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le 5 février 2001

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N° 2910

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le1er février 2001.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE (1) SUR LA PROPOSITION DE LOI (N° 2867) DE M. ALAIN VIDALIES ET LES MEMBRES DU GROUPE SOCIALISTE ET APPARENTÉS, relative aux droits du conjoint survivant,

PAR M. ALAIN VIDALIES,

Député.

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Donations et successions.

La Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République est composée de : M. Bernard Roman, président ; M. Pierre Albertini, Mme Nicole Feidt, M. Gérard Gouzes, vice-présidents ; M. Richard Cazenave, M. André Gerin, M. Arnaud Montebourg, secrétaires ; M. Léo Andy, M. Léon Bertrand, M. Jean-Pierre Blazy, M. Émile Blessig, M. Jean-Louis Borloo, M. Jacques Brunhes, M. Michel Buillard, M. Dominique Bussereau, M. Christophe Caresche, M. Patrice Carvalho, Mme Nicole Catala, M. Jean-Yves Caullet, M. Olivier de Chazeaux, M. Pascal Clément, M. Jean Codognès, M. François Colcombet, M. François Cuillandre, M. Henri Cuq, M. Jacky Darne, M. Camille Darsières, M. Jean-Claude Decagny, M. Bernard Derosier, M. Franck Dhersin, M. Marc Dolez, M. Renaud Donnedieu de Vabres, M. René Dosière, M. Jean-Pierre Dufau, M. Renaud Dutreil, M. Jean Espilondo, M. Jacques Floch, M. Roger Franzoni, M. Pierre Frogier, M. Claude Goasguen, M. Louis Guédon, Mme Cécile Helle, M. Philippe Houillon, M. Michel Hunault, M. Henry Jean-Baptiste, M. Jérôme Lambert, Mme Christine Lazerges, Mme Claudine Ledoux, M. Jean-Antoine Léonetti, M. Bruno Le Roux, Mme Raymonde Le Texier, M. Jacques Limouzy, M. Noël Mamère, M. Thierry Mariani, M. Louis Mermaz, M. Jean-Pierre Michel, M. Ernest Moutoussamy, Mme Véronique Neiertz, M. Robert Pandraud, M. Vincent Peillon, M. Dominique Perben, M. Henri Plagnol, M. Didier Quentin, M. Jean-Pierre Soisson, M. Frantz Taittinger, M. André Thien Ah Koon, M. Jean Tiberi, M. Alain Tourret, M. André Vallini, M. Michel Vaxès, M. Alain Vidalies, M. Jean-Luc Warsmann, M. Kofi Yamgnane.

INTRODUCTION 5

I. - LE CONJOINT SURVIVANT OCCUPE, DANS LE DROIT SUCCESSORAL FRANÇAIS, UNE PLACE RÉDUITE, PEU ADAPTÉE AUX ÉVOLUTIONS DE LA SOCIÉTÉ 6

A. LES DROITS RECONNUS AU CONJOINT SURVIVANT VARIENT CONSIDÉRABLEMENT SELON LES DISPOSITIONS PRISES PAR LE COUPLE POUR ORGANISER LA TRANSMISSION DE SON PATRIMOINE 6

1. Le plus souvent, les dispositions successorales légales ne laissent au conjoint survivant que le bénéfice d'un usufruit 6

2. La loi a ouvert aux époux la possibilité d'aménager les droits du conjoint survivant 8

B. LES DROITS DU CONJOINT SURVIVANT SONT DEVENUS INADAPTÉS AUX ÉVOLUTIONS DE LA SOCIÉTÉ 10

II. - SE DÉMARQUANT DES AUTRES VOIES DE RÉFORME DÉJÀ ENVISAGÉES, LA PROPOSITION DE LOI TEND À RÉPARER L'INJUSTICE DONT SOUFFRE AUJOURD'HUI LE CONJOINT SURVIVANT 13

A. LES TRAVAUX CONDUITS SUR LA QUESTION MONTRENT LA DIVERSITÉ DES SOLUTIONS JURIDIQUES SUSCEPTIBLES D'ÊTRE RETENUES 13

B. REPOSANT SUR UNE LOGIQUE « AFFECTIVE », LA PROPOSITION DE LOI TEND À AMÉLIORER SUBSTANTIELLEMENT LES DROITS DU CONJOINT SURVIVANT 14

1. Le conjoint est placé plus favorablement dans l'ordre successoral 14

2. Le conjoint bénéficie de droits en propriété, assortis d'un droit au logement 15

3. Des garanties minimales sont données au conjoint 16

DISCUSSION GÉNÉRALE 18

EXAMEN DES ARTICLES 21

Article additionnel avant l'article premier (art. 1er du texte adopté par la Commission) : Réorganisation du chapitre III du titre 1er du livre troisième du code civil 21

Article premier (art. 2 du texte adopté par la Commission) : Droits successoraux du conjoint survivant 21

- Article 765 du code civil : Définition du conjoint survivant successible - Conditions dans lesquelles il est appelé à la succession 22

- Article 766 du code civil : Droits successoraux du conjoint survivant en présence de descendants du défunt 23

- Article 767 du code civil : Droits successoraux du conjoint survivant en présence des père et mère du défunt 25

- Article 767-1 du code civil : Droits successoraux du conjoint survivant en l'absence de descendants et des père et mère du défunt 26

- Article 767-2 du code civil : Créance d'aliments contre la succession au profit des ascendants ordinaires du défunt 27

Article 2 (art. 3 du texte adopté par la Commission) : Droit au logement 28

- Article 767-3 du code civil : Droit au logement temporaire 28

- Article 767-4 du code civil : Conditions d'attribution au conjoint d'un droit viager au logement - Modalités d'exercice de ce droit 28

- Article 767-5 du code civil : Imputation de la valeur des droits d'habitation et d`usage sur la valeur des droits en propriété recueillis par le conjoint 31

- Article 767-6 du code civil : Délai laissé au conjoint pour opter pour le droit au logement 32

- Article 767-7 du code civil : Conversion des droits d'habitation et d'usage en une rente viagère ou en un capital 32

- Article 767-8 du code civil : Attribution au conjoint du droit au bail du logement et d'un droit d'usage sur le mobilier 33

Article 3 (supprimé par le texte adopté par la Commission) : Droit au logement temporaire 33

Articles additionnels après l'article 3 :

- (art. 4 du texte adopté par la Commission) : Devoir de secours à l'égard du conjoint survivant 34

- (art. 5 du texte adopté par la Commission) : Attribution préférentielle de la propriété au conjoint survivant 34

- (art. 6 du texte adopté par la Commission) : Réserve au profit du conjoint survivant 35

- (art. 7 du texte adopté par la Commission) : Transmission du droit au bail au conjoint survivant 35

Après l'article 3 36

Article 4 (art. 8 du texte adopté par la Commission) : Coordinations 36

Articles additionnels après l'article 4 :

- (art. 9 du texte adopté par la Commission) : Suppression des discriminations successorales applicables aux enfants adultérins 37

- (art. 10 du texte adopté par la Commission) : Entrée en vigueur de la loi 38

Article 5 (art. 11 du texte adopté par la Commission) : Compensation des pertes éventuelles de recettes 38

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 39

TABLEAU COMPARATIF 45

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 67

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 69

MESDAMES, MESSIEURS,

Contrairement à une idée fréquemment répandue, lorsqu'un homme meurt et que lui survivent son frère et sa femme, celle-ci est loin de recueillir la totalité de la succession. En effet, elle n'obtient qu'un usufruit sur la moitié de celle-ci, tandis que son beau-frère recueille, pour sa part, une moitié en propriété et l'autre en nue-propriété... Et en présence d'enfants du défunt, la veuve ne peut prétendre qu'à l'usufruit sur un quart de la succession.

Certes, l'époque à laquelle le conjoint du défunt ne pouvait « guère hériter que d'un époux né enfant trouvé et mort sans descendance »(1) est révolue, le législateur ayant tenté, par retouches successives, de promouvoir les droits du conjoint. Cependant, les règles successorales légales restent encore marquées par le souci, qui prévalait il y a près de deux siècles, de donner le pas à la parenté sur le mariage et de privilégier le maintien des biens dans la famille par le sang.

Lorsqu'elle n'est pas tempérée par les libéralités qui peuvent être consenties entre époux, la rigueur des dispositions successorales légales suscite aujourd'hui un sentiment d'incompréhension dans l'opinion. Déjà frappée par la perte d'un être cher, le conjoint survivant - une femme de plus de 50 ans dans 80 % des cas en 1999 - peut ainsi se retrouver dans une situation particulièrement difficile, sans qu'il puisse même avoir l'assurance d'être maintenu dans le logement qu'il partageait avec le défunt.

Enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 17 janvier dernier, inscrite à la demande du groupe socialiste à l'ordre du jour de la séance mensuelle d'initiative parlementaire, la présente proposition de loi tend à remédier au décalage qui existe aujourd'hui entre la place qu'accorde l'opinion au conjoint survivant et celle qu'il occupe effectivement dans le droit successoral français.

I. - LE CONJOINT SURVIVANT OCCUPE, DANS LE DROIT SUCCESSORAL FRANÇAIS, UNE PLACE RÉDUITE, PEU ADAPTÉE AUX ÉVOLUTIONS DE LA SOCIÉTÉ

Les règles de dévolution successorale française restent empreintes du souci qui a présidé à leur élaboration en 1804 : il fallait alors éviter que les biens sortent de la famille et l'autonomie de la volonté devait permettre de compenser l'absence de droits successoraux du conjoint par des libéralités. Force est de constater que ces règles se révèlent aujourd'hui de moins en moins adaptées aux mutations de la société et aux aspirations de nos concitoyens.

A. LES DROITS RECONNUS AU CONJOINT SURVIVANT VARIENT CONSIDÉRABLEMENT SELON LES DISPOSITIONS PRISES PAR LE COUPLE POUR ORGANISER LA TRANSMISSION DE SON PATRIMOINE

Si le défunt n'a pris aucune disposition de son vivant pour organiser la transmission de ses biens, celle-ci se fera selon les règles de dévolution légale, qui ne permettent au conjoint que de recueillir une part réduite de la succession.

1) Le plus souvent, les dispositions successorales légales ne laissent au conjoint survivant que le bénéfice d'un usufruit

Prévus dans les articles 765 à 767 du code civil, la nature et l'étendue des droits successoraux du conjoint du défunt varient selon que d'autres membres de la famille viennent ou non à la succession :

- il a droit à un quart de la succession en usufruit lorsque le défunt laisse des enfants, naturels ou légitimes, communs ou issus d'un précédent mariage ;

- il a droit à la moitié de la succession mais toujours en usufruit lorsque viennent à la succession, non plus des enfants, mais les deux parents du défunt, les frères et s_urs ou leurs descendants, ou un seul parent et des frères et s_urs ;

- en revanche, le conjoint survivant peut recueillir la moitié de la succession en propriété si le défunt ne laisse que des ascendants dans une seule ligne, maternelle ou paternelle ;

- enfin, il recueille la totalité de la succession, si le défunt ne laisse pas de descendants, d'ascendants ou de frères et s_urs.

Contrairement aux autres ordres d'héritiers, la présence de parents placés avant le conjoint survivant dans l'ordre successoral n'a pour effet de le priver de toute vocation successorale. Mais, pour être spécifique, sa place dans l'ordre successoral n'en est pas moins réduite. En effet, s'il l'emporte sur les oncles, les tantes ou les cousins du défunt, il ne détient, en revanche, qu'une vocation successorale en usufruit dans les situations qui sont pourtant les plus fréquentes, c'est-à-dire lorsque le défunt laisse des enfants, ses père et mère ou des frères, des s_urs ou des descendants de ceux-ci. De plus, contrairement aux enfants ou aux ascendants du défunt, qui, en application des articles 913 et 914 du code civil, bénéficient impérativement d'une fraction de la succession, qualifiée de « réserve » (2), aucune disposition de ce type ne protège le conjoint du défunt, qui peut ainsi se voir privé de toute vocation successorale si le défunt, par donation ou testament, a disposé de tous ses biens.

En outre, les conditions de liquidation de l'usufruit peuvent se révéler désavantageuses pour le conjoint. En effet, aux termes de l'article 767 du code civil, le montant de l'usufruit est établi sur une masse de calcul assez large, incluant non seulement les biens existant au moment du décès, mais aussi, pour ne pas fausser l'égalité entre les successeurs, ceux que le défunt aurait donnés ou légués à l'un de ses successibles, sans les dispenser d'être rapportées à la succession (3). Toutefois, la masse des biens susceptibles d'être effectivement grevés de l'usufruit du conjoint est plus réduite : en effet, son exercice ne saurait porter atteinte ni aux libéralités consenties ni aux droits des héritiers réservataires. Si un homme laisse deux enfants et décide par testament de léguer à un tiers le restant de la succession, le conjoint ne pourra pas, dans cette hypothèse, exercer son usufruit. En outre, l'avant-dernier alinéa de l'article 767 du code civil prévoit que si le conjoint a été gratifié de libéralités par le défunt (4), il devra les déduire du montant de l'usufruit et ne pourra exiger, le cas échéant, que le complément.

Afin de tenir compte du dénuement dans lequel peut se retrouver le conjoint du défunt, l'article 207-1 du code civil ouvre d'ailleurs à celui-ci, lorsqu'il est dans le besoin, la possibilité de réclamer une pension alimentaire qui sera due par les héritiers non sur leur patrimoine mais à concurrence des biens reçus qui, seuls, peuvent être poursuivis. Cette demande doit cependant être faite dans un bref délai - l'année du décès - à moins que le partage n'ait pas eu lieu, auquel cas, c'est jusqu'à la date de celui-ci que le conjoint survivant pourra réclamer la pension alimentaire. De surcroît, cette disposition a été strictement interprétée par la jurisprudence qui a considéré que l'époux survivant ne peut réclamer des aliments que si ses besoins préexistaient à l'ouverture de la succession.

Si, dans bien des cas, les successions légales laissent au conjoint une portion congrue, il ne s'agit toutefois que de règles supplétives dont les époux peuvent, dans une certaine mesure, s'abstraire s'ils en expriment la volonté.

2) La loi a ouvert aux époux la possibilité d'aménager les droits du conjoint survivant

Les droits du conjoint survivant peuvent se trouver sensiblement accrus par les choix que les époux auront faits, de leur vivant, en matière de régime matrimonial et de libéralités.

_ Le choix du régime matrimonial modifie sensiblement les droits que recueillera une personne lors du décès de son conjoint. En effet, le contrat de mariage déterminant la propriété des biens que possèdent les époux, il apparaît ainsi que plus les biens communs sont importants, plus l'époux survivant sera protégé, puisqu'il restera propriétaire de la moitié de ces biens communs.

Ainsi le régime de la séparation de biens - dans lequel il n'existe pas de biens communs, les biens acquis pendant le mariage étant seulement en indivision entre les époux - peut se révéler extrêmement préjudiciable aux intérêts du conjoint survivant, sans compter les risques de conflit qui risquent de surgir avec les héritiers sur le point de savoir si un bien est propre ou indivis et donne, ou non, lieu à partage. Ainsi, dans l'hypothèse où le conjoint survivant ne posséderait pas ou peu de biens personnels, la totalité ou la majeure partie des biens appartenant au défunt, ceux-ci passeraient donc à la succession, sur laquelle le conjoint survivant n'aurait qu'une part fort réduite.

A l'inverse, le régime de la communauté universelle offre une protection efficace au conjoint survivant. En effet, tous les biens que possèdent les époux - biens propres ou acquis au cours du mariage, biens meubles ou immeubles - font partie de la communauté qui revient donc, pour moitié, au conjoint survivant quand bien même il n'aurait pas lui-même contribué à constituer ce patrimoine. Ce contrat de mariage peut être assorti d'une clause permettant au conjoint survivant de devenir propriétaire de l'intégralité des biens communs au survivant, et de recueillir ceux-ci sans avoir à payer de droits de succession sur la communauté tout en restant propriétaire des biens que le couple possédait. En raison des avantages que présente ce contrat de mariage, il est d'ailleurs fréquent que les époux changent de régime matrimonial pour l'adopter.

_ Outre le choix du régime matrimonial, la réalisation de libéralités par le défunt paraît de nature à modifier substantiellement la situation du conjoint qui lui survit. Les donations ou les testaments au profit du conjoint survivant permettent d'accroître la vocation successorale de celui-ci. Ainsi, est-il fréquent que les époux se consentent une donation réciproque de leurs biens, sans avoir à prévoir l'ordre de leur décès. Cette donation dite « au dernier vivant » prend donc effet au décès du premier d'entre eux en faveur de l'autre et porte sur une masse de biens déterminée par le donateur.

