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le 18 novembre 2004

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N° 1863

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2005 (n° 1800),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

--

ANNEXE N° 8


EMPLOI, TRAVAIL ET COHÉSION SOCIALE


VILLE ET RÉNOVATION URBAINE

Rapporteur spécial : M. FRANÇOIS GROSDIDIER

Député

____

INTRODUCTION 7

I.- PRÉSENTATION GÉNÉRALE DU BUDGET 2005 9

A.- UNE FORTE PROGRESSION 9

B.- L'ÉVOLUTION DU BUDGET PAR CHAPITRES 10

1.- Les changements de nomenclature 10

2.- Les dépenses ordinaires 11

3.- Les dépenses d'investissement 13

C.- L'AUGMENTATION DE L'EFFORT FINANCIER GLOBAL EN FAVEUR DE LA VILLE 14

1.- L'amplification des exonérations fiscales et sociales 15

2.- La réforme de la dotation de solidarité urbaine 18

II.- L'EXÉCUTION DES BUDGETS PRÉCÉDENTS 20

A.- UNE BONNE CONSOMMATION DES CRÉDITS EN 2003 20

B.- UN TAUX D'ENGAGEMENT LIMITÉ AU COURS DU PREMIER SEMESTRE 2004 21

III.- LA MISE EN œUVRE DE LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES DU 1er AOÛT 2001 22

A.- LA MISSION « VILLE ET LOGEMENT » 22

1.- Le programme « Rénovation urbaine » 22

2.- Le programme « Équité sociale et territoriale et soutien » 23

3.- Les transferts de crédits nécessaires 24

4.- Une structuration cohérente 25

B.- LA DÉCLINAISON OPÉRATIONNELLE DES PROGRAMMES 26

C.- LES OBJECTIFS ET INDICATEURS DE PERFORMANCE 28

D.- LE PLAFOND D'AUTORISATION DES EMPLOIS 29

IV.- LE LANCEMENT DU PROGRAMME NATIONAL DE RÉNOVATION URBAINE 31

A.- L'ANRU : UN OUTIL DE SIMPLIFICATION 31

B.- DES FINANCEMENTS À LA HAUTEUR DES ATTENTES 32

C.- UN AVANCEMENT DES PROJETS PROMETTEUR 34

D.- LA POURSUITE DES CONVENTIONS ANTÉRIEURES 35

V.- LA RESTAURATION DE L'ÉQUITÉ SOCIALE ET TERRITORIALE 36

A.- LA PARTICIPATION AU PLAN DE COHÉSION SOCIALE : LE LANCEMENT DU PROGRAMME DE RÉUSSITE ÉDUCATIVE 36

B.- LE NÉCESSAIRE RECENTRAGE DES ACTIONS LOCALES SUR LES THÈMES PRIORITAIRES DE LA POLITIQUE DE LA VILLE 37

1.- Les contrats de ville et le Fonds d'intervention pour la ville 38

2.- Le programme ville, vie, vacances 39

3.- Les adultes relais 41

C.- L'INDISPENSABLE ÉVALUATION DES POLITIQUES MENÉES 41

EXAMEN EN COMMISSION ÉLARGIE 45

L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires, au plus tard huit jours francs à compter du dépôt du projet de loi de finances. Cette date était donc le 9 octobre. À cette date, aucune réponse n'était parvenue à votre Rapporteur spécial, ce qui n'est pas acceptable de la part de services qui ont pourtant reçu les questions dans les délais. Les réponses ont, depuis, été recueillies dans leur intégralité.

Les principales tendances du budget 2005

- Le budget de la ville et de la rénovation urbaine s'élève à 422,65 millions d'euros en 2005 contre 344,43 millions d'euros en 2004, soit une hausse de 78,22 millions d'euros (+ 22,71 %).

- Les dépenses ordinaires (crédits de fonctionnement et d'intervention) augmentent de 15,72 millions d'euros, soit + 6,7 % (250,15 millions d'euros au lieu de 234,43). Cette hausse a une raison formelle : les moyens de fonctionnement atteignent 47,25 millions d'euros (+ 301,44 %) du fait du regroupement sur un chapitre spécifique 39-01 des dotations à trois régions expérimentant la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001. Les moyens d'intervention, eux, sont de 202,9 millions d'euros (- 8,9 %).

- Les dépenses en capital sont de 214 millions d'euros en autorisations de programme, contre 265 millions d'euros en 2004 (- 19,24 %). Les crédits de paiement progressent de 62,5 millions d'euros et s'élèvent à 172,5 millions d'euros, contre 110 millions d'euros l'année dernière (+ 56,8 %).

INTRODUCTION

Le budget de la ville et de la rénovation urbaine s'inscrira dans deux perspectives essentielles l'année prochaine.

D'une part, la loi du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine développera tous ses effets. 2005 sera l'année des premières tranches opérationnelles de travaux lancés par l'intermédiaire de l'Agence nationale de rénovation urbaine. La politique de développement économique des territoires les plus en difficulté se poursuivra grâce aux zones franches urbaines, enrichies de 41 zones nouvelles. L'Observatoire des zones urbaines sensibles, qui vient d'être installé, jouera son rôle de suivi et d'évaluation.

D'autre part, 2005 sera la première année d'application du plan de cohésion sociale - bientôt concrétisé par la loi de programmation pour la cohésion sociale. Ce plan intéresse à bien des égards la politique de la ville, qu'il s'agisse des problèmes d'emploi, de logement ou d'égalité des chances. En 2005, le budget de la ville apportera 62 millions d'euros destinés à financer un nouveau programme de réussite éducative. La réforme de la dotation de solidarité urbaine (DSU) permettra en outre de mobiliser une enveloppe de 120 millions d'euros supplémentaires en faveur des communes les plus en difficulté engagées dans des opérations de rénovation urbaine ambitieuses.

Le budget de la ville et de la rénovation urbaine proposé par le présent projet de loi de finances, s'élevant à 422,65 millions d'euros, permettra de mettre en œuvre ces priorités.

I.- PRÉSENTATION GÉNÉRALE DU BUDGET 2005

A.- UNE FORTE PROGRESSION

Au sein du budget du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale (40,35 milliards d'euros), la section « ville et rénovation urbaine » bénéficie pour 2005 de 422,65 millions d'euros. Ce budget, comparé aux 344,23 millions d'euros de la loi de finances pour 2004, est en hausse de 78,4 millions d'euros, soit près de 23 %.

COMPARAISON DES CRÉDITS EN 2004 ET 2005

(en milliers d'euros)

Loi de finances
pour 2004

Projet de loi de finances pour 2005

7ème partie - Dépenses diverses

Chapitre 37-60 Moyens de fonctionnement des services en charge de la politique de la ville

11.770

8.510

9ème partie - Expérimentations dans le cadre de la loi organique du 1er août 2001

Chapitre 39-01 Programme « Équité sociale et territoriale et soutien » » - Expérimentation en régions Bretagne, Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes (nouveau)

-

38.740

Total pour le titre III

11.770

47.250

6ème partie - Action sociale. Assistance et solidarité

Chapitre 46-60 Interventions en faveur de la ville et du développement social urbain

222.658

202.900

Total pour le titre IV

222.658

202.900

Total pour les dépenses ordinaires

234.428

250.150

7ème partie - Équipements administratifs et divers

Chapitre 57-71 Politique de la ville et du développement social urbain : études et assistance technique (ancien)

-

-

Total pour le titre V

-

-

Chapitre 67-10 Subventions d'investissement en faveur de la politique de la ville et du développement social urbain

110.000

172.500

Total pour le titre VI

110.000

172.500

Total pour les crédits de paiement

110.000

172.500

Total du budget Ville et rénovation urbaine

344.428

422.650

Source : Projet de loi de finances pour 2005.

Votre Rapporteur spécial se félicite de ce que l'essentiel de l'augmentation concerne les crédits de paiement des dépenses en capital, suivant en cela une tendance observée ces dernières années sur le budget de la ville. Le chapitre 67-10 article 30 passe ainsi de 57 millions d'euros en 2004 à 128,1 millions d'euros pour 2005 : 74,5 millions d'euros iront à l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) et 53,6 millions d'euros iront à la Délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain (DIV) pour le solde des programmes de renouvellement urbain.

En revanche, la forte hausse des crédits de fonctionnement du titre III (47,25 millions d'euros en 2005, contre 11,77 millions d'euros en 2004) n'est que formelle. Un chapitre spécifique (39-01) porte en effet une dotation globalisée de crédits de 38,74 millions d'euros, destinée à l'expérimentation en régions Bretagne, Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes du programme « équité sociale et territoriale et soutien », préfigurant ainsi l'application de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Globalement, l'évolution de l'agrégat unique « politique de la ville et du développement social urbain » depuis 2002 est décrite dans le tableau suivant :

INDICATEUR DE COÛTS : DÉPENSE BUDGÉTAIRE

(en millions d'euros)

Composantes de l'agrégat

2002

2003

2004

2005

PLF

Prévision de dépense en gestion

Rénovation urbaine

78

70

64

128

128

Équité sociale et territoriale

289

284

291

296

296

Total

367

354

355

424 (a)

424 (a)

(a) La prévision de dépense de 424 millions d'euros est supérieure à celle inscrite au projet de loi de finances (422,65 millions d'euros), car elle inclut les futurs transferts en gestion.

Source : Projet de loi de finances pour 2005.

B.- L'ÉVOLUTION DU BUDGET PAR CHAPITRES

1.- Les changements de nomenclature

Suivant les préconisations de la Cour des comptes de 2002, la nomenclature budgétaire a évolué et s'est simplifiée.

Par exemple, la ligne spécifique du Fonds de revitalisation économique (FRE) (1) a été supprimée pour la gestion 2003 (chapitre 67-10, article 60). Les aides à l'investissement pour les petites entreprises implantées dans les zones urbaines sensibles ont été imputées sur les crédits d'investissement du
Fonds d'intervention pour la ville (environ 5 millions d'euros en 2003). En fonctionnement, le chapitre 46-60 article 60 a été supprimé pour la gestion 2004 compte tenu, d'une part, de la prorogation par la loi du 1er août 2003 sur la ville et la rénovation urbaine du régime d'exonérations des zones de redynamisation urbaine jusqu'à fin 2008 et, d'autre part, de l'augmentation en 2004 du nombre de zones franches urbaines.

La simplification de la nomenclature se poursuit dans le présent projet de loi de finances, le chapitre 46-60 évoluant sur deux points :

- l'article 40, initialement créé pour permettre des aides financières aux communes en très grande difficulté engagées dans des projets urbains ambitieux, est supprimé. En effet, l'application de la réforme de la dotation de solidarité urbaine (DSU) compensant intégralement, et même au-delà, les aides accordées sur cette ligne, sa conservation ne se justifie plus (20 millions d'euros étaient inscrits pour 2004) ;

- un article 70 est créé pour permettre le suivi du nouveau programme de « réussite éducative » prévu par le plan de cohésion sociale.

Quant au chapitre 57-71, non doté cette année, il est appelé à disparaître. Cette ligne permettait le financement de missions d'étude, d'expertise et d'évaluation conduites par la DIV au niveau national. Depuis la gestion 2001, ces actions ont été transférées sur le chapitre 37-60 article 10, qui a été doté en conséquence en loi de finances. La totalité des études centrales et déconcentrées a été soldée.

2.- Les dépenses ordinaires

a) Les crédits de fonctionnement

Outre le chapitre expérimental 39-01 précité, le titre III concerne les moyens de fonctionnement des services en charge de la politique de la ville, regroupés au chapitre 37-60. Le tableau suivant retrace l'évolution affectant ces crédits.

(En euros)

Chapitre 37-60

Intitulés

2004

2005

Article 10

Délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain

5.770.000

5.500.000

Article 20

Assistance technique des programmes européens

-

-

Article 30

Fonctionnement des services publics de quartier : crédits déconcentrés

4.500.000

2.600.000

Article 80

Dépenses de personnel

1.500.000

410.000

Total

11.770.000

8.510.000

Source : Projet de loi de finances pour 2005.

La légère baisse sur l'article 10 traduit un effort de rationalisation des dépenses de fonctionnement. L'utilisation de cette ligne portera notamment sur la mise en place de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles.

L'article 30 permettait jusqu'en 2004 la prise en charge des frais d'installation et de fonctionnement des délégués du Médiateur de la République, dont le montant fait désormais l'objet d'un transfert en base (230.000 euros pour 2004) au profit du budget des services communs du Premier ministre. Par ailleurs, cette ligne retrace l'action des services déconcentrés de l'État en faveur des services publics de quartier et en matière d'animation et de formation. La baisse réelle de la dotation est de 1,5 million d'euros, 400.000 euros ayant été transférés au profit des trois régions expérimentant la loi organique du 1er août 2001 (chapitre 39-01). Cette diminution tient compte de la tendance, de plus en plus forte, des services des préfectures à instruire les dossiers de formation, d'animation, voire de plates-formes de services publics, non plus sur le titre III, mais sur le titre IV. Ainsi, le montant des crédits mobilisés sur le chapitre 46-60 en faveur de services publics de quartier est estimé, pour 2003, à 8 millions d'euros.

Ainsi que votre Rapporteur spécial l'a déjà signalé, un nouvel article 70 est créé afin d'identifier la participation spécifique du budget de la ville au plan de cohésion sociale : 62 millions d'euros iront au programme de réussite éducative.

L'article 80 a été créé en 2003 pour permettre le versement des indemnités des personnels vacataires et des stagiaires auxquels la DIV fait appel. Les indemnités versées aux « délégués de l'État » (2) sont également imputées sur cette ligne budgétaire. La mesure nouvelle négative correspond à la suppression de la dérogation reconduite depuis plusieurs années permettant de recruter des vacataires au sein des missions ville, en remplacement des appelés ville. 90.000 euros sont par ailleurs transférés sur le chapitre 39-01.

b) Les crédits d'intervention

Le titre IV est composé de l'unique chapitre 46-60 « interventions en faveur de la politique de la ville et du développement social urbain ».

(en euros)

Chapitre 46-60

Intitulés

2004

2005

Article 10

Fonds d'intervention pour la ville

(contrats de ville et autres actions déconcentrées)

131.618.086

83.150.000

Article 30

Partenariat national et innovation

4.000.000

3.000.000

Article 40

Soutien aux grands projets de ville (ancien)

20.022.200

-

Article 50

Opérations ville, vie, vacances

10.017.400

7.750.000

Article 70

Programme de réussite éducative (nouveau)

-

62.000.000

Article 80

Dispositif adultes relais

57.000.000

47.000.000

Total

222.657.686

202.900.000

Source : Projet de loi de finances pour 2005.

S'agissant du Fonds d'intervention pour la ville (FIV), la diminution d'environ 48 millions d'euros sur l'article 10 mérite une double explication. D'une part, une fraction des crédits (26 millions d'euros) correspondant aux trois régions expérimentant la loi organique de 2001 figure au chapitre 39-01. En réintégrant ces crédits, la dotation du FIV est de 109,15 millions d'euros : la baisse réelle n'est plus que de 22,3 millions d'euros. D'autre part, cette diminution tient compte de l'identification, sur le nouvel article 70, des actions éducatives, qui découleront de l'application du plan de cohésion sociale et bénéficieront de 62 millions d'euros pour 2005.

Il faut noter que, pour la dernière année, 9,15 millions d'euros seront transférés en gestion depuis le ministère de la culture et de la communication : dans le projet de loi de finances pour 2006, cette contribution sera inscrite en base du budget de la ville. Votre Rapporteur spécial se félicite de cette clarification.

L'article 30 (« partenariat national et innovation ») concerne les crédits permettant d'impulser des actions d'intérêt national avec des structures dites « têtes de réseau ». Ils sont en baisse d'un million d'euros (- 25 %). La dotation proposée permettra néanmoins de répondre aux engagements pluriannuels contractés par la DIV avec ses partenaires.

Pour les opérations ville, vie, vacances (VVV), il importe là aussi de prendre en compte les 2,25 millions d'euros de crédits transférés sur le chapitre spécifique 39-01 à titre expérimental. Dès lors, la dotation pour 2005 s'établit à 10 millions d'euros, soit une quasi-reconduction par rapport à 2004.

S'agissant enfin du dispositif adultes relais, les crédits pour 2005 sont identiques à ceux de la loi de finances pour 2004, compte tenu du transfert de 10 millions d'euros pour les trois régions expérimentant la loi organique.

3.- Les dépenses d'investissement

Le chapitre 67-10 concerne les subventions d'investissement en faveur de la politique de la ville : contrats de ville, grands projets de ville et opérations de rénovation urbaine.

(en millions d'euros)

Chapitre 67-10

Intitulés

2004

2005

AP

CP

AP

CP

Article 10

Fonds d'intervention pour la ville
(contrats de ville et autres actions déconcentrées)

50

53

22

44,4

Article 30

Grands projets de ville et programme de rénovation urbaine

215

57

192

128,1

Total

265

110

214

172,5

Source : Projet de loi de finances pour 2005.

Sur le FIV, la dotation en réduction tient compte des opérations d'investissement inscrites dans les contrats de ville, mais réintégrées dans les projets financés au titre du programme de rénovation urbaine (3).

Sur l'article 30, votre Rapporteur spécial se réjouit de la forte augmentation des crédits de paiement : 62,5 millions d'euros de plus qu'en
2004 (soit + 56,8 %). La dotation de 214 millions d'euros en autorisations de programme prend en compte un transfert de 2 millions d'euros sur le budget du ministère de l'intérieur au titre du programme exceptionnel d'investissement (PEI) en Corse.

