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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 38

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 1er mars 2006
(Séance de 10 heures)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président,
puis de M. Pierre Morange, vice-président

SOMMAIRE

 

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- Examen du rapport d'information sur les missions du service public de l'audiovisuel et l'offre de programmes (M. Dominique Richard, rapporteur)


2

- Examen de la proposition de résolution sur le 7ème programme-cadre de recherche et de développement des Communautés européennes (PCRD) - n° 2885 (M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur)



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- Information relative à la commission


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La commission a procédé à la désignation des membres de la mission d'information sur l'épidémie à virus chikungunya à la Réunion et à Mayotte.

À titre liminaire, le président Jean-Michel Dubernard a rappelé que plusieurs députés ont posé des questions écrites sur les mesures prises en faveur de la parité de la situation des maîtres du privé et des enseignants des établissements publics. Or le gouvernement a déposé le 30 décembre 2005, c'est-à-dire dans le délai prévu par la loi du 5 janvier 2005, le rapport demandé par le Parlement sur cette question à l'occasion de la discussion de la proposition de loi sur la situation des maîtres du privé. Ce rapport a été reproduit et est à la disposition des députés à l'entrée de la salle de réunion de la commission.

Le président Jean-Michel Dubernard a ensuite indiqué que les groupes lui avaient transmis les noms des candidats pour siéger dans la mission d'information sur l'épidémie à virus chikungunya à La Réunion et à Mayotte. Comme le bureau de la commission l'a décidé au début de la législature, la mission sera composée de six députés UMP, trois députés socialistes, un député UDF et un député communiste. Mais, compte tenu de l'objet de la mission et avec l'accord de tous les groupes, il est proposé de désigner un douzième membre n'appartenant à aucun groupe, Mme Huguette Bello, députée de la Réunion. La diversité des parcours professionnels des membres de la mission sera ainsi renforcée et ses membres ne seront pas tous médecins.

Mme Huguette Bello a effectivement remarqué la présence massive de médecins au sein de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Elle a toutefois indiqué que, pour sa part, en rentrant dans la salle de réunion de la commission elle ne se considérait plus comme directrice d'école mais comme députée représentant le peuple.

Le président Jean-Michel Dubernard a souhaité que les membres de la mission d'information puissent travailler dans un même esprit quelle que soit leur formation. Il est important d'avoir des regards extérieurs au monde médical sur la question du virus chikungunya.

Conformément à la proposition du président Jean-Michel Dubernard, la commission a décidé que la mission d'information sur l'épidémie à virus chikungunya comprendrait douze membres, dont un député n'appartenant à aucun groupe.

*

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné le rapport d'information de M. Dominique Richard sur les missions du service public de l'audiovisuel et l'offre de programmes.

En introduction, M. Dominique Richard, rapporteur, a indiqué qu'en 2005 les récepteurs de télévision avaient été regardés en moyenne 5 h 39 par jour dans chaque foyer français équipé ; les Français âgés de quatre ans et plus ont consacré individuellement 3 h 26 par jour en moyenne à ce média. Déjà, en janvier 2006, moins d'un an après le lancement de la télévision numérique terrestre (TNT), les personnes recevant les signaux de la TNT et disposant d'un adaptateur regardent 4 heures et 4 minutes leur écran contre 3 h 44 pour celles qui ne reçoivent pas la TNT, soit vingt minutes de plus, comme l'indiquent les résultats de l'enquête Médiamat de Médiamétrie publiée en annexe du rapport. Les enfants passent désormais plus de temps sur une année devant un écran de télévision ou d'ordinateur qu'à l'école.

La question de la télévision est au cœur des modes de vie de nos contemporains, elle véhicule une vision de la société, une représentation du monde qui conditionne nombre d'évolutions sociétales et comportementales, contribuant ainsi activement à la construction - ou à la fragilisation - des jeunes.

Les grands principes qui encadrent la diffusion télévisuelle en France, et particulièrement le service public, remontent à une époque encore récente - 1986 - où nos concitoyens n'avaient qu'une offre réduite à trois puis cinq chaînes hertziennes gratuites.

Début 2006, les trois quarts des Français ne disposent encore que de cinq canaux en accès libre.