Les libéralités entre époux sont tout à la fois favorisées par un barème fiscal plus avantageux encore que celui applicable en ligne directe (5) et par l'aménagement d'une quotité disponible plus favorable que lorsqu'est appliqué le régime successoral légal, le législateur ayant ainsi souhaité augmenter les possibilités du disposant en faveur de son conjoint. En effet, celui-ci bénéficie d'une quotité disponible plus importante qui varie selon les héritiers réservataires avec lesquels le conjoint survivant va se trouver en concours :

- en présence de descendants (6), le conjoint peut recevoir le maximum : soit la quotité disponible de droit commun en propriété, soit un quart en propriété et les trois quarts restant en usufruit, soit la totalité en usufruit (art. 1094-1 du code civil). Le choix entre ces options incombe au disposant ou, s'il n'a pas choisi, au conjoint ;

- en présence d'enfants d'un précédent mariage du défunt, le conjoint peut bénéficier de la même quotité disponible mais, en application de l'article 1098 du code civil, « chacun des enfants du premier lit aura, en ce qui le concerne, sauf volonté contraire et non équivoque du disposant, la faculté de substituer à l'exécution de cette libéralité l'abandon de l'usufruit de la part de succession qu'il eût recueillie en l'absence de conjoint survivant » ;

- en présence d'ascendants, le conjoint peut recevoir la nue-propriété de la réserve des ascendants en plus de la quotité disponible de droit commun (la moitié ou les trois quarts), ce qui lui permet, le cas échéant, à leur décès de recueillir la totalité de la succession.

Comme le montre le tableau figurant ci-après, les libéralités susceptibles d'être effectuées au profit du conjoint survivant modifient sensiblement ses droits successoraux.

CE QUI REVIENT AUJOURD'HUI AU CONJOINT SURVIVANT

Le défunt laisse en plus de son conjoint

En l'absence de testament ou donation entre époux

Avec un testament ou une donation entre époux (1)

Des enfants légitimes, naturels ou adoptifs ou des petits-enfants (descendants)

¼ de la succession en usufruit

Il n'y a qu'un enfant : la moitié de la succession en pleine propriété ;

Il y a deux enfants : 1/3 de la succession en pleine propriété ;

Il y a trois enfants ou plus : ¼ de la succession en pleine propriété.

Quel que soit le nombre d'enfants : la totalité de l'usufruit, ou ¼ en pleine propriété et ¾ en usufruit.

Des parents ou des grands-parents du côté paternel et maternel (ascendants)

La moitié de la succession en usufruit (1)

La moitié de la succession en pleine propriété et la nue-propriété de la part des ascendants.

Des frères et s_urs ou des neveux et nièces (collatéraux privilégiés)

La moitié de la succession en usufruit (1)

La totalité de la succession.

Des parents ou des grands-parents, du côté paternel ou maternel seulement

La moitié de la succession en pleine propriété

¾ de la succession en pleine propriété et la nue-propriété de la part des ascendants.

Des oncles, tantes, cousins, cousines ou des parents plus éloignés

La totalité de la succession en pleine propriété

(1) Il en est de même s'il y a à la fois des collatéraux privilégiés et des ascendants.

Malgré les améliorations qui sont ainsi susceptibles d'être consenties aux droits du conjoint survivant, sa situation successorale se révèle aujourd'hui anachronique au regard de l'évolution de la société.

B. LES DROITS DU CONJOINT SURVIVANT SONT DEVENUS INADAPTÉS AUX ÉVOLUTIONS DE LA SOCIÉTÉ

S'agissant tout d'abord des règles de dévolution successorale, force est de constater que celles-ci peuvent sembler anachroniques : en effet, les préoccupations qui les ont inspirées se révèlent aujourd'hui moins prégnantes, en raison de la part prépondérante prise dans les patrimoines par les biens acquis durant le mariage. De même, les règles de dévolution successorale, en donnant priorité à la famille par le sang ne reflètent manifestement pas la tendance au resserrement de la cellule familiale autour de l'enfant et du couple. Comme cela a été souligné lors du 96e congrès des notaires consacré au patrimoine au XXIe siècle, le souci de protéger le conjoint est devenu primordial : il s'agit notamment de veiller à ce qu'il puisse disposer librement d'un patrimoine lui assurant une autonomie dans la gestion de sa vie de veuf et lui permettant d'assumer le coût, le cas échéant, de la dépendance physique. Dans ce contexte, l'allongement de la vie humaine et l'amenuisement des solidarités familiales militent pour une amélioration des droits consentis au conjoint survivant. Bien plus, l'âge de la mortalité ayant augmenté, les héritiers réservataires sont souvent des adultes ayant leurs propres revenus tandis qu'il arrive que le conjoint du défunt, une veuve âgée, ne dispose que de ressources très réduites.

D'autres évolutions de la société, telles que la multiplication des familles recomposées, conduisent également à s'interroger sur la nature des droits devant être consentis au conjoint survivant.

Comme le rapporteur le soulignait plus haut, celui-ci hérite dans la plupart des cas, d'un simple usufruit, s'exerçant dans les conditions prévues aux articles 578 à 624 du code civil. Cette solution présente des avantages : en effet, loin de se limiter à un simple droit d'usage ou d'habitation, le droit d'usufruit donne à son bénéficiaire « le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à charge d'en conserver la substance » (7) puisqu'il doit le rendre, à la fin de l'usufruit, au nu-propriétaire. S'il s'agit d'une maison, le conjoint survivant peut ainsi l'habiter ou la louer et percevoir des loyers ; en contrepartie, et à la différence du locataire ou du titulaire du droit d'usage et d'habitation, il doit s'acquitter de la taxe foncière et est tenu d'effectuer toutes les réparations, sauf celles qualifiées de grosses réparations, définies dans l'article 606 du code civil, qui sont à la charge du nu-propriétaire. Si l'usufruit porte sur un fonds de commerce, le conjoint survivant peut l'exploiter et, s'il s'agit de titres ou d'actions, en percevoir les dividendes.

Toutefois, la succession en usufruit présente des inconvénients économiques : le conjoint usufruitier risque d'être gêné de se voir, du jour au lendemain, obligé de gérer un patrimoine, faute de pouvoir en tirer des revenus, tandis que les nus-propriétaires voient leurs parts successorales gelées et peuvent craindre que le conjoint survivant soit tenté de tirer le plus de biens possible, sans se soucier d'en épuiser la substance. Compte tenu de ces inconvénients, le dernier alinéa de l'article 767 du code civil ouvre d'ailleurs aux héritiers - à ceux-ci seulement et tant que le partage n'est pas devenu définitif - la possibilité d'« exiger » la conversion de l'usufruit légal en une rente viagère (8) dont bénéficie le conjoint survivant, à condition d'accompagner la constitution de la rente de sûretés suffisantes et d'assurer au conjoint une rente équivalente à l'usufruit. Compte tenu des modalités de calcul de la rente, cette possibilité de conversion peut cependant se traduire par un appauvrissement des droits du conjoint survivant.

Force est de reconnaître que l'évolution de la société, avec l'allongement de l'espérance de vie et la multiplication des familles recomposées ne plaide pas en faveur d'une extension de l'usufruit. Ainsi, dans l'hypothèse où un homme meurt en laissant une épouse et des enfants d'un précédent mariage, les droits en usufruit les contraindront à entretenir des relations pérennes quand bien même ils n'auraient eu, avant le décès, aucune relation ou des relations difficiles. Et, pour peu qu'un écart d'âge relativement faible sépare l'usufruitier des enfants, il est à craindre que cette solution ne contraigne ces derniers à être nus-propriétaires à vie et que seuls leurs propres enfants puissent disposer de leur part successorale en pleine propriété.

L'anachronisme des droits consentis au conjoint survivant paraît encore plus évident au regard des législations applicables à l'étranger : dans beaucoup de pays, le conjoint survivant bénéficie d'une réserve qui peut porter sur des biens en propriété (Allemagne, Autriche, Danemark, Italie, Grèce, Portugal, et Suisse) ou en usufruit (Belgique, Espagne) ; en outre, en présence de descendants et en l'absence de libéralités, le conjoint survivant hérite le plus souvent de droits en propriété, sauf en Belgique ou en Espagne.

Le succès même des libéralités consenties entre époux atteste bien de l'insuffisance des droits du conjoint survivant dans les successions légales. Toutefois, celles-ci ne sauraient être présentées comme une panacée. En effet, à la différence des autres donations, les donations entre époux sont révocables (art. 1096 du code civil) par le donateur lui-même, sans formalités excessives, puisque même la révocation implicite est admise. De plus, l'exigence d'un acte notarié pour procéder à une donation (article 931 du code civil) peut parfois constituer un obstacle à la réalisation de libéralités entre conjoints. Enfin, on peut se demander si les libéralités ne sont pas surtout le fait des couples les plus aisés et douter qu'elles soient à même de protéger le conjoint survivant contre un décès accidentel, qui peut frapper une personne jeune, qui n'aura, de ce fait, pas forcément pris de dispositions de nature à protéger les droits de son époux.

Ces défauts rendent aujourd'hui nécessaire la réforme des droits du conjoint survivant. Tel est l'objet de la proposition de loi aujourd'hui soumise à notre examen.

II. - SE DÉMARQUANT DES AUTRES VOIES DE RÉFORME DÉJÀ ENVISAGÉES, LA PROPOSITION DE LOI TEND À RÉPARER L'INJUSTICE DONT SOUFFRE AUJOURD'HUI LE CONJOINT SURVIVANT

Si l'opportunité de la réforme des droits du conjoint survivant n'est pas douteuse, la définition de son contenu peut sembler plus difficile, tant les situations à prendre en compte sont diverses. Les travaux déjà conduits sur le sujet montrent, tout à la fois, la nécessité d'une réforme et la diversité des solutions susceptibles d'être retenues.

A. LES TRAVAUX CONDUITS SUR LA QUESTION MONTRENT LA DIVERSITÉ DES SOLUTIONS JURIDIQUES SUSCEPTIBLES D'ÊTRE RETENUES

· Deuxième volet d'une réforme d'ensemble du droit des successions, le projet de loi n° 2530 (9) présenté par M. Michel Sapin, ministre délégué à la justice dans le Gouvernement de Mme Edith Cresson, tendait à améliorer les droits du conjoint survivant.

Sans faire du conjoint un héritier réservataire ni modifier l'ordre successoral, le texte lui reconnaissait, en l'absence de tout ou partie de ses droits successoraux, la possibilité de réclamer à la succession une contribution au maintien de ses conditions d'existence et notamment de son cadre de vie. En outre, lorsque le conjoint bénéficiait de ses droits successoraux, il augmentait sa part et lui ouvrait une option entre des droits en pleine propriété et des droits en usufruit : en présence de descendants, il pouvait ainsi recueillir, selon son choix, la totalité en usufruit ou le quart en pleine propriété des biens existants au décès. Tout en maintenant la possibilité d'une conversion de l'usufruit en une rente à la demande de l'un des héritiers nus-propriétaires, le projet ouvrait également cette possibilité au conjoint survivant, la conversion ne pouvant être obtenue pour la partie de l'usufruit portant sur son cadre de vie sans son accord. En outre, il prévoyait une indexation de la rente en l'absence d'accord du conjoint et modifiait les règles relatives aux libéralités entre époux. Ces dispositions ont ensuite été reprises dans le projet de loi n° 1941 (10) présenté par M. Pierre Méhaignerie, ministre de la justice dans le gouvernement de M. Edouard Balladur, qui n'est pas non plus venu en discussion.

· S'inscrivant dans une logique différente puisqu'écartant d'emblée toute réforme d'ensemble du droit des successions pour se concentrer sur la seule question des droits du conjoint survivant, le rapport sur la rénovation du droit de la famille rendu en septembre 1999 par le groupe de travail présidé par Mme Françoise Dekeuwer-Défossez a proposé, pour sa part, de reconnaître au conjoint des droits en propriété dans la succession en concours avec les père et mère du défunt, avant ses frères et s_urs.

S'agissant de la nature des droits consentis au conjoint survivant, les auteurs du rapport se sont livrés à une analyse des avantages respectifs de la propriété et de l'usufruit, pour finalement trancher en faveur de celui-ci. Dans le dispositif proposé, le conjoint survivant recevrait l'entier usufruit des biens existant au moment du décès, lui permettant ainsi de conserver son mode de vie, mais chacun des enfants ou descendants se verrait reconnaître la faculté d'exiger sa part réservataire en pleine propriété, en contrepartie de quoi il renoncerait à ses droits dans la quotité disponible.

Enfin, ils ont proposé de consacrer le droit du conjoint survivant au maintien de son logement et de prévoir au profit du conjoint qui se trouve dans le besoin le maintien du devoir de secours entre époux à la charge de la succession.

B. REPOSANT SUR UNE LOGIQUE « AFFECTIVE », LA PROPOSITION DE LOI TEND À AMÉLIORER SUBSTANTIELLEMENT LES DROITS DU CONJOINT SURVIVANT

Sans réformer l'ensemble du droit des successions, la présente proposition de loi tend à répondre au souhait, largement répandu, de donner au conjoint survivant des droits qui reflètent la place qu'il occupait dans la vie du défunt. Elle repose sur une logique affective, dont découlent ses principales dispositions.

La proposition de loi a également été élaborée dans le souci de poser des règles simples et souples, susceptibles de permettre au conjoint survivant de mieux adapter sa part successorale à ses besoins et de s'appliquer au plus grand nombre de situations possibles, étant cependant entendu que dans les situations les plus complexes - et aussi les plus marginales - les époux pourront toujours assurer la transmission de leurs biens par voie de libéralités.

1) Le conjoint est placé plus favorablement dans l'ordre successoral

Alors que le conjoint survivant ne prime aujourd'hui que sur les oncles, tantes et cousins, la proposition de loi, passant d'une logique de sang à une logique de l'affection, lui donne une place plus favorable dans l'ordre successoral. En effet, le conjoint survivant y vient en concours avec les héritiers réservataires que sont les descendants du défunt (art. 766) ainsi que ses père et mère (art. 767) et évince désormais de la succession les frères et s_urs du défunt ainsi que ses neveux et nièces (art. 767-1).

De même, le conjoint survivant écarte-t-il désormais les grands-parents du défunt. Les ascendants ordinaires du défunt n'étant pas créanciers d'aliments du conjoint survivant, une créance d'aliments contre la succession de l'époux prédécédé est introduite pour protéger ces ascendants, lorsqu'ils sont dans le besoin (art. 767-2).

Le rapporteur considère que sa proposition de loi représente un véritable choix de société, reposant sur une appréciation de l'évolution du lien familial. On observe, en effet, que les liens entre frères et s_urs peuvent parfois se distendre compte tenu de la tendance de la population à une plus grande mobilité géographique et de la multiplication des familles recomposées, les collatéraux pouvant être issus de mariages successifs des parents du défunt. On peut d'ailleurs se demander si le droit fiscal n'a pas déjà pris la mesure de l'évolution de la société, en appliquant aux successions entre frères et s_urs une taxation plus sévère qu'à l'égard du conjoint survivant : pour un même montant de 150 000 francs, celui-ci se voit appliquer un droit de 15 %, alors que les frères et s_urs se voient taxés à hauteur de 35 %. La portée de la modification de l'ordre successoral est symbolique : elle marque la reconnaissance de la place du conjoint, mais elle est aussi à la libre appréciation de chacun, la proposition de loi n'empêchant nullement le défunt de donner ou de léguer ses biens à ses frères et s_urs, dans le respect toutefois des droits que la loi réserve à certains héritiers.

2) Le conjoint bénéficie de droits en propriété, assortis d'un droit au logement

La proposition de loi tient compte du souci légitime des personnes de disposer, au décès de leur conjoint, d'un pécule et d'un logement, ces préoccupations se reflétant d'ailleurs dans la composition des successions. En effet, d'après les informations fournies par le Conseil supérieur du notariat, les successions s'élèvent en moyenne à moins de 600 000 francs et sont composées pour 80 % du logement et 20 % d'économies. Aussi la proposition de loi donne-t-elle au conjoint survivant la possibilité de bénéficier de droits en propriété mais aussi d'un droit au logement.

Tout d'abord, elle lui octroie, quels que soient les parents laissés par le défunt, des droits en propriété, qui permettent au conjoint et aux autres héritiers de conserver leur autonomie et semblent donc mieux adaptés à la réalité des familles et des successions qui sont ouvertes aujourd'hui. Le montant des droits recueillis par le conjoint variera selon les membres de la famille venant à la succession : ils seront ainsi de l'ordre d'un quart en présence d'enfants, d'un demi si le défunt laisse ses père et mère, et de trois quarts s'il ne laisse que l'un d'entre eux.

