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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

Mercredi 24 janvier 2007

Séance de 12 heures

Compte rendu n° 24

Présidence de M. Maurice Giro, président

 

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– Audition, ouverte à la presse, de M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, sur la mise en application de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique (M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur)




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En application de l’article 86, alinéa 8 du Règlement, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, sur la mise en application de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur, a remercié le ministre de sa présence devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales qui a désormais pris l’habitude de suivre quasi systématiquement l’application des lois. La nécessité de ce contrôle démocratique est indéniable, surtout lorsqu’il s’agit de textes qui, telle la loi du 9 août 2004, comportent des avancées majeures et attendues pour la rationalisation et l’amélioration de la prévention et de la qualité due système de santé. La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est d’autant plus attachée à cet exercice du « service après vote » que l’adoption d’un texte de loi ne saurait être considérée comme une fin en soi. Ainsi que l’a souligné le Président de la République, « la première exigence de l’action, c’est de mener à leur terme les réformes engagées. Une fois la loi promulguée, c’est là que tout commence ».

À cet égard, cette réunion présente un caractère inhabituel puisque, après deux rapports présentés en mars et novembre 2005 qui faisaient état d’un taux d’exécution particulièrement faible et inquiétant, c’est aujourd’hui la troisième fois que la commission dresse le bilan de la mise en application de la loi du 9 août 2004. Celui qui en est fait aujourd’hui pourrait se résumer ainsi : « en progrès, mais peut mieux faire » !

Il faut certes reconnaître que le retard, qui était préoccupant, a été en partie comblé. À ce jour, 38 décrets d’application de la loi ont été publiés, soit un peu plus de 60 % de l’ensemble des décrets jugés nécessaires à l’application de la loi par le gouvernement lui-même. Il convient également de souligner le souci constant d’une très large concertation qui a présidé à l’élaboration de ces textes, ainsi que les efforts significatifs déployés par le ministère de la santé et des solidarités, en particulier depuis la fin de l’année 2005, en vue de permettre l’entrée en vigueur effective de la loi. Mais s’il y a tout lieu de se féliciter de l’impulsion ainsi donnée, deux sujets d’inquiétude subsistent néanmoins.

Près de deux ans et demi après la publication de la loi et près de trois ans et demi après sa présentation en conseil des ministres, 21 de ses articles demeurent inapplicables dans leur totalité, faute de parution des textes d’application nécessaires. Il apparaît dès lors essentiel que les différents textes réglementaires restant à paraître, dont 23 décrets, soient publiés dans les meilleurs délais et en tout état de cause avant la fin du premier semestre 2007. Au-delà de la sécheresse des statistiques, il convient aussi de mener une réflexion en profondeur sur les moyens d’accélérer la mise en œuvre effective des textes de loi, afin de renforcer la lisibilité et la légitimité de l’action publique, par exemple en préparant systématiquement les décrets d’application dès le stade de l’examen d’un projet de loi par le Parlement, comme ce fut par exemple le cas à l’occasion de la réforme de l’assurance-maladie. Le Président de l’Assemblée nationale a eu l’occasion de déplorer qu’il faille attendre en moyenne dix mois avant que les décrets d’application d’une loi ne soient publiés au Journal officiel, en estimant qu’un délai aussi long suscite l’incompréhension de nos concitoyens. Mais que dire lorsqu’il est deux fois, voire trois fois plus long ?

La parution de plusieurs textes réglementaires depuis la fin de l’année 2005 a cependant permis de rendre applicables des dispositions essentielles de la loi.

Depuis la présentation, en novembre 2005, du deuxième rapport sur la mise en application de la loi relative à la politique de santé publique, 23 décrets ont été publiés. Ils concernent principalement la nouvelle gouvernance en matière de santé publique et notamment les groupements régionaux de santé publique (GRSP) ; le dispositif d’alerte et de gestion des crises sanitaires dont l’efficacité a été renforcée par la publication du décret relatif à l’organisation du système de santé en cas de menace sanitaire grave ; l’École des hautes études en santé publique (EHSP) ; le nouveau dispositif d’encadrement de la recherche biomédicale entré en vigueur pour la quasi-totalité de ses dispositions ; la mise en place du dispositif de formation continue obligatoire des médecins, des pharmaciens et des chirurgiens-dentistes ; l’amélioration de la sécurité sanitaire des eaux destinées à la consommation et le renforcement du dispositif de lutte contre le saturnisme qui est devenu applicable en avril 2006.