Or les évolutions récentes - et encore plus celles des années à venir - bouleversent le paysage audiovisuel avec l'avènement de plus de 180 chaînes thématiques, dont une centaine francophones, la montée en puissance de la télévision numérique terrestre qui offre 18 chaînes gratuites et plusieurs bouquets payants, l'arrivée de la TVHD, la télévision par ADSL, la télévision sur mobile, la vidéo à la demande, les offres « triple play »,...

L'explosion de l'offre, la pression sur le coût des programmes, l'affirmation française de l'impérieuse nécessité d'une diversité culturelle (Convention de l'UNESCO de 2005), l'existence d'une véritable filière créative et économique française dans la fiction, le documentaire, l'animation, le divertissement, imposent que la société française, à travers sa représentation nationale, se pose la question des missions qu'elle impartit à un service public de l'audiovisuel.

Ce débat ne peut plus être confisqué ni par des négociations confidentielles entre le pouvoir exécutif et le service public, ni par les seuls professionnels. C'est la raison pour laquelle la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a décidé de se saisir de cette question en créant une mission d'information sur les missions du service public de l'audiovisuel et l'offre de programmes.

Cette mission a procédé à la plus large consultation possible dans le temps imparti (83 auditions, 176 personnes rencontrées en France et à l'étranger) afin de percevoir l'attente des deux côtés de l'écran : les professionnels de l'audiovisuel, d'une part ; les téléspectateurs et les structures nationales en charge de missions d'intérêt général en lien avec l'objet éditorial des missions confiées au service public de l'audiovisuel, de l'autre.

La mission estime que, si elle est dans son rôle lorsqu'elle pointe les obligations de l'Etat et du service public et fait un certain nombre de recommandations sur les orientations stratégiques, en revanche elle n'a pas à s'immiscer dans la programmation et l'élaboration des grilles des chaînes publiques, qui relèvent des choix des dirigeants et de professionnels, font l'objet d'un contrôle a posteriori du Conseil supérieur de l'audiovisuel et sont débattues au travers de la présentation annuelle du rapport d'exécution du contrat d'objectifs et de moyens devant les commissions chargées des affaires culturelles et des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Le présent rapport a pour objectif de dresser un large constat des missions de service public existantes et de l'état de l'offre de programmes en les replaçant dans le paysage audiovisuel, l'environnement législatif et réglementaire et les évolutions attendues. Il ambitionne également de proposer les réformes jugées indispensables par la mission d'information pour que le service public ait les moyens en termes de stratégie, d'investissement, de gouvernance et de financement d'affronter les temps nouveaux de la télévision. Il aspire enfin à tracer les voies qui permettront aux Français de mieux s'approprier le service public dans la qualité, la spécificité et la diversité de l'offre de programmes, et donc de mieux accepter leur contribution financière par la redevance audiovisuelle.

Plus que jamais, face à ce nouveau paysage, le service public de l'audiovisuel aborde son « heure de vérité ».

Dans les parties I et II du rapport, la mission a procédé à l'examen des missions du service public telles que définies par la loi et a brossé un large tour d'horizon de l'évolution de l'environnement du service public audiovisuel ainsi que de la réglementation européenne.

La mission a souhaité ensuite diviser en deux parties le corps de ses propositions : d'une part, les grandes orientations structurantes définies dans la partie III intitulée « Affirmer le caractère propre et renforcer les moyens du service public » ; d'autre part, une série de propositions plus précises dans la partie IV intitulée « 50 recommandations pour un meilleur accomplissement des missions de service public ».

La première grande réflexion figurant dans la partie III du rapport porte sur la clarification du rôle de l'Etat envers le service public audiovisuel.

La mission estime que les grands principes qui régissent les relations entre l'Etat et le service public audiovisuel ont été arrêtés à une époque révolue où les Français ne recevaient que trois puis cinq chaînes gratuites.

Aujourd'hui, l'abondance de l'offre et la demande de contribution financière du public via la redevance imposent, du point de vue de la mission, les cinq réformes suivantes :

1. Ne plus confisquer la discussion des grandes orientations du service public de l'audiovisuel. La mission propose donc que la période précédant l'adoption du contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions fasse l'objet d'un débat dans la société française en trois étapes :

- ouverture d'un forum Internet pendant un an, dans lequel chaque Français aura l'opportunité de s'exprimer ;

- consultation nationale des organisations représentatives correspondant aux missions de service public ;

- saisine du Parlement sur les orientations définies par l'Etat à l'issue des deux premières phases.

2. Allonger la durée du contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions à dix ans, avec une clause de rendez-vous à cinq ans, pour permettre le développement d'une véritable stratégie.

