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le 23 janvier 2002

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N° 3552

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 janvier 2002.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE (1) SUR LA PROPOSITION DE LOI (N° 3522) DE M. JEAN-MARC AYRAULT ET PLUSIEURS DE SES COLLÈGUES, renforçant la lutte contre les différentes formes de l'esclavage aujourd'hui,

PAR MME CHRISTINE LAZERGES,

Députée.

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Droits de l'homme et libertés publiques.

La Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République est composée de : M. Bernard Roman, président ; M. Pierre Albertini, Mme Nicole Feidt, M. Gérard Gouzes, vice-présidents ; M. Richard Cazenave, M. André Gerin, M. Arnaud Montebourg, secrétaires ; M. Léon Bertrand, M. Jean-Pierre Blazy, M. Émile Blessig, M. Jean-Louis Borloo, M. Michel Bourgeois, Mme Danielle Bousquet, M. Michel Buillard, M. Dominique Bussereau, M. Christophe Caresche, M. Patrice Carvalho, Mme Nicole Catala, M. Jean-Yves Caullet, M. Olivier de Chazeaux, M. Pascal Clément, M. Jean Codognès, M. François Colcombet, M. François Cuillandre, M. Henri Cuq, M. Jacky Darne, M. Camille Darsières, M. Francis Delattre, M. Bernard Derosier, M. Franck Dhersin, M. Marc Dolez, M. Renaud Donnedieu de Vabres, M. René Dosière, M. Julien Dray, M. Jean-Pierre Dufau, Mme Laurence Dumont, M. René Dutin, M. Renaud Dutreil, M. Jean Espilondo, M. Roger Franzoni, M. Pierre Frogier, M. Claude Goasguen, M. Philippe Houillon, M. Michel Hunault, M. Michel Inchauspé, M. Henry Jean-Baptiste, M. Armand Jung, M. Jérôme Lambert, Mme Christine Lazerges, Mme Claudine Ledoux, M. Jean Antoine Leonetti, M. Bruno Le Roux, M. Jacques Limouzy, M. Noël Mamère, M. Thierry Mariani, M. Jean-Pierre Michel, M. Ernest Moutoussamy, Mme Véronique Neiertz, M. Robert Pandraud, M. Dominique Perben, Mme Catherine Picard, M. Henri Plagnol, M. Didier Quentin, M. Dominique Raimbourg, M. Jean-Pierre Soisson, M. Frantz Taittinger, M. André Thien Ah Koon, M. Jean Tiberi, M. Alain Tourret, M. André Vallini, M. Michel Vaxès, M. Alain Vidalies, M. Jean-Luc Warsmann.

INTRODUCTION 5

I. - DE NOUVEAUX MOYENS : UN PRÉALABLE INDISPENSABLE AUX MESURES FIGURANT DANS LA PROPOSITION DE LOI 6

A. LE RENFORCEMENT DES MOYENS DES ASSOCIATIONS 6

B. LA CRÉATION DE CENTRES D'ACCUEIL SPÉCIFIQUES 6

II. - LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI 7

A. UNE DÉFINITION DE LA TRAITE 7

a) Une obligation internationale 7

b) Un moyen de mieux lutter contre les réseaux 7

B. L'OCTROI D'UN TITRE DE SÉJOUR 8

a) Une nécessité pour les victimes 8

b) Une possibilité strictement encadrée 8

C. LE RENFORCEMENT DE L'ARSENAL RÉPRESSIF 9

DISCUSSION GÉNÉRALE 9

EXAMEN DES ARTICLES 11

Article premier (art. 225-4-1 à 225-4-7 nouveaux du code pénal) : Définition et répression de la traite des êtres humains 11

Article 2 : Octroi d'un titre de séjour aux victimes de la traite qui coopèrent avec la justice 16

Article 3 (art. 225-20 et 225-21 du code pénal) : Peines complémentaires applicables aux personnes physiques 18

Article 4 (art. 225-25 nouveau du codé pénal) : Confiscation des biens des auteurs des crimes ou délits de traite et de proxénétisme 18

Article 5 (art. 225-13 du code pénal) : Abus de la vulnérabilité de la personne - fourniture de services non rétribués - renforcement des sanctions pénales 19

Article 6 (art. 225-14 du code pénal) : Conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine - renforcement des sanctions pénales 20

Article 7 (art. 225-15 du code pénal) : Délits de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine commis à l'égard de plusieurs personnes - circonstances aggravantes 21

Article 8 (art. 225-16 bis nouveau du code pénal) : Délits de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine - présomption légale de la particulière vulnérabilité de la victime mineure ou étrangère 21

Article 9 (art. 8 du code de procédure pénale) : Aménagement du délai de prescription lorsque les conditions de travail ou d'hébergement sont contraires à la dignité de la personne 22

Articles 10 et 11 (art. 706-30 et 706-36-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Saisie conservatoire en matière de trafic de stupéfiants et de proxénétisme 23

Article 12 (art. L. 611-1 du code du travail) : Extension des pouvoirs de verbalisation des inspecteurs du travail 24

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 27

TABLEAU COMPARATIF 33

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 41

MESDAMES, MESSIEURS,

Il est assez rare, il faut l'avouer, que les conclusions d'une Mission d'information, dont le rapport a été remis le 12 décembre 2001 (1), puissent trouver une traduction législative dans les semaines qui suivent sa présentation, proposant une réforme d'envergure.

Telle est pourtant l'ambition de la présente proposition de loi qui veut faire entrer dans notre droit certaines des mesures préconisées par la Mission d'information sur les différentes formes de l'esclavage moderne. L'importance du sujet traité explique à coup sûr cette singularité. Qu'il y ait aujourd'hui en France, patrie des droits de l'homme, des milliers de femmes et d'hommes traités en esclaves, contraints à se prostituer, à travailler dans des conditions inhumaines au sein de locaux insalubres, qu'il y ait des enfants errant sans repères et pouvant, d'un moment à l'autre, tomber sous la coupe d'exploiteurs, les forçant à piller les horodateurs, à mendier, à vendre leur corps, ne pouvait qu'appeler une réponse déterminée et rapide de la représentation nationale. Les attentes de tous ceux qui vivent au quotidien ces situations intolérables - associations, représentants d'organisations non gouvernementales, victimes bien sûr mais aussi policiers et magistrats - sont telles qu'il fallait impérativement agir - et vite. Il faut dire aussi que les signataires de la proposition de loi ont été encouragés dans leur démarche par la communauté de vues qui a animé les membres de la Mission, toutes appartenances politiques confondues, et a conduit à l'adoption du rapport à l'unanimité. Il a ainsi abouti à l'élaboration d'un nouveau dispositif en faveur des victimes, leur permettant notamment d'échapper aux réseaux qui les exploitent, mais aussi à une volonté de renforcer l'arsenal répressif pour les coupables de ce que la communauté internationale qualifie aujourd'hui de « traite des êtres humains ».

La proposition de loi ne reprend que les dispositions à caractère législatif avancées par la Mission ; certaines d'entre elles, du reste, ont d'ores et déjà été adoptées (2). Mais avant de les détailler, votre rapporteure voudrait insister sur la nécessité de débloquer les moyens nécessaires pour donner toute son efficacité aux mesures proposées.

I. - DE NOUVEAUX MOYENS : UN PRÉALABLE INDISPENSABLE AUX MESURES FIGURANT DANS LA PROPOSITION DE LOI

Il ne s'agit pas ici d'entamer l'antienne trop connue sur l'exigence de moyens supplémentaires pour mettre en _uvre une nouvelle politique, mais l'aide aux victimes, qui passe notamment, comme on le verra ci-après, par la possibilité d'octroi d'un titre de séjour, ne pourra véritablement être mise en _uvre que si elle s'accompagne de deux éléments : un renforcement du rôle des associations et la création de structures d'accueil spécialisées.

A. LE RENFORCEMENT DES MOYENS DES ASSOCIATIONS

Le rapport de la Mission d'information a clairement mis en exergue le rôle déterminant des associations dans l'aide aux victimes de la traite. Ce sont elles qui, au quotidien, et notamment dans le domaine de la prostitution ou de l'esclavage domestique, les approchent, leur proposent dans un premier temps un soutien médical, psychologique... Nombre d'entre elles se débattent ensuite pour faire échapper les victimes à leurs souteneurs ou à leurs employeurs et en sont réduites à trouver des solutions de fortune, notamment pour les cacher. Il n'est pas acceptable que les fonds qui leur sont alloués demeurent aussi précaires qu'ils le sont aujourd'hui. Des financements pluriannuels sont indispensables et ceci d'autant plus que certaines d'entre elles joueront un rôle majeur pour forger un nouveau statut pour les victimes : elles les accueilleront dans des lieux spécifiques (cf. infra) et les accompagneront tout au long de leur parcours administratif, judiciaire, voire professionnel.

B. LA CRÉATION DE CENTRES D'ACCUEIL SPÉCIFIQUES

Avant que de pouvoir envisager l'avenir - dans son pays d'origine ou en France - la victime doit avant tout échapper à ses exploiteurs et prendre le temps de se reconstruire. La Mission d'information a proposé que certains CHRS (centres d'hébergement et de réinsertion sociale) soient spécifiquement affectés à cette tâche. Disséminés sur le territoire, au nombre de quatre ou cinq, ils seraient sécurisés et permettraient à la victime, pendant trois mois, de retrouver des repères. Ce délai est aussi nécessaire pour que le dialogue s'installe avec les associations, permettant éventuellement d'envisager un dépôt de plainte. Des projets ont été élaborés en ce sens par certaines associations ; il importe de les institutionnaliser en leur donnant les moyens matériels, financiers et humains de fonctionner. Ce n'est qu'au terme de cet hébergement que peut être envisagée la procédure d'octroi d'un titre de séjour décrite ci-après (3).

II. - LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI

A. UNE DÉFINITION DE LA TRAITE

a) Une obligation internationale

La multiplication des échanges, la suppression des frontières à l'intérieur de l'espace Schengen, l'appauvrissement et l'instabilité politique de certains pays d'Europe de l'Est ou d'Afrique sont autant de facteurs qui expliquent la multiplication des réseaux s'enrichissant par l'exploitation des êtres humains, qu'il s'agisse d'exploitation sexuelle ou par le travail. Ce phénomène alarmant, qui suscite des profits considérables, a abouti à une prise de conscience internationale tout à la fois de l'insuffisance des moyens mis en _uvre et de la nécessité d'une action commune pour le combattre. C'est ainsi que, s'agissant des Nations-Unies, le premier protocole additionnel à la Convention de décembre 2000 contre le crime transnational organisé (4), signé par la France, contient une définition de la traite qui englobe un ensemble de faits - recrutement, transport, hébergement, accueil des personnes -, mentionne un ensemble de moyens - recours ou menace de recours à la force, fraude, tromperie, abus d'autorité ou d'une situation de vulnérabilité - et décrit les différentes formes d'exploitation.

