COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 40

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 4 mai 2005
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Edouard Balladur, Président

SOMMAIRE

 

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- Audition de M. Bruno Tertrais, maître de recherches à la Fondation pour la recherche stratégique

  
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Audition de M. Bruno Tertrais, maître de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique

Accueillant M. Bruno Tertrais, maître de recherches à la Fondation pour la recherche stratégique, le Président Edouard Balladur a rappelé que la question de la non-prolifération était à l'ordre du jour, avec la tenue, à New York, de la conférence d'examen du traité de non-prolifération (TNP), et qu'elle était abordée de façon plus passionnée que jamais dans le contexte international actuel. Il a considéré qu'il s'agissait d'un des problèmes les plus importants pour l'avenir.

M. Bruno Tertrais a tout d'abord rappelé que ce n'était pas sans raison que le traité de non-prolifération était considéré comme le socle du régime de non-prolifération : il s'agit de l'un des traités multilatéraux les plus universels, qui compte presque autant d'Etats parties que l'ONU depuis l'adhésion de Cuba, en 2003, sous réserve de l'absence de l'Inde, du Pakistan et d'Israël et sachant que le Saint-Siège, membre du TNP, ne l'est pas de l'ONU. Par conséquent, depuis la fin de la guerre froide, époque à laquelle ni la France ni la Chine n'avaient encore rejoint le traité, on peut considérer que ce traité, initialement valable pour vingt-cinq ans mais dont la prorogation illimitée a été décidée en 1995, a quasiment « fait le plein des voix ».

M. Bruno Tertrais a estimé que ce traité n'était pourtant pas dénué de faiblesses, qui justifiaient certaines critiques à son encontre.

En premier lieu, ce traité, produit de la guerre froide, fut conçu, lors de sa négociation, comme un rempart à la prolifération des armes nucléaires en Europe ; c'est notamment sur un consensus entre les Etats-Unis et l'URSS en vue d'éviter que l'Allemagne ne se dote de l'arme nucléaire qu'a été forgé l'équilibre entre les articles I et II du traité (interdiction de transfert d'armes nucléaires par les Etats qui en sont dotés et de réception par ceux qui ne le sont pas). A la fin des années 1960, la prolifération des Etats nucléaires en Europe était en effet le sujet d'un débat majeur, qui avait débuté avec l'explosion de la première bombe nucléaire française, en 1960.

En deuxième lieu, le TNP est fondé sur un équilibre complexe qui révèle la vision ambiguë de l'arme nucléaire qui prévalait dans les années 1960 : d'un côté, il vise à interdire la prolifération des armes nucléaires ; de l'autre, au nom du droit de tout pays à l'usage pacifique de l'énergie nucléaire, il est extrêmement permissif puisqu'il autorise le développement de tout ce qui est nécessaire à la construction de l'arme nucléaire tout en laissant la possibilité à tout État de se retirer du traité si « des événements extraordinaires, en rapport avec l'objet du présent traité, ont compromis les intérêts suprêmes de son pays. » (article X du traité). Il mène à une aporie en tentant de concilier ces deux objectifs très difficilement compatibles que sont la lutte contre la prolifération et la promotion de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques. Tout repose dès lors sur le dispositif de contrôle.

Or - et c'est là la troisième faiblesse du traité - le TNP ne comporte pas en lui-même de procédure de vérification, qui repose sur la conclusion d'accords de garantie entre les Etats parties et l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA). Il se trouve que beaucoup d'Etats n'ont jamais signé d'accords avec l'AIEA, à l'instar de l'Arabie Saoudite, ce alors même que, depuis 1997, ces accords, qui étaient très insuffisants, peuvent être complétés par la signature d'un protocole additionnel, permettant des inspections plus efficaces et plus intrusives de l'AIEA. Or seule une minorité d'Etats a ratifié ce protocole.

La quatrième faiblesse du TNP vient de son absence d'universalité, l'Inde, le Pakistan et Israël n'en étant pas parties. Le TNP définissant un État nucléaire comme celui qui a fait exploser un engin nucléaire avant le 1er janvier 1968, ces pays ne pourraient le signer qu'en tant qu'Etats non dotés de l'arme nucléaire ; cela impliquerait qu'ils renoncent à l'arme nucléaire, ce qui n'est pas une option envisageable pour les pays cités. Dans ces conditions, le TNP souffre d'une certaine artificialité.

