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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

Mardi 14 novembre 2006

Séance de 16h15

Compte rendu n° 11

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard,
Président,
puis de M.  René Couanau

 

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– Examen de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, portant création d’un ordre national des infirmiers – n° 3357 (Mme Maryvonne Briot, rapporteure)


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– Examen pour avis du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la prévention de la délinquance (articles 5 à 9, 17, 18 à 24, 27 à 29) – n° 3338 (M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur)


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– Informations relatives à la commission

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La commission a examiné, sur le rapport de Mme Maryvonne Briot, la proposition de loi, modifiée par le Sénat, portant création d’un ordre national des infirmiers – n° 3357.

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué que, sous réserve de confirmation ultérieure, la présente proposition de loi devrait être examinée par l’Assemblée nationale le mardi 12 décembre prochain lors de la séance d’initiative parlementaire réservée au groupe UMP.

Mme Maryvonne Briot, rapporteure, a tout d’abord rappelé que la proposition de loi portant création d’un ordre national des infirmiers a été adoptée par l’Assemblée nationale, en première lecture, le 13 juin 2006. Lors de son examen par le Sénat, le 5 octobre dernier, vingt-trois amendements ont été adoptés, dont dix-huit à l’initiative de la rapporteure de la commission des affaires sociales, Mme Sylvie Desmarescaux, dont il convient en préambule de saluer la qualité du travail ainsi que le sens de l’écoute.

Ce texte comporte désormais neuf articles, contre six dans la proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture. Si les articles 3 et 5 ont été adoptés dans les mêmes termes par les deux assemblées parlementaires, le Sénat a apporté quelques aménagements aux quatre autres articles du texte initial de la proposition de loi.

Outre différents amendements de clarification rédactionnelle, l’article 1er a tout d’abord été amendé afin d’harmoniser la procédure disciplinaire de l'ordre avec celle qui existe déjà pour les autres professions médicales et paramédicales. Les infirmiers salariés du secteur privé seront donc soumis, comme les libéraux, à la compétence disciplinaire de l'ordre. Par ailleurs, s’agissant des infirmiers relevant du secteur public, qui restent soumis à la procédure disciplinaire actuellement prévue dans les établissements de santé où ils exercent, leur employeur sera tenu d’informer le président du conseil régional de l'ordre de toute sanction disciplinaire prononcée à leur encontre, en raison d'une faute professionnelle.

D’autre part, l’article 4 de la proposition de loi a fait l’objet d’une réécriture globale afin de supprimer le conseil institué par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui réunit, en principe du moins, l’ensemble des infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes exerçant à titre libéral. En effet, outre le fait que cette instance n’a jamais été mise en place, faute de parution des textes nécessaires d’application, la création des ordres des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures podologues, par la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, et celle à venir de l’ordre des infirmiers ont conduit à le vider progressivement de son contenu. Quant aux professions d’orthophoniste et d’orthoptiste, qui comptent respectivement 14 500 et 2 000 membres, la rapporteure de la commission des affaires sociales du Sénat a indiqué que ces professionnels « préfèrent que les règles déontologiques soient fixées par voie réglementaire et que leur respect en soit assuré par l’autorité judiciaire ». La suppression de ce conseil apparaît dès lors nécessaire, d’autant que les questions interprofessionnelles pourront être abordées plus efficacement au sein du Conseil supérieur des professions paramédicales (CSPPM), dont la réforme est actuellement engagée par le gouvernement afin d’en améliorer le fonctionnement.

Enfin, trois articles additionnels ont été introduits par le Sénat. Dans le prolongement des recommandations de la mission de concertation et de médiation concernant le projet de création d’un ordre infirmier, confiée à M. Édouard Couty par le ministre de la santé et des solidarités, le nouvel article 7 prévoit ainsi qu’un rapport soit présenté par le gouvernement au Parlement, dans les deux mois suivant la promulgation de la future loi, sur le remplacement du CSPPM par une nouvelle structure interdisciplinaire. En outre, à l’initiative du gouvernement, les articles 8 et 9 du présent texte permettent, d’une part, de renforcer l’efficacité du dispositif de formation continue, en prévoyant que l’État peut déléguer, par voie de convention, la gestion matérielle des instances nationales et régionales compétentes en la matière aux ordres des médecins et des chirurgiens-dentistes et, d’autre part, de préciser la nature des règles déontologiques applicables aux pédicures-podologues.

Compte tenu de l’ensemble des améliorations apportées par le Sénat, qui a veillé à préserver l’équilibre de ce texte, et surtout de la nécessité de donner rapidement à l’ensemble de la profession un signe tangible de reconnaissance – qui pourrait ainsi constituer le premier pas dans la mise en œuvre d’une politique globale et concertée de revalorisation de la profession, afin de lui donner toute la place qu’elle mérite dans notre système de santé –, l’adoption de la présente proposition de loi, telle qu’amendée par le Sénat, s’impose dès lors comme une nécessité.

Un débat a suivi l’exposé de la rapporteure.

M. Jean-Luc Préel a déclaré partager le souhait exprimé par la rapporteure d’une adoption conforme de ce texte par l’Assemblée nationale, en jugeant essentiel que ce projet de création d’un ordre infirmier aboutisse et reçoive une traduction concrète avant les prochaines échéances électorales, qui se rapprochent. À la lumière de l’expérience acquise, s’agissant tout particulièrement de la création des ordres des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues, qui est restée lettre morte suite au changement de majorité en 1997, il convient en effet de veiller à ce que l’ensemble des textes d’application soient publiés dans les plus brefs délais après la promulgation de la future loi, afin d’éviter que cette expérience malheureuse ne se reproduise.

On ne peut, d’autre part, que se féliciter de la suppression du conseil des professionnels paramédicaux libéraux institué par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dès lors que cette instance n’a plus aujourd’hui de raison d’être. C’est d’ailleurs pourquoi une disposition analogue était prévue par la proposition de loi du groupe UDF visant à créer un ordre national des infirmiers, qui a été examinée par l’Assemblée nationale en janvier dernier. Le problème de la coordination entre les professionnels de santé libéraux demeure cependant et justifie dès lors d’envisager la création d’unions régionales des professions de santé, parallèlement aux unions régionales des médecins exerçant à titre libéral (URML).

M. Jean-Marie Le Guen a estimé que tant les dispositions de la proposition de loi initiale que les modifications apportées par le Sénat ainsi que les différentes interventions des commissaires montrent combien la création d’un ordre infirmier conduit en définitive à complexifier davantage notre système de santé, alors qu’il devrait au contraire tendre à la simplification. Les évolutions considérables, dont il est actuellement l’objet, exigent en effet d’y apporter plus de fluidité, à travers notamment le développement du partage d’informations entre professionnels et l’amélioration du fonctionnement des différentes structures compétentes en matière de santé mais aussi des déroulements des carrières.

Alors que les questions éthiques et professionnelles nécessitent une réflexion globale et transversale entre les professions médicales et paramédicales et que l’on pourrait par exemple imaginer de confier à des infirmières devenues « cliniciennes » la possibilité de prescrire des soins médicaux, ce texte ne fait qu’ajouter au cloisonnement actuel, en érigeant de véritables tuyaux d’orgues aussi structurés qu’inadaptés, au risque de reproduire à l’infini des dispositifs qui s’avèrent aujourd’hui totalement dépassés.

Rappelant son attachement et son investissement personnel dans la réussite de ce projet de création d’un ordre infirmier, Mme Claude Greff a tout d’abord salué la grande qualité du travail réalisé par la rapporteure ainsi que par la rapporteure de la commission des affaires sociales du Sénat, dans un esprit de concertation et de dialogue constructif et dans l’objectif de permettre une représentation unitaire de la profession. Dès lors, les critiques émises par M. Jean-Marie Le Guen semblent difficilement compréhensibles, d’autant que ce texte a pour vocation d’instituer un ordre et non pas un désordre infirmier.

On ne peut que souligner le manque d’imagination des membres du groupe socialiste, qui ont déposé une série d’amendements identiques à ceux déjà examinés par l’Assemblée nationale en première lecture, ce qui ne peut que les condamner à se répéter à défaut d’être convaincants ! Il importe enfin que la rapporteure continue de défendre la création d’un ordre infirmier jusqu’à sa mise en place effective et puisse pour cela compter sur le soutien de l’ensemble des députés, qui ont soutenu cette proposition de loi dès son origine et qui sont très attachés à son adoption rapide.

Le président Jean-Michel Dubernard a également estimé que la proposition de loi recueille le soutien de nombreux parlementaires, d’autant que, depuis son dépôt, ce texte a évolué dans un sens tout à fait positif qui le rend désormais acceptable par tous.

Se déclarant satisfait par ce texte, M. Pierre Hellier a estimé que si M. Jean-Marie Le Guen a eu raison de souligner les importantes mutations en cours et nécessaires des conditions d’exercice des professionnels de santé, les conclusions qu’il en tire apparaissent toutefois très contestables, dès lors que ces évolutions n’empêchent en aucun cas, bien au contraire, qu’il puisse y avoir des ordres professionnels.

