COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 35

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 23 mars 2005
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président,

puis de M. Georges Colombier, secrétaire,

puis de M. Pierre-Louis Fagniez

SOMMAIRE

 

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- En présence de M.  Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille et de M.  Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, examen des rapports de :

_ M. Pierre-Louis Fagniez sur la mise en application de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique

_ M.  Jean-Michel Dubernard sur la mise en application de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique

_ M.  Jean-Michel Dubernard sur la mise en application de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie

(réunion ouverte à la presse)

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En application de l'article 86, alinéa 8 du Règlement, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné, en présence de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille, et de M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, les rapports de :

- M. Pierre-Louis Fagniez sur la mise en application de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique ;

- M. Jean-Michel Dubernard sur la mise en application de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique ;

- M. Jean-Michel Dubernard sur la mise en application de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.

Le président Jean-Michel Dubernard a tout d'abord remercié chaleureusement le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, M. Philippe Douste-Blazy, et le secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, M. Xavier Bertrand, d'avoir accepté de participer à cette première réunion de la commission consacrée au contrôle de la mise en application de textes législatifs, en soulignant toute l'importance de cette nouvelle procédure, introduite dans le règlement de l'Assemblée nationale en février 2004. En effet, comme l'avait justement souligné M. Xavier Bertrand, alors député, lors de l'examen de la proposition de résolution de M. Jean-Luc Warsmann, « quand la loi ne s'applique pas, c'est le sentiment démocratique qui s'affaiblit ». La mise en œuvre de cette nouvelle procédure permettra ainsi, comme le souhaite le Président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré, de renforcer les fonctions de contrôle du Parlement et de redonner à la loi toute l'autorité et la crédibilité qui doivent lui être attachées.

Le président Jean-Michel Dubernard a ensuite proposé d'organiser les travaux de la commission de la façon suivante : trois séquences d'environ trente minutes seront consacrées à l'examen de chacun des rapports, au cours desquelles la présentation succincte du rapport sur la mise en application de la loi par le rapporteur sera suivie d'une première série de questions des porte-parole de chaque groupe et des réponses du ou des ministres concernés, puis d'une autre série de questions posées par les commissaires mais également, s'il le souhaite, par M. Yves Bur, désormais membre de la commission des finances, et, en conclusion, des réponses du ministre.

Il convient par ailleurs de souligner que l'objet de la réunion est bien de contrôler l'application de ces trois lois, mais en aucun cas de procéder, sur le fond, à leur évaluation, qui serait d'ailleurs tout à fait prématurée. Il est souhaitable en conséquence que chacun respecte l'esprit de cette procédure et s'engage, de façon constructive, dans ce débat.

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La commission a examiné le rapport de M. Pierre-Louis Fagniez sur la mise en application de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur, a indiqué, en premier lieu, que 24 articles de la loi sur 40 ne requièrent directement aucun texte réglementaire pour leur application et sont donc devenus immédiatement applicables dans leur très grande majorité. Il s'agit, par exemple, de l'article 10 relatif à l'information sur les modalités de consentement au don d'organes à fins de greffe, ou encore des articles 21, 28 et 29, qui posent l'interdiction du clonage reproductif et de l'eugénisme, pénalement sanctionnés en tant que crime contre l'espèce humaine. En outre, plusieurs dispositions d'autres articles de la loi, nécessitant par ailleurs la parution de textes réglementaires, sont également devenues immédiatement applicables. Tel est le cas notamment des dispositions des articles 7 et 9 relatives, d'une part, à la prise en charge intégrale des frais de prélèvement et de collecte par les établissements de santé et, d'autre part, au caractère de priorité nationale de la greffe et du prélèvement d'organes et du principe d'équité dans la répartition et l'attribution des greffons, auxquels le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales est très attaché. Enfin, l'application effective de trois articles a été reportée, par la loi, à une date ultérieure à sa promulgation. Ceux-ci prévoient que la loi fera l'objet d'un nouvel examen d'ensemble dans un délai de cinq ans après sa publication et donnera lieu au dépôt de deux rapports au Parlement portant respectivement sur les initiatives qu'aura prises le gouvernement pour élaborer une législation internationale sur le clonage reproductif et sur l'évaluation des recherches sur les cellules souches embryonnaires et adultes.

Il convient, en second lieu, de saluer la mise en place très rapide du dispositif transitoire de recherche sur les cellules souches embryonnaires, conformément aux engagements pris par le ministre chargé de la santé devant la représentation nationale. A ce jour, tous les textes d'application de l'article 37 ont en effet été publiés, ce qui a permis aux chercheurs de postuler à l'appel d'offres européen prévu pour le financement de ces recherches, dont la clôture était fixée à l'automne 2004.

Le taux d'exécution de la loi demeure toutefois particulièrement faible, puisque la grande majorité des textes nécessaires à l'application de la loi n'a toujours pas été publiée. Ainsi, alors que seize articles de la loi renvoient au moins pour leur application à la parution d'un texte réglementaire, il est très regrettable que seuls les textes prévus par l'article 37 soient parus à ce jour. Ce retard trouve son origine dans plusieurs facteurs, dont la priorité donnée à l'application de la loi relative à l'assurance maladie, qui a fortement mobilisé les services du ministère. La loi nécessite également de recueillir l'avis de multiples acteurs et concerne par ailleurs des sujets très techniques, ce qui rend la rédaction des textes d'application particulièrement ardue. Enfin, il apparaît clairement que la situation des ressources humaines de la direction générale de la santé (DGS) continue de comporter des faiblesses structurelles, comme l'a souligné la Cour des comptes dans son rapport public au Président de la République pour 2004.

Il en résulte que la mise en application de la loi requiert encore la parution de 44 textes réglementaires. Plusieurs d'entre eux devraient toutefois être publiés prochainement et concernent des questions aussi fondamentales que la création de l'Agence de biomédecine, le Conseil consultatif national d'éthique (CCNE) ou encore les comités d'experts en matière de prélèvement d'organes et de cellules sur une personne vivante. La publication d'une deuxième salve de textes est programmée à partir de juillet 2005, concernant notamment les modalités d'application des dispositions relatives au diagnostic préimplantatoire (DPI). Au total, 33 textes d'application devraient être publiés d'ici octobre 2005, mais dix arrêtés, dont l'un concerne le guide des bonnes pratiques en génétique, resteront encore à paraître d'ici juin 2006.

En bref, l'application de la loi relative à la bioéthique a pris beaucoup de retard. Il est donc urgent d'accélérer le mouvement pour répondre aux attentes des patients, des familles, des professionnels de santé et des chercheurs. Une nouvelle révision de la loi doit par ailleurs avoir lieu dans à peine un peu plus de quatre ans, ce qui suppose, pour avoir un recul suffisant, qu'elle soit pleinement applicable et appliquée aussi rapidement que possible.

En conclusion, le rapporteur a souhaité avoir des précisions sur les trois points suivants :

- L'Agence de biomédecine, qui constitue l'une des avancées majeures de la loi et qui permettra d'imprimer un rythme beaucoup plus rapide au processus de mise en application de la loi, sera-t-elle bien installée très prochainement ?

- S'agissant plus particulièrement des dispositions de la loi relatives au diagnostic prénatal (DPN) et au diagnostic préimplantatoire (DPI), s'agissant en particulier de l'extension encadrée du champ de celui-ci, également appelée « bébé du double espoir », quels sont l'état d'avancement et la date de parution prévisionnelle de l'ensemble des textes réglementaires d'application, y compris les arrêtés ? Il est en effet essentiel que ces textes importants et attendus, qui sont liés eux aussi à la mise en place de l'Agence de biomédecine, soient publiés dans un délai raisonnable et le ministre partage très certainement cette préoccupation.

