PAR M. MANUEL AESCHLIMANN,

Député.

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INTRODUCTION 5

PREMIÈRE PARTIE : LES CRÉDITS DE L'ADMINISTRATION 6

I. - L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE 6

A. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS 6

B. LE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS D'ACTION DU MINISTÈRE 9

II - L'ADMINISTRATION TERRITORIALE 9

A. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS 9

B. LA RECHERCHE D'UNE PARITÉ INDEMNITAIRE 10

C. LA POURSUITE DE LA MODERNISATION DES PRÉFECTURES 10

1. La revalorisation des crédits de fonctionnement 10

2. L'approfondissement de l'expérimentation de globalisation des crédits 12

DEUXIÈME PARTIE : L'ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES 15

I  - LES CONCOURS DE L'ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES 15

A. LA RECONDUCTION POUR UN AN DU CONTRAT DE CROISSANCE ET DE SOLIDARITÉ : UN CHOIX DE TRANSITION 15

1. Les dotations de fonctionnement 16

2. Les dotations d'équipement 29

3. Les dotations liées aux transferts de compétences 29

4. La dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) 30

B. LES CONCOURS HORS ENVELOPPE : LE POIDS TOUJOURS CROISSANT DES COMPENSATIONS DE FISCALITÉ LOCALE 31

1. Le fonds de compensation de la TVA (FCTVA) 31

2. Les amendes forfaitaires de la police de la circulation routière 31

3. Les subventions et comptes spéciaux du Trésor 31

4. Les compensations d'exonérations et dégrèvements législatifs 31

C. LA COMPENSATION DES SUPPRESSIONS DE FISCALITÉ DEPUIS 1999 32

II. -  L'INDISPENSABLE RÉFORME DES FINANCES LOCALES 36

A. LA RELATIVE AUTONOMIE DES COLLECTIVITÉS LOCALES FRANÇAISES 36

B. UNE DÉCENTRALISATION À BOUT DE SOUFFLE 43

III. -  LES ENGAGEMENTS DU GOUVERNEMENT 47

A. LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2003 : UNE PREMIÈRE ÉTAPE 47

1. Une autonomie accrue des collectivités locales 47

2. Des dispositifs de solidarité rénovés 49

B. LE PROJET DE RÉVISION CONSTITUTIONNELLE 51

AUDITION DE M. NICOLAS SARKOZY, MINISTRE DE L'INTÉRIEUR,

DE LA SÉCURITÉ INTÉRIEURE ET DES LIBERTÉS LOCALES 53

MESDAMES, MESSIEURS,

La récente campagne électorale a montré combien étaient fortes les attentes des Français en matière de sécurité ; les crédits impartis au ministère de l'intérieur dans le projet de loi de finances pour 2003 apportent une réponse à la hauteur de l'enjeu, avec une progression de 5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002, traduisant ainsi très concrètement les engagements pris dans la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure adoptée en juillet dernier.

Les missions du ministère de l'intérieur ne sauraient pour autant se limiter à cet objectif de sécurité : comme l'atteste sa nouvelle dénomination de ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, c'est à lui également qu'il reviendra d'initier la réforme des structures de l'Etat annoncée par le Président de la République, en mettant en place la nouvelle étape de la décentralisation.

A la veille de cette réforme essentielle, l'examen des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales mérite une attention particulière ; atteignant cette année 58,18 milliards d'euros, ils connaissent une progression de 3,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002, soit plus du double du taux d'inflation évalué à 1,5 %. Cette progression est due essentiellement au choix du Gouvernement de reconduire pour un an le contrat de croissance et de solidarité mis en place en 1998, assurant ainsi aux collectivités locales, dans un contexte budgétaire pourtant difficile, une évolution régulière de leurs ressources.

Pour autant, le choix de cette reconduction ne peut être que celui d'un budget de transition ; l'inscription prochaine dans la Constitution du principe de l'autonomie financière des collectivités locales exige, en effet, que soit repensée complètement l'architecture des concours financiers de l'Etat. Dans l'attente de cette réforme, votre rapporteur vous propose, après une première partie consacrée aux crédits de l'administration, d'analyser les crédits impartis aux collectivités locales en y incluant une comparaison avec les autres pays européens. Si cette étude conclut à un classement en bonne place des collectivités locales françaises en terme d'autonomie, elle met également en lumière les limites d'une décentralisation à bout de souffle ; la réforme constitutionnelle, que, sur bien des points, le projet de loi de finances pour 2003 anticipe, sera l'occasion de renouveler le contrat entre l'Etat et les collectivités locales, autour des deux thèmes centraux de l'autonomie et de la solidarité.

PREMIÈRE PARTIE : LES CRÉDITS DE L'ADMINISTRATION

I. - L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE

Le budget du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales pour 2003 reproduit la même structure que les années précédentes : il comprend cinq agrégats qui permettent une ventilation des crédits entre l'administration territoriale, la sécurité civile, la police nationale, les collectivités locales et l'administration générale. Ce dernier agrégat correspond aux crédits de l'administration centrale du ministère, à l'exception de la direction générale de la police nationale et de la direction de la sécurité civile ; les crédits de ces deux directions mobilisent à eux seuls respectivement 55 % et 3 % de l'ensemble des crédits impartis au ministère, hors dotations aux collectivités locales.

L'agrégat budgétaire correspondant à l'administration générale représente 30 % des crédits de l'ensemble, hors dotations aux collectivités locales, soit 2,92 milliards d'euros ; 80 % de ces crédits, soit 2,4 milliards d'euros, sont consacrés aux charges de pensions, c'est-à-dire à l'ensemble des pensions versées aux anciens agents du ministère. Ces charges de pension connaissent, sous l'effet de la démographie, une progression de 3 %.

Le solde de l'agrégat permet de rémunérer un effectif de 5 399 emplois en administration centrale.

Parmi les missions imparties à l'administration centrale, la mise en _uvre des conditions d'exercice de la représentation démocratique regroupe les crédits relatifs à l'organisation des élections et au financement des partis politiques ; s'agissant des élections, le fascicule budgétaire consacré aux crédits du ministère de l'intérieur indique qu'une attention particulière est portée à la maîtrise des coûts moyens des élections par électeur à l'occasion de chaque renégociation de marchés de fournitures, l'externalisation de certaines tâches coûteuses en personnel, telles que la mise sous pli par exemple étant, dans cette perspective, privilégiée. En 2002, la somme consacrée aux élections s'élevait à 262 millions d'euros, dont 160 millions pour les élections présidentielles et 89 millions pour les élections législatives ; les prévisions pour 2003 font très logiquement apparaître, compte tenu du calendrier électoral, une forte réduction des crédits consacrés à ce poste, avec un montant total de 78,4 millions d'euros. S'agissant ensuite du financement des partis et groupements politiques, le montant total de l'aide annuelle allouée par l'Etat, précisée au chapitre 41-61, ne varie pas depuis 1995 et s'établit à 80,26 millions d'euros.

Une autre mission impartie à l'administration centrale concerne le traitement du contentieux engageant la responsabilité de l'Etat ; il s'agit notamment de traiter les affaires relatives au refus de la force publique d'exécuter les décisions de justice, ainsi que d'assurer la protection juridique des fonctionnaires ; l'exécution de cette mission relève des attributions de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques ; les crédits qui lui sont spécifiquement affectés sont reconduits pour l'année 2003 à hauteur de 71,34 millions d'euros.

La tutelle du ministère de l'intérieur sur les cultes fait l'objet d'une dotation de 34 millions d'euros. Ces crédits sont destinés essentiellement à financer et à assurer l'application du concordat en Alsace-Moselle ; grâce à un transfert de crédits du titre III (chapitre 31-21) vers le titre IV (chapitre 41-51), le projet de loi de finances pour 2003 propose une revalorisation des indemnités des desservants du culte en Alsace-Moselle d'un montant de 0,15 million d'euros, permettant ainsi de mettre à niveau des subventions dont le montant n'avait pas été modifié depuis de très nombreuses années.

Les tableaux ci-dessous retracent l'évolution des crédits de l'administration générale depuis 1993 :

- -

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE (DO+CP)
(en millions d'euros)

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000 (*)

2001

2002

2003

Personnels

1 937,97

1 944,67

2 010,97

2 129,74

2 130,61

2 199,30

2 273,97

2 346,05

2 387,23

2 518,91

2 593,79

    dont pensions

1 723,33

1 777,31

1 804,10

1 917,76

1 932,88

1 991,93

2 058,78

2 051,11

2 180,58

2303,23

2406,7

    dont hors pensions

214,64

167,36

206,87

211,98

197,73

207,36

215,19

294,94

206,66

215,68

187,09

Moyens de fonctionnement

221,25

256,12

324,26

214,84

157,94

358,92

239,89

158,13

349,78

418,39

236,24

Interventions

0,91

0,91

0,91

0,91

0,91

0,91

0,91

81,18

81,37

81,34

81,50

Équipements

9,24

10,52

11,82

8,51

11,66

10,06

7,77

11,84

24,15

8,93

11,30

TOTAL Agrégat

2 169,38

2 212,22

2 347,96

2 354,00

2 301,12

2 569,19

2 522,55

2 597,19

2 842,53

3 027,58

2 922,82

TOTAL (hors pensions)

446,05

434,91

543,86

436,23

368,24

577,26

463,77

546,09

661,95

724,34

516,13

% (N+1/N)

 

- 2 %

25 %

- 20 %

- 16 %

57 %

- 20 %

18 %

21 %

9 %

- 29 %

Cette année, les choix budgétaires mettent l'accent sur la revalorisation catégorielle des agents, en y consacrant 2,73 millions d'euros, soit une progression de 9,9 % par rapport à l'année précédente : 2,01 millions d'euros seront ainsi affectés à la revalorisation indemnitaire de l'ensemble du personnel de l'administration centrale, dont 0,53 million permettra d'améliorer le traitement des administrateurs civils et des inspecteurs généraux de l'administration, avec pour objectif principal de renforcer l'attractivité du ministère de l'intérieur et d'améliorer la mobilité interministérielle. Un effort particulier est également réalisé en faveur des personnels des services d'information et de communication, avec un accroissement de crédits de 0,46 million d'euros destiné à combler le retard accumulé au cours des dernières années par rapport aux autres agents de l'administration centrale.

Dans le même objectif de renforcement des capacités d'action du ministère, le projet de loi de finances prévoit une dotation de 0,06 million d'euros destinée à créer, par la transformation de postes d'administrateurs civils et de commissaires de police, quatre postes de sous-directeurs et un poste de directeur de projet. Il s'agit ainsi de poursuivre la réforme de l'encadrement du ministère afin de mieux répondre aux missions de plus en plus complexes qui lui sont confiées.

II - L'ADMINISTRATION TERRITORIALE

L'agrégat budgétaire de l'administration territoriale regroupe les missions suivantes : la représentation de l'Etat dans les départements, la sécurité, l'accueil du public et la délivrance des titres, les relations avec les collectivités locales, la réglementation générale et l'organisation des élections, le développement économique et les politiques interministérielles, l'animation des politiques régionales et les fonctions logistiques.

Les crédits de l'administration territoriale s'élèvent à 1 121 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2003, contre 1 100 millions d'euros en 2002, soit une progression de 2,2 %. Cet agrégat représente 12 % de l'ensemble du budget du ministère de l'intérieur et correspond à un nombre total d'emplois de 30 409 contre 30 084 l'année précédente, soit une progression de 1,08 %.

L'évolution des dépenses relatives à l'administration territoriale sur les dix dernières années est retracée dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE L'ADMINISTRATION TERRITORIALE
(en millions d'euros)

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

Personnels

528,85

595,62

593,24

616,88

626,88

630,33

651,63

671,64

642,79

659,97

584,23

Moyens de fonctionnement

262,50

274,87

276,39

278,36

303,18

291,59

287,75

283,38

399,81

412,45

511,00

Équipements

26,68

40,25

33,28

31,28

35,14

17,61

24,70

29,88

31,20

26,95

26,36

TOTAL (DO + CP)

818,04

910,73

902,91

926,52

965,21

939,53

964,08

984,91

1 073,80

1 099,37

1 121,59

TOTAL
(hors charges salariales)*

767,33

856,06

846,02

896,29

936,29

911,05

929,79

953,10

992,04

1 020,05

1 055,90

    (*) : de 1993 à 1996: hors charges sociales et pensions ; à compter de 1997, les pensions sont inscrites à l'agrégat « administration générale ».

    Source : DGCL

Le projet de loi de finances pour 2003 met l'accent, comme pour l'administration générale, sur la recherche de la parité indemnitaire avec les autres ministères ; ainsi, le montant total des mesures catégorielles en faveur de l'administration territoriale s'élève pour 2003 à un niveau tout à fait exceptionnel de 10,2 millions d'euros. Cet effort concerne en priorité les agents du cadre national des préfectures, à hauteur de 8,25 millions d'euros, et permet d'engager une réflexion sur la mise en place de pondérations géographiques tenant compte des contraintes liées aux sites particulièrement urbanisés ou aux régions peu attractives. En outre, dans le prolongement des mesures adoptées en 2002, une dotation de près de 0,18 million d'euros va permettre d'améliorer la rémunération des directeurs de préfecture ; une revalorisation de 0,9 million d'euros est également prévue pour améliorer le régime indemnitaire du corps préfectoral, qui n'avait pas connu d'évolution depuis 1998.

Depuis la loi n° 85-1098 du 11 octobre 1985 relative à la prise en charge par l'Etat, les départements et les régions des dépenses de personnels, de fonctionnement et d'équipement des services placés sous leur autorité, les crédits de fonctionnement des préfectures sont financés par l'Etat, alors qu'ils l'étaient auparavant par les départements. Ce transfert s'est accompagné d'une déconcentration de la gestion des crédits de fonctionnement, chaque préfecture disposant d'une dotation de crédits à caractère global dont la responsabilité de gestion lui incombe. Jusqu'en 2000, cette déconcentration ne concernait ni les charges de personnel qui demeuraient inscrites sur les lignes budgétaires gérées par l'administration centrale, ni les dépenses d'investissement relevant du titre V, telles que les opérations immobilières. Une expérience est menée depuis le 1er janvier 2000 dans un certain nombre de préfectures, afin de globaliser totalement l'ensemble des crédits impartis aux préfectures et d'en confier la gestion à l'autorité déconcentrée.

Pour les préfectures qui ne participent pas encore à cette expérimentation, et qui restent donc des préfectures « non globalisées », les crédits de fonctionnement prévus dans le projet de loi de finances pour 2003 font l'objet d'une revalorisation tout à fait exceptionnelle à hauteur de 1,9 millions d'euros. Ajoutée à l'augmentation des crédits de fonctionnement des préfectures globalisées, la hausse des crédits atteint cette année 2,15 millions d'euros. Cet abondement est destiné à prendre en compte les charges nouvelles générées notamment par l'agrandissement de certaines préfectures et l'augmentation induite des surfaces nettes utilisées, le renforcement des effectifs des SGAR ainsi que la progression du coût du commissionnement carte bancaire.

Ces crédits sont destinés au fonctionnement général ; ils ne comprennent pas, pour les préfectures non globalisées, les charges de personnel (à l'exception de la rémunération d'agents saisonniers temporaires) et les crédits d'investissement dont la gestion continue de relever de l'administration centrale. Pour l'année 2001, la répartition des crédits entre les différentes dépenses de fonctionnement a été la suivante : 46,7%  pour le fonctionnement courant (fournitures, énergie, fluides, déplacements, frais postaux et télécommunications...), 21 % pour les travaux d'aménagement et d'entretien, 11,5 % pour la rémunération des personnels temporaires, 7,4 % pour l'achat et l'entretien des équipements informatiques, 4,5% pour l'achat et l'entretien de mobilier et de matériels techniques, 4,5% pour les charges locatives, 2 % pour l'achat et l'entretien des matériels de transport et, enfin, 2,4 % pour les actions de communication et de relations publiques.

Le chapitre 37-10, article 10, qui regroupe les crédits de fonctionnement des préfectures non globalisées, constitue, par ailleurs, le support au financement d'opérations innovantes ayant pour objectif une amélioration du service rendu au public et une meilleure productivité des services, comme ce fut le cas par exemple, dans la période récente pour l'installation de bornes de délivrance de certificats de non gages dans les préfectures, la généralisation du paiement par carte bancaire, la mise en réseau des préfectures et la modernisation des équipements, l'ouverture par chaque préfecture d'un site internet ou encore l'expérimentation de la lecture automatique de documents.

Jusqu'à l'année 2000, ces opérations étaient prises en charge par le « fonds de modernisation des préfectures », dont l'enveloppe, constituée au niveau de l'administration centrale, représentait 1% du total des crédits inscrits au chapitre. L'objet du fonds était de financer également des opérations, la plupart d'initiatives locales, liées à l'augmentation des surfaces ou la prise en compte de charges ponctuelles. Le « fonds de modernisation » n'a pas été reconduit en 2000, la ressource correspondante ayant été répartie directement entre les dotations de base de chaque préfecture conformément à l'accord triennal conclu en 1999 entre le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministère de l'intérieur sur la maîtrise des dépenses de fonctionnement des préfectures. Cette année, les crédits permettront notamment de prendre en charge les dépenses supplémentaires induites par l'introduction du nouveau passeport sécurisé « Delphine ».

L'expérimentation de globalisation des crédits de rémunération et de fonctionnement, lancée le 1er janvier 2000, constitue le prolongement de la démarche de déconcentration et de globalisation des crédits de fonctionnement initiée en 1986. Elle préfigure, par ailleurs, les conditions d'exercice de la gestion des moyens mis à la disposition de l'administration territoriale prévues par la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, dont l'entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2006.

L'expérimentation vise à donner au préfet, dans une vision pluriannuelle, une plus grande latitude sur l'emploi des moyens humains et budgétaires concourant à l'exercice des missions courantes de sa préfecture, après une concertation renforcée avec les représentants des personnels. Ses principes reposent sur la fongibilité complète des crédits au sein d'un budget global, ainsi que sur la possibilité de modifier la pyramide des emplois par rapport à la dotation initiale.

Les préfets disposent ainsi de moyens accrus pour adapter les préfectures aux missions qui sont les leurs ; ces moyens doivent néanmoins s'inscrire dans une gestion des personnels conforme aux statuts nationaux en vigueur.

Le nombre de préfectures participant à l'expérimentation de la globalisation a été progressif : la première année, l'expérimentation a été conduite dans quatre départements (Doubs, Finistère, Isère et Seine-Maritime). Elle a été étendue l'année suivante à dix départements supplémentaires (Charente-Maritime, Eure, Eure-et-Loir, Maine-et-Loire, Haut-Rhin, Somme, Var, Vosges, Territoire de Belfort et Seine-Saint-Denis), à quatre en 2002 (Calvados, Oise, Haute-Vienne, Yonne) ; la loi de finances pour 2003 prévoit de nouveau une extension concernant onze préfectures nouvelles qui sont l'Aisne, les Alpes Maritimes, le Cher, l'Indre, l'Indre et Loire, le Loir et Cher, le Loiret, le Rhône, la Saône et Loire, la Seine et Marne et la Martinique. Les choix arrêtés permettent ainsi de disposer d'un échantillon de préfectures significatif : trois régions voient leurs préfectures totalement globalisées (Centre, Haute-Normandie et Picardie), tandis que la réforme est étendue pour la première fois à l'outre-mer avec la Martinique.