L'Union européenne, qui, forte de sa cohésion, peut plus facilement envisager un rapprochement des sanctions pénales entre Etats membres dans ce domaine, n'a pas été en reste. Une décision cadre a, en effet, été élaborée et sera adoptée très prochainement, qui propose une définition assez proche de celle retenue à Palerme.

La France ne peut donc qu'intégrer dans son droit cette nouvelle définition, et cette nécessité se révèle d'autant plus impérieuse que son code pénal ne comporte aujourd'hui aucune incrimination spécifique.

b) Un moyen de mieux lutter contre les réseaux

La Mission a clairement souligné les lacunes de notre droit dans ce domaine : « [En effet,] la traite n'est réprimée en France que de façon indirecte, par le biais d'infractions qui n'ont pas été conçues à cette fin et que certains appellent des infractions "relais" comme le proxénétisme, les conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine ou l'aide à l'entrée et au séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire. Or, ces infractions "relais" peuvent se révéler inadaptées ou incomplètes, diminuant ainsi l'efficacité de l'action répressive. »

Entre l'incrimination d'esclavage, crime contre l'humanité figurant à l'article 212-1 du code pénal, inapplicable aux cas individuels (précisément lorsqu'il n'y a pas de plan concerté à l'encontre d'un groupe de population civile), et la faiblesse des peines - lorsqu'elles sont prononcées - punissant les conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine (articles 225-13 et 225-14 du même code), il était indispensable de créer une nouvelle infraction spécifique qui permette d'appréhender véritablement le phénomène et de réprimer ses auteurs.

B. L'OCTROI D'UN TITRE DE SÉJOUR

Votre rapporteure est bien consciente que la possibilité d'octroyer un titre de séjour aux victimes de la traite est la disposition la plus délicate de la proposition de loi ; elle en constitue pourtant la clé de voûte.

a) Une nécessité pour les victimes

Une évidence d'abord : les victimes de la traite sont, dans leur immense majorité, des étrangers en situation irrégulière. C'est même cette insécurité dont savent tirer profit les trafiquants. Poussées, au départ de leur pays, par la pauvreté, les victimes se voient proposer des billets d'avion, des papiers - vrais ou faux - et se doivent ensuite de rembourser les « dettes » qu'elles contractent ainsi. De même, dans les pays où elles sont exploitées, le fait d'être, au bout d'un certain temps, démunies de titre de séjour les maintient à la merci des exploiteurs. La peur de la police, la crainte d'être arrêté et expulsé, sont autant d'armes aux mains des réseaux. Et c'est aussi parce qu'elles sont en situation irrégulière que les victimes sont considérées par la police, par la justice, avant tout comme des délinquantes pour lesquelles on ne peut envisager de solution.

b) Une possibilité strictement encadrée

Il ne s'agit pas de proposer systématiquement des titres de séjour aux étrangers qui se déclareraient victimes, au risque de provoquer un détournement de procédure analogue à celui auquel on a assisté depuis quelques années en matière de droit d'asile. La Mission a d'ailleurs clairement privilégié la voie de l'aide au retour en proposant notamment la création de centres d'accueil dans certains pays d'origine de la traite. Mais il est vrai que certaines victimes, parce qu'elles sont en France depuis longtemps, parce qu'elles ne pourront pas ou ne voudront pas revenir dans leur pays, doivent pouvoir rester ici et se voir reconnaître une place dans notre société.

La procédure choisie par la Mission présente d'incontestables garde-fous, à l'image du système instauré en Belgique, puisqu'elle conditionne l'octroi du titre de séjour à une collaboration avec les services de police et de justice pour poursuivre les auteurs de la traite. Ce sera le cas, dans un premier temps, pour la carte temporaire délivrée à celui ou celle qui dépose plainte ou témoigne contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre la nouvelle infraction de traite. Ce sera également le cas pour l'octroi de la carte de résident qui ne peut s'envisager qu'à l'aboutissement de la procédure judiciaire et sous certaines conditions.

C. LE RENFORCEMENT DE L'ARSENAL RÉPRESSIF

Outre la nouvelle incrimination de la traite, la proposition de loi comporte des dispositions visant à mieux réprimer les infractions dans le domaine du proxénétisme ou du travail clandestin :

-  extension aux affaires de traite et de proxénétisme des dispositifs dérogatoires existant en droit pénal, qui permettent en matière de trafic de stupéfiants et de blanchiment d'argent de procéder à la confiscation de tout ou partie des biens d'un condamné, quelle que soit leur nature ;

-  extension de la procédure de saisie conservatoire prévue en application de l'article 706-30 du code de procédure pénale aux affaires de proxénétisme ;

-  clarification des articles 225-13 et 225-14 du code pénal réprimant les conditions de travail ou d'hébergement contraires à la dignité de la personne, avec une augmentation corrélative du quantum des peines et un aménagement du délai de prescription ;

-  extension des pouvoirs de verbalisation des inspecteurs du travail aux articles pénaux réprimant les conditions de travail contraires à la dignité humaine.

Ces dispositions sont destinées à conforter l'efficacité du dispositif proposé pour lutter contre ce phénomène que l'on croyait appartenir au passé : l'esclavage, sous toutes ses formes.

*

* *

Après l'exposé de la rapporteure, M. Alain Vidalies a souligné que la proposition de loi, reprenant ces conclusions, poursuivait un objectif humanitaire de protection des victimes, tout en s'attachant à améliorer l'efficacité de la lutte contre les réseaux. Il a indiqué, à cet égard, que le travail de la police était rendu particulièrement difficile par l'intégration internationale des réseaux, alors que la coopération internationale et communautaire est encore trop peu développée. Il a ajouté que la proposition de loi devrait permettre de changer le regard porté par l'opinion publique sur les enfants et les femmes victimes d'exploitation, en leur conférant le statut de victime, alors que le droit actuel en fait des délinquants au regard de la législation sur les conditions d'entrée et de séjour des étrangers.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier

(art. 225-4-1 à 225-4-7 nouveaux du code pénal)

Définition et répression de la traite des êtres humains

Cet article a pour objet d'insérer dans le chapitre V du titre II du livre II du code pénal relatif aux atteintes à la dignité des personnes une nouvelle section 1 bis relative à la traite des êtres humains, qui comprendrait les articles 225-4-1 à 225-4-7 nouveaux.

Cette nouvelle section s'insérerait donc avant celles concernant le proxénétisme (section II) et les conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine (section III), ce qui est logique puisque la traite des êtres humains est l'infraction initiale qui débouche sur d'autres infractions contre les personnes, en particulier celles de proxénétisme ou de conditions de travail ou d'hébergement contraires à la dignité humaine.

1. La définition de la traite

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article 225-4-1 prévoit que la traite des êtres humains est le fait, pour quiconque, en échange d'une rémunération ou de tout autre avantage, ou d'une promesse de même nature, « de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir, pour la mettre à la disposition d'un tiers, même non identifié » afin de permettre la commission contre cette personne :

- des infractions de proxénétisme ;

- des infractions de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité ;

- de tout autre crime ou délit.

On observera, tout d'abord, que l'infraction est constituée même si elle est commise au profit d'un tiers non identifié. Cette disposition semble particulièrement opportune au regard des investigations menées par la Mission d'information sur les diverses formes de l'esclavage moderne, qui ont mis en lumière le fait que les responsables de la traite des êtres humains recourraient à de multiples intermédiaires, souvent inconnus les uns des autres, ce qui entrave considérablement le travail d'enquête des services de police et de justice.

Toutefois, le dispositif proposé précise, fort logiquement, que les éléments matériels comme, par exemple, le transport et l'hébergement ne sont constitutifs d'une infraction que si l'individu qui les assure sait, lorsqu'il met la personne transportée ou hébergée à disposition d'un intermédiaire, qu'elle sera ultérieurement victime d'une infraction pénale. En effet, à défaut d'une telle précision, le fait de recruter ou de véhiculer une personne au profit d'un tiers, ce qui peut être le fait d'un cabinet de recrutement international, constituerait une infraction dès lors qu'un délit ou un crime serait ultérieurement commis à l'encontre de cette personne, ce qui serait totalement infondé.

Bien évidemment, le dispositif proposé ne fait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article 121-7 du code pénal qui prévoit qu'est « complice d'un crime et d'un délit, la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation ». Toutefois, l'article 225-4-1 va au-delà puisqu'il permettra d'incriminer des faits intervenus préalablement à la commission des infractions, à la différence des dispositions relatives à la complicité qui ne trouvent lieu de s'appliquer que si le crime ou le délit a d'ores et déjà été commis. En outre, l'incrimination de traite des êtres humains sera applicable dès lors que la personne aura connaissance du caractère illégal des faits qui doivent être perpétrés contre la victime, sans qu'il soit nécessaire qu'elle en connaisse précisément la nature.

S'agissant de la détermination des catégories d'infractions commises contre la victime qui entraînent la constitution du délit de traite, les dispositions de l'article 225-4-1 s'inspirent, d'une part, de l'article 3 du protocole additionnel à la convention des Nations-Unies contre le crime transnational organisé, signée, mais non encore ratifiée, par la France à Palerme en décembre 2000 et, d'autre part, du projet de décision cadre du Conseil de l'Union visant « à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants ». Ces différents instruments internationaux ayant fait l'objet d'une présentation complète dans le rapport de la Mission d'information, il n'est pas nécessaire d'y revenir ici. Néanmoins, on doit souligner que l'article 225-4-1 anticipe sur leur entrée en vigueur dans notre droit interne, tout en proposant une définition du champ matériel de l'infraction de traite des êtres humains substantiellement plus large.

En effet, s'agissant plus particulièrement des dispositions du projet de décision cadre du Conseil, celles-ci ont pour objet la répression de la traite des êtres humains « à des fins d'exploitation de leur travail ou d'exploitation sexuelle ». Or, le dispositif proposé par l'article 225-4-1 ne se limite pas à ces seuls domaines puisque le fait, en échange d'un avantage, de recruter ou de transporter une personne au profit d'un tiers afin de permettre la commission contre cette personne de « tout autre crime ou délit » que ceux de proxénétisme ou de conditions de travail ou d'hébergement contraires à la dignité humaine, est également constitutif du délit de traite.

Le dispositif ainsi proposé risque d'avoir un champ d'application excessivement vaste, incluant des infractions sans aucun lien avec la réalité de la traite des êtres humains. C'est pourquoi, à l'initiative de sa rapporteure, la Commission a modifié la rédaction proposée pour l'article 225-4-1 en supprimant la référence à la commission de « tout crime ou délit » contre la personne victime de la traite tout en complétant la liste des infractions susceptibles d'être commises contre elle par la mention des « atteintes et agressions sexuelles ».

En outre, le texte initial de la proposition de loi ne permettrait pas de sanctionner une personne qui, au profit d'un tiers, en recrute une autre, elle-même contrainte de commettre des délits pour le compte de ce tiers, puisque ces infractions ne seraient pas commises « contre » la personne mais « par » celle-ci. A cet égard, le développement à Paris de groupes organisés de pilleurs d'horodateurs, tous mineurs étrangers, agissant sous la contrainte et au profit de majeurs les ayant recrutés à cette fin, démontre que cette hypothèse n'est pas théorique, loin s'en faut. Toujours sur la proposition de la rapporteure, la Commission a donc complété la définition de la traite en prévoyant que le fait de recruter, pour le compte d'un tiers, une personne afin de la contraindre à commettre un crime ou un délit est également constitutif du délit de traite.