Par ailleurs, répondant au souci, largement exprimé par les conjoints survivants et relayé par la favec, de demeurer dans la résidence conjugale, la proposition de loi donne à l'époux du défunt, s'il le souhaite, et sauf volonté contraire exprimée par le défunt dans un testament par acte public, un droit viager au logement assorti d'un droit d'usage sur le mobilier le garnissant (art. 767-4), qui s'impute sur les droits en propriété qu'il aura recueillis dans la succession mais qui, s'ils les excédent, ne contraignent pas le conjoint bénéficiaire à récompenser la succession (art. 767-5).

Afin de conférer le maximum de souplesse au dispositif, tout en préservant les droits du conjoint, celui-ci disposera d'un an pour manifester sa volonté d'exercer ces droits d'usage et d'habitation (art. 767-6), qui pourront ultérieurement, d'un commun accord entre le conjoint et les autres héritiers, être convertis en une rente viagère ou en un capital (art. 767-7). Dans l'hypothèse où le logement serait loué, le conjoint survivant se verra attribuer un droit d'usage sur le mobilier garnissant le logement (art. 767-8), les conditions dans lesquels le conjoint peut se voir transféré le bail étant, par ailleurs, facilitées (art. 7 du texte adopté par la Commission).

En outre, le conjoint survivant bénéficie, nonobstant toute disposition testamentaire contraire, de la jouissance gratuite, pendant une année, du logement occupé à titre d'habitation principale à l'époque du décès, les loyers étant remboursés sur la succession si le logement en question fait l'objet d'un bail à loyer (art. 767-3). Il s'agit ainsi de permettre au conjoint survivant de disposer de temps pour s'organiser afin qu'à la douleur du deuil ne s'ajoute pas celle de devoir quitter rapidement la résidence conjugale.

3) Des garanties minimales sont données au conjoint

Revendication fréquemment exprimée, l'octroi d'un droit de réserve au conjoint survivant soulève de délicates questions de principe, dès lors que l'on se place dans la logique de l'affection qui sous-tend la présente proposition de loi. En effet, il est difficilement concevable de vouloir protéger le conjoint contre la volonté du défunt si celui-ci entend le déshériter - puisque tel est le sens de la réserve - alors que la proposition de loi, en plaçant plus favorablement le conjoint survivant dans l'ordre successoral, tend à faire primer les liens affectifs sur ceux du sang. Certes, les enfants et les parents du défunt bénéficient de ce droit de réserve. Mais il faut bien admettre, même avec une certaine brutalité, que l'on ne choisit pas ses parents et que l'on ne change pas d'enfants. Tel n'est pas le cas du conjoint...

Sur un plan pratique, faire du conjoint un héritier réservataire n'irait pas non plus sans soulever des difficultés : le droit réservataire s'acquérant par le seul effet du mariage, faudrait-il désormais le prendre en compte dans le calcul de la prestation compensatoire, à laquelle peut avoir droit le conjoint en cas de divorce ? En outre, créer une réserve au profit du conjoint survivant, qui viendrait s'ajouter à celles qui existent d'ores et déjà au profit des enfants, limiterait singulièrement la liberté testamentaire du défunt. Cette solution ne serait, de surcroît, pas conforme à la logique des droits de réserve dévolus aux enfants et aux ascendants, qui ne peuvent entrer en concurrence puisqu'ils sont héritiers successifs.

En revanche, il n'est pas illogique, dès lors qu'il devient héritier de premier rang, c'est à dire en l'absence de descendants et de père et mère, que le conjoint survivant puisse, à son tour, avoir l'assurance de disposer d'une fraction de la succession. Le texte adopté par la Commission introduit donc dans le code civil un article 914-1 précisant que les libéralités consenties par le défunt qui, en l'absence de descendant et d'ascendant, laisserait un conjoint survivant, ne peuvent excéder les trois quarts des biens du disposant.

Dans le même souci de protéger le conjoint survivant, la rédaction de l'article 207-1 du code civil est modifiée afin de renforcer le devoir de secours qui peut être mis à la charge de la succession lorsque le conjoint survivant voit ses conditions de vie gravement amoindries par le décès de son conjoint.

Au total, et comme le montre le tableau figurant ci-après, la proposition de loi améliore nettement les droits du conjoint survivant et met fin à un statut successoral qui relève aujourd'hui de principes d'un autre âge.

IMPACT DES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI
SUR LES DROITS DU CONJOINT SURVIVANT

 

AUJOURD'HUI

PROPOSITION DE LOI

En présence de descendants

¼ en usufruit

¼ en pleine propriété / droit au logement(1)

En présence des père et mère du défunt

½ en usufruit

½ en pleine propriété / droit au logement(1)

En présence de l'un des deux parents

½ en usufruit

¾ en pleine propriété / droit au logement(1)

En présence de frères et s_urs

½ en usufruit

Toute la succession

En présence d'ascendant ordinaire

½ en usufruit

Toute la succession

En présence d'oncles, tantes, cousins

Toute la succession

Toute la succession

(1) En application de l'article 767-5 du code civil, tel qu'il résulte de la proposition de loi, la valeur des droits d'habitation et d'usage s'impute sur les droits en propriété recueillis par le conjoint. Si ceux-ci sont supérieurs aux droits d'habitation et d'usage, il peut prendre le complément ; dans l'hypothèse inverse, il n'est pas tenu de récompenser la succession.

Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, a indiqué que la Délégation partageait le point de vue exprimé par M. Alain Vidalies sur un texte qu'elle a jugé simple et équitable. Observant que seuls les couples aisés étaient suffisamment informés sur ces sujets et organisaient leur succession en conséquence, elle a souhaité qu'une information sur les droits du conjoint survivant soit délivrée au moment du mariage, par un document annexé au livret de famille. Elle a ajouté que la Délégation recommandait que l'article 767-5 du code civil prévoit que les droits d'habitation et d'usage reconnus au conjoint survivant ne peuvent être convertis en rente viagère ou en capital que d'un commun accord entre ce conjoint et les héritiers. Elle a, également, émis le v_u que la durée de jouissance gratuite du logement et du mobilier reconnue au conjoint survivant soit portée de douze à dix-huit mois. Elle a conclu en souhaitant que la proposition de loi soit mise en application dès sa promulgation, puisqu'elle répond à une véritable attente de nos concitoyens.

Rappelant que cette question était débattue depuis de longues années, Mme Christine Lazerges a considéré que la situation du conjoint survivant devait être améliorée dans le sens d'une plus grande équité. Elle s'est déclarée en accord avec la recommandation de la Délégation tendant à insérer dans le livret de famille des informations sur les successions, mais a souhaité qu'elles portent également sur les règles relatives à l'autorité parentale. Constatant qu'il existe des situations familiales et patrimoniales diverses, elle a, cependant, rappelé que le patrimoine moyen des couples était constitué d'un logement d'une valeur de 600 000 F et d'un livret d'épargne s'élevant de 30 000 à 50 000 F et précisé que la proposition de loi visait surtout à régler la situation des veuves ou des veufs se trouvant dans ce type de situation et non le cas des grandes fortunes. Dans cette perspective, elle a insisté sur la nécessité d'assurer au conjoint survivant le maintien dans le logement pendant une durée d'un an, le droit d'habitation et d'usage étant préférable à l'usufruit, parce qu'il impose moins de charges à son titulaire. Elle a ajouté que la proposition prévoyait également que le conjoint survivant puisse bénéficier d'un quart du patrimoine en pleine propriété, lorsque ce patrimoine est suffisant. Estimant que ces solutions répondaient de manière simple, équilibrée et équitable à la diversité des situations, elle a conclu qu'elles étaient de nature à limiter le développement du contentieux et des conflits entre les enfants et les conjoints survivants.

Observant, elle aussi, que le débat n'était pas nouveau, Mme Nicole Catala a regretté que la proposition de loi ne reprenne qu'une partie seulement des propositions élaborées depuis une quinzaine d'années en matière de droit des successions. Elle a rappelé que, sous l'égide de M. Jean Carbonnier, une commission de travail avait été constituée auprès du garde des Sceaux, pour traiter de manière globale ces questions, le problème du conjoint survivant n'étant pas alors au centre du débat. Elle a donc déploré que l'on traite isolément du cas des veuves et des veufs, au détriment d'une réflexion d'ensemble sur le droit des successions, privilégiant ainsi une vision beaucoup trop partielle de cette problématique, écueil que le projet de loi déposé en 1995 par le Gouvernement de M. Edouard Balladur avait su éviter. Elle a constaté, notamment, que la proposition de loi ne réglait nullement la situation de l'enfant adultérin, alors même que des juridictions ont récemment écarté l'application d'articles du code civil établissant une discrimination à leur encontre en vertu de la Convention européenne des droits de l'homme.

Observant que la proposition de loi présentée par le groupe socialiste semblait s'inspirer essentiellement des travaux menés par la profession notariale, elle a regretté que les conclusions de la commission de travail présidée par M. Jean Carbonnier n'aient pas fait l'objet d'une plus grande attention. Elle s'est, en outre, inquiétée que la proposition examinée aujourd'hui ne reprenne même pas les conclusions des notaires concernant l'aide alimentaire que les héritiers devraient verser aux ascendants dans le besoin, autres que le père et la mère. Par ailleurs, elle a constaté que le conjoint survivant n'était pas assuré de bénéficier des droits sur le logement et le mobilier le garnissant dès lors que, en cas de dégradation des rapports entre les époux avant le décès, le survivant pouvait en être privé par le testament du défunt. Enfin, elle a jugé que, sans créer de réserve au profit du veuf ou de la veuve, il serait nécessaire de reconnaître un droit sur le logement et sur le mobilier, si ce conjoint survivant se révèle être dans le besoin et regretté que la proposition n'aborde pas la question du droit à pension pour ce conjoint, alors que les travaux de la commission de travail de M. Jean Carbonnier le prévoyaient.

Considérant qu'il était normal que le Parlement fasse preuve d'initiative quand une réforme envisagée depuis trente ans n'avait pu encore être menée à bien, M. Emile Blessig a insisté sur la difficulté d'apporter une réponse universelle à une situation éminemment complexe et variée, et souhaité, en conséquence, que l'on confère à la législation une certaine souplesse. Evoquant le cas du conjoint survivant se trouvant dans le besoin, il a observé que l'article 207-1 du code civil, qui prévoit une pension alimentaire en sa faveur, avait été rendu inopérant par la jurisprudence, qui impose que les difficultés de subsistance du conjoint existent avant le décès de son époux pour emporter une obligation alimentaire. Enfin, il a proposé, en l'absence d'enfant commun, que les droits du conjoint survivant ne s'appliquent que si le mariage a eu une certaine durée, évoquant, à cet égard, des expériences menées à l'étranger.

Saluant une approche pragmatique sur un sujet d'une extrême difficulté, M. Gérard Gouzes a appelé l'attention des membres de la Commission sur le risque de créer des injustices si une règle trop rigide était fixée, qui s'applique à une variété de situations familiales. Observant que, face à une législation imparfaite, les couples avaient su ménager leurs intérêts en transformant souvent, en fin de vie, leur régime matrimonial en communauté universelle, il a constaté que la proposition de loi permettrait de résoudre de nombreuses difficultés en apportant des garanties au conjoint survivant, sans pour autant l'ériger en héritier réservataire. Surpris par les critiques de Mme Nicole Catala à l'encontre de ce texte, il a estimé, à l'inverse, qu'il contenait des avancées réelles, rappelant, par ailleurs, que l'obligation alimentaire due aux ascendants existait dans le code civil. Evoquant enfin la question des enfants adultérins, il a souhaité qu'elle soit abordée lors du débat en séance publique.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a tout d'abord fait état d'un amendement présenté par Mme Christine Lazerges, clarifiant la rédaction des dispositions relatives à la conversion des droits d'habitation et d'usage en une rente viagère ou en un capital, afin de préciser qu'elle ne peut résulter que d'un commun accord entre le conjoint bénéficiaire et les autres héritiers. Constatant que les juridictions tiraient déjà les conséquences de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme, le 1er février 2000, il a jugé indispensable de supprimer dans le code civil toutes les dispositions établissant des discriminations en matière successorale au détriment des enfants adultérins et indiqué qu'il présenterait un amendement en ce sens. Puis il a précisé qu'il proposerait également un amendement pour ouvrir aux ascendants ordinaires du défunt une créance d'aliments contre la succession de l'époux décédé, afin de compenser la suppression de leurs droits successoraux en présence d'un conjoint survivant, qui n'est, au demeurant, tenu à aucune obligation alimentaire à leur égard.

Exprimant des réserves sur la possibilité de porter à dix-huit mois la durée pendant laquelle le conjoint survivant pourrait avoir la jouissance gratuite du logement qu'il occupe au moment du décès, il a, en revanche, approuvé les observations de la Délégation relatives à la nécessité d'améliorer l'information des couples sur la situation du conjoint survivant en cas de décès de l'un des époux. Puis, écartant l'adoption d'un dispositif qui garantirait au conjoint survivant le maintien de ses conditions de vie, il a, cependant, jugé souhaitable de lui permettre, en cas de besoin, de réclamer des aliments à la succession, les dispositions de l'article 207-1 du code civil semblant, à cet égard, insuffisantes, compte tenu de la lecture restrictive qu'en fait la jurisprudence.

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EXAMEN DES ARTICLES

La proposition de loi initiale était constituée de cinq articles : les trois premiers modifiaient la rédaction de la section VII du chapitre III du titre premier du livre troisième du code civil, consacrée aux droits du conjoint survivant ; les deux articles suivants prévoyaient respectivement des coordinations dans le code civil et une compensation des pertes de recettes publiques susceptibles d'être engendrées par la proposition de loi.

Au terme de son examen par la Commission, cette proposition de loi comporte six articles supplémentaires.

Article additionnel avant l'article premier

(art. 1er du texte adopté par la Commission)


Réorganisation du chapitre III du titre 1er du livre troisième
du code civil

Afin de tenir compte des nouveaux droits reconnus au conjoint survivant, la Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à introduire un article additionnel (art. 1er du texte adopté par la Commission), procédant à diverses modifications dans l'organisation du chapitre III du titre 1er du livre troisième du code civil, consacré aux divers ordres de succession.

Article premier

(art. 2 du texte adopté par la Commission)


Droits successoraux du conjoint survivant

La section VII du chapitre III du titre premier du livre troisième du code civil est actuellement composée de trois articles, les articles 765 à 767, qui précisent les droits successoraux dont bénéficie le conjoint du défunt lorsque celui-ci n'a pris, de son vivant, aucune disposition particulière à son égard.

Ces dispositions du code civil prévoient, tout d'abord, les conditions générales que doit remplir le conjoint pour avoir une vocation héréditaire : il doit être survivant, ne pas être divorcé et ne pas avoir fait l'objet d'un jugement de séparation de corps passée en force de chose jugée (cf. art. 765). En outre, elles précisent la nature et la quotité des droits successoraux du conjoint survivant, qui dépendent de la présence ou non d'autres membres de la famille appelés à la succession (art. 765, 766 et 1er à 3e al. de l'art. 767), les modalités de calcul et d'exercice de l'usufruit dont peut bénéficier le conjoint survivant (4e à 6e al. de l'art. 767) ainsi que les conditions dans lesquelles il peut être converti en une rente viagère (dernier al. de l'art. 767).

L'article 1er de la proposition de loi initiale donne une nouvelle rédaction à cette section du code civil : il en modifie l'intitulé, pour préciser qu'elle concerne les droits du conjoint « successible » et non plus « survivant », afin de marquer explicitement la revalorisation du conjoint dans l'ordre successoral, et y introduit un premier paragraphe, consacré à la nature des droits du conjoint successible et à leur montant et dont les dispositions se substituent aux articles 765 à 767 du code civil actuellement en vigueur.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur, tendant à modifier la numérotation de la section visée dans cet article par coordination avec les modifications apportées dans l'architecture du chapitre III du
titre 1er du livre troisième du code civil.

Article 765 du code civil

Définition du conjoint survivant successible - Conditions dans
lesquelles il est appelé à la succession

En même temps qu'ils précisent l'étendue des droits auxquels peut prétendre le conjoint survivant, compte tenu des autres parents appelés à la succession, les articles 765, 766 et 767 du code civil rappellent les conditions générales que doit remplir le conjoint du défunt pour avoir une vocation successorale.