C.- L'AUGMENTATION DE L'EFFORT FINANCIER GLOBAL EN FAVEUR DE LA VILLE

En 2005, la politique de la ville et du développement social urbain bénéficiera au total d'un effort financier de 6,396 milliards d'euros, soit une augmentation de 6,7 % par rapport 2004 (5,997 milliards d'euros).

L'évolution depuis 2003 est retracée dans le tableau suivant :

(en millions d'euros)

2003
Exécution

2004
LFI

2005
PLF

CP

CP

CP

A-1. Crédits spécifiques ville

368,04

356,58

434,8

A-2. Crédits des autres ministères

2.240,55

2.219,3

2.185,74

A-3. Solidarité urbaine

448,91

469,75

469,75

TOTAL A

3.057,5

3.045,63

3.090,29

B. Dépenses fiscales et compensations

596,4

648

792,1

TOTAL A + B

3.653,9

3.693,63

3.882,39

C. Fonds européens

221,6

221,6

221,6

D. Caisse des dépôts (bonifications et concours)

141

100

123

E. Autres financements

335,8

967

979

TOTAL A + B + C + D + E

4.352,3

4.982,23

5.205,99

F. Contribution des collectivités territoriales

1.000,68

1.020,68

1.070,68

TOTAL GÉNÉRAL

5.352,98

6.002,91

6.276,67

Source : État récapitulatif de l'effort financier consacré à la politique de la ville
et du développement social urbain.

Votre Rapporteur spécial relève que si beaucoup de contributions sont stables (fonds européens) ou en hausse (Caisse des dépôts et consignations, collectivités territoriales), les crédits émanant des différents ministères sont en baisse. Le tableau ci-dessous en témoigne :

CRÉDITS DES MINISTÈRES CONTRIBUANT A LA POLITIQUE DE LA VILLE

(en millions d'euros)

2003
Exécution

2004
LFI

2005
PLF

(CP)

(CP)

(CP)

Affaires étrangères

0,35

0,35

0,35

Affaires sociales

97,73

94,6

98,39

Affaires sociales (budget du FASILD)

113,47

81,02

81,02

Aménagement du territoire

8,69

8,69

8,69

Culture et communication

21,2

21,82

21,82

Défense

17,67

19,04

20,75

Écologie et développement durable

4,08

6,48

5,9

Éducation nationale

548,96

576,48

572,95

Emploi (hors exonérations ZRU-ZFU)

181,65

132,5

96

Équipement, logement et transports

201,76

215,98

220,98

Fonction publique et réforme de l'État

4,2

2,35

1,8

Intérieur, sécurité intérieure et libertés locales

931,67

938,32

938,35

Jeunesse et sports

18,27

21,66

18,77

Justice

72,91

80,75

82,92

Outre-mer

17,94

19,27

17,05

Total (a)

2.240,55

2.219,3

2.185,74

(a) Déduction faite des transferts en gestion vers le budget de la ville.

Source : État récapitulatif de l'effort financier consacré à la politique de la ville et du développement social urbain.

Il convient de préciser que la baisse importante sur les crédits de l'emploi (96 millions d'euros contre 132,5 millions d'euros) s'explique par la sortie progressive du programme « emplois jeunes » et par la difficulté à évaluer l'impact en 2005 des nouveaux dispositifs.

1.- L'amplification des exonérations fiscales et sociales

À l'inverse des crédits ministériels, votre Rapporteur spécial constate l'augmentation substantielle des exonérations fiscales et sociales accordées par l'État. Ces « dépenses fiscales » stimulent les activités économiques dans les quartiers en difficulté. Le tableau suivant en rend compte :

EXONÉRATIONS FISCALES ET SOCIALES ET COMPENSATIONS

(en millions d'euros)

2003

2004 (a)

2005 (a)

Zones de redynamisation urbaine

Exonération d'impôt sur les bénéfices

52,5

51

52,5

Réduction des droits de mutation (b)

4,5

3

1,5

Exonérations de taxe professionnelle (c)

33

23

23

Exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale

9,8

9

9

Exonération de cotisations maladie

2,3

2,3

2,3

Sous-total

102,1

88,3

88,3

Zones franches urbaines 

Exonération d'impôt sur les bénéfices

100

90

150

Exonération d'imposition forfaitaire annuelle

3

3

4

Exonération de taxe professionnelle

49

75 (d)

77

Exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties

6

15 (d)

16

Exonération de cotisations patronales de sécurité sociale

246

283

363

Exonération de cotisations maladie

2,3

2,7

2,8

Sous-total

406,3

468,7

612,8

Exonération partielle de taxe foncière sur les propriétés bâties

88

91

91 (e)

Total général

596,4

648

792,1

(a) Estimations.

(b) L'exonération d'impôt sur les bénéfices concerne les entreprises nouvelles qui se créent à compter du 1er janvier 1995 dans les zones prioritaires d'aménagement du territoire, en vertu de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Son champ est donc plus large que les seules ZRU. Selon la DIV, le coût propre aux seules ZRU représente 30 % de cette dépense.

(c) La réduction des droits de mutation concerne l'exonération du droit de 3,8 % de mutation pour les acquisitions de fonds de commerce dans certaines zones prioritaires d'aménagement du territoire (article 722 bis du code général des impôts). Là encore, son champ est plus large que les seules ZRU, pour lesquelles le coût propre est estimé à 30 %.

(d) Concernant les 41 nouvelles ZFU, une partie est versée sous forme de compensation aux collectivités locales, une autre partie sous forme de dégrèvements aux entreprises ayant déjà acquitté leurs cotisations (compte tenu de la publication tardive du décret fixant les obligations déclaratives des entreprises situées dans ces zones).

(e) Pour 2005, en l'absence de données, reconduction de la dépense fiscale prévue pour 2004. Cette exonération pourrait être étendue par la future loi de programmation pour la cohésion sociale.

Source : État récapitulatif de l'effort financier consacré à la politique de la ville
et du développement social urbain.

Cette augmentation est essentiellement due aux 41 nouvelles zones franches urbaines (ZFU), qui s'ajoutent depuis le 1er janvier 2004 aux 44 zones préexistantes et, comme elles, bénéficient d'exonérations fiscales (taxe professionnelle, impôt sur les sociétés, droits de mutation, taxe foncière sur les propriétés bâties) et sociales (exonérations des cotisations patronales et des cotisations sociales maladie et maternité pour les artisans et les commerçants).

Votre Rapporteur spécial rappelle que ce dispositif des ZFU, créé par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville, a été mis en place en 1997 dans 44 zones et vise à favoriser l'implantation d'établissements et la création d'emplois dans les quartiers urbains sensibles. Ce dispositif qui n'avait pas été reconduit par le Gouvernement précédent, est à nouveau applicable depuis le 1er janvier 2003 grâce à la loi de finances rectificative pour 2002. Surtout, la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine crée 41 nouvelles zones franches.

Ces créations conduisent à un doublement du nombre de quartiers concernés (de 44 en 1997 à 85 en 2004) et de la population totale couverte, qui passe de 768.000 habitants en 1997 à 1,438 million d'habitants en 2004 (sur la base des données du recensement de 1999) et représente ainsi plus de 30 %
de la population totale des 751 quartiers classés en zones urbaines sensibles (4,7 millions d'habitants).

Parmi les avantages consentis aux ZFU, les établissements de moins de 50 salariés bénéficient d'exonérations sociales qui portent sur les cotisations patronales d'assurances sociales, d'accidents du travail, d'allocations familiales, du versement transport et du Fonds national d'aide au logement (FNAL) portant sur la fraction de la rémunération ne dépassant pas 1,5 SMIC. Ces exonérations s'appliquent pendant une durée de cinq ans maximum à taux plein, puis à taux dégressif sur une durée de trois ou neuf ans selon que l'entreprise emploie plus ou moins de cinq salariés. La loi du 1er août 2003 a également créé une exonération de cotisations patronales de sécurité sociale, de versement transport et de contribution au FNAL en faveur des associations implantées en ZFU ou en ZRU dans la limite de 1,5 fois le SMIC.

Jusqu'à présent, les crédits correspondants figurent au budget de l'emploi et du travail (chapitre 44-77 article 41) et s'élèvent à 363 millions d'euros pour 2005 contre 294,94 millions en 2004. À partir du projet de loi de finances pour 2006, ils seront transférés à la mission « Ville et logement » (programme « Équité sociale et territorial et soutien »).

Ainsi que votre Rapporteur spécial l'a déjà souligné lors de l'examen de la loi du 1er août 2003 (4), ces zones rencontrent un indéniable succès. Depuis leur création en 1997, les ZFU ont permis de tripler le nombre d'emplois dans ces sites : plus de 55.000 emplois ont été créés ou transférés au sein de ces zones franches. Près de 85 % des recrutements ont été réalisés sur des contrats à durée indéterminée. Ces créations d'emplois ont profité aux habitants de ces quartiers, puisqu'en moyenne 30 % des postes ont été pourvus par des personnes de la ZFU.

Ce taux devrait s'accroître avec le renforcement de la clause d'embauche locale : aux termes de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003, le maintien de l'exonération à partir de la 3e embauche est subordonné à la condition qu'un tiers au moins des nouveaux embauchés ou de l'effectif total résident dans la ZUS de l'agglomération où est située la ZFU. Afin d'optimiser cette clause d'embauche préférentielle et d'en faire bénéficier les jeunes, la DIV a signé le 26 novembre 2003 un protocole d'accord avec le conseil national des missions locales pour une durée de trois ans.

S'agissant spécifiquement des effets des exonérations dans les 41 nouvelles ZFU, une évaluation est encore prématurée. Un frein à la création d'emplois est néanmoins d'ores et déjà identifiable : l'absence d'offre immobilière et foncière suffisamment adaptée. Seules quelques ZFU sont en mesure de satisfaire immédiatement aux attentes des agents économiques parce qu'elles disposaient d'emblée de terrains ou de locaux disponibles.

Selon les informations recueillies par votre Rapporteur spécial, les estimations de créations d'emplois pour les six premiers mois sont de 800 à 1.200 emplois, correspondant pour l'essentiel à des créations nettes d'emplois. Compte tenu des délais habituels de recrutement de 2 à 6 mois dans les entreprises, les effets des nouvelles ZFU sur l'emploi ne seront pleinement visibles qu'à la fin de l'année. Pour 2004 et 2005, le nombre total de créations et d'implantations d'entreprises serait d'environ 2.000 pour un effectif total fin 2005 d'environ 8.000 emplois salariés et 1.000 nouveaux artisans, commerçants et travailleurs indépendants.

2.- La réforme de la dotation de solidarité urbaine

En 2004, conformément à l'article L. 2334-13 du code général des collectivités territoriales, le comité des finances locales a décidé d'affecter 66 % de la croissance du solde de la dotation d'aménagement à la dotation de solidarité urbaine (DSU). Au total, les crédits alloués à la DSU en 2004 s'élèvent à 635 millions d'euros (5), contre 615 millions d'euros en 2003, soit une progression de 3,3 %. La masse effectivement mise en répartition entre les communes de métropole s'élève à 609 millions d'euros après prélèvement de la quote-part réservée aux communes des départements et territoires d'outre-mer.

699 communes, représentant 22,81 millions d'habitants, auront ainsi bénéficié en 2004 des crédits mis en répartition au titre de la DSU des communes éligibles de plus de 10.000 habitants, soit 586,68 millions d'euros. La dotation moyenne par habitant s'élève à 25,72 euros (contre 24,96 euros en 2003). S'agissant des communes de 5.000 à 9.999 habitants, 104 communes sont éligibles en 2004. Elles comptent 741.103 habitants et ont bénéficié d'un montant de 19.059.443 euros.

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution de la DSU de 1997 à 2004 :

(en millions d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

330,052

346,799

502,681

574,777

575,243

592,722

614,917

635,037

+ 5,07 %

+ 44,95 %

+ 14,34 %

+ 0,08 %

+ 3,04 %

+ 3,74 %

+ 3,27 %

Source : DIV.

Pour 2005, l'article 59 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale propose d'abonder la dotation de solidarité urbaine (DSU) de 120 millions d'euros chaque année de 2005 à 2009 et de modifier les critères de répartition afin de favoriser les communes situées en ZUS et, parmi ces communes, plus particulièrement celles disposant d'une zone franche urbaine.

D'une part, le texte organise un doublement de l'enveloppe à répartir en cinq ans par prélèvement annuel de 120 millions d'euros sur l'accroissement de la part de la DGF destinée aux communes et aux intercommunalités, avant répartition par le comité des finances locales (6). L'enveloppe de la DSU devrait ainsi atteindre 1,2 milliard d'euros en 2009.

D'autre part, il est proposé de rénover la formule de répartition de la dotation dans le but d'augmenter significativement les crédits alloués aux 120 communes à faible marge de manœuvre financière et qui sont confrontées aux charges socio-urbaines les plus lourdes. La formule de répartition serait complétée par deux coefficients relatifs, d'une part, à l'importance du double des populations résidant en ZUS, en comparaison de la population totale des communes et, d'autre part, des populations résidant en ZFU, comparées à la population des ZUS. Ainsi, dans le cas d'une commune dont toute la population est comprise en ZUS et en ZFU, le coefficient multiplicateur pourrait atteindre 6.

En outre, par amendement au projet de loi, le Gouvernement propose de garantir pour toutes les communes une augmentation d'au moins 5 % par an de la DSU.

Votre Rapporteur spécial souligne en conséquence que les crédits budgétaires pour 2005 ne sauraient être appréciés sans tenir compte de ces 120 millions d'euros supplémentaires au titre de la dotation de solidarité urbaine.

II.- L'EXÉCUTION DES BUDGETS PRÉCÉDENTS

A.- UNE BONNE CONSOMMATION DES CRÉDITS EN 2003

Le taux de consommation des crédits a augmenté en 2002 et 2003, s'établissant à 82,9% et 81,1%, contre 68% et 72,9% en 2000 et 2001. Ainsi que le relève la Cour des comptes (7), cette hausse est due tout à la fois au développement des politiques lancées au début des années 2000 (contrats de ville, programme de renouvellement urbain, adultes relais), à la suppression de dispositifs entraînant une faible consommation (Fonds de revitalisation économique (8)), mais aussi à la diminution des crédits disponibles.

Sur le chapitre 37-60, le montant total des reports de crédits s'est élevé, fin 2003, à 2,865 millions d'euros, soit 20,5% de la loi de finances initiale. La gestion sur ce chapitre a été difficile, compte tenu des phases successives de gels, dégels et annulations de crédits. La programmation des actions a eu lieu tardivement, notamment pour les actions cofinancées, chaque partenaire financier attendant l'engagement effectif des autres financeurs. Les actions qui n'ont pu être réalisées fin 2003 ont donc été reportées sur l'exercice 2004.

S'agissant des crédits d'intervention en faveur de la ville et du développement social urbain (chapitre 46-60), l'inscription en base de l'essentiel des enveloppes transférées initialement en gestion sur le Fonds d'intervention pour la ville (FIV) par différents ministères a fait que ne restaient en cours d'année 2003 que le transfert en provenance du ministère de la culture vers le FIV (9,15 millions d'euros), ainsi que les transferts « ville, vie, vacances » (VVV) en provenance de quatre ministères (théoriquement 2,8 millions d'euros). Globalement, compte tenu de la tension forte due à la régulation budgétaire, le taux de consommation a été très élevé sur l'ensemble du chapitre, de l'ordre de 93 % des crédits ouverts.

Enfin, les crédits de subventions d'investissement du chapitre 67-10 ont été consacrés à la poursuite des actions inscrites dans les contrats de ville et des opérations du programme de renouvellement urbain, ainsi qu'au démarrage du programme national de rénovation urbaine, à la suite de la promulgation de la loi du 1er août 2003. La consommation s'est élevée à 96% (74 millions d'euros sur un montant de 77,42 millions d'euros de crédits ouverts).

B.- UN TAUX D'ENGAGEMENT LIMITÉ AU COURS DU PREMIER SEMESTRE 2004

Les dépenses de la politique de la ville sont souvent particulièrement concentrées au second semestre de l'année, compte tenu des délais de mise en place des crédits à l'échelon déconcentré et des procédures d'octroi de subventions. Des progrès ont été faits pour mieux échelonner ces dépenses, même s'ils se heurtent aux contraintes de la régulation budgétaire. Ainsi, une première série de délégations de crédits est effectuée mi-février, ce qui permet une programmation des actions les plus importantes et un rythme de paiement moins concentré en fin d'exercice budgétaire. Lorsque le montant des crédits de reports d'un exercice sur l'autre est connu, ainsi que les enveloppes de crédits gelés, la DIV procède à une deuxième série de délégations au niveau déconcentré.

Au 31 juillet 2004, le taux d'engagement sur le chapitre 37-60 a été largement inférieur à celui de l'année passée, en particulier parce que les reports de crédits de 2003 sur 2004 ont été à la fois importants et tardifs (2,87 millions d'euros, soit près de 30% des crédits disponibles).

