COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 20

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 3 décembre 2003
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. René Couanau, vice-président.

SOMMAIRE

 

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- Suite de l'examen du projet de loi relatif à la formation tout au long de la vie et au dialogue social - n° 1233 (M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur) -

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a poursuivi l'examen, sur le rapport de M. Jean-Paul Anciaux, des articles du projet de loi relatif à la formation tout au long de la vie et au dialogue social - n° 1233.

Avant l'article 34

La commission a rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz tendant à organiser le même jour dans chaque branche professionnelle une consultation des salariés afin d'apprécier la représentativité des organisations syndicales.

TITRE II
DU DIALOGUE SOCIAL

Article 34 (article L. 132-2-2 du code du travail) : Règles de conclusion des accords collectifs

La commission a rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz de suppression de l'article.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies faisant de l'existence d'un accord majoritaire la condition de validité des accords collectifs à tous les niveaux de négociation.

M. Alain Vidalies a indiqué qu'il s'agit du premier volet d'une série d'amendements concernant la règle de l'accord majoritaire en vue d'effectuer une réelle avancée dans sa mise en œuvre et de régler la question de la représentativité. Ce premier amendement pose le principe de l'appréciation de la représentativité sur la base d'une consultation des salariés organisée tous les cinq ans par branche professionnelle.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur, a indiqué que la position commune des organisations syndicales du 16 juillet 2001 constitue le socle du présent projet de loi. Il répond à la demande des partenaires sociaux d'adapter les règles de conclusion des accords collectifs pendant une période transitoire avant l'adoption de règles définitives. Le choix a été fait de ne pas forcer l'accord majoritaire. L'imposer à tous les niveaux de négociation pourrait bloquer le dialogue social. On peut critiquer cette introduction graduelle de l'accord majoritaire, privilégié au niveau de l'entreprise et, dans une moindre mesure, de la branche : faut-il rappeler que le présent texte s'applique à l'ensemble du champ de la négociation quant la loi Aubry II l'avait cantonné à la réduction du temps de travail ? L'avancée est conséquente et il ne semble pas possible de forcer la marche. En conséquence, tous les amendements allant dans ce sens recevront un avis défavorable du rapporteur.

M. Alain Vidalies a considéré que le choix fait d'une démarche expérimentale en matière d'accords majoritaires n'est pas judicieux. Cette approche homéopathique est contestable. Il est faux de soutenir que le projet de loi serait fidèle à la position commune et d'ailleurs les organisations syndicales le contestent. De nombreuses difficultés sont à prévoir si le texte est maintenu en l'état, s'agissant notamment du droit d'opposition déterminé en fonction du nombre d'organisations syndicales représentatives. Qu'adviendra-t-il de ces calculs si l'Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) par exemple, est jugée représentative au terme de l'examen de son recours par le Conseil d'Etat ?

Le rapporteur a confirmé que le texte respecte la position commune, et en conséquence le souhait des partenaires sociaux, et a estimé que, en cas de partage égal des organisations représentatives dans l'hypothèse où celles-ci seraient en nombre pair, il faudrait par exemple au niveau interprofessionnel recueillir l'accord de quatre organisations sur six. Il appartiendra au ministre de confirmer cette interprétation.

La commission a rejeté l'amendement.

Elle a rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz tendant à faire de l'accord majoritaire la condition de validité d'un accord interprofessionnel.

La commission a rejeté un amendement de M. Alain Vidalies liant la validité d'un accord interprofessionnel à sa signature par une ou des organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins la majorité des suffrages exprimés aux dernières élections prud'homales.

La commission a rejeté deux amendements de M. Maxime Gremetz : le premier substituant au droit d'opposition de la majorité des organisations syndicales celui d'une ou des organisations syndicales représentant la majorité des salariés ; le second portant de quinze jours à un mois le délai dans lequel doit s'exercer le droit d'opposition à un accord interprofessionnel.

La commission a rejeté un amendement de M. Alain Vidalies soumettant la validité d'un accord de branche à sa signature par une ou des organisations syndicales majoritaires dans les élections de représentativité de la branche professionnelle.

La commission a rejeté trois amendements de M. Maxime Gremetz  déclinant selon des modalités variées l'obligation de recueillir un accord majoritaire au niveau de la branche.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies visant à calculer la majorité en fonction des suffrages exprimés, que ce soit pour la consultation spécifique au sein de la branche ou pour les élections du personnel.

M. Alain Vidalies a indiqué qu'il s'agit d'une précision utile compte tenu du caractère flou du texte sur le mode de calcul de la majorité des salariés.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que la juridiction compétente sur la contestation de la consultation de branche est le tribunal d'instance.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer tendant à rendre obligatoire la participation des salariés aux consultations dans la branche et aux élections professionnelles.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable considérant que la liberté de vote consiste aussi en la liberté de ne pas voter et s'est interrogé sur les sanctions dont une telle obligation devrait être assortie.

La commission a rejeté l'amendement.

Elle a adopté un amendement du rapporteur visant à supprimer l'avant-dernier alinéa du II de l'article, redondant au vu des règles de droit commun en matière de renouvellement, de révision et de dénonciation.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies rendant obligatoire la conclusion d'un accord de méthode au niveau de la branche.

M. Alain Vidalies a précisé qu'il s'agit d'éviter de tomber dans la règle de l'opposition majoritaire des organisations syndicales pour valider un accord de branche.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a adopté un amendement de précision du rapporteur.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies visant à conditionner la validité d'un accord d'entreprise à sa signature par une ou des organisations syndicales représentatives de la majorité des salariés de l'entreprise au vu des résultats de la consultation sur la représentativité dans la branche.

La commission a rejeté l'amendement.

M. Maxime Gremetz a protesté contre la tenue concomitante de la réunion de la commission et de la rencontre organisée par le Président de l'Assemblée nationale avec les parlementaires des pays adhérents à l'Union européenne.

La commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz liant la validité de l'accord d'entreprise ou d'établissement à un accord majoritaire.

M. Maxime Gremetz a rappelé qu'il défend de façon constante depuis 1982 le principe de l'accord majoritaire et précisé que, lorsque les règles de la majorité ne sont pas réunies, l'accord doit être soumis à l'approbation des salariés.

Le rapporteur ayant répété que l'article 34 repose sur la reprise au plus près de la position commune adoptée par les organisations syndicales, M. Maxime Gremetz a protesté, rappelant que les principales organisations syndicales souhaitent l'organisation, le même jour dans toutes les entreprises, d'une élection de représentativité au niveau des branches ainsi qu'un changement des critères de représentativité, ce qui permettrait à de nouveaux syndicats, comme l'UNSA, d'être déclarés représentatifs.

Le rapporteur a donné lecture d'un extrait de la position commune adoptée par sept des huit organisations syndicales représentatives et a conclu au caractère fidèle de la transposition opérée.

M. Gaëtan Gorce a indiqué qu'aucune disposition relative à une période transitoire ne figure dans la position commune et, qu'en tout cas, les organisations syndicales signataires ne se retrouvent pas dans les propositions du gouvernement.

M. Maxime Gremetz a ajouté que, si l'on veut s'appuyer sur la position commune, il faut alors reprendre l'intégralité de ses dispositions dans le projet de loi et tenir compte de leur expression actuelle : toutes les organisations syndicales se sont prononcées, au niveau national, contre le projet de loi.

Le rapporteur a contesté ce point, indiquant qu'au cours des auditions qu'il a réalisées, aucune organisation syndicale n'a exprimé son opposition à l'ensemble du projet de loi, même si des désaccords ont pu être formulés sur certains points.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies proposant qu'au niveau de la branche, l'accord de méthode relatif aux conditions de validité des accords d'entreprise soit étendu et s'applique à l'ensemble des entreprises de la branche concernée.

M. Alain Vidalies a expliqué que l'amendement est similaire à un amendement de précision présenté précédemment par le rapporteur et adopté par la commission.

Le rapporteur a répondu qu'en dépit de la proximité des deux dispositifs, le présent amendement ne revêt pas du tout la même portée. Il n'est pas conforme aux dispositions de la position commune dès lors qu'il contraint à l'adoption d'un accord de méthode majoritaire.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Francis Vercamer ayant pour objet d'ajouter une condition supplémentaire de représentativité pour la conclusion d'accords majoritaires, en instituant un seuil de 33 % des inscrits en sus de la majorité des exprimés.

M. Francis Vercamer a fait valoir qu'il est important de prendre en compte le nombre des inscrits, dans la mesure où les organisations syndicales qui signent les accords majoritaires doivent avoir une réelle légitimité, en particulier au sein de l'entreprise.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement, après avoir souligné qu'il rend très difficile la conclusion d'accords majoritaires et risque de déséquilibrer le système et de créer un véritable blocage de la négociation.

M. Maxime Gremetz a, pour sa part, souhaité que l'on ne soit pas plus exigeant avec les salariés qu'avec les politiques, en rappelant le débat auquel avait donné lieu l'institution d'un seuil de 10 % du nombre des électeurs inscrits (pour les élections régionales et européennes). Il faut tout d'abord souligner toute l'importance des suffrages exprimés, comme en témoignent par exemple les élections professionnelles à EDF, lors desquelles la CGT a réuni près de 85 % des suffrages exprimés, soit un niveau très supérieur au seuil de 33 % des inscrits proposé par l'amendement. En outre, si l'on doit se réjouir de l'augmentation du taux de participation des salariés aux élections professionnelles, il ne faut pas pour autant être plus exigeant avec les salariés car, de même que pour les élections politiques, le faible taux de participation s'explique moins par l'incivisme que par l'absence d'offre qui réponde aux attentes des électeurs ou des salariés.

Rejoignant les propos tenus par M. Maxime Gremetz, M. Alain Vidalies a ajouté que l'amendement revêt une portée singulière à la veille des prochaines élections régionales et semble peu opportun.

M. Francis Vercamer a tout d'abord répondu que la notion d'inscrits est prise en compte dans les élections politiques et que l'amendement est cohérent avec celui examiné précédemment afin d'instituer une obligation de vote. Il faut par ailleurs faire preuve de prudence concernant les accords d'entreprises qui peuvent déroger aux accords de branches si l'on veut éviter d'exacerber la concurrence et de favoriser le dumping social entre les entreprises d'une même branche.

M. Maxime Gremetz s'est également déclaré hostile au principe des accords dérogatoires mais a souligné que l'amendement couvre un champ beaucoup plus large que ces seuls accords.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur visant à préciser que la condition de majorité est appréciée au vu des résultats du premier tour des élections professionnelles.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies ayant pour objet de préciser les modalités d'organisation de la consultation des salariés.

M. Alain Vidalies a indiqué que l'amendement reprend les dispositions prévues par l'article 19 de la loi du 19 janvier 2000, dite « loi Aubry II », en matière de consultation.

Le rapporteur ayant fait valoir que le décret paraît plus protecteur que les accords d'entreprise, la commission a rejeté l'amendement.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Alain Vidalies supprimant les dispositions de l'article relatives au droit d'opposition majoritaire aux accords d'entreprise pour ne laisser subsister que la seule voie de l'accord majoritaire.

M. Alain Vidalies a expliqué que l'amendement s'inscrit toujours dans la même logique de promotion des accords majoritaires, par opposition aux « majorités d'opposition ».

M. Gaëtan Gorce a relevé le caractère cocasse du concept d'opposition majoritaire. Le projet de loi soulève un problème de fond dans la mesure où, s'il n'y a pas d'élections professionnelles, du fait de carence ou de blocage, il ne peut y avoir d'opposition aux accords. C'est pourquoi un amendement sera présenté ultérieurement afin de combler ce vide juridique.