3. Adapter le mode de désignation et la durée du mandat du président de France Télévisions :

- mandat de cinq ans tacitement renouvelable une fois, après examen de la conformité de l'exercice du mandat avec les objectifs initiaux ;

- appel à candidatures en deux temps pour le renouvellement à l'issue d'une période de dix ans : le président sortant candidat à son renouvellement est auditionné par le CSA et, s'il n'est pas reconduit, une procédure d'appel à candidatures est lancée comme il est fait actuellement.

4. Définir un chef de file de l'Etat. Actuellement, dix organismes publics interviennent vis-à-vis du service public de l'audiovisuel. Il faut que le ministre chargé de la communication soit clairement identifié comme chef de file.

5. Libérer le groupe France Télévisions de son rôle leader sur l'audiovisuel extérieur, qui ne relève pas tout à fait du même métier, et mettre en place une réelle coordination des intervenants (TV5 Monde, Canal France International, Radio France Internationale, Chaîne française d'information internationale,...).

La deuxième grande orientation proposée par la mission est de conforter la logique de groupe.

La mission partage les orientations de la présidence de France Télévisions sur le développement d'une logique de groupe, à l'inverse d'un patriotisme de chaîne, ce qui n'exclut pas de définir des orientations pour chacune des chaînes. Celles-ci peuvent être ainsi résumées :

- France 2, vaisseau amiral indispensable du groupe, a vocation à être une grande chaîne populaire ;

- France 3 doit affirmer sa vocation régionale, non seulement dans l'information, mais aussi dans les autres genres ;

- France 5 doit demeurer « la chaîne du plaisir de la connaissance partagée », en veillant à une approche très accessible ;

- France 4 doit s'affirmer comme chaîne des jeunes adultes sur l'ensemble des thématiques et créations contemporaines ;

- France Ô doit pouvoir, par diffusion numérique terrestre, être la chaîne d'une meilleure intégration ultramarine dans la communauté nationale.

En respectant ces orientations, il faut laisser plus de liberté au groupe France Télévisions dans la coordination de son offre de programmes, une fois que la couverture du territoire par la TNT le permettra, et intensifier les synergies au sein de France Télévisions.

La troisième grande orientation porte sur l'adaptation des missions du service public de l'audiovisuel aux nouveaux modes de consommation.

Ces nouveaux modes sont autant d'occasions pour le service public d'élargir son offre vers des publics plus ciblés à des heures de moins grande écoute et de répondre ainsi à sa mission de service public, notamment dans la culture, le divertissement et le sport.

À cet égard, la difficile question de la propriété des droits devra être mise sur la table.

La quatrième grande orientation peut être intitulée : « Il y a une vie en dehors du prime time », c'est-à-dire hors du créneau de 19 heures à 22 h 30.

La mission estime que les heures de la journée et la seconde partie de soirée constituent des cases appropriées à l'innovation, à la découverte du patrimoine et à la prise de risque plutôt que d'occuper à l'excès l'écran par des séries étrangères dans la journée et par des émissions de débat en plateau en seconde partie de soirée.

Les œuvres françaises doivent bénéficier de cases privilégiées au titre du second marché - après que la question des droits aura été réglée - et pour la première exposition à l'antenne de jeunes talents. Les cases horaires de la journée sont particulièrement adaptées à cet objectif.

De grandes émissions culturelles, diversifiées et accessibles devraient trouver une place appropriée en deuxième partie de soirée, tout en étant le lieu idéal de promotion de la création en France, en Europe et en régions.

La dernière grande orientation souligne l'impérieux besoin de financement du service public.

L'augmentation du coût des programmes, les investissements technologiques lourds à réaliser, les prescriptions de l'Etat ainsi que les perspectives offertes par la proposition de directive modifiant la directive Télévision sans frontières imposent de donner au service public les moyens de ne pas décrocher par rapport aux autres acteurs, qu'ils soient diffuseurs hertziens ou qu'ils viennent du secteur des télécommunications.

La redevance audiovisuelle doit être confortée en sanctuarisant le principe du remboursement intégral des exonérations sociales, en veillant à l'application du principe de neutralité technologique et en engageant l'Etat sur une progression pluriannuelle de la redevance au minimum conforme au taux qu'il alloue à la dotation globale de fonctionnement des communes.

