N° 260

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2002.

AVIS

PRÉSENTÉ

TOME IX

DÉFENSE

SERVICES COMMUNS :
DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT,
SERVICE DE SANTÉ, SERVICE DES ESSENCES

PAR M. Jean-Yves Le Drian,

Député.

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Voir le numéro : 256 (annexe n° 40)

S O M M A I R E

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Pages

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT 9

I. -  L'ACHÈVEMENT DE LA RÉFORME DE LA DGA : DES OBJECTIFS GLOBALEMENT ATTEINTS 9

A. UN BUDGET DE LA DGA EN LÉGÈRE HAUSSE 9

1. Un titre III stabilisé 9

2. Des dépenses d'investissement en augmentation 11

B. LA RÉDUCTION DES EFFECTIFS : UNE INFLEXION NÉCESSAIRE 13

1. Une diminution continue des effectifs depuis 1997 13

2. L'évolution de la gestion du personnel 14

3. Les limites de la déflation des effectifs 14

C. LA RÉDUCTION DU COÛT DES PROGRAMMES D'ARMEMENT 15

1. La diminution du coût d'intervention 15

2. L'objectif final : la baisse du coût des programmes d'armement 17

II. -  LE CHANGEMENT DE STATUT DE DCN : UNE MUTATION INDISPENSABLE 20

A. LA MISE EN OEUVRE DU CHANGEMENT DE STATUT 20

1. Les étapes de la réforme 21

2. Un calendrier bien défini 22

3. La question de la répartition des immobilisations 23

B. DES QUESTIONS ENCORE EN SUSPENS 24

1. La détermination de la capitalisation 24

2. Le plan de charge futur de DCN 25

3. Les garanties accordées aux personnels 25

C. UNE ÉVOLUTION INDISPENSABLE DANS UN CONTEXTE DE RESTRUCTURATIONS DE GRANDE AMPLEUR DU SECTEUR 26

1. D'importantes restructurations en cours 26

2. Les perspectives pour DCN 27

III. -  LA CONSTRUCTION DE L'EUROPE DE L'ARMEMENT : UN CHANTIER AMBITIEUX POUR LA DGA 28

A. LE DÉVELOPPEMENT DES COOPÉRATIONS EUROPÉENNES EN MATIÈRE D'ARMEMENT 29

1. La diversité des cadres de coopération 29

2. Les avantages associés aux coopérations 30

B. LE RÔLE ESSENTIEL DE LA DGA DANS LA CONSTRUCTION DE L'EUROPE DE L'ARMEMENT 31

1. La promotion d'une Europe de l'armement forte 31

2. L'OCCAR, future agence européenne de l'armement ? 32

DEUXIÈME PARTIE : LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES 37

I. -  UN FORMAT CONDITIONNÉ PAR L'EXIGENCE PRIORITAIRE DU SOUTIEN DES FORCES PROJETÉES 37

A. UNE PARTICIPATION ACCRUE AUX OPÉRATIONS EXTÉRIEURES 37

B. UNE RECHERCHE CONSTANTE DE LA MODULARITÉ ET DE L'OPTIMISATION DES RESSOURCES, RENDUE NÉCESSAIRE PAR LA MULTIPLICATION DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES 38

C. DES RÉPERCUSSIONS IMPORTANTES SUR LE FONCTIONNEMENT DU SERVICE 39

II. -  DES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE RECRUTEMENT ET DE FIDÉLISATION DES PERSONNELS 40

A. UN DÉFICIT AGGRAVÉ EN MÉDECINS D'ACTIVE, MALGRÉ L'INSTAURATION DE MESURES DE REVALORISATION 40

B. LA POURSUITE DU RECRUTEMENT DES MILITAIRES INFIRMIERS ET TECHNICIENS DES HÔPITAUX DES ARMÉES (MITHA) 42

C. LES AUTRES PERSONNELS EN SITUATION DÉFICITAIRE 43

III. -  UNE OUVERTURE TOUJOURS PLUS LARGE AU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER, FORMALISEE DANS LA LOI DE MODERNISATION SOCIALE 44

A. UNE OUVERTURE NÉCESSAIRE À LA CLIENTÈLE CIVILE 44

B. LES MODALITÉS DE PARTICIPATION AU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER 45

IV. -  UN BUDGET EN NETTE AUGMENTATION, AMPLIFIANT LE REDRESSEMENT ENGAGÉ EN 2002 46

A. DES DÉPENSES ORDINAIRES EN PROGRESSION EN RÉPONSE AUX PROBLÈMES D'ATTRACTIVITÉ DE LA CARRIÈRE MÉDICALE DANS LES ARMÉES 46

B. UN TITRE V EN TRÈS FORTE HAUSSE 47

C. UN FINANCEMENT QUI REPOSE DÉSORMAIS MAJORITAIREMENT SUR LES CRÉDITS DE FONDS DE CONCOURS 48

TROISIÈME PARTIE : LE SERVICE DES ESSENCES DES ARMÉES 51

I. -  BILAN DE L'ACTIVITÉ DE CESSION DES PRODUITS PÉTROLIERS AUX ARMÉES 51

A. DES APPROVISIONNEMENTS EN HAUSSE, LIÉS À LA BAISSE DES COURS ET À LA REMISE À NIVEAU DES STOCKS 51

B. LA DISTRIBUTION DES PRODUITS PÉTROLIERS AUX ARMÉES 51

II. -  UN BUDGET EN LÉGÈRE BAISSE ET UNE FORTE CONTRAINTE SUR LE TITRE V 52

A. UNE ÉVOLUTION CONTRASTÉE AU SEIN DU TITRE III 53

B. UNE FORTE CONTRAINTE SUR LE TITRE V 55

III. -  LES ENSEIGNEMENTS DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES ET LA REDÉFINITION DES MATÉRIELS 56

A. LA LOGISTIQUE PÉTROLIÈRE EN OPÉRATIONS 56

B. LES ENSEIGNEMENTS : LA NÉCESSITÉ DE MATÉRIELS POLYVALENTS ET INTEROPÉRABLES 56

C. LA REDÉFINITION DES MATÉRIELS 57

IV. -  LA POURSUITE DE LA RÉORGANISATION DES INFRASTRUCTURES DU SEA 57

CONCLUSION 59

TRAVAUX DE LA COMMISSION 61

I. -  AUDITION DE M. YVES GLEIZES, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL POUR L'ARMEMENT 61

II. -  EXAMEN DES CRÉDITS 66

INTRODUCTION

Les services communs du ministère de la défense, s'ils sont divers tant par leur rôle que par leur poids budgétaire, n'en connaissent pas moins les mêmes impératifs de modernisation et d'adaptation. Trois de ces services sont présentés dans le présent rapport. Il s'agit de la délégation générale pour l'armement (DGA) et de deux services de soutien interarmées, le service de santé et le service des essences des armées.

Par ses missions et son influence, la DGA représente le premier des services communs du ministère de la défense. Fournisseur, contrôleur, expert ou producteur, elle joue un rôle pivot en matière de défense. Elle a mis en _uvre une refonte complète de ses structures et de ses modalités de fonctionnement et la forte baisse de son coût d'intervention ainsi que du coût des programmes d'armement témoigne de la réussite de cette réforme. Son périmètre d'activités a considérablement évolué au cours des dernières années : elle s'est recentrée sur ses fonctions de fournisseur d'équipement et abandonne progressivement son rôle d'opérateur industriel.

La mission de contrôle et de conseil qu'assure la DGA sur l'ensemble des industries d'armement conduit à s'intéresser à l'évolution des industries françaises de défense, plus particulièrement au changement de statut imminent de DCN. Enfin, la DGA joue un rôle essentiel en matière de coopération européenne dans les programmes d'armement, notamment par le biais de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR), et elle s'engage activement dans la promotion de la construction de l'Europe de l'armement.

Quant au service de santé, il a dû faire face aux exigences multiples de la professionnalisation et de l'insertion dans l'édifice normatif de la santé publique. Il a également dû accompagner la restructuration des armées pour la partie du service intégrée aux forces. Une démographie médicale défavorable se conjuguant à la fin du service national, la consolidation de la professionnalisation est aujourd'hui obérée par des difficultés persistantes de sous-effectif et de fidélisation du personnel médical et paramédical.

Comme le service de santé, le service des essences a été très fortement mis à contribution par la multiplication des opérations extérieures et le seuil limite d'emploi des sous-officiers et militaires du rang a été franchi lors des relèves. Déjà professionnalisé à 100% au 1er janvier 2001, le service des essences doit maintenant faire face à la contrainte de mise aux normes de ses capacités de stockage d'ici 2010, imposée par un arrêté ministériel du 22 juin 1998.

Pour l'achèvement de toutes ces réformes et leur consolidation, la vigilance s'impose quant au niveau des enveloppes budgétaires qui seront consacrées aux différents services communs.

PREMIÈRE PARTIE :
LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT

I. -  L'ACHÈVEMENT DE LA RÉFORME DE LA DGA : DES OBJECTIFS GLOBALEMENT ATTEINTS

Depuis 1997, la délégation générale pour l'armement est engagée dans une réforme profonde de son organisation et de ses méthodes, afin de satisfaire à l'objectif de réduction de 30 % du coût des programmes d'armement qui lui a été fixé par le Gouvernement en 1996.

La réforme engagée va au-delà du seul objectif de diminution des coûts : elle vise avant tout à recentrer l'activité de la DGA sur sa fonction essentielle de fournisseur en matériels d'armement des forces armées françaises. La DGA doit s'adapter à un environnement bien différent de celui qui a présidé à sa création en 1961, et qui est caractérisé par une contrainte budgétaire accrue et un secteur de l'armement restructuré et concurrentiel. La confusion de ses missions de gestionnaire et d'opérateur industriel était de plus préjudiciable à son efficacité et à la réduction des coûts et la DGA a abandonné une partie de ses activités industrielles pour revenir à sa mission initiale.

Aujourd'hui, la DGA a réussi à atteindre les principaux objectifs qui lui ont été assignés, et la réforme est en cours d'achèvement. Lors de son audition par la commission de la défense le 16 octobre, M. Gleizes, délégué général pour l'armement, a souligné que désormais, il ne s'agissait plus pour la DGA de lancer un chantier d'aussi grande ampleur, mais de rester dans une logique d'évolution permanente, par la rationalisation et la simplification des structures.

Le projet de budget de la DGA se caractérise par sa stabilité. Après une forte diminution depuis 1997, résultant notamment des évolutions de son périmètre et de la déflation de ses effectifs, les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2003 sont en légère augmentation par rapport à l'année 2002.

Les dotations budgétaires de la DGA pour le titre III augmentent légèrement dans le projet de loi de finances pour 2003 : elles s'établissent à 384,7 millions d'euros, contre 375,2 millions dans la loi de finances initiale de 2002, ce qui représente une hausse de l'ordre de 2,5 %.

 

évolution des crédits du titre iii de la dga depuis 1997

 

(en millions d'euros)

   

LFI 1997

LFI 1998

LFI 1999

LFI 2000

LFI 2001

LFI 2002

PLF 2003

 

Rémunérations et charges sociales

616,4

707,1

711,3

148,2

144,1

119,5

115,3

 

Fonctionnement

208,7

195,4

176,5

174,4

142,3

128,7

137,6

 

Alimentation

2,4

2,0

1,5

1,1

1,2

1,0

0,08

 

Subventions

117,5

117,4

114,3

107,5

114,6

126,1

131,7

 

Total titre III

945,0

1 021,9

1 003,7

431,1

402,3

375,3

384,68

Source : ministère de la défense

 

Cette augmentation s'explique essentiellement par la croissance des crédits de fonctionnement courant et des crédits de subvention. Les rémunérations et charges sociales (RCS) sont en diminution en raison de la réduction des effectifs budgétaires, au titre, notamment, du transfert des effectifs et des crédits des élèves de l'école polytechnique vers l'armée de terre.

Les crédits de fonctionnement courant s'élèvent à 137,6 millions d'euros, en augmentation de 6,8 % par rapport à 2002. Cette augmentation traduit des modifications de périmètre, principalement la budgétisation de quatre établissements de la direction des centres d'expertise et d'essais précédemment rattachés au compte de commerce des constructions navales.

La ventilation des moyens de fonctionnement par direction n'est pas connue à ce jour : elle est fixée en novembre à l'issue du cycle de réunions budgétaires. On peut simplement noter qu'en 2002, la direction des centres d'expertise et d'essais (DCE) conservait sa place prépondérante dans le budget de fonctionnement de la DGA.

évolution du Budget de fonctionnement par direction

(en millions d'euros)

 

Directions

1998

1999

2000

2001

2002

 

    Direction, cabinet, inspection, communication

2,9

3,4

5,0

5,0

3,9

    Direction des systèmes de forces et de la prospective (DSP) hors services de programme à partir de 2000

6,1

4,4

2,3

2,3

2,1

    Direction des systèmes d'armes

17,5

12,8

16,6

9,9

9,3

    Direction des programmes, des méthodes d'acquisition et de la qualité (DPM)

7,6

6,1

7,2

6,4

6,0

    Direction de la coopération et des affaires industrielles (DCI)

1,2

1,1

1,1

0,9

0,9

    Direction des relations internationales (DRI)

1,1

0,9

1,2

1,1

1,0

    Direction de la gestion et de l'organisation (DGO) + divers

45,7

55,4

41

34,1

34,1

    Direction des ressources humaines (DRH)

14,0

11,0

11,0

11,0

4,7

    Centre des hautes études de l'armement (CHEAR)

3,4

3,8

3,8

2,9

2,9

    Direction des constructions navales (DCN) *

0

0

0

0

0

    Service de la maintenance aéronautique (SMA) *

0

0

0

0

0

    Direction des centres d'expertise et d'essais (DCE) *

91,6

73,4

81,1

68,7

62,9

    TOTAL

191,2

172,4

170,3

142,2

128,8

* les coûts de fonctionnement de la DCN, de la quasi-totalité du SMA et d'une partie de la DCE sont couverts par les comptes de commerce.
Source : DGA.

L'accroissement de 6 % des crédits de subvention aux établissements publics, tels que l'office national d'études et de recherches aérospatiales (ONERA), les écoles ou encore l'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR), recouvre pour l'essentiel une augmentation des subventions de l'ONERA et de l'école polytechnique, ainsi qu'un complément relatif aux transferts d'emploi de la DGA vers les écoles.

Le titre III du budget de la DGA se stabilise pour l'année 2003, après une réduction continue des crédits de fonctionnement depuis 1997 et une forte décroissance des crédits de RCS en 1999 et 2000 due au transfert des crédits de RCS des effectifs civils vers la direction de la fonction militaire et du personnel civil (DFP).

Avant de procéder à l'analyse de l'évolution des crédits d'investissement de la DGA, il faut distinguer clairement les investissements que la DGA réalise au profit de ses propres structures, qui sont représentatifs de son coût d'intervention, les crédits d'investissement dont elle assure le gouvernorat (notamment les crédits d'études amont, une partie des crédits « espace » et « forces nucléaires ») et les crédits qu'elle gère pour le compte des états-majors, qui représentent 80 % des crédits d'équipement militaire.

Pour 2003, le projet de budget d'investissement propre de la DGA s'élève à 232,1 millions d'euros en crédits de paiement, la répartition de ce budget entre les directions n'étant pas encore connue. On peut souligner à nouveau la prépondérance logique de la part de la DCE dans les dépenses d'investissement de la DGA.

Les dépenses dont la DGA assume le gouvernorat comprennent :

- pour environ la moitié du périmètre, des opérations du domaine nucléaire, placées principalement sous maîtrise d'ouvrage du commissariat à l'énergie atomique (CEA) et relatives aux investissements et aux travaux nécessaires à la production des charges et des propulseurs nucléaires, y compris leur démantèlement ;

- pour environ 35 %, les études amont, technico-opérationnelles ou à caractère politico-militaire, économique ou social, en amont des programmes d'armement ;

- pour environ 15 %, les investissements techniques de la DGA pour ses centres d'essais et pour ses moyens informatiques et généraux et les travaux d'infrastructures, dont ceux destinés à la restructuration des sites ;

- pour une faible part, des développements techniques en amont des programmes d'armement et certaines opérations de dépollution de sites (par exemple, le programme Secoia).

Le gouvernorat correspondant à la DGA accueille en outre une participation au budget civil de recherche et de développement (BCRD) au titre de la recherche duale. La dotation du BCRD s'établit en 2003 à 190,6 millions d'euros, comme en 2002. Les dotations de la DGA pour 2003, BCRD compris, s'établissent à 1885,7 millions d'euros en autorisations de programme, en augmentation de 7,81 % par rapport à 2002, et à 1 999,6 millions d'euros en crédits de paiement, en hausse de 7,56 %.

Evolution des crédits d'investissement de la DGA

(en millions d'euros)


Chapitre

AP
LFI 2002

AP
PLF 2003

Évolution
AP

CP
LFI 2002 + reports

CP
PLF 2003 + reports

Évolution
CP

 

    51-61

0,00

4,26

 

0,15

2,43

 

    51-71

992,74

977,09

- 1,58 %

809,37

891,75

10,18 %

    52-81

407,06

486,25

19,45 %

461,91

431,81

- 6,52 %

    53-71

0,00

34,25

 

18,29

45,58

149,22 %

    54-41

167,93

168,62

28,11 %

171,24

180,99

35,56 %

    55-11

0,00

46,51

 

0,00

51,14

 

    66-50

190,56

191,03

0,25 %

191,32

191,03

- 0,15 %

    67-10

96,39

91,61

- 4,96 %

100,81

90,95

- 9,78 %

    Total

1 854,70

1 999,64

7,81 %

1 753,12

1 885,70

7,56 %

Source : DGA.

