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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

Mercredi 24 janvier 2007

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 25

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président

 

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– Audition, ouverte à la presse, de M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances, M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes et Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, sur la mise en application de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances (M. Laurent Hénart, rapporteur)







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– Informations relatives à la commission

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En application de l’article 86, alinéa 8 du Règlement, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances, M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, et Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, sur la mise en application de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances.

M. Laurent Hénart, rapporteur, a rappelé que la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances, qui comporte 50 articles, est mue par une triple ambition : favoriser l’égal accès à l’emploi, à la formation et à la réussite scolaire ainsi qu’à l’activité économique ; réformer certaines politiques publiques, comme la politique de la ville ; combattre les éléments qui désorganisent la vie sociale dans les quartiers sensibles, tels que les discriminations ou les difficultés éducatives.

Des résultats concrets ont été obtenus : plus de 300 000 jeunes au total ont bénéficié du soutien à l’emploi des jeunes en entreprise (SEJE) ; la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) a reçu quelque 4 000 réclamations en 2006, soit près de trois fois plus qu’en 2005 ; 316 millions d’euros provenant du Fonds unique de péréquation (FUP) vont venir compléter les moyens disponibles pour la formation et l’insertion des demandeurs d’emploi non indemnisés par les Assédic.

Le présent rapport a cependant pour objet, conformément à l’article 86, alinéa 8, du Règlement, de faire le point des décrets, arrêtés et circulaires pris pour l’application de la loi et des textes qui restent à paraître : 39 des 50 articles de la loi sont applicables aujourd’hui, soit neuf mois après sa promulgation. Compte tenu de la diversité des sujets abordés et du caractère interministériel des textes à prendre, une telle célérité est à saluer.

Les principaux dispositifs sont d’ores et déjà opérationnels : la formation d’apprenti junior ou la majoration de la taxe due par les entreprises ne remplissant pas leur « quota » de contrats d’apprentissage ou de professionnalisation ; le parcours d’accès à la vie active (PAVA) ; la réforme du contrat d’insertion dans la vie sociale (CIVIS) ou du soutien à l’emploi des jeunes en entreprise (SEJE) ; les mesures relatives à la rémunération des stages longs ; les nouvelles zones franches urbaines (ZFU) ; l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé) ; les nouveaux pouvoirs, notamment de transaction, donnés à la HALDE en matière de lutte contre les discriminations ; le contrat de responsabilité parentale, que peuvent signer les maires, les présidents de conseil général et les chefs d’établissement scolaire ; le service civil volontaire.

Plusieurs mesures, cependant, n’ont pas encore fait l’objet de décrets, pour des raisons souvent valables au demeurant.

Ainsi, s’agissant du curriculum vitae (CV) anonyme, l’accord national interprofessionnel du 11 octobre 2006, signé par l’ensemble des partenaires sociaux à l’exception de la CFE-CGC, prévoit diverses mesures de lutte contre les discriminations en matière d’emploi, dont le gouvernement attend qu’elles soient évaluées avant de prendre un décret. En outre, diverses mesures de précision relatives aux dispositifs d’exonérations fiscales et sociales au sein des zones franches urbaines sont en cours de finalisation.

En matière de lutte contre les incivilités, le gouvernement attend, pour définir les pouvoirs de constatation des agents de police municipale et préciser le champ de la faculté offerte aux maires de proposer une transaction aux contrevenants, que soit définitivement adopté le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance.

Enfin, le stage imposé – par un amendement d’origine parlementaire – aux exploitants de débits de boissons est un sujet délicat, sur lequel la concertation se poursuit.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

Le président Jean-Michel Dubernard a félicité le rapporteur pour son exposé clair et synthétique.

M. Maurice Giro a fait part de sa crainte que le contrat d’insertion dans la vie sociale (CIVIS) n’ait donné lieu à un malentendu, certains responsables de missions locales ayant tendance à considérer l’allocation maximum prévue pour chaque contrat comme devant être systématiquement versée.

M. Bernard Perrut a souhaité témoigner de la satisfaction qu’il a observée sur le terrain quant à la mise en œuvre des dispositifs, ainsi d’ailleurs qu’a pu le noter M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, lors d’un déplacement récent dans le Rhône, Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, devant quant à elle s’y rendre très prochainement. Le SEJE, en particulier, créé par une loi de 2002 dont lui-même était rapporteur, mais qui a été enrichi par la présente loi, est un succès, puisque ce contrat a bénéficié au total à plus de 300 000 jeunes. On attend beaucoup aussi des nouvelles dispositions favorisant l’apprentissage, qui mériteraient cependant d’être mieux connues : il faut expliquer aux jeunes, et ce dès le collège, que l’apprentissage junior n’est pas une formation au rabais. Les chiffres montrent, cela dit, une évolution positive au cours des derniers mois. Si la situation de l’emploi s’améliore d’une façon générale, ce n’est pas le fait du hasard, mais le fruit d’un ensemble de mesures visant à favoriser l’emploi et la formation. S’agissant toutefois des entreprises d’insertion, certaines associations, qui font un remarquable travail de terrain, rencontrent des difficultés financières et ont besoin d’être rassurées.