- De quelle façon le ministère de la santé compte-t-il anticiper la clause de révision de la loi, introduite à l'initiative des députés, afin que cette échéance soit effectivement respectée, contrairement à celle fixée par les lois de 1994 ?

Après l'exposé du rapporteur, les porte-parole des groupes sont intervenus.

M. Alain Claeys, pour le groupe socialiste, a considéré, comme le rapporteur, que l'urgence porte sur la création de l'Agence de biomédecine et la définition des modalités d'application de l'article 23 relatif au DPI, en particulier sur l'élargissement de son champ. Il faut d'ailleurs rappeler, concernant ce type de diagnostic, que les dispositions de la loi du 29 juillet 1994 relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain sont longtemps restées inappliquées faute de parution des textes réglementaires nécessaires. Il faut donc éviter que cette situation se reproduise.

De façon plus générale, il serait souhaitable que le gouvernement charge une instance de réfléchir à la question du clonage thérapeutique, puisque la plus grande confusion règne à ce sujet au niveau international. A l'initiative des Etats-Unis, l'Organisation des nations unies (ONU) a en effet adopté une déclaration condamnant toutes les formes de clonage des êtres humains, sans faire aucune distinction entre clonage reproductif et clonage thérapeutique, la France ayant semble-t-il voté contre. Il est donc important de faire le point sur le clonage thérapeutique et ce serait certainement le rôle de l'Agence que d'éclairer le Parlement et le gouvernement sur cette question. Il apparaît enfin nécessaire de réactiver l'initiative franco-allemande qui avait été engagée sur ce sujet il y a quelques années.

M. Jean-Luc Préel, pour le groupe UDF, s'est tout d'abord félicité de la tenue de cette réunion importante, première de son espèce, qui permet d'assurer le suivi de l'application de textes législatifs. Il serait cependant souhaitable que ce travail d'évaluation et de suivi soit poursuivi afin notamment de veiller à ce que les textes d'application soient réellement conformes à l'esprit de la loi, puisque cela n'a pas toujours été le cas, loin s'en faut.

Par ailleurs, le ministre pourrait-il préciser les initiatives internationales que le gouvernement entend prendre en matière de clonage reproductif, conformément à l'article 22 de la loi, et plus largement sur l'ensemble des questions relatives à la bioéthique ? Enfin, compte tenu du grand retard pris dans l'application de la loi relative à la bioéthique, il est indispensable, comme l'a très justement souligné le rapporteur, d'accélérer le mouvement.

Le président Jean-Michel Dubernard a observé que ce n'est malheureusement pas la première fois que des retards sont constatés concernant l'application d'un texte relatif à la bioéthique.

En réponse aux intervenants et après s'est déclaré très heureux d'avoir été invité à faire le point sur l'application de trois lois adoptées en août 2004, M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille, a apporté les précisions suivantes :

- S'agissant de l'Agence de la biomédecine, le décret relatif aux modalités de sa constitution a été examiné hier en Conseil d'Etat. Il devrait donc pouvoir être publié en avril, ce qui permettra, après la nomination de sa directrice générale, de procéder au lancement attendu par tous de l'agence. Les réflexions sont déjà avancées afin que les nominations aux conseils d'administration et d'orientation aient lieu en même temps. La nouvelle agence, à la différence des précédentes créations, est bâtie sur des fondations solides, un travail préparatoire minutieux ayant été réalisé pour permettre une montée en puissance accélérée. Ainsi, l'Etablissement français des greffes (EFG) a déménagé au début de l'année pour permettre l'accueil de nouveaux personnels. Les travaux engagés par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur le transfert à l'agence des fichiers détenus par l'association « France Greffe de moelle » devraient permettre l'intégration des personnels de l'association dans de bonnes conditions. Le contrat d'objectif et de moyens de l'agence est également en préparation.

- S'agissant du clonage thérapeutique, la France doit en effet prendre très rapidement une initiative au niveau international.

- Le décret relatif au DPN et au DPI est d'une rédaction délicate en raison de sa technicité et des sujets abordés. C'est en particulier le cas pour l'extension du champ du DPI, dite « bébé du double espoir ». Ce texte est également complexe par l'importance des dispositions à caractère médical et scientifique qu'il contient et la nécessité de prendre en compte l'évolution des techniques et des connaissances en matière de DPI. Son élaboration nécessite par ailleurs une phase importante de concertation avec les différents professionnels concernés, qui a récemment commencée. Le décret sera soumis au Conseil d'Etat courant juillet et publié en août. S'agissant des arrêtés d'application, qui requerront l'expertise préalable de l'Agence de biomédecine, les principaux d'entre eux pourront être publiés à l'automne 2005.

- La préparation de la révision de la loi sur la bioéthique reposera sur deux paramètres : l'évaluation des politiques relatives à l'ensemble des domaines de la bioéthique, qui nécessitent des ajustements des dispositifs mis en place, et les évolutions médicales et scientifiques, ces dernières ayant pesé particulièrement lourd dans la révision de la loi de 1994, et c'est ce qui a retardé les échéances fixées par les lois de juillet 1994. Compte tenu de la rapidité et du caractère difficilement maîtrisable des progrès scientifiques, un travail de réflexion approfondi s'impose quant aux réponses à y apporter, car elles ont une portée sociétale importante et peuvent engager une certaine vision de l'humanité, s'agissant notamment du statut de l'embryon ou du clonage. Ce travail d'évaluation tiendra compte des rapports annuels et des analyses de l'Agence de biomédecine. Enfin, la législation en matière de bioéthique ne peut plus se concevoir dans un contexte exclusivement national. Ainsi, au regard de l'expérience passée, le dispositif d'évaluation de la loi est-il conçu à présent pour être pleinement intégré à l'application même du texte.

- La parution du décret relatif à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires est effectivement prévue pour août. Dans l'attente de ce texte, qui confiera à l'agence la responsabilité de délivrer les autorisations nécessaires, le dispositif transitoire pris en application de l'article 37 continuera de fonctionner pour les cellules souches importées. La rédaction du décret bénéficiera de l'expertise scientifique et éthique du conseil d'orientation de l'agence, qui sera consulté sur les protocoles de recherches dans le cadre du dispositif prévu.

- S'agissant de la situation de la DGS, force est de reconnaître que les dispositions réglementaires concernant la loi relative à la bioéthique demandent un temps de rédaction beaucoup plus long que celles concernant la loi relative à l'assurance maladie. De plus, il est exceptionnel qu'une même direction - la DGS - ait à traiter de trois lois en même temps. Or, comme le note le rapport de la Cour des comptes, cette direction a d'autres missions essentielles : la gestion des alertes sanitaires, la préparation de plans de réponses à des situations exceptionnelles - pandémie grippale ou plans de lutte contre des actes bioterroristes - et le pilotage des plans de santé, notamment ceux prévus par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. Même si le calendrier présenté apparaît bien tardif à certains, il faut savoir que la DGS a accompli un effort très important. Au cours des dernières années, cette direction a réussi à préparer, en moyenne, une vingtaine de décrets par an. Or actuellement, il lui est demandé d'en élaborer plus de quatre-vingt-dix tout en poursuivant la transposition des directives avec des délais de retard en nette diminution. On ne saurait donc imaginer que la DGS « traîne les pieds ».