Enfin, la cinquième faiblesse du TNP vient de ce qu'il ne concerne que les Etats, cette faille ayant été partiellement comblée par l'adoption de la résolution 1540 du Conseil de sécurité, adoptée en 2004, qui vise à prévenir les transferts de matières ou de technologies sensibles à un acteur non étatique.

Abordant la question du déroulement et des conséquences de la conférence d'examen du TNP qui se déroule actuellement à New York, M. Bruno Tertrais a considéré qu'elle représentait une occasion de débattre sur les équilibres du traité et d'examiner la réalité des engagements pris par les Etats parties à l'occasion des précédentes conférences d'examen. Deux visions, deux camps s'affrontent à cet égard : d'un côté, un bloc d'Etats, dominé par les Etats occidentaux, qui considèrent que l'urgence est à la lutte contre la prolifération et au renforcement des normes de non-prolifération ; de l'autre, des Etats, majoritaires en nombre, appartenant essentiellement au monde en voie de développement, qui font du désarmement nucléaire l'urgence absolue. M. Bruno Tertrais a expliqué que l'approche des partisans du désarmement, bien que correspondant aujourd'hui à la vision la plus répandue du TNP, n'était pas conforme aux intentions des négociateurs du traité. Il a jugé qu'elle empêcherait probablement la conférence de déboucher sur l'adoption d'une déclaration finale, ce qui risquait d'affaiblir la crédibilité du traité et son statut de pierre angulaire de la non-prolifération.

Il a ajouté que cette conférence ne conduirait pas non plus à modifier le traité, alors même que le TNP, texte très court, gagnerait à être précisé sur certains points.

Par exemple, les termes de l'article IV relatifs à l'« utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques », qui se trouvent être au cœur des négociations entre la troïka européenne et l'Iran, ne sont pas définis dans le traité. Ainsi, l'Iran interprète cet article comme fondant un droit à la maîtrise de l'ensemble du cycle du combustible, y compris l'enrichissement, alors que les Européens ont une interprétation restrictive de cet article, d'ailleurs conforme aux intentions des négociateurs.

De même, un débat existe sur l'interprétation de l'article VI relatif au désarmement, à l'origine de positions radicalement différentes. Au sein même des Etats dotés de l'arme nucléaire, les Etats-Unis considère que l'engagement de désarmement nucléaire est une échéance lointaine, qui doit s'inscrire dans le cadre plus général du désarmement général et complet, qui concerne tous les Etats ; quant à la cessation de la course aux armements, ils la considèrent comme acquise. Si la France a une lecture convergente de cet article avec les Etats-Unis, les Britanniques ont, pour leur part, une conception beaucoup moins tranchée et sont plus sensibles aux obligations de désarmement inscrites dans le TNP.

Enfin, l'article X fait débat, même si, sur ce point, des avancées pourraient intervenir, tant l'annonce de retrait du traité par la Corée du Nord a révélé une faille du traité. A cet égard, M. Bruno Tertrais a salué l'intérêt de la proposition française, qui recueille d'ailleurs un large assentiment parmi les délégations, consistant à considérer qu'un Etat qui violerait le TNP avant de s'en retirer resterait comptable des violations commises, même après son retrait. Il a expliqué qu'en vertu de ce principe, en cas de retrait d'un Etat, le Conseil de sécurité des Nations unies pourrait être automatiquement saisi afin d'examiner si cet Etat a rempli ses obligations au sein du TNP.

En conclusion, M. Bruno Tertrais a estimé que la conférence d'examen du TNP ne s'ouvrait pas sous les meilleurs auspices : quand bien même cette conférence conduirait à l'adoption d'un document final, sa portée risque d'être modeste, tant que l'article VI relatif au désarmement, qui reste, à tort ou à raison, considéré par la majorité des Etats parties au traité comme son élément central, restera en débat. Si l'objectif est de préserver le rôle du TNP comme pierre angulaire de la non-prolifération, il importe de prendre en compte le fait que plus de cent pays considèrent que les Etats dotés de l'arme nucléaire ne remplissent pas les obligations et les engagements qu'ils ont souscrits dans le cadre du traité en matière de désarmement. Etablir un consensus sur ce point est une tâche de longue haleine, qui dépasse largement le calendrier de la présente conférence d'examen du TNP.

