur paiement de sa créance échue et, à défaut de ce paiement, réitérer sa réclamation au débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Faute du paiement du warrant à l'échéance, le porteur a pour la réalisation du gage les droits que confèrent aux créanciers privilégiés ou garantis par un nantissement les dispositions des articles L. 143-5 à L. 143-15.
Toutefois, le bailleur peut toujours exercer son privilège jusqu'à concurrence de six mois de loyers échus, six mois de loyers en cours et six mois de loyers à échoir.
Si le porteur fait procéder à la vente, il ne peut plus exercer son recours contre les endosseurs et même contre l'emprunteur qu'après avoir fait valoir ses droits sur le prix des objets warrantés. En cas d'insuffisance du prix pour le désintéresser, un délai de trois mois lui est imparti, à dater du jour où la vente est réalisée, pour exercer son recours contre les endosseurs.
Art. L. 523-55. - Le porteur du warrant est payé directement de sa créance sur le prix de vente, par privilège et de préférence à tous créanciers, et sans autre déduction que celle des contributions directes et des frais de vente et sans autre formalité qu'une ordonnance du président du tribunal de commerce.
Art. L. 523-56. - La fausse déclaration ou le fait pour tout emprunteur de constituer un warrant sur des objets dont il n'est pas propriétaire ou déjà donnés en gage ou en nantissement; le fait pour tout emprunteur de détourner, dissiper ou volontairement détériorer, au préjudice de son créancier le gage de celui-ci est, selon les cas, puni des peines prévues pour l'escroquerie ou l'abus de confiance, aux articles 313-1, 313-7, 313-8 ou 314-1 et 31 4-10 du code pénal.
Art. L. 523-57. - Le montant des droits à percevoir par le greffier est fixé par décret. Les avis prescrits par la présente sous-section sont envoyés en la forme et avec la taxe des papiers d'affaires recommandés.
Art. L. 523-58. - Sont considérées comme nulles et non avenues toutes conventions contraires aux dispositions de la présente sous-section, et notamment toutes stipulations qui ont pour effet de porter atteinte au droit des locataires d'instituer le warrant hôtelier.

Sous-section 3
Le warrant pétrolier

Art. L. 523-59. - Les opérateurs, détenteurs de stocks de pétrole brut ou de produits pétroliers peuvent warranter des stocks en garantie de leurs emprunts, tout en en conservant la garde dans leurs usines ou dépôts.
Les produits warrantés restent, jusqu'au remboursement des sommes avancées, le gage du porteur du warrant.
Le warrant est établi sur une certaine quantité de marchandises d'une qualité spécifiée, sans qu'il soit nécessaire de séparer matériellement les produits warrantés des autres produits similaires détenus par l'emprunteur.
L'emprunteur est responsable de la marchandise qui reste confiée à ses soins et à sa garde, et cela sans aucune indemnité opposable au bénéfice du warrant.
Art. L. 523-60. - Pour établir la pièce qui est dénommée «warrant pétrolier» le greffier du tribunal de commerce de la situation des produits à warranter inscrit, d'après les déclarations de l'emprunteur, la nature, la qualité, la quantité, la valeur, le lieu de situation des produits qui doivent servir de gage pour l'emprunt, le montant des sommes empruntées, ainsi que les clauses et conditions particulières relatives au warrant pétrolier, arrêtées entre les parties.
Il transcrit sur un registre spécial le warrant pétrolier ainsi rédigé et mentionne sur celui-ci le volume et le numéro de la transcription, avec la mention des warrants préexistant sur les mêmes stocks de produits.
Le warrant est signé par l'emprunteur.
Il n'est valable que pour trois ans au plus, mais peut être renouvelé.
Art. L. 523-61. - Le warrant indique si le produit warranté est assuré ou non et, en cas d'assurance, le nom et l'adresse de l'assureur.
Faculté est donnée aux prêteurs de continuer ladite assurance jusqu'à la réalisation du warrant.
Le porteur de warrant a, sur les indemnités d'assurances dues en cas de sinistre, les mêmes droits et privilèges que sur les produits assurés.