Le présent article donne, dans son premier alinéa, une définition du conjoint successible reprenant ces différentes conditions :

-  Le conjoint successible doit, tout d'abord, être survivant, ce qui signifie que ses propres enfants, naturels ou issus d'un précédent mariage, ne sauraient le représenter à la succession ;

-  En outre, le défunt et le conjoint survivant ne doivent, par définition, pas être divorcés ;

-  Enfin, il ne doit pas exister contre le conjoint survivant de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée. En effet, la séparation de corps n'entraînant pas la dissolution du mariage mais mettant seulement fin au devoir de cohabitation des conjoints, un époux séparé de corps conserve donc « les droits que la loi accorde au conjoint survivant », sauf si la séparation de corps est prononcée contre lui (art. 301 du code civil). Est donc privé de sa vocation successorale le conjoint aux torts exclusifs duquel le jugement de séparation de corps est intervenu ou qui a demandé la séparation de corps en raison de la rupture de la vie commune. En revanche, le conjoint survivant conserve sa vocation successorale lorsque la séparation de corps est prononcée par consentement mutuel, aux torts partagés ou aux torts exclusifs du défunt, ou lorsque le défunt a été demandeur d'une séparation de corps pour rupture de la vie commune. On relèvera que lorsque la séparation de corps est prononcée sur demande conjointe, les époux peuvent inclure dans leur convention une renonciation aux droits successoraux auxquels aurait normalement droit le conjoint survivant.

Le deuxième alinéa de l'article 765 du code civil précise que le conjoint successible est appelé à la succession soit seul (cf. art. 767-1), soit en concours avec les parents du défunt que sont ses descendants (cf. art. 766) ou ses père et mère (cf. art. 767).

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Jean-Pierre Michel tendant à étendre aux partenaires d'un pacte civil de solidarité les droits nouveaux reconnus au conjoint survivant. Le rapporteur a estimé que cet amendement était prématuré, cette question n'ayant pas été réglée dans la proposition de loi instituant le PACS et le bilan de ce nouveau dispositif n'ayant pas encore été établi. Il a, cependant, considéré qu'il s'inscrivait dans la logique du nouveau dispositif, qui fait primer les liens affectifs sur les liens du sang, tout en marquant sa préférence pour un dispositif qui tiendrait compte des particularités du PACS. M. Bernard Roman, président, a rappelé que deux rapporteurs d'information désignés par la commission des Lois et la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales travaillaient à établir un premier bilan du PACS et jugé qu'il serait donc préférable d'attendre leurs conclusions pour traiter du problème soulevé par le présent amendement que la Commission a rejeté.

Article 766 du code civil

Droits successoraux du conjoint survivant en présence
de descendants du défunt

Les descendants du défunt excluant tous les autres héritiers, le conjoint survivant dispose aujourd'hui, en leur présence et lorsque le défunt n'a pris aucune disposition relative à l'organisation de sa succession, de droits successoraux réduits.

En effet, dès lors que, conformément au deuxième alinéa de l'article 767 du code civil, « le défunt laisse un ou plusieurs enfants soit légitimes, issus ou non du mariage, soit naturels », le conjoint survivant ne succède pas en propriété et ne dispose que d'un droit en usufruit sur le quart de la succession. Cette quotité est ainsi fixée quel que soit le nombre d'enfants, qu'il s'agisse d'enfants communs du défunt et du conjoint survivant ou d'enfants provenant d'un précédent mariage du défunt, qu'ils aient été légitimés par mariage subséquent ou par autorité de justice, qu'il s'agisse d'enfants adoptés ou naturels. Les droits du conjoint ne sont guère différents lorsqu'un enfant du défunt est prédécédé, les descendants de celui-ci venant à la succession par représentation.

En outre, les biens qui sont frappés du droit de réserve dont bénéficient obligatoirement les enfants du défunt et qui, selon leur nombre, peuvent représenter de 50 à 75 % de la succession (art. 913 du code civil), sont protégés : en effet, le conjoint survivant ne peut exercer son droit d'usufruit sur ces biens de la succession (art. 767, 5e al. du code civil).

Afin de revaloriser les droits consentis au conjoint survivant en présence de descendants du défunt, l'article 766 du code civil, tel qu'il résulte de la proposition de loi initiale, octroie désormais au conjoint des droits en propriété sur le quart de la succession « lorsque le défunt laisse des enfants ou des descendants », sans établir de distinction selon que les enfants sont légitimes ou naturels, issus ou non du mariage du défunt et de son conjoint survivant.

Les droits ainsi consentis correspondent au montant minimum de la quotité disponible, applicable dès lors que le défunt laisse trois enfants ou plus. On rappellera, d'ailleurs que, les projets de loi, présentés par M. Michel Sapin, puis M. Pierre Méhaignerie, modifiant le code civil et relatif aux successions, laissaient au conjoint survivant le choix de recueillir un usufruit portant sur la totalité des biens existant au décès ou la propriété sur ces mêmes biens dans une proportion identique à celle proposée ici.

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Emile Blessig visant à mettre en place un régime successoral du conjoint survivant différencié pour les familles composées d'enfants communs aux deux conjoints et d'enfants non issus du mariage. Son auteur a indiqué qu'il souhaitait prendre en compte la diversité des situations familiales en écartant l'usufruit lorsque le défunt ne laisse que des enfants qui ne sont pas issus du mariage, tandis que le conjoint survivant pourrait, dans les autres cas, exercer au contraire, un droit d'option entre l'usufruit sur la totalité et la pleine propriété sur le quart des biens existants formant la quotité disponible, assortie de la réserve des enfants communs. Le rapporteur ayant estimé que le système proposé par cet amendement était trop complexe, qu'il ne permettait pas véritablement de couvrir toutes les situations familiales existantes et risquait d'accroître les recours au juge, la Commission l'a rejeté.

Article 767 du code civil

Droits successoraux du conjoint survivant en présence
des père et mère du défunt

En l'absence de descendants, sont aujourd'hui appelés à la succession les père et mère du défunt - dits ascendants privilégiés - ainsi que ses frères et s_urs et leurs descendants - dits collatéraux privilégiés :

-  si le défunt ne laisse ni père et mère, mais ses frères et s_urs ou leurs descendants, ceux-ci se partagent la succession, le conjoint survivant ne disposant, dans cette hypothèse, que d'un usufruit de moitié, conformément au 3e alinéa de l'article 767 du code civil ;

-  si le défunt laisse ses père et mère, la succession est partagée entre ceux-ci et les frères et s_urs du défunt ainsi que leurs descendants (11) ; là encore, le conjoint ne recueille qu'un usufruit de moitié qui, compte tenu du droit de réserve dont bénéficient les père et mère du défunt ne s'exerce que sur les biens des frères et s_urs ;

-  si le défunt ne laisse que ses père et mère, ceux-ci se partagent la succession et le conjoint ne recueille encore qu'un droit d'usufruit sur la moitié.

De surcroît, la présence d'ascendants dits ordinaires - grands-parents et arrière-grands-parents - peut également empêcher le conjoint de recueillir des droits en propriété dans la succession. En effet, si le défunt laisse des ascendants dans ses lignes maternelle et paternelle, ceux-ci se partagent la succession par moitié, conformément au mécanisme de la fente, en vertu duquel toute succession échue à des ascendants ou à des collatéraux se divise en deux parts égales : l'une pour les parents de la ligne paternelle, l'autre pour les parents de la ligne maternelle (art. 733 du code civil). Le conjoint ne dispose toujours que d'un droit d'usufruit sur la moitié de la succession.

En revanche, lorsque le défunt ne laisse d'ascendant que dans une ligne, le conjoint recueille en propriété la part de la ligne non représentée dans la succession et dispose alors de la moitié de la succession. Il faut souligner que, dans cette dernière hypothèse, il ne peut prétendre, en plus, à l'usufruit de la moitié sur les autres biens de la succession, le bénéfice de l'usufruit étant, en effet, conditionné au fait que le conjoint ne succède pas en pleine propriété.

L'article 767, tel qu'il résulte de la proposition de loi, prévoit que, si le défunt, à défaut de descendants, laisse ses père et mère, chacun d'entre eux recueille un quart de la succession, l'autre moitié revenant au conjoint survivant qui peut, en outre, si le père ou la mère du défunt est prédécédé, recueillir le quart qui devait revenir à ce parent.

Ces dispositions modifient radicalement les règles de dévolution successorale :

-  Le conjoint survivant voit ses droits confortés : en effet, il recueillera désormais, en présence des père et mère du défunt, des droits en pleine propriété et non un simple usufruit.

-  S'agissant des droits des père et mère du défunt, alors que ceux-ci se partageaient l'intégralité de la succession, dès lors que le défunt laissait un conjoint mais des frères et s_urs ou des descendants de ceux-ci, ils ne recueilleront désormais, en présence du conjoint du défunt, que la moitié de la succession.

-  En ce qui concerne les frères et s_urs du défunt, ainsi que leurs descendants, les droits auxquels ils pouvaient prétendre - la moitié de la succession si le défunt laissait père et mère, les trois quarts si l'un d'entre eux deux était prédécédé - reviendront désormais au conjoint du défunt.

-  De même, les ascendants ordinaires, qui pouvaient recueillir des droits en lieu et place des père et mère lorsque le défunt, bien que marié, ne laissait ni frère, s_ur ou leurs descendants, se trouvent évincés de la succession.

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Emile Blessig visant à attribuer au parent survivant du défunt la part qui serait échue à l'autre parent prédécédé. Le rapporteur ayant indiqué que la proposition de loi visait à améliorer le sort du conjoint survivant et non celui du parent survivant, il a jugé qu'il était contraire à l'esprit du texte. La Commission a rejeté cet amendement.

Article 767-1 du code civil

Droits successoraux du conjoint survivant en l'absence de descendants
et des père et mère du défunt

En application des règles successorales actuelles, les biens du défunt qui laisse un conjoint, mais ni descendants, ni père et mère sont recueillis, soit par ses frères et s_urs et leurs descendants, soit, en leur absence, par ses ascendants ordinaires. Dans ces deux hypothèses, le conjoint ne bénéficie que d'un droit d'usufruit sur la moitié de la succession, à moins qu'une des lignes ascendantes soit défaillante, auquel cas il recueille la moitié de la succession en propriété.

En tout état de cause, le conjoint survivant ne peut recueillir la totalité de la succession que dans les hypothèses prévues dans l'actuel article 765 du code civil, c'est-à-dire lorsque le défunt ne laisse pas de parenté au degré successible (12) ou s'il meurt sans descendants, ni ascendants, ni frères, s_urs ou descendants de ceux-ci. Seuls les collatéraux dits « ordinaires », que sont les oncles, tantes, cousins... sont donc aujourd'hui évincés de la succession par la présence du conjoint survivant.

L'article 767-1, introduit dans le code civil par la présente proposition de loi, prévoit que le conjoint du défunt recueillera désormais toute la succession en propriété, dès lors que le défunt ne laisse pas d'enfants, ni de descendants, ni ses père et mère. Il évincera donc de facto de la succession non seulement les frères et s_urs du défunt ainsi que leurs descendants, mais également les ascendants ordinaires du défunt.

Au total, il se retrouve donc dans le premier ordre des héritiers, en concours avec les descendants et les père et mère du défunt. A l'inverse, les collatéraux privilégiés, qui constituaient jusqu'à présent le deuxième ordre des héritiers avec les ascendants privilégiés, ne viendront plus à la succession du défunt que si celui-ci, en l'absence de toute libéralité consentie en leur faveur, ne laisse ni descendants, ni père et mère, ni conjoint.

Article 767-2 du code civil

Créance d'aliments contre la succession
au profit des ascendants ordinaires du défunt

La Commission a adopté un amendement du rapporteur instituant une créance d'aliments contre la succession de l'époux prédécédé au bénéfice des ascendants du défunt autres que ses père et mère, qui se trouveraient désormais exclus de la succession.

La Commission a ensuite adopté l'article 1er ainsi modifié (art. 2 du texte adopté par la Commission).

Article 2

(art. 3 du texte adopté par la Commission)


Droit au logement

Afin de répondre à la demande fréquemment exprimée par les veufs de pouvoir demeurer dans la résidence conjugale, l'article 2 de la proposition de loi initiale introduisait quatre articles dans le code civil (art. 762 à 767-6), rassemblés dans un paragraphe intitulé « du droit au logement et du mobilier le garnissant ». Compte tenu des amendements adoptés par la Commission, ce paragraphe comporte désormais six articles, numérotés 767-3 à 767-8.

Article 767-3 du code civil

Droit au logement temporaire

La Commission a été saisie de deux amendements, l'un de Mme Christine Lazerges, tendant à garantir un droit au logement d'une année pour tous les conjoints survivants, l'autre de M. André Gerin relatif au transfert au conjoint survivant du bail à loyer de l'habitation et prévoyant, sur décision du juge, une contribution de la succession au loyer et aux charges. Mme Christine Lazerges a indiqué que son amendement tendait à introduire un article 767-3 dans le code civil reprenant, sous réserve de certaines modifications rédactionnelles, l'article 3 de la proposition de loi initiale, afin d'étendre à tous les conjoints survivants le droit au logement temporaire qui, dans le dispositif initialement prévu, ne pouvait bénéficier qu'au conjoint survivant privé, par voie testamentaire, du droit au logement viager. Le rapporteur ayant déclaré qu'il était favorable à cet amendement, la Commission l'a adopté avant de rejeter, en conséquence, celui de M. André Gerin.

Article 767-4 du code civil

Conditions d'attribution au conjoint d'un droit viager au
logement - Modalités d'exercice de ce droit

Cet article soumet à plusieurs conditions l'exercice par le conjoint survivant d'un droit d'habitation sur le logement qu'il occupait effectivement au moment du décès.

-  Tout d'abord, le défunt ne doit pas avoir exprimé de volonté contraire dans un testament par acte public reçu par deux notaires ou par un notaire assisté de deux témoins, cette disposition devant permettre de faire primer la logique de « l'affection », dans laquelle s'inscrit la proposition de loi, tout en protégeant le conjoint survivant de la rédaction d'un testament olographe qui, rédigé sans aucun formalisme, ne pourrait être que le reflet d'éventuels mouvements d'humeur du défunt.

-  En outre, le droit d'habitation consenti au conjoint survivant s'exerce sur le logement que celui-ci occupait « effectivement, à l'époque du décès, à titre de résidence principale ». On relèvera qu'aucune condition n'est posée quant à la résidence commune des époux, ce qui est logique dès lors que le conjoint survivant peut bénéficier de ce droit quant bien même il serait séparé du défunt sans être divorcé (cf. art. 765).

-  Enfin, le logement doit « appartenir aux deux époux ou dépendre totalement de la succession » : il s'agit ainsi d'assurer au veuf la possibilité de continuer à résider dans le logement, alors même qu'il ne lui appartient qu'en partie - par exemple lorsqu'il faisait partie de la communauté matrimoniale et que la moitié dévolue au défunt est désormais dans la succession - ou qu'il ne lui appartenait pas, soit qu'il fût la seule propriété du défunt, soit qu'il dépendît d'une société appartenant à ce dernier.

Un droit d'usage sur le mobilier (13) garnissant le logement assortit le droit d'habitation reconnu au conjoint survivant.

Le présent article confère un caractère viager aux droits d'habitation et d'usage ainsi consentis au conjoint survivant ; il les détiendra donc jusqu'à son décès, à moins qu'il n'ait choisi de les convertir en une rente viagère ou capital (cf. art. 767-5) mais ils seront intransmissibles à ses héritiers.

Le présent article précise, en outre, que ces droits sont « de plein droit opposables aux tiers » : il s'agit ainsi d'éviter que les autres héritiers qui auraient par exemple, la propriété de la maison, ne puissent la vendre et que les nouveaux propriétaires ne puissent ensuite mettre fin au droit d'habitation dont bénéficie le conjoint survivant. En effet, en l'absence de publication, les droits concédés sont souvent inopposables aux tiers : dans un arrêt du 23 juin 1981, la Cour de cassation a ainsi considéré qu'une convention établissant un droit d'usage et d'habitation conférait au bénéficiaire un droit réel immobilier qui, s'il n'a été ni publié ni mentionné dans l'acte de vente de l'immeuble, était inopposable aux acquéreurs.

S'agissant des modalités d'exercice des droits d'habitation et d'usage ainsi conférés au conjoint survivant, on relèvera qu'ils sont d'une portée plus limitée que l'usufruit : le conjoint qui bénéficie d'un droit d'habitation sur un logement est tenu d'y habiter et ne saurait le louer pour percevoir des loyers ; en revanche, contrairement à l'usufruitier (14), il n'aura pas à payer la taxe foncière.

L'article 767-2 ne soumet les droits d'habitation et d'usage reconnu au conjoint survivant qu'à certaines des dispositions du chapitre II du
titre III du livre deuxième du code civil, relatives à l'usage et l'habitation.

