N° 1115
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2003.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2004 (n° 1093),
TOME V
JUSTICE
ADMINISTRATION CENTRALE
et SERVICES JUDICIAIRES
PAR M. JEAN-PAUL GARRAUD,
Député.
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Voir le numéro : 1110 (annexe 33).
Justice - Sécurité.
INTRODUCTION 5
I. - LES CRÉDITS POUR 2004 : LA POURSUITE D'UN EFFORT BUDGÉTAIRE CONSÉQUENT EN FAVEUR DES JURIDICTIONS 6
A. LES SERVICES JUDICIAIRES 6
II. - LE FONCTIONNEMENT DES JURIDICTIONS : DES RÉFORMES STRUCTURELLES NÉCESSAIRES POUR REMÉDIER À UN ENCOMBREMENT PERSISTANT 18
A. UNE ACTIVITÉ JURIDICTIONNELLE SOUTENUE, DES DÉLAIS DE TRAITEMENT ENCORE TROP LONGS 18
B. LES RÉFORMES ENGAGÉES POUR LIMITER L'ENCOMBREMENT DES JURIDICTIONS 28
III. - LA MISE EN PLACE DES JURIDICTIONS DE PROXIMITÉ : DES PERSPECTIVES ENCOURAGEANTES 32
AUDITION DE DE M. DOMINIQUE PERBEN, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE, ET DE M. PIERRE BÉDIER, SECRÉTAIRE D'ÉTAT AUX PROGRAMMES IMMOBILIERS DE LA JUSTICE, SUR LES CRÉDITS DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE POUR 2004 43
PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 53
MESDAMES, MESSIEURS,
Honorant les engagements pris en début de législature malgré un contexte économique difficile, le Gouvernement a fait de la justice une des priorités du projet de loi de finances pour 2004.
En effet, les crédits de ce ministère y progressent de 4,88 %, avec 5,28 milliards d'euros de crédits de paiement. Ses effectifs budgétaires y croissent de 3,14 %, grâce à la création nette de 2 175 emplois tandis que le montant des autorisations de programme, de près de 1 050 millions d'euros en 2004, enregistre un doublement et ce, pour la deuxième année consécutive.
Importante, cette progression des crédits est d'autant plus remarquable qu'elle s'inscrit dans un budget général dont la progression, à périmètre constant, est seulement de 1,5 % entre 2003 et 2004.
Elle est toutefois conforme à la programmation pluriannuelle définie dans la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice. Constituant un effort budgétaire sans précédent, cette programmation () prévoit d'affecter à notre système judiciaire, entre 2003 et 2007, 3,65 milliards d'euros de crédits de paiement nouveaux pour dépenses ordinaires et dépenses en capital, 1,75 milliard d'euros d'autorisations de programme nouvelles ; elle prévoit également la création de 10 100 emplois budgétaires permanents, auxquels s'ajoute le recrutement, sur des crédits de vacation, de juges de proximité et d'assistants de justice, pour un équivalent à temps plein de 580 emplois.
Le rapport annexé à la loi de programmation et d'orientation a affecté ces crédits à la réalisation de quatre objectifs : l'amélioration de l'efficacité de la justice au service des citoyens, l'adaptation du droit pénal à l'évolution de la délinquance et le développement de l'effectivité de la réponse pénale, le traitement plus efficace de la délinquance des mineurs et l'amélioration de l'accès des citoyens au droit et à la justice.
Dans cette programmation pluriannuelle, les services judiciaires, les juridictions administratives ainsi que l'administration centrale - dont les crédits pour 2004 font l'objet du présent avis - concentrent plus de la moitié des créations d'emplois programmées, près de 61 % des crédits de paiement pour dépenses ordinaires et de 22 % des autorisations de programme ouvertes sur la période.
À la mesure de l'amélioration du service public judiciaire qu'attendent nos concitoyens, cette programmation permet d'accroître la part du budget de la justice dans celui de l'État, pérennisant ainsi une tendance observée depuis maintenant plusieurs années, comme le montre le tableau figurant ci-après.
ÉVOLUTION DU BUDGET DE L'ÉTAT ET DU BUDGET DE LA JUSTICE
LOIS DE FINANCES INITIALES
1994-2004
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 | |
Budget de l'État (1) |
221,58 |
226,78 |
237,55 |
241,17 |
243,99 |
257,11 |
256,42 |
263,72 |
269,07 |
273,72 |
283,66 |
Budget de la Justice |
3,24 |
3,37 |
3,58 |
3,64 |
3,79 |
4,00 |
4,16 |
4,44 |
4,69 |
5,04 |
5,28 |
Pourcentage budget |
1,46 % |
1,49 % |
1,51 % |
1,51 % |
1,55 % |
1,56 % |
1,62 % |
1,68 % |
1,74 % |
1,84 % |
1,86 % |
(1) Dépenses du budget général hors remboursements et dégrèvements.
Source : Ministère de la Justice
Indispensable à l'amélioration du fonctionnement du service public judiciaire, la progression des crédits pour 2004 ne saurait toutefois suffire. C'est pourquoi la loi d'orientation et de programmation pour la justice a prévu un certain nombre de réformes structurelles, au premier rang desquelles la création des juridictions de proximité qui font désormais leurs premiers pas.
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* *
I. - LES CRÉDITS POUR 2004 : LA POURSUITE D'UN EFFORT BUDGÉTAIRE CONSÉQUENT EN FAVEUR DES JURIDICTIONS
Avec une dotation de 2 221,798 millions d'euros en crédits de paiement, en progression de 4,67 % par rapport à 2003, les services judiciaires concentrent 42,05 % des crédits de la justice pour 2004. Ils bénéficient notamment de 78,9 millions d'euros de moyens nouveaux en dépenses ordinaires.
_ Avec 28 889 agents, les effectifs des services judiciaires augmenteront de 2,35 %, soit une progression inférieure à l'évolution de l'effectif global du ministère de la Justice qui augmentera en 2004 de 3,14 %.
Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit la création brute de 709 emplois budgétaires, répartis de la façon suivante : 150 emplois de magistrats, 30 emplois de greffiers en chef, 350 emplois de greffiers et 179 autres emplois, dont 60 secrétaires administratifs. Compte tenu de la création en 2003 de 700 emplois (), ce sont 31,6 % des emplois programmés par la loi du 9 septembre 2002 qui auront été créés. Bien qu'important, le rythme des créations d'emplois devra donc être accéléré pour respecter la programmation arrêtée en 2002 qui a prévu la création de 4 450 emplois () au sein des services judiciaires entre 2003 et 2007.
Ces créations concourront à la réalisation des différents objectifs fixés dans la loi d'orientation et de programmation pour la justice. Afin d'améliorer l'efficacité de la justice au service des citoyens en lui permettant de faire face à l'accroissement des charges et au développement de ses missions, dont la justice de proximité :
- 80 magistrats, 202 greffiers, 49 agents de catégorie C et 8 contractuels (assistants spécialisés pour les pôles santé et les pôles de lutte contre la grande criminalité) seront destinées à la réduction des délais de traitement des affaires civiles et pénales ;
- 28 magistrats, 15 greffiers en chef et 50 greffiers concourront au développement des personnels placés ;
- 55 greffiers participeront aux expérimentations engagées dans le cadre du développement des fonctions d'assistance des magistrats ;
- 3 magistrats et 8 agents de catégorie C seront destinés à la maîtrise des politiques publiques ;
- 7 postes de greffiers seront créés afin d'améliorer le suivi des comptes de tutelles ;
- 6 postes de greffiers en chef seront affectés au renforcement du service de documentation et d'études de la Cour de cassation ;
- 20 postes de greffiers et 17 emplois d'agents de catégorie C permettront d'accompagner la mise en place des juridictions de proximité ;
- 5 greffiers en chef à l'École nationale des greffes (eng), 4 greffiers en chef et 60 secrétaires administratifs pour la gestion administrative, 12 contractuels (dont 6 techniciens informatiques et 6 ingénieurs en équipement) ainsi que 2 bibliothécaires adjoints viendront renforcer les fonctions de formation et d'administration.
27 emplois de magistrats, 4 postes de greffiers et 23 emplois d'agents de catégorie C seront créés dans le but d'assurer une meilleure exécution des décisions pénales.
Enfin, 12 postes de magistrats et 12 postes de greffiers seront destinés aux tribunaux pour enfants afin de renforcer l'efficacité du traitement de la délinquance des mineurs.
Dans ses prévisions pour 2004, la Chancellerie estime que, sur les 387 magistrats qui seront recrutés, 272 seront issus de l'École nationale de la magistrature (enm), 80 des concours complémentaires, 30 auront bénéficié d'une intégration directe au titre des recrutements latéraux et 5 auront fait l'objet d'un détachement judiciaire. Bien que l'augmentation, au fil des années, du nombre de magistrats issus de l'ENM - ils étaient 154 en 1999 et 224 en 2003 - réduise la part relative des magistrats recrutés par la voie de concours exceptionnels, ou désormais complémentaires (), le rapporteur ne peut que réitérer les observations faites dans son précédent avis sur la nécessité d'engager une réflexion sur ces différentes voies d'accès à la magistrature afin de rendre sa lisibilité et sa cohérence au système de recrutement des magistrats de l'ordre judiciaire.
A ces créations d'emplois, qui représentent un coût de 26,52 millions d'euros, il convient d'ajouter le recrutement des juges de proximité (cf. III du présent avis), pour lequel 4 millions d'euros de crédits de vacation ont été prévus au titre des moyens nouveaux.
_ Ces créations d'emplois viendront compléter les effectifs budgétaires des magistrats et des fonctionnaires des services judiciaires. S'agissant des premiers, 6 834 emplois en juridictions sont aujourd'hui dénombrés, répartis de la façon suivante :
EFFECTIFS BUDGÉTAIRES DE MAGISTRATS
Juridictions |
Siège |
Parquet |
Autre |
Total |
Magistrat de la Cour de cassation |
160 |
24 |
184 | |
Magistrat au service de documentation et d'études |
8 |
8 | ||
Secrétaire général |
2 |
2 | ||
Totalité des emplois de la cour de cassation |
160 |
24 |
10 |
194 |
Magistrat des cours d'appel et des tribunaux supérieurs d'appel |
1 070 |
269 |
1 339 | |
Secrétaire général (cours d'appel de Paris : 2 et de Versailles : 2) |
4 |
4 | ||
Magistrat placé |
139 |
75 |
214 | |
Totalité des emplois des cours d'appel et T.S.A. |
1 209 |
346 |
4 |
1557 |
Magistrat du siège non spécialisé |
2 603 |
2603 | ||
dont emplois de magistrat chargé du service de l'instance |
853 |
|||
Juge du livre foncier |
36 |
36 | ||
Juge d'instruction |
569 |
569 | ||
Juge des enfants |
387 |
387 | ||
Juge de l'application des peines |
248 |
248 | ||
Magistrat du parquet |
1 238 |
1 238 | ||
Secrétaire général (tribunal de grande instance de Paris) |
2 |
2 | ||
Totalité des emplois des T.G.I. et T.P.I. |
3843 |
1 238 |
2 |
5 083 |
Ensemble des emplois en juridictions |
5 212 |
1 606 |
16 |
6834 |
Source : Ministère de la Justice |
À ces emplois en juridictions, il convient d'ajouter 8 emplois de magistrats au Conseil supérieur de la magistrature, 2 emplois de magistrats à l'École nationale des greffes et 229 dans l'administration centrale du ministère de la Justice ; 450 emplois ne sont pas encore localisés dans les juridictions - ils le seront au fur et à mesure des besoins - et 317 vacances de postes étaient dénombrées au 1er septembre 2003 ().
S'agissant des fonctionnaires des services judiciaires, on répertoriait 20 933 emplois budgétaires au 1er juillet 2003 : 1 714 greffiers en chef, 7 817 greffiers, 9 594 fonctionnaires de catégorie C au titre des personnels de bureau, 1 707 personnels de catégorie C de la filière technique, 87 contractuels et 14 personnes relevant d'autres administrations. Il reste encore à localiser 377 personnels de greffe au titre de l'année 2003 qui le seront concomitamment à leur prise de fonctions afin que l'annonce d'une création d'emploi corresponde à un renfort réel de personnel.
Le ratio magistrat/fonctionnaires des greffes, qui ne prend en compte que le nombre de greffiers en chef, de greffiers et d'agents de catégorie C chargés de fonctions administratives, est resté stable en 2003 et s'établit à 2,62.
_ Ces créations d'emplois dans les services judiciaires s'accompagnent de mesures en faveur des personnels, qui concernent au premier chef les magistrats.
Tout d'abord, il prévoit une provision de 0,867 million d'euros au titre de l'attribution d'une nouvelle bonification indiciaire « encadrement supérieur » à certains magistrats des services judiciaires.
Créée pour prendre en considération l'exercice d'une responsabilité particulière, la détention et la mise en _uvre d'une technicité ou l'existence de sujétions particulières, la nouvelle bonification indiciaire (nbi) bénéficie aujourd'hui à certaines catégories d'emplois relevant des crédits du ministère de la Justice : c'est ainsi le cas des magistrats de l'ordre administratif (décrets n° 2001-1017 du 5 novembre 2001 pour les membres du Conseil d'État et n° 2001-1018 pour les membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel) et de certains emplois de l'administration centrale du ministère de la Justice, mais non des magistrats des juridictions judiciaires. Lors de l'examen des crédits de son ministère pour 2003, le garde des Sceaux avait indiqué, à l'occasion de l'examen d'un amendement de M. Pascal Clément, président de la Commission des lois, tendant à supprimer les crédits prévus pour financer la nbi dont bénéficient les magistrats de l'ordre administratif, son souhait de voir les magistrats de l'ordre judiciaire bénéficier de cet instrument salarial en 2004.
Dans la ligne de cet engagement, le projet de loi de finances aujourd'hui soumis à l'examen du Parlement permet la mise en _uvre d'une première phase d'attribution de la nbi aux magistrats de l'ordre judiciaire : 117 emplois bénéficieront ainsi de 16 530 points. Et il est ensuite prévu que le bénéfice de cet instrument salarial soit progressivement étendu aux autres emplois de chef de juridiction et à certains emplois de responsabilité au sein des tribunaux de grande instance les plus importants. Pour 2004, les emplois et fonctions concernés sont les suivants :
- à la Cour de cassation : les chefs de juridiction, les présidents de chambre et les avocats généraux, les doyens de chambre et les substituts chargés du secrétariat général ;
- dans les cours d'appel : les chefs de cour, le nombre de points attribués étant fonction de la taille de la cour, et les substituts chargés du secrétariat général ;
- dans les tribunaux de grande instance : les chefs des douze juridictions les plus importantes ;
- à l'École nationale des greffes : le directeur.
En outre, les magistrats de l'ordre judiciaire bénéficieront d'une amélioration de leur régime indemnitaire. Après avoir été fortement réévalués entre 1987 et 1996 - ils sont passés durant cette période de 19 % en 1987 à près de 37 % en 1996 - les taux indemnitaires des magistrats sont restés inchangés, alors que, dans le même temps, les régimes indemnitaires des magistrats de l'ordre administratif ont bénéficié de revalorisations successives.
Afin d'assurer aux magistrats de l'ordre judiciaire un régime indemnitaire à la hauteur des responsabilités qu'ils exercent et des fortes sujétions de service qu'ils subissent, le garde des Sceaux a engagé dès 2003 un effort sans précédent de revalorisation, avec pour objectif une parité avec les magistrats des juridictions administratives et financières. A cette fin, une mesure nouvelle de 2,8 millions d'euros a été inscrite en loi de finances pour 2003 ; elle a permis, à compter du 1er octobre dernier, une revalorisation de 4% en moyenne du taux indemnitaire, qui s'établit donc désormais à 41 % (). Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit une mesure d'ajustement de 9,1 millions d'euros, afin d'assurer l'extension en année pleine de cette revalorisation indemnitaire.
Cet effort de revalorisation indemnitaire sera poursuivi en 2004. En effet, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit le financement d'une nouvelle revalorisation de 4 % à compter du 1er octobre 2004, qui portera ainsi le taux indemnitaire des magistrats judiciaires à 45 %. On notera toutefois qu'à cette même date, le taux indemnitaire moyen des magistrats de l'ordre administratif passera de 45 à 47,75 %, soit une progression moins importante que celle accordée aux magistrats judiciaires mais qui recule encore de quelque temps la réalisation d'un alignement complet des régimes indemnitaires des magistrats des deux ordres... Au demeurant, il convient de souligner l'effort important réalisé par le ministère de la Justice : au cours de ces dix dernières années, cette indemnité n'a été augmentée que par des gouvernements issus de l'actuelle majorité, de 33 à 37 % entre 1994 et 1996, de 37 à 41 % entre 2002 et 2003 et de 41 à 45 % pour 2004.
Au total, ce sont 12,17 millions d'euros qui seront consacrés à l'amélioration du régime indemnitaire des magistrats de l'ordre judiciaire en 2004.
Cette revalorisation s'accompagnera, à compter du 1er janvier 2004, de l'instauration d'une modulation partielle du régime indemnitaire des magistrats, qui existe déjà dans les autres juridictions, financières et administratives, ainsi qu'à la Cour de cassation.
En effet, l'article 1er du décret n° 2002-31 du 7 janvier 2002 prévoit l'attribution « aux magistrats de la Cour de cassation, à l'exception de ceux exerçant les fonctions de premier président de cour d'appel, de président du tribunal de grande instance de Paris et de procureur de la République près ce tribunal, [d'] une indemnité destinée à rémunérer l'importance et la valeur des services rendus et à tenir compte des sujétions afférentes à l'exercice de leurs fonctions ». À côté d'une prime forfaitaire dont le montant est calculé en pourcentage du traitement indiciaire brut, ces magistrats perçoivent donc chaque mois « une prime de rendement, calculée en pourcentage du traitement indiciaire brut, selon un taux fixé respectivement par le premier président de la Cour de cassation pour chaque magistrat du siège et par le procureur général près ladite cour pour chaque magistrat du parquet général ». L'arrêté du 7 janvier 2002 pris en application de ce décret a ensuite précisé que le taux de la prime forfaitaire applicable aux magistrats de la Cour de cassation, sauf exceptions précédemment énoncées, est fixée à 39 % tandis que le taux maximal d'attribution individuelle de la prime de rendement est fixé à 15 %.