M. Jean-Marie Le Guen s'est félicité de l'innovation que constitue cette réunion, en soulignant, pour éviter toute ambiguïté, qu'il s'en tiendrait strictement aux questions relatives à l'application de la loi, sans traiter du fond. Les décrets d'application étant encore loin d'être tous parus, il serait très souhaitable que le ministre prenne l'engagement de revenir dans quelques mois devant la commission pour en décrire la teneur. Cela vaut particulièrement pour ceux qui concernent le DPI et la création de l'Agence de biomédecine, d'une urgence particulière.

Le président Jean-Michel Dubernard a souligné que la commission entendait jouer sans relâche son rôle de contrôle et s'est dit certain que, dans ce cadre, le ministre et le secrétaire d'Etat accepteront de s'exprimer à nouveau sur l'application de la loi.

M. Jean-Marie Le Guen a souhaité un engagement plus précis et plus ferme. Quant aux observations formulées par la Cour des comptes à propos de la DGS, surchargée de travail, le ministre pourrait-il indiquer les conclusions qu'il a tirées de la recommandation tendant à doter cette direction de nouveaux outils et si des conséquences budgétaires en découleraient ?

Le ministre a souligné qu'il reviendrait avec plaisir devant la commission s'il y était convié, à l'automne par exemple, lorsque la rédaction des décrets serait bien avancée. La Cour des comptes a consacré un chapitre de son rapport annuel à la DGS, qui doit en effet être réorganisée pour tenir compte de l'évolution et de l'accroissement de ses missions. Dans cette perspective, il convient tout d'abord d'améliorer la prise en compte des situations urgentes et exceptionnelles et de doter la DGS d'une réactivité supérieure, même si des efforts ont été entrepris dans ce sens, et d'intégrer l'impact de lois récentes, telles que la loi relative à la politique de santé publique, la réforme de l'assurance maladie et la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Il est également important de prendre en compte les évaluations, par le Parlement et par l'IGAS, de la loi du 1er juillet 1998, qui a créé la plupart des agences de sécurité sanitaire, ainsi que de la réforme du ministère des affaires sociales.

Une analyse a été menée avec l'aide d'un cabinet de consultants et des pistes ont été tracées. De nombreux chantiers ont été menés concernant la maîtrise des processus de pilotage et de gestion des plans sanitaires et des programmes LOLF ainsi que l'efficacité des modes de fonctionnement interne (planification des activités, niveau de délégation clarifié, partage de l'information formalisé et capacité à fixer des priorités et à procéder à des arbitrages sur les dossiers transversaux).

Des premiers résultats sont déjà perceptibles avec la mise en place du département des situations d'urgence sanitaire et la création de plusieurs postes, dont un directeur de projet pour le programme veille et sécurité sanitaire et deux contrôleurs de gestion. Il faut également renforcer les moyens de la DGS dans le domaine de la gestion des stocks des produits de santé achetés dans le cadre de la lutte contre le bioterrorisme et la préparation aux situations sanitaires exceptionnelles. Il est également important d'aider l'encadrement intermédiaire à développer ses capacités de management. Des efforts de formation sont sans doute à produire dans ce domaine et l'amélioration des processus budgétaires et comptables doit être poursuivie.

La DGS expérimente par ailleurs un fonctionnement par projet pour l'élaboration et le suivi des décrets d'application de la loi relative à la politique de santé publique. Une équipe dédiée d'une dizaine de personnes, représentant l'ensemble des sous-directions, est chargée de coordonner et de suivre la rédaction des textes. Un tableau de bord est par ailleurs mis à jour de façon bimensuelle. Plusieurs chantiers restent enfin à ouvrir en 2005.

Il serait nécessaire de regrouper, à terme, les différentes agences de santé, non pour leur faire perdre leurs spécificités mais pour rassembler et renforcer les expertises. Il est en effet anormal que les entreprises qui interrogent une agence sur un problème donné reçoivent des réponses d'ordre administratif plutôt que sanitaire.

Le président Jean-Michel Dubernard a rappelé que la question de la coopération des agences avait été abordée lors de la discussion, en première lecture, du projet de loi relatif à la politique de santé publique.

La commission a autorisé le dépôt du rapport sur la mise en application de la loi n°2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique en vue de sa publication.

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La commission a ensuite examiné le rapport de M. Jean-Michel Dubernard sur la mise en application de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur, a souligné, comme l'avait fait le ministre, que la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique est un texte porteur d'enjeux fondamentaux pour l'évolution du système de santé français. Premier texte d'ensemble depuis la loi de 1902 relative à l'hygiène publique, elle est également fondatrice pour le Parlement qui a, pour la première fois, débattu et voté une centaine d'objectifs fixant les priorités de la politique de santé publique pour les cinq ans à venir.

Pour 68 de ses articles, aucun texte d'application n'était nécessaire ; ils sont donc devenus immédiatement applicables. Certains portent sur des domaines importants, tels que la définition des missions et des responsabilités de l'Institut de veille sanitaire, la lutte contre les infections nosocomiales en médecine de ville, le tabagisme et l'alcoolisme et quelques dispositions de la réforme du régime des recherches biomédicales. A ce jour, trois décrets et quatre arrêtés d'application de la loi ont par ailleurs été publiés, ce qui a permis de rendre applicables trois autres articles qui concernent le prix de détail minimum des cigarettes, la prolongation d'activités des personnels médicaux et les règles de suspension des médecins en cas d'urgence. Au total, près de 45 % des articles de la loi sont ainsi applicables aujourd'hui. Il n'en reste pas moins qu'une partie importante de la loi n'est toujours pas applicable, ce qui est d'autant plus regrettable que le texte comporte des progrès décisifs pour la qualité et l'efficacité du système de santé publique.

Il faut toutefois reconnaître que la préparation de ces textes d'application est rendue plus complexe par le nombre très important des consultations et concertations interministérielles requises par la loi ; c'est notamment le cas pour le décret relatif à l'Ecole des hautes études en santé publique, qui est placée sous la tutelle conjointe des ministres de la santé, des affaires sociales et de la recherche. De plus, la nécessité de procéder à des expérimentations préalables, par exemple pour la déclaration des événements indésirables graves, ou à des procédures particulières, telles que la notification à la Commission européenne des dispositions relatives aux modalités d'étiquetage nutritionnel, freine encore la mise en œuvre de la loi. Surtout, la mise en œuvre concomitante de plusieurs réformes majeures, en particulier la loi sur l'assurance maladie, qu'il fallait effectivement rendre très vite applicable, a mécaniquement entraîné l'engorgement du ministère de la santé.

En tout état de cause, les grands axes de la politique de santé publique, adoptés par le Parlement dans le cadre du rapport annexé, ont bien été pris en compte par le gouvernement, que ce soit à l'occasion de la loi de finances pour 2005 ou des nombreux plans pluriannuels annoncés récemment par le ministre. Il est par ailleurs très positif qu'un effort d'information ait déjà été engagé pour expliquer la loi, car il est essentiel que tous les acteurs de la santé publique s'approprient la réforme, qui ne peut se dissocier de la loi sur l'assurance-maladie en raison notamment des articulations prévues au niveau national et régional, et la fassent vivre sur le terrain.

En conclusion, le rapporteur a posé les quatre questions suivantes :

- En rationalisant et en simplifiant le système de santé publique, en organisant des partenariats entre les nombreux acteurs concernés, la loi institue une nouvelle gouvernance de la santé publique à laquelle le Parlement est très attaché, comme il l'a montré en amendant profondément le texte initial. Quand le Gouvernement pourra-t-il annoncer que cette nouvelle gouvernance est entrée dans les faits ?