Le rapporteur a observé que la question est pertinente même si l'on peut estimer que les termes « si les organisations syndicales ou signataires ne satisfont pas à la condition de majorité » couvrent le cas de l'absence de représentants du personnel. Cette interprétation méritera d'être confirmée en séance publique par le gouvernement.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz visant à substituer au délai de huit jours prévu par le projet de loi un délai de quinze jours pour permettre aux salariés d'exercer leur droit d'opposition à l'accord d'entreprise.

M. Maxime Gremetz a jugé nécessaire d'assurer une réelle information des salariés sur les enjeux du droit d'opposition et de garantir ainsi la démocratie sociale.

Le rapporteur a répondu qu'un délai supérieur à huit jours n'est pas nécessaire pour s'opposer et qu'il convient d'en rester aux dispositions actuelles du code du travail.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a ensuite examiné deux amendements identiques de MM. Maxime Gremetz et Alain Vidalies visant à supprimer le droit d'opposition aux accords d'entreprise ne concernant qu'une catégorie professionnelle et ne laisser subsister que la seule voie de l'accord majoritaire.

M. Maxime Gremetz a expliqué qu'il s'agit de privilégier le principe de l'accord majoritaire, qui relève d'une démarche constructive et positive, plutôt que le principe, négatif, d'opposition.

M. Alain Vidalies a indiqué que plusieurs amendements seraient présentés afin de promouvoir le principe des accords majoritaires.

La commission a rejeté les deux amendements.

La commission a adopté un amendement de précision du rapporteur destiné à éviter toute confusion entre les « accords-cadres » de branche et les accords conclus sur leur fondement.

La commission a ensuite examiné deux amendements identiques de MM. Maxime Gremetz et Alain Vidalies faisant primer le principe de l'accord majoritaire sur l'exercice du droit d'opposition pour la validation des accords d'entreprise, en cas d'absence d'accord de branche.

M. Maxime Gremetz a rappelé que le dispositif proposé par le projet de loi permettra aux signataires des accords de branche de prévoir ou non la possibilité de dérogation. De ce fait, trois organisations minoritaires pourraient faire prévaloir sur des accords dérogatoires leur volonté contre deux organisations syndicales représentant une majorité des salariés.

M. Alain Vidalies a pour sa part souligné que la détermination de nouvelles règles d'élaboration des normes constitue un choix lourd de conséquences en remettant en cause l'un des fondements de la vie conventionnelle.

La commission a rejeté les deux amendements.

La commission a adopté deux amendements identiques du rapporteur et de M. Francis Vercamer précisant que seules les oppositions majoritaires sont de nature à faire obstacle à l'application d'un accord collectif.

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant quels sont les conventions et accords ne pouvant être déposés avant l'expiration du délai d'opposition, les accords conclus avec une majorité d'engagement n'ayant pas à être soumis à ce délai.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer précisant que l'opposition majoritaire ne fait pas obstacle à l'application unilatérale par l'employeur des mesures dont la mise en œuvre n'est pas subordonnée à la conclusion d'un accord collectif.

M. Francis Vercamer a indiqué qu'il ne faut pas empêcher l'application de mesures qui ne dérogent pas à un accord collectif de niveau supérieur ou à une disposition législative ou réglementaire. Il s'agit en effet de relancer le dialogue social et non d'inciter l'employeur à ne plus recourir à la négociation pour chercher d'emblée l'application unilatérale de ces mesures. Pourquoi un employeur souhaitant accorder une hausse des salaires de 2 % ne pourrait-il pas la mettre en œuvre si les organisations syndicales ont souhaité majoritairement 4 % d'augmentation et ont donc refusé de conclure un accord ?

Le rapporteur a estimé que la jurisprudence permet sous certaines réserves une telle application unilatérale mais qu'il sera utile de demander des précisions au ministre en séance publique sur ce point. Pour autant, l'amendement ne semble pas nécessaire.

M. Gaëtan Gorce s'est interrogé sur la raison pour laquelle on offrirait à l'employeur la possibilité de passer outre à l'opposition majoritaire. L'adoption de cet amendement priverait la négociation de tout son sens. On peut donc se demander en quoi le ministre aurait des interprétations à fournir sur ce point.

La commission a rejeté l'amendement, puis elle a adopté l'article 34 ainsi modifié.

Après l'article 34

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer dissociant le régime juridique des conventions collectives conclues antérieurement à l'adoption de la loi du régime juridique des conventions postérieures.

M. Francis Vercamer a expliqué que le code du travail prévoit actuellement l'incorporation d'office à la convention collective de branche des accords collectifs conclus postérieurement qui auraient le même champ territorial ou professionnel. En raison de l'autonomisation des niveaux de négociation prévue par le projet de loi, il ne faut pas que les nouvelles conventions, incorporées aux conventions antérieures, invalident de facto les mesures dérogatoires permises par l'accord de niveau supérieur.

Le rapporteur a estimé que l'amendement doit être expertisé afin notamment d'examiner sa cohérence avec l'article 39 du projet de loi qui maintient la valeur hiérarchique accordée par leurs signataires aux accords conclus antérieurement. A ce stade du débat, l'adoption de l'amendement n'est pas souhaitable.

La commission a rejeté l'amendement.

Article 35 (article L. 132-7 du code du travail) : Renouvellement et révision des conventions et accords collectifs du travail

La commission a rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz liant la validité d'un avenant à une convention ou un accord à sa conclusion par un accord majoritaire.

La commission a adopté l'article 35 sans modification.

Article 36 (article L. 132-13 du code du travail) : Articulation entre les accords interprofessionnels et les conventions de branche

La commission a examiné deux amendements identiques de MM. Maxime Gremetz et Alain Vidalies de suppression de l'article.

