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le 26 octobre 1998

graphique

N° 1148

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 octobre 1998.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES(1) SUR LE PROJET DE LOI de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 1106)

TOME II

ASSURANCE MALADIE ET ACCIDENTS DU TRAVAIL

PAR M. Claude EVIN,

Député.

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Sécurité sociale.

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; MM. René Couanau, Jean-Michel Dubernard, Jean-Paul Durieux, Maxime Gremetz, vice-présidents ; Mme Odette Grzegrzulka, MM. Denis Jacquat, Noël Mamère, Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; MM. Yvon Abiven, Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux, MM. André Aschieri, Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Baeumler, Pierre-Christophe Baguet, Jean Bardet, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Mmes Huguette Bello, Yvette Benayoun-Nakache, MM. Patrick Bloche, Alain Bocquet, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Jean-Claude Boulard, Bruno Bourg-Broc, Mme Christine Boutin, MM. Jean-Paul Bret, Victor Brial, Yves Bur, Alain Calmat, Pierre Carassus, Pierre Cardo, Roland Carraz, Mmes Véronique Carrion-Bastok, Odette Casanova, MM. Jean-Charles Cavaillé, Bernard Charles, Jean-Marc Chavanne, Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Georges Colombier, François Cornut-Gentille, Mme Martine David, MM. Bernard Davoine, Lucien Degauchy, Marcel Dehoux, Jean Delobel, Jean-Jacques Denis, Mme Monique Denise, MM. Franck Dhersin, Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, MM. Guy Drut, Nicolas Dupont-Aignan, Yves Durand, René Dutin, Christian Estrosi, Claude Evin, Jean Falala, Jean-Pierre Foucher, Jean-Louis Fousseret, Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Yves Fromion, Germain Gengenwin, Mmes Catherine Génisson, Dominique Gillot, MM. Jean-Pierre Giran, Michel Giraud, Jean Glavany, Gaëtan Gorce, François Goulard, Jean-Claude Guibal, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M.  Francis Hammel, Mme Cécile Helle, MM. Pierre Hellier, Michel Herbillon, Guy Hermier, Mmes Françoise Imbert, Muguette Jacquaint, MM. Maurice Janetti, Serge Janquin, Armand Jung, Bertrand Kern, Christian Kert, Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, MM. Jacques Lafleur, Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lasbordes, Mme Jacqueline Lazard, MM. Maurice Leroy, Patrick Leroy, Maurice Ligot, Gérard Lindeperg, Patrick Malavieille, Mme Gilberte Marin-Moskovitz, MM. Didier Mathus, Jean-François Mattei, Mme Hélène Mignon, MM. Jean-Claude Mignon, Renaud Muselier, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Yves Nicolin, Bernard Outin, Dominique Paillé, Michel Pajon, Michel Péricard, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Bernard Perrut, Pierre Petit, Mme Catherine Picard, MM. Jean Pontier, Jean-Luc Préel, Alfred Recours, Gilles de Robien, François Rochebloine, Marcel Rogemont, Yves Rome, Jean Rouger, Rudy Salles, André Schneider, Patrick Sève, Michel Tamaya, Pascal Terrasse, Gérard Terrier, Mmes Marisol Touraine, Odette Trupin, MM. Anicet Turinay, Jean Ueberschlag, Jean Valleix, Emile Vernaudon, Philippe Vuilque, Jean-Jacques Weber, Mme Marie-Jo Zimmermann.

SOMMAIRE

________

Pages

PREMIÈRE PARTIE : LA BRANCHE ASSURANCE MALADIE 9

I.Ä LES DÉPENSES DE L’ASSURANCE MALADIE EN 1998 11

A. UN ASSOUPLISSEMENT LIMITÉ DES OBJECTIFS PAR RAPPORT À 1997 11

1. Des résultats pour 1997 globalement satisfaisants 11

2. Le recadrage des objectifs de l’ONDAM pour 1997 12

3. Les objectifs pour 1998 13

B. DES INTERROGATIONS FORTES QUANT À LA RÉALISATION DES OBJECTIFS POUR 1998 15

1. Les soins de ville : une progression très soutenue des dépenses depuis le début de l’année 1998 16

2. Les établissements de santé publics et assimilés : des perspectives encourageantes 21

3. Les établissements médico-sociaux : des dépenses plus importantes que prévues 22

4. Les cliniques privées : des résultats laissant craindre des tensions en fin d’année 22

II. Ä LA POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE : BILAN 1998 ET OBJECTIFS 1999 25

1. Renforcer la prévention et la promotion de la santé des enfants, des adolescents et des jeunes 25

2. Améliorer la prévention, le dépistage et la prise en charge des cancers 26

3. Diminuer les affections iatrogènes et les infections nosocomiales 26

4. Renforcer la lutte contre les maladies transmissibles 27

5. Mieux prendre en charge le diabète 28

6. Lutter contre la surconsommation médicamenteuse. 28

7. Renforcer la veille et la sécurité sanitaires 28

8. Développer les soins palliatifs et la lutte contre la douleur 29

III. Ä LA MÉDECINE DE VILLE PLACÉE AU PIED DU MUR 31

A. DES ÉVÉNEMENTS JURIDIQUES ET ÉCONOMIQUES MAJEURS 31

1. L’annulation par le Conseil d’Etat des conventions médicales 31

2. Une dérive des dépenses médicalement injustifiée 32

B. DES DÉCISIONS IMMÉDIATES DÉCISIVES POUR L’AVENIR DE LA MÉDECINE DE VILLE 32

1. L’adoption d’un règlement conventionnel minimal 32

2. Le lancement des négociations en vue de la conclusion de nouvelles conventions médicales 35

3. L’adoption de mesures d’urgence 35

4. La mission de concertation sur l’avenir de la médecine de ville 36

C. DES ORIENTATIONS NOUVELLES POUR RÉFORMER EN PROFONDEUR LA MÉDECINE DE VILLE 38

1. Un système davantage basé sur la coopération des professionnels de santé 38

2. La recherche d’une qualité toujours plus grande de soins 41

3. L’amélioration de la régulation de l’offre de soins 42

IV. Ä UNE POLITIQUE DU MÉDICAMENT RÉNOVÉE 47

A. UNE POLITIQUE COHÉRENTE 48

1. Le bon usage 49

2. L’amélioration des conditions d’accès à certains médicaments 50

3. La maîtrise de la dépense 50

B. UNE POLITIQUE PLUS ENGAGÉE DANS LA LOI DE FINANCEMENT 52

1. L’intérêt des médicaments génériques 52

2. La relance de la politique conventionnelle 53

3. L’encadrement de la dépense médicamenteuse 54

V. Ä L’HÔPITAL EN MOUVEMENT 57

A. LA RÉDUCTION DES INÉGALITÉS INTER ET INTRA RÉGIONALES 57

1. La péréquation entre régions 57

2. La réduction des inégalités entre établissements d’une même région 62

3. Un cas particulier : l’Assistance publique-hôpitaux de Paris 65

B. LA RECOMPOSITION DU TISSU HOSPITALIER 72

1. L’ajustement quantitatif : les réductions de capacité 72

2. La rationalisation de l’offre : la coopération inter-hospitalière 72

3. Les contrats d’objectifs et de moyens (COM) 80

4. Mise en place du fonds d’investissement pour la modernisation des hôpitaux (FIMHO) et du fonds d’accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux (FASMO) 83

5. Restructurations et coopérations hospitalières : l’exemple de la région Nord-Pas-de-Calais 84

C. LE CONTRÔLE DE L’ACTIVITÉ LIBÉRALE À L’HÔPITAL 91

DEUXIÈME PARTIE : LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL 93

I. Ä UNE BRANCHE CENTENAIRE 95

A. LA LOI DE 1898 SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL A MARQUÉ UNE TRES NETTE AVANCÉE SOCIALE 95

B. LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES ONT ETE INTÉGRÉS DANS LA SÉCURITÉ SOCIALE EN 1947 96

C. LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL A ACQUIS SON AUTONOMIE DE GESTION EN 1994 98

II. Ä UNE BRANCHE ÉQUILIBRÉE EN 1998 99

A. LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL CONSOLIDE SON ÉQUILIBRE FINANCIER 99

1. Les objectifs fixés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 ont été respectés 99

2. Une baisse des taux de cotisation peut être envisagée 100

B. LE DÉVELOPPEMENT D’UNE POLITIQUE DE PRÉVENTION AMBITIEUSE DOIT PERMETTRE D’AMÉLIORER LA SÉCURITÉ AU TRAVAIL 102

C. LES DROITS DES VICTIMES DOIVENT ÊTRE MIEUX PRIS EN COMPTE 103

1. Garantir aux victimes de meilleurs délais 103

2. Améliorer la prise en charge des maladies professionnelles 104

EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION 107

ANALYSE DES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI RELATIVES À L’ASSURANCE MALADIE ET AUX ACCIDENTS DU TRAVAIL 113

Section 2 - Branche maladie 113

Article 15 (articles L. 321-1, L. 322-3, L. 615-14, L. 615-18 du code de la sécurité sociale et article L. 55 nouveau du code de la santé publique) : Dépistage organisé des maladies aux conséquences mortelles évitables 113

Article 16 (articles L. 161-28-1 nouveau à L. 161-30 du code de la sécurité sociale) : Création d’un système national d’information interrégimes de l’assurance maladie et d’un conseil pour la transparence des statistiques de l’assurance maladie 118

Article 17 (article L. 162-5 du code de la sécurité sociale) : Extension du champ de la négociation conventionnelle avec les médecins 123

Article 18 (article L. 791-2 du code de la santé publique et article 8 de la loi n° 93-8 du 4 janvier 1993) : Élargissement des missions des unions de médecins exerçant à titre libéral 125

Article 19 (article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 et article L. 162-5 du code de la sécurité sociale) : Critères d’attribution de l’allocation de remplacement en cas de cessation d’activité des médecins et des aides à leur reconversion 127

Article 20 : Création d’un fonds d’aide à la qualité des soins de ville 130

Article 21 (articles L. 162-5, L. 162-5-2, L. 162-5-3 et L. 162-5-4 du code de la sécurité sociale) : Clause de sauvegarde applicable aux dépenses médicales 131

Article 22 : Dispositif transitoire relatif au respect de l’objectif des dépenses médicales pour 1998 138

Article 23 (articles L. 512-3 nouveau et L. 601-6 du code de la santé publique, L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle et L. 162-16 du code de la sécurité sociale) : Création d’un droit de substitution au profit du pharmacien 139

Article 24 (articles L. 612-16-1 et L. 612-17-4 du code de la sécurité sociale) : Contenu des conventions passées entre le comité économique du médicament et les entreprises pharmaceutiques 148

Article 25 (articles L. 138-10 à L. 138-19 du code de la sécurité sociale) : Institution d’une clause de sauvegarde applicable à la progression du chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique 151

Article 26 : Création d’une contribution perçue sur l’industrie pharmaceutique au titre de l’année 1998 161

Article 27 (articles 11-1, 27, 27-1 nouveau et 27 quinquies de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 et article L. 174-7 du code de la sécurité sociale) : Régulation des dépenses des établissements et services sociaux et médico-sociaux financées par l’assurance maladie 166

Article 28 (article L. 361-1 du code de la sécurité sociale) : Extension des catégories de bénéficiaires de l’assurance décès 169

Section 4 - Branche accidents du travail 172

Article 31 (articles L. 461-2 et L. 461-5 du code de la sécurité sociale) : Amélioration des conditions de prise en charge des maladies professionnelles 172

Section 6 - ONDAM 175

Article 33 : Fixation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie 175

AUDITIONS DE LA COMMISSION 181

AUDITION DES REPRÉSENTANTS DE LA CONFÉRENCE NATIONALE DE SANTÉ 181

AUDITION DES REPRÉSENTANTS DE L’AGENCE NATIONALE D’ACCRÉDITATION ET D’ÉVALUATION EN SANTÉ 190

AUDITION DU PRÉSIDENT DU CONSEIL D’ADMINISTRATION DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS 195

AUDITION DU PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION NATIONALE DE LA MUTUALITÉ FRANÇAISE 208

ANNEXE : PROTOCOLE D’ACCORD SIGNÉ ENTRE L’ETAT ET LES PHARMACIENS D’OFFICINE 212

PREMIÈRE PARTIE :

LA BRANCHE ASSURANCE MALADIE

L’année 1998 marquera sans doute un tournant dans l’histoire de notre système de soins. L’annulation, par le Conseil d’Etat, durant l’été, des arrêtés d’approbation des conventions médicales, a en effet remis en cause l’économie juridique des ordonnances du 24 avril 1996, “ fer de lance  ” de la maîtrise médicalisée des dépenses mise en place par le “ plan Juppé ”. D’autre part, le dérapage constaté les premiers mois de l’année sur certains postes de dépenses, qui devait conduire le Gouvernement à adopter des mesures d’économie d’urgence, a démontré l’inefficacité partielle des instruments choisis pour cette maîtrise.

Ces circonstances ont accéléré le processus de réforme de la politique d’assurance maladie, dont la ministre de l’emploi et de la solidarité a présenté les grandes lignes le 6 juillet 1998. S’appuyant sur un large travail de concertation, et notamment sur les travaux de la mission d’information sur l’avenir de la médecine de ville (“ mission Stasse ”), le “ plan Aubry ” fait le choix d’un système de soins plus juste, n’admettant ni augmentation de cotisations ni baisse de remboursements aux assurés, mieux coordonné entre ses différents acteurs et davantage orienté vers la prévention et la recherche de la qualité des soins, tout en laissant une grande marge de manoeuvre aux partenaires conventionnels.

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit une grande partie de ces orientations dans un volet santé d’une exceptionnelle importance puisque 16 articles sur un total de 36 lui sont consacrés.

Pour autant, tous les sujets intéressant le système de soins ou la santé publique en général n’y sont pas directement traités. C’est pourquoi le rapporteur a souhaité, après avoir précisé quelles suites ont été données au vote par le Parlement de l’objectif national d’évolution de dépenses d’assurance maladie, analyser les priorités de santé publique fixées pour 1998 et 1999 en examinant les actions menées en 1998, présenter la situation de la médecine de ville et du médicament, des réformes en cours ou de celles qui sont envisagées les concernant et dresser le bilan de la politique hospitalière, en examinant en particulier l’efficacité des outils de restructuration et de réduction des inégalités.

I.Ä LES DÉPENSES DE L’ASSURANCE-MALADIE EN 1998

En application de l’article L.O. 111.3 du code de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale fixe chaque année l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) pour l’ensemble des régimes obligatoires de base.

L’ONDAM comprend, pour la métropole et les DOM, les dépenses remboursées en matière de soins de santé (dépenses de soins ambulatoires et dépenses d’hospitalisation) pour les risques maladie, maternité, accidents du travail ainsi que les prestations en espèces pour les risques maladie et accidents du travail (pour le risque accidents du travail, seules sont retenues les dépenses liées à l’incapacité temporaire).

A. UN ASSOUPLISSEMENT LIMITÉ DES OBJECTIFS PAR RAPPORT À 1997

L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) a été porté de 600,2 milliards de francs pour 1997 à 613,8 milliards de francs pour 1998 par l’article 29 de la loi de financement de la sécurité sociale n° 97-1164 du 19 décembre 1997. Comme l’indiquait le rapport annexé à la loi, il s’agissait d’une augmentation certes limitée (2,27 %), mais sensiblement plus importante que celle prévue pour l’année précédente (1,7 %).

Pour en mesurer la signification, il convient de prendre en considération les résultats pour 1997 qui sont maintenant définitivement établis et les raisons qui ont conduit le Gouvernement à présenter des “ objectifs rebasés ”.

1. Des résultats pour 1997 globalement satisfaisants

Comme le montre le tableau ci-après, les résultats de 1997 ont été globalement conformes à l’objectif fixé par la loi de financement, puisque les dépenses entrant dans le champ de l’ONDAM se sont élevées à 599,5 milliards de francs, soit une progression de 1,5 % par rapport à 1996.

ONDAM
objectif et réalisations 1997

 

1996

1997

Evolution

 

Réalisations
(en milliards de francs)

Objectif
(en milliards de francs)

Réalisations
(en milliards de francs)

1997/1996
(en pourcentage)

· Objectif national hors marge de manœuvre

590,4

600,0

599,5

1,5

I . Métropole

577,3

586 ,8

585,9

1,5

I.1. Soins de ville

256,6

261,8

261,3

1,8

I.2. Versements aux établissements

320,7

325,0

324,6

1,2

I.2.1. Établissements sanitaires

243,0

242,8

243,5

0,2

I.2.1.1. Établissements sanitaires sous dotation globale

230,9

233,2

233,4

1,1

I.2.1.2. Autres établissements sanitaires

11,3

8,9

9,5

Ns

I.2.1.3. Honoraires du secteur public

0,7

0,7

0,6

Ns

I.2.2. Etablissements médico-sociaux

39,3

40,2

40,4

2,8

I.2.2.1. Enfance inadaptée, adultes handicapés

27,0

27,3

27,5

1,9

I.2.2.2. Personnes âgées

12,4

12,9

13,0

4,6

I.2.3. Cliniques privées

38,4

41,9

40,6

5,9

II. Ressortissants français à l’étranger

0,9

0,8

0,9

1,9

III. Prestations DOM

12,3

12,4

12,7

3,2

· Marge de manœuvre résiduelle

0,0

0,2

0,0

 

· Objectif national

590,4

600,2

599,5

1,5

(Sources : Direction de la sécurité sociale et Commission des comptes de la sécurité sociale)

Certains dépassements sectoriels n’apparaissent cependant pas dans ce tableau : ainsi, les dépenses dues aux médecins spécialistes au sein de l’enveloppe “ soins de ville ”, qui enregistre une économie de 500 millions de francs, ont été supérieures de 310 millions de francs à leur objectif prévisionnel.

2. Le recadrage des objectifs de l’ONDAM pour 1997

La décomposition de l’ONDAM pour 1997 sur lequel est fondé le calcul des objectifs pour 1998 a été modifiée pour tenir compte de divers effets de champ.

Il s’agit pour l’essentiel des conséquences de deux mesures :

· la suppression progressive, en application de l’ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée, du régime des prix de journée préfectoraux : les établissements concernés ont dû choisir entre le régime du conventionnement et celui de la dotation globale qui sont entrés respectivement en vigueur le 1er janvier 1997 et le 1er janvier 1998 ;

· l’imputation du remboursement depuis 1997 des médicaments anti-rétroviraux, non plus sur la dotation globale, mais sur l’enveloppe “ soins de ville ”, puisque ces médicaments sont désormais délivrés en officine.

S’y ajoutent différentes opérations de mise en conformité des données statistiques avec les exigences du dispositif de maîtrise des dépenses d’assurance maladie. Elles concernent notamment les données relatives aux médecins libéraux, aux centres d’action médico-sociaux précoces, à la comptabilisation des dépenses d’hormone de croissance.

3. Les objectifs pour 1998

L’ONDAM pour 1998 tel que voté par le Parlement a ensuite été décliné en quatre objectifs prévisionnels :

- soins de ville : 267,5 milliards de francs ;

- établissements de santé publics et assimilés : 248 milliards de francs ;

- établissements médico-sociaux : 41,5 milliards de francs ;

- cliniques privées : 41,3 milliards de francs.

Le tableau ci-après permet de comparer les objectifs pour 1998 aux objectifs (initiaux et “ rebasés ”) et aux résultats enregistrés pour 1997. On note qu’une priorité relative a été donnée au secteur médico-social, comme en 1997 d’ailleurs.

La décomposition de l’ONDAM par secteurs en 1997 et en 1998

 

1997
objectifs
initiaux (1)

1997
comptes (1)

1997
objectifs rebasés (1)

1998
objectifs (1)

1998 objectifs / 1997 objectifs rebasés(2)

1998 objectifs / 1997 comptes (2)

· Objectif national hors marge de manœuvre

600 021

599 479

599 386

612 914

2,26

2,2

I . Métropole

586 781

585 919

585 826

598 767

2,21

2,2

I.1. Soins de ville

261 800

261 320

261 800

267 500

2,18

2,4

I.1.1. Dépenses générées par les médecins libéraux

208 430

208 175

208 444

212 066

1,74

ns

I.1.2. Autres dépenses de ville

53 370

53 145

53 356

55 434

3,89

ns

I.2. Versements aux établissements

324 981

324 599

324 026

331 267

2,23

2,1

I.2.1. Établissements sanitaires

242 818

243 522

243 060

248 407

2,20

2,0

I.2.1.1. Établissements sanitaires sous dotation globale

233 240

233 401

233 240

238 371

2,20

2,1

I.2.1.2. Autres établissements sanitaires

8 855

9 514

9 096

9 296

2,20

- 2,3

I.2.1.3. Honoraires du secteur public

724

607

724

739

2,20

ns

I.2.2. Etablissements médico-sociaux

40 236

40 429

40 236

41 504

3,15

2,7

I.2.3. Cliniques privées

41 927

40 648

40 731

41 357

1,54

1,7

I.2.3.1. Cliniques privées sous OQN (objectif quantifié national) hors consommations intermédiaires

32 454

32 416

33 522

34 014

1,47

ns

I.2.3.2. Établissements à prix de journée préfectoral changeant de mode de tarification (3)

2 400

2 092

2 899

2 952

1,85

ns

I.2.3.3. Cliniques privées hors OQN (3)

7 073

6 140

4 310

4 390

1,85

ns

II. Ressortissants français à l’étranger

800

873

873

889

1,80

1,8

III. Prestations DOM

12 440

12 687

12 687

13 258

4,50

4,5

· Marge de manœuvre résiduelle

179

814

886

ns

· Objectif national

600 200

599 479

600 200

613 800

2,27

2,4

(1) En millions de francs

(1) En pourcentage

La répartition entre les objectifs des deux lignes 1.2.3.2. et I.2.3.3. est provisoire pour 1997 et 1998. Elle sera revue lorsque le montant rebasé définitif de l’objectif quantifié des anciens établissements à prix de journée préfectoraux sera connu.

B. DES INTERROGATIONS FORTES QUANT À LA RÉALISATION DES OBJECTIFS POUR 1998

Les résultats enregistrés au cours du premier semestre 1998 montrent un dérapage des dépenses maladie que la Commission des comptes de la sécurité sociale a évalué aux alentours de 6 milliards de francs par rapport aux objectifs de l’ONDAM.

Pour le seul régime général1 la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) estimait à la mi-octobre que, dans le champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, les prestations remboursées au titre de l’ensemble des risques en France métropolitaine s’élevaient pour les huit premiers mois de l’année à 324 899 millions de francs, soit une progression de 4,2 % par rapport à la même période de 1997 alors que l’objectif fixé s’établissait à + 2,5 % comme le détaille le tableau ci-dessous.

 

Objectif annuel (1)

Taux d’évolution de l’objectif

Réalisations tous risques
(en millions de francs)

Évolution tous risques PCAP (3)
(en %)

   

 

(en millions de francs)

annuel (2)
(en %)

01. ð 07.98

01. ð 08.98

01. ð 07.98

01. ð 08.98

Soins de ville

219 600

2,6

134 063

149 513

6,2

6,5

Établissements sanitaires publics

206 100

2,4

117 251

134 343

1,0 (4)

1,2 (4)

Établissements sanitaires privés

33 800

2,8

20 364

22 788

5,9

5,6

Établissements médico-sociaux

35 500

3,0

16 782

18 255

8,5 (5)

7,7 (5)

dont enfance inadaptée, adultes handicapés

25 800

1,8

16 782

18 255

8,5

7,7

Total objectif de dépenses d’assurance maladie

495 000

2,5

288 461

324 899

4,1

4,2

1. Part estimée du régime général dans l’ONDAM tous régimes.

2. Objectif 1998 rapporté aux réalisations de 1997.

3. Taux d’évolution des dépenses par rapport à la période comparable de l’année précédente.

4. Le taux d’évolution de la dotation globale est calculé en neutralisant l’évolution du poids du régime général par rapport aux autres régimes dans les versements de 1997 et 1998. Par contre, il ne tient pas compte de l’effet de la régularisation, opérée à ce titre fin 1997, de l’exercice 1996.

5. Dépenses médico-sociales hors établissements pour personnes âgées et action socio-médicale précoce.

(Source : CNAMTS)

La situation varie selon les secteurs mais, à l’exception des versements aux établissements sanitaires publics, pour l’essentiel sous dotation globale, tous les autres grands postes de dépenses ont connu une progression rapide qui fait peser de fortes incertitudes sur la réalisation des objectifs fixés pour l’année 1998.

Ainsi que le note la CNAMTS2, l’alourdissement des dépenses cumulées encore enregistré en août sur les soins de ville (+ 6,5 % fin août contre + 6,2 % fin juillet) et sur les établissements sanitaires publics (dont le taux de progression – 1,2 % fin août – reste cependant modéré) n’est pas entièrement compensé par la décélération constatée sur les versements aux établissements sanitaires privés et aux établissements médico-sociaux.

1. Les soins de ville : une progression très soutenue des dépenses depuis le début de l’année 1998

L’agrégat “ soins de ville ” est un poste important de l’ONDAM puisqu’avec un objectif de 267,5 milliards de francs, il en représente près de 44 %.

On rappellera que ce poste est divisé en deux rubriques :

- les dépenses médicales (objectif pour 1998 : 212,1 milliards de francs) qui couvrent les dépenses d’honoraires, de rémunérations et de frais accessoires des médecins généralistes et spécialistes (68,7 milliards de francs) et leurs prescriptions (143,4 milliards de francs) ;

- les autres dépenses (objectif pour 1998 : 55,4 milliards de francs), c’est-à-dire principalement les soins dentaires, les honoraires des sages-femmes et des médecins salariés des centres de santé, ainsi que les prestations réalisées en ville à l’initiative des prescripteurs non libéraux.

De janvier à juin 1998 inclus et par rapport à la même période pour 1997, les dépenses de soins de ville de la CNAMTS, de la MSA, de la CANAM, des régimes de la SNCF et des mines ainsi que de la Caisse militaire ont augmenté de 5,7 %3 alors que l’objectif fixé pour l’année entière s’établissait à 2,2 %.

· Médecins généralistes et médecins spécialistes

La dérive touche les médecins omnipraticiens, mais bien plus encore les spécialistes. Pour les premiers, un taux d’évolution de 1,8 % avait été prévu tant pour les honoraires que pour les prescriptions ; pour les seconds, le taux, qui devait être identique, était réduit d’une somme de 150 millions de francs au titre du dépassement enregistré en 1997 sur leurs honoraires (140 millions de francs) et sur leurs prescriptions (10 millions de francs). A la suite de l’annulation des conventions médicales pour 1998 par le Conseil d’Etat, ces objectifs de dépenses ont été repris par un arrêté du 10 juillet 1998.

Objectifs tous régimes pour 1998

(en millions de francs)

 

Dépenses remboursables

Taux de rembourse-ment

Dépenses remboursées

 

Objectif 1997 rebasé

Objectif 1998

 

Objectif 1998

Omnipraticiens

180 456

183 704

0,78047

143 375

Honoraires

36 729

37 391

0,76941

28 769

Prescriptions

143 727

146 313

0,78329

114 606

Spécialistes

81 204

82 517

0,83245

68 691

Honoraires

49 352

50 149

0,84272

42 262

Prescriptions

31 852

32 368

0,81653

26 429

Or, au premier semestre de cette année et par rapport au premier semestre 1997, pour les trois principaux régimes (CNAMTS, MSA et CANAM), les dépenses engendrées par les médecins généralistes et les médecins spécialistes ont augmenté respectivement de 2,6 % et de 6,4 %. Le mouvement s’est prolongé depuis, comme le montre le tableau ci-dessous qui retrace la situation à la fin du mois d’août 1998.

Dépenses médicales remboursables de janvier à fin août 1998

en France métropolitaine

 

Dépenses remboursables
cnamts, msa, canam

(en milliers de francs)

PCAP (1)

(en pourcentage)

Régime général
PCAP
(1)

(en pourcentage)

Omnipraticiens

     

Honoraires

23 441 705

3,7

4,1

Prescriptions

93 198 425

2,6

2,7

Total prestations

116 640 130

2,8

2,9

Spécialistes

     

Honoraires

32 544 810

4,3

4,5

Prescriptions

22 242 427

10,3

11,0

Total prestations

54 787 237

6,6

7,1

Ensemble

     

Honoraires

55 986 515

4,0

4,3

Prescriptions

115 440 851

4,0

4,2

Total prestations

171 427 366

4,0

4,3

(1) Taux d’évolution des dépenses par rapport à la période comparable de l’année précédente.

(Source : CNAMTS)

En dépenses remboursées, l’évolution est la suivante :

Dépenses médicales rembourées de janvier à fin août 1998

en France métropolitaine

 

Dépenses remboursées
cnamts, msa, canam

(en milliers de francs)

PCAP (1)

(en pourcentage)

Omnipraticiens

   

Honoraires

17 939 555

3,5

Prescriptions

72 535 340

2,4

Total prestations

90 474 895

2,6

Spécialistes

   

Honoraires

27 403 445

4,3

Prescriptions

18 240 299

10,8

Total prestations

45 643 744

6,8

Ensemble

   

Honoraires

45 343 000

4,0

Prescriptions

90 775 639

4,0

Total prestations

136 118 639

4,0

(1) Taux d’évolution des dépenses par rapport à la période comparable de l’année précédente.

(Source : CNAMTS)

Au sein de l’enveloppe des soins de ville, certains secteurs ont connu des évolutions significatives au cours de ce début d’année. On relèvera ainsi celles concernant diverses professions de santé autres que les médecins, les prestations de radiologie et le médicament.

· Les autres professionnels de santé libéraux

Le tableau ci-dessous montre les résultats cumulés de janvier à août 1998 pour les chirurgiens-dentistes libéraux et diverses professions prescrites en faisant apparaître les taux d’évolution par rapport à la période comparable de 1997.

dépenses remboursables et remboursées de janvier à fin août 1998
en France métropolitaine
Résultats par catégorie de professionnels

 

Montants remboursables CNAMTS, MSA, CANAM

Montants remboursés CNAMTS, MSA, CANAM

CNAMTS

 

Montants (en milliers de francs)

Evolution PCAP (en pourcentage) (1)

Montants (en milliers de francs)

Evolution PCAP (en pourcentage) (1)

Montants remboursables PCAP (en pourcentage) (1)

Montants remboursés PCAP (en pourcentage) (1)

Chirurgiens dentistes

           

Honoraires

12 689 991

4,1

9 200 289

4,0

4,3

4,2

Prescriptions

455 181

5,1

263 524

4,5

4,9

4,2

Total

13 145 172

4,1

9 463 813

4,0

4,3

4,2

Laboratoires

10 228 004

6,2

7 939 102

6,8

6,5

7,1

Infirmiers

9 172 734

3,1

8 402 952

3,4

3,6

3,9

Masseurs-Kinésithérapeutes

8 301 997

4,3

6 659 046

4,1

4,5

4,2

Orthophonistes

1 513 580

5,5

1 031 773

5,3

5,7

5,5

Orthoptistes

160 834

7,4

98 808

7,4

7,4

7,5

(1) Taux d’évolution des dépenses par rapport à la période comparable de l’année précédente.

(Source : CNAMTS)

Concernant les transports sanitaires (ambulances et véhicules sanitaires légers), l’annexe annuelle à la convention nationale avait fixé pour 1997 l’objectif prévisionnel d’évolution des dépenses à – 5,8 % (dépenses remboursables). En fait, sur l’ensemble des régimes, les dépenses ont seulement diminué de 1 %.

Au cours des huit premiers mois de 1998, il apparaît que, pour le seul régime général, les dépenses remboursées (4,9 milliards de francs, tous risques) ont augmenté de 8,5 % par rapport à la même période de 1997.

· Les prestations de radiologie

Après une période de stabilité de janvier 1996 à février 1997, les dépenses de radiologie ont augmenté ensuite brusquement, alors même qu’une réforme intervenue au début de l’année 1997 (rémunération au forfait des clichés qui étaient désormais intégrés dans le coefficient de l’acte de radiographie) était censée procurer une économie de 200 millions de francs tous régimes et tous risques.

Cette forte évolution a persisté depuis lors : les dépenses remboursées par la CNAMTS, la MSA et la CANAM de janvier à août 1998 inclus au titre de la spécialité “ radiodiagnostic et imagerie médicale ” s’élèvent à 7 704 millions de francs (+ 8,2 % par rapport à la période comparable de l’année 1997) se décomposant en 6 913 millions de francs pour les honoraires (+ 8,7 %) et 791 millions pour les prescriptions (+ 4,1 %).

· Le médicament

En 1997, les dépenses pharmaceutiques (officine et rétrocession) remboursées par la sécurité sociale tous régimes confondus se sont élevées à 78,5 milliards de francs (108 milliards en dépenses remboursables). Au cours de la même année, elles ont représenté près de 30 % des dépenses de soins de ville et près de 44 % des dépenses correspondant à des prescriptions de ville.

Pour les huit premiers mois de l’année 1998, le régime général comptabilise sur ce poste 45 milliards de francs (en dépenses remboursées pour la métropole). La tendance à la hausse n’est certes pas nouvelle. De 1986 à 1997, le taux de croissance annuel moyen s’est établi à 6 % par an en dépense remboursée (6,6 % par an en dépense remboursable) ; pour la période récente, on relève + 8 % en 1995 ; + 4,5 % en 1996 et + 5,5 % en 1997. Mais les résultats du début de cette année font montre d’une dérive préoccupante comme en témoigne le tableau ci-après.

(en pourcentage)

Médicament – régime général – risque maladie

Evolution 1997

Evolution brute 1er semestre 1998

Evolution corrigée des jours ouvrés 1er semestre 1998

Médicament remboursé à 35 %

– 0,9

+ 2,5

+ 3,4

Médicament remboursé à 65 %

+ 3,9

+ 6,4

+ 7,4

Médicament remboursé à 100 %

+ 8,5

+ 11,8

+ 12,8

Total des remboursements de médicament

+ 5,5

+ 8,5

+ 9,4

(Source : Commission des comptes de la sécurité sociale)

L’évolution concernant les remboursements à 100 % intégre les conséquences de la vente en officine des antirétroviraux qui ne s’est développée qu’à partir de la fin de l’année 1997.

*

* *

La forte progression des dépenses de soins de ville enregistrée au cours du premier semestre 1998 a conduit le Gouvernement à présenter le 29 juillet dernier un plan d’action devant permettre des économies totales de 2,7 milliards de francs selon les estimations fournies par le ministère de l’emploi et de la solidarité.

2. Les établissements de santé publics et assimilés : des perspectives encourageantes

Cette catégorie est essentiellement constituée des établissements sous dotation globale (établissements publics et participant au service public hospitalier) dont l’objectif pour 1998 est fixé à 238,4 milliards de francs. Il s’agit donc d’un poste particulièrement important au sein de l’ONDAM dont il représente près de 40 %.

Les autres établissements sanitaires publics sont pour la plupart des établissements à prix de journée préfectoral dont on a vu qu’ils sont en voie de reclassement entre le régime des établissements privés conventionnés et celui de la dotation globale (objectif pour 1998 : 9 296 millions de francs).

L’objectif des versements de dotation globale pour 1998, en augmentation de 2,2 % par rapport à celui pour 1997, devrait être ramené à 2,14 % compte tenu du léger dépassement (160 millions de francs) constaté cette dernière année.

Selon les estimations de la Commission des comptes de la sécurité sociale, les mesures générales de revalorisation des rémunérations dans la fonction publique décidées à la suite de l’accord conclu le 10 février 1998 conduiront à un dépassement de l’ordre de 500 millions de francs de la provision initialement prévue au titre de la loi de financement pour 1998. Néanmoins, la Commission estime que, sous réserve que les différents effets de champ affectant ce secteur aient été bien évalués, aucune tension ne devrait se manifester sur ce poste.

3. Les établissements médico-sociaux : des dépenses plus importantes que prévues

L’objectif fixé pour 1998 dans ce secteur (41,5 milliards de francs) correspond à une augmentation de 3,15 % par rapport à l’objectif pour 1997 : cette augmentation est destinée à permettre notamment le développement des sections de cure médicale et des services de soins infirmiers à domicile en faveur des personnes âgées.

Concernant l’enfance inadaptée et les adultes handicapés, les dépenses remboursées par le régime général telles qu’annoncées pour les sept premiers mois de l’année s’élevaient à 16 782 millions de francs pour un objectif 1998 de 25 800 millions de francs, ce qui représentait une progression de 8,5 % par rapport à la même période de l’année précédente.

Compte tenu des résultats du mois d’août, les dépenses cumulées atteignent 18 255 millions de francs, ce qui ramène le taux d’augmentation par rapport aux huit premiers mois de l’année précédente à 7,7 %4.

Concernant l’action médico-sociale précoce et les personnes âgées (objectifs annuels du régime général respectivement fixés à 320 et 9380 millions de francs), les résultats ne devraient être connus qu’à la fin de l’année.

4. Les cliniques privées : des résultats laissant craindre des tensions en fin d’année

Différents rebasages techniques ont été prévus dans ce secteur pour lequel l’objectif global avait été fixé à 41 357 millions de francs pour 1998.

Pour l’objectif concernant les cliniques privées entrant dans le champ de l’ONDAM (c’est-à-dire hors DOM5 et hors consommations intermédiaires), on relève pour le premier semestre 1998 une augmentation globale de 4,4 % des dépenses supportées par la CNAMTS, la MSA, la CANAM, ainsi que les régimes des mines et de la SNCF par rapport à la même période de 1997. Cette progression est à comparer à l’objectif de 1,7 % fixé pour l’année 1998.

Pour le seul régime général, on remarque que le taux de progression sur les huit premiers mois de l’année par rapport à la même période de l’année précédente atteint 5,6 % – contre 5,9 % fin juillet – marquant une certaine décélération, mais restant néanmoins supérieur à l’objectif de 2,8 % pour l’ensemble de l’année.

Quant à la situation des cliniques privées au regard de l’accord du 31 mars 1998 fixant leur OQN pour cette année (38,7 milliards de francs), selon la Commission des comptes de la sécurité sociale, les réalisations du premier trimestre 1998, disponibles pour le seul régime général, sont en augmentation de 6,7 % par rapport au premier trimestre 1997. Toutefois, il semblerait que pour le premier semestre on parvienne finalement à un taux nettement plus bas (de l’ordre de + 4,5%) bien que conduisant encore en fin d’année à des réalisations dépassant l’objectif.

*

* *

Ainsi que le montrent les éléments détaillés ci-dessus, si la tendance au dérapage des dépenses d’assurance maladie est évidente, le suivi précis de ces dépenses demeure encore peu aisé.

Divers effets de champ sont liés au changement de statut de certaines dépenses. Mais au-delà de cet aspect ponctuel, il reste difficile de passer de l’objectif tous régimes qu’est l’ONDAM à la part de chaque régime dans ledit objectif. S’il est vrai que le régime général y tient une place majeure, comme le souligne la Commission des comptes de la sécurité sociale, cette part n’est guère stable et n’est pas la même pour chaque composante de l’ONDAM. Or, toujours selon la Commission des comptes de la sécurité sociale, un point d’ONDAM représente environ 600 millions de francs. Et les mêmes problèmes se retrouvent au niveau du suivi des dépenses en raison notamment des systèmes d’information propres à chaque régime. On relève néanmoins un progrès depuis que la CNAMTS publie, le 15 du mois N + 2, un suivi des dépenses du régime général entrant dans le champ de l’ONDAM et présente sous forme agrégée les dépenses pour le régime général, la MSA et la CANAM, engendrées par les médecins libéraux.

On notera enfin, à l’instar de la Commission des comptes de la sécurité sociale, que si les informations disponibles sont parfois très détaillées, “ ni la statistique mensuelle de la CNAMTS, ni la nomenclature utilisée par la Commission ne permettent une lecture directe des objectifs prévisionnels qui sont pourtant au cœur de la politique de maîtrise et pour le plus important d’entre eux – l’objectif de dépenses médicales – au cœur du projet de loi de financement. Pour retrouver une présentation proche de la loi de financement, un travail de recomposition ainsi que le recours à d’autres statistiques permettant notamment de décrire les dépenses d’assurance maladie par catégorie de professionnels de santé et par secteur de soins, sont alors nécessaires. Les autres postes de l’ONDAM n’échappent pas non plus, dès lors qu’on les compare à la nomenclature de la Commission des comptes, à divers reclassements. C’est le cas pour les cliniques privées ou pour le secteur médico-social dont le découpage diffère selon que l’on envisage la nomenclature du compte de la CNAMTS, la statistique mensuelle ou l’ONDAM. Une nouvelle présentation des dépenses de prestations dans le compte de la CNAMTS de la Commission des comptes de la sécurité sociale permettrait d’assurer une meilleure continuité entre les données de la loi de financement et celles de la Commission. ”

II. LA POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE : BILAN 1998 ET OBJECTIFS 1999

En 1998, la loi de financement de la sécurité sociale avait fixé dans son rapport annexé une série de priorités de santé publique, dont une grande partie s’inspirait des conclusions des conférences nationales de santé de 1996 et de 1997. Le projet de loi de financement pour 1999 et plus largement la politique de santé publique pour cette année ne s’écarte pas du chemin tracé depuis deux ans déjà. Si ce n’est quelques nouvelles priorités tenant compte de la conférence nationale de santé 1998 (lutte contre le diabète et les accidents iatrogènes), la politique de santé publique s’inscrit délibérément dans la continuité. Bien entendu, la majorité des objectifs fixés ne pourra être atteinte qu’à moyen ou long terme.

Huit objectifs peuvent être déclinés pour 1998 et 1999.

1- Renforcer la prévention et la promotion de la santé des enfants, des adolescents et des jeunes

Diverses actions ont été ou vont être engagées :

·  En matière de périnatalité.

En 1998, dans le cadre du plan périnatalité annoncé en avril 1994, l’organisation des maternités en réseau a été renforcée. La surveillance prénatale et le suivi postnatal ont été améliorés. Surtout le programme de formation à la réanimation du nouveau-né dans toutes les maternités sera achevé en décembre prochain. Toutefois, l’évaluation de l’efficacité de cette formation reste à faire. Une enquête nationale périnatale dans l’ensemble des maternités publiques et privées se déroulera du 30 novembre au 6 décembre 1998.

·  En matière de promotion de l’éducation sanitaire et de la médecine scolaire.

Le plan de relance pour la santé scolaire annoncé en mars 1998 prévoit principalement l’introduction de 20 heures par an d’éducation pour la santé tout au long de la scolarité et une mise en liaison des services de protection maternelle et infantile(PMI) et des services de promotion de la santé en faveur des élèves (arrêté du 18 août 1997). La fiche de liaison PMI - Santé scolaire doit être généralisée afin de permettre un meilleur suivi de la santé des élèves.

·  La lutte contre le suicide, notamment chez les jeunes.

En collaboration avec de nombreuses régions, un programme national de lutte contre le suicide a été défini par le secrétaire d’Etat à la santé. Une approche globale sur le plan de la prévention et de la prise en charge a été décidée en 1998. L’agence nationale d’accréditation et d’évaluation de la santé (l’ANAES) apportera son soutien à la réflexion sur ce thème. Des recommandations seront émises d’ici deux ans. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 fait de la lutte contre le suicide une de ses priorités dans le rapport annexé.

·  Développer l’information concernant la contraception et la prévention des grossesses non désirées des adolescentes (lancement d’une campagne d’information en 1999). C’est l’un des objectifs du rapport annexé du projet de loi de financement pour 1999. Une réflexion est en cours sur le fonctionnement de centres d’interruption volontaire de grossesses (CIVG).

·  Prévention du saturnisme infantile.

La loi contre les exclusions du 29 juillet 1998 rend obligatoire la déclaration à l’autorité sanitaire de tout cas de saturnisme. Un dispositif de financement des travaux de rénovation a été mis en place. Le rapport annexé pour 1999 réaffirme cette priorité.

2- Améliorer la prévention, le dépistage et la prise en charge des cancers

Priorité de la conférence nationale de santé 1997, cet objectif implique dès 1998 la mise en place de programme nationaux de dépistage (cancer du sein et du col de l’utérus) et une réforme de l’organisation des soins (réseau, pluridisciplinarité des traitements) suite à la circulaire ministérielle du 24 mars 1998. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (article 15) prévoit la prise en charge à 100 % des actes de dépistage. Le dépistage sera étendu au cancer du colon.

3- Diminuer les affections iatrogènes6 et les infections nosocomiales7

·  Les infections nosocomiales

Il a été décidé un plan sur trois ans pour lutter contre les infections nosocomiales. 60 millions de francs en 1998 ont été dégagés pour créer des postes en hygiène hospitalière dans les hôpitaux. Le 20 avril 1998, une circulaire a été adressée sur la prévention de la transmission des agents infectieux véhiculés par le sang ou les autres liquides biologiques. La conférence nationale de santé 1998 suggère d’affiner la recherche en matière d’infections virales et de résistance bactérienne.

· Les accidents iatrogènes

En 1998, la lutte contre les accidents iatrogènes prévoyait une meilleure transmission des données entre les unions régionales des caisses d’assurance maladie (URCAM) et les unions régionales de médecins libéraux (URML), ainsi qu’une meilleure évaluation collective des pratiques (art. L.181-1 du code de la sécurité sociale). Dans cette optique les médecins transmettent leurs données aux URML et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 prévoit que les médecins peuvent s’engager dans une démarche d’évaluation de leurs pratiques professionnelles. La conférence nationale de santé en 1998 s’est principalement centrée sur la iatrogénie médicamenteuse en en faisant une de ses priorités. Trois directions sont indiquées : mieux former les professionnels de santé, améliorer les procédures d’accréditations ou de recommandations en collaboration avec l’ANAES , mieux informer le grand public par rapport à l’auto-médication. L’objectif est de réduire les risques d’un tiers en cinq ans. L’ensemble des travaux de l’ANAES, de l’URML, de l’INSERM serviront de support à l’élaboration par la direction générale de la santé d’un plan de prévention de la iatrogénie en 1999.

Désormais l’ANAES tiendra compte de la prévention des affections iatrogènes et des infections nosocomiales dans son travail d’accréditation et d’évaluation des établissements.

4- Renforcer la lutte contre les maladies transmissibles

On estime qu’un tiers seulement des 600 000 personnes infectées par l’hépatite C connaît son statut sérologique. Le rapport annexé de 1998 annonçait une politique puissante de dépistage et de prise en charge de l’hépatite C. Le rapport annexé au projet de loi de financement pour 1999 réaffirme cette volonté par la mise en place de pôles de référence et la création d’un dossier médical unique pour les patients atteints de l’hépatite C. De nouveaux moyens seront dégagés et l’assurance maladie prendra une plus grande partie des soins en charge. L’effort portera en particulier vers les personnes les plus défavorisées.

La lutte contre le VIH reste une priorité. Malgré les progrès thérapeutiques considérables, la prévention et le dépistage doivent être poursuivis (6 000 personnes contaminées par an). Le SIDA est toujours inscrit comme priorité dans les rapports annexés 1998 et 1999. De nouvelles recommandations en matière thérapeutique vont être proposées.

5- Mieux prendre en charge le diabète

La conférence nationale de santé 1998 a retenu le diabète comme étant l’une de ses trois priorités (particulièrement le diabète non insulino-dépendant). C’est un des nouveaux objectifs de 1999. La conférence nationale de santé 1998 propose de systématiser le dépistage pour les personnes les plus exposées et de mieux prendre en charge le diabétique. Pour 1999, l’ANAES doit mettre au point des recommandations de bonnes pratiques et réfléchir aux propositions de la conférence nationale de santé.

6- Lutter contre la surconsommation médicamenteuse.

C’est un des nouveaux objectifs du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Le Gouvernement espère réduire de 10 % d’ici la fin 1999 les consommations d’antidépresseurs et d’antibiotiques. L’Agence du médicament diffusera des recommandations de bonne pratique. Des réformes de structures sont engagées, notamment au travers du développement des génériques et d’un remboursement concentré sur les médicaments dont l’efficacité médicale est avérée

7- Renforcer la veille et la sécurité sanitaires

La loi du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire parachève le dispositif mis en place dès 1992. Quatre nouvelles structures ont été créées : l’Institut de veille sanitaire (l’IVS), l’agence française de sécurité sanitaire des aliments (l’AFSSA), l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (l’AFSSAPS) et le Comité national de la sécurité sanitaire. Ce comité a notamment pour mission de coordonner la politique scientifique de l’IVS et des agences.

Les capacités d’expertise, de contrôle et de coordination des vigilances seront renforcées. Le rapport annexé de 1999 réaffirme ce souci de la veille sanitaire.

8- Développer les soins palliatifs et la lutte contre la douleur

Déjà vigoureusement soutenue en 1998, cette politique est l’un des objectifs majeurs pour 1999 (rapport annexé 1999).

Le secrétaire d’Etat à la santé, M. Bernard Kouchner, a annoncé le 5 octobre 1998 un plan sur trois ans. Il consiste en une meilleure information du patient, un renforcement de la formation du personnel et des étudiants en médecine, la suppression du carnet à souche8 à compter du 1er janvier 1999 et le droit des infirmiers à prescrire des antalgiques. Le carnet à souche sera remplacé par des ordonnances sécurisées pour prescrire les médicaments classés comme stupéfiants. Un bilan de la loi hospitalière du 31 juillet 1991 obligeant les établissements de santé à prendre en charge la douleur sera établi avant la fin de 1998. Une circulaire précisera avant la fin de 1998 comment élaborer de nouveaux protocoles de soins afin de soulager la douleur. A moyen terme la prise en charge de la douleur sera prise en compte pour l’évaluation des établissements. Une grande campagne d’information débutera début 1999.

En matière de soins palliatifs et d’accompagnement de la fin de la vie, le nombre d’unités de soins palliatifs sera accru, notamment dans les régions qui en sont dépourvues. L’accent sera mis sur la prise en charge à domicile et le fonctionnement des équipes mobiles sera modifié.

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Au travers de tous ces objectifs, des logiques apparaissent. L’axe fort de la politique de santé publique est la prévention. Ainsi le Fonds national de prévention voit ses moyens renforcés ainsi que tous les postes budgétaires concernant la prévention, le dépistage et l’étude des situations sanitaires. L’autre axe fort est le développement de la politique de santé publique au niveau régional ou local, en particulier au travers d’une mise en réseau des soins. La politique de santé est déterminée de plus en plus en fonction des besoins de santé et non de l’offre.

Enfin on peut regretter que l’évaluation de l’efficacité des mesures prises soit insuffisante. Toutefois certaines de ces mesures visent précisément à une meilleure évaluation dans le futur et ces insuffisances tiennent pour une part au fait que les objectifs fixés sont des objectifs à moyen ou long terme.

III.- LA MÉDECINE DE VILLE PLACÉE AU PIED DU MUR

L’année 1998 marquera sans doute un tournant dans l’histoire de la médecine de ville confrontée à plusieurs événements ou évolutions venant remettre en cause, en profondeur, le régime conventionnel des médecins et plusieurs des outils de la maîtrise des dépenses de santé mis en place par les ordonnances du 24 avril 1996, dans le cadre du “ plan Juppé ”. Il en a résulté plusieurs décisions, conjoncturelles ou structurelles, visant à redonner de nouvelles orientations à la modernisation et à la régulation du système des soins de ville.

A– DES ÉVÉNEMENTS JURIDIQUES ET ÉCONOMIQUES MAJEURS

1. L’annulation par le Conseil d’Etat des conventions médicales

Le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, a annulé dans ses décisions du 26 juin 1998 et du 3 juillet 1998 les arrêtés d’approbation de la convention médicale avec les médecins spécialistes et de la convention médicale avec les médecins généralistes. Si la première de ces annulations repose sur un problème de représentativité du syndicat signataire de la convention à la date de signature de celle-ci, la seconde comporte de plus larges conséquences dans la mesure où ont été censurées plusieurs dispositions prises en application des ordonnances d’avril 1996, remettant en cause l’économie du “ plan Juppé ”. Le Conseil d’Etat a en effet jugé illégales, notamment, les dispositions relatives :

· au volet médical de la carte Vitale, dont les modalités de mise en œuvre ne seraient être renvoyées à un décret sans que soient apportées, par le législateur, les garanties nécessaires à la protection des droits individuels ;

· aux conditions de délivrance de la carte de professionnel de santé (CPS), les partenaires conventionnels ayant excédé leur compétence en faisant obligation aux médecins conventionnés d’acquérir cette carte auprès d’un groupement d’intérêt public ;

· à “ l’option conventionnelle ” dite du médecin référent, qui met en place une filière de soins sans que soit respectée la procédure d’avis et d’agrément réservée par l’ordonnance n° 96-345 aux expériences de mise en place de telles filières à titre expérimental ;

· aux modalités de détermination du reversement exigible des médecins en cas de non-respect de l’objectif prévisionnel national d’évolution des dépenses médicales, en ce que les modalités d’individualisation par zone géographique de ce reversement ne respectent pas le principe d’égalité.