- L'Institut national du cancer sera-t-il bien installé dès le mois prochain et l'Ecole des hautes études en santé publique ouverte pour la prochaine rentrée universitaire ?

- Quelles seront les modalités de mise en œuvre du nouveau dispositif de formation médicale continue ?

- Enfin, s'agissant des dispositions de la loi concernant l'usage du titre de psychothérapeute, quel est l'état d'avancement des nombreuses consultations que le ministre a estimées nécessaires de conduire ? Où en sont les concertations menées avec le ministère de l'Education nationale, particulièrement pour les formations de psychopathologie clinique ?

Après l'exposé du rapporteur, les porte-parole des groupes sont intervenus.

M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste, a tout d'abord observé que la nouvelle gouvernance de la santé publique suppose des modifications substantielles des politiques structurelles et conjoncturelles. Dans l'attente des restructurations nécessaires, la continuité est-elle assurée, en matière notamment de gestion des risques ?

Les membres du groupe socialiste avaient par ailleurs fait part de leurs réserves quant à l'étatisation du système, à travers notamment le rôle confié au préfet au sein des groupements régionaux de santé publique (GSRP), et souligné la lourdeur des nouvelles structures envisagées, mais les moyens nécessaires à leur installation existent-ils ? Si tel n'est pas le cas, point n'est besoin de se précipiter pour déstabiliser l'existant.

Il apparaît par ailleurs que le nombre de postes de médecins de santé publique du ministère mis au concours aurait diminué de moitié ; qu'en est-il ? S'agissant du futur Institut national du cancer, selon quel calendrier sera-t-il installé et qui occupera sa présidence et sa direction générale ? La représentation nationale doit avoir la garantie qu'aucune dérive ne se produit dans la création d'une instance qui, pour correspondre à un chantier prioritaire du Président de la République, ne brille ni par sa transparence, ni par son efficacité.

Enfin, le décret relatif aux annonces publicitaires en faveur de certains produits alimentaires reprendra-t-il les recommandations de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) ?

M. Jean-Luc Préel, pour le groupe UDF, a rappelé que la loi était d'autant plus attendue que les retards accumulés ont été importants, mais que le groupe UDF l'avait trouvée assez décevante. Qu'en est-il du suivi des cent objectifs fixés ? Y aura-t-il une évaluation intermédiaire ou faudra-t-il attendre le bilan à cinq ans ? Quant aux conférences régionales de santé publique, auront-elles leur mot à dire en matière de suivi des soins ? Quelle sera la coopération entre les GRSP, les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM), les agences régionales de l'hospitalisation (ARH) et les agences régionales de santé (ARS) expérimentales ? Qu'en est-il des décrets relatifs à l'usage du titre de psychothérapeute, d'une part, et aux ordres des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues, d'autre part ?

M. Pierre-Louis Fagniez, pour le groupe UMP, a souligné que le titre relatif à la recherche biomédicale est l'un des plus aboutis de la loi car il a fait l'objet d'un certain consensus. Certains points sont cependant demeurés en suspens, qui doivent trouver une solution lors de l'élaboration des décrets d'application. C'est notamment le cas pour la recherche conduite dans le cadre de l'évaluation des soins courants, dont il avait été entendu qu'elle ferait l'objet d'un traitement particulier. Les médecins sont très attentifs à cette question, car il en va de l'amélioration générale des soins en France. D'autre part, il faut rappeler que la transposition de la directive n° 2001-20 du 4 mars 2001 relative aux essais cliniques ne crée d'obligations que pour les médicaments ; il convient donc de bien distinguer, dans les textes réglementaires en cours de préparation, les recherches qui portent sur le médicament des autres types de recherches.

Par ailleurs, si la directive prévoit que les médicaments doivent être donnés gratuitement, il est également indiqué qu'à titre exceptionnel, ils peuvent ne pas l'être. Dans la mesure où la loi a posé uniquement l'obligation que le promoteur s'assure du financement de la recherche, le ministre peut-il garantir que, pour les recherches institutionnelles, dans les hôpitaux par exemple, les promoteurs ne seront pas tenus de financer intégralement tous les médicaments pour l'ensemble des recherches en France ? Si tel n'est pas le cas, c'est tout simple : il risque de ne plus y a avoir de recherche.

En réponse aux intervenants, le ministre a rappelé que la nouvelle gouvernance de la politique de santé publique confie à l'Etat la responsabilité de la conception, du pilotage et de l'impulsion de la politique de santé publique, dont la mise en œuvre doit néanmoins s'opérer sous le double signe de la concertation et de la coordination. La loi met à sa disposition un certain nombre de dispositifs : Haut Conseil de la Santé publique pour l'expertise, conférences nationales et régionales de santé pour la définition des objectifs et des principales actions, comité national, GRSP pour la mise en œuvre des actions. La publication des textes d'application de tous ces dispositifs devrait les rendre opérationnels au cours du second semestre 2005.

Cette nouvelle gouvernance nécessite une bonne coordination au niveau du ministère, assurée par son secrétaire général, entre la DGS, la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) et la direction de la sécurité sociale (DSS), ainsi qu'au niveau régional, grâce à la mise en place des GRSP, pour lesquels le décret en Conseil d'Etat devrait être pris dans les jours à venir, maintenant qu'est réglé le dernier point en suspens, à savoir les modalités de leur financement. La santé publique est avant tout l'affaire de l'ensemble des professionnels de santé. C'est dans ce cadre que des réflexions sont en cours sur la définition de mandats sanitaires qui pourraient être confiés aux médecins libéraux, et rémunérés forfaitairement. Il faut également mieux coordonner l'action de l'Etat et celle de l'assurance maladie dans le champ de la santé publique. Le directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) sera ainsi invité à participer au comité national de santé publique. Par ailleurs, la loi du 13 août 2004 a organisé le rapprochement des ARH et des URCAM au niveau régional, et les directeurs des missions régionales de santé ont été désignés en février 2005.

D'autre part, il est faux de dire que le nombre des postes d'internes en santé publique mis au concours ait été réduit de moitié : au contraire, il a été augmenté de soixante-dix.

M. Jean-Marie Le Guen a précisé qu'il avait évoqué la situation des médecins inspecteurs de santé publique, qui sont fonctionnaires du ministère de la santé, et non celle des internes en santé publique. Le syndicat des médecins de santé publique s'est en effet ému récemment de la diminution d'environ la moitié des postes ouverts au concours. Ces informations pourront d'ailleurs être vérifiées.

Après avoir répondu qu'il ne faut pas se focaliser sur les variations d'une année sur l'autre, mais regarder l'évolution à long terme, qui montre que l'actuel gouvernement a, plus que d'autres, le souci de développer une politique de santé publique, le ministre a apporté les précisions suivantes :

- Le décret créant le groupement d'intérêt public de l'Institut national du cancer est à la signature et l'arrêté approuvant la convention constitutive sera publié dans la foulée, avant la fin du mois d'avril 2005. Le président de l'Institut sera M. David Khayat et sa directrice générale Mme Christine Welty.

- La création de l'Ecole des hautes études en santé publique est prévue par la loi du 9 août 2004. Les bases de ce grand établissement ont été établies par un rapport commandé à l'IGAS et à l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche. Une mission de préfiguration, associant notamment M. Michel Garnier, inspecteur général au ministère de l'éducation nationale, et le professeur Jacques Hardy, actuel directeur de l'École nationale de santé publique (ENSP), a été constituée. Le nouvel établissement continuera de former les cadres du ministère, dont la formation était jusqu'à présent dispensée par l'ENSP, et offrira en outre une variété élargie de formations diplômantes.