Des efforts supplémentaires doivent cependant être déployés afin de permettre l’application effective de l’ensemble de la loi dans les meilleurs délais. Les causes des retards sont bien connues. De nombreuses consultations et procédures préalables sont tout d’abord requises au niveau interministériel, et il est aussi parfois obligatoire de notifier certaines dispositions réglementaires à la Commission européenne, d’attendre ses observations, quand il ne faut pas renégocier certaines directives ! C’est notamment le cas pour les dispositions de la loi relative aux modalités d’étiquetage nutritionnel ou à la cosmétovigilance. Des résultats d’expérimentations peuvent également être attendus ou en cours d’exploitation, comme pour le financement des groupements de coopération sanitaire (GCS). Enfin, le problème de l’engorgement du ministère subsiste et plus particulièrement celui de la direction générale de la santé, dont la compétence n’est pas en cause.

Ces retards, qui justifient pour la première fois un troisième bilan d’application, suscitent une certaine irritation même si certains textes réglementaires pourraient toutefois être rapidement publiés. Le décret relatif au message sanitaire dans les publicités télévisuelles portant sur certains aliments devrait ainsi être prochainement publié, de même que les décrets concernant les radiophysiciens employés dans les établissements publics de santé. Enfin, sept décrets pourraient être publiés d’ici le mois d’avril 2007, concernant des sujets aussi divers que les conditions de formation et d’exercice de la profession de conseiller en génétique, la réglementation des pigments pour tatouage, les pharmacies à usage intérieur, les médicaments sous autorisation temporaire d’utilisation (ATU) ou la revente des dispositifs médicaux d’occasion.

Il est certain que la mise en application des dispositions de la loi relative à la santé publique est très compliquée. On peut toutefois s’interroger sur quelques dispositions particulièrement importantes de la loi dont la mise en œuvre accuse un retard significatif, voire inacceptable :

– Concernant la réglementation de l’usage du titre de psychothérapeute, le ministre peut-il confirmer que le décret d’application sera publié dans les meilleurs délais et qu’il sera pleinement conforme aux intentions du législateur, telles qu’elles se sont exprimées notamment au travers de l’adoption récente d’un amendement par l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament, à l’initiative de la rapporteure, Mme Cécile Gallez, de M. Bernard Accoyer, M. Pierre-Louis Fagniez et du président de la commission.

– S’agissant des contrôles médicaux de prévention et de surveillance des élèves et étudiants scolarisés, le décret en conseil d’État nécessaire à l’application de l’article 9 de la loi n’a toujours pas été publié, alors même qu’il s’agit, là encore, d’un enjeu de santé publique fondamental. S’il est vrai qu’un amendement au projet de loi réformant la protection de l’enfance prévoit la mise en place de visites médicales obligatoires aux âges de 9, 12 et 15 ans en plus de celle déjà prévue à l’âge de 6 ans, les dispositions prévues par la loi de santé publique seront-elles mises en œuvre dans les meilleurs délais ?

– Ne peut-on, par ailleurs, accélérer la publication des décrets relatifs à la formation continue des sages-femmes, des préparateurs en pharmacie et des auxiliaires médicaux, et surtout celle des décrets concernant les plans régionaux de santé publique (PRSP) qui semblerait ne devoir intervenir qu’à la fin de l’année 2007 ?

– Enfin, quels sont les principaux points du décret qui devrait être prochainement publié sur le message sanitaire dans les publicités télévisuelles de certains aliments ?