Il faut également saisir l'opportunité de la renégociation de la directive Télévision sans frontières pour :

- réaffirmer le principe d'absence de coupure publicitaire des œuvres ;

- expérimenter pendant deux ans une coupure publicitaire des émissions de flux, hormis celles dites « réservées » comme l'information, les émissions cultuelles ou les programmes pour la jeunesse ;

- au moment de la transposition de la directive et si la dynamique sécurisée de la redevance n'est pas entrée dans les faits, relever le plafond du volume de diffusion publicitaire à neuf minutes par heure, puis à dix minutes deux ans plus tard ;

- multiplier les recettes de complément : parrainage, diversification, services interactifs, vente de produits, mécénat.

Enfin, le titre IV du rapport comporte des propositions d'ambition et de nature diverses visant à mieux assurer les missions de service public en promouvant, par exemple, la diversité, le pluralisme, la qualité et l'innovation, le respect des droits de la personne, la mise en valeur du patrimoine, la diffusion de la création, l'éducation aux médias, le service rendu aux personnes handicapées, etc.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Après avoir rappelé que le président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré, reçoit aujourd'hui les artistes intervenant dans le domaine musical, après avoir reçu hier ceux du monde du cinéma, afin de discuter du projet de loi relatif aux droits d'auteur et aux droits voisins dans la société d'information, le président Jean-Michel Dubernard a félicité le rapporteur pour la qualité de son travail. Le nombre et la qualité des personnes auditionnées ainsi que le déplacement effectué par la mission à Londres montrent bien que le tour de la question a été fait. Les contributions du groupe UDF et du groupe socialiste constituent également des apports très intéressants. Il faut néanmoins noter que plusieurs députés désignés pour être membres de la mission n'ont jamais participé à ses travaux, ce qui est regrettable ; en effet, d'autres députés, très compétents dans ce domaine, auraient souhaité en faire partie. Il faut donc rappeler que les commissaires qui s'inscrivent pour faire partie d'une mission s'engagent à participer à ses travaux.

Après avoir remercié le rapporteur pour le travail effectué, M. Didier Mathus a jugé que le rapport est exhaustif et qu'il ouvre beaucoup de pistes. Pourtant, les membres du groupe socialiste, s'ils ont participé aux travaux de la mission, n'ont pas souhaité se prononcer sur le contenu du rapport qui contient beaucoup d'éléments positifs et qu'ils approuvent pour l'essentiel. En effet, il existe un hiatus trop important entre les préconisations du rapport et les réalités budgétaires depuis 2002. En particulier, l'Etat ne rembourse pas les exonérations de redevance, ce qui constitue un manque à gagner de 80 millions d'euros pour l'audiovisuel public. Compte tenu de ces réalités, si le rapport est globalement intéressant, il a en fait toutes les caractéristiques d'une fiction.

En outre, les membres du groupe socialiste sont en désaccord avec la proposition de relever le plafond de diffusion de la publicité pour compenser le manque de recettes tirées de la redevance. En effet, la faible visibilité de la publicité est une marque de la télévision publique comme de la radio publique. Il est vrai qu'il existe un écart croissant et préoccupant entre les ressources de la télévision publique et celles de la télévision privée. Cependant la télévision publique doit rétablir son identité, qui demeure aujourd'hui un peu floue, et il ne faut pas ouvrir la porte à une augmentation de la publicité qui affecterait gravement le caractère propre du service public de l'audiovisuel.

Mme Anne-Marie Comparini a souligné la qualité du travail du rapporteur et a rappelé que le groupe UDF a rédigé une contribution spécifique.

Le président Jean-Michel Dubernard a noté que la contribution du groupe UDF apporte des éclairages intéressants en ce qui concerne notamment la promotion du spectacle vivant, la question de la violence, l'intégration des personnes handicapées, l'évaluation des dépenses et la diversification des ressources.

M. Jean-Michel Herbillon a expliqué que les députés UMP de la mission d'information sur les missions du service public de l'audiovisuel et de l'offre des programmes approuvent les conclusions du rapport et ses préconisations. La réflexion menée par la mission est utile dans le contexte actuel de bouleversement du paysage audiovisuel, lié en particulier à la multiplication de l'offre de programmes et des nouveaux modes de réception avec toutes leurs conséquences, que ce soit sur le coût des programmes, le financement et la création dans un objectif d'expression de la diversité culturelle. Un tel bouleversement pose en particulier un vrai défi d'adaptation au secteur de l'audiovisuel public, qui doit faire face à une concurrence accrue en termes tant de programmes que d'accès aux marchés publicitaires, dans un cadre très contraint lié à ses obligations et missions de service public.

