N° 2139
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 4 février 2000.
PROJET DE LOI
modifié par le sénat
portant création d'une Commission nationale
de déontologie de
la sécurité.

TRANSMIS PAR
M. LE PREMIER MINISTRE
À
M. LE PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
(Renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de la législation_et de l'administration générale de la République.)

Le Sénat a modifié, en première lecture, le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, dont la teneur suit :
Voir les numéros :
Assemblée nationale : 621, 723 et T.A. 145.
Sénat : 480 (1997-1998), 173 et T.A. 67 (1999-2000).
Sécurité publique.

Article 1er

La Commission nationale de déontologie de la sécurité, autorité administrative indépendante, est chargée, sans préjudice des prérogatives que la loi attribue notamment en matière de direction et de contrôle de la police judiciaire, à l'autorité judiciaire, de veiller au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République.
Sont concernés, à ce titre, lorsqu'ils concourent à une activité de sécurité, les personnels de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de la douane et de l'administration pénitentiaire ainsi que les gardes forestiers, les agents des collectivités territoriales et des établissements publics. Sont également concernées toutes personnes physiques et morales de droit privé assurant, à titre permanent ou occasionnel, à titre principal ou accessoire, y compris bénévolement, des activités de sécurité.

Article 2

La Commission nationale de déontologie de la sécurité est composée de huit membres, nommés pour une durée de six ans non renouvelable :
- le président, nommé par décret du Président de la République ;
- un sénateur, désigné par le Président du Sénat ;
- un député, désigné par le Président de l'Assemblée nationale ;
- un conseiller d'Etat, désigné par le vice-président du Conseil d'Etat ;
- un magistrat hors hiérarchie de la Cour de cassation, désigné conjointement par le premier président de la Cour de cassation et par le procureur général près ladite Cour ;
- un conseiller-maître, désigné par le premier président de la Cour des comptes ;
- deux personnalités qualifiées désignées par les autres membres de la Commission nationale de déontologie de la sécurité.
La commission est renouvelée par moitié tous les trois ans.
La qualité de membre de la commission est incompatible avec l'exercice, à titre principal, d'activités dans le domaine de la sécurité.
Les parlementaires membres de la commission cessent d'y exercer leurs fonctions lorsqu'ils cessent d'appartenir à l'assemblée au titre de laquelle ils ont été désignés.
Si, en cours de mandat, un membre de la commission cesse d'exercer ses fonctions, le mandat de son successeur est limité à la période restant à courir. Par dérogation au premier alinéa, le mandat de ce dernier est renouvelable lorsqu'il a commencé moins de deux ans avant son échéance normale.
Lors de la première constitution de la Commission nationale de déontologie de la sécurité suivant l'entrée en vigueur de la présente loi, sont désignés par tirage au sort quatre membres, à l'exclusion du président, dont les mandats prendront fin à l'issue d'un délai de trois ans.

Article 3

Conforme

Article 4

Toute personne qui a été victime ou témoin de faits dont elle estime qu'ils constituent un manquement aux règles de la déontologie, commis par une ou plusieurs des personnes mentionnées à l'article 1er peut, par réclamation individuelle, demander que ces faits soient portés à la connaissance de la Commission nationale de déontologie de la sécurité. Ce droit appartient également aux ayants droit des victimes. Pour être recevable, la réclamation doit être transmise à la commission dans l'année qui suit les faits.
La réclamation est adressée à un député ou à un sénateur. Celui-ci la transmet à la commission si elle lui paraît entrer dans la compétence de cette instance et mériter l'intervention de cette dernière.
La commission adresse au parlementaire auteur de la saisine un accusé de réception.
Le Premier ministre et les membres du Parlement peuvent, en outre, saisir de leur propre chef la commission de faits mentionnés au premier alinéa.
La commission ne peut être saisie par les parlementaires qui en sont membres.
Une réclamation portée devant la Commission nationale de déontologie de la sécurité n'interrompt pas les délais relatifs à la prescription des actions en matière civile et pénale et aux recours administratifs et contentieux.

Article 5

La commission recueille sur les faits portés à sa connaissance toute information utile.
Les autorités publiques doivent prendre toutes mesures pour faciliter la tâche de la commission. Elles communiquent à celle-ci, sur sa demande motivée, toutes informations et pièces utiles à l'exercice de sa mission telle qu'elle est définie à l'article 1er.
La commission peut demander dans les mêmes conditions aux ministres compétents de saisir les corps de contrôle en vue de faire des études, des vérifications ou des enquêtes relevant de leurs attributions. Les ministres informent la commission des suites données à ces demandes.
Les personnes privées mentionnées à l'article 1er et leurs préposés communiquent à la commission, sur sa demande motivée, toutes informations et pièces utiles à l'exercice de sa mission.
Les agents publics ainsi que les dirigeants des personnes mentionnées au précédent alinéa et leurs préposés sont tenus de déférer aux convocations de la commission et de répondre à ses questions. Les convocations doivent mentionner l'objet de l'audition.
Les personnes convoquées par application de l'alinéa précédent peuvent se faire assister du conseil de leur choix. Un procès-verbal contradictoire de l'audition est dressé à la suite de celle-ci et remis à l'intéressé.
La commission peut consulter toute personne dont le concours lui paraît utile.
Le caractère secret des informations et pièces dont elle demande communication ne peut lui être opposé, sauf en matière de secrets protégés par la loi.