Les évolutions les plus notables concernent principalement les montants consacrés aux investissements techniques et généraux et aux travaux d'infrastructures de la DGA, en hausse significative (35,56 %), les crédits de paiement destinés aux opérations du CEA, en augmentation sensible du fait de l'essor des programme RES et simulation (10,18 %), la dotation d'autorisations de programme pour les études amont, en hausse de 19,45 %, et les dotations d'autorisations de programme et de crédits de paiements permettant le lancement de la réalisation du programme Secoia (chapitre 53-71).

Pour atteindre les objectifs de réduction de coût des programmes d'armement et de coût d'intervention, la DGA a mis en _uvre de profondes transformations de son organisation et de ses structures, qui se sont traduites par une baisse des effectifs de 25 % sur la période 1997-2001, alors que le périmètre de ses activités est resté quasi identique. Cette réduction drastique a été réalisée grâce à d'importants gains de productivité.

Les effectifs de la DGA ont varié sur la période 1997-2002 de 24 189 à 18 195, soit une diminution de plus de 25 %, pour un périmètre d'activités équivalent. Il s'agit d'une réduction de grande ampleur, accompagnant la réorganisation de la DGA.

Les personnels intervenant dans le fonctionnement de la DGA sont répartis en trois catégories principales : personnels militaires, personnels ouvriers et personnels civils non ouvriers. La dernière catégorie est elle-même divisée en personnels titulaires (fonctionnaires) et personnels non titulaires (contractuels).

L'application de différentes mesures se traduit par un solde négatif de 1 645 postes au titre du projet de loi de finances pour 2003 : 1 490 postes de personnels militaires, 124 postes de civils non ouvriers et 31 postes de personnels ouvriers sont concernés.

effectifs budgétaires de la dga pour 2002 et 2003

Statuts et corps

Effectifs budgétaires 2002

Effectifs budgétaires 2003

    Militaires

3 794

2 324

    Fonctionnaires

5 521

5 636

    Contractuels

3 310

3 093

    Ouvriers

7 235

7 142

    TOTAL

19 860

18 195

Source : DGA.

La réorganisation de la DGA et la réduction importante de ses effectifs ont été accompagnées d'une évolution des méthodes de gestion du personnel. Progressivement, le management a été introduit à la DGA et s'est accompagné de la diffusion d'une culture de résultat au sein du personnel.

Le pilotage de la déflation d'effectifs de la DGA a été effectué dans le cadre de la procédure annuelle d'orientation de chaque direction, qui permet de définir les effectifs autorisés et les emplois correspondants. Un système de recueil d'informations sur les compétences, l'expérience et les souhaits des cadres de niveau I a été mis en place en 1997 et son informatisation, destinée à en faciliter l'exploitation, est en cours. Ainsi, l'introduction des nouvelles technologies facilite la valorisation des démarches individuelles tout en améliorant le fonctionnement transversal d'une institution qui a longtemps pratiqué une gestion verticale, par direction.

L'année 2002 a d'ailleurs été marquée par le développement du système d'information CHORUS, base de gestion informatisée en matière de ressources humaines, dans la DGA. La préparation de ce déploiement a fait l'objet de travaux très importants, en liaison avec les différents acteurs étatiques et industriels, notamment pour la description des métiers de référence spécifiques à la DGA, la caractérisation des compétences associées et la cotation des postes permettant de mieux qualifier les parcours professionnels. Une version simplifiée de cet outil informatique fonctionne depuis le début de l'année 2002. Le système CHORUS doit permettre une gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences.

L'important redéploiement des compétences et des personnels, effectué à l'occasion de la réorganisation de la DGA en 1997, s'est achevé avec l'évolution des services de programmes survenue en 2000 et 2001. Le principal objectif de la direction des ressources humaines est désormais de faire fonctionner l'organisation actuelle, en favorisant la mobilité des cadres.

Parallèlement à ces réorganisations de gestion des ressources humaines, des études ont été réalisées auprès des personnels sur leur perception des réformes. Pour la troisième année consécutive, une enquête de climat interne a été réalisée, afin de mieux connaître les attentes et les difficultés des personnels. Des 6 370 réponses fournies (35 % du personnel), il ressort un réel attachement des personnels à leur travail et à leur institution (78 %). Le changement apparaît nécessaire et répond à une motivation : 61 % reconnaissent qu'il y a beaucoup de progrès à faire et un tiers considèrent que si les méthodes de travail progressent, le périmètre du changement est encore mal connu. Enfin, la mise en place des différents systèmes d'information est connue de 70 % des personnels.

La diminution d'effectifs de 25 % mise en oeuvre depuis 1997 est supérieure à ce qui avait été prévu, notamment en raison de la revue des programmes opérée en 1998 et de suppressions supplémentaires d'effectifs en lois de finances.

La DGA a subi une diminution sensible de son encadrement de niveau I, une perte significative de compétences ouvrières et une forte baisse du soutien dans le domaine administratif, alors même que ses missions n'ont pas évolué dans les mêmes proportions. On peut se demander si cette déflation n'a pas atteint ses limites, voire si elle n'a pas été excessive. Il serait désormais souhaitable d'augmenter les effectifs de façon ciblée sur certains métiers stratégiques, pour renforcer des secteurs particuliers.

A titre d'exemple, le renforcement des équipes techniques au sein des services de programmes s'avère indispensable dans les fonctions d'achat : la passation des contrats relatifs aux programmes et aux études amont requiert des compétences spécifiques, notamment juridiques, et on constate un déficit dans ces domaines, alors même que ces fonctions sont essentielles dans la mission d'achat de la DGA. Le déficit de personnel dans la fonction d'acheteur doit être corrigé.

La mise en place de personnels qualifiés dans les structures intégrées de soutien, notamment au service de soutien de la flotte (SSF), serait également nécessaire pour assurer la prise en charge des nouvelles activités qui lui sont transférées par DCN. L'établissement de relations contractuelles avec la nouvelle société DCN va également nécessiter le recrutement de personnels au sein du service des programmes navals (SPN) dès 2003. Enfin, le domaine des systèmes et des réseaux informatiques se caractérise par un déficit global de capacités, notamment en raison de la fuite des spécialistes vers la société civile.

C'est pourquoi la DGA a demandé 210 recrutements supplémentaires annuels sur toute la durée de la prochaine loi de programmation 2003-2008.

En 1996, la DGA s'est vu assigner un objectif de réduction du coût des programmes d'armement de 30 %. Elle se situe au c_ur du processus complexe d'équipement des armées, étant en charge de 80 % des crédits d'équipement militaire. C'est à ce titre qu'elle peut obtenir la réduction des coûts, en diminuant son coût d'intervention et en améliorant sa gestion des crédits et des programmes d'armement.

Les données figurant dans les documents budgétaires permettent de calculer un coût budgétaire de la DGA, qui n'est cependant pas représentatif du véritable coût engendré par la DGA en tant que structure administrative pour le système de défense. Les articles budgétaires gérés par la DGA supportent des dépenses qui ne sont pas liées à son activité, comme la rémunération de personnels qu'elle gère, mais qui ne sont pas employés par elle, et n'incluent pas certaines dépenses qui résultent de son activité, comme la rémunération du personnel civil qu'elle emploie.

C'est pourquoi la DGA a défini un « coût d'intervention », correspondant à l'ensemble des coûts engendrés par son activité étatique et à eux seuls, et qui constitue un outil utile dans le cadre de la politique volontariste de réduction des coûts de structure qui est engagée depuis 1996.

En 1998, une méthode rénovée d'évaluation du coût d'intervention a remplacé celle qui était utilisée entre 1996 et 1998. Appliquée depuis le début de l'année 1999, elle améliore les conditions de pilotage de la réduction du coût d'intervention en individualisant mieux les différentes composantes de ce dernier. Cette méthode est désormais stabilisée.

Le coût d'intervention est donc la différence entre la somme des charges et la somme des produits engendrés par l'activité. La somme des charges est le coût complet de structure. Les produits donnent lieu à des paiements reçus de prestations effectuées au profit de clients « extérieurs » à la DGA et se matérialisent essentiellement par des rentrées de fonds de concours.

Le coût d'intervention de la DGA s'établira en 2002 à environ 923 millions d'euros, soit une valeur équivalente à 2001. Ce montant représente une baisse de 30 % en euros constants par rapport à 1996, ce qui constituait l'objectif assigné à la DGA en 1996 pour l'année 2002. Cet objectif a donc été atteint avec un an d'avance.

objectifs et resultats de la reduction
du coût d'intervention depuis 1998

OBJECTIF

RÉSULTAT

    1998

1 082

1 078

    1999

1 037

976

    2000

976

972

    2001

945

923

    2002

923

ND

Source : DGA.

Les mesures prises pour diminuer le coût d'intervention concernent trois postes principaux de dépenses :

- les rémunérations et charges sociales (RCS) : la maîtrise des dépenses de RCS a été obtenue par la réduction des effectifs et l'amélioration de l'adaptation des compétences aux besoins ;

- le fonctionnement courant des services : une politique de rationalisation du soutien, le resserrement des surfaces occupées et l'optimisation des achats par la globalisation et la mise en concurrence systématique ont permis une baisse des dépenses de fonctionnement de l'ordre de 50 % depuis 1996 ;

- les investissements techniques : ils ont diminué de 14 % depuis 1996, grâce à l'amélioration du contrôle.

Désormais, les responsables de la DGA estiment que le coût d'intervention actuel représente un coût plancher, en-dessous duquel il semble difficile de descendre.

La DGA a défini trois axes d'action :

- la limitation des besoins en matériels et systèmes au juste nécessaire pour l'exécution des missions des forces armées ;

- l'accroissement de l'efficacité du processus d'acquisition et de conduite des programmes ;

- l'instauration de nouvelles relations contractuelles avec les industriels, leur permettant d'accroître leur visibilité, et partant leur productivité et leur réactivité. La procédure de commandes pluriannuelles en est la principale illustration.

Afin de véritablement mettre en _uvre ces principes, une démarche de contrôle de gestion a été engagée au début de 1997. Les objectifs de réduction de coût sont échelonnés, selon les programmes, entre 30 % pour ceux qui entrent en phase de faisabilité et 10 % pour ceux qui sont en production. Au 30 juin 2002, 99 programmes d'armement étaient placés sous contrôle de gestion

Les réductions de coûts cumulées depuis 1997 s'élèvent à 9,59 milliards d'euros. Ces diminutions se traduisent en baisses de besoins financiers étalées sur la durée de réalisation de ces programmes, dont certains dépassent 2015. Elles sont prises en compte dans les mises à jour annuelles de la programmation et dans les projets de loi de finances.

Les réductions de coûts obtenues sont donc considérables et illustrent l'amélioration de la gestion des crédits et des programmes d'armement. Au 30 juin 2002, l'objectif de réduction des coûts sur les 99 programmes en contrôle de gestion était fixé à 18,34 milliards d'euros.

A titre d'exemple, les plus importantes diminutions obtenues en 2002 ont pour origine l'optimisation des choix techniques et de la démarche contractuelle sur le système Atlas Canon, la coopération avec un nouveau pays, la Belgique, pour Hélios II ou encore l'optimisation du besoin et l'application de solutions innovantes avec la construction navale civile sur le programme de bâtiments de projection et de commandement (BPC). Cependant, des augmentations de coûts importantes ont été également enregistrées en 2002 et doivent être déduites des réductions de coûts obtenues. Elles sont dues pour l'essentiel aux décisions d'étalement prises sur l'avion Rafale, l'hélicoptère Tigre et à l'évolution de la logique d'essai sur le programme nucléaire M 51. Enfin, dans le domaine du maintien en condition opérationnelle (MCO), d'importants gisements de coûts ont été identifiés. Cette activité a fait l'objet d'importantes restructurations, qui ont abouti à la mise en place de structures intégrées et rationalisées, la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) et le service de soutien de la flotte (SSF).

Les réductions de coûts obtenues constituent des masses financières importantes et l'amélioration de la maîtrise de gestion des programmes de la DGA doit être mise en exergue, d'autant que des objectifs ambitieux lui sont fixés pour les prochaines années.

La réduction des coûts passe également par l'instauration de nouvelles relations avec les industriels, afin notamment d'accroître leurs capacités de prévision et, de ce fait, leur productivité et leur compétitivité.

On doit souligner le changement radical des relations de la DGA avec les industriels. Tout d'abord, le paysage des industries de défense a été profondément modifié au cours de la dernière décennie ; des entreprises publiques prédominantes, sur lesquelles la DGA exerçait sa tutelle, ont souvent cédé la place à des entreprises privées et soumises à des impératifs de rentabilité.

Ensuite, la DGA a dû modifier son approche dans un contexte de réduction des moyens budgétaires alloués à l'équipement des armées : alors qu'auparavant, les industriels se voyaient fixer des objectifs avant tout techniques, les aspects financiers étant relativement secondaires, la démarche est désormais inversée et la notion de prix de revient est devenue déterminante.

La réorientation des liens entre l'Etat et les industriels s'appuie sur trois principes : un recours à la concurrence le plus large possible, la responsabilisation des maîtres d'_uvre sur des engagements de résultats globaux et la globalisation des commandes.

Le recours systématique à la concurrence constitue l'axe fondamental de la politique d'achat de la DGA. Toutefois, environ 75 % des marchés sont encore notifiés sans mise en concurrence préalable. Cette dernière est souvent rendue impossible du fait des concentrations en cours dans les industries de défense. En outre, l'objectif de responsabilisation des maîtres d'_uvre sur des engagements de résultats et la dépendance souvent constatée pour les prestations de maintenance des équipements à l'égard du maître d'_uvre du système principal sont autant d'obstacles supplémentaires à la mise en concurrence.

Les petites et moyennes entreprises, souvent équipementiers ou sous-traitants des grands maîtres d'_uvre, stimulent la compétitivité par leurs innovations et leur réactivité. Au sein de la DGA, une sous-direction intitulée « PME-PMI et action régionale » analyse les préoccupations de ces entreprises et leurs attentes, et recherche des réponses appropriées à celles-ci. En octobre 2001, un plan d'action pour les PME approuvé par le ministre de la défense a été mis en place.

En complément de ce dispositif, la DGA et l'agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR) ont signé le 21 mars 2002 un protocole d'accord dont l'objectif est de soutenir les PME-PMI proposant un projet d'innovation dans le domaine des applications de défense ou des technologies duales. Ce protocole permet de soutenir l'innovation par des avances remboursables pouvant aller jusqu'à 50 %. L'année 2002 a constitué une période test, pour laquelle 9 régions pilotes ont été choisies, et 2,3 millions d'euros ont été mis en place par la DGA et l'ANVAR. Le dispositif sera généralisé à l'ensemble des régions en 2003.

La procédure des commandes globales représente sans doute le principal acquis de l'évolution des relations entre la DGA et les industriels. Cette démarche est sans conteste plus rationnelle quand il s'agit de programmes qui s'étalent sur plusieurs années : en réunissant l'engagement de plusieurs tranches de fabrication d'un matériel de série, ou plusieurs annuités du développement, en maintenant le calendrier de réalisation, l'Etat peut obtenir des prix plus intéressants en contrepartie de l'engagement à plus long terme qui est pris vis-à-vis de l'industriel.

On assiste ainsi à une montée régulière des commandes pluriannuelles du ministère de la défense :

(en millions d'euros courants)

 

1997

1998

1999

2000

2001

Engagements réalisés

12 228

12 299

13 106

16 368

14 710

Dont commandes globales

1 476

1 905

2 972

3 351

3 689

Part des commandes globales

12,1 %

15,5 %

22,7 %

20,5 %

25,1 %

Source : ministère de la défense

La procédure des commandes globales a ainsi concerné :

- dès 1997, cinq programmes, parmi lesquels les missiles Apache et MICA ;

- en 1998, six programmes, dont le missile M 51 et le char Leclerc, ainsi que le système de combat de la frégate Horizon ;

- en 1999, seulement trois programmes, mais pour des volumes plus importants, avec notamment le Rafale et l'hélicoptère Tigre ;

- en 2000, six programmes, dont l'hélicoptère NH 90, les missiles MICA et M 51 ;

- en 2001, deux programmes seulement, mais pour un montant inégalé, avec l'A 400 M et le Rafale.

En 2002, quatre programmes devraient être concernés, notamment le système d'armement des frégates multimissions FSAF et le missile M 51, sous réserve de l'ouverture des autorisations de programme nécessaires lors du collectif budgétaire de fin d'année 2002. Enfin, le projet de loi de finances pour 2003 permet d'envisager des commandes globales pour le Rafale, sous réserve des autorisations de programme correspondantes, et le programme MICA.

La démarche de changement lancée en 1996 a cédé la place à un objectif d'amélioration continue de l'efficacité de la DGA. Un plan d'action pour la période 2001-2004 a été élaboré par l'équipe de direction de la DGA en juin 2001 : il vise à accroître l'efficacité de la DGA dans un contexte de ressources particulièrement contraint. L'effort de réduction des coûts de réalisation et de soutien des systèmes de défense sera poursuivi, en privilégiant la réduction des délais de développement.