Sur le chapitre 46-60, à ce jour, seul le ministère de la culture a procédé aux transferts de crédits en faveur du FIV (9,147 millions d'euros) et des opérations VVV (61.000 euros). Le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative a indiqué que l'impact du gel budgétaire ne lui permettait pas d'envisager ce transfert, d'un montant prévisionnel de 610.000 euros. Globalement, le gel des crédits a été compensé par l'obtention des reports de crédits depuis l'exercice 2003 dans leur totalité. Ceci a permis, notamment, d'honorer les engagements de l'État en matière de contrats de plan État-régions.

Sur le FIV, au-delà des engagements contractualisés, la DIV a procédé à des délégations de crédits afin de permettre la création ou la poursuite des équipes emploi insertion, des ateliers santé ville, des cellules de veille éducative, des services d'aide aux victimes d'urgence. Un transfert a été opéré par le ministère des affaires sociales en faveur du FIV, à hauteur de 823.786 euros.

Sur le chapitre 67-10, la totalité des autorisations de programme réservées à l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), a été attribuée. En revanche, le gel a touché la dotation du FIV en investissement.

III.- LA MISE EN œUVRE DE LA LOI ORGANIQUE
RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES DU 1er AOÛT 2001

Avant l'application intégrale de la loi organique du 1er août 2001 lors de la prochaine discussion budgétaire, il importe de faire le point sur l'avancée de sa mise en œuvre.

A.- LA MISSION « VILLE ET LOGEMENT »

Les crédits actuellement inscrits à la section budgétaire « Ville et rénovation urbaine » seront regroupés au sein de la mission ministérielle « Ville et logement ». Cette mission est composée de quatre programmes et serait dotée de 7,45 milliards d'euros en 2005.

Deux programmes, « Aide à l'accès au logement » et « Développement et amélioration de l'offre de logement », concernent des crédits relevant jusqu'ici de la seule section « Logement » et ne seront donc pas commentés dans le cadre de ce rapport spécial. En revanche, les deux autres programmes intéressent directement les crédits de la ville.

1.- Le programme « Rénovation urbaine »

Ce programme, dont le responsable est la Déléguée interministérielle à la ville (DIV), serait doté de 226,6 millions d'euros en 2005, soit environ 3% des crédits de la mission.

Ce programme aura pour enjeu de rendre plus attractifs les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il servira de cadre à la mise en œuvre de la rénovation urbaine dont les principes ont été fixés par la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Il visera à restructurer, dans un objectif de mixité sociale et de développement durable, les quartiers où le cadre bâti est le plus dégradé.

Ce programme comportera deux actions :

L'action « Logements participant à la rénovation urbaine » renverra aux moyens mis en œuvre par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) en faveur du logement dans les zones urbaines sensibles. Ces moyens - relevant jusqu'alors de la section budgétaire « Logement » - permettront de soutenir les projets initiés par les collectivités locales, en lien avec les organismes bailleurs. Ils seront principalement destinés à la démolition, la construction et la réhabilitation d'ensembles de logements locatifs sociaux ou de copropriétés dégradées, ainsi qu'à la réalisation de travaux de « résidentialisation ».

L'action « Aménagement des quartiers participant à la rénovation urbaine » permettra le financement des projets relatifs à :

- l'aménagement urbain et la requalification des espaces de proximité ;

- la création, la réhabilitation et la démolition d'équipements publics ou collectifs ;

- la réorganisation du foncier permettant l'émergence d'une offre d'habitat diversifié et le développement de l'activité économique ;

- l'ingénierie de projet.

Les crédits nécessaires à la réalisation de cette action - uniquement des dépenses d'intervention - seront délégués à l'ANRU. Ils sont proposés pour 2005 à une hauteur de 128,1 millions d'euros, ce qui correspond, ainsi que l'avait souhaité votre Rapporteur spécial l'année dernière (9), à l'actuel chapitre 67-10 article 30 « grands projets de ville et programme national de rénovation urbaine ».

2.- Le programme « Équité sociale et territoriale et soutien »

Ce programme bénéficierait en 2005 de 660,4 millions d'euros, soit 8,9% des crédits de la mission. Le responsable de ce programme est également la Déléguée interministérielle à la ville.

Il s'agit, d'une part, de renforcer la mixité fonctionnelle des quartiers prioritaires de la politique de la ville. La finalité sera de changer l'image de ces quartiers, d'y favoriser l'implantation d'activités économiques et d'emplois et d'offrir à leurs habitants de meilleures conditions de vie ; elle sera aussi de les ouvrir sur le reste de l'agglomération en y attirant des habitants des autres secteurs pour y résider ou pour bénéficier de leurs services comme n'importe quel quartier de ville. Il s'agit, d'autre part, de réduire la vulnérabilité sociale et économique de leurs habitants. À ce titre, le programme soutiendra un processus d'adaptation et de dimensionnement de l'offre de services aux besoins de ces populations.

Ce programme se déclinera en quatre actions :

L'action « prévention et développement social » visera à lutter contre la vulnérabilité sociale des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Elle se décomposera en trois sous-actions consacrées à la prévention et en onze sous-actions dédiées au développement social.

L'action « revitalisation économique et emploi » tendra à renforcer la mixité fonctionnelle des quartiers prioritaires de la politique de la ville et à favoriser l'insertion professionnelle de leurs habitants. Cette action devrait se décliner en deux sous-actions : l'une consacrée au développement économique des territoires prioritaires ; l'autre à l'insertion professionnelle de leurs habitants.

L'action « stratégie, ressources, évaluation » servira de cadre à l'ensemble des fonctions d'animation de la politique de la ville. Elle comprendra deux sous-actions :

l'animation de la politique de la ville, consistant à financer des structures supports telles que la DIV, le Conseil national des villes, les centres de ressources dédiés à la politique de la ville ou les délégués de l'État ;

l'évaluation de la politique de la ville, correspondant à la traduction opérationnelle de la création de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles par la loi du 1er août 2003. Cet observatoire assurera le suivi des critères socio-économiques définis par la loi.

L'action « allégements de charges sociales en zones urbaines sensibles » visera à soutenir la création d'activités dans les quartiers classés zones franches urbaines en y attirant des entreprises par un régime d'exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale. Ces ZFU sont aujourd'hui au nombre de 85. Cette action mobilise à elle seule près de 55 % des crédits du programme (363 millions d'euros sur un total de 660,4 millions d'euros en 2005). Ces crédits sont actuellement inscrits sur la section budgétaire « Emploi et Travail » (chapitre 44-77 article 42).

3.- Les transferts de crédits nécessaires

La structuration de la mission « Ville et logement » obligera l'an prochain à procéder à plusieurs transferts de crédits entre sections ministérielles.

Les crédits de personnel seront inscrits dans le programme « équité sociale et territoriale et soutien », au titre de l'action « stratégie, ressources, évaluation ». Des transferts devront être faits en provenance du budget des services communs du ministère de l'équipement. Il s'agit de crédits imputés sur les chapitres 31-90, 31-94, 32-97, 33-90, 33-91, 33-92 et 34-96.

Certaines dépenses de fonctionnement devront également faire l'objet de transferts depuis ce même budget. Il s'agit de crédits de dépenses informatiques et télématiques (chapitre 34-96, article 11), de fonctionnement et de logistique (chapitre 34-98, article 21) et de loyers des immeubles (chapitre 34-98, articles 21 et 51).

En outre, le ministère de la culture inscrira en base, dans le projet de loi de finances pour 2006, sa contribution au Fonds d'intervention pour la ville jusqu'alors transférée en gestion (chapitres 43-20 et 43-30).

Par ailleurs, les contributions du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative (chapitres 43-90 et 43-91) et du ministère de la culture et de la communication (chapitres 43-20 et 43-30) devraient également faire l'objet d'un transfert de crédits dans le prochain projet de loi de finances pour 2006 au titre du financement du programme « ville, vie, vacances ».

Enfin, l'importante enveloppe - 363 millions d'euros en 2005 - nécessaire à la compensation du coût des exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises installées en ZFU devra faire l'objet d'un transfert depuis le budget du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale (chapitre 44-77, article 42).

4.- Une structuration cohérente

D'une manière générale, il convient de rappeler toute la difficulté qu'il y a à avoir une vue d'ensemble des crédits concourant à des politiques interministérielles. C'est le cas de l'aménagement du territoire, de la sécurité, de la lutte contre la toxicomanie. C'est également le cas de la politique de la ville. Le fascicule « jaune » accompagnant le projet de loi de finances n'est pas un document normatif susceptible d'être adopté, mais une simple juxtaposition d'évaluations de dépenses.

Pour autant, des progrès substantiels dans la préparation de l'application de la loi organique relative aux lois de finances ont été réalisés. Il convient en effet de rappeler que l'année dernière le ministère de la ville n'envisageait qu'un seul programme consacré à la politique de la ville, décliné en sous-programmes.

En outre, votre Rapporteur spécial se félicite que l'essentiel des recommandations émises par la Commission des finances en mai 2004 aient été retenues (10:

- les différents programmes consacrés à la politique de la ville et au logement ont été rassemblés dans la même mission « Ville et logement » ;

- la subvention à l'ANRU a été unifiée dans la même mission, par transfert des crédits du logement bénéficiant aux zones urbaines sensibles vers le programme « Rénovation urbaine ».

- les allégements de charges sociales en zones urbaines sensibles, qui faisaient l'objet d'un programme spécifique, ont été intégrés dans le programme « Équité sociale et territoriale et soutien », constituant ainsi sa quatrième action.

Le tableau suivant établit la correspondance entre la structuration en chapitres et articles et la nomenclature en programmes et actions :

TABLEAU DE CONCORDANCE ENTRE LES PROGRAMMES ET ACTIONS
ET LES ACTUELS CHAPITRES ET ARTICLES DU BUDGET « VILLE » (2005)

(en euros)

Chapitre et articles

Montant

Programme « rénovation urbaine »

Action « aménagement des quartiers participant à la rénovation urbaine »

67-10 art.30 (ANRU)

74.500.000

67-10 art.30 (DIV)

53.600.000

Total programme

128.100.000

Programme « équité sociale et territoriale et soutien »

Action « prévention et développement social »

37-60 art.30

1.300.000

39-01 art.10

31.972.222

46-60 art.10

64.857.000

46-60 art.50

7.750.000

46-60 art.70

62.000.000

46-60 art.80

47.000.000

67-10 art.10

41.292.000

Action « revitalisation économique et emploi »

39-01 art.20

2.600.000

46-60 art.10

5.820.500

67-10 art.10

3.108.000

Action « stratégie, ressources, évaluation »

37-60 art.10

5.500.000

37-60 art.30

1.300.000

37-60 art.80

410.000

39-01 art.30

4.167.778

46-60 art.10

12.472.500

46-60 art.30

3.000.000

Total programme (section ville)

294.550.000

Total budget ville

422.650.000

B.- LA DÉCLINAISON OPÉRATIONNELLE DES PROGRAMMES

Le programme « Rénovation urbaine » devrait faire l'objet d'un seul budget opérationnel de programme (BOP) (11), dont la gestion sera confiée à la Déléguée interministérielle à la ville. Les crédits seront délégués à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). Le dialogue de gestion avec cet établissement public devrait s'appuyer sur une convention le liant à la DIV et à la Direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction (DGUHC).

Le programme « Équité sociale et territoriale et soutien », lui, devrait être décliné en BOP régionaux, pilotés par les préfets de région. Les secrétariats généraux pour les affaires régionales (SGAR) et les préfectures de département en seraient les unités opérationnelles. Cependant, il n'est pas à exclure que les préfets des départements les plus urbanisés (qui accueillent, notamment, des sous-préfets chargés de mission pour la politique de la ville) puissent revendiquer la responsabilité d'un BOP. En Île-de-France par exemple, des BOP départementaux semblent plus pertinents qu'un unique BOP régional.

Afin de répondre à ce type de questions et, plus largement, de préparer l'entrée en vigueur de la loi organique de 2001, trois régions (Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes et Bretagne) expérimenteront en 2005 le programme « équité sociale et territoriale et soutien ». Les principaux enjeux de cette expérimentation seront les suivants :

- préciser la répartition des ressources en autorisations d'engagement et crédits de paiement nécessaires à la réalisation de la programmation ;

- déterminer l'ensemble des dépenses qu'il sera nécessaire de soumettre à un plafond (indemnités dues aux délégués de l'État, financement des postes d'adultes relais, programme « ville, vie, vacances »), sans pour autant remettre en cause le principe de fongibilité des crédits ;

- apprécier le caractère opérationnel de l'organisation envisagée, notamment en ce qui concerne le dialogue de gestion et l'exécution de la dépense. L'occasion sera aussi donnée de revoir l'organisation de la DIV (désignation de correspondants territoriaux, interlocuteurs des responsables de BOP) ;

- décliner localement les objectifs et indicateurs de performance, par exemple au niveau des conventions cadres des contrats de ville. Il s'agira également de rechercher d'autres objectifs opérationnels spécifiquement locaux (détermination d'objectifs propres aux ateliers santé ville, au programme adultes relais, aux équipes emploi insertion, aux cellules de veille éducative etc.).

Pour mener à bien cette expérimentation, un nouveau chapitre spécifique (39-01) a été créé au titre III, qui a pour effet d'augmenter artificiellement les moyens de fonctionnement du budget de la ville. Doté en 2005 de 38,74 millions d'euros, ce chapitre se décompose en cinq articles :

- l'article 10 permettra la mise en œuvre de l'action « prévention et développement social » (31,97 millions d'euros) ;

- l'article 20 est dédié à l'action « revitalisation économique et emploi » (2,6 millions d'euros) ;

- l'article 30 est consacré à l'action « stratégie, ressources, évaluation » (4,17 millions d'euros).

Les deux autres articles 1 et 2, dédiés au regroupement des dotations de personnel et au regroupement des autres dotations, ne reçoivent pas de crédits en 2005.

Ainsi que votre Rapporteur spécial l'a indiqué plus haut, ceci se traduit par des transferts de crédits en provenance des autres chapitres, ce qu'indique le tableau suivant :

PROVENANCE DES CRÉDITS AFFECTÉS AU CHAPITRE 39-01

(en euros)

Chapitre et article

Intitulé

Montant

37-60 art. 30

Fonctionnement des services publics de quartier : crédits déconcentrés

400.000

37-60 art. 80

Dépenses de personnel

90.000

46-60 art. 10

Fonds d'intervention pour la ville
(contrats de ville et autres actions déconcentrées)

26.000.000

46-60 art. 50

Opérations ville, vie, vacances

2.250.000

46-60 art. 80

Dispositif adultes relais

10.000.000

Source : Ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.

C.- LES OBJECTIFS ET INDICATEURS DE PERFORMANCE

Les objectifs et indicateurs de performance sont présentés dans des documents préfigurant les futurs projets annuels de performance (PAP), prévus par l'article 51 de la loi organique relative aux lois de finances, appelés à remplacer les actuels « bleus » budgétaire. Sans prétendre ici à un examen approfondi, quelques remarques peuvent être formulées.

D'une manière générale, il faut saluer le fait que les objectifs et indicateurs proposés soient rattachés à chaque programme dans sa globalité, et non à telle ou telle action, ce qui favorise une meilleure compréhension des politiques menées.

Le programme « Rénovation urbaine » est doté de trois objectifs, deux relatifs à l'efficacité socio-économique (point de vue du citoyen) et l'autre mesurant l'efficience de la gestion publique (point de vue du contribuable) :

- renforcer l'attractivité du logement en zones urbaines sensibles (ZUS) : cet objectif sera mesuré par l'évolution du taux de vacance des logements sociaux, ce taux traduisant, au moins partiellement, un déficit d'attractivité de ces zones ;

- rénover le cadre urbain des ZUS : une enquête annuelle mesurera l'évolution de l'opinion des habitants sur l'environnement de leur logement ;

- maîtriser le coût du programme national de rénovation urbaine : l'ensemble des projets de rénovation urbaine devant être validés d'ici juin 2005, le coût global du programme (toutes sources de financement confondues : ANRU, Union européenne, collectivités locales) pourra alors être définitivement arrêté, chaque projet décliné en opérations se voyant réserver une enveloppe référentielle de crédits. Il sera alors possible de suivre le coût moyen par m2 des opérations, ainsi que de surveiller les pourcentages de dépassements des délais et coûts prévus. Un doute subsiste sur la date de disponibilité de ces indicateurs, qui sont à construire.

Les objectifs et indicateurs du programme « Équité sociale et territoriale et soutien » prêtent davantage à discussion. Certains d'entre eux mesurent l'activité plus que la performance. C'est le cas par exemple de l'indicateur fondé sur le nombre d'établissements implantés en ZUS, ZRU et ZFU. D'autres sont insuffisamment dépendants des actions menées. Ainsi, la densité des commerces de détail et des services aux particuliers est une indication pertinente de la revitalisation d'un quartier, mais ne renseigne pas précisément sur l'efficacité des politiques conduites : il faudrait privilégier les objectifs dont la réalisation dépend de façon déterminante des activités du programme, c'est-à-dire sur lesquels les services concernés disposent de véritables leviers d'action. Enfin, les enquêtes de satisfaction des citoyens ou des usagers peuvent être des indicateurs intéressants, à condition qu'ils soient construits sur des sujets ciblés et précis, afin d'être le moins possible en prise avec l'événementiel et les revirements de l'opinion. L'indice dit de « bonne gestion urbaine de proximité » devra à cet égard être élaboré avec précaution.

