N° 1487
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 mars 1999.
PROPOSITION DE LOI
tendant à réprimer la contestation de l'existence
des
génocides et notamment du génocide du peuple arménien.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée

par M. Guy HERMIER, Mme Janine JAMBU, MM. Roger MEÏ, François ASENSI, Gilbert BIESSY, Claude BILLARD, Bernard BIRSINGER, Alain BOCQUET, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Jacques BRUNHES, Patrice CARVALHO, Alain CLARY, Christian CUVILLIEZ, René DUTIN, Daniel FEURTET, Mme Jacqueline FRAYSSE, MM. André GERIN, Pierre GOLDBERG, Maxime GREMETZ, Georges HAGE, Robert HUE, Mme Muguette JACQUAINT, MM. André LAJOINIE, Jean-Claude LEFORT, Patrick LEROY, Félix LEYZOUR, François LIBERTI, Patrick MALAVIEILLE, Ernest MOUTOUSSAMY, Bernard OUTIN, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER, Michel VAXÈS et Jean VILA (1),

Députés.

(1) Constituant le groupe communiste et apparentés.
Droits de l'homme et libertés publiques.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Le 29 mai 1998, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité, après débat, une proposition de loi qui stipule, dans un article unique, que " la France reconnaît publiquement le génocide du peuple arménien ". Après quatre-vingt-trois ans d'un long, trop long et - il faut bien le dire - hypocrite silence, l'Assemblée nationale a pris une décision qui l'honore et avec elle le pays tout entier.
Le groupe communiste, qui n'a cessé - on lui accordera cette constance - d'agir dans ce sens, aurait souhaité que soient clairement désignés les responsables du premier génocide du xxe siècle : le gouvernement " jeune-turc " de l'époque, sous l'Empire ottoman.
La décision de l'Assemblée nationale n'en constitue pas moins un pas historique de nature à renforcer les liens de solidarité entre la France et l'Arménie et à permettre l'établissement d'une paix durable dans cette région de monde.
Le vote de l'Assemblée nationale ne doit pas être un acte sans lendemain mais un engagement à agir. A agir pour que ce crime contre l'humanité s'inscrive dans les mémoires, ce qui implique des initiatives, notamment chaque année à l'occasion de la commémoration du 24 avril.
A agir aussi au sein de la communauté internationale pour la reconnaissance du génocide. Une action d'autant plus nécessaire qu'une vaste campagne est orchestrée par les négationnistes afin de contrecarrer le mouvement d'opinion national et international en faveur de cette reconnaissance.
Dans cette perspective, comme le demande la communauté arménienne, il est proposé de compléter la loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe, dont une proposition de loi du groupe communiste était à l'origine.
Cette loi introduisait un article 24 bis à la loi du 29 juillet 1881 sur la presse indiquant :
" Seront punis des peines prévues par le sixième alinéa de l'article 24 ceux qui auront contesté, par un des moyens énoncés à l'article 23, l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité tels qu'ils sont définis par l'article 6 du statut du Tribunal militaire international annexé à l'accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d'une organisation déclarée criminelle en application de l'article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale. "
Le tribunal pourra en outre ordonner " l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ".
Il est proposé de compléter ce dispositif en visant également tout autre génocide.
Par ailleurs, il est proposé de compléter l'article 48-2 de cette même loi du 29 juillet 1881. Celui-ci indique actuellement : " Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits qui se propose, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l'honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l'apologie des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou des crimes ou délits de collaboration avec l'ennemi et en ce qui concerne l'infraction prévue par l'article 24 bis. "
Il est proposé d'élargir ce dispositif à la défense des victimes de tout génocide.
Sous le bénéfice de ces dispositions, nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

Après le premier alinéa de l'article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
" Seront punis des mêmes peines ceux qui auront contesté tout autre génocide tel que défini par l'article 211-11 du code pénal ou par les tribunaux internationaux ou des organisations internationales reconnues par la France. "

Article 2

Dans l'article 48-2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après les mots : " ou des déportés ", sont insérés les mots : " ou de toutes autres victimes ".

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N° 1487.- Proposition de loi de M. Guy Hermier tendant à réprimer la contestation de l'existence des génocides et notamment du génocide du peuple arménien (renvoyée à la commission des lois).


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