COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 10

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 26 octobre 2005
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Guy Teissier, président

SOMMAIRE

 

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Examen pour avis des crédits pour 2006

- Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » :

    · « liens entre la Nation et son armée » (M. Jean-Claude Viollet, rapporteur pour avis)



2

- Mission « Sécurité » :

    · « gendarmerie nationale » (M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis).

6

- Mission « Défense » :

    · « équipement des forces (espace, communications, dissuasion) »

       (M. Jean Michel, rapporteur pour avis)

9

    · « préparation et emploi des forces (air) »

       (M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis)

12

    · « préparation et emploi des forces (forces terrestres) »

       (M. Joël Hart, rapporteur pour avis)

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Loi de finances pour 2006 : Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » : « liens entre la Nation et son armée » (avis).

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Claude Viollet, les crédits pour 2006 de la Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » : « liens entre la Nation et son armée ».

M. Jean-Claude Viollet, rapporteur pour avis, s'est réjoui que l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), du 1er août 2001, conduise la commission à se prononcer annuellement sur la politique poursuivie afin de maintenir un lien étroit entre les armées professionnelles et les citoyens. Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit de doter le programme budgétaire « Liens entre la nation et son armée » de près de 294,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 279 millions d'euros en crédits de paiement. L'ampleur de l'augmentation de ces financements par rapport à 2005, de 12,5 % et 7,7 %, montre que la promotion de l'image des militaires auprès de nos concitoyens revêt un aspect prioritaire.

Le programme se subdivise en quatre actions à valeur indicative, le principe de fongibilité des crédits s'appliquant à l'échelle des programmes.

La première des actions concerne la journée d'appel et de préparation à la défense (JAPD). La loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national a suspendu la conscription pour les jeunes garçons nés après le 31 décembre 1978 et instauré un service national universel qui concerne les jeunes Français des deux sexes. Ce dernier comprend trois obligations : le recensement, effectué à 16 ans ; l'appel de préparation à la défense, concentré sur une journée au cours de laquelle les jeunes doivent se rendre dans une enceinte militaire ou civile pour suivre des modules d'information et passer des tests de lecture ; l'appel sous les drapeaux, permettant à des volontaires de servir dans les armées.

Les montants inscrits pour 2006 sont significatifs : avec 180 millions d'euros en autorisations d'engagement et 166 millions d'euros en crédits de paiement, l'action JAPD représente à elle seule près des deux tiers de l'enveloppe du programme. Mais les crédits prévus serviront aussi à couvrir les frais de fonctionnement de la direction du service national, qui exerce également d'autres missions, à commencer par la conservation des archives des personnels militaires non-officiers. Du coup, 80 % seulement des crédits de l'action correspondent vraiment à l'objet affiché, ce qui traduit une entorse à la LOLF.

La JAPD a apporté la preuve de son utilité pour la détection des difficultés d'illettrisme et, depuis peu, pour l'initiation des jeunes au secourisme. On peut être, en revanche, plus dubitatif sur son impact pour ce qui concerne la valorisation des armées auprès des jeunes : si 28,2 % se sont déclarés intéressés par des contacts approfondis avec les armées à l'issue de leur JAPD au premier semestre 2005, la traduction de cet intérêt en démarches effectives pour un recrutement reste faible.

Apportant son soutien au principe de la JAPD, le rapporteur s'est inquiété d'une recrudescence de son coût pour chaque participant : stabilisé à 128 euros en 2004, il devrait osciller entre 140 et 145 euros en 2005. L'initiation au secourisme, décidée l'an passé, explique en partie cette évolution, puisque sa charge devrait avoisiner 6,2 millions d'euros cette année. Des gains de productivité pourraient certainement être dégagés en réduisant les effectifs de la direction du service national, dont 555 personnes ne participent pas à la JAPD. A plus long terme, le ministère de la défense ne pourra pas échapper à une réflexion sur l'optimisation des frais d'initiation au secourisme. Actuellement sous-traitée à la Croix rouge française, cette mission pourrait être confiée, à l'avenir, à des personnels militaires ou civils spécialement formés à cet effet, voire à des sapeurs-pompiers professionnels ou volontaires.

La deuxième action du programme est destinée à retracer les financements de la politique de mémoire. En 2006, 8,2 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 12,3 millions d'euros de crédits de paiement lui seront destinés, en forte diminution par rapport à 2005. La contraction de 45,5 % des seuls crédits de paiement s'explique tout à la fois par des transferts de financements vers une autre action et aussi par la fin d'un calendrier commémoratif particulièrement chargé ces deux dernières années. En 2006, l'accent sera plus particulièrement mis sur les batailles de Verdun et de la Somme, avec pour point d'orgue l'inauguration, courant juin, d'un monument dédié aux soldats musulmans morts pour la France au cours de la première guerre mondiale, ainsi que sur le procès de Nuremberg et les opérations extérieures conduites sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies.

La troisième action du programme retrace les financements dédiés à la promotion et la valorisation du patrimoine culturel du ministère de la défense. Le projet de budget pour 2006 y consacre 62,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 60,7 millions d'euros en crédits de paiement. Il s'agit là du deuxième poste de dépenses du programme. Ces montants sont notamment destinés à couvrir la mise en place du service historique de la défense, service à compétence nationale qui pourrait préfigurer l'avenir des archives nationales. Cette action est aussi consacrée aux trois musées des armées qui possèdent le statut d'établissement public. Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit de leur allouer près de 11,3 millions d'euros en fonctionnement et 15,3 millions d'euros en investissement.

On peut regretter que cette action « Promotion et valorisation du patrimoine culturel » soit l'une des moins cohérentes du programme. Non seulement les dix-sept musées de tradition de l'armée de terre et celui du service de santé des armées ne lui sont pas rattachés mais sont inscrits au programme « Préparation et emploi des forces » de la mission « Défense », mais de surcroît, les musiciens militaires professionnels, dont le chiffre varie entre 1 208 et 1 321 selon les sources, en seront eux aussi exclus alors même que les événements musicaux des armées sont supposés y être imputés.

