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N° 2571

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2005

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2006 (n° 2540),

TOME IV

AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

PAR M. JACQUES GODFRAIN,

Député

--

Voir le numéro 2568 (annexe n° 5)

INTRODUCTION 5

I - LE DÉVELOPPEMENT AU CœUR DU DÉBAT MONDIAL 7

A - LE SOMMET DE L'ONU DE SEPTEMBRE 2005 : UN RENDEZ-VOUS ATTENDU 7

1) Les Objectifs du Millénaire pour le Développement : des repères pour mobiliser les nations et la communauté internationale 7

2) Les conclusions du sommet de l'ONU : remobiliser la communauté internationale pour lutter contre la pauvreté 10

B - LES GRANDES INITIATIVES PRISES AU PLAN MONDIAL EN 2005 : DETTE, FINANCEMENTS INNOVANTS, MICROCRÉDIT 11

1) L'annulation de la dette : l'accord majeur de Gleneagles 11

2) Le financement de l'aide publique au développement : la nécessité de créer des mécanismes pérennes 12

3) L'année internationale du microcrédit : l'occasion de soutenir l'épargne des migrants 13

C - UNE EUROPE EN FACE DE SES RESPONSABILITÉS : PREMIER DONATEUR MONDIAL 19

1) 55 % de l'aide mondiale 19

2) Des relations privilégiées avec l'Afrique, les Caraïbes et le Pacifique : les accords de Cotonou 22

3) L'avenir du FED : un instrument plus efficace, voué à disparaître ? 22

II - LA FRANCE, MOTEUR DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT 25

A - UNE AIDE MULTIFORME EN PROGRESSION CONSTANTE 25

1) Un effort soutenu : 0,47 % du RNB en 2006 - 8,2 milliards d'euros 25

2) L'aide publique au développement selon les critères internationaux : un périmètre beaucoup plus large que celui de la mission interministérielle 26

3) La mission « aide publique au développement » : 3 milliards d'euros pour 2006 en crédits de paiement 28

4) Le poids des annulations de dette : un pilier de l'aide publique au développement qui tend à se réduire 32

5) Le rôle des acteurs non étatiques : l'expression de l'esprit français de solidarité 35

B - L'EFFORT FRANÇAIS AU REGARD DE CELUI DES AUTRES GRANDS ETATS 38

1) Des éléments de comparaison 38

2) Les Etats-Unis 39

2) Le Royaume-Uni 40

3) Le Japon 42

4) L'Allemagne 44

5) La Chine 45

C - LES GRANDES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE FRANÇAISE D'AIDE AU DÉVELOPPEMENT 46

1) Une réforme des structures dont la mise en œuvre doit être accélérée 46

2) Les priorités géographiques : l'Afrique pour les deux tiers de l'aide 48

3) La mise en place des documents cadre de partenariat pour concentrer notre aide sur les priorités sectorielles 49

4) Attribuer à terme 0,15 % du RNB au bénéfice des pays les moins avancés 50

III - L'AFRIQUE AU CENTRE DE TOUTES LES ATTENTIONS 53

A - LE POIDS DES DIFFICULTÉS 53

1) Une situation sanitaire accablante 53

2) L'alimentation : des crises préoccupantes en Afrique de l'Ouest et australe 55

3) Une insertion insuffisante dans le commerce mondial ? 56

4) La situation politique et les guerres 58

B - DES MOTIFS D'ESPOIR 61

1) Une prise de conscience mondiale : sortir de la conspiration du silence 61

2) Les ressources pétrolières : l'enjeu du Golfe de Guinée 62

3) Les organisations régionales 64

CONCLUSION 69

EXAMEN EN COMMISSION 71

Mesdames, Messieurs,

Les images de jeunes Africains suspendus aux fils barbelés entourant Ceuta et Melilla, les deux enclaves espagnoles au Maroc, ont marqué les esprits. A juste titre. Elles mettent en lumière, avec une force rarement atteinte, toutes les difficultés du monde dans lequel nous vivons aujourd'hui : ce désir inextinguible des jeunes Africains de trouver, ailleurs, de meilleures conditions de vie ; l'incapacité de l'Europe à apporter une réponse adaptée à ce besoin ; la nécessité pour les Occidentaux - les Américains connaissent les mêmes difficultés avec leur frontière sud - de travailler au développement des Etats les plus pauvres ; l'illusion qui consisterait à croire que nous pouvons nous replier sur nous-mêmes en fermant les yeux sur la misère du monde.

La France peut cependant, s'enorgueillir de son action en ce domaine. Elle porte haut la cause des pays les plus pauvres, notamment par la voix du Président de la République. Cette question est maintenant au cœur des grandes réunions internationales grâce à la conjonction de plusieurs volontés : celle des Nations unies, de certains pays occidentaux comme la France mais aussi le Royaume-Uni qui a fait des questions de développement et de l'Afrique l'un des axes principaux de sa présidence du G8 en 2005, et plus largement de l'Union européenne. La France ne cesse de plaider cette cause depuis des années. Elle ne se contente pas d'alerter ses partenaires. Elle agit. Par l'augmentation substantielle des moyens financiers au service de l'aide publique au développement, par la mise en place d'un mécanisme de financement pérenne des actions en faveur du développement, par des coopérations dans des domaines comme, entre autres, la santé, l'alimentation, l'environnement, la bonne gouvernance, la France fait face à ses responsabilités.

L'année 2005 apparaît, d'ores et déjà, comme une étape significative dans l'effort que les pays les plus riches doivent engager au profit de ceux qui le sont moins. La réunion du G8 à Gleneagles, le sommet de l'ONU en septembre dernier, les initiatives françaises pour le financement de l'aide, ont marqué les esprits. Il faut, en 2006, aller plus loin encore et continuer, au-delà des débats importants qui se tiennent dans les grandes instances internationales, à mener à bien des projets de toutes dimensions qui, concrètement, assurent une vie meilleure aux populations du Sud.

L'essentiel est bien de trouver cette capacité à articuler le plus efficacement possible ces deux échelons : celui des grandes impulsions mondiales et celui des actions locales. Par son expérience et son engagement, la France peut apporter des réponses utiles à cette question.

L'examen du projet de loi de finances pour 2006 nous donne l'occasion, une fois de plus, de nous pencher sur la politique de la France en matière d'aide au développement. Les motifs de satisfaction sont nombreux. Des réformes sont engagées qui permettront, si elles sont pleinement mises en œuvre, de mieux employer les moyens dont nous disposons au profit des Etats en développement.

Le budget 2006 est le premier qui voit la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) s'appliquer entièrement. Une mission interministérielle a été créée. Elle regroupe une partie seulement des moyens financiers qui sont mis en œuvre au titre de l'aide publique au développement au sens que l'OCDE donne à ce terme, qui sert de référence dans le débat international. On verra comment ce nouvel instrument qu'est la mission budgétaire permet de mieux saisir et contrôler l'action de l'Etat dans le domaine de l'aide aux pays les plus pauvres.

On insistera tout d'abord sur le fait que la communauté internationale s'est saisie de la question du développement avec une grande intensité, en en faisant un enjeu autour duquel tous les pays doivent se mobiliser (I). Dans ce contexte, la France apparaît comme jouant un rôle moteur, à la fois comme force de propositions et acteur concret (II). Enfin, si la situation de l'Afrique ne manque pas d'être particulièrement préoccupante, des motifs d'espoir apparaissent. A nous de soutenir les efforts des Africains et d'agir en faveur de ce beau continent (III).

I - LE DÉVELOPPEMENT AU CœUR DU DÉBAT MONDIAL

La tenue du grand sommet de l'ONU en septembre dernier a permis de concentrer l'attention de toutes les nations sur la question du développement. Des initiatives ont été prises, notamment par la France, que ce soit en matière de financement de l'aide ou de réduction de la dette. L'Union européenne a, de son côté, pris également la mesure de l'enjeu en s'affirmant comme un acteur majeur au plan mondial pour l'aide aux pays les plus pauvres. Depuis plusieurs années maintenant, le développement s'impose comme un sujet majeur du débat mondial.

A - Le sommet de l'ONU de septembre 2005 : un rendez-vous attendu

L'enjeu de ce sommet était de mobiliser les nations autour des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Cette réunion a eu le mérite de replacer sur le devant de la scène cette grande entreprise.

1) Les Objectifs du Millénaire pour le Développement : des repères pour mobiliser les nations et la communauté internationale

C'est en 2000 que l'Assemblée générale des Nations unies a adopté la Déclaration du Millénaire qui fait aujourd'hui figure de référence dans le débat mondial sur le développement. Cette déclaration rend compte des principaux défis auxquels se trouve confrontée l'humanité en ce troisième millénaire. Mais au-delà de ce constat, elle propose des solutions pour y faire face. Des critères précis d'évaluation des performances ont été définis au moyen d'un ensemble d'engagements, d'objectifs et de cibles concernant le développement, la gouvernance, la paix, la sécurité et les droits de l'homme. C'est surtout la détermination avec laquelle ont été affirmés les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) qui a marqué les esprits. Cinq ans après, les OMD sont devenus le cadre commun de référence pour les stratégies d'aide au développement. Quels sont-ils ?

OBJECTIFS DU MILLÉNAIRE POUR LE DÉVELOPPEMENT

Objectif n° 1

Réduire l'extrême pauvreté et la faim 

Réduire de moitié la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour

Réduire de moitié la proportion de la population qui souffre de la faim 

Objectif n° 2

Assurer l'éducation primaire pour tous

Donner à tous les enfants, garçons et filles, les moyens d'achever un cycle complet d'études primaires

Objectif n° 3

Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes

Eliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements primaire et secondaire d'ici à 2005, si possible, et à tous les niveaux de l'enseignement en 2015, au plus tard

Objectif n° 4

Réduire la mortalité infantile

Réduire de deux tiers le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans

Objectif n° 5

Améliorer la santé maternelle

Réduire de trois quarts le taux de mortalité maternelle

Objectif n° 6

Combattre le VIH/sida, le paludisme et d'autres maladies

Stopper la propagation du VIH/sida et commencer à inverser la tendance actuelle

Maîtriser le paludisme et d'autres grandes maladies, et commencer à inverser la tendance actuelle

Objectif n° 7

Assurer un environnement durable

Intégrer les principes du développement durable dans les politiques nationales; inverser la tendance actuelle à la déperdition des ressources environnementales;

Réduire de moitié le pourcentage de la population qui n'a pas accès de façon durable à un approvisionnement en eau potable

Améliorer sensiblement la vie d'au moins 100 millions d'habitants de taudis, d'ici à 2020

Objectif n° 8

Mettre en place un partenariat mondial pour le développement

Poursuivre la mise en place d'un système commercial et financier multilatéral ouvert, fondé sur des règles, prévisible et non discriminatoire. Cela suppose un engagement en faveur d'une bonne gouvernance, du développement et de la lutte contre la pauvreté, aux niveaux tant national qu'international

S'attaquer aux besoins particuliers des pays les moins avancés. La réalisation de cet objectif suppose l'admission en franchise et hors contingents de leurs exportations, l'application du programme renforcé d'allégement de la dette des pays pauvres très endettés, l'annulation des dettes bilatérales envers les créanciers officiels, et l'octroi d'une aide publique au développement plus généreuse aux pays qui démontrent leur volonté de lutter contre la pauvreté

Répondre aux besoins particuliers des Etats enclavés et des petits Etats insulaires en développement

Traiter globalement le problème de la dette des pays en développement par des mesures d'ordre national et international propres à rendre leur endettement viable à long terme

En coopération avec les pays en développement, créer des emplois décents et productifs pour les jeunes

En coopération avec l'industrie pharmaceutique, rendre les médicaments essentiels disponibles et abordables dans les pays en développement

En coopération avec le secteur privé, mettre les avantages des nouvelles technologies, en particulier des technologies de l'information et de la communication, à la portée de tous

Après le rapport publié en 2004, conjointement par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) - le Rapport mondial sur le suivi (1) -, le document (2) remis par M. Jeffrey Sachs, directeur du Projet du millénaire, au Secrétaire général de l'ONU, en 2005, a clairement montré qu'un très grand effort devait être engagé pour respecter la Déclaration du Millénaire. Notre génération a les moyens de vaincre l'extrême pauvreté si elle y emploie l'énergie nécessaire. Jeffrey Sachs n'a pas manqué ainsi de critiquer le faible engagement relatif des Etats-Unis qui ne consacrent que 0,16 % de leur PIB à l'aide publique au développement.

En 2005, cinq ans après le lancement de ces OMD, la situation, objectif par objectif, est très variée.

On constate que la proportion des personnes sous-alimentées diminue dans le monde. Toutefois, ce constat ne vaut pas pour l'Asie occidentale, l'Océanie, la Communauté des Etats indépendants ou pour l'Afrique subsaharienne. 700 millions de personnes vivent ou plutôt survivent avec moins d'un dollar par jour.

Certes, l'enseignement primaire progresse d'un point de vue global, mais l'Asie du Sud-Est et l'Afrique subsaharienne connaissent encore un grand retard par rapport aux objectifs fixés. L'égalité des sexes et la parité dans l'enseignement sont loin d'être réalisés dans de nombreux pays, en particulier en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne. De même si les taux de mortalité infantile et maternelle ont diminué rapidement dans certaines zones, ces taux restent beaucoup trop élevés en Afrique subsaharienne. La propagation du VIH-sida se poursuit en dépit des efforts mis en œuvre ; la maladie est bien à l'état de pandémie en Afrique australe. L'accès à l'eau progresse sensiblement, mais là encore l'Afrique subsaharienne et les zones rurales de nombreuses régions du monde restent à l'écart. L'objectif d'assainissement demeure très largement hors de portée en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne. Près de 900 millions de personnes vivent dans des taudis. Enfin, toutes les régions en développement ont connu une dégradation très sensible de l'environnement.

L'Asie est la région où les progrès sont souvent les plus rapides, alors que l'Afrique subsaharienne reste la plus touchée. Une grande partie des objectifs apparaissent largement hors de portée qu'il s'agisse de la sécurité alimentaire, des taux de mortalité infantile et maternelle ou encore de l'habitat précaire qui ne cesse de progresser.

La réalisation des OMD apparaît hors d'atteinte si les tendances actuelles demeurent. 50 milliards de dollars manquent chaque année ; l'obtention de ces moyens supplémentaires signifierait un quasi doublement de l'aide par rapport à 2002.

Un sursaut est nécessaire, absolument nécessaire. Ce fut aussi la conclusion du Sommet de l'ONU de septembre dernier.

2) Les conclusions du sommet de l'ONU : remobiliser la communauté internationale pour lutter contre la pauvreté

La majeure partie des conclusions de ce sommet porte sur le développement et les OMD (3).

Les membres de l'ONU ont réaffirmé « avec force » leur volonté d'assurer la réalisation intégrale, dans les délais prescrits, des buts et objectifs de développement convenus à l'occasion des grandes conférences et réunions au sommet des Nations unies, et notamment les OMD. L'objectif est bien d'éliminer la pauvreté et de promouvoir une croissance économique soutenue. Les principes de politique rationnelle, de bonne gouvernance, d'Etat de droit sont rappelés et chaque pays est considéré comme responsable au premier chef de son propre développement économique et social. Les efforts ainsi fournis par chaque pays doivent être soutenus par l'aide au développement, le commerce international en tant que moteur du développement, ce qui suppose aussi des transferts de technologies et l'accroissement des flux d'investissements.

Les conclusions du sommet portent également sur les conditions de financement du développement. Les membres de l'ONU se déclarent encouragés par l'engagement pris par de nombreux Etats d'augmenter leur aide publique au développement de sorte que le montant de cette aide s'accroisse de 50 milliards de dollars par an d'ici 2010. Nombre de pays développés ont réaffirmé leur volonté de consacrer 0,7 % de leur PIB d'ici 2015 à l'aide publique au développement et au moins 0,5 % d'ici 2010.

Cette déclaration aborde aussi plus largement la question de la dette, du commerce, des investissements, de l'environnement, de l'éducation ...

On peut se montrer sceptique devant de telles déclarations « onusiennes » qui semblent de longs catalogues d'intentions louables. Votre Rapporteur estime qu'elles sont cependant très utiles pour porter constamment la question du développement sur le devant de la scène et maintenir une pression nécessaire sur les pays développés, dont l'intérêt bien compris est d'investir dans l'aide aux pays du Sud. Il faut parler de la pauvreté de ces pays. Ne rien en dire, rester muet face à ces souffrances serait une véritable faute.

Créant un climat général favorable à l'aide au développement, le sommet de l'ONU a été précédé de nombreuses initiatives tout au long de l'année 2005. Les principales portent sur la dette, le financement de l'aide et le microcrédit.

B - Les grandes initiatives prises au plan mondial en 2005 : dette, financements innovants, microcrédit

1) L'annulation de la dette : l'accord majeur de Gleneagles

Le sommet du G8 a réuni le 7 juillet 2005 à Gleneagles au Royaume-Uni, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Allemagne, du Canada, des Etats-Unis, de la France, de l'Italie, du Japon, du Royaume-Uni et de la Russie. L'objectif fixé par la présidence était d'élaborer de nouvelles stratégies et d'orienter sur certains aspects la politique mondiale.

Ce sommet a confirmé l'accord des ministres des finances de juin 2005 pour l'annulation de la dette multilatérale de dix-huit pays pauvres très endettés (4). Cette mesure pourrait être étendue à d'autres pays dans les mois à venir.

Il s'agit d'annuler 100 % du stock de la dette à l'égard de l'Association internationale du développement (AID, du Groupe Banque Mondiale), du Fonds africain de développement (FAD, Banque africaine de développement) et du Fonds monétaire international (FMI) pour les pays pauvres très endettés (PPTE) ayant franchi le point d'achèvement. L'ensemble de ces annulations devrait porter sur environ 55 milliards de dollars de stocks. Les dix-huit pays ayant atteint le point d'achèvement bénéficieront immédiatement d'un allégement de dette d'un montant de 40 milliards de dollars. Neuf autres pays pourraient également bénéficier d'une annulation de dette dans les douze à dix-huit prochains mois, pour un montant de 11 milliards de dollars. Enfin, un groupe de onze pays pourra bénéficier d'une annulation de 100 % de leur dette, pour un montant de 4 milliards de dollars, une fois qu'ils auront franchi le point d'achèvement de l'initiative PPTE, un peu plus tard.

Le coût de ces annulations est provisoirement évalué pour la France à 67 millions de dollars par an pour les trois prochaines années, et à 366 millions de dollars au total d'ici 2015.

2) Le financement de l'aide publique au développement : la nécessité de créer des mécanismes pérennes

En 2002, la France a fait de la question du financement de l'aide au développement l'une de ses priorités afin qu'elle devienne l'une des premières préoccupations de la communauté internationale.

Pour être pleinement efficace, l'aide doit être importante mais aussi prévisible et stable. Les pays en développement doivent, en effet, pouvoir mener des politiques sur le long terme sans dépendre, chaque année, des fluctuations budgétaires propres à chaque Etat donateur. C'est en particulier vrai pour les programmes de développement humain comme l'éducation ou la santé ; des financements réguliers sont indispensables.

Le rapport de M. Landau intitulé Les nouvelles contributions financières internationales, publié en 2004, et le rapport du groupe quadripartite (5) réunissant, à l'époque, le Brésil, le Chili, l'Espagne et la France ont appelé à la mise en place de financements innovants.

Parmi ces financements, on trouve la proposition britannique d'IFF (International Finance Facility) qui correspond à une forme d'emprunt obligataire à long terme pour les pays du Sud permettant de lever des fonds rapidement ainsi que son projet pilote appliqué à la vaccination (IFFim : IFF for immunization). Notre pays s'est également fortement engagé dans les différentes enceintes internationales en proposant le lancement, dès cette année, d'un projet pilote de contribution internationale sur le transport aérien dont le produit pourrait être alloué à la lutte contre le sida et les grandes pandémies. Le débat sur cette question progresse et des résultats très encourageants ont, d'ores et déjà, été obtenus. Le 20 septembre 2004, 111 pays ont soutenu la déclaration de New York de MM. Chirac, Lula da Silva, Lagos et Zapatero. L'importance de tels mécanismes a été reconnue par le Comité du Développement de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International, comme lors du dialogue à haut niveau sur le financement du développement tenu, les 27 et 28 juin à New York, dans le cadre de l'Assemblée Générale de l'ONU. Il en a été de même par les chefs d'Etat et de Gouvernement du G8 à l'occasion du sommet de Gleneagles.

Le Président de la République avait évoqué plusieurs assiettes possibles pour un futur prélèvement international : une contribution sur les transactions financières internationales ; un prélèvement sur les flux de capitaux à destination ou en provenance des pays pratiquant le secret bancaire ; une contribution sur le carburant utilisé par le transport aérien et maritime ; un prélèvement sur les billets d'avion. Dans un premier temps, à titre expérimental, la France a proposé l'instauration d'une contribution de solidarité internationale assise sur les billets d'avion. Un prélèvement forfaitaire de 5 à 10 euros serait opéré pour la classe économique et de 25 à 30 euros pour les classes supérieures. Un rendement compris entre 2 et 5 milliards d'euros est espéré par les autorités françaises. Les modalités de prélèvement devraient être fixées dans un accord international.

Le Brésil et l'Allemagne ont largement souscrit à cette proposition. D'autres pays pourraient leur emboîter le pas comme la Suède, la Belgique, le Luxembourg ou les Pays-Bas. Il est clair que ce mécanisme doit être largement mis en œuvre, par le plus d'Etats possible, pour non seulement permettre de lever des fonds importants et pérennes mais aussi pour éviter des effets de distorsions entre les pays liés à la présence de cette taxation.

3) L'année internationale du microcrédit : l'occasion de soutenir l'épargne des migrants

C'est en 1998 que l'Assemblée Générale des Nations unies a proclamé 2005 « Année internationale du microcrédit » dans le but de renforcer l'impact de la microfinance. Le microcrédit est aujourd'hui considéré comme un outil efficace de lutte contre la pauvreté et de réalisation des OMD.

A travers cette notion de microfinance, il est question d'accroître significativement l'offre de services financiers et de diversifier les produits financiers pour répondre aux besoins réels des populations. La couverture du secteur rural, encore très important dans le Sud, est nettement insuffisante. De nouveaux produits tels que la micro-assurance, pour la santé ou l'habitation par exemple, restent à développer. Le secteur de la microfinance doit aussi poursuivre sa professionnalisation pour assurer sa pérennité. Enfin, pour se développer significativement, ce secteur doit mobiliser les ressources du secteur privé.

On estime que quatre milliards de personnes n'ont pas accès aujourd'hui aux services financiers.

L'objectif principal de cette année du microcrédit est d'accroître l'accès au crédit, à l'épargne, aux produits d'assurance et à d'autres services financiers de base - transferts de fonds, moyens de paiements - pour les populations n'ayant pas aujourd'hui accès à ces services, en particulier dans les pays en développement.

L'objectif de l'ONU était aussi d'associer tous les partenaires à cette action en faveur du microcrédit, que ce soit les Etats membres, les agences des Nations unies, les bailleurs, les Organisations Non Gouvernementales. Le Fonds d'Equipement et le Département des Affaires Economiques et Sociales des Nations unies ont formé un comité dont le mandat est de coordonner les projets de l'année en accord avec les directives du Secrétaire général des Nations unies et les souhaits des Etats Membres. Il a été aussi demandé aux Etats membres de créer un comité national dont la mission est d'établir un diagnostic du secteur de la microfinance dans le pays puis d'élaborer un plan d'actions pour favoriser son développement.

D'après le comité de coordination, plus de 90 pays ont déclaré leur soutien à l'année internationale du microcrédit ; des comités nationaux ou points focaux ont été établis dans 46 pays comprenant des représentants de haut niveau de 35 gouvernements, 60 bureaux nationaux des Nations unies, 41 agences multilatérales, 177 réseaux de microfinance, 13 banques centrales et de nombreux représentants du secteur privé et de la société civile. La mobilisation a donc été réelle autour de cette question.

A l'ONU, deux projets sont en cours : « le livre bleu » et « le projet de données ». Le premier document doit mettre en évidence les obstacles au développement de la microfinance dans le monde et proposer des stratégies pour les surmonter. Le projet de données fera, pour sa part, un état des lieux des données existantes sur l'accès aux services de microfinance dans le monde, et fournira des recommandations pour améliorer significativement ces informations.

Durant l'année 2005, on a observé aussi l'organisation de centaines de séminaires et conférences. Parmi elle, on s'arrêtera un instant sur la Conférence internationale de Paris sur la microfinance des 20 et 21 juin derniers.

Organisée par le Gouvernement français et l'Agence française de Développement, en tant qu'opérateur, et en partenariat avec nos amis britanniques et allemands mais également avec le Collectif des acteurs français de la microfinance, cette conférence a connu un grand retentissement. Ouverte par le Président de la République, la journée du 20 juin a réuni près de 550 participants : ministres du Nord et du Sud, représentants d'organisations internationales, experts, représentants du secteur privé et de la société civile des cinq continents. La journée du 21 juin, organisée par le réseau des acteurs français de la microfinance a réuni quelques 350 participants.