Félicitant également la rapporteure pour la qualité de son travail, M. Marc Bernier a rappelé que le dévouement et le travail remarquable des infirmiers ont été soulignés dans le rapport sur la démographie médicale qu’il a présenté il y a deux ans mais aussi lors des travaux en cours de la mission d’information de la commission sur la prise en charge des urgences médicales. Or cette profession a véritablement besoin de la création d’un ordre, qui ne peut en rien être comparé à des « tuyaux d’orgue ». Il n’est par ailleurs en aucun cas question que les infirmiers exercent les compétences des médecins, ce qu’ils ne souhaitent d’ailleurs pas, dans la mesure où il s’agit bien de procéder à des délégations de tâches et non de compétences.

M. Jean-Marie Le Guen a cependant rappelé que l’Ordre national des médecins s’est fermement positionné contre certaines délégations de compétences entre professionnels. Or aujourd’hui, face à ces durcissements corporatistes, on ne peut que regretter qu’on souhaite manifestement en mettre en place de nouveaux, en créant ainsi les conditions pour que chacun campe sur ses positions.

Le président Jean-Michel Dubernard a estimé que les ordres avaient à la fois des aspects positifs et négatifs, mais que les premiers prévalent cependant, tout du moins à leur création.

En réponse aux intervenants, la rapporteure a fait part de son profond désaccord avec les propos tenus par M. Jean-Marie Le Guen, dans la mesure où, sans détailler à nouveau l’ensemble des raisons qui justifient l’institution d’un ordre infirmier, il convient de rappeler la nécessité de combler un vide juridique qui persiste depuis de nombreuses années. La création d’instances ordinales est en effet essentielle pour définir et veiller au respect des règles déontologiques de la profession et veiller à leur respect mais aussi pour renforcer la représentation de la profession aux niveaux européen et international et, plus largement, pour améliorer la qualité des soins dispensés aux patients. Il convient enfin de souligner que cette proposition de loi est le fruit d’un travail collectif réalisé avec l’ensemble des députés ayant soutenu ce texte ainsi qu’avec la rapporteure de la commission des affaires sociales du Sénat, et cela en concertation étroite avec l’ensemble de la profession.

La commission est ensuite passée à l’examen des articles de la proposition de loi restant en discussion.

Article 1er : Création et définition des modalités de fonctionnement de l’ordre national des infirmiers

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté onze amendements de Mme Catherine Génisson :

– le premier de suppression de l’article et le deuxième visant à abroger le caractère obligatoire de l’adhésion à l’ordre des infirmiers ;

– les troisième et quatrième ayant pour objet d’exclure du champ de compétence de l’ordre les infirmiers relevant de l’Éducation nationale, d’une part, et ceux relevant du statut de la fonction publique d’État, hospitalière ou territoriale, d’autre part ;

– les cinquième et sixième visant à supprimer les dispositions prévues par le huitième alinéa de cet article, selon lesquelles « un code de déontologie, préparé par le conseil national de l’ordre des infirmiers, est édicté sous la forme d’un décret en Conseil d’État », d’une part, et les conseils départementaux de l’ordre des infirmiers, d’autre part ;

– les septième et dernier visant respectivement à préciser que les conseils régionaux et le Conseil national de l’ordre des infirmiers sont constitués à la proportionnelle des trois catégories de représentants définies par le présent article ;

– le huitième tendant à soumettre la fixation du nombre des conseils régionaux de l’ordre à une concertation préalable avec l’ensemble des syndicats représentatifs du secteur de la santé et des agences régionales d’hospitalisation (ARH) ;

– le neuvième précisant que les litiges relatifs à l’exercice libéral de la profession d’infirmier sont instruits devant la chambre disciplinaire de première instance mentionnée à l’article L. 4391-3 du code de la santé publique ;

– l’avant-dernier visant à supprimer l’institution d’une cotisation obligatoirement versée à l’ordre par toute personne inscrite au tableau.

La commission a ensuite adopté l’article 1er sans modification.

Article 2 : Conditions d’exercice de la profession d’infirmier

La commission a adopté l’article 2 sans modification.

Article 4 : Suppression du Conseil des professions d’infirmier, masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, orthophoniste et orthoptiste

La commission a adopté l’article 4 sans modification.

Article 6 : Dispositions de coordination relatives au contentieux du contrôle technique de la sécurité sociale

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté un amendement de Mme Catherine Génisson prévoyant que les fautes, abus, fraudes et tout fait intéressant l’exercice de la profession relevés à l’encontre des infirmiers exerçant à titre libéral, à l’occasion des soins dispensés aux assurés sociaux, sont soumis en première instance et en appel aux chambres disciplinaires mentionnées à l’article L. 4391-3 précité.

La commission a adopté l’article 6 sans modification.

Après l’article 6

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la commission a rejeté un amendement de Mme Catherine Génisson prévoyant la remise d’un rapport au Parlement sur la proposition de remplacement du Conseil supérieur des professions paramédicales (CSPPM) par une nouvelle structure interdisciplinaire, destinée à mettre en oeuvre les liens nécessaires entre tous les acteurs du système de santé.

Article 7 : Dépôt d’un rapport au Parlement concernant la proposition de remplacement du Conseil supérieur des professions paramédicales par une nouvelle structure interdisciplinaire

La commission a adopté l’article 7 sans modification.

Article 8 : Modalités de mise en œuvre de la formation continue des médecins et des chirurgiens-dentistes

La commission a adopté l’article 8 sans modification.

Article 9 : Extension du champ du code de déontologie des pédicures-podologues

La commission a adopté l’article 9 sans modification.

Puis, la commission a adopté l’ensemble de la proposition de loi sans modification.

*

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Michel Dubernard, le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la prévention de la délinquance (art. 5 à 9, 17, 18 à 24, 27 à 29) – n° 3338.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur, a indiqué que le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, examiné au fond par la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, comporte un volet sanitaire et social important, dont la commission des affaires culturelles, familiales et sociales s’est saisie et qui s’organise autour de cinq thèmes : le repérage et le soutien des familles vulnérables et tout particulièrement celles rencontrant des difficultés éducatives ; la définition des missions de l’éducation nationale en matière de prévention de la violence et de contrôle de l’absentéisme scolaire ; le renforcement de la protection des mineurs sollicités via Internet ; la prise en charge des personnes présentant des troubles mentaux dangereux ; les moyens de punir et de soigner les usagers illicites de drogues.

Contrairement à la présentation caricaturale qui a pu en être faite, ce projet de loi n’est pas un texte sécuritaire et répressif. Il comporte de réelles avancées en direction d’une prévention efficace.

Comme le rappelait M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, lors de son audition à l’Assemblée nationale le 8 novembre dernier, il n’est pas possible de considérer comme une fatalité l’augmentation de la délinquance des mineurs qui a progressé de 80 % en dix ans, ce résultat étant le même quelle que soit la méthode de calcul utilisée. Ce triste constat doit conduire à une remise en cause pour examiner avec lucidité les raisons de l’échec des politiques publiques passées, tant dans leur dimension pénale que sociale.

Ce projet de loi comporte donc deux piliers : adapter les sanctions à la gravité des actes pour renforcer leur caractère dissuasif ; revoir l’organisation des actions publiques sur le terrain en donnant au maire un rôle pivot pour la prévention de la délinquance, mais aussi pour la coordination des multiples travailleurs sociaux qui interviennent souvent de manière trop cloisonnée auprès des mêmes familles en difficulté.

Le maire sera l’interlocuteur privilégié de tous les publics en difficulté mais aussi des acteurs sociaux de la prévention. Dans cette nouvelle mission de coordination, le maire ne sera pas seul et pourra s’appuyer sur le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance, que ce projet de loi rend obligatoire dans toutes les villes de plus de 10 000 habitants, et sur le conseil des droits et devoirs des familles.

Le maire disposera de nouveaux outils pour intervenir auprès des familles afin d’améliorer la gradation des réponses : il pourra ainsi faire un rappel à l’ordre pour admonester les mineurs ou les majeurs dont le comportement crée un trouble à l’ordre public ou à la tranquillité publique. Si ce premier avertissement ne suffit pas, ce sera à la justice de se saisir du cas de ces personnes.

De même, en cas de difficulté éducative dans une famille, le maire disposera d’un premier outil : l’accompagnement parental, qui lui permettra de proposer aux parents des aides à la fonction parentale ou la mise en place d’un accompagnement social pour aider à une meilleure gestion des prestations familiales afin qu’elles soient utilisées dans l’intérêt des enfants.

Si ces mesures de soutien ne suffisent pas, du fait du refus des familles de réellement s’impliquer pour assumer leurs responsabilités éducatives, le maire pourra alors saisir soit le président du conseil général en vue d’établir un contrat de responsabilité parentale, soit le juge des enfants en vue de la mise en œuvre d’une mise sous tutelle des prestations familiales. Il pourra enfin saisir le procureur de la République en cas de mise en danger de la santé, de la sécurité ou de l’éducation des mineurs. En cas de carence manifeste de l’autorité parentale, les parents pourront être pénalement sanctionnés, mais cette disposition existe déjà dans le code pénal.