II. -  LE CHANGEMENT DE STATUT DE DCN : UNE MUTATION INDISPENSABLE

La séparation de DCN et de la DGA opérée en 2000 par la transformation de DCN en service à compétence nationale met fin au cumul des deux rôles que la DGA exerçait auparavant vis-à-vis de DCN : celui de tutelle hiérarchique et de partenaire. Elle participe du recentrage de la DGA sur ses missions de conduite de la politique d'équipement des armées et de promotion de la coopération européenne en matière d'armement.

L'absence actuelle de personnalité juridique autonome pour DCN modifie cependant la nature de ces relations : ainsi, les contrats relatifs aux programmes sont des contrats internes à l'Etat et non des marchés régis par le code des marchés publics. Les relations entre la DGA et DCN ne seront « normalisées » qu'après la transformation effective de DCN en société nationale, qui interviendra le 1er janvier 2003. Même après cette date, leurs relations resteront étroites, à l'instar de celles qui existent entre la DGA et les autres entreprises publiques du secteur de la défense.

Le 1er janvier 2003, DCN deviendra une société nationale dont le capital est détenu en totalité par l'Etat. Ce changement de statut constitue une évolution indispensable pour assurer la préservation du potentiel de DCN dans le secteur de la construction navale militaire, dans un contexte d'accélération des restructurations navales en Europe. Sans cette mutation, DCN était condamné au déclin, alors que l'entreprise dispose d'un savoir-faire reconnu et réalise des produits de haute technologie. Le rapporteur est satisfait d'avoir entendu l'amiral Battet, chef d'état-major de la marine, souligner lors de son audition devant la commission de la défense le 9 octobre que DCN disposait de compétences techniques, de commandes importantes de l'Etat et de marchés à l'exportation et indiquer que la marine soutenait pleinement le processus de changement de statut en cours ; le délégué général pour l'armement, M. Gleizes, partageait ce point de vue lors de son audition le 16 octobre devant la commission de la défense.

La réforme de DCN, destinée à assurer sa meilleure adéquation à ses missions et à son environnement concurrentiel, est désormais engagée depuis plusieurs années. Dès 1991, la société DCN International a été créée, afin d'assumer au profit de la DCN les activités commerciales de promotion et de suivi des contrats signés à l'exportation. En 1996, la séparation entre les activités de donneur d'ordre pour le compte de l'Etat et les activités industrielles a été réalisée, et le détachement définitif de DCN vis-à-vis de la DGA est intervenu en 2000, par sa transformation en service à compétence nationale.

Cependant, cette qualification ne lui conférait pas un nouveau statut au sein du secteur public. Il était indispensable de faire évoluer ce statut afin de permettre à DCN de nouer de nouvelles alliances et de lever les contraintes administratives qui lui étaient encore imposées. Les règles de la comptabilité publique découlant de la gestion de DCN dans le cadre d'un compte spécial du trésor, de même que les contraintes du code des marchés publics, s'avéraient incompatibles avec les impératifs industriels et commerciaux d'une entreprise de la taille de DCN. On lui demandait d'être compétitive et de devenir une véritable entreprise, alors que dans le même temps elle était assujettie à des obligations inconciliables avec cet objectif. Dans un rapport public sur les industries d'armement de l'Etat d'octobre 2001, la Cour des Comptes concluait à l'inadaptation de l'actuel statut de DCN, notamment parce qu'il ne permettait pas de nouer des alliances structurelles avec des partenaires français ou étrangers.

Le 6 juillet 2001, le Gouvernement a décidé de transformer DCN en une société nationale entièrement détenue par l'Etat. L'article 78 de la loi de finances rectificative pour 2001 prévoit la clôture du compte de commerce n° 904-05 « constructions navales de la marine militaire » et son remplacement par une entreprise nationale « régie par le Code de commerce dont le capital est détenu en totalité par l'Etat ».

Pour atteindre cet objectif s'inscrivant dans la continuité des précédentes évolutions de DCN, toute l'entreprise est mobilisée depuis juillet 2001. Une société de préfiguration de l'entreprise DCN, dénommée « DCN Développement », a été créée le 28 février 2002 : sa mise en place effective a cependant été significativement retardée (près de trois mois) par rapport à l'hypothèse de calendrier formulée lors des débats parlementaires de décembre 2001. Elle est destinée à porter les participations de la future société nationale DCN et à apporter à DCN le soutien d'experts et de consultants dans des domaines lui faisant défaut, pour mener à terme son évolution.

DCN Développement doit conduire au sein de DCN, ainsi qu'avec les différentes administrations, les divers chantiers indispensables pour le changement de statut, selon une démarche de projet industriel baptisée « DCN 2003 ». A ce titre, elle bénéficie d'une dotation budgétaire de 27 millions d'euros pour 2002 et comptait en août 12 collaborateurs, son plan budgétaire pour 2002 prévoyant un effectif de 42 personnes au 31 décembre 2002. Elle organise la collaboration entre DCN, ses tutelles et les services des administrations concernées, parmi lesquelles on compte notamment la DGA, la marine, le trésor et les impôts.

Elle veille tout particulièrement à la préparation du traité d'apport qui spécifiera le périmètre détaillé des droits, contrats, biens et obligations de l'Etat transférés à la société nationale. Ce traité revêt une grande importance, car il détermine les éléments qui seront apportés à la future société nationale DCN. La préparation du détail des apports en nature nécessite un inventaire contradictoire avec les tiers détenteurs, la description ou le cadastrage des biens, la valorisation par la direction générale des impôts, ainsi que l'avis des commissaires aux apports ; ce processus long et complexe est en cours actuellement. La valorisation des apports, ainsi que les estimations des valeurs locatives, se poursuit ; les services fiscaux, qui en sont chargés, sont saisis de cette question depuis le mois de juin.

La société DCN Développement soutient également DCN pour les opérations d'arrêté comptable des comptes, nécessaires à la préparation du bilan d'ouverture de la société nationale. Le passage de la comptabilité publique à la comptabilité générale représente une évolution considérable, entraînant de profondes modifications des politiques d'achat et de gestion de la production. Pour la première fois, DCN a publié en juillet ses comptes pour l'année 2001 comme une entreprise de droit privé, en application du plan comptable général.

Le projet a été organisé selon un calendrier permettant la mise en place de la société nationale au 1er janvier 2003. Cette échéance est relativement brève au regard de l'ampleur et de la complexité de la mutation qui a été engagée, et impose un travail soutenu à DCN et aux administrations concernées, mais elle doit être respectée pour que DCN soit en mesure, au 1er janvier 2003, de s'engager sur un premier exercice d'activité conforme aux normes générales du droit commercial et de la comptabilité.

Les différents travaux indispensables au changement de statut ont été découpés en « chantiers », au nombre de douze, parmi lesquels on citera l'organisation et la conduite du projet, les stratégies et les alliances, les ressources humaines ou bien encore le nouveau système de gestion et de certification des comptes. Le pilotage des chantiers a été confié aux directions fonctionnelles.

Ces chantiers sont eux-mêmes décomposés en « tâches », correspondant chacune à l'obtention de fournitures identifiées ou à un résultat dans un domaine précis, par exemple la mise au point du contrat d'entreprise entre DCN et l'Etat ou encore la finalisation d'accords d'entreprise avec les représentants des personnels. La direction de projet assure la cohérence d'ensemble et coordonne les projets transversaux avec le concours des ministères concernés.

Reste également une mission d'extinction du service à compétence nationale : il faut clôturer le compte de commerce et assurer la gestion des actifs qui n'ont pas été transférés.

Le changement de statut de DCN conduit à identifier clairement tous les biens mobiliers et immobiliers dont DCN aura besoin pour conduire ses activités : ces biens seront soit apportés à la future société, soit loués à l'Etat, soit mis à disposition pour de courtes périodes.

La répartition du domaine patrimonial des arsenaux entre la marine, la DGA et DCN constitue un des enjeux techniques de la réforme. Ces actifs immobiliers et mobiliers compteront au rang des actifs particuliers de la nouvelle société. Certaines emprises vont changer d'attributaire : ce sera notamment le cas pour celles dont la marine est aujourd'hui attributaire et qui seront apportées à la société.

Les biens mobiliers et immobiliers sont parfois très imbriqués et la répartition n'a pu être réalisée que sur la base d'une appréciation concrète des besoins des trois entités concernées, en prenant en compte des contraintes juridiques. Cependant, cette partition peut désormais être considérée comme achevée.

Certains cas ont été traités de façon spécifique et les solutions retenues sont variables selon les sites concernés et leurs caractéristiques respectives. Par exemple, sur les emprises situées au sein du domaine militaire, aucun terrain ou bâtiment ne peut être apporté à une société. C'est pourquoi, à Brest et à Toulon, les parcelles concédées feront l'objet de conventions d'occupation temporaire de courte ou de longue durée. Cette décision concerne les terrains et les bâtiments industriels, mais également les moyens portuaires (bassins, installations nucléaires...). Les conventions de longue durée, pour une période de vingt ans au moins, seront établies pour les zones sur lesquelles existe une bonne visibilité (par exemple, la zone de la Pointe avec bassins 8 et 10 à Brest). Un projet de convention d'occupation temporaire de longue durée est en fin de négociation avec la marine ; il concerne essentiellement les sites de Brest et Toulon et servira de trame pour les autres textes à rédiger.

A Lorient, les emprises nécessaires à DCN seront essentiellement apportées à DCN ; compte tenu du resserrage des zones d'activités, certaines parcelles seront libérées à terme, leur statut restant à préciser durant la période d'occupation transitoire par DCN. A Cherbourg, la zone sud de l'arsenal sera apportée à la société et elle permettra à terme à DCN d'y construire les sous-marins ; en revanche, les zones à caractère nucléaire resteront sous la responsabilité de la DGA.

Parallèlement au changement de statut, des schémas directeurs ont été établis pour chaque établissement, en vue notamment de regrouper les activités sur une même zone et de réduire les surfaces occupées, généralement trop grandes par rapport à l'activité constatée. L'application de ces schémas directeurs a été engagée, mais elle s'échelonnera sur plusieurs années et devrait se terminer vers 2008-2010.

DCN ne gardera aucune des pyrotechnies, celles-ci étant soit fermées, comme c'est le cas pour Lorient, soit reprises par la marine. La gestion, l'approvisionnement et le stockage des rechanges ont également été rétrocédés à la marine.

Les installations à caractère social font l'objet de mesures particulières : la société détiendra les moyens nécessaires pour assurer la restauration de ses personnels, mettre à disposition des locaux au profit des organisations syndicales et pour la médecine du travail. En revanche, les installations sportives et de loisirs ne seront pas prises en charge par la société, mais confiées aux associations, collectivités locales ou au comité d'entreprise.

Le processus de changement de statut lancé dès 2001 est en cours d'achèvement, mais d'importantes questions doivent encore être réglées au cours des prochains mois. Le niveau de la dotation en capital de la nouvelle société, ainsi que les garanties de plan de charge, figurent au premier rang des éléments qui n'ont pas encore été déterminés et qui revêtiront un caractère déterminant pour l'avenir de l'entreprise.

Le montant de la dotation initiale en capital de la future société DCN sera fixé après l'approbation du business plan de la société. Il sera déterminant pour l'avenir de la société DCN : le niveau retenu devra permettre de garantir l'autonomie de l'entreprise, car une sous-capitalisation serait très dommageable pour son développement ultérieur.

A ce titre, on pourra rappeler les apports en capital de l'Etat à la société GIAT Industries. Cette dernière, dotée à sa création d'un capital de 280 millions d'euros, a bénéficié de recapitalisations successives depuis lors. Au total, 3,1 milliards d'euros (soit 20,3 milliards de francs) ont été versés à la société GIAT depuis 1991, pour des résultats industriels médiocres.

Dotations en capital de GIAT depuis 1991

(en millions d'euros courants)

 

1991

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Total

Apports de l'Etat en fonds propres

160

566,5

564,06

655,5

869

0

304,9

3 120

Source : ministère de la défense.

La situation de DCN se distingue nettement de GIAT, qui intervient sur un marché dont les perspectives d'évolution nationales et mondiales sont défavorables. Le carnet de commandes de DCN est considérable et l'entreprise dispose de savoir-faire et de compétences reconnus. Pour assurer son avenir, elle ne doit pas être sous-capitalisée.

DCN bénéficie d'un carnet de commandes important, du fait de sa situation sur le marché des frégates et d'un réel potentiel à l'exportation, notamment avec les sous-marins conventionnels Scorpène.

Les dispositions du projet de loi de programmation militaire pour 2003-2008 sont en outre favorables aux grands programmes navals : elles confirment le lancement de la construction de 17 frégates multimissions, la poursuite du programme de sous-marins d'attaque Barracuda et la construction de deux BPC (bâtiments de projection et de commandement). La commande d'une troisième frégate Horizon pour 2007 et la construction d'un deuxième porte-avions sont également prévues.

C'est pourquoi la négociation du contrat d'entreprise pluriannuel actuellement en cours entre l'Etat et DCN est particulièrement importante : il déterminera la garantie d'un certain niveau de commandes de la marine, ainsi que les relations financières et les objectifs économiques et sociaux de l'entreprise. L'Etat devra s'engager sur un volume d'activité suffisant, aussi bien pour les constructions neuves que pour l'entretien des bâtiments. Des garanties devront être apportées sur les commandes relatives aux grands programmes, notamment les sous-marins d'attaque et les frégates multimissions, pour lesquelles la notification à DCN de la maîtrise d'ouvrage de l'ensemble du programme est attendue dans le prolongement des études déjà réalisées par l'entreprise. Il est indispensable d'assurer à DCN un plan de charge assez important pour lui permettre de se développer sous ce nouveau statut et de conserver sa compétitivité.

Le changement de statut de DCN a fait l'objet d'une concertation étroite avec les partenaires sociaux. Le personnel est en effet très attaché à son groupe industriel et à ses sites. Il apparaît dès lors indispensable d'accorder aux salariés des garanties suffisantes dans la transformation statutaire de DCN, d'autant plus que d'importants efforts d'adaptation ont déjà été accomplis. Les effectifs ont été réduits de près de 12 000 personnes au cours des dix dernières années, au titre des politiques de départ anticipé.

La solution retenue distingue les différentes catégories de personnel : les ouvriers d'Etat, les militaires, les fonctionnaires et les contractuels de droit public. Les ouvriers d'Etat représentent au total plus des deux tiers des emplois au sein de DCN : ils ne bénéficient pas à proprement parler d'un statut, mais d'un ensemble de dispositions législatives et réglementaires leur conférant de fortes garanties. Ils conserveront au sein de DCN ces garanties jusqu'à la retraite. En revanche, les fonctionnaires, les contractuels de droit public et les militaires devront opter avant fin décembre 2004 soit pour la signature d'un contrat de travail avec la nouvelle société, soit pour un retour dans les services de l'Etat. Le rapporteur insiste pour qu'un traitement individuel permettant de respecter leurs droits et leur parcours professionnel soit mis en _uvre. Il faudra notamment veiller à ce que les fonctions d'encadrement actuelles, notamment celles des ingénieurs d'études et de fabrication (IEF) et des techniciens supérieurs d'études et de fabrication (TSEF), soient bien prises en considération dans la nouvelle convention collective.

Les négociations des accords d'entreprise sont en cours avec les partenaires sociaux pour déterminer le cadre de fonctionnement de la future entreprise ; elles devraient aboutir à la fin de l'année. Ces négociations portent sur cinq points principaux : les instances représentatives du personnel, les droits syndicaux, l'organisation du travail, incluant les congés et la réduction du temps de travail, les régimes de retraite et de prévoyance et les rémunérations.

Parallèlement à ce processus, il importe désormais de doter DCN d'un plan de recrutement et de formation, afin de garantir la pérennité des compétences au sein de l'entreprise. Le rapporteur tient à souligner que des recrutements spécialisés s'imposent à brève échéance pour que DCN soit à la hauteur des ambitions affichées. Il conviendra de mener une réflexion approfondie sur les outils de formation et notamment sur l'avenir des anciens centres de formation rattachés aujourd'hui à la DGA.

L'industrie de la construction navale militaire connaît actuellement de profondes mutations : d'importantes restructurations sont en cours, en Europe et outre-Atlantique. Dans ce contexte, l'évolution du statut de DCN est d'autant plus indispensable, afin de lui permettre de prendre part aux alliances et coopérations nécessaires pour renforcer sa position sur le marché des constructions navales militaires.

L'industrie navale européenne est encore dispersée, notamment en comparaison de l'industrie aéronautique en Europe ou de l'industrie navale aux Etats-Unis, aujourd'hui regroupée en deux pôles, Northrop Grumman et General Dynamics, mais elle connaît actuellement de profondes restructurations.

C'est au Royaume-Uni que les regroupements industriels ont commencé, puisqu'en rachetant Marconi Electronic Systems à la fin des années 1990, British Aerospace (devenu BAe Systems) a acquis ses chantiers militaires de Barrow-in Furness, Glasgow et Govan ; seul subsiste un chantier naval de moyenne importance, Vosper Thornycroft. Par ailleurs, le chantier naval allemand HDW, spécialisé dans la construction de sous-marins à propulsion conventionnelle, a absorbé les chantiers suédois Kockums en octobre 2000, et est désormais contrôlé par le fonds de pension américain One Equity. On prête à ce dernier l'intention de revendre HDW à Northrop Grumman ou à General Dynamics.