Dans son allocution d'ouverture, le Président Chirac a exprimé la nécessité pour la microfinance de changer d'échelle et de « passer de quelques dizaines de millions de bénéficiaires aujourd'hui à plusieurs centaines de millions demain ». Pour ce faire, il a souligné la nécessité d'établir tout d'abord un cadre légal et fiscal adapté. Abordant le rôle de catalyseur des bailleurs de fonds, le Président de la République a préconisé la mobilisation de 3 milliards de dollars de fonds publics par an, soit un triplement des moyens actuels, permettant de porter à 600 millions, d'ici 2015, le nombre de ses bénéficiaires. Il a également souligné que la France prendrait toute sa part dans cet effort et « mobiliserait l'ensemble de ses instruments de garantie pour décupler au cours de la prochaine décennie le nombre de bénéficiaires de microcrédits attribués par les institutions qu'elle appuie ».

L'année du microcrédit a pris fin le 8 novembre au siège de l'ONU, avec l'organisation d'un forum international. Le credo de la microfinance et du microcrédit est, selon l'ONU : « Un petit prêt peut changer une famille. Plusieurs peuvent renforcer une communauté. Des milliers peuvent transformer une économie toute entière ». L'année 2005 aura dépassé sur ce point toutes les attentes selon le Secrétariat général des Nations unies. Cette action de vaste envergure en vue de sensibiliser les dirigeants mondiaux à cette question à été, de l'avis de tous, un succès.

La France ne peut évidemment rester à l'écart de ce mouvement et pourrait prendre une initiative qui compterait dans le monde occidental.

Ne pourrait-elle pas, enfin, agir en faveur de la valorisation de l'épargne des migrants ? Notre intérêt pour cette question est partagé avec quelques uns de nos collègues, dont M. Jean-Pierre Brard, avec lequel votre Rapporteur a signé une proposition de loi en juillet 2004, enregistrée sous le n° 1687. Son titre en résume clairement le contenu : mobiliser l'épargne des travailleurs migrants en France au service du développement de leur région et en faveur de projets productifs.

L'épargne des migrants est au carrefour de la plupart des grandes questions relatives au développement des pays du Sud : la solidarité des migrants avec leur pays d'origine, le caractère essentiel des transferts financiers du Nord vers le Sud, le retour au pays, le développement partagé. Nous, qui accueillons ces travailleurs expatriés, devons nous pencher sur la manière dont les sommes que ces hommes et ces femmes gagnent, par leur labeur, sur notre territoire peuvent contribuer à développer leur pays d'origine. De plus, nous ne pouvons que faire le constat d'une carence de notre système bancaire et financier : il ne porte pas assez d'attention aux populations immigrées.

La valorisation de l'épargne des migrants suppose aussi de porter un autre regard sur ces personnes qui font souvent de grands sacrifices pour soutenir leurs familles et leurs amis dans leur pays d'origine. C'est leur dignité qui s'exprime par les sommes qu'elles adressent à leurs proches.

Les transferts des travailleurs migrants vers leur pays d'origine représentent des montants impressionnants. Chaque travailleur émigré aide financièrement cinq à six personnes en moyenne dans son pays natal ; on peut donc considérer que 200 à 250 millions de personnes à travers le monde bénéficient ainsi du soutien d'un ami ou d'un parent travaillant à l'étranger. Le Fonds monétaire international estimait le volume de tels transferts à plus de 105 milliards de dollars en 1999 (6). Ce chiffre ne rend évidemment pas compte de la réalité puisque bon nombre de ces transferts échappent aux circuits formels ou prennent la forme d'envois en nature. Dans certains pays, ces transferts informels représentaient, il y a quelques années, au moins le double, voire le triple des chiffres officiels. Selon le PNUD, de tels transferts dépassent pour certains pays le montant de l'aide publique au développement dont ces Etats bénéficient. C'est le cas ainsi pour le Maroc : avec un montant de 5 milliards de dollars par an, ces transferts représentent six fois le déficit de la balance commerciale et deux fois l'aide publique au développement reçue annuellement. Pour l'Inde, ce même montant équivaut à un cinquième des recettes d'exportations, deux fois le déficit de la balance commerciale et trois fois l'aide publique au développement reçue. Pour le Mexique, les quatre milliards de dollars transférés par an représentent dix fois l'aide dont bénéficie ce pays. Les montants en cause sont essentiels pour les pays du Sud. Pourtant, leur impact sur le développement économique reste encore trop limité.

De tels transferts vers le pays d'origine sont destinés au soutien de la famille mais aussi à des investissements futur, immobiliers ou portant sur des projets économiques. Ils peuvent représenter de 15 à 65 % des salaires perçus par l'émigré. Ces transferts ont évidemment des effets bénéfiques pour les pays d'origine des migrants. Ils font figure de ressources régulières qui ont un effet stabilisateur sur les économies locales notamment en période de crise. Ils constituent aussi - est-il besoin de le souligner ? - un moyen pour les familles des migrants au sens large du terme de survivre dans des régions frappées par le marasme. Pourtant, nous devons constater que l'emploi de ces sommes d'argent est marginalement dirigé vers des investissements productifs, à hauteur de 11 % en moyenne selon l'étude du CFSI.

La faiblesse de ces investissements s'explique par des obstacles locaux que nous pourrions contourner en instituant un système bancaire et financier de valorisation de l'épargne des migrants. On doit malheureusement constater que les banques des pays du Sud prêtent trop peu aux individus qui souhaitent développer une activité économique. Lorsqu'elles y consentent, ces prêts sont accordés à des taux élevés. En outre, l'instabilité politique, la corruption, l'insécurité, la faiblesse des structures d'encadrement ou de conseil limitent les initiatives.

Pourtant, combien peut être utile pour le développement d'une localité, d'un village, d'une région, la création d'une entreprise par un travailleur migrant qui revient dans son pays après avoir accumulé une épargne suffisante lors de son séjour en Europe. Il peut suffire d'une initiative économique parfois pour stimuler l'activité locale. De telles actions permettraient de contrecarrer les effets négatifs des transferts de fonds dont on ne peut nier l'existence. De tels transferts conduisent, en effet, souvent à la transformation des habitudes de consommation qui impliquent dans de nombreux cas une augmentation des biens importés. Cette manne peut aussi introduire des phénomènes de rentes qui peuvent détourner certaines populations de la production agricole. Elle peut aussi avoir un effet inflationniste et augmenter la dépendance des familles.

Quelles sont les formes des transferts aujourd'hui ? On doit distinguer les transferts formels et informels. Les premiers passent par des sociétés spécialisées comme la Western Union, dont les coûts sont relativement élevés pour les migrants. Ils peuvent aussi emprunter la voie du mandat postal. C'est un procédé simple mais qui a l'inconvénient d'être moins rapide que le précédent et ne permet pas d'éviter totalement les détournements que certains migrants craignent d'après les études que nous avons citées. Les transferts bancaires sont les plus sûrs. Mais ils supposent que le destinataire de la somme envoyée soit également titulaire d'un compte bancaire ce qui ne va pas de soi dans les régions isolées. Les voies informelles sont empruntées, selon l'étude du CFSI, pour plusieurs raisons : habitudes enracinées de longue date, méfiance envers le système bancaire, besoins réels ou perçus du secret, méfiance envers les autorités, difficultés d'accès au système bancaire - par exemple en cas de séjour illégal - coût des transferts formels.

On doit constater que les banques françaises ne s'intéressent pas réellement à cette question. Elles n'offrent pas de produits spécifiques adaptés aux besoins des travailleurs migrants. La valorisation de l'épargne se fait sur notre territoire mais elle est presque impossible dans le pays d'origine. Epargner en France ne permet pas de bénéficier ensuite d'un prêt intéressant pour créer son entreprise ou se faire construire une maison dans son pays. En 1998, quelques banques, pour l'essentiel mutualistes, ainsi que la Caisse des dépôts et consignations avaient créé un Club des banquiers pour forger une réflexion et faire des propositions pour le financement du développement international. Des propositions avaient alors été faites en novembre 1998 à la Mission interministérielle au codéveloppement et aux migrations internationales (MICOMI) pour l'adaptation d'un produit d'épargne au public migrant. Il s'agissait de créer un produit s'inspirant du livret A ou du plan d'épargne logement qui permettrait de diriger son épargne après une période minimale de détention vers un projet de développement économique dans son pays d'origine : des investissements directs dans des projets de création d'entreprises, de logement ou d'équipements d'intérêt général ; des transferts vers des produits d'épargne équivalent dans le pays d'origine ; des souscriptions à des emprunts municipaux ou régionaux ... Ces propositions n'ont pas connu de suites réelles.

Certains pays en développement ont compris tout l'intérêt qu'ils avaient à drainer cette épargne vers leur système bancaire. On peut citer parmi d'autres les initiatives de la Banque de l'habitat du Sénégal qui a mis en place des produits spécifiques comme le compte et le plan épargne retour, plus précisément dans le domaine immobilier. On peut aussi évoquer la politique très volontariste du système bancaire marocain très présent en France pour collecter l'épargne des ressortissants marocains qui travaillent dans notre pays.

Les initiatives proviennent aussi des pays développés. Prenons l'exemple de l'Espagne. La Caja Madrid et la Caja de Murcia ont mené une expérience avec le Banco solidario en Equateur, qui a mis au point un éventail très complet de produits financiers destinés aux immigrés équatoriens en Espagne. Ces banques favorisent ainsi l'utilisation des fonds transférés vers des projets immobiliers ou de développement économique.

On peut aussi mentionner les initiatives locales très intéressantes qui ont été prises par la France, comme celle engagée dans la commune de notre collègue Jean-Pierre Brard, à Montreuil. Un jumelage a été conclu entre cette municipalité et le cercle de Yelimane au Mali, la majorité des Maliens présents à Montreuil étant originaire des 90 villages constituant ce cercle dans la région de Kayes. Plusieurs plans triennaux ont été mis en place en mettant financièrement à contribution les migrants.

Mettre en place de tels programmes n'est pas simple et se heurte parfois aux réticences des travailleurs migrants qui souhaitent soutenir en priorité leur famille par le fruit de leur travail. Mais il y a là des perspectives très stimulantes dont l'avis de janvier 2002 du Haut conseil de la coopération internationale intitulé : Le rôle des migrants, élément essentiel d'une nouvelle politique de coopération, n'avait pas manqué de souligner l'importance. Rappelons quelques unes des observations contenues dans ce document : « Il est paradoxal que des montants qui, pour certains pays, sont supérieurs à l'aide publique au développement reçue, soient traités comme s'ils n'existaient pas. Un travail d'ingénierie doit aboutir à la mise en place de circuits financiers favorisant l'investissement de l'épargne issue de l'immigration dans le développement, en particulier dans le domaine de la création d'activités génératrices de revenus et d'emplois. (...) Il convient d'encourager la mise en place et de développement de systèmes de cautionnement, de fonds de garantie ou de capital-risque pour satisfaire les besoins financiers des entreprises. Les restrictions à l'utilisation hors de France de l'épargne constituée par les personnes issues de l'immigration doivent être levées, notamment dans l'optique que celle-ci leur permette de constituer, dans leur pays, un capital utile au cautionnement des entreprises de membres de leurs familles ».

Comme nous l'écrivions dans l'exposé des motifs de notre proposition de loi de 2004, le co-développement, le développement partagé, peut contribuer à réduire les tensions internationales, à lutter contre le déracinement, à créer des échanges économiques entre partenaires également dignes.

C'est dans cette perspective que M. Brard et votre Rapporteur ont proposé de créer un dispositif financier et technique appelé Livret d'Epargne pour le développement.

Avec ce dispositif, le travailleur migrant, comme toute personne résidant sur le territoire national, pourrait orienter ses placements en faveur d'une offre de crédit adaptée à ses projets d'investissements en France comme dans son pays d'origine. Un taux de rémunération incitatif permettrait en outre, dans le cadre d'accords bilatéraux, de soutenir le développement de l'investissement productif correspondant à la satisfaction des besoins durables des familles, mais également le plan général de développement du pays d'origine et l'émergence de structures locales de crédit. L'objectif est bien de promouvoir des initiatives pérennes et de favoriser la mise en place d'un tissu économique et social, facteur de développement durable.

L'épargne serait collectée par tout établissement financier déjà chargé de l'organisation de la gestion du Livret A et gérée ensuite par la Caisse des Dépôts et Consignations. Ces sommes seraient alors affectées, par répartition, à un fonds dans chaque pays d'origine dont la gestion sera soumise à un accord bilatéral. Les études montrant la nette préférence des travailleurs migrants pour une épargne liquide, ceux-ci pourraient demander la restitution de leur épargne à tout moment, le taux d'intérêt en vigueur étant appliquées à ces sommes.

Pour l'heure, cette initiative soutenue par de nombreuses associations impliquées dans le domaine du développement, et que votre Rapporteur avait déjà défendue dans son avis en 2004, n'a pas connu l'accueil que l'on pouvait espérer de la part du Gouvernement et des structures administratives et financières.

L'an passé, votre Rapporteur indiquait qu'il demeurait très vigilant sur cette question. Les pages qui précèdent en témoignent. Le Gouvernement demeure statique et, embarrassé, ne cesse de répondre de manière dilatoire. Ce n'est pas acceptable. Cette proposition mérite d'être débattue ; le Gouvernement ne s'honore pas en refusant ce débat et en se réfugiant derrière un silence confus. Il est temps de travailler sérieusement sur cette proposition.

C - Une Europe en face de ses responsabilités : premier donateur mondial

1) 55 % de l'aide mondiale

L'Union européenne est le premier donateur d'aide au développement au monde. Elle fournit 55 % de l'aide publique mondiale, soit 30 milliards d'euros par an destinés à 160 pays, territoires et organisations à travers le monde. Plus d'un cinquième de ce montant est géré par la Commission européenne.

La Commission a lancé, en 2000, une réforme du mode de gestion de cette aide pour améliorer la réalisation de ses programmes d'aide extérieure. Cette réforme prévoyait la création, dès janvier 2001, d'une organisation unique chargée de gérer les programmes d'aide au développement extérieure (EuropAid) et la déconcentration, sur la période 2001-2004, des compétences et des ressources vers les bureaux de la Commission à l'étranger (appelés délégations). Le processus de déconcentration s'est achevé en 2004.

En novembre 2004, l'Union a adopté un programme de travail lors du Conseil « Affaires générales et Relations extérieures » qui confère un rôle central au pays partenaire et repose sur une stratégie de terrain pragmatique. Parallèlement, les activités de coopération avec la Banque mondiale et les organisations des Nations unies se sont intensifiées et, du point de vue financier, ont été multipliées par deux entre 2002 et 2004.

Le budget de l'Union européenne consacré à l'aide publique au développement est en progression constante comme le montre le tableau suivant.

Aide publique au développement (APD) et aide publique (AP) financées sur le budget général de la Commission et sur le Fonds européen de développement (en millions euros)

Engagement

Déboursements

APD/AP

2001

2002

2003

2001

2002

2003

APD

5994,02

6532,73

8269,41

5891,76

5920,30

6331,13

AP

3734,89

3673,32

4065,17

1808,40

1984,38

2822,13

TOTAL GÉNÉRAL

9728,91

10206,05

12334,58

7700,16

7904,68

9153,26

Le tableau suivant présente la ventilation sectorielle de l'aide au développement versée par l'Union européenne en 2003.

Ventilation sectorielle de l'Aide au développement versée par l'Union européenne (2003)

Secteurs de destination

Montants des engagements en millions d'euros

 

NEI

Balkans occidentaux

MEDA

Asie

Amérique latine

ACP

PMA

Total

(non spéc.)

INFRASTRUCTURES ET

SERVICES SOCIAUX

287,11

420,21

298,61

381,98

176,81

1346,29

118,22

3 029,22

Éducation

23,35

39,68

101,61

134,02

50,92

181.19

0,97

531,75

Enseignement, niveau non spécifié

 

7,48

 

 

20.66

95,41

0,97

124,52

Enseignement primaire

1,20

1,80

24.11

106,89

1,88

62.41

 

198,29

Enseignement secondaire

 

14,00

 

 

28.38

5,88

 

48,27

Enseignement supérieur

22,15

16,40

77,50

27,13

 

17,50

 

160,68

Santé

 

9,50

24,50

10,74

1,50

287,22

77,17

410,63

Santé, général

 

9.50

15,75

 

 

74,95

 

100,2

Santé de base

 

 

8,75

10,74

1.50

212,27

77.17

310,43

Politique/programmes démographiques et de santé reproductive

 

 

 

2,14

 

3,46

17.45

23,05

Approvisionnement en eau potable et assainissement

21,00

20,60

4,00

26,12

1,20

259,35

 

332,28

Gouvernance et société civile

117,81

217,84

101,63

78,84

88,18

279,71

22,64

906,63

Autres infrastructures sociales

124,95

132,59

66,86

130,12

35.01

335,36

 

824,88

Emploi

 

11.00

22,00

2.12

3,90

 

 

39,02

Logement

 

19.50

 

 

 

 

 

19,5

Autres services sociaux

124.95

102,09

44,86

128,00

31.11

335,36

 

766,36

INFRASTRUCTURES ET

SERVICES ÉCONOMIQUES

172,30

115,05

119.50

40,85

57.29

918,45

 

1 423,45

Transport et stockage

10,30

6,40

96.00

27,65

38,16

706.23

 

884,74

Communications

3,00

7,00

 

 

 

11,32

 

21,32

Production et distribution d'énergie

108,70

86,50

 

3.65

 

34.34

 

233,19

Services bancaires et financiers

 

 

1.50

0,50

1.93

98,34

 

102,27

Affaires et autres services

50,30

15,15

22,00

9,05

17,20

68,23

 

181,93

SECTEURS DE PRODUCTION

2,00

29,39

132,85

63.07

26,00

245,74

25,7!

524,75

Agriculture, forêt et pêche

 

14,00

28,00

25,37

 

133,02

25,71

226,1

Agriculture

 

14,00

28,00

25.37

 

106,06

22,46

195,89

Forêts

 

 

 

 

 

1,81

3,25

5,06

Pêche

 

 

 

 

 

25,15

 

25,15

Industrie, mines et construction

 

 

37,85

 

20.00

53,41

 

111.25

Industrie

 

 

37,85

 

20,00

11,50

 

69.34

Ressources et exploitation minières

 

 

 

 

 

41,83

 

41,83

AIDE D'URGENCE

 

 

0,66

16,00 7,85

48,30

8,00

80,82

 

Aide alimentaire d'urgence

 

 

 

 

33,00

8,00

41

 

Autre aide d'urgence et aux catastrophes

 

 

0,66

16,00 7,85

15,31

 

39,82

 

AUTRES/non alloués/non spécifiés

47,20

28,27

16,02

21,38 15,58

144,70

170,65

443,79

 

Coûts administratifs des donateurs

47,20

28,27

15,02

21,38 15,58

142,47

147,55

417,46

 

Appui aux organisations non gouvernementales

 

 

1,00

 

2,04

2,24

5,28

 

Non alloués/non spécifiés

 

 

 

 

0,19

20,86

21,05

 

TOTAL GENERAL

551,54

630,23

815,51

653,50

448,93

4079,13

610,24

7789,09

2) Des relations privilégiées avec l'Afrique, les Caraïbes et le Pacifique : les accords de Cotonou

En matière de développement, on sait que l'Union européenne entretient des relations privilégiées avec le groupe des pays en développement d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). L'accord de partenariat ACP/UE signé à Cotonou le 23 juin 2000 pour une période de vingt ans est ainsi entré en vigueur le 1er avril 2003 après avoir été ratifié par les quinze Etats de l'Union européenne, la Communauté européenne et soixante-seize pays du groupe ACP. Le volet relatif à la coopération en faveur du financement du développement de l'accord de Cotonou est financé sur le Fonds européen de développement, défini par un protocole financier pour une période de cinq ans. Le montant total du premier protocole financier quinquennal (le 9e FED), complété par les reliquats transférés à partir des précédents FED (6e, 7e et 8e FED), porte sur la période 2000-2007.

La révision quinquennale de l'accord de Cotonou a eu lieu en 2005. Les modalités de fonctionnement du FED n'ont pas été modifiées à cette occasion.

3) L'avenir du FED : un instrument plus efficace, voué à disparaître ?

On sait qu'un débat est en cours au plan européen à propos de l'intégration dans le budget communautaire du FED. La France y est favorable car une telle mesure permettrait de mieux proportionner les contributions des Etats membres à leur richesse respective. La Commission européenne milite également pour cette solution qui, selon elle, contribuerait notamment à rendre la politique européenne de coopération plus visible, cohérente et efficace (7). Aucun accord n'a pu encore être trouvé dans une matière qui relève de l'unanimité. Plusieurs Etats membres qui contribuent en dessous de leur clé budgétaire comme le Royaume-Uni ou l'Espagne s'y opposent. De leur côté, les nouveaux Etats membres mettent en avant leur souhait de voir accorder une priorité à l'Est et tirent argument de leur développement moindre pour s'opposer à tout accroissement de leur contribution au titre de l'aide. La question n'a toujours pas trouvé de solution aujourd'hui, alors que le Royaume-Uni assume la présidence de l'Union européenne.

Le décaissement des crédits européens consacrés à l'aide au développement a souvent été jugé insuffisant. Depuis cinq ans, le rythme de ces décaissements n'est pas régulier et la mise en œuvre des projets communautaires est en effet parfois retardée. On constate cependant que des efforts ont été engagés depuis 2004.

Engagements

(en millions d'euros)

Décaissements

(en millions d'euros)

Crédits européens non consommés

2001

5994

5891

1,7 %

2002

6532

5920

9,4%

2003

8269

6331

23 %

2004

2648

N.C.

7 %

Pour 2004, le montant, prévisionnel, ne concerne que le FED

Une meilleure coordination entre l'aide dispensée par l'Union européenne et celle octroyée par les Etats membres de l'Union passe en premier lieu par une meilleure prise en compte du cadre européen de coopération avec les pays en développement. Concrètement, cette coordination se traduit d'abord par l'adhésion à des objectifs communs au niveau mondial, ensuite par l'élaboration de cadres stratégiques par pays et par secteur cohérent avec les actions européennes et multilatérales et, enfin, par une coordination plus forte sur le terrain.

Un système de programmation pluriannuelle qui se traduit par la constitution de « documents stratégies pays » et de programmes indicatifs définit les priorités sectorielles pour chaque pays et pour chaque région. Pour éviter des redondances entre l'aide communautaire et nationale européenne un travail de concertation et d'échange s'impose. Il est effectué en commun par les experts de la Commission et ceux des Etats membres au cours de l'identification puis de l'élaboration des programmes et des actions. Sur le terrain, la coordination doit être quotidienne entre les postes bilatéraux et les délégations européennes et multilatérales. On aimerait que cette nécessité soit parfaitement respectée.

*

*       *

L'Europe semble donc avoir pris conscience de l'obligation morale et politique qui est la sienne vis-à-vis des pays du Sud, et en particulier de l'Afrique. Nos histoires communes, notre proximité géographique, la présence sur notre territoire de nombreux ressortissants de ces pays ou de personnes qui en sont originaires imposent que la coopération et l'aide au développement soient l'un des axes forts de la politique européenne.

Au sein de l'Union, on peut compter sur la détermination de grands pays comme le Royaume-Uni, l'Allemagne et, bien sûr, la France. De ce point de vue, notre pays a joué un rôle moteur ces dernières années dans la progression de l'aide au plan mondial. A l'heure où certains se plaignent du discrédit de l'action politique, il y a ici matière à montrer que cette action peut encore modifier le cours de l'histoire.

II - LA FRANCE, MOTEUR DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

La France est l'une des principaux acteurs en matière d'aide au développement. Nous venons de l'évoquer à travers la question des financements innovants ou du microcrédit. Mais les propositions ne suffisent pas ; des actions concrètes sont nécessaires. Notre pays montre l'exemple puisqu'il poursuit depuis maintenant quatre ans un effort croissant en faveur de l'aide au développement. La politique française en matière de coopération et d'aide publique au développement s'articule autour de deux grandes priorités : accroître l'effort financier consenti par la France en faveur des pays en développement et améliorer l'efficacité de l'aide française.

A - Une aide multiforme en progression constante

1) Un effort soutenu : 0,47 % du RNB en 2006 - 8,2 milliards d'euros

En mars 2002, lors de la Conférence internationale de Monterrey, le Président de la République a pris l'engagement de donner une impulsion nouvelle à notre effort en faveur du développement des pays du Sud. Cette impulsion forte a été suivie d'effets tangibles puisque de 0,31 % du RNB en 2000, l'aide publique au développement est passée à 0,32 % en 2001, 0,38 % en 2002, 0,41 % en 2003, 0,42 % en 2004 (6,8 milliards d'euros) et 0,44 % en 2005 (7,4 milliards d'euros). En volume, la France occupe le troisième rang après les Etats Unis et le Japon.

Si l'on prend en compte le rapport APD/RNB, la France supporte l'effort le plus important de tous les pays du G7. L'objectif est d'aller plus loin avec une aide qui atteindrait 0,5 % en 2007 soit environ 9 milliards de dollars contre 4,2 milliards en 2001. Le but est plus ambitieux encore à l'horizon 2012 où la France devrait consacrer 0,7 % de son RNB à l'aide publique au développement.

Pour 2006, la France consacrera 0,47 % de son RNB à l'aide publique au développement soit 8,2 milliards d'euros. Le Gouvernement estime d'ailleurs que le taux de 0,47 % pourrait être atteint en exécution dès 2005 en raison de l'opération de réduction de la dette du Nigeria qui interviendrait plus tôt que prévu.

L'engagement de la France va donc bien au-delà des objectifs européens qui prévoient un niveau moyen de l'aide des Etats membres de 0,39 % du RNB en 2006.

La structure de cette aide nous est donnée par le tableau suivant.

