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le 18 novembre 2005

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n° 2568

______

assemblée nationale

constitution du 4 octobre 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2005

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2006 (n° 2540),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

--

annexe n° 5

aide publique au développement

prêts à des états étrangers

rapporteur spécial : m. henri emmanuelli

député

____

PRÉAMBULE : L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT DANS LE MONDE : DES INSUFFISANCES MAJEURES. 7

A.- MALGRÉ UNE AUGMENTATION DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT DANS LE MONDE... 9

B.- ... LES OBJECTIFS DU MILLÉNAIRE NE SERONT TRÈS CERTAINEMENT PAS ATTEINTS EN 2015 14

C.- LES ENGAGEMENTS DU SOMMET DE NEW YORK NE SONT PAS À LA HAUTEUR DES DÉFIS LANCÉS 15

D.- DE NOUVELLES SOURCES DE FINANCEMENT ? 16

E.- UNE AIDE PLUS EFFICACE ? 17

CHAPITRE PREMIER : VUE GLOBALE DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT DE LA FRANCE 19

I.- UNE AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT QUI NE PROGRESSE QUE GRÂCE AUX ANNULATIONS DE DETTES 19

1.- Une augmentation en 2005 plus importante qu'attendue 19

2.- La part prépondérante des annulations de dettes 21

a) les annulations de dette représentent près de 35 % de l'APD française en 2005 21

b) le principe d'additionnalité des allégements de dette n'a pas été respecté en 2005 24

c) ce niveau s'explique essentiellement par l'annulation des dettes nigérianes et irakiennes 25

d) la part prépondérante des annulations Coface 27

e) une imputation budgétaire toujours aussi complexe 28

f) la nécessaire révision du plafond des annulations de dette 31

3.- Les autres ministères 31

a) les crédits d'écolage 32

b) les crédits d'aide aux réfugiés 34

II.- UN PILOTAGE QUI S'AMÉLIORE, NOTAMMENT GRÂCE À LA LOLF 36

A.- LA RÉNOVATION DU DISPOSITIF DE PILOTAGE : UN PROGRÈS AU CONDITIONNEL 36

1.- Un schéma institutionnel renouvelé 37

a) le Comité interministériel de coopération internationale et du développement 37

b) le ministre délégué à la Coopération comme chef de file ? 37

c) La Conférence d'orientation stratégique et de programmation (COSP) 38

d) L'ambassadeur comme coordinateur au niveau local 38

2.- De nouvelles méthodes de programmation 38

a) la définition de sept secteurs prioritaires 38

b) Un nouvel instrument de gestion de l'aide : le Document cadre de partenariat (DCP) 39

3.- Le renforcement de l'Agence française de développement comme opérateur pivot de la coopération française 40

a) l'élargissement des compétences de l'AFD 40

b) le nécessaire renouvellement des relations entre l'AFD et ses tutelles 41

B.- LA MISE EN œUVRE DE LA LOLF EST UN OUTIL DE TRANSPARENCE ET DE LISIBILITÉ 43

1.- Une maquette très satisfaisante 43

2.- Des améliorations limitées à la maquette peuvent être apportées 44

3.- L'Agence française de développement doit constituer un opérateur au sens de la LOLF 45

4.- Les documents budgétaires doivent être améliorés 46

5.- Un dispositif de performance perfectible 48

CHAPITRE II : LES CRÉDITS DES MISSIONS AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT ET PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS 51

I.- L'APD MULTILATÉRALE : LES CONTRIBUTIONS AUX ORGANISATIONS INTERNATIONALES EN NETTE PROGRESSION 51

A.- LES CONTRIBUTIONS INSCRITES SUR LE PROGRAMME « AIDE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE AU DÉVELOPPEMENT » 51

1.- Participations au groupe de la Banque mondiale et au FMI 52

2.- Participation aux groupes des Banques régionales 53

3.- Contributions aux fonds sectoriels 54

B.- LES CONTRIBUTIONS INSCRITES SUR LE PROGRAMME « SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT » 57

1.- Le Fonds pour le Sida 57

2.- Les contributions volontaires aux organisations des Nations Unies 58

3.- La participation au Fonds européen de développement (FED) 59

II.- LES MOYENS D'ACTION BILATÉRAUX DE LA MISSION AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT SONT EN BAISSE 61

A.- LES CRÉDITS D'AIDE BILATÉRALE DU PROGRAMME SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT SONT EN BAISSE 61

1.- Les dépenses de personnel 61

2.- Les crédits d'intervention 62

B.- LE PROGRAMME AIDE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE AU DÉVELOPPEMENT ET LA MISSION PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS 65

1.- L'aide budgétaire à destination des États étrangers 65

2.- Le GIP-ADETEF 67

3.- Le FASEP-études 68

4.- La Réserve Pays émergents 68

C.- L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT 70

1.- L'activité de l'AFD 70

2.- L'élargissement de la zone d'intervention de l'AFD 71

3.- Les sources de financement de l'AFD 73

L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires le 10 octobre.

À cette date, environ 44 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial qui a pu, in fine, travailler avec 91 % des réponses. De même, le Jaune « Etat récapitulatif des crédits concourrant à la coopération avec les pays en développement » et le Document de politique transversale ne lui sont parvenus que tardivement. Cette mission étant discuté tardivement, ce retard n'a pas été trop préjudiciable mais un meilleur respect des délais sera indispensable l'an prochain.

INTRODUCTION

La politique d'aide publique au développement doit constituer un objectif absolument essentiel de notre politique extérieure. Celle-ci est indispensable d'un point de vue moral, d'un point de vue politique mais aussi d'un point de vue économique. Il s'agit, ni plus ni moins, d'affirmer avec force que quand il s'agit de développement, le marché ne peut pas tout faire, au contraire, il est souvent dangereux pour le développement des pays les plus pauvres.

Les dramatiques évènements que vivent les migrants africains sur lesquels on ouvre le feu alors qu'ils tentent de passer une frontière et qu'on abandonne en plein désert illustrent de façon sanglante les obligations qui sont les nôtres. Ce n'est pas par la force que nous endiguerons la misère. L'absence de réponses coordonnée de l'Europe est condamnable et l'on ne peut se contenter de demander aux pays d'Afrique du Nord de faire face seuls à cette situation devenue catastrophique du point de vue humanitaire. La réponse à cette situation passe incontestablement par un développement de ces pays, développement qui passe par un soutien accru des pays développés.

L'aide publique au développement est, après des années de baisse et de dénigrement, redevenue une priorité, du moins affichée, de la communauté internationale. Elle fait régulièrement l'objet d'annonces lors des sommets internationaux ce qui constitue un progrès par rapport à une époque pas si lointaine où elle était considérée comme désuète et inutile.

Néanmoins au-delà des grands discours et des effets d'annonce, les faits sont têtus et la communauté internationale semble incapable de dégager les moyens financiers nécessaires pour atteindre les objectifs du Millénaire qu'elle s'est elle-même fixée en 2000. L'échec du Sommet de New York de septembre dernier est sur ce point révélateur. Et pendant ce temps, une partie trop importante de l'Afrique peine à sortir de la pauvreté et du sous-développement et est confrontée à des pandémies et des conflits catastrophiques.

S'agissant de la France, le Président de la République s'est engagé à plusieurs reprises sur l'objectif de 0,5% du PNB consacré à l'aide publique au développement. Et, une fois n'est pas coutume, cette promesse pourrait bien être tenue. D'une part, la faible croissance que connaît notre pays depuis 4 ans fait que le dénominateur de l'équation ne progresse que faiblement ; d'autre part, ce gouvernement a bénéficié de la montée en puissance de l'initiative Pays pauvres très endettés qui a conduit à des annulations de dette massives.

Ces annulations de dette expliquent l'essentiel de la montée de l'APD constatée en France depuis 2002 et elles se font malheureusement aux dépens des outils traditionnels d'aide publique au développement : le principe d'additionnalité, auquel la France avait souscrit, n'a pas été respecté en 2003, il ne le sera pas non plus en 2005

L'interrogation porte donc la capacité du gouvernement à dégager les crédits nécessaires pour prendre le relais une fois le point haut de l'initiative PPTE atteint. Cette interrogation a été encore repoussée grâce au double effet de l'annulation des dettes irakiennes et nigérannes qui, en 2005, représenteront à elles seules 1,6 milliard d'euros soit près de 20% de notre effort d'APD.

Il est indispensable que le gouvernement se redonne des marges de manœuvre concernant l'aide bilatérale et, même si l'on constate une certaine augmentation des autorisations d'engagement dans ce domaine au profit de l' Agence française de développement, celle-ci est bien loin du compte pour compenser la très prévisible chute des annulations de dette.

PRÉAMBULE

L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT DANS LE MONDE :
DES INSUFFISANCES MAJEURES.

Lors du sommet de New York en septembre 2000, la communauté internationale s'est engagée sur un certain nombre d'objectifs, appelés objectifs du Millénaire, visant à réduire la pauvreté et promouvoir le développement dans le Monde d'ici 2015. Cinq ans plus tard, c'est à un constat décevant qu'est arrivée cette même communauté lors du Sommet de New York qui a eu lieu du 14 au 16 septembre dernier, pour le soixantième anniversaire des Nations Unies.

A.- MALGRÉ UNE AUGMENTATION DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT DANS LE MONDE...

Au rythme actuel, les objectifs du Millénaire ne seront jamais atteints en 2015. On constate pourtant depuis 2000 une augmentation de l'effort d'aide publique au développement des pays développés. Selon les statistiques les plus récentes du Comité d'aide au développement (organe de l'OCDE qui centralise les déclarations des pays membres), l'aide publique au développement a atteint en 2004 le niveau sans précédent de 78,6 milliards de dollars US. Compte tenu de l'inflation et de la baisse du dollar des États-Unis, ce chiffre résulte d'une augmentation de 4.6 % en termes réels entre 2003 et 2004, laquelle fait suite à un accroissement de 4.3 % entre 2002 et 2003.

Ce total représente 0.25 % du revenu national brut (RNB) global des membres du Comité d'aide au développement (CAD), soit le même niveau qu'en 2003, mais davantage qu'en 2002 où il était de 0.23 %, et qu'en 2001 où il atteignait 0.22 %.

Plusieurs facteurs expliquent cette augmentation de 3.1 milliards USD en termes réels en 2004, dont les suivants :

- les contributions aux organisations internationales se sont accrues de 3.7 milliards USD ;

- l'aide à l'Afghanistan et à l'Irak a progressé au total d'au moins 1.5 milliard USD ;

- les dons au titre de la coopération technique ont augmenté de 1.2 milliard USD ;

- le montant brut des dons pour allègement de la dette a diminué de 2.1 milliards USD ;

- le montant net des prêts a baissé de 1.3 milliard USD.

LES OBJECTIFS DU MILLÉNAIRE

Ces huit objectifs, qui se déclinent eux-mêmes en sous-objectifs et sont assortis de cibles quantifiées, doivent être atteints d'ici à 2015, étant précisé que la référence de départ est le constat de ce qu'était la situation en 2000.

Objectif 1 : lutte contre l'extrême pauvreté et la faim

_ Réduire de moitié la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour.

_ Réduire de moitié la proportion de la population qui souffre de la faim.

Objectif 2 : éducation primaire pour tous

Donner à tous les enfants, garçons et filles, partout dans le monde, les moyens d'achever un cycle complet d'études primaires.

Objectif 3 : égalité des sexes

Éliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements primaire et secondaire d'ici à 2005 si possible, et à tous les niveaux d'enseignement en 2015 au plus tard.

Objectif 4 : mortalité infantile

Réduire des deux tiers le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans.

Objectif 5 : santé maternelle

Réduire des trois quarts le taux de mortalité maternelle.

Objectif 6 : grandes pandémies

_ Stopper la propagation du VIH/Sida et commencer à inverser la tendance actuelle.

_ Maîtriser le paludisme et d'autres grandes maladies, commencer à inverser la tendance actuelle.

Objectif 7 : environnement durable

_ Intégrer le développement durable dans les politiques nationales et inverser la tendance actuelle à la déperdition de ressources environnementales.

_ Réduire de moitié le pourcentage de la population qui n'a pas accès à un approvisionnement en eau potable.

_ Améliorer sensiblement la vie d'au moins 100 millions d'habitants de taudis d'ici à 2020.

Objectif 8 : partenariat mondial pour le développement

_ Mise en place d'un système commercial et financier ouvert, fondé sur des règles, prévisible et non discriminatoire.

_ Dans ce cadre, traiter le cas des pays les moins avancés et en particulier :

- admission en franchise et hors contingents de leurs exportations ;

- programme renforcé d'allègement de la dette des PPTE ;

- annulations des dettes bilatérales envers les créanciers officiels ;

- octroi d'une aide publique plus généreuse aux pays décidés à lutter contre la pauvreté ;

- rendre les médicaments essentiels disponibles et abordables pour les pays en développement ;

- mettre les avantages des nouvelles technologies, en particulier de l'information et de la communication, à la portée de tous.

Quinze des vingt-deux pays membres du CAD ont fait état d'un accroissement de leur APD en 2004. Les États-Unis sont restés le donneur d'aide le plus important en volume, suivis par le Japon, la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne. Les seuls pays qui dépassent l'objectif de 0.7 % du RNB préconisé par les Nations Unies pour l'APD sont toujours le Danemark, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas et la Suède.

On constate donc un changement de tendance dans l'effort d'aide publique au développement des pays développés depuis le sommet de New York de 2000 et singulièrement depuis la Conférence de Monterey sur le financement du développement, en mars 2002. L'APD des membres du CAD, qui avait fortement fléchi en termes réels (et plus encore en pourcentage du revenu national brut) entre 1992 et 1997 puis s'était stabilisée aux alentours de 0.22 %, rapportée au RNB, entre 1997 et 2001, a alors recommencé à augmenter, quoiqu'à un rythme extrêmement modeste. En 2002, elle a progressé de 7 % en termes réels, puis à nouveau de 5 % en 2003, où elle a atteint 0.25 % du RNB cumulé des membres, pour finir par dépasser le niveau en termes réels de 1992 qui constituait son précédent record.

Aussi bienvenus que soient ces accroissements anticipés, ils appellent quelques réserves. Premièrement, ils impliquent que les membres du CAD tiendront effectivement leurs promesses.

Deuxième réserve, les estimations concernant le niveau futur de l'aide renvoient à l'aide publique au développement telle que le CAD la définit, laquelle recouvre un certain nombre d'éléments qui n'entrent pas dans la plupart des estimations des besoins, ces dernières concernant généralement les transferts de ressources au service du développement et excluant en conséquence :

- l'aide d'urgence - quelque 5 milliards USD de crédits d'aide bilatérale, et plus de 6 milliards USD si on y ajoute l'aide multilatérale, par an pour la période 2002-03 ;

- la coopération technique - près de 17 milliards USD de crédits d'aide bilatérale en 2002-032 ;

- les opérations d'allégement de la dette - plus de 8 milliards USD de crédits d'aide bilatérale nette en 2003, en progression par rapport aux plus de 5 milliards USD de 2002 ;

- les frais d'administration générale de l'aide - au moins 3 milliards USD par an de crédits d'aide bilatérale en 2002-03 ;

- les coûts de prise en charge des frais de scolarité des étudiants originaires de pays en développement dans des établissements tertiaires des pays du CAD - pas moins de 1 milliard USD par an de crédits d'aide bilatérale en 2002-2003 ;

APD NETTE EN 2004 - EN POURCENTAGE DU RNB

(en pourcentage du RNB)

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Source : OCDE, 11 avril 2005.

APD NETTE EN 2004 - MONTANTS

(en milliards de USD)

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- les coûts d'entretien des réfugiés pendant leur première année de séjour dans un pays du CAD - plus de 1 milliard USD par an de crédits d'aide bilatérale en 2002-03 ;

Il ne s'agit pas de dire que ces catégories de dépenses ne sont pas utiles - l'assistance technique, par exemple, contribue à l'évidence au renforcement des capacités - mais leur prise en compte dans les statistiques du CAD n'en affecte pas moins la fidélité avec laquelle ces dernières rendent compte des transferts réels de ressources. D'une façon générale, il en résulte que l'APD totale, telle qu'elle ressort des chiffres du CAD, doit être nettement supérieure aux estimations des besoins fournies dans les diverses études pour que les mêmes résultats puissent être atteints.

On devrait d'ailleurs constater dans les prochaines années la poursuite des annulations de dette massives auxquelles on assiste depuis quelques années maintenant. En effet, à la date de septembre 2004, des mesures de réduction de la dette avaient été approuvées pour 27 des 40 pays que visait au départ l'Initiative Pays Pauvres Très Endettés, pour un montant total de 54 milliards USD. L'Initiative comportait une « clause de réexamen » imposant une date butoir aux pays bénéficiaires pour la mise en place d'un programme soutenu par le FMI ou l'IDA, qui leur ouvrirait droit à une réduction de leur dette. En septembre 2004, la clause de réexamen a été prorogée pour la quatrième fois et son échéance a maintenant été reportée à fin 2006. Autrement dit, on peut encore escompter d'importantes remises de dette de la part des membres du CAD au cours des deux prochaines années étant donné que plus de la moitié du coût total estimé de l'Initiative PPTE concernait des pays qui n'avaient pas encore atteint le « point d'achèvement » en août 2004.

Les dépenses d'allégement de la dette seront en outre gonflées par les efforts déployés en faveur de l'Irak, qui doit des sommes très importantes, au titre de crédits commerciaux. Rien qu'en 2005, ce sont près de 15 milliards de dollars US qui devraient rentrer dans les statistiques de l'aide publique au développement grâce à l'annulation de la dette irakienne.

Les réflexions qui précèdent ne se veulent en aucune manière minimiser l'utilité d'allégements de la dette lorsque celle-ci est excessive. Les remises de dette, lorsqu'elles viennent effacer des dettes dont le service est assuré, équivalent à un transfert prévisible et non lié au cours de chacune des années restant à courir jusqu'à l'échéance des créances. Dans les 27 PPTE qui ont atteint le « point d'achèvement », les dépenses consacrées aux secteurs sociaux sont passées de 5.8 milliards USD en 1999 à environ 9.3 milliards USD en 2003, et ce principalement parce qu'elles ont pu être financées sur des ressources qui auraient autrement dû servir à payer les créanciers. Même lorsque le service de la dette n'est pas assuré, il est utile d'épurer les comptes, ne serait-ce que pour permettre aux pays concernés de bénéficier de nouveaux investissements. Cela dit, lorsqu'on se réfère aux statistiques du CAD, il est important de ne pas perdre de vue qu'elles ne rendent pas compte des transferts réels, au dollar près, aux pays considérés, et ce pour deux raisons.

Premièrement, comme on l'a vu plus haut, les remises ne portent pas toutes sur des dettes dont le service est assuré. Deuxièmement, les conventions pour l'établissement des notifications au CAD autorisent la comptabilisation dans l'APD de l'encours total des créances remises, à sa valeur faciale, sur une seule année ; or les apports résultant des allégements de dette s'étendent habituellement sur une période plus longue.

B.- ... LES OBJECTIFS DU MILLÉNAIRE NE SERONT TRÈS CERTAINEMENT PAS ATTEINTS EN 2015

Malgré les augmentations constatées et attendues, les chiffres estimés pour 2005 restent très inférieurs à ce que nécessiterait la concrétisation des Objectifs du millénaire pour le développement à l'échelle mondiale, et qui plus est au niveau de chaque région et de chaque pays. Des rapports établis en 2001 pour les Nations unies et pour le FMI et la Banque mondiale font tous ressortir que pour obtenir des avancées adéquates il faudrait un quasi doublement de l'aide en termes réels. Cela implique un chiffre de près de 120 milliards USD pour 2006, soit plus de 30 milliards USD de plus que le niveau actuellement prévu et 50 milliards USD de plus que les apports effectifs de 2003.