Le projet de loi donne donc aux maires de nouveaux instruments gradués selon la gravité de la situation sociale des familles, tout en respectant les compétences respectives de l’autorité judiciaire et du conseil général en matière d’action sociale et de protection de l’enfance. Cette dimension a beaucoup de signification : les grandes villes ne se rendent peut-être pas toujours compte que les petites et moyennes communes souffrent d’un manque de moyens, lié à une coordination insuffisante.

Il faut ensuite souligner l’importance de l’article 5 du projet de loi. Il attribue au maire une mission de coordination des interventions d’action sociale sur le territoire de sa commune et autorise, sous certaines conditions, le partage d'informations entre professionnels intervenant auprès d'une même famille, ainsi que leur divulgation au maire dans la mesure où cela est nécessaire pour l'accomplissement de ses missions. Ce dispositif est donc assez nuancé.

Le maire devra aussi désigner un travailleur social comme coordonnateur pour organiser et permettre un décloisonnement des interventions sociales auprès des familles en difficulté qui voient aujourd’hui souvent intervenir divers travailleurs sociaux agissant d’une manière pas toujours cohérente. Ce coordonnateur aura aussi pour mission de déterminer parmi les informations confidentielles détenues par les professionnels de l’action sociale intervenant auprès d’une famille en difficulté celles qui pourront être transmises au maire et au président du conseil général, dans le cas où cette transmission apparaîtrait nécessaire à la continuité et à l’efficacité de l’accompagnement social de la famille.

Il faut saluer dans ce texte la consécration légale du secret professionnel partagé, qui permettra une meilleure efficacité du travail social tout en préservant le droit des familles au respect de leur vie privée. Il s’agit d’un véritable problème sur le terrain : certains excès rendent nécessaire un encadrement de ces pratiques. Le texte précise explicitement que les informations confidentielles qui feront l’objet d’un partage entre les travailleurs sociaux et les élus ne pourront pas être divulguées à des tiers, sous peine des sanctions prévues à l’article 226-13 du code pénal relatif à la protection du secret professionnel.

Concernant la prévention de la violence à l’école, le Sénat a introduit un article additionnel pour insérer la lutte contre la violence dans les missions de l’enseignement scolaire.

En matière d’absentéisme scolaire, l’article 9 du projet de loi autorise les maires à mettre en place un traitement automatisé de données à caractère personnel relatives aux enfants en âge scolaire domiciliés dans leur commune. Le maire, autorité administrative de proximité, pourra ainsi avoir connaissance des cas d’absentéisme scolaire, détecter des situations anormales et intervenir en prévention afin d’éviter que les enfants tombent dans la délinquance.

Dans le domaine des communications électroniques et des DVD et jeux électroniques, l’article 17 du projet de loi propose quatre réformes : prévoir l’impression d’une signalétique spécifique de protection de l’enfance sur les supports analogiques et numériques contenant des documents à caractère violent ou pornographique ; redéfinir les règles d’exposition et d’interdiction des documents à caractère pornographique ou violent dans les lieux dont l’accès n’est pas réservé au seul public adulte ; définir une nouvelle infraction pénale permettant de sanctionner les propositions sexuelles faites à un mineur de quinze ans au moyen d’un service de communication électronique ; autoriser la police judiciaire, sans être pénalement responsable, à participer sous des noms d’emprunt aux échanges électroniques sur internet, à prendre des contacts et à extraire et conserver des contenus illicites en vue de rassembler les preuves ainsi qu’à rechercher et déferrer à la justice les auteurs d’infractions de mise en péril de mineurs.

Concernant les soins sous contrainte appliqués aux patients atteints de troubles mentaux – autre problème majeur –, la société ne peut rester impuissante devant la multiplication de crimes ou de délits très graves commis par des personnes souffrant ou ayant souffert de troubles mentaux.

M. Jean-Marie Le Guen s’est interrogé sur l’existence d’un chiffrage de ce phénomène, et en particulier sur le chiffrage de sa progression.

Le rapporteur a précisé que les chiffres oscillent entre 3 et 10 % et qu’un taux de l’ordre de 5 % semble le plus pertinent.

Le projet de loi cherche donc à trouver des réponses pragmatiques à des problèmes très complexes car il s’agit de trouver un équilibre délicat entre la prise en charge sanitaire des malades mentaux dans le respect de leur dignité et la prise en compte des exigences de la sécurité publique, ce qui peut conduire à des décisions attentatoires à la liberté individuelle du patient. L’équilibre est donc très difficile à trouver.

Les dispositions des articles 18 à 24 du projet de loi, loin d’être attentatoires aux droits des patients, apportent de nouvelles garanties pour les malades : l’hospitalisation d’office décidée en urgence ne pourra plus être justifiée sous prétexte que « la notoriété publique » atteste de la dangerosité d’une personne ; un avis médical sera toujours nécessaire pour éclairer la prise de décision de l’autorité administrative.

L’article 20 vise à faire du maire, ou du commissaire de police à Paris, l’autorité responsable de la décision initiale d’internement, sur le fondement d’un avis ou d’un certificat médical d’un psychiatre. Cette décision doit être confirmée dans les soixante-douze heures par le préfet, qui est informé de l’hospitalisation dans les vingt-quatre heures, après expertise médicale. Il convient d’éviter les abus et les erreurs qui ont pu être commis par le passé.

Le projet de loi clarifie également les critères justifiant une hospitalisation d’office et ceux de l’hospitalisation à la demande d’un tiers. Seule une mesure d’hospitalisation d’office sera applicable aux individus dont les troubles portent atteinte à la sécurité des personnes ou à l’ordre public.

Les modalités de contrôle et de suivi des personnes hospitalisées sont en outre renforcées par une information systématique des maires sur les sorties d’essai, la création d’un fichier national rassemblant pendant six ans les informations administratives relatives aux personnes internées d’office, le renforcement du suivi médical du patient et la mise en place d’une période de diagnostic s’étendant sur soixante-douze heures, lors de l’hospitalisation, qui permettra au patient de bénéficier d’un diagnostic médical beaucoup plus structuré. Cette période d’observation permettra, une fois la crise surmontée, d’instaurer avec le patient une relation de confiance favorable à la recherche d’un consentement aux soins.

Malgré ces avancées, on peut comprendre l’émotion suscitée chez les professionnels de la santé mentale, les patients et leurs familles par l’insertion dans un texte de sécurité publique d’articles relatifs à l’hospitalisation sous contrainte. Le gouvernement n’a jamais eu l’intention d’assimiler les personnes placées sous le régime de l’hospitalisation d’office à des délinquants : ce sont avant tout les malades qui ont besoin d’une prise en charge sanitaire.

Il est très urgent de parvenir à une réforme globale des soins psychiatriques dans le cadre de la révision de la loi du 27 juin 1990, objectif poursuivi par les professionnels, l’ensemble des structures et associations mais aussi les familles concernées depuis dix ans.

Le rapporteur a indiqué avoir cherché à obtenir un engagement du gouvernement pour que l’ensemble de ces questions – aussi bien celles liées à l’ordre public figurant dans ce texte que celles portant sur les aspects sanitaires des soins de santé mentale – puissent être réglées avant la fin de cette législature. Le gouvernement s’est engagé à tout mettre en œuvre pour parvenir à une réforme globale de la loi du 27 juin 1990 en privilégiant la voie de l’habilitation à légiférer par ordonnance. Il n’y a pas d’autres solutions si l’on veut véritablement réformer la loi de 1990 avant la fin de la législature.

Le texte de cette ordonnance sera négocié avec l’ensemble de la profession et les associations de patients, déjà parties à la concertation mise en œuvre depuis plusieurs mois par le ministère de la santé et des solidarités. La négociation portera sur l’ensemble des dispositions de la loi du 27 juin 1990, y compris les articles 18 à 24 du présent projet de loi. Les professionnels et les familles pourront donc discuter des problèmes de fond comme la réforme de l’hospitalisation à la demande d’un tiers, la création d’une obligation de soins qui pourrait se dérouler dans un cadre ambulatoire ou le renforcement des prérogatives de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques.

Tout cela serait relativement simple si ce travail avait été entrepris il y a quelques mois. Mais aujourd’hui, il faut déterminer le véhicule législatif qui permettra d’habiliter le gouvernement à réformer par voie d’ordonnance la loi du 27 juin 1990. Il convient de trouver une solution à ce problème très rapidement. L’objectif est de réussir à déposer un projet de loi de ratification de cette ordonnance avant la fin de la législature. Si la loi de 1990 est réformée, chacun sera satisfait, familles, patients, associations, ministères de l’intérieur et de la santé, qui ont tous travaillé sur cette question.