Ce problème méthodologique se retrouve pour la dernière action du programme, relative à la communication, dont les crédits avoisinent 43,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 39,9 millions d'euros en crédits de paiement. Cette présentation ne concerne cependant que les moyens de la délégation à l'information et à la communication de la défense (DICoD) et de l'établissement de communication et de production audiovisuelle de la défense (ECPAD). Tous deux bénéficient en fait d'un peu moins de la moitié des moyens budgétaires et humains consacrés à la communication du ministère, le solde étant dévolu aux services d'information et de relations publiques des armées, au service de communication de la délégation générale pour l'armement ou au bureau de communication du service de santé des armées, dont le financement relève du programme « Préparation et emploi des forces ». Ceci contrevient, là aussi, aux dispositions de la LOLF.

Par conséquent, si l'utilité de dépenses destinées à promouvoir la mémoire ou le patrimoine culturel du monde combattant, à sensibiliser les jeunes aux enjeux de la défense, voire à permettre au ministère de la défense de communiquer en direction du grand public n'est pas contestable, la cohérence et la pertinence du contenu du programme budgétaire prévu ne sont pas à la hauteur de l'exigence de transparence formulée par le Parlement lors de l'adoption de la LOLF. Pour cette raison, le rapporteur s'en est remis à la sagesse de la commission.

A l'issue de cette présentation, la commission a examiné un amendement du président Guy Teissier ayant pour objet de revaloriser d'un point la retraite des anciens combattants.

Le président Guy Teissier a rappelé qu'il existait depuis plusieurs années une demande forte et pressante du monde combattant en vue de cette revalorisation. L'amendement soumis au vote de la commission vise à supprimer, au sein de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », 18 millions d'euros sur le programme « Liens entre la nation et son armée » pour affecter cette somme au programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » : 14 millions d'euros seraient prélevés sur les dépenses de personnel des actions « Communication » et « Journée d'appel et de préparation à la défense », les 4 millions restants étant ponctionnés sur les dépenses de fonctionnement et d'investissement de l'action « Communication ».

M. Jean-Claude Viollet a souligné que la revalorisation des retraites des anciens combattants était une préoccupation partagée sur tous les bancs de la commission et, au-delà, sur tous ceux de l'Assemblée nationale. Pour autant, il a attiré l'attention sur les conséquences de la réduction des crédits affectés aux liens entre la nation et son armée. On ne peut reconnaître l'intérêt des journées nation-défense ou de la journée d'appel et de préparation à la défense ni se féliciter de l'amélioration constante de l'image des armées auprès de nos concitoyens, d'un côté, et oublier qu'il s'agit du résultat d'une action de communication gérée par la DICoD, sous l'impulsion de la ministre de la défense, de l'autre.

Il est certes regrettable que le Gouvernement n'accorde pas davantage d'attention au monde combattant. Mais amputer de 18 millions d'euros les crédits destinés aux liens entre la nation et son armée pour augmenter d'un point la pension des anciens combattants revient à considérer le budget de communication de la défense comme une variable d'ajustement. La direction du service national a besoin de tous les moyens inscrits à l'action « Journée d'appel et de préparation à la défense » pour continuer à travailler sur le recensement et sur les modalités d'une éventuelle mobilisation générale, qui reste la finalité ultime du processus.

Pour toutes ces raisons, le rapporteur a indiqué qu'il s'en remettrait à la sagesse de la commission sur le vote de l'amendement présenté par le président Guy Teissier.

Observant que l'expression « variable d'ajustement » a été employée durant des années lorsque le budget de la défense dans son ensemble était utilisé pour combler les besoins d'autres ministères, M. René Galy-Dejean a estimé que de tels termes étaient inappropriés pour qualifier les sommes en cause dans l'amendement soumis au vote de la commission. Ce dernier permet aux parlementaires d'user de la liberté nouvelle, offerte par la LOLF, qui est de modifier la répartition des crédits au sein d'une même mission. Il convient de ne pas laisser échapper cette opportunité. L'ensemble de la représentation nationale a pris des engagements à l'égard des anciens combattants. Ce premier geste serait le bienvenu. Les anciens combattants font partie intégrante du lien entre la nation et son armée. Etre attentif à leurs soucis revient aussi à renforcer ce lien.

Déclarant qu'il se rallierait à l'amendement du président, M. Galy-Dejean a souhaité connaître l'origine des quatre millions d'euros qui ne seront pas prélevés sur les dépenses de personnel du programme « Liens entre la nation et son armée ».

Le président Guy Teissier a précisé que cette somme serait répartie entre les crédits de fonctionnement, hors rémunérations et charges sociales, d'équipement et d'intervention inscrits à l'action « Communication ».

M. Jérôme Rivière a lui aussi observé que l'expression « variable d'ajustement » s'appliquait jusqu'à présent au ministère de la défense lorsque ses crédits étaient réaffectés sur d'autres départements ministériels. Il s'est déclaré favorable au transfert de crédits de l'action « Journée d'appel et de préparation à la défense » vers l'action « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », soulignant qu'un tel amendement replaçait les parlementaires au cœur de leur mandat.

Tout en reconnaissant l'importance de l'action de communication menée par le ministère de la défense, le président Guy Teissier a rappelé que le monde combattant était composé de personnes modestes confrontées à la hausse du coût de la vie. La LOLF offre au Parlement l'opportunité de rompre avec un immobilisme qui n'a que trop duré. Peut-être le vote de cet amendement amènera-t-il le Gouvernement à prendre des initiatives en séance publique ?

M. Jean Michel s'est félicité de la possibilité accordée par la LOLF aux parlementaires d'exercer plus largement leur pouvoir d'amendement sur les projets de loi de finances. Soulignant la faiblesse de la hausse proposée par l'amendement -seulement 36 euros par an pour chaque ancien combattant-, il s'est demandé s'il ne convenait pas, au lieu de proposer une augmentation d'un point, en année pleine, de voter une hausse de deux points sur seulement six mois, à partir du 1er juillet 2006, de manière à ce que cette évolution soit pérennisée en 2007.

Après avoir admis qu'une hausse de deux points serait certainement préférable, le président Guy Teissier a fait valoir qu'elle coûterait deux fois plus cher et amputerait de façon trop importante les crédits de communication. Il a estimé plus sage de s'en tenir, pour l'instant, à une hausse d'un seul point et de réexaminer la situation dans un an.

M. René Galy-Dejean a souhaité que cette première démarche des parlementaires de la commission ne soit pas altérée par des considérations démagogiques. Si la responsabilité budgétaire pesait auparavant exclusivement sur le Gouvernement, elle est désormais partagée avec le Parlement. C'est pourquoi il convient d'être raisonnable et responsable.