L'extension pure et simple de cette prime « de rendement » à l'ensemble des juridictions judiciaires n'est ni possible, compte tenu de la diversité des fonctions juridictionnelles, ni souhaitable, en raison des craintes d'une justice d'abattage qu'elle susciterait. En revanche, il est envisagé d'introduire une modulation individuelle de la prime versée aux magistrats de l'ordre judiciaire en fonction de la contribution de chacun au bon fonctionnement de l'institution. Relevant de la compétence des chefs de cour - les premiers présidents de cour d'appel pour les magistrats du siège et les procureurs généraux pour ceux du parquet -, l'attribution de cette prime devrait se fonder sur l'évaluation dont chaque magistrat fait l'objet. Non contestable dans son principe, l'attribution d'une prime au mérite suscite, à ce stade, plusieurs observations : si la crédibilité du dispositif de modulation repose à l'évidence sur une dispersion minimale des taux appliqués, il convient de veiller à ce qu'une certaine harmonisation dans les modalités d'attribution soit assurée entre les cours, afin, par exemple, que le régime indemnitaire des personnes placées en congé maladie ou maternité n'obéisse à des règles différentes d'une juridiction à l'autre. Par ailleurs, compte tenu de la charge de travail qu'occasionne l'évaluation bisannuelle des magistrats pour les chefs de juridiction et chefs de cour (), il conviendra de veiller à ce que la révision du taux de modulation se fasse selon une périodicité et des modalités qui n'occasionnent pas une surcharge de travail excessive.
Le Gouvernement a indiqué que cette modulation porterait sur la revalorisation du taux indemnitaire obtenue en 2003, soit sur 4 %. Ce choix aboutira à ce qu'en pratique, les magistrats, après perception, durant le dernier trimestre 2003, d'une indemnité de 41 %, perdent le bénéfice de cette revalorisation jusqu'au 30 juin 2004, le temps pour la Chancellerie et les chefs de cour de mettre en place le dispositif de modulation indemnitaire. À ce stade, le Gouvernement ignore si cette modulation jouera sur la prochaine revalorisation qui doit intervenir le 1er octobre 2004 pour porter le taux indemnitaire à 45 %.
Destiné à récompenser ceux des magistrats qui sont les plus diligents, ce dispositif de modulation indemnitaire - ou prime au mérite - ne porte en aucune façon atteinte au principe de l'indépendance des magistrats. Tout à fait compréhensible pour les magistrats du parquet sur lesquels les procureurs généraux et les procureurs disposent d'un pouvoir hiérarchique, il est également tout à fait admissible pour les magistrats du siège, sur lesquels les premiers présidents et les présidents disposent d'un pouvoir d'évaluation. En effet, les magistrats du siège, comme ceux du parquet, sont notés par leurs chefs de juridiction et chefs de cour. La modulation de la prime ne sera que la traduction financière des appréciations portées sur les magistrats, appréciations sur lesquelles le garde des Sceaux n'intervient pas.
Enfin, une dotation de 0,072 million d'euros sera consacrée à la revalorisation du complément indemnitaire servi aux magistrats chargés de la lutte anti-terroriste et à l'instauration de l'équivalent pour les fonctionnaires des services concernés.
_ Les fonctionnaires des services judiciaires bénéficient également de mesures statutaires et indemnitaires.
S'agissant des greffiers, l'année 2004 est tout d'abord marquée par l'achèvement de la réforme statutaire de ce corps. Entamée et financée par provisions au cours des exercices précédents, cette réforme prévoit la mise en _uvre d'un classement indiciaire intermédiaire composé de deux grades et la mise en place de l'attribution d'une nouvelle bonification indiciaire pour 390 emplois de greffiers. Cette réforme a un coût de 9,4 millions d'euros en 2004.
S'agissant des personnels de catégorie C, le plan de transformation des emplois d'agents en emplois d'adjoints, entamé en 2000 (), se poursuit en 2004 : 950 postes d'agents seront concernés pour un coût d'1 million d'euros. Toutefois, avec 3 783 emplois transformés en quatre ans, le corps de agents administratifs ne représentera plus que 16,8 % du total des emplois des deux corps, au lieu de 15 % prévus initialement. Par ailleurs, afin de régulariser des situations individuelles, 132 emplois d'agents des services techniques de 2e classe seront transformés en emplois d'agents administratifs de 2e classe.
Porté à 21 % par un arrêté du 30 mai 2003, le taux moyen de l'indemnité forfaitaire des personnels de catégorie C augmentera d'un point en 2004, grâce à une mesure nouvelle de 1,87 million d'euros inscrite dans le projet de loi de finances pour 2004. Le rapporteur ne peut que constater, pour le regretter, la faiblesse de cette revalorisation par rapport à celle des magistrats et souligner l'importance d'offrir, à cette catégorie essentielle pour le bon fonctionnement de nos juridictions et qui, en pratique exercent souvent des fonctions de greffier, des perspectives de carrière.
De même, si l'absence de mesures indemnitaires en faveur des greffiers en chef se justifie par la consolidation de leur nouveau régime statutaire, il convient de prêter une particulière attention à ce corps qui doit faire face à des nouvelles tâches.
_ Au titre des moyens de fonctionnement des juridictions, les mesures nouvelles prévues au projet de loi de finances pour 2004 sont d'un montant total de 12,651 millions d'euros, soit une progression de 5,41 % de la dotation du chapitre par rapport à 2003. Depuis deux ans, la dotation en crédits de fonctionnement aura donc progressé de 13,8 % contre 14 % entre 1998 et 2002.
Les moyens nouveaux prévus par le projet de loi de finances pour 2004 permettront : d'améliorer l'informatique déconcentrée (5 millions d'euros) ; de mettre en service les nouveaux palais de justice (1,69 millions d'euros) ; d'accompagner les créations d'emplois, y compris les frais de déplacement des personnels placés (1,962 million d'euros) ; d'abonder la dotation au titre des locations immobilières et des opérations de crédit-bail (1,5 million d'euros) ; de renforcer la sécurité des juridictions (1 million d'euros) ; de prendre en compte les moyens de fonctionnement des juges de proximité (0,7 million d'euros) ; de développer la visio conférence (0,5 million d'euros) ; de prendre en compte l'impact des recrutements d'adjoints et d'agents administratifs sur le budget de l'École nationale des greffes (0,3 million d'euros).
En outre, les dépenses d'informatique et de télématique (chapitre 34-05) bénéficient de 6,925 millions d'euros en moyens nouveaux qui seront consacrés au développement de projets nouveaux ou en cours de généralisation.
L'École nationale de la magistrature verra sa dotation progresser de 3,196 millions d'euros, dont 2,16 millions d'euros au titre des mesures d'ajustement et 0,996 millions d'euros au titre de moyens nouveaux. Les mesures d'ajustement doivent notamment permettre de tenir compte des 17 postes d'auditeurs supplémentaires que compte la promotion 2004 (0,65 million d'euros) et assurer le financement du régime indemnitaire des auditeurs de justice (1,06 million d'euros). Pour leur part, les moyens nouveaux permettront le financement de six nouveaux emplois (0,296 million d'euros), la revalorisation indemnitaire des magistrats qui y sont affectés (0,086 million d'euros), un renforcement des crédits de vacation pour la formation des juges de proximité et des juges consulaires (0,067 million d'euros) ainsi qu'une augmentation des moyens de fonctionnement de cet établissement (0,547 million d'euros).
_ Les autorisations de programme relatives aux dépenses d'équipement judiciaire inscrites dans le projet de loi de finances pour 2004 s'élèvent à 309 millions d'euros dont 78 millions d'euros au titre de la loi d'orientation et de programmation pour la justice afin de résorber les déficits de surface et 231 millions d'euros au titre des programmes déjà engagés. Par ailleurs, 111,7 millions d'euros de crédits de paiement seront inscrits en 2004 dont 13 millions d'euros au titre de la loi d'orientation et de programmation. Comme l'année précédente, la priorité sera accordée aux travaux permettant d'améliorer la sécurité des bâtiments judiciaires.
Sujet ancien, la construction d'un nouveau tribunal de grande instance à Paris est au c_ur des priorités immobilières de la Chancellerie, le Président de la République ayant annoncé le 10 janvier 2003, à l'occasion de l'audience solennelle de rentrée de la Cour de cassation, le projet de déménagement de cette juridiction de l'Île de la Cité. L'urgence de mener à bien ce projet est en effet indiscutable, l'éparpillement des juridictions dans une multitude de sites étant préjudiciable au bon fonctionnement de cette juridiction et source de frais de location importants. Les enjeux qui s'attachent à ce chantier justifient, comme ce fut le cas en son temps pour le chantier du grand Louvre, la création par décret, dont le projet est actuellement soumis à l'examen du Conseil d'État, d'un établissement public qui exercera l'ensemble des prérogatives dévolues au maître d'ouvrage. La composition de son conseil d'administration devrait permettre de réunir les différents intervenants concernés par ce chantier. Il comportera ainsi des représentants du ministère de la Justice, du premier président de la cour d'appel de Paris, du procureur général près ladite cour mais également du préfet de la région Ile-de-France, du maire de Paris, des représentants des avocats et des personnels. S'agissant de la détermination de l'assiette foncière, une expertise est d'ores et déjà en cours au sein de la direction des services judiciaires afin d'évaluer les besoins de surface à l'horizon 2020. Pour donner un ordre d'idées, on rappellera que le schéma directeur établi en 1997 avait conclu à la nécessité de doter la juridiction de 100 000 mètres carrés de surface hors _uvre.
Le rapporteur ne saurait que trop souligner l'importance des moyens matériels, dont l'insuffisance entrave de façon évidente le fonctionnement des juridictions. Ainsi, même si elle est atypique compte tenu de l'importance des charges locatives qui pèsent sur cette juridiction (), la situation du tribunal de grande instance de Paris n'en est pas moins éclairante : l'absence de budget de programme en 2003 a ainsi exclu toute possibilité de renouvellement du parc de photocopieurs, pourtant caractérisé par sa vétusté (), a fait obstacle à toute opération de rénovation des locaux et a empêché le financement des contrôles techniques réglementaires dont la réalisation est directement liée à la responsabilité des chefs de service. Face aux difficultés de fonctionnement quotidien dont souffrent les juridictions malgré l'augmentation des crédits votés en lois de finances, la solution réside sans doute dans le renforcement des services administratifs régionaux, ce qui est, en outre, conforme à la logique de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
_ La dotation budgétaire consacrée à l'aide juridique passe de 291,9 à 291,2 millions d'euros entre 2003 et 2004. Un ajustement négatif de 23 millions d'euros pour tenir compte de la baisse des admissions constatée jusqu'en 2002() et de la montée en charge plus progressive que prévue de réformes intervenues en 2000 et 2001 permet le financement des mesures suivantes :
- pour 11,3 millions d'euros, la revalorisation des coefficients du barème de rétribution des avocats, prévue par le décret n° 2003-853 du 5 septembre 2003 () ; cette revalorisation fait suite aux revalorisations qui étaient intervenues en 2001 sur les principaux contentieux (décret n° 2001-52 du 17 janvier 2001) ;
- pour 4,5 millions d'euros, l'augmentation de l'unité de valeur de référence de 2 % prévue dans l'article 79 du projet de loi de finances pour 2004 (); le montant de l'unité de valeur de référence, fixé à 125 F (19,06 €) en 1992, a été porté à 128 F (19,51 €) en 1993, 130 F (19,82 €) en 1995, 132 F (20,12 €) en 1998 et 134 F (20,43 €) en 2000. Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit de porter le montant de l'unité de valeur à 20,84 € en 2004 ;
- pour 3 millions d'euros, une provision pour tenir compte de l'adoption de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, qui permet aux ménages dont la situation financière est la plus obérée, de saisir le juge de l'exécution aux fins de l'ouverture d'une procédure de « rétablissement personnel » qui conduit, le cas échéant après liquidation de leurs biens, à l'effacement de leurs dettes ;
- pour 2,85 millions d'euros, l'exclusion, prévue par le décret du 5 septembre dernier précité, de l'aide personnalisée au logement et de l'allocation de logement social des ressources du demandeur d'aide juridictionnelle prises en compte pour l'appréciation de sa situation ; ne concernant que les bureaux d'aide juridictionnelle qui incluaient ces allocations dans les ressources des demandeurs, soit environ 38 %, cette disposition devrait entraîner une augmentation de 2,5 % des admissions à l'aide juridictionnelle totale, soit environ 17 150 admissions supplémentaires ; le coût budgétaire de cette disposition devrait être échelonné de la manière suivante : + 1 million d'euros en 2003, + 1,85 million d'euros en 2004, + 1,15 million d'euros en 2005 et + 0,5 million d'euros en 2006.
- pour 0,5 million d'euros, une provision pour l'extension de la représentation obligatoire devant la Cour de cassation : actuellement, certains contentieux, tels que l'assistance éducative, l'autorité parentale mais surtout les contentieux sociaux qui représentent 32 % du contentieux civil porté devant cette juridiction, sont dispensés du ministère d'avocat obligatoire ; loin de restreindre l'accès au droit, cette modification permettrait d'établir l'égalité des armes entre les parties les plus aisées, qui, de fait, recourent très fréquemment aux conseils d'un avocat, et celles qui ne peuvent y avoir accès et se trouvent placées en position d'infériorité tout au long de la procédure. En outre, elle permettrait une meilleure information des plaideurs sur leurs droits et les chances de succès de leur pourvoi compte tenu du rôle de filtre que jouent les avocats à la Cour de cassation ;
- pour 0,07 million d'euros, l'extension à l'assistance des victimes du champ des protocoles pris en application de l'article 91 du décret du 19 décembre 1991.
_ Axe important de la loi d'orientation et de programmation pour la justice, l'accès au droit et l'aide aux victimes font l'objet d'une attention particulière dans le projet de loi de finances pour 2004 qui prévoit 2,66 millions d'euros de moyens nouveaux répartis de la façon suivante : 1,11 million d'euros pour les associations et les services d'aide aux victimes ; 1,1 million d'euros pour le développement de la médiation familiale ; 0,32 million d'euros pour le développement des conseils départementaux d'accès au droit ; 0,1 million d'euros de réserve pour faire face aux évènements exceptionnels ; 0,03 million d'euros pour des soutiens financiers aux projets de dimension nationale.
Avec une dotation de 170,328 millions d'euros en crédits de paiement, représentant 3,22 % des crédits de la justice pour 2004, les crédits consacrés aux juridictions administratives augmentent de 11,13 %, soit la progression la plus importante du ministère.
_ Avec 2 632 agents, les effectifs de ces juridictions augmenteront de 3,58 % par rapport à 2003, grâce à la création brute de 97 emplois : 12 pour le Conseil d'État et 85 emplois, dont 42 emplois de magistrats, pour les cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs.
On rappellera que, pour 2003, les effectifs budgétaires des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel s'élèvent à 846 magistrats et 1126 agents de greffe, tandis que le Conseil d'État comptera, au 31 décembre prochain, 216 membres et 353 agents. Après s'être stabilisé à 1,4 entre 1997 et 1999, le ratio agents de greffe/magistrats administratifs diminue continûment depuis cette date : il est ainsi passé de 1,38 à 1,34 entre 2000 et 2002 et les prévisions pour 2003 et 2004 laissent présager une nouvelle détérioration puisqu'il passerait à 1,33 au 31 décembre 2003 et à 1,27 un an après.
_ Les personnels de ces juridictions bénéficieront de plusieurs mesures. Outre des transformations d'emplois et des pyramidages statutaires, un abondement de 0,963 million d'euros est prévu au titre des mesures indemnitaires, principalement pour : augmenter la dotation indemnitaire des membres du Conseil d'État (0,355 million d'euros) ; assurer le complément en année pleine de la revalorisation du taux indemnitaire moyen des membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel qui est passé, le 1er juillet 2003, de 41 à 45 %, afin de préserver l'attractivité du corps en assurant le même niveau de rémunération que les corps comparables issus de l'ena ; permettre une nouvelle revalorisation de ce taux qui, à compter du 1er juillet 2004, sera porté à 47,75 % (0,508 million d'euros). Enfin, une dotation de 0,015 million d'euros est prévue au titre de l'abondement de la nouvelle bonification indiciaire pour l'encadrement supérieur du Conseil d'État et des juridictions administratives, afin de tenir compte des emplois créés en 2003.
_ Le budget pour 2004 prévoit une forte augmentation des moyens de fonctionnement des juridictions administratives, de l'ordre de 9,37 % par rapport à 2003, grâce à une majoration de 3,59 millions d'euros au titre des moyens nouveaux. Cette augmentation bénéficie à l'informatique pour 1,91 million d'euros et aux crédits de fonctionnement courant à hauteur de 1,67 million d'euros.
_ Moins forte que l'année précédente, la progression des crédits de vacation est de 0,14 million d'euros, destinée au financement, d'une part, des besoins en matière d'indemnisation du chômage des agents vacataires des juridictions administratives à hauteur de 0,045 million d'euros et, d'autre part, du recrutement de quinze assistants de justice à hauteur de 0,095 millions d'euros.
_ S'agissant des dépenses d'équipement, 15,4 millions d'euros d'autorisations de programme sont prévus pour 2004 au titre de la loi d'orientation et de programmation pour la justice, répartis entre le Conseil d'État (2,54 millions d'euros) et les juridictions administratives (12,86 millions d'euros). Par rapport à 2003, ces autorisations de programme enregistrent une progression de plus de 25 %.
Avec 659,058 millions d'euros de crédits de paiement en 2004, les crédits consacrés à l'administration générale du ministre de la Justice diminueront de 1,32 %, en raison de la diminution des crédits de paiement pour les dépenses en capital par rapport à 2003. Hors la dotation de l'Agence de maîtrise d'ouvrages et de travaux d'équipements du ministère de la Justice (AMOTMJ) qui s'élève pour l'année prochaine à 7,78 millions d'euros, ils représenteront 12,47 % des crédits de la justice pour 2004.