Certes des progrès ont été accomplis : L'on peut dire en particulier dire avec une certaine certitude qu'au niveau mondial, le nombre absolu de personnes vivant dans l'extrême misère qu'implique le revenu d'un dollar par jour, auquel il a été convenu de fixer le seuil de pauvreté, a diminué depuis 15 ans, ce qui constitue peut-être une première dans l'histoire de l'humanité. Qui plus est, dans le même temps, le nombre d'habitants de la planète est passé d'environ 5.3 milliards en 1990 à 6.3 milliards en 2003. Nous pouvons aussi dire que davantage d'enfants sont scolarisés à l'échelle du monde que ce n'a jamais été le cas, que ce soit en chiffres absolus ou en pourcentage des classes d'âge intéressées, et que l'écart entre les taux de scolarisation des filles et des garçons est plus faible que jamais. Par ailleurs, au niveau mondial, les taux de mortalité des bébés et des enfants ne cessent de baisser, et le nombre de personnes qui ont accès à une eau propre et à des systèmes d'assainissement s'accroît régulièrement.

Reste que le tableau donné par les statistiques disponibles ajoute aussi à la noirceur de la détresse humaine. Environ 1.1 milliard d'individus ont moins d'un dollar par jour pour vivre, plus de 100 millions d'enfants n'ont jamais mis les pieds ne serait-ce qu'à l'école primaire et ne possèdent donc pas la moindre bribe d'instruction qui puisse leur être un jour utile, l'objectif de parité entre les sexes dans le primaire en 2005 ne sera pas atteint et 10 millions d'enfants de moins de cinq ans meurent chaque année de causes qui auraient pu être évitées. En outre, la pandémie de sida continue ses ravages et, conjuguée au paludisme, à la tuberculose et à d'autres maladies relativement négligées, ralentit l'allongement de l'espérance de vie, quand elle ne la raccourcit pas, dans une grande partie de l'Afrique subsaharienne. Qui plus est, les infrastructures et les ressources naturelles sont soumises à des pressions grandissantes sous l'effet de la croissance démographique et de l'augmentation de la consommation.

Quelles sont les chances que les objectifs soient atteints aux dates prévues ? Au niveau mondial, tout d'abord, l'objectif relatif à la pauvreté monétaire est le seul dont la réalisation semble quasiment certaine. Il n'y a à l'évidence pas là de quoi pavoiser. D'après les estimations actuelles, la part de la population des pays en développement vivant avec moins d'un dollar par jour pourra être ramenée à 13 % en 2015, ce qui représente quelque 750 millions de personnes alors qu'on en comptait le chiffre record d'environ 1.5 milliard au début des années 80. Par contre, en ce qui concerne la plupart, sinon la totalité, des autres objectifs, les progrès - et on a toutes les raisons de penser que dans chacun des domaines correspondants la situation continuera de s'améliorer à l'échelle de la planète - ne seront vraisemblablement pas à la hauteur, même au niveau mondial, des attentes des concepteurs des objectifs. C'est probablement pour ceux relatifs à la santé que le chemin à parcourir restera le plus long.

Au niveau régional, c'est l'Asie de l'Est qui conserve les meilleures chances d'atteindre la plupart des objectifs. La croissance et la transition démographique que connaît l'Asie du Sud devraient aussi permettre des améliorations notables dans cette région, qui abrite encore près de 40 % des plus démunis à l'échelle de la planète. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, de même qu'en Amérique latine et dans les Caraïbes, pourtant nettement mieux lotis que l'Asie du Sud en 1990, les progrès ont été plus lents, et il s'offre à l'évidence à ces deux régions des possibilités d'améliorer considérablement leur performance au cours des dix années à venir. En Europe orientale et en Asie centrale, la plupart des indicateurs, qui s'étaient effondrés après l'éclatement de l'ex-Union soviétique, semblent se redresser et les perspectives de voir se matérialiser de réelles avancées (comme cela a déjà été le cas dans les nouveaux États membres de l'Union européenne) sont, là aussi, bonnes. En conséquence, l'Afrique subsaharienne reste la région dont les chances sont les plus compromises compte tenu de la faiblesse de la croissance du revenu par habitant, de l'instabilité politique, de la petite taille des marchés et des taux très élevés de prévalence des maladies infectieuses, notamment du VIH/sida, qui la caractérise depuis toujours.

C.- LES ENGAGEMENTS DU SOMMET DE NEW YORK NE SONT PAS À LA HAUTEUR DES DÉFIS LANCÉS

Ce sont donc près de 50 milliards de dollars qui manquent à l'horizon 2015 pour espérer pouvoir atteindre les objectifs du Millénaire. Le sommet de New York et la célébration du soixantième anniversaire de l'ONU dont il était la raison d'être auraient dû être une opportunité parfaite pour la communauté internationale de réaffirmer son engagement en faveur du développement. Malheureusement, il n'en a rien été. Les 150 chefs d'État présents n'ont pas pu aboutir à un document commun établissant un bilan provisoire des objectifs du Millénaire.

Ont seulement été réitérés les engagements pris par chacune des délégations lors des précédentes réunions, en particulier au G8 de Gleneagles concernant l'annulation des dettes multilatérales des pays les plus pauvres. Cette incapacité de la communauté internationale, et en particulier des pays les plus développés, à reconnaître publiquement le retard pris dans la réalisation des objectifs du Millénaire et à envisager les moyens d'y remédier est très inquiétante et jette une ombre sur la volonté réelle de ces pays d'y contribuer.

D.- DE NOUVELLES SOURCES DE FINANCEMENT ?

Pour honorer leurs engagements, les pays développés vont devoir, dans les prochaines années, faire de l'aide publique au développement une priorité budgétaire, ce alors que la plupart d'entre eux connaissent une situation budgétaire tendue. Jusqu'à aujourd'hui, cette échéance a pu être repoussée grâce au mécanisme des annulations de dette dont le coût budgétaire est, en règle générale, moindre que celui de dépenses budgétaires classiques.

Face à cette difficulté, de nombreux pays ont cherché à élaborer de nouvelles sources de financement pour l'aide publique au développement. La France et la Grande-Bretagne se sont particulièrement investies dans ce domaine. Les Britanniques ont proposé la création d'une Facilité financière internationale, la France la création d'une taxe de solidarité sur les billets d'avion.

Il semble que celle-ci soit en bonne route. Selon la presse qui, une fois encore est la principale source d'informations du Parlement en ce domaine, cette taxe pourrait être créée à l'occasion du projet de loi de finances rectificative pour 2005. Votre rapporteur regrette ce calendrier qui amènera le Parlement à voter dans le cadre de la loi de finances initiale un budget d'aide publique au développement de la France totalement virtuel puisque susceptible d'être profondément modifié par l'instauration de cette taxe.

En effet, les évaluations de recettes, toujours selon la presse, varient entre 200 et 430 millions d'euros. Il s'agit d'une somme significative dont personne ne connaît encore l'affectation. Si, comme il a été évoqué, ceci pourrait servir à financer le Fonds pour le Sida, que deviendront les 250 millions d'euros inscrits sur le programme Solidarité avec les pays en voie de développement ? L'incertitude est donc totale.

Par ailleurs, pour que cette taxe ne pénalise pas de trop le transport aérien français, elle a vocation à se généraliser dans un nombre significatif de pays. Or, aujourd'hui, si une soixantaine de pays s'est déclarée « intéressée », seuls deux ou trois semblent prêts à rapidement franchir le pas. Pis, certains pays, comme l'Allemagne, pourtant favorables initialement au projet, semblent y avoir renoncé.

Au final, votre rapporteur s'interroge fortement sur le bien-fondé de cette nouvelle taxe. Elle semble en fait plus répondre à un double souci : d'une part effectuer une opération d'affichage international à moindre coût pour préserver l'image d'un président présent sur le front du développement ; d'autre part, trouver, compte tenu d'une situation budgétaire catastrophique, des ressources nouvelles sans procéder à des arbitrages nécessairement douloureux.

E.- UNE AIDE PLUS EFFICACE ?

L'accroissement du volume de l'aide doit aller de pair avec un renforcement de son efficacité. La Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide du 2 mars 2005 marque une étape importante dans cette direction. Les pays donateurs ainsi que les pays en voie de développement se sont engagés à s'appliquer, en collaboration avec les organismes multilatéraux de développement et les partenaires des pays en développement, à améliorer la manière dont sont conduits les programmes sur le terrain et à mesurer les avancées obtenues au regard des engagements convenus, sur la base d'indicateurs de progrès et d'objectifs-cibles, d'ordre quantitatif aussi bien que qualitatif.

Une action internationale concertée doit également être menée afin de faire en sorte que les progrès du développement soient correctement mesurés et évalués et que les résultats de cet exercice soient exploités au service de l'amélioration de la performance dans le domaine du développement et de l'efficacité de l'aide. À cette fin doivent être mis en place d'ici à 2010 de systèmes statistiques aptes à produire des données à jour de qualité.

Parallèlement, les membres du CAD doivent poursuivre leurs efforts visant à appliquer l'intégralité des dispositions de la Recommandation de 2001 du CAD sur le déliement de l'aide publique au développement aux pays les moins avancés, et ils sont encouragés à étudier les possibilités qui s'offrent de délier plus largement encore leur aide. L'amélioration de l'efficacité de l'aide passe nécessairement par un renforcement des capacités des pays partenaires.

Votre rapporteur soutient totalement cette démarche. L'une des conditions de la légitimité de l'aide est bien sûr son efficacité. C'est parce qu'un courant de pensée niant économétriquement cette efficacité a pu se développer à la fin des années 80 qu'a pu être justifiée la scandaleuse chute de l'aide publique au développement constatée après la chute du Mur de Berlin. Cela est d'autant plus indispensable que l'on constate sur place la multiplication des acteurs et des intervenants qui peinent souvent à se coordonner et à harmoniser leurs pratiques. Un tel effort est indispensable, faute de quoi toute augmentation de l'aide sera difficile à absorber par le pays sensé en bénéficier.

CHAPITRE PREMIER :

VUE GLOBALE DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT
DE LA FRANCE

Le Président de la République en a fait l'une de ses priorités sur le plan international et le gouvernement ne cesse de répéter cette promesse : l'aide publique au développement française atteindra 0,5 % du revenu national brut (RNB) en 2007 et 0,7 %, objectif fixé par les Nations Unies, en 2012.

Une fois n'est pas coutume, il n'est pas impossible que cette promesse soit respectée, du moins en affichage. En effet, depuis 2002 et a priori jusqu'en 2007, le gouvernement aura bénéficié de la mise en œuvre des allégements de dette, décidés au niveau international, qui aura permis un gonflement de l'aide publique au développement dont on peut parfois légitimement douter de la réalité sur le terrain. Comble de l'ironie, ce n'est que grâce à l'annulation des dettes de l'Irak, en partie imposée par les États-Unis, que l'objectif de 0,5 % sera atteint...

De même, la très faible croissance que connaît la France depuis 2002 facilite considérablement la réussite de l'objectif puisque le dénominateur de l'équation ne progresse que faiblement.

I.- UNE AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT QUI NE PROGRESSE
QUE GRÂCE AUX ANNULATIONS DE DETTES

En 2005, le pourcentage du revenu national brut (RNB) de la France consacré à l'aide publique au développement devrait atteindre 0,47 % après 0,41 % en 2004. Cette progression de 0,06 point équivaut à un peu plus de 1,2 milliard d'euros supplémentaire. Cette augmentation importante s'explique intégralement par la très importante augmentation des annulations de dette qui progressent de 1,4 milliard d'euros entre 2004 et 2005.

En 2006, selon les prévisions inscrites dans le jaune « État récapitulatif des crédits concourant à la coopération avec les pays en voie de développement », l'effort d'aide publique au développement devrait se stabiliser à 0,47 %, de moindres annulations de dette devant être compensées par une augmentation de l'aide multilatérale.

1.- Une augmentation en 2005 plus importante qu'attendue

Alors qu'en 2004, le pourcentage d'aide publique au développement attendue lors de la discussion du projet de loi de finances (0,43 %) n'avait pu être atteint du fait d'annulations de dettes moins importantes que prévues. Il était donc resté à 0,41 %, comme en 2003.

Le graphique ci-dessous retrace l'évolution de l'APD de la France depuis 1994.

graphique
(NB : chiffres à périmètre géographique constant ; référence CAD)

Source : jaunes budgétaires

Par contre, le niveau d'APD prévu dans le projet de loi de finances pour 2005 (0,43 %) sera très largement dépassé grâce à des annulations de dette plus importantes que prévues. Ce dépassement est largement dû à l'annulation de la dette irakienne : hors celle-ci, les annulations de dette seraient d'un peu moins de 2,3 milliards d'euros et le niveau d'aide publique au développement de 7.583 millions d'euros, soit 0,44 % du RNB.

Le tableau ci-après reprend les différentes données publiées dans le jaune chaque année, en comparant pour 2004 et pour 2005, les prévisions et les exécutions.

EFFORT D'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

(en millions d'euros)

2002(1)

2003(1)

2004(3)

2004(1)

2005(3)

2005(2)

2006(3)

1. Aide bilatérale

3.648

4.419

4.757

4.258

5.158

5.599

5.244

Ministère des affaires étrangères (4)

957

1.005

1.070

1.132

1.238

1.179

1.194

Ministère des finances et AFD

1.265

1.741

2.102

1.204

2.145

2.426

2.026

Autres ministères et frais administratifs

1.426

1.673

1.585

1.923

1.774

1.994

2.024

Soit :

- prêts

-29

-143

-105

-236

-230

-468

-18

- dons

2.537

2.719

2.806

3.083

3.130

3.264

3.330

- allègements de dettes

1.140

1.842

2.056

1.412

2.258

2.803

1.932

2. Aide multilatérale

1.985

1.805

1.937

2.339

2.142

2.268

2.740

Aide européenne

1.365

1.160

1.365

1.500

1.413

1.442

1.538

dont Fonds européen de développement (FED)

595

446

565

658

694

642

726

Institutions des nations Unies

126

125

136

145

153

159

185

Banques et fonds de développement (5)

495

520

436

694

575

667

1.017

Total États étrangers

5.634

6.224

6.694

6.597

7.299

7.867

7.984

3. Territoires d'outre-mer

(Mayotte et Wallis-et-Futuna)

188

195

188

222

201

226

229

Total APD (TOM inclus)

5.821

6.420

6.882

6.820

7.501

8.093

8.213

RNB (en milliards d'euros)

1.527

1.560

1.619

1.657

1.702

1.709

1.766

APD (TOM inclus) rapportée au RNB

0,38 %

0,41 %

0,43 %

0,41 %

0,44 %

0,47 %

0,47 %

(1) Chiffres définitifs

(2) Prévisions d'exécution à fin septembre

(3) Prévision associée au projet de loi de finances

(4) Y compris coopération décentralisée

(5) Y compris FMI-FRPC et Fonds multilatéral unique (francophonie)

2.- La part prépondérante des annulations de dettes

a) les annulations de dette représentent près de 35 % de l'APD française en 2005

En 2005, les annulations de dette représenteront 34,6 % de l'effort d'aide publique au développement de notre pays, contre 12,1 % en 2000 ! En effet, l'une des conséquences de l'initiative PPTE a été le gel des procédures d'annulations de dette, en attendant que les pays concernés franchissent toutes les étapes prévues par le Fonds monétaire international. À partir de 2002, de plus en plus de pays ont commencé à franchir ces étapes et à atteindre le point d'achèvement, à partir duquel ils peuvent bénéficier des annulations.

Montants déclarés en APD

Annulations Club de Paris

dont annulations bilatérales

Total

dont PPTE

hors PPTE

2003

1.477,22

177,45

132,14

1.842

En %

82,67 %

9,93 %

7,40 %

100 %

2004

1.239,01

83,33

89,20

1.411,54

En %

58,34 %

6,81 %

34,85 %

100 %

2005

(prévision)

970,66

1.671,72

160,86

2.803,24

En %

34,63 %

59,64 %

5,74 %

100 %

2006
(prévision)

261,78

1.529,66

140,74

1.932,18

En %

13,55 %

79,17 %

7,288 %

100 %

On constate donc depuis 2002 une augmentation considérable des annulations de dettes prises en compte au titre de l'aide publique au développement. Ces annulations passent de 520 millions d'euros en 2000 à 1.842 millions d'euros en 2003 et 2.803 millions d'euros sont prévus en 2005. Or la dynamique de cette augmentation est bien supérieure à celle de l'APD globale.

ÉVOLUTION COMPARÉE DES ANNULATIONS DE DETTE ET DE L'APD GLOBALE

(en millions d'euros)

graphique

* Prévisions.

Source : jaunes budgétaires.

Conséquence de ce décalage, le pourcentage de l'APD global expliqué par les annulations de dette passe de 12,1 % en 2000 à 29,6 % en 2003 et près de 35 % sont attendus en 2005 ! En 2006, ce pourcentage devrait, selon les prévisions inscrites au projet de loi de finances, baisser significativement pour atteindre 23,5 %.

PART DES ANNULATIONS DE DETTE DANS L'APD TOTALE

graphique

* Prévisions.

Source : jaunes budgétaires.

Corrélativement, l'évolution de l'aide publique au développement hors allégement de dettes est très peu satisfaisante :

b) le principe d'additionnalité des allégements de dette n'a pas été respecté en 2005

Lors de la mise en place de l'initiative PPTE, le gouvernement français s'était engagé à respecter le principe d'additionnalité des annulations de dette, à savoir que le montant des annulations de dette doit venir s'ajouter à l'effort d'aide publique au développement hors annulations de dette. Cet effort doit être, dans le pire des cas, constant.

Si ce principe a pu être respecté en 2000, 2001 et 2002 et 2004, cela n'avait pas été le cas en 2003, année où l'APD hors annulation de dette avait reculé de plus de 100 millions d'euros. 2005 voit le phénomène se répéter puisque l'APD hors annulation de dettes recule encore de 100 millions d'euros.

APD HORS ANNULATION DE DETTE

(en millions d'euros)

graphique

* Prévisions.

Source : jaunes budgétaires.

c) ce niveau s'explique essentiellement par l'annulation des dettes nigérianes et irakiennes

Les 2,8 milliards d'euros d'annulations de dette prévus pour 2005 s'expliquent pour l'essentiel par l'annulation des dettes de deux pays, le Nigeria et l'Irak. D'ailleurs, on notera que ces deux pays ne ressortent pas de l'initiative PPTE ce qui explique le faible pourcentage des annulations de dette PPTE dans le total des annulations de dette APD (34,6 % en 2005 contre 58,3 % en 2004 et seulement 13,5 % prévus en 2006).

Le Club de Paris et la République du Nigeria ont en effet signé le 20 octobre 2005 un accord multilatéral de traitement de la dette du Nigeria. Cet accord répond à la volonté affichée par les autorités nigérianes d'utiliser une partie des ressources supplémentaires dégagées grâce aux prix élevés du pétrole pour financer une stratégie de sortie du Club de Paris comprenant des annulations significatives

L'accord conclu porte sur une dette totale de 30 milliards de dollars US. Il permettra au Nigeria de solder, en cinq mois, 100 % de sa dette à l'égard des créanciers du Club de Paris et d'obtenir une annulation de dette d'environ 18 milliards de dollars US. Cette annulation correspond à un taux d'annulation global d'environ 60 % du stock de dette du Nigeria. Les créanciers du Club de Paris recevront 12,4 milliards de dollars US sur une période de cinq mois.

L'accord comprend deux phases. La première phase prévoit un paiement un paiement de 7,7 milliards de dollars US et une annulation de 33 % des dettes éligibles soit 7,2 milliards de dollars US. La seconde phase est attendue d'ici mi-2006 et prévoit une annulation de 34 % des dettes éligibles et le rachat à prix de marché du solde de dette après annulation. Les créanciers recevront à cette occasion un paiement total de 4,7 milliards de dollars US.

Pour sa part, la France recevra 1,3 milliard d'euros d'ici fin 2005 au titre de la première phase et 0,7 milliard d'euros au titre de la seconde d'ici mi 2006. Elle annulera un total de 2,4 milliards d'euros de dette réparti comme suit : 1,1 milliard d'euros en 2005 et 1,3 milliard d'euros en 2006. La dette française qui sera annulée est intégralement composée de créances commerciales non militaires. Dès lors, 100 % des encours de dette annulés seront comptabilisés dans les statistiques d'APD. Le traitement de la dette du Nigeria contribuera donc aux statistiques françaises d'APD à hauteur de 1,1 milliard d'euros en 2005 et 1,3 milliard d'euros en 2006.

Quant à l'Irak, la France s'est engagée, dans le cadre de l'accord multilatéral conclu le 21 novembre 2004 entre les créanciers du Club de Paris et la République d'Irak à annuler jusqu'à 80 % de la dette de l'Irak à son égard en trois phases entre 2005 et 2008.