M. Maxime Gremetz s'est opposé à la remise en cause du principe de faveur opérée au détour de cet article. La législation sociale, conquise de haute lutte, prévoit qu'aucun accord signé, quel que soit son niveau, ne peut être moins favorable aux salariés qu'un texte de niveau supérieur. Ce principe permet de garantir l'égalité des salariés, notamment en l'absence d'organisations syndicales dans certaines entreprises, et d'assurer la protection de leurs droits fondamentaux.

M. Alain Vidalies s'est demandé pour quelles raisons le principe de faveur est remis en cause alors que le projet de loi s'inscrit dans une démarche de renouveau de la négociation collective. Ce principe organise les rapports entre les partenaires sociaux depuis des décennies et garantit un équilibre et une homogénéité du droit social dans l'ensemble des branches professionnelles. Il s'agit d'un aspect fondamental tant pour les salariés que pour les employeurs, par exemple par rapport au droit de la concurrence. Le supprimer débouchera sur un nouveau modèle de société atomisée.

M. Francis Vercamer a souligné la nécessité d'être prudent vis-à-vis de cet article. Les accords doivent bien prévoir la possibilité de dérogations mais il ne faut pas ouvrir sans limite la porte à toute dérogation.

Le rapporteur a rappelé que les articles 36 et 37 du projet de loi permettent de négocier au plus près des besoins des salariés et des entreprises. Le principe de faveur a déjà connu quelques entorses, avec l'apparition des accords dérogatoires en 1982 ou la loi Delebarre en 1986. L'articulation entre la loi et les accords collectifs n'est pas remise en cause : les accords ne peuvent donc qu'être plus favorables que la loi, sauf dérogations déjà existantes. Il n'est pas non plus dérogé au régime de faveur s'agissant du contrat de travail qui permet d'opposer des clauses plus favorables à celles de l'accord d'entreprise. La négociation collective est ainsi encadrée par le haut (la loi) et par le bas (les contrats de travail).

Les dispositions qui changent concernent la possibilité de déroger par un accord négocié de niveau inférieur à un accord de niveau supérieur, sauf interdiction explicite par celui-ci. Cette possibilité est légitime au regard de la garantie que constitue en vertu de l'article 34 la signature des accords sur une base majoritaire.

M. Gaëtan Gorce a déclaré ne pas être convaincu par le bouleversement des règles de la négociation collective opéré par cet article. Devoir prévoir de ne pas pouvoir déroger à une règle lors de la négociation d'un accord aboutit à la fois à modifier la hiérarchie des normes et l'équilibre de la négociation. La situation devient systématiquement défavorable aux droits des salariés et il n'est pas possible de la justifier par l'existence de quelques dérogations liées à la mise en œuvre de la réduction du temps de travail. L'onde positive provoquée par le principe de faveur, s'étendant à toutes les branches et les entreprises et donc à tous les salariés, est désormais bloquée par la barrière juridique que constitue la nécessité de prévoir expressément dans un accord négocié l'application au niveau inférieur de dispositions favorables. A la différence de l'article 34 de faible portée, le présent article constitue une véritable « révolution juridique » - selon le mot du ministre - et est la marque d'une réaction politique.

M. Francis Vercamer a estimé préférable d'encadrer les dérogations au principe de faveur plutôt que de le supprimer afin d'éviter la déresponsabilisation des partenaires sociaux au niveau des branches professionnelles.

M. Maxime Gremetz a rappelé que tous les syndicats sont opposés à cette remise en cause du principe de faveur. On peut également regretter la désinvolture avec laquelle le ministre a considéré les remarques pertinentes de juristes reconnus du droit du travail.

La commission a rejeté les deux amendements.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Francis Vercamer précisant que l'accord collectif supérieur doit prévoir la possibilité pour un accord collectif inférieur de comporter certaines dispositions moins favorables aux salariés.

M. Francis Vercamer a estimé nécessaire de conforter l'accord collectif supérieur comme niveau de négociation des cas où une dérogation moins favorable aux salariés est possible. Les accords de branche ou interprofessionnels doivent en effet avoir un rôle structurant exprimant la solidarité entre salariés. Les dérogations ne doivent être possibles au niveau d'un accord d'entreprise qu'en fonction de nécessités locales ou particulières. Cet amendement permet de traduire au mieux le souhait des signataires de la position commune du 16 juillet 2001, qui aspirent à une « articulation dynamique et maîtrisée des niveaux de négociation ».

M. Alain Vidalies a considéré que cet amendement de repli permet au moins de définir au niveau des accords de branche à quoi il peut être possible de déroger. La rédaction du projet de loi vicie en effet toute forme de négociation collective en posant comme principe qu'il est toujours possible de déroger au résultat de la négociation.

Le rapporteur s'est exprimé contre cet amendement en rappelant que les partenaires sociaux signataires de la position commune ont envisagé un rôle supplétif des accords de niveau supérieur par rapport aux accords décentralisés d'entreprise.

La commission a rejeté l'amendement.

Elle a ensuite examiné deux amendements de M. Alain Vidalies imposant que la remise en cause du principe de faveur soit prévue par une décision explicite de l'accord de niveau supérieur.

M. Gaëtan Gorce n'a pas estimé possible de s'en remettre au seul silence de l'accord collectif pour l'application d'un principe aussi essentiel. Il faut donc remettre les choses dans le bon ordre en prévoyant qu'aucune dérogation n'est possible au niveau local si elle n'a pas été autorisée par le niveau supérieur. Cette disposition du projet de loi ne pourrait d'ailleurs pas être mise en œuvre si le principe majoritaire cher au ministre s'appliquait au niveau politique car tous les groupes parlementaires sauf un y sont opposés. On peut d'ailleurs se demander s'il ne serait pas souhaitable de rendre service au ministre en supprimant une disposition qui lui a été imposée à la suite des positions qu'il a prises concernant la suppression d'un jour férié pour financer l'effort de solidarité en faveur des personnes âgées.

Le rapporteur a estimé que la rédaction du projet de loi permet plus de souplesse.

