N° 1628
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 mai 1999.
PROPOSITION DE LOI
tendant à organiser la consultation de la population de Mayotte sur le choix de son statut définitif dans la République.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

présentée

par MM. Henry JEAN-BAPTISTE, Pierre ALBERTINI, Léo ANDY, Philippe AUBERGER, Jean AUCLAIR, Jacques BARROT, Léon BERTRAND, Claude BIRRAUX, Roland BLUM, Mme Marie-Thérèse BOISSEAU, MM.Loïc BOUVARD, Victor BRIAL, Jean BRIANE, Michel BUILLARD, Yves BUR, Dominique BUSSEREAU, Camille DARSIÈRES, Xavier DENIAU, Yves DENIAUD, Philippe DOUSTE-BLAZY, Jean-Pierre FOUCHER, Germain GENGENWIN, François GOULARD, Gérard GRIGNON, Pierre HÉRIAUD, Mmes Anne-Marie IDRAC, Bernadette ISAAC-SIBILLE, MM. Jean-Jacques JEGOU, Didier JULIA, Christian KERT, Édouard LANDRAIN, Georges LEMOINE, Maurice LEROY, Maurice LIGOT, Daniel MARSIN, Pierre MICAUX, Arthur PAECHT, Dominique PAILLÉ, Pierre PETIT, Henri PLAGNOL, Jean-Bernard RAIMOND, Marc REYMANN, François ROCHEBLOINE, André SANTINI, André THIEN-AH-KOON, Anicet TURINAY, Michel VOISIN, Aloyse WARHOUVER, Jean-Jacques WEBER et Pierre-André WILTZER,

Députés.

TOM et collectivités territoriales d'outre-mer.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
En application de la loi n° 75-1337 du 31 décembre 1975 relative aux conséquences de l'autodétermination des îles des Comores, la population de Mayotte, consultée sur son appartenance à la République française, a exprimé massivement son choix en faveur de la France.
Le scrutin d'autodétermination organisé le 8 février 1976 répondait aux conditions fixées pour une telle consultation par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 décembre 1975.
Une seconde consultation du 11 avril 1976 a fait apparaître la volonté des Mahorais de repousser le statut de territoire d'outre-mer pour accéder à celui de département d'outre-mer, qu'ils réclamaient, en réalité, depuis 1958.
Répondant à ce v_u, un projet de loi portant «départementalisation» de Mayotte fut déposé par le Gouvernement en mai 1976 mais ne vint pas en discussion et c'est en «collectivité territoriale» de la République que Mayotte fut érigée par la loi n° 76-1212 du 24 décembre 1976. Il est bien connu que le retrait du projet de loi est intervenu pour des raisons de politique étrangère et de coopération de la France avec les pays de la région.

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La loi statutaire du 24 décembre 1976 a doté Mayotte d'un statut spécifique mais provisoire.En effet, le législateur de 1976, pour tenir le plus large compte des particularités économiques, sociales et culturelles locales, avait autorisé le Gouvernement à déterminer, par voie d'ordonnances, le régime administratif et financier de la «collectivité territoriale» et à étendre avec toutes les adaptations nécessaires les dipositions législatives qui lui seraient applicables.
Mais, surtout, la loi du 24 décembre 1976 a également prévu, dès son article 1er, que la population de Mayotte serait consultée dans un délai de trois ans sur le maintien du statut de «collectivité territoriale» ou sur la transformation de Mayotte en département d'outre-mer ou bien, éventuellement, sur l'adoption d'un statut différent.
La consultation n'a pas été organisée et pour cette raison une loi n° 79-1113 du 22 décembre 1979 a fixé un nouveau délai de cinq ans à l'intérieur duquel la population serait consultée sur les mêmes options.
Cette prescription n'a pas non plus été respectée en 1984, alors qu'elle résultait, comme celle de 1976, de l'initiative du Gouver nement et de la volonté du législateur.
En d'autres termes, depuis bientôt vingt-trois ans, Mayotte attend l'organisation de la consultation sur son statut définitif dans la République.

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Cette longue période d'incertitude statutaire et juridique que la population mahoraise vit difficilement est pourtant marquée d'événements positifs qui ont entretenu l'espoir du respect des engagements et des promesses.
D'abord, Mayotte a bénéficié, depuis 1986, de plusieurs programmes de mise à niveau juridique par voie d'ordonnances.
Le Gouvernement, en effet, a constamment affirmé que le choix du statut définitif supposait, d'abord, l'actualisation du régime juridique. Celle-ci s'est effectuée dans l'objectif d'étendre à Mayotte le droit commun, avec les adaptations requises par les spécificités locales.
Dans le même temps, les Mahorais ont reçu des plus hautes autorités de l'Etat la promesse d'organiser «avant l'an 2000» la consultation sur le choix du statut ; plusieurs ministres en charge de l'outre-mer ont confirmé l'engagement et entrepris la préparation de cette consultation.
Ainsi a été nommé par le Gouvernement un groupe de réflexion sur «l'avenir institutionnel de Mayotte», présidé par le préfet François Bonnelle et complété par un groupe local, installé à Mayotte sous l'autorité du préfet, représentant du Gouvernement.
Le rapport (Documentation française, 1998, Rapports officiels) remis en juin 1998 au ministre de l'outre-mer conclut, en proposant «cinq voies susceptibles d'être envisagées» :
- un statut nouveau de collectivité territoriale à vocation départementale;
- un statut de département d'outre-mer à qui seraient dévolues des compétences régionales;
- un statut de département d'outre-mer avec création d'une collectivité régionale;
- un statut de département d'outre-mer avec maintien de la collectivité territoriale;
- un statut de territoire d'outre-mer.
Puis une mission «préparatoire à la consultation» composée de membres du cabinet du Premier ministre et du secrétaire d'Etat à l'outre-mer s'est rendue à Mayotte en décembre 1998. Cette mission, d'ailleurs interrompue, n'a pas eu, à ce jour, de suites connues...

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Après une si longue attente marquée par un effort sans précédent de modernisation du droit applicable à Mayotte mais aussi par de multiples progrès économiques et sociaux, le temps est venu de respecter les engagements pris, en ouvrant à la «collectivité territoriale» de nouvelles perspectives institutionnelles.
Les Mahorais considèrent que «le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes» doit pouvoir également s'exercer en faveur de la République française.
L'adoption d'un statut stable, aux lieu et place du régime provisoire qui dure depuis vingt-trois ans, leur apparaît aussi comme une condition essentielle du développement durable de Mayotte.
Pour ces raisons, il vous est demandé de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI
Article unique

Le second alinéa de l'article 2 de la loi n° 79-1113 du 22 décembre 1979 relative à Mayotte est ainsi rédigé :
« Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi n° 0000 du 31 décembre 1999, et au plus tard le 31 décembre 1999, la population de Mayotte sera consultée, après avis du conseil général, sur le maintien du statut défini par la loi n° 76-1212 du 24 décembre 1976 ou sur la transformation de Mayotte en département d'outre-mer ou éventuellement sur l'adoption d'un statut différent.»
N°1628. - PROPOSITION DE LOI de M. Henry JEAN-BAPTISTE tendant à organiser la consultation de la population de Mayotte sur le choix de son statut définitif dans la République (renvoyée à la commission des lois)


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