1996

1997

1998

1999

2000

en M€

%

en

M€

%

en M€

%

en M€

%

en M€

%

Aide multilatérale

681

12

574

10

691

13

669

13

526

12

Aide européenne

675

11

781

14

698

14

750

14

859

19

Aide bilatérale

4 595

77

4 229

76

3 733

73

3 874

73

3 070

69

dont allègements de dettes

772

13

974

17

630

12

790

15

520

12

Total

5 950

100

5 583

100

5 122

100

5 293

100

4 454

100

2001

2002

2003

2004

en M€

%

en M€

%

en M€

%

en M€

%

Aide multilatérale

624

13

621

11

645

10

765

11

Aide européenne

1 165

25

1 365

23

1 160

18

1416

21

Aide bilatérale

2 899

62

3 836

66

4 614

72

4639

68

dont allègements de dettes

470

10

1 138

20

1 842

29

1517

22

Total

4 688

100

5 821

100

6 419

100

6 820

100

On observe que l'aide bilatérale domine représentant 65 % en moyenne du total de l'aide. Puis vient l'aide qui transite par l'Union européenne qui a connu une forte et régulière progression et les allègements de dette qui sont montés en puissance depuis 2002. L'aide multilatérale demeure constante.

2) L'aide publique au développement selon les critères internationaux : un périmètre beaucoup plus large que celui de la mission interministérielle

La mise en place de la loi du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) a conduit à une nouvelle présentation des crédits affectés à l'aide publique au développement.

Nous avons à examiner une mission interministérielle qui comprend deux programmes. Le premier est intitulé « Aide économique et financière au développement ». Il relève du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le second porte sur la « Solidarité à l'égard des pays en développement. Il dépend du Ministre des Affaires étrangères. Nous reviendrons ensuite sur le détail de ces deux programmes. Observons cependant que leur montant total atteint 5,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement pour 2006 et 3 milliards d'euros en crédits de paiement.

Une remarque s'impose. Le montant affiché en termes d'objectifs de l'aide publique au développement française pour 2006 est de 0,47 % du PIB soit 8,2 milliards d'euros. Nul besoin de souligner la très nette différence entre ce montant et celui de la mission interministérielle. Comment l'expliquer ?

Le périmètre de la mission interministérielle « Aide publique au développement » est beaucoup plus restreint que celui de l'aide au sens de l'OCDE. On constate qu'un certain nombre de politiques sont menées dans le cadre d'autres missions budgétaires mais qui relèvent de l'aide publique au développement au regard des critères internationaux. Sont également comptabilisées au titre de l'aide publique au développement les actions engagées par les collectivités territoriales. De plus trois comptes spéciaux du trésor sont regroupés au sein de la mission « Prêts à des Etats étrangers ». Le premier concerne les prêts de la réserve pays émergents ; le deuxième permet de refinancer certaines annulations de dette tandis que le dernier octroie des prêts à l'Agence française de développement pour lui permettre de concéder à son tour des prêts occasionnels à des pays en développement. On constate aussi que le projet de loi de finances pour 2006 met en place un fonds de solidarité pour le développement auquel pourrait être affecté les recettes de la taxe de solidarité sur les billets d'avion qui devrait voir prochainement le jour. Les recettes estimées qui abonderaient ce fonds ont été estimées à 100 millions d'euros ce qui constitue une hypothèse prudente.

L'effort consenti par la France peut finalement se présenter ainsi :

Estimation APD 2005 en millions d'euros

Estimation APD 2006 en millions d'euros

Dépenses du budget général

4940

5689

Dont mission APD

2727

3409

Prélèvements sur recettes

800

812

Comptes spéciaux*

2283

1571

Fonds de solidarité pour le développement

-

100

Total Etat

8023

8172

Collectivités territoriales

56

57

Total de l'aide publique au développement française

8079

8229

En % du RNB

0,47

0,47

* Hors APD déjà comptabilisée dans le programme « Aide économique et financière au développement »

Les deux principaux acteurs de l'aide publique au développement française sont bien le ministère des Affaires étrangères et le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie qui représentaient respectivement 28 % et 40 % de cette aide en 2004.

Mais d'autres ministères, notamment le ministère de l'Education nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, concourent également à l'aide française, par le biais, par exemple, des étudiants étrangers scolarisés en France. A cela, s'ajoutent les actions de coopération internationale dans les domaines éducatifs et le développement des échanges avec les systèmes scolaires et universitaires étrangers. Le ministère délégué à la recherche mène, quant à lui, des partenariats avec les pays en développement via des établissements publics de recherche comme le CNRS ou l'INSERM.

Le ministère de l'Ecologie et du développement durable conduit des politiques visant à renforcer les liens avec les pays du Sud tandis que le ministère de l'Agriculture participe à l'objectif de solidarité avec les pays en développement par des actions de coopération et des partenariats en matière agricole et alimentaire. Le ministère de l'Emploi, du travail et des relations sociales concourt aussi à l'aide publique au développement de la France lorsqu'il intervient en faveur des réfugiés en France.

Enfin on observe que le programme « Français à l'étranger et étrangers en France » du ministère des Affaires étrangères contribue également à l'aide française à travers l'enseignement français à l'étranger par l'accueil d'élèves étrangers.

Ces différents éléments sont retracés dans le document de politique transversale (DPT), et le fascicule jaune « Etat récapitulatif des crédits concourant à la coopération avec les Etats en voie de développement ».

Mais revenons à la mission interministérielle dont nous sommes plus particulièrement saisis.

3) La mission « aide publique au développement » : 3 milliards d'euros pour 2006 en crédits de paiement

Les deux programmes qui la composent bénéficient des moyens suivants :

Programme

Ministre intéressé

Autorisations d'engagement

Crédits de paiements

Plafonds d'emploi autorisé pour 2006

Aide économique et financière au développement

Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

3 134 676 913

966 410 877

Solidarité à l'égard des pays en développement

Ministre des Affaires étrangères

2 175 936 278

2 047 586 278

3 131

Total

5 310 613 191

3 013 997 155

3 131

Montants exprimés en euros

Pour le détail de chacun de ces programmes, on renverra au projet de loi de finances et à son annexe consacrée à l'aide publique au développement(8). Notons simplement quelques points saillants de cette mission.

Le premier programme « Aide économique et financière au développement », sous l'autorité du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, comporte trois actions réparties comme suit :

Numéro et intitulé de l'action

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

01. Aide économique et financière multilatérale

1 127 626 913

612 360 877

02. Aide économique et financière bilatérale

1 770 850 000

182 850 000

03. Traitement de la dette des pays pauvres

236 200 00

171 200 000

Total

3 134 676 913

966 410 877

Au sein de l'action 01 « Aide économique et financière multilatérale » on trouve les participations de la France aux banques multilatérales de développement comme la Banque mondiale, la Banque interaméricaine de développement, la Société financière d'investissement, la Banque africain de développement, la Banque asiatique de développement...

L'action 02 « Aide économique et financière bilatérale » porte, pour l'essentiel, sur des aides qui transitent par l'Agence française de développement.

L'action 03 « Traitement de la dette des pays pauvres » a pour objet de rendre la dette des Etats les moins avancés et des pays à revenu intermédiaire soutenable ou de leur permettre de faire face à une crise de liquidité temporaire. La plupart de ces traitements de dette sont décidés dans le cadre du Club de Paris. Les crédits de la présente action sont utilisés pour indemniser l'Agence française de développement pour les annulations décidées dans le cadre du Club de Paris ou lors de négociations bilatérales.

Le second programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » qui relève du ministère des Affaires étrangères et plus particulièrement du Directeur général de la coopération internationale et du développement comporte six actions.

Numéro et intitulé de l'action

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

01. Animation et coordination de l'aide au développement

35 717 632

35 717 632

02. Affirmation de la dimension culturelle du développement

199 171 030

198 748 030

03. Promotion de l'enseignement supérieur et recherche au service du développement

141 004 791

146 293 791

04. Aide en faveur du développement durable et lutte contre la pauvreté et les inégalités

672 430 680

529 938 680

05. Participation aux débats sur les enjeux globaux et aux dispositifs multilatéraux d'aide publique au développement

1 076 767 474

1 077 043 474

06. Aide aux populations touchées par les crises

50 844 671

59 844 671

Total

2 175 936 278

2 047586 278

La première de ces actions - Animation et coordination de l'aide au développement - regroupe les activités transversales qui participent à la mise en œuvre de l'aide au développement de la France et de la coopération non gouvernementale dans les 150 pays figurant dans la liste établie par le CAD. Il s'agit là de la définition des orientations et de la coordination de notre action.

L'action 02 « Affirmation de la dimension culturelle du développement » vise à favoriser le développement culturel des pays bénéficiant de l'aide publique au développement. Elle renvoie à une conception large de la notion de développement. Il s'agit de la promotion de la langue française dans et hors contexte scolaire et universitaire. Les actions du ministère des Affaires étrangères portent sur l'enseignement du français dans les établissements locaux et les centres culturels, sur le soutien aux enseignants des pays partenaires, sur la diffusion du français par des publications, des productions audiovisuelles et le soutien à l'exportation des productions culturelles et artistiques françaises. La DGCID s'assure de la cohérence de cette action avec celle de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) dont le budget relève d'un autre programme (« Français à l'étranger et étrangers en France »). Cette action entend également contribuer au maintien de la diversité culturelle.

L'action 03 « Promotion de l'enseignement supérieur et recherche au service du développement » regroupe les activités menées par le ministère des Affaires étrangères dans les domaines scientifique, universitaire et de recherche dans les pays bénéficiant de l'aide publique au développement. Il s'agit de participer à la formation des élites locales par des bourses ou des diplômes conjoints mais aussi de soutenir la recherche en faveur du développement via certaines organismes comme l'Institut de recherche pour le développement (IRD) ou le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD).

L'action 04 « Aide en faveur du développement durable et lutte contre la pauvreté et les inégalités » s'inscrit dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le Développement par des actions dites sectorielles (le respect des droits fondamentaux, l'accès aux soins, à l'éducation, aux infrastructures de base ...).

L'action 05 « Participation aux débats sur les enjeux globaux et aux dispositifs multilatéraux d'aide publique au développement » concerne les activités du ministère des Affaires étrangères qui visent à exposer et à promouvoir les opinions et les positions françaises dans les enceintes européennes et internationales compétences pour les questions de développement. C'est dans cette action que l'on retrouve la contribution française au Fonds européen de développement (FED) pour 726 millions d'euros en 2006 ainsi que la participation de la France au Fonds pour le sida, la tuberculose et le paludisme (225 millions d'euros en 2006 contre 150 en 2005). Enfin, figurent également dans cette action les contributions volontaires aux organismes de l'ONU à hauteur de 50,3 millions d'euros.

Enfin, l'action 06 « Aide aux populations touchées par les crises » touche un domaine où notre diplomatie est très active. Il s'agit ici de soutenir l'aide humanitaire et alimentaire d'urgence et les processus de « sortie de crise » par un appui aux populations touchées pour reconstruire leur environnement.

Pour l'ensemble de ces actions, des indicateurs de performance ont été établis permettant de mesurer si les objectifs définis ont bien été atteints. On peut ainsi apprécier les effets de notre action pour la promotion du développement par la culture, la formation et la recherche en comptant le nombre d'élèves et d'étudiants inscrits dans les filières bilingues universitaires, par exemple, ou le nombre des étrangers inscrits dans les cycles universitaires français.

Les documents budgétaires qui sont annexés au projet de loi de finances pour 2006 sont, concernant la mission « Aide publique au développement » d'assez bonne qualité. Il est toutefois extrêmement regrettable que le Document de politique transversale qui permet d'avoir une vision complète de notre action en faveur du développement au regard des critères du CAD de l'OCDE ne soit publié que très tardivement. Dans un domaine aussi transversal que l'aide publique au développement cette carence ne peut être que critiquable. Espérons que l'an prochain des efforts seront faits pour informer les parlementaires et les citoyens dans un délai raisonnable.

4) Le poids des annulations de dette : un pilier de l'aide publique au développement qui tend à se réduire

Déterminer quel est le montant exact des allègements de dette qui contribuent à l'aide publique au développement n'est pas l'exercice le plus simple qui soit. Les documents fournis sont confus, contradictoires et les explications données par l'administration ne brillent pas par leur clarté.

Le fascicule jaune consacré à l'effort d'aide publique au développement nous indique que les annulations de dette qui font l'objet d'une dépense budgétaire représentent aujourd'hui environ 14 % de l'ensemble des annulations. Les 86 % restant sont répartis ainsi : 40 % d'annulations COFACE et 46 % d'annulations portées aux découverts du Trésor. Ces annulations ne sont pas toutes considérées comme relevant de l'aide publique au développement. Ainsi seuls les intérêts sont intégrés dans l'aide publique au développement dans la mesure où le prêt lui-même a déjà été considéré comme participant à cette aide lors de son octroi.

En 2003, les allègements de dette représentaient 1,84 milliard d'euros ; en 2004, 1,41 milliard. Les prévisions pour 2005 s'établissent à 2,8 milliards et pour 2006 à 1,93 milliard d'euros.

On a observé que les annulations de dette avaient largement contribué, ces dernières années, à l'augmentation de l'aide publique au développement française. Elles représentaient seulement 13 % de notre aide soit 772 millions d'euros en 1996 et 10 % de l'aide soit 470 millions d'euros en 2000 contre 1,84 milliard d'euros soit 29 % de notre aide en 2003.

Comme le Gouvernement l'a indiqué à votre Rapporteur, il semble que ces annulations soient très difficiles à prévoir car certaines d'entre elles aujourd'hui escomptées en 2007 pourraient intervenir plus tôt et, à l'inverse, d'autres pourraient être reportées en fonction de la vitesse à laquelle est atteint le point d'achèvement, c'est-à-dire le moment où le pays concerné remplit les conditions pour bénéficier de l'allègement de dette et de la progression des négociations multilatérales et bilatérales pour certains Etats comme le Nigeria et l'Irak.

Si la conclusion des négociations avec le Nigeria intervenait d'ici la fin de l'année 2005, on aboutirait aux montants suivants :

En milliards d'euros

2004

2005

2006

Dépenses d'aide publique au développement

5,4

5,2

5,7

Annulations de dette

1,4

3,2

2,4

Total de l'aide publique au développement

6,9

8,4

8,2

% du RNB

0,42 %

0,50 %

0,47 %

Les contrats de désendettement et de développement (C2D) constituent le volet bilatéral français pour l'allègement de la dette contractée au titre de l'aide publique au développement. Ce volet se conjugue avec l'initiative multilatérale d'allègement de la dette des pays pauvres ; c'est l'initiative PPTE - Pays Pauvres Très Endettés.

Les C2D correspondent à un refinancement par dons des créances : les pays continuent d'honorer leur dette, mais, aussitôt le remboursement constaté, la France reverse au pays la somme correspondante pour l'affecter à des programmes de lutte contre la pauvreté sélectionnés d'un commun accord avec l'Etat partenaire. Ils sont mis en œuvre à partir du point d'achèvement de l'initiative PPTE et viennent s'ajouter aux annulations de dette consenties dans le cadre du Club de Paris. Par ce biais, la France instaure un dialogue avec les autorités des pays bénéficiaires autour de leur politique de réduction de la pauvreté.

Après trois années d'expérience et conformément aux décisions du CICID du 18 mai 2005, le dispositif sera ajusté afin de rendre cet instrument encore plus lisible et efficace. Sa gestion sera déconcentrée sous l'autorité des ambassadeurs ; le rôle de l'Agence française de développement dans la mise en œuvre des C2D sera renforcé dans la Zone de solidarité prioritaire ; le dispositif sera allégé pour les contrats de faible montant.

Quels sont les pays bénéficiaires de ces C2D ?

Sur les vingt-trois pays éligibles aux contrats de désendettement et de développement (9), dix ont atteint le point d'achèvement et huit ont signé leur premier C2D avec la France. Ces pays sont le Mozambique, l'Ouganda, la Tanzanie, la Bolivie, la Mauritanie, le Ghana, Madagascar et le Nicaragua. Le Mozambique a signé son deuxième C2D en novembre 2004 et le deuxième C2D de l'Ouganda est en cours de préparation. Les C2D Honduras et Rwanda sont en cours d'instruction et devraient être signés fin 2005.

Peut-on mesurer l'impact réel des allégements de dette sur la situation des pays pauvres ?

S'il est difficile à évaluer, on peut penser que les initiatives récentes en matière d'annulation de dette ont des conséquences concrètes sur le sort des Etats bénéficiaires. En premier lieu, les annulations de dette accordées dans le cadre de l'initiative PPTE s'inscrivent dans le cadre global de stratégies nationales de lutte contre la pauvreté élaborées en coordination avec les institutions financières internationales. Plus précisément, un pays ne peut être éligible au processus PPTE que s'il a entamé la préparation de la mise en place d'une stratégie de réduction de la pauvreté en coordination avec la Banque mondiale. En second lieu, le FMI et la Banque mondiale exercent un suivi de l'augmentation des dépenses sociales dans les pays bénéficiant des allégements de dette dans le cadre de PPTE.

Dans leur dernier rapport sur la mise en œuvre de l'initiative, ces institutions indiquent que la croissance des dépenses affectées à la réduction de la pauvreté a été plus que proportionnelle à la réduction du service de la dette. Dans les vingt-huit pays ayant franchi le point de décision, c'est-à-dire le moment où ils sont déclarés par les organisations financières internationales éligibles à l'initiative PPTE et susceptibles alors de bénéficier d'une annulation de dettes, les dépenses sociales (éducation, santé de base, développement rural) représentent maintenant plus de quatre fois le montant du service de la dette et sont passées de 5,9 milliards de dollars en 1999 à 10,8 milliards en 2004. Elles devraient atteindre 16,5 milliards de dollars en 2007 selon les prévisions des institutions financières internationales. Ces dépenses sont passées, de 1999 à 2003, de 6,4 % à 7,9 % du PIB. Au total, les dépenses de réduction de la pauvreté représentent, en 2004, 49,3 % des recettes des Etats dans les pays ayant franchi le point de décision contre 40,9 % en 1999. Cette proportion est passée de 38,6 % à 48,7 % sur la même période pour les pays d'Afrique subsaharienne.

La mise en œuvre de l'initiative proposée par le G8 à Gleneagles sur l'annulation de la dette multilatérale des pays pauvres très endettés au point d'achèvement devrait permettre de renforcer encore l'effet des annulations de dette sur la réduction de la pauvreté. Comme l'ont indiqué les ministres des finances du G8 dans leur communiqué du 11 juin 2005, les annulations de dette additionnelles proposées en faveur des pays PPTE ont pour but d'apporter « un soutien important aux efforts des pays en vue de la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement » et le FMI et la Banque mondiale devront vérifier régulièrement que l'allocation de « toutes les ressources additionnelles » apportées aux pays bénéficiaires de l'initiative seront utilisées pour la réduction de la pauvreté.

On le voit, la critique selon laquelle les annulations de dette seraient une manière de « gonfler » le volume de l'aide publique au développement pour donner l'impression, l'impression seulement, qu'une progression s'opère sans réels effets sur le terrain n'est pas justifiée. En revanche, l'idée selon laquelle la France devra prochainement renforcer ses moyens budgétaires au sens strict consacrés au développement parce que la part non budgétaire de cette aide, très élevée actuellement, se réduirait en raison de la diminution du stock de dettes pouvant être annulé, nous semble plus pertinente.

5) Le rôle des acteurs non étatiques : l'expression de l'esprit français de solidarité

Tant les organisations non gouvernementales que les collectivités territoriales contribuent activement à l'aide au développement. En s'engageant dans des projets concrets, ces acteurs démontrent chaque jour que la France est solidaire des pays en difficulté, conformément à ses traditions humanistes.

Ainsi comme le dernier CICID de mai 2005 l'a indiqué dans ses conclusions, les organisations de solidarité internationale (OSI) apportent une contribution essentielle à la mise en œuvre de la politique française de coopération et de solidarité internationale. La part d'aide au développement mise en œuvre par les OSI devrait être au moins doublée en cinq ans, selon le CICID, qui demande également que les OSI soient davantage associées à la formulation, à la mise en œuvre comme au suivi de cette politique dans le cadre de la Commission Coopération-Développement (CCD). De même un représentant des OSI sera associé aux travaux de la Conférence d'orientation stratégique et de programmation (COSP).

En tant que président de l'Association française des volontaires du progrès (AFVP), votre Rapporteur a des preuves constantes de l'engagement des jeunes Français.

Organisation laïque de solidarité internationale et de volontariat, créée en 1963, l'AFVP associe des partenaires publics comme les ministères des Affaires étrangères, des Affaires sociales, de la Jeunesse et de l'Economie et des Finances. Son but est de permettre à des jeunes volontaires de manifester leur solidarité envers des populations en difficulté dans le monde, en participant à des projets de développement sur le mode du partenariat. Depuis quarante ans, grâce à l'AFVP, plus de 10 000 jeunes Français ont pu ainsi s'engager, en intervenant comme techniciens, animateurs ou médiateurs, le plus souvent en partenariat avec des cadres nationaux. Car l'AFVP s'efforce de valoriser au mieux les ressources humaines locales. Trois cents Volontaires du Progrès travaillent actuellement en équipe avec plus de trois cents salariés nationaux, dans trente pays.

C'est principalement en Afrique subsaharienne que l'association intervient. Elle tend cependant à étendre son action au-delà. Son budget annuel s'élève à 24 millions d'euros et ses ressources proviennent à hauteur de 35 à 40 % d'une subvention du ministère des Affaires étrangères.

Membre de plusieurs instances comme le Comité de liaison des ONG de volontariat de développement ou le Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et l'éducation populaire, l'AFVP a engagé un partenariat avec le Service Allemand de Développement (Deutscher Entwicklungsdienst, DED) qui permet de créer des équipes plurinationales. Un programme a été lancé pour ouvrir à l'ensemble des jeunes originaires des États membres de l'Union européenne l'accès aux projets, ce qui contribue à forger chez les Volontaires, une identité commune européenne.

De très nombreuses autres associations auraient pu être citées pour illustrer l'engagement des Français au service des pays les plus pauvres. De même en matière de coopération décentralisée, il est difficile d'évoquer toutes les actions engagées par les collectivités territoriales. Quelques exemples suffiront pour démontrer l'intensité de cette coopération.

Là encore, le dernier CICID a mis l'accent sur le rôle actif des collectivités locales dans la coopération avec les pays en développement. Les actions menées par ces collectivités en faveur des victimes du tsunami ont témoigné de cet engagement constant.

En 2003, les collectivités territoriales et leurs groupements ont ainsi contribué à hauteur de 41 millions d'euros à l'aide publique au développement de la France. A cet égard, on ne peut que souligner l'action particulière des collectivités d'outre-mer qui, en raison de leur situation géographique, occupent une place dans notre dispositif de coopération régionale.

Le CICID a décidé que les collectivités territoriales seraient associées à la définition de la politique de développement et aux travaux de la COSP. La Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD) bénéficiera, de son côté, d'une information régulière sur les travaux du CICID.

Le Gouvernement entend également clarifier les conditions dans lesquelles les collectivités locales peuvent s'engager dans ces actions de coopération alors qu'une étude a été confiée au Conseil d'Etat sur ce point, des décisions jurisprudentielles récentes ayant jeté le trouble sur les règles juridiques applicables en la matière (10). Le Sénat a d'ailleurs adopté le 28 octobre dernier une proposition de loi tendant à sécuriser l'action extérieure des collectivités locales.

En 2005, le ministère des Affaires étrangères a soutenu près de trois cents projets de coopération décentralisée. Les aides apportées ont ainsi permis la réalisation de projets importants ou plus modestes. De nombreuses collectivités se sont engagées dans des actions de solidarité grâce à des soutiens souvent inférieurs à 5 000 euros pour une cinquantaine de projets.

Ces projets peuvent porter sur des programmes de développement rural, de collecte et de traitement des déchets, d'assainissement.

Ainsi, dans le domaine de l'eau, la communauté urbaine de Lyon appuie le renforcement des compétences des établissements publics en charge de l'eau et de l'assainissement au Liban. Les conseils généraux de l'Ardèche et de la Drôme accompagnent les acteurs locaux de la région de Matam au Sénégal dans la définition et la mise en œuvre de leurs propres stratégies de développement. Le conseil général de Loire Atlantique et l'association Guinée 44 ont développé quatre programmes prioritaires de développement agricole et d'appui à la petite entreprise dans la région de Kindia en Guinée. La ville de Montreuil dans sa coopération avec la région du Yelimane au Mali appuie les communes dans la maîtrise du processus de décentralisation en soutenant la structuration de la société civile. Le conseil général de la Vienne accompagne le processus de décentralisation au Burkina Faso. La communauté urbaine de Lille collabore à la mise en place du plan d'urbanisme de la ville de Saint-Louis au Sénégal.

Il s'agit là de quelques exemples destinés à illustrer la floraison d'initiatives qui existent sur nos territoires et montrent la vitalité de l'esprit de fraternité dans notre pays.

Si l'on compare les efforts consentis par les Français au profit des pays les plus en difficultés, nous pouvons ressentir un sentiment de fierté qui ne doit pas cependant nous détourner des nécessaires progrès à accomplir en matière d'aide au développement.

B - L'effort français au regard de celui des autres grands Etats

1) Des éléments de comparaison

Selon les données fournies par le Comité d'Aide au développement de l'OCDE (11), l'aide publique mondiale s'est élevée à environ 79,5 milliards de dollars en 2003 contre 70 milliards en 2002. L'aide publique multilatérale a représenté 25,4 % de l'aide contre 27,4 % en 2002. L'aide au développement bilatérale est restée très majoritaire en 2003, avec 74,5 % du total contre 72,6 % en 2002.