M. Jean-Claude Viollet s'est étonné que le prélèvement de crédits envisagé s'effectue sur les moyens de la DICoD plutôt que sur ceux des SIRPA. Certes, les crédits affectés aux SIRPA ne sont pas intégrés à la mission, mais ils ne sauraient être exonérés de tout effort. Un amendement sur les crédits des SIRPA au sein du programme « Préparation et emploi des forces » permettrait d'ailleurs de rendre plus équitable le poids de la revalorisation des pensions des anciens combattants. L'an passé, il avait été obtenu que la DICoD ne fasse plus l'avance des frais d'impression des revues des armées. Aujourd'hui, elle se trouve sanctionnée malgré ses efforts de productivité.

Il convient, en outre, d'être exemplaire à l'égard des crédits consacrés à la direction du service national. Le rapporteur s'est refusé à pallier les carences de l'Etat depuis trois ans en ponctionnant les moyens de communication du ministère de la défense. Il eût été souhaitable de disposer de plus de temps pour mesurer exactement l'incidence de l'amendement proposé.

Le président Guy Teissier a rappelé que ses marges de manœuvre étaient réduites du fait des règles de la LOLF. Les amendements de transferts de crédits se font au sein d'une même mission et, en l'espèce, les crédits des SIRPA sont rattachés à la mission Défense.

M. Jérôme Rivière a jugé que l'amendement constituait un signe fort permettant de montrer que le Parlement respecte la parole donnée en matière d'augmentation de la retraite mutualiste du combattant. La proposition de M. Jean Michel en termes de calendrier est astucieuse ; toutefois, il n'appartient pas au Parlement de fixer la date de revalorisation des retraites.

La commission a alors adopté l'amendement présenté par le président Guy Teissier.

La commission a donné un avis favorable au programme « Liens entre la nation et son armée » ainsi modifié et émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

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Mission « Sécurité » : « gendarmerie nationale » (avis).

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Philippe Folliot, les crédits de la Mission « Sécurité » : « gendarmerie nationale » pour 2006.

M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis, a rappelé en préambule que les crédits de la gendarmerie pour 2006 s'inscrivaient dans le cadre d'une double programmation ambitieuse prévue par la loi de programmation militaire (LPM) et la loi d'orientation pour la sécurité intérieure (LOPSI), dont ils constituaient l'avant-dernière annuité.

La majorité des crédits figurent dans un programme piloté par le directeur général de la gendarmerie. On peut s'interroger sur le rattachement des crédits immobiliers et informatiques au programme « soutien de la politique de la défense » de la mission « Défense » au regard de la lisibilité de l'action spécifique de la gendarmerie et de l'exigence d'une nomenclature à coût complet voulue par la LOLF. Il est nécessaire de disposer d'une force de police à statut militaire capable, en particulier dans le cadre des OPEX, de participer à la fois aux volets militaire et civil des opérations et dont le savoir-faire en la matière est reconnu. Il paraît alors logique que le budget de cette force relève du ministère de la défense. Il serait cependant souhaitable de rechercher une plus grande autonomie budgétaire, donnant à la gendarmerie les moyens d'accomplir ses missions.

Depuis 2003, la gendarmerie s'est engagée dans une dynamique de modernisation majeure qui s'est traduite par la mise en place, au 1er juillet 2005, d'une nouvelle chaîne de commandement territorial devant accroître la réactivité opérationnelle de l'arme et par une réorganisation territoriale, comprenant des opérations de redéploiement et la mise en place des communautés de brigades.

Les résultats enregistrés attestent des efforts déployés par les personnels. En matière de lutte contre la délinquance, le nombre de crimes et délits constatés baisse de façon ininterrompue depuis février 2003 -il est en recul de 3,08% en septembre 2005-. Le taux d'élucidation ne cesse de s'améliorer. Dans le domaine de la lutte contre l'insécurité routière, le nombre d'accidents a diminué en 2004. Enfin, la gendarmerie a renforcé son action dans la lutte contre l'immigration illégale.

Dans un contexte budgétaire particulièrement difficile, l'effort consenti en faveur de la gendarmerie pour 2006 souligne l'importance de son action au service de la sécurité et traduit la volonté de donner à l'arme les moyens d'accomplir ses missions. Les dotations s'élèvent à 6,7 milliards d'euros, en progression de 6,41 %. A ces crédits, il convient d'ajouter les 600 millions d'euros inscrits sur le programme de soutien de la politique de la défense mais destinés à la gendarmerie.

Ces moyens permettent de conserver une perspective crédible d'exécution de la LOPSI en terme d'emplois et de poursuivre le déroulement du plan d'adaptation des grades aux responsabilités (PAGRE). Cependant, les crédits d'investissements, malgré la progression remarquable des crédits d'équipement alloués au titre de la LOPSI, ne permettent pas de rattraper les retards enregistrés surtout en matière d'immobilier domanial.

Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit la création de 2 000 emplois supplémentaires au titre de la LOPSI. Le coût de ces créations, en rémunérations et charges sociales, est de 36 millions d'euros. L'annuité 2006 marque donc une nette progression par rapport à l'annuité 2005 qui fut en retrait des prévisions. Il conviendra de prolonger cet effort de rattrapage en 2007 avec la création de 1900 emplois afin d'atteindre l'objectif fixé par la loi de 7000 emplois supplémentaires. La deuxième annuité du PAGRE se traduit, pour 2006, par la transformation de 1656 postes de sous-officier subalterne en 750 postes d'officiers, accompagnés du repyramidage de 906 postes de sous-officiers supérieurs. Les moyens dédiés à cette mesure s'élèvent à 15,4 millions d'euros.

L'exercice 2006 se caractérise par la prise en compte, dans les crédits du programme 152, de la rémunération des personnels civils et des pensions. Les crédits demandés pour 2006 au titre des dépenses de personnel s'élèvent à 5 847 millions d'euros, dont 3 486 millions d'euros de rémunérations et charges sociales, en progression de 3,93 % à périmètre comparable.

La gendarmerie bénéficie à nouveau d'une tranche de crédits de 3 millions d'euros consacrés à la prime de résultats exceptionnels.