_ La loi de programmation et d'orientation pour la justice ayant prévu un renforcement des fonctions d'expertise et de gestion de l'administration centrale et fixé à cette fin un objectif de 180 créations d'emplois sur cinq ans, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit la création de 46 emplois répartis de la façon suivante : 1 sous-directeur, 2 magistrats inspecteurs des services judiciaires, 2 administrateurs civils, 4 attachés, 1 secrétaire administratif et 36 agents contractuels. En outre, il sera procédé à 59 transferts d'emplois des services déconcentrés vers l'administration générale afin de clarifier la répartition des moyens et de poursuivre le plan de régularisation des mises à disposition d'agents des services déconcentrés en administration centrale. Enfin, un abondement des crédits de vacations médico-sociales est également prévu à hauteur de 200 000 euros.
_ Les mesures intéressant les personnels consistent tout d'abord dans la mise en _uvre des réformes des statuts de magistrats (élévation à la hors échelle
B-bis de 12 emplois de magistrats inspecteurs) et des greffiers. Par ailleurs, 192 agents sont concernés par des pyramidages et des transformations d'emplois pour améliorer leur déroulement de carrière et adapter certains emplois à leur situation réelle (0,344 million d'euros). Une dotation de 0,4 million d'euros est prévue pour poursuivre la mise à niveau du régime indemnitaire des agents des catégories A, B et C de l'administration centrale. Enfin, sont également prévus un abondement de la dotation relative à la nouvelle bonification indiciaire pour l'encadrement supérieur à hauteur de 0,013 million d'euros, ainsi qu'une augmentation de 0,1 million d'euros de la masse salariale des contractuels afin de garantir à ces personnels des perspectives de revalorisation.
_ Les dotations consacrées à l'action sociale augmenteront de 4,7 %, soit une augmentation de 0,916 million d'euros qui sera consacrée aux séjours de vacances, à la restauration administrative et à la médecine de prévention.
_ Les crédits de fonctionnement de l'administration centrale bénéficieront de 2,3 millions d'euros de moyens nouveaux notamment afin de faire face à l'augmentation des loyers (1 million d'euros) et de financer les études et la communication ainsi que les déménagements des services.
_ Enfin, au titre de l'équipement, 11,5 millions d'euros d'autorisations de programme sont prévus pour la rénovation du bâtiment Vendôme-Cambon (3 millions d'euros) et le relogement de la cnil.
Pour l'agence de la maîtrise d'ouvrage et de travaux d'équipements du ministère de la Justice, une dotation de 1,141 million d'euros est inscrite au titre des moyens nouveaux qui bénéficieront en partie au futur établissement « TGI de paris », à la fois pour permettre le financement de trois emplois et pour le doter de crédits de fonctionnement à hauteur de 0,5 million d'euros.
II. - LE FONCTIONNEMENT DES JURIDICTIONS : DES RÉFORMES STRUCTURELLES NÉCESSAIRES POUR REMÉDIER À UN ENCOMBREMENT PERSISTANT
Les données statistiques disponibles sur l'activité des juridictions montrent que l'augmentation des crédits et des effectifs, constante depuis maintenant plusieurs années, n'a pas permis de réduire les délais de jugement. La loi du 9 septembre 2002 ayant fixé des objectifs chiffrés de réduction des délais - douze mois dans les cours d'appel, six mois dans les tribunaux de grande instance, trois mois dans les tribunaux d'instance, un an pour l'ensemble des juridictions administratives -, des réformes sont indispensables pour modifier le fonctionnement des juridictions afin de mieux répondre aux attentes des justiciables et, le cas échéant, de faire face à l'augmentation des contentieux.
Exception faite de la Cour de cassation, qui grâce à la réforme de la procédure d'admission des pourvois, a vu sa situation s'améliorer sensiblement, les juridictions judiciaires civiles demeurent très encombrées, une nouvelle réduction des délais de traitement dans les cours d'appel étant toutefois observée pour la deuxième année consécutive.
L'ACTIVITÉ JUDICIAIRE CIVILE EN 2002 |
||||
JURIDICTIONS |
AFFAIRES NOUVELLES |
AFFAIRES TERMINÉES |
DURÉE MOYENNE DE TRAITEMENT | |
Cour de cassation |
22 324 |
23 482 |
1 an, 11 mois et 18 jours (1) | |
Cours d'appel |
189 874 |
197 880 |
17,2 mois | |
Tribunaux de grande instance |
595 319 |
579 184 |
9,4 mois | |
Tribunaux d'instance |
497 503 |
481 113 |
5,1 mois | |
(1) : Nombre de jours s'écoulant entre l'enregistrement du dossier à la Cour de cassation et l'arrêt terminant l'affaire. |
_ La Cour de cassation
Après deux années de hausse importante, de l'ordre de 6,3 %, le nombre d'affaires civiles nouvelles (22 324) portées devant la Cour de cassation a diminué de 1,7 %. Alors qu'il avait baissé de 3,7 % l'année précédente, le nombre de décisions rendues a augmenté de 13,9 % : avec 23 482 affaires terminées en 2002, il s'agit du volume d'affaires terminées le plus important depuis 1990. Le délai moyen de traitement d'une affaire civile a diminué de 33 jours pour aboutir à 717 jours et le nombre d'affaires en stock des chambres civiles est passé de 35 190 au 8 août 2002 à 33 618 au 12 août 2003.
Cette amélioration s'explique notamment par la mise en _uvre de la nouvelle procédure d'admission des pourvois, prévue par la loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature. En effet, pour que le fonctionnement de la Cour de cassation ne soit pas entravé par l'examen de pourvois qui ne présentent à l'évidence aucun moyen de droit sérieux, l'article L. 131-6 du code de l'organisation judiciaire a été modifié afin de permettre à la formation de trois magistrats chargés d'examiner l'affaire soumise à la chambre civile à laquelle ils appartiennent de déclarer « non admis les pourvois irrecevables ou non fondés sur un moyen sérieux de cassation ». La procédure est donc la suivante : la formation de la chambre saisie de l'affaire procède à un examen préalable du dossier et l'oriente, le cas échéant, vers son inscription au rôle d'une audience du contrôle d'admissibilité. Le rapporteur chargé du dossier établit une fiche de présentation indiquant les raisons pour lesquelles le pourvoi lui semble irrecevable ou non fondé sur des moyens sérieux. Les avocats concernés peuvent consulter cette fiche au greffe de la chambre et établir avant l'audience une note écrite adressée au président de la chambre et à l'avocat général s'ils l'estiment nécessaire. En 2002, première année de mise en application de ce nouveau dispositif, les affaires closes par le recours à cette procédure ont représenté 22 % des décisions rendues.
Progressant de 20 % entre 2001 et 2002, les cassations ont représenté 22 % des décisions rendues, mais 28 % des affaires soumises à la chambre. Les rejets de pourvois ont représenté 26 % de l'ensemble des affaires terminées et 33,5 % des seules affaires admises.
_ Les cours d'appel
Rompant avec une tendance à la baisse observée depuis 1996, le nombre d'affaires nouvelles (189 874) portées devant les cours d'appel a augmenté de 1,6 % en 2002. Toutefois, cette évolution ne concerne pas toutes les juridictions, la tendance à la baisse se confirmant en 2002 pour sept cours d'appel, parmi lesquelles les plus importantes. Elle s'explique par l'augmentation des contentieux portés devant les prud'hommes et l'augmentation du taux d'appel de leurs décisions. En effet, traditionnellement important, celui-ci a encore augmenté (+ 4,4 %), pour atteindre presque 60 % en 2001. Le taux d'appel à l'encontre des jugements rendus par les tribunaux de commerce a également progressé (+ 5,7 %) et s'est élevé à 12 %. En revanche, les taux d'appel contre les jugements rendus par les tribunaux d'instance et les tribunaux de grande instance sont restés stables, respectivement à 4,7 % et 15,3 %.
Comme en 2001, le nombre d'affaires terminées (197 880) a diminué en 2002 de 4,1 %, atteignant ainsi son niveau le plus bas depuis 1994. Cette diminution n'empêche pas la poursuite de la résorption du nombre d'affaires en stock (261 709), qui a diminué de 3 % entre le 31 décembre 2001 et le 31 décembre 2002. À elles seules, les cours d'appel de Paris, d'Aix-en-Provence et de Versailles ont contribué à la résorption de 90 % du stock.
Pour la deuxième année consécutive, la durée moyenne des affaires terminées a diminué en 2002, pour s'établir à 17,2 mois au lieu de 17,7 mois l'année précédente : un quart des affaires traitées en 2002 l'ont été en moins de 7,2 mois ; la moitié l'ont été en moins de 14 mois ; mais un quart ont été traitées en plus de 23 mois. Faisant suite à plusieurs années marquées par une baisse du stock et une augmentation de la durée moyenne de traitement des affaires, cette évolution conforte l'idée selon laquelle le déstockage se traduit dans un premier temps par une détérioration de la durée de traitement des affaires, d'autant plus importante que les affaires concernées sont anciennes.
_ Les tribunaux de grande instance
Le nombre d'affaires nouvelles (595 319) portées devant les tribunaux de grande instance a baissé pour la sixième année consécutive et de façon plus sensible qu'au cours de l'année précédente (- 0,8 % en 2002 au lieu de - 0,2 % en 2001). Le contentieux porté devant le juge aux affaires familiales représente 58 % de l'ensemble de ces affaires nouvelles contre 50 % en 1996 : si les contentieux post-divorces diminuent de 7,2 % entre 2001 et 2002, les contentieux de ruptures d'union continuent leur progression (+ 1,4 %), moins marquée toutefois que celle des contentieux relatifs aux enfants naturels (+ 3 %). Alors qu'ils avaient diminué jusqu'en 2001, les contentieux de la responsabilité et de l'impayé ont enregistré respectivement des augmentations de 3,3 % et 4,3 % entre 2001 et 2002. Le premier de ces contentieux représente 45 % des procédures de référé engagées devant les tribunaux de grande instance. Enfin, les contentieux de l'exécution enregistrent une baisse de 5,2 %, essentiellement due à la réduction du nombre de recours formés contre les décisions des commissions de surendettement, alors que les saisies mobilières ont progressé de 58,2 %.
Alors qu'il baissait continûment depuis 1996, le nombre d'affaires terminées par les tribunaux de grande instance (579 184) a augmenté de 0,1 % en 2002, l'effet négatif de la mise en _uvre de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence sur la tenue des audiences civiles semblant ainsi s'estomper. Cette amélioration n'empêche pas une nouvelle augmentation du stock d'affaires restant à traiter (619 750) au 31 décembre 2002, mais dans une moindre propension que l'année précédente au cours de laquelle le stock avait le plus progressé (+ 21 000 affaires). La durée moyenne de traitement des affaires terminées en 2002 s'est établie à 9,4 mois contre 9,1 mois en 2001.
_ Les tribunaux d'instance
Après une augmentation en 1999 et 2000 due à l'élévation du taux de ressort de ces juridictions et du seuil de saisine par simple déclaration au greffe, puis une stabilisation en 2001, le nombre d'affaires nouvelles (497 503) portées devant les tribunaux d'instance a augmenté de 0,5 % en 2002. Représentant 27,8 % de l'ensemble des contentieux portés devant les tribunaux d'instance les affaires de tutelles ont encore progressé en 2002, mais à un rythme plus rapide (+ 7,3 % entre 2001 et 2002) (). Le contentieux de l'impayé - qui représente 41 % des affaires soumises à ces juridictions - continue sa progression, de l'ordre de 1,1 % en 2002 et il en est de même en référé.
Relevant de la compétence des greffes des tribunaux d'instance, les acquisitions de nationalité française ont augmenté de 0,8 % entre 2001 et 2002 ; l'acquisition anticipée de nationalité a attiré moins de jeunes qu'au cours des années précédentes (), les naturalisations de jeunes au bénéfice de l'effet familial ainsi que les souscriptions massives observées en 1998 et 1999 à la suite de la loi du 16 mars 1998 ayant sans doute en partie limité le nombre d'acquisitions susceptibles d'être demandées par ces jeunes. Le PACS constitue également une source d'activité importante pour les greffes des tribunaux d'instance tant au titre de l'inscription des déclarations de PACS, de l'ordre de 25 000 en 2002, soit le niveau le plus élevé depuis sa création, que des délivrances de certificats de non-PACS, souvent demandés par les notaires ou les agents immobiliers à l'occasion d'achats de biens immobiliers ou de successions et dont le nombre (620 000) a doublé entre 2001 et 2002.
Après avoir baissé en 2001, le nombre d'affaires terminées (481 113) est reparti à la hausse en 2002, avec une augmentation de 1,6 %. Cette amélioration n'a toutefois pas eu d'incidence sur le stock d'affaires restant à traiter au 31 décembre 2002 (421 079) qui s'est accru de 16 390 affaires, sous l'effet de l'augmentation du nombre d'affaires nouvelles. Après avoir légèrement fléchi en 2001, la durée moyenne des affaires terminées est donc repassée au-dessus de la barre des cinq mois, pour s'établir à 5,1 mois.
Avec 548 746 condamnations inscrites au casier judiciaire national, les juridictions pénales ont prononcé en 2001 un nombre de condamnations en baisse de 6 % par rapport à 2000. Cette diminution concerne surtout les juridictions pour majeurs tels que les tribunaux correctionnels (- 6,2 %), les cours d'appel (- 9,3 %) et les tribunaux de police (- 7,4 %) ; à l'inverse, les condamnations prononcées par les juridictions de mineurs ont progressé (+ 4,8 % pour les juges des enfants, + 3,5 % pour les tribunaux pour enfants) ainsi que les arrêts de cours d'assises à la suite de l'instauration du double degré de juridiction (+ 4,9 % pour les majeurs ; + 13,6 % pour les mineurs).
La structure des peines ne change pas, les peines d'emprisonnement ferme continuant de diminuer en 2001, de l'ordre de 2,5 %, les premières exploitations statistiques pour l'année 2002 montrant toutefois une hausse de 6 % des peines fermes privatives de liberté, ce qui expliquerait la forte progression de la population carcérale constatée en 2003.
Après s'être stabilisée durant deux ans, la durée moyenne des affaires pénales ayant atteint le stade du jugement s'est de nouveau allongée, pour atteindre, comme le montre le tableau figurant ci-après, 11,2 mois, cette dégradation touchant tant les crimes que les délits et les contraventions de cinquième classe.
DURÉE MOYENNE DES PROCÉDURES PÉNALES (en mois) | |||||||
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 | |
Toutes condamnations |
10,3 |
9,7 |
10,3 |
10,7 |
10,8 |
10,8 |
11,2 |
Crimes |
nd |
nd |
nd |
30,2 |
31,7 |
30,6 |
30,9 |
Délits |
10,3 |
9,9 |
10,5 |
10,9 |
11,0 |
11,0 |
11,2 |
dont : vol, recel |
8,8 |
7,8 |
8,7 |
9,2 |
9,5 |
9,4 |
9,5 |
circulation routière |
4,3 |
4,3 |
3,9 |
3,8 |
3,8 |
3,7 |
4,0 |
stupéfiants |
18,2 |
17,1 |
18,3 |
18,7 |
18,6 |
17,9 |
18,6 |
étrangers |
5,9 |
5,9 |
6,1 |
8,1 |
6,8 |
5,7 |
6,0 |
Contraventions de 5e classe |
7,5 |
7,1 |
8,6 |
8,7 |
8,6 |
9,1 |
9,4 |
dont : circulation routière |
4,6 |
6,0 |
7,1 |
7,2 |
7,3 |
8,1 |
8,5 |
environnement |
7,4 |
7,1 |
9,4 |
9,8 |
9,8 |
10,4 |
10,5 |
coups et blessures volontaires |
9,3 |
6,9 |
8,5 |
9,0 |
9,5 |
9,8 |
10,2 |
(1) Sauf pour les crimes, les durées sont calculées par différence entre la date de la condamnation définitive et celle des faits. nd : valeur non disponible. Source : Ministère de la Justice |
_ Le parquet
Plus de 5,4 millions de plaintes, dénonciations et procès-verbaux ont été transmis aux parquets en 2002 : faisant suite à deux années d'augmentation, cette progression, de 1,4 %, est toutefois moins marquée qu'en 2001, année durant laquelle le nombre de procédures transmises s'était accru de 7,6 %. Sur cet ensemble, le nombre d'affaires non élucidées a encore augmenté, pour en représenter 66 % en 2002, au lieu de 42 % en 1990 et 54 % en 1992.
5,083 millions de procédures ont été traitées par les parquets soit une hausse de 2,8 % entre 2001 et 2002. Sur cet ensemble, certaines n'ont pas donné lieu à poursuite, soit que les infractions n'aient pas été caractérisées, que les charges aient été insuffisantes ou qu'il y ait eu des obstacles juridiques à la poursuite (380 013 affaires soit 17 % de plus qu'en 2001), soit que l'auteur de l'infraction n'ait pas été identifié, ce qui est le cas de 66 % des affaires traitées par les parquets, soit une progression de 1,9 % par rapport à 2001. Au total, 1,35 million d'affaires ont donc été susceptibles de recevoir une réponse pénale ; elles représentent 26,6 % des affaires traitées par les parquets, soit moins qu'en 2001 et 2000.
Sur ces affaires « poursuivables », 429 505 - soit 31,8 % - ont fait l'objet d'un classement sans suite pour inopportunité des poursuites, le taux de classement « sec » enregistrant ainsi une baisse d'un point par rapport à 2001. La part des classements pour faible gravité de l'infraction ou du dommage est passée de 40 à 35,8 % des classements « secs » entre 2001 et 2002, tandis que le classement tenant à l'impossibilité de localiser l'auteur des faits est passé de 25,3 à 28,3 % entre 2001 et 2002.