Enfin, les articles 27 à 29 du projet de loi proposent une refonte complète de la procédure d’injonction thérapeutique – c’est le terme employé par le projet de loi mais la notion d’obligation de soins serait peut-être plus opportune – visant les usagers illicites de stupéfiants.

Le cœur de la réforme réside dans la mise en place d’un médecin relais, véritable interface sanitaire entre l’usager de drogues et l’autorité judiciaire. Ce médecin procédera à l’examen médical de la personne interpellée, se prononcera sur l’opportunité d’une mesure d’injonction thérapeutique, proposera le contenu et les modalités de cette mesure et contrôlera le suivi sanitaire de l’injonction.

Le projet de loi renforce également les peines encourues en cas d’usage illicite de stupéfiants lorsque l’infraction est commise par une personne investie de l’autorité publique ou d’une mission de service publique ou par une personne chargée de la sécurité d’un transport. Des peines complémentaires nouvelles sont définies, parmi lesquelles le suivi d’un stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de stupéfiants. Le projet de loi renforce enfin la répression de la provocation à l’usage illicite et au trafic de drogues visant les mineurs.

Enfin, il convient d’aborder la question de l’alcool. Les études les plus récentes montrent le lien étroit entre l’alcoolisme et les crimes et délits sur personnes : 69 % des homicides sont en effet commis sous l’emprise de l’alcool et 49 % des incestes.

Il serait toutefois inopportun de permettre à des personnes ayant provoqué des blessures ou un homicide involontaires sous l’empire de l’alcool de bénéficier d’un abandon des poursuites judiciaires au bénéfice d’une mesure d’injonction thérapeutique.

Cependant, le rapporteur a indiqué réfléchir à la possibilité de prononcer une mesure d’injonction thérapeutique pour les conducteurs consommateurs habituels et excessifs de boissons alcooliques qui seraient contrôlés avec 0,8 gramme ou plus d’alcool dans le sang ou en état d’ivresse manifeste. Ces conducteurs sont passibles de deux ans d’emprisonnement et 4 500 euros d’amende. La procédure de l’injonction thérapeutique pourrait être mise en œuvre au bénéfice des seules personnes ayant uniquement commis le délit défini par l’article L. 234-1 du code de la route, à savoir la conduite dans l’état d’alcoolémie décrit plus haut. Il serait souhaitable que la commission soutienne cette initiative consistant à proposer un article additionnel dans le code de la santé publique pour mettre en place cette injonction thérapeutique sur le modèle de celle applicable aux usagers de drogues. Il est important d’intégrer ce thème dans le présent texte.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

M. Jean-Marie Le Guen a indiqué qu’il n’avait pas encore bien compris l’articulation entre le présent projet et la future et hypothétique ordonnance relative aux soins psychiatriques sans consentement que prépare le gouvernement. Il s’agit pourtant d’un point fondamental. En tout état de cause, si le projet de recourir à une ordonnance n’est pas satisfaisant pour mener à bien une réforme de cette ampleur, la décision de sortir du texte du projet de loi les articles concernant la santé mentale représente un progrès certain. Le maintien de ces dispositions dans le texte constitue en effet une régression inouïe consistant à assimiler la pathologie mentale à la délinquance. Il apparaît par ailleurs que la question de la toxicomanie devrait connaître un sort équivalent et disparaître du présent projet de loi. Il s’agit en effet d’un problème de santé publique et non d’ordre public.

À côté de ces deux sujets qui ne devraient évidemment pas figurer dans ce projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, d’autres dispositions comme celles sur le secret professionnel partagé sont susceptibles de nombreuses critiques. Ce texte souffre également de certaines lacunes, notamment d’une absence de réflexion sur la montée de la violence dans la société en tant que phénomène pathologique, réflexion qui ne se focaliserait pas sur les conséquences de la violence en termes de délinquance.

Le projet de loi a une vision réductrice de la prévention de la délinquance en cherchant à renforcer l’exemplarité des sanctions alors que les comportements sociaux qui conduisent à la délinquance ne sont en rien rationnels. Pour que les mesures annoncées soient réellement dissuasives encore faudrait-il que les auteurs de faits délictueux soient capables de mesurer les risques qu’ils prennent en adoptant de tels comportements. Tout reste donc à faire pour mettre en place une véritable politique de prévention.

Plusieurs questions demeurent donc en suspend : Va-t-on traiter du problème de la santé mentale dans ce projet de loi ou fera-t-il l’objet d’un traitement dans un texte spécifique ? Qu’en est-il du problème de la toxicomanie ?

Par ailleurs la question de l’injonction thérapeutique requiert un travail très fin puisqu’il pose de vrais problèmes de déontologie, comme celui de savoir si le médecin relais agira en qualité de médecin ou d’auxiliaire de justice. La création d’une structure pivot peut se révéler intéressante mais l’idée même d’injonction thérapeutique comporte trop d’ambiguïtés. En ce qui concerne l’usage du cannabis, qui n’entraîne pas obligatoirement de dépendance tout en présentant un caractère nocif, on peut s’interroger sur l’adaptation et la signification d’une obligation de soins. Plus généralement, ces questions complexes liées à la toxicomanie n’ont fait l’objet d’aucune concertation avec les professionnels de santé concernés et témoignent d’une réflexion pour le moins frustre.

M. Pierre-Louis Fagniez s’est félicité de ce que ce texte attendu de longue date reçoive enfin une traduction législative et a remercié le rapporteur d’avoir répondu positivement à la sollicitation forte des professionnels pour que soit traitée séparément la question de la santé mentale. Il est impérieux de distinguer clairement cette question de santé publique de celle de la prévention de la délinquance. En ce qui concerne la question de la toxicomanie, elle pourrait sans doute être traitée d’une manière identique.

La mission d’information sur la famille et les droits des enfants, présidée par Mme Valérie Pécresse, a démontré tout l’intérêt que revêt le secret professionnel partagé, afin de parvenir à une meilleure prise en charge des familles en difficultés en décloisonnant l’intervention des services sociaux et en permettant aux élus de remplir pleinement leurs missions d’action sociale. Or, si l’on compare l’actuelle rédaction de l’article 5 avec le secret professionnel médical, qui est partagé entre les différents acteurs de soins tout en pouvant être levé dans certaines conditions par une intervention du juge, le partage d’informations confidentielles entre travailleurs sociaux d’une part et entre le coordonnateur, le maire et le président du conseil général d’autre part, amène à s’interroger sur les éventuelles atteintes aux droits de la personne qui pourraient en résulter. Cet article suscitera sans doute beaucoup de discussions car il est difficile d’instaurer un secret professionnel partagé sans l’encadrer strictement pour éviter de remettre en cause les droits fondamentaux des personnes.

M. Bernard Perrut a souligné que le projet de loi place le maire au centre du dispositif de prévention de la délinquance. Un certain nombre de conseils intercommunaux de surveillance et de prévention de la délinquance (CISPD) sont d’ores et déjà en place. Les présidents de ces organes intercommunaux disposent-ils des mêmes compétences que le maire ? En outre ces CISPD ne fonctionnent pas toujours de manière très satisfaisante en raison du défaut de partage et de transmission de l’information. On ne peut donc que se réjouir de la création d’un cadre légal réglementant la transmission de l’information. Renforcer le rôle des maires en matière d’absentéisme scolaire est également un point positif même si, sur le terrain, des actions sont déjà menées en ce sens. Il en va de même pour la possibilité reconnue aux maires de placer sous tutelle les prestations familiales.

Le texte comprend également une série de mesures relatives à la protection de la jeunesse qui ont été introduites par le Sénat ; il en va ainsi de la réintroduction des gardiens d’immeuble au sein de cités sensibles. Le rôle de ces gardiens d’immeuble est en effet très important, aussi bien dans le domaine social que pour servir de relais en matière de prévention. La possibilité de résilier les baux d’habitation pour troubles de voisinage suscite en revanche certaines interrogations et demandera à être précisée.

La présence de dispositions relatives à la prévention de la toxicomanie constitue un aspect positif de ce texte, notamment pour ce qui concerne la création de médecins relais dans le cadre de la procédure de l’injonction thérapeutique.

Il convient enfin de réaffirmer le rôle fondamental de l’école en matière de prévention de la délinquance et de se féliciter de la mise en place de l’accompagnement parental conduit par le conseil pour les droits et les devoirs de la famille qui constitue une institution remarquable.

Mme Christine Boutin a indiqué que son intervention serait volontairement brève puisque la discussion se prolongera nécessairement en séance publique, tout en déclarant qu’elle ressentait un malaise profond vis-à-vis du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, le malaise atteignant son point culminant avec les dispositions relatives aux malades psychiatriques même si le retrait de ces articles est annoncé. Pourquoi ce malaise ? La philosophie générale du projet de loi est à l’exact opposé de l’objectif louable de prévention de la délinquance. Il n’est question ici que d’une pure logique de sanctions qui conduit immédiatement à l’enfermement alors que chacun sait, quelle que soit son appartenance politique, que cette réponse n’est pas adaptée à la prévention de la délinquance ou qu’elle trouve en tout cas des limites certaines. De plus, l’état actuel des prisons françaises devrait conduire à privilégier d’autres types de sanctions.