Art. L. 523-62. - Le greffier du tribunal de commerce délivre, à tout requérant, soit un état des warrants inscrits depuis moins de cinq ans au nom de l'emprunteur, soit un certificat établissant qu'il n'existe pas d'inscription.
Art. L. 523-63. - La radiation de l'inscription est opérée sur la justification, soit du remboursement de la créance garantie par le warrant, soit d'une mainlevée régulière.
L'emprunteur qui a remboursé son warrant fait constater le remboursement par le greffe du tribunal de commerce; mention du remboursement ou de la mainlevée sera faite sur le registre prévu à l'article L. 523-60. Un certificat de radiation de l'inscription lui sera délivré.
L'inscription est radiée d'office après cinq ans, si elle n'a pas été renouvelée avant l'expiration du délai. Si elle est inscrite à nouveau après la radiation d'office, elle ne vaut, à l'égard des tiers, que du jour de la nouvelle date.
Art. L. 523-64. - L'emprunteur conserve le droit de vendre les produits warrantés à l'amiable et avant le paiement de la créance, même sans le concours du prêteur; mais la tradition, à l'acquéreur, ne peut être opérée qu'une fois le créancier désintéressé.
L'emprunteur peut, même avant l'échéance, rembourser la créance garantie par le warrant. Si le porteur du warrant refuse les offres du débiteur, celui-ci peut, pour se libérer, consigner la somme offerte en observant des formalités prescrites par décret en conseil d'Etat; les offres sont faites au dernier ayant droit connu par les avis donnés au greffe du tribunal de commerce, en conformité de l'article L. 523-66. Au vu d'une quittance de consignation régulière et suffisante, le président du tribunal de commerce compétent sur le lieu d'inscription du warrant rend une ordonnance aux termes de laquelle le gage est transporté sur la somme consignée.
En cas de remboursement anticipé d'un warrant, l'emprunteur bénéficie des intérêts qui restaient à courir jusqu'à l'échéance du warrant, déduction faite d'un délai de dix jours.
Art. L. 523-65. - Les établissements publics de crédit peuvent recevoir les warrants comme effets de commerce, avec dispense d'une des signatures exigées par leurs statuts.
Art. L. 523-66. - Le warrant pétrolier est transmissible par voie d'endossement. L'endossement est daté et signé, il énonce les noms, professions, domiciles des parties.
Tous ceux qui ont signé ou endossé un warrant sont tenus à la garantie solidaire envers le porteur.
L'escompteur ou le réescompteur d'un warrant sont tenus d'aviser, dans les huit jours, le greffe du tribunal de commerce, par lettre recommandée, avec demande d'avis de réception, ou verbalement contre récépissé de l'avis.
L'emprunteur peut, par une mention spéciale inscrite au warrant, dispenser l'escompteur ou les réescompteurs de donner cet avis, mais, dans ce cas, il n'y a pas lieu à application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 523-64.
Art. L. 523-67. - Le porteur du warrant doit réclamer à l'emprunteur paiement de sa créance échue, et, à défaut de ce paiement, constater et réitérer sa réclamation au débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
S'il n'est pas payé dans les cinq jours de l'envoi de cette lettre, le porteur du warrant est tenu, à peine de perdre ses droits contre les endosseurs, de dénoncer le défaut de paiement, quinze jours francs au plus tard après l'échéance, par avertissement, pour chacun des endosseurs, remis au greffe du tribunal de commerce, qui lui en donne récépissé. Le greffe du tribunal de commerce fait connaître cet avertissement, dans la huitaine qui suit, aux endosseurs, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Art. L. 523-68. - En cas de refus de paiement, le porteur du warrant peut, quinze jours après la lettre recommandée adressée à l'emprunteur, comme il est dit ci-dessus, faire procéder par un officier public ou ministériel à la vente publique de la marchandise engagée. Il y est procédé en vertu d'une ordonnance rendue sur requête par le président du tribunal de commerce de la situation des produits warrantés, fixant les jour, lieu et heure de la vente; elle est annoncée huit jours au moins à l'avance par affiches apposées dans les lieux indiqués par le président du tribunal de commerce. Le président du tribunal de commerce peut, dans tous les cas, en autoriser l'annonce par la voie des journaux. La publicité donnée est constatée par une mention insérée au procès-verbal de vente.