Les négociations avec la partie irakienne relativement à l'accord bilatéral de mise en œuvre de l'accord en Club de Paris se poursuivent et devraient rapidement aboutir. Votre rapporteur ne dispose pas à ce jour de chiffres concernant le montant global de la dette irakienne susceptible d'être annulée. Le chiffre de 16 milliards de dollars a déjà été cité au niveau international mais la répartition entre les pays n'est pas connue. Comme on l'a vu, ces annulations pourraient considérablement augmenter l'effort d'APD affiché par certains pays : ainsi l'APD japonaise augmenterait de 45 %, l'APD allemande de 29 % et l'APD italienne de 66 % !

Qu'en est-il pour la France ? Les hypothèses retenues dans les prévisions d'Aide publique au développement pour 2005 et 2006 s'agissant de la contribution des annulations irakiennes sont respectivement de 510 millions d'euros d'APD en 2005 et 200 millions d'euros en 2006. La France a en effet décidé de plafonner la prise en compte de l'annulation de la dette de l'Irak dans son APD en 2005 et en 2006. Si votre rapporteur se réjouit de cette limitation, il s'interroge sur ses modalités, ses fondements juridiques et sur ses déterminants :

- s'agissant des modalités, s'agit-il simplement d'une déclaration au CAD de l'OCDE ? D'autres pays ont-ils fait de même ?

- quelle valeur juridique a cet engagement ? Est-il susceptible d'évoluer l'année prochaine ?

- pourquoi 510 millions d'euros en 2005 et 200 millions en 2006 ? Ne s'agit-il pas là d'une variable d'ajustement permettant d'atteindre des objectifs par ailleurs inatteignables ? Qu'en sera-t-il pour 2007 ?

d) la part prépondérante des annulations Coface

L'importance des annulations de dette nigérianes et irakiennes a également pour conséquence d'amplifier encore la prépondérance des annulations Coface au sein des annulations de dette. Celles-ci représentaient 34,5 % des annulations en 2003, 38,5 % en 2004 et elles devraient atteindre 60 % en 2005 et 79 % en 2006 !!

ANNULATIONS DE DETTE COFACE EN MONTANT ET EN POURCENTAGE

DU TOTAL DES ANNULATIONS DE DETTE

graphique

* Prévisions

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Votre rapporteur avait déjà fait part de ses doutes quant à l'importance de ces annulations, en particulier quant à leur légitimité. Ces dettes proviennent en effet en grande partie, d'une politique systématique de soutien à l'exportation et à l'investissement des entreprises françaises dans certains PED. l'État français a ainsi alourdi la dette publique des pays destinataires de ces investissements, via le mécanisme de contre-garantie souveraine. Ce type de dettes, s'il a pu parfois servir le développement des pays du Sud, a surtout bénéficié à certaines entreprises françaises, qui ont pu ainsi exporter et investir de manière indue.

Votre rapporteur regrette donc que la commission des finances se soit opposée à la proposition de résolution (n° 2221) de M. Jean-Paul Bacquet, Paulette Guinchard-Kunstler, Jean-Claude Viollet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, tendant à la création d'une commission d'enquête sur les activités de la Compagnie française pour l'assurance du commerce extérieur (COFACE) pour le compte de l'État et leur lien avec l'évolution de l'aide publique au développement. Une telle commission d'enquête aurait indiscutablement permis d'éclaircir cet aspect essentiel de notre politique d'aide publique au développement. La laisser ainsi dans l'ombre nourrit les doutes et les suspicions.

Votre rapporteur spécial a pu néanmoins obtenir du ministère de l'économie et des finances quelques exemples de projets financés par des prêts accordés à l'Irak garantis par la Coface et inclus dans l'assiette des créances à annuler (cf encadré ci-après). On ne peut que se réjouir de cette transparence. Cela prouve bien que l'administration dispose de ces informations non seulement pour l'Irak mais aussi pour l'ensemble des pays bénéficiant d'annulations Coface. Il serait donc très utile que la représentation nationale puisse bénéficier de ces informations, dûment complétées bien sûr par le montant de la créance annulée. Elle serait alors à même de juger de la pertinence de leur inclusion dans l'effort français d'aide publique au développement.

EXEMPLES DE PROJETS FINANCÉS PAR DES PRÊTS
ACCORDÉS À L'IRAK GARANTIS PAR LA COFACE

Date

Secteur

Projet

1975

Tourisme

Réalisation d'un complexe touristique au bord

du lac Habbaniya à 90 km à l'ouest de Bagdad

1979

Santé

Réalisation de six maternités de 260 lits et de résidences

correspondantes pour le personnel

1981

Administration

Construction du Ministère de la jeunesse à Bagdad

1980

Eau

Construction de 346 km de canalisation d'alimentation d'eau et

de cinq stations de pompage

1981

Eau

Construction d'un réseau d'eau de 843 km pour

l'alimentation de Bagdad

1979

Météo

Construction d'un centre météorologique destiné

à la région de Bagdad

1981

Santé

Livraison de l'hôpital Al Ramad à Bagdad

1986

Alimentation

Fourniture de poudre de lait et fromage fondu

1980

Transport

Fourniture de 72 locomotives diesel électriques

1980

Logement

Fourniture de 4000 logements

1981

Santé

Fourniture d'un hôpital ophtalmologique

1981

Transport

Fourniture de 236 voitures à voyageurs (train)

1981

Énergie

Réalisation de 8 groupes turbogaz destinés à la centrale

de Mossoul

1980

Télécom

Fourniture de 2000 lignes téléphoniques sur les

centraux de Kirkouk et Mossoul

1980

Aéroport

Aéroport international de Bagdad

1979

Transport

Autoroute n° 1 section Hilla Diwaria

e) une imputation budgétaire toujours aussi complexe

Année après année, votre rapporteur tente de démêler l'écheveau des annulations de dette afin d'y voir plus clair et mieux comprendre le passage entre les chiffres annoncés dans le jaune et ceux figurant au sein des différents bleus. Votre rapporteur tient à souligner que cette complexité est la conséquence des supports budgétaires divers dont ont bénéficié les prêts à l'origine des créances et qu'elle n'est pas due à une volonté de camoufler ou de dissimuler les choses. Par contre, on peut regretter un certain manque de pédagogie spontanée de la part de l'exécutif s'agissant d'un domaine pourtant fondamental.

Le tableau ci-dessous retrace les différentes imputations, budgétaires ou non, des annulations de dette :

Chapitre 14-01

article 90

§ 21
natexis

Chapitre 44-97

article 50

§ 10
afd

Chapitre 41-43 du ministère des affaires étrangères

(C2D)

(1)

Transports aux

découverts du trésor

COFACE

TOTAL

2003

24,68

261,95

7,78

1.048,35

708,79

2.051,55

En %

1,20 %

12,77 %

0,38 %

51,10 %

34,55 %

100 %

2004

0,09

212,70

22,26

652,12

554,12

1.441,29

En %

0,01 %

14,76 %

1,54 %

45,25 %

38,45 %

100 %

2005

(prévision)

-

235,63

35

733,80

1.509,77

2.514,20

En %

0 %

9,37 %

1,39 %

29,19 %

60,05 %

100 %

2006
(prévision)

-

166

15

241,64

1.600,57

2.023,21

En %

0 %

8,20 %

0,74 %

11,94 %

79,11 %

100 %

Il fait préciser que les chiffres de ce tableau et ceux du tableau plus haut ne coïncident pas tout à fait car certaines annulations de dette ne sont pas comptabilisées au titre de l'APD. En particulier, quand une dette APD (et non commerciales) est annulée, son annulation n'est pas intégrée à l'effort APD dans la mesure où c'est le prêt, lui-même, qui a été considéré comme participant à l'effort APD (éviter les doubles comptes). C'est notamment le cas des annulations de dette au titre des C2D.

Cinq mécanismes ou imputations budgétaires peuvent supporter des annulations de dette, sachant que la nouvelle maquette budgétaire modifie sensiblement cette imputation :

- Le chapitre budgétaire 14-01 des charges communes prenait en charge les annulations supportées par Natexis. Sur ce chapitre, toutes les annulations Dakar sont terminées depuis plusieurs années. Il ne reste que d'éventuelles annulations au titre de Toronto (Naples, Lyon, Cologne) et de Yaoundé. Cette procédure est quasi-éteinte.

- Le chapitre budgétaire 44-97 du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie prenait en charge les annulations supportées par l'Agence française de développement. Cette indemnisation est désormais inscrite sur l'action Traitement de la dette des pays pauvres du programme Aide économique et financière au développement. 166,2 millions d'euros sont inscrits au projet de loi de finances pour 2006.

- Le chapitre 41-43 du ministère des affaires étrangères supportait les annulations de dette opérées au titre des contrats de désendettement-développement (C2D). Désormais ces crédits sont inscrits sur l'action Aide en faveur du développement durable et lutte contre la pauvreté et les inégalités du programme Solidarité à l'égard des pays en développement. 15 millions d'euros sont prévus pour 2006.

- Les annulations COFACE, dont l'importance est grandissante, ne font pas l'objet d'une dépense budgétaire. En revanche, elles ont un coût budgétaire indirect. Elles diminuent la capacité de prélèvement sur le compte État à la COFACE (les prélèvements viennent s'inscrire en recettes sur le budget général). En 2005 et en 2006, ce prélèvement devrait être de 2 milliards d'euros.

- Enfin, les annulations portant sur des prêts du Trésor sont refinancées (sauf en cas d'annulation à 100 %) et sont directement imputées sur les découverts du Trésor et approuvées par le Parlement lors de la loi de règlement. Ainsi, lors de l'examen de la loi de règlement pour 2004, le Parlement a, si l'on peut dire, approuvé le transport aux découverts du Trésor de 652,7 millions d'euros au titre des remises de dettes aux pays les moins avancés. Il s'agit bien de dépenses budgétaires dans la mesure où ces 652 millions d'euros viennent augmenter le déficit de l'État au sens maastrichtien du terme.

Les conséquences budgétaires des annulations de dette multilatérales

Lors du G8 de Gleneagles, les Chefs d'État ont proposé l'annulation des créances de l'AID (Association internationale de développement de la Banque mondiale) et du Fonds Africain de Développement (Banque africaine de développement) sur les 38 Pays Pauvres Très Endettés (PPTE). Le service de la dette des bénéficiaires diminuant grâce à cette initiative, les ressources budgétaires libérées pourront être consacrées à la lutte contre la pauvreté.

Pour le G8, ces annulations de créances doivent être compensées au fur et à mesure de leur échéance donc au rythme où les pays pauvres devaient rembourser leur dette. De cette façon, les institutions dont les créances sont annulées peuvent continuer à intervenir dans les pays pauvres, les ressources qu'elles attendaient leur seront bien versées.

Cette proposition a été soumise aux Assemblées annuelles des institutions de Bretton Woods les 24 et 25 septembre dernier. Afin de recueillir le soutien des actionnaires non-G8 de la Banque mondiale et de la Banque Africaine de développement, les ministres des finances du G8 sont convenus le 25 septembre 2005 d'écrire au Président de la Banque mondiale et au Président de la Banque Africaine de Développement pour préciser les engagements juridiques qu'ils prendront pour assurer l'AID et le FAD de la compensation des créances annulées.

Sur toute la période d'annulation (40 ans), la France devrait verser environ 2.250 millions d'euros à l'AID et 550 millions d'euros au FAD. Sur la période 2006-2015, qui devrait faire l'objet d'une première ouverture budgétaire, 407 millions d'euros pour l'AID et 180 millions d'euros pour le FAD seront nécessaires. Ces engagements juridiques et budgétaires ne figurent bien sûr pas encore dans le projet de loi de finances mais un amendement du gouvernement devrait proposer une augmentation des autorisations d'engagement inscrits au programme Aide économique et financière au développement.

f) la nécessaire révision du plafond des annulations de dette

La mise en œuvre des annulations de dettes décidées en Club de Paris nécessite une autorisation en Loi de finances qui fixe un plafond pour ces opérations. Chaque accord (Toronto, Dakar, Yaoundé) nécessite le vote d'un article en loi de finances, article qui fixe un plafond à ces annulations.

Ce plafond est ensuite régulièrement relevé pour faire face aux engagements de la France. Ainsi la loi de finances rectificative pour 2001 a relevé le plafond du dispositif de Toronto à 5,6 milliards d'euros. Le dernier relèvement date de la loi de finances rectificative pour 2004 : son article 116 a autorisé le relèvement du plafond du dispositif Toronto, sur lequel s'impute aujourd'hui l'essentiel des annulations de dette, à 11,1 milliards d'euros, relèvement considérable que le parlement n'aurait pas dû accepté tel quel.

Ces modifications des plafonds interviennent systématiquement en loi de finances rectificative, juste après le débat sur le projet de loi de finances et, la plupart du temps, par voie d'amendement gouvernemental, sans que le Parlement dispose du temps nécessaire à l'étude de ce dispositif. Votre rapporteur spécial a déjà eu l'occasion de regretter cette situation.

Il semble que, compte tenu des annulations massives de dette accordées au Nigeria et à l'Irak, le plafond de 11,1 milliards d'euros sera plus rapidement atteint que ne le prévoyait le ministère de l'économie et des finances. À la fin 2004, le « compteur » Toronto s'élevait à 6,2 milliards d'euros. Un relèvement du plafond sera donc nécessaire en 2007. Votre rapporteur spécial souhaite que cela ait lieu dès le projet de loi de finances, via un article rattaché à la mission Prêts à des États étrangers, et non dans le collectif 2006 comme l'on en a pris la fâcheuse habitude.

3.- Les autres ministères

Votre rapporteur reviendra plus longuement sur les crédits du Ministère des affaires étrangères et du Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie, pour l'essentiel inscrits sur les missions Aide publique au développement et Prêts à des états étrangers. Seront ici traités les crédits des autres ministères, c'est-à-dire pour l'essentiel le ministère de l'enseignement supérieur et celui de l'emploi, la cohésion et le logement. Comme le précise très utilement le document de politique transversale, ce sont donc sur les missions Recherche et enseignement supérieur et Solidarité et intégration que sont inscrits ces crédits participant à l'effort français d'aide publique au développement.

On constate que ces crédits augmentent particulièrement vite : ils étaient de 1,43 milliard d'euros en 2002, de 1,67 milliard en 2003 et de 1,92 milliard en 2004. En 2005, ils devraient atteindre près de 2 milliards d'euros en 2005 et 2006.

a) les crédits d'écolage

Représentant un peu plus de 100 millions d'euros en 1990, les dépenses d'écolage ont considérablement augmenté depuis puisqu'elles ont atteint 730 millions d'euros en 2004. Le graphique ci-dessous retrace l'augmentation de ces dépenses. Elles n'étaient que de 365 millions d'euros en 2000, en cinq ans, elles auraient donc progressé de plus de 350 millions d'euros !

graphique

Source : Les notes du jeudi, numéro 22, éditées par le Service de la stratégie, des moyens et de l'évaluation , DGCID, MAE, janvier 2005

Ces dépenses sont censées retracer le coût de l'accueil d'un étudiant venant d'un pays en voie de développement par le système éducatif français. Il est calculé en fonction du nombre d'étudiants étrangers venant de pays en voie de développement en France et du coût unitaire moyen d'un étudiant au sein de l'enseignement supérieur français (y compris en y intégrant les coûts structurels).

Cela dénote une évolution différenciée : si la forte hausse de 2001 a été engendrée par celle du coût des personnels, celle de 2002 suit l'effet des coûts conjugués des personnels et de fonctionnement, alors que pour 2003 c'est essentiellement le glissement des nationalités des étudiants pris en charge vers les pays en développement, tendance qui s'est fortement accentuée ces dernières années. En 2004, l'augmentation globale suit celle du nombre d'étudiants pris en compte, mais demeure inférieure à celle des frais de fonctionnement

ÉVOLUTION DES FRAIS D'ÉCOLAGE

(en millions d'euros)

TOTAL

Étudiants

Coût personnel

Frais fonctionnement

Œuvres sociales

2000

365,1

83.480

217,12

78,11

15,77

2001

451,19

96.527

339,71

93,55

17,94

Évolution (en %)

23,61

15,63

25,30

19,75

13,77

2002

547,36

110.092

409,52

116,73

21,11

Évolution (en %)

21,32

14,05

20,55

24,78

17,68

2003

638,86

128.060

475,23

138,40

25,24

Évolution (en %)

16,72

16,32

16,04

18,56

19,55

2004

730,83

143,544

541,04

161,20

28,59

Évolution (en %)

14,40

12,09

13,85

16,47

13,28

Source : ministère de l'Éducation nationale.

Votre rapporteur s'interroge sur cette augmentation considérable. L'importance de cet agrégat statistique dans l'APD française est d'autant plus problématique que seuls trois autres pays membres du CAD comptabilisent ce type de dépenses dans leur APD : l'Allemagne, l'Autriche et le Canada.

Les directives du CAD qui permettent de notifier en APD les dépenses d'écolage précisent que seul peut être comptabilisé le coût imputé aux étudiants issus de pays en développement venus poursuivre leurs études en France dans des domaines liés au développement puis retournant dans leur pays, à la condition que « la présence des étudiants reflète la mise en œuvre par le pays d'accueil d'une politique délibérée de coopération pour le développement ». Or l'augmentation du nombre d'étudiants étrangers, en partie à l'origine de la hausse de l'écolage, résulte d'une politique assumée d'influence et de rayonnement culturel de la France et non pas d'une politique de coopération au développement.

Aucune garantie n'est apportée sur le respect de la directive du CAD concernant les critères de comptabilisation des étudiants. Comme l'indique le CAD dans son examen de l'APD française, dont votre rapporteur s'était fait l'écho l'an dernier, « en l'absence d'informations détaillées sur le sujet, il est difficile de juger si la notification se fait conformément aux directives en termes de sélection des étudiants et des programmes d'études ». Rien n'indique, en effet, que la France ne notifie pas les coûts imputés à l'ensemble des étudiants issus de pays en développement, qu'ils retournent ou non dans leur pays d'origine et quelles que soient les disciplines étudiées.

C'est ce que laisse penser la réponse au questionnaire de votre rapporteur puisqu'il est fait état d'un total de 143.544 étudiants venant de pays en développement. S'agit-il du total des étudiants venant de ces pays ou bien seulement de ceux répondant aux trois critères de l'écolage : être arrivé après le baccalauréat, travailler sur des domaines liés au développement et retournant dans leur pays. Votre rapporteur n'a pas eu confirmation sur ce point.

VENTILATION GÉOGRAPHIQUE DE L'ÉCOLAGE

Bénéficiaires

Montant
(en millions d'euros)

Effectifs étudiants

EUROPE

18,88

3.708

AFRIQUE

521,94

102.515

- dont Nord du Sahara

308,97

60.685

- dont Sud du Sahara

212,97

41.830

AMÉRIQUE

48,04

9.436

- dont Amérique du Nord et du Centre

15,65

3.074

- dont Amérique du Sud

32,39

6.362

ASIE

141,33

27.758

- dont Moyen-Orient

45,48

8.932

- dont Asie Centrale et du Sud

10,63

2.088

- dont Extrême-Orient

85,22

16.738

OCÉANIE

0,65

127

Total

730,83

143.544

RÉPARTITION DES ÉTUDIANTS PAR MATIÈRE ÉTUDIÉE

Matières pratiquées

Nombre
d'étudiants

répartition
(en %)

Administration économique et sociale

7.538

5.25

Droit/sciences politiques

15.411

10.74

Langues

14.044

9.78

Lettres, sciences langues

10.310

7.18

Médecine

14.132

9.85

Odontologie (chirurgie dentaire)

1.233

0.86

Pharmacie

1.691

1.18

Sciences nature et vie

6.703

4.67

Sciences économiques et gestion

24.112

16.80

Sciences structure matière

13.379

9.32

Sciences technologie, ingénierie

18.702

13.03

Sciences humaines et sociales

15.259

10.63

Sciences et Techniques Activité Physique et Sportive

1.031

0.72

Total

143.544

100

b) les crédits d'aide aux réfugiés

Le deuxième poste significatif de dépenses budgétaires déclaré au titre de l'aide publique au développement est l'aide aux réfugiés. Ces dépenses étaient de 261 millions d'euros en 2002, elles devraient être de 458 millions d'euros en 2005 et de 467 millions en 2006.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES POUR L'ACCUEIL DES RÉFUGIÉS NOTIFIÉES EN APD

(en millions d'euros)

graphique
graphique

Source : les notes du jeudi, numéro 22, éditées par le Service de la stratégie, des moyens et de l'évaluation, DGCID, MAE, janvier 2005

Les directives du CAD permettent normalement de comptabiliser, d'une part, les dépenses engagées pour l'aide aux réfugiés dans les PED et, d'autre part, certaines dépenses engagées pour l'accueil des réfugiés dans les pays donateurs les douze premiers mois de leur séjour. Toutefois, une étude présentée au CAD en 2000 met en évidence les disparités de comptabilisation entre les pays membres du CAD et relève les contradictions entre les catégories de dépenses notifiées par un même pays. Il n'existe pas de consensus, parmi les pays membres du CAD, sur la pertinence de comptabiliser ces dépenses. Ainsi, en 2000, seuls deux pays, le Royaume Uni et le Luxembourg, refusaient de comptabiliser l'aide aux réfugiés octroyée sur leur sol, considérant que ces dépenses ne contribuaient pas à l'aide publique au développement. Huit autres ne comptabilisaient pas ces dépenses du fait de la difficulté de collecter les données, tandis que quatorze pays comptabilisaient une part plus ou moins importante de leurs dépenses.