L’examen approfondi du projet de loi laisse apparaître des confusions d’autant plus regrettables que la société perd déjà ses repères. L’article 5 assimile, par exemple, la délinquance à la précarité sociale, tandis que l’article 7 relatif à la tutelle aux prestations familiales introduit une confusion entre ce qui ressort du domaine de compétence du juge et ce qui relève du maire. En matière de contrôle de l’assiduité scolaire, les missions respectives du maire et de l’éducation nationale ne sont également pas suffisamment distinguées.

Les articles relatifs aux troubles psychiatriques, même s’ils vont probablement être retirés de ce texte, risquent d’être repris dans le cadre de l’ordonnance, si bien qu’au final le projet de loi inquiète plus qu’il ne rassure. Il n’est même pas sûr que les amendements déposés sur ce texte pour tenir compte des remarques précédentes, qui seront défendus lors de la séance publique, parviennent à la clarification nécessaire.

M. Maurice Giro a attiré l’attention sur les problèmes de délégation de compétences et de pouvoirs. Il convient de rester prudent sur l’extension des pouvoirs du maire. Celui-ci n’est, en effet, pas amené à exercer tous les pouvoirs qu’on lui prête. Par exemple, l’expulsion des logements reste en définitive une compétence des sociétés d’HLM et non pas un pouvoir de police du maire. Par ailleurs, ces pouvoirs de police du maire ne se délèguent pas. Si un maire devient président d’une structure intercommunale, il est obligé en tout état de cause de solliciter ses collègues maires seuls compétents en matière de police sur le territoire de leurs communes respectives. Il en va de même pour ce qui concerne l’éducation nationale et la lutte contre l’absentéisme : c’est l’inspecteur d’académie ou le directeur d’établissement qui restent au final compétents. Il convient donc d’éclaircir ce problème des délégations de compétences et de pouvoirs.

M. Jean-Marie Le Guen a jugé que le projet de loi traduit un désengagement de l’Etat qui se défausse de ses responsabilités sur les maires en augmentant considérablement leurs missions.

M. Maurice Giro a fait remarquer que le maire peut demander à ce qu’on agisse dans tel ou tel sens mais ne peut pas agir par lui-même, puisque la loi ne permet pas en l’état des délégations de compétence.

Mme Valérie Pecresse a estimé que, pour l’essentiel, ce projet de loi vient utilement équilibrer la lutte contre la délinquance par un volet préventif réclamé par tous. Contrairement à ce qu’il ressort de la condamnation radicale exprimée par Mme Christine Boutin, le projet de loi contient de bonnes dispositions. Il n’est pas question uniquement de police et de justice, mais également de la famille, de l’action sociale, de l’éducation et du rôle du maire comme garant du bon fonctionnement de la société. Si tous ces points primordiaux figurent bien dans le texte du projet de loi, on ne peut néanmoins que partager certaines réserves déjà exprimées et notamment le fait de mêler à ce projet de loi des dispositions relatives à la psychiatrie, même si on sait que les graves pathologies mentales peuvent conduire à des troubles de l’ordre public. Il faut donc se réjouir du consensus qui semble en voie d’aboutir sur ce point pour parvenir à régler dans un texte spécifique la question des soins psychiatriques sous contrainte.

Le secret professionnel partagé est également une source de préoccupation. Un tabou a été levé dans le cadre des travaux de la mission parlementaire sur la famille et les droits des enfants, qui a souhaité que ce sujet soit abordé dans une loi sur la protection de l’enfance mais celle-ci sera examinée par le Parlement après le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance. Dès lors, on peut craindre que les dispositions relatives au partage des informations confidentielles qui figurent dans le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance ne viennent contredire le mécanisme de secret professionnel partagé qui figure dans le projet de loi réformant la protection de l’enfance. Des craintes se sont même exprimées au sujet des réticences que pourraient avoir les professionnels de la protection de l’enfance à partir du moment où l’information partagée pourra être utilisée par les maires dans le cadre de leur politique de lutte contre la délinquance. Il faut dire néanmoins que la rédaction de l’article 5 du présent projet, et notamment l’institution du coordonnateur social qui ne communiquera au maire et au président du conseil général que les informations strictement nécessaires à l’exercice de leurs compétences en matière d’action sociale, est de nature à rassurer les professionnels de l’enfance. Il conviendrait toutefois de rajouter un volet sur l’information des familles dans un texte qui n’aborde pas ce point pour l’instant.

M.  René Couanau, président, a déclaré partager les mêmes préventions que de nombreux autres commissaires au sujet des dispositions relatives aux troubles psychiatriques, qui sont effectivement une source de confusion. L’initiative du rapporteur tendant à les sortir du projet de loi apporte toutefois une réponse satisfaisante. Par ailleurs, même si certaines réalités relèvent plus de la compétence de la commission des lois, elles ne peuvent néanmoins pas être ignorées : 57 % des réponses à la délinquance des jeunes se traduisent par un simple rappel à la loi, une admonestation ou une reconduite chez les parents. Lorsqu’une peine est prononcée, elle n’est en outre exécutée que dix-huit mois après !

Mme Christine Boutin a fait remarquer que le texte ne changera rien sur ce point.

M. René Couanau, président, a souligné qu’il ne partage pas les inquiétudes exprimées au sujet de la toxicomanie. Dans ce domaine, le texte prévoit effectivement une procédure judiciaire, avec consultation de médecins. Avec l’injonction thérapeutique décidée par un juge, on est très loin du dispositif d’hospitalisation d’office qui est une mesure de police administrative sans aucun contrôle a priori de l’autorité judiciaire.

Pour ce qui concerne le secret partagé, pourquoi tant de suspicion à l’encontre des maires qui sont pourtant élus au suffrage universel ? Pourquoi la confiance ne pourrait-elle être accordée qu’à des fonctionnaires ? Comment les maires pourraient-ils exercer leurs compétences en matière d’action sociale s’ils ne sont pas concernés par le partage d’informations confidentielles ? Or ils travaillent déjà avec des travailleurs sociaux et la fonction de coordonnateur social sera assumée par un travailleur social. Le dispositif de secret professionnel partagé paraît donc suffisamment encadré pour éviter toute mise en cause de la vie privée des familles. Cela étant, la mise en œuvre des dispositions de ce projet de loi entraînera des charges supplémentaires et l’Association des maires de France va d’ailleurs attirer l’attention sur ce point. Même si les centres communaux d’action sociale (CCAS) existent déjà, l’impact financier des nouvelles attributions données aux maires par le projet de loi, notamment en matière de personnels, a été sous-estimé.

Si M. Bernard Perrut a justement demandé que soit explicitée l’application des dispositifs du projet de loi aux structures intercommunales, il convient de mettre généralement en garde contre des transferts de compétences trop importants au bénéfice de ces structures. Les structures intercommunales ont d’abord pour mission de coordonner les politiques publiques sur un territoire mais elles ne peuvent s’attribuer des pouvoirs de police qui restent dévolus aux maires.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur a donné les éléments d’information suivants :

– À l’évidence le problème de la prévention de la délinquance est complexe à traiter et l’équilibre entre le renforcement des sanctions et la réponse sociale est difficile à trouver. Il y a certainement un besoin de clarification, mais si une seule solution simple existait, cela se saurait !

– Une nécessaire part de fermeté doit être associée à la compassion et l’accompagnement social, ce qu’on peut aussi appeler « la douceur », pour que les personnes vulnérables retrouvent de l’espoir.

– Il est évident que les sept articles 18 à 24 relatifs à l’hospitalisation d’office concentrent bien des interrogations. Il y a aujourd’hui un problème qui s’explique peut-être par la pression exercée il y a vingt-cinq ans pour réduire le nombre de places dans les hôpitaux psychiatriques, voire fermer ces structures. Le mensuel Lyon Mag posait cette semaine même la question : « Les fous sont-ils dangereux ou inoffensifs : difficile de répondre tant qu’ils ne sont pas passés à l’acte ». On sait pourtant, au travers des exemples de Pau et de Nanterre notamment, que certains passent à l’acte.

– Suivant les estimations, entre 3 et 10 % des malades mentaux sont des menaces pour l’orde public et la sécurité des personnes. Il est nécessaire de prendre des mesures pour éviter les conséquences dommageables, en termes de sécurité publique, des comportements violents de certains malades mentaux. Le projet de loi propose ces mesures.

– L’émotion des professionnels de santé est compréhensible car l’insertion dans un texte de sécurité publique d’articles relatifs à l’hospitalisation sous contrainte relevant du code de la santé publique peut conduire à une confusion entre délinquance et troubles psychiatriques. C’est pourquoi il a fallu faire bouger les choses.