- La loi du 9 août 2004 a réaffirmé le caractère obligatoire de la formation médicale continue (FMC) des médecins libéraux, hospitaliers et salariés non hospitaliers, et a étendu cette obligation aux chirurgiens dentistes, pharmaciens, sages-femmes et auxiliaires médicaux. S'agissant des médecins, cette formation comprendra désormais, dans des conditions définies de concert avec les conseils nationaux de FMC, l'engagement dans des démarches d'évaluation des pratiques professionnelles, évaluation rendue obligatoire par l'article 14 de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie. Une concertation approfondie a permis de dégager les principes suivants : la Haute Autorité de santé définira les référentiels, les méthodes d'évaluation des pratiques et, après avis des conseils nationaux de la FMC, les modalités applicables à chaque catégorie de médecins et les règles que doivent respecter les organismes évaluateurs agréés ; les conseils nationaux de formation médicale continue définiront les orientations et les règles que doivent respecter les organismes agréés pour réaliser les actions de FMC.

Il est par ailleurs proposé qu'en lieu et place des conseils régionaux de la FMC, qui comportent un nombre trop important de membres, des commissions régionales composées de membres désignés par chacun des trois conseils nationaux de FMC et par l'Ordre des médecins soient rendues compétentes pour valider le parcours d'évaluation des pratiques et celui de la FMC. Pour ce faire, une modification de la loi du 9 août 2004 sera proposée au Parlement, dans un cadre qui reste à déterminer, et le décret relatif à la FMC pourra être publié dès la promulgation de ce texte. Il est à noter que le retard pris pour ledit décret n'empêchera pas la mise en œuvre effective des actions de formation, puisqu'il ne concerne que la validation du parcours. Quant au décret relatif à l'évaluation des pratiques professionnelles, il devrait être publié prochainement.

- Depuis la parution de la loi du 9 août 2004, les services de la DGS ont reçu les associations représentant les médecins psychiatres, concernés par les dispositions de l'article 52, les psychologues, les psychanalystes et les psychothérapeutes qui n'appartiennent à aucune de ces trois catégories. Il ressort de ces échanges informels l'existence d'un triple consensus autour d'une exigence minimale de formation théorique et pratique à la psychopathologie clinique, de la nécessité que le décret d'application respecte la diversité des approches de la psychopathologie, et de l'importance de veiller à ce que le futur registre national des psychothérapeutes n'entraîne pas une formation « au rabais » de ces derniers. Par ailleurs, les psychanalystes et les psychothérapeutes s'interrogent sur la compatibilité entre l'existence d'un registre national et le maintien d'un système de reconnaissance par leurs pairs, tandis que les associations de psychologues abordent la question de l'impact direct des réflexions relatives à la formation en psychopathologie clinique sur celle des psychologues. Ces différents éléments confirment la nécessité d'associer pleinement l'éducation nationale à l'élaboration du décret, et de garder à l'esprit le fait que l'évaluation des pratiques ne saurait, dans le domaine des maladies psychiatriques ou de la psychanalyse, revêtir la même technicité que, par exemple, dans celui de l'imagerie médicale.

- Le décret et l'arrêté sur le message sanitaire qui devra accompagner les publicités télévisuelles portant sur certains aliments font l'objet d'une large concertation avec les ministères concernés et les acteurs économiques. L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) comme l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) sont largement associés à sa rédaction et le gouvernement n'entend pas s'écarter de l'avis que rendra l'agence. Les deux textes devraient être publiés dans le courant de l'été 2005.

- Des suivis intermédiaires des cent objectifs seront par ailleurs mis en place. La loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, que le Sénat examinera jeudi 24 mars 2005, en séance publique s'inscrit d'ailleurs dans cette logique de résultats.

- S'agissant de la recherche biomédicale, une concertation approfondie sur un avant-projet de décret a été organisée les 19 et 26 janvier ainsi que le 4 février 2005 avec l'ensemble des acteurs concernés, qui ont porté une appréciation très positive sur la méthode retenue. Les principales préoccupations exprimées étaient le périmètre exact de l'article sur les recherches dans le cadre des soins courants, la question de la fourniture gratuite des produits, la répartition des rôles entre les comités de protection et l'autorité compétente. Elles ont été prises en compte, et la publication du décret est prévue pour le mois de juin 2005. Une mission de l'IGAS sur les comités de protection des personnes, leur statut, leur financement, leur mode de fonctionnement et l'animation du réseau est en cours. Par ailleurs, une disposition de la loi de finances pour 2005 instaure une taxe nouvelle au profit de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) pour financer la montée en charge de l'agence dans le domaine des autorisations d'essais cliniques sur les produits de santé ; cinq emplois nouveaux ont été créés à cet effet.

- Chaque GRSP sera présidé par le préfet, mais il est essentiel que l'animation en soit collégiale, et associe ARH, assurance maladie, professions de santé, etc. Le décret sortira au mois de juin 2005. S'agissant des conférences régionales de santé, elles n'ont pas vocation à s'occuper du curatif individuel.

- Enfin, un ordre national des kinésithérapeutes et un ordre national des pédicures-podologues seront mis en place à la fin de l'année 2005, après la réforme de l'ordre des médecins, qui sera mise en œuvre par ordonnance avant l'été.

M. Yves Bur a jugé essentiel que les textes d'application soient pris aussi rapidement que possible, car le changement des comportements est une œuvre de longue haleine, et la mobilisation du ministère doit être désormais aussi dynamique qu'elle l'a été pour la réforme de l'assurance maladie. Comment articuler le fonctionnement des GRSP et des conférences régionales de santé avec la gouvernance locale dans le cadre des ARS expérimentales et comment mobiliser les praticiens autour des objectifs de santé publique ?

Par ailleurs, on ne saurait trop inciter le gouvernement à faire preuve de vigilance dans sa politique de lutte contre le développement de l'obésité chez les jeunes, car les récentes péripéties autour des distributeurs dans les lycées montrent que des intérêts très puissants sont en jeu. Une campagne de presse vient d'ailleurs être engagée pour la réintroduction des distributeurs automatiques de boissons chaudes dans les établissements scolaires.

M. Claude Evin s'est félicité que la commission innove en consacrant toute une audition à l'application des lois votées par le Parlement, en souhaitant toutefois que l'exercice ne se limite pas à la lecture d'une liste de décrets et d'arrêtés en cours de publication.

S'agissant des psychothérapies, il va de soi que leur évaluation n'est pas de même nature que celle de l'imagerie médicale, mais on peut légitimement se demander pourquoi le ministre a éprouvé le besoin, alors qu'il vient d'être institué une Haute autorité de santé indépendante du pouvoir politique dont les missions comprennent l'évaluation, de s'exprimer d'une façon si radicale sur ce sujet, qui plus est en faisant retirer du site Internet du ministère un rapport de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM).

Mme Catherine Génisson a demandé où en était la concertation avec les ostéopathes sur les décrets d'application prévus par loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui s'était interrompue après le changement de gouvernement en 2002 et qui semble avoir repris récemment.

M. Jacques Domergue a plaidé pour la mise en place de baromètres semestriels ou annuels de la santé publique, afin que la population se sente davantage concernée et s'approprie les politiques menées.

- En réponses aux questions, le ministre a apporté les précisions suivantes. L'idée de baromètres de la santé publique est intéressante, mais l'ampleur du chantier à entreprendre ne doit pas être minorée.