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

M. Pierre-Louis Fagniez s’est réjoui qu’une fois de plus le ministre de la santé soit venu rendre compte de l’application d’une loi volumineuse, complexe et nécessitant de nombreux textes d’application et s’est dit rassuré par l’intérêt du ministre pour le « service après vote », car c’est l’assurance que ces textes réglementaires seront pris avant la fin de la législature. Les députés participent à cet effort, ainsi qu’en témoignent, entre autres, leurs réflexions sur la recherche biomédicale, qui les a conduits à supprimer à l’unanimité une disposition votée dans le cadre du projet de loi portant réforme de la protection juridique des majeurs, et aux termes de laquelle il aurait fallu attendre l’avis du juge des tutelles pour décider de faire bénéficier d’un protocole de recherche une personne qui, sans être placée sous protection juridique, ne serait pas en d’état de donner son opinion parce qu’elle serait, par exemple, dans le coma. Les députés, chaque fois qu’ils le peuvent, essaient ainsi d’aider le ministre dans cet esprit d’« après-vote ».

M. Bernard Accoyer n’a pas dissimulé son inquiétude devant le fait que, trente mois après l’adoption historique, et non sans difficulté, de l’article 52 de la loi du 9 août 2004 qui tendait à mettre fin à une situation de non-droit ayant entraîné d’innombrables victimes, aucun décret d’application n’ait été encore pris.

Ce délai pose une première question dans la mesure où les Français n’ont toujours pas la possibilité d’accéder au droit fondamental de s’informer pour savoir à qui il est possible de se confier en s’appuyant pour ce faire sur la prérogative régalienne de l’Etat de dire qui peut soigner ou aider. Il est primordial de ne pas réserver l’accès aux soins, à la sécurité et à la santé à ceux qui ont le privilège de l’information, de la culture ou des moyens.

L’article 52 pose en second lieu la question de la formation. La loi pose le principe de l’inscription sur un registre national des psychothérapeutes pour pouvoir se prévaloir du titre de psychothérapeute. Si les médecins, les psychologues et les psychanalystes sont inscrits de droit sur cette liste, les autres personnes désireuses de faire usage de ce titre doivent suivre une formation théorique et pratique en psycho-pathologie clinique. Quoi de plus naturel ?

Le ministère de la santé a préparé un projet de décret, récemment examiné par le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), qui prévoit que cette formation pourrait être confiée soit aux universités, ce qui est l’esprit même de la loi, soit, ce qui est plus surprenant, à des organismes ayant passé convention avec elles. Or le problème est que ces organismes ne présentent aucune garantie, à tel point que les services du ministère, dans une première version du décret, avaient prévu que cette formation devait être universitaire sur le plan théorique et pratique, un niveau de master ayant même été envisagé. Pourquoi dès lors avoir changé d’avis et retenu ce conventionnement qui légitimera des instituts n’apportant aucune garantie ?

En troisième lieu, de nombreuses personnes, aux profils extrêmement variés, ont largement profité du vide juridique pour exercer sous le vocable de psychothérapeute. Si certaines sont des professionnels sérieux et de bonne volonté, d’autres le sont moins et en tout état de cause n’ont aucune formation. Pis, certains individus, proches du milieu sectaire, sont des pseudo-professionnels qui s’autoproclament psychothérapeutes et commettent ainsi des dégâts considérables. Leurs victimes, souvent regroupées en associations, appellent au secours et méritent tout autant d’être défendues que certains intérêts professionnels qui ne manquent pas de se faire entendre.

Or le projet de décret prévoit que des commissions régionales pourront procéder à une inscription temporaire de ces professionnels sur le registre des psychothérapeutes ! Cette question de l’inscription temporaire soulève des problèmes majeurs. Nombre d’individus n’hésiteront pas à continuer à se prévaloir de ce titre acquis à titre temporaire, sans la moindre validation de la moindre compétence, ce qui soulève un problème de sécurité des soins. Il y a là un grand danger pour les usagers et une rupture d’égalité de traitement entre les professionnels. Cela ouvre le règne de l’arbitraire en faveur de psychothérapeutes autoproclamés. Cette procédure d’inscription à titre temporaire n’est-elle pas, en outre, directement contraire à l’article 52, dans la mesure où elle permet à des personnes qui ne sont ni médecins, ni psychologues, ni psychanalystes d’être inscrits d’office sur le registre national des psychothérapeutes ?