2. Une dérive des dépenses médicalement injustifiée

Sur les quatre premiers mois de l’année9, les dépenses de soins de ville ont augmenté, pour le seul régime général, de 6,2 % alors que l’objectif fixé pour 1998 s’élève à 2,2 %. Plusieurs postes sont à l’origine de ce dépassement comme le montrent plusieurs constats :

· Les dépenses des spécialistes (6 ,9 %) ont augmenté, sur cette période, beaucoup plus fortement que celle des généralistes (2,3 %).

· Les honoraires des spécialistes ont augmenté de 4,8 % tandis que leurs prescriptions ont connu une évolution de 10 %. Les évolutions par spécialité sont diverses : ainsi, les actes de radiologie ont augmenté de 9,4 % alors que les actes de chirurgie ont progressé de 1,9 % seulement.

· Les honoraires des généralistes ont augmenté quant à eux de 2,4 % et leurs prescriptions de 2,3 %. Toutefois cette augmentation n’intègre que faiblement la hausse du tarif de la consultation du généraliste intervenue en avril dernier (augmentation de 110 à 115 F).

· Les dépenses des dentistes ont augmenté de 5,9 %, ce qui a justifié la mesure prise par le Gouvernement de reporter la hausse tarifaire initialement prévue pour le 1er juillet.

· Les dépenses des orthophonistes (7,2 %) ont fortement progressé, comme celles des biologistes (5,3 %) et des masseurs-kinésithérapeutes (4,1 %).

· L’augmentation des dépenses de médicaments est, quant à elle, très vive à 8,9 %. Hors effet de champ des médicaments anti-rétroviraux, la hausse demeure élevée à 7,2 %.

B. DES DÉCISIONS IMMÉDIATES DÉCISIVES POUR L’AVENIR DE LA MÉDECINE DE VILLE

1. L’adoption d’un règlement conventionnel minimal

Conformément à l’article L. 162-5-9 du code de la sécurité sociale, un règlement conventionnel minimal (RCM), destiné à pallier l’absence de convention médicale, a été pris par arrêté interministériel du 10 juillet 1998 et publié au Journal officiel du 12 juillet 1998.

Ce document permet d’assurer la continuité des relations entre les organismes de prise en charge et les médecins libéraux (tarifs des lettres-clés, maîtrise des dépenses…) et donne une base réglementaire au remboursement par l’assurance maladie des actes effectués par ces professionnels. Tous les praticiens précédemment conventionnés ont été considérés comme adhérents de plein droit au règlement, sauf décision contraire de leur part. Le RCM est donc un dispositif transitoire, dont la durée a été fixée à quatre mois à partir de sa date de publication au Journal officiel, qui cesse d’être applicable à la date d’entrée en vigueur de la ou des conventions médicales. Il convient d’analyser plus en détail son contenu en distinguant les éléments qu’il a repris du système conventionnel précédant et des modifications qu’il y a apportées.

S’agissant de dispositions minimales permettant d’assurer les relations entre les caisses et les médecins, le règlement conventionnel reprend les principales modalités des conventions précédentes :

· Concernant la maîtrise des dépenses, certains éléments du dispositif de maîtrise médicalisée sont reconduits, tels que

– les objectifs d’évolution des dépenses médicales pour l’année 1998 en ce qui concerne les médecins généralistes d’une part et les médecins spécialistes d’autre part (annexe 4 du RCM) ; ils ne font cependant pas l’objet d’une déclinaison au niveau des régions administratives ;

Le RCM ne reprend pas, en revanche, les modalités de calcul d’un éventuel reversement et se borne à faire référence à un “ dispositif de sauvegarde ” à venir (art. 8).

– l’intégralité des références médicales rendues opposables (RMO) avant l’entrée en vigueur du RCM, à l’exception toutefois de celle relative aux frottis cervicaux qui est supprimée, les critères d’opposabilité de ces références demeurant inchangés mais la compétence des comités médicaux paritaires locaux se limitant à l’instruction des dossiers concernant le respect des références.

· Concernant les conditions d’exercice :

– le secteur II et le dépassement à exigences particulières (DEP) sont maintenus pour tous les praticiens qui en bénéficiaient à la date d’entrée en vigueur du RCM. De même, l’octroi du secteur II pour les nouveaux installés reste subordonné aux mêmes conditions que celles définies antérieurement. S’agissant toutefois des titres acquis au sein de l’Union européenne et dans les établissements privés participant au service public hospitalier, leur équivalence est appréciée par la caisse primaire après avis de la CNAMTS ;

– la participation des caisses d’assurance maladie au financement des avantages sociaux des médecins du secteur I (ainsi que pour les remplaçants ayant opté pour le régime des praticiens et auxiliaires médicaux) est maintenue aux taux applicables avant l’entrée en vigueur du RCM ;

– les protocoles locaux de dispense d’avance des frais conclu à la date d’entrée en vigueur du RCM demeurent applicables ;

– les sanctions applicables en cas de non-respect des dispositions du RCM (à l’exception des références médicales opposables) sont définies à l’article 18. Ce texte ne prévoit pas cependant la suspension du droit de pratiquer des honoraires différents.

Le RCM comporte par ailleurs plusieurs modifications d’importance apportées au système conventionnel précédent :

· S’agissant du suivi de la maîtrise des dépenses :

– ainsi qu’indiqué précédemment, le règlement ne prévoit pas de mécanisme de reversement dans l’attente du dispositif de sauvegarde proposé à l’article 21 du présent projet de loi ;

– le dispositif du médecin référent est suspendu, le Conseil d’Etat l’ayant déclaré illégal ;

– le RCM instaure une catégorie spécifique de réseaux de soins qui seront agréés par l’Etat. Les modalités de mise en place de ces réseaux de soins seront précisées par voie d’arrêté (articles 4 et 5).

· Concernant l’information des professionnels :

Les articles 1, 2 et 3 du règlement conventionnel minimal précisent les modalités d’information des médecins et élargissent le champ des professionnels ou organisations destinataires d’informations statistiques régulières, tant au plan national que local. Par ailleurs, le RCM confirme que la périodicité du relevé individuel d’activité et de prescription, envoyé à chaque professionnel, est fixée au trimestre.

· S’agissant de la participation des caisses au financement de la formation continue conventionnelle :

Si le texte est muet sur les dispositifs à mettre en place et les conditions de leur gestion, il permet, en revanche, aux caisses d’indemniser des actions de formation continue sans autres précisions. Ainsi rédigé, le RCM n’apporte donc aucune solution aux difficultés antérieurement rencontrées pour la mise en place de la formation continue conventionnelle.

Dans l’ensemble, on peut considérer ce règlement minimal satisfaisant. Cependant, il serait souhaitable de mettre en place des règles pérennes pour les RCM à venir qui ne limitent pas ces textes à de simples dispositifs de secours mais qui, en indiquant clairement l’ensemble des règles applicables en l’absence d’accord, incitent les partenaires à la négociation par des dispositions adéquates.

2. Le lancement des négociations en vue de la conclusion de nouvelles conventions médicales

Faisant suite à l’annulation de l’arrêté d’approbation de la convention des médecins spécialistes par le Conseil d’Etat pour non-représentativité du syndicat signataire, une enquête de représentativité a été lancée auprès des médecins spécialisés au début du mois de juillet 1998. Elle a abouti, le 11 septembre, à la reconnaissance de quatre syndicats médicaux. Les négociations conventionnelles entre l’ensemble de la profession et les caisses nationales d’assurance maladie ont ainsi pu débuter le 23 septembre dernier.

3. L’adoption de mesures d’urgence

Des mesures d’urgence, visant à enrayer le dérapage des dépenses médicales constaté sur les quatre premiers mois de l’année, ont été adoptées par le Gouvernement et présentées par la ministre de l’emploi et de la solidarité le 6 juillet 1998 dans le cadre des nouvelles orientations de la politique d’assurance maladie, plus couramment appelées “ plan Aubry ”.

Le tarif des actes de radiologie (Z1) a ainsi été temporairement abaissé de 13,5 %, ce qui devrait générer une économie de 450 millions de francs d’ici la fin de l’année. Les revalorisations de forfait de sécurité des biologistes et de la nomenclature des dentistes ont été reportées, ce qui devrait permettre de réaliser des économies respectives de 75 et 190 millions de francs. Il en est de même des revalorisations tarifaires des masseurs-kinésithérapeutes et des orthophonistes prévues par accord conventionnel du 15 juin, qui ont été reportées au 1er novembre, dégageant des économies de 93 et 19 millions de francs.

Par ailleurs, une série de décisions a été prise concernant les médicaments permettant de dégager 1800 millions d’économies : application des engagements sur les prix et les volumes contenus dans les accords conclus entre le comité économique du médicament et certains laboratoires pharmaceutiques (450 millions d’économies), baisse de prix ou ristourne de classes de médicaments à service rendu faible (250 millions d’économies), ristourne sur les antibiotiques et antidépresseurs (1 milliard d’économies) et 100 millions de mesures diverses autres. Enfin, une baisse de 2 à 8 % a été appliquée à différentes prothèses, réalisant une économie de 73 millions de francs.

Au total, ce plan devrait permettre de réaliser, d’ici la fin de l’année, 2,7 milliards d’économies.

4. La mission de concertation sur l’avenir de la médecine de ville

Pour réfléchir tant sur les modes de régulation des dépenses médicales que sur la modernisation et la coordination du système de soins, une mission de concertation avait été lancée en février 1998 avec les organisations représentatives des médecins et autres professions de santé et les représentants des caisses d’assurance maladie, sous l’égide de M. François Stasse, conseiller d’Etat. Quatre groupes de travail étaient formés autour des thèmes de l’avenir des unions régionales de médecins libéraux, du partage de l’information, de la participation des médecins libéraux aux politiques de santé publique ainsi que de la régulation des dépenses de médecine de ville et des modes de rémunération des médecins.

Cette mission a conduit à la présentation, le 15 juin 1998, d’un rapport établissant dix propositions sur des sujets-clefs de l’avenir de la médecine de ville. C’est sur la base de ces propositions que s’est appuyé le “ plan Aubry ” qui inspire largement le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale dans son volet consacré à la santé.

Propositions du rapport de la mission de concertation sur l’avenir de la médecine de ville

1) Priorité à l’évaluation

- mise au point rapide de la nouvelle nomenclature et du codage des actes et des pathologies

- développement d’outils d’aide à la décision

- formation d’un corps de médecins évaluateurs

- encouragement des unions régionales à participer au développement de l’évaluation

2) Partage des données médicales informatisées

- accès facilité des professionnels de santé aux données ; éclatement à la source des informations entre caisses et unions régionales

- création d’une commission nationale des statistiques de santé

3) Encouragement des pratiques coopératives

- promotion des réseaux centrés sur les pathologies, les populations ou les secteurs géographiques spécifiques

- développement d’actions de santé publique associant des médecins

- création d’un “ fonds qualité ” de soutien à la coopération

- création d’enveloppes uniques pour les réseaux

4) Développement de nouvelles fonctions liées à la prévention, la santé publique, la coordination, l’évaluation

- création d’une fonction de gestionnaire de réseaux de soins pour les médecins libéraux

- promotion de la reconversion des praticiens vers la médecine préventive

5) Diversification des modes de rémunération

- maintien du paiement à l’acte

- institution de paiements forfaitaires pour les réseaux, la santé publique, l’évaluation

6) Modernisation de la nomenclature

- modification vers une nomenclature prenant mieux en compte l’évolution technologique

- meilleure rémunération du suivi de certaines pathologies, pour éviter la multiplication d’actes

7) Adoption d’une régulation collective

- suppression du reversement individualisé actuel

- maintien du principe d’enveloppes opposables

8) Association de toutes les professions de santé à la régulation

9) Meilleure maîtrise de la démographie

- institution de mécanismes d’incitation à l’installation dans les régions sous-densifiées

- encouragement au départ en préretraite

- rééquilibrage de la formation en faveur des spécialités sinistrées

10) Encouragement des expérimentations

- expérimentation de nouvelles formes de coopération avec les réseaux informatisés

- encouragement des initiatives des professionnels dans les domaines de la veille et de l’alerte sanitaires, et de la santé publique

C. DES ORIENTATIONS NOUVELLES POUR RÉFORMER EN PROFONDEUR LA MÉDECINE DE VILLE

Le “ plan Aubry ” propose de poursuivre les réformes structurelles de la médecine de ville et au-delà de l’ensemble du système de soins en renforçant ou en rénovant certains axes de réforme à la recherche d’une plus grande coopération des professionnels, d’une meilleure qualité des soins et d’une régulation plus efficace de l’offre de soins.

1. Un système davantage basé sur la coopération des professionnels de santé

a) Un meilleur partage de l’information

Une participation active des médecins et des professionnels de santé en général suppose de mettre régulièrement à leur disposition des données fiables et transparentes et de les associer à leur analyse au travers, notamment, des unions de médecins exerçant à titre libéral.

Des dispositions ont ainsi été prises dans le règlement conventionnel minimal afin d’assurer l’information des professionnels sur les dépenses, au niveau national (syndicats) et régional (syndicats et unions de médecins), chaque médecin recevant par ailleurs un relevé individuel d’activité et de prescription tous les trimestres ; ces dispositions pourront être reprises dans les conventions médicales.

Suivant les orientations du rapport Stasse, la présent projet de loi propose de créer une commission chargée de veiller à la fiabilité des données produites par les organismes d’assurance maladie et d’améliorer le dispositif inter-régime de collecte et d’analyse de leurs informations.

Par ailleurs, des études sont actuellement menées pour que le réseau santé social (RSS) puisse mettre à la disposition des professionnels des informations sur l’évolution et la nature des dépenses médicales dont ils sont à l’origine.

Ceci suppose d’accélérer les travaux de codage des actes et des pathologies, dont il est nécessaire de dresser le bilan.

Le codage des actes de biologie est obligatoire depuis le 1er mars 1997 mais sa montée en charge a véritablement débuté à partir de septembre 1997. Le taux des factures d’analyses biologiques codées est aujourd’hui d’environ 80 %. La CNAMTS a annoncé par circulaire que l’enregistrement des données relatives aux médicaments débuterait le 1er octobre 1997, les pharmaciens étant pour leur part dispensés de coller les vignettes dès lors qu’ils en inscrivaient le contenu dans un message électronique. Neuf mois plus tard, seulement 20 % des montants remboursables en pharmacie étaient codés.

La situation devrait cependant s’améliorer rapidement, grâce à de nouveaux outils et aux perspectives d’accord avec la profession. Il convient à cet égard de rappeler que les codages des médicaments et des actes de biologie couvrent à eux deux près de 40 % des dépenses remboursables hors hospitalisation et permettent de réaliser un suivi approfondi de la prescription médicale.

S’agissant des actes médicaux, l’emploi de l’actuelle nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) pour le codage des actes a été rejeté devant l’imprécision ou l’ambiguïté de certains libellés et la cotation d’actes par assimilation en l’absence de cotation dans la nomenclature. C’est donc la création d’une nomenclature commune à la ville et à l’hôpital qui est requise. Les travaux techniques ont débuté dès 1993. Ils se décomposent en :

– un axe sémantique (libellés exhaustifs, non ambigus),

– un axe “ hiérarchisation ” économique (détermination du coût relatif des actes),

– un axe “ validation scientifique ”, confiée à l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES), en vue de l’admission au remboursement, notamment.

Ces travaux mobilisent des spécialistes des nomenclatures et font appel à de nombreux experts délégués par les sociétés savantes de chaque spécialité. Une méthode de hiérarchisation des coûts des actes chirurgicaux a été approuvée dès 1995 par les syndicats de médecins représentés à la Commission de la nomenclature.

Conformément à l’avenant à la convention d’objectifs et de gestion signé par la CNAMTS et l’Etat en juillet 1998, le codage des actes et des prescriptions devrait être accéléré. Le codage des actes de chirurgie et d’anesthésie-réanimation sera terminé fin 1999 et celui de tous les autres actes des professionnels de santé fin 2000. Le codage des pathologies est pour sa part déjà réalisé dans les services de court séjour des établissements de santé publics et privés ; la réflexion en cours sur son extension sera également accélérée afin que cette extension aux soins de ville puisse commencer en 1999.

b) Un développement accru des réseaux de soins

Les réseaux de soins ont pour objectif de développer, sur une base volontaire, une prise en charge globale coordonnée de certaines catégories de patients ou de pathologies, afin d’assurer des soins de qualité, quels que soient les professionnels ou la structure de soins choisis, permettant une diversification des modes d’exercice autour du malade et une coordination des relations entre l’ensemble des professionnels de santé, libéraux, salariés et hospitaliers.

Plusieurs décisions récentes ont permis de soutenir la création de ces réseaux et notamment :

– l’installation en octobre 1997 du Conseil d’orientation des réseaux et filières expérimentaux (“ comité Soubie ”) et l’approbation du réseau expérimental sur la prévention bucco-dentaire de l’enfant présenté par la Mutualité sociale agricole ;

– le soutien financier de l’Etat à 700 réseaux de santé de proximité, dont 6,7 millions de francs pour des réseaux de soins SIDA et 5,1 millions de francs pour des réseaux de prise en charge des toxicomanes ;

– l’adoption de la circulaire du 24 mars 1998 relative à l’organisation des soins en cancérologie, visant à assurer la coordination et la continuité des soins par la constitution de réseaux de soins et l’intoduction d’un dossier médical commun ;

– l’adoption de la circulaire du 26 mars 1998 relative à la révision des schémas régionaux d’organisation sanitaire (SROS), visant notamment à promouvoir la coordination des soins en développant la complémentarité entre les différents segments de l’offre : médecine hospitalière, médecine de ville, prise en charge médico-sociale ;

– l’adoption, le 31 juillet 1998, de la loi de lutte contre les exclusions qui prévoit, dans le cadre des programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins, de soutenir le développement de réseaux de santé ;

– l’élaboration de deux décrets relatifs à la périnatalité qui organisent la mise en réseau des maternités, dont la publication est attendue dans les semaines à venir.

Cependant le bilan des premiers dossiers examiné par le “ comité Soubie ”, a souligné les grandes difficultés auxquelles sont confrontés les professionnels de santé pour monter un projet alors que les idées, parfois très innovantes, ne font pas défaut. Le manque d’ingéniérie dans le domaine sanitaire et social semble important de même que les difficultés à faire coexister et travailler ensemble des acteurs n’en ayant pas l’habitude.

Plusieurs outils à la disposition des professionnels devraient ainsi être élaborés dans les mois à venir, parmi lesquels :

– la diffusion d’un registre national des réseaux auprès du public ;

– un guide de développement des réseaux de santé de proximité, faisant la synthèse des expériences existantes ;

– un cahier des charges des réseaux qui comporterait une composition pluriprofessionnelle, la tenue d’un dossier médical commun, l’évaluation des pratiques, l’organisation d’un deuxième avis médical en cas de nécessité, l’articulation avec l’hôpital et le suivi des hospitalisations, une formation continue commune et l’analyse régulière des dépenses de santé du réseau ;

– un guide de suivi et d’évaluation des réseaux de santé diffusé par l’ANAES ;

– des formations adaptées aux professionnels de santé travaillant ou désirant travailler en réseau, priorité de la formation continue en 1999.

Ainsi que le soulignait le rapport Stasse, à de nouveaux modes d’exercice de la médecine doivent correspondre de nouveaux modes de rémunération. A cet égard, le présent projet de loi donne une grande marge de manœuvre aux parties conventionnelles pour mettre en place de nouveaux modes de rémunération dans la cadre des réseaux et des filières de soins, en dehors du traditionnel paiement à l’acte (forfait, capitation….)

2. La recherche d’une qualité toujours plus grande de soins

a) Une évaluation des médecins par leurs pairs

La France est caractérisée par un très grand retard en matière d’évaluation des pratiques professionnelles de la médecine de ville, en dépit des travaux ménés jusqu’à ce jour par l’ANAES. Pour faire face à ce retard, l’idée, développée par l’un des groupes de travail de la mission Stasse, est d’associer les médecins à leur propre évaluation en mettant en place une procédure d’évaluation par les pairs, volontaire et déconnectée de toute procédure de sanction, et en diffusant les pratiques d’auto-évaluation. Le présent projet de loi propose d’établir un tel dispositif en s’appuyant sur les unions de médecins exerçant à titre libéral.

b) Une formation médicale continue rénovée et efficace

Malgré plusieurs mesures tendant à assouplir les règles de fonctionnement des fonds de gestion de la formation médicale continue (FMC) obligatoire, mise en place par l’ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 , la situation est demeurée bloquée. Le système a été doublement remis en cause par l’annulation, par le Conseil d’Etat, d’un article de cette ordonnance sur la FMC, de certaines des dispositions contenues dans le décret de décembre 1996 et d’un arrêté de janvier 1997.

Ces circonstances ont récemment conduit le Gouvernement à envisager une réforme en profondeur de la formation médicale continue à l’intention de tous les médecins, quel que soit leur mode d’exercice. Cette réforme, qui pourrait faire l’objet d’une projet de loi au début de l’année prochaine, distinguerait trois types de formation :

– la formation médicale continue proprement dite, destinée à entretenir et actualiser les connaissances scientifiques des médecins ;

– la formation professionnelle axée sur les pratiques : informatique, économie de la santé, méthodologie des bonnes pratiques et de l’évaluation… qui ressortirait de la compétence des partenaires conventionnels ;

– la formation à la vie conventionnelle permettant aux médecins investis dans les instances conventionnelles de se former.

Chacune de ces formations ferait l’objet d’un financement distinct, clairement identifié. Les médecins auraient par ailleurs le choix entre justifier d’un certain nombre d’heures de formation (au minimum 35 heures par an) ou se soumettre à un bilan de formation tous les cinq ans.

c) Une informatisation prenant mieux en compte les préoccupations des professionnels de santé

A ce sujet, le rapporteur renvoie aux conclusions du rapport d’étape de la mission d’information de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur l’informatisation du système de santé, présidée par M. Jean-Paul Bacquet, publié le 26 octobre 1998 (n° 1139).

3. L’amélioration de la régulation de l’offre de soins

a) Des actions mieux ciblées sur la démographie médicale

S’agissant des “ entrées ”, un récent accord conclu entre le Gouvernement et les représentants des internes en médecine permettra désormais de répartir les postes d’internes par spécialités et non plus par grandes disciplines médicales. Deux circulaires datées du 30 mai 1997 et du 7 mai 1998 incitent en outre les commissions chargées de répartir les postes d’internat à diriger les internes vers les spécialités déficitaires. Par ailleurs, certaines des mesures proposées en 1997 par le professeur Nicolas dans son rapport sur “ l’adéquation entre les besoins hospitaliers et les effectifs en anesthésie, obstétrique, psychiatrie et radiologie ” ont été retenues ; ainsi l’introduction de trois disciplines supplémentaires – anesthésiologie-réanimation chirurgicale, pédiatrie et gynécologie obstétrique – au prochain concours de l’internat, est actuellement à l’étude.

Malgré ces efforts, tant le numerus clausus que l’internat correspondent à une approche globale de la régulation médicale qui ne permet pas de répondre aux multiples déséquilibres constatés sur le plan inter-régional et infra-régional ; de très grandes différences existent en effet dans la densité des médecins libéraux, tant généralistes que spécialistes, mais également entre médecine de ville et médecine hospitalière (il y a par exemple trop de radiologues libéraux et pas assez de radiologues hospitaliers) et entre spécialités d’exercice.

Le présent projet de loi innove “ à la sortie ” de la chaîne en donnant la possibilité aux partenaires conventionnels de moduler ou de réserver le revenu de remplacement en cas de cessation anticipée d’activités (le “ MICA ”) ainsi que les aides à la reconversion, qu’ils ont le pouvoir de mettre en place, en fonction de la spécialité d’exercice ou de la zone géographique du médecin. Faudrait-il aller plus loin en accordant des aides à l’installation pour certaines spécialités dans certaines zones, voire en limitant le principe de libre installation ?

b) De nouvelles orientations pour le service médical de la CNAMTS

Les nouvelles orientations du service médical, telles qu’elles résultent de la circulaire cadre de la CNAMTS du 29 mai 1998, consistent à accorder désormais la priorité aux actions dites de santé publique au détriment des contrôles traditionnels des prestations servies aux assurés. Cette orientation correspond aux engagements pris par l’assurance dans la convention d’objectifs et de gestion passée avec l’Etat qui prévoit notamment : “ Les objectifs prioritaire du régime général de l’assurance maladie sont d’assurer la régulation des dépenses de soins de ville, de participer efficacement à la mise en œuvre de la politique hospitalière et des priorités de santé publique, ainsi que d’améliorer la qualité du service rendu aux usagers et accroître les performances de la gestion ”.

Dans ce cadre, “ le service médical doit prendre une part déterminante dans la politique de gestion du risque. Cette démarche implique en particulier :

– un accroissement significatif des actions de santé publique liées à l’analyse de l’activité des professionnels et des établissements de santé,

– le développement du rôle de conseil et de diffusion auprès des professionnels de santé des outils de maîtrise médicalisée,

– le développement d’une coopération approfondie entre le service médical du régime général et les service médicaux des autres régimes, les services administratifs des caisses à l’échelon local et régional (dans le cadre des protocoles d’action concertée) et les agences régionales de l’hospitalisation (ARH) ”.

Ainsi, les nouvelles orientations arrêtées par la CNAMTS entendent-elles mobiliser les praticiens conseils sur l’évaluation collective des pratiques professionnelles au regard des recommandations de pratiques cliniques (même si elles ne sont pas juridiquement opposables comme les références médicales), afin de susciter une modification des comportements notamment de prescription. Dans l’immédiat, cette évaluation collective sera prioritairement orientée sur les patients atteints d’une affection de longue durée, compte tenu du poids de cette catégorie dans la consommation médicale globale.

Pour autant, les contrôles individuels des professionnels, notamment en vue du respect des références médicales opposables (RMO), aujourd’hui au nombre de 243, ne devraient pas être abandonnés, dans la mesure où ce type de contrôles permet de détecter des pratiques dangereuses ou inutiles et, le cas échéant, de mener une action correctrice ciblée sur un professionnel identifié. Le contrôle des professionnels de santé, dont l’efficience devrait être sensiblement accrue par la généralisation du codage des actes et des prestations, sera centré sur les actes et prescriptions abusifs, les indications non scientifiquement validées ou contraires aux données actuelles de la science.

c) Un mécanisme de régulation économique des dépenses médicales plus juste et plus global

La mission Stasse a mené une réflexion approfondie sur ce thème fortement controversé. L’ensemble des participants au groupe de travail sur la régulation des dépenses de médecine de ville et les modes de rémunération des médecins a critiqué les mécanismes de reversement mis en place par les ordonnances du 24 avril 1996 qui, reposant sur des critères individuels au demeurant complexes, s’apparente trop à une sanction. A l’exception des syndicats qui restent opposés à tout principe de régulation économique, quelles qu’en soient les modalités, un consensus s’est dégagé en faveur d’une responsabilité économique collective de l’ensemble des professionnels de santé. En cas de non-respect de l’objectif, deux modalités de responsabilisation ont ainsi été proposées sous la forme d’un prélèvement calculé pour chaque profession en proportion des honoraires perçus à l’exception de tout autre critère individuel, ou d’une suspension partielle ou totale des revalorisations tarifaires à venir. En cas de respect de l’objectif, un mécanisme d’intéressement a été proposé sous la forme d’une revalorisation tarifaire ou de l’alimentation d’un fonds consacré à la qualité et à la modernisation du système de soins.

Le présent projet de loi, s’inspirant de ces propositions, propose de mettre en place une clause de sauvegarde à destination des médecins et des laboratoires pharmaceutiques reposant sur le principe d’une responsabilité collective de ces derniers. Reste cependant le problème des autres acteurs du système de soins pour lesquels la réflexion, consistant à les associer au système de régulation des dépenses de soins, devra être poursuivie : professions “ prescrites ” mais également établissements et centres de santé dans leur activité de prescripteurs de dépenses de ville.

IV.- UNE POLITIQUE DU MÉDICAMENT RÉNOVÉE

En matière de consommation de médicaments, plusieurs problèmes ont été, depuis longtemps, identifiés qui rejoignent souvent l’ensemble des problématiques de santé publique : augmentation des dépenses, inégalités, nécessité de soutenir le développement de l’innovation. Mais le premier de ceux-ci est le poids des surconsommations.

Le premier rapport de l’Observatoire national des prescriptions et consommations des médicaments (juin 1998) a été consacré aux antibiotiques prescrits par les médecins de ville. Il montre que nous consommons 2 à 2,5 fois plus d’antibiotiques qu’en Allemagne ou qu’au Royaume-Uni et, selon les familles d’antibiotiques, jusqu’à 7 fois plus qu’en Allemagne et 5 fois plus qu’au Royaume-Uni. Les antibiotiques sont fréquemment prescrits dans des infections respiratoires d’origine virale qui ne justifient pas un tel traitement. Cette attitude thérapeutique est non seulement injustifiée et inutilement coûteuse, mais peut être source de complications individuelles comme d’effets indésirables.

Le second rapport de l’Observatoire concerne les antidépresseurs (juillet 1998). Il montre également leur mauvaise utilisation : une prescription d’antidépresseurs sur trois est faite en dehors des indications de l’autorisation de mise sur le marché ; environ 20 % des prescriptions d’antidépresseurs ne reposent sur aucun diagnostic psychiatrique étayé ; les prescriptions hors autorisation de mise sur le marché tendant à augmenter (35 % en 1994 et 46 % en 1996).

Globalement, la consommation médicamenteuse tend pourtant à se stabiliser.

Evolution de la consommation de médicaments en France,

en nombre d’unités

Années

Nombre d’unités (millions)

% de croissance annuelle

1985

2 040

1975-80 : + 4,8 % par an

1985

2 520

1980-85 : + 4,3 % par an

1990

2 840

1985-90 : + 2,4 % par an

1995

3 034

1990-95 : + 1,3 % par an

1996

3 010

- 0,8 %

1997

2 995

- 0,5 %

Source : Syndicat national de l’industrie pharmaceutique (SNIP)

Croissance de la consommation de médicaments en France

(en nombre d’unités)

1975-1980

+ 4,8 %

1980-1985

+ 4,3 %

1985-1990

+ 2,4 %

1990-1995

+ 1,3 %

Source : estimation SNIP

Les volumes d’unités vendues ont connu l’évolution suivante au cours des trois dernières années :

- 1995 : + 3,4 %

- 1996 : + 1,1 %

- 1997 : - 0,5 %

Mais, sur les trois derniers mois connus de 1997, la hausse redevient considérable : + 4,5 % (+ 3,7 % après correction des jours ouvrés).

Il est évident que consommer trop, c’est consommer mal : sur 4 000 000 d’admissions annuelles dans les services de spécialités médicales en France métropolitaine, on peut estimer le nombre des hospitalisations motivées par un effet indésirable médicamenteux à environ 128 000 par an.

C’est dire que la consommation de médicaments n’est pas d’abord un problème économique. C’est avant tout un problème de santé publique. De très nombreuses mesures sont d’ores et déjà intervenues, pour agir à la fois sur les facteurs de production et sur la consommation de médicaments.

A. UNE POLITIQUE COHÉRENTE

La politique menée par le Gouvernement dans le domaine du médicament poursuit principalement trois objectifs majeurs :

- développer le bon usage et la sécurité des consommateurs ;

- améliorer l’accès à certains produits ;

- maîtriser la dépense.

1. Le bon usage

La sécurité, dans un contexte où la mise sur le marché de nouveaux médicaments augmente les risques liés à leur utilisation s’est traduite par l’institution de l’Agence de sécurité sanitaire des produits de santé, par la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998, cinq ans après la création de l’Agence du médicament à laquelle elle se substitue.

Les actions menées en ce domaine concernent notamment le contrôle de la qualité pharmaceutique des médicaments par le respect des bonnes pratiques de fabrication, le renforcement des systèmes de vigilance, la réévaluation périodique des médicaments et le renforcement du système d’alerte.

Il importe de s’assurer de la bonne utilisation du médicament, qui nécessite elle-même de disposer d’une analyse précise des prescriptions et des consommations. A cette fin, ont été développés le codage des médicaments vendus à l’officine, l’accès aux données dont disposent les industriels, l’amélioration du système d’information hospitalier et l’informatisation de la médecine de ville. L’Observatoire national des prescriptions et des consommations des médicaments est chargé d’analyser ces données.

En outre, il convient d’insister sur le rôle central dévolu jusqu’à présent à l’Agence du médicament pour développer les pratiques de bon usage.

Celle-ci met au point un référentiel qui intégrera toute l’information officielle sur 25 000 spécialités pharmaceutiques, mentionnant les caractéristiques des produits en cause. Le fonds documentaire est constitué de 350 000 pages soit environ 100 000 documents. Ce fonds documentaire sera numérisée, indexé et traité pour constituer le référentiel.

Une première version de ce référentiel sera disponible au 31 décembre 1998 ; elle devrait, après une période de test, être mise à la disposition des professionnels de santé par l’intermédiaire du réseau santé social (RSS).

La base de données pourra être utilisée dans les logiciels informatiques des médecins.

En outre, l’Agence a mené à bien les actions suivantes :

- actualisation des recommandations de bonnes pratiques et des fiches de transparence ;

- diffusion de recommandations de bonnes pratiques concernant l’antibiothérapie ;

- renforcement du contrôle de la publicité des médicaments et des sanctions en cas de manquements : le taux d’interdiction des publicités destinées aux professionnels a ainsi doublé durant le premier semestre 1998 et les rectificatifs imposés aux laboratoires se sont multipliés.

2. L’amélioration des conditions d’accès à certains médicaments

En premier lieu, il convient d’observer que certains médicaments, jusqu’alors uniquement commercialisés à l’hôpital, sont désormais à la disposition des malades dans les officines de ville. C’est le cas de certains médicaments antirétroviraux pour les malades atteints du virus du Sida, ou de médicaments utilisés pour traiter la maladie d’Alzheimer.

La distribution des médicaments aux patients ambulatoires est améliorée : les médicaments qui, même s’ils sont prescrits à l’hôpital, ne sont pas strictement réservés à l’usage hospitalier, seront mis à la disposition de ces patients dans les officines de ville (c’est déjà le cas d’un antalgique pédiatrique, par exemple).

D’ici la fin de l’année, comme on l’a vu au II supra, le carnet à souche qui permet la délivrance de médicaments anti-douleur doit être supprimé et remplacé par des ordonnances dites “ sécurisées ”, infalsifiables, dont l’usage sera progressivement rendu obligatoire.

3. La maîtrise de la dépense

Il convient, sur ce point, d’indiquer qu’en dépit de la forte augmentation des dépenses de médicaments, le Gouvernement n’a pas procédé - à deux exceptions près - à des déremboursements.
L’évolution des dépenses médicales remboursées par le régime général, constatée au cours des premiers mois de 1998, montre un dérapage des dépenses préoccupant (voir I). C’est pourquoi des mesures structurelles ont déjà été engagées ou sont à l’étude ; en outre, ont été mises en œuvre à compter d’août 1998 de nouvelles mesures essentiellement conjoncturelles.

Le chiffre d’affaires de l’industrie du médicament en 1997 et 1998

En 1997, le chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique a dépassé les 130 milliards de francs, hors taxes, dont plus d’un quart est dû à l’exportation : 36,5 milliards de francs (+ 20,5 % par rapport à 1996). Le chiffre d’affaires de médicaments remboursables - retenu comme base de calcul de la clause de sauvegarde de l’article 25 et - partiellement - comme assiette de la contribution de l’article 26 - représente 55,6 % de ce total. Les autres parts de ce chiffre d’affaires sont de 5,3 % pour le secteur non remboursable, 11,1 % pour l’hôpital et 28 % pour l’exportation.

Les dépenses de recherche et développement atteignent 14 milliards de francs (14 % du chiffre d’affaires), les dépenses de promotion sont en diminution : 12,5 milliards de francs (en 1996).

Sur les sept premiers mois de 1998, le chiffre d’affaires France de l’industrie pharmaceutique a crû de 6,1  en prix fabricant (47,8 milliards de francs) et en unités de 1 %  par rapport à la même période de l’année précédente.

Après avoir diminué en janvier, les remboursements de médicaments de la CNAM connaissent une progression très soutenue depuis février 1998 et atteignent 34,2 milliards de francs : au cours du premier semestre, ils ont augmenté de 8,5 % alors que l’activité des médecins, mesurée par les consultations et visites, n’a augmenté que de 2,5 %.

Les mesures structurelles portent notamment sur :

- les réductions des volumes de consommation dans certaines classes pour lesquelles une surconsommation dangereuse pour la santé publique a été observée (antidépresseurs et certains antibiotiques) ;

- la médicalisation des conditions de prise en charge des médicaments par l’assurance maladie : les critères d’admission au remboursement d’un médicament seront revus afin de les fonder sur les seules considérations de santé publique et notamment sur le service médical rendu par le médicament ;

- le développement des médicaments génériques a d’abord été centré sur l’offre industrielle, par le biais des conventions avec les laboratoires pharmaceutiques négociées par le Comité économique du médicament, par les mesures d’exonération totale ou partielle des taxes ainsi que par des simplifications des procédures administratives d’admission au remboursement.

- la limitation des dépenses promotionnelles des laboratoires emprunte notamment la voie conventionnelle, conduite par le Comité économique du médicament et celle de la taxation de ces dépenses, décidée l’année dernière et analysée avec l’article 26 du présent projet.

Des mesures conjoncturelles ont été en outre mises en place depuis août 1998 afin de faire contribuer les laboratoires pharmaceutiques à hauteur de 1,8 milliard de francs en 1998 en vue d’éviter le dépassement de l’objectif soins de ville résultant de la forte progression des dépenses de médicaments. Il s’agit notamment de l’application des engagements conventionnels prix/volumes, des baisses des prix et des ristournes dans les classes pour lesquelles le coût supporté par la collectivité n’est pas en rapport avec le service médical rendu et des ristournes sur les classes qui ont connu une forte évolution en 1998.

En outre, on note deux déremboursements :

- le déremboursement du Lysanxia en janvier 1998 du fait de la fréquence de prescription de cet anxiolytique à des posologies supérieures à la posologie maximale de l’autorisation de mise sur le marché. La situation de tous les autres anxiolytiques à fort dosage de benzodiazépines est en cours d’évaluation ;

- le déremboursement du Maxepa en juillet 1998 (mesure qui est devenue effective au 1er septembre) du fait de sa place marginale dans la stratégie thérapeutique et d’un service médical rendu insuffisant.

B. UNE POLITIQUE PLUS ENGAGÉE DANS LA LOI DE FINANCEMENT

Les axes ainsi dessinés vont être poursuivis, à l’occasion de la loi de financement pour 1999. Celle-ci doit, avant tout, aboutir à un renforcement des prescriptions de génériques.

1. L’intérêt des médicaments génériques

Le marché des médicaments génériques reste trop peu développé en France. Leur chiffre d’affaires industriel se situe entre 1 et 3 milliards de francs, selon la définition retenue, alors que le potentiel de développement de ce marché est 10 fois plus important. L’offre industrielle doit continuer à se développer.

L’Agence du médicament conduit un programme d’inspection et de contrôle portant sur l’ensemble des médicaments génériques du répertoire, de manière à garantir leur qualité et leur sécurité. Ce programme sera achevé d’ici la fin de l’année. En outre, elle peut désormais commencer l’instruction d’un dossier de demande d’autorisation de mise sur le marché pour un médicament générique avant l’échéance du brevet de la spécialité de référence. Tous les médicaments génériques inscrits sur le répertoire de l’Agence du médicament voient leur prix réduit d’au moins 30 % par rapport à celui de la spécialité de référence (hors mis ceux fixés en 1996 à moins 20 % à titre incitatif).

Il faut également noter la parution d’un répertoire complet des médicaments génériques réalisé par l’Agence du médicament et publié au Journal officiel le 7 juillet dernier. Il comprend 459 spécialités génériques, réparties au sein de 82 groupes dont, pour cette dernière édition, 49 nouveaux groupes de spécialités génériques et 130 nouvelles spécialités. Il existe jusqu’à 50 spécialités génériques par principe actif.

Il convient surtout aujourd’hui d’agir sur la consommation. Tel est l’objectif principal poursuivi par l’article 23 du présent projet, lequel met en place un droit général de substitution pour les pharmaciens d’officine : actuellement, les pharmaciens d’officine n’ont pas la possibilité , sauf urgence ou accord préalable du prescripteur, de modifier la prescription médicale. Cet article, au contraire, prévoit que les pharmaciens pourront, sauf opposition explicite du médecin, substituer des médicaments génériques entre eux et un médicament générique à un médicament de référence - ou l’inverse - dès lors que le médicament délivré est moins coûteux pour l’assurance maladie. Suite aux discussions menées avec les professionnels, la mesure s’accompagnera d’une réforme de la rémunération des pharmaciens d’officine concernant les génériques. Si cette réforme implique un transfert partiel de la responsabilité du médecin vers celle du pharmacien, les droits du prescripteur à diagnostiquer et à prescrire sont totalement préservés, comme ceux du malade.

2. La relance de la politique conventionnelle

- Le décret du 31 décembre 1997 a donné au Comité économique du médicament une existence réglementaire. Désormais, l’action du comité s’inscrit dans un cadre fixé par les ministre chargés de la sécurité sociale, de la santé, de l’économie et de l’industrie. Les ministres notifient chaque année au président du comité, après publication de la loi de financement de la sécurité sociale, les orientations relatives à la politique économique du médicament.

- Un décret relatif à la procédure d’inscription et de fixation des prix des spécialités remboursables et aux conventions que les entreprises pharmaceutiques peuvent conclure avec le comité, après avoir fait l’objet d’une concertation avec l’industrie pharmaceutique est en cours d’élaboration. La procédure conventionnelle constituera désormais la voie de droit commun pour la fixation et la modification des prix des médicaments remboursables, la fixation et la modification par arrêté interministériel n’intervenant qu’à titre subsidiaire, à défaut d’accord conventionnel.

- Dès la parution de ce décret, le Comité économique du médicament engagera une nouvelle campagne de négociation conventionnelle. La démarche conventionnelle vise, par la négociation, à mettre en œuvre la politique du Gouvernement en matière de médicament. Les conventions pluriannuelles devront notamment :

·  permettre le respect de l’ONDAM ;

·  être cohérentes avec une approche par classes thérapeutiques fondées sur des considérations et sur les besoins de santé publique ;

·  obtenir des laboratoires une contribution accrue au développement du bon usage des médicaments et à la réduction des surconsommations dans les classes médicamenteuses où elles sont avérées ;

·  contribuer à la diminution des dépenses promotionnelles des laboratoires ;

·  contribuer au développement des médicaments génériques et du marché concurrentiel.

Il convient en outre de souligner qu’un protocole d’accord a d’ores et déjà été signé avec les pharmacies d’officine le 24 septembre 1998. Le texte de cet accord figure en annexe au présent rapport.

En outre, l’article 24 du présent projet s’inscrit directement dans la relance de la politique conventionnelle. Cet article précise le champ des conventions signées entre le comité et les entreprises pharmaceutiques et le rôle du comité économique du médicament pour en assurer le suivi.

3. L’encadrement de la dépense médicamenteuse

Les dépenses de médicaments sont incluses dans l’objectif des dépenses de soins de ville. La partie de ces dépenses qui est prescrite par les médecins libéraux est elle-même incluse dans les objectifs prévisionnels d’évolution des dépenses médicales opposables aux médecins de ville.

Dans la convention de 1997, en cas de dépassement de ces objectifs, les médecins étaient redevables d’un reversement limité à 5 % en ce qui concerne le dépassement sur le sous-objectif des prescriptions issu de l’ONDAM. Le solde de ce dépassement n’était pas récupéré par l’assurance maladie.

Mis à part le dispositif de taxation assis sur la distribution des médicaments et les dispositions prévues dans les conventions passées entre le Comité économique du médicament et les laboratoires pharmaceutiques sur certains produits, en cas de dépassement des volumes vendus (clauses prix-volume prévoyant une baisse de prix ou une ristourne), aucun mécanisme n’existe aujourd’hui pour assurer le financement du dépassement constaté. Ce dernier reste donc à la charge des assurés sociaux. Il convenait que cette lacune soit comblée.

L’article 25 du présent projet vise, à l’instar des mécanismes de régulation propres aux médecins, à la mise en place d’une contribution des laboratoires pharmaceutiques non conventionnés au respect de l’ONDAM. Cette contribution constituera une clause de sauvegarde pour l’assurance maladie. Ce sera un mécanisme d’ultime recours. Les politiques structurelles comme les mesures en faveur du bon usage du médicament, la lutte contre les surconsommations, le développement des génériques, la médicalisation des conditions de prise en charge et la relance de la politique conventionnelle, etc... constituent toujours l’élément essentiel d’une maîtrise durable des dépenses. Pour autant, cette clause, dissuasive, permettra de responsabiliser les industries pharmaceutiques.

En outre, le projet prévoit, à l’article 26, une contribution exceptionnelle au titre de l’exercice 1998. Les deux mécanismes ne coïncident donc pas dans le temps, la clause de sauvegarde ne présentant pas d’effet rétroactif. Celle-ci aura le mérite essentiel de définir, a priori, les règles pérennes de la maîtrise des dépenses induites par l’activité industrielle de production, de promotion et de vente des médicaments.

V.- L’HÔPITAL EN MOUVEMENT

Le rapport annexé à la loi de financement pour 1998 contenait les lignes directrices précises d’une politique de l’hôpital ainsi résumée “ Consolider le rôle de l’hôpital par une recomposition progressive du tissu hospitalier et une amélioration de son organisation interne ”. Considérant que l’hôpital est un enjeu essentiel de la réforme du système de santé, même s’il n’a pas été au centre de l’actualité cette année, le rapporteur a souhaité faire un bilan du travail de fond effectué dans ce domaine. Pour établir ce bilan, il s’est appuyé sur les informations fournies par le Gouvernement mais également sur les réponses précises et détaillées qu’ont bien voulu lui faire parvenir, durant l’été, les directeurs des agences régionales d’hospitalisation (ARH) en réponse à un questionnaire qu’il a adressé à chacun d’entre eux au mois de juin dernier. Il tient à leur adresser ici ses remerciements pour l’apport très enrichissant que ces documents constituent à la tâche difficile de contrôle parlementaire des dépenses d’assurance maladie.

A. LA RÉDUCTION DES INÉGALITÉS INTER ET INTRA RÉGIONALES

1. La péréquation entre régions

Loi de financement pour 1998 - Rapport annexé :

“ La politique de réduction des inégalités entre régions sera poursuivie, à partir de critère affinés comme le recommande la Conférence nationale de santé, en s’appuyant notamment sur les travaux du Haut comité de la santé publique ”

a) La régionalisation des dépenses hospitalières publiques

Sur la base d’un taux d’évolution national moyen métropolitain de début de campagne de 1,41% par rapport à 1997, les dotations régionalisées ont évolué de + 0,35% - niveau minimum fixé pour garantir une adaptation progressive - à 2,55 % à partir de critères de correction des inégalités entre régions reposant sur les besoins théoriques de santé (“ population hospitalisable dans le secteur public ”) et l’efficience mesurée par le point ISA 1996. Dans le modèle utilisé, la durée théorique de résorption complète des inégalités de ressources a été fixée à seize ans.

La méthode qui a été exposée en détail dans le rapport de l’année dernière a été améliorée sur plusieurs points :

- le critère de besoin et le critère d’efficience ont désormais un poids identique (au lieu de 2/3 - 1/3) ;

- les données relatives à la population hospitalisable ont été actualisées (intégration par exemple des patients hospitalisés pour moins de vingt-quatre heures) ;

- sachant que dans une région on soigne aussi des personnes venant d’autres régions, les flux interrégionaux de patients ont été pris en compte pour moitié (l’autre moitié n’étant pas considérée comme légitime).

Du fait de la prise en compte de ces flux plusieurs régions voient leurs dotation stagner (la Corse avec 0,35) ou faiblement progresser (Bourgogne 1,99/1,83, Bretagne 1,59/1,03, Centre 1,93/1,75, Champagne-Ardennes 1,62/1,14). A l’inverse, la région Provence-Côte d’Azur dont la dotation était en léger recul en 1997 de 0,4% connaît une augmentation sensible, de 1,27%.

Dans son rapport 1998, la Cour des comptes formule plusieurs observations que l’on peut ainsi résumer au risque d’en gommer les nuances :

- l’ampleur de l’effort de réduction des inégalités n’a pas été accentuée en 1998 alors même que la progression des dépenses hospitalières était trois fois supérieure à celle de l’année précédente ;

- la corrélation entre volume des ressources hospitalières publiques et offre des soins (en quantité et en qualité) n’est pas clairement établie. Une péréquation limitée aux seules dépenses d’hospitalisation publique n’est donc peut-être pas pertinente mais elle ne pourrait porter sur l’ensemble des dépenses de soins que s’il existait une fongibilité totale des enveloppes et si était définie une norme d’efficience.

Le rapporteur estime qu’en tout cas les critères actuels de répartition manquent de lisibilité et de transparence.

Dotations régionales de dépenses hospitalières pour 1998

(hors soins de longue durée)

Régions

Dotations

régionalisées

(en milliers de francs)

Taux d’évolution des dotations régionalisées/1997

1 Alsace

8 734 397

1,83 %

2 Aquitaine

11 412 978

1,58 %

3 Auvergne

5 706 713

1,64 %

4 Bourgogne

6 138 284

1,99 %

5 Bretagne

12 719 148

1,59 %

6 Centre

8 382 916

1,93 %

7 Champagne-Ardenne

5 416 268

1,62 %

8 Corse

971 741

0,35 %

9 Franche-Comté

4 802 615

2,19 %

10 Ile-de-France

57 444 979

0,35 %

11 Languedoc-Roussillon

8 633 517

1,48 %

12 Limousin

3 572 055

1,88 %

13 Lorraine

11 342 969

1,57 %

14 Midi-Pyrénées

10 253 923

0,97 %

15 Nord - Pas-de-Calais

15 226 082

2,06 %

16 Basse-Normandie

6 449 531

1,94 %

17 Haute-Normandie

6 413 301

1,74 %

18 Pays-de-Loire

11 586 418

1,99 %

19 Picardie

7 386 693

2,30 %

20 Poitou-Charente

6 033 729

2,55 %

21 Provence - Côte d’Azur

19 067 636

1,27 %

22 Rhône-Alpes

24 185 752

1,76 %

France métropolitaine

251 881 645

1,41 %

Il faut souligner que le taux de 1,41 % n’est qu’un taux partiel. Le taux d’évolution du montant total des dépenses hospitalières est fixé à 2 % pour 1998, soit 1,41 % en début de campagne + 0,59 % de mesures nationales déléguées ultérieurement (revalorisation des traitements de la fonction publique notamment). La dotation régionale est donc la somme de la dotation régionalisée (figurant au tableau ci-dessus) et de la dotation correspondant à ces mesures nationales.

Pour conclure le rapporteur souhaite faire part d’une difficulté concernant la fixation des dotations régionales qui lui a été signalée par plusieurs directeurs d’ARH. Il apparaît que la circulaire budgétaire fixant les priorités et les enveloppes régionales est communiquée aux ARH après la période de concertation budgétaire avec les établissements. Cela est du au fait que les calendriers fixés par la loi hospitalière de 1991(budgets des établissements) et par les ordonnances de 1996 (dotation régionale) ne sont pas compatibles. La loi de 1991 prévoit le vote du budget par les établissements avant le 15 octobre, ouvrant une période de discussion de quarante-cinq jours avant notification de la dotation. La loi de financement étant votée en décembre, la procédure contradictoire qui s’étend du 15 octobre au 30 novembre est vidée de son sens puisqu’elle ne peut porter que sur des orientations et non des engagements précis. Il est suggéré par un des directeurs de déplacer la date limite de dépôt des budgets primitifs du 31 octobre au 1er décembre.

b) La régionalisation de l’objectif national quantifié des cliniques privées

L’article 26 de la loi de financement a modifié l’article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale pour instituer une régionalisation de l’objectif quantifié national (OQN) des cliniques privées à compter du 1er janvier 1998. Sur ce point, le rapport figurant à l’annexe b du projet de loi de financement pour 1999 précise que le dispositif de régionalisation 1998 défini par les signataires de l’accord tripartite national a été conçu comme un mécanisme transitoire, première étape vers une péréquation plus poussée.

