N° 3277
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 septembre 2001.
PROPOSITION DE LOI
créant un Observatoire de lutte contre le blanchiment de l'argent sale et le financement du terrorisme.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée
par M. Michel HUNAULT,
Député.

Relations internationales.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
L'attaque sans précédent qui a frappé les Etats-Unis d'Amérique le 11 septembre 2001 a suscité à travers le monde des sentiments mêlant à la fois l'indignation et l'horreur. Elle appelle les nations du monde à se mobiliser contre le terrorisme. Il convient en particulier d'accroître la surveillance des circuits financiers, susceptibles de financer le terrorisme, et de tout mettre en _uvre afin d'identifier ou de bloquer tous flux suspects. Déjà, au cours de ces dernières années, la France a été, à l'occasion du sommet du G7 en 1989, à l'origine de la création du Groupe d'actions financières sur le blanchiment de capitaux (GAFI) afin d'organiser et de coordonner l'action des Etats.
La lutte contre le blanchiment de l'argent sale et de la corruption a donné lieu à une prise de conscience qui s'est traduite par l'adoption de conventions internationales.
Le blanchiment est le fait de «réintroduire dans les circuits financiers des fonds provenant d'actions ou de trafics délictueux afin d'en dissimuler leurs véritables origines».
La difficulté réside aujourd'hui dans le fait qu'il est très difficile d'identifier le caractère frauduleux du mouvement financier, d'autant plus que les moyens modernes de paiement rendent encore plus difficile la détermination de l'origine de ces mouvements.
Les circuits de recyclage de l'argent sale et du financement du terrorisme sont devenus complexes en raison de leur caractère transnational, de leurs ramifications multiples et croisées à travers les sociétés écrans, les paradis fiscaux et centres off-shore.
Le blanchiment de l'argent sale, le financement d'activités criminelles organisées et du terrorisme connaissent aujourd'hui une internationalisation croissante alors même que les réseaux de blanchiment étaient autrefois circonscrits à certaines régions de la planète.
Sur le plan national, c'est à l'initiative du gouvernement d'Alain Juppé que l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité, en mai 1996, le projet de loi créant un délit général de blanchiment du produit du crime en application de la convention du Conseil de l'Europe du 8 novembre 1990. Pour rendre plus efficace encore cette lutte, le Conseil de l'Europe a depuis adopté le projet de convention pénale sur la corruption afin d'harmoniser l'incrimination des délits et des crimes, jetant ainsi les bases d'un véritable espace judiciaire européen.
Cette lutte contre le blanchiment de l'argent et le financement du terrorisme doit avoir un caractère multidisciplinaire et passer par un renforcement de la coopération transfrontalière entre les Etats eux-mêmes et les institutions internationales.
Aujourd'hui, notre pays doit prendre une initiative afin que la libéralisation des marchés financiers ne mette en péril la stabilité financière. Un cadre de réglementation et de surveillance fiable doit être établi pour mieux garantir que la liberté des mouvements de capitaux ne soit pas utilisée à des fins de blanchiment de l'argent d'activités criminelles ou de financement du terrorisme. Il est nécessaire que les établissements financiers renforcent leur vigilance, que le secret bancaire soit remis en cause pour informer de tout soupçon de blanchiment de capitaux ou de financement d'activités criminelles et terroristes.
La France doit créer cet «Observatoire de la lutte contre le blanchiment de l'argent sale et du financement du terrorisme».
Cet organisme, qui par nature serait indépendant, devrait pouvoir être doté des moyens nécessaires pour veiller à l'application des conventions internationales, des recommandations du Groupe d'actions financières sur le blanchiment de l'argent sale...
La France a montré l'exemple en se dotant d'une législation particulièrement contraignante pour les organismes financiers au regard d'un dispositif anti-blanchiment.
Cependant, au regard des myriades de sociétés écrans à travers lesquelles transitent les flux financiers, venant de paradis fiscaux ou centres off-shore, et afin d'être précurseur dans la lutte contre le blanchiment de l'argent sale et du financement du terrorisme, la France doit se doter de cet observatoire. Il ne serait pas concevable qu'après l'effroyable bilan humain dont ont été victimes des milliers d'innocents dans les tours du World Trade Center les commanditaires de ces actes terroristes puissent tirer un profit financier de leurs actes terroristes par une anticipation des conséquences financières.
La surveillance des circuits financiers doit donc être resserrée sur la base des conventions adoptées par le Conseil de l'Europe et par l'organisation des Nations unies de lutte contre le financement du terrorisme.
La création d'un organisme français spécialisé sera un signe fort pour nos partenaires européens et les nations du monde. Il aura à terme une vocation internationale.
Tel est l'objet de cette proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

Il est créé un « Observatoire de la lutte contre le blanchiment de l'argent sale et le financement du terrorisme », chargé de veiller à l'application des conventions internationales sur le blanchiment de l'argent sale et la lutte contre le terrorisme. La composition et les modalités de fonctionnement de cet organisme sont déterminées par décret.

Article 2

L'aggravation des charges de l'Etat résultant de la présente proposition est compensée, à due concurrence, par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

N°3277-Proposition de loi de M.Hunault créant un Observatoire de lutte contre le blanchiment de l'argent sale et le financement du terrorisme.(commission des lois)


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