N° 2443
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 30 mai 2000.
PROPOSITION DE LOI
portant diverses dispositions relatives
à la
formation en apprentissage et alternance
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée

par MM. Pierre HELLIER, Jean-Claude ABRIOUX, Bernard ACCOYER, René ANDRÉ, Mme Sylvia BASSOT, MM. Jean-Louis BERNARD, Léon BERTRAND, Émile BLESSIG, Roland BLUM, Loïc BOUVARD, Jean BRIANE, Dominique CAILLAUD, Antoine CARRÉ, Jean-Marc CHAVANNE, Georges COLOMBIER, Yves COUSSAIN, Marc-Philippe DAUBRESSE, Bernard DEFLESSELLES, Lucien DEGAUCHY, Francis DELATTRE, Léonce DEPREZ, Franck DHERSIN, Laurent DOMINATI, Dominique DORD, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Jean-Claude ÉTIENNE, Nicolas FORISSIER, Jean-Pierre FOUCHER, Claude GAILLARD, Claude GATIGNOL, Germain GENGENWIN, Jean-Marie GEVEAUX, Jean-Pierre GIRAN, Michel GIRAUD, François GOULARD, Hubert GRIMAULT, Louis GUÉDON, Pierre HÉRIAUD, Philippe HOUILLON, Michel HUNAULT, Édouard LANDRAIN, Jacques LE NAY, François LÉOTARD, Maurice LEROY, Roger LESTAS, Alain MADELIN, Alain MARLEIX, Christian MARTIN, Patrice MARTIN-LALANDE, Mme Jacqueline MATHIEU-OBADIA, MM. Jean-François MATTEI, Pierre MENJUCQ, Charles MIOSSEC, Pierre MORANGE, Hervé MORIN, Jacques MYARD, Yves NICOLIN, Jean-Marc NUDANT, Jacques PÉLISSARD, Bernard PERRUT, Jean-Luc PRÉEL, Jean PRORIOL, Didier QUENTIN, Marc REYMANN, Jean RIGAUD, François ROCHEBLOINE, André SANTINI, Joël SARLOT, Bernard SCHREINER, Guy TEISSIER, Michel TERROT, Léon VACHET, Michel VOISIN et Pierre-André WILTZER,

Députés.

Formation professionnelle.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
L'apprentissage et les formations en alternance sous contrat de travail sont les formes les plus abouties de relation avec le monde professionnel. Instruments de lutte contre le chômage, ils doivent faire l'objet d'efforts particuliers et importants.
Aussi, il convient d'adapter certaines règles actuelles du code du travail qui s'y rapportent afin de permettre leur développement.

I. - LE SOUTIEN À L'INSERTION PROFESSIONNELLE

Face aux difficultés d'insertion professionnelle des jeunes, il convient aujourd'hui de s'engager fermement pour la formation en alternance et notamment de soutenir les entreprises qui participent à la formation des jeunes et à leur insertion professionnelle.
Toutes les mesures contribuant au recul du chômage des jeunes doivent également être soutenues.
Le dispositif des emplois-jeunes permet à l'éducation nationale, aux collectivités locales et aux associations de recruter des jeunes pendant cinq ans tout en bénéficiant d'une aide substantielle de l'Etat.
Aussi, il paraît juste d'aider les entreprises privées qui créent de vrais emplois solvables en embauchant en contrat à durée indéterminée un jeune à la suite d'un contrat d'apprentissage ou d'un contrat d'insertion en alternance et participent ainsi de manière active à la formation des jeunes et à leur insertion professionnelle.
Les aides attribuées par l'Etat doivent encourager au maximum les formules d'insertion dans un emploi plutôt qu'une formation a priori.
Il paraît donc souhaitable de maintenir l'exonération des charges patronales et sociales dont bénéficie l'employeur pendant un an après le terme du contrat d'apprentissage ou d'insertion en alternance lorsque celui-ci est suivi d'un contrat de travail à durée indéterminée.
Il est donc proposé d'insérer au sein de l'article L. 118-5 du code du travail un second alinéa ainsi rédigé : "Cette exonération est maintenue pendant un an lorsque l'employeur embauche l'apprenti en contrat à durée indéterminée à la suite du contrat d'apprentissage", au sein de l'article L. 118-6 du code du travail un nouvel alinéa ainsi rédigé : "Les exonérations visées à l'alinéa premier sont maintenues pendant un an lorsque l'employeur embauche l'apprenti en contrat à durée indéterminée à la suite du contrat d'apprentissage", et au sein de l'article L. 981-4 du code du travail un nouvel alinéa ainsi rédigé : " Cette exonération est maintenue pendant un an lorsque l'employeur embauche la personne bénéficiaire du contrat de qualification en contrat à durée indéterminée à la suite du contrat de qualification", enfin, au sein de l'article L. 981-9 du code du travail, un nouvel alinéa ainsi rédigé : "L'exonération est maintenue pendant un an lorsque l'employeur embauche la personne bénéficiaire du contrat d'orientation en contrat à durée indéterminée à la suite du contrat d'orientation ".