Art. L. 523-69. - L'officier public chargé de procéder à la vente prévient, par lettre recommandée, le débiteur et les endosseurs, huit jours à l'avance, des lieu, jour et heure de celle-ci.
L'emprunteur peut toutefois, par une mention spéciale inscrite au warrant pétrolier, accepter qu'il n'y ait pas obligatoirement vente publique, et que la vente puisse être faite à l'amiable. En pareil cas, la vente sera toujours faite en vertu d'une ordonnance du président du tribunal de commerce de la situation des marchandises warrantées rendue sur requête.
Art. L. 523-70. - Le porteur du warrant est payé directement de ses créances sur le prix de vente, par privilège et de préférence à tous créanciers, sous déduction des frais de vente, et sans autres formalités qu'une ordonnance du président du tribunal de commerce.
Art. L. 523-71. - Si le porteur du warrant fait procéder à la vente, conformément aux articles L. 523-67 à L. 523-69, il ne peut plus exercer son recours contre les endosseurs et même contre l'emprunteur qu'après avoir fait valoir ses droits sur le prix des produits warrantés. En cas d'insuffisance du prix pour le désintéresser, un délai d'un mois lui est imparti, à dater du jour où la vente de la marchandise est réalisée, pour exercer son recours contre les endosseurs.
Art. L. 523-72. - En cas de non-conformité, constatée entre les existants et les quantités ou qualités warrantés, les prêteurs peuvent mettre immédiatement, par lettre recommandée avec accusé de réception, le titulaire du warrant pétrolier en demeure : soit de rétablir la garantie dans les quarante-huit heures suivant la réception de la lettre recommandée, soit de leur rembourser, dans le même délai, tout ou partie des sommes portées sur le warrant pétrolier; s'il ne leur est pas donné satisfaction, les prêteurs ont le droit d'exiger le remboursement total de la créance en la considérant comme échue.
En pareil cas, l'emprunteur perd le bénéfice des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 523-64 concernant le remboursement des intérêts.
Art. L. 523-73. - En cas de baisse de la valeur des stocks warrantés, dépassant ou égalant dix pour cent, les prêteurs peuvent mettre, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, les emprunteurs en demeure d'avoir, soit à augmenter le gage, soit à rembourser une partie proportionnelle des sommes prêtées. Dans ce dernier cas, les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 523-64 sont applicables.
S'il n'est pas satisfait à cette demande dans un délai de huit jours francs, les prêteurs ont la faculté d'exiger le remboursement total de leur créance en la considérant comme échue.
Art. L. 523-74. - Le fait pour tout emprunteur d'avoir fait une fausse déclaration, ou d'avoir constitué un warrant pétrolier sur produits déjà warrantés, sans avis préalable donné au nouveau prêteur; le fait pour tout emprunteur ou dépositaire d'avoir détourné, dissipé ou volontairement détérioré au préjudice de son créancier le gage de celui-ci, est puni selon les cas des peines prévues aux articles 313-1, 313-7 et 313-8 ou 314-1 et 314-10 du code pénal pour l'escroquerie ou l'abus de confiance.
Art. L. 523-75. - Lorsque, pour l'exécution de la présente sous-section, il y a lieu à référé, ce référé est porté devant le président du tribunal de commerce de la situation des marchandises warrantées.
Art. L. 523-76. - Les montants des droits à percevoir par le greffier du tribunal de commerce à l'occasion des warrants pétroliers est celui fixé par le décret qui régit les warrants agricoles. Ce montant pourra toutefois être révisé par un décret spécial aux warrants pétroliers.
Les avis prescrits par la présente sous-section sont envoyés en la forme et avec la taxe des papiers d'affaires recommandés.
Art. L. 523-77. - L'application de la présente sous-section ne saurait :
a) Justifier la moindre dérogation aux obligations imposées par la loi n° 92-1443 du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier en particulier en ce qui concerne la constitution et la répartition des stocks.
b) Atténuer, en cas d'infraction à ces obligations, la responsabilité des opérateurs.