La conséquence de ce mouvement est une diminution régulière du nombre des préfectures émargeant sur le chapitre 37-10, article 10 : il était de 101 en 1999 (la préfecture de la région Ile-de-France est, en effet, dotée d'une enveloppe distincte de celle de la préfecture de Paris), de 97 en 2000,  de 87 en 2001 et de 83 en 2002. Il descendra à 72 en 2003. Les crédits des préfectures globalisées sont totalisés au chapitre 37-30 (les chapitres 37-20 et 37-21 correspondant aux préfectures globalisées en 2001 et 2002).

Le contrat passé par le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales avec la direction du budget ayant été reconduit pour un an, les dotations de l'ensemble des préfectures globalisées progresseront de 0,3 % en 2003, ce qui entraînera une augmentation des crédits de 1,8 million d'euros sur le chapitre 37-20 et de 2,05 millions d'euros sur le chapitre 37-21.

L'expérience de la globalisation exige la mise en place d'une politique d'évaluation rigoureuse afin que puisse être vérifiée la bonne adéquation des choix locaux avec les exigences de qualité de service ; en conséquence, la globalisation s'accompagne du développement d'indicateurs de contrôle de gestion, dont les premiers résultats commencent à être connus.

Un premier bilan d'étape a ainsi d'ores et déjà pu être dressé par le ministère de l'intérieur à partir de l'exploitation de réponses données par les préfets à un questionnaire qui leur a été adressé en mai 2001 ; cette première évaluation permet de montrer que l'expérience est jugée globalement très positive au sein des préfectures en terme de pilotage des services et d'approfondissement du dialogue social ; ce renouveau du dialogue social a eu lieu soit de manière informelle au travers des comités de pilotage mis en place dans les préfectures, soit au sein des comités techniques paritaires locaux qui voient ainsi leur rôle renforcé.

La globalisation a également produit un effet en terme de diffusion d'une culture de gestion renouvelée et élargie ; elle a permis de montrer que la maîtrise technique du dispositif de « globalisation » des crédits de rémunération et de fonctionnement - qui implique l'assimilation de nouveaux concepts de gestion et l'appropriation d'outils informatiques spécifiques - est désormais acquise ; des marges de man_uvre financières plus ou moins marquées ont ainsi pu être dégagées en gestion, rendant nécessaire une réflexion sur l'utilisation des crédits récupérés par cette voie. À terme, la globalisation des préfectures va également se traduire par une amélioration du service aux usagers, l'effort étant porté sur la production régulière d'indicateurs d'activité et de performance au nombre d'une centaine, au moyen d'outils informatiques développés spécifiquement pour l'occasion.

Le tableau joint retrace l'évolution des crédits déconcentrés depuis dix ans de 1992 à 2002, y compris depuis 2000, les crédits affectés aux dotations des préfectures expérimentant la globalisation des rémunérations et des dépenses de fonctionnement inscrits sur les nouveaux chapitres 37-20 et 37-21 qui ont été créés pour l'occasion.

- -

MOYENS DE FONCTIONNEMENT DES PRÉFECTURES : ÉVOLUTION DES CRÉDITS DÉCONCENTRÉS DE 1992 A 2002

 

37-10/10

 

37-20 ( * )

 

37-21 ( * )

 

TOTAL

 

LEGENDES

1992

1 501 395 831

(A)

0

(E)

0

(E)

1 501 395 831

 

(A)

101 préfectures

1993

1 495 243 979

 

0

 

0

 

1 495 243 979

 

(B)

97 préfectures

1994

1 505 923 217

 

0

 

0

 

1 505 923 217

 

(C)

87 préfectures

1995

1 525 808 592

 

0

 

0

 

1 525 808 592

 

(D)

83 préfectures

1996

1 537 003 653

 

0

 

0

 

1 537 003 653

 

(E)

aucune préfecture

1997

1 733 793 573

 

0

 

0

 

1 733 793 573

 

(F)

4 préfectures

1998

1 674 103 000

 

0

 

0

 

1 674 103 000

 

(G)

6 préfectures

1999

1 672 003 000

 

0

 

0

 

1 672 003 000

 

(H)

9 préfectures

2000

1 546 163 715

(B)

346 644 175

(F)

0

 

1 892 807 890

 

(I)

8 préfectures

2001

1 374 095 412

(C)

430 775 689

(G)

606 297 826

(I)

2 411 168 927

     

2002 en F

1 187 828 004

(D)

618 213 089

(H)

632 217 257

(H)

2 438 258 350

     

2002 en €

181 083 212

(D)

94 245 977

(H)

107 537 769

(H)

382 866 958

     

(*) Les dotations globalisées intègrent les dépenses de rémunération.
Source : DGCL.

DEUXIÈME PARTIE :
L'ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES

I  - LES CONCOURS DE L'ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES

La particularité des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales est double : elles transitent en premier lieu majoritairement par des prélèvements sur recettes, et non par des dotations proprement dites ; l'essentiel de l'effort budgétaire en faveur des collectivités locales n'apparaît donc pas dans le bleu budgétaire du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La Cour des comptes, dans une synthèse consacrée aux concours financiers aux collectivités locales, évalue ainsi les prélèvements sur recettes à 61 % des dotations ouvertes hors fiscalité transférée contre 39 % pour les crédits budgétaires.

La seconde spécificité réside dans le caractère très largement automatique de ces concours, pour lesquels les modalités de calcul et d'indexation ne font appel à aucune décision de l'Etat. La rigidité du dispositif s'est de plus fortement accrue depuis 1996, date de mise en place du « pacte de stabilité » : l'article 32 de la loi de finances pour 1996 prévoyait ainsi que l'ensemble des dotations ayant une indexation spécifique (ce qui inclut les dotations de fonctionnement et d'équipement, les financements de transferts de compétences et la dotation de compensation de la taxe professionnelle, hors la fraction liée à la compensation de la réduction pour embauche et investissement) devait être regroupé dans une même enveloppe dont l'évolution est elle-même indexée selon l'indice prévisionnel des prix à la consommation.

Ce dispositif avait pour objectif de garantir une meilleure prévisibilité des ressources des collectivités locales et des charges de l'Etat ; elle permettait également de faire participer les collectivités locales à l'effort de réduction des déficits publics. Prévu initialement pour trois ans, le pacte de stabilité fut reconduit par la suite pour deux ans lors de la loi de finances pour 1999 sous le nom de « contrat de croissance et de solidarité », puis pour un an lors de la dernière loi de finances.

Par rapport à la version initiale du pacte de stabilité, les modalités d'indexation du contrat de croissance et de solidarité ont été modifiées pour prendre en compte non seulement l'évolution des prix, mais également l'indice de variation du PIB. Pour le reste, les principes restent identiques : maintien d'un périmètre normé, prise en compte du « recalage » d'une année sur l'autre de la dotation globale de fonctionnement et, surtout, choix d'une variable d'ajustement, en l'occurrence la dotation de compensation de taxe professionnelle, permettant de respecter l'indexation particulière de chaque dotation au sein d'une enveloppe elle-même indexée.

Le projet de loi de finances pour 2003 reconduit, dans son article 29, le contrat de croissance et de solidarité pour une année ; alors même que le contexte budgétaire général s'annonce beaucoup plus difficile que les années précédentes, le Gouvernement a donc fait le choix de la stabilité et de la continuité. Les concours financiers de l'Etat entrant dans le périmètre normé connaîtront ainsi une progression globale de 1,9 %, l'enveloppe du contrat de croissance et de solidarité restant régie par les mêmes modalités d'indexation (taux d'inflation majoré de 33 % du PIB).

Ce choix ne peut cependant être que celui d'un budget de transition : après une législature d'artifices comptables et de budgets en trompe-l'_il, il ne pouvait être question de réformer en moins de six mois l'architecture des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales. En outre, cette reconduction du contrat de croissance et de solidarité donne au Gouvernement le temps de préparer la réforme de la décentralisation initiée par le Président de la République.

Il serait néanmoins hâtif de ne voir dans le budget présenté cette année que la réplique des pratiques du précédent Gouvernement : en effet, le projet de loi de finances pour 2003 préfigure, par de nombreuses dispositions, ce qui s'annonce d'ores et déjà comme une nouvelle ère de la décentralisation autour des deux thèmes centraux que sont l'autonomie des collectivités locales et la solidarité. Le rapporteur aura l'occasion de présenter ces dispositions un peu plus loin.

La répartition du montant global de la DGF relève de la compétence du Comité des finances locales (CFL), sur proposition du Gouvernement, en application de l'article L. 1211-3 du code général des collectivités locales.

En 2002, la DGF a progressé de 4,07 % par rapport à 2001, de loi de finances initiale en loi de finances initiale, pour s'établir à 18 079,77 millions d'euros.

Préalablement à toute opération de répartition, il a été procédé en 2002 à trois prélèvements sur le montant total : le premier est destiné à couvrir les frais de fonctionnement du CFL (0,442 million d'euros, soit une augmentation de 4,04 % par rapport à 2001) ; le second est un concours particulier destiné à rembourser aux collectivités locales et à leurs établissements publics les charges qu'ils supportent au titre des agents mis à la disposition d'une organisation syndicale (3,4 millions d'euros, soit une augmentation de 14,34 %) ; enfin, un prélèvement de 3,05 millions d'euros a été opéré pour apurer le déficit constaté en gestion pour la dotation globale de fonctionnement 2001.

Après imputation de ces trois prélèvements, le solde est réparti entre la DGF des communes et groupements, d'une part, et la DGF des départements, d'autre part, ces deux enveloppes de crédits progressant de façon identique, conformément à l'article 42 de la loi du 29 novembre 1985.

La répartition de la DGF des communes est résumée dans le schéma suivant :

La dotation forfaitaire regroupe en une seule dotation, évoluant de la même façon pour toutes les communes, toutes les sous-dotations et les concours particuliers qui composaient l'ancienne DGF, à l'exception de la dotation de solidarité urbaine (DSU). Au titre de l'exercice 2002, le CFL a fixé à 49,5 % de l'évolution de la DGF le taux de croissance de la dotation forfaitaire. Celle-ci a, en conséquence, connu une progression de 2,014 % en 2002, contre 1,74 % en 2001.

La masse répartie au titre de la dotation forfaitaire pour 2002 s'élève à 12,96 milliards d'euros, avant le prélèvement opéré au titre de la suppression définitive des contingents communaux d'aide sociale, et à 10,95 milliards après prélèvement. Ce prélèvement, effectué en application de l'article 2334-7-2 du code général des collectivités territoriales, connaît une indexation identique à la DGF mise en répartition.

En outre, compte tenu du mécanisme de lissage sur trois ans des variations de population prévu à l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, la dotation forfaitaire pour 2002 des communes dont la population a augmenté, a été majorée dans les conditions prévues à l'article L. 2334-9 du code général des collectivités territoriales en prenant en compte, à hauteur de 50 %, l'intégralité des variations de population constatée à la suite du recensement général de population de 1999. Le même mécanisme est appliqué pour les communes dont la population a diminué. Toutefois, lorsque la prise en compte de ces diminutions de population aurait eu pour conséquence d'attribuer aux communes une dotation forfaitaire avant prélèvement du contingent communal d'aide sociale inférieure à celle due au titre de 1999, c'est cette dernière qui a été notifiée. Les 3 436 communes qui se trouvent dans cette situation sont celles dont la diminution de population a été supérieure à 8,18 %.

Au total, la prise en compte des variations de population constatées à l'issue du recensement général de population de 1999 a entraîné une majoration cumulée de la dotation forfaitaire pour 2002 de 125,96 millions d'euros dont 44,33 millions au titre de la seule année 2002.

Les recensements complémentaires effectués en 2001 ont, pour leur part, conduit à une majoration de la dotation forfaitaire des communes concernées de 5,6 millions d'euros.

La dotation d'aménagement regroupe la DGF des groupements de communes, la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR).

L'article L. 2334-13 du Code général des collectivités territoriales précise qu'il est procédé en premier lieu à l'affectation des sommes dues au titre de la DGF des groupements de communes à fiscalité propre, dont l'augmentation annuelle constitue une variable exogène. Puis est retiré le montant de la quote-part des communes d'outre-mer, qui doit évoluer de façon telle que le total des attributions leur revenant au titre de la DGF progresse au moins comme l'ensemble des ressources affectées à cette dotation. En 2002, afin d'aboutir au taux de progression minimum de 4,07 %, la quote-part des communes d'outre-mer a bénéficié d'un montant de garantie de 5,182 millions d'euros.

Enfin, le solde est réparti entre la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR).

Depuis la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, six catégories d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), énumérées à l'article L. 5211-29 du code général des collectivités territoriales, bénéficient de la dotation globale de fonctionnement :

- les communautés urbaines faisant application des dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts (taxe professionnelle unique) ;

- les communautés urbaines ne faisant pas application des dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts ;

- les communautés de communes faisant application des dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts ;

- les communautés de communes ne faisant pas application des dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts ;

- les communautés d'agglomération créées avant le 1er janvier 2005 ;

- les syndicats ou communautés d'agglomération nouvelle.

Comme les années précédentes, l'exercice 2002 a été marqué par des variations importantes dans chaque catégorie d'établissements publics de coopération intercommunale : l'augmentation du nombre d'établissements publics à fiscalité propre reste importante (+ 8,75 % par rapport à 2001). Au 1er janvier 2002, on en dénombrait ainsi 2 174, regroupant 26 850 communes et plus de 45 millions d'habitants. On assiste corrélativement à une diminution régulière du nombre de communautés de communes à fiscalité additionnelle depuis 1999 (1 557 en 1999, 1 527 en 2000, 1 481 en 2001 et 1 425 en 2002) qui représentent encore près de 14,7 millions d'habitants.

L'évolution du nombre de groupements est retracée dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE GROUPEMENTS DEPUIS 1992

Au 1er janvier

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

à fiscalité propre :

                     

    Communauté urbaine (CU)

9

9

9

9

10

11

12

12

12

14

14

    Communauté d'agglomération (CA)

               

50

90

120

    Communauté de communes (CC)

 

193

554

756

894

1 105

1 241

1 348

1 493

1 717

2 032

    Syndicat d'agglomération nouvelle (SAN)

9

9

9

9

9

9

9

9

9

8

8

    District

214

252*

290*

324

318

316

310

307

281

171

-**

    Communauté de villes (CV)

 

3

4

4

4

5

5

5

1

0**

-**

Nombre de groupements à fiscalité propre :

 

214

576

1 102

1 235

1 446

1 577

1 681

1 846

2 000

- -

2 174

Nombre total de communes regroupées :

 

5 071

8 973

11 516

13 566

16 240

17 760

19 127

21 328

23 486

- -

26 850

Population regroupée en millions d'habitants :

16,1

21,8

24,6

27,3

29,9

31,8

34,0

37,0

40,3

45,0

    dont TPU :

                     

Nombre de groupements à TPU :

 

18

40

48

55

78

92

109

303

511

745

Nombre total de communes regroupées :

 

179

389

475

548

754

869

4 046

3 264

5 726

9 142

Population regroupée en millions d'habitants :

2,1

2,7

3,0

3,1

3,6

3,8

4,2

13,1

20,7

29,7

sans fiscalité propre :

                     

    SIVU

14 596

nd

14 584

14 490

14 614

nd

nd

14 885

nd

nd

nd

    SIVOM

2 478

nd

2 362

2 298

2 221

nd

nd

2 165

nd

nd

nd

    Syndicat mixte

     

1 107

1 216

nd

nd

1 454

nd

nd

nd

nd : non disponible.

* à fiscalité propre

** la loi du 12 juillet 1999 prévoyait la disparition des districts et des communautés de villes qui se transforment en CU, CA ou CC au 1er janvier 2002 au plus tard.

Source : DGCL.

Les crédits mis en répartition au titre de la dotation d'intercommunalité des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ont été fixés par le Comité des finances locales dans sa séance du 5 février 2002.

Compte tenu du coût croissant de l'intercommunalité lié à la création de nouveaux EPCI et à la transformation en EPCI à taxe professionnelle unique de ceux déjà existants, le Comité des finances locales a décidé, comme en 2001, de reconduire en 2002 les dotations par habitant fixées l'année précédente, à l'exception des communautés d'agglomération et des communautés de communes à taxe professionnelle unique et à DGF bonifiée pour lesquelles la loi prévoit une indexation minimale sur l'indice prévisionnel des prix à la consommation hors tabac (soit 1,5 % en 2002).

En outre, afin de circonscrire la progression des dotations destinées à l'intercommunalité et de maintenir à niveau les dotations de solidarité, plusieurs mécanismes budgétaires ont été utilisés :

- La loi du 12 juillet 1999 avait prévu que la dotation d'intercommunalité des communautés d'agglomération serait financée pour partie par la dotation d'aménagement de la DGF pour les communautés d'agglomération issues de la transformation d'EPCI à fiscalité propre déjà existants et, pour le solde, par un financement extérieur à la DGF, constitué par un prélèvement sur les recettes fiscales de l'Etat fixé à 183 millions d'euros en 2001 et, en tant que de besoin, un prélèvement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) qui s'est élevée à 126 millions d'euros en 2001. Concernant les communautés d'agglomération créées ex nihilo, leur dotation d'intercommunalité devait être intégralement financée par des ressources extérieures à la DGF.

L'article 42 de la loi de finances pour 2002 a pérennisé le financement des communautés d'agglomération en prévoyant qu'il serait, à compter de 2002, intégralement assuré par la dotation d'aménagement à l'instar des autres catégories d'EPCI. Il en résulte qu'aucun prélèvement supplémentaire n'a été opéré sur la dotation de compensation de taxe professionnelle en 2002. Toutefois, afin que la DSU et la DSR ne baissent pas du fait de cette modification du mode de financement des communautés d'agglomération, la dotation d'aménagement a été abondée en 2002 à hauteur des ressources extérieures à la DGF qui avaient été utilisées en 2001, soit 309 millions d'euros au total.

- S'agissant des communautés de communes à fiscalité additionnelle, la répartition de la dotation d'intercommunalité s'est caractérisée en 2002 par la mise en application d'un nouveau mécanisme de garantie. Une disposition nouvelle a ainsi été introduite par l'article 43 de la loi de finances rectificative du 28 décembre 2001 afin d'assurer aux communautés de communes à fiscalité additionnelle qui perçoivent la DGF pour la deuxième année au moins dans cette catégorie une dotation moyenne par habitant au moins égale à celle qu'elles avaient perçue l'année précédente, augmentée comme la dotation forfaitaire des communes (soit 2,014 % en 2002). Cette majoration a été financée par un prélèvement de 30,5 millions d'euros sur le montant de la régularisation de la DGF pour 2000.

