N° 2049
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 décembre 1999.
PROPOSITION DE LOI

tendant à préciser le caractère facultatif de l'inscription au registre du commerce et des sociétés pour les entreprises de pêche maritime.

(Renvoyée à la commission de la production et des échanges, à défaut de constitution
d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée

par MM. François LIBERTI, François ASENSI, Gilbert BIESSY, Claude BILLARD, Bernard BIRSINGER, Alain BOCQUET, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Jacques BRUNHES, Patrice CARVALHO, Alain CLARY, Christian CUVILLIEZ, René DUTIN, Daniel FEURTET, Mme Jacqueline FRAYSSE, MM. André GERIN, Pierre GOLDBERG, Maxime GREMETZ, Georges HAGE, Guy HERMIER, Robert HUE, Mmes Muguette JACQUAINT, Janine JAMBU, MM. André LAJOINIE, Jean-Claude LEFORT, Patrick LEROY, Félix LEYZOUR, Patrick MALAVIEILLE, Roger MEÏ, Ernest MOUTOUSSAMY, Bernard OUTIN, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER, Michel VAXÈS et Jean VILA (1),

Députés.

(1) Constituant le groupe communiste et apparentés.
Commerce et artisanat.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
La loi d'orientation de la pêche du 18 novembre 1997 a permis de faciliter l'exercice de la pêche dans un cadre sociétaire, en permettant la modernisation du statut légal et fiscal des entreprises de pêche. Il est apparu nécessaire, pour la pêche industrielle, de favoriser la mise en société et de promouvoir une véritable gestion des entreprises de pêche en neutralisant les effets fiscaux et sociaux de ce passage en société.
En offrant la possibilité de constituer une " société de pêche artisanale " au patron-pêcheur, le texte de loi permet de moderniser sa structure d'exploitation tout en continuant de bénéficier des avantages actuels du statut d'artisan.
En outre, la loi consacre la nature commerciale de l'activité de pêche. L'inscription au registre du commerce qui en découle permet au patron-pêcheur embarqué ou à son conjoint d'obtenir un mandat général d'administration courante, pouvant représenter l'armement dans l'ensemble des institutions économiques, et notamment les chambres de commerce.
Cependant, l'inscription au registre du commerce ne garantit pas à l'ensemble de la profession que l'exonération de la taxe professionnelle prévue par l'article 1455 du code général des impôts pour les pêcheurs va perdurer dès l'instant qu'ils seraient assimilés aux autres commerçants qui, eux, n'en bénéficient pas.
De même, les pêcheurs étant assimilés à des commerçants, les conflits judiciaires entre pêcheurs et les autres personnes de droit seront de la compétence des tribunaux de commerce.
Il faut donc constater qu'en l'état actuel de la législation les formalités administratives pour l'inscription au registre de commerce sont lourdes et touchent l'ensemble des professionnels de la pêche quelle que soit la façade maritime et quel que soit le segment.
Or, cette uniformité ne correspond pas à une réalité de terrain.
Si le principe de la réforme n'est pas globalement contesté, sa mise en _uvre suscite beaucoup d'inquiétude pour les professionnels de la Méditerranée, où 91 % de la flotte sont composés d'unités de moins de douze mètres et l'essentiel des entreprises de pêche est constitué d'entreprises artisanales familiales.
Les conditions spécifiques d'exercice de l'entreprise de pêche en Méditerranée doivent être reconnues.
Les pêcheurs, dits " conchyliculteurs-petites pêches " (CFP), exercent successivement les deux activités de pêche et de conchyliculture durant une saison.
Or, l'article 40 de la loi dispose que " les activités de cultures marines sont réputées agricoles, nonobstant le statut social dont relèvent ceux qui les pratiquent ".
Pour les entreprises de pêche, on se retrouve donc avec un double statut : un statut de commerçant inscrit au registre de commerce pour leur activité de pêcheur et un statut de non-inscrit au registre de commerce pour leur activité de conchyliculteur, considérée comme agricole.
Sachant que cette situation concerne environ 600 entreprises en Languedoc-Roussillon, il est important de savoir quelle solution va être retenue pour ces entreprises.
D'autre part, la présence des chambres de commerce et de l'industrie comme gestionnaires des criées pourrait, a priori, faire penser que le secteur des pêches maritimes professionnelles dans son ensemble doit être nécessairement compris comme activité commerciale dépendant et participant à la gestion des CCI. Ce point de vue est d'ailleurs soutenu par de nombreux pêcheurs dont les ports sont gérés par les CCI.
Cependant, d'une part plusieurs criées ne sont pas gérées par des CCI (dans ce cas, ce sont des régies municipales comme à Agde ou Port-la-Nouvelle), d'autre part, la croissance de la vente directe (activité tout à fait légale lorsque les normes sanitaires du décret du 9 mai 1995 sont respectées) dans les ports touristiques et pour des segments particuliers (petits métiers) démontre que la criée n'est pas le passage obligé de la commercialisation des produits de la pêche.
Pour illustrer ce propos, il faut noter qu'en Corse 100 % de la production insulaire est vendue hors criée et, sur tout le littoral méditerranéen, de nombreux pêcheurs font la vente directe sur les marchés locaux ou " au cul du bateau ".
Dans ces deux cas, l'entreprise de pêche n'a pas de lien particulier avec la CCI et il est difficile de considérer l'entreprise de pêche comme entreprise " à inscrire au registre du commerce ".
L'ensemble des professionnels de la pêche en Méditerranée au travers de leurs instances régionales et locales demande que l'inscription au registre du commerce ne soit pas impérative, mais qu'elle soit facultative.
Cela se justifie pleinement.
Peut-on vraiment considérer qu'un pêcheur qui consacre 95 % de son activité professionnelle à exploiter un " cru " et seulement 5 % de son activité à vendre et acheter des produits est un professionnel qui fait " acte de commerce " ?
C'est pourquoi nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, de préciser, dans l'article 14 de la loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines du 18 novembre 1997, le caractère facultatif et la démarche individuelle de chaque pêcheur attaché au statut du marin, au regard des spécificités des pêches maritimes et d'adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI
Article unique

L'article 14 de la loi n° 97-105 du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" L'inscription au registre du commerce restera optionnelle et assujettie au volontariat. "


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