Après avoir rappelé que la Commission des affaires étrangères était saisie du projet de loi portant application du protocole additionnel à l'accord entre la France, la Communauté européenne de l'énergie atomique et l'Agence internationale de l'énergie atomique relative à l'application de garanties en France, le Président Edouard Balladur a observé qu'il était difficile d'apprécier la portée concrète du traité de non-prolifération. Il s'est interrogé sur les conséquences d'un échec des négociations en cours relatives à ce traité, jugeant cependant qu'un tel échec n'aurait pas pour effet de mettre fin à cette convention. Il s'est enfin demandé si les stipulations de ce traité étaient encore d'actualité compte tenu de l'évolution de la situation internationale depuis sa signature en 1968.

M. Bruno Tertrais a estimé que le regard porté sur l'énergie nucléaire avait considérablement évolué depuis 1968. Si, dans les années soixante, le nucléaire semblait, pour la plupart des Etats, synonyme de modernité et de progrès, cette énergie est considérée aujourd'hui comme présentant de grands risques d'utilisation. Il y a quarante ans, les pays du Sud n'entendaient pas se priver du cycle nucléaire qui était perçu comme une clé de leur développement. Ces pays n'ont plus la même vision aujourd'hui, même si certains Etats en développement considèrent encore qu'il leur serait nécessaire de disposer d'un accès à l'énergie nucléaire, ce qui n'est nullement synonyme d'un accès au cycle du combustible. Ils pourraient avoir ainsi à leur disposition quelques centrales nucléaires sans pour autant maîtriser ce cycle en totalité.

Il faut également constater que le risque de prolifération dans les années soixante était très différent de celui auquel la société internationale est confrontée aujourd'hui. Il s'agissait à l'époque d'éviter le déclenchement d'une guerre accidentelle entre les Etats-Unis et l'Union soviétique, en raison de l'action intempestive d'un Etat tiers qui aurait disposé de la bombe. Aujourd'hui, le contexte est très différent, le risque étant de voir un État se doter d'armes nucléaires et d'en faire directement usage. On peut penser cependant que le traité de non-prolifération, s'il devait être négocié aujourd'hui, ne serait pas radicalement différent dans son économie générale de celui qui fut signé en 1968. En revanche, on peut estimer qu'il serait désormais difficile de réunir le même nombre de signataires, les pressions des deux grandes puissances ayant à l'époque largement contribué au succès de ce traité.

La portée concrète de ce texte est celle de toute norme de droit international. On peut donc supposer que, si le traité de non-prolifération n'avait pas existé, les puissances nucléaires seraient aujourd'hui beaucoup plus nombreuses. Cette convention constitue essentiellement un socle de référence, dont il est question d'examiner cette année l'application et non de réviser les stipulations. Le risque de la procédure d'examen en cours est principalement de voir certains pays comme l'Iran tirer argument des carences du traité pour en affaiblir la portée et faire disparaître le consensus existant parmi les parties signataires autour de ce texte.

Le Président Edouard Balladur a objecté que l'intérêt des normes, y compris internationales, était d'empêcher certains comportements. N'est-il pas temps désormais, pour la communauté internationale, de passer de la concertation à la coercition ? Il a également souhaité savoir quel était le délai nécessaire pour passer de l'enrichissement de l'uranium à des fins civiles à la construction d'une arme nucléaire, certains estimant, en évoquant l'exemple du Japon, qu'un tel saut technologique pouvait être accompli très rapidement. Si tel est effectivement le cas, quelle portée peut avoir le traité de non-prolifération qui autorise un usage civil de l'énergie nucléaire ?