La France, quant à elle, semble avoir choisi de déclarer la quasi-totalité de ses dépenses d'accueil des étrangers au titre de l'APD.

II.- UN PILOTAGE QUI S'AMÉLIORE, NOTAMMENT GRÂCE À LA LOLF

Décision politique forte du gouvernement Jospin, la réforme de la coopération décidée en 1998 a pu laisser un goût d'inachevé chez certains acteurs du développement. Il s'agissait néanmoins d'une étape indispensable dans le processus de modernisation de nos structures et de nos pratiques, parfois encore trop marquées par des réflexes post-coloniaux.

Ces trois dernières années ont été l'occasion de faire un premier bilan de cette réforme et de la prolonger. Le Comité interministériel de coopération internationale et du développement (Cicid) du 20 juillet 2004 a entamé une profonde réforme du pilotage de l'aide publique au développement française, réforme dont les déclinaisons ont été précisées lors du Cicid du 18 mai dernier.

Cette évolution a par ailleurs coïncidé avec la mise en œuvre progressive de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances, qui est également un puissant facteur de modernisation dans le sens d'une plus grande transparence et d'une meilleure lisibilité de cette politique désormais essentielle. L'application de la LOLF à l'aide publique au développement se traduit incontestablement pour le Parlement, et donc pour la démocratie, par un grand progrès.

Cette double modernisation du pilotage, d'une part, et du débat parlementaire d'autre part constitue indiscutablement un point positif qui doit être salué.

A.- LA RÉNOVATION DU DISPOSITIF DE PILOTAGE : UN PROGRÈS AU CONDITIONNEL

L'an dernier, votre rapporteur s'était longuement fait l'écho de l'analyse menée par le comité d'aide au développement de l'OCDE sur la politique d'aide publique au développement de la France. Même si elle saluait l'effort quantitatif observé (tout en soulignant le rôle primordial des annulations de dettes et en s'interrogeant sur la capacité de la France à prendre le relais de ces annulations avec des crédits budgétaires), l'analyse était particulièrement critique sur l'organisation institutionnelle de cette politique publique : elle soulignait la faiblesse du pilotage général, la place prépondérante et excessive du Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie, l'insuffisante prise en compte des objectifs du Millénaire et, plus généralement, l'absence de vision unifiée du dispositif de coopération français.

La réforme décidée en mai 2004 et confirmée en juillet dernier avait pour ambition de répondre à ces critiques. Les intentions sont louables et vont dans le bon sens. Seul le temps nous dira si elles auront surmonté les nombreux obstacles existants.

1.- Un schéma institutionnel renouvelé

a) le Comité interministériel de coopération internationale et du développement

La réforme de 2004-2005 renforce le rôle du CICID comme instance de définition des orientations de la politique française d'aide publique au développement : contours de la ZSP, objectifs et modalités de l'APD, cohérence des priorités géographiques et sectorielles, suivi et évaluation des politiques et instruments d'APD.

Présidé par le Premier ministre, il est composé des ministres les plus directement concernés par les questions de développement. Le ministère des Affaires étrangères (DGCID) et le ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie (Direction générale du Trésor et des politiques économiques - DGTPE) en assurent conjointement le secrétariat.

Sa création, en 1998, a permis d'améliorer la coopération interministérielle. Il remplit son rôle d'instance de définition des objectifs de la politique d'APD, en fixant ses grandes orientations et objectifs communs. Cela constitue un progrès dans la lisibilité de cette politique publique. Il a également permis d'améliorer la concertation entre les différents acteurs publics du développement, en particulier à travers la création de groupes de travail interministériels chargés de préparer les CICID.

Cependant, la tenue des CICID s'est avérée très irrégulière (il ne s'est réuni que cinq fois depuis sa création) et, comme le soulignait le CAD, dans l'examen par les pairs de l'APD française en 2004, il gagnerait en efficacité à tenir des réunions plus régulières.

b) le ministre délégué à la Coopération comme chef de file ?

Le ministre délégué à la Coopération, au Développement et à la Francophonie devient le chef de file au sein du gouvernement pour l'aide publique au développement, sous l'autorité du ministre des Affaires étrangères. À ce titre, il coordonne les différents acteurs de la coopération française, veille à la bonne réalisation des prévisions et préside la Conférence d'orientation stratégique et de programmation (COSP).

Il représente également le gouvernement lors des discussions budgétaires au Parlement, nonobstant le caractère interministériel de la mission Aide publique au développement. Pour autant, votre rapporteur spécial s'interroge sur la capacité du titulaire de ce poste, indépendamment de la qualité des personnes désignées, à imposer ces arbitrages au ministère de l'économie et des finances et, en particulier, à la très puissante direction générale du Trésor et de la politique économique. Cela nécessitera un certain courage politique et des soutiens forts dans les lieux d'arbitrage interministériel.

c) La Conférence d'orientation stratégique et de programmation (COSP)

Afin de mieux organiser le travail interministériel dans le cadre de la mise en œuvre de l'APD, une instance de pilotage stratégique du dispositif est créée, la COSP. Celle-ci se réunit une fois par an. Préparée par le co-secrétariat du CICID et présidée par le ministre délégué chargé de la coopération et du développement, elle coordonne l'action de l'ensemble des ministères en matière d'APD.

Il lui revient de valider les DCP (voir ci-dessous) et les stratégies sectorielles et d'établir la programmation indicative des ressources allouées par secteur et par pays sur la base de critères de sélectivité. Il lui revient en outre d'examiner les projections françaises d'APD et le Document de politique transversale prévu par la LOLF. Enfin, elle coordonne les actions de communication en matière d'aide publique au développement, en liaison avec le Haut conseil de la coopération internationale (HCCI). La société civile y a un représentant. Les collectivités locales devraient également être associées aux travaux de la COSP.

d) L'ambassadeur comme coordinateur au niveau local

Le rôle de l'ambassadeur devient central, puisqu'il est en charge de la négociation des DCP avec le gouvernement du pays récipiendaire, en lien avec le MAE. Surtout, il assure désormais l'exercice de coordination générale des acteurs publics français sur le terrain (Service de coopération et d'action culturelle de l'ambassade, antenne de l'AFD,...) pour donner plus de cohérence à la politique française de coopération au développement dans un pays donné. Il est informé et exerce un contrôle sur l'instruction et le suivi de l'aide-projet, des aides-budgétaires et des C2D. Il est responsable du dialogue avec le pays récipiendaire.

Votre rapporteur se réjouit de cette indispensable évolution. Il s'interroge néanmoins : cela suppose une profonde évolution des mentalités tant de la part des diplomates, qui ont parfois tendance à négliger les problématiques de développement, que des acteurs de terrain, en premier lieu de l'AFD, qui privilégient la défense de leur indépendance face à une machine diplomatique jugée trop lointaine.

2.- De nouvelles méthodes de programmation

a) la définition de sept secteurs prioritaires

L'ambition de la réforme est de rapprocher nos actions de coopération des objectifs du Millénaire. Sept priorités ont été identifiées : l'éducation, l'eau et l'assainissement, la santé et la lutte contre le sida, l'agriculture et la sécurité alimentaire, la protection de l'environnement et de la biodiversité, les infrastructures en Afrique sub-saharienne et le développement du secteur productif. Un chantier supplémentaire, sur l'enseignement supérieur et la recherche, a été ouvert lors du dernier CICID.

Des consultations de la société civile ont été organisées dans le cadre de l'élaboration de ces stratégies. Le communiqué du CICID de juillet 2004 indique que, chaque année, une table-ronde réunira les acteurs de la coopération (ministères, ONG, AFD, secteur privé) dans chacun de ces secteurs, afin de discuter de la mise en œuvre de ces stratégies et de leur évolution. Enfin, le communiqué indique qu'une programmation indicative des ressources pluriannuelles est prévue pour ces secteurs.

À ces secteurs prioritaires s'ajoutent deux lignes transversales : la promotion de la francophonie et la gouvernance. Cette dernière stratégie, qui porte sur la « consolidation de l'État de droit, des droits de l'homme et de la démocratie et renforcer la gestion transparente des affaires publiques » (Cicid du 18 mai 2005), est en cours de définition. Dans le cadre de la réorganisation de la DGCID, une sous-direction spécifique « de la gouvernance démocratique » est créée, qui sera en charge de cette thématique.

b) Un nouvel instrument de gestion de l'aide : le Document cadre de partenariat (DCP)

La réforme favorise la déconcentration de la gestion de la mise en œuvre, au niveau des pays. Le DCP, qui permet une programmation financière annuelle de l'APD par pays, est un élément essentiel du dispositif. Les DCP concernent, dans un premier temps, les trente premiers bénéficiaires de l'aide française et seront élargis, d'ici l'été 2006, à l'ensemble des pays de la ZSP.

Selon les conclusions du CICID, les DCP doivent associer l'ensemble des acteurs et moyens publics de l'aide française. Ils sont élaborés localement, sous l'autorité de l'Ambassadeur, et validés en COSP, après consultation des autorités locales. Ils deviennent les documents de référence de la programmation par pays.

Les DCP visent à renforcer la concentration sectorielle. Pour cela, un DCP retient jusqu'à trois secteurs de concentration de l'aide parmi les sept secteurs définis comme prioritaires par le CICID. Ces trois secteurs doivent concentrer 80 % environ des ressources, tous instruments confondus. La marge de 20 % restante peut être consacrée aux secteurs à dimension régalienne ou à d'autres secteurs prioritaires n'ayant pas été retenus comme secteurs de concentration. Une fois validés, les DCP sont rendus publics.

Officiellement, les DCP s'inscrivent dans les efforts internationaux actuels visant à améliorer l'efficacité de l'aide, via l'harmonisation et la coordination des bailleurs de fonds. Ainsi, les DCP doivent s'inscrire dans les Cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté nationaux et prendre en compte les secteurs et modalités d'intervention des autres bailleurs de fonds. Mais cela ne doit pas signifier un alignement de l'aide bilatérale française sur des cadres contrôlés de facto par les Institutions financières internationales (IFI), au détriment d'une approche respectueuse du partenariat et inscrite dans une démarche de lutte structurelle contre les inégalités et d'appui au développement durable.

3.- Le renforcement de l'Agence française de développement comme opérateur pivot de la coopération française

a) l'élargissement des compétences de l'AFD

Déjà désignée comme telle par la réforme de 1998, l'agence française de développement voit son statut d'opérateur-pivot confirmé et renforcé par la réforme de 2004. Jusqu'en 2005, trois entités se partageaient la mise en œuvre de l'aide : le ministère des Affaires étrangères, le ministère de l'Économie et des Finances et l'AFD. Plusieurs domaines de compétence sectorielle (agriculture, santé, éducation, environnement) continuaient à la fois de relever du ministère des Affaires étrangères et de l'AFD. En réponse aux critiques du CAD, qui estime que ce mode de gestion de l'APD conduit « à des doubles emplois à Paris ainsi que sur le terrain et nécessite un effort accru de coordination », la réforme de 2004-2005 consacre le statut d'opérateur -pivot de l'AFD sur la ZSP, en organisant un transfert de compétences du MAE vers l'AFD.

Le CICID de juillet 2004 a annoncé le transfert, dès 2005, d'une partie de l'aide-projet jusque-là financée par le Fonds de solidarité prioritaire (FSP) du ministère des Affaires étrangères et redéfinit les champs d'intervention respectifs du MAE et de l'AFD. Au sein de la ZSP, l'AFD a désormais la responsabilité exclusive de la mise en œuvre dans les domaines des infrastructures, du développement rural et de l'environnement, de l'éducation, de la formation professionnelle, de la santé, de l'appui au secteur privé et du développement urbain.

Ces transferts reviennent à réduire le champ d'intervention de la DGCID et, donc du Fonds de solidarité prioritaire, et à élargir celui de l'AFD à l'agriculture, à l'environnement, à la santé et à l'éducation de base. Cette évolution inspire deux remarques à votre Rapporteur :

- d'une part, il s'agit de domaines dans lesquels l'expertise du ministère de la coopération était particulièrement élevée, en particulier grâce à l'assistance technique. Il faudra veiller à ce que ce transfert ne se traduise pas par une perte de compétences.

- d'autre part, les domaines dont l'AFD a désormais la charge correspondent peu ou prou aux Objectifs du Millénaire fixés par l'ONU et sur lesquels le ministère des Affaires étrangères vient de procéder à un travail de réflexion stratégique approfondi dans le cadre de la définition des stratégies sectorielles. Où est la cohérence ?

Secteurs respectifs d'intervention du ministère des Affaires étrangères et de l'Agence française de développement.

Ministère des affaires étrangères  :

- soutien à l'État de droit, à la réforme de l'État, à la gouvernance institutionnelle et financière et à la définition des politiques publiques ;

- soutien à la coopération décentralisée et non gouvernementale ;

- appui à la francophonie et à l'enseignement du français ;

- coopération culturelle et scientifique ;

- formation et enseignements supérieurs ;

- recherche.

Agence française de développement :

- agriculture et développement rural ;

- santé et éducation de base ;

- formation professionnelle ;

- environnement ;

- secteur privé ;

- infrastructure et développement urbain.

b) le nécessaire renouvellement des relations entre l'AFD et ses tutelles

La réussite de la réforme suppose un profond renouvellement des relations entre l'agence française de développement et ses tutelles. Le Cicid du 20 juillet 2004 a ainsi décidé la mise en place d'une convention-cadre entre l'État et l'Agence française de développement (AFD) qui « définira les relations entre l'État (MAE, MINEFI, et Outre-Mer) et l'AFD, ainsi que les régimes juridiques applicables aux opérations de l'agence : dons aux pays en développement ; prêts, avances, prises de participation et garanties ; opérations avec les collectivités d'outre-mer. La convention prévoira la possibilité pour un service de l'État de faire appel à l'AFD pour l'exécution d'opérations particulières et selon des modalités ad hoc ».

Un projet de convention-cadre a été présenté au CICID du 18 mai 2005. La mise en œuvre des nouveaux statuts de l'AFD, qui est en cours et devrait intervenir dans les semaines qui viennent, doit permettre la validation du projet définitif de convention-cadre avant la fin de cette année.

L'établissement d'une convention entre l'AFD et l'État doit permettre en un seul document de clarifier et de préciser les relations entre l'AFD et ses tutelles, notamment en application de l'article 5 des statuts en matière d'aide au développement. La convention portera sur la gestion des ressources pour la mise en œuvre des financements de projets (subventions et bonifications de prêts), pour l'aide budgétaire globale, et enfin pour les opérations réalisées pour le compte de l'État (Contrat de Désendettement et de Développement -C2D-, refinancement du FMI).

La convention précise en outre les modalités par lesquelles l'activité de l'AFD s'insère dans les orientations décidées par le gouvernement : documents cadres de partenariat et stratégies sectorielles. Elle clarifie les relations de travail des agences locales de l'AFD avec les ambassadeurs : concertation renforcée, avis des ambassadeurs sur le cycle du projet, consultation sur les nominations, rapport de l'ambassadeur sur la manière de servir du directeur d'agence, intervention de l'ambassadeur à la signature des conventions de dons.

La convention-cadre doit introduire une innovation autorisée par les statuts : celle de pouvoir gérer des opérations pour le compte des collectivités territoriales françaises. Ceci pourra donc encourager les coopérations régionales, y compris de nature économique à partir de nos collectivités d'Outre-mer. Des coopérations décentralisées sur mandat des collectivités métropolitaines seront possibles dès lors que l'AFD intervient dans le financement.

Enfin, la convention-cadre définira les modalités de rémunération de l'Agence, de mise en place des crédits délégués et de paiement de dividende. Ces dividendes seront conservés par l'Agence et mobilisés pour l'aide au développement.

Suite à cette convention-cadre devront intervenir des contrats d'objectifs et de moyens entre chaque ministère et l'AFD. Un projet de contrat d'objectifs et de moyens entre le MAE et l'AFD est en cours d'élaboration. Il définit notamment, dans le cadre des statuts et de la convention-cadre, les conditions de gestion des crédits délégués par le MAE à l'AFD, pour la mise en œuvre de projets et pour l'assistance technique. Il précise les relations de travail entre le MAE et l'AFD concernant particulièrement le pilotage stratégique de l'aide au développement de la France, qui est de la responsabilité du MAE, ainsi que dans la réflexion sur les grands débats internationaux sur le développement. La finalisation du contrat d'objectifs est subordonnée à l'avis que rendra le Conseil d'État concernant les nouveaux statuts de l'AFD et à la forme définitive de la convention-cadre qui sera signée.

Ce contrat d'objectifs et de moyens doit impérativement être pour le MAE l'occasion de réaffirmer sa tutelle sur l'AFD en lui fixant des objectifs précis et en réaffirmant son rôle premier dans l'élaboration de la doctrine française en matière d'aide publique au développement.

B.- LA MISE EN œUVRE DE LA LOLF EST UN OUTIL DE TRANSPARENCE ET DE LISIBILITÉ

Parallèlement à cette tentative d'amélioration du pilotage, la mise en œuvre de la LOLF permet au Parlement d'avoir une meilleure lisibilité de cette politique publique essentielle qu'est l'aide publique au développement. Pour la première fois aura lieu au Parlement un débat exclusivement consacré à l'aide publique au développement et non plus perdu au sein du budget du ministère des affaires étrangères. Enfin, et il s'agit là d'un progrès important, ce débat sera sanctionné par un vote grâce auquel le Parlement approuvera, ou désapprouvera, la politique d'aide publique au développement menée par le gouvernement.

1.- Une maquette très satisfaisante

La nomenclature budgétaire qui nous est proposée aujourd'hui constitue, si l'on regarde le champ des possibles d'hier, un indéniable succès. Alors que le ministère des affaires étrangères avait un temps envisagé de ventiler ses crédits d'aide publique au développement entre quatre programmes différents, la pression du Parlement et le bon sens, tout simplement, ont in fine permis d'isoler ces crédits au sein d'un seul programme.

Ceci a permis la création d'une mission interministérielle Aide publique au développement rassemblant le programme du Ministère des affaires étrangères Solidarité à l'égard des pays en développement et le programme du Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie Aide économique et financière au développement. Il s'agit d'un progrès indiscutable : le Parlement dispose désormais d'un véhicule, la mission, pour servir de support à une discussion annuelle sur l'aide publique au développement.

Cette discussion peut désormais légitimement porter sur les crédits du Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie dont l'importance dans notre politique d'aide publique au développement, particulièrement sous son angle multilatéral, n'est plus à démontrer.

Certes, cette mission ne rassemble pas l'ensemble des crédits budgétaires participant à l'effort d'APD de la France mais cela s'explique pour des raisons de technique budgétaire insurmontables.

Les crédits d'écolage et d'accueil des réfugiés, très importants quantitativement, sont évalués ex-post et cela n'aurait eu aucun sens politique, et encore moins technique, de les isoler au sein de programmes distincts.