Pour y parvenir, les députés UMP de la mission d'information jugent nécessaire de mieux préciser les relations de l'audiovisuel public avec l'Etat et de définir un chef de file gouvernemental pour le service public audiovisuel. Il faut également assurer à ce dernier une meilleure visibilité sur son avenir au travers de l'allongement de la durée du contrat d'objectifs et de moyens et de la durée du mandat du président de France Télévisions. Les Français et le Parlement devraient être davantage associés à la définition du contrat d'objectifs et de moyens.

Ils souhaitent, en outre que l'effort entrepris au sein du groupe France Télévisions pour renforcer la cohérence et la complémentarité de l'offre de programmes soit accentué. Sans remettre en cause la spécificité et l'identité de chacune des chaînes, un renforcement des synergies au sein du groupe permettrait de mieux répondre aux demandes des différents publics et de dégager des marges de manœuvre financières.

Il est également nécessaire que France Télévisions ne se cantonne pas dans l'avenir au seul réseau hertzien et devienne multimédia. Cette diffusion multi-supports exige que le service public dispose à l'avenir des droits d'exploitation des programmes qu'il produit. En outre, la connaissance de l'Europe et de la vie dans les 25 pays de l'Union européenne devrait être inscrite parmi les obligations du service public audiovisuel, cette préconisation pourrait d'ailleurs être appliquée rapidement compte tenu des négociations en cours sur le contrat d'objectifs et de moyens.

Il y a enfin nécessité de garantir la pérennité du financement de l'audiovisuel public pour lui permettre de s'adapter à la nouvelle donne audiovisuelle. Pour ce faire, si la hausse du taux de la redevance audiovisuelle est difficilement envisageable, il convient que l'Etat compense toutes les exonérations accordées par la loi et prévoit également une contractualisation de l'évolution du produit de la redevance. L'ouverture plus large vers de nouveaux modes de financement du type du parrainage, du mécénat ou d'autres recettes commerciales, doit être privilégiée.

En réponse aux intervenants, M. Dominique Richard a précisé que le décalage existant entre les réalités budgétaires et l'ambition qu'il faut avoir pour le service public justifient bien a posteriori l'utilité de la mission. S'agissant des ressources publicitaires, il n'est pas sûr que les Français perçoivent la différence entre les chaînes privées et les chaînes publiques en matière de volume publicitaire. En revanche, il apparaît capital que, sur les antennes de l'audiovisuel public, aucune œuvre ne soit interrompue par une publicité : c'est un facteur majeur de différenciation. L'augmentation préconisée des ressources publicitaires ne s'envisage qu'en substitution à des ressources budgétaires insuffisantes.

En application de l'article 145 du Règlement, la commission a décidé le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication, les commissaires socialistes indiquant ne pas prendre part au vote.

*

La commission est ensuite passée à l'examen, sur le rapport du président Jean-Michel Dubernard, de la proposition de résolution sur le 7è programme-cadre de recherche et de développement des Communautés européennes présentée par M. Daniel Garrigue, rapporteur de la délégation pour l'Union européenne - n° 2885.

Le président Jean-Michel Dubernard, rapporteur, a rappelé en premier lieu que la proposition de résolution présentée par M. Daniel Garrigue et adoptée par la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale le 22 février dernier porte sur le 7e programme-cadre de recherche et de développement des Communautés européennes (PCRD). Institué en 1984, le PCRD est le premier et le principal outil de financement de la recherche au niveau communautaire. Depuis 1994 et le début du 5e programme-cadre (1994-1998), cet instrument regroupe toutes les activités communautaires de recherche et de développement dans le secteur non nucléaire, celles portant sur le secteur nucléaire figurant dans un programme-cadre Euratom distinct sur lequel la proposition de résolution se prononce également.

On peut certes regretter la trop grande complexité de ce dispositif. L'obtention de crédits nécessite bien souvent de disposer de lobbyistes à Bruxelles : c'est par exemple le cas de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Une autre lourdeur tient à l'obligation pour les projets relevant du PCRD d'associer des équipes de plusieurs Etats-membres, ce qui peut amener à solliciter la collaboration de pays qui, en réalité, ne sont que modérément intéressés par tel ou tel thème.