Il n’est pas question, bien sûr, d’interdire à de nombreuses personnes d’exercer, mais seulement de les obliger à dire la vérité de leurs fonctions en se réclamant d’un titre plus adapté : coach, conseiller,… C’est le rôle régalien de l’Etat de réserver, avec un réel contrôle, le terme de thérapeute aux professionnels qui peuvent légitimement s’en prévaloir.

Enfin, s’agissant des commissions régionales et de la commission nationale appelées à statuer sur la demande de ceux qui jusque-là ont exercé sous le vocable de psychothérapeute sans être ni médecin, ni psychologue, ni psychanalyste, il ne saurait être question d’y faire siéger d’autres membres que ceux qui sont légitimés par leurs compétences reconnues par l’université, qu’ils s’agissent de médecins ou de psychologues. Il n’est pas possible qu’y figurent des psychothérapeutes autoproclamés car on ne peut à la fois être juge et partie. La sécurité des soins et le droit des malades l’exigent.

Il est regrettable que chaque fois qu’une solution semble sur le point d’être trouvée à ce problème complexe, de nouveaux obstacles surgissent. Nombreux sont les députés désireux d’aider le gouvernement, sans revenir pour autant sur l’esprit de la loi et la volonté du législateur, en faveur d’un droit égal à la sécurité pour tous ceux qui un jour ont besoin d’être aidés. C’est le souhait de tous, qu’avec les 30 000 psychologues, les 16 000 psychiatres et la grande majorité des psychanalystes, il soit enfin possible d’aboutir. La situation actuelle ne peut en effet plus durer. C’est pourquoi deux amendements ont été déposés sur le récent projet de loi relatif au médicament, afin d’éviter que le décret d’application de la loi du 9 août 2004 ne s’éloigne de la volonté du législateur.

Après avoir souligné que M. Bernard Accoyer est soutenu par de nombreux députés, M. Jean-Pierre Door a reconnu que le bilan du ministre, même si quelques décrets restent à prendre, est positif, qu’il s’agisse de la formation médicale continue obligatoire attendue depuis longtemps, du conseil de l’ordre des masseurs kinésithérapeutes et des podologues, du dispositif d’alerte et de gestion des risques, notamment en matière de sécurité sanitaire où il faut continuer à travailler sans lever la garde, ou encore des conférences régionales de santé et des groupements régionaux de santé publique, encore qu’il paraisse nécessaire d’en améliorer ou d’en simplifier le fonctionnement. S’agissant de l’Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), la question de la responsabilité civile professionnelle de certaines catégories de médecins n’est pas close. Par ailleurs, le récent rapport sur la santé et la protection sociale des étudiants de M. Laurent Wauquiez montre que de nombreux étudiants échappent à tout suivi sanitaire. Quelles mesures le ministre compte-t-il prendre à cet égard ? Enfin, concernant les tatouages, il est nécessaire de déterminer clairement ce qui est autorisé et interdit, car de nombreux risques infectieux peuvent peser sur de jeunes enfants ou adolescents.

M. Marc Bernier a salué, en tant que président du groupe d’étude sur les professions libérales, le travail exemplaire du ministre et son souci d’une très large concertation. Il faut se féliciter de la mesure relative à la formation continue des chirurgiens-dentistes, pharmaciens et médecins, mais il est regrettable que les décrets concernant les masseurs-kinésithérapeutes et les pédicures podologues n’aient pas encore été publiés. Il faut, à cet égard, rappeler le rôle essentiel des pédicures-podologues dans la prévention des amputations de personnes diabétiques. Enfin, est-il possible de savoir à quelle date seront publiés les décrets relatifs à la formation continue des auxiliaires médicaux, des sages-femmes et des préparateurs en pharmacie ?