Par ailleurs, un outil essentiel de l'aide publique au développement est bien sûr la politique de prêts qui, pour des raisons juridiques inscrites dans la LOLF, ne transite pas par le budget général mais par un compte de concours financier. Ce compte de concours financier, créé par l'article 31 du projet de loi de finances pour 2006, fait d'ailleurs l'objet d'une mission Prêts à des États étrangers composée de trois programmes :

- Prêts à des États étrangers, de la Réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation des projets d'infrastructure ;

- Prêts à des États étrangers en vue de la consolidation de dettes envers la France ;

- Prêts à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers.

Cette mission, dont votre rapporteur spécial a également la charge, sera discutée en même temps que la mission Aide publique au développement, permettant de faire l'unité entre ces deux modalités d'une même politique, et fera l'objet d'un vote distinct ce qui contraste singulièrement avec la pratique de l'ordonnance de 1959 qui prévoyait un vote unique pour l'ensemble des comptes spéciaux du Trésor.

Enfin, il faut rappeler que les parlementaires disposent d'un droit d'amendement étendu qui leur permet de transférer des crédits d'un programme à un autre, dans le cadre d'une même mission. Ainsi, n'importe quel parlementaire pourra-t-il proposer de réduire les crédits de l'aide budgétaire directe inscrite sur le programme Aide économique et financière au développement pour abonder la politique des bourses inscrite sur le programme Solidarité à l'égard des pays en développement.

2.- Des améliorations limitées à la maquette peuvent être apportées

Malgré ces incontestables progrès, quelques réserves peuvent être émises concernant la répartition des crédits entre les deux programmes de la mission Aide publique au développement. On ne peut que constater la prédominance multilatérale du programme Aide économique et financière au développement puisque ce type de crédits représente 63 % du total du programme.

Malgré cela, deux contributions multilatérales très importantes sont inscrites sur le programme du MAE, en rendant la lecture parfois difficile : il s'agit bien sûr des contributions au Fonds européen de développement et au Fonds mondial de lutte contre le sida sur lesquels la possibilité d'intervention et de pilotage est très limitée. Il semblerait plus cohérent que ces dotations soient inscrites sur le programme du Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie. Votre rapporteur souhaite que cette solution soit étudiée.

Inversement, le transfert récent de l'aide budgétaire à Bercy alors qu'il s'agissait d'une compétence du Ministère des affaires étrangères nous semble discutable. Sous réserve d'un examen approfondi de cette question d'ici l'an prochain, votre rapporteur se réserve le droit de déposer un amendement opérant le transfert de ces crédits dans le cadre de la discussion du prochain projet de loi de finances. À l'issue de ces deux mouvements, la structuration de la mission par objectifs serait plus claire puisque l'on aurait un programme d'aide multilatérale géré par le Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie et un programme d'aide bilatérale géré par le Ministère des affaires étrangères.

3.- L'Agence française de développement doit constituer un opérateur au sens de la LOLF

Malgré la proposition en ce sens du ministère des affaires étrangères, le Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie n'a pas souhaité faire de l'AFD un opérateur de l'État, au sens de la LOLF. De quoi s'agit-il ? Dans le cadre de la nouvelle organisation du budget de l'État (LOLF), les politiques publiques peuvent être en partie mises en œuvre par des « opérateurs ». Pour être qualifié d'« opérateur », un organisme doit répondre à quatre critères définis par la LOLF : être doté de la personnalité morale ; être placé sous le contrôle direct de l'État ; mener une activité majoritairement non marchande ; contribuer à la mise en œuvre d'une politique de l'État dont la traduction se trouve dans la loi de finances. La mise en œuvre des programmes relevant de la mission APD associe aujourd'hui six opérateurs de l'État (1).

L'AFD, pourtant opérateur pivot de la politique d'aide publique au développement française, n'a pas été retenue comme opérateur de l'État au sens de la LOLF. La Cour des Comptes, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances en vue du règlement du budget de l'exercice 2004 considère d'ailleurs comme peu justifiable l'exclusion de l'AFD de la liste des opérateurs du programme Solidarité à l'égard des pays en développement. L'Agence répond pourtant, selon la Cour des Comptes, aux quatre critères définis par la LOLF. En effet, elle dispose de la personnalité morale et son statut d'Établissement public industriel et commercial (EPIC) est compatible avec le statut d'opérateur.

Son autonomie reste relative, puisqu'elle est sous la tutelle des ministères des Affaires étrangères et des Finances et, en tant qu'opérateur pivot de la coopération française, elle contribue à la mise en œuvre de la politique d'aide publique au développement de l'État dont la traduction se trouve dans la loi de finances. Reste un quatrième critère, évoqué pour exclure l'AFD des « opérateurs » au sens de la LOLF : un « opérateur » doit avoir une activité majoritairement non marchande. Sur ce point, la position de la Cour des Comptes est claire, considérant qu'« une telle décision repose sur une interprétation erronée du deuxième critère, qui réserve la catégorie des opérateurs au secteur non marchand : la première mission de l'AFD, qui est l'aide au développement pour le compte du Gouvernement, est bien de nature non marchande, tandis que son activité commerciale reste nettement minoritaire. » (2)

Intégrer l'AFD à la liste des opérateurs de l'État donnerait plus de cohérence et de visibilité à la mission Aide publique au développement. En effet, pour mesurer la contribution des opérateurs, ceux-ci sont intégrés dans les projets annuels de performance, qui présentent les missions de l'opérateur, les actions du programme auquel il se rattache, la nature des liens (modalités de tutelle, contrats d'objectifs...), les objectifs et indicateurs de l'opérateur, la récapitulation et la justification des crédits du programme qui lui sont destinés et la consolidation des emplois du programme avec ceux de l'opérateur. Dans la mesure où le projet annuel de performance 2006 de la mission APD intègre déjà indicateurs en rapport avec les activités de l'AFD et où des contrats d'objectifs doivent être signés avec les ministères de tutelle, il paraît assez contradictoire de ne pas aller au bout de cette logique et d'intégrer l'Agence aux opérateurs de l'Etat.

4.- Les documents budgétaires doivent être améliorés

Premiers du genre, les projets annuels de performance (PAP) qui accompagnent le projet de loi de finances sont des documents à la fois frustrants et prometteurs. Frustrants, car le lecteur habitué aux bleus habituels a du mal à retrouver ses repères, à repérer rapidement les informations qu'il avait l'habitude de chercher. En effet, le principe de la LOLF est une moindre spécialisation des crédits (les programmes sont 6 fois moins nombreux que les anciens chapitres) et une nomenclature non plus organisée autour du type de dépense (personnel, fonctionnement, investissement...) mais bien autour de sa finalité.

Aussi est il parfois difficile de s'y retrouver. On dispose néanmoins dans les PAP de nouvelles sources d'information et d'un nouveau mode de présentation de ces informations qui rendent la lecture de ce document plus accessible au non-spécialiste.

Pour autant des progrès peuvent encore être faits concernant la justification au premier euro : si celle-ci est riche et détaillée s'agissant du programme économique et financier au développement, celle du programme Solidarité à l'égard des pays en développement, est encore insuffisante, voire parfois indigente. Certes, l'exercice était beaucoup plus difficile car les activités sont beaucoup plus nombreuses, plus complexes et les acteurs beaucoup plus nombreux. Néanmoins, de nombreuses informations manquent. Les chiffres 2005 sont régulièrement donnés mais c'est rarement le cas pour les chiffres 2006. Certes une telle précision n'aurait qu'une valeur indicative, du fait de la fongibilité accordée par la LOLF, mais cela aiderait tout de même le Parlement à avoir une idée plus précise du sens de son vote. Votre rapporteur souhaite donc qu'un effort en ce sens soit fait l'an prochain.

S'agissant du Document de politique transversale, celui-ci a vocation à rassembler dans un même document l'ensemble des objectifs et des indicateurs inscrits sur les programmes concourant à l'aide publique au développement. Le DPT dont a eu connaissance, bien que tardivement votre rapporteur, remplit parfaitement sa mission et, sous réserve de certaines améliorations, pourrait dès l'année prochaine remplacer le jaune « État récapitulatif des crédits concourant à la coopération avec les pays en voie de développement ». Votre rapporteur souhaite en particulier que soient conservées les données figurant dans la première partie du jaune « Effort d'aide publique au développement » afin de faciliter les comparaisons même si l'annexe 2 apporte des informations très intéressantes. De même, les informations relatives aux effectifs du personnel d'assistance technique doivent trouver leur place dans le DPT.

Définition d'un document de politique transversale

Une politique transversale est une politique publique interministérielle financée à un niveau significatif par l'État, identifiée par le Premier ministre, dont la finalité concerne plusieurs programmes relevant de différents ministères et n'appartenant pas nécessairement à une même mission.

Pour chaque politique transversale, un ministre chef de file, désigné par le Premier ministre, a la responsabilité de coordonner les activités de l'État relevant des différents programmes concernés, en vue de favoriser l'obtention de résultats socio-économiques communs. Le programme relevant du ministre chef de file, de par les fonctions de coordination dont ce dernier est investi, peut donc comporter des objectifs transversaux, qui reflètent les effets conjugués des activités conduites par plusieurs programmes.

Le ministre chef de file a également la responsabilité de produire un document de politique transversale (DPT), en vue du débat budgétaire, qui concrétise sa mission de coordination. Ce document décrit la stratégie globale de la politique transversale et présente, de façon structurée, les objectifs inscrits dans les différents programmes concernés qui la déclinent. Un objectif présent dans le DPT figure nécessairement dans un projet annuel de performances, l'intérêt du DPT étant de démontrer la cohérence entre les objectifs de différents programmes.

5.- Un dispositif de performance perfectible

Le dispositif de performance proposé pour la mission Aide publique au développement est en net progrès par rapport à celui proposé l'an dernier dans l'avant-projet annule de performance qui accompagnait le projet de loi de finances pour 2005.

a) le dispositif de performance du programme Aide économique et financière au développement

Le tableau ci-dessous reprend les objectifs et les indicateurs proposés :

Objectifs et indicateurs du programme Aide économique et financière au développement

Objectif n° 1 : Faire valoir les priorités stratégiques françaises au sein des banques et fonds multilatéraux :

- Part des ressources subventionnées des BMD et des fonds multilatéraux affectée aux secteurs prioritaires pour la France.

- Part des ressources subventionnées des BMD et des fonds multilatéraux qui sont affectés aux zones géographiques prioritaires.

Objectif n° 2 : Participer au rétablissement de la stabilité macroéconomique et à la création des conditions de la croissance des pays en développement :

- Part de l'aide budgétaire française qui s'inscrit dans un processus harmonisé entre les bailleurs de fonds et/ou dans un cadre régional.

Objectif n° 3 : Assurer une gestion efficace et rigoureuse des crédits octroyés à l'aide au développement :

- Montant d'aide au développement apportée par l'AFD sous forme de prêt par euro de subvention de l'État.

- Part des projets de l'AFD et de la Banque mondiale qui sont jugés au moins satisfaisants dans la réalisation de leurs objectifs de développement.

- Part des projets de l'AFD et de la Banque mondiale qui ont fait l'objet de mesures correctrices parmi ceux qui ont connu des problèmes à l'exécution.

Objectifs n° 4 : Promouvoir l'expertise française dans le domaine du développement durable et de la gouvernance économique et financière.

- Nombre de jours consacrés à l'assistance technique internationale par le MINEFI par million d'euro de crédit budgétaire.

- Ratio entre les ressources propres de l'ADETEF et sa dotation budgétaire.

- Part des études FASEP terminées ayant donné lieu à la réalisation du projet d'investissement.

- Part des études FASEP terminées ayant donné lieu à la réalisation du projet étudié avec la participation d'au moins une entreprise française.

La principale difficulté ici est que l'essentiel du programme est constitué de contributions à des fonds internationaux sur lequel le responsable de programme n'a qu'un impact, certes non nul, mais limité.

Le dispositif proposé est relativement satisfaisant, compte tenu de cette contrainte. En particulier, les indicateurs proposés pour le premier objectif sont intéressants car ils permettent, d'une part, de faire un lien avec les Objectifs du Millénaire que s'est assignée la communauté internationale et, d'autre part, de souligner les priorités géographiques de la France. Quelques critiques néanmoins :

- Les objectifs concernant l'Agence française de développement ne sont pas suffisamment développés, d'autant qu'un contrat d'objectifs et de moyens doit bientôt être signé qui pourrait utilement être repris dans le dispositif de performance. Des indicateurs sur les priorités géographiques de l'AFD seraient particulièrement utiles.

- l'objectif concernant les annulations de dette (qui figure dans le dispositif de performance du programme Prêts à des Etats étrangers pour consolidation de dette envers la France) n'est pas satisfaisant. D'une part, une information sur le service de la dette avant et après annulations serait sans doute plus révélatrice. D'autre part, les leviers d'action de la France en ce domaine sont très limités puisqu'elle n'a aucune prise sur le franchissement du point d'achèvement par le pays bénéficiaire. La réflexion doit donc être poursuivie en ce domaine pour trouver des indicateurs qui mesurent à la fois l'efficacité de cette politique d'annulations de dettes et la « valeur ajoutée » apportée par la France.

b) le dispositif de performance du programme Solidarité à l'égard des pays en développement

L'encadré ci-dessous reprend l'ensemble des objectifs et des indicateurs proposés pour ce programme. L'on constate que le Ministère des affaires étrangères a tenu compte des remarques formulées par la mission d `information relative à la mise en œuvre de la LOLF au printemps dernier, ce dont on doit se féliciter.

Les objectifs et les indicateurs sont pour la plupart intéressants et appropriés. On peut néanmoins regretter le faible nombre des objectifs de qualité de service et d'efficience. Seul l'objectif n°5 est concerné. On aurait pu imaginer des indicateurs sur la gestion des projets FSP en termes de respect des devis et des calendriers. De même est très regrettable, et révélatrice, l'absence de tout objectif ou indicateur concernant l'Agence française de développement. Il est impératif que l'on retrouve des éléments du futur contrat d'objectifs et de moyens dans le dispositif de performance. Enfin, est à déplorer l'absence de tout objectif ou indicateur concernant l'aide humanitaire d'urgence.

Malgré ce satisfecit, votre rapporteur regrette vivement l'absence de données chiffrées sur la quasi-totalité des indicateurs ce qui en réduit singulièrement l'intérêt. Il est indispensable que, dès le projet de loi de finances pour 2007, l'ensemble des indicateurs soit renseigné. Dans son travail sur le dispositif de performance de cette mission, la Cour des comptes soulignait d'ailleurs « la faiblesse des systèmes d'informations dont dispose le ministère des affaires étrangères. A cet égard le premier défi de la cellule de contrôle de gestion centrale (CCG) dont s'est dotée la direction générale de l'administration en novembre 2003, est de mettre en place des relais, au sein des directions d'administration centrale et du réseau du ministère des affaires étrangères, pour obtenir des remontées d'informations fiables et homogènes ».

Objectifs et indicateurs du programme solidarité

à l'égard des pays en développement

Objectif n° 1 : Contribuer à l'atteinte des objectifs du Millénaire adoptés par les Nations Unies concernant la lutte contre la pauvreté et le développement durable :

- Proportion de l'aide gérée par la MAE dirigée vers l'Afrique sub-saharienne, les PMA et la ZSP.

- Proportion de l'aide gérée par la MAE affectée aux principales priorités sectorielles françaises définies au CICID.

- Amélioration de l'accès à l'éducation de base.

Objectif n° 2 : Contribuer à la gouvernance démocratique et à la consolidation de l'État de droit :

- Amélioration de la gouvernance de certains pays.

- Taux de projets associant des ONG et des collectivités territoriales françaises à des partenaires étrangers.

Objectif n° 3 : Promouvoir le développement par la culture, la formation et la recherche :

- Nombre d'élèves inscrits dans les sections scolaires bilingues.

- Nombre d'élèves inscrits dans les filières bilingues universitaires.

- Nombre d'élèves et d'étudiants inscrits dans les établissements culturels.

- Nombre de candidats aux diplômes et certifications de français.

- Nombre des étrangers inscrits dans les 2ème et 3ème cycles de l'enseignement supérieur français.

- Qualité des programmes de recherche associant des chercheurs français et étrangers : nombre de projets bénéficiant de la meilleure note possible / nombre de projets éligibles à la notation.

Objectif n° 4 : Promouvoir l'expertise française dans le domaine du développement durable et de la gouvernance économique et financière.

- Part de l'aide publique au développement européenne et multilatérale allouée à l'Afrique subsaharienne, à la ZSP et aux PMA.

- Proportion de l'aide bilatérale française consentie à des organisations régionales en Afrique subsaharienne.

Objectif n° 5 : Assurer un service culturel et de coopération de qualité.

- Ratio d'efficience du réseau de coopération et d'action culturelle.

CHAPITRE II :

LES CRÉDITS DES MISSIONS AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT ET PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS

La mission Aide publique au développement est dotée dans le projet de loi de finances pour 2006 de 5,3 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et d'un peu plus de 3 milliards d'euros de crédits de paiement contre 2,85 milliards en loi de finances initiale pour 2005. Cette hausse de 150 millions d'euros s'explique par une augmentation de l'aide multilatérale qui permet de compenser une baisse de l'aide publique au développement bilatérale gérée par le ministère des affaires étrangères. Votre Rapporteur a donc choisi de traiter successivement l'aide multilatérale de chacun des programmes puis l'aide bilatérale.

I.- L'APD MULTILATÉRALE : LES CONTRIBUTIONS AUX ORGANISATIONS INTERNATIONALES EN NETTE PROGRESSION

Selon les données fournies dans le jaune « État récapitulatif des crédits concourant à la coopération avec les pays en voie de développement », l'aide multilatérale a représenté en 2004 un peu plus de 34 % de notre aide publique au développement. Ce chiffre devrait être de 28 % en 2005 et de 33 % en 2006.

La France contribue en effet à de nombreux fonds internationaux, dotations qui sont inscrites alternativement sur l'un des deux programmes de la mission Aide publique au développement, sans qu'une logique absolue semble guider ces choix. Le rassemblement de l'ensemble de ces contributions au sein d'un programme unique serait peut-être plus clair. La première de ces contributions est bien sûr celle au Fonds européen de développement qui augmente année après année.

D'ailleurs, l'augmentation des contributions aux organisations internationales explique l'intégralité de l'augmentation des crédits de paiement dont bénéficie la mission Aide publique au développement.

A.- LES CONTRIBUTIONS INSCRITES SUR LE PROGRAMME « AIDE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE AU DÉVELOPPEMENT »

Les crédits de paiement inscrits sur l'action « Aide économique et financière multilatérale » représentent plus de 63 % des crédits du programme géré par le Trésor. C'est en effet la principale contribution de ce programme à la mission aide publique au développement. De même, les autorisations d'engagement inscrites sur ce programme sont très élevées : en effet, il a été décidé d'ouvrit autant d'AE que nécessaire pour couvrir l'ensemble des contributions auxquelles la France s'engage lors de la reconstitution du fonds. Ainsi, au moment de la signature de l'accord, l'on ouvre un nombre important d'AE, signe pour nos partenaires de notre volonté de respecter notre parole, mais également outil de prévision d'ouverture de CP dans les années à venir pour honorer les engagements. Par son vote, le Parlement prend acte du fait qu'il sera nécessaire d'ouvrir, année après année, le montant de CP permettant la couverture des AE.

Ainsi, le niveau de la dotation en AE inscrite sur cette action s'explique, pour l'essentiel, par la signature en 2005, du renouvellement, pour trois ans, de l'Association internationale de développement (AID), grâce à laquelle la Banque mondiale octroie des dons et des prêts concessionnels aux pays en développement éligibles. Plus d'un milliard d'euros d'autorisations d'engagement sont ouverts cette année, les crédits de paiement devant s'étalonner sur les trois prochaines années.

