N° 2144
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 février 2000.
PROPOSITION DE LOI
portant réforme du code civil pour les dispositions relatives
à la
prestation compensatoire.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée

par M. André ASCHIERI, Mme Marie-Hélène AUBERT, MM. Yves COCHET, Guy HASCOËT, Noël MAMÈRE et Jean-Michel MARCHAND,

Députés.

État civil.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Instituée par la loi du 11 juillet 1975 relative à la réforme du divorce, la prestation compensatoire a pour objet de compenser les disparités de niveaux de vie entraînées par la dissolution des liens du mariage, consacrant un droit à l'assistance et à la solidarité au profit de l'époux le moins fortuné au moment du divorce (art. 270 du code civil). Cette prestation a été voulue par le législateur, indemnitaire et forfaitaire, caractère inscrit dans l'article 273 du code civil. Déterminée globalement par le versement d'un capital, l'exception étant le versement d'une rente.
Or, plus de vingt années d'application de ces dispositions ont montré leur déviance par rapport à l'esprit du législateur.
En effet, elle suscite de nombreuses critiques car elle peut créer des situations inéquitables, dénoncées par les débiteurs de cette prestation, dont la situation pécuniaire s'est aggravé du fait des aléas de la vie, alors même que les conditions de vie des époux créanciers se sont améliorées, et par leurs héritiers auxquels la charge de leur rente est transmise lorsque le débiteur vient à décéder.
«S'il semble que la prestation compensatoire doit être maintenue, elle ne saurait viser à conserver un statut social comme un droit acquis par le mariage mais fondamentalement à rétablir un équilibre rompu du fait des choix pris en commun par les époux pendant leur vie commune», soulignait le rapport Théry en mai 1998.
Le rapport Dekeuwer-Defossez, remis en septembre 1999 au ministre de la justice met en exergue, à juste titre, les dysfonctionnements créés par l'application de ces mesures.
C'est pourquoi, il convient de réformer la prestation compensatoire en imposant son versement sous la forme d'un capital. Au moment du divorce, les époux possèdent bien souvent un capital constitué de l'existence des biens acquis pendant le mariage. Ce versement de la prestation compensatoire était la forme voulue par le législateur de 1975, les prestations sous forme de rente ne devront être allouées qu'à défaut de capital. De plus, le changement de situation économique des deux époux doit être pris en considération. Par sa fixation sous forme de capital, la dette s'éteindra une fois le versement ou le dernier versement effectué. Ce capital ne pourrait être converti en rente que par décision motivée du juge, lorsque les ressources du débiteur ne permettent pas de verser un capital. Des possibilités de révisions de l'indemnité compensatoire doivent être conjuguées selon la situation économique des deux époux et notamment du débiteur.
Par ailleurs, afin de ne pas pénaliser les héritiers, il paraît nécessaire que la prestation compensatoire sous forme de rente cesse de plein droit.
Ainsi, en cas de remariage et afin d'éviter le cumul de prestations compensatoires du fait de remariages successifs de l'époux créancier, il convient que la prestation cesse d'être due en cas de remariage de ce dernier.
Des mesures transitoires doivent être envisagées en vue de permettre aux débiteurs d'une prestation compensatoire sous forme de rente d'en demander la conversion en capital.
Au bénéfice de ces observations, nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

L'article 273 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé:
«Le versement de la prestation compensatoire sous forme de rente prend fin en cas de remariage, concubinage ou PACS du créancier.»

Article 2

L'article 274 du code civil est ainsi rédigé:
«Art. 274. - La prestation compensatoire prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge.»

Article 3

L'article 276 du code civil est ainsi rédigé:
«Art. 276. - Par décision motivée du juge, le paiement du capital pourra être versé en plusieurs fois lorsque les biens de l'époux débiteur ne permettent pas le versement de celui-ci.»

Article 4

L'article 276-2 du code civil est ainsi rédigé:
«Art. 276-2. - Au décès du débiteur, la prestation compensatoire versée sous forme de rente cesse de plein droit.»

Article 5

A la date d'entrée en vigueur de la présente loi, tout débiteur d'une prestation compensatoire versée sous forme de rente peut demander au juge la conversion de celle-ci en capital.
Le montant du capital dû par l'époux débiteur est fixé compte tenu des rentes versées antérieurement à cette demande.


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