Toutes catégories confondues, 1 650,2 millions d'euros ont été répartis au profit des EPCI à fiscalité propre en 2002, au lieu de 1 651 606 467 euros initialement provisionnés par le Comité des finances locales. A l'issue de la répartition, l'existence d'un reliquat de 1 402 679 euros est donc constatée.

En vertu de l'article L. 2334-13 du code général des collectivités territoriales, ce solde est réparti par le Comité des finances locales entre la DSU et la DSR de manière à ce que chacune reçoive 45 % au moins et 55 % au plus.

Au titre de l'exercice 2002, le Comité des finances locales a réservé 55 % de la croissance du solde de la dotation d'aménagement à la DSU et 45 % à la DSR.

Au total, les crédits alloués à la DSU en 2002 s'élèvent à 592,722 millions d'euros. Ce montant inclut les 6,10 millions d'euros supplémentaires en provenance de la DGF de la région Ile-de-France, prévu par l'article L. 4414-6 du code général des collectivités territoriales, ainsi qu'un abondement exceptionnel de 121,96 millions d'euros prévu par l'article 45 de la loi de finances initiale pour 2002.

La somme effectivement mise en répartition entre les communes de métropole s'élève à 568,791 millions d'euros, après prélèvement de la quote-part réservée aux communes des départements et territoires d'outre-mer.

La masse des crédits disponibles a été répartie respectivement entre les communes de 10 000 habitants et plus et celles de 5 000 à 9 999 habitants, au prorata de la population des communes appartenant à chacune de ces strates.

Parmi ces communes, 17 sont éligibles pour la première fois, pour un montant total de 5 millions d'euros. Sept d'entre elles appartenaient en 2001 à la catégorie des communes de 5 000 à 9 999 habitants dans laquelle aucune n'était éligible.

En revanche, 14 communes perdent le bénéfice de la DSU dans cette catégorie et perçoivent, en 2002, la garantie qui représente 50 % de leur dotation 2001, soit un montant global de 1,879 million d'euros. Sur ces 14 communes, 4 changent de strate démographique mais sont inéligibles dans la catégorie des communes de 5 000 à 9 999 habitants et bénéficient de la garantie pour un montant de 524 000 euros.

Sur les 692 communes éligibles, 443 voient leur dotation 2002 augmenter par rapport à celle de 2001.

104 communes sont éligibles à la DSU en 2002 dans la strate des communes de 5 000 à 10 000 habitants. Elles comptent 732 957 habitants et ont bénéficié de la DSU pour un montant de 17,718 millions d'euros.

Parmi ces communes, 11 sont éligibles pour la première fois dans cette catégorie pour un montant total de 1,35 million d'euros.

En revanche, 9 communes, dont 2 ayant une population DGF 2002 inférieure à 5 000 habitants, deviennent inéligibles à la DSU et perçoivent, à ce titre, la garantie d'attribution correspondant à 50 % de leur dotation 2001. Au total, la garantie allouée à ces communes s'élève à 0,6 million d'euros.

La dotation de solidarité rurale est composée de deux fractions, la fraction « bourgs-centres », réservée aux communes rurales de moins de 10 000 habitants et aux chefs-lieux d'arrondissement de moins de 20 000 habitants assumant des charges de centralité, et la fraction péréquation, réservée aux communes rurales de moins de 10 000 habitants en fonction de leurs ressources et de leurs charges.

Le Comité des finances locales, conformément à l'article L.2334-21 du code général des collectivités territoriales, fixe chaque année la part de la croissance annuelle des crédits de la DSR à réserver à la première fraction, de telle sorte que cette part soit comprise entre 5 et 20 %. Le Comité des finances locales a, comme l'année précédente, choisi la proportion de 20 % pour la répartition 2002.

Dans ces conditions, la première fraction de la DSR répartie en métropole s'est élevée, en tenant compte d'un abondement de 22,867 millions d'euros, à 121,261 millions d'euros, ce qui représente une augmentation de 3,80 % par rapport à 2001, et la fraction péréquation à 263,6 millions d'euros, ce qui correspond à une progression de 7,23 % par rapport à 2001.

La répartition de la DGF des départements

Les crédits réservés à la dotation globale de fonctionnement des départements évoluent comme la DGF mise en répartition, en application de l'article L. 3334-1 du code général des collectivités territoriales. Ils ont donc progressé de 1,38 % en 1998, de 2,78 % en 1999, de 0,84 % en 2000, de 3,38 % en 2001 et de 4,09 % en 2002.

Ces crédits sont minorés, avant la mise en répartition :

· des sommes nécessaires pour garantir aux départements une progression minimale de leur dotation par rapport à l'année précédente ;

· des crédits affectés à la dotation de fonctionnement minimale réservée aux départements considérés comme défavorisés ;

· des prélèvements opérés au titre des années antérieures sur la DGF de la région d'Ile-de-France.

Le solde est ensuite partagé entre la dotation forfaitaire (45 %) et la dotation de péréquation (55 %). Les masses ainsi établies, sont ensuite réparties entre les départements de métropole, la région d'Ile-de-France (RIF), les départements d'outre-mer et les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

La dotation forfaitaire des départements est proportionnelle à celle de l'année précédente ; en 2002, la masse mise en répartition à ce titre est en hausse de 3,75 % contre 2,9 % en 2001.

La dotation de péréquation, qui comprend la dotation impôt ménage et la dotation potentiel fiscal, augmente dans les mêmes proportions.

La dotation de garantie minimale assure aux départements une garantie d'évolution de la somme de leurs dotations forfaitaires, de péréquation et de garantie égale à 55 % au moins du taux d'évolution de l'ensemble des ressources affectées à la DGF. En 2002, seuls trois départements ont bénéficié de cette garantie minimale, contre 6 en 2001, pour un montant de 2,591 millions d'euros.

La dotation de fonctionnement minimale bénéficie aux départements dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur d'au moins 40 % au potentiel fiscal par habitant moyen de l'ensemble des départements ou dont le potentiel fiscal par kilomètre carré est inférieur d'au moins 60 % au potentiel fiscal par kilomètre moyen de l'ensemble des départements. Cette dotation a représenté 104,866 millions d'euros qui ont bénéficié à 24 départements de métropole et 6 départements ou territoires d'outre-mer. Les bénéficiaires sont les mêmes qu'en 2001.

Enfin, le concours particulier contingent d'aide social, destiné à financer la couverture maladie universelle par la suppression des contingents communaux d'aide social, a permis d'abonder la DGF des départements en 2002 de 2,006 milliards d'euros ; cet abondement est issu d'un prélèvement sur la dotation forfaitaire des communes et, s'il y a lieu, sur le produit de leur fiscalité directe locale au profit du département correspondant.

Conformément au premier alinéa de l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales, la dotation globale de fonctionnement doit évoluer à compter de 1996 en fonction d'un indice égal à la somme du taux prévisionnel d'évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation des ménages hors tabac de l'année de versement de la DGF, soit 2003, et de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année en cours, soit 2002, sous réserve que celui-ci soit positif.

Ce même article prévoit dans ses 1° et 2° que cet indice prévisionnel est appliqué à la DGF de l'année en cours, dont le montant doit être révisé pour tenir compte des derniers taux d'évolution connus constituant l'indice d'indexation de l'année en cours. Cet indice ajusté doit être appliqué au montant définitif de l'année précédente (2001).

Cette opération de « recalage » implique donc que soit recalculée la DGF de l'année précédente en fonction des indices économiques constatés et non plus prévisionnels.

Cette révision doit en conséquence s'effectuer à partir du montant définitif de la DGF pour 2001, soit 17 655,67 millions d'euros : dans la mesure où le taux d'évolution du prix de la consommation des ménages hors tabac de 2002 s'est établi à + 1,7 % contre + 1,5 % en loi de finances initiale pour 2002 et que le taux d'évolution du produit intérieur brut en volume au titre de 2001 a été de +1,8 %, contre + 2,3 % en loi de finances initiales pour 2002, il convient de réviser le montant de la DGF pour 2002 selon le calcul suivant :

Montant définitif de la DGF 2001 : 17 655,67 M€

Indice d'actualisation révisé : + 2,6 %

(soit prix 2002 : + 1,7 % + ½ PIB 1,8 %/2)

Ce montant, comparé au montant ouvert initialement, hors majorations exceptionnelles, fait apparaître une augmentation de la DGF pour 2002 de 34,949 millions d'euros. Par ailleurs, il faut ajouter à la DGF 2002 ainsi recalée le « rebasage » de 310,5 millions d'euros provenant, d'une part, de l'intégration de l'intégralité du financement des communautés d'agglomération au sein de la dotation d'aménagement et, d'autre part, de la suppression de la prise en charge par l'Etat de l'achat par les communes des imprimés d'état civil ainsi que de l'abonnement des communes chefs lieux de canton au journal officiel. Le montant de la DGF 2002 à indexer pour obtenir la DGF 2003 s'élève en définitive à 18 425,233 millions d'euros.

L'article L. 1613-2 du code général des collectivités territoriales prévoit qu'il est procédé, avant le 31 juillet, à la régularisation de la DGF afférente à l'exercice précédent. Cette régularisation intervient lorsque l'indice, calculé sur la base du taux d'évolution de la moyenne annuelle du prix à la consommation des ménages hors tabac relatif à cet exercice (2001) et sur la base du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume relatif à l'exercice précédent (2000), tels qu'ils sont constatés à cette date, appliqué au montant de la dernière dotation définitive connue (2000), entraîne un produit différent du montant prévisionnel de la DGF inscrite en loi de finances.

Dans l'hypothèse d'une régularisation positive, le montant est réparti l'année même de la régularisation. En revanche, si la régularisation se révèle négative, elle s'impute sur la DGF du plus prochain exercice.

La régularisation, au 31 juillet 2002, de la DGF 2001 a conduit à retenir un taux d'évolution définitif de 3,50 % (soit évolution des prix 2001 : + 1,6 % majoré de la moitié du PIB total en volume 2000 : + 3,8 %), contre 2,9 % en loi de finances initiale pour 2001. Le montant de cette régularisation positive s'est ainsi élevé à 136,419 millions d'euros, le montant de la DGF 2001 définitive atteignant 17 655,671 millions d'euros.

L'indexation de la DGF pour 2003 :

Compte tenu des critères d'indexation prévus dans le code général des collectivités territoriales, l'indice d'évolution de la dotation globale de fonctionnement devrait s'établir à 2,1 % ; cette progression résulte :

- du taux d'évolution des prix à la consommation des ménages hors tabac estimé pour 2003 à 1,5 % ;

- de la moitié du dernier chiffre connu du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année 2002, soit 1,2 %/2 = 0,6 %.

Ce taux de progression s'applique au montant de la DGF « recalée » en 2002, soit 18 425,233 millions d'euros ; en conséquence, le montant de la DGF inscrite dans le projet de loi de finances pour 2003 s'élève, au total, à 18 812 millions d'euros, soit une progression de 2,294 % par rapport au montant ouvert en loi de finances initiale pour 2003.

La DGF pour 2003 fera, par ailleurs, l'objet d'un double abondement :

- La dotation de solidarité urbaine (DSU) et la première fraction de la dotation de solidarité rurale (DSR) seront abondées à hauteur de 137 millions d'euros, dont 100 millions d'euros provenant de la part revenant aux communes et aux EPCI au titre de la régularisation de la DGF pour 2001, et 37 millions d'euros prélevés sur les recettes fiscales nettes de l'Etat. L'affectation à la DSU et à la DSR de 100 millions d'euros provenant de la régularisation de la DGF pour 2001 correspond à la volonté du Gouvernement de soutenir la péréquation. En effet, sans ressources extérieures, la DSU et la DSR auraient connu une diminution de l'ordre de 20 %. Plutôt que d'affecter cette régularisation forfaitairement aux communes et aux EPCI, pour des montants individuels finalement faibles, le choix a été fait d'aider les communes les plus défavorisées. Le Gouvernement de M. Lionel Jospin avait déjà utilisé les montants de la régularisation de la DGF des années précédentes, à hauteur de 30,5 millions d'euros, au profit du financement de l'intercommunalité.

En revanche, la part de la régularisation de la DGF pour 2001 revenant aux départements, soit 36 millions d'euros, leur sera versée normalement au prorata des montants de DGF attribués initialement en 2001, afin notamment de leur permettre de financer la montée en charge des dépenses liées à l'allocation personnalisée d'autonomie.

- Le solde de la dotation d'aménagement qui vient alimenter la DSU et la DSR sera, par ailleurs, abondé de 23 millions d'euros, afin de compenser la suppression de la taxe sur les débits de boisson prévue à l'article 12 du projet de loi de finances. Cette mesure, qui sera consolidée pour le calcul de la DGF des années suivantes, permet, là encore, de soutenir la péréquation. Comme pour l'abondement issu de la régularisation de la DGF pour 2001, le choix du Gouvernement a conduit à privilégier les communes particulièrement défavorisées, plutôt que d'opérer un saupoudrage sur toutes les communes.

Compte tenu de ces différents abondements, la DGF atteindra 18,87 milliards d'euros en 2003.

La DSI, qui évolue comme la DGF de loi de finances initiale à loi de finances initiale, devrait donc connaître pour cette année une progression de 2,294 %. Toutefois, elle s'établit en 2003 à 252,95 millions d'euros contre 294 millions d'euros en 2002, soit une réduction de 13,8 %, en raison de la prise en compte de la baisse du nombre d'ayants droit du fait de l'intégration progressive des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles.

Les dotations de l'Etat versées au FNPTP et à la majoration du FNP évoluent comme les recettes fiscales nettes de l'Etat, soit, pour cette année, une baisse de 0,66 % (contre une réduction de 1,29 % en 2002). Compte tenu de cette réduction, ces deux dotations s'élèvent respectivement à 259,046 millions d'euros pour le FNPTP et 106,361 millions d'euros pour la majoration du FNP.

Le FNPTP sera également alimenté en 2003 par :

- le produit de la cotisation nationale de péréquation de la taxe professionnelle alloué au FNPTP en 2003 ; son montant n'est pas connu à ce jour ;

- la contribution de la Poste qui continue d'être imposée, au titre de la fiscalité locale, par l'Etat (article 1635 sexies du code général des impôts) et qui sera égale à la différence entre le produit des impositions directes locales alloué à l'Etat par la Poste en 1994, indexée à compter de 1995 en fonction de l'indice de variation du prix de la consommation des ménages, et le produit effectivement prélevé sur la Poste en 2002 ; son montant devrait s'élever à 17 millions d'euros en 2003.

- une dotation représentative de la fiscalité locale de France-Télécom versée auparavant au FNPTP ; en effet, le projet de loi de finances pour 2003 prévoit la banalisation complète de la fiscalité locale de France-Télécom qui était jusqu'à présent perçue directement par l'Etat, pour son propre compte et pour celui du FNPTP ; désormais, les collectivités locales imposeront directement les bases de taxe professionnelle et de foncier bâti liées aux établissements de France-Télécom se situant sur leur territoire ; afin que cette réforme n'entraîne pas de baisse des moyens financiers du FNPTP, une dotation est instituée en 2003 pour remplacer l'ancienne part de la fiscalité locale de France-Télécom qui revenait au FNPTP ; cette dotation sera de 271 millions d'euros en 2003.

Par ailleurs, les exonérations de taxe professionnelle des entreprises implantées au 1er janvier 2002 dans les zones franches prévues dans le pacte de relance pour la ville sont, théoriquement, compensées aux collectivités concernées par préciput sur le FNPTP. Toutefois, cette compensation ne peut être supérieure au surcroît d'abondement, par rapport à l'année précédente, du FNPTP par le produit de la fiscalité locale en provenance de France-Télécom et de La Poste. En 2003, ce prélèvement sera calculé en fonction du montant de fiscalité de la seule Poste et devrait donc être d'un montant relativement modeste (de l'ordre de 2 à 3 millions d'euros).

Il convient enfin de rappeler qu'un prélèvement de 22,867 millions d'euros avait été opéré sur le FNPTP en 2000 au profit de la DSR en application de l'article 65 de la loi de finances pour 2000 et, en 2001, en application de l'article 44 de la loi de finances pour 2001. Ce prélèvement, comme en 2002, ne sera pas reconduit en 2003. Il est remplacé par un abondement de l'Etat au profit de la DSR.

S'agissant du dispositif de compensation par le FNPTP des pertes de dotation de compensation de la taxe professionnelle à certaines communes et EPCI défavorisés, instauré par l'article 58 de la loi de finances pour 1999, et reconduit en 2000 et en 2001, l'article 31 du projet de loi de finances propose de reconduire cette compensation en 2003 au titre des années 1999, 2000 et 2001. Le coût de cette mesure s'élève à 188 millions d'euros.

En revanche, la modulation des diminutions de DCTP de certaines collectivités défavorisées, qui consistait à ne leur faire supporter que la moitié des pertes de DCTP qu'elles auraient dû normalement enregistrer, ne sera pas reconduite en 2003.

La dotation de l'Etat alimentant la majoration du Fonds national de Péréquation connaît une baisse identique à celle des recettes fiscales nettes de l'Etat, soit une réduction de 0,66 %  en 2003. Par ailleurs, l'abondement de 22,867 millions d'euros de majoration du FNP, prévu à l'article 129 de la loi de finances pour 1999, pour les années 1999, 2000 et 2001 et reconduit en 2002 ne devrait pas être reconduit en 2003.

Dans ces conditions, la dotation de l'Etat au FNP connaît une réduction de crédits de 18 %, passant de 130 à 106,4 millions d'euros. Un amendement de la commission des Finances a proposé la reconduction de l'abondement de 22,867 millions d'euros.

Indexée comme la DGF, la dotation particulière élu local se monte à 46,27 millions d'euros en 2003, contre 45,23 millions d'euros en 2002, soit une progression de 2,294 %.

La DGE des communes et des départements est indexée sur la formation brute de capital fixe des administrations publiques et s'élève à 872,199 millions d'euros en 2003, soit une progression de 2,6%.

Ces deux dotations évoluent également comme la formation brute de capital fixe des administrations publiques ; elles connaîtront donc une progression de 2,6% en passant de 840,86 millions d'euros en 2002 à 862,72 millions d'euros en 2003 (respectivement 576,45 millions d'euros pour la DRES et 286,26 millions d'euros pour la DDEC).

S'agissant de la dotation générale de décentralisation (DGD), le montant des crédits ouverts sur le budget du ministère de l'intérieur en loi de finances initiale pour 2002 s'est élevé à 4 622,87 millions d'euros, dont 4 398,97 millions d'euros pour la DGD des communes, des départements et des régions (chapitre 41-56) et 223,90 millions d'euros pour la DGD de la collectivité territoriale de Corse (chapitre 41-57).