L'autre grand chantier naval allemand, Blohm und Voss, spécialisé dans les bâtiments de surface, pourrait prochainement subir la défection de son actionnaire principal, Thyssen, qui cherche à se désengager du capital. En Italie et en Espagne, d'importantes évolutions se préparent : les chantiers navals publics espagnol (Izar) et italien (Fincantieri) devraient être privatisés à moyen terme après le redressement de leur situation financière, ce qui pourrait offrir des opportunités d'alliances internationales. On doit enfin souligner que les possibilités de programmes en coopération ou de développements communs en vue de l'exportation joueront sans nul doute un rôle majeur dans la structuration progressive de l'industrie européenne.

Cette structuration semble d'autant plus indispensable que les entreprises américaines cherchent à acquérir des positions plus fortes en Europe au moyen d'alliances ou de prises de participation. Ainsi, des sociétés américaines, au premier rang desquelles figure Lockheed Martin, ont engagé des coopérations d'envergure avec le groupe espagnol Izar. De même, la prise de contrôle du chantier naval allemand HDW par le fonds de pension américain One Equity suscite des interrogations.

Face à l'offensive des groupes de constructions navales militaires américains, les restructurations européennes doivent permettre l'émergence de groupes attractifs et cohérents. DCN, en tant que principal constructeur naval français, doit prendre une part active aux alliances et coopérations en cours au niveau européen.

L'activité de DCN à l'exportation a été menée jusqu'à ce jour à travers l'entreprise publique DCN International, qui a signé plusieurs contrats ou avenants importants. Parmi eux, on pourra citer le contrat de trois sous-marins Agosta 90B pour le Pakistan en 1994, dont le premier exemplaire vient d'être livré, le contrat de construction de deux sous-marins Scorpène pour le Chili, ou encore le contrat de construction de deux sous-marins Scorpène pour la Malaisie, en coopération avec la société espagnole Izar.

Même si son statut l'empêchait de conclure des alliances structurelles, DCN s'est engagé dans des coopérations multiples, avec Izar dans le domaine des sous-marins à propulsion classique, avec les industriels italiens Fincantieri et Finmeccanica pour la réalisation du programme de frégates Horizon. Il coopère également avec la société WASS (dont l'actionnaire est Finmeccanica) et Thales, pour la commercialisation de torpilles légères et le développement de torpilles lourdes, ainsi qu'avec Rolls Royce et Northrop Grumman pour la réalisation des turbines à gaz WR 241.

La principale coopération engagée à ce jour par DCN est l'alliance commerciale à l'exportation avec Thales. DCN et Thales ont créé en 2001 une société commune, dénommée Armaris (anciennement SSDN), qui regroupe la maîtrise d'_uvre et la commercialisation des programmes à l'exportation et en coopération, dans le domaine des navires de guerre et des systèmes de combat naval. Certains programmes nationaux ayant un potentiel à l'exportation pourront également lui être confiés sur décision de l'Etat. Armaris a démarré son activité opérationnelle le 1er septembre 2002.

DCN et Thales conservent en propre leurs moyens industriels, sur lesquels Armaris s'appuiera pour les programmes dont elle a la responsabilité. Cette alliance va cependant nécessiter l'émergence d'une culture commune aux deux entreprises. Un tel processus, au demeurant indispensable à la réussite d'Armaris, pourrait en outre avoir une conséquence bénéfique, le renforcement de la diffusion d'une culture d'entreprise au sein de DCN.

A ce jour, Armaris est en charge du contrat des deux sous-marins Scorpène pour la Malaisie et pourrait obtenir également une commande de six Scorpène de la part de l'Inde, sous réserve de la conclusion du contrat envisagée avant la fin de l'année. En outre, elle porte la part française de réalisation industrielle du programme franco-italien des frégates Horizon, qui doit faire l'objet d'une décision définitive le 7 novembre, en coopération avec Fincantieri. En ce qui concerne les frégates multimissions, deux stratégies sont en cours d'examen : outre la solution nationale, une coopération avec l'Italie serait envisageable et, dès lors, Armaris pourrait intervenir dans ce programme. Quelle que soit la solution retenue pour les frégates multimissions, un plan de charge suffisant doit être garanti à Armaris pour assurer son développement.

Au travers de cette alliance entre DCN et Thales, c'est le renforcement d'un pôle français de construction navale militaire qui est en jeu, dans un contexte de restructuration de grande ampleur de ce secteur. Le marché européen des frégates pour les dix années à venir représente environ 50 à 60 unités et il est impératif de se placer dès maintenant sur ce marché très concurrentiel, qui connaît actuellement de profonds bouleversements. Le changement de statut de DCN va lui permettre de s'engager dans des coopérations structurelles avec des partenaires nationaux et étrangers et de renforcer sa position dans le secteur des constructions navales militaires.

III. -  LA CONSTRUCTION DE L'EUROPE DE L'ARMEMENT : UN CHANTIER AMBITIEUX POUR LA DGA

La construction de l'Europe de la défense a été lancée dès 1992, par la prise en compte d'une dimension militaire dans le traité de Maastricht, et poursuivie en 1997 avec le traité d'Amsterdam, qui en posait les fondements juridiques. La rencontre franco-britannique de Saint-Malo en décembre 1998 a donné une impulsion politique décisive, qui a ensuite été relayée lors des Conseils Européens successifs, et notamment à Helsinki en décembre 1999 : la création d'une capacité autonome de décision et d'action, appelée force de réaction rapide, y a été décidée.

Cependant, la définition d'une politique de défense indépendante et crédible à l'échelle de l'Union est indissociable d'une industrie de défense européenne forte, produisant les matériels nécessaires pour mettre en _uvre les politiques décidées. La construction d'une Europe de l'armement doit donc suivre deux axes principaux : d'une part, les restructurations industrielles en France et en Europe doivent se poursuivre, afin de permettre l'émergence de pôles industriels attractifs, technologiquement puissants, commercialement forts et financièrement sains. D'autre part, la coopération en matière de recherche et de programmes d'armement doit être approfondie. L'Europe est désormais devenue le niveau pertinent d'analyse lorsque l'on aborde la question de l'avenir des industries d'armement.

La coopération européenne en matière d'armement a été mise en _uvre au cours des dernières années selon des modalités diverses. Cependant, la multiplication des structures de coopération entraîne une certaine complexité, voire un manque de lisibilité. On peut distinguer les coopérations conduites :

- soit directement entre les pays concernés, ce qui est le cas général pour les coopérations bilatérales, éventuellement au travers de structures permanentes telles que l'institut franco-allemand de Saint-Louis pour la recherche, ou bien de structures ad hoc destinées à disparaître après l'achèvement de leur tâche ;

- soit par une agence OTAN créée pour un besoin spécifique : c'est ainsi que l'hélicoptère européen NH 90 est développé ;

- soit dans un cadre institutionnel européen. Par exemple, c'est sous l'égide du groupe armement de l'Europe occidentale (GAEO), forum européen compétent pour traiter des questions d'armement, que le programme Euclid, lancé en 1990, se développe : il est destiné à renforcer la position de l'Europe en matière de recherche et de technologie de défense et quelques 110 projets sont en cours. Au sein de l'Union européenne, un plan d'action capacitaire européen ECAP (European Capability Action Plan) a été lancé en février 2002. Il vise à combler les lacunes capacitaires identifiées, dans la perspective de la montée en puissance d'une capacité militaire européenne et doit conduire à terme à des acquisitions d'équipements. L'ECAP s'organise autour de 18 groupes d'action, qui devraient rendre leurs conclusions pour le mois de mars 2003 ; un certain nombre de projets concrets émergent dès maintenant des groupes de travail, notamment dans le domaine des drones et des capacités de commandement ;

- soit au titre d'initiatives ad hoc : l'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) créée en novembre 1996 par la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Italie, relève d'une telle démarche. La lettre d'intention (LoI) signée en juillet 1998 par la France, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, le Royaume-Uni et la Suède, destinée à faciliter les restructurations transnationales de l'industrie de défense, a conduit à la signature d'un accord cadre ayant valeur de traité dont la transposition dans le droit interne des six pays devrait être achevée d'ici la fin de l'année 2002.

L'intérêt de la coopération dans les programmes d'armement est multiple : il est à la fois d'ordre économique, industriel, militaire et politique.

Tout d'abord, une coopération réussie permet de partager les coûts de développement et d'industrialisation entre les différents pays participants et d'obtenir de meilleurs prix de série du fait de l'allongement de celle-ci. Encore faut-il, il est vrai, que la coopération soit bien menée pour que l'avantage lié à l'allongement de la série ne soit pas obéré par des contraintes et des pratiques contre-productives et que les surcoûts induits par la coopération restent raisonnables.

Une coopération présente également un intérêt industriel, dans la mesure où elle est potentiellement structurante : elle permet de conforter les pôles d'excellence de l'industrie des pays participants et de favoriser les regroupements industriels. Les coopérations en matière de recherche sont sans doute les plus efficaces.

Ensuite, lors de l'élaboration du besoin opérationnel commun, les armées des pays coopérants doivent se rapprocher et la mise en _uvre des coopérations permet d'améliorer l'interopérabilité des forces armées, puisque ces dernières sont alors équipées d'un même système ou de systèmes compatibles. Ces deux éléments présentent un intérêt militaire manifeste dans la perspective de la mise en place d'une force européenne.

Enfin, les coopérations en matière d'armement présentent un intérêt politique, en raison de l'engagement des Etats à coopérer dans le domaine de la défense : ce dernier aspect a un caractère décisif à l'heure où se construit la politique européenne de sécurité et de défense (PESD).

Si des avantages indéniables sont associés aux coopérations en matière d'armement, on ne peut cependant en occulter les difficultés. Il est tout d'abord nécessaire d'identifier un programme susceptible de convenir à plusieurs pays, qui doivent donc avoir des besoins opérationnels proches, selon un calendrier relativement similaire. Le montage industriel correspondant à un programme de coopération doit ensuite préserver les intérêts industriels de chacun des pays participants sans pour autant créer des contraintes inutiles ou entériner des solutions inefficaces. A ce titre, la notion de « juste retour », par laquelle l'industrie de chaque pays participant réalise une part équivalente à l'apport financier de ce pays au programme, présente des risques d'inefficacité économique. Enfin, lors de la réalisation du programme, les difficultés budgétaires que peuvent rencontrer les pays participants peuvent entraîner un bouleversement du déroulement du programme, comme l'illustrent notamment les difficultés actuelles de l'Allemagne à financer certains programmes en coopération. Certains pays peuvent également abandonner un programme en coopération dans lequel ils s'étaient pourtant engagés, préférant recourir à une autre solution.

Quelques exemples peuvent illustrer les difficultés auxquelles doivent parfois faire face les projets de coopération. Ainsi, le Royaume-Uni s'est retiré du programme de télécommunication spatiale Trimilsatcom en 1998, en estimant que ce dernier ne permettrait pas de satisfaire ses besoins dans les délais et selon les coûts voulus, et a préféré recourir à une solution nationale. De même, le projet de coopération tripartite réunissant l'Italie, la France et le Royaume-Uni sur le programme de frégates Horizon a été interrompu en avril 1999 sur proposition britannique.

Les récents succès obtenus en matière de coopération permettent de relativiser les difficultés qui peuvent survenir. Ainsi, la poursuite du programme Horizon sur la base d'une coopération franco-italienne, le lancement du programme de missile air-air MIDE par six pays ou l'entrée du Portugal dans le programme d'hélicoptère NH 90 sont autant de réussites qui illustrent l'intérêt des coopérations européennes en matière d'armement.

La DGA a un rôle majeur à jouer dans la promotion de l'Europe de l'armement, qui doit être à la fois le stimulant et la résultante de l'Europe de la défense. D'une part, elle exerce des fonctions de contrôle sur le secteur français de l'armement et à ce titre peut intervenir dans les processus de restructurations en cours. D'autre part, elle assure la représentation de la France au sein de l'OCCAR, donnant des orientations et en contrôlant le respect au nom de la France.

Au-delà de ses fonctions de fournisseur d'équipement et d'opérateur industriel, la DGA, du fait de son expérience et de son rôle-pivot dans l'industrie d'armement, assure une fonction de contrôle sur ce secteur et de conseil auprès du ministre de la défense dans les orientations à privilégier en matière de restructurations, dès lors que l'Etat-actionnaire est concerné ou que les intérêts souverains de la France sont en jeu. Ainsi, si la DGA n'a plus le rôle déterminant dont elle a pu disposer dans le passé, lorsque son action s'exerçait sur un secteur industriel largement dépendant de la sphère publique, elle dispose cependant d'importants moyens d'action dans le paysage européen de l'armement.

Son rôle est particulièrement important dans le secteur public de l'armement qui subsiste. En effet, la DGA - au nom du ministère - participe activement à l'élaboration de la stratégie des entreprises dont l'Etat est actionnaire et pilote, avec les autres administrations exerçant la tutelle, sa mise en application. Elle a participé à la définition et à la mise en _uvre des rapprochements intervenus ces dernières années autour de Thomson-CSF (devenu Thales en décembre 2000), d'une part, d'Aérospatiale, Matra Hautes Technologies et Dassault Aviation, puis EADS d'autre part, enfin de Snecma, Labinal et Hurel-Dubois. Ces rapprochements visaient à la construction de grands pôles industriels, nationaux tout d'abord, puis ouverts à des alliances ultérieures, européennes notamment.

Par ailleurs, la DGA contribue significativement aux travaux visant à créer l'environnement politique et juridique nécessaire pour faciliter les restructurations industrielles ; elle est intervenue lors de la signature de la lettre d'intention (LoI) évoquée plus haut.

La DGA dispose également d'un puissant levier d'action sur l'offre industrielle européenne, à travers sa politique d'acquisition et de gestion des programmes d'armement en coopération.

Enfin, dans une démarche plus prospective, la DGA met l'accent sur le développement d'une stratégie de définition commune des programmes le plus en amont possible, afin de favoriser la coopération européenne. Elle a élaboré un plan prospectif à 30 ans qui examine par système de forces, toutes armées confondues, les besoins futurs d'équipement militaire. Cet effort, conjugué avec les analyses des partenaires européens sur les mêmes sujets, devrait aboutir au renforcement de la coopération dans les domaines de la recherche et de la technologie, lesquelles constituent des facteurs décisifs d'harmonisation de la demande des Etats. La France s'est fixé pour objectif de mener en coopération 50 % de ses recherches au cours de la période 2003-2008.

L'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) a été créée en 1996 par la France, l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni afin de gérer des programmes en coopération européenne, en cherchant à supprimer les doublons dans la répartition des investissements.

Elle est fondée sur les principes de coopération dits de Baden Baden, datant de décembre 1995, parmi lesquels on doit citer une plus grande efficacité dans la conduite des programmes d'armement, la consolidation de la base industrielle et technologique européenne et l'ouverture à d'autres Etats que les Etats fondateurs, à condition qu'ils participent à un programme significatif géré par l'OCCAR et qu'ils en acceptent les règles.

L'OCCAR a acquis la personnalité juridique d'agence internationale le 26 janvier 2001 en application de la convention spécifique signée le 9 septembre 1998. Cette personnalité juridique confère à l'OCCAR une autonomie contractuelle, la capacité d'employer des personnels, la possibilité d'acquérir des biens et d'ester en justice, ce qui constitue une évolution considérable par rapport à son statut intermédiaire mis en place en 1996. En revanche, elle n'est pas dotée de fonds propres et ne peut être propriétaire des matériels militaires qu'elle achète.

L'OCCAR gère les programmes franco-allemands Tigre, Hot, Roland et Milan, le programme franco-germano-britannique de radar de contrebatterie Cobra, le programme franco-italien de missiles anti-aériens futurs FSAF, ainsi que le programme de véhicule blindé MRAV/GTK, auquel la France ne participe pas. Le programme d'avion de transport A 400 M devrait être intégré d'ici la fin de l'année, au moment où le contrat signé par l'OCCAR et l'industriel entrera en vigueur.

L'OCCAR a été créée pour jouer un rôle de maîtrise d'ouvrage déléguée au profit des Etats membres pour la gestion des programmes en coopération européenne, et la DGA est responsable, pour la France, de lui donner les orientations et d'en contrôler le respect. La DGA exerce donc vis-à-vis de l'OCCAR un double rôle de tutelle globale, en tant que représentant de l'Etat membre, et de maître d'ouvrage en face de son mandataire pour les programmes.

Plus précisément, la DGA accomplit les missions suivantes :

- la représentation du gouvernement français au conseil de surveillance de l'OCCAR, par délégation du ministre de la défense, pour la définition des grandes orientations et le contrôle de l'administration d'exécution ;

- la participation aux divers comités qui préparent et soutiennent le travail du conseil de surveillance ;

- l'approbation des décisions de programme qui fixent l'étendue de la maîtrise d'ouvrage déléguée confiée à l'OCCAR ;

- la gestion des besoins de financement de l'OCCAR selon les processus nationaux ;

- l'approbation des règlements définissant les principales méthodes de fonctionnement de l'OCCAR.

Les personnels français affectés à l'OCCAR, qui les rémunère, proviennent essentiellement de la DGA. Aucun poste de l'OCCAR n'est réservé à un Etat, mais l'organisation s'efforce cependant de respecter un équilibre global entre les membres. Actuellement, le directeur adjoint de l'OCCAR, le chef du service de l'OCCAR et les directeurs des programmes Roland et Hot-Milan sont d'origine française.