M. Bruno Tertrais a indiqué que, dans un tel processus, l'essentiel était d'enrichir, même faiblement, l'uranium, la première phase d'enrichissement étant la plus importante. Une fois cette étape franchie, la constitution d'une arme nucléaire peut ne prendre que quelques mois. On évoque effectivement parfois le cas du Japon qui, maîtrisant le cycle nucléaire à des fins civiles, pourrait très rapidement passer à un usage militaire. Une telle assertion est vraie, même s'il faut préciser que le Japon n'a pas recours aujourd'hui à l'uranium enrichi mais au plutonium, à partir duquel il est également possible de fabriquer des armes atomiques.

M. Paul Quilès a fait observer que, parmi les modes d'enrichissement du combustible nucléaire, seule la centrifugation était de nature proliférante. Il a ensuite considéré que le traité de non-prolifération ne valait que par l'engagement des Etats signataires à en respecter le contenu. L'exposé des motifs de ce traité laisse songeur, si l'on regarde les évolutions intervenues depuis la date de sa conclusion : il affirme ainsi l'objectif de « la cessation de la fabrication d'armes nucléaires et la liquidation de tous les stocks existants » et celui d'un « maintien de la paix et de la sécurité internationale » permettant de ne détourner « vers les armements que le minimum de ressources humaines et économiques du monde ». Ces objectifs prêtent à sourire, lorsque l'on voit l'état des stocks d'armes nucléaires dans le monde et les sommes englouties par l'armement, comparées à celles destinées au développement. En mettant la barre trop haut, le traité n'a-t-il finalement pas nui à sa crédibilité ?

M. Christian Philip a indiqué que l'une des critiques faite au traité était qu'il visait à interdire aux pays autres que les Etats-Unis et l'Union soviétique, le droit de se doter de l'arme nucléaire. Dans les faits, le traité n'est pas parvenu à empêcher certains Etats de se doter de l'arme nucléaire et il n'a pas freiné la prolifération. S'agissant des conférences d'examen comme celle de New York, certaines d'entre-elles se sont-elles déjà achevées sur un échec ?

M. Axel Poniatowski a demandé si l'on pouvait considérer que l'interprétation faite par la France et les Etats-Unis de l'article VI du traité était convergente et si celle-ci divergeait de la position britannique. Il a souhaité savoir où en était la négociation avec l'Iran, quels en étaient les points d'achoppement, et si cette question allait donner lieu à une prise de position du Conseil de sécurité.

Le Président Edouard Balladur a fait observer que de nombreux pays ont tiré parti du fait que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité dotés de l'arme nucléaire n'ont jamais fait part de leur intention de renoncer à l'arme atomique pour développer leur propre programme.

M. André Schneider a demandé dans quelle mesure les Etats signataires au traité pouvaient réellement contrôler les autres Etats Parties et s'est inquiété de la capacité de certaines organisations non étatiques à fabriquer la bombe nucléaire. Par ailleurs, il s'est dit très préoccupé par le transit chaque semaine, par la voie ferrée, dans sa commune, de déchets nucléaires à retraiter. Faut-il, à l'instar de scientifiques opposés à ce recyclage, considérer que certains équipements civils, à l'image de la centrale nucléaire de Fessenheim, représentent un danger nucléaire potentiel ?

En réponse aux différents intervenants, M. Bruno Tertrais a apporté les éléments de réponse suivants :

-  le traité visait à l'origine à éviter que la prolifération ne remette en cause l'objectif du désarmement nucléaire. Il cherchait également à écarter l'accroissement du risque de déclenchement d'une guerre, démultiplié par le nombre de pays détenteurs de la bombe et la généralisation d'un conflit nucléaire par enchaînement ;

-  l'objectif d'un désarmement nucléaire complet présente un caractère irréaliste, mais il ne faut pas pour autant considérer que ce traité est un échec dans la mesure où il a permis de limiter à 8 ou 9 le nombre de puissances nucléaires, alors qu'il pourrait y en avoir aujourd'hui de 20 à 30 sans ce dispositif ;

-  le traité n'explique pas à lui seul la limitation du nombre de pays dotés de l'arme nucléaire ; le « parapluie nucléaire » offert par les Etats-Unis à certains de leurs alliés, comme le Japon, Taiwan et la Corée du Sud, mais aussi à certains pays d'Europe, a participé efficacement au mouvement de non-prolifération ;