On observera, notamment, que les dispositions liées à l'origine conventionnelle de ces droits ainsi que l'article 626 du code civil, qui interdit de jouir de ces droits sans donner caution et faire des états et inventaires, ne sont pas applicables. En revanche, le conjoint survivant devra jouir « en bon père de famille » des droits qui lui sont ainsi conférés (art. 627), ce qui l'obligera à entretenir les biens grevés de ces droits. Ceux-ci ne pourront être ni cédés, ni loués (art. 631 et 634), tandis que le conjoint pourra demeurer dans la résidence avec sa famille « quand même il n'aurait pas été marié à l'époque où ce droit lui a été donnée » (art. 632). Enfin, s'agissant des obligations du conjoint survivant, l'article 767-2 renvoie à l'application de l'article 635 du code civil, qui précise la répartition des charges selon que l'usager utilise ou non la totalité de la maison. Dans l'hypothèse où il occupe la totalité de la maison, il sera assujetti aux réparations d'entretien et au paiement des contributions comme l'usufruitier, les grosses réparations incombant au propriétaire. Si l'usager les effectue lui-même, il pourra, lorsqu'il sera mis un terme au droit d'usage et d'habitation, réclamer au propriétaire le montant des plus-values résultant des grosses réparations qu'il aura effectuées sur le fondement de l'enrichissement sans cause. Le droit d'habitation étant un droit réel, il convient de préciser que si le conjoint survivant a souscrit une assurance, il sera alors indemnisé pour la perte de ce droit. De même, en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique, le conjoint survivant bénéficiera d'une indemnité pour le dédommager de la perte de ses droits d'habitation et d'usage.

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Emile Blessig prévoyant que le droit d'habitation et d'usage reconnu au conjoint survivant peut revêtir des formes allant de l'usufruit à la location. Le rapporteur ayant fait observer qu'un tel dispositif serait source de contentieux et imposerait un recours systématique au juge, la Commission a rejeté cet amendement. Elle a, en revanche, adopté un amendement du rapporteur supprimant du dispositif définissant les droits d'habitation et d'usage du conjoint survivant la référence à l'article 632 du code civil.

La Commission a ensuite été saisie d'un amendement du rapporteur donnant au conjoint successible et aux autres héritiers la possibilité de faire dresser un inventaire des meubles et un état de l'immeuble soumis aux droits d'usage et d'habitation et accordant au conjoint survivant, qui dispose de l'usufruit d'un logement, le droit de louer ce bien, si son état de santé requiert son hébergement dans un établissement spécialisé. Mme Christine Lazerges a fait part de son accord sur le principe d'un dispositif spécifique aux personnes âgées, mais elle s'est interrogée sur les conséquences de cet amendement en termes d'obligation alimentaire des descendants et en matière fiscale. Le rapporteur ayant fait observer que cette disposition ne jouerait qu'en cas de mésentente entre le conjoint survivant et ses enfants, il a estimé qu'elle apportait une solution satisfaisante à la situation des personnes âgées concernées. La Commission a adopté cet amendement.

Article 767-5 du code civil

Imputation de la valeur des droits d'habitation et d`usage sur la valeur
des droits en propriété recueillis par le conjoint

Cet article pose le principe de l'imputation de la valeur des droits d'habitation et d'usage consentis au conjoint survivant sur celle des droits en propriété qu'il recueille dans la succession. D'après les représentants du Conseil supérieur du notariat entendu par le rapporteur, l'estimation de la valeur de ces biens peut se réaliser sans difficultés majeures.

Les modalités d'imputation sont les suivantes : lorsque la valeur de ces biens d'usage et d'habitation est inférieure aux droits par ailleurs recueillis dans la succession, le conjoint survivant verra ces droits s'imputer sur ceux-ci mais il pourra bien sûr prendre le complément qui lui revient sur les biens existants. C'est à lui qu'il reviendra de choisir s'il préfère recueillir l'intégralité de ses droits en propriété ou les combiner avec le bénéfice des droits d'usage et d'habitation (cf. art. 767-4). Cette solution présente, en outre, l'avantage, pour un conjoint survivant âgé, de demeurer dans l'habitation conjugale tout en bénéficiant de biens en propriété, dès lors que la valeur des droits d'usage et d'habitation peut être relativement faible compte tenu de son âge.

La logique s'inverse dès lors que la valeur de ces droits devient supérieure à celle des droits en propriété recueillis dans la succession : le conjoint survivant pourra, en effet, exercer ses droits d'habitation et d'usage, sans être tenu de récompenser la succession de la différence entre la valeur du droit au logement et celle de ses droits successoraux. Il s'agit ici de protéger le logement du conjoint survivant lorsqu'il ne recueille que très peu de droits en propriété.

Article 767-6 du code civil

Délai laissé au conjoint pour opter pour le droit au logement

Le présent article confie au seul conjoint successible le soin de décider s'il souhaite bénéficier ou non des droits d'habitation et d'usage prévus par l'article 767-2 du code civil. En aucun cas, les autres héritiers ne peuvent l'empêcher d'exercer ces droits s'il le décide.

Pour lui permettre de se prononcer sans précipitation, après avoir évalué les conséquences de ce choix qui est par excellence personnel, le présent article lui laisse un an pour manifester sa volonté. On peut considérer que le choix fait par le conjoint de bénéficier de ces droits d'habitation et d'usage vaudra acceptation tacite de la succession puisque, l'option étant indivisible, il ne paraît pas envisageable que le conjoint accepte l'exercice de son droit au logement sans accepter ses droits successoraux.

Article 767-7 du code civil

Conversion des droits d'habitation et d'usage en une rente viagère
ou en un capital

S'ils offrent à une personne la possibilité de continuer à résider dans le cadre qui était le sien avant le décès de son conjoint, les droits d'usage et d'habitation présentent également un certain nombre d'inconvénients : ils contraignent le conjoint à résider au même endroit, ce qui peut, passée une première période de deuil, ne plus correspondre à ses aspirations. Il peut également arriver que le conjoint et les héritiers souhaitent vendre l'habitation ; enfin, le conjoint survivant et les propriétaires de l'habitation peuvent vouloir ne pas avoir à entretenir des relations pérennes, ce qu'implique cependant les droits d'habitation et d'usage consentis au conjoint survivant.

Par conséquent, le présent article autorise la conversion de ces droits en une rente viagère ou en un capital, offrant ainsi une modalité d'extinction de ces droits qui ne soit pas le décès de leur titulaire. Afin que le conjoint ne puisse être contraint d'accepter cette conversion, comme c'est aujourd'hui le cas lorsque les héritiers, en application du dernier alinéa de l'article 767 du code civil, sont tous d'accord pour convertir en une rente viagère la part en usufruit que détient le conjoint survivant, cet article prévoit que cette conversion ne peut se faire qu'avec l'accord dudit conjoint. Afin de conférer plus de souplesse au dispositif, les droits d'usage et de d'habitation peuvent également être convertis en un capital.

La Commission a adopté un amendement de Mme Christine Lazerges tendant à clarifier la rédaction de cet article afin de préciser que les droits d'usage et d'habitation ne peuvent être convertis en une rente viagère ou en capital que si le conjoint successible et les autres héritiers en sont d'accord.

Article 767-8 du code civil

Attribution au conjoint du droit au bail du logement et d'un droit
d'usage sur le mobilier

Dans la proposition de loi initiale, cet article tendait à assurer au conjoint survivant un droit au logement lorsqu'en est jeu non un logement appartenant aux deux époux ou dépendant totalement de la succession mais un logement loué, le droit au bail étant alors attribué au conjoint successible, s'il en fait la demande, à l'exclusion de tout autre ayant droit et étant assorti d'un droit d'usage sur le mobilier le garnissant, tel qu'il est prévu à l'article 767-2.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à donner une nouvelle rédaction à cet article, permettant au conjoint survivant qui occupait au moment du décès un logement loué, de bénéficier d'un droit d'usage sur le mobilier le garnissant.

Puis la Commission a adopté l'article 2 ainsi modifié (art. 3 du texte adopté par la Commission).

Article 3

(
supprimé par le texte adopté par la Commission)

Droit au logement temporaire

La faiblesse des droits successoraux dévolus au conjoint en l'absence de toute libéralité consentie par le défunt peut le contraindre à quitter dans la précipitation la résidence conjugale. A la douleur s'ajoute ainsi la difficulté de quitter un cadre de vie habituelle.

Afin de tempérer, par une transition, la brutalité de la séparation, mais aussi d'offrir au conjoint qui aurait été privé par la volonté du défunt de tout droit viager au logement une protection minimale, le présent article introduit dans le code civil un nouvel article 767-7 offrant au conjoint survivant, de plein droit et pendant une année, la jouissance gratuite du logement qu'il occupait effectivement, à l'époque du décès, à titre d'habitation principale et qui appartenait aux époux ou dépendait totalement de la succession. Ce droit est assorti de la jouissance gratuite du mobilier garnissant ce logement.

Dans l'hypothèse où cette habitation aurait été louée, l'article permet au conjoint survivant de se voir remboursé par la succession les loyers au fur et à mesure qu'il les acquittera. Les loyers seront ainsi considérés comme des charges de la succession dont le défunt n'était pas tenu mais qui sont nées du fait du décès et des nécessités du règlement de la succession.

Le dernier alinéa précise que ces droits sont réputés être des effets directs du mariage et non des droits successoraux, cette dernière disposition indiquant ainsi que ce droit au logement temporaire est indépendant du sort successoral du conjoint survivant mais aussi que l'acceptation de ce droit au logement ne vaut pas acceptation de la succession.

La Commission a adopté un amendement de Mme Christine Lazerges supprimant cet article dont les dispositions figurent désormais, sous réserve de modifications rédactionnelles, dans l'article 767-3.

Articles additionnels après l'article 3

(art. 4 du texte adopté par la Commission)


Devoir de secours à l'égard du conjoint survivant

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Emile Blessig prévoyant que le devoir de secours à l'égard du conjoint survivant peut être mis à la charge de la succession sous la forme d'une pension alimentaire. Son auteur a indiqué que cet amendement visait à revenir sur une jurisprudence restrictive, qui subordonne l'octroi d'un droit au secours à la charge de la succession à l'existence d'un état de nécessité antérieur au décès. Il a, par ailleurs, fait remarquer que son amendement prévoyait une condition suspensive de cette obligation nouvelle en cas de manquement grave du conjoint survivant à ses devoirs envers le défunt. Le rapporteur ayant approuvé cet amendement, la Commission l'a adopté.

(art. 5 du texte adopté par la Commission)

Attribution préférentielle de la propriété au conjoint survivant

La Commission a adopté un amendement du rapporteur accordant au conjoint survivant bénéficiant d'un droit d'habitation sur le logement, le droit d'en devenir propriétaire par préférence à tout autre héritier.

(art. 6 du texte adopté par la Commission)

Réserve au profit du conjoint survivant

La Commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que les libéralités consenties par une personne ne pourront excéder les trois quarts des biens si, à défaut de descendant et d'ascendant, le défunt laisse un conjoint survivant.

(art. 7 du texte adopté par la Commission)

Transmission du droit au bail au conjoint survivant

En application de l'article 1751 du code civil, les conjoints bénéficient de la cotitularité du bail. Toutefois, ce droit n'est ouvert qu'à la double condition que le bail n'ait pas de caractère professionnel - la cotitularité du bail ne peut porter sur un local à usage mixte - et qu'il serve effectivement à l'habitation des deux époux. Dans l'hypothèse où les conjoints seraient séparés de corps ou simplement n'habiteraient pas dans le même logement, le conjoint survivant ne pourrait invoquer la cotitularité du bail.

A défaut de conjoint pouvant bénéficier de cette disposition, le bail peut faire l'objet d'une attribution préférentielle, conformément à l'article 832, du code civil ou être transféré. En effet, en application de l'article 14 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, le contrat de location est transféré, lors du décès du locataire : au conjoint survivant, aux descendants qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès, au partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité, aux ascendants, au concubin notoire ou aux personnes à charge, qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès. En cas de demande multiple, par exemple en cas de demandes émanant du conjoint et d'un enfant né d'un précédent mariage, la loi précise que le juge se prononce en fonction des intérêts en présence. A défaut de personnes pouvant bénéficier de cette transmission, le contrat de location est résilié de plein droit par le décès du locataire.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur modifiant, d'une part, l'article 1751 du code civil, afin de reconnaître expressément au conjoint survivant l'exclusivité du droit au bail après le décès de son époux cotitulaire du bail et, d'autre part, l'article 14 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 qui permet au juge, lorsque les conjoints n'ont jamais vécu ensemble dans l'habitation louée et en fonction des intérêts en présence, de se prononcer sur le transfert du bail auquel peuvent prétendre les personnes visées dans l'article 14 précité.

Après l'article 3

La Commission a été saisie d'un amendement de M. Emile Blessig réservant le bénéfice des dispositions de la loi relative aux droits du conjoint survivant aux époux mariés depuis trois ans lorsque ceux-ci n'ont pas d'enfant issu de leur union. Son auteur a souligné le risque d'un détournement de la loi en l'absence d'une durée minimale du mariage requise. Le rapporteur a jugé qu'il était préférable de ne pas restreindre le nombre de bénéficiaires du nouveau dispositif dans le seul but d'éviter d'éventuels détournements de la loi. Mme Christine Lazerges a fait observer que la crainte de la captation d'héritage pourrait conduire à exclure du dispositif des personnes dont le mariage a été interrompu précocement pour des raisons accidentelles. La Commission a rejeté cet amendement.

Article 4

(art. 8 du texte adopté par la Commission)


Coordinations

Cet article de la proposition de loi tend à procéder à différentes coordinations dans le code civil. La Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à lui donner une nouvelle rédaction.

Aux termes de cette nouvelle rédaction, cet article prévoit tout d'abord une modification de l'article 301 du code civil de façon à ce que celui-ci ne fasse plus référence à l'article 767 mais à l'article 767-8 du code civil.

Il prévoit, en outre, l'abrogation de l'article 1481 de ce code qui permet au conjoint survivant marié sous le régime de la communauté légale d'avoir droit à la nourriture et au logement, ainsi qu'aux frais de deuil, le tout à la charge de la communauté et pendant les neuf mois qui suivent le décès de l'époux. Ces dispositions deviennent inutiles compte tenu du droit au logement temporaire dont pourra désormais bénéficier le conjoint survivant. Certes, ces deux dispositions ne sont pas totalement identiques. En effet, les frais engagés pour assurer le logement gratuit du conjoint survivant sont prélevés sur la succession, et non sur la communauté, et les droits au logement ouverts au conjoint par l'article 1481 ne le contraignent pas à habiter là où il résidait au moment du décès de son conjoint. Cependant, les nouvelles dispositions relatives au droit au logement temporaire sont plus larges : d'une part, elles bénéficient à tous les conjoints survivants, sans considération de la nature du régime matrimonial qui le liait au défunt ; d'autre part, elles instaurent une jouissance gratuite du logement qui tenait lieu d'habitation principale aux époux pendant un an au lieu de neuf mois.

Par coordination avec la suppression de l'article 1481, la dernière phrase de l'article 1491 du code civil, qui précise que les héritiers des époux ne peuvent se prévaloir des droits ouverts au conjoint survivant par l'article 1481, est supprimée.

Articles additionnels après l'article 4

(art. 9 du texte adopté par la Commission)


Suppression des discriminations successorales
applicables aux enfants adultérins

Alors que les enfants légitimes, légitimés, adoptifs ou naturels simples ont tous les mêmes droits sur la succession de leur père ou de leur mère (art. 757 et 758 du code civil), les enfants adultérins, tout en étant également héritiers de leurs parents, voient leur part réduite par rapport à celle des autres enfants du défunt. Ils ne reçoivent que la moitié de la part à laquelle ils auraient eu droit si tous les enfants du défunt, y compris eux-mêmes, étaient légitimes, la demi-part non attribuée à l'enfant adultérin revenant de droit aux enfants légitimes.

De même, l'enfant adultérin n'a pas le même statut successoral que les autres enfants vis-à-vis du conjoint survivant. En présence d'enfants adultérins, les droits successoraux du conjoint survivant varient selon qu'il aurait été, en absence d'enfant adultérin, appelé ou non à succéder en pleine propriété : si tel est le cas, le conjoint ne reçoit que la moitié de ce qu'il aurait dû recevoir en propriété, l'autre moitié revenant aux enfants adultérins (art. 759 du code civil) ; en revanche, lorsque le conjoint n'a qu'une vocation successorale en usufruit, la présence d'un enfant adultérin ne modifie pas ses droits. En matière de libéralités et à condition qu'il n'y ait pas d'autre descendant, le conjoint bénéficie d'une quotité disponible plus avantageuse. En effet, en présence d'enfants adultérins, l'article 1096 du code civil lui permet d'opter alors, entre la totalité en usufruit, la moitié en propriété et l'autre en usufruit, ou les trois-quarts en propriété.