Par ailleurs, le dispositif de l'article 225-4-1 ne précise pas expressément que le consentement de la victime est sans effet sur la constitution de l'infraction de traite, à la différence de ce que prévoit le projet de décision cadre. Or, cette précision n'est pas nécessaire puisque, dès lors que les faits prévus par cet article sont caractérisés, le délit de traite est constitué, indépendamment de l'éventuel consentement ou non de la victime. En effet, comme l'écrivent MM. Roger Merle et André Vitu ; « Les tribunaux n'ont nul besoin d'un texte pour affirmer [...] qu'en principe ni le consentement, ni la tolérance habituelle, ni le pardon de la victime, ne justifient l'infraction pénale. En effet, la répression n'est habituellement pas organisée dans le seul intérêt particulier de telle ou telle victime : elle protège l'intérêt général. Il importe peu dès lors qu'une personne ait accepté qu'une infraction soit commise à son détriment ; elle n'est pas seule en cause. » (5)

Enfin, le dispositif de la proposition de loi ne fait pas mention, aux côtés du transport, de l'hébergement ou du recrutement de la personne de son éventuel enlèvement, contrairement aux disposition du projet de décision cadre. Cependant cette précision n'est pas nécessaire, compte tenu des dispositions de l'article 224-1 du code pénal qui punit de tels faits de vingt ans de réclusion criminelle.

2. Les sanctions encourues

On remarquera d'abord que le régime des sanctions pénales encourues en matière de traite des êtres humains, ainsi que la nature des circonstances aggravantes prévues par le présent article, reprennent très largement les dispositions en vigueur en matière de proxénétisme. Il est, en effet, apparu souhaitable aux auteurs de la proposition de loi de garantir la cohérence du quantum des peines encourues pour ces deux infractions, la première étant, bien souvent, le préalable de la seconde.

a) Les peines correctionnelles

Le second alinéa de l'article 225-4-1 punit la traite des êtres humains de sept ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende, soit des peines identiques à celles encourues en matière de proxénétisme depuis les modifications introduites par la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne (6). On observera que le quantum de peine retenu permettrait la traduction l'auteur des faits devant le tribunal correctionnel selon la procédure de comparution immédiate, ce qui garantit la rapidité et l'efficacité de l'action répressive.

Le nouvel article 225-4-2 porte les peines à dix ans d'emprisonnement lorsque la traite est commise :

- à l'égard d'un mineur ; on remarquera que le quantum de la peine encourue dans cette hypothèse est conforme à ce que recommande le projet de décision cadre qui indique qu'il ne devrait pas être inférieur à huit années d'emprisonnement ;

- à l'égard d'une personne « dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse est apparente ou connue de son auteur », cette rédaction reprenant littéralement les dispositions du 2° de l'article 225-7 du code pénal relatif au proxénétisme aggravé ;

- à l'égard de plusieurs personnes (reprise du 3° de l'article 225-7 précité) ;

- à l'égard d'une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur celui-ci ; compte tenu de la dimension internationale des réseaux de traite, qui recrutent et vendent des personnes afin de les exploiter en dehors de leur pays d'origine, il paraît souhaitable de renforcer en la matière l'action répressive ;

- lorsque la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce « à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications » ; cette rédaction, qui reprend celle du 8° de l'article 225-7 précité, telle qu'elle résulte de la loi n° 98-468 du 17 juin 1998, correspond au cas où il est fait usage des réseaux numériques, et notamment d'Internet, aux fins de la traite des êtres humains.

Afin, d'une part, de mettre le droit français en conformité avec les exigences du projet de décision cadre de l'Union européenne et, d'autre part, de reproduire plus fidèlement, en matière de traite, le régime des circonstances aggravantes applicable en matière de proxénétisme, la Commission a adopté une proposition de la rapporteure tendant à étendre la liste des circonstances aggravantes aux hypothèses suivantes :

- lorsque le délit de traite est commis dans des circonstances qui mettent en danger la vie de la victime ;

- lorsqu'il est fait emploi de contrainte, de violence ou de man_uvre dolosives ;

- lorsque le délit de traite est commis par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la victime ou par une personne ayant autorité sur elle, ou bien par une personne appelée à participer, de par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l'ordre public.

Le montant de l'amende prévue dans ces hypothèses est de 1 500 000 €, ce qui paraît proportionné aux gains générés par la traite des êtres humains. En effet, votre rapporteure rappellera que, selon les indications fournies à la Mission d'information, une jeune femme prostituée en France « rapporte » à un proxénète entre 500 000 francs et 1 million de francs par an, tandis que le seul acheminement des jeunes femmes en provenance des pays de l'Est a généré, en trois ans, un gain d'environ 1,5 milliard de dollars au profit des filières mafieuses.

b) Les peines criminelles

Les faits constitutifs de traite des êtres humains deviennent de nature criminelle, en application des dispositions des articles 225-4-3 et 225-4-4 nouveaux, lorsqu'ils sont commis en bande organisée ou en ayant recours à la torture ou à des actes de barbarie. Les peines encourues sont alors, respectivement portées à vingt ans de réclusion et 3 000 000 € d'amende dans le premier cas et à la réclusion à perpétuité et 4 500 000 € d'amende, dans le second.

Par ailleurs, l'article 225-4-5 prévoit que, lorsque le crime ou le délit commis ou devant l'être contre la personne victime de la traite est puni d'une peine d'emprisonnement supérieure à celle encourue au titre des dispositions des articles 225-4-1 à 225-4-3, l'auteur des faits de traite est passible de la sanction la plus lourde attachée aux crimes ou délits dont il a eu connaissance. Cette disposition, à la rédaction quelque peu complexe, s'inspire notamment de celle de l'article 321-4 du code pénal relatif au recel et procède, d'ailleurs, de la même logique. En effet, dans les deux cas, il s'agit de crimes ou de délits « indirectement » liés aux autres infractions dont la gravité est variable. Or, dans l'hypothèse où l'infraction indirecte est plus sévèrement réprimée que l'infraction de traite, il n'est pas souhaitable que l'auteur de cette dernière bénéficie d'un régime de sanction pénale plus favorable. A titre d'exemple, l'auteur de faits de traite des êtres humains, passible d'une peine d'emprisonnement de 7 ans, mais qui commet ce délit à l'encontre d'une personne ultérieurement victime d'un viol, encourra une peine de quinze ans de réclusion criminelle tout comme l'auteur du viol.

Enfin, la traite des êtres humains étant devenue, pour certains criminels organisés une véritable entreprise qui peut être mise en _uvre par des personnes morales, il importe de prévoir la possibilité d'engager la responsabilité de ces dernières. Tel est l'objet de l'article 225-4-6 nouveau qui prévoit que les personnes morales peuvent être déclarées responsable pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal. Elles encourent alors les peines suivantes :

- une amende, qui peut atteindre le quintuple du montant prévu pour les personnes physiques, soit un maximum de 22,5 millions d'euros si la traite est commise en recourrant à la torture ou à des actes de barbarie ;

- les peines mentionnées à l'article 131-39 du code pénal, c'est-à-dire notamment la dissolution, l'interdiction d'exercer une ou plusieurs activités professionnelles, le placement sous surveillance judiciaire.

Enfin, le nouvel article 225-4-7 prévoit que la tentative de commettre le délit de traite est punie des même peines que le délit lui-même. On observera que cette précision n'a pas à être prévue par la loi en matière criminelle, l'article 121-4 du même code disposant qu'est considéré comme auteur de l'infraction la personne qui tente de commettre un crime.

La Commission a adopté l'article premier ainsi modifié.

Article 2

Octroi d'un titre de séjour aux victimes de la traite
qui coopèrent avec la justice

Le présent article vise à régler la situation inextricable des victimes de la traite qui, comme votre rapporteure a pu l'entendre au cours des diverses auditions réalisées par la Mission d'information et comme elle a pu le constater au cours de ses déplacements sur le terrain avec les associations, sont aujourd'hui, avant tout, considérées comme des personnes délinquantes, des étrangers sans titre qu'on ne peut ni protéger ni assister.

On rappellera que la Mission a souhaité la mise en place d'un dispositif d'accueil d'urgence, sécurisé, qui leur permette de s'échapper des réseaux qui les exploitent. Mais au cours de ce séjour de trois mois dans un CHRS, qui doit les aider à retrouver des repères, à se reconstruire, elles devront aussi envisager l'avenir. Certaines souhaiteront rentrer dans leur pays - et des mesures d'accompagnement doivent être mises en place qui leur apportent certaines garanties -, d'autres voudront rester en France.

Il faut comprendre que les victimes peuvent avoir perdu tout lien avec leur pays, que les traumatismes, les violences qu'elles ont vécus peuvent leur interdire toute idée de retour. La cohérence de la démarche visant à leur accorder un véritable statut impose donc de leur octroyer un titre de séjour.

Le système proposé est proche du système belge, en cela que sa délivrance est subordonnée à la participation de la victime à la procédure répressive. Le bilan de l'expérience menée en Belgique démontre, s'il en était besoin, que la crainte d'un détournement massif de la procédure n'est pas fondée : au total, 673 permis de séjour ont été délivrés depuis six ans à des victimes de la traite.

Pour éviter toute dérive, il procède en deux étapes : un titre de séjour temporaire, renouvelable jusqu'à l'issue de la procédure engagée et sous réserve de la contrôler, une carte de résident à l'issue de celle-ci et sous certaines conditions.

Le paragraphe I du présent article instaure ainsi, dans son premier alinéa, la possibilité pour une victime de la traite de se voir octroyer un titre de séjour, référence étant faite à la « carte de séjour temporaire » telle qu'elle est définie à la section 1 du chapitre II de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Il ne s'agit pas de créer un titre de séjour nouveau mais on observera tout de même que la nouvelle procédure ne s'inscrit pas dans le cadre général de la législation sur les étrangers, tant est spécifique la situation des étrangers concernés (7).

La délivrance de la carte est subordonnée à une demande du procureur de la République ou du juge d'instruction puisqu'elle est conditionnée, ainsi qu'on l'a déjà indiqué, par la volonté de l'étranger victime de coopérer avec les services de police ou de justice dans le cadre de la lutte contre ceux qui l'ont exploité. Cette coopération pourra prendre la forme d'un dépôt de plainte ou d'un témoignage. S'il paraît souhaitable d'ouvrir cette dernière possibilité, c'est parce que, bien souvent, les victimes hésitent à s'adresser à la police et ne veulent pas s'engager dans une plainte, procédure jugée trop contraignante et susceptible de provoquer des représailles des réseaux contre elles-mêmes ou leur famille. La nouvelle procédure prévue par l'article 57 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne sur le témoignage anonyme pourra sans doute être utilisée (8). La plainte ou le témoignage vise les personnes ayant commis l'infraction de traite, nouvellement définie par l'article premier de la présente proposition de loi.