La régionalisation se fait à travers deux enveloppes qui représentent environ 0,5 % du montant de l’OQN fixé pour 1998 à 38 726 millions de francs. L’enveloppe d’efficience (57 millions de francs) sera consacrée à l’harmonisation tarifaire, selon une méthodologie qu’il reste à définir mais qui devrait s’appuyer sur le PMSI. L’enveloppe “ contrats ” (133 millions de francs) sera allouée au financement d’actions prioritaires (santé publique, réseaux...) au moyen des contrats d’objectifs et de moyen. Cette seconde enveloppe est répartie entre les régions pour trois quarts au prorata des dépenses 1996 et pour un quart en fonction du niveau moyen des tarifs des cliniques, de la population hospitalisable et de la mortalité de chaque région.

Pour 1999, les critères de mesure et de correction des inégalités de ressources entre régions seront profondément revus, pour notamment mieux prendre en compte les besoins de santé. Sans préjuger de la négociation tripartite à venir, l’Etat a d’ores et déjà indiqué à ses partenaires son souhait de voir le processus de régionalisation activement poursuivi.

Répartition régionale de l’enveloppe “ contrats ” au sein de l’OQN clinique

Région

Montant en francs

Alsace

2 440 850

Aquitaine

7 720 899

Auvergne

3 112 006

Basse Normandie

2 946 462

Bourgogne

4 489 544

Bretagne

6 673 267

Centre

6 746 752

Champagne-Ardenne

2 891 800

Corse

723 060

Franche Comté

2 037 601

Haute Normandie

4 075 008

Ile de France

20 294 329

Languedoc-Roussillon

6 474 252

Limousin

1 448 293

Lorraine

4 039 073

Midi Pyrénées

7 346 464

Nord - Pas de Calais

7 290 961

Pays de la Loire

7 963 885

Picardie

2 691 183

Poitou-Charentes

3 759 049

Provence - Alpes - Côte d’Azur

14 438 541

Rhône-Alpes

11 292 087

Total

130 895 366

Dans son rapport 1998, la Cour des comptes observe que la régionalisation de tout ou partie de l’enveloppe hospitalière privée (OQN) qui reste à faire, permettrait aux ARH de procéder plus aisément aux transferts d’enveloppes consécutifs aux opérations de rapprochement entre établissements publics et privés.

Comme l’observe un des directeurs d’ARH, dans sa réponse au questionnaire du rapporteur, il existe un décalage entre la mise en oeuvre de la décentralisation des décisions au niveau régional pour le secteur public par rapport au secteur privé. Le retard dans la régionalisation de l’allocation des ressources du secteur privé porte préjudice à une véritable coordination de régionale de l’offre de soins. En outre elle peut donner le sentiment que seul le secteur public est soumis à restructuration.

2. La réduction des inégalités entre établissements d’une même région

Loi de financement pour 1998 - Rapport annexé :

“ Les inégalités entre établissements seront réduites en tenant compte de la disparité qui peut exister entre la zone d’influence d’un établissement et le découpage administratif auquel il est soumis ”.

La réduction des inégalités budgétaires intra-régionales ayant été définie comme objectif national, les directeurs des ARH ont eu le souci de le mettre au premier rang des principes qui ont guidé leur campagne budgétaire 1998, ainsi que le montre l’enquête menée auprès d’eux par le rapporteur. Bien entendu la réduction des inégalités n’est qu’un des éléments pris en compte pour la fixation de la dotation budgétaire de chaque établissement. Dans la plupart des cas elle fait l’objet d’une enveloppe spécifique à côté de celle imposée par les dépenses contraintes (de personnel notamment) et de celle constituée par les ARH pour financer des actions nouvelles qu’il s’agisse d’opérations de recomposition ou de politiques de santé publique correspondant aux priorités nationales ou régionales.

Au-delà d’une approche générale qui est à peu près identique dans l’ensemble des ARH, il est frappant de voir la diversité des méthodes retenues par chaque agence pour procéder à l’établissement des dotations budgétaires. Loin de l’uniformisation napoléonienne traditionnelle des services territoriaux de l’Etat, les ARH développent une autonomie de gestion qui ne doit pas réjouir tous les jours le ministère de la santé mais qui est un gage d’inventivité et de proximité avec les réalités du terrain.

En raison de cette diversité méthodologique, il est assez difficile de faire la synthèse des réponses qui ont été fournies au rapporteur par les ARH sur les critères qu’ils ont retenus pour déterminer les budgets et en particulier sur l’importance du recours aux indicateurs fournis par le PMSI. C’est pourquoi il est proposé de faire un rapide tour de France des procédures de réallocation des ressources budgétaires des ARH.

Les méthodes de réduction des inégalités entre établissements relevant du PMSI et de la catégorie MCO (médecine, chirurgie, obstétrique)

ARH (métropole)

Budgets 1998 : critères de répartition

Alsace

Application des données du PMSI complétées par des indicateurs d’analyse de gestion

Aquitaine

Imposition d’une contribution de solidarité de 0,5% à tous les établissements relevant de la dotation globale et alimentant un fonds régional affecté à la réduction des inégalités.

Répartition des crédits en fonction du PMSI avec un seuil d’incertitude de 5% et une augmentation maximale de 10%

Auvergne

Plan de réajustement sur 5 ans des dotations budgétaires des établissements sous-dotés (point ISA inférieur à 13 F, la moyenne régionale étant de 13,57 F).

Financement sur les crédits supplémentaires résultant du taux d’évolution de la région ; pas de prélèvement sur les établissements surdotés, l’établissement le plus cher étant largement en dessous de la moyenne nationale (14,88 F en 1996) mais un taux d’évolution inférieur au taux retenu pour les autres établissements.

Basse-Normandie

Réduction des inégalités à partir des données du PMSI, financée sur les crédits supplémentaires résultant du taux d’évolution de la région.

Compte tenu d’une répartition globalement équilibrée, le problème des inégalités devrait être résolu en 3-4 ans

Bourgogne

Application systématique des données PMSI avec les modalités suivantes :

- diminution de la dotation des établissements situés au dessus d’un seuil d’incertitude (+ 5% de la moyenne régionale), dans la limite d’1/5ème de la surdotation, à condition que le montant prélevé n’excède pas 1% de leur budget total

- augmentation de la dotation des établissements situés en dessous d’un seuil d’incertitude (- 5% de la moyenne régionale), dans la limite d’1/5ème de la sous-dotation, à condition que le montant attribué n’excède pas 1% de leur budget total.

Bretagne

Plan de réduction des inégalités de dotation sur 7 ans.

Financement sur les crédits supplémentaires résultant du taux d’évolution de la région d’une enveloppe de réduction des inégalités, répartie au prorata des sous-dotations constatées.

Centre

Application des données du PMSI avec les modalités suivantes :

- la réallocation budgétaire a porté sur 15% du budget alloué à chaque établissement

- elle concernait les établissements ayant une dotation supérieure ou inférieure à 3% de la valeur régionale du point ISA (13,74 F)

- elle ne pouvait augmenter la dotation d’un établissement sous-doté de plus de 2%

- les établissements dont les données PMSI n’étaient pas fiables n’étaient pas éligibles à la redistribution.

Champagne-Ardenne

Exploitation des données du PMSI modulées par les indicateurs classiques et un dialogue avec chaque établissement

Corse

informations non communiquées

Franche-Comté

Exploitation des données du PMSI accompagnée d’audits externes pour l’établissement le plus surdoté et le plus sous-doté

Haute-Normandie

Critères qualitatifs et quantitatifs pour bénéficier d’un soutien spécifique

- existence d’un projet médical et d’un projet d’établissement compatible avec le SROS

- engagement de l’hôpital dans une démarche de contrat d’objectifs et de moyens, de regroupement et de coopération

- développement de structures alternatives à l’hospitalisation

- situation au regard de l’activité, des moyens et de la valeur du point ISA.

Maintien des moyens pour les établissements surdotés.

Ile-de-France

- AP-HP : dotation particulière arrêtée par le Gouvernement et répartie par sa direction générale ;

- hors AP-HP, répartition en fonction de la valeur du point ISA, avec un taux de progression supérieur pour les établissements situés dans les zones d’accroissement des besoins de la population.

Financement par un prélévement sur les dotations des établissements dont la valeur du point ISA est supérieure à un chiffre situé entre 16 et 17 F.

Languedoc-Roussillon

Critères qualitatifs et quantitatifs :

- qualité du projet d’établissement

- analyse du programme pluriannuel d’investissements

- qualité du rapport d’orientation et du projet de budget

- données du PMSI

Cette méthode conduit à ne pas réduire les bases de certains établissements surdotés.

Limousin

Combinaison de deux critères :

- données du PMSI

- population hospitalisée en 1996 (entrées/journées)

Calcul d’une dotation cible, pour ½ à partir de la valeur moyenne régionale du point ISA, pour ½ à partir de la valeur moyenne régionale par catégorie d’établissement des entrées et journées d’hospitalisation

La dotation cible définitive de chaque établissement est établie compte tenu d’éléments budgétaires et financiers qui lui sont propres. Les résultats du PMSI entrent ainsi pour moins de 30 % dans le calcul des dotations cibles.

Lorraine

Classement des établissements en trois catégories (ressources croissantes/stables/réduites) selon quatre critères :

- adéquation avec le rôle assigné par la planification

- évolution pluriannuelle de l’activité

- analyse de la productivité

- analyse de la situation budgétaire et financière

Ces trois derniers critères ont donné lieu à l’élaboration d’indicateurs de positionnement, destinés à comparer entre eux des groupes homogènes d’établissements. L’ARH estime en effet que le PMSI ne peut être utilisé de manière universelle et mécanique pour la détermination des budgets.

Midi-Pyrénées

Application des données du PMSI

Nord-Pas de Calais

Comparaison de la valeur du point ISA au sein de catégories correspondant à des profils homogènes.

Définition pour chaque groupe d’une fourchette de normalité à l’intérieur de laquelle la valeur du point ISA devra se situer par écrêtement ou rebasage, à moyen terme, (5 ou 6 ans)

Pays-de-la- Loire

Exploitation des données du PMSI complétée par des indicateurs relatifs aux effectifs et à l’activité des établissements.

Prise en compte également de la situation budgétaire des établissements et du degré d’avancement du projet d’établissement.

Picardie

informations non communiquées

Poitou-Charente

Exploitation des données du PMSI

Provence-Alpes-Côte d’Azur

Prélèvement sur les établissements ayant une valeur de point ISA supérieure à 15,30 (moyenne régionale 14,94 en 1996) au profit des établissements ayant une valeur de point ISA inférieure à 14,60 F et dont la place dans l’organisation régionale de soins et les conditions de fonctionnement le justifient.

Les résultats du PMSI pour les établissements contributeurs ont, dans certains cas, été corrigés par des mesures non reconductibles permettant de lisser sur plusieurs exercices l’effet des prélèvements.

Rhône-Alpes

Application des données PMSI avec les modalités suivantes :

- prélèvement sur la base budgétaire des établissements les mieux dotés (point ISA supérieur à la moyenne et à la médiane régionale), égal à 5% de la différence entre leur budget réel et leur budget théorique résultant de l’application de la valeur moyenne du point ISA

- maintien de la base pour établissements mieux dotés que la moitié de l’échantillon (point ISA supérieur à la médiane régionale)

- allocation complémentaire aux établissements les moins bien dotés (point ISA inférieur à la médiane régionale)

3. Un cas particulier : l’Assistance publique-hôpitaux de Paris

Loi de financement pour 1998 - Rapport annexé :

“ Le Gouvernement veillera à assurer une plus grande transparence dans les procédures relatives aux relations entre l’Assistance publique-hôpitaux de Paris et l’agence régionale d’hospitalisation d’Ile-de-France. ”

L’AP/HP et ses 44 établissements forment un modèle d’organisation hospitalière original sans équivalent ni en France ni à l’étranger. Avec près de 90 000 salariés, 28 milliards de francs de budget (environ la moitié du total de l’Ile-de-France et 10 % du total français) elle constitue un ensemble hospitalier considérable et l’une des dix premières entreprises publiques françaises. Pourtant en pratique, le contrôle de l’Etat sur l’AP/HP est réduit.

L’ordonnance du 24 avril 1996 portant réforme hospitalière n’a pas véritablement modifié les spécificités antérieures : le statut particulier de l’AP/HP reste l’une des particularités auxquelles l’ARH d’Ile-de-France (ARH- IF) est confrontée dans sa tâche de modernisation de l’hospitalisation de l’Ile-de-France.

a) Le cadre juridique fixé aux relations Etat, AP/HP et ARH/IF par l’ordonnance du 24 avril 1996

Pour résumer simplement l’ordonnance, on peut dire qu’en matière de planification, l’AP/HP a été maintenue dans le droit commun et qu’à l’inverse en matière budgétaire le traitement spécifique de l’AP/HP a été renforcé. Toutefois, il est indispensable de faire un rappel d’un certain nombre de données d’ordre pratique pour comprendre les conséquences de ces choix sur les relations entre l’AP/HP, l’ARH-IF et l’Etat.

b) Il n’existe pas de véritable organisation de la tutelle de l’Etat sur les décisions de l’AP/HP

Avant 1996, pour les hôpitaux de droit commun, direction départementale de l’action sanitaire sociale (DDASS) et direction régionale de l’action sanitaire sociale (DRASS) avaient la charge de la tutelle hospitalière. Celle-ci s’exprimait au travers du contrôle de légalité, de l’approbation des projets d’établissements et des projets d’investissement soumis à autorisation ainsi que de la fixation des budgets. Ces pouvoirs étaient pour l’essentiel exercés par les services de la tutelle hospitalière des DDASS. Un petit nombre de fonctionnaires expérimentés avaient ainsi, en pratique, une vue de synthèse sur les hôpitaux de leurs circonscriptions, même si l’on pouvait leur reprocher une attention excessive aux procédures et une connaissance inégale des ressorts de l’économie hospitalière. L’intervention des ARH n’a pas modifié significativement le rôle des services des DDASS. Elle a permis des décisions plus rapides et plus coordonnées.

A la différence du droit commun, aucun service administratif n’avait et n’a la charge de la tutelle sur l’AP/HP. Les moyens du contrôle de l’Etat sont réduits et dispersés. A l’exception du contrôle financier sur l’AP/HP qui dispose de moyens, aucun agent ne se consacre à plein temps au contrôle de l’AP/HP au ministère des finances ou à celui chargé de la santé. Qui plus est, le contrôle porte sur les décisions d’ensemble de l’AP/HP et rarement sur les décisions relatives à chacun des établissements hospitaliers. En pratique tout se passe comme si l’AP/HP exerçait la tutelle sur les hôpitaux de son ressort.

c) Les pouvoirs que confère l’ordonnance du 24 avril 1996 à l’ARH en matière de planification sanitaire sont partiellement vidés de leur contenu par la pratique

·  Les décisions de planification relatives aux activités ou équipements de pointe continuent à relever du niveau national

Les décisions relatives aux services des greffes d’organes, de chirurgie cardiaque, de neurochirurgie, de grands brûlés, etc... mais également relatives aux imageries par résonance magnétique (IRM), aux gamma-caméras, aux appareils de circulation extra corporelles, etc... continuent à relever du niveau national.

Dans la pratique ces services et équipements de pointe sont concentrés dans les CHU et donc en Ile-de-France à l’AP/HP. En conséquence, la majorité des décisions d’investissements importantes de l’AP/HP continue en fait à relever du niveau national. Même si l’avis de l’ARH sur ces dossiers est recueilli scrupuleusement dans la phase initiale de la procédure, son point de vue pèse peu au moment de la décision qui est prise au niveau national. La création en cours d’un centre de greffe hépatique supplémentaire à l’AP/HP dans un paysage déjà encombré s’est faite contre l’avis de ARH-IF.

·  L’AP/HP éprouve de grande difficultés pour s’adapter à la réglementation de droit commun en matière de création, de transformation ou de regroupements de lits

Depuis la loi hospitalière du 31 décembre 1970, et suivant des modalités qui se sont beaucoup transformées avec les années, l’Etat exerce un contrôle rigoureux sur les capacités des hôpitaux et cliniques mesurées en nombre de lits. Les processus de décision internes à l’AP/HP sont mal adaptés à cette réglementation qui, il convient de le dire, est extrêmement contraignante. De nombreuses opérations sont réalisées sans l’avis du comité régional de l’organisation sanitaire et sociale (CROSS). Il en résulte des opérations périodiques de “ régularisations ” qui en raison de la dimension de l’AP/HP compliquent singulièrement la gestion de la carte sanitaire en Ile-de-France.

·  Le contrat d’objectifs et de moyens de l’AP/HP est approuvé au niveau national

Depuis la loi hospitalière de juillet 1991, les établissements hospitaliers doivent se doter d’un projet d’établissement, c’est à dire en pratique d’un plan stratégique d’entreprise. Après avoir été approuvé par la tutelle, le projet d’établissement est mis en application par l’intermédiaire du contrat d’objectifs et de moyens. Dans le cas particulier de l’AP/HP celui-ci relève de l’autorité ministérielle après avis de la commission exécutive de l’ARH-IF et du conseil de tutelle.

d) Le rôle du niveau national en matière d’allocation budgétaire a été renforcé par la réforme de 1996

Le budget de l’AP/HP est fixé par décision conjointe des ministres chargés de la santé, des finances et de l’intérieur. La décision est préparée par un “ conseil de tutelle ” composé de quatre hauts fonctionnaires auxquels a été adjoint depuis la réforme le directeur de l’ARH-IF. L’organisation du conseil de tutelle était de niveau réglementaire avant la réforme de 1996. Elle a reçu une portée législative par l’ordonnance du 24 avril 1996.

En pratique, les représentants du ministre chargé des finances jouent un rôle prépondérant dans la décision. Le conseil de tutelle n’est en rien lié par les mécanismes qui s’imposent aux autres hôpitaux de la région Ile-de-France.

e) Les premières mesures adoptées pour mieux faire participer l’AP/HP à la politique hospitalière régionale

En matière de planification sanitaire, l’ARH-IF et l’AP/HP ont mis en place un processus de rencontres mensuelles destiné à faire converger les décisions d’organisation à prendre. Ce rapprochement entre les décideurs s’est concrétisé dans la préparation du SROS.

En matière budgétaire, l’orientation générale de la politique à suivre a été déterminée au printemps 1997 dans une note préparée par la direction des hôpitaux (avec l’aval de l’ARH-IF) à l’intention du ministre qui l’a approuvée. Ces orientations ont été validées à nouveau au cours de l’été 1997 après le changement de gouvernement.

Planification sanitaire

Le rapport annuel de l’AP/HP et celui de l’ARH-IF pour 1997 décrivent le processus empirique mis en place dès l’installation de l’ARH-IF pour rapprocher les points de vue en matière de planification sanitaire.

Outre des contacts fréquents entre les principaux responsables, un système de réunions mensuelles a été mis en place. Il a permis de balayer l’ensemble des problèmes de complémentarité posés aux hôpitaux de l’AP/HP dans leurs relations avec leurs voisins. Il ne faut pas surestimer les conséquences immédiates qui en ont résulté en raison de l’inertie propre aux décisions en matière d’investissements hospitaliers.

On peut inscrire à l’actif de cette coopération :

- une procédure d’information réciproque en temps réel sur les problèmes rencontrés ;

- l’association systématique de l’ARH-IF aux négociations entre l’AP/HP et les hôpitaux de la région lors de la signature des conventions hospitalo-universitaires,

- l’association de l’ARH-IF aux réseaux mis en place par l’AP/HP en matière de transferts in utero et de prise en charge de l’épidémie hivernale de bronchiolite,

- la définition consensuelle de la participation de l’AP/HP au schéma régional des urgences de l’Ile-de-France,

- la participation au plus haut niveau de l’AP/HP au comité de pilotage du SROS 1999-2004 en cours d’élaboration.

· Allocation de ressources

La coopération entre l’AP/HP et l’ARH-IF en matière budgétaire a peu avancé même si l’étude en cours sur les spécificités budgétaires de l’AP/HP ouvre des perspectives à moyen terme.

Les éléments de la décision budgétaire de l’AP/HP sont restés inchangés

La présentation budgétaire de l’AP/HP est spécifique. A la différence des autres hôpitaux, elle ne distingue pas de section de long séjour. La procédure budgétaire obéit à un calendrier particulier difficilement compatible avec la loi de financement de la sécurité sociale. La décision budgétaire porte sur l’ensemble de l’AP/HP sans véritable considération des mécanismes qui président au niveau national et au niveau régional à la péréquation entre les hôpitaux.

Ainsi pour 1998 et hors mesures salariales, le budget de l’AP/HP a été majoré de 0,3 % contre 0,35 % pour celui des autres établissements hospitaliers de l’Ile de France. Si l’AP/HP avait été traitée comme les autres hôpitaux MCO de la région parisienne, son budget aurait dû diminuer de 1 % en moyenne (hors mesures salariales).

Une étude sur les véritables spécificités de l’AP/HP a été confiée à des experts indépendants

Par accord entre l’ARH-IF et l’AP/HP un expert indépendant a été désigné pour valider le mode de calcul du point ISA de l’AP/HP et d’une façon plus générale pour analyser les spécificités de coût de l’AP/HP. Il s’agit de savoir si la participation de l’AP/HP à la recherche et son rôle dans le traitement des pathologies rares, notamment sur des malades originaires de l’extérieur de la région ou de l’étranger, expliquent des dépenses plus élevées dont le PMSI et les points ISA rendraient mal compte.

L’étude n’est pas achevée. En l’état, elle ne donne pas d’explication au coût plus élevé de l’AP/HP. On peut considérer que la volonté de l’AP/HP de se poser ce type de question est l’indication de sa volonté de s’inscrire dans les contraintes qui s’imposent à l’ensemble des hôpitaux.

f) Les compléments à envisager en 1999 pour permettre une véritable participation de l’AP/HP à la politique hospitalière régionale

- Prendre rapidement le décret relatif à l’organisation de la tutelle sur l’AP/HP

Un projet de décret relatif à l’organisation de la tutelle sur l’AP/HP est en cours d’élaboration depuis plus d’un an. Il normalise la présentation et le calendrier budgétaires de l’AP/HP. Il confie à l’ARH-IF le secrétariat du conseil de tutelle.

- Adopter pour 1999 un traitement budgétaire de l’AP/HP homogène avec les critères retenus au niveau national

Les mécanismes utilisés pour 1998, s’ils étaient reconduits pour 1999, pénaliseraient les hôpitaux de l’Ile-de-France qui n’appartiennent pas à l’AP/HP. Le calcul de la dotation de l’ensemble de l’Ile-de-France est fixé en tenant compte de la valeur moyenne du point ISA de l’Ile-de-France. Celle-ci est majorée car le point ISA de l’AP/HP (1997 : 15,17 francs) est sensiblement plus élevé que celui du reste de la région (14,04 francs) pour une valeur nationale de 12,18 francs.

Si comme pour 1998, la différence de progression des budgets entre l’AP/HP et les autres hôpitaux ne tient pas compte strictement pour 1999 du différentiel des points ISA, le mécanisme aboutirait à faire payer les surcoûts relatifs de l’AP/HP par les hôpitaux plus pauvres du reste de l’Ile-de-France.

Un autre facteur est à prendre en compte, la très faible part de la psychiatrie à l’AP/HP, 2 % du total de son budget contre 25 % pour les hôpitaux non AP/HP. Or il se trouve que la psychiatrie est très mal dotée, relativement en Ile-de-France. Ne pas tenir compte comme pour 1998 de ce facteur aboutirait également à pénaliser les hôpitaux non AP/HP pour favoriser ceux de l’AP/HP.

- Lancer le plus rapidement possible le nouveau projet d’établissement de l’AP/HP

L’actuel projet d’établissement de l’AP/HP “ AP 2000 ” n’a fait l’objet d’aucune approbation explicite. Les priorités qu’il détermine ont été fixées sans référence aux priorités régionales et notamment à la nécessité de redéployer des moyens de Paris intra-muros vers la grande banlieue pour y tenir compte de l’augmentation de la population alors que celle de Paris diminue.

Le schéma régional 1999-2004 est en cours d’élaboration et devrait être publié à la mi-1999. Il est indispensable d’entreprendre la préparation d’un nouveau projet d’établissement immédiatement. Outre qu’il permettrait de faire contribuer sans délai l’AP/HP à la réalisation du nouveau SROS, il constituerait également avec l’adoption du nouveau décret sur la tutelle et la banalisation budgétaire de l’AP/HP une indication explicite de la fin des particularismes injustifiés.

- Prévoir parallèlement à l’élaboration du nouveau SROS la fixation par le ministre chargé de la santé d’objectifs pluriannuels à la région Ile-de-France

Les relations entre les ARH et leur tutelle sont en pratique réduites. Elles reçoivent, par circulaire le plus souvent, ou par des voies plus informelles des instructions. Elles manquent cependant singulièrement d’orientations à moyen terme adaptées au cas particulier de leur région.

Cette lacune pourrait être comblée en prévoyant que toutes les agences (ou les plus importantes) reçoivent une lettre de mission pluriannuelle de leur autorité de tutelle. Adaptée à l’Ile-de-France, une proposition de cette nature permettrait de préciser à la fois les principales orientations régionales mais également les conditions de participation de l’AP/HP à la politique hospitalière régionale. L’élaboration d’ici le printemps 1999 d’un nouveau SROS fournit une bonne opportunité pour mettre au point cette lettre de mission.

B. LA RECOMPOSITION DU TISSU HOSPITALIER

Loi de financement pour 1998 - Rapport annexé :

“ En s’appuyant sur les nouveaux SROS, les ARH mèneront une politique active de recomposition du tissu hospitalier, avec le souci du décloisonnement des différentes composantes de l’offre de soins et des découpages actuels des secteurs sanitaires et du développement des réseaux ”.

1. L’ajustement quantitatif : les réductions de capacité

Pour mémoire on rappellera les causes de l’excédent de lits hospitaliers et particulièrement de lits de court séjour : le progrès des techniques médicales qui a permis de réduire les durées moyennes de séjour de moitié sur la période 1985-1996 et les évolutions démographiques qui réduisent les besoins de court séjour (en obstétrique notamment) au profit des soins de suite et des soins de longue durée. La notion d’excédent (ou de déficit) est définie comme la différence entre le besoin théorique en lits ou places tel qu’il est déterminé par la carte sanitaire et les capacités autorisées (désormais par le directeur de l’ARH).

Ainsi que l’indique le rapport figurant à l’annexe b du projet de loi, en 1994, l’excédent était de 47 700 lits et places soit un taux d’excédent de 19,5 %. L’excédent des capacités de médecine, chirurgie, obstétrique est passé à un peu plus de 31 800 lits au 30 juin 1998 (taux d’excédent : 2,9 %).

Lits et places en court séjour

Besoins théoriques au 30/06/1998

Capacités autorisées au 30/06/1998

Source Enquête direction des hôpitaux

Médecine

115 330

131 640

Chirurgie

106 514

119 773

Obstétrique

24 482

26 766

Total

(a) 246 326

(b) 278 179

excédent (b-a) = 31853

L’excédent de 31 800 lits ou places est donc l’écart constaté entre le nombre de lits autorisés et les données de la carte sanitaire (besoins théoriques).

La réduction de 15 900 lits entre 1994 et 1998 correspond à une réduction des capacités de 13 900 lits et pour le reste, à l’effet mécanique de l’augmentation de la population. Sur la période 1997-1998, le taux d’excédent est passé de 14,3 % en 1997 à 12,9 % en 1998 (- 2900 lits). Au-delà de cette diminution globale de 1,4 %, les comparaisons entre les régions montrent que sur cette dernière période les évolutions ont pu être très contrastées : deux régions (Midi-Pyrénées et Ile-de-France) suppriment 2,3 et 2,6 % de leurs capacités, cinq régions entre 1 et 2 %, les autres n’ayant que des mouvements faibles.

Sur la période 1994-1998, le rapport met en exergue l’effort significatif de réduction de capacités de deux régions dont le taux d’excédent reste supérieur à la moyenne : l’Ile-de-France et la Basse-Normandie. Au contraire le Limousin se caractérise par à la fois un excédent supérieur à la moyenne et un taux de réduction inférieur au taux moyen.

En ce qui concerne l’évolution des capacités par secteur, le rapport souligne la baisse d’un point de la part du secteur public pour l’ensemble du court séjour depuis 1995 et la tendance au renforcement du poids relatif de la médecine et de l’obstétrique à l’hôpital public, celui de la chirurgie augmentant concomitamment dans les établissements privés lucratifs. De fait le secteur public réduit surtout ses lits de chirurgie et le secteur privé surtout son obstétrique. Le rapport considère cependant que le fait marquant est la forte restructuration du secteur privé participant au service public hospitalier.

2. La rationalisation de l’offre : la coopération inter-hospitalière

a) Les instruments de la coopération interhospitalière

La loi hospitalière du 31 juillet 1991 et l’ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 mettent à la disposition des établissements hospitaliers une panoplie étendue d’instruments juridiques :

1- La convention simple (public-public ou public-privé)

2- Le syndicat inter-hospitalier - SIH (établissements du secteur public)

3- Le groupement d’intérêt public - GIP (entre deux ou plusieurs personnes de droit public ou privé dont au moins une personne publique)

4- Le groupement d’intérêt économique - GIE

5- La communauté d’établissements (établissements de santé assurant le service public hospitalier au sein d’un même secteur sanitaire - forme juridique : convention, SIH, GIP, GIE)

6- Le groupement de coopération sanitaire - GCS (public-privé).

Le rapport figurant à l’annexe b établit un bilan de l’utilisation de ces différents outils. S’agissant des quatre premiers (les plus anciens), il met en valeur :

- la prédominance de la forme la plus souple, la convention ;

- l’utilisation du GIP et du GIE pour associer public et privé dans des démarches de coopération logistique ou de cogestion d’équipements mais à petites doses (40 GIP et 30 GIE sur l’ensemble du territoire) ;

- le relatif insuccès du SIH (60), en raison de sa lourdeur et du fait qu’il est vécu comme une étape préalable à la fusion.

Le SIH pourrait néanmoins être dans certains cas un outil utile de restructuration de l’offre hospitalière si son régime juridique était revu. En effet certains établissements publics de santé peuvent être amenés à gérer ensemble des activités de soins de façon coordonnée, avec une mise en commun de praticiens et de personnels soignants. Le syndicat interhospitalier qui est la structure normale de coopération entre deux établissements publics de santé ne permet cependant pas cette gestion commune d’activités de soins car le code de la santé publique réserve cette compétence aux établissements de santé. Or, si le syndicat interhospitalier est un établissement public, il n’a pas la qualité d’établissement public de santé. La fusion des établissements composant le syndicat pour créer un nouvel établissement hospitalier gérant l’ensemble des moyens des deux unités est manifestement une solution trop lourde. Il serait donc judicieux de modifier le code de la santé publique pour permettre aux syndicats interhospitaliers d’exercer, si besoin - ce besoin étant apprécié par le directeur de l’ARH - certaines des missions d’un établissement de santé.

En ce qui concerne les deux formes les plus récentes, une enquête réalisée en juin 1998 par le ministère de la santé auprès des ARH fournit des données quantitatives sur leur développement.

- Les communautés d’établissement en 1998

La communauté d’établissement fédère dans un secteur sanitaire les établissements de santé assurant le service public hospitalier (publics, PSHP, privés concessionnaires du service public), qui doivent obligatoirement y adhérer, autour d’une charte constitutive décrivant les modes d’organisation nouveaux mis en oeuvre et les moyens mobilisés. La charte est soumise à l’agrément du directeur de l’ARH.

Au 30 juin 1998,

16 chartes concernant un total de 93 établissements ont été agréées dans 9 régions métropolitaines et à La Réunion.

6 chartes fédèrent l’ensemble des établissements publics d’un secteur sanitaire.

14 chartes ont la forme d’une convention simple et 2 d’un SIH.

28 chartes sont en cours de préparation et au total 15 % des établissements de santé se sont engagés dans une démarche ou sont prêts à le faire.

Le ministère de la santé estime la faiblesse de ces chiffres normale dans la mesure où la constitution des communautés est une modalité de mise en oeuvre des SROS dont la révision est actuellement la tâche prioritaire des ARH.

Un directeur d’ARH observe dans sa réponse au questionnaire du rapporteur qu’une modification réglementaire devrait permettre de mettre en oeuvre des directions et des commissions médicales d’établissement (CME) communes en vue de concrétiser les communautés d’établissement dans une zone sanitaire.

- Les groupement de coopération sanitaire en 1998

Le groupement de coopération sanitaire (GCS) a été créé pour constituer un cadre juridique de coopération dans le domaine des soins entre les centres hospitaliers et les cliniques privées commerciales. Sans être un établissement de santé - et donc sans être en charge des missions des établissements de santé - il permet d’utiliser et de gérer en commun des équipements, plateaux techniques par exemple et d’organiser des interventions communes de professionnels.

A ce jour, plusieurs groupements de coopération sanitaire sont à l’état de projet mais seuls trois ont été constitués. Le premier accord a pour objet le développement de la télémédecine et fédère une cinquantaine d’établissements de santé de la région Midi-Pyrénées. Le second est conclu entre deux établissements de la région Nord-Pas-de-Calais pour la mise en oeuvre d’une activité de cardiologie interventionnelle (voir ci-dessous : Restructurations et coopérations hospitalières : l’exemple de la région Nord-Pas-de-Calais). Le troisième a été constitué pour améliorer la prise en charge chirurgicale dans une ville moyenne : deux établissements ont été regroupés sur un même site, utilisent en commun le bloc opératoire unique et ont mis en place un système de gardes communes en chirurgie.

Le ministère de la santé observe que le petit nombre de GCS constitués plus d’un an après la parution du décret d’application apparaît paradoxal tant était grande l’attente à l’égard d’une telle forme de coopération, notamment dans les villes moyennes. Les réflexions engagées préalablement à la constitution éventuelle de GCS ont mis en évidence la persistance de difficultés non résolues tenant aux modes de financement, au régime de responsabilité, à la gestion des personnels ou à la nature des relations entre les établissements et les praticiens. Le ministère conclut qu’il appartient aux pouvoir publics, en liaison avec les représentants de l’hospitalisation, d’y apporter des solutions. Le rapporteur partage cette conclusion qui correspond à plusieurs observations qui lui ont été faites par les directeurs d’ARH.

L’une de ces observations a trait à la répartition des rôles entre les groupements de coopération sanitaire et les syndicats interhospitaliers. Le syndicat interhospitalier est destiné à regrouper établissements publics, établissements privés à but lucratif participant à l’exécution du service public hospitalier  et établissements privés concessionnaires du service public. Ces établissements ne peuvent en conséquence constituer entre eux un groupement de coopération sanitaire. A l’expérience ce découpage s’avère inadapté au cas des établissements privés concessionnaires du service public qui refusent de travailler avec les procédures lourdes du syndicat interhospitalier soumis à la comptabilité publique. De ce fait des opérations de restructuration impliquant la concession du service public à une clinique ne peuvent aboutir.

C’est le cas d’opérations de restructuration dans des villes de taille moyenne, 10 à 20 000 habitants, avec un bassin de population de 70 à 100 000 habitants, qui conduisent les ARH à opérer un regroupement des établissements publics et privés existants et un partage des activités entre les entités. En contrepartie du monopole conféré au secteur privé sur un secteur d’activité - généralement la chirurgie - les ARH demandent que la clinique se place sous le régime de la concession de service public mais se heurtent au problème du statut du syndicat interhospitalier. Il conviendrait donc de modifier le code de la santé publique pour enlever les établissements privés concessionnaires du service public du champ du syndicat interhospitalier et les placer ainsi implicitement dans celui du groupement de coopération sanitaire.

b) Les obstacles juridiques

Il ressort des réponses des directeurs des ARH au questionnaire du rapporteur que la coopération interhospitalière se heurte à deux obstacles juridiques principaux, la définition du champ de compétences de l’ARH et le statut des praticiens hospitaliers.

- la définition du champ de compétences de l’ARH

Le champ de compétances des ARH est limité aux établissements de santé. Le secteur médico-social échappe globalement aux compétences des ARH ce qui handicape l’aménagement de l’offre de soins. Or le vieillissement de la population française rend inéluctable l’organisation d’une meilleure prise en charge de la personne âgée. Il faudra favoriser le transfert des moyens du secteur sanitaire excédentaire en lits de court séjour vers le secteur médico-social. C’est à ce prix que l’emploi dans les structures sanitaires et médico-sociales pourra être maintenu en même temps que l’offre hospitalière recomposée de manière plus efficace. Bien que les nouveaux SROS comportent souvent un volet “ personnes âgées ”, leur mise en application risque de faire apparaître les limites d’une réforme inachevée. Le renforcement du rôle social de l’hôpital proclamé par la loi d’orientation contre l’exclusion est un argument de plus en faveur de l’élargissement des compétences des ARH aux institutions sociales et médico-sociales.

Ceci vaut aussi pour la médecine ambulatoire. En fin de compte, il est paradoxal de recomposer le système de santé autour de la notion de réseau coordonné et de ne pas en tirer les conséquences. Il conviendrait donc d’étendre les compétences de l’ARH au médico-social et, même au delà, de faire des ARH des ARS c’est à dire des agences régionales de santé pouvant intervenir dans tous les domaines : secteur hospitalier, médico-social mais aussi médecine ambulatoire et santé publique. Le problème de la segmentation administrative qui vient d’être évoqué rejoint d’ailleurs celui de la segmentation des modes de financement qu’on a vu précédemment avec la lente régionalisation de l’objectif quantifié du secteur privé.

- le statut des praticiens hospitaliers

L’hétérogénéité des statuts des praticiens entre les établissements du secteur public et ceux du secteur privé à but lucratif nuit à un rapprochement entre les uns et les autres.

·  Praticiens hospitaliers (PH) dans un établissement à but lucratif

Le statut des PH à plein temps ne leur permet pas d’exercer aussi dans les locaux d’une clinique à but lucratif, quand bien même leur hôpital coopérerait de façon étroite avec cette clinique. Ceci rend difficile l’utilisation conjointe d’un plateau technique unique privé. Des gardes communes sauveraient dans bien des petites villes des activités de soins.

·  Praticiens libéraux dans un établissement public

L’intervention des praticiens libéraux dans des établissements publics prend cinq formes dont aucune n’offre la souplesse nécessaire pour maintenir une offre de soins sur certains points du territoire :

-  la vacation qui attire peu de médecins hors des établissements les plus importants :

- la “ clinique ouverte” (art. L. 714-36 du code de la santé publique), à condition qu’une offre publique existe en contrepartie pour chaque discipline, condition peu aisée à satisfaire ;

- la participation au plateau technique de l ’établissement, pour autant que l’intervention ne nécessite pas d’hospitalisation ;

- le travail dans le cadre d’un groupement de coopération sanitaire, ce qui suppose l’existence d’un établissement de santé privé ;

- l’intervention dans un hôpital local mais le regroupement d’un hôpital local avec un centre hospitalier n’autorise plus cette possibilité ce qui, en pratique, interdit un tel regroupement.

De même, il faudrait par un assouplissement du statut des PH permettre d’intégrer au sein d’un établissement public un praticien libéral quel que soit son âge en prenant en compte son ancienneté et sa notoriété, dans le cas par exemple d’une clinique ayant accepté de cesser son activité et de la transférer au centre hospitalier avec un ou plusieurs praticiens. Plus généralement il devrait être possible de proposer, à côté du statut de PH, à des praticiens libéraux de conclure un contrat aux conditions du marché accompagné d’engagements précis de gestion.

·  Praticiens hospitaliers dans un établissement public

Certains directeurs d’ARH relèvent que la nomination par le ministre des praticiens hospitaliers dans un service et un établissement donnés est peu favorable à la mobilité qui serait nécessaire pour résoudre le problème des hôpitaux ayant une carence en praticiens soit du fait de l’isolement géographique soit des difficultés de recruter dans certaines disciplines. La nomination des praticiens hospitaliers par l’ARH en activité partagée sur plusieurs établissements d’un même secteur sanitaire permettrait une mutualisation des compétences médicales et donc la constitution de réseaux de soins.

3. Les contrats d’objectifs et de moyens (COM)

Loi de financement pour 1998 - Rapport annexé :

“ A partir d’une vision d’ensemble des enjeux de santé sur leur territoire, et avec le souci d’une légitimité démocratique renforcée, les ARH passeront avec les hôpitaux des contrats pluriannuels qui traduiront leurs priorités stratégiques, telles qu’elles doivent ressortir des SROS, en prenant compte leur projet d’établissement ”.

L’article L. 710-16 du code de la santé publique résultant de l’ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 prévoit que les ARH concluent avec les établissements de santé publics ou privés des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens qui déterminent les orientations stratégiques des établissements et décrivent notamment les projets de transformation.

Il faut rappeler que l’ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée a substitué au régime de conventionnement liant les établissements privés aux caisses régionales d’assurance maladie (CRAM) en application de l’article L. 162-22 du code de la sécurité sociale un régime de contractualisation de ces mêmes établissements avec les agences régionales de l’hospitalisation. La loi prévoit que ces nouveaux contrats doivent être conclus avant le 31 décembre 1998. Les contrats ont un champ plus large que celui des anciennes conventions. En effet, outre la fixation des tarifs de prestations, ils concernent obligatoirement la qualité et la sécurité des soins ainsi que les modalités de la participation des établissements aux actions de santé adoptées par la conférence régionale de santé. Ils prévoient, par ailleurs, les délais retenus par les établissements pour s’engager dans la procédure d’accréditation visée à l’article L. 710-5 du code de la santé publique. Enfin, ils peuvent également porter sur la coopération sanitaire et la constitution de réseaux (article L. 710-16-2 du code de la santé publique).

Conformément aux dispositions du dernier alinéa de l’article L 162-22-1 du code de la sécurité sociale et de l’arrêté du 25 août 1998 (J.O. du 2/09/98), il appartient aux directeurs des agences régionales de l’hospitalisation de fixer les tarifs d’autorité aux établissements n’ayant pas conclu de contrat d’objectifs et de moyens au 1er janvier 1999. Ces tarifs ne peuvent être fixés à un taux qui ne peut être inférieur à 50 % ni supérieur à 75 % de la moyenne des tarifs applicables aux établissements de même nature de la région ayant conclu un contrat et ayant fait l’objet d’un classement identique.

D’après l’enquête effectuée par le rapporteur directement auprès des directeurs d’ARH, les dispositions relatives aux contrats d’objectifs et de moyens sont pour l’instant peu appliquées. Un petit nombre seulement de contrats ont été signés mais beaucoup sont en cours de négociation.

TABLEAU DES CONTRATS D’OBJECTIFS ET DE MOYENS

Région

Contrats signés

Contrats en voie de conclusion

Contrats en cours de négociation

Alsace

0

16 cliniques

5 hôpitaux

Aquitaine

0

1 hôpital public

101 cliniques

Auvergne

0

4 hôpitaux publics

2 cliniques

1 hôpital

28 cliniques

Basse Normandie

0

 

4 cliniques

Bourgogne

0

Ensemble des cliniques

 

Bretagne

1 hôpital Quimper

   

Centre

1 hôpital Tours

10 hôpitaux

20 cliniques

23 hôpitaux 

23 cliniques

Champagne Ardenne

0

1 hôpital public

1 clinique

11 hôpitaux publics 

1 clinique PSPH 

16 cliniques

Haute Normandie

1 tripartite hôpital et clinique de Lillebonne

3 hôpitaux

2 hôpitaux 

29 cliniques

Ile de France

2 hôpitaux 

2 cliniques PSPH

4 cliniques

8 hôpitaux publics 

3 cliniques PSPH 

223 cliniques

5 hôpitaux publics 

1 clinique PSPH

La Réunion

0

 

5 hôpitaux 

2 cliniques PSPH 

10 cliniques

Languedoc Roussillon

0

3 hôpitaux

8 hôpitaux 

110 cliniques

Limousin

0

 

13 cliniques

Lorraine

0

 

32 cliniques

Midi Pyrénées

1 hôpital

1 clinique PSPH

9 hôpitaux

84 cliniques

 

Nord Pas de Calais

1 hôpital Valenciennes

   

PACA

0

1 hôpital

3 hôpitaux

220 cliniques

Pays de la Loire

1 hôpital Angers

1 hôpital

2 hôpitaux 

61 cliniques

Poitou Charente

1 hôpital Angoulême

1 hôpital

5 hôpitaux 

7 cliniques PSPH 

20 cliniques

Rhône Alpes

1 hôpital

1 clinique PSPH

34 cliniques

29 hôpitaux

7 cliniques PSPH 

81 cliniques

 

source : réponses des ARH, fin juillet 1998, au questionnaire du rapporteur

Cette situation est due en premier lieu à la nécessité d’avoir préalablement un projet d’établissement. Or dans certaines régions (Bretagne, Lorraine, Auvergne), quasiment aucun établissement n’avait élaboré de projet et de manière générale les établissements, privés avaient souvent négligé de se doter de projet d’établissement. Ils se trouvent désormais incités par les ARH voire obligés à la faire. Il n’est pas certain en revanche que la différence entre le projet d’établissement et le contrat pluriannuel soit bien claire dans tous les esprits, bien que le contrat apparaisse comme la déclinaison budgétaire de la mise en oeuvre du projet d’établissement, selon les termes d’un directeur d’ARH qui signale la difficulté qui pourrait naître de la contradiction entre le principe d’annualité budgétaire et le caractère pluriannuel de la contractualisation.

4. Mise en place du fonds d’investissement pour la modernisation des hôpitaux (FIMHO) et du fonds d’accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux (FASMO)

Loi de financement pour 1998 - Rapport annexé :

“ Pour faciliter ces évolutions, l’Etat met en place un fonds de modernisation hospitalière, doté de 500 millions de francs (en autorisations de programme), dès 1998, destiné à financer des investissements nécessaires à la recomposition. Parallèlement, un fonds de 300 millions de francs financé par l’assurance maladie facilitera les adaptations sociales liées à ces évolutions ”.

a) Le fonds d’investissement pour la modernisation des hôpitaux (FIMHO)

Ce fonds a été créé par la loi de finances 1998 et doté de 500 millions de francs en autorisations de programme et 150 millions de francs en crédits de paiement.

Sur 91 projets transmis par les ARH, 46 dossiers ont été jugés éligibles en 1998 au titre du FIMHO et se répartissent ainsi :

·  8 opérations de complémentarité entre établissements de santé publics et privés représentent 112 millions de francs, soit 22 % de l’enveloppe de 500 millions de francs

·  7 opérations de regroupement d’établissements de santé privés à but non lucratif représentent 130 millions de francs, soit 26 % de l’enveloppe

·  10 opérations de fusion ou de complémentarité entre hôpitaux publics représentant 72 millions de francs, soit 14,50 % de l’enveloppe

·  12 opérations d’amélioration des établissements de santé mentale représentant 50 millions de francs, soit 10 % de l’enveloppe

·  9 opérations de restructuration interne aux établissements publics représentant 135 millions de francs, soit 26 % de l’enveloppe.

La Cour des comptes note dans son rapport 1998 qu’ont été privilégiées les opérations se rapportant à la périnatalité et qu’un nombre important d’opérations sont localisées en Ile-de-France et portent sur l’adaptation de l’offre en psychiatrie.

En 1999, 350 millions de francs supplémentaires viendront abonder ce fonds.

b) Le fonds d’accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux (FASMO)

Le FASMO a été créé par l’article 25 de la loi de financement pour 1998. Ce fonds, géré par la Caisse des dépôts, doit financer des aides à la mobilité et à la formation des personnels concernés par les opérations de restructuration hospitalière. Plus précisément le FASMO prendra en charge :

- l’indemnité exceptionnelle de mobilité créée par un décret du 31 mai 1997,

- le différentiel de traitement entre la rémunération annuelle d’un agent recruté dans le cadre d’une opération de réorganisation et la rémunération annuelle d’un agent de même qualification qui aurait pu être recruté au premier échelon du premier grade de son corps, afin de compenser le surcoût pour l’établissement de l’embauche d’un agent expérimenté,

- une indemnité volontaire de départ au profit des personnels non médicaux concernés par une réorganisation hospitalière.

Toutefois, fin septembre 1998, n’étaient encore publiés ni les textes réglementaires relatifs à ces indemnités ni ceux relatifs à l’organisation, au fonctionnement et aux missions du fonds, ni a fortiori le décret d’ouverture des crédits (contribution des régimes obligatoire d’assurance maladie fixée annuellement par décret, 300 millions de francs pour 1998 et une somme identique demandée pour 1999).

5. Restructurations et coopérations hospitalières : l’exemple de la région Nord-Pas-de-Calais

(Compte rendu d’une journée de visite d’une délégation de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, conduite par M. Jean Le Garrec, président de la commission)

a) La région Nord-Pas-de-Calais: une région défavorisée dans le domaine de la santé

Les indicateurs de santé de cette région très peuplée (3,965 millions d’habitants) en font une des “ lanternes rouges ” du pays. L’espérance de vie y est de trois ans inférieure à la moyenne nationale et se situe au niveau des pays comme la Roumanie ou l’Equateur. Certaines pathologies y sont anormalement fréquentes (maladies de l’appareil circulatoire, cancers, pathologies médico-sociales).

Sans prendre parti sur les différentes causes de cette situation (notamment celles d’ordre social et environnemental), on constate que l’offre de soins y est sensiblement inférieure à ce qu’elle est, en moyenne, sur l’ensemble du territoire et que des retards sont bien marqués par rapport tant à la région parisienne qu’à des régions comparables par la population (Provence-Côte d’Azur, Rhône-Alpes).

En témoignent les indicateurs suivants :

- 223 médecins pour 100 000 habitants contre 274 pour la moyenne nationale (dont 91 spécialistes contre 134),

- 148 praticiens universitaires-praticiens hospitaliers (PU-PH) contre 300 dans les deux régions citées ci-dessus (dernier rang national des CHU)

- dans les établissements hospitaliers, encadrement en personnel non médical et praticiens hospitaliers inférieur à la moyenne nationale de 12,5 % et 28 %.

Depuis 1996, l’Etat s’est efforcé de réduire ces inégalités à travers une progression plus forte de la dotation globale hospitalière que la moyenne nationale.

Progression de la dotation globale hospitalière

1994

milliards de francs

1995

milliards de francs

1995/

1994

1996

milliards de francs

1996/

1995

1997

milliards de francs

1997/

1996

1998

milliards de francs

1998/

1997

Région Nord-Pas-de-Calais

13,1

13,7

+ 4,62%

14

+ 1,83%

14,9

 

15,2

+ 2,06%

France

219,2

231,9

+ 5,79%

236,7

+ 2,06%

     

+1,41%

On peut cependant penser que la région n’a pas encore bénéficié d’une remise à niveau qui exige la poursuite, voire l’accélération de la péréquation interrégionale.

Il faut noter enfin que les inégalités intra-régionales renforcent la difficulté d’assurer la cohérence du système hospitalier. Les disparités entre secteurs sanitaires - la région en compte 11 - sont en effet fortes (secteur de Douai : coût sanitaire par habitant 2 253 francs/secteur de Boulogne-sur-Mer : 5 845 francs).

Ces handicaps ont cependant eu au moins l’avantage de conduire les professionnels de santé de la région à surmonter les antagonismes traditionnels pour développer des structures de coordination et des partenariats associant soit les différents éléments du secteur public et non lucratif, soit le public et le privé.

Ainsi que l’a noté un des interlocuteurs de la délégation de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, la rareté crée la vertu. Toutefois, la vertu ne peut être entièrement spontanée. Le rôle d’entraînement et d’arbitrage de l’Agence régionale d’hospitalisation doit aussi être souligné.

b) Le pilotage de l’Agence régionale d’hospitalisation

Le premier schéma régional d’organisation sanitaire (SROS) 1994-1998 a permis de mener d’importantes opérations contribuant à une meilleure adaptation des structures hospitalières aux besoins de la population : reconversion de sept établissements de médecine, chirurgie ou obstétrique en soins de suite et de réadaptation, quatre procédures de regroupements d’établissements, etc... Il s’agissait de grosses et coûteuses opérations permettant de répondre à des situations de pénurie, notamment de médecins spécialistes. C’est pourquoi de telles opérations n’engendrent pas d’économies, au contraire. Les établissements neufs, plus attractifs suscitent une nouvelle clientèle dans des populations qui étaient pas ou peu traitées.

