No 1554
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 28 avril 1999.
PROPOSITION DE LOI
relative à l'établissement d'une procédure judiciaire
de
fermeture des débits de boissons.
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)
présentée
par M. François GOULARD,
Député.

Boissons et alcools.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Les débits de boissons, plus communément appelés bars ou cafés, font partie intégrante du commerce et de l'animation de nos villes et villages. Ce sont des lieux de vie, de rassemblement, témoins de l'activité d'une commune. Ils accueillent une population variée; une part minoritaire de celle-ci adopte parfois un comportement excessif, voire répréhensible. Aussi arrive-t-il que certains débits de boissons soient en butte à l'hostilité des riverains, qui supportent mal le bruit inhérent à leur activité, bruit qui peut se répercuter jusque sur la voie publique.
Le code des débits de boissons réglemente strictement la profession de cafetiers. Ce code a notamment prévu une sanction à l'encontre des propriétaires de ce type d'établissement en cas de trouble de l'ordre public, de la santé ou de la moralité publics.
La sanction retenue par le code est unique et consiste en la fermeture de l'établissement. Elle relève d'une décision du préfet ou du ministre de l'intérieur.
On peut relever, en premier lieu, une disproportion entre le fait reproché et la sanction. La fermeture d'un établissement a des conséquences lourdes pour son propriétaire. La perte de chiffre d'affaires qui en résulte peut menacer la poursuite de l'exploitation. En tout état de cause, l'image de son commerce en ressort dégradée. On doit souligner que la sanction peut trouver son origine dans le comportement d'un ou plusieurs clients, sur lesquels l'exploitant n'a qu'un pouvoir relatif.
Mais le problème majeur posé par cette décision préfectorale de fermeture réside dans l'absence totale de droits accordés à la défense, les textes ayant instauré un pouvoir de décision administrative sans aucune procédure permettant aux propriétaires de débits de boissons de faire valoir leur point de vue. Le préfet décide seul de la fermeture. Aucun débat contradictoire n'est prévu. Or, en raison même de la gravité de la sanction, le respect du droit de la défense est impératif. La sanction administrative montre ses limites quant au respect du droit.
De plus, il n'existe pas d'échelle de sanctions en fonction de la gravité des faits reprochés. La durée de la fermeture dépend de l'appréciation souveraine du préfet. La décision préfectorale n'est assortie d'aucune obligation de motivation.
Enfin, la décision préfectorale a des conséquences quasiment irrévocables. La procédure de recours est longue, complexe, et surtout elle n'est pas suspensive. Ainsi la contestation de la décision préfectorale est-elle largement dépourvue d'efficacité.
Les motivations pour justifier d'un changement de procédure dans le cadre de la fermeture des débits de boissons sont nombreuses. La procédure administrative telle qu'elle existe aujourd'hui ne garantit pas l'équité et est susceptible de pénaliser les propriétaires des établissements concernés. Ils sont notamment dépourvus de réelle possibilité d'assurer utilement leur défense.
C'est pourquoi je suggère que l'on supprime la fermeture par arrêté préfectoral et que l'on remplace les articles incriminés - L. 62 et L. 63 du code des débits de boissons - par une procédure judiciaire, garante d'une plus grande équité.

PROPOSITION DE LOI
Article unique

Les articles L. 62 et L. 63 du code des débits de boissons sont ainsi rédigés :
"Art. L. 62. - La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le juge des référés pour une durée n'excédant pas six mois, soit à la suite d'infraction aux lois et règlements relatifs à ces établissements, soit en vue de préserver l'ordre, la santé ou la moralité publics.
"Art. L. 63. - Le tribunal correctionnel peut, dans le même cas, prononcer la fermeture de ces établissements pour une durée allant de trois mois à un an.
"Le cas échéant, la durée de la fermeture prononcée par le juge des référés s'impute sur celle de la fermeture prononcée par le tribunal correctionnel."
N°1554. - PROPOSITION DE LOI de M. François GOULARD relative à l'établissement d'une procédure judiciaire de fermeture des débits de boissons (renvoyée à la commission des affaires culturelles)


© Assemblée nationale