N° 2379
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 mai 2000.
PROPOSITION DE LOI
tendant à la suppression du régime d'exception
applicable à
Paris en matière de pouvoirs de police.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée
par M. Pierre ALBERTINI
et les membres du groupe UDF (1),
Députés.

(1) Ce groupe est composé de : MM. Philippe Douste-Blazy, Jean-Pierre Abelin, Pierre-Christophe Baguet, Raymond Barre, Jacques Barrot, Dominique Baudis, Jean-Louis Bernard, Claude Birraux, Émile Blessig, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Jean-Louis Borloo, Bernard Bosson, Mme Christine Boutin, MM. Loïc Bouvard, Jean Briane, Yves Bur, Dominique Caillaud, Hervé de Charette, René Couanau, Charles de Courson, Yves Coussain, Marc-Philippe Daubresse, Jean-Claude Decagny, Léonce Deprez, Renaud Donnedieu de Vabres, Renaud Dutreil, Alain Ferry, Jean-Pierre Foucher, Claude Gaillard, Germain Gengenwin, Gérard Grignon, Hubert Grimault, Pierre Hériaud, Patrick Herr, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Henry Jean-Baptiste, Jean-Jacques Jegou, Christian Kert, Édouard Landrain, Jacques Le Nay, Jean-Antoine Léonetti, François Léotard, Maurice Leroy, Roger Lestas, Maurice Ligot, François Loos, Christian Martin, Pierre Méhaignerie, Pierre Menjucq, Pierre Micaux, Mme Louise Moreau, MM. Hervé Morin, Jean-Marie Morisset, Arthur Paecht, Dominique Paillé, Henri Plagnol, Jean-Luc Préel, Marc Reymann, Gilles de Robien, Rudy Salles, André Santini, François Sauvadet, Michel Voisin, Jean-Jacques Weber et Pierre-André Wiltzer.
Police.

EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La loi n° 75-1331 du 31 décembre 1975 qui a modifié l'organisation de Paris en instituant un conseil et un maire élus visait à aligner le statut de la capitale sur le droit commun de l'administration communale.
Mais cette évolution fut partielle : le maintien d'un régime dérogatoire concernant les pouvoirs de police dans la capitale fut à l'occasion réaffirmé.
Chacun sait les arguments développés à l'appui de cette singularité.
Le passé révolutionnaire de Paris, sa démographie exceptionnelle, sa situation particulière de siège des pouvoirs publics ou des représentations diplomatiques expliquent - à défaut de la justifier - le maintien d'un texte vieux de quelque deux cents ans : l'arrêté de messidor an VIII qui a fixé l'exception parisienne. Cet arrêté avait vocation à préciser les attributions du préfet de police institué par la loi administrative du 28 pluviôse an VIII.
Certes, nul ne contestera le principe que l'Etat assure par ses propres agents la sécurité des institutions de la République et celle des membres des représentations.
En revanche, cette spécificité parisienne ne saurait légitimer que, deux siècles plus tard et quand bien même quelques attributions marginales ont été reconnues au maire de Paris, le champ des pouvoirs de police communale dévolus au préfet de police reste quasiment entier.
Ainsi, le mouvement communal dont l'amorce est bien antérieure aux lois sur la décentralisation ne bénéficie pas - au moins dans ce domaine - à Paris.
Au moment où la gestion de proximité est tant vantée, ce n'est pas là l'un des moindres paradoxes que de priver le maire de Paris de moyens réglementaires tendant à en assurer l'exercice et à prémunir les Parisiens contre les risques, d'origine humaine ou naturelle, qui les menacent.
L'ordre public communal ne cesse d'évoluer pour mieux s'adapter aux évolutions de la société elle-même. Le maire, autorité de police communale partout ailleurs qu'à Paris, dispose ainsi d'une gamme de prérogatives faisant de lui un véritable protagoniste dans des domaines aussi variés que l'organisation de la circulation et du stationnement, la protection de l'environnement, de la tranquillité et de la sécurité publiques, pour ne citer que ceux-là.
Mais, qu'en est-il d'une gestion de proximité au plus près des attentes des administrés si l'exercice des attributions reste confié à une administration d'Etat, assujettie hiérarchiquement à une autorité autre que celle du maire? Si certains voient dans le préfet de police un exécutif spécialisé de la collectivité locale, c'est au regard de la responsabilité contentieuse de la ville de Paris qui se trouve engagée pour des actes qu'elle n'a pas décidés.
L'arrêté consulaire ne pouvait, à l'évidence, anticiper ce mouvement, ni vouloir en figer définitivement les acteurs.
La lisibilité accrue émanant de la nouvelle organisation de la préfecture de police, distinguant plus nettement les services de police urbaine de proximité de ceux en charge de l'ordre public, constitue un argument en faveur d'une adaptation de Paris sur le cadre juridique des communes où la police est étatisée.
L'abrogation d'une législation archaïque fournit non seulement au maire de Paris les moyens réglementaires pour définir et faire respecter les choix des Parisiens mais doit lui ouvrir également la faculté de se doter d'un corps d'agents de police municipale.
Il ne s'agit pas d'un "embryon de police locale", mais d'assurer, dans l'esprit et sous le contrôle de la loi n° 99-291 du 15 avril 1999, une complémentarité entre les missions des agents de police municipale et celles relevant de l'Etat.
Le corps municipal constituera pour les Parisiens un véritable service chargé de l'application des arrêtés municipaux qui, par sa présence effective sur la voie publique, les rassurera et préviendra bien des atteintes à leur sûreté.
Les obligations issues de la loi du 15 avril 1999 sont autant de garanties sur la coordination des interventions, sur le recrutement et la formation continue des agents territoriaux, assurément plus contraignantes que le recours aux adjoints de sécurité, censé compenser, mais bien insuffisamment, la diminution du nombre des fonctionnaires de police affectés dans la capitale.
A l'heure où le sentiment d'insécurité n'a jamais été aussi manifeste, nonobstant la réforme structurelle de la préfecture de police, conforté par une augmentation depuis ces dernières années des faits de délinquance, la réintégration de Paris dans le droit commun et l'opportunité de créer un corps de police municipale permettront une meilleure répartition des rôles : la police d'Etat se concentrera ainsi sur ses missions essentielles de maintien de l'ordre et de la sécurité publics.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

Les articles 2 à 50 de l'arrêté du 12 messidor an VIII qui détermine les fonctions du préfet de police à Paris sont abrogés.

Article 2

L'article 9 de la loi n° 75-1331 du 31 décembre 1975 portant réforme du régime administratif de la ville de Paris est abrogé.

Article 3

Le premier alinéa de l'article L. 2-512-13 et le premier alinéa de l'article L. 2-512-14 du code général des collectivités territoriales sont abrogés.

Article 4

Les articles L.2-214-3 et L. 2-214-4 du code général des collectivités territoriales sont applicables à Paris.


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