Après avoir baissé en 2001, le taux de réponse pénale - qui mesure la part des affaires poursuivables auxquelles a été apportée une réponse pénale - s'est établi à 68,2 %, principalement en raison de l'augmentation des procédures alternatives. La réponse pénale se répartit entre poursuites judiciaires, composition pénale et mesures alternatives aux poursuites :
- 21,4 % des affaires poursuivables (289 483) ont fait l'objet de mesures alternatives aux poursuites, soit une hausse de 7 % par rapport à 2001. Leur développement résulte pour une large part du recours de plus en plus fréquent aux rappels à la loi, qui représentent près de la moitié des mesures alternatives ;
- 0,5 % ont fait l'objet d'une composition pénale, contre 0,1 % en 2001 ;
- 46,3 % des affaires « poursuivables » (624 650) ont fait l'objet de poursuites devant une juridiction de jugement ou d'instruction, contre 46,8 % en 2001 : 61,3 % d'entre elles (383 274 affaires) ont été renvoyées devant les tribunaux correctionnels ; 23,5% (147 225 affaires) devant les tribunaux de police ; 9,1 % (56 712 affaires) aux juges des enfants ; allant à l'encontre d'une tendance observée durant sept années consécutives, le nombre d'affaires ayant fait l'objet d'une ouverture d'information auprès d'un juge d'instruction (37 439) a augmenté de 2,9 %.
ORIENTATIONS DES AFFAIRES POURSUIVABLES | ||||||
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 | |
Procès-verbaux, plaintes et dénonciations reçus |
4 964 743 |
4 954 988 |
4 932 196 |
5 007 674 |
5 385 826 |
5 461 024 |
dont auteur connu |
1 848 628 |
1 808 749 |
1 861 951 |
1 866 401 |
1 887 648 |
1 877 172 |
Transmissions à d'autres juridictions |
250 283 |
236 654 |
228 361 |
224 434 |
229 562 |
232 185 |
Variation du stock d'affaires en attente |
+ 107 439 |
+ 151 346 |
+ 116 981 |
+ 171 857 |
+ 211 543 |
+ 145 080 |
Affaires pénales traitées par les parquets |
4 607 021 |
4 566 988 |
4 586 854 |
4 611 383 |
4 944 721 |
5 083 759 |
Affaires non poursuivables |
3 446 115 |
3 372 994 |
3 323 906 |
3 318 575 |
3 616 873 |
3 733 366 |
- absence d'infraction, charges insuffisantes, motif juridique |
330 000 |
326 569 |
328 781 |
321 255 |
324 618 |
380 013 |
- défaut d'élucidation |
3 116 115 |
3 046 425 |
2 995 125 |
2 997 320 |
3 292 255 |
3 353 353 |
Affaires poursuivables |
1 160 906 |
1 193 994 |
1 262 948 |
1 292 808 |
1 327 848 |
1 350 393 |
Part des affaires traitées (%) |
env. 25,0 |
26,1 |
27,5 |
28,0 |
26,9 |
26,6 |
- Poursuites |
602 933 |
613 354 |
638 000 |
628 065 |
621 866 |
624 650 |
Part des affaires poursuivables (%) |
env. 52,0 |
51,4 |
50,5 |
48,6 |
46,8 |
46,3 |
- Procédures alternatives réussies |
140 000 |
163 799 |
214 108 |
250 051 |
269 996 |
289 483 |
Part des affaires poursuivables (%) |
env. 12,0 |
13,7 |
17,0 |
19,3 |
20,3 |
21,4 |
- Composition pénale |
- |
- |
- |
- |
1 511 |
6 755 |
Part des affaires poursuivables (%) |
0,1 |
0,5 | ||||
- Classements sans suite |
417 913 |
416 841 |
410 840 |
414 692 |
434 475 |
429 505 |
Part des affaires poursuivables (%) |
env. 36,0 |
34,9 |
32,5 |
32,1 |
32,7 |
31,8 |
Taux de réponse pénale |
env. 64,0 |
65,1 |
67,5 |
67,9 |
67,3 |
68,2 |
Source : cadres du parquet. |
_ La Cour de cassation
Le nombre d'affaires pénales nouvelles (8 310) soumises à la Cour de cassation a diminué de 6,2 % en 2002, amplifiant ainsi la tendance à la baisse observée pour la première fois depuis 1997 en 2001. Après avoir augmenté de 9,9 % en 2001, le nombre d'affaires terminées (8 814) en 2002 a diminué de 8 %.
Le nombre de cassations prononcées (345) a diminué de 28 %, pour ne représenter que 4 % des décisions rendues, contre 5 % en 2001, les rejets de pourvois représentant près de 60 % des seules affaires admises et les irrecevabilités 5,5 %. La procédure de non admission des pourvois est principalement utilisée pour toutes les affaires criminelles dans lesquelles les délais sont expirés sans qu'un mémoire ait été produit ou pour lesquelles le pourvoi n'a pas été soutenu par le demandeur. En 2002, 40 % des décisions rendues par la chambre criminelle étaient des décisions de non admission, ce pourcentage s'élevant à 34 % pour le premier semestre de l'année 2003.
_ Les cours d'appel
Après avoir diminué continûment durant trois ans, le nombre d'affaires nouvelles portées devant les chambres des appels correctionnels (51 555) a augmenté de 7,6 %. Cette augmentation porte exclusivement sur les condamnations prononcées, alors que les arrêts sur les intérêts civils ou en matière d'application des peines diminuent nettement. Le volume d'affaires terminées (49 111) s'est stabilisé, entraînant une augmentation du stock d'affaires pénales en cours qui, avec 26 127 affaires au 31 décembre 2002, représente six mois d'activité.
Après trois années de baisse consécutives, le nombre d'arrêts rendus par les chambres de l'instruction (35 300) a augmenté de 10 % en 2002 : si les arrêts rendus en matière criminelle ont diminué de 64 % par rapport à 2000, en raison de la suppression du double degré de l'instruction depuis l'adoption de la loi du 15 juin 2000, les arrêts statuant sur la détention provisoire et le contrôle judiciaire ont encore progressé (+ 10 %) ainsi que les arrêts statuant sur les autres décisions des juges d'instruction (+ 15,4 %).
_ Les tribunaux correctionnels
Après deux années de baisse consécutives, le nombre de jugements portant condamnations ou relaxes par les tribunaux correctionnels (412 219) a augmenté de 2,5 % en 2002. Cette évolution tient à l'augmentation du nombre d'affaires transmises par les parquets (+ 2,9 %) et les juges d'instruction (+ 1,2 %), soit un total de 11 000 affaires supplémentaires transmises.
Les condamnations (394 091) ont augmenté de 2,7 %, les relaxes (18 128) ont très légèrement baissé, de l'ordre de 0,6 %, entraînant ainsi une très légère baisse du taux de relaxe (4,4 % en 2002 au lieu de 4,5 % en 2000 et 2001). Dans le droit fil des évolutions déjà constatées les années précédentes, les modes de comparution rapide devant les tribunaux correctionnels ont encore augmenté, convocations par OPJ (233 752 affaires, soit une augmentation de 3 % par rapport à 2001) et comparutions immédiates (38 269 affaires, soit une augmentation de 20,7 % par rapport à 2001) ayant été appliquées à près de 71 % des affaires en 2002, contre 69 % en 2000 et 26 % en 1990.
_ Les tribunaux de police
Alors qu'il avait baissé de 8,2 % en 2001, le nombre de procédures transmises (13 025 804) aux officiers du ministère public près le tribunal de police a augmenté de 7,9 % en 2002. Les amendes forfaitaires impayées (12 157 285) constituent l'essentiel de ces procédures et ont augmenté de 7,9 %. Les amendes forfaitaires majorées ont augmenté de 15,2 % tandis que les classements sans suite ont diminué de 22 %, alors qu'ils avaient augmenté de 34,6 % en 2001. Les décisions de poursuite devant les tribunaux de police sont en hausse (+7,8 %) avec 572 352 affaires.
Le nombre d'affaires traitées par les tribunaux de police (709 820) a progressé de 3,6 % en 2002 : les contraventions de cinquième classe ont diminué de 8,6 % en 2002 tandis que celles des quatre premières classes ont augmenté de 17,6 %. Les contraventions des quatre premières classes ayant été traitées par ordonnance pénale ont augmenté de 13,5 % par rapport à 2001 tandis que le nombre de contraventions de cinquième classe traitées par ce biais a diminué de 12 % entre 2001 et 2002.
Si la situation des tribunaux administratifs se stabilise, celle des cours administratives d'appel demeure préoccupante.
_ Le Conseil d'État
Après avoir progressé de 46,3 % en 1998 à cause du contentieux des visas qu'il connaît en premier ressort et des reconduites à la frontière dont il est juge d'appel, le nombre d'affaires enregistrées au Conseil d'État a diminué de 10,76 % en 2002, alors que l'année précédente avait été marquée par une hausse du volume d'affaires nouvelles en raison du contentieux des élections municipales et cantonales.
ACTIVITÉ DU CONSEIL D'ÉTAT
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 (1) | |
Affaires enregistrées |
7 193 |
8 427 |
12 330 |
12 274 |
12 642 |
11 281 |
4 856 |
Affaires traitées |
11 228 |
9 450 |
10 988 |
12 236 |
12 553 |
11 402 |
5 022 |
Délai moyen théorique d'élimination des stocks |
11 mois |
11 mois |
11 mois |
10 mois |
10 mois |
10 mois et 3 sem. |
- |
(1) Du 1er janvier au 30 juin 2003. Source : Ministère de la Justice |
Le nombre d'affaires traitées en 2002 a diminué de 9,17 %, cette diminution résultant de la réforme de la procédure de règlement des questions de compétence à l'intérieur de la juridiction administrative intervenue par décret du 19 avril 2002.
Après avoir baissé continûment entre 1991 et 1998, le nombre d'affaires en stock a augmenté entre 1999 et 2001, avant de baisser de nouveau de 0,36 % en 2002, pour s'établir à 10 190 affaires. Ce stock reste toutefois inférieur à la capacité annuelle de jugement de cette juridiction. En outre, il est « rajeuni », l'objectif étant, pour le 31 décembre prochain, de ramener de 4,5 % à 1 % la part des affaires enregistrées depuis moins de trois ans et d'abaisser de 8 % à environ 5 % la part des affaires enregistrées depuis plus de deux ans mais moins de trois ans.
De dix mois et trois semaines en 2002, le délai théorique d'élimination du stock () s'est détérioré à la suite du transfert à la section du contentieux d'un stock de 712 dossiers de la commission spéciale de cassation des pensions supprimée le 1er avril 2002.
_ Les cours administratives d'appel
Après avoir triplé entre 1992 et 2000 en raison du transfert progressif à ces juridictions de l'appel des recours pour excès de pouvoir, le nombre d'affaires enregistrées dans les cours administratives d'appel a diminué pour la première fois en 2000, de l'ordre de 7 %, puis de nouveau, mais de façon beaucoup plus modeste (0,7 %) en 2002.
ACTIVITÉ DES COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 (1) | |
Affaires enregistrées |
12 477 |
14 330 |
16 056 |
16 540 |
15 375 |
15 267 |
8 174 |
Affaires traitées |
7 461 |
9 199 |
11 390 |
12 906 |
12 928 |
14 281 |
8 214 |
Délai moyen théorique |
3 ans |
3 ans |
3 ans |
2 ans |
3 ans |
2 ans |
- |
(1) Du 1er janvier au 30 juin 2003. Source : Ministère de la Justice |
Après s'être stabilisé en 2001, le volume d'affaires traitées a augmenté de 10,5 % en 2002, avec plus de 14 000 affaires jugées. Cette amélioration s'explique notamment par la création des cours administratives d'appel à Marseille en 1997 puis Douai en 1999 : la première a connu en 1999 la hausse la plus importante du nombre d'affaires réglées (+ 53,5 %) tandis que la seconde a, dès 2000, aligné son activité sur celle des autres juridictions. Le décalage entre le nombre d'affaires nouvelles et traitées ne permet pas de résorber le stock d'affaires qui, bien que de façon ralentie (+ 2,2 % en 2002 au lieu de + 6,2 % en 2001 et + 11,6 % en 2000), a continué de progresser entre 2001 et 2002. Au 31 décembre 2002, il s'élevait ainsi à près de 41 000 affaires, soit cinq fois plus qu'en 1992.
Après avoir continûment augmenté entre 1992 et 1997, le délai théorique d'élimination des stocks est repassé en dessous de la barre des trois ans en 2002, pour s'établir à deux ans et cinq mois.
_ Les tribunaux administratifs
Le nombre d'affaires enregistrées devant les tribunaux administratifs a diminué de 8,6 % entre 2001 et 2002. Cette évolution confirme ainsi le caractère conjoncturel de la progression de 9,1 % observée en 2001, liée à la tenue d'élections locales et, corrélativement, la tendance à la baisse observée depuis 1999. Au total, entre 1991 et 2002, le nombre annuel d'affaires enregistrées en données nettes des séries () aura progressé de 52,5 %.
Alors que le nombre d'affaires traitées a progressé de 81,6 % entre 1991 et 2002, il a diminué de 1,5 % en 2002, notamment en raison du traitement d'affaires anciennes. Toutefois, grâce à la diminution du nombre d'entrées, les tribunaux administratifs, le ratio des affaires traitées sur les affaires enregistrées atteint 106 %.
ACTIVITÉ DES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 (1) | |
Affaires enregistrées |
101 590 |
123 834 |
117 429 |
113 059 |
123 354 |
112 703 |
60 678 |
Affaires traitées |
96 367 |
104 615 |
112 206 |
118 991 |
120 773 |
118 915 |
63 171 |
Délai moyen théorique |
1 an |
2 ans |
1 an |
1 an |
1 an |
1 an |
- |
(1) Du 1er janvier au 30 juin 2003. Source : Ministère de la Justice |
Interrompue en 2001 en raison de l'important contentieux électoral porté devant les tribunaux administratifs, la réduction du nombre d'affaires en stock (196 068) initiée en 2000 a repris en 2002 ; de l'ordre de 3,6 %, elle résulte essentiellement de la réduction du nombre d'affaires enregistrées cette même année. Après avoir diminué régulièrement entre 1991 et 1999, le délai théorique d'élimination du stock s'est stabilisé à un an et huit mois ; alors que le nombre d'affaires nouvelles a augmenté en 2001 et que de nombreuses affaires anciennes ont été réglées en 2002, cette stabilité atteste du maintien de la capacité de jugement des tribunaux administratifs. En revanche, le délai moyen « enregistrement-notification » des affaires jugées, mis en place à partir de 2000, s'est détérioré, passant de 1 an, 9 mois et 19 jours en 2001 à 1 an, 11 mois et 4 jours en 2002, sous l'effet du traitement d'un important volume d'affaires anciennes en 2002.
Tant pour les juridictions judiciaires qu'administratives, la Chancellerie s'est attachée à mettre en _uvre des mesures structurelles destinées à améliorer le fonctionnement des juridictions, et dont certaines étaient inscrites dans le rapport annexé à la loi de programmation et d'orientation du 9 septembre 2002.
_ Afin de remédier à l'encombrement des cours d'appel, la Chancellerie a conclu, à la fin de l'année 2002, deux contrats de résorption de stocks, le premier avec la cour d'appel de Douai, le second, avec la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
Dans ces contrats (), qui ont pris effet le 1er janvier 2003 pour une durée de trois ans renouvelable, chaque juridiction s'engage à atteindre des objectifs, quantitatifs et qualitatifs, révisables annuellement, après concertation avec les services de la Chancellerie, afin de s'adapter aux aléas rencontrés l'année précédente et aux évolutions des contentieux. En contrepartie, des moyens humains et matériels sont octroyés à la juridiction, mais à titre provisoire seulement. En effet, à l'issue du contrat, les emplois supplémentaires de magistrats localisés au début du plan dans les juridictions concernées seront supprimés, les magistrats restant en surnombre dans la juridiction, jusqu'à résorption des emplois vacants ; il en sera de même au greffe, tandis que la dotation globale de fonctionnement de la cour d'appel sera réduite à due concurrence des moyens de fonctionnement alloués pour l'exécution dudit contrat.
Dès 2004, au moins deux nouveaux contrats seront conclus, avec les cours d'appel de Bastia et de Lyon. Et une généralisation des contrats d'objectifs est prévue à l'horizon 2006, pour tenir compte de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF).
_ Conformément au rapport annexé à la loi d'orientation et de programmation du 9 septembre 2002 qui, faisant état de la nécessité de recentrer le juge sur l'exercice de ses missions juridictionnelles, préconisait « une démarche de retrait des magistrats des commissions à caractère purement administratif ou dans lesquelles l'institution judiciaire n'a pas vocation à figurer, eu égard à ses missions », la Chancellerie a entamé le processus de désengagement des magistrats des commissions administratives.
A cette fin, elle a actualisé une liste élaborée en 1996, qui recensait environ 150 commissions et organismes de toutes natures, à compétences aussi bien nationales que locales. Un travail considérable et minutieux a été nécessaire en raison du caractère disparate des fondements juridiques de ces organes (loi, ordonnances, décrets, arrêtés, circulaires) et de leur éparpillement dans des domaines très variés.
Ont été recensées les commissions administratives répondant à la définition fournie par l'article R. 771-2 du code de l'organisation judiciaire, qui considère comme tels tous les organismes, quel que soit l'objet de leurs délibérations, qui ne rendent pas de décisions juridictionnelles. Ont ainsi été exclues les commissions qualifiées par la loi de commissions juridictionnelles, telles que la civi. Par ailleurs, seules les commissions administratives comportant des magistrats de l'ordre judiciaire exerçant en juridiction ont été retenues. Ont été écartées les commissions comportant des représentants du ministère de la Justice ainsi que celles comportant exclusivement des juges administratifs ou des juges consulaires. Les commissions internationales n'ont pas non plus été répertoriées. Enfin, les autorités administratives, dont quatorze d'entre elles comprennent des magistrats le plus souvent en situation de détachement, ne font pas partie du champ de l'étude en raison de leur nature et de leurs attributions particulières.