M. Jean-Marie Le Guen a salué l’initiative du rapporteur.

Le rapporteur a ajouté que la réforme de l’hospitalisation d’office est indispensable et urgente. Mais les points litigieux auraient mérité de figurer dans un dispositif législatif consacré à la réforme du code de la santé publique et, mieux, dans le cadre d’une réforme globale de la loi du 27 juin 1990. Pour des raisons de temps, la solution de l’habilitation à légiférer par ordonnance est proposée. Il faut espérer que cette solution pourra aboutir.

M.  René Couanau, président, s’est interrogé sur la procédure qui pourrait être retenue pour ce faire, puisque les articles en question vont être votés incessamment par l’Assemblée nationale.

Le rapporteur a répondu en fournissant les précisions suivantes :

– Il sera demandé de voter les articles 18 à 24 du projet mais la possibilité reste ouverte, au cours de la navette, voire en commission mixte paritaire, de les supprimer si la procédure de l’ordonnance est menée à son terme et permet la refonte de la loi du 27 juin 1990.

– S’agissant de la lutte contre la toxicomanie et le problème de l’alcool, le projet de loi complète utilement le code de la santé publique. Un amendement viendra préciser les conditions de la lutte contre la consommation excessive d’alcool.

– Les interventions coordonnées de M. Pierre-Louis Fagniez et de Mme Valérie Pecresse, tous les deux membres de la mission d’information sur la famille et les droits des enfants, ont souligné le problème posé par la création d’un secret professionnel partagé. Cependant, en instituant un « travailleur social coordonnateur », le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance atteint un double objectif : donner de la cohérence aux interventions sociales dont bénéficie une même famille en difficulté et garantir que le partage d’informations confidentielles relatives à une famille se fera dans le respect d’une stricte déontologie. Le coordonnateur évaluera ainsi les informations confidentielles qu’il est nécessaire de transmettre au maire et au président du conseil général pour l’exercice de leurs compétences d’action sociale respectives. Un bon équilibre a été trouvé entre respect de la vie privée des familles et efficacité du travail social. L’article 5 du projet de loi permet une coordination avec les dispositions du projet de loi relatif à la protection de l’enfance. Elle est cohérente avec l’attention soutenue qui doit être portée aux familles en difficulté. Il y a là un équilibre à trouver en coordination avec le projet de loi relatif à la protection de l’enfance.

– L’intervention très pertinente de M. Bernard Perrut a porté sur des points qui relèvent plutôt de la compétence de la commission des lois. Le projet de loi apporte des réponses convaincantes sur les sujets de l’absentéisme scolaire et du gardiennage d’immeuble.

– La philosophie générale du projet de loi est de placer le maire au cœur du dispositif. Cette proposition prend tout son sens dans les communes petites, moyennes et grandes, peut-être moins dans les plus grandes villes.

M. René Couanau, président, a relevé que l’alinéa 3 de l’article 21, qui concerne l’hospitalisation d’office et prévoit que la personne en cause est retenue le temps strictement nécessaire dans une structure médicale adaptée lorsque l’avis médical justifiant l’hospitalisation d’office ne peut être obtenu immédiatement, va poser un problème de vide juridique. En effet, le texte ne précise pas la structure médicale où sera accueillie la personne, ni quel sera le statut juridique de la personne contrainte de demeurer privée de liberté.

M. Jean-Marie Le Guen a considéré qu’au moins un point fait consensus au sein de la commission, c’est que les articles 18 à 24 du projet de loi relatifs à l’hospitalisation d’office posent un véritable problème de stigmatisation des personnes concernées. Cependant, la solution avancée par le rapporteur semble dépourvue de cohérence. En effet, comment inviter les commissaires à discuter d’articles dont la suppression sera proposée au bénéfice de l’écriture d’un texte par le gouvernement sous la forme d’une ordonnance ? Cette solution est de nature à rendre schizophrènes les commissaires, appelés à faire leur travail de parlementaires tout en sachant que le gouvernement rédigera une ordonnance sur le sujet. Le gouvernement, semble-t-il, réfléchit actuellement à une fusion des régimes de l’hospitalisation d’office et de l’hospitalisation à la demande de tiers. On s’orienterait vers un régime privilégiant d’abord l’hospitalisation à la demande de tiers, puis, en cas d’impossibilité, l’hospitalisation d’office. Cette approche médicale paraît meilleure ; le problème est qu’elle n’est pas cohérente avec le contenu du projet de loi. Enfin, persister à vouloir débattre des articles 18 à 24 ne résoudra pas du tout le problème fondamental de la stigmatisation : le débat que la commission va tenir conduira bien à cette stigmatisation et le mal sera fait. Il est donc tout à fait inopportun de procéder à la discussion de ces articles.

Mme Valérie Pecresse a estimé que les arguments de M. Jean-Marie Le Guen sont réversibles. En effet, à supposer que ces articles soient in fine supprimés, les débats de commission et le texte adopté auront le mérite d’éclairer le gouvernement sur la position du Parlement, même s’il est vrai qu’il est difficile, en tant que parlementaire, de légiférer alors qu’il est annoncé que le gouvernement rédigera une ordonnance sur le sujet.

M. Dominique Tian a rappelé qu’il s’agit d’examiner un texte adopté par le Sénat. Il n’est pas possible de refuser d’examiner ces articles au prétexte qu’une hypothétique ordonnance va être prise.

Le rapporteur pour avis a estimé utile que la commission examine les articles. En effet, rien n’est encore fait et compte tenu de la signification politique des dispositions en cause, il serait regrettable que la commission ne donne pas son avis.

M. Jean-Marie Le Guen a jugé que la proposition de débattre d’articles appelés à être supprimés au profit d’une ordonnance s’apparente à une manœuvre de dernière minute. En la matière, le choix est clair : il faut soit se taire, soit discuter les articles. Si les commissaires commencent à examiner les articles, il faut aller jusqu’au bout et voter le texte. Voter le texte tout en laissant ouvert le recours à une ordonnance n’a pas de sens.

La commission est ensuite passée à l’examen des articles.

Article 5 : Coordination des interventions en matière d’action sociale en faveur des familles en difficulté et secret professionnel partagé

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin visant à ce que la possibilité de transmission d’informations entre les travailleurs sociaux et le maire soit soumise à l’exigence de l’intérêt des personnes.

Mme Christine Boutin a précisé que cet amendement est le premier d’une série de quatre amendements à l’article 5. Ces amendements poursuivent tous le même objectif : éviter la confusion entre la délinquance et la situation de précarité des personnes.

Se déclarant en accord sur le fond avec les propositions de Mme Boutin, le rapporteur a indiqué que les amendements proposés s’insèrent dans un dispositif déjà très complexe et qu’il serait donc préférable que leur rédaction soit revue afin qu’ils soient en cohérence avec les amendements du rapporteur modifiant l’article 5. Les modifications complémentaires de cet article pourront être examinées par la commission des lois dans le cadre de la réunion qu’elle tiendra en application de l’article 88 du Règlement.

À l’invitation du rapporteur, Mme Christine Boutin a retiré ses amendements.

Mme Valérie Pecresse a relevé que Mme Boutin évoque « l’accord » de la personne, alors que le dispositif de son amendement se limite à « l’information » de la personne pour la transmission entre travailleurs sociaux d’informations la concernant. Si l’amendement se limite effectivement à l’information, il est opportun. En effet, il sera sans doute impossible de recueillir l’accord des personnes alors que l’on se place dans un contexte de prévention de la délinquance.

M. Jean-Marie Le Guen a demandé si les informations concernées par le dispositif du projet de loi peuvent revêtir un caractère médical, ce à quoi Mme Valérie Pecresse a répondu par la négative.

M. Jean-Marie Le Guen a soulevé le problème d’une mère de famille atteinte du SIDA. Cette information appartient bien au dossier social, mais en aucun cas le travailleur social ne doit pouvoir la transmettre à un tiers non soumis au secret professionnel.

Mme Valérie Pecresse a rappelé que les informations en cause sont strictement liées au suivi de l’enfant.

Le rapporteur a estimé que, sous réserve de leur réécriture, les amendements de Mme Christine Boutin pourront utilement améliorer la cohérence du projet de loi avec le texte relatif à la protection de l’enfance.

La commission a ensuite adopté trois amendements du rapporteur pour avis :

– un amendement de simplification rédactionnelle pour éviter de détailler les domaines de compétences de l’action sociale de la commune ;

– un amendement indiquant clairement que les professionnels de l’action sociale pourront partager entre eux des informations à caractère secret ;

– un amendement visant à coordonner le projet de loi avec celui réformant la protection de l’enfance : si l’évaluation des problèmes de la famille révèle une situation de danger pour un ou des mineurs, le coordonnateur devra saisir le président du conseil général au titre de sa compétence spécifique en matière de protection de l’enfance.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 5 ainsi modifié.