Toujours selon le CAD, l'aide publique mondiale gérée par les ONG internationales a représenté 12,8 % de l'aide totale en 2003 (13,1 % en 2002). Celle gérée par les agences des Nations unies correspondait, quant à elle, en 2003, à 4,4 % de l'aide totale (5,4 % en 2002).

versements nets en 2003

Aide totale (privée et publique)

Total tous donneurs

119 243,41

Total pays du CAD

108 544,50

Membres de l'UE, total

49 257,02

France

6 935,53

Allemagne

3 709,45

Japon

6 334,85

Royaume-Uni

5 705,13

Etats-Unis

37 795,42

Union européenne

8 319,38

En millions de dollars

Source : OCDE

2) Les Etats-Unis

L'aide publique au développement des Etats Unis est passée de 9,95 milliards de dollars en 2003 à 11,873 milliards en 2004. Cette hausse s'explique surtout par l'allocation de 1 milliard de dollars au Millenium Challenge Account (MCA) et de 2,4 milliards de dollars à la lutte contre le sida. Néanmoins, ce montant ne représente toujours que 0,1 % du RNB alors que la moyenne OCDE est de 0,22 %.

Les Etats-Unis ont souvent fait l'objet de critiques pour le faible effort consenti en faveur des pays les plus pauvres. Depuis la fin de la Guerre froide, et surtout depuis le 11 septembre 2001, l'aide américaine demeure subordonnée à des considérations politiques ; les alliés des Etats Unis dans la lutte contre le terrorisme sont aujourd'hui les principaux bénéficiaires de cette aide. Les Etats-Unis axent leur politique d'aide sur la primauté du secteur privé dans le développement et sur un double impératif d'efficacité et de sélectivité.

La mise en œuvre du Millenium Challenge Account (MCA), que l'on évoquera plus loin, reflète la stratégie américaine fondée sur la croissance du secteur privé comme moteur du développement. La priorité est ainsi donnée à la mise en place de politiques susceptibles de renforcer l'investissement privé. Par ailleurs, le commerce est perçu comme un moyen privilégié pour financer un développement durable. Cette stratégie connaît cependant une « exception humanitaire » en faveur des pays les moins avancés qui doivent bénéficier de « compassion », selon les termes officiels, par le maintien à un niveau significatif des aides publiques compensant la faiblesse des investissements privés ; ces aides sont destinées, pour l'essentiel, à la lutte contre le sida et l'accès à l'eau potable. De la même façon, les autorités américaines encouragent le rôle dévolu aux ONG et à l'aide humanitaire privée qui réduisent d'autant la part des contributions publiques.

L'efficacité de l'aide est un thème récurrent de la coopération américaine. Les Etats-Unis mettent ainsi en place des indicateurs et des structures spécifiques. Sont favorisés les pays acceptant les « bonnes pratiques » exigées par les Etats donateurs. Les régimes considérés comme défaillants, parce que corrompus ou autoritaires, se verraient privés de toute aide publique, la coopération dépendant alors des contributions caritatives privées.

A cet égard, il faut relever la forte croissance des contributions financières des fondations américaines. En 2002, ces nouveaux acteurs de l'aide américaine ont versé 2,2 milliards de dollars à des projets de coopération internationale.

Au plan géographique, l'assistance internationale américaine privilégie le Proche-Orient (Egypte, Israël, Jordanie), l'Afghanistan, l'Irak, la Russie, l'Ukraine, l'Asie centrale, le Caucase, les Balkans, l'Europe du Sud-est, l'Amérique latine et les Caraïbes. L'aide américaine, véritable instrument politique, passe pour l'essentiel par la voie bilatérale.

Le Président George W. Bush a annoncé, en marge de la conférence de Monterrey, en 2002, une hausse sensible de l'aide publique au développement américaine dans le cadre d'un « nouveau contrat pour le développement ». L'effort américain devait augmenter de 50 % d'ici 2005, passant de 10 à 15 milliards de dollars par an dès 2006. La principale innovation réside dans le fait que ces sommes complémentaires seront versées sur un compte spécifique : le Millenium Challenge Account (MCA), qui a vocation à financer des projets dans un nombre limité de pays. Ce compte a reçu 1 milliard de dollars en 2004 sur les 2,5 milliards de dollars initialement prévus. Les autorités américaines ont élaboré une liste détaillée des orientations du MCA. Six principes doivent guider ce nouveau dispositif de coopération : les pays bénéficiaires seront choisis notamment en fonction de leur potentiel de croissance et de réduction de la pauvreté ; les financements seront attribués sous forme de dons, et des complémentarités seront systématiquement recherchées avec les ressources publiques, privées et multilatérales ; l'élaboration des projets devra associer les structures décentralisées, les élus locaux et la société civile des pays éligibles ; l'attribution des fonds tiendra le plus grand compte des besoins en investissement et des priorités des Etats bénéficiaires; dans la mesure du possible, les projets devront faciliter l'établissement de nouveaux partenariats avec les universités, les fondations, les ONG ... ; enfin, le MCA devra veiller à l'élaboration d'indicateurs et à l'analyse en continu des performances des bénéficiaires.

Au mois de mai 2004, la Millenium Challenge Corporation (MCC), chargée de la gestion du compte a retenu seize pays éligibles parmi lesquels figurent huit pays africains) : Arménie, Bénin, Bolivie, Cap-Vert, Géorgie, Ghana, Honduras, Lesotho, Madagascar, Mozambique, Mali, Mongolie, Sénégal, Sri-Lanka, Vanuatu. Chaque pays éligible doit rédiger un Millenium Challenge Contract, préalable à tout décaissement. Cet accord signé, la mise en œuvre des programmes et les financements afférents seront confiés aux acteurs du développement présents jugés les plus compétents dans le secteur concerné.

2) Le Royaume-Uni

Le Royaume-Uni est le cinquième donateur du CAD en volume avec un montant de 6,3 milliards d'euros en 2003. En revanche, ce pays n'est que le onzième donateur en termes d'effort avec 0,34 % de son RNB. Le Gouvernement britannique, qui a placé ces questions au centre des préoccupations du G8, qu'il présidait en 2005, entend porter son aide publique au développement à 0,4 % pour 2005-2006.

L'aide bilatérale britannique qui représente 60 % de l'aide totale se concentre sur les pays de l'Afrique subsaharienne à hauteur de 47 %. Les pays africains du Commonwealth reçoivent, pour leur part, 83 % des crédits bilatéraux destinés à l'Afrique. Les six premiers bénéficiaires africains du Royaume-Uni sont la Tanzanie, le Ghana, l'Ouganda, l'Afrique du Sud, le Malawi et le Kenya. L'aide bilatérale est aussi largement orientée vers les pays d'Asie avec 38 % des crédits, en particulier vers l'Inde qui reçoit 13,7 % de l'aide bilatérale, le Bangladesh, l'Afghanistan et le Pakistan. L'Amérique latine ne bénéficie que de 1 % de l'aide bilatérale.

Comme dans la plupart des autres pays donateurs, le Royaume-Uni concentre désormais son aide en direction d'un nombre plus limité de pays. D'ici 2006, un effort devrait être fait en faveur des PMA qui recevraient 90 % de l'aide bilatérale en dehors de l'aide humanitaire.

D'un point de vue thématique, la lutte contre le sida a été présentée comme une des priorités de la présidence britannique du G8 et de l'Union européenne en 2005. On observe ici un tournant dans la politique du ministère britannique de la coopération qui s'engage massivement dans le financement des traitements. Ainsi a été annoncée une augmentation significative des contributions britanniques à ONUsida (+ 6 millions de livres sterling en 2004) et au Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme (+ 280 millions de livres sterling d'ici 2008). L'accent est également mis sur l'aide aux populations les plus démunies et sur le développement des secteurs sociaux : population et contrôle des naissances mais aussi sur la bonne gestion des affaires publiques, l'égalité homme-femme, le respect des droits de l'homme, l'environnement. Près d'un tiers de l'aide est destiné aux services sociaux de base - éducation, santé et population - tandis que le secteur de la production représente 14 % des programmes (agriculture, infrastructures économiques, énergie, transports et communications).

La gestion et l'exécution de l'aide britannique sont assurées par le Department For International Development (DFID), créé en 1997 lors de l'arrivée au pouvoir de M. Tony Blair. Ce département est distinct du Foreign Office et le Secrétaire d'Etat au développement international est un ministre de plein exercice, qui siège au Cabinet. Même si d'autres ministères suivent en partie les questions de développement, en particulier le Foreign and Commonwealth Office (FCO), le Treasury, le ministère de la Défense et le ministère du Commerce et de l'Industrie, le Public Service Agreement sur le développement a fait du DFID l'acteur prépondérant de la politique britannique de développement. Les stratégies de coopération et les décisions d'allocation de l'aide sont ainsi élaborées au sein de cet organe, en lien avec le Cabinet Office. Ce rôle central se retrouve sur le terrain, dans les délégations, où le représentant du DFID a le monopole de l'initiative concernant l'identification des secteurs, des instruments et des projets qui vont bénéficier de l'aide britannique. Le DFID est organisé autour de trois directions géographiques consacrées à l'Afrique, l'Asie et l'Europe, complétées par un ensemble de directions thématiques, notamment chargées de l'efficacité, de l'évaluation et de l'audit.

Aux côtés du DFID, la Commonwealth Development Corporation (CDC) constitue le principal canal de l'aide au secteur privé dans les pays en développement. C'est une société publique qui est placée sous l'autorité du DFID ; elle propose des prêts à long terme et des prises de participation dans les secteurs de l'énergie et de l'industrie. Enfin le Natural Resources Institute (NRI), organisme public autonome financé par le DFID, effectue des recherches dans le domaine de l'environnement.

L'aide bilatérale du Royaume-Uni transite par différents instruments comme l'assistance technique et l'aide projet (55 %), les dons divers (12 %), l'aide d'urgence (12 %), l'aide programme (12 % dont 8 % d'aide budgétaire) et les prêts (7 %). Les allègements de dette ne constituent que 1 % de l'aide bilatérale ; le Royaume-Uni a déjà annulé la quasi-totalité de ses créances publiques vis-à-vis des pays en développement. 40 % de l'aide publique au développement transitent par les institutions multilatérales que ce soit la Communauté européenne (23 %), les institutions financières internationales (8,5 %), les agences des Nations unies en charge du développement (4,5 %), et les agences internationales humanitaires (4 %).

L'action de la DFID connaît un certain écho car cet organisme accorde à la communication une place de premier ordre. Par exemple, l'impact de la parution, quelques semaines avant la tenue du sommet de Gleneagles, du rapport de la « Commission  Blair  pour l'Afrique », a montré l'efficacité de cette stratégie de communication.

3) Le Japon

En 2003, le Japon occupait le deuxième rang en volume d'aide avec 8,8 milliards de dollars et le dix-neuvième en termes d'effort soit 0,20 % de ratio APD/PNB.

La politique d'aide publique au développement au Japon relève d'une vingtaine d'acteurs différents mais la définition de cette politique revient, pour l'essentiel, au ministère des Affaires étrangères qui gère directement 19 % de l'aide.

Deux agences occupent une place importante dans la mise en œuvre des programmes : la JICA (Agence japonaise de coopération internationale) et la JBIC (Banque japonaise pour la Coopération internationale). La JICA dispose de prérogatives variées ; elle est chargée de l'exécution de 50 % de la coopération technique et de 70 % de l'aide financière non remboursable, de l'envoi des volontaires pour le progrès (JOCV, équivalent nippon du « Peace Corps » américain) et des programmes d'urgence. Tant en ce qui concerne la coopération technique que la coopération financière non remboursable, la JICA a retenu le développement humain comme objectif prioritaire ; elle concentre ses moyens sur le secteur social, l'agriculture, l'environnement, la participation des femmes au développement et la protection des plus démunis.

Pendant près d'une décennie de 1991 à 2000, le Japon a occupé la place de principal contributeur mondial. Puis l'aide japonaise a connu une baisse assez significative ; en 2000 elle a diminué de 15 % s'ajoutant puis de 18 % l'année suivante. Ce mouvement s'explique par les difficultés économiques que le Japon connaît depuis quelques années. Des débats se sont d'ailleurs engagés autour de ces questions dans le pays conduisant en 1998 à une réforme caractérisée par le fait que, pour la première fois, aucun objectif en termes de pourcentage du PIB n'a été fixé pour l'aide publique au développement. L'accent est porté désormais sur l'efficacité de l'aide, l'amélioration des mécanismes d'aide et de la mise en place d'instruments de suivi et d'évaluation. Il s'agit là d'une tendance générale dans les pays développés.

L'aide publique au développement du Japon est marquée par sa forte orientation bilatérale à hauteur de 70 % et par l'importance accordée, dès 1974, à la question du déliement ; ainsi l'aide japonaise est actuellement déliée à plus de 98 %. Pour le versant multilatérale de l'aide, le Japon est le deuxième contributeur de l'ONU et se situe au premier rang des bailleurs de fonds du PNUD, du FNUAP, de l'UNESCO, de la Banque asiatique de développement et du Fonds africain de développement.

L'Asie reçoit plus de 70 % de cette aide japonaise et constitue, de la sorte, une zone d'intervention privilégiée. L'Afrique ne représente, en revanche, que 14 % de l'ensemble. Les premiers pays bénéficiaires de l'aide japonaise sont la Chine (14 %), l'Inde (10 %), la Thaïlande (9 %), l'Indonésie (8 %) et les Philippines (8 %). Ces cinq premiers bénéficiaires sont les mêmes depuis dix ans et absorbent près de la moitié de l'aide octroyée par le Japon.

La répartition thématique de l'aide montre la prédominance du secteur des infrastructures (58 %) entendu au sens large (économiques, sociales et éducatives). Cette orientation a suscité de nombreuses controverses entre les tenants d'une aide aisément engageable, qui souhaitaient continuer à privilégier le financement d'infrastructures lourdes, et les soutiens d'une assistance plus conforme aux Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). La réforme de l'APD japonaise a tenu compte de cette nécessité et a entraîné un redéploiement progressif des moyens en direction des «besoins humains de base », faisant une place croissante à l'éducation, à l'eau, à l'environnement et aux soins de santé de base.

Le Japon a adopté, le 29 août 2003, des grandes orientations pour sa politique de coopération. Cette charte assigne à l'aide publique au développement japonaise quatre domaines d'intervention prioritaires : l'instauration d'une croissance durable (infrastructures, commerce et investissement) ; le suivi des problèmes d'envergure mondiale (environnement, maladies, démographie, alimentation, énergie, catastrophes naturelles, terrorisme, drogue, crime organisé) ; la construction de la paix (prévention des conflits, aide d'urgence) ; la lutte contre la pauvreté (éducation, santé, eau et assainissement, agriculture). Cette charte a été l'occasion pour le Japon de réaffirmer ses priorités géographiques vers l'Asie et son engagement limité vers l'Afrique.

4) L'Allemagne

En 2003, parmi les membres du CAD, l'Allemagne occupait le quatrième rang en termes de volume d'aide avec un total de 6 milliards d'euros et la douzième place en termes d'effort, c'est-à-dire de ratio APD/PNB, avec 0,28 %. En volume, notre voisin d'outre-Rhin se place donc après les Etats-Unis, le Japon et la France.

C'est en 2001 que l'Allemagne a redéfini ses priorités en adoptant un Programme d'action 2015. Ce document a permis d'introduire la notion de « pays partenaires prioritaires » ; au nombre de quarante en 2002, ces pays peuvent bénéficier d'une coopération portant sur trois secteurs alors que les « pays partenaires », trente-cinq en 2002, ne peuvent faire l'objet de programmes centrés que sur un seul secteur. L'Allemagne s'est fixée de nouveaux thèmes prioritaires, comme l'accès aux services sociaux de base, la protection de l'environnement, l'égalité homme-femme, la bonne gouvernance, l'intégration des pays en développement dans le commerce mondial, la mise en place d'institutions publiques et sociales efficaces, la remise de dette, le rôle accru du secteur privé et de la société civile dans l'effort d'aide.

En 2003, les dix principaux bénéficiaires de l'aide allemande ont été la Serbie-Monténegro, la Chine, la République Démocratique du Congo, le Cameroun, la Bolivie, l'Inde, la Zambie, le Mozambique, l'Indonésie et la Turquie. L'aide allemande s'est principalement concentrée sur les remises de dettes (25 %), l'éducation et la santé (21 %) et les autres infrastructures sociales (15 %).

Le ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement (BMZ) définit la politique de coopération. Réformé en avril 2003, le BMZ est constitué de directions thématiques consacrées, par exemple, à la démocratisation ou la prévention des conflits et géographiques. Il ne met pas en œuvre directement ses projets. Deux établissements placés sous la tutelle du ministère remplissent cette mission.

La GTZ, Agence de coopération technique, a un statut de société de droit privé ; son capital appartient à l'Etat fédéral et elle a conclu, en 1975, avec le BMZ un contrat qui fait de cette agence le principal opérateur en matière d'assistance technique. La KfW, Institut de crédit pour la reconstruction, est chargée, de son côté, de mettre en œuvre la coopération financière et l'aide budgétaire. Il s'agit d'une collectivité bancaire de droit public, détenue à 80 % par l'Etat fédéral et à 20 % par les Länder. Il faut noter que, pour la KFW, les actions en matière de développement ne constituent qu'une part minime de ses activités ; son rôle essentiel est de contribuer au financement de l'économie allemande. La KfW a développé cependant plusieurs filiales spécialisées intervenant dans le soutien au secteur privé des pays émergents, l'appui aux PME ou encore la promotion des énergies respectueuses de l'environnement.

L'aide bilatérale allemande représente 60 % du total avec 24 % de prêts consentis par la KfW et 76 % de dons. L'aide multilatérale a représenté, en 2003, 40 % de l'aide totale. Le Programme d'action 2015 a fixé comme objectif le renforcement de l'action de l'Allemagne au travers des instances européennes mais aussi des organismes des Nations unies, en particulier certaines initiatives transversales comme le Fonds mondial pour la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

5) La Chine

La Chine est tout d'abord un important bénéficiaire de l'aide publique au développement. En 2003, elle a reçu une aide nette de 1,3 milliard de dollars provenant pour moitié du Japon.

Mais, parallèlement, la Chine s'affirme progressivement comme un bailleur de fonds. Cette aide intervient dans le cadre d'une politique internationale de plus en plus active en direction des Etats du Sud. Faute de décompte officiel de l'aide chinoise, il est difficile de l'évaluer avec précision.

L'aide chinoise paraît poursuivre trois objectifs stratégiques principaux. Historiquement, l'aide chinoise a été un instrument dans la traditionnelle rivalité diplomatique qui oppose la République populaire à Taïwan. L'aide permet, en outre, à la Chine d'asseoir son rôle de puissance régionale par un soutien à la Corée du Nord, une forte présence dans la zone du Pacifique ou un partenariat avec le Népal, par exemple. Enfin, cette politique d'aide est très liée à la politique chinoise d'approvisionnement en matières premières. C'est ce qui explique le choix des bénéficiaires de l'aide chinoise en Afrique vers des pays - Niger, Nigeria, Soudan, Gabon - qui peuvent répondre aux importants besoins en hydrocarbures et en minerais de l'économie chinoise. La Chine est ainsi le premier bailleur d'aide en Angola ; elle verse à ce pays plus que les vingt-deux membres du CAD de l'OCDE réunis. De ce fait, il s'agit très souvent d'une aide liée.

C - Les grandes orientations de la politique française d'aide au développement

1) Une réforme des structures dont la mise en œuvre doit être accélérée

La mise en place de la LOLF semble renforcer le poids du ministère des Affaires étrangères dans la conduite de la politique de développement. Il faut s'en réjouir vivement. Le Ministre des Affaires étrangères devient le chef de file de la mission interministérielle et responsable, via le directeur général de la coopération internationale et du développement, d'un programme important. La qualité de chef de file de la mission ne confère pas au Ministre des Affaires étrangères un pouvoir de tutelle ou de contrôle sur le ministère de l'Economie. Il est en charge de la rédaction des documents de politique transversale (DPT) qui retracent l'ensemble des crédits consacrés à une politique même ceux qui ne figurent pas dans la mission interministérielle. Les ambassadeurs ont vocation, quant à eux, à devenir les animateurs de cette politique sur le terrain.

C'est le Conseil interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), réuni le 20 juillet 2004, qui a arrêté les décisions destinées à rendre notre politique d'aide au développement plus efficace. Le CICID du 18 mai 2005 a complété ce dispositif. Cette réforme recentre le ministère des Affaires étrangères sur le pilotage stratégique de l'aide publique au développement et confie de nouvelles tâches opérationnelles à l'Agence française de développement. Elle conforte le rôle du ministère des Affaires étrangères comme celui des ambassadeurs dans l'animation et la coordination du dispositif français de coopération.

Le ministère des Affaires étrangères interviendra désormais dans les secteurs suivants : soutien à l'Etat de droit, à la réforme de l'Etat, à la gouvernance institutionnelle et financière et à la définition des politiques publiques ; soutien à la coopération décentralisée et non gouvernementale ; appui à la francophonie et à l'enseignement du français ; coopération culturelle et scientifique ; formation et enseignement supérieurs ; recherche.

L'Agence française de développement voit sa compétence opérationnelle s'étendre aux secteurs suivants : agriculture et développement rural ; santé et éducation de base ; formation professionnelle ; environnement ; secteur privé ; infrastructures et développement urbain.

En complément de ces orientations, le CICID de mai 2005 a rappelé le rôle dévolu au ministre chargé de la coopération. Il est le chef de file au sein du Gouvernement pour l'aide au développement. C'est pourquoi il préside la Conférence d'Orientation Stratégique et de Programmation (COSP), qui regroupe l'ensemble des acteurs de l'aide publique au développement et doit coordonner l'action de l'ensemble des ministères qui contribuent à l'aide.

L'aide française au développement se caractérise encore par une grande diversité des intervenants. Ce point a été souligné par le Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE. Le 26 mai 2004, la politique française en la matière a fait l'objet par ce Comité d'un examen. Celui-ci a constaté que l'aide française était en perpétuelle croissance depuis 2002 et a donné à la France un satisfecit, de ce point de vue. En revanche, le CAD a considéré que la complexité du dispositif français posait des difficultés et nécessitait l'élaboration de documents d'orientation stratégique. Le Gouvernement a défendu l'idée d'une pluralité d'acteurs comme source de richesse pour le système de coopération français. Néanmoins, notre pays est conscient de la nécessité de tracer des perspectives stratégiques et de coordonner l'ensemble des actions en matière de développement. C'est ce à quoi s'emploient des instruments comme la mission interministérielle « aide publique au développement » ainsi que le document de politique transversale qui accompagne le projet de loi de finances pour 2006.

Le CAD a pris en considération ces nouvelles initiatives en constatant cependant que ces efforts ne transparaissaient pas toujours suffisamment sur le terrain. Il faut, en effet, que des progrès s'accélèrent en ce domaine notamment par le biais des ambassadeurs.

Le CICID du 18 mai 2005 a poursuivi dans la voie déjà tracée, après la Déclaration de Paris sur le renforcement de l'efficacité de l'aide. Sur le plan sectoriel, sept secteurs prioritaires ont été retenus : éducation, eau et assainissement, santé et lutte contre le sida, développement des infrastructures en Afrique subsaharienne, agriculture et sécurité alimentaire, protection de l'environnement, secteur productif. Des documents stratégiques ont été élaborés pour chacun de ces secteurs. Il a été également demandé au ministère des Affaires étrangères de définir une nouvelle stratégie en matière de gouvernance afin de contribuer à la consolidation de l'Etat de droit, des droits de l'homme et de la démocratie et de renforcer la gestion transparente et efficace des affaires publiques. La synthèse se traduit au niveau de chaque pays par la rédaction d'un document cadre de partenariat (DCP) qui définit la stratégie de coopération de l'ensemble des acteurs publics et retient quelques secteurs de concentration.

On le voit, la réforme de notre aide au développement est en cours. Votre Rapporteur souhaite qu'elle s'accélère et que le ministère des Affaires étrangères puisse assumer pleinement sa fonction de stratège pour définir les orientations de notre politique. Il sait les efforts engagés par la nouvelle ministre de la coopération et du développement depuis son arrivée en fonctions. Votre Rapporteur soutient ces efforts en émettant le vœu qu'ils produisent rapidement leurs effets.

2) Les priorités géographiques : l'Afrique pour les deux tiers de l'aide

La France souhaite que l'Afrique subsaharienne qui concentre les retards de développement économique et social, fasse l'objet d'une attention prioritaire et reçoive plus de la moitié de l'augmentation de l'aide publique au développement.

Vingt-deux des premiers bénéficiaires de l'aide française sont des pays africains. L'Afrique reçoit 68 % de l'aide bilatérale et sa partie subsaharienne 57 %.