- Sur les propos tenus par M. Claude Evin, il faut souligner que le suivi des textes d'application de la loi est tout de même la moindre des choses : il a par exemple été très regrettable d'avoir dû attendre cinq ans pour voir sortir les décrets d'application du plan périnatalité de 1994 ! On peut tout de même espérer que celui relatif aux ostéopathes sortira d'ici six mois.

La décision de retirer du site du ministère le rapport sur les psychothérapies n'est en rien un acte de défiance envers l'INSERM, institution très respectable. Il est cependant de la responsabilité politique du ministre chargé de la santé de décider de ce qu'il y a sur le site, et il est apparu peu opportun de présenter une évaluation sélective, publique qui plus est : soit on parle de tout, soit on ne parle de rien. Quant au futur décret, il ne concerne que les prérequis, non l'évaluation des pratiques, et donc pas non plus la Haute autorité de santé.

- La loi relative à la politique de santé publique marque un véritable tournant dans la mobilisation des praticiens autour des objectifs de santé publique, notamment grâce aux consultations de prévention ; de son côté, la réforme de l'assurance maladie confère au médecin traitant un rôle majeur dans le suivi des calendriers de prévention de ses patients : vaccinations, dépistages... Le dossier médical personnel jouera également un rôle essentiel.

- Sur la question des distributeurs automatiques de boissons et aliments dans les établissements scolaires, il faudra en effet faire preuve de vigilance, afin que ne se reproduise pas le précédent du projet de loi relatif aux territoires ruraux, à laquelle avait été ajoutée subrepticement, par voie d'amendement, une disposition revenant sur l'interdiction édictée par la loi de santé publique, ce qui avait motivé l'opposition a posteriori du ministère de la santé.

M. Georges Colombier, président, a remercié le ministre pour ses réponses précises.

La commission a autorisé le dépôt du rapport sur la mise en application de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique en vue de sa publication.

*

La commission a enfin examiné le rapport de M. Jean-Michel Dubernard sur la mise en application de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur, a souligné d'emblée le bilan très satisfaisant de l'application de la loi du 13 août 2004.

Sur 76 articles, 30 sont devenus applicables dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, les autres nécessitant des textes d'application. Au 30 novembre 2004, la proportion de textes réglementaires publiés (hors arrêtés) s'élevait à 24 % ; au 21 mars 2005, 43 textes réglementaires d'application et deux circulaires étaient publiés, rendant applicables dans leur totalité 27 articles de la loi. Seuls 18 décrets et 6 arrêtés restent à paraître, dont une grande partie concernant des dispositions dont l'entrée en vigueur a été différée. La loi est donc pratiquement applicable dans sa totalité. En particulier, les nouvelles institutions, dont la Haute autorité de santé (HAS) et l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM), sont déjà à l'œuvre. Les nouveaux outils, tels le suivi des malades atteints d'affections de longue durée ou la contribution forfaitaire d'un euro, sont également applicables. Les textes ont été rédigés rapidement, alors même que leur confection était rendue complexe par le nombre d'instances dont l'avis était requis.

Parmi les points n'ayant pas encore fait l'objet de textes réglementaires, figurent notamment : les conditions de l'application de la majoration de la participation de l'assuré en cas de non-respect du parcours de soins ; la rédaction du cahier des charges des « contrats responsables », qui s'appliqueront à partir du 1er janvier 2006 ; l'accréditation de la qualité de la pratique des médecins et des équipes médicales ; l'évaluation obligatoire et sanctionnée des pratiques ; le fonctionnement de l'Institut national des données de santé ; l'usage détourné des médicaments ; l'accès des professionnels de santé aux informations de l'assurance maladie sur les soins dont ont bénéficié leurs patients. La sortie rapide de ces textes permettra de couronner cet édifice normatif. Il sera alors possible d'en évaluer les effets sur le système d'assurance maladie. S'agissant plus particulièrement de l'accréditation, il convient de dissiper toute confusion entre ce terme, qui s'appliquera à des médecins ou à des équipes médicales, et celui de certification, qui vise des établissements. Une réunion au ministère de la santé avait été envisagée pour réexaminer cette terminologie, notamment à la lumière de ce qui se passe à l'étranger ; aura-t-elle lieu ?

Enfin quelle sera la place du conseil de l'hospitalisation, et comment fonctionnera-t-il alors même que les dépenses d'hospitalisation représentent la moitié des dépenses de l'assurance-maladie ?

Après l'exposé du rapporteur, les porte-parole des groupes sont intervenus.

M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste, a d'abord demandé la nature du texte définissant les responsabilités du médecin traitant en matière de prévention. De même, si on peut se réjouir que les dépistages du cancer du sein soient finalement exonérés de l'euro forfaitaire, quelle est la base juridique d'une telle exemption, qui avait été explicitement écartée lors de la discussion de la loi ? Il est étonnant que d'autres catégories de patients, telles les victimes des maladies professionnelles, n'en bénéficient pas également.

Par ailleurs, quel sera le coût de l'incorporation de la photo et des données biométriques de l'assuré sur la carte Vitale et quel est l'état des discussions avec le ministre de l'intérieur, que la rumeur dit réservé sur ce dispositif ? Quant au dossier médical personnel, en attend-on toujours 3,5 milliards d'euros d'économies en 2007 comme cela a été annoncé cet été ?

M. Jean-Luc Préel, pour le groupe UDF, s'est réjoui que le Parlement se penche sur l'application des lois qu'il a votées et a souhaité que cet examen porte aussi sur la conformité des décrets à l'esprit des dispositions qu'ils sont censés rendre applicables. Parmi les questions qui se posent figure notamment celle des rôles respectifs du conseil de l'assurance maladie, du conseil de surveillance, du président et du directeur général. L'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (UNOCAM) et l'Union nationale des professionnels (UNPS) seront-elles mises en place à temps pour être associées à la négociation des avenants à la convention nationale, voire à la renégociation de cette dernière si d'aventure elle était annulée par le Conseil d'Etat ? S'agissant du dossier médical personnel, où en est le choix des hébergeurs ? Les délais annoncés seront-ils respectés ?

Par ailleurs, les agences régionales de santé qui seront créées à titre expérimental dans deux ou trois régions pourront-elles fonctionner alors que la fongibilité des enveloppes consacrées aux établissements et à l'ambulatoire, n'existe pas au niveau national ? Enfin, quand l'Institut national des données de santé, pour lesquels sont inscrits 100 000 euros à peine au budget du ministère de la santé, sera-t-il mis en place ? Quand les ordonnances sur l'hôpital sortiront-elles ? Leur application fera-t-elle l'objet d'un suivi parlementaire ?

M. Jean-Pierre Door, pour le groupe UMP, s'est félicité de la rapidité avec laquelle sont sortis la plupart des textes d'application, car il est essentiel que des résultats dans la maîtrise des dépenses soient atteints sans tarder. La même célérité doit présider au lancement du dossier médical personnel et à celui des « contrats responsables » : chaque mois passé est un mois perdu. Il est également essentiel de veiller à la qualité de l'accréditation des pratiques professionnelles, car l'impact sur les tarifs d'assurance des praticiens sera fort. Il est temps, enfin, de choisir les régions où seront expérimentées, à partir du mois d'août, les agences régionales de santé. La région Centre se portera d'ailleurs candidate.

En réponse aux intervenants, M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille, s'est déclaré heureux de s'adresser sur ce sujet à la commission à quelques heures de la présentation des comptes de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), qui font apparaître une progression de 1,6 % seulement des dépenses de médecine de ville, au lieu de plus de 6 % l'année précédente, et une diminution de 5 % des arrêts de travail.