Pour les acquisitions de programmes, le fonctionnement de l'OCCAR est régi par des principes totalement nouveaux par rapport aux pratiques traditionnelles de la coopération. Les fournisseurs des différents pays membres du GAEO sont systématiquement mis en concurrence dans l'optique de consolidation de la base industrielle et technologique de défense en Europe, et la mise en concurrence peut être étendue aux pays extra-européens en cas de réciprocité effective.

Le juste retour industriel, apprécié annuellement et programme par programme pour chaque pays participant, est abandonné au profit d'un équilibre global pluriannuel et multiprogrammes, ce qui n'est pas sans provoquer des réticences parmi les Etats participants. Les Etats membres doivent également acquérir de façon préférentielle des équipements au développement duquel ils ont participé dans le cadre de l'OCCAR. Les programmes confiés à l'OCCAR doivent être réalisés en coopération européenne. Il en résulte que les programmes gérés par les agences OTAN n'ont pas a priori naturellement vocation à être intégrés dans l'OCCAR, mais qu'un programme géré par l'OCCAR peut être ouvert à des Etats non membres.

Ces principes favorisent donc une plus grande intégration des politiques industrielles de défense au niveau européen et une meilleure efficience économique des coopérations mises en _uvre. L'OCCAR peut être considérée comme le précurseur d'une agence européenne de l'armement, qui s'étendra au-delà des quatre pays fondateurs. Le développement des programmes en coopération intégrés à l'OCCAR, ainsi que l'augmentation du nombre de ses membres, est sans aucun doute souhaitable pour favoriser la construction d'une Europe de l'armement puissante.

Tableau des programmes en coopération

Programmes

Pays participants

Maîtrise d' _uvre industrielle

Coûts (part française aux conditions économiques de janvier 2002)

Antichars de troisième génération longue portée (AC 3G-LP)

France, Allemagne, Royaume-Uni (phase de développement)

GIE Euromissile Dynamics Group (MBDA-France, EADS/LFK, MBDA-UK)

0.6 Md€

Avion de transport futur (A 400M)

France, Allemagne, Espagne, Belgique (+ Luxembourg). Rovaume-Uni, Turquie

Airbus Military SAS

6,4 Md€

Radar de contrebatterie COBRA

France, Allemagne, Royaume-Uni

consortium Euroart advanced radar technology GmbH

0,39 Md€

Famille de système sol-air futurs (FSAF)

France, Italie

G1E Eurosam (MBDA-France, MBDA-Italie, Thales)

3,9 Md€

Frégates antiaériennes Horizon

France, Italie

Consortium regroupant Orizzonte (Fincantieri, Finmeccanica) pour l'Italie et DCN et Thales pour la France

2,6 Md€

Hélicoptère Tigre (HAP-HAC)

France, Allemagne (coopération envisagée avec l'Espagne)

- Eurocopter - MTR GmbH pour le moteur (MTLI, Turboméca, Rolls-Rovce)

7,3 Md€

HELIOS II

France, Belgique, Espagne

CNES avec Astrium SAS et Alcatel Space industries (Aspi)

3.0 Md€

LRM NG (composantes roquette NG et modernisation de conduite de tir)

France, Allemagne, Etats-Unis, Italie, Royaume-Uni

Lockheed Martin

0.05 Md€

Système de distribution d'informations multifonctions (MIDS)

France, Allemagne, Espagne, Etats-Unis, Italie

Euromids (Thales, Indra, EADS Deutschland, Marconi Mobile), pour la production européenne

0,2 Md€

Missile à fibre optique (TRIFOM -POLYPHEM)

France, Allemagne, Italie

GIE Euromissile (MBDA-France, EADS/LFK) et Italmissile (Alema Marconi Systems, Simmel Difesa)

 

Missile d'interception à domaine élargi (MIDE)

France, Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Suède

   

Missile de croisière anti-infrastructure (Scalp-EG)

France, Royaume-Uni, Italie

MBDA-France et MBDA-UK

0,78 Md€

Missile Meteor

France, Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Suède

MEDA

0,48Md€

Hélicoptère NH 90

France, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Portugal

Consortium NHI (regroupe Eurocopter, Eurocopter Deutschland, Agusta Westland, Stork Aerospace)

6,0 Md€

Obus antichars à effet dirigé (ACED) "Bonus"

France, Suède

Bofors Defence AB et Giat Industries

0.17Md€

Scafe (systèmes de combat aériens futurs européens)

France, Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Suède

Réflexion en cours devant déboucher sur le moyen terme à des démonstrateurs

Système d'armes PAAMS

France, Italie, Royaume-Uni

Europaams (2/3 Eurosam, 1/3 Ukams ou MBDA-UK)

 

Système de drone de moyenne altitude et de longue endurance (MALE)

France, Pays-Bas

Sagem

 

Système de télécommunications par satellite Syracuse III étape 2

France, Allemagne

Alcatel Space industries (Aspi)

4.2 Md€

Torpilles Mu 90

France, Italie

GEIE EuroTorp (DCN International, Thales. Wass)

1.2Md€

Valorisation RI TA

France, Belgique

   

Valorisation ROLAND

France, Allemagne

   

En gras : programmes intégrés à l'OCCAR.

En italique : programmes et partenaires prévus en coopération à partir de 2003.

DEUXIÈME PARTIE :
LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES

Le service de santé des armées (SSA) rencontre depuis plusieurs années des difficultés en matière de réalisation de ses effectifs et de fidélisation des personnels, qui avaient bénéficié d'un début de prise en considération en 2001 et 2002. L'effort de redressement se poursuit, bien que le déficit en médecins d'active se creuse davantage.

Les missions du service sont plus que jamais dominées par l'exigence prioritaire du soutien des forces projetées, à laquelle il consacre une part croissante de ses moyens en personnel et matériels.

I. -  UN FORMAT CONDITIONNÉ PAR L'EXIGENCE PRIORITAIRE DU SOUTIEN DES FORCES PROJETÉES

La restructuration du SSA dans le cadre de la professionnalisation a été guidée par l'exigence du contrat opérationnel : soutien de 35 000 hommes engagés sur deux théâtres simultanés à moins de 2 500 km de la métropole, avec des taux de pertes maximales de 2 % (soit 700 blessés/jour), d'un groupe aéronaval et d'une force amphibie, ainsi que de trois bases aériennes projetées dont une majeure.

Le service de santé des armées constitue de fait une composante essentielle des opérations extérieures, au cours desquelles il a mis en _uvre avec efficacité sa conception du traitement médical et chirurgical au plus près des combattants. Au cours des douze derniers mois, le SSA a participé à toutes les opérations extérieures et exercices multinationaux. Outre la continuité du soutien des forces engagées notamment en Bosnie (SALAMANDRE), au Kosovo (TRIDENT) et au Tchad (EPERVIER), l'année 2001-2002 a été marquée par la participation aux opérations HERACLES en Asie Centrale et PAMIR en Afghanistan.

Le soutien médical des forces françaises engagées en OPEX en 2001 a mobilisé 270 officiers d'active, 44 officiers de la réserve, 311 sous-officiers d'active, 166 militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées (MITHA), ainsi que 516 EVAT.

Des moyens performants et adaptés ont été engagés, qui assurent aux blessés les meilleures conditions de traitement et de préservation de leurs capacités fonctionnelles. Au premier semestre 2002, ont été ainsi déployés sur les différents théâtres :

- 42 postes de secours ou équivalent de niveau 1 ;

- 7 cellules RAPACE SANTE (équivalent de postes de secours pour base aérienne projetée) ;

- 4 antennes chirurgicales ;

- 4 cabinets dentaires ;

- 4 sections de ravitaillement sanitaire.

La chaîne globale de prise en charge du combattant ne se limite pas au traitement des urgences, mais comprend également la prévention de risques infectieux ou liés à l'environnement dans le cadre de « l'hygiène et la sécurité en opérations » (HSO). Cette année, la préoccupation majeure a porté sur la prise en compte du risque biologique naturel et agressif en opérations extérieures. A ce titre, plusieurs études et mesures ont été prises par le SSA :

- étude et surveillance de la fièvre hémorragique Crimée Congo au Kosovo ;

- étude en cours sur la fièvre hémorragique Vallée du Rift au Tchad ;

- mise en place dans les trousses individuelles de combat d'un traitement prophylactique commun (doxycycline) du paludisme et de certains agents biologiques agressifs.

La modularité et l'optimisation des ressources constituent des objectifs systématiques dans le contexte actuel d'opérations « multi-théâtres » s'inscrivant dans la durée. La concertation permanente entre le centre d'opérations de la direction centrale du SSA et le centre opérationnel interarmées de l'état-major (COIA), indispensable à la réalisation de ces objectifs, sera renforcée par l'affectation d'un médecin en septembre 2002 au centre de planification et de conduite des opérations, qui succèdera au COIA.

Le développement de la fonction « retour d'expérience » permet en outre une amélioration rapide des conditions du soutien médical et une meilleure adaptation des moyens mis en place.

Dans un souci de mutualisation des moyens, des relations étroites sont entretenues lors des opérations extérieures avec les services de santé des armées étrangères, principalement allemand et espagnol, qui s'appuient à la fois sur des principes d'organisation compatibles et des moyens et prestations de qualité comparable. Cette coopération se manifeste notamment par :

- l'alternance des équipes chirurgicales et dentaires françaises et espagnoles au sein du groupement médico-chirurgical de Mostar, devenu ainsi franco-espagnol au printemps 2000 ;

- le soutien chirurgical des éléments étrangers de la brigade multinationale nord de la KFOR (belges, danois, marocains) par le groupe médico-chirurgical français de Mitrovica ;

- la participation de personnels du SSA au sein des états-majors de la SFOR et de la KFOR ;

- l'accueil au sein de l'antenne chirurgicale française à Kaboul de contingents étrangers, y compris américain ;

- l'aide fournie au contingent français par l'hôpital allemand de Kaboul de la FIAS en matière d'examens complémentaires ;

- l'évacuation sanitaire des blessés français dans l'attentat de Karachi en mai 2002 par un avion sanitaire allemand ;

- l'incorporation fin septembre 2002 d'une équipe chirurgicale française dans l'hôpital allemand de Kaboul.

Une certaine complémentarité des moyens a pu être trouvée avec le SSA allemand à deux niveaux. Tout d'abord, le SSA français dispose d'antennes chirurgicales de niveau 2, parfaitement réactives, car immédiatement projetées sur un théâtre en phase initiale d'une opération, tandis que l'Allemagne est en mesure de déployer des hôpitaux de campagne de niveau 3, plus complets et donc plus lourds à mettre en _uvre (2 mois). De la même façon, les armées allemandes disposent de 4 avions version sanitaire permettant chacun la prise en charge d'une trentaine de patients gravement atteints, alors que les avions sanitaires français, sommairement aménagés, ne peuvent évacuer que des patients dont les fonctions vitales sont stabilisées dans une formation sanitaire de campagne.

En progression, l'emploi de réservistes sur un théâtre d'opérations (4 à 5 en permanence) se fait actuellement dans les formations sanitaires de campagne et permet ainsi une plus grande souplesse dans la gestion des effectifs. Mais son impact est limité, car il est subordonné au volontariat et présente des contraintes (préavis, limitation de la durée du mandat, connaissance du milieu...). Il s'agit davantage d'une ressource d'appoint ponctuelle. En outre, si les effectifs réalisés en officiers de réserve s'élèvent à 54,23 % de la cible 2008, les effectifs réalisés en sous-officiers (dont MITHRA) ne sont que de 4,3 % et nuls pour les hommes du rang.

Dans le contexte actuel des opérations extérieures « multi-théâtres », le soutien opérationnel est assuré par le prélèvement de personnels au sein des forces ou dans les organismes de la logistique santé. Ces prélèvements induisent des déficits ponctuels très significatifs pour l'armée de terre et l'armée de l'air, en raison de l'inscription dans la durée des opérations dans les Balkans (KFOR et SFOR). Ainsi, en 2001, un quart des sous-officiers infirmiers de l'armée de terre est parti en opération extérieure. Dans les organismes du SSA, c'est l'équivalent du potentiel chirurgical d'un hôpital d'instruction des armées (HIA) qui est engagé en permanence sur les différents théâtres d'opérations. Les prélèvements de chirurgiens et d'infirmiers dans les hôpitaux militaires, qui connaissent déjà des problèmes de recrutement, désorganisent les équipes et imposent une réduction de l'activité.

De plus, les opérations extérieures induisent un surcoût financier, comprenant les RCS des personnels gérés par le SSA, les matériels et médicaments ainsi que leur transport, les frais de mise en condition des personnels avant leur départ, les frais d'hospitalisation des militaires rapatriés en France et le coût du soutien apporté à des contingents étrangers ou aux populations. Sur ce dernier point, la mise en condition sanitaire, l'équipement et le ravitaillement sanitaire du contingent sénégalais de la mission d'observation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC), dans le cadre du concept RECAMP, a constitué une charge importante pour le SSA. Au total, en 2001, le surcoût lié aux opérations extérieures a représenté 10,90 millions d'euros. Il est estimé pour 2002 à 14,23 millions d'euros (prévision au 1er juillet). On ne peut que regretter que ce surcoût ne soit pas pris en compte, même partiellement sous forme d'une provision, dans le projet de loi de finances initiale pour 2003.

II. -  DES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE RECRUTEMENT ET DE FIDÉLISATION DES PERSONNELS

La disparition du service national a ôté au service de santé des armées une part importante de son personnel qualifié, médical (27 % des médecins, 63 % des pharmaciens, 75 % des vétérinaires et 92 % des chirurgiens-dentistes provenaient du contingent) et paramédical (15 % des infirmiers, 30 % des prothésistes et 51 % des kinésithérapeutes étaient des appelés). La professionnalisation imposait donc une politique active de recrutement de médecins, de personnels paramédicaux militaires et civils et la création d'un corps de chirurgiens-dentistes.

La situation des effectifs reste cependant en 2002 globalement préoccupante, avec des nuances importantes selon l'affectation (logistique santé ou implantation dans les forces) et les catégories.

Au 1er juin 2002, l'effectif réalisé des médecins des armées était de 2 125 pour un effectif budgétaire de 2 429, soit un déficit de 304 postes (12,5 %). Ce sous-effectif, qui existe depuis 1998, s'élevait à 5 % en 2000 (122 postes) et 9,4 % en 2001 (229 postes). A conditions inchangées, il pourrait dépasser 500 postes en 2007. Le déficit pour les médecins généralistes servant au sein des forces s'élève à 184 postes, essentiellement dans le premier grade. Chez les spécialistes, les déficits les plus préoccupants concernent les anesthésistes-réanimateurs (- 24), les radiologues (- 5) et les urgentistes (- 13), spécialités cruciales pour le soutien des forces et déjà déficitaires dans le secteur civil.

Ce sous-effectif, non anticipé, est dû à la conjonction de plusieurs facteurs d'importance variable :

- la diminution de moitié des recrutements imposée au service de 1982 à 1996 en raison de l'existence d'un sureffectif conjoncturel (seulement 49 sorties d'école d'application en 2002) ;

- la professionnalisation qui a entraîné la création de 126 postes budgétaires de médecins à pourvoir ;

- l'allongement de la durée des études médicales ;

- une augmentation des départs depuis 1999, due à des facteurs endogènes (vieillissement du corps, départ à la retraite de promotions nombreuses) et exogènes (opportunités plus nombreuses pour démarrer une seconde carrière dans le secteur civil liées à la baisse du nombre de médecins). Après une baisse constante entre 1990 et 1997 (de 4,2 % à 3,4 %), le taux de départ par rapport à l'effectif global au 1er janvier a atteint 5,6 % en 2000, et 7,4 % en 2001. Dans l'état actuel des prévisions pour 2002, celui-ci pourrait marquer une inflexion, en se stabilisant à 6,7 %.

Parmi les mesures destinées à combler ce déficit, il a été décidé d'augmenter les recrutements initiaux depuis 1997 : 115 places en 1997, 120 en 1998, 130 en 1999, 140 en 2000, 149 en 2001, 170 en 2002. 20 postes budgétaires supplémentaires d'élèves sont prévus en 2003. Le succès du concours est constant, avec 10 candidats pour une place, mais, étant donné la durée des études médicales (actuellement 9 ans pour un généraliste, 15 ans pour un spécialiste), les effets de ce mode de recrutement ne seront pas perceptibles avant 2006. Destinés surtout à pallier les pertes survenues en cours de scolarité du concours de catégorie du baccalauréat, les recrutements en début de deuxième et troisième cycles ne constituent qu'une ressource très marginale (5 places réalisées sur 12 en 2002 en PCEM2 et une place réalisée sur 2 en DCEM4).