Article 6 : Création du conseil pour les droits et devoirs des familles

La commission a examiné un amendement du rapporteur ayant pour effet de supprimer, parmi les mesures dont le conseil pour les droits et devoirs des familles peut prendre l’initiative, la faculté de proposer au maire de demander à la caisse d’allocations familiales de mettre en place un dispositif d’accompagnement des familles consistant en des mesures d’aide et de conseil de gestion.

Le rapporteur a expliqué qu’il s’agit de simplifier le dispositif en ne conservant que deux options, la mesure d’accompagnement en économie sociale et familiale et la mesure judiciaire d’aide à la gestion du budget familial.

La commission a adopté l’amendement, ce qui a rendu sans objet un amendement rédactionnel du rapporteur.

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin supprimant l’obligation de créer un conseil pour les droits et devoirs des familles dans toute commune de plus de 10 000 habitants.

Mme Christine Boutin a estimé qu’avant d’imposer de nouvelles obligations institutionnelles, il faut d’abord laisser le champ libre aux structures sociales existantes et à leurs évolutions.

M. René Couanau, président, a approuvé l’amendement.

Après que le rapporteur s’est déclaré partagé sur cet amendement, la commission l’a adopté.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 6 ainsi modifié.

Article 7 : Désignation du travailleur social coordonnateur comme tuteur aux prestations familiales

La commission a examiné un amendement de suppression de l’article de Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin a fait état de son hostilité de principe à la mise sous tutelle des prestations familiales et indiqué qu’elle développerait son argumentation en séance publique.

Le rapporteur a émis un avis défavorable à l’adoption de l’amendement, soulignant qu’il peut être utile que le coordonnateur social puisse être désigné comme délégué (anciennement tuteur) aux prestations familiales, le juge pour enfants appréciant l’opportunité de désigner ce travailleur social plutôt qu’un autre professionnel spécialisé dans la tutelle aux prestations sociales.

La commission a rejeté l’amendement.

La commission a examiné un amendement de rédaction globale de l’article de Mme Christine Boutin, prévoyant que seul le maire, informé de cas où les prestations familiales ne seraient pas employées dans l’intérêt des enfants, puisse saisir le juge des enfants pour lui signaler ces difficultés.

Mme Christine Boutin a déclaré que cet amendement relève d’une logique de clarification des rôles respectifs du maire et du juge. Il est clair que l’amendement va à l’encontre de l’orientation générale du texte et cette question sera donc plus développée en séance publique. Il faut cependant souligner dès à présent les très grandes réticences de l’Association des maires de France (AMF) quant à la confusion des rôles du maire et du juge.

Le rapporteur a estimé que cet amendement n’est pas utile, car la définition des autorités habilitées à saisir le juge pour enfants relève du pouvoir réglementaire.

M. René Couanau, président, a rappelé que lorsqu’on vise le « maire » dans un texte législatif, ce sont aussi, bien évidemment, les initiatives des services municipaux, des travailleurs sociaux, qui sont en cause. À cet égard, il convient de veiller à ce que certains agents municipaux ne soient pas dotés de prérogatives que n’aurait pas le maire.

M. Jean-Marie Le Guen a observé qu’effectivement dans le projet de loi un « maire », c’est un « père ».

La commission a rejeté l’amendement.

Puis, la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 7 ainsi modifié.

Après l’article 7 :

La commission a examiné un amendement de M. Dominique Tian donnant au procureur de la République la faculté d’ordonner une tutelle aux prestations sociales dès lors qu’un mineur a fait l’objet de deux condamnations pénales définitives.

M. Dominique Tian a expliqué qu’il s’agit de transférer au parquet la prérogative de mise sous tutelle des prestations familiales en cas de condamnations répétées de mineurs. Cette mesure s’appliquerait pendant un an et pourrait être prolongée en cas de nouvelles poursuites pendant cette période.

Le rapporteur a indiqué que plusieurs mesures peuvent être prises vis-à-vis des familles confrontées à de graves difficultés éducatives et qu’il est nécessaire de laisser au juge des enfants la prérogative exclusive du choix entre ces mesures.

La commission a rejeté l’amendement.

Article 8 : Possibilité pour le maire d’adresser un rappel à l’ordre aux personnes troublant l’ordre public

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin précisant que le rappel à l’ordre du maire doit être effectué dans le respect de la compétence des services de la justice et de la police judiciaire.

Mme Christine Boutin a indiqué que l’objectif est là aussi de clarifier les rôles. La mise en œuvre du rappel à l’ordre par le maire ne doit intervenir qu’à titre dérogatoire.

M. René Couanau, président, a estimé que si cette précision est utile, elle mérite d’être prise en compte.

Le rapporteur ayant jugé l’amendement superfétatoire, la commission l’a rejeté.

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin disposant que le rappel à l’ordre du maire n’est pas effectué « verbalement », mais « par tout moyen ».

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin prévoyant que le maire informe le procureur de la République lorsqu’il procède à un rappel à l’ordre.

Mme Christine Boutin a déclaré que son amendement vise à donner une plus grande solennité à la procédure de rappel à l’ordre : les mineurs concernés attacheront plus d’importance à la mesure quand ils sauront que le procureur est tenu au courant. À ce titre, il va aussi dans le sens d’une bonne cohérence des prérogatives des différentes autorités.

M. René Couanau, président, a considéré que cette proposition relève du bon sens, tandis que M. Jean-Marie Le Guen s’est déclaré sceptique quant à la distribution des rôles respectifs du maire et du procureur vis-à-vis des mineurs.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 8 sans modification.

Article 8 bis : Missions du service public de l’éducation

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 8 bis sans modification.

Article 9 : Contrôle de l’absentéisme scolaire – Statut des « Écoles de la deuxième chance » et des « Lycées de toutes les chances »

La commission a examiné un amendement de Mme Christine Boutin précisant que la communication au maire de la liste des élèves domiciliés dans la commune est effectuée « à titre d’information ».

Mme Christine Boutin a expliqué que cet amendement répond toujours au même objectif de clarification des rôles, en l’espèce entre le maire et l’éducation nationale. À terme, cette loi risque de conduire à une centralisation de tous les pouvoirs locaux entre les mains du maire, ce qui représentera un profond changement institutionnel.

Le rapporteur s’est interrogé sur la portée de l’amendement sans s’opposer à son adoption, dans la mesure où le dispositif du traitement automatisé mis en place par le projet de loi vise déjà à améliorer l’information du maire.

La commission a adopté l’amendement.

La commission a ensuite examiné un amendement de Mme Christine Boutin disposant que la liste des élèves auxquels un avertissement a été notifié ne peut être communiquée qu’aux personnes habilitées à la connaître.

Mme Christine Boutin a souligné que le partage nécessaire de certaines informations doit être concilié avec la protection de leur confidentialité : c’est le « secret partagé ».

M. René Couanau, président, a regretté que l’on jette en permanence la suspicion sur les maires.

M. Jean-Marie Le Guen a estimé qu’en l’occurrence il ne s’agissait pas de suspicion mais de protection des maires.

Le rapporteur a déclaré partager cette analyse après avoir observé que le maire est l’unique destinataire de la liste des élèves en question. La précision apportée par l’amendement pourrait jeter un doute sur l’utilisation de cette liste.

La commission a rejeté l’amendement.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 9 ainsi modifié.

Article 17 : Réorganisation du contrôle administratif des documents électroniques à caractère pornographique ou violent – Protection des mineurs contre la pédophilie sur Internet

La commission a examiné un amendement de simplification rédactionnelle présenté par le rapporteur et portant sur la définition des différents types de supports électroniques de documents.

Le rapporteur a indiqué sa préférence pour une formulation la plus générale possible afin d’anticiper les évolutions technologiques.

La commission a adopté l’amendement.

La commission a également adopté deux amendements de clarification rédactionnelle du rapporteur concernant la fixation de la mention d’interdiction et de la signalétique sur les supports électroniques et leurs unités de conditionnement.

Puis, la commission a adopté un amendement du rapporteur étendant la faculté pour le ministère de l’intérieur d’interdire la location ou la vente aux mineurs de documents fixés sur un support électronique qui est prévue par le projet de loi uniquement en cas de non-respect des obligations relatives à la signalétique de protection de la jeunesse. Une telle interdiction pourrait être prononcée en opportunité dans le cas où ces documents présenteraient un risque pour la jeunesse au regard des différents critères retenus par le présent article 17, notamment en cas de sous-évaluation de la signalétique.

Enfin, la commission a adopté un amendement du rapporteur rétablissant le IV de l’article dans une nouvelle rédaction pour assurer la coordination de certains articles du code pénal avec le cadre juridique des communications électroniques défini par la loi n° 2044-669 du 9 juillet 2004.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 17 ainsi modifié.

Après l’article 17 :

La commission a examiné un amendement de M. Bruno Gilles obligeant les fournisseurs d’accès à internet à mettre en œuvre des dispositifs techniques activés par défaut qui permettent d’empêcher l’accès à des contenus en ligne mettant en péril les mineurs.