Les crédits de fonctionnement de la gendarmerie sont répartis entre le programme 152, « gendarmerie nationale », d'une part, et le programme 212, « soutien de la politique de la défense », d'autre part. Les crédits de fonctionnement pour le programme gendarmerie s'élèvent à 551 millions d'euros. Le changement trop important de périmètre entre 2005 et 2006 ne permet pas d'établir des comparaisons exhaustives. Le transfert global des crédits informatique et infrastructure sur le programme 212, se traduit par un glissement de 341,7 millions d'euros du budget de la gendarmerie, au sens de l'ordonnance de 1959, vers l'action 4, politique immobilière, de ce programme de la mission défense. Ce montant correspond aux crédits des locations immobilières.

Les crédits d'équipement de la gendarmerie se répartissent entre le programme « gendarmerie » et le programme « soutien de la politique de la défense ». Les crédits d'équipement inscrits dans le programme 152 s'élèvent en 2006 à 271,30 millions d'euros de crédits de paiement. Les crédits d'infrastructure et d'informatique de gestion transférés au programme 212 s'élèvent à 206,5 millions d'euros en crédits de paiement. Ces montants comprennent 200 millions d'euros de crédits de paiement au titre de la LOPSI, soit une progression de 66 % au regard des montants programmés en 2005. Ils ne permettent pas de rattraper le retard accumulé après trois années marquées par une insuffisance des crédits. L'effort de rattrapage nécessaire paraît trop important pour que les objectifs puissent être atteints en 2007. Un lissage sur deux ans serait un objectif louable.

Les moyens prévus pour le programme 152 permettront de financer en partie le remplacement d'hélicoptères Alouette III, par des appareils du type EC145, et d'hélicoptères de surveillance et d'intervention du type Ecureuil. Au titre de la LOPSI, le remplacement des véhicules de la gendarmerie mobile se poursuivra. Le programme de renouvellement des blindés sera également engagé. La gendarmerie s'oriente vers un VAB 6X6 modifié pour intégrer les spécificités nécessaires à l'exécution des missions de maintien de l'ordre : le véhicule, déjà en service dans les armées, permet d'envisager une communauté logistique intéressante, notamment dans le cadre des opérations extérieures, et représente une solution au regard du maintien en condition opérationnelle.

Les crédits immobiliers de la gendarmerie sont inscrits dans le programme 212, soutien de la politique de la défense. Les besoins dans ce domaine restent considérables. L'examen de la situation fait apparaître un effet de ciseau entre le parc domanial et le parc locatif : la dégradation du premier se poursuit tandis que l'état du parc locatif tend à s'améliorer. Le ratio entre mises en chantier d'unités-logement construites par l'Etat et celles issues du parc locatif s'est inversé depuis 2005. Il serait particulièrement opportun de s'inspirer des résultats obtenus sur le parc immobilier locatif, grâce à la mise en œuvre de dispositifs attractifs, pour rechercher des solutions qui permettraient de générer une dynamique significative d'amélioration du parc domanial. La hausse des crédits d'infrastructure permettra d'accroître le nombre d'opérations de maintenance de ce parc. Dans le cadre de l'étude relative à l'externalisation du parc domanial de la gendarmerie, la société Socotec a évalué à 617 millions d'euros sur 5 ans le montant des travaux de maintenance et de réhabilitation nécessaires.

La commission a approuvé les conclusions du rapporteur sur les crédits du programme « Gendarmerie nationale » et a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurité ».

Mission « Défense » : « équipement des forces (espace, communications, dissuasion) » (avis).

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean Michel, les crédits de la Mission « Défense » : « équipement des forces (espace, communications, dissuasion) » pour 2006.

M. Jean Michel, rapporteur pour avis, a rappelé que d'un point de vue historique, la construction de la force de dissuasion avait entretenu des liens très étroits avec l'espace, tant dans le domaine des lanceurs que dans celui des satellites d'observation. L'étude conjointe des questions d'équipement des forces liées à la dissuasion, aux communications et à l'espace reste pertinente.

Leurs poids budgétaires sont importants, puisque la dissuasion représente de l'ordre de 20% des crédits d'équipements et que les systèmes de communications, de renseignement et de commandement correspondent pour leur part à environ 10 % de ces mêmes crédits.

Surtout, ils constituent de véritables enjeux de souveraineté, la France ayant choisi de pérenniser sa dissuasion tout en se donnant les moyens de maîtriser de manière autonome l'ensemble de ses composantes, tandis que les réseaux de communications interarmées et l'espace conditionnent désormais l'efficacité opérationnelle des forces et la capacité à jouer un rôle de nation cadre dans des opérations menées en coalition. Cette souveraineté s'exerce toutefois différemment, puisque l'ampleur des enjeux spatiaux conduit à porter la notion d'autonomie stratégique au niveau européen, alors que la dissuasion reste encore avant tout un enjeu national.

La présentation budgétaire de la dissuasion nucléaire a été sensiblement modifiée avec le passage à la LOLF. Les crédits qui lui sont dévolus sont désormais répartis entre quatre programmes, l'essentiel des crédits étant affecté au programme 146 « Équipement des forces », qui représente 86 % du total.

L'évolution des crédits en 2006 est caractérisée par une croissance plus rapide que ces dernières années, avec une progression de 5,5 % des crédits de paiement et de 13,4 % des autorisations d'engagement. Ce phénomène s'explique par l'arrivée de phases coûteuses de programmes d'armement, avec notamment des tirs d'essai de M51 et d'ASMP-A. L'exercice 2006 marquera donc un pic au sein de la LPM, avec 21,5% du titre 5 consacrés à la dissuasion, contre 20,9 % en 2005.

La force océanique stratégique (FOST) reste de loin la principale composante de la dissuasion nucléaire, tant du point de vue opérationnel, que budgétaire. Au total, l'ensemble des opérations et des programmes liés à la FOST représente un peu plus de la moitié des crédits de paiement consacrés à la dissuasion. Cette situation s'explique notamment par l'ampleur du programme de renouvellement de cette composante, qui touche à la fois les plateformes, les vecteurs et, à plus longue échéance, les têtes. De plus, le maintien en condition opérationnelle (MCO) de la FOST constitue une lourde charge, en raison de la nécessité d'assurer la permanence à la mer mais aussi de la complexité accrue des nouveaux bâtiments. Les crédits relatifs au MCO devraient ainsi progresser de 30,3 % l'an prochain en raison des besoins liés à l'indisponibilité périodique pour entretien et réparations (IPER) du Téméraire.

Enfin, la progression des dotations prévues pour l'infrastructure des forces nucléaires est très largement liée à la FOST, notamment en raison de la poursuite du programme d'adaptation des installations de l'Ile Longue au M 51 et à leur mise aux normes.