Outre l'augmentation des places offertes pour les entrées en école de formation, l'effort a porté sur la diversification du recrutement. Si le recrutement latéral de médecins thésés sur concours conserve un rendement insuffisant (2 places honorées pour 30 places offertes en 2000, 5 places honorées pour 15 places offertes en 2001), on observe un frémissement pour les recrutements de médecins diplômés sous contrat (OSC et « 98-1 »). Sur les 50 places offertes au total au titre du recrutement complémentaire en 2001, 19 médecins ont pu être recrutés dont 14 sous contrat. Par comparaison, sur les 48 postes offerts en 2000, seuls 5 avaient pu être pourvus, dont 3 par contrat. En 2002, les prévisions portent sur 25 à 30 recrutements de médecins thésés, 8 recrutements d'OSC et 12 recrutements de spécialistes au titre de l'article 98-1 étant déjà effectifs en août 2002. Ce frémissement des recrutements complémentaires est le résultat d'une politique de communication menée auprès des universités et de l'ordre des médecins depuis deux ans. Une campagne d'information pour le recrutement de généralistes, volontaires pour servir comme officier sous contrat (OSC), a été en outre lancée le 1er juin 2002 dans trois revues médicales. La création récente d'un bureau « recrutement » à la direction centrale du SSA devrait également permettre de confirmer ce sursaut, crucial dans l'attente des premiers effets du renforcement du recrutement initial. Il est cependant à craindre que ces mesures, pour positives qu'elles soient, restent encore très insuffisantes pour attirer rapidement de nombreuses candidatures et résorber un déficit qui risque de se creuser davantage jusqu'en 2006.

En vue de limiter les départs et de fidéliser les médecins des armées, différentes mesures de valorisation avaient été inscrites aux budgets 2001 et 2002 : indemnisation forfaitaire des gardes hospitalières, amélioration de l'avancement au grade de médecin principal, revalorisation des primes spéciale et de qualification à partir du grade de médecin en chef de 430 euros par mois à compter d'avril 2002. Cette dernière mesure, introduite par le collectif budgétaire du 6 août 2002, est plus particulièrement destinée aux personnels possédant plus de 25 ans de services et pouvant bénéficier d'une retraite à jouissance immédiate, donc plus enclins à partir.

Il est encore trop tôt pour pouvoir mesurer valablement l'impact de ces mesures, même si la tendance au départ semble s'infléchir au cours du premier trimestre 2002.

D'autres mesures de fidélisation sont inscrites au projet de loi de finances 2003 :

- transformation de postes de médecins en chef en postes de médecins en chef hors échelle (lettre A). Il s'agit de la première annuité d'un plan de 3 ans visant à doubler le contingent de hors échelle afin de permettre l'accès à cette position des généralistes. Cette mesure, qui intervient dans la carrière des médecins 3 à 6 ans après la revalorisation des primes spéciale et de qualification, permet de prolonger la fidélisation ;

- transformation de postes de médecins en chef hors échelle en postes de médecins chefs des services de classe normale et de postes de médecins chefs des services de classe normale en postes de médecins chefs des services hors classe. Ce repyramidage, planifié sur 3 ans, vise principalement à fidéliser les spécialistes ;

- réalisation d'une deuxième tranche de revalorisation des primes spéciale et de qualification à partir du grade de « en chef », à hauteur de 70 euros mensuels.

En réponse à la diminution des candidatures à l'engagement sous statut MITHA et à l'augmentation notable des départs constatées récemment, la direction centrale du SSA a mis en _uvre les mesures suivantes :

- développement d'une campagne d'information auprès des instituts de formation en soins infirmiers (IFSI) ;

- décentralisation du recrutement au niveau des HIA ;

- garantie d'une stabilité d'affectation de 5 ans dans l'HIA de leur choix pour les nouveaux candidats ;

- mise en place d'un pré-recrutement d'infirmiers dès la 3ème année d'études, le SSA prenant à sa charge la dernière année d'études et rémunérant les intéressés comme aides-soignants.

Ces mesures semblent encourageantes, car le bilan prévisionnel pour l'année 2002 laisse entrevoir un solde positif significatif entre les engagements et les départs. Les emplois budgétaires (2 900 pour l'année 2002) sont réalisés au 1er juillet 2002 à 96 %. Les postes libérés par les MITHA des professions non projetables, postes désormais occupés par des techniciens paramédicaux sous statut fonctionnaire (diététiciens, orthophonistes...), permettent au fur et à mesure des départs de procéder au recrutement de MITHA projetables (notamment infirmiers).

La transposition en cours des mesures de la fonction publique hospitalière aux MITHA devrait en outre permettre, par une meilleure reconnaissance des qualifications et une meilleure lisibilité des parcours professionnels, de fidéliser ces personnels, notamment les infirmiers spécialisés et les cadres de santé.

Cependant, la multiplication des opérations extérieures crée de fortes contraintes, ces personnels paramédicaux n'étant jamais remplacés dans les hôpitaux d'où ils sont prélevés. C'est pourquoi le projet de loi de finances pour 2003, renforçant l'effort substantiel déjà engagé dans la loi de finances de 2002 avec la création de 200 postes, prévoit d'accroître de 200 postes supplémentaires le nombre des MITHA (infirmiers essentiellement), afin d'augmenter le taux d'encadrement au lit du malade au sein des hôpitaux militaires et de répondre aux normes d'accréditation.

Signalons enfin, comme les années précédentes, un transfert de postes de gendarmes (30) au profit du service de santé des armées.

Faisant suite à la création du corps en 2000 (décret n° 2000-187), les modalités du recrutement dans le corps des chirurgiens-dentistes d'active sont annoncées pour 2003. En 2002, les effectifs budgétaires des chirurgiens-dentistes s'élevaient à 58, alors que l'effectif réalisé au 1er juillet n'était que de 37. Le SSA envisage un recrutement interne d'élèves chirurgiens-dentistes par changement d'orientation d'élèves médecins doublant leur PCEM1 sans succès, mais reçus en dentaire.

Le fort déficit en personnels civils, lié à des départs massifs lors de la restructuration du dispositif hospitalier et à l'impossibilité de les remplacer rapidement en raison des contraintes liées au recrutement d'ouvriers et de fonctionnaires, constitue une entrave à la bonne marche de la professionnalisation. L'effectif réalisé au 1er juillet 2002 ne s'élève en effet qu'à 4 856, soit un écart de 817 postes par rapport aux droits budgétaires ouverts (5 673). Le recrutement prévisionnel de 666 personnes d'ici fin 2002 ne comblera pas ce déficit, qui devrait donc atteindre au minimum 151 postes.

En ce qui concerne les ouvriers, l'interdiction d'embauche, sauf à hauteur de 40 ouvriers au titre de l'ARTT, ne permet pas de résorber le sous-effectif. Les postes d'ouvriers vacants sont transformés au titre du budget 2003, à hauteur de 246, en postes de fonctionnaires paramédicaux ou techniques. Mais le manque de réactivité du recrutement des personnels sous statut fonctionnaire (lourdeur et lenteur des concours), associé à une situation de pénurie démographique de certaines professions paramédicales (masseurs-kinésithérapeutes et manipulateurs de radiologie) et à un défaut d'attractivité par rapport au secteur libéral, suscitent des difficultés pour réaliser les effectifs. L'acceptation des postes offerts devrait être néanmoins être améliorée par l'abandon du concours national au profit d'un recrutement déconcentré.

III. -  UNE OUVERTURE TOUJOURS PLUS LARGE AU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER, FORMALISEE DANS LA LOI DE MODERNISATION SOCIALE

La suppression du contingent a rendu indispensable l'ouverture très large des hôpitaux militaires, afin de conserver une activité suffisante et variée, gage d'un maintien de la compétence du personnel pour des missions au profit des forces, et de rentabiliser les équipements. Ainsi, les hôpitaux militaires se sont plus largement ouverts au secteur civil dans le domaine de l'urgence, jusqu'à servir de référent dans des spécialités particulières telles que les brûlés. Les services d'accueil des urgences, qui travaillent en étroite collaboration avec les services de secours, fournissent une part importante des hospitalisations et constituent surtout une nécessité pour le maintien du potentiel opérationnel des équipes hospitalières, les préparant aux missions qu'elles retrouvent en opérations extérieures.

La part du secteur civil au sens strict (sans compter les familles des militaires, les retraités et les civils du ministère de la défense) dans l'activité hospitalière du service de santé est ainsi passée entre 1997 et 2001 de 49 % à 72 % des entrées et de 57 % à 76 % des journées d'hospitalisation. 55 % des consultations ne relèvent pas de la sécurité sociale militaire. Un point d'équilibre devra néanmoins être trouvé afin de préserver le caractère prioritaire des missions militaires du service.

En 2001, l'activité hospitalière du SSA, qui a fortement baissé depuis 1997 en raison de la contraction du dispositif hospitalier, devrait mettre un terme à sa décroissance en se stabilisant autour de 90 000 entrées et de 585 740 journées.

PRINCIPAUX INDICATEURS D'ACTIVITÉ DU SERVICE DE SANTÉ

 

RÉALISATIONS

PRÉVISIONS

1998 (1)

1999 (1)

2000 (1)

2001 (1)

2002

2003

Nombre d'entrées :

. à charge du SSA

32 054

21 418

13 487

7 915

7 000

6 500

. à charge de remboursement

84 925

90 716

87 114

80 774

83 000

80 500

dont ceux ne relevant pas de la sécurité sociale militaire

63 384

67 706

68 556

63 697

65 452

63 481

TOTAL

116 979

112 134

100 601

88 689

90 000

87 000

Nombre d'entrées, en pourcentage du total :

. à charge du SSA

27 %

19 %

13 %

9 %

8 %

7,5 %

. à charge de remboursement

73 %

81 %

87 %

91 %

92 %

92,5 %

 

Nombre de journées :

. à charge du SSA

170 404

118 519

74 299

45 014

35 740

30 000

. à charge de remboursement

669 798

638 143

593 890

534 722

550 000

520 000

dont ceux ne relevant pas de la sécurité sociale militaire

527 036

502 129

487 930

442 089

454 720

429 917

TOTAL

840 202

756 662

668 189

579 736

585 740

550 000

Nombre de journées, en pourcentage du total :

. à charge du SSA

20 %

16 %

11 %

8 %

6 %

5,5 %

. à charge de remboursement

80 %

84 %

89 %

92 %

94 %

94,5 %

 

Durée moyenne de séjour (2)

6,67

6,40

6,29

6,20

6,25

6,08

Nombre de consultations

1 045 222

1 001 040

932 416

837 722

760 000

720 000

(1) Sources : résultats du compte de gestion
(2)
CHA Lamalou, HTA et établissements à l'étranger et outre-mer exclus.

Cette participation des hôpitaux militaires au service public hospitalier est désormais formalisée par l'article 11 de la loi n°2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale.

Les équipements et capacités du SSA sont pris en compte dans le schéma régional d'organisation sanitaire sans en faire partie. Un arrêté interministériel santé-défense fixera la liste des hôpitaux des armées concourant au service public ainsi que les équipements concernés.

Cette participation au service public se manifeste également par des conventions de complémentarité établies avec le secteur civil.

Comme leurs homologues du secteur public et privé, les HIA sont soumis à une évaluation de la qualité et de la sécurité de la prise en charge, conformément aux dispositions de l'article R.710 du code de la santé publique, qui précise que l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé procède à l'accréditation des hôpitaux des armées que le ministre de la défense désigne. Le 3 avril 2001, les 9 HIA ont été proposés par le ministre de la défense à l'accréditation. Cette démarche impose des contraintes techniques et financières en matière de sécurité du patient, des personnels, de l'environnement et surtout d'effectifs. L'HIA Laveran à Marseille a été le premier à faire l'objet de la visite d'accréditation en février 2002.

IV. -  UN BUDGET EN NETTE AUGMENTATION, AMPLIFIANT LE REDRESSEMENT ENGAGÉ EN 2002

Le service de santé des armées verra pour la deuxième année consécutive ses crédits budgétaires augmenter en 2003, notamment pour tenir compte des problèmes de recrutement et de fidélisation de ses personnels. La part du financement du service par des recettes externes relevant de l'activité hospitalière (cessions et dotation globale) est cependant désormais prépondérante.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS
DU SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES

(crédits de paiement, en millions d'euros)

 

1998

1999

2000

2001

2002

2003

Évolution
2003/2002

Titre III

265,3

238,9

216,3

219,255

229,540

252,36

+ 9,9 %

Titre V

36,7

41,8

40,6

30,691

24,700

41,028

+ 66,1 %

TOTAL

302,0

280,7

256,9

249,946

254,240

293,388

+ 15,40 %

Les dépenses ordinaires, qui constituent l'essentiel de ce budget, et qui avaient très fortement diminué entre 1998 et 2000, progresseront de 9,9 % en 2003, amplifiant le redressement amorcé dans le budget 2002 (+ 1,4 %).

Cette progression globale masque une réduction importante des crédits de fonctionnement (- 7,8 %), due à la poursuite de la restructuration du service (fermeture du dernier centre hospitalier des armées à Cherbourg et de l'école nationale des officiers de réserve du SSA de Libourne en 2002) et surtout à la prise en compte de la dotation globale de fonctionnement, qui permet de compléter les ressources du service par la procédure du fonds de concours.

Les dépenses de rémunérations et de charges sociales augmenteront de 13,2 %. Cette augmentation intègre les mesures nouvelles destinées à fidéliser les médecins (repyramidage et nouvelle revalorisation de la prime spéciale et de la prime de qualification pour un coût de 0,96 million d'euros), la transposition des mesures « Kouchner » (2,1 millions d'euros) au service de santé, ainsi que la création de 200 postes de MITHA et de 20 postes supplémentaires d'élèves-médecins.

DÉPENSES ORDINAIRES

(en millions d'euros)

 

2001
(loi de finances initiale)

2002
(loi de finances

initiale)

2003
(projet de loi de finances)

Évolution
2003/2002

Rémunérations et charges sociales

183,196

193,955

219,533

+13,2 %

Fonctionnement et alimentation

36,059

35,585

32,823

-7,8 %

TOTAL

219,255

229,540

252,36

+9,9 %

En ce qui concerne les dépenses en capital, les crédits de paiement sont en hausse de 66,1 %, passant de 24,7 millions d'euros en 2002 à 41 millions d'euros en 2003.

Les autorisations de programme sont également en très nette augmentation, de 37,5 % par rapport à 2002, passant de 29,43 à 66,96 millions d'euros, sans atteindre le niveau record de 125,8 millions d'euros enregistré en 2001 au titre du lancement du programme « Hôpital Sainte-Anne 2000 » de Toulon. Ce montant se justifie par la mise en oeuvre d'un programme de mise aux normes incendie et de rénovation des services hospitaliers de l'HIA Bégin de Saint-Mandé, rendu urgent et prioritaire en raison de l'avis défavorable émis par la commission civile de sécurité en mars 2002.

Le programme de construction du nouvel hôpital Sainte-Anne de Toulon, opération classée majeure, reste également prioritaire et ne subira pas de décalage. L'actuel hôpital sera en effet transféré en 2006 dans un bâtiment neuf sur le site de la caserne Grignan, la construction proprement dite devant démarrer à la fin de cette année.

Enfin, l'augmentation des crédits d'équipement correspond à la poursuite du programme « soutien régimentaire 2002 ». La multiplication des opérations extérieures et des exercices multinationaux induisent un taux de rotation élevé des dotations opérationnelles avec des remises à niveau coûteuses obligatoires lors des retours en métropole. Dans cette optique, les crédits budgétaires doivent permettre d'assurer le maintien indispensable de ces dotations opérationnelles, en les faisant évoluer au même rythme que les moyens du service courant pour simplifier les actions de maintenance par l'homogénéité des équipements.

DÉPENSES D'ÉQUIPEMENT ET D'INFRASTRUCTURE

(en millions d'euros)

 

AUTORISATIONS DE PROGRAMME

CRÉDITS DE PAIEMENT

2001

2002

2003

Évolution
2003/2002

2001

2002

2003

Évolution
2003/2002

Équipements

25,307

21,450

32,55

+ 51,7 %

23,556

24,700

28,581

+ 15,7 %

Infrastructure

100,526

7,980

34,415

+ 331,3 %

7,135

0,000

12,447

 

TOTAL

125,833

29,430

66,965

+ 37,5 %

30,691

24,700

41,028

+ 66,1 %

Les ressources financières du service reposent sur les crédits budgétaires provenant des titres III et V du budget de la défense et sur les recettes issues principalement des activités de soins hospitaliers, rétablies au budget du service par la voie de fonds de concours.

Succédant au régime de remboursement des prestations depuis le 1er janvier 2002, le financement du service de santé par dotation globale (DGF) repose sur la définition d'une allocation annuelle forfaitaire versée en 10 fois constituant l'enveloppe financière destinée à ses hôpitaux. Résultant de son activité de soins, cette dotation est rétablie au service par la voie du fonds de concours. Elle est payée pour le compte de l'ensemble des régimes de sécurité sociale par la caisse nationale militaire de sécurité sociale qui joue le rôle de caisse pivot. Le montant 2002 de la DGF s'élève à 341 404 133 euros (arrêté du 30 avril 2002), à comparer aux 254,24 millions d'euros inscrits en loi de finances initiale de la même année. Au total, en 2002, en tenant compte de la dernière loi de finances rectificative, les ressources du SSA devraient atteindre 655 millions d'euros, dont 258 millions en dotation budgétaire et 397 millions en cessions (DGF + versements des mutuelles et personnes hospitalisées). Les ressources externes représentaient donc 60,6 % des ressources du service et la dotation globale proprement dite 52 %. Cette proportion s'inscrit dans une tendance constante depuis 1996 de progression sensible des recettes de cessions dans le financement du service de santé des armées.