M. Alain Vidalies a considéré que l'application du principe de faveur doit rester la règle. C'est donc sa remise en cause qui doit être expresse et non l'inverse. On ne peut pas justifier un tel bouleversement de l'ordre social seulement par une volonté de souplesse, sans être incohérent avec la position commune du 16 juillet 2001.

La commission a rejeté les deux amendements, puis elle a adopté l'article 36 sans modification.

Article 37 (article L. 132-23 du code du travail) : Articulation entre les accords d'entreprise ou d'établissement et les accords interprofessionnels, professionnels et conventions de branche

La commission a examiné deux amendements de suppression de l'article de MM. Alain Vidalies et Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer a retiré son amendement. Dans la mesure où la suppression de l'article 36 n'a pas été votée, ce dernier n'a plus d'objet.

M. Alain Vidalies a indiqué que l'article 37 est, dans sa rédaction actuelle, lourd de conséquences puisqu'il remet en cause la hiérarchie des normes entre les accords d'entreprise et les accords de branches. Cette modification va entraîner une atomisation du travail comme elle existe dans certains pays. Sur ce point, il est intéressant de remarquer que les pays dans lesquels, traditionnellement, le droit social s'est conclu autour d'accords au niveau de l'entreprise ont évolué, ces dernières années, vers la recherche de normes supérieures de façon à harmoniser des règles disparates. La voie que la France s'apprête à emprunter est rigoureusement inverse. Par ailleurs, le choix du gouvernement n'a fait l'objet d'aucune discussion préalable avec les partenaires sociaux. Il introduit une course au moins-disant social largement préjudiciable aux salariés et à la qualité des relations sociales. L'introduction tardive de cette mesure est donc l'expression d'un choix idéologique de la part du gouvernement.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies visant à ce que l'interdiction de déroger au niveau de l'entreprise aux accords de branche ne porte pas uniquement sur le seul salaire minimum mais sur l'ensemble des salaires.

M. Alain Vidalies a indiqué qu'il s'agit d'un amendement de précision visant à éviter qu'une surenchère au moins-disant social se mette en place au niveau des entreprises et a souhaité obtenir la précision suivante : l'ensemble des salaires intégrés dans les classifications sont-ils protégés par les accords de branche ou bien cette protection ne vaut-elle que pour le salaire minimum ?

Le rapporteur a répondu que l'entreprise ne peut selon lui déroger ni au niveau de salaire minimum ni au niveau des salaires liés à une classification fixés par les accords de branche.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz visant à supprimer la remise en cause du principe de faveur que constituerait la généralisation des accords d'entreprise dérogatoires.

M. Maxime Gremetz a indiqué que cette remise en cause constitue un recul social sans précédent. C'est la première fois qu'un gouvernement de droite revient sur des conquêtes sociales aussi fondamentales et aussi anciennes.

Après avoir répondu à M. Maxime Gremetz que le précédent gouvernement n'a pas hésité à remettre en cause l'interdiction du travail de nuit pour les femmes qui remontait à 1892, le rapporteur a émis un avis défavorable.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Alain Vidalies visant à ce que la dérogation aux accords de branche ne devienne pas la règle mais soit explicitement autorisée par la branche.

M. Alain Vidalies a indiqué qu'il convient, pour le moins, que la possibilité de dérogation offerte à l'entreprise soit expressément prévue et son champ d'application limitativement défini.

M. Alain Néri a estimé que le projet de loi s'apparente à un manuel scolaire de grammaire dans lequel les exceptions sont plus nombreuses que les règles.

M. Francis Vercamer a indiqué qu'il souscrit à l'amendement de M. Alain Vidalies.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Francis Vercamer dont l'objet est d'imposer aux entreprises de justifier de circonstances économiques particulières pour pouvoir déroger à un accord collectif de niveau supérieur.

M. Francis Vercamer a précisé que le dispositif prévoit, dans le délai d'un an, le réexamen des circonstances économiques qui ont présidé à l'octroi de cette dérogation.

Le rapporteur a émis un avis défavorable au motif que la fixation des délais de révision relève des conventions collectives

La commission a rejeté l'amendement et adopté l'article 37 sans modification.

Article 38 : Extension du domaine des accords d'entreprise ou d'établissement à celui des conventions ou accords de branche

La commission a examiné trois amendements de MM. Maxime Gremetz, Alain Vidalies et Francis Vercamer de suppression de l'article.

M. Francis Vercamer a retiré son amendement pour les raisons évoquées dans le débat sur l'article 37.

M. Maxime Gremetz a indiqué que l'article 38 illustre parfaitement la teneur du projet de loi : une remise en cause des acquis d'un droit social que beaucoup de pays étrangers prennent pour modèle, la liquidation du principe de faveur.

M. Gaëtan Gorce a souligné que cet article pose de nombreuses questions. Plus de trente articles du code du travail - parmi lesquels ceux fixant les conditions de recours au contrat à durée déterminée, ceux déterminant les modalités du travail à temps partiel ou ceux définissant le régime des heures supplémentaires - sont visés par cette mesure qui permettra la mise en œuvre de dispositions législatives après la simple conclusion d'un accord d'entreprise ou d'établissement. Pourquoi piétiner ainsi la négociation de branche ? Le gouvernement n'a donné aucune explication propre à éclairer sa démarche. On ne peut que s'étonner de sa volonté de faire adopter un tel dispositif quand celui-ci soulève l'opposition unanime de l'ensemble des représentants syndicaux et ne satisfait que le MEDEF.

Le rapporteur a indiqué que les dispositions de l'article 38 n'ont pas d'autre but que d'introduire plus de souplesse pour les entreprises à l'égard des accords de branche et de rapprocher ainsi la négociation des besoins des employeurs et des salariés.