M. Denis Jacquat a estimé que le succès de la zone franche urbaine de Metz-Borny atteste que les outils créés par la présente loi contribuent à améliorer la situation de l’emploi. Le taux de chômage de longue durée y est désormais inférieur à celui de l’agglomération comme à celui de la région, et les personnes en difficulté qui habitent ce secteur ont conscience que les emplois créés, même s’il ne s’agit pas de contrats à durée indéterminée, constituent un premier pas vers l’insertion. À cet égard, il est essentiel que la durée des contrats d’avenir reste de vingt-quatre mois, et ne soit pas ramenée à sept mois comme il en avait été question : l’expérience montre en effet que la réinsertion des publics en difficulté est une œuvre de longue haleine.

Le président Jean-Michel Dubernard a souligné, concernant la remarque du rapporteur relative à l’origine parlementaire de certaines dispositions du projet, qu’on peut comprendre à cet égard l’absence de concertation préalable pour la rédaction des textes d’application, mais que pour autant ces articles doivent être pris en compte.

En réponse aux intervenants, les ministres ont apporté les précisions suivantes.

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, a souligné que les dispositifs doivent évoluer en permanence pour s’adapter à une situation elle-même changeante, tout en restant néanmoins dans la logique quinquennale du plan de cohésion sociale. Celui-ci comporte trois volets – emploi, logement, égalité des chances – et ses quelque vingt programmes sont tous en fonctionnement ; les objectifs quantitatifs – pour les programmes qui en étaient assortis – sont tous respectés, voire légèrement dépassés. C’est dans cette logique générale que s’inscrit l’application de la loi du 31 mars 2006.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, a fait le point sur le nombre de jeunes bénéficiant des différents dispositifs : 402 000 étaient apprentis à la fin de novembre 2006, dont 12 000 au titre de la formation d’apprenti junior – l’objectif était de 15 000, mais la mobilisation de certaines collectivités, notamment régionales, a été faible ; 58 500 bénéficiaient de la nouvelle formule du SEJE à la même date ; 23 000 étaient dans un parcours d’accès à la vie active (PAVA) à la mi-décembre 2006 ; 140 000, enfin, avaient conclu un contrat de professionnalisation à la fin de l’année 2006.

Les principaux décrets concernant la partie relative au travail et à l’emploi de la loi du 31 mars 2006 ont été pris. Parmi ceux qui restent à prendre figure notamment le décret, passablement technique mais dont les incidences sur les centres de formation des apprentis (CFA) sont importantes, relatif à l’affectation de la fraction dite «  Trésor public » de la taxe d’apprentissage : il est en préparation à la direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle (DGEFP) et un accord a été trouvé avec la direction de la législation fiscale (DLF) du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie.

S’agissant du CV anonyme, il convient d’attendre le bilan qui sera fait, à la fin de l’année 2007, de l’expérimentation menée dans le cadre de l’accord conclu par les partenaires sociaux.

Une convention signée par l’Etat et les membres du Comité paritaire national de la formation professionnelle (CPNFP) permettra d’affecter dès 2007 aux centres de formation d’apprentis des moyens financiers considérables, en provenance du Fonds unique de péréquation.

Le nombre de CIVIS signés à la fin de l’année 2006 était de 310 000. Accroître ce nombre n’est pas un objectif en soi et serait même contre-productif : il s’agit d’enclencher le mécanisme conduisant à l’insertion professionnelle. Quant au CIVIS « renforcé », qui concerne 150 000 jeunes, il n’est pas destiné à tous les publics : l’allocation n’est versée qu’à la condition que le jeune n’ait pas d’autres revenus, or il existe beaucoup de solutions rémunérées, comme les stages de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), les formations en alternance, les contrats de professionnalisation, les stages en entreprise ou encore les actions préparatoires au recrutement. D’un montant de 900 euros maximum, cette allocation peut consister en une aide au logement – 20 000 places supplémentaires ont été ouvertes en foyers de jeunes travailleurs (FJT) –, à l’habillement, voire à la restructuration personnelle, l’octroi et l’emploi des fonds étant laissés à l’appréciation des responsables des missions locales. Il ne s’agit donc pas d’un « droit de tirage », ainsi que le ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes a d’ailleurs eu l’occasion de le préciser à Bordeaux devant l’assemblée générale de l’Union nationale des missions locales. Il reste qu’il est naturel que l’enveloppe soit abondée en faveur des bassins d’emploi dont la situation est difficile.

