N° 2638
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 octobre 2000.
PROPOSITION DE LOI

tendant à modifier l'article L. 351-12 du code de la sécurité sociale pour exclure la majoration de 10% pour enfants dans le calcul du cumul d'une pension de réversion et des droits personnels.

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée

par MM. Dominique PAILLÉ, Bernard ACCOYER, André ANGOT, Jean AUCLAIR, Pierre-Christophe BAGUET, Jacques BARROT, Jean-Louis BERNARD, Léon BERTRAND, Roland BLUM, Mme Marie-Thérèse BOISSEAU, MM. Loïc BOUVARD, Michel BOUVARD, Jean BRIANE, Dominique CAILLAUD, Pierre CARDO, Richard CAZENAVE, Henry CHABERT, Hervé de CHARRETTE, Jean-Marc CHAVANNE, Pascal CLÉMENT, Georges COLOMBIER, Jean-Michel COUVE, Marc-Philippe DAUBRESSE, Jean-Claude DECAGNY, Patrick DELNATTE, Yves DENIAUD, Léonce DEPREZ, Dominique DORD, Guy DRUT, Christian ESTROSI, Jean-Claude ÉTIENNE, Jean-Michel FERrAND, Jean-Pierre FOUCHER, Claude GAILLARD, Gilbert GANTIER, Henri de GASTINES, Claude GATIGNOL, Germain GENGENWIN, Michel GIRAUD, Jean-Claude GUIBAL, Pierre HELLIER, Pierre HÉRIAUD, Mme Anne-Marie IDRAC, MM. Denis JACQUAT, Henry JEAN-BAPTISTE, Aimé KERGUÉRIS, Robert LAMY, Jacques LE NAY, Maurice LEROY, Roger LESTAS, Maurice LIGOT, François LOOS, Alain MARLEIX, Jean MARSAUDON, Patrice MARTIN-LALANDE, Mme Jacqueline MATHIEU-OBADIA, MM. Pierre MENJUCQ, Gilbert MEYER, Michel MEYLAN, Pierre MORANGE, Mme Louise MOREAU, MM. Jean-Marie MORISSET, Jacques MYARD, Mme Françoise de PANAFIEU, MM. Jacques PÉLISSARD, Pierre PETIT, Étienne PINTE, Jean-Luc PRÉEL, Jean-Bernard RAIMOND, Jean-Luc REITZER, Marc REYMANN, Jean ROATTA, François ROCHEBLOINE, Rudy SALLES, André SANTINI, Bernard SCHREINER, Michel TERROT, Léon VACHET, Michel VOISIN et Pierre-André WILTZER,

Députés.

Retraites : régime général.

EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Aux termes des articles L. 351-12 et R. 351-30 du code de la sécurité sociale, les pensions personnelles et de réversion sont majorées de 10% lorsque le conjoint survivant d'un assuré des régimes général, des salariés et des salariés non agricoles (MSA), des artisans (AVA) et commerçants (ORGANIC) a élevé trois enfants au moins, pendant neuf ans avant leur seizième anniversaire.
Le cumul des droits personnels et de la retraite de réversion attribuée aux veufs et veuves âgés de cinquante-cinq ans au moins est également autorisé, pour les bénéficiaires du régime général, dans une limite de 52 % du total des droits personnels et de la pension de réversion ou de 73 % du montant maximum de la pension vieillesse.
Au moment de l'instruction des demandes s'est posé le problème de savoir si la majoration de 10% attribuée aux veufs et veuves qui ont élevés trois enfants est incluse dans le calcul du plafond de cumul des avantages personnels de vieillesse et d'une pension de réversion. Car, en cas de dépassement de la limite de cumul, la pension de réversion est réduite d'autant. En revanche, dans l'hypothèse où la majoration pour enfants serait exclue de l'avantage personnel, le montant du dépassement éventuel serait réduit en conséquence et, corrélativement, la pension de réversion s'en trouverait majorée.
La pratique de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) conduisait à inclure cette majoration. La circulaire n° 46/75 du 4 avril 1975 précisait que " pour la fixation de la limite du cumul, il y a lieu de tenir compte de l'intégralité du montant des droits propres du conjoint survivant, y compris les avantages accessoires qui peuvent éventuellement s'y ajouter ".
Cette interprétation a été régulièrement contestée et dans une jurisprudence constante, la Cour de cassation (Chambre sociale, 6 février 1992, Maillard C/CNAVTS) a estimé, à juste titre, que " la majoration pour enfants applicable aux pensions du régime général constitue un avantage distinct de la pension elle-même, qui n'a pas à être compris dans la base de calcul de la limite de cumul autorisé entre un avantage personnel vieillesse et la pension de réversion du régime général et qui doit, le cas échéant, s'ajouter au montant réduit de cette pension après application des règles de cumul ".
Dans d'autres arrêts, elle a souligné que " la majoration pour enfants allouée à l'assurée et correspondant à des charges d'ordre familial était distincte des avantages personnels de vieillesse dont bénéficiait cette dernière " (Chambre sociale du 24 septembre 1992, DRASS de Lille, Mme Cayzeele-Pinaud contre CRAM Nord-Picardie), ou encore que la " majoration pour enfants applicable aux pensions de vieillesse des agents des collectivités locales constitue un avantage distinct de la pension elle-même (...) et que cet avantage n'a pas à être compris dans la base de calcul de la limite du cumul autorisé entre l'avantage personnel de vieillesse de l'intéressée et sa pension de réversion du régime général de la sécurité sociale " (Chambre sociale, 11 avril 1996, CRAM d'Auvergne contre Mme Eymard).
Toutes les conséquences de ces arrêts n'ont pas été prises en considération par les caisses régionales d'assurance maladie (CRAM) ou la direction de la sécurité sociale. Néanmoins, comme a pu le souligner Monsieur le Médiateur de la République dans ses différents rapports sur cette question, " les CRAM ne font plus appel des décisions des tribunaux des affaires de la sécurité sociale qui sont systématiquement favorables aux demandeurs en application de la jurisprudence de la Cour de cassation, lorsque l'affaire est portée au contentieux ".
Afin de clarifier le mode de calcul des limites de cumul, lors du vote de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, le Gouvernement a introduit, in extremis, un amendement qui a eu pour objet de compléter l'article L. 351-12 du code de la sécurité sociale.
Celui-ci est venu prévoir que désormais la majoration pour enfants de 10 % des pensions de vieillesse serait incluse dans le calcul du plafond de cumul des avantages personnels de vieillesse et d'une pension de réversion.
Par cet amendement, le Gouvernement a entendu inscrire dans la loi la pratique connue de la CNAV, bien que celle-ci fut contraire à la jurisprudence.
Contrairement aux affirmations répétées du Gouvernement, cette nouvelle disposition modifie les avantages dont bénéficient les veufs et veuves. En effet, l'inclusion dans le plafond de cumul de la majoration pour enfants a pour effet négatif de fixer la pension de réversion de la mère de famille à un montant inférieur à celui qui aurait été attribué si cette mère de famille avait eu moins de trois enfants, ce qui apparaît à l'évidence contraire à la volonté exprimée par le législateur qui entendait favoriser les assurés ayant élevé trois enfants ou plus.
Malgré la revalorisation du minimum de réversion, l'inclusion de la majoration pour enfants dans le calcul du plafond de cumul, ce système revient à exclure de nombreuses veuves du bénéfice de cet avantage.
Monsieur le Médiateur de la République avait présenté au Gouvernement une proposition de réforme, 97-R020 du 6 août 1997, par laquelle il souhaitait fort légitimement qu'en application du principe de l'égalité soient modifiés les textes applicables afin d'entériner la position de la Cour de cassation de manière à lever toute ambiguïté.
Or, sans aucune justification sérieuse, il a été retenu la solution la moins favorable, faisant ainsi échec à la jurisprudence, bien établie, de la Cour de cassation. L'article 38-IV de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est venu affirmer explicitement, comme il a été indiqué précédemment, que la majoration pour enfants est incluse dans les avantages personnels de vieillesse en cas de cumul avec une pension de réversion.
Nonobstant la réévaluation du taux de liquidation de la pension de réversion, il apparaît fondamental de rétablir l'équité, en excluant la majoration pour enfants de 10% des pensions de vieillesse dans le calcul du plafond de cumul des avantages personnels de vieillesse et d'une pension de réversion.
Cette mesure est d'autant plus légitime que la plupart des veuves, environ 600 000, sont en situation précaire car elles ne perçoivent pas de pension personnelle et sont de fait non imposables.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le troisième alinéa de l'article L. 351-12 du code la sécurité sociale est ainsi rédigé :
" Cette majoration n'est pas incluse dans les avantages personnels de vieillesse dont le cumul avec une pension est comparé aux limites prévues au dernier alinéa de l'article L. 353-1. "

Article 2

Les dépenses résultant pour les régimes sociaux de l'application des dispositions de l'article 1er sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

2638 - Proposition de loi de M. D. Paillé tendant à modifier l'article L. 351-12 du code de la sécurité sociale pour exclure la majoration de 10% pour enfants dans le cumul d'une pension de réversion et des droits personnels (affaires culturelles).


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