II. - L'UNIFORMISATION DES RÈGLES

La prime à l'embauche pour les jeunes d'un niveau de qualification IV et plus a été supprimée (article 131 de la loi de finances pour 1999).
Le risque de cette suppression est de limiter l'apprentissage aux premiers niveaux de qualification. Or, la part des diplômes de niveau V diminue sensiblement et les formations plus qualifiantes progressent.
Par ailleurs, cela décourage les maîtres d'apprentissage dont l'effort n'est que partiellement reconnu.
Enfin, dans un souci de cohérence et de lisibilité des dispositifs d'apprentissage, il paraît souhaitable d'harmoniser le régime quel que soit le niveau de qualification. Le dispositif doit être lisible par les entreprises. Le système de primes liées à l'embauche doit être unifié.
Aussi, dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 118-7 du code du travail, après les mots : "d'une aide à l'embauche", les mots : " lorsque l'apprenti dispose d'un niveau de formation inférieur à un minimum défini par décret " sont supprimés et remplacés par : " d'apprentis ".

III. - L'ÉGALITÉ D'ACCÈS À L'APPRENTISSAGE

Il convient d'assurer une égalité d'accès à l'apprentissage.
Les maîtres d'apprentissage exigent de plus en plus un niveau troisième avec le diplôme national du brevet pour certains. Comment placer les jeunes qui ont un niveau plus faible mais l'âge d'entrer en apprentissage?
Le droit d'accès doit être plus ouvert. L'apprentissage est la filière d'insertion pour certains jeunes en échec scolaire. C'est en effet une seconde chance pour ceux qui ne trouvent pas leur orientation dans les filières proposées par l'éducation nationale (certains jeunes peuvent en effet être rebutés par l'aspect trop théorique de 1'enseignement et trouvent dans l'apprentissage des méthodes qui leur sont plus adaptées).
Aussi, il paraît opportun de créer, au sein du collège, une classe de préapprentissage accueillant des jeunes non titulaires du BEPC âgés de quatorze à dix-huit ans. L'objectif direct serait la signature d'un contrat d'apprentissage. Il s'agirait d'une année de formation-orientation comprenant un bilan de compétences, une remise à niveau scolaire, une information sur les métiers et les professions et une formation à la technique de recherche d'entreprise, des stages d'observation ou d'initiation en milieu professionnel. L'entreprise qui embauche en contrat d'apprentissage un jeune issu d'une classe de préapprentissage bénéficie d'une prime supplémentaire.
Au moins deux classes de préapprentissage sont créées dans chaque département.
Une telle mesure s'inscrit dans le dispositif de lutte contre les exclusions.

IV. - LE TRAITEMENT DES DIFFICULTÉS INHÉRENTES
À LA RUPTURE D'UN CONTRAT D'APPRENTISSAGE

Il apparaît nécessaire de combler un vide juridique : le traitement des difficultés inhérentes à la rupture d'un contrat d'apprentissage.
Lorsque le contrat est résilié, en dehors de la résiliation intervenue pendant les deux premiers mois d'apprentissage, de la résiliation pour faute grave de l'apprenti ou inaptitude de l'apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer, il convient de favoriser la poursuite de l'accueil des jeunes au sein du centre de formation d'apprentis dans l'attente de la conclusion d'un nouveau contrat de travail. La définition d'un délai clairement affiché, compatible avec la préservation du concept d'alternance, servant à la remobilisation et à la recherche d'une nouvelle entreprise, pallierait les risques d'échec des jeunes aux examens.
Aussi, il serait souhaitable que les jeunes disposent dans ce cas d'un délai de deux mois pour retrouver un nouvel employeur. Au-delà, ils ne pourront se présenter aux épreuves de l'année en cours. Pendant ce temps, le jeune aura le statut de stagiaire de la formation professionnelle et bénéficiera ainsi d'une prise en charge de sa rémunération et de sa protection sociale.
Le centre de formation d'apprentis qui accueille l'apprenti prend les dispositions nécessaires pour que celui-ci bénéficie d'une formation pratique complémentaire à celle qui lui est dispensée par le centre.
Aussi, il est inséré, dans le code du travail, un article L. 117-19 ainsi rédigé :
" Art. L. 117-19. - En cas de rupture du contrat d'apprentissage, hormis les cas de résiliation du contrat d'apprentissage pendant les deux premiers mois d'exécution du contrat, de résiliation pour faute grave de l'apprenti ou pour inaptitude de l'apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer, l'apprenti dispose de deux mois pour retrouver un employeur. Pendant ce temps, le centre de formation d'apprentis, qui soutient le jeune dans ses démarches pour trouver un nouvel employeur, prend les dispositions nécessaires pour que celui-ci bénéficie d'une formation pratique complémentaire à celle qui lui est dispensée par le centre. "