Le tableau ci-dessous présente (en AE et en CP) les fonds financés sur ce programme :

AE

CP

Sous action 1.1 Participation au groupe de la Banque mondiale et au FMI

1.084,3

374,5

Association internationale de Développement

1.073

363,2

FMI - bonification FRPC

11,3

11,3

Sous action 1.2 Participation aux groupes des Banques régionales

0

150,2

Banque africaine de développement

0

3,1

Fonds africain de développement

0

114,2

Fonds asiatique de développement

0

30,4

Société interaméricaine d'investissement

0

1,92

Banque ouest africaine de développement

0

0,55

Sous action 1.3 Contribution aux fonds sectoriels

43,3

87,7

Fonds international de développement agricole

0

8

METAC

0

0,3

AFRITAC

1

0,3

Fonds de Doha pour le développement

1

1

Fonds cadre intégré d'assistance technique en faveur des pays les moins avancés (PMA)

5

0,5

Fonds de lutte contre la poliomyélite

0

10

Initiative pour l'alimentation en eau et l'assainissement en milieu rural

0

10

Northern Dimension Environmental Partnership

0

3,6

Chernobyl Shelter Fund

0

4,5

Fonds pour l'environnement mondial

0

41

Protocole de Montréal

40,8

8,4

Total

1.127,6

612,4

1.- Participations au groupe de la Banque mondiale et au FMI

a) Association internationale de développement

Le groupe Banque mondiale regroupe plusieurs entités qui mobilisent chacune des leviers d'action distincts pour favoriser l'aide au développement. La Banque mondiale stricto sensu inclut la Banque internationale de reconstruction et de développement (BIRD) et l'Association internationale de développement (AID).

Quels que soient l'entité et le financement, la Banque s'efforce d'intervenir en cofinancement afin d'accroître l'impact de ses ressources. L'AID octroie des crédits ne portant pas intérêt à longue échéance (35-40 ans). Les bénéficiaires disposent d'une période de grâce de 10 ans pendant lesquels ils ne font aucun versement. L'association accorde également une part de financement sous forme de dons, actuellement à hauteur de 18 % à 21 % de ses ressources, part qui devrait augmenter dans le cadre de l'AID 14. Seuls les pays pauvres peuvent bénéficier de ces dons et crédits (Revenu annuel / hab. inférieur à 875 $). En 2002, 8,1 milliards de dollars de financement leur ont ainsi été apportés.

Afin de couvrir le coût de ces ressources très avantageuses, les bailleurs de fonds de l'AID se réunissent tous les trois ans pour décider du montant des ressources additionnelles qui seront nécessaires pour financer le futur programme de prêts (reconstitution du fonds). Un accord a été trouvé en février dernier prévoyant une contribution totale de 18 milliards de dollars US à l'AID afin de permettre un accroissement d'au moins 25 % du montant de ses dons et prêts

L'AID est l'un des principaux bénéficiaires de l'aide économique et financière française au développement. La France s'est engagée le 22 février 2005 à verser 1.073 millions d'euros, soit 7,2 % du fonds (ce qui fait de la France le cinquième contributeur). Le versement s'effectuera en trois années successives pour des montants respectifs de 363,2, 357,3 et 352,5 millions d'euros.

b) FMI Bonification FRPC

La facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC) est le guichet par lequel le FMI accorde des prêts assortis d'un taux d'intérêt de 0,5 % aux pays à faible revenu (PNB/habitant inférieur à 895 $ en 2003). Les programmes appuyés reposent sur des stratégies globales d'allégement de la pauvreté qui sont pilotées par les pays.

2.- Participation aux groupes des Banques régionales

a) Banque africaine de développement

Le groupe BAfD, créé en 1964, est le deuxième bailleur multilatéral en Afrique, derrière la Banque mondiale. Comme cette dernière, elle possède un guichet concessionnel créé en 1972, le Fonds Africain de Développement, et un guichet non-concessionnel, la BAfD. Son siège est à Abidjan, site qu'elle a abandonné en décembre 2002 en raison des troubles politiques pour s'installer temporairement à Tunis. Elle emploie un millier de salariés.

Outre le financement d'un large éventail de projets et de programmes de développement, la Banque offre des financements au secteur public, dont des prêts d'appui aux réformes, au secteur privé et prend des participations dans divers projets. Elle fournit également une assistance technique aux projets et programmes d'appui institutionnels, encourage les investissements de capitaux publics et privés, alloue des dons pour les opérations humanitaires d'urgence et répond aux demandes d'assistance pour la coordination des plans et des politiques de développement des pays membres régionaux.

La BAfD a approuvé, en 2003, 28 accords de prêts et dons approuvés pour un montant de 1.108 millions de dollars

Le Fonds africain de développement constitue le guichet concessionnel créé en 1972 de la Banque africaine de développement (BAD). Les 114,2 millions d'euros budgétés correspondent au deuxième des trois versements de notre participation à la dernière reconstitution de ce fonds, dont la France est devenue le premier contributeur en 2005. Le FAD est l'une des principales sources de financements concessionnels de l'Afrique sub-saharienne et bénéficie d'un large soutien des donateurs, conformément à la priorité placée en faveur de l'aide à l'Afrique en 2005.

b) Fonds asiatique de développement (FAsD)

Le Fonds asiatique de développement permet à la Banque asiatique de développement (BAsD) d'accorder des dons et des prêts concessionnels à certains pays pauvres d'Asie. Dans le cadre de la huitième reconstitution de ce fonds, la France s'est engagée le 12 mai 2004 à verser 121,8 millions d'euros qui seront payés par quatre annuités égales de 2005 à 2008.

c) Société interaméricaine d'investissement (SII)

La SII est une institution multilatérale qui est entrée en activité en 1989 pour promouvoir le développement économique de ses pays membres d'Amérique latine et des Caraïbes par le biais du financement des entreprises privées. Elle fait partie du Groupe de la Banque interaméricaine de développement.

d) Banque ouest africaine de développement

La Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD) est l'institution commune de financement du développement des États de l'Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA), transformée en une Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) par Traité en date du 10 janvier 1994. Elle a été créée par un Accord signé le 14 novembre 1973 par les États membres de l'UMOA : Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Mali, Niger, Sénégal et Togo. La Guinée Bissau les a rejoints en 1997.

3.- Contributions aux fonds sectoriels

a) Fonds International de Développement Agricole (FIDA)

Le FIDA a été fondé en 1977 à l'initiative des États membres de l'OPEP ; il est maintenant rattaché au système de l'ONU. Le FIDA finance, essentiellement par prêt, des projets de lutte contre la pauvreté en milieu rural, dans près d'une centaine de pays. Sa compétence dans son domaine de spécialité est unanimement reconnue. Il cible "les populations les plus pauvres en milieu rural". Dans le cadre de la sixième reconstitution de ce fonds, la France s'est engagée à verser 8 millions d'euros par an, soit 24 millions d'euros sur les trois années de reconstitution (2004-2006).

b) Fonds AFRITAC et METAC

Le FMI a établi cinq centres régionaux d'assistance technique, dont le Centre d'assistance technique du Moyen-Orient (METAC), pour aider les pays à renforcer les moyens humains et institutionnels dont ils disposent pour concevoir et promulguer des politiques favorisant la croissance et le recul de la pauvreté. Ces centres organisent par ailleurs des formations à l'intention des fonctionnaires des pays membres par l'intermédiaire d'un réseau de six centres régionaux de formation. Créé à Beyrouth (Liban), en 2004, le METAC dessert dix pays du Moyen-Orient (Afghanistan, Égypte, Irak, Jordanie, Liban, Libye, Soudan, Syrie, Cisjordanie et bande de Gaza, Yémen). La France s'est engagée auprès du FMI à financer ce centre d'assistance technique sur trois ans à hauteur de 1 million d'euros sur la période 2004-2006.

Dans le cadre de cette même initiative, deux centres régionaux d'assistance technique (AFRITAC) ont été créés en Afrique : l'un en Afrique de l'Ouest (couvrant le champ des 8 États membres de l'Union économique et monétaire ouest africaine ainsi que la Guinée, la Mauritanie et le Ghana), l'autre en Afrique de l'Est (Érythrée, Éthiopie, Kenya, Ouganda, Rwanda et Tanzanie). Sur la période 2003-2005, AFRITAC Ouest a été financé par la France à hauteur de 1 million d'euros. Il est d'ores et déjà prévu que le FMI sollicite la France courant 2006 pour continuer à aider ce centre à hauteur de 1 million d'euros sur trois ans, soit un montant identique à la première phase triennale de notre soutien.

c) Fonds de Doha pour le développement

Le Fonds de Doha pour le développement a pour objet de financer des formations de politique commerciale et d'analyse des accords de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour des fonctionnaires de pays en voie de développement.

d) Fonds cadre intégré d'assistance technique en faveur des pays les moins avancés (PMA)

Lancé en 1997, ce dispositif rassemble des Institutions financières internationales (IFIs) qui joignent leurs efforts à ceux des donateurs et des PMA pour répondre aux besoins de ces derniers en matière de développement du commerce. Le cadre intégré servira de base aux propositions de renforcement du rôle des IFIs dans ce secteur ; suivant les prochaines décisions de la Banque mondiale et du FMI, il pourrait devenir le dispositif central de la communauté internationale en matière d'aide au commerce.

e) Fonds de lutte contre la poliomyélite

Le Fonds de l'Organisation mondiale de la santé "Initiative pour l'éradication mondiale de la poliomyélite" a été créé en 1988. L'initiative pour l'éradication mondiale de la poliomyélite a pour objectifs :

- Interrompre la transmission du poliovirus sauvage dès que possible et certifier que toutes les régions de l'OMS sont exemptes de poliomyélite d'ici la fin de 2005 ;

- Mettre en œuvre le programme de travail de la phase finale contre la poliomyélite, avec le confinement des poliovirus, la certification mondiale et la mise au point d'une politique vaccinale à suivre après l'éradication ;

- Contribuer au développement des systèmes de santé en renforçant la vaccination systématique et la surveillance des maladies transmissibles.

Le nombre de cas, estimé en 1988 à plus de 350.000, a diminué de plus de 99 % au cours des quinze dernières années pour n'être plus que 1919 cas déclarés en 2002. Durant cette même période, le nombre de pays où sévit la polio a été ramené de 125 à 7. La France s'est engagée en 2003 à contribuer à hauteur de 30 millions d'euros. Les 10 millions budgétés dans le projet de loi de finances correspondent à la tranche annuelle.

f) Initiative pour l'alimentation en eau et l'assainissement en milieu rural

L'initiative pour l'approvisionnement en eau et l'assainissement en milieu rural de la BAfD vise un accès à l'eau à 80 % des populations rurales africaines d'ici 2015. Étroitement coordonnée avec le NEPAD, l'initiative est articulée autour de programmes par pays, dont l'objet est l'investissement dans les secteurs de l'approvisionnement en eau et de l'assainissement. La France a annoncé en avril 2005 une contribution de 40 millions d'euros, dont 14 millions d'euros seront décaissés dès 2005. 10 millions sont inscrits au projet de loi de finances pour 2006.

g) Northern Dimension Environmental Partnership (NDEP)

Lancé en 2001 par le Conseil européen de Göteborg, le NDEP comporte un volet environnement et un volet nucléaire. La participation française est fléchée sur le volet nucléaire, destiné à assurer l'assainissement des bases de sous-marins nucléaires russes désarmés en mer de Barents (Nord-Ouest de la Russie). La France a annoncé une participation de 40 millions d'euros en 2003 et 2004.

h) Fonds sarcophage de Tchernobyl (CSF)

Le fonds CSF, géré par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, a pour objet la stabilisation de l'ancien sarcophage et la construction de la nouvelle arche qui confinera le réacteur accidenté de Tchernobyl. Les difficultés techniques rencontrées dans la réalisation du projet de sarcophage sur le réacteur endommagé de la centrale de Tchernobyl ont rendu nécessaire une reconstitution du fonds CSF. La France y participera en 2006 à hauteur de 4,5 millions d'euros.

i) Fonds pour l'environnement mondial (FEM)

Le Fonds pour l'environnement mondial (FEM) est un fonds multilatéral alimenté par des contributions volontaires, géré conjointement par la Banque mondiale, le programme des Nations unies pour le développement et le programme des Nations unies pour l'environnement. Il a 6 domaines d'intervention : la protection de la couche d'ozone, la lutte contre l'effet de serre, la protection de la diversité biologique, la protection des eaux internationales et la lutte contre la dégradation des sols et les polluants organiques persistants. La France s'est engagée dans le cadre de la troisième reconstitution (2002-2005) du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) à contribuer à hauteur de 164 millions d'euros sur 4 ans, soit 41 millions par an.

j) Fonds pour le Protocole de Montréal

Le Fonds multilatéral aux fins d'application du protocole de Montréal, relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone, a été créé par l'amendement de Londres au dit protocole. Ce fonds « couvre tous les surcoûts convenus pour les parties [pays en développement] afin qu'elles puissent observer les mesures de réglementation prévues par le protocole ». Les négociations pour la quatrième reconstitution des ressources du Fonds se sont terminées en 2002. La part de la France est de 40,8 millions d'euros, versée en trois annuités (2003 à 2005). Une nouvelle reconstitution du fonds est prévue pour la période 2006-2008. 40,8 millions d'euros d'autorisations d'engagement sont ainsi inscrits au projet de loi de finances pour 2006.

B.- LES CONTRIBUTIONS INSCRITES SUR LE PROGRAMME « SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT »

Les crédits de paiement inscrits sur l'action « Participation aux débats sur les enjeux globaux et aux dispositifs multilatéraux d'aide publique au développement » progressent de près de 200 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2006. Hors ces contributions d'ailleurs, le programme recule.

Cette augmentation s'explique pour l'essentiel par la montée en puissance du Fonds pour le sida, la tuberculose et le paludisme et, encore et toujours, du Fonds européen de développement.

1.- Le Fonds pour le sida, la tuberculose et le paludisme

Un temps inscrit sur le budget du ministère de l'économie, le fonds pour le sida est, depuis deux ans, intégralement financé sur le budget du Ministère des affaires étrangères. Encore une fois, votre rapporteur s'interroge sur la logique qui conduit à inscrire tel fonds (la poliomyélite par exemple) à Bercy et tel autre (le Sida) au Quai d'Orsay. N'y aurait-il là qu'une simple volonté d'affichage budgétaire ? À savoir, inscrire dans un budget qui stagne (celui des affaires étrangères) un fonds dont les dotations augmentent, année après année.

En effet, la dotation de la France à ce fonds devrait atteindre 225 millions d'euros en 2006, contre 150 millions d'euros en 2005 et 50 millions les deux années précédentes (lorsqu'il était sur le budget Bercy...). En 2007, cette contribution devrait atteindre 300 millions d'euros.

Rappelons que l'Assemblée générale des Nations-Unies lors de sa session spéciale en 2001 consacrée au SIDA et le sommet du G7 de Gêne de 2001, sont à l'origine de la décision de création d'un Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme. Le Fonds est devenu opérationnel en janvier 2002.

Ce Fonds a été créé en vue d'accroître de manière significative les ressources financières pour lutter contre les trois pandémies de son objet, et affecter ces ressources aux régions les plus nécessiteuses.

Initialement, le Fonds était financé sur une base ad-hoc par des contributions volontaires, non coordonnées dans le temps, de la part, en théorie, de contributeurs tant publics que privés. Dans les faits, plus de 90 % des contributions provenaient des États. Pour pallier les inconvénients de ce système, qui ne donnait au Fonds que peu de prévisibilité de ses ressources futures, celui-ci a adopté un nouveau mode de financement : la reconstitution régulière de ses ressources. Dans ce cadre, les contributions resteront volontaires. Ces cycles de reconstitutions seront complétés par une mobilisation permanente de ressources additionnelles auprès de nouveaux bailleurs.

Ce schéma a été entériné, à l'initiative de la France, par une décision du conseil d'administration en octobre 2003 (malgré l'opposition des États-Unis qui ont déclaré ne pas vouloir participer à de telles conférences de reconstitutions pour le Fonds, tout en continuant d'y contribuer sur une base ad-hoc). Le Conseil de juin 2004 a décidé des modalités pratiques de sa mise en œuvre. La première conférence de reconstitution s'est tenue en 2005 pour couvrir la période 2006/2007. Le fonds dispose de 1,4 milliard de dollars de promesses de dons pour l'année 2005, pour un besoin minimum estimé de 1,7 milliard de dollars.

2.- Les contributions volontaires aux organisations des Nations Unies

Dans la mesure où elles sont à 97 % éligibles à l'aide publique au développement, les contributions volontaires aux organisations du système des Nations Unies figurent désormais au programme Solidarité à l'égard des pays en développement. Par contre, les contributions obligatoires, même quand elles contribuent en partie à l'aide publique au développement, figurent sur le programme Action de la France en Europe et dans le Monde dans la mesure où elles ne couvrent, plus pour l'essentiel, que les dépenses de fonctionnement de ces institutions et leur paiement est donc davantage liée à l'obligation internationale de la France de s'acquitter, en tant qu'État-membre, de sa quote-part au budget.

L'an dernier, votre rapporteur spécial avait vivement regretté la faiblesse des crédits inscrits au titre des contributions volontaires, en particulier concernant le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Sans y voir un lien de cause à effet, ce qui serait présomptueux, le gouvernement a ouvert en loi de finances rectificative pour 2004 20 millions d'euros supplémentaires qui ont été reportés sur 2005. Par ailleurs, 15 millions d'euros ont été ouverts par décret d'avance pour répondre à l'urgence du Tsunami. Unicef a bénéficié de 4 millions d'euros supplémentaires, le CICR de 5 millions et l'OMS de 4 millions. Au total, en 2005, le PNUD aura lui bénéficié de 22 millions d'euros, conformément à l'accord-cadre signé en mai 2004.

En 2006, 50,3 millions d'euros sont inscrits dans le projet de loi de finances ce qui devrait permettre de consolider l'important rattrapage effectué en 2005. Votre rapporteur spécial se réjouit de cette évolution qui permet de joindre ses actes à ses paroles d'adhésion sans réserve au système des Nations Unies.

3.- La participation au Fonds européen de développement (FED)

Selon les statistiques du jaune, l'aide européenne représentait en 2004 64 % de notre aide multilatérale et près de 22 % de notre aide globale. En 2005, ces chiffres seront respectivement de 63,5 % et de 17,8 %. Cette participation se décompose en deux volets : d'une part, la France contribuera à hauteur de 16,57 milliards d'euros au budget de l'Union européenne, budget dont environ 5 % permettent de financer des programmes de développement européen et est donc comptabilisé en aide publique au développement. En 2006, cela devrait représenter 812 millions d'euros. C'est plus que ce qui est inscrit dans le projet de loi de finances au titre du second, et plus connu, volet, à savoir le Fonds européen de développement.

Comme pour le Fonds Sida, votre rapporteur s'interroge sur l'inscription de cette contribution sur le budget du Ministère des affaires étrangères. Celle-ci est récente, elle date de 2002 et ne correspond nullement à une politique mise en œuvre par le Quai d'Orsay puisque les différents FED sont bien sûr négociés au niveau gouvernemental. Il s'agit donc essentiellement d'un guichet dont l'inscription sur ce budget fausse la lisibilité de ce dernier.

a) une dotation 2005 encore insuffisante

Année après année, votre rapporteur spécial regrette la sous-budgétisation de la dotation au Fonds européen de développement (FED). Systématiquement dénoncée par la Cour des comptes, cette sous-dotation est manifestement contraire au principe de sincérité des lois de finances désormais inscrit dans la loi organique relative aux lois de finances. En 2005, 628 millions d'euros étaient inscrits en loi de finances initiale et il est d'ores et déjà établi qu'il sera nécessaire d'ouvrir au moins 60 millions d'euros dans le collectif. Cette situation était prévisible dès le vote de la loi de finances initiale, sans qu'il en ait été tenu compte. La France sera donc amenée à payer des indemnités de retard, qui, comble de la tartufferie, seront déclarées en aide publique au développement...

En 2006, 726 millions d'euros sont inscrits dans le projet de loi de finances et votre rapporteur regrette que cette dotation soit encore insuffisante. L'an dernier, les prévisions de la commission tablaient sur des contributions de la France à hauteur de 800 millions d'euros. On constate en effet une accélération des paiements au titre des différents FED : ils sont passés de 1,5 milliard d'euros par an en moyenne entre 1990 et 1999 à 2 milliards en 2000 et 2001, puis 2,5 milliards en 2003 et 2004 et devraient atteindre 3 milliards d'euros en 2005.

b) la négociation du nouveau FED

Dans le rapport relatif au projet de loi de finances pour 2004, votre rapporteur spécial avait longuement retracé l'historique de la création du FED et le caractère archaïque de son mode de financement, distinct de celui du budget de l'Union européenne. Y était en particulier souligné qu'une budgétisation du FED permettrait à l'Union européenne d'avoir une vision globale des actions extérieures et de la politique de coopération de l'Union, lui conférant ainsi une plus grande lisibilité. Elle permettrait en outre de réintégrer le Parlement dans le circuit institutionnel, en particulier au moment du vote des crédits de paiement lors du débat budgétaire

Le 9ème FED doit prendre fin le 31 décembre 2007, les négociations concernant le 10ème ont donc débuté. Depuis le début, la France défend la budgétisation du FED au sein du budget communautaire. Celle-ci permettrait un rééquilibrage des contributions au principal outil d'aide au développement de l'Union européenne.