M. Alain Vidalies s'est ému du fait que le rapporteur ne réponde pas aux préoccupations exprimées. En effet, avec l'adoption de cet article dans sa rédaction actuelle, le niveau de référence en matière de droit social ne sera plus la branche mais l'entreprise. Il n'est pas exclu que ces dispositions contreviennent à la Constitution puisque les accords conclus sur son fondement dérogeront à des normes dont la supériorité était au moment de leur conclusion garantie par la loi. Par ailleurs, il est curieux de constater que cet article a été introduit au dernier moment dans le projet de loi. Il ne figurait pas dans la première version du texte transmise au Conseil d'Etat et le ministre des affaires sociales, M. François Fillon, comme le gouvernement, avaient alors exprimé leurs réserves sur un tel dispositif.

La commission a rejeté les deux amendements.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Alain Vidalies visant à exclure du champ de cet article les dispositions du code du travail relatives au contrat et à la période de professionnalisation.

M. Alain Vidalies a indiqué que cet amendement vise à opérer une cohérence entre les deux parties du projet de loi en évitant que la formation professionnelle soit soumise aux nouvelles modalités du dialogue social.

Le rapporteur a émis un avis défavorable à cet amendement tout en indiquant que le champ couvert par les dispositions de l'article 38 devra être mieux précisé.

M. Gaëtan Gorce s'est réjoui de la remarque du rapporteur, y voyant la preuve d'une hésitation de la majorité face à cette démarche visant à réinterpréter les accords des partenaires sociaux.

La commission a rejeté l'amendement et adopté l'article 38 sans modification.

Article 39 : Maintien de la valeur hiérarchique des conventions et accords antérieurs

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Alain Vidalies visant à réaffirmer le principe selon lequel une convention ou un accord collectif ne peut comporter des clauses moins favorables que celles des conventions et accords d'un niveau supérieur conclus avant la publication de la présente loi.

M. Alain Vidalies a indiqué que la nouvelle rédaction est plus conforme à l'exposé des motifs du projet de loi. Il a souligné que la rédaction actuelle sera source de contentieux et pose de nombreux problèmes.

M. Gaëtan Gorce s'est interrogé sur l'interprétation qu'il convient de faire de cet article. Son applicabilité à un accord de niveau inférieur est-elle assujettie à la volonté expressément formulée par les signataires de conférer à l'accord conclu avant la loi une valeur impérative ? Dans l'hypothèse d'une dénonciation ou d'une révision de l'accord, ses dispositions continueront-elles de s'imposer au niveau inférieur ? Tout cela milite en faveur d'une sécurisation de ce dispositif.

Le rapporteur a indiqué que la valeur de l'accord doit être appréciée au regard du droit en vigueur à l'époque de la signature et que la rédaction de l'amendement proposé porte atteinte à la liberté contractuelle.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies visant à substituer la valeur « reconnue » aux conventions à celle « accordée par les signataires » afin d'éviter tout contentieux sur l'interprétation a posteriori de la volonté des signataires.

M. Alain Vidalies a de nouveau insisté sur le fait que la rédaction actuelle de cet article conduit à une incertitude juridique absolue. En cas de contentieux il sera très délicat de rechercher quelle était la volonté des signataires quant à la valeur hiérarchique d'un accord puisque le principe était l'application du principe de faveur sans qu'il soit besoin de le préciser.

Le rapporteur a rappelé qu'il ne s'agit pas d'interpréter la volonté des signataires mais d'apprécier la valeur juridique que sa signature confère à l'accord.

M. Alain Vidalies a estimé que l'argumentation du rapporteur est en contradiction avec le texte de l'article.

La commission a rejeté l'amendement.

M. Gaëtan Gorce a mis l'accent sur le fait que la supériorité de l'accord de branche sur l'accord d'entreprise n'est plus désormais absolue mais conditionnée à la volonté expresse des parties ce qui ne manquera pas de susciter de nombreux problèmes juridiques.

La commission a adopté l'article 39 sans modification.

Article 40 (articles L. 132-18 et L. 132-19-1 [nouveau] du code du travail) : Conventions et accords de groupe

La commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz visant à appliquer aux conventions et accords de groupe le principe de l'accord majoritaire.

M. Alain Vidalies s'est interrogé sur la rédaction de l'exposé des motifs de cet article qui évoque notamment la possible fragilisation des relations sociales si l'on admettait la dérogation à un accord de branche par un accord de groupe. Elle souligne, de façon contradictoire avec la philosophie des accords dérogatoires encouragés par ailleurs, le danger réel que représentent ceux-ci.

Le rapporteur a indiqué que la restriction opérée par l'article pour les accords de groupe tient au fait que des conventions collectives différentes peuvent s'appliquer aux entreprises d'un même groupe.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz tendant à supprimer la remise en cause du principe de faveur que constituerait l'autorisation de dérogation aux accords de branche.

La commission a adopté l'article 40 sans modification.

Article 41 (article L. 132-26 du code du travail) : Négociation dans les entreprises dépourvues de délégué syndical

La commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz visant à favoriser la primauté de la représentation syndicale pour la négociation.

M. Maxime Gremetz a rappelé qu'auparavant les accords d'entreprise devaient être plus favorables que les accords de branche et que ce principe est malheureusement abandonné. Il en résulte que des salariés mandatés par l'entreprise pourront négocier des accords dérogatoires à tout l'ordonnancement juridique.

Le rapporteur a préconisé, en l'absence de délégué syndical, de faire confiance d'abord aux représentants élus du personnel, dont la légitimité est importante, pour négocier des accords.

M. Maxime Gremetz a souligné les problèmes qui ne vont pas manquer de se poser dans les petites entreprises. Il a insisté sur le fait que toutes les organisations syndicales ont émis des critiques face aux risques potentiels de ce dispositif.

Le rapporteur a rappelé que le mandatement ne constitue qu'une des trois possibilités ouvertes aux entreprises pour négocier.

La commission a rejeté l'amendement.

La commission a examiné deux amendements identiques de MM. Maxime Gremetz et Alain Vidalies, de suppression du dispositif habilitant les représentants du personnel à négocier des accords en l'absence de délégué syndical.

