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ART. PREMIER
N° 137569
ASSEMBLÉE NATIONALE
6 septembre 2006

ÉNERGIE - (n° 3201)

Commission
 
Gouvernement
 

AMENDEMENT N° 137569

présenté par

M. Dionis du séjour

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ARTICLE PREMIER

Compléter cet article par les alinéas suivants :

« IV. – Après le VII de l’article 22 est inséré un VIII ainsi rédigé :

« VIII. – Les fournisseurs qui concluent des contrats pour l’achat de l'électricité produite sur le territoire national par les installations mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l’article 10 de la présente loi sont compensés du surcoût né de l'exécution de ces contrats dans les mêmes conditions qu’Électricité de France. ».

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le marché de détail de l'électricité a considérablement évolué depuis l’adoption de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité.Ainsi, plusieurs fournisseurs d’électricité ont fait leur apparition et sont aujourd'hui actifs sur le marché français. Ce phénomène doit normalement s’accentuer avec l’ouverture à la concurrence pour l'ensemble des consommateurs.

En outre, EDF a abandonné le statut d'EPIC (Établissement Public à Caractère Industriel et Commercial) pour devenir une SA et exerce désormais, tout comme ses concurrents, son activité sous le statut de société privée. Ces changements dans le paysage énergétique français s'inscrivent dans le processus d'ouverture du marché à la concurrence, en phase finale dans l'ensemble des pays européens.

Le cadre législatif national doit aujourd'hui être modifié pour rétablir l'égalité de traitement entre les différents opérateurs du secteur et permettre l'émergence d'une concurrence effective profitable aux consommateurs finaux d'électricité.

En 2005, la production totale nette d'électricité a atteint 549,4 TWh en France (source: Observatoire de l'énergie). La même année, les centrales d'EDF en France (hors Corse et DOM) ont produit 488,1 TWh (source: EDF, rapport annuel 2005) soit 88,9 % de la production totale. La part d'électricité produite par les autres acteurs présents sur le territoire national est donc très faible (61,3 TWh en 2005 soit moins de 11,2 % de la production totale). De plus, ces 61,3 TWh sont détenus en quasi-totalité par deux opérateurs : SUEZ (Electrabel/CNR/SHEM) et ENDESA (SNET). Cette concentration de la production électrique engendre de graves difficultés d'accès à la ressource pour les fournisseurs concurrents.

En particulier, les fournisseurs qui souhaitent se différencier par leur mix énergétique en proposant une électricité d'origine renouvelable doivent, pour garantir l'origine de leur électricité, s'approvisionner directement auprès de producteurs nationaux d'électricité d'origine renouvelable qui ne sont pas ou plus sous contrat d'achat avec EDF. Or, ces producteurs étant éligibles au bénéfice de l'obligation d'achat, ils exigent à juste titre des autres fournisseurs une rémunération équivalente aux tarifs d'achat. Les fournisseurs d'électricité doivent donc, compte tenu de la récente réévaluation des tarifs d'achat, débourser 82,5 € par MWh produit par une installation éolienne, 300 € par MWh produit par une installation photovoltaïque et 550 € lorsque celle-ci est intégrée au bâti.

Nous ne remettons absolument pas ici en cause les tarifs d'achat, qui permettent d'assurer un juste retour sur investissement et garantissent le développement des filières renouvelables.

Il faut en revanche signaler, qu'en vertu de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, EDF et les distributeurs non nationalisés (DNN) issus de la loi du 8 avril 946 se voient compensés du surcoût né de l'exécution des contrats d'achat grâce au mécanisme de la CSPE.

Le mode de calcul de ce surcoût est déterminé par le décret n° 2004-90 du 28 janvier 2004, modifié par le décret n° 2006-581 du 22 mai 2006. Il correspond, pour EDF, « à la différence entre le prix d'acquisition de l'électricité payé en exécution des contrats en cause et les prix de marché de l’électricité » et, pour les DNN, « à la différence entre le prix d'acquisition de l'électricité payé en exécution des contrats en cause et le coût moyen pondéré qui résulterait de l'achat de la même quantité d'électricité aux tarifs de cession et aux prix de marché ».

Pour illustrer l'importance de cette compensation, l'exemple du solaire photovoltaïque est tout à fait significatif. La filière bénéficie, nous l'avons dit, d'un tarif d'achat de 300 € par MWh et le prix du marché de gros de l'électricité se situe à 47,20 € par MWh (source : CRE, 2006). Le montant de la compensation pour EDF SA s'élève donc à 252,8 € par MWh.

Cette compensation est financée par l'ensemble des consommateurs finaux d'électricité, quelque soit leur fournisseur et même lorsqu'ils auto-produisent leur électricité.

Pour autant, EDF SA et les distributeurs non nationalisés issus de la loi du 8 avril 1946 sont les seuls à bénéficier du mécanisme de compensation. Ils profitent donc d'un avantage institutionnel qui entraîne inévitablement une distorsion de concurrence au niveau de l'achat d'électricité pour revente.

Nous demandons que tous les fournisseurs puissent être compensés dans les mêmes conditions par le mécanisme de la CSPE.

Cette modification du cadre législatif est indispensable pour deux raisons.

Tout d'abord, elle garantira l'égalité de traitement entre les opérateurs indispensable pour assurer l'ouverture du marché à la concurrence dans le respect de la directive 2003/54/CE.

Ensuite, elle va permettre d'impliquer les fournisseurs qui le souhaitent dans la mission de service public de promotion des énergies renouvelables. Les fournisseurs seront en mesure d'acheter l'électricité renouvelable au niveau de l'obligation d'achat et de proposer des offres d'électricité d'origine renouvelable compétitives et incitatives, ce qui rendra plus facile la réalisation de l'objectif de 21 % de la consommation intérieure en 2010, conformément à la directive européenne 2001/77/CE.

Techniquement, l'ouverture du mécanisme de compensation aux fournisseurs qui achètent de l'électricité produite sur le territoire national par les installations mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l’article 10 de la loi du 10 février 2000 est tout à fait possible.

Le mécanisme est d'ores et déjà en place et fonctionne de manière performante pour EDF SA et les nombreux distributeurs non nationalisés issus de la loi de 1946.

En outre, le décret n° 2004-90 du 28 janvier 2004 relatif à la compensation des charges de service public modifié par le décret n° 2006-581 du 22 mai 2006 prévoit déjà que tous les fournisseurs puissent participer à certaines missions de service public et soient à ce titre compensés pour le surcoût engendré grâce à la CSPE. Ainsi, lorsque les fournisseurs d'électricité mettent en oeuvre la tarification spéciale « produit de première nécessité » prévue au dernier alinéa du I. de l'article 4 de la loi du 10 février 2000, les surcoûts qu'ils supportent, qui correspondent, d'une part, au montant des réductions consenties en application de cette tarification spéciale et, d'autre part, aux coûts de gestion supplémentaires directement induits pour ces fournisseurs par la mise en oeuvre de ce dispositif, sont intégralement compensés.

Le mécanisme sera donc étendu sans difficulté pour la compensation du surcoût né de l'achat de l'électricité d'origine renouvelable.