V. - LA DÉTERMINATION DU SALAIRE DE L'APPRENTI
EN CAS DE CONTRATS D'APPRENTISSAGE SUCCESSIFS

Il convient de ne pas pénaliser les jeunes qui décident de suivre plusieurs formations en apprentissage afin d'élargir leurs domaines de compétences ou d'obtenir un niveau de qualification supérieur.
De plus en plus de jeunes souhaitent préparer un diplôme de niveau supérieur ou équivalent, voire inférieur, dans un secteur voisin de leur spécialité d'origine mais hésitent en raison de la diminution de salaire qui en résulterait. En effet, un jeune en deuxième année de CAP qui souhaite continuer sa formation en BP et qui change d'entreprise se retrouve avec une baisse de salaire. La loi prévoit dans ce cas que le jeune est rémunéré suivant la grille correspondant à une première année de formation.
Au sein de l'article L. 117-10 du code du travail, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :
" Le jeune qui, après avoir suivi une première formation en apprentissage, envisage d'en suivre une nouvelle, éventuellement au sein d'une autre entreprise, percevra un salaire correspondant à une troisième année de formation et tenant compte de la durée du contrat et de son ancienneté s'il reste dans la même entreprise. L'indemnité de soutien à l'effort de formation réalisé par l'employeur prévue par l'article L. 118-7 est dans ce cas majorée dans des conditions fixées par décret. "

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

Après le premier alinéa de l'article L. 118-5 du code du travail, il est inséré un second alinéa ainsi rédigé :
" Ces exonérations sont maintenues pendant un an lorsque l'employeur embauche l'apprenti en contrat à durée indéterminée à la suite du contrat d'apprentissage. "

Article 2

L'article L. 118-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" Les exonérations visées au premier alinéa sont maintenues pendant un an lorsque l'employeur embauche l'apprenti en contrat à durée indéterminée à la suite du contrat d'apprentissage. "

Article 3

L'article L. 981-4 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" Cette exonération est maintenue pendant un an lorsque l'employeur embauche la personne bénéficiaire du contrat de qualification en contrat à durée indéterminée à la suite du contrat de qualification ".

Article 4

L'article L. 981-9 du code du travail, est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" L'exonération est maintenue pendant un an lorsque l'employeur embauche la personne bénéficiaire du contrat d'orientation en contrat à durée indéterminée à la suite du contrat d'orientation. "

Article 5

Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 118-7 du code du travail, après les mots : "d'une aide à l'embauche", les mots : " lorsque l'apprenti dispose d'un niveau de formation inférieur à un minimum défini par décret " sont remplacés par les mots : " d'apprentis ".

Article 6

Après le troisième alinéa de l'article L. 211-1 du code du travail, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
" Dans chaque département, il est créé au moins deux classes de préapprentissage, au sein des collèges, accueillant des élèves pendant un an durant les deux dernières années de leur scolarité obligatoire dont l'objectif direct est la signature d'un contrat d'apprentissage. C'est une année de formation-orientation comprenant un bilan de compétences, une remise à niveau scolaire, une information sur les métiers et les professions, une formation à la technique de recherche d'entreprise, des stages d'observation ou d'initiation en milieu professionnel.
"L'entreprise qui embauche en contrat d'apprentissage un jeune issu d'une classe de préapprentissage bénéficie d'une indemnité de soutien à l'effort de formation prévue par l'article L. 118-7 majorée dans des conditions fixées par décret. "

Article 7

Après l'article L. 117-18 du code du travail, il est inséré un article L. 117-19 ainsi rédigé :
" Art. L. 117-19. - En cas de rupture du contrat d'apprentissage, hormis les cas de résiliation du contrat d'apprentissage pendant les deux premiers mois d'exécution du contrat de résiliation pour faute grave de l'apprenti ou pour inaptitude de l'apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer, le jeune dispose de deux mois pour retrouver un employeur. Pendant ce temps, le centre de formation d'apprentis, qui accompagne le jeune dans ses démarches pour trouver un nouvel employeur, prend les dispositions nécessaires pour que celui-ci bénéficie d'une formation pratique complémentaire à celle qui lui est dispensée par le centre ".

Article 8

L'article 117-10 du code du travail, est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" Le jeune qui, après avoir suivi une première formation en apprentissage, envisage d'en suivre une nouvelle, éventuellement au sein d'une autre entreprise, percevra un salaire correspondant à une troisième année de formation et tenant compte de la durée du contrat et de son ancienneté s'il reste dans la même entreprise. L'indemnité de soutien à l'effort de formation réalisé par l'employeur prévue par l'article L. 118-7 est dans ce cas majorée dans des conditions fixées par décret. "

Article 9

Les charges qui incomberaient à l'Etat et aux régimes sociaux sont compensées, à due concurrence, par une augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts, et par la création d'une taxe additionnelle à ces mêmes tarifs.
2443 - Proposition de loi de M. Jean-Pierre Hellier portant diverses dispositions relatives à la formation en apprentissage et alternance (commission des affaires culturelles)


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