Outre l'indexation des crédits ouverts en 2002, la DGD évoluant comme la DGF, soit une progression de 2,294 % en 2003, qui se traduit par une progression de 100,91 millions d'euros de la DGD et de 5,14 millions d'euros de la DGD Corse, les crédits inscrits en loi de finances pour 2003 font l'objet d'un certain nombre d'ajustements :

- Sur le chapitre 41-56 (DGD des communes, départements et régions) ont été prévus les crédits correspondant au transfert aux régions des services régionaux de voyageurs (1 552,73 millions d'euros), ainsi que l'ajustement de la provision ouverte en 2001 pour la compensation aux départements de la perte de ressources fiscales consécutive à la suppression de la vignette automobile des particuliers (5,90 millions d'euros). Le transfert de crédits pour les services régionaux de voyageurs va dans le sens de la globalisation des transferts aux collectivités, et donc d'une plus grande autonomie financière.

- Sur le chapitre 41-57 (DGD de la collectivité territoriale de Corse) est prévu l'ajustement de la provision ouverte en 2001 pour la compensation de la perte de ressources fiscales consécutive à la suppression de la vignette automobile des particuliers, à hauteur de 0,16 million d'euros.

Par ailleurs, l'ajustement des crédits destinés à prendre en compte les effets financiers des transferts de compétences prévus dans la loi relative à la Corse est égal à 1,82 million d'euros. Ces crédits représentent le solde entre le droit à compensation de la collectivité territoriale de Corse et le transfert de ressources fiscales, sous la forme d'une affectation d'une fraction du produit de la taxe intérieure sur les produits pétroliers perçue en Corse.

Ainsi la DGD des communes, des départements et des régions s'établit en 2003 à 6 045,30 millions d'euros et la DGD de la collectivité territoriale de Corse à 231,03 millions d'euros.

A ces dotations viennent s'ajouter celles inscrites aux budgets d'autres ministères : la DGD Culture s'élève pour 2003 à 161,62 millions d'euros, dont 9,03 millions d'euros au titre de la Corse et 152,59 millions d'euros au titre des autres collectivités, ce qui aboutit finalement à une DGD gérée par le ministère de l'intérieur de 6 437,95 millions d'euros. La DGD Formation professionnelle atteint 1 389,43 millions d'euros.

La dotation de compensation de taxe professionnelle est la variable d'ajustement de l'enveloppe normée du contrat de croissance et de solidarité ; les dotations évoluant toutes selon leur propre critère d'indexation au sein d'une enveloppe elle-même indexée, il a en effet été nécessaire de faire le choix d'une variable d'ajustement susceptible d'opérer le « bouclage » de l'enveloppe.

En 2003, la DCTP s'établira à 1 418,825 millions d'euros.

Elle diminue de 3 % par rapport à la DCTP pour 2002 telle qu'elle s'établissait hors abondement « Pantin » et après le prélèvement de 126,08 millions d'euros opéré au profit des communautés d'agglomération.

L'abondement « Pantin » correspond à la compensation forfaitaire de l'Etat à la suite de l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 octobre 2000 « commune de Pantin » : par cet arrêt, la Haute juridiction a jugé que les compensations de taxe professionnelle au titre de l'abattement général de 16 % devait être calculée en fonction de la totalité des bases d'imposition à la taxe professionnelle, qu'il s'agisse de rôles primitifs ou de rôles supplémentaires. Afin de couper court à tous les contentieux en cours ou prévisibles des collectivités locales demandant, à la suite de cet arrêt, la prise en compte des rôles supplémentaires, le Gouvernement de M. Lionel Jospin a validé, lors du précédent projet de loi de finances, et de façon rétroactive, les pratiques antérieures de l'administration fiscale. Il a cependant été décidé corrélativement d'accorder une compensation forfaitaire aux collectivités locales, dont le montant s'élève à 177,9 millions d'euros. Le versement de cette compensation est prévu selon un échéancier précis : 45 % en 2002, 25 % en 2003, 20 % en 2004 et 10 % en 2005.

Compte tenu de cet échéancier, dont chacun a apprécié la présentation trompeuse faite l'année passée, l'abondement à effectuer pour 2003 à la suite de l'arrêt Pantin est de 44,475 millions d'euros, correspondant à 25 % de l'abondement total de la DCTP (hors REI), contre 80 millions d'euros en 2002. Compte tenu de cet abondement, la DCTP s'établira donc, en 2003, à 1463,3 millions d'euros, soit une diminution de - 5,15 % par rapport à la DCTP 2002.

Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2003 ne proroge pas le dispositif de modulation des pertes de DCTP au profit des communes défavorisées afin de ne pas faire subir aux autres collectivités une trop forte baisse. En revanche, les pertes de DCTP enregistrées entre 1999 et 2001 par les communes et groupements défavorisés continuent à être compensées en 2003 par le FNPTP. Cette compensation s'élèvera à 188 millions d'euros, soit le montant attribué en 2002.

Le FCTVA est la principale contribution de l'Etat aux dépenses d'investissement des collectivités locales. Son montant prévisionnel inscrit en loi de finances pour 2003 s'élève à 3 644 millions d'euros, soit une augmentation de + 0,8%.

Le produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation s'élève en 2003 à 368 millions d'euros, soit une hausse de 16 % correspondant à un effet de « rattrapage » après une année 2002 marquée par la loi d'amnistie.

En loi de finances initiale pour 2003, les subventions de fonctionnement des différents ministères devraient se situer à 739 millions d'euros. Les subventions d'équipement des différents ministères s'élèveront à 1 089,6 millions d'euros et les comptes spéciaux du Trésor à 187 millions d'euros.

Les compensations d'exonérations et les dégrèvements législatifs devraient atteindre, en 2003, 10,4 milliards d'euros.

Elles se composent de :

- la compensation au titre de la réduction pour embauche et investissement de la DCTP, soit 123,9 millions d'euros ;

- le montant des compensations relatives à la fiscalité locale, soit 1 971 millions d'euros en 2003 ;

- la contrepartie de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties, soit 98,75 millions d'euros en 2003 ;

- la contrepartie de divers dégrèvements législatifs pour un montant de 8 215 millions d'euros.

Quatre taxes ont vu leur assiette partiellement ou totalement supprimée depuis 1999. Il s'agit de la suppression de la part salaire des bases de la taxe professionnelle, de la suppression de la part régionale des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation et de la suppression de la vignette automobile.

La suppression progressive, à partir de 1999 et sur cinq ans, de la part salaire des bases de la taxe professionnelle a été compensée à hauteur de 7 804 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2002. La compensation est indexée chaque année en fonction du taux d'évolution de la DGF entre 1999 et l'année de versement. A compter de 2004, la compensation sera intégrée à la DGF et évoluera comme cette dernière. En loi de finances initiale pour 2003, le montant de la compensation de la part salaires s'élèvera à 9 033 millions d'euros, compte tenu du prélèvement de 800 millions d'euros opéré au titre de la banalisation de la fiscalité locale de France-Télécom. En effet, le surplus de produit fiscal attribué aux collectivités locales dans le cadre de cette réforme sera déduit, en 2003, du montant des compensations fiscales qu'elles perçoivent, afin d'assurer la neutralité budgétaire de la réforme.

La compensation de la suppression progressive de la part salaire des bases de la taxe professionnelle représente un poids croissant dans les concours financiers de l'Etat aux collectivités locales et explique à elle seule une grande partie de la progression de ces concours.

Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2003 contient d'autres mesures remédiant à certaines lacunes de la réforme de la taxe professionnelle introduite en 1999.

Ainsi, les titulaires de bénéfices non commerciaux et assimilés employant moins de 5 salariés sont actuellement imposés à la taxe professionnelle sur la base d'une assiette comprenant la valeur locative de certaines immobilisations et le dixième des recettes. Ils n'ont donc pas bénéficié de la suppression progressive de la part salaire dans l'assiette de la taxe professionnelle. Pour les faire bénéficier d'un avantage comparable, soit une baisse de leur imposition à la taxe professionnelle d'un tiers environ, il est prévu une diminution progressive, sur 4 ans, de la part des recettes prises en compte dans leur assiette de taxe professionnelle, qui passerait ainsi de 10 % à 6 %. Prévue à l'article 11 du projet de loi de finances pour 2003, cette mesure serait compensée par l'Etat à hauteur de 88 millions d'euros.

Afin, d'autre part, d'aider les entreprises à réaliser des investissements de recherche et de développement, le projet de loi de finances prévoit également de ne plus prendre en compte dans les bases de taxe professionnelle les immobilisations créées ou acquises à l'état neuf, qui bénéficient déjà du crédit d'impôt recherche. Le coût de cette mesure, évalué à 15 millions d'euros, sera pris en charge par l'Etat.

Le montant des crédits ouverts en loi de finances initiale 2002 au titre de la compensation aux régions des pertes de recettes fiscales (chapitre 41-55) s'est élevé globalement à 1 819,37 millions d'euros, dont 842,33 millions d'euros au titre de la compensation résultant de la suppression des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et 977,04 millions d'euros au titre de la compensation résultant de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation (TH). Du fait de l'indexation des crédits ouverts en 2002 (+ 2,294 %), le montant de la compensation des pertes de recettes fiscales aux régions s'élèvera, en 2003, à 1 861,11 millions d'euros, soit 861,66 millions d'euros au titre des DMTO et 999,45 millions d'euros au titre de la suppression de la taxe d'habitation.

S'agissant des départements, la mesure DMTO 1999 a eu pour objet d'unifier le régime d'imposition des cessions de locaux professionnels et agricoles. La loi de finances pour 2000 a étendu ce dispositif aux immeubles d'habitation et a prévu une exonération en ce qui concerne les cessions au profit des SAFER. Les lois de finances pour 2001 et 2002 ont prévu des mesures d'exonérations de vignette. La compensation des pertes de recettes fiscales résultant de ces mesures a été intégrée dans la DGD et évolue chaque année comme la DGF (1 374,367 millions d'euros en 2003).

La répartition des concours financiers de l'Etat entre les différentes dotations fait l'objet du tableau récapitulatif suivant :

II. - L'INDISPENSABLE RÉFORME DES FINANCES LOCALES

L'article 9 de la Charte européenne du 15 octobre 1985 du Conseil de l'Europe reconnaît explicitement le principe d'autonomie locale :

« Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l'exercice de leurs compétences.

Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi

Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d'impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.

Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences. »

Libre disposition de ressources propres, proportionnalité de ces ressources avec les compétences exercées, libre fixation des taux, variété des sources de financement : la Charte européenne résume en quatre alinéas l'essentiel des principes directeurs d'une décentralisation réussie... Qu'en est-il cependant réellement de l'application de ces principes dans l'organisation territoriale française ? Fait-on en l'occurrence mieux ou moins bien que nos voisins européens ? Répondre à ces questions est un exercice périlleux, tant sont divers les systèmes d'organisation territoriale. Une étude du Conseil économique et social daté de 2001 (), ainsi qu'un rapport du Conseil de l'Europe de 2000 () permettent néanmoins de dégager plusieurs points communs () :

Les systèmes d'organisation territoriale européens connaissent une grande diversité d'impôts : il peut s'agir aussi bien d'impôts sur le revenu, d'impôts fonciers, d'impôts sur les mutations à titre gratuit ou à titre onéreux, sur la détention de véhicules à moteur, sur la fortune, sur les jeux, sur la pollution de l'eau, sur les chiens, le tourisme, la publicité... Certaines collectivités n'ont à leur disposition qu'un ou deux types d'impôts (c'est le cas de la Suède, du Royaume-Uni, du Danemark, de l'Irlande ou de la Finlande), d'autres au contraire disposent d'une gamme très étendue pouvant aller jusqu'à six types d'impôts différents (Belgique).

En dépit de cette grande diversité, il est possible de dégager certains points communs : les études comparées ont ainsi permis de démontrer que l'impôt foncier restait l'impôt le plus caractéristique des finances locales. Il représente ainsi le produit le plus important au Royaume-Uni, en Irlande, Belgique, Pays-Bas, Danemark, Finlande, Autriche, Espagne, Portugal et Grèce ; seuls l'Italie, la France et l'Allemagne ne connaissent pas cette prépondérance. L'impôt foncier peut être assis sur la valeur locative du bien, en Belgique, Autriche, Irlande, Portugal et Suède, sur sa valeur vénale, au Royaume-Uni, Danemark, Pays-Bas et Grèce, ou sur le mélange des deux, en Allemagne. Le redevable de l'impôt est, le plus souvent, le propriétaire du bien ; seul le Royaume-Uni ne taxe que l'occupant, la France, l'Irlande et les Pays-Bas taxant à la fois le propriétaire et l'occupant.

Dans tous les pays européens, l'impôt local sur le revenu est un impôt conjoint, sur lequel différents niveaux territoriaux exercent leur pouvoir fiscal. Il peut être important dans certains pays, tels la Suède, le Danemark, l'Espagne ou la Finlande, ou simplement complémentaire, comme en Belgique ou en Italie. L'impôt sur le revenu partagé, sans pouvoir local sur les taux, est également important pour les finances locales allemandes.

L'impôt local sur les activités économiques n'existe que dans quelques pays : la France, où il représente l'impôt local le plus important, l'Allemagne, le Portugal, le Luxembourg, l'Italie et l'Espagne ; à côté de cet impôt local peut coexister une fiscalité foncière sur les entreprises qui, comme au Royaume-Uni, peut être très lourde.

Le concept de marges de man_uvre fiscale se distingue de celui d'autonomie fiscale ; ce dernier s'appuie autant sur une analyse portant sur le niveau de ressources financières de la collectivité locale que sur sa capacité d'action ; le concept d'autonomie revêt donc à la fois un aspect économique et un aspect juridique.

Les marges de man_uvre fiscale se définissent comme « la capacité réelle et propre des collectivités locales à faire évoluer leurs recettes fiscales en jouant sur les taux et/ou sur les assiettes ». Cette autonomie est mesurée en pourcentage des recettes locales totales hors emprunt, les recettes fiscales sur lesquelles les collectivités locales ne disposent pas de marge de man_uvre étant en conséquence considérées comme des recettes transférées. Les marges de man_uvre fiscales de différents pays européens sont retracées dans le tableau suivant :

ORIGINE DES RESSOURCES DES BUDGETS LOCAUX

(en pourcentage)

 

Fiscalité
propre

Redevance
et prix

Transferts

Emprunts

Autres

Allemagne

35,00

4,00

32,00

7,00

0,00

Autriche

16,30

21,00

43,70

10,00

9,00

Belgique

40,75

6,00

44,26

0,00

8,99

Danemark

52,20

22,30

24,50

0,00

1,00

Espagne

29,80

18,50

27,10

14,90

9,70

Finlande

39,50

24,00

28,40

5,60

2,50

France

42,00

8,00

29,00

9,00

12,00

Grèce

27,00

8,00

63,00

2,00

0,00

Irlande

16,00

21,00

57,00

0,00

7,00

Italie

31,00

11,00

42,00

7,00

10,00

Luxembourg

32,88

24,88

33,16

8,00

0,00

Norvège

47,50

12,80

36,20

0,00

3,50

Pays-Bas

15,00

2,00

83,00

0,00

0,00

Portugal

23,00

10,80

49,30

7,50

9,40

Royaume-Uni

25,00

11,00

53,00

8,00

4,00

Suède

56,00

15,00

20,00

0,00

9,00

Source : Conseil de l'Europe

L'analyse de ce tableau révèle que la France se situe en bonne place en terme de marge de man_uvre dans la mesure où, avec un pourcentage de 42 %, les ressources propres des collectivités représentent une part importante de leurs budgets ; comparé à la moyenne constatée dans l'ensemble des pays du Conseil de l'Europe, qui est de 25,73 %, la France se situe même dans le peloton de tête de l'autonomie fiscale locale avec le Danemark et la Suède, tandis que l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas se situent en fin de tableau.

Cette comparaison doit néanmoins être complétée par une analyse portant sur la part des impôts locaux rapportée au PIB ; on pourrait concevoir, en effet, un faible pourcentage de marges de man_uvre fiscale si celui-ci était compensé par une masse importante de recettes. Là encore, les pays scandinaves se distinguent par le poids important des impôts locaux ; la France occupe une position médiane, avec un impôt local représentant 4,5 % du PIB et 20 % du total des impôts nationaux ; l'Allemagne et l'Angleterre se retrouvent cette fois encore en queue de tableau avec une part très faible des impôts locaux rapportée au PIB.

Le degré d'autonomie des collectivités locales peut également s'apprécier au regard de la nature des concours qui leur sont versés : ils peuvent, en effet, prendre la forme de dotations, dont l'emploi et l'affectation relèvent de la seule décision de la collectivité, ou bien être versés sous forme de subventions, affectées à une dépense précise. En terme d'autonomie, la forme de la dotation est préférable à celle de la subvention ; l'article 9 de la Charte européenne de l'autonomie locale recommande d'ailleurs d'y recourir à chaque fois que cela est possible. Parmi les dotations, il faut également préciser qu'il peut s'agir de dotations de fonctionnement, de dotations d'investissement, ou de dotations « mixtes », pouvant être utilisées tour à tour pour du fonctionnement ou de l'investissement.

Le profil des concours de l'Etat pour les pays européens est décrit dans le tableau suivant :

TYPOLOGIE DES CONCOURS (en % du montant total)
(1995 ou 1996)

DOTATIONS MIXTES (libres d'emploi, tant pour les dépenses de fonctionnement que pour les dépenses d'investissement)

    Suède

    Norvège

    Danemark

75,0 % (critères objectifs à 100 %)

56,0 % (critères objectifs à 95 %)

45,3 % (critères objectifs à 99,7 %)

DOTATIONS DE FONCTIONNEMENT (libres d'emploi, pour les seules dépenses de fonctionnement)

    Finlande

    Espagne (PIE)

    Allemagne

    Italie

    Grande-Bretagne

    Pays-Bas

97,1 % (en 1995)

71,7 % (en 1995) (critères objectifs à 100 %)

environ 60,0 % (critères objectifs à 100 %)

55,2 %

49,1 %

24,9 % (en 1995)

DOTATIONS D'INVESTISSEMENT (libres d'emploi, pour les seules dépenses d'investissement)

    Italie

44,8 %

SUBVENTIONS DE FONCTIONNEMENT (affectées aux seules dépenses de fonctionnement, pour un seul projet spécifique)

    Danemark

    Grande-Bretagne

    Norvège

    Pays-Bas

    Suède

    Allemagne

    Espagne

54,7 %

46,5 %

44,0 %

26,3 % (en 1995)

22,5 %

environ 20,0 %

7,4 % (en 1995)

SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENTS (affectées aux seules dépenses d'investissements, pour un projet spécifique)

    Pays-Bas

    Espagne

    Allemagne

    Grande-Bretagne

    Finlande

    Suède

48,8 % (en 1995)

20,9 % (en 1995)

19,4 %

4,5 %

2,9 % (en 1995)

2,5

Source : « Finances locales comparées », Jacques Blanc - LGDJ

S'agissant de la distinction entre dotations et subventions, la France se trouve dans un cas un peu particulier ; les dispositifs mis en place sont incontestablement proches de ceux des pays scandinaves, dans la mesure où près de 95 % des concours de l'Etat prennent la forme de dotations. Il y a eu incontestablement à ce sujet une évolution historique puisque l'essentiel des concours après la Libération était accordé sous forme de subventions spécifiques, destinées à moderniser rapidement le pays dans le cadre de grands programmes d'investissement. La réforme de la décentralisation s'est accompagnée d'une globalisation croissante des concours, l'exemple le plus marquant étant la fusion d'un grand nombre de subventions spécifiques au sein de la dotation générale de décentralisation. Néanmoins, ces dotations globalisées présentent la particularité de compenser la suppression de diverses recettes fiscales ; pour près de la moitié d'entre elles, ce sont donc des dotations dites passives, sur lesquelles l'Etat n'a que peu de prises, et qui sont, en définitive, la traduction incontestable d'une perte d'autonomie des collectivités locales en terme de pouvoir fiscal. Le rapporteur aura l'occasion d'y revenir.