En réponse aux différents intervenants, M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités, a tout d’abord souligné la nécessité qu’à l’avenir toute loi d’envergure aussi ambitieuse que la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique soit pensée et rédigée en vue de sa mise en application, comme cela a par exemple été le cas pour la réforme de l’assurance maladie, lors de laquelle les avant-projets de décrets d’application avaient été préparés en même temps que l’examen du projet de loi par le Parlement, ce qui a permis de rendre 80 % des dispositions de la loi du 13 août 2004 applicables dès le 31 décembre 2004. Rien n’est impossible en la matière, à condition d’en avoir la volonté politique et de se donner les moyens nécessaires pour cela, notamment en termes d’organisation, car tant qu’une réforme n’est pas entrée dans le quotidien des citoyens, elle n’existe pas pour eux. En effet, sans préjuger du vote des parlementaires et de l’exercice de leur droit d’amendement, force est de reconnaître que les modifications introduites par voie d’amendement ne portent, le plus souvent, que sur une partie limitée des projets de loi : la préparation des avant-projets de décrets d’application et la concertation peuvent donc commencer dès le stade de l’examen d’un projet de loi par le Parlement. Ce mode de fonctionnement s’impose tout particulièrement dans le domaine de la santé, par nature très complexe et qui compte de très nombreux intervenants.

À cet égard, le ministre a rappelé avoir apporté son soutien, en tant que parlementaire, à la résolution modifiant le Règlement en vue d’informer l’Assemblée nationale sur la mise en application des lois, adoptée à l’initiative du Président de l’Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré, et de M. Jean-Luc Warsmann, en se déclarant également très attaché à venir rendre compte régulièrement de son action devant la commission.

Concernant le bilan de la mise en application de la loi relative à la politique de santé publique, il convient tout d’abord de rappeler la mise en place de nouvelles instances d’expertise et de conseil, telles que le Comité national de santé publique (CNSP) et la Conférence nationale de santé, l’installation du Haut conseil de la santé publique (HCSP) étant par ailleurs prévue en février prochain. Au niveau régional, toutes les conférences de santé sont aujourd’hui en place et se sont réunies au moins une fois en 2006, tandis que les groupements régionaux de santé publique (GRSP) sont opérationnels dans onze régions et sont en cours de création dans les autres, leur installation effective devant intervenir au premier trimestre 2007.

Diverses mesures, telles que l’élaboration du plan national de lutte contre les addictions et du plan national nutrition santé ou encore l’organisation des états généraux de l’alcool, ont également contribué à la mise en application de la loi relative à la politique de santé publique. Ainsi, sur les cinq plans stratégiques de santé publique prévus par la loi, trois ont été mis en œuvre et le plan national de lutte pour limiter l’impact de la violence sur la santé sera présenté dans les toutes prochaines semaines, de même que celui relatif à la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques. Il était donc nécessaire de donner un coup d’accélérateur au règlement de l’ensemble de ces questions, qui nécessitent au demeurant de très nombreuses réunions de concertation, tant les acteurs sont nombreux.

Pour remettre ce bilan en perspective, il convient également de souligner que sur les 376 décrets nécessaires à l’application des lois adoptées au cours de cette législature dans le domaine de la santé, environ 300 ont été publiés, soit 80 %. S’agissant de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie, 41 décrets sur 48 ont été publiés, sans compter les circulaires et autres textes d’application. Pour la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, 60 des 67 décrets nécessaires à son application ont été publiés. Quant au taux d’exécution du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2006, il est supérieur à 90 %. Il a par ailleurs été répondu à 7 780 questions écrites en 2006. Le ministère de la santé et des solidarités n’a donc pas à rougir de ce bilan de mise en application des textes législatifs !

Concernant la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, sur les 61 décrets nécessaires à son application, 38 ont été publiés à ce jour, soit un taux d’exécution de 60 %. Compte tenu des moyens du ministère de la santé et des solidarités, qui n’est pas le plus doté, ce bilan est tout à fait significatif, du fait notamment d’une accélération dans la publication des décrets d’application depuis la fin de l’année 2005, comme l’ont souligné à juste titre plusieurs membres de la commission.

D’ici avril 2007, 23 décrets restent donc à paraître, ce qui devrait intervenir très prochainement pour certains d’entre eux :

– Le décret relatif au message sanitaire dans les publicités télévisuelles portant sur certains aliments est signé et désormais dans l’attente de la signature des autres ministres concernés par cette question. Après de nombreuses et longues concertations, ce dispositif pourrait donc entrer en vigueur d’ici la fin du mois de février et il semble très probable que les industriels agro-alimentaires choisiront de diffuser ces messages sanitaires plutôt que de payer une nouvelle taxe. Il s’agit là d’une mesure novatrice, que d’autres pays européens envient à la France, de même que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui a pris contact avec le ministère à ce sujet.