Le présent article prévoit que la carte donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle. On sait que la carte de séjour temporaire figurant à l'article 11 de l'ordonnance précitée a une validité qui ne peut être supérieure à un an ; le présent article prévoit que la carte attribuée dans le cadre de la nouvelle procédure est renouvelée « jusqu'à l'aboutissement de la procédure consécutivement engagée » mais là aussi « à la demande du procureur ou du juge d'instruction », ce qui permettra un contrôle du ministère de l'intérieur, au besoin en liaison avec les associations qui prendront en charge les victimes, sur la véracité des faits dénoncés et l'évolution des poursuites.

Les deux derniers alinéas du paragraphe I règlent la situation de l'étranger victime de la traite après l'aboutissement de la procédure engagée.

C'est ainsi que le second alinéa prévoit que, lorsque la plainte ou le témoignage de l'étranger ont contribué « à la condamnation de la personne mise en cause », la carte de résident prévue à la section II du chapitre II de l'ordonnance du 2 novembre 1945 lui est attribuée. Elle a, comme on le sait, une validité de dix ans et est renouvelable de plein droit.

Le troisième alinéa du paragraphe I règle le cas où la procédure n'a pas abouti à la condamnation de la personne mise en cause. Plusieurs situations peuvent se présenter : le procès s'achève sur un non-lieu - les coupables ayant par exemple quitté le territoire -, la qualité de victime n'est pas retenue par les tribunaux... La proposition de loi prévoit la possibilité d'obtenir tout de même le renouvellement de la carte de séjour temporaire ou la délivrance d'une carte de résident de dix ans mais en soumettant, là encore, leur octroi à des conditions strictes.

C'est ainsi que sa carte de séjour temporaire pourra être renouvelée « s'il justifie d'efforts d'insertion » - qui pourront être corroborés par les associations qui l'auront suivi tout au long de son parcours - et s'il « apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources ».

De même pourra-t-il obtenir « sous les mêmes conditions » une carte de résident, s'il justifie, en outre, « d'une résidence ininterrompue d'au moins trois années en France », ce qui est la règle de droit commun pour l'octroi d'une carte de résident.

Le paragraphe II renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des conditions d'application des nouvelles dispositions. Il conviendra notamment de définir les modalités d'agrément des associations qui géreront les CHRS d'accueil, prendront en charge les victimes et les assisteront tout au long de leur parcours, en les aidant notamment dans leurs démarches auprès des services de police et de justice.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 3

(art. 225-20 et 225-21 du code pénal)

Peines complémentaires applicables aux personnes physiques

Cet article a pour objet de permettre aux juridictions de prononcer, à l'encontre des personnes physiques auteurs du crime ou du délit de traite des êtres humains, les sanctions complémentaires prévues par les articles 225-20 et 225-21 du code pénal relatifs au proxénétisme. A cet effet, il insère la référence à la section 1 bis, créée par l'article premier de la présente proposition, au sein des articles précités du code pénal.

L'auteur du crime ou du délit de traite encourra donc, notamment : l'interdiction des droits civiques, civils et de famille ; l'interdiction de séjour, qui emporte la défense de paraître dans certains lieux déterminés par la juridiction ; l'interdiction d'exploiter, directement ou indirectement, des établissements ouverts au public ; l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, de quitter le territoire de la République. A contrario, un coupable de nationalité étrangère pourra faire l'objet d'une mesure d'interdiction du territoire, soit à titre définitif soit pour une durée de dix ans au plus.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 4

(art. 225-25 nouveau du codé pénal)

Confiscation des biens des auteurs des crimes
ou délits de traite et de proxénétisme

Conformément aux recommandations du rapport de la Mission d'information sur les différentes formes de l'esclavage moderne, cet article insère un article 225-25 nouveau au sein du code pénal, qui tend à autoriser, au titre des peines complémentaires, la confiscation de tout ou partie des biens des auteurs des infractions de traite et de proxénétisme.

En effet, le droit en vigueur en matière de proxénétisme n'autorise que la confiscation des « biens mobiliers ayant servi directement ou indirectement à commettre l'infraction ainsi que les produits de l'infraction détenus par une personne autre que la personne se livrant à la prostitution elle même » (article 225-24 du code pénal).

Afin de renforcer l'efficacité de l'action répressive contre la traite et le proxénétisme, il convient d'élargir la possibilité de prononcer cette mesure à tous les biens, « quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis » ainsi que le précise l'article 225-25, qui s'inspire des dispositions applicables en matière de trafic de stupéfiants (article 222-49 du code pénal) ou de blanchiment (article 324-7 12° du même code).

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 5

(art. 225-13 du code pénal)

Abus de la vulnérabilité de la personne - fourniture de services
non rétribués - renforcement des sanctions pénales

L'article 225-13 du code pénal punit de deux ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende le fait d'obtenir d'une personne « en abusant de sa vulnérabilité, ou de sa situation de dépendance, la fourniture de services non rétribués ou en échange d'une rétribution manifestement sans rapport avec le travail accompli. »

Or, ainsi que l'a clairement souligné le rapport de la Mission d'information, cette disposition fait l'objet d'interprétations jurisprudentielles divergentes, souvent restrictives et, partant, défavorables aux droits des victimes. En effet, pour que ce délit soit caractérisé, il faut, en premier lieu, que la victime soit dans une situation de vulnérabilité ou de dépendance et, en second lieu, que l'auteur des faits abuse de cette situation afin d'obtenir des services gratuits ou rémunérés à un niveau manifestement sans rapport avec l'importance du travail accompli, ce qui constitue un ensemble de conditions souvent difficiles à réunir. En outre, il peut être également déduit a contrario de ces dispositions que le fait d'obtenir des avantages de la part d'une personne dans une situation de vulnérabilité ou de dépendance, sans « abuser » de celle-ci, ne constitue pas un délit, ce qui n'est évidemment pas satisfaisant.

Il faut ajouter que les juridictions ne considèrent pas que la minorité de la victime constitue, par définition, une situation de vulnérabilité, ce que l'on peut regretter. Ainsi, la cour d'appel de Paris a refusé, le 19 octobre 2000, d'appliquer les dispositions des articles 225-13 et 225-14 du code pénal dans une affaire concernant une jeune femme, victime d'une forme d'« esclavage domestique » et mineure au moment des faits. Dans cet arrêt, la Cour indique notamment que « l'état de vulnérabilité ou de dépendance n'est pas établi, la jeune fille, en dépit de son jeune âge, en usant de sa possibilité d'aller et venir à sa guise, de contacter sa famille à tout moment, de quitter le foyer des X pour un temps long, d'y revenir sans contrainte, ayant démontré une forme d'indépendance indéniable, sa vulnérabilité ne pouvant résulter de sa seule extranéité ».

Afin de mieux protéger ce type de victimes, le présent article de la proposition de loi propose, tout d'abord, de remplacer la notion d'abus de la vulnérabilité ou de la situation de dépendance par celle de « particulière vulnérabilité » ou d'« état de dépendance » dès lors que ces éléments sont « apparents ou connus de l'auteur ». Ainsi, il suffira désormais de démontrer que l'auteur avait connaissance de cette situation pour que le délit soit constitué, sans qu'il soit nécessaire de prouver un quelconque « abus » de celle-ci. On remarquera que la rédaction suggérée par la proposition de loi s'inspire des dispositions du 2° de l'article 225-7 du code pénal relatif au proxénétisme aggravé, qui est constitué lorsque l'infraction est commise à l'encontre d'une personne « dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état, de grossesse, est apparente ou connue de l'auteur ».

Ces dispositions doivent être rapprochées de celles de l'article 8 de la présente proposition de loi, qui dispose que les mineurs ou les personnes victimes à leur arrivée sur notre territoire des délits prévus aux articles 225-13 et 225-14 sont considérés comme des personnes « particulièrement vulnérables ». Toutefois, votre rapporteure estime que les conditions ainsi définies risquent d'être interprétées de façon restrictive par les juridictions. C'est pourquoi, sur sa proposition, la Commission a modifié la rédaction de cet article pour ne faire référence qu'à la simple vulnérabilité de la victime.

L'article 5 tend également à augmenter substantiellement le quantum des peines encourues par les auteurs du délit prévu par l'article 225-13, en le portant à cinq ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende. Ce faisant, il adapte le niveau des sanctions pénales à la gravité des faits commis et à leur caractère lucratif, tout en permettant un éventuel placement en détention provisoire de l'auteur qui ne peut être prononcé en matière délictuelle que s'il encourt une peine d'une durée supérieure ou égale à trois ans d'emprisonnement en application des dispositions de l'article l43-1 du code de procédure pénale.

La Commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 6

(art. 225-14 du code pénal)

Conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine -
renforcement des sanctions pénales

L'article 225-14 du code pénal prévoit que le fait de soumettre une personne « en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance, à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine » est puni de deux ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende.

Par cohérence avec les modifications apportées à l'article 225-13 par l'article précédent, cet article remplace la référence à l'abus de vulnérabilité ou de situation de dépendance par une mention de la particulière vulnérabilité ou de l'état de dépendance d'une victime, apparents ou connus de l'auteur de l'infraction. Par coordination, la Commission, sur la proposition de la rapporteure, a également retenu une référence à la simple vulnérabilité de la victime.

De même, le présent article renforce les peines encourues en les portant à cinq ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende.

La Commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 7

(art. 225-15 du code pénal)

Délits de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine commis à l'égard de plusieurs personnes - circonstances aggravantes

Lorsque les délits de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine prévus par les articles 225-13 et 225-14 du code pénal sont commis à l'égard de plusieurs personnes, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende, en application des dispositions de l'article 225-15.

Par cohérence avec les deux précédents articles de la proposition de loi qui ont aggravé les sanctions pénales encourues par les auteurs de délits commis à l'égard d'une seule personne (en les portant à cinq ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende), le présent article fait de même lorsque ces infractions sont commises à l'égard de plusieurs d'entre elles. Dans cette hypothèse, les auteurs sont désormais passibles d'une peine de sept ans d'emprisonnement et de 200 000 € d'amende.

En outre, le présent article complète les dispositions de l'article 225-15 en définissant de nouvelles circonstances aggravantes :

- lorsque les infractions prévues par les articles 225-13 et 225-14 sont commises à l'égard d'un mineur, elles sont punies de sept ans d'emprisonnement et de 200 000 € d'amende ;

- lorsqu'elles sont perpétrées à l'égard de plusieurs personnes parmi lesquelles figurent un ou plusieurs mineurs, elles sont punies de 10 ans d'emprisonnement et de 300 000 € d'amende.