Le coût de la composante aérienne est nettement plus limité. L'activité proprement nucléaire des forces aériennes stratégiques (FAS) représente en fait de l'ordre de 15 % du total des missions assurées par les Mirage 2000N. L'ensemble des crédits affectés à la composante aérienne, en 2006, s'établit à 377 millions d'euros en crédits de paiement (+ 3,2 %). Les dotations concernent, d'une part, les adaptations spécifiques et l'entretien des appareils des FAS, ainsi que certaines de leurs infrastructures liées à la dissuasion et, d'autre part, le missile ASMP-A et la tête nucléaire aéroportée (TNA).

Enfin, environ 40 % des crédits de la mission Défense relatifs à la dissuasion nucléaire ont vocation à faire l'objet d'un transfert au profit de la direction des applications militaires du CEA. Les sommes ainsi transférées sont destinées à la fabrication des têtes, aux matières nucléaires, aux recherches en matière de propulsion navale et, surtout, au programme de simulation. S'agissant de ce dernier, jusqu'à présent le calendrier et les devis ont été respectés. A mi-chemin du programme, son coût total estimé ne devrait pas dépasser de plus d'1 % celui initialement prévu. Techniquement, les spécifications ont été atteintes et les éléments déjà en service ont permis la validation de la TNA sans tir réel.

Le programme de simulation est un défi technologique et financier. Il représente un coût total estimé à 5,7 milliards d'euros au coût des facteurs de 2005, étalé sur la période 1996-2010, dont un peu plus de la moitié au titre du laser mégajoule. C'est le prix de l'indépendance puisque la France a choisi, comme pour le reste de sa dissuasion, de préserver son autonomie complète. Ainsi, le programme de simulation numérique est conduit d'une manière qui en garantit l'indépendance. Si des coopérations très étroites sont entretenues avec les Etats-Unis sur certains aspects, elles ont pour but de résoudre en commun certaines questions de manière pragmatique, sans remettre en cause l'indépendance nationale. Enfin, les grands équipements scientifiques et techniques mis en place sont déjà ouverts au monde de la recherche et aux industriels.

Les systèmes de communications et de commandement sont d'ores et déjà une nécessité vitale et le seront encore plus demain. Leur maîtrise d'ensemble est conditionnée par la capacité à disposer d'un système spatial performant et complet. Il s'agit d'un véritable défi, tant en raison des difficultés techniques et budgétaires entraînées par cette évolution que de l'impossibilité pour les nations européennes de disposer chacune de l'ensemble des moyens nécessaires. Des coopérations beaucoup plus étroites que celles actuellement en vigueur doivent donc être établies aujourd'hui, sous peine de se trouver relégué à une place secondaire, sinon vassale.

De fait, un certain nombre de lacunes en matière spatiale ont été identifiées et portent notamment sur les capacités de surveillance électromagnétique et d'écoute, sur celles de surveillance de l'espace et d'acquisition des objectifs mobiles ainsi que sur l'alerte avancée.

Au total, pour 2006, les crédits consacrés à l'espace militaire s'élèvent à 489 millions d'euros en crédits de paiement (+ 5,1 %). La France est de loin le pays faisant l'effort le plus significatif en matière de spatial militaire en Europe. Plus largement, le poids budgétaire des systèmes C4ISR (interarmées et différentes armées) est en moyenne de 1,4 milliard d'euros par an, soit environ 10 % du budget d'équipement. L'évolution rapide des technologies dans le domaine du traitement de l'information devrait permettre de réduire ce poids relatif, à périmètres et performances constants, mais l'accroissement en parallèle des besoins conduira sans doute à maintenir au niveau actuel le poids de ces équipements dans les années à venir.

De plus, ces systèmes font l'objet d'importants travaux de recherche en amont, afin de ne pas se laisser distancer. Une quinzaine de programmes d'études amont couvre actuellement le domaine des communications, pour un investissement de l'ordre de 240 millions d'euros au total.

En matière spatiale, l'année 2005 a été marquée par les évolutions de deux grands programmes satellitaires, avec la mise en service d'Hélios II-A et le lancement de Syracuse III-A, le 13 octobre dernier. Ce dernier offrira aux forces un service de télécommunications du meilleur niveau, même si les besoins en débits ne cessent de croître. Cette première étape devra être complétée en 2006 avec le lancement du satellite Syracuse III-B. Pour Syracuse III-C, le projet est encore à l'étude, tant en ce qui concerne les caractéristiques techniques que les modalités de financement.

La disproportion des moyens spatiaux militaires américains et européens est largement connue. Elle est d'autant plus préoccupante que les Américains mènent une politique cohérente de maintien de la supériorité spatiale acquise. Le budget spatial militaire du département de la défense a atteint 18,6 milliards de dollars pour l'année fiscale 2005 et il a connu une croissance soutenue ces dernières années (+ 25 % entre 2001 et 2003). D'autres acteurs manifestent des ambitions en matière spatiale, le Japon, l'Inde et la Chine, cette dernière étant devenue la troisième puissance spatiale autonome apte aux vols habités.

Face à la montée des concurrents et pour répondre à ses propres besoins, l'Europe n'est pas restée inactive, avec la réalisation en coopération de certains programmes militaires, comme Hélios, et surtout duaux, tels que Pléiades, pour l'observation optique de la Terre, et Galileo, pour le positionnement par satellites. Toutefois, faute d'entente en amont, ce sont surtout des coopérations pragmatiques a posteriori qui sont mises en œuvre. La France a signé des accords cadre de coopération avec l'Allemagne et l'Italie définissant les principes d'un échange de capacités basé sur celui de droits de programmation entre les systèmes radar SAR Lupe et Cosmo-Skymed, d'une part, et le système Hélios II, d'autre part. Il reste que ce type de coopération n'est pas le plus efficace, techniquement et financièrement.

La réflexion sur la possibilité d'améliorer ces coopérations dès la phase de définition des futurs programmes, devant entrer en service au milieu de la prochaine décennie, est donc un enjeu décisif.

Par-delà les problèmes de financement et le rôle utile que pourra jouer l'AED en matière de coordination des prospectives et des besoins opérationnels, c'est la question de la décision politique qui se posera rapidement. De ce point de vue, la compréhension des enjeux et leur acceptation par les opinions publiques seront déterminantes à long terme et il est probable que l'Europe paie actuellement l'absence d'objectif mobilisateur.