M. Alain Vidalies a expliqué que ce paragraphe remet en cause le rôle des syndicats dans le dialogue social en reconnaissant dans certains cas un pouvoir de négociation aux comités d'entreprises et aux délégués du personnel. Le débat sur les rôles respectifs des syndicats et des organes représentatifs du personnel en matière de négociation sociale est fort ancien mais il avait jusqu'à présent été tranché en faveur des syndicats, à travers, notamment, la création du mandatement. Le projet de loi fait aujourd'hui un choix radicalement inverse qui risque de conduire à l'éclatement de la démocratie sociale dans notre pays.

M. Maxime Gremetz a observé que, dans le cas du mandatement, que l'on peut certes contester dans son principe, il existe néanmoins un garde-fou, une garantie de base, puisque les salariés mandatés sont désignés par les organisations syndicales représentatives et ne peuvent pas négocier en dehors de leur mandat. Avec les dispositions prévues dans le II de l'article, ce garde-fou disparaît. La seule solution réelle est donc, comme le préconise M. Bernard Thibaut, de rendre obligatoire les élections professionnelles dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille.

La commission a rejeté les deux amendements.

La commission a également rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz visant à généraliser la possibilité de recourir au mandatement dans les entreprises dépourvues de délégué syndical ou de représentant élu du personnel, sans qu'il soit nécessaire que les accords de branche le prévoient.

La commission a rejeté un amendement de conséquence de M. Alain Vidalies.

La commission a examiné un amendement du rapporteur précisant les conditions de mise en œuvre du mandatement.

Le rapporteur a expliqué qu'il s'agit d'une part de prévoir que les organisations syndicales représentatives au plan national sont informées de la volonté de l'employeur d'entamer des négociations et, d'autre part, d'assurer l'indépendance du salarié mandaté.

M. Alain Vidalies a demandé si la notion d'apparentement à l'employeur du salarié mandaté utilisée par l'amendement est juridiquement validée.

Après que le rapporteur a assuré que cette notion est d'ores et déjà définie par les articles L. 423-8 et L. 433-5 du code du travail, la commission a adopté l'amendement.

La commission a rejeté un amendement de conséquence de M. Alain Vidalies.

Elle a ensuite adopté l'article 41 ainsi modifié.

Article 42 (article L. 132-30 du code du travail) : Commissions paritaires et dialogue social territorial

La commission a examiné un amendement de M. Alain Vidalies de suppression de l'article.

M. Alain Vidalies a souligné que, sous couvert de simplification, la nouvelle rédaction de l'article L. 132-30 du code du travail proposée par l'article remet en cause les garanties individuelles et collectives des salariés qui siègent dans les commissions paritaires locales, alors que ceux-ci doivent être considérés comme des salariés protégés, au même titre que les représentants syndicaux ou les délégués du personnel. Ces garanties sont-elles apportées par ailleurs ?

Le rapporteur s'est opposé à l'amendement en soulignant l'importance des commissions paritaires locales pour la cohérence du dialogue social territorial. Quant aux salariés siégeant dans ces commissions paritaires, leur protection entrera dans le champ de la négociation de branche tel qu'élargi par l'article 46.

La commission a rejeté l'amendement de suppression.

La commission a rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz précisant que les commissions paritaires locales regroupent des entreprises de moins de cinquante salariés.

La commission a ensuite adopté l'article 42 sans modification.

Article 43 (article L. 135-7 du code du travail) : Information sur le droit conventionnel applicable dans l'entreprise

La commission a rejeté un amendement de M. Maxime Gremetz prévoyant que l'accord de branche définissant les conditions d'information des salariés sur le droit conventionnel qui leur est applicable ne peut être moins favorable que les dispositions légales applicables en l'absence d'un tel accord, après que le rapporteur a indiqué que le principe de faveur édicté par l'article 132-4 du code du travail satisfait cette préoccupation.

La commission a adopté un amendement de cohérence du rapporteur.

La commission a examiné en discussion commune deux amendements de MM. Maxime Gremetz et Alain Vidalies tendant à renforcer l'information des salariés sur le droit conventionnel en prévoyant que l'employeur fournit à celui-ci un exemplaire de la convention au moment de l'embauche.

M. Maxime Gremetz a souligné que nombreux sont les salariés qui n'ont pas connaissance du contenu de la convention.

Le rapporteur a jugé qu'une telle obligation serait lourde à mettre en œuvre et que les documents sont souvent peu lisibles. Il a par ailleurs rappelé que la convention peut être consultée sur place dans l'entreprise. Il a enfin indiqué qu'il proposerait un amendement instituant la diffusion du texte de la convention sur le site intranet de l'entreprise lorsqu'il en existe un.

M. Maxime Gremetz a considéré qu'il y a là une contradiction : d'un côté, on estime que les gens lisent de moins en moins et l'on veut privilégier l'écrit et, de l'autre, on les incite à la consultation en ligne. Il a indiqué que, dans sa commune, les procès-verbaux ne sont plus disponibles que sur internet au détriment du support papier. De plus, les conventions ne sont pas affichées dans les entreprises.

Après avoir fait part de son accord avec les propos tenus par le rapporteur, M. Georges Colombier a estimé que, si Maxime Gremetz a raison sur le fond, la lecture sur un écran demeure de la lecture.

La commission a rejeté les deux amendements.

La commission a adopté trois amendements du rapporteur tendant respectivement à :

- clarifier le texte en levant toute ambiguïté quant au caractère obligatoire de la transmission des documents conventionnels aux délégués du personnel et aux délégués syndicaux ;

- prévoir que les documents conventionnels en consultation dans l'entreprise doivent être actualisés ;

- garantir la mise à disposition par l'employeur sur l'intranet de l'entreprise des documents conventionnels.

La commission a adopté l'article 43 ainsi modifié.

Article 44 (article L. 132-5-1 du code du travail) : Droit de saisine des organisations syndicales de salariés de thèmes de négociation

La commission a adopté l'article 44 sans modification.