L'avantage majeur de la dotation globale par rapport au système antérieur de remboursement des prestations médicales est sa régularité et le montant prévisible des versements, qui facilitent grandement la gestion de la trésorerie. D'éventuelles conséquences financières d'une baisse durable et significative de l'activité ne se feraient sentir que lors de la négociation de l'évolution de la DGF de l'exercice suivant. En revanche, la DGF ne remédie pas à certains inconvénients du système des fonds de concours, qui tiennent à la fois à la répartition rigide entre titre III et titre V et à leur versement étalé au long de l'année. Or, les ordonnateurs secondaires ont besoin d'engager rapidement dès le début de l'année un montant de crédits aussi important que possible afin que soient passés en temps utile les marchés nécessaires au bon fonctionnement des établissements.

Il conviendra à l'avenir que l'ajustement de son montant, qui ne saurait être dissocié de l'évolution de l'activité hospitalière du service, soit coordonné avec la fixation des crédits budgétaires, de telle sorte que l'ensemble des ressources du SSA soit compatible avec l'exigence prioritaire du soutien sanitaire des forces. L'augmentation des ressources externes tirées de l'activité hospitalière et la mise en place de la dotation globale, gage d'une certaine stabilité par rapport aux remboursements de prestations, ne doivent pas provoquer une érosion des crédits budgétaires qui fragiliserait le service.

TROISIÈME PARTIE :
LE SERVICE DES ESSENCES DES ARMÉES

Formation interarmées de logistique pétrolière régie par le décret n° 91-686 du 14 juillet 1991, le service des essences des armées exerce ses attributions dans trois grands domaines :

- l'approvisionnement, le stockage et la distribution des produits pétroliers nécessaires aux armées, à la gendarmerie nationale et à tout autre organisme du ministère de la défense ;

- le soutien logistique « carburants » des forces engagées en opérations extérieures ou en exercices ;

- l'expertise dans le domaine de l'énergie et du pétrole.

I. -  BILAN DE L'ACTIVITÉ DE CESSION DES PRODUITS PÉTROLIERS AUX ARMÉES

Les approvisionnements en 2001 ont porté sur des volumes de 1 212 000 m3 (contre 1 101 000 m3 en 2000), soit une hausse de 10 %. Ils se composent pour 73 % de carburants aériens, pour 20 % de carburants terrestres et pour 7 % de fioul domestique. Ils sont en hausse en métropole (+ 14 %), en diminution outre-mer (- 28 %) et sur les théâtres d'opérations (- 16 %). La part des sociétés françaises s'élève à environ 44 % du total des approvisionnements et à 47 % des carburants d'aviation.

Le niveau des stocks, particulièrement bas en début d'année, et la baisse des cours au dernier trimestre 2001 ont amené le SEA à augmenter ses achats en métropole. Le stock total a augmenté de plus de 92 200 m3, pour passer de 495 600 m3 en janvier à 573 276 m3 en décembre 2001. Ce stock se décompose en 248 000 m3 de stock de crise, 150 000 m3 de stock OPEX et 175 276 m3 de stock d'outil d'exploitation.

Les cessions de ces produits aux armées, en baisse globale de près de 11 %, se sont établies à 1 320 900 m3, se décomposant en :

- 1 178 000 m3 (soit 89 %) sur stocks militaires, dont 62 % en carburéacteur ;

- 142 900 m3 sur stocks civils, c'est-à-dire délivrés directement par les sociétés pétrolières en exécution des marchés passés par le SEA au profit de certaines parties prenantes (essentiellement des « mise bord » dans des stations-services ou sur des aérodromes civils).

Comme l'indique le tableau ci-dessous, la répartition des volumes par cessionnaire est sensiblement identique à celle de 2000.

répartition des quantités de produits pétroliers distribuées
aux armées par le SEA de 1998 à 2001

 

(en pourcentage)

1998

1999

2000

2001

Armée de terre

16

14

13

13

Armée de l'air

55

51

45

46

Marine

6

6

5

6,5

Gendarmerie

5

5

3

3

Divers

18

24

34¹

31,52

TOTAL

100

100

100

100

(1) : dont 30 % pour certains « hors défense » (armées étrangères principalement).
(2) : dont 28,5 % pour certains « hors défense ».

Le SEA a distribué près de 10 400 m3 de lubrifiants et produits pétroliers divers (solvants...), en augmentation de 10 % par rapport à 2000.

Ces achats et cessions de produits sont retracés dans le compte de commerce « Approvisionnement des armées en produits pétroliers ». Le montant des produits d'exploitation qui figure dans le compte de résultat est en légère baisse, de 3 % en 2001, à près de 525 millions d'euros.

II. -  UN BUDGET EN LÉGÈRE BAISSE ET UNE FORTE CONTRAINTE SUR LE TITRE V

Pour la première fois depuis 1999, les crédits du service des essences diminueront légèrement, de 1,35 % en 2003, passant de 92,3 à 91,1 millions d'euros.

Comme l'indique le tableau ci-après, cette évolution résulte d'une quasi-stagnation des dépenses ordinaires (- 0,46 %) et d'une diminution de 3,17 % des crédits du titre V.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU SERVICE DES ESSENCES

(crédits de paiement, en millions d'euros)

Chapitre

Article

Intitulé

Budget 2002

PLF 2003

2003/2002

31.21

60
70
94

Rémunération des personnels militaires et NBI

28,568

29,323

+ 2,58 %

31.22

60
70

Indemnités des personnels militaires

7,615

8,801

+ 15,57 %

33.90

63

Cotisations sociales part de l'Etat

2,896

2,909

+ 0,45 %

33.91

63

Prestations sociales versées par l'Etat

1,059

1,080

+ 1,99 %

34.02

50

Fonctionnement

21,803

19,538

- 10,39 %

34.10

70

Alimentation

0,847

0,847

+ 0 %

Total titre III

62,788

62,498

-0,46 %

53.71

71

Fabrication SEA Equipements

14,726

14,290

- 2,96 %

54.41

81

Infrastructure

14,790

14,290

-3,38 %

Total titre V

29,516

28,58

- 3,17 %

TOTAL GÉNÉRAL

92,304

91,078

- 1,33 %

Les dépenses de rémunérations et de charges sociales s'élèveront à 42,1 millions d'euros, soit 4,9 % de plus que l'an dernier. Cette augmentation est due surtout à une majoration des indemnités des personnels militaires de 15,57 %, intégrant une revalorisation de la prime de qualification accordée aux sous-officiers détenteurs du brevet de technicien en essence. En effet, le déficit croissant des sous-officiers (- 12 % par rapport aux effectifs budgétaires en 2001, - 18 % en 2001, - 20 % au 1er août 2002) justifie une politique volontariste de limitation des départs, amorcée avec la création d'une prime spécifique aux sous-officiers supérieurs en mars 2002 et une sélection plus rigoureuse des militaires souhaitant intégrer la fonction publique par le bénéfice de la loi 70-2. Ce déficit est source d'importants problèmes de gestion : augmentation du taux des départs en OPEX, difficulté d'encadrement dans les établissements métropolitains du SEA. Deux postes de sous-officiers sont néanmoins supprimés dans le projet de loi de finances pour 2003, pour être transformés en postes de techniciens civils. La participation du SEA aux opérations extérieures étant importante (plus de 100 personnes en permanence) et l'activité en métropole étant maintenue au même niveau, les personnels sont très sollicités et, en période de relèves, le SEA franchit le seuil limite d'emploi, en particulier pour les sous-officiers et les militaires du rang. En 2001, 35 % des militaires du rang étaient partis en opérations extérieures.

répartition des personnels militaires du SEA
sur les théâtres d'opérations extérieures (en 2001)

 

Officiers

Sous-officiers

Militaires
du rang

Total

Tchad

3

12

36

51

Bosnie-Herzégovine (SFOR)

6

19

44

69

Macédoine-Kosovo

28

52

196

276

Asie centrale

2

2

5

9

TOTAL

39

85

281

405

Pourcentage des effectifs
partis en OPEX/effectifs réalisés

19 %

30 %

35 %

32 %

La diminution des effectifs du personnel civil ouvrier (563 au lieu de 574) est sans incidence sur le budget du service, ces personnes étant rémunérées par la direction de la fonction militaire et du personnel civil. Le SEA, qui a achevé sa professionnalisation dès 2001, a accordé une priorité à la militarisation et à la mise en place de noyaux durs de personnels civils sur les établissements d'avitaillement. Cela s'est traduit par une déflation importante en personnel ouvrier, accompagnée d'une amélioration sensible des pyramides en groupe VI et VII liée à la reconnaissance de la technicité du personnel composant le noyau dur.

effectifs budgétaires du service des essences des armées

 

2000
(loi de finances initiale)

2001
(loi de finances initiale)

2002
(loi de finances initiale)

2003
(projet de loi de finances)

Personnel militaire

Officiers

223

223

223

223

Sous-officiers

341

341

341

339

Militaires du rang

778

831

849

849

TOTAL

1 351

1 395

1 413

1 411

Personnel civil

Non ouvriers

388

413

409

409

Ouvriers

642

577

577

563

TOTAL

1 030

990

986

972

TOTAL GÉNÉRAL

2 381

2 385

2 399

2 383

Les dépenses de fonctionnement diminuent fortement de 10,39 % par rapport à 2002, en passant de 21,8 à 19,5 millions d'euros, avec une économie budgétaire de 2 millions d'euros en 2003.

Si les autorisations de programme connaîtront une légère hausse, de l'ordre de 1  %, les crédits d'équipement s'élèveront à 14,29 millions d'euros (- 2,96 %), ainsi que les crédits d'infrastructure (- 3,38 %). Cette baisse est assez inquiétante, car la contrainte de mise aux normes des capacités de stockage d'ici à 2010 selon la réglementation en vigueur (arrêté ministériel du 22 juin 1998) fait que le service est particulièrement contraint sur les crédits du titre V. A terme, ces crédits devront se maintenir au-dessus du seuil critique des 27,5 millions d'euros, faute de quoi le SEA sera amené à ne pas mettre en conformité certaines installations, au risque de remettre en cause l'autorisation d'exploitation et la sécurité. La fermeture de celles-ci induirait de toute façon des coûts liés à la dépollution.

Les programmes d'acquisition des matériels majeurs et des véhicules sont régulièrement réévalués en fonction de la réalisation des marchés et de l'évolution des besoins. Cette procédure de pilotage a eu pour effet de favoriser la bonne réalisation des objectifs budgétaires. Les moyens dont dispose le SEA pour l'exécution de ses missions de soutien pétrolier tant en métropole qu'en opérations extérieures sont déterminés au plus juste et les programmes d'acquisition ne permettent que la stricte satisfaction des besoins. Après les efforts réalisés sur les parcs de véhicule de la gamme tactique et de semi-remorques citernes, les efforts porteront sur le renouvellement du parc de véhicules avitailleurs. Près des trois quarts du parc des avitailleurs des dépôts sur bases aériennes et aéronavales arrivent en fin de vie et doivent être remplacés d'ici 2010.

Les acquisitions pour l'année 2003 se répartissent suivant le tableau ci-dessous :

(en millions d'euros)

MATÉRIELS

MONTANT

Moyens d'avitaillement

6,62

(oléoserveurs, avitailleurs)

Moyens de transport

0

(camions-citernes, semi-remorques citernes)

Moyens de stockage de campagne

4,7

(bacs souples, cuvettes, caisses de stockage,...)

Véhicules de liaison

0

(tourisme, utilitaires)

Habillement, campement, couchage et ameublement (HCCA)

0,45

Matériels « non majeurs »

1,02

Soutien des matériels

1,5

TOTAL

14,29

En matière d'infrastructure, le SEA procède dans ses établissements à des opérations de modernisation des installations pétrolières (filtration-épuration) et de réhabilitation (renouvellement de capacités, mise à niveau de la protection anti-pollution, incendie).

III. -  LES ENSEIGNEMENTS DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES ET LA REDÉFINITION DES MATÉRIELS

Outre le soutien pétrolier des éléments français au Tchad et de la SFOR (pour lequel la fonction transport est désormais externalisée en quasi-totalité), la France remplit avec efficacité depuis trois ans au Kosovo et en Macédoine la mission de Role Specialist Nation (RSN) pour l'ensemble de la KFOR, à l'exception du contingent russe. Ce pôle de compétence devra être mis en avant dans l'implication de la France dans l'Europe de la défense.

En Asie centrale, la plus grande difficulté a été l'absence des sociétés pétrolières avec lesquelles le SEA traite habituellement.

Le SEA a participé aux diverses missions de reconnaissance (Emirats Arabes Unis, Ouzbékistan, Tadjikistan, Kirghistan) au cours desquelles des contrats de fourniture de carburants ont été passés localement. A la demande de l'état-major de la marine, le détachement de Djibouti a assuré le suivi du stock de carburéacteur approvisionné spécialement pour les avions de chasse embarqués sur le porte-avions.

Le soutien pétrolier des éléments français est assuré différemment selon les territoires. Au Tadjikistan, l'avitaillement des aéronefs est externalisé ; au Kirghizistan et aux Emirats Arabes Unis il est effectué par des personnels du SEA avec des matériels américains et en Afghanistan, entièrement par du personnel et du matériel du SEA. Depuis le début des opérations, le SEA réalise sa mission avec un effectif réduit au minimum (5 officiers, 6 sous-officiers et 12 EVSEA).

La qualité des carburants terrestres n'étant pas satisfaisante, le concept de carburant unique a été appliqué en Afghanistan et a donné entière satisfaction au détachement de l'armée de terre.

Les expériences des opérations extérieures passées avec Daguet, puis en ex-Yougoslavie (SFOR), en Macédoine et au Kosovo (KFOR) et enfin en Asie Centrale ont confirmé le besoin d'intégrer dans une même chaîne toutes les fonctions du soutien pétrolier des forces et la nécessité d'une interarmisation des moyens.

Les missions RSN ou « lead nation » conduisent le SEA à concevoir des matériels interopérables avec les forces de l'OTAN, voire avec les matériels et installations civils. Le SEA s'efforce en outre de disposer de matériels communs aux armées (armement, transmissions, NBC, véhicules...), de manière à permettre une mutualisation du soutien. Afin que les armées disposent d'une ressource en produits pétroliers de qualité, aux normes internationales, aussi bien en métropole qu'outre-mer et en OPEX, le concept du carburant unique (carburéacteur type kérosène, employé tant pour l'avitaillement des aéronefs que comme carburant pour les moteurs diesel) a été développé. Actuellement, les matériels (à moteurs diesel) à vocation opérationnelle des forces armées utilisent indifféremment, en fonction des conditions d'approvisionnement, le carburéacteur ou le gazole.

Les matériels doivent enfin être conformes à la réglementation française en matière de code de la route, de transport de matières dangereuses, d'hygiène de sécurité et de condition de travail (HSCT) ou encore de protection de l'environnement (en première place dans la charte de l'OTAN) qui reste applicable en OPEX.

Les matériels de la nouvelle génération, en particulier les véhicules citernes, ont donné entière satisfaction dans des conditions de circulation et d'emploi difficiles qui, à terme, auront une incidence sur la périodicité de leur renouvellement.

L'expérience tirée des opérations extérieures a montré la nécessité de disposer de matériels rustiques, polyvalents et interopérables. A cette fin, le SEA a étudié et fait réaliser trois nouveaux types de véhicules :

- pour ses besoins, un avitailleur rustique, aérotransportable avec remorque, d'une capacité totale de 30 m3 et un camion citerne de 18 m3 à forte motricité et tous chemins, pouvant tracter une remorque citerne de 18 m3.

- pour l'armée de terre, un véhicule citerne de 11 m3 sur châssis TRM 10 000 apte au ravitaillement des chars Leclerc et à l'avitaillement des hélicoptères.

IV. -  LA POURSUITE DE LA RÉORGANISATION DES INFRASTRUCTURES DU SEA

La rationalisation des moyens dans le cadre du nouveau contexte géostratégique a conduit à programmer la fermeture de nombreux dépôts pétroliers. Les choix ont été guidés par le souci de conserver un potentiel de stockage important, protégé (bacs enterrés) et dont l'exploitation, la mise à niveau et l'entretien se trouvent facilités.

A la demande du conseil général de la Seine-Saint-Denis, le site de la Courneuve, initialement prévu pour être utilisé pour l'exposition universelle de 2004, sera abandonné par le ministère de la défense. Ses activités pétrolières ont cessé le 30 avril 2002. Le centre de ravitaillement des essences et une annexe du laboratoire de Marseille qui s'y trouvaient ont vu leurs activités transférées sur d'autres sites. Le coût du transfert des activités de laboratoire sur Marseille a été estimé à 4 millions d'euros. A ce coût s'ajoutent les frais de personnels (0,5 million d'euros) et de dépollution, pour lesquels une étude simplifiée des risques a été programmée.

En 2003, le DEA d'Aix les Milles sera fermé, toute activité aérienne ayant cessé sur la plate-forme. Le coût de cette opération en 2003 sera de l'ordre de 50 000 euros, hors dépollution.

Le DEA de Mayotte verra son activité transférée à la collectivité territoriale en 2003, sous réserve que la procédure de privatisation en cours respecte les délais.

CONCLUSION

Les services communs du ministère de la défense ont considérablement évolué au cours de la période couverte par la précédente loi de programmation. Sans doute, la DGA figure-t-elle parmi les services qui ont connu les réformes les plus importantes, et le changement de statut de DCN au 1er janvier 2003, qui achève la séparation de l'entreprise de la DGA, illustre son recentrage sur ses activités de fournisseur d'équipements aux armées.