D.- LE PLAFOND D'AUTORISATION DES EMPLOIS

Votre Rapporteur spécial rappelle que la plupart des postes au sein de l'administration en charge de la politique de la ville, c'est-à-dire la Délégation interministérielle à la ville (DIV) et le Conseil national des villes (CNV) (12), sont occupés par des agents de l'État mis à disposition ou détachés depuis d'autres ministères, en particulier celui de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

Plus précisément, le personnel de la DIV se compose :

- d'agents titulaires mis à disposition par le ministère de l'équipement. Parmi les 44 mises à disposition autorisées (39 effectifs réels), 16 sont expressément réservées à la DIV, comptabilisés dans son cadre d'emplois et identifiées comme telles dans le budget de l'équipement, tandis que 28 sont « prêtées » à titre gracieux et hors cadre d'emplois ;

- d'agents titulaires mis à disposition par d'autres ministères. Ne figurant pas au cadre d'emplois de la DIV, ils sont au nombre de 16 actuellement : 2 de l'éducation nationale, 4 de la justice, 2 des affaires sociales, 2 de l'intérieur, 2 du SGG, 1 de la défense, 1 des finances (INSEE) et 1 de la Caisse des dépôts et consignations ;

- d'agents contractuels recrutés sur le cadre d'emplois de la DIV pour trois ans renouvelables et gérés par le ministère de l'équipement (44 emplois autorisés, 39 effectifs réels) (13) ;

- de vacataires auxquels la DIV fait appel pour des tâches ponctuelles ou saisonnières : ce sont les seuls agents rémunérés à partir du budget du ministère de la ville (actuellement 7 équivalents temps plein).

Au total, ce sont donc 88 emplois qui sont financés par le budget « services communs et urbanisme » du ministère de l'équipement : 60 sur le cadre d'emplois de la DIV (44 contractuels et 16 mises à dispositions « réservées ») et 28 hors de ce cadre d'emploi.

Compte tenu de la complexité de cette situation se pose la question du calcul du plafond d'autorisation des emplois prévu par l'article 7 de la loi organique du 1er août 2001 : « les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel sont assortis de plafonds d'autorisation des emplois rémunérés par l'État. Ces plafonds sont spécialisés par ministère ».

Tous les personnels rémunérés ont normalement vocation à être décomptés en équivalents temps plein, y compris les saisonniers et autres agents non titulaires. Devraient donc être comptabilisés l'année prochaine les contractuels recrutés pour 3 ans renouvelables (44 cette année) et les emplois de fonctionnaires gérés par le ministère de l'équipement et réservés à la DIV (au nombre de 16), soit un effectif de 60 emplois. Les crédits réservés à ces 60 emplois sont inscrits au budget de l'équipement, identifiés sur la ligne du chapitre 31-90 article 60 (2,21 millions d'euros pour 2005). S'y ajouteraient les 7 emplois en équivalents temps plein de vacataires, soit un total général de 67 emplois.

À l'inverse, les emplois occupés par des fonctionnaires mis à disposition par le ministère de l'équipement à titre gracieux (au nombre de 28) et par d'autres administrations (16 actuellement) seront logiquement inscrits dans les plafonds d'autorisation d'emplois de leur ministère d'origine et leurs rémunérations relèveront des programmes dans lesquels ces personnels sont inscrits.

Au plan qualitatif, et comme il est fréquent s'agissant d'une « administration de mission », la ventilation du cadre d'emplois par catégories fait apparaître un nombre important d'agents de catégorie A : 40 postes, contre 10 en catégorie B et 10 en catégorie C. Par métiers, on dénombre 13 emplois de direction, de chefs de département et conseillers de la déléguée interministérielle, 24 chargés de mission, 3 administrateurs réseau informatique et webmestre et 20 secrétaires et assistants.

IV.- LE LANCEMENT DU PROGRAMME NATIONAL DE RÉNOVATION URBAINE

La loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1er août 2003 fixe pour la période 2005-2009 les objectifs suivants :

- création de 200.000 logements locatifs sociaux nouveaux visant à compenser la perte de patrimoine social due à la démolition ;

- réhabilitation ou restructuration en profondeur de 200.000 logements sociaux permettant de leur redonner un regain durable d'attractivité (« résidentialisation ») ;

- démolition de 200.000 logements sociaux que la réhabilitation ne peut remettre au niveau de la demande sociale ou dont la destruction est nécessaire à la réalisation d'un projet de restructuration urbaine.

Six milliards d'euros, gérés par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), devaient initialement être mobilisés sur la période de cinq ans couverte par la loi. Mais par amendement au projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, le Gouvernement a ouvert la voie à la prolongation de ce plan jusqu'à 2011 et a réévalué à la hausse les objectifs : 50.000 logements locatifs sociaux s'ajouteront aux 200.000 prévus, les réhabilitations seront doublées de 200.000 à 400.000 et les démolitions passeront de 200.000 à 250.000. L'ensemble des crédits du programme serait ainsi de 8,2 milliards d'euros sur huit ans.

A.- L'ANRU : UN OUTIL DE SIMPLIFICATION

L'idée qui a présidé à la création de l'ANRU - et qui doit perdurer dans son fonctionnement - est de simplifier l'enchevêtrement des modes opératoires des principaux financeurs.

Établissement public à caractère industriel et commercial, l'ANRU a pour mission de contribuer, dans un objectif de mixité sociale et de développement durable, à la réalisation du programme national de rénovation urbaine dans les quartiers classé en zones urbaines sensibles (ZUS). Pour cela, son rôle essentiel consiste à accorder des concours financiers aux collectivités territoriales, aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents et aux organismes publics ou privés qui y conduisent des opérations participant à la rénovation urbaine. Sous certaines conditions, l'ANRU peut également exercer des missions de maîtrise d'ouvrage de tout ou partie de projets de rénovation urbaine.

Placée sous la tutelle du ministre chargé de la politique de la ville, régie par le décret n° 2004-123 du 9 février 2004, l'Agence comprend un conseil d'administration composé en nombre égal, d'une part, de représentants de l'État et, d'autre part, de représentants des communes et de leurs EPCI compétents, des conseils généraux, des conseils régionaux, de l'union d'économie sociale du logement, de l'union nationale des fédérations d'organismes d'habitation à loyer modéré, de la Caisse des dépôts et consignations et de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, ainsi que de personnalités qualifiées. Le conseil d'administration, qui s'est réuni pour la première fois le 7 juin 2004, valide les projets présentés à l'ANRU ou délègue cette compétence au directeur général. Un comité d'engagement préalable examine tous les projets et aide à la prise de décision.

Au plan de l'organisation de la politique de la ville, la création de l'ANRU a eu pour conséquence un réajustement des activités de la DIV. Le bloc de compétence relatif à la rénovation urbaine au sein de la Délégation, ainsi que les 6 agents concernés, ont été transférés à l'ANRU. La DIV conserve cependant un rôle d'expertise en matière de rénovation urbaine au titre des avis donnés sur les dossiers présentés au comité d'engagement et au conseil d'administration de l'ANRU. En outre, la déléguée interministérielle à la ville est responsable du programme « Rénovation urbaine » conduit par l'ANRU.

Au plan budgétaire, l'institution de l'ANRU a entraîné le transfert à son profit des crédits inscrits sur le chapitre 67-10 article 30 dédiés aux opérations d'investissement les plus lourdes (une partie de ces crédits reste cependant allouée aux opérations antérieures de renouvellement urbain).

B.- DES FINANCEMENTS À LA HAUTEUR DES ATTENTES

Les ressources de l'Agence, qui devrait recevoir chaque année 1,1 milliard d'euros, proviennent principalement :

- de l'État, qui lui consacrera 2,5 milliards d'euros sur 5 ans ;

- de l'Union d'économie sociale pour le logement (UESL), gestionnaire du « 1% logement » qui lui affectera annuellement 550 millions d'euros ;

- de la Caisse des dépôts et consignations, par un apport en fonds propres dans le cadre d'une nouvelle convention signée avec l'État ;

- des organismes HLM, par le biais du versement d'une fraction des cotisations additionnelles perçues par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS).

VERSEMENTS À L'AGENCE NATIONALE DE RÉNOVATION URBAINE
(crédits de paiement)

(en millions d'euros)

2004

2005

Pour l'État

50 sur FRU (a)
80 sur LFI

100 sur FRU (a)
173 sur PLF

Pour l'Union d'économie sociale du logement (UESL)

120 prévu avance (b)

130 équivalence État (c)

120 prévu avance (b)

273 équivalence État (c)

Pour Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS)

29

29

Pour Caisse des dépôts et consignations

4

4

Total

413

699

Total 2004-2005

1.112

(a) Excédents du Fonds de renouvellement urbain.

(b) Au titre de la convention du 10 septembre 2003, modifiée par la convention du 27 octobre 2004.

(c) Ces montants complémentaires sont équivalents aux versements effectués par l'État, précédemment ou concomitamment, durant l'année.

Source : ANRU.

S'agissant des crédits de l'État, la loi impose un seuil minimum annuel de 465 millions d'euros en autorisations de programme. Ces crédits sont imputés :

- au budget du ministère du logement sur le chapitre 65-48, article 80 : 250 millions d'euros ont été inscrits en 2004 et 223 millions d'euros sont proposés pour 2005 ;

- au budget du ministère chargé de la ville sur le chapitre 67-10, article 30 : la loi de finances pour 2004 a alloué 215 millions d'euros, le présent projet de loi de finances prévoit 192 millions d'euros pour 2005.

Afin d'atteindre le seuil de 465 millions d'euros en 2005, ces crédits devraient être complétés par 50 millions d'euros de la Caisse des dépôts et consignations sur le solde du Fonds de renouvellement urbain (FRU).

En crédits de paiement, le montant apporté par l'État en 2004 a été de 130 millions d'euros. Il sera de 173 millions d'euros en 2005 : 74,5 millions du ministère de la ville, 98,5 millions du ministère du logement, auxquels devraient s'ajouter 100 millions d'euros émanant de la Caisse des dépôts et consignations sur le solde du FRU dans le prochain projet de loi de finances rectificative. Il convient de rappeler que le FRU, géré par la Caisse des dépôts pour le compte de l'Etat, a en effet financé des prêts en faveur de la rénovation urbaine. Les remboursements abonderont ainsi la trésorerie de l'ANRU.

ENGAGEMENT DE L'ÉTAT
EN FAVEUR DU PROGRAMME NATIONAL DE RÉNOVATION URBAINE

(en millions d'euros)

2004

2005

AP

CP

AP

CP

Ministère de la ville

215

43

192

74,5

Ministère du logement

250

37

223

98,5

Caisse des dépôts et consignations (a)

-

50

50

100

Total

465

130

465

273

(a) Excédents du Fonds de renouvellement urbain (FRU).

Source : ANRU.

C.- UN AVANCEMENT DES PROJETS PROMETTEUR

Pour éviter toute discontinuité entre l'action de l'État et celle de l'Agence, le conseil d'administration de l'ANRU avait autorisé, dès le 3 juillet 2004, la mise en place d'une enveloppe de 300 millions d'euros pour que ses délégués territoriaux puissent prendre les premières décisions d'attribution de subvention pour les opérations les plus urgentes.

Au 15 septembre 2004, 21 conventions ont été signées. Elles représentent un engagement de 833 millions d'euros pour un objectif de 5,225 milliards d'euros, soit 10% du programme. En crédits de paiement, elles représentent pour l'ANRU 128 millions d'euros en 2004 et 879 millions d'euros en 2005. 25 ZUS et 30 communes sont concernées, soit un total de 1.322 opérations physiques.

Par ailleurs, 49 projets ont été examinés par le comité d'engagement, correspondant à 68 quartiers (dont 39 parmi les 162 prioritaires). Ils représentent un coût d'un montant global de 5,5 milliards d'euros dont 1,7 milliard d'euros de subvention ANRU (soit 30 %). En six mois d'activité, le quart des moyens prévus par la loi de programmation du 1er août 2003 est ainsi déjà mobilisé.

La répartition par type d'opérations dans les projets présentés en comité d'engagement se fait en 20.800 logements sociaux à construire, 24.000 à démolir et 58.600 à réhabiliter. En fonction des catégories d'intervention, la répartition des financements retenus est de 4.100 millions d'euros pour les opérations de logement, 745 millions d'euros pour les aménagements d'espaces extérieurs et 625 millions d'euros pour les équipements publics.

Les quartiers prioritaires ont fait l'objet d'un effort financier particulier par rapport aux autres quartiers en ZUS. En effet, le coût moyen des projets sur ces quartiers est de 131 millions d'euros alors que sur les autres ZUS il est de 59 millions d'euros. En conséquence, la subvention ANRU moyenne y est de 40 millions d'euros par projet (soit 31 % de taux moyen), alors qu'il est de 16 millions d'euros pour les autres (soit 27 % de taux moyen).

Enfin, votre Rapporteur spécial tient à rappeler que l'Agence agit sur un territoire donné de manière globale, pas nécessairement sur le seul logement. On peut ainsi constater que la répartition moyenne du coût global des projets est de 74 % pour le logement, de 13 % pour les aménagements d'espaces publics, de 11 % pour les équipements et de 1 % pour l'ingénierie des projets.

D.- LA POURSUITE DES CONVENTIONS ANTÉRIEURES

Les aides de l'État prévues dans le cadre des grands projets de ville et des opérations de renouvellement urbain - qui pourront être revus et éventuellement amplifiés - seront également honorées par l'ANRU par l'intermédiaire d'une contractualisation.

Pour les quartiers non situés en ZUS, l'article 6 de la loi du 1er août 2003 prévoit que les compétences de l'ANRU peuvent être exceptionnellement élargies à des quartiers présentant des caractéristiques analogues aux ZUS, avec l'accord du ministre chargé de la ville et du ministre chargé du logement.

Les grands projets de ville (GPV) et les opérations de renouvellement urbain (ORU) avaient été lancés dans le cadre du programme national de renouvellement urbain lors du Comité interministériel des villes du 14 décembre 1999. Avec la création de l'ANRU, ces programmes ont vocation à s'intégrer dans les projets de rénovation urbaine financés par l'Agence, le ministère de la ville lui transférant la totalité des crédits d'investissement (14). Par exemple, s'il est reconnu nécessaire de modifier le périmètre d'un GPV existant ou les actions prévues lors de la signature de la convention de GPV, ces modifications sont étudiées par le conseil d'administration de l'ANRU et intégrées dans la convention liant l'Agence à la ville concernée.

Votre Rapporteur spécial considère que la plupart des enjeux des GPV et des ORU ont été réaffirmés dans la loi sur la rénovation urbaine de 2003 et qu'ils seront repris de manière plus opérationnelle dans les projets de rénovation urbaine soutenus par l'ANRU.

Seuls les crédits de paiement afférents aux autorisations de programme déléguées en 2003 et lors des exercices antérieurs restent en gestion de la DIV, soit 53,6 millions d'euros sur le chapitre 67-10 article 30 pour 2005. En loi de finances 2004, les 57 millions d'euros de crédits de paiement se partageaient entre 43 millions d'euros en faveur de l'ANRU et 14 millions d'euros à destination de la DIV.

V.- LA RESTAURATION DE L'ÉQUITÉ SOCIALE ET TERRITORIALE

Il faut rappeler que ce programme inclura l'année prochaine les allégements de charges sociales en ZUS, qui relèvent jusqu'alors du budget de l'emploi et du travail (363 millions d'euros pour 2005). Ce programme représenterait ainsi 660,38 millions d'euros. Le budget de la ville y participe à hauteur de 294,55 millions d'euros, tandis qu'environ 2,8 millions d'euros sont transférés en gestion par d'autres ministères (15).

A.- LA PARTICIPATION AU PLAN DE COHÉSION SOCIALE : LE LANCEMENT DU PROGRAMME DE RÉUSSITE ÉDUCATIVE

Bien sûr, beaucoup d'actions menées et de crédits mobilisés dans le cadre de la politique de la ville concourent aux objectifs du plan de cohésion sociale, qu'il s'agisse de l'emploi, du logement ou de l'égalité des chances. Mais, plus spécifiquement, le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale prévoit un nouveau dispositif dit de « réussite éducative » auquel le budget de la ville contribue directement, 62 millions d'euros étant inscrits à cette fin au nouvel article 70 du chapitre 46-60.

Ce montant correspond à l'engagement du Gouvernement pour la première année. Sur la période 2005-2009, les crédits budgétaires annoncés en faveur des outils de réussite éducative sont de 1,469 milliard d'euros selon le calendrier suivant :

CRÉDITS PRÉVUS EN FAVEUR DU PROGRAMME DE RÉUSSITE ÉDUCATIVE

(en millions d'euros)

Année

2005

2006

2007

2008

2009

Crédits

62

174

411

411

411

Source : Article 56 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale.

D'abord, des « équipes de réussite éducative » viendront en aide aux élèves des classes primaires et maternelles. Elles réuniront autour de l'enfant et de ses parents, des enseignants, des éducateurs, des animateurs, des travailleurs sociaux, des psychologues, des pédopsychiatres et des rééducateurs (kinésithérapeutes, orthophonistes). D'après le plan de cohésion sociale, ces équipes seront créées à l'initiative des responsables d'établissements scolaires, des communes et de leurs groupements, des départements, des Caisse d'allocations familiales (CAF) et de l'État. Il s'agirait d'en créer 750, réparties dans les 900 zones ou réseaux d'éducation prioritaire. Le Gouvernement estime à 1 million d'euros le coût d'une équipe, le financement étant assuré par des crédits de l'État (en moyenne 500.000 euros par an), mais aussi par ses partenaires.