REPARTITION GEOGRAPHIQUE DE L'APD BILATERALE FRANCAISE

Versements nets en millions d'euros

1996

1997

1998

1999

2000(1)

2001

2002

2003

 

 

M€

%

M€

%

M€

%

M€

%

M€

%

M€

%

M€

%

M€

%

Aide bilatérale

4 595,0

 

4 228,6

 

3 732,6

 

3 874,0

 

3 069,5

 

2 898,5

 

3 835,9

 

4 614,3

 

* Europe du sud

42,1

1

34,9

1

40,7

1

177,4

5

67,2

2

39,6

1

178,0

5

305,9

7

* Afrique du nord

715,1

16

565,1

13

637,1

17

616,4

16

597,2

19

591,2

20

472,8

12

504,1

11

dont Maghreb

471,6

10

310,9

7

361,3

10

376,9

10

330,8

11

363,4

13

352,3

9

387,4

8

* Afrique sub saharienne

1 939,6

42

1 920,6

45

1 429,6

38

1 330,8

34

1 367,9

45

1 117,6

39

2 287,9

60

2 633,0

57

* Amérique centrale et du Sud

192,8

4

153,8

4

156,3

4

157,4

4

118,8

4

124,7

4

185,4

5

188,7

4

* Moyen -Orient

112,1

2

105,6

2

97,6

3

99,8

3

113,0

4

79,9

3

94,1

2

125,0

3

* Asie centrale et du Sud

57,0

1

65,2

2

40,1

1

15,4

0

58,0

2

59,6

2

-57,0

-1

111,2

2

* Extrême - Orient

255,3

6

176,9

4

175,3

5

186,5

5

164,9

5

171,8

6

269,7

7

274,2

6

* Océanie

667,9

15

630,9

15

683,1

18

681,0

18

70,7

2

66,7

2

66,0

2

55,1

1

* PED non spécifiés(2)

613,1

13

575,6

14

472,7

13

609,3

16

511,9

17

647,5

22

339,0

9

417,1

9

(1) Dix pays ont disparu de la liste du CAD des pays en développement bénéficiaires de l'APD

(2) Dont coûts administratifs

C'est à travers la notion de zone de solidarité prioritaire (ZSP) que s'expriment les choix opérés par la France en matière d'aide au développement. Créée en 1998, la ZSP est une liste de pays vers lesquels la France entend concentrer son action en faveur du développement dans le cadre de l'aide bilatérale. Les contours de cette zone ont été définis en 1999 par le CICID.

Lors de sa réunion du 14 février 2002, ce comité a rappelé qu'un principe de « respiration » devait permettre de faire évoluer la ZSP. En effet, l'existence de cet outil répond à un besoin de stabilité et de sélectivité des interventions de la France en matière d'aide au développement. La sortie de la ZSP ne doit pas se fonder sur des aléas conjoncturels mais répondre à une évolution structurelle : soit le pays atteint un niveau de développement tel que son appartenance à la ZSP n'est plus justifiée, soit on observe que la situation politique de ce pays subit une dégradation profonde et durable qui empêche toute coopération avec lui.

C'est dans cette optique qu'il a décidé en 2002 que ne feraient plus partie de cette zone les pays suivants : Antigue et Barbude, Barbade, Seychelles, Saint Christophe et Nieves, Sainte-Lucie, Maurice, Grenade, Dominique et Saint Vincent et Grenadines. En revanche, le Yémen et le Soudan sont entrés dans la liste des pays de la ZSP ainsi que l'Afghanistan à titre temporaire à la demande du Président de la République. Le périmètre ainsi fixé en 1999 et 2002 n'a pas été modifié depuis.

3) La mise en place des documents cadre de partenariat pour concentrer notre aide sur les priorités sectorielles

L'inclusion dans la ZSP se concrétise par la signature de Documents Cadres de Partenariat (DCP). Le CICID du 20 juillet 2004 a décidé la mise en place de trente DCP d'ici l'été 2005. Ces documents ont pour objectif d'assurer un meilleur pilotage stratégique de l'aide publique au développement, notamment en renforçant la concentration de l'aide française affectée à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement.

Cette concentration se réalise en sélectionnant deux ou trois secteurs d'intervention, parmi les sept secteurs relevant des OMD et déclarés prioritaires par le CICID : l'éducation ; l'eau et l'assainissement ; la santé et la lutte contre le sida ; l'agriculture et la sécurité alimentaire ; le développement des infrastructures en Afrique subsaharienne ; la protection de l'environnement et de la biodiversité ; le développement du secteur productif. Les DCP qui permettent également d'accroître l'articulation entre les interventions françaises et celles des autres bailleurs de fonds doivent être validés par la Conférence d'orientation stratégique et de programmation (COSP).

Dans un premier temps, une trentaine de pays sont concernés : la Côte d'Ivoire, le Maroc, le Mozambique, le Sénégal, la Tunisie, le Cameroun, le Mali, l'Algérie, le Viet Nam, le Burkina Faso, le Bénin, Madagascar, le Niger, le Tchad, le Liban, Djibouti, le Cambodge, la Guinée, la Mauritanie, le Togo, la République centrafricaine, l'Afrique du Sud, l'Ethiopie, le Congo Brazzaville, les Territoires palestiniens, Haïti, le Laos, l'Angola, les Comores, le Nigeria.

A la mi-juillet 2005, sur vingt-deux projets de DCP reçus, dix-neuf projets avaient pu être examinés conjointement par le ministère des Affaires étrangères, le ministère de l'Economie des Finances et de l'industrie et l'Agence française de développement. Des instructions ont été envoyées aux ambassades concernées pour leur permettre de finaliser l'écriture de leur DCP. Par ailleurs, quelques ambassades, au Ghana, au Gabon et au Kenya, non concernées a priori par la rédaction de DCP en 2005, ont élaboré des projets qui sont en cours d'examen. Plusieurs ambassades ont engagé la dernière étape de la rédaction des DCP, c'est-à-dire la discussion du projet avec le pays partenaire. C'est le cas avec le Maroc, Mali, le Bénin, Madagascar, le Tchad, Djibouti, la Guinée, la Mauritanie, les Territoires palestiniens et le Laos. Cette dernière phase de dialogue a été repoussée de quelques mois, essentiellement pour des raisons d'opportunité politique, dans les sept pays : le Sénégal, le Cameroun, l'Algérie, le Vietnam, le Burkina Faso, le Niger, l'Ethiopie.

C'est à l'occasion de la commission mixte France-Cambodge, les 15 et 16 septembre 2005, que le premier DCP a été signé conjointement. Ce document retient trois secteurs de concentration des moyens : l'agriculture et la sécurité alimentaire ; la protection de l'environnement et de la biodiversité ; la santé et la lutte contre le sida.

En outre, un accord de partenariat entre la France et l'Union des Comores a été conclu lors de la Ve commission mixte franco-comorienne des 4 et 5 avril 2005 à Paris. Les objectifs prioritaires retenus par la commission concernant la coopération et le développement sont : le renforcement de la gouvernance et l'appui aux nouvelles institutions ; l'appui au secteur du développement humain (santé, éducation et coopération universitaire) ; le développement rural ; le développement des infrastructures, notamment dans le domaine des transports ; la promotion du co-développement ; le développement de la coopération décentralisée et non gouvernementale dans un cadre de coopération régionale.

La commission mixte franco-tunisienne devrait avoir lieu au cours de la première quinzaine de décembre 2005. La commission mixte franco-libyenne est attendue pour le début de l'année 2006.

4) Attribuer à terme 0,15 % du RNB au bénéfice des pays les moins avancés

La France entend engager un effort particulier vers les PMA. L'objectif est de consacrer à ces pays 0,15 % du RNB en 2012.

En 2003, la répartition par groupes de pays bénéficiaires selon la tranche de revenu était la suivante :

Versements nets 2003 en millions €

Montants

%

Pays moins avancés

1 989,33

43,1 %

Pays à faible revenu

593,10

12,9 %

Pays à revenu intermédiaire tranche inférieure

908,52

19,7 %

Pays à revenu intermédiaire tranche supérieure

203,24

4,4 %

Pays à revenu élevé

0,62

0,0 %

APD non ventilée ou non spécifiée

919,53

19,9 %

Total des versements bilatéraux

4 614,34

100,0 %

Du fait des annulations de dette, la part de l'aide bilatérale destinée aux pays les moins avancés (PMA) a fortement augmenté en 2003 : elle atteint 0,12% du RNB. Le Gouvernement a fait connaître sa volonté de maintenir son effort particulier en direction de ces Etats les plus pauvres.

*

*       *

La France - l'Etat, les citoyens, les associations, les collectivités - fait preuve chaque jour de sa solidarité avec les pays les plus pauvres. Depuis 2002, un effort nouveau a été engagé après quelques années au cours desquelles l'aide au développement ne faisait plus figure de priorité. Aujourd'hui agir en faveur des pays du Sud devient une évidence en France et dans le monde.

Parmi tous les défis, souvent écrasants, qui sont ceux du développement, apparaît le plus écrasant de tous : sortir l'Afrique de son marasme.

III - L'AFRIQUE AU CENTRE DE TOUTES LES ATTENTIONS

L'Afrique est une priorité pour la France. Nous venons de le démontrer amplement. Notre pays entend non seulement agir directement vers ce continent mais également convaincre ses partenaires de la nécessité de s'engager pour l'Afrique. Cette vaste région du monde connaît aujourd'hui des difficultés qui peuvent paraître insurmontables ; la pauvreté, les maladies, les violences, les problèmes d'alimentation, la spirale de l'échec semble sans fin. Et pourtant, des motifs d'espoir existent. L'Afrique s'organise pour surmonter ses conflits. Ses ressources en matières premières la rendent plus attractive pour les investisseurs. Des projets existent, concrets, réalistes, pour contribuer au financement des économies locales. Nous devons aider les Africains à croire en leur capacité à surmonter les obstacles en prenant leurs responsabilités avec notre soutien actif.

A - Le poids des difficultés

Les chiffres sont là. Parmi les cinquante pays les moins avancés (PMA), trente-cinq sont africains. Le continent souffre d'une grande pauvreté. Quatre points sont particulièrement sensibles : la situation sanitaire, la crise alimentaire, l'isolement commercial, les conflits. Ce continent doit faire face à des difficultés dont le poids paraît insoutenable.

1) Une situation sanitaire accablante

La situation sanitaire du continent africain est grave. En Afrique, un enfant sur six meurt avant d'avoir atteint son cinquième anniversaire. Quatre millions d'enfants de moins de cinq ans meurent chaque année de maladies qu'il serait possible de guérir à des prix très réduits pour les deux tiers. La malaria est la première cause de décès chez les enfants africains et la moitié des décès pourrait être évitée si leurs parents avaient accès à des diagnostics et à des médicaments qui ne coûtent guère plus de un dollar la dose 12.

En Afrique, plus de 250 000 femmes meurent encore chaque année de complications d'une grossesse ou d'un accouchement.

Le sida touche 25 millions de personnes sur ce continent où les médicaments sont hors de portée des malades. On estime ainsi qu'en Zambie, un enfant sur trois sera orphelin en 2010. 40 % de la population du Botswana est touchée.

Comme le souligne le rapport de la Commission pour l'Afrique, le fléau du sida frappe ce continent de manière disproportionnée et « l'ampleur de la pandémie est effrayante ». 25 millions de personnes sont déjà mortes et l'espérance de vie dans certains Etats d'Afrique australe est retombée à son niveau des années quarante.

L'impact de cette maladie sur les sociétés est terrible. Outre le problème des orphelins - 43 millions en Afrique en 2003 dont 12 millions en raison du
sida - cette maladie touche les personnes en âge de travailler, les éléments les plus productifs de la population. Les femmes sont aussi très touchées par le virus parce qu'elles sont biologiquement plus vulnérables et que leur statut social les expose plus aux risques.

La lutte contre la pandémie du VIH et du sida doit être une priorité absolue pour la communauté mondiale sous peine de voir l'Afrique sombrer définitivement. Or, en 2001, les dépenses de santé moyennes en Afrique se situaient entre 13 et 21 dollars alors que dans les pays développés, elles s'élèvent à plus de 2 000 dollars par an et par personne.

On constate un manque de personnel médical dont il faudrait tripler les effectifs d'ici dix ans en formant un million de personnes supplémentaires. L'Afrique a également besoin de stocks de médicaments. La crainte de la grippe aviaire montre que, si les pays occidentaux s'organisent pour faire face à une épidémie de grande ampleur, cette perspective est extrêmement inquiétante pour un continent aussi démuni que l'Afrique. On estime qu'aucun traitement antirétroviral n'est encore disponible pour les cinq millions d'enfants qui vivent avec le VIH ou le sida en Afrique.

Ce continent est affligé de maladies qui pourraient être évitées. Les deux tiers des enfants qui meurent avant leur cinquième anniversaire pourraient être sauvés par des traitements peu coûteux tels que des compléments à base de vitamine A, des sels de réhydratation à administrer par voie buccale et des moustiquaires traitées avec un insecticide pour lutter contre le paludisme. Le rapport de la Commission pour l'Afrique constate aussi qu'un dixième de toutes les maladies dont souffrent les enfants africains sont causées par des vers intestinaux qui infectent 200 millions de personnes et dont le traitement coûterait seulement vingt-cinq cents américains par enfant.

Cette situation déplorable est liée à des problèmes immenses d'accès à l'eau potable. Plus de 300 millions d'Africains - 42 % de la population - n'ont toujours pas d'accès à l'eau potable et 60 % n'ont pas accès à des sanitaires. Cette absence d'eau propre réduit les possibilités de soigner les personnes atteintes par le sida. Elle contribue aussi au maintien du paludisme sur une grande échelle.

On voit que les problèmes sanitaires auxquels l'Afrique est confrontée sont immenses, bien au-delà des questions qui nous préoccupent dans nos sociétés occidentales, confortables et aseptisées.

2) L'alimentation : des crises préoccupantes en Afrique de l'Ouest et australe

La sécheresse, les invasions de sauterelles ont plongé l'Afrique de l'Ouest dans une crise alimentaire préoccupante. Le Niger, le Mali et la Mauritanie sont particulièrement touchés, alors même qu'ils font déjà partie des vingt pays les plus pauvres du monde. Le Burkina Faso serait également menacé selon l'Unicef. On estime qu'au Niger, dont on a beaucoup parlé ces derniers mois, trois millions de personnes font face à la famine ; parmi elles, 800 000 enfants. Dans le même temps, l'Afrique australe connaît, elle aussi, la sécheresse. Dix à douze millions de personnes seraient menacées en Zambie, au Zimbabwe, au Malawi, au Mozambique, au Lesotho et au Swaziland. La malnutrition gagne et la mobilisation des pays occidentaux semble bien moins intense que celle qui suivit le tsunami. Les images relayées quelque temps par les médias ont produit leur effet, qui aujourd'hui se dissipe. Pourtant, les faits sont là.

Malnutrition en Afrique de l'Ouest

Pays

Population totale
(en millions)

Personnes sous-alimentées

(en millions)

Tchad

8,1

2,7

Côte d'Ivoire

16,1

2,2

Guinée

8,2

2,1

Liberia

3,1

1,4

Mali

12,3

3,6

Mauritanie

2,7

0,3

Niger

11,1

3,8

Sierra Leone

4,6

2,3

Togo

4,7

1,2

Source : programme mondial alimentaire

3) Une insertion insuffisante dans le commerce mondial ?

On constate que la part relative de l'Afrique dans le commerce mondial est très faible ; malheureusement elle continue de se détériorer. Ainsi, selon l'OMC, la part de ce continent dans le commerce mondial de marchandises s'est établie à 2,2 % des importations et 2,3 % des exportations en 2003. En 1990, elle était de 2,8 % pour les importations et 3,2 % pour les exportations. Cela ne signifie pas que le commerce de l'Afrique diminue mais simplement qu'il augmente moins vite que ce que l'on peut constater sur les autres continents. En valeur absolue, le commerce africain avec le reste du monde augmente.

Les exportations africaines ont connu une décennie difficile dans les années quatre-vingt dix puisqu'elles n'ont augmenté que de 6 % en moyenne annuelle entre 1995 et 2000 puis ont même baissé de 6 % en 2001 avant de remonter en 2 % en 2002. Depuis les exportations du continent ont bénéficié de l'essor rapide du commerce mondial avec un bond de 23 % en 2003 et de 31 % en 2004.

Si le principal débouché du commerce africain demeure l'Europe, on observe une tendance à une réorientation vers l'Asie et l'Amérique du Nord, notamment en raison de la progression du marché pétrolier. En 2004, les importations des Etats-Unis et du Japon en provenance de l'Afrique ont respectivement progressé de 44 % et 35 %. Dans le même temps les importations de l'Union européenne se sont accrues de 14 %. Enfin, on constate que la valeur en dollars des importations de coton de la Chine en provenance de l'Afrique a progressé de 192 %, passant de 223 millions de dollars à 650 millions de dollars.

En 2003, les exportations africaines étaient destinées pour 48,4 % à l'Europe de l'ouest, 18,9 % à l'Amérique du Nord, 17,7 % à l'Asie et 10,2 % au commerce inter-africain. Les premiers exportateurs sont l'Afrique du Sud (21,1 %), l'Algérie (14,2 %), le Nigeria (11,7 %), la Libye (8,6 %) et l'Angola (5,1 %). Les premiers importateurs sont l'Afrique du Sud (24,8 %), le Maroc (8,5 %), l'Algérie, la Tunisie, l'Egypte puis, en Afrique subsaharienne, le Nigeria (6,6 %), la Côte d'Ivoire (2,7 %) et l'Angola (2,5 %).

La forte progression des exportations de marchandises africaines en 2003 et 2004 s'explique par l'augmentation du volume de pétrole exporté et la montée en flèche des cours moyens de ce produit. La production de pétrole en Afrique s'est accrue d'environ 10 %. On constate aussi que l'expansion des exportations de marchandises, de 31 % en Afrique, a été très supérieure à celle relevée au plan mondial en 2004. Les importations de marchandises se sont, quant à elles, également accrues plus rapidement que les années précédentes, leur progression étant moins marquée cependant que celle des exportations.

Toutefois, on ne peut jeter un regard seulement global sur le continent africain car des différences importantes existent entre les régions et les pays. Ainsi, les exportations ont apparemment quadruplé au Tchad sous l'effet de l'augmentation des expéditions de pétrole, tandis qu'elles demeuraient inchangées au Zimbabwe et diminuaient en Côte d'Ivoire. Parmi les exportateurs de pétrole établis de la région, beaucoup ont accru leurs exportations de plus d'un tiers (Angola, Guinée équatoriale, Libye, Nigeria et Soudan). Le Mozambique a lui aussi enregistré une très forte augmentation de ses exportations de marchandises, grâce surtout à une nouvelle progression substantielle des expéditions d'aluminium. Au Maroc et à Maurice, en revanche, la progression des exportations est demeurée relativement modeste en raison de la stagnation des exportations de vêtements et de poissons à destination de l'Europe. L'Afrique du Sud, première nation commerçante de la région, a accru ses exportations d'un quart en dollars en 2003 et en 2004, mais cet accroissement en valeur tient essentiellement à des variations de prix et de change. La forte appréciation du rand en 2003 et en 2004 a favorisé les importations, qui ont augmenté d'un tiers en dollars et d'environ 15 % en termes réels en 2004.

Dans cette perspective, un regard particulier doit être porté sur le cycle de négociation de l'OMC, dit « cycle de Doha ». Trois objectifs y sont poursuivis : continuer l'ouverture des échanges ; encadrer ces échanges par des règles multilatérales plus justes ; faciliter l'insertion des pays en voie de développement dans le commerce mondial. Le champ initial des négociations était très ambitieux puisqu'il couvrait l'agriculture, les produits industriels, les services, la propriété intellectuelle, les indications géographiques, les "questions dites de Singapour" (investissement, concurrence, transparence des marchés publics et facilitation des échanges), les règles internes à l'OMC (antidumping, subventions, accords commerciaux régionaux) et les liens entre commerce et environnement. Mais le périmètre de ce cycle de négociations a été revu à la baisse depuis la réunion à Genève en 2004. Les négociations se concentrent aujourd'hui sur cinq domaines prioritaires : l'agriculture, les droits de douane appliqués aux produits industriels, les services, la facilitation des échanges, et les questions liées au développement.

Un des objectifs de la France dans le cadre de ce cycle est de mieux insérer les pays en développement dans l'économie mondiale, en particulier les pays d'Afrique subsaharienne. Le cycle de Doha s'est, en effet, fixé comme objectif « le développement grâce au commerce ». C'est un enjeu fondamental pour l'Afrique subsaharienne qui reste à l'écart des circuits du commerce international. La France entend notamment défendre les intérêts des PMA et veille aux progrès des négociations dans trois domaines : l'octroi d'un traitement permanent, spécial et différencié, en faveur des PMA ; l'accès aux médicaments ; une meilleure régulation du marché mondial du coton, ce qui est vital pour les pays d'Afrique.

La production de coton fait vivre directement 10 millions de personnes en Afrique de l'ouest et du centre ; elle représente 5 à 10 % du PIB et près de 30 % des recettes d'exportations des pays de la région. Le prix de revient du coton africain est inférieur de près de 50 % à celui du coton produit par les pays développés mais les subventions agricoles massives de ces derniers ont un effet dévastateur pour les pays producteurs d'Afrique. En particulier, le soutien des Etats-Unis à ses producteurs de coton pour un montant de 3,9 milliards de dollars par an, leur garantit un prix représentant le double des cours mondiaux ; cela se traduit par des pertes de revenus très importantes pour les producteurs africains estimées à 250 millions de dollars par an selon la Banque mondiale et par une chute durable des cours mondiaux.

A l'occasion des négociations de l'OMC, quatre pays africains - le Mali, le Tchad, le Burkina Faso, et le Bénin - ont déposé en mai 2003 une demande à cette organisation en vue de la conférence ministérielle de Cancun qui devait se tenir en septembre de la même année, afin que la question du coton soit inscrite à l'ordre du jour. De fait, elle fut l'une des principales causes de l'échec de la conférence de Cancun. Afin de relancer les négociations, par une décision du 31 juillet 2004, le Conseil général de l'OMC a reconnu la nécessité de traiter le sujet du coton dans le cadre des négociations commerciales multilatérales. Le sujet est désormais reconnu comme une partie intégrante du pilier agricole du cycle de Doha.

Les producteurs africains de coton, appuyés par le Brésil, ont par ailleurs saisi l'organe de règlement des différends de l'OMC, qui leur a donné raison en mars 2005 en condamnant le régime de subvention américain comme contraire aux règles de l'organisation. Les Etats-Unis doivent se mettre rapidement en conformité avec les règles internationales, notamment dans la perspective de la conférence ministérielle de Hong Kong en décembre prochain ; mais la résistance de l'administration américaine reste forte, comme en témoigne leur refus de toute mention du coton dans la déclaration du G8 consacrée à l'Afrique.

L'Union européenne mène, en revanche, une politique résolue en faveur du traitement de la question des produits de base. Ainsi, deux initiatives ont été lancées au début de 2004, en particulier à l'initiative de la France. La première réside en un vaste plan d'action en faveur de ces produits avec, notamment, la mise en place de mécanismes de gestion des effets des fluctuations des cours. La seconde conduirait à un partenariat entre l'Union européenne et l'Afrique pour développer le secteur du coton, partenariat qui s'articulerait autour de deux axes d'action : la recherche de conditions commerciales plus justes sur le marché international du coton et le soutien aux pays et régions producteurs de coton en Afrique.

4) La situation politique et les guerres

Au regard du nombre de conflits en cours, la situation en Afrique semble globalement plus satisfaisante depuis quelques temps, même si cette appréciation générale ne doit pas occulter l'aggravation des tensions dans certaines régions.

En Afrique de l'Ouest, on observe une amélioration, par exemple, au Libéria où, après quatorze années de guerre civile et plus de 250 000 morts, le départ en exil du président Taylor en août 2003 a été suivi de la nomination du Président Gyude Briant et d'un gouvernement de transition nationale en octobre de la même année. Le déploiement concomitant de la MINUL avec 14 665 personnels a eu alors pour objectif la tenue d'élections qui ont eu lieu dans des conditions satisfaisantes en octobre et novembre dernier. La situation reste cependant délicate : un quart des combattants a été désarmé, moins du tiers des déplacés et réfugiés ont regagné leur habitation. Le gouvernement éprouve des difficultés à asseoir son autorité et le pays demeure soumis à des mesures d'embargo : armes, voyages, bois d'œuvre, diamants, gel des avoirs.

En Sierra Leone, la situation apparaît stable. La MINUSIL a poursuivi la réduction de ses effectifs : elle a compté jusqu'à 17 000 hommes ; elle est passée à 3451 au 1er avril 2005. Toutefois, en raison de la fragilité du processus de paix dans ce pays, le mandat de cette mission a été prorogé jusqu'au 31 décembre 2005. Le gouvernement sierra leonais, en dépit de moyens réduits, a, de son côté, fait des efforts notables pour améliorer les recettes de l'Etat, notamment par l'exploitation de la filière du diamant.

En Côte d'Ivoire, la situation demeure encore confuse et lourde de menaces. L'impossibilité d'organiser l'élection présidentielle le 30 octobre dernier a conduit l'Union africaine à proposer le maintien du Président en place pour une durée de douze mois au plus le temps que ce scrutin puisse avoir lieu dans des conditions acceptables. Un nouveau Premier ministre acceptable pour l'ensemble des parties devra également être désigné. Ce plan de transition a été endossé par le Conseil de Sécurité de l'ONU dans sa résolution 1633 du 21 octobre 2005. Pour l'heure, la Côte d'Ivoire semble demeurer dans l'expectative.

En Afrique centrale, la situation de l'ex-RDC mérite, comme les années précédentes, une attention soutenue. Après l'accord sur la transition de décembre 2002 et la constitution du gouvernement à la fin de l'année suivante, les parlementaires ont adopté un report de six mois des élections générales prévues pour juin 2005. Dans l'Est du pays, les groupes armés continuent à perpétrer des exactions contre les populations civiles ; l'exploitation illégale des ressources naturelles se poursuit. L'action de la MONUC demeure, dès lors, importante et il est essentiel de désarmer les milices de toutes natures qui sévissent dans cette partie du pays tout en mettant fin aux ingérences extérieures.