L'étude du Conseil économique et social relève que dans presque tous les pays européens, l'autonomie fiscale locale est encadrée ; l'objectif est de limiter les prélèvements obligatoires, mieux répartir la pression fiscale entre niveaux de collectivités territoriales, freiner les distorsions sociales et économiques et enfin protéger les ménages et les entreprises contre des décisions abusives.

Les techniques d'encadrement sont multiples : les taux peuvent être fixés par les Parlements nationaux, comme au Royaume-Uni pour l'impôt foncier à la charge des entreprises, au Danemark pour l'impôt foncier sur les propriétés bâties à usage résidentiel ou encore en Allemagne, pour la majeure partie des impôts gérés par les Länder.

Leur évolution peut également être limitée par un taux plafond, comme en Italie pour l'impôt régional sur les activités productives, en Allemagne pour les impôts communaux en fonction des décisions des Länder, en Espagne pour l'impôt foncier communal et la patente. L'évolution peut également être encadrée par un maximum et un minimum : c'est le cas au Danemark pour l'impôt foncier communal et l'impôt régional additionnel à l'impôt sur le revenu. Enfin, la variation peut également dépendre de l'évolution des taux d'un autre impôt : ainsi, l'impôt régional sur le revenu en Espagne ne peut être inférieur ou supérieur de 20 % au montant de l'impôt d'Etat sur le même revenu.

Des formules plus originales peuvent exister : c'est le cas pour le Royaume-Uni, où un contrôle préalable sur les projets de budget est effectué, par le biais de la fixation d'un niveau de dépenses maximales. Au Danemark, le choix a été fait d'une responsabilisation des élus locaux : l'impôt sur le revenu fait l'objet d'un partage entre les différentes structures locales ; au delà d'un plafond de pression fiscale fixé à 58 %, l'excédent global est restitué au contribuable par un mécanisme mettant à contribution les collectivités locales.

La comparaison des différents systèmes d'encadrement se révèle ardue : il semble néanmoins se dégager une règle simple que les études statistiques de l'OCDE ont permis de mettre en valeur : la liberté de fixation des taux est d'autant plus grande que la part des impôts locaux concernés est faible. Seule l'Espagne accorde une large liberté sur une forte part des recettes fiscales totales ; la Belgique, les Pays-Bas et le Royaume-Uni offre une large liberté aux collectivités locales, mais pour une part minoritaire des recettes fiscales ; à l'opposé, la liberté de vote des taux est très faible pour des pays comme l'Italie ou le Danemark, pour lesquels la part des impôts locaux concernés est forte. L'Allemagne est un cas un peu particulier puisque l'encadrement des taux est très contraignant sur une part très minoritaire des recettes fiscales totales.

La France, là encore, occupe une position intermédiaire : elle cumule les formules d'encadrement des taux en imposant pour certains impôts locaux - taxe professionnelle, taxe foncière sur la propriété non bâtie - le respect d'un plafond ainsi qu'une évolution liée à la taxe d'habitation et à la taxe foncière sur la propriété bâtie. Néanmoins, le produit des quatre taxes directes locales représente 70 % du total des recettes fiscales locales.

Les modalités de recours à l'emprunt offrent, là encore, un bon indicateur du degré d'autonomie des collectivités locales ; il est possible en la matière de dégager trois modèles : un modèle libéral, qui se définit comme l'absence de normes contraignantes, la seule règle imposée étant l'affectation du produit des emprunts au financement des investissements ; un modèle interventionniste, fondé sur le principe de l'autorisation des emprunts ; un modèle mixte, caractérisé par l'affirmation du principe de liberté de l'emprunt, sous réserve d'exceptions et de respect de ratios.

La Suède, la Finlande et la France relèvent assurément du modèle libéral ; quelle que soit la forme de recours à l'emprunt, les collectivités locales françaises ne sont plus soumises à autorisation, sauf en ce qui concerne les émissions obligataires à l'étranger.

L'Allemagne appartient au modèle interventionniste : les emprunts à moyen et long terme doivent avoir été autorisés par le ministre de l'intérieur du Land ; ce dernier surveille l'évolution du compte courant et peut imposer un programme de consolidation en cas de situation déficitaire. Relève également du régime interventionniste le Royaume-Uni : les collectivités locales sont soumises à un agrément et le total des emprunts doit respecter un plafond. La gestion de la dette est également strictement encadrée. Les collectivités locales danoises sont également très encadrées : les emprunts des communes sont quantitativement limités et ne peuvent concerner que des secteurs de compétence particuliers. Les emprunts des comtés n'obéissent pas à cette règle de compétence, mais restent plafonnés en fonction du montant total des investissements.

L'Italie, l'Espagne, la Belgique et les Pays-Bas relèvent du modèle mixte : le recours à l'emprunt des collectivités locales italiennes est libre mais l'ensemble des encours doit respecter des normes de gestion. Les provinces et communes espagnoles doivent demander une autorisation d'emprunter lorsque l'emprunt dépasse un certain montant () ; les provinces et les communes belges ne sont soumises en théorie à aucune règle particulière, mais l'ensemble des budgets locaux doit être approuvé par une autorité locale supérieure. Enfin, les Pays-Bas n'imposent aucune règle particulière, mais les budgets locaux font l'objet d'une surveillance stricte et le montant des emprunts peut être plafonné si la situation de la collectivité l'exige.

En matière d'autonomie financière, la comparaison des systèmes d'organisation territoriale des différents pays européens fait apparaître la bonne place des collectivités locales françaises. L'autonomie dont jouissent ces dernières se caractérise essentiellement par la part importante des recettes fiscales dans l'ensemble de leurs ressources, la liberté d'emprunter et l'absence théorique de tutelle d'une collectivité sur une autre.

Pour autant, cette situation enviable traduit mal les difficultés que connaît actuellement la décentralisation ; le système français est à bout de souffle et rend indispensable une réforme de grande ampleur.

Les évolutions récentes sont en effet inquiétantes : alors que les lois de décentralisation de 1982 et 1983 avaient permis de conférer aux collectivités locales un haut degré d'autonomie, le retour de balancier, près de quinze ans plus tard, a été durement ressenti : la suppression de la part salariale des bases de taxe professionnelle, de la part régionale de la taxe d'habitation, de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, pour les particuliers, de la taxe régionale additionnelle aux droits de mutation à titre onéreux ainsi que l'abaissement, puis le plafonnement, du tarif du droit de mutation à titre onéreux sont autant de mesures qui ont fortement affaibli les marges de man_uvre dont jouissaient les collectivités locales.

Les conséquences de cette recentralisation sont multiples : pour les collectivités locales, la prise en charge par l'Etat d'une part croissante de la fiscalité locale se traduit non seulement par une atteinte à leurs libertés et à leur pouvoir fiscal, mais également par une perte en termes financiers. En effet, dans un contexte de maîtrise des finances publiques, la tendance a été de transformer ce qui relevait du dégrèvement en compensation d'exonération : alors que le dégrèvement prévoit de faire prendre en charge par l'Etat le montant de l'impôt voté par la collectivité, la compensation d'exonération apporte un dédommagement à la collectivité en réponse à la mise en place d'une exonération proposée par le Gouvernement et votée par le Parlement ; elle est calculée en fonction du produit des bases exonérées par le taux figé de l'année de référence. Le dégrèvement est neutre pour la collectivité alors que la compensation est une exonération étroitement dépendante des critères d'indexation. Compte tenu du dynamisme des impôts locaux, l'Etat a cherché à transformer en compensation ce qui relevait du dégrèvement ; il en a été ainsi du plafonnement de la taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée, des dégrèvements totaux de taxe d'habitation, de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, hors sa partie relative à la réduction pour embauche et investissement ainsi que de la compensation pour suppression de la part « salaires » des bases de taxe professionnelle.

La tendance à la recentralisation rend également les collectivités locales tributaires des choix faits par l'Etat en matière de maîtrise des finances publiques ; le contrat de croissance et de solidarité est indexé sur l'évolution des prix hors tabac ainsi que sur le tiers du taux de croissance du PIB ; à l'intérieur de cette enveloppe, les dotations évoluent selon leur propre mode d'indexation, la DGF étant quant à elle indexée sur l'évolution des prix et la moitié du taux de croissance du PIB ; la dotation de compensation de la taxe professionnelle joue alors le rôle de variable d'ajustement afin que l'ensemble de l'évolution des dotations reste compris dans le périmètre de l'enveloppe normée. La conséquence de ce dispositif est que l'évolution de la DCTP n'a plus grand-chose à voir avec l'objectif initial de compensation de la taxe professionnelle.

En outre, le montant du contrat de croissance et de solidarité varie en fonction de critères d'indexation proposés par le Gouvernement et validés par le Parlement ; ils peuvent être modifiés à tout moment en fonction de la conjoncture, à la hausse, comme cela a été le cas depuis 1996, mais également à la baisse, sans que ces modifications ne soient liées à l'évolution des charges des collectivités locales. Ainsi, compte tenu de ces critères d'indexation, certaines collectivités, qui ne perçoivent que la dotation forfaitaire connaissent une progression de crédits inférieure à l'inflation.

La recentralisation est également lourde de conséquences pour l'Etat : ce dernier est, en effet, devenu en quelques années le premier contribuable local, dans la mesure où il a été contraint de prendre en charge, par le biais de compensations et de dégrèvements, une part croissante de la fiscalité locale. Il supporterait ainsi à lui seul plus de 35 % du produit fiscal local. Une étude effectuée, en mai 2000, par le sénateur Yves Fréville a permis de montrer que l'essentiel de la croissance des concours de l'Etat était imputable aux compensations d'exonérations et de dégrèvements, ceux-ci étant passés de 0,45 % du PIB en 1982 à 1,5 % en 1998 (alors que dans le même temps, les dotations de l'Etat dans leur ensemble ont diminué de 1,45 % à 1,35 % du PIB).

La montée en charge des dispositifs de compensation induit également une plus grande rigidité dans la gestion des concours de l'Etat aux collectivités locales. Les dotations passives devenant peu à peu plus importantes que les dotations actives, les concours financiers perdent leur logique de péréquation pour ne constituer que des substituts de fiscalité locale. À terme, l'Etat risque de se priver d'un instrument indispensable de correction des déséquilibres territoriaux.

L'opacité des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales est régulièrement dénoncée par les élus locaux, à travers notamment le Comité des finances locales. Elle a été également analysée en détail par la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000 ; la Cour dénonçait alors « une inflation des dotations pour des objectifs peu identifiables » en précisant que « se mêlent ainsi des objectifs de stabilisation des budgets des collectivités, de péréquation entre celles-ci, de compensation de moindres recettes fiscales, ou encore d'encouragement à l'investissement qui rendent délicates la mise en place d'indicateurs de résultat et l'appréciation de l'efficacité de tels concours ». Les modalités de calcul de la DGF illustrent parfaitement cette complexité : le travail de répartition de certaines de ses composantes fait ainsi intervenir 16 critères différents...

Surtout, les contours de l'action de l'Etat deviennent difficiles à cerner. Le périmètre de l'enveloppe normée parait de plus en plus virtuel ; s'y substitue un empilement de dotations et d'abondements exceptionnels dont la lisibilité est difficile. Ainsi, la dotation de l'Etat au Fonds national de Péréquation a bénéficié d'un abondement de 22,87 millions d'euros en 2000 et 2001 ; la DSU a bénéficié, pour sa part, d'un abondement en 1999 de 76,22 millions d'euros, reconduit en 2000 et 2001 et de 122 millions d'euros en 2002. La DGF a également bénéficié de 282 millions d'euros d'abondements en 2000, de 282 millions d'euros en 2001 et de 309 millions d'euros en 2002. Tous ces abondements sont généralement accordés hors de l'enveloppe du contrat de croissance et de solidarité et ne font donc pas l'objet d'une consolidation pour les années suivantes. La comparaison de la progression des concours de l'Etat d'une année sur l'autre se révèle une tâche particulièrement ardue.

Cette recentralisation insidieuse est intervenue au moment où l'Etat cherchait, par ailleurs, à réduire son déficit en transférant des charges croissantes aux collectivités locales ; les compétences transférées dans ce cadre se sont toutefois opérées sans équivalent en terme de transferts de ressources. Ainsi, les collectivités territoriales ont dû faire face à des retards d'investissement très importants, notamment en matière de lycées et de collèges, sans que les montants de la dotation départementale d'équipement des collèges ou de la dotation régionale d'équipement ne tiennent compte de ces retards. En matière d'enseignement, les transferts de compétence ont également pris la forme plus insidieuse de la contractualisation : l'Etat, par le biais notamment des contrats de plan Etat-régions, s'est ainsi dégagé progressivement de dépenses lourdes touchant notamment aux constructions universitaires.

Les collectivités locales ont dû, en outre, faire face à des charges nouvelles imposées par l'Etat, non pas du fait de nouveaux transferts, mais induites par des réglementations toujours plus contraignantes. Le respect de normes techniques imposées par les instances internationales ou nationales pèse de plus en plus lourd dans le budget des collectivités locales ; comme le souligne le rapport du Conseil économique et social précité, « le poids financier considérable de ces contraintes nouvelles ne tient pas seulement aux équipements nouveaux induits ou aux surcoûts pour les autres équipements projetés mais aussi à la mise aux normes du stock des équipements existants. Il est aggravé par la nécessité de respecter des délais souvent très courts pour cette mise aux normes. ». Les délais de mise en conformité sont d'autant plus exigeants que les élus voient leur responsabilité de plus en plus fréquemment engagée.

L'impact budgétaire de ces nouvelles normes techniques est difficile à évaluer ; s'agissant du secteur particulier de la prévention et de la lutte contre les pollutions - incluant la gestion de l'eau, le traitement des déchets, la lutte contre le bruit et le nettoyage de la voirie -, une étude de l'inspection générale de l'administration du ministère de l'intérieur a permis toutefois d'estimer à environ 205 milliards de francs les dépenses engagées par les collectivités locales pour les années 1993 à 1995.

Les charges nouvelles incombant aux collectivités locales résultent également du poids croissant de la gestion du personnel territorial ; bien que la masse salariale représente près de 42 % des dépenses de fonctionnement, les collectivités locales n'ont que très peu de marge de man_uvre pour en maîtriser l'évolution : elles dépendent, en effet, en large partie, pour ce qui est des traitements et des mesures sociales, de décisions de l'Etat. A cet égard, la pratique du précédent Gouvernement n'a fait qu'accroître ces charges de personnel : en imposant à la fonction publique territoriale, sans réelle concertation, la nouvelle durée du temps de travail, le gouvernement de M. Lionel Jospin a pris le risque d'affaiblir durablement les marges de man_uvre financière des collectivités locales, au détriment de l'investissement et des équipements locaux ; ainsi que le relevait l'audit de la situation des finances publiques commandée en juin par le Gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin (): « pour les personnels des administrations locales, la nouvelle durée légale du travail est effective depuis le 1er janvier 2002. Chaque situation locale est spécifique, particulièrement dans les petites communes où la nouvelle règle s'applique à de faibles effectifs, de sorte que la prévision du rythme de la montée en charge de la mesure et de son effet global sur les charges de personnel est spécialement incertaine. Cependant, une accélération de la croissance des rémunérations, après celle déjà enregistrée en 2001 semble probable. » La hausse effectivement constatée entre 2001 et 2002 s'élève à 6,1 %. Cette progression s'est faite bien entendu sans que les dotations de l'Etat ne soient réévaluées en conséquence.

Dans ce contexte, la hausse de 0,4 % par an de la cotisation des employeurs à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales vient alourdir davantage les charges imputées aux collectivités locales.

Formidable vecteur de dynamisme et d'initiatives, la décentralisation a incontestablement contribué à la croissance de ces dernières années ; ainsi, depuis le début des années quatre-vingt dix, environ deux tiers de l'investissement sont réalisés par les administrations publiques locales et, comme l'a montré Jacques Méraud () dans une étude sur l'évolution des comptes des administrations publiques locales entre 1959 et 1994, « plus l'investissement public local augmente, plus le PIB est stimulé. On observe un effet stimulant analogue de l'investissement des administrations locales sur la productivité et l'emploi du secteur privé. Il y a là une manifestation significative de ce qu'on appelle la croissance endogène. »

Force est cependant de constater que les conditions du financement de cette décentralisation ne permettent plus aux collectivités locales d'assurer leurs missions dans de bonnes conditions ; la réforme constitutionnelle voulue par le Président de la République en matière de décentralisation devra ainsi nécessairement s'accompagner d'une refonte générale des relations financières.

D'ores et déjà, le projet de loi de finances pour 2003 préfigure ce qui s'annonce comme une nouvelle étape dans la décentralisation.

III. - LES ENGAGEMENTS DU GOUVERNEMENT

Le projet de loi de finances pour 2003 est, répétons le, un budget de transition : toute réforme d'ensemble des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales aurait été prématurée avant la révision constitutionnelle annoncée par le Premier ministre dans son discours de politique générale du 3 juillet dernier.

Néanmoins, le projet de loi de finances pour 2003 fournit déjà, de façon très concrète, les grands axes de la future réforme :

L'article 14 du projet de loi de finances pour 2003 assouplit, à compter de 2003, les modalités de fixation du taux de taxe professionnelle.

Dans leur rédaction actuelle, les articles 1636 B sexies et 1636 sexies A du code général des impôts imposent aux collectivités locales soit de faire varier leur taux d'impôts locaux dans les mêmes proportions d'une année sur l'autre, soit de faire varier de façon différenciée ces taux, le taux de taxe professionnelle devant toutefois varier dans les mêmes conditions que celui de la taxe d'habitation ; cette variation ne peut en outre dépasser la variation, en moyenne pondérée, du taux moyen de la taxe d'habitation et des taxes foncières.

Afin de laisser davantage de marges de man_uvre aux collectivités locales et à leurs groupements dotés d'une fiscalité propre, le projet de loi de finances prévoit une modification des deux articles précités en permettant une variation de la taxe professionnelle dans la limite d'une fois et demie la variation du taux de la taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, du taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières.

Lorsque il sera fait application de cette variation d'une fois et demie, il ne pourra être fait utilisation du dispositif exceptionnel prévu au 2 de l'article 1636 B sexies permettant des diminutions exceptionnelles de taxe d'habitation et de taxe foncières sans liaison avec la taxe professionnelle ; le mécanisme de majorations exceptionnelles de taux de taxe professionnelle de 5 %, prévues au 3 du même article, et permettant à une commune ou un département de compenser un taux de taxe professionnelle inférieur à la moyenne ne pourra non plus être utilisé.