Quatre cents commissions environ ont été étudiées par la direction des services judiciaires. Parmi elles, sur le fondement des critères énoncés ci-dessus, 222 commissions administratives comportant ou susceptibles de comprendre des magistrats exerçant en juridiction ont finalement été répertoriées. Il s'agit de 12 commissions de discipline ; 39 commissions électorales ; 34 commissions d'inscription et de qualification et de jurys de concours ; 29 commissions compétentes en matière judiciaire, pénitentiaire ou de protection judiciaire de la jeunesse ; 13 commissions relatives aux professions judiciaires ; 24 commissions à caractère social ; 17 commissions à caractère économique et fiscal ; 12 commissions compétentes en matière de culture et de communication ; 13 commissions compétentes en matière d'aménagement du territoire ; 4 commissions compétentes en matière d'aide aux rapatriés ; 5 commissions compétentes en matière d'outre-mer ; 20 commissions diverses.
Parmi ces commissions répertoriées, une trentaine peut d'ores et déjà faire l'objet d'un retrait des magistrats la composant. C'est notamment le cas des commissions suivantes :
- s'agissant des commissions de discipline : les chambres de discipline des pharmaciens, des vétérinaires et les conseils de disciplines des employés communaux ;
- s'agissant des commissions électorales : les commissions relatives aux élections aux chambres des métiers et aux conseils d'administration de la sécurité sociale ;
- s'agissant des commissions à caractère social : les commissions d'aide sociale et la commission d'attribution de la médaille française ;
- s'agissant des commissions à caractère économique : la commission d'autorisation de transfert de débits de boisson et la commission d'attribution d'aide aux personnes âgées ;
- s'agissant des commissions compétentes en matière d'aide aux rapatriés : les quatre commissions répertoriées.
La liste des commissions pour lesquelles une modification de la composition est immédiatement envisageable sera soumise à la consultation des syndicats puis au travail interministériel afin d'aboutir, avant la fin de l'année, à une première liste de commissions pour lesquelles un retrait des magistrats pourra intervenir à très court terme.
Une seconde liste de commissions, comportant un certain nombre de commissions électorales et de commissions relatives à l'aménagement du territoire, pour lesquelles le retrait des magistrats pourra intervenir à moyen terme, sera soumise à la consultation des juridictions et à un examen interministériel plus approfondi.
Enfin, s'agissant des commissions récemment créées, telles que le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante ou la commission de l'aléa thérapeutique, elles ne pourront échapper, à plus long terme, à un réexamen de leur composition. En effet, la participation de magistrats à ces commissions, créées pour faire face à l'apparition de risques nouveaux d'ordre scientifique, sanitaire, alimentaire ou industriel, dans le but de prévenir ceux-ci et de procéder à une indemnisation avant tout recours juridictionnel, est susceptible d'être en contradiction avec la notion de juge impartial, prise en compte par la jurisprudence de la Cour de cassation et du Conseil d'État, ainsi qu'avec celle de la séparation effective des pouvoirs administratif et judiciaire.
_ La Chancellerie s'est également attachée à renforcer l'assistance du magistrat, conformément aux orientations retenues dans la loi du 9 septembre 2002. À cette fin, le nouveau statut des greffiers, entré en vigueur le 1er juin 2003, a prévu une extension des missions des greffiers en matière de recherches juridiques, de mise en état des dossiers et de participation à la rédaction des décisions selon les directives des magistrats. En outre, deux groupes de travail, l'un pour le domaine pénal, l'autre pour le domaine civil, ont été respectivement mis en place le 20 décembre 2002 et le 25 mars 2003, pour définir le périmètre fonctionnel du greffier rédacteur. Le groupe de travail sur le domaine pénal ayant achevé ses travaux le 30 juin dernier, les premières expérimentations ont débuté en octobre 2003 dans deux cours d'appel (Bordeaux et Rouen) et dix tribunaux de grande instance (Arras, Bayonne, Bergerac, Bordeaux, Castres, Grasse, Lyon, Périgueux, Rouen et Valence). Une formation d'adaptation dispensée par l'École Nationale des Greffes, en liaison avec l'École Nationale de la Magistrature, est dispensée aux greffiers participant à cette expérimentation. Le groupe de travail chargé du domaine civil poursuit son étude du périmètre fonctionnel et l'expérimentation devrait être mise en place en juin 2004.
_ Principales bénéficiaires du renforcement des moyens prévu par la programmation quinquennale pour les juridictions administratives, les cours administratives d'appel se sont engagées dans des contrats d'objectifs à ramener à un an le délai de traitement des affaires portées devant les juridictions administratives, d'ici à 2007, conformément aux prescriptions figurant dans le rapport annexé à la loi du 9 septembre 2002.
Elles se sont ainsi engagées à : mettre en _uvre un traitement différencié des dossiers selon leur degré de difficulté ; rationaliser davantage l'analyse et l'exploitation des flux d'entrée et du stock, pour une détection plus systématique des affaires relevant d'un traitement par ordonnance ; augmenter le nombre de rapporteurs dans les chambres ; développer les fonctions d'aide à la décision pour les magistrats.
En contrepartie, il reviendra au Conseil d'État de fournir les moyens nécessaires au fonctionnement des juridictions grâce à une amélioration de l'outil informatique, à une augmentation du nombre de postes de magistrats et de fonctionnaires des greffes, au recrutement d'assistants de justice, et, dans un certain nombre de cas, à la réalisation de travaux d'agrandissement ou d'adaptation des locaux pour pouvoir accueillir les nouveaux arrivants.
Une évaluation des résultats sera pratiquée chaque année et des adaptations pourront être décidées d'un commun accord entre le secrétaire général du Conseil d'État et la cour administrative concernée, après consultation du Conseil Supérieur des Tribunaux administratifs et des Cours administratives d'appel.
A titre expérimental, un contrat d'objectifs a également été conclu avec le tribunal administratif d'Orléans. Cette procédure pourra éventuellement être étendue à d'autres juridictions du premier degré sur la base du volontariat.
Ces efforts de contractualisation seront confortés par la création, conformément à la loi d'orientation et de programmation du 9 septembre 2002, d'une huitième cour administrative d'appel, destinée à alléger définitivement la charge de la cour administrative d'appel de Paris, et de deux tribunaux administratifs supplémentaires pour alléger la charge des juridictions les plus encombrées, notamment en région parisienne et dans les régions du pourtour méditerranéen.
_ Comme ce fut déjà le cas avec le décret n° 2001-710 du 31 juillet 2001, qui ouvrit aux présidents et présidents de chambre des cours administratives d'appel, la possibilité de régler par voie d'ordonnance certaines affaires simples et ramena de cinq à trois magistrats la formation de droit commun, le pouvoir réglementaire s'est efforcé de concourir au désencombrement de ces juridictions, avec le décret n° 2003-543 du 24 juin 2003 relatif aux cours administratives d'appel et modifiant la partie réglementaire du code de la justice administrative.
Tout d'abord, afin de décourager les appels dilatoires ou dépourvus de pertinence, ce décret modifie l'article R. 811-7 du code de la justice administrative pour poser le principe du recours obligatoire à un avocat. Loin de restreindre l'accès au juge, cette mesure part du constat que les requêtes présentées sans le concours d'un avocat sont pour la moitié vouées au rejet par ordonnance, notamment pour irrecevabilité. En permettant aux auxiliaires de justice d'éviter que des personnes n'interjettent appel sans aucune chance de succès et ne commettent des erreurs procédurales, cette disposition est de nature à mieux garantir les droits des justiciables grâce à l'intervention de l'avocat. Des exceptions de trois ordres sont toutefois maintenues :
- au profit des agents publics, lorsqu'ils interjettent appel d'un jugement statuant sur les recours pour excès de pouvoir relatifs à leur situation personnelle, par souci de parallélisme avec la dispense dont bénéficient les employés de droit privé devant les juridictions prud'homales ;
- en cas de litige en matière de contraventions de grande voirie, mentionnées à l'article L. 774-8 du code de justice administrative ;
- pour les demandes d'exécution d'un arrêt de la cour administrative d'appel ou, devant celle-ci, d'un jugement rendu par le tribunal administratif situé dans son ressort et frappé d'appel.
En outre, ce même décret modifie l'article R. 811-1 du code de justice administrative afin de supprimer, pour les requêtes nouvelles enregistrées après le 1er septembre 2003, la possibilité d'appel pour certains litiges jugés par un juge unique dont la liste figure à l'article R. 222 -13 de ce même code.
Enfin, l'article R. 222-1 du code de justice administrative est modifié afin de permettre au juge d'appel de statuer par ordonnance et de régler l'affaire au fond lorsqu'une ordonnance rendue en première instance, et frappée d'appel, est entachée d'un vice qui conduit à son annulation - ce qui impliquait jusqu'à présent son passage en formation collégiale - mais qu'il apparaît, à l'examen du dossier, qu'une autre solution, elle-même susceptible d'être retenue par ordonnance, peut être adoptée.
III. - LA MISE EN PLACE DES JURIDICTIONS DE PROXIMITÉ : DES PERSPECTIVES ENCOURAGEANTES
Instituées dans le ressort de chaque cour d'appel par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice qui en a indiqué les compétences et les principales règles d'organisation, les juridictions de proximité sont désormais en cours d'installation : le cadre de leur activité a été précisé par voies législative et réglementaire, les recrutements s'organisent et le projet de loi de finances pour 2004 prévoit les crédits nécessaires pour assurer le fonctionnement de ces nouvelles juridictions.
La Chancellerie a confié à une mission le soin de suivre l'installation de ces nouvelles juridictions : réunissant treize personnes et dirigée par un inspecteur des services judiciaires rattaché au directeur des services judiciaires, la mission est en relation avec les cours d'appel qui assurent l'instruction des candidatures ; elle effectue le contrôle de la recevabilité des dossiers, sélectionne ceux qui seront proposés par le ministre au Conseil supérieur de la magistrature et fournit des informations aux personnes qui souhaitent se porter candidates, tout en coordonnant l'activité des différents services concernés par la mise en place de ces juridictions.
Le décret n° 2003-542 du 23 juin 2003 a précisé les compétences et l'organisation de ces nouvelles juridictions de première instance. A cette fin, il modifie le code de l'organisation judiciaire, le nouveau code de procédure civile, le code de procédure pénale ainsi que le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Aux termes de l'article L. 331-2 du code de l'organisation judiciaire tel qu'il résulte de la loi du 9 septembre 2002, cette nouvelle juridiction connaît en dernier ressort, en matière civile, des « actions personnelles mobilières dont elle est saisie par une personne physique pour les besoins de sa vie non professionnelle, jusqu'à la valeur de 1 500 euros ou d'une valeur indéterminée mais qui ont pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 1 500 euros ». Cet article a également donné compétence à la juridiction de proximité pour connaître des procédures d'injonction de faire et de payer dans les mêmes conditions. Le décret précité du 23 juin 2003 exclut expressément de ce champ les contestations en matière de baux à loyer d'immeubles ou de baux à usage commercial, artisanal ou industriel qui échappent également à la compétence des tribunaux d'instance, conformément à l'article R. 321-2 du code de l'organisation judiciaire (). De même, il prévoit, dans un nouvel article R. 331-2 de ce même code, que la juridiction de proximité connaît toutes les demandes incidentes, exceptions ou moyens de défense qui ne soulèvent pas une question relevant de la compétence exclusive d'une autre juridiction, sauf si le moyen de défense ou l'exception implique l'examen d'une question de nature immobilière pétitoire. Il précise également l'articulation des compétences entre la juridiction de proximité et le tribunal d'instance, dont la compétence générale d'attribution est modifiée ().
Le juge de proximité s'est également vu reconnaître par l'article 10 de la loi d'orientation et de programmation pour la justice des compétences pénales de deux ordres :
- d'une part, la validation, sur délégation du président du tribunal de grande instance, des mesures de composition pénale prévues aux articles 41-2 et 41-3 du code de procédure pénale () ;
- d'autre part, le jugement de certaines contraventions de police commises par les personnes physiques. Introduit par l'article 27 du décret du 23 juin 2003, l'article R. 53-40 du code de procédure pénale énumère ces contraventions, qui sont extrêmement variées : en effet, les juges de proximité sont compétents pour juger de nombreuses contraventions prévues par le code pénal, qui vont de la première à la cinquième classes et sont contre les personnes, mais également contre les biens, l'État, la nation ou la paix publique, la vie ou l'intégrité des animaux. Ils sont également compétents pour connaître de contraventions prévues par d'autres codes - code de la route, code de la santé publique, code forestier, code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme, code rural - ainsi que par des décrets, tels que décret du 22 mars 1942 sur la police, la sûreté et les voies ferrées d'intérêt général et local ou encore le décret du 27 juin 1996 relatif à la lutte contre la rage. Pour s'en tenir à quelques exemples, les juges de proximité jugeront désormais de certaines contraventions des quatre premières classes réprimées par le code de la route, de l'abandon d'armes ou d'objets dangereux (contravention de la première classe réprimée par l'art. R. 641-1 du code pénal), de la divagation d'animaux dangereux (contravention de la deuxième classe réprimée par l'art. R. 622-2 du code pénal), des bruits ou tapages injurieux ou nocturnes (contravention de la troisième classe réprimée par l'art. R. 623-2 du code pénal) ; des violences légères (contravention de la quatrième classe réprimée par l'art. R. 624-1 du code pénal) ; des violences ayant entraîné une interruption de travail inférieure à huit jours ou de l'intrusion dans les établissements scolaires (contraventions de la cinquième classe respectivement réprimées par les article R. 625-1 et R. 645-12 du code pénal). Ils connaîtront également des contraventions réprimant les bruits de voisinage et le fait de contrevenir à l'interdiction de fumer prévue dans certains lieux affectés à un usage collectif (art. R. 48-2 et R. 355-28-13 du code de la santé publique), le fait de voyager dans un train sans titre de transport (art. 80-3 du décret du 22 mars 1942 précité) ou encore le fait d'allumer du feu en contravention avec les dispositions de l'article L. 322-1 du code forestier (art. R. 322-5 de ce code).
Après la loi d'orientation et de programmation du 9 septembre 2002 et la loi organique n° 2003-153 du 26 février 2003 relative aux juges de proximité, le décret n° 2003-542 du 23 juin 2003 a précisé sur plusieurs points l'organisation de ces juridictions.
Il a tout d'abord précisé le siège et le ressort des juridictions de proximité qui, conformément à l'article L. 331-1 du code de l'organisation judiciaire (coj) tel qu'introduit par la loi d'orientation et de programmation du 9 septembre 2002, sont instituées dans le ressort de chaque cour d'appel. Le nombre et l'implantation de ces juridictions sont identiques à ceux des tribunaux d'instance, dont il partage le greffe et le secrétariat-greffe (art. R. 811-7 du coj, introduit par l'art. 14 du décret du 23 juin 2003). Il fixe également les règles applicables en cas de création, de modification du ressort ou de suppression d'une juridiction de proximité (art. R. 331-4 du coj).
Au-delà de cette identité de ressort, les juridictions de proximité, bien que juridictions autonomes, entretiennent des liens étroits avec les tribunaux d'instance. En effet, la loi d'orientation et de programmation pour la justice a confié au juge d'instance le soin d'exercer les fonctions des juges de proximité lorsque ceux-ci sont absents ou empêchés ou lorsqu'ils sont en nombre insuffisant (art. L. 331-9 du coj) ; elle lui a également confié le soin de statuer en tant que juridiction de proximité en cas de difficulté juridique sérieuse portant sur l'application d'une règle de droit ou sur l'interprétation du contrat liant les parties (art. L. 331-4 du coj). En outre, la loi organique n° 2003-153 du 26 février 2003 relative aux juges de proximité a confié au magistrat du siège du tribunal de grande instance chargé de la direction et l'administration du tribunal d'instance le soin d'organiser l'activité et les services de la juridiction de proximité et de fixer par ordonnance annuelle la répartition des juges de proximité dans les différents services de la juridiction(). Elle lui a également confié le soin de conduire l'entretien précédant l'évaluation de l'activité professionnelle des juges de proximité (art. 12-1 du statut de la magistrature). Aux termes des articles R. 331-5 et R. 331-6 du coj, créés par le décret du 23 juin dernier, c'est à ce magistrat qu'il revient d'installer le juge de proximité et de recevoir son rapport d'activité annuel. Et il lui incombe également de présider, dans les juridictions de proximité comportant un effectif d'au moins trois juges de proximité, les assemblées des magistrats du siège et du parquet ainsi que les assemblées des magistrats du siège (art. R. 762-11 du coj).
La juridiction de proximité entretient également des liens avec le tribunal de grande instance. Aux termes de l'article 41-22 du statut de la magistrature tel qu'il résulte de la loi organique du 26 février 2003, c'est au président de cette juridiction qu'il revient de transmettre un dossier à un autre juge de proximité du ressort du TGI à la demande de l'une des parties ou du juge de proximité, lorsque le litige dont ce dernier doit connaître présente un lien avec son activité professionnelle ou lorsqu'il entretient ou a entretenu des relations professionnelles avec l'une des parties. En outre, le nouvel article R. 311-38-1 du code de l'organisation judiciaire confie au président du tribunal de grande instance le soin de procéder à l'inspection des juridictions de proximité situées dans le ressort de son tribunal et de s'assurer de la bonne administration des services judiciaires et de l'expédition normale des affaires.
Si loi d'orientation et de programmation du 9 septembre 2002 a précisé les grandes lignes du fonctionnement des juridictions de proximité, en indiquant notamment qu'elles statuent à juge unique (art. L. 331-7 du coj) et qu'elles peuvent tenir des audiences foraines (art. L. 331-8 du coj), le décret du 23 juin dernier apporte plusieurs précisions. Il prévoit ainsi pour les juges de proximité le port d'une médaille, le choix de cet insigne les rapprochant ainsi des conseillers prud'homaux ; il organise les assemblées générales des juridictions de proximité qui seront instituées dans les juridictions comportant au moins trois juges de proximité (art. R. 762-9 et R. 762-10 du coj) et précise leurs attributions ; il précise les lieux dans lesquels peuvent être tenues des audiences foraines (art. R. 321-44 du coj). Enfin, il apporte des modifications au nouveau code de procédure civile pour étendre aux juridictions de proximité certaines dispositions relatives aux tribunaux d'instance.