La consolidation du processus de paix au Burundi repose largement sur la stabilisation de la situation en RDC. L'accord d'Arusha, signé en août 2000 a organisé une transition avec une alternance entre les présidents Buyoya, d'origine tutsi, pour la période 2001-2003, et Ndayizeye, d'origine hutu, depuis 2003. Une partie de la rébellion s'est associée au processus. En 2004, un accord sur le partage du pouvoir après la transition a été conclu et une Constitution a été adoptée. Les élections ont pu se tenir dans les conditions prévues, notamment grâce au déploiement d'une force intérimaire de maintien de la paix de l'Union Africaine puis de l'ONU. Le Président de la République a été élu le 19 août 2005.

Dans la Corne de l'Afrique, après plus de dix ans de guerre civile, la Somalie semble avoir trouvé les voies d'un accord politique. Les négociations, qui ont débuté en 2002 au Kenya avec toutes les parties à l'exception du Somaliland, ont abouti à une charte fédérale de transition. Les principales institutions se sont mises en place : une assemblée de 275 sièges a élu, en octobre 2004, M. Abdullahi Yusuf au poste de Président. Il a ensuite désigné M. Mohamed El Gedi au poste de Premier ministre. Ce dernier a formé un gouvernement d'union nationale de 89 ministres. La question principale est aujourd'hui celle du retour de ces institutions sur le territoire somalien.

Les relations entre l'Ethiopie et l'Erythrée se sont, quant à elles, à nouveau tendues, l'enjeu étant la mise en œuvre de la décision de délimitation frontalière rendue par la commission arbitrale en avril 2002.

La situation au Soudan fait l'objet d'un bilan contrasté. Au Sud, l'accord de paix général et définitif signé le 9 janvier 2005 à Naivasha a ouvert une période intérimaire de six ans et porte tant sur les aspects sécuritaires que sur le partage du pouvoir et des ressources. La mort du leader John Garang ne semble pas remettre en cause cette dynamique, qui clôt un long chapitre de plus de vingt ans de guerres civiles. Au Darfour, le conflit qui s'est ouvert en février 2003, a conduit à un véritable désastre humanitaire : probablement 300 000 morts, victimes d'attaques et de la très grave situation humanitaire, sont à déplorer. On compte aussi 1,85 million de déplacés, 230 000 réfugiés au Tchad. Selon une commission d'enquête internationale, des crimes contre l'humanité ont été commis dans le Darfour, en particulier par les milices dites janjawids. La mission de l'Union africaine dans le Darfour, qui compte actuellement près de 4000 hommes, dont 600 policiers, a contribué à cette baisse de la violence. Grâce à une forte mobilisation internationale de l'Union européenne et de l'OTAN, ses effectifs devraient être portés à 7 700.

En matière de paix et de sécurité, l'objectif de la France est bien de renforcer les capacités des organisations et pays africains à agir par eux-mêmes, le cas échéant avec notre soutien, et toujours dans le respect de la Charte des Nations unies. La France agit en faveur de ce continent dans de multiples instances. C'est le cas au sein du Conseil de sécurité des Nations unies. Afin de résoudre les conflits africains les trois quarts des casques bleus déployés dans le monde sont mobilisés sur ce continent. L'Union Européenne est également devenue un acteur important de la sécurité en Afrique.

Même si l'avenir est lourd de menaces, comme en Côte d'Ivoire, l'Afrique fait des progrès pour sortir du marasme. Des motifs d'espoir existent pour ce continent. Il faut savoir en tirer le meilleur parti.

B - Des motifs d'espoir

1) Une prise de conscience mondiale : sortir de la conspiration du silence

L'Afrique a besoin d'un engagement massif de la part de la Communauté internationale.

Les tableaux suivants montrent que des efforts financiers restent encore à accomplir, notamment de la part des Etats-Unis. Car si ce pays demeure le plus gros contributeurs en valeur absolue, son effort vis-à-vis de l'Afrique ne représente qu'un peu plus d'un tiers de l'aide publique au développement américaine contre près de 70 % pour la France par exemple.

Rang

Pays

Aide publique au développement versée
à l'Afrique

(en millions de dollars)

% du donateur dans l'aide totale versée à l'Afrique

1

Etats-Unis

5 063,5

19,2 %

2

France

3 586,9

13,6 %

3

Allemagne

2 061,4

7,8 %

4

Royaume Uni

1 508,1

5,7 %

5

Belgique

1 053,3

4,0 %

6

Pays Bas

1 026,3

3,9 %

7

Italie

744,2

2,8 %

8

Japon

703,9

2,7 %

9

Suède

683,1

2,6 %

10

Norvège

580,7

2,2 %

Rang

Pays donateurs

Part de l'Afrique dans l'aide publique au développement bilatérale versée par le pays

1

Belgique

71,8 %

2

Italie

70,1 %

3

France

68,8 %

4

Allemagne

50,8 %

5

Norvège

39,7 %

6

Royaume Uni

39,1 %

7

Suède

38,4 %

8

Pays Bas

34,8 %

9

Etats-Unis

34,7 %

10

Japon

11,1 %

L'année 2005 a été celle de cette mobilisation qui nous fait espérer qu'un effort plus important sera accompli en direction de ce continent. Il apparaît que les Britanniques, sous l'impulsion de leur Premier ministre, ont décidé de mettre l'Afrique au cœur de leurs préoccupations. La Commission pour l'Afrique mise en place par M. Tony Blair a remis en 2005 un rapport très remarqué, au ton vif, qui contient des propositions concrètes et a connu un remarquable écho dans les médias. De ce point de vue, tout ce qui peut attirer l'attention sur l'Afrique mérite d'être salué. Le Sommet de Gleneagles en juillet 2005 a été également l'occasion de placer ce continent sur le devant de la scène. Les conclusions de ce sommet ont mis en évidence le fait qu'une « chance historique » s'offrait à l'Afrique avec la prise de conscience des dirigeants de ce continent qu'ils devaient jouer un rôle moteur dans leur propre développement. Le contexte facilite cette démarche avec les OMD ou le NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique) engagé par l'Union africaine, qui place au cœur de son action la promotion d'une bonne gestion des affaires publiques, la paix, la sécurité et le développement économique.

Toutes ces initiatives autour de l'Afrique sont prometteuses. On peut espérer que ce continent ne sera plus l'objet d'une « conspiration » du silence au motif que sa situation serait trop désespérée pour justifier toute action. L'heure n'est plus à la bonne conscience mais à la conscience responsable et active. L'Afrique justifie un engagement continu de la part des pays les plus riches. Cette constance est le gage de la réussite de la politique de développement en direction de ce continent.

2) Les ressources pétrolières : l'enjeu du Golfe de Guinée

Avec l'envolée des cours du pétrole, les regards se portent de plus en plus vers le continent africain qui ne manque pas de ressources en hydrocarbures. C'est en particulier le Golfe de Guinée qui attire les investisseurs et apparaît stratégique aujourd'hui.

Les huit pays riverains du golfe de Guinée - le Nigeria, l'Angola, le Cameroun, la Guinée équatoriale, Sao Tomé et Principe, le Gabon et les deux Congo - représentent plus de 200 millions d'habitants, soit le tiers de la population d'Afrique subsaharienne et l'essentiel de sa production pétrolière avec quatre millions de barils/jour, soit 5 % de la production mondiale.

Cette région, politiquement instable et peu homogène culturellement, est dominée par le poids économique et démographique du géant nigérian  qui compte 130 millions d'habitants et produit plus de deux millions de barils/jour, soit, à lui seul, plus que les sept autres pays réunis. Le Nigeria, seul pays du continent avec l'Afrique du Sud à pouvoir revendiquer une envergure internationale, reste cependant en proie à d'importantes difficultés internes, qui limite ses ambitions de puissance régionale. L'Angola, dix fois moins peuplé que le Nigeria, s'affirme également comme un acteur important, notamment grâce à sa puissance militaire et dispute au Nigeria le leadership régional. La plupart des pays de la région restent très instables, l'Angola, la RDC et le Congo sortant de conflits particulièrement meurtriers.

Des litiges frontaliers existent entre les pays riverains du Golfe, exacerbés par les enjeux économiques de la délimitation des zones maritimes souvent riches en pétrole. L'intégration régionale reste, quant à elle, incomplète. Plusieurs organisations régionales regroupent certains des pays de la région : le Nigeria appartient à la CEDEAO, tournée vers l'Afrique de l'Ouest, les six plus petits pays (31 millions d'habitants) appartiennent à la CEMAC (et donc à la zone franc), la CEEAC regroupe onze pays, dont sept du Golfe de Guinée, mais pas le Nigeria. Aucune de ces appartenances régionales ou internationales (Commonwealth, Francophonie, lusophonie), n'est en mesure de fédérer les pays du Golfe de Guinée autour d'un pôle commun. La seule organisation régionale spécifique est la Commission du Golfe de Guinée, instituée par un traité signé le 3 juillet 2001 par les huit pays mais qui n'est pas encore entré en vigueur à ce jour.

Au plan économique, le golfe de Guinée est une zone pétrolière d'importance stratégique, avec des réserves considérables. Total y est un opérateur essentiel, en particulier au Nigeria et en Angola ; il y réalise le tiers de sa production mondiale. La production de pétrole est en forte expansion : un doublement est attendu d'ici 2020. Le Golfe de Guinée est ainsi devenu l'une des régions pétrolières les plus dynamiques et les plus concurrentielles dans le monde. Cette production est largement off-shore ; avec une évacuation maritime aisée vers les Etats-Unis ou l'Europe, l'activité pétrolière est relativement préservée de la situation socio-politique, et donc moins sensible au « risque pays ». Les retombées directes pour les populations restent cependant faibles.

Les disparités sont fortes selon les pays : la production pétrolière est dominée par le Nigeria (2,3 millions b/j) et l'Angola (un million de b/j, et un doublement attendu en cinq ans). Vient ensuite la Guinée équatoriale (350 000 b/j), désormais le troisième producteur de la zone. Ces trois pays ont des perspectives de croissance très fortes. Au Congo et au Gabon (environ 250 000 b/j), la production décline. Au Cameroun, elle est devenue faible (70 000 b/j), en RDC elle est marginale (20 000 b/j). A Sao Tomé et Principe, archipel particulièrement pauvre et isolé, la production n'a pas débuté mais suscite des espoirs considérables.

Un trait commun de ces économies pétrolières est leur manque de transparence, l'opacité des finances publiques et l'ampleur des détournements. L'EITI (initiative pour la transparence des industries extractives) semble un cadre de réponse adapté et d'autant plus nécessaire qu'arrivent des opérateurs de pays émergents, dont les principes déontologiques ne sont pas ceux adoptés ces dernières années par les compagnies occidentales. Des progrès importants ont été réalisés ces dernières années, notamment au Congo et au Gabon.

Les Etats-Unis font preuve d'un intérêt accru pour le Golfe de Guinée, qui représente 15 % des importations américaines de brut, et devrait en assurer 25 % dans dix ans. La sécurisation de ces approvisionnements est considérée comme un enjeu de sécurité nationale, et une coopération militaire importante se met en place avec plusieurs pays de la région. Les économies émergentes d'Asie, ainsi que le Brésil, désireux de répondre à leurs besoins croissants en matière première (pétrole, mais aussi cuivre, fer, manganèse, bois) sont également de plus en plus présents dans cette région. L'arrivée d'opérateurs pétroliers émergents provenant de Chine, d'Indonésie ou de Malaisie ravive une concurrence déjà forte. Les coopérations bilatérales se montrent plus actives et, dans le cas de la Chine, s'affranchissent volontiers des conditionnalités imposées par les autres bailleurs.

3) Les organisations régionales

On constate depuis quelques années l'émergence de partenaires africains de plus en plus solides. La construction africaine, concrétisée par l'Union africaine, les organisations régionales et le NEPAD doit être salué. Les Africains ont engagé de réels efforts pour apporter des solutions régionales à des problèmes survenant sur le continent. On peut citer, en matière de maintien de la paix, l'action de l'Union africaine au Burundi et au Darfour, celle de la CEDEAO au Libéria, en Sierra Leone et en Côte d'Ivoire ; on peut également évoquer les médiations engagées au Darfour ou en Côte d'Ivoire ou la vigilance accrue en matière de respect de la légalité constitutionnelle comme en témoignent la médiation de la CEDEAO au Togo ou la suspension de la Mauritanie de l'Union africaine après le coup d'Etat d'août dernier.

A l'instar des autres partenaires au développement, la France fait du NEPAD le cadre privilégié de son intervention en Afrique subsaharienne. Or le NEPAD met en avant l'échelon régional pour mettre en œuvre les politiques de développement. Dans ce contexte, le soutien à l'intégration régionale en Afrique subsaharienne constitue un axe prioritaire de la coopération française.

On constate une multiplication des organisations régionales qui entraîne parfois des chevauchements de compétences. La France entend soutenir les Africains dans leur action en faveur d'une rationalisation de ces structures. Cela passe par des actions destinées à renforcer les capacités des institutions.

La France apporte, en particulier, son soutien aux instances régionales de la zone franc : l'UEMOA - Union économique et monétaire Ouest-africaine
- et la CEMAC - Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale. Il s'agit notamment de favoriser les processus de convergence et d'intégration économiques au sein de la zone.

En Afrique de l'Ouest, si l'UEMOA a réalisé des avancées en matière d'intégration régionale, la CEDEAO, jusqu'à présent, a surtout développé des activités liées aux questions de paix et de sécurité régionales. L'espace couvert par CEDEAO reste cependant adapté à un processus d'intégration régionale en Afrique de l'Ouest car il est structuré autour de solidarités transfrontalières. Il apparaît ainsi comme un cadre de référence plus naturel pour la réalisation de grands projets d'infrastructures. La CEDEAO a ainsi été désignée « point focal du NEPAD » pour l'Afrique de l'Ouest.

La France accompagne également dans leurs efforts d'intégration d'autres communautés économiques régionales d'Afrique subsaharienne, telles le COMESA, la SADC et l'EAC. A travers ces appuis, l'objectif recherché par la France est double : apporter une expertise dans des domaines où la coopération française possède un avantage comparatif du fait de son expérience déjà acquise avec la zone franc, tout en favorisant les échanges d'expériences et la coopération Sud/Sud ; maintenir une présence auprès de pays avec lesquels la coopération bilatérale est réduite.

La France entend également renforcer des organisations régionales à caractère thématique à l'image de l'OHADA pour le droit des affaires, l'OFPA pour les fonctions publiques africaines francophones, la CIMA pour les assurances, la CIPRES pour la prévoyance sociale, AFRISTAT, pour l'élaboration de statistiques harmonisées ou encore, l'ACBF, pour le renforcement des capacités locales d'analyse et de gestion du développement. Par ailleurs, la France soutient des forums et réseaux de réflexions et d'échanges favorisant l'intégration régionale, tel que le Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest.

Il s'agit aujourd'hui d'assurer l'articulation des espaces d'intégration régionaux au projet politique d'intégration continentale porté par l'Union africaine, en appuyant notamment la transformation des communautés économiques régionales en véritables communautés d'intégration régionale.

L'Union africaine a, quant à elle, confirmé sa place sur la scène internationale. Ses principales institutions sont désormais en place : une Commission de quinze membres dirigée par le président Konaré ; un Parlement installé en Afrique du Sud ; une Cour des droits de l'homme. A Addis Abeba, le COREP (comité des représentants permanents) se réunit régulièrement et assiste le conseil exécutif composé des ministres des Affaires étrangères. Le Conseil Paix et sécurité, constitué de quinze membres représentatifs des régions géographiques, a été installé en mai 2004. Il exprime des positions sur les sujets politiques les plus sensibles et définit l'action de l'Union africaine sur les sujets de crise comme au Soudan ou en Côte d'Ivoire.

Le Président Konaré qui dirige la Commission africaine dispose d'une légitimité forte, confortée par les chefs d'Etat qui ont adopté lors du sommet d'Addis Abeba en juillet 2004 sa « Vision de l'Union Africaine » et des missions de la Commission.

Par ailleurs, un enjeu important est la mise en place de la Force Africaine en Attente (états-majors et brigades sous-régionaux), avant 2010.

Le président en exercice de l'Union africaine se confirme comme un acteur de poids, particulièrement respecté. Le mandat nigérian entamé en juillet 2004 a été prolongé de six mois jusqu'au sommet de Khartoum en janvier 2006, lors duquel le prochain président sera élu.

La crise du Darfour a eu valeur de test pour les acteurs de la construction africaine. L'Union africaine a déployé un effectif de 7000 hommes en septembre 2005. Le Président nigérian Obasanjo s'est fortement investi dans les négociations politiques entre les protagonistes du Darfour.

En évoquant les organisations régionales africaines, nous souhaiterions nous arrêter un instant sur le rôle de l'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) qui constitue un succès dans le domaine si important du droit économique. La signature du traité de Port-Louis, le 17 octobre 1993, aujourd'hui ratifié par les quinze pays de la zone Franc et la Guinée Conakry, a permis la création de cette institution que la France soutient particulièrement

L'OHADA a pour mission d'élaborer des règles de droit et de procédures unifiées dans cette zone de l'Afrique pour mettre fin à l'éclatement des normes juridiques que l'on a pu constater après la décolonisation (13). Après l'indépendance, chaque pays de cette région a tout naturellement adopté des règles de droit qui lui étaient propres, exerçant ainsi sa souveraineté. Mais dans un contexte actuel où l'heure est à l'harmonisation des normes, il est apparu que cette diversité juridique constituait un sévère handicap pour le développement de cette région du monde. Les objectifs de l'organisation sont les suivants : mettre à la disposition de chaque Etat des règles communes simples, modernes adaptées à la situation économique ; promouvoir l'arbitrage comme instrument rapide et discret des litiges commerciaux ; améliorer la formation des magistrats et des auxiliaires de justice ; préparer l'intégration économique régionale.

Le projet de l'OHADA relaie les différentes initiatives prises dès les années soixante pour organiser des regroupements régionaux comme l'Union douanière et économique d'Afrique centrale (UDEAC), puis la Communauté économique de l'Afrique de l'Ouest (CEAO), la Communauté économique des Etats d'Afrique centrale (CEEAC), la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CDEAO) ou l'Union économique et monétaire de l'Ouest africain (UEMOA). Il s'agit de mettre fin au morcellement du droit des affaires dans cette région.

L'OHADA s'appuie sur des organes comme les Conseils des Ministres de la Justice et des Finances qui adoptent à l'unanimité les actes uniformes, directement applicables dans chacun des droits internes des Etats Parties. Cette organisation dispose aussi d'une Secrétariat Permanent basé à Yaoundé. Il s'agit de l'organe administratif de l'organisation. Il existe également une Cour Commune de Justice et d'Arbitrage - la CCJA - qui siège à Abidjan. Elle est compétente en lieu et place des cours de cassation nationales pour régler les différends relatifs au nouveau droit des affaires. Elle a rendu ses premiers jugements au mois d'octobre 2001. La CCJA est également un centre d'arbitrage régional.

L'École Régionale Supérieure de la Magistrature - ERSUMA - est installée à Porto-Novo. Elle a engagé un programme triennal de formation en 2001 pour les magistrats en droit des affaires ; les auxiliaires de justice comme les notaires, les avocats, les experts.

La France a pris une part très active dans le financement de cette organisation et des actions qu'elle a entreprises. Elle y a tout intérêt car l'OHADA démontre que le droit inspiré de notre tradition juridique peut se présenter comme une alternative crédible à la common law, dans le monde des affaires. Ainsi notre pays a pris en charge tout le processus d'élaboration des sept premiers actes uniformes adoptés par le Conseil des ministres de l'OHADA de 1997 à 2000, portant par exemple sur le droit commercial général ou le droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique.

La France a également apporté son soutien pécuniaire à l'édition et la diffusion d'un premier « code OHADA » rassemblant les textes du traité de l'OHADA et les premiers actes uniformes en 1999. C'est dans les mêmes conditions qu'est parue la mise à jour de ce code en 2002. Par ailleurs, plusieurs ouvrages et publications ont assuré la promotion de ce nouveau droit, parmi lesquels il faut citer en particulier un manuel universitaire en huit tomes cofinancé principalement par la France et l'Agence universitaire de la Francophonie, et un premier ouvrage en anglais, cofinancé par la France et le Royaume-Uni.

La France a également pris en charge des équipements informatiques pour le Secrétariat permanent ainsi que des formations de greffiers et d'acteurs non judiciaires.

On constate que la France a pris une part importante dans le lancement de cette organisation dont le succès est reconnu par tous. Toutefois, il importe que soit assurée la pérennité de cette institution, ce qui ne semble pas tout à fait être le cas d'un point de vue financier.

CONCLUSION

Evoquer l'aide publique au développement, c'est tenter d'embrasser toute la misère du monde. L'espoir d'y parvenir serait dérisoire. Nous avons essayé, ici, de retracer simplement quelques-uns des grands débats qui traversent la communauté internationale aujourd'hui.

Mais il n'est pas question seulement de dollars, d'euros, de pourcentage du RNB, d'objectifs, de conventions, de conférence, de NEPAD, de PPTE, de DSP, d'OMD, de FAD, de FMI, d'IFF, de FED, de COFACE, de CICID, de CAD, d'APD.

Il est question ici d'hommes, de femmes, d'enfants qui, à l'heure où sont écrites ces lignes, à l'heure où elles sont lues, souffrent de faim, de maladie, de peur, de fatigue... de misère. Les nouveaux misérables vivent à quelques heures d'avion du Palais Bourbon. Il ne faut pas les oublier.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission des Affaires étrangères a entendu en commission élargie, au cours de sa réunion du mercredi 16 novembre 2005, Mme Brigitte Girardin, Ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie.

M. Edouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères - Dans le cadre de la commission élargie, nous examinons aujourd'hui les crédits affectés à la mission interministérielle « aide publique au développement », ce qui nous conduira à nous pencher sur l'effort que la France engagera en 2006. Mme la ministre nous exposera la répartition de ces crédits entre le ministère des affaires étrangères et celui des finances. La commission élargie entendra ensuite M. Henri Emmanuelli, rapporteur spécial de la commission des finances, et M. Jacques Godfrain, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Après que le Gouvernement aura éventuellement présenté des amendements, la séance se conclura par les interventions des commissaires.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie - Depuis 2002, le développement des pays du Sud constitue une priorité centrale pour le Gouvernement. Les objectifs ambitieux fixés par le Président de la République sont aujourd'hui devenus consensuels au sein de la communauté internationale. Il s'agit d'abord d'augmenter l'aide publique au développement, qui sera portée à 0,5% de notre revenu national brut en 2007, en vue d'atteindre 0,7 % en 2012. Au cours des dernières années, notre aide a augmenté régulièrement, et ce sera encore le cas en 2006, le projet étant construit avec un objectif de 0,47 %, soit 8,2 milliards.

La communauté internationale nous rejoint dans cet objectif d'augmentation de l'aide, comme cela a été confirmé, en juillet, lors du G8 qui s'est tenu à Gleneagles. Elle se mobilise aussi, progressivement, sur les financements innovants. Plus largement, elle partage nos vues sur les objectifs ultimes de l'aide, à savoir les objectifs du Millénaire pour le développement, qui visent à réduire la pauvreté de moitié dans le monde d'ici 2015. Comme la France, la communauté internationale tient à mettre l'accent sur l'Afrique, continent qui ne bénéficie pas suffisamment des effets positifs de la mondialisation. Ces orientations se sont révélées consensuelles lors du sommet des Nations unies de septembre dernier, qui a été un succès pour la France.

L'accent mis sur le développement est bien entendu un acte de générosité, mais c'est également une nécessité, comme l'actualité le rappelle quotidiennement. Comment, si nous laissions le Sud s'enfoncer dans la pauvreté, pourrions-nous lutter contre la propagation de maladies contagieuses ? Comment pourrions-nous lutter efficacement contre le terrorisme ? Comment pourrions-nous éviter que des millions de malheureux cherchent à immigrer clandestinement en Europe ?

Au-delà, notre aide vise également à augmenter notre influence dans le monde, en particulier pour mettre en avant les idées françaises d'une mondialisation mieux régulée et de la préservation de la diversité culturelle.

Dans le format nouveau des lois de finances, la priorité donnée à l'aide au développement se traduit par deux innovations. Une mission budgétaire « aide publique au développement » a été créée, qui regroupe des crédits budgétaires des deux ministères des affaires étrangères et de l'économie, des finances et de l'industrie, et un document de politique transversale intitulé « politique française en faveur du développement » a été réalisé, qui rassemble les actions de tous les ministères actifs en ce domaine et qui dresse la liste des objectifs correspondants.

Sa réalisation a permis deux progrès essentiels. En premier lieu, il clarifie les objectifs de notre aide, qui sont ainsi regroupés autour de trois axes : mettre en œuvre les objectifs du Millénaire, promouvoir le développement à travers les idées et le savoir-faire français ; gérer efficacement l'aide publique au développement. D'autre part, ce document comporte en annexe le tableau - que vous aviez demandé avec force l'an dernier -, permettant d'établir un lien entre les crédits budgétaires que vous votez et le chiffre que nous déclarons publiquement pour notre aide publique au développement, c'est-à-dire l'objectif de 0,47 % pour 2006. Cela a représenté un travail compliqué, car les règles budgétaires et celles de l'OCDE sont très différentes.

J'en viens au volume de crédits que le Gouvernement vous propose de voter. Le projet de loi de finances confirme sa volonté de placer l'aide au développement au cœur de ses priorités. Je mettrai en exergue trois aspects : l'augmentation immédiate des moyens, la préparation de l'avenir et la meilleure efficacité de notre aide.

