N° 2154
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 février 2000.
PROPOSITION DE LOI

visant à rendre obligatoire la gratuité sur les sections autoroutières en milieu urbain et périurbain en cas de non-mise en _uvre d'une véritable politique de développement des transports en commun.

(Renvoyée à la commission de la production et des échanges, à défaut de constitution
d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)
présentée

par MM. Roger MEI, Guy HERMIER, François ASENSI, Gilbert BIESSY, Claude BILLARD, Bernard BIRSINGER, Alain BOCQUET, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Jacques BRUNHES, Patrice CARVALHO, Alain CLARY, Christian CUVILLIEZ, René DUTIN, Daniel FEURTET, MmeJacqueline FRAYSSE, MM. André GERIN, Pierre GOLDBERG, Maxime GREMETZ, Georges HAGE, Robert HUE, Mmes Muguette JACQUAINT, Janine JAMBU, MM. André LAJOINIE, Jean-Claude LEFORT, Patrick LEROY, Félix LEYZOUR, François LIBERTI, Patrick MALAVIEILLE, Ernest MOUTOUSSAMY, Bernard OUTIN, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER, Michel VAXÈS et Jean VILA (1),

Députés.

(1) Constituant le groupe communiste et apparentés.
Voirie.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Nombre de régions françaises accusent un retard important en matière de transports en commun. Ainsi, le dernier rapport de la Cour des comptes, de juin 1999, sur la politique autoroutière française met en exergue la prédominance du mode routier.
Or, le "tout automobile" a montré ses limites. Le mode routier est responsable de 80 % des émissions de C02 pour le secteur des transports, asphyxiant, de fait, les villes. En outre, les déplacements deviennent pour beaucoup insupportables tant en termes de temps que de coût, nonobstant les problèmes de stationnement et de circulation urbaine, en découlant.
Il est essentiel désormais que l'organisation des transports s'inscrive dans une approche intermodale qui se fonde non plus, seulement, sur une offre d'infrastructures, mais surtout sur une logique de service aux usagers. De même, les projets d'infrastructures doivent donner la priorité à des solutions alternatives moins coûteuses que les autoroutes. Par exemple, la construction de voies rapides ou l'aménagement des axes routiers existants (nationaux et départementaux). Enfin, pour réduire les conséquences négatives entraînées par les infrastructures routières, essentiellement sur l'environnement et les conditions de vie, il faut prévoir des mesures d'accompagnement.
La loi sur l'air de décembre 1996 vise déjà à promouvoir d'autres réponses que le " tout routier ". Elle fixe ainsi, notamment, les modalités de mise en _uvre des plans de déplacements urbains pour les agglomérations de plus de 1 000 000 habitants. Pourtant, ces plans accusent un retard important et l'absence de PDU approuvés et mis en _uvre contribue à la pérennisation de situations intolérables :
- absence de transports en commun ;
- explosion du trafic routier mettant en danger la sécurité des usagers ;
- péages autoroutiers excessifs en milieu urbain et périurbain.
De plus, la mise en place des PDU ne garantit pas toujours une réponse appropriée immédiate. Dans certaines grandes villes ou agglomérations, les axes autoroutiers concédés pourraient être effectifs, alors même que les transports collectifs (métro, bus, car...) ne seraient en service que dans une quinzaine d'années.
Cette proposition de loi a deux buts. Même si nous ne sommes pas opposés à certaines dérogations, nous souhaitons encadrer celles-ci, qui sont aujourd'hui devenues trop systématiques, au détriment de l'esprit de la loi originelle d'avril 1995. Dans un second temps, et toujours dans l'esprit de la loi susdite, nous souhaitons pallier les effets néfastes pour les usagers des péages autoroutiers en milieu urbain et périurbain, dans l'attente d'une mise en _uvre concrète des PDU dans les agglomérations concernées.
Ces péages sont, en effet, à l'origine d'un traitement inégalitaire des habitants d'un même département ou d'une même agglomération. Ainsi, selon leur lieu de résidence, certains salariés n'ont d'autres alternatives que l'utilisation de l'autoroute à péage, tandis que d'autres peuvent emprunter des sections gratuites ou recourir à des transports en commun adaptés en termes de fréquence, de coût et de desserte.
Pour ces raisons, le principe de gratuité de l'usage des autoroutes prévu par la loi du 18 avril 1955 doit devenir effectif en milieu urbain et périurbain. C'est l'objet de cette proposition de loi. Toutefois, cette interdiction de toute dérogation au principe de gratuité n'est prévue qu'en l'absence d'une véritable politique de développement des transports en commun. Cette proposition de loi _uvre donc également à la mise en place de mesures pour un tel développement.
Pour contrôler la mise en place effective de moyens de transport intermodulaires, une commission paritaire est créée. Elle aura pour double fonction, de contrôler la mise en _uvre concrète des PDU et DTA, pour autoriser le péage urbain et périurbain des axes autoroutiers concédés. En cas d'application de l'autorisation de dérogation au principe de gratuité, elle devra également statuer sur la mise en place d'une tarification particulière, adaptée aux usagers domiciliés et travaillant dans un périmètre qu'ils auront à déterminer.
Aussi parce qu'elle s'inscrit dans le principe reconnu par l'article 2 de la LOTI, qui est le droit au transport pour chaque citoyen, quels que soient leur revenu et leur localisation géographique, il vous est proposé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

L'article 4 de la loi n° 55-435 du 18 avril 1955 portant statut des autoroutes est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
" En l'absence de mise en _uvre des dispositions :
" - de l'article 14 de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie qui fixe les délais, les modalités et les objectifs des plans de déplacements urbains (PDU) dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants ;
" - de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire visant la réalisation du dossier de voirie d'agglomération (DVA) sur les territoires concernés par une directive territoriale d'aménagement (DTA).
" Il ne peut être dérogé au 1er alinéa du présent article de la présente loi fixant le principe de la gratuité, pour les sections d'autoroutes situées dans les périmètres concernés. "

Article 2

Il est institué une commission paritaire composée de représentants du ministère des transports, d'élus locaux, de représentants des usagers de la route et de représentants des sociétés autoroutières.
La commission est chargée de contrôler la mise en _uvre effective des PDU et de la DTA. Elle a également en charge de veiller à la bonne application aux usagers des critères retenus par l'article 3 de la présente loi.

Article 3

Lorsque la commission, créée par l'article 2, constate la mise en _uvre des dispositions du 2e alinéa de l'article 1er de la présente de loi, il peut être dérogé au principe de gratuité à la condition qu'une tarification préférentielle soit prévue pour certaines catégories d'usagers dans les périmètres concernés.
Les catégories d'usagers soumises à une telle tarification sont :
- les utilisateurs effectuant un trajet domicile-lieu de travail ;
_ les transporteurs routiers, dont la société est implantée localement, qui effectuent une livraison ou un chargement dans l'agglomération concernée.


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