Chapitre IV
Du nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement

Art. L. 524-1. - Le paiement du prix d'acquisition de l'outillage et du matériel d'équipement professionnel peut être garanti, soit vis-à-vis du vendeur, soit vis-à-vis du prêteur qui avance les fonds nécessaires au paiement du vendeur, par un nantissement restreint à l'outillage ou au matériel ainsi acquis.
Si l'acquéreur a la qualité de commerçant, ce nantissement est soumis, sous réserve des dispositions ci-après, aux règles édictées par les chapitres II et III du titre IV du livre Ier, sans qu'il soit nécessaire d'y comprendre les éléments essentiels du fonds.
Si l'acquéreur n'a pas la qualité de commerçant, le nantissement est soumis aux dispositions de l'article L. 524-16.
Art. L. 524-2. - Le nantissement est consenti par un acte authentique ou sous seing privé enregistré au droit fixe.
Lorsqu'il est consenti au vendeur, il est donné dans l'acte de vente.
Lorsqu'il est consenti au prêteur qui avance les fonds nécessaires au paiement du vendeur, le nantissement est donné dans l'acte de prêt.
Cet acte doit mentionner, à peine de nullité, que les fonds versés par le prêteur ont pour objet d'assurer le paiement du prix des biens acquis.
Les biens acquis doivent être énumérés dans le corps de l'acte et chacun d'eux doit être décrit d'une façon précise, afin de l'individualiser par rapport aux autres biens de même nature appartenant à l'entreprise. L'acte indique également le lieu où les biens ont leur attache fixe ou mentionne, au cas contraire, qu'ils sont susceptibles d'être déplacés.
Sont assimilés aux prêteurs de fonds les garants qui interviennent en qualité de caution, de donneur d'aval ou d'endosseur dans l'octroi des crédits d'équipements. Ces personnes sont subrogées de plein droit aux créanciers. Il en est de même des personnes qui endossent, escomptent, avalisent ou acceptent les effets créés en représentation desdits crédits.
Art. L. 524-3. - A peine de nullité, le nantissement doit être conclu au plus tard dans le délai de deux mois à compter du jour de la livraison du matériel d'équipement sur les lieux où il doit être installé.
A peine de nullité également, le nantissement doit être inscrit dans les conditions requises par les articles L. 142-3 et L. 142-4, et dans un délai de quinze jours à compter de la date de l'acte constitutif du nantissement.
Lorsque la livraison du matériel intervient après la date prévue dans le contrat ou si elle n'est pas faite au lieu primitivement fixé, les créances inscrites deviennent de plein droit exigibles si le débiteur n'a pas fait connaître, dans les quinze jours de cette livraison, au créancier nanti la date ou le lieu auquel elle est intervenue.
Le nantissement ne peut être opposé aux tiers si, dans la quinzaine de l'avis à lui notifié ou dans la quinzaine du jour où il aura eu connaissance de la date ou du lieu de la livraison, le créancier nanti n'a pas requis du greffier du tribunal où à été prise l'inscription du nantissement, que mention soit faite de cette date ou de ce lieu en marge de ladite inscription.
Art. L. 524-4. - Les biens donnés en nantissement par application du présent chapitre peuvent, en outre, à la requête du bénéficiaire du nantissement, être revêtus sur une pièce essentielle et d'une manière apparente d'une plaque fixée à demeure indiquant le lieu, la date et le numéro d'inscription du privilège dont ils sont grevés.
Sous peine des sanctions prévues à l'article L. 524-19, le débiteur ne peut faire obstacle à cette apposition, et les marques ainsi apposées ne peuvent être détruites, retirées ou recouvertes avant l'extinction ou la radiation du privilège du créancier nanti.
Art. L. 524-5. - Toute subrogation conventionnelle dans le bénéfice du nantissement doit être mentionnée en marge de l'inscription dans la quinzaine de l'acte authentique ou sous seing privé qui la constate, sur remise au greffier d'une expédition ou d'un original dudit acte.