Vous aurez constaté que le budget de cette mission, dans un contexte budgétaire particulièrement tendu, est en augmentation, sensible, de 200 millions, soit 7 %. Comme les années précédentes, la majeure partie de cet accroissement bénéficiera à nos engagements multilatéraux, notamment à travers les Nations Unies et la Banque mondiale. En particulier, la décision de doubler, d'ici deux ans, notre contribution actuelle au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, qui atteindra donc 300 millions en 2007, fait de la France le premier contributeur mondial à ce Fonds, devant les Etats-Unis. Nous sommes également, depuis janvier, le premier contributeur au Fonds africain de développement et, je le rappelle, au Fonds européen de développement.

Ce recours à l'aide multilatérale est nécessaire, compte tenu de l'ampleur des défis à relever. Il nous permet d'obtenir des résultats tangibles, comme le montre l'exemple du sida, puisque le nombre de malades sous traitement anti-rétroviraux, quasi nul il y a quelques années dans les pays en développement, est passé à 1,6 million grâce au Fonds mondial. Enfin, l'aide multilatérale nous permet d'être actif et plus influent au sein d'institutions qui décaissent des sommes importantes.

Mais l'aide bilatérale n'a pas été pour autant oubliée, et j'ai entendu votre message à ce sujet. C'est le second point que je voulais mettre en avant en insistant sur ce budget qui prépare l'avenir. En effet, l'objectif de 0,5 % en 2007 et de 0,7 % en 2012 suppose la poursuite de nos efforts budgétaires. C'est pourquoi le texte prévoit de lancer déjà les projets qui permettront les décaissements futurs.

Ainsi, les autorisations d'engagement pour les projets bilatéraux - en pratique le Fonds de solidarité prioritaire et les concours sous forme de dons de l'Agence française de développement - qui étaient de 300 millions en 2002, atteindront 450 millions en 2006. Les prêts de l'Agence française de développement suivent la même voie, puisqu'ils passeront de 370 millions en 2002 à plus de 1,2 milliard en 2006. Ainsi, au total, en quatre ans, le volume des projets bilatéraux lancés aura été multiplié par 2,5, ce qui traduit une politique particulièrement volontariste.

Le troisième volet de notre politique tend à promouvoir une aide plus efficace, car il serait déraisonnable de demander un effort au contribuable français sans améliorer l'impact de notre aide. Il s'agit tout d'abord de redonner à notre aide les marges de manœuvre qu'une gestion trop rigide lui avait enlevées. Vous avez sans doute constaté que, dans une mission dont les crédits augmentent, les charges de personnel diminuent. Ce n'est pas que l'aide au développement puisse se passer de l'action de l'homme, bien au contraire. Mais, depuis de nombreuses années, notre aide est grevée par des charges récurrentes qui limitent fortement notre capacité de pilotage. Avec ce budget, nous libérons près de 50 millions pour des projets. Il nous faudra poursuivre cet effort d'assouplissement car, aujourd'hui, notre marge de manoeuvre est plus limitée que celle de nos voisins britanniques ou allemands alors même qu'ils consacrent une part plus faible de leur richesse nationale à l'aide au développement.

Parallèlement, il nous faut améliorer la prévisibilité de notre aide, ce qui passe par l'augmentation des volumes d'autorisation d'engagement. J'ai lancé un groupe de travail, qui examinera à quelles catégories ces principes s'appliquent.

Un autre exemple intéressant est celui de l'aide alimentaire. L'an dernier, vous avez voté le regroupement de ses crédits sur le budget du ministère des Affaires étrangères, ce qui nous a permis une bien plus grande efficacité. Ainsi, en 2005, 60 % de cette aide a été achetée dans l'environnement régional, pour 30 % seulement en 2004. Cette souplesse budgétaire nous a permis d'économiser des coûts de transports inutiles et d'aider mieux ces pays. J'espère que cet exemple préfigure les gains que nous permettra la LOLF.

Au delà d'une efficacité accrue, ce déliement de notre aide alimentaire a également l'avantage d'en éliminer les effets négatifs pour les économies des pays bénéficiaires. Cet exemple me semble devoir être mis en avant, au moment où certains se permettent de critiquer la politique agricole commune de l'Union européenne, tout en déversant leurs excédents alimentaires sous forme d'aide dans les pays les plus pauvres ou en déprimant les cours mondiaux du coton par des exportations massivement subventionnées.

Avec le même objectif d'efficacité, nous avons enfin instauré une réforme importante de notre dispositif depuis 2004, en améliorant le pilotage stratégique de notre aide - qu'il appartient au ministre en charge de la Coopération, en tant que chef de file de l'aide publique au développement, de coordonner - et la lisibilité de notre action, la mise en œuvre des projets revenant à l'Agence française de développement sur la base d'instructions précises de l'Etat.

Pour la mise en œuvre de cette réforme, de nombreux outils ont été créés. Ainsi, je réunis régulièrement tous les ministères concernés dans le cadre d'une conférence d'orientation stratégique et de programmation. Nous élaborons également, pour chaque pays, sous le pilotage de nos ambassadeurs, des documents cadres de partenariat appelés à devenir de véritables plans d'action conclus entre la France et les pays que nous aidons. Il s'agit de s'engager mutuellement sur une feuille de route, pour une période de trois à cinq ans.

Ces documents doivent respecter quatre priorités. La première est d'obtenir davantage de lisibilité sur le terrain afin de rendre notre aide mieux perceptible, en mettant notamment un accent sur la francophonie ou la lutte contre l'immigration clandestine. La deuxième est de parvenir à moins de dispersion et plus de cohérence, afin de rendre nos projets plus percutants et d'être chef de file dans nos domaines d'intervention. La troisième est de rechercher une meilleure coordination avec le pays aidé mais aussi avec les autres intervenants français que sont les collectivités locales, les entreprises ou les ONG, et avec les autres bailleurs de fonds internationaux, en particulier les Européens. Nous souhaitons enfin davantage de prévisibilité, afin d'inscrire notre action dans une durée de trois ou cinq ans. Il s'agit donc de construire notre politique de coopération selon une logique de programmation et de contractualisation.

Pour conclure, je voudrais vous dire un mot des sources innovantes de financement qui trouvent leur traduction dans ce projet. Il s'agit tout d'abord de la facilité financière internationale pour la vaccination - car, en vaccinant les enfants, on fait des économies sur les traitements futurs. Cette ponction sur les budgets à venir est donc totalement justifiée.

La deuxième innovation, complémentaire, est la création d'une contribution de solidarité sur les billets d'avion. Depuis près de deux ans, les efforts de conviction de la France en ce domaine ont été incessants. Sous l'impulsion du Président de la République, nous avons obtenu l'adhésion de nombreux pays sur des déclarations de plus en plus précises et, en septembre, aux Nations unies, soixante-dix-neuf pays se sont engagés en signant une déclaration qui mentionnait cette contribution.

Déjà, trois pays sont prêts à mettre en œuvre immédiatement, un tel dispositif, que nous souhaitons affecter en priorité au secteur de la santé. Bien entendu, au-delà du noyau précurseur que nous constituons avec le Chili et le Royaume-Uni - et, bientôt, je le pense, avec le Brésil - nous devons poursuivre avec persévérance notre effort de conviction. C'est pourquoi il est important de créer le dispositif législatif approprié, dont nous mettrons les détails au point lors de la conférence ministérielle que le Président de la République a lancée pour les 28 février et 1er mars prochains.

Comme toujours pour les grandes initiatives internationales, c'est seulement dans la durée que nous prendrons toute la mesure d'une innovation aussi radicale. Mais dans ce domaine comme dans les autres, le Gouvernement montre toute sa détermination à œuvrer en faveur des pays les plus pauvres.

M. Edouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères - Je vous remercie, Madame la ministre. Je salue la présence d'une délégation de députés du Cameroun, qui constateront le sérieux et la sérénité de nos débats.

M. Henri Emmanuelli, rapporteur spécial de la commission des finances - Je souhaite souligner d'emblée l'importance que revêt la politique d'aide publique au développement. Comme l'a rappelé Mme la ministre, celle-ci est indispensable d'un point de vue moral, politique et économique. Il s'agit ni plus ni moins d'affirmer avec force que le marché, loin de pouvoir tout faire, est souvent dangereux pour le développement des pays les plus pauvres. Après des années de baisse et de dénigrement, l'aide publique au développement est redevenue une priorité - au moins affichée - de la communauté internationale. Toutefois, au-delà des beaux discours et des effets d'annonce, les faits sont têtus et la communauté internationale semble bien incapable de dégager les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs du Millénaire qu'elle s'est elle-même fixés en 2000. L'échec du sommet de New York de septembre dernier est sur ce point révélateur. Pendant ce temps, une partie bien trop importante de l'Afrique peine à sortir de la pauvreté et se trouve confrontée à des pandémies ou à des conflits sanglants. Je souhaite par ailleurs appeler l'attention de chacun sur la gravité des événements récents au sud de l'Europe. Face à la pression de la misère, il a fallu utiliser les armes, mais ce n'est pas en brandissant les fusils que l'on endiguera les flux d'arrivants. En outre, de telles méthodes ne sont guère compatibles avec les valeurs humanistes que nous nous faisons fort de défendre !

Pour en revenir à la France - et au risque de vous surprendre, je commencerai mon exposé par un satisfecit et un encouragement. Le satisfecit concerne l'application de la LOLF : celle-ci se révèle en effet très positive pour la politique d'APD, puisque c'est grâce à elle que nous nous retrouvons aujourd'hui pour discuter de ces enjeux essentiels. Les crédits d'aide ne sont plus perdus dans la masse des crédits de Bercy ou dans celle du Quai. Ils sont désormais à peu près identifiés au sein de programmes spécifiques. Bien entendu, la maquette budgétaire demeure perfectible car on peut encore remédier à certaines dispersions de crédits, mais l'essentiel est qu'il existe désormais un lieu de débat annuel - suivi d'un vote - sur l'aide publique au développement. Il s'agit d'un indiscutable succès démocratique.

L'encouragement, Madame la ministre, vous concerne plus directement : la réforme annoncée par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement - CICID - doit permettre un meilleur pilotage de notre politique d'aide. Encore faut-il pour y parvenir que le ministre chargé de la coopération soit à même d'imposer ses arbitrages aux différentes administrations concernées. Ne souriez pas, Monsieur le Premier ministre Balladur (Sourires). Je pense en particulier à la direction du Trésor, ici représentée, et qui, bien sûr, n'a rien entendu...

M. Edouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères - J'espère au contraire qu'elle prend bonne note ! (Sourires)

M. le Rapporteur spécial - On a parfois le sentiment que le ministère des Affaires étrangères a abandonné une réalité contre une promesse et un pari : le Quai a en effet accepté de réduire le périmètre d'intervention du fonds de solidarité prioritaire - qui était son principal outil d'action bilatérale - au profit de l'Agence française de développement, en échange d'un rôle moteur dans le pilotage et la programmation de cette grande politique publique. Je vous engage, Madame la ministre, à faire preuve de beaucoup de ténacité, voire d'autorité pour garder la main !

Pour en venir au fond de l'action, le Président de la République s'est engagé à plusieurs reprises sur l'objectif de consacrer 0,5 % du PNB à l'aide publique au développement. Et, une fois n'est pas coutume, cette promesse pourrait bien être tenue... La faible croissance que connaît notre pays depuis quatre ans fait que le dénominateur de l'équation ne progresse que faiblement, cependant que le Gouvernement a bénéficié de la montée en puissance de l'initiative « pays pauvres très endettés » - PPTE , laquelle a conduit à des annulations de dette massives. Ces annulations de dette expliquent l'essentiel de la montée de l'APD constatée en France. Elles étaient de 520 millions en 2000 ; elles seront de 2,8 milliards cette année ; elles représentaient 11,7 % de notre aide en 2000, contre près de 35 % en 2005. Mon propos n'est évidemment pas de nier l'efficacité de ces annulations : elles permettent de réduire les dépenses budgétaires consacrées au remboursement de la dette pour les affecter aux dépenses sociales. On peut néanmoins s'interroger sur la légitimité de certaines annulations, en particulier celles portées par la Coface, qui représenteront 79 % des annulations en 2006 sans que le Parlement puisse connaître précisément l'objet des créances annulées.

Outre leur caractère parfois nébuleux, ces annulations de dette se font aux dépens des outils traditionnels d'aide publique au développement : le principe d'additionnalité - le montant des annulations de dette doit venir s'ajouter à l'effort d'aide publique au développement hors annulations de dette - n'a pas été respecté en 2003 et il ne le sera pas davantage cette année, puisque l'APD hors annulations diminue de 100 millions par rapport à 2004.

Enfin, je m'étais interrogé il y a quelques années sur la capacité du Gouvernement à dégager des crédits pour prendre le relais, une fois le sommet de l'initiative PPTE atteint. Cette interrogation a été encore repoussée, grâce au double effet de l'annulation des dettes irakiennes et nigériennes, lesquelles représentent à elles seules 1,6 milliard, soit près de 20 % de notre effort total. A cet égard, pouvez-vous nous indiquer les montants d'annulation de dettes irakiennes pris en compte au titre de l'aide publique au développement en 2006 et 2007 ?

Je souhaiterais également que Mme la ministre nous informe, dans la mesure du possible, sur le projet de taxe sur le transport aérien lancé par le Président de la République. Etes-vous déjà en mesure de préciser le calendrier ? A-t-on une idée des recettes attendues, la première année puis en année pleine ? D'autres pays envisagent-ils un dispositif analogue ?

La deuxième grande tendance budgétaire que l'on peut dégager est l'importance de l'APD multilatérale, et en premier lieu, de la contribution de la France à l'aide de l'Union européenne. Les contributions au FED explosent et, plus globalement, l'augmentation des contributions multilatérales explique l'essentiel de l'augmentation des crédits de la mission « aide publique au développement ». C'est le cas en particulier de notre contribution à l'association internationale de développement gérée par la Banque mondiale. Il est indispensable que la France retrouve des marges de manoeuvre bilatérales.

En outre, si l'on retranche de cette aide bilatérale les crédits d'écolage et d'accueil des réfugiés, dont la prise en compte au titre de l'APD est au mieux excessive, ainsi que les frais administratifs, et que l'on ne retient que les dépenses effectivement pilotables et programmables - soit la coopération technique et les prêts et dons - on ne retrouve plus qu'un milliard d'euros, soit à peu près 15 % du montant affiché.

L'enjeu, c'est que la France retrouve des marges de manœuvre au plan bilatéral et qu'elle accepte de dégager de nouveaux crédits budgétaires en faveur de cette politique essentielle qu'est l'aide publique au développement. Cela ne semble pas être le chemin pris par le Gouvernement puisque les crédits d'aide bilatérale du programme « solidarité à l'égard des pays en développement » sont en recul de plus de 100 millions. Or, il s'agit bien là des crédits que vous maîtrisez réellement, Madame la ministre ! C'est pourquoi vous ne serez pas surpris que j'émette un avis défavorable à l'adoption des crédits de cette mission.

M. Jacques Godfrain, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères - Je ne reviens pas sur les chiffres énoncés précédemment, mais il faut tout de même saluer l'effort continu de notre pays depuis 2002 pour atteindre l'objectif de 0,7 % en 2012. Madame la ministre, parce qu'ils s'intéressent à la politique d'aide au développement, les parlementaires seront attentifs au contenu de cette aide, notamment lorsque les allégements de dette auront sensiblement diminué.

Je ne reviens pas non plus sur les conditions dans lesquelles nous sommes amenés à examiner les crédits affectés à l'aide publique au développement. Leur présentation dans le cadre de la mission interministérielle est plus claire et nous permet de mieux cerner les enjeux. Je regrette simplement que les documents transversaux nous soient parvenus si tard, même si j'ai conscience de la difficulté de recueillir l'ensemble des données utiles. Il faut progresser en ce domaine.

Je tiens à saluer à mon tour l'initiative du Président de la République tendant à taxer les billets d'avion au profit du développement, même si elle représente un risque pour l'équilibre des comptes des compagnies aériennes opérant sur notre sol. Elle présente en effet le grand mérite de faire réfléchir les dirigeants des pays développés sur leurs responsabilités.

Je m'attacherai plus particulièrement à cinq points : la réforme de notre système d'aide publique au développement, les négociations commerciales qui se déroulent actuellement dans le cadre du cycle de Doha, l'épargne des migrants, le rôle des collectivités locales dans la coopération avec le Sud et la place de notre pays dans la région de plus en plus stratégique qu'est le Golfe de Guinée.

Dans le cadre de la réforme de notre système d'aide au développement, le ministère des Affaires étrangères remplit désormais une fonction d'orientation stratégique de la politique en matière d'aide au développement. Tout du moins en théorie ! Dans la pratique, le poids de l'Agence française de développement est encore fort, en dépit des décisions qui ont été prises dans le cadre du CICID. Je sais que les structures se mettent en place et que cela prend du temps. Je souhaiterais néanmoins savoir quelles sont aujourd'hui les inerties auxquelles on est confronté dans la réforme de l'aide publique au développement. Quel est le rôle exact de l'Agence française de développement dans cette réforme ? Je voudrais également savoir ce que vous envisagez pour que le point de vue du ministère des Affaires étrangères - lequel doit désormais fixer les orientations de la politique d'aide - puisse être non seulement entendu - c'est la moindre des choses - mais aussi suivi par l'Agence.

J'ai déjà eu l'occasion d'interroger le ministre des Affaires étrangères sur la position de la France et de l'Union européenne dans le cycle de négociation de Doha, lequel s'est fixé comme objectif « le développement grâce au commerce ». Je ne reviendrai pas sur les conditions dans lesquelles M. Mandelson négocie au nom de l'Europe. Il serait d'ailleurs utile que nous puissions avoir des informations plus précises que celles dont nous avons disposé jusqu'à présent.

Je souhaite aussi vous interroger sur la manière dont notre diplomatie entend défendre à la fois le respect de notre agriculture, qu'il n'est pas question de brader, et les intérêts des pays du Sud, très agricoles, qui ont besoin de tirer des revenus décents de leurs productions. A cet égard, je voudrais prendre l'exemple du marché du coton. La production de coton fait vivre aujourd'hui 10 millions de personnes en Afrique de l'Ouest et du Centre. Elle représente 5 à 10 % du PIB et 30 % des recettes d'exportations des pays de la région. Le prix de revient du coton africain est inférieur de près de 50 % à celui des pays développés - je pense en particulier aux Etats américains du Texas et de la Louisiane. Or, on constate que les subventions américaines ont un effet dévastateur pour les pays producteurs d'Afrique. Des subventions américaines de près de 4 milliards de dollars garantissent ainsi un prix représentant le double des cours mondiaux, ce qui conduit à une perte de revenus de 250 millions de dollars par an pour les pays africains selon la Banque mondiale elle-même. La filière cotonnière dans l'Afrique de la zone franc risque de disparaître si nous n'y prenons garde, ce qui serait catastrophique pour l'économie de ces pays. J'observe au passage que la crise ivoirienne tire l'une de ses sources dans la baisse des revenus cotonniers dans la région du nord.

Sur ces sujets, nous ne devons pas nous laisser impressionner par la propagande du groupe de Cairns, qui mène une campagne très active en faveur d'un libre échangisme effréné. Le commerce a ses vertus, mais les pays du Sud ont également besoin de protections contre un mouvement de mondialisation qui peut faire des ravages. L'Union européenne doit contribuer à assurer un équilibre au plan mondial.

C'est pourquoi je souhaite savoir quelle est la politique de l'Union européenne et de la France au sujet des produits de base. Quelles sont nos positions, à quelques semaines de la réunion de Hong Kong ? Quel soutien allons-nous apporter aux initiatives africaines engagées par le groupe des quatre - Burkina Faso, Mali, Bénin et Tchad - et relayées aujourd'hui par 25 pays ?

Je voudrais également, puisque l'occasion m'en est donnée, revenir sur un projet qui m'est cher, ainsi qu'à mon collègue Jean-Pierre Brard : il s'agit de l'épargne des migrants. L'année 2005 a été celle de la microfinance et du microcrédit. Les réunions se sont succédé, à l'ONU mais également en France sous la présidence de M. Chirac en juin dernier. Ces initiatives ont constitué de grands succès, et ce n'est que justice car la question du microcrédit est essentielle pour développer les économies des pays du Sud. Trop d'habitants de ces pays n'ont pas la possibilité d'accéder à des financements pour monter leurs projets, souvent de taille modeste mais essentiels dans les régions en question. En 2004, j'ai déposé, avec Jean-Pierre Brard, une proposition de loi tendant à valoriser l'épargne des migrants ce qui serait un moyen de répondre, au moins en partie, aux besoins d'investissement local. Chaque travailleur émigré aide en moyenne cinq à six personnes dans son pays natal ; on peut ainsi considérer que 200 à 250 millions de personnes à travers le monde bénéficient du soutien d'un ami ou d'un parent travaillant à l'étranger. Le FMI estimait le volume de ces transferts, au bas mot, à 105 milliards de dollars en 1999. Or, ces flux financiers sont encore trop peu dirigés vers des investissements productifs sur place. Il s'agirait donc de les orienter vers des projets économiques permettant de démultiplier l'effet de ces transferts.

Nous proposons, avec M. Brard, d'aider à orienter ces placements grâce à des taux de rémunération incitatifs dans le cadre d'accords avec les banques qui seraient chargées de collecter l'épargne et, via la Caisse des dépôts, de l'affecter à des fonds dont la gestion serait assurée dans le cadre d'accords bilatéraux. Cette proposition n'est pas fantaisiste. Je souhaite donc savoir pourquoi le Gouvernement y reste sourd et n'engage apparemment aucune réflexion à ce sujet. J'insiste auprès de vous, Madame la ministre, pour que vous me fournissiez une explication précise et claire et non, comme vos prédécesseurs, une simple réponse d'attente. Ne négligeons pas les intérêts des millions d'actifs des pays pauvres présents sur notre sol, sinon la réalité continuera de nous rattraper et les troubles que nous déplorons actuellement dans nos banlieues perdureront.

Au titre de la coopération décentralisée, je viens de recevoir une délégation de parlementaires camerounais qui m'ont fait connaître leur attachement aux actions de coopération engagées par les collectivités locales françaises. Que compte faire le Gouvernement pour préserver ce type de coopération, alors que certaines juridictions ont estimé récemment qu'elle ne pouvait pas entrer dans le champ normal des compétences des collectivités territoriales et que le Sénat a adopté, le 27 octobre, une proposition de loi destinée à sécuriser l'action extérieure de ces collectivités ? Je crois que, pour les projets de terrain, ces coopérations décentralisées sont primordiales.

Un mot enfin du Golfe de Guinée, même si cela sort un peu du cadre de l'aide publique au développement. Riche en énergies fossiles, il est au centre des attentions, notamment des Américains et des Chinois. Quelle est la place de la France dans cette région ? Quelle politique y mène-t-elle ?

J'inviterai tout à l'heure mes collègues à voter ce budget qui traduit tout l'intérêt de la France pour les pays du Sud.

M. Richard Cazenave - M. Jacques Godfrain a posé d'excellentes questions, qui s'inscrivaient d'ailleurs moins dans le cadre de ce budget que dans celui de son environnement technique et commercial. Mais il est évident que des contradictions entre notre aide publique au développement et les négociations internationales pourraient ruiner nos efforts. Il importe donc de savoir comment ces négociations se déroulent et quel est leur impact sur l'économie des pays en développement.

Je m'étonne par ailleurs que certains aient l'air de bouder leur plaisir et s'apprêtent à voter contre un budget qui, dans un contexte difficile, accroît considérablement l'effort en faveur du Sud, alors qu'ils votaient naguère sans rechigner de bien moins bons budgets.

M. le Rapporteur spécial - C'est reparti...

M. Richard Cazenave - Pourquoi seriez-vous les seuls à donner des leçons ? Avec vous, dans une économie européenne florissante, l'aide publique au développement s'était cassé la figure jusqu'à 0,35 % du PNB !

Certes, les bons résultats sont obtenus cette année en partie grâce à l'annulation de la dette. Certains semblent considérer qu'il ne s'agit pas vraiment d'une aide, mais pourquoi n'y ont-ils pas recouru autrefois ? Les gouvernements des pays concernés sont heureux que par ces annulations, nous leur donnions les moyens de prendre de nouvelles mesures dans le domaine social et de soutenir des projets de développement local.

C'est donc avec enthousiasme que le groupe UMP votera ce budget, d'autant que sa reconfiguration dans le cadre de la LOLF élargit le champ d'investigation des parlementaires, ce qui renouvelle quelque peu l'intérêt de l'exercice budgétaire.

Il me semble toutefois que pour atteindre les objectifs de 0,5 % du PNB en 2007 et de 0,7 % en 2012, nous aurions besoin de davantage de prévisibilité. Sans doute ne vous sera-t-il pas possible, Madame la ministre, de nous donner un éclairage au-delà de 2006, mais il serait utile qu'un groupe de travail comportant des parlementaires se penche sur la programmation de la montée en puissance des autres instruments, bilatéraux et multilatéraux, de l'aide au développement. Cela nous éviterait d'être confrontés dans l'avenir à des sauts qualitatifs brutaux.

M. Jean-Louis Dumont - J'ai apprécié la capacité d'analyse et de proposition de nos deux rapporteurs, chacun dans son rôle. Voilà qui montre la bonne santé démocratique de nos commissions.