La Commission a été saisie d'un amendement du rapporteur supprimant les différentes dispositions du code civil établissant une discrimination successorale au détriment des enfants adultérins. Indiquant que cet amendement tirait la conséquence de la condamnation, le 1er février 2000, de la France par la Cour européenne des droits de l'homme pour discrimination à l'égard des enfants adultérins, le rapporteur a observé cependant qu'il ne permettait pas de résoudre le cas des enfants incestueux qui continueront à subir une inégalité en matière de succession puisqu'il reste impossible d'établir leur filiation à l'égard de leurs deux parents. M. Bernard Roman, président, ayant considéré que cet amendement constituait une avancée décisive, la Commission l'a adopté.

(art. 10 du texte adopté par la Commission)

Entrée en vigueur de la loi

La Commission a été saisie d'un amendement du rapporteur prévoyant que les dispositions relatives aux droits des conjoints survivants entreront en vigueur à l'issue d'un délai de six mois. Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, a souhaité que le délai soit ramené à quatre mois et que le droit temporaire au maintien dans les lieux soit d'application immédiate. Le rapporteur a déclaré que le délai de six mois était indispensable du fait de la complexité des mesures réglementaires nécessaires à la mise en _uvre des dispositions nouvelles ; il a indiqué, en revanche, qu'il présenterait ultérieurement un amendement permettant l'application immédiate des dispositions relatives au droit au logement temporaire. La Commission a adopté cet amendement.

Article 5

(art. 11 du texte adopté par la Commission)


Compensation des pertes éventuelles de recettes

Cet article prévoyant, en termes traditionnels, la compensation des pertes de recettes publiques engendrées par la présente proposition de loi est la condition de sa recevabilité financière.

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La Commission a ensuite adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.

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En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant ci-après.

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Proposition de loi relative aux droits du conjoint survivant

Article premier

Le chapitre III du titre premier du livre troisième du code civil est ainsi modifié :

I. -  Après l'article 732 du même code, il est inséré un article 732-1 ainsi rédigé :

« Art. 732-1. -  La filiation naturelle ne crée de droits successoraux qu'autant qu'elle est légalement établie.

« L'enfant naturel a, en général, dans la succession de ses père et mère et autres ascendants, ainsi que de ses frères et s_urs et autres collatéraux, les mêmes droits qu'un enfant légitime.

« Réciproquement, les père et mère et autres ascendants de l'enfant naturel, ainsi que ses frères et s_urs et autres collatéraux, viennent à sa succession comme s'il était un enfant légitime. »

II. -  La section III est intitulée : « Des droits des parents en l'absence de conjoint successible ». Elle comporte trois paragraphes.

1° Le paragraphe 1 est intitulé : « Des successions déférées aux descendants » et comporte l'article 745 ;

2° Le paragraphe 2 est intitulé : « Des successions déférées aux ascendants » et comporte les articles 746, 748 et 749 ;

3° Le paragraphe 3 est intitulé : « Des successions collatérales » et comporte les articles 750 à 753 et 755.

III. -  En conséquence, les intitulés : « Section III - Des successions déférées aux descendants », « Section IV - Des successions déférées aux ascendants » et « Section V - Des successions collatérales » sont supprimés.

IV. -  Les articles 756, 757 et 758 sont abrogés.

Article 2

La section VII du chapitre III du titre premier du livre troisième du code civil est ainsi modifiée :

I. -  L'intitulé de la section est ainsi rédigé : « Section IV - Des droits du conjoint successible ».

II. -  Avant l'article 765, sont insérés une division et un intitulé ainsi rédigés : « § 1. -  De la nature des droits et de leur montant ».

III. -  Les articles 765 à 767 du même code sont remplacés par cinq articles ainsi rédigés :

« Art. 765. -  Est conjoint successible le conjoint survivant non divorcé et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée.

« Le conjoint successible est appelé à la succession soit seul, soit en concours avec les parents du défunt.

« Art. 766. -  Lorsque le défunt laisse des enfants ou des descendants, le conjoint survivant recueille le quart de la succession.

« Art. 767. -  Si, à défaut d'enfants ou de descendants, le défunt laisse ses père et mère, le conjoint survivant recueille la moitié de la succession. L'autre moitié est dévolue pour un quart au père et pour un quart à la mère.

« Quand le père ou la mère est prédécédé, la part qui lui serait revenue échoit au conjoint survivant.

« Art. 767-1. -  En l'absence d'enfants ou de descendants du défunt et de ses père et mère, le conjoint survivant recueille toute la succession.

« Art. 767-2. -  Lorsque le conjoint survivant recueille la totalité ou les trois quarts de la succession, les ascendants du défunt, autres que les père et mère, qui sont dans le besoin, bénéficient d'une créance d'aliments contre la succession du prédécédé.

« Les aliments sont accordés en proportion des besoins de ceux qui les réclament et de ceux du conjoint successible. »

Article 3

Après l'article 767-2 du même code, sont insérés une division et six articles ainsi rédigés :

« § 2. -  Du droit au logement et du mobilier le garnissant

« Art. 767-3. -  Si, à l'époque du décès, le conjoint survivant non divorcé et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée occupe effectivement à titre d'habitation principale, un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, il a, pendant une année, la jouissance gratuite de ce logement et du mobilier qui le garnit.

« Si son habitation était assurée au moyen d'un bail à loyer, les loyers lui en seront remboursés par la succession pendant l'année, au fur et à mesure de leur acquittement.

« Les droits prévus au présent article sont réputés effets directs du mariage et non droits successoraux.

« Le présent article est d'ordre public.

« Art. 767-4. -  Sauf volonté contraire du défunt exprimée dans les conditions de l'article 971, le conjoint qui occupait effectivement, à l'époque du décès, à titre d'habitation principale, un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, a sur ce logement, jusqu'à son décès, un droit d'habitation et un droit d'usage sur le mobilier le garnissant, compris dans la succession.

« Ces droits d'habitation et d'usage sont de plein droit opposables aux tiers et s'exercent dans les conditions prévues aux articles 627, 631, 634 et 635.

« Le conjoint successible et les autres héritiers peuvent exiger qu'il soit dressé un inventaire des meubles et un état de l'immeuble soumis aux droits d'usage et d'habitation.

« Par dérogation aux articles 631 et 634, le conjoint survivant peut donner à bail le logement sur lequel il dispose d'un droit d'habitation lorsque l'évolution de son état de santé ne lui permet plus de rester dans les lieux et justifie son hébergement dans un établissement spécialisé.

« Art. 767-5. -  La valeur des droits d'habitation et d'usage s'impute sur la valeur des droits successoraux recueillis par le conjoint.

« Si la valeur des droits d'habitation et d'usage est inférieure à celle de ses droits successoraux, le conjoint peut prendre le complément sur les biens existants.

« Si la valeur des droits d'habitation et d'usage est supérieure à celle de ses droits successoraux, le conjoint n'est pas tenu de récompenser la succession à raison de l'excédent.

« Art. 767-6. -  Le conjoint successible dispose d'un an à partir du décès pour manifester sa volonté de bénéficier de ces droits d'habitation et d'usage.

« Art. 767-7. -  Le conjoint successible et les héritiers peuvent, d'un commun accord, convertir les droits d'habitation et d'usage en une rente viagère ou en un capital.

« Art. 767-8. -  Lorsque le logement faisait l'objet d'un bail à loyer, le conjoint survivant qui, à l'époque du décès, occupait effectivement les lieux à titre d'habitation principale bénéficie du droit d'usage sur le mobilier le garnissant, compris dans la succession. »

Article 4

Le premier alinéa de l'article 207-1 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. 207-1. - Si, par la mort de l'un des époux, les conditions de vie du conjoint survivant se trouvent gravement amoindries, un devoir de secours peut être mis à la charge de la succession, sous la forme d'une pension alimentaire. Le délai pour le réclamer est d'un an à partir du décès et se prolonge, en cas de partage, jusqu'à son achèvement.

« Lorsque le conjoint a, durant le mariage, manqué gravement à ses devoirs envers le défunt, le juge pourra, à la demande de l'un des héritiers, décharger la succession de sa contribution à la pension alimentaire. »

Article 5

Après le dixième alinéa de l'article 832 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L'attribution préférentielle de la propriété du local visée au septième alinéa est de droit pour le conjoint survivant qui a demandé à bénéficier du droit d'habitation sur cet immeuble en application des articles 767-4 et 767-6. »

Article 6

I. -  Après l'article 914 du même code, il est inséré un article 914-1 ainsi rédigé :

« Art. 914-1. -  Les libéralités, par actes entre vifs ou par testament, ne pourront excéder les trois quarts des biens, si, à défaut de descendant et d'ascendant, le défunt laisse un conjoint survivant, non divorcé et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée. »

II. -  Dans l'article 916 du même code, les mots : « A défaut d'ascendants et de descendants » sont remplacés par les mots : « A défaut de descendant, d'ascendant et de conjoint survivant non divorcé et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée ».

Article 7

I. -  L'article 1751 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de décès d'un des époux, le conjoint survivant cotitulaire du bail dispose d'un droit exclusif sur celui-ci sauf s'il y renonce expressément. »

II. -  Le septième alinéa de l'article 14 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :

« - au conjoint survivant qui ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 1751 du code civil ; ».

Article 8

I. -  Dans la dernière phrase de l'article 301 du code civil, la référence : « 767 » est remplacée par la référence : « 767-8 ».

II. -  L'article 1481 du même code est abrogé.

III. -  La dernière phrase de l'article 1491 du même code est supprimée.

Article 9

I. -  Le dernier alinéa de l'article 334 du même code est supprimé.

II. -  A la fin de l'article 913 du même code, les mots : « , hormis le cas de l'article 915 » sont supprimés.

III. -  Les articles 334-7, 759 à 764, 908, 908-1, 915 à 915-2, 1097 et 1097-1 du même code sont abrogés.

IV. -  En conséquence, l'intitulé : « Section VI - Des droits successoraux résultant de la filiation naturelle » du chapitre III du titre premier du livre troisième du même code est supprimé.

Article 10

Les articles 1 à 8 de la présente loi entreront en vigueur le premier jour du septième mois suivant la publication de celle-ci au Journal officiel de la République française.

Article 11

Les pertes éventuelles de recettes pour l'Etat engendrées par les dispositions prévues ci-dessus sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte de référence

___

Texte de la proposition de loi

___

Conclusions de la Commission

___


Code civil

Livre troisième

Des différentes manières
dont on acquiert la propriété

Titre 1er
Des successions

Chapitre III
Des divers ordres de succession

 

Article 1er

Le chapitre III du titre premier du livre troisième du code civil est ainsi modifié :

I. -  Après l'article 732 du mê-me code, il est inséré un article 732-1 ainsi rédigé :

« Art. 732-1. -  La filiation naturelle ne crée de droits successoraux qu'autant qu'elle est légalement établie.

« L'enfant naturel a, en général, dans la succession de ses père et mère et autres ascendants, ainsi que de ses frères et s_urs et autres collatéraux, les mêmes droits qu'un enfant légitime.

   

« Réciproquement, les père et mère et autres ascendants de l'enfant naturel, ainsi que ses frères et s_urs et autres collatéraux, viennent à sa succession comme s'il était un enfant légitime. »

Section III
Des successions déférées
aux descendants

 

II. -  La section III est intitulée : « Des droits des parents en l'absence de conjoint successible ». Elle comporte trois paragraphes.

Art. 745. -  Les enfants ou leurs descendants succèdent à leurs père et mère, aïeuls, aïeules, ou autres ascendants, sans distinction de sexe ni de primogéniture, et encore qu'ils soient issus de différents mariages.

 

1° Le paragraphe 1 est intitulé : « Des successions déférées aux descendants » et comporte l'article 745 ;

Ils succèdent par égales portions et par tête, quand ils sont tous au premier degré et appelés de leur chef : ils succèdent par souche, lorsqu'ils viennent tous ou en partie par représentation.

   

Art. 746. -  Si le défunt n'a laissé ni postérité, ni frère, ni s_ur, ni descendants d'eux, la succession se divise par moitié entre les ascendants de la ligne paternelle et les ascendants de la ligne maternelle.

 

2° Le paragraphe 2 est intitulé : « Des successions déférées aux ascendants » et comporte les articles 746, 748 et 749 ;

L'ascendant qui se trouve au degré le plus proche recueille la moitié affectée à sa ligne, à l'exclusion de tous autres.

   

Les ascendants au même degré succèdent par tête.

   

Art. 748. -  Lorsque les père et mère d'une personne morte sans postérité lui ont survécu, si elle a laissé des frères, s_urs, ou des descendants d'eux, la succession se divise en deux portions égales, dont moitié seulement est déférée au père et à la mère, qui la partagent entre eux également.

   

L'autre moitié appartient aux frères, s_urs ou descendants d'eux, ainsi qu'il sera expliqué dans la section V du présent chapitre.

   

Art. 749. -  Dans le cas où la personne morte sans postérité laisse des frères, s_urs ou des descendants d'eux, si le père ou la mère est prédécédé, la portion qui leur aurait été dévolue conformément au précédent article, se réunit à la moitié déférée aux frères, s_urs ou à leurs représentants, ainsi qu'il sera expliqué à la section V du présent chapitre.

   

Art. 750. -  En cas de prédécès des père et mère d'une personne morte sans postérité, ses frères, s_urs ou leurs descendants sont appelés à la succession, à l'exclusion des ascendants et des autres collatéraux.

 

3° Le paragraphe 3 est intitulé : « Des successions collatérales » et comporte les articles 750 à 753 et 755.

Ils succèdent, ou de leur chef, ou par représentation, ainsi qu'il a été réglé dans la section II du présent chapitre.

   

Art. 751. -  Si les père et mère de la personne morte sans postérité lui ont survécu, ses frères, s_urs, ou leurs représentants ne sont appelés qu'à la moitié de la succession. Si le père ou la mère seulement a survécu, ils sont appelés à recueillir les trois quarts.

   

Art. 752. -  Le partage de la moitié ou des trois quarts dévolus aux frères ou s_urs, aux termes de l'article précédent, s'opère entre eux par égales portions, s'ils sont tous du même lit ; s'ils sont de lits différents, la division se fait par moitié entre les deux lignes paternelle et maternelle du défunt ; les germains prennent part dans les deux lignes, et les utérins ou consanguins chacun dans leur ligne seulement ; s'il n'y a de frères ou s_urs que d'un côté, ils succèdent à la totalité, à l'exclusion de tous autres parents de l'autre ligne.

   

Art. 753. -  A défaut de frères ou s_urs ou de descendants d'eux et à défaut d'ascendants dans une ligne, la succession est dévolue en totalité aux ascendants de l'autre ligne ; à défaut d'ascendants dans l'une et l'autre ligne, la succession est dévolue pour moitié aux parents les plus proches dans chaque ligne.

   

S'il y a concours de parents collatéraux au même degré, ils partagent par tête.

   

Art. 755. -  Les parents collatéraux au-delà du sixième degré ne succèdent pas, à l'exception, toutefois des descendants des frères et s_urs du défunt.

   

Toutefois, les parents collatéraux succèdent jusqu'au douzième degré lorsque le défunt n'était pas capable de tester et n'était pas frappé d'interdiction légale.

   

A défaut de parents au degré successible dans une ligne et de conjoint contre lequel il n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée, les parents de l'autre ligne succèdent pour le tout.

   

Section IV
Des successions déférées aux ascendants

Section V
Des successions collatérales

Art. 756. -  La filiation naturelle ne crée de droits successoraux qu'autant qu'elle est légalement établie.

 

III. -  En conséquence, les intitulés : « Section III - Des successions déférées aux descendants », « Section IV - Des successions déférées aux ascendants » et « Section V - Des succussions collatérales » sont supprimés.

IV. -  Les articles 756, 757 et 758 sont abrogés.

Art. 757. -  L'enfant naturel a, en général, dans la succession de ses père et mère et autres ascendants, ainsi que de ses frères et s_urs et autres collatéraux, les mêmes droits qu'un enfant légitime.

   

Art. 758. -  Réciproquement, les père et mère et autres ascendants de l'enfant naturel, ainsi que ses frères et s_urs et autres collatéraux, viennent à sa succession comme s'il était un enfant légitime.

   
 

Article 1er

La section VII du chapitre III du titre premier du livre troisième du code civil est ainsi modifiée :

Article 2

(Alinéa sans modification)


Section VII
Des droits du conjoint survivant

I. -  L'intitulé de la section est ainsi rédigé : « Section VII - Des droits du conjoint successible ».

I. -
... « Section IV -  Des...

 

II. -  Avant l'article 765, sont insérés une division et un intitulé ainsi rédigés : « § 1. -  De la nature des droits et de leur montant ».

