N° 2635
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 octobre 2000.

PROPOSITION DE LOI
tendant à instaurer un délai de paiement dans les marchés publics.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée
par M. Yves BUR,
Député.

Marchés publics.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Aux termes de l'article 178 du code des marchés publics, une autorité administrative doit procéder au mandatement des acomptes et du solde du marché dans un délai qui ne peut excéder trente-cinq jours (pour les marchés de l'Etat et de ses établissements publics qui ne prévoient pas un règlement par lettre de change-relevé). Mais ce délai peut être porté à quarante-cinq jours (pour les marchés des collectivités territoriales et de leurs établissements publics), à deux mois (pour le solde de certaines catégories de travaux et pour les marchés de travaux dont la durée d'exécution est supérieure à six mois) ou encore à soixante-quinze jours (pour les marchés industriels dont la durée d'exécution est supérieure à six mois).
A ces délais doit encore être ajoutée la période plus ou moins longue de temps qui s'écoule entre le mandatement et le paiement par le comptable public, lequel n'est tenu par aucun délai légal. Par conséquent, nombreux sont les titulaires de marchés publics (et notamment les PME) qui, n'étant pas payés en temps utiles et ne disposant pas de trésorerie comparable à celles des grandes entreprises, se retrouvent obligés de contracter un emprunt bancaire ou, dans le pire des cas, de déposer leur bilan.
De ce fait, dans son document d'orientation sur la réforme des marchés publics, le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, tout en soulignant les efforts importants récemment menés pour réduire les délais de paiements publics, constate que la situation actuelle " n'est pas pleinement satisfaisante " et souhaite que "  les administrations et collectivités publiques puissent à l'avenir s'engager contractuellement sur un délai global de paiement auprès de leurs fournisseurs ".
Substituer à l'actuel délai de mandatement un délai global de paiement (c'est-à-dire comprenant à la fois le délai de mandatement et celui de paiement) satisferait une majorité d'entreprises créancières de l'administration et répondrait en outre aux objectifs européens de lutte contre les retards de paiements dans les transactions commerciales : un projet de directive, qui est en cours d'adoption, prévoit en effet la mise en place d'un délai global conventionnel de paiement.
Pour toutes ces raisons, il vous est proposé, Mesdames, Messieurs, d'adopter les présentes dispositions modifiant le code des marchés publics.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L'article 178 du code des marchés publics est ainsi rédigé :
Art. 178. - I. - L'administration contractante est tenue de procéder au paiement des acomptes et du solde dans un délai maximal de quarante jours à compter de la date à laquelle sont remplies les conditions administratives ou techniques déterminées par le marché auxquelles sont subordonnés les mandatements et les paiements.
" II. - Le défaut de paiement dans le délai prévu au I ci-dessus fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant, des intérêts moratoires à compter du jour suivant l'expiration dudit délai.
" III. - Le délai prévu au I du présent article ne peut être suspendu qu'une seule fois, huit jours au moins avant son expiration, quand des raisons imputables au titulaire ou au sous-traitant s'opposent au paiement.
" Cette suspension est notifiée aux intéressés par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal qui précise les raisons de l'opposition au paiement, détaille si nécessaire les pièces à fournir ou à compléter, et indique que la suspension du paiement ne prendra fin qu'après la remise desdites pièces.
" IV. - En cas de désaccord sur le montant d'un acompte ou du solde, le paiement est effectué sur la base provisoire des sommes admises par l'administration contractante. Lorsque les sommes ainsi payées sont inférieures à celles qui sont finalement dues au titulaire ou au sous-traitant, celui-ci a droit à des intérêts moratoires sur la différence.
" V. - L'avance forfaitaire prévue à l'article 154 du présent code est réglée sans formalités dans un délai maximal de quarante jours à partir de la date d'effet de l'acte qui emporte commencement d'exécution du marché. Si le titulaire doit constituer une garantie à première demande ou une caution, l'avance ne peut être réglée avant que cette garantie ou cette caution ait été constituée. "

Article 2

I. - Après le deuxième alinéa de l'article 352 du code précité, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
" Les intérêts moratoires prévus au II de l'article 178 sont à la charge de l'Etat quand le retard de paiement est imputable au comptable public. "
II. - Le premier alinéa de l'article 352 bis est abrogé.

Article 3

Les charges éventuelles qui découleraient, pour les collectivités locales, de l'application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement et de la dotation générale de décentralisation.
Les pertes de recettes et les charges qui incomberaient à l'Etat sont compensées, à due concurrence, par une augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 4

Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les modalités d'application de la présente loi.
2635 - Proposition de loi de M. Yves Bur tendant à instaurer un délai de paiement dans les marchés publics (commission des lois).


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