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TEXTE ADOPTÉ n° 735

« Petite loi »

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

5 décembre 2001

RÉSOLUTION

sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (COM [2000] 392 final/n° E 1551) et visant à instaurer une directive-cadre fixant les règles générales applicables aux services d'intérêt général.

Est considérée comme définitive, en application de l'article 151-3 du Règlement, la résolution dont la teneur suit :

Voir les numéros : 3142 et 3414.

Télécommunications.

Article unique

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu l'article 16 du traité instituant la Communauté européenne,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (COM [2000] 392 final/n° E 1551),

Vu la communication de la Commission sur les services d'intérêt général en Europe (COM [2000] 580 final/n° E 1560),

Vu la déclaration du Conseil européen de Nice des 7, 8 et 9 décembre 2000 sur les services d'intérêt général,

Considérant que l'existence des services d'intérêt général doit constituer l'un des piliers du modèle social européen ;

Considérant que, par la résolution (T.A. n° 599) du 20 décembre 2000 sur la communication susvisée de la Commission, l'Assemblée nationale a souhaité l'élaboration, sur la base de l'article 16 du traité instituant la Communauté européenne, d'un projet de directive fixant des règles générales applicables à l'ensemble des services d'intérêt général et servant de base à l'établissement des directives sectorielles ;

Considérant que la proposition de directive soumise à l'Assemblée nationale devrait, en ce qui concerne le service universel des communications électroniques et les droits des utilisateurs de ces technologies, prévoir des dispositions s'inscrivant dans le même esprit que les règles générales que la représentation nationale appelle de ses v_ux pour l'ensemble des services d'intérêt général ;

1. Estime indispensable qu'une directive-cadre précisant l'article 16 du traité soit élaborée et qu'elle comporte les dispositions suivantes :

a) Définition des services d'intérêt général : « Tout service assuré, sous le contrôle d'une personne publique, par une personne morale de droit public ou privé, dans le respect des principes d'égalité, de continuité et de mutabilité, afin d'assurer à tous les citoyens la jouissance de droits sociaux et économiques fondamentaux, tout en contribuant au renforcement de la cohésion sociale et territoriale de l'Union européenne » ;

b) Définition des obligations et des missions de service public incombant aux services d'intérêt général :

- universalité : les services d'intérêt général doivent proposer leurs prestations à tous les citoyens, dans des conditions transparentes et à un prix abordable ;

- égalité : tous les citoyens étant égaux devant l'accès aux services d'intérêt général, l'opérateur doit pouvoir proposer ses prestations dans des conditions identiques à l'ensemble des usagers et ne peut, par conséquent, appliquer des tarifs instituant des discriminations sociales ou territoriales, sous quelque forme et pour quelque motif que ce soit ;

- continuité : les services d'intérêt général doivent fournir leurs prestations de façon régulière et ininterrompue, sauf cas de force majeure ;

- mutabilité : de façon à offrir aux usagers des prestations de qualité, les services d'intérêt général doivent intégrer les innovations techniques ;

- information : lorsque les conditions dans lesquelles le service d'intérêt général est assuré risquent d'être modifiées, l'opérateur doit en avertir les usagers, dans les plus brefs délais, en fournissant une explication sommaire leur permettant de comprendre la cause de modification ;

- procédures de réclamation et de recours : celles-ci doivent être simples, transparentes et rapides, et prévoir, le cas échéant, l'octroi de réparations ;

- recherche et environnement : les autorités réglementaires nationales peuvent exiger des opérateurs chargés des services d'intérêt général qu'ils respectent des normes environnementales particulières et qu'ils contribuent financièrement et matériellement à l'effort de recherche dans leur secteur d'activité ;

c) Le champ des services d'intérêt général peut être complété et pourra inclure des services nouveaux, notamment dans le domaine des nouvelles technologies de l'information et de la communication, comme Internet et la téléphonie mobile ;

d) Conformément au principe de subsidiarité, il incombe aux autorités politiques du niveau concerné - Union, Etats membres, autorités locales - de décider du statut des prestataires des services d'intérêt général et de compléter le contenu de leurs obligations et missions de service public ;

e) Les obligations et missions de service public doivent faire l'objet d'un financement transparent qui garantisse leur pérennité.