Article 6

La commission peut charger un ou plusieurs de ses membres de procéder à des vérifications dans les lieux où se sont déroulés les faits ayant fait l'objet de la saisine de la commission.
Ces vérifications ne peuvent s'exercer que dans les lieux publics et les locaux professionnels, après un préavis adressé aux agents intéressés et aux personnes ayant autorité sur eux, ou pour le compte desquelles l'activité de sécurité en cause était exercée, afin de leur permettre d'être présents.

Article 7

La commission adresse aux autorités publiques et aux dirigeants des personnes privées mentionnées à l'article 1er intéressés tout avis ou recommandation visant à remédier aux manquements constatés ou à en prévenir le renouvellement.
Les mêmes autorités ou personnes concernées sont tenues, dans un délai fixé par la commission, de rendre compte à celle-ci de la suite donnée à ces avis ou recommandations.
En l'absence d'un tel compte rendu ou si elle estime, au vu du compte rendu qui lui est communiqué, que son avis ou sa recommandation n'a pas été suivi d'effet, la commission peut établir un rapport spécial qui est publié au Journal officiel de la République française.

Article 8

La commission ne peut intervenir dans une procédure engagée devant une juridiction. Elle ne peut remettre en cause le bien-fondé d'une décision juridictionnelle.
Lorsque la commission est saisie de faits donnant lieu à une enquête judiciaire ou pour lesquels une information judiciaire est ouverte ou des poursuites judiciaires sont en cours, elle doit recueillir l'accord préalable des juridictions saisies ou du procureur de la République, selon le cas, pour la mise en _uvre des dispositions de l'article 5 relatives à la communication de pièces et des dispositions de l'article 6 relatives à l'accès aux lieux des faits.
Si la commission estime que les faits mentionnés dans la saisine laissent présumer l'existence d'une infraction pénale, elle les porte sans délai à la connaissance du procureur de la République, conformément aux dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale.
L'article 226-10 du code pénal relatif aux dénonciations calomnieuses est applicable aux réclamations portées devant la commission._Si celle-ci estime qu'une réclamation constitue une telle dénonciation, elle en donne avis sans délai au procureur de la République, conformément aux dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale._Les parlementaires ne peuvent être poursuivis pour dénonciation calomnieuse ou complicité de dénonciation calomnieuse du fait des transmissions effectuées par eux à la commission en application du deuxième alinéa de l'article 4 de la présente loi.
Le procureur de la République informe la commission de la suite donnée aux transmissions faites en application des deux alinéas précédents.

Article 9

Sans préjudice des dispositions des articles 7 et 8, la commission porte sans délai à la connaissance des autorités ou des personnes investies du pouvoir disciplinaire les faits de nature à entraîner des poursuites disciplinaires. Ces autorités ou personnes informent la commission, dans le délai fixé par elle, de la suite donnée aux transmissions effectuées en application du présent article.

Article 9 bis (nouveau)

La commission tient informé le parlementaire auteur de la saisine des suites données à celle-ci en application des articles 7 à 9.

Articles 10 à 13

Conformes

Article 13 bis

Est puni d'une amende de 50_000 F le fait de ne pas communiquer à la commission, dans les conditions prévues à l'article 5, les informations et pièces utiles à l'exercice de sa mission ou de ne pas déférer, dans les conditions prévues au même article, à ses convocations ou d'empêcher les membres de la commission d'accéder, dans les conditions prévues à l'article 6, aux locaux professionnels.
Les personnes physiques encourent également les peines complémentaires suivantes :
1° L'interdiction des droits civils, civiques et de famille, suivant les modalités prévues par l'article 131-26 du code pénal ;
2° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues à l'article 131-35 du code pénal.
Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal, du délit défini au premier alinéa. Les peines encourues par les personnes morales sont :
1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
2° L'exclusion des marchés publics, suivant les modalités prévues par le 5° de l'article 131-39 du code pénal ;
3° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, suivant les modalités prévues par le 9° de l'article 131-39 du code pénal.

Article 14

La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises et à Mayotte._Elle ne s'applique pas aux agents de la Polynésie française, du territoire des îles Wallis-et- Futuna, de la Nouvelle-Calédonie et des provinces de Nouvelle-_Calédonie.
Délibéré en séance publique, à Paris, le 3 février 2000.

Le Président,
Signé : Christian PONCELET.


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