Ces modifications mettent en _uvre les recommandations de la Mission d'information qui a constaté que la plupart des victimes de ce que l'on a coutume d'appeler « l'esclavage domestique » sont mineures au moment des faits et subissent de graves sévices que le régime actuel des sanctions pénales ne permet pas de réprimer de façon suffisante.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Article 8

(art. 225-16 bis nouveau du code pénal)

Délits de conditions de travail et d'hébergement contraires
à la dignité humaine - présomption légale de la particulière vulnérabilité
de la victime mineure ou étrangère

Les investigations menées par la Mission d'information ont clairement établi que la majeure partie des victimes des délits prévus aux articles 225-13 et 225-14 du code pénal étaient étrangères, souvent en situation irrégulière et parfois mineures. Or, c'est précisément leur situation de clandestinité qui les rend vulnérables et permet aux auteurs des délits de commettre leur forfait.

Pourtant, l'analyse de la jurisprudence démontre qu'un mineur ou un étranger, voire un mineur étranger, soumis à des conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine n'est pas de ces seuls faits considéré comme étant en situation de « vulnérabilité ».

C'est pourquoi cet article insère un article 225-16 bis (nouveau) dans le code pénal qui prévoit que sont, notamment, considérées comme « particulièrement vulnérables » au sens des articles 225-13 et 225-14 :

- les mineurs ;

- les personnes qui ont été victimes des faits décrits par ces articles « à leur arrivée sur le territoire national » ; il s'agit ainsi de permettre de poursuivre et de sanctionner des personnes qui recrutent, pour leur propre compte ou le compte de tiers, des ressortissants étrangers afin de les exploiter de façon indigne dès leur arrivée sur notre territoire.

Par coordination avec les modifications qu'elle a apportées aux articles 5 et 6, la Commission, à l'initiative de sa rapporteure, a modifié la rédaction de cet article pour supprimer la référence au caractère « particulièrement » vulnérable de la victime.

Le texte proposé pour l'article 225-16 bis crée ainsi une « présomption légale de vulnérabilité » au profit des catégories de personnes le plus souvent concernées par les délits de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine, pour lesquelles la charge de la preuve est généralement difficile à apporter, notamment en raison de l'obstacle de la langue ou de leur mutisme engendré par la crainte qu'elles éprouvent à l'égard des auteurs des faits.

Au total, la conjonction de ces dispositions et l'aggravation des peines encourues lorsque les victimes se trouvent dans une telle situation de vulnérabilité devrait permettre d'améliorer considérablement la répression de ces délits qui portent atteinte à la dignité humaine.

La Commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 9

(Art. 8 du code de procédure pénale)

Aménagement du délai de prescription lorsque les conditions de travail ou d'hébergement sont contraires à la dignité de la personne

Comme tout délit, les infractions visées aux articles 225-13 et 225-14 du code pénal, qui concernent respectivement, rappelons-le, l'absence ou l'insuffisance de rémunération d'un travail et les conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité de la personne, se prescrivent par trois ans.

Ce délai est apparu insuffisant à la Mission d'information, qui observe que, détruites psychologiquement et souvent physiquement, les victimes de ces infractions, notamment les mineurs, ne parviennent pas à porter plainte rapidement contre leurs tortionnaires.

Afin d'éviter que ces victimes le soient doublement, d'abord de leurs bourreaux et ensuite de la rigueur des règles de prescription, la Mission d'information a proposé, lorsque ces infractions sont commises contre des mineurs, que le délai de trois ans ne commence à courir qu'à compter leur majorité.

C'est pourquoi l'article 9 de la proposition de loi modifie l'article 8 du code de procédure pénale relatif aux règles de prescription en matière délictuelle.

Il complète pour cela le deuxième alinéa de cet article, qui énumère les délits dont la prescription, lorsqu'ils sont commis à l'encontre de mineurs, ne commence à courir qu'à partir de la majorité de ces derniers, afin d'insérer une référence à l'article 225-15, qui sanctionne l'insuffisance de rémunération ou les conditions de travail et d'hébergement d'un mineur contraires à la dignité de la personne (article 7 de la proposition de loi). Il ajoute également à cette liste l'infraction de traite des êtres humains impliquant des mineurs (article 225-4-2).

Les victimes mineures de réseaux de traite ou de conditions de travail contraires à la dignité humaine, comme celles ayant fait l'objet de violences ou d'abus sexuels, pourront donc porter plainte jusqu'à l'âge de 21 ans.

La Commission a adopté cet article sans modification.

Articles 10 et 11

(Art. 706-30 et 706-36-1 [nouveau] du code de procédure pénale)

Saisie conservatoire en matière de trafic de stupéfiants et de proxénétisme

L'article 706-30 du code de procédure pénale met en place une procédure de saisie conservatoire des biens des personnes mises en examen pour trafic de stupéfiants ou blanchiment.

Lorsqu'une information est ouverte pour ces infractions, le président du tribunal de grande instance ou un juge délégué par lui peut, sur requête du procureur de la République, ordonner, aux frais du Trésor et selon les modalités prévues par le code de procédure civile, des mesures conservatoires sur ces biens destinées à garantir le paiement des amendes encourues et l'exécution des mesures de confiscation prévues. En cas de condamnation, les saisies conservatoires sont validées et les sûretés inscrites définitivement. En revanche, la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, tout comme l'extinction de l'action publique, emporte de plein droit mainlevée, aux frais du Trésor, des mesures ordonnées.

L'article 10 de la proposition de loi modifie ces dispositions sur deux points :

-  Il remplace la référence au président du tribunal de grande instance et au juge délégué par un renvoi au juge des libertés et de la détention. Cette substitution est conforme à la logique de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence, qui a créé le juge des libertés et de la détention. Rappelons que, aux termes cette loi, ce magistrat sera chargé de remplacer, à compter du 16 juin 2002, le président du tribunal ou son délégué dans un certain nombre fonctions ayant trait aux libertés individuelles (contrôle des gardes à vue, des perquisitions en matière pénale, fiscale et douanière, de la rétention des étrangers ...).

-  Il confère au juge des libertés et de la détention une compétence nationale pour ordonner ces saisies conservatoires. Les biens des trafiquants n'étant pas forcément situés uniquement dans le ressort du tribunal de grande instance, mais étant souvent répartis sur l'ensemble du territoire national, cette extension de compétence est un gage d'efficacité.

L'article 11 de la proposition de loi met en place un dispositif similaire encas de proxénétisme, conformément aux recommandations de la Mission d'information.

Il insère, pour cela, dans le titre dix-septième du code de procédure pénale consacré à la poursuite, à l'instruction et au jugement des infractions en matière de proxénétisme un nouvel article 706-36-1 qui reprend, au mot près, les dispositions de l'article 706-30, en intégrant les modifications apportées par l'article 10.

La Commission a adopté les articles 9 et 10 sans modification.

Article 12

(Art. L. 611-1 du code du travail)

Extension des pouvoirs de verbalisation des inspecteurs du travail

L'article L. 611-1 du code du travail confie aux inspecteurs du travail la Mission de veiller à l'application des dispositions du code du travail et des lois et règlements relatives au régime du travail et de constater, avec les agents et les officies de police judiciaire, les infractions à ces dispositions.

Cet article les autorise également à constater certaines infractions au code de la sécurité sociale ainsi que celles au principe de non discrimination dans le travail visées au 3° de l'article 225-2 du code pénal.

Afin de permettre une meilleure répression des infractions d'absence ou d'insuffisance de rémunération d'un travail (article 225-13 du code pénal) et de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine (article 225-14 du même code), la Mission d'information a proposé d'étendre la compétence des inspecteurs du travail à la constatation de ces infractions.

L'article 12 de la proposition de loi complète donc l'article L. 611-1 du code du travail afin d'insérer une référence à ces infractions, y compris lorsqu'elles sont accompagnées de circonstances aggravantes.

On observera, toutefois, qu'en application du troisième alinéa de l'article L. 611-8 de ce code, les inspecteurs du travail ne pourront constater ces infractions dans les locaux d'habitation qu'après avoir reçu l'autorisation d'y pénétrer par les personnes qui les occupent.

La Commission a adopté cet article sans modification.

La Commission a ensuite adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter la proposition de loi dans le texte ci-après.

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Proposition de loi renforçant la lutte
contre les différentes formes de l'esclavage aujourd'hui

Article premier

Sont insérés après l'article 225-4 du code pénal une section et sept articles ainsi rédigés :

« Section 1 bis. - De la traite des êtres humains

« Art. 225-4-1. - La traite des êtres humains est le fait, en échange d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage, de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir, pour la mettre à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin, soit de permettre la commission contre cette personne des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteinte sexuelles, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre cette personne à commettre tout crime ou délit.

« La traite des êtres humains est punie de 7 ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende.

« Art. 225-4-2. -  L'infraction prévue à l'article 225-4-1 est punie de dix ans d'emprisonnement et 1 500 000 € d'amende lorsqu'elle est commise :

« 1° à l'égard d'un mineur ;

« 2° à l'égard d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;

« 3° à l'égard de plusieurs personnes ;

« 4° à l'égard d'une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur le territoire de la République ;

« 5° lorsque la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications ;

« 6° dans des circonstances qui exposent directement la personne à l'égard de laquelle l'infraction est commise à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;

« 7° avec l'emploi de contrainte, de violences ou de man_uvres dolosives ;

« 8° par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la personne victime de l'infraction prévue à l'article 225-4-1 ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

« 9° par une personne appelée à participer, de par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l'ordre public. 

« Art. 225-4-3. - L'infraction prévue à l'article 225-4-1 est punie de vingt ans de réclusion criminelle et de 3 000 000 € d'amende lorsqu'elle est commise en bande organisée.

« Art. 225-4-4. - L'infraction prévue à l'article 225-4-1 commise en recourant à des tortures ou des actes de barbarie est punie de la réclusion criminelle à perpétuité et de 4 500 000 € d'amende.

« Art. 225-4-5. - Lorsque le crime ou le délit qui a été commis ou qui devait être commis contre la personne victime de l'infraction de traite des êtres humains est puni d'une peine privative de libertés d'une durée supérieure à celle de l'emprisonnement encouru en application des articles 225-4-1 à 225-4-3, l'infraction de traite des êtres humains est punie des peines attachées aux crimes ou aux délits dont son auteur a eu connaissance et, si ce crime ou délit est accompagné de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances aggravantes dont il a eu connaissance.

« Art. 225-4-6. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions prévues à la présente section. Les peines encourues par les personnes morales sont :

« 1° l'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;

« 2° les peines mentionnées à l'article 131-39.

« Art. 225-4-7. - La tentative des délits prévus à la présente section est punie des mêmes peines. »

Article 2

I. - La carte de séjour temporaire prévue à la section I du chapitre II de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est délivrée, à la demande du procureur de la République ou du juge d'instruction, à l'étranger qui dépose une plainte ou témoigne contre une personne qu'elle accuse d'avoir commis à son encontre l'infraction visée à l'article 225-4-1 du code pénal. Cette carte donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle. A la demande du procureur de la République ou du juge d'instruction, elle est renouvelée jusqu'à l'aboutissement de la procédure consécutivement engagée.

La carte de résident prévue à la section II du chapitre II de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée est délivrée à l'étranger dont le témoignage ou la plainte, déposés dans les conditions visées au premier alinéa, ont contribué à la condamnation de la personne mise en cause.

