COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 13

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 2 décembre 2003
(Séance de 11 heures)

Présidence de M. Yves Fromion, vice-président

SOMMAIRE

 

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- Examen, pour avis, du projet de loi de finances rectificative pour 2003 - n° 1234
(M. Marc Joulaud, rapporteur pour avis)


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Loi de finances rectificative pour 2003 (avis)

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné, pour avis, sur le rapport de M. Marc Joulaud, le projet de loi de finances rectificative pour 2003 - n° 1234.

M. Marc Joulaud, rapporteur pour avis, a indiqué que le projet de loi de finances rectificative pour 2003 ouvre, en ce qui concerne les services militaires, 32,2 millions d'euros de crédits au titre III et 499 millions d'euros au titre V et qu'il annule 12,2 millions d'euros à ce même titre. Il complète un dispositif qui inclut aussi un décret d'avance et un décret d'annulation, tous deux du 26 novembre 2003, ainsi qu'un décret de virement. Le décret d'avance ouvre au titre III 400 millions d'euros, destinés au financement des opérations extérieures, 365 millions d'euros ayant pour objet le paiement des surcoûts de rémunérations et 35 millions d'euros celui des surcoûts de fonctionnement. Le décret d'annulation constitue le gage du décret d'avance et il annule le même montant de crédits : 20 millions d'euros au titre III et 380 millions d'euros aux titres V et VI.

L'originalité du projet de collectif est qu'il rétablit les crédits d'équipement ainsi annulés : les 499 millions d'euros d'ouvertures au titre V se décomposent en effet entre 119 millions d'euros pour compenser l'application de la taxe sur la valeur ajoutée à DCN et 380 millions d'euros pour rétablir les crédits annulés par le décret d'annulation.

Pour la première fois, les surcoûts dus aux opérations extérieures ne sont pas financés par des annulations équivalentes de crédits d'équipement. Les crédits d'équipement établis par la loi de finances initiale pour 2003 seront en situation d'être consommés dans leur intégralité. Cette préservation en 2003 des crédits d'équipement est une très grande nouveauté dont il faut se féliciter.

Néanmoins, les conditions du financement des opérations extérieures demeurent insatisfaisantes. Le surcoût de celles-ci s'élève en 2003 à 648 millions d'euros, soit presque autant qu'en 2002, répartis entre 388 millions d'euros pour les rémunérations, 193 millions d'euros pour le fonctionnement et 67 millions d'euros pour l'équipement. Le projet de loi de finances initiale pour 2003 n'ayant pas mis en place les crédits nécessaires au financement de cette charge, il a fallu payer les rémunérations supplémentaires sur le budget courant. Le ministère s'est trouvé, à la fin du mois de novembre, dans l'impossibilité de payer l'intégralité des traitements de décembre. Les crédits d'équipement assurent la trésorerie des crédits ordinaires pendant un mois. Cette situation montre une fois de plus que la procédure de financement des opérations extérieures n'est pas bonne et qu'il est absolument nécessaire qu'à l'avenir les crédits qui leur sont destinés soient inscrits en loi de finances initiale.

En 2003, ces crédits traduisent une forte diminution de l'intensité des opérations en Afghanistan, qui passent de 203 millions d'euros à 66 millions d'euros de surcoûts, pour 1 500 militaires engagés contre 4 200 en 2002, une réduction plus prudente du dispositif dans les Balkans, avec 5 950 militaires et 277 millions d'euros de surcoûts contre 8 000 militaires et 361 millions d'euros en 2002, et une forte reprise des opérations en Afrique, avec plus de 7 000 militaires et 278 millions d'euros de surcoût, contre 1 350 militaires et 75 millions d'euros en 2002. Plus de 15 000 militaires sont en opérations, soit plus qu'en 2002 où ils étaient 14 500. L'Afghanistan représente 10 % des surcoûts, les Balkans 43 % et l'Afrique 44 %. Cette montée en force de l'Afrique ne traduit pas le retour des interventions d'autrefois. Si l'opération en Côte d'Ivoire a été lancée comme une opération bilatérale, elle est désormais conduite comme une opération multilatérale sous l'égide de l'ONU.