II. -  (Alinéa sans modification).

 

III. -  Les articles 765 à 767 du même code sont remplacés par quatre articles ainsi rédigés :

III. -  
... par cinq
articles...

Art. 765. -  Lorsque le défunt ne laisse pas de parenté au degré successible, ou s'il ne laisse que des collatéraux autres que des frères ou s_urs ou des descendants de ceux-ci, les biens de sa succession appartiennent en pleine propriété au conjoint non divorcé qui lui survit et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée.

« Art. 765. -  Est conjoint successible le conjoint survivant non divorcé et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée.

« Le conjoint successible est appelé à la succession soit seul, soit en concours avec les parents du défunt.

« Art. 765. -  (Sans modification).

Art. 766. -  Lorsque le défunt ne laisse dans une ligne, paternelle ou maternelle, aucun parent au degré successible, ou s'il ne laisse, dans cette ligne, que des collatéraux autres que des frères ou s_urs ou des descendants de ceux-ci, la moitié de sa succession est dévolue, nonobstant les dispositions de l'article 753, au conjoint non divorcé qui lui survit et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée.

« Art. 766. -  Lorsque le défunt laisse des enfants ou des descendants, le conjoint survivant recueille la propriété du quart des biens de la succession.

« Art. 766. -  

...recueille le
quart de...

Art. 767. -  Le conjoint survivant non divorcé, qui ne succède pas à la pleine propriété et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée a, sur la succession du prédécédé, un droit d'usufruit qui est :

« Art. 767. -  Si, à défaut d'enfants ou de descendants, le défunt laisse ses père et mère, le conjoint survivant recueille la propriété de la moitié des biens de la succession. L'autre moitié est dévolue pour un quart au père et pour un quart à la mère.

« Art. 767. -  


...recueille la moitié de...

D'un quart, si le défunt laisse un ou plusieurs enfants soit légitimes, issus ou non du mariage, soit naturels ;

« Quand le père ou la mère est prédécédé, la part qui lui serait revenue échoit au conjoint survivant.

(Alinéa sans modification).

De moitié, si le défunt laisse des frères et s_urs, des descendants de frères et s_urs, des ascendants ou des enfants naturels conçus pendant le mariage.

« Art. 767-1. -  En l'absence d'enfants ou de descendants du défunt et de ses père et mère, le conjoint survivant recueille toute la succession en propriété. »

« Art. 767-1. -  


...succession .

Le calcul sera opéré sur une masse faite de tous les biens existant au décès du de cujus, auxquels seront réunis fictivement ceux dont il aurait disposé, soit par acte entre vifs, soit par acte testamentaire, au profit de successibles, sans dispense de rapport.

 

« Art. 767-2. -  Lorsque le con-joint survivant recueille la totalité ou les trois quarts de la succession, les ascendants du défunt, autres que les père et mère, qui sont dans le besoin, bénéficient d'une créance d'aliments contre la succession du prédécédé.

« Les aliments sont accordés en proportion des besoins de ceux qui les réclament et de ceux du conjoint successible. »

Mais l'époux survivant ne pourra exercer son droit que sur les biens dont le prédécédé n'aura disposé ni par acte entre vifs, ni par acte testamentaire, et sans préjudicier aux droits de réserve ni aux droits de retour.

   

Il cessera de l'exercer dans le cas où il aurait reçu du défunt des libéralités, même faites par préciput et hors part, dont le montant atteindrait celui des droits que la présente loi lui attribue, et, si ce montant était inférieur, il ne pourrait réclamer que le complément de son usufruit.

   

Jusqu'au partage définitif, les héritiers peuvent exiger, moyennant sûretés suffisantes, et garantie du maintien de l'équivalence initiale, que l'usufruit de l'époux survivant soit converti en une rente viagère équivalente. S'ils sont en désaccord, la conversion sera facultative pour les tribunaux.

   
 

Article 2

Après l'article 767-1 du même code, sont insérés une division et cinq articles ainsi rédigés :

Article 3

... article 767-2 du...
...et six
articles...

 

« § 2. -  Du droit au logement et du mobilier le garnissant

« § 2. -  (Alinéa sans modification).

   

« Art. 767-3. -  Si, à l'époque du décès, le conjoint survivant non divorcé et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée occupe effectivement à titre d'habitation principale, un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, il a, pendant une année, la jouissance gratuite de ce logement et du mobilier qui le garnit.

   

« Si son habitation était assurée au moyen d'un bail à loyer, les loyers lui en seront remboursés par la succession pendant l'année, au fur et à mesure de leur acquittement.

   

« Les droits prévus au présent article sont réputés effets directs du mariage et non droits successoraux.

   

« Le présent article est d'ordre public.

Art. 971. -  Le testament par acte public est reçu par deux notaires ou par un notaire assisté de deux témoins.

« Art. 767-2. -  Sauf volonté contraire du défunt exprimée dans les conditions de l'article 971, le conjoint qui occupait effectivement, à l'époque du décès, à titre de résidence principale, un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, a sur ce logement, jusqu'à son décès, un droit d'habitation et un droit d'usage sur le mobilier le garnissant.

« Art. 767-4. - Sauf...



...titre d'habitation principale,...




...garnissant, compris dans la
succession
.

Art. 627. -  L'usager, et celui qui a un droit d'habitation, doivent jouir en bons pères de famille.

« Ces droits d'habitation et d'usage sont de plein droit opposables aux tiers et s'exercent dans les conditions prévues aux articles 627, 631, 632, 634 et 635.




... 631,
634...

Art. 631. -  L'usager ne peut céder ni louer son droit à un autre.

Art. 632. -  Celui qui a un droit d'habitation dans une maison, peut y demeurer avec sa famille, quand même il n'aurait pas été marié à l'époque où ce droit lui a été donné.

Art. 634. -  Le droit d'habitation ne peut être ni cédé ni loué.

Art. 635. -  Si l'usager absorbe tous les fruits du fonds, ou s'il occupe la totalité de la maison, il est assujetti aux frais de culture, aux réparations d'entretien, et au payement des contributions, comme l'usufruitier.

 

« Le conjoint successible et les autres héritiers peuvent exiger qu'il soit dressé un inventaire des meubles et un état de l'immeuble soumis aux droits d'usage et d'habitation.

« Par dérogation aux articles 631 et 634, le conjoint survivant peut donner à bail le logement sur lequel il dispose d'un droit d'habitation lorsque l'évolution de son état de santé ne lui permet plus de rester dans les lieux et justifie son hébergement dans un établissement spécialisé.

S'il ne prend qu'une partie des fruits, ou s'il n'occupe qu'une partie de la maison, il contribue au prorata de ce dont il jouit.

   
 

« Art. 767-3. -  La valeur des droits d'habitation et d'usage s'impute sur la valeur des droits en propriété que le conjoint recueille dans la succession.

« Art. 767-5. -  La...

... droits successoraux
recueillis par
le conjoint.

 

« Si la valeur des droits d'habitation et d'usage est inférieure à celle des droits en propriété, le conjoint peut prendre le complément sur les biens existants.


...
celle de ses droits successoraux, le...

 

« Si la valeur des droits d'habitation et d'usage est supérieure à celle des droits en propriété, le conjoint n'est pas tenu de récompenser la succession à raison de l'excédent.


...
celle de ses droits successoraux, le...

 

« Art. 767-4. -  Le conjoint successible dispose d'un an à partir du décès pour manifester sa volonté de bénéficier de ces droits d'habitation et d'usage.

« Art. 767-6. -  Le...

 

« Art. 767-5. -  Les droits d'habitation et d'usage peuvent, avec l'accord du conjoint, être convertis en une rente viagère ou en un capital.

« Art. 767-7. -  Le conjoint successible et les héritiers peuvent, d'un commun accord, convertir les droits d'habitation et d'usage en une rente viagère ou en un capital.

Art. 1751. -  Le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l'habitation de deux époux est, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire, et même si le bail a été conçu avant le mariage, réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux.

« Art. 767-6. -  Lorsque le logement faisait l'objet d'un bail à loyer, le droit au bail, réputé appartenir aux deux époux selon l'article 1751, est attribué au conjoint successible s'il en fait la demande, à l'exclusion de tous autres éventuels ayants droit. Dans cette hypothèse, le conjoint successible pourra également bénéficier du droit d'usage sur le mobilier prévu à l'article 767-2. »

« Art. 767-8. -  Lorsque...

... loyer,
le conjoint survivant qui, à l'époque du décès, occupait effectivement les lieux à titre d'habitation principale bénéficie du droit d'usage sur le mobilier le garnissant, compris dans la succession. »


... article 767-4. »

En cas de divorce ou de séparation de corps, ce droit pourra être attribué, en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause, par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation de corps, à l'un des époux, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l'autre époux.

   
 

Article 3

Après l'article 767-6 du même code, sont insérés une division et un article ainsi rédigés :

Article supprimé.

 

« § 3. -  Du droit au logement temporaire

 
 

« Art. 767-7. -  Si, à l'époque du décès, le conjoint occupe effectivement, à titre d'habitation principale, un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, il a de plein droit, pendant une année, la jouissance gratuite de ce logement ainsi que du mobilier qui le garnit.

 
 

« Si son habitation était assurée au moyen d'un bail à loyer, les loyers lui en seront remboursés par la succession pendant l'année, au fur et à mesure de leur acquittement.

 
 

« Les droits prévus au présent article sont réputés effets directs du mariage et non droits successoraux. »

 
   

Article 4

Le premier alinéa de l'article 207-1 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

Art. 207-1. - La succession de l'époux prédécédé doit les aliments à l'époux survivant qui est dans le besoin. Le délai pour les réclamer est d'un an à partir du décès et se prolonge, en cas de partage, jusqu'à son achèvement.

 

« Art. 207-1. -  Si, par la mort de l'un des époux, les conditions de vie du conjoint survivant se trouvent gravement amoindries, un devoir de secours peut être mis à la charge de la succession, sous la forme d'une pension alimentaire. Le délai pour le réclamer est d'un an à partir du décès et se prolonge, en cas de partage, jusqu'à son achèvement.

   

« Lorsque le conjoint a, durant le mariage, manqué gravement à ses devoirs envers le défunt, le juge pourra, à la demande de l'un des héritiers, décharger la succession de sa contribution à la pension alimentaire. »

La pension alimentaire est prélevée sur l'hérédité. Elle est supportée par tous les héritiers, et en cas d'insuffisance, par tous les légataires particuliers, proportionnellement à leur émolument.

   

Toutefois, si le défunt a expressément déclaré que tel legs sera acquitté de préférence aux autres, il sera fait application de l'article 927.

   

Art. 832. - Dans la formation et la composition des lots, on doit éviter de morceler les héritages et de diviser les exploitations.

 

Article 5

Après le dixième alinéa de l'article 832 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

Dans la mesure où le morcellement des héritages et la division des exploitations peuvent être évités, chaque lot doit, autant que possible, être composé, soit en totalité, soit en partie, de meubles ou d'immeubles, de droits ou de créances de valeur équivalente.

   

Le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut demander l'attribution préférentielle par voie de partage, à charge de soulte s'il y a lieu, de toute exploitation agricole, ou partie d'exploitation agricole, constituant une unité économique, ou quote-part indivise d'exploitation agricole, même formée pour une part de biens dont il était déjà propriétaire ou copropriétaire avant le décès, à la mise en valeur de laquelle il participe ou a participé effectivement ; dans le cas de l'héritier, la condition de participation peut avoir été remplie par son conjoint. S'il y a lieu, la demande d'attribution préférentielle peut porter sur des parts sociales, sans préjudice de l'application des dispositions légales ou des clauses statutaires sur la continuation d'une société avec le conjoint survivant ou un ou plusieurs héritiers.

   

Les mêmes règles sont applicables en ce qui concerne toute entreprise commerciale, industrielle ou artisanale, dont l'importance n'exclut pas un caractère familial.

   

Au cas où ni le conjoint survivant, ni aucun héritier copropriétaire ne demande l'application des dispositions prévues au troisième alinéa ci-dessus ou celles des articles 832-1 ou 832-2, l'attribution préférentielle peut être accordée à tout copartageant sous la condition qu'il s'oblige à donner à bail dans un délai de six mois le bien considéré dans les conditions fixées au chapitre VII du titre Ier du livre VI du code rural à un ou plusieurs des cohéritiers remplissant les conditions personnelles prévues au troisième alinéa ci-dessus ou à un ou plusieurs descendants de ces cohéritiers remplissant ces mêmes conditions.

   

Le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut également demander l'attribution préférentielle :

   

De la propriété ou du droit au bail du local qui lui sert effectivement d'habitation, s'il y avait sa résidence à l'époque du décès ;

   

De la propriété ou du droit au bail du local à usage professionnel servant effectivement à l'exercice de sa profession et des objets mobiliers à usage professionnel garnissant ce local ;

   

De l'ensemble des éléments mobiliers nécessaires à l'exploitation d'un bien rural cultivé par le défunt à titre de fermier ou de métayer lorsque le bail continue au profit du demandeur, ou lorsqu'un nouveau bail est consenti à ce dernier.

   

L'attribution préférentielle peut être demandée conjointement par plusieurs successibles.

   
   

« L'attribution préférentielle de la propriété du local visée au septième alinéa est de droit pour le conjoint survivant qui a demandé à bénéficier du droit d'habitation sur cet immeuble en application des articles 767-4 et 767-6. »

A défaut d'accord amiable, la demande d'attribution préférentielle est portée devant le tribunal, qui se prononce en fonction des intérêts en présence. En cas de pluralité de demandes concernant une exploitation ou une entreprise, le tribunal tient compte de l'aptitude des différents postulants à gérer cette exploitation ou cette entreprise et à s'y maintenir et en particulier de la durée de leur participation personnelle à l'activité de l'exploitation ou de l'entreprise.

   

Les biens faisant l'objet de l'attribution sont estimés à leur valeur au jour du partage.

   

Sauf accord amiable entre les copartageants, la soulte éventuellement due est payable comptant.

   
   

Article 6

I. -  Après l'article 914 du même code, il est inséré un article 914-1 ainsi rédigé :

« Art. 914-1. -  Les libéralités, par actes entre vifs ou par testament, ne pourront excéder les trois quarts des biens, si, à défaut de descendant et d'ascendant, le défunt laisse un conjoint survivant, non divorcé et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée.

Art. 916. -  A défaut d'ascendants et de descendants, les libéralités par actes entre vifs ou testamentaires pourront épuiser la totalité des biens.

 

II. -  Dans l'article 916 du même code, les mots : « A défaut d'ascendants et de descendants » sont remplacés par les mots : « A défaut de descendant, d'ascendant et de conjoint survivant non divorcé et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée ».

Art. 1751. -  Le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l'habitation de deux époux est, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire, et même si le bail a été conclu avant le mariage, réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux.

 

Article 7

I. -  L'article 1751 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

En cas de divorce ou de séparation de corps, ce droit pourra être attribué, en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause, par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation de corps, à l'un des époux, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l'autre époux.

   
   

« En cas de décès d'un des époux, le conjoint survivant cotitulaire du bail dispose d'un droit exclusif sur celui-ci sauf s'il y renonce expressément. »

Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986

 

II. -  Le septième alinéa de l'article 14 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :

Art. 14. -  En cas d'abandon du domicile par le locataire, le contrat de location continue :

-  au profit du conjoint sans préjudice de l'article 1751 du code civil ;

   

-  au profit des descendants qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date de l'abandon du domicile ;

   

-  au profit du partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ;

   

- au profit des ascendants, du concubin notoire ou des personnes à charge, qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date de l'abandon du domicile.

   

Lors du décès du locataire, le contrat de location est transféré :

-  sans préjudice des sixième et septième alinéas de l'article 832 du code civil, au conjoint survivant ;

 

« -  au conjoint survivant qui ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 1751 du code civil ; ».

-  aux descendants qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès ;

   

- au partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ;

   

- au ascendants, au concubin notoire ou aux personnes à charge, qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès.

   

En cas de demandes multiples, le juge se prononce en fonction des intérêts en présence.

   

A défaut de personnes remplissant les conditions prévues au présent article, le contrat de location est résilié de plein droit par le décès du locataire ou par l'abandon du domicile par ce dernier.

   

Code civil

Art. 301. -  En cas de décès de l'un des époux séparés de corps, l'autre époux conserve les droits que la loi accorde au conjoint survivant. Il en est toutefois privé si la séparation de corps est prononcée contre lui suivant les distinctions faites à l'article 265. Lorsque la séparation de corps est prononcée sur demande conjointe, les époux peuvent inclure dans leur convention une renonciation aux droits successoraux qui leur sont conférés par les articles 765 à 767.