La phase actuelle qui se poursuivra à travers le deuxième SROS, en cours d’élaboration, est caractérisée par des opérations moins lourdes, la priorité étant donnée aux actions de coordination et de coopération. La révision du SROS s’appuie sur une série d’études et d’enquêtes destinées à analyser les insuffisances de l’offre de soins hospitalière dans les grands bassins de vie (cette notion étant jugée plus pertinente par l’ARH que celle de secteur sanitaire) pour chacune des grandes catégories de pathologies. L’objectif est de dresser une carte des insuffisances et des lacunes du tissu hospitalier. Sur cette base seront ensuite lancés des appels à projets sur des besoins précis et identifiés. Auront vocation à y répondre des groupements de coopération sanitaire constitués spontanément par les professionnels eux-mêmes, l’ARH se bornant à fixer le cadre et le délai de la négociation.

Comme dans la phase précédente, il n’y a guère à attendre d’économies de cette démarche, quand bien même la région Nord-Pas-de-Calais sera la première région à avoir entièrement résorbé son excédent de lits (par la suppression des lits “ papier ” et des lits très sous-utilisés). La démarche est en effet qualitative : transformer des établissements médiocres et peu actifs en établissements actifs et performants et avoir dans chaque bassin un pôle qualitatif couvrant les principales pathologies.

Un certain nombre d’opérations en cours qui ont été présentées à la délégation illustrent à la fois la méthodologie, les difficultés et les résultats de cette démarche.

c) Mise en réseau de sept maternités (six publiques et une maternité privée participant au service public hospitalier)

En mars 1996, au sein du CHRU de Lille, s’est ouvert l’hôpital Jeanne de Flandre, regroupement, dans un établissement neuf et très bien équipé, des deux maternités du CHRU et du service de médecine néonatale. Offrant les conditions optimales d’accueil et de sécurité, Jeanne de Flandre a obtenu rapidement un succès dépassant les capacités prévues (conçu pour faire 4 200 accouchements par an, il s’orientait vers l’accueil de 4 600 accouchements en 1997 et 4 800 en 1998). Face à cette situation, la direction se trouvait devant le choix suivant : soit laisser faire et vider de leur clientèle les petites maternités de la zone, avec le gros risque de ne plus exercer correctement une des missions de l’hôpital qui consiste à être le recours régional ultime en cas de naissance difficile (très concrètement, le service étant plein, les patientes pré ou post partum sont transférées ailleurs in extremis), soit s’associer avec les autres maternités pour recentrer l’hôpital sur ce rôle de recours tout en assumant la fonction de maternité de proximité pour les Lillois. C’est cette deuxième option qui a été retenue et à l’issue d’une phase de rencontres et d’échanges avec six autres maternités, a été signée, sous l’égide de l’ARH, une convention formalisant l’organisation d’un réseau de prise en charge périnatale Lille métropole.

Le fonctionnement de ce réseau est basé sur une régulation consistant à réorienter une partie des patientes sollicitant une inscription à Jeanne de Flandre vers une des autres maternités du réseau. Ne sont en effet acceptées à l’hôpital que les femmes habitant dans la “ zone Jeanne de Flandre ” et celles dont l’état pathologique justifie une prise en charge de haut niveau. Cette “ sectorisation ” quelque peu autoritaire fonctionne sans récriminations ni fraudes significatives dans la mesure où l’hôpital est en mesure de garantir la qualité des maternités qui lui sont associées et auxquelles effectivement il apporte une aide pour renforcer progressivement leurs compétences. Il y a là en quelque sorte une forme “ d’accréditation ” avant la lettre. On notera pour finir que l’hôpital Jeanne de Flandre devrait revenir au chiffre de 4 200 accouchements par an en 1999.

d) Fusion de deux établissements privés participant au service public hospitalier

Ce projet qui pourrait être achevé en 2001 a pour objet la constitution d’un pôle mère-enfant par la fusion de la maternité Saint-Philibert de Lomme et de l’hôpital pédiatrique Saint-Antoine de Lille sur un troisième site, à Lille, lui-même déjà occupé partiellement par un établissement hospitalier (Saint-Vincent). Ce rapprochement est motivé par la nécessité d’adapter la maternité et l’hôpital pédiatrique aux nouvelles exigences de la réglementation (une maternité de niveau III, c’est à dire habilitée à l’enseignement et à la recherche doit pratiquer au moins 1 500 accouchements par an et compter un service de réanimation néonatale), ainsi qu’à la demande des patients et à la réalité de la concurrence (voir ci-dessus l’attractivité de l’hôpital Jeanne de Flandre). Il est soutenu par l’ARH dans la mesure où il permet d’accroître la participation au service public dans le domaine de la périnatalité et de créer une maternité à Lille intra-muros dans un quartier comprenant des populations défavorisées.

Il se traduit par un regroupement dans une structure juridique (sur autorisation du directeur de l’ARH) et globalement, par une augmentation du budget et du personnel (+ 120 personnes dont 17 médecins) bien que la demande d’autorisation porte sur un nombre de lits inférieur de plus de cent unités au nombre actuel de lits agréés des deux établissements fusionnés. En effet est attendu de l’opération une augmentation d’activité en journées d’hospitalisation (+ 10 %) et en consultations (+ 8 %) sur l’ensemble des sites concernés par l’opération.

e) Fusion de trois cliniques du secteur privé participant au service public hospitalier (régime minier)

Contrairement au cas précédent, cette opération s’est faite au sein d’un même organisme hospitalier, l’Association hospitalière Nord Artois cliniques (AHNC), qui a décidé de regrouper trois établissements vétustes dans un bâtiment nouveau et très moderne de 226 lits, la polyclinique de Hénin Beaumont, au centre de gravité du triangle formé par les trois établissements, ce qui a facilité l’adhésion des élus et du personnel. On notera en premier lieu que les trois sites “ abandonnés ” ont été ou seront reconvertis en foyer d’accueil, centre de rééducation ou centre administratif. Une région qui a déjà souffert des friches industrielles ne peut se permettre d’y ajouter des friches hospitalières. On notera également qu’à nouveau la diminution du nombre de lits (- 146), va de pair avec une augmentation d’activité. En fait l’attrait de la polyclinique, dû au niveau de sécurité accru et à la valeur de l’équipe médicale, fait que, après un an de fonctionnement, le budget, les effectifs du personnel, le nombre de lits en chirurgie et les équipements paraissent insuffisants.

f) Création d’une unité de chirurgie cardiaque commune entre un centre hospitalier et une clinique privée

Dans la région Nord-Pas-de-Calais les deux centres pratiquant la chirurgie cardiaque (CHRU de Lille et clinique du Bois à Lille) sont saturés. Le délai d’attente est de quatre mois et entraîne des “ fuites ” vers la région parisienne où une opération est possible dans un délai de quarante-huit heures. En octobre 1997, le centre hospitalier de Lens a obtenu une autorisation de soins pour la chirurgie cardiaque, en dérogation à la carte sanitaire, sous condition d’exploitation conjointe avec la polyclinique de Bois-Bernard. En effet, les deux établissements qui avaient déjà l’habitude de travailler ensemble dans ce domaine (mise en place d’une astreinte commune d’angioplastie coronaire d’urgence) ont décidé de créer une unité commune de chirurgie cardiaque qui sera opérationnelle le 1er septembre 1999.

Cette création a pris la forme juridique d’un groupement de coopération sanitaire qui détiendra et assurera l’exploitation des matériels nouveaux demandés (pompes de circulation extra-corporelle). L’activité sera réalisée sur le site de Lens mais répartie égalitairement entre les deux établissements. Les lits seront pour moitié publics et pour moitié privés. La convention constitutive du groupement prévoit que le centre hospitalier met à la disposition du groupement le personnel non médical nécessaire. Ce personnel garde son statut public et est rémunéré par le centre hospitalier. Il a en effet paru impossible de faire cohabiter dans le même service des personnels à statut différent. En revanche, il était nécessaire que praticiens hospitaliers et médecins de la clinique exercent conjointement dans la nouvelle unité. Afin de neutraliser la différence d’origine vis à vis du patient, il a été convenu que les hospitaliers auraient un statut de praticien hospitalier à temps partiel complété par un contrat avec la clinique pour couvrir la partie privée de leur activité. Cette solution permettra d’harmoniser les rémunérations des uns et des autres.

La convention constitutive a été approuvée par l’ARH. C’est dire qu’elle a aussi l’accord de l’assurance maladie puisque le directeur de la Caisse régionale est vice-président de la commission exécutive. On voit là l’intérêt d’avoir réuni les tutelles au sein d’un organisme unique. Or, le cas lensois est très innovant puisque les groupements de coopération sanitaire ont été utilisés jusqu’à présent pour gérer des équipements lourds et non des lits. Il a fallu donc à la fois de l’imagination chez ses initiateurs et de l’ouverture d’esprit de la part des décideurs.

En contrepoint de cette expérience on relèvera que la création d’un centre de cardiologie interventionnelle mariant le centre hospitalier de Valenciennes et un établissement privé s’est faite sous la forme plus souple d’une convention de partenariat garantissant aux praticiens privés, sur un plateau public, la totale liberté d’exercice dans les conditions habituelles de la médecine libérale.

M. Gérard Dumont, directeur de l’ARH, estime que le groupement de coopération sanitaire est une bonne formule mais qu’effectivement de simples conventions peuvent suffire et que, de manière générale, “ la boîte à outils ” permet de résoudre la plupart des problèmes à condition que les caisses d’assurance maladie jouent le jeu.

C. LE CONTRÔLE DE L’ACTIVITÉ LIBÉRALE À L’HÔPITAL

Loi de financement pour 1998 - Rapport annexé :

“ Sur la base des observations de la Cour des comptes relatives à l’activité libérale des praticiens hospitaliers, une attention particulière sera portée à l’évolution des règles d’encadrement de cette activité et à leur contrôle. ”

Interrogé par le rapporteur sur les suites données aux observations figurant sur ce sujet dans le rapport de la Cour des comptes 1997, le ministère de la santé lui a indiqué que “ des mesures étaient à l’étude qui visent à ce que l’activité libérale s’exerce dans les meilleures conditions possibles. ”

Le rapporteur estime qu’une mesure s’impose rapidement, sans étude supplémentaire, le rapport de la Cour des comptes ayant parfaitement défriché le sujet. Elle concerne le mode d’encaissement des honoraires.

Il faut rappeler que les praticiens hospitaliers exerçant une activité libérale à l’hôpital reversent une partie de leurs honoraires à l’établissement. Cette redevance est soit prélevée à la source, soit versée trimestriellement, selon que le praticien a choisi, comme le prévoit l’article L 714-32 du code de la santé, de percevoir ses honoraires par l’intermédiaire de l’établissement ou directement. En pratique la perception directe a été retenue par la quasi totalité des praticiens et le calcul de la redevance repose sur les déclarations d’activité du praticien. Dans son rapport 1997, la Cour des comptes souligne que les contrôles opérés par les chambres régionales, par rapprochement avec les données portant sur le remboursement des actes, ont fait ressortir “ une fréquence élevée de minorations de déclarations, parfois pour des volumes importants d’honoraires ”.

Comme les conventions nationales des médecins généralistes et spécialistes de 1997 l’avaient stipulé, il convient d’obliger désormais les praticiens à percevoir leurs honoraires par l’intermédiaire de l’administration hospitalière, “ ce qui devrait réduire dans une large mesure les cas de minoration de déclaration. ” (rapport de la Cour des comptes).

DEUXIÈME PARTIE :

LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL

La branche des accidents du travail et maladies professionnelles est cette année centenaire, puisqu’elle a été pionnière en matière de protection sociale avec la loi du 9 avril 1898 qui a été la première à assurer la couverture d’un risque social, le risque professionnel.

Pour autant, beaucoup reste encore à faire aujourd’hui. Il s’est produit, dans la décennie 1990, plus de 1,3 million d’accidents du travail par an (dont 730 ont été mortels en 1996). La CNAMTS a également recensé 10 345 maladies professionnelles reconnues en 1994, 11 367 en 1995 et 12 686 en 1996. Dans son rapport remis au Gouvernement en juillet 1998 sur la gestion du risque et des problèmes de santé publique posés par l’amiante en France, le professeur Claude Got a mené une étude exhaustive qui va bien au-delà des seules maladies liées à l’amiante et prouve que les procédures sont souvent déficientes et les taux de sous-déclaration considérables.

En s’appuyant sur ce constat, Mme Martine Aubry, ministre de l’emploi et de la solidarité, a annoncé le 29 juillet 1998 un certain nombre de mesures pour permettre d’améliorer les conditions de reconnaissance et de réparation des maladies professionnelles. Plusieurs d’entre elles sont de nature réglementaire et interviendront dans le courant de l’année 1999. Leur impact financier est d’ores et déjà intégré dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Celui-ci comporte également quelques mesures législatives dans ce domaine.

En poursuivant l’oeuvre accomplie depuis un siècle, il s’agit de faire progresser la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles au bénéfice des victimes et de mener une politique toujours plus active de prévention, afin que le travail ne soit plus un lieu dangereux.

I.- UNE BRANCHE CENTENAIRE

A. LA LOI DE 1898 SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL A MARQUÉ UNE TRES NETTE AVANCÉE SOCIALE

Au cours de la seconde moitié du XIXème siècle, la question de la réparation des accidents du travail s’est trouvée posée avec une acuité sans cesse croissante. En effet, le développement du machinisme rendait chaque année plus fréquent le nombre des accidents du travail, tandis que les idées en faveur d’une plus grande protection pour les travailleurs face aux risques inhérents à l’exercice de leur profession progressaient dans la société et sur le plan politique.

La réparation des accidents du travail restait soumise au droit commun de la responsabilité, tel qu’il résultait de l’article 1382 du code civil. Il fallait que la victime apporte la preuve d’une faute commise par son employeur et d’un lien de causalité entre cette faute et l’accident. Si cette preuve était apportée, la victime obtenait réparation intégrale du dommage. Mais il s’agissait d’une preuve généralement difficile à administrer, car le salarié prenait le risque d’être licencié et car nombre d’accidents étaient aussi dus à une négligence du salarié ou à un cas de force majeure.

L’intervention du législateur apparaissait donc inévitable. Après dix-huit années de discussion parlementaire et de travaux préparatoires, et après la loi de 1884 sur l’assurance des accidents du travail qu’avait fait voter le chancelier Otto von Bismarck dès 1884 en Allemagne, la loi du 9 avril 1898 entrait en vigueur le 1er janvier 1899. Cette nouvelle législation spécifique, la première législation sociale en France, était fondée sur la notion de risque professionnel. Il avait paru équitable de faire supporter par l’employeur les conséquences dommageables du risque qu’il avait créé par les machines et installations dont il tirait profit, même s’il n’avait commis aucune faute. Par contre, la réparation des conséquences de l’accident n’était plus que partielle, selon des modalités fixées forfaitairement par la loi. La faculté donnée aux employeurs de s’assurer leur permettait d’ailleurs de satisfaire à leurs obligations sans avoir à supporter les aléas individuels de la gestion du risque.

En instituant une responsabilité pour risque, le législateur a ainsi créé une obligation de prise en charge par l’employeur qui s’éloignait tant de la prévoyance individuelle que de la responsabilité civile. Il a dès lors incité les employeurs à garantir leur solvabilité contre ce risque, d’abord par la création volontaire de caisses de compensation mutualistes, puis par un système d’assurance rendu obligatoire par la loi du 31 mars 1905. Ce faisant, la loi du 9 avril 1898 a eu un caractère fondateur. Elle créait la notion de risque social qui a ensuite été étendue à d’autres événements de la vie (vieillesse, maladie...) et elle mettait en place un système d’assurance permettant de résoudre le problème du financement.

Il s’agit bien d’un compromis historique car, en échange d’une réparation automatique sur le fondement du principe de la présomption d’imputabilité à l’employeur, l’indemnisation des préjudices subis par la victime n’est plus que partielle et forfaitaire. L’objectif global de la nouvelle législation, au-delà de l’aide individuelle apportée à la victime, est en effet d’assurer le maintien de la capacité de travail plutôt que de rendre intégralement justice aux accidentés du travail. Ainsi la rente est-elle calculée sur la base d’un salaire corrigé dit utile et d’un taux d’incapacité également corrigé. De même et contrairement au droit commun, le préjudice moral n’est pas réparé. En revanche, l’employeur bénéficie d’un principe d’immunité en vertu duquel toute action judiciaire à son encontre sur cette base est exclue, sauf faute inexcusable ou intentionnelle.

Le champ d’application de cette nouvelle législation, initialement limité aux entreprises industrielles, a été progressivement étendu aux exploitations agricoles (1922), aux gens de maison (1923) et aux voyageurs de commerce (1937). L’ensemble des travailleurs se trouvait ainsi protégés, à la seule condition que le contrat de louage de services par lequel ils étaient liés à un employeur ait été exécuté comme tel. Par ailleurs, la loi du 25 octobre 1919 a étendu le bénéfice de la législation sur les accidents du travail à certaines maladies professionnelles, c’est-à-dire à des affections provoquées par l’exercice normal de certaines professions ou de certains travaux.

B. LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES ONT ETE INTÉGRÉS DANS LA SÉCURITÉ SOCIALE EN 1947

La création, en 1945, d’une organisation générale de la sécurité sociale a entraîné une réforme importante de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, réalisée par la loi n° 46-2426 du 30 octobre 1946 sur la prévention et la réparation des accidents du travail et maladies professionnelles. L’intégration du risque professionnel au sein de la sécurité sociale impliquait en effet de considérer l’accident du travail sous l’angle du seul risque social, au même titre que la maladie, et non plus sous celui de la responsabilité sans faute de l’employeur. La socialisation des risques ainsi réalisée était toutefois déjà en germe dans la loi du 9 avril 1898.

Si l’employeur n’est plus directement responsable des accidents du travail survenus à ses salariés, il continue à en supporter la charge, le financement de ce qui n’est pas encore une branche autonome étant assuré par une cotisation exclusivement patronale. Il ne s’agit plus de sociétés d’assurance privées à but lucratif qui gèrent ce système mais d’un véritable service public.

La nouvelle législation étend également le bénéfice du nouveau régime intégré à la branche maladie en abandonnant la notion traditionnelle de contrat de louage de service au profit de celle, plus large, de lien de dépendance qui caractérise l’ensemble de la sécurité sociale. De même, l’accident survenant pendant le trajet entre le domicile et le lieu de travail est aussi assimilé à un accident du travail.

L’indemnisation des victimes et de leurs ayants droit reste forfaitaire, les prestations étant toutefois sensiblement améliorées notamment en ce qui concerne le taux des rentes attribuées en cas d’incapacité permanente ou de décès consécutif à l’accident. La procédure est aussi simplifiée, l’autorité judiciaire n’intervenant plus qu’en cas de litige entre la caisse de sécurité sociale et la victime.

La loi n° 46-2426 du 30 octobre 1946 précitée met également en place des mécanismes de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, à la fois par un système incitatif de fixation des taux de cotisation, par l’obligation faite aux employeurs de respecter certaines règles de sécurité et par des interventions directes des caisses de sécurité sociale. Une importance particulière est enfin apportée aux moyens permettant à la victime de récupérer sa capacité de travail, non seulement en lui assurant les soins médicaux nécessaires, mais aussi en développant ses possibilités de rééducation professionnelle, de réadaptation fonctionnelle et de reclassement.

La loi n° 72-965 du 25 octobre 1972 relative à l’assurance des travailleurs de l’agriculture contre les accidents du travail et les maladies professionnelles a créé le régime obligatoire des salariés agricoles, intégré dans l’organisation générale de la mutualité sociale agricole (MSA). Pour les exploitants agricoles par contre, il n’y a pas de régime obligatoire car il est souvent difficile de départager l’activité professionnelle de la vie quotidienne. Les accidents du travail et la vie privée sont donc couverts par la même assurance obligatoire.

C. LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL A ACQUIS SON AUTONOMIE DE GESTION EN 1994

Pour mieux prendre en compte les spécificités de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles, il convenait toutefois d’isoler ce risque qui avait été rattaché à la branche maladie du régime général en 1947. Il importait en effet de tenir compte du mode particulier de tarification des accidents du travail et de la nécessité de développer une politique de prévention tout à fait spécifique.

La Commission des accidents du travail et maladies professionnelles a été créée par l’article 9 de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale. Elle se substitue au conseil d’administration de la CNAMTS pour la gestion de la branche. Elle est composée paritairement entre les représentants des assurés sociaux et des employeurs de dix membres du conseil d’administration de la CNAMTS et exerce les compétences de celle-ci pour la branche. A cette fin, elle doit notamment déterminer la tarification permettant de garantir l’équilibre financier. Elle est garante de l’autonomie de la branche, mais dans le respect de l’objectif de dépenses voté par le Parlement dans la loi de financement de la sécurité sociale.

La branche des accidents du travail dispose désormais des moyens lui permettant d’assumer pleinement ses responsabilités. Il convient toutefois de rappeler que le législateur n’a pas entendu, par la loi du 25 juillet 1994 précitée, mettre en place une gestion paritaire totalement autonome de la branche de manière analogue à celle qui prévaut dans les régimes de retraite complémentaire obligatoires. Ainsi, toutes les décisions relatives à la définition du risque indemnisé demeurent de la compétence exclusive de l’Etat.

II.- UNE BRANCHE ÉQUILIBRÉE EN 1998

A. LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL CONSOLIDE SON ÉQUILIBRE FINANCIER

1. Les objectifs fixés par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 ont été respectés

L’objectif de dépenses pour la branche des accidents du travail et maladies professionnelles dans l’ensemble des régimes obligatoires de base, fixé à 50,8 milliards de francs par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, a été globalement respecté puisque l’exécution prévisionnelle est de 51,1 milliards de francs. L’écart observé de 300 millions de francs est essentiellement dû à des dépenses de transferts nets. Le Gouvernement propose de le fixer à 53 milliards de francs pour l’année 1999 - soit une augmentation de 4,3 % correspondant notamment au coût des mesures annoncées qui seront prises pour améliorer la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Cet objectif de dépenses inclut le versement forfaitaire annuel de la branche accidents du travail au profit de la branche maladie du régime général, institué par l’article 30 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 dans le but de compenser les dépenses supportées par cette dernière au titre des affections non prises en charge en application de la législation sur les maladies professionnelles. Ce versement a été fixé, à titre provisionnel, à un milliard de francs pour 1997. Il a fait l’objet d’une estimation plus précise par la commission présidée par M. Alain Deniel, conseiller-maître à la Cour des comptes qui, dans son rapport remis à la ministre de l’emploi et de la solidarité le 9 octobre 1997, a mis en lumière la véritable ampleur du phénomène de sous-déclaration des maladies professionnelles.

Au vu des conclusions de ce rapport, le décret n° 98-178 du 16 mars 1998 a fixé forfaitairement à 900 millions de francs pour 1997 le montant que la branche accidents du travail devait à la branche maladie. Ce montant doit être révisé tous les trois ans en fonction de plusieurs critères qualitatifs, et il est revalorisé pendant la période intermédiaire dans les mêmes conditions que les rentes d’accidents du travail. En conséquence, le montant a été fixé à 909,9 millions de francs pour 1998. Cependant, le versement forfaitaire pour 1997 ayant été surévalué, le transfert de fonds effectif entre la branche accidents du travail et la branche maladie n’a été que de 809,9 millions de francs en 1998. Compte tenu d’une revalorisation des rentes de 1,2 % en 1999, le versement pour cette année, inclus dans l’objectif de dépenses de la branche, est de 921 millions de francs.

Les dépenses du régime général représentant 86 % de l’ensemble des dépenses de la branche, il est possible d’envisager l’équilibre global de la branche à travers l’équilibre correspondant au sein du seul régime général. Depuis la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 précitée, l’équilibre de la branche des accidents du travail et maladies professionnelles doit y être réalisé distinctement de celui de la branche maladie, les deux trésoreries étant séparées. Comme en 1995 et en 1996, la branche a été légèrement excédentaire (274 millions de francs) en 1997. Cette situation devrait encore s’améliorer à la fin de l’exercice 1998, avec un excédent prévisionnel estimé à 1,754 millions de francs par la Commission des comptes de la sécurité sociale.

2. Une baisse des taux de cotisation peut être envisagée

Les conditions générales de l’équilibre de la branche justifient donc une baisse des cotisation dues par les employeurs en 1999. Il convient en effet de rappeler à cet égard que l’excédent cumulé de la branche depuis l’arrêté du 26 décembre 1994 apurant les comptes est de 1,44 milliard de francs. Après avoir maintenu un taux net de cotisation de 2,262 % en 1997 et 1998, le Gouvernement a décidé de le diminuer à 2,21 % en 1999. Les entreprises devraient ainsi bénéficier d’une baisse globale de leurs charges sociales de l’ordre d’un milliard de francs.

En cela, le Gouvernement suit les recommandations émises par la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles le 1er juillet 1998. Il faut rappeler à cette occasion la nouvelle procédure de fixation des taux de cotisation de la branche instituée par l’article 13 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998. La commission a désormais jusqu’au 31 janvier pour délibérer sur les taux à fixer, conformément à la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 précitée. Elle doit respecter les conditions générales de l’équilibre financier de la branche fixées à l’automne dans la loi de financement de la sécurité sociale. En 1998, suite à une situation de conflit avec le Gouvernement et faute de quorum, la commission n’avait pas pu délibérer et les taux avaient été fixés par arrêté conjoint de la ministre de l’emploi et de la solidarité et du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie le 6 mars 1998. Cette situation ne devrait donc pas se reproduire en 1999.

Il faut rappeler également que le taux net des cotisations patronales d’accidents du travail est fixé chaque année en fonction de l’évolution du coût du risque des trois dernières années, rapportée à la masse salariale pour la même période, et de trois majorations (M1, M2 et M3) destinées à financer certaines charges spécifiques de la branche. Ce mécanisme de tarification a un caractère incitatif au développement de la prévention à l’intérieur des entreprises. Une diminution du risque doit entraîner mécaniquement une baisse des cotisations, ce qui incite les entreprises à poursuivre leurs efforts de prévention.

Cette situation correspond à la logique de fonctionnement tout à fait spécifique de la branche. En effet, l’objectif des règles de tarification des accidents du travail, c’est-à-dire la fixation des cotisations correspondantes, est de faire varier les ressources de la branche de manière à couvrir le coût des dépenses sans dégager ni excédent, ni déficit. Dans la mesure où la législation sur les accidents du travail et des maladies professionnelles vise à assurer la réparation du préjudice subi par les victimes, il est normal que les cotisations demandées aux employeurs évoluent en fonction de la valeur du risque, c’est-à-dire du montant des dépenses occasionnées par les accidents et maladies enregistrés au cours d’une période donnée dans l’entreprise.

Pour des raisons économiques, le degré d’individualisation de la valeur du risque varie selon la taille de l’établissement ou de l’entreprise :

- dans les établissements de moins de dix salariés n’appartenant pas à un entreprise comportant dix salariés ou plus, les cotisations d’accident du travail sont calculées sur la base d’un taux brut, c’est-à-dire d’un taux collectif exprimant la valeur moyenne nationale du risque afférent à l’activité exercée ;

- dans les entreprises de deux cents salariés et plus10, les cotisations sont déterminées par établissement sur la base de taux nets réels, qui sont calculés en fonction de la valeur du risque propre à chaque établissement ;

- dans les entreprises dont l’effectif est compris entre dix et deux cents salariés, on applique des taux mixtes comportant une fraction du taux brut et une fraction du taux net réel.

Ces règles de tarification ont un effet “ auto-équilibrant ”, toute augmentation du nombre ou de la gravité des accidents du travail entraînant automatiquement une augmentation du montant des cotisations perçues. Cependant, le montant des cotisations d’accidents du travail encaissées varie également en fonction de l’évolution de l’assiette, c’est-à-dire de la masse salariale, ce qui explique l’apparition d’excédents ou de déficits temporaires.

B. LE DÉVELOPPEMENT D’UNE POLITIQUE DE PRÉVENTION AMBITIEUSE DOIT PERMETTRE D’AMÉLIORER LA SÉCURITÉ AU TRAVAIL

La politique de prévention des risques professionnels doit figurer au nombre des priorités d’action des pouvoirs publics et des caisses de sécurité sociale, compte tenu du nombre toujours trop important d’accidents du travail et de maladies professionnelles.

Le régime général y a consacré 2,15 milliards de francs en 1998 (soit une augmentation de 1,7 % par rapport à 1997) au travers du Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Ce fonds finance notamment les actions propres de la CNAMTS et des CRAM en matière de prévention, ainsi que le budget de l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS).

Il faut rappeler que les cotisations favorisent la prévention puisque l’entreprise qui parvient à mieux protéger ses salariés contre les risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles bénéficie en retour d’une baisse de ses charges sociales. Des ristournes sur cotisation peuvent aussi être accordées aux employeurs justifiant d’une politique de prévention particulièrement efficace au sein de leur entreprise. Une cotisation supplémentaire peut à l’inverse être imposée pour tenir compte des risques exceptionnels présentés par une exploitation.

Des avances peuvent également être attribuées en vue de faciliter la réalisation d’aménagements destinés à assurer une meilleure protection des travailleurs. De même, les entreprises qui souscrivent un contrat de prévention, transposant au niveau local les actions de prévention spécifiques à leur branche d’activité et définies dans une convention d’objectif nationale, peuvent bénéficier d’avances pouvant atteindre jusqu’à 0,6 % du produit des cotisations. Ces avances sont acquises en cas d’amélioration effective de la protection contre les risques d’accident du travail. Toutes branches professionnelles confondues, 1 410 contrats engageant 13 millions de francs ont été signés par les entreprises en 1997, ainsi que 7 conventions d’objectifs nationales.

Les orientations du Gouvernement pour développer la politique de prévention des accidents du travail ont été présentées devant le Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels le 17 février 1998 et le 3 juillet 1998. Plusieurs axes sont envisagés. La création de l’Institut de veille sanitaire par la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l’homme est un élément important de l’organisation et du développement de la surveillance épidémiologique en ambiance de travail. Les études, recherches et expertises appliquées au milieu du travail pourront ainsi être amplifiées.

L’adaptation et l’amélioration de la réglementation nationale sera aussi réalisée à l’occasion de la transcription des directives communautaires sur les risques chimiques et cancérogènes, sur les normes de base en matière de radioprotection et sur les appareils de levage. Il s’agira également de mieux contrôler le respect des normes ainsi fixées, au titre des programmes d’action prioritaires de la médecine du travail en 1999. Ces programmes comporteront notamment des actions spécifiques sur les chantiers susceptibles de mettre les travailleurs en contact avec l’amiante.

Depuis 1993, les partenaires sociaux au sein de la CNAMTS ont adopté des programmes quadriennaux de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles et d’amélioration des conditions de travail. Le programme 1997-2000 comporte quatre axes principaux : amplifier l’action pour la maîtrise des risques professionnels, anticiper les évolutions qui affecteront l’entreprise, optimiser le fonctionnement de l’Institution de prévention11 et mieux faire connaître cette institution ainsi que sa politique.

Toutes ces différentes interventions doivent surtout être mieux coordonnées au plan opérationnel. Il faudrait notamment mieux utiliser l’expérience acquise dans ce domaine par l’inspection du travail, la médecine du travail et les comités d’hygiène et de sécurité.

C. LES DROITS DES VICTIMES DOIVENT ÊTRE MIEUX PRIS EN COMPTE

1. Garantir aux victimes de meilleurs délais

Il est indispensable de garantir aux victimes le respect d’un délai raisonnable pour être indemnisé en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Il s’agit d’une mesure de décence, trop souvent contrariée par des décisions administratives trop procédurières.

Il a été constaté par les rapports Deniel et Got que les caisses de sécurité sociale contestent systématiquement les demandes d’indemnisation des maladies professionnelles. Lorsqu’une caisse entend contester le caractère professionnel d’une maladie, elle doit en informer par écrit la victime et l’employeur dans un délai de 60 jours en vertu de l’article R. 441-10 du code de la sécurité sociale. Mais une fois la contestation préalable soulevée, la caisse n’est plus tenue par aucun délai. Le Gouvernement envisage donc de modifier par décret la réglementation sur ce point, en supprimant cette procédure et en encadrant dans un délai fixe de trois mois, éventuellement renouvelable, les réponses des caisses. Il conviendra notamment de préciser qu’en cas d’absence de réponse des caisses, le caractère professionnel de la maladie sera considéré comme définitivement établi.

L’article 31 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 redéfinit quant à lui le délai de prescription de deux ans pour les victimes d’une maladie professionnelle. Par l’absence de connaissance du lien possible entre leur maladie et leur ancien travail, beaucoup d’entre elles se trouvaient forcloses et considéraient à juste titre le système comme inéquitable. Ce délai de prescription ne devra donc plus courir à compter de la première constatation médicale de la maladie, mais de l’information de la victime par certificat médical du lien possible entre sa maladie et son activité professionnelle passée. Un dispositif particulier et plus avantageux de réouverture des droits est aussi prévu pour les victimes de l’amiante, dont la durée d’incubation de la maladie est particulièrement longue.

2. Améliorer la prise en charge des maladies professionnelles

a) Une meilleure reconnaissance des maladies professionnelles

Les règles fixant les modalités de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles doivent être en constante évolution pour tenir compte de la réalité des risques observés sur le terrain.

Le système classique de reconnaissance des maladies professionnelles repose sur des tableaux annexés à l’article R. 461-3 du code de la sécurité sociale, chacun d’eux indiquant la maladie professionnelle en cause, ses principales manifestations, les travaux susceptibles de la provoquer, ainsi que le délai de prise en charge à partir du moment où l’assuré a cessé d’être exposé au risque. Ces tableaux n’ont pas été révisés en 1998. Le Gouvernement envisage par contre deux modifications aux tableaux des maladies professionnelles en 1999, qui entraîneront un surcoût de 200 millions de francs pour la branche accidents du travail.

Les lombalgies et dorsalgies les plus graves ne figurent pas actuellement parmi le champ des maladies professionnelles. Le Gouvernement envisage donc de créer deux nouveaux tableaux (n° 97 et 97 bis) au vu des nombreuses études menées ces dernières années sur le caractère souvent psychosomatique de ces affections. Il s’agit notamment de prendre en charge les sciatiques par hernie discale provoquées par des travaux de manutention manuelle de charges lourdes ou des travaux exposant habituellement à des vibrations de basses et moyennes fréquences.

Les pneumoconioses sont des maladies professionnelles (parfois dues à l’amiante) reconnues dans des conditions beaucoup trop rigoureuses. Le Gouvernement propose donc de supprimer les dispositions réglementaires qui empêchent aujourd’hui une juste prise en charge de ces maladies, notamment en ce qui concerne la durée d’exposition au risque et l’obligation de passer devant un collège spécial de trois médecins pour obtenir la reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie.

Par ailleurs, il faut rappeler que le mode de reconnaissance des maladies professionnelles a été amélioré en 1993 par l’introduction d’un système complémentaire qui permet de reconnaître la nature professionnelle d’une maladie sans attendre la révision du tableau correspondant ou la création d’un nouveau tableau. En effet, ce système est fondé sur une expertise individuelle confiée à des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles composés de trois médecins. Il permet, lorsque le comité estime qu’il y a un lien direct de cause à effet entre le travail habituel de la victime et la maladie, de reconnaître le caractère professionnel de celle-ci dans les deux cas suivants :

- la maladie figure dans un tableau mais une ou plusieurs conditions relatives au délai de prise en charge, à la durée d’exposition au risque ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies ;

- la maladie ne figure pas dans un tableau mais a entraîné le décès de la victime ou un taux d’incapacité permanente au moins égale aux deux tiers.

Pour la période s’étendant de leur installation au 30 juin 1998, les comités régionaux ont rendu 5 405 avis, dont plus de la moitié (53,6 %) sont favorables dans le premier cas (maladies figurant sur un tableau) et seulement le quart dans le deuxième cas (maladies hors tableau), en raison des conditions strictes posées. L’intérêt de cette procédure est ainsi démontré.

b) Des modalités de réparation plus favorables

En cas d’incapacité permanente, la victime a droit à une rente viagère, calculée en fonction du salaire antérieur et du taux d’incapacité permanente. Ce taux est déterminé d’après un barème prenant en compte la nature de l’infirmité, l’état général ou l’âge de la victime. Mais il n’est pas opposable aux caisses et n’a donc qu’un caractère facultatif. Le Gouvernement propose de réactualiser ce barème au vu des dernières connaissances médicales, avec l’aide notamment du Haut comité médical de la sécurité sociale, et de l’annexer au code de la sécurité sociale pour que les victimes en aient connaissance et puissent l’opposer aux caisses.

Les rentes d’accidents du travail seront par ailleurs versées mensuellement dès 1999 pour toutes les victimes ayant un taux d’incapacité permanente égal ou supérieur à 50 %, contre seulement 66,66 % aujourd’hui. 49 000 personnes seront concernées par cette mesure qui représentera un coût de 150 millions de francs pour la branche accidents du travail en 1999. On rappellera que les autres rentes restent versées trimestriellement.

Enfin, l’article 28 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 étend aux ayants droit d’une personne décédée ayant un taux d’incapacité d’au moins deux tiers un capital décès équivalant, selon le droit commun, à trois mois de salaires sous plafond. Cette mesure est à la charge de la branche maladie du régime général.

EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION

La commission a examiné le rapport de M. Claude Evin sur les branches assurance maladie et accidents du travail au cours de sa réunion du mardi 20 octobre 1998.

Après l’exposé du rapporteur, le président Jean Le Garrec a souligné la nécessité d’effectuer l’année prochaine de nouvelles missions auprès de quelques ARH.

M. Jean Bardet s’est étonné que le projet de loi de financement ne reprenne qu’un seul des objectifs de santé publique sur les dix présentés par la Conférence nationale de santé, à savoir le dépistage des cancers, et qu’il n’y ait dans ce projet aucune disposition sur l’hôpital qui représente plus de 50 % des dépenses.

M. Denis Jacquat a souhaité savoir dans quel délai et sous quelle forme serait présenté le texte relatif à la pharmacie évoqué par le rapporteur.

M. Germain Gengenwin a posé des questions sur :

- le caractère contestable de l’utilisation du système de la lettre-clé flottante comme instrument de maîtrise des dépenses d’assurance maladie ;

- la position du rapporteur sur la baisse prévisible des cotisations d’accidents du travail dues par les employeurs ;

- les modifications qui seraient apportées aux seuils de population conditionnant l’ouverture d’une pharmacie.

M. Jean-Luc Préel, après avoir souligné qu’il serait souhaitable de pouvoir disposer du rapport le plut tôt possible avant la séance publique, a souhaité obtenir des précisions sur :

- les mécanismes et les critères qui seront mis en œuvre par les ARH en 1999 pour corriger les inégalités géographiques constatées ;

- les mesures à mettre en œuvre pour régler le problème des professions médicales “ sinistrées ”, comme celle d’anesthésiste, car il serait absurde qu’un manque d’anesthésistes soit la cause de la fermeture d’un établissement ;

- les propositions à faire pour mettre en œuvre une politique de prévention et d’éducation sanitaire coordonnée visant à réduire la mortalité évitable, le projet de loi de financement ne comportant pas de mesure significative allant dans ce sens ;

- le bien-fondé de la clause de sauvegarde économique prévue par le présent projet de loi de financement qui aurait pour conséquence de pénaliser les médecins “ vertueux ” et qui, par son mécanisme d’ajustement des tarifs infra-annuel, prive les médecins de toute lisibilité sur le régime applicable.

M. Bernard Accoyer, après s’être étonné du silence du projet de loi sur le financement de l’hôpital, a présenté les observations suivantes :

- L’importance du problème de la démographie des professions de santé n’est pas assez prise en compte.

- Le mécanisme de la lettre-clé flottante ne relève pas d’une maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

- Il est regrettable que le projet de loi de financement ne comporte pas de disposition relative à la formation médicale continue, à l’évaluation des pratiques, à la coordination des soins et à l’informatisation de la branche maladie, alors que cette dernière se révèle être un échec très coûteux.

- On peut se demander sur la base de quels critères médicaux a été déterminée la hausse de l’ONDAM, étant souligné que cette hausse sera largement absorbée par le dépassement très probable de l’objectif 1998 ; en particulier, ne semblent pas avoir été pris en compte les incidences du vieillissement de la population, de la commercialisation de nouvelles molécules comme le Viagra, l’impact de ce dernier médicament sur les dépenses de santé remboursées pouvant être évalué dans l’hypothèse la plus basse à près de 300 millions de francs, et de la régularisation de 100 000 clandestins, laquelle devrait coûter près de 1,25 milliard de francs à la sécurité sociale.

M. Edouard Landrain a posé des questions sur :

- l’état d’avancement des Etats généraux de la santé ;

- les causes de l’augmentation des déclarations de maladies professionnelles ;

- l’attitude des chambres régionales des comptes à l’égard des hôpitaux publics qui s’efforcent de promouvoir des pratiques innovantes en matière de coopération entre établissements.

M. Yves Bur a formulé les remarques suivantes :

- Il convient de rappeler que le plan Juppé était fondé sur la responsabilisation des acteurs du système de santé. Or, l’avenir des relations conventionnelles semble compromis si le Gouvernement n’hésite pas à revenir sur des mesures ayant fait l’objet d’un accord en cas de dérapage, même léger, des dépenses. Ainsi, la convention des chirurgiens dentistes, qui a fait l’objet des critiques de la Cour des comptes, prévoyait l’institution d’un dispositif d’encadrement des dépenses de prothèses en contrepartie du relèvement de la tarification de certains actes dans la nomenclature ; il n’est pas cohérent que le Gouvernement prenne prétexte de cette augmentation pour remettre en cause l’accord conclu.

- Les modalités d’application des trente-cinq heures dans les établissements sanitaires et sociaux posent de nombreux problèmes et il convient de rassurer sur ce point les personnels, qui seront sans doute par ailleurs appelés à consentir certains efforts en termes de niveau de rémunération.

En réponse aux intervenants, M. Claude Evin, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail, a donné les éléments d’information suivants :

- Il est normal que la question du financement des hôpitaux ne soit pas traitée en tant que telle, la loi de financement de la sécurité sociale ne permettant au Parlement que de se prononcer sur les grands équilibres par branches et sur l’ONDAM de façon globale, et non pas en détail sur chacune des quatre enveloppes qui en découlent. Le projet de loi de financement ne comprend, comme son nom l’indique, que des articles ayant une portée financière et la loi organique comporte des contraintes dont il faut tenir compte. Cette année les hôpitaux ne font l’objet que de développements dans le rapport annexé à l’article premier du projet de loi. Des outils ont été mise en place l’année dernière et il faut leur laisser le temps d’être expérimentés. Les relations entre les agences régionales de l’hospitalisation (ARH) et les établissements ne sont donc pas abordées dans les dispositifs des articles mêmes de la loi.

- De même, les questions relatives à la santé publique ne figurent pas dans les articles du projet lui-même, mais font l’objet de développements dans le rapport annexé. Seule la nouvelle politique de dépistage du cancer nécessite une traduction législative, étant précisé que le coût des opérations de dépistage du cancer prévu à l’article  15 devrait s’élever à environ 250 millions de francs.

- Il est possible que figurent dans le projet de loi portant diverses mesures d’ordre social (DMOS), qui sera déposé devant le Parlement au printemps 1999, les dispositions relatives aux pharmacies. Comme l’indique le protocole d’accord avec les pharmaciens, un relèvement du seuil de population de 2 500 habitants à 3 000 habitants pour la création des officines pourrait être proposé.

- Le présent projet de loi ne met pas en place un système de lettres-clés flottantes - puisqu’il n’y a aucun flottement automatique - mais permet seulement une modification temporaire de ces lettres-clés en cours d’année, au vu de l’évolution des dépenses médicales, afin d’assurer le respect de leur objectif.

- La baisse des cotisations patronales d’accidents du travail, qui relève du domaine réglementaire, sera mise en oeuvre pour l’année 1999 ainsi que l’a confirmé le Gouvernement, conformément aux recommandations de la Commission des accidents du travail et maladies professionnelles.

- S’agissant des spécialités médicales sinistrées, le projet de loi donne aux partenaires conventionnels la possibilité de moduler le mécanisme d’incitation à la cessation d’activité (MICA) par zone géographique et par spécialité médicale.

- L’évaluation des pratiques médicales est traitée par le projet de loi qui propose d’en confier la tâche aux unions régionales de médecins exerçant à titre libéral.

- Contrairement à ce que certains prétendent, les relations conventionnelles ont un avenir assuré puisque le présent projet de loi propose d’élargir le champ de négociation des conventions médicales. Le rapporteur proposera à cet égard des amendements visant à en élargir encore davantage le champ.

- La préparation des Etats généraux de la santé se déroule aujourd’hui de façon satisfaisante et permet l’organisation de multiples réunions dans les régions.

- Le Gouvernement entend mener une politique ambitieuse en matière de maîtrise médicalisée des dépenses. Aussi, la décomposition du montant de l’ONDAM prend-elle effectivement en compte des données sanitaires.

- Les observations faites par certaines chambres régionales des comptes ont montré que les directeurs des ARH ont besoin d’une plus grande assise juridique pour appuyer leurs décisions.

- La question de l’application de la loi sur les 35 heures se pose avec une grande acuité pour les établissements médico-sociaux et pour les établissements de santé à but non lucratif contribuant au service public hospitalier soumis au régime de la dotation globale. Ceux-ci, qui sont dotés d’un statut de droit privé, ne rentrent pas dans le cadre des négociations concernant la fonction publique. Le Gouvernement n’a à ce jour pas apporté de réponse éclairante à ce sujet.

- Le doublement des maladies professionnelles en quatre ans résulte de la modification des tableaux des maladies professionnelles, avec notamment une plus large reconnaissance des maladies dues à l’amiante, et de la mise en place d’un système complémentaire de reconnaissance qui a concerné 2 500 maladies entre 1993 et 1998.

ANALYSE DES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI RELATIVES À L’ASSURANCE MALADIE ET AUX ACCIDENTS DU TRAVAIL

Section 2

Branche maladie

Article 15

(articles L. 321-1, L. 322-3, L. 615-14, L. 615-18 du code de la sécurité sociale et article L. 55 nouveau du code de la santé publique)

Dépistage organisé des maladies aux conséquences mortelles évitables

Cet article vise à définir, d’une part les conditions d’organisation des programmes de dépistage organisé de maladies aux conséquences mortelles évitables, d’autre part les conditions de prise en charge des actes de dépistage organisé par l’assurance maladie.

Les maladies aux conséquences mortelles évitables sont la cause d'un grand nombre de décès en particulier de décès prématuré (survenant avant soixante-cinq ans). Tirant les leçons des expériences menées depuis plusieurs années en matière de dépistage des maladies aux conséquences mortelles évitables, la conférence nationale de santé a préconisé en 1997 le développement d'une politique de réduction des risques et la mise en place d'un dispositif de dépistage organisé de ces maladies.

1. Le constat : l'insuffisante organisation du dépistage des maladies aux conséquences mortelles évitables

La conférence a notamment insisté sur l’amélioration de la prévention, du dépistage et de la prise en charge des cancers.

En 1996, les cancers ont été la cause de 147 800 décès, soit plus d’un quart des décès et 37 % des décès prématurés. Les cancers, avec leurs quatre localisations les plus fréquentes - le cancer du sein, le cancer colorectal, le cancer de la prostate et le cancer du poumon - représentent la deuxième cause de décès après les maladies cardio-vasculaires. Le nombre de nouveaux cas de cancers en 1995 était estimé à 240 000 dont 135 000 chez l’homme et 105 000 chez la femme. En outre, la probabilité d’avoir un cancer au cours de sa vie était évaluée sur la période 1988-1992 à près d’un homme sur deux et plus d’une femme sur trois.

Le dépistage permet de réduire à terme l'incidence des pathologies mortelles, en particulier les pathologies cancéreuses. Depuis plus de dix ans, des expériences de dépistage organisé du cancer ont été conduites dans plusieurs départements. Elles ont permis de constater des inégalités entre les départements dans le dépistage des populations et des insuffisances dans l'organisation des campagnes, la prise en charge des actes de dépistage et, plus globalement, de prendre conscience des incohérences du système.

Ainsi, dans les vingt-sept départements où existe un programme de dépistage organisé du cancer du sein, celui-ci cohabite avec le dépistage individuel ou spontané sans que les conditions de réalisation, de qualité, de rythme, de financement et de prise en charge (gratuité ou paiement du ticket modérateur) soient harmonisées. Dans les autres départements, le dépistage du cancer du sein est réalisé de façon individuelle, sans organisation, sans vérification de la qualité, sans évaluation. Il résulte de ce manque d'organisation la multiplication d'actes non anodins (radiographies par exemple), coûteux, pas toujours nécessaires et réalisés dans des conditions de qualité mal assurées.

Dans ce cadre, les actes de dépistage organisé sont financés par les fonds de prévention des caisses d'assurance maladie (le fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires - FNPEIS - pour la CNAMTS), les actes de dépistage individuel étant financés sur “ le risque ”, donc sur l'ONDAM.

Force est de constater que l'organisation actuelle du dépistage en France des maladies aux conséquences mortelles évitables manque de cohérence ; elle n'est pas à la hauteur des enjeux et marque un retard par rapport à d'autres pays, notamment la Grande-Bretagne et les Pays-Bas en ce qui concerne le dépistage du cancer du sein.

2. Le dispositif proposé : la mise en place d'un système national de dépistage organisé

· L'économie du dispositif

Afin de franchir une étape décisive dans la médecine préventive et de réduction des risques, permettant de réduire la mortalité, le dispositif proposé vise à structurer le dépistage.

La mise en place d'un système national de dépistage organisé a pour premier objectif de garantir l'égalité d'accès aux soins pour toutes les personnes concernées en assurant la gratuité du dépistage et en harmonisant les conditions de sa réalisation (rigueur, qualité, évaluation). Elle vise également à améliorer l'efficacité du dépistage en termes de santé publique et de rationalisation budgétaire. Dans le cadre du nouveau système, les actes de dépistage seront pris en charge par le risque sur l'ONDAM et l'organisation, la démarche qualité, la formation et l'évaluation par le FNPEIS.

A terme, quand le dispositif sera opérationnel, le dépistage devrait reposer sur des bases scientifiquement prouvées et établies par l'ANAES et s'effectuer dans des conditions identiques sur tout le territoire. Afin d'éviter qu'il y ait une superposition de deux systèmes quand le dispositif sera opérationnel, une nomenclature distincte sera mise au point pour les actes de dépistage organisé exonérés du ticket modérateur et pour les actes de diagnostic, de suivi et de contrôle prescrits par les médecins sur indications qui continueront d'être remboursés selon les conditions habituelles. En coordination avec la politique de dépistage organisé, le plafond maximum des actes sur indications fera l'objet d'une négociation avec les professionnels. Cependant, le médecin traitant gardera la possibilité de prescrire des examens de diagnostic sur prescription s'il y a des signes cliniques, des facteurs de risque ou la nécessité d'un contrôle, mais ces actes ne seront pas alors imputés sur l'enveloppe du dépistage.

Le nouveau système de dépistage ne devrait pas permettre de faire d'économies en matière de dépistage ni coûter plus cher. On estime en effet que l'extension du dépistage à des personnes qui sans la réforme n'auraient pas été suivies sera compensée par la diminution des actes inutiles. L'économie véritable résidera dans la réduction de traitements lourds pour des maladies avancées.

· Le dispositif

- Les quatre premiers paragraphes de l'article, qui modifient la code de la sécurité sociale, ont pour objet, d'une part d'intégrer les actes de dépistage organisé des maladies aux conséquences mortelles évitables dans le périmètre d'intervention de l'assurance maladie, d'autre part d'assurer la prise en charge de ces actes à 100 % par l'assurance maladie.

Le paragraphe I modifie l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale relatif au champ de la couverture du régime général d'assurance maladie et des régimes alignés.

Le vise à insérer dans le deuxième alinéa (1°) une mention précisant expressément que les frais relatifs aux actes d'investigation individuels sont pris en charge par l'assurance maladie dans les conditions de droit commun (65 % et ticket modérateur à la charge de l'assuré). Ces actes sont déjà pris en charge par l'assurance maladie ; il s'agit en fait d'une précision de précaution ayant pour objet d'éviter que l'introduction dans l'article d'une disposition concernant la couverture des frais d'examens de dépistage organisé (voir ci-dessous le 2° du I) ne conduise a contrario à considérer désormais que les actes d'investigations individuels ne sont plus remboursés.

Le a pour objet d'ajouter un alinéa (8°) à la fin de l'article visant à intégrer dans le périmètre d'intervention du régime général et des régimes alignés d'assurance maladie les actes de dépistage effectués dans le cadre des programmes de dépistage organisé en application de l'article L. 55 nouveau du code de la santé publique (voir ci-dessous V).