Cela dit, la largeur du champ couvert par ces programmes et l'ampleur des moyens qui y sont consacrés font qu'ils constituent un outil indispensable pour le développement de la recherche communautaire, d'autant plus nécessaire que la dépense de recherche européenne moyenne ne représente que 1,9 % du PIB quand les objectifs définis au Conseil européen de Lisbonne préconisent 3  %  en 2010. L'enveloppe du prochain PCRD n'est pas encore fixée mais devrait atteindre de 55 à 70 milliards d'euros. S'il reste une incertitude sur ce montant, c'est que les prescriptions financières de l'Union européenne entre 2007 et 2013 ne sont pas encore fixées. Dans son projet de 7e PCRD, présenté le 6 avril 2005, la Commission européenne avait affiché un objectif financier très ambitieux : doubler le montant du 6e PCRD avec un budget global de plus de 72 milliards d'euros sur sept ans et d'un peu plus de 3 milliards d'euros pour le volet Euratom. Le Conseil des ministres n'a pas suivi cette proposition, mais il n'y a pas lieu, pour autant, de céder au pessimisme. Si le Conseil a souhaité limiter drastiquement les crédits destinés à financer la « compétitivité au service de la croissance et de l'emploi » - programme qui comprend notamment les crédits du PCRD -, il a en effet, dans le même temps, porté la priorité sur l'effort de recherche en souhaitant que, d'ici à 2013, il augmente de 75 % par rapport à 2006.

Au-delà de cette forte évolution financière, le 7e PCRD présente deux innovations majeures : l'une en direction de la recherche académique avec la création d'un Conseil européen de la recherche ; l'autre en direction de la recherche appliquée avec la mise en place d'initiatives technologiques conjointes.

Le Conseil européen de la recherche (CER), qui se met actuellement en place, sera à la fois une instance prospective et une agence de moyens, sur le modèle des Councils britanniques. S'inspirant également de la National Science Foundation américaine, le CER a exclusivement pour mission de financer la recherche fondamentale. Des scientifiques de haut niveau, comme Mme Catherine Bréchignac, présidente du CNRS, ont été associés à la mise en place de cette instance et elle fonctionnera en toute indépendance. Deux des vingt-deux membres du Conseil sont français : il s'agit du physicien Daniel Estève, vice-président, et du linguiste et sémiologue Alain Peyraube. Le CER n'est pas une simple structure venant s'ajouter aux précédentes. Il constitue en réalité un changement de perspective dans la construction de l'Europe de la recherche jusqu'alors essentiellement fondée sur la coopération : le CER met pour la première fois l'accent sur l'excellence hors toute autre considération. Enfin, il est à noter que des moyens importants sont consacrés à cette initiative : la Commission propose pour le volet « Idées », qui comprend les financements liés au CER, un budget de 11,8 milliards d'euros pour la période 2007-2013, soit 16 % du budget total du PCRD.

Le deuxième outil novateur mis en place par le 7e PCRD sont les initiatives technologiques conjointes. Il s'agit de grands programmes associant partenaires publics et privés autour d'une thématique de recherche commune. Les chercheurs français doivent effectivement évoluer dans leur conception des rapports avec l'entreprise. À cet égard, il est frappant que des pratiques qui vont maintenant de soi dans un secteur tel que la biomédecine ne se diffusent pas encore dans toute la recherche.

Fort de ce constat, la présente proposition de résolution s'articule autour de deux axes. La délégation souhaite voir la France tirer mieux parti des instruments proposés par l'Union européenne et, dans le même temps, réclame une politique européenne plus ambitieuse.

Il ne fait aucun doute que les nouveaux outils proposés dans le cadre du prochain PCRD sont de nature, si notre pays sait s'en saisir, à conforter la participation française au programme européen. De plus, il est à noter que les nouveaux instruments européens sont très proches, dans leurs structures et dans leur finalité, des nouveaux dispositifs français que sont l'Agence nationale de la recherche (ANR), l'Agence de l'innovation industrielle (AII) ou les pôles de compétitivité. À notre pays de savoir en tirer pleinement parti. La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est pleinement convaincue de ce mot d'ordre puisque, chaque fois que cela été possible, elle s'est appliquée à articuler l'économie du dispositif français proposé par le projet de loi de programme pour la recherche avec les structures européennes, adoptant à cette fin des amendements provenant de la majorité comme de l'opposition. C'est ainsi qu'elle a souhaité que le Haut conseil de la science et de la technologie prenne en compte les actions menées au niveau de l'Espace européen de la recherche, que les formes de coopération mises en place par le projet de loi (PRES et réseaux thématiques de recherche avancée) puissent intégrer des établissements européens et, enfin, que l'évaluation de la recherche française organisée autour de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES) fasse appel à des évaluateurs issus de l'Union européenne.