Conformément aux orientations définies dans le rapport annexé à la loi du 9 septembre 2002, ces juridictions ont vocation à être animées par des juges non professionnels ; cette composition fait d'ailleurs leur spécificité et leur raison d'être, la proximité recherchée avec les justiciables passant tant par la nature des litiges traités, la simplicité des règles procédurales applicables ou la proximité géographique que par la composition de ces juridictions. Aussi la loi organique n° 2003-153 du 26 février 2003 a-t-elle précisé le statut et les conditions de recrutement des juges de proximité en y consacrant un chapitre V quinquies inséré dans le statut de la magistrature.
Nommés pour une durée de sept ans non renouvelable dans les conditions prévues pour les magistrats du siège (art. 41-17 du statut), ces juges sont soumis au statut de la magistrature (art. 41-19 du statut), sous réserve de certains aménagements : leur régime disciplinaire a ainsi été aménagé pour tenir compte du caractère temporaire de l'exercice de leurs fonctions juridictionnelles (art. 41-23 du statut) ; des règles déontologiques spécifiques ont été instituées en raison de la faculté qui leur est ouverte d'exercer concomitamment une activité professionnelle (art. 41-22 du statut), des règles d'incompatibilités spécifiques ayant été prévues pour les membres des professions juridiques et judiciaires afin de leur interdire l'exercice de leurs fonctions juridictionnelles dans le ressort du tribunal de grande instance duquel ils ont leur domicile professionnel.
La loi organique du 26 février 2003 s'est également attachée à définir les conditions de recrutement et de formation des juges de proximité. La longueur de la procédure de recrutement () explique d'ailleurs qu'à ce jour seuls 32 dossiers aient été soumis au CSM.
Prévus à l'article 41-17 du statut de la magistrature, les critères devant être remplis par les personnes désireuses d'exercer les fonctions de juge de proximité privilégient l'expérience professionnelle. Les candidats peuvent ainsi être : d'anciens magistrats de l'ordre judiciaire ou administratif ; des personnes qui remplissent les conditions requises pour présenter le concours d'accès à l'enm ou qui sont membres ou anciens membres des professions libérales juridiques ou judiciaires soumises à un statut ou dont le titre est protégé, et qui, en tout état de cause, justifient de quatre années d'exercice au moins dans le domaine juridique ; d'anciens fonctionnaires des services judiciaires des catégories A et B, que leur expérience qualifie pour l'exercice des fonctions judiciaires ; des conciliateurs de justice ayant exercé leur fonction pendant au moins cinq ans ; enfin, des personnes justifiant de vingt-cinq années au moins d'activité dans des fonctions impliquant des responsabilités de direction et d'encadrement dans le domaine juridique ().
L'article 35-7 du décret du 7 janvier 1993, tel qu'il résulte du décret n° 2003-438 du 15 mai 2003, a précisé les conditions de traitement des candidatures : dépôt des demandes des intéressés auprès des chefs de la cour d'appel dans le ressort de laquelle ils résident ; instruction des candidatures et transmission au garde des Sceaux avec un avis motivé ; transmission par celui-ci à la formation du csm compétente à l'égard des magistrats du siège des projets de nomination aux fonctions de juge de proximité, auxquels est jointe la liste de tous les candidats à ces fonctions dans la même juridiction, étant précisé que les dossiers de l'ensemble des candidats sont tenus à la disposition du csm.
A la fin du mois d'août dernier, plus de 4 700 demandes de renseignements ou de dossiers avaient été adressées à la mission « juges de proximité » et trente-cinq dossiers, sur les soixante déjà reçus par la mission, ont été proposés au csm dès la première semaine de juillet.
Même s'il faut se garder de toute extrapolation rapide compte tenu du petit nombre de dossiers alors transmis, il est intéressant d'examiner le profil des candidats proposés par la Chancellerie.
L'examen de leur origine professionnelle montre que les différents viviers pointés par le législateur pour recruter les juges de proximité ont été exploités. En effet, il s'agit : pour 31 %, de professionnels libéraux et officiers ministériels, en activité ou à la retraite ; pour 20 %, d'anciens magistrats de l'ordre judiciaire (notamment un ancien premier président) ou de l'ordre administratif (ancien conseiller maître à la Cour des comptes ; ancien président de section d'une chambre régionale des comptes ; ancien conseiller d'État en service extraordinaire ; ancien maître des requêtes au Conseil d'État) ; pour 11 %, de personnes disposant d'une expérience de 25 ans d'encadrement et de direction dans le domaine juridique ; pour 9 %, de conciliateurs.
Comme le laisse présager l'examen de ces profils, l'âge moyen des candidats proposés au csm est sensiblement plus élevée que la limite d'âge de trente-cinq ans imposée par l'article 41-17 du statut pour le recrutement de certains juges de proximité, puisqu'il est de 56,6 ans, contre 54,2 ans pour l'ensemble des dossiers reçus par la mission. Dans les dossiers reçus et proposés, les candidatures masculines sont majoritaires, respectivement de l'ordre de 58 % et 66 %. Enfin, la répartition par cour d'appel des dossiers proposés au csm est inégale, les juridictions du nord et de l'ouest, très réactives, concentrant davantage de candidatures (par ordre décroissant : dix sur Paris, cinq sur Amiens, Douai et Rennes ; quatre à Versailles ; deux à Bordeaux et une à Aix-en-Provence, Grenoble, Reims et Riom). Il semblerait toutefois, que, à la lumière des nouveaux dossiers reçus, les juridictions du sud constituent un vivier de candidatures important.
L'article 41-19 du statut soumet les futurs juges de proximité à une obligation de formation qui peut prendre deux formes et dont les conditions d'organisation ont été précisées dans le décret n° 2003-438 du 15 mai 2003 modifiant le décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 pris pour l'application de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. L'objectif est ainsi de donner à ces magistrats temporaires une formation leur permettant d'assumer leurs nouvelles missions juridictionnelles sans trop de lourdeur, certains d'entre eux exerçant concomitamment une activité professionnelle.
La formation peut, dans une première hypothèse et à la demande du Conseil supérieur de la magistrature compétent pour procéder à la nomination des juges de proximité, présenter un caractère probatoire ; organisée par l'École nationale de la magistrature et comportant un stage en juridiction, elle donne lieu à la rédaction, par le directeur de l'ENM d'un bilan adressé à la formation compétente du csm et au garde des Sceaux ; c'est après examen de ce rapport que le csm nomme, le cas échéant, le candidat juge de proximité. Contrepartie de l'élargissement du vivier de recrutement, la faculté ainsi accordée au csm de soumettre le candidat à une formation probatoire devrait être de nature à éviter toute « frilosité » dans les nominations, celles-ci ayant lieu en connaissance de cause. Aux termes du nouvel article 35-11 du décret du 7 janvier 1993 pris pour l'application du statut de la magistrature, ces candidats suivent une formation de cinq jours consécutifs à l'enm, comprenant notamment des enseignements portant sur la déontologie, les principes de la procédure et le fonctionnement des juridictions, ainsi que l'apprentissage de la technique de la rédaction des jugements et de la tenue d'une audience. S'ensuit un stage en juridiction « à raison de vingt-quatre jours de présence effective en juridiction sur une période de douze semaines ».
L'article 35-12 du décret du 7 janvier 1993 précise les modalités de choix du lieu de ce stage, choix qui relève de la compétence de l'enm : afin de ne pas décourager les candidatures de personnes qui exerceraient une activité professionnelle concomitante et compte tenu du fait que ce stage ne se déroule pas par journées consécutives, il est précisé que le lieu de stage est choisi dans le ressort de la cour d'appel ou dans celui d'une cour limitrophe, dont relève la juridiction d'affectation du juge de proximité ou la juridiction pour laquelle une proposition d'affectation du candidat a été faite. En revanche, afin de préserver l'indépendance de ces juges ou candidats et anticipant les incompatibilités géographiques imposées aux juges de proximité, il est précisé que lorsque ces derniers sont membres ou anciens membres d'une profession libérale juridique ou judiciaire, ils ne peuvent effectuer ce stage dans une juridiction du ressort du tribunal de grande instance où ils exercent - ou ont exercé - leur activité professionnelle.
En tout état de cause, les candidats que le csm n'aura pas jugé utile de soumettre à une formation probatoire doivent suivre une formation organisée par l'ENM et effectuer un stage en juridiction. Si la formation à l'École est identique à celle précédemment décrite pour les candidats soumis à une formation probatoire, le stage est en revanche allégé, l'article 35-9 du décret du 7 janvier 1993 le limitant à seize jours de présence effective en juridiction sur une période de huit semaines, sa durée pouvant même, « à titre exceptionnel, être réduite par le Conseil supérieur de la magistrature, au vu de l'expérience professionnelle du candidat ».
Cette formation initiale est rémunérée, à hauteur d'une indemnité de vacation correspondant au taux unitaire par jour de formation, conformément à l'article 35-14 du décret du 7 janvier 1993.
Enfin, à cette formation initiale, s'ajoute une obligation de formation continue, d'une durée totale de dix jours pendant la période d'exercice des fonctions (art. 35-13 du décret du 7 janvier 1993). L'article 35-14 du décret du 7 janvier 1993 précise que toute journée de formation donne lieu à la perception d'une indemnité de vacation correspondant au taux unitaire (soit 70,20 euros par jour) qui, contrairement aux indemnités perçues au titre de la formation initiale, s'impute sur le total des vacations annuelles effectuées par les juges de proximité.
Réuni le 22 juillet dernier pour examiner les trente-cinq premières candidatures transmises par le garde des Sceaux, le Conseil supérieur de la magistrature a rejeté deux dossiers. La qualité des candidatures l'a conduit à recevoir vingt dossiers avec avis conforme, dont six avec un stage abrégé et treize avec un stage complet, et à soumettre treize autres dossiers à un stage probatoire.
Ont été soumis au stage abrégé, en raison de leur expérience évidente, tous les magistrats de l'ordre judiciaire et deux avocats dont les dossiers comportaient de nombreuses attestations, émanant plus particulièrement de magistrats. Ces personnes ont donc pris leurs fonctions dans les tous premiers jours du mois d'octobre. Ont été soumis à un stage non probatoire complet : certains avocats, les magistrats des juridictions administratives et financières, les maîtres de conférence des universités, les anciens hauts fonctionnaires ou fonctionnaires de catégorie A, un général de gendarmerie retraité, un commissaire de police retraité, un ancien officier actuellement délégué du procureur de la République de Bordeaux. En revanche, ont été soumis à une formation probatoire plusieurs anciens notaires ainsi que trois conciliateurs. Sans qu'il faille en tirer la conclusion que le csm a des positions de principe à l'égard de telle ou telle profession, ces données montrent avant tout qu'il a su utiliser avec pragmatisme l'outil que lui a offert le législateur pour s'ouvrir à des profils a priori atypiques - par exemple un urbaniste exerçant en libéral et une juriste exerçant dans une association familiale - à qui il a proposé de faire la preuve de leur capacité en les soumettant à une formation probatoire.
L'âge moyen des candidats retenus est de 57,39 ans ; les juges de proximité bénéficiant du stage abrégé sont toutefois plus âgés (61,17 ans) que ceux soumis au stage complet qui suit la prestation de serment (56,8 ans) et que les candidats devant effectuer une formation probatoire (56,31 ans). Comme le laissait présager l'examen des dossiers proposés et reçus - et à l'inverse du corps judiciaire professionnel - les femmes sont moins nombreuses que les hommes, qui représentent 69,7 % des candidats retenus par le csm le 22 juillet dernier. Les personnes nommées avec avis conforme du Conseil ont été affectées dans les juridictions suivantes : Libourne, Martigues, Beauvais, Senlis, Aubervilliers, Pantin, Saint-Ouen, Ivry-sur-seine, Lorient, Quimper, Rennes, Clermont-Ferrand, Chartres, Péronne, Saint-Quentin, Lille, Palaiseau, Boulogne-Billancourt et Puteaux.
3 300 juges de proximité devant être recrutés entre 2003 et 2007, il est envisagé de recruter 750 nouveaux juges de proximité entre septembre 2003 et décembre 2004, ce qui pourrait conduire à la tenue de cinq réunions du Conseil supérieur de la magistrature sur cette période afin d'examiner les dossiers transmis par la Chancellerie. Environ 150 dossiers devraient être soumis à chaque réunion du Conseil, ce chiffre ayant été retenu afin de tenir compte des capacités de formation de l'enm et des possibilités d'accueil des stagiaires par les juridictions. La localisation géographique des juges de proximité a d'ores et déjà été fixée par la Chancellerie en prenant en compte l'activité juridictionnelle tant en matière civile que pénale, la population dans le ressort et les effectifs des magistrats, ainsi que les propositions des cours d'appel. Deux mille dossiers, dont l'original a été déposé dans une cour d'appel, sont actuellement en cours d'instruction.
Afin d'assurer la mise en place des juridictions de proximité, la loi de finances pour 2003 et le projet de loi de finances pour 2004 ont dégagé les crédits nécessaires pour assurer la rémunération des juges de proximité et allouer à ces nouvelles juridictions les moyens humains et matériels indispensables à leur fonctionnement. Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit ainsi une dotation de 7 millions d'euros pour les juridictions de proximité.
Conformément à l'article 41-21 du statut de la magistrature qui a posé le principe de la rémunération des juges de proximité par la perception d'une indemnité de vacation, le nouvel article 35-14 du décret du 7 janvier 1993, tel qu'il résulte du décret n° 2003-438 du 15 mai 2003, a précisé les modalités de leur rémunération. Il a fixé le montant brut du taux unitaire de la vacation allouée aux juges de proximité, à vingt-cinq dix millièmes du traitement brut annuel moyen d'un magistrat du second grade, soit 70,20 euros au 3 septembre 2003. Le nombre de vacations allouées à chaque juge de proximité ne peut excéder 15 par mois et 132 par an.
Un arrêté du 15 mai 2003 () a précisé les modalités de décompte de ces vacations :
- lorsque le service assuré consiste dans la tenue d'une audience, l'indemnité de vacation est égale à trois taux unitaires, rémunérant forfaitairement la préparation et la tenue de l'audience, ainsi que la rédaction des décisions afférentes à celle-ci ;
- lorsque le service ne consiste pas dans la tenue d'une audience, une indemnité de vacation au taux unitaire est versée par demi-journée de présence dans la juridiction pour l'accomplissement des fonctions judiciaires.
La réalité du service fait est attestée par le magistrat chargé de l'administration et de la direction du tribunal d'instance dans le ressort duquel la juridiction de proximité a son siège. Ces indemnités de vacation sont soumises au régime général de sécurité sociale, par application des dispositions du décret n° 86-63 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'État.
Pour faire face à la montée en charge des recrutements de juges de proximité, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit une mesure nouvelle de 2,7 millions d'euros en crédits de vacation, qui s'ajoute aux 2,6 millions d'euros déjà inscrits en loi de finances pour 2003. En outre, une mesure de 1,3 millions d'euros est prévue sur le chapitre 33-90 pour le paiement des cotisations correspondantes.
S'agissant des moyens de fonctionnement, la loi de finances pour 2003 a prévu une mesure nouvelle de 400 000 euros au titre des moyens généraux des services afin d'assurer une mise en place satisfaisante de ces nouvelles juridictions de première instance et accompagner les premiers recrutements des juges de proximité. Cette enveloppe permet le financement des frais de déplacement, le premier équipement informatique et mobilier, les moyens de fonctionnement courant ainsi que les moyens d'accompagnement nécessaires en termes de locaux.
Les premières cours d'appel concernées par la nomination des trente-deux juges de proximité dont la candidature a été retenue le 22 juillet dernier par le Conseil supérieur de la magistrature ont été sollicitées pour faire connaître l'état exact de leurs besoins. La Chancellerie a indiqué que seuls les besoins avérés et fondés sur une mutualisation des moyens au regard du taux d'occupation des locaux et du poste de travail seraient satisfaits.
Pour 2004, une mesure nouvelle de 700 000 euros est prévue en crédits de fonctionnement pour accompagner les nouveaux recrutements de juges de proximité. Ils ont été établis à partir de l'hypothèse de l'affectation d'un bureau dès lors qu'une juridiction comporte quatre juges.
S'agissant des moyens humains, les soixante emplois de greffiers créés par la loi de finances pour 2003 à ce titre seront localisés dans les juridictions concernées au fur et à mesure des besoins. Pour sa part, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit la création, pour accompagner la création des juridictions de proximité, de vingt postes de greffiers et de dix-sept emplois de catégorie C.
En outre, les besoins immobiliers liés à l'implantation des juridictions de proximité sont pris en compte dans les programmes immobiliers en cours.
Enfin, tenant compte de la charge de travail occasionnée par la formation des juges de proximité pour l'École nationale de la magistrature, le projet de loi de finances a prévu, au titre des mesures nouvelles dont bénéficie l'établissement, un crédit de vacation pour la formation initiale des juges de proximité à hauteur de 17 000 euros.
Au total, et compte tenu de la longueur de la procédure de recrutement, la Chancellerie estime que six cents juges de proximité, y compris ceux qui ont déjà été recrutés cette année, seront opérationnels au 31 décembre 2004, les crédits prévus pour cet exercice devant toutefois permettre d'assurer la rémunération de 935 juges de proximité.
Le ministère de la Justice s'est donc donné les moyens de mettre en _uvre cette réforme ambitieuse, destinée à améliorer le fonctionnement de notre service public judiciaire. Sans doute, et cela est bien normal lorsqu'il s'agit de créer une nouvelle juridiction, des ajustements seront-ils nécessaires. A cet égard, la période qui s'ouvre et qui marquera les premiers pas de ces juridictions, sera le moment privilégié pour évaluer les aspects positifs et négatifs de cette réforme. Certains ajustements sont d'ailleurs déjà engagés : ainsi, le Sénat a-t-il adopté, à l'occasion de l'examen en première lecture du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, deux amendements relatifs aux compétences pénales des juges de proximité (). En aucun cas toutefois, ces ajustements ne sauraient justifier la condamnation sans appel que certains font parfois de cette réforme.
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Avant d'émettre un avis sur les crédits, la Commission a procédé, le 4 novembre 2003, à l'audition de M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la Justice, et de M. Pierre Bédier, secrétaire d'État aux programmes immobiliers de la justice, sur les crédits du ministère de la Justice pour 2004.