M. Jean-Marie Le Guen a répliqué qu'il n'accorde plus aucun crédit à la parole de la CNAMTS et qu'il considère son directeur général comme un proconsul propagandiste.

Le ministre a déploré cette remarque, qu'il a jugée insultante pour le personnel de la CNAMTS qui effectue un travail remarquable, et a poursuivi ses réponses :

- le dossier médical personnel, élément emblématique de la réforme de l'assurance maladie, n'est qu'un élément parmi d'autres d'un dispositif d'ensemble, destiné à provoquer une modification en profondeur des comportements, tant chez les professionnels de santé que chez les patients ; c'est de l'ensemble que l'on peut attendre 3,5 milliards d'euros d'économies en 2007. Les deux tiers des médecins et la quasi-totalité des pharmaciens étant déjà équipés de logiciels, les appels d'offres vont être lancés prochainement, et tout pourra aller très vite grâce à la longue concertation que le gouvernement a pris le temps d'organiser.

- Le ministre de l'intérieur n'est aucunement hostile, au contraire, à ce que la nouvelle carte Vitale comporte la photo et les données biométriques de l'assuré. Il en coûtera entre 35 et 40 millions d'euros, soit exactement ce qui était prévu, et les premières cartes seront distribuées dans le courant du second semestre de 2006.

- Le décret sur l'évaluation des pratiques professionnelles sera publié dans les tous prochains jours, après les avis officiels rendus par la CNAMTS et la Haute Autorité de santé, et au terme d'une très longue concertation avec l'ensemble des acteurs concernés.

- Le décret sur l'accréditation fait l'objet d'échanges avec la Haute autorité de santé et devra aussi être discuté entre l'assurance maladie et les médecins puisqu'il prévoit, conformément à la loi, la possibilité d'une prise en charge d'une partie des primes de responsabilité civile pour les médecins accrédités ; le gouvernement souhaite publier ce texte avant la fin du premier semestre 2005.

- Le décret relatif aux sanctions financières applicables en cas d'abus pratiqués par les professionnels de santé, les assurés, les entreprises ou les établissements de santé va être transmis d'ici la fin de la semaine à la CNAMTS pour avis et devrait être publié dans le courant du mois d'avril. S'agissant des contours précis du parcours de soins, la concertation avec l'ensemble des partenaires concernés se poursuit et devrait aboutir dans les prochaines semaines.

- Sur l'Institut national des données de santé, le travail est engagé avec les différents partenaires de l'établissement pour préciser les choses, et notamment les conditions des échanges de données ; le décret sur ce sujet sera publié avant la fin du mois de juin. S'agissant du décret relatif à l'accès des professionnels de santé aux informations de l'assurance maladie sur les soins dont ont bénéficié leurs patients, la CNAMTS a donné son avis sur ce projet, et lorsque la CNIL et le Conseil de l'Ordre auront donné le leur, le texte pourra être pris très rapidement.

- Au 17 mars 2005, plus de 4 millions de formulaires « médecin traitant » avaient été renvoyés à l'assurance maladie. Le flux quotidien de réponses se situe aux alentours de 160 000 par jour, ce qui devrait permettre d'atteindre au 30 juin l'objectif de 40 % d'assurés ayant choisi leur médecin traitant. C'est un succès important, qui montre l'adhésion des Français à cet aspect majeur et emblématique de la réforme. Dans plus de neuf cas sur dix, ce médecin traitant est un médecin généraliste. Le rôle du « médecin de famille » est donc consacré. Neuf généralistes sur dix sont entrés dans le dispositif à ce stade, ainsi que 92 % des médecins référents. Il n'y a donc pas de blocage, mais au contraire une adhésion massive des assurés comme des médecins. Les missions du médecin traitant sont explicitées par la convention médicale.

- Les contrats complémentaires dits « responsables » sont un élément très important de la mise en œuvre de la réforme, puisqu'il s'agit de définir les modalités d'implication des organismes complémentaires dans l'incitation au respect du parcours de soins. L'article 57 de la loi du 13 août 2004 lie en effet le bénéfice des exonérations fiscales et sociales au caractère « responsable » du contrat de couverture complémentaire, et donc à la contribution des organismes complémentaires à la régulation des dépenses de santé. Le décret définissant le contenu de ces contrats est en cours de concertation avec les opérateurs - mutuelles, assureurs, institutions de prévoyance -, les partenaires sociaux et les représentants des usagers et des patients. Ses grandes lignes devraient être connues d'ici la fin de ce mois, afin de donner de la visibilité aux organismes complémentaires, dont beaucoup tiennent leurs assemblées générales en avril. Ce décret devra notamment fixer le montant restant à la charge personnelle du patient qui a choisi de ne pas respecter le parcours de soins et édicter des obligations de prise en charge de certains actes de prévention.

- II n'y a aucune raison que les mutuelles et les assurances augmentent leur tarif de façon plus importante que les années précédentes ; ce n'est pas seulement le ministre de la santé qui le dit, mais l'ensemble des experts réunis au sein du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie dans un avis rendu la semaine dernière. Les principaux représentants des organismes complémentaires s'accordent sur un chiffre proche de 5 % de progression des dépenses des complémentaires, ce qui est tout à fait comparable avec les chiffres des années précédentes. Il n'y a pas, pour les années à venir, d'augmentation prévisible des tarifs des complémentaires. Il n'y a, dans la réforme, aucun transfert de dépenses entre l'assurance maladie de base et les complémentaires car de tels transferts ne sont en rien une réponse aux problèmes structurels de financement de l'assurance maladie. De plus, la maîtrise médicalisée des dépenses signifie aussi une maîtrise des dépenses pour les complémentaires : c'est du « gagnant-gagnant ».

- Le Sénat entame ce jeudi 24 mars la première lecture du projet de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Ce texte donnera plus de portée aux lois de financement en permettant un vrai débat sur l'équilibre de chacune des branches, leur donnera en outre plus de crédibilité en intégrant les prévisions financières à un cadrage pluriannuel et renforcera également la transparence en instituant un vote du Parlement sur les différentes composantes de l'ONDAM. Le périmètre des lois de financement est en outre étendu aux fonds qui participent au financement de la sécurité sociale, comme le Fonds de solidarité vieillesse et le Fonds de financement des prestations sociales agricoles. Enfin, ce texte introduit une démarche « objectifs-résultats » en s'inspirant de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances ; une annexe de la loi présentera les programmes de qualité et d'efficience de la politique de sécurité sociale dans chacune de ses branches pour les exercices à venir.

- Le décret sur la permanence des soins a été transmis le 9 mars au Conseil d'Etat, qui devrait l'examiner le 19 avril. La négociation conventionnelle se poursuit : des réunions se sont tenues les 11 et 18 mars. Il s'agit de consolider la permanence des soins, tout en maintenant les principes généraux d'organisation définis en 2003, et en particulier le principe du volontariat. Une étude récente de l'Ordre des médecins a montré que le pourcentage de médecins volontaires augmentait, et avait atteint 60 % ; il faut encore accroître ce pourcentage, car plus il y aura de médecins volontaires, plus la permanence des soins sera « gérable » par chaque médecin. Le texte vise aussi à accroître la souplesse d'organisation sur le terrain, sous la responsabilité des préfets, par exemple dans la configuration des secteurs de permanence au cours de la nuit. La négociation conventionnelle permettra de mieux rémunérer la permanence des soins et les astreintes des médecins. Le décret renforcera également la régulation, en confortant le principe d'une régulation médicale par le « SAMU-centre 15 » tout en reconnaissant la place de « SOS-Médecin » dans le dispositif.