Ensuite, des « plates-formes de réussite éducative » seront créées à destination des élèves de l'enseignement secondaire, que le Gouvernement souhaiterait voir devenir des « pôles d'excellence éducative ». 150 seraient mises en place en 5 ans dans les quartiers sensibles, pour un coût annuel de 500.000 euros. Ces plates-formes réuniront les services sociaux et sanitaires de l'éducation nationale, ceux de l'aide sociale à l'enfance et les centres de pédopsychiatrie.

Enfin, des « internats de réussite éducative » accueilleront les collégiens les plus en difficulté. Ils dispenseront un enseignement général et d'initiation professionnelle et organiseront des activités récréatives et culturelles au profit de leurs pensionnaires. Une trentaine de ces établissements devraient être créés : trois dans les régions Ile-de-France, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d'azur, et Nord-Pas-de-Calais, un dans chacune des autres régions. Le coût d'un internat est estimé à 800.000 euros par an.

Fidèles à l'esprit du plan de cohésion sociale, ces dispositifs devront être ouverts au maximum de partenaires possibles et pilotés au plus près des besoins locaux. Selon le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, « les chefs d'établissement, professeurs, caisses d'allocations familiales... doivent se mobiliser sur le terrain au sein d'une structure ayant la personnalité morale, comme des caisses des écoles, des établissements publics locaux... ». Des groupements d'intérêt public (GIP) devraient pouvoir être créés pour mener des actions éducatives, culturelles, sociales et sanitaires en faveur des élèves du premier et du second degré (article 55 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale).

Compte tenu des coûts affichés, votre Rapporteur spécial attire l'attention sur les efforts qui seront nécessaires pour mobiliser et diversifier les sources de financement.

B.- LE NÉCESSAIRE RECENTRAGE DES ACTIONS LOCALES SUR LES THÈMES PRIORITAIRES DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

En dehors des 62 millions d'euros consacrés au programme de réussite éducative, les autres moyens en faveur de l'équité sociale et territoriale sont proposés en 2005 à une hauteur de 232,55 millions d'euros. Ainsi qu'on l'a déjà signalé, la diminution par rapport à l'exercice précédent s'explique par la suppression des crédits du chapitre 46-60, article 40, consacré au soutien des villes en grande difficulté (20 millions d'euros en 2004), qui ne se justifient plus compte tenu de la réforme de la DSU et des 120 millions d'euros attendus à ce titre en 2005.

Au-delà de l'appréciation sur le montant des crédits, votre Rapporteur spécial souhaite qu'ils soient utilisés à des fins de financement d'actions prioritaires de la politique de la ville. Une forte mobilisation des crédits de droit commun des autres ministères doit ainsi être recherchée, afin d'éviter les effets de substitution constatés par le passé.

Quelques uns des principaux dispositifs directement financés par le budget de la ville seront ici examinés.

1.- Les contrats de ville et le Fonds d'intervention pour la ville

À l'exception des projets de rénovation urbaine gérés par l'ANRU, les champs concourant à la politique de la ville peuvent être soutenus par les crédits contractualisés de la DIV, en fonctionnement et en investissement, en complément des crédits de droit commun des différents ministères.

Les contrats de ville sont ainsi pour partie alimentés par le Fonds d'intervention pour la ville (FIV), dont les crédits pour 2005 figurent :

- à l'article 10 du chapitre 46-60, à hauteur de 83,15 millions d'euros ;

- parmi les dotations attribuées à titre expérimental aux régions Bretagne, Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes dans le cadre du programme « équité sociale et territoriale et soutien » (26 millions d'euros au sein des crédits figurant au chapitre 39-01).

Ces 109,15 millions d'euros apparaissent comme une baisse par rapport à 2004, où ils étaient de 131,62 millions d'euros. Cette baisse est partiellement artificielle, car elle est compensée par le nouveau programme de réussite éducative précité, qui bénéficie de 62 millions d'euros qui pourront être consacrés à des actions qui, jusqu'ici, était prises en charge sur le fondement du chapitre 46-60, article 10.

Ce sont donc 171 millions d'euros de crédits qui seront consacrés, en 2005, aux actions de fonctionnement conduites dans le cadre des contrats de ville. Ainsi, le niveau de 2003 (176,86 millions d'euros) est quasiment retrouvé. La progression par rapport à 2004, qui a été une année plus difficile (131,62 millions d'euros), est de 31 %.

S'agissant des crédits d'investissement, les autorisations de programme passent de 50 millions d'euros en 2004 à 22 millions d'euros pour 2005. Les crédits de paiement diminuent de 53 millions d'euros à 44,4 millions d'euros (chapitre 67-10 article 10). Cette baisse est parfaitement logique, dès lors que beaucoup d'opérations seront intégrées dans le nouveau programme de rénovation urbaine, relevant lui du chapitre 67-10 article 30 et bénéficiant de 71,1 millions d'euros de plus qu'en 2004 (+ 124,7 %).

Selon les informations recueillies par votre Rapporteur spécial, une évaluation sommaire des contrats de ville 2000-2006 a été réalisée à mi-parcours début 2004. Les trois thèmes traités en priorité par ces contrats sont l'emploi, l'éducation et la prévention de la délinquance :

- l'emploi et l'insertion sont une préoccupation majeure de la plupart des contrats de ville. Par exemple, 65 équipes emplois insertion (16) se sont développées dans les quartiers : en 2002, 38.000 accompagnements individualisés vers l'emploi ont été effectués, dont près de 40 % de moins de 26 ans. Une personne sur trois reçues dans ce cadre n'était pas connue de l'ANPE ;

- le champ périscolaire a également été particulièrement investi par les contrats de ville. Des actions partenariales ont permis un traitement pluridisciplinaire des difficultés rencontrées par les jeunes en échec scolaire. La territorialisation de la politique de la ville a permis une plus grande ouverture de l'école sur le quartier : on peut citer en exemple le dispositif « école ouverte » et un meilleur suivi des élèves en difficulté avec les cellules de veille éducative ;

- les maisons de la justice et du droit permettent une présence judiciaire de proximité. Les fonctions de médiations sociales ont été renforcées : elles concernent aujourd'hui plus de 15.000 emplois qui participent tant à la réduction de l'insécurité, avec les correspondants de nuit par exemple, qu'à un meilleur dialogue avec les institutions, grâce aux adultes relais notamment.

2.- Le programme ville, vie, vacances

Ce programme bénéficie du soutien financier de plusieurs ministères et a pour objet de prévenir la délinquance et les comportements inciviques de jeunes lors des vacances scolaires, et au-delà, de favoriser leur insertion durable. À l'origine destinés aux opérations anti-« été chaud », les crédits ont été étendus à des actions d'animation et d'insertion au bénéfice des jeunes, tout au long de l'année. Appliqué à l'ensemble du territoire, ce programme concerne désormais plus de 800.000 jeunes.

En 2003, le programme VVV a été affecté par les gels de crédits touchant les ministères partenaires de ces opérations. Le ministère de le ville a maintenu sa dotation de 8,9 millions d'euros, les autres ministères continuant à contribuer à ce dispositif : justice (540.000 euros), culture (1,39 million d'euros), affaires étrangères (430.000 euros) et sports (120.000 euros). Le ministère des affaires sociales (2,13 millions d'euros) a versé début 2003 sa contribution pour l'année 2002, tandis que le ministère de la jeunesse n'a pas contribué aux opérations pour cette année 2003 (450.000 euros).

En 2004, l'État a consacré un budget global de 12,42 millions d'euros au financement du dispositif VVV. Par ministère, le détail de cette contribution est le suivant :

- ministère en charge de le ville : 10,79 millions d'euros. Ce montant comprend l'apport transféré en base du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale (2,13 millions d'euros) et du ministère de la justice (260.000 euros) ;

- ministère de la justice : environ 84.000 euros de dépenses de personnel consacrées à l'encadrement de certaines opérations VVV ;

- ministère de la culture : 1,2 million d'euros. 600.000 euros sont transférés en gestion au bénéfice de la section « ville » et 1,14 million d'euros correspond à des dépenses d'intervention (financement du projet « un été au ciné - cinéville ») ;

- ministère des affaires étrangères : 350.000 euros sous la forme de dépenses d'intervention consacrées au financement du projet « VVV - solidarité internationale ».

Le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative n'a pas procédé au transfert en gestion de sa contribution dont le montant prévisionnel était de 610.000 euros. À l'inverse, la contribution de forces armées sous la forme de mise à disposition de personnels chargés de l'encadrement de certaines opérations doit être soulignée, même si elle ne peut faire l'objet d'un chiffrage précis de la part de la gendarmerie et de la police.

Pour 2005, après ajout aux 7,75 millions d'euros du chapitre 46-60, article 50 des moyens transférés sur le chapitre expérimental 39-01 (2,25 millions d'euros), les crédits s'élèvent à 10 millions d'euros, soit une infime diminution de 17.400 euros par rapport à la loi de finances pour 2004 (- 0,17 %).

Au-delà des crédits étatiques, les résultats de l'enquête menée par la DIV auprès des préfets au début de cette année permettent d'estimer que l'investissement initial de l'État est multiplié par 3,8, en prenant en compte aussi bien les dépenses d'intervention que les mises à disposition en personnel et en matériel opérées par les collectivités territoriales, les caisses d'allocations familiales, les bailleurs sociaux ou le monde associatif. Les chiffres suivants peuvent être avancés :

(en millions d'euros)

Organismes financeurs

État
(DIV)

État
(autres)

CAF

Collectivités locales

Autres
financeurs

Montant 2003

10,2

2,66

7,9

23,6

16,5

Source : DIV.

3.- Les adultes relais

Le programme « adultes relais » a été lancé lors du Comité interministériel des villes du 14 décembre 1999. Il tend à créer ou à développer le lien social dans les territoires de la politique de la ville grâce à des missions de médiation sociale entre les habitants, les services publics et les équipements de proximité. Il permet aussi de revaloriser le rôle des adultes et la fonction parentale et participe à la prévention et à la lutte contre l'insécurité.

Ce programme a été élargi aux collectivités territoriales et aux établissements publics locaux par le décret n° 2002-374 du 20 mars 2002, permettant le recrutement d'adultes relais dans le cadre du contrat emploi consolidé (CEC). L'aide de l'État est calculée sur la base du SMIC annuel à temps plein, cotisations sociales et patronales comprises. Au 1er juillet 2004, elle s'élève à 17.743 euros par poste et par an. Pour les établissements publics locaux d'enseignement, l'aide de l'État peut être fixée à 19.960 euros ou 22.178 euros par poste et par an.

La montée en charge du programme adultes relais est lente mais régulière : 215 postes fin 2000, 1.498 fin 2001, 2.428 fin 2002 et 3.100 fin 2003. Le Comité interministériel pour l'intégration du 10 avril 2003 a confirmé ce programme et a proposé de l'élargir à l'intégration des personnes d'origine étrangère, notamment dans les domaines de l'accès aux soins et l'accompagnement au logement.

Selon les informations obtenues par votre Rapporteur spécial, 3.100 adultes relais étaient en activité début 2004 et 3.300 auront bénéficié du dispositif d'ici la fin de l'année. Le gel budgétaire intervenu au premier semestre 2004 a freiné le développement de ce programme. Pour 2005, les crédits restent de 57 millions d'euros : 47 millions d'euros figurent au chapitre 46-60 article 80, auxquels s'ajoutent 10 millions d'euros inclus dans la dotation des trois régions expérimentant la loi organique de 2001 (chapitre 39-01).

C.- L'INDISPENSABLE ÉVALUATION DES POLITIQUES MENÉES

La loi du 1er août 2003 a assigné des objectifs précis de réduction des inégalités aux politiques publiques et mis à leur disposition des moyens de mesurer les écarts et leurs évolutions. S'ajoutant aux outils d'évaluation préexistants, un Observatoire national des zones urbaines sensibles a été créé par cette loi, afin de mesurer l'évolution des inégalités sociales et des écarts de développement dans les 751 ZUS, de suivre la mise en œuvre des politiques publiques conduites en leur faveur, de mesurer les moyens spécifiques mis en œuvre et d'en évaluer les effets.

Selon le décret n° 2004-1135 du 22 octobre 2004 relatif à l'Observatoire national des zones urbaines sensible, l'Observatoire « collecte auprès de l'État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics respectifs les éléments d'information nécessaires à la production des différents indicateurs » prévus par la loi du 1er août 2003. Il « analyse ces informations et fait réaliser toute étude pouvant éclairer les constats provenant de ces informations. À cette fin, il rassemble et utilise les connaissances scientifiques disponibles permettant de dégager des enseignements à caractère prospectif. Il vient en appui aux études locales en diffusant les informations rassemblées et en favorisant l'adoption de méthodologies communes ».

Le conseil d'orientation de cet Observatoire a été effectivement installé le 25 octobre 2004. Situé à Saint-Denis dans les locaux de la DIV (qui en assure le secrétariat permanent), cet Observatoire se substituera à la mission « observation, veille scientifique, évaluation », chargée d'animer et d'apporter son soutien méthodologique aux activités d'études de la DIV et d'assurer la liaison avec les principaux organismes d'étude et les producteurs de statistiques susceptibles de contribuer à la connaissance et à l'évaluation de la politique de la ville.

Sur le fondement des travaux de l'Observatoire, un rapport annuel détaillé sur l'évolution des ZUS et des ZFU sera présenté par le Gouvernement au Parlement, au plus tard à l'ouverture de la session ordinaire. Quoique ce rapport ne soit pas encore disponible à l'heure actuelle, une étude publiée par la DIV en septembre dernier présente les premiers éléments de l'évaluation des 751 ZUS.

Il en ressort d'abord qu'entre 1990 et 1999, la population des ZUS a diminué de 5% en moyenne, alors qu'elle s'est accrue de 4% sur l'ensemble du territoire national. Il semble, au vu des données 2003, que ce mouvement ne se soit pas inversé. Plus précisément, c'est la taille des ménages (et non leur nombre) qui s'est réduite dans les ZUS, comme d'ailleurs sur les autres territoires. On note en revanche plusieurs spécificités : le nombre de familles a baissé, alors qu'il a cru ailleurs ; la part des familles mono-parentales progresse davantage en ZUS (15% du nombre des ménages, contre 8% hors ZUS) ; la population étrangère est davantage représentée, les immigrés représentant 18 % de la population en ZUS (contre 7,5% de la population à l'échelle nationale).

S'agissant du logement, 61% des ménages résidant en ZUS sont locataires en HLM. Seuls 60.000 nouveaux logements ont été construits dans les ZUS entre 1990 et 1999. L'importance du logement social en ZUS a pour corollaire une proportion de ménages pauvres de 27%, soit trois plus que le reste de l'espace urbain. Mais la concentration massive de pauvreté se constate aussi dans les logements du secteur privé.

Au plan de l'emploi, environ 20% de la population active des ZUS était au chômage en 2003, soit le double du taux de chômage national. Entre 1990 et 1999, le taux de chômage a augmenté significativement pour plusieurs raisons : au sein de la population active des ZUS, les pertes d'emploi ou les départs non compensés vers d'autres quartiers ont entraîné une baisse rapide du nombre d'actifs occupés (- 15 %), alors que le nombre de chômeurs était déjà en progression de près de 23 %. Votre Rapporteur spécial relève néanmoins que les ZUS sont sensibles à la conjoncture économique. En témoigne la baisse du nombre de chômeurs de catégorie 1 (CDI à temps plein) de 20 % entre 1999 et 2001, du fait de l'amélioration du marché de l'emploi à cette période (la baisse est de 13 % dans les autres zones urbaines et de 16 % dans le reste de la France métropolitaine). En outre, on note un indéniable dynamisme économique des 38 ZFU créées le 1er janvier 1997 : entre 1999 et 2002, le nombre d'établissements y a cru de près de 40 %, soit six fois plus que dans les unités urbaines ayant une ZUS.

En revanche, les habitants des ZUS se déclarent beaucoup plus fortement qu'ailleurs être victimes, individuellement ou collectivement, de dégradations et de vandalisme. C'est le cas de 52% des ménages à faible niveau de vie résidant en ZUS alors que, sur les autres territoires, ils ne sont que 26% à faire une telle déclaration.

Au-delà de ces quelques éléments généraux, votre Rapporteur spécial attire l'attention sur la nécessité de bien cibler les évaluations, les disparités d'une zone à une autre étant très grandes et leur efficacité respective très variable.

*

* *

EXAMEN EN COMMISSION ÉLARGIE

Lors de sa réunion du mercredi 17 novembre 2004, votre Commission des finances, de l'économie générale et du Plan a examiné, en commission élargie à l'ensemble des députés, les crédits de la Ville et de la rénovation urbaine.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances - Je suis heureux d'accueillir M. Daubresse, ministre délégué au logement et à la ville, au sein de cette commission élargie, qui se substitue à la séance plénière avec les mêmes conditions de publicité. Je rappelle que la clé du succès de cette formule réside dans le caractère dynamique du débat, que je souhaite le plus vivant possible. La séance plénière qui aura lieu le 19 novembre sera exclusivement consacrée à l'examen d'éventuels amendements, aux explications de vote et au vote des crédits.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Je me félicite de la tenue de cette commission élargie, car la formule est bonne. Je rappelle qu'au terme de l'audition de M. Daubresse, dont je salue la présence, les deux commissions se prononceront, séparément, sur les crédits présentés.