L'évolution statutaire de DCN était indispensable dans un contexte de restructurations accélérées du secteur de la construction navale militaire, elle lui permettra de prendre une part active aux alliances et coopérations nécessaires pour renforcer sa position dans un secteur en pleine mutation.

Si l'enveloppe financière globale accordée aux services communs pour 2003 est satisfaisante, cette appréciation générale doit être nuancée par les réductions importantes réalisées sur les crédits de fonctionnement des services de soutien des forces (- 7,8 % pour le service de santé, - 10,4 % pour le service des essences).

Plus encore, l'expérience a montré que les crédits du budget de la défense servaient trop souvent de variable d'ajustement, qui plus est dans un contexte économique dégradé. Le non respect des engagements pris par le ministre de la défense lors de la présentation du projet de loi de programmation militaire, dont le budget 2003 représente la première annuité, rendrait très difficile de nouveaux gains de productivité autour des commandes pluriannuelles. Il est donc nécessaire d'être particulièrement attentif à la mise en _uvre des dispositions du projet de loi de finances pour 2003.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. -  AUDITION DE M. YVES GLEIZES, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL POUR L'ARMEMENT

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu M. Yves Gleizes, délégué général pour l'armement, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 (n°187) et sur le projet de loi de finances pour 2003 (n° 230), au cours de sa réunion du mercredi 16 octobre 2002.

M. Yves Gleizes a évoqué l'activité de la DGA au cours de l'année écoulée. Si les programmes nationaux se sont déroulés de façon satisfaisante en 2002, le bilan est plus nuancé pour les programmes en coopération. Des programmes majeurs ont franchi des étapes importantes au cours de cette année : les programmes des frégates multimissions, des systèmes de drones MALE (moyenne altitude longue endurance) et MCMM (multi capteurs multi missions), ainsi que du missile de croisière naval ont été lancés, les essais de qualification du missile de croisière Scalp-EG ont été engagés, 20 Rafale supplémentaires ont été commandés. Pour les programmes en coopération, le bilan est plus mitigé, notamment en raison du report des programmes d'avion de transport A 400 M et du missile d'interception Météor, qui sont suspendus à la décision de l'Allemagne ; en outre, l'Espagne n'a pas encore annoncé son choix quant à son entrée dans le programme d'hélicoptères Tigre. En revanche, l'année 2002 a été plus favorable dans le secteur de l'observation spatiale : un accord franco-allemand pour l'accès à une capacité radar a été conclu et vient compléter un accord intervenu en 2001 avec l'Italie, et le programme « segment sol d'observation » (SSO) a été lancé. Enfin, les ministres français et italien ont donné une forte impulsion à la coopération sur les futures frégates multimissions.

Le délégué général pour l'armement a souligné que le taux d'exécution budgétaire est très satisfaisant : il a insisté sur la bonne consommation des crédits, qui contredit l'idée souvent avancée selon laquelle le ministère de la défense ne dépenserait pas les crédits qui lui sont alloués. La DGA prévoit de respecter ses objectifs d'engagement en 2002 : le niveau d'engagement devrait se situer au-dessus des résultats atteints en 2001, notamment grâce aux commandes globales. Ces dernières devraient atteindre un montant de 6 milliards d'euros en 2002 : elles concernent l'avion de transport futur, le programme Rafale, le programme de missiles sol-air futurs (FSAF) et le missile M 51. En ce qui concerne la commande de ce dernier, il s'agit en fait de l'affermissement d'une tranche conditionnelle du marché notifié le 27 décembre 2000. Toutefois, les autorisations de programme correspondantes n'ont pas encore été mises en place dans le budget 2002, il est donc nécessaire qu'elles soient intégrées dans le collectif budgétaire de fin d'année, afin de respecter la date de notification fixée au 27 décembre 2002.

La DGA s'est profondément transformée depuis 1997. Son coût d'intervention a été réduit de 30 % et ses effectifs ont diminué de 25 %. Elle a considérablement réduit le coût des programmes d'armement, réalisant 9,6 milliards d'euros d'économie sur l'ensemble des programmes, ce qui représente une augmentation d'environ 10 % du pouvoir d'achat du ministère de la défense. La réduction du coût des programmes n'a pas pour autant porté atteinte aux marges des industriels : les économies ont été réalisées grâce à de nouveaux modes de passation des contrats et à une organisation en plateau avec les états-majors et les industriels, afin de mieux faire correspondre les besoins des utilisateurs avec les équipements fournis. La DGA est à présent une administration moderne : elle utilise de façon croissante les nouvelles technologies et met en place des possibilités d'achat par Internet avec les fournisseurs. Cette approche permet notamment de faciliter l'accès des petites et moyennes entreprises aux marchés d'armement et participe à la modernisation de la gestion de la DGA.

Le délégué général pour l'armement a ensuite évoqué le projet de loi de programmation militaire pour les années 2003 à 2008. Le rétablissement de la disponibilité des matériels des armées constitue une priorité. Les ressources supplémentaires votées dans la loi de finances rectificative d'août dernier et les ressources inscrites dans la loi de programmation répondent à ce besoin. En parallèle, les structures étatiques de maintenance évoluent avec la mise en place des structures intégrées de soutien, la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) et le service de soutien de la flotte (SSF). La DGA a d'ores et déjà mis à la disposition de ces structures plus de 450 personnes. Enfin, il convient désormais de raisonner sur la disponibilité d'un système complet et non plus d'un équipement particulier et de globaliser les prestations afin de gagner en flexibilité. Des expériences d'ampleur limitée ont été lancées par la DGA, telles que l'optimisation du réapprovisionnement des rechanges consommables des matériels aéronautiques des forces armées (ORRMA) : ce programme, qui responsabilise l'industriel dans la gestion des consommables aéronautiques, est en cours de notification.

Le projet de loi de programmation militaire pour 2003-2008 prévoit la réalisation des équipements prévus par le modèle d'armée 2015. La DGA compte maintenir l'effort sur la réduction des coûts et des délais des programmes, en visant notamment à approfondir la phase de levée de risques. Face à des maîtres d'_uvre en situation dominante, la DGA veillera à maintenir une mise en concurrence au niveau des équipements en imposant des plans d'acquisition à l'industriel maître d'_uvre. Le développement d'un portail d'armement qui sera mis en ligne sur Internet avant la fin de l'année permettra à la DGA de mieux communiquer avec sa base de fournisseurs, plus particulièrement avec les petites et moyennes entreprises, afin de faciliter leur accès aux marchés et d'élargir le panel de fournisseurs de la DGA. Enfin, le recrutement de véritables acheteurs spécialisés est déjà bien engagé.

Les ressources que le projet de loi de programmation militaire prévoit de consacrer aux actions de recherche et de technologie s'élèvent à 3,8 milliards d'euros sur six ans, ce qui représente une hausse d'environ 16  % par rapport à la précédente loi de programmation militaire. Cette montée en puissance doit permettre à la France d'atteindre le niveau du Royaume-Uni en 2008. La DGA s'est fixé des objectifs précis en matière de recherche et de technologie, notamment le recours au développement de démonstrateurs technologiques, le renforcement de la coordination entre les travaux de recherche des ministères civils et les travaux financés par la défense, ainsi que le renforcement de la coopération européenne.

Souhaitant continuer à jouer un rôle moteur dans la construction de l'Europe de l'armement, la DGA soutient activement la montée en puissance de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR), ainsi que la transposition en droit interne des dispositions de la lettre d'intention (LoI) signée en 1998 par six pays pour améliorer le fonctionnement de l'industrie européenne de défense. Elle s'efforce d'obtenir des résultats concrets du processus ECAP (European capability action plan) d'identification des lacunes capacitaires des Etats de l'Union européenne, qui pourraient déboucher à terme sur des programmes d'acquisition.

Le délégué général pour l'armement a ensuite dressé un panorama de l'évolution des industries de défense françaises.

Les travaux se poursuivent activement pour aboutir à la transformation de DCN en société nationale, le plus tôt possible au cours de l'année 2003. Les programmes prévus par le projet de loi de programmation militaire sont favorables ; DCN disposera d'une période de transition de cinq ans durant laquelle elle bénéficiera de garanties d'activité.

Le plan stratégique, économique et social (PSES) mis en _uvre par GIAT-Industries arrive à son terme et s'est traduit notamment par une réduction importante d'effectifs. Cependant, malgré cet effort, GIAT-Industries ne semble pas en mesure de parvenir à un équilibre et son plan de charge prévisionnel, avec notamment l'arrêt à terme de la production du char Leclerc, ne suffira pas à garantir la stabilisation du format de l'entreprise.

La SNPE connaît pour sa part une situation difficile, après la catastrophe survenue à Toulouse en 2001 : ses activités chimiques sont fragilisées en raison de l'arrêt de la production de phosgène. Avec le projet de formation de la société Héraklès conjointement avec SNECMA, le délégué général pour l'armement a indiqué toutefois que l'avenir de la branche matériaux énergétiques paraît bien assuré.

Dans les autres secteurs de l'industrie de défense, les consolidations se sont poursuivies. On peut signaler en particulier que dans le domaine de l'électronique de défense, Alcatel s'est désengagé du capital de Thales et que les activités spatiales de EADS ont été réorganisées.

Les prises de commande à l'exportation des industries françaises de défense en 2001 se sont inscrites en recul par rapport aux commandes enregistrées en 2000, ce qui illustre le caractère fluctuant des résultats à l'exportation. Après un début d'année 2002 difficile, marqué par l'échec de la vente d'avions Rafale à la Corée du Sud et un contexte de forte concurrence américaine, l'industrie française a ensuite enregistré des succès notables, tels que la fourniture de sous-marins Scorpène à la Malaisie. D'autres contrats importants sont espérés avant la fin de l'année.

Le délégué général pour l'armement a ensuite rappelé les perspectives ouvertes par le projet de loi de finances pour 2003, qui est cohérent avec le projet de loi de programmation militaire. Quant au budget de fonctionnement de la DGA, il est en stabilisation, après six années de diminution continue.

M. Yves Gleizes a indiqué en conclusion que ses priorités pour l'avenir étaient la préparation du futur et les actions de recherche et de technologie, le renforcement de la construction de l'Europe de l'armement et la poursuite de la modernisation de la délégation générale pour l'armement, en cohérence avec la réforme de l'Etat.

M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis pour les services communs, a souhaité obtenir la confirmation que la réduction de 25  % de l'effectif de la DGA était calculée sans inclure DCN dans le périmètre. Il a ensuite demandé si, dans le cas où une coopération franco-italienne serait engagée pour le programme de frégates multimissions, la société qui serait maître d'_uvre avait déjà été choisie.

Après avoir confirmé que le chiffre de 25  % cité concernait bien la seule DGA étatique, M. Yves Gleizes a indiqué que pour le programme de frégates multimissions, la coopération se présentait bien avec l'Italie et, quelle que soit la solution qui serait retenue en définitive, ce programme favoriserait la mutation de la nouvelle société DCN.

M. Jean-Yves Le Drian s'est félicité des propos du délégué général pour l'armement sur DCN. Ils sont en accord avec l'objectif de la loi de finances rectificative pour 2001, qui est de garantir un plan de charge suffisant à DCN pour réussir son changement de statut. La loi prévoit aussi que l'ensemble des commandes garanties doit faire l'objet d'un contrat d'entreprise qui sera présenté aux commissions de la défense et des finances dans les trois mois suivant l'entrée en vigueur du statut.

Il a ensuite demandé si le délégué général pour l'armement considérait encore la DGA comme un industriel ou s'il ne pensait pas plutôt que celle-ci, du fait des réformes réalisées depuis 1997, avait changé de nature, devenant essentiellement un donneur d'ordres.

M. Yves Gleizes a répondu qu'une grande partie de la DGA avait exercé des métiers industriels dans le passé. Néanmoins, cette part de son activité n'avait cessé de diminuer, avec le départ successif des activités d'explosifs, d'armement terrestre et de construction navale militaire. La DGA a permis de développer et de renforcer l'industrie de défense française par son action d'orientation et de développement des programmes. Ce métier est commun à tous les grands pays producteurs d'armement. Dans chacun de ceux où se développe une puissante industrie d'armement, un organisme similaire à la DGA a été créé pour orienter et encadrer son action.

Evoquant les modalités d'une éventuelle coopération avec les Britanniques pour la construction du deuxième porte-avions, M. Jérôme Rivière a demandé si une coopération sur des sous-ensembles ne serait pas plus fructueuse qu'une coopération sur l'ensemble du programme, puisqu'il semblait que les Britanniques étaient sur le point de faire le choix d'un porte-aéronef pour appareils à décollage vertical, plutôt que d'un porte-avions classique.

M. Yves Gleizes a répondu qu'il avait été simplement demandé à la DGA de fournir une étude sur trois options, en vue de guider la décision gouvernementale. La première option est celle d'une coopération avec les Britanniques. On sait peu de choses aujourd'hui sur les caractéristiques retenues par ceux-ci, elles ne seront connues qu'en mars 2003. La deuxième option, la plus simple, est celle d'un sister-ship du Charles de Gaulle. Cependant, la propulsion nucléaire fait l'objet d'un débat. La troisième option est celle d'un porte-avions construit par la France seule, qui serait sans doute proche du Charles de Gaulle, mais avec une propulsion classique. Les échéances prévues par le projet de loi de programmation militaire permettent de mener une réflexion approfondie. La DGA s'efforcera de favoriser la réalisation d'un nombre maximal d'équipements en coopération.

Soulignant la discordance entre les dates retenues pour l'entrée en service de la première frégate multimissions, soit 2008, et pour celle du missile de croisière naval, soit 2011, M. Charles Cova a demandé si un calendrier plus adapté, permettant d'assurer la cohérence du système d'armes et de rallier au programme de missile de croisière naval des pays européens tels que la Grande-Bretagne et l'Italie ne pourrait pas être recherché, en avançant la réalisation de ces programmes : en effet, le coût supplémentaire de l'accélération de ce programme de missile de croisière semble relativement modeste.

M. Yves Gleizes a répondu que les frégates prévues pour entrer en service en 2008 étaient des frégates de lutte anti-sous-marine, les nouvelles frégates destinées à la lutte contre la terre entrant en service en 2011. C'est là le besoin exprimé par la marine. Dès lors, le calendrier des missiles de croisière navals et celui des frégates destinées à les emporter sont cohérents.

Si l'industriel souhaite que le missile de croisière naval puisse être opérationnel avant la date pour laquelle le besoin français est formulé, il lui revient de rechercher des coopérations internationales. La France ne financera pas seule le développement d'un programme de ce type à seule fin de permettre son exportation avant même d'en avoir l'usage. Cela a été fait, mais les frais ont été trop importants.

Faisant allusion au débat qui oppose le ministère de la défense aux industriels, M. Yves Fromion a demandé quelles étaient les perspectives d'aboutissement du projet de missile mer-mer Exocet block III.

Par ailleurs, à enveloppe financière égale, ne serait-il pas plus judicieux d'acheter davantage d'hélicoptères NH 90, plutôt que de rénover des Puma et des Cougar dont certains ont déjà quarante ans d'âge ?

M. Yves Gleizes a répondu qu'il n'est envisagé à ce jour qu'une modernisation de l'électronique de l'Exocet. Toutefois, le ministère de la défense examine la possibilité de s'impliquer dans le développement de l'Exocet block III, mais aucune décision n'a encore été prise.

Le choix de la rénovation des Puma et des Cougar a fait l'objet d'une longue réflexion. L'achat de quinze NH 90 supplémentaires plus modernes peut paraître une solution intellectuellement plus satisfaisante, mais ne permettrait pas à l'armée de terre de bénéficier de la capacité aéromobile souhaitée. C'est pourquoi elle a été écartée.

Le président Guy Teissier a soulevé la question de l'équité entre les armées, puisque la marine recevra ses premiers NH 90 dès 2005, alors que l'armée de terre devra attendre jusqu'en 2011.

Indiquant que 27 hélicoptères NH 90 devaient être livrés à la marine à partir de 2005 à raison de deux par an, M. Richard Mallié s'est inquiété des problèmes logistiques résultant d'un délai de production aussi important. En 14 ans, l'appareil ne manquera pas d'évoluer et la flotte d'hélicoptères de la marine sera disparate.

M. Yves Gleizes a rappelé qu'initialement, la marine devait recevoir 4 hélicoptères par an, mais que c'est faute de crédits suffisants que le rythme de livraison avait été révisé à la baisse. Il faut toutefois souligner que le NH 90 bénéficie d'un bon niveau de commandes à l'exportation, ce qui permettra de maintenir une cadence de production rationnelle du point de vue industriel.

II. -  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a ensuite examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Yves Le Drian, les crédits des services communs : délégation générale pour l'armement, service de santé, service des essences, pour 2003.

Concluant à une nécessaire vigilance, M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis, s'en est remis à la sagesse de la commission sur le vote des crédits, indiquant qu'à titre personnel, il s'abstiendrait.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des services communs : délégation générale pour l'armement, service de santé, service des essences, pour 2003, les commissaires socialistes s'abstenant.

*

Au cours de cette même réunion, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la défense pour 2003, les membres du groupe socialiste s'abstenant.

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N° 0260  - 09 - Avis de M. Jean-Yves Le Drian  sur le projet de loi de finances pour 2003 - défense - services communs : délégation générale pour l'armement, service de santé, service des essences

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