Le paragraphe II a pour objet d'introduire un alinéa (16°) à la fin de l'article L. 322-3 visant à permettre la prise en charge à 100 % des actes de dépistage organisé dans le cadre des programmes pour les assurés relevant du régime général et des régimes alignés d'assurance maladie.

- Les paragraphes III et IV visent à effectuer les mêmes modifications dans les articles correspondants pour les travailleurs non salariés non agricoles relevant de la CANAM.

A cet effet, le paragraphe III apporte deux modifications à l'article L. 615-14 du code de la sécurité sociale.

Le du paragraphe insère, par précaution, un alinéa (12°) dans cet article pour afficher clairement le maintien de la couverture, au titre des prestations de base (50 % dans le régime de la CANAM), des frais relatifs aux actes d'investigation (individuels) exécutés ou réalisés à des fins de dépistage. Si l'objectif semble bien être le même que pour le régime général (voir ci-dessus le 1° du I), on note toutefois une différence de rédaction ; selon les informations qui ont été données au rapporteur, celle-ci s'expliquerait simplement par la différence d'organisation du texte des deux articles L. 321-1 et L. 615-14.

Le a pour objet d'insérer un alinéa (5°) à la fin de l'article L. 615-14 visant à intégrer dans le périmètre d'intervention de la CANAM les actes de dépistage effectués dans le cadre des programmes de dépistage organisé.

Le paragraphe IV vise à introduire dans l'article L. 615-18 un renvoi à l'article L. 322-3 concernant la prise en charge à 100 % des actes de dépistage organisé par le régime général afin de permettre aussi pour les personnes relevant du régime des travailleurs indépendants la prise en charge à 100 % de ces actes.

- Le paragraphe V vise à insérer dans le livre premier du code de la santé publique (Protection générale de la santé publique), un titre II bis intitulé : “ Lutte contre les maladies mortelles évitables ” comprenant un seul article, l'article L. 55 nouveau.

Cet article a pour objet d'instituer le principe de programmes de dépistage organisé de maladies aux conséquences mortelles évitables et de définir les conditions d'organisation, d'exécution et de suivi du dépistage.

Le premier alinéa de l'article pose le principe de l'organisation de programmes de dépistage organisé. Ces programmes sont mis en œuvre en fonction des conclusions de la conférence nationale de santé dans des conditions fixées par voix réglementaire, sans préjudice des compétences des départements en matière de dépistage du cancer (article 68 de la loi de finances pour 1964). Le champ des programmes de dépistage organisé est limité aux maladies aux conséquences mortelles évitables.

Le deuxième alinéa prévoit que la liste des programmes est fixée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, après avis de l'ANAES et de la CNAMTS. Cela marque bien le caractère national des programmes.

Le troisième alinéa fixe les termes de la démarche-qualité qui doit caractériser le dépistage. A cet effet, il prévoit qu'une convention-type fixée par arrêté interministériel, après avis de la CNAMTS, déterminera les critères de qualité (information du patient, qualité des examens, des actes et soins complémentaires, suivi, information et évaluation des programmes) que devront respecter les professionnels et organismes qui souhaiteront participer aux programmes de dépistage et s'engageront contractuellement avec les organismes d'assurance maladie.

Le quatrième alinéa prévoit qu'un décret fixera la liste des examens qui ne pourront être réalisés que par les professionnels et organismes ayant souscrit la convention-type. A terme, l'exécution de certains examens et tests de dépistage pourrait donc être réservée aux seuls structures et professionnels conventionnés.

Le dernier alinéa prévoit la participation de l'Etat aux actions d'accompagnement, de suivi et d'évaluation des programmes. On peut rappeler que seuls les actes de dépistage organisé seront pris en charge à 100 % par l'assurance maladie et imputés sur l'ONDAM. Le suivi, l'accompagnement et l'évaluation seront financés par le FNPEIS et par une dotation spécifique de l'Etat (250 millions de francs, hors ONDAM, sont prévus par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999).

Le rapporteur considère que le succès de la réforme suppose, d'une part une bonne implication de tous les professionnels, et en particulier des médecins traitants, dans le nouveau dispositif et les mesures d'accompagnement concernant la formation et l'évaluation de leurs pratiques, d'autre part un important effort d'information du public.

Article 16

(articles L. 161-28-1 nouveau à L. 161-30 du code de la sécurité sociale)

Création d’un système national d’information interrégimes de l’assurance maladie et d’un conseil pour la transparence des statistiques de l’assurance maladie

Cet article crée un système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (SNIIRAM) et un conseil pour la transparence des statistiques de l’assurance maladie. Pour cela, il modifie la section 4 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, intitulée “ Systèmes d’information de l’assurance maladie et cartes de santé ” par l’ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins. Quatre nouveaux articles sont introduits dans cette section (L. 161-28-1 à L. 161-28-4), un article est modifié (L. 161-29) et un article abrogé (L. 161-30).

1. Nécessité d’améliorer la connaissance des statistiques de l’assurance maladie

La politique de maîtrise médicalisée de l’évolution des dépenses de santé, qui a été impulsée en 1993 par M. René Teulade, ministre des affaires sociales et de l’intégration, suppose une bonne connaissance de l’offre de et de la consommation des soins. Les partenaires conventionnels doivent donc disposer de l’ensemble des instruments nécessaires à une gestion médicalisée des dépenses. A cet effet, l’article 15 de la loi n° 93-8 du 4 janvier 1993 relative aux relations entre les professions de santé et l’assurance maladie, créant un article L. 161-28 dans le code de la sécurité sociale, a donné mission aux caisses nationales d’assurance maladie de coordonner l’utilisation faite par les caisses primaires des données résultant du codage des actes pour la mise en oeuvre de cette politique de maîtrise médicalisée des dépenses de santé. La perspective du développement du codage des pathologies et l’informatisation du système de santé, au travers du réseau santé-social (RSS), de la carte Sesam-Vitale et de la carte des professionnels de santé (CPS), renforcent encore l’importance de l’enjeu que constitue le traitement des informations recueillies.

Comme l’a souligné le rapport de la mission de concertation sur la médecine de ville remis le 15 juin 1998 au Gouvernement par M. François Stasse, la politique de maîtrise médicalisée des dépenses de santé implique une relation de confiance entre les médecins, l’Etat et l’assurance maladie. Cette relation de confiance ne peut se développer que s’il y a accord sur le partage et la fiabilité de l’information médicalisée. Il faut lever le doute qui pèse encore sur la chaîne informationnelle, du fait que les caisses d’assurance maladie exercent à la fois des fonctions de recueil et de traitement des données et d’évaluation des pratiques. A cette fin, le retour d’information vers les professionnels de santé doit être amélioré. Il leur permettra notamment de développer des pratiques d’auto-évaluation.

Pour rétablir la confiance au sein du système d’information en santé, le rapport Stasse précité envisage trois solutions possibles pour en retenir une. L’éclatement à la source des données informatiques médicales, d’une part vers les caisses d’assurance maladie et d’autre part vers les unions régionales des médecins libéraux (URML), ne règle pas le problème initial de la fiabilité de l’information et dédoublera les coûts de traitement. La création d’une Agence nationale de l’information de santé, tant pour les informations relatives à la médecine de ville que celles relatives au secteur hospitalier, semble encore prématurée au vu de son ampleur. L’institution d’une tierce partie de confiance entre les professionnels de santé et l’assurance maladie, chargée d’expertiser le travail de production statistique des caisses et de veiller à un retour effectif d’information vers les professionnels de santé, semble être la solution la plus efficace susceptible d’être mise en place rapidement et sans surcoût.

Le rapport Stasse préconise donc la création d’une commission nationale des statistiques de santé, jouant à la fois le rôle de comité scientifique et déontologique, qui gérerait les demandes d’accès aux informations et serait habilitée à organiser des audits sur la qualité des informations transmises, le pertinence des règles de gestion statistique, le degré de précision des agrégats et le respect des règles éthiques relatives au secret médical. Le caractère neutre de cette institution doit être garanti par sa composition, paritaire entre les professionnels de santé et l’assurance maladie et comprenant des personnalités indépendantes choisies pour leurs compétences dans le domaine de la conception et de l’utilisation des outils statistiques.

Conformément au souhait exprimé par tous les syndicats de médecins libéraux, le Gouvernement a décidé de suivre cette proposition. La solution la plus immédiatement opérationnelle consiste en effet à confier aux seules caisses d’assurance maladie la gestion du système de traitement et d’enrichissement des données médicales et de mettre en place une instance externe de contrôle des données ainsi produites.

2. Création d’un système national d’information interrégimes de l’assurance maladie

Les systèmes nationaux interrégimes (SNIR) de comptabilisation des dépenses d'assurance maladie reposent aujourd'hui sur de simples accords conventionnels entre régimes. Aucune règle n'oblige l'ensemble des régimes à transmettre les données nécessaires à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) qui gère ces systèmes. Il faut rappeler que l’Etat s’était engagé, dans la convention d’objectifs et de gestion conclue avec la CNAMTS pour les années 1997-1999, à donner une véritable base réglementaire aux SNIR.

Le SNIR des professionnels de santé est l’outil statistique utilisé par la CNAMTS pour mesurer l’activité et les prescriptions des praticiens exerçant à titre libéral. Il utilise la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) pour rassembler l’ensemble des informations collectées par les différents régimes d’assurance maladie adhérents et ainsi connaître le volume et le montant des prestations. Parmi les nombreuses utilisations des informations collectées, il faut notamment citer les relevés individuels d’activité et de prescription (RIAP) envoyés chaque semestre aux praticiens et aux caisses primaires. Le SNIR des professionnels de santé comporte toutefois certaines lacunes : il n’inclut pas tous les régimes, la CNAMTS n’a pas la possibilité de contrôler la qualité des données fournies par les différents régimes et l’identification des praticiens n’est pas toujours assurée.

Le SNIR des établissements de santé couvre quant à lui le champ des établissements publics et privés, sanitaires et médico-sociaux. Il a pour vocation de regrouper par établissement l’ensemble des flux financiers liés aux dépenses hospitalières prises en charge par l’assurance maladie. Il n’est cependant pas alimenté par l’ensemble des régimes d’assurance maladie et ne concerne pas tous les hôpitaux non soumis à dotation globale.

Pour remédier à ces lacunes, qui ont notamment été relevées par la Cour des comptes dans ses rapports annuels au Parlement sur la sécurité sociale en 1997 et en 1998, l’article L. 161-28-1 nouveau du code de la sécurité sociale crée un système national d'information interrégimes de l'assurance maladie (SNIIRAM), chargé à la fois de contribuer à la connaissance des dépenses de l'ensemble des régimes d'assurance maladie et d’assurer la transmission en retour aux prestataires de soins d'informations pertinentes relatives à leur activité, leur revenu et leurs prescriptions. Il concernera tant les professionnels de santé que les établissements de santé. Il s’agit en fait de rendre obligatoire de par la loi les SNIR des professionnels et des établissements, tout en les fusionnant.

Le SNIIRAM sera mis en place par tous les organismes gérant un régime de base d'assurance maladie. Les modalités de gestion et de recueil des informations du SNIIRAM seront définies conjointement par un protocole passé entre les trois principaux régimes d'assurance maladie au moins (CNAMTS, MSA et CANAM). Ce protocole devra être approuvé par un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

Les données reçues et traitées par le SNIIRAM doivent préserver l'anonymat des personnes ayant bénéficié des prestations de soins, en application de la loi n° 78-16 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Par contre, il constitue un traitement de données nominatif au regard des professionnels de santé puisqu’il doit permettre un retour d’information à chacun d’eux sur son activité. L’application stricte de l’article 15 de la loi n° 78-16 du 6 janvier 1978 précitée imposerait en conséquence de soumettre à la CNIL un projet d’acte réglementaire pour chaque caisse de chaque régime. Tous ces actes réglementaires auraient en fait le même objet et le même dispositif que l’arrêté ministériel prévu à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 161-28-1 nouveau pour approuver les conditions d’organisation du traitement des données par le SNIIRAM. Conformément au souhait exprimé par la CNIL, notamment pour les traitements relatifs aux cartes informatiques santé ou pour le répertoire national interrégime des bénéficiaires de l’assurance maladie, il serait préférable que cet arrêté ministériel se substitue à plusieurs centaines d’actes réglementaires identiques. Un arrêté spécifique restera toutefois nécessaire si une caisse souhaite mettre en place un traitement informatique ne répondant pas au modèle type qui sera annexé à cet arrêté.

3. Création d’un conseil pour la transparence des statistiques de l’assurance maladie

Afin d’améliorer le contrôle du Parlement sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale et de rétablir la confiance entre les professionnels de santé et les caisses d’assurance maladie, il est indispensable de pouvoir garantir la fiabilité des chiffres produits par l'assurance maladie dans le domaine des soins de ville.

A cette fin, l’article L. 161-28-2 nouveau du code de la sécurité sociale crée un conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie. Ce conseil est placé auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Il a pour objectif de garantir la qualité du recueil et du traitement des données relatives aux dépenses d'assurance maladie.

Ce conseil est composé de deux parlementaires (le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale ou son représentant et le président de la commission des affaires sociales du Sénat ou son représentant), du secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale, de représentants des caisses nationales d'assurance maladie, de représentants des professionnels de santé et de personnalités qualifiées dans les domaines de l'information de santé ou des statistiques, afin de garantir la capacité d’expertise scientifique du conseil.

L’article L. 161-28-3 nouveau définit les missions du Conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie. Il faut préciser que sa compétence est limitée aux soins de ville et ne comprend pas le secteur hospitalier, à la différence du SNIIRAM, car les données hospitalières sont déjà connues grâce au système de la dotation globale et car le problème de manque de confiance sur l’information se pose essentiellement pour la médecine ambulatoire.

Le nouveau conseil est chargé de veiller à la qualité du recueil et du traitement des informations statistiques produites par l'assurance maladie, relatives aux seuls soins de ville. A cet effet, il adressera des avis aux organismes d'assurance maladie pour améliorer la qualité des informations statistiques qu’elles ont produites dans le domaine des soins de ville et définir la nature et les destinataires des productions statistiques utiles à la connaissance des pratiques de soins ambulatoires.

Le conseil doit également remettre chaque année un rapport aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, que ceux-ci transmettent au Parlement, lors du dépôt du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il conviendrait cependant de rattacher explicitement le rapport du Conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie à l’annexe b jointe chaque année au projet de loi de financement de la sécurité sociale, conformément à l’article 3 de la loi de financement pour 1996. Il n’y a par ailleurs pas lieu de limiter le dépôt de ce rapport à une durée limitée à cinq ans.

L’article L. 161-28-4 nouveau indique que les organismes d'assurance maladie sont tenus de communiquer au conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie la description précise des traitements des informations statistiques relatives aux soins de ville qu'ils mettent en oeuvre, ainsi que les informations statistiques qu'ils produisent dans le domaine des soins de ville. Cette obligation de transmission des méthodes statistiques utilisées permettra au nouveau conseil de réaliser de véritables audits scientifiques garantissant la fiabilité de ces méthodes.

4. Suppression du comité national paritaire de l’information médicale

Le III de l’article 16 du présent projet de loi supprime le comité national paritaire de l'information médicale, créé à l'article L. 161-30 du code de la sécurité sociale par l’article 15 de la loi n° 93-8 du 4 janvier 1993 relative aux relations entre les professions de santé et l’assurance maladie. Ce comité résultait d’une véritable volonté politique pour que les médecins soient associés à la définition des conditions d’élaboration du codage des pathologies et d’utilisation des données qui en sont issues. Il s’agissait déjà de permettre aux médecins et aux caisses de définir ensemble les instruments de la politique de maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

Par coordination, le 3° de l’article L. 161-28-3 nouveau du code de la sécurité sociale et le 2° du II du présent article transfèrent les missions consultatives de ce comité en matière de codage des actes et des pathologies au nouveau conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie créé à l’article L. 161-28-2 nouveau du code de la sécurité sociale.

Cette substitution du nouveau conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie au comité national paritaire de l’information médicale ne paraît pas très opportune. Le champ de compétence des deux organismes ne correspond pas car le comité paritaire national a une mission spécifique relative au codage des actes et des pathologies, tant dans le secteur ambulatoire que dans le secteur hospitalier, alors que la compétence du nouveau conseil pour la transparence des statistiques est limitée à la médecine de ville. De plus, la composition des deux organismes n’est pas équivalente, compte tenu de leurs missions différentes : le comité paritaire est ainsi présidé par un magistrat mais ne comporte aucun statisticien.

Le rapporteur souhaite donc maintenir le comité national paritaire de l’information médicale en l’état.

5. Substitution de référence

Enfin, le 1° du II de cet article procède à une substitution de référence d’ordre rédactionnel au sein de l'article L. 161-29 du code de la sécurité sociale. Il vise à remplacer la référence à l’article 378 de l’ancien code pénal par la référence aux articles 226-13 et 226-14 du nouveau code pénal, qui concernent la punition de l’atteinte au secret professionnel. Le personnel administratif des caisses d’assurance maladie a en effet connaissance des numéros de code des actes effectués et des pathologies pendant l’exercice de ses fonctions et se trouve de ce fait soumis aux règles relatives au secret professionnel.

Cette disposition de substitution de référence, faisant suite à la nouvelle codification du droit pénal, figure toutefois déjà à l’article 333 de la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 relative à l’entrée en vigueur du nouveau code pénal. Elle est donc parfaitement inutile.

Article 17

(article L. 162-5 du code de la sécurité sociale)

Extension du champ de la négociation conventionnelle avec les médecins

Les rapports entre les organismes d’assurance maladie et les médecins sont régis par une ou plusieurs conventions nationales dont le contenu est défini par l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale. Le présent article a pour objet d’élargir le contenu de ces conventions en complétant cet article afin de donner aux parties conventionnelles la faculté de mettre en place de nouvelles formes d’organisation de la médecine libérale et de nouvelles modalités de rémunération des praticiens.

Le troisième alinéa (a du 12°) du paragraphe I offre aux parties la possibilité de mettre en place des filières de soins, bâties autour d’un médecin généraliste choisi par le patient et chargé d’assurer le suivi et la coordination de ses soins en l’orientant si besoin vers les spécialistes ou les structures hospitalières adéquates. La ou les conventions pourront déterminer les conditions d’exercice de ces filières ainsi que les modes de rémunération autres que le paiement à l’acte, tels que le forfait, qui pourront les caractériser.

Cet alinéa permettra donc aux parties conventionnelles, si elles le souhaitent, de remettre en place l’option conventionnelle dite “ médecin référent ”, ajoutée par avenant à l’ancienne convention nationale des médecins généralistes par arrêté du 17 octobre 1997 et annulée par le Conseil d’Etat dans sa décision du 3 juillet 1998. Ce dernier s’était en effet fondé sur l’existence d’une procédure d’avis et d’agrément prévu par l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale pour les actions expérimentales mettant en place des filières ou des réseaux de soins pour retenir de l’incompétence des parties conventionnelles en la matière. Le présent alinéa écarte cet argument et autorise donc la constitution de filières par deux voies : la voie conventionnelle de l’article L. 162-5 modifié par le présent article ou la voie expérimentale de l’article L. 162-31-1 précité.

Le quatrième alinéa (b du 12°) du même paragraphe donne aux parties conventionnelles la faculté de mettre en place des réseaux de soins qui permettent d’organiser la prise en charge globale de patients, atteints de pathologies lourdes ou chroniques, en coordonnant l’intervention de tous les professionnels de santé autour du malade. A l’instar de l’alinéa précédent, les parties conventionnelles pourront en définir les modes d’exercice et de rémunération particuliers. De même, ce régime de création conventionnelle de réseaux se juxtapose au régime expérimental prévu par l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale qui demeure.

Le cinquième alinéa (c du 12°) soumet la création de filières ou de réseaux de soins par les parties conventionnelles à deux conditions ; celle de préciser les droits et obligations des médecins, des assurés et des caisses d’assurance maladie et celle de prévoir des modalités d’évaluation tant médicale qu’économique s’agissant respectivement des modes d’exercice et des modes de rémunération.

Le sixième alinéa (13°) élargit le champ de la négociation conventionnelle quant aux modes de rémunération des médecins en donnant aux parties la faculté de définir des modes de rémunération autres que le paiement à l’acte pour des activités de soins, dans le cadre des filières notamment, mais aussi pour des activités non curatives liées en particulier à la prévention, à l’éducation sanitaire, à la formation, à l’évaluation, à la santé publique ou à la veille sanitaire. Cette diversification des modes de rémunération, laissée à l’initiative des partenaires conventionnels, reprend l’une des dix propositions du rapport de la mission de concertation sur l’avenir de la médecine de ville, présenté par M. François Stasse le 15 juin 1998. Faute d’adapter le mode de rémunération des médecins aux nouvelles fonctions qu’ils sont aujourd’hui appelés à exercer - évaluation, santé publique, organisation, formation et gestion - ces fonctions risquent de ne devenir que des activités de second rang, peu valorisées, que le praticien ne remplira que si son activité de consultation lui en laisse le temps et l’envie. La présente disposition donne ainsi un large pouvoir d’initiative aux parties conventionnelles, pouvoir qui devra cependant être strictement encadré par des contrats passés entre les médecins concernés et les organismes d’assurance maladie définissant les droits et obligations des parties.

Le paragraphe II du présent article, en complétant l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, étend les dérogations autorisées par l’article L. 162-31-1 du même code en termes de tarifs et d’honoraires, de paiement direct des honoraires par le malade, de taux de couverture du risque par l’assurance maladie et de tiers payant aux filières, aux réseaux et aux nouveaux modes de rémunération des praticiens autres que le paiement à l’acte mis en place par les parties conventionnelles dans le cadre du paragraphe I. Une grande liberté est ainsi laissée aux partenaires pour l’organisation de ces nouvelles formes d’exercice de la médecine, liberté étendue aux modalités de prise en charge et de paiement des soins par les patients.

Article 18

(article L. 791-2 du code de la santé publique et article 8 de la loi n° 93-8 du 4 janvier 1993)

Élargissement des missions des unions de médecins exerçant à titre libéral

La loi n° 93-8 du 4 janvier 1993 relative aux relations entre les professions de santé et l’assurance maladie, dite “ loi Teulade ”, a créé dans chaque région une union de médecins exerçant à titre libéral (URMEL) chargée d’améliorer la gestion du système de santé et de promouvoir la qualité des soins.

Le paragraphe I du présent article élargit le champ des missions de ces unions professionnelles en complétant l’article 8 de la loi précitée. Les deuxième et troisième alinéas de ce paragraphe confient ainsi aux unions l’organisation d’actions d’évaluation des pratiques professionnelles, individuelles ou collectives, et la diffusion des méthodes et référentiels d’évaluation auprès des médecins. Cette nouvelle mission s’accomplira en liaison avec l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES), instance déjà compétente en la matière à qui reviendra le soin d’habiliter des médecins, membres de son réseau national ou local d’experts ou médecins libéraux dont elle assurera la formation, à exercer ces actions d’évaluation. Celles-ci seront menées à la demande des médecins intéressés. Il s’agit donc d’un système facultatif, auquel les médecins seront libres de se soumettre sans contrainte ni aucune forme de sanction ou de publicité.

L’insertion dans la loi de cette mission n’était pas indispensable à son accomplissement, la loi Teulade confiant déjà aux unions professionnelles de médecins libéraux “ l’évaluation des comportements et des pratiques professionnelles en vue de la qualité des soins ”. Elle permet cependant d’institutionnaliser un système basé sur le volontariat et l’impartialité avec le choix d’une évaluation par les pairs, distincte de toute procédure de sanction, selon les vœux du groupe de travail relatif à l’avenir des unions régionales de médecins libéraux réuni par M. François Stasse, dans le cadre du rapport sur l’avenir de la médecine de ville publié le 15 juin 1998.

Le financement de ces actions d’évaluation n’est pas précisé. Il pourrait être assuré par une contribution des unions professionnelles et des régimes d’assurance maladie, à laquelle pourrait s’ajouter une participation du Fonds d’aide à la qualité des soins de ville, créé à l’article 20 du présent projet de loi.

Le quatrième alinéa du même paragraphe charge les unions professionnelles d’analyser chaque trimestre l’évolution des dépenses médicales et d’assurer la diffusion de leurs conclusions auprès des médecins. Les unions disposeront pour accomplir cette mission du concours des unions régionales des caisses d’assurance maladie (URCAM) instituées par l’ordonnance n° 96-344 du 24 avril 1996 portant mesures relatives à l’organisation de la sécurité sociale. Cette mission n’est pas non plus nouvelle, la loi Teulade attribuant déjà aux unions professionnelles le rôle de conduire des analyses et des études “ relatives au fonctionnement du système de santé, à l’exercice libéral de la médecine ... ” et d’informer les médecins. Force est cependant de constater que les unions n’ont que faiblement rempli ce rôle jusqu’à ce jour. L’affirmation et le renforcement de cette mission répond à une demande forte des médecins soucieux de disposer d’informations régulières et transparentes sur l’évolution des dépenses médicales.

Le dernier alinéa du même paragraphe confie au pouvoir réglementaire le soin de préciser les modalités de mise en œuvre des dispositions précédantes.

Le paragraphe II du présent article tire les conséquences du premier paragraphe en complétant les missions de l’ANAES, décrites à l’article 791-2 du code de la santé publique, afin que l’Agence apporte son concours aux actions d’évaluation des soins et pratiques professionnelles qui seront menées par les unions professionnelles de médecins exerçant à titre libéral. Cette aide prendra la forme de la mise à la disposition des unions des experts de son réseau national ou local et de l’habilitation des “ médecins-évaluateurs ”, dont l’ANAES assurera la formation. Il pourra s’agir pour ces derniers de médecins en exercice, qui accompliront des missions d’évaluation en parallèle et à temps partiel de leur activité principale.

Article 19

(article 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 et article L. 162-5 du code de la sécurité sociale)

Critères d’attribution de l’allocation de remplacement en cas de cessation d’activité des médecins et des aides à leur reconversion

Cet article a pour objet de revoir le système d’aide au départ à la retraite anticipée ou à la reconversion des médecins libéraux.

La loi n° 88-16 du 5 janvier 1988 relative à la sécurité sociale avait instauré pour les médecins cessant toute activité médicale âgés de soixante ans au moins une allocation de remplacement, financée par les médecins en exercice et le régime général d’assurance maladie, proportionnelle à leurs revenus dans la limite d’un plafond, jusqu’à leur soixante-cinquième anniversaire. L’ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins avait rendu ce dispositif beaucoup plus attractif - tout en le limitant aux médecins exerçant une activité médicale non salariée -, en l’étendant pour l’année 1997 aux médecins âgés de cinquante-six ans au moins et au-delà aux médecins âgés de cinquante-sept ans au moins.

Victime de son succès, le mécanisme d’incitation à la cessation d’activité (MICA) s’est trouvé menacé faute de financement suffisant. Fin 1997, le régime enregistrait déjà un déficit de 148 millions de francs ; à cotisations des actifs inchangés, ce déficit se serait élevé pour l’année 1998 à 448 millions de francs. Cette situation devait conduire le Gouvernement à relever le taux de cotisations des médecins de 0,704 % à 1,76 % de leurs revenus et à abaisser le plafond de l’allocation à 188 493 francs par décret du 31 août 1998. Par ailleurs il est apparu que le MICA ne répondait pas aux objectifs de rééquilibrage démographique qui avaient motivé sa création. Ainsi sur les 1 515 médecins ayant bénéficié du dispositif en 1996 et 1997, 57 % étaient des généralistes, tandis que 30 % des spécialistes concernés exerçaient des spécialités considérées déficitaires, au premier rang desquels les chirurgiens, les anesthésistes-réanimateurs et les gynécologues-obstétriciens. Le présent article a donc pour objet de modifier les critères d’attribution du MICA et des aides à la reconversion que peuvent mettre en place les parties conventionnelles pour en faire des outils de régulation démographique plus efficaces.

Le 1°) du paragraphe I prolonge le MICA jusqu’au 31 décembre 2004, l’ordonnance précitée ayant limité son existence jusqu’au 31 décembre 1999. Les prévisions démographiques peuvent justifier cet allongement du dispositif. Une récente étude de l’Institut national d’études démographiques démontre ainsi que le nombre de médecins en activité devrait commencer à diminuer à partir de 2008 ; pour certaines spécialités, telles que la chirurgie ou la psychiatrie, ce nombre devrait diminuer dès 2003.

Le 2°) du même paragraphe donne la possibilité aux partenaires conventionnels de limiter ou de moduler l’allocation de remplacement à certaines zones géographiques et/ou aux qualifications ou spécialités des médecins à partir du 1er juillet 1999. Le MICA pourra donc être plus ou moins attractif selon les régions, les qualifications ou spécialités d’exercice des médecins. Il pourra même être réservé à celles qui sont les plus excédentaires.

Le 3°) du même paragraphe allonge de trois à six mois le délai au-delà duquel le montant de l’allocation, le montant de la cotisation et la répartition de celle-ci entre les médecins et les régimes d’assurance maladie ainsi que les cas d’exonération sont fixés par décret à défaut d’accord entre les parties conventionnelles, c’est-à-dire entre d’une part, une ou plusieurs organisations syndicales nationales représentatives de médecins et, d’autre part, la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et au moins une autre caisse nationale, soit la Caisse nationale d’assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, soit la Caisse centrale de secours mutuels agricoles. Dans le silence des conventions médicales, c’était jusqu’à présent le pouvoir réglementaire qui avait défini les montants du MICA et de ses cotisations par le décret du 21 avril 1997 modifié par le décret du 31 août 1998.

Le paragraphe II modifie le 7° de l’article 162-5 du code de la sécurité sociale qui autorise les parties conventionnelles, médecins et organismes d’assurance maladie, à mettre en place des aides à la reconversion professionnelle des médecins et à en définir les modalités de financement et d’organisation. Ces aides pourront désormais, à l’instar du MICA, être modulées en fonction de la zone, de la qualification ou de la spécialité du médecin. Il convient de noter que cette possibilité laissée aux partenaires conventionnels de créer des aides à la reconversion, qui pourrait par exemple inciter des médecins à se reconvertir dans la médecine non prescriptive, n’a jamais été utilisée.

Article 20

Création d’un fonds d’aide à la qualité des soins de ville

Cet article a pour objet d’apporter un soutien financier aux mutations de l’exercice de la médecine ambulatoire, en créant un fonds d’aide à la qualité des soins de ville.

Le paragraphe I de cet article prévoit la création, pour cinq ans à partir du 1er janvier 1999, d’un fonds d’aide à la qualité des soins de ville rattaché à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) mais géré en partenariat avec l’ensemble des professionnels de santé exerçant en ville, auxquels ce fonds est destiné, ainsi qu’avec les autres régimes obligatoires d’assurance maladie.

Il constitue ainsi le pendant du fonds d’accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux, créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 mais qui ne fonctionne pas encore et du fonds d’aide à l’adaptation des établissements hospitaliers, institué par la loi de finances pour 1998.

Le paragraphe II précise quels seront les objectifs des aides qui pourront être allouées par le fonds ainsi que ses bénéficiaires.

Les aides devront viser à l’amélioration de la qualité et de la coordination des soins de ville et seront attribuées à des professionnels de santé, médecins et auxiliaires médicaux, individuellement ou collectivement, au sein d’un réseau de soins ou de tout autre groupement de professionnels de santé exerçant en ville. Elles pourront également soutenir le développement des nouveaux modes d’exercice des soins de ville, au premier rang desquels les réseaux.

Concrètement, ces aides pourront prendre la forme de soutiens à la réalisation ou à la diffusion des bonne pratiques (élaboration de protocoles, organisation de conférences de consensus...), d’aides à l’évaluation des professionnels, d’aides au développement d’applications informatiques et de serveurs professionnels intégrés au Réseau santé social (RSS), auquel pourront être connectés les professionnels de santé, et d’aides à la mise en réseau de ces professionnels par le financement d’études de faisabilité ou d’évaluation, ou encore par des actions d’accompagnement au montage et à l’organisation de ces réseaux.

On peut se demander si le fonds aura vocation à soutenir également les réseaux “ ville-hôpital ” qui coordonnent l’intervention des professionnels de santé libéraux et hospitaliers, le besoin de décloisonnement entre le secteur des soins de ville et le secteur hospitalier apparaissant très fort.

Le paragraphe III dispose que les ressources du fonds seront constituées par une contribution des régimes obligatoires d’assurance maladie dont la loi de financement fixera chaque année jusqu’en 2003 le montant. Pour l’année 1999, ce montant a été fixé à 500 millions de francs.

La règle de répartition de cette somme entre les différents régimes obligatoires d’assurance maladie sera identique à celle qui est appliquée pour la répartition entre ces régimes des cotisations sociales des médecins et auxiliaires médicaux conventionnés prises en charge par ces régimes et qui fait l’objet d’un arrêté interministériel.

Le paragraphe IV prévoit que les modalités de fonctionnement et de gestion du fonds, de participation des professionnels de santé à sa gestion ainsi que les critères d’éligibilité des aides seront déterminés par décret en Conseil d’Etat. L’ambition serait, semble-t-il, de mettre en place une gestion décentralisée du fonds, en fonction des règles et critères généraux établis par voie réglementaire, à partir des unions régionales des caisses d’assurance maladie.

Article 21

(articles L. 162-5, L. 162-5-2, L. 162-5-3 et L. 162-5-4 du code de la sécurité sociale)

Clause de sauvegarde applicable aux dépenses médicales

Le présent article a pour objet de mettre en place un nouveau système de régulation de ces dépenses permettant d’assurer le respect de l’objectif de ces dépenses.

L’ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins avait instauré un mécanisme de reversement à la charge des médecins en cas de non-respect de l’objectif prévisionnel d’évolution des dépenses médicales. Elle confiait à la ou aux conventions nationales des médecins le soin de définir les critères d’individualisation de ce reversement par médecin, cette individualisation devant tenir compte notamment du respect des objectifs par spécialité ou par zone géographique. Le Conseil d’Etat, dans sa décision du 3 juillet 1998, a déclaré illégales les dispositions de la convention nationale des médecins généralistes précisant ces critères d’individualisation, qui portent atteinte selon lui au principe d’égalité entre les médecins selon qu’ils exercent dans une zone ayant ou non respecté l’objectif prévisionnel, quels qu’aient été le niveau et les caractéristiques de leur activité.

Le paragraphe I complète l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale qui définit le contenu de la ou des conventions nationales régissant les rapports entre les médecins généralistes et spécialistes et les régimes obligatoires d’assurance maladie. Ces conventions devront désormais prévoir les modalités selon lesquelles les parties assureront un suivi périodique des dépenses médicales et prendront toutes mesures nécessaires au respect des objectifs fixés pour ces dépenses. Ces mesures pourront prendre la forme d’une modification des tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires des praticiens dans le cadre du mécanisme d’ajustement infra-annuel prévu au paragraphe III du présent article.

Le paragraphe II propose une nouvelle rédaction de l’article L. 162-5-2 du code de la sécurité sociale.

·  Le paragraphe I de ce nouvel article L. 162-5-2 reprend une grande partie de son ancienne rédaction. L’objectif des dépenses de soins de ville (qui n’est plus qualifié d’objectif “ prévisionnel d’évolution ”), déterminé par le Gouvernement quinze jours après la publication de la loi de financement de la sécurité sociale, doit ainsi être décliné chaque année dans une annexe à la ou aux conventions avec les médecins en un objectif de dépenses médicales (qui n’est plus, non plus qualifié d’objectif “ prévisionnel d’évolution ”), pour les médecins généralistes d’une part et pour les médecins spécialistes, d’autre part. Il comprend les dépenses d’honoraires, de rémunérations, de frais accessoires et de prescription correspondant aux dépenses remboursables par les régimes d’assurance maladie, maternité, invalidité et accidents du travail. L’annexe distingue ensuite dans ce montant la partie correspondant aux dépenses d’honoraires, de rémunération et de frais accessoires des praticiens (généralistes ou spécialistes) et la partie relative à leurs prescriptions, qui doit tenir compte des orientations fixées par la politique du médicament.

A la différence de l’ancienne rédaction, le nouvel article L. 162-5-2 ne prévoit pas la déclinaison des montants précédemment décrits par spécialités médicales ou par zones géographiques. Il comporte par ailleurs une innovation majeure en laissant aux parties conventionnelles le soin de déterminer, dans l’annexe annuelle précitée, et dans des limites déterminées par décret, l’écart entre le montant prévisionnel des dépenses médicales et le montant constaté des dépenses réalisées au cours de l’année à partir duquel le mécanisme de régulation mis en place par le présent article peut être déclenché.

L’objectif opposable aux médecins généralistes ou aux médecins spécialistes sera ainsi encadré dans un “ tunnel ” constituant une marge de manoeuvre autour dudit objectif. Ainsi, si l’écart fixé par l’annexe dans les limites autorisés est par exemple de 10%, et si l’objectif opposable aux médecins généralistes a été fixé à + 1,8%, le tunnel s’établit entre + 1,62  et + 1,98 % d’augmentation des dépenses. Le mécanisme de revalorisation et d’alimentation d’un fonds de régulation prévu aux paragraphes IV et V du nouvel article L. 162-5-2 n’est donc mis en œuvre que si les dépenses médicales des médecins généralistes n’ont pas dépassé la borne inférieure du tunnel, soit 1,62 %. Inversement, la clause de sauvegarde, prévue par le nouvel article L. 162-5-3 proposé au paragraphe III du présent article, ne s’applique que si les dépenses visées ont dépassé la borne supérieure du tunnel, soit 1,98 % dans l’exemple choisi. La régulation des dépenses, à la hausse ou à la baisse par rapport aux objectifs prévisionnels, ne se déclenche donc pas au franc le franc.

·  Le paragraphe II du nouvel article L. 162-5-2 reprend exactement l’ancienne rédaction des deux premiers alinéas du II de cet article. Il prévoit, dans son premier alinéa, la fixation dans une annexe annuelle à la ou aux conventions avec les médecins des tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires des praticiens conventionnés en dehors des cas de dépassement autorisés. Il permet, au deuxième alinéa, d’accorder aux médecins une revalorisation d’honoraires à la condition que cette revalorisation ait été préalablement provisionnée dans l’objectif des dépenses médicales.

·  Le paragraphe III du nouvel article L. 162-5-2 qui reprend en grande partie l’ancienne rédaction de l’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale modifié au paragraphe III du présent article, concerne les modalités de fixation du montant des dépenses médicales lorsque celles-ci ont dépassé à la hausse ou à la baisse l’écart (ou les bornes du tunnel) autorisé par les parties selon le paragraphe I.

Il appartient aux parties conventionnelles d’arrêter ce montant, dans le respect de l’avenant annuel à la convention d’objectifs et de gestion conclue entre l’Etat et la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), qui fixe les conditions et les modalités de mise en oeuvre de l’objectif prévisionnel d’évolution des dépenses de soins de ville. Cette précision doit permettre de prendre en compte les augmentations de dépenses médicales qui auraient pour origine la survenance d’épidémies exceptionnelles ou des actions de santé publique d’envergure. Avant d’arrêter ce montant, les parties conventionnelles devront - élément d’innovation par rapport à la rédaction précédente - recueillir l’avis du secrétaire général permanent de la commission des comptes de la sécurité sociale.

·  Les paragraphes IV et V du nouvel article L. 162-5-2 prévoient la procédure applicable lorsque le montant des dépenses médicales constaté est inférieur à l’objectif qui avait été fixé.

Le paragraphe IV prévoit que la différence entre le montant constaté et l’objectif est versée à un fonds de régulation “ à due concurrence ” de la provision préalablement constituée pour la revalorisation des honoraires des médecins prévue au paragraphe II. On peut donc en déduire que les économies supplémentaires réalisées au-delà du niveau de la provision seront des économies nettes venant réduire d’autant la réalisation de l’ONDAM.

Il est par ailleurs précisé que la somme versée au fonds de régulation sera calculée selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’Etat en fonction des dépenses réalisées d’une part sur les honoraires, rémunérations et frais accessoires des médecins et d’autre part sur leurs prescriptions. Cette disposition signifie qu’une partie seulement des économies réalisées sur ces deux postes alimentera le fonds. Les taux de 80 à 100 % pour les honoraires, rémunérations et frais accessoires et de 50 % pour les prescriptions seraient actuellement envisagés.

Il semble cependant impossible de faire coïncider au même niveau la provision pour revalorisation des honoraires et le montant versé au fonds de régulation calculé selon les règles déterminées par décret en Conseil d’Etat. Le système ne peut fonctionner que si la somme versée au fonds de régulation est au maximum égale à la provision. Il conviendrait donc de substituer aux termes : “ à due concurrence ” les termes : “ à concurrence de ”.

Le paragraphe V précise, dans son a), que l’annexe annuelle à la ou aux conventions médicales fixera la part de la somme versée au fonds de régulation qui sera consacrée à des actions non reconductibles de modernisation du système de soins, qui pourraient prendre la forme d’aides à la création ou au développement de filières et de réseaux de soins.

Le b) du même paragraphe confie à la même annexe annuelle le soin de déterminer les tarifs, les niveaux et la date d’effet des revalorisations qui seront décidées si le montant des dépenses constatées est inférieur à l’objectif. Il limite cependant le montant de la provision à la somme qui sera versée au fonds de régulation selon les modalités de calcul mentionnées au paragraphe IV. Ainsi les revalorisations ne pourront dépasser la somme qui sera versée au fonds de régulation même si elles avaient été provisionnées à un niveau supérieur.

·  Le paragraphe VI du nouvel article L. 162-5-2 précise comment le fonds de régulation sera alimenté. Il appartiendra aux régimes d’assurance maladie qui prennent en charge, selon l’article L. 722-4 du code de la sécurité sociale, une partie des charges sociales des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés, c’est-à-dire à la CNAMTS, à la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs indépendants (CANAM) et à la Mutualité sociale agricole (MSA), de financer le fonds selon les mêmes règles de répartition en fonction desquelles ces régimes se répartissent la charge des cotisations sociales précitées.

Le paragraphe III du présent article propose une nouvelle rédaction de l’article L. 162-5-3 relatif aux règles applicables en cas de non-respect de l’objectif des dépenses médicales.

·  Le paragraphe I du nouvel article L. 162-5-3 met en place une procédure infra-annuelle d’ajustement des dépenses médicales par les parties conventionnelles ou, à défaut, par l’Etat.

Le premier alinéa autorise les parties, si celles-ci constatent à la fin du mois d’avril ou à la fin du mois de septembre, lorsque sont connues les dépenses médicales respectivement des quatre et des huit premiers mois de l’année, que l’évolution de ces dernières risque de compromettre le respect de l’objectif annuel fixé pour ces dépenses, de prendre toutes mesures en leur pouvoir de nature à permettre le respect de cet objectif. Ce pouvoir est étendu à la modification transitoire, qui ne peut dépasser la fin de l’année en cours, des tarifs des honoraires des médecins, ce qui revient à autoriser les parties à ajuster la valeur des lettres-clés.

Le deuxième alinéa fixe les conditions d’approbation de ces nouveaux tarifs. Ces derniers doivent faire l’objet d’un avenant à l’annexe annuelle à la ou aux conventions médicales prévue à l’article L. 162-5-2 qui fixe le montant et la décomposition de l’objectif des dépenses médicales. Les parties doivent transmettre cet avenant aux ministres compétents avant le 30 juin ou le 30 octobre. Elles disposent donc de deux mois, à partir du constat du risque de “ dérapage ” des dépenses médicales, pour négocier de nouveaux tarifs transitoires. Si aucune opposition n’est manifestée dans les quinze jours suivant la notification de l’avenant par la CNAMTS aux ministres, l’avenant est réputé approuvé.

Le troisième alinéa donne la possibilité à chaque caisse nationale d’assurance maladie signataire de la ou des conventions médicales de demander à l’Etat, avant le 15 juillet ou avant le 15 novembre, de modifier les tarifs des honoraires et leur durée d’application si les partenaires conventionnels n’ont pu se mettre d’accord. Cette modification fait alors l’objet d’un arrêté interministériel qui doit intervenir au plus tard le 31 juillet ou le 30 novembre. Il ressort de la rédaction de la présente disposition que la modification réglementaire des tarifs pourrait être appliquée au-delà de l’année en cours.

Le quatrième alinéa autorise l’Etat à procéder unilatéralement à une modification des tarifs si les mesures précédentes ne sont “ manifestement  ” pas de nature à permettre le respect de l’objectif des dépenses médicales. L’Etat pourra donc se substituer aux parties conventionnelles, en cas de carence de celles-ci, ou s’il juge insuffisantes les mesures précédemment adoptées. Les tarifs des honoraires pourraient donc faite l’objet d’une nouvelle modification dont la durée d’application, à l’instar de l’alinéa précédent, n’est pas limitée. L’Etat doit toutefois intervenir avant le 31 juillet ou le 30 novembre et doit préalablement recueillir l’avis de la CNAMTS.

Le paragraphe II du nouvel article L. 162-5-3 crée une “ contribution conventionnelle  ” à la charge des médecins conventionnés en cas de dépassement de l’objectif des dépenses médicales. Le dispositif manque quelque peu de clarté : s’agira-t-il du dépassement de l’objectif global des dépenses médicales, incluant les dépenses relevant des médecins généralistes et des médecins spécialistes ou distinguera-t-on ces deux postes ? Il semble que la rédaction du paragraphe I du nouvel article L. 162-5-2, prévue au II du présent article, ainsi que la possibilité que soient négociées deux conventions médicales distinctes pour les médecins généralistes et pour les médecins spécialistes militent pour la deuxième interprétation. Une contribution conventionnelle sera donc redevable de l’ensemble des médecins généralistes conventionnés, en cas de non-respect de l’objectif de dépenses médicales des médecins généralistes et une autre contribution conventionnelle sera exigée de l’ensemble des médecins spécialistes conventionnés en cas de non-respect de l’objectif des médecins spécialistes.

Le deuxième alinéa souligne que le montant exigible des médecins ne peut dépasser le montant du dépassement global constaté. Il précise par ailleurs que cette contribution sera proportionnelle aux honoraires et aux prescriptions réalisées par chaque médecin, selon des règles de calcul qui feront l’objet d’un décret en Conseil d’Etat.

Le troisième alinéa dispose que seront déduites du montant exigible des médecins les réserves éventuellement constituées par le fonds de régulation la ou les années précédentes, à l’exception des sommes affectées par les parties dans l’annexe annuelle à la ou aux conventions médicales aux actions non reconductibles de modernisation du système de soins. La question se pose alors de savoir si les réserves disponibles dans le fonds sont collectives et peuvent donc être utilisées indifféremment pour réduire la contribution des médecins généralistes ou des médecins spécialistes ou s’il convient de distinguer, à l’intérieur de ces réserves, les sommes correspondant aux économies précédemment réalisées par les médecins généralistes - et qui peuvent être déduites d’une contribution conventionnelle des seuls médecins généralistes - des sommes correspondant aux économies des médecins spécialistes, qui peuvent être déduites de leur propre contribution s’il y a lieu. Il semble que ce soit cette dernière hypothèse qui soit la plus logique. Il y aurait donc en fait deux fonds de régulation, l’un pour les médecins généralistes et l’autre pour les médecins spécialistes.

Le dernier alinéa prévoit que l’annexe annuelle à la ou aux conventions médicales fixera à l’année n+1 le montant global exigible de l’ensemble des médecins (généralistes ou spécialistes) sur l’année n.

·  Le paragraphe III du nouvel article L. 162-5-3 détermine les conditions dans lesquelles la contribution sera mise à la charge des médecins conventionnés (généralistes ou spécialistes).

Le deuxième alinéa rappelle que cette contribution est due par l’ensemble des médecins conventionnés (généralistes ou spécialistes) ou par ceux ayant adhéré au règlement conventionnel minimal en l’absence de convention médicale.

Le troisième alinéa souligne que la contribution est répartie entre ces médecins proportionnellement aux revenus tirés, l’année où le dépassement a été constaté, de leurs activités dans le cadre de la convention médicale ou du règlement conventionnel minimum.

Le quatrième alinéa prévoit que les médecins exerçant, à la fin de l’année où le dépassement a été constaté, depuis sept ans ou moins sont exonérés de la contribution conventionnelle. Cependant, les parties pourront fixer dans le ou les conventions médicales un plafond de revenus au-delà duquel l’exonération ne sera pas appliquée.

Le cinquième alinéa dispose qu’un arrêté fixera au plus tard le 31 juillet de l’année n+1, suivant l’année n où le dépassement a été constaté, le taux de la contribution conventionnelle de façon à ce que le produit global de celle-ci corresponde au montant fixé par l’annexe annuelle de la ou des conventions médicales de l’année n+1. La fixation du taux ne relève donc que d’une opération mathématique à partir du montant global de la contribution arrêté par les parties selon les modalités prévues au paragraphe II.

Le sixième alinéa autorise les partenaires conventionnels à moduler ce taux de contribution en fonction du niveau de revenus et de l’appartenance du médecin au secteur à honoraires libres de la ou des conventions médicales (plus couramment appelé “ secteur  II ”), le montant global de la contribution restant identique. Les médecins du secteur II pourront donc être plus lourdement frappés par la contribution conventionnelle si la ou les conventions médicales le prévoient.

Le dernier alinéa prévoit la déduction du bénéfice imposable des médecins de la contribution conventionnelle qu’ils auraient acquittée.

·  Le paragraphe IV du nouvel article L. 162-5-3 confie aux organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale du régime général, les URSSAF, le soin de recouvrer et de contrôler la contribution conventionnelle selon les mêmes règles, garanties et sanctions applicables aux cotisations familiales personnelles.

Le deuxième alinéa confie à un décret le soin de déterminer les modalités de versement de la contribution qui pourra s’effectuer par acompte provisionnel. A l’instar des cotisations familiales, la contribution conventionnelle fera donc l’objet d’un acompte au mois d’août, soldé au mois de novembre suivant. Cet acompte, ainsi que le précise le présent dispositif, sera calculé soit sur la base des revenus de l’année n-1, soit sur la base des revenus forfaitaires définis par décret. Une régularisation ultérieure devrait donc être effectuée au vu des revenus déclarés de l’année n.

Le troisième et dernier alinéa dispose que le produit de la contribution conventionnelle sera partagé entre la CNAMTS, la CANAM et la MSA selon les mêmes règles de répartition d’après lesquelles ces caisses se répartissent la part des cotisations sociales des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés qu’elles prennent à leur charge, selon l’article L. 722-4 du code de la sécurité sociale.

Le paragraphe IV propose une nouvelle rédaction de l’article L. 162-5-4 du code de la sécurité sociale qui s’inspire largement de son ancienne rédaction.

Si un médecin ne s’est pas acquitté, totalement ou partiellement, de la contribution conventionnelle dont il est redevable dans un délai de deux mois après la date limite de paiement, l’URSSAF en informe la caisse primaire d’assurance maladie dont il relève. Celle-ci, à l’instar du système précédent de reversement, peut décider de déconventionner le médecin fautif, après lui avoir permis de présenter ses observations. Comme dans l’ancien système, la durée de ce déconventionnement peut aller de un à six mois et peut tenir compte du montant de la contribution conventionnelle. Cette décision pouvant être contestée devant les tribunaux administratifs.

Article 22

Dispositif transitoire relatif au respect de l’objectif des dépenses médicales pour 1998

Cet article met en place un dispositif transitoire en cas de respect ou de non-respect des dépenses médicales pour l’année 1998.

Le paragraphe I valide les objectifs des dépenses médicales et les provisions fixés pour l’année 1998 pour les médecins généralistes, d’une part et les médecins spécialistes, d’autre part, en fonction de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie déterminé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998. Ces objectifs et ces provisions ayant fait l’objet d’une annexe aux conventions médicales avec les médecins généralistes et les médecins spécialistes étaient en effet frappés de la même nullité que ces conventions à la suite des décisions du Conseil d’Etat du 26 juin et du 3 juillet 1998, bien qu’aucun vice de forme, de compétence ou de procédure ne les ait entachés. Il était donc nécessaire de les valider pour assurer le respect de l’objectif des dépenses médicales de 1998.

Le paragraphe II dispose qu’en cas de respect de l’objectif pour 1998 des dépenses médicales des médecins généralistes ou des médecins spécialistes, et si l’écart entre cet objectif et le montant constaté des dépenses dépasse un taux fixé par décret, c’est le mécanisme mis en place par l’article 21 qui s’applique. La différence sera alors versée au fonds de régulation créé par ce même article pour financer des actions non reconductibles de modernisation du système de soins. La présente disposition est cependant silencieuse dans l’hypothèse où l’écart entre l’objectif et le montant constaté est inférieur au taux fixé par décret.