Je me réjouis de l'augmentation considérable du budget de la ville et de la rénovation urbaine, qui s'accroîtra de plus de 22 % en 2005. Les engagements pris en matière de rénovation urbaine seront donc tenus ; chacun s'en félicitera. Par ailleurs, je suis très sensible au fait que 300 millions soient consacrés à la prévention de la délinquance dans le cadre du programme « équité sociale et territoriale ». Tous les maires savent l'importance de telles initiatives pour le rétablissement du lien social.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, suppléant M. François Grosdidier, rapporteur spécial de la même commission pour les crédits de la ville et de la rénovation urbaine - C'est un excellent budget qui nous est présenté. 2005 sera une année charnière : celle de la montée en puissance de la loi de 2003 sur la ville et la rénovation urbaine, et aussi la première année d'application du plan de cohésion sociale. Le budget du ministère délégué est à la hauteur de l'enjeu : il s'élèvera à 422 millions en 2005, en hausse de 23 %. L'augmentation profitera surtout aux dépenses d'investissement, celle, apparente, des moyens de fonctionnement n'étant due qu'à l'application de la LOLF.

A ce sujet, conformément à une suggestion de la commission des finances, les crédits de la ville et du logement seront désormais regroupés au sein d'une seule mission composée de quatre programmes : deux correspondent aux crédits du logement, les deux autres aux crédits de la ville, ceux qui nous intéressent aujourd'hui. Il s'agit du programme « rénovation urbaine », d'une part, du programme « équité sociale et territoriale » d'autre part.

Le programme « rénovation urbaine » sera doté de 226 millions en 2005, la contribution du budget de la ville étant de 128 millions, délégués à l'Agence nationale de rénovation urbaine. Le programme « équité sociale et territoriale » regroupera les autres actions prioritaires de la politique de la ville. Le budget qui nous est soumis y apportera 294,6 millions, les autres crédits correspondants aux compensations d'allégements de charges sociales dans les zones urbaines sensibles.

Cette structuration de la mission « Ville et logement » est satisfaisante, mais il reste à définir les modalités de la déconcentration. C'est à quoi contribueront les expérimentations prévues dans les régions Bretagne, Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes.

S'agissant du programme de rénovation urbaine engagé par la loi de 2003, les crédits de l'Etat sont à la hauteur des promesses. Ainsi, en autorisations de programme, l'ANRU bénéficiera de 192 millions émanant du budget de la ville, qui s'ajouteront aux 223 millions apportés par le budget du logement. En crédits de paiement, l'Agence recevra 74 millions du budget de la ville et 98 millions de celui du logement. De surcroît, la Caisse des dépôts et consignations devrait apporter un soutien supplémentaire - sous forme de prélèvement sur les excédents du FRU - lors de la prochaine loi de finances rectificative. Au total, l'apport de l'Etat à l'Agence sera donc de 465 millions en autorisations de programme et de 273 millions en crédits de paiement. Voilà qui permettra de soutenir le programme de rénovation urbaine ; il a bien démarré, puisque 21 conventions ont déjà été signées, qui représentent un engagement de 833 millions. De plus, 49 projets ont été examinés par le comité d'engagement, pour un coût global de 5,5 milliards. L'ampleur des chiffres atteste du changement de régime de la politique de la ville.

S'agissant de la restauration de l'équité sociale et territoriale, une mesure nouvelle de 62 millions servira à financer le programme de réussite éducative qui figure dans le plan de cohésion sociale et qui devrait mobiliser près de 1,5 milliard d'aide de l'Etat sur cinq ans. Il s'agira de financer, pendant ce quinquennat, 750 équipes de réussite éducative réparties dans 900 zones d'éducation prioritaire, 150 plates-formes de réussite éducative et une trentaine d'internats de réussite éducative.

Les autres moyens proposés pour 2005 s'élèvent à 232 millions, en diminution par rapport à 2004, ce qui s'explique par la suppression des crédits spécifiquement consacrés au soutien des villes en grande difficulté. Ceux-ci, en effet, ne se justifient plus depuis la réforme de la DSU, qui se traduira par l'affectation aux communes concernées de 120 millions supplémentaires en 2005 et autant chaque année suivante jusqu'en 2009. Cette réforme aura un impact certain sur le budget de certaines communes, dont la dotation augmentera considérablement. D'ailleurs, l'appréciation des crédits de la ville et de la rénovation urbaine ne peut se faire qu'en tenant compte de la réforme de la DSU mais aussi de l'allégement des cotisations sociales en faveur des nouvelles zones franches urbaines et aussi de la réforme du prêt à taux zéro, qui améliorera la rotation dans le parc locatif social.

Les crédits alloués aux trois régions qui expérimentent la LOLF sont intégrés dans le budget de la ville ; ce réajustement fait, les opérations « ville, vie, vacances » conserveront des crédits stables, de même que le dispositif « adultes relais ». En revanche, la ligne consacrée aux actions partenariales sera de trois millions, en baisse d'un million.

Le fonds d'intervention pour la ville recevra 109 millions en crédits d'intervention et 44 millions en investissement. La baisse des crédits d'investissement est logique, puisque de nombreuses opérations seront intégrées dans le nouveau programme de rénovation urbaine, en augmentation de 125 %. Quant à la baisse des crédits d'intervention, elle sera compensée par le nouveau programme de réussite éducative.

En conclusion, le budget de la ville et de la rénovation urbaine apparaît donc tout à fait crédible, et bien adapté aux priorités définies.

M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Le budget consacré à la politique de la ville en 2005 illustre l'engagement fort pris par le Gouvernement en faveur de la cohésion et de la mixité sociales. Conjuguant rénovation urbaine, cohésion sociale et mixité, il connaît en effet une augmentation de 22,7 %, s'établissant à plus de 420 millions. Cette hausse doit être saluée, d'autant qu'elle se produit dans un contexte très contraint, la France s'étant engagée à réduire fortement son déficit budgétaire en 2005. Elle signifie que le Gouvernement tient la politique de la ville et de la rénovation urbaine comme l'une des priorités de son action.

L'enjeu est de restructurer les quartiers dans lequel le bâti est le plus dégradé. Le programme de rénovation urbaine prévoit en conséquence la démolition et la reconstruction de 200 000 logements et la réhabilitation de 200 000 autres logements dans les quartiers prioritaires d'ici à 2008. L'Agence nationale pour la rénovation urbaine jouera un rôle clé, puisque 30 % des crédits du budget de la politique de la ville, soit 128 millions en crédits de paiement, seront consacrés à l'amélioration du cadre de vie.

Par ailleurs, ce budget finance un programme visant à restaurer l'équité sociale et territoriale par la prévention de la délinquance, le rétablissement du lien social, la mise en œuvre de l'opération « Ville, vie vacances » et la requalification urbaine : 70 % des crédits, soit 296 millions, sont consacrés à ce programme, dont 233 en faveur de l'équité territoriale proprement dite et 62 millions en faveur de la réussite éducative, dans le cadre du projet de cohésion sociale.

Le projet de loi de finances comporte en outre des mesures visant à relancer l'accession sociale à la propriété, à travers la réforme du prêt à taux zéro. Cette réforme aura pour effets d'augmenter le nombre des ménages aidés, de favoriser les familles par des bonifications, d'étendre le champ d'application à l'ancien et de transformer le mode de financement, le prêt prenant désormais la forme d'un crédit d'impôt.

Je salue ces aménagements positifs, mais je souhaite des éclaircissements sur un certain nombre de points, Monsieur le ministre délégué. Le projet de cohésion sociale contient-il une mesure incitant les organismes HLM à vendre des logements sociaux, afin d'encourager l'accession sociale à la propriété ? Pourriez-vous nous indiquer les perspectives d'évolution après 2006 des aides structurelles communautaires ? Pourriez-vous nous donner des précisions quant à l'application en zone urbaine sensible de la délégation de compétences en matière d'aide à la pierre, prévue dans la loi sur les responsabilités locales et confirmée à l'article 42 du projet de cohésion sociale ?

Ce budget devrait permettre d'atténuer les effets les plus préoccupants de la crise qui affecte les quartiers en difficulté. Je vous invite donc à approuver son adoption.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - J'ai eu peur que nous ne parlions pas du même budget. Si on analyse les chiffres, les éléments qui composent ce budget représentaient 344 millions l'année dernière : le total n'est plus que de 321,8 millions cette année. Ce n'est que grâce au programme de réussite éducative et à l'expérimentation de la LOLF que le montant affiché atteint 422 millions d'euros. Si on considère l'ensemble de ce qui fait la politique de la ville, qui ne se limite pas au bâti mais inclut l'accompagnement social, l'effort de l'Etat diminue. Les crédits de fonctionnement de la Délégation interministérielle à la ville sont de 5,5 millions, contre 6,6 en 2003. Aux services publics, à l'animation, à la formation, vous ne consacrez que 3 millions : c'est moitié moins qu'en 2003. Les maires, qui sont aujourd'hui en congrès, connaissent l'utilité du fonds d'intervention pour la ville. Ses crédits, qui s'élevaient à 145,8 millions en 2003, sont tombés à 83,1 millions cette année.

Ce budget traduit le choix qui est le vôtre : vous avez axé toute la politique de la ville sur le renouvellement urbain. Ce choix, nous le contestons.

Selon le rapporteur général, les crédits consacrés au dispositif des adultes relais seraient en progression. Or, j'ai l'impression qu'ils baissent de 10 millions. Quant au financement de l'opération « Ville, vie, vacances », augmenté l'année dernière, il diminue de 2,3 millions. Or ce dispositif sert à occuper les enfants pendant les vacances scolaires.

En matière de renouvellement urbain, combien de conventions ont-elles été approuvées par le conseil d'administration de l'ANRU ? Qu'est-ce que cela représente financièrement et en termes de « population ZUS » ? Je souhaite par ailleurs savoir quelle est la position du Gouvernement sur sa participation à l'ANRU. Vous prévoyez 415 millions en autorisations de programme. Or, je me souviens que nous avions voté 465 millions.

Le comité interministériel pour la ville semble fossilisé. Quand va-t-il enfin se réunir à nouveau ?

Comment expliquez-vous les baisses de crédits affectant le fonds d'intervention pour la ville, l'opération « Ville, vie, vacances » et le dispositif des adultes relais ?

Enfin, combien d'associations vont-elles pouvoir bénéficier des exonérations de cotisations patronales accordées en ZFU et en ZRU ? J'ai peur qu'il y en ait très peu.

M. Jean-Claude Mignon - Nous examinons un budget important pour nos concitoyens les plus en difficulté, dont la situation appelle un effort particulier de l'Etat. Cet effort est réel, comme en témoigne votre budget qui s'élève à 423 millions et augmente de 22,7 %. Il faut le souligner, malgré ce que nous venons d'entendre, cette hausse intervenant dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques.

Toutes administrations confondues, les crédits consacrés à la ville et au développement urbain, atteignent 6 milliards d'euros. Au nom du groupe UMP, je ne peux que m'en féliciter.

Au budget que vous nous présentez aujourd'hui, il convient d'ajouter les 62 millions prévus pour financer en partie le projet de cohésion sociale et les 31,5 millions affectés à l'ANRU.

Il faut encore mentionner les 120 millions dont vont bénéficier les 120 villes ayant les charges urbaines les plus importantes, à partir d'un prélèvement sur recettes au sein de l'enveloppe globale de la DGF, conformément à la réforme de la dotation de solidarité urbaine. Il ne s'agit pas d'un effort de l'Etat, mais des collectivités territoriales les plus riches envers les plus pauvres. Cet effort de solidarité mérite d'être salué.

Au sein de votre budget, 2 % des crédits vont au fonctionnement, 57 % aux interventions et 41 % aux investissements. Il s'agit donc plus d'un budget d'action que d'un budget de gestion. Le groupe UMP ne peut qu'approuver ce choix.

Ce budget vient soutenir un ambitieux programme prévoyant la démolition et la reconstruction de 200 000 logements, ainsi que la réhabilitation de 200 000 autres, jusqu'en 2008. Au-delà des crédits budgétaires, signalons aussi les exonérations de taxe professionnelle, d'impôts sur les bénéfices, de cotisations sociales, qui stimulent l'activité dans les 44 zones franches urbaines créées en 1997 et les 41 nouvelles ZFU créées au 1er janvier 2004. L'effet de ce dispositif est réel : entre 1999 et 2002, le parc d'établissements s'est accru de 40 % et 56 % des établissements installés en ZFU ont au moins un salarié.

Ce budget doit permettre de restaurer l'équité dans les quartiers en difficulté, dont la situation est préoccupante. Les chiffres de l'Observatoire des zones urbaines sensibles, publiés en septembre par la délégation interministérielle à la ville, sont révélateurs. Tout en partageant votre préoccupation constante de valoriser le dynamisme et l'inventivité de ces quartiers, il n'en reste pas moins vrai qu'on trouve, dans les 751 ZUS, 27 % de ménages pauvres, 20 % de chômeurs et 17 % de jeunes sans qualification. Ces quartiers sont aussi marqués par le sentiment d'insécurité qui persiste, malgré la politique courageuse du Gouvernement : 52 % des ménages se sont déclarés victimes de dégradations et de vandalisme, ce chiffre étant sans doute en deçà de la réalité, car je sais la peur qui règne dans certains quartiers et qui mure dans le silence de nombreuses victimes, voire certaines administrations.

Votre budget renforce l'ANRU, à laquelle vous allouez 173 millions de crédits de paiement, dont 74,5 iront à la section « Ville et rénovation urbaine ». Déjà, 60 projets ont reçu un avis favorable et 42 conventions pluriannuelles sont prêtes à être signées. Cela se traduira par 20 000 constructions de logements sociaux, 53 000 réhabilitations, 24 000 démolitions et de nombreuses opérations qui vont radicalement transformer le cadre de vie des habitants. Par ailleurs, l'article 44 du projet de cohésion sociale va modifier le régime des aides de l'ANRU, laquelle pourra accorder des majorations de subvention ou modifier l'assiette de calcul des aides. Ce sont là des mesures pragmatiques dont l'élu de terrain que je suis ne peut que se réjouir.

Je l'ai dit, 62 millions sont affectés au financement d'une partie du plan de cohésion sociale. Il s'agit de soutenir les future équipes de réussite éducative. Ainsi, 50 millions iront au programme 15 en faveur des enfants en situation de fragilité, et 12 millions au programme 16 qui vise à accompagner les collégiens en difficulté et à rénover l'éducation prioritaire.

En outre, 233 millions sont affectés aux actions de prévention de la délinquance, qu'il s'agisse de la médiation sociale, de la justice de proximité, ou de l'aide aux victimes. Vous contribuez à rétablir le lien social en finançant des emplois d'adultes relais. Par ailleurs, 10 millions sont affectés à l'opération « Ville, vie, vacances », 44 millions aux opérations de requalification urbaine inscrites dans les grands projets de ville, et 50 millions aux associations.

La force de ce budget, c'est qu'il rompt avec l'approche cloisonnée qui prévalait jusqu'alors. Vous menez une politique de la ville essentiellement partenariale, associant les collectivités locales et le tissu associatif, une politique fondée non sur la contrainte, mais sur le contrat. Votre ministère se dote d'outils de mesure : compte tenu des enjeux financiers, il ne me semble pas anormal de mesurer l'efficacité de la politique de la ville.

Par ce budget, vous réaffirmez le rôle central de l'Etat. Le groupe UMP approuve ce budget et le votera.

M. François Grosdidier, rapporteur spécial de la commission des finances - Je souhaite interroger le Gouvernement sur l'état d'avancement du programme de rénovation urbaine et sur les besoins de financement pour 2005, 2006 et 2007.

Par ailleurs, l'article 6 de la loi de 2003 donne accès aux financements de l'ANRU à l'ensemble des quartiers analogues aux ZUS. L'effet de cette mesure est-il marginal ou massif ?

Le programme de réussite éducative est un élément capital du plan de cohésion sociale. L'Etat y consacre des moyens importants, mais j'aimerais savoir quels autres financements seront mobilisés et selon quels partenariats.

Par ailleurs, la diminution des crédits de fonctionnement n'est qu'optique car elle tient simplement à la mise en œuvre de la loi organique, à l'expérimentation en cours en Nord-Pas-de-Calais, Ile-de-France et Bretagne et à la globalisation des crédits FID et adultes-relais. En attendant la généralisation de cette expérience, les objectifs et les indicateurs de performance seront-ils disponibles pour la loi de finances 2006 ?

J'aimerais également savoir si le futur plafond d'autorisation d'emplois a été arrêté et comment seront pris en compte les agents, très nombreux, de l'équipement mais aussi de l'intérieur.

Dispose-t-on aujourd'hui des éléments d'évaluation pour les 41 nouvelles zones franches urbaines ? L'Observatoire des zones urbaines sensibles est-il opérationnel ? Quand paraîtra le rapport prévu par la loi ?

Enfin, envisagez-vous, Monsieur le ministre, de proposer aux acteurs de tous les contrats de ville une grille de critères d'évaluation qui leur serait fort utile, en particulier en matière d'animation, où le meilleur côtoie le pire, comme l'a montré le rapport de la Cour des comptes ?