Article 45 (article L. 412-8 du code du travail) : Modalités d'accès et d'utilisation des NTIC par les organisations syndicales de salariés dans les entreprises

La commission a examiné en discussion commune deux amendements de MM. Alain Vidalies et Maxime Gremetz tendant à inclure dans l'accord d'entreprise les modalités de mise à disposition des salariés du contenu des conventions.

La commission a rejeté les amendements.

La commission a adopté l'article 45 sans modification.

Article 46 (article L. 133-5 du code du travail) : Dispositions tendant à améliorer l'exercice du droit syndical

La commission a adopté l'article 46 sans modification.

Article 47 (articles L. 123-4, L. 212-4-6, L. 212-4-12, L. 212-10, L. 212-15-3 et L. 227-1du code du travail, article L. 713-18 du code rural et article II-2° de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques vacances) : Dispositions de coordination

La commission a rejeté un amendement de suppression de l'article de M. Maxime Gremetz.

La commission a adopté deux amendements du rapporteur de coordination et de précision rédactionnelle.

La commission a adopté l'article 47 ainsi modifié.

Article 48 : Application des dispositions du titre II de la loi à Mayotte

La commission a adopté l'article 48 sans modification.

Article additionnel avant l'article 49 (article L. 136-1 et L. 136-2 du code du travail) : Composition et missions de la commission nationale de la négociation collective

La commission a examiné un amendement du rapporteur tendant à améliorer le dialogue entre les différentes sources normatives en matière de droit du travail.

M. Maxime Gremetz a demandé que la représentation parlementaire, composée de trois députés et trois sénateurs, prévue au I de l'amendement soit modifiée. Il serait préférable d'adopter une représentation parlementaire identique à celle existant au conseil d'orientation des retraites.

Le rapporteur s'est interrogé sur le risque éventuel de modification de l'équilibre interne de la commission que comporte cette proposition.

M. René Couanau, président, a jugé que, si l'on se fonde sur le nombre de groupes présents au Sénat, on risque de multiplier le nombre des parlementaires.

M. Jean-Marie Geveaux, après avoir fait part de son accord sur le fond avec M. Maxime Gremetz, a souligné la qualité de l'amendement et suggéré que la question de la représentation parlementaire au sein de la commission soit réglée au cours du débat en séance publique.

Le rapporteur a suggéré une rédaction mentionnant « des députés et des sénateurs représentant les groupes constitués dans chaque assemblée ».

M. Alain Vidalies s'est interrogé sur la compatibilité du dispositif avec certains principes constitutionnels et politiques.

La commission a adopté l'amendement ainsi rectifié.

Article 49 : Rapport sur l'application de la loi

La commission a adopté deux amendements du rapporteur tendant respectivement à faire de l'avis de la Commission nationale de la négociation collective sur le rapport d'application de la loi un avis motivé et à prévoir que le rapport remis au Parlement après avis de la Commission nationale de la négociation collective ne porte pas sur l'ensemble de la loi mais sur l'application de son titre II relatif au dialogue social.

La commission a adopté l'article 49 ainsi modifié.

TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES

Chapitre Ier
Garanties de certaines créances salariales

Article 50 (article L. 143-11-3 du code du travail) : Garantie de certaines créances salariales

La commission a examiné un amendement de suppression de l'article de M. Maxime Gremetz.

M. Alain Vidalies a estimé que cet article répond à la nécessité de préserver l'UNEDIC et l'ASSEDIC de certaines fraudes.

La commission a adopté l'article 50 sans modification.

Après l'article 50

Après que M. René Couanau, président, a indiqué que les articles 51 et 52 figurent d'ores et déjà dans la loi de finances et ont été en conséquence retirés par le gouvernement, la commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz étendant l'agrément visé à l'article L. 129-1 du code du travail aux associations sans but lucratif, dont les activités concernent l'assistance aux personnes qui ont besoin d'une aide personnelle à leur domicile ou d'une aide à mobilité dans l'environnement de proximité favorisant leur maintien à domicile.

Le rapporteur ayant jugé que - s'il partage l'esprit de l'amendement -, celui-ci semble couvert par la rédaction actuelle du code du travail, la commission a rejeté l'amendement.

M. Maxime Gremetz a demandé que le projet de loi soit scindé en deux parties et que chacune de ces parties fasse pour son adoption l'objet d'un vote séparé. Il a estimé que la commission doit se prononcer sur deux textes différents artificiellement accolés et que le gouvernement aurait dû faire adopter en premier lieu par le Parlement l'accord historique sur la formation professionnelle. Il s'est déclaré en parfait accord avec le titre Ier, mais farouchement opposé au contenu du titre II portant sur le dialogue social. Ce couplage de textes est d'autant moins justifié que le ministre a prétexté un problème de temps.

Le rapporteur a souligné la cohérence du projet de loi qui, d'une part, fournit au dialogue social une méthode et, d'autre part, propose d'en consacrer la réussite concrète. Il a, en conséquence, donné un avis défavorable à un vote séparé.

M. Alain Vidalies a estimé que mêler les deux textes, les niveaux de négociation, constitue une approche maladroite par sa radicalité et a donné un avis favorable au vote séparé car il n'y a pas de lien entre les deux parties du texte : la première partie du projet est même l'inverse d'une première application de la seconde partie !

M. Georges Colombier a indiqué qu'au conseil général de l'Isère, en raison des différences d'appréciation politique, le vote par division constitue souvent une solution commode. Cette méthode pourrait peut-être s'appliquer au projet de loi.

M. René Couanau, président, a fait part de son hostilité au principe d'un vote séparé sur le texte.

M. Claude Gaillard a estimé que le vote séparé sur ce texte n'est pas justifié car il existe un lien entre ces deux titres qui concourent tous deux à l'amélioration des relations professionnelles.

La commission a rejeté la demande de vote séparé formulée par M. Maxime Gremetz.

Elle a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.


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