– Le décret relatif aux conditions d’intégration à l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) des médecins et praticiens hospitaliers est en cours d’examen par le Conseil d’État, ainsi que celui concernant les dispositions applicables aux radiophysiciens employés dans les établissements publics de santé qui devrait être publié en février 2007. À cet égard, il faut être conscient de l’importante charge de travail qui est actuellement celle du Conseil d’État, en particulier de la section sociale, qui doit notamment examiner certains textes prioritaires, tel le décret sur l’interdiction de fumer dans les lieux publics.

La publication de sept autres décrets devrait également intervenir d’ici le mois d’avril 2007 :

– S’agissant des dispositions relatives aux micro-organismes et toxines, le décret d’application de l’article 22 de la loi devrait être publié au cours du premier trimestre 2007.

– L’arbitrage interministériel ayant été rendu la semaine dernière, le décret relatif aux conditions de transfert des débits de boissons à consommer sur place, sans limitation de distance, au profit de certains établissements de tourisme peut dès maintenant être transmis au Conseil d’État.

– Concernant les dispositions prévues par l’article 47 de la loi, le décret relatif aux médicaments bénéficiant d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) est sur le point d’être transmis au Conseil d’État et devrait être publié courant février 2007. En outre, le décret relatif aux pharmacies à usage intérieur n’a pu être finalisé que très récemment car il a été nécessaire d’engager de longues concertations avec les syndicats, l’ordre des pharmaciens, les fédérations hospitalières et l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). Il sera toutefois transmis dans les prochains jours au Conseil d’État.

– Les conditions de formation et d’exercice de la profession de conseiller en génétique seront précisées par un décret faisant suite, là encore, à de très larges concertations, qui devrait être soumis prochainement au Conseil d’État.

– Le décret concernant la réglementation des pigments pour tatouage fait actuellement l’objet d’une procédure de notification à la Commission européenne. La fin du délai de statu quo, initialement prévue pour le 15 novembre 2006, a été reportée au 15 février 2007. La parution du décret est donc prévue pour avril 2007.

– Concernant la réglementation de l’usage du titre de psychothérapeute, le projet de décret d’application de l’article 52 de la loi constitue un texte d’équilibre, issu d’une très large concertation avec l’ensemble des acteurs concernés, dont M. Bernard Accoyer, qui a permis de rapprocher les points de vue, du moins sur certains sujets, où les opinions des uns et des autres pouvaient pourtant sembler a priori inconciliables. Par ailleurs, si certains étaient d’avis de ne jamais publier ce texte d’application, il faut souligner la volonté constante et les efforts importants du ministre de la santé depuis juin 2005 pour permettre au contraire l’entrée en vigueur effective de ce dispositif, en proposant pour cela une solution équilibrée.

En effet, la dernière version du projet de décret, adoptée à l’unanimité par le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), pose le principe d’une formation obligatoire de qualité, comprenant 400 heures de formation théorique et au moins cinq mois de formation pratique. La formation sera confiée à l’université ou, selon les règles propres à chaque université, à des organismes qu’elle aurait agréés : ce ne sont donc en aucun cas les organismes qui pourront eux-mêmes s’agréer ! Il est par ailleurs difficilement concevable que les universités délivrent de tels agréments sans respecter un certain nombre de dispositions, ni s’assurer de la qualité de la formation dispensée par ces organismes. L’examen du projet de décret par le Conseil d’État pourrait du reste fournir l’occasion d’apporter certaines précisions complémentaires. Si les inquiétudes pouvaient paraître légitimes il y a quelques années quant à l’entrée en vigueur effective des dispositions prévues par l’article 52 de la loi, les avancées sont donc aujourd’hui incontestables.