M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement et à la ville - Parmi tous les sujets que je souhaite aborder, l'Observatoire national des zones urbaines sensibles est sans doute le plus important. Le premier rapport que nous avons préparé avec la Délégation interministérielle à la ville comporte une masse d'informations dans lesquelles il faudra trouver un fil conducteur, mais nous avons préféré livrer cette première photographie pour engager la concertation avec les différents partenaires et avec les associations d'élus locaux. Je rappelle en outre que ce rapport a été explicitement prévu par la loi du 1er août 2003. Je puis donc vous livrer les grandes tendances de ce document préparé par Mme Malgorne, préfète de la Région Bretagne et Présidente du Conseil d'orientation de l'Observatoire installé le 25 octobre 2003.

Les 751 ZUS comptent 4,7 millions d'habitants. Leur taille va de 330 à plus de 50 000 habitants. Les quatre grandes régions - Ile-de-France, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Nord-Pas-de-Calais - représentent la moitié du total, ce qui explique que deux d'entre elles aient été choisies pour l'expérimentation de la LOLF. Bien évidemment, les crédits ainsi déconcentrés pour expérimenter la fongibilité de la ligne n'apparaissent plus dans le Fonds d'intervention pour la ville. Le rapport montre aussi un déclin démographique dans ces zones ainsi qu'une diminution du nombre des étrangers qui y résident, même si leur poids demeure plus important que dans le reste du pays.

Ces zones abritent 6,4 % du nombre total de logements en France métropolitaine. Le parc de logements sociaux y est particulièrement important, avec une prédominance de trois/quatre pièces. Les deux tiers de ces logements ont été construits entre 1949 et 1974, il importe donc de réfléchir à la métamorphose de ces quartiers, par la démolition-reconstruction, comme par la réhabilitation.

On y compte trois fois plus de ménages pauvres que dans le reste de l'espace urbain et on y observe une concentration de la pauvreté ainsi que du nombre de ménages dont la personne de référence est étrangère.

Même si l'activité économique n'y est pas très soutenue, on peut aujourd'hui parler d'un réel dynamisme, puisque le nombre d'établissements économiques a crû ces dernières années de 10,5 % contre 6 % pour le reste du territoire. Cette croissance a même été six fois supérieure dans les zones franches urbaines.

Les ZUS sont mieux dotées que les territoires équivalents en équipements publics, mais moins en services de proximité et en commerces. La vie sociale y est plus réduite et on trouve malheureusement en tête des loisirs la télévision. Le déficit en matière de lecture est très important, on en voit les effets dans l'échec scolaire.

Le bruit et l'insécurité sont les principaux facteurs de la mauvaise qualité de vie.

Les enjeux de scolarité sont majeurs. Ainsi, le taux de bacheliers est passé de 12,5 % à 24,6 %, tandis qu'il progressait de 18,8 % à 36,8 % en moyenne nationale. Le retard scolaire est significatif dès le CE2 et 39 % des élèves sont en retard en sixième contre 29 % dans le reste du pays. L'écart des taux de réussite au brevet est de 10 %.

La santé est sans doute la principal lacune de ce rapport. Nous avons eu du mal à recueillir des informations pertinentes et la médecine scolaire fait surtout apparaître un taux d'obésité plus important et une absence d'hygiène bucco-dentaire. Il faudra aller beaucoup plus loin dans ce domaine.

Le chômage frappe 20 % des actifs et il est particulièrement élevé chez les jeunes adultes puisqu'en 2003 un tiers des 20-29 ans n'étaient plus en formation et n'avaient pas d'emploi.

M. Borloo a souligné l'importance de cet Observatoire pour mesurer les impacts de la politique de la ville. Car les ZUS n'ont pas vocation à le rester à perpétuité ; il faut tout faire pour que les choses changent ! Nous n'avons donc, Monsieur Le Bouillonnec, absolument pas l'intention de fossiliser cette politique, d'ajouter une couche à ce qui existe déjà, de mener sans cesse les mêmes actions : nous sommes engagés dans une refondation complète de cette politique. Lorsque j'étais moi-même rapporteur de ce budget, je ne faisais pas de procès d'intention au ministre de l'époque, M. Bartolone, j'essayais de mener une réflexion d'ensemble.

Aujourd'hui, la philosophie de M. Borloo, à laquelle j'adhère pleinement, est de concentrer l'action sur les quartiers les plus en difficulté et d'appuyer sur les leviers qui permettent vraiment d'agir contre la fracture sociale. Le premier de ces leviers est le dispositif des zones franches urbaines, qui est un vrai succès. Le deuxième est éducatif, avec les équipes de réussite éducative auxquelles nous consacrons 62 millions et qui seront dotées, à la fin des cinq années de la loi de programmation, de plus de 400 millions. Le troisième levier est l'action en faveur des communes en grande difficulté - qui cumulent faible potentiel fiscal et charges sociales considérables - grâce à la réforme de la dotation de solidarité urbaine. Le quatrième est la métamorphose des quartiers via l'Agence de rénovation urbaine.

Vous le voyez, nous travaillons sur le hard comme sur le soft, sans négliger les dispositifs antérieurs - adultes-relais, villes-vie-vacances, actions en faveur des associations - qui s'inscrivent dans cette nouvelle politique. Celle-ci est un tout et on ne peut l'apprécier à partir des seuls éléments budgétaires : il faut aussi prendre en considération la nouvelle DSU, les équipes de réussite éducative, l'ANRU, les ZFU. Il manque, je l'ai dit, un outil de santé et nous envisageons, avec Philippe Douste-Blazy, d'intégrer des actions de prévention dans la réflexion sur les équipes de réussite éducative.

Si 20 millions d'aides aux communes en difficulté disparaissent, elles disposeront de 120 millions de plus avec la réforme de la DSU, qui aura un effet multiplicateur très important. Ainsi, une ville comme Roubaix aura vu sa dotation progresser de 450 % ! Vous serez amenés à débattre de cette réforme dans le cadre de la loi de programmation financière. Nous avons déjà eu au Sénat une discussion très riche, qui avait été préparée par l'important travail du Comité des finances locales, auquel avaient participé notamment MM. Carrez et Fourcade, mais aussi MM. Migaud et Bockel. Notre volonté est de garantir et de pérenniser la DSU, car les maires en avaient assez de ne pas savoir où ils allaient. Cette réforme s'étalera sur cinq ans, 674 millions étant dégagés cette année. Les communes verront ainsi leur dotation progresser de 5 % la première année, de 10 % la deuxième, de 16 % la troisième, de 22 % la quatrième et de 29 % la cinquième. De la sorte, votre commune de Cachan, Monsieur Le Bouillonnec, disposera de 140 000 euros de plus en 2009. En outre, une clause a été prévue pour garantir un équilibre si la croissance de la dotation n'était pas conforme aux prévisions.

Pour analyser l'effort global qui sera accompli l'an prochain, il faut s'intéresser à la fois à la DSU, mais aussi aux augmentations de la dotation forfaitaire et de la dotation d'intercommunalité, sans oublier la dotation de solidarité rurale, qui progressera de 20 %. A périmètre constant, on peut donc considérer que le budget de la ville augmente de 30 % et même de 50 % si on tient compte de la nouvelle DSU.

Il faut aussi mettre en regard de la légère diminution des moyens du Fonds d'intervention pour la ville, l'inscription d'une enveloppe de 62 millions en faveur des équipes de réussite éducative.

Pour ce qui est de l'ANRU, nous lui consacrons des sommes considérables, puisque plus de 7 milliards seront mobilisés cette année, dont un tiers en provenance de l'Etat. Celui-ci tient ses engagements, mais on a fonctionné jusqu'ici à guichets ouverts. Désormais il faudra fixer des priorités et examiner les projets en détails. Une opération urbaine doit porter sur la reconstruction et la réhabilitation de logements, et non servir à financer des équipements publics ou la voirie. Grâce au conseil d'administration transparent que nous avons mis en place et où siègent des représentants de toutes les tendances et de tous les financeurs, ainsi qu'au comité de vigilance indépendant, où siègent par exemple Yazid Zabeg et Fadela Amara, nous avons toutes garanties à ce sujet.

L'ANRU est dotée de 415 millions de crédits sur les deux budgets de la Ville et du Logement et de 465 millions au total avec les 50 millions provenant du fonds de rénovation urbaine.

J'en viens aux questions posées par les rapporteurs et M. Mignon. Va-t-on vers la vente de logements HLM ? La question relève plutôt de la politique du logement. J'y ai travaillé avec la volonté d'améliorer les ventes de HLM. Mais comme le dit M. Ollier, il faut essayer de mener une politique globale et cohérente d'accession sociale à la propriété qui ne concerne pas que le locatif social. S'agissant de la location accession, nous avons arrêté en juin un dispositif fiscal consensuel et le dispositif juridique figure dans la loi de programmation financière de la cohésion sociale. Les dispositions concernant les ventes de HLM seront dans la loi relative à l'habitat pour tous que je présenterai au Gouvernement au début de l'année prochaine et au Parlement au cours du premier semestre 2005. Enfin, le prêt à taux zéro réformé est un outil majeur et apporte un avantage réel aux ménages dont les revenus sont inférieurs à 2,3 SMIC. En structurant une grande politique d'accession sociale à la propriété, nous contribuerons aussi à atténuer la crise du logement puisque les accédants libéreront du locatif.

Sur le plan européen, sur les 15 milliards de crédits affectés au FSE pour la période 2000-2006, 1,54 milliard ira à la politique de la Ville, ce qui aura un effet de levier pour un montant d'environ 4,5 milliards. Parmi les programmes les plus intéressants, le programme URBAN 2, auquel sont affectés 105 millions, concerne le développement urbain durable dans neuf quartiers comprenant des GPV et des ORU. Nous demanderons à la DATAR de décider de l'usage de ces fonds européens pour la politique de la ville. Faut-il se contenter d'un ciblage local ou élaborer un programme national de développement urbain ? La loi d'août 2003 visait à mutualiser les moyens pour obtenir un effet de levier sans pour autant mettre en cause la déconcentration des crédits, puisque 95 % des moyens affectés à la politique de la Ville sont déconcentrés. Pour ma part, j'ai tendance à faire confiance aux élus locaux. En ce qui concerne les ZUS, la définition donnée dans le projet de loi relatif aux responsabilités locales ne vise pas les crédits des ZUS gérés par l'ANRU, mais l'article 42 du projet de loi de cohésion sociale qui organise les conventions de délégation de compétences indique qu'il faut tenir compte des actions dans les ZUS qui relèvent de la cohésion sociale. Sur ce sujet un peu complexe, je transmettrai début 2005 un petit guide aux préfets et aux élus s'ils le veulent.

Pour répondre à M. Grosdidier, j'ai demandé qu'au projet de loi de finances rectificative on abonde les crédits de l'ANRU de 100 millions imputés sur le reliquat du fonds de renouvellement urbain de la Caisse des dépôts fin 2003.

Je ne peux faire qu'un état provisoire de l'avancement des projets de l'ANRU puisque le comité d'engagement en évalue sans cesse de nouveaux. 60 projets ont été validés dont 14 ont reçu l'avis favorable du conseil d'administration. Ils concernent 83 quartiers dont 47 des 162 quartiers prioritaires, pour un coût de travaux global de 6,7 milliards dont 2 milliards de subventions de l'ANRU. Ils prévoient 26 000 constructions, 29 000 destructions et 68 000 réhabilitations - ce dernier chiffre est plus élevé que prévu, suite à la concertation avec les maires. Nous avons toujours affirmé le principe d'une construction pour une démolition, mais en tenant compte des logements vacants, il suffit en fait de 0,8 construction pour retrouver le nombre de logements occupés précédemment. Les crédits iront pour 74 % au logement, 13 % à l'aménagement d'espaces publics, 11 % aux équipements et 1 % à l'ingénierie. Les principaux financeurs sont pour 30 % les communes, 8 % les OPCI, 5 % les départements, 4 % les régions, 5 % les bailleurs, 4 % les fonds européens et 2 % d'autres sources.

S'agissant des besoins de financement, avec la mobilisation du reliquat du FRU, 515 millions sont assurés pour 2004. 465 millions sont inscrits au projet de loi de finances pour 2005 et cette même somme est garantie pour 2006. Nous avons obtenu du Premier ministre l'assurance qu'il n'y aurait aucun gel de crédits pour la politique de la Ville, la politique du Logement, et l'ANRU. Les crédits de paiement pour 2004 et 2005 suffisent donc à assurer la montée en puissance des opérations. J'ai demandé au Sénat de prolonger l'ANRU de trois ans, sur la période 2008-2011, ce qui permettra de faire face à toutes les demandes, d'ajuster ici ou là les périmètres des ZUS, de réfléchir à des actions dans l'habitat ancien et à des actions spécifiques pour l'habitat minier - sur ce point j'ai accepté au Sénat un amendement concernant l'EPINORPA. Avec non plus 30 milliards, mais 40 milliards sur huit ans, nous pourrons opérer une véritable programmation. On nous a demandé 80 dérogations au titre de l'article 6 pour des sites hors ZUS, mais appartenant à des GPV ou des ORU. A saupoudrer les crédits, on dilue les priorités. Cependant il faut essayer de tenir compte de paramètres objectifs. C'est pourquoi j'ai demandé à la DIV d'établir des indices équivalents ZUS. Sur cette base nous avons fait un classement qui a permis de retenir trente opérations par dérogation.

Avec les équipes de réussite éducative, nous voulons mobiliser l'ensemble de la communauté éducative autour des enfants de deux à seize ans. On s'aperçoit en effet chaque jour un peu plus que les problèmes de violence, de délinquance, de santé, d'échec scolaire se jouent très tôt. C'est pourquoi, M. Borloo a souhaité que ces équipes s'occupent de la petite enfance le mercredi et hors du temps scolaire, suivies par des plates-formes de réussite éducative au collège et enfin par des internats d'excellence qui assureront une véritable mixité sociale. Si, il y a une génération, on trouvait plus de fils d'ouvriers qu'aujourd'hui dans les classes préparatoires, c'est en partie grâce aux internats. C'est en supprimant ce genre de handicaps et en proposant les bonnes filières que les élèves doués et combatifs réussiront. Les équipes de réussite éducative seront décentralisées et s'appuieront sur les CAF, les conseils généraux, les maires ; nous mobiliserons les outils existants, contrats temps libre et contrats éducatifs locaux, et nous ne nous priverons pas des concours financiers déjà en place. Chaque équipe de réussite éducative disposera d'environ 500 000 euros. Pour ce qui est de leur fondement juridique, nous préférons conserver la souplesse. Elles peuvent dépendre de la caisse des écoles ou d'un établissement public local. Mais comme l'ont suggéré le Conseil national de l'éducation et le Conseil économique et social, nous proposerons sans doute des établissements publics de coopération éducative dirigés par les maires dans un souci de proximité, sur le modèle des établissements publics de coopération culturelle.

Les zones franches urbaines, créées il y a quelques années puis abandonnées par la majorité précédente, ont été reprises à la satisfaction de tous les maires de droite ou de gauche. La première évaluation des 41 nouvelles ZFU est très positive. En 2004, ces zones regroupent 1,438 million d'habitants et plus de 30 % des 751 quartiers de ZUS sont en ZFU. Désormais, on y crée des emplois, soit par développement des entreprises existantes, soit par transfert. En cinq ans, de 1997 à 2001 le nombre d'entreprises en ZFU a doublé, passant de 11 000 à 21 000 et le nombre d'emplois salariés qui était de 25 000 s'est accru de 45 000 postes, soit un triplement. Le mouvement s'est poursuivi en 2004. Fin 2003, il y avait dans les ZFU 24 000 entreprises en exercice dont 11 000 employant des salariés et un total de 81 000 salariés dont 59 000 ouvrant droit à exonération de charges. En ce qui concerne le monde associatif, nous avons demandé à la DIV de mener une étude. Nous y reviendrons lorsqu'elle sera achevée.

Nous disposons ainsi au total de 6,4 milliards dont notamment 434 millions de crédits spécifiques de la Ville, 2,184 milliards de crédits des autres ministères, 586 millions pour la DSU, 792 millions d'exonérations fiscales, 221 millions de fonds européens, 123 millions en provenance de la Caisse des dépôts et 400 millions de la CAF ainsi que plus d'un milliard des collectivités locales. Nous sommes en état de mener une vraie politique.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire - Le président Méhaignerie étant obligé de nous quitter, je devrais désormais assumer seul la présidence.

Monsieur le ministre délégué, vous avez abordé un sujet qui nous tient particulièrement à cœur : la « lisibilité » des dispositifs. Pour la commission des affaires économiques, c'est une absolue nécessité, en particulier pour ce qui concerne l'accession sociale à la propriété. En effet, alors que 82 ou 84 % des Espagnols sont propriétaires de leur logement et qu'en Grande-Bretagne ce taux tourne autour de 70 %, la proportion n'est que de 54 % en France. Des procédures plus simples permettraient d'améliorer la situation et c'est dans cet esprit que je présenterai un certain nombre d'amendements vendredi. Mais je ne doute pas que nous nous rencontrions sur ce point...

M. Pierre Cohen - Que la DSU augmente, c'est sans aucun doute une bonne chose mais vous ne pouvez prétendre, Monsieur le ministre délégué, que la totalité de cette enveloppe supplémentaire ira à la politique de la ville. Beaucoup de villes sont en effet financièrement asphyxiées et il faudra bien qu'elles aient les moyens d'équilibrer leur budget.