La modification prévue à l'article 14 ne concerne que les conditions de variation des taux ; le dispositif de plafonnement, prévu aux articles 1636 B septies et 1636 B decies, qui limite le taux de taxe professionnelle à deux fois celui constaté au niveau national pour les collectivités de même nature, est maintenu.

Les modalités d'encadrement des taux de taxe professionnelle se justifiaient certainement lorsque la décentralisation n'en était qu'à ses balbutiements parce qu'il semblait utile d'instaurer des garde-fous. Aujourd'hui, les modalités d'encadrement apparaissent complexes et peu adaptés aux réels besoins des collectivités locales. En raison de cette complexité, peu de collectivités ont choisi la méthode de variation différenciée des taux : ainsi, en 2000, 13,6 % des communes, 7,7 % des établissements publics de coopération intercommunale et 5 % des départements seulement avaient opté pour cette méthode. Comme l'indiquait le Conseil des impôts dans son Xe rapport : « l'autonomie fiscale des collectivités locales est en définitive très en deçà de ce que l'on attendait de la liberté de vote des taux des quatre taxes. La liberté de répartition de la charge fiscale entre les différentes catégories de contribuables est largement illusoire. »

En rendant aux collectivités locales une marge de man_uvre dans la procédure de fixation de leur taux d'imposition locale, l'article 14 du projet de loi de finances pour 2003 préfigure ce qui sera le thème majeur de la réforme de la décentralisation qui doit être inscrite dans la Constitution : la libre administration et les garanties financières de cette libre administration. Le Gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin mise à juste titre sur le comportement responsable dont ont fait preuve jusqu'à présent les élus locaux en matière de gestion des impôts locaux.

Cette logique de responsabilisation des exécutifs locaux parait toutefois trop timorée compte tenu des besoins des collectivités locales. La décentralisation actuelle se caractérise par une croissance des dotations de l'Etat, rendant ainsi les collectivités locales dépendantes de décisions qu'elles ne maîtrisent pas. Redonner un pouvoir plein et entier aux élus locaux en matière de fiscalité est le corollaire indispensable d'une démocratie locale rénovée.

En conséquence, le rapporteur a déposé un amendement à l'article 14 proposant une déliaison totale du taux de taxe professionnelle et ne maintenant que les plafonds prévus à l'article 1636 B septies. Cette proposition a rencontré un large écho parmi les parlementaires et recueilli plus de cent trente signatures.

Après un long et riche débat lors de la séance du 18 octobre, le rapporteur a retiré son amendement, le Gouvernement s'étant engagé à poursuivre la réflexion sur une déliaison totale des taux lors du débat sur la décentralisation. Un groupe de travail composé d'élus locaux et de représentants de chefs d'entreprises devrait être constitué très prochainement.

Ce débat sera également l'occasion de réfléchir aux moyens de limiter la pression fiscale locale ; il est en effet regrettable que les collectivités ne soient pas encouragées à procéder à des abattements fiscaux, ceux-ci n'étant actuellement pas pris en compte dans le calcul du potentiel fiscal.

L'article 13 du projet de loi de finances pour 2003 a pour objet d'assujettir France-Telecom aux impôts directs locaux dans les conditions de droit commun.

La loi du 2 juillet 1990, relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, a mis en place un régime fiscal dérogatoire pour la Poste et France-Télécom ; aux termes de la loi, ces opérateurs publics sont assujettis à un taux unique de taxe professionnelle pour l'ensemble du territoire national, dont le produit est directement versé à l'Etat. A compter de 1995, une partie de cet impôt a été affectée au Fonds national de Péréquation de Taxe professionnelle ; cette contribution spécifique est égale à la différence entre le produit des impositions directes locales alloué à l'Etat par France-Télécom et la Poste en 1994, indexé à compter de 1995 en fonction de l'indice de variation du prix à la consommation des ménages, et le produit effectivement prélevé sur la Poste et France-Télécom.

Le maintien de cette fiscalité dérogatoire pour France-Télécom ne se justifie plus : la filialisation de l'opérateur public a contribué à réduire fortement le produit de cet impôt, les filiales étant imposées dans les conditions de droit commun. En outre, cette fiscalité s'est révélée en définitive défavorable à l'opérateur public dans la mesure où elle instaurait des distorsions de concurrence avec les autres opérateurs de téléphonie mobile. Enfin, le manque à gagner pour les collectivités locales se chiffrait à près de 200 millions d'euros.

Dans ses conditions, le Gouvernement a décidé de normaliser la fiscalité de France-Télécom ; les collectivités locales bénéficieront désormais, en plus du produit des impositions locales correspondant aux activités de téléphonie mobile, du produit des taxes foncières et de la taxe professionnelle acquittées par l'opérateur.

Les pertes de recettes pour l'Etat et le FNPTP feront cependant l'objet d'une compensation par un prélèvement, pour chaque collectivité, sur le montant de la compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle et, si ce montant se révèle insuffisant, sur le produit des quatre taxes directes locales.

Quoique neutre sur le plan fiscal, cette mesure permet de rendre aux collectivités locales le contrôle de leurs ressources ; elle s'inscrit donc elle aussi incontestablement dans la voie ouverte de l'autonomie rénovée des collectivités locales.

L'accroissement du pouvoir fiscal des collectivités locales ne doit pas se faire au détriment des collectivités les plus défavorisées ; cet impératif de solidarité constitue un engagement très ferme du Gouvernement, qui envisage d'ailleurs de l'inscrire explicitement dans la Constitution.

Le projet de loi de finances pour 2003 traduit, très concrètement, cette préoccupation en prévoyant des abondements exceptionnels, d'un montant total de 137 millions d'euros, pour les communes les plus défavorisées.

Le rapporteur a déjà eu l'occasion de présenter ces abondements exceptionnels dans le développement consacré à l'évolution des concours de l'Etat aux collectivités locales ; il convient de souligner, à présent, que ces abondements, prévus à l'article 32 du projet de loi de finances pour 2003, permettent de maintenir à niveau les dotations de solidarité urbaine et de solidarité rurale, destinées aux communes particulièrement défavorisées. L'architecture actuelle de la dotation globale de fonctionnement implique, en effet, que la répartition des crédits destinés aux dotations de solidarité soit effectuée après répartition des crédits de la dotation forfaitaire et de la dotation d'intercommunalité. Le financement de l'intercommunalité pesant de plus en plus lourd au sein de l'enveloppe de la DGF, ces critères de répartition, hérités du précédent Gouvernement, ont joué au détriment des dotations de solidarité.

Ainsi, en l'absence d'abondements exceptionnels, les crédits destinés aux communes les plus défavorisées auraient connu une réduction de l'ordre de 20 %.

C'est cette même logique de solidarité qui a conduit le Gouvernement à reconduire, à l'article 31 du projet de loi de finances, l'abondement exceptionnel de 188 millions d'euros du FNPTP destiné à financer les baisses de DCTP subies par les communes et les groupements les plus défavorisés et c'est toujours dans cette même logique que la compensation de la suppression de la licence sur les débits de boisson viendra s'imputer sur le solde de la dotation d'aménagement pour abonder la DSU et la DSR.

S'il est tout à fait indispensable de maintenir l'effort de solidarité, il apparaît néanmoins souhaitable que les futures lois de décentralisation soient l'occasion d'une réflexion globale sur les critères retenus pour les communes éligibles aux dotations de solidarité ; la DSU, par exemple devrait intégrer un critère tenant compte de l'activité économique de la commune.

Enfin, la solidarité implique que l'Etat ait la capacité de se sortir du calcul des dotations et de l'architecture complexe des concours financiers aux collectivités locales, lorsqu'il s'agit de réagir promptement aux grandes catastrophes naturelles : dans cette optique, l'aide budgétaire aux communes forestières sinistrées par les tempêtes de décembre 1999 est poursuivie en 2003, à hauteur de 11 millions d'euros ; les communes touchées par les inondations en septembre dans le sud de la France feront également l'objet d'une attention particulière lors de la loi de finances rectificative de décembre.

Afin de ne pas faire peser excessivement la dotation destinée à financer l'intercommunalité sur les autres dotations incluses dans la DGF, l'article 30 du projet de loi de finances pour 2003 prévoit un assouplissement de ses critères ; la loi du 12 juillet 1999 tendant au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale a, en effet, introduit une grande rigidité dans la gestion de l'enveloppe de la dotation globale de fonctionnement, en édictant, pour certaines catégories de groupements de communes, des critères d'indexation minimale automatique de leurs dotations. Ce dispositif s'est fait au détriment des dotations de solidarité, dont la répartition n'est effectuée qu'après répartition des crédits de la dotation forfaitaire et de la dotation d'intercommunalité.

Afin de ne pas pénaliser trop fortement ces dotations destinées aux communes les plus défavorisées, le Gouvernement a donc décidé de modifier les critères d'indexation de la dotation d'intercommunalité, en ne retenant que le seuil minimal du montant atteint l'année précédente. Le Comité des Finances locales disposera cependant de toute liberté pour fixer un taux d'évolution supérieur à ce seuil.

Pour limitée qu'elle soit, cette réforme traduit bien la volonté du Gouvernement de réfléchir à une nouvelle architecture des concours de l'Etat, et notamment de la dotation globale de fonctionnement. La refonte du dispositif des aides de l'Etat aux collectivités locales devra toutefois attendre le préalable indispensable de la révision constitutionnelle.

Le projet de loi constitutionnelle sur l'organisation décentralisée de la République a été déposée le 16 octobre au Sénat ; l'Assemblée nationale devrait l'examiner courant novembre.

Les principes qui ont inspiré sa rédaction ont été maintes fois développés par le Premier ministre : les collectivités locales ont un rôle essentiel à jouer dans la modernisation du pays, car elles seules sont à même de rénover le débat politique en rapprochant le citoyen des instances de décision. C'est dans cette optique que l'article 1er de la Constitution devrait consacrer le caractère décentralisé de l'organisation administrative française.

Afin d'encourager les initiatives locales, le principe de subsidiarité trouvera une reconnaissance constitutionnelle ; il implique que les collectivités territoriales ont vocation à exercer l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en _uvre à l'échelle de leur ressort ; ce principe se trouvera renforcé par l'inscription du droit à l'expérimentation ; c'est en effet notamment par l'expérimentation que sera déterminé le bon échelon de compétences. La coordination de l'action des collectivités locales sera assurée par l'introduction de la notion de « chef de file », désignant la collectivité qui aura la charge de définir les modalités de l'action menée conjointement.

Les moyens d'expression démocratique seront développés à l'échelon local : il s'agit, en effet, d'un corollaire indispensable de l'accroissement des compétences au niveau décentralisé. Les modalités de consultation des électeurs d'une partie de territoire seront ainsi reconnues et organisées par la Constitution, de même que le droit de pétition, permettant d'obtenir l'inscription à l'ordre du jour des assemblées délibérantes de toute question relevant de leur compétence.

Afin de donner aux collectivités locales les moyens d'exercer leurs compétences, la Constitution reconnaîtra explicitement leur pouvoir réglementaire ; surtout, elle affirmera le principe de garantie des ressources et de leur libre disposition. Les collectivités locales se verront ainsi reconnaître de par la Constitution la faculté de recevoir le produit d'impositions et d'en fixer elles-mêmes, dans les limites définies par le législateur, aussi bien le taux que l'assiette. Tout transfert de compétences de l'Etat aux collectivités territoriales devra faire l'objet de l'attribution de ressources d'un montant nécessaire à l'exercice de ces compétences. L'autonomie financière des collectivités sera en outre reconnue par le principe selon lequel l'addition des recettes fiscales, des autres ressources propres et des dotations émanant d'autres collectivités doit représenter une part déterminante de l'ensemble des ressources. Enfin, corollaire indispensable de l'autonomie, la correction des inégalités territoriales devient également un objectif à valeur constitutionnelle.

C'est véritablement un nouveau pacte qui est proposé entre l'Etat et les collectivités locales ; devant une décentralisation à bout de souffle, le Président de la République a choisi de réviser la loi fondamentale plutôt que de procéder à un nouveau rapiéçage. Une loi organique, ainsi que plusieurs lois organisant les transferts de compétences, devraient suivre dans les deux premiers trimestres de l'année 2003.

Le prochain projet de loi de finances, pour 2004, sera la première traduction concrète de cette nouvelle étape.

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Le 16 octobre 2002, la Commission a procédé à l'audition de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, sur les crédits de son ministère pour 2003.

Après avoir excusé M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales, dont la présence est requise au Sénat pour la présentation du projet de loi constitutionnelle relatif à la décentralisation, M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, s'est déclaré heureux de présenter à la commission des Lois de l'Assemblée nationale le premier budget de son ministère pour cette nouvelle législature. Soulignant que la présentation du budget était toujours un moment important pour la démocratie, il a observé qu'il s'agissait également d'un rendez-vous que des membres de la représentation nationale lui avaient fixé l'été dernier, lors du vote de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI), des parlementaires de l'opposition ayant reproché au Gouvernement de légiférer à crédit. Rappelant que cette loi prévoyait une enveloppe financière de 5,6 milliards d'euros sur cinq ans pour la police et la gendarmerie nationales, ainsi que la création de 13 500 emplois entre 2003 et 2007, le ministre s'est réjoui que le projet de budget pour 2003 en soit la résultante directe.

M. Nicolas Sarkozy a indiqué que les crédits de son ministère atteindraient 19,54 milliards d'euros en 2003, soit une hausse de 10,9 % par rapport à 2002, cette progression globale incluant le transfert sur le budget de l'intérieur de la compensation versée aux régions au titre de la gestion des services ferroviaires de compétence régionale. Il a fait remarquer que ce transfert de 1,55 milliard d'euros vers la dotation générale de décentralisation (DGD) allait dans le sens de la globalisation des transferts et donc de l'autonomie financière des collectivités. Il a précisé par ailleurs que, hors transferts, le budget du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales atteignait 17,99 milliards d'euros, soit une augmentation de 2,1 % - qui inclut toutefois l'économie mécanique de 183 millions d'euros liée à l'absence d'élections nationales en 2003 - et, hors collectivités locales, 9,817 milliards d'euros, soit une progression de 3 % par rapport à 2002. Il a ajouté que, si l'on excluait le financement des élections, le budget atteignait 9,726 milliards d'euros et progressait d'exactement 5 %, soit une dépense de 162 € par Français.

Le ministre a ensuite présenté le budget de la police nationale, dont il a rappelé qu'il comptait pour 56 % de ce total, soit 5,449 milliards d'euros pour 2003, en hausse de 5,8 % par rapport à 2002. Il a ajouté que, sur les 6 500 emplois que la LOPSI prévoyait de créer en cinq ans dans la police, 1 900 - près du tiers - le seraient dès 2003, soit 1 000 emplois administratifs, scientifiques et techniques et 900 policiers « actifs », terminologie dont il a d'ailleurs estimé la pertinence discutable et l'abandon souhaitable.

Expliquant, à cet égard, qu'il avait voulu donner une priorité particulière à la création d'emplois administratifs, parce qu'elle constitue le moyen le plus rapide d'augmenter les effectifs sur le terrain - dans la mesure où il faut au moins un an pour former un policier après son recrutement alors que les personnels administratifs sont déjà formés -, il a précisé que le retour des policiers sur la voie publique avait déjà commencé. Il a déclaré avoir obtenu du ministre des finances l'autorisation de lancer une partie des recrutements prévus par le budget avant le vote de la loi de finances, afin de permettre à 500 agents administratifs et à 500 gardiens de la paix supplémentaires de prendre leur poste ou d'intégrer leur école de formation dès 2002. Il a ajouté que les concours de recrutement des 900 autres agents seraient organisés avant la fin de l'année, justifiant cette décision par la nécessité de relier l'annonce d'un renforcement des effectifs à sa mise en _uvre effective, condition nécessaire à la crédibilité de la parole politique à l'égard des citoyens.

Expliquant, par ailleurs, avoir découvert avec surprise, en prenant ses fonctions, que plus de 1 000 emplois administratifs pourtant ouverts au budget restaient vacants, au mépris des dispositions votées par le Parlement, le ministre a indiqué qu'avait été organisé, au mois d'août, un concours exceptionnel pour combler l'intégralité de ces vacances et conclu que ce serait donc, au total, plus de 2 000 agents administratifs supplémentaires - deux fois plus que le nombre des postes ouverts au budget - qui seraient recrutés d'ici au printemps prochain.

Le ministre de l'intérieur a indiqué que ces recrutements s'accompagneraient d'un effort indemnitaire considérable, d'un montant de 110 millions d'euros au total. Il a précisé, à cet égard, que l'augmentation de deux points de l'indemnité de sujétions spéciales de police (ISSP) était confirmée, conformément aux engagements pris par le Gouvernement précédent, qui n'avait toutefois pas financé cette promesse.

Abordant ensuite le problème, qu'il a jugé considérable, de la mise en _uvre de la réduction du temps de travail dans la police nationale, M. Nicolas Sarkozy a indiqué qu'il avait obtenu une enveloppe de 46,8 millions d'euros pour financer le rachat de 5 jours supplémentaires en moyenne par agent, au taux de 85 euros déjà en vigueur pour les gendarmes. Il a expliqué que, en l'absence de cette procédure de « rachat », ce sont au total 4 000 équivalents temps plein qui auraient été perdus, en totale contradiction avec les engagements du Gouvernement.

Il a ensuite fait valoir que, pour améliorer l'efficacité des services de police, il était également indispensable de renforcer leurs capacités judiciaires, ce qui se traduisait dans le budget par l'extension de la qualification d'officier de police judiciaire à 2 000 gradés et gardiens supplémentaires et par une revalorisation de l'indemnité liée à cette qualification de près de 50 %, soit un montant total de 600 euros par an.

Il a, enfin, précisé que les 14 000 personnels administratifs, qui fournissent à la police nationale un appoint indispensable, allaient bénéficier également d'une revalorisation indemnitaire sans précédent, une enveloppe de 7,5 millions d'euros étant prévue pour rétablir enfin l'égalité de traitement entre ces agents et ceux du cadre national des préfectures.

S'agissant de la mise en _uvre du programme d'équipement et de modernisation de la police nationale, pour lequel la LOPSI prévoit une enveloppe totale de 1,18 milliard d'euros en cinq ans, le ministre a indiqué que 180 millions d'euros en crédits de paiement seraient ouverts dès 2003, crédits qui permettraient de renforcer la protection individuelle et collective des policiers (gilets pare-balles, flash-balls, protection des vitrages des véhicules). A cet égard, le ministre a précisé qu'il avait décidé d'étendre aux gendarmes l'usage des flash-balls.