Si la procédure n'aboutit pas à la condamnation de la personne mise en cause, la carte de séjour temporaire de l'étranger ayant témoigné ou déposé une plainte dans les conditions visées au premier alinéa est renouvelable s'il justifie d'efforts d'insertion et apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources. Une carte de résident peut également lui être délivrée, sous les mêmes conditions, s'il justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins trois années en France.

II. - Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent article. Il détermine notamment les modalités d'intervention dans la procédure qu'il met en _uvre d'associations qui se proposent par leurs statuts d'assister les victimes.

Article 3

I. - Dans le premier alinéa de l'article 225-20 du code pénal, les mots : « la section 2 » sont remplacés par les mots : « les sections 1 bis et 2 ».

II. - Dans l'article 225-21 du code pénal, les mots : « à la section 2 » sont remplacés par les mots : « aux sections 1 bis et 2 ».

Article 4

Il est inséré après l'article 225-24 du code pénal un article 225-25 ainsi rédigé :

« Art. 225-25. - Les personnes physiques et morales reconnues coupables des infractions prévues aux sections 1 bis et 2 du présent chapitre encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »

Article 5

Dans l'article 225-13 du code pénal, les mots : « en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance » sont remplacés par les mots : « dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur » et les mots : « deux ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende » sont remplacés par les mots : « cinq ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende ».

Article 6

Dans l'article 225-14 du code pénal, les mots : « « en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance » sont remplacés par les mots : « dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur » et les mots : « deux ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende » sont remplacés par les mots : « cinq ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende ».

Article 7

I. - Dans l'article 225-15 du code pénal, les mots : « cinq ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende » sont remplacés par les mots : « sept ans d'emprisonnement et de 200 000 € d'amende ».

II. - Le même article est complété par les alinéas suivants :

« Lorsqu'elles sont commises à l'égard d'un mineur, elles sont punies de sept ans d'emprisonnement et de 200 000 € d'amende.

« Lorsqu'elles sont commises à l'égard de plusieurs personnes parmi lesquelles figurent un ou plusieurs mineurs, elles sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 300 000 € d'amende. »

Article 8

Il est inséré, après l'article 225-16 du code pénal un article 225-16 bis ainsi rédigé :

« Art. 225-16 bis. - Pour l'application des dispositions des articles 225-13 et 225-14, sont notamment considérés comme des personnes vulnérables ou en situation de dépendance, les mineurs ou les personnes qui ont été victimes des faits décrits par ces articles à leur arrivée sur le territoire national. »

Article 9

Dans l'article 8 du code de procédure pénale, après la référence : « 222-30, », est insérée la référence : « 225-4-2, » et après la référence : « 225-7, », est insérée la référence : « 225-15, ».

Article 10

I. - Dans le premier alinéa de l'article 706-30 du code de procédure pénale, les mots : « le président du tribunal de grande instance ou un juge délégué par lui » sont remplacés par les mots : « le juge des libertés et de la détention ».

II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l'application des dispositions du présent article, le juge des libertés et de la détention est compétent sur l'ensemble du territoire national. »

Article 11

Il est inséré, après l'article 706-36 du code de procédure pénale, un article 706-36-1 ainsi rédigé :

« Art. 706-36-1. - En cas d'information ouverte pour une infraction entrant dans le champ d'application de l'article 706-34 et afin de garantir le paiement des amendes encourues ainsi que, le cas échéant, la confiscation prévue par l'article 225-25 du code pénal, le juge des libertés et de la détention, sur requête du procureur de la République peut ordonner, aux frais avancés du Trésor et selon les modalités prévues par le code de procédure civile, des mesures conservatoires sur les biens de la personne mise en examen.

« La condamnation vaut validation des saisies conservatoires et permet l'inscription définitive des sûretés.

« La décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d'extinction de l'action publique.

« Pour l'application des dispositions du présent article, le juge des libertés et de la détention est compétent sur l'ensemble du territoire national. »

Article 12

Le deuxième alinéa de l'article L. 611-1 du code du travail est complété par les mots : « et les infractions prévues par les articles 225-13 à 225-16 bis du code pénal. »

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte de référence

___

Conclusions de la Commission

___

 

Article 1er

Sont insérés après l'article 225-4 du code pénal une section et sept articles ainsi rédigés :

 

« Section 1 bis. -  De la traite des êtres humains

 

« Art. 225-4-1. - La traite des êtres humains est le fait, en échange d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage, de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir, pour la mettre à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin, soit de permettre la commission contre cette personne des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteinte sexuelles, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre cette personne à commettre tout crime ou délit.

 

« La traite des êtres humains est punie de 7 ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende.

 

« Art. 225-4-2. -  L'infraction prévue à l'article 225-4-1 est punie de dix ans d'emprisonnement et 1 500 000 € d'amende lorsqu'elle est commise :

 

« 1° à l'égard d'un mineur ;

 

« 2° à l'égard d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;

 

« 3° à l'égard de plusieurs personnes ;

 

« 4° à l'égard d'une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur le territoire de la République ;

 

« 5° lorsque la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications ;

 

« 6° dans des circonstances qui exposent directement la personne à l'égard de laquelle l'infraction est commise à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;

 

« 7° avec l'emploi de contrainte, de violences ou de man_uvres dolosives ;

 

« 8° par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la personne victime de l'infraction prévue à l'article 225-4-1 ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

 

« 9° par une personne appelée à participer, de par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l'ordre public. 

 

« Art. 225-4-3. -  L'infraction prévue à l'article 225-4-1 est punie de vingt ans de réclusion criminelle et de 3 000 000 € d'amende lorsqu'elle est commise en bande organisée.

 

« Art. 225-4-4. -  L'infraction prévue à l'article 225-4-1 commise en recourant à des tortures ou des actes de barbarie est punie de la réclusion criminelle à perpétuité et de 4 500 000 € d'amende.

 

« Art. 225-4-5. -  Lorsque le crime ou le délit qui a été commis ou qui devait être commis contre la personne victime de l'infraction de traite des êtres humains est puni d'une peine privative de libertés d'une durée supérieure à celle de l'emprisonnement encouru en application des articles 225-4-1 à 225-4-3, l'infraction de traite des êtres humains est punie des peines attachées aux crimes ou aux délits dont son auteur a eu connaissance et, si ce crime ou délit est accompagné de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances aggravantes dont il a eu connaissance.

Code pénal

Art. 121-2. -  Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 et dans les cas prévus par la loi ou le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.

« Art. 225-4-6. -  Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions prévues à la présente section. Les peines encourues par les personnes morales sont :

Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public.

 

La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article 121-3.

 

Art. 131-38. -  Le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime l'infraction.

« 1° l'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;

Art. 131-39. -  Lorsque la loi le prévoit à l'encontre d'une personne morale, un crime ou un délit peut être sanctionné d'une ou de plusieurs des peines suivantes :

« 2° les peines mentionnées à l'article 131-39.

1° La dissolution, lorsque la personne morale a été créée ou, lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit puni en ce qui concerne les personnes physiques d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans, détournée de son objet pour commettre les faits incriminés ;

 

2° L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ;

 

3° Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;

 

4° La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;

 

5° L'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;

 

6° L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de faire appel public à l'épargne ;

 

7° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d'utiliser des cartes de paiement ;

 

8° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit ;

 

9° L'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle.

 

Les peines définies aux 1° et 3° ci-dessus ne sont pas applicables aux personnes morales de droit public dont la responsabilité pénale est susceptible d'être engagée. Elles ne sont pas non plus applicables aux partis ou groupements politiques ni aux syndicats professionnels. La peine définie au 1° n'est pas applicable aux institutions représentatives du personnel.

 
 

« Art. 225-4-7. -  La tentative des délits prévus à la présente section est punie des mêmes peines. »

   

Ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945
relative aux conditions d'entrée et de séjour
des étrangers en France

Chapitre II, section I. -  Cf. annexe.

Article 2

I. -  La carte de séjour temporaire prévue à la section I du chapitre II de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est délivrée, à la demande du procureur de la République ou du juge d'instruction, à l'étranger qui dépose une plainte ou témoigne contre une personne qu'elle accuse d'avoir commis à son encontre l'infraction visée à l'article 225-4-1 du code pénal. Cette carte donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle. A la demande du procureur de la République ou du juge d'instruction, elle est renouvelée jusqu'à l'aboutissement de la procédure consécutivement engagée.

Chapitre II, section II. -  Cf. annexe.

La carte de résident prévue à la section II du chapitre II de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée est délivrée à l'étranger dont le témoignage ou la plainte, déposés dans les conditions visées au premier alinéa, ont contribué à la condamnation de la personne mise en cause.

 

Si la procédure n'aboutit pas à la condamnation de la personne mise en cause, la carte de séjour temporaire de l'étranger ayant témoigné ou déposé une plainte dans les conditions visées au premier alinéa est renouvelable s'il justifie d'efforts d'insertion et apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources. Une carte de résident peut également lui être délivrée, sous les mêmes conditions, s'il justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins trois années en France.

 

II. -  Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent article. Il détermine notamment les modalités d'intervention dans la procédure qu'il met en _uvre d'associations qui se proposent par leurs statuts d'assister les victimes.

Code pénal

Art. 225-20. -  Les personnes physiques coupables des infractions prévues par la section 2 du présent chapitre encourent également les peines complémentaires suivantes :

Article 3

I. -  Dans le premier alinéa de l'article 225-20 du code pénal, les mots : « la section 2 » sont remplacés par les mots : « les sections 1 bis et 2 ».

1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues par l'article 131-26 ;

 

2° L'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, suivant les modalités prévues par l'article 131-27 ;

 

3° L'interdiction de séjour ;

 

4° L'interdiction d'exploiter, directement ou indirectement, les établissements ouverts au public ou utilisés par le public énumérés dans la décision de condamnation, d'y être employé à quelque titre que ce soit et d'y prendre ou d'y conserver une quelconque participation financière ;

 

5° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation ;

 

6° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, de quitter le territoire de la République.

 

Art. 225-21. -  L'interdiction du territoire français peut être prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable de l'une des infractions définies à la section 2 du présent chapitre.

II. -  Dans l'article 225-21 du code pénal, les mots : « à la section 2 » sont remplacés par les mots : « aux sections 1 bis et 2 ».

Chapitre V. -  Des atteintes
à la dignité de la personne

Section 1 bis. -  Cf. supra art. 1er de la proposition de loi.

Section 2. -  Cf. annexe.

Article 4

Il est inséré après l'article 225-24 du code pénal un article 225-25 ainsi rédigé :

« Art. 225-25. -  Les personnes physiques et morales reconnues coupables des infractions prévues aux sections 1 bis et 2 du présent chapitre encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »

Art. 225-13. -  Le fait d'obtenir d'une personne, en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance, la fourniture de services non rétribués ou en échange d'une rétribution manifestement sans rapport avec l'importance du travail accompli est puni de deux ans d'emprisonnement et de 500 000 F d'amende.