Le paragraphe III prévoit qu’en cas de non-respect du même objectif par les médecins généralistes ou par les médecins spécialistes et si l’écart entre cet objectif et le montant constaté des dépenses dépasse un taux fixé par décret, le montant de la contribution exigible des médecins généralistes ou spécialistes sera calculé en fonction des honoraires perçus et des prescription réalisées selon les règles antérieurement en vigueur, c’est à dire selon les dispositions du décret n° 96-1116 du 19 décembre 1996 relatif au versement exigible des médecins conventionnés en cas de non-respect de l’objectif prévisionnel des dépenses médicales et modifiant le code de la sécurité sociale.

Ainsi, en cas de dépassement résultant des seuls honoraires, la contribution sera égale à l’intégralité du dépassement constaté ; si le dépassement résulte des seules prescriptions, la contribution s’élèvera à 5 % du dépassement constaté dans la limite de 1% des dépenses remboursables au titre des honoraires; enfin, en cas de dépassement portant à la fois sur les honoraires et les prescriptions, la contribution sera égale au dépassement des honoraires et à 5 % du dépassement en matière de prescriptions, dans la limite de 1 % des dépenses remboursables au titre des honoraires.

Les règles de calcul de ce reversement ayant été expressément déclarées illégales par le Conseil d’Etat dans sa décision du 3 juillet 1998 d’annulation de la convention avec les médecins généralistes, la présent disposition constitue donc une mesure de validation législative dont la durée est cependant limitée à l’année 1998.

Article 23

(articles L. 512-3 nouveau et L. 601-6 du code de la santé publique, L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle et L. 162-16 du code de la sécurité sociale)

Création d’un droit de substitution au profit du pharmacien

Le présent article vise à créer un droit de substitution d’un médicament prescrit par le médecin par un autre médicament appartenant au même “ groupe générique ”, sur décision du pharmacien et sauf opposition expresse du prescripteur.

Le principal intérêt de ce mécanisme est, naturellement, de permettre, à efficacité de traitement égale, une substitution aboutissant à un coût moindre. La création de ce droit de substitution doit permettre de contribuer à doubler la part des médicaments génériques actuellement trop peu développée en France. La part des génériques représente 4 à 5 % du marché des médicaments en ville. Dans nombre d’autres pays, cette part de marché est de 10 % à 30 % : 12 % aux Etats-Unis, 20 % en Allemagne, 15 % en Grande-Bretagne. Il convient d’ajouter à ce constat quantitatif le fait que l’essentiel du marché des génériques est réalisé par des produits de marque alors que les génériques vendus sous dénomination commune internationale (DCI) sont très faiblement développés : au cours de la période allant d’août 1997 à juillet 1998, le chiffre d’affaires des génériques vendus sous DCI n’est que de 350 millions de francs alors que, pour la même période , les génériques de marque représentent un chiffre d’affaires dix fois plus important.

Même si le Gouvernement et le Parlement ont déjà favorisé le développement des génériques en matière de taxation, il reste que le droit de substitution devrait en faciliter la diffusion. La moitié du marché du médicament remboursable pourrait se faire par des produits génériques. Le droit de substitution va donc dans le bon sens. En outre, ce droit évite des phénomènes de rupture d’approvisionnement et permet au pharmacien d’officine de proposer un médicament dont le prix est moindre que le produit prescrit. Il s’agit donc d’un mécanisme dont, a priori, on est en droit d’attendre des effets très positifs, à condition d’en encadrer la pratique de manière à garantir les droits du prescripteur, donc ceux du patient.

En premier lieu, il faut observer que le droit de substitution existe, selon des modalités comparables à celles du présent article, dans de nombreux pays étrangers et qu’il est impossible de ne pas établir un lien entre l’existence de ce droit et le développement des produits génériques.

La faculté de substitution existe en Allemagne sur prescription du médecin, la substitution ne pouvant s’opérer que pour des médicaments figurant une liste établie par les autorités de santé, en Autriche, si le produit prescrit n’est pas disponible, en Espagne, soit sur autorisation du médecin, soit à la double condition d’obtenir l’accord du patient et que la formule du produit substitué soit identique. En Finlande où depuis 1996, elle s’exerce avec une autorisation du médecin et l’accord du patient, les médecins peuvent prescrire le médicament sous son nom de marque ou sous un nom de générique et le pharmacien est alors autorisé à fournir le générique si son prix est moins élevé. La Suède pratique un droit de substitution, que le médecin prescripteur peut refuser en mentionnant ce refus sur l’ordonnance. La Grande-Bretagne autorise une substitution de la part du pharmacien, dans le cadre de la même DCI; toutefois, si la prescription est libellée sous le nom de marque du produit, aucune substitution n’est alors possible. A titre exceptionnel, la faculté de substitution existe également en Italie, au sein d’une même DCI. Certes, la substitution en tant que telle n’est reconnue ni en Irlande, ni en Belgique, ni au Danemark, mais il convient de souligner à quel point le dispositif proposé par cet article ressemble à celui qui est pratiqué dans nombre de pays européens.

En second lieu, il convient d’insister sur la philosophie d’ensemble du mécanisme : aucune atteinte n’est portée au droit de prescription à proprement parler. En particulier, le II du présent article prévoit que la substitution n’est possible qu’avec un accord tacite du médecin prescripteur. Si cet accord se présume, la possibilité de substituer peut cependant être explicitement écartée par le prescripteur. Le droit de substitution n’existera donc que si le prescripteur n’a pas exclu cette possibilité.

C’est à la lumière de ces considérations préalables qu’il convient d’analyser le dispositif proposé par cet article.

1. Instauration du droit de substitution

Le dispositif proposé par le I vise en créant un article L. 512-3 nouveau dans le code de la santé publique, à établir dans la loi le droit de substitution, par le pharmacien, d’un produit par un produit de même groupe générique, tel que défini au II de l’article 23.

Contrairement à une idée répandue, le droit de substitution existe déjà en France dans deux circonstances précises prévues par des textes réglementaires.

- L’article R. 5015-61 du code de la santé publique interdit au pharmacien de modifier une prescription sans l’accord exprès et préalable de son auteur. A contrario, il existe donc bien un droit de substitution subordonné à l’accord du médecin prescripteur. Celui-ci s’exerce en particulier en cas d’indisponibilité de certains produits. Si le pharmacien décèle une anomalie dans la prescription (article R. 5015-60 du même code) il doit alors renvoyer le patient vers son médecin en notifiant son refus sur l’ordonnance. Le refus est subordonné à l’existence d’un motif sérieux, par exemple pour la délivrance de substances vénéneuses qui ne serait pas assortie des indications posologiques requises (article R. 194 du même code).

Dans la pratique, la substitution - notamment en cas d’indisponibilité du produit - s’exerce le plus souvent après un accord téléphonique auprès du médecin, ce qui peut être source de difficultés certaines pour le pharmacien si sa responsabilité est ensuite mise en cause.

Le premier alinéa de l’article L. 512-3 nouveau du code de la sécurité sociale donne un fondement légal à ces possibilités en prévoyant deux cas dans lesquels la substitution s’exercera même en dehors de produits appartenant au même groupe générique :

- soit après accord exprès du médecin (ce qui, logiquement, devrait se traduire par la suppression de l’article R. 5015-61 du code, devenu redondant),

- soit dans le cas d’urgence.

Il existe, en effet d’ores et déjà un droit de substitution “ autonome ”, qui concrètement, s’exerce notamment au cours des services de garde. L’article R. 5015-7 du code, qui est extrait du code de déontologie, met à la charge du pharmacien un devoir de “ porter secours à toutes personnes en danger immédiat, hors le cas de force majeure ”. Cet article constitue d’ailleurs une obligation positive, qui est le pendant de l’incrimination de la non assistance à personne en danger (article 223-6 alinéa 2 du nouveau code pénal). Elle se traduit par la délivrance de médicaments indispensables à des malades atteints de pathologies graves, comme un diabète. Le droit de substitution est alors conçu comme un “ devoir de secours lié à l’urgence ” 12.

Le dispositif proposé au premier alinéa, qui ne fait que reprendre ces possibilités de substitution, ne constitue donc pas une nouveauté.

Le deuxième alinéa de l’article L. 512-3 du code, en revanche introduit une innovation puisqu’il inverse la logique précédente et reconnaît un droit pour le pharmacien de substituer princeps et générique, puisque le II du présent article identifie l’un et l’autre.

Cette possibilité de substitution est générale, et ne nécessite plus l’accord préalable du prescripteur. Elle ne connaît que deux exceptions :

- le refus exprès du médecin, qui peut faire figurer une mention en ce sens sur la prescription pour “ raisons particulières tenant au patient ”. On songe en particulier, naturellement, à des personnes trop habituées à un type de médicament ou à une posologie particulière mais ce n’est pas le seul, le médecin demeurant libre de son appréciation quant à la “ non-substituabilité ” du produit concerné, non pas dans son principe actif mais dans l’excipient qu’il incorpore, lequel peut par exemple contenir du sucre. Les motifs en cause ne peuvent donc être liés à la seule existence du générique mais uniquement à l’intérêt du patient. Le médecin n’est donc pas libre d’apprécier la valeur thérapeutique du produit prescrit par rapport à celle du produit substituable. Les motifs ne peuvent tenir qu’au patient lui-même, par exemple l’habitude de se conformer à une posologie ou l’impossibilité d’absorption sous une forme plutôt qu’une autre... Ces raisons présentent un caractère exclusif ;

- la deuxième réserve tient au prix des produits substitutifs et elle est fixée par le IV du présent article. L’article L. 512-3 nouveau renvoie en effet aux règles déterminées par l’article L. 162-16 du code de la sécurité social, tel qu’il résulte du IV.

Il est clair que la faculté de substitution est désormais largement ouverte, sauf décision expresse contraire du médecin, au profit du pharmacien, lequel acquiert ainsi une possibilité large d’intervention.

Le code de déontologie comporte en lui-même suffisamment de précisions pour que ce nouveau droit s’exerce dans un cadre bien délimité : préservation de la santé publique, règles de bonne pratique, strictes règles de délégation des responsabilités, etc...

De la même manière, les règles publicitaires sont très strictement définies par le code de la santé publique. En outre, on notera que le deuxième alinéa de l’article L. 549 de ce même code prohibe l’exercice de la profession de pharmacien destiné à la recherche d’intérêts ou ristournes en fonction des médicaments vendus. Compte tenu du fait que le droit de substitution va, sans nul doute, entraîner un démarchage de la part des représentants des laboratoires vers les pharmaciens, il conviendrait d’étendre la réglementation déontologique concernant les relations entre médecins et laboratoires aux pharmaciens.

Il résulte de l’article 47 de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993, portant diverses dispositions d’ordre social, codifiée à l’article L. 365-1 du code de la santé publique qu’“ est interdit le fait, pour les membres des professions médicales visées au titre Ier du livre IV du présent code, de recevoir des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, procurés par des entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. ”

Ce même texte énumère ensuite toute une série d’exceptions à la prohibition ainsi formulée :

- conventions dont le but “ explicite et réel ” porte sur des activités de recherche,

- hospitalité offerte lors de manifestations professionnelles et scientifiques ;

- actions de formation médicale continue ou “ relations normales de travail ”.

Connu sous le nom, trivial, de loi “ anti-cadeaux ”, ce mécanisme a donné lieu à un contrôle extrêmement attentif de la part de la direction de la consommation et de la répression des fraudes et à quelques condamnations à des peines d’amende. En dépit de certaines difficultés initiales de mise en oeuvre, portant notamment sur la définition de l’avantage ou de celle de “ relations normales de travail ”, le système repose sur le contrôle des conventions conclues entre médecins et industrie. L’entreprise doit transmettre les conventions au Conseil de l’ordre et obtenir son avis, avis transmis par elle au médecin.

Afin de préciser la portée du texte, ont été édictés :

- une circulaire du 9 juillet 1993, relative à l’application de cet article, qui rappelle l’importance de la procédure conventionnelle,

- un document émanant du Conseil de l’ordre, intitulé “ Recommandations à propos des relations médecins-industrie ” qui définit des avantages prohibés.

En dépit de certains reproches qui lui sont parfois adressés, tenant à la lourdeur de la procédure, à la minutie avec laquelle sont examinés certaines des manifestations visées par cet article - repas, nuit d’hôtel, voyage, manifestations culturelles... -, ou encore à l’absence de traitement différencié entre la prise en charge de “ frais d’hospitalité ” à l’occasion d’un congrès et les dossiers de recherche clinique, pour lesquels le versement d’honoraires est plus logique, l’objectif fondamental de ce texte est de veiller à la déontologie d’ensemble de la profession, ce qui fait jouer un rôle essentiel aux conseils de l’ordre. Le rapporteur juge donc ce texte positif même s’il est perfectible. Le présent article, si l’on y prenait garde, pourrait conduire à un “ report ” des actions ainsi prohibées vers les pharmaciens. Il paraît donc logique d’étendre le mécanisme “ anti-cadeaux ” aux pharmacies d’officine, dès lors que ces derniers disposeront désormais d’un pouvoir dans la détermination du médicament vendu.

Cette même logique ne pourra s’appliquer au premier alinéa de l’article L. 549 du code de la santé publique, lequel prohibe les intérêts ou ristournes en fonction des unités prescrites, puisqu’il est en contradiction avec le mode de rémunération des pharmaciens d’officine. Il ne paraît pas non plus opportun d’étendre l’article L. 462 relatif aux conventions de location de locaux ou de matériel, qui ne se justifie que s’agissant de l’exercice médical.

Enfin, il convient de souligner que la fin du dispositif du I renvoie à un décret en Conseil d’Etat le soin de préciser les conditions d’application de cet article notamment celles qui tiennent à la “ non-substituabilité ”, c’est à dire en particulier à la forme que revêtira la mention en cause et à sa motivation par le médecin.

2. Nouvelle définition du médicament générique

Le dispositif proposé par le II a pour objet de mieux définir le médicament générique. La définition actuelle de l’article L. 601-6 du code de la santé publique vise deux produits ayant “ la même composition qualitative et quantitative en principes actifs, la même forme pharmaceutique ” et dont la bioéquivalence est démontrée. Cette définition est parfois critiquée au motif qu’elle est trop restrictive par rapport à la définition européenne du générique qui retient une notion selon laquelle le générique peut être constitué par une “ spécialité pharmaceutique essentiellement similaire à un produit autorisé, selon les dispositions communautaires en vigueur, depuis au moins six ans dans la Communauté et commercialisé dans l’Etat membre concernée par la demande ; cette période est portée à dix ans lorsqu’il s’agit d’un médicament de haute technologie. ”13. Cette notion, à son tour, fait référence à la DCI.

Cette conception, plus large, est reprise par l’article R. 5133-1 du code de la santé publique, lequel, pour rappeler la définition communautaire, dispose :

“ Une spécialité est considérée comme étant essentiellement similaire à une autre spécialité si elle a la même composition qualitative et quantitative en principes actifs, la même forme pharmaceutique et si, le cas échéant, le bioéquivalence entre les deux spécialités a été démontrée par des études appropriées de biodisponibilité. ”

Le décret n° 97-221 du 13 mars 1997 a précisé la définition même du générique et les conditions de délivrance des autorisations de mise sur le marché. L’article R. 5143-9 du code de la santé publique issu de ce même décret définit ainsi la notion de biodisponibilité : “ la vitesse et l’intensité de l’absorption dans l’organisme, à partir d’une forme pharmaceutique, du principe actif ou de sa fraction thérapeutique destinée à de devenir disponible au niveau des sites d’action ” et celle de bioéquilibre comme “ l’équivalence des disponibilités ”.

La notion de médicament générique est donc définie d’une manière plus stricte par la loi que par le décret ou par la norme européenne. A partir de ces textes, une décision du 23 juin dernier a établi un répertoire de 459 spécialités génériques, réparties au sein de 82 groupes. Ce répertoire des médicaments génériques devrait être remis à jour trimestriellement par l’Agence du médicament.

Le présent dispositif ne remet pas en cause la définition même du générique, qui demeure donc stricte, mais il vise à introduire la notion de “ groupe générique ”, constitué par le médicament princeps, désormais appelé “ spécialité de référence ”, et par l’ensemble des produits qui en sont génériques. Ainsi sera facilitée la substitution pour le prescripteur comme pour le pharmacien, d’un produit par un autre, qui lui est identique. Au sein du même groupe générique, le choix du prescripteur pourra donc s’opérer librement, soit d’un princeps prescrit vers un de ses génériques, soit inversement. Il pourra également s’exercer en faveur des produits de marque comme des produits commercialisés sous DCI. La seule réserve à liberté du choix entre produits substituables résulte d’une contrainte tarifaire prévue par le IV ci-dessous.

3. Modification de conséquence du code de la propriété intellectuelle

Le III du présent article n’appelle pas de longs commentaires : il vise, par conséquence de l’existence du droit de substitution, à modifier l’article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle, en prévoyant que l’infraction constituée par le fait d’avoir “ sciemment livré un produit ou fourni un service autre que celui qui lui aura été demandé sous une marque enregistrée ” ne joue pas si le pharmacien fait usage du droit de substitution, qu’il s’agisse des cas où il y a eu accord préalable du médecin, d’urgence ou de substitution spontanée. Les médicaments étant dans la plupart des cas prescrits en marques et non en DCI ou en groupes génériques, il est clair qu’il faut expressément écarter l’application de cette prohibition punie au maximum, en vertu de l’article L. 716-9 du même code, de deux ans d’emprisonnement et de un million de francs d’amende, en cas d’usage par le pharmacien de son droit de substitution.

4. Principe de la substitution à coût égal

Le dispositif du IV prévoit que l’usage du droit de substitution entre un produit et un élément du même groupe générique doit se faire à charge égale pour l’assurance maladie. En conséquence, le niveau de remboursement du produit substituable ne saurait dépasser celui du produit prescrit. Cette règle ne vaut que pour la substitution avec accord tacite du prescripteur : elle ne vaut ni en cas d’urgence ni en cas d’application de l’accord exprès et préalable de celui-ci. Il s’agit exclusivement du cas dans lequel le pharmacien procède spontanément à la substitution (2ème alinéa de l’article L. 512-3). Seuls sont visés les médicaments qui, en vertu de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, sont pris en charge ou remboursés par les caisses d’assurance maladie. L’objectif de ce texte est donc de favoriser, non le produit en fonction de son prix de vente mais en fonction du montant moindre de son remboursement.

Les deux derniers alinéas du IV prévoient les sanctions en cas d’inobservation de cette règle de limitation des dépenses :

- si le pharmacien délivre un médicament d’un montant de remboursement supérieur à celui qui était initialement prescrit, le texte lui fait obligation de verser à la caisse concernée une somme correspondant à la dépense supplémentaire pour elle ;

- un minimum forfaitaire est prévu pour cette pénalité, qui sera fixé par arrêté ;

- le recouvrement des sommes en cause est identique à celui d’une cotisation de sécurité sociale. En conséquence, les dispositions de l’article L. 243-18, prévoyant une majoration de 10 % après expiration des délais de paiement, majoration ensuite augmentée de 3 % après l’expiration d’un délai de trois mois, sont applicables. Toutefois, ces pénalités sont automatiquement remises, en application de l’article R. 243-19-1 lorsqu’elles sont inférieures à un seuil, fixé par décret. Il convient de noter que ce seuil ne se confond pas nécessairement avec le minimum forfaitaire de la pénalité visé ci-dessus ;

- enfin, il convient de souligner que le texte prévoit que la sanction ne s’applique “ qu’après que l’intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations ”.

Le rapporteur entend faire les remarques suivantes :

- Le texte ne laisse pas apparaître de possibilité d’appréciation en opportunité de la part de la caisse : la substitution d’un produit par un autre devra donc systématiquement donner lieu à une analyse du remboursement par le pharmacien. On est en droit de se demander si un peu de souplesse ne devrait pas être introduite dans ce texte. Ainsi rédigé, en effet, toute substitution se traduisant par une majoration, ne serait-ce que d’un franc, donne lieu à sanction financière alors fixée au montant du versement forfaitaire.

- On se demande en outre quelles “ observations ” peuvent être formulées, dès lors que la sanction financière est automatique. Si il y a automaticité de la sanction, la procédure “ contradictoire ” devient sans intérêt, puisque la caisse ne peut pas tenir compte des observations de l’intéressé.

- Le texte ne fournit aucune indication quant au formalisme de ces “ observations ”, forme, délai, réponses, etc...

Ces dispositions pourraient entraîner en définitive, une excessive prudence dans le comportement des pharmaciens en matière de substitution. Certes, il convient d’en faire un instrument de meilleure maîtrise des dépenses de pharmacie et il ne faudrait pas que l’extension des génériques se traduise par une augmentation des remboursements, ce qui serait tout à fait paradoxal. En outre, le rapporteur doit invoquer un autre intérêt de ce mécanisme : l’un des reproches formulés à l’encontre du droit de substitution tient au fait que l’objectif d’évolution des dépenses de soins de ville, au respect duquel les médecins sont tenus, intègre naturellement les prescriptions et notamment celles des médicaments. Du fait de l’existence même du droit de substitution, la réalité de la dépense pourrait échapper au prescripteur, lequel, en vertu de l’article L. 162-2-1 du code de la sécurité sociale est tenu, dans sa prescription “ d’observer la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins ”. D’où l’intérêt du dispositif consistant à prévoir que la substitution ne peut se traduire par un coût supplémentaire de remboursement.

Pour autant, il convient sans doute d’introduire un peu de souplesse dans le mécanisme proposé par le IV de cet article.

Article 24

(articles L. 612-16-1 et L. 612-17-4 du code de la sécurité sociale)

Contenu des conventions passées entre le comité économique du médicament et les entreprises pharmaceutiques

Cet article a pour objet de mieux définir le contenu des conventions passées entre les entreprises de l’industrie pharmaceutique et le Comité économique du médicament pour fixer le prix des médicaments, ainsi que de renforcer les pouvoirs de ce Comité.

Créé par l’article 61 de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d’ordre sanitaire, social et statutaire, le Comité économique du médicament a fait l’objet, depuis lors, du décret n° 97-1275 du 29 décembre 1997, relatif à sa composition et à son fonctionnement. Aux termes de l’article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale, sa mission essentielle consiste à contribuer “ à l’élaboration de la politique économique du médicament. Il met en œuvre en ce qui le concerne les orientations, relatives notamment à la maîtrise des dépenses de remboursement, qu’il reçoit des ministres compétents. En particulier, il applique ces orientations à la fixation des prix des médicaments à laquelle il procède en application de l’article L. 162-17-4. ”

Ce dispositif, que le présent article tend à modifier, prévoit l’existence d’un mécanisme conventionnel régissant les rapports entre le comité et les entreprises commercialisant des médicaments remboursables (article L 162-17 du code de la sécurité sociale) d’une durée maximale de quatre ans, fixant (notamment) les prix et éventuellement leur évolution. A défaut de convention, la fixation de ces prix intervient par arrêté ministériel. L’économie d’ensemble du système consiste à laisser le champ libre à la négociation conventionnelle, et, à défaut de son aboutissement, à faire intervenir la puissance publique.

Le présent article ne bouleverse pas ce schéma d’ensemble, mais il vise, dans le but de développer le système conventionnel, à mieux définir le contenu des conventions.

Le I du présent article prévoit de modifier l’article L. 162-16-1 pour définir le prix du médicament. Les principales modifications introduites par cet article consistent :

- en premier lieu, à indiquer que la fixation du prix tient compte :

- de l’amélioration du service médical rendu apporté par le produit ;

- des prix des médicaments comparables ;

- des volumes de ventes ;

- des conditions prévisibles d’utilisation du médicament.

Cette liste n’est pas limitative, et on peut s’interroger sur la notion de “ médicaments comparables ” qui ne correspond ni à la DCI, ni à la définition d’un générique.

- en deuxième lieu, à mentionner les marges que le Gouvernement est habilité à établir par arrêté en application de l’article L. 162-38 du même code ;

- en troisième lieu, il prévoit d’appliquer le titre IV de l’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence aux infractions aux prix du médicament s’agissant de leur constat et de leur poursuite. On soulignera, en particulier, les obligations liées à l’obligation de facturation (article 31), l’interdiction de vente à pertes (article 32), les délais de paiement (trente ou vingt jours selon les cas : article 35) mais surtout l’obligation faite aux grossistes de mentionner à tout acheteur qui en fait la demande les “ rabais et ristournes ” (article 33) ;

- enfin, il prévoit, en cas d’absence de convention, que l’arrêté de fixation des prix est pris “ après avis ” du comité économique du médicament.

Le II précise en premier lieu le contenu des conventions, ici encore en procédant à une énumération qui ne présente pas de caractère limitatif mais fixe un contenu minimal à la procédure conventionnelle qui détermine - comme sous l’empire de l’ancien texte - le prix et, le cas échéant, son évolution. En revanche, le nouveau texte fait désormais mention des éléments suivants :

- l’évolution des prix, “ notamment en fonction des volumes de vente ”.

- si elles existent, les remises consenties par les entreprises pharmaceutiques à la CNAM en application de l’article L. 162-18 du code de la sécurité sociale, ce qui ne modifie en rien le système qui s’applique actuellement ;

- les engagements de l’entreprise portant sur la politique de promotion de l’entreprise concernée et sur le respect des volumes de ventes.

Le contenu des conventions est donc plus précis et plus contraignant que ne l’était l’ancien texte. L’absence de conventionnement entraîne, en vertu de l’article 25, l’inclusion de l’entreprise concernée dans le champ du processus de la clause de sauvegarde.

En outre, cet article tend à instituer une procédure de suivi périodique, par le comité économique du médicament, de l’évolution d’ensemble des dépenses de médicaments - et pas seulement des dépenses donnant lieu à remboursement. On peut supposer, en l’absence d’une définition plus précise, que les dépenses ainsi visées sont celles des médicaments tels que définis par l’article L. 596 du code de la santé publique, qui retient la notion la plus large.

Le suivi est effectué par le comité, en comparaison de ces dépenses par rapport à l’ONDAM, et doit donner lieu à deux constats, à l’issue de quatre et huit mois de l’année. En cas de dérapage, le comité acquiert désormais le pouvoir de “ déterminer ” les mesures nécessaires au redressement des prix, qui peuvent prendre la forme d’une modification des prix ou aller, en cas de refus de signature de l’avenant, jusqu’à la résiliation de la convention.

La question fondamentale que pose cet article est celle des moyens du Comité économique du médicament. Composé de six membres, de rapporteurs et d’un secrétariat placé auprès de la direction de la sécurité sociale, on peut douter que cette structure légère réponde aux missions nouvelles que la loi lui assigne au présent article comme à l’article 25. Le développement de la politique conventionnelle risque donc d’être entravé par le caractère assez léger de cette structure.

Article 25

(articles L. 138-10 à L. 138-19 du code de la sécurité sociale)

Institution d’une clause de sauvegarde applicable à la progression du chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique

Le présent article établit un lien entre l’évolution de l’ONDAM, d’une année sur l’autre, et celle du chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique pour la même période de référence. Si le taux de croissance du chiffre d’affaires est plus fort que celui de l’ONDAM, les entreprises non conventionnées sont alors redevables d’une contribution, dont les modalités de calcul, pour chaque entreprise, sont fixées par le présent article.

1. Examen du dispositif

a) Le mécanisme de contribution

Le seuil de déclenchement du mécanisme est prévu par le 2° du II du présent article. Il s’agit du cas dans lequel le taux de progression du chiffre d’affaires hors taxes réalisé sur les médicaments remboursables par l’ensemble de l’industrie pharmaceutique - définie par référence à l’activité de fabrication, d’importation, d’exportation ou de vente en gros des médicaments, retenue par l’article L. 596 du code de la santé publique, soit la définition la plus large possible - est supérieur au taux de progression de l’ONDAM, soit 2,6 % pour 1999. Ce dernier taux est arrondi à la décimale la plus proche. Seul le chiffre d’affaires des entreprises redevables entre en ligne de compte. Le franchissement de ce seuil entraîne automatiquement le versement d’une contribution globale, progressive en fonction du dépassement de l’ONDAM :

- si le dépassement est de moins de 1 %, la contribution due est de 0,15 % du chiffre d’affaires ;

- si ce dépassement est compris entre 1 % et 2 %, elle est de 0,65 % ;

- s’il est compris entre 2 % et 4 %, le taux est de 1,3 % ;

- s’il est compris entre 4 % et 5,5 %, le taux est de 2,3 % ;

- au-delà, il est de 3,3 %.

Le chiffre d’affaires pris en compte pour le déclenchement de la clause de sauvegarde exclue celui des entreprises qui ne sont redevables à aucune titre de la contribution. Ainsi, le chiffre d’affaires d’une entreprise qui n’est plus redevable au cours de l’année n’est pris en compte pour le déclenchement de la clause, ni au titre de l’année n, ni au titre de l’année n-1.

b) Les entreprises redevables

Si la définition du champ d’application du présent article paraît particulièrement large, en fait l’article L. 138-10, nouveau, du code de la sécurité sociale prévoit une très large exonération. Ne sont, en effet, pas redevables de la contribution celles des entreprises pharmaceutiques qui ont conclu, en application des articles L. 162-16-1, L. 162-17-4 et L. 162-18 du code de la sécurité sociale, une convention :

- fixant le prix de vente de l’ensemble des médicaments remboursables ;

- comportant des engagements sur le chiffre d’affaires et, en cas de non-respect de ces engagements, des clauses portant soit sur les prix, soit sur le versement d’une remise à la CNAM, à la caisse des professions non agricoles et à la MSA, en application de l’article L. 162-18 du même code en cours de validité au 31 décembre de l’année civile au titre de laquelle est due la contribution.

La liste de ces entreprises est arrêtée par le Comité économique du médicament avant le 31 janvier de l’année suivant celle au titre de laquelle la contribution est due.

Le rapporteur doit formuler plusieurs observations sur cette exception :

- le champ actuel du conventionnement portant sur les prix de l’ensemble des produits et sur les chiffres d’affaires couvre environ 90 % des entreprises (99 % de celles-ci étant conventionnées). Ainsi, le texte de la clause de sauvegarde ne concerne que 10 % du marché actuel ;

- le chiffre d’affaires des entreprises non redevables n’est pris en compte ni pour le déclenchement de la clause de sauvegarde, ni pour le calcul de la contribution, qui sera ainsi très réduite ;

- on se heurte à un problème de confidentialité du contenu des conventions conclues avec le Comité économique du médicament. Les entreprises peuvent vouloir conserver secrètes des clauses relevant de relations commerciales dont la publication peut créer des distorsions de concurrence

- la discrimination faite entre les entreprises à l’égard du conventionnement est susceptible de poser de nombreux problèmes : en fonction de l’ordre de passage des entreprises devant le Comité économique du médicament, celles-ci pourront relever soit d’une convention qu’elles auront eu le temps de négocier et de signer avant le 31 décembre, soit du mécanisme de sauvegarde ;

- cette discrimination se double d’une inégalité entre les entreprises conventionnées pour la totalité de leurs produits et les autres, alors que ce critère ne reflète pas nécessairement l’objectif de maîtrise des dépenses recherché par le texte.

Il faut également insister sur l’importance que revêt la publication de la liste des entreprises non assujetties à la contribution. Il est clair qu’il s’agit d’un document susceptible de faire grief, donc qui peut donner lieu à un recours contentieux.

c) Comment la contribution est-elle individualisée ?

L’article L. 138-11 nouveau du code de la sécurité sociale prévoit les modalités d’individualisation de la contribution pour les entreprises redevables. Ce montant global est tout d’abord réparti :

a) pour 30 % sur le chiffre d’affaires des entreprises concernées. Il s’agit du chiffre d’affaires hors taxes provenant des activités économiques liées aux médicaments remboursables des entreprises redevables ;

b) à concurrence de 40 % sur la variation annuelle de ce chiffre d’affaires ; en sont exonérées les entreprises créées depuis moins de deux ans, encore que ce point mériterait d’être précisé quant à la date à partir de laquelle s’apprécie cette condition : s’agit-il de la date d’inscription au registre du commerce du début de l’activité effective de vente ou de fabrication ; quant se termine la computation de ce délai...? Enfin, on notera que les entreprises dont la progression de chiffres d’affaires est inférieure à celle de l’ONDAM n’entrent pas dans le champ du calcul de cette fraction (alors qu’elles sont incluses dans le processus de déclenchement de la contribution)

c) à concurrence de 30 % sur les dépenses de promotion publicitaire des entreprises redevables, définies à l’article L. 245-1 du code de la sécurité sociale - dont sont toutefois exonérées, en application de l’article L. 245-4 les entreprises n’appartenant pas majoritairement à un groupe ou à une autre entreprise, dont le chiffre d’affaires hors taxes est inférieur à 50 millions de francs.

La répartition, par entreprise redevable, est ensuite effectuée en trois fractions (art. L. 138-12) :

- le rapport entre le chiffre d’affaires de l’entreprise et le montant du chiffre d’affaires de l’ensemble des chiffres d’affaires des entreprises concernées, multiplié par le montant total de la part visée au a) (soit 30 % de ces chiffres d’affaires) ;

- le rapport entre la variation du chiffre d’affaires de l’entreprise et les variations correspondantes de l’ensemble des chiffres d’affaires par rapport à celle de l’ONDAM, multiplié par le chiffre obtenu au b) ;

- le rapport entre la contribution payée par l’entreprise au titre des dépenses de promotion et la somme des contributions des entreprises à ce titre, multiplié par le chiffre obtenu au c).

Outre l’absence de simplicité du mécanisme, le rapporteur doit souligner que, selon le texte, les règles d’exonération s’appliquent au niveau de la répartition globale de la contribution et non de son individualisation par entreprise. Cette ambiguïté mériterait d’être levée.

Cependant, il est évident qu’une entreprise exonérée, par exemple du paiement de l’imposition assise sur les dépenses de promotion publicitaire est, de ce fait, exonérée du paiement de cette contribution additionnelle. Les dépenses de recherche ne sont pas exclues de l’assiette pour des raisons détaillées dans le commentaire de l’article 7 du présent projet

Le tableau ci-après détaille le calcul de la contribution et de ses fractions.

Exemple de calcul et de répartition de la contribution

(Taux de croissance de l’ONDAM : 2,60 %)

 

Entreprises redevables

CA n

CA n+1

Taux d’évolution

Part dans le CA

Croissance du CA supérieure à 2,6 %

Part dans la croissance du CA supérieure à 2,6 %

Taxe promotion payée

Part dans la taxe promotion payée

 

Entreprise A

1000

1100

10,00 %

47,21 %

74

86,25 %

2

57,14 %

 

Entreprise B

500

500

0 %

21,46 %

0

0 %

0,501

14,29 %

DONNÉES :

Entreprise C

700

730

4,29 %

31,33 %

11,8

13,75 %

3,5

28,57 %

 

Total des 3 entreprises

2200

2330

5,91 %(1)

100,00%(2)

85,8

100,00 %(3)

 

100,00 % (4)

 

Taux de taxation applicable (5)

1,30 %

             
 

Montant total de la contribution

30,29

             

(1) L’évolution du CA global des trois entreprises déclenche la contribution

(2) Partie a au prorata du CA

(3) Partie b au prorata de la croissance du CA (supérieure à 2,6 %)

(4) Partie c au prorata de la taxe promotion payée

(5) Déterminé de la manière suivante : 5,91 % - 2,6 % = 3,31 %, donc compris entre 2 % et 4 %

       

Entreprise A

Entreprise B

Entreprise C

 

partie a au prorata du CA

30 %

9,09

4,29

1,95

2,85

CHIFFRAGE :

partie b en fonction de la progression du CA

40 %

12,12

10,45

0,00

1,67

 

partie c en fonction des dépenses de promotion

30 %

9,09

5,19

1,30

2,60

d) Comment la contribution est-elle recouvrée ?

Le texte n’impose que formellement une obligation déclaratoire nouvelle à la charge des entreprises concernées. L’article L. 138-15 prévoit seulement une déclaration des éléments servant de base au calcul avant le 15 février de l’année n (pour les éléments relatifs à l’année n-1). Mais, en pratique, de telles obligations déclaratoires existent déjà par ailleurs, parfois avec des dates différentes - par exemple au IV de l’article 26 à la date du 1er avril 1999 - ou à l’article L. 245-3 du code de la sécurité sociale, s’agissant de la contribution assise sur les dépenses de prospection, ou, d’une manière générale, à l’article L. 138-5 du code de la sécurité sociale s’agissant des grossistes répartiteurs. Il convient donc de s’interroger sur le bien-fondé de la mise en place, d’une manière pérenne, d’une obligation déclaratoire supplémentaire, alors que la simple extension du dispositif de l’article L. 138-5 du code de la sécurité sociale suffirait sans doute, si on l’étendait, à remplir cette obligation, puisque celui-ci vise la progression du chiffre d’affaires et crée une obligation déclaratoire trimestrielle et que l’article L. 245-3 vise d’ores et déjà la déclaration des frais de prospection. Il conviendrait d’harmoniser les obligations déclaratoires de toutes les entreprises concernées par tel ou tel fragment de contribution.

Conformément à l’article L. 138-14 du code de la sécurité sociale, le recouvrement de la contribution incombe à l’ACOSS qui l’effectue directement (article L. 225-1-1), avec, le cas échéant, l’assistance des URSSAF.

Pour les deux premières parties de la contribution, assises sur le chiffre d’affaires, le versement a lieu au plus tard le 30 juin de l’année qui suit celle au titre de laquelle la contribution est due. Pour la fraction assise sur les dépenses de promotion publicitaire, l’article L. 138-13 nouveau du code prévoit un versement provisionnel à cette date, ensuite régularisé l’année suivante. Ce système, lui aussi complexe, est rendu nécessaire par le fait que la contribution assise sur les dépenses de promotion est versée au plus tard le 1er décembre de l’année d’exécution, ce qui justifie la régularisation ex-post. Toutefois, ici encore, une solution plus simple mériterait d’être explorée.

Le texte prévoit des pénalités soit en cas de déclaration manifestement erronée, soit en cas de non-déclaration dans les délais prescrits.

Les taux de majorations applicables sont alors de 20 % :

- pour la contribution assise sur le chiffre d’affaires ;

- pour la contribution assise sur sa variation ;

- pour la contribution assise sur le versement dû à raison des frais de prospection.

Il ne semble pas, compte tenu de la rédaction du texte qu’un “ report ” de majoration ou qu’une remise gracieuse soit possible en cas de déclaration manifestement erronée. Tel n’est pas le cas en cas de déclaration tardive, où la pénalité applicable n’est alors que de 10 %, cette dernière majoration pouvant, quant à elle, faire l’objet d’une demande de remise gracieuse.

e) Quelle est l’affectation de la contribution ?

En application de l’article L. 138-18 nouveau du code de la sécurité sociale, la taxe est affectée, suivant une clé de répartition fixée par arrêté, entre les régimes qui financent le régime maladie des praticiens et auxiliaires médicaux, à savoir principalement le régime général et, accessoirement, le régime des non salariés non agricoles et la MSA.

f) Comment les groupes d’entreprises sont-ils taxés ?

L’article L. 138-19 nouveau vise à taxer les groupes d’entreprises et non pas les entreprises individuelles si celles-ci font partie d’un groupe. La définition de la notion de groupe fait référence à celle qui existe en droit des sociétés, prévue par l’article 357-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, improprement référencée par le présent article sous l’appellation “ code des sociétés ”. Ce texte définit le contrôle exclusif par une société qui résulte :

- “ soit de la détention directe ou indirecte de la majorité des droits de vote dans une autre entreprise ;

- soit de la désignation, pendant deux exercices successifs, de la majorité des membres des organes d’administration, de direction ou de surveillance d’une autre entreprise ; la société consolidante est présumée avoir effectué cette désignation lorsqu’elle a disposé au cours de cette période, directement ou indirectement, d’une fraction supérieure à la sienne ;

- soit du droit d’exercer une influence dominante sur une entreprise en vertu d’un contrat ou de clauses statutaires, lorsque le droit applicable le permet et que la société dominante est actionnaire ou associée de cette entreprise. ”

Ce même texte vise le contrôle conjoint défini comme le “ partage du contrôle d’une entreprise exploitée en commun par un nombre limité d’associés ou d’actionnaires, de sorte que les décisions résultent de leur accord ” et l’influence notable qui est “ présumée lorsqu’une société dispose, directement ou indirectement, d’une fraction au moins égale au cinquième des droits de vote de cette entreprise. ”

Cette définition de la notion de groupe n’appelle pas de remarques particulières du rapporteur : elle englobe toutes les sociétés qui publient des comptes consolidés, le contrôle conjoint et l’influence notable. Elle est donc suffisamment large pour que des filiales n’échappent pas à la taxation.

En outre, cette définition est cohérente avec le fait que les scissions et les fusions d’entreprises - ou de groupes - ne jouent pas sur les éléments de calcul de la contribution (articles L. 138-15 et L. 138-11) s’agissant de la variation de chiffre d’affaires.

g) Quelles sont les exonérations ?

Outre l’exonération générale applicable aux entreprises conventionnées au 31 décembre de chaque année, le texte prévoit plusieurs cas d’exonération :

- des créations depuis moins de deux ans d’entreprises, qui les exonère de la part de contribution assise sur la variation de chiffre d’affaires ;

- des entreprises exonérées du paiement de la cotisation assise sur les dépenses de promotion, c’est-à-dire en application de l’article L. 245-4, celles dont le chiffre d’affaires est inférieur à 50 millions de francs sont exonérées de la part de cotisation additionnelle à celle-ci, encore que, sur ce point, la rédaction de l’article L. 138-11 ne soit pas dépourvue de toute ambiguïté, puisqu’il existe une différence entre l’exonération et le calcul de la répartition globale de la contribution ;

- enfin, il convient d’observer que le montant global de la contribution ne peut excéder 10 % du chiffre d’affaires de l’entreprise concernée, au titre des médicaments remboursables.

h) La date d’entrée en vigueur de la clause de sauvegarde est fixée à l’exercice 1999.

Ce système n’a donc aucune portée rétroactive.

2. Observations du rapporteur

Le rapporteur entend formuler une observation de principe, au soutien du dispositif, ainsi que certaines critiques sur les modalités proposées par cet article :

a) Il convient de souligner que la mise en place d’une clause de sauvegarde applicable à l’industrie pharmaceutique est cohérente avec l’action de maîtrise des dépenses, qui ne saurait laisser la production et la vente de médicaments remboursables évoluer sans lien avec l’ONDAM. Outre ce principe, on doit également indiquer que l’évolution du chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique - déjà rappelé dans la partie générale du présent rapport et qui sera détaillée avec l’analyse de l’article 26, ci-après, fait apparaître que cette contribution est économiquement fondée. Aussi et surtout, la mise en place de cette clause de sauvegarde correspond à la définition de règles claires, connues des industriels préalablement à l’exercice auquel elles s’appliquent, pérennes, ce qui est préférable aux systèmes de contributions aléatoires, dont les règles sont fixées ex-post. La stratégie industrielle des grands groupes pharmaceutiques ne peut qu’en être confortée. Enfin, le caractère progressif du taux de la contribution laisse une grande marge de manœuvre : en prenant comme base l’ONDAM pour 1998, proposé par l’article 38 du présent projet, qui présente une augmentation de 2,6 %, le taux maximum ne serait franchi que si le chiffre d’affaires global des entreprises situées dans le champ d’application du présent article augmentait de 8,1 % ! Il convient donc d’insister sur le caractère positif de la mise en place de telles règles, préalables à l’activité et que les industries concernées pourront intégrer à leur stratégie.

b) Pour autant, le mécanisme demeure perfectible sur bien des points, en premier lieu quant à l’exclusion de son champ d’application des entreprises conventionnées, c’est-à-dire de la quasi-totalité des entreprises potentiellement incluses dans le champ d’application défini par le projet de loi.

Le rapporteur tient à insister sur le caractère peu compatible d’une exonération aussi large, dont les modalités concrètes sont laissées au rythme de travail du Comité économique du médicament, avec l’objectif de maîtrise des dépenses de santé que poursuit le présent article. Il faut souligner que les conventions ainsi passées n’ont pas fait la preuve de leur efficacité puisqu’elles n’ont pas empêché le dérapage des prix. Il est évident que l’adoption de cet article en l’état entraînerait l’obligation de renégocier toutes les conventions existantes.

Il conviendra, en toute hypothèse, de lever à l’occasion du débat sur cet article, certaines ambiguïtés que le texte recèle :

- il n’est pas tenu compte des possibilités de modifier, en cours d’année, l’ONDAM par une loi de financement rectificative, la rédaction de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale étant claire quant à la définition des lois de financement “ de l’année ”, seules visées par l’article L. 138-10 nouveau de ce code ;

- il convient ensuite de préciser si les entreprises visées à la fin de l’article L. 138-11 du code sont exonérées de paiement ou si, simplement, elles n’entrent pas dans le calcul des trois fractions visées par cet article ;

- il convient, enfin, d’envisager la question de l’harmonisation des obligations déclaratoires des entreprises concernées pour tout ou partie de la taxation applicable à l’industrie pharmaceutique.

Sous ces réserves, le rapporteur tient, en conclusion, à réaffirmer qu’il est favorable au principe de la mise en place de la clause de sauvegarde.

Article 26

Création d’une contribution perçue sur l’industrie pharmaceutique au titre de l’année 1998

Le présent article vise à créer une contribution perçue sur l’industrie pharmaceutique. Cette contribution n’est instituée qu’au titre de l’année 1998 et devra être versée au plus tard le 31 août 1999.

La structure de cette contribution est très proche de celle qui régissait les contributions du “ plan Juppé ”, créées par l’article 12 de l’ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996, par ailleurs modifiée par l’article 7 du présent projet. Aussi, plutôt que d’une création, il serait matériellement plus exact de parler d’une “ reconduction ” de la taxation spécifique de l’industrie pharmaceutique, même si le présent article se présente comme un mécanisme nouveau.

1. Un système de taxation cohérent et multiple

Il existe à l’heure actuelle une taxation diversifiée et spécifique à l’industrie pharmaceutique, fondée sur l’activité économique et publicitaire de celle-ci.

·  L’article 12 de l’ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 relative aux mesures urgentes tendant au rétablissement de l’équilibre financier de la sécurité sociale a institué trois contributions dont était redevable l’industrie pharmaceutique. La fourchette des taux a été établie par ce texte et, concrètement, ils ont été fixés par un décret n° 96-688 du 2 août 1996. Pour une analyse détaillée de l’assiette - très comparable à celle retenue par le présent article - de ces contributions, on se reportera aux commentaires de l’article 7 du présent projet. Ces contributions ont rapporté 2,5 milliards de francs.

·  L’article 32 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a modifié l’assiette de la taxe applicable aux grossistes répartiteurs. Créée par la loi n° 91-738 du 31 juillet 1991 portant diverses mesures d’ordre social sous forme de contribution “ exceptionnelle ”, reconduite à quatre reprises jusqu’à la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier, qui l’a rendue pérenne et codifiée à l’article L. 138-1 du code de la sécurité sociale, cette contribution a fait l’objet, avec la loi de financement pour 1997, d’une extension d’assiette. Initialement basée sur les ventes de médicaments remboursables réalisés en France par des établissements de vente en gros de spécialités pharmaceutiques, elle a alors été étendue d’une part aux ventes réalisées auprès des pharmacies mutualistes et des pharmacies de secours minières et, d’autre part, aux ventes directes effectuées par les laboratoires pharmaceutiques aux officines, ce qui représentait alors un chiffre d’affaires d’environ 7 milliards de francs, qui, ne transitant pas par les “ grossistes répartiteurs ”, échappait à l’imposition. Le produit de cette taxe était de 750 millions de francs en 1997, 1 064 en 1998 - compte tenu du changement d’assiette - et devrait être de 1 087 millions de francs pour 1999.

·  La loi de financement pour 1998 a modifié, par deux fois, la fiscalité applicable à l’industrie pharmaceutique.

Son article 11 a modifié les règles applicables à la taxation des dépenses de promotion publicitaire des laboratoires instituée par l’article L. 245-2 du code de la sécurité sociale pour :

- harmoniser la définition des établissements concernés ;

- prévoir un abattement forfaitaire de 3 millions de francs et, le cas échéant, de 30 % du chiffre d’affaires hors taxe relatif aux médicaments génériques remboursables ;

- prévoir un barème de taxation au lieu d’un taux unique. Ce barème est rappelé dans le commentaire du II du présent article, ci-dessous (article L. 245-1 du code de la sécurité sociale). Le produit de cette taxe est en forte progression : 900 millions de francs en 1996, 994 en 1997, 1 335 millions de francs en 1998 et 1 365 millions de francs en 1999.

Son article 12 a par ailleurs créé une contribution spécifique sur les ventes directes des laboratoires pharmaceutiques aux pharmacies d’officines, mutualistes et de secours minier. En sont exclues les ventes de génériques et les ventes aux pharmacies hospitalières. Le taux de cette contribution est de 2,5 %. Elle s’applique pour les ventes réalisées depuis le 1er janvier 1998. Elle doit représenter 1,48 milliard de francs pour 1998 et, compte tenu de la forte réduction d’activité qu’elle doit entraîner, 113 millions de francs pour 1999.

Cet ensemble fiscal présente donc une grande diversité mais aussi une nette cohérence. Le mouvement général tend à fiscaliser les activités qui se développent pour tenter d’échapper à la fiscalisation existante ou à soumettre à taxation des activités dont le potentiel de développement est important comme les activités de promotion. Le présent article ne déroge pas à la règle et s’inspire largement des dispositifs existants - ou ayant existé -.

2. Analyse du dispositif

a) Paragraphe I : assiette de la contribution

Le dispositif tend, en premier lieu, à définir l’assiette de la contribution. Il vise à établir une contribution au titre de l’année 1998, assise sur l’activité des entreprises pharmaceutiques, principalement leur chiffre d’affaires. Les entreprises concernées sont constituées par l’ensemble des établissements visés par l’article L. 596 du code de la santé publique, c’est-à-dire la totalité des industries pharmaceutiques, dont l’activité est “ la fabrication, l’importation, l’exportation et la distribution en gros des médicaments, produits et objets mentionnés à l’article L. 512, la fabrication, l’importation et la distribution de médicaments destinés à être expérimentés sur l’homme ainsi que l’exploitation de spécialités pharmaceutiques ou autres médicaments. ”

Comme les contributions de 1996, la contribution repose sur trois bases :

· La première assiette de la contribution est constituée par le chiffre d’affaires hors taxes réalisé en 1998 par les entreprises concernées

Pour des raisons contentieuses, déjà analysées à l’article 7 du présent projet, les dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche ne sont pas exonérées de la base taxable. Le chiffre d’affaires 1998 n’étant naturellement pas connu dans la mesure où l’exercice n’est pas clos, il est impossible de chiffrer avec exactitude cette base. Toutefois, on peut tirer des chiffres précédents la conclusion que cette assiette est en croissance régulière.

La référence faite par le texte - du a) comme du b) - aux articles L. 162-17 du code de la sécurité sociale et L. 618 du code de la santé publique vise, l’une la liste des médicaments remboursables et l’autre la liste des médicaments. Pour être largement redondante, il faut surtout voir dans cette double référence - similaire à celle retenue par l’article 12 de l’ordonnance du 24 janvier 1996 - la volonté de couvrir le champ le plus large possible de l’activité du secteur du médicament.