Il a, en outre, fait valoir que ces crédits permettraient, notamment, d'améliorer l'état du parc des véhicules et ajouté que le secteur privé se verrait confier, de manière plus systématique, les travaux d'entretien et de réparation, tandis que le rythme de leur renouvellement serait accéléré. Il a estimé, en effet, qu'il ne revenait pas aux préfectures de réparer les voitures, citant l'exemple de l'Essonne où 80 des 250 véhicules de la police nationale sont actuellement immobilisés.

S'agissant enfin des crédits destinés à l'immobilier, le ministre a annoncé qu'ils seraient doublés aussi bien en autorisations de programme qu'en crédits de paiement

Rappelant que, même si les crédits de la gendarmerie nationale restaient inscrits sur le budget de la défense, il avait néanmoins la responsabilité de leur mise en _uvre, M. Nicolas Sarkozy a indiqué que le budget 2003 de la gendarmerie était également en augmentation de 8,4 % par rapport à 2002, à 4,256 milliards d'euros. Il a expliqué que cette très forte augmentation était d'abord due au rétablissement de la sincérité budgétaire, la totalité des crédits destinés au paiement des loyers de la gendarmerie ayant été inscrite au budget, ce qui n'était pas le cas depuis plusieurs années. Le ministre a estimé honteux qu'en 2002, par exemple, ce type de dépenses n'ait été « budgété » que jusqu'au mois d'août, à la suite de ce qui relevait sans doute d'un oubli du précédent Gouvernement.

Le ministre a ajouté, par ailleurs, que l'application de la LOPSI dans la gendarmerie se traduisait par la création de 1 200 emplois nouveaux, dont 1 140 sous-officiers et 60 officiers, tandis que, sur le plan indemnitaire, elle bénéficierait, comme la police, de l'augmentation de deux points de l'indemnité de sujétions spéciales et de l'augmentation à 600 euros de l'indemnité d'officier de police judiciaire.

Au titre du programme d'équipement et de modernisation de la gendarmerie nationale, il a précisé qu'un effort important serait engagé, notamment pour le parc de véhicules - achat de 350 véhicules de maintien de l'ordre et 3 400 véhicules légers -, dont le ministre a dénoncé la vétusté.

Il a indiqué qu'au total la gendarmerie recevrait 304 millions d'euros en 2003 sur l'enveloppe de 2,85 milliards d'euros prévue par la LOPSI et que, ainsi, tous services confondus, 40 % de l'enveloppe budgétaire prévue sur cinq ans seraient mobilisés dès la première année.

Le ministre de l'intérieur a ensuite souligné l'importance du budget consacré à la sécurité civile qui, même si elle n'est pas concernée par la LOPSI, joue un rôle fondamental pour la sécurité des Français, comme les inondations du mois dernier dans le Sud de la France l'ont encore montré. A cet égard, le ministre a fait valoir que, sans les hélicoptères de secours, les inondations des 8 et 9 septembre derniers n'auraient pas seulement entraîné les 25 victimes qui sont à déplorer aujourd'hui, mais auraient fait plus de 800 morts, cette estimation reposant sur la seule base des personnes hélitreuillées in extremis alors qu'elles étaient en situation de risque mortel.

Il a indiqué que, en augmentation de 29,7 %, les crédits de la sécurité civile dans le budget 2003 atteignaient 323 millions d'euros, croissance qui devrait notamment permettre de financer 40 emplois supplémentaires, soit 18 créations nettes - 11 pilotes et 7 mécaniciens - pour le groupement des moyens aériens et 22 transformations d'emplois de personnels de la police nationale, destinées à la création de 11 postes de pilotes et de 11 postes de mécaniciens supplémentaires. Il a ajouté que, dans le même temps, le plan de modernisation de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris serait poursuivi, 3 millions d'euros étant prévus au budget 2003 pour la création de 125 emplois et l'acquisition de nouveaux équipements, qui permettraient de remplacer du matériel hors d'âge et de satisfaire les nouveaux besoins opérationnels. Il a précisé que cette augmentation recouvrait également le financement de mesures indemnitaires spécifiques.

S'agissant du budget d'équipement de la sécurité civile, le ministre a indiqué que le budget 2003 prévoyait une importante remise à niveau, les crédits afférents augmentant de 50 % en autorisations de programme et permettant, notamment, l'acquisition des nouveaux hélicoptères EC 145 et de divers matériels complémentaires, dont un PC de crise. M. Nicolas Sarkozy a expliqué que l'usage de ces hélicoptères serait dévolu aussi bien à la police qu'à la gendarmerie et précisé, s'agissant de Paris et de sa région, qu'un hélicoptère spécifique et son commando seraient affectés à la lutte contre les vols à main armée. Il a fait valoir que ce dispositif, loin d'être la simple copie de systèmes fonctionnant, par exemple, aux Etats-Unis, répondait non seulement à une logique opérationnelle, mais redonnerait en outre confiance aux forces de l'ordre, en leur permettant de lutter à armes égales contre le grand banditisme.

M. Nicolas Sarkozy a souligné ensuite que la principale innovation du budget 2003 pour la sécurité civile était la création d'un nouveau fonds d'aide à l'investissement des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), qui serait doté de 45 millions d'euros en 2003. Il a expliqué que ce fonds prendrait la succession de la majoration exceptionnelle de la dotation globale d'équipement (DGE) en faveur des SDIS, qui avait été créée pour trois ans en 2000 afin de consommer des crédits dormants de la DGE, tout en précisant que le fonds d'aide à l'investissement aurait un fonctionnement très différent. A cet égard, le ministre a fait valoir, tout d'abord, qu'il s'agissait d'un dispositif permanent et non temporaire, ensuite, que les crédits ne seraient plus répartis uniformément entre toutes les dépenses, mais prendraient la forme de subventions ciblées sur les projets les plus importants. Il a ainsi exprimé le souhait que, dès 2003, le fonds puisse être mis à contribution pour aider les SDIS qui souhaitent basculer leur réseau de transmissions sur la technologie ACROPOL. A ce propos, le ministre a affiché son ambition de voir les trois forces de sécurité utiliser le même réseau de télécommunications pour qu'il soit mis fin par là même à la situation peu rationnelle qui prévaut actuellement.

Abordant la question des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales, le ministre a indiqué que 9 724 millions d'euros seraient consacrés aux dotations aux collectivités locales, soit près de la moitié des crédits de son ministère. Rappelant que ces crédits ne représentaient en fait qu'une faible part des concours de l'Etat à ces collectivités - certaines dotations, dont en particulier la dotation globale de fonctionnement (DGF) étant des prélèvements sur les recettes de l'Etat qui n'apparaissent pas directement dans les documents budgétaires -, il a précisé que le total des concours de l'Etat aux collectivités locales atteindrait en 2003, 58,18 milliards d'euros, soit une progression de 3,3 % par rapport à 2002.

Il a ensuite souligné que la réforme constitutionnelle, qui introduira une nouvelle vague de décentralisation, conduirait à aménager les relations financières entre l'Etat et les collectivités, indiquant que si les collectivités exerçaient à titre expérimental des compétences de l'Etat elles se verraient attribuer les ressources correspondantes, évoquant l'éventualité du transfert d'impôts, comme par exemple la taxe intérieure sur les produits pétroliers. Il a fait observer, toutefois, que pour pouvoir préparer cette réforme dans la sérénité, il était essentiel de partir d'une base stabilisée et a indiqué qu'il avait, en conséquence, obtenu le maintien pour 2003 des dispositifs prévus en 2002. Il a précisé, à ce propos, que l'enveloppe du contrat de croissance et de solidarité, en hausse de 1,9 % par rapport à 2002, serait indexée selon les mêmes règles qu'en 2002, chacune des dotations de l'enveloppe évoluant également selon ses propres critères, identiques à ceux de 2002. Il a noté que, compte tenu de ce mode d'indexation, la dotation globale de fonctionnement (DGF) augmentera de 2,3 % pour atteindre 18,81 milliards d'euros, hors abondements exceptionnels en 2003. Il a souligné, en outre, que la baisse de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP), qui joue le rôle de variable d'ajustement dans l'enveloppe normée, serait limitée à 3 % alors qu'elle atteignait 7,5 % en 2002.

Le ministre a ensuite souligné que le projet de loi de finances pour 2003 poursuivait deux grandes orientations : améliorer l'autonomie fiscale des collectivités locales et préserver l'aide de l'État aux collectivités les plus défavorisées. S'agissant de la première orientation, il a précisé qu'il était prévu de restituer aux collectivités locales, à compter du 1er janvier 2003, la taxe professionnelle et la taxe sur le foncier bâti de France-Télécom, ce qui répondait à une revendication très ancienne des élus locaux.

Rappelant que, jusqu'à présent, les collectivités ne pouvaient ni augmenter le taux de la taxe professionnelle plus rapidement que celui de la taxe d'habitation ou de la moyenne de la taxe d'habitation et des taxes foncières, ni baisser le taux de la taxe professionnelle moins rapidement que celui des autres impôts directs, le ministre a, par ailleurs, annoncé que le projet de loi de finances assouplirait cette règle en permettant une différence de 50 % entre l'évolution de la taxe professionnelle et celle des trois autres taxes.

Pour préserver l'aide de l'Etat aux collectivités locales défavorisées, il a indiqué que deux mesures importantes étaient prévues par le projet de loi de finances. Il a ainsi expliqué que les ressources du fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP), qui étaient abondées jusqu'ici par une partie du produit de la taxe professionnelle de France-Télécom, seraient maintenues grâce à une dotation de remplacement de l'Etat d'un montant de 271 millions d'euros en 2003. Il a ajouté, par ailleurs, que les dotations de péréquation intégrées à la DGF - la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR) - bénéficieraient de trois abondements exceptionnels d'un montant total de 160 millions d'euros et progresseraient, en conséquence, de 2 %, tandis que les autres dotations de solidarité seraient maintenues au même niveau qu'en 2002. Enfin, il a annoncé que l'aide budgétaire aux communes forestières sinistrées par les tempêtes de décembre 1999 serait maintenue en 2003 avec un montant de 11 millions d'euros tandis que les inondations récentes du Sud de la France donneraient lieu à des ouvertures de crédits dans la prochaine loi de finances rectificative.

Après avoir souligné que les crédits de l'administration générale, d'un montant de 2 922 millions d'euros diminueraient de 3,5 % en raison de la baisse des crédits destinés aux élections, le ministre a précisé qu'ils seraient consacrés à 80 % aux retraites des agents du ministère, les autres mesures portant sur le renforcement de l'encadrement de l'administration centrale, une utilisation plus systématique des emplois vacants et une accélération de l'effort mené pour résorber les emplois précaires. Puis, il a indiqué que le budget de l'administration territoriale atteindrait 1,12 milliard d'euros en 2003, soit une augmentation de 2 %. Il s'est félicité du mouvement de globalisation des crédits de fonctionnement et de rémunération des préfectures en soulignant que onze préfectures supplémentaires, dont la première située outre-mer, à la Martinique, allaient tenter l'expérience de sorte qu'au total, en 2003, près du tiers des préfectures aurait une gestion des crédits globalisée. Précisant, à ce propos, que la globalisation se ferait en 2003 aux mêmes conditions financières que lors des trois dernières années, il a souhaité qu'une nouvelle étape soit franchie en 2004 en envisageant la globalisation de tout ou partie des crédits d'équipement, la généralisation à la France entière de la gestion globalisée, ou même des premières mesures de globalisation interministérielle des crédits.

Soulignant que les crédits de fonctionnement des préfectures augmenteraient pour la première fois depuis plusieurs années, avec une mesure nouvelle de 2,15 millions d'euros, il a indiqué que les effectifs des préfectures resteraient stables en 2003, tandis que les mesures catégorielles représenteraient 10,2 millions d'euros au total, cette enveloppe permettant de rapprocher fortement les rémunérations des agents des préfectures de la moyenne interministérielle, ramenant par exemple à moins de 5 % l'écart à cette moyenne pour les agents de catégorie C. Le ministre a insisté, par ailleurs, sur le fait qu'une ligne budgétaire de 2,65 millions d'euros de vacations serait ouverte dans le budget des préfectures pour accélérer le traitement des demandes d'asile territorial, dont le nombre croît de façon exponentielle, rendant la situation de nombreuses préfectures absolument intenable. Rappelant que le délai moyen du traitement de ces demandes était de six mois, alors que la durée de la rétention administrative ne pouvait pas excéder douze jours, il a annoncé que, pour concrétiser un engagement du Président de la République, son ministère souhaitait déposer un projet de loi sur l'immigration au début de l'année prochaine, qui mettrait en _uvre un nouveau régime juridique du droit d'asile. Il a indiqué, à ce propos, qu'il était prêt à débattre de cette question avant le dépôt du texte avec les membres de la commission des Lois, ajoutant qu'il était également disposé à rendre compte de son activité internationale dans ce domaine.

Après avoir souligné l'importance qu'il attachait au respect des promesses faites aux Français en matière d'insécurité et rappelé que le budget qu'il présentait était la traduction du deuxième volet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, qui porte sur les moyens, le ministre a conclu son propos en annonçant que, dès la semaine prochaine, le premier volet de cette loi d'orientation, portant sur la politique de sécurité, trouverait sa traduction concrète dans un nouveau projet de loi sur la sécurité intérieure, qui permettra de mieux utiliser les moyens de la gendarmerie nationale et de la police nationale, en créant de nouvelles infractions et en supprimant certains des obstacles inutiles qui gênent aujourd'hui l'action de ses services.

M. Gérard Léonard, rapporteur pour avis des crédits de la sécurité intérieure, s'est réjoui que le ministre de l'intérieur soit en mesure d'honorer les engagements pris dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation adoptée durant l'été, observant que cette exécution budgétaire était sans précédent. Il a souhaité savoir dans quelle mesure les créations d'emplois proposées pour 2003 pourraient être confortées par une meilleure utilisation des effectifs existants, faisant référence à la compensation de l'impact de la réduction du temps de travail, à l'affectation des forces mobiles à des missions de sécurisation et aux redéploiements. Après avoir indiqué qu'il avait constaté, sur le terrain, la capacité des services d'investigation à faire preuve d'imagination face à la baisse de leurs moyens et de leurs effectifs, il s'est demandé s'il ne serait pas aujourd'hui opportun d'étendre les sûretés départementales, créées en 1996 mais insuffisamment développées. Il a également souhaité obtenir des précisions sur le développement d'ACROPOL, afin de dissiper l'impression de « fuite en avant » qui se dégage parfois de ce dossier.

Après avoir constaté la forte augmentation des crédits affectés à la sécurité civile, notamment imputable à des mesures de mise à niveau des moyens de secours nationaux, et rendu hommage au courage et au dévouement des sapeurs-pompiers particulièrement sollicités lors des catastrophes récentes, M. Thierry Mariani, rapporteur pour avis des crédits de la sécurité civile, a souhaité connaître l'appréciation du ministre de l'intérieur sur l'organisation du dispositif de prévention ainsi que ses projets en matière d'amélioration des moyens d'alerte, de transmission et de communication entre les intervenants lors des crises. Revenant sur les conséquences des attentats terroristes du 11 septembre 2001, il a également interrogé le ministre sur la mise en _uvre du projet de pôle de défense civile dont ce dernier a annoncé la création prochaine à Cambrai. Rappelant le contexte difficile dans lequel s'effectuent les missions des sapeurs-pompiers et regrettant qu'une vingtaine d'entre eux soient décédés cette année, il a également souhaité connaître les mesures envisagées afin d'améliorer leur sécurité, notamment les dispositions particulières susceptibles de figurer dans le prochain texte sur la sécurité en ce qui concerne les agressions dont certains sont victimes. Le rapporteur pour avis a enfin évoqué la crise du volontariat pour interroger le ministre sur les travaux de la commission installée le 25 juillet dernier ainsi que sur les moyens envisagés pour y remédier.

Sur les questions de sécurité civile, le président Pascal Clément a estimé que les exigences de formation issues de la réforme des services d'incendie et de secours avaient sonné le glas du volontariat. Il a, par ailleurs, observé que la future réforme constitutionnelle devrait offrir l'occasion d'évoquer le problème de la prise en charge de cette mission, regrettant qu'actuellement les conseils généraux soient tenus de financer un service dont le commandement relève très largement du préfet. Evoquant également les transferts de compétence envisagés, il a souhaité que les départements soient en première ligne pour ce qui concerne la compétence de voirie. Il s'est enfin interrogé sur le concept d'autonomie locale, observant que, jusqu'à présent, la dotation globale de fonctionnement avait servi de variable d'ajustement pour l'Etat dans les contextes budgétaires difficiles.

M. Manuel Aeschlimann, rapporteur pour avis des crédits de l'administration générale et des collectivités locales, a interrogé le ministre sur la future réforme des finances locales, en souhaitant savoir notamment quelles seraient les suites données à la note d'orientation présentée au Comité des finances locales en 2001. Prolongeant cette réflexion, il a émis le souhait que soient précisées les grandes lignes du projet de révision constitutionnelle et, notamment, les termes utilisés de « ressources déterminantes » pour définir le concept d'autonomie locale. Il a également souhaité obtenir des précisions sur le financement futur de l'intercommunalité, qui pèse de façon toujours croissante sur les dotations de solidarité. Enfin, il a interrogé le ministre sur les grandes lignes du projet de loi réformant la loi du 12 juillet 1999 tendant au renforcement et à la simplification de l'intercommunalité.

M. Jacques Brunhes a demandé au ministre s'il envisageait de mettre en _uvre les préconisations de la mission conduite, à la demande du précédent Gouvernement, par MM. Robert Pandraud et Christophe Caresche, tendant à la création d'un observatoire de la délinquance et à une refonte du mode de comptabilisation des crimes et délits. Après avoir souligné que nombre de contrats des 14 500 adjoints de sécurité arrivaient à échéance, il s'est interrogé sur l'avenir de ces emplois. Il s'est inquiété de la contradiction qui existe entre la baisse des crédits de fonctionnement des écoles de formation des gardiens de la paix et l'augmentation prévisible des recrutements. Puis, il a fait observer qu'il conviendrait de trouver une solution au problème des vacances d'emplois résultant du décalage entre les départs en retraite des fonctionnaires, qui interviennent traditionnellement au printemps, et les sorties des promotions des nouveaux policiers, qui se déroulent généralement en septembre ou octobre. Par ailleurs, soulignant que le taux d'encadrement dans la couronne parisienne était inférieur à la moyenne nationale, il a souhaité qu'une solution soit trouvée en la matière. Il a regretté que la suppression de certaines brigades de gendarmerie, à l'exemple de ce qui s'est passé dans la circonscription de Gennevilliers, ne soit pas compensée par une augmentation des effectifs dans les commissariats _uvrant dans la même zone. Enfin, il a demandé au ministre si la dotation de solidarité urbaine continuerait d'être calculée sur le fondement d'indices synthétiques.

