N° 2084
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 19 janvier 2000.
PROPOSITION DE LOI
tendant à protéger les emprunteurs
contre les situations de
surendettement.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée
par M. Bernard DEFLESSELLES,
Député.

Politique sociale.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Face à la stratégie de crédit " tous azimuts " des sociétés de crédit, les emprunteurs sont de plus en plus nombreux à être confrontés à des situations de surendettement inextricables. Devant ce phénomène croissant à l'heure actuelle, il convient de protéger au maximum l'emprunteur en empêchant que sa situation d'endettement ne perdure et ne s'aggrave indéfiniment.
La loi du 10 janvier 1978 relative à la protection des emprunteurs - actuellement codifiée sous les articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation - a eu pour principal objectif de rééquilibrer les relations entre les organismes de crédit et les consommateurs.
Dans son article L. 311-37, elle prévoit que " le tribunal d'instance connaît des litiges nés de l'application du présent chapitre. Les actions engagées devant lui doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion... ".
Cette disposition était à l'origine destinée, dans le cadre de la protection des emprunteurs, à obliger le prêteur - la société de crédit - à mettre fin dans un délai bref au crédit autorisé dès que le débiteur devenait manifestement incapable de faire face à son endettement.
Or, ce texte ayant été rédigé en termes très généraux, la Cour de cassation a considéré de manière logique que le délai de forclusion de deux ans s'appliquait à l'ensemble des actions engagées dans le cadre de la loi, qu'elles émanent du prêteur mais aussi de l'emprunteur. Par ailleurs, le juge, normalement chargé, de par le caractère d'ordre public de la loi, de relever d'office l'irrégularité de l'offre de crédit, est lui-même limité par le délai de forclusion de deux ans qu'il est tenu de respecter.
Cette situation a eu pour conséquence de vider la loi de 1978 d'une grande partie de son efficacité. En effet, la grande majorité des contrats de crédit souscrits par les emprunteurs présentent des dispositions qui devraient être invalidées dans le cadre des normes imposées par la loi de 1978, mais qui, ayant été conclus plus de deux ans avant la demande de constatation de leur résiliation, échappent à la sanction prévue par le législateur de la déchéance du prêteur du droit aux intérêts.
Il en résulte que la protection des emprunteurs n'est pas assurée comme elle devrait l'être et que les situations de surendettement ne cessent d'augmenter. C'est pourquoi il apparaît nécessaire de combler les lacunes de cette loi en précisant que seules les actions engagées par le prêteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cette précision aurait pour conséquence de faire échapper - a contrario - au délai de forclusion de deux ans l'action de l'emprunteur et permettrait ainsi au juge par la même occasion de relever d'office l'irrégularité du contrat de crédit, quelle que soit son ancienneté.
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous propose, Mesdames et Messieurs, d'adopter cette proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article unique

Le premier alinéa de l'article L. 311-37 du code de la consommation est ainsi rédigé :
" Le tribunal d'instance connaît des litiges nés de l'application du présent chapitre. Les actions engagées devant lui par le prêteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion, y compris lorsqu'elles sont nées de contrats conclus antérieurement au 1er juillet 1989. "


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