En la matière, la qualité des soins et la sécurité des patients ne laissent personne indifférent, et le ministre chargé de la santé moins que personne, mais il importe de traiter ce sujet dans la sérénité. Le décret aurait déjà pu être transmis au Conseil d’État si deux amendements sur ce sujet n’avaient pas été adoptés par l’Assemblée nationale, contre l’avis du gouvernement, qui avait proposé de les sous-amender, lors de l’examen du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament, à l’initiative notamment du président Jean-Michel Dubernard et M. Bernard Accoyer. Cette question sera à nouveau débattue cet après-midi, lors de l’examen de ce projet de loi par le Sénat et le gouvernement sera conduit à renouveler son opposition à ces deux amendements, dans la mesure où ils relèvent du domaine réglementaire. En tout état de cause, la publication du décret est donc suspendue à l’adoption de ce projet de loi par le Sénat et, le cas échéant, à la position de la commission mixte paritaire (CMP) à ce sujet.

Sur le fond, il faut souligner à nouveau qu’il n’est pas question que des organismes de formation s’autoconventionnent : les modalités de mise en œuvre de ce dispositif pourront certes être précisées avec le ministère de l’Éducation nationale, mais les garanties que les députés appelaient de leurs vœux sont d’ores et déjà réunies et figurent bien dans le projet de décret d’application de la loi. Celui-ci précise en effet très clairement le rôle de l’université, qui pourra seule dispenser ces formations ou conventionner des organismes qui en seront chargés. À dire vrai, il semble difficile de préciser les choses plus clairement !

Enfin, les dispositions du décret prévoyant l’inscription à titre temporaire sur la liste permettant l’usage du titre de psychothérapeute visent à laisser le temps aux candidats de s’adapter en se formant. Seuls seront autorisés à s’inscrire sur cette liste temporaire, sous le contrôle des commissions régionales, ceux qui justifieront de trois années d’expérience et s’engageront à suivre une formation approfondie dans les quatre années suivantes. Ce texte est donc pleinement conforme aux intentions du législateur.

Concernant les autres dispositions de la loi, neuf décrets d’application pourront être publiés après le mois d’avril 2007 :

– Le décret relatif à la revente des dispositifs médicaux d’occasion a été notifié à la Commission européenne en octobre 2006 et a fait l’objet d’un avis circonstancié le 4 janvier 2007. Le délai de statu quo, initialement fixé au 11 janvier 2007, est reporté au 11 avril. La parution de ce texte devrait donc intervenir en juin 2007.

– Le décret relatif aux plans régionaux de santé publique (PRSP) devrait paraître fin 2007, mais ce délai n’a pas empêché d’élaborer ces plans puisque deux d’entre eux seulement restent à finaliser.

– S’agissant du décret sur le suivi sanitaire des élèves et étudiants, l’adoption d’un amendement par l’Assemblée nationale au projet de loi réformant la protection de l’enfance, à l’initiative de la rapporteure, Mme Valérie Pécresse, soulève des interrogations quant à son articulation avec les dispositions prévues par la loi relative à la politique de santé publique.

– Les deux décrets relatifs aux codes de déontologie des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues sont en attente de propositions de la part des conseils de l’ordre, qui viennent d’être mis en place. La transmission des deux textes au Conseil d’État pourrait intervenir, au plus tard, en juin 2007. À cet égard, il convient de souligner que les professionnels paramédicaux ont également vocation à profiter de l’ensemble des avancées prévues par la loi relative à la politique de santé publique.

– S’agissant du décret sur la cosmétovigilance, de nouvelles observations de la Commission européenne sont attendues. Il n’est donc pas possible de fixer aujourd’hui une date prévisionnelle de parution de ce texte.

– Concernant les trois décrets relatifs aux conditions de mise en œuvre de la formation continue des préparateurs en pharmacie, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux, des concertations doivent être engagées, notamment sur la question de la formation des agents hospitaliers. Il est apparu, de surcroît, plus sage d’attendre le retour d’expérience de la mise en place du nouveau dispositif de formation continue des médecins, des pharmaciens et des chirurgiens-dentistes.

Enfin, la rédaction de quatre décrets d’application de la loi relative à la politique de santé publique est actuellement suspendue :

– Le décret relatif aux modalités de transmission à l’Institut national de veille sanitaire (INVS) des informations nécessaires à l’évaluation de la politique vaccinale est suspendu car l’INVS dispose déjà de ces informations.