·  Avec la même base, ce dispositif taxe la variation du chiffre d’affaires des mêmes entreprises constatée entre 1997 et 1998, au-delà de 2,3 % d’augmentation par entreprise. A la différence de la contribution de 1996, cette taxation ne se fera pas par paliers

·  Enfin la contribution est assise sur la publicité pharmaceutique, c’est-à-dire le “ total des charges comptabilisées au cours du dernier exercice clos au titre des frais de prospection et d’information des praticiens afférents à l’exploitation en France des spécialités pharmaceutiques remboursables ou des médicaments agréés à l’usage des collectivités ” (article L. 245-2 du code de la sécurité sociale), par ailleurs soumises à imposition pour toutes les entreprises pharmaceutiques dont le chiffre d’affaires hors taxes est inférieur à 50 millions de francs, sauf si elles sont filiales d’une entreprise dont le chiffre d’affaires dépasse ce montant.

b) Taux

Le II fixe le taux des trois éléments constitutifs de la contribution

Si la loi est compétente pour fixer le taux des impositions de toutes natures, il est admis que cette fixation peut faire l’objet d’une fourchette si elle est suffisamment précise, tout en renvoyant au décret le soin de fixer le taux précis de l’impôt. Tel est le cas en l’espèce : le taux de la partie de la contribution assise sur le chiffre d’affaires est compris entre 0,8 % et 4 %, celui de la partie relative à l’excédent du chiffre d’affaires 1998/1997 est compris entre 15 et 35 %. Cette fourchette est plus réduite que celle des fractions de la contribution “ Juppé ” correspondante. Toutefois, s’agissant d’un seul taux, on peut considérer cette fourchette comme excessivement large. La seule originalité par rapport au système de 1996 concerne la partie de contribution assise sur les dépenses de promotion publicitaire, qui se présente comme une majoration du taux de la contribution, ayant la même assiette, créée par l’article L. 245-2 du code de la sécurité sociale. Or, cet article fait varier le taux et le montant de la contribution en fonction du montant des charges de promotion et du chiffre d’affaires, selon le barème suivant :

Part de l’assiette

correspondant aux rapports “ R ” - entre les charges de prospection et d’information et le chiffre d’affaires hors taxes - suivants

Taux

de la contribution par tranche

(en pourcentage)

R < à 10 %

9,5

R égal ou > à 10 % et < à 12 %

15

R égal ou > à 12 % et < à 14 %

18

R égal ou > à 14 %

21

La nouvelle taxation s’ajoutera donc à la contribution, ainsi déterminée.

C’est donc en appliquant à la contribution assise sur le chiffre des dépenses de publicité réalisées en 1997 et qui sera versée “ au plus tard ” le 1er décembre 1998, en application de l’article L. 245-6 du code de la sécurité sociale, un taux de majoration compris entre 20 % et 40 % que sera calculée cette partie de contribution.

c) Exonérations (III)

Comme à l’article L. 245-4 du code de la sécurité sociale s’agissant de la contribution assise sur les dépenses de promotion ou à l’article 12 de l’ordonnance de 1996, précité, pour deux des trois contributions qu’il instituait, le présent texte prévoit un mécanisme d’exonération, qui, ici, s’applique à la totalité des parties de la contribution. Celui-ci est partiellement identique à celui qui était retenu par le “ plan Juppé ”, à savoir les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 100 millions de francs. Il emprunte également à l’article L. 245-4 du code de la sécurité sociale s’agissant des filiales, incluses dans le champ de la taxation seulement si elles dépendent à 50 % au moins d’une entreprise ou d’un groupe d’entreprises dont le chiffre d’affaires consolidé dépasse le seuil d’assujettissement. Contrairement à ce dernier texte, il ne prévoit pas de mécanisme de revalorisation, puisque la contribution est annuelle.

d) Obligation de déclaration (IV et V)

Le dispositif met à la charge des entreprises visées au I une obligation de déclaration à l’ACOSS des “ éléments nécessaires ” au calcul de la contribution, ce avant le 1er avril 1999. Si cette date n’est pas respectée, le montant de la contribution est fixé - à titre non définitif - à 5 % du chiffre d’affaires - hors taxes - réalisé au titre des produits remboursables, au cours de l’année 1997. Cette même sanction s’applique en cas de déclaration manifestement erronée. Si la déclaration est produite entre le 1er avril 1999 et le 31 décembre 1999, le montant de la contribution est alors majoré de 10 %. A défaut, le montant calculé à titre prévisionnel devient définitif. Cette majoration de 10 % peut faire l’objet - notamment en cas de bonne foi - d’une remise gracieuse. En revanche, la déclaration jugée manifestement erronée ne peut donner lieu selon les termes mêmes du texte ni à modification ni à remise gracieuse. Le montant de la contribution n’est pas déductible de l’assiette de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés.

e) Groupes d’entreprises

Le VI vise à taxer les groupes d’entreprises, et non pas les entreprises individuelles si celles-ci font partie d’un groupe. La définition de la notion de groupe fait référence à celle qui existe en droit des sociétés, prévue par l’article 357-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, improprement référencé par le présent article sous l’appellation “ code des sociétés ”. Le rapporteur renvoie, sur ce point, au commentaire de l’article 25, qui prévoit un dispositif identique.

f) Affectation

Le VII prévoit que le produit de la contribution est réparti comme celui de la taxe sur les grossistes répartiteurs, affecté en totalité aux régimes d’assurance-maladie qui financent le régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (articles L. 138-8 et L. 722-4 du code de la sécurité sociale), c’est-à-dire principalement le régime général.

g) Plafonnement

Comme en ce qui concerne la clause de sauvegarde instituée à l’article 25, le VIII plafonne à 10 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé au titre de l’année 1998, le montant maximal de la contribution dû par une entreprise ou un groupe d’entreprises, tel que défini par le VI.

Article 27

(articles 11-1, 27, 27-1 nouveau et 27 quinquies de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 et article L. 174-7 du code de la sécurité sociale)

Régulation des dépenses des établissements et services sociaux et médico-sociaux financées par l’assurance maladie

Cet article a pour objet d’étendre aux établissements et services sociaux et médico-sociaux relevant de la loi du 30 juin 1975, relative aux institutions sociales et médico-sociales, le dispositif d’enveloppe opposable qui est appliqué aux établissements de santé depuis l’ordonnance hospitalière du 24 avril 1996.

Avant d’examiner le dispositif de l’article 27, il convient de rappeler ce que recouvre le secteur médico-social.

1. Le secteur médico-social :

Les prestations de soins du secteur social et médico-social constituent une enveloppe de l’objectif national des dépenses d’assurance-maladie (ONDAM) avec les soins de ville, les établissements sanitaires et les cliniques privées. Mais il s’agit de dépenses non encadrées qui ne sont soumises à aucune des formes de régulation prévues par les ordonnances de 1996.

Dans son dernier rapport sur la sécurité sociale, la Cour des comptes constate que cette absence d’encadrement rend impossible tout “ compte fiable des dépenses supportées par l’assurance maladie pour le secteur médico-social ”.

L’assurance maladie ne finance pas l’intégralité des structures sociales et médico-sociales. Les interventions des départements en faveur des adultes handicapés et des personnes âgées étaient en 1996 de 16,9 milliards de francs. L’Etat a financé les centres d’aide par le travail (CAT) et les centres d’hébergement et de réadaptation sociale (CHRS) à hauteur de 7,3 milliards de francs. Enfin, la dépense d’assurance maladie a été évaluée, au titre des personnes handicapées, à 27 milliards de francs et au titre des personnes âgées, à 12,5 milliards de francs.

L’objectif de dépenses des établissements médico-sociaux compris dans l’ONDAM s’élèvent à 43,809 milliards de francs pour 1999.

2. La régulation des dépenses d’assurance maladie du secteur médico-social

Il convient d’analyser en premier lieu les principes de l’enveloppe opposable (paragraphe II) avant de voir la procédure budgétaire (paragraphe I).

Le paragraphe II propose la création d’un article 27 quinquies dans la loi du 30 juin 1975. Ce nouvel article prévoit en son premier alinéa la mise en place d’un objectif de dépenses pour les “ prestations des établissements et services sociaux et médico-sociaux à la charge des organismes de sécurité sociale. ” Il s’agit donc des dépenses imputables à l’assurance maladie. Elles se répartissent entre trois types d’établissements et services :

- les établissements et services destinés aux enfants handicapés qui relèvent pour la plupart du secteur associatif et représentent 130 361 places. Il s’agit des établissements d’éducation spéciale - tels que les instituts médico-éducatifs (IME) ou les instituts médico-professionnels (IMPRO) -, des services de soins et d’éducation spécialisée à domicile (SESSAD), des centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP) et des centres d’action médico-sociale précoce (CASMP).

- les structures pour adultes handicapés qui représentent 24 599 places et comprennent les maisons d’accueil spécialisé (MAS) ainsi que les foyers à double tarification (FDT) ;

- les structures pour personnes âgées : 3 600 maisons de retraite médicalisée, 900 logements foyers médicalisés et 1 500 services de soins à domicile (SSAD).

Le deuxième alinéa de ce nouvel article 27 quinquies dispose que cet objectif de dépenses est fixé chaque année par le Gouvernement en fonction de l’ONDAM fixé par la loi de financement de la sécurité sociale.

Le quatrième alinéa du nouvel article 27 quinquies décrit la répartition de cette enveloppe limitative.

L’objectif de dépenses est constitué en dotations limitatives régionales. Celles-ci sont réparties en dotations départementales par les préfets de région, après avis des préfets de département et du directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation.

Ces enveloppes s’inscrivent dans les différents modes de régulation budgétaire pratiqués par les établissements et services médico-sociaux énumérées au deuxième alinéa du nouvel article 27 quinquies : la dotation globale, le prix de journée et les forfaits de soins.

Le système de l’enveloppe limitative applicable dans les établissements de santé est donc étendu aux établissements médico-sociaux mais il ne leur est pas imposé le mode de régulation de l’hôpital public, à savoir la dotation globale.

Aujourd’hui, les dépenses des établissements pour personnes âgées sont tarifées sous forme de forfaits de soins. Dans les établissements pour handicapés, prévaut le régime de prix de journée. Ces deux systèmes sont inflationnistes comme l’a montré la Cour des comptes dans son dernier rapport sur la sécurité sociale.

Compte tenu de ce nouvel article 27 quinquies, le représentant de l’Etat pourra donc appuyer sa décision sur l’existence de ces objectifs de dépenses et des enveloppes régionales et départementales dans le cadre de la procédure budgétaire définie au paragraphe I de cet article du présent projet de loi et de la procédure d’autorisation définie au paragraphe III.

· Le paragraphe I crée un article 27-1 dans la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 qui définit les conditions d’exercice, compte tenu du nouvel objectif de dépenses, de la procédure budgétaire prévue à l’article 26-1 de la loi susvisée.

Le préfet notifie, en approuvant le budget des établissements, le prix de journée ou le forfait dont le remboursement peut être demandé à l’assurance maladie.

Le préfet peut modifier les prévisions de recettes et de dépenses des établissements médico-sociaux dans trois cas. Deux cas existent déjà dans l’actuel article 27 : l’insuffisance des prévisions de recettes ou de dépenses et l’incompatibilité entre les prévisions de dépenses et les besoins de la population ou l’évolution de l’activité et des coûts. Ces deux cas sont repris dans le nouvel article 27-1 (1° et 2° du nouvel article).

Un troisième cas est créé par le nouvel article 27-1 : l’inadéquation entre les prévisions de dépenses ou de recettes et les dotations régionales ou départementales (2° du nouvel article 27-1).

Le préfet pourra désormais se fonder sur les enveloppes régionales et départementales pour refuser aux établissements privés l’habilitation à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale ou l’autorisation de dispenser des soins remboursables aux assurés.

· Le paragraphe III insère un alinéa dans l’article 11-1 de la même loi. De la même façon que pour la procédure budgétaire, le préfet pourra appuyer sa décision sur l’existence des objectifs et des dotations régionales et départementales dans le cadre de la procédure d’autorisation, prévue par l’article 11-1 de la loi du 30 juin 1975 et mise en œuvre en cas de création, de transformation et d’extension des établissements et services privés.

·  Le paragraphe IV propose d’abroger le dernier alinéa de la loi susvisée codifié à l’article L. 174-7 du code de la sécurité sociale. Il s’agit des deux cas où le préfet intervient dans la procédure budgétaire. L’alinéa doit être abrogé puisque le nouvel article 27-1 a modifié la procédure budgétaire en instituant un troisième cas d’intervention du préfet lié au respect des enveloppes limitatives comme on l’a vu précédemment.

Article 28

(article L. 361-1 du code de la sécurité sociale)

Extension des catégories de bénéficiaires de l’assurance décès

Cet article a pour objet d’étendre le bénéfice du capital décès aux ayants droit des titulaires d’une pension d’invalidité ou d’une rente d’accidents du travail avec une incapacité permanente d’au moins deux tiers, tout en assurant aux autres catégories le maintien de leurs droits au capital décès fixés par la législation actuelle.

1. Etat du droit positif

L’assurance décès du régime général, régie par les articles L. 361-1 à L. 361-5 du code de la sécurité sociale, garantit aux ayants droit de l’assuré social le payement d’un capital décès. Celui-ci doit servir à couvrir les frais occasionnés par le décès, notamment les frais d’obsèques. Il doit également permettre d’aider la famille du défunt à faire face, pendant la période qui suit immédiatement le décès, aux difficultés financières résultant de la disparition prématurée de la personne qui lui procurait tout ou partie de ses moyens d’existence par l’exercice de son activité professionnelle.

Le capital décès est égal à 90 fois le gain journalier de base servant au calcul de l’indemnité journalière de l’assurance maladie. Il existe des règles de plafonnement. Son barème varie en conséquence, au 1er janvier 1998, entre 1 690 F et 42 270 F. Il est attribué par priorité aux personnes qui étaient, au jour du décès, à la charge effective, totale et permanente de l’assuré. En cas de pluralité de bénéficiaires prioritaires, un ordre de préférence est établi par la loi.

Dans l’état actuel du droit, fixé par les articles L. 313-1 et R. 361-3 du code de la sécurité sociale, seuls les assurés remplissant à la date de leur décès les mêmes conditions que celles fixées pour bénéficier pendant un an des prestations en nature de l’assurance maladie ouvrent droit au capital décès. Ces conditions sont définies par l’article R. 313-2. L’assuré doit justifier :

a) Soit que le montant des cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès assises sur les rémunérations qu'il a perçues pendant un mois civil ou trente jours consécutifs est au moins égal au montant des mêmes cotisations dues pour un salaire égal à soixante fois la valeur du SMIC ;

b) Soit avoir effectué au moins soixante heures de travail salarié ou assimilé au cours d'un mois civil ou de trente jours consécutifs ;

c) Soit que le montant des cotisations mentionnées au a et assises sur les rémunérations qu'il a perçues pendant trois mois civils est au moins égal au montant des mêmes cotisations dues pour un salaire égal à 120 fois la valeur du SMIC ;

d) Soit avoir effectué au moins 120 heures de travail salarié ou assimilé pendant trois mois civils ou trois mois de date à date.

En application de l’article L. 161-8 du code de la sécurité sociale, l’assuré ne doit pas avoir cessé, à la date du décès, de remplir l’une de ces conditions depuis plus de douze mois. Il en est de même pour les titulaires d’une pension de vieillesse, d’une allocation de préretraite ou d’une pension d’invalidité. L’article L. 311-5 du même code garantit quant à lui aux chômeurs indemnisés et aux salariés en convention de conversion le maintien de leurs droits à l’assurance décès. Dans le cadre conventionnel, il est aussi prévu le versement supplémentaire d’une allocation décès au seul conjoint d’un allocataire de l’UNEDIC ou d’un bénéficiaire d’une convention de conversion. Par contre, il n’est rien prévu au titre de l’assurance décès pour les retraités, ni pour les titulaires d’une pension d'invalidité ou d'une rente d'accident du travail et de maladie professionnelle, au-delà de l’année qui suit l’interruption de leur contrat de travail.

2. Modification proposée par le présent article

Cet article, qui propose une nouvelle rédaction de l’article L. 361-1 du code de la sécurité sociale, vise à remédier à la situation inégalitaire des invalides et des accidentés du travail, en réalisant une extension des catégories de bénéficiaires du capital décès. Etant donné la nature très particulière de cette prestation sociale, à savoir faire face au décès prématuré de l’assuré, il ne s’agit cependant pas de l’étendre aux retraités.

Continueront de bénéficier de l’assurance décès les ayants droit de toute personne qui :

·  soit exerçait une activité salariée et remplissait les conditions précitées visées à l’article L. 313-1 du code de la sécurité sociale ;

·  soit percevait l'une des allocations prévues par l’article L. 322-3 du code du travail dans le cadre de conventions de conversion ou l’allocation prévue au 4° de l’article L. 322-4 du code du travail pour les salariés bénéficiant d’un congé pour suivre des actions de reclassement et dont le contrat de travail était suspendu ;

·  soit percevait l’une des allocations chômage visées à l’article L. 351-2 du code du travail.

Pourront aussi désormais bénéficier de l’assurance décès les ayants droit de toute personne qui :

·  soit était titulaire d'une pension d'invalidité mentionnée à l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale ;

·  soit était titulaire d'une rente allouée en vertu des législations sur les accidents du travail et maladies professionnelles applicables aux professions non agricoles, correspondant à un taux d’incapacité de travail d’au moins deux tiers en vertu de l’article R. 371-1 du code de la sécurité sociale.

Il faut noter que l’état de l’assuré social est pris en compte, pour toutes les catégories, jusqu’à trois mois avant son décès et non plus seulement au jour du décès. Il s’agit du même délai que celui en vigueur pour l’assurance veuvage. Le maintien provisoire pendant douze mois de ses droits à l'assurance décès, au titre de l'article L. 161-8 du code de la sécurité sociale, est quant à lui toujours apprécié à la date du décès.

Le coût de cette extension de l’assurance décès aux invalides et aux accidentés du travail avec une incapacité permanente d’au moins deux tiers, qui concernerait 10 000 personnes, est estimé par le Gouvernement à 270 millions de francs en année pleine, à la charge de la branche maladie du régime général de sécurité sociale.

Section 4

Branche accidents du travail

Article 31

(articles L. 461-2 et L. 461-5 du code de la sécurité sociale)

Amélioration des conditions de prise en charge des maladies professionnelles

Cet article assouplit les règles de prescription pour le calcul du délai de prise en charge des maladies professionnelles en général et apporte une solution particulière pour les victimes de l’amiante. Il traduit la volonté du Gouvernement d’améliorer la réparation des maladies professionnelles, suite aux propositions figurant dans les rapports de M. Alain Deniel d’octobre 1997 et du professeur Claude Got de juillet 1998.

1. Modification des règles de délai pour la reconnaissance des maladies professionnelles

Les patients ignorent souvent l’origine de leur maladie et les médecins ne les avertissent pas fréquemment du risque de perdre leur droit à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie du fait des règles de prescription et d’une démarche trop tardive. C’est une exigence de justice la plus élémentaire que de permettre aux victimes d’exercer effectivement leurs droits à réparation. On ne doit pas utiliser le manque d’information des assurés pour éviter d’avoir à reconnaître une maladie professionnelle.

Les maladies professionnelles sont en principe les maladies inscrites et définies avec précision dans des tableaux annexés à l’article R. 461-3 du code de la sécurité sociale. L’affection dont est atteint un salarié est alors présumée être une maladie professionnelle si trois conditions sont cumulativement réunies :

·  Cette affection doit être inscrite aux tableaux.

·  L’intéressé doit avoir été exposé de façon habituelle au risque de la maladie.

·  L’intéressé ne doit pas avoir cessé, au moment de la première constatation médicale de sa maladie, d’être exposé au risque (par arrêt de travail ou changement d’emploi) depuis un certain délai appelé délai de prise en charge.

La déclaration de la maladie à la caisse de sécurité sociale compétente incombe non à l’employeur (comme pour les accidents du travail), mais à la victime. Elle doit intervenir dans les quinze jours qui suivent la cessation du travail en vertu des articles L. 461-5 et R. 461-5 du code de la sécurité sociale. Dans le cas où l’assuré demande réparation d’une maladie nouvellement inscrite aux tableaux mais dont il était déjà atteint avant cette inscription, les mêmes articles prévoient un délai de déclaration de trois mois à compter de la date d’entrée en vigueur du nouveau tableau.

Toutefois, le défaut de déclaration dans ces délais n’est pas de nature à priver la victime de son droit à réparation. Le dernier alinéa de l’article L. 461-5 du code de la sécurité sociale, renvoyant à l’article L. 431-2 du même code, fixe en effet à deux ans à partir du jour de la cessation de travail le délai de prescription.

Le 2° du I du présent article prévoit un nouveau point de départ pour ce délai de prescription. Celui-ci ne courra désormais qu’à compter de la date à laquelle la victime a été informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle. Dans le cas de maladie professionnelle à longue période d’incubation, cette constatation peut en effet n’intervenir que longtemps après la cessation de travail.

Afin de conserver la notion de délai de prise en charge figurant dans les tableaux, le 1° du I modifie par coordination le dernier alinéa de l’article L. 461-2, afin de garantir que la première constatation médicale intervient toujours pendant le délai normal d’incubation de la maladie prévu par les tableaux, à savoir le délai de prise en charge. La date de la première constatation médicale est définie à l’article D. 461-7 comme étant la date connue avec certitude et confirmée par un médecin agréé de la première constatation par un médecin de l’une des affections figurant dans les tableaux.

Cette dissociation de la date de la première constatation médicale de celle du point de départ de la prescription biennale, favorable aux victimes, devrait entraîner une charge supplémentaire de 150 millions de francs pour la branche accidents du travail, selon les estimations du Gouvernement intégrées dans les objectifs de dépenses du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

2. La réouverture des droits pour les victimes de l’amiante

Pour la reconnaissance des maladies professionnelles liées à l’amiante, les deux tableaux correspondants (n° 30 pour les affections professionnelles et n° 30 bis pour les cancers broncho-pulmonaires) ont été réformés par le décret n° 96-455 du 22 mai 1996 dans le sens d’un assouplissement significatif des conditions de reconnaissance du caractère professionnel des maladies consécutives à l’inhalation de poussières d’amiante. Le délai de prise en charge a été porté de 10 à 20 ans pour l’asbestose et les lésions pleurales bénignes, de 15 à 40 ans pour le mésothéliome et de 15 à 35 ans pour le cancer broncho-pulmonaire primitif. De même, les travaux devant avoir été accomplis sont cernés plus précisément et intègrent à la fois les métiers de la transformation des matériaux et ceux de la maintenance. Au total, de 1992 à 1996, 3 862 maladies professionnelles causées par l’amiante ont été reconnues par la CNAMTS, le nombre de cas par an étant en augmentation chaque année.

Le rapport du professeur Claude Got rappelle que nombre de victimes de l’amiante ont été déboutées de leur droit légitime à réparation du fait de l'application des règles de prescription. Par méconnaissance du lien entre leur maladie et leur activité professionnelle, elles avaient en effet déposé tardivement leur déclaration par rapport à la date où le diagnostic de leur affection avait été fait. Il apparaît donc équitable de permettre aux victimes de l'amiante de présenter une demande pour récupérer leurs droits aux prestations prévues par la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Le II du présent article lève la forclusion pour les assurés du régime général et du régime des salariés agricoles victimes d'affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante ou provoquées par elles, dès lors qu'une constatation médicale a été faite. Les personnes concernées recouvreront leurs droits aux prestations, aux rentes, au placement, à la rééducation professionnelle et à l’accès à leur dossier.

Cette dérogation exceptionnelle aux règles fixées par les articles L. 431-2 et L. 461-5 du code de la sécurité sociale est encadrée dans certains délais. Il faut que la première constatation médicale de la maladie soit intervenue entre la date de création de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles, le 1er janvier 1947, et la date d'entrée en vigueur de la présente loi de financement de la sécurité sociale. Le III limite également à un délai de deux ans à compter de la publication de la présente loi la possibilité pour les victimes et leurs ayants droit de déposer leur demande.

Les prestations qui pourront être accordées sur la base de cette demande ne pourront pas avoir effet rétroactif, c’est-à-dire qu’il n’y aura pas de rattrapage pour la période antérieure au dépôt de la nouvelle demande. Elles se substitueront également pour l’avenir aux autres avantages qui auront déjà pu être accordés à la victime pour la même maladie au titre des assurances sociales ou du droit commun, notamment en cas de faute intentionnelle de l’employeur. Ces avantages seront évalués et revalorisés dans les mêmes conditions que pour les révisions des tableaux des maladies professionnelles, fixées par l’avant-dernier alinéa de l’article L. 461-2 et le cinquième alinéa de l’article R. 413-1 du code de la sécurité sociale.

Le IV du présent article renvoie à un décret simple le soin de fixer les modalités de financement, par la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles, de la charge correspondante. Les dépenses engagées par les caisses d’assurance maladie en vertu de la réouverture des droits réalisée par le présent article pour les victimes de l’amiante ne seront pas comprises dans la valeur du risque propre d’une entreprise ou d’un établissement servant au calcul de sa cotisation, mais figureront au compte spécial prévu au septième alinéa de l’article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale. Par mesure de solidarité, toutes les entreprises seront donc sollicitées financièrement.

Section 6

ONDAM

Article 33

Fixation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie

L’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM), fixé par le présent article, se distingue de l’objectif de la branche maladie, fixé à l’article 32, en déduisant de ce dernier les frais de gestion, les frais financiers, les dépenses consacrées aux actions sanitaires et sociales et aux fonds de prévention des caisses des régimes obligatoires de base, ainsi que les transferts internes entre celles-ci. En sont également soustraites les rentes d’accidents du travail et les indemnités journalières de maternité.

L’ONDAM correspond donc à l’ensemble des dépenses de soins de santé, liées aux risques maladie, maternité et accidents du travail ainsi qu’aux prestations en espèces des risques maladie et accidents du travail14.

Ces dépenses se répartissent pour la métropole entre quatre secteurs producteurs de soins pour lesquels le Gouvernement, dans les quinze jours suivant la publication de la loi de financement de la sécurité sociale, fixera le montant des enveloppes de dépenses :

·  l’enveloppe “ soins de ville ”, qui comprend les dépenses d’honoraires privés et de prescriptions exécutées en ville à l’exception des indemnités journalières maternité et des rentes d’accidents du travail ;

·  l’enveloppe “ établissements sanitaires ”, qui regroupe les dépenses des établissements sanitaires fonctionnant sous dotation globale, des hôpitaux militaires et des établissements sanitaires fonctionnant à prix de journée préfectoral ;

·  l’enveloppe “ établissements médico-sociaux ”, qui comprend les dépenses des établissements prenant en charge les personnes âgées, l’enfance inadaptée et les adultes handicapés ;

·  et l’enveloppe “ cliniques privées ” qui comprend les dépenses des établissements à tarification conventionnelle entrant dans le champ de l’objectif relatif aux établissements privés d’hospitalisation ainsi que les établissements (ou les activités d’établissements) exclus de ce champ.

S’y ajoutent les dépenses de soins de santé des départements d’outre-mer (DOM) et des ressortissants français à l’étranger.

Le tableau ci-après décrit la décomposition des objectifs de l’ONDAM en 1998 par rapport aux comptes de 1997.

(en milliards de francs)

 

Comptes 1997

Objectifs 1998

Comptes 1997/objectifs 1998

I - Métropole

585,9

600

+ 2,4 %

I-1. Soins de ville

261,3

267,3

+ 2,3 %

I-2. Etablissements sanitaires

243,5

248,1

+ 1,9 %

I-3. Médico-social

40,4

41,5

+ 2,7 %

I-4. Cliniques privées

40,6

43,1

+ 6,2 %

II - Ressortissants français à l’étranger

0,9

0,8

- 8,9 %

III - Prestations DOM

12,7

12,6

- 0,8 %

Marge de manoeuvre résiduelle

0

0,2

-

Total ONDAM

599,5

613,6

+ 2,3 %

Il convient de rappeler que l’ONDAM ne constitue pas un plafond de dépenses pour les assurés dont les droits restent ouverts et dont les prestations seront servies sans restriction quantitative. En revanche, le vote par le Parlement de l’ONDAM sera suivi de toute une série de décisions comportant des engagements fermes.

Ainsi, à partir de l’enveloppe des dépenses de soins de ville déterminée par le Gouvernement, et dans les cinquante jours suivant la publication de la loi de financement, les caisses d’assurance maladie et les organisations représentatives de médecins devront signer une annexe à la ou aux conventions médicales avec les médecins généralistes d’une part et avec les médecins spécialistes d’autre part, où sera fixé, à partir de l’objectif prévisionnel des dépenses de ville, un objectif prévisionnel d’évolution des dépenses médicales comprenant :

·  un objectif de dépenses remboursables par les régimes d’assurance distinguant les montants prévisionnels des dépenses d’honoraires et des dépenses de prescription ;

·  et éventuellement la revalorisation des honoraires pour 1999, si l’objectif de 1998 a bien été respecté, et une provision pour leur revalorisation en l’an 2000.

L’objectif prévisionnel d’évolution des dépenses hospitalières déterminera par ailleurs le montant annuel des dépenses des établissements de soins publics et des établissements de santé privés à caractère non lucratif participant à l’exécution du service public hospitalier. Les ministres de la santé et de la sécurité sociale le diviseront en dotations régionales à caractère limitatif “ en fonction des besoins de la population, des orientations des schémas d’organisation sanitaire et des priorités nationales ou locales, en matière de politique sanitaire, en tenant compte de l’activité et des coûts des établissements ”, ainsi que de la nécessité de réduire les inégalités de ressources entre régions et entre établissements. Il appartiendra aux agences régionales de l’hospitalisation (ARH) de définir et de mettre en oeuvre cette politique régionale d’offres de soins hospitaliers en déterminant la dotation de chaque établissement.

Pour les établissements privés, qui ne sont pas financés par dotation globale, l’évolution des dépenses restera régulée par la fixation d’un objectif quantifié national, décliné par région depuis le 1er janvier 1998.

L’ONDAM ne revêt donc pas lui-même un caractère impératif, mais les décisions qui succèdent à son adoption fixent des financements limitatifs ou comportent des mécanismes de régulation a posteriori qui leur donnent une portée impérative.

Pour 1998, l’ONDAM avait été fixé à 613,6 milliards de francs, ce qui correspondait à une hausse de 2,2 % par rapport à 1997.

Pour 1999, le présent article propose de fixer l’ONDAM à 629,8 milliards de francs, soit une hausse de 2,6 % par rapport à l’objectif voté pour 1998. Cette augmentation a été décidée pour prendre en compte, d’une part l’effet de la croissance générale de l’économie qui entraîne systématiquement un recours accru aux soins et d’autre part, les effets sur les budgets hospitaliers de l’accord sur les rémunérations dans la fonction publique ainsi que le développement du secteur médico-social en faveur des personnes âgées. Elle devrait permettre également de financer des opérations de santé publique d’envergure, au premier rang desquelles les campagnes de dépistage des cancers féminins qui seront menées dans le cadre des programmes de lutte contre les maladies mortelles évitables créés par l’article 15 du présent projet.

Dans une lettre adressée au président de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) en date du 15 octobre 1998, conformément à la procédure de consultation prévue par l’avenant à la convention d’objectifs et de gestion conclue entre cette caisse et l’Etat, la ministre de l’emploi et de la solidarité a indiqué la répartition de l’ONDAM envisagée par le Gouvernement pour 1999, présentée dans le tableau ci-dessous :

Objectif national de dépenses d’assurance maladie 1999

 

Objectif 1999

Évolution

1999/1998

Évolution

1998/1997

1. Soins de ville

273 506

2,39 %

2,18 %

2. Versements aux établissements

340 882

2,65 %

2,08 %

2.1 Etablissements de santé hors cliniques

dont Etablissements de santé sous dotation globale

254 435

244 826

2,49 %

2,50 %

2,29 %

2,20 %

2.2 Etablissements médico-sociaux

43 809

3,72 %

3,15 %

2.3 Cliniques privées

42 638

2,52 %

1,51 %

dont OQN (avant prise en compte évolution 98)

34 127

2,29 %

1,85 %

Marge de manœuvre

516

   

Objectif national

629 800

2,60 %

2,27 %

(*) Les montants en francs sont provisoires et susceptibles d’ajustements ultérieurs consécutifs aux opérations de rebasage et de transfert

Selon les dernières informations disponibles, on peut craindre que l’ONDAM voté pour 1998 ne soit dépassé, réduisant d’autant l’augmentation envisagée pour l’ONDAM 1999, sur lequel le Parlement est appelé à se prononcer dans le présent projet de loi. Il faut en effet que la Représentation nationale décide d’une évolution de crédits en fonction d’une somme qui n’est pas encore connue au moment où elle se détermine. Cette difficulté justifie la procédure de suivi infra-annuel proposée à l’article 21 du présent projet.

AUDITIONS DE LA COMMISSION

AUDITION DES REPRÉSENTANTS DE LA CONFÉRENCE NATIONALE DE SANTÉ

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. François de Paillerets, président de la Conférence nationale de santé, accompagné de MM. Jacques Vleminckx, Matthieu Méreau et Jean-François Collin, membres du bureau de la Conférence, lors de sa réunion du mercredi 23 septembre 1998.

Le président Jean Le Garrec a souligné l’importance de l’audition des représentants de la Conférence nationale de santé en faisant valoir que les choix du législateur en matière de santé publique devaient être éclairés par les travaux de cette instance qualifiée, travaux qui font la synthèse de ceux des conférences régionales de santé et permettent de mobiliser l’ensemble des professionnels de santé.

M. François de Paillerets a estimé que cette audition représentait le point d’orgue de la mission de la Conférence nationale de santé. Celle-ci s’est tenue au mois de juin dernier, dans la lignée des conférences précédentes. Il s’agit d’abord d’une continuité méthodologique puisque la conférence a travaillé à partir du rapport du Haut comité de la santé publique. Il convient d’ailleurs de rendre hommage à la qualité du travail accompli par les membres actuels du Haut comité de la santé publique, dont le mandat arrive à expiration.

La continuité des travaux de la Conférence nationale de santé est également thématique, dans la mesure où les trois sujets de réflexion retenus cette année (inégalités de santé inter et intra-régionales, accidents iatrogènes et diabète) avaient déjà été abordés et figuraient parmi les dix priorités dégagées par la première Conférence nationale de santé. La Conférence nationale de santé de 1998 a retenu trente-neuf propositions se rattachant, pour les plus importantes d’entre elles, aux trois thèmes précités. Le thème sans doute le plus difficile mais également le plus porteur d’avenir est celui de la réduction des inégalités de santé inter et intra-régionales qui sera traité par M. Jacques Vleminckx, qui avait animé le groupe de travail correspondant.

M. Jacques Vleminckx a rappelé qu’en 1997, la Conférence nationale de santé avait souhaité une plus grande transparence de l’action du Gouvernement en ce qui concerne les méthodes et les critères utilisés pour opérer les redistributions inter-sectorielles et inter et intra-régionales, d’une part, et d’autre part, l’amélioration de la collecte des données ainsi que la recherche et le développement de nouveaux indicateurs au niveau inter et intra-régional, notamment en ce qui concerne la morbidité. Il apparaissait en particulier nécessaire de mieux cerner la question de l’inégalité de l’accès aux soins et, dans le domaine de la répartition des ressources, celle de la démographie des professionnels de santé et de la localisation des structures de soins.

Au terme des travaux de la Conférence nationale de santé de 1998, deux constatations s’imposent en matière d’inégalités. En premier lieu, les réflexions de la Conférence se sont limitées aux inégalités inter et intra-régionales d’accès aux soins de santé. En effet, l’accès aux soins n’est qu’un des facteurs de santé parmi d’autres, au nombre desquels on citera le logement, l’emploi, l’éducation, l’environnement et le niveau ou le mode de vie, cette conception extensive étant illustrée par la définition de la santé donnée par l’OMS, à savoir “ un état complet de bien-être physique, mental et social, et non seulement une absence de maladie ou d’infirmité ”.

En second lieu, il apparaît que l’un des principes fondamentaux d’une politique de santé est de garantir à chacun, quels que soient son lieu d’habitation et sa situation sociale, l’accès à des prestations sanitaires de qualité.

A partir de ces constatations d’ordre général, les propositions de la Conférence de 1998 relatives à la réduction des inégalités sont structurées autour de quatre orientations. La première consiste à renverser la logique du système, pour passer d’un dispositif centré sur l’offre de soins, et principalement d’ailleurs sur celle des soins médicaux au détriment des soins para-médicaux et des services médico-sociaux, à une démarche fondée sur le besoin de prestations sanitaires. Il faut donc permettre l’accès et l’analyse des différentes données statistiques, valider et contrôler ces informations dans le cadre de banques de données régionales et renforcer les observatoires régionaux de la santé. Le recentrage sanitaire ainsi proposé doit déboucher sur l’élaboration de critères permettant de calculer les allocations régionales de ressources en partant des besoins et en se démarquant de l’organisation actuelle du système de santé.

Pour opérer ce changement, la Conférence nationale demande le développement des actions de santé en créant une enveloppe spécifique complémentaire des autres enveloppes existantes de soins. La conférence donne à cette demande d’enveloppe supplémentaire trois justifications :

- permettre le développement du préventif au-delà du curatif ;

- inciter les différents acteurs de santé à travailler ensemble et de manière coordonnée sur des programmes régionaux de santé incluant par définition une dimension préventive ;

- permettre à terme la fongibilité des enveloppes existantes, les dépenses financées dans le cadre de l’enveloppe supplémentaire qui correspondent à des activités devenues pérennes pouvant être progressivement basculées sur ces enveloppes.

La deuxième orientation vise à promouvoir le niveau régional dans les politiques de santé, non seulement en développant les capacités d’observation et de décision à l’échelon des régions, mais aussi en renforçant le rôle des conférences régionales chargées d’établir des programmes régionaux, en y associant les collectivités territoriales.

La troisième orientation porte sur l’adaptation du fonctionnement des établissements et des professions de santé grâce à la promotion des mécanismes de financement qui permettent de garantir le respect de critères de qualité et le développement, en concertation avec les intéressés, des procédures d’incitation et de limitation à l’installation des médecins dans certaines zones géographiques ou situations données. Dans le même esprit, il faut favoriser la représentation et l’expression des usagers dans toutes les instances où se négocient les orientations de santé.

La quatrième orientation consiste à prendre en compte la situation des plus démunis, étant rappelé que la pauvreté demeure le principal problème à traiter pour protéger la santé. Dans ce but, il serait souhaitable de présenter rapidement un projet de loi complet et précis sur l’allocation autonomie, de favoriser l’installation d’établissements et de professionnels de santé dans les zones défavorisées afin de corriger les inégalités de répartition géographique, et d’assurer l’accès aux soins pour les personnes ayant des revenus modestes, en mettant en place la couverture maladie universelle et en garantissant aux intéressés la gratuité totale des soins. Il convient de noter que si la Conférence nationale de santé a retenu dix-huit des quarante propositions élaborées par le groupe de travail sur la réduction des inégalités, les autres propositions ne sont pas abandonnées et pourront être reprises par la conférence de 1999.

M. François de Paillerets, évoquant le thème du diabète abordé par la Conférence nationale de santé de 1998, a souligné que cette maladie touchait 1,5 million de Français et que ce nombre était susceptible de croître dans des proportions importantes si rien n’était fait pour l’empêcher. Par ailleurs, cette maladie a des conséquences à la fois très graves, puisque souvent mortelles, et très coûteuses. Il s’agit donc d’une question exemplaire au regard du difficile problème que constitue la prise en charge des maladies chroniques. Trois des dix recommandations émises sur ce thème par la Conférence nationale de santé seront détaillées.

Il faut d'abord mettre en place un dépistage systématique de cette maladie qui permette d’éviter ou de retarder l’apparition des complications qu’elle entraîne. Il convient de souligner que ce dépistage est simple et peu coûteux, puisqu’il consiste en une prise de sang pour doser la glycémie. Il doit être ciblé sur les personnes à risques, c’est-à-dire sur celles qui sont âgées de plus de quarante-cinq ans et sont apparentées à une personne atteinte de diabète.

La situation actuelle étant caractérisée par le fait que trop de personnes atteintes d’un diabète simple sont traitées à l’hôpital, alors qu’à l’inverse, trop de diabètes lourds sont uniquement pris en charge dans le cadre de la médecine ambulatoire, il faut en second lieu coordonner de manière plus rationnelle les interventions des différents acteurs en mettant en place un “ chaînage ” comportant un maillon de proximité, un maillon spécialisé et un maillon de référence ultra spécialisé.

Le troisième aspect sur lequel il convient de mettre l’accent relève de l’éducation sanitaire. En effet, le traitement du diabète ne peut se faire seulement sur ordonnance et implique en quelque sorte de “ négocier ” avec le patient, afin que celui-ci puisse s’approprier une partie de son traitement et de son suivi. De bons résultats ont déjà été obtenus sur ce point en France pour les enfants diabétiques et à l’étranger pour les personnes d’âge mûr. Il est souhaitable de professionnaliser les actes éducatifs qui s’avèrent nécessaires pour atteindre cet objectif en formant à cette démarche éducative les professionnels de santé concernés et en rémunérant lesdits actes. De manière générale, il faut aussi agir plus en amont pour déjouer le piège que constituent les habitudes alimentaires et la sédentarité propres à nos sociétés développées.

Le troisième grand thème retenu par la Conférence nationale de santé est celui du risque iatrogénique, qui, abordé sous l’angle plus général des infections nosocomiales, avait déjà fait l’objet de recommandations l’année dernière. Certaines de ces recommandations ont été reprises dans le rapport du Gouvernement annexé au projet de loi de financement et leur mise en œuvre a commencé, ce dont il faut évidemment se féliciter.

L’attention de la conférence s’est cette année focalisée sur les accidents iatrogènes liés aux médicaments. Le constat en la matière est inquiétant, puisque pas moins de 5 % des hospitalisations ont un lien avec un accident médicamenteux, — que cet accident soit la cause de l’hospitalisation ou qu’il survienne pendant une hospitalisation — et que le nombre de décès imputables à ce type d’accident est de l’ordre de mille par an, dont le tiers est considéré comme évitable. Parmi les onze propositions formulées par la Conférence nationale de santé, on retiendra particulièrement l’amélioration du dispositif de pharmaco-vigilance et le développement de l’information des acteurs de santé et des citoyens. Sur ce dernier point, il convient de souligner, d’une part, que le risque zéro n’existe pas et ne saurait exister dans le domaine de la prescription médicamenteuse et, d’autre part, que prescrire mieux consiste souvent à prescrire moins. En tout état de cause, il est important de débattre d’un sujet qui est trop souvent resté soumis à la loi du silence.

Il faut espérer que la conférence de 1998 ait des conséquences positives, comme cela a été le cas pour la conférence de 1997. Parmi les recommandations de cette dernière conférence qui ont été mises en œuvre, on citera le développement de l’éducation à la santé en milieu scolaire, la restructuration des soins en matière de cancérologie et le déroulement de la Coupe du monde de football sans publicité pour l’alcool, mesures qui participent au nécessaire développement d’une culture de santé publique.

L’avancement au printemps de la prochaine conférence constitue par ailleurs un point positif et devrait permettre à cette instance d’intervenir plus en amont dans le processus d’élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Enfin, des améliorations peuvent certainement encore être apportées au travail de la Conférence nationale de santé, notamment en ce qui concerne son articulation avec les conférences régionales.

Après avoir souligné le grand intérêt des travaux de la Conférence en 1998, le président Jean Le Garrec s’est réjoui de la modification du calendrier de ses travaux qui permettra à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales d’avancer l’audition annuelle du bureau de la conférence. Il a ensuite estimé que les inégalités interrégionales devant la mort étaient en effet liées non seulement à l’offre de soins, mais aussi au mode de vie ou aux habitudes alimentaires. On ne peut qu’approuver la formule “ soigner mieux c’est souvent moins prescrire ” ainsi que les recommandations de la conférence sur la diffusion de l’information et le développement d’une analyse des politiques de santé au niveau régional.

M. Claude Evin, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail, a posé deux séries de questions portant, la première, sur la méthodologie, la deuxième, sur le fond. Concernant la méthodologie, il convient de s’interroger sur le partage des compétences et l’articulation des travaux entre le Haut comité de la santé publique d’une part, et la Conférence d’autre part. Comment les travaux des conférences régionales sont-ils pris en compte et quelles sont les améliorations possibles, notamment en ce qui concerne l’élaboration des nouveaux Schémas régionaux d’organisation sanitaire (SROS) ? Enfin, s’il est logique que la Conférence nationale soit composée en partie de professionnels de grand renom, on peut cependant s’interroger sur sa composition actuelle.

Concernant les questions de fond, en premier lieu, la lutte contre les inégalités pose le problème de l’articulation entre les constats établis par la Conférence et les critères d’attribution des enveloppes déterminées à partir de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie. Un effort a été accompli en ce sens en 1998. Est-il ou non suffisant ?

Le cloisonnement actuel des enveloppes pose le problème du financement des activités d’expérimentation et de prévention. A supposer que la création d’une cinquième enveloppe relève de la compétence du législateur, il incomberait à celui-ci de définir les modalités de gestion de cette enveloppe et les formes de financement auxquelles elle donnerait lieu.

Enfin, le dépistage systématique du diabète, maladie à laquelle il convient effectivement d’être très attentif, pose la question du financement de cette activité, comme, plus généralement, celle de la rémunération de “ l’activité pédagogique ” qui doit être menée en matière médicale.

En réponse, M. François de Paillerets a indiqué que l’articulation entre le Haut comité de santé publique et la conférence nationale ne posait pas de problème. En effet, le Haut comité intervient en amont et effectue un travail d’expertise préalable à celui de la conférence, laquelle s’appuie sur ce travail pour le confronter à la problématique de la santé sur le terrain et définir des priorités. En privilégiant l’analyse de la santé publique à long terme, la conférence ne peut répondre à toutes les questions qui se posent légitimement à un moment donné. S’agissant de la composition de la Conférence, celle-ci inclut, certes, des professionnels, mais également des non-professionnels intéressés par la politique de la santé. L’apport des collèges régionaux est tout à fait fondamental. Il faut de surcroît souligner que si la conférence annuelle dure trois jours et se tient à huis clos, en amont, un travail est réalisé également tout au long de l’année et mobilise tous les acteurs de la conférence.

M. Jean-François Collin a confirmé qu’il existait une grande différence entre les régions en ce qui concerne le développement et l’activité des conférences régionales, même si la situation évolue rapidement. Ainsi, une soixantaine de programmes régionaux de santé sont désormais en cours d’élaboration, à partir des recommandations des conférences. Celles-ci ne se réunissant qu’une seule fois par an, l’instauration d’un véritable dialogue entre les différentes parties prenantes, et notamment entre les professionnels de santé et les usagers, prendra cependant un certain temps. De plus, l’élaboration des SROS continue à être réalisée sans que les représentants des usagers puissent intervenir. Cependant, la réunion des états généraux de la santé permettra aux usagers de s’exprimer.

Les directions régionales de l’action sanitaire et sociale (DRASS) assurent aujourd’hui la coordination et le secrétariat des différentes actions (conférences régionales, SROS, états généraux). Dans certaines régions, les DRASS qui, en plus, ont fourni du personnel aux Agences régionales d’hospitalisation (ARH), n’ont pas toujours les moyens d’assurer ces nouvelles tâches, ce qui est susceptible de créer des goulots d’étranglement.

Par ailleurs, l’ensemble des actions de prévention connaissent des problèmes de financement puisque les crédits prévus pour 1998 au titre des fonds de prévention ne sont toujours pas parvenus dans les régions, alors qu’ils doivent être consommés avant la fin de l’année.

M. Matthieu Méreau, après avoir rappelé que les inégalités et disparités entre les services déconcentrés de l’Etat n’étaient pas un phénomène propre à la santé, a souligné que ce secteur était, au niveau régional, caractérisé par une grande multiplicité des décideurs. On peut citer les unions régionales des médecins libéraux, les unions régionales des caisses d’assurance maladie, les agences régionales d’hospitalisation et les directeurs d’hôpitaux).

Il est tout à fait certain que les inégalités constatées aujourd’hui entre les régions en matière de santé publique sont inacceptables politiquement. Il reste à définir les modalités techniques de réduction de ces inégalités et donc à réaliser des arbitrages entre différentes possibilités de répartition des enveloppes nationales. Plusieurs questions doivent à ce sujet être tranchées :

- quelle référence faut-il adopter en tant que norme : une dotation cible ou bien une moyenne nationale ?

- quels critères faut-il retenir pour le calcul de l’allocation des ressources : les besoins démographiques, la morbidité, la mortalité, des facteurs d’ordre économique, culturel ou environnemental ?

- quel doit être l’objet de cette répartition : l’enveloppe des praticiens libéraux ou bien seulement la dotation du secteur hospitalier ?

On demeure ici encore largement dans le domaine de la recherche et l’intégration de ces différents facteurs dans des équations de calcul et de péréquation est particulièrement complexe. Du temps est donc encore nécessaire pour affiner la réflexion. On peut cependant d’ores et déjà dire que les critères retenus devront être tout à la fois conformes aux réalités des besoins de santé, simples et facilement accessibles pour qu’une multiplicité de décideurs puissent s’entendre.

M. Denis Jacquat s’est tout d’abord déclaré quelque peu surpris par la formule “ moins prescrire c’est mieux prescrire ”, étant donné que l’immense majorité des médecins établissent leurs prescriptions en leur âme et conscience.

Il a ensuite posé une question sur les problèmes de répartition géographique des praticiens, auxquels il est actuellement très difficile de remédier en raison du principe de liberté d’installation. Il y a quelques années, il a été décidé d’imposer aux infirmières un passage de trois ans en milieu hospitalier avant qu’elles puissent s’installer en libéral. Une mesure de ce type, qui permettrait d’orienter les nouveaux diplômés vers des établissements hospitaliers en manque de médecins puis vers les zones rurales entourant ces établissements, a-t-elle été envisagée par la Conférence nationale ?

M. André Aschieri a regretté que le rapport de la Conférence nationale ne consacre que très peu de développements à la prévention, alors que celle-ci représente un enjeu prioritaire pour notre système de santé. Vingt heures par an consacrées à l’action auprès des publics scolaires constitue une bonne mesure mais plus doit être fait si l’on souhaite rattraper le retard de notre pays par rapport aux autres pays développés. Dans ce même esprit, il est dommage que le rapport n’évoque pas les dispositions adoptées dans le cadre de la loi sur la veille sanitaire et le projet d’agence de sécurité sanitaire de l’environnement.

M. Pierre Hellier, après avoir rappelé que le rapport de la Conférence nationale avait retenu trois thèmes de réflexion majeurs, a souhaité savoir quel aurait pu être le quatrième thème.

M. François de Paillerets, président de la Conférence nationale de santé, a apporté les éléments de réponse suivants :

- La phrase utilisée en ce qui concerne les accidents iatrogènes est très exactement : “ mieux prescrire c’est souvent moins prescrire ”. Le mot “ souvent ” a son importance et renvoie à la fin du chapitre relatif à ces questions. Celui-ci souligne que si parfois le médicament peut être néfaste, dans la très grande majorité des cas, il permet de soulager, de soigner et de guérir. Le propos n’était donc en rien agressif mais avait simplement pour but de refléter les débats qui ont eu lieu sur ce sujet durant la conférence.

- En ce qui concerne la prévention, la Conférence nationale de santé a le sentiment de participer très activement à l’effort de promotion d’une politique nationale de prévention. L’enveloppe spécifique régionale de santé, le dépistage du diabète et les actes éducatifs qui l’accompagnent recouvrent très précisément des actions de prévention. Il convient cependant, en la matière, d’avancer tout à la fois de façon déterminée et avec précaution, car il ne faudrait pas heurter de front un système d’assurance maladie essentiellement dirigé vers le curatif. L’évolution doit donc être progressive. Il n’est cependant pas normal que, aujourd’hui, alors que les dépenses de santé s’élèvent à 12 000 francs par an et par personne, sur cette somme, seulement 1 franc soit consacré à l’éducation à la santé et 10 francs à la prévention.

- Le débat sur la démographie médicale est particulièrement difficile. Durant les travaux de la conférence, certains participants souhaitaient le maintien du statu quo alors que d’autres plaidaient pour l’instauration de numerus clausus géographique et disciplinaire. Le rapport a adopté une position médiane en proposant de fixer des plafonds dans certaines régions pour quelques disciplines, en concertation avec les professionnels.

M. Jacques Vleminckx a souligné que la Conférence nationale de santé et le Haut comité de santé publique ne s’opposaient pas, mais étaient au contraire complémentaires. Au sein de la conférence, le poids des corporatismes s’atténue et des consensus impossibles à réaliser il y a trois ans se créent.

En ce qui concerne l’enveloppe nouvelle consacrée à la prévention, sa gestion devrait être pluripartite entre l’ARH, le comité permanent de la Conférence régionale de santé et d’autres partenaires. Il semble souhaitable, enfin, qu’elle soit intégrée dans l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) afin d’être soumise au contrôle du Parlement et ce, en dépit de sa spécificité.

M. François de Paillerets a déclaré retenir, pour sa part, comme quatrième thème prioritaire, les problèmes liés au vieillissement de la population qui doivent dès maintenant être pris à bras le corps.

M. Matthieu Méreau a préféré mettre en avant la promotion de la santé des enfants et des adolescents, thème mis en avant par la conférence en 1997.

Mme Catherine Génisson a observé que si le slogan “ prescrire moins pour mieux soigner ” était séduisant, la iatrogénie était moins le produit de la surprescription médicale, que des incompatibilités médicamenteuses et de gestes médicaux inappropriés.