Article 4

Article 8

« I. -  Dans la dernière phrase de l'article 301 du code civil, la référence : « 767 » est remplacée par la référence : « 767-8 ».

Art. 1481. -  Si la communauté est dissoute par la mort de l'un des époux, le survivant a droit, pendant les neuf mois qui suivent à la nourriture et au logement, ainsi qu'aux frais de deuil, le tout à la charge de la communauté, en ayant égard tant aux facultés de celle-ci qu'à la situation du ménage.

Les articles 1481 et 1491 du même code sont abrogés.

II. -  L'article 1481 du même code est abrogé.

Ce droit du survivant est exclusivement attaché à sa personne.

   

Art. 1491. -  Les héritiers des époux exercent, en cas de dissolution de la communauté, les mêmes droits que celui des époux qu'ils représentent et sont soumis aux mêmes obligations. Ils ne peuvent, toutefois, se prévaloir des droits résultant de l'article 1481.

 

III. -  La dernière phrase de l'article 1491 du même code est supprimée.

Art. 334. -  L'enfant naturel a en général les mêmes droits et les mêmes devoirs que l'enfant légitime dans ses rapports avec ses père et mère.

   

Il entre dans la famille de son auteur.

 

Article 9

Si, au temps de la conception, le père ou la mère était engagé dans les liens du mariage avec une autre personne, les droits de l'enfant ne peuvent préjudicier que dans la mesure réglée par la loi, aux engagements que, par le fait du mariage, ce parent avait contractés.

 

I. -  Le dernier alinéa de l'article 334 du même code est supprimé.

Art. 913. -  Les libéralités, soit par actes entre vifs, soit par testament, ne pourront excéder la moitié des biens du disposant, s'il ne laisse à son décès qu'un enfant ; le tiers, s'il laisse deux enfants ; le quart, s'il en laisse trois ou un plus grand nombre ; sans qu'il y ait lieu de distinguer entre les enfants légitimes et les enfants naturels, hormis le cas de l'article 915.

 

II. -  A la fin de l'article 913 du même code, les mots : « , hormis le cas de l'article 915 » sont supprimés.

Art. 334-7. -  Dans le cas prévu au troisième alinéa de l'article 334 ci-dessus, l'enfant naturel ne peut être élevé au domicile conjugal qu'avec le consentement du conjoint de son auteur.

 

III. -  Les articles 334-7, 759 à 764, 908, 908-1, 915 à 915-2, 1097 et 1097-1 du même code sont abrogés.

Art. 759. -  Les enfants naturels dont le père ou la mère était, au temps de leur conception, engagé dans les liens du mariage avec une autre personne, n'excluent pas celle-ci de la succession de leur auteur, lorsque, à leur défaut, elle y eût été appelée par application des articles 765 et 766 ci-dessous.

   

En pareil cas, ils ne recevront, quel que soit leur nombre, que la moitié de ce qui, en leur absence, aurait été dévolu au conjoint selon les articles précités, le calcul étant fait ligne par ligne.

   

La répartition de la succession se fixe d'après l'état des vocations héréditaires au jour du décès, nonobstant toutes renonciations ultérieures.

   

Art. 760. -  Les enfants naturels dont le père ou la mère était, au temps de leur conception, engagé dans les liens d'un mariage d'où sont issus des enfants légitimes, sont appelés à la succession de leur auteur en concours avec ces enfants ; mais chacun d'eux ne recevra que la moitié de la part à laquelle il aurait eu droit si tous les enfants du défunt, y compris lui-même, eussent été légitimes.

   

La fraction dont sa part héréditaire est ainsi diminuée accroîtra aux seuls enfants issus du mariage auquel l'adultère a porté atteinte ; elle se divisera entre eux à proportion de leurs parts héréditaires.

   

Art. 761. -  Si le conjoint survivant ou les enfants issus du mariage demandent, à charge de soulte s'il y a lieu, que certains biens de la succession leur soient attribués par préférence dans les conditions de l'article 832, les enfants naturels visés aux deux articles précédents ne pourront s'opposer à cette attribution préférentielle. La même faculté s'étend au local d'habitation dans lequel le ou les demandeurs avaient leur résidence secondaire.

   

Le conjoint peut exercer ce droit lorsqu'il vient à la succession par application, soit de l'article 759, soit de l'article 767, et il peut, dans tous les cas, l'exercer en demandant une attribution préférentielle sur ces mêmes biens en usufruit seulement.

   

Art. 762. -  Dans le cas des articles 759 et 760, le père ou la mère pourra écarter les enfants naturels de toute participation personnelle aux opérations futures de liquidation et de partage, en leur faisant, de son vivant, une attribution suffisante de biens, sous la stipulation expresse qu'elle a lieu en règlement anticipé de leurs droits successoraux.

   

Art. 763. -  L'attribution se fait en la forme des donations. Elle emportera transfert de la propriété par l'acceptation de l'attributaire ou de son représentant légal.

   

Tant qu'elle n'est pas acceptée, elle peut être révoquée ou modifiée par son auteur dans les mêmes formes. Si l'attributaire ne veut ou ne peut en percevoir les revenus, ils seront employés pour son compte et à son nom.

   

L'attribution prend effet à l'ouverture de la succession lorsqu'elle n'a pas été antérieurement acceptée par l'attributaire.

   

Art. 763-1. -  Si, à l'ouverture de la succession, les estimations ayant été faites comme en matière de rapport, il est constaté que la valeur des biens attribués excède les droits successoraux d'un attributaire, ou, à l'inverse, leur est inférieure, il y aura lieu à réduction ou à complément, selon le cas, sans toutefois que les autres héritiers ou l'enfant puisse élever aucune réclamation quant aux revenus perçus en trop ou en moins avant le décès.

   

S'il y a lieu à complément, celui-ci est fourni en argent ou en nature, au gré des autres héritiers.

   

Art. 763-2. -  L'attribution ne vaut règlement anticipé de la succession que si elle confère à un tiers, désigné dans les catégories professionnelles qui seront agréées par décret, le pouvoir exclusif et irrévocable de représenter l'attributaire dans toutes les opérations à venir de liquidation et de partage, ainsi que d'agir et de défendre pour son compte dans toutes les instances qui pourraient s'élever au sujet de ses droits successoraux.

   

Art. 763-3. -  Le tiers constitué par le défunt pour représenter un attributaire est tenu envers celui-ci de toutes les obligations d'un mandataire.

   

Art. 764. -  Si, à l'ouverture de la succession, il n'y a ni conjoint survivant, ni enfant issu du mariage, ou s'ils renoncent, les pouvoirs du représentant cesseront de plein droit, et les attributions seront traitées comme avancements d'hoiries.

   

Art. 908. -  Les enfants naturels ne peuvent rien recevoir par donations entre vifs ou par testament de leur père ou de leur mère au-delà de ce qui leur est accordé par les articles 759 et 760 ci-dessus lorsque le disposant était, au temps de leur conception, engagé dans les liens du mariage avec une autre personne.

   

L'action en réduction ne pourra être exercée, néanmoins, que par le conjoint ou par les enfants issus de ce mariage, selon les cas, et seulement après l'ouverture de la succession.

   

Art. 908-1. -  Les dispositions de l'article précédent sont applicables quand bien même la filiation des gratifiés ne serait pas légalement établie, si par des indices tirés de l'acte lui-même, il est prouvé qu'elle a été la cause de la libéralité.

   

Art. 915. -  Quand un enfant naturel dont le père ou la mère était, au temps de la conception, engagé dans les liens du mariage avec une autre personne, est appelé à la succession de son auteur en concours avec les enfants légitimes issus de ce mariage, il compte par sa présence pour le calcul de la quotité disponible ; mais sa part dans la réserve héréditaire n'est égale qu'à la moitié de celle qu'il aurait eue si tous les enfants, y compris lui-même, eussent été légitimes.

   

La fraction dont sa part dans la réserve est ainsi diminuée accroîtra aux seuls enfants issus du mariage auquel l'adultère a porté atteinte ; elle se divisera entre eux par égales portions.

   

Art. 915-1. -  Quand l'enfant naturel visé à l'article précédent est appelé seul à la succession de son auteur, ou en concours avec d'autres enfants qui ne sont pas issus du mariage auquel l'adultère avait porté atteinte, la quotité disponible en faveur de toute autre personne que le conjoint protégé est celle de l'article 913.

   

Art. 915-2. -  S'il est dans le besoin, l'enfant naturel dont la vocation se trouve réduite par application des articles 759 et 760 peut, contre l'abandon de ses droits aux héritiers, réclamer de la succession une pension alimentaire.

   

Cette pension obéit aux règles de l'article 207-1 du présent code.

   

Les héritiers peuvent, toutefois, écarter cette réclamation en accordant au demandeur une part égale à celle dont il eût bénéficié sans l'application des articles 759 et 760.

   

Art. 1097. -  Si l'époux ne laisse que des enfants naturels qu'il a eus pendant le mariage, il pourra disposer, en faveur de son conjoint, soit des trois quarts de ses biens en propriété, soit de la moitié en propriété et de l'autre moitié en usufruit, soit encore de la totalité en usufruit.

   

S'il laisse à la fois des enfants naturels visés à l'alinéa précédent et d'autres enfants, issus ou non du mariage, il pourra disposer en faveur du conjoint de tout ce dont l'article 1094-1 ci-dessus lui permet de disposer.

   

Art. 1097-1. -  Les enfants naturels conçus pendant le mariage, d'un autre que de l'époux, ne pourront se prévaloir contre celui-ci de la faculté ouverte aux enfants par l'article 1094-2 ci-dessus.

   

 

IV. -  En conséquence, l'intitulé : « Section VI - Des droits successoraux résultant de la filiation naturelle » du chapitre III du titre premier du livre troisième du même code est supprimé.

   

Article 10

« Les articles 1 à 8 de la présente loi entreront en vigueur le premier jour du septième mois suivant la publication de celle-ci au Journal officiel de la République française.

Code général des impôts

Art. 575 et 575 A. - [droit de consommation sur les tabacs manufacturés]

Article 5

Les pertes éventuelles de recettes pour l'Etat engendrées par les dispositions prévues ci-dessus sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 11

(Sans modification).

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article premier [devenu article 2 du texte adopté]

(art. 765 du code civil)

Amendement présenté par M. Jean-Pierre Michel :

Compléter le premier alinéa de cet article par la phrase suivante : « Les droits ouverts au conjoint successible par les articles 766 à 767-6 bénéficient au partenaire lié au défunt par un pacte civil de solidarité. »

(art. 766 du code civil)

Amendement présenté par M. Emile Blessig :

Rédiger ainsi cet article :

« Art. 766. - Si l'époux prédécédé laisse des enfants ou descendants issus de son mariage avec le conjoint survivant, le conjoint peut, à son choix, recueillir l'usufruit de la totalité ou la propriété du quart des biens existants au décès.

« Si le défunt laisse des enfants ou descendants qui ne sont pas issus de son mariage avec le conjoint survivant, celui-ci recueille la propriété du quart des biens existants.

« Si certains enfants ou descendants sont issus du mariage et non les autres, le conjoint peut, à son choix, recueillir l'usufruit des biens existant formant la quotité disponible et la réserve des enfants communs ou le quart de ces biens en pleine propriété.

« Si les enfants ou descendants et le conjoint conviennent de partager autrement les biens existants, ces conventions ne seront pas regardées comme des libéralités entre héritiers. »

(art. 767 du code civil)

Amendement présenté par M. Emile Blessig :

Rédiger ainsi le dernier alinéa de cet article :

« Lorsque le père ou la mère est prédécédé, la part qui lui serait revenue échoit au parent survivant. »

Article 2 [devenu article 3 du texte adopté]

(art. 767-2 du code civil devenu art. 767-4)

Amendement présenté par M. Emile Blessig :

Après les mots : « dépendant totalement de la succession », rédiger ainsi la fin de cet article : « peut demander aux héritiers ou légataires de l'immeuble, et sur leur refus au juge, de lui concéder la jouissance du logement et du mobilier qui le garnit. La concession prend, suivant les cas, la forme d'un droit réel d'usufruit, d'un droit d'usage, d'un droit d'habitation ou d'un bail. »

Article 3 [supprimé par le texte adopté]

(art. 767-7 du code civil)

Amendement présenté par M. André Gerin :

Compléter cet article par les alinéas suivants :

« Lorsque l'habitation était assurée au moyen d'un bail à loyer, le droit au bail est attribué, outre le mobilier, au conjoint survivant dès lors que celui-ci en fait la demande.

« Dans tous les cas, la succession peut être tenue de contribuer au loyer et aux charges de l'habitation dans une proportion que le juge détermine et qu'il peut réviser. »

Après l'article 3

Amendement présenté par M. Emile Blessig :

Insérer l'article suivant :

« Les dispositions de la loi n° du relative aux droits du conjoint survivant ne s'appliquent, en l'absence d'enfants ou de descendants issus de l'union entre le défunt et le conjoint survivant, que si la durée du mariage a été supérieure à trois ans à la date du décès. »

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

- Conseil supérieur du notariat :

· M. Jean-Paul DECORPS, Président honoraire ;

· M. Jacques COMBRET, rapporteur général du congrès sur la famille ;

· M. Didier FROGER, membre du bureau ;

· M. Jean-François PENIGUEL, du service des affaires juridiques ;

· Mme Aude de CHAVAGNAC, chargée des relations avec le Parlement.

- Fédération des associations de conjoints survivants (FAVEC)

· Mme Geneviève LEBOUCHER, administratrice ;

· M. Philippe JAMALI, juriste.

- M. Jean-Pierre GRIDEL, conseiller à la Cour de cassation.

*

* *

2910 - Rapport de M. Alain Vidalies relatif aux droits du conjoint survivant (commission des lois)

() Marie-Claude Catala de Roton, « Les successions entre époux », Economica.

() La réserve est égale à la moitié de la succession si le défunt laisse un enfant ; elle est de 2/3 si le défunt laisse deux enfants et de 3/4 s'il laisse trois enfants ou plus.

Elle est égale à la moitié de la succession si, à défaut d'enfant, le défunt laisse un ou plusieurs ascendants dans chacune des lignes, paternelle et maternelle ; elle représente le quart de la succession si le défunt ne laisse des ascendants que dans une ligne.

() Seuls les biens donnés ou légués à des successibles sans que le défunt exige qu'ils soient rapportés à la succession (on parle alors de biens donnés « par préciput et hors part ») et ceux dont le défunt a disposé au profit d'étrangers sont exclus de la masse de calcul. Il en résulte ainsi que le défunt, en disposant de la totalité de sa succession au profit d'un tiers institué légataire universel a nécessairement privé son conjoint de tout son droit d'usufruit légal (Cass. Civ. I, 25 avril 1984).

() Les avantages qui découlent des conventions matrimoniales et les avantages légaux, tels que l'usufruit sur les droits de propriété littéraire ou artistique ou les avantages accordés à l'époux survivant par la législation sociale, peuvent être cumulés avec l'usufruit successoral.

() Les mutations à titre gratuit entre vifs consenties par actes passés à compter du 1er janvier 2000 et pour les successions ouvertes à compter de cette date bénéficient d'un abattement de 500 000 francs lorsqu'elles sont faites au conjoint mais de 300 000 francs lorsqu'elles sont faites aux enfants.

() Pour l'aménagement de la quotité disponible en présence d'enfant adultérin, voir le commentaire de l'article 9 du texte adopté par la Commission.

() Article 578 du code civil.

() La jurisprudence a admis la conversion de l'usufruit en un capital, qui ne peut toutefois survenir qu'avec l'accord du conjoint survivant (Cass. civ. I, 6 juin 1990).

() Enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 23 décembre 1991.

() Enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 8 février 1995.

() Si les père et mère sont vivants, chacun d'entre eux recueille un quart de la succession, les frères et s_urs ainsi que leurs descendants se partageant l'autre moitié ; si le père ou la mère du défunt est prédécédé, les frères et s_urs ou leurs descendants se partagent les trois quarts de la succession.

() En application de l'article 755 du code civil, « les parents collatéraux au delà du sixième degré ne succèdent pas, à l'exception, toutefois, des descendants des frères et s_urs du défunt ».

() L'article 535 du code civil par renvoi à l'article 534 précise que le mobilier « ne comprend pas l'argent comptant, les pierreries, les dettes actives, les livres, les médailles, les instruments des sciences, des arts et métiers, le linge de corps, les chevaux, équipages, armes, grains, vins, foins et autres denrées ; il ne comprend pas aussi ce qui fait l'objet d'un commerce ».

() Article 1400, paragraphe II du code général des impôts.


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