Quant aux subsides du Fonds social européen, la France a obtenu, non sans de longues discussions, que les missions locales soient prioritaires, sous réserve toutefois que soient respectés les objectifs du fonds, à savoir conduire les jeunes vers l’emploi ou vers une situation leur permettant d’y accéder.

S’agissant de la formation d’apprenti junior, il convient de rappeler qu’elle ne remet pas en cause la scolarité obligatoire jusqu’à seize ans, ni n’exonère de l’acquisition du socle commun de connaissances et de compétences, que les apprentis juniors ne quittent pas le collège en fin de cinquième – c’est l’âge et non le niveau d’études qui donne le droit d’entrée dans cette formation – et que l’apprenti junior ne redouble pas sa première année de parcours d’initiation aux métiers, mais peut la poursuivre. Il faut également rendre hommage aux principaux de collège, qui ont contribué à la mise en œuvre du dispositif dans le cadre de l’orientation scolaire et compris qu’il s’agissait de permettre à des jeunes ayant l’intelligence du geste de trouver leur voie et un équilibre personnel auxquels ils n’accédaient pas par l’enseignement théorique classique.

Enfin, le décret relatif à la formation des exploitants de débits de boisson est encore en cours de concertation.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, a indiqué qu’en application de l’article 29 de la loi du 31 mars 2006, 15 nouvelles zones franches urbaines ont été créées, portant le total de ces zones à 100, qui couvrent une population totale de 1,7 million d’habitants, soit près d’un tiers de la population des zones urbaines sensibles. Si les critères retenus sont bien ceux fixés par la loi, le taux de chômage reste toutefois l’élément principalement pris en compte. Par ailleurs, 31 zones franches urbaines existantes verront leur périmètre étendu par un décret en Conseil d’État, actuellement en cours d’examen.

Certains décrets relatifs aux exonérations sociales et fiscales restent également à prendre. Celui modifiant le décret du 17 juin 2004 relatif aux exonérations sociales en faveur des zones franches urbaines et des zones de redynamisation urbaine le sera avant la fin du premier trimestre 2007. Celui prévu à l’article 30 n’a pas encore pu être pris car le dispositif initialement prévu à cet article n’a pas reçu l’accord de la Commission européenne et a dû être modifié dans la loi de finances rectificative pour 2006. Quant à l’assouplissement de la procédure d’autorisation des implantations commerciales en zones franches urbaines, prévu par l’article 36 de la loi, cette mesure ne nécessite pas de décret pour son application.

S’agissant de la lutte contre les incivilités, un projet de décret a été rédigé par le ministère de la justice, mais il ne sera finalisé qu’après l’aboutissement du processus législatif en cours relatif à la prévention de la délinquance.

Enfin, le décret précisant l’organisation et les modalités de fonctionnement de l’Acsé a été publié le 30 juillet 2006. Son conseil d’administration s’est réuni pour la première fois le 19 octobre dernier. L’Agence est pleinement opérationnelle depuis le 1er janvier 2007.

M. Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l’égalité des chances, revenant sur la question du CV anonyme, a souligné avoir rencontré, à l’occasion du « Tour de France de la diversité », plus de 3 000 chefs d’entreprise prêts à s’engager pour la promotion de la diversité et le refus de la discrimination. On observe en outre, depuis deux ans, un phénomène important : l’existence et l’action de la HALDE, grâce en particulier à son président, M. Louis Schweitzer, sont connues d’un nombre croissant de gens, qui n’hésitent pas, ainsi qu’en témoignent les chiffres, à se saisir de cet outil que la loi a mis au service de l’égalité, lorsqu’ils sont les victimes ou les témoins de discriminations, que ce soit en matière d’emploi, de logement ou même d’accès aux lieux de distraction, montrant par là qu’ils font du droit à l’égalité une exigence personnelle.

Il a par ailleurs salué la nomination du journaliste Rachid Arhab au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) par le Président de l’Assemblée nationale.

La commission a autorisé le dépôt du rapport sur la mise en application de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances en vue de sa publication.

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Informations relatives à la commission

La commission a désigné les membres d’une éventuelle commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament :

Titulaires

Suppléants

M. Jean-Michel Dubernard (UMP)

M. Yves Bur (UMP)

Mme Cécile Gallez (UMP)

M. Georges Colombier (UMP)

M. Bernard Accoyer (UMP)

M. Pierre Morange (UMP)

M. Jean-Pierre Door (UMP)

M. Bernard Perrut (UMP)

M. Pierre-Louis Fagniez (UMP)

M. Jean-Luc Préel (UDF)

M. Gérard Bapt (SOC)

M. Claude Evin (SOC)

M. Jean-Marie Le Guen (SOC)

Pas de candidat désigné (CR)