-  certaines conférences d'examen prévues par le traité se sont soldées par l'absence d'adoption d'un document final. A l'inverse, la conférence d'examen de 1995 a été la plus aboutie, puisqu'elle a décidé la prorogation du TNP pour une durée indéfinie ; alors que les conférences précédentes auraient pu aboutir à la non reconduction du traité, le résultat de la conférence de New York est à bien des égards plus important, paradoxalement, en raison du contexte international actuel ;

-  il est très inquiétant que certains pays n'aient pas signé le protocole additionnel au traité et qu'ils n'aient aucun accord de garantie dans le cadre de l'AIEA ; il n'est pas certain que la conférence de New York permette d'avancer sur ce point ; à titre d'exemple, l'Arabie Saoudite souhaite être exempte de tout mécanisme d'inspection et l'Iran a signé le protocole, mais ne l'a pas encore ratifié ;

-  les Etats-Unis majorent le risque du terrorisme nucléaire, dont ils ont une approche excessivement alarmiste ; la probabilité pour les mouvements terroristes de se doter de l'arme nucléaire est aujourd'hui quasi nulle, car il est très difficile d'accéder aux matières nécessaires à la confection de la bombe, même s'il existe encore quelques sites insuffisamment protégés en Russie ; plus une bombe est compacte, plus elle nécessite la mobilisation de connaissances et de moyens importants, hors de portée des organisations terroristes ; le vrai risque est celui de l'utilisation d'une bombe sale, mais l'impact d'une telle arme est avant tout d'ordre psychologique, le nombre de victimes qu'elle est susceptible d'occasionner étant très limité.

-  l'article VI du traité concerne la cessation de la course aux armements, le désarmement nucléaire et le désarmement général et complet. La Grande-Bretagne interprète cet article, clé de voûte de la crédibilité du traité, de façon moins restrictive que la France ou les Etats-Unis, considérant qu'il s'agit notamment de démontrer de bonne foi aux autres Parties l'effort des Etats dotés de l'arme atomique vers le désarmement nucléaire ;

- s'agissant de l'Iran, trois scénarios sont envisageables à la suite de l'élection présidentielle du mois de juin : soit les Européens reconnaissent à l'Iran le droit à une petite capacité symbolique expérimentale d'enrichissement, avec, par exemple, une usine pilote d'enrichissement dans laquelle, selon l'AIEA, sont actuellement installées 164 centrifugeuses ; soit les Iraniens revendiquent leur droit inaliénable à l'énergie nucléaire et considèrent qu'il est aussi un droit inaliénable au cycle du combustible, y compris à l'enrichissement par centrifugation ; soit enfin, les négociations s'éternisent et les Iraniens mènent secrètement des activités, préalables à l'enrichissement, de conversion d'uranium naturel en hexafluorure d'uranium ; dans cette dernière hypothèse, faute de soutien de la Chine, le Conseil de sécurité ne pourrait adopter de résolution coercitive mais les Etats-Unis, l'Europe et le Japon adopteraient des sanctions adaptées et coordonnées ;

-  le désarmement nucléaire n'a jamais constitué un facteur de non-prolifération. Entre 1987 et 1995 par exemple, les mesures de désarmement prises par les Etats nucléaires n'ont eu aucune répercussion sur les programmes de l'Irak, de l'Iran, de l'Inde, du Pakistan, d'Israël ou de la Libye ;

-  aujourd'hui, un retrait du traité de l'Iran représenterait un véritable risque pour le régime de non-prolifération. Plus que le retrait, l'objectif de l'Iran est, peut-être, s'inspirant du cas du Japon, de détenir la capacité de posséder l'arme nucléaire tout en étant en règle vis-à-vis du TNP.

Le Président Edouard Balladur a remercié M. Bruno Tertrais pour la clarté et la précision de son propos et il a conclu qu'il en avait tiré deux enseignements principaux : malgré ses faiblesses, mieux vaut un traité de non-prolifération qu'aucune règle en la matière ; la stabilité mondiale repose avant tout sur la capacité de dissuasion des cinq membres du Conseil de sécurité, détenteurs légitimes de l'arme nucléaire.

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