Article 5

Dans l'article 225-13 du code pénal, les mots : « en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance » sont remplacés par les mots : « dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur » et les mots : « deux ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende » sont remplacés par les mots : « cinq ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende ».

Art. 225-14. -  Le fait de soumettre une personne, en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance, à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine est puni de deux ans d'emprisonnement et de 500 000 F d'amende.

Article 6

Dans l'article 225-14 du code pénal, les mots : « « en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance » sont remplacés par les mots : « dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur » et les mots : « deux ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende » sont remplacés par les mots : « cinq ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende ».

Art. 225-15. -  Les infractions définies aux articles 225-13 et 225-14 sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 1 000 000 F d'amende lorsqu'elles sont commises à l'égard de plusieurs personnes.

Article 7

I. -  Dans l'article 225-15 du code pénal, les mots : « cinq ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende » sont remplacés par les mots : « sept ans d'emprisonnement et de 200 000 € d'amende ».

 

II. -  Le même article est complété par les alinéas suivants :

 

« Lorsqu'elles sont commises à l'égard d'un mineur, elles sont punies de sept ans d'emprisonnement et de 200 000 € d'amende.

 

« Lorsqu'elles sont commises à l'égard de plusieurs personnes parmi lesquelles figurent un ou plusieurs mineurs, elles sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 300 000 € d'amende. »

 

Article 8

Il est inséré, après l'article 225-16 du code pénal un article 225-16 bis ainsi rédigé :

Art. 225-13 et 225-14. -  Cf. supra art. 5 et 6 de la proposition de loi.

« Art. 225-16 bis. -  Pour l'application des dispositions des articles 225-13 et 225-14, sont notamment considérés comme des personnes vulnérables ou en situation de dépendance, les mineurs ou les personnes qui ont été victimes des faits décrits par ces articles à leur arrivée sur le territoire national. »

Code de procédure pénale

Art. 8. -  En matière de délit, la prescription de l'action publique est de trois années révolues ; elle s'accomplit selon les distinctions spécifiées à l'article précédent.

Le délai de prescription de l'action publique des délits commis contre des mineurs prévus et réprimés par les articles 222-9, 222-11 à 222-15, 222-27 à 222-30, 225-7, 227-22 et 227-25 à 227-27 du code pénal ne commence à courir qu'à partir de la majorité de ces derniers.

Article 9

Dans l'article 8 du code de procédure pénale, après la référence : « 222-30, », est insérée la référence : « 225-4-2, » et après la référence : « 225-7, », est insérée la référence : « 225-15, ».

Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, le délai de prescription est de dix ans lorsque la victime est mineure et qu'il s'agit de l'un des délits prévus aux articles 222-30 et 227-26 du code pénal.

 

Art. 706-30. -  En cas d'information ouverte pour infraction aux articles 222-34 à 222-38, 324-1 et 324-2 du code pénal, et afin de garantir le paiement des amendes encourues, ainsi que l'exécution de la confiscation prévue au deuxième alinéa de l'article 222-49 et au 12° de l'article 324-7 du code pénal, le président du tribunal de grande instance ou un juge délégué par lui, sur requête du procureur de la République, peut ordonner, aux frais avancés du Trésor et selon les modalités prévues par le code de procédure civile, des mesures conservatoires sur les biens de la personne mise en examen.

Article 10

I. -  Dans le premier alinéa de l'article 706-30 du code de procédure pénale, les mots : « le président du tribunal de grande instance ou un juge délégué par lui » sont remplacés par les mots : « le juge des libertés et de la détention ».

La condamnation vaut validation des saisies conservatoires et permet l'inscription définitive des sûretés.

 

La décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d'extinction de l'action publique.

 
 

II. -  Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

 

« Pour l'application des dispositions du présent article, le juge des libertés et de la détention est compétent sur l'ensemble du territoire national. »

 

Article 11

Il est inséré, après l'article 706-36 du code de procédure pénale, un article 706-36-1 ainsi rédigé :

Art. 736-34. -  Les infractions prévues par les articles 225-5 à 225-10 du code pénal, ainsi que le délit de participation à une association de malfaiteurs prévu par l'article 450-1 du même code lorsqu'il a pour objet de préparer l'une de ces infractions, sont poursuivies, instruites et jugées selon les règles du présent code, sous réserve des dispositions du présent titre.

Code pénal

Art. 225-25. -  Cf. supra art. 4 de la proposition de loi.

« Art. 706-36-1. -  En cas d'information ouverte pour une infraction entrant dans le champ d'application de l'article 706-34 et afin de garantir le paiement des amendes encourues ainsi que, le cas échéant, la confiscation prévue par l'article 225-25 du code pénal, le juge des libertés et de la détention, sur requête du procureur de la République peut ordonner, aux frais avancés du Trésor et selon les modalités prévues par le code de procédure civile, des mesures conservatoires sur les biens de la personne mise en examen.

 

« La condamnation vaut validation des saisies conservatoires et permet l'inscription définitive des sûretés.

 

« La décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d'extinction de l'action publique.

 

« Pour l'application des dispositions du présent article, le juge des libertés et de la détention est compétent sur l'ensemble du territoire national. »

Code du travail

Art. L. 611-1. -  Les inspecteurs du travail sont chargés de veiller à l'application des dispositions du code du travail et des lois et règlements non codifiés relatifs au régime du travail, ainsi qu'à celles des conventions et accords collectifs de travail répondant aux conditions fixées au titre III du livre 1er dudit code. Ils sont également chargés, concurremment avec les agents et officiers de police judiciaire, de constater, s'il y échet, les infractions à ces dispositions.

Ils constatent, en outre, les infractions aux dispositions des articles L. 431, L. 472, deuxième alinéa, et L. 473, alinéa premier, du code de la sécurité sociale ainsi que les infractions définies au 3° et au 6° de l'article 225-2 du code pénal.

Article 12

Le deuxième alinéa de l'article L. 611-1 du code du travail est complété par les mots : « et les infractions prévues par les articles 225-13 à 225-16 bis du code pénal. ».

Dans les cas expressément prévus par la loi ou le règlement, ces attributions peuvent être exercées par des fonctionnaires de contrôle assimilés.

 

Un décret contresigné par le ministre chargé du travail et par le garde des sceaux, ministre de la justice, détermine les modalités de contrôle de l'application des dispositions du présent code aux salariés des offices publics et ministériels, des professions libérales, des sociétés civiles, des syndicats professionnels et associations de quelque nature que ce soit.

 
   

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Article 2

Ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945
relative aux conditions d
'entrée et de séjour des étrangers en France

Chapitre II : Des différentes catégories d'étrangers selon les titres qu'ils détiennent

Section 1 : Des étrangers titulaires de la carte de séjour temporaire

Art. 10 -  Abrogé.

Art. 11. -  La durée de validité de la carte de séjour temporaire ne peut être supérieure à un an et ne peut dépasser la durée de validité des documents et visas mentionnés à l'article 5 de la présente ordonnance.

L'étranger doit quitter la France à l'expiration de la durée de validité de sa carte à moins qu'il n'en obtienne le renouvellement ou qu'il ne lui soit délivré une carte de résident.

Art. 12. -  La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources et qui prend l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle soumise à autorisation porte la mention "visiteur".

La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant".

La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger sous réserve d'une entrée régulière pour lui permettre de mener des travaux de recherche ou de dispenser un enseignement de niveau universitaire porte la mention "scientifique".

La carte de séjour temporaire délivrée à un artiste-interprète tel que défini par l'article L. 212-1 du code de la propriété intellectuelle ou à un auteur d'_uvre littéraire ou artistique visée à l'article L. 112-2 du même code, titulaire d'un contrat de plus de trois mois passé avec une entreprise ou un établissement dont l'activité principale comporte la création ou l'exploitation d'une _uvre de l'esprit, porte la mention "profession artistique et culturelle" » ;

La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui, désirant exercer en France une activité professionnelle soumise à autorisation, justifie l'avoir obtenue porte la mention de cette activité, conformément aux lois et règlements en vigueur.

La carte de séjour temporaire peut être refusée à tout étranger dont la présence constitue une menace pour l'ordre public.

La carte de séjour temporaire peut être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, en infraction avec l'article L 341-6 du code du travail.

Art. 12 bis. -  Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit :

1° A l'étranger mineur, ou dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, dont l'un des parents au moins est titulaire de la carte de séjour temporaire, ainsi qu'à l'étranger entré régulièrement sur le territoire français dont le conjoint est titulaire de cette carte, s'ils ont été autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial ;

2° A l'étranger mineur, ou dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qui justifie par tout moyen avoir sa résidence habituelle en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ;

3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ;

4° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ;

5° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, marié à un ressortissant étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "scientifique" à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière ;

6° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité de père ou de mère d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, la carte de séjour temporaire n'est délivrée à l'étranger que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ;

7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;

8° A l'étranger né en France, qui justifie par tout moyen y avoir résidé pendant au moins huit ans de façon continue, et suivi, après l'âge de dix ans, une scolarité d'au moins cinq ans dans un établissement scolaire français, à la condition qu'il fasse sa demande entre l'âge de seize et vingt et un ans ;

9° A l'étranger titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 % ;

10° A l'étranger qui a obtenu le statut d'apatride en application de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, ainsi qu'à son conjoint et à ses enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire, lorsque le mariage est antérieur à la date de cette obtention ou, à défaut, lorsqu'il a été célébré depuis au moins un an sous réserve d'une communauté de vie effective entre les époux ;

11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire.

La carte délivrée au titre du présent article donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle.

Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° ci-dessus est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé.

Art. 12 ter. -  Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l'article 12 bis est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu l'asile territorial en application de l'article 13 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 précitée ainsi qu'à son conjoint et à ses enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire lorsque le mariage est antérieur à la date de cette obtention ou, à défaut, lorsqu'il a été célébré depuis au moins un an, sous réserve d'une communauté de vie effective entre époux.

La carte délivrée au titre du présent article donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle

Art. 12 quater. -  Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour, composée :

-  du président du tribunal administratif ou d'un conseiller délégué, président ;

-  d'un magistrat désigné par l'assemblée générale du tribunal de grande instance du chef-lieu du département ;

-  d'une personnalité qualifiée désignée par le préfet pour sa compétence en matière sociale.

Dans les départements de plus de 500 000 habitants, une commission peut être instituée dans un ou plusieurs arrondissements.

La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15.

L'étranger est convoqué par écrit au moins quinze jours avant la date de la réunion de la commission qui doit avoir lieu dans les trois mois qui suivent sa saisine ; il peut être assisté d'un conseil ou de toute personne de son choix et être entendu avec un interprète. L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle dans les conditions prévues par la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, cette faculté étant mentionnée dans la convocation ; l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par le président de la commission.

S'il ne dispose pas d'une carte de séjour temporaire ou si celle-ci est périmée, l'étranger reçoit, dès la saisine de la commission, un récépissé valant autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait statué.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables dans le département de la Guyane, ni dans la commune de Saint-Martin (Guadeloupe) pendant une durée de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile.