Je partage ce qu'a dit M. Emmanuelli sur le PNUD. Nous avons été nombreux ces dernières années à nous inquiéter du manque de crédits et de l'absence de la France dans cet organisme, qui appelle souvent au secours. Son document annuel, qui mériterait d'être mieux connu, permet de bien mesurer l'évolution et l'efficacité des crédits affectés aux grandes politiques humanitaires de solidarité et leurs effets sur les conditions de vie dans les pays en développement.

Il est vrai que les collectivités locales se sont engagées depuis longtemps dans la coopération décentralisée, qui permet aussi de faire mieux comprendre par la population la nécessité de la solidarité. Cette nouvelle vision est souvent plus efficace que les grandes opérations menées par l'Etat et on peut donc s'étonner des critiques portées par les chambres régionales des comptes. Nous devons être attentifs à cette dérive de contrôleurs qui refusent d'être eux-mêmes contrôlés et qui se permettent de plus en plus souvent de porter un jugement sur l'opportunité des politiques menées.

Je souhaiterais par ailleurs savoir, Madame la ministre, où en sont les changements annoncés pour l'AFD : le conseil de surveillance, auquel je participe en tant que suppléant, prévu la semaine dernière a été reporté à demain. Je suis en outre frappé par le rôle que jouent habituellement les tutelles sur les décisions que prend ce conseil, comme si l'essentiel était la logique administrative qui n'est pourtant pas vraiment gage d'efficacité et de rapidité de réaction. Certes, l'AFD est capable de se mobiliser et ses capacités ont évolué ces dernières années, mais il y a encore trop de freins à son action. Il faut espérer que la LOLF permettra d'être plus efficace.

J'avais l'an dernier posé des questions à la suite des grands incendies en Nouvelle-Calédonie. Je comprends mieux, après ce qu'a dit M. Cazenave, pourquoi je n'ai jamais eu de réponse...

M. Richard Cazenave - Ça n'a rien à voir ! Vous ne supportez pas la critique !

M. Jean-Louis Dumont - Nous avons constaté que les secours locaux disposaient de peu de matériel et la solidarité n'a pas pu jouer, dans la mesure où l'Australie était également frappée. Je souhaite donc savoir si des mesures ont été prises à la suite de ces événements.

S'agissant de l'Afrique noire, j'ai été frappé par l'indifférence avec laquelle a été accueillie l'invasion de criquets, qui aura aussi des conséquences sur les récoltes suivantes.

De façon générale, si ce budget évolue de façon satisfaisante, il faudra mesurer en fin d'année la mobilisation réelle des crédits et la qualité des interventions. L'annulation de la dette fait l'objet de certaines critiques, y compris au sein des pays bénéficiaires, car elle fait que les crédits prévus dans le cadre de l'aide au développement ne sont plus affectés.

Il semble encore trop souvent que la vision des ONG impliquées directement sur le terrain diffère de celle de l'Etat. Sans doute faudrait-il se doter d'une capacité d'évaluation de l'efficacité de l'aide au développement afin de voir où les crédits sont les plus utiles.

Enfin, je regrette que certains projets éligibles aux aides, notamment relatifs à l'eau et à l'assainissement, cheminent avec trop de lenteur, alors que nous disposons, en particulier en Lorraine, de compétences en ingénierie pour les mener à bien.

Mme la Ministre déléguée - M. Emmanuelli a parlé d'échec du sommet de New York. Mais, alors que la France plaide depuis très longtemps, dans l'indifférence générale, en faveur de l'aide au développement et de l'Afrique, ces dernières ont enfin été mises au cœur de l'agenda international et 80 % de la déclaration des chefs d'Etat et de gouvernement concernent l'aide au développement. Si on met les choses en perspective, on s'aperçoit donc que nous sommes enfin parvenus à intéresser la communauté internationale à ces problèmes, ce qui est une bonne chose.

Je partage par ailleurs votre sentiment : on ne lutte pas contre l'immigration clandestine à coups de mitraillette et de mesures répressives. Le discours permanent du Président de la République est qu'il faut agir sur les pays sources et donc aider le Sud à se développer.

Vous m'avez invitée à être ferme dans mon rôle de chef de file de l'aide au développement dans le cadre de la réforme décidée avant que je prenne mes fonctions et qu'il me revient de mettre en œuvre. Vous connaissez ma ténacité et ma détermination et vous pouvez donc être assuré que je jouerai pleinement le rôle interministériel qui m'a été confié au sein de la Conférence stratégique d'orientation et de programmation, où l'ensemble des ministres décide des politiques qui sont ensuite déclinées en projets par l'AFD.

Vous m'interrogez sur l'annulation de la dette irakienne. Pour qu'elle ne perturbe pas la lisibilité de l'aide publique au développement, nous utilisons la facilité prévue par l'accord du Club de Paris en ventilant l'impact de cette créance de 5 milliards - dont la moitié en majorations de retard - sur la période 2005 à 2008. Les montants prévus sont de 510 millions pour 2005, 200 millions pour 2006, 550 millions pour 2007 et 570 millions pour 2008, les estimations pour ces deux dernières années pouvant être modifiées en fonction du taux de change et de la mise en œuvre de l'accord. Il est possible que d'autres pays veuillent procéder comme nous. En tous cas, cette dette militaire n'a pas de lien direct avec l'aide publique au développement.

Pour ce qui est de la taxe sur les billets d'avion, nous aurons une réunion fin février ou début mars pour fixer les modalités de son entrée en vigueur, à laquelle nous souhaitons procéder dès 2006. Le niveau de cette taxe est modeste, de quelques euros sur les vols intra-européens et quelques euros supplémentaires pour la classe affaires. Selon nos hypothèses, pour la France seule, son produit en année pleine pourrait atteindre 200 millions d'euros. Nous poursuivons nos efforts pour mobiliser de nombreux autres Etats, et si nous y parvenons, ce produit pourrait atteindre 10 milliards de dollars par an. Il est urgent de trouver des sources innovantes pour financer le développement, les besoins étant estimés, selon tous les experts, à 50 milliards de dollars supplémentaires par an, dont 25 milliards pour l'Afrique. Les annulations de dette pour les pays les plus pauvres ne représentant que 1,5 milliard par an, on mesure l'effort à faire. Une taxe sur les billets d'avion est particulièrement intéressante : le transport aérien augmente de 5 % par an, et ces quelques euros, comparés aux taxes d'aéroport et aux taxes pour la sécurité, n'auront aucun impact sur le trafic ni sur la concurrence. En revanche, c'est là une façon simple sur le plan technique de mobiliser des ressources importantes, stables et prévisibles. Nous souhaitons les affecter aux actions pour la santé et à la lutte contre les pandémies, notamment en Afrique, et l'on sait combien la prise en charge des traitements contre le sida nécessite une telle stabilité.

M. Edouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères - Si tous les pays au monde suivent l'exemple de la France, quel sera le produit global de cette taxe ?

Mme la Ministre déléguée - Le minimum estimé est de 10 milliards de dollars.

M. le Rapporteur spécial - Avec les Etats-Unis ?

Mme la Ministre déléguée - En fait nous proposons un système extrêmement souple. Si certains Etats ne veulent pas nous suivre, et on peut penser que les autorités américaines auraient du mal à le faire, nous envisageons également la possibilité d'une taxe volontaire. Les compagnies aériennes, y compris aux Etats-Unis, pourraient proposer aux passagers de contribuer ou non pour une somme modique à de grandes causes, comme la lutte contre les pandémies en Afrique. Compte tenu de ce qu'est le charity business aux Etats-Unis, ce serait certainement productif.

M. Edouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères - Je retiens donc la somme de 10 milliards face à 50 milliards de besoin.

Mme la Ministre déléguée - Ces 10 milliards sont une évaluation.

En ce qui concerne le rôle de l'AFD, Monsieur Godfrain, vous connaissez les principes de la réforme. Le ministère définit et pilote des politiques, l'AFD est l'opérateur qui monte les projets. Comme toute réforme, elle se passera bien si l'on s'en donne les moyens. En tant que titulaire d'un autre ministère, j'ai déjà exercé pendant trois ans la tutelle sur l'AFD et tout se passait bien. J'ai la ferme volonté de continuer à exercer cette tutelle avec la même vigilance afin que les politiques décidées soient mises en œuvre sur le terrain le plus correctement possible. Au cours des quatre derniers mois, sur des cas précis, je n'ai pas constaté de problème particulier.

M. Michel Bouvard - Nous avons confiance en votre fermeté. Mais la mission d'information sur la LOLF avait recommandé que l'on donne à l'AFD le statut d'opérateur public au sens de la LOLF. Cela aurait évidemment amélioré les possibilités de contrôle du Parlement sur les effectifs de l'AFD, ses moyens et leur mise en œuvre. La Cour des comptes fait la même observation dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances pour 2004. Nous aimerions une réponse positive du Gouvernement sur ce point, l'AFD ayant tous les caractères d'un opérateur public au sens de la LOLF. Lui en reconnaître le statut améliorerait la transparence et permettrait au Parlement de soutenir le Gouvernement dans sa fermeté.

Mme la Ministre déléguée - En effet, il y a eu débat sur ce point. L'AFD, opérateur pivot de l'aide publique au développement, n'est pas un opérateur public si l'on s'en tient aux critères de la réforme budgétaire. Un tel opérateur doit en effet exécuter une politique de l'Etat contrôlée par l'Etat, financée par lui au moyen d'une subvention ou d'une taxe et avoir vocation à participer à une première étape de consolidation comptable auprès de l'Etat. Ce n'est pas le cas de l'AFD ni de la majorité des EPIC. L'AFD est aussi un établissement financier et , de ce fait, n'entre pas dans le périmètre des administrations publiques.

M. le Rapporteur spécial - J'ai cru comprendre qu'il y avait un autre argument aux yeux de la direction du Trésor : l'AFD est endettée, et l'on préfère que sa dette ne vienne pas grossir celle de l'Etat...

M. Michel Bouvard - M. Emmanuelli invoque là une raison certainement profonde. Nous poursuivrons ce débat, étant donné la position de la Cour des comptes.

Mme la Ministre déléguée - M. Godfrain m'a également interrogée sur le cycle de Doha et notamment sur le coton. Nous sommes mobilisés pour rappeler en permanence qu'il s'agit d'un cycle de développement et pour consolider le traitement de préférence commerciale des pays les moins avancés. En ce qui concerne précisément le coton, les producteurs africains n'obtiennent pas une juste rémunération à cause des subventions à l'exportation que perçoivent les agriculteurs américains. Tant qu'il en sera ainsi, nous ne pourrons guère avancer. Mais nous nous efforçons de soutenir la filière et nous aurons une réunion à ce sujet à Bruxelles le 23 novembre, ainsi qu'un séminaire à Dakar les 24 et 25 novembre. Je peux déjà faire état de quatre avancées. D'abord, nous plaidons pour la mise en place, dans ce secteur, de la facilité de choc exogène du FMI, qui s'élève à 600 millions de dollars par an. En second lieu, la France mène des travaux sur le lissage des variations des prix du coton - ce sera l'objet du séminaire de Dakar. Ensuite, nous mobilisons des financements pour cette filière par l'intermédiaire de l'AFD, avec déjà 100 millions d'euros d'engagement dans les pays de la zone Franc. L'Union européenne soutient également financièrement les actions pour améliorer la qualité et la productivité. Enfin, dans le cadre des négociations de l'OMC, nous soutenons bien sûr l'ensemble des pays producteurs dans leurs efforts pour améliorer leur situation.

S'agissant de l'épargne des migrants, Monsieur Godfrain, votre proposition n'est nullement tombée dans l'oubli. Au contraire, elle est tout à fait séduisante, et nous y travaillons dans le cadre du co-développement qui intéresse de plus en plus de nos partenaires européens. Mais telle qu'elle est rédigée, elle pose des problèmes techniques. En particulier, passer par des structures essentiellement étatiques pourrait décourager les migrants. Il faudrait que d'autres établissements, notamment le Crédit mutuel, et peut-être le Crédit coopératif, s'y intéressent. Nous sommes prêts à en discuter de nouveau avec vous.

Vous vous êtes également intéressé, ainsi que M. Dumont, à la coopération décentralisée. C'est un volet essentiel de l'aide publique au développement et dans le document cadre de partenariat, qui est le nouvel instrument de la coopération, je souhaite que l'on ne se limite pas à l'aide bilatérale ou multilatérale, mais que l'on inclue l'aide privée et toute la coopération décentralisée. En mutualisant les efforts, nous ne pourrons qu'être plus efficaces. Il se posait un problème d'insécurité juridique pour les collectivités locales qui mènent de telles opérations. Le Sénat a adopté le 27 octobre dernier en première lecture une proposition qui règle le problème et que vous aurez à examiner.

Le Golfe de Guinée est une zone particulièrement importante pour la France. Elle comporte des pays anglophones aussi bien que francophones et nous n'y menons pas une politique unique.

Nous sommes très présents dans les pays francophones, comme le Cameroun - j'en profite pour saluer moi aussi nos amis qui sont ici. Mais notre aide monte aussi en puissance dans les pays anglophones comme le Ghana. Le point commun entre ces pays est souvent leurs ressources pétrolières. Nous faisons tout notre possible pour favoriser la politique de transparence, dans le cadre de l'initiative de transparence des industries extractives : le Gabon, le Nigeria et le Congo y ont adhéré.

M. Cazenave a évoqué les efforts à accomplir en matière de prévisibilité de l'aide. J'ai mis en place un groupe de travail interministériel, afin que nos engagements puissent être programmés sur plusieurs années, et je vous tiendrai naturellement informés de ses réflexions. Quant aux annulations de dettes, elles sont par nature imprévisibles puisqu'elles dépendent des progrès des discussions des pays concernés avec le FMI et du rythme de leurs réformes.

Monsieur Dumont, le projet de décret sur le nouveau statut de l'AFD est en cours d'examen au Conseil d'Etat. La réunion du Conseil de surveillance a été reportée pour attendre son avis, et il n'y a pas d'autre interprétation à en tirer. Quant aux ONG, je suis consciente du rôle essentiel qu'elles jouent dans notre dispositif de coopération. L'aide qui passe par elles est intégrée dans nos documents cadres de partenariat. Vous savez que 80% des aides doivent être concentrées sur trois grands secteurs, et les premiers documents cadres de partenariat, qui sont presque prêts, désignent quasiment tous l'eau et l'assainissement comme un secteur prioritaire. L'eau est en effet au centre de toute politique de santé et d'éducation.

Mme Henriette Martinez - L'engagement financier de la France est capital, et conforme aux objectifs du Président de la République, mais l'efficacité de notre aide publique au développement dépend également de la cohérence du dispositif. Vous avez souligné l'importance des documents cadres de partenariat. En matière de santé, il est primordial qu'ils relaient les priorités du Gouvernement. Ce n'est pas toujours le cas. Ainsi, seul le Niger, dans toute l'Afrique de l'Ouest, a retenu la santé comme priorité. Il est vrai qu'il détient de tristes records en matière de fécondité et de pauvreté. Le Niger a été l'objet d'un programme de santé novateur qui fait référence désormais dans le monde entier, financé par la France et mis en œuvre par des praticiens tunisiens. Sa réussite est avérée et le Niger l'a généralisé. Sommes-nous assurés que les 15 millions que nous investissons dans le programme de santé nigérien, auxquels s'ajoutent 27 millions de dollars de la Banque mondiale, seront utilisés de façon optimale pour la population ? Il faut, par exemple, donner la priorité aux ressources humaines plutôt qu'au béton, même si l'engagement du président nigérien de construire mille centres de santé devait en souffrir. La France a-t-elle les moyens de poser cette exigence ?

Toujours en matière de santé, si nous sommes assurés que nos engagements envers le Fonds mondial de lutte contre le sida seront tenus, il faut veiller à ce qu'ils ne représentent pas l'intégralité de notre effort. Déjà deux tiers de nos crédits sont absorbés par le sida ! Les 50 millions prévus par an pour les autres maladies seront-ils bien dégagés ? Seule l'amélioration de la santé détournera les forces vives de l'Afrique subsaharienne de l'objectif de venir coûte que coûte en Europe. La pandémie du sida est certes un drame, mais il ne faut pas lui donner une priorité absolue sur toutes les autres maladies. En Afrique subsaharienne, la rougeole tue chaque année autant d'enfants que le sida. La différence est qu'un vaccin existe, qui coûte 80 centimes d'euro. Il faudrait moins de 250 000 euros par an pour vacciner les enfants : c'est bien peu, en comparaison des 300 millions du sida ! Et le paludisme tue à lui seul un million d'enfants africains chaque année. Il ne faut pas oublier ces fléaux et je vous remercie des préoccupations que vous exprimez en matière de santé.

Mme Gabrielle Louis-Carabin - Vous vous êtes rendu compte, Madame la ministre, en vous rendant à Haïti, de l'extrême pauvreté et de l'instabilité politique du pays. L'immigration constitue l'unique espoir des Haïtiens, qui partent pour la Guyane, la Martinique, la Guadeloupe ou l'Amérique. La solidarité est donc essentielle. Une impulsion nouvelle doit être donnée pour la reconstruction du pays. Pour réduire l'immigration, il faut soutenir des projets concrets et cohérents de développement durable. Des fonds européens viennent d'être débloqués pour soutenir l'effort de démocratisation mené par le gouvernement haïtien ; je pense d'ailleurs que les élections se dérouleront dans de bonnes conditions. Pouvez-vous nous donner des précisions sur l'aide française à Haïti ? C'est une question vitale pour nos régions.

Mme la Ministre déléguée - Les problèmes de santé sont essentiels en Afrique. Vous savez que 80 % de notre aide au développement sont concentrés sur trois secteurs prioritaires. Lorsqu'un pays choisit de ne pas retenir la santé parmi eux, il reste encore 20 % qui peuvent lui être consacrés. Vous avez évoqué le partenariat exemplaire que nous avons institué au Niger avec la Tunisie. Je me suis rendue au Niger en septembre, et j'ai mesuré les problèmes structurels qu'il connaît, notamment en matière de reproduction et de malnutrition. Le Niger détient le record du monde de la démographie : les femmes y ont en moyenne huit enfants et les problèmes de malnutrition infantile sont structurels plutôt que dus à une crise alimentaire. Sur mille enfants de moins de 5 ans, trois cents meurent chaque année de malnutrition.

Je ne crois pas qu'il y ait une telle volonté de « faire du béton ». Les centres de santé sont assez bien répartis sur le territoire. C'est de ressources humaines qu'ils manquent, de médecins et d'infirmiers, qui sont essentiels pour prendre les patientes en charge et les éduquer à la nutrition. Notre volonté d'agir en la matière est partagée par les autorités nigériennes. J'ajoute que, les jeux de la francophonie se tenant en décembre à Niamey, nous réfléchissons à faire un geste supplémentaire de solidarité francophone dans le domaine de la santé.

Nous avons doublé notre contribution au Fonds mondial de lutte contre le sida, ce qui fait de nous le premier contributeur, mais je vous rappelle que la tuberculose et le paludisme, font également des ravages en Afrique. Sans nous lancer dans une compétition sur l'ampleur de l'hécatombe, je souligne que le sida tue trois millions de personnes par an dans le monde, dix mille par jour. Les personnes touchées sont condamnées. Le sida touche en priorité les 14-49 ans, soit la population qui crée la valeur ajoutée et participe au développement du pays, et il représente une véritable pandémie en Afrique, avec une croissance qui ruine toute politique de développement. Mais les aides du Fonds mondial ne sont pas entièrement déséquilibrées en faveur du sida. Nous faisons également des efforts dans d'autres cadres. Ainsi, nous participons à l'initiative qu'a lancée l'OMS sur la rougeole en Afrique et contribuons pour 15 millions au GAVI, l'alliance mondiale pour la vaccination. Dans le cadre du financement innovant du développement, nous sommes associés aux facilités financières internationales accordées pour les vaccins -  entre 80 et 100 millions par an seront consacrés à la vaccination.

J'étais à Haïti il y a quelques semaines. La coopération, qui avait été mise en sommeil en 2001, a été reprise en 2004. En Haïti comme ailleurs, nous donnons la priorité à l'Etat de droit, à la bonne gouvernance et à la sécurité, et donc au maintien de l'ordre, et notre effort de coopération ne se relâche pas. Ainsi, dix millions sont versés au titre du ministère des affaires étrangères par le biais de trois fonds de solidarité qui concernent l'aide éducative, l'aide alimentaire et l'aide budgétaire. A cela s'ajoutent dix millions de l'AFD au titre de la santé, de la lutte contre le sida, de l'adduction d'eau et d'électricité et de l'assainissement. Enfin, la coopération régionale s'exerce à partir des départements français des Amériques, et quatorze projets sont en cours, qui relèvent du fonds de coopération régionale. Je mentionnerai en particulier les relations entre les administrations haïtiennes concernées et le CHU de Fort-de-France, l'Institut Pasteur de Guyane en matière de paludisme, ainsi que les accords passés entre l'Université d'Antilles-Guyane et celle d'Haïti. J'espère bien sûr que la coopération se renforcera encore entre la France et Haïti, et surtout qu'Haïti retrouvera un climat de sérénité après les élections prévues le 27 décembre et l'entrée en fonction d'un nouveau gouvernement en février prochain. Comme vous l'avez souligné, l'Union européenne a débloqué 72 millions en faveur d'Haïti, dont 10 millions d'aide budgétaire, et nous mobilisons la communauté internationale en faveur de ce pays dans toutes les instances appropriées.

J'ai noté, au cours de ma visite aux Antilles, que l'immigration clandestine, qui affecte au premier chef la Guadeloupe, ne provient pas de l'ensemble du territoire d'Haïti mais principalement de la région des Nippes. Nous élaborons donc avec les autorités haïtiennes un projet de coopération ciblé vers cette région, afin de dissuader les départs. Je souhaite d'ailleurs procéder de même avec les autres régions de départ de l'immigration clandestine - Anjouan, aux Comores, par exemple, pour ce qui concerne l'immigration clandestine vers Mayotte -, car l'on traitera plus efficacement le problème en le prenant à la source.

M. Edouard Balladur, président de la commission des affaires étrangères - Je vous remercie, Madame la ministre, de vos réponses précises. Nous allons prendre congé de vous, mais j'invite les membres des deux commissions à rester pour voter sur les crédits que vous nous avez présentés.

Conformément aux conclusions du Rapporteur pour avis, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Aide publique au développement » pour 2006.

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N° 2571 - Avis de M. Jacques Godfrain présenté au nom de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540) - tome IV - Aide publique au développement

1 () Sur ce sujet on se reportera à notre avis n° 1866 sur le projet de loi de finances pour 2005, p. 8 et suiv.

2 () Investir dans le développement. Plan pratique pour réaliser les OMD. Voir le site du Projet du Millénaire : http://www.unmillenniumproject.org/reports/french.htm

3 () Voir la déclaration finale du sommet : http://www.un.org/french/summit2005/documents.html

4 () Ces pays sont le Bénin, la Bolivie, le Burkina Faso, l'Ethiopie, le Ghana, le Guyana, le Honduras, Madagascar, le Mali, la Mauritanie, le Mozambique, le Nicaragua, le Niger, le Rwanda, le Sénégal, la Tanzanie, l'Ouganda et la Zambie.

5 () Ce groupe a été créé en janvier 2004 à Genève après la rencontre entre le Président de la République, M. Jacques Chirac, le Président du Brésil, M. Lula da Silva, le Président du Chili, M. Lagos et le Secrétaire général de l'ONU. Il a été rejoint ensuite par l'Espagne après l'élection de M. Zapatero, puis par l'Allemagne, en janvier 2005, et l'Algérie au mois d'avril 2005.

6 () Voir l'étude très complète publiée par le Comité français pour la solidarité internationale (CFSI) : La valorisation économique de l'épargne des migrants. Épargner ici, investir là-bas, un état des lieux, décembre 2003. Nous renvoyons aussi au numéro de septembre-octobre 1998 de Migrations études, consacré à l'épargne des migrants et qui porte, plus précisément, sur une étude très détaillée des pratiques des migrants maliens et sénégalais en France. On se référera également à : Aude Penent, « Transferts financiers des migrants : un levier pour le développement des pays du Sud ? », Problèmes économiques, 16 février 2005, n° 2869, p. 41.

7 () Communication C 5048/05 en date du 4 janvier 2005.

8 () http://alize.finances.gouv.fr/budget/plf2006/bleus/pdf/DBGNORMALMSNAD.pdf

9 () Côte d'Ivoire, Congo, RDC, Guinée, Mozambique, Madagascar, Mauritanie, Burundi, Ghana, Rwanda, Ouganda, Tanzanie, Sao Tomé et Principe, Sierra Leone, Soudan, Liberia et six pays hors ZSP (Bolivie, Nicaragua, Honduras, Malawi, Myanmar et Somalie).

10 () Voir TA Poitiers, 18 novembre 2004, Jean-Romée Charbonneau c/ Département des Deux-Sèvres, AJDA, 7 mars 2005, p.487, note Y. Gounin. Ce tribunal a annulé deux actions humanitaires engagées par une Conseil général au motif qu'elles ne pouvaient être regardées comme répondant à des besoins des habitants du département.

11 () Les données pour l'année 2004 ne seront disponibles qu'à la fin de cette année.

12 () Source : Notre intérêt commun, rapport de la Commission pour l'Afrique, 2005, P. 1 et suivantes

13 () On renverra pour plus de précisions sur l'OHADA au site de cette organisation www.ohada.com et à l'ouvrage de Philippe Tiger, Le droit des affaires en Afrique. OHADA, PUF, 1999.


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