Après s'être rallié à l'appréciation très positive portée par M. Gérard Léonard sur la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, M. Christian Estrosi a souligné qu'il était parfois difficile de combler des vacances de poste dans la police nationale, notamment dans certaines zones géographiques, faute d'incitation financière suffisante ou de conditions de logement décentes. Il a demandé au ministre s'il était possible de réviser le classement des zones dans lesquelles les agents bénéficient d'un régime indemnitaire plus favorable. Il l'a également interrogé sur la possibilité de faire bénéficier d'augmentations d'effectifs les collectivités locales qui construiraient des logements destinés à accueillir des policiers. Enfin, il s'est inquiété du problème de transition susceptible d'apparaître dès lors que les communes, à terme, ne financeront plus les services départementaux d'incendie et de secours, tandis que les départements ne sont pas encore prêts à prendre le relais.

Après avoir rappelé que de très nombreuses communes avaient édifié des bâtiments en vue d'accueillir les agents de la police de proximité, M. Francis Delattre a regretté que ces locaux soient fréquemment inemployés en raison de l'insuffisance des effectifs. Poursuivant son propos sur les questions relatives à la gestion des personnels, il a considéré que leur affectation devrait être décidée au plus proche du terrain, là où les responsables sont à même d'évaluer les besoins réels, et non relever, comme c'est le cas actuellement, des secrétariats généraux de l'administration de la police. Puis, réagissant aux propos du ministre selon lesquels la police n'avait pas pour mission d'entretenir son parc automobile, il a relevé que, s'agissant des véhicules dotés d'un équipement technique spécifique au maintien de l'ordre, il ne lui paraissait pas opportun d'en confier la maintenance à des sociétés privées extérieures. Évoquant ensuite les difficultés pratiques auxquelles se heurtent les personnels de la police pour accéder à un logement, notamment en Ile-de-France, il a suggéré la mise en place à leur profit d'un fonds de garantie des loyers. S'agissant de la volonté affichée par le ministre de réaffecter sur la voie publique les policiers actuellement employés à des tâches administratives, il a fait part de son scepticisme en la matière, en se fondant sur les travaux menée sous la précédente législature par la mission d'évaluation et de contrôle (MEC) qui avaient révélé qu'une part substantielle de ces agents souffraient de problèmes de santé incompatibles avec l'exercice de missions de sécurisation. Enfin, après avoir observé que la liberté de fixer l'impôt ne devait pas être considérée comme le seul critère d'évaluation de l'autonomie financière des collectivités locales, notamment parce que, pour les plus pauvres d'entres elles, la réalité de cette prérogative est particulièrement limitée, il a insisté sur l'importance des mécanismes de péréquation des ressources entre les collectivités locales.

M. Christophe Caresche a tout d'abord remarqué que l'accroissement significatif des crédits du ministère de l'intérieur pour 2003 s'inscrivait dans la continuité des efforts entrepris en ce domaine par le précédent Gouvernement. Il s'est ensuite inquiété des conséquences de la décision du nouveau Gouvernement de supprimer les emplois d'adjoints de sécurité et s'est interrogé, par ailleurs, sur les raisons qui conduisaient à diminuer les crédits consacrés à la formation des policiers, alors même que leurs missions deviennent de plus en plus complexes. Approuvant la volonté du ministre de fidéliser les personnels des compagnies républicaines de sécurité ainsi que les gendarmes mobiles, il a néanmoins observé qu'aucune enveloppe budgétaire ne semblait prévue à cet effet. Puis, après avoir évoqué les investigations qu'il avait menées conjointement avec son collègue M. Robert Pandraud dans le cadre de la mission que leur avait confiée le précédent premier ministre, il a souligné la grande imprécision des statistiques actuelles en matière de mesure de la délinquance. Il a donc jugé hasardeux de faire de ces statistiques un élément d'évaluation de l'activité de la police qui pourrait être tentée, en conséquence, de réduire artificiellement le nombre de dépôts de plaintes, seule donnée statistiquement prise en compte, au profit des simples « mains courantes ».

M. Jean-Pierre Soisson s'est félicité, à titre liminaire, du budget présenté, soulignant que celui-ci devrait être à même de répondre à l'inquiétude exprimée récemment par les gendarmes. Après avoir indiqué qu'il n'envisageait pas l'institutionnalisation du concept de pays, il a souhaité savoir si le Gouvernement entendait cependant pérenniser les instructions adressées aux préfets afin de privilégier le financement des communautés de communes regroupées en pays. Il a enfin demandé au ministre de lui confirmer qu'une étude était effectivement en cours pour examiner l'éventualité d'une attribution d'une partie de la taxe intérieure sur les produits pétroliers aux collectivités locales.

Après avoir confirmé l'utilisation croissante par les forces de l'ordre de la « main courante », M. Jérôme Lambert s'est inquiété des modalités de redéploiement des effectifs dans les zones de gendarmerie, se demandant si les logements existants pourraient être maintenus malgré la fermeture des lieux d'accueil du public. Il a souligné la contradiction entre la volonté du Gouvernement de fidéliser les compagnies républicaines de sécurité et l'augmentation de leurs crédits de déplacement. De même, il s'est étonné de la diminution de la dotation destinée à financer les enquêtes de police judiciaire, alors même que le ministre a annoncé une augmentation du nombre d'agents bénéficiant de la qualité d'OPJ.

Après avoir souligné qu'il s'agissait d'un budget courageux et de bon sens, M. Jacques-Alain Bénisti a estimé que le rééquilibrage était préférable au redéploiement, citant le cas de Paris qui dispose d'un policier pour 200 habitants, alors que la banlieue n'en compte qu'un pour 2 000. Il a proposé que ce ratio soit ramené à un policier pour 400 habitants dans la capitale et qu'il soit porté à un pour 800 habitants dans les départements de la petite couronne. A cet égard, il a regretté que les dix gendarmes dont les postes ont été supprimés dans sa circonscription n'aient pas été remplacés par des policiers. Evoquant la question de l'immigration, il a indiqué que le Val-de-Marne accueillait de plus en plus de familles d'immigrés envoyées par la ville de Paris, sans que des financements accompagnent ce transfert de charges, et a déploré, de manière plus générale, que la promesse d'augmentation de la dotation de solidarité urbaine pour les villes les plus pauvres n'ait pas été tenue. Prenant l'exemple de Rungis et de Villiers-sur-Marne, il a jugé nécessaire de réduire les inégalités en matière de taxe professionnelle, que ce soit par le recours aux communautés d'agglomération ou par des dotations publiques. Soulignant enfin la vétusté des bateaux de la police des mers, il a proposé que ceux-ci soient remplacés par des scooters des mers, seuls à même de poursuivre efficacement les vedettes des trafiquants.

En réponse aux différents intervenants, le ministre a apporté les précisions suivantes :

-  Les redécoupages entre les zones de police et de gendarmerie et les redéploiements d'effectifs sont nécessaires. Face à des délinquants qui ignorent ou utilisent les frontières entre les zones urbaines et rurales ainsi que les barrières administratives, l'organisation des services de l'Etat et l'affectation des forces doivent s'adapter. L'intérêt général doit l'emporter sur les réflexes corporatistes.

-  La répartition des compétences entre la police et la gendarmerie fait actuellement l'objet d'une concertation dans chaque département : les solutions seront définies localement, au plus près du terrain, et feront l'objet prochainement de propositions précises. Les créations d'emplois inscrites dans le projet de budget pour 2003 permettront aussi de mener à bien cette réforme de façon souple et dynamique.

-  L'affectation des effectifs sur le terrain n'est pas toujours rationnelle, bien que les comparaisons soient parfois difficiles à établir. Ainsi, le nombre élevé de policiers à Paris par rapport aux départements de la « petite couronne » et, plus encore, de la « grande couronne », s'explique en partie par les enjeux que recouvre la capitale en matière d'ordre public, ainsi que par l'ampleur des déplacements de population et des flux touristiques qui la traversent chaque jour. En revanche, dans certaines villes ou départements, le niveau des effectifs n'est pas pertinent. De plus, la délinquance augmente très fortement dans les zones rurales. Ces phénomènes doivent être pris en compte.

-  Il existe, incontestablement, un déficit d'encadrement et une rotation excessive des personnels en Ile-de-France. Cette situation s'explique par le lien que le statut général de la Fonction publique établit entre l'ancienneté des fonctionnaires et les possibilités de mutation. Il conviendrait d'offrir des rémunérations plus attractives aux agents qui supportent des sujétions particulières et de renforcer les aides au logement lorsque le coût des loyers est important. A cet égard, un plus grand partenariat avec les collectivités locales qui acceptent de mettre des logements à disposition des policiers doit être recherché. Les formules de réservation, de garantie des loyers, voire d'aide à l'accès à la propriété, seront développées.

-  L'affectation d'une partie importante des forces mobiles à des missions de sécurité publique, dans leur région d'implantation, doit permettre de renforcer les effectifs sur le terrain, indépendamment des créations d'emplois prévues pour 2003. Dès le 1er novembre prochain, 4 000 gendarmes mobiles et CRS seront mis à disposition des directions départementales. Les crédits consacrés à l'indemnisation de leurs déplacements sont en hausse dans le projet de loi de finances pour 2003 ; toutefois, cette évolution résulte d'une augmentation du taux desdites indemnités et non pas du volume d'heures prises en compte.

-  L'absence de simultanéité entre les départs à la retraite et l'affectation opérationnelle des nouveaux policiers s'explique souvent par l'importance des congés et des récupérations accumulés par certains fonctionnaires durant leur carrière. Ce problème ne peut être résolu qu'en permettant à des agents de rester en activité au-delà de l'âge normal de leur départ à la retraite, ce qui est désormais possible, tant dans la police que dans la gendarmerie.

-  Le devenir des adjoints de sécurité (ADS) est un enjeu réel pour la police nationale. Dans l'immédiat, les emplois existants ont été consolidés dans le projet de loi de finances pour 2003. Un nouveau statut juridique devant être élaboré, des propositions seront formulées prochainement : elles pourraient conduire à mettre en place de nouveaux contrats de droit public, d'une durée de trois ans, renouvelables. Le cas échéant, des solutions seront apportées dans le cadre de la loi relative à la sécurité intérieure.

-  S'agissant des moyens de fonctionnement et d'équipement, les crédits proposés pour la gendarmerie permettront de remédier à la sous-évaluation manifeste de certaines dépenses. Jusqu'à présent, les besoins des gendarmes n'avaient jamais été considérés comme prioritaires dans l'ensemble du budget du ministère de la défense, ce qui explique, voire justifie, le mécontentement qu'ils ont manifesté à la fin de l'année dernière. Les gendarmes sont aujourd'hui davantage attachés à leur statut qu'au cadre de la fonction militaire. En toute hypothèse, un principe de parité doit être respecté entre les policiers et les gendarmes.

-  De manière générale, une déconcentration des moyens de fonctionnement sera mise en _uvre, leur gestion devant être davantage opérée au niveau des départements.

-  Les crédits consacrés réellement aux enquêtes et aux surveillances ne seront pas diminués en 2003. Ne sont supprimés que des montants précédemment inscrits à ce titre mais, en réalité, affectés à d'autres dépenses.

-  Le financement des écoles de formation fait l'objet de diverses mesures comptables, mais le niveau des crédits correspondants n'est pas affecté dans le projet de loi de finances pour 2003.

-  Le développement du réseau de communications cryptées ACROPOL s'est heurté à des difficultés. Ainsi, le système permettant aux policiers d'émettre à partir des terminaux un signal de détresse est inadapté. Par ailleurs, l'extension d'ACROPOL aux lieux souterrains n'était pas prévue dans le projet initial. Sous ces réserves, le système est jugé performant par ses utilisateurs, notamment en province.

-  Le renforcement de l'action judiciaire des forces de sécurité est une autre priorité du Gouvernement. Dès l'année prochaine, la qualification d'officier de police judiciaire sera attribuée à 2 000 gardiens de la paix supplémentaires. L'extension, voire la généralisation, des sûretés départementales est étudiée.

-  Les contrats locaux de sécurité existants sont maintenus, même si leur animation et leur suivi seront désormais réalisés au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance institués par le décret du 15 mai 2002.

-  L'évolution de la délinquance est mesurée aujourd'hui de la même façon qu'hier. La fiabilité de l'appareil statistique qui permet de recenser les crimes et les délits pourrait sans doute être améliorée, mais cela supposerait qu'un large consensus se dégage sur les modalités de la réforme. Dans l'immédiat, l'outil existant, qui permet d'apprécier l'évolution de la délinquance dans le temps, sera conservé.

-  Les volontaires qui représentent 200 000 des 240 000 sapeurs pompiers voient leur nombre et la durée de leur engagement s'infléchir alors que le nombre et la technicité des interventions s'accroissent. Dans ce contexte et en attendant les propositions de la mission qui travaille sur le sujet, différentes mesures pourraient contribuer à l'encouragement du volontariat ; l'âge minimum d'engagement des volontaires pourrait être ramené de dix-huit à seize ans, leur formation valorisée dans le cursus scolaire, en particulier dans le cadre d'un bac professionnel actuellement à l'étude, les années de volontariat prises en compte dans le cadre d'une bonification d'années de retraite, dispositif pour lequel le Premier ministre a donné son accord. Il serait légitime qu'un avantage puisse être accordé à ceux qui se dévouent pour les autres : le volontariat ne doit jamais être pénalisant.

-  Le futur projet de loi sur la sécurité intérieure devrait comporter des dispositions destinées à protéger les sapeurs-pompiers et leurs familles au même titre que d'autres professions, les agresseurs devant être systématiquement sanctionnés.

-  La création d'un pôle de défense civile à Cambrai répond à une nécessité de formation à la lutte contre les risques nucléaires radiologiques, biologiques et chimiques. Une inspection est en cours dans le cadre de ce projet dont la mise en _uvre doit être aussi rapide que possible, tandis qu'un exercice de grande ampleur consacré à la réduction des conséquences d'une attaque de cette nature aura lieu très prochainement, avec le soutien de la commission européenne.

-  Les récentes inondations du Gard ont souligné que, si l'alerte avait correctement fonctionné entre les services de prévision et les préfectures et relativement bien entre les préfectures et les communes, certains maires, remarquables de dévouement mais tributaires du peu de moyens dont ils disposent et de la rupture des réseaux de communication, avaient pu rencontrer des difficultés à répercuter l'alerte. Une étude est donc en cours en liaison avec la préfecture concernée pour disposer de réseaux de transmission demeurant en activité lorsque les réseaux téléphoniques ne fonctionnent plus.

-  En ce qui concerne les dispositions contenues dans la loi relative à la démocratie de proximité supprimant les contingents communaux des SDIS à partir de 2006, les liens entre les communes et les SDIS semblent devoir être maintenus ; le texte à venir sur la sécurité civile devrait permettre un débat sur cette question ; il ne s'agit pas de revenir sur les dispositions contenues dans la loi mais de réfléchir à un équilibre sur ce sujet. La création d'un fonds d'aide à l'investissement des SDIS témoigne, en outre, de la volonté de soutenir ces établissements.

-  Le principe de l'autonomie des collectivités locales, garanti par un niveau de ressources déterminantes, figurera effectivement dans la Constitution ; il est cependant nécessaire de poursuivre la réflexion sur ce qu'il signifie exactement, la solution pour accroître l'autonomie locale n'étant pas forcément d'accroître la fiscalité propre. L'exemple des Länder en Allemagne est, à cet égard, éclairant puisqu'ils jouissent d'une large autonomie de gestion alors qu'ils sont financés essentiellement par des dotations de l'Etat. En outre, sera également introduite dans la Constitution une référence au principe d'expérimentation des collectivités locales : à ce titre, il peut être envisagé des expérimentations sur le mode de financement des collectivités en lien avec les compétences transférées ; le transfert des recettes de la taxe intérieure sur les produits pétroliers pourrait ainsi coïncider avec le transfert de la compétence voirie. L'assiette des impôts ainsi transférés doit être dynamique, mais la réforme ne doit pas se traduire par une explosion de la fiscalité locale. Il est essentiel de faire figurer, au même titre que celui de l'autonomie locale, le principe de péréquation afin de préserver les dotations de solidarité.

-  L'inscription des pays dans la Constitution n'est pas souhaitable, car il ne faut pas multiplier les niveaux de collectivités. Les pays permettent aux collectivités de mener à bien un projet précis, dans le cadre d'une intercommunalité ; ils ne perçoivent pas, en tant que tels, de DGF ou de DGE.

-  Le financement de l'intercommunalité sera toujours assuré, quelle que soit la future architecture des concours financiers de l'Etat. En outre, il est probable que le contrat de croissance et de solidarité sera reconduit pour 2004, avec éventuellement quelques aménagements.

-  La note d'orientation sur la réforme des finances locales présentée en 2001 comporte de nombreuses propositions constructives. Elle est, en revanche, un peu timorée sur l'avenir de la fiscalité locale, puisque, partant du constat que rien ne peut être changé, la note conclut par des propositions consistant à accroître les dotations.

-  Dans le cadre d'une réforme des financements de l'Etat, les dotations de solidarité seront maintenues, éventuellement intégrées dans une enveloppe de dotation globale de fonctionnement élargie ; elles restent, dans le projet de loi de finances 2003, calculées selon les mêmes indices synthétiques qu'en 2002. Ainsi, la dotation de solidarité urbaine connaît une augmentation supérieure à celle de l'inflation, en dépit d'un contexte budgétaire difficile.

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En conclusion, le ministre a tenu à préciser qu'il ne profiterait pas de l'important effort budgétaire consenti cette année en faveur de la police et de la gendarmerie pour critiquer l'action de ses prédécesseurs. Il a indiqué qu'il mesurait la difficulté de la tâche à laquelle tout ministre de l'intérieur est nécessairement confronté. Il a ajouté qu'il souhaitait développer avec la commission des Lois un véritable partenariat et qu'il se tenait à sa disposition pour aborder, le cas échéant à intervalles réguliers, des questions importantes, telles que l'évolution de la délinquance, le mode de comptabilisation des crimes et des délits, l'organisation en France de la communauté musulmane ou l'immigration.

Après avoir relevé que l'examen du prochain projet de loi sur la sécurité intérieure serait l'occasion d'aborder certaines de ces questions et approuvé l'idée d'organiser au sein de la Commission un débat sur l'immigration, le président Pascal Clément a remercié le ministre de sa venue.

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Après le départ du ministre, conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales pour 2003 : administration générale et collectivités locales.

N° 0261 - 04 - Avis de M. Manuel Aeschlimann sur le projet de loi de finances pour 2003 - intérieur et décentralisation : administration générale et collectivités locale


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© Assemblée nationale

() Rapport présenté par M. Jean-Pierre Brunel et avis du Conseil économique et social « L'avenir de l'autonomie financière des collectivités locales » juin 2001.

() Rapport du Conseil de l'Europe « Les finances locales en Europe » 2000.

() Cette étude a également été réalisée sur la base de l'ouvrage de M. Jacques Blanc « Finances locales comparées » LGDJ 2002.

() Cette réglementation ne s'applique pas aux Communautés autonomes qui relèvent, elles, d'un régime très libéral en matière d'emprunts.

() « Audit de la situation des finances publiques », par MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse, juin 2002.

() « Les collectivités locales et l'économie nationale », par M. Jacques Méraud, Crédit local de France-Dexia, 1997.