États membres

Clé PNB

Clé Budget 1999

Clé 8ème FED

et 9ème FED

Belgique

3,1

3,9

3,92

Danemark

1,9

2,0

2,14

Allemagne

26,0

25,5

23,36

Grèce

1,5

1,6

1,25

Espagne

6,6

7,6

5,84

France

17,2

17,0

24,30

Irlande

0,8

1,3

0,62

Italie

14,2

13

12,54

Luxembourg

0,2

0,2

0,29

Pays-Bas

4,5

6,2

5,22

Autriche

2,6

2,5

2,65

Portugal

1,2

1,5

0,97

Finlande

1,4

1,5

1,48

Suède

2,7

2,8

2,73

Royaume-Uni

16,1

13,4

12,69

Total

100 %

100 %

100 %

Pour la France, cela lui permettrait de faire de substantielles économies : en 2000, la contribution de le France au FED était de 361 millions d'euros, près du double est inscrit au projet de loi de finances pour 2006. Ceci a conduit à une déformation de notre aide au détriment de l'aide bilatérale. Une baisse de notre contribution au FED (qui resterait tout de même de l'ordre de 600 millions d'euros par an) permettrait de dégager des marges de manœuvre budgétaire non négligeables.

Néanmoins, les pays bénéficiant d'une sous-participation au FED, comme le Royaume-Uni ou l'Espagne, ne seront très certainement pas prêts à renoncer à cet avantage. Une décision à l'unanimité étant nécessaire, un compromis sera inévitable. La France ne doit pas hésiter à proposer de revoir à la baisse les ambitions du 10ème FED.

II.- LES MOYENS D'ACTION BILATÉRAUX DE LA MISSION
AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT SONT EN BAISSE

On a vu la très importante progression de l'aide multilatérale du fait, essentiellement, de notre contribution à l'Association internationale de développement gérée par la Banque Mondiale, et de nos participations au Fonds européen de développement et au Fonds Sida. Du côté de l'aide bilatérale, si les crédits du programme Aide financière et économique au développement progressent légèrement, ceux du programme Solidarité à l'égard des pays en développement sont en forte baisse.

A.- LES CRÉDITS D'AIDE BILATÉRALE DU PROGRAMME SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT SONT EN BAISSE

Si l'on exclut l'action 5 Participation aux débats sur les enjeux globaux et aux dispositifs multilatéraux d'aide publique au développement, les crédits de paiement du programme Solidarité à l'égard des pays en développement sont en forte baisse. La quasi-totalité des autres actions est en recul. Comme votre rapporteur l'a déjà souligné, le passage de la nomenclature de l'ordonnance organique de 1959 à celle de la LOLF rend les comparaisons difficiles et il est parfois difficile de s'y retrouver.

1.- Les dépenses de personnel

Les dépenses de personnel du programme, c'est-à-dire inscrites sur le titre II, représenteront 202 millions d'euros en 2006, soit à peu près 10% des crédits du programme. Ces crédits permettront de financer 3.131 emplois exprimés en équivalents temps plein qui se répartissent entre :

- les différentes directions de la direction générale de la coopération et du développement (DGCID) dont les effectifs s'établissaient début 2005 à environ 480 agents dont 56% de catégorie A, 13% de catégorie B et 31 % de catégorie C. Il est à noter que plus de 70% des agents de catégorie A ne sont pas des agents titulaires du ministère des affaires étrangères (titulaires détachés d'autres administrations - agriculture, santé, éducation, finances... - et non titulaires), traduisant la diversité des métiers de la DGCID. Cette direction générale étant responsable, outre du présent programme, du programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique », il est difficile d'arrêter précisément les effectifs affectés à chacun des deux programmes, les agents ne se consacrant qu'exceptionnellement à un seul d'entre eux. D'une enquête effectuée début 2005, il ressort toutefois qu'environ 70 % des ETPT, soit 330, relèvent du présent programme.

- Le service des affaires francophones et de la délégation à l'action humanitaire relevant respectivement des actions 5 et 6.

- Les 112 services de coopération et d'action culturelle (SCAC) à l'étranger chargés de la mise en œuvre de la coopération bilatérale avec les pays et institutions partenaires. Les personnels expatriés de ces services sont très majoritairement des agents de catégorie A détachés d'autres administrations ou non titulaires dans les secteurs de l'éducation, de l`enseignement supérieur et de la recherche. Les SCAC emploient par ailleurs des agents recrutés localement, généralement affectés à des tâches administratives.

- Les 79 établissements culturels, établissements à autonomie financière ; les personnels expatriés affectés dans ces établissements, majoritairement non titulaires du ministère des affaires étrangères, assurent les fonctions de directeur, de comptable, et participent aux activités linguistiques et culturelles de l'établissement. Les établissements culturels emploient en outre un nombre important de personnels de recrutement local, pour une grande part en charge des cours de langues, activité génératrice d'autofinancements très importants. Du fait de cet autofinancement les personnels de recrutement local (2.265 ETPT) ne sont actuellement pas dénombrés dans le plafond d'emploi de 16.720 ETPT.

- Les 21 centres de recherche qui se différencient des précédents par leur secteur d'intervention, la recherche en archéologie et en sciences sociales et leurs personnels (dont 252 recrutés locaux) ont des statuts comparables.

- Le réseau des 147 alliances françaises, établissements de droit local ; en 2005, 260 agents expatriés (200 contractuels et 60 volontaires internationaux) sont mis à la disposition de ces structures pour en assurer la direction et/ou dispenser des cours de français et encadrer des activités culturelles.

- L'assistance technique mise à la disposition des institutions des pays partenaires ; en 2005, l'effectif s'établit à environ 1.410 ETPT, dont 1.200 agents sous contrat avec le ministère et 210 volontaires internationaux (VI).

2.- Les crédits d'intervention

Les crédits d'intervention sont bien sûr ventilés entre les différentes actions du programme en fonction de leur finalité. L'on peut néanmoins essayer de reconstituer certains outils d'intervention.

a) l'action Affirmation de la dimension culturelle du développement voit ses crédits augmenter de 13 millions d'euros

Cette action, dotée de 138 millions d'euros, regroupe des crédits très variés sans que sa cohérence soit parfaitement évidente. En outre, les indications figurant dans le bleu ne permettent pas toujours de savoir les dotations dont devraient bénéficier les différents bénéficiaires.

27 millions d'euros seront consacrés aux subventions de fonctionnement des 79 centres et instituts culturels, chargés de la mise en œuvre des actions de diffusion et de coopération dans l'ensemble des domaines de la coopération française. Précisons que ces ressources viennent abonder l'autofinancement des instituts (46 % des ressources bruts en 2004). Par ailleurs les établissements culturels bénéficieront d'une subvention pour opération dont le montant est aujourd'hui indéfini.

Les 147 Alliances françaises devraient également recevoir des subventions de fonctionnement et pour projet, au titre des actions de coopération culturelle et de français, représentant un montant total d'environ 9,5 millions d'euros. Elles disposent également de subventions d'appui aux projets immobiliers (acquisition, construction, rénovation, mise en sécurité).

L'AFAA (Association française d'action artistique) recevra une subvention inchangée par rapport à 2005, soit 6,2 millions d'euros.

Canal France international verra également sa subvention reconduite à hauteur de 20,5 millions d'euros. Votre rapporteur s'interroge sur l'inscription de cette dépense sur la mission Aide publique au développement alors que le reste des dépenses de l'audiovisuel extérieur figure sur la mission Action extérieure de l'Etat. Un transfert au sein d'un nouveau programme Action audiovisuelle extérieure rattaché à la mission Action extérieure de l'Etat serait plus judicieux.

Concernant les projets FSP mis en œuvre dans les domaines de la coopération culturelle et du français, les prévisions d'exécution 2005 s'établissent à 24 millions d'euros. Pour 2006, 19,051 millions d'euros d'AE et 19,678 millions d'euros de CP sont prévus pour financer les projets FSP relevant de l'action 2.

Par ailleurs, il semble que 25 millions d'euros sont envisagés pour financer différentes opérations d'intervention comme le soutien à des médias étrangers, à des actions en faveur du cinéma et du livre, sans que la moindre évaluation précise ne soit fournie.

b) l'action Promotion de l'enseignement supérieur et recherche au service du développement voit ses crédits fortement régresser

Cette action est dotée de 146 millions d'euros de crédits de paiement dont 26,7 millions de dépenses de personnel.

Ici encore, les chiffres relatifs à 2006 sont quasiment absents du bleu qui se contente de donner des prévisions d'exécution pour 2005 !! L'une des seules informations dont l'on dispose à la lecture du bleu est que les transferts aux ménages seront abondés à hauteur de 52,7 millions d'euros, transferts qui intègrent une part prépondérante de bourses sans que l'on sache leur montant prévisionnel.

Pour les projets FSP, les dépenses pour les projets en cours dans le domaine de la coopération universitaire scientifique et de recherche sont évaluées à hauteur de 30,7 millions d'euros pour 2005. Pour 2006, 19,4 millions d'euros d'AE et 24,6 millions de CP sont prévus.

Quant aux subventions aux alliances françaises, aux subventions pour opérations aux établissements de recherche, aux programmes d'échanges scientifiques, aucune donnée 2006 n'est disponible.

c) l'action Aide en faveur du développement durable et lutte contre la pauvreté et les inégalités voit ses crédits de paiement reculer

Hors titre 2, les autorisations d'engagement inscrites sur cette action s'élèvent à 590 millions d'euros et les crédits de paiement à 448 millions. Par rapport à 2005, les premières sont en hausse de plus de 80 millions d'euros, les secondes reculent de 25 millions.

Cette action finance à la fois l'aide alimentaire (à hauteur de 28,6 millions d'euros), un certain nombre de bourses (à hauteur de 20,6 millions d'euros en 2005, sans que le chiffrage 2006 soit disponible) et la coopération décentralisée qui devrait bénéficier de 11,5 millions d'euros en 2006.

Les crédits de paiement des projets FSP mis en œuvre dans les domaines des stratégies sectorielles décidées par le CICID et de la gouvernance démocratique sont évalués en prévision d'exécution 2005 respectivement à 73 millions d'euros et 40 millions. Pour 2006, 107,102 millions d'euros d'AE et 80,61 millions d'euros de CP sont prévus pour financer les projets FSP relevant de l'action 4.

Les crédits inscrits en 2006 pour les C2D (15 millions d'euros) permettront d'honorer les C2D déjà signés qui se poursuivront en 2006 au bénéfice du Mozambique, l'Ouganda, la Tanzanie, le Nicaragua, Madagascar, le Ghana et la Bolivie. Deux C2D devraient être signés en 2006 (Honduras et Rwanda), ces deux pays ayant atteint le point d'achèvement. Les C2D non encore conclus (Cameroun et République démocratique du Congo) n'ont pas été budgétés en raison d'un très fort degré d'incertitude sur leur réalisation effective et faute d'indications fiables sur leur coût. Il s'agira néanmoins des deux C2D les plus coûteux budgétairement et leur signature en 2006 rendrait nécessaire l'ouverture de crédits supplémentaires.

d) l'action Aide aux populations touchées par les crises progresse

58,7 millions d'euros sont inscrits sur cette action qui doit permettre de financer l'aide humanitaire d'urgence à hauteur de 38 millions d'euros et l'aide à la reconstruction pour (appui au retour de la démocratie, microprojets de reconstruction, actions de formation) pour 20,582 millions d'euros de CP et 11,582 millions d'euros d'AE (9 millions d'euros en CP 2006 sont inscrits sur cette action pour financer les projets FSP « sortie de crise » en cours).

e) le soutien aux organisations de solidarités internationales

Votre rapporteur a eu l'occasion de la rappeler à de nombreuses reprises, la France est le dernier pays de l'OCDE en termes de montant d'aide publique au développement transitant par les organisations de solidarité internationale. Pour répondre à cette forte lacune, le président de la République s'est engagé à doubler, d'ici 2009, le volume d'APD géré par les OSI. Malheureusement, au vu des informations contenues dans le bleu, il est impossible d'identifier sur chaque action le montant prévisible de crédits devant transiter par les OSI. Votre rapporteur regrette cette grave lacune et souhaite que celle-ci soit corrigée pour le projet de loi de finances pour 2007.

B.- LE PROGRAMME AIDE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE AU DÉVELOPPEMENT ET LA MISSION PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS

Les moyens d'action bilatéraux du Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie sont assez réduits dans la mesure où seuls sont concernés l'action 2 Aide économique et financière bilatérale du programme Aide économique et financière au développement et le programme Prêts à des États étrangers, de la Réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation des projets d'infrastructure  de la mission Prêts à des États étrangers.

En effet, l'essentiel du programme Aide économique et financière au développement consacré à la participation aux organisations internationales de développement (63 %) et traitement de la dette des pays pauvres (17 %). Restent donc 182,8 millions d'euros de crédits de paiement inscrits sur l'action n° 2 et 150 millions sur le programme de la Réserve pays émergents.

En outre, sur ces 182,8 millions d'euros, 84,8 millions relèvent de l'Agence française de développement sur laquelle nous reviendrons ultérieurement. Les outils restant disponibles sont donc l'aide budgétaire, le GIP ADETEF, le FASEP-études et le Réserve pays émergents.

1.- L'aide budgétaire à destination des États étrangers

Un temps inscrit sur le budget du ministère des affaires étrangères, cette politique figure depuis quelques années sur le budget du Ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie. Votre rapporteur s'avoue quelque peu sceptique sur ce transfert même si cette distinction entre aides programme, confiées au Ministère des Affaires Étrangères (MAE) ou l'AFD, et les aides budgétaires globales, du ressort du Ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie (MINEFI) a été entérinée par le Cicid de juillet 2004. Ce partage semble quelque peu illusoire dans la mesure où c'est bien l'AFD, et non le MAE, qui a récupéré l'essentiel de l'aide-programme.

La doctrine élaborée en concertation avec le MAE précise les modalités d'emploi des aides budgétaires globales. Ainsi, la programmation pour 2005 a prévu qu'elles doivent :

- soutenir les pays en sortie de crise : Centrafrique, RDC, Burundi ;

- faciliter la conclusion d'accords avec le FMI et la réinsertion dans la communauté financière internationale : Niger, Guinée-Bissau, Togo ;

- favoriser les pays les plus performants, notamment en matière de gestion de leurs finances publiques, dans une perspective pluriannuelle : Burkina-Faso, Mali, Bénin.

Cette programmation peut être révisée en cours d'année en fonction des événements. Ainsi en 2005 :

- la crise institutionnelle au Togo a définitivement éloigné la perspective d'un programme FMI au Togo en 2005, libérant ainsi 1,5 million d'euros par rapport à la programmation initiale ;

- la situation budgétaire catastrophique en Centrafrique ainsi que la crise alimentaire au Niger a donc conduit le ministre à leur affecter les montants ainsi libérés.

AFFECTATION DES AIDES BUDGÉTAIRES EN 2004 ET 2005

pays

2004

2005

CP

exécution

programmation

exécution

Burkina-Faso

5,5

5,5

5,5

Burundi

5

3

3

Centrafrique

6

1,5

0 (1,5+1 transféré au MAE)

Congo-B

24 (LFR04)

Djibouti

3 (reporté)

RDC

5

5

5

Togo

1,5

0

Bénin

1,5

1,5

Guinée-Bissau

1 (reporté)

1

1

Mali

9

9

9

Niger

10

7

7,5

régional UEMOA

20

20

Total

64,5

55

52,5

En 2006, l'aide budgétaire sera dotée 65 millions d'euros de crédits de paiement et de 85 millions d'euros d'autorisations d'engagement. Cette distinction entre AE/CP peu orthodoxe pour ce type de dépenses s'explique par la volonté de disposer d'un outil budgétaire permettant, vis-à-vis des pays bénéficiaires, d'afficher un engagement pluriannuel.

2.- Le GIP-ADETEF

Le GIP ADETEF est en charge de la coopération technique internationale de la France dans les domaines de responsabilité du ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie. L'ADETEF finance, gère, coordonne et facilite la mise à disposition de l'expertise et du savoir-faire du MINEFI pour des actions et programmes de coopération définis avec les institutions publiques des pays partenaires. Les actions menées par l'ADETEF peuvent être financées sur sa dotation budgétaire, par le budget des pays avec lesquels il coopère ou par des financements internationaux (Union Européenne, Banque Mondiale...).

Cette coopération peut s'appuyer sur des partenariats public/privé notamment dans le cadre des appels d'offres.

L'ADETEF intervient ainsi selon trois modalités qui correspondent à des démarches et à des financements distincts :

- la coopération bilatérale entre des administrations étrangères et des directions du ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie ;

- la coopération sous forme de jumelages entre administrations, sur financements de l'Union européenne (d'abord uniquement avec les pays candidats, et de plus en plus avec tous les pays bénéficiant de financements européens)

- la coopération multilatérale lorsque le GIP prend en charge des projets lancés par des organismes internationaux, attribués en général après appels d'offres.

En 2004 et 2005, ces actions ont concerné la quasi totalité des directions du ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie. L'activité a porté sur les pays candidats à l'adhésion, ainsi que les Balkans et la CEI, l'Asie du Sud-Est (le Vietnam plus particulièrement), la Chine, les pays d'Afrique subsaharienne, le Maghreb, le Proche et le Moyen-Orient et l'Amérique Latine.

La part des activités du GIP provenant des contrats obtenus à la suite de réponse aux appels d'offres lancés par les bailleurs internationaux (Banque Mondiale et Union européenne notamment) a tendance à s'accroître compte tenu de l'option stratégique retenue par le GIP. Cela se fait sans préjudice du nombre de jumelages institutionnels, le nombre de jumelages dans les pays candidats dits "de la seconde vague" (Roumanie, Bulgarie, puis Croatie et Turquie) et des pays des Balkans occidentaux (Bosnie-Herzégovine, Serbie Monténégro, Albanie, Ancienne République Yougoslave de Macédoine) remplaçant le volume important des jumelages qui ont été gagnés par la France dans les PECO, pays de la première vague d'élargissement et membres de l'UE depuis le 1er mai 2004.

Cette nouvelle stratégie appelle néanmoins une réflexion sur les adaptations à moyen terme des moyens du GIP. En 2006, le GIP sera doté de 4,55 millions d'euros.

3.- Le FASEP-études

Le FASEP-Études finance principalement des études de faisabilité, ainsi que des opérations d'assistance technique ou de coopération institutionnelle à finalité économique et financière, destinées à des bénéficiaires étrangers et réalisées par des prestataires français, en « amont » de projets d'infrastructures dans les pays émergents et en transition. L'instruction des dossiers s'attache à sélectionner les interventions qui, tout en s'inscrivant dans les priorités des pays bénéficiaires, sont susceptibles de promouvoir les technologies et le savoir-faire français, en amont d'opérations qui ont les meilleures chances d'être ensuite réalisés. Sont ainsi privilégiées les interventions en amont de projets dont les perspectives de financement paraissent a priori favorables, soit grâce aux ressources propres du pays concerné, soit en faisant appel aux sources de financement disponibles notamment auprès des banques multilatérales. L'instruction s'attache également à vérifier que des entreprises françaises sont susceptibles, de fait, de participer à la réalisation du projet, si celui-ci est lancé.

Plus de la moitié des prestataires soutenus directement par le FASEP sont des entreprises de taille moyenne (CA inférieur à 50 millions d'euros et moins de 250 salariés), mais disposent d'une réelle ouverture à l'international (80 % des utilisateurs déclarent au moins 20 % de CA export).

