N° 1626
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 mai 1999.
PROPOSITION DE LOI
visant à adapter le plan d'épargne en actions (PEA)
aux exigences de
la monnaie unique.
(Renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du plan, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)
présentée
par M. Gilbert GANTIER,
Député.

Politique économique.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
A l'heure de l'euro et de la libre circulation des capitaux, la diversification des portefeuilles d'actions s'impose comme une réalité économique et financière nouvelle.
Un accord-cadre vient d'être signé entre huit bourses européennes dont Londres, Francfort et Paris pour créer un marché unique européen des grandes valeurs. A l'horizon 2001-2002, les plus grosses valeurs cotées se négocieront sur un marché unique. Dès aujourd'hui, un accès plus aisé aux marchés de valeurs européens est incontestable.
C'est pourquoi l'orientation de l'épargne nationale vers les fonds propres des entreprises, en général, et la constitution de plans d'épargne en actions (PEA) régis par la loi n° 92-666 du 16 juillet 1992, en particulier, doivent s'adapter à ces conditions nouvelles.
Le PEA a été créé en vue d'orienter l'épargne vers les entreprises. Ce produit financier, assorti d'avantages fiscaux lors des opérations de cession en cours ou à la liquidation du plan (exonération d'imposition sur les plus-values), constitue un placement à la fois attractif et peu risqué. En effet, le PEA permet un «panachage» de l'épargne et donc une répartition du risque.
Mais le PEA, dont le succès auprès des épargnants et des entreprises ne s'est pas démenti, comporte certaines faiblesses.
La loi du 16 juillet 1992 institue le plan d'épargne en actions à partir d'actions strictement françaises. En effet, l'article 2 de la loi précise que les émetteurs d'actions, de certificats d'investissement, de certificats coopératifs d'investissement ou des parts de SARL doivent avoir leur siège en France.
Or, la transition vers la monnaie unique sera complètement effectuée au 1er janvier 2002. La libéralisation des marchés de capitaux ne peut donc aller de pair avec un cloisonnement national des produits d'épargne.
Il convient en conséquence, dans la logique européenne, de permettre aux épargnants d'avoir accès aux titres émis par des entreprises européennes tout en profitant de l'avantage fiscal résultant de la constitution d'un PEA. Cette diversification du portefeuille signifie en effet également diversification du risque pour l'épargnant.
Mais l'ouverture du PEA aux titres émis par les entreprises européennes doit se faire dans une certaine limite. Privilégier l'allocation de l'épargne nationale vers les entreprises françaises reste un impératif.
Autre faiblesse actuelle du PEA : le plafond fixé depuis l'origine à 600000 F par titulaire. On a trop souvent accusé le capitalisme français d'être un « capitalisme sans capitaux », victime de capitaux étrangers excessivement volatils, fragilisant les entreprises françaises face aux entreprises des pays étrangers et aux fonds de pensions anglo-saxons. La France se trouve ainsi très ouverte aux capitaux étrangers. Il en résulte que les capitaux internationaux détiennent des pourcentages importants d'entreprises françaises : 35 % du marché financier français est ouvert aux capitaux internationaux.
Augmenter le plafond du PEA permettrait de réaliser une meilleure allocation de l'épargne nationale vers les entreprises dont l'insuffisance en fonds propres est un mal bien connu.
Cette mesure aurait pour effet d'orienter les patrimoines vers les valeurs mobilières et vers le financement des entreprises, alors qu'aujourd'hui l'ensemble de la fiscalité du patrimoine encourage plutôt l'évasion fiscale et la fuite des capitaux.
Il est donc nécessaire de porter ce plafond à 1 million de F (155000 euros) par titulaire.
Il convient, toujours dans cette optique d'assouplissement, de ramener le délai de liquidation du PEA de huit à six ans. Cette novation se justifie par le fait que les marchés financiers évoluent en temps raccourci, et que fixer le terme d'un plan d'épargne à huit ans semble désormais excessif. Rendre le produit un peu plus liquide, c'est le rendre du même coup plus attractif.
La monnaie unique nous impose enfin d'adapter le code général des impôts. Depuis le ler janvier 1999, les cours boursiers ont tous adopté la double cotation francs/euros. Ce processus doit également s'appliquer à la législation fiscale. C'est pourquoi le montant proposé pour l'augmentation du plafond des versements destinés à figurer sur un PEA est libellé en euros, avec son équivalent en francs.
Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

I. - A la fin du dernier alinéa de l'article 1er de la loi n° 92-666 relative au plan d'épargne en actions du 16 juillet 1992, la somme «600000 F» est remplacée par la somme : «155000 euros (1016733,35 F)».
II. - A la fin du dernier alinéa du I de l'article 163 quinquies D du code général des impôts, la somme «600000 F» est remplacée par la somme : «155000 euros (1016733,35 F)».

Article 2

Le dernier alinéa (2) du I de l'article 2 de la loi du 16 juillet 1992 précitée est ainsi modifié :
I. - La première phrase est supprimée.
II. - Cet alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
«Les titres éligibles au PEA peuvent être émis par des organismes dont le siège social se situe en France ou dans n'importe quel pays de l'Union européenne. Néanmoins, les versements concernant les titres financiers émis par des organismes non domiciliés en France ne peuvent excéder le tiers des versements placés sur le PEA.»

Article 3

Les 1 et 2 du III de l'article 163 quinquies D du code général des impôts sont ainsi rédigés :
«1. La liquidation du PEA peut intervenir à partir de la sixième année. Au-delà de la sixième année, les retraits partiels de sommes ou de valeurs et, s'agissant des contrats de capitalisation, les rachats partiels n'entraînent pas la clôture du PEA. Toutefois, aucun versement n'est possible après le premier retrait ou le premier rachat.
«2. Avant l'expiration de la sixième année, tout retrait de sommes ou de valeurs figurant sur le plan ou tout rachat entraîne la clôture du plan.»

Article 4

La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
N°1626. - PROPOSITION DE LOI de M. Gilbert GANTIER visant à adapter le Plan d'épargne en actions (PEA) aux exigences de la monnaie unique (renvoyée à la commission des finances)


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