M. Dominique Tian a rappelé qu’en novembre 2005, tous les fournisseurs d’accès se sont engagés à fournir à leurs abonnés, à partir du 31 mars 2006, des logiciels de contrôle parental gratuits et efficaces. Il apparaît que, sur de multiples points, cet accord n’est pas respecté par les intéressés. C’est pourquoi il est légitime que le législateur intervienne.

Le rapporteur a déclaré comprendre les intentions des auteurs de l’amendement, mais a mis en avant la nécessité de vérifier sa compatibilité avec la directive communautaire du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information. En particulier, l’article 15 de cette directive interdit aux États membres d’imposer aux fournisseurs d’accès une obligation générale de surveillance des informations qu’ils transmettent ou stockent. La directive ne permet pas non plus à ces fournisseurs de dresser des listes noires d’interdiction d’accès, compétence qui appartient exclusivement aux Etats. Cet amendement doit donc être réexaminé et éventuellement réécrit.

M. Jean-Marie Le Guen a indiqué que le groupe socialiste fera des propositions sur cette question. Effectivement, on ne peut concevoir que ce soient les opérateurs qui établissent les listes noires : ce serait de la discrimination commerciale. Ce qui est en cause, c’est la responsabilité de l’État.

M. Dominique Tian n’ayant pas souhaité retirer l’amendement, la commission l’a rejeté.

Article 18 : Renforcement du contrôle des sorties d’essai des établissements psychiatriques

La commission a examiné un amendement de suppression de l’article de M. Jean-Marie Le Guen.

M. Jean-Marie Le Guen, après avoir précisé que son argumentation vaut pour la série d’amendements de suppression qui va suivre sur les articles 18 à 24, a indiqué que les dispositions relatives à l’hospitalisation psychiatrique sans consentement n’ont pas leur place dans un texte traitant de la prévention de la délinquance. Ces mesures reposent en effet sur un amalgame entre troubles mentaux, dangerosité et délinquance et stigmatisent les patients et la psychiatrie. Il faut rappeler que la principale recommandation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en matière de santé mentale est précisément la lutte contre la stigmatisation. Il s’agit d’un véritable problème de santé publique car la stigmatisation et la criminalisation aboutiraient à la rétraction des malades, de leur entourage et des médecins face à une logique punitive qui nous ferait basculer dans le XIXè siècle. Aucune urgence n’exige que des dispositions relatives à la psychiatrie et à la réforme de la loi de 1990, devenue indispensable, figurent dans le présent projet de loi alors qu’un texte distinct pourrait être examiné en première lecture, après une large concertation, au début de l’année prochaine.

M. René Couanau, président, a précisé que tous les commissaires s’interrogent à propos de la procédure alternative envisagée qui consisterait à autoriser le gouvernement à légiférer par ordonnance.

Le rapporteur ayant émis un avis défavorable, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 18 sans modification.

Article 19 : Création d’un fichier national des hospitalisations d’office

Pour des motifs identiques à ceux évoqués précédemment, la commission a rejeté deux amendements de suppression de l’article présentés par M. Jean-Marie Le Guen et Mme Christine Boutin.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 19 sans modification.

Article 20 : Recours obligatoire à l’hospitalisation d’office en cas d’atteintes à la sûreté des personnes ou à l’ordre public

La commission a rejeté un amendement de suppression de M. Jean-Marie Le Guen et donné un avis favorable à l’adoption de l’article 20 sans modification.

Article 21 : Renforcement du rôle du maire dans la procédure de l’hospitalisation d’office

La commission a rejeté deux amendements de suppression présentés par M. Jean-Marie Le Guen et de Mme Christine Boutin et donné un avis favorable à l’adoption de l’article 21 sans modification.

Article 22 : Renforcement des garanties médicales lors de la confirmation des décisions d’hospitalisation sans consentement

La commission a rejeté deux amendements de suppression présentés par M. Jean-Marie Le Guen et Mme Christine Boutin et donné un avis favorable à l’adoption de l’article 22 sans modification.

Article 23 : Possibilité pour le Préfet d’ordonner une expertise médicale

La commission a rejeté un amendement de suppression de M. Jean-Marie Le Guen et donné un avis favorable à l’adoption de l’article 23 sans modification.

Article 24 : Régime d’hospitalisation d’office pour irresponsabilité pénale

La commission a rejeté deux amendements de suppression présentés par M. Jean-Marie Le Guen et Mme Christine Boutin et donné un avis favorable à l’adoption de l’article 24 sans modification.

Article 27 : Modalités de l’injonction thérapeutique applicables aux personnes signalées par l’autorité judiciaire

La commission a rejeté un amendement de suppression de M. Jean-Marie Le Guen.

Elle a examiné un amendement du rapporteur permettant à l’autorité sanitaire de faire procéder à une enquête sur la vie familiale, professionnelle et sociale de la personne interpellée, le cas échéant à la demande du médecin relais, et renvoyant au juge le soin de se prononcer sur l’opportunité de cette enquête au cas où l’autorité sanitaire ne donnerait pas suite à la demande du médecin relais.

Le rapporteur a précisé que le but est de concilier les objectifs poursuivis par le médecin relais, l’autorité sanitaire et l’autorité judiciaire qui doivent, dans leur domaine de compétences respectives, travailler conjointement afin de rendre plus efficaces les mesures d’injonction thérapeutique. Les directions départementales de l’action sanitaire et sociale peuvent, à bon droit, estimer que les enquêtes demandées par le médecin relais sont inutiles. L’autorité judiciaire est la mieux placée pour trancher ce désaccord.

La commission a adopté l’amendement.

Elle a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 27 ainsi modifié.

Article 28 : Peines applicables en cas d’usage illicite de stupéfiants

La commission a rejeté un amendement de suppression présenté par M. Jean-Marie Le Guen.

Elle a examiné un amendement du rapporteur précisant que les peines applicables à l’usage illicite de stupéfiants par le personnel d’une entreprise de transport devront s’appliquer à tous les travailleurs impliqués dans la sécurité du transport, y compris les travailleurs intérimaires ou ceux mis à la disposition d’une entreprise de transport par une entreprise extérieure.

M. Jean-Marie Le Guen a tout d’abord demandé si les parlementaires doivent être regardés comme des personnes dépositaires de l’autorité publique et donc soumises aux peines renforcées. Par ailleurs, il serait utile de savoir sous quelle forme se dérouleront les opérations de dépistage, prises de sang ou autres, et quels éléments devront être réunis en vue d’un diagnostic.

Le rapporteur a indiqué qu’il semblerait que le président de l’Assemblée nationale soit dépositaire de l’autorité publique mais pas un député.

La commission a adopté l’amendement.

La commission a adopté quatre amendements du rapporteur, le premier habilitant la police judiciaire à pénétrer dans les lieux de transports collectifs, le deuxième et le troisième étendant les peines de suspension et d’annulation du permis de conduire aux titres de conduite des navires de plaisance à moteur et le quatrième modifiant l’article par coordination.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 28 ainsi modifié.

Article 29 : Procédures judiciaires applicables à l’injonction thérapeutique

La commission a rejeté un amendement de suppression présenté par M. Jean-Marie Le Guen et donné un avis favorable à l’adoption de l’article 29 sans modification.

M.  René Couanau, président, a tenu à faire observer que si la discussion a permis de dégager une unanimité au sein de la commission sur le fait que les articles relatifs à l’hospitalisation psychiatrique doivent faire l’objet d’un texte distinct, l’information fournie sur le processus législatif qui devrait être retenu est insuffisante et ne permet pas à la commission de se prononcer de manière satisfaisante.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption des articles du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance (n° 3338) dont elle s’est saisie, ainsi modifiés.

*

Informations relatives à la commission

La commission a désigné les membres d’une éventuelle commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 :

Titulaires

Suppléants

M. Jean-Michel Dubernard (UMP)

M. Jean-Pierre Door (UMP)

M. Yves Bur (UMP)

M. Pierre Morange (UMP)

M. Pierre-Louis Fagniez (UMP)

M. Dominique Tian (UMP)

M. Denis Jacquat (UMP)

M. Philippe Vitel (UMP)

M. Jean-Marie Rolland (UMP)

M. Jean-Luc Préel (UDF)

M. Gérard Bapt (Soc.)

Mme Danièle Hoffman-Rispal (Soc.)

M. Jean-Marie Le Guen (Soc.)

Non désigné (CR)

La commission a désigné les membres d’une éventuelle commission mixte paritaire sur le projet de loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié :

Titulaires

Suppléants

M. Jean-Michel Dubernard (UMP)

Mme Marie-Anne Montchamp (UMP)

M. François Cornut-Gentille (UMP)

M. Bernard Perrut (UMP)

M. Maurice Giro (UMP)

M. Xavier de Roux (UMP)

M. Jacques Godfrain (UMP)

M. Dominique Tian (UMP)

M. Patrick Ollier (UMP)

Mme Anne-Marie Comparini (UDF)

M. Jean-Pierre Balligand (Soc.)

M. Alain Vidalies (Soc.)

M. Michel Charzat (Soc.)

Non désigné (CR)