Les conflits qui peuvent se produire entre les titulaires d'inscriptions successives sont réglés conformément à l'article 1252 du code civil.
Art. L. 524-6. - Le bénéfice du nantissement est transmis de plein droit conformément à l'article 1692 du code civil aux porteurs successifs des effets qu'il garantit, soit que ces effets aient été souscrits ou acceptés à l'ordre du vendeur ou du prêteur ayant fourni tout ou partie du prix, soit plus généralement qu'ils représentent la mobilisation d'une créance valablement gagée suivant les dispositions du présent chapitre.
Si plusieurs effets sont créés pour représenter la créance, le privilège attaché à celle-ci est exercé par le premier poursuivant pour le compte commun et pour le tout.
Art. L. 524-7. - Sous peine des sanctions prévues à l'article L. 524-19, le débiteur qui, avant paiement ou remboursement des sommes garanties conformément au présent chapitre, veut vendre à l'amiable tout ou partie des biens grevés, doit solliciter le consentement préalable du créancier nanti, et à défaut, l'autorisation du juge des référés du tribunal de commerce statuant en dernier ressort.
Lorsqu'il a été satisfait aux exigences de publicité requises par le présent chapitre et que les biens grevés ont été revêtus d'une plaque conformément à l'article L. 524-4, le créancier nanti ou ses subrogés disposent pour l'exercice du privilège résultant du nantissement du droit de suite prévu à l'article L. 143-12.
Art. L. 524-8. - Le privilège du créancier nanti en application du présent chapitre subsiste si le bien qui est grevé devient immeuble par destination.
L'article 2133 du code civil n'est pas applicable aux biens nantis.
Art. L. 524-9. - Le privilège du créancier nanti en application du présent chapitre s'exerce sur les biens grevés par préférence à tous autres privilèges, à l'exception :
1° Du privilège des frais de justice;
2° Du privilège des frais faits pour la conservation de la chose;
3° Du privilège accordé aux salariés par les articles L. 143-l0, L. 143-11, L. 742-6 et L. 751-15 du code du travail.
Il s'exerce, notamment, à l'encontre de tout créancier hypothécaire et par préférence au privilège du Trésor, au privilège visé à l'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale, au privilège du vendeur du fonds de commerce à l'exploitation duquel est affecté le bien grevé, ainsi qu'au privilège du créancier nanti sur l'ensemble dudit fonds.
Toutefois, pour que son privilège soit opposable au créancier hypothécaire, au vendeur du fonds de commerce et au créancier nanti sur l'ensemble dudit fonds, préalablement inscrits, le bénéficiaire du nantissement conclu en application du présent chapitre doit signifier auxdits créanciers, par acte extrajudiciaire, une copie de l'acte constatant le nantissement.
Cette signification doit, à peine de nullité, être faite dans les deux mois de la conclusion du nantissement.
Art. L. 524-10. - Sous réserve des dérogations prévues par le présent chapitre, le privilège du créancier nanti est régi par les dispositions du livre Ier, titre IV, chapitre III en ce qui concerne les formalités d'inscription, les droits des créanciers en cas de déplacement du fonds, les droits du bailleur de l'immeuble, la purge desdits privilèges et les formalités de mainlevée.
Art. L. 524-11. - L'inscription conserve le privilège pendant cinq années à compter de sa régularisation définitive.
Elle garantit, en même temps que le principal, deux années d'intérêts. Elle cesse d'avoir effet si elle n'a pas été renouvelée avant l'expiration du délai ci-dessus; elle peut être renouvelée deux fois.
Art. L. 524-12. - L'état des inscriptions existantes, délivré en application des dispositions réglementaires prises à cet effet, doit comprendre les inscriptions prises, en vertu du présent chapitre. Il peut être également délivré au requérant, sur sa demande, un état attestant seulement qu'il existe ou qu'il n'existe pas, sur les biens désignés, des inscriptions prises soit en vertu des chapitres I et II du titre IV du livre Ier, soit en vertu du présent chapitre.