M. François des Paillerets a fait remarquer qu’effectivement, un tiers des accidents iatrogéniques étaient évitables, dont ceux liés aux gestes médicaux, mais que les deux autres tiers, liés aux risques médicamenteux, ne l’étaient pas, ce que traduit la formule : “ le risque zéro n’existe pas ”.

AUDITION DES REPRÉSENTANTS DE L’AGENCE NATIONALE D’ACCRÉDITATION ET D’ÉVALUATION EN SANTÉ

La commission a entendu M. Yves Matillon, directeur général de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES), accompagné de Mme Claudine Renou-Fages, secrétaire générale et du docteur Hervé Maisonneuve, directeur de l’évaluation, lors de sa réunion du mercredi 23 septembre 1998.

Le président Jean Le Garrec, rappelant que la commission avait entendu M. Matillon il y a un an, lui a demandé de faire le point sur l’avancement des travaux de l’ANAES depuis cette date.

M. Yves Matillon a indiqué que, depuis sa précédente audition par la commission, le conseil scientifique de l’Agence, divisé en deux sections, avait été mis en place en octobre 1997, et que, depuis lors, ce conseil scientifique et le conseil d’administration avaient effectué un travail très important. L’activité de l’Agence a notamment été marquée par la parution d’un manuel d’accréditation — le plus léger de tous les manuels parus dans le monde — édité au début du mois de septembre 1998, et qui est à l’heure actuelle envoyé aux 3 700 établissements concernés. L’effectif théorique de 130 personnes employées par l’Agence est en voie d’être atteint, puisque celle-ci emploie aujourd’hui 95 personnes.

S’agissant de l’évaluation, l’Agence a fait porter ses travaux sur les référentiels professionnels et les recommandations de bonne pratique. La production de 1997 a été diffusée tandis que des référentiels professionnels nouveaux étaient mis en chantier. L’évaluation concerne également les pratiques professionnelles, tant la pratique libérale que le secteur hospitalier. L’Agence développe, en outre, une réflexion relative aux nouvelles technologies, qui s’avérera particulièrement efficace si elle contribue à une réforme des nomenclatures. Enfin, une approche médico-économique se développe. Il faut préciser que l’évaluation porte exclusivement sur les pratiques professionnelles et ne s’intéresse pas actuellement aux compétences individuelles. Ce chantier sera considérable, mais devra être engagé à terme.

S’agissant de l’accréditation, la procédure qui s’est mise en place depuis 1990 évolue lentement. Elle nécessite en effet une démarche partagée avec l’ensemble des professionnels et des établissements. Une brochure sur l’accréditation a été tirée à 150 000 exemplaires.

La rédaction du manuel d’accréditation a constitué la première étape du processus. La deuxième consiste dans le recrutement d’experts visiteurs. Après une présélection sur 2 560 candidats, 300 ont été soumis à sélection et 70 recrutés. Ces derniers suivent aujourd’hui une formation. A partir du mois prochain, ils vont commencer leurs visites dans quarante établissements publics et privés, dont trois hôpitaux locaux, un hôpital militaire, un centre de recherche. Plus de deux cents établissements s’étaient déclarés initialement intéressés et, suite à l’édition du manuel, 120 ont confirmé vouloir entrer dans la démarche. Le bilan de l’étude des 40 établissements pionniers sera établi à la fin de cette année. En 1999, cette démarche pourrait toucher 2 à 300 établissements, avant d’être généralisée.

Le président Jean Le Garrec s’est interrogé sur le statut et le mode de recrutement des visiteurs et sur la manière dont l’Agence jugeait le “ palmarès ” des hôpitaux, publié par la revue “ Sciences et avenir ” et faisant état d’un risque de mortalité allant, selon les établissements, de 1 à 20.

M. Claude Evin, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail, a posé des questions sur la manière dont l’évaluation était ressentie par les professionnels concernés, notamment les unions professionnelles, sur l’évaluation des pratiques professionnelles confrontées aux techniques nouvelles, par exemple les prothèses. En effet, cette problématique n’est pas résolue à l’heure actuelle, et le développement de recommandations de bonnes pratiques pourrait faire évoluer les comportements en la matière. En ce qui concerne l’évaluation des compétences des médecins, on note une absence de consensus mais il s’agit d’une mission qu’à terme, l’ANAES devrait assumer. S’agissant de l’accréditation, si l’on peut manifester une certaine impatience, il serait utile de pouvoir établir des éléments de comparaison avec les démarches menées à l’étranger.

En réponse, Mme Claudine Renou-Fages a indiqué que les experts visiteurs avaient le statut de collaborateurs temporaires de l’Agence. Celle-ci s’est adressée, par voie d’appel d’offres, à des professionnels ayant une expérience en établissement. La sélection aboutit ensuite au recrutement et à la signature de contrats de collaboration qui leur permet à la fois de bénéficier d’une formation et de se rendre dans les établissements au rythme de quatre visites par an, tout en continuant leur activité professionnelle, réserve faite de six semaines d’absence. L’objectif est d’aboutir au recrutement de 800 experts, mobilisables sur l’année. Le financement de leur activité se fera par le biais de la redevance d’accréditation. Un décret est d’ailleurs en cours d’examen par le conseil d’Etat.

M. Yves Matillon a souligné que la compétence de l’Agence s’étendait à la fois au secteur public et au secteur privé, et que les experts visiteurs venaient de l’un et l’autre secteurs.

En ce qui concerne la publication de l’article de la revue “ Sciences et Avenir ”, deux remarques peuvent être formulées :

- d’une part, il convient d’assurer la transparence qui s’impose en matière d’évaluation des établissements de soins et des pratiques médicales ; l’ANAES a d’ailleurs prévu la participation des usagers dans les procédures d’élaboration du manuel d’accréditation ;

- d’autre part, il faut mettre en perspective les statistiques collectées concernant les pratiques médicales de manière à éviter les biais statistiques tenant par exemple aux populations (âges, publics....) traitées.

M. Hervé Maisonneuve a indiqué que le succès de la démarche d’évaluation, devant déboucher finalement sur un changement des pratiques médicales, supposait une mise en œuvre progressive et un minimum de temps. Il est clair que les incitations les plus efficaces visant à modifier ces pratiques sont d’ordre financier, mais celles-ci ne relèvent pas de l’ANAES. Dans l’échelle de l’efficacité viennent ensuite, dans l’ordre, l’action des leaders d’opinion notamment les sociétés savantes, les outils d’aide à la décision face au malade, l’audit clinique des pratiques professionnelles individuelles ou des équipes médicales - moyen efficace mais difficile à mettre en œuvre -, les visites médicales et la formation médicale continue (FMC), cette dernière ayant toutefois relativement peu d’impact. Actuellement, la politique d’incitation à la modification des pratiques médicales définies par l’ANAES est mise en œuvre par cinquante médecins libéraux et cinquante médecins hospitaliers dont chacun a pour mission de susciter l’engagement dans cette démarche de cent à trois cents professionnels de santé.

M. Yves Matillon a souligné la difficulté de modifier les pratiques professionnelles et a insisté sur l’importance d’une action partenariale de l’ANAES avec les unions régionales des médecins libéraux (URML) pour diffuser les nombreux référentiels produits par l’ANAES et susciter progressivement des changements de comportement.

M. Claude Evin s’est interrogé sur l’efficacité de la publication au mois de mars 1997 de 243 références médicales opposables (RMO) sur 60 thèmes, ce nombre pouvant apparaître trop élevé, et a demandé comment la procédure des RMO était articulée avec la procédure d’accréditation et d’évaluation.

M. Yves Matillon a souligné l’intérêt de la mise en œuvre des RMO qui constituent un moyen d’engager la démarche de modification des pratiques médicales et a estimé souhaitable de limiter le nombre de celles-ci afin d’en assurer la plus grande efficacité possible.

M. Bernard Accoyer a regretté la politique de temporisation coupable du Gouvernement dans la nécessaire mise en oeuvre de la réforme de 1996 dont l’accréditation représentait un axe majeur. En dépit d’un accord de principe sur la politique d’accréditation et sur la nécessité d’améliorer la qualité des soins, depuis un an et demi, il est à craindre que les retards qui se sont accumulés auront des conséquences néfastes sur l’état de santé de la population. De plus, le risque apparaît que l’accréditation des établissements et des services se transforme en une accréditation des seuls établissements alors que c’est l’accréditation des centres de décision, c’est-à-dire des services, qui doit être privilégiée. En outre, il serait souhaitable que l’évaluation des médecins libéraux soit mise en œuvre rapidement sous réserve de réunir les moyens nécessaires pour une politique de formation professionnelle continue (FMC) des médecins efficace. Enfin, il serait opportun que l’ANAES se mobilise sur plusieurs thèmes prioritaires : le financement des pathologies nouvelles, les nouveaux médicaments et les problèmes liés à l’allongement de la vie.

M. Denis Jacquat s’est interrogé sur les sanctions pouvant être prises à la suite d’une appréciation négative dans le cadre d’une procédure d’accréditation, en liaison avec les agences régionales d’hospitalisation (ARH) et les DRASS. Il s’est enquis des moyens permettant d’assurer la publicité des comptes rendus auprès des usagers.

M. Pierre Hellier a estimé que, si un certain temps était nécessaire pour mettre en place les outils de l’accréditation et de l’évaluation, il convenait dorénavant de passer à la phase de l’application et a demandé dans quel délai tous les établissements hospitaliers auraient fait l’objet de la procédure d’accréditation.

Mme Catherine Génisson, après avoir souligné l’importance du rôle que peuvent jouer les usagers pour faire évoluer les pratiques médicales et sortir d’une évaluation purement professionnelle, a demandé des précisions concernant le profil professionnel des visiteurs experts pour l’accréditation et les conditions de leur intervention dans les établissements.

M. Claude Evin a tenu à souligner que le retard pris par l’ANAES était dû non au gouvernement actuel mais au précédent qui n’a publié les décrets nécessaires qu’au printemps 1997, alors que la création de l’ANAES était prévue par l’ordonnance du 24 avril 1996. De surcroît, le choix pour l’ANAES du statut d’établissement public administratif — choix fait par le gouvernement Juppé et non remis en cause par son successeur — explique certainement la lourdeur du système. Toutes les expériences étrangères montrent qu’il ne s’agit pas là de la bonne formule.

En réponse, M. Yves Matillon a donné les précisions suivantes :

- Le manuel d’accréditation a demandé trois ans de travail. L’ANAES a développé de manière considérable ses relations avec les structures d’accréditation étrangères pour pouvoir pleinement bénéficier de leurs expériences.

- La démarche première de l’ANAES a consisté à ne pas opposer accréditation des services et accréditation des établissements, en choisissant la voie médiane de l’évaluation de l’activité. Cette démarche pourra être poursuivie pour parvenir, à terme, à une évaluation des pratiques professionnelles.

- Le rapport d’accréditation a comme premier objectif d’aider l’établissement dans le cadre de la contractualisation avec l’Agence régionale de l’hospitalisation. Il est également destiné à être accessible au public.

- Les visites d’accréditation sont réalisées par trois ou quatre experts-visiteurs par établissement. Il s’agit le plus souvent d’un directeur d’établissement, d’un médecin et d’un autre professionnel médical.

- L’ANAES ne se livre pas à l’évaluation des médicaments qui relève des compétences de l’Agence du médicament. En revanche, elle procède à l’évaluation du coût des pathologies et à celle, très importante, des nouvelles technologies. Pour ce dernier domaine, le principal problème consiste dans l’absence de lien entre l’évaluation et les décisions en matière de nomenclature et de prise en charge des soins.

- En 1999, trois cents établissements feront l’objet d’accréditation. A partir de l’an 2000, l’objectif de l’ANAES est d’atteindre 750 à 800 établissements par an. En Grande-Bretagne, quarante établissements sont évalués, mais l’agence ne compte que quarante agents. Au Canada, le rythme est très rapide, comme aux Etats-Unis qui bénéficient de près d’un siècle d’expérience dans ce domaine. En France, le problème n’est pas l’augmentation des moyens mais plutôt l’évolution des mentalités car la procédure d’accréditation est inédite.

AUDITION DU PRÉSIDENT DU CONSEIL D’ADMINISTRATION DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M.  Jean-Marie Spaeth, président du conseil d’administration de la Caisse d’assurance maladie (CNAM), lors de sa réunion du mercredi 23 septembre 1998.

M. Jean-Marie Spaeth a tout d’abord rappelé l’importance qu’il accorde au travail du Parlement sur la protection sociale et la politique de santé en particulier. L’examen de la troisième loi de financement de la sécurité sociale signifie que ce processus fait désormais partie de notre vie démocratique. Démocratie sociale et démocratie parlementaire non seulement ne sont pas antinomiques, mais peuvent désormais se renforcer à condition d’inventer les bonnes articulations ou les bonnes passerelles.

La réforme constitutionnelle et les ordonnances de 1996 ont permis de sortir d’une longue période au cours de laquelle le pouvoir politique et les partenaires sociaux au sein des caisses, ont consacré, sur les problèmes de la sécurité sociale et de son devenir, beaucoup plus d’énergie à se neutraliser qu’à construire, en prenant appui sur des champs de compétence peu clairs et très émiettés.

Les conséquences en ont été l’absence de pilotage global des évolutions nécessaires au sein du système de santé, les prélèvements supplémentaires pour les cotisants et un recul de la couverture sociale pour les assurés. Les séquelles se feront sentir pour tous durant quelques années encore à travers la contribution au remboursement de la dette sociale, qu’on peut qualifier “ d’impôt de non-gestion passée ”. Néanmoins, un coup d’arrêt a été donné à cette dérive grâce à la réforme de l’assurance maladie. Il nous appartient, chacun à notre place, d’en tirer profit pour sortir notre système de santé d’une situation qui a empiré au fil des années. C’est notamment le cas en matière de clarification des compétences entre l’Etat et les caisses, ou de développement de la démarche contractuelle associant l’Etat et les caisses nationales.

Le Parlement a compétence pour fixer les principaux objectifs et les grands arbitrages du budget de la sécurité sociale, en même temps que les lignes majeures de la politique de santé. Il est nécessaire d’insister sur une articulation efficiente entre les choix budgétaires et les options de politique de santé car c’est là que le Parlement peut le mieux faire œuvre utile et combler un vide dans le système de santé. La fixation des objectifs de dépenses conduit à placer sous tension les différents acteurs du système, caisses et professionnels de santé en particulier, et crée des incitations pour qu’ensemble ils parviennent aux objectifs fixés. Seul le Parlement détient la légitimité suffisante pour déterminer le niveau des dépenses en s’appuyant sur les expertises qui lui sont soumises. Ce schéma peut fonctionner durablement dès lors que, d’année en année, les objectifs financiers et budgétaires traduisent des choix politiques et reflètent l’élaboration de priorités — notamment sur le plan de la santé publique — qui sous-tendent les arbitrages budgétaires, et que les parlementaires disposent d’informations de qualité. L’émergence de la politique de santé dont notre pays a besoin est à ce prix.

Contrairement à un discours convenu, la contrainte économique sur le système de santé n’est nullement, dans ses formes actuelles en tout cas, synonyme de rationnement des soins. Elle implique, en revanche, une exigence de performance et de qualité pour un système de santé qui consomme plus de 10 % de la richesse nationale, ce qui en fait l’un des plus coûteux au monde et en même temps l’un de ceux où l’évaluation des résultats reste, sinon inexistante, du moins sous développée.

Notre système d’offre de santé a, par sédimentation successive de techniques de plus en plus pointues et de pratiques de plus en plus spécialisées, progressivement perdu de vue ce qui en fait la raison d’être : la qualité du service rendu à la population. A partir du moment où l’offre créait la demande, on a pu parfois négliger de s’interroger sur le besoin de soins, exprimé ou latent, faute de capacités financières, ou perdu dans un système dépourvu de coordination des soins. Or il s’agit non seulement de rendre le système solvable, mais également, de satisfaire l’intérêt collectif des demandeurs de soins, ce qui suppose la plus grande égalité possible d’accès aux soins et à la prévention.

On peut également affirmer que permettre à l’assurance maladie d’être garante de la qualité et de l’efficience des prestations fournies aux assurés sociaux constitue l’un des acquis principaux de la réforme. Seule l’assurance maladie est en situation de négocier des accords conventionnels avec les professionnels de santé en médecine de ville et de faire des conventions des outils de réorganisation du système de soins. Elle seule peut en outre développer des systèmes d’information qui permettent de déceler d’éventuelles anomalies dans la distribution des prestations de soins. Les professions de santé et les structures de soins expriment des exigences légitimes quant aux moyens que la collectivité doit mettre à leur disposition. Elles ont aussi, collectivement et individuellement, des comptes à rendre à la population sur le coût et la qualité des prestations fournies.

C’est du reste le sens du travail d’évaluation, dont l’ANAES est entre autres chargée. Le service médical doit également avoir un rôle important à jouer en particulier dans la diffusion de référentiels de bonnes pratiques et la vérification de leur respect. Ces référentiels représentent l’état de l’art médical face à une pathologie donnée que la pratique courante n’a pas toujours parfaitement assimilé.

L’exemple du diabète, qui touche environ 1 300 000 personnes, est significatif à cet égard. La prise en charge des malades fait intervenir à la fois des professionnels libéraux, des professions paramédicales, des associations et des services hospitaliers. L’absence de coordination donne lieu non seulement à une redondance de soins, et donc aboutit à un gaspillage, mais se solde également souvent par une absence de qualité. Il est essentiel de réduire les risques d’hypertension inhérents à cette pathologie. Des démarches préventives sont nécessaires, comme l’éducation alimentaire, dont une étude allemande a montré qu’elles permettaient dès la deuxième année une réduction majeure des prescriptions de médicament anti-diabétiques.

Une nouvelle approche du système de santé consisterait dans cet exemple à diffuser des référentiels standardisés de prise en charge de cette pathologie, depuis sa prévention jusqu’au traitement des phases aiguës à partir desquels les professionnels pourraient s’organiser. Toutes les dimensions de leurs activités devraient être reconnues, avec pour corollaire une diversification du mode de rémunération aujourd’hui uniquement axé autour de la réalisation d’un acte de soins. Les économies entraînées par la diminution de la consommation médicamenteuse de cette population permettraient de financer les soins aussi indispensables que les examens du fond d’œil.

Au travers de cet exemple, chacun est concerné : la profession médicale comme les scientifiques pour que ces référentiels soient élaborés et validés, le Parlement pour permettre une diversification des modes de rémunérations des professionnels, les caisses et les syndicats médicaux pour les traduire dans leurs accords conventionnels, les professionnels pour s’organiser en réseaux, les patients pour adopter des comportements préventifs et le service médical des caisses pour évaluer le respect des référentiels.

Il est clair que les interventions du Parlement et de l’assurance maladie, parce que leur légitimité est différente par nature, se situent dans des champs de compétence complémentaires. L’étatisation aurait pour effet la confusion des rôles qui a été si longtemps le meilleur alibi de l’immobilisme. La réforme a posé les fondations indispensables pour mener à bien la modernisation du système de santé, d’une part, en donnant une vraie place au Parlement et en créant, d’autre part, les instruments institutionnels d’un dialogue permanent entre l’Etat et les caisses : c’est le rôle des conventions d’objectifs et de gestion Etat/caisses nationales de sécurité sociale.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 que le Gouvernement a rendu public hier marque un tournant. Tout d’abord, il confirme et lève toute ambiguïté sur la prise en compte de la dimension économique de la pratique médicale. Au-delà des clivages politiques traditionnels, il existe désormais un consensus sur le fait que les médecins, ordonnateurs de dépenses publiques, doivent prendre leur part de responsabilité, aux côtés des assurés sociaux et des financeurs. Cette responsabilité économique collective du corps médical, intrinsèquement liée à son pouvoir de décision en tant que prescripteur, se traduira par un mécanisme simplifié de revalorisation ou de contribution additionnelle de la profession. Il s’agit d’une simplification notoire du dispositif et surtout d’une clarification. Désormais toute ambiguïté est en effet levée : cette responsabilité économique ne constitue aucunement un jugement de valeur sur les pratiques individuelles. Elle ne représente ni plus ni moins une sanction pour les professionnels de santé que les hausses de cotisations pour les assurés sociaux. Cette clarification va permettre de sortir d’un faux débat délibérément entretenu par ceux qui refusent que le corps médical assume une partie des conséquences économiques de ses décisions médicales.

Ensuite, ce projet de loi conforte l’assurance maladie et ses partenaires conventionnels dans la dynamique aujourd’hui impulsée dans le sens d’une réforme structurelle du système de santé. Il propose en particulier de légaliser le dispositif du médecin référent qui permet au patient de choisir un médecin généraliste favorisant la prise en charge globale de la santé des patients, instaurant ainsi une amorce de coordination des soins. Mais, plus avant, il propose de faire du cadre contractuel entre l’assurance maladie et les professionnels de santé, l’instrument privilégié de la modernisation, de l’innovation de la distribution des soins de ville et des accompagnements nécessaires à ces évolutions. Toute initiative conventionnelle était jusqu’alors immanquablement sanctionnée par le conseil d’Etat. Prochainement, les partenaires conventionnels pourront prendre en compte la santé de la population dans son acception globale, en reconnaissant que la santé et l’activité médicale recouvrent plusieurs dimensions, non seulement curative, mais également préventive, d’éducation sanitaire ou d’évaluation des pratiques. Il sera possible de rémunérer les professionnels autrement qu’en se basant exclusivement sur le paiement à l’acte des soins, en intégrant, pour une part, la rémunération des fonctions que les professionnels assurent au profit de la population et qui ne se traduisent pas nécessairement par des actes médicaux.

Cette loi permettra également d’avancer sur la voie de la coordination des soins. C’est là un enjeu essentiel car, comme dans tout autre secteur de l’activité économique, il ne suffit pas que chaque acteur soit performant pour que le système de santé soit performant. Il convient également que leur organisation et leur coordination soient performantes. Le cadre conventionnel permettra désormais de prôner la rencontre des différents professionnels au sein de réseaux de soins autour de certaines pathologies par exemple. De telles démarches nécessitent une implication forte des professionnels, c’est pourquoi il est nécessaire de laisser, dans un cadre général défini au plan national, une large part aux initiatives locales.

Les mesures structurelles sur le système de santé passent également par une action sur la quantité d’offreurs de soins. A aucun moment le critère des besoins de santé n’est aujourd’hui pris en compte dans l’organisation des études, dans la répartition des médecins entre les disciplines, sur le territoire ou dans les mécanismes de préretraites. Le projet de loi prévoit d’offrir une possibilité de modulation des mécanismes de préretraites selon les disciplines et les zones géographiques. Il s’agit d’une étape importante souhaitée par la CNAMTS. Mais son usage ne sera vraiment pertinent qu’après l’élaboration d’une sorte de carte géographique de la médecine libérale. Une telle carte fondée sur les besoins de santé constituerait un instrument de choix au service d’une action intelligente sur la démographie médicale.

Ces perspectives nouvelles de réorganisation du système n’auront pas un effet immédiat. Il est donc prévu que le Gouvernement propose, au-delà du mécanisme de responsabilité collective économique annuel, des rendez-vous d’analyses de dépenses en cours d’année et qu’il puisse prendre sans délai certaines mesures correctrices nécessaires.

Si le projet de loi comporte une dynamique conventionnelle nouvelle intéressante, il présente néanmoins quelques points faibles.

En particulier, pour que le cadre conventionnel soit fécond, il faut que les règles du jeu soient claires pour les négociateurs. Ceux-ci doivent donc connaître celles qui s’appliqueront en cas d’échec des négociateurs. Pour les médecins, ces règles sont le règlement conventionnel minimal dont on pourrait concevoir que son contenu soit stabilisé par le pouvoir législatif. De cette façon, les inconvénients, pour les médecins, d’une décision des syndicats médicaux visant à rester hors du champ conventionnel, leur apparaîtraient clairement.

Le traitement des cancers féminins est un exemple qui illustre parfaitement les incohérences du système français de prévention et de santé publique. Toutes les instances scientifiques et médicales insistent sur le caractère prioritaire du dépistage, pour lequel il existe des moyens efficaces. Mais cette efficacité impose que les professionnels respectent un certain nombre de critères de qualité dans l’organisation et la pratique des actes. Le Gouvernement propose de généraliser à tout le territoire les programmes organisés de mise en œuvre des critères de qualité aujourd’hui développés dans quelques départements. Chacun pourrait s’en réjouir, et pourtant, force est de constater que la méthode retenue n’est pas satisfaisante. Les professionnels peuvent continuer, en dehors de ces programmes et de toutes les contraintes de qualité qui s’y attachent, à multiplier ces mêmes actes. Le maintien de ce système inorganisé, sans garantie de qualité ni de conformité aux préconisations de la communauté scientifique n’est plus acceptable. Il crée un gaspillage que ne peut plus s’offrir le système de santé et dont les femmes apparaissent au demeurant comme les premières victimes. Il est de la compétence du pouvoir législatif de poser le principe selon lequel seuls certains professionnels agréés sur des critères de qualité, doivent être autorisés à pratiquer de tels actes, comme cela a déjà été fait pour la procréation médicalement assistée. Ce principe est d’ailleurs destiné à se développer en fonction de la technicité et de la difficulté de certains actes.

En conclusion, M. Jean-Marie Spaeth a rappelé l’importance qu’il attache non seulement à préserver mais également à étendre l’autonomie de gestion de l’assurance maladie, souvent décrite de façon abusive sous l’angle des petites querelles de pouvoir. Il faut s’inscrire en faux contre cette idée ; l’autonomie est d’abord une des conditions de l’efficacité de son action en matière de régulation des soins de ville comme pour l’animation du réseau des caisses d’assurance maladie. L’autonomie suppose de poursuivre dans la voie déjà engagée de l’allégement de la tutelle de l’Etat, vraisemblablement par de futures étapes législatives. Cette autonomie a un prix, qui consiste à rendre compte des résultats de son action dans la plus complète transparence, car le service public est d’abord le service du public. Pour leur part, les dirigeants de l’assurance maladie y sont prêts.

Le président Jean Le Garrec s’est déclaré en accord avec l’idée que la démocratie sociale et la démocratie politique n’étaient en effet nullement antagonistes et a indiqué que jugeant nécessaire d’améliorer l’organisation du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, il ferait des propositions prochainement dans ce sens.

M. Claude Evin, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail, a présenté les observations suivantes :

- La récente annulation des conventions médicales montre en effet que le cadre législatif actuel ne permettait pas aux partenaires conventionnels de prendre des initiatives innovantes, par exemple sur l’organisation du système de soins ou sur le mode de rémunération des professionnels de santé. Il serait donc souhaitable que le projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte des dispositions autorisant à engager des réformes structurelles par voie contractuelle.

- Concernant la démographie médicale, l’idée d’un conventionnement sélectif récemment avancé par le directeur de la CNAM est intéressante dans son principe. Sans aller jusque là, la conférence nationale de santé propose, dans le cadre de ses travaux sur le rééquilibrage des inégalités inter et intrarégionales, “ de développer des processus concertés avec les professionnels de santé comportant des incitations et de limites à l’installation dans des zones géographiques données et/ou face à des situations données ”. Il serait donc intéressant de savoir si cette proposition pourrait être prise en compte dans le cadre des futures négociations conventionnelles.

- Les parties conventionnelles doivent être mieux informées des conséquences d’un éventuel échec des négociations, ce qui suppose que le législateur fixe les principes directeurs du règlement conventionnel minimal applicable en pareil cas. Encore faut-il savoir ce que ces principes recouvrent exactement.

- La Conférence nationale de santé propose de systématiser un dépistage ciblé du diabète et de financer l’accompagnement des malades. Certaines de ces mesures relèvent de la convention et d’autres du législateur ; la question de l’intégration de leur coût dans l’ONDAM doit être posée.

- Des progrès doivent être accomplis dans la voie de l’agrément des pratiques professionnelles évoqué au cours de l’audition de la matinée par les représentants de l’ANAES.

- Sur la question de la télétransmission des feuilles de soins, il serait souhaitable de connaître les contreparties qui ont été demandées aux médecins ayant reçu 9 000 F de subvention pour avoir signé un contrat relatif à l’informatisation de leur cabinet, étant rappelé que pas moins de 54 % des médecins ont signé un tel contrat. La recommandation du comité central d’enquête sur le coût des services publics relative à la modulation de cette aide à l’informatisation ne semblant pas avoir été mise en oeuvre jusqu’à présent, on peut se demander s’il est encore possible de le faire.

En réponse, M. Jean-Marie Spaeth a apporté les éléments suivants :

- S’agissant des recommandations de la Conférence nationale de santé, il convient de rappeler que cette instance regroupe exclusivement des professionnels de santé et que les caisses de sécurité sociale n’y sont pas représentées. Compte tenu de la place que devraient prendre les politiques de santé publique, il serait peut-être souhaitable que le rôle et la composition de la Conférence soit élargis afin de favoriser une meilleure prise en compte des objectifs de santé publique dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et dans la politique conventionnelle.

- L’annulation des conventions médicales est également imputable à un problème de représentativité des syndicats médicaux signataires, domaine dans lequel la CNAM n’a aucune prise. Il est d’ailleurs parfois difficile de comprendre l’évolution dans le temps de la notion de représentativité, sachant que les syndicats en question vont participer aux prochaines négociations conventionnelles. Il faut faire preuve d’imagination pour que les négociations conventionnelles ne se limitent pas au niveau national, mais se développent également au niveau régional et départemental. On pourrait ainsi concevoir qu’une convention nationale opposable soit complétée par des contrats conclus au plan local.

- En ce qui concerne la démographie médicale, il serait souhaitable de s’appuyer sur une carte des besoins sanitaires tenant compte des situations particulières, par exemple géographiques, pour déterminer l’offre de soins la plus pertinente, pour mettre en place d’éventuelles formules de préretraites ou d’incitation à l’implantation et pour organiser le troisième cycle des études médicales, étant souligné que l’orientation des spécialistes ne doit pas être faite en fonction des seuls besoins des hôpitaux, mais également en prenant en considération ceux de la population.

L’opposition entre médecine générale et médecine spécialisée est d’ailleurs stérile et il conviendrait que la médecine générale puisse être choisie pour son intérêt propre et non pas par défaut.

- Le conventionnement sélectif pourrait constituer une source de gâchis dans la mesure où il aboutirait en pratique à empêcher certains jeunes médecins ayant effectué des études longues et coûteuses d’exercer leur profession. En revanche, il faudrait pouvoir faire preuve de plus de souplesse, notamment en organisant des passerelles entre les disciplines. La carte des besoins sanitaires déjà évoquée pourrait également devenir un instrument d’orientation et de sélection se fondant sur le critère de la qualité et non sur celui du nombre, étant rappelé qu’aujourd’hui, la pratique de certains actes sont déjà réservés à des médecins titulaires d’un agrément spécifique.

- En cas d’absence de convention, le règlement conventionnel minimal devrait au moins prévoir, conformément à la proposition du conseil d’administration de la CNAM, une répartition par moitié de la charge des cotisations sociales, sachant que les caisses financent aujourd’hui les deux tiers de ces cotisations et les médecins le tiers restant.

A la demande du président Jean Le Garrec, M. Jean-Marie Spaeth a confirmé que le montant annuel moyen des cotisations actuellement prises en charge par les caisses était de l’ordre de 62 000 F. Il a ensuite souligné qu’un éventuel échec des négociations conventionnelles devrait également entraîner la cessation du financement de la formation continue des médecins et qu’on pouvait s’interroger en pareil cas sur l’opportunité de maintenir le secteur II.

En revanche, il ne paraît pas opportun que le règlement minimum comporte l’institution d’un tiers obligatoire. Le système du tiers-payant ne doit pas être une sanction pour les médecins, mais un mode normal de relations entre les caisses et les assurés.

M. Claude Evin a estimé, pour sa part, que les parlementaires devaient naturellement, se préoccuper des assurés sociaux, en premier lieu. C’est à ce titre que le tiers payant pourrait être imposé en cas d’absence de convention.

Poursuivant ses réponses, M. Jean-Marie Spaeth a constaté que les travaux de l’ANAES pourraient être plus rapides. En particulier, alors que la Caisse finance l’ANAES, elle met beaucoup de temps à obtenir la publication par l’agence des références positives comme celles demandées en juin 1997 sur l’hypertension et le diabète, qui permettent, sans contrainte, d’obtenir un consensus des professionnels.

S’agissant de la télétransmission des feuilles de soins électroniques, la plupart des médecins ont bénéficié de l’aide à l’équipement, mais un nombre important d’entre eux ne sont pas encore équipés. Le système d’aides est maintenant achevé et les sommes du Formel non utilisées ont été transférées au dispositif de préretraites (MICA). Les médecins qui en ont bénéficié doivent s’engager, neuf mois après la distribution des cartes, à transmettre leurs prescriptions par télétransmission. Si dans ce délai de neuf mois 90 % du total des actes n’étaient pas télétransmis, l’aide devrait faire l’objet d’un remboursement.

M. Jean-Luc Préel a posé des questions sur les rapports entre la CNAM et le Gouvernement, en particulier sur l’autonomie de gestion dont dispose la Caisse. Est-il légitime que le Gouvernement intervienne, comme il l’a fait vis-à-vis des radiologues, et, dans le cadre d’une telle intervention, quel est alors le rôle de la CNAM ? Une union nationale des caisses pourrait-elle être mise en place et, d’une manière plus générale, comment assurer la coordination nationale des politiques menées ? Comment doit-on apprécier les sanctions collectives et la politique de maîtrise collective des dépenses ? Quels sont les frais de gestion de la CNAM ? Quelle appréciation peut-on porter sur la mise en place de réseaux et de filières ? Quelle est la fiabilité des chiffres diffusés par la CNAM et comment assurer un suivi plus régulier de l’information sur les dépenses de santé ?

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général, a constaté que l’annulation de deux conventions par le Conseil d’Etat consistait plus à inviter le législateur à légiférer qu’à rejeter le contenu concret du dispositif conventionnel.

Il a ensuite posé des questions sur :

- l’opportunité de permettre à la CNAM de ne pas conventionner dans un secteur ou une aire géographique donnée, ce qui aurait pour effet d’inciter les médecins les moins qualifiés à se tourner vers le secteur de la prévention, comme semble le réclamer une organisation syndicale ;

- l’éventualité de supprimer la possibilité de délégation au premier franc à une assurance privée.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour la branche vieillesse, s’est interrogé sur :

- la possibilité d’individualiser les sanctions contre les médecins, le principe de responsabilité collective étant inacceptable ;

- la fiabilité des chiffres avancés s’agissant des radiologues, la lettre Z englobant aussi d’autres spécialités ;

- l’augmentation du “ numerus clausus ” des étudiants en médecine ;

- le rôle de l’hôpital dans le déficit ;

- l’avenir des mutuelles étudiantes régionales ;

- le désarroi des médecins confronté au choix du matériel informatique nécessaire à la télétransmission des feuilles de soins électroniques ;

- la possibilité de mettre en place un système de choix de la caisse d’affiliation au niveau national.

M. Patrick Devedjian a posé des questions sur :

- la démographie médicale et la révision du “ numerus clausus ” ;

- les techniques de déconventionnement qui pourraient être envisagées ;

- la nécessité de mieux assurer la transparence de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris et la participation de celle-ci et des CHU à la politique hospitalière du Gouvernement ;

- la rigidité des enveloppes médecine libérale-hôpitaux et la possibilité de transférer des sommes d’une enveloppe à une autre.

M. Jean-Pierre Foucher, après s’être inquiété de la remise en question du paiement à l’acte, a posé des questions sur le remboursement des vaccinations et la mise en place de la carte Sesam Vitale.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, a posé des questions sur l’agrément des professionnels en matière de prévention et sur le débat entre compétence et proximité, sur le sort du carnet de santé, sur l’amélioration de la condition des généralistes - dont le rôle éminent sera, selon lui, consacré le jour où sa consultation sera payée autant ou plus que celle du spécialiste -, sur l’autonomie de la CNAM par rapport au Gouvernement, sur les problèmes posés par l’existence de lettres-clés insuffisamment spécifiques, comme le montre la situation actuelle des radiologues.

M. Bernard Accoyer, après avoir souligné que l’hôpital représentait le poste principal de dépenses de l’assurance maladie, s’est inquiété du mode de calcul de l’objectif national de dépenses d’assurances maladie (ONDAM) : le Gouvernement annonce un taux de progression de 2,6 % calculé par rapport à l’objectif voté et non pas l’objectif réalisé, ce qui aboutirait à un résultat négatif pour certaines composantes de l’ONDAM.

Il a ensuite posé des questions sur :

- la fiabilité des statistiques de l’assurance-maladie dont les évolutions semblent parfois liées à des fluctuations dans la saisie des feuilles maladie ;

- sur les difficultés de mise en place de la télétransmission dans les cabinets médicaux, que la CNAM prétend généraliser alors qu’en Bretagne, elle n’est pas encore réalisée ;

- et sur le “ numerus clausus ”.

En réponse, M. Jean-Marie Spaeth a donné les éléments suivants :

- Dans les années 60 et 70, nous avons bénéficié d’un développement massif de l’offre de soins, du fait de la solvabilisation des assurés. Quand les dépenses augmentaient trop, on ne se préoccupait pas de l’offre des soins mais on diminuait le ticket modérateur en pensant que les assurés feraient pression sur les médecins comme s’il existait des relations égalitaires entre l’assuré et le médecin. La réforme de 1996 a introduit la notion de responsabilité économique du prescripteur. Individuellement, à de rares exceptions, les médecins font leur travail. La responsabilité professionnelle est individuelle, mais la responsabilité économique est collective. Il n’est pas possible de mettre en place un système de reversement fondé sur le respect d’une bonne pratique qu’en réalité on ne sait pas définir.

- La prévention et l’éducation sanitaire sont parties intégrantes de la pratique médicale. Pourtant, le système de santé français, trop orienté vers les actions curatives et caractérisé par un cloisonnement excessif entre les activités, ne rend pas aisé le développement de ces pratiques. La revalorisation des pratiques médicales et, partant, du prix des consultations, passe donc également par une meilleure prise en compte de l’acte intellectuel, dont relèvent la prévention et l’éducation sanitaire, alors que le système actuel ne se réfère qu’aux seules prescriptions.

- En ce qui concerne le conventionnement et le déconventionnement, il est très difficile d’avancer en l’absence d’une connaissance précise des besoins de santé dans notre pays. Il convient donc d’abord d’élaborer une carte des besoins en santé publique avant d’envisager de limiter le nombre des entrées à l’université et de définir des systèmes de passerelles entre spécialités.

- La CNAM était tout à fait prête à assurer la réorientation de 400 médecins vers la médecine du travail ; elle avait dégagé les postes et les crédits correspondants. Si l’opération n’a pas pu se faire, c’est en raison de l’opposition de la faculté de médecine, contre laquelle la CNAM est impuissante.

- Au sujet de la nomenclature des actes médicaux et des lettres-clés, le système actuel n’est en effet pas satisfaisant. Il doit être révisé mais l’arbitrage entre les professionnels est difficile à faire. Ainsi, grâce au progrès technologique, l’imagerie médicale a fait des progrès considérables et si son utilisation est génératrice de coûts supplémentaires, elle permet également de limiter le recours aux explorations invasives. Des arbitrages devront cependant être faits entre les différentes techniques si l’on ne veut pas assister à un empilement des examens, et ces choix ne pourront pas être effectués par les seuls professionnels.

- Le cadre législatif actuel ne permettait pas une modification des tarifs médicaux en cours d’année, y compris en cas d’accord conventionnel. Ce n’est que parce que les conventions ont été annulées que le gouvernement a pu modifier unilatéralement certains tarifs. Le projet de loi de financement pour 1999 revient sur ce blocage en permettant des ajustements infra-annuels.

- Il n’est pas dans l’intention de la CNAM de supprimer le paiement à l’acte, mais de faciliter d’autres modes de rémunération, ce qui serait une façon d’accroître son autonomie.

- Dans le cadre des délégations de gestion, la CNAM ne rembourse que les dépenses réelles.

- Les frais de gestion de la CNAM peuvent être évalués à environ 5 % de son budget.

- En ce qui concerne l’augmentation de l’ONDAM pour 1999, il serait inacceptable qu’elle soit calculée sur les objectifs 1998 et non sur les résultats effectifs.

- La fongibilité des enveloppes financières n’a d’intérêt et ne sera efficace que si elle est réalisée sur la base de pathologies comme le diabète ou de projets médicaux.

AUDITION DU PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION NATIONALE DE LA MUTUALITÉ FRANÇAISE

La commission a entendu M. Jean-Pierre Davant, président de la Fédération nationale de la mutualité française, lors de sa réunion du mercredi 23 septembre 1998.

M. Jean-Pierre Davant a tout d’abord considéré que son audition devant la commission consacrait le rôle spécifique que peut jouer la Mutualité française dans l’évolution positive du système de santé publique. La Fédération nationale de la mutualité française a depuis de nombreuses années fait savoir qu’elle souhaitait voir adopter une approche globale de la politique de santé ainsi qu’un certain nombre de réformes structurelles. Les annonces effectuées par Mme Martine Aubry devant la commission des comptes de la sécurité sociale, notamment en ce qui concerne les médicaments génériques et le droit de substitution, sont donc tout à fait satisfaisantes.

Chaque année, 10 à 11 % de la richesse nationale, soit 850 milliards de francs, sont consacrés en France à la satisfaction des besoins de santé, soit par le biais des impôts, de la CSG et des cotisations sociales, soit à travers les systèmes de protection complémentaire (mutuelles, organismes de prévoyance), soit enfin par des dépenses directes des particuliers. Pour la Mutualité française, il convient donc de savoir si l’utilisation qui est faite de cet investissement national est de nature à satisfaire les besoins sanitaires des Français. C’est là, la question fondamentale, bien plus que celle de l’équilibre des comptes de l’assurance maladie, qui ne permet pas de régler les problèmes structurels du système de soin et de fixer des objectifs à long terme.

Le basculement quasi total du financement de l’assurance maladie sur la CSG est une excellente mesure mais demeure le problème des cotisations patronales. Le système qui a été bâti à la Libération reposait sur des cotisations assises sur la masse salariale qui pouvait, à juste titre, être considérée comme réellement représentative de la richesse. Non seulement ce n’est plus le cas, mais c’est un processus qui tend à détruire l’emploi. La réforme des cotisations patronales est donc nécessaire et constituerait un rééquilibrage entre les personnes physiques et les personnes morales.

Concernant l’offre de soins, quatre mesures essentielles doivent être adoptées :

- l’informatisation, sans laquelle aucune modernisation de notre système de santé ne peut être envisagée, tant sur le plan de la transparence des coûts que sur celui de la qualité des soins ;

- la coordination des soins, qu’il s’agisse des spécialisations des praticiens, de la coordination sanitaire et sociale ou de l’expérimentation des filières ;

- la promotion d’une qualité égale des soins dispensés par les hôpitaux ; l’affirmation selon laquelle il convient de fermer les petits établissements est sans fondement. Dans les grands centres hospitaliers, il existe aussi des services inutiles. Toutefois, s’il est indispensable, avant toute décision, d’être mieux informé sur l’activité réelle des hôpitaux, qu’ils soient publics ou privés, il convient d’agir rapidement car il n’est pas possible de laisser ouverts ceux qui pourraient mettre en danger la vie des gens.

Le président Jean Le Garrec s’étant demandé si il n’y avait pas tout de même un lien fort entre la recherche de l’équilibre des comptes et l’allocation optimale des ressources, M. Jean-Pierre Davant a indiqué qu’il ne convenait pas de prendre en compte seulement l’assurance maladie, dont la couverture sera assurée à hauteur de 673 milliards de francs, mais l’ensemble des dépenses de santé dont le montant dépasse 857 milliards. Or, si l’on peut tenter de maîtriser par ajustements les dépenses des premières, les problèmes de santé publique ne seront pas réglés pour autant.

M. Claude Evin, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail, a souligné qu’il était primordial que le président d’un organisme complémentaire affirme l’importance de prendre en compte les dépenses de santé à la fois obligatoires et complémentaires et a souhaité savoir où en étaient les projets de la Mutualité française en matière de filières et de réseaux.

En réponse, M. Jean-Pierre Davant a indiqué que la Mutualité a passé un accord dans une soixantaine de départements avec les médecins généralistes. Ce projet de réseau concernait la coordination des soins, l’utilisation privilégiée de médicaments génériques et l’extension du secteur 1. Cet accord est devenu caduc avec l’annulation des conventions médicales.

M. Bernard Accoyer a demandé l’avis du président de la Mutualité sur :

- d’éventuelles exceptions à la compensation par l’Etat des exonérations de cotisations ;

- le projet de couverture maladie universelle ;

- la concurrence dans le secteur de la couverture santé complémentaire ;

- le problème de l’assiette des cotisations patronales et l’idée de faire porter l’impôt sur la distribution plutôt que sur la production ;

- et l’augmentation tendancielle des dépenses de santé liée au vieillissement de la population qui induit des “ dépenses de jeunesse et de vigueur ”.

En réponse, M. Jean-Pierre Davant a apporté les précisions suivantes :

- L’Etat, dans la mesure où il s’est engagé à compenser les exonérations de cotisations, ne peut que respecter ses obligations dans un souci de bonne gestion.

- Il est clair que la Mutualité française avait préconisé une assurance maladie universelle unifiant les règles des régimes spécifiques et non un système où cohabitent des régimes spécifiques avec des transferts financiers entre eux.

- La concurrence dans le domaine de la couverture complémentaire existe, mais elle doit être impérativement régulée. L’exemple suivant ne doit pas se reproduire : un organisme bancaire de l’Est a proposé à certains de ses clients une complémentaire santé ; leur critère de sélection a été la modicité des dépenses par rapport aux cotisations payées, la banque utilisant ses fichiers pour vérifier le montant des remboursements. Une des mutuelles de l’Est s’est ainsi plainte d’avoir perdu une soixantaine de clients parmi les plus jeunes. Sans un système de régulation, la concurrence mène donc à la sélection du risque. Ceci est d’autant plus grave que la couverture complémentaire est particulièrement nécessaire en France, puisque le taux de remboursement de l’assurance maladie obligatoire, de 52 %, est le plus bas d’Europe.

- En ce qui concerne les cotisations patronales, la Mutualité est ouverte au débat et prête à faire des propositions novatrices. Il est à noter que les cotisations sont intégrées dans le prix de vente des produits : elles ne pèsent donc pas sur les employeurs. Il ne faut pas oublier ce point dans le débat actuel sur l’assiette des cotisations sociales.

- Enfin, en matière de dépenses de santé, il est vrai que la tendance est à la hausse. En fait, cette question introduit le problème majeur de l’évaluation. Par exemple, le Viagra peut être un médicament dans certains cas, alors que dans d’autres, il s’agit d’une dépense de confort. L’objectif premier doit être d’éviter des gaspillages qui s’élèvent à 100 milliards de francs, selon le directeur général de la CNAM. Ubu est encore roi dans le domaine de la santé.

ANNEXE

PROTOCOLE D’ACCORD SIGNÉ ENTRE L’ETAT ET LES PHARMACIENS D’OFFICINE

Article 1

L’Etat affirme son attachement au rôle d’acteur de santé joué par les pharmaciens d’officine dans le cadre des dispositions du code de la santé publique relatives à la dispensation du médicament.

Dans l’exercice quotidien de leur profession, les pharmaciens d’officine s’engagent à renforcer la qualité de la dispensation des médicaments, notamment :

- en développant le conseil personnalisé et le suivi auprès des patients, dans les conditions de confidentialité adéquates ;

- en favorisant le bon usage des médicaments ainsi que l’observation des traitements, en garantissant la validation des prescriptions dont ils assurent l’exécution afin de rechercher, en collaboration avec les médecins, la meilleure qualité des soins et la maîtrise de la consommation pharmaceutique.

Article 2

L’Etat s’engage à proposer au Parlement dans les meilleurs délais des dispositions simplifiant le régime des créations et transferts des officines sur le territoire et encourageant les regroupements d’officines.

Le principe d’une pharmacie par tranche entière de 2 500 habitants, majorée à 3 000 dans les communes de plus de 30 000 habitants, est retenu, sous réserve des dispositions spécifiques applicables dans les départements d’Alsace-Moselle et de la Guyane. Toute nouvelle implantation d’officine est possible tant que le ratio en résultant n’est pas atteint, une attention toute particulière étant portée à sa localisation, de manière à privilégier une desserte harmonieuse de la population. Au-delà du ratio, seuls les regroupements et les transferts peuvent être autorisés.

Article 3

L’Etat s’engage à proposer au Parlement dans les meilleurs délais des dispositions instituant le principe d’une convention entre les pharmaciens d’officine et l’assurance maladie.

La convention, opposable à tout pharmacien, organise les rapports entre la pharmacie d’officine et l’assurance maladie. Elle pourrait porter notamment sur la qualité de la dispensation pharmaceutique, le bon usage du médicament, la coordination des soins, la formation pharmaceutique continue, les conditions, en particulier économiques, du développement de la dispense d’avance des frais ainsi que la participation des pharmaciens au développement des médicaments génériques.

Article 4

L’Etat s’engage à proposer au Parlement dans les meilleurs délais des dispositions permettant aux pharmaciens de substituer un médicament à un autre au sein du même groupe générique, sauf opposition du médecin, sous réserve que cette substitution s’opère sans réel surcoût pour l’assurance maladie et lui procure une économie dans le cas de la substitution d’un médicament générique à la spécialité de référence dont il est générique.

Les modalités d’appréciation de ces conditions pourront être précisées par la convention visée à l’article 3 du présent protocole.

Article 5

Dans l’attente de la publication des dispositions législatives prévues à l’article 3 du présent protocole, et sous réserve de la finalisation des dispositions prévues à l’article 7 ci-après, les pharmaciens d’officine s’engagent dans le cadre de la convention prévue à l’article L. 161-34 du code de la sécurité sociale à participer au déploiement de SESAM-Vitale.

Article 7

L’Etat s’engage à élaborer en concertation avec la profession un nouveau mode de rémunération de la pharmacie d’officine avant la fin de l’année 1998, à coût constant pour l’assurance maladie.

Le nouveau mode de rémunération aura pour objet de valoriser l’acte pharmaceutique et d’harmoniser l’évolution des rémunérations des officines.

Il comportera des dispositions garantissant une évolution de la rémunération concernant les spécialités remboursables qui devra être compatible avec le respect de l’objectif de soins de ville. Afin d’améliorer la connaissance de l’économie de l’officine, la convention prévue à l’article 3 du présent accord organise un bilan annuel relatif à la situation économique des officines et à l’application de la convention.

Au terme de deux années d’application du nouveau mode de la rémunération, un bilan en sera dressé par les parties.

____________

N 1148.– Rapport de M.Claude Evin (au nom de la commission des affaires culturelles), sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 1106).– Tome II : assurance-maladie et accidents du travail.

1 En métropole, le régime général devrait représenter plus de 80 % des dépenses en 1998 de l’ensemble des régimes.

2 Communiqué du 15.10.98.

3 Une évolution corrigée des jours ouvrés serait, souligne la Commission des comptes de la sécurité sociale, proche de 6,5 %.

4 Pour sa part, la Commission des comptes de la sécurité sociale donne une évaluation portant sur les six régimes (CNAMTS, MSA, CANAM, SNCF, Mines et Caisse militaire) et le premier semestre de l’année qui indique une progression de 9,3 %.

5 Les DOM font l’objet d’une ligne individualisée séparément.

6 Les affections iatrogènes sont provoquées par les traitements médicaux..

7 Les infections nosocomiales sont des maladies contractées en milieu hospitalier.

8 Le carnet à souche vise à contrôler et à surveiller la prescription et l’utilisation des antalgiques.

9 Des données actualisées figurent au I du présent rapport mais les décisions du Gouvernement ont été prises sur la base de l’évolution des dépenses de janvier à avril 1998

10 En 1999 s’appliquera pour la première fois le nouveau seuil de 200 salariés, remplaçant l’ancien seuil de 250 salariés en vertu du décret n° 95-1109 du 16 octobre 1995

11 L’Institution de prévention des risques professionnels de la sécurité sociale regroupe la CNAMTS, les CRAM, l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention es accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) et son groupement européen (EUROGIP)

12 Voir C. Royere-Meyer : du droit au devoir de substitution du pharmacien, R.D.S.S. n° 34 sept. 1998

13 Directive du 22 décembre 1986. 87/21/CEE.

14 Sous la seule forme, pour ces derniers, d’incapacités temporaires