Le rapporteur a souligné son identité de vue avec le rapporteur de la délégation pour l'Union européenne, M. Daniel Garrigue, partageant avec lui les mêmes regrets quant à l'ambition insuffisante de la recherche européenne. Au-delà des seuls aspects financiers, on peut en effet regretter que l'action européenne n'aille pas plus loin. Il faut notamment, comme le propose la délégation :

- renforcer et pérenniser les mécanismes d'appel à projets en veillant à la complémentarité des niveaux européen et national ;

- mieux associer les PME aux programmes de recherche et d'innovation ;

- renforcer la gouvernance des programmes européens en instituant, pour chaque projet, de véritables chefs de file ;

- encourager la mobilité des chercheurs ;

- doter l'Union d'une véritable stratégie en matière de recherche ;

- mettre systématiquement en commun, dans le cadre de l'évaluation, les experts des différents membres de l'Union.

Le rapporteur a considéré que ce dernier point est particulièrement important, rappelant que lui-même a tenté de promouvoir une telle initiative au niveau européen. Si elle reçoit systématiquement l'assentiment des chercheurs européens, elle a reçu en revanche un accueil plus que réservé de la part de la Commission européenne, ce qui est surprenant.

Enfin, il convient de signaler l'intérêt qu'il y aurait à mettre en place en Europe une réglementation s'inspirant du Bayh-Dole act américain, dont les chercheurs locaux soulignent à quel point il a fait avancer les choses dans le domaine de la valorisation des recherches financées sur fonds fédéraux.

Au regard de tous ces éléments, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales se doit d'adopter la proposition de résolution sans modification.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Daniel Garrigue, rapporteur de la délégation pour l'Union européenne, a déclaré partager totalement les conclusions du rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. M. Jean-Michel Dubernard est d'ailleurs directement à l'origine de l'une des propositions de la délégation : celle concernant la mutualisation des compétences d'évaluation européennes. Il faut rappeler que si l'effort moyen de recherche chiffré en Europe s'élève à 1,9 % du PIB, il recouvre en fait des situations très diverses. En 2004, ce taux était de 2,16 % en France : notre situation n'est donc pas parmi les plus mauvaises.

Le rapporteur a observé que le rang moyen de la France n'est obtenu que grâce au poids élevé de l'effort de recherche publique alors que l'objectif européen recommande que l'engagement des entreprises privées représente les deux tiers de l'effort national de recherche.

M. Daniel Garrigue, rapporteur de la délégation pour l'Union européenne, a ensuite apporté les précisions suivantes :

- Les ambitions affichées dans le PCRD (et notamment le nombre d'outils qu'il contient) étant considérables par rapport aux moyens qui y sont affectés, des arbitrages apparaissent nécessaires pour préserver l'efficacité du PCRD.

- Le parallélisme des institutions mis en place à l'échelon européen à travers le PCRD et à l'échelon national avec le projet de loi pour la recherche est effectivement intéressant, mais certaines clarifications s'imposeront.

- Du point de vue stratégique, on est en droit d'adopter une attitude iconoclaste à l'encontre de la « stratégie de Lisbonne ». Cette « stratégie » a certes eu le mérite de promouvoir l'objectif de consacrer 3 % du PIB à la recherche. Mais, pour le reste, c'est en fait une stratégie par procuration qui s'en remet aux États membres pour fixer les orientations stratégiques. Il s'agit d'une véritable faiblesse européenne par rapport aux Etats-Unis ou au Japon, ce constat ne valant d'ailleurs pas que pour la recherche mais aussi pour l'énergie ou la technologie.