M. René Galy-Dejean s'est réjoui de la poursuite de l'important effort de la France en faveur de la dissuasion nucléaire. Il est particulièrement positif qu'un véritable consensus se dégage sur ce sujet au sein de la commission. De nombreux pays se dotent d'équipements nucléaires à un rythme soutenu, et il serait paradoxal qu'au même moment, la France baisse la garde en la matière. Le sujet de la dissuasion n'est encore guère pris en considération par nos partenaires, mais si l'Union européenne souhaite devenir un continent-puissance, elle devra impérativement être dotée de l'arme nucléaire, quelles que soient les modalités d'organisation retenues. L'effort réalisé par la France devrait permettre une telle évolution.

Après avoir souligné que le programme de simulation était une véritable réussite, M. Antoine Carré a souhaité savoir dans quelles conditions était abordée la question du maintien des compétences de la direction des applications militaires du CEA.

Le rapporteur a répondu que le programme de simulation était effectivement un succès, et ce à plusieurs titres, les objectifs, aussi bien que les coûts, étant respectés. Les derniers essais réalisés à Mururoa s'avèrent à cet égard très utiles, en permettant de vérifier l'adéquation entre la simulation et la réalité. Les Etats-Unis regrettent d'ailleurs de ne pas avoir procédé à ce type d'essais. S'agissant des moyens de calcul, c'est une société américaine qui avait été retenue par appel d'offres pour la première tranche, mais c'est Bull qui a finalement été choisi pour la deuxième tranche dans le cadre d'une procédure similaire, et cette société donne pleine et entière satisfaction. Le passage de témoin entre les personnels ayant connu la période des essais et les nouveaux concepteurs se déroule progressivement et sera pleinement réalisé à l'horizon 2012-2013. A l'heure actuelle, 40 % des personnels de la direction des applications militaires n'ont pas connu les essais. Cette transition est essentielle pour la crédibilité d'un outil de dissuasion dont la modernisation porte sur des équipements qui resteront en service jusqu'à l'horizon 2040.

Le rapporteur s'en étant remis à la sagesse de la commission, celle-ci a donné un avis favorable au programme « Equipement des forces (espace, communications et dissuasion) ».

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Mission « Défense » : « préparation et emploi des forces (air) » (avis).

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Louis Bernard, les crédits de la Mission « Défense » : « préparation et emploi des forces (air) », pour 2006.

M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis, a souligné que, dans la nouvelle architecture budgétaire issue de la loi organique relative aux lois de finances, les différentes armées ne sont pas identifiées en tant que telles. De fait, l'évolution de la nomenclature et des périmètres de dépenses rend malaisées les comparaisons d'une année sur l'autre. A ce titre, 2006 constitue pour l'examen du budget une période de transition.

L'essentiel des crédits de l'armée de l'air se trouve dans le programme « Préparation et emploi des forces », 4,908 milliards d'euros étant alloués aux forces aériennes pour leur fonctionnement, et dans le programme 146 « Equipement des forces », avec 2,439 milliards d'euros destinés à la modernisation des matériels. Dans son ensemble, le projet de loi de finances pour 2006 permet de répondre aux besoins de l'armée de l'air, même si l'exécution des crédits consacrés aux carburants et à l'entretien des matériels devra être examinée avec attention.

S'agissant du fonctionnement des forces, le niveau des effectifs reste stable : au sein du programme 178, qui réunit 97 % des effectifs de l'armée de l'air, sont prévus pour 2006 65 488 personnels civils et militaires, contre 65 684 en 2005, à périmètre identique. Toutefois, il faut souligner que, comme l'année précédente, l'armée de l'air enregistre en 2005 un sous-effectif global d'environ 4,5 % ; elle a fait le choix d'exclure tout dépassement du montant autorisé pour sa masse salariale, ce qui suppose, par construction, d'accepter un certain sous-effectif.

La dotation en carburants, laquelle conditionne pour partie le volume de l'activité des forces, constitue également un enjeu important, alors que l'armée de l'air est la plus affectée de toutes les armées par les fluctuations du prix du baril de pétrole, du fait du volume de sa consommation. Sa dotation en carburant connaît une augmentation sensible en 2006, pour atteindre 186,3 millions d'euros, mais, de même que les années précédentes, il est à craindre qu'elle ait besoin de moyens supplémentaires dans ce domaine d'ici la fin de 2006.

L'effort budgétaire engagé en matière d'entretien des matériels depuis 2002 est poursuivi, avec l'inscription en 2006 de 968,19 millions d'euros en crédits de paiement, tandis que la SIMMAD, organisme interarmées chargé de l'entretien de tous les matériels aériens, s'efforce d'améliorer la gestion de la maintenance, notamment par une meilleure contractualisation. La disponibilité des aéronefs de l'armée de l'air a enregistré des améliorations tangibles, puisqu'elle est passée d'une moyenne de 54,2 % en 2000 à 63 % en 2004, et se maintient à ce niveau au premier semestre 2005. Si ce bilan s'avère satisfaisant, la progression continue de la disponibilité des équipements connaît une pause, en raison des contraintes financières auxquelles la SIMMAD se trouve confrontée. De fait, celle-ci pâtit de reports de charges importants et, afin de les résorber, elle se trouve dans l'obligation de prendre des mesures d'économies jusqu'en 2008. C'est pourquoi il importe de veiller à la bonne exécution des crédits qui lui sont alloués, afin de lui permettre d'assainir sa situation financière et de poursuivre sa tâche dans de bonnes conditions. Le ministère de la défense a par ailleurs engagé une réflexion prospective sur l'entretien des matériels, en créant en juin dernier une mission de modernisation de la maintenance aéronautique, qui associe tous les acteurs concernés. Elle a pour objectif d'explorer toutes les pistes d'amélioration, afin de réformer l'organisation et les processus actuels de maintenance à un horizon de trois ans.

S'agissant de la modernisation des équipements aériens, l'avion Rafale s'insère progressivement dans les forces de combat ; après trois appareils en 2004, puis onze en 2005, douze avions seront livrés en 2006, et le premier escadron de Rafale au standard F2 entrera en service à l'été 2006 sur la base de Saint-Dizier. Le deuxième escadron, celui-ci au standard F3, sera opérationnel en 2008, et à, l'horizon de 2015, les Rafale doivent représenter 120 des 300 avions en ligne.