Les entreprises françaises concernées par ces opérations en retirent un bénéfice à plusieurs titres. C'est d'abord un soutien direct en termes de notoriété et de présence locale sur des marchés à potentiel pour les ingénieries qui développent leurs activités à l'international. Le levier apporté s'apprécie en termes de notoriété acquise et de référence visible auprès des décideurs locaux, mais également auprès des bailleurs multilatéraux du fait de la coordination assurée avec ces institutions. Le levier apporté s'apprécie également en termes de participation aux projets qui suivent les interventions soutenues par le FASEP. En effet lorsque les projets d'investissements correspondants sont effectivement lancés, on constate que dans 80 % des cas une ou plusieurs entreprises françaises participent au projet, en dépit d'un contexte de forte concurrence internationale

En 2006, le FASEP-études sera doté de 20 millions d'euros.

4.- La Réserve Pays émergents

La RPE a pour finalité la mise en œuvre d'une aide économique et financière dans les pays émergents, réalisée par l'intermédiaire de prêts concessionnels destinés à financer des projets participant au développement économique des pays emprunteurs et dont la réalisation fait appel à des biens et services français.

Si ces financements sont bien comptabilisés sans l'aide publique au développement, le compte est depuis deux ans excédentaire grâce au rythme de remboursement satisfaisant des prêts. Il contribue donc négativement à l'effort d'APD (-277 millions d'euros en 2004, -516 millions en 2005 et -272 millions attendus en 2006).

Depuis la création de la RPE en 1998, des financements ont été décidés à hauteur de plus de 1,3 milliard d'euros. La répartition des projets par secteur confirme l'importance accordée à l'objectif de développement durable : les projets dans le secteur des transports représentent environ 50 % des crédits octroyés et prennent en compte de manière croissante les problématiques de réduction de la pollution ou des gaz à effet de serre. L'eau et l'environnement représentent plus d'un tiers des interventions

L'aide se concentre sur les pays émergents et la liste est arrêtée chaque année par le ministre de l'Économie, des finances et de d'industrie. En 2004, les pays suivants étaient éligibles : Chine, Vietnam, Indonésie, Philippines, Turquie, Serbie Monténégro, Algérie, Maroc, Tunisie, Égypte, Afrique du Sud, Kazakhstan, Azerbaïdjan, Bolivie, Colombie, Guatemala, Pérou, El Salvador, Ouzbékistan.

Les décisions de financement sont prises pour chaque projet par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur avis du comité interministériel présidé par la DGTPE. La France signe avec les pays bénéficiaires, projet par projet, des protocoles financiers intergouvernementaux. Ces accords sont mis en œuvre par la Direction des activités institutionnelles de Natexis Banques Populaires, agissant au nom et pour le compte de l'État français, dans le cadre d'une convention avec l'emprunteur. Natexis reçoit d'ailleurs une rémunération de 3,7 millions d'euros.

L'année 2004 a vu un doublement du niveau d'activité de la RPE, avec la conclusion de plusieurs accords politiques bilatéraux, dans un contexte de reprise des projets d'infrastructures. Onze projets ont été décidés, représentant un financement français (prêts intergouvernemental et crédits bancaires garantis) de 325 millions d'euros, contre neuf projets en 2003 pour un montant de 168 millions d'euros. Les engagements sont passés de 78 millions d'euros en 2003 à 154 millions d'euros en 2004.

Pour 2006, 300 millions d'euros d'Autorisations d'engagement sont prévus. Cet accroissement par rapport aux deux années précédentes se justifie par la montée en puissance des besoins de financement de projets d'infrastructure dans un grand nombre de pays émergents, tendance que l'on a déjà pu constater à partir de 2004.

Pour 2006, le montant des crédits de paiement prévu est de 150 millions d'euros, qui prend en compte les besoins de transfert à l'organisme gestionnaire, pour le compte de l'État, des protocoles RPE, sur la base de ses estimations de tirages. Le principe d'un versement progressif en fonction des besoins de paiement induits par la réalisation des projets engendre mécaniquement un délai entre les engagements et les paiements, qui s'effectuent sur une base pluriannuelle.

C.- L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT

Opérateur pivot de notre aide publique au développement, l'Agence française de développement (AFD) voit son rôle encore renforcé par la réforme décidée par les Cicid de juillet 2004 et de mai 2005. Elle récupère en effet un certain nombre de compétences autrefois dévolues au Ministère des affaires étrangères. Ce transfert doit s'accompagner, comme on l'a déjà vu, par une rénovation des statuts, la négociation d'une convention-cadre et la conclusion de contrats d'objectifs et de moyens avec les ministères concernés. Est bien sûr concerné au premier chef le MAE dont la tutelle sur l'AFD est aujourd'hui très insuffisamment exercée. Le contrat d'objectifs et de moyens actuellement en négociation doit impérativement permettre au ministère de fixer des objectifs précis à l'AFD et confirmer son rôle premier dans la détermination des orientations stratégiques de l'aide publique au développement française.

1.- L'activité de l'AFD

La situation financière de l'AFD est très satisfaisante : ses capacités d'investissement sont en hausse, mais davantage assise sur des ressources du marché.

LES ENGAGEMENTS APD DE L'AFD

(en millions d'euros)

2003

2004

Prêts

671,5

818,7

Subventions

175,5

173,5

PPTE

30,3

40,2

Garanties

70,1

25,6

Fonds propres

15,5

18,3

Ajustement structurel

46

40,5

Total

1.008,8

1.116,9

Source : AFD, Rapport annuel 2004.

Les engagements de l'AFD en 2004, hors ajustement structurel et initiative PPTE, représentaient 992.2 millions euro. Bien que ces engagements dépassent les objectifs fixés par le Plan d'orientation stratégique (POS) de l'Agence (677 millions d'euro pour 2004), les situations sont très différentes selon les instruments. Ainsi, les prêts très concessionnels, instrument adapté aux pays à faible revenu, n'ont atteint que 37,3 millions d'euro pour un objectif de 60 millions. À l'inverse, les prêts souverains concessionnels ont largement dépassé les objectifs du POS, avec 440.5 millions euro engagés pour 280 millions prévus au POS. L'objectif pour 2005 a été fixé à 557 millions d'euro pour 285 millions prévus dans le POS.

Pour 2004, l'AFD a consacré à l'Afrique sub-saharienne 70 % des subventions (120.5 millions d'euro) ; l'activité de crédits et de garantie est en revanche plus limitée, puisque cette zone géographique a représenté à peine 32 % des engagements. Ce désengagement de l'Afrique pour l'activité de prêts vient de ce qu'un grand nombre de pays de la Zone de solidarité prioritaire (ZSP) ne sont plus autorisés à emprunter à l'AFD du fait des décisions successives concernant le traitement de la dette (Dakar 1, Dakar 2, initiative PPTE), qui ont manifesté la baisse de solvabilité de ces pays. Cela relève également des retards pris dans la mise en œuvre de l'IPPTE pour les pays (hors PMA) qui pourraient bénéficier de prêts très concessionnels après accès au point d'achèvement. Aussi la ZSP est -elle perçue par l'Agence comme à la fois trop large pour les subventions et trop étroite pour les prêts, ce qui l'a conduite à ne pouvoir traduire sa priorité africaine, mise en exergue dans le POS, que par une concentration des subventions sur ce continent, et à obtenir de pouvoir intervenir en prêts en dehors de la ZSP.

Si les activités financées sur dons se sont accrues entre 2001 et 2004, passant de 166 à 173.5 millions d'euro, leur part dans l'ensemble des financements AFD s'est réduite de 32 % en 2001 à 21.2 % en 2004 et devrait diminuer encore en 2005, avec un objectif de 18.2 % (224.5 millions d'euro).

L'augmentation de la taille moyenne des projets financés sur prêts constitue l'un des axes du POS de l'AFD. Conformément à cette orientation, afin d'assurer une baisse du coût de transaction et une meilleure efficacité de l'aide, le montant moyen des projets a ainsi doublé en 3 ans, passant de 7 millions d'euro en 2001 à 15.7 millions en 2004 (l'objectif pour 2005 étant de maintenir ce niveau à 15 millions d'euro).

2.- L'élargissement de la zone d'intervention de l'AFD

L'AFD a souhaité ces dernières années élargir sa zone d'intervention. En effet, dans les pays étrangers, l'AFD intervient dans le cadre de la zone de solidarité prioritaire (ZSP), la liste des pays inclus dans la ZSP étant fixée par le comité interministériel de coopération internationale et du développement (CICID). C'est à ce titre, par exemple, que l'agence intervient désormais en Afghanistan, suite à l'entrée de ce pays dans la ZSP.

Conformément aux conclusions du CICID du 11 décembre 2002 et par lettre du directeur général de la coopération internationale et du développement (DGCID) et du directeur du Trésor, représentant l'État au conseil de surveillance de l'AFD, l'AFD a été autorisée à intervenir également dans les pays suivants : Jordanie, Syrie, Turquie, Égypte, Chine et Thaïlande, « sur des catégories d'emprunteurs à la solvabilité avérée et dans des conditions financières peu concessionnelles ».

D'autre part, la catastrophe du raz-de-marée en Asie, survenue en décembre 2004, a conduit l'État français à autoriser l'AFD à intervenir, pour une période temporaire et dans le cadre de la reconstruction de ces pays, au Sri Lanka et en Indonésie. Enfin, signalons que l'AFD n'est pas autorisée à intervenir en Irak.

En Asie, l'AFD bénéficie de son implantation ancienne en Asie du Sud-est (Vietnam, Laos, Cambodge), qui lui permet d'être un acteur majeur du développement de ces pays, favorisant une politique active de co-financement avec les institutions multilatérales (Banque asiatique de développement, notamment), et intervenant de façon croissante sur des domaines d'intérêt régional (bassin du Mekong, par exemple). La stratégie de l'AFD dans les pays émergents d'Asie (Chine, Thaïlande) repose sur la mise en œuvre d'un concept élargi de l'aide publique au développement, prenant en compte la production et la protection des biens publics mondiaux : climat, maladies émergentes, environnement global, etc.

En Chine, par exemple, l'impact de l'activité économique sur la problématique mondiale des gaz à effet de serre rend urgente toute contribution technique et institutionnelle de réduction des émissions. L'efficacité énergétique est le principal axe de développement défini entre l'AFD et ses partenaires chinois et il permet de valoriser des compétences françaises à haute valeur ajoutée.

La lutte contre les maladies émergentes dont l'Asie est un des foyers alarmant de propagation est une priorité à laquelle contribuent déjà les compétences scientifiques et industrielles françaises. Ce sont deux des priorités actives et globales de l'AFD dans cette région.

Les interventions dans les deux pays concernés à ce stade (Chine, Thaïlande) sont encore trop récentes pour tirer un bilan effectif du programme d'engagement et de l'application de ce programme aux priorités sectorielles régionales. Les engagements cumulés autorisés en Chine et en Thaïlande en 2003-2005 sont de 70 millions d'euros (Chine) et 9,8 millions d'euros (Thaïlande), Proparco inclus. Les engagements futurs devraient mobiliser les produits financiers les moins concessionnels ou à conditions de marché de l'Agence et concerner progressivement des partenaires non souverains.

En Méditerranée, l'intervention de l'AFD dans des pays du bassin méditerranéen n'appartenant pas à la ZSP (Turquie, Jordanie, Syrie, Égypte) s'appuie sur les importants acquis de l'AFD au Maghreb. Les difficultés de développement sont très largement communes : pression démographique et migrations, retard économique et faible croissance, dégradation urbaine, crise de l'approvisionnement hydrique, notamment, outre le contexte politique régional. L'AFD intervient dans le cadre du processus de Barcelone (mise à niveau des entreprises en vue de rejoindre les standards européens), de la lutte contre les déficits hydriques et en soutien aux programmes d'infrastructures et de services de proximité.

Les interventions cumulées 2004-2005 dans les pays concernés sont limitées, à la mi-2005, à la Turquie (142 millions d'euros) et la Jordanie (1 million d'euros sur dons). En Turquie, les perspectives permettent d'envisager un volume de concours de 100 millions d'euros par an. En Jordanie, un programme pluriannuel sur dons d'un montant de 20 millions d'euros, faisant suite à un engagement du Président de la République, sera mis en œuvre en faveur de projets institutionnels. Les autres pays ont fait l'objet d'un nombre significatif de missions d'identification et de contacts en vue d'une montée en puissance progressive. De premières interventions sur prêts en Égypte (prêts non souverains, ce qui limitera fortement le niveau des engagements) et en Jordanie pourraient se concrétiser au cours du second semestre 2005 ou début 2006. En Syrie, l'AFD a suspendu ses démarches en attendant une amélioration du contexte politique.

3.- Les sources de financement de l'AFD

L'Agence française de développement dispose de six sources de développement différentes : des subventions budgétaires émanant du budget du MAE, des emprunts que l'AFD lève sur les marchés et dont les intérêts sont bonifiés par le Trésor au gré des échéances, des emprunts auprès du Trésor d'une durée de 30 ans, des emprunts levés sur les marchés, des reprises au cas par cas sur les provisions constituées les années antérieures et, depuis 2004, le réinvestissement dans les concours de la moitié du résultat de l'exercice précédent.

a) les subventions budgétaires du Ministère des affaires étrangères

Pour 2006, 300 millions d'euros d'autorisations d'engagements (contre 170 millions en loi de finances initiale 2005) de dons sont ouverts sur le budget du Ministère des affaires étrangères et 184 millions d'euros de crédits de paiement (contre 110 millions en 2005).

Cette très importante augmentation est due aux transferts de compétence décidés par le Cicid de juillet 2004. En application de ces décisions, une liste de 62 projets relevant des secteurs dévolus à l'AFD (santé, éducation de base, formation professionnelle, agriculture et développement rural, environnement, secteur privé, infrastructures et développement urbain) a été arrêtée conjointement entre le MAE et l'AFD. Le processus de transfert a été entrepris dans le cadre d'un étroit partenariat avec les pays bénéficiaires (clôture des conventions et des contrats, transfert de la maîtrise d'ouvrage, transfert des crédits en autorisations de programmes -AP - et en crédits de paiements -CP).

En cours de procédure, la décision a été prise (pour des raisons d'opportunité politique ou technique) de laisser le MAE poursuivre jusqu'à leur achèvement 14 de ces 62 projets. Ce sont donc 48 projets qui seront effectivement transférés en 2005. En 2005, 85,7 millions d'euros d'AP et 17,2 millions d'euros de CP seront ainsi transférés du chapitre 68.91 FSP au chapitre 68.93 AFD.

Les assistants techniques affectés sur les projets transférés à l'AFD doivent terminer jusqu'à leur terme normal le contrat qu'ils ont souscrit avec le MAE. Au delà, si le projet se poursuit, c'est l'AFD qui procédera à leur recrutement dans le cadre de ses procédures propres et en faisant appel en tant que de besoin aux services du GIP "France Coopération Internationale". En vue de couvrir la dépense, un transfert de crédits d'un montant de 11 millions d'euros (provenant de l'ex chapitre 42.15) sera effectué début 2006 en faveur de l'AFD.

Concernant ce transfert, votre rapporteur souhaite relayer une inquiétude des ONG. Il semble que l'AFD ait décidé de fixer à 6 millions d'euros le montant moyen des projets soutenus. Or ce montant moyen dépasse de beaucoup la moyenne et même le plafond des projets que la DGCID avait coutume de financer et exclut de fait les projets de quelques centaines, voire dizaines, de milliers d'euro. Seront donc privilégiées les opérations de grande envergure. Le montant moyen des projets financés sur dons par l'AFD atteint, en 2004, 6.7 millions d'euros, alors que le montant moyen des projets FSP transférés en 2005 à l'AFD s'élève à 1.7 million d'euros. Le transfert de compétences à l'AFD risque d'avoir pour conséquence de créer un vide, au mieux en dessous de l'objectif moyen de 6 millions d'euro, au pire en dessous de la moyenne des projets financés sur dons. Ceci serait contradictoire avec l'objectif d'amélioration de la qualité des projets, qui passe, dans de nombreux secteurs, par une approche par l'apprentissage et une réforme du cycle des projets et suppose de commencer par de petits projets, les interventions pouvant ensuite être étendues progressivement sur la base des leçons tirées de ces expériences.

b) la bonification des prêts

Le financement par l'État de la bonification des prêts accordés par l'État passe par deux canaux : d'une part, une dotation budgétaire inscrite sur le programme Aide économique et financière au développement, d'autre part des prêts inscrits sur le programme Prêts à l'AFD en vue de favoriser le développement économique et social des États étrangers. En 2006, l'AFD sera autorisée à mettre en place pour 1,14 milliard d'euros de nouveaux projets. Ceux-ci seront financés à hauteur de 220 millions d'euros d'autorisations d'engagements de crédits budgétaires et à hauteur de 210 millions d'euros de prêts. Ces prêts constituent une ressource très concessionnelle : 30 ans dont 10 de différé, à un taux d'intérêt de 0,25 %.

Ces engagements ne se traduiront réellement en APD qu'à partir de 2008, car le principe de versement après constatation de la réalisation des prestations engendre mécaniquement un délai entre les engagements et les paiements, ces derniers seuls étant comptabilisés en APD. Un concours AFD se décaisse ainsi en moyenne en 5 ans, avec une forte latence au démarrage, comme cela peut être constaté sur l'historique du compte ; les engagements 2006 (210 millions d'euros) ne nécessiteront que 3,5 millions d'euros de CP dans la même année (soit 1,7 %) ; et les engagements 2005 (118 millions d'euros) n'induiront que 21,5 millions d'euros de CP en 2006 (soit 18 %).

De même que pour les AE, le montant de CP demandés sur le compte de concours financier pour 2006 (103,2 millions d'euros) correspond à deux types d'engagements :

- 99,7 millions d'euros de reste à verser sur des prêts en cours de décaissement dans les États étrangers, dont 21,5 millions d'euros au titre des engagements 2005, et 78,2 millions d'euros pour les autres années antérieures ;

- 3,5 millions d'euros au titre des nouveaux engagements pour 2006.

S'agissant des crédits inscrits sur le budget général, 44,5 millions d'euros de crédits de paiement sont demandés qui correspondent à des besoins de crédits de paiements de 120,1 millions d'euros après déduction de 75,6 millions d'euros autofinancés par l'AFD par prélèvement sur la part de 50 % de son résultat réservée par l'État dans l'hypothèse d'un résultat 2005 au moins égal à 151,2 millions d'euros.

c) la rémunération de l'AFD par l'État

Les remboursements de frais de gestion au titre des concours aux États étrangers visent types d'opération :

- les prêts au titre de la réserve Pays Émergents ;

- les dons-projets octroyés par l'AFD sur subvention MAE, sur la base de 10 % de la moyenne des engagements (AE) et de décaissements (CP) ;

- les Contrats de Désendettement et de Développement (C2D), sur la base de 3 % des décaissements (CP) pour les C2D de montants annuels inférieurs à 1,5 m€ et 1,5 % au-delà ;

- les aides budgétaires, sur la base de 1 % de la moyenne des engagements (AE) et de décaissements (CP).

En 2006, cette rémunération devrait être de 21,5 millions d'euros.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 16 novembre 2005, la Commission a examiné les crédits de la mission « Aide publique au développement » et du compte spécial : Prêts à des États étrangers.

Votre Rapporteur spécial a invité la Commission à ne pas voter ces crédits. Celle-ci ne l'a pas suivi et a adopté les crédits de la mission « Aide publique au développement » et du compte spécial « Prêts à des États étrangers » et vous demande d'émettre un vote favorable à leur adoption.

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N° 2568 - Rapport de M. Henri Emmanuelli fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540) - Annexe n° 5 - aide publique au développement - prêts à des Etats étrangers

1 () le GIP ADETEF (Assistance au développement des échanges en technologies économiques et financières) en ce qui concerne le programme piloté par le Minefi ; le GIP FCI (France coopération internationale) et les associations EGIDE (Centre français pour l'accueil et les échanges internationaux), AFVP (Association française des volontaires du progrès), AFAA (Association française d'association artistique) et ADPF (Association pour la diffusion de la pensée française) pour ce qui concerne le programme piloté par le MAE.

2 () Cour des Comptes, Rapport sur l'exécution des lois de finances en vue du règlement du budget de l'exercice 2004, suivi des réponses des administrations, Rapport sur les résultats et la gestion budgétaire, p. 73.


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