M. Pierre Cohen a estimé qu'il est paradoxal de débattre simultanément du futur PCRD et d'un projet de loi pour la recherche qui n'établit aucun lien avec les instruments européens. Cette situation est grave. La France, par exemple dans le domaine de l'espace, a su impulser de grandes politiques européennes, mais tel n'est plus le cas depuis quelques années. Par ailleurs, si on peut regretter que les débats en cours sur la recherche, très sérieux et plutôt consensuels en commission, ne le soient pas en séance publique c'est uniquement le fait du triomphalisme du ministre délégué à la recherche, triomphalisme qui n'est vraiment pas de mise : comment peut-on se targuer de promouvoir la recherche européenne quant la politique européenne de la France ne vise qu'à défendre les moyens affectés à l'agriculture et à réduire le plus possible l'ensemble du budget communautaire ?

M. Alain Claeys a jugé inacceptable le point 6 de la proposition de résolution, aux termes duquel la légation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale « souhaite que la recherche européenne soit plus lisible et plus ambitieuse » ; non pas sur le fond de la proposition, qu'il partage, mais compte tenu de la position française sur les perspectives financières de l'Union exprimée par le Président de la République : comment peut-on à la fois réclamer un engagement financier plus soutenu de l'Union européenne dans la recherche lorsque dans le même temps on plaide pour une stabilisation de son budget global - compte tenu des besoins de financement liés à l'élargissement - et le maintien en l'état du soutien aux programmes existants ?

En réponse aux orateurs, le rapporteur a tout d'abord souligné la nécessité de dissocier les dispositions du projet de loi de programme pour la recherche, actuellement en cours d'examen par l'Assemblée nationale, de la proposition de résolution et du rapport d'information de la délégation pour l'Union européenne sur le 7è programme-cadre de recherche et de développement des Communautés européennes. Concernant le projet de loi, il est regrettable que sur un tel sujet, un consensus n'ait pu émerger alors même qu'il tend, enrichi des amendements adoptés par la commission, à être le plus « eurocompatible » possible. Les articulations sont forcément limitées. Il n'appartient pas en effet à la Représentation nationale de statuer en lieu et place de l'Union européenne ; il lui est cependant possible de préparer les débats et d'affirmer sa volonté d'avancer sur ce sujet avec les partenaires européens de la France puisqu'il est évident, et tous les députés sont d'accord sur ce point, que l'avenir de la recherche européenne dépendra des efforts que nous ferons tous en la matière. Aussi il est regrettable qu'un consensus n'ait pu être trouvé.

M. Alain Claeys s'est déclaré en désaccord avec la position du rapporteur quant à la possibilité de parvenir à un consensus sur cette question, dans la mesure où il existe de profondes divergences entre la majorité et l'opposition parlementaires, notamment, sur le mode de fonctionnement de la recherche et de l'enseignement supérieur et sur les moyens financiers qui doivent leur être consacrés. Ni médiocre, ni sectaire, ce débat est au contraire noble et correspond au fonctionnement démocratique normal d'une assemblée parlementaire. Le nombre raisonnable d'amendements déposé par le groupe socialiste doit d'ailleurs permettre d'examiner en profondeur l'ensemble des questions soulevées par ce projet.

Le rapporteur a néanmoins estimé que, pour des raisons politiques, l'opposition affiche sans doute des divergences plus marquées qu'elles ne le sont en réalité.

Mme Anne-Marie Comparini a pour sa part rappelé que la délégation pour l'Union européenne a insisté sur le fait que les perspectives financières européennes pour les sept prochaines années semblent trop limitées si l'on veut promouvoir efficacement tant la recherche que la compétitivité des entreprises. À cet égard, dans le prolongement des débats qui ont eu lieu au sein du Parlement européen, il serait souhaitable que les parlementaires français se prononcent en faveur d'une augmentation du budget de la Commission européenne.

Conformément aux conclusions du rapporteur et après que M. Alain Claeys et M. Pierre Cohen ont déclaré s'abstenir, la commission a adopté l'article unique de la proposition de résolution sans modification.

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Information relative à la commission

La commission a désigné les membres de la mission d'information sur l'épidémie à virus chikungunya à la Réunion et à Mayotte :

- M. Bertho Audifax, président rapporteur (UMP)

- Mme Huguette Bello (NI)

- Mme Jacqueline Fraysse (CR)

- Mme Catherine Génisson (Soc.)

- M. Denis Jacquat (UMP)

- M. Mansour Kamardine (UMP)

- M. Yvan Lachaud (UDF)

- M. Jean-Marie Le Guen (Soc.)

- Mme Gabrielle Louis-Carabin (UMP)

- M. Pascal Ménage (UMP)

- M. Christophe Payet (Soc.)

- M. René-Paul Victoria (UMP)


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