Les surcoûts de rémunérations liés à ces opérations sont intégralement financés, par le décret d'avance pour 365 millions d'euros et par le projet de loi de finances initiale pour le solde. En revanche, seuls 73 millions d'euros des 193 millions d'euros de surcoûts de fonctionnement sont financés par des abondements de crédits : ceux-ci se répartissent entre 20 millions d'euros pour le collectif, 35 millions d'euros pour le décret d'avance et 18 millions d'euros pour le décret de virement. 120 millions d'euros restent donc à la charge des armées, de même que les surcoûts de dépenses d'équipement, soit 67 millions d'euros.

Alors qu'aucun crédit d'entretien programmé des matériels n'est annulé par le décret d'annulation, 150 millions d'euros sont affectés à ce titre par le projet de loi de finances rectificative.

La compensation de l'incidence fiscale de la réforme de DCN était attendue. En effet, la transformation de DCN en société nationale la soumet aux conditions de droit commun en matière de fiscalité. La loi de finances initiale pour 2003 avait ouvert les autorisations de programme nécessaires à la compensation sur les commandes de 2003 ; le projet de loi de finances pour 2004 ouvre les crédits de paiement nécessaires pour les paiements en 2004. Le projet de loi de finances rectificative complète le dispositif en ouvrant les crédits de paiement nécessaires pour 2003 et les autorisations de programme nécessaires pour les commandes de 2004. Si le dispositif est donc satisfaisant pour 2003 et 2004, il est indispensable de trouver un mécanisme qui permette de régler la situation des années ultérieures.

Le projet de loi de finances rectificative complète par ailleurs, à hauteur de 412 millions d'euros, la dotation en autorisations de programme nécessaires au financement de la première commande de quatre frégates multimissions, qui bénéficiait déjà de 1,7 milliard d'euros dans le projet de loi de finances pour 2004.

Enfin, l'article 48 permet de satisfaire une demande ancienne de la gendarmerie, l'intégration de l'indemnité de sujétion spéciale de police (ISSP) dans les retraites dès l'âge de 50 ans, comme pour les policiers, et non 55 ans, ce qui était le cas jusqu'à présent.

M. Yves Fromion, président, a salué trois « premières » : la loi de programmation militaire est respectée pour la deuxième année consécutive ; le financement des opérations extérieures n'est pas gagé par une réduction des crédits d'équipement ; les crédits d'entretien programmé du matériel sont préservés.

M. Charles Cova a demandé si le remboursement de la TVA payée par la marine nationale sur les équipements livrés par DCN était garanti pour les années à venir.

Le rapporteur pour avis a répondu que, si la compensation de la TVA était garantie pour 2003 et 2004 et sans doute pour la fin de la période de programmation, une solution plus durable restait à trouver.

M. Yves Fromion, président, a fait observer que l'entretien de certains matériels anciens mettait les armées dans des situations peu confortables. Ainsi, les systèmes de freinage des blindés AMX 10 RC sont dérivés de ceux des Citroën DS 19 et DS 21. Pour les entretenir, il a fallu en reconstituer les éléments, l'industriel ayant cessé de les produire.

Il a ensuite estimé que le provisionnement en loi de finances initiale des crédits relatifs aux opérations extérieures pouvait être rendu difficile par le caractère imprévisible de certaines de ces opérations et risquerait de poser problème pour la conduite de notre action diplomatique.

M. Jean Michel a souligné que l'actuelle majorité n'avait pas toujours respecté ses engagements budgétaires en matière de défense, notamment entre 1993 et le début de l'année 1997. Il a ensuite jugé que l'effort, de l'ordre de 187 millions d'euros, demandé cette année au ministère de la défense n'était pas anodin et pèserait sur l'exécution des budgets d'investissement et surtout de fonctionnement.

M. Yves Fromion, président, a répondu que la contribution du ministère de la défense s'inscrivait dans le cadre de l'effort général et qu'elle ne remettait pas en cause l'application de la loi de programmation.

Saluant les efforts de transparence budgétaire réalisés par le ministère de la défense depuis plusieurs années, M. Jean Michel a considéré qu'ils rendaient plus regrettable encore le financement a posteriori des opérations extérieures. L'argument selon lequel son inscription en loi de finances initiale pourrait réduire la liberté d'action de notre pays se heurte au fait que la quasi-totalité des opérations extérieures auxquelles la France participe est menée sous l'égide de l'ONU.

M. Yves Fromion, président, a répondu que, même si le montant des crédits consacrés aux opérations extérieures pouvait s'avérer relativement stable d'une année sur l'autre, sa répartition entre les différents théâtres d'opération pouvait fluctuer de manière importante.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption du projet de loi de finances rectificative pour 2003.

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