M. Dominique Perben, garde des Sceaux, ministre de la Justice, a rappelé l'adoption, il y a un peu plus d'un an, au terme de débats approfondis, de la loi d'orientation et de programmation de la justice du 9 septembre 2002, mobilisant, pour la période 2003-2007, des moyens nouveaux importants afin d'améliorer l'efficacité de la justice, de traiter efficacement la délinquance des mineurs et d'améliorer l'accès des citoyens à la justice. Il a indiqué que le projet de budget pour 2004 était rigoureusement conforme aux engagements pris alors devant les Français. Il a considéré que ce traitement budgétaire favorable au regard des contraintes de maîtrise de la dépense publique ne faisait que renforcer son souci d'une bonne utilisation des moyens de l'État, afin de répondre aux attentes des Français. Il a ajouté que ce projet de budget s'inspirait également d'une volonté de modernisation et d'innovation dans le cadre de la réforme de l'État, tout en admettant que les traditions du ministère de la Justice étaient plutôt étrangères aux contraintes strictes de la gestion et de l'évaluation des résultats. Il a mis à la disposition de la Commission un document présentant sa stratégie ministérielle de réforme, arrêtée à la demande du Premier ministre, et qui repose sur une trentaine de réformes assorties d'un calendrier, dont certaines seront mises en _uvre dès 2004.
Il a ensuite développé plusieurs aspects du budget de la justice. Le projet de budget s'inscrit en cohérence avec la loi organique relative aux lois de finances, laquelle se traduira dès 2004 par des expérimentations dans chacune des composantes du ministère, portant sur un volume total de crédits de 180 millions d'euros. Dans le même esprit, les contrats d'objectifs et de moyens seront progressivement étendus à l'ensemble des cours d'appel. Dès 2004, les cours d'appel de Lyon et de Bastia ainsi que l'École nationale de la magistrature souscriront un tel contrat, dont le dispositif sera généralisé au 1er janvier 2006. Les engagements pris dans le cadre de ces contrats portent sur la réduction des stocks de dossiers en instance, sur la maîtrise des frais de justice, mais aussi sur des progrès qualitatifs et quantitatifs : amélioration du traitement des affaires civiles et pénales, efficacité de la mise en _uvre des politiques judiciaires. Plus qu'une technique, ces contrats d'objectifs sont un moyen d'administrer autrement. Afin de parvenir à ces résultats, le ministère passera à l'heure de l'administration électronique. Son budget informatique s'établira globalement à 84,1 millions d'euros en 2004, en progression de près de 3 % par rapport à 2003.
En 2004, avec un volume de crédits de 5,28 milliards d'euros et une progression de presque 5 %, la justice reste un secteur prioritaire. Les montants de crédits sont en ligne avec la loi d'orientation et de programmation, de même que les créations d'emplois, qui s'élèveront à 2 229 postes, soit une augmentation d'environ 10 % par rapport à 2003. Les services judiciaires disposeront de 715 emplois supplémentaires dont 150 magistrats, la protection judiciaire de la jeunesse de 234 emplois, les juridictions administratives de 97 emplois et l'administration centrale de 46 emplois. Les créations de postes commencent à donner leurs pleins effets sur le terrain : le nombre d'arrivées de magistrats, ou « localisations », dépassera ainsi le seuil de 300 en 2004. Le potentiel des juridictions et la rapidité de traitement des dossiers en seront significativement améliorés. En particulier, les sept juridictions interrégionales spécialisées dans la lutte contre la criminalité organisée et la délinquance économique et financière bénéficieront de l'affectation de 86 postes de magistrats et 112 postes de fonctionnaires, notamment de greffe.
Un effort particulier est consenti pour les créations de postes dans l'administration pénitentiaire, qui bénéficiera de 1 128 emplois afin de répondre à l'augmentation récente de la population carcérale, de renforcer la capacité de maintien de l'ordre, de créer des établissements adaptés pour les mineurs et de poursuivre le programme d'ouverture d'unités hospitalières sécurisées interrégionales.
En vue d'améliorer la gestion du ministère, la filière administrative y sera renforcée, notamment par la création de 60 postes de secrétaires administratifs dans les juridictions, qui permettront aux greffiers de se recentrer sur leurs fonctions juridictionnelles. Pour assurer l'équilibre du système, ces créations d'emplois s'accompagnent d'une progression de 7 % des crédits de fonctionnement pour l'ensemble du ministère.
Les crédits de fonctionnement des services judiciaires augmentent de 5,4 % afin d'accompagner les recrutements de magistrats et de fonctionnaires, de mettre en service de nouveaux bâtiments judiciaires, de renforcer la sécurité des juridictions, de poursuivre le développement de l'informatique déconcentrée et de développer la visioconférence, laquelle fait l'objet d'un groupe de travail interne en vue d'expérimentations dès 2004. Le recrutement d'au moins 600 juges de proximité en 2004, conforme à l'objectif de 3 300 à la fin de 2007, sera rendu possible par l'augmentation de 5,8 % des crédits de vacation.
La progression de 5 % des crédits de fonctionnement de la protection judiciaire de la jeunesse permettra de prendre en compte l'évolution des dépenses immobilières et de communication, d'ouvrir trois nouveaux centres éducatifs fermés et de mettre en place une action éducative dans les quartiers pour mineurs des établissements pénitentiaires.
Les crédits de fonctionnement de l'administration pénitentiaire croissent de 10 %, afin de prendre en compte l'évolution du nombre des détenus et d'assurer la sécurité dans les prisons grâce à l'installation de tunnels à rayons X, à la mise en place de systèmes de téléphonie sans fil et à l'acquisition de gilets pare-balles pour les surveillants les plus exposés.
En matière de crédits d'intervention, les crédits d'aide juridictionnelle bénéficieront d'une mesure nouvelle de 15,8 millions d'euros, représentant 5 % de la dotation, afin d'améliorer la rétribution des avocats. Le budget de l'aide aux victimes augmentera de 17,5 %, soit un supplément de 1,1 million d'euros, afin d'aider davantage le réseau associatif et d'abonder le fonds de réserve pour la prise en charge des accidents collectifs. Pour justifier le caractère prioritaire de cette action, le garde des Sceaux a fait valoir qu'il n'y a pas de crédibilité de la justice sans une attention portée aux victimes.
Présentant les moyens consacrés à l'immobilier, M. Pierre Bédier, secrétaire d'État aux programmes immobiliers de la justice, a souligné qu'ils connaîtraient en 2004 une forte croissance pour la deuxième année consécutive, les autorisations de programme dépassant un milliard d'euros, en augmentation de 50 % environ, et les crédits de paiement atteignant pour la première fois 300 millions d'euros, soit une progression de 5 %. Les autorisations de programme consacrées aux programmes judiciaires s'élèvent à 309 millions d'euros et les crédits de paiement à 119 millions d'euros pour 2004. Neuf chantiers importants de construction ou de rénovation de palais de justice doivent être lancés.
Quant aux constructions pénitentiaires, elles font l'objet de 688 millions d'euros d'autorisations de programme et de 173 millions d'euros de crédits de paiement. Ces dotations permettront de livrer les quatre derniers établissements prévus dans le cadre du « programme 4000 », augmentant ainsi de 2 000 places environ la capacité nette du système carcéral français. En outre, le quart du budget d'investissement pénitentiaire est consacré à la rénovation des établissements existants, qu'il s'agisse de projets majeurs portant sur de grands établissements du type Fleury-Mérogis ou d'opérations plus limitées. Un effort tout particulier est consenti en direction des mineurs : dès 2004, l'intégralité des projets pénitentiaires prévus par la loi de programme en direction des mineurs aura été lancée, qu'il s'agisse de la construction de nouveaux établissements ou de la rénovation des quartiers pour mineurs dans les établissements classiques.
Les premières procédures de partenariat entre public et privé pour la réalisation d'établissements pénitentiaires, prévues par la loi d'orientation et de programmation, seront lancées en 2004. Elles auront vocation à s'appliquer à une large proportion du programme de constructions, soit environ 9 000 places sur 13 200. Le budget pour 2004 prévoit à cet effet une autorisation de programme d'un montant de 335 millions d'euros ainsi que 60 millions d'euros de crédits de paiement destinés à l'achat des terrains. Il s'agira de la première mise en _uvre à une telle échelle d'un outil important de modernisation de la gestion publique.
Le rapporteur pour avis a salué le fait que l'augmentation significative des moyens alloués à la justice en 2004 s'accompagne, contrairement à ce que l'on pouvait traditionnellement constater, de réformes de procédures et de structures, de telle sorte que les délais de traitement des dossiers pourraient être effectivement réduits. Il a fait observer que les auditions qu'il avait conduites dans le cadre de la préparation de son rapport avaient fait ressortir les difficultés de fonctionnement quotidien éprouvées par certaines juridictions, à l'exemple du tribunal de grande instance (tgi) de Paris, dont 72 des 136 photocopieurs ne faisaient plus l'objet d'opérations de maintenance. Après avoir indiqué que les dépenses de loyer représentent en 2003 61,27 % de la dotation de l'arrondissement judiciaire de Paris, il s'est interrogé sur l'adaptation des crédits de fonctionnement à l'augmentation continue des emplois. Puis il a appelé l'attention du garde des Sceaux sur la nécessité de moderniser les indicateurs statistiques, afin de suivre au plus près et de manière plus rapide l'évolution de l'activité des juridictions.
Exprimant sa satisfaction à l'égard de la mise en place d'une prime modulable attribuée aux magistrats de l'ordre judiciaire, il a demandé au garde des Sceaux selon quelle périodicité et selon quels critères elle serait distribuée. Il a souligné que l'actuelle majorité avait d'ores et déjà revalorisé régulièrement les indemnités de fonctions des magistrats de l'ordre judiciaire, indemnités qui étaient passées à 37 % en 1996, à 41 % en 2003 et à 45 % du traitement pour 2004, permettant un rapprochement de la situation des magistrats judiciaires avec celle des magistrats administratifs et financiers.
Il a demandé quelles perspectives de carrière seraient offertes, au-delà du 1 % d'augmentation salariale prévue pour 2004, aux agents de catégorie C, dont la participation au service public de la justice s'avère primordiale. Il a interrogé le garde des Sceaux sur les suites qu'il comptait donner au rapport présenté par M. Anicet Le Pors sur le personnel des greffes des juridictions administratives. Il a également demandé si des mesures étaient envisagées pour rationaliser les modes de recrutement des magistrats et actualiser le programme du concours d'entrée à l'École nationale de la magistrature. Enfin, il s'est dit favorable à la transformation de l'École nationale des greffes en établissement public, afin qu'elle puisse faire face de la manière la plus satisfaisante possible à l'augmentation des effectifs d'élèves.
Mme Valérie Pécresse, rapporteure pour avis des crédits de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse, après s'être félicitée du respect des objectifs de la loi d'orientation et de programmation pour la justice, a souhaité savoir, à l'heure où le projet de budget prévoyait l'acquisition de 2 000 bracelets électroniques, quelles mesures seraient prises pour inciter les magistrats à recourir plus fréquemment à la surveillance électronique. Elle a demandé selon quelles modalités les « centres de détention à régime allégé », dont la création avait été proposée dans le rapport présenté récemment par M. René Eladari, s'articuleraient avec les centres de semi-liberté et les centres pour peines aménagées. Puis elle a sollicité l'avis du garde des Sceaux sur le rapport de l'Observatoire international des prisons, qui avait dénoncé la surpopulation carcérale. Enfin, elle l'a interrogé sur les mécanismes d'évaluation qui seraient mis en _uvre pour suivre l'activité de la protection judiciaire de la jeunesse, dont le fonctionnement avait été sévèrement critiqué par la Cour des comptes dans un rapport particulier de juillet 2003.
M. André Vallini a indiqué qu'il n'était pas convaincu par la mise en place de primes au rendement, qu'il a jugées contraires à l'indépendance des magistrats et dont les critères sont difficiles à déterminer, rappelant par ailleurs que les chefs de cour ignoraient souvent l'activité réelle des magistrats dont ils ont la responsabilité. Tout en indiquant que l'Observatoire international des prisons avait également publié des rapports très sévères sur la gestion carcérale du précédent gouvernement, il a observé que la surpopulation des prisons avait atteint cet été un record historique, expliquant les prises de position de cette association. Après avoir indiqué qu'il souscrivait aux propositions de M. Jean-Luc Warsmann relatives au développement des mesures alternatives à l'incarcération et qu'il était favorable au développement des établissements pour mineurs, il a regretté que l'état de grâce observé lors du vote de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et du rapport de la commission d'enquête sur les prisons ait pris fin en 2001. Évoquant enfin le rapport Terra sur le suicide en prison, il a souhaité connaître les mesures concrètes envisagées par le Gouvernement pour lutter contre ce phénomène.
M. Gérard Léonard a déclaré partager la satisfaction des rapporteurs pour avis sur la bonne exécution de la loi d'orientation et de programmation pour la justice, observant que la deuxième année était souvent décisive. Il s'est notamment félicité de voir que les créations d'emplois sont accompagnées des moyens de fonctionnement correspondants. Évoquant l'évaluation en cours des maisons de justice et du droit, il a souhaité savoir s'il existait une synthèse des conclusions de cette évaluation. Après avoir rappelé que trois maisons de justice et du droit avaient été créées dans la communauté urbaine du grand Nancy, et qu'elles fonctionnaient de manière satisfaisante, il a souhaité connaître la politique de la Chancellerie en matière de financement, observant que ces structures bénéficiaient souvent des services d'un greffier et d'agents de justice.
Après avoir évoqué le rapport de la Cour des comptes remettant en cause de manière relativement sévère le fonctionnement des services de la protection judiciaire de la jeunesse, M. Jean Leonetti a jugé nécessaire d'évaluer les moyens mis en _uvre pour lutter contre la délinquance des mineurs. Après avoir cité l'augmentation des mesures de réparation, le raccourcissement des délais d'exécution des mesures éducatives et la construction de quartiers pour mineurs, il a insisté sur l'importance des classes-relais, fondamentales pour l'insertion des jeunes délinquants. Au-delà du partenariat État-conseils généraux, il a souhaité savoir s'il était possible d'associer plus étroitement les municipalités à la politique de prévention de la délinquance.
Évoquant la difficulté que pouvait éprouver le Conseil supérieur de la magistrature à s'assurer de la pertinence et du bien-fondé des notations de magistrats, notamment au regard de la pratique des surnotations utilisée pour faciliter le transfert d'un magistrat vers une nouvelle affectation, le Président Pascal Clément s'est demandé s'il ne serait pas judicieux de mettre l'inspection générale des services judiciaires non seulement à la disposition du garde des Sceaux, mais également des chefs de cours et de juridictions.
M. Robert Pandraud a souhaité connaître l'état du dossier relatif à la salle d'audience de l'aéroport de Roissy. M. André Vallini ayant suggéré, à cet égard, de créer un tribunal à Roissy, d'autant plus justifié que, dans cette zone économique en plein essor, la mise en place d'une juridiction prud'homale, commerciale et civile était incontestablement légitime, M. Robert Pandraud a ajouté qu'il demandait une telle création depuis deux décennies.
Évoquant le placement en foyer de mineurs délinquants, M. Xavier de Roux a jugé indispensable de développer la coopération entre les conseils généraux et le ministère de la Justice afin de trouver des solutions alternatives à celles qui consistent à placer des jeunes délinquants dans des foyers de protection de l'enfance. Il a déploré que, du fait d'un manque patent de places dans des structures adaptées, des jeunes soient placés, pour des raisons familiales et sociales, dans des foyers avec des jeunes délinquants. Interrogeant ensuite le ministre sur le taux de progression des incarcérations par rapport aux capacités d'accueil dans les établissements pénitentiaires, il a souhaité qu'une réflexion soit menée sur le développement des alternatives à l'incarcération. Il a enfin demandé au ministre de fournir un bilan de la mise en place des juridictions de proximité dont la création a été décidée par le législateur en 2002.
Tout en faisant état des divergences de fond qui subsistent entre l'actuelle majorité et l'opposition sur les problèmes de la justice, M. Bernard Roman a salué la qualité d'écoute dont témoigne le garde des Sceaux à l'égard des parlementaires. Déclarant partager la satisfaction du ministre sur le taux de progression du budget du ministère de la Justice, il a néanmoins émis des réserves sur la façon dont les crédits pouvaient être utilisés : citant le cas de personnes placées en garde à vue pendant toute une nuit dans un commissariat de Lille, à la suite d'un léger dépassement du taux d'alcoolémie autorisé au volant, il a souhaité que les procédures soient améliorées afin que ces dérives ne puissent se reproduire.
M. Robert Pandraud a interrogé le ministre sur le nombre d'étrangers en prison ; il a plaidé pour une politique de coopération avec leur pays d'origine, dans lesquels ces détenus devraient effectuer ou achever leur détention.
En réponse aux intervenants, les ministres ont apporté les précisions suivantes :
· Sur les services judiciaires et les juridictions administratives
- La location des bureaux grevant lourdement les budgets de certaines juridictions, et pas seulement celle de Paris, une réflexion est conduite par la Chancellerie et le secrétariat d'État aux programmes immobiliers de la justice sur les investissements nécessaires pour remédier à cette situation.
- Des efforts doivent être consentis afin de limiter le grand nombre de vacances de postes au tribunal de grande instance de Paris qui fait figure d'exception en la matière : cette juridiction semble en effet peu attractive pour les magistrats comme pour les personnels des greffes, dont les effectifs connaissent un renouvellement rapide, les personnels y ayant souvent leur première affectation mais retournant en province dès que possible.
- Une enveloppe de 150 000 euros a été affectée au tribunal de grande instance de Paris, afin d'assurer l'entretien des photocopieurs, fortement sollicités depuis que les avocats peuvent se faire délivrer copie de tout ou partie des actes et pièces des dossiers.
- Les statistiques sur l'activité des services judiciaires élaborées par le ministère de la Justice pêchent par perfectionnisme et ne sont, du fait d'un décalage de deux ans, guère opérationnelles ; un travail est donc engagé pour disposer de statistiques portant sur des périodes d'activité plus rapprochées, nécessaires pour une bonne mise en _uvre des contrats d'objectifs ; si un gros travail reste à faire en matière pénale, les statistiques disponibles en 2004 en matière civile devraient porter sur l'année 2003.
