COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 51

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 28 juillet 2004
(Séance de 9 heures 30)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président.

SOMMAIRE

 

pages

- Examen du rapport d'information sur les établissements et services sociaux et médico-sociaux (M. Pierre Morange, rapporteur)


2

- Informations relatives à la commission

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné le rapport d'information de M. Pierre Morange sur les établissements et services sociaux et médico-sociaux.

M. Pierre Morange, président de la mission d'information, a évoqué les conditions de travail de la mission, qui a été créée le 29 avril 2003 et comprend onze membres. Les thèmes de travail retenus ont été l'application de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale ainsi que les perspectives ouvertes par le projet de loi réformant la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées.

Les circonstances, liées au calendrier des travaux du Parlement et aux modifications dans la composition du gouvernement, n'ont pas permis la présentation du rapport avant le dépôt du projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées portant réforme de la loi du 30 juin 1975 précitée.

Le champ du secteur social et médico-social est difficile à appréhender de façon synthétique. En effet, il comporte plus de 24 500 établissements, regroupe 1,05 million de lits ou places et emploie plus de 400 000 salariés. Les financements publics qui lui sont consacrés s'élèvent à 84 milliards.

Divers textes sont intervenus qui ont influé sur le secteur et ses activités : la loi du 20 juillet 2001 portant création de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), la loi du 2 janvier 2002 précitée, la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et handicapées et le projet de loi, en cours de navette, relatif à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Par ailleurs, les décrets d'application de la loi portant rénovation de l'action sociale et médico-sociale ont été pris tardivement, tout comme le décret dit « budgétaire » qui n'a été publié qu'au mois d'octobre dernier.

La mission d'information a procédé à plus de quarante-cinq auditions afin de rendre compte de l'ensemble des champs d'activité du secteur et de pouvoir formuler un certain nombre de recommandations :

- La première recommandation porte sur l'amélioration de la prise en charge psychiatrique en France. En effet, il s'agit d'un domaine impliqué dans l'ensemble des branches du secteur social et médico-social. L'inadéquation des moyens est particulièrement forte dans le champ de la psychiatrie infanto-juvénile.

- La deuxième recommandation tend à une clarification du rôle des associations. Dans le fil de la loi du 2 janvier 2002, il convient notamment de décider si ces acteurs peuvent tout à la fois représenter les intérêts des personnes et gérer les structures qui les accompagnent.

- La troisième recommandation concerne l'abolition du critère de l'âge pour la définition des prestations et de l'action sociale.

- La quatrième recommandation incite à poursuivre le combat contre les mauvais traitements, question qui a fait l'objet de deux rapports, l'un remis à la secrétaire d'Etat aux personnes âgées en janvier 2001, l'autre résultant des travaux d'une commission d'enquête sénatoriale déposé au mois de juin 2003.

- La dernière recommandation est relative à la professionnalisation des personnels, élément indispensable de garantie de la qualité des services et de l'accueil.

Enfin, les membres de la mission d'information appartenant au groupe socialiste ont apporté une contribution qui est intégrée au rapport.

En réponse à une question de M. Henri Nayrou, M. Pierre Morange, président de la mission d'information, a précisé que le rapport sera disponible dans les jours prochains.

Le président Jean-Michel Dubernard a souligné que, dans le domaine de la psychiatrie, on a assisté au cours des dernières décennies à un mouvement d'ouverture des établissements au profit de la prise en charge ambulatoire. La situation ainsi créée n'est pas sans poser des problèmes. Par ailleurs, de nombreuses personnes détenues relèvent manifestement d'une prise en charge strictement psychiatrique. Puis, il a demandé au président de la mission d'information des précisions sur les pistes de travail suggérées par son rapport concernant le rôle des associations, la question des mauvais traitements et la professionnalisation du personnel.

M. Pierre Morange, président de la mission d'information, a rappelé que la mission s'est attachée à fournir une image claire d'un secteur consommant 80 milliards d'euros par an et à préciser les rôles respectifs des différents financeurs.

Pour ce qui concerne la psychiatrie, et sans vouloir médicaliser le problème, une politique de développement de la prévention psychiatrique infantile est indispensable afin d'éviter des évolutions postérieures néfastes. Les missions du secteur doivent être redéfinies dans l'ensemble de son champ d'intervention : enfance en situation de précarité, populations en grande difficulté sociale, handicap et dépendance. Le mouvement qui a constitué à privilégier la prise en charge ambulatoire a montré ses limites. Dans de nombreux cas, il faut organiser la sécurisation des personnes, cela pour elles-mêmes comme pour la société.

La loi du 2 janvier 2002 portant rénovation de l'action sociale et médico-sociale a engagé les associations dans un mouvement d'évaluation de leurs actions. La place importante prise par le secteur privé dans plusieurs branches du secteur s'explique par l'histoire : il a fallu pallier des carences du service public. On se trouve aujourd'hui confronté à une situation complexe qui appelle une clarification du rôle des associations. On constate ainsi des différences de coût pouvant aller du simple au double pour des prestations réputées équivalentes. Aujourd'hui, la plupart des associations gestionnaires se livrent à ce travail d'évaluation.

La suppression du critère de l'âge est unanimement réclamée. Le texte relatif aux personnes handicapées, en cours de navette au Parlement, prévoit l'abolition de ce critère dans un délai de trois à cinq ans. Il appartiendra au Parlement de suivre avec attention l'application de cette mesure.

La question de la maltraitance a été largement abordée par le Parlement. Un des éléments majeurs de lutte contre ces situations réside dans une meilleure formation des personnels.

M. Maurice Giro a regretté que la maltraitance, notamment des enfants, qui fait l'objet de plaintes en augmentation auprès des conseils généraux, n'ait pas davantage été examinée par la mission d'information.