Au-delà de la contribution des usagers, les formes de financement autorisées peuvent être notamment : la subvention budgétaire ; l'ouverture d'un droit à compensation ; des subventions croisées ; la péréquation tarifaire ; l'octroi de droits exclusifs.

Les conditions que les Etats membres doivent réunir pour être autorisés à déroger aux règles de concurrence, afin de permettre aux services d'intérêt général de remplir leur mission spécifique, doivent être prévues de façon claire et précise par la directive-cadre ;

f) Les droits des salariés doivent respecter les dispositions suivantes :

- les prestataires des services d'intérêt général doivent se conformer à la législation sociale de l'Etat membre dans lequel ils exercent leurs activités et, en tout état de cause, à celle prévue par le droit communautaire ;

- ils doivent procéder à un bilan social annuel, qui doit faire l'objet d'une consultation avec les salariés et leurs représentants et qui est transmis à l'autorité publique responsable ;

g) La régulation :

Les autorités régulatrices sont chargées : de contrôler l'activité des opérateurs ; d'assurer le respect des obligations et des missions de service public précitées et, lorsqu'elles sont compatibles avec ces obligations, des règles de concurrence ; de contrôler les tarifs et la qualité du service ; d'assurer la protection des usagers et de veiller à la transparence des éventuels financements publics, en conformité avec les dispositions communautaires.

Leur statut est défini par les Etats membres ou, en cas de création d'autorités régulatrices européennes, par l'Union européenne. Sont fixées également les conditions dans lesquelles les décisions prises par les autorités régulatrices peuvent être contestées devant les tribunaux et celles selon lesquelles les autorités régulatrices sont soumises à un contrôle régulier des parlements nationaux ;

h) L'évaluation des résultats :

Doivent être mis en place au niveau pertinent des organes indépendants chargés d'évaluer le respect des obligations de service public et d'effectuer les études et analyses pouvant servir de base à une évolution de la réglementation ou de l'organisation des services d'intérêt général.

Ces organes doivent prévoir une participation des représentants des acteurs et des usagers des services d'intérêt général.

Leurs travaux sont publiés.

2. Considère souhaitable qu'un membre de la Commission européenne soit exclusivement chargé du suivi des services d'intérêt général.

3. Juge nécessaire que, dans le cadre des négociations à l'Organisation mondiale du commerce, l'Union s'attache à promouvoir l'existence des services d'intérêt général, obtienne que ces services fassent l'objet d'un accord particulier et qu'en tout état de cause les services non marchands, notamment l'éducation, la santé ou la sécurité publique, soient exclus du champ de l'accord général sur le commerce des services, et veille au maintien de certains services marchands, de fait non marchands, dans des territoires où leur rentabilité ne peut être assurée.

4. Demande aux autorités françaises de relayer la proposition d'une directive-cadre sur les services d'intérêt général et de saisir la Commission européenne des propositions retenues par l'Assemblée nationale concernant le contenu de ce texte.

5. Appelle les autorités françaises à demander la modification de la proposition de directive (COM [2000] 392 final/n° E 1551) soumise à l'examen de l'Assemblée nationale sur les points suivants :

- insérer, à l'article 3-2 de cette proposition de directive, après les mots : « Ils s'efforcent », les mots : « sans préjudice des obligations de service universel » ;

- supprimer, aux articles 4-1 et 6-1 de cette proposition de directive, le terme : « raisonnables », ou au moins d'expliciter dans le texte ce qui est précisément entendu par ce terme ;

- supprimer, à l'article 8-3 de cette proposition de directive, les mots : « en vue de garantir que la fourniture du service universel répond au critère de rentabilité et » ;

- remplacer, à l'article 11-3 de cette proposition de directive, les mots : « objectifs de performance » par les mots : « objectifs de service universel » et les mots : « données relatives aux performances » par les mots : « données relatives au respect du service universel » ;

- préciser, dans le texte des articles 12-2 et 13-2 de cette proposition de directive, que les organismes indépendants mentionnés font l'objet d'un « contrôle régulier par les parlements nationaux » ;

- supprimer, à l'article 13-3 de cette proposition de directive, la référence à des principes de « distorsion minimale du marché » et de « proportionnalité ».

A Paris, le 5 décembre 2001.

Le Président,

Signé : Raymond FORNI.