En ce qui concerne les drones, le programme de démonstrateur d'avion de combat non piloté Neuron, lancé en 2003, se met en place. Il a suscité l'adhésion de six pays européens - la Suède, l'Italie, l'Espagne, la Grèce, la Suisse et la Belgique - et un premier vol est prévu en 2009-2010. Le coût total du démonstrateur doit atteindre 400 millions d'euros, dont 223 millions d'euros apportés par la France. De même, le programme de démonstrateur Euromale, lancé en juin 2004, devrait rallier plusieurs pays européens, afin de satisfaire à terme un réel besoin opérationnel des forces armées de l'Union. En revanche, la livraison du système intérimaire de drone Male (SIDM) ne devrait intervenir qu'en avril 2006, avec plus de dix-huit mois de retard, alors qu'il était censé prendre la relève des drones Hunter, retirés du service en septembre 2004. Ce décalage remet en cause l'articulation prévue entre les deux systèmes et se traduit par une diminution des capacités de l'armée de l'air.

Quant au programme A 400 M, il se déroule dans de bonnes conditions. L'année 2005 est marquée par l'association de deux, voire de trois nouveaux pays : l'Afrique du Sud, qui a décidé d'acquérir huit appareils, le Chili, qui a signé une lettre d'intention cet été, et la Malaisie, avec qui les négociations sont bien avancées.

Pour autant, les premiers exemplaires de l'A 400 M ne seront livrés à l'armée de l'air qu'en 2009 ; or, sa flotte de transport tactique est aujourd'hui dans une situation tendue, alors que va débuter le retrait des premiers avions Transall. S'ouvre donc une période de transition difficile. L'arrivée de deux avions TLRA, le premier en juillet 2006 et le second en janvier 2007, permettra toutefois de renforcer la flotte logistique de l'armée de l'air, aux côtés des trois A 310 en service. Enfin, le dossier des avions ravitailleurs multirôles est toujours à l'étude, afin de remplacer la flotte actuelle de ravitailleurs à la fois ancienne, donc coûteuse à entretenir, et insuffisante dans son format. L'armée de l'air s'oriente aujourd'hui vers le choix d'un programme d'avions dit MRTT (Multirôle transport tanker) et étudie la possibilité de recourir à un partenariat public-privé ; elle examine notamment la solution proposée par EADS d'appareils MRTT de classe A 330. Avec ce programme, EADS s'est d'ailleurs mis sur les rangs, associé à Northrop Grumman, pour le contrat d'acquisition de cent avions ravitailleurs par le Pentagone.

Enfin, l'armée de l'air est animée d'un véritable esprit de réforme, qui touche plusieurs domaines. Elle a engagé un travail de réflexion approfondi sur l'évolution de ses structures, afin de les simplifier, de les décentraliser et de les adapter au caractère de plus en plus interarmées et international des opérations. Elle poursuit sa réorganisation interne en pôles fonctionnels, la mise en place du pôle « soutien » ayant été lancée cet été à Bordeaux à partir de l'état-major de la région aérienne Sud. L'armée de l'air a également relevé un défi important, en prenant la direction, à partir de juillet 2005 et jusqu'en janvier 2006, de la composante aérienne de la Nato Response Force 5 (NRF 5). Ceci atteste de la capacité opérationnelle qu'elle peut offrir à l'OTAN, mais aussi à l'Union européenne.

L'armée de l'air prend une part active aux opérations extérieures de la France : outre l'importante mission Serpentaire, conduite en Afghanistan, elle a également été mobilisée pour des opérations humanitaires en Indonésie, à la suite du tsunami, au Pakistan, ainsi que pour la Louisiane. Elle participe pleinement à la construction de la défense européenne, particulièrement par deux initiatives : d'une part, la mise en place de l'école de formation de pilotes de chasse franco-belges, dont la première promotion a reçu son brevet en juillet 2005 ; d'autre part, par la conclusion d'accords de sûreté aérienne avec des pays frontaliers, comme l'Espagne, la Belgique, l'Italie et la Suisse.

Le président Guy Teissier a noté que, si le rapporteur n'avait pas abordé dans son exposé la question du plan « Air 2010 », ce dernier, en prévoyant une rationalisation des bases de l'armée de l'air, prépare l'arrivée du Rafale et doit permettre de maintenir l'excellence technique et l'entraînement des forces aériennes. On peut noter que les effectifs britanniques sont moindres rapportés au nombre d'appareils.

En réponse à une question de M. René Galy-Dejean portant sur l'industriel chargé du programme SIDM, M. Jean-Louis Bernard a précisé qu'EADS avait indiqué qu'il achèverait ce programme avec retard, en faisant face aux pénalités qu'il subirait de ce fait.

Après que M. Jean Michel a précisé que les Britanniques réalisaient un effort de défense supérieur d'environ 10 milliards d'euros par an à celui consenti par la France, le président Guy Teissier a indiqué que le format de l'armée britannique était plus réduit et les salaires de meilleur niveau, ce qui pourrait conduire à l'avenir à une réflexion sur les moyens de maintenir l'attractivité de nos armées pour l'ensemble de la hiérarchie.

La commission a approuvé les conclusions du rapporteur sur les crédits du programme « Préparation et emploi des forces (air) ».

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Mission « Défense » : « préparation et emploi des forces (forces terrestres) » (avis).

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné pour avis, sur le rapport de M. Joël Hart, les crédits de la Mission « Défense » : « préparation et emploi des forces  (forces terrestres) », pour 2006.

M. Joël Hart, rapporteur pour avis, a rappelé que la comparaison entre les crédits alloués à l'armée de terre par le budget 2005 et ceux prévus dans le projet de loi de finances pour 2006 s'avérait particulièrement difficile compte tenu des importants changements de périmètre intervenus du fait de la LOLF. En effet, alors que l'armée de terre comptait en 2005 environ 135 000 militaires, seuls 126 000 (93 %) d'entre eux sont pris en compte au sein du programme 178 (préparation et emploi des forces), certains éléments étant comptabilisés au sein d'autres programmes.