Ce n'est pas ici que vous trouverez des adversaires de la politique de la ville. Cependant il me paraît important que nous puissions nous montrer critiques et notre devoir est d'imposer une discussion franche, par exemple à propos du sort fait aux associations depuis trois ans. Nous relevons aussi que les 38 millions consacrés aux expérimentations dans le cadre de la LOLF sont loin de compenser ne serait-ce que la diminution de la ligne allouée au FIV. Vous ne nous avez donc pas convaincus sur ce point. Surtout, vous nous semblez répéter dans vos budgets une erreur qui était déjà celle de la loi : vous privilégiez le « hard », le renouvellement urbain, comme si c'était la seule réponse aux difficultés des villes.

S'agissant des équipes de réussite éducative, je dirai que je suis pour ma part partisan de la démarche de « veille éducative », qui a démontré son efficacité et sa capacité à mobiliser les bonnes volontés. Même si ce dispositif est compliqué, il permet de faire travailler ensemble éducation nationale, services sociaux et communes. Vous proposez d'affecter 62 millions d'euros aux nouvelles équipes de réussite éducative, soit 500 000 euros par équipe, mais à quel niveau se fera l'affectation ? Vous avez avancé plusieurs suggestions mais je rappelle que les caisses des écoles n'existent plus guère et je relève que les GIP se situent au niveau du contrat de ville. Quant à d'éventuels établissements publics à caractère éducatif, il faudra trois ou quatre ans pour les mettre en place. Des précisions s'imposeraient par conséquent sur ce point, comme sur les besoins auxquels vous entendez répondre et sur les compétences qui seront reconnues aux divers membres de ces équipes.

M. François Brottes - Je constate que la loi de cohésion sociale ne se bornera pas à modifier les règles de licenciement : elle apportera aussi du nouveau en ce qui concerne la DSU. Mais il y aura tout de même la modification des règles de licenciement...

D'autre part, il semble que vous vouliez obliger les organismes HLM des départements ruraux à cotiser à l'ANRU. Pourtant, les campagnes n'ont rien à attendre de cette agence. Vont-elles devoir payer pour les villes ? Cela n'irait pas dans le sens de la péréquation telle que le Premier ministre vient de la définir devant le congrès des maires !

M. Yves Nicolin - Au vu du rapport de l'observatoire national des ZUS, il est clair que les politiques menées depuis vingt ans n'ont pas répondu aux attentes. Il est donc bon que le Gouvernement définisse aujourd'hui des axes clairs et qu'il privilégie l'investissement en réduisant les dépenses de fonctionnement à la portion congrue. Ce n'est pas en saupoudrant qu'on remplira le tonneau des Danaïdes !

Je me félicite également de la prolongation du dispositif ANRU. Il est essentiel d'avoir des dossiers parfaitement montés si l'on veut de réelles modifications dans les quartiers. Mais il faudra aussi une évaluation précise des résultats pour vérifier que nous sommes sur la bonne voie.

Mme Odile Saugues - Je ne relèverai qu'un chiffre dans le rapport de l'observatoire national : dans les ZUS, on compte trois fois plus de pauvres que dans le reste de l'espace urbain. Et il s'agit de vrais pauvres, Monsieur le ministre délégué. L'une des difficultés auxquelles nous sommes confrontés à cet égard tient au poids des charges dans le logement social : elles représentent 30 % du montant du loyer, contre 18 % dans le secteur privé. Le forfait charges ne suffit visiblement pas à solvabiliser les locataires et malgré tous les propos tenus lors des congrès du mouvement HLM, rien n'a vraiment changé. Les pauvres continuent à ne pouvoir faire face aux factures de chauffage, en augmentation constante, cependant que la loi « ascenseurs » n'a été accompagnée d'aucune réforme du financement. Avant que vous ne preniez ma succession, Monsieur le ministre délégué, j'avais entrepris de mutualiser les moyens du CIV et du CENH. Pour votre part, vous parlez de pousser les feux pour ce qui est du CIV. Je ne saurais trop vous inciter à tirer tout le parti possible de ces outils, en effet, et je vous invite à prendre en compte les demandes du CENH.

M. Jean-Claude Mignon - Il ne faut pas opposer les villes et la campagne, monsieur Brottes. La plupart des villes se sont dotées d'équipements structurants au bénéfice de tout le territoire alentour et cela leur coûte très cher. Il est donc normal que tout le monde mette la main à la poche. Il faut également se réjouir de la priorité donnée aux projets de rénovation urbaine : cela permettra de régler bien d'autres problèmes. Cependant, il convient de régler la question du périmètre à retenir pour les reconstructions : sera-ce celui des communautés d'agglomérations lorsqu'elles existent ? Celui du département ? Ne pourrait-on faire appel aux villes nouvelles qui bénéficient de privilèges budgétaires importants ? Les compétences obligatoires ne devraient pas être négligées au profit des compétences facultatives...

Mme Nathalie Gautier - S'il semble n'y avoir pour l'instant aucun problème majeur pour le montage financier des dossiers de rénovation urbaine, il n'en est pas de même pour le financement du logement social hors ANRU. Là, les réhabilitations et les constructions neuves sont d'autant plus difficiles qu'il faut composer avec les surcoûts fonciers. Vous avez évoqué la possibilité d'accorder un certain nombre de dérogations pour les démolitions hors ZUS, mais je note que, sur 210 à 230 demandes, 30 seulement auraient été prises en compte. J'espère qu'on pourra faire davantage même si j'admets la nécessité d'éviter le saupoudrage. En effet, dans l'agglomération lyonnaise qui concentre 5 % des crédits de la politique de la ville, il est essentiel qu'on règle le problème du quartier de Norenchal, à Fontaines-sur-Saône, afin d'avoir une répartition plus équilibrée des logements sociaux.

Par ailleurs je regrette la réduction des crédits du FACIL et leur réorientation en faveur des seuls primo-arrivants. Tout cela risque d'être au détriment des populations déjà en place.

M. Jean-Louis Dumont - Les acteurs du logement social sont fortement mobilisés. Les opérations de l'ANRU concernent une population en grandes difficultés. Or elles commencent toujours par un déménagement.

J'appelle l'attention du ministère sur les conséquences qui pourraient résulter du défaut d'accompagnement social des populations ainsi transplantées. A cet égard, quelle place sera faite aux associations et à l'économie sociale en général, dont certains membres du Gouvernement semblent avoir une vision très réductrice ? J'observe par ailleurs que certaines familles bénéficient de droits théoriques auxquels elles ne peuvent prétendre dans la pratique, puisque la caisse nationale d'allocations familiales a décidé de ne plus verser les aides inférieures à un certain montant. Dans un premier temps, il s'agissait des aides inférieures à 15 € par mois ; désormais, il s'agirait de 24 € par mois, ce qui représente 288 € par an, somme qui n'a rien de négligeable au moment où les charges ne cessent d'augmenter. Pourquoi, plutôt que de supprimer des droits ouverts, ne pas procéder à des versements trimestriels ou semestriels ?

Enfin, Monsieur le ministre, j'aimerais connaître vos intentions quant aux ventes de HLM, car les bailleurs sociaux s'inquiètent.

M. le Ministre délégué - Je rappelle en premier lieu à M. Cohen que la loi prévoit le contrôle de l'affectation de la DSU par les communes qui en sont les bénéficiaires ; je serai très vigilant sur ce point. S'agissant de l'aide aux villes en grande difficulté, chacun sait bien qu'il s'agissait de compenser la « non réforme » de la DSU. Cette réforme ayant été faite, il faut naturellement comparer ce qui est comparable et considérer les 120 millions supplémentaires alloués à la DSU comme une partie des crédits de la ville, sachant qu'une clause de sauvegarde permettra de pérenniser les équilibres actuels. D'ailleurs, la remarquable action conduite par Mme Vautrin, qui m'a précédé au ministère, a permis d'obtenir un consensus politique suffisant pour que les sénateurs socialistes acceptent de voter l'article du projet relatif à la DSU. Il en va de même pour le FIV, dont certains des crédits tendaient à la prévention de la délinquance : si nous allouons désormais 62 millions supplémentaires à la réussite éducative, nul ne peut nier qu'il s'agit d'une action en faveur de la ville !

Mme Gautier a raison : la DIV devra rouvrir le dossier périlleux de la carte des ZUS. Elle a, effectivement, été dressée à une autre époque, époque pendant laquelle, d'ailleurs, les maires ne se précipitaient pas, estimant sans doute que leur commune perdrait en image si des crédits ainsi libellés leur étaient attribués. On constate une toute autre approche aujourd'hui, les édiles n'étant pas indifférents à la concentration des moyens... La question se pose désormais de savoir s'il faut revoir les compétences des communautés d'agglomérations ; c'est une question de fond et le Gouvernement sera, sur ce point, à l'écoute des parlementaires. Je rappelle que la compétence « habitat » n'est pas obligatoire pour les communautés urbaines, mais qu'elle l'est pour la politique de la ville. A présent, politique du logement et politique de la ville étant étroitement liées, une cohérence indispensable est assurée ; laissez-nous le temps de la traduire dans les faits.

S'agissant des dérogations au titre de l'article 6, nous établissons des indices synthétiques « équivalents ZUS ». Toutefois, chacun comprendra que l'on ne puisse faire des exceptions une généralité. Pour ce qui est du projet en cours à Norenchal, une réponse précise vous sera faite sous un mois.

A M. Brottes, je rappelle que les organismes HLM ruraux cotisent à l'ANRU par solidarité mais qu'en contrepartie ils bénéficient de la garantie de la CGLLS. De plus, nous relançons les OPAH en secteur rural. Enfin, parallèlement à la réforme de la DSU, nous augmentons la DSA de 80 millions. Autrement dit, nous menons une action conjuguée en faveur des zones urbaines et des campagnes.

MM. Nicolas et M. Mignon ont évoqué le financement de l'ANRU. La doctrine du Gouvernement est claire : nous ne voulons pas que l'Agence soit considérée comme un simple guichet, et nous voulons une logique de projet, qui doit conduire à reconstituer une véritable mixité sociale et non à concentrer à nouveau les mêmes populations dans les mêmes quartiers. On peut, donc, raisonner en termes de territoires ou de communautés d'agglomérations, à condition que cela ne « cannibalise » pas le programme de doublement de l'offre locative sociale. Comme M. Dumont, je considère que la politique du logement doit respecter les hommes et qu'il convient donc d'aider les réseaux de solidarité qui accompagnent les populations provisoirement relogées avant qu'elles ne retournent dans leur quartiers où elles vivront mieux. C'est pourquoi nous souhaitons aider les associations d'insertion, comme en témoignent les mesures prises, en juillet, au terme d'un comité interministériel.

Mme Saugues s'est inquiétée du montant des charges locatives dans l'habitat social. J'ai demandé un rapport à ce sujet, dont les conclusions ne m'ont pas encore été rendues ; je n'ai donc rien décidé à ce jour. Une réflexion de fond s'impose, mais l'on sait déjà que ces charges tiennent pour partie à l'utilisation de systèmes de chauffage inadaptés. D'ailleurs, les charges locatives sont plus basses dans les projets menés à bien sous l'égide de l'ANRU. Il conviendra donc de privilégier les économies d'énergie. Dans un autre domaine, je suis tout à fait favorable au rapprochement entre le CNH et le CNV.

Que M. Dumont se rassure : la loi « propriété pour tous » comportera un volet destiné à favoriser la vente de HLM, mais elle ne la rendra pas obligatoire. Il n'y a donc aucun changement de cap.

En conclusion, chacun voit bien qu'il faudra refonder les contrats de ville. Je confierai donc, prochainement, une mission en ce sens à un élu local.

M. le Président de la commission des affaires économiques - Monsieur le ministre, je vous remercie.

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Après l'audition de M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au Logement et à la Ville, lors de la réunion de la commission élargie, la Commission a examiné les crédits de la Ville et de la rénovation urbaine.

M. Jean-Louis Dumont a remarqué que si la formule de la commission élargie présentait l'indéniable avantage de densifier les débats, il ne fallait pas, en revanche, qu'elle se traduise par une limitation de l'expression des parlementaires. En particulier, il devrait être possible de poser plusieurs questions. La séance sur la ville a abouti à limiter la possibilité de poser des questions. Même si on peut comprendre qu'elle ait été écourtée, il est en revanche regrettable que des questions qui auraient dû être abordées ne l'aient pas été. Il faut rappeler que certaines commissions élargies se sont terminées à 13 heures voire au-delà, et que même la concomitance avec le Congrès de l'association des maires de France ne justifie pas que la séance ait été abrégée.

M. Jean-Jacques Descamps, Président, a effectivement rappelé que la commission élargie doit en principe permettre aux intervenants de reprendre la parole pour poser plusieurs questions.

M. François Grosdidier, Rapporteur spécial, a indiqué qu'il ne voyait pas, pour cette année, de thème d'enquête pertinent à soumettre à la Cour des comptes.

La Commission a ensuite, suivant l'avis favorable du Rapporteur spécial, adopté les crédits de la Ville et de la rénovation urbaine et vous demande d'émettre un vote favorable à leur adoption.

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N° 1863 - annexe 8 - Rapport spécial au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2005 : Ville et rénovation urbaine (M. François Grosdidier)

1 () Le Fonds de revitalisation économique avait été créé par la loi n° 2000-1208 relative à la solidarité et au renouvellement urbains du 13 décembre 2000 afin de contribuer à un dispositif d'aides directes aux petites entreprises en création ou en développement (ces aides pouvaient compléter sous certaines conditions les exonérations applicables en ZRU et en ZFU) et afin de soutenir les collectivités et acteurs locaux conduisant des actions d'animation économique et de développement local en direction des créateurs et chefs d'entreprises dans le cadre des contrats de ville 2000-2006.

2 () Les délégués de l'État sont des fonctionnaires des services déconcentrés, en général de catégorie A, mandatés directement par le préfet pour lui rendre compte de la problématique d'intervention de l'État sur un quartier prioritaire de la politique de la ville ou sur un contrat de ville. On compte actuellement 250 délégués dans 40 départements. Ils sont majoritairement issus des administrations suivantes : emploi et solidarité, équipement, intérieur et éducation nationale. Ils consacrent en général de l'ordre de 20 % de leur temps à l'exercice de cette mission et bénéficient à cette fin d'une décharge partielle de service.

3 () Voir les développements ultérieurs sur le programme national de rénovation urbaine.

4 () Voir l'avis présenté au nom de la commission des finances n° 997, juillet 2003.

5 () Ce montant inclut 6,1 millions d'euros supplémentaires en provenance de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de la région Île-de-France, la consolidation en 2004 de l'abondement de 141 millions d'euros en 2003, ainsi que 14 millions d'euros tirés de l'augmentation du solde de la dotation d'aménagement.

6 () Le Sénat a amendé le dispositif en prévoyant notamment que le montant de l'abondement exceptionnel annuel puisse être modulé si la DGF venait à passer sous la barre des 500 millions d'euros.

7 () Rapport sur l'exécution des lois de finances en vue du règlement du budget de l'exercice 2003.

8 () Comme signalé plus haut, ce fonds n'est plus doté depuis 2003 (pour le titre VI) et 2004 (pour le titre IV), mais des actions peuvent encore être financées à ce titre sur d'autres articles du budget de la ville.

9 () Voir le Rapport spécial n° 1110 annexe 7, novembre 2003, page 29.

10 () Michel Bouvard, Didier Migaud, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard, « Une nouvelle architecture du budget de l'État pour une plus grande efficacité de l'action publique », Rapport d'information n° 1554, mai 2004.

11 () Les budgets opérationnels de programme (BOP) sont les fractions de programme déléguées à un opérateur (déconcentré ou non), participant à sa réalisation pour en permettre la mise en œuvre. Chaque BOP comprend la déclinaison des objectifs et des indicateurs de performance du programme et un budget prévisionnel. Il comprend en outre le plan d'action avec la programmation des moyens correspondants ainsi que le schéma d'organisation financière détaillant les différents services appelés à mettre en œuvre le BOP.

12 () Le CNV bénéficie de moyens budgétaires prélevés sur le budget de la DIV et d'une série de mises à disposition : un magistrat et une chargée de mission contractuelle mis à disposition par le ministère de la justice ; deux chargés de mission contractuels de la DIV ; un attaché d'administration centrale mis à disposition par la Caisse des dépôts et consignations ; une secrétaire mise à disposition par le ministère de l'équipement sur le cadre d'emploi de la DIV.

13 () On trouve notamment parmi ceux-ci 3 agents détachés par d'autres ministères (intérieur, éducation nationale et affaires sociales) et 3 emplois fonctionnels de direction (déléguée, délégué-adjoint, secrétaire général).

14 () Par exemple, l'ANRU a signé au début du mois d'octobre avec Le Havre une convention prolongeant l'ancien dispositif GPV sur la période 2004-2008. La convention porte sur 301 millions d'euros, soit trois fois plus que précédemment. L'engagement financier de l'État sera plus important et les bailleurs sociaux apporteront 32 millions d'euros en fonds propres et 130 millions par des prêts souscrits auprès de la Caisse des dépôts et consignations. 1.742 logements devront être démolis, 3.143 réhabilités et 6.005 réaménagés.

15 () Voir les développements précédents sur l'application de la loi organique relative aux lois de finances de 2001.

16 () Ces équipes assurent un appui de proximité aux demandeurs d'emploi et servent de relais avec les services sociaux et les services chargés de l'emploi. Ces opérations peuvent bénéficier de subventions de l'État de 45.000 euros pendant les trois premières années, puis de 30.000 euros et de 15.000 euros les deux années suivantes.


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