Art. 13. -  Sous réserve des obligations internationales de la France, l'octroi de la carte de séjour temporaire peut être subordonné à la production par l'étranger d'un visa de séjour d'une durée supérieure à trois mois.

Section 2 : Des étrangers titulaires de la carte de résident.

Art. 14. -  Peuvent obtenir une carte dite "carte de résident" les étrangers qui justifient d'une résidence non interrompue, conforme aux lois et règlements en vigueur, d'au moins trois années en France.

La décision d'accorder ou de refuser la carte de résident est prise en tenant compte des moyens d'existence dont l'étranger peut faire état, parmi lesquels les conditions de son activité professionnelle et, le cas échéant, des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France.

La carte de résident peut être refusée à tout étranger dont la présence constitue une menace pour l'ordre public.

Art. 15. -  Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour :

1° A l'étranger marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ;

2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge ;

3° A l'étranger qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins ;

4° A l'étranger titulaire d'une rente d'accident de travail ou de maladie professionnelle versée par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 % ainsi qu'aux ayants droit d'un étranger, bénéficiaires d'une rente de décès pour accident de travail ou maladie professionnelle versée par un organisme français ;

5° Au conjoint et aux enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire d'un étranger titulaire de la carte de résident, qui ont été autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial ;

6° A l'étranger ayant servi dans une unité combattante de l'armée française ;

7° A l'étranger ayant effectivement combattu dans les rangs des forces françaises de l'intérieur, titulaire du certificat de démobilisation délivré par la commission d'incorporation de ces formations dans l'armée régulière ou qui, quelle que soit la durée de son service dans ces mêmes formations, a été blessé en combattant l'ennemi ;

8° A l'étranger qui a servi en France dans une unité combattante d'une armée alliée ou qui, résidant antérieurement en territoire français, a également combattu dans les rangs d'une armée alliée ;

9° A l'étranger ayant servi dans la Légion étrangère, comptant au moins trois ans de services dans l'armée française, titulaire du certificat de bonne conduite ;

10° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 portant création d'un Office français de protection des réfugiés et apatrides, ainsi qu'à son conjoint et à ses enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire lorsque le mariage est antérieur à la date de cette obtention ou, à défaut, lorsqu'il a été célébré depuis au moins un an, sous réserve d'une communauté de vie effective entre les époux ;

11° A l'apatride justifiant de trois années de résidence régulière en France ainsi qu'à son conjoint et à ses enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ;

12° A l'étranger qui est en situation régulière depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" ;

13° A l'étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire en application des articles 12 bis ou 12 ter lorsqu'il remplit les conditions prévues aux alinéas précédents ou, à défaut, lorsqu'il justifie de cinq années de résidence régulière ininterrompue en France.

L'enfant visé aux 2°, 3°, 5°, 10° et 11° du présent article s'entend de l'enfant légitime ou naturel ayant une filiation légalement établie ainsi que de l'enfant adopté, en vertu d'une décision d'adoption, sous réserve de la vérification par le ministère public de la régularité de celle-ci lorsqu'elle a été prononcée à l'étranger.

La carte de résident est délivrée de plein droit à l'étranger qui remplit les conditions d'acquisition de la nationalité française prévues à l'article 44 du code de la nationalité.

Art. 15 bis. -  Par dérogation aux dispositions des articles 14 et 15, la carte de résident ne peut être délivrée à un ressortissant étranger qui vit en état de polygamie ni aux conjoints d'un tel ressortissant. Une carte de résident délivrée en méconnaissance de ces dispositions doit être retirée.

Art. 15 ter. -  La carte de résident peut être retirée à l'employeur ayant occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 341-6 du code du travail.

Art. 15-1. - Une carte de résident valable jusqu'à ce qu'il atteigne l'âge de vingt et un ans est délivrée de plein droit à l'étranger qui remplit les conditions prévues à l'article 21-7 du code civil et n'a pas manifesté sa volonté d'être français.

Cette carte lui est renouvelée pour dix ans à l'âge de vingt et un ans si, parvenu à cet âge, il n'a pas procédé à la manifestation de volonté prévue à l'article 21-7 du code civil.

Art. 16. -  La carte de résident est valable dix ans. Sous réserve des dispositions de l'article 15 bis et de l'article 18, elle est renouvelable de plein droit.

Art. 17. -  Lorsqu'elle a été délivrée à un étranger résidant sur le territoire de la France métropolitaine, la carte de résident en cours de validité confère à son titulaire le droit d'exercer, sur ce territoire, la profession de son choix, dans le cadre de la législation en vigueur. Par dérogation aux dispositions de l'article 1er du décret du 12 novembre 1938, les étrangers exerçant une profession industrielle, commerciale ou artisanale, titulaires de la carte de résident, sont dispensés de la carte d'identité de commerçant.

Les dispositions législatives applicables aux résidents privilégiés le sont également aux titulaires d'une carte de résident.

Art. 18. -  La carte de résident d'un étranger qui aura quitté le territoire français pendant une période de plus de trois ans consécutifs est périmée.

La période mentionnée ci-dessus peut être prolongée si l'intéressé en a fait la demande soit avant son départ de France, soit pendant son séjour à l'étranger.

Art. 18 bis-  L'étranger, qui, après avoir résidé en France sous couvert d'une carte de résident, a établi ou établit sa résidence habituelle hors de France et qui est titulaire d'une pension contributive de vieillesse, de droit propre ou de droit dérivé, liquidée au titre d'un régime de base français de sécurité sociale, bénéficie, à sa demande, d'une carte de séjour portant la mention « retraité ». Cette carte lui permet d'entrer à tout moment sur le territoire français pour y effectuer des séjours n'excédant pas un an. Elle est valable dix ans et est renouvelée de plein droit. Elle n'ouvre pas droit à l'exercice d'une activité professionnelle.

Le conjoint du titulaire d'une carte de séjour "retraité", ayant résidé régulièrement en France avec lui, bénéficie d'un titre de séjour conférant les mêmes droits.

Article 4

Code pénal

Livre deuxième : Des crimes et délits contre les personnes

Chapitre V : Des atteintes à la dignité des personnes

Section II : Du proxénétisme et des infractions assimilées

Art. 225-5. -  Le proxénétisme est le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit :

1° D'aider, d'assister ou de protéger la prostitution d'autrui ;

2° De tirer profit de la prostitution d'autrui, d'en partager les produits ou de recevoir des subsides d'une personne se livrant habituellement à la prostitution ;

3° D'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de la prostitution ou d'exercer sur elle une pression pour qu'elle se prostitue ou continue à le faire.

Le proxénétisme est puni de sept ans d'emprisonnement et de 1 000 000 F d'amende.

Art. 225-6. -  Est assimilé au proxénétisme et puni des peines prévues par l'article 225-5 le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit :

1° De faire office d'intermédiaire entre deux personnes dont l'une se livre à la prostitution et l'autre exploite ou rémunère la prostitution d'autrui ;

2° De faciliter à un proxénète la justification de ressources fictives ;

3° De ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en vivant avec une personne qui se livre habituellement à la prostitution ou tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à la prostitution ;

4° D'entraver l'action de prévention, de contrôle, d'assistance ou de rééducation entreprise par les organismes qualifiés à l'égard de personnes en danger de prostitution ou se livrant à la prostitution.

Art. 225-7. -  Le proxénétisme est puni de dix ans d'emprisonnement et de 10 000 000 F d'amende lorsqu'il est commis :

1° A l'égard d'un mineur ;

2° A l'égard d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;

3° A l'égard de plusieurs personnes ;

4° A l'égard d'une personne qui a été incitée à se livrer à la prostitution soit hors du territoire de la République, soit à son arrivée sur le territoire de la République ;

5° Par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la personne qui se prostitue ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

6° Par une personne appelée à participer, de par ses fonctions, à la lutte contre la prostitution, à la protection de la santé ou au maintien de l'ordre public ;

7° Par une personne porteuse d'une arme ;

8° Avec l'emploi de la contrainte, de violences ou de man_uvres dolosives ;

9° Par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice, sans qu'elles constituent une bande organisée ;

10° Grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 225-8. -  Le proxénétisme prévu à l'article 225-7 est puni de vingt ans de réclusion criminelle et de 20 000 000 F d'amende lorsqu'il est commis en bande organisée.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par le présent article.

Art. 225-9. -  Le proxénétisme commis en recourant à des tortures ou des actes de barbarie est puni de la réclusion criminelle à perpétuité et de 30 000 000 F d'amende.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue au présent article.

Art. 225-10 -  Est puni de dix ans d'emprisonnement et de 5 000 000 F d'amende le fait, par quiconque, agissant directement ou par personne interposée :

1° De détenir, gérer, exploiter, diriger, faire fonctionner, financer ou contribuer à financer un établissement de prostitution ;

2° Détenant, gérant, exploitant, dirigeant, faisant fonctionner, finançant ou contribuant à financer un établissement quelconque ouvert au public ou utilisé par le public, d'accepter ou de tolérer habituellement qu'une ou plusieurs personnes se livrent à la prostitution à l'intérieur de l'établissement ou de ses annexes ou y recherchent des clients en vue de la prostitution ;

3° De vendre ou de tenir à la disposition d'une ou de plusieurs personnes des locaux ou emplacements non utilisés par le public, en sachant qu'elles s'y livreront à la prostitution.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par les 1° et 2° du présent article.

Art. 225-11. -  La tentative des délits prévus par la présente section est punie des mêmes peines.

Art. 225-12. -  Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies aux articles 225-5 à 225-10.

Les peines encourues par les personnes morales sont :

1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;

2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.

___________________

N° 3552.- Rapport de Mme Christine Lazerges, au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi de M. Jean-Marc Ayrault renforçant la lutte contre les differentes formes de l'esclavage aujourd'hui.

() Rapport d'information n° 3459.

() On citera la procédure permettant de témoigner de façon anonyme, l'augmentation de la peine d'emprisonnement pour proxénétisme simple (loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 sur la sécurité quotidienne), la pénalisation du client d'un prostitué mineur de 15 à 18 ans (loi sur l'autorité parentale adoptée, en deuxième lecture, à l'Assemblée nationale, à la fin du mois de décembre 2001).

() On observera que la régularité du séjour d'un étranger n'est pas une condition de l'hébergement dans un CHRS.

() Plus communément désignée sous le titre de « Convention de Palerme ».

() In Traité de droit criminel, page 569, éditions Cujas, 1988.

() L'article 60 de cette loi a porté de cinq à sept ans d'emprisonnement les peines encourues en matière de proxénétisme.

() Ils n'entrent pas en effet, a priori, dans les catégories mentionnées dans cette section ouvrant droit à l'attribution d'une carte. Au reste, leur situation de victime doit pouvoir leur faire reconnaître un statut particulier au sein de cette législation. C'est ainsi, par exemple, comme on le verra ci-après, que la carte proposée donne droit à une autorisation de travailler.

() Voir le nouveau Titre XXI, intitulé « De la protection des témoins », inséré dans le code de procédure pénale.


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