M. Pierre Morange, président de la mission d'information, a rappelé que l'objet de la mission est de présenter une vision synthétique des problèmes excluant l'approche spécifique de certaines catégories de population. Néanmoins, la quatrième proposition de la mission, relative à la professionnalisation des personnels, prend naturellement en compte les mauvais traitements infligés aux enfants.

M. Pierre-Louis Fagniez s'est interrogé sur le prolongement qui pourrait être donné par l'Assemblée nationale aux travaux de la mission d'information.

Le président Jean-Michel Dubernard a admis qu'il s'agit là d'un problème de fond qui concerne toutes les missions d'information. En l'espèce, certaines propositions pourraient être intégrées dans un projet de loi portant diverses modifications d'ordre social ou dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Pierre Morange, président de la mission d'information, a également souligné que l'on touche là le cœur de la fonction parlementaire : sur quelles actions concrètes peuvent déboucher les travaux des missions d'information ? Le premier objet de la présente mission est de synthétiser une masse complexe d'informations et d'en donner une vision pédagogique pouvant servir d'outil de travail. Cela a débouché naturellement sur l'énumération de pistes et de recommandations et il est éminemment souhaitable que, dans le cadre de son activité législative et budgétaire, le Parlement trouve les moyens de répondre aux propositions. La mission d'évaluation et de contrôle chargée d'assurer l'évaluation des lois de financement de la sécurité sociale, que l'Assemblée nationale propose de créer en introduisant un amendement dans le projet de loi relatif à l'assurance maladie, pourrait notamment s'intéresser aux problèmes soulevés par la mission.

M. Henri Nayrou a regretté la multiplication des informations, ainsi que le morcellement des initiatives et des propositions, face auxquelles l'opposition comme la majorité tournent en rond. On peut se demander si c'est bien le rôle des parlementaires d'actualiser en permanence ces informations. Le vote du budget pourrait être l'occasion pour le gouvernement de donner les moyens de concrétiser les propositions formulées dans le cadre des missions parlementaires.

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué que pour être efficaces les missions d'information doivent porter sur des sujets pertinents et ciblés. On peut citer l'exemple de la mission sur l'organisation interne de l'hôpital présidée par M. René Couanau dont certaines propositions ont été prises en compte par le ministre de la santé pour la présentation du plan hôpital 2007.

M. Frédéric Reiss a considéré que le diagnostic est nécessairement plus facile que la mise en œuvre des solutions. Deux problèmes mériteraient cependant d'être approfondis : la situation des populations fortement marginalisées et la maltraitance des personnes âgées, de plus en plus souvent séparées de leurs familles qui les placent en établissements tout en engageant parfois des actions juridiques contre ces derniers.

M. Pierre Morange, président de la mission d'information, a indiqué que la mission s'est trouvée dans l'obligation de prendre en compte plusieurs textes adoptés récemment ou en préparation dans le domaine social et médico-social. C'est le cas pour la loi du 2 janvier 2002 dont relèvent les personnes en situation d'extrême précarité et l'évaluation de l'action des associations agissant dans le domaine sanitaire et social. C'est encore le cas pour le projet de loi relatif aux personnes handicapées, actuellement en cours de navette, qui satisfait d'ores et déjà certaines demandes de la mission d'information. Dans le domaine de la psychiatrie, il faut également souligner l'apport de la loi de janvier 2002 qui fixe aux établissements un cadre à la fois protecteur et contraignant même si certaines mesures tel que le « conseil de vie » sont difficilement applicables. Une meilleure intégration et une meilleure participation des familles aux structures médico-sociales ainsi qu'un effort de professionnalisation des personnels devraient permettre une réduction significative des cas de maltraitance.

M. Maurice Giro a souligné les difficultés tenant à la compétence étendue des conseils généraux dans le domaine social. Il en résulte de grandes disparités d'un département à l'autre et une difficulté à évaluer globalement le fonctionnement du secteur médico-social.

M. Henri Nayrou a fait part de son étonnement quant à la date retenue pour l'examen de ce rapport, en fin de session extraordinaire, alors qu'un sujet de cette nature aurait mérité un meilleur traitement.

Le président Jean-Michel Dubernard a regretté ce procès d'intention en rappelant que la présentation du rapport a été retardée pour cause d'élections et a dû être avancée avant l'automne afin que les propositions puissent être prises en compte dans la préparation de la loi de finances et des projets de loi à venir. Il faut rappeler que le secteur social et médico-social représente un coût budgétaire de 84 milliards d'euros et qu'une meilleure utilisation de cet argent est sans doute possible.

S'agissant des diversités d'actions d'un département à l'autre, M. Pierre Morange, président de la mission d'information, a ajouté que ces disparités résultent également de l'empilement et de la complexité des actions mises en place depuis de nombreuses années.

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La commission a décidé, en application de l'article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication.

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Informations relatives à la commission

La commission a désigné :

Mme Pascale Gruny, rapporteure sur la proposition de résolution de M. Kléber Mesquida tendant à la création d'une commission d'enquête sur les responsabilités dans le massacre de nombreuses victimes civiles, rapatriées et harkis après la date officielle du cessez-le-feu de la guerre en Algérie - n° 1637 ;

- M. Emmanuel Hamelin, rapporteur sur la proposition de résolution de M. Patrick Bloche tendant à la création d'une commission d'enquête visant à analyser les conditions de la cession d'une partie d'Editis, premier groupe français d'édition, et à évaluer ses conséquences économiques et sociales dans le secteur de l'édition - n° 1704 ;

- Mme Bérengère Poletti, rapporteure sur la proposition de résolution de Mme Muguette Jacquaint tendant à la création d'une commission d'enquête sur l'application de la loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001 relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception - n°1728.

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