- Les magistrats de l'ordre judiciaire ont bénéficié en 2003 et bénéficieront en 2004 de revalorisations indemnitaires qui rapprocheront leur régime de celui des magistrats administratifs et financiers, 2,5 points seulement les séparant d'un alignement complet avec ces derniers ; cette revalorisation doit cependant être assortie d'un effort budgétaire à travers la mise en place d'une modulation des primes ; l'inconstitutionnalité de cette dernière ne paraît pas avérée, des mécanismes analogues ayant été mis en place au Conseil d'État, à la Cour de cassation, dans le juridictions administratives et financières ; l'attribution de cette prime ne relèvera pas de la compétence du ministre mais de celles des chefs de cour, sur proposition des chefs de juridiction ; cette prime sera versée mensuellement et sa révision, semestrielle, sera l'occasion d'un entretien entre l'intéressé et le chef de cour ; les critères d'appréciation qui seront retenus ne sauraient être des critères de moyens, tels que le nombre de placements en garde à vue ordonnés, mais des critères de résultat.
- Essentiels au bon fonctionnement des juridictions, les agents de catégorie C ne doivent pas être oubliés ; à cette fin, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit une revalorisation d'un point de leur indemnité, l'accès pour 80 agents de catégorie C au corps des greffiers, la création de postes de secrétaire administratif et la transformation des emplois d'agents de services techniques en emplois d'agents administratifs.
- S'agissant des recrutements de magistrats, l'augmentation des effectifs ne nuit pas à la qualité des recrutements de magistrats, dont la diversification - étudiants, personnes disposant d'une expérience professionnelle - est satisfaisante.
- Le rapport de l'inspection générale des services judiciaires sur les maisons de justice et du droit ne les remet pas en cause et ne demande pas non plus leur généralisation ; mais elles doivent s'insérer dans un schéma départemental et disposer de moyens pérennes ; l'augmentation des dotations aux associations permettra à la Chancellerie de leur apporter son soutien financier, qui prend le relais de crédits du ministère de la Ville ; en outre, il est impératif que les personnels des greffes affectés à ces maisons de justice et du droit soient de bonne qualité et des efforts sont consentis pour intégrer les agents de justice dans les métiers de la justice ; en tout état de cause, le bon fonctionnement de ces structures suppose une concertation entre les collectivités locales et le ministère de la Justice.
- Il est indispensable que les chefs de cour exercent de la façon la plus complète et effective les compétences qui leur sont attribuées en matière disciplinaire ; le rapport que remettra la commission sur l'éthique des magistrats devrait comporter des propositions sur l'exercice du pouvoir disciplinaire.
- 32 juges de proximité sont d'ores et déjà nommés et une liste de 150 candidats a été transmise au Conseil supérieur de la magistrature ; des propositions portant sur un nombre équivalent de candidatures devraient ensuite être présentées au Conseil supérieur de la magistrature tous les trois mois environ ; l'examen des dossiers montre que les différents viviers de recrutement pointés par le législateur sont exploités et on dénombre beaucoup de candidatures de qualité ; le fonctionnement concret de ces nouvelles juridictions devra être examiné sur le terrain, mais, d'ores et déjà, les premiers échos sont encourageants.
- La chancellerie et le ministère de l'Intérieur ont confié à une mission commune le soin d'expertiser le site de la salle d'audience de Roissy afin de s'assurer qu'il est adapté au fonctionnement d'une juridiction et d'évaluer les travaux nécessaires à son utilisation ; il est vrai que la plan de cette salle, conçue à l'époque par le ministère de l'Intérieur, ne correspond pas aux us et coutumes des palais de justice ; en tout état de cause, il est préférable, pour des raisons humanitaires, de juger sur place plutôt qu'au tribunal de grande instance de Bobigny confronté à une charge de travail considérable en matière correctionnelle.
- Le rapport rendu par MM. Anicet Le Pors et Frédéric Aladjidi sur l'amélioration de la situation statutaire et des modalités de gestion des personnels des greffes des juridictions administratives a été transmis aux partenaires sociaux.
· S'agissant de l'administration pénitentiaire :
- La surpopulation carcérale reste préoccupante : le nombre des détenus est aujourd'hui de 58 500, après avoir atteint près de 61 000 au 1er juillet, près de 25 % d'entre eux sont des étrangers. Il faut garder présent à l'esprit le fait que l'augmentation de la population carcérale résulte d'une multitude de décisions juridictionnelles sur lesquelles l'administration pénitentiaire n'a aucune prise et qui s'imposent à elle.
- L'observatoire international des prisons est une simple association de la loi de 1901 ; ses rapports ne reflètent que sa position et ne sont d'ailleurs pas toujours fondés sur une analyse rigoureuse de la situation carcérale. Toutefois, il est notoire que le parc pénitentiaire français est vétuste, près d'un établissement sur deux ayant été construit au 19e siècle. L'amélioration des conditions de détention est d'ailleurs l'une des priorités du Gouvernement, qui a initié un ambitieux programme de construction, tout en prévoyant un important recrutement de personnels : 2 000 gardiens surveillants seront recrutés annuellement pendant les cinq années à venir afin de tenir compte des importants besoins de l'administration pénitentiaire en personnels et des nombreux départs à la retraite prévus. C'est d'ailleurs grâce au renforcement des effectifs de gardiens surveillants, à leur professionnalisme et aux initiatives qu'ils ont prises que l'été 2003 s'est déroulé sans heurts majeurs, en dépit de la forte chaleur et de la surpopulation carcérale.
- Compte tenu de cette surpopulation, les peines alternatives à l'incarcération doivent impérativement être développées ; la diminution du nombre des travaux d'intérêt général observée au cours des dernières années n'est pas acceptable, d'autant moins que nombre de collectivités locales sont désireuses d'en bénéficier. Par ailleurs, grâce à la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002, l'administration pénitentiaire peut mettre en _uvre et assurer le suivi de près de 500 mesures de placement sous surveillance électronique, bien que les magistrats y recourent trop peu, puisque 250 personnes seulement sont placées sous ce régime. C'est pourquoi, dans le cadre de l'examen du projet de loi adaptant la justice aux évolutions de la criminalité, et conformément aux recommandations élaborées par M. Jean-Luc Warsmann dans son rapport sur les peines alternatives à l'incarcération et les modalités d'exécution des courtes peines, il est proposé de permettre aux juridictions de jugement, et non au seul juge de l'application des peines, de prononcer ab initio un placement sous surveillance électronique. Le développement du bracelet électronique ne doit cependant pas être considéré comme l'unique solution à l'ensemble des problèmes liés à la surpopulation carcérale et à l'exécution des peines. En effet, cette mesure, difficile à supporter physiquement et exigeant une forte autodiscipline de la part des intéressés, s'adresse plus particulièrement aux personnes condamnées insérées socialement et équilibrées. Le développement du recours à la surveillance électronique passe également par une amélioration de l'organisation de l'exécution des peines, notamment grâce au renforcement des effectifs et des moyens alloués aux services pénitentiaires d'insertion et de probation. En tout état de cause, il importe qu'à l'avenir aucune libération sèche de prison ne puisse plus intervenir afin de mieux lutter contre la récidive et favoriser la réinsertion des condamnés.
- L'essoufflement du recours aux mesures de semi-liberté et des placements à l'extérieur a conduit M. René Eladari à préconiser la mise en place de « centres de détention allégés ». Ces centres, moins sécurisés que les établissements pénitentiaires traditionnels et donc moins coûteux pour les finances publiques tout en offrant de meilleures conditions de détention aux condamnés, bénéficieraient, en revanche, de la présence renforcée de personnels socio-éducatifs et d'insertion. Cependant, l'administration pénitentiaire mène une réflexion sur la faisabilité technique de cette proposition.
- Le rapport du professeur Terra sur les suicides en prison n'est pas encore achevé ; il a pour objectif de déterminer les moyens permettant d'obtenir une diminution du nombre de ces actes grâce à la mise en place de véritables indicateurs d'alerte au service de personnels chargés de la surveillance des détenus. A cet effet, ces personnels devraient bénéficier d'une formation spécifique rendant possible la détection anticipée des détenus présentant un risque suicidaire.
- La mixité des détenus majeurs et des mineurs au sein des établissements pénitentiaires doit être évitée et c'est pourquoi le Gouvernement, tout en poursuivant un ambitieux programme de rénovation des quartiers mineurs prévoit, par ailleurs, la construction d'établissement pénitentiaires pour mineurs. Ces établissements devraient permettre d'adapter le rythme de la détention aux mineurs afin de tenir compte des contraintes spécifiques dues à leur âge, notamment grâce à la mise en place d'action de scolarisation et de formation soutenues.
- Si la garde à vue tend à devenir la règle, au lieu de rester l'exception, c'est aussi parce qu'elle revêt un caractère protecteur pour les personnes avec l'intervention de l'avocat, comme pour la justice. Toutefois, la procédure de remise en liberté demeure trop complexe ; cette situation requiert non une modification de la loi, mais des instructions aux parquets.
· S'agissant de la protection judiciaire de la jeunesse :
- La nécessaire réforme de la protection judiciaire de la jeunesse doit s'inscrire dans un projet global tendant à l'amélioration de la justice des mineurs. A cet égard, il importe de renforcer les liens institutionnels entre cette administration et celle relevant des départements en permettant le développement de véritables partenariats.
- Les actions de prévention de la délinquance des mineurs doivent, en priorité, être menées conjointement par les administrations d'État et celles du département, ce qui n'exclut pas la participation d'autres services relevant des collectivités locales à l'instar des administrations municipales.
- Le recours aux classes relais constitue indéniablement une solution intéressante à destination des mineurs en rupture scolaire mais capables de suivre un enseignement et doit, à ce titre, être encouragé.
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Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère de la Justice pour 2004 : administration centrale et services judiciaires.
PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR ()
- MM. Bernard Even, président, et Robert Le Goff, secrétaire général du syndicat de la juridiction administrative.
- M. Paul-Louis Albertini, secrétaire général de l'union syndicale des magistrats administratifs.
- M. Dominique Barella, président de l'union syndicale des magistrats.
- Mme Véronique Rodero, présidente de l'Association des greffiers en chef des tribunaux d'instance et de police.
- Mme Claire Mourier, secrétaire générale pour l'administration centrale du syndicat Interco Justice CFDT.
- MM. Dominique Huloux, trésorier national, et Jean-Michel Joly, secrétaire général adjoint du syndicat CGT des chancelleries et des services judiciaires.
- M. Guy Cibrario, secrétaire général adjoint pour la direction des services judiciaires, Mme Fabienne Garioud, secrétaire du bureau pour la direction des services judiciaires et M. Jean-Philippe Guilloteau, délégué national secteur pénitentiaire, du syndicat C-Justice.
- M. Philippe Neveu, secrétaire général du syndicat des greffiers de France.
- MM. Patrick Lebrun, secrétaire général, et Christophe Poisle, secrétaire général adjoint de l'union syndicale autonome justice (usaj).
- MM. Jérôme Cayol, membre du conseil de l'ordre du Barreau de Paris, Bernard Chambel, président de la Conférence des Bâtonniers, Jean-Paul Lévy, président de la commission textes du Conseil national des barreaux, et Mme Françoise Louis, responsable des relations avec les pouvoirs publics pour la profession d'avocat.
Avis n° 1115 tome V de M. Jean-Paul Garraud sur les crédits de l'administration centrale et des services judiciaires du budget de la justice du projet de loi de finances pour 2004
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() L'article 2 de la loi du 9 septembre 2002 précise que cette programmation couvre le coût des créations d'emplois, des mesures relatives à la situation des personnels, du fonctionnement, des actions d'intervention et des équipements de l'administration centrale du ministère de la justice, des juridictions de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif ainsi que des services chargés de l'exécution des décisions de justice.
() 180 emplois de magistrats et 520 emplois de fonctionnaires et agents.
() Est prévue la création de 950 emplois de magistrats et de 3 500 fonctionnaires et agents des services judiciaires.
() La loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 a institué à titre permanent des concours complémentaires, qui succèdent aux concours organisés en 1998 et 1999 et qui permettent le recrutement de personnes disposant d'une expérience professionnelle de 10 ou 15 ans et d'un âge minimal de 35 ou 50 ans, pour exercer les fonctions de magistrats des second et premier grades.
() Ce chiffre résulte de la différence entre les effectifs budgétaires des juridictions et de l'administration centrale, y compris les emplois créés par la loi de finances pour 2003 mais encore non localisés, et l'effectif réel des magistrats en juridiction, qui tient compte des 224 magistrats nommés en juridictions en septembre 2003 à l'issue de leur scolarité à l'enm et des 81 magistrats recrutés par concours complémentaire, qui ont débuté leur stage en septembre.
() Arrêté du 22 octobre 2003 relatif au régime indemnitaire de certains magistrats de l'ordre judiciaire et de certains personnels de l'École nationale de la magistrature (Journal officiel du 26 octobre 2003, p. 18277).
() L'article 12-1 du statut de la magistrature prévoit que « l'activité professionnelle de chaque magistrat fait l'objet d'une évaluation tous les deux ans.[...] Cette évaluation est précédée d'un entretien avec le chef de la juridiction où le magistrat est nommé ou rattaché. »
() Les recrutements s'effectuent, pour 75 % des postes à pourvoir, par concours exceptionnel et, pour les 25 % restants, par voie d'inscription sur une liste d'aptitude.
() Les dépenses de loyers représentent 61,27 % de la dotation de l'arrondissement judiciaire de Paris.
() Depuis juillet 2003, la maintenance de 72 appareils du TGI sur un parc de 136 n'est plus assurée.
() Après une augmentation supérieure à 10 % par an entre 1992 et 1995, les admissions à l'aide juridictionnelle ont entamé une baisse à partir de 1997. De 1999 à 2002, les évolutions annuelles moyennes de l'aide juridictionnelle sont les suivantes : légère diminution (-0,8%) de l'ensemble des admissions ; diminution de 4 % des admissions civiles ; progression de 1 % des admissions pénales ; progression de 7 % des admissions administratives ; progression de 20 % des admissions liées aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers.
() Décret modifiant le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
() Le dernier alinéa de l'article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique confie à la loi de finances le soin de déterminer le montant de l'unité de valeur servant à fixer le niveau de la dotation annuelle des barreaux pour les missions d'aide juridictionnelle.
() Les ouvertures de régime pour les majeurs protégés ont augmenté de 6 % ; les demandes relatives au fonctionnement des régimes en cours ont progressé de 12,7 %, de même que les ouvertures de régimes de protection pour les mineurs à hauteur de 9 %.
() 18 391 jeunes de 13 à 15 ans ; 11 850 jeunes de 16 à 17 ans.
() Ce délai est calculé à partir du ratio, pour une année donnée, entre le nombre de dossiers en stock dans la juridiction et le nombre d'affaires jugées sur l'année. Il permet de déterminer, compte tenu de l'évolution des affaires enregistrées par la suite et à capacité de jugement constante, le délai théoriquement nécessaire pour résorber le stock des juridictions.
() Une série correspond à un ensemble de requêtes ayant un objet analogue, dont la solution dépend de la ou des mêmes questions de droit, présentées ou non devant la même juridiction, et dont le nombre total, apprécié en valeur relative par rapport au flux annuel, est significatif.
() La conclusion de ces contrats suppose une demande conjointe des chefs de cour, l'avis de l'assemblée générale plénière et la conclusion de conventions avec les barreaux et la compagnie des avoués.
() En revanche, les juridictions de proximité connaîtront, dans les limites de leurs compétences, du contentieux relatif aux baux d'habitation.
() Le décret du 23 juin 2003 étend notamment la compétence des tribunaux d'instance aux actions personnelles ou mobilières qui, bien qu'indéterminées, ont pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas son seuil de compétence (7600 euros) ; ces actions sont aujourd'hui portées devant le tribunal de grande instance où les procédures sont plus lourdes, ce qui conduit parfois les justiciables à renoncer à leur action.
() Applicable à certaines contraventions et certains délits punis d'une peine maximale de trois ans d'emprisonnement, la composition pénale constitue une alternative aux poursuites qui permet au délinquant majeur ayant reconnu les faits d'exécuter une mesure (par exemple, un travail non rémunéré) contre l'extinction de l'action publique.
() Bien que figurant dans l'article 41-18 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, cette disposition a été jugée par le Conseil constitutionnel comme n'ayant pas de valeur organique mais ayant valeur de loi ordinaire (décision n° 2003-466 DC du 20 février 2003).
() Les personnes dont le dossier sera soumis au CSM à l'automne n'arriveront en juridiction qu'en septembre 2004, s'ils sont soumis à un stage probatoire.
() La disposition ouvrant aux personnes justifiant d'une expérience de cet ordre dans les domaines administratif, économique ou social la faculté d'exercer les fonctions de juge de proximité a été censurée par le Conseil constitutionnel qui a considéré que l'exercice antérieur de fonctions de cet ordre « ne révèle pas par lui-même, quelles que soient les qualités professionnelles antérieures des intéressés, leur aptitude à rendre la justice ; qu'en définissant de telles catégories de candidats aux fonctions de juge de proximité sans préciser le niveau de connaissances ou d'expérience juridiques auquel ils doivent répondre, le législateur a manifestement méconnu l'article 6 de la Déclaration de 1789 » (Décision n° 2003-466 DC du 20 février 2003).
() Arrêté du 15 mai 2003 pris en application de l'article 35-14 du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 modifié pris pour l'application de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature (Journal officiel du 17 mai 2003, p. 8491).
() Adoptés sur proposition de M. Pierre Fauchon, l'article 63 bis permet au tribunal de police ou au juge de proximité saisis d'une affaire pour laquelle ils ne sont pas compétents de la renvoyer directement à la juridiction compétente ; l'article 63 ter précise l'application dans le temps des compétences pénales des juridictions de proximité.
() Le syndicat FO-FAGE a fait parvenir une contribution écrite.
Le syndicat de la magistrature n'a pu être entendu.