– Le décret relatif à l’étiquetage nutritionnel des denrées alimentaires est également dans l’attente de la renégociation d’une directive européenne. Courant 2007, un premier projet de révision de la directive relative à l’étiquetage nutritionnel devrait être présenté par la Commission européenne aux États membres et des contacts seront très prochainement pris à ce sujet avec le commissaire européen chargé de la santé.

– S’agissant du décret relatif aux conditions de déclaration des événements indésirables graves, la loi du 9 août 2004 prévoyait une phase d’expérimentation préalablement à sa publication. Cette expérimentation débutera au milieu de l’année 2007 et s’achèvera à la fin de l’année 2008, phase d’évaluation comprise. Le Conseil d’État pourra donc être saisi de ce texte en avril 2009.

– Enfin, la rédaction du décret relatif au financement des groupements de coopération sanitaire (GCS) soulève des problèmes juridiques, car les expérimentations n’ont pu être menées à leur terme. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 prévoit d’ailleurs la prolongation de cette expérimentation jusqu’en décembre 2008.

S’agissant de la responsabilité civile médicale, les concertations se sont poursuivies avec l’ensemble des acteurs concernés, en particulier la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA), qui semblent nettement plus favorables à la mise en place d’un nouveau dispositif fondé sur l’écrêtement des sinistres. Conformément aux dispositions prévues par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2007, le gouvernement devrait, dans les prochaines semaines, présenter des mesures destinées à garantir les droits des patients en termes d’indemnisation, tout en apportant une réponse concrète aux difficultés posées par l’augmentation des primes d’assurance pour certains professionnels de santé. Parce qu’il faut relever le défi de l’avenir de la chirurgie française, il est en effet apparu nécessaire d’aller au-delà du dispositif prévu par le décret publié l’été dernier, en application de la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, qui a permis la prise en charge d’une partie des primes d’assurance par l’assurance maladie, à un niveau d’ailleurs supérieur à celui qui était initialement prévu. Il n’en demeure pas moins nécessaire de poursuivre la réflexion sur ce sujet afin qu’une solution soit rapidement apportée aux problèmes liés à la responsabilité civile médicale.

Enfin, s’agissant des décrets dont l’élaboration relève de la seule Direction générale de la santé (DGS), il est à noter que 26 ont été publiés en 2004, contre 45 en 2005 et 52 en 2006 ! Le travail très important réalisé par la DGS mérite donc d’être salué et en particulier son directeur, le professeur Didier Houssin. Du reste, si les députés veulent venir sur place suivre les différentes phases de la préparation d’un décret, ils ne pourront que constater la volonté et les efforts significatifs déployés par le ministère pour permettre l’entrée en vigueur des dispositions législatives dans les meilleurs délais. Il est cependant vrai que la meilleure solution en la matière consiste à préparer les décrets d’application en même temps que la rédaction et l’examen des projets de loi, comme le Président de l’Assemblée nationale en a du reste formulé le souhait.

M. Maurice Giro, président, a remercié le ministre pour ses réponses précises et pour l’écoute dont il a fait preuve envers les députés.

Revenant sur la question des psychothérapeutes, M. Bernard Accoyer a fait part de ses très vives inquiétudes concernant les dispositions du décret prévoyant l’inscription, à titre temporaire, sur la liste permettant l’usage du titre de psychothérapeute de professionnels disposant de trois ans d’expérience, qui auraient adressé une demande dans ce sens à une commission régionale avant le 1er septembre 2008, alors même qu’ils ne satisfont pas aux conditions de formation requises. En effet, chacun doit être pleinement conscient que ces dispositions, contraires à la volonté du législateur, conduiraient de fait à donner une légitimité à des personnes qui ne présentent aucune garantie de sérieux, en leur permettant ainsi d’user librement du titre de psychothérapeute. Contrairement aux assurances du ministre, ce projet de décret apparaît en réalité pire que la situation de vide juridique qui prévaut actuellement !

Le ministre a répondu que le projet de décret ne prévoit aucune automaticité quant à l’inscription des professionnels sur cette liste.

Puis, la commission a autorisé le dépôt du rapport sur la mise en application de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique en vue de sa publication.