Art. L. 524-13. - La notification, conformément à l'article L. 143-10, de poursuites engagées en vue de parvenir à la réalisation forcée de certains éléments du fonds auquel appartiennent les biens grevés du privilège du vendeur ou du privilège de nantissement en vertu du présent chapitre, rend exigibles les créances garanties par ces privilèges.
Art. L. 524-14. - En cas de non-paiement à l'échéance, le créancier bénéficiaire du privilège établi par le présent chapitre peut poursuivre la réalisation du bien qui en est grevé dans les conditions prévues à l'article L. 523-3. L'officier public chargé de la vente est désigné, à sa requête, par le président du tribunal de commerce. Le créancier doit, préalablement à la vente, se conformer aux dispositions de l'article L. 143-10.
Le créancier nanti a la faculté d'exercer la surenchère du dixième, prévue à l'article L. 143-13.
Art. L. 524-15. - Les biens grevés en vertu du présent chapitre, dont la vente est poursuivie avec d'autres éléments du fonds, sont l'objet d'une mise à prix distincte ou d'un prix distinct si le cahier des charges oblige l'adjudicataire à les prendre à dire d'expert.
Dans tous les cas, les sommes provenant de la vente de ces biens sont, avant toute distribution, attribuées aux bénéficiaires des inscriptions, à concurrence du montant de leur créance en principal, frais et intérêts conservés par lesdites inscriptions.
La quittance délivrée par le créancier bénéficiaire du privilège n'est soumise qu'au droit fixe.
Art. L. 524-16. - Si l'acquéreur n'a pas la qualité de commerçant, le nantissement est soumis aux dispositions des articles L. 524-1 à L. 524-9, L. 524-11 et L. 524-12 et du présent article. L'inscription prévue à l'article L. 524-3 est alors prise au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel est domicilié l'acquéreur du bien grevé.
A défaut de paiement à l'échéance, le créancier bénéficiaire du privilège établi par le présent chapitre peut faire procéder à la vente publique du bien grevé conformément aux dispositions de l'article L. 523-3.
Les inscriptions sont rayées soit du consentement des parties intéressées, soit en vertu d'un jugement passé en force de chose jugée.
A défaut de jugement, la radiation totale ou partielle ne peut être opérée par le greffier que sur le dépôt d'un acte authentique de consentement donné par le créancier.
Lorsque la radiation non consentie par le créancier est demandée par voie d'action principale, cette action est portée devant le tribunal de commerce du lieu où l'inscription a été prise.
La radiation est opérée au moyen d'une mention faite par le greffier en marge de l'inscription.
Il en est délivré certificat aux parties qui le demandent.
Art. L. 524-17. - Pour l'application du présent chapitre, les greffiers sont assujettis aux diligences et responsabilités fixées par voie réglementaire pour la tenue du registre des inscriptions et la délivrance des états ou certificats requis.
Leurs émoluments sont établis comme il est prévu par les textes réglementaires en vigueur.
Art. L. 524-18. - Ne sont pas soumis à l'application du présent chapitre :
1° Les véhicules automobiles visés par le décret n° 53-968 du 30 septembre 1953;
2° Les navires de mer, ainsi que les bateaux de navigation fluviale visés par les articles L. 78 et suivants du code des voies navigables et de la navigation intérieure;
3° Les aéronefs visés par l'article L. 110-1 et suivants du code de l'aviation civile.
Art. L. 524-19. - Est puni des peines de d'abus de confiance prévues par les articles L. 314-1 et L. 314-10 du code pénal le fait, pour tout acquéreur ou détenteur de biens nantis en application du présent chapitre, de les détruire ou tenter de les détruire, les détourner ou tenter de les détourner, ou enfin les altérer ou tenter de les altérer d'une manière quelconque en vue de faire échec aux droits du créancier.
Sont punies des mêmes peines toutes man_uvres frauduleuses destinées à priver le créancier de son privilège sur les biens nantis ou à le diminuer.
Art. L. 524-20. - Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les mesures propres à assurer l'application du présent chapitre.

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N° 1336.- Projet de loi, adopté par le Sénat, relatif au code de commerce (partie législative) (renvoyé à la commission des lois).- annexe : code de commerce, livres III, IV et V.


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