En fonctionnement, la masse financière prévue pour la préparation des forces terrestres s'élèvera, en 2006, à 7 488 millions d'euros dont 4 646 millions d'euros au titre des rémunérations et charges sociales et 2 842 millions d'euros pour les pensions. Ces chiffres, qui ne s'appliquent qu'aux 126 000 militaires du programme 178, concernent aussi les emplois des 25 000 civils des forces terrestres inscrits dans ce programme. Le projet de loi de finances alloue à l'armée de terre un niveau de crédits en cohérence avec les effectifs et les objectifs de la loi de programmation militaire. Cette masse budgétaire permet le maintien de ses effectifs. En revanche, les crédits de fonctionnement courant imposent une nouvelle économie estimée à 15 millions d'euros alors même que le prix des carburants ne cesse d'augmenter. Le principal poste sur lequel pourront porter les économies est celui du chauffage.

Les crédits d'équipement, de leur côté, sont plus difficiles à comptabiliser. La plus grande partie apparaît dans l'action 2 du programme d'équipement des forces qui regroupe 1 770 millions d'euros. Mais le programme relatif à la préparation des forces rassemble également près de 990 millions d'euros. Le programme de soutien à la politique de défense en agrège, pour sa part, 277 millions au titre de l'infrastructure et environ 51 millions au titre des systèmes informatiques. Ce sont au total 3 100 millions d'euros qui sont consacrés à l'équipement des forces terrestres. Cette somme est légèrement inférieure à l'annuité inscrite en loi de programmation militaire, fixée à 3 313 millions d'euros. Ce décrochage qui n'est certes pas aussi important qu'il a pu l'être dans le passé entre lois de programmation et lois de finances conduit néanmoins à étaler dans le temps et à réduire un certain nombre de programmes.

C'est ainsi que le parc de d'hélicoptères gazelles antichars sera progressivement diminué et que la rénovation des hélicoptères de transports Puma n'est plus envisagée. L'acquisition de certains engins de franchissement, non prévue par la loi de programmation, est également abandonnée. Enfin, les crédits destinés à l'entretien programmé du matériel seront particulièrement contraints, ce qui risque de réduire encore davantage la disponibilité des parcs de matériels.

Dans un contexte budgétaire contraint, l'entraînement des personnels apparaît comme une variable déterminante. Toutefois, l'absence d'actualisation des coûts de fonctionnement ainsi que la nécessité de réaliser 3,5 % d'économies budgétaires par rapport à 2005 ont conduit le chef d'état-major de l'armée de terre à aligner les prévisions d'entraînement des forces en 2006 sur l'activité enregistrée en 2005, à savoir 96 jours au lieu des 100 prévus par la loi de programmation. Compte tenu des contraintes auxquelles est soumise l'armée de terre, un tel niveau d'activité serait déjà satisfaisant.

En revanche, la situation reste toujours délicate pour l'aviation légère de l'armée de terre qui n'a pas réussi à faire voler ses équipages plus de 147 heures en 2004 alors que le seuil de sécurité est de 150 heures par an et que l'objectif a été fixé par la loi de programmation à 180. En 2006, comme en 2005, l'objectif reste fixé à 160 heures de vol. Le vieillissement des hélicoptères constitue le principal frein à l'entraînement. Proche de 70 % en 2000-2002, la disponibilité des appareils est désormais inférieure à 60 %.

La disponibilité de ses moyens aériens va rapidement devenir un des principaux défis que l'armée de terre aura à relever au cours des prochaines années. Ainsi, l'école de pilotage franco-allemande du Luc devrait déjà être en possession d'une dizaine d'hélicoptères Tigre. Or, à ce jour, seuls deux engins ont été réceptionnés, l'un d'entre eux étant déjà immobilisé pour un motif technique.

La disponibilité des matériels terrestres reste tout aussi préoccupante. La seule bonne nouvelle concerne le blindé léger AMX 10 P dont les fissures apparues dans le châssis sont en cours de réparation. En revanche, le véhicule léger tout terrain P4, les camions de transport de troupe ou encore le véhicule de transport logistique (VTL) pâtissent de leur grand âge. Une amélioration significative de leur disponibilité paraît difficile à envisager. Pour une grande partie de ces matériels, la disponibilité oscille entre 58% et 63%. Mais les engins qui sont en cours de rénovation ne sont pas pris en compte dans ces statistiques. Comme, par ailleurs, l'armée de terre tient à ce que les matériels envoyés en opérations extérieures soient disponibles à plus de 90 %, la disponibilité réelle des matériels qui restent dans les régiments s'avère largement inférieure aux chiffres théoriques.

Dans un régiment du génie qu'il a visité, le rapporteur a constaté le nombre considérable de véhicules en attente de pièces de rechange. Beaucoup de P4 attendaient depuis des semaines des clignotants... D'autres engins, plus spécifiques et constituant des microparcs, comme les EBG (engins blindés du génie), étaient en attente de pièces plus rares.

Le char Leclerc est confronté à de nouvelles difficultés : les patins en aluminium, qui s'usent trop vite, doivent être remplacés par des patins en aciers. Mais pour l'instant, les délais de livraison de l'industriel sont très longs, ce qui immobilise de nombreux blindés. Le fonctionnement des récupérateurs de tir ne s'avère pas satisfaisant, de même que les épiscopes qui présentent des défauts d'étanchéité. La disponibilité du Leclerc, ce char neuf dont la livraison n'est toujours pas terminée, est aujourd'hui inférieure à 40 %.

M. Joël Hart a ensuite rappelé qu'entre 18 000 et 20 000 soldats des forces terrestres étaient en permanence stationnés outre-mer ou à l'étranger et que l'armée de terre menait également des missions de sécurité publique sur le territoire national, comme Vigipirate, la lutte contre les incendies de forêt ou l'aide aux populations victimes de catastrophes naturelles.

En conclusion, appelant à une nécessaire vigilance sur la disponibilité de certains matériels, il a considéré que, compte tenu des contraintes financières de l'Etat, le projet de loi de finances pour 2006 prévoyait un bon budget pour les forces terrestres.

M. Jérôme Rivière s'est réjoui que la nouvelle nomenclature issue de la LOLF permette d'éviter à l'avenir un détournement de l'utilisation des crédits votés par le Parlement pour la modernisation de certains équipements essentiels, comme les hélicoptères de l'ALAT, au profit du maintien en condition opérationnelle d'autres matériels, ces deux aspects relevant de deux programmes distincts.

Le président Guy Teissier a jugé concluant le maintien des avis budgétaires de la commission sur les crédits prévus pour la préparation et l'emploi opérationnel de chaque armée.

La commission de la défense nationale a alors approuvé les conclusions du rapporteur sur les crédits du programme « Préparation et emploi des forces (forces terrestres) ».

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