- Un protocole d'accord a été signé en août 2004 ente l'Etat, la CNAMTS et les organisations représentatives de médecins sur la chirurgie libérale, afin de répondre au malaise profond de la profession qui a plusieurs causes : absence de revalorisation des honoraires et gel de la lettre clé KCC pendant de nombreuses années ; forte augmentation des primes de responsabilité civile ; perte d'attractivité de la spécialité aux yeux des jeunes médecins. Ce protocole comprend des mesures fortes : augmentation du nombre d'internes ; revalorisation des honoraires de 25 % en deux fois au 1er octobre 2004 et au 1er avril 2005 ; rémunération des astreintes dans les unités d'urgence des cliniques (UPATOU) ; aide au paiement des primes de responsabilité civile. Les engagements pris sont tenus : la négociation de la convention médicale et les négociations propres à la classification commune des actes médicaux (CCAM) vont permettre de les mettre en œuvre. S'agissant des astreintes, 150 euros seront versés à un anesthésiste et deux chirurgiens par UPATOU, voire davantage si c'est médicalement justifié. La clarification commune des actes médicaux (CCAM) sera appliquée à compter du 25 mars 2005 et les chirurgiens bénéficieront de « majorants » permettant de respecter l'objectif de 25 % de hausse. Les décrets sur l'accréditation et les aides au paiement des primes sont en cours de concertation. Le Conseil national de la chirurgie devrait se réunir sous trois semaines pour faire un bilan d'étape de l'application du protocole.

- En ce qui concerne les agences régionales de santé (ARS), le gouvernement a choisi une démarche pragmatique, en commençant par constituer des missions régionales de santé (MRS) regroupant ARH et URCAM pour l'exercice de leurs missions conjointes. Le décret définissant leur condition de fonctionnement est paru le 2 décembre 2004 et leurs directeurs ont été désignés le 15 février 2005 ; elles se mettent donc en place sans retard. Ces MRS ont un rôle important à jouer dans le décloisonnement entre ville et hôpital, dans la mise en place de la permanence des soins et dans la promotion de la qualité des soins. S'agissant des ARS, un travail technique associant les ARH et les URCAM s'est engagé à l'automne pour déterminer les contours des futures expérimentations. Le conseil de la CNAMTS a souhaité aussi de son côté avancer dans sa réflexion ; s'il faut naturellement attendre que le conseil précise sa position, le gouvernement souhaite bien élaborer le décret définissant le cadre de l'expérimentation d'ici l'été. La fongibilité des enveloppes est une piste séduisante mais la tarification à l'activité change quelque peu les données du problème.

- Le décret sur l'accréditation des médecins fera bientôt l'objet d'une concertation, et devrait être publié avant la fin juin. Les médecins et les équipes médicales exerçant en établissement de santé, dans des spécialités limitativement énumérées, pourront s'engager dans des procédures d'accréditation, comprenant notamment l'envoi d'informations relatives aux événements porteurs de risques. Ils pourront alors bénéficier d'une aide de l'assurance maladie pour payer leur prime d'assurance. Par ailleurs, en application de l'article 15 de la loi relative à l'assurance maladie, l'Observatoire des risques médicaux, qui est placé auprès de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) et associe assureurs, médecins, assurance maladie et autorités sanitaires - et dont l'arrêté de composition a été publié le 17 décembre 2004 - sera installé le 12 avril prochain. Cela permettra d'élaborer un diagnostic partagé par l'ensemble des parties sur le niveau et l'évolution des primes d'assurance en responsabilité civile des médecins au regard de l'évolution des sinistres indemnisés.

- S'agissant du dépistage du cancer du sein, une circulaire est en cours de signature afin de donner une base légale à l'exonération de l'euro forfaitaire. La lettre de la loi n'interdit pas une telle exonération ; s'il en était autrement et que le recours à la loi s'avérait nécessaire, le groupe socialiste ne manquerait pas d'apporter son soutien à cette initiative...

- Enfin, les trois familles fondatrices de l'UNOCAM s'étant mises d'accord en décembre 2004 sur les statuts de cet organisme, ces statuts seront repris dans le décret en Conseil d'Etat, qui sera examiné mardi 29 mars et dont la parution est prévue pour le mois d'avril 2005.

M. Claude Evin a précisé que le groupe socialiste ne contestait naturellement pas les chiffres publiés par la CNAMTS, mais souhaitait que l'on ne leur fasse pas dire ce qu'ils ne disent pas. Les données de janvier et février 2005 ne font que traduire une situation comptable, ainsi que suffit à le démontrer l'exemple des dépenses hospitalières dont le montant enregistre une hausse apparente de 6 %, normalement impossible puisque les établissements fonctionnent selon la règle du douzième ! Quoi qu'il en soit, cette progression indique au passage que la maîtrise des dépenses hospitalières est loin d'être acquise.

Il n'est pas non plus question de contester l'intérêt d'une meilleure information sur le calendrier de publication des décrets, mais encore faut-il que celui-ci n'apparaisse pas comme la seule préoccupation du ministère. La circulaire relative aux budgets des hôpitaux publics a été publiée le 4 mars, mais les établissements doivent faire parvenir leurs projets de budget à l'ARH avant le 15 mars, et la délibération en conseil d'administration ne peut intervenir avant la fin d'avril ! De leur côté, les ARH ont reçu notification de leurs dotations la semaine dernière, dotations d'ailleurs modifiées quelques jours après. De nombreux députés avaient regretté, lors de la discussion de la loi relative à l'assurance-maladie, que l'hôpital ne soit pas concerné par la réforme. Il faudra sans tarder combler cette lacune, alors même que le Parlement ne pourra se prononcer sur les ordonnances réformant l'hôpital. Il est essentiel de mettre l'ensemble des sujets sur la table, car la maîtrise des dépenses suppose une cohérence d'ensemble du dispositif.

Mme Catherine Génisson s'est inquiétée, dans l'optique de la généralisation du dossier médical personnel, du degré d'informatisation des hôpitaux. Il est indispensable, s'agissant de la permanence des soins, de distinguer la régulation médicale avant hospitalisation et la régulation des gardes de médecine générale, cette dernière devant être confiée, pour éviter des conflits majeurs, aux médecins généralistes eux-mêmes et non aux hôpitaux.

Le ministre s'est dit en accord avec Mme Catherine Génisson sur ce dernier point : la clé du problème réside dans la régulation pré-hospitalière. Pour ce qui est du dossier médical personnel, les difficultés de méthodologie seront sans doute compensées, chez les médecins libéraux, par le fait qu'ils s'approprieront le dispositif d'une façon plus active. A l'hôpital, en revanche, c'est la volonté politique qui est la clé du succès, mais il n'y a pas lieu de s'inquiéter outre mesure. Il faudra sans doute, cela dit, rappeler parfois avec insistance que le dossier n'est pas la propriété du médecin, mais du malade. Enfin, les chiffres valent ce qu'ils valent, et l'on doit se réjouir au passage que l'opposition ne conteste pas ceux de l'assurance-maladie ; mais que n'aurait-on entendu de sa part si ceux annoncés pour janvier et février 2005 avaient été mauvais ! La contre-performance apparente des hôpitaux, dans ce contexte d'amélioration sensible, s'explique en grande partie par le passage du budget global à la tarification à l'activité, dont les effets positifs se feront sentir plus tard.

M. Pierre-Louis Fagniez, président, a remercié le ministre pour ce long et passionnant échange, dont il faut souhaiter qu'il sera suivi de nombreux autres.

La commission a autorisé le dépôt du rapport sur la mise en application de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie en vue de sa publication.


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